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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du vendredi 25 octobre 2013

SOMMAIRE

Présidence de M. Christophe Sirugue

1. Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014

Quatrième partie (suite)

Article 44 (précédemment réservé)

Mme Bérengère Poletti

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales

Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales

Amendement no 665

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales

Article 45 (précédemment réservé)

M. Bernard Accoyer

Mme Jacqueline Fraysse

Mme Fanélie Carrey-Conte

M. Étienne Blanc

Mme Véronique Louwagie

Amendements nos 337 , 608 , 686 , 437 , 148 , 805 , 839

Rappel au règlement

M. Bernard Accoyer

Article 45 (précédemment réservé - suite)

Rappel au règlement

Mme Bérengère Poletti

Article 45 (précédemment réservé - suite)

Amendements nos 361 , 669

Après l’article 45 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 184 , 463 rectifié , 793 , 428 , 150 , 510 , 661

Article 46 (précédemment réservé)

M. Bernard Accoyer

M. Martial Saddier

M. Étienne Blanc

Amendement no 684 et 151

Après l’article 46 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 420 rectifié , 529 , 532 , 558 , 584 , 152 , 654 rectifié

Article 47 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Mme Bérengère Poletti

Amendement no 765 rectifié

Mme Martine Pinville, rapporteure

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie

Après l’article 47 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 502 rectifié , 798

Article 48 (précédemment réservé)

Amendement no 687 et 688

Article 49 (précédemment réservé)

Article 50 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Après l’article 50 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 154 deuxième rectification , 155 rectifié , 493

Avant l’article 51 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 492 , 564

Article 51 (précédemment réservé)

M. Jean-Louis Roumegas

Mme Marisol Touraine, ministre

Avant l’article 52 (amendement précédemment réservé)

Amendement no 201

M. Laurent Marcangeli, rapporteur de la commission des affaires sociales

Article 52 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Amendements nos 205 , 156

Article 53 (précédemment réservé)

Après l’article 53 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 772 , 157 rectifié , 185 , 454 rectifié

Article 54 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Article 55 (précédemment réservé)

Mme Linda Gourjade

Amendement no 158 rectifié

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Amendement no 204

Article 56 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Amendement no 609

Article 57 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Amendement no 610

Articles 58 et 59 (précédemment réservés)

Après l’article 59 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 159 , 453

Article 60 (précédemment réservé)

Après l’article 60 (amendement précédemment réservé)

Amendement no 211

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales

Article 61 (précédemment réservé)

Article 62 (précédemment réservé)

Amendement no 317

Article 63 (précédemment réservé)

Amendements nos 312 , 313

Article 64 (précédemment réservé)

Mme Jacqueline Fraysse

Amendements nos 352 , 531, 552 et 586 , 810 , 587, 588, 623, 589, 590 rectifié, 591, 592, 593 et 594

Vote sur l’ensemble de la quatrième partie

Mme Marisol Touraine, ministre

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Christophe Sirugue

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 (nos 1412, 1470, 1462).

Quatrième partie (suite)

M. le président. Ce matin, l’Assemblée a poursuivi l’examen de la quatrième partie du projet de loi, s’arrêtant à l’article 44.

Article 44 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, inscrite sur l’article.

Mme Bérengère Poletti. Madame la ministre, nous abordons, avec cet article 44, les mesures que vous souhaitez mettre en place pour faciliter le recours à la contraception pour les mineures de moins de quinze ans. Nous avons déjà eu l’année dernière des échanges sur la problématique du recours à l’interruption de grossesse et de la délivrance de la contraception. En deux mots, il s’agissait de la prise en charge à 100 % de l’interruption volontaire de grossesse et, pour les mineures, de la délivrance d’une contraception de manière anonyme et gratuite. Lors des débats, j’avais attiré votre attention sur le fait que la délivrance anonyme et gratuite de la contraception demeurerait vaine si l’on ne prenait pas en charge la prescription, c’est-à-dire la consultation du prescripteur de la contraception, ainsi que les examens biologiques. Je souhaitais que ces deux actes, au même titre que la délivrance de la contraception, soient pris en charge de manière anonyme et gratuite.

Vous m’aviez expliqué que vous aviez besoin d’un certain délai pour étudier la question, ce qui est compréhensible. Cette année, vous revenez vers nous avec un article qui atteste votre envie de faire avancer le sujet, ce qui est une bonne chose, mais vous nous proposez un recours au tiers payant, ce qui, du point de vue de la gratuité, n’est bien évidemment pas suffisant. En effet, pour une consultation de médecin, d’un coût de 23 euros, la jeune mineure – car ce sont bien souvent malheureusement les jeunes filles qui sont confrontées au problème – va devoir payer 7 euros.

Je serai peut-être un peu longue, monsieur le président, mais je n’ai pu aborder le sujet en commission et mon collègue ne s’est pas exprimé. Je compte sur votre magnanimité.

M. le président. Je le suis toujours, madame la députée, mais il y a malgré tout un règlement à respecter ! Je vous en prie, poursuivez.

Mme Bérengère Poletti. Pour les examens biologiques à mon sens les plus couramment pratiqués, c’est-à-dire le dépistage de la glycémie, du cholestérol total et de l’antithrombine III, il restera à payer à la patiente 9,88 euros. Bref, si l’on additionne les deux actes, le reste à la charge de la jeune mineure avoisinera les 17 euros. Je souhaite avoir une réponse sur ce sujet, car je considère qu’il est injuste pour ces jeunes mineures de ne pas bénéficier de la gratuité. Quant à anonymat, je souhaiterais savoir comment vous entendez faire prendre en charge l’assurance par la caisse d’assurance maladie : le tiers payant sera-t-il imputé sur la carte des parents ? Ce serait inquiétant, et contreproductif, car en ce cas, l’anonymat ne peut être garanti.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Madame Poletti soulève de vraies questions, et je rejoins ses préoccupations. Je me félicite d’ailleurs de la réaction du ministère sur ce sujet. En effet, même si les chiffres relatifs à l’utilisation du dispositif n’étaient pas très positifs, Mme la ministre a pris en compte la situation et a fait en sorte qu’il puisse fonctionner – car ce dispositif reste une très bonne idée. Je crois, madame Poletti, que nous pouvons nous rejoindre sur cela et faire chaque année le point sur la situation.

Je veux vous communiquer deux chiffres dont je dispose depuis hier concernant la région Midi-Pyrénées, qui comprend huit départements et des territoires d’une grande variété : montagne, rural, semi-rural, semi-urbain, auxquels s’ajoutent des quartiers sensibles et de grosses agglomérations formant des communautés urbaines. Sur une population de trois millions d’habitants donc, les 15-17 ans ont utilisé 127 fois le dispositif en se servant d’un numéro d’inscription au répertoire anonyme, contre 13 391 utilisations à l’aide d’un numéro d’inscription au répertoire identifié – c’est-à-dire que la jeune fille est identifiée par le numéro de ses parents.

Il n’y a donc pas photo : les jeunes filles se situent aujourd’hui très majoritairement dans le cadre d’un parcours accompagné par leurs parents, père ou mère, peu importe, qui savent et qui suivent. Il va donc falloir, chaque année, dresser un bilan pour voir s’il y a une montée en charge du dispositif et détecter d’éventuels problèmes d’accès à la contraception dans les quartiers.

Je remercie à nouveau Mme la ministre. Un ministère peut fort bien décider que de toute façon, il a raison ! Eh bien, cela n’a pas été le cas, madame Poletti, et je tenais à vous le dire.

Mme Bérengère Poletti. Je n’ai pas dit le contraire !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Il y avait une bonne idée politique au départ et, lorsque Mme la ministre a entendu les remontées du terrain, elle a pris des mesures pour améliorer la mise en œuvre du dispositif. Je ne peux que m’en féliciter. Peut-être y aura-t-il encore une amélioration l’an prochain. En tout état de cause, je me félicite de l’écoute du ministère sur ce sujet.

M. le président. La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social.

Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales. Pour rebondir sur ce que vient de dire Mme Lemorton, il faut effectivement assurer la promotion de la santé et développer la prévention : ce sont des axes de la stratégie nationale de santé qui prennent ici tout leur sens. Il faut toujours mieux informer et accompagner.

M. le président. Nous en arrivons aux amendements.

La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, pour soutenir l’amendement n665.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Cet amendement me permettra de faire le point sur le dispositif général proposé par le Gouvernement. Il a pour objet d’inclure dans le champ du tiers payant les actes de pose, de changement ou de retrait des contraceptifs implantables, autrement dit les stérilets.

Nous avons eu un débat l’année dernière sur l’accès à la contraception des mineurs. Je tiens à rappeler que l’un de mes axes prioritaires est de garantir l’effectivité des droits, en faisant en sorte que les femmes, et en particulier les plus jeunes d’entre elles, accèdent à une bonne contraception, qui soit adaptée. Mme Poletti, vous êtes d’ailleurs d’une constance parfaite sur ce sujet, puisque vous défendiez cette position sous l’ancienne majorité, qui ne vous avait pas suivie.

On sait bien que, s’agissant des mineurs, il y a à la fois un enjeu financier et un enjeu que je qualifierais de psychologique : il n’est pas toujours aisé de parler de sa contraception et de trouver le bon endroit où se la faire prescrire. Cela a justifié la mesure que j’ai prise l’année dernière et qui est complétée aujourd’hui. Elle a commencé à produire des effets : les dépenses d’assurance maladie au titre de la gratuité de la délivrance de la contraception sont significatives, puisqu’elle dépassent 55 000 euros pour quatre mois d’exercice d’application. C’est donc un premier pas.

Nous voulons en franchir un autre grâce au tiers payant, chez le médecin ou pour les actes de biologie associés. Chez le médecin, la mineure n’aura pas de reste à charge. Elle versera une avance de 6,90 euros, soit la part qui ne relève pas de l’assurance maladie mais de l’assurance complémentaire, pour une consultation chez le généraliste de 23 euros. Je tiens à rappeler que la jeune fille peut éventuellement bénéficier de l’assurance complémentaire de ses parents.

Par ailleurs, les chiffres indiqués par Mme Lemorton concernant Toulouse et la région Midi-Pyrénées doivent être interprétés avec précaution : en effet, une jeune fille qui dépend de la sécurité sociale de ses parents peut être en pleine intelligence avec eux. Le fait qu’elle se fasse rembourser sur leur carte ne sera pas nécessairement source de difficultés, elle ne souhaite pas forcément l’anonymat. Ne formulons pas d’emblée l’hypothèse que toutes les jeunes filles veulent voir le médecin sans que leurs parents en soient informés.

Je rappelle qu’il existe 1 200 centres de planification, où l’anonymat complet est possible. Si nous voulons aller plus loin, cela passe évidemment par la mise en place du tiers payant généralisé, c’est le projet du Gouvernement, qui permettra aux jeunes femmes et aux jeunes filles de bénéficier d’une confidentialité complète.

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie, pour donner l’avis de la commission.

M. Christian Paul, rapporteur de la commission des affaires sociales. Avis évidemment favorable.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Madame la ministre, vous ne m’avez pas répondu sur la prise en charge par la caisse d’assurance maladie des honoraires du médecin ou du laboratoire : cela apparaîtra-t-il sur la carte des parents ? Auquel cas, il y a un risque pour la jeune fille voulant rester anonyme – on connaît l’existence de situations très compliquées – que sa démarche soit dévoilée à ses parents.

Mme Claude Greff. Bien sûr !

Mme Bérengère Poletti. Je rappelle en effet que les parents reçoivent régulièrement des relevés des actes pratiqués. En permettant que cela apparaisse dessus, on prend un risque patent.

Par ailleurs, un certain nombre de régions ont mis en place des Pass contraception, dont le fonctionnement n’est pas très satisfaisant. Pour ma part, j’ai toujours pensé que ce genre de chose devait être pensé au niveau national pour permettre une communication très simple en direction des jeunes mineures, qui doivent savoir comment accéder à leur contraception avec toutes les garanties possibles.

Il serait donc préférable d’organiser à l’échelle nationale la façon de faire en sorte que le recours à la contraception soit anonyme et gratuit, c’est-à-dire pris en charge à 100 %. Le volet communication pourrait éventuellement être assuré par les régions, avec les moyens aujourd’hui dédiés aux Pass contraception.

Je souhaiterais connaître votre avis sur ces deux sujets, madame la ministre.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Poletti, je ne crois pas que l’on puisse ériger le secret en règle absolue pour la prise en charge sanitaire des mineures. Il y a un enjeu de traçabilité. Prenons la question des pilules contraceptives : si un problème sanitaire se pose, et nous avons constaté que cela pouvait arriver, nous devons être en mesure, comme pour n’importe quelle autre prescription, de suivre les patients.

Une jeune fille, une mineure qui veut absolument entrer en contact avec un professionnel de santé de manière anonyme avec une prise en charge complète dispose, ainsi que je vous l’ai indiqué, de 1 200 centres de planification sur le territoire national. Elle peut y trouver à la fois le conseil, le soutien, l’accompagnement et la prescription dont elle a besoin. Si la jeune femme choisit de consulter un médecin en ville, c’est qu’elle se trouve dans une relation de confiance, de transparence. Il est normal que nous puissions alors suivre les dépenses et tenir compte des enjeux sanitaires liés à cet acte.

Quant aux Pass contraception financés par les régions, et dont le succès, disons-le, est mitigé, ils pourront être utilisés demain dans le cadre du dispositif que nous proposons. Rien n’interdira une jeune fille de s’en servir pour financer des consultations, ce qui se fait peu aujourd’hui. Mais je ne suis absolument pas fermée à ce que l’État et les régions qui se sentent engagées mènent conjointement, dans le cadre des ARS, une réflexion sur les politiques territoriales à mener pour faciliter l’information, qui est généralement bien diffusée, et l’accès à la contraception et aux professionnels de santé de manière générale. Ces politiques relèvent en effet des régions.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Madame la ministre, je suis un peu étonnée par votre argument. Si vous entendez mettre en place une contraception accessible aux mineures de façon anonyme et gratuite, ce n’est pas pour énoncer dans le même temps un objectif de traçabilité ! Autant laisser les mineures se débrouiller avec leurs parents pour consulter un médecin et se faire prescrire un contraceptif !

La contraception anonyme et gratuite pour les mineures ne vise pas à répondre aux besoins des jeunes filles qui sont correctement prises en charge par leur famille. Celles-ci n’ont aucun problème, elles bénéficient de la mutuelle et des assurances de leurs parents. Mais il y a des jeunes filles qui ont difficilement accès aux centres de planification, parce que les horaires ne leur conviennent pas ou parce qu’elles habitent en milieu rural ou dans les quartiers. Et pour elles, tout ce que vous répondez est qu’il faut assurer la traçabilité et que leurs parents doivent être informés !

Je ne comprends pas votre démarche. Vous dites tout et son contraire. C’est pourquoi il me semble si important d’aller réellement vers un dispositif gratuit et anonyme, qui répond bien à l’objectif que nous nous assignons tous, à savoir la protection des jeunes filles se trouvant dans des situations compliquées.

Mme Claude Greff. Tout à fait d’accord !

(L’amendement n665 est adopté.)

(L’article 44, amendé, est adopté.)

Article 45 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, inscrit sur l’article.

M. Bernard Accoyer. L’article 45 paraît aller dans la bonne direction, mais les effets pervers se cachent toujours dans les détails. C’est ce que nous redoutons ici.

En effet, cet article comporte plusieurs zones d’ombre. Il prévoit en particulier la sélection d’un certain nombre de contrats d’aide à la complémentaire santé ou de contrats solidaires et responsables par une procédure d’appel d’offres dont les clauses ne sont pas transparentes. C’est sur ce point que portent nos inquiétudes : ce pourrait être une manière déguisée de recourir à la clause de désignation, ou d’instaurer un plafond conditionnant les avantages fiscaux, qui se chiffrent à 600 millions d’euros, pour les compagnies qui rempliraient les critères. On comprend bien qu’il peut y avoir des arrangements entre les pouvoirs publics et les acteurs. Nous en avons déjà parlé lors du débat sur le retour de la clause de désignation, appelée de façon cryptique clause de recommandation.

Ce sont toujours les mêmes qu’on retrouve autour de la table : les partenaires sociaux, employeurs et salariés, qui peuvent sélectionner ainsi leurs amis des grandes institutions de prévoyance, comme les grandes mutuelles. Dans cette affaire, les petites mutuelles et les assurances seraient lésées. Plus grave encore, le libre accès à des soins de qualité ou à des prestations de haut niveau, par exemple en optique ou dans bien d’autres domaines encore, serait remis en cause. Dans le même temps, des emplois en France seraient menacés puisqu’on ferait davantage appel à des biens ou à des produits de santé fabriqués de plus en plus loin, hors de l’Union européenne.

Enfin, madame la ministre, nous appelons votre attention sur l’inconstitutionnalité de cette procédure telle qu’elle est présentée.

Mme Claude Greff. Bien sûr !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article comporte diverses mesures visant à réformer la protection sociale complémentaire santé.

Lors de l’examen du projet de loi sur la sécurisation de l’emploi qui généralisait la complémentaire santé pour tous les salariés, nous avions dénoncé un système qui laissait de côté ceux qui justement avaient le plus besoin d’une complémentaire : les retraités, les jeunes, les chômeurs et les salariés précaires. Cet article vise à les réintégrer, notamment en facilitant l’accès à l’aide à la complémentaire santé, l’ACS.

Pour notre part, nous soulignons la nécessité d’une prise en charge maximale par l’assurance maladie obligatoire, qui reste le seul mode de financement des dépenses de santé à la fois universel, puisque tant les salariés que les chômeurs et les retraités sont couverts, et équitable, puisque chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. À défaut, on le voit bien, vous êtes condamnés à imaginer à chaque nouveau dispositif une nouvelle rustine pour rattraper ceux qui échappaient au dispositif précédent. Vous créez ainsi un contrat de sortie pour les personnes qui ont dépassé le seuil de l’ACS, une aide qui elle-même visait les personnes ayant dépassé le plafond de la CMU-C.

Vous prévoyez également d’améliorer la qualité des contrats solidaires, ce qui est une bonne chose. Mais je note que parmi vos pistes d’amélioration ne figurent ni le principe de solidarité, c’est-à-dire la progressivité des primes en fonction des revenus, ni celui d’égalité : pas de tarifs majorés pour les personnes âgées et pour les chargés de famille.

Pour financer ces mesures, vous prévoyez la fiscalisation des cotisations employeurs de prévoyance, ce qui apparaît comme un encouragement direct aux entreprises à baisser leurs contributions à la prévoyance de leurs salariés. Dans ces conditions, on peut se demander pourquoi une telle fiscalisation n’est pas prévue s’agissant de l’épargne retraite, qui reste exemptée de l’impôt sur le revenu.

M. le président. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je voudrais revenir sur plusieurs éléments importants, en particulier les questions essentielles de l’accès au soin et du reste à charge pour les patients.

Tout d’abord, je voudrais relever dans cet article une avancée dont on a peu parlé : la possibilité pour les étudiants isolés et précaires bénéficiant de certaines aides sociales des CROUS d’accéder désormais à la CMU complémentaire. C’est un point important à souligner en matière d’accès aux soins pour les jeunes.

Ensuite, je souhaite revenir sur l’enjeu majeur que constitue la refonte des contrats solidaires et responsables, notamment dans le cadre de la lutte contre les dépassements d’honoraires. Ce dernier objectif est pour nous un enjeu politique fort et clair, majeur en matière d’accès aux soins.

Il existe plusieurs outils pour lutter contre les dépassements d’honoraires, ainsi que nous l’avons vu dans le cadre des négociations autour du contrat d’accès aux soins, et il est clair que les contrats solidaires et responsables en sont un très important. Or on sait que, dans le passé, la prise en charge sans limite des dépassements d’honoraires a largement contribué à les solvabiliser. Il faut donc mettre un coup d’arrêt à de tels processus. Pour cela, il faut nécessairement plafonner dans les contrats solidaires et responsables le niveau de prise en charge des dépassements d’honoraires.

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. Tout à fait !

Mme Fanélie Carrey-Conte. Nous l’avons fait en commission des affaires sociales, en fixant un plafond de 150 %. Mais si nous voulons faire des contrats solidaires et responsables un outil véritablement efficace dans la lutte contre les dépassements, nous devons nous donner résolument l’objectif de descendre en dessous de ces 150 %. Il faut modifier le texte en ce sens.

M. Christian Paul, rapporteur. Très juste !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Absolument !

Mme Fanélie Carrey-Conte. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Enfin, la question du reste à charge et de la régulation des prix dépend du niveau de remboursement des complémentaires, mais aussi du niveau limite des prix, notamment dans le domaine de l’optique. Nous aurons l’occasion d’en débattre à travers plusieurs amendements, mais il est évident que nous devrons ici aussi mobiliser plusieurs outils.

Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la manière dont vous entendez continuer à travailler avec l’ensemble des professionnels de l’optique sur les dispositifs permettant d’instaurer des logiques de régulation dans ce secteur ?

M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc.

M. Étienne Blanc. L’article 45 présente deux inconvénients.

Tout d’abord, vous souhaitez faciliter ou encourager l’encadrement des contrats de complémentaire santé, par exemple en fixant un plafond. Le premier inconvénient de ce dispositif sera d’augmenter le reste à charge pour un certain nombre de Français qui choisiront des lunettes ou des prothèses dépassant ce plafond, ce qui posera un véritable problème.

M. Bernard Accoyer. Bien sûr !

M. Étienne Blanc. En outre, il existe une véritable solidarité, naturelle, entre ceux qui peuvent financer un matériel haut de gamme et ceux qui ne le peuvent pas.

M. Christian Paul, rapporteur. C’est bien connu !

M. Étienne Blanc. La fixation d’un tel plafond peut donc induire des effets extrêmement négatifs.

Le deuxième problème concerne notre industrie. Certains d’entre nous dans cet hémicycle, et je parle ici également au nom de Marie-Christine Dalloz, sont originaires de régions dans lesquelles la lunetterie a été longtemps un phare de l’industrie, tant pour l’innovation et la recherche que pour le design et les matériaux. En fixant ce plafond, vous allez évidemment pénaliser les activités de recherche et d’innovation de ces industries, et freiner leur conquête de marchés à l’étranger. Je pense qu’il faut faire preuve d’une extrême prudence avec des dispositifs d’encadrement de ce type, qui peuvent s’avérer très dangereux pour l’avenir de l’industrie dans le domaine de la santé.

M. Lionel Tardy et M. Martial Saddier. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Selon l’exposé des motifs, cet article a pour objet la généralisation de la couverture complémentaire santé. On peut regretter que la situation des personnes n’ayant pas du tout de complémentaire santé ne soit pas évoquée.

Cet article est donc une nouvelle étape, qui vise à adapter le cas échéant les dispositifs actuels. Nous partageons tous en effet l’objectif de permettre l’accès à des soins de qualité à toutes les personnes, quel que soit leur âge, leur statut, leur profession ou leur lieu de résidence.

Les mesures de l’article s’articulent en trois axes. Le premier consiste à simplifier l’accès à la CMU-C à des étudiants bénéficiant de certaines aides sociales, ce dont je me réjouis. Je regrette en revanche que la loi ne soit pas très bavarde sur le sujet, puisqu’elle renvoie la définition des prestations concernées à un arrêté des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la Sécurité sociale.

Le deuxième axe concerne l’amélioration du rapport qualité-prix des contrats souscrits dans le cadre de l’aide à la complémentaire santé par une mise en concurrence des organismes complémentaires. Cela nous ramène aux débats que nous avons eus mardi soir à propos de la clause de désignation, ou de recommandation, et des avis de l’Autorité de la concurrence et des décisions du Conseil constitutionnel. Nous en reparlerons à propos des amendements de suppression.

Le troisième axe concerne l’évolution des règles en matière de contrats solidaires et responsables, les modifications éventuelles, la couverture minimale pour certains soins. Ce qui me gêne, c’est que la modification des règles risque de poser des problèmes pour les contrats en cours. On peut aussi regretter l’absence de concertation et le manque de lisibilité des dispositifs mis en place, en particulier des modalités de leur application.

