Points-clés
La procédure législative comprend trois phases principales : le dépôt du texte, son examen par le Parlement et sa promulgation par le Président de la République (après une éventuelle saisine du Conseil constitutionnel pour examen de la conformité du texte à la Constitution).

L’esprit qui prévaut est la recherche d’un consensus entre les deux assemblées :

- le texte suit un mouvement de va-et-vient entre l’Assemblée nationale et le Sénat, où seuls demeurent en discussion les articles qui n’ont pas été adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées : c’est la « navette » ;

- si la navette n’aboutit pas à l’adoption d’un texte commun par les deux assemblées ou si elle prend trop de temps, le Gouvernement peut décider de recourir à une procédure de conciliation en convoquant une commission mixte paritaire composée de sept députés et sept sénateurs ; pour les propositions de loi, les présidents des deux assemblées ont également la faculté de convoquer une telle commission ; la commission mixte paritaire est chargée de rédiger un texte de compromis que le Gouvernement pourra éventuellement soumettre aux deux assemblées.

En cas d’échec de la procédure de conciliation, le Gouvernement use généralement de la possibilité qui lui est offerte de laisser le dernier mot à l’Assemblée nationale.

Dès son adoption, le texte est transmis au secrétariat général du Gouvernement qui le présente à la signature du Président de la République pour promulgation. Cependant, la promulgation peut être retardée si le Conseil constitutionnel est saisi aux fins de vérifier la conformité du texte à la Constitution (elle peut même être empêchée si le Conseil déclare le texte inconstitutionnel) ou si, exceptionnellement, le Président de la République demande une nouvelle délibération.

 

I. –    LE DÉPÔT DU TEXTE

L’initiative des lois appartient au Premier ministre ainsi qu’aux députés et aux sénateurs. Les initiatives du Premier ministre sont appelées « projets de loi », celles des parlementaires sont dénommées « propositions de loi ».

Avant son examen, tout texte doit faire l’objet d’un dépôt subordonné à plusieurs formalités préalables :

–    pour les projets, le dépôt est précédé de la consultation pour avis du Conseil d’État, agissant en ce cas comme conseil du Gouvernement et non comme juridiction administrative, suivie d’une délibération du Conseil des ministres ;

–    les propositions peuvent être déposées par un ou plusieurs députés ou par un ou plusieurs sénateurs, à la condition que leur adoption n’ait pas pour conséquence une diminution des ressources publiques ou la création ou l’aggravation d’une charge publique (article 40 de la Constitution) ; le Bureau de chaque assemblée parlementaire est chargé de vérifier la recevabilité financière des propositions de loi. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l’alinéa 5 de l’article 39 de la Constitution permet au Président d’une assemblée, sauf opposition de l’auteur, de soumettre pour avis au Conseil d’État une proposition de loi.

Les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale doivent être déposés d’abord à l’Assemblée nationale ; à l’inverse, les lois ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumises en premier lieu au Sénat (article 39, alinéa 2, de la Constitution). En dehors de ces cas, l’examen d’une loi commence indifféremment devant l’une ou l’autre assemblée.

À la suite de son dépôt, qui fait l’objet d’une publicité officielle, tout texte est imprimé et renvoyé à l’examen d’une commission permanente ou spéciale.

Les projets et les propositions comprennent deux parties :

–    l’exposé des motifs, dans lequel sont présentés les arguments de l’auteur du texte à l’appui des modifications ou des dispositions législatives nouvelles envisagées ;

–    le dispositif, rédigé en articles portant une numérotation successive ; il constitue la partie normative qui sera seule soumise à l’examen des assemblées. Chaque article a pour objet soit de supprimer ou de modifier une disposition d’une loi en vigueur, soit d’édicter une disposition législative nouvelle.

Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, les projets de loi doivent répondre à certaines conditions de présentation, qui ont été définies par la loi organique du 15 avril 2009. Au moment de leur dépôt, ils doivent ainsi être accompagnés d’une étude d’impact. Celle-ci définit les objectifs poursuivis, expose les motifs du recours à une nouvelle législation, l’état actuel du droit dans le domaine visé, l’articulation du projet avec le droit européen, évalue les conséquences économiques, financières, sociales et environnementales des dispositions du projet et les modalités d’application envisagées. Si la Conférence des présidents de l’assemblée sur le bureau de laquelle le texte a été déposé estime, dans un délai de dix jours à compter du dépôt du projet, que ces conditions de présentation ne sont pas respectées, le texte ne peut être inscrit à l’ordre du jour. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Premier ministre ou le Président de l’assemblée intéressée et statue dans un délai de huit jours.

II. –    LA NAVETTE

Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement par les deux assemblées du Parlement en vue de l’adoption d’un texte identique. Un texte adopté en termes identiques par les deux assemblées est définitif : il constitue le texte de la loi.

La procédure conduisant à l’adoption définitive d’un texte consiste en un mouvement de va-et-vient du texte entre les deux assemblées (d’où le nom de navette), chacune étant appelée à examiner et, éventuellement, à modifier le texte adopté par l’autre ; à chaque étape, seuls les articles sur lesquels demeure une divergence restent en discussion. La navette prend fin lorsqu’une assemblée adopte sans modification, pour chacun de ses articles, le texte précédemment adopté par l’autre. Chaque examen par une assemblée est appelé « lecture ».

