N° 1719

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2023.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680)

TOME VI

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

 

TRANSPORTS TERRESTRES ET FLUVIAUX

PAR Mme Danielle BRULEBOIS

Députée

——

 

 Voir les numéros : 1680, 1745 (Tome III, annexe 15).


— 1 —

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUction

PremiÈre partie : prÉsentation des crÉdits du projet de loi de finances pour 2024 consacrÉs aux infrastructures de transport

I. Un budget consacrÉ aux transports terrestres et fluviaux en forte hausse pour 2024

A. LES CRÉDITS DU Programme 203 augmentent significativement POUR 2024

1. Les crédits budgétaires augmentent de plus de 300 millions d’euros par rapport à la LFI 2023 à structure constante et courante

2. Des fonds de concours reversés au programme 203 en forte hausse

3. Des plafonds d’emplois stables sur le périmètre du programme

B. Le budget de L’AFIT France augmente de 0,8 milliard d’euros par rapport À 2023

1. Les recettes affectées à l’Afit France sont dynamiques et majorées par le projet de taxe sur les concessions autoroutières et les aéroports

2. La trajectoire haussière du budget de l’Afit France se poursuit en 2024

II. Une priorité donnée aux mobilités décarbonées par rapport à la route

A. Le soutien aux mobilités actives et au mode fluvial

1. Le rythme soutenu des investissements de régénération et de modernisation du réseau fluvial devrait se poursuivre en 2024

2. Le nouveau plan « Vélo et mobilités actives 2023-2027 » bénéficie de financements renforcés par rapport à 2018-2022

B. Les crédits dédiés à la route sont stables pour 2024

SECONDE PARTIE : Une nouvelle donne pour le ferroviaire

I. UN ENGAGEMENT HISTORIQUE POUR RELANCER LE FERROVIAIRE

A. Un contexte favorable au rail : la fréquentation des trains de voyageurs est dynamique

B. 100 milliards d’euros d’investissements à l’horizon 2040

II. régénérer et moderniser le réseau ferré national : une priorité pour réussir la décarbonation des transports

A. l’État du réseau ferré national

1. Un réseau, y compris structurant, vieillissant

2. Un risque de décrochage au niveau européen en matière de modernisation

B. les risques d’un sous-investissement à long terme

1. Le maintien du niveau des investissements actuels pourrait entraîner jusqu’à un quart de pertes de trafic à l’horizon 2040

2. Seul un sursaut d’investissements conforme aux annonces de la Première ministre permettrait une hausse durable des trafics ferroviaires

C. Des financements supplémentaires alloués au réseau ferré national à déterminer à l’horizon 2027

1. Une programmation pluriannuelle des investissements est attendue

2. La mobilisation du fonds de concours versé à SNCF Réseau pour le financement du réseau apparaît insuffisante

III. un premier acte pour le déploiement des services express régionaux métropolitains

commentaires des articles du projet de loi

Article additionnel après l’article 52 Rapport sur les modalités de financement de la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire

Article additionnel après l’article 52 Rapport sur le maillage des lignes ferroviaires existantes

Examen en commission

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 

 


— 1 —

   INTRODUction

Le présent avis porte sur le budget dédié aux transports terrestres et fluviaux dans le projet de loi de finances pour 2024, et tout particulièrement sur le périmètre du programme 203 consacré aux « Infrastructures et services de transports » dont la spécificité est d’être abondé par des fonds de concours de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). Ce programme finance les actions engagées en faveur de la politique des transports de l’État pour les modes ferroviaire, portuaire, fluvial et routier, à l’exception de celles financées par les autres sources de financement (en particulier, l’Afit France, le programme 869 dédié au Charles de Gaulle express, les taxes et redevances affectées à la Société du Grand Paris – SGP – et à Voies navigables de France – VNF). Il n’inclut également pas les transports maritimes et aériens qui font l’objet d’avis budgétaires distincts.

Dans le cadre de cet avis, les principaux acteurs concernés par le périmètre et les actualités du programme 203, dont l’Autorité de régulation des transports, le Conseil d’orientation des infrastructures, les Régions de France, le groupe SNCF et SNCF Réseau, la Société du Grand Paris, Voies navigables de France, France Nature Environnement (FNE) et la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), ont été entendus par votre rapporteure pour avis.

Votre rapporteure pour avis se félicite d’un budget global dédié aux transports terrestres et fluviaux significativement en hausse pour 2024. Cette hausse estimée à 12 % par rapport à l’année 2023 traduit les engagements du Gouvernement en faveur de la décarbonation des mobilités et du verdissement des infrastructures de transport. Le budget pour 2024 accorde en effet une nette priorité au développement des modes décarbonés (en particulier, le mode ferroviaire et les transports collectifs) par rapport au mode routier dont les crédits n’augmentent pas, et s’appuiera sur une nouvelle source de financement mettant à contribution les modes de transport les plus émetteurs de gaz à effet de serre.

Outre une présentation globale des crédits du programme 203 tels que complétés par le budget de l’Afit France pour 2024, votre rapporteure pour avis a souhaité porter un focus particulier sur les financements alloués au secteur ferroviaire dans le cadre de la « nouvelle donne ferroviaire » annoncée par la Première ministre. À la suite de la remise des conclusions du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) le 24 février 2023 ([1]), la Première ministre s’est en effet engagée à déployer un plan d’avenir pour les transports avec un investissement massif de 100 milliards d’euros annoncés dans le ferroviaire à l’horizon 2040.

Conformément aux recommandations du COI et de l’Autorité de régulation des transports ([2]), le soutien à la régénération et à la modernisation du réseau ferré national (RFN), dont l’état de vieillissement avancé constitue un frein majeur à la progression du mode ferroviaire, y a été défini comme une priorité, de même que le développement des transports du quotidien (dont le ferroviaire n’est qu’une composante) via le lancement de nouveaux services express régionaux métropolitains (SERM).

L’ensemble des acteurs auditionnés dans le cadre de cet avis ont salué ces annonces et les grandes orientations affichées pour le secteur ferroviaire. Les nouveaux contrats de plan État-région (CPER) pour la période 2023-2027, actuellement en cours de négociation, traduisent les engagements du Gouvernement en prévoyant une première hausse des crédits dédiés au rail. En revanche, à ce jour, il apparaît que les modalités de financement des investissements supplémentaires annoncés en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau ferroviaire d’ici la fin du quinquennat restent à déterminer et à programmer.

 

 


— 1 —

   PremiÈre partie : prÉsentation des crÉdits du projet de loi de finances pour 2024 consacrÉs aux infrastructures de transport

Il est à noter, à titre préliminaire, que le budget de l’État consacré aux transports terrestres et fluviaux est dispersé entre plusieurs sources de financement au sein du projet de loi de finances (PLF) 2024. Les crédits budgétaires du programme 203 « Infrastructures et services de transports » n’offrent ainsi qu’une vision partielle de l’ensemble des financements concernés.

Le budget total dédié aux transports terrestres et fluviaux peut être estimé à 10,367 milliards d’euros en 2024, en augmentation de 13 % par rapport à la loi de finance initiale (LFI) pour 2023. Cette estimation budgétaire inclut :

 le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) estimé à 4,6 milliards d’euros en 2024, en hausse de 800 millions d’euros par rapport à 2023 grâce au projet de taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance inscrit à l’article 15 du PLF 2024 ;

 le programme 203 « Infrastructures et services de transports », doté de 4,386 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), hors fonds de concours de l’Afit France ([3]), en hausse de 7,7 % (+ 314 millions d’euros) par rapport à la LFI 2023 ;

– les taxes affectées à la Société du Grand Paris et la redevance hydraulique versée à Voies navigables de France, respectivement plafonnées à 887 millions et 136,5 millions d’euros dans le PLF 2024 ;

 le programme 869 « Charles de Gaulle express » doté de 367 millions d’euros en CP.

