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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2016-2017

Compte rendu
intégral

Première séance du mardi 08 novembre 2016

SOMMAIRE

Présidence de M. Claude Bartolone

1. Hommage au maréchal des logis-chef Fabien Jacq

2. Questions au Gouvernement

Mouvement des personnels hospitaliers

M. Alain Marty

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Lutte contre la fraude fiscale

M. Romain Colas

M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances

Acquisition d’œuvres par les musées nationaux

M. Alain Tourret

Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication

Mouvement des personnels hospitaliers

M. Nicolas Sansu

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Assurance emprunteur

M. Charles de Courson

M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances

Accueil des migrants dans les communes

Mme Laurence Arribagé

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Mesures pour le tourisme

M. Éric Elkouby

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international

Inégalités salariales entre les femmes et les hommes

Mme Catherine Coutelle

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes

Mesures en faveur des forces de l’ordre

M. Rémi Delatte

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Mouvement des personnels hospitaliers

M. Patrick Weiten

M. Manuel Valls, Premier ministre

Impôt de solidarité sur la fortune

M. Jacques Myard

M. Manuel Valls, Premier ministre

Situation en Turquie

M. François-Michel Lambert

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international

Service des urgences de l’hôpital de Thann

M. Michel Sordi

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Politique du logement

Mme Audrey Linkenheld

Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable

Situation des professeurs de français langue étrangère

M. Thierry Mariani

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Suspension et reprise de la séance

Présidence de M. Marc Le Fur

3. Fixation de l’ordre du jour

4. Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique - Compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte

Présentation commune

M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances

M. Sébastien Denaja, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Discussion générale commune

M. Charles de Courson

M. Stéphane Saint-André

M. Gaby Charroux

Mme Sandrine Mazetier

M. Olivier Marleix

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique)

Amendements nos 38 , 49 , 69 , 70 , 39 , 40 , 50 , 41 , 65 , 19 , 26 , 21 , 67 , 27 , 74 , 62 , 30, 28 , 44 , 22 , 46 , 45 , 24 , 35 , 63 , 36 , 64 , 37 , 66 , 48 , 25 , 23 , 47 , 42 , 73 , 43

Vote sur l’ensemble

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte)

Vote sur l’ensemble

Suspension et reprise de la séance

5. Projet de loi de finances pour 2017

Seconde partie (suite)

Administration générale et territoriale de l’État

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage

M. Michel Zumkeller

M. Stéphane Saint-André

M. Nicolas Sansu

Mme Anne-Yvonne Le Dain

M. Olivier Marleix

6. Compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte (suite)

7. Projet de loi de finances pour 2017

Seconde partie (suite)

Administration générale et territoriale de l’État (suite)

M. le président

M. Lionel Tardy

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État

M. Paul Molac

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État

Mission « Administration générale et territoriale de l’État » (état B)

Amendement no 481

M. David Habib, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Amendement no 384

Article 52

Amendements nos 75 , 91 , 100 , 120 , 278 , 322 , 332

M. Paul Molac, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Amendements nos 350 , 378

Après l’article 52

Amendements nos 498 , 333

Engagements financiers de l’État

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics

M. Gabriel Serville

Mme Marine Brenier

M. Philippe Gomes

M. Christian Eckert, secrétaire d’État

M. Jean-Claude Buisine

M. Christian Eckert, secrétaire d’État

Mission « Engagements financiers de l’État » (état B)

Mission « Remboursements et dégrèvements » (état B)

Amendement no 445

Mission « Investissements d’avenir » (état B)

Article 56

Amendements nos 416 , 321, 320 , 415

Compte d’affectation spéciale« Participation de la France au désendettement de la Grèce » (état D)

Compte d’affectation spéciale« Participations financières de l’État » (état D)

Compte de concours financiers« Avances à divers services de l’Étatou organismes gérant des services publics » (état D)

8. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Claude Bartolone

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Hommage au maréchal des logis-chef Fabien Jacq

M. le président. Mesdames, messieurs (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent), vendredi dernier, le maréchal des logis-chef Fabien Jacq, du 515e régiment du train, a perdu la vie au nord du Mali après l’explosion de son véhicule blindé sur une mine. Je salue la mémoire de ce soldat âgé de vingt-huit ans engagé dans l’opération Barkhane aux côtés de ses camarades pour protéger la population de cette région du Sahel contre les groupes armés terroristes.

J’adresse à sa famille, à ses proches, à ses camarades les condoléances de l’Assemblée nationale. J’adresse également aux quatre autres soldats blessés dans cette explosion nos vœux de prompt rétablissement et le soutien sans faille de la représentation nationale.

Je vous invite à observer une minute de silence. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement observent une minute de silence.)

2

Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Mouvement des personnels hospitaliers

M. le président. La parole est à M. Alain Marty, pour le groupe Les Républicains.

M. Alain Marty. Le groupe Les Républicains s’associe bien sûr à l’hommage que vous venez de rendre, monsieur le président.

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Les infirmiers, les aides-soignants et autres personnels hospitaliers manifestent aujourd’hui dans toute la France. Ce mouvement de colère n’est pas à prendre à la légère. Je le répète : ce mouvement de colère n’est pas à prendre à la légère : il traduit l’exaspération de professionnels dont l’action est indispensable à notre système de santé, à la prise en charge des patients, et plus largement au maintien du lien social.

Ce que dénoncent ces personnels de santé épuisés, stressés, ce sont des conditions de travail qui se détériorent et la peur de ne plus être en mesure d’assurer leur mission, pourtant si importante. Ceux qui soignent ont le sentiment de mal faire leur travail en raison du rythme de travail, de l’insuffisance des effectifs et des contraintes réglementaires.

Les infirmiers libéraux, qui participent eux aussi au mouvement, sont bien souvent les derniers professionnels à accéder au domicile et sont en cela le réceptacle de la violence sociale dont souffre notre pays. Ces professionnels dénoncent également une insécurité croissante dans l’exercice de leur métier face à la multiplication des agressions et des incivilités.

Monsieur le Premier ministre, ces personnels de santé sont les grands oubliés de votre politique ; ils vous le font savoir. Votre loi santé a réuni contre elle l’ensemble des acteurs de la santé – avouez que la performance est singulière – et n’a répondu en rien aux attentes des infirmières et des infirmiers, dont j’ai pu, en tant que praticien hospitalier, apprécier la compétence et le dévouement.

Monsieur le Premier ministre, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, on nous a dit que tout allait bien. Dans ce cas, comment expliquez-vous l’exaspération et la colère des professionnels de santé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le député Marty, sachez que je porte une attention extrême à la situation de l’hôpital public.

M. Laurent Wauquiez. Ce n’est pas tout que de l’affirmer !

Mme Marisol Touraine, ministre. Et je veux devant vous, comme je l’ai fait à plusieurs reprises, exprimer à tous les professionnels de l’hôpital public,…

Mme Marie-Louise Fort. Des regrets !

Mme Marisol Touraine, ministre. …à la fois ma reconnaissance et la fierté de la France de pouvoir compter sur des professionnels aussi remarquables au quotidien.

Je sais que les conditions de travail sont parfois difficiles et que des efforts importants ont été demandés aux professionnels de santé, à l’hôpital public comme ailleurs, depuis un certain nombre d’années.

Je veux exprimer ma reconnaissance à ces professionnels et leur dire que j’entends leurs inquiétudes et leurs préoccupations. Je les ai entendues lorsque, dans le cadre de la loi et de décisions prises, j’ai rétabli le service public hospitalier, qui avait été supprimé. J’ai entendu la spécificité de l’hôpital public lorsque j’ai mis fin à la convergence tarifaire entre le public et le privé. Et c’est pour marquer la reconnaissance envers les infirmiers que j’ai souhaité engager des revalorisations salariales allant jusqu’à 3 900 euros par an pour les infirmières au cours des années qui viennent de s’écouler ; elles seront d’ailleurs prolongées par l’ajout de nouvelles revalorisations.

Par ailleurs, des réformes de fond ont été engagées afin que les personnels soient mieux accompagnés, et je suis certaine que d’autres questions me donneront l’occasion de m’exprimer sur ces points-là. J’annoncerai dans quelques semaines un plan d’accompagnement des professionnels de santé, en particulier à l’hôpital public, pour aider ces derniers à faire face à leurs conditions de travail et les améliorer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Lutte contre la fraude fiscale

M. le président. La parole est à M. Romain Colas, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Romain Colas. Monsieur le président, le groupe socialiste, écologiste et républicain s’associe à l’hommage que vous avez rendu à notre soldat tombé au Mali.

Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Cet après-midi, nous adopterons le projet de loi Sapin 2 qui permettra d’améliorer considérablement notre législation en matière de lutte contre la corruption, d’assurer une vraie protection des lanceurs d’alerte, de mettre en œuvre de nouvelles mesures de transparence et de régulation attendues par le monde agricole et de renforcer la régulation des acteurs des marchés pour lutter contre la finance dévoyée tout en protégeant les consommateurs, les investisseurs et les épargnants. Cette loi complétera également les outils permettant à notre administration de lutter plus efficacement contre la fraude et l’érosion des bases fiscales.

Depuis 2012, le Gouvernement et notre majorité se sont résolument engagés dans la lutte contre ce fléau qui porte atteinte non seulement à nos finances publiques, mais aussi à la confiance de nos concitoyens en leurs institutions. Nous avons agi à l’échelle nationale, notamment avec la création du parquet financier doté de moyens entièrement dédiés à la lutte contre la fraude. Nous avons agi à l’échelle internationale en faisant de la France un des moteurs du plan BEPS porté par l’OCDE. Grâce à cette mobilisation, nous obtenons des résultats inédits en rattrapant les personnes morales ou physiques concernées par l’évasion fiscale et l’abus de droit, ces individus et ces sociétés qui minent délibérément notre contrat social.

Alors que l’on pourrait espérer que ce combat mené au nom de la justice et de l’équité fasse l’unanimité dans cet hémicycle, il est incompréhensible, pour ne pas dire inadmissible, que certains à droite proposent d’en rabattre sur les moyens procéduraux et humains indispensables à la lutte contre la fraude fiscale. Tandis que nous nous apprêtons à voter définitivement le projet de loi Sapin 2 qui intensifie encore la lutte contre la délinquance fiscale, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, rappeler l’engagement de la France en la matière et les moyens que vous comptez mobiliser pour rendre cette lutte toujours plus efficace ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances. J’ai plaisir à répondre moi-même à votre question, monsieur le député, arrivant de Bruxelles où la bataille contre la fraude et l’opacité fiscales est sur le point d’être gagnée ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Sylvain Berrios. Donnez vos conseils à Cahuzac !

M. Michel Sapin, ministre. Je puis vous annoncer qu’il a été décidé, au niveau bruxellois, d’établir une liste des juridictions non coopératives des paradis fiscaux qu’il conviendra de combattre dans les années à venir. Grâce à une mobilisation aux échelons européen et international, caractérisée en particulier par le travail de l’OCDE visant à l’élaboration d’un plan de lutte contre l’érosion des bases fiscales à l’échelle internationale, …

M. Sylvain Berrios. Cahuzac !

M. Michel Sapin, ministre. … grâce à la forte présence de la France aux échelons européen et international, grâce aussi à des dispositions législatives adoptées par cette assemblée et en particulier par cette majorité, nous avons réussi à obtenir des résultats exceptionnels en matière de lutte contre la fraude fiscale. Je vais vous donner quelques chiffres. Dans les années précédant 2012, la lutte contre la fraude fiscale permettait d’effectuer chaque année des redressements fiscaux de l’ordre de 16 milliards d’euros en moyenne, ce qui certes est déjà beaucoup ! Actuellement, ils sont de l’ordre de 22 milliards d’euros par an.

M. Philippe Cochet. Grâce à Cahuzac !

M. Michel Sapin, ministre. Autrement dit, en cinq ans, grâce à cette mobilisation, grâce à l’adoption d’un certain nombre de dispositions nouvelles et à la coopération internationale, le budget de l’État bénéficie chaque année de 6 milliards d’euros supplémentaires pris aux fraudeurs ou à ceux qui ont voulu anormalement optimiser le paiement, ou le non-paiement, de leur impôt.

M. Philippe Cochet. Cahuzac !

M. Michel Sapin, ministre. Je voudrais aussi dire ici que cela se fait non pas sur les petits, mais sur les gros. Les cinq cas les plus importants ont rapporté 3,5 milliards d’euros à l’État. Autrement dit, nous faisons payer les grandes multinationales qui croient pouvoir se perdre dans les nuages, mais que nous ne perdons pas de vue ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Christian Jacob. Quel ministre !

M. Alain Marty. Cahuzac !

Acquisition d’œuvres par les musées nationaux

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Alain Tourret. Madame la ministre de la culture et de la communication, un couple d’Américains, Marlene et Spencer Hays, vient de donner à la France, au musée d’Orsay, 187 œuvres d’une collection exceptionnelle rassemblant, outre des toiles impressionnistes de parfaite qualité, un fonds de Nabis comprenant vingt-trois Vuillard, douze Bonnard et plusieurs Denis. Après l’exposition qui leur a été consacrée en 2013 au musée d’Orsay sous le beau nom d’« Une passion française », le couple Hays a donc décidé d’enrichir les collections françaises. Grâce à eux, la France possède désormais la première collection relative à cette période exceptionnelle que fut la fin du XIXsiècle, lorsqu’aux impressionnistes succédèrent les Nabis, si proche des fauves.

Ces collectionneurs américains, que le Président de la République vient d’honorer, auraient pu créer une fondation aux États-Unis. Ils ont préféré choisir la France, nous rappelant ainsi qu’en matière de culture, d’art et de musées, rien n’égale la France ! En Normandie, précisément, Laurent Fabius, auquel je rends hommage, et moi-même avons créé et mis en valeur le festival « Normandie impressionniste » qui a rassemblé des dizaines de milliers de visiteurs, venus voir notamment une collection, « Peindre en Normandie », consacrée à l’impressionnisme en Normandie et ayant notamment pour mécène le conseil régional de Normandie.

Désormais, en Normandie, Monet et Clemenceau hantent par leur présence, leur créativité et leur amour pour la peinture, les jardins de Giverny. Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour favoriser nos musées, accueillir les fondations et renforcer nos collections de peinture, symboles de la grandeur de la France depuis un demi-millénaire, ce qui à n’en pas douter remplacera la morosité actuelle par l’esthétique et – pourquoi ne pas le dire – par la beauté ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. Éric Straumann. Bravo !

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, la donation qui vient d’être faite à la France est inédite et exceptionnelle. Vous l’avez dit, elle intégrera les collections publiques. C’est donc un cadeau qui est fait à l’ensemble des Français et dont nous pouvons nous réjouir. Elle se compose de près de 200 peintures et dessins d’artistes français, du XIXsiècle majoritairement, dont des chefs-d’œuvre d’Édouard Vuillard, de Pierre Bonnard et de Maurice Denis. En tout, ce couple d’Américains aura donné plus de 600 œuvres. Selon la première estimation du montant total de cette collection, plus de 300 millions d’euros nous sont ainsi offerts, par-delà la beauté de chaque œuvre.

Les Hays ont estimé que c’est en France que ces tableaux seraient le mieux vus et que les Américains eux-mêmes les verraient davantage au musée d’Orsay qu’ils ne le feraient aux États-Unis.

M. Éric Straumann. Merci Giscard !

Mme Audrey Azoulay, ministre. Pour eux, la place de ces œuvres est en France. Selon eux, comme ils l’ont dit au New York Times, la France est la meilleure au monde pour mettre en avant, enseigner et faire rayonner la culture. La France, contrairement aux États-Unis, leur assure que ces collections ne seront jamais vendues. Il importe que nous nous soyons collectivement mobilisés pour donner une issue concrète à leur geste. Je remercie tous ceux qui y ont contribué, notamment le musée d’Orsay et Guy Cogeval qui le dirige, ainsi que le ministère de la culture.

Nous avons régulièrement la chance de recevoir des dons – pas toujours de cette ampleur !–, mais nous agissons aussi par d’autres biais tels que les crédits d’acquisition des musées et la fiscalité, notamment la réduction d’impôt de 90 % appliquée à l’achat d’œuvres classées trésor national qui a permis l’acquisition d’une paire exceptionnelle de Rembrandt auprès des Pays-Bas. Les collections privées exposées en ce moment à Paris montrent également la place que nous faisons à la culture. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Mouvement des personnels hospitaliers

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Nicolas Sansu. Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, des dizaines de milliers de personnels hospitaliers et d’infirmiers crient leur colère et leur inquiétude partout en France. Colère devant des conditions de travail et de rémunération qui se dégradent, avec des conséquences dramatiques pour la santé des personnels, pouvant aller jusqu’au suicide ; …

Mme Claude Greff. Très bien !

M. Nicolas Sansu. … inquiétude devant des directives de la tutelle qui rendent de plus en plus prégnants les choix budgétaires, là où la prise en charge digne et efficace des patients devrait être la seule boussole. En effet, l’austérité budgétaire, avec un plan triennal de restrictions de 3 milliards d’euros pour les hôpitaux et de 10 milliards d’euros pour la santé aura été extrêmement dommageable à l’égalité d’accès aux soins sur le territoire national.

La fermeture de milliers de lits d’hospitalisation, la suppression de 22 000 emplois dans les hôpitaux, la tarification à l’activité, et dernier avatar, la création de groupements hospitaliers de territoire, qui agissent comme des machines à concentrer d’un côté et à désertifier de l’autre, auront confirmé les orientations de la loi « Hôpital, patients, santé et territoire » votée sous la droite, et que nous avions combattue ensemble en 2009, madame la ministre.

Mme Claude Greff. Mais elle a continué, et c’est pire !

M. Nicolas Sansu. Sur un territoire que vous connaissez bien, la région Centre-Val de Loire, ces orientations nationales se sont traduites, pour le centre hospitalier de Vierzon, par la suppression de vingt postes – et de fait, l’épuisement des personnels –, la fermeture de onze lits en chirurgie et pédiatrie – dix de plus peut-être en médecine – et un déficit structurel, du fait de l’inadéquation de la tarification à l’activité. En outre, certaines spécialités, que l’hôpital de référence du groupement hospitalier de territoire souhaiterait rapatrier, risquent de se voir dévitalisées.

Bien sûr, des coopérations sont indispensables, des évolutions et la bonne gestion des deniers publics sont nécessaires, mais il ne faut jamais oublier les patients et l’égalité de traitement que nous leur devons, partout en France.

Madame la ministre, l’exaspération est grande car, en dix ans, les citoyens, les personnels, les élus ont vu dériver la République de la solidarité vers une République des comptables, injuste et inefficace ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Mme Isabelle Attard et Mme Claude Greff. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, je veux dire à nouveau toute la reconnaissance du Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) pour les personnels hospitaliers, qui permettent à nos concitoyens d’être soignés dans de très bonnes conditions, que nous envient beaucoup de pays européens. Je veux saluer leur engagement quotidien ainsi que leur remarquable professionnalisme.

M. Rémi Pauvros et M. Michel Ménard. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le député, je ne peux pas vous laisser dire que nous avons réduit les budgets de l’hôpital public et que nous avons supprimé des postes. Répéter un chiffre faux n’en fait pas une vérité ! Nous avons créé 31 000 postes à l’hôpital public depuis 2012 (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Vous pouvez dire que ça n’est pas assez, qu’il fallait en créer davantage, cela, je peux l’entendre. Mais dire que nous avons supprimé des postes est faux.

M. Christian Jacob. Honteux !

Mme Marisol Touraine, ministre. Je veux rappeler que, depuis 2012, nous avons investi dix milliards d’euros pour l’hôpital public. Mais derrière le rétablissement du service public hospitalier, les revalorisations salariales,…

M. Bernard Debré. C’est faux !

Mme Marisol Touraine, ministre. …j’entends pour ma part les inquiétudes exprimées par les professionnels.

M. Christian Jacob. Des mots.

Mme Marisol Touraine, ministre. Lorsque je parle d’investissements pour l’hôpital, vous savez très bien, monsieur Sansu, que les hôpitaux que vous défendez sur votre territoire ont été soutenus financièrement. J’entends les préoccupations. Des réformes importantes sont engagées pour la médecine et la chirurgie ambulatoires et pour le regroupement, avec la mise en place de groupements hospitaliers de territoires, qui s’adaptent à la réalité du terrain. Je souhaite que nous puissions mieux accompagner les professionnels de santé. Ce sera l’objet du plan que je présenterai dans quelques semaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Mme Claude Greff. Baratin !

M. Philippe Meunier. Bla bla bla !

Assurance emprunteur

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, les associations de consommateurs appellent l’attention des parlementaires et du Gouvernement depuis de nombreuses années, sur la grave question de l’assurance emprunteur, dont les taux sont généralement compris entre 0,3 et 0,5 % du montant du prêt, produit souvent couplé avec un crédit immobilier.

En effet, des études, dont un rapport de l’inspection générale des finances de 2013, ont montré que la marge sur ces contrats des sociétés d’assurance, filiale des banques, est supérieure à 55 % du montant des primes, soit 3 milliards de rente annuelle ! Or ces primes peuvent représenter jusqu’au quart du coût du crédit, les taux d’emprunt immobilier à long terme ayant fortement chuté, pour s’établir à 1,41 % en moyenne au mois d’octobre.

La situation actuelle n’est pas satisfaisante : non seulement la part de marché des banques est de 88 % mais celles-ci, dans 60 % des cas, opposent des refus aux demandes de résiliation ! Cette situation de quasi-monopole du secteur bancaire engendre des profits anormaux, au détriment des consommateurs.

Un amendement au texte « Sapin II », soutenu par le groupe de l’Union des démocrates et indépendants et de très nombreux parlementaires, sur tous les bancs de cette assemblée, a été adopté en deuxième lecture. Il vise à permettre aux emprunteurs de résilier annuellement leur assurance emprunteur, et de faire ainsi jouer la concurrence, y compris pour les contrats de prêt en cours. Le Gouvernement, lors du vote de cet amendement, s’en était remis à la sagesse de l’Assemblée nationale. D’où ma question, monsieur le ministre.

Lors du vote définitif de la loi Sapin II par l’Assemblée nationale dans deux heures, le Gouvernement se déclarera-t-il favorable à cette mesure essentielle pour la protection des consommateurs ?

Plusieurs députés du groupe Union des démocrates et indépendants. Très bien !

M. Charles de Courson. Dans cette hypothèse, le Gouvernement peut-il confirmer à la représentation nationale que cette mesure ne s’appliquera pas seulement aux nouveaux contrats, mais aussi à tous les contrats en cours ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Vigier. Excellent !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances. J’apporterai, sur un sujet aussi délicat que celui-là, une réponse précise à votre question précise. Vous l’avez dit, l’Assemblée nationale a introduit en deuxième lecture du projet de loi que vous avez eu la gentillesse d’appeler « Sapin II », un droit de substitution annuel des contrats d’assurance emprunteur.

Ces dispositions permettent de résilier annuellement un contrat d’assurance emprunteur, au-delà de la période de douze mois suivant la signature de l’offre de prêt. Elles ouvrent ainsi pendant toute la durée du prêt, la possibilité d’y substituer un autre contrat d’assurance emprunteur. Même si le Gouvernement a émis des réserves lors des débats, je pense que cette disposition peut être utile. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Il faut cependant éviter que cette disposition crée des risques supplémentaires, notamment en étant mise en œuvre dans des conditions qui soient dommageables pour les plus âgés et les moins aisés des emprunteurs, voire pour ceux qui rencontreraient des problèmes de santé.

Je sais que je ne vous satisferai pas entièrement, monsieur le député, mais laissez-moi vous dire clairement les choses, car il faut être précis sur le plan juridique : les mesures que l’Assemblée s’apprête à adopter aujourd’hui n’ont pas vocation à porter atteinte à des situations contractuelles en cours. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.) Comme c’est le cas du mécanisme issu de la loi Hamon, cet article, s’il devait être adopté, s’appliquerait aux contrats signés après son entrée en vigueur.

Accueil des migrants dans les communes

M. le président. La parole est à Mme Laurence Arribagé, pour le groupe Les Républicains.

Mme Laurence Arribagé. Monsieur le Premier ministre, la crise migratoire actuelle est en passe de devenir l’un des plus grands échecs humanitaires de nos sociétés modernes. Il est temps d’y apporter une réponse concertée, durable et non démagogique.

Au nom des milliers de réfugiés en détresse, il est de votre responsabilité de dépasser les postures politiciennes afin d’être à la hauteur des attentes de nos concitoyens, en matière d’humanisme et de solidarité certes, mais également en matière de faisabilité et de moyens.

Dès lors, je déplore la faiblesse de votre gestion des suites du démantèlement de la jungle de Calais : faisant l’impasse sur la notion élémentaire de dialogue, votre majorité impose à des maires consternés des décisions de relogements soudaines et trop souvent irresponsables en l’absence de conditions structurelles, sociales et financières minimales requises.

Loin de jeter les bases d’une collaboration en bonne intelligence, vos tentatives de passage en force ne font que crisper les élus locaux et les habitants, qui s’opposent alors, à juste titre, à ces installations improvisées de centres d’accueil de demandeurs d’asile.

En Haute-Garonne par exemple, le maire de Saint-Gaudens a préféré suspendre le contrat de ville de sa commune plutôt que d’obtempérer à l’implantation d’un centre, décidée sans consultation de ses services, dans un périmètre qu’il jugeait inapproprié.

Pourtant, les municipalités sont prêtes à participer à l’effort national. Aussi, je condamne l’obstination de vos ministres qui se contentent d’asséner des discours moralisateurs plutôt que d’offrir un accompagnement adapté aux communes. Ces méthodes vous mèneront au-devant d’un échec prévisible.

M. Jean Lassalle. Très bien !

Mme Laurence Arribagé. Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous restaurer la confiance avec les maires de France, indispensable à la mise en place de solutions pérennes face à cette crise migratoire sans précédent, tout en tenant compte des réalités de nos collectivités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Madame la députée, nous venons de réaliser deux grosses opérations humanitaires, une première à Calais où près de 7 500 migrants relevaient, pour 85 % d’entre eux environ, du droit d’asile en France. Dans le cadre du démantèlement de la jungle de Calais, nous les avons accueillis, y compris les mineurs isolés, dans 460 centres d’accueil et d’orientation.

Je me suis rendu hier à Calais pour remercier non seulement l’ensemble des services de l’État, qui se sont mobilisés sous la responsabilité de la préfète Fabienne Buccio, et les associations, mais aussi l’ensemble des préfets et des maires qui ont accepté d’accueillir sur leurs territoires des centres d’accueil et d’orientation. Je profite de cette séance des questions au Gouvernement pour remercier chaleureusement ces maires de France qui ont donné le plus beau visage de notre pays en acceptant d’accueillir ceux qui relevaient du droit d’asile en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

Ces maires de France ont donné une image exemplaire, très éloignée des discours tenus par certains qui préconisaient que l’on mobilisât la population contre les préfets alors même que nous cherchions à organiser cette opération humanitaire. Le beau visage de la France, c’est celui de ces maires que je veux ici chaleureusement remercier, et qui appartiennent à toutes les sensibilités (Mêmes mouvements).

Il est possible, madame la députée, qu’ici ou là, des problèmes se soient posés. S’ils remontent jusqu’à nous, comme cela ne manquera pas de se produire, nous prendrons les mesures nécessaires, mais cette opération s’est déroulée dans des conditions exemplaires, grâce à la mobilisation de tous, en particulier des maires qui ont donné le plus beau visage de la République et de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Mesures pour le tourisme

M. le président. La parole est à M. Éric Elkouby, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Éric Elkouby. Monsieur le Premier ministre, avec 84,5 millions de visiteurs étrangers accueillis en 2015, la France est la première destination touristique mondiale. Cependant, les dramatiques attentats ayant ensanglanté notre pays ont porté un sérieux coup d’arrêt à cet engouement pour la France. Les nombreuses agressions dont certains touristes sont victimes contribuent, elles aussi, à ralentir cet essor.

Ainsi, nous avons pu constater depuis janvier 2016 une chute conséquente des arrivées de touristes étrangers en France, avec un recul de 8,1 %. Si ce phénomène touche en premier lieu notre capitale, Paris, ou encore la Côte d’Azur, de grandes villes touristiques comme Strasbourg ou d’autres métropoles sont également concernées.

Le tourisme est une priorité nationale depuis 2012 et face à cette situation, votre gouvernement a rapidement pris les devants pour restaurer l’image et le rayonnement de la France dans le monde. Ce lundi 7 novembre, vous avez réuni le comité interministériel sur le tourisme, ce qui n’était plus arrivé depuis 2003 !

Lors de la réunion de ce comité, vous avez annoncé le déblocage de 42,7 millions d’euros pour relancer l’attractivité économique du tourisme en France, qui représente 1 million d’emplois directs et indirects et 41,4 milliards d’euros de recettes provenant des touristes étrangers.

Si la France est particulièrement visitée par les Européens, les Américains, les Asiatiques ou les Africains, elle l’est aussi, et de plus en plus, par les Français eux-mêmes, ce qui implique de développer une stratégie touristique spécifique auprès de nos concitoyens.

Monsieur le Premier ministre, pourriez-vous nous détailler les objectifs de votre plan en faveur du tourisme et ses retombées …

M. le président. Merci !

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le député, vous avez raison, le tourisme représente 7,5 % du PIB et 2 millions d’emplois non délocalisables. Il mérite toute notre attention, notre mobilisation, notre détermination. C’est le sens du comité interministériel présidé par le Premier ministre, qui s’est réuni hier et qui a adopté un plan de soutien de près de 43 millions d’euros, qui s’articule autour de quatre grands axes.

Tout d’abord, 15,5 millions seront dévolus à la sécurité des touristes, dans les lieux touristiques, les transports, les sites accueillant des spectacles. Sur cette somme, 10 millions seront consacrés au renforcement de la vidéosurveillance.

Pas moins de 10,5 millions serviront à promouvoir notre pays auprès des touristes étrangers et 11 millions à soutenir les professionnels dans la phase difficile qu’ils traversent, en particulier à Paris et sur la côte d’Azur.

Par ailleurs, 6 millions d’euros serviront à encourager le départ en vacances des Français les plus modestes, notamment les retraités : 100 000 d’entre eux bénéficieront d’un dispositif de chèques vacances adapté.

Sur le plus long terme, nous avons décidé d’engager des réformes structurelles.

