Application de la loi du 19 janvier 2000
relative à la réduction négociée du temps de travail

Communication à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales
le 28 juin 2000

M. Gaëtan GORCE, rapporteur,
Député de la Nièvre

Introduction

La présente communication intervient seulement cinq mois après le vote de la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail. Pour autant de nombreux éléments sont intervenus depuis lors. L’ensemble des décrets d’application était publié au 23 février assurant une mise en œuvre rapide.

Le processus de réduction généralisée du temps de travail a débuté avec l’adoption de la loi du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation à la réduction du temps de travail. La " deuxième loi 35 heures " ne l’a pas abrogée mais complétée, approfondie et amplifiée.

Les entreprises de moins de vingt salariés continuent d’ailleurs de conclure des accords sur cette première base juridique, soit qu’elles acceptent de souscrire des engagements quantifiés en termes d’emplois (au minimum 6 % de créations d’emplois), soit qu’elles souhaitent devancer l’obligation légale de passer à 35 heures en procédant à la réduction du temps de travail par étapes d’ici le 1er janvier 2002, soit encore qu’elles se créent à 35 heures en acceptant de verser à leurs salariés une rémunération équivalant à 169 fois le SMIC horaire. Elles représentent d’ailleurs près de 13.000 accords, soit près de 40 % du total.

La présente communication ne peut donc se cantonner au seul bilan de la deuxième loi sur la réduction du temps de travail. On s’efforcera par conséquent, dans un premier temps, de rappeler les conditions d’entrée en vigueur de la loi du 19 janvier 2000, et dans un second temps de dresser un bilan de la réduction généralisée du temps de travail mise en œuvre par les lois des 13 juin 1998 et 19 janvier 2000.

I – La loi est entrée en vigueur dans des conditions juridiques et de délais très satisfaisantes.

Après l’examen du Conseil constitutionnel saisi par les parlementaires de l’opposition, la deuxième loi sur les 35 heures a pu être publiée au Journal officiel. Plusieurs décrets d’application et une circulaire d’application ont ensuite été publiés et ont permis aux différents acteurs sociaux de se doter de l’ensemble des outils nécessaires à des négociations sérieuses et complètes.

1. La décision du Conseil constitutionnel n’a pas remis en cause la démarche de généralisation des 35 heures.

La décision du Conseil constitutionnel du 13 janvier 2000 a confirmé la validité de la dynamique impulsée il y a plus de deux ans, dynamique qui repose sur l’intervention du législateur pour réduire la durée du travail en s’appuyant sur les enseignements et la dynamique de la négociation. Le Conseil a d’ailleurs observé que la loi, loin de contraindre la négociation entre partenaires sociaux, la " facilite par l’édiction de nouvelles procédures d’accord collectif ".

Dans sa décision, le Conseil a rejeté la thèse invoquée par les requérants de l’inégalité entre entreprises. Il en résulte que l’allégement de cotisations sociales patronales mis en place par la loi peut légitimement être réservé aux entreprises qui s’engagent dans une démarche négociée de réduction effective du temps de travail à 35 heures, négociée donc respectueuse des intérêts des salariés et créatrice d’emplois. De même, le juge constitutionnel a rejeté la thèse de l’inégalité entre salariés rémunérés au SMIC.

Il convient, enfin, de souligner que le Conseil n’a annulé aucun des 37 articles qui lui étaient soumis. La censure partielle de plusieurs d’entre eux et l’interprétation faite de certaines dispositions n’ont remis en cause ni l’équilibre du texte, ni son application qui a pu se faire dans de bonnes conditions depuis le 1er février.

Le Conseil constitutionnel n’a déclaré non conformes à la Constitution que quatre séries de dispositions. Il a rejeté les autres griefs dont il était saisi et n’en a soulevé aucun d’office.

·  La démarche poursuivie par le Gouvernement et consistant à faire confiance à la négociation collective pour mettre en œuvre la réduction du temps de travail a été totalement validée par le Conseil. Une question se posait : celle de la sécurisation juridique des accords collectifs de branche ou d’entreprise conclus à la suite de la première loi du 13 juin 1998. Le Conseil a estimé que, compte tenu du principe de liberté contractuelle des partenaires sociaux, protégé par l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et l’alinéa huit du préambule de la Constitution de 1946, le législateur ne pouvait " dans les circonstances particulières de l’espèce " remettre en cause le contenu des accords collectifs conclus sous l’empire de la loi du 13 juin 1998 que pour un " motif d’intérêt général suffisant ".

Or, certaines dispositions introduites par le projet de loi dans le code du travail modifiaient ce dernier dans un sens contrariant l’application de clauses substantielles figurant dans plusieurs accords collectifs " alors que ces clauses n’étaient contraires à aucune disposition législative en vigueur lors de leur conclusion et ne méconnaissaient pas les conséquences prévisibles de la réduction du temps de travail décidée par le législateur en 1998. " Le Conseil a, par conséquent, déclaré non conformes à la Constitution les derniers mots de l’article 28-II de la loi qui ne laissait aux clauses de ces accords contraires à la seconde loi qu’un délai de survie d’un an.