I.   Un budget consacrÉ aux transports terrestres et fluviaux en forte hausse pour 2024

  1.   LES CRÉDITS DU Programme 203 augmentent significativement POUR 2024

1.   Les crédits budgétaires augmentent de plus de 300 millions d’euros par rapport à la LFI 2023 à structure constante et courante

Le programme 203 est doté de 4,386 milliards d’euros en crédits de paiement (CP) dans le PLF 2024, soit une hausse de 7,7 % (+ 314 millions d’euros) par rapport à la LFI 2023.

L’augmentation des crédits concerne principalement le mode ferroviaire (action 41) et les transports collectifs (action 44), en cohérence avec les engagements du Gouvernement en faveur des mobilités décarbonées et de la transition écologique du secteur des transports.

Évolution des crÉdits du programme 203 entre 2023 et 2024 par action

(Crédits de paiement en millions d’euros)

Action

Libellé

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

04

Routes – Entretien

300

299

-1

41

Ferroviaire

2 705

2 966

+261

42

Voies navigables

254

255

+1

43

Ports

94

92

-2

44

Transports collectifs

307

366

+59

45

Transports combinés/fret

136

136

0

47

Fonctions support

47

57

+10

50

Transport routier

158

167

+9

52

Transport aérien

72

47

-26

Total

4 073

4 386

+314

Source : DGITM

L’action 41 du programme 203, qui représente plus de 60 % du budget du programme, est composée essentiellement des subventions d’exploitation versées par l’État à SNCF Réseau et, dans une moindre proportion, SNCF Voyageurs. Dans ce périmètre, SNCF Réseau percevrait, pour l’année 2024, un concours de l’État de 2,942 milliards d’euros (en hausse) dont :

– 2,113 milliards d’euros au titre de la redevance d’accès des trains régionaux de voyageurs (TER) ;

– 600 millions d’euros pour la redevance d’accès des trains d’équilibre du territoire (TET), plus communément appelés « Intercités » ;

– 229 millions d’euros au titre de la « compensation fret » ([4]).

L’État verse également à SNCF Voyageurs une compensation au titre de l’exploitation des TET inscrite dans sa convention d’exploitation signée le 17 mars 2022 et estimée à 249,3 millions d’euros en 2024, ainsi qu’une compensation du manque à gagner résultant de la mise en œuvre des tarifs sociaux nationaux (26 millions d’euros pour 2024).

Au global, la hausse des crédits de l’action 41 concerne plus précisément les concours ferroviaires versés à SNCF Réseau (+ 238 millions d’euros), le financement de l’exploitation des TET versé à SNCF Voyageurs (+ 49 millions d’euros) et les tarifs sociaux (+ 10 millions d’euros) qui recouvrent les premiers financements relatifs à la mise en place du « Pass rail » ([5]).

La hausse de 10 millions d’euros inscrite à l’action 47 « Fonctions support » concerne spécifiquement le financement de l’expérimentation du titre unique. Ce dispositif vise à encourager le recours aux transports collectifs en simplifiant les démarches et les déplacements des usagers grâce à un billet commun à tous les transports collectifs d’un territoire. Le ministre délégué chargé des transports, M. Clément Beaune, a lancé de premiers travaux au début de l’année 2023 pour en déterminer l’architecture, en partenariat avec l’Agence de l’innovation des transports (AIT). Des expérimentations sont prévues avec des collectivités volontaires pour 2024.

L’action 47 recouvre également les subventions pour charges de service public (SCSP) versées à l’Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) et à l’Autorité de régulation des transports (ART) dont la dotation a été augmentée de 1 million d’euros pour atteindre 15 millions d’euros dans le PLF 2024. Cette hausse est néanmoins jugée insuffisante par le régulateur au regard de l’élargissement continu de son champ de compétences et de la hausse de ses effectifs. L’ART estime une réévaluation nécessaire de l’ordre de 4,6 millions d’euros.

Enfin, l’enveloppe supplémentaire de 9 millions d’euros prévue à l’action 50 « Transport routier » correspond au montant résultant du nouvel accord sur le congé de fin d’activité des conducteurs routiers.

Les autres actions du programme sont stables par rapport à la LFI 2023, en particulier s’agissant des crédits de la politique d’entretien et de régénération du réseau routier national (action 04 dotée de 299 millions d’euros), des crédits pour les ports (action 43) correspondant aux subventions au dragage versées par l’État ainsi que des crédits pour les voies navigables (action 42) couvrant essentiellement la SCSP versée à Voies navigables de France.

2.   Des fonds de concours reversés au programme 203 en forte hausse

L’une des spécificités du programme 203 est d’être abondé par voie de fonds de concours émanant de l’Afit, de la SNCF et des collectivités territoriales. Ces fonds de concours s’inscrivent également en forte hausse dans le PLF 2024 par rapport à la LFI 2023 (+ 1,3 milliard d’euros). Ce dynamisme s’explique notamment par la hausse prévisionnelle du budget de l’Afit de l’ordre de 800 millions d’euros pour 2024 et l’engagement du groupe SNCF dans le cadre de la « nouvelle donne ferroviaire » annoncée par la Première ministre.

L’augmentation porte principalement sur l’action 41 « Ferroviaire » (+ 856 millions d’euros correspondant à des fonds de concours du groupe SNCF) et sur l’action 44 « Transports collectifs » (+ 231 millions d’euros correspondant essentiellement aux opérations du volet « Mobilités » du CPER d’Île-de-France).

Évolution des fonds de concours REversÉs au programme 203 entre 2023 et 2024 par action

(Crédits de paiement en millions d’euros)

Action

Libellé

LFI 2023

PLF 2024

Évolution

01

Routes – Développement

796

910

+114

04

Routes – Entretien

658

732

+74

41

Ferroviaire

639

1 495

+856

42

Voies navigables

2

10

+8

43

Ports

89

78

-11

44

Transports collectifs

443

674

+231

45

Transports combinés/fret

71

107

+37

47

Fonctions support

2

2

0

50

Transports routier

0

0

0

51

Sécurité ferroviaire

45

45

0

Total

2 744

4 054

+1 310

Source : DGITM

Il est à noter que ces montants pourront évoluer en fonction du budget voté par le conseil d’administration de l’Afit, du groupe SNCF, et des délibérations des collectivités territoriales.

3.   Des plafonds d’emplois stables sur le périmètre du programme

La mise en œuvre du programme 203 est assurée par les agents du ministère des transports, soit 9 019 équivalents temps plein travaillé (ETPT), inscrits à l’action 8 du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables », et répartis entre l’administration centrale (principalement la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer – DGITM) et les services déconcentrés.

Une part importante du programme est également mise en œuvre par des opérateurs, entreprises publiques et délégataires, dont SNCF Réseau, Voies navigables de France, les ports et les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA), l’Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF), l’Autorité de régulation des transports (ART), les entreprises publiques de transport (dont la RATP), l’Afit France et la Société du Grand Paris.

Les plafonds d’emplois des opérateurs inscrits au programme 203 sont stables dans le PLF 2024 par rapport à la LFI 2023. Lors de leurs auditions dans le cadre de cet avis, la SGP et VNF ont toutefois alerté sur l’évolution de leurs plafonds d’emplois :

– la SGP identifie un besoin de plus d’une centaine d’ETP supplémentaires pour assurer ses nouvelles missions potentielles ([6]) auprès des métropoles concernées par le déploiement des services express régionaux métropolitains (SERM) ;

– quant à VNF, ses plafonds d’emplois ont été réduits significativement par les lois de finances successivement adoptées depuis 2015. L’opérateur a dû engager des restructurations profondes et alerte sur la complexité du dialogue social qui en a résulté, dans un contexte où les objectifs fixés en matière de régénération, de modernisation et de développement de son réseau fluvial par son contrat d’objectifs et de performance (COP) 2020-2029 sont particulièrement ambitieux.

