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N° 286 rect.

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÉME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 octobre 2022

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273)

TOME III

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

PAR Mme Anne STAMBACH-TERRENOIR

Députée

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 Voir le numéro : 273

 


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

I. une stabilisation des crÉdits et des effectifs inadaptée aux enjeux du développement durable

A. Un programme au cœur des politiques de dÉveloppement durable

1. Champ et priorités du programme

2. Structure du programme

3. Le rattachement au programme 129 des crédits de la planification écologique

B. les crÉdits d’audit externe : une question financiÈre et Éthique

C. UNE stabilisation des effectifs inadaptée À l’enjeu historique de la transition écologique

D. s’assurer du bien-ÊTRE des personnels

1. Veiller aux cas de souffrance au travail

2. Poursuivre les efforts de lutte contre le harcèlement moral et sexuel, de prévention contre l’épuisement au travail et en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

a. Un accord récent sur l’égalité professionnelle

b. La lutte contre les discriminations et les haines

c. Le traitement des signalements et des cas de harcèlement, violences et discriminations

3. La formation professionnelle

4. La lutte pour l’égalité professionnelle et contre les discriminations au sein des autorités administratives indépendantes et des écoles relevant du pôle ministériel

a. Acnusa

b. Commission de régulation de l’énergie

c. École nationale des ponts et chaussées

d. École nationale des travaux publics de l’État

II. des autoritÉs administratives indÉpendantes sous tension

A. La Commission nationale du débat public

B. L’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires

C. La Commission de régulation de l’énergie

III. une ambition insuffisante pour les Écoles d’ingÉnieurs

IV. le parc immobilier au dÉfi de la transition ÉnergÉtique

V. l’Évolution des prestations numÉriques et le tÉlÉtravail

A. L’importance des prestataires extérieurs

B. LES dotations consacrées à la politique numérique

C. La politique de télétravail

Examen en commission

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 


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   Introduction

Le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables » constitue le programme support de la mise en œuvre des politiques publiques du pôle regroupant le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le ministère de la transition énergétique et les cinq ministères délégués et secrétariats d’État qui leur sont associés, ainsi que le secrétariat d’État à la mer. Il porte l’essentiel de la masse salariale des ministères précités et de trois autorités administratives indépendantes, ainsi que le financement des politiques transverses de fonctionnement et d’investissement nécessaires à la réalisation de ces politiques.

Les crédits demandés pour 2023 s’élèvent à 3,004 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 3,021 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse respective de 3,4 % et 4,3 % par rapport au projet de loi de finances pour 2022.

Si l’on ne peut que saluer cette légère augmentation des crédits, ces chiffres ne reflètent pas la politique menée ces dernières années, caractérisée au contraire par une baisse continue des crédits du programme 217. Elle marque plutôt une continuité de la politique budgétaire conduite par le pôle ministériel, à la suite de ses restructurations et de la revue de ses missions. Or, le dérèglement climatique et les défis posés par la transition énergétique – avec la nécessité d’augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique de notre pays – ont des conséquences sur la charge de travail des personnels du pôle ministériel, qui œuvrent de plus en plus en flux tendu, faute de disposer de plus d’effectifs.

Années après années, les rapporteurs pour avis en charge du programme 217 de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » soulignent les effets de plus en plus marqués du dérèglement climatique, en métropole comme en outre-mer. En juillet 2019, des pics de canicule sans précédent étaient enregistrés dans notre pays. Or ces pics ont été dépassés en 2022, sur une plus longue durée. Ils se sont accompagnés d’une sécheresse historique, d’incendies de forêts dans le Sud de la France, notamment dans l’arc méditerranéen et en Gironde, mais également, ce qui est inhabituel, dans des aires plus septentrionales, comme les Monts d’Arrée en Bretagne ou encore dans les Vosges.

Le phénomène est mondial. La fonte des glaces de l’Arctique n’est plus une simple hypothèse mais une certitude dont il ne manque que la chronologie précise. L’Europe centrale a souffert lors de l’été 2022 d’incendies et de sécheresses sans précédent, tandis que des inondations catastrophiques ont anéanti un tiers des récoltes au Pakistan. D’ores et déjà, la première cause des migrations forcées dans le monde est le dérèglement climatique.

La France dispose d’une stratégie pour la transition énergétique et la transition écologique dans le cadre de la politique européenne, visant à rendre l’Union européenne neutre en carbone en 2050. Rappelons toutefois que le Haut conseil pour le climat a jugé dans son rapport annuel de 2021 que « les politiques publiques sont globalement trop peu alignées avec les orientations de la stratégie nationale de bas-carbone pour garantir l’atteinte des objectifs ». Cette longue période de transition doit être mise à profit pour que l’ensemble des acteurs de la société cessent d’émettre des gaz à effet de serre. Une préoccupation majeure apparaît néanmoins : le dérèglement climatique semble se dérouler plus rapidement qu’initialement prévu, ce qui exige de notre société une capacité de réaction et d’adaptation également plus rapide que l’agenda européen.

Dans ce contexte, les politiques nationales et les actions des collectivités territoriales ne doivent pas se limiter à respecter la feuille de route environnementale européenne mais à aller, autant que possible, au-delà. L’analyse des crédits budgétaires est à cet égard un bon moyen de vérifier si la volonté affichée par le Gouvernement de faire de la transition écologique une priorité se traduit par des actions en ce sens, en disposant des ressources humaines et budgétaires adéquates. Que le Gouvernement lance la création d’un Secrétariat général à la planification écologique rattaché à Mme la Première ministre – idée que portait, rappelons-le, M. Jean-Luc Mélenchon dès 2012 – est certes intéressant, mais encore faut-il s’assurer que le travail de coordination de ce secrétariat s’appliquera concrètement sur notre territoire. Or le programme 217 se caractérise par la stricte stabilisation du nombre d’agents chargés de mettre en œuvre cette transition, intervenant après des années de diminution.

Il y a là une contradiction majeure. D’un côté, notre pays doit disposer d’expertise pour la rénovation énergétique des bâtiments, la mise au point de modes de transport décarbonés, l’utilisation de la chaleur, la gestion de l’eau, la préservation de la biodiversité, la protection des forêts ; d’un autre côté, les moyens budgétaires proposés ne permettent pas toujours à l’État, à ses directions régionales et départementales ainsi qu’à ses autorités indépendantes de conduire à plein niveau leurs actions.

Cette situation est d’autant plus préoccupante que le budget de l’État dispose de quelques marges d’action. Le programme 217 retrace ainsi une partie des crédits de recours à des cabinets de conseil par le pôle ministériel, recours jugé excessif par une récente commission d’enquête du Sénat. Les dotations consacrées à des audits extérieurs pourraient être redéployées vers des créations d’emplois, notamment vers les autorités administratives indépendantes relevant du programme, qui travaillent à la limite de leurs capacités avec un sens élevé du service public.

Votre rapporteure pour avis déplore ce décalage entre une ambition à laquelle adhèrent nos concitoyens, et la réalité vécue sur nos territoires. La transition écologique, et de manière générale le développement durable, reposent sur des métiers nombreux et à forte technicité, qui doivent être préservés et développés. Ces métiers forment un gisement d’emplois utiles à la société et sont non délocalisables. Ils répondent à une demande citoyenne en pleine évolution, caractérisée par la montée des exigences environnementales, un sentiment d’abandon des territoires et une demande accrue de sécurité et de transparence.

Dans ce contexte, votre rapporteure pour avis tient à saluer l’implication des agents chargés de mettre en œuvre ces politiques et des syndicats qui les défendent. Ils continuent, années après années, à accomplir leurs missions de service public dans un contexte difficile, alors que le Gouvernement ne leur donne pas tous les moyens pour agir.

Au regard de l’inadéquation entre les crédits alloués et la nécessité de politiques plus ambitieuses que celles actuellement conduites en faveur du développement durable, au regard également du problème posé par les dépenses trop élevées d’audit externe, votre rapporteure émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».


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I.   une stabilisation des crÉdits et des effectifs inadaptée aux enjeux du développement durable

Avec 3,004 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 3,021 milliards d’euros en crédits de paiement, les dotations du programme 217 pour 2023 sont en hausse respectivement de 4,3 % et de 3,4 % par rapport à 2022, en ligne avec le taux d’inflation.

Les effectifs du programme sont stabilisés pour 2023 par rapport à 2022. Cette stabilisation intervient après des années de diminution due aux restructurations du ministère, due également à une vision par trop comptable de la gestion du pôle ministériel alors que l’urgence climatique exige des actions plus volontaristes. Il n’y a donc pas de signe politique du Gouvernement sur la nécessité de donner aux agents des ministères relevant du programme les moyens d’agir.

A.   Un programme au cœur des politiques de dÉveloppement durable

1.   Champ et priorités du programme

Le programme 217 est le programme support de la mise en œuvre des politiques publiques du pôle ministériel regroupant le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le ministère de la transition énergétique et les cinq ministères et secrétariats d’État qui leur sont associés. Cette gestion commune, sous l’égide d’un secrétaire général unique, se retrouve au niveau départemental avec la création de secrétariats généraux communs départementaux le 1er janvier 2021. L’objet de cette réorganisation, destinée à rassembler, en métropole et en outre-mer, l’ensemble des fonctions support dont les moyens étaient auparavant dispersés entre plusieurs entités, a été de faciliter la transversalité des politiques publiques et de développer des synergies dans l’élaboration des politiques de développement durable.

Le programme 217 porte sur :

– les effectifs des ministères précités, à l’exception, pour le ministère de la transition écologique, de ceux de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), inscrits au programme 181 « Prévention des risques » ;

– les crédits de fonctionnement et d’investissement de l’administration centrale ;

– les emplois et crédits de trois autorités administratives indépendantes (AAI) : la Commission de régulation de l’énergie (CRE), la Commission nationale du débat public (CNDP) et l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) ;

– une partie du financement de deux opérateurs : l’École nationale des ponts et chaussées (ENPC, rebaptisée École des ponts ParisTech) et l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE).

