Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

–  audition de M. Nicolas Dufourcq, directeur général de BPI France, et Mme Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française              2

– Présences en réunion...........................16

 


Mercredi
8 avril 2020

Séance de 9 heures 

Compte rendu n° 49

session ordinaire de 2019-2020

 

 

Présidence de

 

M. Éric Woerth,

Président

 


  1 

La commission entend M. Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, et Mme Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française.

 

M. le président Éric Woerth. Nous accueillons M. Nicolas Dufourcq, directeur général de la Banque publique d’investissement – Bpifrance – et Mme Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française. D’ici quelques semaines, notre commission entendra le président de la FBF, Frédéric Oudéa, sur les conditions de la sortie de crise et la montée en puissance du système financier. Pour l’heure, il s’agit de comprendre les dispositifs mis en place – prêts garantis par l’État (PGE) ou par Bpifrance – l’articulation entre la banque publique d’investissement et les banques, les conditions d’éligibilité et les raisons justifiant les premiers refus de prêt.

M. Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance. Dès le début de la crise, la sphère publique et le monde bancaire français ont fait preuve d’une grande réactivité et peuvent s’enorgueillir d’avoir réalisé une performance opérationnelle plutôt unique en Europe.

Anticipant le confinement et la panique susceptible de saisir le monde entrepreneurial, Bpifrance a annoncé dès le 15 mars, dans le cadre du plan de soutien d’urgence, le prêt Atout – des quotités élevées, sans garantie et sur une durée longue – et, en collaboration avec les régions, le prêt Rebond – à l’intention des TPE et des PME, d’une durée de sept ans et à taux zéro. Par ailleurs, nous avons relevé notre garantie à 90 % sur tous nos produits et suspendu l’appel des échéances en capital et intérêts des prêts en cours pour une durée de six mois.

Dans le même temps, les discussions ont commencé avec la direction du trésor du ministère de l’économie et des finances et la FBF pour monter un dispositif beaucoup plus large, le prêt garanti par l’État.

Le principe est le suivant : les banques sont chargées de distribuer un produit d’intérêt général, un prêt garanti par l’État à hauteur de 90 %. Il s’agit, par une sorte d’avance sur recettes, de financer jusqu’à trois mois de perte du chiffre d’affaires pendant la crise sanitaire. Pour les start-up, le critère est celui des charges salariales. L’État fait un geste significatif en abaissant la prime de garantie à 0,25 % pour la première année, 0,5 % pour les deuxième et troisième années puis 1 % pour les années suivantes.

À la date du 8 avril, 13 000 agences avaient distribué au moins un PGE et préaccordé 13 milliards d’euros à 86 000 entreprises ; les prêts effectivement signés s’élevaient à 5 milliards, pour un montant moyen de 150 000 euros. Le volume total des demandes atteignait 27 milliards.

Pas moins de 1 435 entreprises ont sollicité un prêt Atout, pour un total de 3 milliards, tandis que 88 millions d’euros étaient consentis à 671 PME via le prêt Rebond, financé par les régions.

Comme les prêts sans garantie habituellement accordés par Bpifrance, le prêt Atout est adossé à un fonds de garantie doté par l’État, ou, en l’absence de crédits du programme budgétaire 134, par le recyclage des dividendes de Bpifrance.

Pour le PGE, le mécanisme est différent puisque les fonds propres de l’État sont directement mobilisés. La banque qui attribue le prêt se retourne vers l’État en passant par le canal informatique de Bpifrance, qui conserve et gère les listings de crédits. Ce dispositif monte rapidement en puissance : les demandes représentent chaque jour entre 1,5 et 2 milliards d’euros de crédits.

Sont éligibles toutes les entreprises notées jusqu’à 5+ – une note assez faible qui correspondrait, pour l’éducation nationale, à 10/20. L’attribution du prêt à ces entreprises est quasi automatique. La discussion entre l’entrepreneur et le banquier porte sur le montant consenti – équivalant à un, deux ou trois mois de perte de chiffre d’affaires –, mais en aucun cas sur le taux, les conditions de la garantie ou la durée du prêt.

Les entreprises notées 7, 8 ou 9 étaient déjà en difficulté et sont pour la plupart débanquarisées. Nous nous interrogeons sur les entreprises non notées – souvent des TPE – et les entreprises notées 5 ou 6. L’éventail est assez large et va des entreprises bien dirigées mais connaissant quelques faiblesses à des entreprises de mauvaise qualité. La plupart d’entre elles méritent d’être accompagnées jusqu’au rebond : cette crise, à l’inverse sans doute de la crise de 2008, n’est pas une crise darwinienne condamnant les plus faibles des entreprises, mais une crise épidémique qui les a forcées à fermer, nonobstant leur santé économique.

Mme Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française. La Fédération bancaire française (FBF) regroupe 340 banques, dont 115 banques étrangères ; elle s’appuie sur 103 comités territoriaux, relais utiles pour la mise en œuvre sur le terrain du plan de soutien d’urgence.

Les banques françaises, selon le modèle de banque universelle, accompagnent de façon volontaire les acteurs de l’économie. La quasi-totalité des banquiers sont aujourd’hui mobilisés et travaillent au siège ou depuis leur domicile.

Dès le 13 mars, les banques ont annoncé un moratoire sur les remboursements des crédits en cours. Du 20 au 23 mars, nous avons travaillé jour et nuit avec Bpifrance et Bercy sur le dispositif du PGE. L’information a été diffusée auprès des 65 000 chargés de clientèle le 24 mars, veille du lancement du prêt. Dès le 26 mars, les préaccords représentaient 1,6 milliard d’euros.

S’il faut agir rapidement, nous ne confondons pas vitesse et précipitation. Le délai entre la demande et la décision d’octroi est mis à profit pour discuter, échanger avec l’entreprise. Comme les autres dispositifs publics – chômage partiel, report de charges –, le PGE est orienté en fonction des besoins des entreprises. Si les banques discutent du montant du prêt – un, deux ou trois mois de perte de chiffre d’affaires –, ce n’est pas par sadisme congénital mais pour travailler sur les besoins et calibrer la réponse globale en fonction des enjeux.

À la date de vendredi, soit huit jours ouvrés après le début de la commercialisation du PGE, les demandes de crédit s’élevaient à 27 milliards, en provenance de 130 000 entreprises. Il conviendra de rapporter ces chiffres, qui sont des indicateurs, aux montants effectivement accordés.

 

Nos salariés sont pleinement impliqués et échangent avec les chambres consulaires et les organisations patronales pour expliciter le fonctionnement du PGE et l’éligibilité au dispositif, mais aussi pour faire remonter les inquiétudes exprimées sur le terrain. Ainsi, il a paru nécessaire de préciser dans un document publié le 1er avril que la prise de garantie personnelle n’était pas exigée. Par ailleurs, les banques révisent et allègent la documentation exigée pour les dossiers les plus simples.

Il s’agit de réagir rapidement et à tous les niveaux afin d’adapter en continu le dispositif. C’est le sens du travail des salariés du secteur bancaire, qui ont apprécié les marques de reconnaissance à leur endroit. Dans cette période, cela compte beaucoup.

M. le président Éric Woerth. Je vous remercie. Mes questions sont les suivantes : comment sont traités les dossiers des entreprises placées sous procédure de sauvegarde ? Quelle est la taille et la forme juridique des entreprises éligibles ?

La banque centrale déverse aujourd’hui beaucoup de liquidités ; les banques répercutent-elles ce mouvement en augmentant les volumes distribués ?

Enfin, les Allemands garantissent les prêts à 100 % ; cela vous semble-t-il souhaitable en France ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Je voudrais saluer la réactivité de la réponse à la situation totalement inédite que nous vivons. Ce n’est pas la même crise qu’il y a douze ans – nous avons volontairement appuyé sur le bouton « stop » de l’économie. Le recours aux garanties est massif : leur montant s’élève à 300 milliards d’euros, contre 5 ou 6 milliards garantis par OSEO en 2008, me semble-t-il. Comment Bpifrance et le réseau bancaire encaissent-ils la différence ?

Vous avez rappelé qu’il existe à la fois des prêts sans garantie dans le cadre du programme 134 et le PGE. S’agissant des garanties, quel est le pilotage et comment le reporting a-t-il lieu ? Avez-vous déjà des simulations du taux de défaut ? Il y aura finalement un coût pour les finances publiques… Par ailleurs, quel est le taux d’appel et que devient la rémunération des garanties ? Est-elle conservée par Bpifrance ou automatiquement reversée au budget général de l’État ?

Beaucoup d’entreprises sont exclues du PGE non parce qu’elles font l’objet d’une procédure collective, ce qui est en effet prévu, mais parce qu’elles sont au bord d’une telle situation ou qu’elles viennent d’en sortir. Or c’est précisément dans ce genre de cas qu’un appui en trésorerie est nécessaire pour traverser la tempête. Pourrait-on élargir les critères d’éligibilité dans le cadre du prochain PLFR ? En outre, les entreprises du secteur agricole dont le chiffre d’affaires est inférieur à 750 000 euros sont exclues. La Commission européenne ayant assoupli les critères des aides d’État, pourrait-on intégrer ces entreprises dans le dispositif ?

Pourriez-vous apporter des précisions sur les prêts de Bpifrance ? Quels sont les critères d’éligibilité ?

Quand et comment intervenez-vous, en tant qu’investisseur en fonds propres, auprès des entreprises en difficulté, petites ou grandes ?

 

Je ne doute pas de la sincérité de vos propos, madame Atig, mais il existe un écart avec ce qu’on observe sur le terrain. On peut se féliciter de la mise en route du PGE, mais il y a trop de refus de crédits. Il faut que la politique de risque s’assouplisse : des crédits qui auraient pu être refusés hier à des entreprises fragiles doivent désormais être accordés compte tenu du partage de risque avec l’État, à hauteur de 90 %. Les réflexes doivent changer.

Enfin, confirmez-vous que les entreprises n’ont pas à passer par le réseau de Bpifrance et qu’elles doivent uniquement s’adresser à leur banque ?

M. Xavier Roseren. Je voudrais souligner la mobilisation des réseaux bancaires, dans un temps record, pour l’octroi de prêts garantis et la mise en place très rapide, par Bpifrance, de la plateforme de gestion du PGE. Par ailleurs, il me semble que la préservation de l’action de banque publique de Bpifrance, bien qu’elle soit limitée, est précieuse.

Êtes-vous capable d’évaluer les effets des mesures de soutien aux entreprises sur l’équilibre financier du groupe Bpifrance ? Par ailleurs, avez-vous connaissance de difficultés dans le cadre de l’instruction des dossiers au plan régional ?

Quel est le niveau des reports de crédit ? Qu’en est-il aussi des durées et des coûts ? On nous dit que ces derniers sont parfois très importants. Travaillez-vous sur de nouveaux dispositifs bancaires qui tireraient des enseignements de la crise actuelle ?

Enfin, les entreprises de biotech étaient déjà pénalisées par le manque d’apport de capital : comment pourrait-on les soutenir dans le contexte actuel ?

M. Patrick Hetzel. Il y a un problème de communication : le PGE est sans frais, mais pas sans versement d’intérêts. Ce point a fait l’objet de nombreuses interrogations.

Les entreprises traitées prioritairement par le réseau bancaire sont celles considérées comme les plus solvables. Il semble qu’il y ait un risque de refus dans certains cas. Des règles ont-elles été définies ? Les critères ne devraient pas être les mêmes que d’habitude. Certaines banques réclameraient le résultat comptable consolidé au 31 décembre dernier alors que beaucoup d’entreprises ne le connaîtront probablement qu’à la fin du mois d’avril. Par ailleurs, des établissements bancaires ont demandé des cautions personnelles, ce qui a causé un certain émoi – mais il y a eu une rectification en la matière.

Des entreprises ont du mal à obtenir un retour rapide de Bpifrance, ce qui serait lié à des difficultés informatiques dans le traitement des dossiers.

Autre sujet, quelle est l’articulation avec les régions, lesquelles ont également prévu d’accorder des subventions dans certains cas ?

Mme Sarah El Haïry. Quelle est votre évaluation du nombre de bénéficiaires potentiels de ces mesures ?

Le monde associatif rencontre des difficultés : a-t-il bien accès aux prêts garantis ?

Enfin, pourriez-vous nous indiquer la répartition de ces prêts selon les types de structures ?

Mme Christine Pires Beaune. Je partage ce qu’a dit le rapporteur général au sujet du décalage entre ce qui remonte du terrain et vos propos.

Je comprends bien qu’il existe un délai incompressible pour l’examen des demandes. Néanmoins, ne peut-on pas faire mieux que cinq jours ?

Peut-on connaître le volume des prêts refusés par les banques et avoir un panorama par départements ou, à défaut, par régions ? Quels sont les profils types des entreprises concernées et les principales raisons des refus ?

La garantie de l’État est de 90 %. Elle vient de passer à 100 % en Allemagne, où la durée des prêts est par ailleurs beaucoup plus longue. Que diriez-vous de porter le délai de remboursement de cinq à dix ans et de fixer la première échéance à deux ans au lieu d’un ?

M. Charles de Courson. La première mesure prise par les banques est de reporter de six mois le remboursement des prêts en cours, sans coût supplémentaire. Certains établissements le font automatiquement et d’autres seulement à la demande des entreprises. Y a-t-il une règle commune ?

S’agissant des PGE, quel est l’ordre de grandeur du taux de refus en fonction des réseaux bancaires ? Ne faudrait-il pas un produit spécifique pour les entreprises fragiles, dont le taux de garantie serait supérieur à 90 % ? Ne devrait-on pas également considérer les quasifonds propres comme des fonds propres pendant la durée de la crise ?

Est-il exact que Bpifrance demande aux entreprises de signer un document écrit qu’il faut envoyer par la Poste, ce qui ralentit l’octroi des prêts ?

Est-il vrai que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution calcule la solvabilité en prenant en compte la totalité des PGE et non pas seulement la part de ces prêts qui n’est pas garantie par l’État ?

Quel dispositif les banques ont-elles prévu pour éviter un effet de substitution entre les PGE et les prêts classiques ?

S’agissant des entreprises pour lesquelles les PGE iraient au-delà d’un an, les taux d’intérêt sont-ils déjà fixés ?

M. le président Éric Woerth. Si la question de la prise en compte des PGE dans les ratios prudentiels se pose effectivement, quelles sont les solutions envisagées ?

Mme Sabine Rubin. La garantie des prêts bancaires par l’État nous paraît nécessaire, mais on ne s’éloigne guère du modèle économique habituel alors que la crise risque d’être beaucoup plus forte que prévu. Des mesures plus structurelles et plus directes seraient souhaitables, notamment des nationalisations dans certains cas. Par ailleurs, la garantie des prêts ne dépasse pas 300 milliards d’euros, contre 320 milliards en 2008.

Nous sommes très intéressés, nous aussi, par la typologie des entreprises auxquelles des prêts ont été refusés et par les motifs invoqués.

Quelle est votre évaluation du nombre de faillites auxquelles nous assisterons probablement malgré les mesures adoptées ?

Qu’adviendra-t-il des entreprises qui ne pourront pas rembourser leurs emprunts ? Y aura-t-il une conversion en capital détenu par l’État ?

Les banques françaises se sont engagées à respecter les recommandations de la BCE en ce qui concerne le gel du versement des dividendes. En revanche, nous avons appris que Total versait 1,8 milliard d’euros. Le Gouvernement, qui est habilité à modifier les règles par ordonnance, ne devrait-il pas adopter des mesures dissuasives et non pas incitatives ?

Mme Maya Atig. Les assouplissements qui ont été décidés en matière prudentielle constituent un retour à la normale : il y avait des obligations supplémentaires de fonds propres dans le cadre du coussin contra-cyclique car on considérait qu’on était dans une période de surchauffe de crédit. La conjoncture a été prise en compte : on est revenu à la moyenne – mais on n’est pas encore allé en deçà, sauf pour certains ratios – afin de ne pas imposer une contrainte supplémentaire aux banques. On ne leur demande pas de faire comme si tout allait merveilleusement bien…

Les mesures d’assouplissement prises par les banques centrales permettent, d’une part, de financer les surcroîts temporaires de liquidités nécessaires aux économies de tous les pays, d’autre part, de limiter la volatilité sur les marchés : il s’agit avant tout de permettre le retour au calme.