M. Julien Aubert. Il serait temps !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Ce sera l’objet de la deuxième conférence annuelle du tourisme que j’organiserai le 17 novembre prochain avec Matthias Fekl, qui rassemblera tous les professionnels, les acteurs des territoires, des régions et des métropoles, et qui se concentrera sur quatre priorités, à savoir l’investissement, l’accueil, la formation, le numérique, avec un objectif : rester la première destination mondiale du tourisme. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Inégalités salariales entre les femmes et les hommes

M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

Mme Catherine Coutelle. Madame la ministre chargée des droits des femmes, hier, 7 novembre, à l’appel d’un collectif, de nombreuses femmes dans tous les métiers se sont arrêtées de travailler à seize heures trente-quatre pour signifier qu’elles n’étaient plus payées jusqu’à la fin de l’année par rapport aux hommes.

Si le taux d’emploi des femmes continue à progresser en France, l’écart entre les hommes et les femmes tous salaires confondus est de 27 %. Ce chiffre recouvre toutefois des réalités très différentes. Il est de 27 % si l’on compare tous les emplois, en incluant les temps partiels, qui sont majoritairement occupés par les femmes. Il est de 19 % si l’on compare les salaires à temps plein. Les femmes ont des qualifications moindres, des métiers peu reconnus, occupent des postes moins rémunérés et s’arrêtent plus dans leur carrière. Enfin, à formation et compétences égales, il reste un écart de 10 % que rien ne peut expliquer.

À travail égal, salaire égal : cela figure dans la loi. La loi pour l’égalité a presque quarante ans ! Comme l’incitation ne suffit plus, notre gouvernement et notre majorité ont accéléré le pas. Najat Vallaud-Belkacem a pris un décret dès 2012 pour sanctionner les entreprises. Les temps partiels, sauf dérogation des partenaires sociaux, ne peuvent être de moins de vingt-quatre heures. Les trimestres nouveaux sont comptés pour les retraites. Les négociations salariales doivent obligatoirement comporter un volet égalité.

Mais la loi ne suffira pas. C’est une question de société, de mentalité, depuis l’orientation des filles jusqu’aux stéréotypes qui ferment leur carrière. Tant que les femmes devront assurer la double, voire la triple journée, les inégalités professionnelles perdureront.

Madame la ministre, c’est un combat de tous les jours, un investissement à long terme, et pas seulement un sujet que l’on découvre au moment des campagnes électorales, comme les propos certains candidats de droite le laissent supposer. Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les actions du Gouvernement pour faire reculer encore et toujours ces inégalités de manière durable ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes.

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes. En effet, madame la présidente Catherine Coutelle, selon les enquêtes, les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes sont de 19 à 25 %. Plus de trente ans après la loi Roudy, ces chiffres sont insupportables, inacceptables.

Il faut comprendre quelles sont les causes de ces écarts.

D’abord le temps partiel, spécifique aux femmes, qui ampute salaire et retraite par la suite.

Ensuite, les femmes et les hommes n’occupent pas les mêmes métiers. Les compétences des femmes sont souvent bien moins rémunérées que celles des hommes. Par exemple, soulever des malades ou des personnes âgées est bien moins rémunéré que de soulever des sacs de ciment. Et pourtant, la charge est la même. (Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Enfin, les femmes sont moins promues que les hommes, et plus l’on monte dans la fonction d’encadrement, moins les femmes sont présentes. (Tumulte persistant sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. S’il vous plaît, mes chers collègues ! Rien ne justifie ce genre de réaction !

Mme Laurence Rossignol, ministre. À poste égal, l’écart moyen est de 10 %, comme vous l’avez indiqué. La maternité continue de défavoriser les femmes et de les pénaliser dans leur vie professionnelle.

Depuis 2012, nous nous sommes attachés à agir sur toutes les causes de ces inégalités. (Plusieurs députés du groupe Les Républicains continuent de s’exclamer.)

M. le président. S’il vous plaît !

Mme Laurence Rossignol, ministre. La loi de 2013 a instauré le principe d’une durée minimale de travail de vingt-quatre heures hebdomadaires. Pour lutter contre les ségrégations des métiers, le Gouvernement a mis en place en 2015 un plan au long cours sur la mixité, que nous compléterons prochainement par un plan interministériel déjà présenté et par un plan spécifique pour les métiers du numérique. Enfin, nous avons ouvert 70 000 nouvelles places de crèche pour permettre aux mères de famille de travailler.

La lutte contre les stéréotypes de genre est un élément essentiel de la mixité des métiers et de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. La même démarche est engagée dans la fonction publique. Mme Dombre Coste remettra prochainement un rapport parlementaire consacré à ce sujet.

M. Philippe Meunier. Rien sur les sacs de ciment ?

Mme Laurence Rossignol, ministre. Vous le voyez, la détermination du Gouvernement est sans faille. L’égalité entre les femmes et les hommes l’exige. Bien sûr, il existe des entreprises vertueuses et nous devons les encourager. Les autres doivent être sanctionnées. Il faut aussi que les partenaires sociaux fassent de ce sujet un sujet prioritaire, et ce au plus haut niveau. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Mesures en faveur des forces de l’ordre

M. le président. La parole est à M. Rémi Delatte, pour le groupe Les Républicains.

M. Rémi Delatte. Monsieur le Premier ministre, à Dijon, ce week-end, nos forces de l’ordre et de lutte contre les incendies, auxquelles je redis toute notre solidarité (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants), ont été l’objet d’un guet-apens au cocktail Molotov. Dans le même temps, un surveillant pénitentiaire de la maison d’arrêt de Dijon était pris en otage par un détenu incarcéré pour radicalisation.

Ces attaques, hélas ! ne sont pas isolées : Mantes-la-Jolie, La Seyne-sur-Mer, Lorient, ou encore Massy. La mise en danger et les agressions de nos forces de sécurité, de ces femmes et ces hommes de devoir, dans le contexte de menace que nous connaissons, appelle à instaurer la réponse ferme de l’impunité zéro face à ces criminels. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

Au-delà des mesures bienvenues mais tardives que vous avez pu annoncer, il devient impératif de garantir la sécurité des Français et de ceux qui se sont engagés pour les protéger, en leur apportant un soutien sans faille et des moyens d’agir.

Monsieur le Premier ministre, les propositions sont sur la table : c’est le rétablissement des peines planchers ; c’est la révision de la légitime défense ; c’est le renforcement des moyens matériels ; c’est l’affranchissement de tâches administratives qui détournent les agents du terrain.

Oh, je ne suis pas en train de dire que tout est facile, monsieur le Premier ministre, mais il y a urgence ! Et il faut du courage. Au-delà des discours qui souvent renforcent la colère et l’exaspération, les forces de l’ordre et nos compatriotes vous conjurent de restaurer l’autorité de l’État dans tous les territoires de la République.(Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, il y a dans votre question beaucoup de pondération mais aussi beaucoup de vérité quant aux sujets évoqués. J’essaierai d’y apporter la réponse la plus complète possible dans un temps contraint.

Vous avez raison de dire qu’il y a un problème de moyens et qu’il y a un problème d’effectifs. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, depuis 2012, nous avons souhaité rehausser le niveau des effectifs de la police nationale et de la gendarmerie nationale. À la fin de l’année 2016, ce sont 6 800 emplois qui auront été créés dans les forces de l’ordre.

M. Christian Jacob. Faux !

M. Éric Ciotti. Il y a au contraire 868 policiers et gendarmes en moins !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous en créerons de nouveau 2 700 en 2017. Ce sont donc 9 000 emplois qui auront été créés pendant le quinquennat. (Exclamations sur divers bancs.)

M. Éric Ciotti. Parlez-en à M. Migaud !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous insistez également sur les moyens autres, tels les véhicules, les armes, les moyens de protection. Vous avez raison de le faire. C’est bien pourquoi nous avons augmenté de 15 % les crédits de fonctionnement hors personnel de la police et de la gendarmerie, ce qui nous a permis de mettre en place un plan de rééquipement des brigades anticriminalité. Le plan de 250 millions d’euros qui fera l’objet d’un amendement parlementaire pour accentuer l’augmentation déjà significative en loi de finances pour 2017 permettra d’équiper l’ensemble des forces de sécurité publique.

Mme Claude Greff. Il y a urgence, monsieur le ministre !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. S’agissant de la légitime défense, nous présenterons des dispositions au Parlement avant la fin du mois de novembre, comme je l’ai dit à l’occasion de l’examen du budget. Nous ferons de même en ce qui concerne l’anonymisation et pour aligner dans la loi les outrages aux forces de l’ordre et les outrages à magistrat.

Voilà l’ensemble des sujets que nous avons sur le métier. Nous les traitons avec d’autant plus d’énergie que, dans une période pas si lointaine – et vous êtes bien placé pour le savoir ! –, 13 000 emplois ont été supprimés au sein de la police et de la gendarmerie. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Mouvement des personnels hospitaliers

M. le président. La parole est à M. Patrick Weiten, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Patrick Weiten. Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, les infirmières et les infirmiers n’en peuvent plus. Ils sont dans la rue. Des rassemblements, initiés par dix-huit syndicats et organisations professionnelles représentatives des infirmiers salariés, qu’ils exercent dans le privé, le public ou à titre libéral, ainsi que les étudiants, témoignent aujourd’hui, une fois de plus, de leur détresse.

Cet été déjà, les suicides de plusieurs soignants ont mis en évidence une souffrance grandissante et insupportable. Cadences infernales, manque de personnel, étranglement budgétaire, insécurité, pénibilité non reconnue et absence de considération de la part du Gouvernement : oui, leur colère est affirmée, justifiée et légitime. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

Il y a quelques semaines, vous vous êtes glorifiée d’avoir sauvé la Sécurité sociale. Sachez, madame la ministre, que les Français ne sont pas dupes. Le mirage du retour à l’équilibre se paie. Il se paie, au mépris des patients, par la dégradation des conditions de travail de ces personnels de santé qui sont les premières victimes expiatoires de vos économies drastiques.

Plusieurs députés du groupe Union des démocrates et indépendants. Très juste !

M. Patrick Weiten. Au chevet des malades à l’hôpital, dans le maintien à domicile des personnes dépendantes et au sein des maisons de retraite, les infirmiers et les soignants accomplissent les gestes qui soignent le corps tout en prodiguant la sollicitude qui guérit l’âme.

Malheureusement, depuis 2012, vous avez rendu leur métier inhumain. En effet, la surcharge de travail qui leur est imposée les empêche de mener à bien leur mission, de faire évoluer leurs précieuses connaissances et de former les étudiants stagiaires qui leur sont confiés. La situation est grave et alarmante. Les infirmiers attendent une réponse, mais surtout des actes concrets et immédiats.

Madame la ministre, quand allez-vous cesser de dévaluer et de mépriser le travail de ces acteurs premiers et essentiels de notre système de santé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, la ministre Marisol Touraine a eu l’occasion de répondre par deux fois à une question sur ce sujet venant de bancs différents.

Mme Claude Greff. Elle n’a pas convaincu !

M. Manuel Valls, Premier ministre. J’adhère en écho à ces propos et à ce qui a été exprimé sur tous les bancs, à savoir un profond attachement à la fonction publique,…

Mme Claude Greff. Il ne suffit pas de le dire !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …qu’il s’agisse de la fonction publique d’État quand on parle de la police, des collectivités locales quand il faut accueillir des populations en difficulté, ou de la fonction publique hospitalière.

Je rends naturellement hommage à ces hommes et ces femmes, notamment dans les services de santé, qui font un travail considérable et dont chacun salue la proximité et l’humanité.

Mme Claude Greff. Concrètement ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Mais puisque nous sommes ici, à l’Assemblée nationale, dans un débat politique qui doit être à la hauteur des enjeux et de l’attente des Français, je veux vous dire une chose : j’entends les uns proposer davantage de postes de policiers et de gendarmes,…

M. Christian Jacob. C’est contre vous qu’ils manifestent !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …davantage de moyens pour l’hôpital, et j’entends presque certains nous dire qu’il faut encore plus de moyens pour l’éducation nationale, sans naturellement parler du passé et du bilan du quinquennat précédent.

Je veux que vous nous expliquiez, monsieur le député, comment on fait avec 300 000, 500 000, 700 000 fonctionnaires de moins(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain), c’est-à-dire ce que vous proposez dans le cadre de votre primaire, qu’au demeurant je respecte.

Mme Christine Pires Beaune. Bravo !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Oui, l’État, la fonction publique c’est la colonne vertébrale de la nation. C’est ainsi que la France s’est construite.

Mme Claude Greff. Des promesses ! Nous, nous agissons !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Mais puisqu’un moment de vérité va s’ouvrir devant les Français, je vous demande de faire preuve de vérité, de responsabilité…

M. Philippe Cochet. Un Premier ministre ne devrait pas dire cela…

M. Manuel Valls, Premier ministre. …parce que ceux qui proposent autant de suppressions sont les mêmes qui mettent en cause l’action du Gouvernement qui a créé 9 000 postes dans la police et la gendarmerie, 60 000 dans l’éducation, 31 000 dans la fonction publique hospitalière. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Christian Jacob. C’est faux !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Eh bien moi, je suis prêt, avec la majorité, à engager un débat, bilan contre bilan et projet contre projet. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Impôt de solidarité sur la fortune

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour le groupe Les Républicains.

M. Jacques Myard. Ma question s’adresse à la maison Bercy bicéphale – je n’ai pas dit Janus, car cela appartient à un passé récent…

Je commence par le ministre du budget, chef comptable : il y a trois semaines, répondant à la question d’un membre de votre majorité, ou du moins ce qu’il en reste, vous avez fait le panégyrique d’un impôt mortifère pour l’économie française, l’ISF – impôt sur la fortune.

En réalité, vous avez oublié que cet impôt est véritablement destructeur du tissu économique de la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) C’est une machine infernale qui a chassé hors de France 600 milliards d’euros d’épargne des Français, qui ont été investis à l’étranger pour y créer des emplois. La France est devenue championne du monde dans l’exportation de capitaux en stock, devant les États-Unis !

Monsieur le chef comptable de Bercy, apprenez l’économie et relisez Marx qui savait, lui, ce qu’était le capital nécessaire à une économie. Et on va dire, avec Karl Marx : « Vive le grand capital » !

Ma première question est simple : quand allez-vous supprimer cet impôt mortifère qui détruit l’emploi en France ?

Investir est primordial, mais il faut aller plus loin et savoir où on va investir. La récente affaire Alstom montre à l’évidence que la France n’a plus de politique industrielle, qu’elle ne sait pas véritablement prévoir et qu’elle subit les marchés erratiques. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

Voilà pourquoi tous les États du monde ont une politique industrielle – je veux notamment parler des États-Unis. Dans un domaine très important, celui de l’intelligence artificielle, la France est première en jeunes pousses. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) Allez-vous…

M. le président. Merci !

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, eh bien nous continuons le débat que votre collègue de l’UDI vient d’entamer !

J’ai parlé tout à l’heure du rôle de l’État et de la puissance publique décentralisée – un État qui doit être efficace et stratège. Mais il y a une deuxième passion française, qui est celle de l’égalité. Et si nous pouvons avoir des discussion sur l’efficacité de tel ou tel outil fiscal, s’il faut tout faire pour que la compétitivité de nos entreprises soit au rendez-vous – c’est ce que nous faisons depuis 2012 –, si nous devons créer les conditions de l’attractivité,…

M. Christian Jacob. Avec le succès que l’on sait !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …notamment après le Brexit, et vous en débattez à l’Assemblée nationale, il y a cette passion de l’égalité.

M. Christian Jacob. C’est de l’égalitarisme !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Et l’impôt sur la fortune, ou l’impôt sur les grandes fortunes, sous ses différentes formes, colle comme un sparadrap à droite française.

M. Claude Goasguen. Ce n’est pas vrai !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Car vous n’avez jamais compris que cette passion de l’égalité nécessitait que chacun, d’une manière ou d’une autre, contribue à l’effort national.

M. Jacques Myard. Que faites-vous de l’investissement ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. En proposant la suppression de cet impôt, c’est un signe que vous adressez aux Français…

M. Éric Straumann. C’est un signe aux investisseurs !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …et ce sont 6 milliards en moins pour financer les politiques publiques que vous-mêmes vous proposez.

Monsieur Myard, bilan contre bilan, projet contre projet, je vous attends également sur ce sujet, aussi essentiel que les autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Situation en Turquie

M. le président. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. François-Michel Lambert. Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères. Permettez-moi d’y associer mes collègues Henri Jibrayel, Christian Kert, ainsi que les parlementaires mobilisés sur ce sujet.

Vendredi 4 novembre, onze députés du parti HD, le Parti démocratique des peuples, ont été arrêté en Turquie.

Un mandat d’arrêt a été lancé à l’encontre de plusieurs autres députés en déplacement l’étranger.

Depuis la tentative du coup d’État du 15 juillet, dans toute la Turquie, en particulier au Kurdistan, répression et violence s’intensifient chaque jour contre l’opposition. Plus de 100 000 personnes ont été arrêtées, 3 600 juges et procureurs ont été limogés, 2 000 écoles et universités fermées, 12 000 enseignants destitués, 133 journalistes incarcérés, 186 médias, dont vingt-trois chaînes de télévision et stations de radio kurdes fermées. Quarante mairies sont mises sous tutelle, et leurs élus incarcérés. Avocats, étudiants, intellectuels, syndicalistes leaders politiques, défenseurs des droits de l’homme sont jetés en prison, voire torturés.

Erdogan veut restaurer la peine de mort. Il sera alors en mesure de détruire toute trace d’une opposition déjà affaiblie, d’une presse amputée et muselée, de minorités profondément meurtries par nombre de massacres organisés.

Monsieur le ministre, en mon nom, en celui de mes collègues et du député turc kurde Garo Paylan, que je devais rencontrer ce dimanche et qui est retenu par la force en Turquie, je vous demande de dresser un bouclier moral face à la dérive dictatoriale du régime Erdogan. Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas !

La France doit agir concrètement, notamment grâce à sa place et son rôle au Conseil de sécurité des Nations unies. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le député, depuis plusieurs semaines en effet, la Turquie connaît une évolution préoccupante, vous venez de le rappeler. Vous avez décrit la situation. Des arrestations se sont succédé : celles de journalistes, de députés, par exemple du maire de la ville de Diyarbakir. La répression est continue, et surtout elle s’est amplifiée depuis le coup d’État du 15 juillet. Elle prend un tour préoccupant.

Alors, il faut faire face à ces évolutions. Il faut être lucide sur la situation et clair sur nos principes.

La lucidité, c’est de reconnaître aussi que la Turquie est la cible du terrorisme, qu’il vienne de Daech ou du PKK.

M. Claude Goasguen. Vous ne pouvez pas dire ça ! Cela suffit avec les Kurdes !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Il ne faut pas oublier non plus la tentative du coup d’État du 15 juillet,…

M. Claude Goasguen. Arrêtez !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. …au cours de laquelle le Parlement, symbole démocratique, a été bombardé, ce qui a provoqué un véritable choc dans le pays. J’ai pu m’en rendre compte lors de mon récent déplacement à Ankara, le 24 octobre.

La Turquie est en droit de se défendre, mais elle ne peut pas le faire, à nos yeux, sans respecter les principes de l’État de droit. Je l’ai dit très clairement à mes interlocuteurs. Ce n’est pas lorsqu’elle prend, comme elle le fait depuis plusieurs semaines, les mesures que vous avez rappelées.

Avec nos partenaires de l’Union européenne, nous nous sommes concertés. Nous sommes très clairs et nous avons dénoncé ce qui vient de se passer.

M. François Rochebloine. Belle réussite !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. En effet, nous pensons qu’il faut maintenir le dialogue avec la Turquie.

M. François Rochebloine. Pendant que les députés sont en prison !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Mais ce dialogue doit être franc. Il doit être clair. En particulier, il est nécessaire de rappeler que la Turquie fait partie du Conseil de l’Europe, comme nous, ce qui implique le respect de certaines valeurs fondamentales, par exemple le refus de la peine de mort.

Nous devons faire comprendre à la Turquie, qui se replie aujourd’hui, qu’elle n’a aucun intérêt à agir ainsi. Si elle veut respecter le droit, elle doit commencer par respecter l’État de droit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Service des urgences de l’hôpital de Thann

M. le président. La parole est à M. Michel Sordi, pour le groupe Les Républicains.

M. Michel Sordi. Ma question s’adresse à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.

Madame la ministre, il y a deux jours, vous déclariez sur BFM TV : « Je crois beaucoup en la nécessité de sauver les hôpitaux de proximité ». Pourtant, hier, vous avez accepté la fermeture du service des urgences de l’hôpital de Thann, situé dans ma circonscription.

De ce fait, 120 000 personnes sont privées d’un service d’urgence de proximité. Désormais, 30 000 habitants dans les fonds de vallée se trouvent à plus d’une heure de route du premier service d’urgence, ce qui va à l’encontre de la promesse du candidat Hollande de fixer un délai maximum d’une demi-heure pour accéder aux soins d’urgence.

Hier, vous avez laissé quatre des cinq médecins urgentistes quitter leur poste aux urgences de Thann pour être mutés dans un autre établissement.

Leur demande de mutation a été acceptée par le Centre national de gestion du personnel hospitalier sans que l’hôpital de Thann ait été informé ni qu’il ait eu les moyens de retarder leur départ ou le temps de trouver une solution pour réorganiser le service. C’est inadmissible !

Comment peut-on continuer, comme vous l’avez fait en 2015, à réduire le temps de présence des médecins urgentistes dans les établissements, alors même qu’il en manque déjà beaucoup ?

Le groupement hospitalier Sud Alsace était précurseur, par son ampleur, dans la démarche des groupements hospitaliers territoriaux. Nous avons bénéficié d’une aide d’un million d’euros en 2015 pour mettre en place le service de soins de suite et d’oncologie, mais d’aucune aide supplémentaire pour le moment sur l’enveloppe de 200 millions d’euros que vous venez de débloquer pour réhabiliter, comme promis, les bâtiments vétustes.

Madame la ministre, pouvez-vous m’indiquer quelles solutions vous pouvez apporter rapidement pour maintenir les urgences du centre hospitalier de Thann ? Pouvez-vous me confirmer que le groupement hospitalier Sud Alsace va bénéficier d’une aide supplémentaire pour cet hôpital ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, c’est vrai : l’Agence régionale de santé a été amenée à suspendre l’activité de service d’urgence de l’hôpital de Thann pour une période que je souhaite la plus courte possible. Pourquoi cette décision a-t-elle été prise ? Parce qu’il n’y a plus suffisamment de médecins.

Certains d’entre eux ont quitté l’hôpital, comme le droit français leur en donne la possibilité, dans la mesure où ils ont considéré ne pas avoir à leur disposition tous les instruments ou tous les personnels permanents.

Les postes existent, mais on recourait en quantité excessive à l’intérim médical. Les médecins ont considéré que, tant que celui-ci ne serait pas supprimé, ils ne pourraient pas exercer dans de bonnes conditions. Je souhaite que nous puissions attirer des professionnels, ce qui permettra de rouvrir ce service hospitalier.

C’est ce à quoi nous travaillons et c’est la raison pour laquelle j’ai mis en place un plan d’attractivité pour les praticiens hospitaliers, afin d’accélérer la carrière de ceux qui vont dans des établissements plus isolés ou moins spontanément attractifs, comme celui de Thann.

D’autre part, j’ai mis fin à la tarification à l’activité exclusive dans les hôpitaux de proximité, précisément pour permettre leur maintien.

Encore un mot, monsieur le député : lorsque j’entends certains de vos candidats (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) annoncer dans leur programme la suppression des hôpitaux de proximité pour faire des économies en matière de santé, je me dis que vous allez devoir choisir entre la défense de votre hôpital ou celle de vos candidats. À l’évidence, l’une et l’autre ne sont pas compatibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Politique du logement

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

Mme Audrey Linkenheld. Madame la ministre du logement et de l’habitat durable, 432 000 nouveaux logements autorisés ces douze derniers mois, 140 000 logements sociaux agréés, 400 000 logements rénovés durablement : ces résultats sont très bons pour l’immobilier et pour le secteur du bâtiment. Il faut s’en réjouir, parce que les engagements du début de quinquennat sont en passe d’être tenus (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains) et surtout parce que, derrière les chiffres, ce sont d’abord des hommes, des femmes, des familles, des enfants, des étudiants, des seniors qui ont trouvé ou vont trouver enfin un logement qui leur convienne. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

La droite a longtemps voulu nous faire croire que la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové – ALUR – empêcherait toute reprise de l’immobilier. Non seulement elle s’est trompée, non seulement la droite a fragilisé la reprise en créant des inquiétudes inutiles, mais elle persiste dans l’erreur en voulant maintenant abroger cette loi de progrès, comme elle veut revenir sur la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains – SRU – et ses obligations de production de logement social. Alors que les faits sont là,…

M. Philippe Meunier. Combien de chômeurs ?

Mme Audrey Linkenheld. …alors que la politique menée depuis 2012 sur fond de réformes structurelles et de soutiens conjoncturels porte ses fruits, les candidats à la primaire de droite continuent de proposer les vieilles recettes libérales du laisser-faire, du laisser-aller. Pourtant, le logement est un bien de première nécessité. Sans toit, sans logement décent, il est bien difficile d’élever ses enfants, de travailler, d’apprendre, d’étudier, bref, de vivre.

M. Philippe Meunier. Combien de logements avez-vous construits depuis 2012 ?

Mme Audrey Linkenheld. Pour nous la gauche, la régulation des prix et des loyers, l’intervention publique, nationale et locale, reste plus que jamais indispensable pour agir sur les besoins en logements des classes moyennes et populaires. (Exclamations sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

Aussi, madame la ministre, pouvez-vous indiquer à la représentation nationale comment le Gouvernement entend poursuivre cette politique volontariste ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du logement et de l’habitat durable.

Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable. Madame la députée, vous m’interrogez sur les travaux législatifs en cours et sur le sens que la majorité a souhaité donner, depuis le début du quinquennat, à ses politiques de logement.

M. Philippe Meunier. Elles ne sont pas brillantes !

Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Vous l’avez dit : loi de mobilisation pour le foncier public, loi ALUR en 2014, nouveau prêt à taux zéro, TVA réduite dans les quartiers de la politique de la ville, investissements locatifs revisités par la ministre Pinel. N’en déplaise aux râleurs (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), nos dispositifs de relance fonctionnent à taux plein. Voilà notre bilan : 432 000 logements autorisés sur les douze derniers mois, 367 000 chantiers lancés, une accélération sans précédent qui aide nos concitoyens à mieux se loger. Nous connaissons ainsi nos meilleurs chiffres depuis plusieurs années en matière de construction de logements.

Par ailleurs, la loi ALUR, adoptée en 2014, a permis de très grandes avancées, notamment l’encadrement des loyers, aujourd’hui en place à Paris, demain appliqué à Lille et, bientôt, dans l’agglomération parisienne, puis à Grenoble. Notre bilan…

M. Philippe Meunier. Il est mauvais !

Mme Emmanuelle Cosse, ministre. …c’est aussi la pérennisation du modèle du logement social et, cette année, nous aurons lancé 140 000 logements sociaux, un chiffre également inédit, après 120 000 l’an passé.

Pourtant, mesdames, messieurs les députés, j’entends là aussi, sur ce sujet, deux projets très différents, notamment celui formé par l’opposition à l’occasion de l’examen du projet de loi Égalité et citoyenneté, qui préfère démanteler le logement social, abroger la loi SRU et s’opposer aux mesures de mixité sociale. C’est une honte d’en être là en 2016 (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) quand il s’agit de répondre aux besoins de nos concitoyens sur le logement ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Enfin, ce soir, en séance, je défendrai devant vous le budget du logement et de l’hébergement, qui est également en hausse : nous avons en effet augmenté de 40 % les places d’hébergement, et nous continuerons. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Situation des professeurs de français langue étrangère

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, pour le groupe Les Républicains.

M. Thierry Mariani. Madame la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, depuis 1883, les alliances françaises développent et défendent dans le monde les valeurs et les ambitions de notre culture.

Les alliances françaises, ce sont 816 associations, présentes dans 135 pays, qui constituent la première école de langue française, avec près de 560 000 apprenants. Aujourd’hui, madame la ministre, vous le savez, la Fondation Alliance française lance une initiative, « Le défi : un million d’amis pour l’Alliance française », dont je porte à mon veston le symbole. Il s’agit de rappeler l’action que mènent les alliances françaises au service du rayonnement de notre pays. Comme mon collègue député des Français de l’étranger Alain Marsaud, à chacun de mes déplacements, je constate l’enthousiasme de ceux qui défendent notre langue, de Chisinau à Chengdu, de Perth à Oulan-Bator, chère à mon ami Jérôme Chartier. Je vois partout des équipes dynamiques, enthousiastes, qui œuvrent pour défendre notre langue.

Ma question porte sur l’avenir de ces professeurs de français langue étrangère – FLE. Madame la ministre, vous le savez, ils demandent une reconnaissance quand ils reviennent en France. À l’étranger, ces professeurs sont, le plus souvent, payés moins de 1 000 euros, au titre de contrats locaux. Ils formulent une demande précise : pouvez-vous créer un certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré – CAPES –, ce qui permettrait de reconnaître leur spécificité et leur offrir la possibilité de poursuivre leur carrière, une fois revenus en France ? Par ailleurs, le diplôme d’aptitude à l’enseignement du français langue étrangère – DAEFLE –, institué par l’Alliance française de Paris, peut-il être reconnu ? Ces professeurs sont des missionnaires de notre langue ; ils sont peu payés. Reconnaissons-leur une valeur quand ils reviennent dans notre pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, merci pour votre question et pour l’hommage que vous venez de rendre aux enseignants de français langue étrangère, auquel je m’associe pleinement. De fait, il faut le dire, ils exercent un travail très précieux. Qu’ils soient en poste à l’étranger ou, parfois, en France – le cas peut se présenter – ils sont confrontés à des publics divers, à des personnes ayant des motivations très différentes pour apprendre le français, qu’il s’agisse d’un désir d’intégration, d’un projet professionnel, d’une reprise d’études ou, s’agissant, par exemple, des réfugiés que nous recevons en France, d’une question, quasiment, de survie. Je veux à mon tour leur rendre un hommage appuyé et vous rassurer : nous prenons en considération leur situation particulière, même si on peut toujours améliorer les choses – je suis prête à y travailler avec vous. Par exemple, dans le cadre du concours d’enseignement qui leur est proposé, les enseignants ayant exercé à l’étranger peuvent emprunter la voie interne, ce qui leur permet de voir leur exercice professionnel à l’étranger reconnu, dès lors qu’il a duré au moins trois ans. C’est une façon de mettre en avant les compétences qu’ils ont acquises au cours de ces expériences.

S’agissant du CAPES, j’en profite pour dire que le nombre d’inscrits au concours de CAPES de lettres modernes de cette année a augmenté de 9 %, ce qui est une très bonne nouvelle. Ce CAPES de lettres modernes offre une option permettant le recrutement d’enseignants spécialisés dans l’enseignement du français aux étrangers.