M. le président. Sur l’article 45, je suis saisi de plusieurs amendements. Nous commençons par deux amendements identiques, nos 337 et 608.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n337.

M. Bernard Accoyer. Je serai bref, puisque j’ai déjà évoqué les raisons qui conduisent à demander la suppression de cet article.

Il arrive souvent que des dispositions en apparence généreuses…

M. Christian Paul, rapporteur. La gauche avance masquée, c’est bien connu !

M. Bernard Accoyer. …produisent des effets pervers.

Mme Carrey-Conte tout à l’heure visait très clairement l’écrasement des prix dans tous les domaines, pour les prestations médicales ou chirurgicales comme pour les médicaments et produits de santé. Or, il est presque de règle que le prix soit fonction de la qualité. Vous êtes donc en train, avec cette collectivisation qui, article après article, envahit le PLFSS, d’amener notre système d’assurance maladie à un niveau extrêmement bas.

Un certain nombre de questions se posent d’ores et déjà mais demain, avec ce que vous voulez faire, la situation sera bien pire. Les génériques viendront des pays émergents. Il en ira de même pour les lunettes et un certain nombre de produits de santé. Ce seront autant de chômeurs en plus en France, avec à la clé des régions totalement sinistrées. Avec les mesures que vous prenez, vous êtes en train d’assassiner des petites mutuelles, des compagnies, des cabinets d’assureurs. Nous y reviendrons dans quelques instants à propos du droit d’option pour les frontaliers. Ce faisant, vous allez détruire des dizaines de milliers d’emplois.

Il faut toujours chercher un équilibre entre des dérapages que, bien entendu, nous ne pouvons que condamner et l’accès à l’innovation et aux meilleurs produits que nous souhaitons tous.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n608.

Mme Bérengère Poletti. La création d’un appel d’offres pour les contrats proposés aux personnes éligibles à l’aide à la complémentaire santé est une fausse bonne idée, madame la ministre.

La rédaction de l’article laisse plusieurs questions en suspens. Comment l’appel d’offres va-t-il être mené ? Qui va décider des contrats qui seront choisis ? Quelles garanties seront demandées ? Combien de contrats seront choisis ? En créant des sortes de « contrats dédiés ACS », puisque les bénéficiaires seront obligés d’y avoir recours, on complexifie le système et on stigmatise ces populations, ce qui n’arrangera pas le problème du non-recours de beaucoup de bénéficiaires potentiels à cette aide. Il serait beaucoup plus efficace d’agir sur les garanties des contrats solidaires et responsables afin que l’ACS reste bien une aide à l’acquisition d’une mutuelle choisie par les bénéficiaires plutôt qu’une CMU-C bis pour des publics un peu moins fragiles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements, et tous ceux qui leur sont semblables.

S’il est aujourd’hui nécessaire d’intervenir par la loi, c’est avant tout parce que la labellisation qui avait été adoptée dans le PLFSS pour 2012, c’est-à-dire du temps de la majorité précédente, n’a pas réussi à se mettre en place. C’est pour cela qu’il nous faut agir. Il est en effet urgent de créer un autre instrument de régulation. Le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie l’avait d’ailleurs suggéré. Les assureurs ou mutuelles seront sélectionnés sur la base d’un cahier des charges précis en termes de garanties minimales attendues. Ce sera effectivement, comme l’ont dit plusieurs de mes collègues, notamment Mme Carrey-Conte, un véritable progrès pour les bénéficiaires de ces contrats ACS.

Pour éclairer le débat, je précise qu’il s’agit d’une mise en concurrence, pas d’une procédure de marché public et donc d’un appel d’offres. Il y aura plusieurs niveaux de garanties. Un nombre limité d’opérateurs sera sélectionné – vous aviez parlé d’une quinzaine, madame la ministre, lors de l’annonce de la stratégie nationale de santé, vous nous en reparlerez peut-être. Un cahier des charges précis sera défini par décret. Depuis plusieurs jours, nous nous efforçons de faire comprendre que la loi ne fait pas tout et qu’après le vote du PLFSS, le ministère de la santé devra encore accomplir un travail immense dans le domaine réglementaire. Le décret viendra donc préciser la procédure. Je vous le dis très franchement : le principe est bon, l’impulsion est nécessaire mais les détails relèvent des administrations concernées. L’objet de cette mesure est simple : améliorer la qualité des contrats des complémentaires santé pour les bénéficiaires de l’ACS.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable, bien évidemment. L’objet de cet article, on l’a souligné, est de garantir à nos concitoyens une meilleure couverture complémentaire. C’est pour nous un objectif politique important. Le relèvement du seuil de la CMU et de l’ACS au 1er juillet dernier a constitué une première réponse. Cela concerne, je tiens à le rappeler, 750 000 Français, ce qui n’est pas rien, avec un montant d’aide significatif pour les bénéficiaires de l’ACS, de l’ordre de 500 euros pour une personne âgée de plus de 60 ans.

Les contrats solidaires et responsables doivent contribuer à une meilleure couverture, mais aussi à la régulation de l’offre de soins, nous aurons l’occasion d’y revenir. C’est ainsi qu’entreront en vigueur de nouvelles règles au 1er janvier 2015, qui ne s’appliqueront pas et n’auront pas d’impact sur les contrats en cours. Il y aura donc une redéfinition des contrats. Pour ce qui est de l’appel d’offres pour les contrats ACS, selon une recommandation du Haut conseil à l’assurance maladie, il sera lancé à partir d’un cahier des charges détaillé qui sera élaboré par voie de décret. La procédure sera suivie directement par l’État, avec l’appui technique du Fonds CMU.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je voudrais réagir sur le principe du recours à la mise en concurrence, dont les règles seront fixées par décret.

Vous avez évoqué, madame la ministre, un cahier des charges. Dans cette affaire, il faut être pragmatique : on sait très bien que l’on peut, au travers d’un cahier des charges, organiser de manière indirecte la concurrence au profit d’un ou plusieurs acteurs particuliers, et sans forcément le vouloir, d’ailleurs. Cela peut poser problème.

Vos arguments soulèvent plusieurs interrogations. D’abord, est-il possible, compte tenu du petit nombre d’acteurs existants, de s’assurer que les règles d’impartialité et de prévention des conflits d’intérêts seront parfaitement respectées ? Ensuite, n’y a-t-il pas un risque que les modalités de mise en concurrence qui vont être établies en fonction du cahier des charges puissent, dans le futur, amener les juges à rouvrir le débat sur la légalité d’une désignation ? Vous en avez fait les frais avec la loi relative à la sécurisation de l’emploi, le Conseil constitutionnel est intervenu sur le sujet.

Mme Claude Greff et M. Bernard Accoyer. Eh oui !

Mme Véronique Louwagie. N’aurait-il pas été plus judicieux, finalement, de travailler avec les mutuelles pour bâtir des offres adaptées aux bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé, pour améliorer l’accès à une mutuelle des personnes qui n’en ont pas, c’est aussi un sujet essentiel, et pour faciliter l’adéquation du contrat aux besoins et à la situation des citoyens ? Cela aurait beaucoup mieux répondu aux enjeux de la généralisation de la complémentaire santé.

(Les amendements identiques nos 337 et 608 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n686.

Mme Bérengère Poletti. Il est défendu

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Défavorable, pour les raisons exposées précédemment.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

(L’amendement n686 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n437.

M. Bernard Accoyer. Il s’agit d’un amendement de repli. Nous redoutons que, par petites touches, la collectivisation de notre système de soins…

M. Christian Paul, rapporteur. Vous voulez dire la soviétisation !

M. Bernard Accoyer. …aboutisse à faire baisser de plus en plus sa qualité. Comme cela s’est produit dans tous les pays qui ont connu une telle évolution, on risque d’aboutir à un système hors assurance, qui d’ailleurs se développe déjà. En effet, lorsque l’on est malade, que l’on a besoin de soins, de lunettes, de prothèses et autres dispositifs médicaux, l’on cherche pour soi et pour les siens les meilleures garanties possibles.

Puisque vous persistez à conserver la procédure d’appel d’offres qui nous paraît porteuse de grands dangers, nous vous proposons un amendement de repli que vous pourriez retenir dans la mesure où il conserve une partie de votre dispositif, dont nous ne nions pas l’intérêt.

Nous vous proposons donc de mettre en place un dispositif de labellisation, sur le modèle de l’une des deux procédures offertes aux collectivités territoriales par l’article 38 de la loi du 3 août 2009 pour l’organisation de la protection de leurs agents. Cette procédure de labellisation se substituerait ainsi à la procédure de sélection dont nous redoutons les conséquences. Un tel dispositif, d’une part, garantirait aux assurés le rapport qualité-prix attendu de la couverture, et d’autre part permettrait de renforcer réellement l’attractivité de l’aide à la complémentaire santé et de simplifier les démarches des personnes susceptibles d’en bénéficier sans rompre l’égalité entre les organismes assureurs.

Madame la ministre, malgré les réticences que vous pouvez avoir, et je le comprends, à l’égard des propositions que je vous fais, je vous demande d’étudier très attentivement celle-ci, autour de laquelle nous pourrions tous nous retrouver.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. Bernard Accoyer et Mme Bérengère Poletti. Pour quelles raisons ?

M. Christian Paul, rapporteur. Pour les mêmes que précédemment !

(L’amendement n437 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur, pour soutenir l’amendement n148.

M. Christian Paul, rapporteur. Il s’agit simplement, mais c’est important, d’ajouter dans l’article une mention sur les prestations liées à la prévention.

(L’amendement n148, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur, pour soutenir l’amendement n805.

M. Christian Paul, rapporteur. Cet amendement prolonge une discussion que nous avons eue en commission à propos du plafonnement de la prise en charge des dépassements d’honoraires dans le cadre des contrats responsables et solidaires des complémentaires santé.

Rappelons à cette occasion que le présent article est une pièce maîtresse du PLFSS. Le Gouvernement a souhaité, et nous soutenons fermement cette idée, avancer dans la définition de ce qu’est un contrat responsable et solidaire pour les complémentaires santé. La question cruciale est bien sûr d’éviter que les complémentaires santé ne solvabilisent durablement les dépassements d’honoraires, qui peuvent représenter jusqu’à cinq à six fois le prix habituel. Il existe même parfois des remboursements aux frais réels, même si cela ne concerne qu’une très petite minorité de salariés.

Le Gouvernement a souhaité qu’il y ait un fondement législatif au plafonnement des dépassements d’honoraires. Nous avons réfléchi en commission à ce que pourrait être ce plafond. Le présent amendement précise donc les conditions de prise en charge des frais exposés au-delà des tarifs de responsabilité pour certaines dépenses de santé. Il précise que les frais d’optique doivent impérativement faire l’objet d’un niveau minimal de prise en charge et d’un plafond tarifaire. Il plafonne également la prise en charge des dépassements d’honoraires pratiqués par les médecins à hauteur de 100 %. Nous estimons en effet que les contrats responsables, parce qu’ils bénéficient d’une aide fiscale, doivent éviter d’encourager les dépassements excessifs en les solvabilisant.

J’ajoute qu’une prise en charge trop importante aurait pour effet de renchérir inutilement le coût de l’ensemble des contrats complémentaires en santé. Nous sommes attentifs à l’objectif de solidarité évoqué sur tous les bancs, mais la solidarité, ce n’est pas le gaspillage.

Il faut que nous trouvions le bon outil de régulation. Nous pourrons en discuter, madame la ministre. Il ne s’agit pas d’un carcan ou d’un encadrement, mais d’une régulation normale, d’un plafonnement. L’avenant n8 à la convention médicale a fait progresser les choses. Cet amendement marque une étape supplémentaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. L’accès aux soins est une préoccupation constante du Gouvernement depuis son arrivée aux responsabilités. Pour l’améliorer, nous avons pris plusieurs dispositions et engagé diverses démarches. Nous avons d’abord favorisé, avec le pacte territoire-santé, l’installation de professionnels de santé dans les territoires car l’accès aux soins, c’est la garantie de pouvoir se faire soigner partout, où que l’on habite.

Nous avons aussi pris des mesures pour améliorer la couverture des Français, c’est ce dont nous discutons dans le cadre du présent article, à travers le relèvement du seuil de la CMU, de l’ACS et des dispositions concernant les étudiants par exemple.

Enfin, le Gouvernement a engagé dès l’année dernière une bataille pour la régulation des dépassements d’honoraires, en permettant la mise en place d’une négociation conventionnelle. Elle a abouti à la signature de l’avenant n8, qui permet à la fois d’encadrer les dépassements d’honoraires, de sanctionner au besoin ceux qui seraient injustifiés et de les modérer, avec la mise en place d’un contrat d’accès aux soins. Le directeur de la CNAM a annoncé récemment que ce contrat d’accès aux soins, d’ores et déjà signé par 9 000 médecins, serait mis en œuvre avant la fin de l’année.

Pour lutter contre les dépassements d’honoraires, une régulation par le biais des organismes complémentaires est aussi utile. La mise en place de nouveaux critères plus exigeants pour les contrats responsables et solidaires permettra de mieux maîtriser les dépenses de santé et le reste à charge, en permettant une régulation des tarifs. C’est ainsi que nous proposons de définir, d’une part, un panier de soins minimal pour bénéficier du label « responsable et solidaire » et, d’autre part, un plafond de dépenses.

Monsieur le rapporteur, vous souhaitez fixer un seuil au-delà duquel les dépassements d’honoraires ne seraient pas couverts par les contrats responsables et solidaires. Le Gouvernement comprend votre préoccupation et partage votre objectif. C’était le sens des dispositions que je viens de rappeler. Pour autant, à quel niveau faut-il plafonner les dépassements d’honoraires pris en charge par les contrats responsables et solidaires ? La discussion mérite d’être engagée avec les organismes complémentaires eux-mêmes. Des positions diverses se sont exprimées, plus ou moins élevées que le taux de 100 % que vous avez retenu. Il est donc nécessaire de donner sa place à la concertation – je ne parle pas de négociation. Le seuil devra évidemment être en rapport avec ce qui a été négocié dans le cadre de l’avenant n8, c’est une question de cohérence politique. Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Je serai solidaire du rapporteur, quelle que soit sa décision. Mais je veux me faire le porte-voix des médecins de secteur 1 – je rappelle que je ne suis pas médecin – et rappeler ce qui se passe aujourd’hui.

La base de remboursement de l’acte, pour un médecin de secteur 2, est de 23 euros. Le prix moyen de l’acte étant de 41,40 euros, le montant du dépassement moyen est de 18,40 euros. Si un praticien de secteur 2 signe le contrat d’accès aux soins, il garde le tarif de 41,40 euros, et sa base de remboursement passe de 23 euros à 28 euros. Ces 5 euros sont payés à la fois par le régime complémentaire et par le régime obligatoire, c’est-à-dire en tous les cas par les cotisations du patient.

L’effort du médecin, dans ce cas, est nul. L’effort du régime obligatoire est réel, avec une augmentation de la prise en charge des cotisations sociales pour des actes au tarif opposable, notamment pour des cas de tiers payant dans le cadre de l’AME, de la CMU ou d’accidents du travail, bref, ce que fait naturellement un médecin de secteur 1. On aura donc amélioré les revenus des médecins de secteur 2 par diminution de leurs cotisations, sans leur avoir demandé aucun effort.

Voilà la réalité. Je m’appuie sur des chiffres connus de tous. Je ne voudrais donc pas, et c’est en cela que je soutiens l’amendement du rapporteur, que l’on accompagne l’augmentation des tarifs parce que des médecins sortiraient du contrat d’accès aux soins, puis y entreraient à nouveau après avoir augmenté leurs tarifs. Il s’agit de l’accès aux soins pour tous. C’est une réalité pour les médecins de secteur 1, qui vont finir, je vous le dis, par être découragés à l’idée de soigner les gens en secteur 1.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Paul, rapporteur. Nous avons bien entendu votre souhait, madame la ministre, de disposer d’une base législative pour réguler les contrats des complémentaires santé et plafonner la prise en charge des dépassements d’honoraires, suivant une méthode privilégiant la concertation.

Si nous avons fixé un plafond à 100 %, c’est que nous souhaitons décrocher du taux de 150 %, qui constitue le seuil de l’abus, à partir duquel des sanctions sont possibles. L’idée qu’un contrat responsable pourrait aller jusqu’à 150 % heurte les parlementaires de la majorité.

Vous nous demandez de mener cette entreprise dans un climat de concertation. Nous y sommes sensibles. Dans un souci de dialogue avec le Gouvernement, nous proposons, avec l’amendement n839 qui va venir, de laisser au pouvoir réglementaire, par décret en Conseil d’État, la possibilité de plafonner la prise en charge des dépassements d’honoraires pratiqués par les médecins. Je propose donc de retirer l’amendement précédent, au profit de l’amendement n839. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Accoyer. C’était une introduction laborieuse !

M. Christian Paul, rapporteur. Un peu de pédagogie ne fait pas de mal.

(L’amendement n805 est retiré.)

M. le président. L’amendement n839 est donc défendu. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis favorable. Je voudrais faire quelques observations. Depuis la signature de l’avenant n8, qui permet d’encadrer les dépassements d’honoraires, nous constatons une baisse des tarifs des honoraires médicaux. Nous avons donc d’ores et déjà obtenu une diminution des dépassements.

Depuis la signature de cet accord, les personnes éligibles à l’ACS peuvent consulter le professionnel de santé de leur choix, au tarif de la sécurité sociale, même s’il s’agit d’un médecin de secteur 2 et même s’il n’est pas entré dans le dispositif du contrat d’accès aux soins.

Je voudrais rassurer Mme la présidente de la commission des affaires sociales. Les professionnels de santé doivent assurer une stabilité de leurs tarifs pour pouvoir bénéficier des dispositions du contrat. Ils ne peuvent sortir du dispositif et y entrer à nouveau. Au moment où ils y entrent, ils ne peuvent augmenter les honoraires qu’ils pratiquaient auparavant pour atteindre la limite maximale du contrat. Cette interrogation s’était fait jour et il m’a semblé la retrouver dans vos propos, madame la présidente.

Enfin, le Gouvernement a été très attentif à la situation des médecins de secteur 1, puisque dans le cadre de cet accord, leurs actes sont valorisés, notamment à travers la création du forfait pour les médecins traitants.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Introduire par amendement des dispositions aussi importantes, de nature à faire vaciller les fondements même de la médecine à la française et de notre système d’assurance maladie, n’est pas du bon travail. M. Paul, qui a une certaine obsession à tout mettre sous contrainte, à tout encadrer, multiplie les initiatives de cette nature. Si je comprends bien, l’amendement n839 vient d’être déposé. Quand l’a-t-il été exactement, monsieur le président ? (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. le président. Hier, à 18 h 30.

M. Christian Paul, rapporteur. Cela fait vingt-deux heures.

M. Bernard Accoyer. Et pourtant, nous travaillons depuis une semaine ici ! Mais c’était la même chose en commission : nous n’avions aucun document écrit, monsieur le rapporteur, et vous vous en êtes accommodé ! Mme la présidente a protesté mais nous avons tout de même dû écouter cinq ministres et vingt-deux collaborateurs qui les accompagnaient sans un seul document écrit ! Vous conviendrez que pour un sujet aussi important que la maîtrise des dépenses publiques, cela pose problème.

M. Lionel Tardy. Ce n’est vraiment pas bien !

M. Bernard Accoyer. Nous travaillons dans des conditions indignes, monsieur le président, et je vous prie de bien vouloir le faire savoir à M. le président de l’Assemblée nationale.

Cet amendement, s’il était adopté, conduirait à la remise en cause de filières industrielles entières, dans l’optique notamment mais pas seulement. Vous prenez des mesures dans la plus complète improvisation, sans vous appuyer sur la moindre étude d’impact concernant les conséquences que votre idéologie militante et dogmatique aura sur l’emploi, la qualité des produits et les délocalisations que vous êtes en train même de décider, monsieur Paul. Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas votre amendement.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur Accoyer, il est insupportable que vous remettiez sans cesse en cause l’organisation de cette commission.

M. Bernard Accoyer. C’est de l’improvisation !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. La commission fonctionne bien. Il est vrai que le démarrage a été difficile sur ce PLFSS, et je l’ai fait savoir. En revanche, aujourd’hui, il suffirait d’être un peu attentif pour constater que tout fonctionne correctement. Vous vous vantez d’être tout le temps dans l’hémicycle mais la plupart de nos collègues consultent le site Eloi, qui les informe de l’arrivée des nouveaux amendements. Faites donc comme eux, monsieur Accoyer !

M. Bernard Accoyer. À 18 heures hier, nous étions dans l’hémicycle ! Pas vous !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Nous ne travaillons pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre, monsieur Accoyer, voyons ! Je serais vous, j’arrêterais là cette course folle pour remettre en cause le travail de notre commission. Quand il y a des problèmes, je les dénonce, mais quand tout va bien, je le dis également !

M. Étienne Blanc. Mais cela ne va jamais !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Paul, rapporteur. Les vingt-deux heures qui se sont écoulées depuis le dépôt de cet amendement auraient dû largement suffire à M. Accoyer pour en prendre connaissance et s’apercevoir qu’il est très proche du texte initial du PLFSS, déposé il y a quinze jours, lui-même conforme aux intentions du Gouvernement, étude d’impact à l’appui. Il n’y a pas une once d’improvisation dans tout cela, simplement un travail parlementaire de dernière heure qui peut parfois rendre difficile, pour l’opposition, la comparaison des textes successifs. Cet amendement est très proche du texte initial du Gouvernement. Ce débat était nécessaire pour bien préciser les intentions mais pour le reste, il n’y a pas matière à critique, sauf à avoir vraiment envie de polémiquer dans la dernière ligne droite.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.

M. Bernard Accoyer. Sur le fondement de l’article 58. Je suis absolument désolé de prolonger ainsi nos débats mais convenez, madame la ministre, que placés dans des conditions identiques lorsque vous étiez, ce n’est pas si loin, dans l’opposition, vous auriez multiplié les suspensions de séance ! Vous êtes en train de faire basculer à la fois le système de soins et les industries de santé en France, au détour d’un simple amendement.

M. Christian Paul, rapporteur. Vous n’avez pas lu le projet !

M. Bernard Accoyer. Monsieur Paul, si prompt à donner des leçons à tout le monde, je vous rappelle que nous avons siégé hier jusqu’à environ 19 h 45 dans l’hémicycle, que nous avons repris après l’interruption jusqu’à 1 heure du matin et que nous sommes revenus à 9 h 30 ce matin.

M. Christian Paul, rapporteur. Vous savez, il y a des gens qui travaillent dans les usines, à 1 heure du matin ! Pour 1 000 euros par mois !

M. Bernard Accoyer. Vous vous êtes d’ailleurs absenté davantage que les députés de l’opposition, tout comme vous d’ailleurs, madame la présidente, qui n’étiez pas là lorsque nous avons abordé les articles relatifs au médicament ce matin.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. On en reparlera quand vous arrêterez d’être un intermittent de cette commission !

M. Bernard Accoyer. Vous nous faites travailler dans des conditions indignes, sur des questions fondamentales et essentielles, qui tiennent aux industries du médicament et des biens de santé en France ainsi qu’aux emplois qui s’y rattachent, et à l’accès de nos compatriotes à des produits de santé de qualité.

M. Christian Paul, rapporteur. Vous ne nous impressionnez pas, monsieur Accoyer !

M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, reconnaissez vous-même que vous n’avez pas évoqué cette question avec les représentants des professions concernées.

