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N° 2301

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2019

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2020
(n° 2272),

TOME III

examen de la seconde partie
du projet de loi de finances

moyens des politiques publiques
et dispositions spéciales

Par M. Joël GIRAUD

Rapporteur général,

Député

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SOMMAIRE

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 Pages

EXAMEN DES ARTICLES

SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2020  CRÉDITS ET DÉCOUVERTS

I.  Crédits des missions

Article 38 et état B Crédits du budget général

Article 39 et état C Crédits des budgets annexes

Article 40 et état D Crédits des comptes daffectation spéciale et des comptes de concours financiers

II.  Autorisation de découvert

Article 41 Autorisations de découvert

TITRE II AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2020 – PLAFONDS DES AUTORISATIONS DEMPLOIS

Article 42 Plafonds des autorisations demplois de lÉtat

Article 43 Plafonds des emplois des opérateurs de lÉtat

Article 44 Plafonds des emplois des établissements à autonomie financière

Article 45 Plafonds des emplois de diverses autorités publiques indépendantes

TITRE III REPORTS DE CRÉDITS DE 2019 SUR 2020

Article 46 Majoration des plafonds de reports de crédits de paiement

TITRE IV DISPOSITIONS PERMANENTES

I.  Mesures fiscales et budgétaires non rattachées

Avant larticle 47

Article additionnel avant larticle 47 Ajustement des modalités de calcul du quota de réinvestissement pour le bénéfice du report dimposition en cas dapport-cession suivi dun réinvestissement dans diverses entités de placement à risque

Article additionnel avant larticle 47 Ajustement des conditions de mise en œuvre du réinvestissement pour le bénéfice du report dimposition en cas dapport-cession suivi dun réinvestissement dans diverses entités de placement à risque

Article additionnel avant larticle 47 Prorogation de lexonération des plus-values immobilières de cessions en faveur du logement social

Avant larticle 47

Article additionnel avant larticle 47 Diminution du droit de partage en cas de divorce ou de rupture de PACS

Avant larticle 47

Article 47 Exonération de contribution économique territoriale et de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des activités commerciales situées dans des communes rurales isolées

Article 48 Exonération de contribution économique territoriale et de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des entreprises commerciales ou artisanales situées dans des communes ayant conclu une convention dopération de revitalisation de territoire

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Suppression de la taxe de séjour au forfait pour les logements sans classement ou en attente de classement

Article additionnel après larticle 48 Modification de la taxe de séjour applicable aux auberges collectives

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Faculté dun versement semestriel de la taxe de séjour

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Prorogation et évaluation du dispositif de soutien aux jeunes entreprises innovantes (JEI)

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Aménagement de lexonération de cotisation foncière des entreprises pour les sociétés de presse

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Exonérations de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes en faveur de la batellerie artisanale

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Modification des règles de détermination de la valeur locative des installations de stockage de déchets

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Tarif de limposition forfaitaire sur les entreprises de réseau applicable aux installations de production de gaz naturel liquéfié

Après larticle 48

Article additionnel après larticle 48 Prorogation en 2020 du régime des zones de revitalisation rurale

Après larticle 48

Article 49 Modification des modalités du forfait des dépenses de fonctionnement pour le calcul du crédit dimpôt recherche et du crédit dimpôt innovation

Après larticle 49

Article additionnel après larticle 49 Aménagement des modalités de sous-traitance dans le cadre du crédit dimpôt recherche

Après larticle 49

Article additionnel après larticle 49 Rapport sur les évolutions du crédit dimpôt recherche relatives au forfait de fonctionnement et aux dépenses ne relevant pas de la recherche et développement

Article 50 Rationalisation de la réduction dimpôt en faveur du mécénat

Après larticle 50

Article additionnel après larticle 50 Bornage temporel de certaines dépenses fiscales relevant de la catégorie des « trous noirs fiscaux »

Après larticle 50

Article additionnel après larticle 50 Extension du dispositif de lissage de limposition de certains revenus agricoles aux éléments de stocks bloqués

Article additionnel après larticle 50 Plafonnement et bornage temporel de limposition des revenus des artistes et sportifs selon une moyenne pluriannuelle

Article additionnel après larticle 50 Suppression de la condition dinscription au registre du commerce et des sociétés dans le cadre de la location meublée à titre professionnel

Après larticle 50

Article additionnel après larticle 50 Prorogation du crédit dimpôt en faveur des métiers dart

Après larticle 50

Article additionnel après larticle 50 Aménagement de la condition relative à la part des logements faisant lobjet de prêts locatifs sociaux dans le total des logements sociaux livrés dans le cadre du crédit dimpôt en faveur de linvestissement locatif outremer

Après larticle 50

Article 51 Création dune taxe forfaitaire  sur les contrats à durée déterminée dits dusage

Article 52 Révision des valeurs locatives des locaux dhabitation (RVLLH) et simplification des procédures dévaluation des locaux professionnels

Article 53 Transposition de la directive (UE) 2017/2455 du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique

Article 54 Obligation dinformation à la charge des exploitants dentrepôts logistiques

Article 55 Publication de la liste des plateformes qui ne coopèrent pas avec ladministration fiscale

Article additionnel après larticle 55 Transmission aux établissements habilités à le délivrer de linformation permettant de vérifier léligibilité dun souscripteur au livret dépargne populaire

Article 56 Mise en œuvre de la facturation électronique dans les relations interentreprises et remise dun rapport sur les conditions de cette mise en œuvre

Article 57 Possibilité pour les administrations fiscales et douanières de collecter et exploiter les données rendues publiques sur les sites internet des réseaux sociaux et des opérateurs de plateforme

Article 58 Simplification des obligations déclaratives et des modalités détablissement des impositions en matière dimpôt sur le revenu

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Mention du taux moyen et du taux marginal sur lavis dimposition à limpôt sur le revenu

Article additionnel après larticle 58 Demi-part des veuves des anciens combattants

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Prorogation jusquau 31 décembre 2022 de la déduction spécifique au titre des revenus fonciers, dite « Cosse », et ajout dune condition relative à la performance énergétique pour en bénéficier

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Prorogation jusquen 2022 de la réduction dimpôt pour la restauration immobilière dans certains quartiers anciens dégradés

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Exclusion des installations de stockage dénergie recourant à des batteries du champ de la réduction dimpôt pour investissements productifs en outre-mer

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Dégressivité du taux de la réduction dimpôt au titre des dons pour le financement dune campagne électorale

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Rapport sur la pertinence des zonages pour lapplication du dispositif dinvestissement locatif dit Pinel et du prêt à taux zéro (PTZ)

Après larticle 58

Article additionnel après larticle 58 Rapport sur le crédit dimpôt pour lemploi dun salarié à domicile

Article 59 Obligation de télédéclaration et de télépaiement de la taxe spéciale sur les conventions dassurances et des contributions assimilées

Après larticle 59

Article additionnel après larticle 59 Instauration dun dispositif dautoliquidation de la taxe sur la valeur ajoutée pour les transferts de certificats de garantie dorigine et les garanties de capacité

Article additionnel après larticle 59 Transfert aux agences de leau de la perception du droit de timbre acquitté par les titulaires du permis de chasser

Article additionnel après larticle 59 Suppression de tarifs dérogatoires de la redevance pour pollution de leau au titre de certains rejets en mer

Article additionnel après larticle 59 Extension du champ des redevances de leau dont la gestion peut être mutualisée au sein dune agence de leau

Après larticle 59

Article additionnel après larticle 59 Protection des agents de ladministration fiscale en charge des relations avec les aviseurs fiscaux

Après larticle 59

Article additionnel après larticle 59 Codification et extension à la taxe sur la valeur ajoutée du dispositif relatif aux aviseurs fiscaux

Article additionnel après larticle 59 Extension aux plus-values de cessions dactifs numériques de la procédure de demande de justifications dont le défaut peut entraîner la taxation doffice

Article additionnel après larticle 59 Suppression de la mission de recouvrement de diverses taxes par lOffice français de limmigration et de lintégration (OFII)

Article additionnel après larticle 59 Modification du contenu de lannexe générale sur les instruments économiques, fiscaux et budgétaires au service de lenvironnement

Après larticle 59

Article additionnel après larticle 59 Rapport dévaluation des effets de la fiscalité applicable aux transmissions de capitaux à raison du décès de lassuré dune assurance-vie

Après larticle 59

Article additionnel après larticle 59 Rapport sur le plafonnement des indemnisations versées aux aviseurs fiscaux

Après larticle 59

Article 60 Simplification du recouvrement de la TVA à limportation auprès des entreprises

Après larticle 60

Article additionnel après larticle 60 Possibilité pour lInstitut de France et les académies de passer des conventions de mandat avec des prestataires privés pour sécuriser la gestion de certaines prestations en encaissement et décaissement

Après larticle 60

Article 61 Unification des modalités de déclaration et de recouvrement de certaines impositions indirectes et amendes

Article additionnel après larticle 61 Augmentation de la taxe sur certaines dépenses de publicité

Après larticle 61

Article 62 Rééquilibrage des taxes affectées au Centre national du cinéma et de limage animée

Article 63 Alignement progressif de la fiscalité du tabac applicable en Corse sur celle applicable sur le continent, à compter de 2022, sur une période de cinq ans

Après larticle 63

Article 64 Compensation des revalorisations exceptionnelles du revenu de solidarité active (RSA)

Article 65 Contribution de lAssociation de gestion du fonds pour linsertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) à la transformation des entreprises adaptées

Article 66 Garantie par lÉtat des emprunts de lUnédic émis en 2020

Article 67 Augmentation maîtrisée de certaines prestations sociales et suppression de lindexation de la réduction de loyer de solidarité (RLS)

Article 68 Interdiction de loctroi de garantie de lÉtat au commerce extérieur pour la recherche, lextraction et la production de charbon

Article 69 Octroi de la garantie de lÉtat au titre de prêts de lAgence française de développement (AFD) au Fonds vert pour le climat (FVC)

Article 70 Octroi de la garantie de lÉtat à la Banque africaine de développement dans le cadre du dispositif dit AFAWA (« Affirmative finance action for women in Africa »)

Article 71 Prorogation de la garantie des prêts à taux zéro du dispositif « Nouvel accompagnement pour la création ou la reprise dentreprise » (NACRE)

Article 72 Création dune aide à laccession sociale et à la sortie de linsalubrité spécifique à lOutre-mer

Après larticle 72

II.  Autres mesures

Action extérieure de lÉtat

Avant larticle 73

Administration générale et territoriale de lÉtat

Article additionnel avant larticle 73 Rapport relatif à la carte délecteur

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

Avant larticle 73

CCF Avances à laudiovisuel public

Avant larticle 73

Cohésion des territoires

Article 73 Prise en charge par « Action Logement » dune partie des contributions des bailleurs sociaux au financement des aides à la pierre

Article 74 Renforcement des mesures daccompagnement vers et dans le logement

Article 75 Financement complémentaire du Fonds national daide au logement (FNAL) par Action Logement

Article additionnel après larticle 75 Plancher de reste à charge pour les locataires bénéficiant de lAPL

Après larticle 75

Article additionnel après larticle 75 Rapport sur les modalités dune gestion différenciée des moyens de la politique de la ville

Conseil et contrôle de lÉtat

Article additionnel après larticle 75 Dispense du paiement préalable à lexercice dun recours devant la commission nationale du contentieux du stationnement payant

Défense

Après larticle 75

Écologie, développement et mobilité durables

Article 76 Reprise par lÉtat de la dette de SNCF Réseau à hauteur de 25 Md€

Après larticle 76

Article additionnel après larticle 76 Remise dun rapport au Parlement sur lopportunité pour lÉtat de créer une société anonyme à capitaux publics pour la gestion des autoroutes à la fin des concessions actuelles

Après larticle 76

CAS Transition énergétique

Après larticle 76

Enseignement scolaire

Après larticle 76

Immigration, asile et intégration

Article additionnel après larticle 76 Suppression de dispositions caduques du code lentrée et du séjour des étrangers et du droit dasile

Investissements davenir

Après larticle 76

Justice

Article additionnel après larticle 76 Prolongation de lexpérimentation relative à la médiation familiale préalable obligatoire

Outre-mer

Après larticle 76

Recherche et enseignement supérieur

Article additionnel après larticle 76 Indicateur de gestion du patrimoine immobilier des universités

CAS Gestion du patrimoine immobilier de lÉtat

Articles additionnels après larticle 76 Dispositions relatives au patrimoine immobilier des universités et des ministères

Relations avec les collectivités territoriales

Article 77 Décalage de la date dentrée en vigueur de lautomatisation du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Article 78 Répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

Après larticle 78

Article additionnel après larticle 78 Critères déligibilité des communes à la dotation déquipement des territoires ruraux

Article additionnel après larticle 78 Encadrement des variations de la dotation déquipement des territoires ruraux

Après larticle 78

Article additionnel après larticle 78 Dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité

Après larticle 78

Article additionnel après larticle 78 Progression du Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France

Après larticle 78

Article additionnel après larticle 78 Financement des établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris

Après larticle 78

Article additionnel après larticle 78 Rapport au Parlement

Remboursements et dégrèvements

Article additionnel après larticle 78 Rapport sur les remises gracieuses et transactions

Articles additionnels après larticle 78 Rapports sur les contentieux fiscaux et non fiscaux de lÉtat

Article additionnel après larticle 78 Rapport sur les difficultés denregistrement des transactions immobilières

Santé

Après larticle 78

Article additionnel après larticle 78 Annexe générale relative aux actions de prévention

Après larticle 78

Solidarité, insertion et égalité des chances

Après larticle 78

Travail et emploi

Article 79 Recentrage des dispositifs dexonération spécifique en faveur des aides à domicile intervenant auprès de publics fragiles

Article 80 Recentrage de laide aux créateurs et repreneurs dentreprises sur son public cible

ANNEXE :  LISTE DES RAPPORTS SPÉCIAUX ANNEXÉS AU RAPPORT GÉNÉRAL SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2020


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   EXAMEN DES ARTICLES

   SECONDE PARTIE : MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Lors de ses réunions du mercredi 6 novembre et du jeudi 7 novembre 2019, la commission a examiné les articles dits « de récapitulation » (articles 38 à 46), ainsi que les mesures fiscales et budgétaires non rattachées (articles 47 à 72) du présent projet de loi de finances.

TITRE PREMIER
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2020  CRÉDITS ET DÉCOUVERTS

I. – Crédits des missions

Article 38 et état B
Crédits du budget général

Le présent article est un article de récapitulation, dont l’adoption tire les conséquences de l’examen des crédits des missions et programmes du budget général de l’État au cours de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances.

Les crédits du budget général sont présentés dans les annexes relatives à chaque mission budgétaire et figurent à l’état B annexé au présent projet de loi de finances.

Le montant des crédits bruts ouverts sur le budget général est fixé à 501,2 milliards deuros en autorisations dengagement (AE) et à 478,0 milliards deuros en crédits de paiement (CP), au lieu de 483,1 milliards d’euros en AE et 468,6 milliards d’euros en CP en loi de finances initiale pour 2019. Les crédits de paiement sont donc en hausse de 2,0 %.

Les crédits nets du budget général, c’est-à-dire déduction faite des remboursements et dégrèvements, s’élèvent à 360,2 milliards deuros en AE et 337,0 milliards deuros en CP, au lieu de 347,2 milliards d’euros en AE et 332,7 milliards d’euros en CP en loi de finances initiale pour 2019. La hausse des crédits nets en CP est alors limitée à 1,3 %.

L’évolution des crédits du budget général est commentée en détail dans la fiche n° 9 du tome I du présent rapport général.

*

*     *

À l’occasion de l’examen des crédits des différentes missions, la commission a adopté 19 amendements, constituant des propositions de modification de létat B, à hauteur de 188,3 millions deuros.

amendements de modification de l’État b adoptÉs par la commission

(en millions d’euros)

Numéro
damendement

Auteurs

Mission

Impact budgétaire

Objet

II-CF907

Commission des affaires économiques

Agriculture, alimentation,
forêt et affaires rurales

0,45

Renforcement du soutien des organisations de producteurs et de leurs associations

II-CF123

Commission des affaires économiques

Agriculture, alimentation,
forêt et affaires rurales

0,45

Renforcement du soutien en faveur de l’expérimentation des fermes DEPHY

II-CF125

Commission des affaires économiques

Agriculture, alimentation,
forêt et affaires rurales

0,44

Augmentation des dépenses de personnel du médiateur des relations commerciales agricoles

II-CF897

Joël Giraud

Anciens combattants,
mémoire et liens
avec la Nation

0,11

Règlement au titre de l’allocation de reconnaissance pour les supplétifs de statut civil de droit commun l’ayant sollicité entre le 5 février 2011 et le 19 décembre 2013

II-CF895

François Jolivet

Cohésion des territoires

3,4

Revalorisation du forfait journalier des pensions de famille

II-CF939

François Jolivet

Cohésion des territoires

50

Création d’une aide au logement centrée sur la rénovation des logements à destination des ménages modestes bénéficiaires des aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH)

II-CF728

Christophe Bouillon et les membres du groupe Socialistes et apparentés

Écologie, développement
et mobilité durables

22

Maintien des crédits de l’action « Ferroviaire » du programme 203 à son niveau de la loi de finances pour 2019

II-CF914

Saïd Ahamada

Écologie, développement
et mobilité durables

0,15

Maintien des moyens des centres de sécurité des navires

II-CF1006

Joël Giraud

Écologie, développement
et mobilité durables

0,5

Financement de 8 équivalents temps plein travaillé pour les parcs nationaux

II-CF831

Laurent Saint-Martin

Écologie, développement
et mobilité durables

0,01

Diminution symbolique des crédits du programme 203 pour lancer une réflexion sur la structure de la mission

II-CF199

Julien Aubert

Écologie, développement
et mobilité durables

5,1

Remplacement des programmes 174 « Énergie, climat et après mines » et 345 « Service public de l’énergie » par un programme à vocation sociale et territoriale et par un programme centré sur la transition énergétique

II-CF356

Marie-Ange Magne

Économie

95,9

Attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de rapatrier les aides au transport postal de la presse du programme 134 de la mission vers le programme 180 de la mission Médias, livre et industries culturelles

II-CF402

Catherine Osson

Enseignement scolaire

2,13

Revalorisation des agents de catégorie 3 de l’enseignement scolaire agricole

II-CF46

Jean-Noël Barrot

Immigration, asile
et intégration

0,2

Revalorisation du financement de vacations de psychologues intervenant en centres de rétention administrative

II-CF990

Max Mathiasin

Outre-mer

0,1

Augmentation des crédits de l’insertion économique régionale des collectivités d’outre-mer

II-CF532

Laurent Saint-Martin

Recherche et
enseignement supérieur

0,1

Diminution symbolique des crédits du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » de la mission pour lancer une réflexion sur le périmètre de la mission

II-CF514

Fabrice Le Vigoureux

Recherche et
enseignement supérieur

2

Doublement du fonds de garantie des prêts étudiants

II-CF1025

Stella Dupont

Solidarité, insertion
et égalité des chances

0,26

Rétablissement du budget du programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » à son niveau de 2017

II-CF69

Marie-Christine Verdier-Jouclas et plusieurs de ses collègues

Travail et emploi

5

Soutien au financement des Maisons de l’emploi

Total

188,3

 

Source : commission des finances.

Limpact net des 19 amendements adoptés est de – 20 000 euros en autorisations dengagement et en crédits de paiement sur le total des crédits bruts ouverts sur le budget général.

En effet, les amendements II-CF831 et II-CF532 de M. Laurent Saint‑Martin ont procédé à des diminutions symboliques de crédits de 10 000 euros chacun sur des programmes, sans augmenter à due concurrence les crédits d’autres programmes.

Les autres amendements sont neutres au niveau du budget général. Cela résulte de l’application du premier alinéa de l’article 47 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([1]), qui définit les règles de recevabilité des amendements. Ceux-ci doivent de façon systématique compenser les ouvertures de crédits par une annulation de crédits à due concurrence sur d’autres programmes de la même mission.

*

*     *

Suivant lavis du Rapporteur général, la commission adopte larticle 38 et létat B, modifiés compte tenu des votes précédemment intervenus lors de lexamen successif des différentes missions.

*

*     *


Article 39 et état C
Crédits des budgets annexes

Le présent article est un article de récapitulation, dont l’adoption tire les conséquences de l’examen des crédits des budgets annexes au cours de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances.

Les crédits correspondants sont présentés à l’état C annexé au présent projet de loi de finances.

Évolution des crÉdits des budgets annexes

(en millions d’euros)

Budget annexe

Loi de finances initiale pour 2019

Projet de loi de finances pour 2020

Autorisations dengagement

Crédits
de paiement

Autorisations dengagement

Crédits
de paiement

Contrôle et exploitation aériens

2 122,0

2 122,3

2 140,9

2 140,9

Publications officielles et information administrative

176,0

166,0

161,6

156,6

Total

2 298,0

2 288,0

2 302,5

2 297,5

Source : loi de finances initiale pour 2019 et présent projet de loi de finances.

Les crédits de paiement du budget annexe Contrôle et exploitation aériens sont en hausse de 0,9 % par rapport au niveau fixé en loi de finances initiale pour 2019.

Les crédits du budget annexe Publications officielles et information administrative sont en recul de 5,7 % en CP par rapport au niveau fixé en loi de finances initiale pour 2019.

Au total, les crédits des budgets annexes sont en hausse de 0,4 % en CP.

*

*     *

La commission adopte larticle 39 et létat C sans modification.

 


Article 40 et état D
Crédits des comptes daffectation spéciale
et des comptes de concours financiers

Le présent article est un article de récapitulation, dont l’adoption tire les conséquences de l’examen des crédits des comptes d’affectation spéciale (CAS) et des comptes de concours financiers (CCF) au cours de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances. Les crédits de ces comptes sont détaillés à l’état D annexé au présent projet de loi de finances.

Évolution des crÉdits des comptes spÉciaux

(en millions d’euros)

Comptes spéciaux

LFI 2019

PLF 2020

Écart LFI 2019/PLF 2020

AE

CP

AE

CP

CP

CAS Aide à lacquisition de véhicules propres

264,0

264,0

0

0

– 264,0

CAS Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

1 296,7

1 296,7

1 572,8

1 572,8

+ 276,1

CAS Développement agricole et rural

136,0

136,0

136,0

136,0

0

CAS Financement des aides aux collectivités pour lélectrification rurale

360,0

360,0

360,0

360,0

0

CAS Financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage

1 709,7

1 709,7

0

0

– 1 709,7

CAS Gestion du patrimoine immobilier de lÉtat

391,3

483,0

428,0

447,0

– 36

CAS Participation de la France au désendettement de la Grèce

118,0

125,7

480,6

263,7

+ 138

CAS Participations financières de lÉtat

10 000

10 000

12 180,0

12 180,0

+ 2 180

CAS Pensions

59 015,0

59 015,0

59 612,8

59 612,8

+ 597,8

CAS Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

359,2

359,2

312,7

312,7

– 46,5

CAS Transition énergétique

7 279,4

7 279,4

6 309,9

6 309,9

– 969,5

Sous-total CAS

80 929,3

81 028,7

81 392,8

81 195,0

166,3

CCF Accords monétaires internationaux

0

0

0

0

0

CCF Avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

11 343,5

11 343,5

10 385,0

10 385,0

– 958,5

CCF Avances à laudiovisuel public

3 859,6

3 859,6

3 789,0

3 789,0

– 70,6

CCF Avances aux collectivités territoriales

110 610,9

110 610,9

112 995,6

112 995,6

+ 2 384,7

CCF Prêts à des États étrangers

1 245,4

1 114,3

1 250,3

1 041,7

– 72,6

CCF Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

50,1

325,1

75,1

525,1

+ 200

Sous-total CCF

127 109,4

127 253,4

128 495,0

128 736,3

+ 1 482,9

Total

208 038,7

208 282,1

209 887,8

209 931,3

+ 1 649,1

Source : loi de finances initiale pour 2019 et présent projet de loi de finances.

Les crédits des CAS sont en hausse de 166,3 millions deuros par rapport au niveau adopté en loi de finances initiale pour 2019, soit une hausse de 0,2 %.

Cette lecture est cependant biaisée : l’article 30 et l’article 33 du présent PLF proposent la suppression, respectivement, des CAS Financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage (FNDMA) et Aide à lacquisition de véhicules propres (AAVP) :

– le CAS FNDMA est supprimé car il est rendu caduc par la création de France compétences. Au 1er janvier 2020, les ressources qui lui étaient auparavant affectées – principalement une partie de la taxe d’apprentissage – financeront France compétences ;

– le CAS AAVP est supprimé car l’équilibre de ses ressources et de ses dépenses n’est plus assuré depuis l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2019. En outre, l’article 18 du présent projet de loi prévoit une refonte des différents « malus » applicables aux véhicules à moteur à compter de 2021. Le produit du « malus » automobile, seule ressource qui est actuellement affectée au CAS AAVP, sera reversé au budget général.

En dehors de ces deux suppressions, les crédits des CAS augmentent de 2 140 millions d’euros, soit une hausse de 2,6 %. Cela tient en particulier à l’augmentation des recettes attendues des privatisations envisagées des groupes La Française des jeux et Aéroports de Paris, retracées dans le CAS Participations financières de lÉtat (+ 2 180 millions d’euros) ainsi que d’une hausse du solde du CAS Pensions (+ 598 millions d’euros), contrebalancées par la baisse du solde du CAS Transition énergétique (– 970 millions d’euros), en raison du niveau moindre de remboursement de la dette de compensation des charges de service public de l’énergie.

Les crédits des CCF sont en hausse de 1 649,1 millions deuros par rapport au niveau voté en loi de finances initiale pour 2019, soit une hausse de 0,8 %.

Cette hausse résulte principalement de deux mouvements contraires :

– une hausse sur le CCF Avances aux collectivités territoriales, pour 2 385 millions d’euros, notamment au titre des avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes.

– une baisse sur le CCF Avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics, pour 959 millions d’euros, liée principalement au remboursement des avances octroyées au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune. Cela résulte de la résorption progressive des retards de paiement induits par la mise en place des nouvelles dispositions de la politique agricole commune (PAC) 2014-2020 ;

En 2020, le solde des comptes spéciaux, qui regroupent également les comptes de commerce et les comptes d’opérations monétaires visés à l’état E annexé au présent projet de loi de finances, sétablirait à 35 millions deuros, en baisse de 949,7 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2019.

Évolution du solde des principaux comptes spÉciaux

(en millions d’euros)

Comptes spéciaux

LFI 2019

PLF 2020

Comptes d’affectation spéciale

+ 1 862,6

+ 1 186,0

Comptes de concours financiers

– 1 002,4

– 1 296,2

Comptes de commerce

+ 45,5

+ 53,6

Comptes d’opérations monétaires

+ 79,0

+ 91,2

Total

+ 984,7

+ 35,0

Source : présent projet de loi de finances.

*

*     *

La commission adopte larticle 40 et létat D sans modification.

 


II. – Autorisation de découvert

Article 41
Autorisations de découvert

Le présent article autorise les découverts des comptes de commerce et des comptes d’opérations monétaires, qui sont détaillés à l’état E annexé au présent projet de loi de finances. Les justifications des autorisations de découvert demandées sont quant à elles présentées dans les annexes relatives à chacune de ces deux catégories de comptes.

Les comptes de commerce et les comptes d’opérations monétaires

Les comptes de commerce retracent des opérations de caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l’État non dotés de la personnalité morale. Les évaluations de recettes et les prévisions de dépenses de ces comptes ont un caractère indicatif. Seul le découvert fixé pour chacun d’entre eux a un caractère limitatif (1).

Les comptes dopérations monétaires retracent les recettes et les dépenses de caractère monétaire. Pour cette catégorie de comptes, les évaluations de recettes et les prévisions de dépenses ont un caractère indicatif. Seul le découvert fixé pour chacun d’entre eux a un caractère limitatif (2).

(1) Article 22 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

(2) Article 23 de la LOLF.

Le présent article prévoit ainsi que les autorisations de découvert accordées pour 2020 s’élèvent :

– à 19 896 809 800 euros au titre des comptes de commerce ;

– et à 250 000 000 euros au titre des comptes d’opérations monétaires.

La loi de finances initiale pour 2019 avait fixé les autorisations de découvert aux niveaux suivants :

– 19 860 809 800 euros au titre des comptes de commerce ;

– et 250 000 000 euros au titre des comptes d’opérations monétaires.

Conformément à l’article 42 de la LOLF ([2]), les découverts sont votés par compte spécial. La décomposition des autorisations de découvert pour 2020 est ainsi prévue :

Découvert des comptes de commerce

(en millions d’euros)

Approvisionnement de l’État et des forces armées en produits pétroliers, biens et services complémentaires

125,0

Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire

23,0

Couverture des risques financiers de l’État

542,0

Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État

0

Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État

19 200,0

Lancement de certains matériels de guerre et matériels assimilés

0

Opérations commerciales des domaines

0

Régie industrielle des établissements pénitentiaires

0,6

Renouvellement des concessions hydrauliques

6,2

Soutien financier au commerce extérieur

0

Total

19 896,8

découverts des comptes d’opérations monétaires

(en millions d’euros)

Émission des monnaies métalliques

0

Opérations avec le Fonds monétaire international

0

Pertes et bénéfices de change

250

Total

250

*

*     *

La commission adopte larticle 41 sans modification.

 

 


—  1  —

TITRE II
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2020 – PLAFONDS DES AUTORISATIONS DEMPLOIS

Article 42
Plafonds des autorisations demplois de lÉtat

Le présent article fixe les plafonds des autorisations d’emplois par ministère et par budget annexe.

En application du 6° du I de l’article 34 de la LOLF ([3]), la première partie de la loi de finances de l’année fixe le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État.

Ce plafond est fixé pour 2020, à l’article d’équilibre du présent projet de loi de finances (article 37), à 1 950 428 équivalents temps plein travaillé (ETPT), au lieu de 1 953 516 ETPT en loi de finances initiale pour 2019.

En application du 2° du même article, la seconde partie de la loi de finances détermine la répartition de ces plafonds par ministère et par budget annexe. Le présent article présente cette répartition. En application de l’article 43 de la LOLF, ces plafonds donnent lieu à un vote unique.

L’évolution des plafonds des autorisations d’emplois par ministère par rapport à la loi de finances initiale pour 2019 est la suivante.

 

Évolution des plafonds des autorisations d’emplois par ministère

(en équivalents temps plein travaillé – ETPT)

Ministère

Plafond des autorisations demplois prévu

LFI 2019

Plafond des autorisations demplois prévu

PLF 2020

Écart

Action et comptes publics

123 501

122 029

– 1 472

Agriculture et alimentation

30 097

29 799

– 298

Armées

271 268

271 125

– 143

Cohésion des territoires

564

291

– 273

Culture

10 670

9 593

– 1 077

Économie et finances

12 608

12 294

– 314

Éducation nationale

1 024 061

1 022 849

– 1 212

Enseignement supérieur, recherche et innovation

7 298

6 992

– 306

Europe et affaires étrangères

13 598

13 524

– 74

Intérieur

287 291

292 469

5 178

Justice

86 452

88 011

1 559

Outre-mer

5 548

5 583

35

Services du Premier ministre

11 608

9 759

– 1 849

Solidarités et santé

9 519

7 436

– 2 083

Sports

1 529

1 529

Transition écologique et solidaire

39 373

37 382

– 1 991

Travail

8 852

8 599

– 253

Total Budget général

1 942 308

1 939 264

– 3 044

Contrôle et exploitations aériens

10 545

10 544

– 1

Publications officielles et information administrative

663

620

– 43

Total Budgets annexes

11 208

11 164

– 44

Total général

1 953 516

1 950 428

– 3 088

Source : loi de finances pour 2019 et présent projet de loi de finances.

Au niveau global, le plafond des autorisations d’emplois pour le budget général s’élève à 1 939 264 ETPT, soit une diminution de 3 044 ETPT par rapport au niveau fixé en loi de finances initiale pour 2019.

Le plafond des autorisations d’emplois pour les budgets annexes s’élève à 11 164 ETPT, soit un niveau en baisse de 44 ETPT par rapport à la loi de finances initiale pour 2019.

Au total, le plafond des autorisations d’emplois de l’État (budget général et budgets annexes) s’élève à 1 950 428 ETPT, en diminution de 3 088 ETPT par rapport à la loi de finances initiale pour 2019. Cette évolution s’explique par :

– l’effet en année pleine des variations d’effectifs intervenues en 2019, à hauteur de + 863 ETPT. La loi de finances initiale pour 2019 prévoyait en effet la suppression de – 1 571 ETP, mais l’effet en ETPT en 2020 est positif en raison des dates d’arrivée et de départ des agents ;

– des mesures de périmètre et de transfert en 2020 à hauteur de
– 1 991 ETPT, correspondant pour l’essentiel à la mise en place des secrétariats généraux communs aux préfectures et directions départementales au ministère de l’intérieur (transfert de 1 834 ETPT à partir des ministères de la transition écologique et solidaire, de l’action et des comptes publics, de l’agriculture et de l’alimentation ainsi que des solidarités et de la santé), au transfert sous plafond d’emplois des opérateurs concernés d’effectifs aujourd’hui gérés par le ministère de la culture en titre 2 et affectés à divers opérateurs (– 1 168 ETPT) et au transfert de 154 ETPT du ministère des armées vers la direction des applications militaires ;

– des corrections techniques à hauteur de + 514 ETPT, principalement au titre des apprentis et volontaires du service militaire volontaire (SMV) et du ministère des armées (+ 411 ETPT).

Cette année encore, le Gouvernement a fait l’effort de présenter dans l’exposé des motifs de l’article le schéma d’emplois des ministères en ETP à périmètre constant, ce que le Rapporteur général souhaite souligner avec satisfaction.

Schéma d’emplois 2020 de l’État À périmètre constant

(en équivalents temps plein)

Ministère ou budget annexe

Schéma demploi

Action et comptes publics

– 1 653

Agriculture et alimentation

+ 130

Armées

+ 300

Cohésion des territoires

– 8

Culture

– 15

Économie et finances

– 282

Éducation nationale

Enseignement supérieur, recherche et innovation

Europe et affaires étrangères

– 81

Intérieur

+ 1 347

Justice

+ 1 520

Outre-mer

+ 35

Services du Premier ministre

+ 169

Solidarités et santé

+ 203

Sports

– 40

Transition écologique et solidaire

– 797

Travail

– 226

Budget général

+ 196

Contrôle et exploitation aériens

Publications officielles et information administrative

– 4

Budgets annexes

 4

Total général

+ 192

Source : exposé des motifs de l’article 42 du présent projet de loi de finances.

*

*     *

La commission adopte larticle 42 sans modification.

Article 43
Plafonds des emplois des opérateurs de lÉtat

Le présent article fixe le plafond des autorisations d’emplois des opérateurs de l’État à 402 032 équivalents temps plein travaillé (ETPT) pour 2020 au lieu de 401 849 ETPT en loi de finances initiale pour 2019, soit une hausse de 183 emplois.

plafond d’emplois des opérateurs de l’état

(en ETPT)

Missions (opérateurs de lÉtat)

Plafond des autorisations demplois
LFI 2019

Plafond des autorisations demplois

PLF 2020

Écart

Action extérieure de l’État

6 530

6 324

– 206

Administration générale et territoriale de l’État

358

355

– 3

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

14 003

13 882

– 121

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

1 317

1 278

– 39

Cohésion des territoires

281

639

358

Culture

14 461

15 483

1 022

Défense

6 564

6 937

373

Direction de l’action du Gouvernement

597

591

– 6

Écologie, développement et mobilité durables

19 578

19 292

– 286

Économie

2 563

2 496

– 67

Enseignement scolaire

3 276

3 233

– 43

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

1 195

1 106

– 89

Immigration, asile et intégration

1 984

2 173

189

Justice

617

625

8

Médias, livre et industries culturelles

3 004

3 102

98

Outre-mer

127

127

0

Recherche et enseignement supérieur

259 387

259 638

251

Régimes sociaux et de retraite

307

294

– 13

Santé

1 624

134

– 1 490

Sécurités

279

293

14

Solidarité, insertion et égalité des chances

8 198

8 041

– 157

Sport, jeunesse et vie associative

657

692

35

Travail et emploi

54 089

54 445

356

Contrôle et exploitation aériens

812

805

– 7

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

41

47

6

Total

401 849

402 032

183

Source : loi de finances initiale pour 2019 et présent projet de loi de finances.

Cette évolution tient notamment :

– à un schéma d’emplois de – 239 équivalents temps plein (ETP). Ce schéma d’emplois permet en particulier de renforcer les politiques de l’emploi (+ 395 ETP) et de l’asile (+ 189 ETP). En parallèle, les réformes engagées se traduisent par plusieurs baisses d’effectifs, pour les opérateurs associés aux ministères de la transition écologique et solidaire (– 276 ETP, dont + 200 ETP pour la Société du Grand Paris), de l’agriculture et de l’alimentation (– 190 ETP), de la solidarité et de la santé (– 143 ETP) et de l’Europe et des affaires étrangères (– 106 ETP). Ces baisses résultent notamment des chantiers de transformation menés dans le cadre de la démarche « Action publique 2022 » ;

– à des mesures de périmètre pour un impact de – 776 ETPT, principalement en raison de la sortie de l’Agence nationale de santé publique et de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé qui rejoignent le champ des opérateurs de la sécurité sociale, ainsi que de la création de l’Agence nationale des territoires et de l’Agence nationale du sport ;

– des mesures de transfert et des corrections et abattements techniques, pour + 1 948 ETPT ;

– l’effet en année pleine des schémas d’emplois et suppressions d’effectifs intervenues en 2019 (– 1 177 ETPT).

La commission des finances a adopté l’amendement CF1541 du Rapporteur général visant à augmenter de 8 ETPT le plafond d’emplois des parcs nationaux, compte tenu notamment de la création du parc national de forêts de Champagne et Bourgogne. En conséquence, pour tenir compte des règles de recevabilité financière, il diminue les plafonds d’emplois :

– de l’École nationale supérieure maritime (ENSM) à hauteur de 1 ETPT ;

– de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) à hauteur de 4 ETPT ;

– de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) à hauteur de 1 ETPT ;

– de l’École nationale des ponts et chaussées (ENPC) à hauteur de 1 ETPT ;

– de l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE) à hauteur de 1 ETPT.

*

*     *

M. le président Éric Woerth. Pour la première fois cette année, l’article 43, qui fixe le plafond des emplois des opérateurs de l’État, a suscité un certain nombre d’amendements, afin de proposer une redistribution des plafonds d’emplois des opérateurs rattachés aux programmes d’une même mission, à savoir la mission Écologie, développement et mobilités durables.

L’une des conséquences de ce nombre significatif d’amendements est leur incompatibilité dans la plupart des cas, dans la mesure où ils proposent des modifications différentes des mêmes plafonds d’emploi.

Les amendements ont été classés en partant de ceux qui proposent les modifications les plus substantielles des plafonds par rapport à ce que prévoit le texte du projet.

Toutefois, il est possible, pour certains des amendements, que leur adoption ne fasse pas obstacle à l’adoption de l’ensemble des autres amendements. Je vous indiquerai donc, au cas par cas, quels amendements demeureraient et pourraient encore être mis aux voix une fois l’un ou l’autre des amendements adoptés.

La possibilité de modifier les plafonds d’emploi des opérateurs de l’État est ainsi offerte, ce qui n’était pas évident au regard de l’article 40. En effet, pour les plafonds d’emplois de l’État, qui sont déterminés pour chaque ministère, on ne peut diminuer le plafond d’un ministère pour augmenter celui d’un autre ministère. Ici, c’est le rattachement de différents opérateurs à une même mission qui nous permet de considérer que la diminution d’un plafond peut compenser la hausse d’un autre plafond.

La commission examine dabord lamendement II-CF553 de M. Xavier Paluszkiewicz.

M. Joël Giraud, rapporteur général. En effet, la situation de l’article 43 est un peu particulière : il peut être amendé, mais l’adoption d’un amendement ferait tomber la plupart des autres. Par conséquent, je vous informe d’emblée de ma position : je souhaite que les effectifs des parcs nationaux soient renforcés. Nous avons adopté à l’unanimité un amendement de crédits dans le cadre de la mission Écologie, développement et mobilités durables, permettant de financer huit ETP (équivalent temps plein). J’y suis favorable et je demanderai donc le retrait de tous les amendements incompatibles avec l’amendement II-CF1541, même s’ils sont plus ambitieux ; en effet, ils feraient tomber l’ensemble des amendements.

Je donnerai un avis défavorable aux amendements proposant la réduction du plafond d’emploi de la société du grand Paris (SGP), afin d’être cohérent. Le nombre d’emplois prévu, qui n’est en effet pas négligeable, permet de renforcer la SGP conformément aux recommandations de la Cour des comptes.

L’amendement II-CF1541 relatif aux parcs nationaux réduit le plafond d’emploi de plusieurs opérateurs, afin qu’une charge trop lourde ne pèse pas sur un petit nombre d’entre eux ; il permet ainsi un relatif équilibre.

S’agissant de la SGP, je serai formel : je ne souhaite pas de réduction du nombre de ses emplois.

M. le président Eric Woerth. L’adoption de l’amendement II-CF553 ferait tomber tous les autres amendements à l’article.

M. Xavier Paluszkiewicz. L’amendement proposait d’augmenter les effectifs de la SGP à hauteur de quinze ETP. Toutefois, j’ai entendu les propos de M. le rapporteur général et je le retire.

Lamendement II-CF553 est retiré.

La commission examine les amendements identiques II-CF910 de la commission du développement durable et II-CF1154 de Mme Emilie Bonnivard.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. L’amendement déposé par Adrien Morenas, qui a beaucoup travaillé à ces questions, vise à transférer quarante ETP des effectifs de la SGP au sein du programme Infrastructures et services de transport vers le programme Paysages, eau et biodiversité, afin d’augmenter le plafond d’emploi des agences de l’eau.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Conformément à mes propos préalables, je suis défavorable à cet amendement. Toutefois, je ne suis pas défavorable au principe du renforcement des effectifs des parcs nationaux et des agences de l’eau. Cependant, le prélèvement des effectifs se faisant au détriment de la SGP, je vous demande le retrait de l’amendement.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’entends vos arguments, mais je ne peux retirer l’amendement déposé par la commission du développement durable.

Mme Émilie Bonnivard. L’amendement II-CF1154 est identique. Je rappelle que les agences de l’eau jouent un rôle important dans la gestion économe de la ressource en eau et dans le financement d’actions en faveur de la biodiversité. Elles ont d’ores et déjà conduit un effort important en matière de mutualisation des fonctions. L’idée consistait donc à mettre un terme à la diminution du nombre d’ETP de ces agences. Toutefois, conformément aux recommandations du rapporteur, je retire l’amendement II-CF1154.

Lamendement II-CF1154 est retiré.

M. le président Éric Woerth. L’adoption de l’amendement II-CF910 aurait pour effet de faire tomber l’ensemble des autres amendements à l’exception de l’amendement II‑CF388.

La commission rejette lamendement II-CF910.

Elle en vient à lexamen de lamendement II-CF1541 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons adopté un amendement relatif aux crédits de la mission Écologie, développement et mobilités durables. Présentement, l’amendement II-CF1541 détaille la proposition de prélèvement des huit équivalents temps plein travaillé (ETPT) au bénéfice des parcs nationaux, à raison d’un auprès de l’École nationale supérieure maritime (ENSM), de quatre auprès de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), d’un auprès de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM), d’un auprès de l’École nationale des ponts et chaussées (ENPC) et d’un auprès de l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE).

M. Charles de Courson. Il ne serait pas raisonnable en effet de créer un nouveau parc national consacré à la forêt, à la fois en Champagne, en Bourgogne et en Haute-Marne, en maintenant en l’état les effectifs de l’ensemble des parcs nationaux, sauf à redéployer les effectifs des autres parcs. Toutefois, les prélèvements que vous prévoyez sont-ils soutenables ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ils ont précisément été choisis pour cette raison.

M. Charles de Courson. Le choix de prélever quatre ETPT à l’ANDRA est surprenant, en pleine montée en puissance de Cigéo, qui représente, je le rappelle, 30 milliards d’investissement. Est-ce véritablement raisonnable ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’ANDRA bénéficie d’une augmentation hors plafond de 40 ETPT.

Mme Bérangère Abba. J’ai en effet le bonheur de partager avec vous l’excellente nouvelle que constitue la naissance du onzième parc national des forêts, entre Champagne et Bourgogne, Haute-Marne et Côte-d’Or. Le décret a été publié ce matin. Après dix années de travail sur les enjeux de la préservation de la biodiversité et du rôle de la forêt, j’en suis très heureuse.

M. le président Éric Woerth. L’adoption de l’amendement II-CF1541 aurait pour effet de faire tomber les amendements II-CF393, II-CF790, II-CF725 et II-CF388.

Mme Bérangère Abba. Je retire l’amendement II-CF725 au profit de celui du rapporteur.

La commission adopte lamendement II-CF1541 (amendement II-2509).

Par conséquent, les amendements II-CF393, II-CF790 et II-CF388 tombent.

Elle adopte larticle 43 ainsi modifié.

 


Article 44
Plafonds des emplois des établissements à autonomie financière

Le présent article fixe le plafond des autorisations d’emplois des établissements à autonomie financière (EAF) pour 2020.

Cette disposition, prévue à l’article 76 de la loi de finances pour 2009 ([4]), complète les dispositifs de plafonnement des autorisations d’emplois de l’État et des opérateurs de l’État.

Elle est applicable aux emplois d’établissements dépourvus de la personnalité morale et qui ne constituent pas des opérateurs de l’État. Cette catégorie d’établissements est visée à l’article 66 de la loi de finances pour 1974 ([5]), qui prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles « lautonomie financière pourra être conférée à des établissements et organismes de diffusion culturelle ou denseignement situés à létranger et dépendant du ministère des affaires étrangères ».

Ces établissements relèvent du ministère de lEurope et des affaires étrangères et sont notamment des instituts français, le cas échéant de recherche. Leur liste est fixée par arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères et du ministre en charge du budget ([6]).

Le plafond des autorisations d’emplois s’applique uniquement aux agents de droit local recrutés à durée indéterminée.

plafonds des emplois des établissements à autonomie financière

(en équivalents temps plein – ETP)

Mission

Action extérieure de lÉtat

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

LFI 2018

LFI 2019

PLF 2020

Programme Diplomatie culturelle et dinfluence

3 540

3 600

3 564

3 489

3 449

3 449

3 449

3 449

3 411

Source : lois de finances initiales et présent projet de loi de finances.

Ce plafond, fixé à 3 411 ETP pour 2020, serait en diminution de 38 ETP par rapport à la loi de finances pour 2019. Le niveau du plafond a été stable entre 2016 et 2019. Cette baisse s’explique par un transfert d’emplois vers le titre 2 opéré dans le cadre de la fermeture de quatre EAF en 2020.

Il est à noter que le plafond est exprimé en ETP, et non en ETPT comme pour le plafond des autorisations d’emplois de l’État, des opérateurs de l’État ou de diverses autorités publiques.

Par conséquent, le Rapporteur général appelle, cette année encore, à une harmonisation de la méthode de fixation des plafonds des emplois des établissements à autonomie financière avec les autres catégories de plafonds d’emplois de l’État (ministères et opérateurs), afin qu’ils soient exprimés en ETPT.

*

*     *

La commission adopte larticle 44 sans modification.

 


Article 45
Plafonds des emplois de diverses autorités publiques indépendantes

Le présent article fixe le plafond des autorisations d’emplois des autorités publiques indépendantes (API) et des autorités administratives indépendantes (AAI) dont les effectifs ne sont pas inclus dans un plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État.

La loi de finances pour 2012 ([7]) a instauré la fixation de ce plafond d’autorisations d’emplois. Celle-ci avait également prévu la création d’une annexe générale au projet de loi de finances de l’année relative aux API et aux AAI dont les effectifs ne sont pas inclus dans un plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État ([8]). Cette annexe générale est désormais prévue à l’article 23 de la loi du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ([9]).

Ces dispositions sont de nature à améliorer l’information du Parlement, à renforcer le contrôle de l’évolution des effectifs au sein des API et des AAI, ainsi que le suivi de leurs dépenses. Le Rapporteur général constate que cette annexe a été remise en temps utile au Parlement.

Les plafonds des emplois des autorités publiques indépendantes, fixés en loi de finances initiale, sont relativement stables sur moyenne période.

 

Évolution des plafonds d’emplois des autorités publiques indépendantes

(en ETPT)

Autorité

LFI

2012

LFI

2013

LFI

2014

LFI

2015

LFI

2016

LFI 2017

LFI 2018

LFI 2019

PLF 2020

Écart entre LFI 2019 et PLF 2020

ACPR – Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

1 121

1 121

1 121

1 121

1 121

1 121

1 050

1 050

1 050

AFLD  Agence française de lutte contre le dopage

65

65

64

62

62

62

62

70

74

4

AMF – Autorité des marchés financiers

469

469

469

469

469

469

475

475

485

10

ARAFER – Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières

52

56

59

63

68

75

75

83

94

11

CSA  Conseil supérieur de laudiovisuel

284

284

284

284

284

290

6

H3C – Haut Conseil du commissariat aux comptes

43

50

50

55

58

61

65

65

65

HADOPI – Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet

71

71

71

71

65

65

65

65

65

HAS – Haute Autorité de santé

409

411

394

395

394

395

395

425

425

MNE – Médiateur national de l’énergie

47

46

41

41

41

41

41

41

41

Total

2 277

2 289

2 269

2 561

2 562

2 573

2 512

2 558

2 589

31

Source : lois de finances initiales, présent projet de loi de finances.

L’augmentation du plafond de 31 ETPT entre 2019 et 2020 concerne notamment :

– l’Autorité des marchés financiers – AMF (+ 10 ETPT), dans un contexte marqué d’une part par l’élargissement des missions de l’Autorité dans le cadre de la loi n° du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises dite « PACTE » ([10]) et d’autre part par les enjeux liés à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ;

– l’Agence française de lutte contre le dopage – AFLD (+ 4 ETPT) en raison d’un transfert dans le cadre de l’évolution du dispositif des conseillers interrégionaux antidopage (CIRAD) ;

– l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières – ARAFER (+ 11 ETPT) au titre de l’extension de ses missions sur la régulation du secteur aéroportuaire et des activités de gestionnaire d’infrastructures de la Régie autonomie des transports parisiens (RATP). L’ARAFER devient, à cette occasion, l’Autorité de régulation des transports (ART) ([11]).

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*     *

La commission adopte larticle 45 sans modification.

 


TITRE III
REPORTS DE CRÉDITS DE 2019 SUR 2020

Article 46
Majoration des plafonds de reports de crédits de paiement

L’article 15 de la LOLF prévoit que les crédits de paiement disponibles sur un programme à la fin de l’année peuvent être reportés sur le même programme ou, à défaut, sur un programme poursuivant les mêmes objectifs. Ce report est mis en place dans la limite de 3 % des crédits initiaux inscrits, sur le même titre, du programme à partir duquel les crédits sont reportés. Il est pris par arrêté conjoint du ministre chargé des finances et du ministre intéressé.

S’agissant des crédits hors dépenses de personnel, le même article 15 précise que « ce plafond peut être majoré par une disposition de loi de finances ».

Le Parlement peut donc accorder au Gouvernement une souplesse de gestion permettant un report supérieur à 3 % des crédits initiaux du programme sur l’exercice budgétaire suivant, à la condition que ces crédits ne portent pas sur des dépenses de personnel.

Le présent article a pour objet de prévoir cette exception au titre de cinq programmes au lieu de vingt-trois programmes en loi de finances initiale pour 2019. Le projet de loi de finances pour 2019 prévoyait cette exception pour quinze programmes. Le Gouvernement avait étendu cette exception à d’autres programmes par le biais d’amendements, en cours d’examen du projet de loi.

Le montant de ces reports, non communiqué par le Gouvernement à la date de la rédaction du présent rapport général, sera présenté de manière prévisionnelle en loi de finances rectificative de fin d’année. Aux termes du IV de l’article 15 de la LOLF, les arrêtés de report sont publiés au plus tard le 31 mars 2020.

Les programmes concernés par la majoration des plafonds de reports de crédits de paiement sont les suivants.

Programmes concernés par une majoration de reports
de crédits de paiement

Programme

Mission

Motif de report

Aide économique et financière au développement

Aide publique au développement

Report d’une opération de traitement de dette d’un État étranger

Conseil d’État et autres juridictions administratives

Conseil et contrôle de l’État

Report sur 2020 du financement d’une opération immobilière

Conseil supérieur de la magistrature

Justice

Report d’investissements informatiques

Cour des comptes et autres juridictions financières

Conseil et contrôle de l’État

Report d’attributions de produits destinés à financer des programmes immobiliers

Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants

Action et transformation publiques

Dépenses immobilières réalisées dans le cadre du Grand plan d’investissement

Source : présent projet de loi de finances.

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La commission adopte larticle 46, sans modification.

 


TITRE IV
DISPOSITIONS PERMANENTES

I. ‑ Mesures fiscales et budgétaires non rattachées

Avant l’article 47

La commission est saisie de lamendement II-CF1095 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Cet amendement propose de perfectionner le plan d’épargne retraite (PER) créé par la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE). Le dispositif fonctionne de telle sorte que les versements opérés, soit par un particulier à titre individuel, soit dans le cadre d’un plan d’épargne retraite collectif ouvert par une entreprise, sont déductibles du revenu imposable, jusqu’à hauteur de 10 % de ce revenu. Mais les plus-values réalisées sont imposées au prélèvement forfaitaire unique (PFU) si elles sont issues de versements excédant 10 % des revenus professionnels.

Cela rend ces plans d’épargne retraite un peu moins avantageux que les versions antérieures telles que les plans d’épargne retraite collectifs (PERCO), dans le cadre desquels les plus-values issues de ces versements non déductibles du revenu imposable sont imposées à 17,2 % et selon les règles du PFU. Cet amendement propose donc d’appliquer à ces versements non déductibles le régime antérieur, pour faciliter ou encourager les entreprises à faire migrer les plans d’épargne retraite collectifs de l’ancienne vers la nouvelle formule.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour compléter notre échange préliminaire, sans être traumatisé à l’idée d’examiner les 2 000 amendements annoncés par Charles de Courson, je lui signale simplement que si nous en avions un peu moins, les 10 et 11 novembre, cela serait plus commode pour nous tous ici. Plus sérieusement, je préfère que la colère aille contre le Gouvernement.

Quant à l’amendement, il réduit le champ d’application du PFU et profite surtout aux contribuables les plus aisés. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1095.

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*     *

Article additionnel avant l’article 47
Ajustement des modalités de calcul du quota de réinvestissement
pour le bénéfice du report dimposition en cas dapport-cession suivi
dun réinvestissement dans diverses entités de placement à risque

La commission examine lamendement II-CF1171 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Il s’agit du mécanisme de l’apport-cession, qui a fait l’objet d’une réforme l’année dernière, dans le cadre du projet de loi de finances. Ce dispositif encourage les entrepreneurs qui ont cédé leur entreprise à réinvestir les fruits de cette cession dans d’autres entreprises, grâce à un transfert ou un report d’imposition.

Lors de l’édiction des textes réglementaires d’application, la direction de la législation fiscale (DLF) avait un petit peu corseté le dispositif, au-delà des vœux du législateur. Cet amendement vise donc à repréciser les choses, notamment en matière de calcul du quota d’investissement des fonds qui peuvent être « destinataires » des sommes réinvesties.

M. Joël Giraud, rapporteur général. On en reviendrait effectivement à la logique des dispositions qui prévalaient avant l’imposition du corset dont vient de parler Jean-Noël Barrot. Avis favorable.

La commission adopte lamendement II-CF-1171 (amendement II-2510).

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Article additionnel avant l’article 47
Ajustement des conditions de mise en œuvre du réinvestissement pour le bénéfice du report dimposition en cas dapport-cession suivi dun réinvestissement dans diverses entités de placement à risque

La commission examine lamendement II-CF1168 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Toujours dans le souci de clarifier ce que le législateur avait souhaité l’année dernière et qui n’avait pas été fidèlement retranscrit dans les textes réglementaires, est ici visé le critère du rythme d’investissement des fonds destinataires des sommes réinvesties par les entrepreneurs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement clarifie la disposition adoptée l’an dernier, devenue l’article 115 de la loi de finances initiale (LFI) pour 2019. C’est un amendement anti-abus. J’y suis très favorable.

La commission adopte lamendement II-CF-1168 (amendement II-2511).

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Article additionnel avant l’article 47
Prorogation de lexonération des plus-values immobilières de cessions
en faveur du logement social

La commission est saisie de lamendement II-CF1140 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Cet amendement propose de prolonger de deux ans la durée d’application du régime d’exonération d’impôt sur les plus-values pour les particuliers qui cèdent des biens immobiliers au profit d’organismes en charge du logement social. Cela permettrait d’éviter un blocage des transactions au cours de l’année 2020, dans l’attente de savoir si la prochaine loi de finances prorogera ou non la mesure.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous devions examiner cet amendement en discussion commune avec l’amendement II-CF772 de Mme Stéphanie Do, qui n’a pas pu défendre le sien. J’aurais pourtant émis un avis favorable à son endroit, parce qu’il prévoit la prolongation de deux dispositifs de ce type, et non d’un seul.

Monsieur Bazin, je vous propose de rectifier votre amendement afin d’ajouter, en plus de la référence au 8° du II de l’article 150 U du code général des impôts, la référence au 7° du même II. Si vous acceptez cette rectification, je suis favorable à votre amendement.

M. Thibault Bazin. Je suis d’accord pour la rectification.

La commission adopte lamendement II-CF-1140 ainsi rectifié (amendement II-2512).

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Avant l’article 47

La commission examine lamendement II-CF1097 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Voici à nouveau un amendement qui concerne le plan d’épargne retraite.

Dans la loi PACTE, nous avons adopté des dispositions qui, grâce à un doublement des abattements applicables, permettent à ceux qui le voudraient de déboucler un contrat d’assurance-vie pour alimenter un nouveau plan d’épargne retraite. Nous proposons que soit de même relevé le plafond de déductibilité des sommes transférées d’un contrat d’assurance-vie de plus de huit ans à un plan d’épargne retraite, de façon à renforcer l’incitation à passer des premiers, qui rencontrent actuellement des difficultés importantes liées au niveau des taux, aux seconds. Nous prendrions cette mesure non seulement au bénéfice des assurés et des épargnants, mais aussi des compagnies d’assurances et des sociétés de gestion d’actifs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable. Adopter cet amendement serait coûteux et ne profiterait qu’à des contribuables aisés épargnant plus de 10 % de leurs revenus dans un PER.

La commission rejette lamendement II-CF-1097.

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Article additionnel avant l’article 47
Diminution du droit de partage en cas de divorce ou de rupture de PACS

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF565 de Mme Véronique Louwagie et II-CF1365 du rapporteur général.

Mme Marie-Christine Dalloz. La loi de finances rectificative de 2011 a relevé à 2,5 % le droit de partage de biens, meubles ou immeubles, entre copropriétaires, cohéritiers et coassociés. Ce taux s’applique notamment en cas de divorce, notamment lorsqu’il y a un patrimoine immobilier à partager. Cela surenchérit de façon assez considérable la transmission et le partage de biens.

Le présent amendement propose donc de supprimer cette taxe sur les partages qui, objectivement, n’a pas lieu d’être.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Depuis que je suis rapporteur général, je tente de supprimer ce que j’appelle l’impôt sur le divorce.

Après avoir abordé ce sujet lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, nous sommes convenus avec le Gouvernement d’une diminution du droit, pour qu’il revienne, en deux ans, au taux d’origine, c’est-à-dire à 1,1 %. Tel est l’objet de mon amendement II-CF1365, qui propose la diminution progressive – mais certaine – de l’impôt sur le divorce. Je vous propose donc, madame Dalloz, puisque nous suivons la même logique, de retirer votre amendement et de me rejoindre dans la défense de celui sur lequel nous sommes tombés d’accord avec le Gouvernement. Sinon, avis défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cela ne réduit pas cet impôt à zéro, mais un taux de 1,1 % constitue déjà une amélioration, une étape.

M. Charles de Courson. Ne faudrait-il pas faire aussi un effort sur le droit prélevé à l’occasion des mariages ? Il faudra y songer, même s’il s’agit de montants beaucoup moins élevés que pour cet amendement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. On a déjà supprimé en première partie le droit fixe sur les contrats de mariage.

M. Charles de Courson. Mais il ne s’agissait que du droit fixe – lequel était très faible, de l’ordre de 125 euros. Il faudrait essayer de réduire parallèlement les droits proportionnels, faute de quoi nous pourrions être accusés de ne pas prendre des décisions équilibrées.

Lamendement II-CF565 est retiré.

La commission adopte lamendement II-CF1365 (amendement II-2513).

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Avant l’article 47

La commission examine lamendement II-CF8 de M. Marc Le Fur.

M. Fabrice Brun. Cet amendement vise à rééquilibrer la fiscalité immobilière en préservant de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) le foncier non bâti, les espaces naturels et les propriétés rurales.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons très largement débattu de ce sujet au cours des deux dernières années. Je maintiens mon avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF8.

Puis elle examine lamendement II-CF693 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. Cet amendement concerne l’artificialisation des sols. Il s’inspire d’une réflexion conduite par l’association Humanité et biodiversité, en proposant d’étendre l’exonération prévue au I de l’article 976 du code général des impôts aux terrains situés en zone naturelle des plans locaux d’urbanisme (PLU) communaux ou intercommunaux, terrains non constructibles qui comportent des habitats naturels et des biotopes protégés.

Cette exonération concernerait ainsi des milieux non productifs, ne générant pas de revenus pour le propriétaire.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF693.

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Article 47
Exonération de contribution économique territoriale et de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des activités commerciales situées dans des communes rurales isolées

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article propose de créer un nouveau dispositif d’exonérations d’impôts locaux dans les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZORCOMIR) – ciblé uniquement sur les petites activités commerciales (entreprises de moins de onze salariés et de moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires) et les territoires ruraux les plus fragiles (petites communes n’appartenant pas à une aire urbaine de plus de 10 000 emplois et comptant moins de dix commerces).

Le dispositif envisagé devrait s’appliquer à 21 512 communes.

Pour les établissements commerciaux éligibles situés dans une ZORCOMIR, les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre pourront, par une délibération prise dans les conditions de droit commun, instituer :

– une exonération partielle ou totale de cotisation foncière des entreprises (CFE) des établissements éligibles ;

– une exonération partielle ou totale de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) des immeubles rattachés au 1er janvier de l’année d’imposition à un établissement éligible.

Pour rappel, l’exonération de CFE emporte, dans des proportions similaires, une exonération de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Le dispositif proposé est sans incidence budgétaire pour l’État, dans la mesure où l’exonération de contribution économique territoriale (CET), c’est-à-dire de CFE et de CVAE, ainsi que l’exonération de TFPB ne sont pas compensées.

Ce nouveau régime des ZORCOMIR s’appliquera aux impositions établies au titre des années 2020 à 2023.

Dernières modifications législatives intervenues

La loi de finances rectificative pour 2017 a mis en place dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais les bassins urbains à dynamiser (BUD).

La loi de finances pour 2018 a maintenu le bénéfice des avantages liés à l’appartenance à une zone de revitalisation rurale (ZRR) jusqu’au 30 juin 2020 pour les communes plus incluses dans une ZRR au 1er juillet 2017.

La loi de finances pour 2019 a simplifié les dispositifs d’exonérations zonées applicables en outre-mer et a mis en place les zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG).

La loi de finances pour 2019 a mis en place pour la Collectivité de Corse les zones de développement prioritaire (ZDP).

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   Les dix dispositifs d’exonÉrations zonÉes en faveur des territoires ruraux et urbains

Afin de soutenir l’activité et l’emploi sur des territoires spécifiques, dix dispositifs d’exonérations zonées ont été mis en place par le législateur. Ces dispositifs consistent en des incitations fiscales temporaires en faveur des entreprises faisant le choix de s’installer et de se développer dans les territoires faisant face à des difficultés économiques et sociales.

Il existe actuellement dix dispositifs fiscaux d’exonérations zonées :

– les zones d’aide à finalité régionale (ZAFR) ;

– les zones d’aide à l’investissement (ZAI) ;

– les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs (ZFU-TE) ;

– les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) ;

– les zones de restructuration de la défense (ZRD) ;

– les zones de revitalisation rurale (ZRR) ;

– les zones de développement prioritaire (ZDP) ;

– les zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG) ;

– les bassins d’emploi à redynamiser (BER) ;

– les bassins urbains à dynamiser (BUD).

Les exonérations portent essentiellement sur la fiscalité applicable aux entreprises, à savoir l’impôt sur le revenu (IR) et l’impôt sur les sociétés (IS) au titre des bénéfices, la cotisation foncière sur les entreprises (CFE), la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ainsi que la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB).

Chacun de ces régimes est exclusif l’un de l’autre (le choix pour un établissement de recourir à l’un de ces régimes étant considéré comme un droit d’option irrévocable). Ils sont également soumis au respect des règles européennes en matière d’aides d’État, en particulier au respect du règlement européen d’exemption générale par catégorie (RGEC) du 17 juin 2014 ([12]) et du règlement européen des aides de minimis du 18 décembre 2013 ([13]).

En effet, l’article 107 du traité de fonctionnement de l’Union européenne dispose que « sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources dÉtat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ». Sont toutefois considérées comme compatibles avec le marché intérieur, les aides « destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi » ainsi que « les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques ».

1.   Les zones d’aide à finalité régionale (ZAFR)

Les ZAFR correspondent aux territoires de l’Union européenne présentant des retards de développement économique dans lesquels les pouvoirs publics, l’État et les collectivités territoriales peuvent allouer, jusqu’au 31 décembre 2020, des aides aux entreprises pour encourager les investissements et la création durable d’emplois. Ces aides d’État sont qualifiées d’aides à finalité régionale (AFR).

Les lignes directrices relatives aux aides à finalité régionale pour les années 2014 à 2020 ([14]) ont attribué à la France une enveloppe de 15,6 millions d’habitants pouvant être couverts par des ZAFR : 24,17 % de la population nationale est éligible aux ZAFR jusqu’en 2020, au lieu de 18,4 % pour les années 2007 à 2013. Le gouvernement français a toutefois choisi de constituer une « réserve » de 0,36 % de la population nationale de l’enveloppe octroyée, soit 233 757 habitants. Cette réserve peut être utilisée pour intégrer en cours de période des territoires au zonage AFR, en cas de sinistre économique d’une ampleur particulière, de façon à permettre des mesures d’accompagnement et de renforcement de l’attractivité. Deux demandes d’utilisation de la réserve AFR ont déjà été notifiées et approuvées par la commission, la première concernant 6 communes affectées par des restructurations d’anciens sites de défense, et la seconde concernant 52 communes nécessitant un accompagnement renforcé de l’État. Il subsiste donc à ce jour un reliquat de population éligible aux AFR de 44 147 habitants.

La délimitation des ZAFR est définie conjointement par la Commission européenne et les autorités nationales, en concertation avec les préfectures et les collectivités territoriales. Un nouveau zonage a été élaboré pour la période allant de 2014 à 2020, traduit par deux décisions de la Commission ([15]) et par le décret du 2 juillet 2014 modifié en dernier lieu par le décret du 26 avril 2017 ([16]). Ces derniers identifient deux types de zones :

– les zones dites « a » ([17]) dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi. En France, ces zones concernent la Guadeloupe, Saint-Martin, la Guyane, la Martinique, La Réunion et Mayotte, dont l’ensemble des communes sont classées en zones « a ». Les aides dans ces zones peuvent représenter de 45 % à 70 % du coût des investissements productifs pour les grandes entreprises, avec des bonifications de taux possible de 10 % pour les moyennes entreprises et de 20 % pour les petites entreprises ;

– les zones dites « c » ([18]) qui sont défavorisées par rapport à la moyenne nationale et sélectionnées sur des bases plus restrictives. Les aides dans ces zones peuvent représenter 10 % du coût des investissements productifs pour les grandes entreprises, avec des bonifications de taux possible de 10 % pour les moyennes entreprises et de 20 % pour les petites entreprises.

TABLEAU DES TAUX PLAFONDS DE CUMUL D’AIDES
À FINALITÉ RÉGIONAL

(en pourcentage)

Types de zone

Taux daides

Grandes entreprises

Moyennes entreprises

Petites entreprises

Zones a

70

80

90

55

65

75

45

55

65

Zones c

10

20

30

Source : décret n° 2014-758 du 2 juillet 2014 relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des petites et moyennes entreprises pour la période 2014-2020.

Zones d’aide à finalitÉ rÉgionale
pour les annÉes 2014 À 2020

Source : Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

En application de l’article 44 sexies du code général des impôts (CGI), les entreprises créées dans les ZAFR, exerçant une activité industrielle, artisanale, commerciale ou professionnelle (uniquement, pour ces dernières, si elles sont soumises à l’IS), bénéficient d’une exonération dégressive d’IR ou d’IS au titre des bénéfices pendant cinq ans suivant leur création, selon la chronique suivante :

– exonération intégrale les deux premières périodes de douze mois ;

– exonération de 75 % la troisième période de douze mois ;

– exonération de 50 % la quatrième période de douze mois ;

– exonération de 25 % la cinquième période de douze mois.

En application des articles 1383 A, 1464 B et 1464 C du CGI, des exonérations totales de TFPB et de CFE sont possibles pour les entreprises nouvellement créées et éligibles à l’exonération prévue à l’article 44 sexies du même code, sous réserve d’une délibération en ce sens de la part de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dans le ressort duquel les établissements de l’entreprise sont situés. Cette délibération fixe la durée de l’exonération, comprise entre deux et cinq ans, et s’applique uniquement à la part de TFPB et de CFE qui leur revient.

Une exonération totale ou partielle de CFE, au titre de certaines extensions ou créations d’activités industrielles ou de recherche scientifique et technique, est également prévue à l’article 1465 du CGI. Cette exonération nécessite une délibération préalable de la commune ou de l’EPCI, et ne peut avoir pour effet de reporter de plus de cinq ans l’application du régime d’imposition de droit commun.

Enfin, en application des I et II l’article 1586 nonies du CGI, les entreprises bénéficiant de l’exonération de CFE sont également exonérées de CVAE. Cette exonération peut également s’appliquer aux parts régionale et départementale de CVAE, sur délibération préalable de ces collectivités territoriales.

Pour bénéficier de ces exonérations, les entreprises doivent s’implanter dans les ZAFR au plus tard le 31 décembre 2020 (toutefois, la modification du zonage ne remet pas en cause les exonérations courantes). Le bénéfice des exonérations est subordonné au respect des règles européennes en matière d’aides d’État.

2.   Les zones d’aide à l’investissement pour les petites et moyennes entreprises (ZAI-PME)

Les ZAI-PME comprennent l’ensemble des communes de France, à l’exception :

– des communes situées dans la région Île-de-France, sauf les communes situées dans une zone urbaine sensible (ZUS) ou une ZRR ;

– des communes ou parties de commune classées en ZAFR ([19]).

Dans les ZAI-PME, ne peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur et exemptées de l’obligation de notification à la Commission européenne que les aides accordées à des projets d’investissement et qui n’excèdent pas 7,5 millions d’euros.

Zones d’aide À l’investissement
pour les PME

Source : commission des finances ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

L’article 1465 B du CGI prévoit, sur délibération de la collectivité territoriale, des exonérations totales ou partielles de CFE et de CVAE pour cinq ans au maximum, au bénéfice des petites et moyennes entreprises (PME) qui créent des activités industrielles ou de recherche scientifique et technique dans les zones d’aide à l’investissement des PME (ZAI-PME) jusqu’au 31 décembre 2020. Une PME au sens du droit de l’Union européenne est une entreprise qui occupe moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total de bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros ([20]).

3.   Les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs (ZFU-TE)

Les ZFU-TE sont définies au B du 3 de l’article 42 de la loi du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire ([21]) et correspondent à des quartiers particulièrement défavorisés de plus de 8 500 habitants (aucune condition démographique n’étant prévue s’agissant de l’outre-mer).

Zones franches urbaines – Territoires entrepreneurs

Source : Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

La liste de ces zones est annexée à la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville ([22]). Leur délimitation est opérée par décret en Conseil d’État, en tenant compte des éléments de nature à faciliter l’implantation d’entreprises ou le développement d’activités économiques :

– deux décrets du 26 décembre 1996 ([23]), modifiés par deux décrets du 31 décembre 1997 ([24]), ont fixé la délimitation de 44 premières ZFU-TE en métropole et en outre-mer ;

– le décret du 31 juillet 2001 a modifié l’emprise d’une ZFU-TE ([25]) ;

– le décret du 12 mars 2004 a créé 41 nouvelles ZFU-TE ([26]) ;

– le décret du 19 décembre 2006 a créé 15 nouvelles ZFU-TE ([27]). En effet, la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances a abaissé le critère de population de 10 000 à 8 500 habitants ([28]) ;

– enfin, le décret du 15 mai 2007 a étendu l’emprise de 31 ZFU-TE ([29]).

Au total, ce sont 100 ZFU-TE qui ont été créées depuis 1996. Ces dernières sont d’ailleurs toutes concernées totalement ou partiellement par un ou plusieurs QPV.

Zones franches urbaines – Territoires entrepreneurs pour les départements de la petite couronne parisienne

Source : Géoportail, Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

En application de l’article 44 octies A du CGI, les entreprises créées entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2020 dans l’une des ZFU-TE métropolitaines bénéficient d’une exonération dégressive d’IR ou d’IS au titre des bénéfices réalisés au sein de la zone. Cette exonération ne bénéficie toutefois qu’aux entreprises :

– qui emploient au maximum 50 salariés et dont le chiffre d’affaires ou le total de bilan n’excède pas 10 millions d’euros ;

– dont le capital n’est pas détenu à 25 % ou plus par une entreprise qui emploie plus de 250 salariés et réalise un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros ou dont le bilan excède 43 millions d’euros (soit une entreprise de taille intermédiaire – ETI – ou une grande entreprise) ;

– qui exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale ou non commerciale, à l’exception des activités de crédits-bails mobiliers, de location d’immeubles, de construction automobile ou navale, de fabrication de fibres textiles, de sidérurgie ou de transports routiers de marchandises.

L’exonération ne peut excéder 50 000 euros par période de douze mois (100 000 euros pour les entreprises qui ont créé une activité entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014), plafond majoré de 5 000 euros pour chaque salarié embauché à temps plein pour au moins six mois, à compter du 1er janvier 2015, et domicilié dans un QPV ou une ZFU-TE.

Pour les créations ou implantations réalisées à compter du 1er janvier 2015, le bénéfice de l’exonération est subordonné à une clause d’embauche locale fixée à 50 % de l’effectif ou des embauches faites depuis la création ou l’implantation.

Enfin, pour les créations ou implantations réalisées à compter du 1er janvier 2016, le bénéfice de l’exonération est subordonné à l’existence d’un contrat de ville mettant en œuvre la politique de la ville.

Pour les entreprises implantées à compter du 1er janvier 2015, les exonérations d’IR et d’IS au titre des bénéfices sont prévues pour huit ans, selon la chronique suivante :

– exonération intégrale les cinq premières périodes de douze mois suivant la création de l’entreprise ;

– exonération de 60 % la sixième période de douze mois ;

– exonération de 40 % la septième période de douze mois ;

– exonération de 20 % la huitième période de douze mois.

Aucune exonération de fiscalité locale n’est applicable dans ces zones.

En 2019, le dispositif d’exonérations d’IS et d’IR applicable aux ZFU-TE a bénéficié à 17 800 entreprises, pour un coût de 175 millions d’euros (montant stable en prévision pour 2020).

4.   Les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)

Les QPV, définis à l’article 5 de la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ([30]) et par le décret du 3 juillet 2014 pris pour son application ([31]), correspondent aux quartiers situés dans un territoire urbain (population d’au moins 10 000 habitants) et caractérisés par :

– un nombre minimal de 1 000 habitants ;

– un critère de revenu par habitant (revenu médian par unité de consommation) à partir duquel est apprécié l’écart de développement économique et social par rapport, d’une part, au territoire national et, d’autre part, à l’unité urbaine dans laquelle se situe le quartier.

Dans les départements et collectivités d’outre-mer, ces quartiers peuvent être caractérisés par des critères sociaux, démographiques, économiques ou relatifs à l’habitat, tenant compte des spécificités de chacun de ces territoires.

quartiers prioritaires de la politique
de la ville

Source : Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Deux décrets du 30 décembre 2014 fixent la liste des QPV, l’un pour la métropole ([32]), l’autre pour l’outre-mer ([33]), modifiés par un décret du 14 septembre 2015 ([34]). Ces derniers comptabilisent 1 296 quartiers prioritaires de plus de 1 000 habitants situés dans les agglomérations métropolitaines de plus de 10 000 habitants et 218 quartiers prioritaires dans les départements d’outre-mer, à Saint-Martin et en Polynésie française.

Parmi les 1 514 QPV en métropole et en outre-mer, ceux qui présentent les dysfonctionnements urbains les plus importants bénéficient du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), porté par l’Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU), soit 216 quartiers d’intérêt national et environ 250 quartiers d’intérêt régional. Ce programme a pour ambition de réduire les écarts de développement entre les QPV et les autres territoires, et d’améliorer les conditions de vie de leurs habitants. Il s’appuie sur la signature de contrats de ville, sur 10 ou 15 ans, afin d’apporter une réponse aux enjeux urbains des QPV qui soit cohérente avec l’ensemble des autres dimensions de la politique de la ville (emploi, développement économique et cohésion sociale).

quartiers prioritaires de la politique de la ville et zones franches urbaines POUR LES DÉPARTEMENTS DE LA PETITE COURONNE PARISIENNE

Note : en bleu sont représentés les quartiers prioritaires de la politique de la ville ; en rose sont représentées les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs ; en mauve, les zones de superposition entre ces deux zonages.

Source : Géoportail, Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

 

Zones franches urbaines et quartiers prioritaires de la politique
de la ville POUR La ville de Marseille

Note : en bleu sont représentés les quartiers prioritaires de la politique de la ville ; en rose sont représentées les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs.

Source : Géoportail, Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Les entreprises existantes dans un QPV au 1er janvier 2017 ainsi que les entreprises créées entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2022 peuvent bénéficier d’exonérations de fiscalité locale si elles :

– emploient moins de 50 salariés et ont un chiffre d’affaires ou un total de bilan inférieur à 10 millions d’euros (moins de 11 salariés et moins de 2 millions de chiffre d’affaires pour les entreprises existantes au 1er janvier 2015 ou créées entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2016) ([35]) ;

– ne sont pas détenues à plus de 25 % par une ETI ou une grande entreprise ;

– exercent une activité commerciale.

Les exonérations ne sont susceptibles de s’appliquer qu’aux établissements situés au 1er janvier de l’année d’imposition dans le périmètre d’un des QPV. Toutefois, dans les cas où la limite d’un quartier correspond à une voie publique, les établissements situés sur chacune des bordures de cette voie sont réputés implantés dans le QPV.

Les exonérations prévues sont les suivantes :

– exonération de TFPB pour cinq ans, sauf délibération contraire, en application de l’article 1383 C ter du CGI ;

– exonération de CFE pour cinq ans, sauf délibération contraire, en application du I septies de l’article 1466 A du CGI, dans la limite de 78 561 euros de base nette imposable. À l’issue de cette période de cinq ans, un abattement sur la base nette imposable de CFE est pratiqué, à hauteur de 60 % la première année, 40 % la deuxième année et 20 % la troisième année ;

– le cas échéant, et dans des durées et proportions similaires que pour la CFE, exonération de CVAE en application du III de l’article 1586 nonies du CGI.

De manière additionnelle, le I de l’article 1466 A du CGI dispose que les communes sur les territoires desquelles est situé un QPV peuvent, sur délibération, exonérer de la CFE (et de CVAE) les créations ou extensions d’établissements réalisées dans un de ces quartiers pour les établissements employant moins de 150 salariés (au lieu de 50 salariés) et pour une durée maximale de cinq ans. Cette exonération s’applique dans la limite d’un montant de 29 124 euros de base nette imposable. Il revient à la commune de déterminer le taux d’exonération, sa durée ainsi que les QPV concernés.

En 2019, les exonérations de CVAE et de CFE ont concerné respectivement 4 080 entreprises et 16 400 entreprises, pour un coût respectif de 3 millions d’euros et de 4 millions d’euros. L’exonération de TFPB a coûté 3 millions d’euros en 2019 (le coût prévisionnel 2020 est de 4 millions d’euros) pour 9 600 bénéficiaires.

5.   Les zones de restructuration de la défense (ZRD)

Prévues au 3 ter de l’article 42 de la loi du 4 février 1995 précitée, les ZRD sont des territoires dans lesquels la réorganisation des unités militaires et des établissements relevant du ministère de la défense a conduit à une perte importante d’emplois. Ces territoires doivent être couverts par un contrat de redynamisation de site de défense (CRSD). Les ZRD se répartissent en deux catégories :

– la première catégorie des ZRD s’entend des territoires incluant une ou plusieurs communes caractérisées par une perte d’au moins 50 emplois du fait de la réorganisation des unités militaires et dont le territoire est couvert par un CRSD. Ces territoires doivent satisfaire à l’un des critères suivants : un taux de chômage supérieur de trois points à la moyenne nationale ; une variation annuelle moyenne négative de la population entre les deux derniers recensements connus supérieure en valeur absolue à 0,15 % ; une variation annuelle moyenne négative de l’emploi total sur une période de quatre ans supérieure ou égale en valeur absolue à 0,65 % ; un rapport entre la perte locale d’emplois directs du fait de la réorganisation des unités militaires sur le territoire national et la population salariée d’au moins 5 % ;

– la seconde catégorie des ZRD, qui inclut les communes de la première catégorie, vise les communes caractérisées par une perte d’au moins 50 emplois directs du fait de la réorganisation des unités militaires et dont le territoire est couvert par un CRSD, mais sans critères additionnels de taux de chômage ou de variation de la population et de l’emploi.

Les CRSD sont conclus entre, d’une part, l’État et, d’autre part, les communes ou groupements de collectivités territoriales correspondant aux sites les plus affectés par la réorganisation du fait d’une perte nette de nombreux emplois directs et d’une grande fragilité économique et démographique. Ils sont d’une durée de trois ans, reconductible une fois pour deux ans.

Les ZRD sont délimitées par arrêté ministériel. Cet arrêté détermine, pour chaque zone, l’année au titre de laquelle elle est reconnue. Les ZRD sont situées dans sept départements, à savoir l’Allier, les Ardennes, la Côte-d’Or, l’Eure-et-Loir, la Marne, l’Oise, le Bas-Rhin et la Haute-Saône.

zones de restructuration
de la défense

Source : Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Afin d’aider le développement économique des territoires concernés par le redéploiement des armées, des exonérations en ZRD sont applicables aux entreprises implantées dans les six années qui suivent la publication de l’arrêté de reconnaissance ou, si cette dernière est postérieure, aux entreprises implantées au 1er janvier de l’année précédant celle de la reconnaissance de la ZRD :

– exonération d’IR ou d’IS, en application de l’article 44 terdecies du CGI, à raison des bénéfices provenant des activités implantées, selon la chronique suivante : exonération totale pendant cinq ans, exonération à hauteur de deux tiers la première période de douze mois suivant cette période de cinq ans, et à hauteur d’un tiers la seconde période de douze mois ;

– exonération de TFPB pendant cinq ans, sur délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI, en application de l’article 1383 I du CGI ;

– exonération de CFE pendant cinq ans, sur délibération de l’organe délibérant, en application du I quinquies B de l’article 1466 A du CGI ;

– le cas échéant, dans les mêmes conditions que les exonérations de CFE, exonération de CVAE en application des I et II de l’article 1586 nonies du CGI.

Le bénéfice de ces exonérations est réservé aux contribuables exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou non commerciale (uniquement, pour ces dernières, si elles sont soumises à l’IS), à l’exception des activités de crédit-bail, de location d’immeubles ou agricoles.

En 2019, 550 entreprises ont bénéficié des exonérations d’IR ou d’IS dans le cadre du dispositif ZRD, pour un coût de 4 millions d’euros, identique au coût estimé pour 2020.

6.   Les zones de revitalisation rurale (ZRR)

La réforme des ZRR, votée en loi de finances rectificative pour 2015 ([36]), a simplifié les critères de classement pris en compte à compter du 1er juillet 2017. Les ZRR sont définies au II de l’article 1465 A du CGI et correspondent aux communes membres d’un EPCI qui satisfait aux conditions suivantes :

– une densité démographique inférieure à la densité médiane nationale des EPCI métropolitains ou une population en diminution de 30 % ou plus depuis les quatre dernières décennies à condition qu’il se trouve dans un arrondissement composé majoritairement de communes classées en ZRR et dont la population est supérieure à 70 % de l’arrondissement (seules les communes de l’EPCI de Decazeville communauté sont concernées par ce critère de baisse de population) ;

– un revenu fiscal par unité de consommation médian inférieur à la médiane des revenus médians des EPCI métropolitains.

Le classement des communes en ZRR est établi par arrêté ministériel ([37]). Il est révisé au 1er janvier de l’année qui suit le renouvellement général des conseils communautaires. Le zonage actuel est entré en vigueur le 1er juillet 2017. Auparavant, les critères d’éligibilité étaient appréciés au niveau des communes et reposaient sur un déclin de la population générale, un déclin de la population active et une forte proportion d’emplois agricole.

Afin d’éviter une sortie brutale de certaines communes du fait du nouveau zonage, le bénéfice du dispositif d’exonérations a été maintenu jusqu’au 30 juin 2020 pour les communes de montagne n’étant plus incluses dans une ZRR au 1er juillet 2017 ([38]). La loi de finances pour 2018 a mis en place un mécanisme similaire pour l’ensemble des autres communes sorties du zonage ([39]).

Au 1er juillet 2017, 13 845 communes métropolitaines et 45 communes d’outre-mer sont classées en ZRR, auxquelles doivent être ajoutées les 1 011 communes de montagne et les 3 063 autres communes bénéficiant du dispositif transitoire prévu par la loi montagne et la loi de finances pour 2018. Au total, 17 976 communes bénéficient du classement ou des bénéfices du classement, soit près de 50 % des communes et 15 % de la population.

Enfin, dans le cadre de la révision des ZFANG applicables aux départements et régions d’outre-mer et de la mise en cohérence des régimes zonés dans ces territoires, la loi de finances pour 2019 prévoit que les communes d’outre-mer ne peuvent plus prétendre au régime des ZRR à compter du 1er janvier 2019 ([40]).

Communes en zones de revitalisation
rurale en 2018

Source : commission des finances ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Le dispositif ZRR prévoit des exonérations pour les entreprises créées, implantées ou reprises dans une telle zone jusqu’au 31 décembre 2020 et qui emploient moins de onze salariés :

– exonération intégrale d’IR ou d’IS, en application de l’article 44 quindecies du CGI, selon la chronique suivante : exonération intégrale les cinq premières périodes de douze mois suivant la création ; exonération de 75 % la sixième période de douze mois ; exonération de 50 % la septième période de douze mois ; et exonération de 25 % la huitième période de douze mois ;

– exonération de TFPB entre deux et cinq ans, sur délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI, en application des articles 1383 A et 1464 C du CGI ;

– exonération de CFE entre deux et cinq ans, sur délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI, en application des articles 1464 B et 1464 C du CGI ;

– le cas échéant et dans les mêmes conditions que pour la CFE, exonération de CVAE en application des I et II de l’article 1586 nonies du CGI.

Les exonérations précédentes s’appliquent aux entreprises qui exercent une activité industrielle, commerciale, artisanale ou non commerciale (à condition d’être imposable à l’IS), à l’exception des activités bancaires, financières, d’assurances, de gestion ou de location d’immeubles et de pêche maritime.

Par ailleurs, l’article 1465 A du CGI prévoit, sauf délibération contraire de la commune ou de l’EPCI, une exonération de CFE d’une durée maximale de cinq ans pour :

– les créations d’activités en ZRR par des artisans, inscrits au répertoire des métiers, procédant à des travaux de fabrication, de transformation, de réparation ou des prestations de services et pour lesquels la rémunération du travail représente plus de 50 % du chiffre d’affaires ;

– les créations d’activités commerciales et les reprises d’activités commerciales, artisanales ou professionnelles réalisées par des entreprises exerçant le même type d’activité, avec moins de cinq salariés et installées dans une commune de moins de 2 000 habitants en ZRR.

Cette exonération de CFE entraîne également une exonération de CVAE en application du III de l’article 1586 nonies du CGI.

Enfin, des exonérations spécifiques sectorielles sont prévues :

– exonération de TFPB, sur délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI, de certains locaux destinés à l’hébergement et au tourisme en application de l’article 1383 E bis du CGI, sans limite de durée ;

– exonération de TFPB, sur délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI, de certains logements destinés à être rénovés dans le cadre d’un soutien financier de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) en application de l’article 1383 E du CGI, pour une durée de quinze ans ;

– exonération, sur délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI, de taxe d’habitation (TH) des meublés de tourisme et des chambres d’hôtes, en application de l’article 1407 du CGI.

7.   Les zones de développement prioritaire (ZDP)

Les ZDP ([41]) ont été créées par la loi de finances pour 2019 et concernent les communes situées dans les régions de France métropolitaine qui répondent cumulativement aux conditions suivantes :

– elles appartiennent au tiers des régions ayant le taux de pauvreté le plus élevé qui s’entend de la part de la population dont le revenu est inférieur à 60 % du revenu médian ;

– elles appartiennent au tiers des régions ayant la part de jeunes de 15 à 24 ans ni en emploi ni en formation la plus élevée ;

– elles appartiennent au tiers des régions ayant la densité de population au kilomètre carré la plus faible ;

– au moins 30 % de la population de la région vit dans des EPCI qui répondent cumulativement aux trois critères précités.

Le classement des communes en zone de développement prioritaire est établi au 1er janvier 2019 et pour une durée de deux ans. En pratique, seule la région de Corse est concernée ([42]).

zone de développement prioritaire

Source : commission des finances ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Dans les ZDP, les PME (entreprise de moins de 250 salariés ayant un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros ou un total de bilan annuel inférieur à 43 millions d’euros) qui sont créées entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2020 et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale bénéficient d’une exonération d’IR ou d’IS, en application de l’article 44 septdecies du CGI, à raison des bénéfices réalisés, selon la chronique suivante : exonération totale pendant deux ans ; exonération à hauteur de 75 % la première période de douze mois suivant cette période ; à hauteur de 50 % la deuxième période de douze mois ; et à hauteur de 25 % la troisième période de douze mois.

Il est également prévu pour ces PME une exonération totale puis partielle de CFE et de TFPB au titre des dix premiers exercices de l’entreprise. Pour chacune de ces deux impositions, l’exonération comporte deux volets :

– une part obligatoire appliquée à la moitié de la base nette imposable de CFE en application de l’article 1463 B du CGI et de TFPB en application du I de l’article 1383 J du même code ;

– une part facultative, sur décision de l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI, portant sur l’autre moitié de base nette imposable de CFE en application de l’article 1466 B bis du CGI et de TFPB en application du II de l’article 1383 J du même code.

L’exonération totale, pour sa part obligatoire comme sa part facultative, s’applique pendant les sept exercices après l’année de création de l’établissement. Au-delà, une imposition progressive est mise en place, selon la chronique suivante : exonération à hauteur de 75 % la première année suivant cette période ; à hauteur de 50 % la deuxième année ; et à hauteur de 25 % la troisième année.

L’exonération de CFE se traduit également, dans les mêmes conditions, d’une exonération de CVAE en application de l’article 1586 nonies du CGI.

Pour 2020, le coût de ces exonérations est estimé à 2 millions d’euros, pour un nombre de bénéficiaires indéterminé.

8.   Les zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG)

Les entreprises situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte ou à La Réunion peuvent bénéficier d’avantages fiscaux pérennes, sous réserve de satisfaire aux conditions suivantes, prévues à l’article 44 quaterdecies du CGI :

– employer moins de 250 salariés et réaliser un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros ;

– exercer son activité principale dans l’un des secteurs éligibles à l’aide fiscale à l’investissement productif en outre-mer prévue à l’article 199 undecies B du CGI (activité agricole ou activité industrielle, commerciale ou artisanale sauf dans les secteurs du commerce, des débits de tabac et de boisson, de la restauration, des conseils ou expertise, de l’éducation, de la banque, etc.).

zones franches d’activité nouvelle
génération

Source : commission des finances ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Les entreprises situées dans une ZFANG bénéficient d’un abattement de 50 % sur le bénéfice imposé à l’IR ou l’IS au titre de chaque exercice ouvert et dans la limite de 150 000 euros.

La limite est portée à 300 000 euros et le taux est majoré à 80 % pour les entreprises situées en Guyane et à Mayotte. La limite et le taux sont également majorés dans les mêmes proportions en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion pour certaines activités listées par la loi (recherche et développement, technologies de l’information, tourisme, environnement, énergies renouvelables, travaux publics, etc.).

Les entreprises éligibles à l’abattement sur le bénéfice ont également, sauf délibération contraire de l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI à fiscalité propre :

– un abattement sur la base nette imposable de la CFE, en application de l’article 1466 F du CGI, égal à 80 % de cette base dans la limite de 150 000 euros par année d’imposition. Un taux majoré est également prévu dans les mêmes conditions que pour l’imposition au titre des bénéfices et s’établit à 100 % de la base nette imposable ;

– un abattement sur la base d’imposition de la TFPB, en application de l’article 1388 quinquies du CGI, égal à 50 % de cette base. Un taux majoré est également prévu dans les mêmes conditions et s’établit à 80 % de la base d’imposition ;

– un abattement sur la valeur ajoutée au titre de la CVAE similaire à l’abattement de la base nette imposable de la CFE, en application du IV de l’article 1586 nonies du CGI.

9.   Les bassins d’emploi à redynamiser (BER)

Les BER sont définis au 3 bis de l’article 42 de la loi du 4 février 1995 précitée, et correspondent aux territoires caractérisés par :

– un taux de chômage en 2006 supérieur de trois points au taux national ;

– une variation annuelle négative de la population entre les deux derniers recensements connus supérieure à 0,15 % ;

– une variation annuelle négative de l’emploi entre 2000 et 2004 supérieure à 0,75 %.

Ces derniers sont reconnus par voie réglementaire ([43]). Dans les faits, les BER se situent dans les départements des Ardennes (zone d’emploi de la Vallée de la Meuse) et de l’Ariège (zone d’emploi de Lavelanet).

bassins d’emploi à redynamiser

Source : commission des finances ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Les entreprises créées dans les BER jusqu’au 31 décembre 2020 bénéficient des exonérations suivantes :

– exonération d’IR ou d’IS à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans le bassin pendant cinq ans (le bénéfice de l’exonération est perdu à compter de l’exercice au cours duquel une distribution de dividendes aux actionnaires est réalisée), en application de l’article 44 duodecies du CGI ;

– exonération de TFPB pendant cinq ans, en application de l’article 1383 H du CGI, sauf délibération contraire de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’EPCI ;

– exonération de CFE pendant cinq ans, en application du I quinquies A de l’article 1466 A du CGI, là encore sauf délibération contraire ;

– le cas échéant, exonération de CVAE en application du III de l’article 1586 nonies du CGI.

Le bénéfice de l’exonération est réservé aux contribuables exerçant une activité industrielle, commerciale ou artisanale ou non commerciale (uniquement, pour ces dernières, si elles sont soumises à l’IS).

En 2019, 800 entreprises ont bénéficié des exonérations d’IR ou d’IS prévues dans le cadre du dispositif BER, pour un coût de 6 millions d’euros, l’estimation pour 2020 prévoyant un coût identique.

10.   Les bassins urbains à dynamiser (BUD)

Les BUD sont définis à l’article 44 sexdecies du CGI et concernent les communes qui appartiennent à un ensemble d’EPCI contigus rassemblant au moins un million d’habitants et qui satisfont aux conditions suivantes :

– la densité de population de la commune est supérieure à la moyenne nationale ;

– le revenu disponible médian par unité de consommation de la commune est inférieur à la médiane nationale des revenus médians ;

– le taux de chômage de la commune est supérieur au taux national ;

– au moins 70 % de la population de chaque EPCI vit dans des communes respectant les trois conditions précédentes.

Sont également classées dans un BUD les communes qui satisfont aux trois premières conditions précédentes et qui sont limitrophes d’au moins une commune classée en bassin urbain à dynamiser. Ce dernier critère, introduit en loi de finances pour 2019 ([44]), a permis d’attraire dans le champ des BUD neuf nouvelles communes.

Le classement des communes en BUD est établi au 1er janvier 2018 et pour une durée de trois ans par arrêté ministériel ([45]). En pratique, ce classement concerne un bassin minier situé dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais.

Dans les BUD, les PME (entreprise de moins de 250 salariés et un chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros ou un total de bilan annuel inférieur à 43 millions d’euros) qui sont créées jusqu’au 31 décembre 2020 et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale bénéficient d’une exonération d’IR ou d’IS, en application de l’article 44 sexdecies du CGI, à raison des bénéfices réalisés, selon la chronique suivante : exonération totale pendant deux ans ; exonération à hauteur de 75 % la première période de douze mois suivant cette période de deux ans ; à hauteur de 50 % la deuxième période de douze mois ; et à hauteur de 25 % la troisième période de douze mois.

Il est également prévu pour ces PME, sur le même schéma que pour la ZDP de Corse, une exonération totale puis partielle de CFE et de TFPB au titre des dix premiers exercices de l’entreprise. Pour chacune de ces deux impositions, l’exonération comporte deux volets :

– une part obligatoire appliquée à la moitié de la base nette imposable de CFE en application de l’article 1463 A du CGI et de TFPB en application du I de l’article 1383 F du même code ;

– une part facultative, sur décision de l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI, portant sur l’autre moitié de base nette imposable de CFE en application de l’article 1466 B du CGI et de TFPB en application du II de l’article 1383 F du même code.

L’exonération totale, pour sa part obligatoire comme sa part facultative, s’applique pendant les sept exercices après l’année de création de l’établissement. Au-delà, une imposition progressive est mise en place, selon la chronique suivante : exonération à hauteur de 75 % la première année suivant cette période ; à hauteur de 50 % la deuxième année ; et à hauteur de 25 % la troisième année.

L’exonération de CFE emporte également, dans les mêmes conditions, exonération de CVAE en application de l’article 1586 nonies du CGI.

Pour 2019 et 2020, le coût de ces exonérations n’est pas chiffré ou est inférieur à 500 000 euros.


bassins urbains à dynamiser

Source : Géoportail ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Les dispositifs fiscaux d’exonérations
zonées

 

Dispositif

Base légale (CGI)

Zone et activités ciblées

Exonérations dIR ou dIS au titre des bénéfices

Exonérations de fiscalité locale

Zones d’aide à finalité régionale (ZAFR)

44 sexies

1383 A

1464 B

1464 C

1465

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’entreprises exerçant une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale.

 

Zones défavorisées par rapport à la moyenne nationale.

Exonération de 2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération totale, sur délibération, de TFPB et de CET de 2 ans à 5 ans.

 

Exonération totale ou partielle, sur délibération, de CET pour certaines activités industrielles ou de recherche de 5 ans au maximum.

Zones d’aide à l’investissement des PME (ZAI-PME)

1465

1465 B

Création jusqu’au 31 décembre 2020 par une PME d’une activité industrielle ou de recherche scientifique et technique.

 

Zones France entière sauf ZAFR et région Île-de-France (sauf ZRR et ZUS).

Exonération totale ou partielle, sur délibération, de CET pour certaines activités industrielles ou de recherche de 5 ans au maximum.

Zones franches urbaines territoires entrepreneurs

(ZFU-TE)

44 octies A

Création jusqu’au 31 décembre 2020 par une entreprise de moins de 50 salariés et 10 millions d’euros de chiffre d’affaires d’une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale.

 

Quartiers particulièrement défavorisés de plus de 8 500 habitants.

Exonération de 5 ans puis dégressivité sur 3 ans (60 %, 40 % et 20 %), dans la limite de 50 000 euros par période de douze mois.

Quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)

1383 C ter

1466 A

Création jusqu’au 31 décembre 2022 par une entreprise de moins de 50 salariés et 10 millions d’euros de chiffre d’affaires d’une activité commerciale ou entreprises similaires existantes.

 

Quartiers d’au moins 1 000 habitants, caractérisés par un écart de développement économique et social et situés dans un territoire urbain d’au moins 10 000 habitants.

Exonération totale, sauf délibération contraire, de TFPB de 5 ans.

 

Exonération totale, sauf délibération contraire, de CET dans la limite de 78 561 euros de base nette imposable pendant 5 ans puis dégressivité sur 3 ans (60 %, 40 % et 20 %) pour les entreprises de moins de 50 salariés.

 

Exonération totale ou partielle, sur délibération, de CET dans la limite de 29 124 euros de base nette imposable pour 5 ans au maximum pour les entreprises de moins de 150 salariés.

Zones de restructuration de la défense (ZRD)

44 terdecies

1383 I

1466 A

Création d’une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale pendant une période de six ans à la suite de la création de la ZRD.

 

Communes caractérisées par une perte d’au moins 50 emplois directs du fait de la réorganisation des unités militaires et dont le territoire est couvert par un CRSD.

Exonération de 5 ans puis dégressivité sur 2 ans (66 % et 33 %).

Exonération totale, sur délibération, de TFPB et de CET de 5 ans.

Zones de revitalisation rurale (ZRR)

44 quindecies

1407

1383 A

1464 B

1464 C

1465 A

1383 E

1383 E bis

Création ou reprise jusqu’au 31 décembre 2020 d’une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale par une entreprise de moins de 11 salariés.

 

Commune membre d’un EPCI répondant à des critères démographiques et de revenu fiscal.

Exonération de 5 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération totale, sur délibération, de TFPB et de CET de 2 ans à 5 ans.

 

Exonération totale, sauf délibération contraire, de CET pour certaines activités artisanales de 5 ans au maximum.

 

Diverses exonérations sectorielles pour les entreprises artisanales, les meublés de tourismes, les chambres d’hôtes ainsi que certains logements rénovés par l’ANAH.

Zones de développement prioritaire (ZDP)

44 septdecies

1383 J

1463 B

1466 B bis

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’une PME qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale.

 

Collectivité de Corse.

Exonération de 2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération obligatoire de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %) pour 50 % de la base nette imposable.

 

Exonération, sur délibération, de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans pour les 50 % restant.

Zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG)

44 quaterdecies

1388 quinquies

1466 F

Activités nouvelles ou existantes d’une entreprise de moins de 250 salariés et 50 millions d’euros de chiffre d’affaires dans un secteur éligible.

 

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion.

Abattement de 50 % sur le bénéfice imposé à l’IR ou l’IS au titre de chaque exercice ouvert et dans la limite de 150 000 euros (majoration possible à 80 % dans la limite de 300 000 euros).

Abattement de base imposable de CET de 80 % dans la limite de 150 000 euros (majoration possible à 100 %).

 

Abattement sur la base imposable de TFPB de 50 % (majoration possible à 80 %).

Bassins d’emploi à redynamiser (BER)

44 duodecies

1586 nonies

1466 A

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’entreprises exerçant une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale.

 

Bassin caractérisé par un taux de chômage élevé et une population en diminution.

Exonération de 5 ans.

Exonération totale, sauf délibération contraire, de TFPB et de CET de 5 ans.

Bassins urbains à dynamiser (BUD)

44 sexdecies

1383 F

1463 A

1466 B

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’une PME exerçant une activité industrielle, commerciale ou artisanale.

 

Bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais.

Exonération de 2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération obligatoire de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %) pour 50 % de la base nette imposable.

 

Exonération, sur délibération, de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans pour les 50 % restant.

CET : contribution économique territoriale, c’est-à-dire cotisation foncière des entreprises (CFE) et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Source : commission des finances

 


—  1  —

B.   L’absence de dispositif ciblÉ de lutte contre les fermetures de commerce de proximité en milieu rural

Actuellement, le seul zonage d’intervention économique qui vise spécifiquement les territoires ruraux est celui des ZRR. Pour rappel, ces dernières couvrent 17 976 communes, soit près de 50 % des communes et 15 % de la population. De plus, les exonérations fiscales ne concernent que la création ou la reprise jusqu’au 31 décembre 2020 d’une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale par une entreprise de moins de 11 salariés, et non les entreprises déjà installées dans ces zones et faisant face à des difficultés économiques liées à une désertification commerciale croissante. Ce ciblage très large (une commune sur deux) et limité au flux (entreprises nouvelles) ne permet pas d’inverser, dans les espaces ruraux les plus en difficulté, les fermetures de commerces de proximité.

L’évaluation préalable du présent article précise qu’aujourd’hui « plus de 25 % des habitants en milieu rural vivent dans une commune dépourvue de tout commerce et sont obligés de parcourir plusieurs kilomètres pour trouver un magasin alimentaire ou une pharmacie ». Le temps moyen nécessaire pour accéder à un panier de 29 commerces et services de la gamme intermédiaire est ainsi en France de 11 minutes (données 2012 produites par l’INSEE). Ce temps moyen double et passe à 22 minutes en moyenne pour les communes de moins de 3 500 habitants. De même, mais dans une proportion moins significative que le critère de population, le temps moyen d’accès à ces commerces s’élève pour les communes appartenant à une ZRR à 17 minutes en moyenne.

Ainsi, la désertification commerciale semble toucher plus fortement les communes comportant moins de 3 500 habitants et, dans une moindre mesure, les communes appartenant à une ZRR.

Temps moyen d’accès aux services d’usage courant
au plus prÈs du domicile

(en minutes)

Source : données INSEE 2012 ; Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Ce constat est confirmé par une analyse du temps d’accès aux services en fonction de la densité de population des communes. Dans les communes denses ou à densité intermédiaire, un habitant sur deux accède aux principaux services de la vie courante en moins de 3,5 minutes. En revanche, le temps d’accès médian double dans les territoires peu denses (6 minutes) et triple dans les communes très peu denses (10 minutes).

Temps mÉdian d’accÈs aux principaux services
de la vie courante par type de territoire

(en minutes)

Densité de la commune

Temps médian

Dense

3,2

Densité intermédiaire

3,1

Peu dense

5,5

Très peu dense

9,6

Source : INSEE, 2012.

De même, l’accès aux services de la vie courante est plus rapide dans les pôles urbains que dans les territoires isolés peu denses. Dans les pôles urbains, les temps de trajet médians aux services de la vie courante avoisinent en moyenne 4 minutes et ce, quel que soit le degré de densité de la commune. Dans les zones périurbaines, il en est de même pour les communes les plus denses. C’est dans les territoires les moins denses que les temps d’accès sont les plus longs : ils dépassent 10 minutes et ce, quel que soit l’éloignement au pôle urbain. Ainsi, dans les communes très peu denses des couronnes périurbaines ou isolées, le temps moyen d’accès est comparable.

Temps mÉdian d’accÈs aux principaux services
de la vie courante par type de territoire

(en minutes)

Type de territoire

Densité du territoire

Temps médian

Urbain

Dense

3,0

Densité intermédiaire

3,2

Peu dense

4,2

Périurbain

Dense

3,1

Densité intermédiaire

3,3

Peu dense

5,9

Très peu dense

9,3

Isolé

Peu dense

6,0

Très peu dense

10,5

Source : INSEE, 2012.

Dans ce contexte, il convient de rappeler que le commerce joue un rôle fondamental dans l’aménagement, le développement et l’attractivité des territoires ruraux par l’animation qu’il suscite et par les services qu’il rend à la population. La fonction conviviale du commerce est irremplaçable, par l’animation et l’attractivité qu’il exerce au travers de la satisfaction des besoins des consommateurs. À l’inverse, l’absence ou la disparition de ce type de commerce, se traduisant par une vacance commerciale forte et des villages dévitalisés, pénalise les personnes à faible mobilité et décourage l’installation d’habitants et d’entreprises, tout en privant ces territoires de lieux de sociabilité.

C’est à ce titre que le législateur est invité à renforcer certains dispositifs fiscaux afin de contribuer au maintien ou de créer une desserte commerciale de base pour l’ensemble de la population, notamment dans les zones touchées par un déclin démographique et économique en milieu rural.

II.   Le dispositif proposÉ

Pour dynamiser l’activité commerciale et lutter efficacement contre les fermetures des commerces de proximité en milieu rural, le présent article propose de créer un nouveau dispositif d’exonération d’impôts locaux dans les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZORCOMIR) – ciblé uniquement sur les petites activités commerciales (entreprises de moins de onze salariés et de moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires) dans les territoires ruraux les plus fragiles (petites communes n’appartenant pas à une aire urbaine de plus de 10 000 emplois et comptant moins de dix commerces).

Au total, le dispositif envisagé par le présent article devrait, selon l’évaluation préalable, s’appliquer à 21 512 communes.

A.   La crÉation des zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZORCOMIR)

Le présent article a pour objet la création d’un nouveau dispositif de soutien en matière fiscale : les ZORCOMIR. Les collectivités territoriales concernées pourront ainsi instituer, sur délibération, des exonérations pérennes, partielles ou totales, de CFE, de TFPB et de CVAE en faveur des entreprises existantes sur leur territoire au 1er janvier 2020 ou en faveur des entreprises créées à partir de cette date.

1.   La création des zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZORCOMIR)

Le B du I du présent article insère dans le CGI un nouvel article 1464 G dont les II et III définissent les conditions pour bénéficier de l’exonération ainsi que celles pour qu’une commune soit classée en ZORCOMIR.

Ainsi, le III du nouvel article 1464 G dispose que les communes doivent satisfaire aux conditions suivantes pour être classées au 1er janvier 2020 au sein d’une ZORCOMIR :

– disposer d’une population inférieure à 3 500 habitants ;

– ne pas appartenir à une aire urbaine de plus de 10 000 emplois ;

– comprendre un nombre d’établissements exerçant une activité commerciale inférieur ou égal à 10.

Il est précisé que les données utilisées pour le classement des communes en ZORCOMIR sont celles disponibles au 1er janvier de l’année de classement et établies par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Ce classement sera établi au 1er janvier 2020 par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de l’aménagement du territoire.

De plus, le II du nouvel article 1464 G dispose que pour bénéficier des exonérations fiscales applicables au sein des ZORCOMIR, un établissement devra relever d’une entreprise qui, d’une part, emploie moins de 11 salariés et, d’autre part, réalise un chiffre d’affaires annuel inférieur à 2 millions d’euros ou possède un total de bilan inférieur à 2 millions d’euros.

Ces établissements doivent également exercer une activité commerciale. Un arrêt du Conseil d’État du 29 avril 2002 précise que l’exercice à titre professionnel d’opérations ayant le caractère d’actes de commerce, au sens de l’article L. 110-1 du code de commerce, est une activité commerciale ([46]). Ainsi, outre les commerces proprement dits, sont également considérés comme commerciaux les établissements cinématographiques ou de divertissement, les entreprises de transport, de manutention, de bâtiment, de travaux publics, de spectacles vivants, de ventes de services lorsqu’il s’agit d’établissements destinés à fournir le logement et la nourriture (hôtels, pensions de famille, restaurants, cafés), ainsi que les activités immobilières commerciales, bancaires, financières et d’assurances.

Enfin, la règle concernant le seuil d’effectif doit prendre en compte les modifications issues de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (dite loi « PACTE ») qui doivent entrer en vigueur à compter du 1er janvier 2020 ([47]). Ces dispositions, codifiées à l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale (dans sa version à venir au 1er janvier 2020), disposent que « le franchissement à la hausse dun seuil deffectif salarié est pris en compte lorsque ce seuil a été atteint ou dépassé pendant cinq années civiles consécutives ».

2.   Les exonérations de fiscalité locale applicables dans les ZORCOMIR

Pour les établissements commerciaux éligibles situés dans une ZORCOMIR, les communes et leurs EPCI à fiscalité propre peuvent, par une délibération prise dans les conditions de droit commun (avant le 1er octobre pour être applicables l’année suivante – sauf en 2020, cf. infra), instituer :

– une exonération partielle ou totale de CFE des établissements éligibles (I du nouvel article 1464 G créé par le B du I du présent article) ;

– une exonération partielle ou totale de TFPB des immeubles rattachés au 1er janvier de l’année d’imposition à un établissement éligible (I du nouvel article 1382 I créé par le A du I du présent article).

Le VI du nouvel article 1382 I dispose que dans le cas où l’exonération s’applique à un immeuble loué, le bailleur doit déduire le montant de l’avantage fiscal issu de l’exonération de TFPB du montant des loyers.

En application de l’article 1586 nonies du CGI, l’exonération de CFE emporte également une exonération de CVAE. En effet, cet article dispose que « la valeur ajoutée des établissements exonérés de CFE en application de la délibération dune commune ou dun EPCI est, à la demande de lentreprise, exonérée de CVAE pour sa fraction taxée au profit de la commune ou de lEPCI ». De plus, « lorsque des établissements peuvent être exonérés de CFE par délibération dune commune ou dun EPCI, les départements et les régions peuvent, par une délibération […], exonérer leur valeur ajoutée de CVAE pour sa fraction taxée à leur profit ». Dans ce cas, « la délibération détermine la proportion exonérée de la valeur ajoutée taxée au profit de la collectivité délibérante ». Le D du I du présent article prévoit l’application de cette règle pour l’exonération prévue au nouvel article 1464 G.

Il s’agira donc d’exonérations permanentes qui permettront non seulement d’aider les commerçants qui voudraient lancer ou reprendre une activité dans une commune rurale, mais aussi de préserver les commerces existants, qui souffrent de vulnérabilité économique. La possibilité offerte aux collectivités territoriales d’exonérer totalement ou partiellement permettra d’adapter les ZORCOMIR aux caractéristiques de leur territoire, tout en permettant aux collectivités territoriales de maîtriser leurs contraintes budgétaires.

Pour bénéficier de ces exonérations, le III du nouvel article 1382 I et le IV du nouvel article 1464 G disposent que le redevable doit effectuer une déclaration au service des impôts avant le 1er janvier de l’année au titre de laquelle l’exonération est applicable. À défaut du dépôt de cette demande, l’exonération n’est pas accordée au titre de l’année concernée. Par dérogation, pour bénéficier des exonérations en 2020, le IV du présent article précise que les déclarations pourront être adressées au service des impôts au plus tard le 29 février 2020.

Le II du présent article précise que le nouveau régime des ZORCOMIR s’applique uniquement aux impositions établies au titre des années 2020 à 2023. L’évaluation préalable du présent article indique en effet que la Commission européenne « a annoncé vouloir prolonger de deux ans sept régimes daides dÉtat prévus antérieurement pour sappliquer jusquau 31 décembre 2020 », en particulier « le règlement de minimis ».

Enfin, le III du présent article dispose que, par dérogation et pour 2020, les collectivités territoriales et les EPCI peuvent délibérer jusqu’au 21 janvier 2020 afin d’instituer les exonérations, au lieu du 1er octobre 2019 si les règles de droit commun devaient s’appliquer.

3.   Le droit d’option et l’exclusion des autres régimes d’exonérations zonées

De manière habituelle concernant les exonérations zonées, le IV du nouvel article 1382 I et le V du nouvel article 1464 G disposent que les exonérations applicables dans les ZORCOMIR sont exclusives de celles prévues dans les autres dispositifs zonés (ZAFR, QPV, ZRD, ZRR, ZDP, ZFANG, BER, BUD, ZFU-TE), mais aussi de celles applicables à certaines entreprises (sociétés coopératives agricoles, activité de vente de livres neufs, etc.), et de celles applicables aux jeunes entreprises innovantes (JEI).

Si l’établissement ou l’immeuble est éligible à l’un de ces régimes, et à celui des ZORCOMIR, et qu’il souhaite bénéficier de ce dernier, l’entreprise doit exercer un droit d’option en ce sens. Ce dernier est irrévocable et emporte renonciation définitive aux autres régimes. À défaut d’option, le redevable continue de bénéficier de l’application du régime dont il bénéficiait avant l’institution de l’exonération propre aux ZORCOMIR.

Ce droit d’option n’est pas dédié aux ZORCOMIR et s’applique symétriquement aux autres dispositifs d’exonérations zonées. Aussi, le C du I du présent article effectue les coordinations nécessaires avec les droits d’option des autres dispositifs d’exonérations zonées.

4.   Le respect des contraintes européennes en matière de minimis

Le V du nouvel article 1382 I du CGI ainsi que le VI du nouvel article 1464 G du même code disposent que le bénéfice de ces exonérations est subordonné au respect du règlement européen relatif aux aides de minimis ([48]). Ce dernier dispose que « le montant total des aides de minimis octroyées par État membre à une entreprise unique ne peut excéder 200 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux ».

B.   L’impact BudgÉtaire et Économique

Le présent article retient, pour la définition des ZORCOMIR, un critère de population de 3 500 habitants ainsi que la présence de 10 commerces par commune. L’évaluation préalable justifie ce choix par le fait que « au-delà de ce double seuil, une présence commerciale plus forte, par effets dagglomération et de réseau, est constatée ». Avec de tels seuils, elle précise que 21 762 communes seraient potentiellement concernées par le dispositif proposé, regroupant 6 774 334 habitants et 81 000 commerces.

Communes de moins de 3 500 habitants
et de moins de 10 commerces

(nombre de communes)

Strates de communes

Nombre de communes de moins de 3 500 habitants

Nombre de communes de moins de 3 500 habitants et de moins de 10 commerces

De 0 à 500

18 778

17 754

De 501 à 1 000

6 776

3 671

De 1 001 à 2 000

4 529

334

De 2 001 à 3 000

1 682

3

De 3 001 à 3 500

524

0

Total

32 289

21 762

Source : évaluation préalable du présent article.

L’utilisation du critère de 10 commerces permet de cibler davantage le dispositif des ZORCOMIR en faveur des communes de plus petites tailles (aucune commune de plus de 3 000 habitants n’est concernée), donc celles davantage concernées par une vacance commerciale élevée.

Toutefois, parmi les communes ayant moins de 10 commerces et respectant le critère de population, 250 communes font partie d’une aire urbaine de plus de 10 000 emplois, et sont donc à ce titre exclues du zonage. Aussi le dispositif ne concerne que 21 512 communes. Les communes exclues du dispositif à ce titre sont situées à proximité des grandes villes (Paris, Bordeaux, Lyon, Marseille, Toulouse, etc.).

Grandes Aires urbaines de plus de
10 000 emplois en 2010

Source : Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), 2019.

Enfin, le Rapporteur général souligne que le coût pour les collectivités territoriales du dispositif n’est pas chiffrable dès lors qu’il s’agit d’un dispositif facultatif applicable sur délibération des communes ou EPCI. Il est rappelé à ce titre que le dispositif proposé est sans incidence budgétaire pour l’État, dans la mesure où les exonérations de CET et de TFPB ne sont pas compensées.

*

*     *

La commission est saisie de lamendement II-CF1252 de M. Philippe Chassaing.

M. Philippe Chassaing. Cet amendement propose de pérenniser au-delà d’une première année le dispositif d’exonération établi par le présent article, pour les communes qui ont été une première fois éligibles à ce dispositif d’exonération. L’objectif est de limiter ainsi les effets de seuil, qui pourraient obliger certaines communes à sortir du dispositif dès la première année, parce qu’elles ne rempliraient plus les conditions requises.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable. Cet amendement n’est pas nécessaire, puisque le classement des zones de revitalisation des commerces en milieu rural sera réalisé au 1er janvier 2020 sur la base des critères d’éligibilité à la date du 1er janvier 2020. Or le dispositif proposé s’applique aux impositions établies pour les années 2020 à 2023. Ajouter ainsi un mécanisme de sortie en sifflet ne me semble pas particulièrement utile.

La commission rejette lamendement II-CF1252.

Puis elle examine lamendement II-CF1405 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Nous attendons toujours les rapports qui nous ont été promis par le Gouvernement il y a trois semaines, notamment le rapport annuel sur le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et le rapport annuel sur les compensations d’exonérations pour les collectivités.

Le présent amendement vise à demander un rapport d’évaluation de ce nouveau dispositif, qui peut être effectivement très intéressant. Il est borné dans le temps, puisqu’il s’arrête en 2023. Mais on pourrait peut-être mener une évaluation des critères qui figurent dans l’article, pour voir quelles collectivités y recourront.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je partage votre remarque liminaire quant à la transmission des rapports. Mais, pour cette même raison, mieux vaut peut-être ne pas en demander un nouveau en l’espèce.

Les éléments que vous mentionnez doivent plutôt, à mon sens, être examinés dans le cadre du printemps de l’évaluation, mais également dans le rapport d’application des mesures fiscales (RALF). Le coût pour les collectivités territoriales va dépendre du nombre de collectivités adhérant au système. Non moins de 21 512 communes sont concernées ; en plaçant la barre plus haut, ce serait l’intégralité de la France… Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Lamendement II-CF1405 est retiré.

La commission adopte larticle 47 sans modification.

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Article 48
Exonération de contribution économique territoriale et de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des entreprises commerciales ou artisanales situées dans des communes ayant conclu une convention dopération de revitalisation de territoire

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à compléter le dispositif des opérations de revitalisation de territoire (ORT) en dotant certaines des collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernées d’un outil de soutien fiscal aux petites et moyennes entreprises (PME) exerçant une activité commerciale ou artisanale, en vue de renforcer l’attractivité des centres de villes moyennes.

Les zones de revitalisation des centres-villes (ZRCV) seront mises en place dans les secteurs d’intervention identifiés dans les conventions ORT et dont le revenu médian par unité de consommation est inférieur à la médiane nationale. Le classement sera établi au 1er janvier de chaque année par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de l’aménagement du territoire.

Pour les établissements exerçant une activité commerciale ou artisanale éligible situés dans une ZRCV, les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre pourront, par une délibération prise dans les conditions de droit commun, instituer :

– une exonération partielle ou totale de cotisation foncière des entreprises (CFE) des établissements éligibles ;

– une exonération partielle ou totale de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) des immeubles rattachés au 1er janvier de l’année d’imposition à un établissement éligible.

Pour rappel, l’exonération de CFE emporte également une exonération de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Le dispositif proposé est sans incidence budgétaire pour l’État, dans la mesure où l’exonération de contribution économique territoriale (CET), c’est-à-dire la CFE et la CVAE, ainsi que l’exonération de TFPB ne sont pas compensées.

Ce nouveau régime des ZRCV s’appliquera aux impositions établies au titre des années 2020 à 2023.

Dernières modifications législatives intervenues

La loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN) a mis en place les opérations de revitalisation de territoire (ORT).

La loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a mis en place le dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif privé en faveur de la rénovation des logements anciens, dit « Denormandie ancien ».

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   Dix dispositifs d’exonÉrations zonÉes en faveur des territoires ruraux et urbains

Afin de soutenir l’activité et l’emploi sur des territoires spécifiques, dix dispositifs d’exonérations zonées ont été mis en place par le législateur. Ces dispositifs consistent en des incitations fiscales temporaires en faveur des entreprises faisant le choix de s’installer et de se développer dans les territoires faisant face à des difficultés économiques et sociales.

Il existe actuellement dix dispositifs fiscaux d’exonérations zonées.

Les exonérations portent essentiellement sur la fiscalité applicable aux entreprises, à savoir l’impôt sur le revenu (IR) et l’impôt sur les sociétés (IS) au titre des bénéfices, la cotisation foncière sur les entreprises (CFE), la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ainsi que la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB).

Chacun de ces régimes est exclusif l’un de l’autre (le choix pour un établissement de recourir à l’un de ces régimes étant considéré comme un droit d’option irrévocable). Ils sont également soumis au respect des règles européennes en matière d’aides d’État, en particulier au respect du règlement européen d’exemption générale par catégorie (RGEC) du 17 juin 2014 ([49]) et du règlement européen des aides de minimis du 18 décembre 2013 ([50]).

Chacun de ces régimes fait l’objet d’une présentation détaillée dans le commentaire de l’article 47 du présent rapport ([51]).

 

 


Les dispositifs fiscaux d’exonérations
zonées

 

Dispositif

Base légale (CGI)

Zone et activités ciblées

Exonérations dIR ou dIS au titre des bénéfices

Exonérations de fiscalité locale

Zones d’aide à finalité régionale (ZAFR)

44 sexies

1383 A

1464 B

1464 C

1465

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’entreprises exerçant une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale.

 

Zones défavorisées par rapport à la moyenne nationale.

Exonération de 2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération totale, sur délibération, de TFPB et de CET de 2 ans à 5 ans.

 

Exonération totale ou partielle, sur délibération, de CET pour certaines activités industrielles ou de recherche de 5 ans au maximum.

Zones d’aide à l’investissement des PME (ZAI-PME)

1465

1465 B

Création jusqu’au 31 décembre 2020 par une PME d’une activité industrielle ou de recherche scientifique et technique.

 

Zones France entière sauf ZAFR et région Île-de-France (sauf ZRR et ZUS).

Exonération totale ou partielle, sur délibération, de CET pour certaines activités industrielles ou de recherche de 5 ans au maximum.

Zones franches urbaines territoires entrepreneurs

(ZFU-TE)

44 octies A

Création jusqu’au 31 décembre 2020 par une entreprise de moins de 50 salariés et 10 millions d’euros de chiffre d’affaires d’une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale.

 

Quartiers particulièrement défavorisés de plus de 8 500 habitants.

Exonération de 5 ans puis dégressivité sur 3 ans (60 %, 40 % et 20 %), dans la limite de 50 000 euros par période de douze mois.

Quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)

1383 C ter

1466 A

Création jusqu’au 31 décembre 2022 par une entreprise de moins de 50 salariés et 10 millions d’euros de chiffre d’affaires d’une activité commerciale ou entreprises similaires existantes.

 

Quartiers d’au moins 1 000 habitants, caractérisés par un écart de développement économique et social et situés dans un territoire urbain d’au moins 10 000 habitants.

Exonération totale, sauf délibération contraire, de TFPB de 5 ans.

 

Exonération totale, sauf délibération contraire, de CET dans la limite de 78 561 euros de base nette imposable pendant 5 ans puis dégressivité sur 3 ans (60 %, 40 % et 20 %) pour les entreprises de moins de 50 salariés.

 

Exonération totale ou partielle, sur délibération, de CET dans la limite de 29 124 euros de base nette imposable pour 5 ans au maximum pour les entreprises de moins de 150 salariés.

Zones de restructuration de la défense (ZRD)

44 terdecies

1383 I

1466 A

Création d’une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale pendant une période de six ans à la suite de la création de la ZRD.

 

Communes caractérisées par une perte d’au moins 50 emplois directs du fait de la réorganisation des unités militaires et dont le territoire est couvert par un CRSD.

Exonération de 5 ans puis dégressivité sur 2 ans (66 % et 33 %).

Exonération totale, sur délibération, de TFPB et de CET de 5 ans.

Zones de revitalisation rurale (ZRR)

44 quindecies

1407

1383 A

1464 B

1464 C

1465 A

1383 E

1383 E bis

Création ou reprise jusqu’au 31 décembre 2020 d’une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale par une entreprise de moins de 11 salariés.

 

Commune membre d’un EPCI répondant à des critères démographiques et de revenu fiscal.

Exonération de 5 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération totale, sur délibération, de TFPB et de CET de 2 ans à 5 ans.

 

Exonération totale, sauf délibération contraire, de CET pour certaines activités artisanales de 5 ans au maximum.

 

Diverses exonérations sectorielles pour les entreprises artisanales, les meublés de tourismes, les chambres d’hôtes ainsi que certains logements rénovés par l’ANAH.

Zones de développement prioritaire (ZDP)

44 septdecies

1383 J

1463 B

1466 B bis

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’une PME qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale.

 

Collectivité de Corse.

Exonération de 2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération obligatoire de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %) pour 50 % de la base nette imposable.

 

Exonération, sur délibération, de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans pour les 50 % restant.

Zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG)

44 quaterdecies

1388 quinquies

1466 F

Activités nouvelles ou existantes d’une entreprise de moins de 250 salariés et 50 millions d’euros de chiffre d’affaires dans un secteur éligible.

 

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion.

Abattement de 50 % sur le bénéfice imposé à l’IR ou l’IS au titre de chaque exercice ouvert et dans la limite de 150 000 euros (majoration possible à 80 % dans la limite de 300 000 euros).

Abattement de base imposable de CET de 80 % dans la limite de 150 000 euros (majoration possible à 100 %).

 

Abattement sur la base imposable de TFPB de 50 % (majoration possible à 80 %).

Bassins d’emploi à redynamiser (BER)

44 duodecies

1586 nonies

1466 A

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’entreprises exerçant une activité industrielle, artisanale, commerciale ou libérale.

 

Bassin caractérisé par un taux de chômage élevé et une population en diminution.

Exonération de 5 ans.

Exonération totale, sauf délibération contraire, de TFPB et de CET de 5 ans.

Bassins urbains à dynamiser (BUD)

44 sexdecies

1383 F

1463 A

1466 B

Création jusqu’au 31 décembre 2020 d’une PME exerçant une activité industrielle, commerciale ou artisanale.

 

Bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais.

Exonération de 2 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %).

Exonération obligatoire de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans (75 %, 50 % et 25 %) pour 50 % de la base nette imposable.

 

Exonération, sur délibération, de CET et de TFPB de 7 ans puis dégressivité sur 3 ans pour les 50 % restant.

CET : contribution économique territoriale, c’est-à-dire cotisation foncière des entreprises (CFE) et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ; EPCI : établissement public de coopération intercommunale.

Source : commission des finances.

 


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B.   Les opérations de revitalisation de territoire dans les villes moyennes

Partant du constat d’une perte de dynamisme et d’attractivité des villes moyennes, la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN) du 23 novembre 2018 a mis en place un nouvel outil destiné à revitaliser les centres-villes : les opérations de revitalisation de territoire (ORT) ([52]). Ces dernières visent à lutter contre la dévitalisation des centres-villes en s’appuyant sur deux principes :

– une approche intercommunale pour éviter des contradictions dans les stratégies urbaines qui peuvent conduire à développer en périphérie une offre commerciale concourant à dévitaliser le centre-ville ;

– un projet d’intervention urbain, économique et social de revitalisation, favorisant la mixité sociale, le développement durable, la valorisation du patrimoine et l’innovation.

Les ORT ont été codifiées à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation. Il s’agit d’une convention signée entre l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), la commune principale de l’EPCI, tout ou partie de ses autres communes membres volontaires, l’État et ses établissements publics (Caisse des dépôts et consignations – CDC, Agence nationale de l’habitat – ANAH, Agence nationale pour la rénovation urbaine – ANRU), ainsi qu’avec toute personne publique ou privée susceptible d’apporter son soutien ou de prendre part à des opérations prévues par la convention.

La convention doit avoir pour objet la mise en œuvre d’un « projet global de territoire destiné à adapter et moderniser le parc de logements et de locaux commerciaux et artisanaux ainsi que le tissu urbain de ce territoire pour améliorer son attractivité, lutter contre la vacance des logements et des locaux commerciaux et artisanaux ainsi que contre lhabitat indigne, réhabiliter limmobilier de loisir, valoriser le patrimoine bâti et réhabiliter les friches urbaines, dans une perspective de mixité sociale, dinnovation et de développement durable ».

La convention d’ORT peut prévoir tout ou partie des actions suivantes :

– des actions d’amélioration de l’habitat similaires à celles prévues dans le cadre des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH) prévues à l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation (versement d’aides pour l’amélioration de l’habitat, accompagnement et amélioration du cadre de vie, respect de la diversité de la population dans les quartiers, implantation de services ou d’équipements commerciaux ou artisanaux de proximité) ;

– des actions de revalorisation des îlots d’habitat vacant ou dégradé, de relogement et d’accompagnement social des occupants ;

– des actions coercitives de lutte contre l’habitat indigne ;

– des actions en faveur de la transition énergétique, notamment par une amélioration de la performance énergétique du parc immobilier et de la végétalisation urbaine ;

– des actions en faveur de la mixité sociale et d’adaptation de l’offre de logements, de services publics et de services de santé aux personnes en perte d’autonomie ;

– des actions d’aménagement des espaces et des équipements publics de proximité et prenant en compte les difficultés d’accessibilité et de desserte des commerces et des locaux artisanaux de centre-ville ;

– des actions d’intervention immobilière et foncière visant à la reconversion ou la réhabilitation des sites industriels et commerciaux vacants ainsi que des sites administratifs et militaires déclassés ;

– des actions destinées à moderniser ou créer des activités ou des animations économiques, commerciales, artisanales, touristiques ou culturelles, sous la responsabilité d’un opérateur ;

– enfin, des actions favorisant, dans les centres-villes, la création, l’extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales ou artisanales.

La convention doit délimiter le périmètre des secteurs d’intervention, parmi lesquels figure nécessairement le centre-ville de la ville principale du territoire de l’EPCI signataire. Ce périmètre peut également inclure un ou plusieurs centres-villes d’autres communes membres de cet établissement. Elle doit préciser sa durée (une période minimale de cinq ans étant recommandée), le contenu et le calendrier des actions prévues, le plan de financement de ces actions et leur répartition entre les différents secteurs d’intervention délimités. Elle doit enfin préciser les modalités de pilotage, de suivi, de coordination et d’évaluation des actions (création d’un comité local de l’ORT).

Le choix des secteurs d’intervention doit s’effectuer dans le cadre d’une stratégie territoriale basée sur un diagnostic partagé. Comme vu supra, l’un des secteurs d’intervention doit nécessairement concerner le centre-ville de la ville principale de l’EPCI signataire qui accueille obligatoirement une ou plusieurs actions retenues dans le plan d’action. Le périmètre du centre-ville est identifié à l’échelle locale en s’appuyant sur un « faisceau d’indices » : « lhistoire des lieux, ses fonctions symboliques et de représentation, la forme et lâge du bâti, la densité (de population, de construction, de commerce, de bâtiments administratifs), le patrimoine historique, architectural et artistique, les fonctions de centralité permettant son rayonnement au sein du bassin de vie (sièges des administrations et collectivités, services publics, sièges sociaux dentreprises, emplois, équipements, commerces et services, rue commerçante, halles/marchés), son attractivité, etc. » ([53]). Par ailleurs, des secteurs d’intervention peuvent concerner d’autres centres-villes au sein de l’ORT si ce choix est cohérent avec la stratégie d’ensemble de revitalisation de la centralité principale.

La définition des secteurs d’intervention est importante, car ils emportent les effets juridiques de l’ORT. Ces derniers visent notamment à :

– faciliter les procédures : droit de préemption urbain renforcé et droit de préemption sur les fonds et locaux artisanaux et commerciaux ; accélération de la procédure liée à l’abandon manifeste d’un bien ; dispositif expérimental du permis d’aménager sur plusieurs sites ;

– renforcer l’activité commerciale en centre-ville : exonération d’autorisation d’exploitation commerciale (AEC) pour les projets commerciaux qui s’implanteront dans un secteur d’intervention contenant un centre-ville identifié par la convention ORT, ainsi que pour les projets mixtes commerces‑logements de ces mêmes centres-villes ; faculté donnée aux préfets de suspendre l’examen des projets d’implantation commerciale en périphérie ;

– faciliter la réhabilitation de l’habitat : dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif privé en faveur de la rénovation des logements anciens, dit « Denormandie ancien » (article 199 novovicies du code général des impôts – CGI ([54])) ; financement par l’ANAH à destination d’acteurs institutionnels de travaux de rénovation dans le cadre de la vente d’immeuble à rénover (VIR) et du dispositif d’intervention immobilière et foncière (DIIF).

Toutefois, la définition d’un secteur d’intervention n’entraîne aucune exonération de fiscalité locale pour les établissements commerciaux installés dans ces territoires.

Au 28 juin 2019, seulement 19 communes ont signé une convention ORT. Toutefois, certaines collectivités territoriales sont déjà engagées dans une dynamique de projet qui concerne leur centre-ville. Ainsi, les 222 territoires du programme national Action Cœur de Ville pourront rapidement transformer leur convention existante en convention ORT, tout comme les communes lauréates de l’appel à manifestation d’intérêt centre-bourg, celles bénéficiant du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) et celles bénéficiant du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD).

Communes appartenant au programme
Action cœur de Ville en 2018

Source : commissariat général à l’égalité des territoires (CGET).

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article vise à compléter le dispositif des ORT en dotant les collectivités territoriales et les EPCI d’un outil de soutien fiscal aux petites et moyennes entreprises (PME) exerçant une activité commerciale ou artisanale en vue de renforcer l’attractivité des centres-villes des villes moyennes. En effet, actuellement, aucun dispositif d’exonération fiscale n’est spécifiquement applicable aux commerces dans les centres des villes moyennes.

Ce nouvel outil fiscal sera mis en place dans les secteurs d’intervention des communes ayant signé une convention ORT et dont le revenu médian par unité de consommation est inférieur à la médiane nationale.

A.   La crÉation des zones de revitalisation des centres-villes (ZRCV)

Le dispositif proposé par le présent article autorise les collectivités territoriales situées en ZRCV à délibérer afin d’instaurer, en faveur des PME commerciales ou artisanales situées dans un secteur d’intervention au 1er janvier 2020 ou créées à partir de cette date, des exonérations partielles ou totales de contribution économique territoriale (CET) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB).

1.   La création des zones de revitalisation des centres-villes (ZRCV)

Le B du I du présent article insère dans le CGI un nouvel article 1464 F dont les I et II définissent les conditions pour bénéficier de l’exonération ainsi que celles pour qu’un territoire soit classé en ZRCV.

Ainsi, le II du nouvel article 1464 F dispose que sont classés en ZRCV les secteurs d’intervention d’une ORT situés dans des communes qui satisfont aux conditions suivantes :

– avoir conclu avant le 1er octobre de l’année qui précède celle du classement une convention d’ORT qui prévoit notamment l’une des actions suivantes :

● des actions d’aménagement des espaces et des équipements publics de proximité et prenant en compte les difficultés d’accessibilité et de desserte des commerces et des locaux artisanaux de centre-ville ;

● des actions destinées à moderniser ou créer des activités ou des animations économiques, commerciales, artisanales, touristiques ou culturelles, sous la responsabilité d’un opérateur ;

● des actions favorisant dans les centres-villes la création, l’extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales ou artisanales ;

– avoir un revenu fiscal par unité de consommation médian inférieur à la médiane nationale. Cette condition n’est pas applicable aux départements d’outre-mer.

Il est précisé que les données utilisées pour le classement des communes en ZRCV sont celles disponibles au 1er janvier de l’année de classement et établies par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Ce classement sera établi au 1er janvier de chaque année par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de l’aménagement du territoire.

De plus, le I du nouvel article 1464 F dispose que pour bénéficier des exonérations fiscales applicables au sein des ZRCV, un établissement devra relever d’une petite ou moyenne entreprise (PME) au sens du droit de l’Union européenne, c’est-à-dire une entreprise qui occupe moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros ([55]).

Ces établissements doivent également exercer une activité commerciale ou artisanale. Pour rappel, un arrêt du Conseil d’État du 29 avril 2002 précise que l’exercice à titre professionnel d’opérations ayant le caractère d’actes de commerce, au sens de l’article L. 110-1 du code de commerce, est une activité commerciale ([56]). Ainsi, outre les commerces proprement dits, sont également considérés comme commerciaux les établissements cinématographiques ou de divertissement, les entreprises de transport, de manutention, de bâtiment, de travaux publics, de spectacles vivants, de ventes de services lorsqu’il s’agit d’établissements destinés à fournir le logement et la nourriture (hôtels, pensions de famille, restaurants, cafés), ainsi que les activités immobilières commerciales, bancaires, financières et d’assurances. L’activité artisanale est quant à elle exercée par un artisan, c’est-à-dire un travailleur indépendant qui exerce une activité manuelle exigeant une certaine qualification acquise notamment par l’apprentissage : boulangerie, pâtisserie, boucherie, coiffure, plomberie, menuiserie, serrurerie, etc.

2.   Les exonérations de fiscalité locale applicables dans les ZRCV

Pour les établissements exerçant une activité commerciale ou artisanale éligible situés dans une ZRCV, les communes et leurs EPCI à fiscalité propre peuvent, par une délibération prise dans les conditions de droit commun (avant le 1er octobre pour être applicables l’année suivante – sauf en 2020, cf. infra), instituer :

– une exonération partielle ou totale de CFE des établissements éligibles (I du nouvel article 1464 F créé par le B du I du présent article) ;

– une exonération partielle ou totale de TFPB des immeubles rattachés au 1er janvier de l’année d’imposition à un établissement éligible (I du nouvel article 1382 H créé par le A du I du présent article).

Le VI du nouvel article 1382 H dispose que dans le cas où l’exonération s’applique à un immeuble loué, le bailleur doit déduire le montant de l’avantage fiscal issu de l’exonération de TFPB du montant des loyers.

En application de l’article 1586 nonies du CGI, l’exonération de CFE emporte également exonération de CVAE. En effet, cet article dispose que « la valeur ajoutée des établissements exonérés de CFE en application de la délibération dune commune ou dun EPCI est, à la demande de lentreprise, exonérée de CVAE pour sa fraction taxée au profit de la commune ou de lEPCI ». De plus, « lorsque des établissements peuvent être exonérés de CFE par délibération dune commune ou dun EPCI, les départements et les régions peuvent, par une délibération […], exonérer leur valeur ajoutée de CVAE pour sa fraction taxée à leur profit ». Dans ce cas, « la délibération détermine la proportion exonérée de la valeur ajoutée taxée au profit de la collectivité délibérante ». Le D du I de l’article 47 du présent projet de loi de finances prévoit l’application de cette règle pour l’exonération prévue au nouvel article 1464 F.

Pour bénéficier de ces exonérations, les III des nouveaux articles 1382 H et 1464 F disposent que le redevable doit effectuer une déclaration au service des impôts avant le 1er janvier de l’année au titre de laquelle l’exonération est applicable. À défaut du dépôt de cette demande, l’exonération n’est pas accordée au titre de l’année concernée. Par dérogation, pour bénéficier des exonérations en 2020, le V du présent article précise que les déclarations pourront être adressées au service des impôts au plus tard le 29 février 2020.

Le II du présent article précise que le nouveau régime des ZRCV s’applique uniquement aux impositions établies au titre des années 2020 à 2023. L’évaluation préalable du présent article indique en effet que la Commission européenne « a annoncé vouloir prolonger de deux ans sept régimes daides dÉtat prévus antérieurement pour sappliquer jusquau 31 décembre 2020 », en particulier « le règlement de minimis ».

Enfin, le III du présent article dispose que, par dérogation et pour 2020, les collectivités territoriales et les EPCI peuvent délibérer jusqu’au 21 janvier 2020 afin d’instituer les exonérations, au lieu du 1er octobre 2019 si les règles de droit commun devaient s’appliquer.

3.   Le droit d’option et l’exclusion des autres régimes d’exonérations zonées

De manière habituelle concernant les exonérations zonées, les IV des nouveaux articles 1382 H et 1464 F disposent que les exonérations applicables dans les ZRCV sont exclusives de celles prévues dans les autres dispositifs zonés (ZAFR, QPV, ZRD, ZRR, ZDP, ZFANG, BER, BUD, ZFU-TE), mais aussi de celles applicables à certaines entreprises (sociétés coopératives agricoles, activité de vente de livres neufs, etc.), et de celles applicables aux jeunes entreprises innovantes (JEI).

Si l’établissement ou l’immeuble est éligible à l’un de ces régimes, et à celui des ZRCV, et qu’il souhaite bénéficier de ce dernier, l’entreprise doit exercer un droit d’option en ce sens. Ce dernier est irrévocable et emporte renonciation définitive aux autres régimes. À défaut d’option, le redevable continue de bénéficier de l’application du régime dont il bénéficiait avant l’institution de l’exonération.

4.   Le respect des contraintes européennes en matière de minimis

Les V des nouveaux articles 1382 H et 1464 F du CGI disposent que le bénéfice de ces exonérations est subordonné au respect du règlement européen relatif aux aides de minimis ([57]). Ce dernier dispose que « le montant total des aides de minimis octroyées par État membre à une entreprise unique ne peut excéder 200 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux ».

B.   L’impact BudgÉtaire et Économique

De nombreux centres de villes moyennes sont particulièrement touchés par une vacance commerciale qui s’aggrave. Le rapport conjoint du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et de l’Inspection générale des finances (IGF) de juillet 2016 sur la revitalisation commerciale des centres-villes relève qu’avec un taux moyen de vacance commerciale dans les centres des villes moyennes qui atteint 10,4 % en 2015, en augmentation sur les dix dernières années, la dévitalisation commerciale s’aggrave dans les centres des villes moyennes. Sur un panel portant sur près de 900 centres-villes, 55 % des villes moyennes ont un taux de vacance commerciale supérieur à 10 % contre seulement 27 % dans les grandes villes. Cette situation s’aggrave dans la mesure où 87 % des centres-villes des communes du panel ont vu leur taux de vacance commerciale augmenter entre 2001 et 2015 ([58]).

Il ressort de ce rapport que si les facteurs liés à la vacance commerciale sont d’ordre socio-économique (chômage, paupérisation, départ de la population en zone périurbaine, fermetures d’équipements et de services), ils sont également liés à un déséquilibre de l’offre commerciale entre le centre et la périphérie (concurrence des centres commerciaux), à la concurrence du commerce en ligne ainsi qu’à la pression des impôts directs locaux. À cet égard, ce rapport constate que :

– les villes moyennes sont particulièrement vulnérables en cas d’initiatives non coordonnées en matière d’urbanisme, notamment de développement de grandes surfaces commerciales dans la périphérie qui font concurrence aux commerces de centre-ville ;

– la fiscalité locale applicable aux commerces repose en partie sur une assiette foncière qui désavantage structurellement les magasins physiques par rapport aux entreprises de vente à distance en ligne.

Ce constat est partagé par la fédération du commerce spécialisé qui souligne que « le taux moyen de la vacance en centre-ville est passé de 7,2 % en 2012 à 9,5 % en 2015 et 11,9 % en 2018 ». La fédération précise que 70 % des « villes moyennes connaissent un taux de vacance inquiétant à plus de 10 % ». Ce taux dépasse même « 15 % pour 33 % de ces centres-villes, et 20 % pour 14 % des villes étudiées dans cette catégorie ». Ce constat résulte, d’une part, du transfert des activités en périphérie des centres-villes et, d’autre part, de la transformation des modes de consommation et de distribution ([59]).

Dans ce cadre, la possibilité donnée aux collectivités territoriales d’introduire des exonérations de fiscalité locale permettra de soutenir les artisans et les commerçants installés ou faisant le choix de s’installer dans ces centres de villes moyennes. Ces exonérations étant facultatives, elles ne sont toutefois pas compensées par l’État aux collectivités territoriales et sont sans conséquence pour le budget de l’État.

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Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1533 de M. Benoit Potterie.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF303 de M. Mohamed Laqhila.

M. Mohamed Laqhila. L’article 48 prévoit la création de nouvelles exonérations facultatives de cotisation économique territoriale et de taxe foncière sur les propriétés bâties, en faveur des activités artisanales et commerciales, dans les zones de revitalisation des centres-villes créées par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN). Ce dispositif va bien évidemment dans le bon sens, mais la confédération des petites et moyennes entreprises nous alerte sur sa trop faible efficacité, dans la mesure où ces exonérations ne sont que facultatives.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne suis pas favorable à ce que nous imposions aux collectivités territoriales de délibérer. Ce n’est d’ailleurs pas très cohérent avec le principe de leur libre administration. Demande de retrait.

M. Charles de Courson. Si on adoptait cet amendement, il faudrait prévoir une compensation. Or elle n’est pas prévue par l’amendement.

M. le président Éric Woerth. Monsieur Laqhila, vous pourrez peut-être prévoir une compensation pour la séance publique.

La commission rejette lamendement II-CF303.

Elle en vient à lamendement II-CF1406 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Jean-Louis Bricout. Il s’agit encore d’une demande de rapport. Il convient, en effet, d’évaluer le coût du dispositif d’exonération des impôts locaux prévu par l’article 48. Le rapport pourrait se pencher sur la définition des zones de revitalisation des centres-villes, ainsi que sur les critères retenus en matière d’éligibilité des entreprises ou sur l’étendue des exonérations, partielles ou totales, de cotisation foncière des entreprises (CFE), de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) des activités commerciales et artisanales.

Cette demande prend modèle sur la demande de rapport inscrite à l’article 17 de la loi du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour les mêmes raisons que celles que j’ai évoquées tout à l’heure à propos d’une demande comparable, je formule une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

Lamendement II-CF1406 est retiré.

La commission adopte larticle 48 sans modification.

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Après l’article 48

La commission est saisie de lamendement II-CF311 de M. Marc Le Fur.

Mme Marie-Christine Dalloz. Par cet amendement, notre collègue Marc Le Fur propose que les conseils régionaux puissent fixer le taux de la part régionale de la TICPE jusqu’au 31 décembre de l’année qui précède l’entrée en vigueur du tarif modifié. Aujourd’hui, ce taux est fixé avant le 30 novembre de la même année.

Or la vision de l’année suivante en termes de recettes et de dotations permettrait d’affiner les prévisions. Il s’agit simplement de repousser d’un mois le délai. Ce ne serait applicable qu’au 1er janvier 2021.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous protestions tout à l’heure sur le fait que nous aurions peu de temps pour déposer des amendements et les étudier avant le 12 novembre et l’examen en commission du PLFR 2019. De la même manière, je ne suis pas sûr qu’il soit utile de laisser la seule nuit de la Saint-Sylvestre, c’est-à-dire celle du 31 décembre, à la direction générale des finances publiques (DGFIP) et à tous les distributeurs de carburant, pour collecter les délibérations, vérifier leur légalité, former les éventuels recours, entrer les informations dans leurs systèmes d’information… Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je le maintiens. Considérant qu’une région adopte son budget souvent dans le courant du mois de décembre, cet amendement lui permettrait d’avoir une vision globale en termes de recettes et d’engagements. Cela ne veut pas dire que tout devra être fait le 31 décembre.

La commission rejette lamendement II-CF311.

Elle en vient à lamendement II-CF953 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Cet amendement vise à étendre l’application de la taxe d’embarquement aux passagers débarquant d’une ligne maritime ou aérienne régulière dans les régions de Guadeloupe et de La Réunion, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, et le département de Mayotte, sur le modèle de ce qui se fait en Corse. Il s’agit d’accorder à ces collectivités des moyens supplémentaires pour leur développement. Cela étant, je n’entends pas interférer sur les sujets intéressant des territoires qui ne sont pas de ma compétence directe. Je suis tout à fait disposé à passer la main à des collègues qui en sont issus.

M. le président Éric Woerth. Nous sommes compétents pour tous les territoires, monsieur Castellani : nous sommes députés de la nation.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis défavorable à l’élargissement de cette taxe au débarquement. L’augmentation d’impôt va frapper au premier chef les Ultramarins et leur famille, qui ne pourront y échapper en rentrant chez eux. Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. Michel Castellani. Je le retire, tout en rappelant à M. le rapporteur général que cette mesure existe en Corse – ce qui est parfois oublié.

Lamendement II-CF953 est retiré.

La commission examine lamendement II-CF995 de la commission des affaires économiques.

Mme Stéphanie Do, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement vise à permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements de souscrire à des titres participatifs émis par les offices publics de l’habitat. Cette disposition permettrait de soutenir les offices publics, qui disposeraient ainsi d’apports de quasi-fonds propres. Elle concrétiserait l’engagement pris par le ministre, à l’occasion du dernier congrès de l’Union sociale pour l’habitat, conformément au souhait des acteurs de diversifier leurs sources de financement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. À la différence de votre précédent amendement, qui aurait pu être adopté si vous l’aviez présenté, Madame Do, celui-ci m’incite à donner un avis défavorable, car il ouvrirait la boîte de Pandore. Il ne me paraît pas opportun de remettre en cause le principe général applicable aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale, à savoir l’obligation de dépôt des fonds auprès de l’État. Par contagion, nous risquerions d’ouvrir cette faculté à d’autres titres participatifs, ce qui ne me paraît pas utile et pourrait même se révéler risqué.

M. le président Éric Woerth. J’ai beaucoup hésité sur la recevabilité financière de cette disposition au regard de l’article 40 de la Constitution ; dans le doute, je l’ai déclarée recevable.

M. Charles de Courson. Actuellement, les collectivités territoriales peuvent émettre des obligations. Mon département l’a fait une fois, il y a très longtemps. Pourquoi, dès lors, exclure les titres participatifs ?

M. le président Éric Woerth. En l’occurrence, il s’agirait d’acheter des titres émis par un tiers, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

La commission rejette lamendement II-CF995.

Elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF1224 et II-CF1225 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. L’amendement II-CF1224 concerne la taxe locale sur la publicité extérieure, dont le produit est perçu au profit du bloc communal. Il vise à rendre la collecte de cette taxe obligatoire pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents, ce qui leur offrirait des recettes supplémentaires. Il faut insister sur le fait que la publicité, en particulier numérique, est aujourd’hui particulièrement agressive.

L’amendement II-CF1225 est un amendement de repli, qui a pour objet d’inciter les communes à relever leurs taux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis défavorable à ces amendements. Il me semble impossible de doubler le tarif maximal applicable aux dispositifs publicitaires dont l’affichage fait la promotion d’un produit ou d’une pratique néfaste pour la santé, l’environnement ou la biodiversité. Non seulement les contenus publicitaires varient au cours d’une année, mais il est très difficile de juger de ce qui est nocif ou de ce qui ne l’est pas. Dès lors, l’objectivité n’est pas garantie. Je vous demande de retirer ces amendements, qui me paraissent inapplicables ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme Sarah El Haïry. Je pensais à des produits, comme le tabac, que chacun s’accorde à juger particulièrement nocifs. Cela étant, je les retire pour les retravailler.

Les amendements II-CF1224 et II-CF1225 sont retirés.

La commission en vient à lamendement II-CF575 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet amendement vise à simplifier et à clarifier la législation, tant pour les entreprises que pour les collectivités territoriales. J’ai bien noté la volonté manifestée tout à l’heure par le rapporteur général de ne pas faire peser une charge de travail excessive sur la DGFIP en fin d’année. Je lui suggère de faire preuve de la même sollicitude envers les collectivités territoriales. Les entreprises qui exploitent des panneaux publicitaires extérieurs sont tenues de faire une déclaration annuelle, alors qu’elles concluent généralement un contrat décennal, cela oblige les mairies à procéder à des vérifications chaque année. Ne pourrait-on pas simplifier le dispositif en demandant aux entreprises de n’établir la déclaration qu’en cas de suppression ou de modification du dispositif publicitaire ? Cela éviterait aux services municipaux d’être surchargés à cette période de l’année.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Les exploitants de panneaux publicitaires ne sont pas, pour la majorité d’entre eux, des PME ; ce sont des groupes importants qui établissent automatiquement ces déclarations au cours de l’année fiscale et peuvent aisément les adresser à l’administration. Communiquer ces informations n’est pas un problème pour eux. Demande de retrait ou défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous me surprenez, monsieur le rapporteur général, vous qui prenez habituellement en considération les préoccupations de la ruralité. Les grandes sociétés que vous évoquez exercent essentiellement leur activité en ville. Dans nos petites communes rurales, les panneaux sont souvent exploités par une seule entreprise, et non par un groupe de communication.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai été maire d’une commune rurale, dans laquelle 80 % des panneaux publicitaires dépendaient d’une entreprise bien connue, et où un ou deux panneaux seulement présentaient les caractéristiques que vous décrivez. Dans un tel cas de figure, le recouvrement ne paraît pas trop ardu.

La commission rejette lamendement II-CF575.

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Article additionnel après l’article 48
Suppression de la taxe de séjour au forfait pour les logements sans classement ou en attente de classement

La commission discute de lamendement II-CF1342 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai déposé trois amendements concernant la taxe de séjour.

Le premier vise à instituer un tarif fixe pour la taxe de séjour frappant les auberges collectives, c’est-à-dire les hébergements proposant des chambres partagées, comme les auberges de jeunesse, les centres internationaux de séjour, les refuges et les hôtels. L’année dernière, nous avons été empêchés de délibérer sur ce sujet qui concerne les collectivités territoriales, car cette catégorie juridique n’existait pas, alors qu’il incombait à Atout France, conformément à sa mission, de la créer. Nous avons donc mené, avec Mme Bonnivard, ce travail, dont est issu l’amendement en question, qui tend à créer et à définir juridiquement cette catégorie d’hébergement touristique, et à lui appliquer, comme cela avait été demandé, un tarif fixe compris entre 0,20 et 0,80 euro, au lieu du tarif proportionnel.

Le deuxième amendement vise à instituer un versement par les plateformes de location en ligne, deux fois l’an, avant le 30 juin et avant le 31 décembre. La nouvelle règle s’appliquerait, par souci de simplicité, à l’ensemble des collectivités territoriales, et non sur délibération, comme le proposent d’autres amendements. Nous avons besoin d’un système peu ou prou unifié ; il est inutile d’ajouter de la complexité à la complexité.

Enfin, le troisième amendement – celui dont nous discutons spécifiquement présentement – a pour objet de supprimer la taxation au forfait des logements en attente de classement ou sans classement, qui est complètement inapplicable. Il convient de privilégier dans ce cas l’utilisation de la taxe de séjour au réel.

Ces amendements répondent en grande partie aux préoccupations soulevées par nombre d’entre vous, notamment Mme Lardet. Nous en avions également discuté avec le président de la commission.

M. le président Éric Woerth. Après l’examen du projet de loi de finances, il conviendra de voir si le groupe de travail qui avait examiné ces sujets méritera d’être prolongé.

Mme Émilie Bonnivard. Je vous remercie, Monsieur le président, Monsieur le rapporteur général, d’avoir corrigé une partie des difficultés posées par la réforme, notamment concernant les refuges de montagne et les auberges de jeunesse. Le tarif appliqué sera-t-il identique à celui des hébergements équivalant aux hôtels de tourisme une étoile ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Oui.

Mme Émilie Bonnivard. Le prélèvement de la taxe de séjour constitue une autre difficulté. Je suis d’accord avec vous quant à la nécessité d’unifier le système. Votre amendement devrait, me semble-t-il, régler les difficultés éprouvées par les stations de montagne du fait du versement de la taxe qui, effectué le 31 décembre, empêche de tenir compte de l’activité du même mois. Le décalage entre la perception de la taxe en décembre, notamment par les plateformes de location, et son reversement à la collectivité sera donc réduit grâce au versement du mois de juin.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Absolument. Je vous avoue que ça n’a pas soulevé l’enthousiasme – c’est un euphémisme – des plateformes concernées.

M. Charles de Courson. Cet amendement aboutira-t-il à la surtaxation ou à la sous-taxation des hébergements en instance de classement ou sans classement ? Par ailleurs, pour ceux qui attendent le classement, l’amendement ne prévoit pas de délai maximal. Dès lors, certains n’auraient-ils pas intérêt à rester indéfiniment dans l’attente, ce qui leur permettrait de payer un montant de taxation moindre que s’ils étaient classés ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il est très difficile d’anticiper les effets de la mesure, en raison des taux variables actuels, qui posent des problèmes à la profession et qui sont précisément la raison pour laquelle nous proposons, à sa demande, de revenir à des taux fixes. Les dispositions en vigueur posent des problèmes de perception pour les hébergements tels que les refuges ou les auberges de jeunesse. Je ne suis pas capable de dire, à l’instant t, si la mesure proposée sera à fonds équivalents pour les collectivités territoriales, compte tenu de l’hétérogénéité des taux actuels de taxation. En tout état de cause, le système ne pouvait pas perdurer pour ces catégories d’hébergement. La demande émane également d’un certain nombre de collectivités, qui souhaitaient une simplification. Certaines d’entre elles n’avaient pas délibéré sur les taux, car elles n’avaient pas compris le système. La situation était un peu complexe.

M. le président Éric Woerth. Les sommes en jeu restent assez faibles, compte tenu des prix pratiqués. Il est préférable, à mes yeux, de taxer au réel plutôt qu’au forfait.

La commission adopte lamendement II-CF1342 (amendement II-2514).

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Article additionnel après l’article 48
Modification de la taxe de séjour applicable aux auberges collectives

La commission examine, en discussion commune, lamendement IICF1131 de M. Vincent Rolland, les amendements identiques II-CF1336 du rapporteur général, II-CF313 de M. Xavier Roseren et II-CF332 de Mme Frédérique Lardet, les amendements II-CF59 de Mme Émilie Bonnivard et II-CF116 de M. Xavier Roseren, les amendements identiques IICF67 de Mme Annie Genevard et II-CF135 de Mme Jeanine Dubié, et les amendements IICF117 de M. Xavier Roseren, et II-CF1129 et II-CF1130 de M. Vincent Rolland.

M. Vincent Rolland. L’amendement II-CF1131 vise à appliquer aux gîtes d’étape et de séjour, aux refuges de montagne et aux hébergements collectifs à destination de la jeunesse ou à vocation sociale, le tarif de séjour applicable aux hôtels de tourisme une étoile. Cela paraît justifié, compte tenu des populations auxquelles ces hébergements s’adressent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai déjà présenté l’amendement II‑CF1336.

M. Xavier Roseren. Les amendements II-CF313, II-CF116 et II‑CF117 ont pour objet de corriger les effets de bord des dispositions que nous avions votées dans le cadre du PLFR 2017 en matière de taxe de séjour. Le dispositif en vigueur pénalise les refuges de montagne et les gîtes, qui acquittent parfois un montant de taxe équivalent à celui d’un hôtel quatre étoiles. Le tarif étant disproportionné et pouvant nuire à l’activité touristique, l’amendement II-CF116 propose notamment d’assimiler ces établissements à des hôtels une étoile pour la fixation du montant de la taxe de séjour. L’amendement II-CF313, quant à lui, vise à définir juridiquement l’« auberge collective ».

Mme Frédérique Lardet. Comme chaque année depuis 2017, je viens en commission des finances parler de la taxe de séjour proportionnelle frappant les hébergements non classés, qui a engendré une forte complexité, relevée par les collectivités territoriales, mais constitue aussi une injustice pour les hébergements collectifs. Je me félicite que le rapporteur général se soit saisi du sujet cette année, mon amendement II-CF332 se trouvant ainsi défendu.

Mme Émilie Bonnivard. En guise de défense de l’amendement II-CF59, je veux remercier à nouveau le rapporteur général du travail qu’il a effectué. La typologie des hébergements proposée est beaucoup plus juste et nettement plus conforme à la réalité du confort offert et à la clientèle concernée. On supprimera ainsi la disproportion résultant de l’application d’une taxation au pourcentage.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement II-CF67 émane de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM). Il a pour objet de faire varier le barème de la taxe de séjour en fonction du type d’hébergement. De fait, la taxe peut emporter des conséquences économiques lourdes, la plupart des villes qui l’ont instituée, dont Paris, ayant opté pour le taux maximum de 5 %. Les autres formes d’hébergement non classables s’adressent tout particulièrement à un public jeune et familial, au pouvoir d’achat limité.

M. Michel Castellani. La taxe de séjour s’appliquant à toutes les formes d’hébergement, l’amendement II-CF135 vise à distinguer la catégorie des hébergements non classés, en particulier ceux qui accueillent les jeunes, les personnes les moins fortunées.

M. Vincent Rolland. Les amendements II-CF1129 et II-CF1130 concernent principalement les gîtes de groupe ou d’étape, pour lesquels le niveau de taxe de séjour actuellement appliqué est tout à fait prohibitif pour les vacanciers. Ils ont pour objet de mettre fin à cette anomalie.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Tous les amendements, hormis le II-CF1131 de M. Rolland, sont satisfaits par mon amendement II-CF1336. J’observe qu’aucun de vos amendements ne définit la catégorie juridique de l’« auberge collective ». Je m’y suis donc employé, afin de stabiliser le droit applicable.

Monsieur Rolland, vous connaissez le marché aussi bien que moi : on ne peut pas dire qu’un chalet de montagne, un meublé de tourisme classé cinq étoiles, loué à un prix élevé – je n’en ai pas trouvé à moins de 2 500 euros la semaine en saison – équivaut à un hébergement dans un village de vacances, quand bien même celui-ci serait aussi classé cinq étoiles. On ne saurait appliquer une même taxe de séjour de 30 centimes par personne et par nuit à des villages de vacances familiaux et à des chalets de montagne qui se caractérisent parfois, dans certaines stations, par un très grand luxe. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Je suis plutôt favorable à l’amendement du rapporteur général, tout en m’interrogeant sur la définition qu’il donne de la nouvelle catégorie de l’« auberge collective ». Elle figurerait à l’article L. 312-1 du code du tourisme comme un « établissement commercial » poursuivant « une activité lucrative ou non » et qui « offre des lits à la journée dans des chambres partagées ». Que sont des « chambres partagées » ? Cela sous-entend qu’il existerait des auberges non collectives. Cela me paraît bien compliqué.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cette définition a été élaborée avec les secteurs concernés, mais aussi avec la direction générale des entreprises (DGE) qui aura à mettre en œuvre le dispositif. Ce travail en commun me semble la garantie d’une disposition stable juridiquement. Si une ambiguïté juridique apparaissait par la suite, nous pourrions procéder à une rectification dans le cadre du groupe de travail.

Successivement, la commission rejette lamendement II-CF1131, puis adopte les amendements identiques IICF1336, II-CF313 et II-CF332 (amendement II-2515).

En conséquence, les amendements II-CF59 et II-CF116, les amendements identiques II-CF67 et IICF135, ainsi que les amendements II-CF117, II-CF1129 et II-CF1130 tombent.

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Après l’article 48

La commission examine lamendement II-CF1098 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Il s’agit de rétablir l’exonération de taxe de séjour en faveur des salariés en déplacement professionnel. Cela concerne, par exemple, en zone de montagne, des ouvriers employés sur les chantiers de construction ou des personnes exerçant des activités saisonnières, ou, en Île-de-France, des salariés mobilisés pour effectuer les travaux du Grand Paris.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis défavorable à cet amendement, car il risque d’engendrer une perte de recettes considérable pour des territoires. La taxation est justifiée par le fait que ces personnes bénéficient, au même titre que les habitants, des équipements collectifs. Dans le cadre de mon activité salariée, j’ai longtemps effectué des déplacements professionnels sous un statut particulier qui me permettait de bénéficier d’une dérogation. Je ne l’utilisais pas, ayant des scrupules à ne pas payer mes 20 centimes après avoir profité pendant quinze jours de tous les services de la ville et de l’agglomération. Et puis, honnêtement, il arrive que vous choisissiez votre lieu de séjour en fonction des services mis à votre disposition, de l’agrément que vous en retirerez.

Lamendement II-CF1098 est retiré.

La commission en vient à lamendement II-CF1178 de Mme Frédérique Lardet.

Mme Frédérique Lardet. Cet amendement vise à ce que les plateformes perçoivent la taxe de séjour selon le barème en vigueur au moment de la réservation. Les plateformes de réservation en ligne collectent la taxe de séjour lors du règlement du séjour par le voyageur, qui s’effectue en ligne au moment de la réservation. Étant donné que les nouveaux barèmes de taxation entrent en vigueur le 1er janvier de chaque année, et que de nombreuses réservations sont effectuées bien en amont, il est essentiel que les assujettis règlent le montant de la taxe en fonction du barème dont ils ont connaissance au moment de la réservation.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je comprends votre préoccupation, mais cette mesure engendrerait des effets d’aubaine considérables. Certaines communes n’appliquent, par exemple, la taxe de séjour que périodiquement, en pratiquant des tarifs de très haute saison durant seulement quelques semaines. C’est le cas, notamment, des stations de montagne. Les personnes qui réservent en juin ne paieraient ainsi aucune taxe de séjour pour un séjour au ski en février. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Lamendement II-CF1178 est retiré.

La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques IICF51 de Mme Émilie Bonnivard, II-CF134 de Mme Jeanine Dubié et II-CF318 de Mme Marie-Noëlle Battistel, ainsi que lamendement II-CF901 de M. Xavier Roseren.

Mme Émilie Bonnivard. L’amendement II-CF51 est, me semble-t-il, satisfait par l’amendement II-CF1339 du rapporteur général. Son objet est de conférer plus de souplesse aux collectivités, qui pourraient décider d’un versement trimestriel ou semestriel de la taxe de séjour par les plateformes. Le rapporteur général a défini une voie semestrielle qui me paraît correcte. Je retire donc mon amendement.

M. Michel Castellani. L’amendement II-CF134 vise à obliger les plateformes d’intermédiation locative à verser, au plus tard le 31 décembre de l’année, la taxe de séjour collectée cette année-là. Il laisse également à la collectivité territoriale compétente la possibilité de décider, par délibération, d’un versement trimestriel ou semestriel.

M. Xavier Roseren. Pour les plateformes, la loi prévoit uniquement un versement au 31 décembre de chaque année, ce qui offre peu de visibilité aux collectivités territoriales. L’amendement II-CF1339 proposé par le rapporteur général règle le problème, en prévoyant un versement semestriel.

Les amendements II-CF51, II-CF134, II-CF318 et II-CF901 sont retirés.

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Article additionnel après l’article 48
Faculté dun versement semestriel de la taxe de séjour

La commission examine  lamendement II-CF1339 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement vise l’article idoine du code général des collectivités territoriales, ce qui explique qu’il n’était pas en discussion commune avec les précédents. Il vise à appliquer les mesures que vous appeliez tous de vos vœux.

La commission adopte lamendement II-CF1339 (amendement II-2516).

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Après l’article 48

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1306 de M. Thibault Bazin.

Elle discute des amendements II-CF1269 et II-CF1268 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. L’article L. 2334-34-1 du code général des collectivités territoriales détermine les sanctions applicables en cas de défaillance dans le recouvrement de la taxe de séjour par les professionnels. Les sanctions encourues nous paraissent assez faibles. Nous avons donc déposé plusieurs amendements pour y remédier. L’amendement II‑CF1269 vise à permettre aux EPCI de saisir le juge afin qu’il prononce des sanctions, au même titre que la commune. En effet, nombre d’EPCI et de communautés de communes disposent de compétences en la matière.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement II-CF1269 est satisfait par l’article L. 5211-21 du code général des collectivités territoriales. Pour ce qui est de l’amendement II-CF1268, la sanction qu’il prévoit me semble assez disproportionnée. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Xavier Roseren. Je retire l’amendement II-CF1269.

S’agissant de la sanction, à 12 500 euros au maximum dans le droit en vigueur, elle ne nous paraît pas dissuasive. Certaines plateformes continuent à ne pas déclarer ou à ne pas appliquer le bon tarif. Si l’on conserve le montant actuel, on n’arrivera pas à faire rentrer les plateformes dans le cadre légal et à assurer une perception correcte de la taxe de séjour.

Lamendement II-CF1269 est retiré.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Lorsqu’on établit des sanctions, elles sont applicables à tout le monde, tant à la plateforme internationale qu’aux loueurs classiques. Appliquer une amende de 100 000 euros à un loueur de meublé ayant omis d’établir sa déclaration présenterait, je le maintiens, un caractère disproportionné. Par ailleurs, le principe d’égalité entre les contribuables empêche de les séparer en catégories. Défavorable.

M. le président Éric Woerth. J’ajoute que l’amende est de 12 500 euros par déclaration ; elle doit donc être multipliée par le nombre de déclarations manquantes. Si la plateforme applique un mauvais taux ou ne reverse pas une partie du produit de la taxe, elle devra acquitter une amende considérable au total.

M. Charles de Courson. Ne faudrait-il pas, comme en matière fiscale, appliquer non pas un montant mais un pourcentage du montant éludé ? Cela résoudrait le problème. En effet, que l’amende soit de 12 500 ou de 100 000 euros, elle est inadaptée à un certain nombre de situations. Ne serait-il pas plus adéquat, monsieur le rapporteur général, d’appliquer une pénalité, mettons, de 10 % des sommes impayées ?

M. le président Éric Woerth. Ce sujet pourra être discuté dans le cadre du groupe de travail.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le montant de 12 500 euros est dissuasif, alors qu’un pourcentage peut représenter une somme très inférieure, par exemple dans une petite commune. On peut étudier cette question, mais les équilibres en vigueur me semblent assez satisfaisants.

La commission rejette lamendement II-CF1268.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1308 de M. Thibault Bazin.

Elle en vient à lamendement II-CF1270 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. Cet amendement vise à assurer la cohérence de la législation avec l’exercice de la compétence en matière de tourisme. L’article L. 2333-44 du code général des collectivités territoriales autorise le maire à contrôler le recouvrement de la taxe de séjour, mais non les EPCI, lesquels disposent pourtant d’une compétence en la matière. L’amendement a pour objet de leur permettre d’effectuer les contrôles.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement est satisfait par l’article L. 5211-21 du code général des collectivités territoriales.

Lamendement II-CF1270 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF13 de M. Marc Le Fur.

La commission examine lamendement II-CF1445 de Mme Dominique David.

Mme Dominique David. Nous avons adopté en commission lors de l’examen de la première partie de la loi de finances un amendement alignant la taxation des logements vacants sur celle frappant les résidences secondaires. Cette disposition a toutefois été rejetée en séance publique.

La taxe sur les logements vacants a pour objet d’inciter les propriétaires à proposer des logements vides sur le marché locatif mais, de toute évidence, elle ne suffit pas. Mon amendement vise à renforcer ce dispositif, en offrant la possibilité aux communes de plus de 50 000 habitants connaissant des tensions dans le secteur du logement de voter une surtaxe sur les logements vacants.

Sur le fond, le problème des logements vacants dépend de particularités locales. C’est pourquoi une réponse locale, comme celle que je propose, me paraît plus adaptée.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’avais donné un avis favorable à un amendement de Christine Pires Beaune en commission, auquel le ministre a, quant à lui, donné un avis défavorable, sur le fond, en séance. Comme votre amendement, sans être identique, procède de la même logique, je serais tenté de donner un avis de sagesse. Toutefois, compte tenu de l’avis qu’a donné le ministre, je crois que nous devons avoir cette discussion en séance avec lui. Il avait avancé des arguments très clairs pour justifier son net désaccord sur le fond.

Je vous propose de retirer l’amendement et de le redéposer en séance, afin de voir si la position du Gouvernement demeure inchangée. Je continue à penser qu’il y a un problème, même si le ministère est d’un avis contraire.

Lamendement II-CF1445 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF1402 de M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. La haute valeur environnementale s’apparente, en quelque sorte, à une graine dormante plantée pendant le Grenelle de l’environnement, qui aurait germé au cours de l’examen de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM). Lors des débats sur ce texte, nous avons considéré qu’elle constituait la certification de l’agroécologie définie dans la loi d’avenir agricole en 2014.

Le soutien à la première année de certification pour la haute valeur environnementale constituerait un levier profond de la transition agroécologique. La haute valeur environnementale est reconnue par l’ensemble des organisations professionnelles et environnementales comme une troisième voie permettant d’accompagner cette transition entre l’agriculture biologique et l’agriculture conventionnelle. Parce qu’elle est inclusive et que sa mise en œuvre en France servirait de laboratoire en amont de la politique agricole commune, où elle pourrait se substituer, à terme, aux mesures agroenvironnementales, nous proposons de soutenir un mouvement de la société civile déjà engagé autour de la haute valeur environnementale. Des producteurs, des distributeurs, des régions, des territoires s’engagent dans cette transition agroécologique, en lui donnant un nom, un label public reconnu.

Nous demandons simplement un soutien de 3 500 euros au titre de la première année, contrairement au crédit d’impôt sur l’agriculture biologique, qui s’inscrit dans la durée. Nous enclencherions ainsi un processus d’une grande efficience.

M. Joël Giraud, rapporteur général. De nombreux amendements similaires ont été débattus l’an dernier. Je signale d’ailleurs l’engagement de Marie-Christine Verdier-Jouclas sur ce sujet, qui concerne l’ensemble des exploitations agricoles, et pas uniquement la viticulture.

Votre amendement est l’unique survivant d’une liasse de plusieurs, parce que vous êtes le seul à avoir modifié la date de son entrée en vigueur afin qu’il soit recevable en seconde partie. Comme plusieurs amendements allant dans le même sens seront débattus en séance, je souhaiterais que vous retiriez le vôtre, qui ne précise d’ailleurs pas les modalités d’imputation du crédit d’impôt. Nous pourrons avoir un débat global sur la haute valeur environnementale en séance. Si vous le souhaitez, je vous ferai part des problèmes techniques que j’ai relevés afin que vous puissiez modifier la rédaction de votre amendement.

M. Dominique Potier. Compte tenu de vos arguments et des soutiens amicaux que j’ai suscités dans la majorité, je retire l’amendement avec confiance.

Lamendement II-CF1402 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF327 de Mme Véronique Louwagie.

Puis elle étudie lamendement II-CF1254 de Mme Martine Leguille-Balloy.

Mme Martine Leguille-Balloy. J’ai redéposé cette année un amendement que j’avais déjà présenté en 2018, portant sur les hippodromes. À l’heure où on parle beaucoup de revitalisation rurale, il est bon de rappeler que les courses hippiques constituent des animations très prisées en milieu rural. La taxe affectée ayant pour objet d’aider le fonctionnement des hippodromes a abouti à une situation inéquitable dans la mesure où, en raison du mode de calcul retenu, les gros hippodromes sont les seuls à en bénéficier. Ainsi, neuf hippodromes français bénéficiant déjà d’importantes ressources en raison du montant des paris qui y sont pris touchent un peu plus de 782 000 euros par an, alors que certains des petits hippodromes, qui revitalisent vraiment les campagnes, perçoivent moins de 60 euros.

L’amendement II-CF1254 a pour objet de remédier à cette injustice sociale, de sorte que cette taxe participe plus fortement à l’objectif de revitalisation des campagnes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le présent amendement propose effectivement une répartition plus équitable du produit sur les courses hippiques, qui permettrait de soutenir les petits hippodromes actifs sur le plan du nombre de courses mais mobilisant de faibles enjeux financiers. Néanmoins, cette nouvelle répartition pénaliserait quelques grands hippodromes – parmi lesquels il s’en trouve un que M. le président connaît bien…

À mes yeux, l’équité doit primer sur le reste, c’est pourquoi j’émets un avis de sagesse.

M. le président Éric Woerth. Pour ma part, je suis très opposé à cet amendement. D’abord, il n’a pas fait l’objet d’une concertation, ce qui est assez curieux alors même que la taxe affectée a été votée et mise en place en 2010, à l’issue d’une discussion avec le ministère – j’étais alors moi-même ministre du budget – et d’un accord entre la majorité et l’opposition. L’idée était de prélever cette taxe, non pas sur la partie des enjeux revenant aux parieurs, mais sur la redevance due à l’État, pour la reverser aux collectivités territoriales investissant beaucoup sur leur propre champ de courses. Il convient de préciser que le champ de courses n’est souvent que la partie émergée d’un iceberg qui comprend aussi des activités d’élevage et d’entraînement. Il draine des milliers d’emplois, et pas seulement quelques personnes extrêmement fortunées qui viennent à l’hippodrome voir courir les chevaux dont ils sont propriétaires ; il s’agit de tout un écosystème.

Tous les hippodromes sont éligibles, mais évidemment les plus petits touchent très peu en raison du faible montant des paris, tandis que les plus gros touchent des sommes beaucoup plus importantes en raison des dépenses considérables qu’ils ont à assumer. Je serais favorable à cet amendement si on mutualisait les dépenses des gros hippodromes. Durant des années, des collectivités territoriales ont en effet investi des millions d’euros pour entretenir leurs hippodromes, tandis que d’autres, qui n’abritent qu’un petit hippodrome, s’inscrivent dans la logique de gestion classique d’une collectivité territoriale.

À force d’apporter des modifications au système – nous l’avons déjà fait plusieurs fois, notamment l’année dernière –, nous courons le risque de créer une instabilité susceptible de conduire à la suppression pure et simple de cette mesure par l’État, qui pourrait finir par se lasser.

M. Thibault Bazin. Vous avez raison de parler d’écosystème, monsieur le président, et si nous voulons vraiment avoir un impact social et territorial sur l’équitation – qui est, rappelons-le, le premier sport féminin et le troisième sport en France, tous pratiquants confondus –, le vrai sujet pour la filière est celui de la TVA, qui pourrait avoir un véritable effet de levier. C’est donc le problème auquel nous devrions nous atteler au niveau européen.

M. le président Éric Woerth. Nous y atteler, c’est le cas de le dire, mais la TVA est cependant un autre sujet, que nous pourrons aborder si nous retrouvons un peu de marge de manœuvre dans ce domaine.

Mme Bénédicte Peyrol. Comme vous l’avez dit, monsieur le président, nous sommes déjà revenus sur ce point à plusieurs reprises, notamment l’année dernière. Par ailleurs, même si M. le rapporteur général a donné quelques éléments de réponse, il serait bon de disposer d’une évaluation de l’impact que la mesure proposée pourrait avoir sur les différents hippodromes, notamment les plus petits, si nous voulons être en mesure d’aboutir à un système juste et équilibré.

Mme Martine Leguille-Balloy. Monsieur le président, vous parlez de mutualiser les dépenses, mais il me semble tout de même qu’un hippodrome tel que celui de Vichy, par exemple, qui touche 360 000 euros par an pour faire des travaux, est plus à même d’entretenir ses installations tout en contribuant à la vie sociale locale que ne peut le faire un petit hippodrome qui touche moins de 60 euros. À mon avis il faut commencer par mutualiser en répartissant mieux les sommes perçues par les hippodromes au titre de la taxe affectée.

Comme vous le savez, les hippodromes des petites villes sont entretenus par les collectivités territoriales, le plus souvent grâce à des bénévoles. Pensez-vous que ce soit normal ?

M. le président Éric Woerth. Je suis très favorable aux petits hippodromes, j’en veux pour preuve que nous avons fait en sorte qu’ils puissent continuer leur activité alors qu’un programme prévoyait leur fermeture. Les petits hippodromes, qui programment peu d’événements, relèvent plutôt d’une logique d’intérêt local, donc d’une prise en charge locale. Il faut y voir l’équivalent de ce qui se fait dans le football, avec la répartition des clubs en différentes divisions correspondant à leur importance.

Si vous supprimez les gros hippodromes, vous supprimerez les petits, et c’en sera fini de la filière des courses, déjà très mal en point. Contrairement à l’Italie et à l’Allemagne, où la filière des courses a disparu, nous avons la chance d’avoir encore en France une filière pourvoyant une centaine de milliers d’emplois, que nous devons protéger. Pour cela, nous devons faire en sorte que de grands événements continuent de pouvoir être organisés, car ce sont de tels événements qui incitent les propriétaires à acheter des chevaux – et le jour où ils cesseront d’en acheter, tout sera terminé, puisqu’il n’y aura plus d’élevage…

Mme Émilie Cariou. J’entends vos arguments, monsieur le président, mais j’entends aussi ceux de Mme Leguille-Balloy : nous devons effectivement réfléchir à la mise en place de mesures d’équité entre les grands et les petits hippodromes – une taxe a été créée il y a quelques années, mais rien ne nous empêche aujourd’hui de revoir les modalités de répartition de ses recettes. Il est un peu prématuré de défendre cet amendement aujourd’hui, car il faudrait d’abord concerter davantage. Je suggère donc à notre collègue de le retirer, avant que ne s’engage un vrai travail de fond sur la question des hippodromes. Une proposition plus aboutie pourra alors faire l’objet d’un nouvel amendement.

M. le président Éric Woerth. Madame Leguille-Balloy, retirez-vous votre amendement ?

Mme Martine Leguille-Balloy. Non, je ne retire pas mon amendement.

La commission rejette lamendement II-CF1254.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite lamendement II-CF1298 de M. Thibault Bazin.

Puis elle examine, en discussion commune, lamendement II-CF1453 de M. Hervé Pellois et lamendement II-CF11 de M. Marc Le Fur.

M. Hervé Pellois. L’amendement II-CF1453 tend à préciser la notion de « serrage des récoltes », une activité qui permet de bénéficier de l’exonération permanente de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bâtiments ruraux affectés de manière permanente et exclusive à un usage agricole.

Certaines récoltes, parmi lesquelles les pommes de terre, doivent être stockées dans des bâtiments spécialement affectés à cet usage et garantissant leur bonne conservation à une température comprise entre 2 °C et 12 °C. Si l’élevage nécessite de disposer de bâtiments maintenus à une certaine température pour le bien-être des animaux, la conservation des tubercules implique, elle aussi, de disposer d’installations adéquates au sein des exploitations agricoles.

M. Joël Giraud, rapporteur général. D’un point de vue juridique, je ne vois pas comment on va définir la notion de moyens de stockage permettant de garantir la qualité des produits. Par ailleurs, il s’agit d’une exonération particulièrement difficile à mettre en œuvre pour l’administration fiscale, puisqu’elle serait désormais conditionnée non seulement par le type d’activité exercé – dans le cas présent, une activité agricole de serrage –, mais également par les moyens mis en œuvre pour exercer cette activité – ici, un stockage permettant une qualité saine, loyale et marchande.

Je ne vois vraiment pas comment ces amendements pourraient être mis en application, c’est pourquoi je souhaite leur retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Pellois ?

M. Hervé Pellois. Je préfère attendre la fin de la discussion pour en décider, monsieur le président.

M. Charles de Courson. Il faudrait déjà savoir si les bâtiments de stockage sont actuellement exonérés de la taxe sur le foncier bâti. Dans ma région, on cultive beaucoup la pomme de terre et on la conserve dans les fermes, avec une surprime en fonction de la durée. Je sais que ce dispositif se développe de plus en plus pour les céréales.

Je pensais qu’il y avait une exonération, avec cependant une subtile distinction entre les bâtiments pourvus d’équipements spécifiques et les autres, mais je peux me tromper. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point, monsieur le rapporteur général ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Très honnêtement, je ne suis pas en mesure de vous répondre avec précision sur ce point. J’ai tendance à penser que votre supposition est fondée, mais je préfère vérifier avant de vous en donner confirmation. Nous aurons l’occasion d’en reparler en séance publique.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1453 et II-CF11.

Elle est saisie des amendements identiques II-CF10 de M. Marc Le Fur et IICF1454 de M. Hervé Pellois.

Mme Marie-Christine Dalloz. Les contraintes réglementaires et le coût toujours croissant qu’elles entraînent poussent les exploitants à se regrouper et à construire en commun les bâtiments nécessaires à l’activité agricole. L’amendement II-CF10 propose de permettre à ces regroupements, quelle que soit leur forme juridique, de bénéficier de l’exonération permanente de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bâtiments ruraux affectés de manière permanente et exclusive à un usage agricole.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le choix a été fait de limiter le bénéfice de l’exonération aux seules coopératives agricoles, et je m’y tiendrai. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF10 et II-CF1454.

Elle examine lamendement II-CF745 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. L’amendement II-CF745 vise à clarifier le statut fiscal des bassins de baignade naturels au titre de la taxe d’habitation et de la taxe sur le foncier bâti. Début 2019, j’avais déjà posé une question écrite sur ce thème, malheureusement restée sans réponse – mais quand on me fait sortir par la porte, je reviens par la fenêtre ! Avec cet amendement, je souhaite donc que puisse être apportée une réponse aux contribuables de bonne foi qui, n’ayant pas les moyens de construire une piscine classique, ont opté pour un bassin de baignade naturel – ce qu’ils peuvent également avoir fait pour être en accord avec leur vision de l’environnement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. En toute logique, les bassins naturels n’ayant pas fait l’objet d’une construction sont soumis à la taxe foncière sur les propriétés non bâties…

M. Fabrice Brun. Ils sont imposables ou non imposables ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ils sont imposables à la taxe foncière sur les propriétés non bâties, mais non assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ni à la taxe d’habitation.

Cela dit, il existe des piscines naturelles qui, par leur conception, sont très proches d’une piscine classique, et se trouvent donc soumises à la taxe sur le foncier bâti et à la taxe d’habitation. Même si ces nouvelles piscines sont très en vogue, rien ne justifie en effet qu’elles soient soumises à un régime dérogatoire.

Il s’agit en tout état de cause d’une question d’ordre réglementaire, ce qui justifie d’ailleurs que vous ayez posé une question écrite à ce sujet – à laquelle je regrette que vous n’ayez pas obtenu de réponse.

Je vous invite par conséquent au retrait de cet amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.

M. Fabrice Brun. Si je comprends bien, les bassins créés par la nature, sans intervention de l’homme, ne sont pas imposés au titre de la TFPB et de la TH, mais seulement au titre de la taxe sur le foncier non bâti, tandis que les bassins naturels « construits » sont, eux, considérés comme des constructions par l’administration fiscale, et taxés à ce titre.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est tout à fait cela.

M. Fabrice Brun. Je retire mon amendement, mais je continue d’espérer recevoir une réponse à ma question écrite.

Lamendement II-CF745 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF1200 de M. Jean-Marc Zulesi.

M. Jean-Marc Zulesi. La ressource en eau sera certainement le principal enjeu du XXIe siècle. C’est pourquoi il est primordial de travailler dès maintenant à l’optimisation et à la réduction de sa consommation. Le traitement des eaux usées est, lui aussi, essentiel et, sur ce point, nous devons trouver des moyens d’accompagner les collectivités territoriales.

Tel est l’objectif de l’amendement II-CF1200, qui vise à exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties les stations d’épuration, afin de faciliter la mise en place sur le territoire de nouvelles installations, ainsi que la modernisation et l’extension des installations existantes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Si je comprends bien, vous souhaitez vous assurer que les installations appartenant à des collectivités territoriales ou à leurs groupements bénéficient d’une exonération permanente de taxe sur le foncier bâti, quel qu’en soit le gestionnaire. Cette préoccupation est satisfaite par les dispositions légales existantes.

En revanche, si vous visez des installations appartenant à des entreprises privées, celles-ci sont évidemment exclues du champ des installations relevant des collectivités territoriales, et je suis alors défavorable à votre proposition.

M. Jean-Marc Zulesi. Mon amendement vise les deux objectifs que vous avez cités, monsieur le rapporteur.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’y suis donc défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1200.

Elle examine, en discussion commune, lamendement II-CF15 de M. Marc Le Fur et lamendement II-CF1042 de M. Bertrand Pancher.

Mme Marie-Christine Dalloz. La France a une politique assez volontariste sur le plan fiscal en matière de méthanisation. Le problème des agriculteurs méthaniseurs a déjà été largement abordé, et l’amendement II-CF15 a pour objet de donner la possibilité aux collectivités territoriales qui le souhaitent – j’insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une contrainte, mais d’une simple faculté – d’appliquer aux méthaniseurs dits non agricoles les exonérations de taxe foncière et de cotisation foncière des entreprises prévues pour la méthanisation agricole.

Une telle disposition ne représenterait aucune perte de recette pour le budget de l’État, monsieur le rapporteur général.

M. Michel Castellani. L’amendement II-CF1042 a pour objet de permettre que les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre puissent, par délibération, exonérer de taxe foncière les installations et bâtiments de toute nature affectés à la production de biogaz, d’électricité et de chaleur par méthanisation.

Pour atteindre en 2030 l’objectif de 10 % d’énergies renouvelables que la France s’est fixé, le développement de l’ensemble des types de méthanisation est nécessaire. Tel est l’objet de mon amendement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons ici affaire à un amendement régulièrement déposé depuis la loi de finances rectificative pour 2016. Je précise qu’il a été adopté une seule fois par la commission des finances parce que les députés qui auraient dû lever la main ont alors négligé de le faire…

Je considère qu’il faut distinguer la méthanisation industrielle, que vous proposez d’exonérer, de la méthanisation agricole de proximité, déjà exonérée. Les installations à caractère industriel sont généralement des unités plus grosses qui vont présenter, d’un point de vue environnemental, un bilan carbone beaucoup moins intéressant que les petites installations n’ayant vocation qu’à procurer un complément de revenus.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. Charles de Courson. Il s’agit là d’un vrai problème. L’administration fiscale a considéré que les cuves de méthanisation étaient des immeubles.

Mme Émilie Cariou. C’est dans la loi !

M. Charles de Courson. Bien sûr, et on ne compte plus les personnes qui, ayant monté un projet en pensant qu’il bénéficierait d’une exonération, ont déchanté en recevant la douloureuse – de 100 000 euros à 300 000 euros, pour vous donner un ordre de grandeur –, qui remettait évidemment en cause l’équilibre économique des projets concernés.

Or l’exonération fiscale constitue un bon moyen de favoriser le développement de la méthanisation. Certes, un moyen encore plus efficace consisterait à agir sur le prix d’achat du gaz ainsi produit, mais du fait de la vente à l’encan de plus en plus pratiquée, les prix ont plutôt tendance à baisser.

J’ajoute qu’une telle mesure ne coûte rien à l’État, puisqu’il appartient aux collectivités territoriales de décider si elles mettent ou non en place une telle mesure.

M. Benoit Simian. J’abonde dans le sens de notre collègue Charles de Courson. La mesure proposée est très girondine, puisqu’on laisse aux collectivités la possibilité de délibérer. Elle constitue, par ailleurs, un soutien très efficace à une filière qui a mobilisé des crédits d’État, notamment de l’ADEME, pour les investissements, et peine à atteindre l’équilibre – je suis bien placé pour le savoir, ayant deux installations dans ma circonscription. L’adoption de cet amendement constituerait un signal fort adressé à la filière ; il s’agit donc de faire un vrai choix politique sur ce point.

Mme Olivia Grégoire remplace M. Éric Woerth pour présider la séance.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Même s’il s’agit d’une exonération facultative, quel est le poids d’une collectivité territoriale face à un industriel qui arrive avec un projet de méthanisation ? Je vous avoue aborder avec une certaine méfiance ce genre d’exonération facultative, c’est pourquoi je maintiens mon avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements II-CF15 et II-CF1042.

La commission est saisie de lamendement II-CF87 de Mme Lise Magnier.

Mme Lise Magnier. Parmi les différents dispositifs existants pour soutenir financièrement les propriétaires qui réalisent des travaux éligibles au crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), le code général des impôts permet aux collectivités territoriales d’exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties les logements achevés avant le 1er janvier 1989 qui ont fait l’objet de dépenses éligibles au CITE.

Cette exonération peut être décidée par les collectivités, mais elle doit être fixée à 50 % ou à 100 % du montant de la taxe foncière revenant à la collectivité délibérant en ce sens, sans possibilité de modulation du taux. De surcroît, cette exonération s’applique obligatoirement pour cinq années lorsque les collectivités ont délibéré.

L’amendement II-CF87 vise à assouplir cet outil mis à la disposition des collectivités pour accompagner la rénovation énergétique des logements, en limitant l’application à trois années, afin d’éviter que les collectivités se privent de cette ressource pour une durée obligatoire de cinq ans, et en permettant à celles-ci de fixer un taux compris entre 50 % et 100 %, plutôt que d’avoir à choisir entre 50 % et 100 %.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Sur le fond, je suis plutôt favorable à cet amendement qui me paraît intéressant. Toutefois, par mégarde, vous avez supprimé la phrase en vigueur énonçant que « la délibération porte sur la part revenant à chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ».

Puisqu’il est impossible ici de procéder à une rectification de cette nature, je vous propose de retirer votre amendement et de le réécrire en vue de la séance publique, où je lui donnerai un avis favorable.

Lamendement II-CF87 est retiré.

La commission examine lamendement II-CF391 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. L’amendement II-CF391 fait suite au constat, qui me semble partagé par tous, que nous sommes très en retard en matière de rénovation thermique des bâtiments. L’article 1383-0 B du code général des impôts permet aux collectivités territoriales et EPCI à fiscalité propre de décider sur délibération d’exonérer totalement ou partiellement de taxe foncière les propriétaires pendant cinq ans lorsque certains travaux d’économie d’énergie ont été réalisés.

Il est donc proposé d’assouplir ce dispositif en l’étendant à tous les logements de plus de deux ans, et non plus seulement à ceux achevés avant le 1er janvier 1989.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avec cet amendement, vous proposez d’étendre l’exonération facultative de TFPB pour les logements anciens à tous les logements de plus de deux ans. En fait, cela revient à l’étendre à des logements quasi neufs, ce qui me semble constituer une considérable extension du périmètre du dispositif, qui pourrait se révéler contre-productive.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je conçois que la durée de deux ans ne soit pas forcément pertinente, mais si nous prenions en compte les logements achevés avant 2005 ou avant 2012, par exemple, pour suivre les réglementations thermiques, pourriez-vous être favorable à cette proposition ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Disons que je la regarderais avec une plus grande bienveillance, et que j’entamerais des négociations avec le Gouvernement si les bâtiments visés étaient véritablement des bâtiments anciens.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je vais donc redéposer mon amendement en retenant une autre année pour l’achèvement des logements, par exemple 2005, et dans l’immédiat je retire mon amendement.

Lamendement II-CF391 est retiré.

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Article additionnel après l’article 48
Prorogation et évaluation du dispositif de soutien
aux jeunes entreprises innovantes (JEI)

La commission est saisie de lamendement II-CF1549 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement II-CF1549, que je crois très attendu, propose de proroger jusqu’au 31 décembre 2022 le dispositif de soutien aux jeunes entreprises innovantes (JEI).

M. Charles de Courson. Sur le principe, je suis tout à fait favorable à votre amendement, monsieur le rapporteur général. Mais dispose-t-on d’une évaluation du dispositif actuel, que vous proposez de renouveler pour les années à venir ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Conformément à la logique d’évaluation qui m’est aussi chère qu’à vous, monsieur de Courson, l’amendement prévoit la remise d’un rapport sur les effets du dispositif et ses pistes d’évolution.

À l’heure actuelle, nous ne disposons de quelques chiffres sur l’exonération d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés – cela représente environ 10 millions d’euros par an – et sur les cotisations sociales patronales – il s’agit de quelque 100 millions d’euros par an.

Mme Cendra Motin. Il convient effectivement, monsieur le rapporteur général, de ne pas oublier les dispositifs sociaux qui accompagnent les jeunes entreprises innovantes, car ils sont importants. Il conviendrait que le rapport porte sur tous les dispositifs de droit commun, qu’ils soient fiscaux ou sociaux, car ces éléments d’information nous seront très utiles pour nos travaux futurs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Soyez rassurée, madame Motin, le rapport porte bien sur tout le champ du dispositif.

La commission adopte lamendement II-CF1549 (amendement II-2517).

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Après l’article 48

La commission examine lamendement II-CF667 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Les exonérations de TFPB votées par le Parlement, souvent à l’initiative du Gouvernement, pénalisent les communes dans la mesure où ces exonérations ne sont plus compensées. On attend toujours le fameux rapport qui nous a été promis sur le sujet mais, dans celui qui nous a été remis en 2016, il apparaît que les exonérations appliquées ont eu pour effet de priver de 57 millions d’euros un certain nombre de communes – souvent les plus pauvres, puisqu’il est ici question de logements sociaux. Avec l’amendement II-CF667, nous souhaitons que la commune puisse au moins s’opposer à la perte de cette recette en disposant d’une sorte de droit de veto.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je partage votre préoccupation relative à l’obtention des éléments d’information demandés, mais j’estime que la disposition proposée permettrait aux collectivités de remettre en cause les engagements de l’État en matière de fiscalité et l’équilibre financier des projets de construction de logements neufs passés et nouveaux.

Je reste donc défavorable à cet amendement – tout comme je reste dans l’attente des éléments que nous ne cessons de réclamer.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur général, compte tenu de la ligne que la commission des finances s’efforce de suivre, nous ne pouvons accepter que l’État décide d’exonérations sans compensation quand elles sont obligatoires. Il y aurait bien une solution, consistant à les rendre facultatives, ce qui serait conforme à nos positions sur le fond. La solution actuelle n’est effectivement pas du tout logique, puisqu’elle pénalise les communes les plus pauvres, ce qui est pour le moins paradoxal.

M. Jean-Louis Bricout. La commune d’Hirson, située dans ma circonscription, est confrontée au problème qui vient d’être évoqué. Il n’est pas normal d’accorder des exonérations sans les compenser, et sans laisser le choix aux communes concernées.

La commission rejette lamendement II-CF667.

Elle est saisie des amendements identiques II-CF771 de Mme Stéphanie Do et IICF1485 de M. Daniel Labaronne.

Mme Stéphanie Do. L’amendement II-CF771 ouvre le dispositif de prêt social location-accession (PSLA) aux logements anciens avec travaux.

Destiné aux ménages aux revenus modestes sous plafond de ressources, le PSLA propose aux locataires-accédants un dispositif original d’accession à la propriété assorti de fortes garanties, dans le cadre d’une opération agréée par l’État. Dans un premier temps, le ménage est locataire de son logement – cette phase lui permet de tester sa capacité de remboursement. Puis, dans un deuxième temps, il peut lever son option d’achat et se porter acquéreur de son logement. L’opérateur doit offrir au locataire-accédant des garanties en termes de relogement et de rachat du bien.

Le PSLA permet à l’opérateur de bénéficier d’un prêt refinancé par la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que de certains avantages fiscaux : exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans et TVA à 5,5 %.

Ce dispositif a fait ses preuves, et il serait utile de l’étendre au logement ancien avec travaux.

M. Daniel Labaronne. Les territoires ruraux font face à une très importante vacance des logements dans les cœurs de bourg. Les logements faisant l’objet d’un contrat de location-accession PSLA bénéficient actuellement d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties de quinze ans, ce régime étant réservé aux logements neufs.

Le mécanisme du prêt social location-accession est aujourd’hui réservé aux opérations neuves alors qu’il pourrait également être intéressant pour les opérations d’accession sociale à la propriété réalisées dans des immeubles anciens après réhabilitation, notamment dans le cadre de la revitalisation des centres-bourgs.

Tel est l’objet de l’amendement II-CF1485.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Sans aller jusqu’à dire que je suis tout à fait d’accord avec ces amendements – car nous avons déjà pris des mesures intéressantes dans le domaine auquel ils se rapportent, notamment la mise sous conditionnalité du PTZ utilisable en cas de ventes de logements du parc social à leurs occupants –, j’en comprends l’intention.

Je vous invite à retirer ces deux amendements afin qu’une vraie discussion s’engage avec le ministre en séance publique, et que celui-ci se prononce sur les arguments que vous avancez. À défaut de retrait, j’émettrai un avis défavorable.

M. Daniel Labaronne. J’insiste sur le fait que ma préoccupation n’était pas tant de discuter du mécanisme du prêt social location-accession que de susciter une réflexion sur la question de la vacance des locaux en milieu rural. Cela dit, je retire mon amendement.

Les amendements II-CF771 et II-CF1485 sont retirés.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques IICF406 de M. Stéphane Peu et II-CF819 de M. François Pupponi, ainsi que lamendement II-CF1299 de M. Thibault Bazin.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’article 1384 C du code général des impôts prévoit un régime d’exonération de taxe foncière au profit des opérations dites d’acquisition‑amélioration de logements locatifs sociaux.

Depuis quelques années, des difficultés sont apparues quant à la possibilité d’appliquer ce texte lorsque le bailleur social acquiert un immeuble qui, au départ, n’était pas affecté au logement – il peut s’agir de bureaux ou de commerces – en vue de le transformer en logements sociaux. La rédaction de l’article peut en effet prêter à discussion, car elle vise « les logements acquis en vue de leur location ». S’il peut sembler assez évident que cette terminologie vise l’affectation de l’immeuble après l’acquisition, certains services fiscaux locaux ont pu considérer que le régime d’exonération était exclu lorsque l’immeuble acquis n’était pas déjà affecté au logement avant même son acquisition par le bailleur.

Il paraît opportun de régler cette difficulté : tel est l’objet de l’amendement II‑CF406.

M. François Pupponi. On peut comprendre la demande des bailleurs qui achètent des locaux pour les transformer en logements sociaux et qui souhaitent bénéficier, à ce titre, de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Mais, une fois de plus, les communes seront pénalisées, puisque les locaux en question, qui ne sont pas des logements et qui produisent une recette fiscale, seront, du jour au lendemain, exonérés de taxe foncière.

Sur le principe, nous sommes d’accord, il faut favoriser la construction de logements sociaux, mais cela ne doit pas se faire au détriment des communes les plus pauvres. C’est pourquoi je proposerais de rectifier mon amendement II‑CF819 pour que les communes disposent au moins d’un droit de veto.

M. Thibault Bazin. L’amendement II-CF1299 répond au souhait de M. Pupponi puisqu’il est prévu que l’exonération s’applique à ces immeubles « si les collectivités territoriales qui perçoivent cette taxe le souhaitent par une délibération ». Nous pourrions favoriser ainsi la transformation de bureaux en logements en appliquant l’exonération de taxe foncière de manière équitable.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ces amendements ont en commun d’apporter une précision qui est de nature réglementaire, car interprétative. A priori, la loi n’interdit pas d’appliquer l’exonération de taxe foncière à des locaux non affectés à l’habitation acquis en vue de les transformer en logements sociaux ; elle devrait donc l’autoriser. C’est pourquoi je vous propose de retirer vos amendements et de discuter de cette question en séance publique avec le ministre, afin qu’il confirme clairement cette interprétation. Ensuite, nous pourrons travailler sur le fond.

M. Thibault Bazin. Vous nous avez dit la même chose l’année dernière, monsieur le rapporteur général ! Et, en séance publique, le ministre nous avait indiqué que la disposition proposée pourrait pénaliser les collectivités. Nous avons donc retravaillé notre amendement en tenant compte de ses remarques. Je souhaite donc que nous nous prononcions sur ces amendements qui visent précisément à éviter que les collectivités ne soient pénalisées.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur général, nous devons, me semble‑t‑il, tous nous rallier tous à l’amendement de M. Bazin, qui apporte une réponse aux différentes questions soulevées. En séance publique, le ministre nous dira ce qu’il en pense. On nous fait le coup à chaque fois en nous demandant de retirer nos amendements. Nous les retirons, nous les retravaillons pour les redéposer l’année suivante, et on nous dit que ce sont des marronniers !

Il s’agit d’un véritable problème. Or l’amendement de M. Bazin, qui est sage et équilibré, permettrait de le résoudre : votons-le. Si le Gouvernement s’y rallie, c’est très bien ; s’il juge nécessaire de le peaufiner, il le sous-amendera. Quoi qu’il en soit, la commission doit arrêter sa position. Au demeurant, monsieur le rapporteur général, vous êtes vous-même en fait plutôt favorable à cet amendement.

M. François Pupponi. Je souscris aux propos de M. de Courson. Dans son amendement, M. Bazin non seulement propose de clarifier l’interprétation de la loi – s’il ne s’agissait que de cela, il aurait pu être retiré –, mais pose également le principe selon lequel les collectivités locales devront se prononcer sur l’exonération, ce qui est nouveau. Je suggère donc que nous adoptions l’amendement de M. Bazin et que nous en discutions ensuite en séance publique.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je tiens à préciser que l’amendement II-CF406 apporte une clarification qui s’impose du fait que les services fiscaux ont, sur ce point, une interprétation différente de la loi. Par ailleurs, je souscris à la proposition concernant l’accord des collectivités, car il n’est pas question de les dépouiller de leurs ressources. Je ne retirerai donc pas cet amendement.

M. François Jolivet. Je soutiens, pour ma part, l’amendement II-CF406 et je suis défavorable à celui de M. Bazin. Tout d’abord, il s’agit d’un problème d’interprétation administrative, qui ne relève pas du domaine de la loi : il suffit que le ministre rappelle aux directions départementales des finances publiques (DDFIP) la manière dont elles doivent travailler. Ensuite, il serait illusoire de penser qu’un bailleur social qui souhaiterait réaliser une opération d’aménagement ou de construction de logements accepte de faire porter par ses locataires, qui sont pauvres, les impôts fonciers de la ville sur le territoire de laquelle il investit. Les communes seraient ravies d’apprendre qu’elles garderaient la recette, mais elles n’auraient pas d’acheteurs ni d’opérateurs. Enfin, le régime actuel est favorable aux bailleurs sociaux, pourvu que le texte soit appliqué correctement. C’est pourquoi je voterai l’amendement de M. Peu.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Si l’on parle d’une délibération des collectivités, cela signifie que l’on pose le principe de la non-compensation. Il faut tout de même faire attention à ce que l’on écrit, en la matière.

Ce que je souhaite, c’est, comme l’a indiqué à l’instant M. Dufrègne, que nous connaissions l’interprétation de la loi par le Gouvernement sur ce point. Si, cette fois, nous n’obtenons pas du ministre un engagement clair en séance publique, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée ou j’émettrai un avis favorable à l’amendement II-CF406 de M. Peu. Toutefois, à ce stade, je vous demande de retirer vos amendements car, en l’absence du ministre, ils sont un vœu pieux. À défaut de retrait, avis défavorable.

M. Jean-Paul Dufrègne. Peu s’en faut que je retire l’amendement II-CF406, mais je le maintiens.

M. François Pupponi. Je maintiens également l’amendement II-CF819.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Permettez-moi d’apporter la précision pédagogique suivante : je suis tenu par l’avis de la commission, de sorte que, si les amendements sont rejetés, je serai obligé d’émettre un avis défavorable…

M. Jean-Paul Dufrègne. Dans ce cas, je retire l’amendement II-CF406 !

Lamendement II-CF406 est retiré.

M. François Pupponi. Monsieur le rapporteur général, M. Dufrègne ayant retiré son amendement, vous pourrez, lorsqu’il le défendra en séance publique, émettre un avis favorable.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ou je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée.

M. François Pupponi. D’accord. Mais qu’en est-il de l’amendement de M. Bazin, qui est différent des deux autres ? S’il le retire, y serez-vous également favorable en séance publique ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’y serai défavorable, comme je viens de l’indiquer.

M. François Pupponi. Dans ce cas, je retire mon amendement et je voterai celui de M. Bazin.

Lamendement II-CF819 est retiré.

La commission rejette lamendement II-CF1299.

Elle examine ensuite les amendements identiques II-CF405 de M. Stéphane Peu et II-CF624 de M. François Pupponi.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’article 1384 G du CGI dispose qu’en cas de démolition‑reconstruction de logements locatifs sociaux dans le cadre d’une convention ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine), la nouvelle construction ne peut pas bénéficier des régimes d’exonération de taxe foncière prévus pour ces opérations si la construction démolie en avait déjà bénéficié et si la commune compte plus de 50 % de logements sociaux.

Cette règle a été adoptée dans le cadre de la loi de finances pour 2017, à l’initiative de certains élus locaux qui s’inquiétaient des pertes de recettes fiscales liées à ces exonérations et souhaitaient limiter la concentration des logements sociaux sur leur territoire dès lors que ces logements y étaient déjà nombreux. Si ces préoccupations sont tout à fait compréhensibles, il est des situations dans lesquelles la reconstruction sur place s’impose. Par le présent amendement, nous proposons donc de permettre aux élus locaux de déroger à la règle, s’ils le souhaitent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’an dernier, après avoir été adoptés par notre commission, des amendements analogues ont été rejetés par l’Assemblée en raison des explications données par le ministre.

Je rappelle que cette mesure a été inscrite dans le code général des impôts à l’initiative de M. Pupponi lui-même, au motif qu’en l’absence d’une telle exception, les communes concernées – par définition, des communes pauvres relevant de la politique de la ville – verraient des immeubles générant des recettes fiscales importantes être remplacés par des immeubles qui n’en procurent plus. Vous souhaitez désormais revenir partiellement sur cette mesure. Si, grâce à votre amendement, les collectivités territoriales font le choix de l’exonération, elles ne seront plus compensées du fait du caractère facultatif de l’exonération. Il s’agira donc, pour elles, d’une perte sèche.

C’est pourquoi, à ce stade, je suis défavorable à ces amendements. La discussion aura lieu de nouveau en séance publique avec le ministre, qui a déjà donné un avis défavorable l’an dernier.

M. François Pupponi. Monsieur le rapporteur général, nous avons un désaccord sur ce point. Dès lors que ces exonérations ne sont plus compensées, nous proposons que la commune ait le choix de se priver de cette recette. Si elle fait ce choix, elle l’assume, mais c’est elle qui décide. Tel est l’objet de ces amendements : il s’agit de laisser à la commune la liberté de choix. Ce n’est pas l’État qui décide, mais c’est la collectivité, et cela me paraît plutôt sain.

La commission rejette les amendements II-CF405 et II-CF624.

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement II-CF1300 de M. Thibault Bazin.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques II-CF412 de M. Stéphane Peu et II-CF626 de M. François Pupponi.

M. Jean-Paul Dufrègne. Une ordonnance du 20 juillet 2016 a créé le mécanisme du bail réel solidaire, qui a pour objet de favoriser des opérations d’accession à la propriété très sociale en dissociant la propriété du foncier, acquis par un organisme de foncier solidaire, et la propriété du bâti, acquis par le ménage. Ces opérations, encadrées par un strict mécanisme antispéculatif, se développent sur l’ensemble du territoire, avec l’appui d’un certain nombre de collectivités territoriales.

La loi de finances rectificative pour 2016 a permis aux collectivités territoriales qui le souhaitent d’appliquer un abattement de 30 % sur la taxe foncière sur les propriétés bâties due par les ménages qui acquièrent leurs logements dans ces conditions. Pour encourager davantage ce type d’opérations, il est proposé de permettre aux collectivités de porter cet abattement à un niveau supérieur à 30 %. Là encore, il s’agirait d’une mesure facultative, qui serait prise localement par délibération.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet abattement existe depuis à peine deux ans. Vous proposez qu’il soit possible d’aller jusqu’à l’exonération totale de taxe foncière, en permettant de porter cet abattement à 100 %. J’y suis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF412 et II-CF626.

Elle passe à lamendement II-CF1244 de Mme Frédérique Tuffnell.

M. Daniel Labaronne. Il s’agit d’exonérer de la taxe sur le foncier non bâti les tourbières qui font l’objet d’un engagement de gestion.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je souscris à l’objectif de préserver les zones humides, mais le dispositif doit être opérant au plan juridique. Or tel n’est pas le cas de celui qui est proposé par l’amendement. C’est pourquoi j’ai suggéré à Mme Tuffnell que nous y retravaillions d’ici à la séance publique. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer.

M. Daniel Labaronne. Je vous remercie de votre proposition et je retire l’amendement.

Lamendement II-CF1244 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF668 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Par cet amendement, nous proposons qu’une collectivité territoriale puisse opposer son veto à l’application, cette fois, de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties sur son territoire.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF668.

Elle examine ensuite lamendement II-CF153 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. Actuellement, le dispositif de majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires ne peut s’appliquer que dans les zones urbaines de plus de 50 000 habitants. Or, dans de petites communes, notamment touristiques, qui n’appartiennent pas à de telles zones urbaines, la multiplication des résidences secondaires a pour conséquence une raréfaction des logements disponibles pour les résidences principales et une augmentation des prix. À titre d’exemple, la part de la taxe d’habitation liée aux résidences secondaires est de 85 % à Megève et de plus de 70 % à Chamonix.

Par cet amendement, dont le coût serait nul, nous proposons de permettre à ces communes de majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et de leur offrir ainsi un outil fiscal supplémentaire de nature à encourager le logement permanent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Sur l’ensemble des amendements ayant trait à la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS), j’émettrai un avis défavorable.

Nous devrons réfléchir à ces questions d’ici à 2023. Il nous faut, en la matière, bâtir un système global intelligent qui prenne en compte les problématiques de la taxe sur les logements vacants (TLV) et de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires soulevées par Mme David et Mme Pires Beaune. Je demande donc aux auteurs de l’ensemble de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, avis défavorable.

M. Éric Woerth remplace Mme Olivia Grégoire pour présider la séance.

Mme Émilie Bonnivard. Je tiens à souligner les difficultés que rencontrent les résidents principaux, notamment les jeunes qui souhaitent s’installer et les saisonniers, pour se loger dans les stations de montagne. Les communes concernées ne disposent actuellement d’aucun levier pour permettre à ces personnes d’accéder à la propriété ou à la location à un prix raisonnable. Il convient donc que nous puissions remédier à ces difficultés dans le cadre d’une réflexion approfondie. J’ajoute que le problème se pose également à propos des « lits froids » et des « volets clos », pour lesquels nous n’avons aucune solution fiscale, qu’elle soit incitative ou contraignante.

M. Charles de Courson. Pensez-vous que ce problème puisse être résolu à coups de mesures fiscales ? J’ai quelques doutes. Il me paraît préférable de privilégier d’autres outils, le droit de l’urbanisme par exemple. Sinon, que se passera-t-il ? Les propriétaires de résidence secondaire déclareront celle-ci comme leur résidence principale, ce qui aurait des effets pervers, notamment en matière d’inscriptions sur les listes électorales. En outre, j’appelle votre attention sur le fait que la taxe d’habitation ne sera maintenue que sur les résidences secondaires. En tout état de cause, je ne suis pas favorable à ce type d’approche exclusivement fiscale.

M. Lionel Causse. Un mot sur l’amendement ultérieur II-CF26, que je vais retirer. Depuis deux ans, j’alerte l’Assemblée sur la problématique du zonage des communes ayant la possibilité de majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. Ce dispositif ne s’applique actuellement qu’aux communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants. Or de nombreuses petites communes connaissent les mêmes problématiques liées à l’augmentation des loyers et du prix d’acquisition des logements. Il faudra donc trouver, d’une façon ou d’une autre, une solution pour assouplir le dispositif et l’adapter aux territoires concernés.

M. le président Éric Woerth. Je ne suis pas certain qu’en la matière, la solution soit d’ordre fiscal.

La commission rejette lamendement II-CF153.

Lamendement II-CF26 de M. Lionel Causse est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF229 de Mme Frédérique Lardet et II-CF814 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Frédérique Lardet. Par cet amendement, nous proposons que les communes situées dans le périmètre d’application de la taxe sur les logements vacants puissent appliquer une majoration maximale de 100 % – et non plus de 60 % – de la part communale de la taxe d’habitation des logements meublés non affectés à l’habitation principale.

Dans des territoires comme la Haute-Savoie, très attractifs pour les touristes et les frontaliers, la situation du logement est très tendue, de sorte que le prix du mètre carré ne cesse de croître. Le rapporteur général ayant indiqué que cette question ferait l’objet d’une réflexion globale, je vais retirer l’amendement. Mais, dans ces zones, il devient urgentissime de trouver une solution ; je souhaite participer aux travaux annoncés en la matière.

Lamendement II-CF229 est retiré.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement a le même objet que celui de Mme Lardet. Je précise qu’il ne concerne, bien entendu, que les zones tendues et qu’il ne vise pas à instaurer un taux de majoration fixe : il s’agit seulement d’offrir aux communes concernées – dont fait partie Paris, par exemple – la possibilité de porter le taux de la majoration à 100 %.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme je l’ai indiqué, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut avis défavorable. Cette question doit faire l’objet d’une réflexion globale, car je crois également que la solution n’est pas uniquement d’ordre fiscal.

M. le président Éric Woerth. Je rappelle que la taxe d’habitation sur les résidences secondaires demeurera après la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales. On peut majorer la seule taxe qui existe, mais cela relève d’une logique étonnante. De même, on déplore que, dans les territoires touristiques, les résidences secondaires soient trop nombreuses, mais n’est-ce pas le propre de ces territoires et de leur économie que d’attirer les propriétaires de résidence secondaire ? Il existe certainement des solutions qui permettent de trouver des logements pour les résidents principaux, mais on ne peut pas tout avoir.

Lamendement II-CF814 est retiré.

La commission examine lamendement II-CF1500 de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Cet amendement va dans le même sens que les précédents. Une commune qui compte plus de 50 % de résidences secondaires se trouve dans une situation budgétaire particulière. Il faut donc offrir aux exécutifs locaux qui le souhaitent –  il ne s’agit pas d’une obligation – le moyen de surtaxer les résidences secondaires.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Jean-Félix Acquaviva. Cette question doit faire réellement l’objet d’une discussion globale. Certaines zones sont, de fait, très tendues. Certes, la fiscalité n’est pas l’alpha et l’oméga de la politique menée en la matière, mais elle est un outil important dont les communes concernées doivent pouvoir user librement, même si les logiques d’urbanisme doivent être prises en compte. J’espère donc que l’annonce d’une réflexion globale par le rapporteur général sera suivie d’effets. Quoi qu’il en soit, je soutiens l’amendement de M. Colombani.

M. Michel Castellani. D’une façon générale, les communes doivent avoir la liberté de mieux moduler leur politique en matière de taxes locales et de pouvoir « mordre » sur l’évolution du marché foncier. Il faut tenir compte de la situation particulière de certaines d’entre elles, en particulier en Corse, où le nombre de résidences secondaires excède très largement celui des résidences principales.

La commission rejette lamendement II-CF1500.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF1495 de M. Daniel Labaronne et II-CF1172 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Daniel Labaronne. Il est, en effet, nécessaire qu’un débat général ait lieu sur la question des reliquats de la taxe d’habitation. Ainsi, cet amendement, que je vais retirer, vise à remédier à l’inégalité de traitement dont pâtissent les organismes privés à but non lucratif exerçant des activités sanitaires, sociales et médico-sociales, puisque ceux-ci ne bénéficient pas, contrairement aux établissements publics sanitaires, sociaux et médico-sociaux, d’une exonération de la taxe d’habitation. Quant aux établissements privés de statut commercial, ils ne sont pas assujettis à cette taxe. Cette diversité de situations est tout à fait anormale et devra être prise en compte dans le débat que le rapporteur général a annoncé.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Demande de retrait des deux amendements ; à défaut, avis défavorable.

Les amendements II-CF1495 et II-CF1172 sont retirés.

La commission est saisie de lamendement II-CF457 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Marie-Christine Dalloz. Dès lors que la taxe d’habitation a été supprimée pour 80 % des ménages, il conviendrait, afin de favoriser la compétitivité de nos entreprises, de supprimer également la cotisation foncière des entreprises (CFE), qui est une forme économique de taxe d’habitation et qui n’a aucun lien avec les résultats de l’entreprise. Tel est l’objet de cet amendement ambitieux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le Gouvernement a fait le choix d’alléger la fiscalité des entreprises en prenant d’autres mesures fiscales, concernant notamment l’impôt sur les sociétés. En matière d’imposition locale, il a choisi de supprimer la taxe d’habitation sur les résidences principales, et je fais partie de ceux qui ont beaucoup insisté, malgré des vents contraires, pour que soit maintenue la règle du lien entre les taux pour éviter précisément qu’une pression trop importante ne s’exerce sur la CFE. J’ajoute que l’adoption de cet amendement entraînerait une perte de recettes fiscales non compensée de 8 milliards d’euros, entièrement supportée par les intercommunalités. Avis très défavorable.

M. le président Éric Woerth. C’est toute la question des impôts de production. Bruno Le Maire a indiqué vouloir commencer par la C3S (contribution sociale de solidarité des sociétés), qui fait l’objet d’amendements depuis deux ans. Mais la CFE est la taxe d’habitation des entreprises ; la question se pose donc également.

La commission rejette lamendement II-CF457.

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement II-CF669 de M. François Pupponi.

Elle examine ensuite lamendement II-CF1259 de M. Benoit Simian.

M. Benoit Simian. Il s’agit de mettre fin à l’exonération de contribution économique territoriale (CET) pour ceux des exploitants viticoles qui n’utilisent pas des modes de production respectueux de l’environnement susceptibles de faire l’objet d’une certification « bio » ou « HVE (Haute valeur environnementale) 2 », par exemple – il appartiendra au Gouvernement d’en décider par décret.

Ce dispositif, qui a une visée environnementale incitative, a été élaboré avec les producteurs du Médoc, où il existe une attente dans ce domaine. Lors de son déplacement dans ma circonscription, Bruno Le Maire a pris position publiquement sur cet amendement, dont le coût serait nul et qui inciterait les exploitants viticoles à sortir de la chimie. Actuellement, 99 % des exploitations viticoles de ma circonscription sont engagées dans une démarche agro-environnementale vertueuse ; il faut les encourager.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons abordé tout à l’heure la question de la haute valeur environnementale, qui doit faire l’objet de dispositifs incitatifs, à l’image du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique, par exemple. Or le dispositif que vous proposez est, non pas incitatif, mais punitif, puisqu’il s’agit de priver les personnes qui n’adoptent pas ce type de démarche du bénéfice d’une exonération. Je suis opposé à une telle mesure punitive, que je trouve très sévère pour les exploitants agricoles.

M. Benoit Simian. Bien entendu, cet amendement a été élaboré avec la filière – lorsqu’on est député du Médoc, on ne se met pas les exploitants à dos. Actuellement, toutes les propriétés viticoles y sont classées « HVE 2 » ou « HVE 3 ». J’ajoute que la situation actuelle est vécue par nos concitoyens comme une injustice fiscale, car le boulanger d’une petite commune paie la CET quand le viticulteur, qui est souvent le « viti-actionnaire » d’une multinationale, ne paie rien. C’est une mesure redistributive qui vise à inciter ces viticulteurs à contribuer à l’effort territorial.

La commission rejette lamendement II-CF1259.

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Article additionnel après l’article 48
Aménagement de lexonération de cotisation foncière des entreprises
pour les sociétés de presse

La commission est saisie des amendements identiques II-CF1383 de Mme Émilie Cariou et II-CF1418 de Mme Marie-Ange Magne.

Mme Émilie Cariou. Il s’agit de procéder aux coordinations rendues nécessaires par les évolutions de la distribution de la presse liées à l’application de la loi relative à la modernisation de la distribution de la presse.

Des sociétés coopératives de groupage de presse sont substituées aux sociétés coopératives de messageries de presse. Or la loi consacre la possibilité pour les premières, composées d’entreprises de presse, de ne pas effectuer elles-mêmes les opérations de groupage et de distribution des titres de leurs associés, mais de pouvoir recourir au service de sociétés agréées de distribution de la presse. Cet amendement a donc pour objet de modifier l’article 1458 du code général des impôts, dont le 1° bis est relatif à l’exonération de CFE pour les sociétés de ce secteur.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Favorable à ces amendements que j’ai cosignés.

La commission adopte les amendements II-CF1383 et II-CF1418 (amendement II-2518).

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Après l’article 48

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF454 de Mme Véronique Louwagie.

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Article additionnel après l’article 48
Exonérations de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes
en faveur de la batellerie artisanale

La commission examine ensuite lamendement II-CF1385 de Mme Émilie Cariou.

Mme Émilie Cariou. Il s’agit de tenir compte de la dissolution de la chambre nationale de la batellerie artisanale, votée en loi de finances pour 2019, et de préserver le régime fiscal dont bénéficient les entreprises de batellerie artisanale antérieurement immatriculées au registre de la CNBA.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Après les premières propositions faites sur le sujet par M. Ahamada, je suis favorable à cet amendement, qu’il a, du reste, cosigné.

La commission adopte lamendement II-CF1385 (amendement II-2519).

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Après l’article 48

Puis la commission est saisie des amendements identiques II-CF948 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1532 de M. Benoit Potterie.

Mme Marie-Christine Dalloz. La valeur locative de chaque propriété bâtie est déterminée, en vertu de l’article 1498 du code général des impôts, par application d’un tarif au mètre carré à la surface pondérée d’un local. À la suite de la révision des valeurs locatives cadastrales, il peut être appliqué un coefficient de localisation aux tarifs par mètre carré, lesquels peuvent ainsi être majorés de 1,1, 1,15, 1,2 ou 1,3 ou minorés de 0,7, 0,8, 0,85 ou 0,9. Toutefois, cette modulation est quasi systématiquement appliquée à la hausse. Le présent amendement vise donc à introduire dans la loi le même mécanisme de modération que celui qui existe déjà pour la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), afin que le coefficient multiplicateur ne puisse varier de plus de 0,05 chaque année.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Défavorable. Ces coefficients sont liés aux caractéristiques du lieu. En outre, l’article 52 relatif à la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation prévoit que les révisions de coefficient de localisation ne pourront désormais avoir lieu que tous les deux ans, ce qui devrait permettre de promouvoir la stabilité fiscale que nous recherchons tous.

La commission rejette les amendements II-CF948 et II-CF1532.

Elle examine ensuite les amendements identiques II-CF945 de Mme MarieChristine Dalloz et II-CF1530 de M. Benoit Potterie.

Mme Marie-Christine Dalloz. Depuis quelques années, les représentants des commerçants réclament la mise en œuvre d’une véritable réforme de la fiscalité locale afin de l’adapter à l’évolution des formes d’activité. L’amendement II-CF945 a ainsi pour objet d’alléger la fiscalité assise sur les surfaces de vente en créant un abattement de 30 % pour la détermination de la valeur locative des locaux commerciaux.

M. Benoit Potterie. L’amendement II-CF1530 a pour objet d’alléger la fiscalité assise sur les surfaces de vente en créant un abattement de 30 % pour la détermination de la valeur locative des locaux commerciaux qui est utilisée pour l’établissement de la taxe foncière sur les propriétés bâties et la CFE.

En effet, notre modèle de fiscalité date d’une époque où le commerce ne se faisait qu’en magasin et était florissant. Or tel n’est plus le cas aujourd’hui : le commerce physique est en grande difficulté. Tout le monde s’accorde ainsi à reconnaître la nécessité d’une réforme de la fiscalité locale, qui n’est plus adaptée au mode de distribution actuel et futur. Pourtant, rien ne bouge. C’est pourquoi, en attendant cette réforme, nous vous proposons cette mesure, que je vous invite à adopter si vous ne voulez pas voir disparaître toute une partie de notre économie génératrice d’emplois.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons déjà parlé du e‑commerce, sur lequel une mission est en cours. Dans la mesure où nous avons obtenu en séance publique, de la part du Gouvernement, l’engagement que le rapport serait remis dans les prochains mois au Parlement, et où nous constituerons ici sur cette base un groupe de travail transpartisan sur la fiscalité du e‑commerce, je vous suggère de retirer vos amendements.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il y a toujours un rapport ou quelque chose à attendre pour faire évoluer les choses. Je maintiens mon amendement d’appel !

La commission rejette les amendements II-CF945 et II-CF1530.

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Article additionnel après l’article 48
Modification des règles de détermination de la valeur locative
des installations de stockage de déchets

La commission passe aux amendements identiques IICF1345 rectifié du rapporteur général et IICF1543 du président Éric Woerth.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Monsieur le président, je vais avoir la courtoisie de vous laisser défendre votre amendement, qui est identique au mien.

M. le président Éric Woerth. Nous avons en effet la même idée, concernant le stockage des déchets. Il s’agirait de soumettre les alvéoles de stockage en fin de vie, c’est‑à‑dire fermées, à un régime fiscal distinct, au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de celui des alvéoles en activité. La situation actuelle pose des problèmes à l’administration fiscale, et les options diffèrent selon les départements. L’amendement permettrait d’adapter la fiscalité à la réalité du bien immobilier.

Mme Émilie Cariou. Pourriez‑vous préciser les personnes morales visées par votre amendement ? Quel est son effet exact ? S’agit‑il d’une exonération ou d’une modification de la nature de la taxe foncière ?

M. le président Éric Woerth. C’est la modalité de calcul qui est modifiée, pour la phase de post‑exploitation des installations.

Mme Émilie Cariou. Est‑ce à dire que les locaux passeraient d’un statut industriel à un simple statut professionnel ?

M. le président Éric Woerth. Absolument ! Afin de coller à la réalité de la situation.

Mme Émilie Cariou. En ce cas, nous serons favorables à ces amendements.

La commission adopte les amendements II-CF1345 rectifié et IICF1543 (amendement II-2520).

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Après l’article 48

La commission examine ensuite lamendement IICF460 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Marie-Christine Dalloz. Nous constatons, depuis quelques années, que la notion d’immobilisation industrielle est appliquée selon une géométrie variable par l’administration fiscale. Le Gouvernement avait rendu en 2018 un rapport, dont nous proposons d’appliquer les conclusions, en rehaussant à un million d’euros le seuil en deçà duquel un local ne serait pas qualifié de « local industriel ».

M. Joël Giraud, rapporteur général. Madame Dalloz, vous oubliez que nous avons déjà travaillé tous ensemble sur cette question et trouvé l’an dernier un consensus autour de 500 000 euros. Alors que la mesure entre en vigueur en 2020, vous proposez de revenir sur ce consensus, ce qui me semble particulièrement inopportun, d’autant que l’amendement aurait des conséquences significatives pour les collectivités territoriales. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avions retenu le seuil de 500 000 euros, en l’absence d’évaluation précise. Essayons de ne pas revenir sur une mesure qui n’est pas encore appliquée !

Mme Marie-Christine Dalloz. Le « consensus » était le fait de la majorité. Nous avons, pour notre part, considéré que 500 000 euros n’était pas un seuil suffisant. C’est pourquoi nous proposons ambitieusement de le doubler.

La commission rejette lamendement II-CF460.

Elle passe à lexamen des amendements IICF1227, IICF1228, IICF1229 et IICF1230 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin. Des maires et des commerçants de ma circonscription m’ont fait part de problèmes concernant la taxe foncière sur les propriétés bâties à usage professionnel. En 2017, des revalorisations de base importantes ont été accompagnées de deux dispositifs pour définir un encadrement des taxes et lisser les effets jusqu’en 2025, afin que la trésorerie des entreprises puisse les supporter. Ces dispositifs sont efficaces et utiles, mais, dans certains cas, ils tombent, notamment lorsque le propriétaire fait des travaux concernant plus de 10 % de la surface du local. Un restaurateur de ma circonscription, qui a créé des douches pour transformer son restaurant en restaurant routier, a ainsi vu sa taxe foncière passer de 3 000 à 14 000 euros !

C’est pourquoi je vous propose de jouer sur la notion de surface, en passant à 20 % ou, à tout le moins, en offrant aux communes cette possibilité. Je présente également une solution de repli consistant à limiter la hausse de la taxe foncière – sur les deux années qui suivent la perte du bénéfice du lissage – à 50 % du montant de la taxe foncière acquittée l’année précédente la première année et à 75 % la seconde année.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable. Vous introduisez un élément de différenciation entre les collectivités, ce qui poserait un vrai problème de constitutionnalité. Par ailleurs, un changement de consistance de plus de 10 % signifie un accroissement de plus de 10 % de la surface d’un commerce. Il me semble normal, dans ce cas, d’appliquer les valeurs locatives révisées.

Je crois qu’il faut éviter de tenter de repousser l’entrée en vigueur, déjà très progressive, des nouvelles valeurs locatives des locaux professionnels. En plus du lissage, il existe, comme vous l’avez précisé, un mécanisme d’encadrement ainsi qu’un coefficient de neutralisation visant à maintenir constantes les proportions des locaux professionnels et des locaux d’habitation dans l’assiette des taxes locales perçues. Étant donné que cela me semble suffisant, je vous suggère de retirer vos amendements.

Mme Cendra Motin. Les commissions départementales peuvent décider d’appliquer un coefficient particulier à certains lots cadastraux. La différenciation existe donc de fait, même si elle ne doit pas s’appliquer dans ce type de cas.

L’exemple que je vous ai donné laisse supposer un accroissement du chiffre d’affaires. Mais, par exemple, dans le cas d’une démolition de la partie vétuste d’un bâtiment, l’entreprise perd également l’avantage de l’encadrement et du lissage. Je continuerai à vous « harceler » d’ici à la séance, mon cher rapporteur général, pour vous exposer mes motifs et mon point de vue.

Les amendements IICF1227, IICF1228, IICF1229 et IICF1230 sont retirés.

La commission examine les amendements identiques IICF877 de Mme Frédérique Lardet et IICF1002 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Frédérique Lardet. L’amendement vise à proroger jusqu’au 31 décembre 2022 la non-imposition au titre de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER) des sites mobiles construits en montagne. Depuis juin 2017, selon les chiffres de la fédération française des télécoms, 3 166 nouveaux sites 4G ont été activés en zone de montagne pour atteindre un total de 6 258 sites. L’exemption d’IFER a entraîné une accélération significative des déploiements de sites mobiles dans les territoires de montagne, lesquels cumulent pourtant des contraintes liées au relief, à l’altitude et au climat.

M. Michel Castellani. Les dispositions relatives à l’IFER, qui ont été très favorables au déploiement des sites mobiles, cesseront malheureusement le 31 décembre 2020. C’est pourquoi l’amendement II-CF1002 propose de proroger jusqu’au 31 décembre 2022 la non‑imposition au titre de l’IFER des stations construites en montagne.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je connais bien ces amendements de l’Association nationale des élus de la montagne ! Les dispositions actuelles ont été définies dans la loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, adoptée en décembre 2016. Depuis lors, des dispositions complémentaires ont été mises en œuvre. Par ailleurs, le système d’exonération, tel qu’il a été conçu dans la loi, est valable sans limite de temps.

Sur le fond, je ne suis pas opposé à une prorogation du dispositif pour soutenir les nouveaux sites dans les zones de montagne, mais faisons alors en sorte que l’exonération soit limitée dans le temps. Je vous suggère de retirer vos amendements, pour que nous puissions réfléchir, d’ici à la séance, à un dispositif de prorogation qui serait mieux encadré. Ce qui était vrai en 2016 ne l’est plus forcément aujourd’hui et demande, en tout état de cause, à être réexaminé. Les concessions perpétuelles ne sont pas toujours la meilleure solution. Retrait ou avis défavorable.

Lamendement IICF877 est retiré.

M. Michel Castellani. Je ne comprends pas votre argumentation, monsieur le rapporteur général, puisque notre amendement propose une borne au 31 décembre 2022.

Mme Christine Pires Beaune. Bien qu’élue de montagne, je soutiens le rapporteur général, parce qu’il faut adapter la situation aux décisions récentes, notamment au new deal mobile. Aujourd’hui, nous avons déjà donné les moyens aux opérateurs de se déployer. En outre, les choix sont faits localement, puisque des commissions font remonter les lieux d’implantation. Faisons confiance aux élus. Il n’y a pas de raison de mieux traiter les usagers occasionnels de certaines stations que les usagers permanents de certains territoires.

La commission rejette lamendement IICF1002.

Puis elle examine, en discussion commune, lamendement IICF1202 de M. Éric Bothorel, les amendements identiques IICF919 de Mme Marie-Christine Dalloz et IICF1201 de M. Éric Bothorel, ainsi que lamendement IICF1203 de M. Éric Bothorel.

M. Éric Bothorel. Je vais présenter mes trois amendements en même temps. Ils visent à introduire une exemption d’IFER mobile pour les stations radioélectriques 5G qui seront construites entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2025, afin de garantir les conditions d’un déploiement rapide et effectif de la 5G. C’est un premier pas indispensable avant une refonte plus complète du dispositif. Sans une modération fiscale spécifique à la 5G, l’IFER mobile augmentera de 80 millions d’euros en 2025, soit une hausse de 37 %.

Deux de mes amendements visent également à demander un rapport. L’échange qui vient d’avoir lieu sur les dispositifs en montagne apporte de l’eau à mon moulin sur la nécessité de clarifier la politique de l’IFER, qui n’est plus lisible. Compte tenu des enjeux technologiques à venir, le new deal mobile ne diminue pas la pression mise sur les opérateurs pour déployer un certain nombre d’antennes – la 5G en nécessite beaucoup.

Mme Marie-Christine Dalloz. Aujourd’hui, le montant de la taxe s’élève à 1 657 euros par an et par dispositif technologique. Ainsi, si un même pylône est équipé d’une antenne 2G, d’une antenne 3G, d’une antenne 4G et, à partir de 2020, d’une antenne 5G, la taxe est exigible quatre fois. Cela est contradictoire. On voudrait que les territoires soient équipés en 5G – un plan très haut débit a été lancé par le Président de la République –, mais plus il y aura d’équipements, plus cela sera coûteux pour les réseaux mobiles. C’est pourquoi l’amendement vise à introduire une exemption d’IFER mobile pour les stations radioélectriques 5G qui seront construites entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2025, afin de garantir les conditions d’un déploiement rapide et effectif de la 5G.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous devez vous douter que je vais tenir des propos comparables à ceux de tout à l’heure, puisque la proposition est pire cette fois. Ce n’est pas borné dans le temps, Madame Dalloz. La construction est certes bornée, mais pas l’exonération qui, elle, vaut sans limite. Par ailleurs, les exonérations à caractère général sur la 5G pour de grands groupes de téléphonie mobile ne sont peut‑être pas la condition unique de leur survie. Enfin, il existe déjà des réductions de tarifs pour les nouvelles stations : le tarif est réduit de 75 % pour les nouvelles stations au titre des trois premières années d’imposition et de 50 % pour les stations assurant la couverture de zones blanches par un réseau de radiocommunications mobiles. Restons-en là. Avis défavorable.

La commission rejette successivement lamendement II-CF1202, les amendements identiques II-CF919 et II-CF1201 et lamendement II-CF1203.

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Article additionnel après larticle 48
Tarif de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau applicable aux installations de production de gaz naturel liquéfié

La commission est saisie de lamendement IICF1074 de M. Saïd Ahamada.

M. Saïd Ahamada. Les installations de production de gaz naturel liquéfié (GNL) sont soumises à l’IFER. Le montant forfaitaire qui leur est appliqué est beaucoup trop élevé pour les installations modestes, qu’il met en péril au moment même où nous souhaitons développer la filière. L’amendement vise à appliquer un tarif différencié en fonction des capacités de stockage des méthaniers.

Suivant lavis favorable du rapporteur général, la commission adopte lamendement II-CF1074 (amendement II-2521).

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Après l’article 48

Puis la commission examine lamendement IICF551 de M. Xavier Paluszkiewicz.

M. Xavier Paluszkiewicz. C’est un petit-fils et arrière-petit-fils de mineurs qui défend cet amendement visant à régler le problème de la redevance communale des mines, dont la répartition est devenue complètement obsolète. Ce fonds est scindé en trois fractions : 35 % pour les communes sur lesquelles se situe la mine ; 10 % pour les communes intéressées en fonction du tonnage ; 55 % pour les communes dans lesquelles les mineurs sont domiciliés. Or, s’il y a quelques décennies, les mineurs habitaient à proximité immédiate de l’exploitation, cela n’est plus vraiment le cas.

D’autres départements que la Meurthe‑et‑Moselle sont concernés : la Moselle, la Meuse, la Côte‑d’Or, les Vosges et la Martinique. En modifiant le seuil de répartition de la troisième fraction au prorata du nombre d’ouvriers ou d’employés travaillant dans la commune d’exploitation et non plus en fonction du lieu où ils sont domiciliés, l’amendement permettrait une répartition plus juste et mieux adaptée à la vie moderne. Cela ne coûtera pas « un flèche » de plus, comme on dit chez nous.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous proposez de modifier par la loi des dispositions de nature réglementaire, ce qui pose problème. Par ailleurs, est‑il vraiment possible de distribuer une partie de l’aide aux communes dans lesquelles ne résiderait qu’un ouvrier minier ? Cela conduirait à un saupoudrage excessif au détriment des villes ouvrières et minières.

M. Xavier Paluszkiewicz. C’est le contraire, monsieur le rapporteur général ! L’idée est de ne pas saupoudrer dans des communes lointaines, mais de se concentrer sur les communes où l’exploitation minière existe.

Mme Émilie Cariou. C’est bien l’inverse, en effet. Aujourd’hui, la redevance est en grande partie distribuée à des communes où se situent les logements des mineurs et non pas aux communes minières. C’est un amendement intéressant. À titre personnel, je lui trouve un défaut, puisque, dans sa rédaction actuelle, il s’appliquerait également aux hydrocarbures liquides et gazeux. Je vous propose d’en revoir la rédaction pour le redéposer en séance et en discuter avec le ministre.

M. Thibault Bazin. Ce sujet revient chaque année. J’avais d’ailleurs déposé un amendement similaire sur un précédent projet de loi de finances. À chaque fois, le Gouvernement nous répond d’attendre la réforme du code minier, laquelle n’arrive jamais.

Mme Émilie Cariou. Je n’ai pas dit ça !

M. Thibault Bazin. La question de l’étude d’impact se pose également. Il existe actuellement une concentration sur certaines communes. Des communes souffraient, historiquement, des externalités négatives des mines, mais bénéficiaient d’externalités positives grâce aux dotations et à la présence sociale. Aujourd’hui, à cause du faible nombre d’employés miniers, elles ne bénéficient plus du tout de la dotation. Les sommes ne seraient pas ridicules, au regard du budget des communes. Il faudrait étudier précisément les gagnants et les perdants de la mesure proposée.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je répète qu’il s’agit de dispositions réglementaires. Qui plus est, si vous voulez retravailler l’amendement, vous pouvez le faire, à cette réserve qu’il concerne une modification qui n’est pas d’ordre législatif. Dans sa rédaction actuelle, vous faites sauter le seuil de dix ouvriers, ce qui conduit à une répartition à partir du premier ouvrier. Je pense que vous faites l’inverse de ce que vous souhaitez. Je propose le retrait.

M. Charles de Courson. Nous avions le même problème avec les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. C’est pourquoi nous avions confié aux conseils départementaux le soin de les répartir en fonction de plusieurs critères. Il serait préférable de confier aux conseils départementaux la répartition de cette troisième fraction, mine par mine. Le seuil de dix salariés a été défini afin d’éviter de distribuer des fonds pour un ou deux salariés dans la commune.

Lamendement II-CF551 est retiré.

La commission est saisie de lamendement IICF1245 de Mme Frédérique Tuffnell.

M. Benoit Simian. Après l’enfant des mines, celui des marais… Quand j’étais maire, j’avais à gérer un marais de 300 hectares. Les zones humides sont au cœur de la transition écologique et solidaire. L’amendement vise à exonérer les propriétaires de zones humides de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti. Ces terrains représentent d’énormes investissements en matière de préservation. Nous avions eu un débat avec vous, monsieur le rapporteur général, il y a quelques semaines, et vous aviez suggéré à Mme Tuffnell de redéposer l’amendement, ce que nous avons fait.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai dit sur l’amendement précédent concernant les zones humides qu’il convenait de proposer un amendement global, afin d’en discuter en séance. Je vous suggère de le retirer

Lamendement II-CF1245 est retiré.

La commission examine lamendement IICF927 de Mme MarieChristine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Plusieurs jurisprudences ont fragilisé la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Malgré un vrai travail de fond, il demeure difficile de faire le lien entre le code général des impôts et celui des collectivités territoriales. C’est pourquoi je vous propose, grâce à une rédaction modeste, de permettre une coordination et une sécurisation de la taxe, qui sera ainsi rendue plus lisible pour les collectivités territoriales.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit de précisions d’ordre réglementaire. Par ailleurs, il est d’ores et déjà possible de prendre en compte les dépenses concernées dans le cadre du financement du service public de collecte et de traitement des déchets. Enfin, la notion de coût net moyen annualisé des dépenses d’investissement d’immobilisations non amorties et n’ayant pas donné lieu à la constitution de dotations aux amortissements sera extrêmement difficile à calculer et à contrôler. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF927.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette successivement lamendement IICF925 de Mme MarieChristine Dalloz, les amendements identiques IICF928 de Mme Marie–Christine Dalloz et IICF1043 de M. Bertrand Pancher, ainsi que lamendement IICF1226 de Mme Sarah El Haïry.

La commission est saisie de lamendement IICF456 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement vise à modifier le calcul de la valeur ajoutée servant pour la cotisation sur la valeur ajoutée et le plafonnement de la contribution économique territoriale, en se basant sur la valeur réelle nette des matériels et en déduisant de cette valeur ajoutée leur amortissement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. D’un point de vue comptable, votre amendement me semble plutôt illogique, la valeur ajoutée correspondant à la valeur de production minorée des consommations intermédiaires. Il s’agit d’un solde intermédiaire de gestion qui se trouve au‑dessus de la prise en compte des amortissements, ces derniers n’intervenant qu’à partir du résultat brut d’exploitation, qui suit l’excédent brut d’exploitation (EBE), lui‑même suivant la valeur ajoutée. Il n’est donc pas anormal que les dotations aux amortissements des biens corporels et incorporels ne soient pas prises en compte pour la détermination de la valeur ajoutée. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF456.

Puis elle examine lamendement IICF802 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement vise à revenir sur le taux réduit de taxe de publicité foncière ou de droit d’enregistrement en zone tendue. La minoration du taux devant favoriser la construction en zone peu tendue, il n’est pas logique d’en faire bénéficier les zones tendues.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai le sentiment que votre argument n’est pas le bon. Le taux réduit n’est pas une faveur faite au neuf, mais la contrepartie de l’assujettissement de l’opération à la TVA. Votre amendement reviendrait à pénaliser le neuf. Je vous suggère donc de le retirer.

Lamendement II-CF802 est retiré.

La commission examine les amendements identiques IICF414 de M. Stéphane Peu et IICF628 de M. François Pupponi.

M. Jean-Paul Dufrègne. Le bail réel solidaire a institué une dissociation de la propriété du foncier et du bâti. Ces opérations impliquent plusieurs mutations immobilières. Ainsi, dans le cas le plus courant, l’organisme de foncier solidaire (OFS) achète un terrain ou un immeuble bâti – première mutation –, puis concède des droits réels, grâce à un bail réel solidaire, à un opérateur – deuxième mutation –, lequel va, après avoir construit ou rénové les logements, céder ses droits à un ménage – troisième mutation –, chacune de ces mutations étant en principe soumise à la taxe de publicité foncière ou aux droits d’enregistrement.

Afin d’éviter ces situations et d’encourager ce type d’opération, il est proposé de soumettre les acquisitions immobilières réalisées par les OFS au droit fixe de 125 euros, étant précisé que la cession des droits aux ménages reste, quant à elle, soumise aux droits d’enregistrement selon les règles de droit commun, en fonction des modalités du contrat et de l’âge de l’immeuble.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ces opérations bénéficient déjà d’exonérations fiscales, notamment en ce qui concerne la taxe de publicité foncière et la taxe foncière sur les propriétés bâties, avec un abattement de 30 % sur la base d’imposition. Soit dit en passant, je m’étonne que Jean‑Paul Dufrègne défende une mesure qui se traduirait par une perte de recettes pour les départements ! Cela pèserait surtout sur les départements qui ont le plus de logements sociaux et qui sont les plus pauvres. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Dufrègne. J’adore quand le rapporteur général fait un petit tacle ! Nous proposons de compenser la perte de recettes pour les collectivités par une majoration de leur dotation de fonctionnement.

La commission rejette les amendements II-CF414 et II-CF628.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques IICF415 de M. Stéphane Peu, IICF629 de M. François Pupponi et IICF702 de M. Thibault Bazin, ainsi que lamendement IICF1301 de M. Thibault Bazin.

M. Jean-Paul Dufrègne. Afin de favoriser les opérations d’accession à la propriété destinées aux ménages modestes, l’amendement vise à permettre aux conseils départementaux qui le souhaitent d’exonérer de droits d’enregistrement les ventes de logements réalisées dans ce cadre, sous réserve du respect des conditions qui s’imposent aux organismes HLM en matière d’accession sociale à la propriété, qu’il s’agisse des plafonds de ressources des accédants, du plafonnement des prix de vente ou encore des garanties de rachat et de relogement. Je vous précise, monsieur le rapporteur général, que ceux qui voudraient entrer dans ce processus le feront d’une manière volontaire et mesureront, à ce moment, la perte de recettes qui peut en découler.

Lamendement IICF1301 est retiré.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ces amendements ont déjà été rejetés l’an dernier. Votre outil fiscal serait aux mains des départements, alors que la politique publique afférente relève plutôt du bloc communal. Je confirme l’avis défavorable de l’automne 2018.

M. Thibault Bazin. Je veux bien que cela relève du bloc communal, mais on promeut pourtant la délégation des aides à la pierre au niveau du département. Ce n’est donc pas qu’une affaire communale ou intercommunale, puisque plusieurs départements ont des programmes d’aide à la pierre et ont mené des actions en faveur de l’accession à la propriété.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est pour cela que j’ai précisé « plutôt », monsieur le député.

La commission rejette les amendements identiques II-CF415 et II-CF629, ainsi que lamendement II-CF702.

Puis elle examine les amendements identiques IICF417 de M. Stéphane Peu et IICF631 de M. François Pupponi.

M. Jean-Paul Dufrègne. Face aux difficultés d’accès au logement des personnes les plus démunies, l’Union sociale pour l’habitat a proposé un dispositif visant à développer, avec le concours d’associations agréées d’intermédiation locative volontaires, l’intervention des organismes HLM dans le parc privé.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette les amendements II-CF417 et II-CF631.

Elle examine ensuite lamendement IICF71 de M. Thomas Rudigoz.

M. Thomas Rudigoz. L’amendement vise à ce que dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants dotées d’un plan de mobilité approuvé, une taxe sur les déplacements effectués au moyen de véhicules terrestres à moteur, dénommée « tarif de transit », puisse être instituée, à titre expérimental et à la demande de l’autorité organisatrice de la mobilité. L’objectif est de limiter les nuisances associées au trafic de transit et d’inciter au report sur les axes de contournement prévus dans et en dehors de l’agglomération.

Je tiens à bien préciser qu’il ne s’agit pas d’un péage urbain. Cette tarification de transit ne touchera pas les habitants de l’agglomération, comme cela se fait à Londres, par exemple, mais ne concernera que le trafic de transit national et international.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je comprends, bien évidemment, votre souhait d’éviter que le trafic de transit traverse les métropoles. Malheureusement, votre dispositif vise l’ensemble des véhicules des particuliers. Plusieurs difficultés avaient déjà été soulevées lors de l’examen de votre proposition dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités (LOM). Dans un système où le « transit » n’est pas précisément défini, un risque existe que la taxe de transit finisse par ne plus en être une. Par exemple, quel est le transit entre Villefranche‑sur‑Saône et L’Isle‑d’Abeau ? L’absence de définition de la notion même de transit pose un problème, qui peut laisser la place à des interprétations abusives pour les usagers. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF71.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite lamendement IICF455 de Mme Véronique Louwagie.

Puis elle examine lamendement IICF30 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard. Afin de faciliter le travail des départements et de permettre aux communes qui ont subi des dégâts naturels d’être accompagnées par le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), l’amendement vise à préciser une date limite de notification par l’État, avant le 30 juin, du montant du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle pour chaque département, afin de laisser au département un délai suffisant pour délibérer sur sa répartition avant le 30 septembre, date butoir fixée par les préfets. Nous laissons deux mois aux départements pour effectuer la répartition.

Deuxièmement, afin de faire face à des situations exceptionnelles, nous proposons qu’une partie des crédits de ce fonds soit répartie au bénéfice de communes défavorisées ayant connu des catastrophes naturelles et à la réalisation d’ouvrages de protection contre les risques naturels ou en faveur de l’environnement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je pense que le FDPTP ne doit pas devenir une enveloppe mobilisable pour financer des projets, sous le contrôle du département, dans la mesure où c’est avant tout un fonds de péréquation. Le financement se ferait au désavantage d’autres communes défavorisées. Il ne faut pas mélanger les exercices de péréquation et ceux de financement de projets. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF30.

Elle est ensuite saisie de lamendement IICF17 de M. Marc Le Fur.

Mme Marie-Christine Dalloz. Actuellement, par un effet de bord, les éoliennes sont exclues de la taxe d’aménagement, étant donné qu’elles ne sont pas soumises à un permis de construire. Il serait logique de les réintégrer dans le dispositif.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’installation d’une éolienne sur un territoire apporte de la CFE, de la CVAE, ainsi que de l’IFER éoliennes terrestres, cette imposition représentant plus de 70 % de la fiscalité sur les éoliennes. Avis plutôt défavorable, même s’il serait intéressant que vous demandiez au Gouvernement, en séance, pour quelle raison exactement les éoliennes ont été exclues du dispositif de la taxe d’aménagement.

Lamendement II-CF17 est retiré.

La commission examine lamendement IICF389 de M. Loïc Prudhomme.

Mme Sabine Rubin. L’amendement vise à modérer l’artificialisation des espaces naturels agricoles ou forestiers, celle-ci étant source de nombreux dangers pour les populations, notamment en matière de crues. Or cette artificialisation ne cesse d’augmenter, en moyenne de 1,4 % par an depuis 1992. La France s’est engagée, dans son plan national biodiversité, à lutter contre l’artificialisation des terres. L’amendement s’inscrit dans cette démarche, en visant à supprimer l’abattement de 50 % de la taxe d’aménagement pour les locaux à usage industriel ou artisanal et leurs annexes, les entrepôts et les hangars non ouverts au public, qui ont une empreinte sur l’artificialisation des sols.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement a déjà été rejeté l’an dernier, et j’y suis toujours défavorable. Le fait de s’acquitter de la taxe d’aménagement n’a pas forcément pour corollaire l’artificialisation d’un sol. La construction d’étages supplémentaires, par exemple, est plutôt vertueuse en ce sens. Je vous suggère de retirer votre amendement qui serait contre-productif.

Mme Sabine Rubin. Les aménagements ne se font pas nécessairement en hauteur. Je parlais des nouvelles constructions au sol à usage industriel.

La commission rejette lamendement II-CF389.

La commission est saisie de lamendement II-CF1167 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. L’objet de cet amendement est de permettre aux communes d’étendre aux propriétés bâties l’exonération prévue à l’article 72 de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dite loi biodiversité, qui ne concerne que les propriétés non bâties, afin de leur offrir davantage de souplesse dans la contractualisation. Nous faisons confiance aux maires et nous souhaitons leur donner encore plus de moyens.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je n’y suis pas favorable, car l’obligation environnementale réelle n’est pas suffisamment contraignante.

La commission rejette lamendement II-CF1167.

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Article additionnel après l’article 48
Prorogation en 2020 du régime des zones de revitalisation rurale

La commission discute de lamendement II-CF1483 de M. Daniel Labaronne.

M. Benoit Simian. Le présent amendement, qui s’inscrit dans le cadre du plan d’action « Nos campagnes, territoires d’avenir », vise à préserver le régime de zone de revitalisation rurale (ZRR) jusqu’au 31 décembre 2020 pour les communes qui devaient sortir du zonage.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est logique et cohérent : avis favorable.

M. Thibault Bazin. C’est cohérent avec les projets qui sont montés, mais le Gouvernement devra nous indiquer rapidement ce qu’il se passera après le 31 décembre 2020, car beaucoup de projets restent en suspens, notamment dans le domaine de la lutte contre la désertification médicale.

Mme Christine Pires Beaune. J’aurais aimé connaître l’avis de Mme Louwagie, qui a rédigé un rapport sur les ZRR qui propose plusieurs pistes.

Mme Véronique Louwagie. Le rapport que j’ai, en effet, rédigé avec ma collègue Anne Blanc fait état de plusieurs difficultés. L’une d’elles, objet du présent amendement, tient à ce que certaines communes ne répondant plus aux critères du zonage y ont été maintenues jusqu’au 30 juin 2020 afin de continuer à bénéficier de tous les dispositifs applicables aux ZRR. Afin d’éviter une sortie brutale de ces 4 074 communes, nous avions proposé à l’époque de réunir l’ensemble des acteurs des collectivités territoriales pour chercher une solution. Le report au 31 décembre 2020 me paraît dans ce contexte pertinent.

J’ajoute qu’à moins que nous ne prenions des dispositions particulières, toutes les exonérations fiscales s’appliquant aux entreprises arrivent à échéance au 31 décembre 2020. Il importera donc de mener une réflexion sur l’ensemble de ces dispositifs en 2020.

Mme Émilie Cariou. Les modalités de calcul ont en effet changé sous la précédente législature, excluant des communes dont les caractéristiques n’avaient pourtant pas changé : elles étaient rurales, avec un revenu par habitant très faible et une faible densité de population. Votre rapport envisage diverses pistes concernant les ZRR, tandis que celui de Daniel Labaronne propose une réforme du système de zonage. Nous nous engageons à y réfléchir afin d’éviter que le système prenne fin au 31 décembre 2020.

Mme Véronique Louwagie. Dans les conclusions du rapport, nous avions constaté que ces dispositifs n’atteignaient pas les objectifs recherchés. Les territoires concernés se trouvaient dans une situation marquée par le manque d’infrastructures et une baisse de la population. Nous avions donc émis l’idée qu’il faudrait revoir les dispositifs de soutien dans ces ZRR. Mais cela avait provoqué tellement de réactions qu’il nous a paru difficile de renoncer à l’ensemble des exonérations existantes.

M. Daniel Labaronne. Il s’agit de nous donner du temps pour engager une réflexion sur la géographie prioritaire, afin de centrer les dispositifs sur les territoires ruraux qui en ont le plus besoin. Près de la moitié des communes étant concernée par le dispositif ZRR, le rôle incitatif de certains dispositifs ne joue plus vraiment.

M. le président Éric Woerth. On ne peut pas reporter sans cesse ce dispositif ; il faut soit le confirmer, soit le moderniser, soit le changer complètement, soit supprimer tous les zonages et apporter une aide indépendante de la localisation, dans le cadre d’une politique transversale – il y a mille possibilités !

La commission adopte lamendement II-CF1483 (amendement II2522).

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Après l’article 48

Puis elle examine lamendement II-CF1260 de M. Benoit Simian.

M. Benoit Simian. L’objet du présent amendement est d’offrir la possibilité aux régions qui le souhaitent de créer, à titre expérimental, une taxe régionale sur les poids lourds. Un dispositif similaire a été prévu lors de la création de la collectivité européenne d’Alsace (CEA). Cela permettrait de trouver des financements pour entretenir notre réseau routier, qui ne cesse de se dégrader. La France chute ainsi de la septième à la dix-huitième place dans le dernier classement de l’état des routes établi par le Forum économique mondial : il y a donc véritablement urgence à trouver des financements innovants.

Prenant en compte la nécessité de préserver la compétitivité des entreprises de transports routiers, je défendrai un peu plus tard la suppression de la taxe à l’essieu, en contrepartie de la faculté laissée à l’initiative locale, telle cette taxe régionale sur les poids lourds.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Même si je suis, à titre personnel, un zélateur des écotaxes poids lourds, le dispositif abandonné en 2014 ne peut pas être recréé au détour d’un amendement : c’est le rôle du Gouvernement de proposer ce que l’on peut faire dans ce domaine. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Benoit Simian. Il s’agit d’un amendement d’appel, car je pense que la question doit être posée. Ce n’est pas parce que nous avons échoué au niveau national qu’il faut fermer les portes au niveau régional. Les bonnets rouges y étaient défavorables mais les bérets noirs, dans le Sud-Ouest, sont favorables à ce type de redevance sur les poids lourds, notamment quand ils sont en transit.

M. Charles de Courson. Nous avons voté un amendement dans la loi relative aux compétences de la collectivité européenne d’Alsace (CEA). Le Gouvernement a choisi de fixer par ordonnance le taux, les modalités, etc. Pourquoi ne pas vous y référer en prévoyant que le Gouvernement déciderait par ordonnance, puisque c’est ce qu’il a accepté dans le texte sur la CEA ? Je précise que, sur le fond, je suis favorable.

La commission rejette lamendement II-CF1260.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques II-CF120 de la commission des affaires économiques, II-CF295 de M. Dominique Potier et II-CF477 de Mme Véronique Louwagie.

M. Dominique Potier. L’amendement II-CF295 vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l’application de la capacité de modulation de la part communale et intercommunale de la taxe d’aménagement et sur ses effets au regard de la protection du foncier exempt de constructions antérieures.

Il s’agit de lutter contre la dégradation des terres et d’atteindre l’objectif de « zéro artificialisation nette ». Outre des règles d’urbanisme plus coercitives et plus cohérentes, l’effacement de l’effet spéculatif lors du changement d’usage des sols constitue un levier extrêmement précieux ; or il est peu utilisé. Le rapport aurait donc pour objet d’étudier comment optimiser ce levier fiscal.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce sujet est intéressant mais faut-il en faire un rapport ? Compte tenu du nombre de rapports, plus urgents, que nous attendons déjà, je suis dubitatif. Je donnerai un avis de sagesse sur le fond mais un avis défavorable sur la forme.

M. Dominique Potier. Si le Gouvernement avait présenté un calendrier précis pour la présentation d’une loi foncière, nous aurions pu retirer cet amendement mais, en l’occurrence, je le maintiens.

La commission rejette les amendements identiques II-CF120, II-CF295 et IICF477.

Elle en vient à lamendement II-CF478 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Le présent amendement demande la remise d’un rapport sur l’application actuelle du versement pour sous-densité, dispositif qui permet aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière de plan local d’urbanisme (PLU) qui le souhaitent d’instaurer un seuil minimal de densité par secteur. Il pourrait être intéressant de disposer d’un outil un peu plus pertinent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce sujet, déjà abordé lors de l’examen de la loi d’orientation des mobilités, dite LOM, avait fait l’objet d’un avis défavorable. Je confirme cet avis : si nous devons reparler de l’application du versement pour sous-densité, c’est sans doute le cadre du printemps de l’évaluation.

La commission rejette lamendement II-CF478.

Puis elle examine les amendements II-CF1204 et II-CF1421 de M. Éric Bothorel.

M. Éric Bothorel. Monsieur le rapporteur, vous évoquiez tout à l’heure les effets marginaux que pouvait avoir l’exonération de l’imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (IFER). Or les prix des forfaits télécoms ont chuté de 42 % en cinq ans, la France étant le pays qui propose les forfaits fixes et mobiles les moins chers. On peut s’en féliciter mais cela fait des recettes en moins pour les opérateurs téléphoniques, dont la dynamique de revenus se situe plutôt dans les marchés émergents, par exemple en Afrique. Il n’y a pas beaucoup d’argent à gagner en France quand on est opérateur téléphonique !

Je souhaite donc la remise de deux rapports, l’un sur la fiscalité des télécoms pour la partie mobile, l’autre sur la fiscalité des télécoms au sens global du terme. Nous avons accumulé des dispositifs qui ne sont plus tout à fait lisibles et qu’il me semble nécessaire de rénover. Les recettes, qu’il s’agisse de l’IFER mobile ou de l’IFER fixe, sont perçues par les collectivités.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je n’ai pas l’impression que nous ayons besoin d’un rapport annuel sur la fiscalité applicable à ce secteur d’activité. En revanche, nous avons instauré un printemps de l’évaluation dans le cadre duquel le rôle des rapporteurs spéciaux est précisément de faire le point sur ce type de dispositif. Je vous invite donc à retirer vos amendements et à vous rapprocher du rapporteur spécial de ce secteur. Le printemps de l’évaluation est la meilleure façon pour le Parlement de jouer son rôle d’évaluation sur bien des sujets. Évitons de demander au Gouvernement de s’y substituer.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1204 et II-CF1421.

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Article 49
Modification des modalités du forfait des dépenses de fonctionnement pour le calcul du crédit dimpôt recherche et du crédit dimpôt innovation

Résumé du dispositif proposé

L’assiette du crédit d’impôt recherche (CIR) et du crédit d’impôt innovation (CII) inclut les dépenses de fonctionnement exposées par l’entreprise, calculées selon un système de forfait dont le taux varie en fonction des dépenses auxquelles il se rapporte : 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations, 50 % des dépenses de personnel hors « jeunes docteurs » et, pour le seul CIR, 200 % des dépenses de personnel afférentes aux « jeunes docteurs ».

Ces taux, inchangés depuis 2011 pour le CIR et depuis sa création en 2013 pour le CII, se révèlent plus généreux que les dépenses de fonctionnement réellement engagées par les entreprises, notamment s’agissant des dépenses de personnel.

Le présent article procède donc à un ajustement du forfait des dépenses de fonctionnement en ramenant le taux afférent aux dépenses de personnel de 50 % à 43 %. La mesure s’appliquerait aux dépenses engagées à compter de 2020.

Le gain budgétaire tiré de cette mesure est estimé à 230 millions d’euros par an à compter de 2021.

L’article modifie également le seuil de dépenses de recherche dont le dépassement entraîne l’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire servant à mieux connaître l’utilisation du CIR : actuellement fixé à 2 millions d’euros, il serait rétabli à son niveau antérieur de 100 millions d’euros.

Dernières modifications intervenues

Les taux du forfait des dépenses de fonctionnement du CIR résultent de l’article 41 de la loi de finances pour 2011. Ceux du CII ont été introduits, en même temps que l’outil, par l’article 71 de la loi de finances pour 2013.

Le seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire a été ramené de 100 millions à 2 millions d’euros par l’article 151 de la loi de finances pour 2019.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission des finances, à l’initiative du Rapporteur général, a :

– introduit une obligation déclarative complémentaire allégée pour les entreprises exposant des dépenses de R&D comprises entre 10 et 100 millions d’euros ;

– sollicité du Gouvernement la remise d’un rapport exhaustif sur l’utilisation du CIR par les groupes et sur l’externalisation auprès de sous-traitants d’opérations de R&D.

I.   L’état du droit

Outils fiscaux de soutien à la recherche et à l’innovation, le crédit d’impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt innovation (CII) présentent un coût budgétaire élevé, justifiant certaines obligations documentaires renforcées et militant, dans le contexte budgétaire actuel, pour une rationalisation mesurée de leur assiette.