1. –    L’EXAMEN EN PREMIÈRE LECTURE

L’examen en première lecture d’un texte déposé devant une assemblée comporte plusieurs étapes : l’examen par une commission, l’inscription à l’ordre du jour et, enfin, la discussion en séance publique au terme de laquelle le texte sera transmis à l’autre assemblée. La transmission du texte à l’autre assemblée ouvre la navette.
La procédure exposée ci-après est celle suivie à l’Assemblée nationale. Cette procédure est, dans ses grandes lignes, la même au Sénat, bien que des différences, parfois non négligeables, existent entre les deux assemblées.

a)    L’examen en commission

Une fois déposé, tout texte est renvoyé à l’examen d’une commission. Sauf constitution d’une commission spéciale – c’est-à-dire une commission constituée spécialement pour l’examen d’un projet ou d’une proposition – l’examen est effectué par l’une des huit commissions permanentes de l’Assemblée nationale (sept au Sénat).

Le renvoi des textes à l’une ou l’autre des commissions permanentes est effectué par le Président de l’Assemblée nationale en fonction de leurs compétences respectives, telles qu’elles sont définies par le Règlement de l’Assemblée. Une ou plusieurs autres commissions permanentes peuvent se saisir pour avis.

La commission saisie d’un texte (dite commission saisie au fond) désigne parmi ses membres un rapporteur chargé de présenter, au nom de celle-ci, un rapport qui sera imprimé, distribué et mis à disposition par voie électronique. Il revient en particulier au rapporteur d’entendre les représentants des différentes organisations (syndicats, associations, etc.) concernées par le texte dont il a la charge. Depuis 2019 et sauf exception (projets de loi constitutionnelle, de finances ou de financement de la sécurité sociale), les avis rendus par les commissions pour avis sont annexés au rapport de la commission saisie au fond.

Il est également admis depuis 2019 que la commission saisie au fond puisse prendre l’initiative de solliciter l’avis d’une autre commission permanente sur une partie d’un texte qui lui est soumis. La pratique veut que, dans ce cas communément qualifié de « délégation d’articles », la commission saisie au fond reprenne alors à son compte les amendements présentés par la commission saisie pour avis, afin que ceux-ci soient intégrés au texte qui servira de base à la discussion en séance publique.

Sur le fondement du dernier alinéa de l’article 39 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, et de l’article 4 bis de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, le Président d’une assemblée peut soumettre une proposition de loi au Conseil d’État, avant son examen en commission, sauf si son auteur s’y oppose.

La commission peut procéder à des auditions avant d’engager l’examen d’un texte. Les règles applicables à cet examen, qu’il s’agisse de son organisation ou de la recevabilité des amendements, sont similaires à celles prévues pour l’examen en séance plénière. La présence du Gouvernement aux travaux de la commission est de droit. À l’issue de ses travaux, la commission saisie au fond adopte un rapport qui présente ses conclusions. Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, la discussion en séance porte, sauf pour les projets de loi constitutionnelle, de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale, sur le texte adopté par la commission et non sur le texte initialement déposé ou transmis. À cet effet, la commission peut :

–    proposer un nouveau texte, intégrant les amendements des députés ou du Gouvernement acceptés par elle ;

–    adopter le texte dans sa rédaction initiale ;

–    rejeter le texte.

Si la commission ne présente pas de texte, la discussion s’engage en séance sur le texte initial.

b)    L’inscription à l’ordre du jour

Pour être discuté en séance publique, un projet ou une proposition de loi doit être inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée.

Depuis la révision du 23 juillet 2008, la Constitution prévoit un délai minimal de six semaines entre le dépôt d’un texte et sa discussion en séance (quatre semaines pour les textes transmis par l’autre assemblée). Ces délais ne s’appliquent pas pour les projets de loi de finances, de financement de la sécurité sociale ou relatifs aux états de crise. Ils ne s’appliquent pas non plus lorsque le Gouvernement a décidé d’engager la procédure accélérée (dans ce cas, un délai minimal de quinze jours est maintenu pour les seuls projets et propositions de loi organique) et que les Conférences des présidents ne s’y sont pas conjointement opposées.

Depuis la même révision, la Constitution institue aussi un partage de l’ordre du jour, qui est fixé par chaque assemblée :

–    deux semaines sur quatre sont réservées par priorité à un ordre du jour fixé par le Gouvernement. En vertu de cette priorité, le Gouvernement arrête la liste des textes qu’il veut faire figurer à l’ordre du jour et fixe l’ordre dans lequel ils seront discutés, ainsi que leur date de discussion. Pour assurer une bonne programmation des travaux, le Gouvernement informe au préalable les assemblées et notamment leurs commissions ;

–    une semaine sur quatre est réservée par priorité au contrôle de l’action du Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques ;

–    une semaine sur quatre est réservée à un ordre du jour législatif fixé par chaque assemblée ;

–    une journée par mois est consacrée à un ordre du jour réservé aux initiatives des groupes d’opposition ou minoritaires.

