RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

 

Ministère de l’Europe

et des Affaires étrangères

 

 

 

 

 

 

 

Projet de loi

autorisant la ratification de l’accord de dialogue politique et de coopération

entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part,

et la République de Cuba, d’autre part

 

NOR : EAEJ1735040L/Bleue-1

 

 

ÉTUDE D’IMPACT

 

I-                   Situation de référence

 

  1. La relation franco-cubaine

 

La République française (ci-après « la  France ») et la République de Cuba (ci-après « Cuba ») ont tissé, tout au long de leur histoire commune, des relations d’amitié et de coopération, qui ont été relancées depuis 2012 par des rencontres politiques au plus haut niveau. La visite du Président de la République à Cuba en mai 2015, puis de celle du Président Raul Castro à Paris en février 2016, ont revêtu un caractère historique, puisqu’aucun chef d’Etat français ou cubain n’avait jusqu’alors effectué de déplacement officiel dans l’autre pays.

 

Ces visites ont marqué le début d’une nouvelle ère dans les relations bilatérales franco-cubaines. Celle-ci s’est notamment concrétisée par la restructuration de la dette cubaine vis-à-vis de la France, la signature le 1er février 2016 d’une feuille de route économique bilatérale dont les axes prioritaires sont le tourisme, l’énergie, les infrastructures, la santé, les transports et l’agroalimentaire, l’agriculture, et l’extension du champ de compétence de l’Agence française de développement (AFD) à Cuba où elle est présente depuis octobre 2016[1]. L’organisation d’un mois de la culture française à Cuba ainsi que la signature de contrats d’entreprises françaises constituent également des illustrations de la mise en mouvement de ce partenariat rapproché.

Le budget de coopération de la France à Cuba s’élève à 334 K€ dont 315 K€ relèvent du programme 185, dédié à la diplomatie culturelle et d'influence, et 19 K€ proviennent du programme 209, consacré à la solidarité à l'égard des pays en développement. Ce budget a connu une augmentation de plus de 20 % depuis 2014 afin de permettre le renforcement de l’influence de la France à Cuba. La coopération s’articule autour de 3 axes : les formations supérieures et la recherche, l'enseignement et la diffusion de la langue française, et la coopération artistique et culturelle. 


Il est également à noter que la présidente du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, Mme Danielle Bousquet, a notamment participé au congrès sur l’éducation, l’orientation et la thérapie sexuelle organisée par la directrice du centre national d’éducation sexuelle cubain, Mme Mariela Castro Espin, en septembre 2015 à La Havane.

Malgré le fort intérêt des entreprises françaises pour le marché cubain, le commerce bilatéral entre la France et Cuba ne parvient pas à croître. En effet, après une baisse de 4,5% du commerce bilatéral entre la France et Cuba en 2015, les échanges ont continué à diminuer de 10% l’année suivante, passant de 172,3 M€ à 155,3 M€ avec une baisse des exportations et une hausse des importations. Cette contraction est principalement liée à deux facteurs :

- une réduction des exportations françaises à Cuba, notamment de céréales, qui ont connu une baisse de 12,7 % entre 2015 et 2016 (passant de 146,8 M€ à 128,2 M€), qui s’explique notamment par la baisse de la production disponible sur cette période en raison des mauvaises récoltes liées aux conditions météorologiques ;

- l’interruption temporaire de la ligne d’assurance-crédit COFACE, visant à garantir les exportations françaises vers Cuba[2]. L’accord intergouvernemental relatif à cette ligne de crédit, signé en octobre 2012, prévoit la signature d’avenants pour permettre le financement des exportations. Or, un avenant avait pris fin début 2015, avant qu’un autre ne soit signé mi-2016.

Quant aux importations depuis Cuba[3], elles ont augmenté de 6,5 % sur la période considérée, ce qui a provoqué une contraction de l’excédent commercial français : il est ainsi passé de 121,3 M€ en 2015 à 101M€ en 2016, soit une diminution de 16,7 %.

La France devrait néanmoins pouvoir gagner progressivement des parts de marché à Cuba. Malgré l’absence de données locales en matière de commerce extérieur pour 2016[4], les autres partenaires de l’île rencontrent les mêmes vents contraires au développement de leurs flux commerciaux, tandis que le lancement de nouveaux instruments financiers (implantation de l’AFD, fonds de contre-valeur franco-cubain, ligne BPI-AE moyen/long terme, intervention envisagée de la Banque européenne d’investissement) et les débouchés, entre autre, du grand contrat concernant la rénovation, l’extension et la concession de l’aéroport de La Havane (remporté par le consortium Bouygues/ADP) pourrait rapidement bénéficier au commerce bilatéral entre nos deux pays.

Il n’en demeure pas moins que Cuba traverse actuellement une grave crise de liquidités compte tenu de la situation actuelle du Venezuela, son principal partenaire économique et financier. Le PIB cubain a officiellement baissé de 0,9 % en 2016 et les 2 % de croissance attendus par le gouvernement cette année seront difficiles à atteindre. De fait, la plupart des économistes tablent sur une légère récession ou, au mieux, à une stagnation de l’économie cubaine.

 

Malgré une situation économique dégradée, les besoins cubains pour le développement économique du pays, son évolution actuelle, et les axes prioritaires définis par ses responsables laissent présager des opportunités pour les entreprises françaises.

 


  1. La politique étrangère de Cuba

 

Alors que les relations diplomatiques entre Cuba et les Etats-Unis étaient rompues depuis 1961, les Présidents Barack Obama et Raul Castro ont annoncé le 17 décembre 2014 le lancement du processus de normalisation entre La Havane et Washington et rétabli officiellement ces relations en juillet 2015. L’administration Obama a retiré Cuba de la liste des États soutenant le terrorisme et adopté des mesures successives d’assouplissement de certaines dispositions de l’embargo, avant le déplacement du Président Barack Obama à La Havane, du 20 au 22 mars 2016. Il n’en reste pas moins que l’embargo lui-même reste en vigueur : seul le Congrès étant en mesure de l’abroger.