Ainsi, à l’exception notable des stipulations sur les heures supplémentaires et le repos compensateur obligatoire devenues contraires aux dispositions de la seconde loi, et qui seront inopposables aux salariés, tous les accords de branche et d’entreprise conclus sur le fondement de la loi du 13 juin 1998 continueront de produire leurs effets jusqu’à leur terme.

Pour des motifs analogues, le Conseil constitutionnel a déclaré non conforme à la Constitution les mots " et, en tout état de cause, une durée annuelle de 1600 heures " figurant à l’article 8-V de la loi. Ainsi, les accords de modulation applicables à la date de la publication de la deuxième loi et prévoyant un volume d’heures annuel d’heures de travail supérieur à 1600 heures demeureront en vigueur. L’effet de cette censure a cependant été limité par la confirmation du principe selon lequel le respect du seuil de 1 600 heures conditionnait le bénéfice des allégements de cotisations.

Ont également été censurées les dispositions de l’article 17-I qui limitait à trois ans au maximum l’application des clauses relatives à la formation négociées postérieurement à l’entrée en vigueur de la première loi du 13 juin 1998. Les clauses portant sur le co-investissement formation négociées postérieurement à la loi du 13 juin 1998 continueront de produire leurs effets jusqu’à leur terme, quand bien même elles excluraient toute action de formation du temps de travail effectif.

·  Le Conseil constitutionnel n’a pas nullement remis en cause les nouvelles règles applicables à la taxation et au contingent des heures supplémentaires. Les seules dispositions annulées par le Conseil constitutionnel ont été celles figurant à l’article 5 de la loi portant sur la contribution de 10 % qui avait été instituée pour les quatre premières heures supplémentaires (de la 36ème à la 39ème). Ces dispositions instituaient un régime de rémunération et de taxation différent des quatre premières heures supplémentaires selon que le salarié était employé dans une entreprise passée aux 35 heures ou en dessous (bonification de 10 % en régime transitoire, de 25 % en régime définitif) ou dans une autre entreprise (contribution de 10 % en régime transitoire, bonification de 15 % et contribution de 10  en régime définitif).

Ces mesures aboutissaient, selon le Conseil constitutionnel, à une " différence de traitement qui reposait sur une circonstance étrangère à la volonté comme au comportement individuel du salarié ", ce qui a été jugé contraire au principe d’égalité.

La déclaration de non-conformité prononcée par le Conseil a pour effet de généraliser la bonification à tous les salariés et de supprimer la contribution au titre des quatre premières heures supplémentaires que ce soit dans le régime transitoire ou dans le régime définitif. Il en résulte que les salariés bénéficient d’une bonification de 10 % sous forme de repos sauf si un accord collectif a prévu que la bonification prenne la forme d’une majoration de salaire au titre de chacune des quatre premières heures supplémentaires au cours de la période transitoire, et ce, quelle que soit la durée collective applicable dans l’entreprise. Cette bonification passera, pour tous les salariés, à 25 % au terme de la période de transition. Par ailleurs, il faut signaler que le Conseil constitutionnel a annulé, en toute logique, les dispositions qui prévoyaient que la contribution ne serait pas due en cas de repos compensateur à hauteur de 125 %.

·  Ce que beaucoup d’observateurs ont appelé l’" amendement Michelin " (figurant à l’article 1er–IV de la loi) faisait de la conclusion d’un accord de réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires ou 1600 heures annuelles ou, à défaut, de l’engagement de négociations sérieuses et loyales tendant à la conclusion d’un tel accord, un préalable à la présentation d’un plan social. Cette disposition a été jugée non conforme à la Constitution. Le Conseil a en effet considéré qu’" en instituant une obligation préalable à l’établissement d’un plan social, sans préciser les effets de son inobservation et, en particulier, en laissant aux autorités administratives et juridictionnelles le soin de déterminer si cette obligation est une condition de validité du plan social, et si son inobservation rend nulles et de nul effet les procédures de licenciements subséquentes, le législateur n’a pas pleinement exercé sa compétence. "

Le Conseil constitutionnel a également considéré que " la préoccupation des auteurs de cet amendement était d’ores et déjà prise en compte par l’article L. 321-4-1 du code du travail qui fait des mesures d’aménagement et de réduction du temps de travail un volet important du plan social. "

Il convient aujourd’hui de relever l’existence d’un problème d’application de la loi suite à la décision du Conseil constitutionnel qui n’a invalidé que de façon incomplète le dispositif de l’" amendement Michelin ". Une disposition tout à fait liée au mécanisme proposé par l’" amendement Michelin " dans l’esprit du législateur n’a malencontreusement pas fait l’objet, en effet, de la même invalidation, comme cela aurait été logique.