Enfin, la formation spécialisée de ces enseignants français langue étrangère leur permet également d’intervenir dans des centres de formation publics.

Nous mettons donc aujourd’hui beaucoup de choses en œuvre pour leur faciliter la tâche, mais je suis prête à travailler pour que nous allions plus loin. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Philippe Gomes. Très bien !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Présidence de M. Marc Le Fur

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Fixation de l’ordre du jour

M. le président. La conférence des présidents, réunie ce matin, a arrêté les propositions d’ordre du jour suivantes pour le mardi 29 novembre, le mercredi 30 novembre et le jeudi 1er décembre :

Nouvelle lecture de la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre ;

Proposition de résolution au titre de l’article 34-1 de la Constitution pour rendre justice aux victimes de la répression de la Commune de Paris de 1871 ;

Proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires ;

Proposition de loi instituant des funérailles républicaines ;

Proposition de loi relative à relative à la promotion des langues régionales ;

Projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession du Monténégro ;

Proposition de loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse ;

Proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique.

Il n’y a pas d’opposition ?… Il en est ainsi décidé.

4

Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique

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Compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte

Lecture définitive (Discussion générale commune)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, en lecture définitive, du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (nos 4187, 4189) et de la proposition de loi organique relative à la compétence du Défenseur des droits pour l’orientation et la protection des lanceurs d’alerte (nos 4188, 4189). La Conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

Je vous rappelle qu’à l’issue de la discussion générale commune, nous examinerons successivement le projet de loi puis la proposition de loi organique. Le vote sur le projet de loi aura lieu dans l’hémicycle par scrutin public. Le vote sur la proposition de loi organique aura lieu dans les salles voisines de l’hémicycle. Durant ce scrutin, ouvert pour trente minutes, la séance ne sera pas suspendue, ou le sera très brièvement.

Présentation commune

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, monsieur le rapporteur, messieurs le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mesdames, messieurs les députés, le débat parlementaire sur le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique touche à sa fin. Il a été particulièrement utile. Grâce à vous tous, il a permis d’atteindre les ambitions initialement fixées, et même, sur certains points du texte désormais enrichis et approfondis, de les dépasser.

En juin dernier, lors de la première lecture, je résumais ainsi les trois principaux objectifs du texte : premièrement, favoriser une plus grande transparence et restaurer un lien de confiance indispensable au bon fonctionnement de notre démocratie ; deuxièmement, renforcer la lutte contre la corruption afin de combler les lacunes du système national et de hisser la France au niveau des meilleurs standards européens et mondiaux ; troisièmement, moderniser l’économie en favorisant un meilleur financement de nos entreprises, en renforçant la régulation financière et en protégeant davantage les consommateurs.

Ces objectifs, ambitieux, étaient partagés par l’ensemble des rapporteurs du projet de loi à l’Assemblée nationale et par une très large majorité de députés. Cette convergence a permis d’avoir, au sein des deux chambres, des discussions riches, intéressantes et constructives. Certes, il existe des divergences d’analyses, d’opinions et de points de vue entre la majorité sénatoriale et celle de l’Assemblée nationale – sinon, nous ne serions pas là cet après-midi. Ces oppositions sont même parfois très marquées. Je crois pouvoir affirmer, par exemple, que les rôles que les sénateurs ou vous-mêmes attribuez respectivement aux citoyens, à la société et à l’État ne sont pas identiques. Ce désaccord, parmi d’autres, est une explication de l’échec de la commission mixte paritaire de septembre.

Cependant, en acceptant le débat, en écoutant les arguments de chacun, les parlementaires ont, par leur travail, corrigé et amélioré le projet de loi. Je remercie tout particulièrement les rapporteurs de l’Assemblée nationale, MM. Denaja, Colas et Potier, mais aussi ceux du Sénat, MM. Pillet, de Montgolfier et Grémillet qui, en commission comme en séance publique, se sont pleinement engagés pour faire progresser le texte. La qualité de nos échanges et le résultat final honorent l’ensemble des parlementaires ayant participé aux différentes lectures, que je remercie.

Le texte présenté aujourd’hui comporte en effet des mesures significatives introduites à l’initiative des parlementaires. Dans le domaine de la transparence, les échanges sur la définition et la protection des lanceurs d’alerte ont été importants. Notre société honorait, en paroles, nos concitoyens les plus courageux, tout en les laissant juridiquement vulnérables. Il m’a donc semblé indispensable – et les députés de la majorité ont partagé cette opinion – de retenir une définition large des lanceurs d’alerte afin de permettre à tous, quel que soit le domaine d’activité en cause, de bénéficier du niveau de protection le plus élevé, et ce dans l’intérêt général.

M. Yann Galut. Très bien !

M. Michel Sapin, ministre. Le travail parlementaire pour aboutir à cette définition a été exceptionnel, aussi riche que celui réalisé sur l’encadrement du signalement et des conditions de l’alerte. De telles mesures représentent une véritable avancée en faveur de la démocratie.

Les différences entre l’Assemblée nationale et le Sénat ont également été marquées s’agissant de l’instauration d’un répertoire numérique unique de ce qu’il est convenu d’appeler les représentants d’intérêts auprès des pouvoirs publics. Cependant, elles n’ont pas empêché l’adoption d’une mesure qui, dans le respect de la Constitution, couvre désormais très largement les activités des lobbyistes.

L’absence d’encadrement avait en effet inexorablement éveillé les soupçons à l’encontre des institutions publiques, alors même que la représentation d’intérêts n’a en soi rien de blâmable et peut même participer à la réflexion devant présider à l’adoption de la loi ou du règlement. De tels soupçons fragilisaient le bon fonctionnement de notre démocratie. La transparence va permettre de renforcer la confiance des Français en leurs pouvoirs publics.

Cette mesure fait d’ailleurs écho à l’action menée depuis 2012 par le Gouvernement et la majorité en faveur d’une plus grande exemplarité des responsables politiques et, plus généralement, de toutes les institutions publiques. Elle peut ainsi être rattachée à la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui a créé la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique – HATVP –, dont nous renforçons aujourd’hui les pouvoirs. En matière de lutte contre la corruption, le projet de loi s’inscrit également dans la continuité de l’action gouvernementale durant cette législature, en donnant suite à la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière.

Aujourd’hui, vous allez voter la création de l’Agence française anticorruption, un nouveau service dont le statut et les missions ont fait l’objet d’importantes discussions. Vous avez souhaité faire de cette agence une institution forte en matière de prévention comme de lutte contre la corruption, en la dotant de pouvoirs étendus. Je m’en félicite et je m’engage à lui attribuer les moyens de remplir sa mission, de façon à donner à cette réforme décisive toute l’ampleur nécessaire. La probité et l’éthique méritent en effet qu’on y consacre des crédits et des postes !

Vous avez également introduit dans le texte un dispositif transactionnel novateur, la convention judiciaire d’intérêt public, pour permettre à l’autorité judiciaire de sanctionner pénalement les personnes morales mises en cause pour une atteinte à la probité. Je suis certain que ce dispositif sera mis en œuvre utilement par les magistrats et qu’ainsi notre pays pourra enfin lutter efficacement contre la corruption transnationale.

Cette loi permettra également de moderniser l’économie – une modernisation bénéfique tant pour les entreprises que pour les citoyens. En améliorant la réglementation française dans le domaine financier, nous contribuerons tous ensemble à préserver le mieux possible la stabilité financière. Nous accroîtrons également la protection des investisseurs.

Là encore, les travaux parlementaires ont souvent conduit à des améliorations du texte proposé par le Gouvernement. Par exemple, la mesure consistant à confier des pouvoirs d’urgence au Haut Conseil de stabilité financière en matière assurantielle a bénéficié de la confrontation des points de vue. J’ai désormais le sentiment que nous avons, grâce à ces échanges, un dispositif tout à fait proportionné aux objectifs de stabilité financière que nous nous sommes fixés. Une autre mesure me semble particulièrement significative pour assurer la protection des épargnants : l’interdiction de la publicité pour des plateformes internet qui proposent des instruments financiers très risqués. Ces dispositions ont été largement complétées au cours de la navette parlementaire et je m’en félicite.

D’autres dispositions proposées par les rapporteurs, avec l’accord du Gouvernement, sont aussi de bonnes illustrations de la modernisation de la vie économique. En particulier, le contrôle par l’assemblée générale des actionnaires de la rémunération des mandataires sociaux est un progrès utile qui servira la justice sociale.

M. Charles de Courson. Enfin !

M. Arnaud Richard. Il était temps.

M. Michel Sapin, ministre. Les secrets n’ont de raison d’être que s’ils ont vocation à protéger l’intérêt général. Ainsi, la publicité de certaines informations relatives à l’imposition des très grandes entreprises fera progresser l’efficacité de la lutte contre les pratiques agressives d’optimisation fiscale en mettant nos concitoyens en mesure de les détecter, sans qu’il soit porté une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre.

Toutes ces mesures ont été rédigées et adoptées avec le souci de concilier le respect de l’État de droit, en particulier de la Constitution, et l’efficacité économique. Le projet de loi dans son état actuel a, me semble-t-il, réussi à trouver le bon équilibre entre ces préoccupations : il porte ainsi nos exigences à un très haut niveau.

Le texte qui sera définitivement voté dans quelques minutes concrétisera pleinement les objectifs poursuivis. Cette adoption sera, pour moi, une satisfaction personnelle : vous connaissez mon engagement en faveur de la transparence de la vie publique et de la lutte contre les atteintes à la probité sous toutes leurs formes, engagement qui vaut déjà à ce texte le surnom de « Sapin II ». Cette satisfaction sera aussi et surtout celle d’une victoire collective, puisqu’elle sera le fruit d’une belle coconstruction du Gouvernement et du Parlement.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. C’est vrai.

M. Michel Sapin, ministre. Cette méthode de travail parlementaire – je le dis clairement ayant été moi-même parlementaire très jeune – met en évidence les qualités démocratiques des institutions de notre pays.

Monsieur le président, je tiens à saluer le travail de l’ensemble des services de l’Assemblée nationale sur ce texte qui a été longuement débattu et qui a donné beaucoup de travail à trois commissions : mes remerciements vont donc à leur président et à leurs membres ainsi qu’à tous ceux qui travaillent auprès des rapporteurs et qui suivent nos séances, notamment la nuit, pour nous permettre d’avancer dans de bonnes conditions.

À l’issue de ce vote, le travail devra toutefois se poursuivre. Nos concitoyens ne se satisfont pas du seul vote de la loi ; ils veulent encore en voir tous les effets. Les agriculteurs, particulièrement touchés aujourd’hui en raison des crises du secteur, attendent ainsi la mise en œuvre des mesures inscrites dans ce texte car elles répondent à des besoins urgents. Plus généralement, pour que l’ensemble des dispositions de ce texte entrent en vigueur rapidement, il faudra que les mesures d’application nécessaires soient adoptées dans un bref délai. J’y serai évidemment très attentif.

Je peux même, s’agissant de l’Agence française anticorruption, qui est un des éléments forts du texte, vous informer que le garde des sceaux et moi-même aurons à désigner très rapidement celui qui agira comme préfigurateur de cette agence avant d’avoir à en diriger l’action. Il sera ainsi au travail dans les tout prochains jours pour permettre à cette agence d’entrer dans les faits.

Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi que vous vous apprêtez à voter proclame l’exigence qui est la nôtre, toujours renouvelée et jamais épuisée, d’une République exemplaire. Il renforce les protections en faveur du contre-pouvoir de nos concitoyens. Il leur accorde les moyens nécessaires à un contrôle plus efficace des institutions publiques, mettant ainsi en application un principe que nos ancêtres révolutionnaires n’avaient pas eu peur de proclamer à l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. »

Mesdames et messieurs les députés, nous pouvons être fiers et des valeurs et des mesures présentes dans ce texte. Nous avons su le bâtir ensemble, avec le souci du rassemblement, pour une économie moderne et utile à chacun dans le cadre d’une démocratie confiante et apaisée. Soyons-en sûrs, désormais, cette loi permettra à la France de renouer avec le meilleur d’elle-même et d’être, également sur ce point, un exemple et, je l’espère, une référence dans le monde entier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

M. Sébastien Denaja, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, nous nous retrouvons aujourd’hui pour les lectures définitives du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique et de la proposition de loi organique relative à la compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte – elle fera de celui-ci leur protecteur. Que de chemin parcouru depuis juin dernier ! Que d’efforts fournis, aussi, pour ne pas manquer un des derniers grands rendez-vous de la législature, afin d’améliorer la transparence et de lutter plus efficacement contre la corruption ! Je veux vous dire ma fierté des progrès accomplis et de l’engagement de nos collègues, en particulier de ceux de la majorité car, il faut le bien le dire, l’opposition se sera caractérisée, à quelques exceptions près, dont celle, notable, de M. de Courson, par sa remarquable absence, traduisant ainsi, une fois de plus, le mépris et l’indifférence de la droite pour la lutte contre la corruption.

La première ambition du texte est de s’inscrire dans le prolongement des avancées décisives adoptées par notre majorité depuis 2013 en matière de transparence et de lutte contre la corruption, qu’il s’agisse de transparence de la vie publique, avec la création de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, ou de lutte contre la fraude fiscale avec notamment la création du parquet national financier. Tous ces textes, dont celui-ci, ont donné chair aux engagements pris au Bourget en janvier 2012 par François Hollande en matière de lutte contre la finance dévoyée et l’argent sale qui corrompt.

La seconde ambition du texte est d’apporter des réponses concrètes et nombreuses aux nombreuses attentes exprimées par la société civile et par les acteurs de la vie économique. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la commission des finances et celle des affaires économiques se sont vues déléguer l’examen de plusieurs dizaines d’articles, sur les 156 que compte désormais le projet de loi.

L’ampleur et la diversité des thématiques abordées ne doivent pas occulter le fil rouge qui a toujours guidé notre travail. À chaque lecture, nous nous sommes attachés à rééquilibrer les situations économiques, notamment dans le secteur agricole, en particulier dans le secteur laitier, qui attend avec impatience le vote des mesures contenues dans ce projet de loi.

Grâce au soutien du groupe majoritaire, de Mme Sandrine Mazetier, sa responsable, et de son président, M. Bruno Le Roux, j’ai pu joindre à ce premier texte une proposition de loi organique permettant de confier la protection des lanceurs d’alerte au Défenseur des droits. Cette disposition importante prolonge le volet du projet de loi ordinaire créant un statut général des lanceurs d’alerte. Cette avancée considérable fera de la France la pionnière en matière de protection des lanceurs d’alerte en Europe et même dans le monde.

L’ensemble de ces mesures participent d’une même volonté de garantir la probité des comportements au sein tant des institutions publiques que de la vie économique. Ce texte constitue, en ce sens, un véritable marqueur pour la majorité qui l’a défendu et amélioré au cours de nos débats. Je salue, à ce titre, le très important travail des deux rapporteurs pour avis, MM. Romain Colas et Dominique Potier.

Des divergences majeures sont apparues entre l’Assemblée nationale et la droite sénatoriale sur des mesures emblématiques du projet de loi et de la proposition de loi organique : elles n’ont pas permis à la commission mixte paritaire d’aboutir en septembre dernier. Je me félicite de cette situation car elle permettra à notre assemblée d’adopter dans quelques instants un texte fidèle à la volonté et à la vision défendues à l’Assemblée nationale par la majorité de gauche. Ce que nous nous apprêtons à voter, c’est une véritable loi de gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Yann Galut. C’est important.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Le 28 septembre, notre commission a préféré rétablir les rédactions qu’elle avait adoptées en première lecture,…

M. Yann Galut. Très bien ! C’est ce qu’il fallait faire !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. …tout en reprenant certains ajouts rédactionnels – faut-il le préciser ? – du Sénat.

S’agissant de l’article 13, relatif à l’encadrement du lobbying, les députés ont défendu, de manière constante, la constitution d’un répertoire unique des représentants d’intérêts intervenant auprès des pouvoirs publics. Le Président de l’Assemblée nationale lui-même, M. Claude Bartolone, défend depuis longtemps et avec conviction ce projet et nous avons travaillé avec toutes les parties concernées pour parvenir à une rédaction qui permette de contrôler les activités de lobbying tout en assurant le respect des garanties constitutionnelles attachées à ces institutions. Ainsi, celles-ci détermineront elles-mêmes les conséquences liées à l’inscription au registre d’un représentant d’intérêt. Le Sénat, lui, avait préféré un répertoire dont il aurait conservé l’entière maîtrise : telle n’est pas notre vision.

Nous n’avons pas non plus trouvé d’accord sur plusieurs aspects du statut des lanceurs d’alerte, s’agissant en particulier du soutien financier qu’il convient de leur apporter et que nous souhaitons réel et concret. La volonté des députés, que n’a pas suivie le Sénat, est de créer un véritable statut du lanceur d’alerte.

M. Yann Galut. Très bien !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Oui, monsieur Galut, nous allons établir un véritable statut général du lanceur d’alerte grâce à une définition large du lanceur d’alerte, permettant de couvrir toutes les situations, notamment celle de M. Deltour.

M. Michel Sapin, ministre. Il le mérite.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. C’est grâce au travail que nous avons fait ensemble que nous pouvons aboutir à une définition beaucoup plus large de ces situations, que nous voulons traiter efficacement.

A l’article 8, nous avons introduit un outil performant, l’Agence française anticorruption, qui remplacera l’actuel Service central de prévention de la corruption, lequel, il faut le rappeler, avait été réduit aux acquêts par la droite lorsqu’elle était majoritaire entre 2007 et 2012, avec 4,75 équivalents temps plein. Nous créons une agence qui sera au contraire dotée, le ministre s’y est engagé, de soixante-dix agents. En comparant les politiques, les Français pourront savoir qui lutte vraiment contre la corruption.

Nous avons également rétabli la commission des sanctions au sein de l’Agence française anticorruption et nous souhaitons qu’elle soit dotée – ce sera le cas – de toutes les garanties d’indépendance fonctionnelle, s’agissant notamment de la nomination de son directeur ou de sa directrice.

En ce qui concerne la moralisation de la vie économique, j’ai défendu, avec le soutien du groupe majoritaire, l’introduction d’un dispositif contraignant d’encadrement des rémunérations des dirigeants des grandes entreprises cotées. Ce dispositif prévoit que l’assemblée générale des actionnaires devra approuver les rémunérations proposées par le conseil d’administration. Elle le fera annuellement et son vote portera sur l’ensemble des éléments de la rémunération. Le texte prévoit même un contrôle ex post des rémunérations variables et exceptionnelles. Le Sénat, lui, s’était contenté d’un encadrement très léger, « Canada Dry », pourrait-on dire, en introduisant un vote non contraignant sur une politique de rémunérations. Ce vote, de plus, aurait été non pas annuel mais pluriannuel.

De même, en matière de reporting public, le Sénat ne proposait qu’un succédané du dispositif que nous avons décidé de rétablir dans toute sa force.

Un dernier point de divergence avec le Sénat a été l’incorporation d’une proposition de loi concernant des pans entiers du droit des sociétés, qu’il était impensable que notre assemblée adopte alors qu’elle n’avait fait l’objet d’aucune discussion.

Saisi une seconde fois le 4 novembre, le Sénat a choisi d’adopter de nouveau des dispositions profondément différentes de celles retenues par l’Assemblée nationale. Concernant les lanceurs d’alerte, la commission des lois du Sénat a significativement resserré la définition retenue par l’Assemblée nationale. S’agissant de l’encadrement du lobbying, le Sénat – je le répète – s’était contenté d’un répertoire qui lui soit propre, alors que la logique de la lisibilité et de l’intelligibilité du répertoire d’encadrement des lobbyistes implique qu’il soit unique. En effet, ce qui importe, c’est de rendre transparente la fabrication des décisions pour l’ensemble des citoyens.

Dans ces conditions, le désaccord persistant entre les deux chambres ne pouvait être tranché qu’en donnant le dernier mot à l’Assemblée nationale.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous propose donc, conformément au dernier alinéa de l’article 45 de la Constitution, de reprendre le dernier texte voté par l’Assemblée nationale, c’est-à-dire le texte adopté en nouvelle lecture. C’est sur cette base que la commission des lois s’est réunie à midi : elle a accepté vingt et un amendements reprenant des amendements adoptés par le Sénat en nouvelle lecture. Avec mes collègues Romain Colas et Dominique Potier, chacun pour les articles qui le concernaient, nous avons été favorables à toutes les propositions des sénateurs susceptibles d’améliorer encore les deux textes. Je souhaite donc que ces différents amendements puissent être maintenant adoptés en séance.

Il me reste à inviter notre assemblée à adopter ce projet de loi et cette proposition de loi organique. Ces textes sont le fruit d’un travail parlementaire très approfondi, qui a mobilisé trois commissions et dont nous pouvons considérer qu’il permettra à notre pays de se placer parmi les plus avancés en matière de lutte contre la corruption et de transparence publique.

Vous le disiez, monsieur le ministre : il s’agit là d’une belle œuvre collective. Je tiens à saluer l’état d’esprit qui a présidé à nos travaux. C’est vous, monsieur le ministre, qui avez permis cette coconstruction, faisant en sorte que la loi Sapin 2 – que nous appelions, lors de nos déplacements à vos côtés à Londres, la « Sapin two bill » (Sourires) – puisse être aussi, d’une certaine manière, la loi Colas 1, la loi Potier 1, la loi Mazetier 1, la loi Denaja 1,…

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Pas mal !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. …parce que vous avez permis à chaque député de cet hémicycle de s’investir dans l’élaboration de ce texte.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Absolument !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Je pense aussi à M. Galut et, dans l’opposition, à M. de Courson – la majorité sait aussi faire preuve d’ouverture… En tout cas, on peut parler d’une véritable coconstruction.

Ce texte va marquer l’histoire de notre quinquennat. C’est une véritable loi de gauche qui fait progresser, une fois de plus, la lutte contre la corruption dans notre pays. Oui, nous travaillons à l’édification d’une République nouvelle, d’une République exemplaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Yann Galut. Excellente intervention !

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Quel lyrisme !

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, permettez-moi de citer trois mots pour conclure ce long combat législatif que nous avons mené ensemble : loyauté, justice, éthique.

La loyauté réside dans notre mode de travail, dans l’attitude qui a présidé à nos relations. Entre les parlementaires et le Gouvernement – je veux saluer le travail que nous avons engagé, pour notre part, avec Stéphane Le Foll, Emmanuel Macron puis Martine Pinville –, les échanges étaient empreints de cette loyauté, dans les accords comme dans les désaccords, afin de trouver des solutions ensemble. Cette loyauté a aussi régné dans notre dialogue permanent avec les forces économiques, celles de l’artisanat – en ce qui me concernait –, des PME et du monde agricole, dans leur diversité. Le temps de la loyauté est le temps de l’écoute, du dialogue, de la recherche de compromis et de solutions communes.

Cette loyauté, nous l’avons également trouvée dans nos relations avec le Sénat, dans un alignement des astres assez rare entre le Gouvernement et le Parlement, entre la majorité et l’opposition. Sur 95 % des sujets, l’Assemblée nationale et le Sénat ont trouvé des accords, au nom de la lutte contre la crise mais aussi de valeurs partagées. Sans en faire un principe universel, je veux en tirer une simple leçon : lorsqu’on s’écoute, lorsqu’on prend le temps d’analyser les causes de la crise, lorsqu’on est attaché à des valeurs communes, on est capable de trouver des chemins communs. Il est inutile d’hystériser les débats, de sortir ses drapeaux : on peut, de manière pragmatique, se rassembler et trouver des solutions, comme nous l’avons fait sur l’ensemble des sujets économiques.

Je veux le dire avec force : nous rencontrons aujourd’hui, sur nos territoires, la satisfaction du monde de l’artisanat et du monde agricole. Je pense notamment aux éleveurs et à ceux qui ont le plus souffert des crises du passé. Nous avons su analyser ces crises, et nous avons compris qu’elles étaient le fruit de mesures ultralibérales et désinvoltes. Qu’il s’agisse des décisions prises en matière de quotas laitiers ou des dispositions de la loi de modernisation de l’économie – la loi LME – ayant entraîné un déséquilibre au sein des filières, ces mesures avaient dépouillé, appauvri et fragilisé le secteur de la production, exposé aux vents mauvais de ceux qui cherchent en permanence la baisse des coûts au détriment de la dignité humaine, du respect des producteurs et de nos écosystèmes.

Nous avons réintroduit ce principe de loyauté dans les négociations en amont et en aval, avec l’obligation pour les grands groupes agroalimentaires, les géants du secteur, de publier leurs comptes et d’être transparents. Nous avons imposé la prise en compte des coûts de production et de la valeur ajoutée dans les négociations en amont et en aval des filières, celles qui relient les producteurs aux transformateurs et les transformateurs aux distributeurs. Nous avons considéré que les droits à produire n’étaient pas commercialisables dans les années à venir.

Nous avons introduit un principe nouveau, celui de la lutte contre l’accaparement des terres. La politique foncière est capitale, parce qu’elle est la mère de toutes les politiques agricoles et agroalimentaires, et nous savions que le droit des sociétés comportait une faille qu’il nous fallait combler. Ce sujet avait été évoqué lors de la discussion de la loi d’avenir pour l’agriculture, mais il n’avait pas pu aboutir. Les « lanceurs d’alerte » – entre guillemets ! – qu’ont été les fonds spéculatifs chinois ayant sévi dans l’Indre nous ont aidés à mobiliser nos forces et à trouver, dans un dialogue avec le Gouvernement, des solutions dont j’espère qu’elles produiront leur effet, car la maîtrise publique du foncier est une politique qui permet le maintien des patrimoines naturels, du bien commun et de l’égalité des chances dans le renouvellement des générations d’entrepreneurs sur nos territoires.

Le second mot-clé sur lequel je veux m’attarder est l’éthique. Comme la loyauté, ce mot a pu paraître désuet, alors qu’il est extrêmement moderne. Sans éthique, sans justice, il n’y a pas d’effort possible. La plainte que nous entendons, qui nourrit tous les populismes et toutes les peurs sur nos territoires, naît souvent de la révolte contre l’indolence et contre l’indécence que constitue l’inégalité des chances entre ceux qui trichent et ceux qui respectent la loi. Il n’y a pas de jour, sur nos territoires, où un député ou un sénateur n’entend pas cette plainte des entrepreneurs qui exercent leur métier de façon loyale et qui ne supportent plus la concurrence de ceux qui ne respectent ni les règles sociales, ni les règles environnementales, ni aucune règle éthique. Retrouver de l’éthique et de la justice, c’est redonner du sens à l’économie, c’est permettre à chacun de gagner.

Mes chers collègues, nous pouvons comprendre qu’il y ait une compétition, que les meilleurs gagnent, que certains se lèvent plus tôt, fabriquent du meilleur pain, de plus beaux meubles ou construisent de plus belles maisons, mais personne ne peut comprendre qu’un entrepreneur remporte un marché parce qu’il n’a pas payé ses salariés ou les charges sociales, parce qu’il a triché sur la nature des matériaux ou parce qu’il a profité d’un rapport léonin. Nous devons trouver cette éthique, qui doit redevenir le gouvernail de nos politiques publiques. Nous devons porter ces combats au-delà des frontières de la France, en Europe, avec courage.

De la lutte contre les paradis fiscaux à la lutte contre le travail détaché, il y a un récit : c’est celui de la loi Sapin 2, que nous portons de façon collégiale et que nous voterons unanimement, je l’espère, dans quelques instants. Ce récit doit nous mener vers d’autres combats : je pense au devoir de vigilance des sociétés mères sur leurs filiales et leurs sous-traitants. Pendant toute la durée de cette législature, nous aurons contribué à rendre la mondialisation plus heureuse et l’économie plus saine. C’est la chance de la France et la chance de l’Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous procédons cet après-midi à la lecture définitive du projet de loi dit « Sapin 2 ». Les orateurs qui se sont succédé à cette tribune ont rappelé que ce texte était le fruit d’un long processus législatif, qui a commencé il y a plus de sept mois. Le texte initial comportait cinquante-sept articles ; il en compte maintenant près du double.

M. Sylvain Berrios. Il ne va donc pas dans le sens de la simplification du droit !

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, c’est la preuve d’un travail parlementaire fructueux, qui a conduit l’Assemblée nationale à adopter 941 amendements et le Sénat à en adopter 386.

Beaucoup de choses ont déjà été dites par mes collègues : je me concentrerai donc, si vous le voulez bien, sur les articles dévolus à la commission des finances, en vertu de la formule originale de la délégation d’articles. Je remercie Sébastien Denaja et l’ensemble des membres de la commission des lois d’avoir respecté cette procédure.

Avec le Sénat, force est de constater que ce n’est pas sur les articles dévolus à nos commissions des finances respectives que les désaccords ont porté. Après la nouvelle lecture du projet de loi au Sénat, il n’y a guère que sur l’article 21 bis A habilitant le Gouvernement à réformer par ordonnance le code de la mutualité qu’un désaccord de fond est susceptible de persister entre nos deux chambres.

Je veux donc revenir sur les progrès que nous avons pu accomplir ensemble, monsieur le ministre, dans le cadre de l’examen des articles de votre texte délégués à la commission des finances.

En matière d’encadrement du système financier et de financement de l’économie, nous avons créé un régime macroprudentiel dans le secteur des assurances. Un tel régime était souhaité par les autorités chargées de faire respecter les règles de prudence dans ce secteur. Le texte a été considérablement amélioré au cours de la navette parlementaire : le nouveau système a été encadré, pour répondre aux inquiétudes légitimes qui avaient pu se faire jour, notamment chez certains distributeurs de contrats d’assurance vie. Nous disposons désormais d’un dispositif à la fois efficace, susceptible de prévenir les risques, clair et lisible. D’ailleurs, j’expliquais récemment que ce dispositif allait jouer un rôle d’extincteur en cas d’incendie. Il n’y a pas de raison de s’inquiéter : au contraire, la présence d’un extincteur est rassurante le jour où l’on rencontre un problème.

Nous avons étendu les pouvoirs de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ACPR – et de l’Autorité des marchés financiers – AMF – en matière de régulation financière. En outre, nous avons décidé de flécher une partie des fonds collectés dans le cadre des livrets de développement durable vers le financement de l’économie sociale et solidaire. D’ailleurs, ces livrets s’appelleront prochainement « livrets de développement durable et solidaire ».