Évolution des plafonds d’emplois des opÉrateurs du programme

 

LFI 2023

PLF 2024

Sous plafond

Hors plafond

Sous plafond

Hors plafond

SGP

1 017

 

1 017

 

VNF

4 028

35

4 028

40

EPSF

106

 

106

 

Source : PLF 2024

B.   Le budget de L’AFIT France augmente de 0,8 milliard d’euros par rapport À 2023

1.   Les recettes affectées à l’Afit France sont dynamiques et majorées par le projet de taxe sur les concessions autoroutières et les aéroports

Les recettes de l’Afit sont en augmentation constante depuis 2022. D’après les prévisions actuelles, elles augmenteraient de 800 millions d’euros (+ 22 %) en 2024 pour atteindre près de 4,6 milliards d’euros.

Certaines ressources seraient particulièrement dynamiques en 2024 : le produit de la taxe de solidarité sur les billets d’avion affecté à l’Afit augmenterait de 55 %. Les produits de la redevance domaniale et de l’ex-TICPE sont également orientés à la hausse, respectivement à hauteur de 11 % et de 10 %.

Recettes prÉvisionnelles de l’AFIT France en 2023 et 2024

(En millions d’euros)

 

Recettes

Exécution 2022

Prévision 2023

Prévision 2024

Évolution en % 2023-2024

Taxe d’aménagement du territoire (due par les concessionnaires d’autoroutes)

561

561

561

0 %

Redevance domaniale

370

370

411

+ 11%

Amendes radars

178

250

250

0 %

TICPE

1 248

1 908

2 090

+10 %

Taxe de solidarité sur les billets d’avion

138

163

252

+55 %

Plan de relance

660

498

411

-17 %

Opération « Marseille en Grand »

82

0

0

0 %

Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance (nouvelle)

 

 

600

 

Total

3 237

3 750

4 575

+21 %

Source : DGITM.

Surtout, le projet de loi de finances pour 2024 prévoit l’instauration d’une nouvelle taxe dont le produit serait intégralement affecté à l’Afit (article L. 1512‑20 du code des transports) afin de financer le plan d’avenir pour les transports et la « nouvelle donne ferroviaire » annoncée par la Première ministre en février 2023.

Ce projet de « taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance » est inscrit à l’article 15 du PLF 2024. Y seraient assujettis les exploitants d’infrastructures de transport de longue distance (tels que définis par un nouvel article L. 425-4 du code des impositions sur les biens et services) dont les revenus d’exploitation excèdent 120 millions d’euros par an et dont le niveau moyen de rentabilité excède 10 %.

Compte tenu de ces critères, le projet de taxe toucherait principalement les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) historiques (APRR, AREA, Atlandes, ATMB, Cofiroute, Escota, SANEF, SAPN) et quelques aéroports (Paris, Lyon, Marseille, Nice) ([7]), soit expressément les modes de transport les plus émetteurs de gaz à effet de serre et polluants. Le rendement de la taxe est estimé à 600 millions d’euros en 2024, dont 480 millions des SCA et 120 millions des aéroports (essentiellement Aéroports de Paris).

Les retombées de ce projet de taxe sur les tarifs autoroutiers et aériens demeurent incertaines à ce stade d’examen du présent PLF. Le projet de taxe soulève en particulier des incertitudes juridiques concernant l’ouverture d’un potentiel droit à compensation sur les péages des SCA historiques (APRR, AREA, ASF, Escota, Sanef et SAPN).

Le droit à compensation des sociétés concessionnaires d’autoroutes

L’article 32 du cahier des charges des SCA historiques prévoit un dispositif de compensation en cas de modification, création ou suppression d’impôt, de taxe ou de redevance « spécifique » aux sociétés concessionnaires d’autoroutes de nature à dégrader l’équilibre économique et financier des concessions. Dans son avis portant sur la contribution de certaines sociétés titulaires de contrats de concession ou de contrats assimilés au financement des investissements publics ([8]), le Conseil d’État alerte ainsi sur le fait que « toute nouvelle contribution qui, sans viser explicitement les sociétés concessionnaires d’autoroutes, aurait pour effet pratique, compte tenu de ses modalités, de peser exclusivement ou quasi exclusivement sur elles pourrait entrer, sous réserve de l’appréciation du juge du contrat, dans le champ de l’article 32 et, par suite, ouvrir à ces sociétés un droit à compensation. » Selon l’interprétation de ce point, les SCA historiques pourraient être fondées à répercuter la nouvelle taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance, inscrite dans le PLF 2024, sur les péages.

Par ailleurs, dans ce même avis, le Conseil d’État a exclu la possibilité de neutraliser les stipulations de l’article 32 par une disposition législative. Il a en effet estimé que les motifs d’intérêt général invoqués par le Gouvernement – et notamment les « effets d’aubaine » générés par la baisse de la fiscalité générale, et en particulier du taux de l’impôt sur les sociétés, qui permettrait aux SCA historiques de dégager environ 7,9 milliards de dividendes supplémentaires jusqu’à la fin des contrats ([9]) – n’étaient pas suffisants pour justifier une atteinte aux contrats légalement conclus au sens de la jurisprudence constitutionnelle.

La taxe pourrait également faire l’objet d’une répercussion sur les tarifs aériens. Le groupe Aéroports de Paris, qui estime à 90 millions d’euros l’impact de la taxe sur son bénéfice d’exploitation en 2024, a annoncé son intention de répercuter progressivement jusqu’à 75 % de la taxe sur les compagnies aériennes à travers les redevances qu’elles lui versent à compter de 2024.

Au global, l’essentiel des recettes de l’Afit provient des secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre et polluants (routier et aérien) pour le financement d’investissements fléchés vers des modes décarbonés et moins polluants.

2.   La trajectoire haussière du budget de l’Afit France se poursuit en 2024

La loi n° 2019‑1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM) avait défini, pour la période 2019-2023, une trajectoire pluriannuelle d’investissements en faveur des infrastructures de transport. Celle-ci a été respectée et même dépassée par les budgets successifs de l’Afit avec 15,8 milliards d’euros de dépenses réalisées entre 2019 et 2023 (par rapport aux 13,7 milliards initialement prévus par la LOM).

Trajectoire financiÈre de l’AFIT France prévisionnelle (LOM) et réelle pour la période 2019-2023

(En millions d’euros)

 

Trajectoire financière

2019

2020

2021

2022

2023

Total

Prévisionnelle (LOM)

2 683

2 982

2 687

2 580

2 780

13 712

Dépenses réalisées dans le cadre LOM ([10])

2 464

2 824

3 051

3 655

3 811

15 805

Source : LOM, DGITM.

Conformément à la loi d’orientation des mobilités, et à la suite des travaux du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), la trajectoire d’investissements de l’Afit devrait être prochainement formellement définie pour la période 2024-2029.

Si celle-ci n’a pas encore été communiquée au Parlement, la Première ministre s’est d’ores et déjà prononcée le 24 février 2023 en faveur du scénario dit de la « planification écologique » issu du rapport du COI et recommandé par ses membres ([11]). Ce scénario accorde une nette priorité aux mobilités décarbonées (en particulier, le ferroviaire, les transports collectifs et le fluvial), aux mobilités du quotidien ainsi qu’à la régénération et la modernisation des infrastructures existantes par rapport aux projets de développement de nouveaux services de transport. Il prévoit des hausses conséquentes des budgets d’investissement en faveur du réseau ferroviaire.

Conformément à cet engagement, en 2024, le budget affecté à l’Afit est en forte hausse avec près de 4,6 milliards d’euros annoncés dans la loi de programmation des finances publiques (+22 % par rapport à 2023). La hausse bénéficierait essentiellement aux mobilités décarbonées, en particulier le ferroviaire, les transports collectifs, les transports combinés et le vélo qui représenteraient 59 % des investissements en 2024 (contre moins de 50 % en 2022).