Il faut rappeler que les auteurs de l’amendement avaient souhaité exclure du dispositif les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire visées à l’article L. 321-9 du code du travail, car ces entreprises ne sont manifestement plus en mesure de sauvegarder leurs activités et l’emploi même en mettant en œuvre une réduction du temps de travail de leurs salariés. Il était donc logique d’exonérer ces entreprises rencontrant de grandes difficultés de survie de cette obligation. Le VI de l’article 1er avait permis cette exclusion du dispositif principal situé au IV de l’article 1er.

Le fait que le Conseil constitutionnel n’ait invalidé que le IV de l’article 1er , et non le VI qui était pourtant directement lié d’après les débats parlementaires à la précédente disposition, pose aujourd’hui une difficulté importante puisque, de par la loi telle qu’elle a été promulguée, les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire se verraient désormais exclues de l’obligation visée au deuxième alinéa de l’article L. 321-4-1 qui prévoit que " la procédure de licenciement est nulle et de nul effet tant qu’un plan visant au reclassement de salariés s’intégrant au plan social n’est pas présenté par l’employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés. "

L’intention du législateur était pourtant claire : le dispositif de l’" amendement Michelin " – qui aurait dû être davantage précisé pour ne pas être invalidé par le Conseil constitutionnel – devait s’appliquer à toutes les entreprises sauf à celles en redressement ou en liquidation judiciaire visées à l’article L. 321-9 qui se trouvaient exonérées de l’obligation de passer aux 35 heures avant de présenter un plan social, mais en aucun cas de l’obligation d’établir un plan social. Il n’a jamais été envisagé par la Représentation nationale d’insérer dans le code du travail une disposition permettant de revenir sur le droit applicable antérieurement à la deuxième loi sur les 35 heures en matière de nécessité d’élaboration des plans sociaux ou des plans de reclassement. Le législateur n’a aucunement souhaité appauvrir les dispositions de l’article L. 321-4-1 qui impose de façon tout à fait logique que toutes les entreprises, qu’elles soient ou non en redressement ou en liquidation judiciaire, doivent se conformer à l’obligation d’élaborer un plan social complet, lorsqu’elles emploient au moins cinquante salariés et que le nombre de licenciements est au moins égal à dix dans une même période de trente jours.

L’invalidation partielle par le Conseil constitutionnel du dispositif introduit dans le deuxième projet de loi sur les 35 heures n’est donc pas sans conséquences juridiques fâcheuses. Cependant, les juges pourront en cas de contentieux se référer aux débats parlementaires qui éclairent bien la volonté du législateur à ce sujet.

·  Enfin, une dernière disposition invalidée concerne le dernier alinéa de l’article 32-II de la loi, qui avait pour objet d’exclure certains salariés à temps partiel du bénéfice de la garantie mensuelle de salaire prévue pour les salariés payés au SMIC ayant réduit leur temps de travail. Cette exclusion visait les salariés employés à temps partiel à la date de la réduction du temps de travail, occupés sur un emploi équivalent à celui occupé par un salarié bénéficiant de la garantie, et choisissant de maintenir ou d’accroître leur durée du travail.

Si le Conseil constitutionnel a reconnu la légitimité de la garantie instituée par la loi, il a censuré l’exclusion de ces salariés en considérant que puisque la logique de garantie salariale avait été retenue, elle ne pouvait souffrir aucune exception. Selon le Conseil, le législateur " a établi une différence de traitement sans rapport direct avec l’objectif qu’il s’était fixé. " Ainsi les salariés déjà à temps partiel qui choisissent de maintenir ou d’augmenter leur durée du travail à l’occasion du passage aux 35 heures pourront bénéficier, à due proportion, de la garantie prévue par l’article 32 au profit des salariés payés au SMIC.

2. La publication des décrets et de la circulaire d’application dans des délais raisonnables a permis aux différents acteurs de disposer rapidement des outils indispensables à une négociation sérieuse.

La loi est entrée en vigueur pour le 1er février 2000 mais plusieurs mesures nécessitaient l’édiction de décrets pour pouvoir être appliquées. La liste de ces décrets, au nombre de quatorze, figure en annexe. Notons que l’ensemble de ces décrets ont été pris entre le 27 janvier et le 23 février 2000. Une première circulaire, provisoire, a été publiée le 3 février. C’est le 6 mars que le ministère de l’emploi et de la solidarité a diffusé la circulaire d’application définitive. Ce document relativement volumineux, présenté sous la forme de 46 fiches thématiques explicatives, comporte divers exemples chiffrés et des tableaux pédagogiques. On peut se féliciter de ce que cette circulaire ait adopté une approche résolument pédagogique du dispositif légal. Quelques clarifications utiles ont ainsi été apportées et permettent de consolider encore la compréhension qui sera faite par les acteurs du contenu de la loi.

S’agissant des temps de pause et de restauration, la circulaire a par exemple rappelé qu’ils ne sauraient être a priori considérés comme du temps de travail effectif. Il n’en est autrement que si, durant ces temps, le salarié reste à la disposition de l’employeur et ne peut vaquer à des occupations personnelles.