Comme l’ont rappelé Sébastien Denaja et Dominique Potier, nous avons avancé en matière de lutte contre l’évasion fiscale, de moralisation et de transparence du fonctionnement de notre économie. Nous avons instauré un contrôle parlementaire sur les évolutions de la liste des États et territoires non coopératifs : les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat seront désormais saisies lorsque la France décidera d’ajouter ou de retirer de sa liste nationale l’un de ces paradis fiscaux. Sur proposition de notre collègue Éric Alauzet, nous avons décidé la création d’un registre public des bénéficiaires effectifs des sociétés. Nous avons abaissé le seuil de déclaration des prix de transfert pour les entreprises – c’est un élément essentiel pour lutter contre l’érosion de nos bases fiscales.

Comme l’ont souligné les deux rapporteurs et le ministre, nous avons adopté le premier dispositif de droit positif prévoyant un reporting public pays par pays, anticipant en cela les débats en cours entre le Parlement européen, la Commission européenne et les États. Nous envoyons ainsi un signal fort, qui montre la volonté du Gouvernement et de la majorité d’accroître la transparence et d’exiger que les grands groupes paient des impôts là où ils réalisent des bénéfices, tout en s’assurant que la vigilance citoyenne puisse s’exercer. Le dispositif devra encore être amélioré, mais permettez-moi de souligner une nouvelle fois que la France est le premier État à se doter d’une législation innovante en la matière.

Nous avons également voulu protéger les intérêts des consommateurs. Ainsi, nous avons interdit toute forme de publicité pour des produits financiers à très haut risque – dans ce domaine, le texte a été enrichi par rapport au projet gouvernemental initial.

Enfin, nous avons consacré un droit annuel à la mobilité en matière d’assurance emprunteur. Monsieur le ministre, j’ai entendu la réponse que vous avez apportée tout à l’heure à la question de Charles-Amédée de Courson : il subsiste donc sans doute un point de désaccord entre nous. Pour clarifier la volonté du législateur, je veux rappeler que, dans notre esprit, cette mesure défendue par Pierre-Alain Muet et Charles-Amédée de Courson devait concerner non seulement le flux – les contrats à venir –, mais également le stock de contrats d’ores et déjà conclus, ce qui est essentiel si l’on veut faire vivre ce beau nouveau « droit à l’oubli » que nous avons créé dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé portée par Marisol Touraine.

Permettez-moi de conclure mon intervention par un certain nombre de remerciements, habituels dans le cadre d’une lecture définitive. Ainsi, je remercie l’ensemble des collègues qui se sont investis dans l’élaboration de ce texte : les rapporteurs, Sébastien Denaja et Dominique Potier, les différents responsables, Sandrine Mazetier, Christophe Castaner, Sophie Errante, sans oublier Charles de Courson, dont la présence a été constante lors de nos débats.

M. Arnaud Richard. Bravo !

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Je remercie nos collaborateurs, que nous mettons à rude épreuve lorsque nous jouons un rôle particulier sur un texte comme celui-ci, ainsi que les administrateurs de notre assemblée – merci, monsieur le ministre, d’avoir eu quelques mots pour eux, car leur rôle est essentiel pour nous permettre d’exercer pleinement notre rôle de législateur.

Je remercie vos collaborateurs et vos équipes, monsieur le ministre, car ils ont toujours été disponibles, à l’écoute ; ils ont parfois accepté le débat entre nous, mais toujours dans un état d’esprit extrêmement constructif et dans le respect des prérogatives du Parlement.

Enfin, je vous remercie, monsieur le ministre. Si ce texte est une œuvre collective, c’est parce que vous avez été un chef d’orchestre laissant à chacun la liberté de s’exprimer. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.) S’il a pu exister des solistes, vous nous avez permis de composer une belle harmonie. (Exclamations sur divers bancs.)

M. Sylvain Berrios. Confettis et cotillons !

M. Dominique Dord. Il aura bien mérité son investiture !

M. Christophe Castaner. C’est beau comme du Mozart !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. En tout cas, c’est plus beau que la grosse caisse jouée par la droite !

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Ne vous en déplaise, chers collègues de l’opposition, je suis fier de terminer cette législature en adoptant ce texte. Que chacun prenne ses responsabilités : c’est encore une fois la gauche qui aura permis d’avancer en matière de transparence, de lutte contre la fraude et pour le progrès ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Discussion générale commune

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous voici aujourd’hui arrivés au terme de l’examen d’un projet de loi que le groupe UDI avait suggéré de rebaptiser « projet de loi portant diverses dispositions d’ordre économique, social et financier ».

M. Arnaud Richard. Très juste.

M. Charles de Courson. En effet, ce texte est un véritable fourre-tout, traitant de sujets aussi divers que variés. Nous déplorons, au groupe UDI, que cette absence de cohérence ait conduit à retarder l’entrée en vigueur de la plupart des mesures contenues dans le texte, alors que peu de points de blocage ont empêché l’Assemblée nationale et le Sénat de parvenir à un accord dès la première lecture.

Toutefois, globalement, les dispositions que comporte ce projet de loi, aussi minimes soient-elles pour certaines, vont plutôt dans la bonne direction. Nous saluons tout particulièrement le travail accompli par la représentation nationale s’agissant de l’encadrement de la rémunération des mandataires sociaux des sociétés, désormais soumise à la décision des assemblées générales d’actionnaires. C’est une mesure que notre groupe défendait depuis de très nombreuses années, car il était nécessaire de mettre fin à l’endogamie des dirigeants, qui fixent leur rémunération entre eux sans se soucier de leurs actionnaires.

Le groupe UDI salue également les mesures de lutte contre la corruption et de protection des lanceurs d’alerte, notamment la création d’un socle de dispositions communes relatives à ces derniers, ainsi que nous l’avions préconisé.

Enfin, nous saluons l’amendement adopté par notre Assemblée interdisant à un citoyen de se porter candidat à une fonction élective – locale pour le moment – si le bulletin n2 de son casier judiciaire comporte des mentions incompatibles avec l’exercice de cette fonction. Cette mesure est une première étape afin de restaurer la confiance de nos concitoyens envers leurs élus, aujourd’hui dégradée.

Concernant les mesures liées à l’agriculture, nous avons regretté l’absence d’ambition du Gouvernement, ainsi que le reniement de la promesse du ministre de l’agriculture de refonder la loi  LME de 2008.

Certaines dispositions, quoique mineures, vont cependant dans le bon sens. Ainsi, nous avons soutenu l’interdiction de la cession à titre onéreux des contrats de vente de lait de vache, proposition formulée d’ailleurs dans le rapport sur l’élevage français de nos collègues Thierry Benoit et Annick Le Loch.

Nous regrettons cependant que le Gouvernement ne nous ait pas entendus sur plusieurs sujets : la mention du nom des négociateurs dans les contrats passés entre OP – organisations de producteurs – ou AOP – associations d’organisations de producteurs – et les industriels, la renégociation automatique des contrats entre fournisseurs et distributeurs en fonction des indicateurs établis par l’Observatoire des prix et des marges, l’interdiction du logo « Transformé en France ».

Nous déplorons surtout que rien n’ait été fait pour mettre fin à la cartellisation croissante de la grande distribution, alors que nous avions proposé que l’Autorité de la concurrence puisse fixer un pourcentage maximum de parts de marché applicable aux groupements d’achats.

Il est également regrettable qu’en matière d’assurance-vie, le Gouvernement n’ait pas retenu l’amendement du groupe UDI qui, afin de protéger l’épargne de nos concitoyens en cas de crise grave, ne permettait pas de bloquer leurs contrats d’assurance-vie dans toute une série de cas, analogues à ceux retenus pour le déblocage de la participation ou de l’intéressement : mariage, naissance, achat d’un logement, etc. Il est vrai que le Gouvernement a expliqué que le blocage des contrats d’assurance-vie pouvait être limité par le Haut conseil de stabilité financière, mais notre amendement offrait une meilleure garantie aux épargnants.

Enfin, je souhaiterais dire un mot de l’assurance-emprunteur. L’amendement adopté par notre Assemblée, et déposé notamment à l’initiative du groupe UDI, mais également de nombreux autres collègues, et qui permettait au consommateur une renégociation annuelle, a en effet été supprimé par le Sénat, mais rétabli en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale. Cette disposition est essentielle afin de protéger les droits des consommateurs, et nous nous réjouissons qu’elle soit sur le point d’être définitivement adoptée. Cette disposition s’applique – notre collègue rapporteur l’a rappelé – non seulement aux nouveaux contrats, mais aussi aux contrats en cours, contrairement à ce que vous avez laissé entendre, monsieur le ministre, dans votre réponse, il y a à peine une heure à la question que je vous ai posée dans le cadre des questions au Gouvernement.

M. Arnaud Richard. Exactement.

M. Charles de Courson. Il ne s’agit pas d’abroger un contrat, mais de rappeler que ce contrat a une durée d’un an et qu’au bout d’un an, on peut « changer de crémerie ». Ce n’est pas plus compliqué que cela, monsieur le ministre.

M. Arnaud Richard. En effet !

M. Charles de Courson. Dans cette affaire, je crains fort que vos services ne vous aient fourvoyé. Alors suivez le bon sens des parlementaires, de toutes sensibilités d’ailleurs.

Mes chers collègues, je conclurai en disant que si le groupe UDI déplore l’absence de vision politique et d’ambition, ainsi que nous l’avions indiqué lors de la première lecture, nous ne nous opposerons pas aux mesures intéressantes, quoique souvent insuffisantes, que ce texte contient. Toutefois, nous aurions espéré que le Gouvernement se montre plus ouvert à nos propositions. C’est pourquoi le groupe UDI s’abstiendra sur ce projet de loi, tout comme sur la proposition de loi organique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André.

M. Stéphane Saint-André. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes réunis pour l’ultime étape du parcours parlementaire de ce projet de loi. Depuis plus de quinze ans, la France ne fait pas partie des pays au « top niveau » dans les classements des ONG reconnues pour leur expertise dans la lutte contre la corruption. Aux alentours de la vingt-cinquième place dans le classement de Transparency International, nous progressons malgré tout depuis trois ans. Les récentes lois sur la transparence et contre la corruption ont aidé. Je pense à celles de 2013 relatives à la transparence de la vie publique et à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, qui ont participé au renforcement de l’encadrement juridique, mais n’ont pas encore produit tous leurs effets.

Les dispositions supplémentaires du présent projet de loi permettront de perfectionner nos dispositifs de lutte contre la corruption et les atteintes à la probité, qu’il s’agisse de prévention ou de répression.

Au nom des députés du groupe RRDP, je vous confirme la position que nous avons exprimée lors des précédentes lectures : nous soutenons ce projet de loi, avec toutefois quelques réserves.

Par exemple, les lanceurs d’alerte sont certes nécessaires et ont joué un rôle utile dans plusieurs scandales récents. Il faut soutenir ceux qui sont de bonne foi et préviennent des phénomènes de corruption. Mais il faut aussi prendre garde aux dérives possibles, aux effets pervers, aux abus. Une définition imprécise de la notion de lanceur d’alerte pourrait rendre possibles des manipulations économiques ou diplomatiques, voire des comportements malveillants. L’ajout des mots : « de manière désintéressée », objet de débats dans les deux chambres, est un vrai sujet.

Dans son avis, le Conseil d’État dénonçait notamment le caractère déficient de l’étude d’impact. Pour ne prendre qu’un seul exemple, elle ne dit pas un mot sur les éventuels effets indésirables d’une réduction d’un an à six mois de la durée de validité des chèques, alors que l’on touche là à une habitude bien ancrée chez nos concitoyens. Le groupe RRDP est favorable au remplacement de cette mesure par une demande de rapport sur le sujet, adoptée à l’article 25 en nouvelle lecture : ce rapport va en effet pallier l’absence d’étude d’impact.

Concernant le reporting, nous sommes favorables à un reporting complet et public pour les multinationales. À la version de la Commission européenne, nous préférons celle de la directive du Parlement européen, votée à quatre reprises par des députés de toutes les familles politiques. Nous avons ici l’opportunité d’envoyer un message fort à l’Europe.

Autre sujet médiatique moralement intolérable et économiquement inacceptable : la rémunération indécente des grands patrons.

M. Gaby Charroux. C’est bien vrai !

M. Stéphane Saint-André. Nous devons fixer des limites, un seuil de revenu maximum. Nous demandons l’application de l’aphorisme : « un revenu maximal pour une décence minimale ». Le discours de ceux qui prétextent la sacro-sainte « loi du marché » pour refuser de fixer une limite aboutit à tous les excès.

Nous espérons pouvoir vous convaincre aussi sur le sujet des associations d’élus, qu’il serait inconvenant de considérer comme des représentants d’intérêts privés. Leurs membres sont élus au suffrage universel, leur consultation est prévue dans de nombreux textes. Elles répondent quotidiennement aux sollicitations des représentants de l’État, au niveau central ou déconcentré, pour contribuer à la réflexion lors de l’élaboration de textes législatifs ou réglementaires.

Par ailleurs, nous avons déposé un amendement destiné à rendre obligatoire le cautionnement des PME qui soumissionnent à un marché public afin de les mettre sur un pied d’égalité et leur assurer une garantie de paiement formelle.

S’agissant de l’agriculture, on tâtonne depuis des années sur la question du prix à payer à nos paysans. Nous n’avons toujours pas réussi à inverser le phénomène de captation de la valeur ajoutée par la grande distribution et l’industrie agroalimentaire au détriment de nos paysans qui souffrent de cette injustice.

Mais au-delà de ces légères divergences, nous avons de grandes convergences, et nous saluons l’enrichissement du texte. Pour ce qui concerne la protection des consommateurs, nous nous félicitons de l’adoption de notre amendement mettant fin aux abus sur l’assurance emprunteur.

Le texte contient de bonnes mesures, susceptibles d’améliorer notre droit et les pratiques, ce dont nous nous félicitons. Dans ces conditions, les députés du groupe RRDP le voteront. (Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux.

M. Gaby Charroux. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes pour la dernière fois réunis pour examiner, en lecture définitive, le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Comme lors des examens en première et en nouvelle lectures, nous nous abstiendrons sur un texte qui reste, à nos yeux, au milieu du gué.

Mais saluons d’abord le mérite premier de ce projet de loi, celui de mettre en discussion la probité politique et la corruption des élites. Il était essentiel que nous ayons un débat de fond sur ce sujet, tant les scandales à répétition indignent l’opinion publique et fracassent  la confiance de nos concitoyens à l’égard des dirigeants politiques et économiques.

Ainsi, après avoir exercé les fonctions de président de la Commission européenne, M. Barroso n’aurait pas enfreint le code de bonne conduite et les règles d’intégrité de l’Union européenne – c’est du moins ce qu’affirme le comité d’éthique de l’Union – en acceptant un poste à responsabilité au sein de Goldman Sachs, la sulfureuse banque d’affaires américaine qui avait, on s’en souvient, joué un rôle machiavélique dans le déclenchement de la crise grecque. Stupeur !Incompréhension ! Dégoût, même. Ce pantouflage inacceptable – et je pèse mes mots – revêt, selon moi, une double signification : d’une part, il montre que l’Europe, en plus d’aller droit dans le mur, tend à appuyer sur l’accélérateur, ce qui est désolant et appelle des actes forts ; d’autre part, il montre la nécessité de se montrer intraitable en matière d’éthique, de lutte contre la corruption, d’exercice transparent de fonctions publiques, qu’elles soient locales, nationales ou transnationales, si l’on veut un jour restaurer ce lien de confiance avec la population.

Pour revenir à notre pays, oui, nous sommes aujourd’hui en retard en matière de lutte contre la corruption. Ce constat est partagé sur tous les bancs de l’hémicycle. Mais on se demande bien quel est le fil conducteur de ce texte, véritable « fourre-tout », puisque l’on y parle non seulement de corruption, mais aussi de droit des sociétés, d’agriculture, de domanialité publique, d’assurance emprunteur, de réglementation financière et de bien d’autres sujets encore.

Plutôt que de se concentrer sur l’essentiel, ce projet de loi tente ainsi de traiter tous les sujets à la fois, alors que certains d’entre eux auraient mérité un projet de loi spécifique. Cela nous laisse un sentiment d’amertume, l’impression d’être davantage dans l’affichage que dans le concret. Or en la matière, l’ambition affichée ne saurait suffire, seuls les actes comptent.

Toutefois, la principale avancée concerne la protection des lanceurs d’alerte. Sur ce sujet, nos discussions auront permis d’enrichir le projet de loi, ce qui est une très bonne chose. Pour autant, beaucoup reste à faire pour garantir un statut pleinement protecteur à cette « ressource », cette véritable « richesse » pour la démocratie.

Nous étions par ailleurs favorables à la création d’une agence française anti-corruption, mais les contours finalement retenus pour la nouvelle institution nous semblent flous, notamment pour ce qui concerne son indépendance.

De même, mes chers collègues, il était urgent de réguler les pratiques des lobbyistes, et la création d’un registre public obligatoire va clairement dans le bon sens. On peut néanmoins regretter que le champ d’application de cette disposition ne soit pas aussi large que possible.

Mais là où le bât blesse fondamentalement, c’est en matière de lutte contre la délinquance économique, la fraude et l’évasion fiscales ainsi que sur les règles relatives à la probité du monde des affaires.

Sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, peu d’engagements ont été pris – presque aucun, si ce n’est un reporting pays par pays, lacunaire et largement critiqué par la société civile. Le combat n’est pas fini et nous espérons avancer avant la fin de la législature, comme nous l’avons fait pour la taxe sur les transactions financières.

Par ailleurs, alors que le Sénat, de droite, y est favorable, l’Assemblée refuse toujours de faire sauter le verrou de Bercy, véritable anomalie démocratique, « préjudiciable à l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale », selon les mots de la Cour des comptes.

Mettre l’économie au service de la société, et non l’inverse, voilà bien une autre cible que manquera ce projet de loi. Largement lacunaire, l’encadrement des rémunérations dans les entreprises, tel qu’ici proposé ne suffira pas à faire disparaître les prétentions délirantes de quelques surhommes autoproclamés. Ainsi, rendre décisionnel le vote des actionnaires aura un impact très marginal, comme on s’en rendra probablement compte très vite. Toutes nos propositions en la matière auront été successivement retoquées, à l’image de celles contenues dans la proposition de loi que j’ai défendue sur l’encadrement des rémunérations dans les entreprises, qui visait à supprimer les salaires indécents pratiqués dans les grandes entreprises du CAC 40.

Nous déplorons également que se poursuive, malgré l’opposition de nombreux élus d’outre-mer, la volonté de céder à une filiale privée de la CDC les parts détenues par l’État dans les sociétés immobilières d’outre-mer, qui représentent 48 % du logement social de ces territoires.

Au bout du compte, accueillant favorablement les réelles avancées du texte qui nous est soumis, mais prenant également acte de ces manquements importants, nous ne pourrons pas voter en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, il est vraiment temps de protéger rapidement et efficacement les Antoine Deltour, les Irène Frachon, les Nicolas Forissier ou les Raphaël Halet de demain. Ce sera chose faite avec l’adoption de la proposition de loi organique confiant au Défenseur des droits l’accompagnement et le soutien des lanceurs d’alerte.

Je n’ai à ce propos qu’un regret : que l’unanimité de la gauche au Sénat n’ait pas suffi à rétablir l’ensemble des prérogatives de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement. La droite sénatoriale a décidément choisi la suspicion, alors que nous voulons, quant à nous, protéger les lanceurs d’alerte.

Cette proposition de loi et le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique sont aussi, et nous le revendiquons, des textes de transparence – contre les trous noirs de la finance internationale et contre les fonds vautours, sur le financement des partis politiques et sur leurs prêteurs, ainsi que sur les représentants d’intérêts. Tout acte visant à peser sur la décision publique doit se faire en plein jour : tel sera le rôle du registre unique dans lequel devront s’inscrire les représentants d’intérêts et que contrôlera la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.

Le projet de loi entend aussi lutter contre la corruption et s’en donne les moyens avec l’agence anticorruption et les moyens importants dont cette dernière sera dotée. C’est là du concret.

Nous avons également voulu mettre fin à l’impunité des entreprises coupables de corruption transnationale et d’atteintes à la probité. La convention judiciaire d’intérêt public permettra de sanctionner rapidement et lourdement ces entreprises et d’obtenir réparation pour les victimes, pour la société et pour nos finances publiques. C’est une mesure de justice pour nos entreprises qui sont aujourd’hui lourdement condamnées outre-Atlantique ou en Europe, alors que, pour les mêmes faits, leurs concurrents risquent cent fois moins en France – à supposer qu’ils soient même condamnés.

Le Sénat a voulu permettre explicitement le recours à cette convention pour les infractions connexes au blanchiment de fraude fiscale. Nous partageons ce point de vue et reprenons cette rédaction, en espérant que des victimes de telles infractions pourront ainsi bénéficier de la réparation qui leur est due – je pense en particulier aux actions qui pourront être intentées pour la réparation des préjudices subis par les lanceurs d’alerte dans le domaine bancaire.

Ce texte touche aussi le quotidien, avec notamment des mesures que nous avons saluées en faveur des agriculteurs, en particulier des acteurs du secteur laitier.

Une autre mesure nous tient particulièrement à cœur : celle qui concerne l’assurance emprunteur souscrite par tous ceux qui s’endettent pour acheter leur maison. Dès la loi « consommation », nous avons voulu, avec les associations de consommateurs, que nos concitoyens puissent changer cette assurance chaque année, et ce pour toute la durée de leur prêt – c’est du reste ce que prévoit le code des assurances. Devant l’interprétation fallacieuse de cette disposition par certains acteurs, nous avons adopté en nouvelle lecture un amendement réaffirmant ce droit. Je tiens donc à préciser à cette tribune, dans le cadre de cette lecture définitive, que l’intention du législateur est bien que cette possibilité de changement offerte chaque année s’applique à tous les emprunts souscrits depuis la promulgation de la loi du 17 mars 2014.

M. Arnaud Richard. Très bien !

Mme Sandrine Mazetier. Mes derniers mots iront à nos rapporteurs, MM. Sébastien Denaja, Dominique Potier et Romain Colas, dont je salue l’inventivité, la combativité et la détermination. Avec eux, nous sommes fiers du travail accompli et impatients que toutes ces dispositions, sans exception, s’appliquent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous arrivons au terme des discussions parlementaires sur ce projet de loi, qui a beaucoup évolué au fil du temps. Bien évidemment, nous partageons pleinement les objectifs de transparence, de lutte contre la corruption internationale et de soutien aux lanceurs d’alerte. Monsieur le ministre, la convergence à laquelle nous avons pu aboutir sur de nombreux points montre que ces objectifs rencontrent une adhésion sur tous les bancs de notre assemblée.

Je pense en premier lieu à l’agence anticorruption qui, sous la double tutelle du ministère de la justice et du ministère du budget, disposera d’un pouvoir de sanction administrative. Cette mesure, couplée à la procédure de transaction pénale, permettra à la France d’être crédible sur la scène internationale, avec un dispositif comparable à celui des États-Unis ou de la Grande-Bretagne. Nous nous félicitons aussi de l’introduction dans ce texte de l’amendement « Lellouche-Berger », qui donne une compétence extraterritoriale à cette agence.

Il faut toutefois apporter à cela un bémol non négligeable, lié au seuil à partir duquel vous voulez contraindre les entreprises à mettre en place l’arsenal des mesures de prévention de la corruption et qui nous semble, à 500 salariés, excessivement bas. À travers la question du seuil se pose évidemment celle de la cible : vous avez choisi, monsieur le ministre, de cibler nos entreprises de taille intermédiaire, alors que la priorité de l’agence doit être plutôt la lutte contre la corruption transnationale commise par les grandes entreprises multinationales.

Nous sommes également favorables aux mesures prévues par ce texte pour mieux protéger les lanceurs d’alerte. Il s’agit en effet d’une nécessité incontestable. Nous considérons notamment comme indispensables les dispositions qui permettront au défenseur des droits d’aller jusqu’à l’indemnisation du lanceur d’alerte, qui peut se trouver dans une situation très grave et préjudiciable.

Personne ne souhaitant, en revanche voir émerger un monde de délateurs professionnels – fussent-ils pétris des meilleures intentions et des meilleurs sentiments –, il est regrettable que le Gouvernement n’ait pas suivi la position de sagesse du Sénat, qui permettait d’atteindre un équilibre irréprochable entre protection et responsabilité des lanceurs d’alerte.

Pour en finir avec les sujets de consensus, je me félicite enfin que le Gouvernement ait eu le bon sens de nous écouter à propos de la réforme du code des marchés et ait suivi nos propositions pour préserver l’accès des PME et TPE aux marchés publics. Il en va de même, et je tiens à en rendre hommage aux rapporteurs, pour les nombreux sujets examinés par la commission des affaires économiques, comme l’interdiction de cession des contrats laitiers pendant sept ans ou les mesures relatives à l’encadrement des relations commerciales, qui sont des avancées utiles.

Malheureusement, le consensus s’arrête là et d’importants points de désaccord demeurent.

Pour ce qui est, tout d’abord, du fameux article 13, le choix du Gouvernement nous semble porter atteinte à la séparation des pouvoirs. Il n’est en effet pas concevable pour le groupe Les Républicains qu’une autorité nommée par le Président de la République, quel qu’il soit, puisse contrôler, fût-ce de manière indirecte, le travail des parlementaires. Nous avons donc déposé un amendement tendant à revenir à la version du Sénat, infiniment plus sage et plus équilibrée.

À propos des représentants d’intérêts, je regrette aussi le rendez-vous manqué avec le Gouvernement, qui a refusé d’introduire systématiquement plus de transparence dans le pantouflage et a repoussé toute tentative visant à mieux encadrer la relation d’influence entre les hauts fonctionnaires partis dans le privé et les pouvoirs publics. Tant de vertu affichée pour prétendre encadrer le lobbying et tant de pudeur pour encadrer le pantouflage prêteraient presque à sourire si le sujet n’était pas si sérieux. Avec ce texte, monsieur le ministre, vous allez renforcer une spécificité française qui fait du lobbying une sorte de monopole d’État des anciens élèves de quelques grandes écoles de l’administration, que je n’ai pas besoin de citer.

En matière de lobbying, nous regrettons aussi votre définition trop restrictive pour ce qui concerne les représentants des cultes, lesquels ne seront exclus du dispositif que « dans leur relation avec le ministre et les services ministériels chargés des cultes ». En clair : un évêque qui voudra un jour s’entretenir avec un député sur un projet de loi relatif, par exemple, à la légalisation de la gestation pour autrui relèvera, aux termes de la loi, de la définition du lobbyiste, ce qui semble tout à fait inapproprié.

En matière de reporting public, nous sommes, bien entendu, totalement opposés au choix qu’a fait la majorité, sans doute plus proche des réelles intentions du Gouvernement, qui entend aller – le cas échéant, tout seul – plus loin que la directive européenne.

Un mot, enfin, des dispositions relatives à l’assurance-vie. Alors que M. Romain Colas parlait tout à l’heure d’« extincteur », nous regrettons que tant d’inquiétudes aient été agitées à propos des contrats d’assurance-vie, qui requièrent au contraire de la confiance. Nous souhaitons donc que soient maintenues les avancées adoptées au Sénat à l’initiative d’Albéric de Montgolfier en vue de mieux protéger les épargnants.

Vous l’avez compris, monsieur le ministre, malgré des objectifs partagés et des avancées indéniables pour lesquelles nous saluons le travail des trois rapporteurs, les points de divergence demeurent cruciaux et nous empêchent, en l’état, de voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale commune est close.

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture

(transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique)

M. le président. J’appelle maintenant, conformément à l’article 114, alinéa 3, du règlement, le projet de loi dans le texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

J’appelle l’Assemblée à statuer d’abord sur les amendements dont je suis saisi.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. En nouvelle lecture, nous avions fait droit à la demande de plusieurs collègues d’étendre le champ de contrôle de la nouvelle agence anticorruption aux 2 000 associations reconnues d’utilité publique. Par cohérence, cet amendement vise à en faire de même pour les fondations reconnues d’utilité publique.

(L’amendement n38, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n49.

M. Michel Sapin, ministre. Cet amendement, qui me semble utile, est la reprise d’un amendement adopté par la commission des lois du Sénat. Il vise à préciser le délit d’entrave à l’exercice du droit de communication des agents de l’agence de prévention de la corruption et les sanctions applicables. C’est aussi une manière de donner à cette agence tous les pouvoirs pour agir dans un domaine où nous avons voulu lui donner une énorme capacité d’action.

(L’amendement n49, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix, pour soutenir l’amendement n69.

M. Olivier Marleix. Cet amendement tend à rétablir l’engagement de la responsabilité pénale et civile pour tout recours abusif ou déloyal à la procédure de signalement, tel qu’il avait été introduit, dans sa sagesse, par le Sénat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement à plusieurs reprises et le repousse à nouveau. J’en reste à l’idée que les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires et je m’étonne que le Sénat n’ait pas fait sienne cette maxime. Avis défavorable.

(L’amendement n69, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix, pour soutenir l’amendement n70.

M. Olivier Marleix. Cet amendement tend à faire du respect de la procédure décrite dans le texte un gage de la bonne foi du lanceur d’alerte. C’est là un élément important pour déterminer cette bonne foi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Les organisations non gouvernementales qui nous observent sont très vigilantes sur ce point, qu’il convient donc de préciser. Monsieur Marleix, vous proposez d’apprécier la bonne foi du lanceur d’alerte en fonction du strict respect des canaux de signalement organisés par l’article 6 C. Or, cette idée a été écartée à plusieurs reprises en première lecture.

Nous pensons qu’il faut conserver de la souplesse pour permettre aux juridictions d’apprécier la situation et la régularité de l’alerte au regard des circonstances de l’espèce et non du strict respect de la procédure prévue à l’article 6 C.

En outre, si nous adoptions cet amendement, nous risquerions de créer un a contrario. En effet, la bonne foi du lanceur d’alerte ne saurait s’apprécier uniquement au regard du respect de la procédure de signalement : d’autres éléments doivent être pris en compte. Pour toutes ces raisons, je demande à l’Assemblée de rejeter votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Yann Galut.

M. Yann Galut. Je rejoins les propos tenus par M. Denaja : il existe une réelle inquiétude après le vote du Sénat sur les canaux d’alerte, renforcée par le présent amendement.

Vous aviez souligné, monsieur le ministre, lors de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, la souplesse de ce recours aux canaux de signalement ; il serait sans doute utile d’y revenir. Les ONG souhaitent en effet que cela figure dans le texte, et j’y suis également favorable ; je l’avais indiqué lors du débat en séance publique. Vous m’aviez alors rassuré en indiquant que ces canaux de signalement seraient souples, par exemple dans l’hypothèse où la hiérarchie serait impliquée, voire complice.

