Date : jeudi 13 février 2020
Cible : Sur l'Article 10

L’article 10 du projet de loi porté par le Gouvernement prévoit la mise en œuvre d’un « âge d’équilibre » à partir duquel les assurés pourront partir à la retraite à taux plein. Autour de cette « référence collective », s’articulera un mécanisme de bonus/malus qui impactera le montant des pensions.

Le Gouvernement ne cache pas l’objectif de cette disposition : inciter les Françaises et les Français à travailler plus longtemps. Cette mesure centrale du projet de loi entre pourtant en contradiction avec la réalité du monde de l’emploi, et ce à plusieurs égards. 

Dans un rapport publié en 2018, France Stratégie rappelait que le taux d’emploi des 60-64 ans n’atteignait que 30%en France tandis qu’il grimpait à plus de 42% en moyenne dans l’Union européenne. Pour la tranche d’âge 55-64 ans, ce taux n’était que de 56% contre 63% en moyenne dans les pays de l’OCDE. 

De multiples causes expliquent le faible taux d’emploi des plus de 55 ans dans notre pays. Bien loin de idées reçues, on constate que seules 29% des personnes de 60 ans en situation de non-emploi touchent une pension de retraite. 

Les séniors sont ainsi davantage confrontés aux situations de chômage de longue durée que le reste de la population. En 2018, 60,2% des personnes sans emploi de plus de 55 ans l’étaient depuis plus d’un an contre 41,8% pour l’ensemble des catégories actives selon les chiffres du Ministère du Travail.  

Il apparait aussi clairement que le Gouvernement, dans son projet de loi, a omis une pluralité de facteurs et d’indicateurs qui pèsent sur les capacités d’emploi des plus âgés et, de ce fait, occulté une part substantielle de la réalité du monde du travail. Plus largement, l’idée d’instaurer un « âge d’équilibre » pose la question du modèle de société que nous souhaitons collectivement. 

Ainsi, alors que France se distingue par un taux d’espérance de vie en bonne santé bien plus faible que dans le reste de l’Europe, il conviendrait davantage de porter un véritable projet progressiste, qui inclurait les plus fragiles au marché du travail plutôt que de les exposer à une précarité toujours plus grande, qui prendrait à bras-le-corps la problématique de la souffrance au travail plutôt que de contraindre les Françaises et les Français à travailler toujours plus longtemps dans des conditions parfois inacceptables.