Les effectifs du pôle ministériel ont fait l’objet ces dernières années d’une revue des missions conduites au sein de chaque service. Le Gouvernement souhaite, citons-le :

« mettre en cohérence l’organisation et les missions avec la vision du pôle ministériel à cinq ans, fondée sur une simplification et une accélération des procédures, l’intégration de la transformation numérique, et un souci de développer ou de faire évoluer l’expertise et l’innovation ;

« faire des choix forts qui permettent de porter efficacement ces priorités ;

« respecter les orientations gouvernementales en matière de renforcement de la proximité des services publics de l’État avec les territoires ;

« redonner de la visibilité aux agents. »

La revue des missions s’est traduite ces dernières années par une diminution de 2 % des effectifs à chaque exercice budgétaire. Or les priorités du programme affichent une ambition certaine : le Gouvernement indique vouloir «doter le pôle ministériel de l’expertise et des ressources nécessaires à la prise en compte de la transition écologique ; fournir un appui aux agents, en adéquation avec leurs missions, tout en recherchant une utilisation plus efficiente des moyens, notamment par la mutualisation et par la modernisation de l’environnement de travail numérique ; être exemplaire par la promotion du plan d’action services publics éco-responsables, avec par exemple l’insertion de clauses environnementales et sociales dans les contrats d’achats publics et l’amélioration de la performance économique et énergétique des bâtiments d’administration centrale ; enfin mettre en œuvre les orientations gouvernementales en matière de renforcement de la proximité des services de l’État avec les territoires.»

Il y a une nette contradiction entre les priorités affichées et l’évolution des effectifs du pôle. La transition écologique constitue certainement une des politiques les plus difficiles à concevoir et à appliquer pour un État. Elle exige une stratégie et des compétences. Or la stabilisation des effectifs se retrouve dans toutes les déclinaisons du programme 217, à l’exception de l’échelon départemental, qui sera renforcé. Les personnels affectés aux AAI ne bénéficient pas non plus de renforts significatifs. Votre rapporteure pour avis conçoit mal comment, dans de telles conditions, l’expertise de l’État pourrait être renforcée, d’autant que l’ENPC et l’ENTPE, gérées par le programme, ne peuvent non plus former plus d’ingénieurs, en raison d’un manque d’espace et de ressources humaines.


2.   Structure du programme

Le programme 217 est composé de douze actions :

– l’action 07 « Pilotage, support, audit et évaluations » regroupe depuis le projet annuel de performances de 2021 l’intégralité des crédits hors titre 2 ([1]) du programme, à l’exception de ceux destinés aux AAI, qui conservent des actions spécifiques. Cette action comprend aussi les dépenses de titre 2 des personnels exerçant des activités transversales. Elle rassemble 27,7 % des crédits du programme pour 2023.

L’action 07 est divisée en huit sous-actions (fonction juridique, fonctionnement de l’administration centrale et des services rattachés, immobilier de l’administration centrale et des services rattachés, services numériques – fonctionnement des infrastructures et évolution des systèmes d’information-, moyens hors titre 2 consacrés aux ressources humaines, actions nationales et internationales en faveur du développement durable, fonctionnement courant de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable – IGEDD (ex CGEDD) –, moyens consacrés à l’ENTPE et à l’ENPC) ;

– les actions 25 à 27 concernent les dépenses de personnel et de fonctionnement des trois AAI rattachées à ce programme ;

– les autres actions sont des actions dites « miroirs », chacune regroupant les crédits de personnel consacrés à une politique publique.

Le programme 217 porte ainsi la quasi-intégralité des effectifs de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », à l’exception, comme précédemment indiqué, des effectifs de l’ASN.


Présentation du programme 217 par action

Numéro et intitulé de l’action

Part dans la totalité des crédits

07 – Pilotage, support, audit et évaluations

27,7 %

08 – Personnels œuvrant pour les politiques de transport

19,8 %

11 – Personnels œuvrant pour les politiques du programme « Affaires maritimes »

6,9 %

13 – Personnels œuvrant pour la politique de l’eau et de la biodiversité

8,9 %

15 – Personnels œuvrant pour les politiques du programme « Urbanisme, territoires et aménagement de l’habitat »

22,5 %

16 – Personnels œuvrant pour la politique de la prévention des risques

8,9 %

22 – Personnels transférés aux collectivités territoriales

0,6 %

23 – Personnels œuvrant pour les politiques de l’énergie et du climat

2,2 %

25 – Commission nationale du débat public (CNDP)

0,1 %

26 – Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA)

0,1 %

27 – Commission de régulation de l’énergie (CRE)

0,7 %

28 – Personnels œuvrant dans le domaine de la stratégie et de la connaissance des politiques de transition écologique

1,7 %

3.   Le rattachement au programme 129 des crédits de la planification écologique

La création d’un Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), institué par le décret n° 2022-990 du 7 juillet 2022, était très attendue depuis l’annonce, le 16 avril dernier par le Président de la République, de confier au Premier ministre la mission de coordonner l’action écologique au sein de l’État. Préconisée par M. Jean-Luc Mélenchon dès 2012, cette idée aura mis dix ans à voir le jour, alors qu’elle part d’un principe simple : l’écologie concerne l’ensemble des secteurs de notre société ; elle ne peut relever du seul ministère qui en est nommément chargé.

Les crédits du SGPE sont inscrits non au programme 217 mais au programme 129 « Coordination du travail gouvernemental ». Ce choix n’appelle pas de commentaire particulier de votre rapporteure pour avis. La logique retenue a été de rattacher le secrétariat général auprès de Mme la Première ministre pour lui permettre d’assurer la cohérence d’ensemble des actions écologiques de l’État et lui donner une autorité supplémentaire par rapport aux ministres.

Dans l’immédiat, le SGPE est une structure légère, puisque le programme 129 le dote pour 2023 de 15 équivalents temps plein (ETP).

B.   les crÉdits d’audit externe : une question financiÈre et Éthique

Le rapport de la commission d’enquête du Sénat sur l’influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques (n° 578, 2021-2022, du 16 mars 2022), dont le président était M. Arnaud Bazin, sénateur membre du groupe Les Républicains, et la rapporteure était Mme Éliane Assassi, sénatrice membre du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Écologiste, a révélé une emprise inquiétante de ces cabinets sur la marche de l’État. La logique de rentabilité qu’ils promeuvent auprès des entreprises s’accommode en effet mal des paramètres plus nombreux et plus complexes de la conduite des politiques publiques, comme les facteurs socioculturels.

Ce rapport a révélé que les dépenses de conseil de l’État avaient dépassé le milliard d’euros en 2021 (avec un doublement des dépenses entre 2018 et 2021) : le coût du conseil en stratégie et organisation a été multiplié par 3,7 depuis 2018 et celui sur les systèmes d’information par 5,8. Il s’avère en outre que le ministère de la transition écologique a fait partie sur cette période des cinq ministères ayant le plus recouru à ces cabinets, avec les ministères de l’intérieur, de l’économie et des finances, de la défense et les ministères sociaux.

Une lettre du ministère adressé aux syndicats, le 2 juin 2022, retrace pour le pôle ministériel la majeure partie des dépenses de conseil qu’il a effectuées depuis 2018.

Dépenses de conseil du pôle ministériel

                                                                                                                                                                  (en euros)

Prestation de conseil

2018

2019

2020

2021

Communication

875 990,06

696 049,03

723 177,67

753 010,72

Audit comptable et financier

354 596,32

398 214,68

284 027,07

977 369,74

Stratégie et organisation

2 099 853,21

11 716 422,06

17 854 896,57

21 425 191,13

Recrutement

75 494,00

27 070,00

128 100,00

72 346,80

Expertise métier

10 476 525,56

9 459 777,38

10 866 284,24

13 246 175,37

Expertise juridique

2 888 856,81

2 461 250,43

2 350 923,85

4 549 850,01

Expertise en assurance

7 253,48

3 323,45

1 243,04

7 890,76

Total

16 778 569,44

24 762 107,03

32 208 652,44

41 031 854 53

Source : Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Il s’avère toutefois, à la lecture de l’annexe au projet de loi de finances pour 2023 « Recours aux conseils extérieurs » (autrement appelé le jaune budgétaire) que le pôle ministériel a, en 2021, dépensé 59,90 millions d’euros, ce qui l’a placé en tête de tous les ministères. Lors du premier semestre de 2022, il a déjà consacré 44,06 millions d’euros à ce type de dépenses.

Le tableau annexé à la lettre du 2 juin 2022 appelle les commentaires suivants :

-         les dépenses annuelles de conseil n’ont cessé de croître depuis 2018, passant de plus de 16 à plus de 41 millions d’euros ; il est loisible de penser que si le Sénat n’avait pas procédé à une commission d’enquête, cette progression se serait poursuivie ;

-         s’il est compréhensible que le pôle ministériel recourt à des prestataires extérieurs pour la communication, le recrutement, les assurances, tâches pour lesquelles il ne dispose pas toujours des compétences nécessaires, voire pour la mise en place de technologies novatrices, comme l’éolien en mer, l’incompréhension est de mise pour la stratégie et l’organisation, l’expertise des métiers et l’expertise juridique. Il dispose en effet des administrateurs civils, attachés d’administration centrale et techniciens issus de l’Institut national du service public, des instituts régionaux d’administration et des écoles d’ingénieurs… À moins de considérer que l’enseignement délivré par ces écoles et l’expérience acquise au fil du temps par les agents du ministère n’ont aucune valeur ;

-         les prestations de conseil ne forment qu’une faible part de la totalité des dépenses de la mission « Écologie, développement et mobilités durables. Mais en valeur absolue, les dépenses ont dépassé 114 millions d’euros en quatre ans, soit environ 22 % de la masse salariale de l’Office nationale des forêts, qui a un besoin criant de personnels, soit également une somme largement supérieure aux investissements immobiliers de modernisation des écoles d’ingénieurs relevant du programme 217 et de la tour Séquoia.

L’émotion provoquée par le rapport du Sénat a conduit M. Jean Castex, Premier ministre, à signer le 19 janvier 2022 une circulaire adressée à tous les ministères, leur indiquant que l’administration ne devait « avoir recours à des conseils extérieurs qu’après avoir démontré qu’elle ne dispose pas des moyens ou compétences nécessaires » et que les cabinets ministériels internalisent « les compétences et expertises qui correspondent à des besoins permanents ou réguliers et des commandes récurrentes ».