 

L’administration Trump a cependant annoncé le 3 février 2017 le lancement d’un « réexamen complet de toutes les politiques des États-Unis à l’égard de Cuba », dont les conclusions ont été rendues publiques à l’occasion d’un discours prononcé à Miami devant la communauté cubano-américaine le 16 juin 2017. L’administration Trump s’apprête ainsi à durcir les conditions de voyage des ressortissants américains vers l’île, et à interdire les transactions avec les entités contrôlées par le ministère des forces armées (qui contrôlent une part très significative de l’économie cubaine). Ces annonces, qui ne devraient pas avoir a priori d’effets majeurs et qui doivent encore faire l’objet d’une traduction réglementaire par l’Office of foreign assets control (OFAC), laissent néanmoins peu de place à la poursuite de la normalisation des relations entre Cuba et les Etats-Unis. Il est probable que le processus initié sous la présidence de Barack Obama soit au mieux gelé sous la présidence de Donald Trump, ce qui renforce la nécessité et l’intérêt pour les pays européens de consolider leurs relations avec Cuba durant cette période.

 

Cuba bénéficie par ailleurs de sympathies, qu’elle entretient, dans diverses régions du monde. Cependant, elle a connu une grave crise après l’effondrement de l’URSS en 1991 et cherche aujourd’hui à diversifier ses partenaires. Très proche du Venezuela et des membres de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA), ainsi que de la Chine, de la Russie et de la Corée du nord, elle cherche également à renforcer ses relations avec l’Union européenne et d’autres pays latino-américains. Elle est en effet un acteur très influent en Amérique latine et dans les Caraïbes, où elle demeure à la fois un « marqueur » pour de nombreuses diplomaties, qui mesurent toujours l’indépendance de leurs partenaires européens à l’égard des États-Unis à l’aune des relations qu’ils entretiennent avec le régime cubain, et un « faiseur d’opinion » qui donne le ton bien au-delà du seul cercle des États bolivariens. La Havane a en outre joué un rôle reconnu de médiation en hébergeant les sessions de négociation de paix entre le gouvernement colombien et la guérilla des FARC, qui ont abouti à la signature des accords de paix le 24 novembre 2016.

 

  1. La relation entre l’Union européenne et Cuba

 

Les relations entre l’Union européenne et Cuba reposaient, depuis 1996, sur une position commune du Conseil de l’Union européenne n° 96/697/PESC du 2 décembre 1996[5], adoptée à l’initiative du Premier ministre espagnol, José Maria Aznar, au titre de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union. Cette déclaration conjointe avait mis un terme au durcissement des relations entre l’Union européenne et Cuba à la suite d’une vague de répressions à Cuba qui avait conduit l’Union à prendre des mesures restrictives (suspension de la coopération européenne et des États membres, et limitation des déplacements et rencontres de haut niveau). Aux termes de la position commune de 1996, toute coopération avec Cuba était subordonnée à une démocratisation du régime. Cette position a été formellement abandonnée par l’Union européenne le 6 décembre 2016 par la décision (PESC) 2016/2233[6].

Les relations entre l’Union européenne et Cuba avaient en réalité repris dès 2008 avec la signature d’une déclaration conjointe de coopération et l’instauration d’un dialogue politique. Cette relance des relations est mentionnée dans la communication de la Commission européenne du 30 septembre 2009 intitulée «L’Union européenne et l’Amérique latine : un partenariat entre acteurs mondiaux»[7]. L’ouverture des négociations du présent accord ainsi que l’évolution des relations entre Cuba et les Etats-Unis avaient été saluées dans la déclaration du sommet UE-CELAC des 10 et 11 juin 2015[8] à Bruxelles. Les parties appelaient notamment de leurs vœux la levée de l’embargo sur Cuba. Le Parlement européen a assorti son aval au présent accord le 5 juillet 2017 d’une résolution non législative qui réaffirme la valeur stratégique des relations entre l’Union européenne et Cuba tout en soulignant en particulier la nécessité de défendre et d’améliorer le respect des droits de l’Homme, de la démocratie et des libertés fondamentales dans ce pays[9].

 

La France a joué un rôle moteur dans la relance du dialogue entre Cuba et l’Union européenne, en facilitant la reprise de la coopération en 2008, alors qu’elle assurait la Présidence de l’Union, mais également dans le lancement et l’aboutissement des négociations entre l’Union européenne et Cuba. Un dialogue de haut niveau sur les droits de l’Homme est conduit annuellement depuis 2015 ; la troisième et dernière session en date ayant eu lieu le 22 mai 2017 à Bruxelles.

 

La question de l’exercice des droits de l’Homme à Cuba, s’agissant notamment des droits civils et politiques, du pluralisme et de la démocratie représentative, constituent des sujets de préoccupation constants pour l’Union européenne et l’ensemble de ses États membres. La France privilégie une approche européenne  dans le cadre du dialogue de haut niveau sur les droits de l’Homme. Par ailleurs, il s’agit de contribuer par tous les autres moyens possibles, économiques, et de coopération, à la transition économique et politique de ce pays.

 


L’Union européenne est le second partenaire économique de Cuba après le Venezuela et le plus gros investisseur étranger, principalement dans le secteur du tourisme, de la construction, de l’électricité et de l’agroalimentaire. Un tiers des visiteurs étrangers à Cuba sont européens. En 2015, les exportations de biens européens vers Cuba atteignaient 2,2 Mds d’€, contre 0,54 Md d’€ d’importations. Les principaux biens d’exportation de ce pays sont les carburants minéraux, le sucre, les boissons et le tabac. Cuba a perdu le bénéfice du système de préférence généralisé (SPG) européen et l’accès privilégié au marché européen qui en découlait en 2014, après avoir été classé dans la catégorie haute des pays à revenu intermédiaire (PRI). Les exportations de tabac ont particulièrement été affectées, avec une augmentation très importante des droits de douane appliqués.[10]

 

II Historique des négociations

 

Le 18 avril 2013, la Commission européenne a présenté au Conseil la recommandation visant à autoriser la Commission et la Haute Représentante à négocier les dispositions d'un accord de dialogue politique et de coopération entre l’Union européenne et la République de Cuba. Le projet de directives de négociations a été adopté lors du Conseil Affaires étrangères du 10 février 2014 ; les négociations ont débuté en avril de la même année et se sont achevées à l'issue de sept cycles, en mars 2016.

 

L’accord de dialogue politique et de coopération (ADPC) entre l’Union européenne et Cuba a été paraphé par l’Union Européenne le 11 mars 2016, soit seulement deux ans après l’ouverture des négociations, par la Haute Représentante, Mme Federica Mogherini. Il a été signé à Bruxelles par l’Union européenne, ses États membres, et la République de Cuba, le 12 décembre 2016 à Bruxelles.