Aux termes de la Constitution, certains textes sont toujours prioritaires. Le Gouvernement peut ainsi faire inscrire les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale à l’ordre du jour des semaines de l’Assemblée ou des semaines de contrôle ; il peut également obtenir l’inscription des projets transmis par l’autre assemblée depuis plus de six semaines et des projets relatifs aux états de crise pendant les semaines de l’Assemblée.

Par ailleurs, la pratique montre que les domaines respectifs des semaines de contrôle et de l’Assemblée ne sont pas totalement étanches : le groupe majoritaire peut demander l’inscription de projets de loi, voire demander l’organisation d’un débat, lors de la semaine législative de l’Assemblée ; en sens inverse, les créneaux disponibles des semaines de contrôle sont parfois consacrés à un ordre du jour législatif.

c)    L’examen en séance publique

La discussion en séance publique s’articule en deux phases : la phase d’examen général et la phase d’examen détaillé. La Conférence des présidents peut organiser soit la phase d’examen général, soit l’ensemble de la discussion.

 -->    La phase d’examen général

La phase d’examen général est essentiellement une phase de présentation. Le président de séance, après avoir appelé le texte à l’ordre du jour, donne la parole au Gouvernement, représenté par le ministre concerné par la discussion, puis au rapporteur de la commission et, en cas de délégation d’articles, au rapporteur pour avis. Pour la discussion en première lecture des propositions, la parole est d’abord donnée au rapporteur. Depuis 2019, sauf décision contraire de la Conférence des présidents, la durée de l’intervention du rapporteur ne peut excéder dix minutes.

Dans cette phase d’examen peut s’intercaler la discussion d’une motion de rejet préalable, dont l’adoption, d’ailleurs exceptionnelle, a pour effet d’entraîner le rejet du texte avant même que ne s’engage son examen détaillé. Les motions de renvoi en commission et d’ajournement ont été supprimées par la révision du Règlement de 2019.

Depuis la même révision, le principe selon lequel la Conférence des présidents organise la discussion générale d’un texte en fixant sa durée globale, répartie ensuite entre les groupes politiques en tenant compte de leurs effectifs, a été abandonné. Elle attribue désormais, selon les textes, un temps de parole de cinq ou dix minutes à chaque groupe. Un député n’appartenant à aucun groupe peut s’exprimer pour une durée qui est toujours égale à cinq minutes. La Conférence des présidents conserve la possibilité de retenir une durée et un nombre d’orateurs différents pour un texte particulier.

Les députés sont inscrits dans la discussion générale par leur président de groupe et l’ordre de passage des orateurs est déterminé par le Président de l’Assemblée en respectant une alternance entre les groupes.

-->    La phase d’examen détaillé

La phase d’examen détaillé consiste dans la discussion article par article du texte.

             L’examen des articles

Les amendements peuvent être présentés par tous les participants au débat : Gouvernement, commission saisie au fond et députés à titre individuel. Pour la bonne organisation des travaux, les amendements, excepté ceux présentés par le Gouvernement ou la commission saisie au fond, doivent avoir été déposés, sauf décision contraire de la Conférence des présidents, au plus tard, à 17 heures le troisième jour ouvrable qui précède le début de l’examen du texte en séance publique (des délais spécifiques s’appliquent lors de la discussion des lois de finances). À l’exception des amendements du Gouvernement, les amendements doivent satisfaire, comme les propositions de loi, à des conditions de recevabilité financière. Ils doivent également respecter les dispositions de l’article 41 de la Constitution, c’est-à-dire relever du domaine de la loi et ne pas être contraires à une délégation accordée au Gouvernement en application de l’article 38. Tout amendement est recevable en première lecture à condition de présenter un lien, même indirect, avec le texte examiné.

Le président de séance appelle les articles dans l’ordre de leur numérotation, sauf, exceptionnellement, en cas de réserve ou de priorité. La discussion porte sur chaque article et sur tous les amendements qui s’y rapportent. Les députés peuvent tout d’abord s’inscrire, pour deux minutes, dans la discussion d’un article, dans la limite d’un orateur par groupe et d’un orateur n’appartenant à aucun groupe. Après ces interventions, le président de séance appelle les amendements. La parole est donnée à l’auteur de l’amendement, puis au rapporteur de la commission saisie au fond (ou au rapporteur pour avis lorsqu’il y a une délégation d’articles) et au ministre pour qu’ils donnent leur avis et, enfin, à deux orateurs, dont au moins un d’avis contraire. Le Règlement autorise le président de séance à ne donner la parole qu’à un seul orateur par groupe pour défendre une série d’amendements identiques, le Conseil constitutionnel ayant toutefois considéré que cette limitation ne pouvait être mise en œuvre « que pour prévenir les usages abusifs, par les députés d’un même groupe, des prises de parole sur les amendements dont ils sont les auteurs ». La durée de ces interventions autres que celle du Gouvernement ne peut excéder deux minutes.

L’ordre d’appel des amendements présente une grande importance pour le déroulement du débat, ne serait-ce que parce que l’adoption d’une solution entraîne automatiquement l’élimination des solutions concurrentes. Les principes de base de la mise en discussion des amendements conduisent à aller du général au particulier : une suppression d’article est appelée avant la suppression d’un alinéa, la suppression d’un alinéa avant celle d’une phrase incluse dans cet alinéa, etc. Lorsque plusieurs amendements concernent la même partie du texte, ils sont appelés en fonction de leur plus ou moins grand éloignement du texte initial. Les amendements sont mis en discussion puis aux voix, un par un, en suivant l’ordre découlant de ces principes.