Le jaune budgétaire, qui rappelle les conditions que le Gouvernement devra désormais respecter pour recourir à des conseils extérieurs, montre –involontairement – que ce recours ne survient pas uniquement quand l’administration fait face à un manque d’expertise mais qu’il peut intervenir « lorsque les capacités des services ne permettent pas d’absorber la charge nécessaire à la mise en œuvre d’un besoin dans les délais impartis ». On ne saurait mieux admettre que le pôle ministériel manque d’emplois et que le conseil est un palliatif. Maintenir les crédits de conseil à ce niveau est irresponsable au regard des besoins en effectifs, absolument nécessaires pour réussir la transition écologique.

Les secrétariats généraux des ministères se sont vu confier la responsabilité d’appliquer la circulaire du Premier ministre, ainsi qu’un objectif de réduction de 15 % des dépenses de conseil en 2022 par rapport aux montants engagés en 2021. Au sein du pôle ministériel, la circulaire s’est traduite par la mise en place d’un comité d’engagement chargé d’examiner les projets de recours à des consultants. L’objectif est de respecter la réduction de dépenses demandée par le Premier ministre, sachant que les études sur les éoliennes en mer (69 millions d’euros) n’entrent pas dans cette trajectoire de diminution.

Cette diminution est insuffisante pour votre rapporteure pour avis, qui considère que les sommes en jeu, importantes en valeur absolue, pourraient être consacrées à l’emploi public ou à des dépenses d’investissement, les auditions qu’elle a conduites ayant par exemple montré que de nombreux besoins pouvaient être satisfaits par la majoration des crédits de certaines actions pour un montant de quelques millions d’euros, bien loin des sommes considérables consacrées à l’audit externe. Ainsi en est-il de la nécessité de moderniser les bâtiments des écoles relevant du pôle ministériel ou de l’augmentation modérée, mais absolument indispensable, des effectifs des trois AAI.

C.   UNE stabilisation des effectifs inadaptée À l’enjeu historique de la transition écologique

Les effectifs de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sont portés par deux programmes : le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » et le programme 181 « Prévention des risques » qui correspond aux effectifs de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Certes pour 2023, les effectifs se caractérisent par leur quasi stabilisation (62 équivalents temps plein travaillés - ETPT - en moins sur un volume de plus de 35 000 agents). Techniquement, l’administration centrale enregistrera des transferts vers l’échelon départemental, conformément à la décision du Gouvernement, annoncée dans la présentation du programme, « de réorienter l’action publique vers les territoires et dans l’objectif de renforcer les actions de prévention des risques au service des populations ».

Mais faut-il se satisfaire de cette stabilisation quand elle intervient après plusieurs années de réduction drastique ? Quand l’impression dominante est que le Gouvernement n’est pas à la hauteur de l’enjeu historique de l’écologie ? Le signal politique envoyé par le Gouvernement est faible au regard des enjeux. L’environnement économique et géopolitique ne peut l’exonérer d’une stratégie plus ambitieuse, avec les emplois publics pour la mettre en œuvre. C’est parce qu’il y a une conjonction de crises – énergie, dérèglement climatique, biodiversité – qu’il faut sortir du modèle productiviste et fonder notre modèle de société sur des postulats respectant l’environnement. Le projet de loi de finances pour 2023 est marqué par une forme d’atonie de l’action publique.

Comme à chaque exercice budgétaire, le programme 217 enregistre des transferts d’emplois. 75,33 ETPT sont transférés au sein du pôle, principalement au bénéfice de l’action 11, mais également pour l’action 15. Il s’agit essentiellement de mettre en place la direction générale des affaires maritime, de la pêche et de l’aquaculture. 140,93 ETPT sont transférés vers les entités suivantes : Office français de la biodiversité, ministère de l’intérieur et ministère de l’économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique.

Le solde des entrées et des sorties pour 2023 est nul. Rappelons qu’il résulte d’hypothèses. 3 152 départs et entrées sont pris en compte, à raison de 1 333 départs à la retraite et 1 897 recrutements externes. Les entrées et les sorties concernent de manière équilibrée chaque catégorie de fonctionnaires, les catégories A, B et C enregistrant chacune un tiers de ces entrées et sorties.


Le tableau ci-dessous présente l’évolution par action des effectifs du pôle ministériel inscrits en lois de finances de 2017 à 2023 :

Évolution des effectifs relevant du programme 217

Actions

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Action 7

8 903

8 267

8 056

7 620

6 114

5 527

5 469

Action 8

10 244

10 141

10 053

9 717

9 455

9 164

9 165

Action 11

2 942

2 780

2 540

2 475

2 437

2 668

2 742

Action 13

3 838

4 027

3 833

3 863

3 781

3 482

3 300

Action 15

9 366

9 163

9 315

8 934

8 743

9 205

9137

Action 16

3 373

3 254

3 239

3 495

3 480

3 218

3 246

Action 22

378

316

275

255

303

463

513

Action 23

762

774

704

779

772

775

812

Action 25

12

13

12

10

13

9

11

Action 26

12

12

14

12

16

11

11

Action 27

144

143

147

153

158

155

155

Action 28

-

644

626

606

587

602

600

Total 217

39 974

39 534

38 812

37 919

35 859

35 224

35 162

Programme 281 : ASN

406

420

422

425

429

445

457

Total 217 + P 281

40 380

39 954

39 234

38 344

36 288

35 669

35 619

Source : Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

La décrue des effectifs, nette et continue depuis 2017 (et antérieurement) en raison d’une part des restructurations du pôle ministériel, d’autre part du non remplacement de tous les agents partant à la retraite, se ralentit fortement pour 2023. L’impression prévaut néanmoins que si le Gouvernement achève un cycle de réorganisation du pôle ministériel, il ne prend pas la mesure des impératifs écologiques. Face aux urgences, le renforcement des emplois publics qui concourent à la protection de l’environnement et à la transition écologique s’imposait.

Au total, les CP pour la rémunération des personnels s’élèvent pour 2023 à 2,784 milliards d’euros. On notera que la revalorisation du point d’indice de la fonction publique de 3,5 % au 1er juillet 2022 conduit à une majoration de ces crédits de 71,7 millions d’euros, à raison de 47,7 millions hors du compte d’affectation spéciale sur les pensions et 24 millions au sein de ce compte.

D.   s’assurer du bien-ÊTRE des personnels

Il est difficile de recenser et de quantifier les effets des nombreuses restructurations ayant affecté ces vingt dernières années les ministères qui sont aujourd’hui dans le champ du programme 217. Les vagues de déconcentration et de décentralisation et la rationalisation des politiques publiques ont conduit à la diminution continue des effectifs globaux des ministères relevant du pôle, notamment à l’échelon central, les gouvernements successifs souhaitant préserver les capacités des directions départementales territoriales. Certains opérateurs de l’État en région, comme Météo France ou le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) ont subi des pertes notables de ressources humaines.

S’agissant des services déconcentrés, on observera qu’ils font l’objet de réorganisations fréquentes, conformément aux circulaires du Premier ministre du 24 juillet 2018 relative à l’organisation territoriale des services publics et du 12 juin 2019 relative à la mise en œuvre de la réforme de l'organisation territoriale de l’État. Ainsi, dans un passé récent, une direction générale « territoires et mer » a accompagné en Guyane la réorganisation en 2020 des services ; en Île-de-France, la création de la direction régionale et interdépartementale de l'environnement, de l'aménagement et des transports a été actée le 1er avril 2021, en réunissant la direction régionale et interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement et la direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie ; le réseau routier national non concédé alsacien a été transféré à la Collectivité européenne d'Alsace et à l'euro-métropole de Strasbourg (1er janvier 2021). Plus récemment, en Corse, la création d’une direction de la mer et du littoral est entrée en application le 1er octobre 2021.

D’autres projets, notamment de mutualisation des moyens, seront conduits en 2023, comme la réorganisation des centres de gestion administrative et financière des agents et celle de la chaîne des dépenses et des recettes. En outre, la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS », a modifié les missions du pôle ministériel, avec des conséquences sur son organisation. La gestion des sites Natura 2000 terrestres sera transférée aux régions à partir du 1er janvier 2023. La loi précitée a enfin prévu, pour les départements et les métropoles, voire les régions (à titre expérimental), l’attribution, à leur demande, de sections non concédées du réseau national, à compter du 1er janvier 2024.

Ces changements sont parfois la conséquence d’un monde en constante mutation, dans une société où les besoins évoluent rapidement au gré des novations technologiques ou des aspirations du corps social et l’État ne saurait se mettre à l’écart de ces mutations. Mais lorsqu’ils sont constants, ils peuvent à la longue perturber les agents, accroître en sus leur charge de travail en raison de la mutualisation des tâches et ils exigent de leur direction un travail d’accompagnement et d’explication.

Les auditions de votre rapporteure pour avis ont montré le sens élevé du service public des agents du pôle ministériel, tous grades confondus, ainsi que, pour certains, une incompréhension des multiples changements dont le pôle ministériel a fait l’objet. Le secrétariat général du pôle en est bien conscient ; il faut souhaiter qu’il porte sur ce point aux agents toute l’attention requise. 

En revanche, la prise en compte de réalités bien connues dans le secteur privé – stress, risques psycho-sociaux, harcèlement – apparaît récente… Non que les responsables du ministère aient négligé ce point dans le passé, mais la systématisation de procédures date selon les directions et les opérateurs des années 2018 à 2020. Il est assez rare d’évoquer ces questions dans un rapport budgétaire, mais le pôle ministériel comprend des milliers d’agents. Aussi est-il important de vérifier si leur bien-être et leur dignité au travail sont respectés.

1.   Veiller aux cas de souffrance au travail

Interrogés par votre rapporteure pour avis, les responsables du pôle ministériel ont admis que les vagues successives de réorganisation pouvaient perturber une partie des agents. Ce point a été confirmé par les syndicats et par plusieurs témoignages, qui ont fait état de cas de souffrance au travail. Aussi des outils ont-ils été développés pour aider les services ministériels à appréhender cette souffrance.