M. Christian Paul, rapporteur. Mais bien sûr que si ! Depuis des mois !

Article 45 (précédemment réservé - suite)

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Monsieur Accoyer, cette idée farfelue selon laquelle il y aurait d’un côté des défenseurs de la médecine et de l’autre des étatistes inconscients n’a aucun sens, ne serait-ce que parce que l’ensemble des médecins libéraux ont tranché, et depuis longtemps. Leurs représentants signent des conventions, l’ensemble des médecins, de secteur 1 et 2, sont attachés au système conventionnel. Ils discutent ensemble, débattent du dispositif. En dehors des quelques ultras que vous semblez représenter parfois, monsieur Accoyer, personne n’y trouve à redire. Lorsque l’on défend la médecine, et je veux croire qu’on la défend des deux côtés de cet hémicycle, quel que soit le secteur d’activité, l’on a simplement pour but de réguler le système pour permettre aux médecins de travailler sereinement et aux patients d’accéder aux soins dans les meilleures conditions. Nous ne sommes pas là pour opposer les uns aux autres au travers de leurs honoraires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Accoyer. J’ai parlé des dispositifs médicaux, monsieur Sebaoun !

M. le président. La parole est à M. Olivier Véran.

M. Olivier Véran. Chers collègues de l’opposition, si l’on pouvait donner un nom à son ulcère, le mien s’appellerait Bernard.

Mme Bérengère Poletti. Et moi, Parti socialiste !

M. Olivier Véran. Il est très facile d’être de mauvaise foi dans l’opposition, mais vous atteignez des sommets. Vous parlez du recul de la place de la Sécurité sociale, de l’assurance maladie obligatoire dans le remboursement des soins, mais c’est vous qui avez instauré un système de médecine à deux vitesses, c’est vous qui avez déclaré, voici cinq ans, que le marché de la santé était ouvert, que tout le monde pouvait y venir, que c’était open bar ! C’est vous qui avez créé le secteur 2, c’est vous qui n’avez pas augmenté suffisamment la rémunération des actes à tarif opposable et c’est vous qui voulez nous faire croire que nous opposons les médecins de secteur 1 et de secteur 2 et que nous faisons la chasse aux libéraux !

De quoi sommes-nous en train de parler ? Des dépassements d’honoraires excessifs, de ceux que vous ne pratiquez même pas vous-même, monsieur Accoyer ! Et quand on vous dit qu’on veut donner la place à la concertation des acteurs, mutualistes ou médecins libéraux, pour définir collectivement la manière dont les soins pourront être pris en charge dans le cadre des contrats responsables, vous criez au scandale et vous nous accusez de bafouer la démocratie ! Voter contre cet amendement signifierait que vous vous portez en faux contre l’idée même de la concertation des professionnels. Je reconnais que cela fait quatre jours que nous sommes tous cloîtrés ici….

M. Christian Paul, rapporteur. Quatre jours et quatre nuits.

M. Olivier Véran. …pour discuter de ce texte très important et que cela peut taper sur les nerfs, mais de grâce, un peu de bonne foi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christian Paul, rapporteur. Très bien !

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour un rappel au règlement.

Mme Bérengère Poletti. Nos collègues font des remarques déplacées et je sens une certaine nervosité ici. Je constate que les débats ne se déroulent pas dans la sérénité. Aussi vous demanderai-je, au nom de l’article 58, de suspendre la séance un quart d’heure. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

(La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)

Article 45 (précédemment réservé - suite)

(L’amendement n839 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n361.

M. Bernard Accoyer. Il est défendu.

(L’amendement n361, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement rédactionnel de M. Christian Paul, n669.

(L’amendement n669, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 45, amendé, est adopté.)

Après l’article 45 (amendements précédemment réservés)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 45.

La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n184.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à instituer au profit de l’assurance maladie une contribution sur les mutuelles et unions, assise sur les dépenses engagées au cours de l’année civile précédente pour des opérations de marketing et sponsoring.

Il s’appuie sur les recommandations du rapporteur pour l’équilibre et les recettes Gérard Bapt qui, à propos d’un amendement visant à rendre d’application directe l’article 10 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 qui prévoyait la communication annuelle aux assurés des frais de gestion des organismes complémentaires selon des modalités précisées par un arrêté qui n’a jamais été pris, affirmait : « Il reste que les frais de gestion des organismes complémentaires sont bien plus importants que ceux de la Sécurité sociale et que nous sommes tous d’accord pour vouloir en accroître la transparence. Il serait bon de connaître le montant des frais de marketing organisme par organisme : on pourrait certainement faire des économies dans ce domaine. »

Compte tenu de la situation des finances sociales, il n’est pas légitime que certains soient exonérés de participer aux efforts collectifs pour le rétablissement des sociaux. Cet amendement vise à mettre en œuvre cette excellente idée du rapporteur.

(L’amendement n184, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n463 rectifié.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à interdire les dépassements d’honoraires, qui constituent aujourd’hui un obstacle majeur à l’accès aux soins pour nos concitoyens. L’observatoire citoyen des restes à charge en santé fournit des chiffres édifiants. Sur 40 milliards d’euros d’honoraires versés aux professionnels de santé exerçant à titre libéral en 2012, plus de 7 sont imputables aux seuls dépassements d’honoraires. Les médecins spécialistes établis en secteur 2 totalisent 82 % de ces dépassements.

Pour endiguer ce phénomène, le Gouvernement a imaginé le dispositif du contrat d’accès aux soins, mais celui-ci risque de s’avérer inopérant et coûteux. En effet, les médecins signataires s’engagent à ne pas pratiquer de dépassement pour les bénéficiaires de la CMU complémentaire ou de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé et à ne pas aller au-delà d’un taux moyen de dépassement de 100 % du tarif opposable. Comme ce taux est une moyenne, ils pourront cependant compenser l’absence de dépassement pour les bénéficiaires de la CMU ou de l’ACS en faisant payer à leurs autres patients des dépassements supérieurs à ce plafond.

Ce dispositif sera très onéreux, puisqu’il prévoit une importante participation de l’assurance maladie au financement des cotisations sociales des médecins signataires. Plutôt que de mettre en place un tel dispositif, bancal et peu efficace, nous proposons de supprimer les dépassements d’honoraires, mesure qui doit bien sûr s’accompagner d’une révision, voire d’une revalorisation claire et précise de certains actes médicaux qui le méritent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Je partage avec Mme Fraysse l’idée que ce qui reste à la charge des patients est l’une des préoccupations essentielles des politiques de santé et d’assurance maladie. Le Gouvernement a choisi dès l’année dernière de privilégier la méthode conventionnelle. Par ailleurs, tout un ensemble de dispositifs parviennent maintenant à maturité : la garantie du tarif opposable pour les plus modestes, en particulier les bénéficiaires de l’ACS, la création du contrat d’accès aux soins, la sanction des pratiques tarifaires excessives, le plafonnement des dépassements, auparavant solvabilisés par les contrats responsables.

Nous travaillons également avec M. Sebaoun à une proposition de loi du groupe socialiste, à laquelle je suis sûr que vous apporterez votre soutien, visant à mieux encadrer l’exercice libéral à l’hôpital public, notamment pour ce qui concerne ces dépassements d’honoraires. En clair, il existe aujourd’hui une batterie d’outils destinés à diminuer le reste à charge, bien que le combat soit loin d’être terminé – ce sera même l’un des fils directeurs de la législature en matière de santé.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis pour les mêmes raisons.

(L’amendement n463 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n793.

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement invite les partenaires conventionnels à engager une négociation pour définir les tarifs de l’optique au profit des bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé, sur le modèle du dispositif existant pour la CMU complémentaire. Si cette négociation ne devait pas aboutir, il va de soi que le Gouvernement prendrait ses responsabilités, comme c’est le cas pour toutes les négociations conventionnelles.

On constate en effet que la dépense en optique est plus chère en France que dans les pays voisins. Elle est très élevée en particulier pour les personnes âgées qui, bien sûr, ont davantage besoin de lunettes que le reste de la population et qui ont souvent des revenus plus faibles. La dépense par habitant en France est de 88 euros par an, alors qu’elle n’est que de 54 euros par an en Allemagne, où la filière optique ne se porte pas mal, et de 30 euros en Espagne.

Nous constatons également que les personnes bénéficiant du soutien de la CMU ont un bon accès à l’optique, car la CMU est une bonne complémentaire santé qui assure une prise en charge satisfaisante de l’optique. En revanche, l’ACS n’est pas suffisante. C’est pourquoi nous souhaitons réguler les contrats proposés, et permettre une prise en charge aussi satisfaisante que celle de la CMU. Concrètement, 17 % des bénéficiaires de la CMU ont un bon équipement optique, contre 11 % seulement des bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé.

C’est une priorité du Gouvernement que de favoriser un accès aux soins de meilleure qualité en matière d’optique. Cet amendement s’inscrit dans le cadre d’une politique plus vaste, qui consistera notamment à permettre aux personnes à faibles revenus, dont les personnes âgées, de bénéficier de meilleurs remboursements. Cette mesure doit concerner tous les Français. Je réfléchis particulièrement à des mesures spécifiques pour l’équipement des enfants à l’âge crucial de l’apprentissage de la lecture, où la qualité de la prise en charge est naturellement un sujet de préoccupation. Nous aurons l’occasion d’en débattre de nouveau. À ce stade, cet amendement est un premier engagement du Gouvernement à garantir un bon accès en matière d’optique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Avis très favorable.

(L’amendement n793 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n428.

M. Martial Saddier. Il est défendu.

(L’amendement n428, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, rapporteur, pour soutenir l’amendement n150.

M. Christian Paul, rapporteur. Cet amendement est présenté par des membres du groupe SRC, mais Mme Massonneau et M. Roumegas s’y sont associés. Ils l’ont également défendu en commission, laquelle l’a approuvé. Il s’agit de maintenir un droit ouvert à l’aide à la complémentaire santé pour les bénéficiaires du minimum vieillesse. Cela participe de notre fervente détermination à mieux organiser l’accès aux soins pour les plus modestes, en l’occurrence pour les personnes âgées.

L’amendement vise donc à améliorer le recours à l’ACS pour les personnes âgées en situation de précarité en automatisant le renouvellement de leurs droits. C’est une proposition importante qui figurait d’ailleurs dans le très précieux rapport de la sénatrice Aline Archimbaud sur l’accès aux soins des plus précaires. Je vous propose donc de l’approuver.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement y est très favorable et lève le gage.

(L’amendement n150, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n510.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à ouvrir la possibilité pour l’assurance maladie obligatoire de proposer également une assurance maladie complémentaire. En effet, nous considérons que l’assurance maladie est plus universelle et égalitaire que les assureurs privés, puisqu’elle ne sélectionne pas ses assurés en fonction de leur état de santé ou, ce qui revient au même, de leur âge. Elle est aussi mieux gérée que les assurances complémentaires puisque, pour 100 euros de prestations versées, ses frais de gestion se limitent à 5,40 euros contre 24,40 euros en moyenne pour les complémentaires du secteur privé.

Nous demandons donc un rapport sur le sujet, qui vise en fait à engager la réflexion. Nous souhaitons mettre en débat la possibilité d’étendre l’expérience de la CMU complémentaire en créant une sorte de Sécurité sociale complémentaire, la Sécu-C, qui, par effet collatéral, ne manquerait pas d’inciter les complémentaires santé à modérer leurs tarifs.

M. le rapporteur a justifié le rejet de cet amendement en commission en proposant que se tienne à l’Assemblée nationale une table ronde sur le sujet, et en indiquant qu’une évolution aussi importante nécessite des travaux préparatoires, ce dont je conviens tout à fait. C’est très exactement l’objet de ma proposition, qui n’est naturellement pas du tout incompatible avec la tenue de cette table ronde à laquelle je participerai avec beaucoup d’intérêt.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. La position de la commission n’a pas varié. Nous avons en effet le souci, au cours de cette législature, de bien asseoir et même de rebâtir les fondements sur lesquels repose la protection des Français contre la maladie : la Sécurité sociale et l’assurance maladie d’une part, l’ensemble des complémentaires d’autre part et enfin les rapports entre les deux et leurs rôles respectifs. Un vaste débat public est en cours depuis plusieurs mois sur cette question essentielle. Il est vrai que le reste à charge pour les patients demeure important dans de nombreux domaines. Il faut tout à la fois lancer la reconquête sélective des domaines d’intervention que l’assurance maladie obligatoire n’avait pas suffisamment pris en compte au cours des dernières années, et aussi mieux réguler les complémentaires santé, sur lesquelles nos débats de l’après-midi ont prouvé que nous pouvions progresser.

Tels sont les deux piliers de l’action à mener. Il faut en effet y réfléchir et nous vous proposerons bientôt, avec la présidente de la commission, un échéancier de travail à cet effet. Voilà pourquoi je maintiens l’avis défavorable de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. La réflexion est toujours utile, madame Fraysse. Le rapporteur a indiqué qu’elle se poursuivrait dans le cadre d’un débat organisé à l’Assemblée nationale. Nous venons de recevoir le rapport du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, qui constitue une étape importante de la réflexion. À ce stade, il ne me paraît pas nécessaire d’aller au-delà, d’où un avis défavorable.

(L’amendement n510 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n661.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à obtenir du Gouvernement un rapport d’information pour évaluer le coût et les bénéfices financiers mais aussi, j’insiste, sociaux d’une élévation du plafond de ressources de la CMU complémentaire. Les plafonds mensuels de l’ASPA et de l’AAH s’établissent respectivement à 787,26 et 776,59 euros, soit 71 et 60 euros au-dessus du plafond de ressources de la CMU-C. Tous cela reste en-deçà du seuil de pauvreté, qui est de 964 euros.

Il y a une injustice à ne pas octroyer la CMU-C aux bénéficiaires de ces minima sociaux, car après avoir payé leur complémentaire, pour ceux qui le peuvent, leur reste à vivre est équivalent ou à peine supérieur à celui des bénéficiaires de la CMU-C. C’est d’ailleurs une source de situations inextricables, le bénéfice de l’AAH faisant suite à l’aggravation d’un handicap et se traduisant par une exclusion du bénéfice de la CMU-C, ce qui est un comble.

Une telle mesure entraînerait des bénéfices sociaux puisque d’après de nombreuses études, le recours à la CMU-C génère une économie de 1 000 euros par an et par foyer, et de 300 euros par an pour le recours à l’ACS, montants qu’il faut rapprocher des 435 euros par bénéficiaire de la CMU-C dépensés chaque année en moyenne.

Pour des raisons de coût, nous ne pouvions évidemment pas proposer directement l’adoption de cette mesure de justice, mais au moins le Gouvernement pourrait-il l’évaluer pour que nous statuions l’an prochain.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Je conviens volontiers, monsieur Roumegas, que les effets de seuil ont un caractère toujours injuste et parfois même détestable. Pour mémoire, les plafonds de la CMU complémentaire et de l’ACS ont été augmentés cette année de 7 %, ce qui a bénéficié à 750 000 Français. Les bénéficiaires de l’AAH et de l’ASPA ont aujourd’hui droit à l’acquisition d’une complémentaire santé, à hauteur de 500 euros pour les personnes âgées de plus de 60 ans. Si les bénéficiaires de l’AAH sont au-dessus du plafond de revenus de la CMU-C, c’est bien parce que cette allocation a été revalorisée de 25 %.

Nous n’agissons naturellement pas aujourd’hui pour solde de tout compte : il faudra procéder par étapes tout au long de la législature. À ce stade, toutefois, la commission n’a pas accepté cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous avons eu ce débat de fond dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté à l’occasion de l’examen de plusieurs dispositions facilitant l’accès aux soins. Quant au présent amendement, il est déjà satisfait par l’article 27 de la loi de sécurisation du marché de l’emploi, transposant l’ANI, qui prévoit d’ores et déjà la remise d’un tel rapport. Je vous propose donc de retirer votre amendement, sans quoi j’y serai défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. J’accepte la promesse de Mme la ministre qu’une réponse soit apportée dans ce rapport présenté au titre de l’ANI.

(L’amendement n661 est retiré.)

Article 46 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Cet article concerne les droits aux prestations en espèces des travailleurs non salariés. Je voudrais m’exprimer sur les travailleurs français transfrontaliers qui travaillent en Suisse, et je le fais au nom de plusieurs collègues d’un département frontalier – Mmes Virginie Duby-Muller et Sophie Dion et MM. Lionel Tardy, Martial Saddier et Marc Francina – mais aussi au nom de M. Etienne Blanc, ici présent, et de Mme Annie Genevard, qui préside un collectif important sur cette question.

Les travailleurs frontaliers ont longtemps dû chercher eux-mêmes une assurance santé. Ils ont trouvé une réponse dans des assurances privées il y a plusieurs dizaines d’années, car personne ne s’occupait d’eux.

Lorsque les accords bilatéraux sont intervenus, c’est M. Moscovici, sous la pression de Jacques Chirac, alors Président de la République, qui a instauré un droit d’option permettant de choisir entre l’assurance maladie suisse, l’assurance maladie obligatoire française et une assurance privée.

Le législateur a prorogé ce droit d’option, et ce, jusqu’au mois de mai 2014. C’est de cette échéance que nous devons parler. Elle concerne 150 000 travailleurs frontaliers français qui travaillent en Suisse, et dont une bonne partie serait au chômage s’ils n’étaient pas allés, laissant leur famille et leur domicile, venant de toute la France, et parfois de plus loin, chercher un travail dans ce pays.

Ils travaillent dans des conditions difficiles, dans un pays extérieur à l’Union européenne, avec une durée de travail hebdomadaire qui peut dépasser quarante heures, avec seulement quatre semaines de congés payés, dans des conditions précaires, où le licenciement peut intervenir du jour au lendemain, et avec un régime de pension qui n’a rien à voir avec celui que nous connaissons en France.

Si ce droit d’option était supprimé, 95 % de ces 150 000 familles seraient concernées. Non seulement leurs cotisations augmenteraient de 100 % alors qu’elles apportent une contribution à la richesse nationale, mais en outre, leur fiscalité va être revue.

Une grande partie d’entre eux ne pourrait plus garder leur emploi en Suisse compte tenu des frais inhérents au logement et aux déplacements. Ils seraient contraints d’abandonner leur emploi et deviendraient chômeurs en France.

M. le président. Je vous remercie.

M. Bernard Accoyer. J’ai fini, monsieur le président.

Aujourd’hui, 150 000 familles sont concernées.

M. le président. Monsieur Accoyer, le temps de parole est le même pour tout le monde.

M. Bernard Accoyer. Je vous demande encore quelques secondes, monsieur le président.

Les conséquences socio-économiques en région frontalière seraient dramatiques. Ce serait une véritable crise économique, avec la multiplication des pertes d’emploi dans les assurances, dans le commerce, dans le bâtiment et dans l’économie tout entière. Et je reviens…

M. le président. Merci !

La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Comme vient de le faire Bernard Accoyer, je voudrais à mon tour défendre la situation particulière des zones transfrontalières, qui sont une véritable richesse pour notre pays et un gisement d’emplois extraordinaire, qui n’existerait pas sans la présence de lieux de travail importants à proximité du territoire national.

Cela représente 150 000 emplois pour la Confédération helvétique et, en supprimant le droit d’option, le Gouvernement et la majorité portent un coup extrêmement dur aux 150 000 familles touchées et aux départements limitrophes.

Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’il s’agit de départements de montagne, reconnus au titre de la loi de 1985 et du traité de l’Union européenne, et que vous y frappez le premier employeur départemental : c’est le cas pour l’Ain et pour la Haute-Savoie.

Je voudrais également tordre le cou à l’idée que l’on se fait du travailleur frontalier. Tous les travailleurs frontaliers, mes chers collègues, n’ont pas un salaire énorme, et les conditions de travail, auxquelles il faut ajouter les trajets, sont difficiles. Très peu de ces travailleurs ont des CDI, et le code du travail, en Suisse, n’est pas le même qu’en France. Nombre d’entre eux sont en CDD et travaillent quarante-cinq heures par semaine, l’âge de la retraite étant fixé à soixante-sept ans. Le droit d’option était aussi une contrepartie de ces conditions de travail extrêmement difficiles.

Enfin, je voudrais terminer en évoquant d’autres incidences dont on parle peu. Cela va être une véritable tragédie pour les cabinets d’assurance dans ces départements frontaliers.

Mme la ministre de la santé est également responsable des hôpitaux, notamment des hôpitaux publics. Or les services de santé dans nos départements ne sont pas actuellement en état de recevoir l’ensemble des frontaliers.

S’ajoute à cela la dégressivité qui a été votée hier soir. C’est pourquoi je vous demande, madame la ministre, d’être extrêmement vigilante sur l’incidence que la dégressivité et la suppression du libre choix pourraient avoir sur l’offre de soins dans les départements limitrophes, qui n’est aujourd’hui pas à même de faire face à cette évolution soudaine.

M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc.

M. Étienne Blanc. La décision du Gouvernement de mettre un terme au libre choix est significative, et emblématique de l’ignorance – qui ne date pas d’aujourd’hui – de la situation très spécifique et particulière des zones frontières.

En prenant cette décision funeste, vous posez plusieurs problèmes – qui ont été très bien exposés par mes collègues.

Le premier est celui d’une région frontalière qui vit au rythme de la Suisse. En France, désormais, 400 000 travailleurs frontaliers quittent, tous les matins, le territoire national pour aller travailler dans un pays voisin, dont 150 000 en Suisse. Je citerai l’exemple de la commune de Divonne-les-Bains : sur 8 500 habitants, 2 000 travaillent dans des entreprises en Suisse, 500 à 600 dans des organisations internationales. L’impact est très important dans le domaine de l’emploi et de l’économie, mais il l’est plus encore pour les familles.

Un deuxième problème est celui des personnes qui suivent des traitements de longue durée en oncologie dans les hôpitaux genevois. Vous leur annoncez qu’à partir du 1er juin ils ne seront plus assurés. Ils n’ont aucune certitude, aucune garantie quant à leur avenir. Nous avons reçu à ce sujet des fax et des lettres très inquiétants.

Enfin, j’appelle votre attention, madame la ministre, sur le fait que, dans nos régions, les loyers sont très élevés et que nous peinons, pour cette raison, à attirer des médecins généralistes. Or, vous allez faire revenir à la Sécurité sociale des milliers de personnes qui n’ont pas de médecin traitant.

Dans le pays de Gex, par exemple, où nous manquons cruellement de généralistes, comment cela va-t-il se passer ? Cette décision hâtive pose des problèmes majeurs et induit des conséquences extrêmement lourdes. Un report serait particulièrement bienvenu.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir les amendements nos 684 et 151.

M. Christian Paul, rapporteur. Ce sont des amendements rédactionnels.

(Les amendements nos 684 et 151, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 46, amendé, est adopté.)

Après l’article 46 (amendements précédemment réservés)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 420 rectifié, 529, 532 et 558, portant articles additionnels après l’article 46, et pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements n°s 529, 532 et 558 sont identiques.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n420 rectifié.

M. Lionel Tardy. Chers collègues, vous me permettrez d’excuser l’absence de Virginie Duby-Muller, députée de Haute-Savoie, qui compte plus de 45 000 frontaliers dans sa circonscription et qui, au nom des parlementaires de nos départements, a porté ce dossier à Bercy et à l’Élysée. Elle est actuellement retenue dans sa circonscription par la visite de François Lamy, ministre délégué chargé de la ville.

Au moment où certains élus quittent le PS, déçus par la politique gouvernementale et les atermoiements du Président Hollande, vous observerez, mes chers collègues, que, dans l’opposition, nous savons respecter l’accueil républicain. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mon amendement vise à prolonger le droit d’option jusqu’au 1er juin 2017. Si vous refusez de le prolonger de six ans, comme le proposent mes collègues, j’espère que vous aurez au moins le courage politique de régler cette question pour la période couvrant la fin du quinquennat.

Car c’est bien une question de volonté. Vous vous retranchez derrière une éventuelle censure du Conseil constitutionnel, mais si vous vouliez rendre le droit d’option définitif, vous le pourriez.

Je ne reviendrai pas sur les arguments nombreux, déjà développés par mes collègues, qui montrent que la suppression de cette liberté est une ineptie pour un gouvernement censé défendre le pouvoir d’achat des Français. Car les frontaliers sont aussi des Français.