A propos de la modulation, la circulaire a explicité la notion de " calendriers individualisés " qui n’institue pas à proprement parler une individualisation de la modulation. Cette modalité permet simplement, au sein d’une équipe occupée selon la même durée collective, de faire travailler les salariés selon des horaires différents. Comme l’a indiqué la circulaire, " les périodes hautes et basses seront les mêmes pour tous les salariés relevant de la même unité de travail, mais chacun pourra être occupé selon un horaire individuel. "

La circulaire a également élargi la définition des cadres occupés selon un horaire collectif, qui peuvent également être entendus selon ce document, comme " ceux dont le rythme de travail épouse celui de l’horaire collectif sans s’identifier exactement ou en permanence à celui-ci, c’est-à-dire des cadres qui, au-delà de l’horaire collectif, sont amenés à effectuer des heures supplémentaires en nombre limité pour permettre le passage de consignes, la rédaction de rapports d’activité ou encore la préparation du travail du ou des jours suivants. "

On peut relever que cette lecture de la loi tend à favoriser un élargissement de la catégorie des cadres ayant vocation à bénéficier de la même réduction du temps de travail que celle applicable aux autres salariés. Cette démarche apparaît tout à fait en phase avec le souci des députés membres de la majorité qui avaient exprimé lors des débats à l’Assemblée nationale le souhait que les cadres ne soient en rien exclus de la réduction du temps de travail.

S’agissant des cadres en général, on peut noter que la circulaire est allée nettement au-delà du texte de la loi en précisant qu’en l’absence de convention collective de branche applicable au secteur concerné, l’entreprise peut se référer à la convention collective d’une branche connexe ou comparable, ce qui constitue une prise de position audacieuse de la part du ministère.

D’une manière générale, on peut relever que la question des cadres fait souvent l’objet, depuis l’entrée en vigueur de la deuxième loi, d’avenants aux accords collectifs précédemment signés. Il est vrai que bon nombre de négociateurs ont souhaité intégrer dans leurs accords certaines des dispositions novatrices prévues par la loi du 19 janvier 2000 sur le personnel d’encadrement.

Une autre prise de position a enfin été prise en matière d’astreinte. Rappelons que, d’après l’article 4 de la loi (qui a créé un article L. 212-4 bis dans le code du travail), l’astreinte se définit comme " la période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise, la durée de cette intervention étant considéré comme un temps de travail effectif ". Notons que les astreintes sont mises en place par accord de branche ou d’entreprise ; à défaut, l’employeur doit en informer le comité d’entreprise ou les délégués du personnel, ou lorsque ces institutions n’existent pas, l’inspecteur du travail.

La circulaire a abordé la question difficile de l’articulation entre le temps d’astreinte et les temps de repos quotidiens (les 11 heures de repos consécutives) et hebdomadaires (les 36 heures de repos consécutives). Il convient à ce propos de rappeler que, selon la jurisprudence, si l’astreinte ne constitue pas du travail effectif, elle n’est pas non plus du repos. La question qui se pose, dès lors, est de savoir si un salarié peut se trouver en position d’astreinte après avoir achevé une période de travail sans qu’il y ait infraction à la réglementation des repos. La circulaire propose une solution assez nette en considérant que " le salarié placé en position d’astreinte sans réaliser d’intervention ne se trouve pas placé dans une position permettant d’analyser le temps de l’astreinte comme du temps de travail effectif. Il en résulte que la position d’astreinte sans intervention durant une période de repos ne constitue pas en tant que telle une infraction aux règles relatives au repos quotidien (L. 220-1) ou au repos hebdomadaire (L. 221-4). "

La circulaire a toutefois tempéré cette prise de position – qui ne saurait d’ailleurs lier le juge – par un avertissement : un même salarié ne saurait être systématiquement placé en situation d’astreinte durant des périodes de repos quotidiens ou hebdomadaires. De telles pratiques donneraient en effet lieu à signalement auprès des services de l’administration centrale.

II – La dynamique de négociation se poursuit à un rythme soutenu.

1. Bilan depuis le 13 juin 1998 : un succès confirmé

Il faut commencer par un constat : au 14 juin 2000, près d’un salarié sur deux des entreprises de plus de vingt salariés – passées aux 35 heures depuis le 1er janvier dernier – est concerné par un accord de réduction du temps de travail, soit 3,6 millions de salariés.

Les 35 heures ont de façon indéniable provoqué un renouveau du dialogue social. Le bilan 1999 de la négociation de branche semble faire ressortir une certaine stabilité de celle-ci (733 textes en 1999 contre 741 en 1998). Cette apparente atonie s’explique par la diminution du nombre d’avenants salariaux et ne doit pas dissimuler le changement qualitatif de la négociation de branche en 1999. 147 textes portant sur la réduction, l’aménagement du temps de travail et l’emploi ont d’ores et déjà été conclus (sur 218 branches nationales), couvrant 10,6 millions de salariés, 113 ont été étendus qui concernent 9,1 millions de salariés.