Depuis 2019, les députés ont la possibilité de déposer des contributions écrites pour exprimer leur avis sur un texte inscrit à l’ordre du jour, l’un de ses articles ou un amendement. Les contributions écrites, qui présentent un caractère personnel, sont annexées au compte rendu des débats. Le nombre maximal de contributions écrites pouvant être déposées par session par chaque député est arrêté par la Conférence des présidents (il est actuellement fixé à cinq).

         Les votes

Après l’examen du dernier amendement présenté sur un article, l’Assemblée vote sur cet article, éventuellement modifié, la discussion du texte se poursuivant dans les mêmes conditions, article par article, jusqu’au dernier d’entre eux.

À l’issue de l’examen des articles, il peut être procédé à une seconde délibération de tout ou partie du texte, celle-ci étant de droit à la demande du Gouvernement ou de la commission. Le président de séance met ensuite aux voix l’ensemble du texte, éventuellement modifié par les amendements précédemment adoptés. Ce dernier vote peut être précédé d’explications de vote, qui sont accordées à raison d’un orateur par groupe, pour une durée de cinq minutes.

Les votes ont lieu normalement à main levée. En cas de doute sur le résultat d’un vote à main levée, le président de séance procède au vote par assis et levé. Dans ces deux cas, aucune précision sur le sens des votes des députés présents n’apparaît au compte rendu des débats. Il en va différemment lorsqu’il est procédé par scrutin public, lequel peut être demandé par le Gouvernement, le président ou le rapporteur de la commission, les présidents des groupes ou leurs représentants ainsi que le président de séance. Pour certains textes importants, la Conférence des présidents décide elle-même le scrutin public, en fixant sa date à un moment favorable à la participation de l’ensemble des députés. Ce type de scrutin est appelé « vote solennel ». Depuis 2019, la Conférence des présidents a la possibilité de dissocier les explications de vote – qui se déroulent alors à la fin de l’examen des articles – du vote par scrutin public sur l’ensemble du texte, qui est en général reporté au mardi, après les questions au Gouvernement.

         Le « temps législatif programmé »

Depuis la réforme du Règlement de l’Assemblée nationale du 27 mai 2009, la Conférence des présidents peut également, sous certaines conditions, décider d’appliquer à un texte la procédure du « temps législatif programmé ». Cette possibilité a été ouverte par la loi organique du 15 avril 2009, sur le fondement de l’article 44 de la Constitution dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Il s’agit de fixer une durée maximale pour l’examen de l’ensemble d’un texte, 60 % du temps étant attribué aux groupes d’opposition puis réparti entre eux à proportion de leur effectif. Le reste du temps est réparti de la même façon entre les autres groupes. Les non-inscrits disposent d’un temps de parole spécifique.

Toutes les interventions des députés sont décomptées du temps de leur groupe, à l’exception de celles des présidents de groupe – qui disposent à titre personnel d’un temps personnel d’une heure – , des rapporteurs sur les dispositions qui sont de leur compétence, et du président de la commission saisie au fond. Les présidents de groupe ont la possibilité de rétrocéder la moitié de leur temps de parole à un député de leur groupe, désigné pour la durée de la lecture d’un texte.

Les présidents de groupe peuvent obtenir, de droit, qu’une durée minimale soit consacrée à un texte examiné selon cette procédure, et, une fois par session, ils peuvent obtenir un allongement exceptionnel de cette durée dans une limite maximale. Ces durées minimale et maximale ont été fixées respectivement à vingt-cinq et quarante heures par la Conférence des présidents, qui peut à tout moment augmenter la durée prévue pour l’examen d’un texte, si elle constate que celle-ci est insuffisante.

Un président de groupe peut en outre obtenir de droit, une fois au cours des douze mois qui suivent le début d’une session ordinaire, un allongement du temps attribué à son seul groupe (sur la base du barème de 40 heures actuellement).

Lorsque le « temps législatif programmé » s’applique, la durée de la discussion générale n’est pas limitée et dépend du temps que les différents groupes souhaitent lui consacrer. Le temps de parole sur chaque article, comme celui consacré à la défense de chaque amendement, n’est pas limité non plus, à l’exception des députés n’appartenant à aucun groupe, dont les interventions ne peuvent excéder cinq minutes. Cependant, lorsqu’un groupe a épuisé le temps qui lui était alloué, la parole est refusée à ses membres, et ses amendements sont mis aux voix sans débat.

Un temps supplémentaire est accordé, sur demande d’un président de groupe ou de son délégué, à chaque groupe et aux députés non-inscrits, lorsque le Gouvernement ou la commission saisie au fond déposent un amendement après l’expiration des délais opposables aux députés. Ce temps supplémentaire ne peut être utilisé que sur l’article ou l’article additionnel sur lequel porte l’amendement déposé hors délai.

Quand le « temps législatif programmé » est appliqué, tous les députés qui le souhaitent disposent de deux minutes, à l’issue de l’examen des articles, pour une explication de vote personnelle non décomptée du temps de leur groupe.