Le régime prudentiel du PGE est en cours de précision. En toute logique, un prêt garanti par l’État doit bénéficier du traitement prudentiel le plus favorable : si une banque prête 100 euros dont 90 sont garantis par l’État, on considère que son risque est de 10 euros. Cela dit, ce principe général doit se combiner avec différents textes et l’interprétation du texte prudentiel doit être précisée : on peut envisager soit d’aligner l’arrêté afin qu’il reprenne mot pour mot les termes du texte prudentiel, soit de s’en écarter. Le mécanisme de surveillance unique examine la question

M. le président Éric Woerth. Sera-t-il nécessaire de modifier un texte législatif ou le problème peut-il être réglé par une négociation avec le superviseur, afin d’éviter que la distribution de crédit ne se trouve freinée ?

Mme Maya Atig. En temps normal, on ne déploierait pas le dispositif tant que ses conditions d’application ne seraient pas clairement définies. Dans le contexte exceptionnel que nous connaissons, il a été décidé de le lancer sans attendre, en travaillant d’arrache-pied au niveau institutionnel pour préciser ses modalités sans freiner sa mise en œuvre. Nous espérons trouver très rapidement des solutions et estimons qu’il n’est pas nécessaire pour cela de modifier la loi.

Je ne dispose pas de chiffres portant sur les moratoires accordés, qui ont été traités automatiquement par certaines banques et au cas par cas par d’autres. Peut-être pourrons-nous disposer, dans un mois ou deux, de statistiques de la Banque de France à ce sujet.

S’il n’y a pas de pénalités pour les reports de crédits, tous les contrats prévoient que des intérêts s’appliquent. Il y a deux cas de figure : certaines banques ont choisi de suspendre l’amortissement du capital et de continuer à prélever les intérêts sur la période concernée, tandis que d’autres préfèrent reporter le remboursement de l’intérêt et du capital – dans ce cas le montant de l’intérêt reste inchangé, mais son règlement est différé. La plupart des entreprises, qui n’ont affaire qu’à une seule banque, ne se voient appliquer qu’un seul des deux procédés ; pour les autres, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver. Nous sommes en train de rédiger un document pédagogique visant à expliquer les différentes situations, mais il est souhaitable pour tout le monde de conserver les contrats inchangés afin d’éviter de la paperasse inutile.

Nombre de questions relatives au champ d’application du PGE trouvent une réponse dans la « foire aux questions » publiée le 1er avril sur les sites du ministère des finances, de Bpifrance et de la FBF. Les associations sont éligibles à condition d’employer un salarié ou de recevoir des subventions publiques, et les commerçants sont eux aussi éligibles. Pour ce qui est des entreprises non notées, elles font généralement l’objet d’une cotation interne qui permet d’établir une équivalence avec les notes attribuées par la Banque de France, donc de les faire bénéficier du PGE.

Pour ce qui est de la répartition des refus, elle ne peut s’évaluer quantitativement en soustrayant le nombre des accords de celui des demandes. Le bon indicateur est plutôt celui du nombre de dossiers adressés à la médiation du crédit : en effet, l’entreprise qui n’obtient qu’un prêt d’un montant correspondant à un mois de perte de chiffre d’affaires et non à trois mois, comme elle le demandait, ne va pas s’adresser à cette instance, puisqu’elle ne s’est pas vraiment vu opposer un refus. Après les premiers dossiers, adressés par des entrepreneurs extrêmement bien informés, on aborde maintenant l’examen de cas plus compliqués.

Aujourd’hui, une entreprise affichant une cotation considérée comme assez bonne au regard des critères de la Banque de France, c’est-à-dire jusqu’à 5+, se voit accorder un prêt de façon quasi systématique, ce qui n’aurait pas été le cas en temps normal, et les dossiers qui vont poser problème sont ceux des entreprises cotées 5 ou 6. Les entreprises en procédure collective mais dont le plan de continuation est en cours d’application auront plus de facilité à obtenir un prêt, mais sans automaticité – sans doute ces entreprises devront-elles faire l’objet de dispositifs publics spécifiques.

M. Nicolas Dufourcq. Si, en 2008, OSEO avait garanti à 90 % des milliards d’euros de crédit aux PME en difficulté, la situation actuelle n’a rien de comparable : à l’époque, on n’avait pas appuyé sur le bouton « stop » de l’économie. Le gouvernement de l’époque avait estimé la sinistralité à des niveaux très élevés et doté en conséquence le programme 134 du budget de l’État, destinée à OSEO, de près d’un milliard d’euros. La sinistralité ne s’étant pas réalisée dans les proportions prévues, les crédits votés en 2009 n’ont finalement été consommés qu’au cours des années suivantes, pratiquement jusqu’en 2015, et le programme 134 n’a plus jamais été doté.

La gestion du PGE sera assurée par Bpifrance. Alors que nous nous occupons actuellement d’environ 90 000 entreprises, il n’est pas exclu que nous ayons 400 000 lignes de garantie supplémentaires à gérer fin 2020 – contre 200 000 lignes gérées actuellement. Cet important travail de documentation, qui nous est familier, consiste d’abord à gérer la relation avec les banques venant chercher une garantie en cas de défaut des entreprises. Nous cherchons en priorité à récupérer les créances avant de recourir au budget de l’État. Une fois la garantie acquise, les flux s’effectuent à partir des fonds de garantie de Bpifrance pour les prêts qu’elle consent directement, ou à partir d’un fonds intermédiaire doté par l’État pour la garantie de l’État.

Pour ce qui est du taux de défaut, nous allons commencer à calculer les pertes attendues sur la base des données de la crise de 1993 – la plus grande crise bancaire qu’ait connue la France depuis la Seconde Guerre mondiale, avec des taux de sinistralité records – et de celles qui ont suivi. On peut considérer que, si le PGE représente 100 milliards d’euros – et non 300 milliards d’euros, ce qui est une estimation très élevée –, un taux de sinistralité de 10 % aboutirait à une perte de 10 milliards d’euros, dont les banques assumeraient un dixième et l’État le restant. Je pense cependant que cette estimation est pessimiste et que, comme en 2009, la sinistralité va se révéler plus faible que prévu, notamment parce que le crédit est quasi automatique jusqu’à la cotation 5+ et que, dans une crise épidémique suivie d’un rebond, les entreprises cotées 5+ finissent par rembourser.

Pour ce qui est des recettes, Bpifrance ne conserve pas les vingt-cinq points de base, qui reviennent à l’État. La loi que vous avez votée prévoit que le service rendu par Bpifrance le soit à titre gratuit. C’est un réel effort qui est ainsi demandé à Bpifrance.

M. le président Éric Woerth. Bpifrance ne prendra donc rien sur les 0,25 % de la prime de garantie ?

M. Nicolas Dufourcq. Non, la gestion des 400 000 dossiers évoqués sera effectuée à titre gratuit – ce qu’on peut comprendre quand il est demandé aux banques de pratiquer un taux extrêmement favorable et de ne pas facturer non plus la distribution du PGE.

Pour ce qui est de la zone-tampon, une entreprise se trouvant en sortie de procédure collective et disposant d’un jugement publié est éligible au PGE, au cas par cas.

La réglementation européenne interdit d’accorder un crédit à une entreprise en difficulté, c’est-à-dire se trouvant en cessation de paiements avant le 31 décembre 2019 ou ayant perdu la moitié de ses fonds propres. La Commission européenne considère que les entreprises ayant perdu des fonds propres mais présentant un résultat opérationnel positif devraient être éligibles au PGE pour un montant maximum strictement égal à ce qu’elles ont perdu en raison de la crise sanitaire. Une fois que cette position aura été formalisée, ce qui pourrait nécessiter une modification de la loi, de nombreuses entreprises
 notamment des start-up, qui consomment leurs fonds propres très rapidement – vont devenir éligibles.

Bpifrance consent également des prêts directs aux entreprises cotées jusqu’à 5 ou 6, sans conditions d’éligibilité mais à l’issue d’un examen au cas par cas. Du fait que nous avions anticipé le PGE de dix jours, nous avons pris de plein fouet la vague d’angoisse provenant des entreprises. Nous avons mobilisé 500 volontaires pour répondre aux 65 000 appels reçus sur le numéro vert que nous avions mis en place, et consenti 3 milliards d’euros au titre du prêt Atout, un prêt sur six ans avec un différé de remboursement d’un an, à un taux plus élevé que le PGE, à savoir 2,5 % – ce qui n’empêche pas qu’il soit très demandé. Cela correspond à la situation actuelle, qui se caractérise par une énorme demande de liquidité, mais une élasticité-prix plutôt réduite. Après avoir obtenu l’aval de la Commission européenne, le gouvernement allemand vient ainsi d’annoncer une garantie de 100 % aux entreprises, assortie d’un taux d’intérêt de 3 %.

Les régions contribuent à hauteur de 140 millions d’euros, pour financer les prêts Rebond – prêts à taux zéro d’une durée de sept ans, avec un différé de remboursement de deux ans – dont le montant par prêt sera compris entre 10 000 et 300 000 euros, pour un montant moyen de 30 000 euros. Ces prêts sont complémentaires du PGE et très adaptés aux entreprises des territoires.

Pour soutenir les fonds propres, nous avons créé deux fonds nouveaux. L’un, doté de 100 millions d’euros, va permettre d’injecter des obligations à bons de souscription d’actions dans les PME saines que la crise vient fragiliser. Le montant des tickets sera proche d’un million d’euros, nous imaginons en distribuer 80 assez rapidement au profit de PME familiales.

Le second fonds a été créé pour les start-up. Les levées de fonds prévues en avril ont été interrompues et un pont aérien de cash doit également être organisé pour elles. Nous avons créé un fonds d’obligations convertibles d’un montant de 80 millions d’euros, afin de combler les tours de table prévus en avril, mai et juin, en attendant que les investissements reprennent à la fin de l’été.

De plus, Bpifrance est directement ou indirectement actionnaire de 4 000 entreprises françaises, que nous soutenons.

M. Philippe Chassaing. Les banques proposent des offres pour la clientèle financièrement fragile, qui limitent les frais bancaires à 20 euros par mois. Les ménages qui n’entrent pas dans cette catégorie aujourd’hui doivent attendre que leurs comptes bancaires connaissent des dysfonctionnements pendant trois mois consécutifs pour en bénéficier. Quelles solutions sont proposées par les établissements bancaires aux personnes qui verront leurs revenus diminuer au cours des prochains mois ?

Les TPE risquent aussi de subir des incidents bancaires : des solutions sont-elles prévues pour elles ?

Mme Véronique Louwagie. L’attribution du PGE aux entreprises ayant une note de 5+ est quasi automatique. Quelles sont les différentes proportions ? Combien sont notées 5+ ?  Combien entre 5 et 6 ? Combien ont une moins bonne notation et combien ne sont pas notées ?

Compte tenu de l’urgence de la situation et des difficultés actuelles des entreprises, il serait bon que la commission des finances reçoive très régulièrement un reporting sur les PGE accordés et les refus opposés aux entreprises.

M. le président Éric Woerth. Cette demande a été adressée au ministre de l’économie après notre réunion de la semaine dernière.

Mme Véronique Louwagie. Par ailleurs, deux scénarios sont envisagés par les banques pour le report de six mois des échéances : dans l’un, les intérêts sont payés pendant cette période ; dans l’autre les intérêts sont reportés sur les échéances à venir à l’issue des six mois. Pourrait-on imaginer que ces intérêts soient calculés au taux actuel et non au taux en vigueur lorsque le prêt a été octroyé ? Les différences sont parfois significatives.

M. Vincent Ledoux. La FBF a-t-elle eu vent de difficultés de certains clients de néo-banques, qui n’ont pas accès aux prêts garantis par l’État ?

Selon le baromètre publié par la CCI des Hauts-de-France pour le mois de mars, seules 18 % des entreprises touchées ont effectué une démarche auprès de Bpifrance. Pour quelle raison ? Existe-t-il des disparités régionales ?

M. Jean-Paul Dufrègne. Tout ce qui relève des procédures collectives est essentiel. Les entreprises en cours de redressement ont besoin d’être soutenues dans la durée.

Bpifrance est déjà opérateur de prêt pour les entreprises. Faut-il réformer ses statuts pour lui permettre d’investir dans les fonds propres des entreprises qui ne remplissent pas les critères de rentabilité exigés par les banques privées mais qui sont écologiquement ou socialement utiles ?

Je m’interroge moi aussi sur l’opportunité de modifier la durée de remboursement des prêts : une durée de cinq ans n’est pas adaptée à toutes les entreprises.

M. Mohamed Laqhila. Nous remercions tous les jours ceux qui sauvent des vies, il faut aussi remercier ceux qui sauvent notre économie. Il faut sauver toutes les entreprises. Or, les banquiers prennent parfois peu de risques et les commerçants et artisans sont en difficulté.

Le dispositif du PGE est simple au niveau de Bpifrance, mais il est traité de manière différente selon les réseaux bancaires. En outre, les SCI en sont exclues, notamment celles des propriétaires qui louent des locaux à usage professionnel. Il faudrait imaginer un dispositif analogue pour sauver ce secteur.

Enfin, les banques continuent de facturer des frais alors que les entreprises sont en situation très difficile.

Mme Marine Le Pen. Nous nous félicitons de toutes les mesures mises en œuvre, mais un énorme trou dans la raquette demeure pour les artisans, les commerçants et les agriculteurs. L’immense majorité de ceux qui nous contactent indiquent qu’à la fin du mois d’avril, ils seront au tapis.

La commission pourrait encourager la réflexion sur un système différent pour les autoentrepreneurs, les artisans, les commerçants et les agriculteurs, et plus généralement pour les entreprises de moins de 1 000 salariés. J’ai proposé il y a trois semaines qu’ils passent directement par la Banque de France pour utiliser l’argent mis à disposition par la BCE : 10 milliards serviraient à octroyer à ces entreprises un forfait de 1 500 euros, plus 1 000 euros par salarié, et cela chaque mois jusqu’à la fin du confinement. D’autant que, sans vouloir désespérer Billancourt, celui-ci risque de durer trois mois. Les commerçants et artisans ne pourront pas rembourser en cinq ans des prêts sur un chiffre d’affaires qu’ils n’auront pas pu faire. Pour préserver ce tissu économique essentiel à notre pays, il faut penser à un système différent.

Mme Émilie Bonnivard. Le coût des reports des échéances bancaires peut être très élevé. Le taux appliqué est identique au taux initial, mais il semble que les garanties d’emprunt explosent. Prenons un cas précis : pour un emprunt contracté sur 64 mois, dont le coût des intérêts et des assurances pour toute la durée du prêt est de 5 000 euros, le report de six mois coûterait 800 euros supplémentaires. Comment est-ce possible si les taux restent les mêmes ? Comment fonctionnent les garanties ?

M. François Jolivet. Je m’inquiète de l’allocation des ressources humaines pour faire face aux demandes des entreprises, au vu de la situation dans l’Indre. Les 86 000 garanties accordées par Bpifrance doivent être rapportées aux 4,5 millions d’entreprises que compte notre pays.

On me dit que les banques facturent des assurances-crédit ou des frais de dossier, demandent des garanties personnelles aux chefs d’entreprise pour les 10 % de crédit non garantis. Quant aux entreprises, elles rencontrent de grandes difficultés pour reporter les frais financiers sur les encours de la dette. La Fédération bancaire française prévoit-elle de rappeler les pratiques professionnelles, ou faudra-t-il en passer par la loi pour que tout le monde soit traité de la même manière ?

Les garanties d’État sont-elles soumises au secret bancaire ou pourrons-nous en avoir connaissance ? Parmi les 86 000 garanties octroyées, combien concernent des entreprises de moins de dix salariés ? Comment s’opère la répartition entre les réseaux bancaires ? Il semble que l’allant ne soit pas le même selon les réseaux… Sur quelles activités portent les garanties accordées jusqu’à présent ?