Plus flagrant encore est le dynamisme de la négociation d’entreprise. Le nombre des accords conclus en 1999 a plus que doublé par rapport à 1998. Les accords sur le temps de travail ont quadruplé, les accords spécifiques de réduction du temps de travail ont été multipliés par sept.

33 644 accords d’entreprise de réduction du temps de travail ont été signés depuis le 13 juin 1998, dont près de 5.000 depuis le 19 janvier dernier, signe incontestable du dynamisme impulsé au dialogue social : on rappellera à titre exemple que les accords de réduction du temps de travail conclus sur le fondement de la " loi Robien " entre juin 1996 et juin 1997 étaient au nombre de 523.

Ces accords ont permis de créer (plus de 31 000 accords dits offensifs) ou préserver (un peu moins de 2 000 accords dits défensifs) 203 633 emplois. Il arrive que ces chiffres soient contestés. La croissance serait seule responsable de la réduction du chômage. Comment expliquer que le chômage ait reculé sous le seul effet de croissance, faiblement créatrice d’emplois depuis trois décennies, de 12,6 % de la population active en juin 1997 à 9,8 % aujourd’hui et qu’il ait reculé de près de 17 % en un an ? La réduction du temps de travail joue de toute évidence un rôle dans la réduction quantitative du chômage, mais aussi dans l’enrichissement de la croissance en emplois : elle est en effet un moment de réflexion sur l’organisation du travail et contribue ainsi à son amélioration.

La mise en place des 35 heures a profondément modifié l’organisation des entreprises. Ce phénomène constaté empiriquement dans de très nombreuses entreprises, a été relevé par un récent sondage CSA. D’après cette enquête, plus de huit entreprises interrogées sur dix contre quatre sur dix en 1999 sont aujourd’hui engagées dans le processus de la réduction du temps de travail soit parce qu’elles ont déjà mis en place les 35 heures soit parce qu’elles les négocient actuellement. Une très faible minorité (3 %) n’auraient pas l’intention de mettre en place les 35 heures préférant recourir aux heures supplémentaires.

Le recours aux nombreuses possibilités d’aménagement du temps de travail modifie le cadre collectif des horaires de travail traditionnel : la réduction du temps de travail peut être quotidienne, hebdomadaire ou prise sous forme de jours de repos. L’usage de calendriers individuels élaborés pour des périodes longues (plusieurs mois voire l’année entière) en témoigne également.

Deux autres effets de la réduction du temps de travail peuvent difficilement être contestés. Tout d’abord, l’allégement du coût du travail pour les salaires les moins élevés a permis aux entreprises de réduire la durée du temps de travail sans affaiblir leur compétitivité. En second lieu, les salariés concernés sont satisfaits : à 81 % (d’après une enquête SOFRES de mai dernier), ils jugent la manière dont la réduction du temps de travail a été mise en œuvre dans leur entreprise positive ; à 83 % ils ne souhaitent pas revenir à la situation antérieure. Il est à noter que les cadres ne sont en rien les perdants de la réduction du temps de travail, près de deux tiers d’entre eux bénéficient des mêmes modalités d’application que les autres salariés.

2. Des débuts prometteurs pour la loi du 19 janvier 2000

Il est pour l’heure difficile d’opérer des distinctions entre les accords conclus sur le fondement de la première loi et ceux conclus sur le fondement de la deuxième loi, et plus encore parmi ceux signés par un ou des syndicats majoritaires et ceux ayant donné lieu à consultation des salariés.

Il est cependant possible de constater que le rythme de signatures reste soutenu et d’anticiper que la part des salariés couverts par une convention ou un accord de branche étendus devrait s’accroître (16 % des accords sont actuellement des accès directs) sous le double effet de l’ouverture du droit à allégement par la deuxième loi sur les 35 heures (plus de 110 conventions ou accords étendus ouvrent accès direct au nouvel allégement 35 heures contre seulement 66 qui ouvrent droit à l’accès direct aux aides incitatives de la première loi) et du temps nécessaire à la négociation d’accords d’entreprises de qualité.

La deuxième loi sur les 35 heures a en effet eu le souci de prolonger et renforcer la démarche de qualité initiée par la loi du 13 juin 1998. Il s’agit en effet de profiter de la négociation sur la réduction du temps de travail pour repenser l’organisation du travail.

C’est également dans cet esprit que les conditions de recours à l’appui-conseil ont été précisées par circulaire et que son accès reste ouvert après la conclusion d’un accord de réduction du temps de travail. 19.000 conventions d’appui-conseil avaient été signées avant le 1er février 2000, plus de 3.300 l’ont été entre cette date et le 1er mai 2000.