Je me concentrerai ici sur la méthode. À aucun moment, je dis bien « à aucun moment », mes chers collègues, la prorogation du droit d’option n’a été envisagée, malgré les nombreuses interpellations des frontaliers et des parlementaires, qui ont le défaut d’être des parlementaires de l’opposition…

M. Christian Paul, rapporteur. Et la précédente majorité, qu’a-t-elle fait ?

M. Lionel Tardy. Le rapport demandé par la ministre s’interrogeait sur les modalités de la suppression et non sur la suppression elle-même, preuve que cette décision a été entérinée sans concertation.

M. Christian Paul, rapporteur. Elle a été prise par la majorité précédente !

M. Lionel Tardy. En 2006, la majorité avait eu le courage de proroger le dispositif par voie d’amendement. Celui que je propose est construit sur le même modèle et, je le répète, il vous laisse le temps de réfléchir à la façon dont le droit d’option pourrait être rendu définitif ou, en tout cas, de trouver une solution beaucoup plus durable, réfléchie et acceptable que la non-solution qui se dessine.

Par cet amendement, je vous demande, comme mes collègues, de proroger le droit d’option. Un rejet signifierait clairement que vous refusez de prolonger ce dispositif, malgré tous les problèmes que cela va poser. Madame la ministre, j’invite le Gouvernement à prendre ses responsabilités.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n529.

M. Martial Saddier. Dans le droit fil de mon propos sur l’article 46, je défends cet amendement au nom des parlementaires présents, mais également de Marc Francina et de Virginie Duby-Muller, deux de mes collègues qui comptent nombre de frontaliers dans leur circonscription, comme moi, dans le département de la Haute-Savoie. Nous proposons de proroger le droit d’option.

Les travaux menés par le ministère ont montré clairement que la décision était beaucoup trop hâtive, qu’il y avait encore beaucoup trop d’interrogations et qu’on se faisait une fausse idée du statut. Ces travaux dénotent également une absence de connaissance du code du travail de la Confédération helvétique, qui n’a absolument rien à voir avec le code du travail français. Enfin, ils soulignent que des travaux sur la facilitation du transport sont en cours, mais qu’ils ne produiront leurs effets que dans plusieurs années. Cette situation pose aujourd’hui d’énormes problèmes aux travailleurs frontaliers qui doivent rejoindre tous les jours leur lieu de travail.

Enfin, il y a une absence totale d’étude d’impact sur les incidences pour les établissements de santé, publics ou privés, et pour l’offre médicale de proximité, qu’il s’agisse des sages-femmes, des infirmières ou des médecins libéraux.

Que dire, enfin, des cabinets d’assurance, qui n’ont jamais été évoqués dans nos débats ? Il y a aujourd’hui des cabinets qui annoncent leur fermeture et des licenciements, sans parler des frontaliers qui vont probablement perdre leur travail.

L’état actuel du marché du travail et l’organisation de l’offre de soins dans notre pays ne nous permettent pas, mes chers collègues, d’absorber du jour au lendemain l’éventuel retour des frontaliers. Il est impératif, pour notre pays et pour ses départements frontaliers, de proroger le droit d’option, afin de pouvoir continuer à travailler avec les associations de frontaliers, qui ont fait un énorme travail au côté des parlementaires.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n532.

M. Bernard Accoyer. Madame la ministre, vous pouvez comprendre, à travers les interventions de mes collègues, le caractère dramatique que cette décision, en termes…

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Mais qu’avez-vous donc fait pendant dix ans ?

M. Bernard Accoyer. J’entends les hurlements de la présidente de la commission… Je vais vous transmettre, madame la présidente, les lettres et les messages de ceux qui appellent au secours parce qu’ils sont en train de suivre des traitements et qu’ils arrivent à peine à boucler leur budget dans une région où le coût de la vie est extrêmement élevé, les conditions de travail n’étant en rien comparables avec celles que nous connaissons sur le sol français. Il s’agit de familles qui sont toujours à la limite de la rupture, mais qui ne s’arrêtent pas parce que, là-bas, la garantie de l’emploi n’est absolument pas assurée.

C’est pour cette raison qu’il convient de proroger le droit d’option, comme le propose cet amendement qui compte dix-sept signataires, tous députés frontaliers. Car 95 % des frontaliers sont concernés par cette disposition. Il semble impossible de ne pas entendre leur détresse et l’inquiétude légitime qu’ils ressentent face à la crainte de devoir abandonner leur emploi. Je rappelle que, paradoxalement, cela coûte très cher que de travailler en Suisse. Il faut se loger, se déplacer, s’assurer, préparer ses vieux jours.

Cela créerait, de surcroît, une crise économique frontalière sans précédent, tout simplement parce que ces populations qui sont aujourd’hui au travail, se transformeraient en populations au chômage. Une telle situation perturberait gravement tout le fonctionnement de l’économie frontalière qui, aujourd’hui, est encore à l’équilibre, mais, comme partout dans le pays, reste précaire. Madame la ministre, soyez attentive, écoutez nos appels au secours !

Je mentionne également le secteur de l’assurance, qui serait complètement déstabilisé tandis que la hausse des cotisations serait de 100 %, affectant gravement le pouvoir d’achat des frontaliers au moment où, en plus, ils vont subir une hausse considérable de la fiscalité du fait d’autres dispositions adoptées.

Cette prorogation s’impose donc.

M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour soutenir l’amendement n558.

M. Étienne Blanc. Madame la ministre, dans l’argumentation développée par le Gouvernement, il y a deux arguments de droit qui, à nos yeux, ne tiennent pas.

Le premier concerne l’égalité. Vous dites qu’il faut que les travailleurs frontaliers cotisent comme les travailleurs français. Vous allez avoir un véritable problème devant le Conseil constitutionnel, car le droit du travail et les conditions de travail en Suisse ne sont pas du tout les mêmes qu’en France. Vous allez faire cotiser sur des contrats totalement différents au regard de la retraite, du congé de maternité, etc.

Il existera donc des cotisations à taux unique pour des conditions totalement différentes, ce qui représente une véritable rupture d’égalité. En outre, un problème de droit subsiste. En Suisse, accidents du travail et invalidité sont financés par les employeurs. Faudra-t-il cotiser deux fois pour ces deux risques ? Telle est le premier problème de droit qui se pose, et à propos duquel j’aimerais bien vous entendre, madame le ministre. Le second concerne le droit européen, qui autorise la prorogation de la dérogation, contrairement à ce que vous dites. La France s’est engagée à déroger au titre du traité sur la libre circulation des personnes et dans le cadre des accords bilatéraux avec la Confédération helvétique. Elle peut donc le faire car, sauf erreur de ma part, un traité international s’impose à la Constitution.

De fait, une telle dérogation est à nos yeux parfaitement possible et parfaitement admise. Les arguments qui viennent d’être développés sont des arguments percutants, madame la ministre. Votre décision me semble hâtive et ne tient pas suffisamment compte des réalités frontalières locales, qui sont très particulières. Vous ne pouvez pas sourire quand on vous met en garde sur les difficultés qui attendent un certain nombre de familles !

M. Martial Saddier. Tout à fait !

M. Étienne Blanc. C’est la raison pour laquelle je vous demande instamment, madame la ministre, d’examiner notre proposition de dérogation. On peut discuter deux ans de plus avec les compagnies privées, qui proposent aujourd’hui de contribuer à la solidarité. Vous avez en main tous les éléments de droit pour trouver une solution.

M. le président. Sur l’amendement n420 rectifié et sur les amendements identiques nos 529, 532 et 558, je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Je laisserai Mme la ministre préciser le contenu exact de la solution retenue. Tout a été fait pour que le passage au régime général soit favorable aux travailleurs frontaliers, et nous veillerons à ce qu’il le soit.

M. Martial Saddier. Mais non !

M. Christian Paul, rapporteur. Je rappelle également pour mémoire, à l’attention de ceux qui sont encore là cet après-midi, que la prorogation pour sept ans du régime concerné est due au vote de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007 par la précédente majorité.

M. Martial Saddier. Et alors ?

M. Bernard Accoyer et M. Lionel Tardy. On vous demande de faire pareil !

M. Christian Paul, rapporteur. Si le pérenniser était si juste et si facile, vous auriez dû le faire. Vous ne l’avez pas fait, il est donc aisé d’identifier aujourd’hui où sont les responsabilités.

M. Bernard Accoyer. Mais vous, vous pouvez le faire !

M. Christian Paul, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable. Pourquoi en sommes-nous là ? Pourquoi ce fameux droit d’option, dont nous entendons parler depuis quelque temps, existe-t-il ? Parce que les frontaliers, jadis, ne bénéficiaient pas de l’affiliation au régime général.

M. Bernard Accoyer. C’est exactement ce que j’ai dit !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il a donc fallu trouver une solution. Celle-ci a consisté à mettre en place un dispositif transitoire, donc temporaire, visant à permettre aux frontaliers d’accéder, comme tous les citoyens français, au régime général. C’est chose faite. Le régime qui devait expirer en 2007 a été prorogé jusqu’en 2014, le plus longtemps possible. Le gouvernement précédent n’envisageait d’ailleurs pas de revenir là-dessus. En effet, nous sommes soumis à une exigence constitutionnelle, celle de l’égalité de tous sur le territoire au regard des droits sociaux. Nous ne pouvons pas entretenir éternellement des dispositifs dérogatoires. Il faut savoir terminer une transition. Il existe par principe, dans notre pays, une affiliation obligatoire au régime de l’assurance maladie, chacun demeurant libre de s’affilier ou non à un régime complémentaire. Telle est l’architecture de notre système, qui garantit la solidarité de tous.

Une option suppose qu’on ait la possibilité de choisir. La grande force du système français, c’est qu’il ne sélectionne ni les risques ni les patients. Toute personne, quelle qu’elle soit et quels que soient son âge et ses pathologies, peut être prise en charge par l’assurance obligatoire. Comme vous êtes attentifs à ce qui se passe dans vos départements, mesdames et messieurs les députés de l’opposition, je citerai la lettre d’un jeune homme publiée dans La Presse pontissalienne, qui ne peut ignorer le sort des frontaliers. Ce jeune homme n’est pas anonyme, il s’appelle Thomas Dornier-Guibelin. Atteint d’un cancer, il a été exclu de l’assurance privée à laquelle il était affilié en Suisse en raison du coût de ses traitements.

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. Voilà la différence !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il est alors revenu vers l’assurance maladie obligatoire, qui ne lui a pas posé de questions et qui lui a fourni la couverture nécessaire. Nous ne pouvons évidemment pas accepter, ne serait-ce que pour des raisons de solidarité, un système dans lequel les personnes bien portantes ne présentant pas de risque s’assurent auprès d’organismes privés, laissant la prise en charge de ceux qui sont malades ou âgés à la solidarité nationale. Nous ne pouvons pas accepter cela. Pour autant, nous ne sommes pas sourds aux préoccupations exprimées depuis plusieurs mois. Le Gouvernement a mis en place une concertation, alors même que le dispositif devait s’éteindre en 2014. Il en est sorti l’idée de faciliter la transition par la mise en place de taux de cotisation préférentiels avant intégration des frontaliers dans le droit commun.

Concrètement, la cotisation transitoire sera de 6 % la première année, puis de 8 %. Elle sera assise sur le revenu fiscal de référence après application de deux abattements, un premier de 9 534 euros pour frais professionnels et un deuxième de 10 %. Selon un tel schéma, la moitié des frontaliers relevant aujourd’hui d’une assurance privée ne paieront pas un euro de plus et la contribution des autres sera limitée. Enfin, je sais par ailleurs que des inquiétudes relatives à la continuité des soins ont été formulées. J’y ai été très attentive, car il s’agit d’un enjeu tout à fait décisif. Les frontaliers aujourd’hui suivis en Suisse pour des pathologies lourdes pourront continuer leurs traitements dans les mêmes conditions. Il n’est évidemment pas question d’interrompre leurs traitements ou de les obliger à changer de traitement ou de lieu de traitement. La question du basculement de ces assurés est traitée de manière détaillée dans le rapport de l’IGAS et de l’IGF que plusieurs ministres, dont moi-même, ont commandé.

M. Lionel Tardy. À charge !

Mme Marisol Touraine, ministre. Un comité de suivi inter-administrations a été mis en place pour garantir le bon déroulement pratique des opérations et la continuité de l’accès aux soins. Comme vous le voyez, messieurs les députés, …

Mme Véronique Louwagie. Et mesdames !

Mme Marisol Touraine, ministre. … nous sommes très attentifs à la situation des frontaliers suisses dans le cadre de l’assurance maladie obligatoire et du régime général de solidarité en vigueur dans notre pays, qui garantit une prise en charge solidaire et de qualité. Nous sommes évidemment attentifs, comme je l’ai indiqué, à conduire les nécessaires transitions.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Nous vous demandons très simplement et très calmement, monsieur le rapporteur, de faire ce que nous-mêmes avons fait à deux reprises, c’est-à-dire proroger le dispositif. Vous ne pouvez pas exiger d’une majorité de proroger un dispositif deux ou trois ans avant son arrivée à échéance, en l’espèce juin 2014 ! En bonne logique, c’est le dernier PLFSS avant échéance qui proroge. Nous l’avons fait à deux reprises, nous vous demandons simplement et calmement de faire le même exercice au lieu de vous défausser sur d’autres. Et comme vous avez déplacé le débat sur le terrain politique, ce que nous n’avons pas fait, je vous dis calmement que vous ne trouverez pas d’élus de votre bord, ni maire ni conseiller général ni conseiller régional, dans les départements concernés, sur d’autres positions que l’opposition, car tous pourraient tenir exactement le même discours que le nôtre !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Dans un but électoral !

M. Martial Saddier. Ce n’est pas une affaire politique, mais un vrai débat de fond. Je vous remercie de vos réponses, madame la ministre, mais la démonstration juridique de notre collègue Étienne Blanc coupe court à vos arguments. Il existe un support juridique : la loi « montagne » qui a bientôt trente ans et que le Conseil constitutionnel n’a jamais remise en cause. Elle permet aux territoires de montagne de mener des politiques spécifiques dans le cadre des traités européens et constitue le support juridique pour proroger le dispositif dont nous parlons.

Enfin, à propos du volet médical, je vous remercie de votre réponse sur la continuité des soins, mais vous ne nous avez pas répondu. La dégressivité date d’hier soir. Autrement dit, lorsque vous avez commandé un rapport aux inspecteurs généraux, ils ne risquaient pas d’en parler, et pour cause. Nous n’avons donc aucun élément de réponse sur la capacité des soins hospitaliers, public et privé, ni sur l’effet de la dégressivité. Il y a là un argument supplémentaire en faveur de la prorogation du droit d’option, afin de nous donner un peu de temps supplémentaire.

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Tout a été dit, mes chers collègues. Les conditions d’une extinction du droit d’option ne sont pas réunies, comme l’ont souligné mes collègues assis de ce côté-ci de l’hémicycle. Annie Genevard vous avait interrogée à ce sujet, madame la ministre, lors de la séance de questions au Gouvernement du 3 octobre 2012. Vous aviez répondu à l’époque qu’il était trop tôt pour en parler. Virginie Duby-Muller vous a adressé plusieurs questions écrites, dont la plus récente date d’octobre 2012. La réponse, faite au mois de décembre, se contentait de préciser en quoi consistait l’accord du 21 juillet 1999 et d’indiquer que l’extinction du régime dérogatoire nécessitait un travail approfondi avec l’ensemble des acteurs concernés pour préparer la sortie du dispositif. Elle prévoyait de mettre à profit l’année 2013 pour préparer une telle évolution de façon adaptée et équitable pour l’ensemble des parties prenantes, en associant pleinement les représentants des transfrontaliers concernés. Je constate qu’une telle concertation n’a pas eu lieu et je répète que les conditions d’une extinction du droit d’option ne sont pas réunies.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. La décision vous appartient, madame la ministre. Vous avez décidé qu’on ne prorogerait pas le dispositif et nous espérons que vous allez changer d’avis. Vous avez sous-estimé la dimension sociale, économique et, disons-le, dramatique de la fin du droit d’option. Le rapport de l’IGAS que vous évoquez, madame la ministre, était un rapport de commande qui demandait comment sortir du droit d’option, comme vous l’avez d’ailleurs dit tout à l’heure. Certains, dans votre entourage, ont parlé d’égalité. Mais lorsque l’on travaille à l’étranger, dans des conditions précaires, dans un pays où le droit du travail n’a rien à voir avec le nôtre et où ce n’est pas l’employeur qui cotise avec les salariés pour se constituer des droits à l’assurance maladie, contrairement aux grands principes de l’assurance maladie obligatoire française, on ne peut pas parler d’égalité.

Vous avez parlé de sélection des risques, madame le ministre, mais 95 % des salariés sont affiliés à un régime d’assurance privé et beaucoup d’entre eux, qui nous ont écrit, sont atteints d’affections que l’on qualifierait ici de longue durée. Quant à la concertation, nous savons par ceux que vous avez rencontrés que vous n’avez pas trouvé d’accord. Ce que nous vous demandons, par ces amendements, c’est de revoir votre position et de comprendre que tout cela entraînera en France non seulement des drames mais une hausse du chômage, dont j’ai cru comprendre qu’il constituait la priorité absolue du Gouvernement.

M. Étienne Blanc. Évidemment !

M. Bernard Accoyer. Le chômage touchera les travailleurs frontaliers, qui ne pourront plus boucler leur budget et abandonneront leur emploi, et touchera également les entreprises et les commerces des régions frontalières. Toute une économie qui fait vivre 150 000 familles sera sinistrée, sans parler des cabinets d’assureurs dont tous les salariés deviendront également des chômeurs. Pour toutes ces raisons, madame le ministre, nous vous demandons de proroger le dispositif.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Pour ce qui est de la concertation, Mme la ministre a indiqué qu’une mission associant l’IGAS et l’IGF avait été diligentée à l’initiative du Gouvernement. À l’issue d’un travail approfondi, cette mission a rendu un rapport extrêmement détaillé, notamment sur la question des capacités d’accueil médical.

Sur le fond, je n’ai pas grand-chose à ajouter à l’excellente démonstration que vient de faire Mme la ministre, qui illustre toute la différence existant entre un système d’assurance maladie solidaire, répondant aux besoins de santé des patients quels que soient leurs revenus, et un système privé qui, lui, sélectionne les patients. Pour ce qui est de la constitutionnalité, l’argument de la montagne me semble un peu dépassé : tout dépend, en fait, du lieu exact de résidence des personnes concernées. Par ailleurs, je veux faire observer qu’il y a déjà eu une première prorogation, de moindre durée que celle durant laquelle la mesure a été en vigueur sous la présidence de Jacques Chirac – afin d’éviter, justement, d’entraîner un problème de constitutionnalité.

M. Bernard Accoyer. Eh bien, vous n’avez qu’à faire la même chose ! C’est ce que nous demandons !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Enfin, la troisième remarque que je veux faire, c’est que votre amendement est indiscutablement un cavalier et, de ce fait, ne passera pas le filtre du Conseil constitutionnel.

M. Bernard Accoyer. En 2006, ce n’était pas un cavalier !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Mme la ministre a fait, me semble-t-il, des propositions très raisonnables, visant notamment à introduire une certaine progressivité et des abattements, qui respectent les droits des personnes concernées.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n420 rectifié.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants49
Nombre de suffrages exprimés49
Majorité absolue25
Pour l’adoption16
contre33

(L’amendement n420 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 529, 532 et 558.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants51
Nombre de suffrages exprimés51
Majorité absolue26
Pour l’adoption16
contre35

(Les amendements identiques nos 529, 532 et 558 ne sont pas adoptés.)

M. Martial Saddier. C’est dramatique !

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n584.

M. Bernard Accoyer. L’amendement n584 est un amendement de repli faisant suite au rejet de celui que nous avions proposé en vue de proroger à nouveau le droit d’option – un amendement strictement identique à celui de 2006, qui n’était pas un cavalier et n’était pas contraire à la Constitution, puisque le PLFSS avait passé sans problème son examen par le Conseil constitutionnel. Cet amendement de repli propose qu’un rapport portant sur les conséquences sanitaires, sociales et financières de la suppression du droit d’option soit remis au Parlement. Il a été cosigné par Annie Genevard, qui préside un collectif regroupant une cinquantaine de parlementaires concernés par ce problème et portant les arguments que nous avons développés devant vous.

J’insiste à nouveau, madame la ministre de la santé, sur le fait que les capacités de soins du côté français sont totalement insuffisantes pour répondre, dans des conditions de sécurité satisfaisantes, aux demandes de transferts que ces décisions vont entraîner. Vous allez donc devoir encore investir dans les établissements de soins, car en l’état actuel, nous n’avons pas assez de médecins dans les établissements concernés, souvent déjà sollicités au-delà de leurs capacités en raison des transhumances touristiques. Franchement, il n’y a aucune logique économique dans votre décision, qui ne vise qu’à imposer à tout prix votre point de vue. Nous le regrettons profondément, car ce point de vue n’est, à nos yeux, pas celui de la générosité et de la justice.

M. Étienne Blanc. Exactement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable, monsieur le président. La question du suivi de la situation est, certes, une question importante, mais j’ai d’ores et déjà constitué un comité de suivi de la réforme, chargé d’examiner l’évolution de la réforme. Le rapport que vous demandez n’est donc pas nécessaire.

(L’amendement n584 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n152.

M. Christian Paul, rapporteur. L’amendement n152 vise à éclairer notre assemblée sur le droit aux indemnités journalières, et se complète de la demande d’un rapport remis avant le 30 septembre de chaque année.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n152 est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour soutenir l’amendement n654 rectifié.

M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement !

M. le président. J’ai déjà donné la parole à Mme Massonneau, monsieur Accoyer, mais vous l’aurez ensuite.

Vous avez la parole, madame Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. L’amendement n154 rectifié vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, un rapport sur les modalités d’adaptation des conditions d’attribution des indemnités journalières au titre de l’assurance maladie.

Aujourd’hui, pour bénéficier des indemnités journalières de maladie, il faut soit un montant minimal de cotisations au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès, assises sur les rémunérations perçues pendant les six mois civils précédents, soit un minimum de 200 heures de travail salarié ou assimilé au cours des trois mois civils ou 90 jours précédents – ceci pour les indemnités journalières de moins de six mois. Pour celles de plus de six mois, il faut douze mois d’immatriculation en tant qu’assuré social, 800 heures travaillées au cours des douze mois précédents, dont 200 pendant les trois premiers mois, ou un montant minimal de cotisations au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès, assises sur les rémunérations perçues pendant les six premiers mois.

Ce mode de calcul peut se comprendre, du fait de l’ouverture d’une période d’indemnité prédéfinie. Mais il exclut, de fait, les travailleurs qui ne sont pas en mesure de remplir les conditions requises, parfois en raison d’écarts assez faibles. Alors que la situation actuelle du monde du travail est plutôt précaire, le rapport ici demandé visera à explorer les pistes d’une refonte du mode de calcul, en instaurant notamment une proratisation du calcul des indemnités journalières.

M. le président. Vous souhaitiez prendre la parole pour un rappel au règlement, monsieur Accoyer ?

M. Bernard Accoyer. En effet, monsieur le président. Mon rappel au règlement se rapporte à notre rapporteur Gérard Bapt, qui est justement en train de quitter l’hémicycle – mais puisque ce que j’ai à dire le concerne, il aura certainement à cœur de rester encore quelques instants pour écouter ce que j’ai à dire. (M. Gérard Bapt revient s’asseoir au banc de la commission.)