L’un des principaux outils est l’accompagnement personnalisé des agents, rénové dans le cadre de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Les encadrants et les bureaux des ressources humaines de proximité en sont les principaux acteurs, en lien étroit avec les acteurs médico-sociaux (médecins du travail, assistants de service social notamment). En parallèle, cet outil vise également à renforcer les compétences managériales des différents niveaux d’encadrants, sachant qu’ils ont un rôle dans la détection des signaux faibles et forts de risques psychosociaux.

Il n’existe pas de statistiques consolidées recensant les cas de souffrance au travail au sein du pôle ministériel, celui-ci indiquant que chaque cas apparaît unique. Dont acte, mais rappelons qu’il existe bien des méthodes de quantification de ces cas puisque les associations de responsables de ressources humaines parviennent à établir un nombre de 2 millions de personnes annuellement touchées dans le secteur privé. À une échelle régionale, le directeur de la Dreal d’Occitanie a fait part de 18 cas en 2021 recensés par ses deux médecins du travail, pour une direction qui comprenait cette année-là 717 agents. Il est donc impératif que le pôle ministériel réfléchisse à la manière de collecter et d’agréger des données.

2.   Poursuivre les efforts de lutte contre le harcèlement moral et sexuel, de prévention contre l’épuisement au travail et en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

Votre rapporteure pour avis tient à mettre particulièrement l’accent sur les questions d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, ainsi que les efforts que doit accomplir le pôle ministériel pour la prévention des risques psycho-sociaux au travail et en faveur de la lutte contre le harcèlement moral et sexuel.

Depuis plusieurs années, tant les syndicats que les associations féministes font état des discriminations et atteintes diverses à l’intégrité physique ou morale que peuvent subir des personnes sur leur lieu de travail, notamment les femmes. Il s’avère que des pans entiers de notre société (sport, spectacle, presse, politique…) sont touchés. Votre rapporteure a souhaité en conséquence analyser si l’État respectait en la matière son devoir de prévention à l’encontre de telles atteintes, et de sanction si elles surviennent.

a.   Un accord récent sur l’égalité professionnelle

L’accord sur l’égalité professionnelle est récent. Il date du 23 octobre 2019 et a été signé par les ministres et l’ensemble des organisations syndicales représentatives.

Il prévoit que la gouvernance, le suivi et l’évaluation des actions sont assurés de façon partenariale au sein d’un comité de suivi « égalité » et d’un comité de suivi « discriminations ». Chacun se réunit au moins trois fois par an. Il s’applique à tout le personnel, aussi bien en administration centrale ou déconcentrée que dans les établissements publics sous tutelle, qui sont tenus de le décliner par des plans d’actions adaptés et de l’inscrire dans leur dialogue social.

Le Gouvernement a indiqué à votre rapporteure pour avis que « le plan d’actions de ce protocole contient des propositions fortes concernant la formation et la sensibilisation, les recrutements, les promotions, les rémunérations, notamment par la création d’un observatoire des rémunérations. L’accent est mis sur le soutien à toutes les parentalités, maternelles et paternelles. La prévention et le traitement du harcèlement sexuel, des violences et agissements sexistes fait l’objet de mesures dédiées. Le protocole comporte des propositions innovantes : expérimentation d’une semaine de 4 jours pendant un an pour les nouveaux parents, étude sur les rémunérations par la méthode des cohortes genrées, incubation de projets et d’études concernant les femmes et le numérique, projet OSER ! pour les femmes cadres ». Ce protocole court jusqu’en octobre 2023 et une nouvelle négociation s’ouvrira donc l’an prochain.

b.   La lutte contre les discriminations et les haines

Le 23 février 2022, le premier protocole de lutte contre les discriminations et les haines a été signé avec l’ensemble des représentants des personnels. Il s’agit donc également d’un accord récent, qu’il convient de saluer.

Vingt mesures concrètes sont à mettre en œuvre d’ici à 2025, l’objectif étant de développer un environnement de travail qui puisse s’adapter aux différences. Le plan d’actions prévoit des mesures pour vérifier l’absence de discrimination notamment dans le cadre des recrutements, des déroulements de carrière et des promotions. L’identification et le traitement des signalements font également l’objet de mesures spécifiques.

Ce protocole propose des réponses aux alertes des agents : les orientations s’appuient sur les échanges avec les représentants des personnels et sur les résultats du premier baromètre social réalisé à l’été 2021. Ils ont permis d’identifier cinq principaux critères de risques de discriminations au sein des ministères - le sexe, l’âge, l’appartenance syndicale, les origines et l’apparence physique - qui font l’objet d’attentions particulières dans le protocole.

L’ensemble de ces engagements est en cohérence avec la démarche de labellisation Alliance Afnor. Le pôle ministériel a reçu les deux labels égalité et diversité en février 2022.

c.   Le traitement des signalements et des cas de harcèlement, violences et discriminations

Un dispositif de signalement externalisé a été mis en place au sein du pôle ministériel depuis 2021 et confié à Allodiscrim. Il permet d’accompagner un agent dans ses recours internes au sein du pôle ministériel, sa compétence correspondant au décret n°2020-256 du 13 mars 2020 relatif à la mise en place d’un dispositif de signalement de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel et des agissements sexistes.

Le traitement des cas fait l’objet d’une coordination nationale par la direction des ressources humaines du pôle. Un plan de prévention des violences et harcèlements sexuels et agissements sexistes a été concerté et validé en comité d’hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en 2022. Les chefs des services déconcentrés sont responsables de la conduite du traitement des actions et ils en informent l’administration centrale.

Ces dispositifs sont appuyés par des campagnes de communication et d’information : un guide ministériel sur les violences et harcèlements sexuels a été élaboré et publié en 2021. Il est le résultat d’un travail conjoint avec les représentants des personnels dans le cadre de la mise en œuvre du protocole pour l’égalité entre les femmes et les hommes signé le 23 octobre 2019. Des formations ciblées ont été déployées en utilisant l’ensemble des vecteurs disponibles, y compris des moyens innovants tels que le théâtre forum impliquant la participation des agents.

Les efforts du pôle ministériel doivent être incontestablement salués et soutenus, même si leurs effets ne sont pas encore évalués. Votre rapporteure pour avis a relevé par ailleurs une appréciation quelque peu critique des représentants syndicaux à l’égard des dispositifs mis en place.

3.   La formation professionnelle

La formation professionnelle tient par nature une place importante au sein du pôle ministériel car celui-ci englobe un ensemble de compétences, administratives, techniques et comportementales très variées. En outre, les changements intervenant dans les politiques publiques et dans l’organisation des services supposent de mettre à disposition des agents et des encadrants un panel de formations leur permettant de s’adapter en permanence. Le ministère a donc investi, de longue date, dans une politique de formation de ses agents, tant initiale que continue.

Ainsi, chaque année, environ 800 agents fréquentent les écoles du ministère en formation initiale et la moitié des agents du pôle ministériel suivent au moins un stage au titre de la formation continue. 74 725 journées stagiaires ont été consacrées à la formation continue en 2021. À ce bilan s’ajoutent de nombreuses formations digitalisées en classes virtuelles, qui se déroulent sur des temps plus courts.

Les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement doivent appliquer à leur échelon les accords et protocoles précités sur le bien-être des personnels. Ainsi, celle d’Occitanie, auditionnée par votre rapporteure pour avis, s’est dotée depuis 2020 d’une feuille de route portant sur un partage du sens de l’action, des valeurs et des postures attendues des différents acteurs en interne ; une gestion des ressources humaines favorisant les choix des parcours professionnels, ainsi que l’amélioration et l’adaptation des compétences en continu.

Le renforcement de l’égalité professionnelle est soutenu avec la mise en œuvre du protocole national. Deux référents ont été désignés à partir de 2020 parmi les agents afin de porter ces actions. Un plan d’actions 2020-2022 a été construit afin de définir les orientations souhaitées pour la Dreal autour d’objectifs comme produire des écrits où la place des femmes est clairement visible, accompagner les femmes au travers des politiques de ressources humaines, sensibiliser et informer les agentes et les agents à l’égalité professionnelle et s’appuyer sur les politiques publiques pour développer l’égalité professionnelle.

La mise en œuvre d’un plan de prévention des risques psycho-sociaux a été engagée à partir de 2020. Les actions visent notamment le traitement de la surcharge de travail et des conflits de valeur. Un comité de suivi émanant du CHSCT accompagne et oriente le développement des actions. La Dreal bénéficie de l’appui d’un psychologue du travail, qui accompagne les situations collectives et individuelles à risque. Les situations collectives de risques psychosociaux, lorsqu'elles sont identifiées, font systématiquement l’objet, en application des circulaires nationales sur le sujet, d’une réunion spécifique de la direction, des partenaires médico-sociaux (assistant ou assistante de service social, et médecin de prévention), du chef de service concerné et du secrétaire général ou de son adjointe afin d’identifier les facteurs de risques et les actions de prévention et de traitement à engager. Les deux médecins du travail de la Dreal jouent un rôle actif dans le signalement, le traitement et l’orientation des situations. Le CHSCT est tenu informé d'une manière anonyme des initiatives prises, et des réunions régulières entre le secrétariat général et le pôle médico-social permettent d'évoquer toutes les situations qui le nécessitent.

Hors de l’administration centrale et des services déconcentrés, on relèvera que le Cerema a mis en place un plan d’égalité professionnelle entre femmes et hommes et un plan de formation professionnelle. Pour ce qui concerne la lutte contre le harcèlement moral et sexuel, il adhère au dispositif Allodiscrim précité. Enfin, pour les risques psycho-sociaux, le Cerema a signé depuis plusieurs années un contrat avec l’organisme Pros Consult qui offre une plate-forme d’écoute individuelle anonyme pour ses agents. Le même organisme assure des prestations de médiation, ainsi que des prestations d’accompagnement collectif sur saisine de la direction des ressources humaines.