 

M. Fabrice Brun. Si nous avons tous salué la réactivité en ces premières semaines, nous savons que les mesures prévues ne seront pas suffisantes. Le report de charges ne sauvera pas les artisans, les commerçants, les restaurateurs, les travailleurs indépendants et les libéraux, car aucune entreprise ne peut résister sans recette pendant trois mois. Il faut une exonération totale de charges pour les mois de mars, avril et mai.

Les prêts garantis par l’État excluent les entreprises en difficulté, mais je note l’ouverture de M. Dufourcq à ce sujet. De plus, les refus de prêts sont trop nombreux  tous les députés le constatent dans leur circonscription. Les banques sont frileuses car la garantie de l’État n’est pas totale. Pourquoi la garantie n’est-elle pas de 100 % comme en Allemagne ?

Enfin, envisagez-vous un plan spécifique de soutien à la restauration et aux acteurs touristiques, qui subissent de plein fouet le séisme économique ?

Mme Anne-Laure Cattelot. Rapporteure spéciale sur le budget des transports, je suis attentive à la crise du secteur aérien. Les pertes mondiales sont estimées à 250 milliards d’euros. Les États français et néerlandais ont prévu un prêt pour soutenir Air France-KLM, mais quid des autres compagnies, notamment Corsair, qui joue un rôle fondamental pour la connexion avec les territoires d’outre-mer ? Leur situation ne répond pas aux critères de la BPI : cela va-t-il évoluer ?

Je partage aussi les inquiétudes de M. Brun concernant le secteur de la restauration.

Mme Valérie Rabault. Je remercie Bpifrance de nous avoir fourni des cartes, très intéressantes, à l’échelon régional : serait-il possible de disposer de données par département, et en fonction de la notation des entreprises ?

Quel montant total représente le report de six mois des échéances pour les réseaux bancaires ?

Certaines commandes fermes de très grandes entreprises auprès de leurs sous-traitants ne seront pas payées au mois d’avril. Les demandes de garanties risquent-elles d’exploser de ce fait ?

Enfin, je salue l’action de Bpifrance car, dans le contexte que nous connaissons, je ne sais pas comment nous aurions fait sans elle. C’est une courroie de transmission efficace et rapide.

M. Joël Giraud. Beaucoup de réseaux bancaires traitent les entreprises ayant des chiffres d’affaires inférieurs à 65 000 euros comme des comptes de particulier et n’instruisent donc pas leur demande de PGE. Il s’agit essentiellement de commerçants ou d’artisans. Je vous avais demandé de faire de la pédagogie pour que les banques comprennent bien qu’un plan de continuation de l’activité n’était pas une procédure collective. Faut-il en faire aujourd’hui pour que ces entreprises bénéficient des PGE ?

M. le président Éric Woerth. La question des artisans et des commerçants est récurrente.

M. Nicolas Forissier. Il faut geler la situation. Je m’étonne de trouver encore tant de cas de petites entreprises ou d’entrepreneurs indépendants qui se voient refuser des prêts de trésorerie par les réseaux bancaires. La pédagogie est essentielle : il faut arrêter de faire comme d’habitude.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Certains secteurs d’activité voient systématiquement leurs demandes rejetées : les discothèques, les agents immobiliers, la restauration, les entreprises d’énergies renouvelables ou les centres de beauté. Chaque banque a ses critères d’exclusion.

Je me réjouis de l’aide apportée aux start-up, mais il leur est demandé de fournir un bilan pour en bénéficier, ce qui est impossible pour une entreprise qui démarre.

Toutes les entreprises notées 5 ou 6 voient leurs demandes de prêts refusées, ce sont pourtant celles qui ont besoin d’aide aujourd’hui.

M. Fabrice Le Vigoureux. Madame Atig, vous dites que tout le monde veut éviter la paperasse, mais je connais nombre d’experts-comptables ou d’entreprises à qui l’on réclame des comptes prévisionnels de trésorerie à partir de plusieurs scénarios, alors même que nous ne savons pas quand nous sortirons du confinement.

S’agissant des reports d’échéance de six mois, certaines banques demandent le règlement définitif avant avril 2021, ce qui imposera des doubles échéances durant les six mois qui suivront la suspension. Ne pourrait-on prévoir un report à l’issue du crédit initial ?

M. Benoit Simian. L’assouplissement des règles de l’Union européenne permettant l’octroi de prêts garantis par l’État est-il suffisant pour que les banques accordent des prêts sans être accusées de soutien abusif ? D’autres mesures permettraient-elles de fluidifier l’octroi des prêts ?

Je rejoins la demande de Mme Rabault : pourrions-nous avoir des précisions par filière et par type d’entreprise ainsi qu’une cartographie plus détaillée ? Nous pourrions ainsi mieux accompagner les territoires qui en ont besoin.

M. Nicolas Dufourcq. Nous sommes parfaitement conscients de la gravité de la situation dans le secteur de la restauration et de l’hôtellerie. Nous abondons d’ailleurs l’un de nos fonds d’investissement dédié à l’hôtellerie et au tourisme. Nos équipes travaillent avec la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre du programme Cœur de ville pour que toutes les opérations effectuées ne soient pas anéanties par notre incapacité à assurer un pont aérien de cash pour ces entreprises.

S’agissant du reporting, nous allons avoir de plus en plus de données. J’ai proposé au ministère des finances de structurer leur communication, avec des cartes par département ou par notation d’entreprise. La répartition par réseau bancaire n’est pas prévue pour l’instant. Tous sont aujourd’hui engagés. Les différences peuvent tenir à la personnalité des chargés de clientèle. Un important travail de management doit être mené pour faire accepter l’idée d’un crédit automatique, qui n’a rien de naturel, même pour le personnel de Bpifrance.

Les grandes entreprises paieront-elles leurs fournisseurs fin avril ? Nous exerçons une forte pression en ce sens sur celles qui sont dans le portefeuille de Bpifrance. Par ailleurs, pour obtenir le PGE, il faut signer une déclaration sur l’honneur attestant que ce crédit ne sert pas à en rembourser un autre ou à faire un placement financier, et s’engager à respecter le code de commerce s’agissant des délais de paiement aux fournisseurs. Les 300 milliards ne sauraient servir à suppléer un défaut radical sur le crédit interentreprises.

 

Le PGE me paraît parfaitement calibré pour les petits commerçants, les restaurateurs ou encore les artisans, qui subissent de plein fouet une décision administrative dont ils ne sont pas responsables. Hier, je me suis longuement entretenu avec CMA France, afin d’adapter le dispositif, d’autant que la vague est devant nous, les artisans n’étant pas encore venus voir ni Bpifrance ni les banques.

Les 300 milliards seront suffisants, dans la mesure où c’est plus que le quart du total de l’encours du crédit aux entreprises.

Seules 18 % des entreprises concernées dans les Hauts-de-France ont demandé un PGE, parce qu’elles avaient une bonne trésorerie sur laquelle elles ont vécu. L’extension de la durée du confinement va faire monter leur anxiété. Le réseau est désormais prêt à les accueillir.

M. le président Éric Woerth. Sur le terrain, la situation n’est pas très claire. Les artisans et les commerçants ne savent pas vraiment à qui s’adresser, en dehors de leur banque, des chambres de métiers et de l’artisanat et des chambres de commerce et d’industrie.

M. Nicolas Dufourcq. Les artisans et les commerçants qui ont moins de 10 salariés et qui ont perdu plus de 50 % de leur chiffre d’affaires du mois de mars doivent s’adresser à la direction générale des finances publiques (DGFiP) pour bénéficier du fonds de solidarité, lequel leur verse 1 500 euros et dans certains cas 2 000 euros. L’allocation est cumulable avec d’autres prestations, notamment celles des collectivités locales et de la caisse de retraite des artisans, et des indemnités journalières. Le petit PGE s’adresse expressément à la toute petite entreprise et à la petite association, sans exclure de profession.

M. le président Éric Woerth. N’oublions pas que, dans certains départements, confinés depuis plus longtemps, comme l’Oise, ou dans la région Grand Est, certaines entreprises vont encore plus mal.

M. François Pupponi. Je vous confirme le décalage entre le discours des banques et les pratiques locales. Les agences ne jouant pas le jeu, les entreprises ne peuvent même pas déposer de dossier. Nous devons voir comment les aider.

Mme Maya Atig. Je tiens une nouvelle fois à insister sur les qualités d’écoute et la sincérité dont font preuve les banques. Les agences échangent énormément avec leurs clients. S’agissant de la nécessité d’apporter des clarifications aux commerçants et aux artisans, sachez que nous échangeons avec leurs unions. De la pédagogie reste à faire, pour que le banquier et son client soient à égalité devant l’information. En un moment où nous n’avons pas le temps de prendre du recul, notre réunion, ce matin, est particulièrement utile – je pense, par exemple, au traitement des intérêts évoqué par M. Le Vigoureux.

Nous devons être prévenus des cas d’engorgement et de l’indisponibilité de certaines agences, dans la mesure où les incidents se traitent également avec les conseillers.

Enfin, l’articulation entre les multiples dispositifs offerts aux commerçants et aux artisans peut expliquer votre impression d’un décalage entre l’enveloppe de 300 milliards d’euros et le niveau actuel de soutien.

 

La question de l’accès des différentes professions est détaillée dans la note technique que nous allons vous envoyer. L’enjeu pour les clients est d’éviter un surendettement inutile. Bercy nous a demandé d’avancer sur la question des entreprises refusées, qui n’a pas de solution automatique. Les sujets qui ne sont pas abordés dans la foire aux questions seront évoqués dans d’autres supports que nous allons diffuser pour faciliter le parcours de nos clients.

M. le président Éric Woerth. Nous serions intéressés par une note complète, et néanmoins simple, pour suivre la situation.

Un comité de suivi sera par ailleurs bientôt convoqué par le Premier ministre.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. En faisant remonter les informations du terrain, tout particulièrement en cette période de contrôle des mesures d’urgence, nous remplissons notre mission de parlementaire. Aussi, nous vous saurions gré, madame Atig, de les faire redescendre dans les réseaux, afin de garantir l’efficacité des mesures que nous avons prises.

M. le président Éric Woerth. Alors que le « stop » a été très brutal et que le « go » peut prendre un peu de temps, nous devons veiller à éviter le plus possible la casse.

 

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

 

Réunion du mercredi 8 avril 2020 à 9 heures

Présents. M. Saïd Ahamada, M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Bruno Duvergé, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Joël Giraud, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, M. Marc Le Fur, Mme Patricia Lemoine, Mme Marine Le Pen, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, M. JeanPaul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Christine Pires Beaune, M. Benoit Potterie, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, M. Robin Reda, M. Xavier Roseren, Mme Claudia Rouaux, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth

Excusés.  M. Damien Abad, M. David Habib, Mme Lise Magnier, M. Olivier Serva