RÉpartition des dÉpenses de l’AFIT par mode de transport

(En millions d’euros)

Mode de transport

Exécution 2022

Prévision 2023

Prévision 2024

% en 2024

Routes – Entretien et régénération

597

678

748

16 %

Routes – Développement et modernisation

461

542

687

15 %

Ferroviaire, transports collectifs, combinés, vélo

1 785

2 187

2 703

59 %

Voies navigables

309

185

318

7 %

Ports

79

81

78

2 %

Autres

56

104

40

1 %

Total

3 654

3 777

4 575

100 %

Source : Afit France, DGITM.

À moyen terme, l’Afit assurera intégralement le financement de la part État des volets « Mobilités » des contrats de plan État-région (CPER), soit 8,6 milliards d’euros sur la période 2023-2027 (1,7 milliard par an). L’enveloppe prévue est en hausse de 50 % par rapport aux CPER 2015-2022 (hors financements supplémentaires issus du plan de relance) et traduit les nouvelles priorités budgétaires.

RÉpartition par mode de transport des 8,6 milliards d’euros prévus dans les CPER 2023-2027 (part État financée par l’Afit)

Source : Communication du Gouvernement sur le « Plan d’avenir pour les transports », publiée le 7 juin 2023.

Près des deux tiers de l’enveloppe sont ainsi fléchés vers les transports ferroviaires et collectifs, notamment les SERM (700 millions d’euros), les petites lignes (environ 750 millions d’euros), les gares pour des opérations de mise en accessibilité au bénéfice des personnes à mobilité réduite (500 millions) et le fret (500 millions). Les ports bénéficieraient également de moyens renforcés (500 millions d’euros), de même que le secteur fluvial (plus de 400 millions d’euros) et le vélo dans le cadre du nouveau plan « Vélo et mobilités actives » (200 millions d’euros). En contrepartie, l’enveloppe prévue pour les opérations routières est réduite de moitié par rapport aux précédents CPER (1,6 milliard d’euros sur la période 2023-2027 contre 3,3 milliards sur 2015-2022).

Hors CPER, l’Afit continue de soutenir financièrement le renouvellement du matériel roulant des TET au titre de conventions de fonctionnement signées par l’État sur plusieurs lignes dont elle reste l’autorité organisatrice.

La programmation détaillée des dépenses de l’Afit pour 2024 sera votée par son conseil d’administration à la fin de l’année 2023.

II.   Une priorité donnée aux mobilités décarbonées par rapport à la route

A.   Le soutien aux mobilités actives et au mode fluvial

1.   Le rythme soutenu des investissements de régénération et de modernisation du réseau fluvial devrait se poursuivre en 2024

Le contrat d’objectifs et de performance (COP) signé le 30 avril 2021 entre l’État et VNF pour la période 2020-2029 a fixé une trajectoire d’investissements en régénération et modernisation du réseau fluvial (hors projets de développement) volontariste. Grâce à une enveloppe supplémentaire du plan de relance (175 millions d’euros financés par l’État), l’opérateur a largement respecté la trajectoire prévue avec plus de 230 millions d’euros d’investissements réalisés en moyenne sur les années 2021, 2022 et 2023. Le plan de relance aura ainsi permis d’accélérer de nombreux chantiers sur le réseau fluvial.

Le COP est actuellement en cours d’actualisation (prévue tous les trois ans) ; ses montants pourraient être révisés à la hausse afin de prendre en compte le contexte inflationniste et également les effets du réchauffement climatique qui majorent la fragilité du réseau fluvial (du fait d’une sécheresse accrue). En 2023, en matière de régénération, l’établissement priorise des opérations de gestion de la ressource en eau (travaux d’étanchéité, renouvellement d’ouvrages hydrauliques, sécurisation de barrages manuels sur le réseau à petit gabarit). Les opérations de modernisation visent notamment le déploiement de la fibre optique et de la téléconduite des ouvrages hydrauliques de façon à en améliorer la fiabilité et la productivité.

L’opérateur alerte sur le risque d’une décélération des projets d’investissement dans le contexte inflationniste et du fait de l’épuisement des crédits issus du plan de relance. Il est donc attendu que l’actualisation en cours du COP, dans le cadre de sa révision triennale, préserve la dynamique enclenchée ces dernières années et conformément aux recommandations du COI.

Les ressources de l’opérateur fluvial sont par ailleurs globalement stables pour 2024 :

– la subvention pour charges de service public (SCSP), qui représente plus de 35 % des ressources budgétaires de VNF, est stable par rapport à 2023. Elle s’élève à 253,3 millions d’euros en AE et en CP en 2024 ;

– le plafond de la redevance hydraulique, principale ressource propre de l’établissement, a été réévalué dans le projet de loi de finances pour 2024 à 136,5 millions d’euros (127,5 millions dans la LFI 2023) pour permettre à l’établissement de répondre à des besoins croissants (notamment liés au dragage des voies navigables) et des contraintes nouvelles (telles que l’envahissement du réseau à petit gabarit par des espèces exotiques envahissantes). D’après l’opérateur, un déplafonnement de cette ressource pourrait permettre de collecter jusqu’à 200 millions d’euros par an. Ce budget supplémentaire serait essentiel pour soutenir le financement des investissements dans le réseau fluvial ;

– les autres ressources propres de VNF (redevances domaniales, péages pour le fret et le tourisme notamment) devraient progresser en 2024 (elles sont estimées à 67,5 millions d’euros en 2023) ;

– VNF reçoit également une dotation de l’Afit de 128 millions d’euros destinée aux investissements de régénération et de modernisation, ainsi que des cofinancements de l’Union européenne et des collectivités locales au titre d’opérations en cours ou déjà terminées comme le projet Seine-Escaut (80 millions d’euros estimés en 2023) ;

Après une trajectoire continue de réduction d’effectifs sur ces cinq dernières années, le plafond d’emplois de l’opérateur est stabilisé à 4 028 ETP dans le PLF 2024.

2.   Le nouveau plan « Vélo et mobilités actives 2023-2027 » bénéficie de financements renforcés par rapport à 2018-2022

Le nouveau plan « Vélo et mobilités actives 2023-2027 », annoncé en septembre 2022 par la Première ministre, se poursuit en 2024. Il fait suite à un premier plan Vélo (2018-2022) qui avait permis de financer 933 projets d’aménagements cyclables, à travers cinq appels à projets du Fonds national mobilités actives. Ce premier plan représentait un budget total de 365 millions d’euros de subventions publiques (dont 100 millions issus du plan de relance) et un montant total de projets de 1 833 millions d’euros. Dans le cadre du nouveau plan, un sixième appel à projets d’aménagements cyclables a été lancé et 200 millions d’euros de subventions pourraient être attribués pour la seule année 2023.

Le plan a été doté de 2 milliards d’euros sur l’ensemble de la période 2023‑2027. En complément du Fonds national mobilités actives, dans le cadre des CPER 2023-2027, l’Afit contribue également au plan à hauteur de 200 millions d’euros. Cette enveloppe vise à soutenir financièrement l’aménagement des itinéraires cyclables prévus par les schémas national et régionaux des véloroutes. Le programme CEE Alvéole+ de soutien aux stationnements sécurisés de vélo devrait également être abondé.

L’ensemble des indicateurs disponibles sont en progression et attestent d’un développement important des infrastructures cyclables et de la pratique du vélo. Les aménagements cyclables sécurisés ont augmenté (de 40 201 kilomètres en 2017 à 57 305 en 2023). Les ventes de vélos à assistance électrique ont progressé de 165 % entre 2017 et 2022 avec environ 16 millions de vélos vendus sur la période. 87 millions d’euros ont été versés depuis 2017 au titre des aides à l’achat de vélos (inscrites au programme 174), qui seront par ailleurs étendues aux vélos d’occasion en 2024. La part modale du vélo pour les déplacements entre le domicile et le travail a augmenté de 2,2 % en 2017 à 2,9 % en 2020.