Il convient donc de faire œuvre utile en rappelant cela à la représentation nationale et, à travers elle, aux ONG qui nous regardent et qui vous ont sollicité. Je suis sûr, monsieur le ministre, dans la continuation de ce que vous avez toujours exprimé, que vous saurez me rassurer et les rassurer.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre. Ces précisions nous sont demandées, à juste titre, à chaque fois que ce sujet est abordé. Des inquiétudes se manifestent à l’extérieur ; oui, les choses changent et les inquiétudes doivent disparaître.

Il existe un canal normal pour permettre la saisine de la hiérarchie d’une situation qui apparaîtrait à un lanceur d’alerte comme devant être dénoncée. Mais, évidemment, si cette hiérarchie fait elle-même partie de ceux dont les comportements sont dénoncés par le lanceur d’alerte, il existe une autre voie, extérieure à l’entreprise, qui permet au lanceur d’alerte d’agir dans de bonnes conditions et avec les protections qui lui sont accordées par cette loi. Je le rappelle extrêmement précisément pour rassurer ceux qui nourrissaient des inquiétudes.

M. Yann Galut. Merci, monsieur le ministre !

(L’amendement n70 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, pour soutenir l’amendement n39.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. En nouvelle lecture, nous avions précisé à l’article L. 1132-3-3 du code du travail que toute mesure de représailles contre un lanceur d’alerte était nulle de plein droit. Si nous persistons dans notre intention, cette disposition est toutefois redondante avec l’article L. 1132-4 du code du travail. Nous proposons donc de supprimer cette redondance. En pratique, toute mesure de représailles dans l’entreprise contre le lanceur d’alerte sera bien évidemment nulle de plein droit.

(L’amendement n39, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 40 et 50.

La parole est à M. Sébastien Denaja, pour soutenir l’amendement n40.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Le présent amendement tient compte de la prochaine promulgation de la loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, définitivement adoptée le 6 octobre dernier – l’indépendance des médias, en particulier de l’audiovisuel et de la radio publics, fait partie des changements intervenus depuis 2012.

Cette loi modifie la rédaction de l’article 226-10 du code pénal relatif à la dénonciation calomnieuse, elle-même modifiée par le présent projet de loi. Il convient donc d’articuler ces deux rédactions afin d’éviter que la promulgation de la loi Sapin 2 n’écrase les modifications votées dans la loi relative aux médias.

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n50.

M. Éric Alauzet. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 40 et 50, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 41 et 65.

La parole est à M. Sébastien Denaja, pour soutenir l’amendement n41.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. En première lecture, nous avions suivi M. Tourret sur les questions de computation de la prescription en matière pénale. Mais, M. Tourret ayant obtenu des engagements auprès du Sénat, il se ravise et nous revenons donc en arrière : tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n65.

M. Stéphane Saint-André. Défendu.

(Les amendements identiques nos 41 et 65, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement n19.

Mme Sandrine Mazetier. Le Sénat a proposé d’étendre la possibilité de conclure une convention judiciaire d’intérêt public à des infractions connexes au blanchiment de fraude fiscale, et il a eu raison. Si d’aventure le parquet national financier envisageait d’ouvrir cette possibilité dans des affaires qui ont durablement abîmé la vie de lanceurs d’alerte, ceux-ci obtiendront ainsi réparation rapide des lourds préjudices qu’ils ont subis – je pense à Nicolas Forissier ou à Stéphanie Gibaud dans le domaine bancaire. Je vous invite donc à voter cet amendement.

M. Yann Galut. Très bien ! Excellent amendement !

(L’amendement n19, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement n26.

Mme Sandrine Mazetier. Il est défendu.

(L’amendement n26, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix, pour soutenir l’amendement n21.

M. Olivier Marleix. Cet amendement porte sur un point très fortement débattu, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. Nous considérons, au nom de la séparation des pouvoirs et de l’autonomie constitutionnellement reconnue de chacune de nos assemblées, que ce n’est pas à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dont le président est désigné par le Président de la République, de définir la liste des personnes que nous serions habilités ou non à rencontrer en élaborant ce répertoire des représentants d’intérêts. Les assemblées doivent conserver leur pleine autonomie sur ce point.

Je propose donc de revenir à la version du Sénat, qui laissait cette autonomie à chacune des assemblées parlementaires. Cela n’empêche pas de disposer d’un répertoire unique, comme vous le souhaitez, géré par la Haute Autorité. Cette rédaction issue du Sénat est infiniment plus respectueuse de la séparation des pouvoirs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Je prends un instant pour répondre parce que c’est le point fondamental sur lequel a buté la commission mixte paritaire, le nœud de l’opposition entre la majorité de gauche de l’Assemblée nationale et la droite sénatoriale, rejointe par le groupe Les Républicains de l’Assemblée.

Notre volonté est claire : nous voulons la transparence totale du processus et surtout de l’activité des lobbyistes auprès de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Gouvernement – c’est l’objet même du projet de loi. Nous tenons à un répertoire unique des représentants d’intérêts : telle est la volonté de cette assemblée, défendue en première lecture par des amendements émanant du bureau de l’Assemblée nationale, et exprimée fortement par le président de l’Assemblée lui-même, Claude Bartolone.

Vous, monsieur Marleix, vous voulez adopter l’idée, défendue au Sénat, d’un répertoire propre à cette assemblée. Tout d’abord, cette position, qui manquerait de lisibilité, engendrerait des formalités supplémentaires pour ceux qui agissent en tant que lobbyistes auprès des pouvoirs publics. Nous pensons même qu’il y aurait là une contrariété non pas avec le principe de séparation des pouvoirs, mais avec le principe constitutionnel de liberté d’entreprendre.

Nous pensons au contraire que cette disposition respecte le principe de l’autonomie des assemblées parce que nous permettons à chacune, l’Assemblée nationale d’un côté et le Sénat de l’autre, d’adopter des règles propres à l’encadrement de ces activités, mais sur le fondement d’un registre unique assurant lisibilité pour les citoyens…

M. Jean-Luc Laurent. Et simplicité !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. …et simplicité pour ceux qui auront à l’utiliser et à s’y inscrire : les représentants d’intérêts. L’avis est donc fermement défavorable.

M. Jean-Luc Laurent. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Même fermeté.

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Je ne laisserai pas le rapporteur faire une présentation inexacte à l’Assemblée nationale de cet amendement, qu’il n’a visiblement pas très bien lu. Nous proposons non pas de remettre en cause le répertoire unique, mais de l’alimenter par trois sources différentes – l’Assemblée nationale, le Sénat et le Gouvernement –, la Haute Autorité assurant ensuite la gestion de ce répertoire. C’est une façon de faire beaucoup plus respectueuse de l’autonomie de nos assemblées parlementaires.

M. Guy Geoffroy. Très bien !

(L’amendement n21 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n67.

M. Stéphane Saint-André. Les associations d’élus ne peuvent pas être considérées comme des lobbies. Le 28 septembre dernier, la Commission européenne a d’ailleurs exclu les collectivités locales ainsi que leurs associations représentatives du champ d’application de son propre registre de transparence. Il vous est proposé d’en faire de même.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. Nous pensons que les associations d’élus ne sont pas, en règle générale, des lobbyistes comme les autres ou, du moins, qu’elles n’accomplissent pas des missions de lobbying au sens où on l’entend généralement. Elles doivent être pour partie exclues du champ du répertoire des représentants d’intérêts, mais une partie – résiduelle – doit y être incluse.

Je m’en remets donc à la sagesse de l’Assemblée nationale, ne sachant arbitrer les élégances pour savoir si votre rédaction est plus précise ou non. Il me semble en effet qu’elle est de nature à exclure de la définition les activités des associations d’élus lorsque leur mission même le justifie. Toutefois, il ne faut pas courir le risque d’en faire autant pour des activités relevant manifestement de la représentation d’intérêts.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Nous avons déjà eu ce débat. Pour dire les choses très clairement – j’espère que personne ici n’aura un avis différent –, lorsqu’une organisation d’élus agit dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par la loi, elle n’est évidemment pas un organe de « lobbyistes », entre guillemets. Mais si une organisation veut, comme elle en a parfaitement le droit, faire des propositions dans tel ou tel domaine qui, certes, concernent les élus – tout les concerne car la vie quotidienne des Français les concerne –, alors elle apparaît comme étant une organisation de lobbying. Telle est la proposition votée jusqu’à présent – le présent amendement ne la contredit pas, du reste.

Cet amendement complète les dispositions prévues par la loi en précisant que ces associations ne sont pas des lobbies dans l’exercice des missions prévues par leur statut. Pour le Gouvernement, de telles missions portent sur la défense institutionnelle du rôle des collectivités territoriales, et non sur d’autres intérêts qui pourraient s’exprimer au travers de ces associations d’élus. Cet amendement laisse donc une part importante des activités – peut-être la plus importante, voire la quasi-totalité – des associations d’élus dans le domaine protégé par la loi et qui ne nécessite pas de s’inscrire dans le registre. En revanche, sur les autres aspects, les associations auront cette obligation. Avis de sagesse.

M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt.

M. Olivier Dussopt. Je soutiens l’amendement de notre collègue Saint-André. Les associations d’élus ne sont pas des lobbies : elles défendent les intérêts des territoires et leurs particularités. Je considère que la rédaction proposée par notre collègue répond pleinement aux objectifs en différenciant bien ce qui relève du lobbying et ce qui relève de l’intérêt général.

Mme Sandrine Mazetier. Très bien !

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Sagesse favorable !

(L’amendement n67 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 27 et 74.

La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n27.

M. Daniel Goldberg. Cet amendement entend conserver le II de l’article 33 de l’ordonnance n2015-899 du 23 juillet 2015, qui facilite le recours par les maîtres d’ouvrage, en particulier les bailleurs sociaux, aux marchés de conception-réalisation. Ces derniers permettent en effet de construire plus vite et pour un coût restreint environ 15 000 logements par an.

La disposition visée, adoptée à titre expérimental, est valable jusqu’en 2018. Il serait dommage d’y mettre un terme sans avoir effectué l’évaluation prévue à cette date. Or c’est ce qui se produira si le texte est adopté dans la rédaction actuellement proposée à notre assemblée.

Le Sénat a rétabli cette dérogation permise aux maîtres d’ouvrage des acteurs locaux. Je sais que certains de nos collègues ont évoqué les risques qu’elle représenterait pour l’accès aux marchés des PME ou des TPE mais je pense au contraire que la conception-réalisation permet de leur ouvrir des marchés supplémentaires, soit directement, soit par l’intermédiaire de la sous-traitance, soit via les groupements de commandes.

L’objet de cet amendement est donc de supprimer l’alinéa 6 de l’article 16 bis et donc de permettre la poursuite de l’expérimentation jusqu’en 2018.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n74.

M. Benoist Apparu. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Notre collègue propose de revenir sur l’amendement que nous avions adopté en nouvelle lecture à l’initiative, notamment, de notre collègue Carole Delga et de la rapporteure générale Valérie Rabault.

Il visait à supprimer une disposition prévue par l’ordonnance de 2015 qui permet aux organismes HLM de recourir, de manière dérogatoire, à un marché global de conception-réalisation même lorsque la réalisation des travaux ne le nécessite pas.

La suppression de cette possibilité avait semblé opportune à l’Assemblée nationale pour deux raisons. D’abord il s’agit d’une violation au principe de l’allotissement qui n’est pas justifiée par des contraintes techniques ni par des exigences de sécurité. Deuxièmement l’allotissement, qui garantit une mise en concurrence plus satisfaisante, est normalement plus économique pour les acquéreurs. Les organismes HLM pourraient ainsi gagner à renoncer à leurs marchés globaux même si j’entends évidemment les arguments tout à fait fondés qui viennent d’être avancés par notre collègue Daniel Goldberg.

Finalement c’est un conflit entre deux intérêts publics qu’il nous faut maintenant trancher très sereinement : d’un côté la nécessité parfois d’une exécution rapide en matière de construction de HLM – et de ce point de vue on comprend, mon cher collègue Dumont, le souhait des organismes HLM de pouvoir recourir à ces procédures – ; de l’autre, celle de faciliter l’accès à la commande publique des TPE et des PME.

À titre personnel, je suis favorable à la position de Mme Delga – j’imagine que cela ne surprendra personne. La commission m’a suivi sur ce point en émettant un avis défavorable mais je veux quand même souligner la nécessité d’un point de vue équilibré parce que ce sont bien deux intérêts publics qui sont en présence.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Sagesse.

M. le président. La parole est à M. Michel Ménard.

M. Michel Ménard. Le recours à la conception-réalisation est à l’origine de 15 à 25 % de la production de logements sociaux par an : 15 à 25 % de projets en cours seraient donc bloqués si on supprimait cette possibilité.

Au moment où nous assistons à la relance de la construction de logements, notamment sociaux, j’invite les parlementaires à ne pas casser cette dynamique, à laisser l’expérimentation aller au terme que nous lui avons fixé, soit la fin de 2018.

La conception-réalisation n’empêche nullement les petites entreprises de travailler, d’une part parce que 75 à 85 % des constructions se font hors conception-réalisation, et d’autre part parce que même quand il y a conception-réalisation, cela n’empêche nullement les entreprises générales de faire appel à des entreprises sous-traitantes.

Cet amendement reprend, comme Daniel Goldberg l’a rappelé à l’instant, un amendement adopté par le Sénat. Je souhaite vivement que nous l’adoptions. Ne cassons pas la dynamique engagée de relance du bâtiment, particulièrement de la construction de logements sociaux.

M. Philippe Bies. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, mes chers collègues, l’objet du débat à cet instant n’est pas seulement la construction, comme cela vient d’être rappelé par le rapporteur et un de nos collègues. Cela intéresse aussi les opérations de réhabilitation thermique, qui demandent une technicité et une compétence particulières.

Je voudrais ajouter qu’au-delà des organismes HLM, ce sont aussi les SEM qui sont visés.

Enfin, pour faire lit de ce qui est dit par rapport à l’entreprise unique, je voudrais indiquer que sur les 62 projets d’un groupe HLM qui couvre l’ensemble du territoire national, y compris ultramarin, et qui pratique depuis sept ans la conception-réalisation, 50 % ont été attribués à des groupements de PME-TPE. Des entreprises locales participent donc à ce type de marché. Sur un autre département, ce peut être des entreprises de statuts divers, tiers par tiers, mais je remarque que l’on a obtenu 100 % pour des PME et des TPE et que l’entreprise nationale, le « major » comme certains l’appellent, ne dépasse pas 50 % de ce marché.

Le marché de conception-réalisation ne met pas en cause la qualité architecturale mais prend en compte certaines spécificités des métropoles. C’est aussi le devenir de la maîtrise d’ouvrages HLM pour laquelle nous combattons qui est en jeu.

Je voudrais rassurer ma collègue présidente de région : il me semble que chacun peut obtenir satisfaction lorsque l’élu qui connaît bien l’organisme HLM, le maire ou le président du conseil départemental auprès duquel sont adossés des offices publics de l’habitat, a tous les moyens d’exiger l’intervention de groupements d’entreprises ou d’associations d’artisans dans le cadre de la conception-réalisation.

M. le président. Veuillez conclure.

M. Jean-Louis Dumont. L’expérimentation sera évaluée en 2018 et je prends d’ores et déjà rendez-vous : chacun doit être satisfait, aussi bien le BTP que la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises, la CAPEB, et les organismes syndicaux de petites entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Carole Delga.

Mme Carole Delga. Nous constatons en effet une reprise de la construction et de l’investissement dans le logement social mais la question est de savoir si nous considérons comme une priorité que l’ensemble de nos TPE et de nos PME puissent accéder à la commande publique et que dans la conception-réalisation il n’y ait pas uniquement pour les organismes d’HLM et les SEM de construction la possibilité de globaliser sans aucun motif un marché tout à fait divisible en lots.

Je propose que nous votions contre cet amendement parce que nous devons soutenir la reprise de nos petites entreprises, qui elles sont créatrices d’emplois, sur l’ensemble de nos territoires.

Mme Valérie Rabault. Très bien !

Mme Carole Delga. L’argument selon lequel cela provoquerait des retards dans la réalisation est inexact : il est tout à fait possible de recourir une conception-réalisation divisible, avec une vraie efficacité, une vraie intégration de la compétence de nos petites entreprises, du moment qu’il y a des lots adaptés à leur taille.

Les groupements d’entreprises ne sont pas toujours possibles – nous avons d’ailleurs encore un travail à mener avec l’ensemble des fédérations, avec l’ensemble des TPE et des PME, pour que cette habitude soit prise. Ce que nous souhaitons, c’est que nos TPE et nos PME puissent candidater à des marchés de construction de logements sociaux. Je défends le principe de fond d’un allotissement de la commande publique dans l’ensemble des organismes publics pour permettre aux TPE et aux PME de bénéficier d’une reprise qui est indispensable au secteur du BTP, qui a gravement souffert ces dernières années. (Vifs applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Sébastien Denaja, rapporteur. C’est Mme Delga qui gagne à l’applaudimètre !

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. Trois remarques très rapides.

La première, c’est qu’à partir du moment où on a lancé une expérimentation, il faut la laisser aller à son terme avant d’en tirer des conclusions, positives ou négatives.

Mme Audrey Linkenheld. Très bien !

M. Benoist Apparu. Deuxième élément, nous assistons en ce moment à une reprise de la production de logements, aussi bien dans le secteur privé que dans le secteur public. Ce n’est pas le moment de changer les dispositifs fiscaux ou juridiques, comme on a l’habitude de le faire, à la moitié du chemin.

Enfin, si je partage l’analyse de Mme Delga quant aux PME et aux TPE, il me semble que si on veut permettre à nos petites entreprises locales d’accéder à des marchés, c’est en augmentant la production globale de logements qu’on y arrivera plutôt qu’en restreignant les possibilités, ce qui risque de casser le marché pour toutes les entreprises, les grandes comme les petites. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Valérie Rabault. N’importe quoi !

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Je veux simplement donner le point de vue du groupe SER sur ce sujet.

Nous soutiendrons l’amendement de M. Goldberg parce que rien ne justifie de mettre fin avant terme à un dispositif qui permet de réaliser plus vite et pour moins cher des opérations de construction de logements sociaux et de rénovation thermique et qui n’exclut en rien les TPE et les PME.

(Les amendements identiques nos 27 et 74 sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n62.

M. Joël Giraud. Cet amendement tendant à modifier l’article 16 bis a déjà été adopté au Sénat en séance publique après avoir fait l’objet d’un avis de sagesse du Gouvernement. Il reprend donc le texte adopté par le Sénat en première lecture. Il vise à rendre le cautionnement obligatoire pour apporter aux PME une garantie de paiement formelle dans le cadre d’un marché de partenariat.

Le rapport de nos collègues sénateurs Portelli et Sueur souligne la nécessité d’introduire une telle disposition dans la loi de façon à systématiser la garantie de paiement en faveur des sous-traitants pour que la défaillance d’un sous-traitant ne puisse pas avoir d’incidence sur l’exécution d’un contrat de partenariat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Cette disposition étant déjà satisfaite, je vous demande de retirer votre amendement, mon cher collègue.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Même avis et même demande de retrait.

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Je maintiens mon amendement dans la mesure où il a fait l’objet au Sénat d’un avis de sagesse à la fois du Gouvernement et du rapporteur. Je doute qu’il soit satisfait, la loi de 1975 ne prévoyant pas expressément de garantie pour le sous-traitant dans le cadre d’un contrat de partenariat. Je pense donc qu’il est nécessaire de légiférer.

(L’amendement n62 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 30 et 28, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les soutenir.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Rédactionnels.

(Les amendements nos 30 et 28, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n44.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Élagage rédactionnel.

(L’amendement n44, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 22 et 46.

La parole est à M. Olivier Marleix, pour soutenir l’amendement n22.

M. Olivier Marleix. Même si le rapporteur pour avis Romain Colas s’en défend aujourd’hui, il est clair qu’il a provoqué une petite pagaille en proposant ces dispositions, qui visent à permettre le blocage des retraits des valeurs d’assurance-vie, qui sont, chacun le sait, le placement préféré des Français avec plus de 70 milliards d’euros de dépôts.

En première lecture, à l’initiative de nos collègues Lionel Tardy et Patrick Hetzel notamment, nous avons essayé d’introduire des cas de dérogation pour permettre à des gens qui font face à des accidents de la vie tels que le licenciement ou le décès d’un conjoint de continuer à retirer des sommes. Ces amendements ont été repoussés pour des raisons qui ne nous ont pas convaincus.

À ce stade de la discussion, nous n’avons malheureusement plus la liberté de revenir sur ce sujet : nous ne pouvons plus que reprendre les amendements adoptés par le Sénat, comme celui voté à l’initiative du rapporteur général de la commission des finances Albéric de Montgolfier, qui proposait de limiter à six mois la capacité de bloquer les retraits.

Nous reprenons donc cet amendement, qui nous paraît le minimum, en regrettant une fois encore de ne pouvoir faire mieux. De telles possibilités de blocage n’ont pas été nécessaires pendant la grande crise financière de 2008-2009. Nous avons donc un doute légitime sur l’utilité de ces dispositions aujourd’hui, même si elles vous ont été inspirées par des gens parfaitement qualifiés. En tout état de cause, elles ont suscité une réelle inquiétude, si on en juge d’après les récents mouvements de dépôts et retraits.

Il convient donc de corriger ce dispositif autant qu’on peut encore le faire.

M. le président. La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n46.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Il est identique. Je vais être bref à cette heure car nous sommes tous impatients d’adopter définitivement ce texte, mais je ne peux laisser sans réponse, monsieur Marleix, le commentaire qui est le vôtre, parce que vous réécrivez quelque peu l’histoire.

En premier lieu, la crise de 2008 n’a pas concerné, fort heureusement, le secteur de l’assurance-vie : c’est la raison pour laquelle nous n’avons pas eu besoin de tels outils.

En outre, nous n’avons pas mis la pagaille en créant un dispositif macro-prudentiel dans les assurances. Au contraire, nous tirons les leçons des errements passés dans le secteur financier. Nous serions coupables, sachant qu’il existe des risques, de ne pas nous saisir des pouvoirs donnés au législateur comme au Haut Conseil de stabilité financière, afin de nous doter de ces outils qui n’ont qu’une visée : protéger les épargnants, monsieur Marleix.

Cela, vos collègues sénateurs de droite l’ont parfaitement compris, puisqu’ils n’ont eu de cesse, au cours de la navette, non de caricaturer ce dispositif comme vous le faites, mais de l’améliorer.

Au cours de la navette, nous avons complété ce texte que le Sénat, heureusement, a abordé de manière bien plus positive que vous. Il s’agissait pour le Sénat, comme pour nous à l’Assemblée nationale, de protéger les épargnants. Nous avons amélioré le dispositif. La dernière proposition du Sénat consiste à limiter la faculté de réguler les valeurs de rachat à six mois non renouvelables : je considère que cela participe d’un encadrement souhaitable, au sein d’un dispositif qui sera utile en cas de crise pour protéger les épargnants, notamment les plus modestes d’entre eux, parce que les mieux informés auront eu le temps de s’organiser.

M. le président. Je rappelle qu’en dépit de ce débat, M. Marleix et M. Colas défendent le même amendement : on aurait pu ne pas le comprendre. (Sourires.)

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Je vais mettre tout le monde d’accord : avis favorable aux deux amendements !

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. La question soulevée est grave ; il ne s’agit pas, en effet, de déstabiliser les épargnants en matière d’assurance-vie.

Le groupe UDI avait fait une suggestion qui n’a pas été adoptée : elle consistait à prévoir, en cas de blocage, que celui-ci ne pourrait s’appliquer dans neuf cas, analogues à ceux prévus pour le déblocage de la participation et de l’intéressement.

Le Gouvernement a demandé que notre amendement soit retiré, expliquant que le Haut Conseil pouvait prendre cette décision.

Vous reprenez l’idée en prévoyant de limiter temporairement le paiement des valeurs de rachat « pour tout ou partie du portefeuille », mais cela n’a pas été bien compris des épargnants. On trouve de nombreux articles expliquant qu’il ne faut plus placer son argent en assurance-vie, parce que les paiements pourront être bloqués quand on en aura besoin.

Ces amendements apportent une petite atténuation sous la forme d’une limite dans le temps, mais il est dommage de ne pas avoir retenu notre amendement qui aurait sécurisé bien des choses…

(Les amendements identiques nos 22 et 46 sont adoptés.)

M. le président. Sur l’ensemble du projet de loi, je suis saisi d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n45.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Il porte lui aussi sur le dispositif macro-prudentiel concernant les assurances, à l’article 21 bis du projet de loi. Il s’agit de prendre en compte l’encadrement de cette disposition adopté au Sénat.

(L’amendement n45, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n24.

M. Lionel Tardy. Dans sa version initiale, l’article 25 diminuait la durée de validité du chèque, la faisant passer d’un an à six mois. Cette mesure, qui devait s’appliquer au 1er janvier, a été supprimée au profit d’un rapport du Gouvernement sur « les enjeux liés à la monnaie fiduciaire à l’heure de la dématérialisation des moyens de paiement » – un titre qui serait plus approprié pour un article scientifique !

Le chèque bancaire reste une exception française. Il sera sans doute amené à disparaître. Quelle sera donc la valeur ajoutée d’un tel rapport ?

Toutes les missions d’information et de contrôle qui ont travaillé sur l’application des lois arrivent au même constat : très peu de ces rapports sont remis et rarement dans les temps. Il convient donc d’éviter une telle demande de rapport. C’est le sens de mon amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis. Avis défavorable, monsieur Tardy. En effet, il y a eu de longs débats dans l’hémicycle, qui ont conduit à repousser la disposition que je proposais et qui était soutenue par le Gouvernement. Elle faisait suite à des Assises des moyens fiduciaires, mais le Parlement veut visiblement se saisir de cette question : le rapport peut lui en donner l’occasion. Il faudra qu’un jour nous modernisions nos moyens de paiement. Le rapport peut nous ouvrir la voie.

(L’amendement n24, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 35 et 63.

La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n35.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Comme tous les amendements qui me restent à défendre, il est rédactionnel.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n63.

M. Stéphane Saint-André. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 35 et 63, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 36 et 64.

La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n36.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Rédactionnel.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n64.

M. Stéphane Saint-André. Défendu.

(Les amendements identiques nos 36 et 64, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 37 et 66.

La parole est à M. Romain Colas, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n37.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis. Rédactionnel.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n66.

M. Stéphane Saint-André. Défendu.

(Les amendements identiques nos 37 et 66, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n48.

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis. C’est un amendement de cohérence.

(L’amendement n48, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n25.

M. Lionel Tardy. Les alinéas 2 à 9 de l’article 36 prévoient une réglementation spécifique en matière de délais de paiement dans les activités d’export hors de l’Union européenne.

Comme le soulignent les sénateurs, ce dispositif a pour effet d’augmenter les délais fournisseurs pour transférer partiellement les besoins de trésorerie induits par les différences de délais de paiement entre la France et l’étranger.

En voulant soulager la trésorerie des négociants, il détériore celle de leurs fournisseurs, dont aucune donnée précise ne vient établir qu’elle serait meilleure.

Surtout, le choix de délais plus long va à rebours de la politique menée par le législateur depuis 2008. Tous les acteurs que j’ai auditionnés pour établir mon rapport pour avis sur les entreprises, qui porte justement sur les délais de paiement, s’accordent à demander un cadre législatif stable.

Je conçois que l’idée soit séduisante à première vue. J’ai pu moi-même y être sensible. Cependant, l’introduction de nouveaux délais risque d’ouvrir une boîte de Pandore, alors que la priorité doit être donnée à la réduction généralisée de ces délais de paiement. Un jour de retard par rapport aux délais globaux moyens représente environ 1 milliard d’euros de créances pour les PME. Selon la Banque de France, un strict respect des règles en matière de délais de paiement permettrait de restituer 14,9 milliards d’euros aux PME et 3,8 milliards d’euros aux entreprises de taille intermédiaire. Mon amendement vise donc à supprimer les alinéas 2 à 9 de l’article 36.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Monsieur Tardy, vous oubliez simplement les milliards de chiffre d’affaires à l’export que perd la France parce que des concurrents européens appliquent des moyens de paiement plus souples que les nôtres.

Il ne s’agit pas d’ouvrir une boîte de Pandore mais d’adopter une disposition tendant à encadrer, limiter, contrôler, qui suppose l’accord du fournisseur.

(L’amendement n25, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix, pour soutenir l’amendement n23.

M. Olivier Marleix. Nous n’allons pas reprendre tous les débats, qui ont été longs. Mais que notre pays adopte seul des dispositions de reporting public en sur-transposant les obligations européennes est éminemment contestable, puisque cela fragilisera la compétitivité de nos entreprises.

Sur la forme, il y a une extravagance dans cette rédaction puisqu’elle fait référence à une directive qui n’est encore à ce stade qu’un projet. C’est vraiment une originalité sur laquelle le Conseil constitutionnel se prononcera avec intérêt.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Je salue M. Marleix qui veut expliquer ce texte à son groupe, totalement absent de toutes les discussions. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Eh oui ! vous étiez seul, monsieur Marleix ! L’avis est défavorable.

(L’amendement n23, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, rapporteur, pour soutenir l’amendement n47.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Il est défendu.

(L’amendement n47, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, rapporteur, pour soutenir l’amendement n42.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Il est de coordination.

(L’amendement n42, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, rapporteur, pour soutenir l’amendement n73.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Il est défendu.

(L’amendement n73, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, rapporteur, pour soutenir l’amendement n43.

M. Sébastien Denaja, rapporteur. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. C’est le dernier et je l’approuve !

(L’amendement n43 est adopté.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants518
Nombre de suffrages exprimés479
Majorité absolue240
Pour l’adoption308
contre171

(Le projet de loi est adopté.)

Texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture

(compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte)

M. le président. J’appelle maintenant, conformément à l’article 114, alinéa 3, du règlement, la proposition de loi organique dans le texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je rappelle que l’adoption de ce texte en lecture définitive nécessite la majorité absolue des membres composant l’Assemblée, soit 287 voix.

Le scrutin est ouvert pour 30 minutes dans les salles voisines de l’hémicycle.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

5

Projet de loi de finances pour 2017

Seconde partie (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2017 (nos 4061, 4125).

Administration générale et territoriale de l’État

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’administration générale et territoriale de l’État (n4125, annexe 3 ; n4132, tomes I et II.)

La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le budget de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » s’élève en 2017 à 2 918 millions en autorisation d’engagement, AE, et à 2 935 millions en crédits de paiement, CP, dont 2 031 millions de crédits T2 – en augmentation de 61 millions, soit 3 %. Les crédits du HT2 s’établissent à 887 millions en AE et à 904 millions en CP. Ils progressent de 318 millions en AE et de 325 millions en CP.