 

Les autorités cubaines conditionnaient la signature de l’accord à l’abandon formel de la position commune de 1996, qui définissait toujours officiellement la politique de l’Union et de ses États membres vis-à-vis de Cuba en subordonnant toute coopération avec Cuba à une démocratisation du régime. Cette décision a été formellement abandonnée par l’Union européenne le 6 décembre 2016 (décision (PESC) 2016/2233[11]).


III-            Objectifs de l’accord

 

Le présent accord de dialogue politique et de coopération, conclu à Bruxelles le 12 décembre 2016 et approuvé par le Parlement européen le 5 juillet 2017[12], est le premier accord jamais signé entre les parties. Il constituera le nouveau cadre juridique des relations entre l’Union européenne et Cuba tout en permettant aux États européens de développer individuellement leurs propres relations et opportunités avec ce pays. L’accord-cadre porte sur tous les secteurs d’intérêts communs aux parties et vise avant tout à instaurer de bonnes pratiques de dialogue et de coopération entre l’Union européenne et Cuba, et à consolider les liens existants. Cet accord a pour objectif d’obtenir des résultats concrets en se fondant sur le respect des normes internationales, notamment en matière de droits de l’Homme, de bonne gouvernance et de commerce, et à renforcer les échanges dans le cadre des instances internationales, en particulier à l’ONU. L’accord prévoit un dialogue politique renforcé, une amélioration de la coopération bilatérale et l'élaboration d'une action commune dans les enceintes multilatérales. Il vise à accompagner le processus de transition et de modernisation de l'économie et de la société cubaines.

 

L’accord de dialogue politique et de coopération entre l’Union européenne et Cuba devrait ainsi contribuer à l’intensification du dialogue politique et au développement de la coopération, y compris commerciale, entre la France et Cuba.

 

IV. Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

 

1. Conséquences juridiques :

 

 

Avec cet accord, l’Union européenne, ses États membres et Cuba s’engagent à renforcer leur coordination dans le cadre des accords et organisations internationales auxquels elles sont parties, en particulier l’organisation des Nations unies, l’organisation mondiale du commerce, et de leurs  engagements internationaux dans le domaine du désarmement, du développement durable, et des droits sociaux et environnementaux. Ces engagements sont rappelés dans les considérants puis tout au long de l’accord.

 

Cuba fait partie de plusieurs organisations internationales, notamment :

 

- l’Organisation des Nations unies (ONU) ;

- l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) ;

- l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ;

- l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ;

- l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) ;

- la Cour pénale internationale (CPI) ;

- l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

 

Par ailleurs, le présent accord-cadre n’aura pas d’incidence immédiate sur les accords bilatéraux que chaque Etat membre a conclus, mais la mise en œuvre de l’accord-cadre pourrait, à terme, nécessiter de revoir les accords bilatéraux conclus avec Cuba.

 

 

L’accord poursuit des objectifs dans les domaines de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), de la politique commerciale commune et de la coopération au développement.

 

Par conséquent, la base juridique de la décision adoptée pour autoriser la signature de l’accord repose sur l'article 37 du traité sur l’Union européenne (TUE, titre V « action extérieure de l'Union ») qui dispose que « l'Union peut conclure des accords avec un ou plusieurs États ou organisations internationales dans les domaines relevant du présent chapitre »[13] et les articles 207[14] et 209[15] du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE, cinquième partie « l'action extérieure de l'union », titre II « la politique commerciale commune »).

 


La signature de l’accord de dialogue politique et de coopération avec la République de Cuba a été autorisée par la décision (UE) 2016/2232 du Conseil du 6 décembre 2016[16], conformément à l’article 218, paragraphe 5 TFUE[17] qui prévoit l’adoption d’une décision pour autoriser la signature d’un accord. L'article 218, paragraphe 8, deuxième alinéa, TFUE[18] dispose par ailleurs que le Conseil doit statuer à l'unanimité si l'accord porte sur un domaine pour lequel l'unanimité est requise pour l'adoption d'un acte de l'Union. La PESC est un domaine pour lequel l’unanimité est requise pour l’adoption d’un acte de l’Union.

 

Dans l'attente de son entrée en vigueur, et conformément à l'article 86 (le premier jour du deuxième mois suivant la date à laquelle les parties se sont mutuellement notifiés l’achèvement de leurs procédures internes requises), certaines dispositions de l'accord (notifiées par l’Union et acceptées par Cuba lors de l’échange de leurs instruments de ratification) sont appliquées à titre provisoire entre l'Union et Cuba depuis le 1er novembre 2017, mais uniquement dans la mesure où elles couvrent des domaines relevant de la compétence de l'Union y compris des questions relevant de la compétence conférée à l'Union pour définir et mettre en œuvre une politique étrangère et de sécurité commune. A ce titre, les articles suivants n’entrent pas dans le champ d’application provisoire de l’accord : article 29 (blanchiment d’argent) ; article 35 (protection consulaire) ; article 55, dans la mesure où il concerne la coopération relative au transport maritime ; article 58 (bonne gouvernance en matière de fiscalité) ; article 71, dans la mesure où il concerne la sécurité des frontières ; et article 73, dans la mesure où il concerne la coopération relative aux indications géographiques non-agricoles.

 

 

Le présent accord est un accord mixte qui doit, pour entrer en vigueur, être également approuvé ou ratifié par les États membres. En effet, il porte à la fois sur des matières relevant de la compétence exclusive de l’Union européenne en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne[19] (tels que la politique commerciale commune ou l’établissement de règles de concurrence), et sur des matières relevant de la compétence partagée entre l’Union et les États membres, tels que les transports, l’environnement, ou encore l’espace de liberté, de sécurité et de justice, dans la mesure où les stipulations de l’accord sont susceptibles d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée.

 


La décision du 6 décembre 2016 précise les dispositions qui, relevant de la compétence des États membres, ne seront pas appliquées avant que ces derniers ne ratifient l’accord : il s’agit des articles 29 (blanchiment d’argent) ; 35 (protection consulaire) ; 55 (transports) dans la mesure où il concerne la coopération relative au transport maritime ; 58 (bonne gouvernance en matière de fiscalité) ; 71 (douanes) dans la mesure où il concerne la sécurité des frontières ; et 73 (propriété intellectuelle) dans la mesure où il concerne la coopération relative aux indications géographiques non-agricoles.