Nous venons d’appendre, par une dépêche d’agence dont je vais vous donner lecture, que Gérard Bapt avait demandé au Gouvernement de revenir, pour les plans d’épargne logement et l’épargne salariale, sur son projet de relever les taux de prélèvement. (« Quel rapport avec le débat ? » sur les bancs du groupe SRC.) Moins de vingt-quatre heures après le débat de trois heures que nous avons eu ici même, et lors duquel nous vous avons expliqué que vous vous apprêtiez à prendre une mesure funeste (« Ce n’est pas un rappel au glement ! » sur les bancs du groupe SRC), voilà que le rapporteur demande au Gouvernement de faire le contraire de ce qu’il a fait voter hier ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je rappelle ce que M. Bapt disait hier dans l’hémicycle, alors que nous lui demandions justement un aménagement spécial concernant les prêts épargne logement : « Avis défavorable. Le présent amendement vise à accroître encore le différentiel non justifié de traitement entre les différents produits de placements (…) Une telle sélectivité serait incompréhensible. »

M. le président. Votre intervention n’est pas un rappel au règlement, monsieur Accoyer, et vous le savez fort bien.

M. Bernard Accoyer. Nous demandons des explications !

M. le président. Je vous prie de me laisser présider, monsieur Accoyer.

La parole est à M. le rapporteur, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n654 rectifié.

M. Christian Paul, rapporteur. Il me semble en effet important que la séance puisse continuer à se dérouler dans des conditions normales, sous la présidence que vous exercez d’une manière remarquable, monsieur le président.

La commission a émis un avis favorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour un rappel un règlement – en espérant que cette fois, ce soit vraiment le cas.

Mme Bérengère Poletti. Monsieur le président, nous passons des heures à débattre dans cet hémicycle, parfois dans des conditions difficiles. La dépêche de l’AFP citée par notre collègue Accoyer constitue la preuve d’un manque de respect caractérisé pour le Parlement…

M. le président. Il ne s’agit pas d’un rappel au règlement, madame Poletti !

(L’amendement n654 rectifié est adopté.)

M. Bernard Accoyer. C’est un scandale !

M. le président. Monsieur Accoyer, je vous demande, pour la dernière fois, de respecter la présidence !

La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Monsieur le président, cette dépêche de l’AFP constitue un incident majeur dans le déroulement de nos débats. Je demande une suspension de séance car j’estime indispensable que nous puissions échanger longuement au sujet de cet incident – pour cela, il nous faudra une suspension d’au moins un quart d’heure.

M. le président. La suspension est de droit. Elle sera d’une minute. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

(La séance, suspendue quelques instants, est reprise à dix-sept heures dix.)

Article 47 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article 47.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 47 comporte deux dispositions relatives au plan d’aide à l’investissement dans le secteur médico-social. Il s’agit, d’une part, de la reconduction pour 2014 du financement de ce plan par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ; d’autre part, de la déconcentration des crédits aux agences régionales de santé. Cela témoigne de l’intention louable de préserver le niveau de la solidarité nationale en la matière, mais également d’un manque de financement chronique de ce secteur et de son impuissance à engager des opérations lourdes.

Je profite de mon intervention pour faire état des difficultés de financement du secteur médico-social, notamment dans le milieu associatif. Selon une étude du centre d’économie sociale du CNRS, 92 % des associations sont touchées. On relève également des difficultés de recrutement face à la diversification des missions et des métiers ainsi qu’à la hausse de l’activité dans le secteur et à la hausse des coûts de fonctionnement. Ces difficultés entraînent une pression en termes de gains de productivité, qui se répercute en premier lieu sur les personnels depuis plusieurs années. Je tenais à attirer l’attention du Gouvernement sur ces situations préoccupantes, qui risquent de porter atteinte à l’accueil des personnes concernées.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. La partie médico-sociale de ce PLFSS est malheureusement bien maigre. Nous avons peu d’occasions de nous exprimer à ce sujet, mais il est vrai que le faible niveau de l’ONDAM médico-social ne laisse qu’une très étroite marge de manœuvre. J’avais déposé un amendement, adopté par la commission des affaires sociales – le rapporteur s’en était, me semble-t-il, remis à la sagesse de la commission.

Cet amendement sage et porteur d’économies visait à donner la possibilité aux établissements et services de procéder à des évaluations externes mutualisées. Ainsi, lorsque le même organisme gère plusieurs établissements, comme un institut médico-éducatif et un service d’éducation spéciale et de soins à domicile, il devrait pouvoir procéder de manière concomitante et ne payer qu’une seule fois – ou à peine plus – les 10 000 à 20 000 euros que coûte chacune de ces évaluations.

Toutefois, la sévérité du filtrage cette année a fait que, malheureusement, notre amendement, considéré comme un cavalier social, n’a pas été retenu. Je souhaite néanmoins entendre Mme la ministre sur notre proposition, source d’économies substantielles.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n765 rectifié.

Mme Martine Pinville, rapporteure. Cet amendement est rédactionnel.

(L’amendement n765 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 47, amendé, est adopté.)

Mme Bérengère Poletti. Et la réponse à ma question ?

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Martine Pinville, rapporteure. Je tenais à dire quelques mots car nous en arrivons à la partie médico-sociale, qui ne comporte qu’un seul article. Nous avons débattu de longues heures sur la partie consacrée à la maladie et sur celle consacrée aux recettes et à l’équilibre général, mais la partie médico-sociale concerne plus spécifiquement les personnes âgées et les personnes handicapées. Je tiens à remercier Mmes les ministres ici présentes pour le travail réalisé par le Gouvernement dans le cadre du Comité interministériel du handicap, qui comporte une programmation d’actions en faveur des personnes handicapées.

De plus, le Premier ministre a annoncé l’élaboration d’une loi d’orientation et de programmation pour l’adaptation de la société au vieillissement, avec un phasage et une lecture très clairs. Ce projet de loi, qui sera présenté dès cette fin d’année ou en début d’année prochaine, concernera dans un premier temps l’allocation personnalisée d’autonomie et l’aide à domicile et, dans un deuxième temps, les restes à charge et les établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes.

Mme la ministre confirmera sans doute l’engagement du Gouvernement. La volonté affichée et le calendrier retenu sont très clairs, et nous aurions aimé pouvoir discuter et proposer davantage, mais ce calendrier nous permettra, dès l’année prochaine, d’adapter la société.

Mme Bérengère Poletti. Avec quels moyens ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Certes, la question des moyens se pose, et nous allons en débattre. Mais nous devons également traiter de l’adaptation des logements, des quartiers, des villes, avec tous les acteurs qui pourront travailler sur ce dossier. C’est pour cela qu’un débat est prévu : les travaux d’élaboration d’un premier projet de loi débuteront très rapidement afin de pouvoir présenter un texte dès l’année prochaine.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie. Je confirme bien évidemment ce qu’a dit Mme la rapporteure concernant l’engagement du Gouvernement et du Premier ministre en personne sur la perspective de la loi relative à l’autonomie, sur sa structure et son agenda.

Dans le domaine spécifique sur lequel vous m’avez interrogée, madame Poletti, un groupe peut, à ma connaissance faire un appel d’offres pour une évaluation de plusieurs structures. Ce n’est peut-être pas la mutualisation que vous appelez de vos vœux, mais il est possible de lancer un seul appel d’offres pour évaluer plusieurs structures, permettant ainsi d’en diminuer le coût. Voilà ma réponse, en l’état actuel du droit.

Après l’article 47 (amendements précédemment réservés)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n502 rectifié portant article additionnel après l’article 47.

Mme Jacqueline Fraysse. Le dispositif de convergence tarifaire entre public et privé a été aboli pour les établissements de santé, ce dont nous nous félicitons. Toutefois, la convergence tarifaire existe toujours dans le secteur médico-social, notamment pour les établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes et les unités de soins de longue durée. Ce mécanisme retire à ces établissements d’importants moyens financiers, et donc à terme des moyens humains, entraînant inévitablement une baisse de la qualité de soins, ce qui est grave.

Concernant les EHPAD, seuls 1,6 % d’entre eux ont des ratios d’encadrement supérieurs à 0,5 soignant par résident, alors que le plan « Solidarité grand âge » préconisait un soignant pour un résident. Le manque à gagner lié au maintien de la convergence tarifaire est de l’ordre de 88 millions d’euros et conduira à la suppression de plusieurs milliers de postes. Il est évident que les tarifs plafond actuellement fixés sont trop bas et qu’il faut les réévaluer pour permettre à ces établissements de travailler dans de bonnes conditions.

Pour les USLD, les effets de la convergence tarifaire sont également graves puisque 80 % des lits sont concernés. La Fédération hospitalière de France évalue cette perte à 211 millions d’euros au niveau national, ce qui, selon elle, entraînerait la suppression de 6 000 postes de soignants d’ici à 2016.

Concrètement, dans une USLD de 40 résidents, le ratio est aujourd’hui de 0,72, soit une aide-soignante pour huit toilettes chaque matin. Si la convergence tarifaire s’applique, une seule aide-soignante aura la charge de douze ou treize toilettes par matin, ce qui, vous en conviendrez, est beaucoup et même trop.

Pour conclure, les missions de ces établissements sont d’autant plus primordiales que la durée de vie s’allonge. De la même façon que nous avons voté ensemble l’abandon de la convergence tarifaire public-privé l’année dernière, cet amendement a pour but de l’abroger pour les EHPAD et les USLD.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission.

Mme Jacqueline Fraysse. Hélas !

Mme Martine Pinville, rapporteure. Sans entrer dans le débat technique concernant cet amendement, il me semble difficile de l’envisager isolément. Nous devons mener une réflexion globale : c’est tout le sens des travaux qui seront conduits dans le cadre de la préparation de la loi d’orientation et de programmation qui sera proposée l’année prochaine. Nous devons y travailler, bien évidemment, mais de façon globale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. L’avis du Gouvernement est défavorable, madame Fraysse. Je voudrais tout d’abord rebondir, comme on dit maintenant, sur l’un de vos propos : le plan « Solidarité grand âge » proposait en effet un taux d’encadrement bien supérieur, mais rien n’a été fait en ce sens. À l’inverse, nous faisons chaque année des progrès substantiels en termes de médicalisation.

Nous ne retenons pas votre proposition de suppression du dispositif de convergence tarifaire et des tarifs plafond car il permet de mettre en œuvre un objectif de réduction des inégalités de ressources entre les établissements. Certes, il convient parfois d’ajuster les modalités de mise en œuvre des dispositifs de réduction des inégalités pour répondre au mieux à cet objectif – cela a été fait à plusieurs reprises – mais il s’agit de rendre plus homogène et plus équitable les règles d’allocation de ressources.

Par ailleurs, des travaux plus globaux sont engagés sur la tarification des établissements et des services sociaux et médico-sociaux, tant dans le secteur du handicap que dans celui de l’âge. Ces travaux devront notamment permettre de compléter les outils dont nous disposons actuellement pour moderniser l’allocation de ressources, outils qui ne sont pas, nous le reconnaissons, totalement satisfaisants aujourd’hui.

Je pense à la mise à disposition du secteur et des autorités de tarification de référentiels – référentiels d’évaluation des besoins, de prestations mises en œuvre au service des usagers ou de coûts – ou encore d’outils plus efficients de contractualisation. Ainsi, dans le secteur du handicap, ces réflexions seront menées dans le cadre des travaux à venir sur la réforme de la tarification des EHPAD. Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Guedj.

M. Jérôme Guedj. Je ne voudrais pas que l’on passe trop vite sur ces amendements et sur ces propositions.

Je dirai tout d’abord à Jacqueline Fraysse que nous avons eu raison, l’année dernière, dans le PLFSS 2013, de supprimer la convergence tarifaire sans tarder, s’agissant des établissements sanitaires. La convergence tarifaire en EHPAD, même si le terme est le même, n’a rien à voir, tant dans son concept que dans ses modalités : évitons la confusion !

Pour autant, et j’apprécie les propos tenus par Mme la ministre, des effets pervers ont pu être constatés par tous, indépendamment du souci de corriger les inégalités.

Notre collègue Pascal Terrasse n’a pas pu défendre un amendement qui proposait la suspension de ce mécanisme de convergence tarifaire. Vous nous avez répondu que cela serait appréhendé plus globalement, dans une réforme de la tarification que nous sommes plusieurs à appeler de nos vœux.

J’ajoute, pour nos réflexions à venir et en avant-première du rapport que nous venons de remettre au Premier ministre avec mes collègues parlementaires en mission – mission dont l’objet était d’apprécier les effets et les impacts du crédit d’impôt compétitivité emploi sur le secteur associatif et sur le secteur privé à but non lucratif –, que l’une des préconisations de ce rapport est d’appréhender la question de la convergence tarifaire, soit de manière isolée, soit d’une manière plus globale dans le cadre d’une réforme de la tarification.

Dans la perspective du débat à venir, je précise que nous estimons devoir tenir compte, dans la tarification des EHPAD, des missions d’intérêt général que ceux-ci sont amenés à assumer ; cela concerne notamment les établissements publics et les établissements associatifs. Même si cela n’entre pas dans le périmètre de ce PLFSS, nous avons compris que la réforme de la perte d’autonomie était engagée et qu’elle définirait les contours d’une réforme de la tarification, absolument indispensable.

Sans attendre, je veux fermer la boucle des débats que nous avons eus lors de l’examen de l’article 15 : dès 2014, des mesures seront proposées, notamment dans le budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, à travers le plan d’aide à l’investissement, le soutien au secteur de l’aide à domicile ainsi que le soutien aux actions de prévention et d’aide aux aidants. La réforme est engagée et la volonté est, je le crois, partagée par tous.

(L’amendement n502 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n798.

Mme Martine Pinville, rapporteure. Cet amendement, accepté par la commission, propose d’arrêter l’expérimentation relative à la partie « soins » de l’activité des EHPAD. En effet, cette expérimentation, prorogée d’un an l’année dernière, ne s’est pas révélée intéressante et n’aboutit pas, ou du moins n’est pas convaincante. Je propose donc la suppression ou l’arrêt de cette expérimentation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Notre avis est favorable, car les travaux préparatoires à l’expérimentation dans le cadre de l’article 67 ont mis en lumière la difficulté de restreindre la mesure de la qualité de la prise en charge en EHPAD au seul domaine des soins, et n’ont pas permis d’aboutir en temps utile au démarrage de l’expérimentation elle-même.

Parallèlement, l’expérimentation d’un tableau de bord de pilotage de la performance des établissements sous l’égide de l’ANAP atteste qu’il est possible de construire et de partager un ensemble d’indicateurs pertinents, robustes et reproductibles dans le champ médico-social, indicateurs qu’il est proposé de développer dans le cadre d’une très large concertation.

(L’amendement n798 est adopté.)

Article 48 (précédemment réservé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 687 et 688, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Christian Paul, rapporteur, pour les soutenir.

M. Christian Paul, rapporteur. Ce sont des amendements rédactionnels.

(Les amendements nos 687 et 688, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 48, amendé, est adopté.)

Article 49 (précédemment réservé)

(L’article 49 est adopté.)

Article 50 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article 50.

Mme Jacqueline Fraysse. Madame la ministre, l’une des lacunes majeures de ce PLFSS est l’insuffisance de financement des hôpitaux publics, alors que vous vous dites soucieuse de leur avenir. Je note que ce texte va piller le Fonds pour l’emploi hospitalier, alimenté par une contribution des hôpitaux sur leur masse salariale pour financer la CNRACL, et, par le jeu des compensations, les régimes de retraite du privé.

Ce PLFSS met en place un système brutal de dégressivité des tarifs, sans aucun critère de pertinence des actes puisque vous ne l’avez pas accepté, ce qui va surtout permettre de réduire encore l’ONDAM, et sans remettre en cause la convergence tarifaire rampante qui est opérée via la baisse différentiée des tarifs des hôpitaux publics et des cliniques privées.

Dans cet article, vous nous annoncez un ONDAM hospitalier encore une fois nettement inférieur à l’évolution tendancielle des dépenses des hôpitaux. Heureusement que vous nous dites être engagée en faveur de l’hôpital public ! Si tel n’était pas le cas, je n’ose imaginer ce qu’il en serait.

L’ONDAM hospitalier est insuffisant pour permettre aux hôpitaux de relever les défis qui sont les leurs et de se moderniser après tous les coups qu’ils ont reçus lors des précédentes directions de notre pays par la droite. L’hôpital de Nanterre, pour prendre cet exemple que je connais bien, n’attend ainsi que le déblocage des fonds nécessaires pour mettre en œuvre un projet de modernisation justement élaborée à la suite d’une large concertation avec les citoyens et leurs élus, avec les médecins et les personnels hospitaliers qui ont beaucoup travaillé dans ce sens. On peut vraiment se demander jusqu’à quand va durer le lent étranglement des hôpitaux.

Enfin, lors du dernier PLFSS, nous avons adopté un article prévoyant qu’un rapport détaillant les opérations projetées ou réalisées de construction d’établissements publics de santé en partenariat public-privé dans le cadre des plans « Hôpital 2007 » et « Hôpital 2012 » serait présenté pour mettre en perspective les surcoûts financiers occasionnés par l’absence de maîtrise d’ouvrage publique. Pouvez-vous, madame la ministre, m’indiquer si ce rapport qui devait être publié avant le 30 septembre 2013 l’a été et s’il est disponible ?

(L’article 50 est adopté.)

Après l’article 50 (amendements précédemment réservés)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n154 deuxième rectification.

M. Christian Paul, rapporteur. Cet amendement a été adopté par la commission, et je propose à M. Dufau de le présenter.

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau. Cet amendement, qui a effectivement été adopté par la commission des affaires sociales, fixe les conditions de tarification et de remboursement des cures thermales par voie de convention quinquennale entre la CNAM et les établissements thermaux. Il crée un tarif forfaitaire de responsabilité par orientation thérapeutique et ce tarif forfaitaire est la base de la prise en charge par la Sécurité sociale. Il n’évoluera pas pendant cinq ans. Il ménage donc les finances de la CNAM et participe ainsi à la maîtrise des dépenses de santé.

Il est à noter que ce tarif sera opposé aux patients bénéficiaires de la CMU-C ou de l’ACS. Il est donc socialement juste.

Par ailleurs, il crée un prix limite de facturation par orientation thérapeutique, toujours par voie de convention, qui peut être actualisé en fonction d’un indice intégrant les coûts d’exploitation – coûts de l’énergie, coût de la vie – pour une bonne gestion des établissements et par là même supprime toute dérive tarifaire.

Pour toutes ces raisons, cet amendement équilibré me paraît apporter une bonne réponse au problème posé.

(L’amendement n154 deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 155 rectifié et 493, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Christian Paul, rapporteur, pour soutenir l’amendement n155 rectifié.

M. Christian Paul, rapporteur. Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport détaillant l’évolution de la prise en charge par l’assurance maladie obligatoire des dépenses de santé et des facteurs d’évolution. Cet amendement a été déposé conjointement avec ma collègue Jacqueline Fraysse et la commission a émis un avis favorable.

(L’amendement n155 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je vous prie de m’excuser, nous étions dans le cadre d’une discussion commune et j’ai oublié de donner la parole à Mme Jacqueline Fraysse pour soutenir l’amendement n493 avant de mettre aux voix l’amendement n155 rectifié.

Vous avez la parole, madame Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à concrétiser une promesse de Mme la ministre de la santé, qui nous annonçait, lors de la présentation de la stratégie nationale de santé, vouloir proposer que le Parlement soit saisi, chaque année, dans le cadre des PLFSS, non seulement des objectifs des dépenses de santé, mais aussi des éléments lui permettant d’apprécier la part de ces dépenses couvertes par l’assurance maladie. La ministre s’était alors engagée à enrayer la tendance à la baisse de la part des dépenses prises en charge par l’assurance maladie que l’on observe depuis 2004.

Lorsque j’ai déposé mon amendement en commission, le rapporteur a observé que ces données existaient déjà dans le PLFSS à l’annexe 7. Je m’y suis reportée et, en effet, la structure de financement de l’ensemble de la consommation de soins et de biens médicaux y figure, mais le développement des affections de longue durée déforme cette répartition. En effet, le tableau de l’annexe 7 indique que la Sécurité sociale de base prend en charge 75,5 % de la consommation de soins et de biens médicaux. Mais il s’agit là d’une moyenne qui prend en compte les personnes en affection de longue durée, qui, elles, sont prises en charge à 100 % par l’assurance maladie. Si la moyenne de prise en charge est de 75,5 % en comptant les ALD, je voudrais connaître le pourcentage de prise en charge pour les autres patients qui ne sont pas atteints d’une affection de longue durée.

Je pense que cet amendement est pertinent. Il demande un rapport annuel détaillant notamment les différents niveaux de prise en charge, hors dépenses liées aux ALD.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Paul, rapporteur. Hélas, madame Fraysse, nous venons d’adopter l’amendement n155 rectifié.

M. le président. Comme nous sommes dans le cadre d’une discussion commune, l’adoption de l’amendement n155 rectifié fait en effet tomber l’amendement n493.

M. Christian Paul, rapporteur. C’est bien ce qu’il me semblait.

Mme Jacqueline Fraysse. Cela sauve M. Paul qui n’a pas à me répondre. (Sourires.)

M. le président. C’est une erreur de ma part, et je l’assume.

Avant l’article 51 (amendements précédemment réservés)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n492 portant article additionnel avant l’article 51.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à instaurer l’obligation d’affiliation de tout membre d’un culte. La caisse des cultes, ou CAVIMAC, a, jusqu’en 1999, laissé à la discrétion de la hiérarchie catholique le choix d’affilier ou non les séminaristes et novices.

M. Christian Paul, rapporteur. Je suis étonné que vous abordiez un tel sujet ! (Sourires.)

Mme Jacqueline Fraysse. Vous savez, mon souci de la justice sociale n’a pas de frontière ! La justice en direction de personnes qui exercent des cultes mérite notre attention.

En 1989, la CAVIMAC a précisé dans son règlement intérieur que la date d’entrée en vie religieuse était fixée à la date de la première profession ou des premiers vœux, excluant les périodes d’activité en qualité de membre de cultes antérieurs aux vœux ou à la tonsure, soit entre cinq et cinquante-trois trimestres selon l’Association pour une retraite convenable, qui regroupe d’anciens ministres du culte et membres de congrégations et communautés religieuses.

Dans une décision de novembre 2011, le Conseil d’État a jugé illégale cette disposition. La Cour de cassation, de son côté, considère que les séminaristes ne peuvent être assimilés à de simples étudiants et que l’engagement religieux est manifesté notamment par un mode de vie en communauté et par une activité essentiellement exercée au service de sa religion.

À l’initiative de la CAVIMAC et de la tutelle, le Parlement a toutefois adopté, dans le PLFSS pour 2012, un article qui assimile les périodes de noviciat et de grand séminaire à des années d’étude, ce qui permet à la CAVIMAC de s’en tirer à bon compte en proposant aux séminaristes ou aux novices de racheter ces périodes à des conditions bien entendu inatteignables.

Ce faisant, cet article contredit la décision de la Cour de cassation, et mon amendement vise donc à rappeler l’obligation d’affiliation de tout membre d’un culte, quelle que soit l’étape de son engagement religieux, et à préciser les critères objectifs caractérisant cet engagement religieux. Il propose donc, d’une part, que toute collectivité ou communauté religieuse tienne un registre de la liste complète de ses membres mentionnant obligatoirement la date de leur entrée, et d’autre part, de définir objectivement la qualité de membre d’une collectivité ou d’une communauté religieuse par la manifestation d’un engagement religieux ou par un mode de vie en communauté et une activité exercée au service de sa religion. En conséquence, l’article assimilant les novices et les séminaristes à des étudiants n’a plus lieu d’être et doit être supprimé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Avis défavorable.

L’affiliation des ministres des cultes et membres des congrégations à l’assurance vieillesse est obligatoire depuis 1979. Pour la période antérieure à cette date, les religieux qui se sont consacrés uniquement à leur ministère peuvent demander une validation gratuite auprès de la CAVIMAC, la caisse d’assurance vieillesse des cultes. Comme vous l’avez indiqué, jusqu’en 2006 les périodes de formation, séminaire et noviciat, n’étaient pas prises en compte pour le calcul de la retraite des intéressés. Pour les périodes de formation antérieures à 2006, la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 a ouvert le dispositif de rachat des années d’études. Mais depuis 2006, les personnes sont affiliées dès leur entrée au séminaire ou en congrégation.