4.   La lutte pour l’égalité professionnelle et contre les discriminations au sein des autorités administratives indépendantes et des écoles relevant du pôle ministériel

Les autorités administratives indépendantes et les écoles qui relèvent du programme 217 conduisent également des actions en faveur de l’égalité professionnelle et contre les différentes formes de discrimination et de harcèlement.

a.   Acnusa

Bien qu’étant une entité de petite dimension (12 ETP, un président, trois ou quatre apprentis), l’Acnusa dispose actuellement d’un comité technique (qui deviendra en 2023 un comité social d’administration de proximité) avec deux représentants du personnel élus. Une convention a été signée avec la directrice des ressources humaines du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Elle permet que l’ensemble des personnels ait accès aux services (médecine du travail, assistance sociale, cellules d’écoute du ministère, mobilité professionnelle, offre de formation) dont disposent les agents des directions centrales du ministère.

Un accord sur le temps de travail et un accord sur le télétravail, déclinant les accords ministériels, ont été signés respectivement en 2020 et 2022. Un plan de formation est également établi annuellement et présenté pour information en comité technique.

Le bilan social présente enfin annuellement la situation des effectifs de l’Autorité et les conditions d’emploi (mutations, congés, arrêts maladie, formation) ([2]) .

 

b.   Commission de régulation de l’énergie

La CRE est confrontée depuis sa création à une augmentation constante du nombre de ses missions et à une charge de travail en croissance permanente. La question de l’adéquation des effectifs des personnels à cette charge et de leur bien-être y est donc prégnante. Un comité technique doit se tenir au mois de novembre 2022, afin que soient présentées les lignes directrices de gestion en matière de ressources humaines. La CRE indique s’attacher à ce que les politiques internes en matière de contrat, de rémunération, de parcours professionnels comme de formation, puissent bénéficier de la même manière aux agents féminins et masculins. La définition de bandes de rémunération pour chaque niveau de métier a par ailleurs permis en 2022 de corriger les écarts de salaire qui ne se justifiaient pas au détriment des personnels féminins.

La commission décline également chaque année un plan de formation pour ses agents. Plus récemment, en décembre 2021, la direction a envoyé aux personnels un questionnaire relatif à la qualité de vie au travail, toujours en raison de la forte augmentation de leurs tâches.

Ce questionnaire a connu un très fort taux de réponses. Si les résultats ont fait ressortir la fierté des agents de travailler pour la CRE et les missions de service public qu’elle incarne, ils ont également témoigné d’une charge de travail susceptible de générer des risques psycho-sociaux (RPS). Aussi la commission prépare-t-elle actuellement un plan d’actions en matière de RPS, grâce à la mobilisation de groupes de travail internes associant directement ses agents. Ce document sera présenté au CHSCT de la CRE le 23 novembre 2022.

La CRE est moins avancée sur la prévention du harcèlement moral et sexuel, mais elle devrait prochainement mettre en place un référent. Pour l’heure, le recueil de signalements est confié à son déontologue.

c.   École nationale des ponts et chaussées

L’ENPC dispose d’un plan d’égalité professionnelle entre femmes et hommes, voté en conseil d’administration le 30 novembre 2021. Un référent égalité a été nommé afin de mettre en œuvre et suivre ce plan et il a reçu une lettre de mission ad hoc. Des actions de formation sont proposées aux agents sur l’égalité entre les femmes et les hommes, notamment à destination des encadrants responsables des recrutements (les fiches de poste sont rédigées de manière non sexuée) et une analyse des écarts de rémunérations a été engagée par le service des ressources humaines.

Un plan de formation professionnelle a été présenté au comité technique du 24 mars 2022. Six thèmes y sont inscrits : connaissance de l’environnement professionnel, compétences support, compétences métiers, communication et valorisation, management, l’hygiène, sécurité et conditions de travail pour un budget de 100 000 euros en 2022. Une cellule d’écoute et de lutte contre le harcèlement moral et sexuel a été mise en place avec le recours à une plateforme extérieure pour tout signalement, la possibilité de faire appel à l’association France Victime, le recours à une cellule d’écoute psychologique sept jours sur sept et la possibilité de consulter le médecin de prévention ou l’infirmière sur ces sujets.

d.   École nationale des travaux publics de l’État

L’ENTPE a mis en place un dispositif similaire à celui de l’ENPC.

II.   des autoritÉs administratives indÉpendantes sous tension

Trois autorités administratives indépendantes relèvent du programme 217 : la Commission nationale du débat public (CNDP), l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) et la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Elles ont en commun d’avoir une charge de travail croissante alors que leurs moyens sont stables, travaillant de ce fait sous tension. Cela fait plusieurs années qu’il leur manque toujours les quelques emplois qui leur permettraient de mieux accomplir les missions que le législateur leur a confiées. Il serait logique en conséquence de leur donner les moyens de leur fonctionnement.

A.   La Commission nationale du débat public

Rappelons que les missions de la CNDP ont été élargies par l’ordonnance du 3 août 2016 relative à la réforme de l’information et de la participation du public. Elle garantit le droit du public à être informé et à participer aux décisions ayant un impact sur l’environnement, établit et gère une liste nationale de garants, assure le continuum de la participation tout au long de la vie d’un projet et assurer des missions de conciliation entre les parties prenantes d’un projet. Aussi fait-elle face à de multiples tâches :

-         organisation d’un nombre accru de débats publics, du fait de l'extension de sa compétence aux plans et programmes nationaux et de l'instauration d'un droit d'initiative citoyenne ;

-         suivi d’un nombre accru de concertations et donc de garants, compte tenu de la création de concertations volontaires avec des garants et des concertations dites « continues » jusqu’à l’enquête publique ;

-         réalisation de missions de conseil et avis méthodologiques ;

-         gestion des marchés publics relatifs à l’organisation des débats publics ;

-         recrutement, gestion des garants, notamment leur formation initiale et continue ;

-         indemnisation et remboursement des frais de déplacement des tiers-garants ;

-         mise en place et financement d’expertises indépendantes décidées, en tant que de besoin, par la CNDP, lors des débats publics ou des concertations préalables.

Enfin, deux lois récentes ont institué un dispositif nouveau, avec la participation du public par voie électronique, impliquant pour la première fois la CNDP dans la phase aval de participation du public des procédures d’autorisation. Ce dispositif est systématiquement substitué aux enquêtes publiques dans les cas suivants :

-         ouvrages nécessaires à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et, par extension, projets d’aménagement incluant un équipement olympique (loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des Jeux olympiques) ;

-         projets de création de nouveaux centres pénitentiaires (loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice).

L’activité de la CNDP a été multipliée par six en trois ans. C’est en soi un constat satisfaisant, qui montre que les mécanismes de participation du public sont connus. Le problème central réside dans le fait que ses moyens n’augmentent pas en parallèle.

Après un niveau record en 2019 de 180 décisions et la désignation de 135 garants, dont la progression a été interrompue en 2020 par la pandémie de covid, le bilan de l’année 2021 confirme la hausse générale de la charge de travail de la commission, avec un niveau jamais atteint de nominations de garants, de commissaires en charge des débats publics, ainsi que l’installation de 17 délégués régionaux dans l’hexagone et en outre-mer.

Les crédits accordés à la CNDP dans le PLF 2023 s’élèvent à 4,06 millions d’euros, à raison de 3,10 millions pour les dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement (964 149 euros) accusant une très légère érosion. Elles ont été établies en tenant compte d’éléments comme la hausse prévisible de l’activité de la commission, activité qu’elle ne peut réguler puisqu’elle a compétence liée par la loi, le déploiement d’un nouveau système d’information ou encore la mise en œuvre de marchés publics lancés en 2022.

Les effectifs de la CNDP s’établissent à 12 EPTP (présidente et vice-président compris), auxquels se joignent périodiquement 25 commissaires, indemnisés à chacune de leur participation à une réunion. Au regard de la densité de ses missions, il lui manque au minimum 2 EPTP. Comme l’a indiqué lors de son audition sa présidente et ancienne ministre, Mme Chantal Jouanno, la CNDP est passée en quelques années d’une gestion artisanale d’une vingtaine de dossiers par an à l’instruction de questions variées et complexes. Il lui est parfois arrivé de ne pouvoir prendre en charge la gestion d’un débat public, par manque de moyens humains, et elle craint la charge de travail future qui pourrait être la sienne avec le développement des chantiers d’éoliennes. Il conviendrait en conséquence qu’elle puisse récupérer les 2 EPTP dont elle a besoin.

B.   L’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires

Auditionné par votre rapporteure pour avis, M. Gilles Leblanc, président de l’Acnusa, a rappelé que face à des demandes environnementales en constante augmentation, émanant notamment des collectivités territoriales, le plafond du nombre d’EPTP dont dispose l’autorité demeure fixé à 12. La fin de la pandémie de covid a marqué la reprise du trafic aérien, qu’il s’agisse des avions de ligne, de l’aviation d’affaires ou de l’aviation légère. Or les missions de l’Acnusa sont largement corrélées à ce trafic. L’année 2022 se caractérise déjà par un pic du nombre de manquements à la règlementation aérienne constatés par l’Autorité (près de 600 dossiers) dont la majorité devrait donner lieu à des poursuites.

Rappelons que l’Acnusa, créée par la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999, assume trois missions :

-         l’édiction de normes, avec par exemple l’homologation d’outils de mesure du bruit ;

-         la consultation par les collectivités territoriales et les aéroports sur diverses questions, comme la mise en place de plans d’exposition au bruit ;

-         un pouvoir de sanction, s’appliquant aux aéroports soumis aux règles édictées par le ministre chargé de l’aviation civile. Toute sanction est prise collégialement et l’Acnusa fait remarquer que toute infraction supposée donne lieu à l’ouverture d’un dossier, alors que les compagnies aériennes commettent souvent les mêmes infractions sur les mêmes aéroports, dont le traitement pourrait être groupé, ce qui en allègerait la partie procédurale.

Pour 2023, la dotation de l’Acnusa s’élève à 2,01 millions d’euros, dont 1,50 million pour les dépenses de personnel. L’adossement progressif de l’Acnusa aux fonctions support des ministères (conventions sur l’hébergement, les systèmes d’information et ressources humaines) permet toutefois de disposer d’appuis administratifs plus robustes, compensant son effectif réduit.