Le nouveau plan « Vélo et mobilités actives » contient également un volet dédié au développement de la marche à pied. Les collectivités sont incitées à mieux prendre en compte la marche dans leurs politiques publiques et à l’appréhender comme un mode de déplacement à part entière à la fois vertueux pour la santé et l’environnement. Un appel à projet « Marche du quotidien » doté de 1 million d’euros a été lancé en mai 2023 par l’Agence de la transition écologique (Ademe) afin d’accompagner les collectivités souhaitant s’engager dans une politique dédiée (soutien financier et appui aux actions mises en place). Un deuxième appel à projets d’un même montant devrait être lancé en 2024.

B.   Les crédits dédiés à la route sont stables pour 2024

En contrepartie du renforcement des moyens consacrés aux mobilités décarbonées, le budget consacré aux infrastructures routières est globalement stable en 2024 par rapport à 2023 en euros constants, avec une priorité donnée en faveur de l’entretien et de la régénération du réseau existant :

– environ 1 milliard d’euros, dont 748 millions d’euros issus du budget de l’Afit et 299 millions d’euros issus de l’action 04 du programme 203, est consacré à l’entretien et à la régénération du réseau routier. Ces montants sont quasi-stables en 2024 par rapport à 2023 ;

– le budget prévisionnel de l’Afit consacré au développement d’infrastructures routières (nouveaux projets routiers) s’élève à 687 millions d’euros (+145 millions par rapport à 2023), ce qui représente une part stable dans le budget de l’agence (de l’ordre de 15 %) ;

– enfin, dans les CPER 2023-2027, il est prévu que les montants dédiés au mode routier soient divisés par deux par rapport aux précédents CPER (1,6 milliard d’euros sur la période 2023-2027 contre 3,3 milliards sur 2015-2022).

D’après l’audition de la DGITM, les investissements dans le réseau routier seraient par ailleurs principalement orientés vers le verdissement de ses infrastructures et de son usage (utilisation de matériaux recyclés sur les chantiers, développement d’aires de covoiturage, de voies réservées, de bornes de recharge, de dispositifs de réduction des nuisances sonores et d’amélioration du traitement des eaux, etc.).

Ces choix budgétaires sont conformes au rapport du COI remis à la Première ministre, qui, dans son scénario dit de la « planification écologique », recommandait la décélération des projets de développement routier et la concentration des investissements en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau routier existant.

Ces orientations ne concernent toutefois pas tous les territoires, en particulier certains situés en outre-mer comme la Guyane, dont le réseau routier est parcellaire et nécessite a contrario d’importants projets de développement à des fins de désenclavement dans un contexte de forte pression démographique.

 

 


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SECONDE PARTIE : Une nouvelle donne pour le ferroviaire

  1.   UN ENGAGEMENT HISTORIQUE POUR RELANCER LE FERROVIAIRE

A.   Un contexte favorable au rail : la fréquentation des trains de voyageurs est dynamique

Avec 391 millions de trains.km en 2022, l’offre de transport ferroviaire de voyageurs poursuit le rebond entamé en 2021 après la crise sanitaire avec une progression de près de 9 % par an et un niveau supérieur de plus de 2 % à celui de 2019. La hausse est portée par le développement de l’offre de services conventionnés TER et Intercités (+8 % par rapport à 2019). La reprise est en revanche plus lente pour les services librement organisés (- 3 % par rapport à 2019 en trains.km).

La fréquentation ferroviaire, mesurée en nombre de passagers par kilomètre, s’inscrit encore plus nettement en hausse (+ 2 % en 2022 par rapport à 2019 avec plus de 100 milliards de passagers.km). Elle augmente pour les services conventionnés TER et Intercités (+ 12 %), en particulier les Intercités de nuit (+ 77 %), et les services commerciaux (+ 4 %), mais demeure en net recul pour les services conventionnés d’Ile-de-France (- 11 %).

Les premières données disponibles pour l’année 2023 confirment ces tendances. La fréquentation augmente de 6 % au premier semestre 2023 par rapport au premier semestre 2022. La hausse concerne tout autant les Intercités (+ 13 %), les TER (+ 11 %) que le Transilien (+ 4,6 %) et le TGV (+ 4,9 %) ([12]). À l’été 2023, les voyageurs ont également davantage anticipé leurs réservations avec environ la moitié des billets achetée plus de 25 jours avant le départ (+8 jours par rapport à 2022). Le groupe SNCF anticipe une demande dynamique dans les prochaines années qui pourrait se traduire par des hausses de trafic d’environ 20 % pour la longue distance et les TER, et 10 % pour les Transilien à l’horizon d’une dizaine d’années.

Ces données récentes traduisent à la fois des effets de rattrapage post-crise sanitaire mais aussi un renouvellement de la demande des voyageurs en faveur du train. Le contexte apparaît particulièrement favorable au report modal attendu des voyageurs de la route vers le rail.

B.   100 milliards d’euros d’investissements à l’horizon 2040

Lors de la remise officielle du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures le 24 février 2023, la Première ministre a annoncé une « nouvelle donne ferroviaire » de l’ordre de 100 milliards d’euros d’investissements supplémentaires jusqu’en 2040. Ces annonces traduisent un engagement historique pour relancer le secteur ferroviaire dont les bénéfices en matière de décarbonation du secteur des transports sont considérables. Alors que le transport routier est responsable de près des trois quarts des émissions de gaz à effet de serre du secteur, le transport ferroviaire est le mode de transport le moins émetteur. Il représente seulement 1,2 % des émissions du secteur pour une part modale qui s’établit à 9,2 % en 2021 pour le transport de fret et de voyageurs ([13]).

Les annonces de la Première ministre ont donné une nette priorité à la régénération et la modernisation du réseau ferré national avec l’ambition d’augmenter les financements d’ici la fin du quinquennat respectivement à hauteur de 1 milliard d’euros supplémentaires pour la régénération du réseau, et 500 millions d’euros pour sa modernisation, et en particulier, le déploiement de la commande centralisée de réseau (CCR) et de l’ERTMS (« European rail trafic management system ») (en sus des 2,8 milliards d’euros prévus par le contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau).

Le plan d’investissements annoncé soutiendrait également le développement des transports du quotidien via la mise en œuvre des services express régionaux métropolitains (SERM) dans plusieurs métropoles.

L’ensemble des personnes auditionnées dans le cadre de cet avis ont salué l’annonce de ce plan et en particulier, la priorité donnée à la régénération et la modernisation du réseau existant dont l’état de vieillissement préoccupant obérerait toute relance du rail à moyen et long terme. Ce choix est cohérent avec les conclusions du Conseil d’orientation des infrastructures ([14]) et, plus récemment, celles de l’Autorité de régulation des transports dans son rapport publié à l’été ([15]).

Le scénario dit de la « planification écologique » recommandé par les membres du COI et retenu par la Première ministre, recommandait en effet un effort supplémentaire de l’ordre de 2,3 milliards d’euros (constants) par an pendant toute la décennie 2030, dont environ 1 milliard supplémentaire pour la régénération du réseau, 1 milliard d’euros pour le déploiement de la CCR (avec l’objectif d’une couverture de 90 % du réseau à l’horizon 2040) et entre 300 et 500 millions d’euros pour le déploiement de l’ERTMS (avec l’objectif d’équiper le réseau central du réseau transeuropéen de transport (RTE-T), soit 9 000 kilomètres, à l’horizon 2040).