(L’amendement n492, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n564.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement a trait au versement du capital décès, qui aujourd’hui ne bénéficie pas aux retraités. En effet, seuls les salariés, les chômeurs indemnisés, les bénéficiaires d’une pension d’invalidité ou encore les bénéficiaires d’une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle avec un taux d’incapacité d’au moins 66,66 % ont droit à ce versement.

Ce capital décès représente environ trois mois de salaire de l’assuré. Il peut servir aux proches à faire face aux frais engagés pour les obsèques du défunt, mais aussi aux charges du quotidien que la famille doit continuer d’assumer.

L’élargissement que nous souhaitons proposer de ce versement constituant une charge supplémentaire, il se heurterait à l’article 40 de la Constitution. En revanche, il est proposé que le Gouvernement remette au Parlement un rapport dans les six mois suivant la promulgation de la loi sur les conditions d’une ouverture aux retraités du droit au versement du capital décès. Ce serait un grand service à rendre aux familles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Martine Pinville, rapporteure. Avis défavorable. Les personnes de plus de soixante-cinq ans relevant du régime général – sachant qu’il n’y a pas d’âge plancher dans certains régimes – perçoivent au décès de leur conjoint une pension de réversion. Cela dit, le rapport demandé à l’article 13 bis du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraite devra étudier les possibilités de faire évoluer les règles relatives aux pensions de réversion, dans le sens d’une meilleure prise en compte du niveau de vie du conjoint survivant et aussi d’une meilleure harmonisation entre les régimes.

(L’amendement n564, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 51 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, inscrit sur l’article 51.

M. Jean-Louis Roumegas. Je profite de cet article pour poser une question à Mme la ministre sur un sujet qui a été soulevé par deux de nos collègues, députés des Français de l’étranger, MM. Coronado et Amirshahi. Il s’agit de la question des certificats de vie demandés aux Français de l’étranger : ce sont les seuls à qui sont demandés ces certificats.

C’est bien plus qu’une formalité. En fait, nous disent nos collègues, cette demande de certificat entraîne une rupture d’égalité avec les Français résidant sur le territoire national. Les contraintes matérielles auxquelles ils sont confrontés entraînent souvent la suspension de fait du versement de leur pension de retraite, ce qui les met en difficulté financière.

Il faudrait allonger les délais imposés, en passant d’un à trois mois avant suspension et d’une fois tous les ans à une fois tous les deux ans concernant la production du certificat. Je crois que le Gouvernement s’était engagé à produire un rapport relatif aux conventions bilatérales sur les retraites et sur cette question des certificats de vie. Mais les problèmes rencontrés sur le terrain ne s’arrêtent pas là. Il est très difficile, pour les Français de l’étranger, de contacter le médiateur de la Caisse nationale d’assurance vieillesse. La somme de travail de celui-ci est beaucoup trop grande et il faudrait instituer, selon mes deux collègues, du fait de l’augmentation du nombre de nos compatriotes résidant à l’étranger, un poste de médiateur par continent au moins.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a déjà assoupli les formalités imposées aux pensionnés qui résident à l’étranger, notamment pour ce qui est de la fréquence de demande des certificats d’existence ou du délai avant suspension de la pension.

J’ai le plaisir de vous confirmer, puisque je crois l’avoir déjà dit en commission, que le décret d’application de l’article 83 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, qui permet aux caisses d’échanger entre elles les certificats, afin d’éviter les demandes redondantes, est actuellement dans le circuit du contreseing.

La situation des Français de l’étranger, par ailleurs, devrait se trouver améliorée par la mise en place du nouveau groupement d’intérêt public prévu par la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraite qui va mettre en œuvre des simplifications nouvelles, relatives en particulier aux certificats d’existence des retraités qui vivent à l’étranger.

Vous l’avez indiqué, l’article 29 bis de cette loi prévoit un rapport faisant le point sur les difficultés rencontrées par nos compatriotes résidant à l’étranger en matière de retraite. Je sais que ce rapport est attendu et qu’il sera important, car il nous permettra d’améliorer la situation.

(L’article 51 est adopté.)

Avant l’article 52 (amendement précédemment réservé)

M. le président. La parole est à M. Laurent Marcangeli, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles, pour soutenir l’amendement n° 201.

M. Laurent Marcangeli, rapporteur de la commission des affaires sociales. Il est rédactionnel.

(L’amendement n201, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Article 52 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article 52.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article détermine les dotations de la branche « accidents du travail et maladies professionnelles » aux deux fonds des victimes de l’amiante et de cessation anticipée d’activité. Il fixe également à 790 millions d’euros le montant du versement effectué par la branche AT-MP à la branche « maladie » pour compenser la sous-déclaration des AT-MP.

Je redis que ce montant est inchangé depuis deux ans, alors même que nous savons tous qu’il est très largement sous-estimé, comme le confirme le rapport Diricq qui évalue cette sous-déclaration à plus d’un milliard d’euros.

Encore ce rapport la sous-estime-t-il lui-même. Ainsi, l’Institut de veille sanitaire, qui fait tout de même autorité, estime à 21 000 le nombre des cancers d’origine professionnelle, alors que l’AT-MP n’en prend en charge que 2 000. Or, le coût moyen des soins pour un cancer est évalué à 150 000 euros ; si l’on multiplie ce montant par 21 000, on peut estimer à plusieurs milliards le coût des seuls des cancers d’origine professionnelle. C’est dire à quel point ces 790 millions sont insuffisants.

Les victimes de ces sous-déclarations sont évidemment les travailleurs les plus exposés. Je souhaite donc savoir, madame la ministre, si vous envisagez de prendre des mesures et, si oui, lesquelles. La situation n’est pas acceptable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n205.

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. Cet amendement a donné lieu à un débat fourni en commission, et je me suis permis d’évoquer dans la discussion générale les raisons qui m’ont amené à le déposer. Je vais entrer un peu plus dans le détail. C’est la deuxième année consécutive que l’État ne prévoit pas, en loi de finances, de verser sa dotation au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante.

Cet amendement ne propose qu’une chose : placer le Gouvernement devant ses responsabilités en diminuant le montant de la dotation à la branche AT-MP à due concurrence, ce qui porterait le montant de la dotation à 388 millions d’euros.

Cet amendement est gagé. Des droits sur le tabac seront affectés au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, afin de ne pas adresser de signal défavorable aux victimes. Reste que le Gouvernement, s’il lève le gage, devra abonder cette dotation en conséquence.

La commission n’a pas donné d’avis favorable à cet amendement de son rapporteur…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement a effectivement suscité le débat au sein de la commission. Un certain nombre d’entre nous, sur tous les bancs, se sont émus de la situation des victimes de l’amiante, drame national qui dure et qui durera encore un certain temps. J’ai été vice-président de la mission d’information qui a travaillé sur ce sujet et qui a estimé à 100 000 le nombre des victimes de l’amiante.

Que l’État ne participe plus au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante est un mauvais signal. Il s’agit de solidarité nationale. On ne peut faire reposer le financement du FIVA sur les seuls salariés relevant de la branche AT-MP, alors que les victimes de l’amiante viennent de divers horizons, y compris du service public pour ceux qui travaillaient dans les ports et les chantiers navals. Faire appel au seul régime général est injuste.

De plus, l’État a une responsabilité dans le fait que l’interdiction de l’amiante a tardé. Je ne jette la pierre à personne. Il y a eu une dérive dans le temps, malheureusement pour les victimes : il faut la constater. Il me paraît normal que l’État participe au financement de ce fonds et continue d’y participer.

Je soutiens cet amendement, car je ne voudrais pas que les Français reprochent à l’État de se désintéresser du sujet. Dans ma circonscription, j’ai beaucoup de victimes ou d’ayants-droits qui sont attentifs à cette question.

M. le président. La parole est à M. Christian Hutin.

M. Christian Hutin. Sans aller à l’encontre de ce qu’ont dit M. le rapporteur et M. Vercamer, je pense que, sur un sujet comme celui-ci, il faut rester factuel. La Cour des comptes a pointé le fait que le fonds de roulement du FIVA était largement excédentaire : de plus de 200 millions. Dans un esprit de bonne gestion, nous avons décidé l’année dernière en commission – et je crois, monsieur Vercamer, que vous étiez d’accord – qu’il n’y avait pas lieu de l’abonder.

Cette année, 47 millions vont à la branche AT-MP. Il reste 150 millions.

Il n’y a pas de nécessité que l’État participe au financement, mais, nous en serons tous d’accord, il existe une obligation morale. Nous sommes collectivement responsables de ce drame national. Je sais pouvoir faire confiance au Gouvernement, pour en avoir parlé avec Mme le ministre : s’il y a lieu de financer, l’État financera et sera au rendez-vous. De la même manière que nous l’avons fait, il y a moins de dix-huit mois, lorsqu’il y a eu des dysfonctionnements au sein du FIVA, l’État sera présent, surtout si nous réussissons, avec les amendements suivants, à ouvrir une deuxième voie.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Cela commence à faire un certain temps que je siège à la commission des affaires sociales et, lorsque que vous étiez dans l’opposition, j’ai toujours entendu beaucoup de passion dans vos propos, à juste titre d’ailleurs, quand il s’agissait de soutenir les victimes de l’amiante et leur famille, notamment à travers un amendement sur le FIVA, fidèlement et régulièrement défendu.

Je suis donc étonnée de cette baisse de la contribution de l’État : elle constitue un mauvais signal et c’est pourquoi je soutiens l’amendement.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement ne vise pas à établir sur qui pèse la responsabilité, qui, on l’a dit, est collective. En revanche, je croyais que s’imposait la règle résultant de l’article 53 de la loi de financement pour 2001, qui prévoyait une contribution de l’État au financement du FIVA. Il me semble donc que cette obligation existe. Quand on a pris un engagement, on doit l’assumer, faute de quoi c’est un mauvais signal qui est adressé. Que le fonds soit excédentaire ne suffit pas à motiver le désengagement de l’État.

(L’amendement n205 n’est pas adopté.)

M. Jean-Louis Roumegas. A rebours de la proposition précédente, nous souhaitons que soit rétablie la contribution des entreprises ayant exposé leurs salariés à l’amiante au fonds de cessation d’activité anticipée pour les travailleurs de l’amiante, le FCAATA, qui avait été supprimée en 2005.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. Avis défavorable de la commission et de ma part.

La contribution des entreprises au financement du FCAATA a été instaurée en 2004 et supprimée en 2009. Il ne paraît pas utile de revenir en arrière. Afin de mieux faire supporter les coûts occasionnés à l’entreprise qui a exposé le salarié à l’amiante, les procédures de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur sont plus adaptées. Elles concernent des dossiers liés à l’amiante dans près de 40% des cas.

Je rappelle que le FCAATA est déjà financé par les entreprises par le biais d’une contribution de la branche AT-MP à hauteur de 821 millions cette année. Cette charge est répartie entre l’ensemble des entreprises et je ne pense pas qu’elles doivent être encore mises à contribution.

Au demeurant, il ne me semble pas qu’il faille multiplier les systèmes de préretraite sachant que les préretraites « amiante » sont souvent utilisées dans le cadre de restructurations et détournées de leur véritable objet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends bien votre préoccupation, monsieur le député. Incontestablement, il n’est pas possible de se désintéresser de la responsabilité des entreprises. Le message ne doit pas être que la politique menée consisterait d’un côté à mobiliser la solidarité nationale et, de l’autre, à désengager les entreprises ou à les éloigner de leur responsabilité.

En revanche, ce que vous proposez répondrait-il aux enjeux existants ? Je ne le crois pas.

Tout d’abord, lorsque la contribution directe des entreprises existait, les contentieux étaient très importants et n’aboutissaient pas à une prise en charge ou à une mise à contribution satisfaisantes.

En outre, plus on s’éloigne de la période d’utilisation intensive de l’amiante, moins le rétablissement de cette contribution serait sensé.

Comme vient de le dire M. le rapporteur, le développement des procédures de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur semble mieux adapté. Je tiens à attirer votre attention sur le fait que les dossiers de l’amiante représentent aujourd’hui près de 40 % des cas de faute inexcusable de l’employeur chaque année, ce qui montre que ce dispositif fonctionne bien et qu’il doit être privilégié.

M. Christian Hutin. Absolument.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je vous demande plutôt de retirer votre amendement, étant entendu que le Gouvernement ne considère évidemment pas que les entreprises doivent être déresponsabilisées. Simplement, la voie juridictionnelle de la faute inexcusable de l’employeur est de meilleure qualité et, je le répète, doit être privilégiée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Je retire donc l’amendement.

(L’amendement n642 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Marcangeli, pour soutenir l’amendement n156.

M. Laurent Marcangeli. Je laisse M. Roumegas le défendre car, s’il a été adopté par la commission, je n’y étais pas favorable à titre personnel.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Avec l’accord de la commission, comme vient de le rappeler le rapporteur, il s’agit de demander au Gouvernement d’évaluer l’amélioration des conditions de traitement des dossiers des victimes de l’amiante – ou simplement des ayants droit car, parfois, ce ne sont pas des personnes dont la maladie s’est déclarée qui sont concernées mais des personnes qui ont été exposées à l’amiante dans des entreprises nommément ciblées.

Nous demandons qu’un rapport soit remis au Parlement avant le 1er juillet 2014.

J’en profite pour dire que, dans nos circonscriptions, nous rencontrons souvent des travailleurs ayant été exposés à l’amiante qui connaissent beaucoup de difficultés administratives afin d’établir leur dossier, en particulier en ce qui concerne la liste des entreprises concernées. Il suffit parfois que le siège social ou l’adresse aient changé pour que l’administration ne reconnaisse pas les années d’exposition alors qu’il s’agit de la même entreprise. Le problème est simplement administratif. Peut-être le rapport que nous demandons contribuera-t-il également à améliorer le traitement administratif des dossiers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. À titre personnel, je suis défavorable à cet amendement accepté par la commission. Sa rédaction, en effet, me semble hasardeuse parce qu’elle assimile l’indemnisation des victimes de l’amiante et de leur ayants droit, qui relève du FIVA, et l’accès à une pré-retraite « amiante» via le FCAATA pour les travailleurs qui ont pu être exposés à l’amiante mais qui ne développeront pas forcément de pathologie. Ce sont deux sujets distincts.

Un rapport existe quant à l’accélération du traitement des dossiers par le FIVA ; sur ce point l’amendement est inutile. Cet objectif devrait selon moi figurer dans le contrat de performances 2014-2016 dont nous ignorons encore la conclusion puisque le Gouvernement a retardé sa parution d’une année, ce que je regrette.

S’agissant des préretraites « amiante », la Haute autorité de santé a rendu ses conclusions sur le suivi post-professionnel des travailleurs de l’amiante, lesquels sont désormais systématiquement informés d’une possibilité de suivi médical.

Quant au rapport demandé l’an passé sur la nouvelle voie d’accès à la CAATA, je ne peux que déplorer la légèreté qui a prévalu sur un tel sujet, mais faut-il vraiment créer un nouveau dispositif de préretraite ? Il me semble qu’il est intéressant de poser la question.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Un rapport de M. Hutin est en cours d’élaboration, monsieur Roumegas, puisqu’il travaille actuellement sur le sujet et qu’il aura l’occasion de présenter ses analyses et ses propositions.

Je comprends parfaitement votre demande mais elle me semble ainsi satisfaite. Un télescopage des deux démarches n’étant pas très heureux, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. Je vous assure de l’intérêt du Gouvernement, en relation avec M. Hutin, pour le sujet que vous portez et je suis certaine que ce dernier trouvera le moyen de recueillir vos préoccupations.

M. le président. La parole est à M. Christian Hutin.

M. Christian Hutin. Je vais aller dans le même sens que Mme la ministre.

Vous aviez déposé un premier amendement reprenant une partie de mon amendement de l’année précédente et y ajoutant un certain nombre de cas particuliers de travailleurs dans les entreprises de désamiantage. Comme il était imparfait sur un plan juridique, vous proposez aujourd’hui une nouvelle reprise de ma proposition d’amendement quant à une réflexion sur l’ouverture de la deuxième voie.

Je l’ai dit en commission et je le répète : j’auditionnerai M. Ricordeau, inspecteur de l’IGAS qui s’occupe de ce rapport, à la fin du moins de novembre dans le cadre du groupe « amiante ». Je pense que nous disposerons des premiers éléments pour avancer. Rien ne nous empêchera de poser des questions sur ces travailleurs des entreprises de désamiantage.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Lorsque la commission s’est réunie, nous ne savions pas où en était la rédaction du rapport.

M. Christian Hutin. C’est vrai.

M. Jean-Louis Roumegas. C’est M. Hutin qui nous l’a appris. Puisque le Gouvernement reconnaît le retard et que nous avons toute confiance dans le suivi que M. Hutin assurera, nous suivons l’avis de l’un et de l’autre.

(L’amendement n156 est retiré.)

(L’article 52 est adopté.)

Article 53 (précédemment réservé)

Après l’article 53 (amendements précédemment réservés)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 53.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n772.

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement vise à aligner le taux d’incapacité requis des non salariés agricoles sur celui des salariés, notre préoccupation étant d’harmoniser les différents régimes entre eux.

Il s’agit également d’une mesure d’équité et de justice en faveur des victimes d’accident du travail ou de maladies professionnelles qui justifient d’incapacités physiques prononcées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. Avis favorable, cet amendement réparant un oubli du PLFSS.

(L’amendement n772 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 157 rectifié et 185, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Laurent Marcangeli, rapporteur, pour soutenir l’amendement n157 rectifié.

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. Lorsqu’une CARSAT impute au compte employeur des taux AT-MP trop élevés, l’entreprise peut en obtenir une correction devant le juge de la tarification et a droit au remboursement des montants trop versés. Mais les URSSAF opposent la prescription triennale car le recours contre la décision de la CARSAT n’a pas en lui-même d’effet interruptif de la prescription des remboursements du trop perçu.

Pour interrompre le délai de prescription, les entreprises devraient en droit déposer chaque année une demande chiffrée devant l’URSSAF, mais c’est impossible en pratique tant qu’elles ne disposent pas d’un jugement, lequel n’intervient le plus souvent qu’après plusieurs années. Dès lors, certaines sommes indûment versées par les entreprises ne sont jamais remboursées.

J’ai donc proposé de conférer à l’action engagée contre la décision de la CARSAT un effet interruptif de la prescription, comme la Cour de Cassation l’a fait dans son dernier rapport annuel. Il s’agit ainsi de sécuriser juridiquement notre système de tarification AT-MP et de compléter par une mesure d’équité et de justice les réformes de 2009 et 2010 qui ont permis de limiter les recours abusifs. Cet amendement a été adopté par la commission.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n185.

Mme Véronique Louwagie. Mon collègue a évoqué l’essentiel.

En effet, l’URSSAF est chargée du recouvrement des cotisations et la CARSAT de la fixation du taux AT-MP. Lorsqu’un litige survient avec la seconde, la première n’est pas du tout tenue par cette procédure et l’entreprise se trouve en difficulté.

Cet amendement répond à une certaine logique, à une volonté de simplification et de rendre un service aux entreprises en prenant en compte une adéquation entre prescription et litige avec la CARSAT de manière à pouvoir en faire état auprès des URSSAF.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. Cet amendement a le même objectif que celui que je viens de présenter mais je propose de retenir la rédaction de ce dernier, qui a donc été adopté par la commission, ce qui fera tomber celui de Mme Louwagie. S’il ne devait pas être adopté, j’émettrai un avis favorable à l’adoption de son amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable à ces deux amendements.

Je veux dire fortement qu’il ne s’agit pas de nier la difficulté existante, non plus que les propositions de la Cour de cassation, lesquelles sont toutefois assez récentes : il en résulte que nous n’avons pas pu les examiner attentivement et en expertiser les conséquences, alors qu’elles seraient susceptibles d’avoir un impact très significatif sur les finances de la branche et, donc, potentiellement, sur la prise en charge des assurés victimes de l’amiante.

Je mets en garde contre l’adoption de ces amendements susceptibles de soulever des problèmes.

(Les amendements nos 157 rectifié et 185, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n454 rectifié.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement demande au Gouvernement de présenter au Parlement les modalités juridiques et pratiques d’évolution du régime d’indemnisation des victimes d’AT-MP vers un régime de réparation intégrale.

Le rapport du professeur Masse publié voilà plusieurs années préconise l’évolution du régime de réparation forfaitaire des AT-MP vers la réparation intégrale. Le médiateur de la République avait également demandé de reconsidérer le système de réparation forfaitaire pour mettre un terme aux inégalités entre les victimes du travail et les victimes d’un dommage environnemental ou de la circulation.

Le PLFSS pour 2013 a créé une nouvelle prestation pour recours à tierce personne et Mme la ministre s’était engagée à homogénéiser et à systématiser la prise en compte par les caisses de la perte de revenus professionnels subie par la victime d’un accident du travail.

Il s’agit indiscutablement de progrès mais que je qualifierai d’homéopathiques qui, en tout état de cause, ne résolvent pas l’injustice qui perdure entre les victimes selon l’origine de leur préjudice.

La preuve, c’est que ces dispositions représentent un effort de quelques dizaines de millions – on annonçait, je crois, 55 millions d’euros pour 2013 –, alors que le rapport Laroque évaluait le basculement vers un régime de réparation intégrale à près de 3 milliards d’euros. Je rappelle que les accidentés du travail sont également victimes d’une autre injustice votée par la droite, à laquelle nous nous étions vigoureusement opposés – avec vous d’ailleurs – et sur laquelle le Gouvernement n’est pas encore revenu : la fiscalisation des indemnités journalières versées par la Sécurité sociale aux accidentés du travail…

M. le président. Merci, chère collègue.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous avons déposé un amendement proposant la défiscalisation de ces indemnités, même si nous savions qu’il était irrecevable, car cela me donne au moins l’occasion de vous interroger : madame la ministre, envisagez-vous de revenir sur cette honteuse fiscalisation, et si tel est le cas, dans quels délais ?

M. le président. Merci, chère collègue.

Mme Jacqueline Fraysse. J’aimerais également que vous répondiez à ma précédente question.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Marcangeli, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Vous avez évoqué, madame, le groupe de travail présidé par M. Michel Laroque, inspecteur général des affaires sociales, qui a mis en évidence en 2004 le coût très élevé de l’instauration de la réparation intégrale – 3 milliards d’euros pour le seul régime général, comme vous l’avez rappelé. Dans leur accord national interprofessionnel du 12 mars 2007, les partenaires sociaux n’ont pas proposé de s’orienter vers la réparation intégrale ; ils ont au contraire réaffirmé le principe d’une réparation forfaitaire automatique, mais mieux individualisée, grâce notamment à l’homogénéisation de la prise en compte de l’incidence professionnelle du sinistre. Le Conseil constitutionnel, enfin, a jugé le 18 juin 2010 que le régime d’indemnisation AT-MP, excluant toute réparation intégrale, est conforme à la Constitution.

En matière d’indemnisation des victimes, notre pays n’a pas à rougir de la comparaison avec les autres pays européens. Plutôt que d’alourdir la branche avec de nouvelles charges, et les entreprises avec de nouvelles taxes, il convient de conduire une politique de renforcement de la prévention et de la réinsertion professionnelle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n454 rectifié n’est pas adopté.)

Article 54 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article 54.

Mme Jacqueline Fraysse. Je partage évidemment avec le rapporteur le souci de la prévention – qui n’est pas l’objet de ce débat – mais des accidents surviennent, en dépit de la prévention. Si la réparation intégrale est abandonnée faute de moyens, et si cet abandon est conforme à la Constitution, il n’est pas conforme, en revanche, à l’intérêt des salariés qui sont victimes de ces accidents et qui peuvent en pâtir toute leur vie.

Par ailleurs, je regrette que Mme la ministre ne réponde pas à la question que je lui ai posée concernant l’insuffisance de la compensation à la branche maladie, liée aux sous-déclarations des accidents du travail et des maladies professionnelles. C’est une question importante, et chacun sait que 790 millions ne suffisent pas. Envisage-t-on de corriger cette anomalie ?

(L’article 54 est adopté.)

Article 55 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Linda Gourjade, inscrite sur l’article 55.

Mme Linda Gourjade. Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, l’article 55 prévoit l’augmentation de 50 % en cinq ans du complément familial, prestation qui vise particulièrement les familles de trois enfants à faibles revenus. Son montant actuel est de 167 euros par mois, ses bénéficiaires profiteront d’une augmentation de 17 euros par mois chaque année et ce sont 400 000 familles qui seront concernées.

L’objectif de cette mesure est de renforcer l’aide aux familles les plus démunies. Je vous rappelle qu’en France, un enfant sur cinq vit dans une famille pauvre, et nous connaissons tous les conséquences que cela peut avoir sur ces enfants. Pour aider les familles les plus pauvres, bénéficiaires du RSA, cette prestation sera exclue du calcul de la base ressource, sur laquelle le RSA est calculé. Cette modification se fera par décret et j’espère, madame la ministre, que les délais de mise en œuvre seront rapides, pour que les familles concernées en bénéficient au plus vite.

M. le président. À l’article 55, je suis saisi d’un amendement n158 rectifié.

La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales de la commission des affaires sociales pour la famille, pour le soutenir.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales. Cet amendement est rédactionnel : je vous propose de retenir la rédaction qui figure depuis 2004 à l’article L. 531-2, relatif à l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant, qui est plus précise que celle introduite en 1977 pour le complément familial.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille. Avis favorable.

(L’amendement n158 rectifié est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure, pour soutenir l’amendement n204.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il s’agit également d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n204, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 55, amendé, est adopté.)

Article 56 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article 56.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 56 instaure la modulation de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE. Cette disposition, comme la limitation du quotient familial, s’inscrit dans une politique plus générale de remise en cause des fondements universalistes de notre politique familiale.

Celle-ci poursuit deux objectifs principaux. Historiquement, son objectif principal était de soutenir la natalité ; de ce point de vue, c’est un succès, puisque la France est le seul pays européen, avec l’Irlande, dont la natalité se maintient. Le deuxième objectif, peut-être un peu secondaire, est de redistribution, à la fois verticale, des ménages aisés vers les ménages modestes, et horizontale, des ménages sans enfants vers les ménages avec enfants. Une étude de l’INSEE montre que cette redistribution, même s’il s’agit d’un objectif secondaire par rapport à la natalité, a néanmoins un impact supérieur à celui de l’impôt sur le revenu.

Avec la remise en cause de l’universalisme des allocations familiales, les prestations familiales auront désormais surtout une fonction de redistribution verticale, au détriment de leur fonction nataliste et de leurs effets de redistribution horizontale.

Mme Bérengère Poletti. Tout à fait !

Mme Jacqueline Fraysse. Ce faisant, c’est évidemment le fondement même des prestations familiales qui est remis en cause, en rupture avec les éléments constitutifs de la Sécurité sociale, qui prônait l’universalité des prestations.

Mme Bérengère Poletti. Exactement !

Mme Jacqueline Fraysse. Cette orientation nous préoccupe.

M. le président. Nous passons à l’examen des amendements à l’article 55.

La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n609.

Mme Bérengère Poletti. L’article 55 modifie les conditions d’attribution de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant, ou PAJE, pour les enfants de moins de trois ans. Le montant de l’allocation de base, qui est aujourd’hui de 184 euros par mois pour les familles ne dépassant pas un certain plafond de revenu, va être divisé par deux pour 280 000 ménages.

Madame la ministre, j’ai la conviction profonde et sincère que la politique familiale n’est pas une politique sociale.

La politique familiale a donné d’excellents résultats en France, parce que, sur une très longue période, elle a permis aux femmes qui voulaient travailler de le faire, en les soutenant par des allocations familiales données par l’État.

L’une de vos collègues socialistes a évoqué en commission le cas de l’Allemagne, sur lequel je voudrais m’arrêter car il illustre parfaitement mon propos. En Allemagne, lorsqu’une femme a un enfant, il est très mal vu qu’elle travaille. Une pression sociale s’exerce sur les mères : on considère que lorsqu’elles en ont les moyens, il vaut mieux qu’elles restent chez elles et qu’elles s’occupent de leurs enfants. En France, on peut avoir des enfants et travailler, et je pense que la politique familiale que nous menons depuis des années contribue à cela. On ne tient pas compte du revenu des personnes ; on considère qu’une famille est une famille et qu’une femme doit être aidée pour faire garder ses enfants. Je trouve dangereux et dommage de mettre à mal cette politique familiale, dont nous pouvons être fiers et que tous les pays nous envient. Nous avons aujourd’hui un taux de natalité remarquable, qui est un atout pour la France, et nous risquons de le mettre à mal par l’introduction des politiques sociales dans la politique familiale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. L’allocation de base de la PAJE est une prestation sous conditions de ressources, mais quasi universelle. Son plafond d’exclusion est élevé et seulement 14 % des familles n’y ont pas droit – contre 52 % pour l’allocation de rentrée scolaire. L’instauration d’un second plafond rendra la prestation plus redistributive. Notre volonté est de faire en sorte qu’en fonction de l’évolution des familles, et notamment du niveau de pauvreté de beaucoup d’entre elles, on puisse retrouver une distribution plus juste. Il faut que tous les enfants aient les mêmes chances. Le nouveau plafond n’entraînera de baisse du montant versé que pour 10 % des bénéficiaires actuels, soit 180 000 ménages, et non pas 280 000, comme vous l’avez dit. Cette mesure est cohérente avec l’augmentation du montant du complément familial pour les familles les plus pauvres.

Il est nécessaire de prendre des mesures d’économies pour redresser les comptes de la CNAF ; mais, comme le montre cette mesure, le PLFSS opère le redressement des comptes dans la justice.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Ce qui est visé au travers de la politique familiale définie par le Premier ministre et le Gouvernement, c’est précisément d’assurer une meilleure redistribution et un meilleur ciblage des aides, au profit des familles les plus modestes, tout en garantissant la pérennité de la branche famille, dont le déficit n’a cessé de se creuser entre 2007 et 2012.

Je tiens également à souligner que cette mesure s’inscrit dans un plan d’ensemble et qu’elle ne doit pas être examinée de manière isolée. Plusieurs prestations familiales destinées à venir en aide aux foyers les plus démunis, telles que l’allocation de soutien familial et le complément familial, verront leur montant augmenter de façon très substantielle sur cinq ans. C’est un effort très important en direction des plus modestes, et l’ensemble de ces mesures participe d’une politique familiale équilibrée, rénovée et juste.

À propos de l’Allemagne, enfin, je voudrais tout de même appeler votre attention sur le fait qu’aujourd’hui, dans les familles les plus modestes, plus de 90 % des enfants sont gardés par leurs parents, ce qui est un véritable frein au retour à l’emploi de ces femmes. L’efficacité de la politique familiale française vient effectivement de ce que les femmes ne sont pas obligées de s’arrêter de travailler lorsqu’elles viennent d’avoir un enfant. Encore faut-il assurer aux femmes de tous les milieux sociaux la possibilité de faire ce choix : c’est ce à quoi nous travaillons.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Vous dites, madame la ministre, que ce dispositif n’est pas isolé et qu’il s’inscrit dans un plan d’ensemble. Mme Fraysse, Mme Poletti et vous-même avez toutes rappelé que la politique familiale française est un succès et qu’on nous l’envie. Or, il me semble qu’à travers le plan d’ensemble que vous évoquez, vous continuez de vous attaquer à la famille !

Vous avez commencé en 2012, avec la suppression du dispositif de paiement forfaitaire des cotisations sociales, qui permettait aux familles d’avoir recours à des aides à domicile ; vous avez poursuivi avec la réduction du quotient familial, qui est passé de 2 336 euros en 2011 à 2000 euros en 2012 et 1 500 en 2013, soit 836 euros de baisse en deux ans ; vous avez ensuite essayé de revenir sur la réduction d’impôt dont bénéficient les parents d’enfants lycéens ou étudiants, mais je crois que nous allons heureusement échapper à cette catastrophe ; et à présent vous diminuez le pouvoir d’achat de certaines familles, en réduisant leur allocation de 184 à 92 euros. Dès le mois de janvier, cette disposition va entrer en vigueur et 280 000 familles vont être privées de 92 euros, au titre d’une allocation de base. C’est très regrettable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Je rappellerai simplement qu’en 2012, l’allocation de rentrée scolaire a augmenté de 25 % : c’est une mesure positive en direction de la famille. Par ailleurs, dans la COG, la convention d’objectifs et de gestion entre la CNAF et l’État, deux mesures très importantes ont été mises en place pour favoriser l’accueil de la petite enfance.

Au-delà de l’accueil de la petite enfance dans la COG, le nombre de places en école maternelle pour les moins de trois ans va à nouveau augmenter alors que vous les aviez totalement supprimées. Les familles, c’est nous qui nous en occupons aujourd’hui, dans un souci d’équilibre.

Mme Poletti a donné l’exemple de l’Allemagne, et vous évoquez souvent l’importante natalité en France. Il est vrai que nous sommes le deuxième pays européen en termes de natalité, mais l’élan démographique n’est plus seulement fonction des prestations servies en espèces. La démographie est forte dans les pays qui ont mis en place une politique de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, et le lien est établi entre haut niveau d’emploi des femmes et le nombre élevé de naissances. C’est donc bien le modèle français qui fait école, et pas le modèle allemand, et ce modèle nous incite à ouvrir un nombre important de places d’accueil pour les jeunes enfants afin de favoriser la vie familiale et professionnelle.

Toute notre politique va dans ce sens : plus de justice, égalité entre hommes et femmes, résorption du déficit de la branche famille et soutien aux parents. Ce sont vraiment des axes de travail importants mis en œuvre par ce PLFSS et la COG qui a été signée il y a peu de temps entre la CNAF et l’État.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Madame la ministre, madame la rapporteure, faites très attention ! Nous parlons ici de jeunes couples qui commencent dans la vie. Ils ont souvent deux salaires qui peuvent sembler corrects pour vivre, mais ce sont de jeunes personnes qui démarrent et dont les revenus sont très sollicités, et qui essaient de mettre de l’argent de côté.

Vous venez déjà de les toucher dans leur épargne. Sachez que la colère gronde dans nos campagnes. M. Bapt l’a entendu, ce n’est pas pour rien qu’il a publié aujourd’hui un communiqué demandant au Gouvernement de revenir en arrière. Il a dû rentrer dans sa circonscription, ou bien on lui a fait dire que les gens étaient furieux.

Il en va de même dans le cas dont nous débattons. Les jeunes couples, les jeunes familles, les catégories moyennes, tous sont furieux. Pourquoi touchez-vous comme cela aux quelques revenus qu’ils ont ? Ils n’ont droit à rien, à aucune aide sociale. Ils avaient un petit peu d’aide parce qu’on les accompagnait quand ils fondaient une famille, qu’ils avaient des enfants qu’ils sont obligés de faire garder. La vie est difficile, et encore une fois vous les frappez. Ce que vous faites là est vraiment injuste, et j’espère que vous reviendrez en arrière.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. La rapporteure a indiqué qu’il existait un lien entre les familles qui disposaient d’un certain montant de revenus et le taux de natalité.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Le taux de natalité ne dépend donc pas uniquement des prestations !

Mme Véronique Louwagie. Je crois qu’il faut soutenir cette situation. Finalement, vous apportez de l’eau à mon moulin en indiquant que la réussite de cette politique familiale consiste à soutenir toutes les familles.

Je rejoins tout à fait les propos de ma collègue Bérangère Poletti, et comme je l’ai dit au ministre du budget hier, je considère que votre majorité a commis trois erreurs.

La première fût d’abroger la défiscalisation des heures supplémentaires. C’est une vraie difficulté. Je vais vous raconter une anecdote. Samedi dernier, j’assistais dans ma circonscription à la petite manifestation d’un club d’ULM. J’y ai rencontré une famille modeste qui pouvait s’offrir ce petit plaisir en consacrant chacun trois cents euros chaque année à ce loisir. Aujourd’hui, ils ne peuvent plus car il n’y a plus d’heures supplémentaires.

M. Matthias Fekl. Et combien d’emplois ont été créés ?

Mme Véronique Louwagie. La deuxième erreur de votre majorité, je l’ai signalée hier à M. Cazeneuve en espérant que la majorité et le Gouvernement allaient revenir sur cette disposition, c’est d’avoir créé une taxe rétroactive de 15,5 % sur l’ensemble des produits du type PEL, PEA et contrats d’assurance vie.

Et voici que vous commettez maintenant une troisième erreur en vous attaquant aux familles. Comme le disait Mme Poletti, ce sont des couples, des personnes qui ont des jeunes enfants, il faut les aider. Ce n’est pas facile lorsque les deux travaillent, il faut les aider. Il faut soutenir ces familles, et vous cassez ce dispositif.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Le groupe UDI soutiendra cet amendement. La politique familiale n’est pas une politique sociale, c’est une politique qui vise à aider les familles à élever leurs enfants. Cela n’a jamais été, depuis la guerre, basé sur les revenus familiaux, mais toujours sur une politique de natalité et de développement des familles leur permettant de travailler ou d’avoir d’autres activités.

Cet article est un coup de poignard dans le pacte républicain. Depuis toujours, l’ensemble des mouvements politiques se sont entendus sur le fait que la politique familiale ne devait pas être basée sur le revenu. Vous revenez aujourd’hui sur ce point, c’est un coup de poignard dans le pacte républicain qui existe depuis la guerre.

Mme Véronique Louwagie. C’est le troisième du mandat !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Je ne peux pas laisser passer un certain nombre d’affirmations.

En premier lieu, vous dites que la politique familiale est un grand succès, c’est vrai à condition qu’on ne laisse pas se creuser le déficit de la branche famille. Car je ne connais pas de politique qui ait un avenir si l’on ne réduit pas les déficits. Plus le déficit se creuse et moins l’on peut consacrer d’argent à des investissements d’avenir tels que le développement des places d’accueil, des places en crèche collectives, des places auprès des assistantes maternelles, ou le développement de la préscolarisation des enfants de deux à trois ans qui permet de corriger très rapidement de futures inégalités qui seraient très coûteuses pour la nation.

Je trouve assez étonnant de la part de l’opposition, qui appelle toujours à plus de rigueur et moins de dépenses, de vouloir laisser le déficit se creuser.

Mme Bérengère Poletti. Les deux ne sont pas incompatibles !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Ce n’est pas notre volonté, nous estimons au contraire que si l’on veut assurer la pérennité de la politique familiale, il faut précisément traiter aussi le problème du déficit de la branche famille.

S’agissant de l’universalisme, le principe d’universalité des allocations familiales n’est absolument pas remis en cause, le Gouvernement a fait ce choix.

Il faudrait raisonner en fonction des attentes des familles d’aujourd’hui. Ce ne sont pas simplement des attentes en termes de prestations financières. Les attentes portent aussi sur l’universalité dans l’accès aux services. Aujourd’hui, toute famille veut pouvoir accéder à une place en crèche. Au vu de ce qui a été fait sous la législature précédente en matière de correction des inégalités territoriales et sociales pour l’accueil des jeunes enfants, qui défend aujourd’hui les familles, si ce n’est nous qui assurons une forme d’universalisme en offrant effectivement les mêmes services à toutes les familles ?

Monsieur Vercamer, vous avez parlé d’élever les enfants. Vous avez raison, il faut effectivement donner à tous les milieux sociaux les moyens de bien élever leurs enfants. Or jusqu’à présent, la politique familiale, par ses prestations financières, rapporte plus, après impôts, à des familles aisées qu’à des familles modestes. Est-ce de la justice ? Est-ce une façon de reconnaître l’ensemble des familles ? Nous ne le pensons pas.

S’agissant de l’abaissement du quotient familial, nous n’allons pas faire pleurer sur une mesure qui n’affecte pas 88 % des familles. Elle ne touche que les 12 % des familles les plus aisées. Faut-il rappeler que le revenu médian des salariés tourne aujourd’hui autour de 1 600 euros ?

Les familles composées d’un couple avec deux enfants vont commencer à être touchées lorsque le revenu du couple atteint près de 5 800 euros. Le fait que la politique familiale soit effectivement orientée aujourd’hui vers plus de justice sociale et l’universalité des services permettra de garantir l’efficacité et la performance de notre politique familiale.

(L’amendement n609 n’est pas adopté.)

(L’article 56 est adopté.)

Article 57 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article supprime le complément libre choix d’activité majoré, et je considère qu’avec la modulation de la PAJE prévue à l’article précédent, ces dispositions mettent en cause le fondement de notre politique familiale.

Les prestations familiales font partie intégrante du salaire socialisé, et la remise en cause des cotisations employeurs ainsi que l’annonce d’une réflexion sur un changement d’assiette sont en réalité une baisse de ce salaire socialisé, et donc une baisse des moyens financiers pour les familles.

Bien sûr, nous ne contestons pas qu’il faille aider davantage les familles les plus modestes mais nous considérons que les moyens existent pour qu’elles soient aidées davantage sans remettre en cause le fondement de la politique familiale et sans que les aides accordées aux familles un peu moins modestes soient remises en cause.

Il y a beaucoup d’argent dans ce pays qui ne sert à rien sauf à la spéculation, et qui pourrait être utilisé pour ne pas déshabiller les uns pour aider davantage les autres, mais pour aider tout le monde davantage et construire des places en crèche. Car vous avez raison, madame la ministre, c’est très important et nous en manquons.

Vous parlez du seuil que vous avez mis en place, mais nous ne sommes pas dupes. Il est vrai qu’à l’étape actuelle, 88 % des familles ne seront pas touchées, et seules les 12 % les plus aisées seront affectées. Mais nous considérons que ce seuil, fixé par décret, va bouger. Et les prestations familiales vont devenir la variable d’ajustement de la branche famille. Ce seuil descendra bientôt jusqu’aux classes moyennes, nous n’en doutons pas.

Mme Bérengère Poletti et M. Francis Vercamer. Bien sûr !

Mme Jacqueline Fraysse. Je rappelle que c’est l’impôt qui devrait être l’instrument de redistribution, et non pas les prestations familiales.

Mme Bérengère Poletti. Vous avez raison, madame Fraysse !

Mme Jacqueline Fraysse. Je me demande s’il ne faut pas voir dans cette réforme des prestations familiales un renoncement à mettre en œuvre la grande réforme fiscale qui était promise par notre président et qui permettrait de réhabiliter l’impôt sur le revenu pour en faire le principal instrument de redistribution dans un cadre juste.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n610.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement tend à supprimer l’article 57, qui supprime le complément libre choix d’activité majoré pour les familles qui dépassent le plafond pour bénéficier de l’allocation de base, faisant ainsi largement baisser la rémunération du complément de libre choix d’activité, pourtant déjà faible.

En outre, il est totalement illogique que, dans le projet de loi sur l’égalité entre hommes et femmes, le Gouvernement affiche l’objectif de rendre attractif le recours au complément de libre choix d’activité pour les hommes, et que dans le même temps il en réduise la rémunération.

Cette mesure s’ajoute à l’ensemble des dispositifs déjà critiqués : la baisse du quotient familial, la baisse de l’allocation de base pour 280 000 ménages, la suppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité et toutes les hausses d’impôts de ces derniers mois qui vont peser lourdement sur le budget des ménages.

C’est de plus une nouvelle brèche dans notre politique familiale, qui devrait pourtant être un investissement dans l’avenir de notre pays. C’est pourtant grâce à cette politique que notre natalité est nettement plus élevée que dans la plupart des pays européens et également répartie dans les couches sociales.

Par ailleurs, la ministre vient de justifier les prises de position du Gouvernement par la situation du déficit de la branche famille. On peut regretter à cet égard la décision du Gouvernement de revenir en arrière sur les modalités de financement de la branche famille.

Je vous rappelle que lors du précédent mandat, il avait été prévu d’avoir recours à la TVA sociale et de supprimer la cotisation d’allocation familiale de 5,4 % calculée sur l’ensemble des revenus.

Nous aurions pu apporter ainsi une réponse à la nécessité d’équilibrer la branche famille sans attaquer les dépenses comme vous le faites.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement.

Aujourd’hui, le montant du complément de libre choix d’activité est majoré lorsque le bénéficiaire ne perçoit pas l’allocation de base de la PAJE, laquelle est soumise à un plafond de ressources. Il s’agit donc d’un avantage réservé aux familles les plus aisées : seuls 14 % des allocataires sont des bénéficiaires potentiels de l’allocation de base de la PAJE.

Mme Véronique Louwagie. Et alors ? Ce n’est pas une raison pour supprimer cet avantage !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. C’est une injustice ! Je refuse l’inversion de la logique de la redistribution ! Certaines familles n’ont pas droit à l’allocation de base de la PAJE parce que leurs revenus dépassent un plafond ; or, si elles demandent le CLCA, on leur majore cette aide à hauteur de l’allocation à laquelle elles n’ont pourtant pas droit. Ce n’est pas ce qui devrait se faire ! On observe souvent un effet d’aubaine : de nombreuses familles dont le CLCA est majoré auraient réduit leur activité en tout état de cause.

Par ailleurs, je tiens à préciser que le montant du CLCA non majoré n’est pas modifié.

Enfin, comme je l’ai déjà indiqué en commission, la suppression de la totalité de l’article 57 supprimerait également les mesures de simplification de l’attribution du CLCA pour les non-salariés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Il est défavorable. Madame Louwagie, vous critiquez la suppression du CLCA majoré ; or, comme l’a expliqué très justement Mme la rapporteure, il s’agit de rétablir l’effectivité du principe de mise sous conditions de ressources de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant, et de respecter le principe selon lequel cette allocation ne peut être versée qu’aux familles dont les ressources sont inférieures à un certain plafond.

Comment justifier que les bénéficiaires du CLCA, qui ne perçoivent pas l’allocation de base du fait de ressources trop élevées, perçoivent une majoration de CLCA égale à l’allocation de base à laquelle ils n’ont pas droit ? Vous le voyez bien : cette situation est incohérente et injuste. Je rappelle que cette mesure bénéficie à 16 % des familles appartenant aux déciles de revenus les plus élevés.

Pour l’ensemble de ces motifs, le Gouvernement est défavorable à cet amendement de suppression.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Madame la ministre, vous n’arriverez pas à nous faire croire que les jeunes couples et les jeunes familles sont dans des situations enviables : nous savons bien qu’ils connaissent des difficultés ! Avec cet article, comme le disait ma collègue Véronique Louwagie, vous ne faites que confirmer la remise en cause de l’universalité des aides familiales, que vous voulez transformer en aides sociales.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Non !

Mme Bérengère Poletti. Vous commencez timidement en prétendant vous attaquer aux plus riches, mais ce n’est que le début ! Vous vous attaquez une fois de plus aux politiques familiales : ce n’est pas la première mesure qui nous pousse à nous demander si vous aimez vraiment les familles. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Denys Robiliard. Vous n’avez pas le monopole de la famille !

M. Michel Pouzol. Ni de l’amour ! (Sourires.)

(L’amendement n610 n’est pas adopté.)

(L’article 57 est adopté.)

Articles 58 et 59 (précédemment réservés)

(Les articles 58 et 59 sont successivement adoptés.)

Après l’article 59 (amendements précédemment réservés)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n159 tendant à introduire un article additionnel après l’article 59.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps mon amendement n453.

M. le président. Je vous en prie, madame la rapporteure.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. J’ai examiné dans mon rapport la contribution des associations familiales à notre politique familiale. Ancrées dans la longue histoire des mouvements d’entraide familiale, elles apportent, depuis la base, des réponses aux besoins des familles. Or l’action des associations est structurée par des unions départementales et nationale, les UDAF et l’UNAF, organisées par la loi. Les unions sont des institutions semi-publiques qui représentent les familles auprès des pouvoirs publics et doivent apporter un appui aux associations familiales dans leur diversité. Elles disposent d’un financement public, le fonds spécial, versé par la CNAF et la MSA, dont le montant et les modalités de revalorisation ont été définis en dernier lieu dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2005.