A.   Le CIR et le CII : des outils généreux reposant sur une assiette étendue

Prévu à l’article 244 quater B du code général des impôts (CGI), le CIR permet aux entreprises industrielles et commerciales ou agricoles qui sont imposées d’après leur bénéfice réel de jouir d’un avantage fiscal assis sur certaines dépenses exposées dans le cadre d’opérations de recherche scientifique et technique.

Les petites et moyennes entreprises, définies par renvoi au règlement européen général d’exemption par catégorie (RGEC) du 17 juin 2014 ([60]), peuvent également bénéficier du CII prévu au k du II du même article 244 quater B du CGI. Sont concernées les entreprises qui emploient moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel ou le total de bilan annuel n’excède pas, respectivement, 50 millions d’euros ou 43 millions d’euros.

1.   Les taux du CIR et du CII

Le taux de droit commun du CIR est de 30 % des dépenses éligibles. Il est majoré à 50 % pour celles engagées par des exploitations situées dans une collectivité territoriale régie par l’article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion) et, pour les dépenses engagées au titre d’exercices clos à compter du 31 décembre 2019, situées dans la Collectivité de Corse ([61]). Ce taux est ramené à 5 % pour la fraction des dépenses supérieure à 100 millions d’euros.

L’avantage ouvert par le CII, quant à lui, est égal à 20 % des dépenses éligibles, dans la limite de 400 000 euros par an. Ce taux est porté à 40 % pour les exploitations ultramarines ou situées en Corse.

Le tableau suivant dresse la synthèse des différents taux applicables.

taux du CIR et du CII

 

CIR

CII

Taux de droit commun

30 %

20 %

Taux majoré – outre-mer et Corse

50 %

40 %

Taux pour la fraction de dépenses supérieure à 100 M €

5 %

Source : commission des finances.

Illustration du calcul du CIR

Une entreprise engage au titre d’un exercice 120 millions d’euros de dépenses ouvrant droit au CIR.

● Si elle n’est pas établie en outre-mer ou en Corse, le montant du CIR auquel elle peut prétendre est égal à :

(100 × 30 %) + [(120 – 100) × 5 %], soit 30 + 1 = 31 millions d’euros.

● Si elle est établie en outre-mer ou en Corse et dès lors éligible au taux majoré, le montant du CIR est égal à :

(100 × 50 %) + [(120 – 100) × 5 %], soit 50 + 1 = 51 millions d’euros.

2.   L’assiette du CIR et du CII : les dépenses éligibles

Le CIR et le CII ne se confondent pas, le premier étant consacré aux travaux de recherche et développement (R&D) là où le second porte sur certaines dépenses d’innovation. Cependant, une même opération peut successivement relever de chacun des deux outils, d’abord du CIR au titre d’activités de R&D, puis du CII au titre d’activités innovantes.

La distinction entre R&D et innovation

La R&D consiste à faire progresser les connaissances scientifiques et techniques (« l’état de l’art ») à travers des travaux expérimentaux complexes reposant sur des technologies nouvelles. La définition des opérations de R&D s’appuie sur le « Manuel de Frascati » élaboré dans le cadre de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et dont la dernière édition remonte à 2002.

L’innovation, quant à elle, recouvre les opérations améliorant les performances de produits du point de vue technique, de leurs fonctionnalités, de l’ergonomie ou de l’écoconception. Elle est précisée par le « Manuel d’Oslo », également élaboré sous l’égide de l’OCDE et dont la troisième édition date de 2005 – une nouvelle édition parue en 2018 n’a pas encore été traduite en français.

En droit français, les opérations de recherche au sens du CIR sont définies à l’article 49 septies F de l’annexe III du CGI, qui distingue :

– la recherche fondamentale, qui apporte une contribution théorique ou expérimentale à la résolution de problèmes techniques à travers l’analyse des propriétés, structures et phénomènes physiques ou naturels ;

– la recherche appliquée, destinée à identifier les applications envisageables des résultats d’activités de recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles pour atteindre un objectif donné ;

– le développement expérimental effectué au moyen de prototypes ou d’installations pilotes.

La distinction entre R&D et innovation est la plus délicate en matière de développement expérimental. L’un des principaux critères de distinction réside dans la dissipation des incertitudes scientifiques ou techniques, cette dissipation relevant de la R&D.

La doctrine fiscale fournit de très nombreuses illustrations permettant d’appréhender les opérations relevant de la R&D et celles en étant exclues (1).

(1) Bulletin officiel des finances publiques  BOFiP –, BOI-BIC-RICI-10-10-10-20, § 210 à 580.

L’assiette du CIR et du CII est constituée de différents types de dépenses, certaines relevant strictement de la R&D (pour le CIR) ou de l’innovation (pour le CII), d’autres présentant un rattachement plus distant à ce type d’activités. L’ensemble de ces dépenses figurent au II de l’article 244 quater B, dont le k porte spécifiquement sur le CII.

En vertu du dernier alinéa du II de l’article 244 quater B, les opérations auxquelles les dépenses se rattachent doivent être localisées dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en matière fiscale. Cette condition de territorialité ne s’applique cependant pas à toutes les dépenses, une exception étant prévue pour celles relatives à la veille technologique et pour les frais de prise, de maintenance et de défense des brevets et des certificats d’obtention végétale.

a.   Les dépenses de R&D proprement dites

Les dépenses ouvrant droit au CIR qui relèvent de la R&D stricto sensu sont définies aux a à b bis du II de l’article 244 quater B du CGI et recouvrent les postes suivants :

– les dotations aux amortissements des immobilisations directement affectées à la réalisation d’opérations de R&D (hors immeubles acquis, achevés ou dont le permis de construire a été délivré avant 1991) (a du II) ;

– les dotations aux amortissements correspondant à la différence entre, d’une part, l’indemnisation d’assurance au titre d’un sinistre touchant une immobilisation affectée aux opérations de R&D, d’autre part, le coût de reconstruction et de remplacement (a bis du II) ;

– les dépenses de personnel relatives aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés aux opérations de R&D (b du II) ; sont retenues :

– les rémunérations versées aux salariés inventeurs dans le cadre d’opérations de R&D en application de l’article L. 611‑7 du code de la propriété intellectuelle (b bis du II) :

Ces dépenses sont retenues pour leur montant effectif. En revanche, et en application de la seconde phrase du b du II, les dépenses de personnel se rapportant à des titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent recrutés dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée (CDI) sont retenues pour le double de leur montant – prise en compte à hauteur de 200 %. Ce doublement d’assiette « jeunes docteurs » est toutefois encadré :

– il ne s’applique que pendant les vingt-quatre premiers mois suivants le recrutement ;

– l’effectif du personnel de recherche de l’entreprise ne doit pas avoir diminué par rapport à l’année précédente.

b.   Les opérations de sous-traitance

En vertu des d et d bis du II de l’article 244 quater B du CGI, les opérations de sous-traitance ouvrant droit au CIR permettent à une entreprise donneuse d’ordre de confier à certains organismes la réalisation d’opérations de R&D, selon des modalités prévues au d ter du même II et au III de cet article.

Deux types d’organismes sous-traitants doivent être distingués : les organismes publics ou assimilés (« sous-traitance publique ») et les organismes privés agréés (« sous-traitance privée »).

● Les organismes de recherche publics ou assimilés sont mentionnés au d du II. Ils réunissent notamment des établissements d’enseignement supérieur, certaines fondations agréées, des établissements publics de coopération scientifique, certaines associations régies par la loi du 1er juillet 1901, des instituts techniques ou encore des communautés d’universités.

S’il n’existe pas de lien de dépendance, au sens du 12 de l’article 39 du CGI, entre l’entreprise donneuse d’ordre et l’organisme sous-traitant public ou assimilé, les dépenses exposées par l’entreprise donneuse d’ordre dans le cadre de la sous-traitance publique sont prises en compte pour le double de leur montant. Ce doublement d’assiette vise à inciter les entreprises à externaliser certaines opérations de R&D et participe au développement de l’activité des organismes concernés.

Le lien de dépendance au sens du 12 de l’article 39 du CGI

La notion de lien de dépendance entre deux entreprises au sens du 12 de l’article 39 du CGI recouvre deux types de situations :

– une entreprise détient, directement ou indirectement, la majorité du capital de l’autre entreprise ou, à défaut, exerce dans cette dernière le pouvoir de décision ;

– les deux entreprises sont contrôlées par une troisième entreprise selon les mêmes modalités, c’est-à-dire que cette troisième entreprise détient la majorité du capital des deux autres ou qu’elle y exerce le pouvoir de décision.

La première situation correspond à une relation de type mère-fille, la seconde à une relation d’entreprises sœurs.

● L’autre catégorie d’organismes auxquels peuvent être confiées des opérations de recherche ouvrant droit au CIR est définie au d bis du II. Il s’agit d’organismes de recherche privés ayant obtenu un agrément délivré par le ministre chargé de la recherche – ou, dans le cas d’un organisme établi dans un État membre de l’Union européenne ou partie à l’EEE, délivré par l’autorité nationale étrangère compétente. Sont également éligibles les experts scientifiques ou techniques agréés selon les mêmes modalités.

En vertu du second alinéa du d ter, les dépenses exposées dans le cadre de la sous-traitance privée sont retenues dans la limite d’un plafond fixé au triple du montant total des autres dépenses de R&D. En conséquence, une entreprise qui n’exposerait en interne aucune dépense de R&D ne pourrait prétendre au CIR au titre des opérations confiées à des sous-traitants privés agréés.

● Les dépenses de sous-traitance, que celle-ci soit publique et relève du d ou qu’elle soit privée et relève du d bis, font l’objet d’un plafonnement global prévu au d ter du II :

– 2 millions d’euros ;

– ou 10 millions d’euros en l’absence d’un lien de dépendance au sens du 12 de l’article 39 du CGI ;

– ou 12 millions d’euros en l’absence d’un lien de dépendance pour les opérations de sous-traitance publique.

● Enfin, aux termes du III de l’article 244 quater B, les organismes sous‑traitants doivent déduire de la base de calcul de leur CIR les sommes qu’ils ont reçues au titre des opérations de R&D confiées par les entreprises donneuses d’ordre – le sous-traitant doit donc déduire de l’assiette de son propre CIR les montants facturés au donneur d’ordres, qui sont inclus dans le CIR de ce dernier.

Si le sous-traitant privé n’est pas agréé, il n’a pas à procéder à cette déduction, dans la mesure où le donneur d’ordres ne peut prétendre au CIR au titre des opérations externalisées. Il en va de même si le donneur d’ordres ne peut prétendre au CIR au motif qu’il ne satisfait pas aux conditions prévues à l’article 244 quater B du CGI. Dès lors, le sous-traitant peut inclure l’ensemble des sommes facturées au donneur d’ordres dans son propre CIR ([62]).

En revanche, si le donneur d’ordres est bien éligible au CIR mais renonce au bénéfice de ce dernier, le sous-traitant devra procéder à la déduction prévue.

c.   Les dépenses ne relevant pas strictement de la R&D

Certaines dépenses ouvrant droit au CIR ne correspondent pas, stricto sensu, à des opérations de R&D :

– les dépenses de propriété intellectuelle, recouvrant les frais de prise, de maintenance et de défense des brevets et des certificats d’obtention végétale (e et e bis du II) et les dotations aux amortissements de brevets et certificats d’obtention végétale (f du II) ;

– les dépenses de normalisation, qui sont retenues pour la moitié de leur montant et qui incluent notamment la rémunération et les charges sociales des personnels participant aux réunions officielles de normalisation (g du II) ;

– dans la limite de 60 000 euros par an, les dépenses de veille technologique (j du II).

Ces différentes activités (gestion des brevets, normalisation, veille technologique) ne relèvent pas de la R&D d’après le Manuel de Frascati de l’Organisation de coopération et de développement économiques, qui fournit la définition de la R&D. Sont en effet notamment exclus de cette dernière selon ce manuel :

– les services d’information scientifique et technique, consistant en la collecte, l’indexation, l’enregistrement, le classement, la diffusion, la traduction, l’analyse et l’évaluation de données, de même que la collecte de données d’intérêt général, opérations à rapprocher de la veille technologique ;

– les travaux de normalisation ;

– les travaux administratifs et juridiques relatifs aux brevets et licences ([63]).

d.   Les dépenses de nouvelles collections « textile-habillement-cuir » (THC)

Ouvrent également droit au CIR les dépenses engagées au titre de l’élaboration de nouvelles collections par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir (THC) :

– dépenses afférentes aux personnels chargés de la conception des nouveaux produits (stylistes et techniciens des bureaux de style) et à ceux responsables de la réalisation des prototypes ou d’échantillons non vendus ;

– dotations aux amortissements des immobilisations affectées à la conception de nouveaux produits ou de prototypes ou échantillons ;

– dépenses de fonctionnement (cf. infraf).

Le CIR-THC est prévu au h du II de l’article 244 quater B du CGI.

e.   Les dépenses d’innovation prévues dans le CII

Les dépenses engagées par les PME ouvrant droit au CII figurent aux 1° à 6° du k du II de l’article 244 quater B du CGI. Ainsi qu’il a été vu, elles n’entrent dans la base de calcul du CIR de l’entreprise que dans la limite d’un plafond de 400 000 euros annuel.

Sont éligibles :

– les dotations aux amortissements des immobilisations affectées à la conception de prototypes ou d’installations pilotes de nouveaux produits autres que ceux prévues au a du II, c’est-à-dire qui sont hors du champ du CIR et qui ne relèvent pas de la R&D (1° du k). Les notions de nouveau produit et de prototype et installation pilote sont définies aux quatre derniers alinéas du k ;

– les dépenses afférentes aux personnels exclusivement affectés à la conception des prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits mentionnés au 1° (2° du k) ;

– les dépenses de fonctionnement, calculées forfaitairement (cfinfraf) (3° du k) ;

– les dépenses relatives à la propriété intellectuelle liée aux opérations ouvrant droit au CII, à savoir les dotations aux amortissements des brevets et certificats d’obtention végétale et les frais administratifs et juridiques relatifs à ces brevets, certificats et aux dessins et modèles (4° et 5° du k) ;

– certaines dépenses de sous-traitance, lorsque les opérations sont confiées à des entreprises ou des bureaux d’études et d’ingénierie agréés (6° du k).

f.   Les dépenses de fonctionnement calculées forfaitairement

Parallèlement aux dépenses précédemment mentionnées – dotations aux amortissements, dépenses de personnel, sous-traitance, dépenses afférentes à la propriété intellectuelle, à la veille technologique, à la normalisation et à de nouvelles collections du secteur THC –, l’assiette du CIR et du CII inclut les dépenses de fonctionnement qu’exposent les entreprises dans les opérations qu’elles réalisent.

Les dépenses de fonctionnement ne se rattachent pas directement aux travaux de R&D ou d’innovation : elles consistent en des dépenses afférentes aux personnels de soutien, des dépenses administratives ou encore d’achat de matières premières. Les activités auxquelles elles se rattachent contribuent néanmoins à la bonne réalisation des opérations réalisées, expliquant leur prise en compte dans l’assiette des crédits d’impôt.

Ces dépenses ne sont cependant pas retenues pour leur montant effectif, mais figurent dans l’assiette du CIR et du CII sur la base d’un forfait dont le taux varie en fonction de la nature des dépenses.

● Dans le cadre du CIR et en vertu du c du II de l’article 244 quater B du CGI, le forfait des dépenses de fonctionnement est égal à :

– 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations affectées aux opérations de R&D mentionnées au a du II ;

– 50 % des dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche affectés à ces opérations, hors jeunes docteurs ;

– 200 % des dépenses de personnel afférentes aux jeunes docteurs, exposées pendant les vingt-quatre premiers mois de leur recrutement en CDI (3° du c) – il s’agit des mêmes dépenses que celles prises en compte pour le double de leur montant en vertu du b du II.

Un forfait de fonctionnement est également prévu dans le cadre du CIR‑THC : le 3° du h du II le fixe à 75 % des dépenses de personnel afférentes aux stylistes, techniciens de bureaux de style et ingénieurs et techniciens de production.

● Dans le cadre du CII, le forfait de fonctionnement est défini au 3° du k du II et est égal à :

– 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations affectées aux opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits ;

– 50 % des dépenses de personnel afférentes aux salariés directement et exclusivement affectés à de telles opérations.

● Enfin, il y a lieu de noter l’existence d’autres forfaits dans le cadre des dépenses de normalisation, bien qu’ils ne fassent pas directement référence aux dépenses de fonctionnement :

– un forfait égal à 30 % des salaires afférents aux périodes durant lesquelles les salariés de l’entreprise participent aux réunions de normalisation, au titre des autres dépenses exposées dans ce cadre (2° du g) ;

– un forfait journalier de 450 euros par jour de présence à ces réunions au titre des dépenses exposées par certaines personnes, dont les mandataires sociaux, au titre de leur participation.

● Le tableau suivant dresse la synthèse des taux du forfait applicables pour le calcul des dépenses de fonctionnement à inclure dans l’assiette des crédits d’impôts, en fonction des dépenses concernées.

Forfait des dépenses de fonctionnement
applicables dans le cadre du CIR et du CII

Outil

Type de dépense

Forfait

Fondement juridique
(II de l’article 244 quater B)

CIR

Dotations aux amortissements des immobilisations R&D

75 %

Premier alinéa du c

Dépenses de personnel hors « jeunes docteurs »

50 %

Premier alinéa du c

Dépenses de personnel afférentes aux « jeunes docteurs »

200 %

3° du c

CIR-THC

Dépenses de personnel

75 %

3° du h

CII

Dotations aux amortissements des immobilisations

75 %

3° du k

Dépenses de personnel

50 %

3° du k

 

● Les taux du forfait des dépenses de fonctionnement précédemment exposés résultent d’une évolution relativement longue :

– lors de la création du CIR, en 1983, seules les dépenses de personnel étaient retenues dans les dépenses de fonctionnement, sur la base d’un forfait au taux de 55 % ;

– en 1991, le taux du forfait a été porté à 75 % ;

– l’année suivante, en 1992, est introduit le CIR-THC, dans le cadre duquel le forfait est fixé à 75 % des dépenses de personnel afférentes aux salariés affectés aux opérations relevant du dispositif ;

– en 1995, une modulation du taux du forfait a été introduite en fonction de la localisation des opérations de R&D auxquelles les personnels participent ;

– le forfait spécial au titre des jeunes docteurs a été introduit en 1999, à hauteur de 100 % des dépenses afférentes, ce niveau ayant été porté à 200 % à compter de 2005. Prévu initialement pour douze mois à compter du premier recrutement en contrat à durée indéterminée, il a été porté à vingt-quatre mois à compter de 2008 ;

– en 2011, le forfait du CIR (hors CIR-THC) fut modifié pour aboutir à la situation actuelle : 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations et 50 % des dépenses de personnel (le forfait de 200 % pour les jeunes docteurs étant maintenu) ;

– enfin, la création du CII à compter de 2013 a conduit à introduire le forfait des dépenses de fonctionnement pour cet outil, soit 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations et 50 % des dépenses de personnel.

Les deux tableaux ci-après dressent la synthèse des évolutions apportées au forfait des dépenses de fonctionnement.

Évolution du forfait des dépenses de fonctionnement

Année

Outil

Dépenses et taux du forfait

Fondement juridique

1983

CIR

55 % des dépenses de personnel

LFI 1983, art. 67 (n° 82‑1126)

1991

CIR

75 % des dépenses de personnel

LFI 1991, art. 82 (n° 90‑1168)

1992

CIR-THC

Introduction du volet THC : 75 % des dépenses de personnel

LFR 1991, art. 61 (n° 91‑1323)

1995

CIR

Modulation géographique :
75 % des dépenses de personnel
65 % si personnels en Île-de-France
100 % si personnels en territoires ruraux ou zones d’aménagement du territoire

Loi orientation aménagement territoire, art. 15 (n° 95‑115)

1999

CIR

100 % des dépenses de personnel afférentes aux jeunes docteurs (12 mois)

Loi innovation et recherche, art. 8 (n° 99‑587)

1999

CIR

Suppression de la modulation géographique, rétablissement du forfait de 75 % (100 % pour les jeunes docteurs)

LFR 1999, art. 16 (n° 99‑1173)

2005

CIR

200 % des dépenses de personnel afférentes aux jeunes docteurs (12 mois)

LFI 2006, art. 22 (n° 2005‑1719)

2008

CIR

200 % des dépenses de personnel afférentes aux jeunes docteurs (24 mois)

LFI 2008, art. 69 (n° 2007‑1822)

2011

CIR

75 % des dotations aux amortissements des immobilisations
50 % des dépenses de personnel
(pas de modification du forfait « jeunes docteurs » : 200 %, 24 mois)

LFI 2011, art. 41 (n° 2010‑1657)

2013

CII

Introduction du CII :
75 % des dotations aux amortissements des immobilisations
50 % des dépenses de personnel

LFI 2013, art. 71

(n° 2012‑1509)

Source : commission des finances.

Dans le tableau suivant, qui illustre le forfait applicable pour chaque type de dépense au fil du temps, les modifications apportées par rapport au droit antérieur apparaissent en gras, les cases colorées indiquant le taux de forfait actuellement en vigueur depuis la dernière modification intervenue.

Évolution du Forfait applicable en fonction du type de dépenses

Année

CIR

CIRTHC

CII

Personnel

Jeunes docteurs

Amortissements

Personnel

Personnel

Amortissements

1983

55 %

1991

75 %

1992

75 %

75 %

1995

75 %
65 % IdF
100 % rural / ZAT

75 %

1999

75 %

100 % (12 mois)

75 %

2005

75 %

200 % (12 mois)

75 %

2008

75 %

200 % (24 mois)

75 %

2011

50 %

200 % (24 mois)

75 %

75 %

2013

50 %

200 % (24 mois)

75 %

75 %

50 %

75 %

Source : commission des finances.

Les modifications apportées au forfait des dépenses de fonctionnement par la loi de finances pour 2011 visaient à mieux refléter la réalité des dépenses exposées par les entreprises :

– le forfait assis sur les dépenses de personnel, fixé jusqu’alors à 75 %, était trop généreux par rapport à la situation moyenne des entreprises bénéficiaires du CIR, expliquant son abaissement à 50 % ;

– la création du forfait égal à 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations visait à mieux prendre en compte la situation du secteur industriel, dans lequel les investissements en équipements sont particulièrement lourds.

3.   L’obligation documentaire complémentaire

Comme tout avantage fiscal, le CIR fait l’objet d’une déclaration que l’entreprise doit renseigner et dans laquelle doivent figurer, pour chaque poste de dépenses éligibles, les montants engagés. Il s’agit de la déclaration n° 2069‑A‑SD, commune au CIR, au CIR-THC et au CII.

● Une obligation documentaire complémentaire est prévue au III bis de l’article 244 quater B. Matérialisée à l’annexe n° 1 de la déclaration de CIR (2069‑A‑1‑SD), elle a pour objectif de mieux suivre l’utilisation du CIR par certaines entreprises.

Le défaut de production de cette documentation complémentaire est puni d’une amende majorée de 1 500 euros, aux termes du second alinéa du 1 de l’article 1729 B du CGI.

● Jusqu’en 2018, cette obligation complémentaire portait sur la nature des travaux de recherche en cours, l’état d’avancement des programmes et les moyens y étant consacrés. Étaient assujetties à cette obligation les entreprises engageant plus de 100 millions d’euros de dépenses éligibles.

Le contenu des éléments à faire figurer dans la déclaration a été enrichi d’un volet dédié aux jeunes docteurs, afin de connaître la part de ces derniers financés par les dépenses ouvrant droit au CIR ou recrutés sur leur base. Les informations ainsi obtenues alimentent un rapport annuel sur l’utilisation du CIR par ses bénéficiaires publié par le ministre chargé de la recherche au moment du dépôt du projet de loi de finances de l’année. Ces compléments, introduits par l’article 95 de la loi de finances pour 2018 ([64]), résultaient d’une initiative de Mme Amélie de Montchalin, alors rapporteure spéciale des crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.

Le seuil dont le dépassement conditionne l’assujettissement à cette obligation documentaire complémentaire a été ramené à 2 millions d’euros par la loi de finances pour 2019 ([65]), là aussi à l’initiative de Mme de Montchalin. L’objectif de cette mesure était d’améliorer les données disponibles sur l’utilisation du CIR par les entreprises en élargissant le périmètre des bénéficiaires de l’outil concernés par la production de cette documentation.

L’utilisation du CIR

Les modalités d’utilisation du CIR, c’est-à-dire de son imputation pour l’essentiel, sont définies à l’article 199 ter B du CGI pour les entreprises imposées à l’impôt sur le revenu et à l’article 220 B, qui renvoie au précédent, pour les entreprises à l’impôt sur les sociétés.

● Le CIR s’impute sur l’impôt dû au titre de l’année durant laquelle les dépenses ont été engagées. Cependant, cette imputation est plafonnée au montant d’impôt dû, et l’excédent éventuel de CIR constitue une créance que l’entreprise impute sur l’impôt dû au titre des trois années suivantes. Si, à l’issue de cette période, un excédent demeure, ce dernier est remboursé.

● Le II de l’article 199 ter B prévoit que le CIR est immédiatement remboursé dans certaines hypothèses liées à la qualité du bénéficiaire, ce qui permet de profiter de l’intégralité de l’avantage fiscal sans attendre potentiellement quatre ans. Peuvent prétendre à un tel remboursement immédiat :

– les entreprises nouvelles dont au moins la moitié du capital est entièrement libérée et détenue de façon continue par des personnes physiques, des sociétés elles‑mêmes détenues à hauteur d’au moins 50 % par des personnes physiques, ou par certains organismes (notamment les sociétés de capital-risque, les fonds communs de placement à risques ou encore les sociétés financières d’innovation) (1° du II) ;

– les entreprises en difficulté, qui font l’objet d’une procédure de conciliation ou de sauvegarde ou d’un redressement ou d’une liquidation judiciaires (2° du II) ;

– les entreprises répondant à la qualification de « Jeunes entreprises innovantes », au sens de l’article 44 sexies‑0 A du CGI (3° du II) ;

– les PME, au sens européen (4° du II).

● Enfin, la créance de CIR peut, dès l’année d’engagement des dépenses, faire l’objet d’un préfinancement à hauteur de 80 % de son montant, permettant à l’entreprise qui recourt à cette possibilité de disposer rapidement d’un apport de trésorerie important.

 

B.   L’opportunité d’une rationalisation mesurée du CIR

Première dépense fiscale en termes de coût, le CIR paraît propice à des aménagements mesurés permettant, sans remettre en cause l’outil, de dégager des marges de manœuvre budgétaires dans le cadre de la rationalisation ciblée des dépenses fiscales bénéficiant aux entreprises.

1.   Une dépense fiscale coûteuse à l’utilité attestée

a.   Le CIR, première dépense fiscale en montant

Depuis la disparition du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), intervenue à compter du 1er janvier 2019, le CIR est la première dépense fiscale en vigueur en termes de coût pour les finances publiques – son montant au titre de l’année 2018 s’élevant à 6,2 milliards d’euros et les prévisions pour 2019 et 2020 s’établissant à un coût record de 6,5 milliards d’euros.

Pour un panorama détaillé du CIR en termes de coût budgétaire, de créances et de bénéficiaires, il est renvoyé aux développements pertinents qui figurent dans l’édition 2019 du rapport sur l’application des mesures fiscales, paru en juillet dernier ([66]). Seuls les principaux éléments figurent dans les développements suivants.

● Depuis 2013, le CIR a connu une importante dynamique, son coût ayant pratiquement doublé. Parallèlement, le nombre de ses bénéficiaires s’est rétracté, aboutissant à une hausse du montant moyen de chaque créance.

Ces données sont résumées dans le tableau suivant, illustré par un graphique.

Évolution du coût budgétaire du CIR (2012-2020)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019 (P.)

2020 (P.)

Coût (en M€)

3 269

5 108

5 094

5 555

6 100

6 200

6 500

6 500

Bénéficiaires

26 468

27 387

26 026

24 113

22 585

21 087

Source : Évaluations des voies et moyens annexées aux projets de loi de finances 2014 à 2020, tome II : Dépenses fiscales.

Le CII, quant à lui, présente un coût moins élevé mais qui a connu une hausse significative depuis sa création, puisqu’il a presque triplé. Le tableau ci‑après, qu’illustre le graphique suivant, montre cette évolution.

coût budgétaire du cii

(en millions d’euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019 (P.)

2020 (P.)

68

108

173

157

190

195

200

Source : Évaluations des voies et moyens annexées aux projets de loi de finances pour 2016 à 2020, tome II : Dépenses fiscales.

 

b.   Le CIR, outil essentiel de compétitivité et d’attractivité

Bien que coûteux, le CIR n’en est pas moins utile : soutien important pour la R&D des entreprises françaises, il permet aussi, à travers ses mécanismes incitatifs en matière de sous-traitance publique et de recrutement de jeunes docteurs, d’encourager certaines opérations.

L’efficacité du CIR et, plus généralement, les bonnes performances de la France dans le domaine de la R&D et de l’innovation, ont été récemment mises en avant :

– dans le contexte de la crise financière mondiale survenue en 2008-2009, le CIR a substantiellement contribué à la résistance des entreprises françaises et au redressement de l’effort de R&D privée dans le pays et, depuis, il est établi que l’outil a eu un impact positif sur l’évolution des dépenses de R&D, sur l’emploi des jeunes docteurs et sur les gains de productivité ([67]) ;

– la récente étude du cabinet EY sur l’attractivité de la France montre que le pays, en 2018, était la deuxième destination en Europe en matière de projets d’investissements étrangers et occupait la première place s’agissant de la R&D ([68]). Si le CIR n’est naturellement pas le seul facteur expliquant ces bonnes performances, il n’en constitue pas moins un important élément d’attractivité et de compétitivité..

2.   Des marges d’évolution raisonnables préservant l’équilibre général du CIR

Si le CIR est un outil précieux, certaines marges de manœuvre existent néanmoins pour le faire évoluer de façon rationnelle et mesurée, sans compromettre son économie générale.

a.   Un forfait de dépenses de fonctionnement supérieur à sa valeur réelle

● Une analyse fine des dépenses ouvrant droit au CIR, reposant sur une ventilation par nature de dépenses, permet d’identifier les principaux postes. Ces données figurent, s’agissant des dépenses 2015 et 2016, dans le tableau et le graphique ci-après, et mettent en évidence le poids des dépenses de fonctionnement.

Répartition des dépenses de recherche par nature de dépenses

Nature des dépenses

Dépenses 2015

Dépenses 2016

Dépenses de personnel

49,4 %

49,4 %

Dont « jeunes docteurs »

0,9 %

1,0 %

Dépenses de fonctionnement

29,1 %

29,9 %

Recherche externalisée (sous-traitance)

12,2 %

11,8 %

Dont sous-traitance publique

7,6 %

8,0 %

Dont sous-traitance privée

4,6 %

3,8 %

Amortissements

5,3 %

5,3 %

Dépenses relatives aux brevets

3,1 %

3,0 %

Veille technologique

0,4 %

0,4 %

Subventions publiques remboursées

0,4 %

0,2 %

Normalisation

0,0 %

0,0 %

Total

100 %

100 %

N.B. : l’arrondi de la somme peut être différent de la somme des arrondis.

Source : France Stratégie, Commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation, Limpact du crédit dimpôt recherche, mars 2019, et évaluation préalable du présent article.

 

Si certains postes de dépenses connaissent, d’une année sur l’autre, de légères variations, les grands équilibres de répartition des dépenses demeurent constants, les trois principales dépenses étant :

– les dépenses de personnel ;

– les dépenses de fonctionnement ;

– les dépenses exposées dans le cadre d’opérations externalisées.

En 2016, ces trois postes ont représenté plus de 90 % du total des dépenses engagées par les entreprises.

● Les dépenses de fonctionnement à elles seules correspondent à près d’un tiers de l’assiette du CIR, et leur part dans le total va en s’accroissant, là où celle des dépenses de personnel reste constante et celle des opérations externalisées diminue. Ces éléments témoignent de la part importante qu’occupe le forfait des dépenses de fonctionnement dans le coût du CIR, circonstance qui renforce l’opportunité d’une évolution du dispositif sur ce point.

Le niveau du forfait des dépenses de fonctionnement dans le cadre du CIR, ainsi qu’il a été vu, n’a pas été modifié depuis la loi de finances pour 2011, s’établissant à :

– 75 % des dotations aux amortissements des immobilisations ;

– 50 % des dépenses de personnel hors « jeunes docteurs » ;

– 200 % des dépenses de personnel afférentes aux « jeunes docteurs ».

Depuis 2013, les dépenses de fonctionnement dans le cadre du CII sont prises en compte selon des modalités similaires, à l’exception de la majoration « jeunes docteurs ».

● Dans un rapport sur le CIR publié en juillet 2013, la Cour des comptes indiquait que le coût effectivement supporté par les bénéficiaires du CIR au titre des frais de fonctionnement s’établissait à 56 % des dépenses de personnel en 2010, un niveau très en deçà des 75 % des dépenses de personnel qui prévalait avant la loi de finances pour 2011 ([69]).

Ce sont des constats de cet ordre qui ont motivé la réforme entreprise par la loi de finances pour 2011 à travers l’abaissement du niveau du forfait au titre des dépenses de personnel et l’introduction de la prise en compte des dotations aux amortissements des immobilisations.

Néanmoins, la Cour considérait que ces modifications conduisaient à maintenir un mode de calcul trop généreux, le forfait de fonctionnement utilisé au titre du CIR dépassant les frais effectivement constatés en moyenne au sein des bénéficiaires de l’outil.

La Cour des comptes recommandait ainsi une réforme selon deux modalités alternatives :

– soit le rétablissement d’un taux unique, fixé à 55 % ;

– soit le maintien de taux différenciés, notamment pour permettre la bonne prise en compte des spécificités du secteur industriel et de l’importance au sein de ce dernier des dépenses d’équipement, conduisant aux taux suivants :

Cette recommandation de la Cour, consistant à ramener le forfait des dépenses de fonctionnement dans une fourchette comprise entre 40 % et 46 % des dépenses de personnel, a été reprise par le ministre de l’économie et des finances lors du débat d’orientation des finances publiques (DOFP) pour 2020 du 11 juillet dernier. Le niveau alors annoncé par le ministre était de 43 % ([71]).

Dans l’édition 2019 du rapport sur l’application des mesures fiscales, le Rapporteur général a pu témoigner de son soutien à une telle initiative ([72]), qui faisait écho à certaines propositions figurant dans l’édition 2018 de ce rapport ([73]).

b.   Une obligation documentaire complémentaire potentiellement lourde pour les petites entreprises

L’abaissement du seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire de 100 millions d’euros à 2 millions d’euros, bien que motivé par une meilleure connaissance de l’utilisation du CIR par les entreprises et répondant à des considérations parfaitement légitimes, pourrait être de nature à faire peser sur certaines entreprises une charge administrative relativement lourde.

● Ce constat vaut tout particulièrement pour les petites entreprises fortement impliquées dans des opérations de R&D et qui, à ce titre, pourrait dépasser relativement aisément le nouveau seuil de 2 millions d’euros.

D’après les données fournies au Rapporteur général en juillet dernier lors de l’élaboration du rapport sur l’application des mesures fiscales, 1 035 entreprises seraient concernées par le nouveau seuil, parmi lesquelles 587 entreprises réalisant un chiffre d’affaires ne dépassant pas 50 millions d’euros et pouvant, dès lors, être classées parmi les PME ([74]). L’évaluation préalable du présent article fournit un chiffre actualisé d’environ 1 370 entreprises ayant déclaré des dépenses de R&D comprises entre 2 millions d’euros et 100 millions d’euros.

La charge supplémentaire pour de telles entreprises risque d’être accentuée par la nature des éléments à fournir, qui portent sur les projets de R&D en cours et donc potentiellement à caractère pluriannuel, non sur ceux réalisés.

Ces considérations expliquent certainement la neutralisation de l’article 151 de la loi de finances pour 2018 précitée – qui avait abaissé le seuil – par une instruction fiscale publiée le 17 avril 2019 qui est venue substituer au seuil de 2 millions d’euros, actualisé par une première instruction fiscale le 13 février 2019, l’ancien seuil de 100 millions d’euros ([75]).

● Enfin, le contexte déclaratif du CIR va, indépendamment de l’obligation complémentaire, connaître en 2020 une évolution importante qui pourrait supposer un certain accompagnement des entreprises, singulièrement des plus petites.

Il est en effet rappelé qu’en vertu du XIII de l’article 1649 quater quater du CGI modifié en ce sens par l’article 76 de la seconde loi de finances rectificative pour 2017 ([76]), la souscription de la déclaration de CIR sera obligatoirement faite par voie électronique à compter du 1er janvier 2020, et donc dès les dépenses engagées en 2019.

3.   Une évolution du CIR qui s’inscrit dans la participation des entreprises à la réduction de l’IR des ménages

Faire évoluer le CIR sur certains aspects, sans remettre en cause son économie générale et, ainsi, ne pas prendre le risque d’en compromettre l’efficacité et de pénaliser un secteur essentiel à l’économie française, apparaît légitime eu égard à l’ampleur de la dépense et à l’inadéquation de certains dispositifs, tel le forfait des dépenses de fonctionnement.

L’édition 2019 du rapport sur l’application des mesures fiscales soulignait ainsi l’opportunité d’apporter certaines corrections à cet outil fiscal utile mais particulièrement généreux, et suggérait expressément un abaissement du forfait des dépenses de fonctionnement ([77]).

Ces modifications s’inscriraient également dans le cadre plus large touchant les dépenses fiscales des entreprises et leur participation à l’effort de financement de la réduction d’IR pour les ménages qui est prévue à l’article 2 du présent projet de loi de finances.

Ce point avait été mis en avant lors du DOFP pour 2020 précité par le ministre de l’économie et des finances Bruno Le Maire, qui mentionnait :

– le tarif réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole non routier (GNR), qui fait l’objet de l’article 16 du présent projet de loi ;

– le dispositif en faveur du mécénat des entreprises, modifié par l’article 50 du présent projet de loi ;

– le CIR, objet du présent article.

Durant ce débat, avait également été annoncée une modification de la déduction forfaitaire spécifique (DFS), niche sociale consistant en un abattement de cotisations dans certains secteurs.

Le gain attendu de ces mesures avait alors été chiffré à 600 millions d’euros dès 2020 et à 1,4 milliard d’euros à compter de 2021.

II.   Le dispositif proposé

Le présent article apporte des modifications mesurées au CIR pour en rationaliser certains aspects sans compromettre son efficacité. Les mesures qu’il prévoit devraient permettre de réduire le coût de la dépense fiscale de 230 millions d’euros par an environ, à compter de 2021.

A.   La réduction du forfait des dépenses de fonctionnement et le relèvement du seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire

Les modifications qu’il est proposé d’apporter au CIR et au CII consistent, d’une part, à réduire le forfait des dépenses de fonctionnement selon les modalités annoncées en juillet dernier lors du DOFP et, d’autre part, à relever le seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire.

1.   L’abaissement à 43 % des dépenses de personnel du forfait des dépenses de fonctionnement

● La modification du forfait des dépenses de fonctionnement est réalisée par le  du I du présent article, qui ramène son taux afférent aux dépenses de personnel (hors « jeunes docteurs ») de 50 % à 43 % :

– le a de ce 1° modifie à cet effet le premier alinéa du c du II de l’article 244 quater B du CGI, relatif au CIR ;

– le b du même 1° modifie le 3° du k du II de l’article 244 quater B, relatif au CII.

Le taux retenu par le Gouvernement, soit 43 %, est celui annoncé par Bruno Le Maire devant notre assemblée le 11 juillet dernier à l’occasion du DOFP.

Le taux du forfait assis sur les dotations aux amortissements (75 %) et celui reposant sur les dépenses de personnel afférentes aux « jeunes docteurs » (200 %) ne sont en revanche pas concernés par le dispositif proposé. Le forfait applicable dans le cadre du CIR-THC et prévu au 3 du h du II de l’article 244 quater B du CGI n’est pas non plus modifié.

● Aux termes du II du présent article, ces nouvelles modalités de calcul du forfait des dépenses de fonctionnement s’appliqueront aux dépenses exposées par les entreprises à compter du 1er janvier 2020.

2.   Le rétablissement à 100 millions d’euros du seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire dans le cadre du CIR

Le  du I du présent article rétablit le seuil dassujettissement à lobligation documentaire complémentaire prévue au III bis de l’article 244 quater B du CGI à son niveau antérieur à la loi de finances pour 2019 précitée, c’est-à-dire 100 millions deuros de dépenses ouvrant droit au CIR à la place du seuil actuellement en vigueur de 2 millions d’euros.

Ainsi qu’il a été vu, la doctrine fiscale a anticipé cette évolution législative : après la publication, le 13 février dernier, d’une première instruction tirant les conséquences de l’article 151 de la loi de finances pour 2019 et inscrivant dans le BOFiP le seuil de 2 millions d’euros, une nouvelle instruction a été prise le 17 avril suivant, pour rétablir le seuil de 100 millions d’euros.

Le Rapporteur général, dans le cadre du rapport sur l’application des mesures fiscales de juillet dernier, a déjà eu l’occasion d’indiquer son sentiment très négatif sur une telle pratique, consistant pour l’administration fiscale à neutraliser unilatéralement par voie d’instruction fiscale la lettre de la loi et l’intention du législateur, indépendamment des motivations d’une telle action et de sa pertinence sur le fond ([78]).

B.   L’impact budgétaire et économique

Le gain annuel tiré des modifications résultant du présent article est estimé à 230 millions d’euros à partir de 2021. Il devrait contribuer aux objectifs d’équilibre des finances publiques, sans pour autant pénaliser les entreprises qui continueront à bénéficier d’un niveau de soutien élevé pour leurs opérations de R&D. Il semble d’ailleurs possible d’aller plus loin en matière d’évolution du CIR et du CII sans grever l’utilité de ces outils.

1.   Un gain budgétaire annuel de 230 millions d’euros à compter de 2021

● Si la modification touchant le seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire est sans incidence budgétaire, la réduction du forfait des dépenses de fonctionnement devrait permettre à l’État de réaliser un gain annuel évalué à 230 millions deuros, et ce à compter de 2021, ainsi que l’illustre le tableau suivant.

chronique de l’impact budgétaire
de l’abaissement du forfait des dépenses de fonctionnement

(en millions d’euros)

Année

2020

2021

2022

2023

Impact budgétaire

0

+ 230

+ 230

+ 230

Source : évaluation préalable du présent article.

L’impact budgétaire de l’abaissement du forfait des dépenses de fonctionnement est légèrement supérieur aux prévisions faites par le ministre de l’économie et des finances lors du DOFP de juillet dernier, qui s’établissaient alors à 200 millions d’euros. Il reste cependant dans le même ordre de grandeur.

● La mesure n’aura aucune incidence sur lexercice budgétaire 2020, et ce même si elle s’applique aux dépenses engagées à compter du 1er janvier 2020 et peut dès lors concerner des exercices en cours qui seront clos durant l’année 2020.

En effet, il est rappelé que le CIR d’une entreprise dont l’exercice ne coïncide pas avec l’année civile est imputé sur l’impôt dû au titre de l’exercice clos pendant l’année civile qui suit celle durant laquelle les dépenses ont été engagées : la logique est celle de l’année civile, non de l’exercice fiscal. À titre d’exemple, dans l’hypothèse d’un exercice clos le 30 juin, le CIR correspondant aux dépenses exposées entre janvier et juin 2020 s’imputera sur l’impôt dû au titre de l’exercice clos le 30 juin 2021.

Le dispositif proposé sera donc sans effet sur les recettes fiscales de l’État en 2020, justifiant son placement en seconde partie du présent projet de loi de finances.

2.   Des aménagements au CIR qui ne pénaliseront pas les entreprises et qui pourraient être approfondis

Sous l’angle économique, le présent article ne devrait pas excessivement grever les entreprises, une partie de son dispositif allégeant au contraire certaines contraintes qui pèsent sur elles. Si les mesures proposées vont indéniablement dans la bonne direction, leur accentuation paraît possible sur certains aspects.

À titre liminaire, le Rapporteur général souhaite insister sur le fait que l’ensemble des évolutions proposées dans les développements qui suivent ne sont en aucun cas de nature à compromettre l’équilibre du CIR ni faire obstacle au maintien d’un niveau de soutien fiscal élevé en faveur de la R&D.

En outre, un soin particulier serait apporté à la préservation des PME, pour le développement desquels la R&D et l’innovation sont des facteurs essentiels.