Si un président de groupe s’y oppose, le « temps législatif programmé » ne peut s’appliquer lorsque la discussion d’un texte en première lecture intervient moins de six semaines après son dépôt ou moins de quatre semaines après sa transmission.

2. –    LA TRANSMISSION ET LES LECTURES SUCCESSIVES

Le texte ainsi adopté par la première assemblée saisie est transmis sans délai à l’autre assemblée qui l’examine à son tour, en première lecture, selon les mêmes modalités : examen par une commission, inscription à l’ordre du jour, discussion en séance publique.

Si la seconde assemblée adopte tous les articles du texte qui lui a été transmis sans modification, ce texte est définitivement adopté.

Dans le cas contraire, la navette se poursuit entre les deux assemblées. À partir de la deuxième lecture, les articles précédemment votés en termes identiques par l’une et l’autre assemblée ne sont pas remis en discussion : le champ de la navette ne comprend plus ces articles dits « conformes ». Seuls restent en discussion les articles du texte pour lesquels les deux assemblées ne sont pas parvenues à l’adoption d’un texte identique. Après la première lecture, s’applique la règle de l’« entonnoir » : les amendements doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion, les seules exceptions concernant les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle. La navette se poursuit en deuxième, troisième, voire quatrième lecture et plus, tant que tous les articles n’ont pas été adoptés dans les mêmes termes.

Toutefois, la Constitution de 1958 a institué une procédure de conciliation permettant au Gouvernement d’accélérer le vote définitif d’un texte en interrompant le cours normal de la navette.

III. –    LE RECOURS À LA PROCÉDURE DE CONCILIATION : LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Cette procédure de conciliation consiste, après deux lectures du texte par chaque assemblée – ou une seule lecture si le Gouvernement a préalablement engagé la procédure accélérée – à provoquer la réunion d’une commission comprenant sept députés et sept sénateurs (auxquels s’ajoutent autant de membres suppléants), d’où l’appellation de commission mixte paritaire (CMP).

La composition politique des CMP doit refléter celle des assemblées. Depuis 2019, le Règlement de l’Assemblée nationale prévoit que la désignation des représentants dans les commissions mixtes paritaires « assure, sous réserve que le groupe qui dispose du plus grand nombre de sièges de titulaires conserve au moins un siège de suppléant, que chaque groupe dispose d’au moins un siège de titulaire ou de suppléant ».

En pratique, sous la XVe législature à l’Assemblée nationale, la majorité a toujours bénéficié de cinq postes de titulaires (4 députés LaRem ; 1 député MoDem) et le nombre de groupes n’a jamais permis qu’ils aient tous au moins un poste. Une alternance entre les groupes a donc été décidée par la Conférence des présidents. Au Sénat, la composition des CMP n’est pas fixe mais reflète toujours un équilibre de quatre sénateurs de la majorité sénatoriale et trois de l’opposition, tant pour les titulaires que pour les suppléants.

Cette commission désigne son bureau. Le président de la CMP est traditionnellement le président de la commission saisie au fond de l’assemblée où se tient la commission mixte, le vice-président étant le président de la commission saisie au fond de l’autre assemblée. Le bureau comprend également au moins deux rapporteurs, un député et un sénateur, qui seront chargés de rendre compte de ses travaux devant leur assemblée respective. En règle générale, ce sont les rapporteurs de chaque commission saisie au fond qui occupent ces postes.

Au cours de cette réunion, ces parlementaires cherchent à trouver un texte de compromis pour tous les articles qui restent en discussion. Ils peuvent décider de retenir la rédaction précédemment adoptée par l’une ou l’autre assemblée ou bien d’élaborer, pour certains articles, une rédaction nouvelle.

Il n’existe pas de règles encadrant impérativement les débats en CMP (les articles peuvent ainsi être appelés ou non dans leur ordre numérique).

Les votes sont rares (une disposition mise aux voix n’est, par définition, pas consensuelle) et ont généralement lieu à main levée. Les suppléants ne votent que pour maintenir la parité entre les deux chambres.

Les travaux de cette commission sont consignés dans un rapport. Si les membres de la CMP élaborent et adoptent un texte de compromis, ce texte est reproduit dans le rapport. Dans le cas contraire, le rapport expose les raisons pour lesquelles la conciliation n’a pas pu se faire.

À ce stade, différentes hypothèses se présentent, avec des conséquences elles- mêmes différentes, sur la suite de la procédure d’adoption du texte.

1. –    LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE EST PARVENUE À ÉTABLIR UN TEXTE DE COMPROMIS

Le Gouvernement peut soumettre ce texte à l’approbation de l’une puis de l’autre assemblée. Il peut également, notamment si le texte de compromis ne lui convient pas, renoncer à faire statuer les assemblées sur ce texte. Dans ce cas, la navette reprend au stade où elle avait été interrompue et doit se poursuivre jusqu’à l’adoption du texte en termes identiques par les deux assemblées.

