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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 08 octobre 2013

SOMMAIRE

Présidence de M. Claude Bartolone

1. Avenir et justice du système de retraites

Discussion des articles (suite)

Article 2 (suite)

Mme Huguette Bello

M. Jacques Lamblin

M. Jacques Bompard

M. Bernard Perrut

M. Philippe Vigier

M. Arnaud Robinet

M. Alfred Marie-Jeanne

Mme Véronique Louwagie

M. Julien Aubert

M. Laurent Marcangeli

M. Bernard Accoyer

M. Laurent Wauquiez

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

M. Arnaud Robinet

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 137 , 608 , 609 , 610 , 613 , 616 , 617 , 618 , 1670 , 2931 , 3015

M. le président

Suspension et reprise de la séance

M. le président

Rappel au règlement

M. Arnaud Robinet

M. le président

Article 2 (suite)

M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Rappel au règlement

M. Laurent Wauquiez

Article 2 (suite)

M. Arnaud Robinet

Mme Marisol Touraine, ministre

Rappel au règlement

M. Arnaud Robinet

Suspension et reprise de la séance

Article 2 (suite)

M. André Chassaigne

Rappel au règlement

M. Arnaud Robinet

Article 2 (suite)

Amendements nos 138 , 2932 , 15 , 45 , 103 , 2870 rectifié , 2964 , 3038 , 16 , 46 , 104 , 1857 , 1858 , 1859 , 1865

Rappel au règlement

M. André Chassaigne

Article 2 (suite)

Amendements nos 1866 , 1867 , 1902 , 1903 , 1904 , 1910 , 1911 , 1912 , 1933 , 2968 , 2967 , 2026 , 2032 , 2034

Après l’article 2

Amendements nos 136 , 2930 , 3037 , 163 , 2976 , 2855 rectifié , 17 , 48 rectifié , 105 , 165 , 28 rectifié , 71 rectifié , 127 , 367 , 369 , 377 , 1537 (rect.) , 2536 , 3034

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Claude Bartolone

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Avenir et justice du système de retraites

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (nos 1376, 1400, 1397).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant après avoir commencé d’entendre les orateurs inscrits à l’article 2.

Article 2 (suite)

M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello. Monsieur le président, madame la ministre des affaires sociales et de la santé, madame la présidente de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, cette nouvelle réforme prévoit une hausse des cotisations relayée, dans un second temps, par un allongement plus rapide de la durée de cotisation.

La mesure de durée a été privilégiée, au motif qu’elle est plus que compensée par l’augmentation de l’espérance de vie. Mais comme vous le dites, madame la ministre, nous ne sommes pas égaux en termes d’espérance de vie ! La Réunion est l’une des régions où l’espérance de vie est la plus faible : elle a fortement progressé depuis un demi-siècle, mais il existe toujours un écart par rapport à la moyenne nationale – près de deux ans pour les femmes et trente mois pour les hommes.

Cette mesure de durée se traduira par un relèvement de l’âge réel de départ à la retraite – une « augmentation mécanique », comme le ministère de l’économie vient de l’écrire à Bruxelles. Quand le chômage de longue durée est important, quand les jeunes sont pénalisés à leur entrée sur le marché du travail, quand les seniors sont poussés vers la sortie, c’est la perspective d’une retraite à taux plein qui s’éloigne et la diminution des pensions qui se profile.

À La Réunion, 30 % des retraités vivent déjà avec le minimum vieillesse – l’allocation de solidarité aux personnes âgées –, soit neuf fois plus qu’en France continentale, avec parmi eux une majorité de femmes. Selon une étude récente de l’INSEE, 42 % des Réunionnais de plus de 65 ans vivent en-dessous du seuil de pauvreté : c’est quatre fois plus que la moyenne nationale. Ces chiffres donnent le vertige et nous craignons qu’ils se dégradent encore, malgré les mesures prévues par ce projet de loi pour compenser les effets liés à la pénibilité au travail, aux temps partiels et aux parcours professionnels fragmentés.

La Réunion est déjà qualifiée de « département hors normes ». S’il ne revient pas au système de retraites de corriger les déséquilibres du marché du travail, il est d’autant plus indispensable de contrecarrer l’évolution actuelle que les prochaines années seront marquées par un vieillissement de la population réunionnaise. À cet égard, je suggère que le nouveau comité de suivi des retraites prévu à l’article 3 puisse accorder une attention spécifique aux inégalités générées par le système de retraites dans les régions d’outre-mer.

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Avec ce projet de loi, madame la ministre, vous avez atteint trois objectifs, si j’ose dire. Premièrement, vous augmentez le coût du travail en augmentant les cotisations patronales. Deuxièmement, vous appauvrissez les actifs en vous en prenant à leur salaire, puisqu’ils paieront 0,3 % supplémentaire de cotisations retraite. Troisièmement, vous appauvrissez les retraités, car votre proposition de gel de pensions s’ajoutera à l’augmentation de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie et à la fiscalisation de la majoration des pensions de 10 % liée à l’éducation d’une famille de trois enfants et plus. Cela commence à faire beaucoup !

Cette situation est aggravée par le fait que chacun des ministres de ce Gouvernement se comporte comme s’il était hébergé dans un tuyau d’orgue, ignorant totalement ce que font ses collègues en matière financière. Ainsi, ces décisions financièrement lourdes ignorent les décisions tout aussi financièrement lourdes de MM. Sapin, Moscovici et Cazeneuve. Cette conjonction de mesures attaque considérablement le revenu de nos concitoyens, qui n’en peuvent plus !

M. Laurent Marcangeli. Vous avez raison !

M. Jacques Lamblin. Comment expliquer cela ? Vous avez une valeur fétiche : c’est l’âge de 62 ans. Si vous aviez repoussé un peu plus l’âge du départ à la retraite, vous n’auriez pas été obligés de vous attaquer aux revenus des retraités, ni à ceux des actifs, ni aux entreprises. Cette décision est, financièrement, extrêmement lourde pour nos concitoyens, parce que vous n’avez pas voulu regarder les choses en face. Au contraire, elle est relativement hypocrite : l’affichage reste le même mais, en pratique, les actifs ne partiront en retraite qu’à 63, 64, 65 ou 66 ans, tout cela avec un effet différé.

M. le président. La parole est à M. Jacques Bompard.

M. Jacques Bompard. Madame la ministre, mes chers collègues, le système de retraites est en faillite. Fondé il y a longtemps sur une société cohérente, c’est-à-dire assise sur le travail de tous, tout a changé aujourd’hui : nous avons basculé dans un système aberrant, pollué entre autres par le traitement social du chômage. Le droit au travail, pourtant inscrit dans la Constitution via le Préambule de la Constitution de 1946, a été remplacé par la liberté de travailler ou de ne pas travailler. En effet, les revenus du travail et les indemnités issues du traitement social du chômage sont, bien souvent, pratiquement équivalents. De ce fait, comme souvent, le rêve a engendré la folie.

Le véritable projet de loi que les citoyens attendent exige un retour au bon sens. Il passerait d’abord par le retour du droit au travail pour tous, autour d’un programme de grands travaux structurants déployé dans tout le pays. Il prévoirait aussi un rallongement du temps de travail : le pays d’Europe ayant le taux de chômage le plus faible est aussi celui où l’on travaille le plus – quarante-deux heures par semaine. Il comporterait également un recul de l’âge de départ à la retraite à 65 ans. Il passerait aussi par la simplification et l’égalité de tous les régimes, donc par l’arrêt du clientélisme, incluses dans les promesses présidentielles de justice mais totalement oubliées aujourd’hui. Enfin, il assurerait la protection de la famille et passerait donc par l’arrêt des réformes anti-familiales mises en place par le Gouvernement. Voilà le programme nécessaire à une loi de bon sens, celle que les citoyens attendent.

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Avec cette réforme, madame la ministre, mes chers collègues, vous passez à côté des enjeux de justice et d’équité qui correspondent pourtant à la principale attente des Français en matière de retraites. Si les grands principes des réformes de 2003 et de 2010 – nos réformes – sur les mesures d’âge sont maintenus, c’est, dans ce cas précis, au prix d’une hypocrisie flagrante – excusez-moi de le rappeler !

Le principe d’une répartition des gains d’espérance de vie entre durée de travail – donc durée de cotisation – et retraite, posé dès 2003, est poursuivi ; cependant, il ne s’accompagne pas d’un décalage de l’âge légal de départ à la retraite. Ainsi, si la durée de cotisation passe à quarante-trois ans, le salarié qui a commencé à travailler à 23 ans ne pourra partir qu’à 66 ans pour avoir sa retraite complète, alors même que l’âge légal sera toujours fixé à 62 ans. C’est prendre le risque que les Français partent à la retraite dès cet âge-là, avec une décote, donc, il faut bien le reconnaître, avec une baisse significative du niveau de leur pension.

À mon sens, procéder comme le fait le Gouvernement revient donc à choisir la mesure d’allongement de la durée du travail à la fois la plus néfaste pour le pouvoir d’achat des retraités, la moins lisible pour les assurés et la moins honnête – disons-le  – à l’égard des jeunes générations.

C’est également choisir l’option la moins efficace financièrement. À l’horizon 2030, le scénario privilégié par le Gouvernement évoque une économie de 2,7 milliards d’euros ; or l’augmentation d’une seule année de l’âge légal de départ à la retraite, qui passerait alors à 63 ans, permettrait une économie de 3,6 milliards d’euros pour le régime général et de 5,3 milliards d’euros tous régimes confondus.

Autant dire que le choix du Gouvernement d’allonger la durée de cotisation d’un trimestre tous les trois ans à partir de 2020 est une mesure à la fois insuffisante et peu courageuse. Autant dire que seul le recul de l’âge légal de départ à la retraite est de nature à produire les recettes dont le système de retraites a besoin. Mais vous ne vous engagez pas sur cette voie : on peut tout simplement le regretter.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Madame la ministre, vous avez intitulé votre texte « projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites ». Or l’avenir et la justice passent par la validation de la réforme de 2010. Nous vous remercions donc d’admettre que cette dernière a permis de faire une grande partie du chemin.

M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales. Vous vous répétez !

M. Philippe Vigier. Si cette réforme de 2010 avait été injuste, si elle avait remis en cause l’avenir, j’imagine en effet que vous n’auriez pas hésité une seconde à abroger cette loi.

Certes, on est loin des propos de Martine Aubry, qui interpellait à l’époque François Hollande sur un plateau de télévision en lui demandant s’il reviendrait ou non sur la retraite à 60 ans.

M. Pouria Amirshahi. Martine Aubry avait raison !

M. Philippe Vigier. Surtout, monsieur le rapporteur, cette réforme de 2010 a prévu concomitamment l’augmentation de la durée de cotisation et l’allongement de l’âge légal, porté à 62 ans en 2018. Si vous considérez qu’il est injuste de reculer l’âge légal, pourquoi n’annulez-vous pas tout de suite cette mesure ?

Comme Bernard Perrut l’a très bien expliqué, votre réforme est injuste parce qu’elle baisse le pouvoir d’achat des salariés, qu’elle brise la compétitivité et qu’elle ampute d’un milliard d’euros les revenus des retraités. Pire encore : dans votre réforme, ce n’est qu’à partir de 2020 que l’on commence à allonger la durée de cotisation, sans toucher à l’âge légal.

M. Bernard Perrut. Tout à fait !

M. Philippe Vigier. Cela signifie que des hommes et des femmes jeunes devront travailler beaucoup plus longtemps pour bénéficier d’une retraite plus faible. C’est une double injustice : je tenais à le souligner.

M. Bernard Perrut. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Madame la ministre, nous voici avec l’article 2 véritablement au cœur du projet de loi, à l’une de ses mesures phares : l’allongement de la durée de cotisation à partir de 2020.

Comme j’ai eu l’occasion de vous le dire précédemment, je vous reconnais une certaine forme de courage car vous allez à l’encontre de vos convictions et des propos que vous avez tenus depuis 2003. Vous validez non seulement la réforme de 2010, comme l’a dit Philippe Vigier, mais également la réforme Fillon de 2003.

M. Matthias Fekl. La réforme Fillon-Sarkozy !

M. Arnaud Robinet. Je comprends que notre collègue Christian Paul a été missionné pour essayer de rassurer l’aile gauche du parti socialiste ainsi que le Front de gauche. Cependant, ses propos m’inquiètent : il affirme clairement qu’en dépit de l’allongement de la durée de cotisation à quarante-trois annuités, il ne faut pas s’inquiéter car beaucoup de Français n’iront pas jusque là, dans la mesure où ils pourront partir en retraite bien avant grâce au compte pénibilité et en continuant à bénéficier du dispositif « carrières longues » que nous avions mis en place dès 2003 – je ne crois pas caricaturer vos propos, monsieur Paul. Ma question, qui est aussi ma grande inquiétude, est la suivante : comment allez-vous financer nos systèmes de retraites ? On sait déjà que vous n’en financerez qu’un tiers à l’horizon 2020 – 7 milliards d’euros sur les 20 milliards nécessaires. Et pour la suite, M. Paul explique que la grande majorité des salariés n’auront pas à cotiser quarante-trois annuités, puisqu’ils partiront avant !

M. Christian Paul. C’est un expert en déficit qui parle !

M. Arnaud Robinet. On le voit bien : nous mettez à mal notre système de retraites par répartition, fondé sur la solidarité intergénérationnelle. Avec votre réforme, vous appauvrirez les retraités, et les Français partiront à la retraite avec de petites pensions puisqu’ils subiront un certain nombre de décotes. Je pense également aux jeunes générations qui sont totalement oubliées dans votre projet de loi, malgré les promesses du président Hollande lors de la campagne présidentielle.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Quel toupet !

M. Arnaud Robinet. Le meilleur moyen de retrouver l’équilibre aurait été de reculer l’âge légal de départ à la retraite. Comme cela a déjà été dit, le recul d’une seule année de l’âge légal de départ à la retraite engendrerait une économie de 5,3 milliards d’euros, tous régimes confondus.

M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne.

M. Alfred Marie-Jeanne. Deux conceptions s’exposent et s’opposent dans le débat d’aujourd’hui. Depuis 1993, l’allongement de la durée de cotisation a été plus rapide – plus 3,75 annuités – que l’allongement de l’espérance de vie à soixante ans – plus 3,38 années pour les hommes et plus 2,76 pour les femmes.

Entre 2000 et 2020, selon les réformes déjà votées, l’augmentation de la durée de cotisation représentera 86 % de l’augmentation de l’espérance de vie des hommes et 117 % de celle des femmes. Or, si l’espérance de vie augmente régulièrement, la période des difficultés de santé et des incapacités s’allonge également. L’espérance de vie en bonne santé stagne pour les hommes – 62,7 ans en 2011 contre 62,3 ans en 2005 – et marque un net recul d’un an pour les femmes.

L’espérance de vie des cadres à trente-cinq ans est supérieure de six ans à celle des ouvriers. Augmenter la durée de cotisation, c’est aussi augmenter le risque de voir ceux qui exercent une activité pénible avérée ne jamais atteindre la retraite. Selon le Conseil d’orientation des retraites, les générations nées après 1950 auront pour la première fois du fait des réformes précédentes un temps de retraite plus court que celui de leurs aînés. C’est un constat regrettable. C’est un recul social véritable : difficile pour moi de l’accepter, encore moins de l’avaliser.

Mme Huguette Bello. Très bien.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. L’article 2 est essentiel. Le Gouvernement se doit de constater que le système français de retraites par répartition est une nouvelle fois confronté au mur des déficits et de la dette. Les faits reviennent à la charge et rappellent au Gouvernement socialiste une réalité que tout le monde connaît. Il manque déjà 7 milliards d’euros pour financer les retraites et, en 2020, il en manquera de 20 à 25 milliards.

Les mensonges de François Hollande éclatent au grand jour. Avec cet article 2, nous constatons que les socialistes n’abrogeront pas la réforme de 2010…

M. Philippe Vigier. Bonne nouvelle !

Mme Véronique Louwagie. …alors qu’il s’agissait d’un engagement de campagne. Les socialistes ne rétabliront pas non plus la retraite à soixante ans. Les questions que les Français se posent sont pourtant simples. François Hollande, le Gouvernement auront-ils le courage de réformer un régime au bord de l’explosion financière et empreint d’injustice ? (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.) Le Gouvernement aura-t-il le courage de poursuivre l’alignement entre tous les systèmes de retraites engagé par la réforme Raffarin-Fillon en 2003 et approfondi par la réforme Woerth en 2010 ? Le Gouvernement aura-t-il le courage comme lors de la réforme Bertrand de 2008 de s’attaquer aux régimes spéciaux qui coûtent chaque année – il est important de le rappeler – une demi-dizaine de milliards au contribuable ?

Le Gouvernement aura-t-il la même détermination dont Nicolas Sarkozy a fait preuve face à la rue, face aux grèves, face aux menaces de blocage du pays en intervenant ? Depuis trente ans, la gauche est une dans une posture démagogique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) La droite, elle, a osé s’attaquer aux problèmes des retraites. La nouvelle génération, notre génération, n’est pas dupe. À reporter sans cesse une vraie réforme des retraites, c’est notre avenir que l’on sacrifie. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Avec l’article 2, l’effondrement de notre système de retraites est proche. Et c’est aussi la confiance qui disparaît. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Catherine Quéré. Vous aviez dix ans !

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Dans le film Le Guépard, il est une citation fameuse : tout changer pour que rien ne change ».

M. Matthias Fekl. C’est convenu comme citation ! Et c’est d’abord un roman avant d’être un film !

M. Julien Aubert. Le Gouvernement fait exactement l’inverse : ne rien changer pour que tout change ! En voulant absolument conserver les acquis et la fameuse ligne Maginot de l’âge légal de la retraite, vous êtes obligés, madame la ministre, de vous livrer à des contorsions au détriment de la lisibilité de votre réforme. Vous avez maintenu le décrochage public-privé qui est l’un des motifs de frustration actuel parmi la population qui ne comprend pas pourquoi l’on traite différemment des situations similaires. Vous ne voulez pas toucher à l’âge légal – vous n’avez pas été suffisamment fous pour revenir sur notre réforme de 2010 –, mais vous relevez l’âge réel de départ à la retraite, ce qui confine à l’hypocrisie la plus totale en expliquant que rien ne changera alors qu’en réalité on cotisera plus longtemps.

S’agissant du pouvoir d’achat, vous avez résolu l’équation en sacrifiant ma génération – la génération des quarantenaires – en décidant que la réforme entrera en vigueur après l’élection présidentielle de 2017, soit en 2020, afin que quelques bas motifs arithmétiques ne viennent pas gêner des considérations politiques. Cela est profondément injuste et relève d’une conception gérontocratique du système des retraites, qui s’opère toujours au détriment des mêmes : les jeunes et les classes modestes. Pour un Gouvernement qui a été élu sur le thème de la jeunesse, du pouvoir d’achat et de la rupture, il y a encore du travail à faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Marcangeli.

M. Laurent Marcangeli. Madame la ministre, le projet de loi traite selon son titre de l’avenir et de la justice du système de retraites. Or votre réforme n’est ni d’avenir ni juste. Vous voulez nous faire prendre des vessies pour des lanternes car, en fait, vous allez alourdir le coût du travail. Surtout, comme l’ont dit de nombreux collègues du groupe UMP, votre réforme est injuste car elle pénalise la jeunesse. Pendant la campagne présidentielle, le candidat Hollande avait fait de la jeunesse sa grande priorité. Or avec cette réforme, la jeunesse est trahie. Vous alourdissez un peu plus les charges qui pèseront sur les générations futures. Par pure idéologie, vous refusez de mettre le doigt sur le véritable enjeu, l’âge de départ à la retraite. Votre blocage idéologique, votre refus de regarder la vérité en face vous empêchent de faire une réforme digne de ce nom, une réforme juste et d’avenir. Vous n’avez aucun courage politique, aucune vision d’avenir. Votre réforme n’est qu’une réformette ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Julien Aubert. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Denis Jacquat. Un homme modéré !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Il est revenu pour repartir dans cinq minutes !

M. Bernard Accoyer. L’article 2 résume toute l’ambiguïté et l’hypocrisie du Gouvernement. D’abord, il valide les réformes de 1993, de 2003, de 2010 à l’encontre desquelles, madame la ministre, vous n’avez pas eu de mots assez durs pour les condamner définitivement, annonçant qu’elles seraient abrogées. Or vous renoncez.

Ce qui est beaucoup plus grave, c’est que vous mettez en danger notre système par répartition. Les mesures que vous prenez sur l’allongement de la durée de cotisation sont trop tardives, insuffisantes. Comme vous ne voulez pas, par dogmatisme, toucher à l’âge légal de départ, ce sont – les Français doivent le savoir – les pensions qui vont baisser.

Mme Véronique Louwagie. Bien sûr.

M. Bernard Perrut. En effet.

M. Arnaud Robinet. Eh oui !

M. Bernard Accoyer. Mais l’hypocrisie ne s’arrête pas là. Le Gouvernement, en effet, a été pris en flagrant délit de double langage : alors qu’au Palais Bourbon on parle d’un âge légal de soixante-deux ans auquel il ne sera pas touché, parce que c’est une promesse du candidat Hollande, on parle au contraire à Bruxelles d’un âge de soixante-six ans pour partir à la retraite.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Ah ! M. Accoyer était à Bruxelles. C’était pour cela qu’il n’était pas là jusqu’à présent !

M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, j’ai une question très précise : l’âge légal est-il de soixante-deux ans ou faudra-t-il, comme vous l’avez dit vous-même à Bruxelles, partir à soixante-six ans ?

S’agissant des mesures envisagées pour la prise en compte de la pénibilité, elles entraînent plus de dépenses que de recettes, alors que l’on recherche déjà 20 milliards d’euros. C’est extraordinaire pour une réforme qui prétend sauver l’avenir de nos retraites ! Plus préoccupant encore, on remet en cause la répartition. Alors qu’avec ce système ce sont les cotisations des actifs qui financent la pension des retraités, vous privilégiez l’impôt. A la hausse des cotisations – salariés et employeurs –, s’ajoute en effet la hausse des impôts : vous mettez ainsi un terme de façon scandaleuse à des droits familiaux qui ont été acquis depuis des décennies, tandis que plusieurs millions de retraités vont voir leur revenu baisser. Vous portez un coup de poignard à la politique familiale. Et tout cela, sans arriver à  l’équilibre financier. En effet, votre réforme n’apportera que 7 milliards alors qu’il en faut 20. On est bien loin des 120 milliards d’euros que les réformes courageuses de la droite et du centre ont permis de mettre en place pour éviter que le gouffre ne soit trop profond ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Un revenant !

