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N° 965

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 mars 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à assouplir les critères de délivrance de la décharge
de responsabilité solidaire des couples séparés,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Alexandra MARTIN, Emmanuelle ANTHOINE, Émilie BONNIVARD, Ian BOUCARD, JeanLuc BOURGEAUX, Éric CIOTTI, Josiane CORNELOUP, MarieChristine DALLOZ, Christelle D’INTORNI, Julien DIVE, Francis DUBOIS, Michel HERBILLON, Philippe JUVIN, Yannick NEUDER, Éric PAUGET, Alexandre PORTIER, Nathalie SERRE, Pierre VATIN,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Chaque année en France plus de 300 000 couples se séparent par divorce ou dissolution du Pacs : près d’un mariage sur deux se termine par un divorce (46 %) et une rupture sur quatre survient dans les 6 premières années de vie commune (24 %).

Ces formes diverses d’union impliquent une communauté de vie et parfois de biens pendant toute leur durée. Même si à l’occasion de la séparation, l’immense majorité des couples trouve un accord pour payer leurs impôts, quand la séparation est moins harmonieuse ou quand une rectification d’impôt surgit, l’accord devient plus difficile.

L’administration fiscale n’attend pas la résolution de ce conflit. En l’absence de paiement, elle recherche l’ex‑partenaire qui sera en mesure de payer le restant dû, en application du principe de solidarité fiscale. Ce sont ainsi des saisies bancaires, saisies sur salaire, saisies des biens, avis à tiers détenteurs qui vont s’abattre sans aucun discernement sur l’ex‑conjoint.

Il est courant de penser que le contrat de mariage en séparation de biens protège de ce type de mésaventure mais il n’en est rien. Le Trésor public a la possibilité de gager et recouvrer la dette du couple en hypothéquant les biens immobiliers d’un seul des partenaires, même ceux détenus avant l’union.

L’article 1691 bis du Code Général des Impôts, introduit par la loi de finances de 2008, a prévu un dispositif dit de « Décharge en responsabilité solidaire » visant à permettre la répartition des dettes fiscales de la période commune de l’union entre ces deux individus.

Ainsi, la décharge de l’obligation de paiement des dettes fiscales du couple est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et la situation financière et patrimoniale du demandeur. L’examen de la situation patrimoniale est donc un préalable dans l’appréciation de la disproportion marquée.

Lors de la précédente législature, les conditions d’appréciation de la situation financière ont été assouplies en réduisant de 10 ans à 3 ans la période de paiement par les revenus nets en charge.

Aujourd’hui, 90 % des demandes de décharge sont déposées par des femmes qui sont souvent seules en charge des enfants et restent tenues de payer solidairement des montants d’impôts dont elles ignorent l’origine et dont elles n’ont pas pu bénéficier des revenus.

Les conditions sévères et restrictives de l’octroi de la décharge sont méconnues du grand public. Peu de jeunes couples sont informés de la solidarité illimitée à laquelle ils souscrivent par ignorance. Les époux en s’unissant offrent au fisc l’intégralité de leur patrimoine en garantie du paiement des impôts du foyer.

Il est encore plus anormal que la législation actuelle prévoit que le demandeur reste tenu de payer solidairement les majorations et pénalités exigées pour des revenus occultes ou dissimulés de son ex‑conjoint.

Ainsi, pour rectifier cette situation, il est proposé d’inclure dans les conditions d’examen de la demande de décharge de responsabilité solidaire des ex‑époux, l’appréciation de l’origine du montant de la dette fiscale de la période de vie commune.


proposition de loi

Article 1er

Le 2 du II de l’article 1691 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. La situation financière nette du demandeur est appréciée sur une période n’excédant pas trois années. La décharge de l’obligation de paiement est alors prononcée selon les modalités suivantes : » sont remplacés par le signe : « : ».

2° Après le même premier alinéa, il est inséré un 1° ainsi rédigé :

« 1° Dans le cas d’une de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. La situation financière nette du demandeur est appréciée sur une période n’excédant pas trois années. La décharge de l’obligation de paiement est alors prononcée selon les modalités suivantes : »

3° Est ajouté un 2° ainsi rédigé :

« 2° Dans le cas où le montant de la dette fiscale résulte d’un contrôle fiscal ayant donné lieu, par suite d’un manquement aux obligations déclaratives, d’une soustraction frauduleuse ou d’une tentative de soustraction frauduleuse au paiement des impositions mentionnées au 1° et 2° du I ainsi qu’à l’article 1723 ter‑00 B, à une rectification d’un bénéfice ou revenu propre au conjoint ou au partenaire de pacte civil de solidarité du demandeur. La décharge n’est alors accordée que si le demandeur ne s’est pas enrichi à la faveur de cette fraude fiscale commise par son ancien conjoint ou partenaire de pacte civil de solidarité et n’a pas participé directement ou indirectement à celle‑ci. »

Article 2

L’article 1er est applicable aux demandes en décharge de l’obligation de paiement déposées à compter du 1er juin 2023.

Article 3

La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.