II.   régénérer et moderniser le réseau ferré national : une priorité pour réussir la décarbonation des transports

A.   l’État du réseau ferré national

1.   Un réseau, y compris structurant, vieillissant

À ce jour, malgré l’augmentation des efforts de régénération, le réseau, y compris structurant, atteint des signes de vieillissement préoccupants :

– l’âge des voies de réseau ferré national s’établit à 28,4 ans en 2022 (22,6 ans pour les voies de catégories 2 à 4 les plus utilisées). Par comparaison, le réseau allemand atteint un âge moyen de 20,9 ans en 2022, stable dans le temps ([16]) ;

– l’indice de consistance de la voie (ICV) ([17]) s’élève à 49,1 en 2022 ; il est en hausse depuis plusieurs années mais en-deçà de l’indice optimal pour le renouvellement des voies, fixé à 55 par SNCF Réseau (soit un âge d’environ 20 ans pour les voies de catégories 2 à 4).

Évolution de la longueur des voies et de l’icv par catégorie de voie par rapport au seuil optimal entre 2019 et 2022

2.   Un risque de décrochage au niveau européen en matière de modernisation

La France a par ailleurs accumulé du retard dans la modernisation de son réseau ferroviaire et en particulier, le déploiement de la commande centralisée du réseau (CCR) et de l’ERTMS (« European rail trafic management system ») :

– la France a équipé moins de 20 % de son réseau de la CCR (contre plus de 60 % sur les réseaux de l’Allemagne, du Royaume-Uni, de la Suisse et de l’Italie) :

– l’ERTMS est déployé sur environ 1 100 kilomètres du réseau, ce qui représente moins de 15 % de l’objectif fixé par le règlement n° 1315/2013 (UE) pour 2030 (soit 9 000 kilomètres).

L’Autorité de régulation des transports alerte sur un véritable « risque de décrochage » du réseau ferroviaire français par rapport à ses voisins européens ; nombre d’entre eux s’étant engagés résolument dans une modernisation et une digitalisation de leur infrastructure ferroviaire depuis les années 1990-2000.

État d’avancement du déploiement de la commande centralisée de réseau (CCR) et de l’ERTMS à l’horizon 2030 dans les principaux pays européens

Source : ART.

Le modèle de financement de la CCR et de l’ERTMS ne permet actuellement pas de combler le retard pris. Le contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau pour 2021-2030 ne prévoit en effet ni de budget dédié (en dehors des fonds propres du gestionnaire d’infrastructures) ni de trajectoire industrielle et financière précise en matière de modernisation du réseau. Les dépenses réalisées par SNCF Réseau, de l’ordre de 400 millions d’euros pour la CCR et 250 millions d’euros pour l’ERTMS pour l’année 2023, apparaissent donc largement insuffisantes par rapport à des besoins estimés à 2 milliards d’euros par an jusqu’en 2040 par l’ART.

investissements réalisés par sncf réseau pour la ccr entre 2018 et 2023

(en millions d’euros courants)

 

2018

2019

2020

2021

2022

Prévision 2023

Dépenses réalisées signalisation

327

362

330

384

393

600

Dont CCR

222

241

229

254

287

411

Source : DGITM.

Investissements réalisés par SNCF Réseau pour l’ERTMS entre 2018 et 2023

(en millions d’euros courants)

 

2018

2019

2020

2021

2022

Prévision 2023

Dépenses réalisées

12

37

89

134

173

256

Dont LGV Paris-Lyon

12

34

82

121

154

157

Source : DGITM.

Or, l’accélération de la modernisation du réseau apporterait des gains significatifs en matière de productivité, de capacité et de qualité de service. La France se prive ainsi de gains de performance importants de nature à rendre le rail plus compétitif par rapport à d’autres modes plus polluants et émetteurs de GES. La dégradation du réseau ferré national et son obsolescence technique rendent également hypothétique toute hausse des trafics ferroviaires, tout en générant des frais d’entretien supplémentaires à moyen terme.

B.   les risques d’un sous-investissement à long terme

1.   Le maintien du niveau des investissements actuels pourrait entraîner jusqu’à un quart de pertes de trafic à l’horizon 2040

Dans son rapport publié en juillet 2023 (précité), l’Autorité de régulation des transports (ART) a évalué les effets sur l’état du réseau et les trafics de deux scénarios d’investissements : un scénario dit « tendanciel » issu de la trajectoire d’investissements prévue par le contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau pour la période 2021-2023 ([18]), et le scénario dit de « transition écologique » reprenant la trajectoire « planification écologique » défini par le dernier rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) remis à la Première ministre le 24 février 2023.

Les résultats de leur étude confirment que le scénario « tendanciel » fondé sur les niveaux d’investissements réalisés ces dernières années, ne permet pas d’enrayer la spirale de paupérisation du réseau. Bien que la trajectoire des dépenses de régénération de SNCF Réseau a été relevée à plus de 2,8 milliards d’euros par an pour la période 2021-2030 dans le cadre de son contrat de performance, cet effort budgétaire ne permettrait qu’une modernisation lente du réseau et imposerait des choix d’investissements qui conduiraient à une forte dégradation d’une partie du réseau.

D’après le groupe SNCF, à l’horizon 2030, 35 % des lignes les plus circulées, soit près de 6 500 kilomètres, seraient concernées par un risque de dégradation très important en termes de performance d’exploitation et de qualité de service. Le réseau présenterait une qualité de service très inégale avec d’un côté, les lignes TGV les plus circulées dont SNCF Réseau serait en mesure de stabiliser la performance, et de l’autre, de « vastes zones en sous-investissement structurel dont la qualité de service serait fortement dégradée avec une multiplication des ralentissements » ([19]).

Évolution de l’indice de consistance de la voie (ICV) par groupe de ligne dans la trajectoire d’investissements prévue par l’actuel contrat de performance État-sncf réseau

Source : ART.

En l’absence d’effort budgétaire supplémentaire, les estimations de l’ART prévoient :

– une érosion des trafics : la dégradation du réseau conduirait à des pertes de trafic de l’ordre de 13 % à l’horizon 2030 et jusqu’à 25 % en 2042 du fait de la hausse des défaillances. Les pertes de trafic concerneraient tout particulièrement les services conventionnés (TER) qui sont les principaux utilisateurs des lignes de catégories 5 à 6 et des lignes de desserte fine du territoire dont l’état se dégraderait significativement (cf. graphique) ;

– une hausse des coûts d’exploitation : le vieillissement du réseau conduirait à une hausse de l’ordre de 20 % des dépenses d’entretien d’ici 2042 (nécessaires à la maîtrise de la sécurité de l’exploitation).

2.   Seul un sursaut d’investissements conforme aux annonces de la Première ministre permettrait une hausse durable des trafics ferroviaires

A contrario, le scénario dit de « transition écologique », fondé sur les investissements recommandés dans le dernier rapport du COI – soit une augmentation progressive des dépenses de développement, de régénération et de modernisation de SNCF Réseau pour atteindre environ 5 milliards d’euros par an en 2030 jusqu’en 2042 –, permettrait de moderniser une grande partie du réseau et de préserver la quasi-totalité du réseau à l’horizon 2042. L’ICV moyen s’améliorerait pour toutes les catégories de lignes d’ici 2042 et dépasserait 55 pour la totalité du réseau structurant à la fin des années 2030.

Évolution de l’indice de consistance de la voie (ICV) par groupe de lignes dans le scénario de « planification écologique » issu du coi

Source : ART.

icv du réseau ferré national en 2042 selon le scénario d’investissements

Source : ART.

Cet investissement dans le réseau permettrait d’accompagner la hausse des trafics (estimée à 36 % par l’ART à l’horizon 2042) tout en maîtrisant les dépenses d’entretien et de gestion (notamment grâce aux gains de productivité permis par le déploiement de la CCR).

Dans ce contexte, un manque d’investissements dans le réseau induirait des conséquences à rebours des objectifs ambitieux de report modal.

C.   Des financements supplémentaires alloués au réseau ferré national à déterminer à l’horizon 2027

1.   Une programmation pluriannuelle des investissements est attendue

L’ensemble des représentants du secteur ferroviaire auditionnés a souligné la nécessité d’une programmation pluriannuelle des investissements dans le réseau ferroviaire inscrite dans le temps long. Ce besoin tient en premier lieu aux spécificités de l’infrastructure ferroviaire, lourde et complexe, et dont le cycle de vie s’inscrit sur plusieurs décennies. L’ART rappelle ainsi que « les décisions d’investissement entraînent des conséquences pour plusieurs décennies et les retards en matière de maintien en l’état et de régénération de l’infrastructure sont difficiles à rattraper » ([20]). Les retards accumulés sur le réseau ferroviaire ne pourraient techniquement pas être résorbés rapidement.

La programmation aurait également un intérêt opérationnel important. Elle permettrait de donner de la visibilité au gestionnaire d’infrastructures (qui assure la maîtrise d’ouvrage des travaux sur le réseau) et aux entreprises du secteur des bâtiments et des travaux publics (BTP) pour anticiper et préparer les chantiers à venir ; ce qui, à ce jour, n’est que peu envisagé. En conséquence, le gestionnaire d’infrastructures ne serait pas en capacité de consommer efficacement un apport budgétaire important soudain et non anticipé. Autrement dit, SNCF Réseau a besoin de temps pour programmer et engager des travaux sur le réseau ferré.

À l’occasion de la prochaine actualisation du contrat de performance de SNCF Réseau prévue à l’article L. 2111-10 du code des transports, il pourrait être prévu qu’y soit annexée une programmation pluriannuelle des investissements de SNCF Réseau sur dix ans, sur laquelle l’Autorité de régulation des transports pourrait émettre un avis et dont elle pourrait garantir le suivi de la mise en œuvre ([21]).

2.   La mobilisation du fonds de concours versé à SNCF Réseau pour le financement du réseau apparaît insuffisante

À ce jour, la programmation détaillée des investissements supplémentaires annoncés par la Première ministre en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau ferroviaire à l’horizon 2027 reste méconnue et absente du présent projet de loi de finances 2024.

La trajectoire d’investissements en régénération et en modernisation continuerait de reposer exclusivement sur les fonds de SNCF Réseau, sans concours public supplémentaire dédié et inscrit au PLF. Celle-ci repose actuellement principalement sur le produit des péages ferroviaires acquittés par les entreprises ferroviaires à SNCF Réseau, et le fonds de concours reversé à SNCF Réseau et alimenté par une partie des bénéfices perçus par les filiales du groupe SNCF à l’année N-1 (principalement, SNCF Voyageurs mais aussi Keolis et Geodis).

Le principe de ce fonds de concours codifié à l’article L. 2111-24 du code des transports, a été fixé par la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire et renforcé par la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire. Il a fait l’objet d’un abondement conjoncturel exceptionnel de l’État lors de la crise sanitaire de façon à maintenir l’effort de régénération dans le réseau aux niveaux prévus dans le contrat de performance (via l’opération de recapitalisation du groupe SNCF à hauteur de 4,05 milliards d’euros et le versement des produits de cessions d’actifs stratégiques du groupe SNCF).

Sa trajectoire prévisionnelle, fixée par le contrat de performance signé le 6 avril 2021 avec l’État pour la période 2021-2030, atteint 925 millions d’euros pour 2024 avant de décroître à moins de 700 millions d’euros par an à compter de 2026 jusqu’en 2029. L’évolution de ce fonds de concours demeure structurellement sensible aux résultats économiques et financiers du groupe SNCF. Son fonctionnement est également de nature à remettre en cause l’indépendance du gestionnaire d’infrastructures dans un contexte d’ouverture à la concurrence.

Pour 2024, en sus des 2,8 milliards d’euros d’investissements en régénération prévus par le contrat de performance, 300 millions d’euros supplémentaires pour la modernisation et la régénération du réseau ferroviaire ont été annoncés. Cet effort proviendrait d’un abondement supplémentaire du fonds de concours que le groupe SNCF n’a toutefois pas confirmé lors de son audition.

Il apparaît aujourd’hui nécessaire de mobiliser des concours publics supplémentaires pour respecter la trajectoire d’investissements en faveur de la régénération et de la modernisation du réseau annoncée par la Première ministre.

III.   un premier acte pour le déploiement des services express régionaux métropolitains

Le plan d’avenir pour les transports, dans lequel s’inscrit « la nouvelle donne ferroviaire » annoncée par la Première ministre, affiche l’ambition de doubler la part modale du transport ferroviaire et collectif dans les déplacements du quotidien d’ici 2030. Les services express régionaux métropolitains (SERM) en sont une pierre angulaire.

Ces projets visent en effet à développer une nouvelle offre de transports aux usagers destinée à assurer de meilleures liaisons entre les centres urbains des métropoles et leurs zones périphériques (périurbaines ou rurales) et favoriser le report modal attendu de la route vers les transports collectifs. Ils pourront s’appuyer sur le mode ferroviaire mais pas uniquement ; ils reposeront en tout état de cause sur un haut niveau de multimodalité (RER, bus express, tramway, métro, mobilités actives, voies réservées, etc.). La terminologie initialement retenue dans le débat public de « RER métropolitains » tend ainsi à être progressivement écartée au profit du nom de « SERM » qui reflète davantage cette ambition multimodale.

Embryonnaires il y a encore quelques années ([22]), plusieurs projets de SERM sont aujourd’hui résolument en cours d’amorçage depuis l’annonce de dix nouveaux « RER métropolitains » par le Président de la République le 27 novembre 2022. Une première enveloppe de 30 millions d’euros avait permis de financer de premières études préfigurant de premiers projets de SERM en 2021-2022 dans les avenants de prolongation aux CPER 2015-2020. Doté d’une enveloppe de 700 millions d’euros dans le cadre des nouveaux CPER pour la période 20232027, le lancement des études préliminaires de préfiguration, voire des premières opérations, apparaît définitivement acté à compter de 2024.

cartographie nationale des Projets de services express régionaux métropolitains

Source : COI.

Les besoins de financement sont aujourd’hui estimés à plus de 15 milliards d’euros au total pour la dizaine de projets identifiés. Les montants des investissements à réaliser varient néanmoins beaucoup d’un projet à l’autre : certains projets de SERM sont estimés à plusieurs milliards d’euros (entre 2,8 et 4,3 milliards d’euros pour le SERM de Lyon, entre 5 et 8 milliards pour celui de Lille) tandis que d’autres se chiffrent davantage en millions d’euros (comme à Rennes, Rouen, Toulouse, Nantes, etc.) d’après les données fournies par l’association Régions de France.

Plusieurs points d’attention ont pu être soulevés lors des auditions conduites dans le cadre de cet avis budgétaire :

– au regard de son expérience acquise grâce sa maîtrise d’ouvrage des chantiers du Grand Paris Express (GPE), la SGP souligne la nécessité d’envisager les SERM avant tout comme une offre de services (et non une offre isolée d’infrastructures de transport), au plus proche des besoins des usagers et des territoires, en lien avec les réseaux de transport existants et les projets d’aménagement global des territoires ;

– pour la partie ferroviaire des SERM, la régénération et la modernisation (CCR, ERTMS) préalables du réseau ferroviaire seront essentielles pour accueillir des circulations nouvelles, notamment en heures de pointe. Le COI rappelle également que les projets devront pleinement intégrer les besoins de désaturation et de développement capacitaire des nœuds ferroviaires « sans les reporter vers d’autres financements hypothétiques » ;

L’horizon d’aboutissement des projets de SERM demeure lointain (fin de la décennie 2030 pour la plupart des grands projets), tandis que les opérations occasionneront de la gêne immédiate pour la population. Les usagers ne pourront pas bénéficier des nouveaux services avant plusieurs années.

Enfin, votre rapporteure pour avis invite à élargir l’ambition des SERM au-delà des grandes métropoles pour ne pas accroître les fractures territoriales.