Dans cette intervention, je souhaite mettre en évidence deux projets de réformes majeures qui sont présentés dans ce projet de loi de finances pour 2017.

Le premier concerne le Plan préfectures nouvelle génération, PPNG. Il s’agit d’une réforme structurelle d’ampleur qui permet de moderniser les préfectures. Ce plan entre dès à présent dans sa phase opérationnelle de mise en œuvre puisque le premier centre d’expertise et de ressources pilote ouvre aujourd’hui même, 8 novembre, en Yvelines.

Ce plan, vous le savez, vise à adapter les missions du réseau de façon durable et profonde, en particulier en matière de production et de délivrance des titres afin de pouvoir renforcer quatre missions prioritaires : la lutte contre la fraude – précisément en matière de titres – le contrôle de légalité et la fonction juridique, les sécurités et la gestion locale des crises et, enfin, l’animation interministérielle des politiques locales, en particulier l’ingénierie territoriale qui doit permettre de mieux accompagner au plus près des besoins les projets soutenus par les élus locaux sur le territoire mais, aussi, ceux des chefs d’entreprise et des responsables associatifs.

Ce plan est intégralement financé par des crédits supplémentaires obtenus en 2017 – 26 millions au total – afin que cette réforme ne pèse pas sur les budgets des préfectures. Il s’agit, pour plus de la moitié, de dépenses liées aux systèmes d’information afin de mettre en place de nouvelles télé-procédures, d’assurer la mise à niveau des logiciels de traitement des titres et d’étendre les dispositifs de recueil de données pour les cartes nationales d’identité et les passeports.

Cette réforme, comme le ministre de l’intérieur s’y est engagé auprès des organisations syndicales, permet de redéployer des effectifs pour renforcer les missions sur lesquelles le réseau des préfectures doit être mieux armé.

Le ministère recherche également tous les moyens de contribuer au désendettement de l’État. C’est pourquoi le PLF comporte une mesure importante, relative à la dématérialisation de la propagande électorale. Elle permettrait de réaliser 170 millions d’économies – l’économie est substantielle – pour le budget de l’État en 2017 pour les élections présidentielle et législatives. Le ministre de l’intérieur sait que cette question suscite des débats passionnés, qu’un lien est établi entre la participation électorale et l’accès à la propagande électorale. Or, l’avis du Gouvernement diffère car nous sommes les seuls en Europe, avec le Royaume-Uni, à envoyer aux électeurs la propagande des candidats à leur domicile – la vitalité démocratique de nos voisins européens, pour autant, ne pâtit pas de ce dispositif.

De même, nous avons désormais rôdé nos dispositifs techniques lors des élections départementales et régionales de 2015. Surtout, la consultation relative au projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes effectuée au mois de juin dernier a démontré l’absence de lien entre la participation électorale et la dématérialisation de la propagande qui, en l’occurrence, a été totale.

Pour autant, conscient de la nécessité de rassurer sur cette question, le Gouvernement propose dans ce projet de loi de finances d’entourer cette réforme de trois garanties. Tout d’abord, une campagne de communication importante, ensuite, l’impression de stocks de papiers de propagande des candidats disponibles en mairie et en préfecture, enfin, l’envoi d’un courrier au domicile des électeurs pour assurer leur bonne information et les renvoyer vers le site internet dédié.

Le Gouvernement attache une importance particulière à cette réforme que nous considérons aussi comme un progrès environnemental et comme une sécurisation du processus électoral, les opérations de mise sous pli et d’envoi des propagandes étant délicates et coûteuses.

Je souhaite également apporter quelques précisions sur la logique de rabots qui a prévalu par le passé sur l’administration territoriale de l’État, dont le résultat a été la suppression de 3 866 postes dans le réseau territorial entre 2009 et 2015, soit l’équivalent de 12 à 13 préfectures moyennes.

La reconduction en 2017 de l’atténuation du schéma d’emplois a été obtenue. Le ministre, en effet, a obtenu ce moindre effort pour initier la réforme PPNG dont je viens de vous parler, laquelle a nécessité un temps important de dialogue et de concertation pour permettre ensuite de la mener et de rendre des effectifs conséquents sur plusieurs années. C’est pourquoi ce projet de loi de finances prévoit que les effectifs du réseau territorial ne diminueront que de 500 ETP contre 650 prévus par la loi de programmation des finances publiques.

Ce projet de loi comporte aussi plusieurs mesures catégorielles dans un contexte interministériel de stricte modération salariale.

Enfin, je terminerai cette présentation en évoquant les actions financées dans le cadre du plan de lutte antiterrorisme – à hauteur de 0,8 million d’euros. En effet, une partie de la lutte antiterroriste passe par l’amélioration de la formation des imams mais, également, par la relance des dépenses de recherche en islamologie et sur l’islam de France. Des moyens supplémentaires sont prévus à cet effet dans le projet qui vous est présenté.

Je souhaite conclure mon propos, mesdames et messieurs les députés, en soulignant que les préfectures et les services territoriaux de l’État assurent un rôle central dans la politique d’accueil et de relocalisation des demandeurs d’asile. La France tiendra ses engagements, notamment grâce à ce réseau dont le Gouvernement démontre, avec le PLF pour 2017, qu’il en confortera le rôle et les missions.

À un moment où nous devons entendre le sentiment de relégation qui s’exprime dans certains territoires, il en va de la cohésion sociale et territoriale de notre pays ! Ce projet de loi de finances pour 2017, avec la mission « Administration générale et territoriale de l’État », est la meilleure réponse à la demande de proximité et de modernisation formulée par les Français à l’égard de l’État. Nous y répondons !

M. le président. Nous en venons à l’expression des porte-parole des groupes.

La parole est à M. Michel Zumkeller, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Michel Zumkeller. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage, monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » est essentielle en ce qu’elle vise à garantir aux citoyens l’exercice du droit de vote et à assurer la présence et la continuité de l’État sur l’ensemble du territoire de la République.

Cette année, c’est un budget de 2,32 milliards qui nous est présenté, en hausse de 14,8 % par rapport à 2016 mais, mes chers collègues, une telle hausse doit être relativisée. En effet, elle s’explique essentiellement par la tenue en 2017 de plusieurs échéances électorales majeures : l’élection présidentielle, les élections législatives, le renouvellement de la moitié du Sénat ainsi que les élections territoriales à Saint-Martin, Saint-Barthélémy, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

Alors qu’aucun crédit n’avait naturellement été ouvert en loi de finances pour 2016, les dépenses se rapportant à l’organisation des élections représentent 75 % des crédits demandés au projet de loi de finances pour 2017.

L’évolution des crédits de la mission doit également être examinée en tenant compte du transfert des crédits consacrés au fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD, qui figuraient jusqu’alors dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Doté d’un budget de 80,4 millions d’euros, celui-ci aura vocation à financer les actions de prévention de la radicalisation violente ainsi que la mise en œuvre sur le plan local des orientations de la stratégie nationale de prévention de la délinquance.

En outre, madame la secrétaire d’État, j’ai indiqué en ma qualité de rapporteur qu’en dépit d’une volonté d’« amélioration de la prévision et du pilotage des dépenses de contentieux », la tradition de sous-budgétisation des crédits destinés à couvrir le coût du contentieux ne semble pas se démentir cette année, ce que nous déplorons.

L’une des autres priorités attribuées à cette mission est de contribuer aux efforts dans la lutte contre le terrorisme et la radicalisation : le groupe UDI s’en félicite. Nous saluons à ce titre les effectifs supplémentaires accordés en 2016 et en 2017 aux préfectures dans le cadre du pacte de sécurité : 185 équivalents temps plein en 2016 et 185 ETP en 2017.

Autre priorité de cette mission : la modernisation et la simplification des procédures administratives.

L’année 2017, en effet, sera marquée par une évolution du réseau des préfectures à travers le Plan préfectures nouvelle génération, mis en œuvre dès 2016, qui prévoit de repenser les modalités de délivrance des titres et devrait produire ses effets les plus significatifs en 2017 et 2018.

Mais ce plan nous semble insuffisant : nous devons entreprendre une véritable réorganisation de l’État, une requalification de sa présence dans les territoires dans un esprit de nécessaire concertation avec les acteurs locaux.

Nous ne pourrons nous exonérer d’une redéfinition des missions de l’administration territoriale si nous voulons, à l’avenir, sauvegarder nos services publics.

J’évoquerai, enfin, l’article 52 du projet de loi de finances pour 2017, relatif à la dématérialisation de la propagande électorale. C’est la troisième fois en l’espace de quatre ans que vous tentez d’imposer cette réforme. En effet, après avoir tenté de l’appliquer aux élections européennes, régionales et départementales, vous proposez cette fois la dématérialisation pour les élections législatives. Vous le savez, 20 % des ménages ne disposent pas d’une connexion à internet et tous les Français ne sont pas en mesure d’en faire usage. Par ailleurs, de nombreuses zones rurales sont très mal desservies. Adopter une telle mesure reviendrait ainsi à réduire l’information de nos concitoyens, au risque de faire progresser l’abstention, sous prétexte d’économies budgétaires. En outre, l’an passé, vous aviez évoqué une concertation préalable avec la commission des lois et les associations d’élus locaux. Il n’en a malheureusement rien été.

Si, comme nous le souhaitons, cet article 52 venait à être supprimé, nous espérons que vous sauriez en tirer toutes les conséquences, en revenant sur votre projet d’introduire, par décret, la dématérialisation de la propagande électorale pour les élections présidentielles.

M. Philippe Vigier. Excellent !

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Stéphane Saint-André. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, nous examinons aujourd’hui la mission « Administration générale et territoriale de l’État », dont les crédits augmentent d’environ 300 millions d’euros par rapport à 2016, que ce soit en autorisations d’engagement ou en crédits de paiement, pour revenir à peu près aux montants alloués en 2015.

Cette mission comporte plusieurs volets, dont le programme 307, « Administration territoriale », qui garantit la présence de l’État sur l’ensemble du territoire et la mise en œuvre des politiques publiques nationales par les crédits alloués aux préfectures, ce qui est une excellente chose. Les crédits de l’action « Réglementation générale, garantie de l’identité et de la nationalité et délivrance des titres » sont en augmentation de quelque 35 millions d’euros. J’en profite ici pour saluer l’accord financier trouvé avec l’Association des maires de France, et annoncé en commission élargie par M. le ministre du budget, quant à la compensation pour les mairies du transfert de compétences en matière de délivrance des passeports biométriques.

Le budget du programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative », augmente sensiblement, l’action « Organisation des élections » voyant ses crédits croître de plus de 210 millions, en raison de l’organisation de plusieurs élections nationales et ultramarines majeures en 2017. J’ai noté avec intérêt l’information donnée par Christian Eckert, selon laquelle quatre emplois équivalent temps plein seront créés au profit de la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques, dont l’activité sera, de fait, plus importante en 2017, et dont les moyens devaient être renforcés afin que cette autorité administrative indépendante puisse convenablement exercer sa mission de contrôle.

J’évoquerai plus précisément la question de la propagande électorale, dont les crédits se montent à 53,3 millions d’euros. Nous nous satisfaisons de la suppression, à l’initiative de la commission élargie, qui a été saisie d’amendements provenant de plusieurs groupes, dont celui auquel j’appartiens, de l’article 52 portant sur la dématérialisation de la propagande électorale. Parce qu’elle est inadaptée aux besoins de l’ensemble des territoires et aux demandes d’informations formulées par les électeurs, à plus forte raison dans les territoires ruraux et les zones de montagne, parce qu’elle est discriminante pour les personnes handicapées, qu’elle affaiblit l’intérêt des citoyens pour le débat public et qu’elle ne favorise pas le mouvement des citoyens vers les urnes, nous ne pouvions que refuser cette dématérialisation.

D’ailleurs, comme les années précédentes, un spectre très large de députés a de nouveau repoussé cette initiative gouvernementale. C’est la preuve que cette mesure n’était pas la bienvenue. Et, vous le savez, l’opposition de mon groupe à la dématérialisation n’est pas nouvelle. Nous ne pouvons nous satisfaire d’une administration « numérique par défaut ».

Les promoteurs d’une solution « tout dématérialisé » soulignent que cette réforme, aujourd’hui techniquement réalisable, permettrait une meilleure information des électeurs et s’avérerait utile pour améliorer le taux de participation, notamment auprès des jeunes électeurs. Or l’abstention concerne souvent ceux de nos concitoyens qui sont les plus concernés par la fracture numérique. Quelque 17 % de la population ne disposent pas d’une connexion internet à domicile, et le seul fait de disposer d’une connexion ne suffit pas à préjuger de l’utilisation de cette technologie. Sur l’ensemble des personnes ayant la possibilité de se connecter à l’intérieur ou à l’extérieur de leur domicile, soit 84 % de la population, près de 21 % utilisent cet outil de manière très occasionnelle, et 16 % ne l’utilisent pas. Ces personnes résident d’ailleurs pour beaucoup en zone rurale, les mêmes zones rurales qui ne disposent pas de connexion à haut débit permettant le téléchargement de documents volumineux.

Le bilan contrasté de l’expérimentation « e-propagande » des supports électoraux, menée en mars 2015 dans cinq départements, confirme la faible appétence des électeurs pour cette pratique. Il y va, enfin, de l’avenir de la filière papier.

Comme nous avons fait preuve de pragmatisme en supprimant cette mesure de dématérialisation de la propagande électorale, et puisque nous sommes satisfaits par l’augmentation globale des crédits alloués à cette mission, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera ce budget.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Nicolas Sansu. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, cette mission porte deux réformes majeures pour 2017.

Le plan « Préfectures nouvelle génération » se traduira par le développement de la e-administration et une « rationalisation » du réseau des sous-préfectures. D’une part, la réforme implique la généralisation de la dématérialisation dans la délivrance des titres – téléprocédure – au travers de la création de plateformes interdépartementales ou régionales pour les passeports et les naturalisations. D’autre part, l’organisation du réseau préfectoral est bouleversée, ce qui engendrera une nouvelle réduction – de 560 suppressions de postes en 2017 – des effectifs de l’administration préfectorale, qui a déjà beaucoup souffert.

Cette réforme structurelle majeure entraîne la suppression pure et simple des missions d’accueil du public pour les démarches liées aux certificats d’immatriculation des véhicules, aux permis de conduire, ainsi qu’aux cartes d’identité et aux passeports. Les usagers seront clairement invités à s’orienter vers les téléprocédures, via leur ordinateur personnel. Au-delà de la question des suppressions d’emploi, la crainte principale des usagers est la perte de proximité qui en résultera, et un accès plus difficile aux informations en l’absence d’interlocuteur identifié.

La question du rôle et du maillage des sous-préfectures demeure aujourd’hui posée, tant du point de vue des services rendus à nos concitoyens que du soutien apporté aux collectivités territoriales. Surtout, on doit regretter que le plan « Préfectures nouvelle génération » réponde davantage à des considérations comptables qu’aux besoins des usagers. Il est temps que s’ouvre un véritable débat national visant à améliorer l’efficacité des politiques publiques. L’analyse purement financière, le pilotage à coups de rationalisation, d’optimisation et d’indicateurs de charges mène à une impasse. Il faut octroyer aux personnels, comme aux citoyens, de nouveaux droits d’intervention dans l’évaluation de cette efficacité, au regard des besoins de la population et des collectivités, qui peuvent parfois varier d’un territoire à l’autre.

Seconde réforme proposée dans ce budget : la dématérialisation de la propagande électorale. Après avoir tenté en vain, en 2014, de la supprimer pour les élections départementales et régionales et pour les élections européennes, vous proposez aujourd’hui de modifier les règles pour les élections législatives de juin prochain et de prendre la même mesure, par décret, pour l’élection présidentielle. Nous repousserons une nouvelle fois cette proposition et voterons évidemment les amendements tendant à sa suppression – le texte qui nous est soumis aujourd’hui étant celui du projet de loi, il nous faudra en effet confirmer en séance le vote de ces amendements qui a eu lieu en commission élargie.

Il n’est pas acceptable de porter ainsi gravement atteinte à la démocratie. La réception de la propagande électorale sous format papier permet de mobiliser les électeurs en leur rappelant leur devoir de citoyen. Sa suppression va encourager l’abstention. Si la démocratie n’a pas de prix, admettons au moins qu’elle a un coût. Il apparaît pour le moins contradictoire de simplifier les démarches d’inscription sur les listes électorales afin de diminuer l’abstention et, dans le même temps, de prendre cette mesure qui la développera.

M. Dominique Le Mèner. C’est une évidence !

M. Nicolas Sansu. L’envoi papier permet à chacun, y compris à celles et ceux qui ne disposent pas d’un accès à internet, de prendre connaissance des enjeux du scrutin.

M. Jean-Luc Laurent. Très juste !

M. Nicolas Sansu. Étant donné la fracture numérique qui caractérise notre pays, chacun sait qu’il n’est pas possible de garantir une réelle égalité d’accès à l’information politique par la voie électronique.

Il va sans dire également que l’adoption d’un tel dispositif nuirait gravement à l’égalité des candidatures devant le peuple, alors même que les nouvelles règles de la campagne électorale relatives à la présence dans les médias ont déjà largement entamé l’égalité de traitement, ce qui est antidémocratique.

M. Jean-Luc Laurent. Excellent !

M. Nicolas Sansu. L’argument du gain économique n’est donc pas tenable, et nous rejoindrons nos collègues pour supprimer cet article 52.

M. Jean-Luc Laurent, M. Dominique Le Mèner et M. Philippe Vigier. Très bien !

M. Nicolas Sansu. Pour toutes ces raisons, les députés du Front de gauche voteront contre les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

M. Nicolas Dupont-Aignan. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un dossier essentiel de ce projet de loi de finances, avec la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Il ne s’agit de rien de moins que de l’action de l’État sur l’ensemble du territoire français, en métropole comme dans les départements et les territoires d’outre-mer, de l’action de l’État en direction des territoires et des citoyens, ainsi que des collectivités territoriales, acteurs essentiels de notre démocratie.

Cette mission comporte trois volets, à commencer par la modernisation des préfectures, ces portes d’entrée de l’État sur les territoires, dont les crédits connaîtront une augmentation de 57 millions d’euros, ce qui est raisonnable. On constate par ailleurs une augmentation modeste, mais intéressante, des effectifs de l’administration centrale de l’État, avec la création de 159 équivalents temps plein, mais aussi de l’administration territoriale, avec 187 nouveaux postes, destinés à assurer notamment le pacte de sécurité et l’accueil des migrants. J’insiste sur le fait que 111 d’entre eux s’occuperont d’affaires administratives. Il est important de rappeler qu’il n’y a pas que des hauts fonctionnaires dans nos administrations, mais qu’il y a aussi des personnels de catégorie C, de catégorie B, dont les émoluments évoluent lentement – c’est aussi le cas des catégories A qui ne font pas partie des A prime.

On note une volonté du Gouvernement d’agir sur le monde réel, dans les territoires, les préfectures et les sous-préfectures, avec ce concept de « préfectures nouvelle génération ». On peut saluer aussi sa politique d’accès à l’information grâce à l’informatique et aux nouveaux outils, et sa volonté de sécuriser ces mêmes outils informatiques. Un effort significatif a été fait en la matière, avec une augmentation des crédits de 20 %, que je tenais à souligner.

Je voulais évoquer également les centres d’expertise et de ressource des titres, qui permettront de gérer les cartes d’identité, les permis de conduire et les passeports. Nous disposerons ainsi de fichiers stables, solides, conformes et sécurisés, grâce à ce nouveau dispositif, placé sous le contrôle d’autorités indépendantes. C’est une manière de prendre en compte le monde numérique dans lequel nous vivons, sans faire l’impasse sur cette réalité.

J’en viens à mon deuxième point : la vie associative, cultuelle et politique. Sur le plan cultuel, je voudrais souligner l’effort important en faveur de tout ce qui touche au culte musulman, avec une hausse des crédits de 100 millions d’euros, notamment en matière de recherche universitaire sur les questions de l’islam de France et de l’islam en France. Des aides publiques iront par ailleurs à l’essor d’un islam démocratique, intellectuel, moral, comparable à ce que peuvent être d’autres cultes en France depuis le Concordat et la loi de 1905. L’effort financier qui est consenti est puissant, et il faut le saluer. Plutôt que de créer une grande institution nationale qui aurait pu avoir des annexes en province, on a préféré s’appuyer sur le réseau universitaire et scientifique qui s’étend sur tout le territoire français, pour faire émerger une compétence dans ce domaine dans toute la France, y compris dans les DOM-TOM, et je trouve cette option très pertinente.

S’agissant de la vie politique, il a déjà été question de la dématérialisation de la propagande électorale. Le groupe socialiste, écologiste et citoyen n’y est pas favorable, pour une raison très simple.

M. Dominique Le Mèner. Ah !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. L’immense majorité de la population ouvre les enveloppes électorales qu’elle reçoit et lit les textes qu’elles contiennent. Les gens ont leurs idées, mais ils aiment aussi connaître les idées des autres et la manière dont elles sont formulées.

M. Nicolas Dupont-Aignan. Très bien !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. C’est ce cela que se nourrit une démocratie, et pas seulement d’injonctions médiatiques, qu’elles soient télévisuelles, radiophoniques, ou qu’elles émanent de la presse écrite. Je songe aussi aux réseaux sociaux, qui sont extrêmement actifs dans ce domaine, avec une propagande parfois agressive. La propagande politique, dans un État démocratique, doit se faire sur un support papier. Il faut que, dans le calme de la résidence, dans le calme de la vie quotidienne, chacun puisse faire son choix en conscience, en ayant lu et compris les différents programmes, qui auront été écrits et formulés sur un support accessible – et pas seulement sur un écran. Il n’y a pas un ordinateur par adulte et par citoyen dans chaque foyer, et tout le monde n’a pas accès à un internet solide.

M. Dominique Le Mèner. Absolument !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Nous avions déposé en commission un amendement tendant à supprimer l’article 52, que nous défendrons à nouveau en séance.

Je voulais encore souligner que les crédits destinés à soutenir les partis politiques ont été maintenus au même niveau depuis deux ans, à hauteur de 68 millions d’euros, sans augmentation depuis 2012. L’aide aux partis politiques est donc plus faible que l’aide à la presse – il fallait le souligner.

Je note enfin que les effectifs de personnes handicapées s’établissent à 6,1 % pour la quatrième année, ce qui est supérieur à l’objectif initialement fixé.

Ce budget est tout à fait satisfaisant, à quelques minces réserves près. Nous le voterons donc, après avoir voté les amendements tendant à supprimer l’article 52.

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix, pour le groupe Les Républicains.

M. Olivier Marleix. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, malheureusement, les années se suivent et se ressemblent.

Depuis cinq ans, ce sont les mêmes sujets qui reviennent devant nous sans être tranchés, nous donnant le sentiment d’un temps perdu. Concernant d’abord la carte des sous-préfectures, après plusieurs faux départs en 2012 et en 2013, il aura fallu attendre 2016 pour que le ministre Bernard Cazeneuve nous annonce une réforme qui « n’est pas le grand soir des sous-préfectures », mais qui se veut néanmoins « historique, car elle n’a pas de précédent depuis Raymond Poincaré ».

En réalité vous ne changez pas grand-chose, et c’est sans doute ce que vous pouviez faire de mieux, tant ce réseau incarne l’armature de la République sur nos territoires et vaut infiniment mieux que les lectures purement comptables que l’on pourrait être tenté d’en avoir ici ou là. Ce que nous espérons sur ce sujet, madame la secrétaire d’État, c’est qu’il n’y ait pas une réforme cachée consistant à remplacer insidieusement des sous-préfectures par des maisons de l’État sans sous-préfet à leur tête.

Ensuite, 2017 nous est annoncée comme étant la grande année de mise en œuvre du « plan préfecture nouvelle génération », qui n’est en réalité qu’une réforme des services de délivrance de titres. Elle est utile, sans doute un peu tardive, et en tout cas insuffisante. Alors que la simplification nous a été annoncée comme le grand chantier du Président de la République, il a manqué depuis cinq ans une véritable réflexion sur le rôle du corps préfectoral dans notre pays. Celui-ci pourrait être pourtant la clé du déverrouillage administratif que les Français appellent de leurs vœux avec un sentiment d’urgence.

En effet, les différentes réformes de l’administration territoriale menées ces dernières années, y compris celles qu’a engagées l’ancienne majorité, ont abouti à une régionalisation des services de l’État, c’est-à-dire à leur éloignement du citoyen et des acteurs locaux. Or, dans le même temps, la réglementation a connu une complexification croissante – il serait inutile de rappeler tous les textes adoptés, la mention de la loi ALUR évoque à elle seule bien des choses dans nos esprits – qui a engendré un besoin encore plus grand de proximité et de soutien des acteurs locaux.

En d’autres termes, il y a, d’un côté, une complexification du droit, et, de l’autre, un éloignement de l’administration. Ce double mouvement entraîne des blocages administratifs, et un sentiment d’abandon et parfois d’exaspération se développe dans nos territoires ruraux chez ceux qui entreprennent ; agriculteurs, artisans, chefs d’entreprise.

À ce titre, les documents budgétaires que vous nous fournissez chaque année comportaient un indicateur de performance passionnant, le délai d’instruction des dossiers relatifs aux installations classées pour la protection de l’environnement et des dossiers déposés au titre de la loi sur l’eau. Je le scrutais chaque année et le commentais ; il a mystérieusement disparu. Cela devient une habitude, ces derniers temps, au ministère de l’intérieur : à l’instar des chiffres en matière de sécurité, les indicateurs dont les chiffres ne sont pas bons sont supprimés, car c’est beaucoup plus simple. Les derniers chiffres étaient en effet effarants : ils révélaient que le délai d’instruction moyen était passé entre 2012 et 2014 de 263 jours à 320 jours. Qu’il faille 320 jours pour obtenir une autorisation administrative dans notre pays est tout à fait consternant.

Voilà une illustration parfaite de l’une des trop nombreuses lourdeurs administratives auxquelles vous auriez pu remédier ces cinq dernières années. Malheureusement, vous ne l’aurez pas fait. Pour notre part, nous sommes persuadés qu’il faut les conditions d’un véritable réarmement juridique du corps préfectoral, en se réservant de renforcer le pouvoir discrétionnaire des préfets dans notre droit. Il faut leur redonner, par la loi, un pouvoir renforcé d’interprétation de la norme en fonction d’un intérêt général qui doit s’apprécier également localement. Nous avons la chance de disposer d’un corps préfectoral, préfets et sous-préfets – et je sais que je suis entendu en haut lieu en m’exprimant dans cet hémicycle –, de très grande qualité qui fait un travail de proximité et constitue un modèle pour de nombreux pays dans le monde ; de grâce, utilisons-le !

Enfin, dernier sujet mais non des moindres : la carte nationale d’identité électronique. Une fois n’est pas coutume, le ministre de l’intérieur cherche à minimiser avec une modestie soudaine sa performance. Elle est pourtant remarquable : on va passer d’un fichier de 17 millions de titres, celui des passeports, à un fichier en comportant potentiellement 60 millions. Ce « fichier des honnêtes gens », pour reprendre l’expression qu’un certain Jean-Jacques Urvoas avait employée dans une autre vie, permettra de mieux lutter contre le terrorisme, contre la délinquance ou encore contre la fraude, et nous y sommes donc tout à fait favorables.

Sur la méthode en revanche, vous avouerez qu’un peu plus de transparence n’aurait pas fait de mal sur un sujet aussi sensible, madame la secrétaire d’État.

Mme Marie-Christine Dalloz. Et l’avis de la CNIL !

M. Olivier Marleix. Ce décret « pris en douce […] un dimanche de la Toussaint », selon les mots de Mme Lemaire, pour un sujet sur lequel la droite avait fait le choix d’en passer par un débat parlementaire, n’est pas à l’honneur de ce gouvernement.

Mme Marie-Christine Dalloz. Exactement !

M. Olivier Marleix. Au-delà de la transparence, sur le fond, notre principal reproche porte sur la demi-efficacité choisie par le ministre. Certes, on disposera d’un fichier central fiable, mais sans le recours à un composant électronique disposé à l’intérieur de la carte d’identité, on n’aura pas les moyens d’empêcher la fabrication de fausses cartes d’identité. Je vous rappelle que selon l’imprimerie nationale, il y a sans doute 4 millions de faux documents d’identité en circulation dans notre pays ; c’est un vrai sujet ! Même la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, vous a invités à remédier à cette situation en mettant en œuvre la carte d’identité électronique.

Mme Marie-Christine Dalloz. Eh oui !

M. Olivier Marleix. Avec vous, on aura donc le fichage généralisé, mais sans la sécurité des titres : c’est un bel exploit, il faut le souligner.

Vous l’aurez compris, pour toutes ces raisons, le groupe les Républicains votera contre les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État. » (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

6

Compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte (suite)

M. le président. Mes chers collègues, j’interromps momentanément nos travaux pour vous communiquer le résultat du scrutin public sur la proposition de loi organique relative à la compétence du défenseur des droits pour l’orientation et la protection des lanceurs d’alerte :

Nombre de votants 536

Nombre de suffrages exprimés 499

Majorité requise pour l’adoption de la proposition de loi organique 287

Pour l’adoption 316

Contre 183

(La proposition de loi organique est adoptée.)

7

Projet de loi de finances pour 2017

Seconde partie (suite)

Administration générale et territoriale de l’État (suite)

M. le président. Nous poursuivons l’examen des crédits relatifs à l’administration générale et territoriale de l’État.

Nous en arrivons aux questions.

Je vous rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour une question du groupe Les Républicains.

M. Lionel Tardy. Madame la ministre, ma question porte sur la réforme territoriale et ses conséquences budgétaires.

Dessinée sur un coin de table, cette réforme territoriale est entrée en vigueur au 1er janvier 2016. Il est aujourd’hui encore difficile de comprendre ses objectifs, car ni la loi de délimitation ni la loi NOTRe, n’ont réglé le problème de la répartition des compétences entre les collectivités territoriales et la question des relations de ces dernières avec l’État.

Après avoir annoncé que cette réforme serait source d’économies, le Gouvernement a, petit à petit, effacé cet argument de son discours, et pour cause : plus on avance dans la mise en œuvre concrète, plus on réalise que les coûts de fusion risquent d’être supérieurs aux économies possibles, à moins que les exécutifs ne prennent à bras-le-corps la réduction des frais de fonctionnement ou ne fassent le tri dans les dépenses.