La loi a scindé le fonds spécial en deux parts. La première finance les activités institutionnelles des unions, notamment de représentation des familles ; elle représente 80 % de l’ensemble, soit environ 22 millions d’euros en 2013. La seconde part finance des actions conduites en faveur des familles définies par voie de convention avec le ministère des affaires sociales ; elle représente seulement 20 % du fonds, soit 6 millions d’euros répartis entre une centaine d’UDAF. La loi a prévu l’indexation de chaque part du fonds. L’indexation de la seconde part est un peu plus dynamique que celle de la première, car il s’agit de donner de façon progressive une place croissante aux activités menées par les UDAF en soutien de projets associatifs à but familial.

La réforme de 2005 a inscrit les unions dans une voie prometteuse, mais elle mérite d’être approfondie. Malgré les nouveaux dispositifs, la baisse du nombre de familles adhérentes – moins 12 % en dix ans – se poursuit. Le partenariat avec la puissance publique devrait être pleinement mis à profit pour aider les unions à jouer leur rôle d’appui aux associations familiales, afin de mieux repérer les besoins de toutes les familles, dans leur diversité.

Après nos débats en commission, il m’apparaît que l’essentiel est bien de faire progresser le partenariat entre l’UNAF et l’État. Je vous propose donc, mes chers collègues, de demander au Gouvernement d’examiner les effets de la réforme de 2005. Sur la base d’un rapport remis par le Gouvernement, le Parlement pourra améliorer les modalités de financement et de partenariat avec les unions d’associations familiales.

J’ai présenté en commission une mesure de court terme : la non-revalorisation dès 2014 de la première part du fonds spécial. C’est une solution pour augmenter mécaniquement la seconde part du fonds, mais je pense qu’il conviendra de l’examiner de façon globale dans le cadre de la réforme du fonds spécial. Dès lors, je retire l’amendement n159 et maintiens uniquement l’amendement n453, qui demande au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement avant le 1er juin 2014.

M. Jean-Pierre Dufau et M. Gérard Sebaoun. Très bien !

(L’amendement n159 est retiré.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n453 ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Conformément à la mission que lui confie la loi, l’UNAF représente plus de 700 000 familles dans 130 institutions et commissions nationales. Cet organisme a su structurer un réseau décliné aux niveaux régional et départemental, à travers les URAF et les UDAF auxquelles adhèrent près de 7 000 associations.

Pour l’exercice de cette mission, la loi prévoit un financement de l’UNAF par la branche famille, par l’intermédiaire du fonds spécial des associations familiales. Le montant de ce fonds, qui s’élève en 2013 à près de 28 millions d’euros – soit une progression de 1,5 % par rapport à 2012 –, est déterminé au prorata du montant des prestations familiales versées l’année précédente par la CNAF et la MSA. 20 % du montant total de ce fonds sont destinés à financer des actions définies dans une convention d’objectifs conclue entre l’État et l’UNAF. Une convention pour 2013 et 2014 a été signée le 24 avril 2013.

L’amendement que vous maintenez, madame la rapporteure, témoigne de votre souci d’employer ces moyens de la manière la plus efficiente pour la représentation des familles et pour les actions à leur service, dans le contexte de forte contrainte qui pèse sur l’ensemble des finances publiques. Ce souci, que le Gouvernement partage, sera au cœur de la préparation de la nouvelle convention d’objectifs devant être signée avant le 1er janvier 2015.

Comme il est d’usage pour la préparation de ce type de convention, une mission sera confiée à l’Inspection générale des affaires sociales, qui réalisera un bilan de l’action des unions d’associations familiales et de la réforme du fonds spécial intervenue en 2005, en vue de travailler avec l’UNAF à toutes les pistes de progrès. Cette démarche me semble répondre aux préoccupations que vous avez exprimées, madame la rapporteure : c’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Nous sommes ravis du retrait de l’amendement n159 : certes, la commission avait émis un avis favorable, mais les députés du groupe UMP avaient voté contre cet amendement qui conduisait à réduire des fonds à destination du mouvement familial présent sur tout le territoire pour aider les familles.

À travers votre amendement n453, madame la rapporteure, vous laissez entendre que le mouvement familial serait financé par la branche famille sans aucun contrôle. Vous parliez d’un besoin de partenariat : Mme la ministre vous a répondu en précisant qu’une mission serait confiée à l’IGAS.

Depuis 2005, l’UNAF est soumise chaque année à un contrôle, via la réunion de la commission d’évaluation et de contrôle présidée par un membre de l’IGAS et dans laquelle sont représentés les ministères des finances, de la famille et des affaires sociales. Il s’agit non seulement d’un contrôle des comptes, mais également d’un contrôle des procédures et des actions menées sur l’ensemble des deux parts du fonds spécial. On peut même se demander quel autre secteur associatif est soumis aujourd’hui à un tel contrôle : il n’y en a pas ! Je ne perçois donc pas du tout l’intérêt de votre amendement, madame la rapporteure, dans la mesure où des contrôles existent déjà.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. L’amendement n453 ne parle pas du tout de contrôle : il vise simplement à évaluer l’efficience de la réforme que la majorité précédente a mise en œuvre en 2005. Je n’ai jamais évoqué ni employé de terme qui pourrait faire penser à un contrôle. Arrêtons-nous au texte de l’amendement que j’ai déposé : je ne vais pas le relire car il est déjà tard et certains d’entre nous souhaitent rentrer chez eux. (Sourires.)



Cela étant, Mme la ministre s’est engagée à confier à l’IGAS la rédaction d’un rapport dans le but de poursuivre le partenariat entre l’UNAF et l’État. Au vu de cet engagement, je retire l’amendement n453.



Mme Véronique Louwagie. Nous en sommes très satisfaits !

(L’amendement n453 est retiré.)

Article 60 (précédemment réservé)

(L’article 60 est adopté.)

Après l’article 60 (amendement précédemment réservé)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n211 tendant à introduire un article additionnel après l’article 60.

M. Francis Vercamer. Le Gouvernement a mis en place une réforme des rythmes scolaires. Dans ce cadre, il a demandé aux collectivités territoriales de mettre en place des activités périscolaires, lesquelles sont habituellement financées par la caisse d’allocations familiales, par le biais de prestations de services et du projet « Enfance jeunesse » lorsqu’un contrat de ce type a été conclu entre les communes et les CAF.

À la demande des maires, le Gouvernement a pris, à titre expérimental, un décret permettant de diminuer le taux d’encadrement de ces activités périscolaires. Or la CAF a décidé de ne pas en tenir compte et de ne pas financer les activités périscolaires assurées avec un taux d’encadrement réduit, et donc à un coût moindre pour les communes. Ainsi, les caisses d’allocations familiales participent au financement de ce type d’activités, à l’exclusion des trois heures organisées dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires. Il me paraît assez cavalier que la CNAF et les caisses d’allocations familiales refusent de financer des activités périscolaires couvertes par un décret pris par le Gouvernement et cosigné par la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative.

Par ailleurs, la réforme des rythmes scolaires va générer, pour les communes, un certain nombre de coûts que les caisses d’allocations familiales se sont engagées à financer à hauteur de 54 euros par enfant et par an. Quelle est la part prise par la CAF dans le coût total porté par les communes ? Quel est l’impact de ces dépenses sur le budget des caisses d’allocations familiales ? En effet, cette réforme présente un coût certain, d’autant que sa généralisation est prévue en 2014 – en tout cas, c’est ce qui est décidé à l’heure actuelle.

Il me paraîtrait donc intéressant de disposer d’un rapport sur les conditions de participation des caisses d’allocations familiales au financement des activités périscolaires mises en œuvre par les communes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. La réforme des rythmes scolaires est mise en œuvre depuis quelques mois seulement : le rapport demandé me semble donc prématuré.

La CNAF accompagne effectivement la réforme des rythmes éducatifs depuis la rentrée 2013, tout en continuant de participer au financement des activités périscolaires de droit commun.

L’implication de l’ensemble des CAF représente un effort considérable de 163 millions pour la période 2013-2014, puis 250 millions d’euros par an à partir de 2015, soit près de 913 millions d’euros entre 2013 et 2017. Les critères d’éligibilité à la prestation de services d’accueil, de loisirs sans hébergement périscolaires sont inchangés. Les communes qui percevaient déjà la prestation de services ordinaire périscolaire ne perdent donc rien. Par rapport aux nouvelles formes d’accueil relevant d’un projet éducatif territorial, il peut exister des différences en matière de taux d’encadrement, qui ont une incidence sur les coûts. Les différentes configurations seront évaluées dans le cadre de la COG. Certaines communes ont d’ailleurs choisi d’avoir un taux d’encadrement supérieur à celui qui est imposé.

Avis défavorable donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Alors que la réforme des rythmes scolaires a commencé à se mettre en œuvre le 1er septembre – nous sommes les 25 octobre – vous voudriez déjà qu’il y ait un rapport sur la façon dont les caisses d’allocations familiales participent, ou ne participeraient pas selon vous, à cette réforme. Permettez-moi de vous rappeler quelques éléments, plus que factuels, qui visent à soutenir les communes qui se sont engagées la réforme des rythmes éducatifs. Le financement emprunte deux voies. La CNAF a d’une part participé au financement du fonds d’amorçage au titre de l’année 2014 pour un montant de 62 millions d’euros. À titre pérenne, la branche famille participe depuis la rentrée scolaire 2013 au financement de la réforme des rythmes éducatifs par une prestation de services spécifiques pour les accueils déclarés, les heures d’accueil périscolaires induites par la réforme. Le montant prévisionnel de cette dépense s’élève à 250 millions d’euros par an à compter de 2015 avec une montée en charge progressive entre 2013 et 2014. Il s’agit d’une dépense nouvelle d’un montant de 850 millions d’euros pour la durée de la convention d’objectifs et de gestion. Le bénéfice de cette prestation est cumulable avec les aides versées au titre du fonds d’amorçage. Une commune entrée dans la réforme en septembre peut donc, au minimum, bénéficier d’une aide de 104 euros par enfant, par élève, 50 euros au titre du fonds d’amorçage, 54 euros au titre de la CNAF et, pour peu, qu’elle se situe dans des zones bien spécifiques, elle se voit allouer 40 euros supplémentaires, soit un total de 144 euros.

Vous faites état de difficultés ou d’interrogations de la part des communes, monsieur le député. Vous n’êtes pas sans savoir que le Président de la République comme le Premier ministre sont soucieux de contribuer au perfectionnement de la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. Un groupe réunissant l’État, la CNAF, mais aussi l’AMF a entamé ses travaux depuis quelques jours et s’est réuni pour la première fois mercredi 23 octobre. La mission de ce groupe de travail est d’aborder l’ensemble des questions de financement posées à chacun des acteurs de la réforme des rythmes éducatifs. Par ailleurs, il existe déjà un comité de suivi de la réforme mis en place sous l’égide du ministère de l’éducation nationale.

Qu’apporterait le rapport au Parlement que vous sollicitez ? Cela ne semble pas être le bon outil, c’est-à-dire un outil qui pourrait être efficace pour la mise en œuvre de la réforme dans les meilleures conditions possibles et sur l’ensemble du territoire. Les communes qui se sont engagées dans cette réforme ont fait preuve le plus souvent d’une grande efficacité dans l’organisation d’activités périscolaires, ce qui leur a grandement facilité le passage à la réforme des rythmes éducatifs. Les CAF n’ont donc pas à rougir de leur investissement dans la meilleure application de cette réforme.

M. le président. La parole est à Mme la Présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Votre demande, monsieur Vercamer, sera satisfaite. Si mes souvenirs sont bons, nous avons décidé au bureau de la commission la création d’une mission sur les caisses d’allocations familiales et je pense que vous en serez le président ; le rapporteur sera M. Christian Hutin. Vous aurez donc tout le loisir, pendant six mois, de voir ce qui se passe dans les caisses d’allocations familiales. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Je remercie Mme la présidente de la commission d’annoncer officiellement cette nomination.

Mme Véronique Louwagie. Très bien.

M. Francis Vercamer. Jusqu’à présent, je n’en avais entendu parler qu’en privé.

Mais ma question était plus vaste, madame la ministre. Le décret autorise un allégement de l’encadrement des enfants. La CAF participe au financement des activités périscolaires liées à la réforme des rythmes scolaires, mais ne finance pas à la même hauteur les activités périscolaires relevant du régime de droit commun. La CAF va, de fait, dépenser plus d’argent. Si l’on allège l’encadrement, cela coûte moins cher aux communes. Or comme la CAF participe de manière proportionnelle aux coûts, si cela coûte moins cher à la commune, cela coûte moins cher à la CAF. Et la CAF refuse, si bien qu’elle dépense plus d’argent qu’elle ne devrait. Aujourd’hui, la CAF ne veut pas tenir compte du décret pris par le Gouvernement. C’est pour le moins cavalier de la part d’un tel établissement.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. L’amendement de notre collègue Vercamer est un excellent amendement car il s’agit d’un sujet sensible. Il pourrait même rendre service au Gouvernement dans la mesure où un rapport remis au Parlement contribuerait à un effort de transparence, de communication et d’information des députés. En effet, madame la ministre, les choses ne se passent pas aussi bien que vous le dites sur le terrain, alors même que des communes étaient volontaires. Dans ma circonscription, dans le département des Ardennes, deux communautés de communes ont, avant la mise en œuvre de la réforme, procédé à une évaluation de son coût. L’estimation financière les a effrayées au point de demander à pouvoir se retirer de l’expérimentation, ce qui leur fut refusé. Le résultat, c’est que l’on fait maintenant de la garderie dans les écoles.

La commission des affaires sociales sera, certes, informée par les travaux de la mission, mais elle mériterait de l’être également par le biais d’un rapport. Car le problème de la réforme est davantage une question de coût que de fond. En cette période d’expérimentation, il serait donc intéressant d’évaluer les coûts de la mise en œuvre de la réforme et de voir comment les communes ou communautés de communes volontaires ont dépensé les moyens publics qui leur ont été accordés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Je ne peux pas laisser dire que les caisses d’allocations familiales décident au petit bonheur la chance ce qu’elles versent ou ne versent pas : les taux sont définis dans le code de l’action sociale et des familles. Vous connaissez parfaitement les règles de versement des CAF en ce qui concerne les activités périscolaires. Ne confondez pas ce qui relève des activités périscolaires traditionnelles et ce qui relève de la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires. Il ne s’agit pas de dévoyer le fondement même de la réforme des rythmes scolaires : les heures libérées doivent permettre à des enfants, qui n’avaient jusqu’à présent pas accès à un certain nombre d’activités, d’y accéder. Beaucoup de communes qui se sont lancées dans l’expérimentation n’évoquent pas le problème du financement, je vous le dis très clairement. Ce problème peut se poser pour de petites communes et des communes rurales sur lesquelles…

Mme Bérengère Poletti. Oui.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. …le groupe mis en place avec l’AMF est en train de travailler. Mais tirer des généralités à partir de situations particulières, c’est méconnaître ce qui est en train de se mettre en place et laisser croire que la caisse d’allocations familiales change ses modalités de financement des activités périscolaires, ce qui n’est pas le cas. Ne confondons pas les activités qui relèvent du temps éducatif et celles qui relèvent du temps périscolaire, pour lesquelles la CAF maintient ses prestations comme elle les a toujours assumées jusqu’à présent.

(L’amendement n211 n’est pas adopté.)

Article 61 (précédemment réservé)

(L’article 61 est adopté.)

Article 62 (précédemment réservé)

M. le président. L’amendement n317 de M. Bapt ayant été adopté lors de la réunion de la commission au titre de l’article 88, la parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure, pour le soutenir.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n317, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Article 63 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n312.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n312, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n313.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n313, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 63, amendé, est adopté.)

Article 64 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l’article.

Mme Jacqueline Fraysse. Je ferai une ultime intervention à la fin de ce grand débat. L’article 64 qui prévoit l’unification de la gestion par la MSA des prestations des branches Amexa – assurance maladie des travailleurs agricoles – et Atexa – accidents du travail des travailleurs agricoles – va dans le bon sens. Il améliorera la qualité du service en créant un guichet unique et l’efficience de la gestion de la protection sociale des travailleurs agricoles. Cependant, avec mes collègues André Chassaigne et Alain Bocquet, je souhaite appeler votre attention sur les préoccupations que suscite cet article chez les salariés des sociétés d’assurance qui géraient jusqu’alors ces branches. Ils s’inquiètent des conséquences d’une décision prise sans consultation préalable des acteurs concernés, j’entends les assurés et les instances statutaires des associations. Ainsi, plus de deux cent cinquante salariés d’Apria RSA seraient touchés par cette décision et restent encore à ce jour dans l’ignorance de la situation qui serait désormais la leur. Ces questions sont d’autant plus importantes que – soulignent les personnels concernés – les perspectives envisagées conduiraient à la suppression de la liberté de choix des assurés et retireraient à chacun des assureurs membres des associations l’autorisation donnée par les pouvoirs publics de gérer ces deux régimes.

La MSA dans son avis sur le PLFSS s’en est d’ailleurs également inquiété. Prenant acte de l’annonce du transfert à la MSA des personnels dédiés à ces activités, elle indique que cette intégration nécessitera des moyens en termes de formation et d’aides à la mobilité. Je souhaite, madame la ministre, que vous puissiez me donner des précisions quant à l’accompagnement par les pouvoirs publics de ce transfert.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n352, tendant à supprimer l’article 64.

Mme Bérengère Poletti. L’article 64 du projet de loi prévoit de confier à la MSA la totalité de la gestion des branches maladie – Amexa – et accidents du travail – Atexa – des exploitants agricoles.

Cette mesure n’est ni justifiée dans son principe, ni fondée sur une analyse qui démontrerait son utilité générale. L’organisation de ces deux régimes agricoles ne peut être rayée d’un trait.

La mesure proposée supprimerait un principe fondateur de l’organisation de la protection sociale des exploitants agricoles, inscrit dans le code rural : la liberté de choix de leur assureur, selon des conditions d’habilitation prévues par la loi L. 731-30 et L. 752-13.

Les exploitants agricoles sont très attachés à ce principe en raison de la qualité de service qu’il induit. Ils sont aujourd’hui 35 000 à avoir choisi Apria pour la gestion de leurs prestations maladie – Amexa – et 250 000 pour la gestion de leurs prestations accidents du travail – Atexa. Depuis plus de cinquante ans, les organismes délégués démontrent leur efficacité en matière de gestion. À titre d’exemple, le taux de recouvrement d’Apria est de six points supérieur à celui de la MSA.

Les références citées dans l’exposé des motifs de l’article 64 sont mal fondées.

Dans son rapport de 2006, la Cour des comptes suggérait certes le transfert de la branche maladie à la MSA, mais préconisait aussi le transfert de la branche accidents du travail à Apria, en raison de sa forte implication en ce domaine. En outre, elle indiquait que « la réduction des frais de gestion découlant de la suppression de la liberté de choix de l’assureur est hypothétique ».

Dans un autre rapport de 2013, relatif aux délégations de gestion du régime général au bénéfice des mutuelles de la fonction publique et des mutuelles étudiantes, la Cour des comptes vantait les mérites de la pluralité de choix en proposant d’introduire « une liberté d’option » pour ces assurés.

En outre, le rapport conjoint de l’IGAS et d’IGF, cité dans l’exposé des motifs, ne traite absolument pas de la branche accidents du travail des exploitants agricoles, ni du recouvrement.

En tout état de cause, l’efficience alléguée de la mise en place de cette mesure est insuffisamment documentée. Or toute réforme mal évaluée et mal préparée dans le secteur de la protection sociale coûte en définitive très cher. Le précédent récent du RSI le montre. Cela doit être à nouveau évité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Avis défavorable.

La dualité des opérateurs entraîne des dysfonctionnements nombreux. Les coûts de gestion sont plus élevés et le contrôle plus aléatoire. Le nombre d’exploitants agricoles affiliés aux assureurs privés diminue depuis dix ans dans la branche maladie comme dans la branche AT-MP. En matière de maladie, seuls 7 % des non-salariés sont affiliés à un assureur privé.

La Cour des comptes a constaté depuis 2006 le caractère marginal de cette gestion déléguée et propose de la confier entièrement à la MSA. En matière d’AT-MP, elle a noté que le taux de recouvrement d’Atexa était insuffisant et que la gestion des réseaux privés n’était pas assez rigoureuse.

Contrairement à ce qu’indique l’exposé sommaire de votre amendement, madame Poletti, la Cour n’a jamais préconisé de confier la totalité de la gestion aux assureurs privés. Au contraire, dans son rapport de 2007, elle proposait de confier à la MSA la totalité de la couverture AT-MP.

Supprimer cet article reviendrait à maintenir une situation coûteuse pour la branche.

Précisons, pour finir, que les assureurs seront indemnisés après établissement du préjudice, au terme d’une procédure contradictoire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je voudrais réagir aux arguments de Mme la rapporteure. La dualité des caisses entraînerait des dysfonctionnements, a-t-elle affirmé. Je ne crois pas qu’il y ait eu des dysfonctionnements ; en tout cas il n’en a jamais été fait état.

En revanche, il est bien connu qu’il existe des dysfonctionnements au sein du RSI dont la création a reposé sur un regroupement de la branche maladie, de la branche allocations familiales et de la branche retraite.

Mme la rapporteure a indiqué que la Cour des comptes avait suggéré dans son rapport le transfert de la branche accidents du travail vers la MSA. Il faut savoir aussi qu’elle vante les mérites de la pluralité de choix. Elle propose notamment d’introduire une liberté d’option pour ces assurés. Je vous renvoie au rapport de 2013.

Enfin, la branche accidents du travail est une branche très particulière, qui réclame une connaissance spécifique de la part de professionnels.

(L’amendement n352 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 531, 552 et 586, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme la rapporteure, pour les soutenir.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il s’agit d’amendements rédactionnels, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n531 est adopté.)

(L’amendement n552 est adopté.)

(L’amendement n586 est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n810.

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement vise à donner à la MSA le monopole du service des indemnités journalières dès le 1er janvier 2014.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j’y suis favorable : il s’agit d’un simple amendement de précision.

(L’amendement n810 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements, nos 587, 588, 623, 589, 590 rectifié, 591, 592, 593 et 594, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme la rapporteure, pour les soutenir.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il s’agit d’amendements rédactionnels.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements ?

(Les amendements nos 587, 588, 623, 589, 590 rectifié, 591, 592, 593 et 594 sont successivement adoptés.)

(L’article 64, amendé, est adopté.)

Vote sur l’ensemble de la quatrième partie

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la quatrième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014.

(L’ensemble de la quatrième partie du projet de loi est adopté.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des articles du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014.

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi auraient lieu le mardi 29 octobre, après les questions au Gouvernement.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Au terme de ces quatre jours de débats, je voudrais saluer l’engagement de chacune et de chacun, quels que soient les bancs d’où ils se sont exprimés.

Je tiens à remercier tous les rapporteurs : Mme Clergeau, Mme Pinville, M. Paul, ici présents, mais aussi Mme Rabault, M. Bapt, M. Marcangeli, M. Issindou,.

Je voudrais, bien évidemment, saluer le travail effectué en commission, malgré des débuts difficiles, que je regrette, je vous le redis.

Je salue également la présidente de la commission des affaires sociales et je remercie les services des commissions pour leur mobilisation.

Monsieur le président, vous me permettrez de vous remercier ainsi que les autres vice-présidents pour la manière dont les débats ont été conduits.

À titre personnel et au nom du Gouvernement, je me réjouis qu’avec l’opposition, nous ayons pu nous retrouver sur certains sujets qui ont donné lieu à des votes communs. Je salue aussi le travail positif et constructif des députés de la majorité qui a permis d’améliorer de façon très significative le travail du Gouvernement sur un grand nombre de points que je ne peux énumérer tant ils sont nombreux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, mardi 29 octobre, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Vote solennel sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 ;

Discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2014 :

Débat sur l’égalité hommes-femmes.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance



de l’Assemblée nationale



Nicolas Véron