Dans son fonctionnement quotidien, les difficultés de l’Acnusa sont néanmoins liées à ce faible effectif. En mode stabilisé, aucune difficulté d’importance n’est à souligner mais des difficultés conjoncturelles apparaissent lorsque des départs simultanés de personnels s’opèrent. Les fonctions de comptable et de gestionnaire financier ne sont en outre assurées que par un seul agent, ce qui constitue un point de fragilité potentiel.

C.   La Commission de régulation de l’énergie

La CRE est une AAI chargée du bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz, depuis leur ouverture à la concurrence au début des années 2000. Elle appuie son fonctionnement sur deux organes indépendants : le collège de la commission (5 commissaires) et le comité de règlement des différends et des sanctions (4 magistrats). Elle constitue une instance indispensable à la confiance des professionnels de l’énergie et des citoyens dans le système énergétique.

Le champ d’activités de la CRE s’est considérablement élargi depuis sa création, la commission ayant hérité de près de 80 nouvelles compétences depuis 2013 : proposition des tarifs règlementés de vente, tarification des réseaux et des infrastructures d’électricité et de gaz, renforcement de son rôle dans les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables, mission de régulation du stockage pour le gaz, encadrement de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique pour les fournisseurs alternatifs, surveillance des marchés de gros et de détail de l’électricité et du gaz, expérimentations relatives aux smart grids et aux services de flexibilité locale, accompagnement de la transition énergétique dans les zones non interconnectées… Le traitement du contentieux de la contribution au service public de l’électricité alourdit en outre considérablement la charge de travail de la CRE, avec en 2021 un stock de plus de 55 000 dossiers de réclamations et de requêtes, tombé actuellement à 14 000, grâce au travail de ses agents.

La hausse sans précédent des prix du gaz sur les marchés de gros mondiaux, qui a commencé en mars 2021 et qui s’est aggravée avec le conflit en Ukraine, a entraîné dans son sillage celle des prix de gros de l’électricité, provoquant une crise des prix de l’énergie sans précédent en Europe. La charge de travail de la CRE a considérablement augmenté, notamment celle relative à la surveillance des marchés de gros et de détail.

Pour 2023, la dotation budgétaire de la CRE s’établit à 22,07 millions d’euros, à raison de 15,90 millions pour les dépenses de personnel et 6,72 millions pour ses dépenses de fonctionnement. Celles-ci comprennent principalement des études et des enquêtes sur le fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz, les activités de la CRE au sein des instances européennes puisqu’elle participe à la définition des règles des marchés, le fonctionnement d’un comité de prospective en son sein ainsi que des frais divers tels que des déplacements.

Le nombre d’EPTP s’établit pour 2023 à 155, soit une stricte stabilité par rapport à 2022, à raison de 145 agents de catégorie A, 8 de catégorie B et 2 de catégorie C. Compte tenu des spécificités des métiers qui s’y exercent – certains étant analogues au trading dans les salles des marchés – la proportion de fonctionnaires est très faible, à hauteur de 10 %, le reste des personnels étant recrutés pour des contrats de trois ans. Ce recours aux recrutements hors de la fonction publique, est autorisé à la fois par l’article L. 133-5 du code de l’énergie et par la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017.

La CRE est néanmoins confrontée à des difficultés de recrutement. Il lui est difficile de trouver les personnes de nationalité française dont elle a besoin pour la surveillance des marchés, d’autant que le secteur privé, pour des métiers comparables, offre des salaires plus élevés. Elle recrute le plus souvent des profils juniors qui restent en son sein trois à quatre ans, avant de se diriger vers le secteur privé, et doit donc relever un véritable défi d’attractivité. La rotation des personnels y est constante.

Il manque à la CRE au minimum 7 ETPT qu’elle n’est pas parvenue à obtenir lors des arbitrages budgétaires. Le risque est qu’elle retarde l’instruction de dossiers par manque de personnel ou renonce à certaines de ses tâches, comme la coopération internationale.

III.    une ambition insuffisante pour les Écoles d’ingÉnieurs

Il est intéressant de noter que tant Mme Aude Luquet, dans son avis budgétaire relatif aux crédits des politiques de développement durable du PLF 2021, que M. Vincent Descoeur, dans son avis, rédigé un an après sur le PLF 2022, avaient insisté sur la nécessité de mieux accompagner l’École nationale des ponts et chaussées (ENPC) et l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE), qui constituent les deux opérateurs du programme 217 pour l’enseignement.

Votre rapporteure pour avis arrive à des conclusions analogues. Il s’agit moins de déplorer la baisse tendancielle des subventions pour charges de service publics (SCSP) de l’ENPC et de l’ENTPE que de constater un manque d’ambition pour ces deux écoles, dont le rôle est de fournir à l’État et aux entreprises les cadres dont la France a besoin en génie civil et – évolution récente – pour assurer la transition écologique.

Ajoutons que la fermeture de l’École nationale des techniciens de l’équipement (ENTE), située à Valenciennes, sans la moindre considération pour les personnels, prévenus semble-t-il par visioconférence, constitue un signal très négatif…

Ces écoles ont en commun de partager une valeur cardinale : la recherche de l’intérêt général. Elles ont pour tradition de former des ingénieurs d’excellents niveaux, spécialistes de leur domaine mais disposant d’une formation suffisamment généraliste pour s’adapter tout au long de leur carrière professionnelle aux exigences de notre temps. S’il est en effet nécessaire pour notre pays de former des techniciens et des ingénieurs dans les nouveaux métiers liés à la transition écologique, comme le pilotage des énergies, il lui faut également disposer des personnes aptes à faire évoluer maintenant l’ensemble des métiers traditionnels vers la transition écologique. En génie civil par exemple, toutes les étapes de la vie d’un bâtiment ou d’une route devront, de leur conception à leur fin de vie, obéir à des pratiques respectueuses de l’environnement, en réfléchissant parallèlement aux usages que le public fera de ces équipements. L’interdisciplinarité est donc le maître mot de la formation qu’elles dispensent.


Le tableau ci-dessous rappelle le nombre d’élèves intégrant chaque année le pôle ministériel :

 

 

2017

2018

2019

2020

2021

ENPC

26

21

26

20

20

ENTPE

123

111

113

119

120

Source : Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

On observera en outre l’attachement de ces élèves à la fonction publique, puisque très peu d’entre eux ont choisi de la quitter :

 

 

2017

2018

2019

2020

2021

ENPC

démission

0

0

0

0

0

disponibilité

2

3

1

0

0

détachement

1

5

8

2

0

ENTPE

démission

3

4

1

1

0

disponibilité

1

0

0

0

0

détachement

1

1

2

3

1

Source : Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

 

L’atout supplémentaire des ingénieurs diplômés de ces écoles réside dans leur capacité à évoluer dans le secteur public comme dans le secteur privé et à dialoguer avec l’un comme avec l’autre.

Or l’ENPC est confrontée à un effritement de ses ressources financières depuis 2016. La SCSP est légèrement inférieure à 27 millions d’euros (soit la moitié de ses ressources) ; les droits de scolarité avoisinent 10 millions d’euros ; les ressources tirées des activités de recherche dépassent 10 millions d’euros, le solde étant assuré par la taxe d’apprentissage (600 000 euros). Cette stagnation des ressources empêche l’école de développer un programme immobilier qui lui permettrait de diplômer 350 élèves par an, à comparer à 290 actuellement. Au moment où notre pays a besoin d’ingénieurs compétents pour assurer la transition écologique, maintenir cette situation est irresponsable au regard de l’impératif de leur formation.

L’ENPC compense en partie ce manque de moyens grâce au mécénat, mais il est évident que l’ambition de l’école de contribuer à la transition écologique par le contenu de ses formations et par l’effectif des ingénieurs qui en sortent annuellement se trouve entravée, malgré le dynamisme de sa direction. Le mécénat n’est jamais garanti sur la durée (la chaire financée par un cimentier a ainsi pris fin). La souplesse de sa gestion lui permet de maintenir ses modules pédagogiques, mais elle nourrit quelques craintes pour son proche avenir. Comme tout établissement, sa facture d’énergie (électricité et fluides) risque de s’alourdir en 2023 (elle serait multipliée par quatre).

L’ENTPE connaît une situation analogue. Son budget tourne autour de 23 millions d’euros depuis plusieurs années, 88 % des ressources provenant de la SCSP et 12 % émanant de ressources propres (en 2022, les ressources propres formeront 16 % du total, grâce aux appels à projets, aux partenariats avec des entreprises, aux contrats européens et nationaux et à la taxe d’apprentissage). Les frais d’inscription demeurent au niveau de ceux des universités. Du côté des dépenses, la masse salariale constitue le poste principal, à raison de 15 millions d’euros et les frais de fonctionnement 5 millions. L’école n’a pas reçu de compensation résultant de l’augmentation du point d’indice pour l’exercice 2022 – ce sera en revanche le cas pour 2023 – et elle s’inquiète, comme tous les établissements disposant d’un important patrimoine immobilier, de l’augmentation du coût de l’énergie. Entre le chauffage, la gestion des fluides, l’activité de ses laboratoires (qui nécessite de l’électricité), son coût de fonctionnement risque de s’alourdir au minimum d’un million d’euros en 2023.

La modernisation des bâtiments et leur rénovation thermique apparaissent comme un impératif dans le contexte de recherche de sobriété énergétique, mais l’investissement est évalué à 30 millions d’euros, somme que l’école ne peut avancer. Une aide publique s’avère en conséquence indispensable.