La discussion, en séance publique, des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire s’ouvre par l’exposé du rapporteur de la commission mixte, suivi des interventions du Gouvernement, éventuellement de la défense de la motion de rejet préalable, et des orateurs inscrits dans la discussion générale. La discussion des articles se limite à la discussion et au vote des amendements. Pour cette lecture, seuls les amendements du Gouvernement ou ceux acceptés par lui peuvent être déposés. L’Assemblée procède ensuite au vote sur l’ensemble du texte, compte tenu de la rédaction retenue par la CMP, éventuellement modifiée par les amendements.

Si chaque assemblée adopte l’ensemble d’un projet ou d’une proposition de loi, compte tenu du texte élaboré par la CMP, éventuellement modifié par les mêmes amendements, la procédure de conciliation a réussi et le texte est définitif.

2. –    L’ÉCHEC DE LA PROCÉDURE DE CONCILIATION : LE DERNIER MOT DONNÉ À L’ASSEMBLÉE NATIONALE

Si le texte de compromis est rejeté par l’une ou l’autre assemblée ou si des amendements au texte de la CMP adoptés par une assemblée ne le sont pas par l’autre, il y a échec de la procédure de conciliation. Cet échec peut également tenir au fait que la commission mixte n’est pas parvenue à établir un texte de compromis. Dans ces différents cas, le Gouvernement a la possibilité de donner le dernier mot à l’Assemblée nationale.

Cette procédure comporte trois étapes se déroulant dans l’ordre suivant : la nouvelle lecture par l’Assemblée, la nouvelle lecture par le Sénat et la lecture définitive par l’Assemblée.

Lors de la nouvelle lecture, l’Assemblée délibère sur le dernier texte adopté avant que ne s’engage la procédure de conciliation. Ceci signifie que, dans le cas d’un texte déposé en première lecture au Sénat, l’Assemblée nationale réexamine le texte qu’elle a adopté en dernier lieu. Ce texte fait l’objet d’un examen en commission et est discuté selon la procédure ordinaire. Le texte adopté par l’Assemblée est transmis au Sénat qui l’examine également selon la procédure ordinaire. Si le Sénat l’adopte sans modification, le texte est définitivement adopté. Dans le cas contraire, il est transmis à l’Assemblée en vue de la lecture définitive.

Lors de la lecture définitive, l’Assemblée délibère dans un cadre strictement délimité. Elle statue, sur proposition de la commission, soit sur le texte établi par la commission mixte paritaire, s’il y en a un, soit sur le texte qu’elle a adopté au cours de la nouvelle lecture. Dans ce dernier cas, elle ne peut adopter d’autres amendements que ceux adoptés par le Sénat, en commission ou en séance, lors de sa nouvelle lecture.

IV. –    LES PROCÉDURES PARTICULIÈRES D’ADOPTION

1. –    LA PROCÉDURE D’EXAMEN SIMPLIFIÉE

L’Assemblée ne dispose que d’un temps limité pour ses séances publiques. Or, le Parlement est couramment saisi de textes qui exigent, certes, l’intervention du législateur, mais n’en présentent pas moins un intérêt plus technique que politique.

C’est d’abord pour la discussion de ces textes, ainsi que pour les projets de loi autorisant la ratification d’un traité ou l’approbation d’un accord international, que l’Assemblée dispose d’une procédure d’examen simplifiée. Lorsqu’elle est mise en œuvre, il n’y a pas de discussion générale. Seuls les articles faisant l’objet d’amendements sont appelés et mis aux voix ; il n’y a pas d’intervention sur les articles, et sur chaque amendement, outre le Gouvernement, peuvent seuls intervenir l’un des auteurs, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et un orateur contre. Quand il n’y a pas d’amendements, l’ensemble du texte est immédiatement mis aux voix, sans explications de vote.

Les règles d’application de cette procédure garantissent le respect des droits d’expression des députés, notamment de ceux qui appartiennent à l’opposition. En effet, si la procédure peut être engagée par la Conférence des présidents à la demande du Président de l’Assemblée, du Gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou du président d’un groupe, un droit d’opposition est ouvert symétriquement à ces mêmes autorités (à l’exception du Président de l’Assemblée) jusqu’à la veille de la discussion à 13 heures. Si ce droit est exercé, le texte concerné est examiné suivant la procédure de droit commun. Une autre garantie est apportée par la disposition selon laquelle le dépôt par le Gouvernement d’un amendement postérieurement à l’expiration du délai d’opposition entraîne automatiquement le retrait du texte de l’ordre du jour de l’Assemblée. Le texte peut alors être inscrit à l’ordre du jour de la séance suivante selon la procédure de droit commun.

Cette procédure d’examen simplifiée est toujours précédée d’un examen du texte en commission.

2. –    LA PROCÉDURE DE LÉGISLATION EN COMMISSION

La procédure de législation en commission a été instituée par la réforme du Règlement de 2019. Lorsqu’elle est engagée, le droit d’amendement des députés et du Gouvernement ne s’exerce qu’en commission, ce qui réduit d’autant la durée de la discussion en séance publique sur les textes ou parties de textes considérés comme plus techniques ou consensuels.

