N° 2226

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 février 2024.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

invitant le Gouvernement à mettre en œuvre un moratoire sur la fermeture de classes en zone rurale,

 

présentée par

M. Fabrice BRUN, M. Vincent DESCOEUR, M. Olivier MARLEIX, Mme Emmanuelle ANTHOINE, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, Mme Sylvie BONNET, Mme Émilie BONNIVARD, M. Ian BOUCARD, M. Jean-Luc BOURGEAUX, M. Hubert BRIGAND, M. Pierre CORDIER, Mme Marie-Christine DALLOZ, M. Francis DUBOIS, M. Nicolas FORISSIER, M. Patrick HETZEL, Mme Véronique LOUWAGIE, M. Emmanuel MAQUET, Mme Frédérique MEUNIER, Mme Isabelle PÉRIGAULT, Mme Christelle PETEX, M. Alexandre PORTIER, M. Nicolas RAY, M. Vincent ROLLAND, M. Jean-Pierre TAITE, Mme Isabelle VALENTIN, M. Jean-Pierre VIGIER, M. Éric CIOTTI, M. Stéphane VIRY, M. Philippe JUVIN,

députés et députées.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« L’école rurale doit vivre ». Cet appel, prononcé par l’Association des maires ruraux, est le cri d’alarme d’élus de différentes sensibilités pour dénoncer la fermeture progressive des classes en zone rurale.

La volonté de l’éducation nationale d’appliquer des critères qui aboutissent à une accélération des fermetures de classes en zones rurales est un non‑sens pour nos élus locaux et pour les parents d’élèves. Alors même que le « soutien à la ruralité » est affiché comme une priorité par l’État, les décisions unilatérales affectant directement la carte scolaire en zone rurale, impactent l’aménagement du territoire.

Si la baisse des effectifs d’élèves touche autant le monde urbain que le monde rural, il ne semble pas concevable que lorsque les directeurs académiques poursuivent dans le primaire le dédoublement des postes en zones urbaines denses, le monde rural doive payer le tribut d’une approche comptable déséquilibrée.

C’est d’autant plus « injuste » pour des territoires confrontés aux difficultés et aux spécificités des « classes rurales multi‑âges » ainsi qu’à la problématique de l’éloignement scolaire qui oblige les élèves à effectuer des temps de trajet importants. L’État se doit de favoriser l’égalité des chances devant l’offre scolaire, qui passe par un droit à l’accès scolaire à proximité. Ce droit est fragilisé dès lors que sont imposé des contraintes de déplacements aux enfants par les regroupements forcés. Il est totalement rompu lors de la fermeture de classes par une approche comptable.

Pourtant en 2021, l’État s’est engagé à « prendre en compte les contraintes territoriales dans l’allocation nationale des moyens de l’éducation nationale à travers la définition d’un indice d’éloignement » et à « mieux prendre en compte les spécificités des "classes multi âges", notamment en matière de formation et d’accompagnement des personnels enseignants ». Ces engagements attendent toujours d’être appliqués, si l’on veut conserver des classes ouvertes et une bonne qualité d’enseignement au sein des territoires ruraux. Il n’est pas concevable de rester inactif face à cette véritable fracture territoriale, malheureusement trop souvent négligée par la puissance publique. En quarante ans, ce sont plus de 17 000 écoles qui ont été fermées. Il s’agit d’un quart des établissements français, et la tendance s’accélère ces dernières années, au vu du nombre de contestations à ce sujet sur l’ensemble du territoire.

Pour répondre à cette problématique, l’État doit repenser sa doctrine scolaire en milieu rural pour conjuguer aménagement du territoire et réussite des élèves. L’école rurale est une chance, elle conjugue aussi proximité et qualité de l’enseignement, contribuant à l’épanouissement et à l’apprentissage des savoirs fondamentaux de nos enfants.

Ainsi, il n’est pas possible de priver le monde rural de la présence d’une école contribuant au maintien et à l’arrivée de jeunes ménages. La dynamique économique et l’attractivité des communes rurales en dépendent au même titre que la présence médicale et le commerce de proximité. De fait, des solutions doivent être trouvées rapidement pour empêcher que les zones rurales deviennent des variables d’ajustement tant pour les directeurs d’académies que pour l’État, aux profits des plus grandes agglomérations.

Considérant ces éléments, il semble nécessaire de mettre en place un moratoire sur la fermeture de classes en zone rurale. Il en va de l’avenir de nos enfants et de nos communes qui participent au maillage de l’ensemble du territoire. Cette proposition concrète portée par l’Association des maires ruraux de France, soutenue par de nombreux élus locaux, la communauté pédagogique et les parents d’élèves mérite de trouver un écho favorable au Parlement.

Tel est l’objet de la présente proposition de résolution.

 


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proposition de loi

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant la mobilisation des élus locaux, des associations d’élus, de la communauté pédagogique et des parents d’élèves en faveur de la suspension des fermetures de classes en zone rurale ;

Déclare soutenir, dans le cadre d’un moratoire, la suspension des projets de fermetures de classes en zone rurale sur le territoire national ;

Demande au Gouvernement de défendre cette position pour soutenir la ruralité, l’apprentissage des savoirs fondamentaux et l’égalité des chances des enfants vivant en zone rurale ;

Estime, en conséquence, qu’en France, une évolution du cadre réglementaire est souhaitable et doit être travaillé en associant pleinement les représentants des collectivités locales au premier rang desquelles les communes, dont l’Association des maires ruraux de France, pour sauvegarder l’école rurale et les classes au sein des territoires ruraux.