 

 


   commentaires des articles du projet de loi

Article additionnel après l’article 52
Rapport sur les modalités de financement de la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire

La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a adopté l’amendement II-CD209 de la rapporteure pour avis, Mme Danielle Brulebois, qui prévoit la remise au Parlement d’un rapport précisant les modalités de financement des 1,5 milliard d’euros d’investissements supplémentaires annoncés par la Première ministre à l’horizon 2027 pour la régénération et la modernisation du réseau ferré national.

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Article additionnel après l’article 52
Rapport sur le maillage des lignes ferroviaires existantes

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement II-CD145 de la rapporteure pour avis, Mme Danielle Brulebois, qui prévoit la remise au Parlement d’un rapport sur le maillage territorial des lignes ferroviaires existantes (lignes à grande vitesse, trains d’équilibre des territoires, transport express régional). Ce rapport vise en particulier à évaluer l’impact de la suspension ou de la suppression de certaines lignes sur la desserte fine des territoires.

 


   Examen en commission

Après avoir auditionné M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le 11 octobre 2023, et M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, le 17 octobre 2023, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » le mardi 17 octobre 2023 soir et le mercredi 18 octobre 2023 matin et après-midi (voir tome XI de l’avis n° 1719 : https://assnat.fr/WqHsAM).

À l’issue de cet examen, elle a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission modifiés.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(Par ordre chronologique)

 

Autorité de régulation des transports (ART)

M. Jordan Cartier, secrétaire général

Conseil d’orientation des infrastructures (COI)

M. David Valence, député, président du COI

M. Olivier Milan, co-rapporteur du COI et inspecteur général à l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD)

Régions de France

M. Michel Neugnot, vice-président de la région Bourgogne-Franche-Comté, président-délégué de la commission « Mobilité, transports, infrastructures » de Régions de France

Société du Grand Paris *  

M. Jean-François Monteils, président

M. Frédéric Bredillot, membre du directoire

M. Deniz Boy, directeur délégué aux relations parlementaires

M. Guillaume Menager, responsable des relations parlementaires

SNCF Direction & SNCF Réseau *

M. Laurent Trevisani, directeur général délégué Stratégie Finances du groupe SNCF

Mme Laurence Nion, conseillère parlementaire du groupe SNCF

Mobilians *

Mme Dorothée Dayraut-Jullian, directrice des affaires publiques

M. Frédéric Geney, responsable des affaires publiques

M. Gabriel Favarel, directeur conseil chez Anthenor Public Affairs

France Nature Environnement *

Mme Geneviève Laferrere, pilote du réseau « Transports et mobilité durables »

 

 

Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) - Ministère de la transition écologique

M. Thierry Coquil, directeur général

Mme Sandrine de Lahondès, sous-directrice du budget, de la synthèse stratégique et de l’appui aux services

Agence de financement des infrastructures de transports de France (Afit)

M. Thierry Coquil, président par intérim

Mme Katrin Moosbrugger, secrétaire générale

Voies navigables de France

M. Thierry Guimbaud, directeur général

M. Régis Bac, directeur juridique, économique et financier

Mme Muriel Mournetas, responsable des relations institutionnelles

Direction du budget – Bureau des transports

M. Frédéric de Carmoy, chef du bureau des transports

M. Victor Mabille, adjoint au chef de bureau

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

 


([1]) Rapport du Conseil d’orientation des infrastructures, Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leur transition : stratégie 2023-2042 et propositions de programmation, remis à la Première ministre le 24 février 2023.

([2]) Rapport de l’Autorité de régulation des transports, Scénarios de long terme pour le réseau ferroviaire français (2022-2043), juillet 2023.

([3]) Une partie seulement du budget de l’Afit est reversée au programme 203 sous la forme de fonds de concours ; le reste fait l’objet de paiements directs (essentiellement pour le financement de grands projets, à destination de SNCF Réseau, SNCF Gares & connexions, Voies navigables de France et des sociétés concessionnaires d’autoroutes). À titre indicatif, en 2022, le montant en CP des opérations directes était de 1,2 milliard d’euros de CP (36 %), celui des fonds de concours de l’Afit, de 2,1 milliards d’euros (64 %).

([4]) La « compensation fret », mise en place en 2010, vise à couvrir auprès de SNCF Réseau la différence entre le coût marginal d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire par les trains de fret et les redevances facturées aux opérateurs de fret (dites « redevances de circulation nette »). Son montant inclut également depuis la LFI 2023 une enveloppe supplémentaire prévue par le « plan fret » 2021-2024 de 65 millions d’euros correspondant à la prise en charge par l’État d’une partie de la redevance de circulation nette (RDC).

([5]) Annoncé par le Président de la République en septembre et inspiré d’un dispositif similaire mis en place en Allemagne, le « Pass Rail » prendrait la forme d’un abonnement mensuel ouvrant droit à un accès illimité aux transports de proximité (locaux, TER, Intercités).

([6]) La proposition de loi relative aux services express régionaux métropolitains a été adoptée par l’Assemblée nationale le 16 juin 2023, et est actuellement en cours d’examen au Sénat.

([7]) Avis de M. Jean-Luc Fugit, rapporteur sur la première partie du projet de loi de finances pour 2024, pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, octobre 2023.

([8]) Avis délibéré et adopté par le Conseil d’État dans sa séance du jeudi 8 juin 2023.

([9]) La baisse progressive du taux d’impôt sur les sociétés, initiée par l’article 11 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, de 33 % à 25 % à compter de 2022, permettrait aux SCA historiques de dégager environ 7,9 milliards d’euros (courants) de dividendes supplémentaires, sans obligation de répercussion sur les tarifs, jusqu’à la fin des contrats d’après le rapport de l’Autorité de régulation des transports publié en janvier 2023 (Économie des concessions autoroutières, 2nde édition).

([10]) Outre les dépenses engagées dans le cadre de la LOM, l’Afit France a également été mobilisée sur la période 2019-2023 pour le financement d’autres opérations dont le canal Seine-Nord Europe, l’opération ferroviaire Lyon-Turin, l’opération « Marseille en Grand » (32 millions dans le budget rectificatif n° 3 de juin 2022), le projet Eole (prolongement du RER E) ainsi que des projets spécifiques du plan de relance.

([11]) Rapport précité du Conseil d’orientation des infrastructures, 24 février 2023.

([12]) D’après des données transmises par le groupe SNCF.

([13]) Bilan annuel des transports en 2021, Service des données et des statistiques (SDES) du ministère de la transition écologique.

([14]) Rapport précité du Conseil d’orientation des infrastructures, février 2023.

([15]) Rapport de l’Autorité de régulation des transports, Scénarios de long terme pour le réseau ferroviaire français (2022-2043), juillet 2023.

([16]) Rapport annuel de l’Eisenbahn-Bundesamt (Office fédéral des chemins de fer) sur l’état et le développement des infrastructures ferroviaires en Allemagne.

([17]) L’indice de consistance de la voie (ICV) est un indicateur d’âge moyen de la voie au regard de sa durée de vie théorique. Un tronçon neuf a une valeur de 100 et un actif en fin de vie prend la valeur 10.

([18]) Ce scénario représente des investissements de 136 milliards d’euros pour la période 2022-2042, dont 50 milliards d’euros pour le renouvellement et la modernisation.

([19]) D’après l’audition du groupe SNCF.

([20]) Rapport de juillet 2023 précité.

([21]) Cette évolution juridique nécessiterait de modifier le décret n° 2019-1264 du 29 novembre relatif à l’élaboration et à l’actualisation du contrat entre l’État et SNCF Réseau, et à terme, l’article L. 2111-10 du code des transports, consacré audit contrat.

([22]) Rapport de SNCF Réseau, Étoiles ferroviaires et service express métropolitain – Schéma directeur, mars 2020.