Cette procédure peut être engagée sur proposition du Président de l’Assemblée nationale, du président de la commission saisie au fond, d’un président de groupe ou du Gouvernement, sur tout ou partie d’un projet de loi, d’une proposition de loi ou d’une proposition de résolution, à l’exception des projets et propositions de loi constitutionnelle, des projets de loi de finances et des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

Ces mêmes personnes, à l’exception du Président de l’Assemblée nationale, peuvent s’opposer à l’engagement de la procédure de législation en commission à deux moments :

-    au plus tard 48 heures après la réunion de la Conférence des présidents ayant décidé d’appliquer la procédure ;

-    à l’issue de la réunion de la commission et au plus tard 48 heures après la mise à disposition du texte adopté par elle.

La discussion en commission se déroule, pour l’essentiel, selon les règles ordinaires. La seule particularité réside dans la possibilité d’examiner une motion de rejet préalable au stade de la commission. Si une telle motion est adoptée, le texte est rejeté puis examiné en séance selon la procédure ordinaire.

Sur les articles faisant l’objet d’une procédure de législation en commission, ne sont recevables, en séance publique, que les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec un texte en navette ou à corriger une erreur matérielle. Les articles auxquels ces amendements se rapportent ne sont ni appelés, ni mis aux voix. L’Assemblée ne vote que sur les amendements.

Lorsque la procédure de législation en commission porte sur la totalité des articles d’un texte, il n’y a pas de discussion générale en séance publique. Seuls s’expriment le Gouvernement, le rapporteur de la commission saisie au fond et, le cas échéant, son président. Le dépôt d’une motion de rejet préalable est possible. L’Assemblée se prononce sur le texte adopté en commission par un vote unique, précédé par des explications de vote (un orateur par groupe pour une durée de cinq minutes).

Lorsque la procédure de législation est « partielle », c’est-à-dire qu’elle ne porte que sur une partie des articles d’un texte, la discussion se déroule dans les conditions de droit commun, l’ensemble des articles faisant l’objet de la procédure de législation en commission étant mis aux voix à la fin.

3. -    LE « VOTE BLOQUÉ »

Le vote bloqué, procédure inscrite à l’article 44, alinéa 3, de la Constitution, permet au Gouvernement de demander à l’une ou l’autre assemblée de se prononcer par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion, en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par lui.

Le Gouvernement dispose d’une grande latitude pour mettre en œuvre cette procédure. Il est libre de choisir le moment où il annonce son intention d’en faire usage. Il lui appartient de définir le texte qui fait l’objet du vote unique : une partie du texte en discussion – un article ou un groupe d’articles – ou l’ensemble du texte ; il décide également des amendements qui seront retenus.

La mise en œuvre de cette procédure a pour effet de supprimer le vote sur les amendements et les articles faisant l’objet du vote unique. Elle ne permet pas de faire obstacle à la discussion de tous les articles et des amendements qui s’y rapportent, y compris des amendements non retenus par le Gouvernement.

4. –    L’ENGAGEMENT DE RESPONSABILITÉ DU GOUVERNEMENT SUR LE VOTE D’UN TEXTE

La Constitution (article 49, alinéa 3) permet au Premier ministre, après délibération en Conseil des ministres, d’engager la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale, ou, une fois par session, sur un autre projet ou proposition de loi. Cette procédure ne peut pas être mise en œuvre devant le Sénat, le Gouvernement n’étant pas responsable devant cette assemblée.

Comme dans le cas du vote bloqué, le Gouvernement est libre de choisir le moment où il engage sa responsabilité et de décider du contenu du texte sur lequel il l’engage.

À la différence du vote bloqué, l’engagement de responsabilité a pour effet de suspendre immédiatement la discussion du texte sur lequel il porte.

À compter de l’engagement de responsabilité s’ouvre un délai de vingt-quatre heures pendant lequel des députés peuvent déposer une motion de censure.

Une motion de censure n’est recevable que si elle est signée par un dixième au moins des membres de l’Assemblée nationale. Si une motion de censure est déposée, il est pris acte de son dépôt. Cette motion est ensuite discutée et mise aux voix dans des délais et des conditions fixées par la Constitution et le Règlement de l’Assemblée (le vote ne peut intervenir moins de 48 heures après le dépôt et la discussion doit avoir lieu au plus tard le troisième jour de séance suivant l’expiration de ce délai). La motion n’est adoptée que si elle recueille la majorité des voix des membres composant l’Assemblée, seuls les députés favorables à son vote participant au scrutin.

Si aucune motion de censure n’est déposée dans le délai de 24 heures ou si la motion n’est pas adoptée, le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité est considéré comme adopté. L’engagement de responsabilité ne vaut que pour la lecture au cours de laquelle il a été mis en œuvre et n’a donc aucune incidence sur le déroulement de la navette.

Si la motion de censure est adoptée, le Premier ministre doit remettre la démission de son Gouvernement et, de manière subsidiaire, le texte sur lequel portait l’engagement de responsabilité est considéré comme rejeté. Une telle situation ne s’est jamais produite depuis 1958.

V. –    LA PROMULGATION DE LA LOI

1. –    LA PROMULGATION

L’adoption définitive d’un projet ou d’une proposition de loi clôt, en principe, la phase parlementaire de la procédure législative et débouche normalement sur la promulgation de la loi.

Le texte définitif est transmis au secrétariat général du Gouvernement, qui est notamment chargé de présenter le texte à la signature du Président de la République auquel appartient la compétence de promulguer les lois (c’est-à-dire de leur donner force exécutoire). Le Président de la République dispose d’un délai de quinze jours pour promulguer la loi. La loi est ensuite publiée au Journal officiel de la République française.