Le programme immobilier des deux écoles peut être résumé comme suit :

Le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) couvrant la période 2020-2024 de l’ENPC a été approuvé le 29 mars 2020 par la direction de l’immobilier de l’État. Le coût total des opérations engagées ou prévues en 2023 s’établit ainsi :

 

Opérations

Période

Estimation

Co-Innovation-Lab/Nouvelle halle DE-DR-Espaces projets D/SCHOOLStockage

2021-2026

5,17 M€

Aire démonstrateur-Stockage

2021-2026

1,07 M€

Opération Saclay – Bâtiment ENPC – ZAC de l’Ecole Polytechnique

2021-2026

10,45 M€

M€ = millions d’euros – Source : Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires


Le SPSI couvrant la période 2016-2023 de l’ENTPE a été approuvé le          29 juillet 2019 par la direction précitée. Les opérations engagées ou prévues en 2023 s’établissent ainsi :

 

Opérations

Période

Estimation

Rénovation de toitures – terrasses (étanchéité, isolation : entretien

2020-2023

0,40 M€

Mise en place d’un système de rafraîchissement sur eau de nappe pour supprimer les climatiseurs

2021-2023

0,10 M€

Entretien sur différents ouvrants

2020-2023

0,10 M€

Aménagement de nouveaux espaces pour la pédagogie

2021-2023

0,15 M€

Accessibilité des équipements sportifs

2022-2023

0,17 M€

Aménagement des espaces extérieurs au campus

à partir de 2023

4,00 M€

M€ = millions d’euros – Source : Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Dans sa réponse à une question de votre rapporteure pour avis, le pôle ministériel reconnaît un manque de moyens pour conduire à bien la mue immobilière des deux écoles : « Dans les deux écoles, les besoins de rénovation, d’entretien ou de reconversion du patrimoine génèrent un besoin de financement tant en investissement qu’en fonctionnement. Ces besoins ne faisant pas l’objet de subventions complémentaires spécifiques de la part du ministère de tutelle, les opérations sont financées notamment par un prélèvement sur le fonds de roulement des écoles.

« Cependant, l’intégralité des opérations prévues dans les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) des écoles ne pourra être financée sur leur fonds de roulement. Une partie de ces opérations a donc été inscrite dans les contrats de plan État-région 2021-2027 en cours de négociation ».

Les ressources humaines étant stables – 230 personnes dont 193 ETP – après plusieurs diminutions enregistrées ces dernières années, l’ENTPE est dans la situation paradoxale de devoir développer ses capacités dans toutes les directions – formation initiale, développement de l’apprentissage, formation continue, considérée comme un immense enjeu pour l’avenir, réponse à des demandes de partenariat et des appels d’offres européens – à moyens constants. En-deçà d’un taux d’encadrement des élèves par le corps enseignant et administratif, son excellence académique ne pourrait plus être assurée.

Le cas de l’ENPC et de l’ENTPE interroge la vision que l’État a de ces deux écoles très anciennes. Les moyens dont elles disposent sont stabilisés, mais au regard des missions supplémentaires qui leur sont demandées – notamment la formation continue et la recherche – il leur est difficile de développer de nouvelles activités. C’est une situation regrettable car notre pays a besoin d’expertise technique et ces deux écoles pourraient contribuer encore plus au rayonnement de notre pays en accueillant plus d’étudiants étrangers.

Cette situation interroge aussi la capacité de l’État à jouer son rôle de stratège. Alors que la transition énergétique est érigée par le Gouvernement comme une priorité – du moins est-ce ce qu’il affiche – cette priorité ne semble pas aller au-delà des intentions. Elle ne s’accompagne pas d’une méthode d’action et d’un projet d’échéancier financier. Sans doute est-ce là le rôle du Secrétariat général à la planification écologique, mais il n’est pas pour l’heure opérationnel.

La France dispose avec l’ENPC et l’ENTPE de deux écoles à la fois prestigieuses et modernes, mais le Gouvernement ne met pas en harmonie les prévisions portant sur les métiers de l’avenir, qui sont indispensable à la transition écologique, et les formations que l’ensemble du secteur éducatif propose. La stabilisation des moyens de l’ENPC et de l’ENTPE est-elle satisfaisante ? Votre rapporteure pour avis répond par la négative. Le financement de ces deux écoles est marqué par une atonie regrettable alors qu’ils constituent des établissements d’excellence, dont les directions et les personnels ont une haute idée de leur mission de service public et un réel sens du dévouement envers leurs étudiants. La réussite de la transition écologique suppose de renforcer leur attractivité et leurs moyens pour former des ingénieurs rompus aux questions posées par l’urgence climatique. Elle exige donc une réflexion stratégique que le Gouvernement ne conduit malheureusement pas au regard des exigences écologiques de notre temps.

IV.   le parc immobilier au dÉfi de la transition ÉnergÉtique

Le pôle ministériel dispose d’un large ensemble immobilier à Paris et en province, pour abriter ses services centraux et déconcentrés. Comme la plupart des administrations, ce parc mêle des bâtiments anciens et modernes, dont certains ne répondent plus aux exigences de la transition énergétique. Des crédits d’investissement ont toujours été consacrés à chaque exercice budgétaire à leur entretien, mais la crise énergétique exige du pôle qu’il mette en place un plan de sobriété énergétique.

Ce plan est actuellement préparé en application de la circulaire du 25 juillet 2022 de Mme la Première ministre. Il vise une diminution des consommations de 10 % en deux ans. Il s’agit de dispositions pouvant être mises en œuvre rapidement car elles jouent essentiellement sur le comportement des agents et le pilotage des installations.

Au-delà de ce plan de sobriété, le pôle ministériel conduit depuis plusieurs années une action de réduction de ses consommations énergétiques dans le cadre de la mise en œuvre de sa stratégie immobilière. Cette action se décline en plusieurs objectifs :

La réduction des surfaces occupées par l’administration centrale est un facteur essentiel de réduction des consommations d’énergie, comme des autres coûts de fonctionnement immobiliers. Cette réduction passe par plusieurs leviers : libération de locaux devenus inutiles, recherche de nouvelles implantations moins étendues, accueil d’entités tierces ou densification des surfaces disponibles.

À titre d’exemple, la Grande Arche de la Défense et la tour Séquoia ont vocation à accueillir d’autres services et opérateurs au fur et à mesure que se libèrent des espaces disponibles. Dès avril 2017, y ont été installés des opérateurs comme l’Agence nationale de contrôle du logement social ou la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement, ainsi que des associations comme l’Association mondiale de la Route. Pour les années à venir, le ministère s’est engagé à accueillir à La Défense le médiateur national de l’énergie à l’expiration du bail du local qu’il occupe aujourd’hui. À une moindre échelle, l’unité des concours et examens maritimes (UCEM) a rejoint le bâtiment du Centre de valorisation des ressources humaines (CRVH) de Nantes en avril 2022.

Il s’agit de mobiliser au moins deux des trois leviers permettant d’améliorer l’efficacité énergétique : optimiser l’exploitation des équipements, effectuer des travaux de rénovation énergétique et faire évoluer le comportement des agents.

L’optimisation du pilotage des installations concerne d’abord les sites dotés d’une gestion technique centralisée, mais peut également s’appliquer à d’autres. Ainsi, en 2021, le site de l’École nationale des techniciens de l’équipement de Valenciennes a été choisi pour expérimenter un dispositif permettant d’optimiser sa consommation électrique en l’adaptant aux besoins des occupants et des usagers. Le pilotage en continu des équipements tient compte des caractéristiques de fonctionnement du bâtiment, de sa fréquentation qui, s’agissant d’un bâtiment d’enseignement et de logement étudiant, varie fortement au cours du temps, ou encore des conditions météorologiques environnantes. Cette intervention en temps réel est rendue possible grâce à la plateforme numérique développée par l’entreprise Ergelis. L’objectif est une économie d’énergie de 30 %.

En matière de travaux de gros entretien et de renouvellement destinés à améliorer les performances énergétiques des bâtiments, des travaux sur le CVRH de Toulouse sont en cours.

La sensibilisation des agents pour des comportements plus économes fait partie de la démarche « Services publics écoresponsables » du pôle ministériel et elle est avancée par celui-ci comme une clé de la sobriété énergétique. Bien entendu, chacun de nous doit se comporter de manière responsable pour limiter son impact écologique, mais faire des agents du ministère un vecteur essentiel de la politique de sobriété est abusif. Il revient à l’État de dégager les moyens de la rénovation thermique des bâtiments, pilier essentiel de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, et non, selon une logique libérale, d’attendre que des progrès proviennent de prises de conscience. C’est toute la différence entre une campagne de sensibilisation et une vraie politique publique.

Pour l’heure, le projet prioritaire du pôle ministériel est d’atteindre les objectifs du décret du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire (dit « tertiaire »), avec le remplacement de la façade de la tour Séquoia, qui présente des problèmes d’étanchéité et dont les performances thermiques sont médiocres. L’évaluation du coût des travaux est de 40 millions d’euros.

S’agissant des actions de plus long terme, le pôle ministériel a commencé à préparer son plan d’actions destiné à inscrire son parc immobilier dans les objectifs de réduction de 40 %, 50 % et 60 % des consommations énergétiques d’ici, respectivement, 2030, 2040 et 2050 fixés par le décret « tertiaire ».

Ce plan d’action est pour l’heure à l’état de projet et la question qui se pose est de savoir si l’État sera en mesure financièrement de dégager des moyens. La politique immobilière du pôle ministériel est dotée pour 2023 de 59,17 millions en AE et 81,27 millions en CP, mais les AE correspondant aux dépenses d’investissement sont peu élevées, à hauteur de 3,83 millions. Les CP sont certes plus importants (41,80 millions), mais les dotations apparaissent insuffisantes au regard de l’importance du parc immobilier du pôle.

V.   l’Évolution des prestations numÉriques et le tÉlÉtravail

Comme de nombreuses administrations, le pôle ministériel dispose de ressources humaines et techniques pour gérer son système d’information, mais il ne peut assurer en interne la totalité des prestations numériques. La couverture de l’ensemble des services et produits numériques pour la bonne marche de l’administration comme pour les services à apporter aux usagers rend nécessaire, pour le pôle, de recourir à différents prestataires externes, au-delà des fonctionnaires et contractuels affectés à la direction du numérique ou aux maîtrises d’ouvrage.

A.   L’importance des prestataires extérieurs

Les prestations portent en effet sur tous les champs du numérique : conception et urbanisation des produits et services, exploitation et évolution des réseaux, infrastructures et autres briques technologiques, circulation et sécurisation des données… Si la direction du numérique (DNUM) conserve la responsabilité et le pilotage de la politique numérique, les prestations extérieures restent indispensables pour mobiliser des expertises à la fois diverses, rares, ou sollicitées de manière peu fréquente. Elles permettent également aux techniciens du ministère de compléter leur vision de l’état de l’art et de remettre en cause des pratiques en voie d’obsolescence.