J’avais déposé voilà un an une proposition de loi pour essayer de faire de la mutualisation des coûts une priorité. Il semble que cela n’ait pas été envisagé par le Gouvernement. La mutualisation des fonctions supports et le non-alignement des dépenses de fonctionnement sont deux exemples qui permettraient ou auraient permis que les coûts de fusion ne soient pas supérieurs aux économies. Le risque est que les coûts de fusion se répercutent ensuite sur la fiscalité locale. Certains concitoyens vont déjà subir une hausse de cette fiscalité en raison de l’harmonisation des taux entre collectivités fusionnées. En d’autres termes, les Français vont sans doute constater avec stupeur que vous avez réussi à fusionner des collectivités sans réaliser d’économies substantielles.

Lorsqu’il était secrétaire d’État à la réforme territoriale, André Vallini avait annoncé que la fusion des régions devrait engendrer entre 12 et 25 milliards d’euros d’économies. Ma question est donc simple, madame la secrétaire d’État : quels sont les chiffres ? Quelles sont les premières retombées de cette nouvelle carte des régions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Monsieur le député Lionel Tardy, si vous me permettez une petite observation liminaire, votre question est un peu en dehors du sujet de notre débat, qui porte sur le budget du ministère de l’intérieur. Le fonctionnement des collectivités locales, à savoir leur organisation, leurs coûts de fonctionnement et leur système fiscal n’a rien à voir avec le budget de l’État, et du ministère de l’intérieur en particulier. La fiscalité dont il est question aujourd’hui est celle de l’État, et non pas celle des collectivités locales. Je vous renvoie donc au débat que vous aurez sur les collectivités territoriales, car n’ayant pas anticipé de question sur un autre sujet que le débat d’aujourd’hui, je ne suis pas en mesure de vous apporter de réponse. J’en ferai part à Jean-Michel Baylet et Estelle Grelier, en me référant aux chiffres d’André Vallini que vous avez mentionnés et qui avaient été avancés au moment du débat sur la fusion des régions.

Concernant le sujet qui nous occupe aujourd’hui, à savoir l’organisation de l’administration territoriale de l’État, le Gouvernement a voulu que la réorganisation de l’État soit à l’image de la fusion et de la réorganisation des collectivités, notamment des régions, avec un préfet et des services de l’État dans chaque grande région. Le souci rappelé à l’époque par le Président de la République, le Premier ministre et le ministre de l’intérieur était de préserver la proximité et d’assurer un équilibre à l’intérieur des grandes régions. Cela avait conduit à répartir les services régionaux de l’État entre les anciennes régions fusionnées. De la même façon, le souci de proximité s’était manifesté par la volonté de renforcer l’administration des services de l’État à l’échelle départementale, de maintenir le réseau des sous-préfectures et de renforcer le dispositif de l’État au moyen du réseau d’ingénierie territoriale dont j’ai parlé tout à l’heure.

M. le président. Nous laissons à M. Paul Molac la possibilité de poser sa question pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Paul Molac. Je vous remercie, monsieur le président. Parce que j’organisais cet après-midi un colloque sur les conséquences du Brexit sur l’Irlande et ses relations avec le continent, il m’a fallu courir dans les couloirs.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il faut choisir : le cumul des activités, ce n’est pas bon !

M. Paul Molac. La première question que je souhaite poser au Gouvernement concerne la propagande électorale.

Nous avons supprimé en commission élargie l’article relatif à la dématérialisation des supports de cette propagande pour les élections législatives. Le régime de propagande de l’élection présidentielle relevant du domaine réglementaire, il pourra être modifié dans ce sens par le Gouvernement sans que nous puissions nous y opposer d’autre façon que par nos cris. Nous aimerions donc savoir si les enveloppes de propagande seront diffusées dans les foyers lors de la prochaine élection présidentielle.

De façon subsidiaire, nous aimerions savoir si le Gouvernement entend s’engager à examiner avec les parlementaires, les associations d’élus, la société civile la façon dont on pourrait atteindre un certain degré de dématérialisation dans un autre cadre que celui du projet de loi de finances, et d’une façon moins brutale, car cette mesure n’est pas comprise par nos concitoyens. Je rappelle que la fracture numérique concerne à peu près 25 à 30 % d’entre eux.

Ne pourrait-on pas envisager, comme pour les impôts, de demander dans un premier temps aux électeurs, lorsqu’ils s’inscrivent sur les listes électorales, par exemple, s’ils souhaitent recevoir la propagande électorale en exemplaire imprimé ou sous forme dématérialisée ?

M. Olivier Marleix. C’est ingérable !

M. Paul Molac. La dématérialisation doit être mise en œuvre de façon progressive, et certainement pas de façon arbitraire comme c’est le cas ici, car c’est très mal vécu par les Français ; j’ai reçu de nombreux mails sur ce sujet, des personnes m’ont interrogé sur ce problème.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Monsieur le député Paul Molac, votre question comporte plusieurs éléments. Comme cela a été rappelé en début de discussion, ce n’est pas la première fois que ce sujet est débattu dans le cadre du projet de loi de finances, dans cette assemblée comme au Sénat. In fine, c’est bien la représentation nationale, ce sont bien les parlementaires qui décident.

M. Jean Lassalle. Très bien !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Le débat a et aura lieu aujourd’hui, et c’est bien l’Assemblée qui décidera.

Pour autant, peut-on prévoir une situation différente pour chacun de nos concitoyens ? Je ne fais que percevoir la complexité du processus que vous proposez, monsieur le député ! Comme je l’ai rappelé tout à l’heure, le Gouvernement a prévu certaines dispositions visant à garantir un égal accès à l’information. Pour répondre plus précisément à la question que vous avez posée, si les élections législatives relèvent d’une disposition législative, la décision au sujet de l’élection présidentielle est prise par décret. Bien entendu, si la représentation nationale refusait l’application du dispositif aux élections législatives, je ne prendrais aucune décision par décret afin de respecter la volonté du Parlement.

M. Olivier Marleix. Très bien !

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.

Mission « Administration générale et territoriale de l’État » (état B)

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », inscrits à l’état B.

Sur ces crédits, je suis saisi de deux amendements.

La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n481.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Cet amendement vise à inscrire un crédit d’un montant de 1 843 885 euros afin de répondre à l’urgence humanitaire et aux conséquences du démantèlement de la lande de Calais. Les moyens supplémentaires inscrits au budget 2017 du ministère de l’intérieur seront répartis de la façon suivante : 825 000 euros au profit du programme « Administration territoriale » afin d’assurer le recrutement de quinze personnes dans les préfectures en renfort des services en charge des guichets uniques des demandes d’asile et 1 018 885 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement au profit du programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur » afin d’assurer le recrutement de treize personnes au sein de la direction générale des étrangers en France pour faire face au développement des missions liées à la gestion des demandeurs d’asile.

M. le président. La parole est à M. David Habib, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

M. David Habib, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. La commission n’a pas examiné cet amendement mais j’émets un avis favorable à titre personnel. Compte tenu des besoins inhérents à cette action d’envergure, il semble indispensable que nous disposions des crédits nécessaires.

(L’amendement n481 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement n384.

M. Jean-Luc Laurent. Cet amendement vise à ouvrir un débat sur le vote électronique, qui a fait l’objet d’un moratoire à la suite de plusieurs constats d’incident. J’ai bien conscience qu’avoir en deux minutes un débat utile et satisfaisant sur le vote électronique est un exercice particulièrement difficile, mais je tiens à dire que le vote électronique est dangereux et qu’il affaiblit le rituel démocratique.

M. Dominique Le Mèner. Très bien !

M. Jean-Luc Laurent. Le terme « rituel » n’a rien de péjoratif ni de dérisoire, bien au contraire. Je suis heureux de constater que la mode des machines à voter inaugurée en 1969 est derrière nous. En raison d’incidents, de doutes et de constats de différences – pour employer des termes mesurés – entre les émargements et le nombre de votes enregistrés sur les machines, l’État a inauguré une période de moratoire qui n’a pas permis de refermer la parenthèse des machines à voter. Dans un souci d’intérêt général et de robustesse du processus électoral, mais aussi parce qu’il faut protéger la démocratie à laquelle nous sommes tant attachés des pirates et des manipulations susceptibles de se produire et parce que le recours à la machine à voter favorise l’opacité et le doute, compte tenu aussi des temps d’incertitude et de décalage entre la citoyenneté, le vote et l’ensemble des élus que nous vivons, il me semble que réinstaurer la transparence par l’exercice direct du vote au travers d’un bulletin déposé dans l’urne constitue un moyen utile et efficace de restaurer la confiance.

M. Dominique Le Mèner. Exactement !

M. Jean-Luc Laurent. Je propose donc d’aider les maires qui veulent en finir avec les machines à voter en constituant, par le vote de cet amendement, un fonds destiné à les racheter. (Rires.) Les maires qui veulent s’en débarrasser ne sont pas forcément ceux qui les ont achetées, ils peuvent être leurs successeurs liés par des contrats. Je propose donc de créer un fonds pour racheter les machines à voter et, comme j’entends des rires, je vous propose, mes chers collègues, que nous détruisions tous ensemble les machines à voter le 14 juillet prochain ! (Rires et applaudissements sur divers bancs.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. David Habib, rapporteur spécial. La commission n’a pas examiné cet amendement,…

M. Jean-Luc Laurent et M. Dominique Le Mèner. Quel dommage !

M. David Habib, rapporteur spécial. …qui d’ailleurs ne porte pas sur les machines à voter mais sur la création d’un fonds susceptible d’aider à leur rachat. Je rappelle à notre assemblée que trente-deux communes représentant 848 000 inscrits ont abandonné cette modalité d’expression du suffrage universel sans avoir recours à la moindre dotation de l’État entre 2008 à 2014. En outre, M. Laurent, soucieux de ne pas dépasser son temps de parole, n’a pas précisé que l’État a aidé les communes à procéder à leur acquisition et à leur entretien. Il serait tout de même un peu étrange qu’il les aide à y renoncer après les avoir ainsi aidées ! Enfin, si je puis me permettre, M. Laurent devait gager la création de ce fonds, ce qu’il a fait au détriment d’un programme fort utile pour le ministère de l’intérieur. Y prélever cinq millions d’euros pour l’exercice 2017 perturberait son fonctionnement. Pour toutes ces raisons, j’émets un avis très défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

M. Dominique Le Mèner. Dommage !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Le choix d’utiliser des machines à voter appartient à chaque commune. L’État ne souhaite pas en interdire l’utilisation à l’approche d’une période électorale. Je confirme par ailleurs ce que vient de dire M. le rapporteur spécial : l’État aide d’ores et déjà financièrement les communes qui achètent des urnes sur présentation des justificatifs. L’abandon des machines à voter et leur remplacement par les urnes est donc bien aidé par l’État.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. Sans alourdir le débat, je voudrais faire remarquer que nous n’avons pas la possibilité, lors de l’examen des annexes, de procéder par un autre moyen que le gage. Laissons donc de côté ce débat. Ce n’est pas la volonté de supprimer une action ou de diminuer les moyens du ministère de l’intérieur qui m’anime mais celle d’ouvrir un débat. L’État ayant joué un rôle incitatif en soutenant les communes désireuses d’acheter des machines qui se révèlent être des dangers dont il faut se prémunir, il est tout à fait fondé d’ouvrir un fonds pour aider les communes. L’État les ayant encouragées à investir dans ces machines, il doit les aider et les reprendre. L’amendement est donc parfaitement fondé et je le maintiens.

(L’amendement n384 n’est pas adopté.)

(Les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », modifiés, sont adoptés.)

Article 52

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements identiques, nos 75, 91, 100, 120, 278, 322, 332, 350 et 378.

La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, pour soutenir l’amendement n75.

Mme Marie-Lou Marcel. L’article 52 a déjà fait l’objet d’amendements de suppression en commission élargie. Il prévoit la dématérialisation de l’ensemble du matériel de propagande électorale à compter des élections législatives de 2017. Si cet article est maintenu, nos concitoyens amenés à élire leurs députés dans quelques mois ne recevront plus les bulletins de vote ni les professions de foi des candidats, ce qui équivaudra pour certains à un manque complet d’information. Cela serait une aberration au moment où l’on s’inquiète à juste titre de la hausse permanente de l’abstention. Cela serait également une injustice car l’accès à internet de nombreux électeurs, notamment dans les territoires ruraux, est parfois difficile voire impossible en raison de la qualité aléatoire de la couverture de ces territoires.

En outre, de nombreux électeurs, les personnes âgées au premier chef, ne disposent pas d’une connexion internet à domicile ou n’en ont qu’une maîtrise imparfaite. En l’état, un tel article pénaliserait les citoyens les plus fragiles et ceux qui sont éloignés des centres urbains. Il remettrait en cause le droit fondamental d’être également informé sur les candidats se présentant aux élections et sur leur programme en tout point du territoire. Il suffit de se rendre dans les maisons en période électorale pour constater que les documents de propagande y sont étalés sur la table, que les électeurs les consultent et qu’ils font leur choix sur cette base. Vous avez affirmé, madame la secrétaire d’État, que la dématérialisation induirait des économies, mais celles-ci ne peuvent être réalisées au détriment d’un égal accès à l’information. C’est pourquoi cet amendement propose la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n91.

Mme Marianne Dubois. Je propose moi aussi de supprimer cet article, car la dématérialisation des supports de propagande électorale n’est pas bienvenue, notamment en milieu rural. La fracture numérique perdure et ne doit en aucun cas se muer en rupture d’égalité. Une telle mesure favorisera l’abstention et pénalisera de nombreuses imprimeries locales. Par conséquent, il convient de supprimer cet article afin de maintenir le lien électoral papier avec les habitants.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n100.

Mme Véronique Louwagie. Je rappelle, en sus de ce que viennent de dire nos collègues, que la dématérialisation est une évolution méritant d’être envisagée dans certains cas mais pas du tout adaptée à d’autres. En matière d’élections, il en va de l’expression démocratique des citoyens et la démocratie ne doit pas s’exonérer de l’exigence d’être accessible à tous.

M. Jean Lassalle. Bravo !

Mme Véronique Louwagie. La fracture numérique est en effet une réalité en France. Nous avons le devoir d’assurer l’égalité des citoyens devant le vote, or les infrastructures techniques sont inégalitaires en fonction des territoires. En outre, de nombreuses personnes ne maîtrisent pas les outils informatiques ou pas suffisamment. Il ne s’agit pas là de couverture numérique mais d’un problème de formation de certaines personnes. Par ailleurs, toutes ne disposent pas d’un ordinateur. L’égalité des électeurs est essentielle et primordiale. La suppression de l’article 52 tel que le propose le Gouvernement permettra de maintenir la distribution à domicile des programmes de tous les candidats. Cet amendement garantit la réelle égalité d’accès à l’information politique.

M. Jean Lassalle. Tout à fait !

Mme Véronique Louwagie. Outre l’égalité, j’évoquerai un second point : la nécessité d’un lien entre les élus et les électeurs. Tandis qu’un large fossé se creuse entre le monde politique et les citoyens, il importe de maintenir la proximité existante, celle du débat mené dans les foyers sur la base de ces documents étalés sur les tables et donnant lieu à un échange. Le débat démocratique naît de la réception de ces documents. Telles sont les raisons qui sous-tendent cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Le Mèner, pour soutenir l’amendement n120.

M. Dominique Le Mèner. Je pense qu’une majorité de députés dans cet hémicycle sont désormais convaincus de l’utilité de supprimer cet article. L’argument des économies a été bien souvent avancé, sans que soit évoquée la question environnementale, puisque la dématérialisation a un coût énergétique. Par ailleurs, la démocratie suppose que l’on s’adresse à tous les territoires. Or il semble quelque peu absurde de proposer de dématérialiser la propagande électorale quand une partie importante de la population ne bénéficie pas de l’accès à internet. Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons de supprimer cet article.

M. le président. La parole est à M. Olivier Marleix, pour soutenir l’amendement n278.

M. Olivier Marleix. Je reviendrai sur l’argument central, celui du principe d’égalité devant la loi. La dématérialisation de la propagande serait moins grave, quoique troublante, pour l’élection présidentielle, car chacun finit par connaître les candidats, notamment grâce aux primaires. Ce n’est pas le cas des candidats aux élections législatives ou cantonales. Rappelons que le taux d’accès à internet n’est pas de 80 %, comme la moyenne nationale pourrait le laisser entendre, mais bien souvent de 50 % à peine, ce qui fait que seule une moitié des électeurs d’une circonscription auraient accès à l’information. Il y aurait là une atteinte évidente au principe d’égalité.

Cette atteinte au principe d’égalité concerne aussi les candidats. Alors que les grandes formations politiques pourront suppléer la disparition de la propagande papier en faisant distribuer des tracts par leurs nombreux militants, les petits candidats – une expression que je n’aime pas employer –, issus de formations qui n’ont pas les mêmes moyens, seront désavantagés. Pour toutes ces raisons, il est plus sage, ainsi que l’a proposé notre commission, d’écarter cet article.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n322.

M. Philippe Vigier. Madame la secrétaire d’État, vous aurez fait l’unanimité avec cet article… en faveur de sa suppression ! Chacun l’a dit, il s’agit d’une question majeure de démocratie. Olivier Marleix, avec élégance, a expliqué que les grandes familles politiques avaient la possibilité d’acheminer autrement les professions de foi ou les bulletins de vote chez les électeurs. Ce n’est pas le cas des autres. Il y va du pluralisme, madame la secrétaire d’État ! La démocratie a un prix : 180 millions d’euros, ce n’est pas cher payé, me semble-t-il !

Au-delà de cet aspect essentiel, je voudrais vous proposer d’autres pistes d’économie, qui vont dans le sens des objectifs de la COP21. Dématérialisons les permis de construire, les délibérations des conseils municipaux, cela permettra de réduire les coûts de façon considérable.

Nous sommes au cœur d’un problème démocratique. L’accès à l’information de chaque citoyen est une exigence absolue pour les élections. La propagande, dans sa version papier, revêt aussi une dimension affective : l’électeur prépare ainsi son bulletin de vote, compare les différentes professions de foi, en discute en famille, avec ses amis. Car les Français aiment la politique !

M. Jean Lassalle. Tout à fait !

M. Philippe Vigier. Si la propagande devait être dématérialisée, cela ferait croître l’abstention, entraînerait un rejet plus fort de la classe politique. Et ce serait la France qui serait perdante. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Paul Molac, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour soutenir l’amendement n332.

M. Paul Molac, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. L’expérimentation menée par le ministère de l’intérieur dans cinq départements tests lors des scrutins départementaux de 2015 montre que seuls 1,92 % des électeurs inscrits consultent les sites internet publiant la propagande, alors que 78 % d’entre eux lisent la documentation papier lorsqu’elle leur est transmise à domicile. Ce n’est pas la même chose d’aller chercher l’information que de la recevoir ! Par ailleurs, la fracture numérique persiste : 17 % de la population n’a pas accès à internet chez soi, et sur les 83 % de nos concitoyens qui disposent d’internet à leur domicile, 16 % ne l’utilisent pas.

La dématérialisation pose aussi un problème pour les petits candidats, dont les électeurs ne pourront être informés de l’existence.

Enfin, l’argument écologique est à nuancer, lorsque l’on considère que l’emploi de papier recyclé ou issu de forêts gérées durablement est obligatoire pour qui veut recevoir le remboursement par l’État. Par ailleurs, un bilan environnemental de la communication par la voie électronique commandé par l’ADEME en 2011 a montré que l’impression d’un document produisait moins de CO2 que la lecture sur écran pour les documents de plus de 8 pages et dont le temps de lecture dépasse les 30 minutes.

Plusieurs députés du groupe Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains. Très bien !

M. Paul Molac, rapporteur pour avis. L’économie numérique a aussi un impact sur l’environnement, et cela sera le cas tant que l’électricité ne sera pas entièrement issue d’énergies renouvelables…

Informer chaque citoyen en lui envoyant à son domicile les professions de foi de l’ensemble des candidats est indispensable. Cette information a un coût économique et un coût écologique, mais cela est justifié au regard des enjeux, notamment de l’abstention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir l’amendement n350.

M. Jean-Luc Laurent. J’ai également déposé avec M. Hutin un amendement de suppression de cet article. C’est surtout Bercy qui recherche, pour des raisons comptables, des mesures d’économie et propose de supprimer l’archaïsme de la propagande électorale. Nos collègues ont avancé différents arguments en faveur de la suppression de cet article. je voudrais ajouter quelques éléments. L’économie envisagée apparaît dérisoire. Elle est présentée, à juste titre, sous l’angle environnemental – M. Molac vient d’en parler – mais en tordant la réalité des choses. Je voudrais surtout parler du coût civique que représenterait une telle mesure, avec la remise en cause de l’exercice de la démocratie, de l’égalité. D’ailleurs, ce coût civique n’a pas été évalué dans l’étude d’impact. Il convient de supprimer cet article, au risque de creuser davantage le fossé entre les citoyens et le monde politique.

On aurait pu penser que cette mesure serait mise en œuvre à l’occasion de l’élection présidentielle…

Mme Véronique Louwagie. Tout à fait !

M. Jean-Luc Laurent. …mais elle ne le sera que pour les élections législatives, qui suivent la présidentielle, et qui connaissent une baisse constante de la participation. C’est une aberration totale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains)

M. le président. La parole est à M. Mathieu Hanotin, pour soutenir l’amendement n378.

M. Mathieu Hanotin. Je ne suis pas l’élu d’une circonscription rurale, mais d’une circonscription très urbaine, puisqu’elle compte seulement trois communes – Saint-Denis, Pierrefitte et Villetaneuse. L’accès à internet n’y connaît pas d’obstacles techniques, comme à la campagne, et pourtant, je vous le dis, une telle mesure posera des problèmes compte tenu du nombre important de nos concitoyens, particulièrement les plus âgés, qui n’ont pas accès à internet ou qui n’ont pas la culture de l’internet, ou pas l’habitude de l’utiliser, en particulier pour les questions électorales. La dématérialisation sera problématique pour l’élection présidentielle et les élections législatives, mais aussi pour les élections plus petites, comme les cantonales, pour lesquelles la propagande agit comme un rappel, trois ou quatre jours avant le rendez-vous électoral.

M. Jean Lassalle. Tout à fait !

M. Mathieu Hanotin. Beaucoup d’enveloppes reviennent dans les mairies avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée ». Si l’on regarde les taux de votants au sein de la population qui a déménagé au sein de la ville et n’a pas reçu la propagande, on s’aperçoit que seuls 10 % d’entre eux sont allés voter.

M. Jean Lassalle. C’est vrai.

M. Mathieu Hanotin. Je me permets de faire une proposition, qui vise à considérer les évolutions numériques comme une plus-value. Il faut un double système, un envoi papier complété par un système électronique efficace. Il faudra attendre que les usages prennent – et sans doute se posera-t-on la question de manière différente dans ce même hémicycle dans dix ans –, mais entre temps, cela sera de nature à faire augmenter la participation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

M. David Habib, rapporteur spécial. Ces amendements n’ont pas été présentés en commission des finances…

Mme Marie-Christine Dalloz. Si, ils l’ont été en commission élargie !

M. David Habib, rapporteur spécial. Pas tous, madame la députée. La commission des finances a cependant exprimé de façon quasi unanime un avis favorable à ces amendements.

Même si je sens que mon propos détonnera dans cette assemblée, je me déclare à titre personnel favorable à la dématérialisation. Pour des raisons économiques, d’abord : 170 millions, ce n’est pas une petite somme que l’on peut facilement gommer de nos réflexions.

Je sais que nous avons voté une loi qui modifiera les listes électorales, mais il est aujourd’hui difficile de distribuer ces documents. Plus de 10 % d’entre eux, soit plusieurs millions sur l’ensemble de l’hexagone, ne sont pas distribués. Si l’on ajoute à cela les documents distribués tardivement, parfois l’avant-veille de la consultation électorale, on atteint des chiffres significatifs. Ces professions de foi ne peuvent être des indicateurs, et encore moins fonctionner comme des alertes s’agissant d’une élection prochaine.

Je rejoins les propos de MM. Molac et Hanotin, le Gouvernement a la volonté de travailler sur le long terme. L’idée de la dématérialisation des documents administratifs et, comme l’a dit M. Vigier, des autres documents qui participent à notre vie civique, doit s’installer. Il est nécessaire d’encourager ce débat pour que nous puissions disposer de documents dans les meilleures conditions, simultanément sous leurs formes papier et télématique.

Jean Lassalle s’apprête sans doute à prendre la parole ; je précise que je suis l’élu d’une circonscription aussi rurale que la sienne, où la connexion internet laisse à désirer – peut-être parce que le conseil général, Modem, n’a pas été très entreprenant en la matière (Sourires.)

J’entends ce qui a été dit par les auteurs de ces amendements ; Mme la secrétaire d’État va s’exprimer. Il est certain que si une élection avait pu donner lieu à la dématérialisation de la propagande, c’est bien l’élection présidentielle, qui est la plus médiatisée, et où tous ceux qui veulent être candidats, et qui ne le seront pas, sont bien connus des citoyens. Cela aurait pu être l’occasion d’une première expérience à l’échelle nationale. D’autres ont été conduites, notamment en Loire-Atlantique, lors du référendum sur l’aéroport Notre-Dame-des-Landes : le taux de participation a été supérieur à celui d’habitude enregistré dans ce type de consultation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Rappelons quelques arguments. Tout d’abord, ce débat n’est pas récent, contrairement à ce que j’ai entendu. La question de dématérialiser la propagande a été posée pour la première fois au détour d’un rapport rédigé en 2006. Le débat ne date donc pas d’hier.

Par ailleurs, la plupart des pays européens ont adopté cette pratique. Nous sommes les seuls, avec le Royaume-Uni, à ne pas avoir suivi.

Troisièmement, économiser 170 millions, ce n’est pas rien ! Si une telle somme se trouvait à la disposition de l’Assemblée nationale, vous sauriez très bien comment la dépenser !

Quatrièmement, les considérations environnementales ne sont pas négligeables. L’impression de professions de foi pour tous les électeurs atteint des proportions considérables, surtout lorsque le nombre de candidats aux élections est important. Je me souviens en particulier de l’année 2002 où plus de quinze candidats s’étaient présentés aux présidentielles !

M. Jean-Luc Laurent. Il faut supprimer les élections et dissoudre le peuple !

M. Nicolas Sansu. Et recourir au tirage au sort !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Tout cela représente un coût budgétaire, ne l’oublions pas.

Rappelons également, à la suite du rapporteur, qu’une expérimentation a été menée en 2015 à l’occasion des élections départementales, régionales et de la consultation sur le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Enfin, le Gouvernement a assorti sa proposition d’un certain nombre de garanties : un site dédié devrait permettre d’accéder aux informations, des documents seront mis à disposition dans les préfectures et les mairies et une campagne de presse sera organisée.

Je pense que nous avons bien encadré cette proposition, qui n’est pas aussi baroque que vous le laissez entendre. Je vous laisse peser le pour et le contre, à présent.

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est vrai, madame la secrétaire d’État, ce débat revient régulièrement. Deux éléments doivent être pris en compte, à commencer par celui de la fracture numérique. Certains territoires ruraux ou de montagne ne sont toujours pas couverts par internet. Soyons sérieux ! Vous qui aimez tant parler d’égalité, ne creusez pas les inégalités en rendant plus difficile pour les habitants de certains territoires la connaissance des propagandes électorales.

La méconnaissance, la difficile maîtrise de l’outil informatique, est une autre donnée à prendre en considération. Certaines personnes ne sont pas formées et n’ont pas envie d’apprivoiser l’outil informatique. Nous devons respecter ce choix. Ma conception de la démocratie se refuse à exclure d’autorité ces personnes-là.

Enfin, puisque vous parlez d’économie, madame la secrétaire d’État, je vous invite à vous inspirer de l’exemple des pays étrangers. Dans le cadre de missions sur la vérification du processus démocratique, menées par le Conseil de l’Europe, j’ai pu me déplacer à l’étranger, notamment en Moldavie. Les bulletins de vote, ainsi, ne sont envoyés qu’aux mairies. Il n’est en effet pas nécessaire de doubler tous les bulletins de vote, en les envoyant à domicile et à la mairie. Envoyons les bulletins de vote aux mairies, et les propagandes électorales aux électeurs, nous aurons déjà réalisé d’importantes économies !

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan.

M. Nicolas Dupont-Aignan. Je propose que nous passions au vote car tous les arguments autour de cette affaire démocratique de la plus haute importance ont déjà été mille fois débattus.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. le président. D’autant plus que tout le monde est à peu près d’accord !

La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Je suis d’accord.

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin.

M. Jean-Christophe Fromantin. Pareil !

M. le président. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Dans le milieu urbain, non plus, il n’y a pas toujours, au sein des familles, un ordinateur par personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

Quant aux considérations environnementales, rappelons que les arbres qui poussent absorbent le CO2. Le papier qu’ils deviennent contient du CO2, qu’on peut ensuite enfouir et recycler. Les arbres repoussent et réabsorbent du CO2. Supprimez le papier et la concentration de l’air en CO2 augmentera !

M. Philippe Vigier. Exactement !

M. le président. La parole est à Mme Claudine Schmid.

Mme Claudine Schmid. N’oublions pas non plus les Français de l’étranger. La connexion internet n’est pas toujours bonne selon les pays, et il ne serait pas toujours possible de télécharger la propagande électorale. Par ailleurs, les consulats et les ambassades ne sont pas aussi proches que les mairies. Quant aux campagnes de presse, il ne faut pas compter sur la presse étrangère pour couvrir les législatives en France !

Il aurait fallu commencer par modifier les listes électorales pour obliger les électeurs à inscrire une adresse électronique et permettre aux candidats de leur envoyer leur propagande. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. Éric Straumann.

M. Éric Straumann. Je partage l’analyse de mes collègues. Il faudrait réfléchir aux conditions générales de la propagande, notamment la question de l’affichage. En Allemagne, les professions de foi ne sont plus envoyées mais on peut afficher presque n’importe où. Nous devrions avoir une vue d’ensemble de la question. Je vous propose d’adopter ces amendements.

(Les amendements identiques nos 75, 91, 100, 120, 278, 322, 332, 350 et 378 sont adoptés, l’article 52 est ainsi supprimé et les amendements nos 89, 54, 53, 127, 52 et 139 tombent.)

Après l’article 52

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n498.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Il s’agit d’un amendement de précision qui tend, par parallélisme avec les dispositions applicables aux autres élections, lorsqu’une campagne audiovisuelle est prévue par la loi, de préciser la prise en charge par l’État du coût de celle-ci.

(L’amendement n498, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Paul Molac, rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n333.