Dès les débats préparatoires de la deuxième loi, il avait été précisé qu’une négociation de qualité nécessitait environ six mois de négociation. Ce n’est donc qu’à compter du mois prochain que devraient véritablement se faire sentir sur le rythme de signature des accords les effets de l’adoption de la deuxième loi. C’est du reste ce qu’a indiqué la ministre de l’emploi et de la solidarité lors de sa récente audition par la commission des affaires sociales du Sénat.

Les premières informations émanant des services en charge du recouvrement et de la gestion des cotisations de sécurité sociale incitent cependant à penser que le rythme de signature des accords conclus sur le fondement de la deuxième loi pourrait être plus rapide que prévu et pourrait impliquer d’ici la fin de l’année un réajustement des prévisions initiales, notamment sur un plan financier.

La ministre de l’emploi et de la solidarité s’est d’ailleurs exprimée en ce sens devant la commission des affaires sociales du Sénat le 14 juin dernier ainsi qu’hier lors de la séance de questions au Gouvernement à l’Assemblée nationale.

L’annulation par le Conseil constitutionnel de la contribution de 10 % sur les heures supplémentaires impliquait déjà un ajustement puisqu’elle conduisait à la disparition de 7 milliards de recettes affectées au fonds de réforme des cotisations sociales (FOREC). Outre ce besoin de financement ab initio, le rythme de signature d’accords de réduction du temps de travail plus rapide que prévu pourrait conduire à accroître légèrement le besoin de financement pour l’an 2000.

La conjoncture et la hausse des profits des entreprises permettent par un meilleur rendement des droits sur le tabac et de la contribution sociale sur les bénéfices de dégager 4,5 à 5 milliards de francs de recettes supplémentaires. Les deux ou trois milliards de francs manquants seront financés par redéploiement des crédits du ministère de l’emploi. La ministre a rappelé qu’il n’était " pas question de les financer par une hausse des cotisations salariales ou patronales ".

La question du financement pour l’avenir appelle davantage réflexion. Le succès des 35 heures, la montée en puissance de la négociation entraîneront mécaniquement une hausse des aides destinées à compenser le financement du passage à 35 heures et, au-delà, à alléger le coût du travail des entreprises.

L’amélioration induite de la situation de l’emploi, la décroissance du chômage impliquent de poser de nouveau la question de la participation de l’UNEDIC au financement des 35 heures. Elle se posait déjà du seul fait de la croissance : l’UNEDIC a appelé l’Etat à son secours lorsque la crise a creusé son déficit, il serait logique que l’UNEDIC en excédent consacre une partie de celui-ci à la prise en charge de certaines dépenses. N’y a-t-il pas une forme d’exigence morale dans la participation de l’UNEDIC au financement du passage aux 35 heures qui contribue directement à l’amélioration de ses comptes ?

ANNEXES

Annexe 1 : la liste des décrets d’application

- Décret n° 2000-69 du 27 janvier 2000 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises

- Décret n° 2000-70 du 28 janvier 2000 relatif au bulletin de paie et modifiant l’article R. 143-2 du code du travail

- Décret n° 2000-73 du 28 janvier 2000 relatif à l’allégement de cotisation prévu à l’article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale et modifiant ce code (troisième partie : décret)

- Décret n° 2000-74 du 28 janvier 2000 relatif au dispositif d’appui et d’accompagnement prévu par le XIV de l’article 19 de la loi 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail

- Décret n° 2000-81 du 31 janvier 2000 relatif au contrôle de la durée du travail et modifiant le code du travail (troisième partie : décrets)

- Décret n° 2000-82 du 31 janvier 2000 relatif au contrôle de la durée du travail et modifiant le code du travail (troisième partie : décrets)

- Décret n° 2000-83 du 31 janvier 2000 relatif au champ de l’allégement de cotisations sociales prévue par l’article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale

- Décret n° 2000-84 du 31 janvier 2000 relatif à l’incitation financière à la réduction du temps de travail prévue par l’article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail, modifié par la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail et applicable aux entreprises de 20 salariés au moins et aux entreprises nouvelles

- Décret n° 2000-89 du 2 février 2000 relatif à l’application de l’allégement de cotisation prévu à ‘article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale dans certains régimes spéciaux de sécurité sociale

- Décret n° 2000-113 du 9 février 2000 relatif à la consultation des salariés instaurée par l’article 19 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail

- Décret n° 2000-118 du 14 février 2000 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport public urbain de voyageurs

- Décret n° 2000-140 du 21 février 2000 relatif aux pénalités concernant l’application de l’article 32 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail et des articles L. 212-4 bis, L. 212-4-3, L. 212-4-4, L. 212-4-6, L. 212-4-13 et L. 212-15-3 du code du travail et modifiant ce code (deuxième partie : décrets en Conseil d’Etat)

- Décret n° 2000-147 du 23 février 2000 relatif au contrôle de l’exécution des engagements auxquels est subordonnée l’aide prévue à l’article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 modifiée d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail

- Décret n° 2000-150 du 23 février 2000 relatif aux conditions de suspension et de suppression du bénéfice de l’allégement de cotisations sociales prévu par l’article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale

Annexe 2 : Quelques exemples d’accords collectifs signés en vertu des dispositions novatrices de la deuxième loi

Les cas d’accords innovants, équilibrés et complets signés depuis l’entrée en vigueur de la deuxième loi sont bien évidemment innombrables. Quelques uns peuvent être cités afin d’illustrer concrètement l’idée maintes fois développée au cours des débats parlementaires selon laquelle des accords signés en vertu de la première loi allaient pouvoir être aisément adaptés voire améliorés grâce aux dispositions de la deuxième loi. De même, de très nombreux accords intéressants et équilibrés ont été signés depuis le 1er février 2000 pour la première fois dans des entreprises ou des branches qui n’avaient pas anticipé le passage à la nouvelle durée légale du travail.

1. L’avenant à l’accord signé dans le secteur de la sidérurgie : des règles particulièrement souples pour les cadres

Un avenant à l’accord baptisé " Cap 2010 " conclu dans le groupe sidérurgique Usinor le 18 octobre 1999 a été signé le 21 avril 2000 par la direction du groupe et les trois syndicats CFE-CGC, CFTC et FO et porte sur les conventions de forfaits annuels des cadres. Deux forfaits annuels, l’un de 212 jours de travail par an et l’autre de 1687 heures par an, déjà prévus par l’accord initial, ont été maintenus.

Les forfaits en nombre de jours travaillés par an concernent des ingénieurs et des cadres. Il est prévu que des salariés de niveau V métallurgie et exceptionnellement d’autres salariés du niveau V " en raison de leur autonomie et du caractère particulier des missions confiées " se verront proposer de relever du statut des cadres et pourront ainsi opter pour le forfait en jours. Quant au forfait de 1687 heures (37 heures en moyenne hebdomadaire), il est ouvert à certains ingénieurs et cadres ainsi qu’à des salariés de niveau V. Pour ces derniers, un changement de statut interviendra, les intéressés devenant cadres.

2. Les avenants à l’accord signé dans la métallurgie : un arrêté d’extension accompagné de quelques exclusions et réserves

Les dispositions relatives à l’organisation du travail et aux 35 heures dans la métallurgie signées le 29 janvier 2000, soit quelques jours après la promulgation de la loi, par l’UIMM et les fédérations CFE-CGC, CFTC, et FO ont été étendues par arrêté publié le 31 mars au Journal officiel. Elles résultent de deux avenants signés le 29 janvier.

Il est intéressant de noter que l’arrêté ministériel a apporté des précisions et formulé quelques réserves ; en revanche, les exclusions apparaissent peu nombreuses et concernent notamment des points relatifs aux heures complémentaires ou à la modulation. Les réserves qui ont été établies concernent notamment la mise en place des forfaits pour les cadres. L’arrêté note que la qualité de cadre n’est pas suffisante à elle seule à fonder valablement la conclusion d’une convention de forfait ; le bien-fondé de l’établissement d’un forfait doit reposer sur une " analyse objective des fonctions réellement exercées, indépendamment de la volonté manifestée par le salarié. "

3. L’accord signé dans l’industrie textile : des dispositions encore plus favorables aux salariés en matière de majoration des heures supplémentaires

L’Union des industries textiles (UIT) et les fédérations de la CFE-CGC, de la CFTC, de la CGT et de FO ont signé le 3 mars 2000 un accord définissant le régime des heures supplémentaires suite au vote de la deuxième loi. Ce texte complète l’accord conclu dès octobre 1998 à la suite de l’adoption de la première loi sur les 35 heures.

Selon ce nouvel accord, le taux de bonification pour les quatre premières heures (de la 36ème à la 39ème heure) sera celui fixé par le législateur (soit 10 % qui doivent être portés à 25 % en 2001). Toutefois, au-delà des 90 heures supplémentaires par an, c’est-à-dire à partir de la 91ème heure supplémentaire par an, le taux de majoration est porté conventionnellement dès le 1er février 2000 de 10 % à 25 %, ce qui constitue une anticipation par rapport au régime légal tout à fait favorable aux salariés.

4. L’avenant à l’accord sur les 35 heures chez Renault SA

Renault SA a conclu le 18 février 2000 un avenant de son accord du 16 avril 1999 sur les 35 heures. L’avenant a été signé par les mêmes syndicats que l’accord initial, à savoir la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC, le CSL/SIR et FO, porte sur le temps de travail des cadres, le capital temps collectif et le régime des heures supplémentaires.

Le décompte du temps de travail en jours est généralisé à l’ensemble des ingénieurs et cadres, " compte tenu de l’autonomie et des responsabilités dont disposent chez Renault les ingénieurs et les cadres et des termes de la loi du 19 janvier 2000 ". Des avenants aux contrats de travail devront donc être signés par les intéressés. En contrepartie, des " plans de progrès " vont être développés avec pour objectif une amélioration de l’organisation et une répartition équilibrée de la charge de travail de ces salariés.