L’effectif de la DNUM est d’environ 350 agents équivalents temps plein. L’apport de prestataires extérieurs de services équivaut a minima à un doublement des effectifs. Pour ré-internaliser l’ensemble des fonctions assurées actuellement, il faudrait tenir compte du temps de formation continue et des ressources additionnelles à mobiliser pour proposer une trajectoire de carrière attractive et adaptée aux différentes situations.

Les principales sociétés sous-traitantes des tâches exécutées en 2022 pour le compte de l’État sur le périmètre du programme 217 sont, pour des engagements supérieurs à 1 million d’euros, SCC France, l’UGAP, Sopra Steria Group et Apitech. Cinq autres sous-traitants travaillent pour le ministère à raison d’engagements supérieurs à 100 000 euros : CGI France, NUMA, Wavestone, Open et Octo Technology.

B.   LES dotations consacrées à la politique numérique

La sous-action 4 « services numériques – fonctionnement des infrastructures et évolution des systèmes d’informations », inscrite à l’action 7 est dotée de 49,92 millions d’euros en AE et de 41,39 millions d’euros en CP.

Schématiquement, 7,13 millions d’euros en CP financent la construction de l’environnement de travail numérique ; 24,25 millions en CP portent sur la politique technique et le fonctionnement des infrastructures du pôle ministériel et 10 millions en CP sont consacrés à l’évolution et l’exploitation des systèmes d’information des activités support.

Les crédits demandés pour 2023 seront affectés aux besoins suivants :

-         adaptation de l’environnement de travail numérique aux usages actuels et futurs : renouvellement des matériels, travail à distance, outils collaboratifs, renforcement des réseaux ;

-         adaptation des infrastructures et services numériques : traiter l’obsolescence, mise en œuvre des feuilles de route numérique et écologie ;

-         évolution des systèmes d’information des activités support, dont principalement les services informatiques pour les ressources humaines et les finances.

Les dépenses relatives à l’achat de gros matériels et à la partie technique de la réalisation de systèmes d’information ministériels sont en diminution constante depuis 2017 (elles sont désormais inférieures à 1 million d’euros). L’évolution technologique tend par ailleurs à réduire l’utilisation de matériels en propre ou des applicatifs spécifiques pour privilégier des outils mutualisés, interministériels ainsi que les abonnements à des services. Les choix en 2016 de mettre en place une offre interministérielle de services d’hébergement informatique explique également la baisse progressive du niveau d’investissement. Conjugués aux nouveaux modes d’accès aux outils numériques, ces choix justifient que les opérations à venir de transformation numérique ne constituent plus des dépenses significatives d’investissement.

Le pôle ministériel a dû faire preuve de réactivité ces dernières années, notamment en raison de la crise sanitaire, qui a entraîné en 2020 une réallocation des crédits vers l’équipement des agents en moyens mobiles et sécurisés, le dimensionnement des réseaux et l’accessibilité à distance des applicatifs et outils numériques, plutôt que les évolutions des systèmes d’information support. L’exécution budgétaire de 2021 a aussi été marquée par les conséquences de la crise sanitaire et la généralisation du télétravail. Les moyens ont été mobilisés pour permettre l’adaptation des applicatifs, outils, matériels et infrastructures aux nouveaux modes de travail. Par ailleurs, les travaux entamés à la fin de 2021 sur les enjeux liés à la sobriété numérique et à l’ouverture des données ont abouti à l’élaboration de feuilles de route avec des actions initiées en 2022 et à renforcer en 2023.

C.   La politique de télétravail

Rappelons que le pôle ministériel a fait partie des ministères pionniers en matière de télétravail, les premières expérimentations remontant à 2012. Avant le premier confinement dû à la crise sanitaire, le taux de télétravail au sein du pôle était supérieur à 11 %. La crise sanitaire a accéléré le recours au télétravail, facilité par l’amélioration de l’environnement de travail numérique des agents et le développement des outils collaboratifs

En 2022, le taux de télétravail est de l’ordre de 56 % dans les services et de 50 % dans les établissements publics sous tutelle. Il s’agit de taux particulièrement élevés, sachant que certains des métiers du pôle ministériel, notamment les interventions techniques, ne peuvent par nature relever du télétravail. Ainsi en est-il des milliers d’agents affectés dans les directions interdépartementales des routes. 

Le pôle ministériel a diffusé en 2019 aux services une note de cadrage relative au déploiement du télétravail, mettant l’accent sur les chartes des temps visant à concilier travail et vie privée et à protéger le droit à la déconnexion. Les chartes des temps sont actuellement en cours de rédaction et de validation par les instances de concertation de différents services.

Le plan ministériel pluriannuel de prévention des risques psycho-sociaux (RPS), diffusé en avril 2021, comprend un volet sur le temps de travail. Ce plan prévoit deux actions principales :

- la mise en place généralisée des chartes des temps permettant de cadrer l’exercice du travail sur site et en télétravail ;

- faire de l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle l’un des thèmes majeurs de la négociation relative au télétravail.

Les négociations relatives au télétravail ont été menées avec les organisations syndicales représentatives du pôle ministériel, aboutissant à la signature le 12 février 2022 d’un accord ministériel, cosigné par Mme Barbara Pompili et l’ensemble de ces organisations. Cet accord reprend non seulement la nécessité d’élaborer les chartes des temps mais il prend en compte l’ensemble des risques psycho-sociaux qui pourraient émerger en raison d’un développement massif du télétravail.

À ce titre, plusieurs dispositifs ont d’ores et déjà été mis en place ou sont en cours de déploiement :

- une formation au télétravail et aux nouvelles méthodes de travail ;

- une formation obligatoire de tous les encadrants, en cours de déploiement, visant à mieux cerner les enjeux de l’encadrement à distance, de la gestion par la confiance et des risques psycho-sociaux pouvant apparaître dans leur équipe ;

- des outils pédagogiques, en cours d’élaboration afin d’expliquer les enjeux de la bonne               utilisation des outils numériques ;

- des actions de sensibilisation sont régulièrement réalisées afin de maintenir la vigilance des cadres sur les risques d’isolement des agents ;

- la mise en place d’équipes pluridisciplinaires afin d’analyser les conditions de la mise en œuvre du télétravail et en tirer des actions à mener (médecin du travail, conseiller de prévention, service social, service des ressources humaines, directions) ;

- l’intégration systématique du télétravail dans les documents uniques d’évaluation des risques professionnels (DUERP) avant la fin de l’année 2022 ;

- des visites à domicile des conseillers de prévention ou des assistants de service social, à la demande de l’agent et un accompagnement du service social, qui peut également être sollicité en cas de besoin ;

- l’information du médecin du travail de la liste des agents en télétravail plus de trois jours par semaine, et la possibilité pour celui-ci de mettre en place un suivi personnalisé des agents selon les demandes des agents ;

- une vigilance renforcée s’agissant des agents exerçant pour raisons médicales plus de trois jours en télétravail, avec des entretiens réguliers entre le manager et l’agent concerné ;

- la vigilance des encadrants quant au maintien d’un esprit collectif de travail.

En complément de l’ensemble de ces mesures de prévention, une négociation avec les organisations syndicales est en cours concernant le droit à la déconnexion qui constitue l’un des enjeux majeurs en termes de risques psycho-sociaux. Les travaux devraient s’achever d’ici la fin de l’année 2022.

D’après le pôle ministériel, grâce à ces mesures de prévention, il n’est pas remonté de signalements d’isolement des agents et ces derniers ont d’ailleurs manifesté, dans le cadre du baromètre social réalisé en 2021, leur souhait à 75 % de poursuivre le télétravail à la suite de la crise sanitaire. Le pôle ministériel déclare rester vigilant sur le risque d’isolement de certains agents, qui n’est pas tant le fait du télétravail que lié à des difficultés d’insertion ou de réinsertion professionnelle, à l’instar des agents longtemps éloignés du service.

 


   Examen en commission

Après avoir auditionné M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le 27 septembre 2022, M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, le 4 octobre 2022, Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre chargée de la transition énergétique, le 5 octobre 2022, et Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État chargée de l’écologie, le 12 octobre 2022, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » le mercredi 19 octobre 2022, matin, après-midi et soir (voir tome XI de l’avis 286 rect. https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/dossiers/plf_2023).

À l’issue de cet examen, elle a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission modifiés.

 


  1  

   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(Par ordre chronologique)

 

Fédération nationale de l’équipement et de l’environnement (FNEE-CGT)

M. Philippe Garcia, secrétaire général

 

Confédération générale du travail (CGT)

M. Ivan Candé

 

Fédération de l’équipement, de l’environnement, des transports et des services (Ffets FO)

M. Zainil Nizaraly, secrétaire général

 

Syndicat national des personnels de l’environnement (Snape FO)

M. Benoît Pradal, secrétaire général

 

École nationale des Ponts-et-Chaussées

Mme Sophie Mougard, directrice

M. Patrick Robn, directeur-adjoint

 

Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement d’Occitanie

M. Patrick Berg, directeur

 

École nationale des travaux publics de l’État

Mme Cécile Delolme, directrice

M. Xavier Olagne, directeur-adjoint

 

Ministère de la transition écologique

M. Guillaume Leforestier, secrétaire général

M. Vincent Moreau, directeur des affaires financières du secrétariat général

M. Jacques Clément, directeur des ressources humaines

 

Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires

M. Gilles Leblanc, président

M. Philippe Gabouleau, secrétaire général

M. Alexandre Boyer, chargé de communication

 

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement

M. Philippe Berteaud, directeur

 

Commission de régulation de l’énergie

M. Rachid Bouabane-Schmitt, secrétaire général

 

Commission nationale du débat public

Mme Chantal Jouanno, ancienne ministre, présidente

Mme Éléonore Bouhier, responsable du pôle administratif et comptable

 

 

 

 

 


([1]) Le titre 2 correspond aux dépenses de personnel.

([2])  https://www.acnusa.fr/sites/default/files/2022-03/BIlan%20social%202021.pdf