M. Christian Paul. Un intermittent du spectacle !

Mme Annie Genevard. Attaque personnelle !

M. Laurent Wauquiez. Cela gênerait-il certains de nos collègues que l’opposition s’exprime ? Cela perturberait-il les débats ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Visiblement, vous n’êtes pas très à l’aise avec certains angles morts de vos propositions !

M. le président. Seul M. Wauquiez a la parole.

M. Laurent Wauquiez. Madame la ministre, chers collègues, votre réforme n’a de juste que l’emballage. En réalité, elle est un trompe-l’œil sur un mur décrépi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Quels sont les principaux points d’injustice ? D’abord, vous laissez subsister toutes les différences d’âge pour le départ à la retraite. Avec votre réforme, certains pourront continuer à prendre leur retraite à quarante-cinq ans, d’autres à soixante-deux ans.

M. Matthias Fekl. Comme dans la grande réforme Sarkozy.

M. Laurent Wauquiez. Ensuite, vous laissez en l’état les différences de modalités de calcul de la retraite. Pour certains, il faut revenir des années en arrière, pour d’autres sur leurs derniers mois de carrière. C’est une autre injustice fondamentale.

M. Bernard Accoyer. C’est vrai !

M. Laurent Wauquiez. Surtout, vous laissez subsister ces différences par clientélisme électoral. Vous n’avez jamais eu le courage de vous attaquer aux régimes spéciaux, qui coûtent entre 6 à 7 milliards d’euros chaque année à notre système de financement de retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Accoyer. Injustice !

M. Laurent Wauquiez. Si à cela on ajoute les coûts administratifs auxquels vous ne vous attaquez pas non plus, on aboutit à une réforme fondamentalement injuste. Vous fermez les yeux sur les principales sources d’injustice en France parce que cela vous dérange par rapport à votre clientèle politique.

L’article 2 met en place l’augmentation progressive du régime de retraites. Nous avons entendu, madame la ministre et ce point est particulièrement choquant, que la mise en place de la retraite serait différenciée selon que l’on soit dans le public ou le privé. Votre collègue Mme Lebranchu – et il serait normal qu’elle vienne s’expliquer devant la représentation nationale…

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Ça recommence !

M. Laurent Wauquiez. …après les propos qu’elle a tenus – a indiqué que lorsque l’on était dans le public, la montée en puissance des cotisations serait plus lente que dans le privé. Dès lors comment pouvez-vous, un seul instant, prétendre que votre réforme est injuste (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC),...que votre réforme est juste ? Je demande non seulement que vous nous répondiez, madame la ministre, mais que Mme Lebranchu vienne s’expliquer sur les propos qu’elle a tenus. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.– Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Au terme des interventions sur cet article important du projet de loi, article qui marque l’un des engagements du Gouvernement pour garantir le financement de nos régimes de retraites dans la durée, je répondrai à certaines interpellations, en tout cas à celles émanant de parlementaires qui participent depuis le début de nos discussions à nos échanges. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)



Pourquoi le Gouvernement a-t-il choisi de faire reposer une partie de la réforme sur l’allongement de la durée de cotisation au-delà de 2020 ? Nous considérons, pour répondre là aux critiques de la droite, que nos concitoyens sont en droit de faire des projets. Ces projets ne se décident pas du jour au lendemain, mais plusieurs années à l’avance. Le respect que l’on doit aux Français, c’est de leur permettre de maintenir leurs projets,…



M. Laurent Wauquiez. Le Gouvernement change de position toutes les cinq secondes !

Mme Marisol Touraine, ministre. …contrairement à ce qui a été le cas lors de la réforme de 2010, qui s’est appliquée de manière brutale.

Nous avons la volonté d’allonger la durée de cotisation à un rythme défini, inscrit dans la loi, à partir de 2020, car l’espérance de vie s’allonge.

M. Julien Aubert. Vraiment ? (Sourires.)

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est une des grandes conquêtes de ces dernières années. Il est donc normal que, vivant plus longtemps, nous puissions consacrer une partie de ce temps gagné au travail. J’entends les critiques de la droite, lesquelles, je l’avoue, me laissent assez perplexe. Vous aurez un peu de mal, mesdames et messieurs, à expliquer à nos concitoyens que la réforme que nous proposons, réforme forte et juste (« Non » sur les bancs du groupe UMP) serait plus injuste avec un allongement à 43 annuités et le maintien de l’âge légal à soixante-deux ans que ce que vous proposez, à savoir le relèvement de l’âge légal à soixante-cinq ans assorti de l’allongement de la durée de cotisation à 44 annuités. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Accoyer. Qu’avez-vous dit à Bruxelles ?

M. le président. je vous en prie, mes chers collègues.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je reste assez perplexe, je le répète, devant un tel raisonnement.

M. Bernard Accoyer. Qu’avez-vous dit à Bruxelles ?

Mme Marisol Touraine, ministre. M. Jacquat et d’autres sur ces bancs ont expliqué…

M. Denis Jacquat. C’est bien, vous avez écouté !

Mme Marisol Touraine, ministre. …qu’une personne née après 1972 qui devra donc, à compter de 2020, cotiser 43 annuités, ne pourra prendre sa retraite, si elle commence à travailler à vingt-trois ans, qu’à soixante-six ans, ajoutant immédiatement que, comble de l’injustice, cette personne n’irait pas en fait jusqu’à soixante-six ans mais jusqu’à soixante-deux ans seulement – on ne sait pas pourquoi ! – et donc que sa retraite se trouverait ainsi diminuée. Pour lui éviter cela, ils auraient trouvé une solution imparable : lui imposer d’aller jusqu’à soixante-cinq ans.

Une telle solution, malheureusement, revient au fond à dire qu’ils se préoccupent tellement du pouvoir d’achat de cette personne qu’ils ne veulent surtout pas lui permettre de choisir de partir avant soixante-cinq ans.

Prenons le cas d’une femme ayant commencé à travailler à vingt-trois ans et ayant eu – ce qui est assez banal – deux enfants. Elle va pouvoir prétendre à deux années de cotisations par enfant, ce qui fait qu’elle devra travailler non jusqu’à soixante-six ans mais jusqu’à soixante-deux ans. Eh bien, si votre proposition lui était appliquée, elle serait obligée de travailler jusqu’à soixante-cinq ans ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Quelle justice !

M. Gérald Darmanin. C’est du délire !

Mme Marisol Touraine, ministre. Vous pouvez donc difficilement nous expliquer que le relèvement de l’âge légal est une mesure plus juste que l’allongement de la durée de cotisation. C’est la raison pour laquelle nous faisons ce choix, un choix que nous assumons.

Dans notre réforme – et je rebondirai sur les propos de certains orateurs de la majorité –, l’allongement de la durée de cotisation est indissociable de la volonté de prendre en compte la diversité des parcours, la diversité des manières dont on rentre dans la vie active, la diversité des vies familiales et des vies professionnelles. La durée de cotisation est un critère juste dès lors qu’il tient compte de la réalité de ce que vivent les salariés. C’est ainsi que, grâce aux dispositions de l’article 6, nous allons permettre aux personnes exposées à la pénibilité de travailler moins longtemps. C’est ainsi que nous allons comptabiliser l’ensemble des trimestres pour grossesse et maternité, ce qui permettra aux femmes concernées de travailler moins longtemps. C’est ainsi que nous allons proposer de mieux prendre en compte le travail à temps partiel, ce qui permettra à une femme qui travaille douze heures par semaine de valider des trimestres, ce qui est impossible aujourd’hui.

L’allongement de la durée de cotisation permet de tenir compte de ces variations à l’inverse du relèvement sec de l’âge légal, qui est toujours votre obsession. Cet allongement s’appliquera à l’ensemble de nos concitoyens salariés, quel que soit le régime dont ils relèvent. C’est une mesure que nous avons tenu à inscrire dans la loi alors que nous aurions pu procéder par décret : nous avons voulu que la représentation nationale puisse en débattre.

M. Julien Aubert. Bravo !

M. Bernard Accoyer. Merci d’avoir bien voulu consulter le Parlement, madame la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Ce sera une protection apportée à nos concitoyens. Cet allongement est la mesure la plus juste.

Au fond, mesdames, messieurs de l’opposition, ce qui, pour vous, est insupportable, c’est que la gauche assume de faire une réforme des retraites, c’est que la gauche assume de porter ses valeurs y compris dans une réforme des retraites, c’est que la gauche montre que le choix de la justice est toujours possible, même quand des efforts sont demandés à nos concitoyens. Ce choix, vous l’avez toujours refusé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Quelle démonstration !

M. Jean-Pierre Vigier. Bla-bla-bla !

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Monsieur le président, je demande une suspension de séance d’une demi-heure pour permettre à Mme Lebranchu de venir répondre aux interrogations de l’opposition, particulièrement aux questions de notre collègue Laurent Wauquiez.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. C’est toujours la même chose avec vous : vous voudriez que le Gouvernement soit présent au grand complet !

M. le président. Monsieur Robinet, je suis sûr que le président Accoyer vous dira que le Gouvernement est largement représenté ce soir et bien représenté et que les ministres présents dans l’hémicycle ont le pouvoir de parler au nom du Gouvernement dans son entier. Mais comme la suspension est de droit, je vous l’accorde, pour cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinq, est reprise à vingt-deux heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous en venons aux amendements à l’article 2.

Nous commençons par une série d’amendements de suppression, nos 137, 608 à 622, 1670, 2931 et 3015, sur lesquels je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine et le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n137.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement est clair, simple et limpide puisqu’il vise simplement à supprimer l’article 2. Nous ne sommes pas les seuls à faire cette demande : le groupe GDR, le groupe écologiste et certains députés socialistes vont dans le même sens.

Le choix du Gouvernement d’allonger la durée de cotisation d’un trimestre toutes les trois générations à compter de 2020 est à la fois insuffisant et injuste. C’est la solution la plus néfaste pour le pouvoir d’achat des retraités déjà lourdement affecté depuis un an. C’est la moins lisible pour les assurés. C’est la moins honnête à l’égard des jeunes générations puisque celles-ci vont voir diminuer leurs pensions dans les années à venir : ils partiront toujours à soixante-deux ans sans avoir un nombre suffisant d’annuités.

Pour notre part, nous préconisons le recul de l’âge de départ à la retraite. À titre d’exemple, l’augmentation d’une seule année de l’âge légal – qui passerait donc à soixante-trois ans pour la génération de 1962 – permettrait une économie de plus de trois milliards d’euros pour le régime général et de plus de cinq milliards d’euros tous régimes confondus.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n608.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous proposons la suppression de cet article qui vise à augmenter la durée de cotisation.

Tout d’abord, il n’est pas juste de prétendre que l’allongement de la durée de vie implique mécaniquement l’allongement du temps passé au travail. Ce raisonnement passe sous silence le fait que, depuis 1950, la productivité a été multipliée par plus de six et la richesse produite également, ce qui est considérable.

Ensuite, l’article ne règle rien. Comme nous l’avons démontré, les économies éventuellement réalisées sur l’assurance vieillesse se feront au détriment de l’assurance chômage et de l’assurance maladie. vous ne redressez donc pas, madame la ministre, les comptes sociaux : vous transvasez simplement les charges et les déficits d’une caisse à l’autre.

M. Paul Molac. C’est vrai !

Mme Jacqueline Fraysse. Surtout, nous estimons que les moyens financiers existent pour faire autrement, comme nous vous l’avons démontré. Il s’agit d’avoir le courage politique d’explorer d’autres pistes de financement visant à élargir l’assiette, dans un souci à la fois de justice et d’efficacité.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n609.

M. André Chassaigne. Le titre Ier du projet de loi comprend des dispositions qui prétendent consolider la situation de notre système de retraite à l’horizon 2020 et garantir sa pérennité financière dans sa durée.

Il est vrai que les chiffres ressassés à l’envi par les gouvernements successifs sont a priori effrayants : en 1960, il y avait quatre actifs pour un retraité ; en 2000, deux actifs pour un retraité ; en 2040, il y aurait un actif pour un retraité. Ces chiffres prouveraient que la réforme proposée serait inévitable. Pourtant, la consultation du dernier rapport du COR, notamment les pages consacrées au taux de renouvellement des générations, montre qu’il n’y a lieu de s’alarmer.

Du reste, nous sommes passés sans difficultés de quatre actifs à deux actifs pour un retraité entre 1960 et aujourd’hui. Pourquoi ? Parce qu’entre-temps, le PIB a doublé. Aujourd’hui, les deux actifs produisent une fois et demie de plus que les quatre actifs d’hier. Et à l’horizon 2020, un actif produira plus que les deux d’aujourd’hui. Il y aura donc autant de richesses disponibles pour les retraités.

Votre arithmétique, que je qualifierai, sans provocation, d’arithmétique de comptoir, justifierait à elle seule d’augmenter la durée de cotisation et de retarder l’âge légal du départ à la retraite, avec l’argument choc que l’on vivrait plus longtemps. Votre réforme, tout comme les précédentes, permettrait donc de sauvegarder notre régime par répartition et de garantir le niveau de vie des retraités. Mais nous n’y croyons plus !

Déjà, avec la réforme Balladur, les pensions du privé ont diminué de 20 %.

Avec cette réforme dite de gauche, la durée de cotisation sera augmentée. Pourtant, déjà les deux tiers des salariés ne travaillent plus après soixante ans. Avec cette réforme dite de gauche (interruptions sur plusieurs bancs du groupe UMP), l’âge moyen auquel on pourra faire valoir son droit à la retraite à taux plein se situera à soixante-sept voire soixante-dix ans. Avec cette réforme dite de gauche, la période de carence où l’on ne sera ni salarié ni retraité va s’accroître inexorablement. Nous nous opposons à ce choix absurde et absolument injuste et nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n610.

M. Marc Dolez. Par cet amendement, comme par les précédents, nous demandons la suppression de cet article 2, le cœur même de ce projet de loi que nous combattons avec beaucoup d’énergie. Pourquoi faire le choix de l’augmentation de la durée de cotisation ? Il est absurde et injuste…

M. Gérald Darmanin. C’est le changement !

M. Marc Dolez. …d’imposer aux salariés de travailler plus longtemps, pour finalement toucher moins…

M. Gérald Darmanin. C’est le redressement dans la justice !

M. Marc Dolez. ….alors qu’il n’y a pas d’emploi pour les plus de soixante ans et que moins d’une personne sur deux occupe un emploi au moment de faire valoir ses droits. Pourquoi imposer à l’immense majorité des salariés de travailler encore plus longtemps, alors que le chômage de masse frappe durement les jeunes ? C’est là qu’il y a rupture du contrat entre les générations. La solidarité intergénérationnelle signifie bien sûr que les actifs paient les pensions des retraités mais aussi, qu’en contrepartie, les salariés âgés laissent leur place sur le marché du travail aux nouvelles générations. Tel n’est pas le choix, madame la ministre, que vous faites aujourd’hui avec vos propositions.

La durée de cotisation couplée avec le recul de l’âge légal de départ à la retraite à soixante-deux ans, décidé par la réforme Sarkozy en 2010 que vous ne remettez pas en cause (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Philippe Vigier. Excellent !

M. Marc Dolez. …signifie à terme la mort de notre système de retraite par répartition. C’est la raison pour laquelle nous invitons évidemment très largement sur les bancs de cette assemblée à rejeter cet article 2. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello, pour soutenir l’amendement n613.

Mme Huguette Bello. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour soutenir l’amendement n616.

M. Jean-Jacques Candelier. Madame la ministre, vous n’avez certainement pas lu tous les travaux disponibles sur la question des retraites avant de nous proposer cette réforme. Ou alors vous les avez mal lus.

Parmi d’autres, nombreux, Jean-Michel Harribey, professeur d’économie bien connu, nous donne pourtant les raisons objectives de ne pas pousser des cris d’orfraie quant à l’évolution démographique qui, selon vous, permet de justifier l’inacceptable. En effet, l’aggravation des déficits des caisses de retraite – 20 milliards d’euros prévus en 2020 – n’est pas due à l’évolution démographique mais à la crise et au chômage.

C’est confirmé par le rapport Moreau, publié en juin dernier : « La durée et l’ampleur de la crise depuis 2008 affectent fortement le système des retraites et rendent plus exigeantes les conditions du retour à l’équilibre. À long terme, les effets directs de la crise économique sur les ressources du système de retraite ne seront pas atténués mais la crise, en pesant négativement sur les pensions futures des générations touchées, aura pour conséquence de ralentir l’effet de noria sur la croissance de la pension moyenne des retraités, tant que toutes les générations touchées par la crise ne seront pas parties à la retraite. »

Le péril vient donc de la poursuite de politiques d’austérité – dans lesquelles vous nagez et qui aggravent la récession – et de l’accomplissement des réformes structurelles réclamées à cor et à cri par la Commission européenne, le patronat et tous les lobbies de l’assurance.

Presque toutes les dispositions prises en 1993, 2003 et 2010 s’en tiennent aux mêmes remèdes : sous-indexation des pensions par rapport aux salaires, calcul des pensions sur la base des vingt-cinq meilleures années au lieu des dix pour les salariés du privé, et, par-dessus tout, allongement indéfini de la durée de cotisation.

Nous aurions espéré qu’un Gouvernement qui se range à gauche de l’échiquier politique change de credo, qu’il nous propose une autre réforme, en décidant notamment d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et des sociétés non financières à une contribution d’assurance vieillesse. Nous vous demandons de supprimer l’article 2. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Vigier. Merci les communistes !

M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour soutenir l’amendement n617.

M. Patrice Carvalho. Au nom de l’allongement de l’espérance de vie, madame la ministre, vous nous proposez dans cet article d’augmenter la durée de cotisation. Vous faites le choix, comme les précédents gouvernements de droite, de condamner notre peuple à travailler toujours plus longtemps. Les calculs sont froids : tout gain d’espérance de vie serait partagé entre deux tiers au travail et un tiers à la retraite. Les générations de 1955 et 1956 doivent déjà cotiser 41,5 annuités, et celles de 1957 devront cotiser 41,75 annuités.

En application de la loi de 2010, votre réforme prolongera cette tendance au-delà de 2020 pour atteindre 43 annuités en 2035, en dépit d’un chômage croissant qui touche les plus jeunes et les plus vieux. En outre, et c’est un sujet dont vous ne voulez pas parler, l’espérance de vie en bonne santé, c’est-à-dire sans incapacité, est en train de diminuer : entre 2008 et 2010, elle est passée de 62,7 ans à 61,9 ans pour les hommes et de 64,6 ans à 63,5 ans pour les femmes. Cette évolution est inéluctable au regard de l’aggravation générale des conditions de travail. Avec vos choix politiques, il n’est pas à exclure que l’espérance de vie diminue à son tour.

M. Philippe Vigier. Quel réquisitoire !

M. Patrice Carvalho. Quel sera le résultat de vos choix ? Les Françaises et les Français travailleront toujours plus pour moins de temps de retraite en bonne santé. Votre Gouvernement va à l’encontre de toute l’histoire humaine qui a consisté à accompagner le progrès social par la réduction du temps de travail, l’amélioration des conditions de travail et de vie. N’est-ce pas un comble que ce soit un Gouvernement socialiste qui soit aujourd’hui à la manœuvre ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Qu’il est loin le temps où Pierre Mauroy et Jean Auroux abaissaient l’âge de la retraite à soixante ans. Il faut supprimer cet article 2

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour soutenir l’amendement n618.

M. Gaby Charroux. Répétons-le, chers collègues…

M. Gérald Darmanin. Pas trop, ça suffit !

M. Gaby Charroux. …l’allongement de la durée de cotisation, c’est le décalage de l’âge de départ à la retraite ainsi que la baisse des pensions. Ce sont nos collègues socialistes qui l’expliquaient fort bien à la droite, en 2010.

M. Éric Straumann. On est d’accord !

M. Gaby Charroux. Permettez-moi de citer, chers collègues, vos raisonnements de l’époque. Au ministre UMP en charge de la précédente réforme, vous disiez : « Ayez le courage de le dire : votre réforme va décaler l’âge de départ à la retraite de ceux qui ont commencé à travailler jeunes, comme elle décale l’âge de départ à la retraite de tous les salariés. »

À l’époque, vous craigniez – à juste titre – que l’allongement de la durée de cotisation ne favorise les plans d’épargne retraite et les systèmes par capitalisation.

Oui, en baissant les pensions, l’essor des assurances individuelles proposées par les mastodontes de la bancassurance sera assuré. Oui, il sera donné un coup de pouce formidable aux régimes par capitalisation, ces produits financiers qui prolifèrent sur le dos de l’assurance vieillesse solidaire attaquée. Oui, les principes de solidarité et d’universalité, hérités du programme du Conseil national de la Résistance, sont bafoués.

C’est la raison pour laquelle nous battrons contre l’allongement de la durée de cotisation, car en dépit d’un consensus délétère qui semble régner, d’autres solutions existent. C’est pourquoi nous demandons par notre amendement la suppression de l’article 2. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n1670.

M. Gilles Lurton. Madame la ministre, malgré toutes les explications que vous nous avez données, pour moi une personne qui commence à travailler à vingt-cinq ans ou à vingt-sept ans ne totalisera pas, avec votre système, le nombre suffisant de trimestres pour pouvoir prétendre à une pension complète à soixante-deux ans, âge légal de départ à la retraite.

C’est donc bien une politique contre la jeunesse active et contre les familles. A cette politique contre la jeunesse et contre la famille, il faut ajouter l’augmentation des cotisations de retraite : désormais, un salarié du privé ne cotise pas moins de 27 % de ses revenus pour la retraite. Plus de cotisations sociales payées par la jeunesse active et par les familles, ce qui veut signifie moins d’embauche pour les jeunes et plus de chômage, donc une baisse de recettes pour les caisses de retraites.

M. Éric Straumann. Il a raison !

M. Gilles Lurton. C’est une véritable duperie !

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n2931.

M. Bernard Accoyer. Avec cet article 2, on essaie de faire croire que le problème du financement de nos retraites serait résolu. Or chacun sait que les mesures prévues sont insuffisantes. Surtout, contrairement à ce que dit le Gouvernement, elles sont totalement injustes : sans augmenter l’âge légal, cet article entraînerait mécaniquement une baisse des pensions. C’est pour cette raison qu’il nous paraît devoir être supprimé.

J’ajouterai, madame la ministre, deux éléments. Premièrement, je vous demande une nouvelle fois de nous dire si l’âge légal est fixé soixante-deux ans – ce que vous dites ici à Paris –, ou à soixante-six ans – ce que dit le Gouvernement à Bruxelles…

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Cela nous manquait !