Il convient de noter que le capital temps collectif Renault qui vise à éviter le recours au chômage partiel a été encadré par des plafonds légaux (cinq jours par an et 15 jours dans un cadre pluriannuel) contenus à l’article 16 de la loi du 19 janvier 2000.

5. Un accord d’entreprise équilibré signé dans un grand magasin

Le 9 juin dernier, la direction du Bon marché qui représente près de 1000 salariés correspondant à 800 emplois équivalent temps plein, a signé un accord d’aménagement et de réduction du temps de travail avec trois syndicats : la CFDT, la CFTC et la CGT. Effectif le 4 septembre prochain, le passage aux 35 heures devrait se traduire par la création de 20 emplois équivalents temps plein sous réserve de l’imputation dans ce chiffre du passage à temps plein de salariés travaillant actuellement entre 28 et 35 heures par semaine.

Aux termes de cet accord, les salaires seront maintenus grâce à une indemnité de compensation intégrée dans le salaire de base à partir de 2002.

Un forfait annuel de 217 jours (ce qui constitue le plafond fixé par la loi du 19 janvier 2000) est prévu pour certains cadres. Il faut noter que les modalités de réduction du temps de travail pour les employés et agents de maîtrise diffèrent selon les départements commerciaux ou fonctionnels. Dans tous les cas, il faut signaler que la modulation représente la modalité de réduction du temps de travail retenue pour faire face aux fluctuations d’activités. On peut noter que dans les départements commerciaux, l’accord prévoit une répartition des horaires différente selon trois types de semaines : celles de 32 heures sur quatre ou cinq jours, celles de 40 heures sur cinq jours et celles de 42 heures sur six jours. Le recours aux semaines très fortes est limité à neuf semaines par an tandis que le contingent d’heures supplémentaires est limité à 70 heures par an. Le personnel bénéficie de cinq jours supplémentaires de repos utilisés au choix du salarié.

La modulation du temps partiel est possible pour les salariés ayant une durée contractuelle de travail au moins égale à 24 heures par semaine.

La pause de 15 minutes par période de travail de quatre heures, portée à 20 minutes par périodes de six heures est incluse dans le temps de travail effectif. Le temps d’habillage y est également inclus pour les salariés dont la tenue constitue une protection mais pas pour les autres personnels portant une tenue de travail ; ceux-ci sont " libres de circuler à l’intérieur de l’entreprise vêtus de leur tenue. "

6. Un exemple d’accord complet et favorable aux salariés grâce à des négociations fructueuses dans un groupe de presse

La direction d’Emap France et les quatre syndicats représentés – la CFDT, la CGT, FO et le SNJ (syndicat national des journalistes) – ont signé le 29 février 2000, un accord de réduction et d’aménagement du temps de travail s’appliquant à 900 salariés, dont 380 journalistes. Notons que la réduction du temps de travail n’entraînera pas de réduction de salaire mais s’accompagnera d’un gel des augmentations collectives pour 2000. L’accord doit permettre la création de postes supplémentaires avec au minimum l’équivalent de 31 emplois équivalents temps plein, dont 23 pour les journalistes d’ici le 31 juillet 2000.

La durée annuelle de travail a été ramenée de 1755 heures à un minimum de 1583 heures et à un maximum, dans des services recourant à la modulation, de 1600 heures. Est mis en place un décompte du temps de travail au moyen de relevés hebdomadaires en heures (système qui devra être " fiable et infalsifiable " pour reprendre les termes de l’article 1er–V de la loi, disposition issue d’un amendement défendu à l’Assemblée nationale par M. Yves Cochet).

La modulation dans des services, qui sont d’après l’accord " soumis à des contraintes fortes en termes de volume et de rythme " devra respecter une limite haute de 40 heures. Sa mise en œuvre permettra d’instaurer au moins 22 semaines de travail limitées à quatre jours de travail. Le délai de prévenance à respecter, lors de modifications du calendrier prévisionnel de travail, sera comme la loi le prévoit de sept jours ouvrés.

Une centaine de cadres, dont les directeurs de ressources humaines adjoints et les responsables de ce service, environ 40 salariés des services de la publicité et environ 80 journalistes (dont les directeurs de rédaction, les directeurs en chef et les directeurs artistiques) bénéficieront d’un forfait en nombre de jours sur l’année. La durée du travail a en effet été ramenée de 225 jours à 203 jours par an. Il faut relever que la date de prise des jours de réduction du temps de travail doit être fixée conjointement par le salarié et son supérieur hiérarchique. Le décompte des prises de jours RTT se fera mensuellement par fiche individuelle nominative. Le forfait s’accompagne d’une limitation de l’amplitude de présence sur la journée à 12 heures, pour une durée quotidienne de travail effectif de 10 heures au maximum.

Enfin, une commission paritaire de suivi de l’accord se réunira cinq fois d’ici novembre 2000 ; elle adoptera ensuite un rythme trimestriel.