M. Paul Molac, rapporteur pour avis. Cet amendement est le fruit d’une réflexion menée par la commission des lois au printemps 2016 sur le financement des campagnes électorales. Il tend à modifier le taux de change applicable aux opérations retracées dans les comptes de campagne des candidats aux élections législatives et sénatoriales dans les circonscriptions à l’étranger, et à retenir un taux de change glissant, constaté au dernier jour du mois précédant le paiement de la dépense ou l’encaissement de la recette.

Cette petite modification, proposée par le président de la commission des lois, a été adoptée à l’unanimité.

(L’amendement n333, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Engagements financiers de l’État

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs aux engagements financiers de l’État, aux remboursements et dégrèvements et aux investissements d’avenir, ainsi qu’aux comptes spéciaux – participation de la France au désendettement de la Grèce, participation financière de l’État et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics (n4125, annexes 24, 41 et 48).

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames et messieurs les rapporteurs, messieurs les rapporteurs spéciaux, mesdames et messieurs les députés, nous examinons cet après-midi un ensemble de crédits particulièrement vaste, regroupés au sein de missions budgétaires dont les enjeux sont décisifs pour le pilotage de nos finances publiques.

J’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors de la discussion générale du projet de loi de finances pour 2017, l’amélioration du solde public sur la durée du quinquennat permet, après dix années de hausse continue, de stabiliser la dette publique en pourcentage du PIB en 2016. Au final, sous cette mandature, notre dette publique n’aura augmenté que d’un peu plus de six points de PIB contre plus de vingt-cinq points lors du quinquennat précédent, c’est-à-dire quatre fois plus.

Cette stratégie d’assainissement des comptes publics nous a notamment permis de réaliser des économies considérables sur la charge de la dette. Dans le même temps, la dette française, qui continue d’apparaître comme une valeur refuge, a bénéficié d’une baisse de taux d’intérêt très significative, qui nous permet aujourd’hui d’emprunter à des taux historiquement bas, à échéance de dix ans.

Et si nous pouvons bénéficier aujourd’hui de tels taux, c’est bien parce que notre politique est crédible. Cette crédibilité, nous la devons notamment à des comptes publics redressés, qui respectent les engagements pris en 2012 par ce Gouvernement. La qualité de notre politique d’émission, menée par l’Agence France Trésor et reconnue sur le plan international, y contribue aussi largement.

En ce qui concerne les emprunts dits « toxiques » des collectivités locales, je me contenterai de rappeler que le montant du fonds de soutien aux collectivités et à leurs établissements ayant souscrit de tels emprunts a été doublé en loi de finances rectificative de 2015, de manière à faire face à l’envolée du franc suisse et à ses conséquences pour les collectivités débitrices. Depuis lors, le fonds continue à fonctionner sur cette base sans élément nouveau majeur. Grâce à un engagement financier très lourd de l’État, les objectifs politiques fixés au fonds de soutien ont été remplis lors de cette première phase : les bilans des collectivités et des banques ont été désensibilisés, la santé financière des collectivités, en particulier celle des plus petites, a été préservée.

J’en viens aux participations financières de l’État. Depuis 2014, l’État actionnaire dispose d’une doctrine d’intervention claire, qui lui permet de faire entendre sa voix et de défendre une vision de long terme. La représentation de l’État dans les instances de gouvernance des entreprises dont il est actionnaire a gagné en efficacité. Avec l’adoption de la loi dite « Florange », les actionnaires de long terme – au premier rang desquels figure l’État –, disposent désormais de droits de vote doubles pour peser dans les grandes orientations stratégiques des entreprises.

La refondation de la filière nucléaire justifie un niveau exceptionnel de dépenses du compte d’affectation spéciale en 2017, afin d’assurer la mise en œuvre des orientations annoncées par le Président de la République en juin 2015. L’objectif est de remettre de la cohérence dans la filière, de façon à garantir le plein succès des projets à venir, que ce soit à l’export, avec la construction de deux réacteurs EPR sur le site d’Hinkley Point au Royaume-Uni, ou en France, avec le grand carénage et le prochain renouvellement de notre parc nucléaire.

Ainsi, EDF deviendra le chef de file de la filière, ce qui mettra fin à une décennie de compétition avec Areva, désormais recentré sur le cycle du combustible. L’État est convaincu que la stratégie d’EDF, qui passe par des investissements importants dans le nucléaire et les énergies renouvelables, est de nature à créer de la valeur. C’est pourquoi il soutiendra le renforcement des fonds propres de l’entreprise en participant à son augmentation de capital.

Je souhaiterais enfin dire quelques mots du nouveau programme d’investissements d’avenir – PIA3 –, d’un montant de 10 milliards d’euros, annoncé par le Président de la République dès 2015. Dans le sillage des deux premiers programmes, ce troisième volet financera les investissements nécessaires à la croissance de demain.

Ce seront donc 10 milliards, qui permettront de soutenir l’enseignement, de valoriser la recherche et d’accélérer la modernisation des entreprises.

Depuis son origine, le PIA concourt à l’amélioration de la qualité environnementale. Le PIA3 marque une nouvelle étape, puisque 6 milliards d’euros, soit 60 % des crédits, seront destinés à des projets qui relèvent de ce secteur. C’est un gage de plus donné à nos concitoyens de la mobilisation totale du Gouvernement sur le front du développement durable et de la croissance verte.

En outre, pour tenir compte des recommandations formulées par la Cour des Comptes – qui ne dit pas que des choses inintéressantes ! –, les crédits de paiement versés aux opérateurs au titre du PIA 3 seront autorisés annuellement au sein du budget général, à partir de 2018, alors que les autorisations d’engagement sont ouvertes en totalité en 2017. Cette évolution, qui s’accompagne d’un regroupement des crédits sur une seule et même mission budgétaire, se traduira par une amélioration de l’information du Parlement, tout en préservant les principes de sélection rigoureuse qui font la spécificité du PIA.

Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, les caractéristiques des crédits de l’État que je vous présente aujourd’hui.

M. Jean-Claude Buisine. Très bien !

M. le président. Nous allons maintenant entendre les porte-parole des groupes.

La parole est à M. Gabriel Serville, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Gabriel Serville. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, la mission que nous examinons aujourd’hui est essentiellement composée de la programmation de la charge de la dette publique, chiffrée à plus de 40 milliards d’euros par an. Cette charge représente le troisième poste du budget de l’État, devant la justice, la défense, ou encore la sécurité.

La dette publique est ainsi au cœur des politiques publiques. Pas seulement dans notre pays, mais dans toute l’Europe. En moins de dix ans, sa réduction est devenue la priorité absolue de l’Union. En soi, cet objectif constitue une spécificité dans le monde occidental, puisque certains pays comme les États-Unis continuent à laisser filer leur dette après avoir vainement tenté de la contenir, conscients de la nécessité d’éviter un scénario de déflation à la japonaise.

Disons-le très clairement : il est dangereux de faire de la réduction de la dette publique l’alpha et l’oméga des politiques publiques. Les valeurs comptables ne sauraient régner sans partage sur un véritable projet politique fédérateur et progressiste. La volonté politique ne saurait s’effacer derrière les exigences d’acteurs financiers en quête de rentabilité. En la matière, l’Europe, doit rectifier le tir et proposer un nouveau projet susceptible de combler le fossé qui ne cesse de se creuser entre les peuples et leurs décideurs publics.

Combattre la dette, c’est en parler franchement et sans résignation. Quelles doivent être nos priorités en la matière ? Comment choisir nos boussoles politiques ?

Il nous faut d’abord rendre l’impôt le plus juste possible : chacun doit contribuer à raison de moyens, les citoyens comme les entreprises.

Combattre la dette, c’est aussi lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, qui nous coûtent chaque année entre 60 et 80 milliards d’euros.

Plutôt que d’y participer, nous devrions également dénoncer la course au moins-disant social et fiscal qui se trame au niveau communautaire.

Combattre la dette, c’est enfin favoriser l’investissement et la transition énergétique, pour redonner de la vigueur à notre croissance économique.

Une question paraît tout aussi centrale, celle de l’identité des créanciers de l’État. Qui détient la dette du pays ? Tout au plus savons-nous qu’elle est détenue majoritairement par des non-résidents. Mais qui se cache derrière ces chiffres ? La représentation nationale ne dispose d’aucun panorama complet de la situation. Notre groupe considère que cette opacité doit être combattue avec la plus ferme détermination, car il s’agit d’une question de souveraineté nationale.

Par ailleurs, ces intérêts, ces 40 milliards d’euros par an, ne sont remboursés ni plus ni moins que par les impôts de nos concitoyens. Il est donc absolument légitime et normal, de savoir à qui ces montants sont versés.

Mes chers collègues, la question qui se pose ici à nous est d’ordre éthique, car, à l’heure où l’on prétend lutter contre les paradis fiscaux, on ne saurait accepter que notre dette vienne les alimenter de façon pernicieuse. Bien entendu, les choses ne sont pas aisées. La chaîne de détention est particulièrement complexe. À titre d’exemple, derrière un fonds d’investissement britannique pourrait se cacher une organisation russe ou saoudienne. Cette chaîne de détention peut aller jusqu’à transiter dans les paradis fiscaux. Aussi, certains estiment qu’il s’échange entre 80 et 100 milliards d’euros de dette française par jour ! Les intermédiaires étant nombreux et les acteurs internationaux, on a affaire à des porteurs en cascade, ce qui rend difficile toute remontée de la chaîne de détention.

Néanmoins, les décideurs politiques que nous sommes ne sauraient se contenter de cette opacité, qui exige une action politique volontariste plutôt que la résignation. La mise en place d’un registre, à tout le moins accessible au décideur public, dans des termes qu’il conviendrait de définir, apparaît comme une exigence incontournable. En tout état de cause, pour sortir du piège de la dette, il nous faut trouver des solutions réellement innovantes, remettant l’exigence démocratique au cœur de la problématique.

Au regard ces différentes appréciations et observations, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine émettra un vote négatif sur la mission budgétaire que vous nous présentez aujourd’hui.

M. le président. La parole est à Mme Marine Brenier, pour le groupe Les Républicains.

Mme Marine Brenier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, l’endettement de la France est l’une des questions les plus préoccupantes pour notre pays, car elle conditionne notre souveraineté budgétaire. Or, monsieur le secrétaire d’État, nous attendons toujours des résultats concrets de votre politique. Cette année encore, nous assistons à l’accroissement inexorable de notre dette, conformément, ai-je malheureusement envie d’ajouter, à cette manie que vous avez de faire courir la date et de faire peser sur les générations futures les conséquences de votre mauvaise gestion.

M. Jean-Claude Buisine. Bigre !

Mme Catherine Coutelle. Cela ne vous est jamais arrivé, sans doute !

Mme Marine Brenier. Depuis 2012, la dette continue de croître à un rythme soutenu, affichant aujourd’hui le chiffre record de 2 170 milliards d’euros, soit 98,4 % du PIB.

Mme Catherine Coutelle. Vous l’avez accrue de 500 milliards d’euros !

Mme Marine Brenier. Permettez-moi, monsieur le ministre, de citer vos propos lors de l’examen de cette mission budgétaire en commission élargie, le jeudi 3 novembre dernier, lorsque mon collègue Lionel Tardy évoquait ce niveau d’endettement : « Je vous invite donc à vous méfier, et à éviter de donner avec sérieux des chiffres qui sont faux – car ces chiffres sont tout simplement faux. » Or, monsieur le secrétaire d’État, ce chiffre « faux » est celui de l’INSEE, publié le 30 septembre 2016. Exprimée en pourcentage du PIB, la dette augmente bien de « 0,9 point par rapport au premier trimestre 2016, à 98,4 % ».

Avec un tel endettement, notre économie aura bien du mal à se redresser. Pourtant, la France bénéficiait jusqu’en 2012 de taux historiquement bas, dus à une politique monétaire favorable et surtout à la crédibilité des engagements budgétaires de la précédente majorité. Mais, depuis quatre ans, l’effort de réduction des déficits a été relâché.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Oh !

Mme Catherine Coutelle. Vous ne manquez pas d’air !

Mme Marine Brenier. Bruxelles s’en inquiète régulièrement, tout comme le Haut Conseil des finances publiques.

La dégradation de la situation de la France s’explique aussi par le fait qu’en plus d’une pression fiscale record, votre gouvernement n’a pas réalisé les réformes nécessaires. Si quelques efforts sont consentis dans ce projet de budget pour 2017, ils proviennent, pour beaucoup, d’économies de constatation et, à certains égards, de la poursuite de la logique du « rabot ». Cela explique que, depuis 2012, vous ayez sans cesse dû reporter la date à laquelle vous annonceriez un recul de la dette publique. D’abord évalué à 91,3 % du PIB en 2013 puis à 94,3 % l’année suivante, le plafond sera ensuite continuellement revu à la hausse !

Le problème de la soutenabilité de la dette est aggravé par celui du coût de son financement. En effet, pour la seule dette de l’État, la charge d’intérêts financée par le budget général sera cette année de 41,8 milliards d’euros, soit plus de 10 % des dépenses de l’État. Cette dépense stérile est désormais le deuxième poste budgétaire de l’État, devant le budget de la défense, qui nous semble pourtant être une priorité pour garantir la sécurité de nos concitoyens.

Nous sommes anesthésiés par ces taux d’intérêt anormalement bas qui rendent totalement indolore l’augmentation de l’encours de notre dette. Mais dès qu’ils remonteront, notre pays sera confronté à des difficultés extrêmes. La prochaine majorité devra donc rapidement adopter des mesures crédibles de réduction des dépenses de l’État, à même de rassurer les investisseurs et de restaurer notre crédibilité budgétaire. Je vous assure que nous le ferons !

Un autre élément retient notre attention dans cette mission, le programme 114 « Appels en garantie de l’État », qui acte le transfert de la gestion des garanties publiques au commerce extérieur de la COFACE – Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur – à Bpifrance Assurance Export, filiale du groupe Bpifrance placée en situation de quasi-régie avec l’État. La recette exceptionnelle de 4,3 milliards d’euros, engrangée par le passage d’une garantie indirecte à une garantie directe de l’État, est un leurre sans lequel le déficit de l’État aurait été encore plus dégradé en 2017.

Certes, au sens de la comptabilité nationale, ce reversement n’est pas une recette supplémentaire dans le calcul du déficit public tel que défini par le traité de Maastricht. Toutefois, la prochaine majorité ne pourra plus bénéficier de ces 4,3 milliards d’euros, puisque ce solde aura été vidé par vos soins.

Le constat est sans appel : votre gouvernement fragilise la trajectoire des finances publiques à compter de 2018. C’est l’illustration, une fois de plus, de la gestion – ou plutôt de la non-gestion – socialiste, qui consiste à raisonner à court terme et à reporter toujours à plus loin les mesures dont notre pays a besoin.

Mme Catherine Coutelle. Que ne faut-il pas entendre !

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Philippe Gomes. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’endettement de la France est probablement l’une des questions les plus préoccupantes pour la République, car c’est notre souveraineté nationale qui est en jeu.

On l’a dit, les crédits de cette mission arrivent en troisième position du budget de l’État, devant des budgets aussi essentiels que ceux la défense, de la recherche et de l’enseignement supérieur, du travail ou encore de l’écologie. En effet, la dette française a battu tous les records à partir de la crise économique et financière de 2008. Elle a ensuite continué à augmenter chaque année dans des proportions préoccupantes, malgré des taux d’intérêt très bas, les plus bas du demi-siècle écoulé.

Rappelons que la dette publique de la France représentait 65 % du PIB il y a dix ans, contre 96,1 % cette année. Dans ses soixante engagements de campagne, le candidat François Hollande s’engageait à ce que l’endettement de la France soit maîtrisé à la fin du mandat, à hauteur de 80,2 % du PIB. Or, selon le Gouvernement lui-même, la dette représenterait encore 96 % du PIB l’année prochaine.

Cette prévision, si éloignée de la promesse présidentielle soit-elle, est sans doute encore loin de la réalité. La dette devrait dépasser bel et bien les 100 % de PIB à la fin du quinquennat.

En effet, comme on l’a également souligné, le Gouvernement utilise le mécanisme des primes d’émissions afin de faire baisser la dette pour l’exercice en cours, ce qui ne manquera pas d’aggraver son poids pour les exercices ultérieurs. En recourant à cet artifice, il a dissimulé, selon nous, environ 95 milliards d’euros de dette depuis 2012, 95 milliards qui pèseront bien sûr sur les années à venir.

Sous l’actuel quinquennat, la dette de la France a franchi pour la première fois, le 17 août 2014, la barre des 2 000 milliards d’euros. Cette trajectoire d’endettement est-elle équivalente à celle de nos homologues européens ? Hélas non ! Nous ne pouvons pas invoquer cet argument, puisque nous sommes désormais très loin non seulement de la trajectoire de l’Allemagne, mais aussi de celle de la moyenne des pays de la zone euro.

En effet, alors que la dette publique a augmenté en France de 326 milliards d’euros en cinq ans, elle a baissé en Allemagne ainsi que dans la moyenne de la zone euro. Elle dépasse à présent de près de vingt points celle de l’Allemagne et de cinq points celle de la moyenne de la zone euro.

Cette situation n’est pas tenable. Comme l’a toujours dit le groupe de l’Union des démocrates et indépendants, mettre fin à la spirale de l’endettement est vital pour notre pays et vital pour les générations futures. Cet objectif répond à trois impératifs qui devraient tous nous réunir et transcender les clivages politiques.

Tout d’abord, un impératif éthique : notre pays ne doit pas faire supporter aux générations futures la mauvaise gestion passée. Ce sont aujourd’hui, vous le savez, 31 800 euros dont chaque Français devrait s’acquitter pour que la France honore l’ensemble de ses engagements passés : 31 800 euros, c’est une somme !

Ensuite un impératif économique : il convient de ne pas mettre de frein à la croissance du pays et de favoriser la relance de l’investissement.

Enfin, un impératif politique : redonner un sens à notre démocratie et assurer de réelles marges de manœuvre aux élus. Lorsque le budget de la dette est d’une importance telle que celle qu’il atteint aujourd’hui dans notre projet de loi de finances, quelle est la marge réelle des élus au sein de cette assemblée ?

Ce n’est que lorsque ce préalable sera levé que notre pays pourra retrouver non seulement le chemin de la croissance, mais, de manière plus fondamentale, une véritable souveraineté.

Le président de la Cour des comptes Didier Migaud a dit, il est bon de le rappeler : « Aussi longtemps que notre pays aura une dette élevée, il se situera dans une zone dangereuse. Le risque d’emballement de la dette n’est pas que théorique ». C’est la raison pour laquelle les députés du groupe de l’Union des démocrates et indépendants ne peuvent soutenir ce budget.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je ne voudrais pas rallonger les débats à cette heure tardive, mais j’ai entendu un certain nombre de contre-vérités que je me dois de redresser.

Je m’adresserai à M. Serville plus tard, lorsque je répondrai à la question de M. Buisine qui porte sur un thème similaire.

Madame la députée Brenier, il ne faut pas dire n’importe quoi. Vous annoncez un pourcentage de la dette de 98,4 %, reprenant d’ailleurs des propos de M. Tardy. Ce pourcentage correspond à une évaluation trimestrielle. J’ai indiqué à plusieurs reprises à M. Tardy, comme je le fais chaque année – mais vous n’étiez peut-être pas parmi nous – que la dette évolue de façon erratique au cours de l’année. Le mot n’est pas juste, mais il signifie une chose : la dette est toujours en augmentation au cours des premiers mois, voire des premiers trimestres de l’année, et elle retombe toujours en fin d’année.

Pourquoi ? Simplement parce que les rentrées fiscales de l’État se concentrent à la fin de l’année. Si certains impôts sont perçus tous les mois – c’est le cas des impôts sur le revenu mensualisés – les impôts de type TVA n’entrent pas de façon linéaire. Quant aux impôts locaux, ce sont des recettes que nous percevons pour l’essentiel en fin d’année, avant de les reverser aux collectivités. Je vous signale que nous les reversons aux collectivités par douzième dès le début de l’année.

C’est pourquoi l’évolution de la dette de l’État présente toujours un pic au mois de juin, voire au mois de septembre, et retombe toujours en fin d’année.

Puisque vous voulez des chiffres, en voici un : la dette en France s’élèvera à la fin 2016 à 2 144,8 milliards, soit 96,1 % du PIB. Ce chiffre figurera au compte rendu. Je vous donne rendez-vous en février prochain pour comparer l’exécution du budget 2016 au chiffre que je vous ai cité ce soir.

Concernant l’augmentation de la dette et notre responsabilité, permettez-moi de vous citer également quelques chiffres. En 2007 – vous savez à quoi correspond cette date – la dette de notre pays s’élevait à 1 253 milliards d’euros, pour atteindre 1 869 milliards en 2012. Elle a ainsi augmenté de 25 points de PIB, de 616 milliards d’euros exactement. En comparaison, elle n’a augmenté que de 6 points de PIB entre 2012 et 2017.

M. le président. Merci !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Monsieur le président, mon temps de parole serait-il limité ?

M. le président. Vous n’auriez même pas dû avoir la parole. Dans cet exercice un peu contraint, les ministres ne répondent pas aux orateurs.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je profiterai donc de ma réponse à M. Buisine pour compléter mon propos sur la charge de la dette et revenir sur les chiffres faux qui ont été présentés par votre collègue.

M. le président. Nous en arrivons aux questions.

Je vous rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.

La parole est à M. Jean-Claude Buisine, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Jean-Claude Buisine. Monsieur le ministre, je veux tout d’abord vous féliciter une nouvelle fois pour la qualité de votre gestion de la dette publique et votre attachement à la préservation de la souveraineté financière de notre pays. Le Gouvernement est en effet parvenu à tirer parti du contexte macroéconomique pour réduire le poids de l’endettement. Ces efforts sont à resituer dans un cadre européen.

Ma question se décompose en trois points.

Tout d’abord, a-t-on constaté – à la hausse comme à la baisse – un effet « Brexit » sur nos modalités de financement ?

Ensuite, si deux tiers des encours de la dette de l’État sont détenus par des non-résidents, qu’en est-il chez nos principaux partenaires européens, notamment italien et allemand ?

Enfin, comment les effets « volume », « inflation » et « taux » sont-ils pondérés dans vos prévisions pour 2017 ?

Je vous remercie pour vos éléments de réponse qui permettront, j’en suis sûr, d’éclairer nos débats et de rappeler à nos collègues de l’opposition qu’en matière de crédibilité budgétaire, nous n’avons aucune leçon d’économie à recevoir.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Monsieur le président, je vais essayer de m’en tenir à deux minutes.

Monsieur le député, vous nous interrogez, à l’instar de M. Serville, sur le pourcentage de la dette détenue à l’étranger.

C’est un exercice malaisé, M. Serville l’a bien expliqué. Il se peut que la circulation de la dette et l’existence de titrisations rendent la traçabilité extrêmement difficile. Néanmoins, l’enquête Eurostat de juin 2015 sur la structure de la dette publique, au sens de Maastricht, a montré un niveau d’internalisation de 57,2 % pour la dette française – il était de 61,9 % dans l’étude précédente.

Monsieur Buisine, vous nous demandez de comparer notre situation à celle de nos voisins. La même étude en Allemagne montre une internalisation de 56,8 % – elle est de 51,3 % aux Pays-Bas. Comme vous le voyez, les chiffres de la France et de l’Allemagne sont comparables, voire quasiment identiques.

En Italie, la dimension domestique est plus forte puisque la part de la dette publique détenue par les non-résidents y est de 33,6 %. Ce pourcentage est atypique par rapport à ceux de la France, de l’Allemagne et des Pays-Bas.

S’agissant de la charge d’intérêts de la dette, je me permettrai de corriger les chiffres qui ont été avancés tout à l’heure. La charge d’intérêt de la dette baisse, madame la députée Brenier. Elle a baissé de 14 % en cinq ans – je tiens les chiffres à votre disposition. Elle devrait s’établir à 41,8 milliards d’euros en 2017, en légère augmentation par rapport à 2016. Je vous demande de prendre ces chiffres avec précaution sachant, vous le savez, que les taux d’intérêt varient.

Nous revoyons régulièrement à la baisse – certains appellent cela des économies de constatation – la charge d’intérêts dans le courant de l’année en fonction des taux d’intérêt. Un effet « volume » augmente la dette de l’ordre de 700 millions d’euros, auquel il faut ajouter un effet « inflation » défavorable de 1,6 milliard et un effet « taux » favorable de 1,7 milliard. Nous prévoyons des taux de l’ordre de 1,25 à 1,50 % en fin d’année – ils se situent encore aujourd’hui autour de 0,5 %, soit à un niveau nettement inférieur.

Mission « Engagements financiers de l’État » (état B)

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », inscrits à l’état B.

(Les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » sont adoptés.)

Mission « Remboursements et dégrèvements » (état B)

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », inscrits à l’état B.

Sur ces crédits, je suis saisi d’un amendement n445. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour le soutenir.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il s’agit par cet amendement de coordonner la décision qui a été prise par le Parlement de réduire d’un euro la recette au titre de la contribution à l’audiovisuel public, ce qui permet d’ajuster les crédits nécessaires. Cela avait été fait, au titre de la coordination, dans l’état A, il convient donc de le faire dans l’état B.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Bachelay, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

M. Guillaume Bachelay, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Avis favorable.

(L’amendement n445 est adopté.)

(Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », modifiés, sont adoptés.)

Mission « Investissements d’avenir » (état B)

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Investissements d’avenir », inscrits à l’état B.

(Les crédits de la mission « Investissements d’avenir » sont adoptés.)

Article 56

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n416.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cet amendement vise à répondre à un souhait en permettant au Parlement de se prononcer sur les projets de redéploiement modifiant la répartition initiale des fonds entre les différentes actions du programme d’investissements d’avenir. Le Parlement pourra ainsi interroger le Gouvernement pour s’assurer de la pertinence des projets de redéploiement. Cela, je crois, répond à un souhait exprimé par l’ensemble des parlementaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Guillaume Bachelay, rapporteur spécial. Si vous le permettez, monsieur le président, j’interviendrai sur l’amendement n416 et sur les trois suivants, les nos 321 et 320 de Mme Sas et le n415 du Gouvernement.

Ces amendements n’ayant pas été examinés en commission, j’émets un avis à titre personnel.

La loi de finances rectificative de mars 2010, qui avait fixé le cadre et les modalités du financement des programmes d’investissements d’avenir, prévoyait qu’un rapport annuel soit remis au Parlement pour l’informer du suivi de la mise en œuvre de ces programmes.

Ces amendements, celui que nous examinons et ceux qui nous seront présentés dans quelques instants par notre collègue Eva Sas, visent à enrichir le contenu de ce rapport annuel transmis au Parlement afin de lui offrir une vision d’ensemble de l’exécution des programmes d’investissements d’avenir, en particulier au regard des enjeux liés à la transition écologique et au redéploiement du programme d’investissements d’avenir.

Chère collègue Eva Sas, le Gouvernement propose une rédaction alternative qui permet d’intégrer ces préoccupations, qui sont celles de la mission d’évaluation et de contrôle sur les programmes d’investissements d’avenir, dans le financement de la transition écologique. Je vous propose donc de retirer vos deux amendements, faute de quoi je serai contraint d’émettre un avis défavorable, au profit de ceux du Gouvernement qui reçoivent de ma part un avis favorable.

(L’amendement n416 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 321 et 320, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme Eva Sas, pour les soutenir.

Mme Eva Sas. Ces deux amendements reprennent les premières propositions de la mission d’évaluation et de contrôle, que j’ai menée avec ma collègue Sophie Rohfritsch, relative aux programmes d’investissements d’avenir dans la transition écologique.

L’amendement n320 vise à ce que le Gouvernement justifie devant le Parlement les motifs et les incidences des redéploiements qu’il pourrait décider. En effet, au cours de notre mission, nous avons pu constater que les financements de la transition écologique par les PIA ont manqué d’un suivi rigoureux.

À titre d’exemple, Jean-Marc Ayrault annonçait en 2013 que près de 50 % des PIA 2 seraient consacrés à la transition écologique via des financements directs ou indirects. Or notre mission a démontré que seuls 17 % des programmes étaient initialement consacrés au financement direct de la transition écologique et que les critères d’éco-conditionnalité restaient variables selon les projets.

De plus, de nombreux redéploiements sur les crédits des PIA ont été opérés au détriment de la transition écologique et au profit de secteurs, comme la défense, qui ont besoin de crédits budgétaires immédiats.

C’est pourquoi je propose également l’amendement n321 qui vise à ce que le Parlement suive plus facilement le financement de la transition écologique par les programmes d’investissements d’avenir. Cette précision nous semble d’autant plus essentielle que 60 % des crédits du PIA 3 sont censés bénéficier à la transition écologique.

J’ai bien entendu les propos du rapporteur.

Je suis prête à retirer l’amendement n321, au bénéfice de l’amendement du Gouvernement, qui poursuit la même préoccupation que le nôtre. Tous deux tendent à permettre au Parlement de suivre le financement du développement durable, plus précisément de la transition écologique, dans les programmes des investissements d’avenir.

En revanche, je maintiens l’amendement n320, qui ne coïncide pas tout à fait avec celui du Gouvernement. La motivation devant le Parlement des redéploiements effectués nous semble essentielle.

(L’amendement n321 est retiré.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je comprends les motivations de Mme Sas, issues d’un travail qu’elle a évoqué, mais je l’invite à se reporter à l’amendement n416, qui vient d’être adopté. En le présentant, j’aurais dû préciser que cet amendement n416 va au-devant du souhait exprimé dans l’amendement n320. Notre amendement propose en effet d’informer le Parlement des redéploiements.

Quant à l’amendement n321, il est effectivement satisfait par l’amendement n415.

M. le président. Compte tenu de ces explications, madame Sas, souhaitez-vous maintenir l’amendement n320 ?

Mme Eva Sas. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n320 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n415.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je viens de le présenter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Guillaume Bachelay, rapporteur spécial. Favorable.

(L’amendement n415 est adopté.)

(L’article 56, amendé, est adopté.)

Compte d’affectation spéciale

« Participation de la France au désendettement de la Grèce » (état D)

M. le président. J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce », inscrits à l’état D.

(Les crédits du compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » sont adoptés.)

Compte d’affectation spéciale

« Participations financières de l’État » (état D)

M. le président. J’appelle les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », inscrits à l’état D.

(Les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » sont adoptés.)

Compte de concours financiers

« Avances à divers services de l’État

ou organismes gérant des services publics » (état D)

M. le président. J’appelle les crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », inscrits à l’état D.

(Les crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics » sont adoptés.)

M. le président. La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

8

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2017 : examen des crédits de la mission « Égalité des territoires et logement ».

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures vingt.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly