Touchant aux questions de la filiation, des origines, de l’identité, à la liberté, la révision de notre cadre bioéthique emporte les convictions et sentiments personnels et profonds, qui dépassent l’approche « politique ». 

Tout au long de son examen, j’ai veillé à ce que les dispositions proposées par le Gouvernement et enrichis par les parlementaires garantissent l’équilibre des valeurs structurantes de la bioéthique, qui sont la dignité, le respect de la personne, et notamment l’absence de discrimination en fonction de l’orientation sexuelle, ainsi que les principes d’indisponibilité et de non-marchandisation du corps humain.

C’est par exemple pour cette raison que je suis notamment opposé à la technique du « bébé médicament », qui heurte directement mon éthique personnelle.

C’est également au nom de mes convictions personnelles, d’ailleurs, que je  soutiens ce projet de loi, notamment dans la mesure où elle consacre une nouvelle liberté pour les couples de femmes et les femmes seules : celle de pouvoir avoir recours, dans les mêmes conditions que les couples hétérosexuels, à l’aide médicale à la procréation.

Oui, L’extension de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules constitue pour moi une avancée majeure en termes d’égalité, et de liberté.

Mais cette liberté, je souhaite qu’elle puisse à la fois s’exercer sans discrimination liée à l’orientation sexuelle des demandeurs en matière de traitement de la demande, mais également dans le respect de la liberté de conscience des médecins.

L’exercice d’une liberté nouvelle ouverte par le projet de loi peut cependant heurter d’autres droits. Ainsi, la liberté pour un donneur de procéder à un don de gamètes  en gardant l’anonymat heurte ainsi le droit pour un enfant à connaitre l’identité de son père biologique. Sur cette question, je pense que la levée de l’anonymat pourrait décourager des donneurs. C’est pourquoi, je souhaite maintenir l’anonymat du donneur.

Le projet de loi tel qu’il sera adopté, ne sera pas, et ne doit pas être automatiquement étendu à la Nouvelle-Calédonie.

D’abord, parce que certaines mesures relèvent de nos compétences locales, et donc de la décision de nos institutions. Comme par exemple le remboursement par la CAFAT de l’aide médicale à la procréation pour les couples de femmes et les femmes seules, ou encore le déploiement d’un grand plan de lutte contre l’infertilité, que j’ai appelé avec de nombreux collègues parlementaires, au niveau national.

Mais surtout, les mesures principales, et notamment l’Assistance médicale à la procréation, ouverte pour les couples de femmes ou femmes seules (article premier), sont à la croisée de compétences de l’État et de compétences de notre territoire. Ainsi, si la Calédonie est compétente depuis 2013 en matière de droit civil, et donc par exemple de filiation, l’État reste compétent en matière de nationalité de l’enfant né d’un couple de femmes, ou encore en matière de restriction des libertés publiques, comme celles applicables au consentement des personnes mineures ou des majeurs protégés.

Il est donc impératif de prendre le temps du dialogue avec les autorités locales et l’ensemble des institutions parties-prenantes sur ces questions, afin de transposer dans de bonnes conditions la loi sur la Bioéthique dans le droit interne calédonien.

Une fois la loi promulguée, le Gouvernement devra donc mettre à profit ce temps court de dix-huit mois afin de procéder, dans les meilleures conditions, à l’extension en Nouvelle-Calédonie de ces différentes dispositions. Pour cela, j’insiste sur la nécessité de définir, dès maintenant et avec précision, un processus de préparation des ordonnances prévues à l’article 31, en fixant un calendrier et en désignant les acteurs et les institutions qui, au niveau local et national, pourront prendre part à ce travail minutieux de transposition, dans le respect des spécificités de notre territoire.