 

L’article 27 du présent accord prévoit que « les parties conviennent de coopérer afin de garantir un niveau élevé de protection des données à caractère personnel conformément aux normes adoptées au niveau multilatéral et aux autres pratiques et instruments juridiques internationaux ».

Cuba n’étant pas membre de l’Union européenne, elle ne peut se voir transférer des données à caractère personnel que si elle assure un niveau de protection suffisant de la vie privée et des libertés et droits fondamentaux des personnes à l’égard du traitement dont ces données font l’objet, comme le prévoit l’article 68 de la loi n° 78-17 dite « informatique et libertés »[20]. Or la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) estime que Cuba ne dispose pas d’une législation adéquate en matière de protection des données à caractère personnel[21]. Par ailleurs, Cuba n’a pas, à ce jour, fait l’objet d’une reconnaissance de protection adéquate par l’Union européenne.

 

2. Conséquences politiques :

 

L’accord permettra le développement d’un dialogue plus dense entre l’Union européenne et Cuba au niveau bilatéral mais également à l’échelon régional et international dans le but de partager les positions des parties et de trouver autant que possible des domaines de coopération conjoints. Les deux parties s’engagent en effet à dialoguer et à échanger dans les enceintes internationales et en particulier aux Nations unies, et à poursuivre et promouvoir le partenariat entre l’Union européenne et la Communauté des États latino-américains et des Caraïbes (CELAC), partenariat stratégique pour l’Union européenne qui se structure autour de trois piliers : le dialogue politique, les relations commerciales et l’aide au développement [Partie II – article 3].

 

Un dialogue politique entre l’Union européenne et Cuba se tiendra à intervalles réguliers au niveau politique et des hauts fonctionnaires et sera doublé de dialogues spécifiques qui restent à définir conjointement. L’objectif de ces instances permettra d’exposer, de comprendre et de rapprocher progressivement les positions des parties. Il s’agit de renforcer le dialogue entre l’UE et Cuba réinstauré en 2008 pour mener des actions de coopération conjointe ou des initiatives au plan multilatéral [partie II – article 4]. A noter que la tenue d’un dialogue sur les droits de l’Homme est mentionné spécifiquement [partie II – article 5].

 


Les articles 6 à 9 de la partie II sont consacrés aux engagements en matière de paix et sécurité. Les parties s’engagent à mettre en œuvre leurs obligations internationales en matière de commerce illicite d’armes conventionnelles, légères et de petit calibre. Les parties considèrent comme « un élément essentiel de l’accord » les dispositions de l’article 7 consacrant leur engagement à coopérer et à contribuer à la lutte contre la prolifération des armes de destructions massives et de leurs vecteurs. L’Union européenne prend note de la proclamation de la zone Amérique latine et Caraïbes comme « zone de paix » et région exempte d’armes nucléaires, ce qui n’engendre pas d’engagements particuliers mais qui reste un point de sensibilité pour la France et le Royaume-Uni, qui ont veillé pendant la négociation de l’accord à ne pas accepter un langage plus contraignant sur ce point, Cuba comme certains États membres de l’Union européenne ayant signé le traité sur l’interdiction des armes nucléaires.

 

Les parties s’engagent à coopérer dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, en appliquant les résolutions des Nations unies et les instruments juridiques internationaux et en travaillant pour améliorer le cadre normatif international. Cette coopération sera menée y compris en matière de financement du terrorisme. Les parties conviennent également de l’importance de coopérer dans le domaine de la justice pénale internationale, notamment dans le cadre de la Cour pénale internationale [titre II, article 9].

 

Conformément à l'opposition de principe de l'Union européenne aux sanctions secondaires et aux sanctions unilatérales à portée extraterritoriale et à la résolution votée chaque année depuis 1992 sur la « nécessité de lever le blocus économique, commercial et financier appliqué à Cuba par les Etats-Unis d'Amérique » à l’Assemblée générale des Nations unies, les parties s’engagent à entretenir un dialogue régulier sur les mesures coercitives unilatérales [partie II, article 10].

 

Le dialogue politique et les actions de coopération avec Cuba seront également renforcés en matière de lutte contre le trafic d’êtres humains et le trafic de migrants, la lutte contre la production, le trafic et la consommation de drogues illicites et la lutte contre la discrimination raciale et la xénophobie. Dans tous ces domaines il s’agira notamment d’appliquer et de promouvoir les textes des Nations unies et de procéder à des échanges de bonnes pratiques [partie II, articles 11 à 13].

 

La mise en œuvre des dix-sept objectifs du développement durable (ODD) fera l’objet d’échanges de vue via un dialogue spécifique et l’amélioration de la « coopération pratique » entre l’Union Européenne et Cuba. Le principe de consacrer 0,7% du RNB des pays développés à l’aide au développement et la nécessité de suivre et réévaluer les engagements internationaux en matière de développement durable sont inscrits dans l’accord [partie II, article 14].

 

3. Conséquences économiques :

 

Le but de l’accord est de créer un environnement plus favorable, prévisible et transparent, pour les opérateurs économiques et d’améliorer leurs capacités de production et de création d’emploi. Aucun volet relatif à la libéralisation de lignes tarifaires n’est contenu dans l’accord, et la protection des investissements n’est pas couverte[22].

 


Les seules dispositions commerciales sont relatives au cadre commun dans lequel les parties s’engagent à travailler. Les objectifs de l’accord (article 2) en matière économique et commerciale sont la consolidation et le renforcement des relations existantes dans le domaine du commerce (2a) ainsi que l’accompagnement du processus de modernisation de l’économie cubaine (2b). Les parties s’engagent à promouvoir les relations commerciales et économiques en conformité avec les règles et les principes régissant le commerce international tels qu’inscrits dans les accords de l’Organisation mondiale du commerce.

 

Une soixantaine d’entreprises françaises sont actives à Cuba par le biais de partenariats avec des entités cubaines, de bureaux de représentation et de sociétés détenues par des Français établis localement. Des missions du mouvement des entreprises de France (MEDEF) sont régulièrement organisées (la dernière en janvier 2017). La foire internationale de La Havane (FIHAV) est l’occasion pour des entreprises françaises d’exposer chaque année leur savoir-faire (prochaine édition prévue en novembre 2017). L’assurance-crédit à moyen et long terme est de nouveau possible depuis fin 2015 avec la garantie de Bpifrance-assurance export (BPI-AE) pour autant qu’une banque européenne accepte de porter l’opération (seule l’assurance court-terme l’était auparavant par la compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (COFACE)).

L’investissement français le plus important est celui du groupe Pernod-Ricard, qui a noué en 1993 un partenariat avec la société d’Etat Cuba Rón pour la distribution mondiale du rhum Havana Club, avec la constitution de la société mixte Havana Club International. En 2007, le partenariat a été approfondi par la création d’une distillerie à San José afin de soutenir la croissance des ventes (multipliées par 10 depuis 1993), qui pourrait s’accélérer encore avec l’ouverture potentielle du marché américain (40 % du marché mondial du rhum).

De plus, les autorités cubaines ont annoncé en août 2016 la concession de l’aéroport de La Havane au consortium Bouygues et Aéroports de Paris. Il s’agit de la première fois que les autorités cubaines confient la concession d'une grande infrastructure à des entreprises étrangères. Ce choix inédit se justifie par le dynamisme du tourisme à Cuba (record de 4 millions de visiteurs en 2016), ainsi que par l’arrivée des premiers vols depuis les Etats-Unis. D’autres grands groupes participent aux projets de développement de l’île. Ils se concentrent dans les secteurs du tourisme (Accor), du bâtiment et de la construction (Bouygues), de l’énergie (Total), de la construction électrique (Schneider), de l’agroalimentaire (Soufflet) et des transports (Air France).

 

1.1 L’accord devrait faciliter le développement des activités de l’Agence française de développement (AFD) à Cuba. Conformément à l’annonce du Président de la République en mai 2015 à l’occasion de son déplacement dans ce pays, l’AFD a ouvert une antenne à La Havane en octobre 2016[23]. Elle a d’ores et déjà instruit un premier projet cofinancé avec le fonds international de développement agricole (FIDA) pour la consolidation de l’élevage et de la filière lait dans la région de Camagüey. L’octroi du financement pour ce projet, d’un montant total de 51,6 M€ (AFD 25 millions, Fida 10,9 millions, fonds de contrevaleur franco cubain 6 millions, contrepartie cubaine 9,7 millions), est intervenu en décembre 2016. S’agissant des projets à venir, l’AFD explore des possibilités de financement dans les secteurs du transport, notamment ferroviaire, des énergies renouvelables et de l’assainissement de l’eau. Ces projets sont actuellement à l’étude.

 


L’agence française de développement bénéficiera du rapprochement entre l’Union européenne et Cuba, avec la perspective de la négociation d’accords techniques et financiers (conventions de prêt, procédure d’achat de matériel et de fourniture à l’international, importations dans des délais raisonnables), de l’identification et du lancement de nouveaux projets dans les meilleurs délais, notamment dans le secteur des transports, de l’eau et de l’assainissement, de l’énergie, du tourisme et de l’aménagement urbain, tous mentionnés comme des secteurs de coopération dans le présent accord.

Cuba s’engage, notamment à l’article 18.5 de l’accord, à accomplir toutes les procédures d’importation, en exemption de droits de douane et de taxes, relatives aux marchandises et aux intrants liés aux actions de coopération.

 

1.2 Le secteur agricole, qui joue un rôle central à Cuba pour des raisons tant historiques, qu’économiques et sociales, constituait encore en 2015 le premier pourvoyeur d’emplois du pays, réunissant 20 % de la population active. Le pays a longtemps vécu de l’exportation du sucre avec une concentration de la terre qui a fait de la réforme agraire l’un des premiers chantiers de la Révolution, cette monoculture ne permettant pas d’assurer l’autonomie alimentaire du pays. Après la chute de l’Union soviétique, principal fournisseur d’intrants (carburant, engrais) et principal débouché pour la canne, le modèle sucrier a été délaissé au profit des cultures vivrières. Ainsi, en 2014 les ventes de sucre ne représentent plus que 8,6% des exportations cubaines (contre 80% en 1990). Pourtant, l’autonomie alimentaire reste encore à construire. On estime qu’en 2015, Cuba a importé autour de 2Mds USD de produits alimentaires, surtout des céréales (44%), de la viande et préparations à base de viande (15%) et des produits laitiers (13%, principalement du lait en poudre acheté au Canada à prix subventionné). Malgré la priorité donnée à l’agriculture dès 2008 pour l’amélioration du modèle économique, force est de constater que le secteur est encore loin de contribuer au développement du pays. Dans le présent accord, l’article 50 est dédié à l’agriculture, au développement rural, à la pêche et à l’aquaculture, instaurant une coopération des parties dans le but d’améliorer la productivité et la production cubaines, le développement rural, de développer les marchés et la promotion des relations commerciales internationales et l’exploitation et la gestion durable des ressources halieutiques.  La chute des importations cubaines dans les années 90 de matériel agricole, d’engrais et de pesticides suite à l’effondrement de l’URSS a eu pour conséquence indirecte le développement local d’une agriculture de conservation qui présente aujourd’hui un intérêt potentiel de coopération technique pour le ministère de l’agriculture français. Les techniques cubaines sont en effet liées à l’agro-écologie et à l’initiative internationale « 4 pour 1000 : les sols pour la sécurité alimentaire et le climat »[24] lancée lors de la COP21.

 

Cuba importe près de 70 % des produits alimentaires consommés dans le pays, situation qui semble devoir durer. Près de la moitié des exportations françaises à destination de Cuba sont ainsi des produits agricoles, essentiellement des céréales (80%). D’autre part, la production sucrière cubaine reste à des niveaux faibles, par manque d’investissements. Les autorités cubaines sont à la recherche de partenaires étrangers pour investir dans le secteur agricole et agroalimentaire. Des opportunités existent pour les entreprises françaises en matière de production de bières et malts, de céréales, de farine de blé, de viande porcine, bovine et de volaille, ainsi que pour la production de fertilisants et intrants chimiques ou biologiques et en matière de semences et de génétique animale. Des contrats de gestion pour quatre centrales sucrières ont été ouverts aux investisseurs étrangers. Ce secteur est aussi à la recherche de matériel et machines agricoles.

 


Le lancement du premier projet de l’AFD, à savoir la consolidation de l’élevage et de la filière lait dans la région de Camagüey, concourt au renforcement de la coopération entre la France et Cuba dans le secteur agricole. Ce projet a notamment permis l’organisation d’une mission par Business France d’équipementiers agricoles à Cuba en juin 2017. Par ailleurs, la coopération agricole entre la France et Cuba prend appui sur des partenariats entre instituts de recherche (notamment le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, organisme français de recherche agronomique et de coopération internationale pour le développement durable des régions tropicales et méditerranéennes), et implique des établissements d’enseignement technique agricole français (non couverts par le présent accord), en particulier guadeloupéens et martiniquais, des professionnels (via une association pour une agriculture paysanne et écologique dans la Caraïbe – APEC).

 

1.3 Au niveau bilatéral, la signature en février 2017 d’un accord intergouvernemental[25] a permis la création d’un programme scientifique, le Partenariat Hubert Curien « Carlos J. Finlay ». Ce nouveau programme doit contribuer à structurer la coopération scientifique dans des secteurs prioritaires pour la France et Cuba (notamment la santé, l’agronomie, et l’environnement). Il vise à favoriser le développement de projets de recherche conjoints de haut niveau. Huit projets ont d’ores et déjà été retenus pour la période 2017-2018 dans des disciplines très variées : l’agronomie, la biologie et la santé, les sciences de l’ingénieur, et la chimie. Le présent accord permettra de renforcer ces coopérations au niveau européen.

 

4. Conséquences financières :

 

Le montant de l’aide de l’Union européenne à Cuba était de 86 M€ entre 2008 et 2014 et s’élève à 50 M€ pour la période 2014-2020 via l’Instrument de coopération au développement (ICD)[26]. Ce pays étant considéré comme « gradué », c’est-à-dire sorti du champ d’éligibilité selon les critères du comité d’aide au développement de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’Union européenne se désengage progressivement en matière d’aide publique au développement. Sur cette période, 21 M€ sont dédiés à l’agriculture durable et la sécurité alimentaire, 18 M€ à l’environnement et au changement climatique, 10 M€ au développement social et économique et 1 M€ à des actions de soutien diverses. Par ailleurs, 5 M€ ont été alloués pour cette même période à des projets dans le secteur social et culturel et Cuba est éligible aux programmes européens pour l’Amérique latine (en particulier Al-Invest (soutien aux PME), COPOLAD (coopération en matière de lutte contre le trafic de drogue), EUROCLIMA et Erasmus+.

 


Aucun engagement financier supplémentaire spécifique ne découle du présent accord. Néanmoins, le développement d’une assistance technique et financière et la promotion de modalités et d’instruments innovants de coopération et de financement sont prévus à l’article 18.1 a) et à l’article 20, concernant les modalités et procédures de coopération ainsi que les moyens de la coopération et la protection des intérêts financiers des parties,. L’Union européenne doit informer Cuba des nouveaux mécanismes et instruments dont ce pays pourrait bénéficier et il est prévu que l’aide humanitaire de l’Union soit fournie sur la base des besoins définis conjointement en cas de besoin. A l’article 37 sur le développement et la cohésion sociale, les parties reconnaissent également que pour réaliser leurs objectifs elles « mobiliseront d’importantes ressources financières provenant à la fois des ressources de coopération et des ressources internes », ce qui ne les engage cependant pas à fixer des engagements nouveaux ou chiffrés.

 

5. Conséquences sociales :

 

Le titre III de la partie III est consacré à la promotion de la justice, à la sécurité des citoyens et aux migrations. Les domaines de coopération qui y sont identifiés et qui relèvent du domaine social concernent la prévention et la lutte contre le problème mondial de la drogue (article 28) et la société civile, dont le « rôle potentiel » à la réalisation des objectifs de l’accord est souligné (article 36). Le titre IV de la partie III est dédié au développement social et à la cohésion sociale dans l’optique de réaliser les objectifs du programme de développement durable à l’horizon 2030. Les domaines de coopération identifiés dans ce domaines sont l’emploi et la protection sociale (article 38), l’éducation (article 39), la santé publique (article 40), la protection des consommateurs (article 41), la culture et le patrimoine (article 42), les personnes en situation de vulnérabilité (article 43), la dimension hommes-femmes (article 44), la jeunesse (article 45) et le développement des communautés locales (article 46). Les parties s’engagent essentiellement au partage de bonnes pratiques, d’information et d’expérience en matière de politique économique, commerciale, d’investissement, budgétaire, sociale, d’emploi, de protection sociale, et de lutte contre toutes les discriminations.

Pour la France, ces dispositions doivent permettre d’accroître nos échanges, nos actions de coopération et la mobilisation d’expertise technique avec Cuba dans tous ces domaines. Les ministres de la santé français et cubain ont notamment signé en mai 2015, à l’occasion de la visite du Président de la République à Cuba, une déclaration d’intention pour le renforcement de la coopération sanitaire[27]. Cette déclaration d’intention vise à développer les échanges sur un secteur dans lequel l’expertise des autorités françaises est particulièrement reconnue. Les similarités des systèmes de santé respectifs, s’appuyant sur le concept de service public de la santé, permet d’envisager des pistes de collaboration intéressantes entre les deux pays et constitue une valeur ajoutée de la France par rapport au système de santé américain.

Par ailleurs, la France et Cuba mènent des actions de coopération en matière de lutte contre les violences et les discriminations à l'encontre des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI).


  1. Conséquences administratives :

 

En France, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères est la principale administration concernée par la mise en œuvre du présent accord, et en particulier la direction des Amériques, la direction de l’Union européenne, et l’ambassade de France à La Havane pour le suivi de la mise en place des dialogues, des consultations régulières et de la bonne coopération entre l’Union européenne, la France et Cuba. L’agence française de développement, les ministères techniques et tout autre opérateur ayant vocation à intervenir à Cuba pourront par ailleurs évaluer la mise en place et l’utilité de l’accord via le degré d’amélioration de la coopération, des relations administratives et du climat des affaires à Cuba. Ce suivi fait partie de l’activité régulière des administrations concernées et n’aura pas d’incidence sur le budget du ministère et des opérateurs, que ce soit en termes de coût ou d’effectifs.

 

L’accord prévoit l’institution d’un conseil conjoint (article 81) qui se réunira régulièrement (tous les deux ans au maximum) au niveau ministériel pour examiner toute question importante s’inscrivant dans le cadre de l’accord et d’un comité mixte composé (article 82) de représentants des parties au niveau des hauts fonctionnaires. Un sous-comité de coopération est institué et des sous-comités thématiques peuvent également être créés (article 83). Le rôle des États membres est cependant secondaire dans ces instances de discussion et de coordination par rapport à celui de l’Union européenne.

 

7. Conséquences concernant la parité entre les femmes et les hommes et la jeunesse :

 

La dimension homme-femme est identifiée comme l’un des secteurs de coopération de l’accord (article 44) qui renvoie en particulier à l’application effective de la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et à la déclaration et au programme de Pékin[28]. Parmi les objectif de coopération figurent notamment l’égalité des chances dans les domaines politique, économique, social et culturel, la lutte contre la violence faite aux femmes et l’autonomisation des femmes.

L’article 45 est dédié à « la jeunesse ». Il prévoit que « la coopération entre les parties appuie toutes les politiques pertinentes concernant la jeunesse », stipule que la coopération vise à encourager une participation active des jeunes à la société, et vise la mise en œuvre de programmes pour favoriser la coopération entre les organisations de jeunesse, notamment des programmes d’échange. L’article 39 est par ailleurs dédié à la coopération dans le domaine de l’éducation.


8. Conséquences environnementales :

 

Le développement durable et la durabilité environnementale sont identifiés comme des secteurs de coopération à l’article 20. Le titre V de la partie III est par ailleurs dédié à l’environnement, la gestion des risques de catastrophe et au changement climatique. On peut regretter l’absence de mention des engagements dans le cadre de l’accord de Paris, sans doute due à la concomitance de la fin de la négociation et de la tenue de la COP21, mais il est bien précisé à l’article 47.3 que la coopération doit faciliter les progrès lors des conférences internationales et contribuer à la mise en œuvre effective des accords multilatéraux dans le domaine du changement climatique, de la biodiversité, de la désertification, de la sécheresse et de la gestion des produits chimiques. La coopération doit notamment favoriser les initiatives conjointes  dans le domaine de l’atténuation  et de l’adaptation au changement climatique. Les dispositions concernant l’eau et l’assainissement se réfèrent à la disponibilité, la gestion durable de l’approvisionnement en eau et l’assainissement pour tous.

 

Il est à noter que Cuba a activement contribué à la conclusion d’un  accord universel, contraignant et ambitieux lors du sommet de Paris en décembre 2015. En effet, elle a joué un rôle de « facilitateur », qui s’est avéré décisif pour convaincre certains pays, initialement opposés à cet accord. En outre, Cuba a officiellement ratifié l’accord de Paris le 12 décembre 2016 et se montre actif dans toutes les enceintes multilatérales quant à la défense des préoccupations environnementales partagées par la France.

 

V – État des signatures et ratifications

 

L’Union européenne, l’ensemble de ses États membres, et la République de Cuba ont signé le présent accord le 12 décembre 2016 à Bruxelles.

 

Les processus de ratification sont en cours. A ce jour, l’accord a été ratifié par onze États membres de l’Union : Bulgarie, République tchèque, Allemagne, Estonie, Hongrie, Lettonie, Finlande, Danemark, Espagne, Luxembourg et Slovaquie[29].

 

Le Parlement européen a approuvé l’accord le 5 juillet 2017, ouvrant la voie à son application provisoire. Cette application provisoire est effective depuis le 1er novembre 2017[30].

 

VI -  Déclarations ou réserves

 

Le Gouvernement français n’envisage pas de faire de réserve ou de déclaration.

1

 


[1] Cette extension a donné lieu à la signature de l’accord relatif à l’établissement et aux activités de l’Agence française de développement et de Proparco dans la République de Cuba, à La Havane le 29 juillet 2016, publié par décret n° 2017-229 du 23 février 2017.

[2] Ce mécanisme a été mis en place en 1991 pour permettre l’approvisionnement de Cuba, notamment en produits agroalimentaires, après la chute de l’URSS.

[3] Note sur le commerce bilatéral France-Cuba en 2016, ministère de l’économie, direction générale du Trésor, 14 mars 2017.

[4] Les chiffres seront publiés au deuxième semestre 2017

[5] http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:31996E0697&from=FR

[6] http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32016D2233

[7] http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52009DC0495&from=fr

P. 5 « Après plusieurs années de stagnation au niveau des relations, un dialogue politique à haut niveau a été lancé et la coopération au développement rétablie avec Cuba, ce qui pourrait, à terme, créer les conditions à l’instauration d’un cadre contractuel pour les relations entre l’UE et Cuba. »

[8] http://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2015/06/11-eu-celac-summit-brussels-declaration/

 Déclaration de Bruxelles, extrait :

18. Dans un esprit de coopération, l'UE et Cuba ont entamé des négociations au début de 2014 sur un accord de dialogue politique et de coopération qui, une fois conclu, créera les conditions propices à un resserrement des liens et à un dialogue pour soutenir le processus de modernisation en cours à Cuba. Cet accord contribuera aussi à consolider encore la structure générale des relations entre les deux régions, l'UE et la CELAC.

19. Nous saluons l'annonce faite le 17 décembre dernier par le président de la République de Cuba, Raul Castro Ruz, et celui des États-Unis d'Amérique, Barack Obama, concernant le rétablissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Dans ce contexte, nous comptons que toutes les mesures nécessaires seront prises pour mettre fin rapidement à l'embargo. Nous référant à la résolution A/RES/69/5 de l'Assemblée générale des Nations unies, nous réaffirmons les positions bien connues qui sont les nôtres : nous rejetons les mesures coercitives à caractère unilatéral ainsi que l'application des dispositions extraterritoriales de la loi Helms-Burton. Ces mesures ont eu pour la population cubaine de fâcheuses conséquences humanitaires et nuisent au développement légitime des liens économiques entre Cuba, l'Union européenne et d'autres pays.

[9] http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A8-2017-0233+0+DOC+XML+V0//FR

 

[10] Cf. site du SEAE, « Relations UE-Cuba »

https://eeas.europa.eu/headquarters/headquarters-homepage/16662/node/16662_fr

[11] http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32016D2233

[12] Résolution législative du Parlement européen du 5 juillet 2017 sur le projet de décision du Conseil relatif à la conclusion, au nom de l’Union, de l’accord de dialogue politique et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République de Cuba, d’autre part (12502/2016 – C8-0517/2016 – 2016/0298(NLE)) (Approbation)

[13] Cf. chapitre 1er « Dispositions générales relatives à l’action extérieure de l’Union »

[14] Article 207 TFUE

1. La politique commerciale commune est fondée sur des principes uniformes, notamment en ce qui concerne les modifications tarifaires, la conclusion d'accords tarifaires et commerciaux relatifs aux échanges de marchandises et de services, et les aspects commerciaux de la propriété intellectuelle, les investissements étrangers directs, l'uniformisation des mesures de libéralisation, la politique d'exportation, ainsi que les mesures de défense commerciale, dont celles à prendre en cas de dumping et de subventions. La politique commerciale commune est menée dans le cadre des principes et objectifs de l'action extérieure de l'Union.

2. Le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire, adoptent les mesures définissant le cadre dans lequel est mise en œuvre la politique commerciale commune.

3. Si des accords avec un ou plusieurs pays tiers ou organisations internationales doivent être négociés et conclus, l'article 218 est applicable, sous réserve des dispositions particulières du présent article.

La Commission présente des recommandations au Conseil, qui l'autorise à ouvrir les négociations nécessaires. Il appartient au Conseil et à la Commission de veiller à ce que les accords négociés soient compatibles avec les politiques et règles internes de l'Union.

Ces négociations sont conduites par la Commission en consultation avec un comité spécial désigné par le Conseil pour l'assister dans cette tâche et dans le cadre des directives que le Conseil peut lui adresser. La Commission fait régulièrement rapport au comité spécial, ainsi qu'au Parlement européen, sur l'état d'avancement des négociations.

4. Pour la négociation et la conclusion des accords visés au paragraphe 3, le Conseil statue à la majorité qualifiée.

Pour la négociation et la conclusion d'un accord dans les domaines du commerce de services et des aspects commerciaux de la propriété intellectuelle, ainsi que des investissements étrangers directs, le Conseil statue à l'unanimité lorsque cet accord comprend des dispositions pour lesquelles l'unanimité est requise pour l'adoption de règles internes.

Le Conseil statue également à l'unanimité pour la négociation et la conclusion d'accords:

a) dans le domaine du commerce des services culturels et audiovisuels, lorsque ces accords risquent de porter atteinte à la diversité culturelle et linguistique de l'Union ;

b) dans le domaine du commerce des services sociaux, d'éducation et de santé, lorsque ces accords risquent de perturber gravement l'organisation de ces services au niveau national et de porter atteinte à la responsabilité des États membres pour la fourniture de ces services.

5. La négociation et la conclusion d'accords internationaux dans le domaine des transports relèvent du titre VI de la troisième partie, et de l'article 218.

6. L'exercice des compétences attribuées par le présent article dans le domaine de la politique commerciale commune n'affecte pas la délimitation des compétences entre l'Union et les États membres et n'entraîne pas une harmonisation des dispositions législatives ou réglementaires des États membres dans la mesure où les traités excluent une telle harmonisation.

[15] Article 209 TFUE :

1. Le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, arrêtent les mesures nécessaires pour la mise en œuvre de la politique de coopération au développement, qui peuvent porter sur des programmes pluriannuels de coopération avec des pays en développement ou des programmes ayant une approche thématique.

2. L'Union peut conclure avec les pays tiers et les organisations internationales compétentes tout accord utile à la réalisation des objectifs visés à l'article 21 du traité sur l'Union européenne et à l'article 208 du présent traité. Le premier alinéa ne préjuge pas la compétence des États membres pour négocier dans les instances internationales et conclure des accords.

3. La Banque européenne d'investissement contribue, selon les conditions prévues dans ses statuts, à la mise en œuvre des mesures visées au paragraphe 1.

[16] http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32016D2232&from=FR

[17] Article 218, paragraphe 5 TFUE

 Le Conseil, sur proposition du négociateur, adopte une décision autorisant la signature de l'accord et, le cas échéant, son application provisoire avant l'entrée en vigueur.

[18] Article 218, paragraphe 5 TFUE 8

Tout au long de la procédure, le Conseil statue à la majorité qualifiée.

Toutefois, il statue à l'unanimité lorsque l'accord porte sur un domaine pour lequel l'unanimité est requise pour l'adoption d'un acte de l'Union ainsi que pour les accords d'association et les accords visés à l'article 212 avec les États candidats à l'adhésion. Le Conseil statue également à l'unanimité pour l'accord portant adhésion de l'Union à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; la décision portant conclusion de cet accord entre en vigueur après son approbation par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

[19] Article 3 TFUE paragraphe 1 :

« 1. L'Union dispose d'une compétence exclusive dans les domaines suivants :

a) l'union douanière ;

b) l'établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur ;

c) la politique monétaire pour les États membres dont la monnaie est l'euro ;

d) la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la politique commune de la pêche ;

e) la politique commerciale commune. »

[20] Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés

[21] https://www.cnil.fr/fr/la-protection-des-donnees-dans-le-monde

[22] Un accord de libre-échange, sur le modèle de ce qui a été prévu dans l’accord établissant une association entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et l'Amérique centrale, d'autre part  (dit « accord UE-SICA »), supposerait la négociation d’un accord additionnel mais ayant pour préalable l’adoption d’un nouveau mandat de négociation. Ceci n’est pas à l’ordre du jour.

[23] Ouverture d’un bureau de représentation prévue dans le cadre de l’accord relatif à l’établissement et aux activités de l’Agence française de développement et de Proparco dans la République de Cuba, à La Havane le 29 juillet 2016, publié par décret n° 2017-229 du 23 février 2017.

 

[24] http://agriculture.gouv.fr/rejoignez-linitiative-4-pour-1000

[25] Accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Cuba relatif à la création d’un programme conjoint de coopération scientifique « partenariat Hubert Curien (PHC) franco-cubain Carlos J. Finlay », signé à La Havane le 17 février 2017.  Les autorités cubaines n’ont pas encore notifié leur approbation de cet accord. En application des dispositions de son article 11, il entrera en vigueur après notification par les parties de l’accomplissement des procédures internes requises.

[26] Source Commission européenne : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-16-742_fr.htm

L’instrument de financement de l’Union européenne pour la coopération au développement (2014-2020) institué par le règlement (UE) N° 233/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014

 

[27] https://cu.ambafrance.org/Signature-d-une-lettre-d-intention-pour-le-renforcement-de-la-cooperation

[28] Adoptés à la 16e séance plénière le 15 septembre 1995 de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, réunie à Beijing du 4 au 15 septembre 1995 : http://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/pdf/BDPfA%20F.pdf

 

[29] http://www.consilium.europa.eu/fr/documents-publications/agreements-conventions/agreement/?aid=2016056

 

[30] http://www.consilium.europa.eu/fr/documents-publications/agreements-conventions/agreement/?aid=2016056