M. Bernard Accoyer. …pour essayer de justifier les mesures de redressement.

Deuxièmement, vous avez tout à l’heure – et même l’oreille du président de l’Assemblée en a frémi – dit que vous aviez généreusement concédé de consulter le Parlement pour allonger la durée de cotisation alors que vous n’en aviez pas besoin. S’il est exact que vous auriez pu le faire pour les régimes privés, c’est faux pour ce qui concerne les régimes publics. Il est tout de même ennuyeux de se voir traité de cette façon et, en plus, d’entendre quelque chose d’inexact.

La gauche, permettez-moi de le rappeler, n’a jamais consulté le Parlement quand elle a porté les plus mauvais coups à nos régimes de retraite. En 1983, c’est par ordonnance que les milliers de milliards d’euros qu’a coûté la retraite à soixante ans ont été assénés aux Français, sans la moindre étude d’impact, alors que l’on savait que les régimes ne seraient plus équilibrés à partir de 2000. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Enfin, l’année dernière, c’est par la voie réglementaire que vous en avez mis pour 11 milliards d’euros sur les régimes de retraite, en revenant sur la retraite à soixante ans. Voilà, madame la ministre, la réalité des chiffres. La réalité c’est que cette réforme est une anti-réforme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n3015.

Mme Véronique Massonneau. Cet amendement vise à supprimer l’article 2…

Plusieurs députés du groupe UMP. Encore !

Mme Véronique Massonneau. …– mais pas pour les mêmes raisons, vous allez voir – et son dispositif d’allongement de la durée de cotisation. Les écologistes sont opposés à une augmentation de la durée du travail et prônent une véritable réflexion autour de la problématique du partage du temps de travail. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.) De plus, la mise en place d’un allongement de la durée de cotisation doit prendre en compte plusieurs critères. Si l’accroissement de l’espérance de vie est une chance pour la France, je ne le nie pas, il est nécessaire d’aller au-delà de ce critère pour tenir compte notamment de l’espérance de vie en bonne santé.

Un député du groupe UMP. Cot, cot, cot codec !

Mme Véronique Massonneau. Arrêtez ! Cela suffit ! Je ne suis pas une poule !

M. le président. De tels comportements sont franchement incroyables, mes chers collègues !

Mme Véronique Massonneau. La durée moyenne de cotisation est de trente-cinq ans pour les femmes et de trente-sept ans pour les hommes en dépit des dernières réformes touchant à l’allongement de la durée de cotisation et au report de l’âge légal. Comment cette mesure ne pourrait-elle pas toucher davantage les seniors et les femmes en particulier ? Souhaitons-nous vraiment baisser le niveau des pensions, car telle est bien la conséquence de cette mesure ?

Quelque 59 % des retraités étaient actifs au moment de liquider leur retraite. Quelle sera la conséquence pour les autres ? L’UNEDIC a évalué à 440 millions d’euros le coût des dernières réformes qui auraient eu pour conséquence 30 000 chômeurs supplémentaires en année pleine. L’étude d’impact n’a pas mesuré les conséquences de cet allongement sur le chômage des seniors ni sur celui des jeunes. (Mêmes interruptions sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Catherine Coutelle. Ce comportement est honteux, scandaleux !

M. Patrice Carvalho. Ils sont alcoolisés !

M. Michel Issindou, rapporteur. Complètement avinés !

M. le président. Finissez, je vous prie, madame Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Les projections retenues pour la mise en place de ces dispositifs me semblent en outre quelque peu optimistes. Pour toutes ces raisons, les écologistes sont défavorables à cette mesure et nous demandons sa suppression. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

M. le président. Mes chers collègues, laissez-moi vous dire, avant que nous ne poursuivions nos travaux, que je ne veux pas que l’hémicycle se transforme en cour de récréation. Certaines attitudes sont inacceptables. C’est pourquoi je vous propose une minute de suspension afin que chacun puisse retrouver son calme.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue pour une minute.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente, est reprise à vingt-deux heures trente-trois.)

M. le président. La séance est reprise.

Mes chers collègues, permettez-moi de vous dire, avant que nos travaux ne reprennent, qu’il y a des choses que je n’accepterai jamais dans cet hémicycle. Que des parlementaires se transforment en imitateurs d’oiseau quand un collègue s’exprime, ce n’est pas acceptable ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Il y a des choses qui relèvent de notre responsabilité collective. Ne vous étonnez pas ensuite qu’il puisse y avoir des voix pour les populistes si les électeurs se rendent compte que les élus de la République se comportent d’une telle façon. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour un rappel au règlement.

M. Arnaud Robinet. Mon article se fonde sur l’article 58, alinéa 1, du règlement.

Monsieur le président, l’interruption de séance, qui devait durer une minute, a duré trois minutes. Nous ne sommes pas dupes. Nos collègues de la majorité en effet ne sont pas majoritaires pour décider du sort de ces amendements. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Nous regrettons vivement cette interruption de séance, qui a permis (Mêmes mouvements)

M. le président. Monsieur Robinet, permettez-moi d’espérer que vous réfléchirez aux propos que vous venez de tenir : ne confondons pas en effet mathématiques et philosophie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Article 2 (suite)

M. le président. Nous en revenons aux amendements identiques.

La parole est à M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.

M. Michel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales. Dans le calme que j’espère retrouvé, car tous ces débats sont un peu stériles et inutiles,…

M. le président. Venons-en au fond, je vous prie, monsieur le rapporteur.

M. Michel Issindou, rapporteur. …je comprends donc que si une partie des députés ici présents veulent plus d’années de cotisations – quarante-quatre –, d’autres en veulent moins. Pour notre part, nous proposons un schéma équilibré de réforme, à savoir une fusée à deux étages s’agissant des cotisations. Nous avons en effet souhaité une augmentation modérée à la fois de leur montant, pour ne peser ni sur les entreprises ni sur le pouvoir d’achat des ménages, et de leur durée, en prévenant correctement à l’avance tous ceux qui auront, si je puis dire, à la subir.

C’est donc pour garantir que le système de retraites remplit son objectif, fixé à l’article 1er, à savoir servir une pension correcte et satisfaisante, permettant de vivre dignement, que nous avons agi modérément sur ces deux paramètres. Notre schéma est donc tout à fait cohérent.

Certes, si vous prenez l’exemple de gens qui n’auront pas travaillé du tout avant l’âge de vingt-trois ans et qui n’auront pas d’enfants, certains devront aller au-delà de soixante-deux ans, mais d’autres pas : entre la prise en compte de la pénibilité, des mesures favorables concernant, comme cela a été rappelé par Mme la ministre, le chômage, la formation et la maternité, les cas seront très divers.

M. Laurent Wauquiez. Ce n’est pas ce que dit le rapport de Bercy.

M. Michel Issindou, rapporteur. Je me demande d’ailleurs si l’âge légal a un sens. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Dominique Tian. C’est de l’ultralibéralisme !

M. Laurent Wauquiez. Quel aveu !

M. Michel Issindou, rapporteur. On pourrait avoir un schéma de retraite où les quarante-trois annuités seraient suffisantes. Demandons à chacun d’effectuer quarante-trois annuités.

Avec votre schéma à l’égalité prétendûment parfaite, un jeune qui a commencé à travailler à dix-huit ou dix-neuf ans devra rester en activité jusqu’à son soixante-cinquième anniversaire, soit quarante-sept ou quarante-huit ans. Est-ce cela la justice que vous souhaitez ? Nous estimons, pour notre part, que celui qui aura travaillé quarante-trois ans aura ses droits à la retraite.

Nous présentons donc un schéma structuré, cohérent, dont les deux parties ne peuvent être déconnectées. On ne peut prendre la première et laisser la deuxième. Tout cela fonctionne ensemble, et c’est pour cela que le projet du Gouvernement tient la route.

j’émets donc un avis défavorable sur tous les amendements présentés même s’il y a davantage de cohérence dans ce qui se dit à ma gauche ici, et que je peux entendre, que dans ce qui se dit sur ma droite.

M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

M. Arnaud Robinet. Il est pour la retraite à soixante-cinq ans !

Mme Catherine Vautrin. Il l’a dit !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Ce débat est intéressant : alors que l’on entend des arguments à gauche puis d’autres à droite, je constate que certains applaudissent les arguments des autres.

Que propose l’UMP ? Imaginons qu’elle soit aujourd’hui aux responsabilités.

M. Denys Robiliard. Quel cauchemar !

M. Denis Jacquat. Bientôt, bientôt !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Qu’offrirait-elle aux Français en matière de réforme des retraites ?

M. Dominique Tian. Vous êtes l’orateur de l’UMP ?

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. L’UMP a en effet cette faculté de nous raconter des histoires et de mentir ici, à l’Assemblée nationale, comme elle ment à l’extérieur.

Prenons ses propositions, celles signées par M. Wauquiez, par M. Bertrand…

M. Xavier Bertrand. Fait personnel ! (Sourires.)

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. …et par tant d’autres. Que nous proposez-vous en réalité ? Référons-nous, puisque vous prétendez que notre réforme nuirait aux familles et pénaliserait les jeunes, à l’amendement que vous présenterez dans quelques instants, qui symboliserait, paraît-il, votre projet.

M. Bernard Accoyer. Donnez-nous plutôt l’avis de votre commission !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Né en 1989, j’ai vingt-quatre ans aujourd’hui. (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Ce n’est pas vrai !

M. le président. Laissez le rapporteur pour avis rêver !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Selon votre projet, qu’est-ce qui m’attend si j’entre aujourd’hui dans la vie active ? Avec quarante-quatre années de cotisation, il faudra que j’attende l’âge de soixante-huit ans pour partir à la retraite ! Pire, si j’ai dix-huit ans et que j’ai un travail pénible, il faudra toujours quarante-quatre annuités pour que je puisse prendre ma retraite, voire, si l’âge légal est de soixante-cinq ans, quarante-sept ans de durée de cotisation. Voilà ce que vous voulez proposer aux ouvriers !

M. Dominique Tian, rapporteur. Mais non !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. C’est pourtant ce que vous allez présenter dans un instant.

Votre proposition n’est pas juste. Pire, elle serait une catastrophe économique pour le pays. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Elle serait dangereuse.

On peut mentir mille fois à une personne, c’est ce que vous faites (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP), mais on ne peut pas mentir mille fois à mille personnes, comme vous le faites régulièrement !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements ?

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Défavorable.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour un rappel au règlement.

M. Laurent Wauquiez. Mon rappel se fonde sur l’article 58, alinéa 1.

Pour le bon déroulement de nos débats, nous avons posé deux questions très précises à Mme la ministre.

La première, posée par le président Accoyer, portait sur le rapport envoyé par Bercy à Bruxelles. Vous nous avez vous-même indiqué, monsieur le président, que Mme la ministre est fondée à répondre à l’ensemble des questions au nom du Gouvernement. Vous avez raison : qu’elle y réponde donc ! Ce rapport précise que ce qui compte n’est pas l’âge légal du départ à la retraite – quel aveu, d’ailleurs, que celui, tout à l’heure, de M. le rapporteur ! –, mais l’âge effectif de ce départ à la retraite. Ce rapport, envoyé par le Gouvernement à Bruxelles, prévoit qu’avec cette réforme un assuré en France, ne pourra, à terme, prendre sa retraite à taux plein qu’à partir de soixante-six ans ! C’est expressément ce qui y est écrit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Nous attendons donc une réponse de la part de Mme la ministre – si elle ne connaît pas les rapports envoyés par le Gouvernement à Bruxelles, ce serait inquiétant.

J’en viens à la seconde question que nous avons posée et à laquelle Mme la ministre n’a pas non plus répondu. Une de ses collègues du Gouvernement, Mme Lebranchu,…

…a expliqué que la réforme entrerait en vigueur sous un régime à deux vitesses : une vitesse accélérée pour le privé, qui devrait voir ses cotisations augmenter tout de suite,…

M. Bernard Accoyer. Ce ne serait pas constitutionnel !

M. Laurent Wauquiez. …et une autre pour le public qui aurait, lui, un régime préservé – les socialistes protégeant ainsi leur clientèle électorale –, avec des cotisations qui augmenteraient beaucoup plus lentement.

Nous ne pouvons pas accepter, monsieur le président, que Mme la ministre ne réponde pas à la représentation nationale.

Article 2 (suite)

M. le président. Pour répondre aux rapporteurs, la parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Je veux en effet répondre aux deux rapporteurs, même si nous attendons, bien sûr, la réponse de Mme la ministre aux deux questions posées.

M. Bernard Accoyer. C’est terrassant ! (Sourires.)

M. Arnaud Robinet. Nous avons bien compris : il n’y a plus d’âge légal de départ à la retraite. C’est un aveu, et les Français seront contents de l’entendre !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Et les vingt milliards de déficit ?

M. Arnaud Robinet. Oui, c’est terrassant. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)

Mes chers collègues, vous caricaturez les propos de l’opposition. Nous, nous sommes fiers d’une chose : grâce à la réforme de 2010, grâce au recul de l’âge de départ à la retraite, qui est passé de soixante à soixante-deux ans, nous avons au moins, monsieur Terrasse, garanti, premièrement, le financement de notre système de retraites par répartition et, deuxièmement, le versement d’une pension à tous.

Tous les Français auront une pension, qu’ils recevront chaque mois.

M. Michel Issindou, rapporteur. À crédit !

M. Arnaud Robinet. Votre réforme, avec votre mesure consistant à augmenter la durée de cotisation, aura pour seule conséquence une diminution des pensions, puisque certains partiront à soixante-deux ans sans avoir cotisé le temps nécessaire à une retraite à taux plein.

M. Laurent Wauquiez. Très bien !

M. Arnaud Robinet. Alors, oui, nous, nous sommes fiers de ce que nous avons fait ; les Français ont eu ce qui leur était promis. Avec vous, on va vers la paupérisation de la société française ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Marisol Touraine, ministre. Je répondrai très rapidement aux deux questions, non que la personne qui me les a posées fasse preuve d’une présence telle qu’elle justifie que je lui réponde (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), mais parce que je crois que cela fait partie des usages.

Je vous conseille, messieurs les députés, de relire le rapport envoyé à Bruxelles. Ce à quoi vous faites allusion est un exemple parmi d’autres : quelqu’un qui commence à travailler à 23 ans – exemple que vous évoquiez – pourra, avec quarante-trois annuités, aller jusqu’à 66 ans…

M. Laurent Wauquiez. Vous ne répondez pas !

M. Marc Dolez. CQFD !

Mme Marisol Touraine, ministre. …s’il ne bénéficie pas d’une réduction de la durée de cotisation, que ce soit pour des raisons familiales ou professionnelles.

Quant à la seconde question, je vous indique, messieurs les députés, que les fonctionnaires, comme les salariés du privé, verront leurs cotisations augmenter de 0,3 % à l’horizon 2017.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour un rappel au règlement.

M. Arnaud Robinet. Monsieur le président, ce rappel au règlement est fondé sur l’article 58, alinéa 1, de notre règlement.

Mme la ministre a mis en cause un parlementaire, alors que depuis hier, elle n’écoute pas les débats ! Elle n’a pas écouté la discussion générale, elle ne répond pas aux questions, et passe son temps à utiliser son iPad ou son iPhone ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Nous demandons donc une suspension de séance.

M. le président. Si la suspension est de droit, j’accède d’autant plus à votre demande que cela permettra aux uns et aux autres de retrouver un calme indispensable à la poursuite de nos travaux.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 2 (suite)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je tiens en effet, monsieur le président, à prendre la parole, non pas dans le cadre d’un rappel un règlement, mais tout simplement dans le débat, en réaction aux propos tenus par Mme la ministre.

Qui plus est, ce jeune ne pourra partir à la retraite à 66 ans que si sa carrière professionnelle n’a connu aucun accroc, aucun aléa. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vous avez été très honnête, madame la ministre, en nous présentant la réalité des chiffres : un jeune ayant commencé à travailler à l’âge de 23 ans qui devra cotiser quarante-trois ans partira donc à la retraite à l’âge de 66 ans (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC),…

Au mieux, le texte de loi permet de gagner deux ans en cas de pénibilité. Cela veut donc dire qu’une personne ayant un travail pénible – nous en connaissons tous – partira à la retraite à l’âge de 64 ans.

M. Laurent Wauquiez. Très bien !

M. André Chassaigne. On développe souvent l’argument selon lequel ce texte de loi concerne uniquement la durée de cotisation. Certes, il concerne d’abord la durée de cotisation, mais il a trait aussi à l’âge de départ : dans les faits, l’âge de départ est touché, y compris pour les gens qui ont un travail pénible. Pour ceux d’entre eux qui ont commencé à travailler à 23 ans, l’âge de départ à la retraite sera de 64 ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe SRC. À taux plein !

M. Laurent Wauquiez. Bien sûr !

M. André Chassaigne. …je dis bien 66 ans, au mieux !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 137, 608, 609, 610, 613, 616, 617, 618, 1670, 2931 et 3015.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants188
Nombre de suffrages exprimés184
Majorité absolue93
Pour l’adoption78
contre106

(Les amendements identiques nos 137, 608, 609, 610, 613, 616, 617, 618, 1670, 2931 et 3015 ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet, pour un rappel au règlement.

M. Arnaud Robinet. Monsieur le président, ce rappel au règlement est fondé sur l’article 58, alinéa 1 de notre règlement et porte sur le déroulement de nos débats.

Je trouve assez déplorable que certains parlementaires – notamment un rapporteur pour avis de ce texte – parlent sur les réseaux sociaux du contre-projet de l’UMP et dévoilent des amendements déposés par des membres de notre groupe, alors même que ces amendements n’ont pas encore été défendus dans l’hémicycle. Je trouve cela tout à fait désagréable : cela porte atteinte au bon déroulement de nos débats.

M. le président. Je suis sûr que chacun va maintenant reprendre ses esprits.

Article 2 (suite)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 138 et 2932.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n138.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement maintient la règle posée par la loi de 2003 – validée, d’ailleurs, par la majorité actuelle. Il s’agit de maintenir la règle de partage des gains d’espérance de vie afin de maintenir constant le rapport entre la durée d’activité et la durée de retraite. À raison d’un trimestre supplémentaire tous les trois à quatre ans, la durée d’assurance passerait à 42 ans pour la génération née en 1962, à 43 ans pour la génération née en 1975 et à 44 ans pour la génération née en 1989. Telle est la règle définie par la loi de 2003, validée par le Gouvernement.

Cette montée en charge viendrait compléter la mesure phare de report de l’âge légal de départ à 65 ans. Si le rythme proposé est sensiblement proche de la réforme proposée par le présent projet de loi, la montée en charge retenue est plus longue et permet de maintenir le principe d’une possible hausse de la durée d’assurance au-delà de 2035.

En cas de dépassement des besoins des financements – nous envisageons cette hypothèse car nous considérons que notre contre-projet permettrait aux financements de retrouver l’équilibre – il serait envisageable de redistribuer les excédents sous forme de baisses de cotisations.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n2932.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement vise à instaurer un dispositif qui adapte la durée de cotisation à l’évolution de l’espérance de vie avec un âge légal de départ qui évolue. Cela a été prévu par la réforme de 2003, et confirmé par la réforme de 2010. C’est un mécanisme qui a été adopté il y a déjà bien longtemps par la plupart des pays comparables au nôtre, en particulier les pays de l’OCDE.

Si vous le permettez, monsieur le président, je souhaite maintenant poser une question à Mme la ministre. Tout à l’heure, elle a en effet pris à partie les auteurs de deux questions qui lui ont été posées. Elle a d’ailleurs reconnu, en répondant à l’une d’elles, que le Gouvernement tenait deux discours différents : l’un à Bruxelles, avec un âge de départ effectif à la retraite à 66 ans, l’autre à Paris, pour la clientèle du parti socialiste, avec un âge de départ à 62 ans. Ce point étant acquis, elle a ajouté – ce qui était inutile, convenons-en – que l’un des deux députés lui ayant posé ces questions était très souvent absent des débats.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Mais c’est vrai !

M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, ce n’est pas à vous de juger de l’assiduité des parlementaires, mais à M. le président et à ses services. Ce n’est pas non plus le rôle de Mme la présidente de la commission des affaires sociales, qui est si prompte à donner des leçons à tout le monde.

Nous revendiquons notre liberté de siéger et de tenir séance ici. Je voudrais que vous nous disiez si ces allusions s’adressaient à mon collègue Laurent Wauquiez ou à moi-même.

M. Christian Paul. Aux deux !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, vous l’aurez compris. Nous pensons que l’allongement de la durée de cotisation à 43 ans est suffisant pour atteindre l’équilibre. En 2035, la bosse démographique sera passée. L’allongement de la durée de cotisation à 43 ans est donc non seulement nécessaire, mais aussi suffisant : il ne s’agit pas d’en rajouter. Pour nous, ces amendements n’ont donc aucun sens.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable, monsieur le président. Concrètement, cet amendement propose de porter la durée de cotisation au-delà de 44 annuités, d’une manière dont la logique semble échapper à certains des participants à ce débat – en tout cas, au Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous sommes à un moment intéressant du débat, car les réponses de Mme la ministre et du rapporteur montrent clairement l’hypocrisie du projet de loi. Le rapporteur lui-même l’a avoué. En effet, que nous a-t-il dit ? Que l’âge légal de départ à la retraite n’avait plus de signification.

Comme l’a très bien montré notre collègue André Chassaigne, vous maintenez, monsieur le rapporteur, la fiction hypocrite d’un âge légal de départ à la retraite : en allongeant la durée de cotisation, personne ne pourra partir avec une retraite correcte à l’âge légal.

Les réponses de Mme la ministre et de M. le rapporteur établissent clairement l’hypocrisie qui est au cœur de ce projet de loi. Pour des raisons politiques, ils ne touchent pas à l’âge légal de départ à la retraite mais, dans les faits, ils vident de son sens l’âge légal de départ à la retraite.

L’aveu fait par M. le rapporteur et par Mme la ministre, qui a parlé de 66 ans comme cela a été relevé, montre à quel point votre réforme des retraites est un trompe-l’œil.

M. Christian Jacob et M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Les amendements proposés sont beaucoup plus justes. Nous avions critiqué le basculement en 2020, qui pénalisait la jeunesse. Le repousser à 2 051 permettrait de ne pas faire porter totalement le poids de votre réforme sur notre génération, les trentenaires et les quarantenaires.

Vous nous avez dit que vous aviez choisi 2020 car cela permettait aux familles d’avoir des perspectives – en d’autres termes, de voir venir. Avouez que cet argument est également valable pour 2051.

Enfin, si l’idée de votre réforme est de prévenir les gens par avance, que n’avez-vous pas fait la même chose lorsque vous avez augmenté brutalement la TVA,…

M. Bernard Roman. C’est vous qui avez augmenté la TVA ! On a supprimé cette augmentation !

M. Julien Aubert. …annoncé une réforme sur l’excédent brut d’exploitation avant de revenir dessus, ou supprimé la défiscalisation des heures supplémentaires ?

Il aurait été intéressant que la stabilité sociale ait pour corollaire la stabilité fiscale : les Français aimeraient aussi savoir, madame la ministre, à quelle sauce ils vont être mangés l’année prochaine.

M. Laurent Wauquiez et M. Bernard Accoyer. Très bien ! Bravo !

(Les amendements identiques nos 138, 2932, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 15, 45, 103, 2 870 rectifié, 2964, 3038, 16, 46, 104, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 15, 45, 103 sont identiques, de même que les amendements nos 2870 rectifié et 2964 et que les amendements nos 16, 46, 104.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n15.

M. Arnaud Robinet. À défaut d’agir sur l’âge légal de départ à la retraite – bien que nous ayons un peu de mal à comprendre la position du Gouvernement, notamment du rapporteur sur le sujet –, il faut que la durée de cotisation augmente plus rapidement que le rythme retenu par le présent projet de loi, soit 43 ans à partir de 2020 pour la génération 1973-2035. Cela permettra d’augmenter le rendement de cette mesure à court terme afin de garantir une pension aux retraités, ce qui est notre seul objectif.

M. Paul nous a dit que la durée de cotisation prévue était certes de quarante-trois annuités, mais que la grande majorité des salariés français ne serait pas concernée puisqu’elle partira à la retraite avant, dans la mesure où tous concernés par le dispositif sur la pénibilité !

M. Christian Paul. Non, ce n’est pas vrai !

M. Arnaud Robinet. Cet amendement prévoit donc que l’augmentation de la durée de cotisation produise tous ses effets à court terme, afin de rétablir l’équilibre financier du système de retraite, soit 44 annuités en 2020 pour la génération 1958-2020.

Cet allongement commencerait dès 2016 pour les assurés nés à partir de 1954. Cette recherche d’équité entre les générations suppose de tenir compte à la fois des gains d’espérance de vie et de l’insertion professionnelle plus progressive des jeunes générations pour relever l’âge de départ à la retraite et la durée d’assurance.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n45.

M. Jean-Pierre Barbier. Puisque cette réforme ne permet pas de trouver l’équilibre financier que nous souhaitons tous, cet amendement se propose d’accélérer le processus d’augmentation de la durée de cotisation, à défaut de l’augmentation de l’âge légal de la retraite.

Si l’on souhaite atteindre l’équilibre financier, il faut bien évidemment prendre une mesure courageuse. Or, ce n’est pas du tout le cas de la réforme. Il est important de le dire et de le marteler : l’avenir du système par répartition passe par l’équilibre financier.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n103.

M. Dominique Tian. Je sais que la pédagogie vous est chère, monsieur le président. Comme est l’art de répéter les choses, je vais donc réitérer les arguments d’Arnaud Robinet, ce qui devrait être utile notamment au rapporteur.

À défaut d’agir sur l’âge légal, il faut que l’augmentation de la durée de cotisation augmente plus rapidement que le rythme retenu par le présent projet de loi, soit 43 ans à partir de 2020 pour la génération 1973-2035, afin d’augmenter le rendement de cette mesure à court terme – 5,4 milliards d’euros tous régimes en 2030 mais 0 en 2020.

Cet amendement prévoit que l’augmentation de la durée de cotisation produise tous ses effets à court terme afin de rétablir l’équilibre financier du système de retraite, soit 44 annuités en 2020 pour la génération 1958-2020. Cet allongement commencerait dès 2016 pour les assurés nés à partir du 1er janvier 1954.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2870 rectifié, 2964.

La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n2870 rectifié.

M. Philippe Vigier. Ce soir, madame la ministre, nous assistons, je crois, à une « opération vérité », puisque vous avez enfin renoncé aux vieilles lunes de la retraite à 60 ans. J’ai d’ailleurs retrouvé l’amendement que vous aviez déposé le 3 septembre 2010 : c’était l’amendement n286, qui visait à revenir à la retraite à 60 ans. Je pense, chacun l’a bien compris, que celui-ci est enterré !

La réforme aujourd’hui n’est pas financée et la retraite par répartition est menacée. Le groupe UDI dit simplement qu’il faut proposer des mesures d’âge et un âge légal qui permettent de sécuriser le financement du système. C’est cela le pacte de confiance à proposer aux jeunes, qui seront sûrs d’avoir une retraite.

Votre réforme est d’autant moins financée que des mesures nouvelles – Bernard Accoyer le disait tout à l’heure – ne sont même pas financées. L’amendement vise donc à fixer la limite d’âge à 64 ans et à allonger à 44 années la durée de cotisation. Vous avez dit tout à l’heure que l’espérance de vie progressait. Mais ce n’est pas nouveau ! Cela ne vient pas d’arriver en 2013 !

Nous demandons donc un effort partagé car nous ne voulons plus de petites retraites, de la baisse du pouvoir d’achat des retraités ou des salariés et d’une baisse de la compétitivité des entreprises.

« L’opération vérité », c’est une retraite pour tous avec un bon niveau de retraite ! Cela passe par un âge légal à 64 ans et 44 annuités de cotisations.

Ne dites pas, madame la ministre, qu’en augmentant le nombre d’années de cotisation sans modifier l’âge légal de départ à la retraite, vous servirez aux retraités la même retraite. Ils sauront qu’ils partiront avec moins. Et cela, vous ne voulez pas leur dire. La réforme que vous proposez est un gage de défiance.

M. Laurent Wauquiez. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut, pour soutenir l’amendement n2 964.

M. Bernard Perrut. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir l’amendement n3 038.

M. Denis Jacquat. Il est défendu.

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 16, 46, 104.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n16.

M. Arnaud Robinet. L’amendement que nous proposons reprend le premier scénario du fameux rapport Moreau, que nous avons étudié longuement.

À court terme, c’est-à-dire en 2020, une accélération du calendrier d’allongement des durées d’assurance serait ainsi susceptible de produire des effets. Plusieurs scénarios ont été examinés, dont celui qui consiste à porter la durée d’assurance de 41,75 ans pour la génération 1957 à 43 ans pour la génération 1962 puis à 44 ans pour la génération 1966, c’est-à-dire de l’accroître rapidement à raison d’un trimestre par génération.

Le rapport de Yannick Moreau était très clair : « La commission juge utile que la concertation sur la prochaine réforme discute de l’opportunité de ces mesures d’accélération qui peuvent renforcer la capacité du système à affronter les défis qui l’attendent jusqu’en 2035 et limiter les prélèvements supplémentaires sur les actifs dans la période de sortie de crise actuelle ».

Par cet amendement, nous respectons donc le rapport Moreau et nous demandons au Gouvernement d’ouvrir la concertation sur le premier scénario de court terme du rapport Moreau.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n46.

M. Jean-Pierre Barbier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n104.

M. Dominique Tian. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Ces amendements comportent quelques nuances en allant plus ou moins vite en matière de durée de cotisation, mais, dans l’ensemble, ils vont extrêmement vite.

Nous avons expliqué pour notre part pourquoi nous souhaitions avoir une combinaison entre cotisation et âge pour aboutir à une réforme moins brutale. On dirait que les auteurs de ces amendements sont dans la nostalgie des réformes des retraites passées,…

M. Christian Paul. Bien sûr !

M. Michel Issindou, rapporteur. …et qu’il faudrait brutaliser les Français pour proposer une réforme des retraites. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)



Vous êtes toujours, semble-t-il, dans ce schéma : il faut des choses violentes et fortes. Je ne dis pas que cette réforme des retraites sera la dernière,… (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Philippe Gosselin. Cela n’en prend pas le chemin !

M. Denis Jacquat. Il y avait un rendez-vous en 2013 !

M. Charles de La Verpillière. C’est un aveu !

M. Michel Issindou, rapporteur. …mais on peut penser qu’avec le comité de suivi que l’on va mettre en place, on aura la capacité à ajuster les paramètres – puisque c’est le sujet – dans la continuité, et non pas par des crises tous les trois, quatre ou cinq ans, sachant d’ailleurs que le rythme s’accélère dangereusement car le problème n’est jamais réglé.

Essayons donc de régler les choses autrement, dans une relative douceur, en demandant un effort modéré aux Français quant à l’allongement de la durée de cotisation. Prenons l’exemple de la génération 1958 : ce sont des gens qui, âgés aujourd’hui de 55 ans, peuvent espérer partir à la retraite au bout de 41,5 annuités. Voilà que vous leur dîtes brutalement que ce ne sera plus 41,5 ans mais 44 annuités qui seront requises pour partir à la retraite ! Alors qu’à 55 ans, ils ont commencé à penser un peu sérieusement à la retraite, vous les brutalisez pour un résultat improbable. Nous préférons jouer en partie sur les cotisations et sur l’âge que sur un seul paramètre. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Charles de La Verpillière. Vous allez baisser les pensions !

Plusieurs députés du groupe UMP. Le rapport Moreau le dit !

M. Bernard Accoyer. Le compte n’y est pas !

M. Michel Issindou, rapporteur. Bien sûr que le rapport Moreau le dit ! Mais Mme Moreau dit aussi qu’on peut augmenter seulement les cotisations et ne pas toucher à l’âge. (Mêmes mouvements.)

M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !

M. Michel Issindou, rapporteur. Elle a fait beaucoup d’hypothèses et de simulations. Vous retenez celle-là parce qu’elle vous arrange. Nous avons retenu pour notre part un projet modéré. Vous ne l’acceptez pas tel quel et avez besoin de le rendre plus violent. J’émets un avis défavorable à vos amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable. À vrai dire, j’ai plutôt un avis bienveillant ce soir :…

M. Jean-Frédéric Poisson. Profitons-en !

M. Charles de La Verpillière. Cela nous avait échappé !

Mme Marisol Touraine, ministre. …je veux croire que vous avez cherché à voir jusqu’où vous étiez capable d’aller. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Laurent Wauquiez. C’est incroyable ! Quand on est à ce point désavoué par les Français, on est un petit peu plus modeste !

Plusieurs députés du groupe UMP. Quelle arrogance !

Mme Marisol Touraine, ministre. N’attachons donc pas plus d’importance à ce qui, à l’évidence, n’est pas sérieux.

Plusieurs députés du groupe UMP. Quel mépris !

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous expliquer que 43 annuités en 2035, c’est brutal et injuste, mais que 44 annuités en 2020, c’est raisonnable et responsable, je veux imaginer que, même vous, n’y croyez pas !

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. C’est incohérent !

M. Christian Jacob. Madame la ministre, je vous invite à faire preuve d’un peu moins d’arrogance. On peut avoir une argumentation sur le fond sans être en permanence dans le mépris et l’arrogance ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)



Je vous invite à regarder les résultats électoraux : vous verrez que cette arrogance ne paie peut-être pas, madame la ministre. (Protestations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

M. Christian Paul. C’est un expert qui parle !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Ce n’est pas vous qui avez fait 40 % !

M. Christian Jacob. Un peu de modestie ne vous nuirait pas non plus !

M. Laurent Wauquiez. En tout cas, ce Gouvernement vous emmène au massacre !

M. le président. Je suis sûr que tout le monde regardera ces résultats avec beaucoup d’attention. (Sourires.)

M. Christian Jacob. Sur le fond, vous êtes dans une logique d’augmentation des cotisations, comme vous êtes toujours dans une logique d’augmentation des impôts. L’augmentation des cotisations se traduit par deux éléments : l’augmentation du coût du travail, ce qui amoindrit la compétitivité des entreprises…

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Frédéric Poisson. C’est vrai, évidemment !

M. Christian Jacob. …et une baisse du salaire net des salariés. Se baser uniquement sur l’allongement de la durée de cotisation sans passer par l’âge légal ne sera pas suffisant, vous le savez pertinemment…

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis et M. Michel Issindou, rapporteur. On a compris !

M. Christian Jacob. On verra dans le cadre de la loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale que cela se traduira également par une baisse des pensions. C’est cela la réalité des choses.

Le système que nous avons choisi est de reporter l’âge légal, ce qui nous permet de retrouver l’équilibre sans baisser le salaire net des salariés – comme vous allez le faire –, sans baisser les pensions des retraités, et en maximisant également la compétitivité des entreprises.

Vous êtes dans la logique inverse. Votre réforme pénalise les entreprises et les salariés, et vous traitez nos arguments uniquement par le mépris ! Acceptez de vous arrêter deux minutes sur les sujets du pouvoir d’achat, des retraités et de la compétitivité des entreprises : je suis sûr que vous entendrez alors nos arguments différemment. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.

M. Xavier Bertrand. Il a beaucoup été question de cohérence. Je demanderai donc à M. Issindou et à d’autres s’ils ont fait preuve de cohérence, lorsque l’on sait qu’ils ne voulaient pas aller au-delà de soixante ans en 2010. Êtes-vous, oui ou non, revenus en arrière ?

M. Jean-Paul Dupré. Qu’avez-vous fait ?

M. Xavier Bertrand. Vous n’êtes pas revenus en arrière. Comment voulez-vous, ensuite, incarner la crédibilité en politique ? De la même façon, s’agissant de la cohérence, vous avez crié au scandale, notamment en 2008, lorsqu’un décret a été pris pour allonger la durée de cotisations. Vous allez plus loin encore aujourd’hui. Le vrai sujet, c’est qu’il y a, actuellement, un discrédit de la politique dont vous portez l’entière responsabilité parce que vous êtes au pouvoir et parce que vous faites le contraire de ce que vous avez plaidé à l’époque ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)



Comment voulez-vous que les Français vous croient quand vous dites que cette réforme est juste, alors qu’elle porte partout les stigmates de l’injustice, qu’il s’agisse du public, du privé ou des retraités, dont, sous votre mandat et pour la première fois, les pensions ou les retraites complémentaires ne sont plus revalorisées en fonction de l’inflation, d’où une pénalisation de leur pouvoir d’achat ? Où est la justice quand les jeunes générations manifestent aujourd’hui à l’appel de syndicats qui, pourtant, ont, par le passé, été plus souvent habitués à manifester contre la droite que contre vous ?

Ils ont manifesté dans la rue parce qu’ils ont compris qu’ils étaient les victimes de cette réforme qui ne règle rien. Il est évident qu’aujourd’hui, en termes de cohérence, il faudrait faire preuve de courage. Je l’ai dit et je le répète, ce n’est pas la marque de fabrique de ce Gouvernement ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Thierry Benoit. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Je comprends que ce ne soit pas facile, madame la ministre. Le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement vient d’ailleurs d’arriver.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Il est présent depuis le début !

M. Sébastien Denaja. Tout à fait, il est là depuis deux heures !

M. Philippe Vigier. Il vient de revenir, pour être précis, madame la présidente de la commission des affaires sociales ! Lui-même déclarait en 2010, lors de la discussion de l’exception d’irrecevabilité, qu’il était scandaleux d’allonger la durée de cotisations et qu’il fallait revenir à la retraite à soixante ans !

M. Philippe Gosselin. Le changement, c’est maintenant !

M. Philippe Vigier. Nous vous le disons, très calmement, madame la ministre : le rapporteur, en précisant qu’une nouvelle réforme serait nécessaire, vient d’avouer que votre réforme ne fonctionne pas.

M. Michel Issindou, rapporteur. Je n’ai absolument pas dit cela !

M. Philippe Vigier. Vous annoncez, ce soir, votre échec. Heureusement qu’il y a eu cette réforme de 2010…

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. La preuve !

M. Philippe Vigier. …qui vous sert bien aujourd’hui. Vous pourriez fixer la limite d’âge à soixante ans et six mois ! Or vous ne le faites pas, car vous avez besoin de ces bornes d’âges que nous avons définies ! Et nous vous interpellons sur le niveau des petites retraites, madame la ministre. Il est intolérable, pour celui qui touche 850 euros par mois, d’apprendre que sa retraite sera revalorisée non plus au 1er avril, mais au 1er octobre.

Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !

(Les amendements identiques nos  15, 45 et 103 ne sont pas adoptés.)

(Les amendements identiques nos  2870 rectifié et 2964 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n3038 n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos  16, 46 et 104 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en venons à une série d’amendements identiques nos  1857 à 1871, sur laquelle je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1857.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous n’acceptons pas l’augmentation de la durée de cotisations pour l’ensemble de nos concitoyens pour les raisons que nous avons déjà largement exposées. C’est pourquoi nous avions demandé la suppression de cet article, ce que vous n’avez pas accepté. Nous ne tolérons pas davantage cette augmentation de la durée de cotisations pour les fonctionnaires de l’État et les militaires concernés par les alinéas 10 et 11. C’est la raison pour laquelle nous proposons de les supprimer.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1858.

M. André Chassaigne. Nous allons avoir l’occasion de communiquer quelques témoignages, car j’ai effectivement lancé un appel et j’en ai reçu plusieurs dizaines. Je me limiterai, donc, à vous en lire un parmi d’autres. « Les quarante-trois ans de cotisations, qu’est-ce que cela veut dire ? J’ai vingt-neuf ans. Je travaille depuis un peu plus de cinq ans. Pour moi, c’est une projection bien lointaine. On nous parle de l’allongement de l’espérance de vie. Mais cela me projette à un âge canonique dans lequel je ne suis pas capable de m’imaginer. Quarante-trois ans, soixante-sept ans l’âge de départ. C’est à peu de chose près l’âge auquel mon grand-père est décédé.

Je cherche dans mon entourage des gens qui ont ces âges-là et j’essaie de me dire que je leur ressemblerai, mais que je travaillerai encore. Je pense à eux, mais je ne m’imagine pas comme eux. Je suis trop jeune, c’est impossible. Je les regarde. La totalité sont retraités. Certains ont la forme, d’autres pas. La plupart me paraissent avoir beaucoup travaillé au cours de leur carrière en donnant beaucoup à leur travail et pas nécessairement à l’usine ou dans des tâches difficiles. Je m’imagine travailler avec ces gens. Dans mon boulot, la Territoriale, un secteur qui ne connaît pas le concept de travail pénible, je ne vois pas comment ils pourraient tenir le coup.

Soixante-sept ans, augmentons encore plus ! Travailler jusqu’à la mort, nous forcer à travailler jusqu’au bout pour subvenir à de maigres besoins. » (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Accoyer. C’est insupportable !

M. Dominique Tian. C’est du Zola !

M. André Chassaigne. « On voit nos parents partir à la retraite. Souvent, ils sont en forme. Ils peuvent en profiter. Après avoir fait beaucoup d’efforts pour notre éducation, pour payer la maison, mes parents se paient de beaux petits plaisirs. Mais est-ce qu’un jour je pourrai vivre cela aussi ? Au nom de quelle égalité ma génération devrait-elle vivre moins bien que celle de mes parents ? Ils ont volé quelque chose ? » (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1859.

M. Marc Dolez. Défendu !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour soutenir l’amendement n1865.

M. Jean-Jacques Candelier. Je lirai de nouveau un témoignage, monsieur président. Sans doute certains diront-ils que nous sommes sur Radio Nostalgie ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce témoignage est celui d’un professeur d’EPS. « Voici mon témoignage concernant les quarante-trois annuités de cotisations. Je suis enseignant d’EPS en Gironde. J’ai trente-cinq ans. J’ai eu la chance d’obtenir le concours très tôt, ce qui n’est pas la majorité des cas. Je suis donc entré fonctionnaire stagiaire à vingt et un ans. Si je veux une retraite à taux plein, je devrai aller jusqu’à soixante-quatre ans.

En fêtant, ce jour, l’anniversaire de mon beau-père, qui a soixante-quatre ans, je me suis dit qu’il a bien eu de la chance de profiter de ses petits enfants entre soixante ans, l’âge de son départ, et soixante-quatre ans, de les garder pour que nous puissions aller bosser quand j’étais encore en bonne santé et que je ne pourrai sans doute pas profiter de mes petits enfants de la même manière. »

M. Dominique Tian. Il est pourtant sportif ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Candelier. « À soixante-quatre ans, enseigner l’EPS, avec quelle envie ? Laisser la place à la jeunesse serait bien plus cohérent, pédagogiquement parlant, pour la santé. » (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour un rappel au règlement.

M. André Chassaigne. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 1 du Règlement, et concerne le bon déroulement de nos travaux. Je dirai à certains collègues que je qualifierai leurs réactions d’imbéciles, alors que nous lisions ces témoignages ! Quand on essaie de faire entrer dans cet hémicycle un peu d’humanité en citant des témoignages, on doit être écouté avec respect ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. Dominique Tian. Des témoignages de militants communistes !

M. André Chassaigne. Quand on veut donner des leçons de politique, alors qu’on sait comment la parole politique est considérée dans le pays, la moindre des choses est d’éviter des remarques désobligeantes et d’écouter les citoyens lorsqu’ils s’expriment ici ! Même si on ne partage pas leurs idées et que l’on n’a pas la même conception de la parole politique, on doit faire preuve de respect ! Je ne tolère pas que des individus tels que vous se comportent de cette façon ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Article 2 (suite)

M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour soutenir l’amendement n1866.

M. Patrice Carvalho. Défendu !

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour soutenir l’amendement n1867.

M. Gaby Charroux. Défendu !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous avons eu droit à un deuxième aveu de la part de M. le rapporteur. Au bout de trois, avant même que le coq n’ait chanté, cela va devenir suspect, monsieur le rapporteur ! Vous venez de nous dire que votre réforme était un mi-parcours. Vous avez vous-même indiqué que vous étiez parfaitement conscient qu’avant même d’avoir bouclé votre réforme, il serait sans doute nécessaire d’en ajouter une autre.

M. Michel Issindou, rapporteur. Je n’ai jamais dit cela !

M. Laurent Wauquiez. Cela nous amène à une question très simple autour de laquelle vous tournez depuis le début et sur laquelle le président Accoyer, M. Robinet vous ont interrogé et sur laquelle je vous interroge. Toutes les évaluations économiques montrent que cette réforme s’élève à 7 milliards d’euros en termes d’efforts pour un besoin de financement de 20 milliards d’euros.

M. Bernard Accoyer. C’est exact !

M. Laurent Wauquiez. On constate aisément que vous poussez les problèmes devant vous. La question très simple que nous sommes en droit de vous poser est la suivante : où allez-vous prendre les 13 autres milliards d’euros ? En ne consentant qu’un tiers de l’effort, la réalité n’est-elle pas que vous allez faire financer, de fait, votre réforme des régimes de retraites en baissant les retraites, en augmentant les cotisations et en décalant l’âge effectif de départ à la retraite ?

Dans la poche de qui comptez-vous prendre les 13 milliards d’euros ? Telle est la question que la représentation nationale est en droit de poser.

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Je répondrai ainsi à la question de M. Wauquiez : (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Dans quelle poche allez-vous prendre l’argent qui vous manque ? Il est clair que vouloir augmenter la durée de cotisations en refusant obstinément de repousser l’âge de départ à la retraite a un effet pervers. Les conséquences financières de vos mesures seront différées dans le temps, les recettes ne seront donc pas immédiates alors que vous avez besoin d’argent rapidement. La seule solution est de vous attaquer au montant des retraites

Nos collègues communistes ont insisté sur certains effets. Mais il en existe un autre qui est soigneusement tu et qui est le plus grave de tous : vous vous attaquez au montant des retraites dès l’année prochaine en augmentant la CASA, les cotisations et la fiscalité des retraités.

M. Jean-Paul Dupré. Ce n’est pas vrai du tout !

M. Jacques Lamblin. On a précisé tout à l’heure que le revenu moyen d’une femme retraitée s’élevait à 830 euros. Faites le calcul. Cette femme, dès l’année prochaine, perdra 10 euros par mois, résultat des mesures que vous proposez. Voilà comment vous trouverez les milliards qui vous manquent !

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Je voudrais également répondre à la question de M. Wauquiez et à celle de M. Lamblin. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Roman. Ils se posent des questions entre eux !

M. le président. Vous répondez à la commission ou au Gouvernement, mon cher collègue ! Ce sera bien utile.

M. Arnaud Robinet. Mme la ministre ne répond pas, M. le rapporteur non plus. La présidente de la commission des affaires sociales a disparu.

Plusieurs députés du groupe SRC. Elle est là !

M. Arnaud Robinet. Nous posons la question depuis que nous débattons en commission. Pour financer nos régimes de retraites, nous avons besoin de 21 milliards d’euros. Les 7 milliards d’euros du plan de financement sont obtenus grâce à l’allongement de la durée des cotisations qui aura ses effets à l’horizon 2035. Or on oublie l’article 32, mes chers collègues. Le Gouvernement veut mettre la main sur les excédents des caisses de retraites des libéraux qui s’élèvent à plusieurs milliards d’euros. Vous avez refusé de nous répondre sur le véritable objectif de l’étatisation de la caisse des libéraux. Est-ce, madame la ministre, la réponse aux questions posées par M. Wauquiez, par M. Lamblin et par l’ensemble des députés de l’opposition depuis les débats en commission ?

M. le président. La parole est à M. Christian Paul.

M. Arnaud Robinet. Le commissaire politique !

M. le président. Cachez votre joie !

M. Christian Paul. Comme chacun l’observe dans cet hémicycle, dans les tribunes et peut-être, aussi, sur les réseaux sociaux très attentifs à nos débats, nous cheminons. Nous cheminons probablement peut-être un peu moins vite qu’il ne le faudrait.

M. Laurent Wauquiez. Pourquoi ? Vous êtes pressé ?

M. Christian Paul. Les invectives sont, en effet, nombreuses, il y a beaucoup de bruit. Nous nous y attendions. Il y a également nombre d’injonctions, y compris de la part de députés assez intermittents dans ce débat et dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Et vous ?

M. le président. S’il vous plaît !

M. Christian Paul. Non, nous sommes présents depuis le début, c’est-à-dire depuis lundi seize heures ! Je note, de plus, un travestissement permanent des propos, notamment de ceux du rapporteur, lequel présente et défend le texte avec, je le crois, beaucoup de rigueur.

Quand il dit qu’il y aura un pilotage du système de retraite et qu’il faudra procéder à des choix, en fonction de la conjoncture économique et des circonstances, que chacun doit pouvoir apprécier, il lui est reproché de vouloir faire une réforme permanente. L’un des apports de ce texte, ce sera, je crois, ce système de pilotage.

Cela dit, il est difficile de débattre de ce texte quand nous sommes à peine à l’article 2 et que M. Robinet, lui, est déjà à l’article 32 pour défendre une somme d’intérêts particuliers. Revenons à l’intérêt général, revenons à l’article 2 et passons très vite à l’article 3.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Issindou, rapporteur. Monsieur Wauquiez, je ne doute pas une seconde du dispositif que nous vous présentons.

M. Dominique Tian. Heureusement !

M. Michel Issindou, rapporteur. Je dis simplement, avec une grande prudence, dont vous auriez peut-être pu faire preuve à l’époque,…

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Absolument !

M. Michel Issindou, rapporteur. …que l’on ne peut imaginer ce que sera la situation économique dans vingt ans. Si je ne sais pas s’il y aura une nouvelle réforme des retraites, c’est parce qu’il pourrait survenir une situation que nous ne maîtriserions pas. Je préfère être prudent plutôt que de dire, comme je l’ai entendu en 1993, en 2003 et en 2010, que le problème est réglé : « Circulez, il n’y a plus rien à voir. »

M. Bernard Accoyer. Nous n’avons jamais dit ça !

M. Michel Issindou, rapporteur. Vous l’avez dit, messieurs. La der des ders, ce n’est pas une phrase que nous avons inventée en 2010, je la retrouverai dans vos propos si vous voulez. Nous avons simplement la prudence de dire que la situation économique peut se dégrader.

M. Dominique Tian. Et le plein emploi alors ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Aujourd’hui, toutes choses égales par ailleurs, nous avons un système qui doit nous mener jusqu’en 2035 ou 2040. Nous sommes convaincus qu’il est sérieux et équilibré, avec une hausse des cotisations et un allongement progressif de la durée de cotisation.

M. Laurent Wauquiez. Tous les experts disent qu’il manque 13 milliards !

M. Michel Issindou, rapporteur. Cela fait un bon système de retraite, monsieur Wauquiez, ne vous en déplaise.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1857, 1858, 1859, 1865, 1866 et 1867.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants148
Nombre de suffrages exprimés141
Majorité absolue71
Pour l’adoption28
contre113

(Les amendements identiques nos 1857, 1858, 1859, 1865, 1866 et 1867 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en venons à une autre série d’amendements identiques, nos 1902 à 1916.

Sur ces amendements, je suis par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n1902.

Mme Jacqueline Fraysse. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1903.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n1904.

M. Marc Dolez. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour soutenir l’amendement n1910.

M. Jean-Jacques Candelier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour soutenir l’amendement n1911.

M. Patrice Carvalho. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour soutenir l’amendement n1912.

M. Gaby Charroux. Nous demandons la suppression de l’alinéa 12, qui vise les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents de collectivités locales ainsi que les ouvriers des établissements industriels d’État.

Nous refusons que l’ensemble des assurés de tous les régimes voient augmenter leur durée de cotisation à taux plein, sous prétexte que, dès lors que l’on vit plus longtemps, on devra travailler aussi un peu plus longtemps. Il s’agit d’une absurdité !

Cette réforme présentée trois ans après la réforme de 2010, sous la pression des marchés financiers et des institutions européennes, ne nous paraît pas à la hauteur d’un gouvernement de gauche. Comment peut-on aujourd’hui défendre ce que l’on condamnait hier ?

Voilà ce que vous disiez en en 2003, sur la réforme des retraites : « Votre réforme, cela se traduira aussi par une insécurité pour les salariés : l’allongement uniforme de la durée de cotisation fait dorénavant de la retraite à soixante ans une fiction. Avec l’allongement de la durée des études, la précarisation grandissante du travail et les périodes de chômage, les salariés ne sauront plus à quel âge ils pourront partir à la retraite à taux plein. » Et vous ajoutiez : cette réforme est « sexiste, car elle impose une double peine aux femmes. En effet, la baisse de leurs pensions sera plus importante que celle des pensions des hommes, du fait de carrières plus courtes, plus heurtées et bien moins rémunérées. Et à cette baisse s’ajoutera la réduction des avantages familiaux. Votre réforme sera uniquement supportée par les salariés, les retraités et les fonctionnaires. Elle épargne – je le dis sans jeu de mots – les rentiers, les détenteurs du patrimoine et les entreprises. »

Pour toutes ces raisons, si bien synthétisées par l’ancien porte-parole du groupe socialiste devenu Premier ministre, nous ne doutons pas que cet amendement sera adopté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Vous avez reconnu tout à l’heure, gros aveu de faiblesse, monsieur le rapporteur, que cette réforme n’était pas la der des ders, mais j’imagine que vous êtes mal à l’aise. Vous n’avez voté aucune de celles qui ont été réalisées jusqu’à présent. Or, le rapport Moreau l’explique très bien, ce sont 120 milliards d’euros d’économies que l’on a pu faire grâce à ces réformes auxquelles vous vous êtes toujours opposé. Si nous condamnons celle-ci, vous l’avez compris, c’est qu’elle n’est pas financée et que vous fragilisez le système par répartition. C’est d’ailleurs un argument que vous n’utilisez plus. Avant, vous accusiez la droite d’être contre ce système. C’est vous qui êtes en train de le fragiliser.

Nous parlerons un peu plus tard des stages, mais vous parlez des réseaux sociaux, monsieur Paul. Ce qui intéresse les jeunes qui nous regardent, c’est de savoir ce que l’on fera pour eux. Si nous souhaitons que cette réforme soit financée, c’est que des avancées sont nécessaires. Le minimum vieillesse est à un niveau insupportable, et nous avons entendu ce qu’a dit André Chassaigne tout à l’heure. Il faut aussi aider les jeunes, car ils entrent tard dans la vie active, et financer leurs stages.

À toutes ces questions, vous n’apportez pas de réponse, sauf une : les retraites vont baisser. Les Français l’ont compris.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Nous avons entendu tout à l’heure notre collègue du groupe communiste rappeler ce que les députés du groupe socialiste ont répété jour et nuit ici même pendant des semaines entières il y a seulement trois ans, et vous en particulier, madame la ministre, qui étiez le porte-étendard contre la réforme de 2010, qui, pour l’essentiel, n’est pas remise en cause aujourd’hui.

Comment voulez-vous que les Français puissent faire confiance à des politiques tels que vous,…

M. Laurent Wauquiez. D’ailleurs, ils ne leur font pas confiance !

M. Bernard Accoyer. …qui disent quelque chose lorsqu’ils sont dans l’opposition et font le contraire, comme le soulignent nos collègues communistes, sans aller d’ailleurs assez loin, lorsqu’ils sont au Gouvernement.

Franchement, c’est particulièrement inquiétant. Mais il y a une autre question qui casse la confiance et la menace encore plus, c’est que vous prétendez faire une réforme pour laquelle il manquera 13 milliards d’euros en 2020. Où sont-ils, ces 13 milliards ? Dans les baisses de pension ? Dans des hausses de cotisations inavouées ? Dans des hausses d’impôts à venir encore ? Madame la ministre, vous avez dit que le Parlement méritait d’être informé, prouvez-le.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1902, 1903, 1904, 1910, 1911 et 1912.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants142
Nombre de suffrages exprimés133
Majorité absolue67
Pour l’adoption21
contre112

(Les amendements identiques nos 1902, 1903, 1904, 1910, 1911 et 1912 ne sont pas adoptés.)

M. le président. J’en viens à une autre série d’amendements identiques, les amendements nos 1932 à 1946, sur lesquels je suis par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n1933.

M. André Chassaigne. Ce sera la seule intervention sur cette série.

En lien avec notre refus de l’allongement de la durée de cotisation dans tous les régimes, nous demandons la suppression de l’alinéa 13, qui modifie le code rural et de la pêche maritime en ce sens.

On le voit bien, aucun secteur n’est épargné. Pour la première fois, un gouvernement de gauche assume l’allongement de la durée du travail pour pouvoir bénéficier d’une retraite à taux plein et renonce à son idéal de droit social d’une retraite à soixante ans. Pourtant, il n’y a pas si longtemps, trois ans, la gauche était unie contre la réforme de 2010 et nous étions unis contre le credo « puisque l’on vit plus longtemps, il faut travailler plus longtemps ».

Aujourd’hui, vous reprenez cet argument à la droite : puisque l’espérance de vie augmente, il est logique de travailler plus longtemps.

M. Dominique Tian. C’est évident !

M. André Chassaigne. Ce que vous oubliez de dire, mais ce que vous disiez il y a trois ans, c’est que la productivité des travailleurs a été multipliée par six en soixante ans. Or on ne vit pas six fois plus longtemps. Qu’en est-il de l’espérance de vie en bonne santé ? Si l’espérance de vie que je qualifierai de simple continue à augmenter, ce n’est pas le cas de l’espérance de vie en bonne santé. En France, l’espérance de vie en bonne santé pour un homme est de 61,9 ans. Avec l’allongement de la durée du travail, on sait d’ores et déjà que peu de Français arriveront à l’âge de la retraite en bonne santé, et ce d’autant plus que la durée de travail s’allongera. Les travailleurs arriveront diminués à la retraite.

Actuellement, 80 % des personnes de plus de soixante-deux ans ne sont pas en activité, elles sont au chômage ou au RSA, quatre personnes sur dix sont sans activité et rémunérées à partir de cinquante-cinq ans, 60 % de ceux qui prennent leur retraite sont sans activité au moment de la liquidation, plus de 10 % de la population active est au chômage, dont le quart est constitué de jeunes de moins de vingt-cinq ans.

Depuis vingt ans, en 1993, en 2003, en 2010, les réformes s’enchaînent, toujours au détriment des salariés. Cette réforme de 2013, si elle est adoptée, s’ajoutera à la liste des précédentes réformes de droite, avec les mêmes mesures et avec les mêmes résultats : hausse des cotisations, hausse de la durée de cotisation et baisse des pensions. Ce n’est pas ce que les Français attendaient d’un Gouvernement de gauche !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. J’espère, monsieur Chassaigne, que nous arriverons à vous démontrer dans les prochaines heures…

M. Bernard Accoyer. Ce n’est pas sûr !

M. Michel Issindou, rapporteur. …que cette réforme est totalement différente de celle de 2010 et que votre critique est un peu sévère. Un grand nombre de mesures vous montreront qu’elle a une tonalité différente et que les Français sauront y trouver leur compte. La commission est défavorable à votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. L’heure est grave, la France a peur pour son système de retraite. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)



Cela a été dit et redit, mais nous souhaitons avoir une véritable réponse de la part du Gouvernement. Comme l’a rappelé M. Accoyer, on prévoit 20 milliards de déficit et on annonce 7 milliards de financement. Reste donc 13 milliards d’euros à trouver pour financer notre système de retraite. Mais c’est un minimum car ce projet de loi ouvre de nouveaux droits. Nous ne sommes pas contre de nouveaux droits, dont certains sont justifiés, mais comment sont-ils financés ?

Nous attendons votre réponse, madame la ministre, sur les financements qui doivent servir à sauver le système par répartition et donc à rassurer nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Au fond, ce que montrent nos débats tout au long de cette soirée, c’est à quel point, en n’assumant pas des choix forts, vous cumulez tous les handicaps. Vous laissez subsister les injustices du régime de retraite. De fait, vous vous exposez à des contradictions profondes avec les thèses que vous défendiez vous-mêmes. Vos anciens soutiens de gauche ont évidemment raison de vous mettre en contradiction avec des propos précédents. Vous en êtes la parfaite incarnation, madame Touraine, puisque, quand vous combattiez notre réforme, vous avez tenu des propos exactement contraires à ceux que vous tenez maintenant, et nous n’hésiterons pas dans la suite des débats à vous confronter à travers le Journal officiel à vos propres contradictions. Vous aboutissez surtout à une réforme en trompe-l’œil, qui ne résout rien, laisse subsister toutes les injustices et ouvre la voie à de futures augmentations de cotisations.

En l’absence de choix, vous avez donc choisi l’hypocrisie, ce qui a été bien mis en avant par M. Issindou et, de fait, vous faites exploser le concept d’âge légal de départ à la retraite, avec une réforme qui n’est pas financée sur la durée, ce qui vous obligera à y revenir.

Quand on fait de fausses réformes, quand, à l’image du Président de la République, on ne fait pas des choix forts, à l’arrivée, ce sont les Français qui vont payer l’absence de vos décisions.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n1933.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants145
Nombre de suffrages exprimés137
Majorité absolue69
Pour l’adoption19
contre118

(L’amendement n1933 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n2968.

Mme Véronique Massonneau. Dans la période de crise que nous traversons depuis plusieurs années, qui se caractérise par un fort chômage, en particulier chez les seniors et les jeunes, l’allongement de la durée de cotisation suscite des inquiétudes quant à son impact sur le chômage. En effet, d’après l’INSEE, seuls 59 % des salariés du secteur privé passent directement de l’emploi à la retraite, les autres ayant connu chômage, invalidité… Confirmant ces inquiétudes, l’UNEDIC a estimé que le premier relèvement de l’âge légal de quatre mois au 1er juillet 2011 avait provoqué 9 000 inscriptions supplémentaires de seniors à Pôle emploi en 2011, 30 000 en année pleine. Cet amendement propose donc de conditionner l’allongement de la durée de cotisation à la démonstration de sa neutralité sur la situation du chômage en France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Je comprends que Mme Massonneau fasse le lien entre l’emploi et le régime des retraites, car il est évident que ce lien existe. Pour autant, nous ne nous satisfaisons pas du taux de chômage des seniors : des politiques sont conduites et nous pouvons espérer que, d’ici à 2020 – les mesures d’âge prendront effet à compter de cette date –, la situation des seniors se sera améliorée. Il serait désespérant qu’elle ne le soit pas. Cela progresse d’ailleurs déjà assez fortement, nous sommes de plus en plus près de l’objectif, grâce aux mesures prises, contrats de génération et autres. La situation des seniors sera donc en 2020, je l’espère, bien améliorée, et notre allongement progressif devra être maintenu en l’état. Il est évidemment nécessaire d’améliorer l’emploi à tous les niveaux, que ce soit celui des seniors ou des jeunes. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Quand on parle de sujets aussi importants que celui de l’emploi, et notamment de l’emploi des seniors, monsieur Issindou, on ne peut pas se contenter de réponses vagues, faites d’espoir. Surtout pas vous, qui connaissez très bien ces réalités de l’emploi. Nous avons fait partie – c’est un des points sur lesquels vous ne pouvez pas nous prendre en défaut – d’un gouvernement qui a profondément amélioré le taux d’emploi des seniors. La réalité, depuis que vous êtes arrivés au pouvoir, s’est totalement inversée. Si vous prenez les chiffres de l’emploi, qui tombent chaque mois, eh bien, vous qui êtes un spécialiste de ces questions, vous le savez, il s’avère que, si l’emploi des jeunes s’améliore, celui des seniors connaît une dégradation apocalyptique. Les chiffres des contrats de génération sont catastrophiques. Vous avez même été obligés de renoncer totalement à l’esprit de ces contrats, puisque, alors qu’il s’agissait initialement de faire en sorte qu’un senior partant à la retraite forme un jeune entrant dans le même métier, vous avez, tellement les chiffres sont apocalyptiques, donné des instructions pour que, quel que soit le métier du senior qui part, l’arrivée d’un jeune compense ce départ, sans la moindre transmission de compétences.

Récemment, a été signé dans ma circonscription un contrat de génération entre une secrétaire comptable et un ouvrier manutentionnaire.

M. Bernard Accoyer. C’est illégal !

M. Laurent Wauquiez. Je ne doute pas que le transfert d’expérience soit assuré : il n’y aucun doute que la secrétaire comptable forme l’ouvrier manutentionnaire ! Tout cela est du pur affichage.

La réalité, et elle a été très bien dénoncée par notre collègue, c’est que vous ne vous occupez plus de l’emploi des seniors. Votre seul recours, ce sont des contrats aidés ciblés uniquement sur les jeunes, et les chiffres de l’emploi des seniors plongent de façon catastrophique. Je rebondis sur les exemples donnés par notre collègue André Chassaigne. Vous ne faites rien pour l’emploi des seniors. Le fait que vous repoussiez l’âge effectif de départ à la retraite les condamne à partir beaucoup plus tard.

M. Jean-Marc Germain. Vous plaisantez ! Vous voulez repousser ce départ à soixante-cinq ans !

M. Laurent Wauquiez. Vous n’agissez pas sur le front de l’emploi des seniors, vous êtes hypocrites sur l’âge légal, vous êtes dans une impasse à la fois sur l’emploi et sur le régime des retraites.

M. Christian Paul. Rassurez-moi, monsieur Wauquiez : vous n’avez pas été ministre ?

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. L’espoir ne fait pas vivre. Cette question posée par nos collègues écologistes est extrêmement sérieuse car, de plus en plus, l’UNEDIC prend le relais, avant le départ à la retraite. Je ne vois pas ce qui s’oppose à ce qu’un rapport montre les conséquences de vos mesures sur le système de retraite et la prise en charge du chômage par l’UNEDIC. Pourquoi refusez-vous cette proposition ?

(L’amendement n2968 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n2967.

Mme Véronique Massonneau. Presque identique au précédent, c’est encore un amendement de repli. Nous ne demandons plus une démonstration, mais la simple présentation devant l’Assemblée nationale d’un rapport présentant les conséquences de l’allongement de la durée de cotisation sur la situation du chômage en France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. Denis Jacquat. Elle ne mérite pas ça ! C’est le même avis sur tous les amendements que présente Mme Massonneau !

M. Michel Issindou, rapporteur. M. Wauquiez invente des chiffres à cette heure tardive. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Les chiffres ne sont pas ce que vous décrivez, monsieur Wauquiez ! Vous n’avez pas prouvé une telle efficacité dans votre action pendant dix ans. Les contrats de génération sont en train de démarrer, laissez-les monter en puissance et vous verrez que l’emploi des seniors s’améliorera. Nous faisons tout ce que nous pouvons et nous avons pris des mesures sans doute plus efficaces que les vôtres. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) En tout cas, nous avons trouvé une situation qui n’était guère favorable pour les seniors ; c’est celle que nous essayons d’améliorer, pour rejoindre une moyenne européenne, autour de 50 % d’activité. C’est déjà un objectif ambitieux, par rapport à la situation que nous avons trouvée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable. Madame la députée, si nous avons fait le choix de reporter l’allongement de la durée de cotisation à 2020 et au-delà, c’est notamment pour prendre en considération la situation du marché de l’emploi, qui est pour nous une préoccupation de chaque instant et figure au cœur de la politique que mène le Gouvernement. Je ne peux laisser dire que le Gouvernement serait indifférent à ce qui doit être mis en place pour faciliter le retour à l’emploi des jeunes et des moins jeunes, en particulier des seniors. Vous trouverez d’ailleurs, dans ce texte, toute une série de dispositions, sur lesquelles nous reviendrons au cours du débat, qui permettent de faciliter la transition entre la fin de la carrière et la retraite : aménagement des dispositifs de retraite progressive, ouverture de dispositifs d’anticipation des mécanismes de retraite ou de temps partiel… Ce sont des réponses aux sujets que vous évoquez. C’est pour cela que je donne un avis défavorable à votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette question avec les derniers chiffres de l’emploi des seniors, qui me permettront, monsieur Issindou, de vous confronter à une dure réalité que, visiblement, vous ignorez. La réalité, c’est la dégradation de l’emploi des seniors et de leur taux d’activité depuis plusieurs mois consécutifs. Je vous apporterai les chiffres puisque vous ne suivez pas la situation de l’emploi dans ce pays, malheureusement très lourde.

Il est incompréhensible, quand une de nos collègues demande simplement un rapport d’information, qui permettrait de suivre, au fur et à mesure que se déploie votre réforme, l’évolution de l’emploi des seniors, que vous balayiez cette demande d’un revers de main. Je ne partage pas les idées de ma collègue sur le contenu que doit avoir une future réforme des retraites, mais elle a évidemment raison quand elle fait ce lien entre l’emploi des seniors et la réforme des retraites. Que craignez-vous de ce petit geste qui consiste à s’assurer que la représentation nationale puisse suivre l’évolution de l’emploi des seniors, que vous ignorez visiblement vous-même au point de n’être pas au courant des chiffres des derniers mois ? Faites au moins un geste à l’égard de la représentation du groupe écologiste (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et faites en sorte que la prise en compte de l’emploi des seniors par la représentation nationale soit améliorée.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Cet amendement, à nos yeux, va dans le bon sens, car il est indispensable que les députés soient totalement informés, lorsqu’une réforme est votée, de ses conséquences. Il s’agit d’un allongement des durées de cotisation, de l’âge de départ, pour lequel nous présentons des propositions différentes, et il est naturel que nous puissions être éclairés. Tout à l’heure, monsieur le rapporteur, lorsque je vous demandais, en application de la loi de 2010, une clause de revoyure, à laquelle seraient associés les partenaires sociaux, vous avez eu peur. Cela a été la même chose en commission. Chaque fois que l’on vous a demandé un point d’étape, un bilan, une étude, un rapport, vous vous y êtes opposé. Vous qui êtes toujours prêt à invoquer la transparence, pour éclairer les parlementaires, pourquoi refusez-vous cet accès à l’information ? Que redoutez-vous ? Nous soutiendrons l’amendement de Mme Massonneau car il nous apparaît indispensable d’être éclairés le plus précisément possible.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. J’entends bien les arguments de Mme la ministre mais j’ai tout de même le sentiment que le scénario prévu est très optimiste. Ne pourrait-on pas envisager tout simplement un rapport, autour de 2018 – une sorte de clause de revoyure, effectivement ?

M. Dominique Tian. Oui, ce serait bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Issindou, rapporteur. Je ne m’oppose évidemment pas à la transparence et à la clarté. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) Cependant, est-il nécessaire de demander un rapport sur des sujets où les chiffres – M. Wauquiez l’a rappelé à l’instant – sont connus et publiés en permanence ?

M. Bernard Accoyer. Vous les connaissiez donc en 2010 !

M. Michel Issindou, rapporteur. Quand nous aurons à décider, comme c’est prévu, de l’allongement progressif, nous connaîtrons parfaitement la situation de l’emploi des seniors. Est-il besoin d’avoir ce rapport ? Le Parlement peut se saisir à tout moment de l’emploi des seniors. C’est une information qui n’a rien de secret, le suivi est très régulier et très précis. Ceux qui auront à décider de l’allongement ou de la réduction de la durée auront évidemment tous ces chiffres à leur disposition. J’incite à la modération pour ce qui est des rapports que nous demandons, les uns et les autres, surtout quand les chiffres existent par ailleurs.

M. Denis Jacquat. C’est du fait du règlement de l’Assemblée ! Pour contourner l’article 40 !

M. Michel Issindou, rapporteur. Il n’est pas nécessaire de les publier dans un rapport spécial. Ces chiffres sont connus et rendus publics régulièrement.

M. Arnaud Robinet. Vous êtes en totale contradiction !

M. Michel Issindou, rapporteur. Pas du tout !

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

M. Jean-Patrick Gille. Il est évident que les deux sujets sont liés. Sur les chiffres, nous pouvons éviter la polémique. Il y a à la fois une augmentation du taux d’activité des seniors, de cinquante-cinq à soixante-quatre ans, et du nombre de chômeurs, et ce pour deux raisons. La première, que tout le monde connaît, c’est la crise. La seconde est mécanique : vous avez mis fin – je ne polémique pas à ce sujet – à la dispense de recherche d’emploi pour les seniors, alors qu’auparavant ils sortaient mécaniquement des statistiques. Ce qui explique que les chiffres du chômage sont actuellement très élevés, car les seniors ne sont plus décomptabilisés. Ce paradoxe qui voit le taux d’activité et le nombre de chômeurs augmenter est tout simplement dû au fait que la population active des seniors a augmenté parce que vous avez repoussé l’âge de départ à la retraite.

En ce qui concerne les études à mener, il faudra voir si ce travail doit revenir au COR. Le comité de suivi que nous créons à l’article 3 et qui aura une fonction de pilotage devra être lui aussi informé. Je suis prêt à reconnaître que nous manquons encore d’études. Ce n’est pas que l’on manque de chiffres – j’en donnerai quelques-uns – mais les mécanismes sont complexes, notamment pour comprendre le fait que l’âge de liquidation des retraites n’est souvent pas le même, malheureusement, que celui de la cessation d’activité, puisque seuls 59 % des gens liquident leur retraite en étant encore en activité.

Mais paradoxalement, il existe des chiffres de l’UNEDIC dans une note d’ailleurs étonnante qui indique que le nombre de seniors indemnisés – cela ne comprend pas tous les chômeurs, même si l’on est souvent indemnisé en fin de carrière – est stable à 23 % des indemnisés et représente, puisqu’il s’agit de fins de carrière, 27 % des dépenses d’indemnisation de l’UNEDIC.

M. Christian Paul. Et voilà, monsieur Wauquiez !

(L’amendement n2967 n’est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à une série d’amendements, nos 2024 à 2038, sur lesquels je suis saisi par le groupe GDR d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n2026.

M. Marc Dolez. Comme nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises, notre système de retraites par répartition n’est pas malade du vieillissement de la population, mais du chômage de masse, de la précarité et des bas salaires qui ont un double effet, en tirant vers le bas les futures pensions de ceux qui les subissent, tout en privant le système des retraites de ressources considérables. Une augmentation de 100 000 chômeurs coûte entre 500 et 800 millions d’euros de recettes. Par conséquent, l’équilibre financier de notre système passe par une autre politique de l’emploi fondée sur la lutte contre la précarité, l’augmentation des salaires, la réduction du temps de travail ou l’interdiction des licenciements boursiers. C’est pourquoi nous souhaitons, dans cet amendement, que le Gouvernement publie chaque année un rapport évaluant l’impact du relèvement de l’âge légal du départ en retraite et de l’allongement de la durée de cotisations sur le nombre supplémentaire d’inscrits à Pôle emploi, dans la catégorie des plus de cinquante-cinq ans, et sur l’évolution de l’emploi des seniors.

Cette demande, madame la ministre, est d’autant plus importante – et elle se justifie d’autant plus à ce point du débat – qu’alors que le Gouvernement avait toujours mis en avant qu’il ne toucherait pas à l’âge légal de la retraite, pour la première fois devant la représentation nationale, ce soir, madame la ministre, vous avez reconnu que l’allongement de la durée de cotisation allait mécaniquement repousser l’âge effectif de la retraite.

M. Laurent Wauquiez. Tout à fait !

Mme Isabelle Le Callennec. Nous le savions depuis le début !

M. Marc Dolez. Cette affirmation très importante vient justifier notre amendement. Elle justifierait aussi que, dans quelques instants, notre assemblée repousse l’article 2 au cœur de ce projet de loi. Quoi qu’il en soit, nous devons prendre toute la mesure de cette déclaration, qui pèsera très lourdement sur la suite de nos débats.

M. André Chassaigne. Très bien !

M. le président. Sur l’article 2, je suis saisi par le groupe GDR d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour soutenir l’amendement n2032.

M. Jean-Jacques Candelier. Nous proposons que le Gouvernement, s’appuyant sur les études et les chiffres de l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce et de l’INSEE, rende public chaque année un rapport évaluant l’impact du relèvement de l’âge légal de départ en retraite et de l’allongement de la durée de cotisations sur le nombre supplémentaire d’inscrits à Pôlemploi dans la catégorie des demandeurs de plus de cinquante-cinq ans et sur l’évolution de l’emploi des seniors.

L’allongement de la durée de cotisation nécessaire pour ouvrir le droit à la retraite est un non-sens économique en période de chômage de masse. Il l’est d’autant plus que toutes les études montrent que le taux d’emploi chute vertigineusement à partir de cinquante-cinq ans, de sorte que la majorité des seniors ne pouvant liquider leur retraite se retrouvent contraints d’attendre au chômage cette échéance. De fait, l’allongement de la durée de cotisation permettra une réduction du déficit de l’assurance vieillesse par la baisse des pensions en raison des décotes. Ce déficit, par un jeu de vases communicants, se reportera sur l’assurance chômage, dont le déficit est déjà colossal, à cause de politiques économiques ruineuses pour l’emploi.

À titre d’exemple, l’UNEDIC estime que le premier relèvement de l’âge légal, en juillet 2011, a engendré 9000 inscrits supplémentaires à Pôlemploi parmi la catégorie seniors, et 30 000 en année pleine. Afin de redonner confiance aux assurés dans notre système de retraite, ainsi que dans les décisions prises par leurs élus et le Gouvernement, le présent amendement demande que le Gouvernement remette chaque année un rapport mettant en lumière les conséquences des mesures d’âge concernant les retraites.

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour soutenir l’amendement n2034.

M. Gaby Charroux. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable. Je voudrais toutefois revenir sur certains points. À l’évidence, la situation de l’emploi a un impact sur les comptes sociaux et sur l’équilibre des régimes de retraite : personne ne peut l’ignorer ni le contester. Même si cela n’est pas l’unique raison pour laquelle le Gouvernement est engagé de manière résolue dans une politique de l’emploi, il va de soi que toute amélioration du marché du travail aura des répercussions positives.

Mme Isabelle Le Callennec. Et une dégradation agira de manière inverse !

Mme Marisol Touraine, ministre. Je vous confirme que le taux d’emploi des seniors a augmenté de trois points en 2012, ce qui constitue une réponse, certes insuffisante, aux préoccupations que vous avez exprimées. La DARES, qui est un service d’analyse statistique du ministère des affaires sociales, produit chaque année des tableaux de bord sur la situation de l’emploi et sur les différentes composantes de ce marché. À l’évidence, le comité de suivi dont nous allons examiner les caractéristiques au prochain article aura à se saisir de ces informations pour apprécier la situation de nos régimes de retraite, puisque ceux-ci ne peuvent s’apprécier que par rapport à la situation de l’emploi.

Je ne vous ferai pas l’injure, monsieur le député, d’imaginer que vous ne faites pas la différence entre « âge effectif » de départ en retraite et « âge légal ». La mesure qui consiste à allonger la durée de cotisations revient à demander aux Français qui seront concernés, après 2020, de travailler un peu plus longtemps. Si vous voulez entendre que, dans le cadre de cette réforme, nous demandons, en manière d’effort et de contribution pour l’équilibre de notre régime de retraite, que les Français nés après 1972 – et ce progressivement jusqu’en 2035 – se mettent à travailler un peu plus longtemps, alors je vous le confirme. Il s’agit en effet de l’un des éléments du financement de notre réforme qui doit s’apprécier dans la durée, à travers les efforts financiers demandés aux salariés de tous les régimes et aux entreprises, à travers également la mise à contribution des retraités ainsi que l’allongement de la durée de cotisation. Comme nous avons eu l’occasion d’en débattre hier, vous trouverez l’ensemble des informations sur ce cheminement financier aux pages 28 et 29 de l’étude d’impact de cette loi.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous voyons de plus en plus à quel point le Gouvernement nous sert un double discours. Vous mettez en effet en avant un âge légal, dont vous reconnaissez vous-même qu’il est purement théorique et qu’il ne constitue qu’un droit fictif. Or plus vous touchez à la durée de cotisations, plus vous videz de son sens ce droit théorique. Ce qui intéresse les Français, ce n’est pas de savoir avec quel emballage vous présentez l’âge légal, c’est de savoir en réalité à quel âge ils pourront partir à la retraite en bénéficiant d’une pension décente. Nos débats ont mis au jour le cadeau empoisonné qui se cachait sous votre emballage : vous condamnez les Français à un départ à la retraite plus tardif. Toutefois, étant donné que vous n’assumez pas de toucher à l’âge légal, l’ampleur de l’effort que vous demandez est plus importante que si vous aviez le courage de toucher au seul âge légal pour tous les Français, avec une mesure de justice concernant le public et le privé et tous les régimes spéciaux. Mais vous n’avez pas ce courage !

Deuxièmement, le tissu de banalités alignées sur le lien entre le taux d’emploi des seniors et la retraite est affligeant. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Marc Germain. Arrêtez !

M. Christian Paul. Mais vous avez échoué !

M. Laurent Wauquiez. La réalité, qui dérange visiblement un certain nombre de nos collègues (Mêmes mouvements), c’est que depuis que vous êtes arrivés au pouvoir – et il n’y a pas besoin de SFR pour cela –, les chiffres de l’emploi se sont dégradés de façon considérable.

M. Denys Robiliard. Et tous les plans sociaux que vous aviez retardés ?

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Rendez-nous Xavier Bertrand ! Au moins, il est plus sérieux.

M. Laurent Wauquiez. Les premières victimes de votre politique sont les seniors. Vous semblez ignorer ces chiffres, madame la ministre et monsieur le rapporteur, et cela est inquiétant. Le nombre de seniors, qui sont inscrits dans les catégories A, B, C, a dépassé le million. Vous auriez pu l’évoquer, cher collègue ! Les augmentations sur un an sont de 15 %. Les seniors, depuis la mise en place de votre politique, sont bien les principales victimes (Exclamations sur les bancs du groupe SRC: chiffres après chiffres, mois après mois, on le constate. Ils étaient 20 % parmi les demandeurs d’emploi, ils sont aujourd’hui 25 % ; ils étaient 25 % parmi les chômeurs de longue durée, ils sont aujourd’hui 30 %

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.

M. Xavier Bertrand. Madame la ministre, vous savez pertinemment ce qu’il aurait fallu faire pour dégager l’horizon des retraites au-delà de trois ou quatre ans, comme c’est le cas aujourd’hui, mais vous n’avez ni pu ni voulu le faire. L’ensemble des partenaires sociaux – notamment les syndicats – ne vous ont jamais donné le moindre feu vert pour repousser l’âge de la retraite. Or vous savez que c’est cela le véritable facteur nécessaire au système. Vous avez dit tout à l’heure que l’emploi jouait un rôle dans le système des retraites, mais il n’est pas le principal facteur ni la principale réponse – évidemment, plus il y a de salariés, plus les cotisations sont importantes. Notre problème est de fait le corollaire d’une bonne nouvelle : nous vivons de plus en plus longtemps et il faut donc payer des retraites plus longues à plus de retraités. Si le principal problème est démographique, la réponse principale est donc, elle aussi, démographique.

M. Pouria Amirshahi. Non !

M. Xavier Bertrand. Je n’ai pas fait de grande école, j’essaie seulement de raisonner avec bon sens.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Et voilà pour Wauquiez !

M. Xavier Bertrand. Vous tournez autour du pot, parce que vous n’avez pas osé prolonger l’âge de la retraite au-delà de soixante-deux ans, après avoir répété qu’être allé au-delà de soixante ans constituait un scandale sans pareil. Vous étiez prisonniers de votre promesse de campagne, quand vous savez que c’est pourtant la seule solution qui s’imposera à terme. Fixer l’âge de la retraite à soixante-cinq ans demande un effort. D’ailleurs, si nous étions dans une posture d’opposants bêtes et méchants, nous n’aurions strictement rien dit ; mais nous savons que réside dans cette décision la seule façon de donner une visibilité à la réforme au-delà de trois ou quatre ans, sans quoi nous serons contraints d’y revenir dans quatre ans, car l’avenir aujourd’hui n’est pas financé.

À la question démographique, la réponse est principalement démographique. Repousser l’âge légal permet de savoir exactement l’âge auquel on pourra prendre sa retraite. Au contraire, avec le seul allongement de la durée de cotisations, en fonction de l’âge auquel on rentre sur le marché du travail, cela peut aller bien au-delà des soixante-cinq ans. Il faut refuser cette hypocrisie. C’est pourquoi nous souhaitons une clarification de la situation, en repoussant l’âge légal au-delà de soixante-deux ans. En refusant de le faire, vous créez une inquiétude chez nos concitoyens. Les réactions sur les bancs communistes et les sondages montrent bien que les Français ne croient pas que cette réforme soit juste et équitable et qu’elle apporte de vraies solutions. Les Français ne sont pas dupes, alors que vous n’avez pas voulu sortir de l’ambiguïté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien ! Belle démonstration !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Bertrand, nous donner des leçons, alors que nous nous retrouvons de nouveau dans l’hémicycle à débattre de la question des retraites, seulement quelques années après le vote d’une loi qui était censée tout régler ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Xavier Bertrand. Jusqu’en 2020 !

Mme Marisol Touraine, ministre. Vous avez un culot, que je ne vous dénie pas d’ailleurs, qui ne suffit pas à faire la preuve de l’efficacité de votre loi. Vous nous avez expliqué en 2010 exactement la même chose qu’aujourd’hui, avec des formules identiques – le problème démographique auquel il faut apporter une réponse démographique.

Mme Marie-Christine Dalloz. Eh bien, nous sommes constants !

Mme Marisol Touraine, ministre. Cette réponse réside pour vous uniquement dans le relèvement de l’âge légal, que vous avez mis en œuvre en 2010. Si véritablement c’était la solution qui devait apporter la réponse aux enjeux auxquels nous sommes confrontés, nous ne nous retrouverions pas ici aujourd’hui à débattre de nouveau de la question des retraites.

Nous ne nions pas que le débat démographique existe. C’est pourquoi nous y répondons par l’allongement modéré de la durée de cotisation, une mesure plus juste que votre solution qui comporterait une injustice, soulignée à plusieurs reprises par M. le rapporteur et par M. le rapporteur pour avis, à savoir qu’elle ferait porter l’effort sur ceux qui ont commencé à travailler jeune.

M. Xavier Bertrand. C’est nous qui avons inventé le régime des carrières longues ! Les communistes le réclamaient !

Mme Marisol Touraine, ministre. Plus vous relevez l’âge légal, plus vous faites reposer l’effort sur ceux qui commencent à travailler tôt.

Par conséquent, ni pour des raisons démographiques, ni pour des raisons de justice, ni pour des raisons d’efficacité économique ou financière, on ne peut, au regard de ce qui s’est passé en 2010, considérer que les leçons que vous nous donnez aujourd’hui seraient susceptibles d’être suivies d’effet.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2026, 2032 et 2034.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants127
Nombre de suffrages exprimés116
Majorité absolue59
Pour l’adoption20
contre96

(Les amendements identiques nos 2026, 2032 et 2034 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je tiens à revenir sur l’importance du vote sur l’article 2. Je ne vais pas essayer de convaincre nos collègues de droite parce que les arguments qu’ils développent sont à l’opposé de ceux que nous soutenons. Le rapporteur l’a dit : ils jugent qu’il faut encore aller plus loin, travailler davantage,…

M. Christian Jacob. Eh oui !

M. André Chassaigne. …repousser l’âge de la retraite, cotiser plus et bien évidemment, pour financer la retraite, prendre toujours dans la poche des mêmes, dans celle des salariés, et surtout exonérer ceux qui possèdent la puissance financière.

Mais je me tourne vers mes collègues de gauche qui, il y a trois ans, étaient à nos côtés pour manifester, en particulier contre le contenu de cet article. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Xavier Bertrand. C’est vrai !

M. Philippe Vigier et Mme Marie-Christine Dalloz. C’est bien de le rappeler !

M. André Chassaigne. Je veux rappeler quel va être l’objet du vote : il s’agit d’accepter ou non de porter la durée de cotisation de quarante et un an trois-quarts à quarante-trois années d’ici 2035. J’ai bien dit quarante-trois années… Les générations nées à compter de 1973 devront ainsi justifier de 172 trimestres de cotisation pour bénéficier d’une pension à taux plein, soit à l’âge de soixante-six ans dans le meilleur des cas, si on arrive à mettre en place une forme de sécurité emploi-formation qui permettra de travailler sans interruption de l’entrée dans la vie active jusqu’à la retraite. On ne peut pas, madame la ministre, dire que c’est seulement un plus longtemps. Si on ajoute à votre dispositif la réforme précédente qui était portée par la droite, cela fait six trimestres plus six trimestres, soit trois années ! Pour un salarié qui aura travaillé sans interruption pendant quarante ans, prolonger de trois années sa vie active, ce n’est pas une petite chose, il suffit de regarder autour de nous. J’ai lu tout à l’heure un témoignage : c’est la réalité de l’humain, la réalité de ce que vivent certains dans notre pays. Au moment de voter, il faut penser à tout cela. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Cet article est très important. Pour répondre à M. Bertrand et aussi, mais pas pour les mêmes raisons, à M. Chassaigne, je rappelle que cette réforme n’est pas semblable à celle de 2010 ni aux précédentes. Le texte proposé par le Gouvernement a en effet réussi à dépasser l’opposition entre allongement et stabilité de la durée de cotisation.

M. Xavier Bertrand. Évidemment, il préfère l’alourdissement des cotisations !

M. Jean-Marc Germain. Le groupe SRC a dit : « D’accord pour un allongement, mais à condition bien sûr qu’il y ait un allongement de l’espérance de vie et que celui-ci se traduise bien par une augmentation du temps passé en retraite. » D’accord pour un allongement donc mais pas tout de suite, car vous savez très bien qu’il y a 600 000 départs en retraite chaque année, monsieur Bertrand, et que l’allongement immédiat de trois ans que vous proposez aboutirait à un million six cent mille actifs supplémentaires, que le marché du travail ne pourrait évidemment pas absorber tout de suite. C’est pourquoi nous disons oui à l’allongement, mais après 2020.