Cependant, la promulgation d’une loi peut être retardée ou empêchée dans deux cas : le contrôle de la constitutionnalité des lois et la nouvelle délibération de la loi.

2. –    LES EFFETS DU CONTRÔLE DE CONSTITUTIONNALITÉ

Le Conseil constitutionnel est notamment chargé de contrôler la conformité des lois votées par le Parlement à la Constitution.

a)    La saisine du Conseil constitutionnel

Ce contrôle a lieu d’office pour les lois dites organiques, à savoir les lois expressément visées comme telles par la Constitution et qui ont pour objet d’appliquer des dispositions constitutionnelles.

Pour les autres lois, dites ordinaires, ce contrôle n’est effectué qu’à la demande de certaines autorités : le Président de la République, le Premier ministre, le Président du Sénat, le Président de l’Assemblée nationale et, depuis une révision de la Constitution de 1974, soixante députés ou soixante sénateurs.

La saisine doit avoir lieu dans le délai de promulgation ; elle suspend ce délai. Le Conseil constitutionnel, lorsqu’il est saisi, dispose d’un mois pour rendre sa décision ou de huit jours en cas d’urgence si le Gouvernement en fait la demande. Ses décisions s’imposent à tous et ne peuvent faire l’objet d’aucun recours.

b)    Les effets des décisions du Conseil constitutionnel

Lorsque le Conseil constitutionnel déclare la loi conforme à la Constitution, celle ci peut être promulguée.

À l’inverse, une décision déclarant la totalité d’une loi contraire à la Constitution fait obstacle à sa promulgation. La procédure législative qui a conduit à l’adoption d’une telle loi se trouve annulée et il n’y a d’autre solution que de la reprendre dès l’origine, sauf si le motif de non-conformité constitue un obstacle déterminant supposant, par exemple, une modification préalable de la Constitution elle-même.

Enfin, le Conseil constitutionnel peut décider qu’une loi est en partie conforme à la Constitution. Dans une telle hypothèse, la loi peut être promulguée, à l’exception de ses articles ou parties d’articles déclarés contraires à la Constitution.

3. –    LA NOUVELLE DÉLIBÉRATION DEMANDÉE PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Dans le délai de quinze jours à compter de l’adoption de la loi par le Parlement, le Président de la République peut également demander une nouvelle délibération de la loi, notamment pour remédier à une déclaration d’inconstitutionnalité.

Cette procédure, qui n’a été utilisée que trois fois depuis 1958, est ouverte par un décret du Président de la République contresigné par le Premier ministre. Le délai de promulgation est suspendu. Une phase complémentaire de la procédure législative s’ouvre alors puisqu’il va être demandé au Parlement de reprendre, en tout ou partie, l’examen du texte qu’il vient d’adopter : cette phase complémentaire suit les règles de la procédure législative ordinaire précédemment décrites (dépôt du texte, navette et, le cas échéant, procédure de conciliation, adoption définitive enfin).

VI. –    UNE PROCÉDURE SPÉCIFIQUE : LES ORDONNANCES

Aux termes de l’article 38 de la Constitution, le « Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ».

Ceci à plusieurs conditions :

–    une loi d’habilitation doit préalablement être adoptée par le Parlement selon la procédure législative décrite ci-dessus. Cette habilitation peut résulter d’un article de projet de loi, mais en aucun cas d’une proposition de loi ou d’un amendement d’origine parlementaire ;

–    cette loi d’habilitation doit préciser les matières législatives qui pourront faire l’objet d’ordonnances ;

–    elle fixe également le délai pendant lequel le Gouvernement peut prendre des ordonnances ;

–    elle précise enfin le délai imparti au Gouvernement pour déposer au Parlement le projet de loi de ratification.
Délibérées en Conseil des ministres, les ordonnances doivent faire l’objet d’un avis en Conseil d’État et porter le contreseing du Premier ministre et des ministres responsables, ainsi que la signature du Président de la République.

Si le Gouvernement ne dépose pas de projet de loi de ratification à l’expiration du délai fixé, les ordonnances deviennent caduques.

Lorsque le Gouvernement a déposé le projet de loi de ratification, le Parlement peut ratifier les ordonnances et leur conférer ainsi valeur législative ou ne pas être appelé à en débattre. Dans ce dernier cas, les ordonnances demeurent des actes de l’autorité réglementaire. Le Conseil constitutionnel considère toutefois que les dispositions d’une ordonnance non ratifiée doivent être regardées, à l’expiration du délai de l’habilitation et dans les matières qui relèvent du domaine législatif, comme des dispositions législatives au sens de l’article 61-1 de la Constitution, ouvrant ainsi la voie à leur éventuelle contestation par une question prioritaire de constitutionnalité (décisions n° 2020-843 et 2020-851/852 QPC des 28 mai et 3 juillet 2020). 

Depuis la révision du 23 juillet 2008, la Constitution précise que les ordonnances ne peuvent être ratifiées que de manière expresse, ce qui exclut la « ratification implicite » des ordonnances, pratique auparavant tolérée par le Conseil constitutionnel.

 

Septembre 2023