M. André Chassaigne. À soixante-quatre ans !

M. Jean-Marc Germain. Mais l’allongement ne sera pas pour tout le monde, monsieur Chassaigne. Ceux qui ont eu des métiers pénibles pourront partir à soixante ans et si, en plus, ils ont eu une carrière longue, ils pourront partir avant. Ce n’est donc pas la réforme de 2010. Vous savez bien que si on n’acceptait pas cet allongement jusqu’à 2035, on aurait alors moins de moyens pour mettre en place d’autres mesures qui nous semblent très importantes pour notre pays : par exemple s’occuper bien de la dépendance, prévoir encore davantage de moyens pour l’éducation nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) C’est un choix de société :…

M. Christian Jacob. Votre projet va déjà coûter 13 milliards !

M. Jean-Marc Germain. …nos enfants vivront mieux que leurs parents, auront une durée de retraite plus longue, feront un effort un peu plus important de cotisation mais auront une meilleure retraite. Tel est le message que nous adressons aujourd’hui aux jeunes générations.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Je ne vais pas revenir sur les arguments que j’ai déjà développés pour expliquer pourquoi nous demandions la suppression de cet article, mais je redis qu’une telle mesure est inefficace économiquement et de plus socialement injuste, ne fût-ce que si on pense aux femmes. Catherine Coutelle l’a rappelé : elles seront pour le moins pénalisées par cet allongement de cotisation puisque ce sont elles notamment qui travaillent à temps partiel, qui ont des carrières heurtées, et qui devront donc travailler plus longtemps pour obtenir leur nombre de trimestres. C’est pourquoi le groupe écologiste votera contre l’article 2.

M. le président. Je mets aux voix l’article 2.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants166
Nombre de suffrages exprimés165
Majorité absolue83
Pour l’adoption101
contre64

(L’article 2 est adopté.)

Après l’article 2

M. le président. Nous en venons à plusieurs articles additionnels après l’article 2.

Je suis saisi de dix amendements, nos 136, 2930, 3037, 163, 2976, 2855 rectifié, 17, 48 rectifié, 105 et 165, pouvant être soumis à une discussion commune.

Sur les amendements identiques nos 136 et 2930, je suis saisi par le groupe Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n136.

M. Arnaud Robinet. Nous savons que les effets de la crise ont un impact très négatif sur l’équilibre financier de notre système de retraite. En dépit de la réforme de 2010 – pour mémoire, le COR prévoyait auparavant un besoin de financement de 40 milliards à 50 milliards d’euros à l’horizon 2020 –, de nouveaux efforts et de nouveaux ajustements doivent être effectués. M. le rapporteur l’a reconnu en disant que la réforme que nous examinons aujourd’hui ne sera pas la der des ders car on ne peut maîtriser ni prévoir la situation économique future. C’est la raison que la majorité invoque pour revenir sur la réforme de 2010 mais, au-delà de la situation économique, il y a bien sûr la politique économique qui est menée.

Les années de croissance quasi nulle que nous traversons creusent le déficit du système, qui devrait atteindre près de 20 milliards d’euros, alors que vous nous proposez, madame la ministre, un financement supplémentaire à hauteur de 7 milliards d’euros. En attendant une reprise durable – que nous espérons tous malgré votre politique – et une hausse structurelle de l’emploi, nous devons donc faire un effort supplémentaire pour sauver notre système de retraites par répartition auquel nous sommes attachés. Cet effort doit être à la fois lisible, efficace et juste. Le paramètre qui répond le mieux à cette triple injonction est évidemment l’augmentation de l’âge légal du départ à la retraite.

M. Jean-Frédéric Poisson. Bien sûr !

M. Arnaud Robinet. Or ce projet de loi est une triple tromperie à l’égard des Français : vous augmentez le coût du travail ; vous appauvrissez les retraités et les actifs ; vous tablez à terme sur la multiplication des départs avec décote et donc sur la baisse des pensions des futurs retraités.

Nous, nous proposons de reporter l’âge légal du départ à la retraite à soixante-cinq ans et de retourner ainsi à la situation qui préexistait avant 1983, c’est-à-dire avant les décisions catastrophiques de François Mitterrand. Depuis 1981, les femmes ont gagné près de cinq ans d’espérance de vie, les hommes plus de huit ans. Notre défi ne doit pas être de baisser sans cesse l’âge de départ à la retraite mais de garantir un niveau de vie décent aux retraités et de soulager les jeunes générations de la dette qui s’accumule sur nos comptes sociaux.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n2930.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement propose d’agir sur l’âge légal parce que si l’on agit seulement sur l’augmentation de la durée de cotisation, il faut avoir le courage de dire que les pensions baisseront beaucoup, ce à quoi le Gouvernement se refuse. Il prétend ici que l’âge de la retraite sera de soixante-deux ans… et à Bruxelles, de soixante-six ans.

Madame la ministre, gouverner, c’est avoir du réalisme et du courage. Or vous avez rappelé que vous niez totalement la conséquence démographique de l’allongement de l’espérance de vie. Celui-ci est une bonne nouvelle, mais encore faut-il en tenir compte pour sauvegarder nos régimes de retraite. Mais vous en restez, comme le montrait encore à l’instant M. Germain, au partage du travail dont on sait depuis 1983, et aussi depuis les 35 heures, qu’il ne fait qu’aggraver le chômage.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Il fallait les abroger en ce cas !

M. Bernard Accoyer. Cette situation est particulièrement grave pour notre pays. Seul le parti socialiste, la gauche française, prétend que l’on peut la faire perdurer. Je rappelle d’ailleurs que les 35 heures n’ont été copiées dans aucun autre pays.

M. Jean-Marc Germain. C’est 33 heures en Allemagne !

M. Bernard Accoyer. Quant à l’âge légal du départ à la retraite, vous, socialistes français, êtes les seuls, contre le monde entier, contre tous les autres pays dotés d’un régime de retraite par répartition, à nier cette réalité heureuse qu’est l’allongement de l’espérance de vie. Non seulement vous la niez mais, en plus, le compte n’y est pas. En effet, vous pourriez essayer de combler le manque de financement en passant de la cotisation à l’impôt, mais avec cette réforme, seuls 7 milliards sont attendus : il en manquera donc 13 milliards. Nous vous demandons une nouvelle fois comment vous les financerez d’ici à 2020. Je vous rappelle que malgré votre opposition à toutes les réformes conduites jusqu’ici pour sauver la répartition, celles-ci ont dégagé 120 milliards. Prenez vos responsabilités, madame la ministre, et dites-nous où sont ces 13 milliards !

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir l’amendement n3037.

M. Denis Jacquat. Les réformes de 2003 et de 2010 menées par les gouvernements précédents ont permis de réduire efficacement les injustices et de garantir l’avenir de notre système de retraite par répartition. Afin de continuer cette politique juste et responsable, de nouveaux efforts et de nouveaux ajustements sont aujourd’hui à effectuer. L’un d’eux consiste à augmenter l’âge légal de départ à la retraite, notion paramétrique fondamentale sans laquelle la réforme sera incomplète et profondément injuste. Immobilisé par ses postures idéologiques, le Gouvernement refuse de s’engager sur cette voie. Pourtant, aujourd’hui comme en 2010, ce paramètre est celui qui répond le mieux aux exigences aptes à garantir l’avenir et la justice du système de retraite. L’idée que le relèvement de l’âge légal serait une mesure injuste est fondée sur une caricature qui ne résiste ni au bon sens, ni aux chiffres, ni aux comparaisons européennes.

Il est logique de fonder la réforme des retraites sur une prolongation de la vie active, car l’une des causes profondes des déséquilibres financiers est l’allongement de la durée de la vie.

Le recul de l’âge légal de départ à la retraite est de nature à produire des recettes dont le système de retraites a besoin, sans pénaliser le pouvoir d’achat des salariés ni la compétitivité des entreprises.

De plus, augmenter l’âge légal de départ à la retraite est une mesure qui respecte un principe fondamental de justice et d’égalité : l’effort doit être partagé par tous les Français et non pas seulement par une partie d’entre eux.

Puisque le Gouvernement n’est décidé à se montrer ni responsable, ni juste, cet amendement propose de relever l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1964.

L’augmentation progressive de l’âge de départ à la retraite au rythme de quatre mois par génération permettra d’atteindre l’âge d’équilibre et de raison de 65 ans en 2026.

Cet amendement s’inscrit donc dans la continuité de la réforme de 2010 et répond à une démarche juste et responsable garantissant l’avenir de notre système de retraites, lequel a besoin de visibilité, de lisibilité et de pérennité.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n163.

Mme Marie-Christine Dalloz. Sur le besoin de financement de 13 milliards, à trouver en plus de vos 7 milliards dans le cadre de cette réforme, trois possibilités s’offraient à vous.

Vous pouviez tout d’abord allonger la durée légale du travail. Mais, comme l’a très bien dit l’un des orateurs précédents, les syndicats ne vous ont pas donné quitus pour ce faire. Pour ne pas froisser qui que ce soit, vous avez donc renoncé à allonger la durée légale du travail ou à repousser l’âge du départ à la retraite.

Deuxième paramètre sur lequel vous aviez la possibilité d’intervenir : la baisse des retraites versées aujourd’hui. Vous avez actionné ce levier, certes a minima, pour ne pas trop brusquer ; mais dans les faits, cela entraînera encore une fois une perte de pouvoir d’achat pour les retraités.

Troisième paramètre, que nous avions refusé lors de la réforme de 2010 : l’augmentation des cotisations, tant patronales que salariales. Or vous avez utilisé ce paramètre.

Le problème est que, tant par manque de courage que par idéologie, vous vous êtes arrêtés en chemin : il manque par conséquent 13 milliards. Parce que vous n’avez pas eu le courage d’aborder la question de l’âge légal de départ à la retraite, parce que vous ne voulez surtout pas admettre qu’il faut abandonner le grand dogme du parti socialiste, à savoir l’âge de départ à la retraite à 60 ans – aujourd’hui 62 ans en fait –, nous en arrivons à une cote très mal taillée, à une réforme qu’il faudra revoir très rapidement, à des déficits qui continueront à se creuser, à des inégalités criantes.

Il ne suffit pas de parler de justice toutes les deux phrases : encore faut-il réellement démontrer qu’il y a un effet de justice. Or, dans ce cas précis, votre réforme n’a rien de juste.

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n2976.

M. Jean-Frédéric Poisson. Cet amendement vise, comme ceux précédemment présentés par mes collègues, à reporter l’âge de départ à la retraite à 65 ans. Pour ajouter à l’argumentation développée par les orateurs précédents, je me fonderai sur les propos du rapporteur, figurant à la page 15 du rapport de la commission.

M. Michel Issindou, rapporteur. Vous avez de bonnes lectures !

M. Jean-Frédéric Poisson. Vous expliquez, monsieur le rapporteur, les raisons pour lesquelles le Gouvernement, dont vous avez épousé la thèse, a choisi l’hypothèse moyenne parmi les cinq scénarios préparés par le COR pour la prévision de l’évolution des indicateurs économiques.

Voici ce que vous écrivez : « Sur la période 2013-2020, le taux de chômage recule pour atteindre 7,9 % en 2020. C’est un taux réaliste par rapport à la sortie de la crise économique actuelle, et qui doit traduire le résultat de la politique volontariste du Gouvernement. »

M. Michel Issindou, rapporteur. J’assume !

M. Jean-Frédéric Poisson. Je suis sûr que vous assumez, monsieur le rapporteur, mais c’est précisément ce qui m’inquiète, pour tout vous dire ! Très franchement, la sortie de la crise économique actuelle, qui fonde votre choix de scénario, personne ne la voit venir ! Personne !

Alors que nous assistons tous avec tristesse ces jours-ci à l’annonce de nouveaux plans sociaux massifs dans une entreprise industrielle de télécommunications française, que tout le monde connaît – ce n’est ni la première, ni la dernière, car il y en aura d’autres, malheureusement –, rien ne vous permet de dire aujourd’hui avec assurance que, dans sept ans, le chômage s’établira en moyenne à 7,9 %. Sept ans, c’est à la fois lointain et proche à l’échelle de la vie économique d’un pays !

En outre, dans les décennies qui suivront – 2020-2030, 2030-2040, 2040-2050 et 2050-2060 –, le taux de chômage est censé descendre à 4,8 % puis à 4,5 %, correspondant à une situation de plein-emploi. C’est sur cette hypothèse, madame la ministre, monsieur le rapporteur, que votre projet de loi est fondé, vous permettant de ne pas reculer l’âge légal de départ à la retraite.

Or ces prévisions économiques nous paraissent aujourd’hui, non pas farfelues – ce terme serait méchant et immérité, eu égard au travail que vous avez accompli – mais très hasardeuses, pour ne pas dire parfaitement infondées.

C’est la raison pour laquelle nous préférons, pour notre part, nous fonder sur un scénario plus pessimiste, qui nous conduit à considérer comme raisonnable de reculer l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans pour maintenir le système de retraites par répartition.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n2855 rectifié.

M. Philippe Vigier. C’est parce que nous sommes attachés, à l’UDI, à la retraite par répartition que nous voulons équilibrer ce système de retraites. La discussion que nous avons ce soir nous a permis d’avancer, monsieur Issindou : vous avez définitivement enterré le tabou de l’âge de départ à la retraite à 60 ans. M. Dolez vous l’a d’ailleurs dit avec beaucoup d’engagement tout à l’heure, regrettant les propos qui avaient été tenus sur ces bancs en 2010.

Nous savons maintenant que nous devrons partir plus tard à la retraite. Vous semblez découvrir que nous avons la chance de vieillir plus longtemps, et donc de travailler plus longtemps : en effet, si l’on vit plus longtemps, l’on bénéficie d’une retraite qui est versée plus longtemps.

Si nous vous en voulons, avec force, c’est parce que vous avez tous les paramètres d’appréciation à votre disposition. Or en refusant tous les projets de convergence entre le public et le privé que nous vous avons proposés, vous vous privez de ressources complémentaires.

L’on sait que les retraites des régimes spéciaux coûtent pas moins de 6,5 milliards d’euros à l’État ; mais là, c’est « Circulez, il n’y a rien à voir ! ». Vous n’avez jamais voulu aborder cette question ; pourtant, l’équilibre général, la répartition, cela passe par la contribution des uns et des autres.

Avec un âge légal de départ à la retraite de 64 ans en 2020 et 44 ans de cotisation, vous donnez une vraie visibilité à la jeunesse. Vous rassurez également les aînés, qui programment leur départ à la retraite, car ils savent qu’ils partiront avec un niveau de retraite garanti.

Nous savons très bien qu’il manque 14 milliards. En vous engageant sur cette voie, vous allez augmenter les cotisations, et par conséquent toucher à la compétitivité des entreprises.

Comparez la situation des entreprises françaises à celle des entreprises allemandes : combien avons-nous perdu, depuis dix ans, de taux de marge par rapport aux entreprises allemandes, qui sont, comme vous le savez, nos premiers clients, et qui nous concurrencent au quotidien ?

En augmentant ces cotisations, vous pénalisez les entreprises ; en pénalisant les entreprises, vous pénalisez l’emploi ; et en pénalisant l’emploi, vous pénalisez naturellement les cotisations qui rentrent dans les caisses.

Voilà le cercle infernal dans lequel vous vous enfermez ! Je vous le dis avec force, monsieur Issindou : il est grand temps de vous ressaisir ! En 2010, vous vous étiez trompés ; ce soir, vous vous trompez à nouveau : décidément, vous êtes fâchés avec les retraites !

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 17, 48 rectifié, 105 et 165.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n17.

M. Arnaud Robinet. Nous le répétons depuis l’ouverture du débat sur ce projet de loi, le seul paramètre, la seule solution pour financer notre système de retraites et produire les recettes nécessaires, tout en conservant l’objectif de sauver le système de retraites par répartition, c’est le recul de l’âge du départ à la retraite.

Ce recul ne pénalisera pas le pouvoir d’achat des salariés ; il ne pénalisera pas les retraités ; il ne pénalisera pas la compétitivité de nos entreprises, et surtout ne laissera pas notre jeunesse sur le bord de la route. Il permettra en effet à cette jeunesse de toucher une retraite dans les années à venir. Cet amendement a donc pour objet de reculer l’âge du départ à la retraite.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n48 rectifié.

M. Jean-Pierre Barbier. Le présent amendement propose également de reculer l’âge légal de départ à la retraite. Cette proposition, si j’en crois M. le rapporteur, est violente. Mais l’important aujourd’hui est de produire les recettes dont notre système aura besoin d’ici 2020, sans pénaliser le pouvoir d’achat des salariés ni nuire à la compétitivité de nos entreprises avec une hausse pénalisante des cotisations retraite.

Vous avez, monsieur le rapporteur, qualifié ces propositions de violentes : vous procédez par affirmation. Vous affirmez que votre réforme est équitable alors qu’elle ne l’est pas ; vous affirmez que la réforme est équilibrée alors qu’elle ne l’est pas ; vous affirmez que nos propositions sont violentes alors que c’est faux !

Ce qui sera violent, c’est le déficit que nous constaterons en 2020 ; ce qui sera violent, c’est la réaction des Français quand ils s’apercevront que vous leur avez à nouveau menti.

Je trouve regrettable que nous ne puissions pas, comme tous nos voisins européens, augmenter l’âge de départ à la retraite : ce serait pourtant une décision de transparence.

À nos collègues qui, tout à l’heure, ont fait preuve d’humanité en nous lisant des témoignages, je voudrais simplement leur demander de transmettre à leurs auteurs que le travail n’est pas une punition, mais bien quelque chose de gratifiant ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n105.

M. Dominique Tian. Je rappelle, comme mes collègues avant moi, que le déficit des régimes de retraites s’établit déjà à 13 milliards. Nous allons en outre, tout au long de nos débats, ajouter des droits nouveaux, tels que la pénibilité, les stages et diverses autres mesures extrêmement coûteuses.

Nous devrions nous inspirer d’études européennes, et notamment du modèle suédois, dont nous avons déjà brièvement et insuffisamment parlé. Nous aurions pu également citer l’Allemagne, qui a fait des progrès considérables et dont les régimes de retraites sont équilibrés – nous en sommes très loin, en France !

Seul le recul de l’âge légal de départ à la retraite est de nature à produire les recettes dont le système de retraites a besoin à court terme, sans pénaliser le pouvoir d’achat des salariés ni nuire à la compétitivité des entreprises par une hausse pénalisante des cotisations de retraite.

Sur le plan moral, nous connaissons la situation : que devons-nous laisser à nos enfants ou à nos petits-enfants : un régime extrêmement déficitaire ou bien des mesures plus courageuses que celles qui nous sont proposées aujourd’hui ?

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n165.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le vrai courage eût été, dans le cadre de cette réforme, de vous montrer à la hauteur des ambitions que vous affichez : « Garantir l’avenir et la justice du système de retraites », ce n’est pas dire aux Français que l’on fera un petit peu de tout aujourd’hui, sans toucher à l’élément fondamental qu’est l’âge légal du départ à la retraite. Cela n’assurerait en effet pas la pérennité du système puisque, dans trois ou quatre ans, il faudrait à nouveau revenir sur le sujet.

Vous avez la chance aujourd’hui – j’espère que vous en avez conscience, chers collègues de la majorité ! – de pouvoir compter sur une opposition honnête et intègre : en aucun cas, nous ne vous faisons de propositions démagogiques ou malhonnêtes, encore moins populistes.

L’opposition vous incite à avoir le courage de reporter l’âge légal à 63 ans plutôt que de rester à 62 ans – disposition que vous aviez d’ailleurs combattue il y a trois ans, car vous vous en teniez strictement à l’âge de 60 ans. Nous aurions pu nous contenter d’une posture démagogique, telle que celle que vous avez adoptée il y a trois ans en criant qu’il fallait revenir à 60 ans.

M. Jean-Marc Germain. Ce n’est pas vrai !

Mme Marie-Christine Dalloz. Mais aujourd’hui, vous avez conscience que l’emploi pose un réel problème en France, que l’emploi des jeunes est une difficulté. Avec votre mesure, vous allez créer une attitude anxiogène chez les jeunes, car vous ne leur garantissez nullement un système de retraites pérenne et efficace. Telle est la réalité !

Prenez en compte le fait que nous vous aidons avec cette proposition de fixer l’âge légal à 63 ans, qui est objective, intègre et honnête. Le vrai courage consiste à adopter ces mesures d’âge, parce que sinon cela reviendrait à mentir aux Français. Même si vous avez une certaine pratique du mensonge depuis ces dix-sept derniers mois, il serait raisonnable de revenir sur ces dispositions. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. André Chassaigne. Chassez le naturel, il revient au galop !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Nous avons reçu quelques leçons, auxquelles nous allons tenter de répondre. Nous sommes sur deux schémas complètement différents. Vous affirmez avec force et certitude que l’âge légal doit être fixé à 65 ans : c’est un choix que nous n’avons pas fait, pour des raisons que nous avons déjà explicitées.

Nous ne voulons pas en effet de cette brutalité : nous voulons qu’une personne ayant commencé de travailler à 18, 19 ou 20 ans puisse partir une fois ses annuités accomplies, et non pas à l’âge très reculé que vous aurez fixé, en l’occurrence 65 ans.

Nous faisons le choix qui nous paraît le plus juste : celui de la durée de cotisation, qui permet à certains de partir avant l’âge légal grâce à des mesures de prise en compte de la pénibilité, et à d’autres de partir un peu après. Loin de l’avoir nié, nous avons même affirmé qu’il y aurait en partie un allongement.

La vraie différence, c’est que vous refusez de jouer sur les cotisations. Vous nous reprochez d’être esclaves des syndicats sur la question de l’âge légal.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est vrai !

M. Michel Issindou, rapporteur. Mais vous, vous êtes esclaves du MEDEF sur la question des cotisations ! À chacun son esclavage !

Mme Marie-Christine Dalloz. Pas du tout !

M. Michel Issindou, rapporteur. Si vous refusez toute cotisation, c’est parce que le MEDEF vous a dit qu’il ne fallait surtout pas toucher aux cotisations.

M. Jean-Pierre Barbier. Nous ne sommes pas aux ordres des patrons !

M. Jean-Frédéric Poisson. Arrêtez !

M. Michel Issindou, rapporteur. Monsieur Poisson, vous estimez que nos hypothèses d’emploi sont trop optimistes. Mais si vous et nous faisons de la politique, c’est vraisemblablement parce que nous avons un peu d’espoir quant à l’avenir de l’emploi. Lorsque nous mettons en place des politiques pour l’emploi, nous espérons qu’elles produiront leurs effets et qu’en 2020 nous serons sortis de la crise que nous avons trouvée en arrivant aux affaires après dix ans de votre politique.

M. Jean-Frédéric Poisson. Ce n’est pas avec vos mesures que l’on sortira de la crise !

M. Michel Issindou, rapporteur. Nous formulons des hypothèses optimistes : nous n’allons pas prévoir aujourd’hui que la crise va durer pendant dix ans, ou ce n’est plus la peine de faire de la politique.

M. Jean-Frédéric Poisson. Vous pourriez être plus prudents !

M. Michel Issindou, rapporteur. Vous verrez que les politiques que nous mettons en place produiront leurs effets.

M. Jean-Frédéric Poisson. On verra !

M. Michel Issindou, rapporteur. Monsieur Poisson, en 2010 vous avez affirmé que le chômage serait de 4 % en 2024.

M. Jean-Frédéric Poisson. Moi je vous parle de ce que vous dites aujourd’hui !

M. Michel Issindou, rapporteur. C’était un objectif ambitieux, mais l’on voit bien qu’il tout aussi bien être considéré comme farfelu que celui que vous nous reprochez aujourd’hui.

Pour notre part, nous ne choisissons pas la brutalité, préférant l’allongement de la durée de cotisations. Nous choisissons également de ne pas brutaliser ceux qui approchent de la retraite, et notamment la génération de 1958 que vous bousculez déjà.

Enfin, je ne vous permets pas de dire avec autant de certitude que notre réforme n’aboutira pas. Qu’est-ce qui vous permet de dire qu’il faudra y revenir dans trois ans ?

M. Arnaud Robinet. Parce qu’elle n’est pas financée !

M. Michel Issindou, rapporteur. Si, 7 milliards vont rentrer dans le régime général.

M. Arnaud Robinet. 13 milliards ne sont pas financés !

M. Jean-Marc Germain. Ce sont l’État et les régimes complémentaires qui les financent !

M. Michel Issindou, rapporteur. Nous aurons l’occasion de revenir sur ces 13 milliards !

Voilà pourquoi nous estimons que notre réforme est équilibrée. Elle joue sur deux paramètres tandis que vous jouez sur un seul. Je me souviens d’une phrase du rapport Moreau qui montre qu’en augmentant les cotisations de plus de 1 % on arrivera à l’équilibre, ou qu’en fixant l’âge légal de départ à la retraite à soixante-cinq ans on arrivera aussi à l’équilibre. Mais pour notre part, nous ne voulons pas de cette brutalité-là. Nous préférons jouer sur les deux paramètres de manière équilibrée. La cotisation étant modérée, progressive et étalée, nous n’amputons pas le pouvoir d’achat des ménages…

Mme Marie-Christine Dalloz et M. Dominique Tian. Si, vous l’amputez !

M. Michel Issindou, rapporteur. …ni la compétitivité des entreprises. Enfin, nous ne brutalisons pas ceux qui s’apprêtent à partir à la retraite.

Ainsi, nous aboutissons à une réforme équilibrée et juste.

M. Jean-Marc Germain et M. Christian Paul. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable.

À ceux qui imaginent que la France serait à l’écart du monde, je veux leur dire que tel n’est pas le cas. Au Canada, l’âge légal de départ en retraite est de soixante ans, aux États-Unis, pays libéral s’il en est, il est de soixante-deux ans, en Suède de soixante et un ans, et en Belgique de soixante ans dès lors que l’on a quarante-deux années de cotisation.

M. Jean-Frédéric Poisson. Et en Allemagne ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Poisson, vous voulez sans doute faire référence à l’âge de soixante-sept ans. Il ne s’agit pas de l’âge légal de départ en retraite mais de l’âge de départ à taux plein qui en France est également de soixante-sept ans. Comparons donc ce qui est comparable.

Par ailleurs, contrairement à ce que j’ai entendu à plusieurs reprises lors de nos débats, il n’y a aucun lien entre la réforme que nous proposons et l’évolution du pouvoir d’achat des retraités. Je vous renvoie à une étude de la Caisse nationale d’assurance vieillesse produite il y a quelques jours et qui montre qu’après notre réforme de 2013, le nombre de retraités qui partiraient en retraite avec une décote est strictement le même que celui que l’on observe aujourd’hui. Il n’y a donc aucune relation particulière entre notre réforme et le pouvoir d’achat futur des retraités.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Monsieur Issindou, c’est vous qui êtes maintenant au pouvoir. Aussi, vous ne pouvez plus dire que nous sommes les suppôts ou les otages du MEDEF.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Vous portez pourtant leurs amendements !

M. Dominique Tian. Cet argument, le Front de gauche pourrait l’employer utilement à l’encontre du parti socialiste et l’accuser d’être peut-être l’otage du MEDEF – c’est Mme Fraysse qui l’a dit me semble-t-il. D’ailleurs, ce que vous avez fait s’agissant de l’excédent brut d’exploitation le prouve, puisque vous avez reculé sous la pression du MEDEF. C’est donc vous qui êtes les otages du MEDEF. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Ah bon ?

M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.

M. Jacques Lamblin. Monsieur le rapporteur, j’ai écouté attentivement vos propos, comme chacun ici, dont le ton se voulait rassurant. Mais il me semble qu’il y a une différence fondamentale entre les prévisions de la loi 2010 et les vôtres.

En 2010, c’est vrai, on s’appuyait sur un scénario qui ne s’est pas réalisé. Le vôtre est fondé sur un scénario qui ne réalisera peut-être pas non plus.

M. Michel Issindou, rapporteur. On verra !

M. Jacques Lamblin. Personne ne connaît à l’avance le cours des événements du monde.

Mais la différence fondamentale entre nous c’est qu’avec nos prévisions, nous arrivions théoriquement à l’équilibre tandis que vous, dès le début, vous avez un déficit de 13 milliards d’euros.

Vous nous dites, sur un ton rassurant, qu’un petit coup par ci, un petit coup par là, ça ne se verra pas. Bien entendu, cela ne se verra pas, sauf que tout le monde y va de son petit coup : la ministre des affaires sociales, le ministre du travail, le ministre du budget ou le ministre des finances. Résultat : le pouvoir d’achat des Français s’effondre et c’est de votre fait.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 136 et 2930.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants90
Nombre de suffrages exprimés90
Majorité absolue46
Pour l’adoption17
contre73

(Les amendements identiques nos 136 et 2930 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n3037 n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 163 et 2976 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n2855 rectifié n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 17, 48 rectifié, 105 et 165 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 28 rectifié, 71 rectifié et 127.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour soutenir l’amendement n28 rectifié.

M. Arnaud Robinet. L’opposition constructive que nous sommes essaie d’aider le Gouvernement à trouver des manœuvres de financement afin de trouver 13 milliards d’euros. Je viens d’entendre M. Germain nous dire que c’est l’État qui financera ces 13 milliards d’euros. Mais l’État, c’est nous. La dette, ce sont les contribuables français qui devront la payer.

Le dispositif « carrières longues » que nous avions mis en place en 2003 et que vous n’aviez pas voté, avait été conçu pour remédier aux effets de la pénibilité dans la mesure où les personnes ayant commencé très tôt à travailler l’avaient fait généralement dans des fonctions exposées à un ou plusieurs facteurs de pénibilité.

Étant donné que le projet de loi met en place un dispositif général de compensation-réparation de la pénibilité à grande échelle – plus de 3 millions de salariés sont potentiellement concernés à terme –, le dispositif « carrières longues » devient donc sans objet. Cet amendement prévoit donc d’éteindre l’application de cette mesure au moment où le dispositif pénibilité sera monté en puissance.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour soutenir l’amendement n71 rectifié.

M. Jean-Pierre Barbier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n127.

M. Dominique Tian. Cet amendement me permet de rappeler que le dispositif « carrières longues » a constitué une mesure sociale extrêmement importante et populaire puisqu’elle a connu un grand succès. C’était la marque de la générosité du gouvernement de Nicolas Sarkozy sous l’action bienveillante de Xavier Bertrand. Ce dispositif, qui traitait de la pénibilité dans le travail, a été assez facile à mettre en place. On partait de l’âge de départ, souvent huit, dix, douze, quatorze ou quinze ans passés dans un atelier, une usine ou un champ. Le dossier de la pénibilité que vous allez ouvrir est beaucoup plus dangereux, difficile et coûteux pour les finances publiques et notre régime de retraite, dont la santé financière n’est pas assurée, risque de subir un coup fatal. Nous tenions à rappeler que le dispositif « carrières longues » a été une avancée significative sur le plan social.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Le dispositif « carrières longues » et le dispositif « pénibilité » n’ont pas le même objet. Le premier permet à des assurés qui ont une carrière complète de partir à taux plein. Par ailleurs, les personnes concernées ne sont pas forcément les mêmes. Voilà pourquoi nous ne le supprimerons pas. Il existe des personnes qui ont des carrières longues dans des métiers non pénibles et d’autres qui ont des métiers très pénibles mais pas de carrière complète.

Il importe donc de conserver les deux systèmes. Avis défavorable donc.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Je note que M. Robinet vient de reconnaître que le dispositif « pénibilité » est bon puisqu’il précise, dans l’exposé sommaire de son amendement, que 3,3 de salariés sont potentiellement concernés.

M. Arnaud Robinet. Je n’ai pas dit qu’il était bon !

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis. Par ailleurs, comme vient de le rappeler, à juste titre, le rapporteur, les carrières longues ne concernent pas forcément celles et ceux qui auraient rencontré des difficultés dans leur métier. Au fond, les métiers qui peuvent être à fortes contraintes, ne sont pas liés à ceux qui commencent très tôt. Nous pensons en effet qu’il est utile que ce dispositif « carrières longues » soit maintenu pour celles et ceux qui ont commencé très tôt à travailler. Je rappelle au demeurant que si vos propositions avaient été retenues, des jeunes qui commencent à travailler à dix-sept ans seraient obligés de travailler quarante-sept ans, ce qui est beaucoup. Nous estimons, au contraire, qu’il est utile et nécessaire de maintenir, à côté du dispositif « pénibilité », un dispositif pour les carrières longues, de manière à permettre à celles et ceux qui ont commencé très tôt à travailler, de partir beaucoup plus tôt. Voilà un engagement présidentiel qui est tenu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 28 rectifié, 71 rectifié et 127 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi des amendements identiques, nos 367 à 381.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n367.

Mme Jacqueline Fraysse. En l’état actuel du projet de loi, nous contestons avec force les choix de financement effectués pour combler le déficit de l’assurance vieillesse. En 2010, toute l’opposition était rassemblée pour exiger le maintien de la retraite à soixante ans et le financement de l’assurance vieillesse par une contribution sur les revenus du capital. Le parti socialiste chiffrait d’ailleurs cette contribution à 25 milliards d’euros d’ici à 2025, donc très largement de quoi financer le déficit. Pour ce qui nous concerne, notre position n’a pas changé. Cet amendement vise donc à étudier en profondeur le bien-fondé de nos propositions, d’une part le retour à l’âge légal à soixante ans pour tous, d’autre part des pistes de financement que nous avons avancées et qui n’ont obtenu jusqu’à présent aucune autre réponse que celle de notre cher rapporteur : « Notre système est contributif et basé sur le travail ». C’est vrai, mais notre proposition ne déroge absolument pas à cette règle car toute création de richesse de valeur ajoutée est issue du travail et doit donc être mise précisément à contribution.

En fait, ce qui déséquilibre notre système contributif et basé sur le travail, c’est justement qu’une part de plus en plus importante de la richesse produite par le travail ne contribue pas, qu’il s’agisse des exonérations massives de cotisations sociales patronales, notamment sur les bas salaires, ou des dividendes qui ont explosé ces dernières années et qui représentent, je le répète, 180 milliards d’euros par an.

Comment dès lors pouvez-vous parler d’un texte juste, alors que vous taxez les salariés et les retraités, y compris les plus modestes, et que vous refusez obstinément de faire contribuer les dividendes ? C’est donc pour avancer sur ce point et rendre possible le retour à la retraite à soixante ans que nous déposons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n369.

M. Marc Dolez. Notre groupe, s’il conteste les choix présentés sur les retraites, se veut aussi force de proposition. Nous avançons un certain nombre de propositions pour trouver d’autres financements qui, nous le pensons, pourraient permettre de revenir à la retraite à soixante ans, comme la modulation des cotisations sociales patronales en fonction des choix de gestion de l’entreprise en matière d’emploi et de salaire, ou comme la taxation des revenus financiers des entreprises.

Madame la ministre, monsieur le rapporteur, je crois que la proposition que nous faisons est raisonnable, mais je n’ai pas le sentiment que vous soyez totalement convaincus : c’est la raison pour laquelle nous proposons que le Gouvernement présente à l’Assemblée nationale, avant le 31 décembre 2014, un rapport qui étudierait l’impact de nos propositions.

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux, pour soutenir l’amendement n377.

M. Gaby Charroux. Comme nous ne nous résignons pas à accepter le recul sans fin des droits de nos concitoyens, nous proposons d’étudier, comme le disait Marc Dolez, des pistes alternatives de financement dans un rapport que le Gouvernement remettrait au Parlement d’ici la fin de 2014. Il pourrait envisager notamment la possibilité d’un retour à la retraite à soixante ans moyennant de nouveaux financements, la modulation des cotisations patronales d’assurance vieillesse en fonction des choix de gestion des entreprises et la mise œuvre déterminée de la résorption des inégalités entre femmes et hommes, notamment au niveau du salaire.

La simple mise en œuvre de l’égalité salariale rapporterait entre 12 et 15 milliards d’euros d’ici à 2020 : il n’y aurait donc aucun problème de financement des retraites si le scandale de cette inégalité était réellement combattu.

Pour toutes ces raisons, nous proposons que nos pistes de financement, à défaut d’être adoptées, soient au moins étudiées de manière transparente par le Gouvernement dans un rapport d’ici la fin de l’année.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Le Gouvernement a pris dès juillet 2012 une mesure tendant à revenir à la retraite à soixante ans pour ceux avaient cotisé pendant quarante et une annuités. Permettre de partir à soixante ans aux assurés qui n’ont pas une carrière complète dans un contexte d’allongement de la durée d’assurance ne serait pas responsable, car cela inciterait les assurés à partir en retraite avec une décote. C’est ce que nous ne voulons pas : nous souhaitons encourager les assurés à partir à taux plein pour avoir un niveau de pension satisfaisant tout au long de leur retraite.

Les mesures de financement que vous proposez aujourd’hui ne sont pas celles que nous défendons dans ce projet. Je pense que le rapport n’aurait pas de grand intérêt. J’émet donc un avis défavorable.

(Les amendements identiques nos 367, 369 et 377, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1537 rectifié et 2536, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes, pour soutenir l’amendement n1537 rectifié.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Lorsque nous avons reçu le président du COR, ainsi qu’un certain nombre de chercheurs, à la délégation aux droits des femmes, ils ont fait valoir qu’on avait du mal à évaluer précisément l’impact des différentes réformes sur les écarts de pension entre les femmes et les hommes. À chaque réforme, en effet, on modifie plusieurs paramètres.

Je ne donnerai que deux exemples, puisqu’il est tard. La réforme de 2003 a introduit une décote et une surcote. On sait qu’aujourd’hui, 58 % des hommes bénéficient de la surcote et beaucoup moins chez les femmes. Les hommes partent à 75 % en départ anticipé pour longue carrière. À l’inverse, la borne d’âge de 2010, de soixante-cinq à soixante-sept ans, touche beaucoup plus les femmes que les hommes, parce qu’elles seront beaucoup plus nombreuses à devoir partir à soixante-sept ans.

Mais je dois reconnaître, madame la ministre, qu’après avoir interrogé un certain nombre de cabinets ministériels, pour savoir ce que rapporte cet allongement de soixante-cinq à soixante-sept ans et combien de femmes sont touchées, je n’ai pas de réponse satisfaisante. Pour pouvoir juger de l’impact de ces différentes réformes, je sollicite un rapport devant le Parlement.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Romagnan, pour soutenir l’amendement n2536.

Mme Barbara Romagnan. Mon amendement a le même but : étudier l’opportunité de ramener l’âge de départ en retraite de soixante-sept à soixante-cinq ans à travers un rapport, comme Catherine Coutelle vient de le dire.

Certes, on ne peut pas encore mesurer les effets du passage de soixante-cinq à soixante-sept ans, pour autant on sait que cette mesure affecte principalement les assurés aux carrières courtes marquées par des interruptions d’activité, c’est-à-dire principalement les femmes. Or, l’âge moyen de départ à la retraite des femmes est déjà plus tardif que celui des hommes. Et malgré qu’elles travaillent plus longtemps, elles sont encore 40 % à ne pouvoir partir à la retraite à taux plein, alors que c’est le cas de seulement 23 % des hommes. Il y a risque d’accroître encore cet écart. Des études montrent également qu’entre 2005 et 2011, les années de vie sans incapacité à soixante-cinq ans ont baissé de 0,2 an pour les femmes, ce qui ramène cette grandeur à 8,6 ans. On peut dire que ce n’est pas beaucoup, mais ce n’est pas une évolution positive. Ce décalage a pour conséquence de diminuer les années de retraite en bonne santé, particulièrement pour les femmes.

J’insiste sur ce point que si elles ont des carrières hachées, sont moins bien rémunérées et ont des retraites plus faibles, c’est parce qu’elles interrompent leur carrière, de façon temporaire ou totale, pour s’occuper des enfants : certes des leurs, mais ce sont aussi ceux des hommes, qui pendant ce temps vont au travail. Je ne dis pas que c’est facile, mais ils poursuivent leur carrière professionnelle et cotisent. Et ces enfants sont aussi ceux de la société, qui vont permettre plus tard de payer les retraites. Il serait juste de pouvoir mesurer les choses correctement pour étudier l’opportunité de revenir à l’âge limite de soixante-cinq ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. J’aurais tendance à vous proposer de retirer l’amendement car on pourrait procéder autrement.

M. André Chassaigne. Quand même, c’est un amendement socialiste !

M. Michel Issindou, rapporteur. Le Conseil d’orientation des retraites est capable de faire ce genre d’études sans aucun problème. On pourrait aussi inclure cette mesure dans l’article 13 sur les droits familiaux et conjugaux qui prévoit un rapport.

Je comprends votre position et je la partage : ce que vous avez dit est parfaitement juste. La réforme comprend des mesures relatives au temps partiel, au chômage. On peut répondre à votre demande à travers les mécanismes du COR ou à travers l’article 13.

Je pense aussi que l’abaissement de l’âge limite de soixante-sept à soixante-cinq ans ne peut pas concerner seulement les femmes : nous sommes bien d’accord, l’amendement parle beaucoup des femmes, mais il faut l’envisager pour l’ensemble des hommes et des femmes. Je vous propose le retrait ou, à défaut, un avis défavorable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je ne suis pas favorable à ces amendements tels qu’ils viennent d’être présentés. Il paraît nécessaire de disposer d’un certain nombre d’informations sur les conditions dans lesquelles hommes et femmes partent en retraite. Nous allons être amenés à faire une étude très précise de la situation des femmes pour pouvoir déterminer de quelle manière les droits familiaux pourraient davantage bénéficier aux femmes. C’est dans le cadre d’une approche globale que doit se situer l’analyse.

Je préconise le retrait de vos amendements, sinon je donne un avis défavorable. Votre demande sera intégrée au rapport sur les droits familiaux ou, année après année, dans l’évaluation qui sera faite de la retraite des femmes par le comité de suivi, dont c’est un axe de travail important.

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. J’ai écouté avec attention la réponse de M. le rapporteur et celle de Mme le ministre : j’avoue que je suis extrêmement surpris. On veut donner du travail au COR : c’est parfait, mais dans l’article 3 on veut dépouiller, voire assassiner le COR. Je me pose donc quelques questions. Or, le problème des femmes, nous en avons parlé pendant la réforme de 2010 et on en parle de plus en plus. J’avais loué, en son temps, le travail de Mme Zimmermann à la tête de la délégation. C’est maintenant Mme Coutelle. Nous voulons tous ensemble lutter contre les inégalités. Mme Coutelle a rappelé fort justement que nous nous étions fait avoir au sujet d’un amendement concernant la lutte contre les inégalités entre les hommes et les femmes.

Si les amendements dont nous parlons sont retirés, comme l’ont souhaité le rapporteur et la ministre, je tiens à dire que je les reprendrai.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes.

Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes. Je veux bien vous entendre, mais il faut que nous ayons les informations et les études. Très sincèrement, madame la ministre, aujourd’hui, nous ne les avons pas.

Deuxième point : il ne s’agit pas seulement de droits familiaux et conjugaux. Il y a aujourd’hui des femmes célibataires qui vivent d’un emploi à temps partiel et le taux d’activité des femmes chez les seniors est plus faible que celui des hommes. Et ce sont les femmes qui vont devoir travailler plus longuement pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Je vous entends, je vous fais confiance, mais très sincèrement la délégation a besoin d’éléments chiffrés très précis.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Romagnan.

Mme Barbara Romagnan. J’entends aussi, mais je ne suis pas convaincue et je vais maintenir mon amendement. Nous ne demandons que des études, pas le retour à 65 ans.

(L’amendement n1537 rectifié est adopté et l’amendement no 2536 tombe.)

M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir l’amendement n3034.

M. Denis Jacquat. Le décret du 2 juillet 2012 qui fixe les conditions d’ouverture du droit à la retraite anticipée à 60 ans pour les assurés justifiant de la durée d’assurance cotisée requise pour leur génération et ayant commencé à travailler avant vingt ans est entré en vigueur le 1er novembre.

Selon la ministre des affaires sociales et de la santé, cette mesure devait concerner 110 000 personnes en 2013. Les demandes de retraite anticipée pour carrière longue pouvant être effectuées depuis la parution du décret au Journal officiel le 3 juillet 2012, on estimait en novembre de la même année que près de 28 000 personnes auraient reçu une réponse favorable leur permettant de partir à la retraite à 60 ans.

Évalué à 1,1 milliard en 2013 pour l’ensemble des régimes de base, le coût de cette mesure était alors estimé à trois milliards à l’horizon 2017.

Par souci de transparence, le Parlement devrait être informé du nombre de départs enregistrés ainsi que de ses conséquences financières sur l’augmentation des cotisations sociales des salariés et des employeurs et sur la situation financière des régimes de retraite.

Afin d’éviter toute pression politique sur le chiffrage, il convient que ce rapport soit rédigé par l’autorité non-gouvernementale qu’est le Conseil d’orientation des retraites.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n3034 n’est pas adopté.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, aujourd’hui, mercredi 9 octobre 2013, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ; suite du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 9 octobre 2013 à une heure quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance



de l’Assemblée nationale



Nicolas Véron