En tout état de cause, l’attractivité de la France ne sera pas remise en cause par le dispositif proposé – cela irait à rebours des initiatives prises depuis le début de la législature par le Gouvernement et sa majorité. Il n’est d’ailleurs pas inutile de rappeler que l’attractivité nationale en matière de R&D ne repose pas uniquement sur le CIR, loin de là : la qualité des infrastructures et des formations et l’excellence des équipes de recherche sont autant de facteurs essentiels. Les remarquables performances françaises en 2018, année durant laquelle les investissements dans des projets de R&D ont crû de 85 % par rapport à 2017, fournissent à cet égard une illustration éloquente de ce constat : le CIR n’ayant pas fait l’objet de modification entre 2017 et 2018 – du moins sur le volet purement fiscal –, il ne peut à lui seul expliquer un quasi-doublement des investissements.

a.   La réduction du forfait des dépenses de fonctionnement : une mesure rationnelle et modérée qui gagnerait à être étendue

Ramener à 43 % des dépenses de personnel le forfait des dépenses de fonctionnement permettra de mettre en œuvre une recommandation déjà ancienne de la Cour des comptes et reprise en juillet dernier par le Rapporteur général.

Le nouveau taux du forfait permettra de mieux refléter la réalité des dépenses exposées, tout en assurant un soutien public important : la baisse, de sept points, n’est pas de nature à fondamentalement remettre en cause les pratiques des entreprises.

Par ailleurs, le fait de conserver inchangé le forfait assis sur les dotations aux amortissements des immobilisations, qui demeure fixé à 75 % de celles-ci, prémunit la réforme proposée de tout impact délétère sur le secteur industriel. Il s’agit au demeurant de la stricte application de la recommandation faite par la Cour en 2013.

Enfin, réduire l’intensité d’un avantage fiscal paraît légitime lorsque l’impôt sur lequel s’impute ledit avantage est lui aussi en diminution.

Le taux de l’IS diminue depuis 2017 et va atteindre 28 % en 2020 et 26,5 % en 2021, sous réserve des dispositions applicables aux plus grandes entreprises prévues à l’article 11 du présent projet de loi, pour finalement s’établir à 25 % à compter de 2022.

Dans ces conditions, conserver un crédit d’impôt au niveau qui était le sien lorsque le taux de l’IS était fixé à 33 1/3 % ne semble pas totalement justifié.

La baisse programmée du taux de l’IS, l’ampleur prise par le CIR en termes budgétaires et les considérations justifiant la diminution du forfait des dépenses de fonctionnement militent pour accentuer de façon modérée la réforme prévue au présent article.

Ainsi qu’il a été vu, seul le taux du forfait assis sur les dépenses de personnel hors « jeunes docteurs » du CIR et du CII est appelé à diminuer. Il ne serait pas incohérent d’étendre cette diminution à deux autres volets du dispositif :

– le taux majoré « jeunes docteurs », fixé à 200 % ;

– le taux de 75 % des dépenses de personnel exposées dans le cadre du CIR-THC.

● Ramener de 200 % à 43 % le taux du forfait assis sur les dépenses de personnel afférentes aux « jeunes docteurs » peut, de prime abord, paraître radical, mais une telle mesure garantirait toujours un niveau de soutien élevé à l’embauche de ces personnels.

En effet, il est rappelé que les dépenses de personnel « jeunes docteurs » sont déjà prises en compte à hauteur de 200 % dans l’assiette du CIR, mesure de nature à garantir à elle seule l’attractivité du recrutement de cette population.

L’exemple suivant, qui figurait déjà dans l’édition 2019 du rapport sur l’application de la loi fiscale proposant une telle évolution, en atteste ; il repose sur une rémunération d’un « jeune docteur » de 100 000 euros.

montant du cir « jeune docteur »
en fonction du niveau du forfait de dépenses de fonctionnement

 

Rémunération

Montant retenu dans lassiette du CIR

Total de lassiette

Montant du CIR
(30 %)

Rapport CIR/Rémunération

Au titre de la rémunération

Au titre des dépenses de fonctionnement

Droit actuel

100 000

200 000

200 000

400 000

120 000

120,0 %

Réforme suggérée

100 000

200 000

43 000

243 000

72 900

72,9 %

Source : commission des finances.

Le rapport entre le montant du CIR et la rémunération effectivement versée est de 120 % en l’état du droit, ce qui est particulièrement élevé, voire excessif : l’entreprise perçoit un avantage fiscal supérieur aux dépenses engagées ouvrant droit à cet avantage. La Cour des comptes, en 2013, jugeait qu’un « tel taux de soutien public, supérieur à la dépense engagée, napparaît pas justifié. » ([79])

Avec un forfait de 43 %, le niveau de soutien serait de l’ordre de 73 % de la rémunération, ce qui resterait généreux et incitatif pour l’embauche de jeunes docteurs.

Une telle évolution constituait l’une des pistes mises en avant par la Cour des comptes en 2013 pour rationaliser le CIR ([80]). Elle figurait également, outre l’édition 2019 déjà mentionnée, dans l’édition 2018 du rapport sur l’application des mesures fiscales présenté par le Rapporteur général ([81]).

Une autre forme de rationalisation, plus mesurée, du forfait « jeune docteur » pourrait consister à ramener son taux, non pas à 43 %, mais à 100 %. En reprenant l’exemple précédent, le montant du CIR s’établirait à 90 000 euros pour une rémunération de 100 000 euros, conduisant à un financement par le CIR à hauteur de 90 %.

Ces pistes mériteraient d’être étudiées de façon exhaustive, afin d’appréhender leur impact économique et leurs effets sur l’embauche des jeunes docteurs, ainsi que le gain budgétaire potentiel.

● Réformer le forfait de 75 % des dépenses de personnel applicable dans le cadre du CIR-THC serait motivé par un souci de cohérence.

Le taux de 75 % pour le CIR-THC a été fixé en 1992, lors de l’extension de l’assiette du CIR à laquelle le dispositif procédait.

Ce taux de 75 % était alors également applicable aux dépenses de personnel dans le cadre du CIR « classique », en vertu du c du II de l’article 244 quater B du CGI : il est donc plausible que le taux du CIR-THC ait été fixé par alignement sur le taux déjà existant.

En revanche, à la différence du forfait pour dépenses de personnel « classique », qui a évolué en 1995, en 1999 et enfin en 2011, aucune modification n’a été apportée dans le cadre du CIR-THC.

Le présent article paraît constituer l’occasion idoine pour aligner le forfait du CIR-THC sur celui du CIR classique.

Dans l’hypothèse où un niveau de 43 % serait jugé excessivement bas, notamment en raison de l’absence d’un taux renforcé assis sur les dotations aux amortissements des immobilisations exploitées pour des opérations éligibles au CIR-THC, une solution de compromis est envisageable. Elle consisterait à retenir un taux de 55 %, qui est la préconisation de la Cour pour le CIR « classique » si un taux unique devait être préféré à des taux différenciés selon les dépenses.

Une autre solution, de nature à complètement aligner le CIR-THC sur le reste de l’outil, serait d’introduire un forfait de fonctionnement double :

– 75 % des dotations aux amortissements ;

– 43 % des dépenses de personnel.

Là encore, ces pistes de réflexion supposeraient une analyse fouillée permettant, si cela se révélait justifié, de procéder aux aménagements idoines en disposant de toutes les données pertinentes.

b.   L’allégement des formalités déclaratives : une mesure acceptable mais aux modalités perfectibles

● Le rétablissement du seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire prévue au III bis de l’article 244 quater B à son niveau antérieur, fixé à 100 millions d’euros, sera de nature à alléger de façon relativement substantielle la charge administrative pesant sur les entreprises exposant des dépenses de R&D comprises entre 2 et 100 millions d’euros.

La mesure devrait également assurer la bonne transition entre la déclaration physique du CIR et celle faite par voie électronique, obligatoire à compter de 2020 : le nouveau format pouvant se révéler délicat à gérer pour les petites entreprises, un contenu déclaratif simplifié est bienvenu.

● Néanmoins, si le principe du relèvement du seuil est reconnu comme opportun, le niveau retenu pour ce seuil peut en revanche être contesté.

Le rétablissement pur et simple de l’ancien seuil, en effet, fait fi des considérations qui avaient conduit le Parlement à abaisser ce seuil : disposer d’un panel d’entreprises plus représentatif des bénéficiaires du CIR dans la perspective d’une meilleure connaissance de l’utilisation de cet outil.

Il semble en effet utile de rappeler que très peu d’entreprises dépassent le seuil de 100 millions d’euros de dépenses de R&D :

– la Cour des comptes, sur la base des déclarations faites en 2011, relevait en 2013 que seules 17 entreprises étaient concernées ([82]) ;

– sur la base de données récemment communiquées au Rapporteur général par l’administration fiscale et relatives aux principaux bénéficiaires du CIR, il est possible d’évaluer le nombre d’entreprises concernées en 2016 et en 2017 à une vingtaine environ : 18 pour le CIR 2016, 20 pour le CIR 2017.

La seconde estimation est au demeurant potentiellement généreuse dans la mesure où elle s’appuie sur le montant des créances de CIR et retient les entreprises dont la créance est supérieure à 30 millions d’euros. En effet, certaines dépenses sont prises en compte à hauteur de 200 % de leur montant et leur volume excède très largement celui des dépenses minorées pour le calcul du CIR – telles que celle de normalisation. Dès lors, une créance de 30 millions d’euros peut correspondre à des dépenses inférieures à 100 millions d’euros.

Un seuil fixé à 100 millions d’euros aboutirait ainsi à ce que le rapport annuel prévu au III bis et censé présenter l’utilisation du CIR par ses bénéficiaires se fonde sur le comportement d’une vingtaine de très grandes entreprises. Dans de telles conditions, il est probable que ce rapport ne soit pas exploitable pour connaître la façon dont les TPE et les PME se servent de l’outil. Une telle conclusion serait éminemment regrettable s’agissant d’une dépense fiscale dont le coût dépasse 6 milliards d’euros par an.

● Le Rapporteur général préconise donc de conserver le principe du relèvement du seuil, mais d’atténuer son ampleur et de fixer le nouveau seuil à un niveau plus modéré de 10 millions d’euros.

Un tel seuil renforcerait la pertinence des données recueillies sur le CIR, tout en préservant :

– les TPE, dont l’un des critères de qualification est la réalisation d’un chiffre d’affaires n’excédant pas 2 millions d’euros ;

– les petites entreprises au sens européen, pour lesquelles le plafond de chiffre d’affaires est de 10 millions d’euros ([83]) ;

– plus généralement, la plupart des PME, à l’éventuelle exception des plus importantes qui engagent d’importantes dépenses de R&D et dont l’inclusion dans le dispositif n’apparaît pas illégitime :

Une autre piste envisageable consisterait à conserver le dispositif proposé par le Gouvernement et donc le nouveau seuil de 100 millions d’euros, tout en y adjoignant un seuil supplémentaire de 10 millions d’euros : les entreprises dont les dépenses de R&D se trouveraient comprises entre ces deux seuils seraient alors assujetties à une obligation documentaire complémentaire allégée, portant essentiellement sur le volet « jeunes docteurs » et sur les projets réalisés l’année durant laquelle les dépenses ont été exposées, et non nécessairement les projets en cours.

En tout état de cause, il semble souhaitable de modifier l’amende prévue à l’article 1729 B en cas de défaut de production de l’obligation documentaire. Son montant est majoré, s’établissant à 1 500 euros. Il pourrait être envisagé de cantonner ce montant majoré aux entreprises exposant plus de 100 millions d’euros de dépenses, les autres se trouvant alors passibles de l’amende de droit commun de 150 euros.

c.   Les aménagements possibles relatifs aux dépenses d’innovation

Le forfait des dépenses de fonctionnement ne constitue pas le seul levier sur lequel il est possible d’agir pour rationaliser le CIR sans compromettre l’économie générale de cet outil et ses effets positifs : les dépenses d’innovation sont également propices à une évolution.

La première perspective d’évolution de l’outil fiscal en matière d’innovation porte sur le CII. Dans son rapport précité sur l’application des mesures fiscales de juillet 2019, le Rapporteur général s’interrogeait sur le maintien en l’état de cet outil. Il ne peut donc que se réjouir du bornage prévu à l’article 7 du présent projet de loi, qui permettra d’évaluer de façon complète le CII et d’en tirer toutes les conséquences.

La seconde piste paraissant pouvoir être explorée porte sur les dépenses incluses dans l’assiette du CIR ne relevant pas stricto sensu de la R&D, c’est‑à‑dire :

– les dépenses de propriété intellectuelle, prévues aux ee bis et f du II de l’article 244 quater B du CGI ;

– les dépenses de normalisation, prévues au g du même II ;

– les dépenses de veille technologiques (j du même II).

Il en va de même s’agissant du CII et du CIR-THC, pour les dépenses prévues aux 4° et 5° des h et k du même II.

Ainsi qu’il a été vu dans la première partie du présent commentaire, ces dépenses ne relèvent pas de la R&D au sens du Manuel de Frascati ([84]). En outre, les externalités produites par les opérations auxquelles elles se rattachent paraissent moins saillantes que celles résultant de véritables travaux de R&D. Dès lors, leur exclusion de l’assiette du CIR pourrait se révéler opportune.

● Une telle exclusion, toutefois, ne devrait pas être brutale, afin de ne pas pénaliser trop durement les entreprises exposant de telles dépenses : si elle devait être retenue, un délai semblerait nécessaire.

Le caractère différé de l’exclusion permettrait au demeurant de procéder, le cas échéant, à une évaluation complète des outils publics de soutien à l’innovation, qu’ils soient ou non fiscaux, pour permettre d’apprécier le plus exhaustivement possible la pertinence d’un CIR sans ces dépenses ou, au contraire, d’établir l’intérêt de les maintenir dans le champ du dispositif.

Pourrait ainsi être proposée l’abrogation des dispositions afférentes à ces dépenses ne relevant pas de la R&D à compter du 1er janvier 2024, laissant quatre années entières pour réaliser tous les travaux d’évaluation jugés utiles.

● Une solution alternative à l’exclusion pure et simple consisterait à réserver le bénéfice de la prise en compte de ces dépenses dans l’assiette du CIR aux seules PME – sous réserve de la compatibilité d’une telle solution au regard des règles européennes en matière d’aides d’État. Les PME bénéficieraient ainsi d’un avantage fiscal plus étendu, propice à leur développement et leur croissance.

Ces deux propositions alternatives, déjà avancées par la Cour des comptes en 2013 ([85]), avaient été reprises par le Rapporteur général en juillet dernier dans l’édition 2019 du rapport sur l’application des mesures fiscales ([86]).

La première, l’exclusion des dépenses visées, pourrait conduire à un gain budgétaire de l’ordre de 200 millions d’euros d’après les données publiées par la Cour en 2013. Cette dernière estimait le gain susceptible d’être tiré de la seconde proposition, qui cantonne aux PME le bénéfice du CIR au titre de ces dépenses, à 160 millions d’euros.

Cette réflexion suppose une étude approfondie portant sur l’impact des pistes mises en avant pour les entreprises concernées et, plus largement, les secteurs économiques dont elles relèvent. Une telle étude paraît néanmoins inévitable dans la mesure où ces dépenses ne devraient pas, en toute cohérence, relever du CIR.

d.   La nécessité d’une meilleure information sur l’utilisation du CIR par les groupes et sur la sous-traitance

Enfin, le présent projet de loi de finances semble constituer le véhicule idoine pour aborder deux aspects particuliers de l’utilisation du CIR :

– l’application du seuil de 100 millions d’euros de dépenses au-delà duquel le taux du CIR passe de 30 % (ou 50 % en outre-mer et en Corse) à 5 % ;

– le recours à l’externalisation d’opérations de R&D auprès de sous‑traitants, incluant notamment les sous-traitances en cascade.

● Ainsi que le Rapporteur général l’avait évoqué dans l’édition 2019 du rapport sur l’application des mesures fiscales, le fait que le seuil de 100 millions d’euros soit apprécié au niveau de chaque entreprise, et non au niveau du groupe, peut conduire à certains abus, singulièrement quand le groupe relève de l’intégration fiscale ([87]).

Dans une telle hypothèse, où les sociétés sont détenues au moins à hauteur de 95 %, le groupe peut s’assimiler à une même entité économique. Dès lors, une répartition artificielle des dépenses de R&D entre membres du groupe pour que chaque société ne dépasse pas le seuil n’est pas à exclure, ainsi que l’illustre l’exemple suivant.

comparaison du cir d’un groupe
sans et avec répartition artificielle des dépenses

(en millions d’euros)

Société

Sans répartition artificielle des dépenses

Avec répartition artificielle des dépenses

Dépenses

Taux applicable

Montant du CIR

Dépenses

Taux applicable

Montant du CIR

A

130

30 % jusqu’à 100, 5 % au-delà

31,50

100

30 %

30

B

160

30 % jusqu’à 100, 5 % au-delà

33,00

100

30 %

30

C

60

30 %

18,00

100

30 %

30

D

50

30 %

15,00

100

30 %

30

E

35

30 %

10,50

100

30 %

30

F

165

30 % jusqu’à 100, 5 % au-delà

33,25

100

30 %

30

Total

600

141,25

600

180

Source : commission des finances.

Dans la première situation, sans répartition artificielle, l’application du taux réduit de 5 % une fois le seuil de 100 millions d’euros dépassé conduit à substantiellement réduire l’avantage fiscal global tiré par le groupe, par rapport à une situation où chaque société se verrait appliquer le taux normal de 30 % sur l’intégralité des dépenses exposées.

Des données obtenues de l’administration fiscale précisant les créances de CIR déclarées par les principaux bénéficiaires de l’outil montrent que, pour différentes entités manifestement membres d’un même groupe, le montant de chaque créance avoisine 30 millions d’euros – ce qui, schématiquement, correspond à 100 millions d’euros de dépenses.

● Il y a cependant lieu de souligner qu’une telle répartition artificielle, si elle est possible, ne reflète certainement pas la pratique de la plupart des groupes, sinon de tous.

En outre, substituer à une appréciation du seuil au niveau de chaque société une appréciation au niveau du groupe auquel elles appartiennent aurait des conséquences particulièrement lourdes pour certains groupes, notamment ceux dont les différentes entités sont spécialisées dans un domaine particulier. L’exemple suivant démontre l’importance de l’impact qu’une appréciation du seuil au niveau du groupe peut avoir.

comparaison du montant de cir en fonction
du niveau d’appréciation du seuil de 100 millionS d’euros

(en millions d’euros)

Société

Appréciation au niveau de chaque société

Appréciation au niveau du groupe

Dépenses

Taux applicable

Montant du CIR

Dépenses

Taux applicable

Montant du CIR

A

100

30 %

30

300

30 % jusqu’à 100, 5 % au-delà

40

B

100

30 %

30

C

100

30 %

30

Total

300

90

300

45

Source : commission des finances.

Il ressort de cet exemple que, pour le même montant de dépenses exposées, le CIR résultant d’une appréciation du seuil au niveau du groupe est très nettement inférieur à celui découlant d’un calcul au niveau de chaque société.

● De nombreux outils anti-abus existent déjà dans le droit fiscal français, et il ne paraît pas nécessairement judicieux de compromettre les performances de nos entreprises de façon potentiellement radicale pour contrer des pratiques abusives qui peuvent n’être que résiduelles : quelques comportements peu vertueux ne doivent pas entraîner une pénalisation excessive de tous.

L’ensemble de ces éléments militent donc pour une réflexion globale sur l’utilisation du CIR par les groupes, qui ne saurait laisser de côté la question de la compétitivité des entreprises françaises et de l’attractivité du pays – ce que le Rapporteur général appelait déjà de ses vœux dans son rapport de juillet dernier.

Les dépenses exposées par les entreprises au titre d’opérations de R&D externalisées auprès de certains organismes sont incluses dans l’assiette du CIR du donneur d’ordres. Parallèlement, ces dépenses sont déduites de l’assiette du CIR du sous-traitant, aux termes du III de l’article 244 quater B du CGI.

Les modalités de cette déduction au niveau du sous-traitant ont pu susciter certaines critiques, l’assiette n’étant pas seulement minorée des dépenses effectivement engagées par le sous-traitant, mais également de la marge de ce dernier. Cependant, ces modalités paraissent légitimes et, en tout état de cause, les solutions alternatives ne semblent guère satisfaisantes.

● La déduction de l’ensemble des sommes facturées par le sous-traitant est destinée à éviter toute double prise en compte des mêmes dépenses, dans le CIR du donneur d’ordres d’abord, dans celui du sous-traitant ensuite, sous un angle global tenant compte de l’aide fiscale cumulée des deux entreprises.

Illustration de la détermination du CIR dans le cas d’une sous-traitance

Une entreprise A externalise un projet de recherche auprès d’un sous‑traitant privé agréé B, qui lui facture à ce titre des dépenses de 2 000 euros :

– 1 500 euros au titre des dépenses effectivement engagées ;

– 500 au titre de la marge.

Parallèlement, le sous-traitant B expose 10 000 euros de dépenses au titre de ses propres opérations de R&D.

● L’entreprise A inclut dans l’assiette de son CIR un montant de 2 000 (l’opération n’ouvre pas droit au doublement d’assiette).

Le sous-traitant B déduit de son assiette de 10 000 la somme facturée, soit 2 000, et aboutit à une assiette propre de 8 000 euros.

L’assiette cumulée des deux entreprises est de 10 000 euros.

● Si B ne déduisait que les dépenses effectivement engagées et non sa marge, son assiette de CIR serait de 10 000 – 1 500 = 8 500 euros.

L’assiette du CIR de A restant à 2 000 euros, l’assiette cumulée des deux entreprises serait alors de 10 500 euros, se trouvant ainsi majorée de la marge de B.

Il n’est pas inutile de rappeler que si les modalités de calcul aident le donneur d’ordres, elles n’ont pas réellement pour effet de pénaliser le sous-traitant : l’aide apporté au donneur d’ordres améliore la situation financière de ce dernier, qui sera ainsi mieux à même d’exposer des dépenses de R&D, y compris en recourant à la sous-traitance et en fournissant ainsi aux organismes éligibles une activité économique importante. L’externalisation est d’ailleurs vivement incitée par le dispositif en vigueur, notamment à travers le doublement des dépenses externalisées dans le cadre de la sous-traitance publique.

Il convient donc d’être particulièrement prudent en la matière pour éviter de réduire l’incitation à externaliser, situation qui pénaliserait avant tout les sous‑traitants.

● À cet égard, retenir une solution consistant à ne pas inclure dans le CIR du donneur d’ordres les dépenses qu’il engage auprès du sous-traitant ne paraît pas souhaitable :

– cela reviendrait à ne plus soutenir l’entreprise à l’initiative du projet, le donneur d’ordres, ce qui ne va pas de soi en termes économiques ;

– les grandes entreprises disposant d’importantes capacités propres de R&D pourraient être alors tentées d’internaliser les opérations qu’elles confiaient jusque-là à des sous-traitants ;

– le surcoût budgétaire pourrait être important dans la mesure où les dépenses retenues par le donneur d’ordres sont plafonnées par le d ter du II de l’article 244 quater B du CGI, là où aucun plafond n’est prévu au niveau du sous‑traitant.

● Une solution plus modérée consistant à plafonner la somme que le sous‑traitant déduit aux seules dépenses qu’il engage effectivement – donc sans inclure sa marge – présenterait l’inconvénient de surenchérir le coût du CIR en majorant l’assiette globale rattachée à l’opération. En outre, ainsi qu’il a été vu, le mécanisme actuel aboutit à une neutralité d’ensemble.

Ce type de solution méconnaîtrait cette logique globale, qui embrasse l’opération dans ses deux aspects, donneur d’ordres et sous‑traitant, et aboutirait à ne se concentrer que sur l’un des deux acteurs.

● Enfin, une troisième voie limitant l’assiette du donneur d’ordres aux seules dépenses effectivement engagées par le sous-traitant pourrait entraîner des complications relativement lourdes pour le sous-traitant en termes de transparence et de contrôle.

Cela conduirait en outre le donneur d’ordres à voir son assiette de CIR inférieure aux dépenses effectivement engagées auprès du sous-traitant, pouvant réduire l’incitation à sous-traiter : là encore, cette solution, en défaveur du donneur d’ordres ne serait pas nécessairement à l’avantage des sous-traitants pour autant.

● Ces éléments exposés, il n’en reste pas moins certain que la sous-traitance constitue un volet important du CIR en réunissant environ 12 % des dépenses ouvrant droit à l’outil.

Il semble donc indispensable que le Parlement dispose d’informations exhaustives sur l’effectivité de l’externalisation d’opérations de R&D, déclinant notamment les aspects suivant :

– le nombre d’entreprises externalisant des opérations de R&D, à travers une présentation d’ensemble et par catégorie ;

– en suivant la même présentation, le nombre moyen et médian des opérations externalisées, le montant global de ces opérations et leurs montants moyen et médian ;

– toujours avec la même présentation d’ensemble et par catégorie, les données relatives aux sous-traitants, notamment leur nombre et les montants globaux, moyens et médians effectivement engagés (hors marge).

Avec un tel panorama, la représentation nationale disposerait d’informations complètes et précises lui permettant de mieux appréhender cet aspect cardinal du CIR.

Enfin, le dernier volet qui paraît pouvoir faire l’objet d’une attention appuyée dans le cadre du présent projet de loi porte sur la sous-traitance en cascade, situation dans laquelle un organisme sous-traitant d’une entreprise donneuse d’ordre externalise lui-même tout ou partie des travaux confiés.

● Le principe d’une telle cascade n’apparaît pas prohibé par le droit en vigueur. Si la loi n’en fait pas directement mention, un arrêt rendu le 29 novembre 2018 par la cour administrative d’appel de Paris traite du sujet ([88]).

Dans cette affaire, une société HP membre d’un groupe fiscalement intégré et agréée au titre du d bis du II de l’article 244 quater B du CGI s’était vu commander des travaux de recherche pharmaceutique par des entreprises n’appartenant pas au groupe. La société HP avait confié la réalisation de ces travaux à deux autres sociétés membres du groupe intégré, HPC et HPS, non agréées.

La CAA de Paris n’a pas remis en cause le principe, pour un sous-traitant, de recourir à un sous-traitant de second rang non agréé. En revanche, elle a rappelé que, dans le cadre d’une externalisation de travaux de R&D, seul le donneur d’ordres peut prétendre au CIR : les sociétés HPC et HPS ne pouvaient donc prétendre au CIR au titre des sommes facturées à HP, les donneurs d’ordres réels étant les sociétés extérieures au groupe.

Le fait de recourir à des sous-traitants de second rang non agréés peut être vu comme une faille dans le dispositif d’externalisation des travaux prévu dans le cadre du CIR – sauf naturellement si le contrat de sous-traitance de second rang satisfait aux conditions de l’agrément –, puisque cela peut conduire à ce que les mêmes dépenses soient prises en compte plusieurs fois, au niveau du donneur d’ordres (potentiellement deux fois en cas de sous-traitance publique ouvrant droit à un doublement d’assiette) et au niveau du sous-traitant de second rang privé non agréé.

● Un autre problème potentiel résulte du recours, pour un sous-traitant, à une entité sous-traitante de second rang établie en dehors de l’Union européenne ou de l’EEE.

Pour mémoire, aux termes du dernier alinéa du II de l’article 244 quater B du CGI, les dépenses ouvrant droit au CIR doivent « correspondre à des opérations localisées au sein de lUnion européenne ou dans un autre État partie à laccord sur l[EEE] ». La condition tenant à la localisation de la réalisation des opérations de R&D est reprise dans le BOFiP, qui précise que « léligibilité des dépenses de recherche au crédit dimpôt dépend du lieu de réalisation des opérations » ([89]).

Dans ces conditions, il ne semble pas possible qu’une sous-traitance en cascade puisse conduire à ce que des travaux soient réalisés hors de l’Union européenne ou de l’EEE. Une telle prohibition découle de la lettre de la loi qui vient d’être rappelée, mais aussi de la logique président au dispositif de sous‑traitance dans le cadre du CIR.

À supposer qu’une incertitude subsiste sur ce point, une clarification législative expresse serait plus qu’opportune.

En tout état de cause, le Parlement devrait disposer de toutes les informations utiles sur les modalités de contrôle des agréments des sous-traitants et sur les éventuels abus constatés reposant sur le recours à des sous-traitants de second rang dans des pays tiers.

● Enfin, une autre faille potentielle de la sous-traitance peut résider dans l’interposition, par une société étrangère, d’une filiale en France qui confierait à des organismes publics – ceux mentionnés au d du II de l’article 244 quater B du CGI – des travaux de recherche, ouvrant ainsi droit à un doublement d’assiette.

Dans certains cas, il a été constaté que la filiale française est en réalité une « coquille vide » dépourvue de substance économique et qui ne réalise aucune opération de R&D elle-même : elle existe pour confier à des sous-traitants des travaux et percevoir un CIR majoré, puis transférer ce dernier à la société étrangère par des flux de trésorerie ou toute autre forme de prix de transfert.

Une solution qui pourrait être mise en œuvre pour contrer ce type de montage consisterait à étendre à la sous-traitance publique la mesure d’encadrement qui existe déjà pour la sous-traitance privée agréée, au d bis du II de l’article 244 quater B : la prise en compte des dépenses sous-traitées dans la limite de trois fois le montant des autres dépenses de R&D engagées. Cette condition, qui permet d’exiger de l’entreprise donneuse d’ordre une substance économique minimale par la réalisation d’opérations de R&D, semble opportune.

Il importerait cependant de veiller à ce que sa mise en œuvre ne pénalise pas excessivement les organismes publics et les nouvelles entreprises, telles que des start-up, qui peuvent sous-traiter leurs opérations de R&D en phase d’amorçage avant de les réaliser elles-mêmes.

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*     *

La commission des finances s’est ralliée à l’analyse du Rapporteur général sur ces sujets en adoptant :

– un amendement portant article additionnel après l’article 49 et introduisant un dispositif anti-abus en matière de sous‑traitance en cascade ([90]) ;

– un amendement portant également article additionnel après l’article 49 et prévoyant l’étude approfondie des évolutions complémentaires envisagées en matière de forfait de fonctionnement et de dépenses ne relevant pas de la R&D ([91]) ;

– enfin, un amendement au présent article 49 sollicitant la remise d’un rapport complet sur l’utilisation par les groupes fiscalement intégrés du CIR et sur la sous-traitance dans le cadre du CIR ([92])

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Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1108 de Mme Laure de La Raudière.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF304 de M. Mohamed Laqhila, II-CF1205 de M. Éric Bothorel et II-CF1262 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Mohamed Laqhila. Le projet de loi de finances pour 2020 propose de baisser de 50 % à 43 % le taux de prise en compte des frais de personnel de recherche pour le calcul du crédit d’impôt recherche (CIR) et du crédit d’impôt innovation (CII). C’est un mauvais signal envoyé aux entreprises, en particulier les entreprises innovantes. S’il faut, bien évidemment, accompagner et contrôler le crédit d’impôt recherche, la baisse de ce taux aurait un effet plutôt négatif sur les mesures d’embauche. L’amendement II-CF304 a donc pour objet de maintenir le taux initial.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’argent public doit prioritairement servir à financer la recherche publique et les activités de recherche qui font effectivement de l’innovation sociale et technologique. Depuis des années, la recherche publique souffre d’un manque criant de moyens, humains et financiers. Or, sur bien des aspects, le crédit d’impôt recherche constitue une véritable gabegie d’argent public, dont tirent profit de grands groupes par le biais de schémas d’optimisation fiscale. Le champ des dépenses ouvrant droit au bénéfice du crédit d’impôt recherche apparaît bien trop large, alors que l’argent public devrait accompagner les seules activités utiles à la société. L’amendement II-CF1262 propose ainsi de recentrer le crédit d’impôt recherche en excluant un certain nombre de dépenses éligibles.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable à l’amendement de M. Laqhila, qui reviendrait à supprimer l’essentiel de l’article 49. Avis défavorable également à l’amendement II-CF1205 de M. Bothorel.

Enfin, le dernier amendement concerne notamment le crédit d’impôt collection, que nous avons prévu de borner en première partie afin de pouvoir l’évaluer avant, le cas échéant, d’envisager son évolution ou sa suppression. Je suis donc défavorable à un amendement qui le supprimerait aussi brutalement.

M. le président Éric Woerth. C’est la Cour des comptes qui avait proposé cette évolution pour le crédit d’impôt recherche. Cela étant, il faut faire très attention à ne pas y toucher tous les ans. Le ministre a parlé de « sacralisation » : qu’est-ce que cela signifie si nous amendons ce dispositif chaque année ?

M. Charles de Courson. Je regrette cet article gouvernemental. Nous étions quasiment tous d’accord pour ne plus y toucher pendant plusieurs années. Or là, on bricole, on baisse de sept points, et on dégage 230 millions. D’ailleurs, avec le décalage du crédit d’impôt, cela n’aura d’incidence qu’en 2021. Je trouve dommage d’y toucher : nous ne sommes plus crédibles quand il y a un écart entre ce que l’on dit et ce que l’on fait.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je rappelle à l’ancien magistrat de la Cour des comptes que vous êtes que ce bricolage est la conclusion d’un rapport de la Cour. C’est elle qui l’a proposé !

M. le président Éric Woerth. Le dispositif proposé vaudra pour les dépenses engagées en 2020.

La commission rejette successivement les amendements II-CF304, II-CF1205 et IICF1262.

Elle examine ensuite, en discussion commune, lamendement II-CF1562 du rapporteur général, les amendements identiques II-CF156 de M. Fabrice Le Vigoureux et IICF1255 de M. Fabien Roussel, ainsi que lamendement II-CF1416 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’article 49 prévoit de relever de 2 à 100 millions d’euros le seuil d’assujettissement à l’obligation déclarative complémentaire du crédit d’impôt recherche (CIR). Considérant que cela n’était pas opportun, nous sommes plusieurs à avoir déposé des amendements visant à supprimer ce relèvement ou à fixer un seuil moins élevé. Le relèvement à 100 millions d’euros me paraît inopportun puisque l’objectif de la déclaration est de mieux connaître l’utilisation du CIR par les entreprises, notamment s’agissant des jeunes docteurs. L’abaissement du seuil avait d’ailleurs été réalisé sur l’initiative d’Amélie de Montchalin, alors rapporteure spéciale des crédits de la recherche.

En outre, la neutralisation de cet abaissement adopté en loi de finances par une instruction fiscale ne me semble pas bienvenue et traduit surtout un irrespect absolu du Parlement, la volonté du législateur étant bafouée. Si la loi est votée, il n’appartient pas au Gouvernement de la mettre en échec par ce mode opératoire : s’il veut sortir du bois, il n’a qu’à le faire pendant la discussion, mais pas dans ces conditions, que je n’ai pas appréciées du tout !

En revanche, je suis assez sensible à certains arguments mis en avant par le Gouvernement sur les difficultés d’exploitation de la déclaration et la potentielle charge pour les petites et moyennes entreprises (PME). C’est pourquoi, plutôt que de supprimer le relèvement du seuil à 100 millions d’euros, je vous propose une solution intermédiaire : le maintien du relèvement du seuil à 100 millions, avec une nouvelle obligation allégée pour les entreprises dont les dépenses de recherche et développement (R&D) sont comprises entre 10 et 100 millions d’euros. Une telle solution permet de ne pas toucher les plus petites des PME qui auraient été concernées par un seuil à 2 millions, et de garantir l’utilité de la déclaration complémentaire – un seuil à 100 millions ne concerne qu’une vingtaine d’entreprises, ce qui empêche de tirer des conclusions intéressantes sur le CIR.

M. Laurent Saint-Martin. Comment des dispositions votées par le Parlement peuvent-elles se retrouver écrasées dans le bulletin officiel des finances publiques (BOFIP) par une disposition d’ordre réglementaire, sans que cela repasse par le Parlement ? C’est impossible : pour « délégiférer », il faut repasser devant le Parlement. Ce n’est en rien anecdotique mais bien un vrai problème démocratique. Il faut que nous en sachions plus sur ce point.

M. le président Éric Woerth. Vous avez absolument raison. Je pense que tout le monde sur ces bancs sera d’accord pour accomplir ce travail, que nous pouvons peut-être confier à la Cour des comptes – nous n’avons pas de droit de tirage sur le Conseil d’État. Nous devons examiner très précisément ce problème parce que cela peut engager la responsabilité de l’administration. Écraser la loi, c’est ne pas la respecter !

M. Charles de Courson. Il existe une procédure constitutionnelle de déclassement ; elle devrait être utilisée, mais il paraît qu’elle l’est de moins en moins. Il y a vingt-six ans, on était attentif à distinguer les dispositions relevant des articles 34 et 37 de la Constitution, autrement dit de la loi et du règlement. Aujourd’hui, c’est fini ! On bourre nos lois de dispositions réglementaires. C’est tout à fait regrettable.

Quant à l’amendement Giraud, c’est un moindre mal par rapport au texte gouvernemental. Je le voterai sans enthousiasme : on bricole, on modifie, alors qu’on avait dit qu’on n’y toucherait plus. Respectons nos engagements !

M. Jean-Paul Dufrègne. Pour ma part, je ne le voterai pas. Je maintiens l’amendement II-CF1255, qui tend à supprimer cette nouvelle disposition. Le seuil de dépenses de recherche avait été adopté dans le cadre de la loi de finances pour 2019 : le réaménager aujourd’hui à partir de la proposition du Gouvernement ne me semble pas judicieux. On nous répète sans cesse qu’il ne faut pas changer les dispositions adoptées l’année précédente : soyons logiques et maintenons cette disposition !

M. Fabrice Le Vigoureux. Il faut bien voir ce que l’on demande aux entreprises, car 2 millions de dépenses de recherche éligibles au CIR, ce n’est pas rien ! On sort du domaine de la très petite entreprise. Le document qui leur est demandé fait trois pages, avec cinq encadrés : un stagiaire bien rodé mettrait une demi-journée à le remplir. L’obligation n’est donc pas très forte.

La France a un problème de valorisation du doctorat, car elle manque de données. Ce document nous permet de connaître les rémunérations moyennes, la part des docteurs dans le personnel titulaire, les partenariats avec les laboratoires de recherche publics ou privés, toutes informations extrêmement intéressantes. L’amendement du rapporteur général va dans le bon sens mais, en première intention, je souhaitais plutôt maintenir le dispositif de l’amendement d’Amélie de Montchalin, que j’avais d’ailleurs cosigné. M. le rapporteur général pourrait-il nous préciser si l’obligation allégée permet de recueillir ces informations stratégiques sur les doctorats ?

Mme Christine Pires Beaune. Parlons un peu du coût du CIR pour nos finances publiques : 6 milliards d’euros, un montant multiplié par deux en six ans. Je trouve cela inquiétant et je voterai donc l’amendement du rapporteur général, même si je regrette, comme M. Le Vigoureux, que l’on ne maintienne pas le seuil à 2 millions.

Je regrette surtout, monsieur le rapporteur général, que votre rapport sur l’application de la loi fiscale (RALF), paru très récemment, ne mentionne pas d’autres pistes d’amélioration. Je déposerai des amendements en séance concernant le plafond : celui-ci se calcule aujourd’hui par entreprise et non par groupe. On oublie souvent que 44 % de ces 6 milliards vont aux très grandes entreprises.

Par ailleurs, l’écrasement par le BOFIP de la disposition issue de l’amendement de Mme de Montchalin me rend très perplexe. Il convient de vérifier si cela est vraiment occasionnel ou s’il s’agit d’une pratique courante.

Mme Émilie Cariou. Nous sommes favorables à l’amendement du rapporteur général, qui propose un juste milieu entre 2 millions et 100 millions. Il serait choquant de repasser à un seuil à 100 millions.

Non, le BOFIP ne peut pas s’opposer à la loi, et cela peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil d’État. Toutefois, en l’espèce, qui irait s’en plaindre puisque le BOFIP relâche la bride par rapport à ce que nous avions voté l’année dernière ? Nous devons voir comment corriger ces comportements, car il n’est absolument pas acceptable qu’un texte administratif écrase une loi !

M. Jean-Paul Dufrègne. Devant ce piétinement du Parlement, il faut une réaction forte. Nous ne devons pas repartir de la disposition proposée par le Gouvernement ; s’il y a des modifications à apporter, repoussons-les à l’année prochaine. Faisons un exemple face à l’arrogance gouvernementale !

Mme Christine Pires Beaune. La première des choses à faire est de rechercher le responsable de cette situation. Je ne suis pas sûre que le ministre y soit pour quoi que ce soit.

M. le président Éric Woerth. D’ailleurs, personne ne le pense !

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour rassurer tout le monde, je veux juste préciser que l’allégement que je propose ne porte pas sur des informations fondamentales. De plus, mon amendement permet d’éviter la majoration de pénalité pour les PME. Si nous supprimons sèchement le relèvement, la pénalité majorée leur sera appliquée. Je demande donc le retrait des amendements en faveur du mien, en proposant bien sûr la cosignature aux auteurs de ces amendements, comme je le fais systématiquement en pareil cas.

Les amendements II-CF156 et II-CF1416 sont retirés.

La commission adopte lamendement II-CF1562 (amendement II2523).

En conséquence, lamendement II-CF1255 tombe.

La commission examine lamendement II-CF1431 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le présent amendement a pour objet de demander un rapport au Gouvernement sur l’utilisation du CIR par les groupes et sur la sous‑traitance, afin de s’assurer qu’il n’y a pas d’optimisation. Il s’agit, par ailleurs, d’étudier le phénomène de la sous-traitance en cascade, qui est un élément perturbateur dans l’utilisation du CIR.

M. Charles de Courson. Il faudrait peut-être légèrement modifier votre amendement concernant la transférabilité vers les sous-traitants du CIR. Beaucoup de sous‑traitants nous ont signalé des exemples concrets démontrant que le CIR n’est pas transparent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cela est prévu dans le rapport.

La commission adopte lamendement II-CF1431 (amendement II-2524).

Puis elle adopte larticle 49 ainsi modifié.

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Après l’article 49

La commission est saisie de lamendement II-CF307 de M. Marc Le Fur.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet amendement propose de revoir les conditions de qualification de « jeune entreprise innovante », en y incluant les entreprises réalisant des dépenses d’innovation à hauteur de 15 % de leurs charges déductibles.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons voté tout à l’heure la prorogation du dispositif avec une demande de rapport qui inclut ces préoccupations. Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement.

Lamendement II-CF307 est retiré.

Lamendement II-CF308 de M. Marc Le Fur est également retiré.

La commission examine ensuite lamendement II-CF1278 de Mme Natalia Pouzyreff.

Mme Natalia Pouzyreff. Cet amendement a pour objet d’orienter la manne de 6,5 milliards du CIR qui va aux entreprises, notamment les plus grandes, de façon plus favorable à la recherche publique et privée. Il s’agirait de limiter le plafond, actuellement de 100 millions d’euros, à 80 millions de dépenses éligibles dès lors que moins de 10 % d’entre elles sont allouées à des programmes menés en coopération avec des organismes de recherche extérieurs. Ces dispositions comptables un peu nouvelles seraient censées inciter les grands groupes à partager davantage leurs efforts de recherche avec des organismes de recherche extérieurs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je vois cet amendement comme un amendement d’appel, cohérent avec celui que nous venons de voter, que Mme Pouzyreff a d’ailleurs cosigné. Je lui demande donc de le retirer, sachant que je présenterai un peu plus tard un amendement sur les problématiques de contournement par la sous-traitance en cascade.

Lamendement II-CF1278 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF306 de M. Marc Le Fur.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF1258 de M. Fabien Roussel.

M. Fabien Roussel. Le crédit d’impôt recherche est actuellement calculé au taux de 30 % sur la fraction des dépenses de recherche inférieure à 100 millions d’euros. Le présent amendement a pour objet de plafonner les dépenses qui peuvent dépendre du CIR à 100 millions d’euros, en supprimant la disposition qui prévoit un taux de 5 % sur la fraction excédant ce montant.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Autant je me pose des questions sur les risques d’optimisation, autant je ne souhaite pas brider nos champions en matière de recherche et de développement. Je suis donc défavorable à un dispositif qui plafonnerait pour le principe : il est logique que de très grandes entreprises fassent de la R&D.

La commission rejette lamendement II-CF1258.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF1479 de Mme Sabine Rubin et II-CF1257 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Éric Coquerel. L’amendement II-CF1479 vise à considérer l’assiette au niveau de la société en entier et pas au niveau de ses entités, car le droit en vigueur a permis beaucoup d’abus. Le CIR, principalement destiné aux PME à l’origine, s’est progressivement transformé, le relèvement, en 2008, du plafond à 100 millions d’euros ayant bénéficié aux très grands groupes – quarante-deux entreprises captent 31 % des créances du CIR. Ce quasi‑monopole, véritable préemption par les grands groupes, est pour le moins exagéré et ne correspond pas à l’apport pour le pays en emplois – c’est même souvent plutôt le contraire.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’amendement II-CF1257 a pour objet d’apprécier le seuil de 100 millions au niveau du groupe et non au niveau de la seule entreprise.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous venons justement de voter un amendement qui nous permettra, dès l’an prochain, d’avoir une bonne information sur l’utilisation du CIR par les groupes. Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements, sinon l’avis sera défavorable.

M. Michel Castellani. Je rappelle au rapporteur général que nous avons fait évoluer les dispositifs du crédit d’impôt recherche et du crédit d’impôt innovation en Corse dans le budget précédent. Cependant, nos décisions ne seront applicables qu’après que la Commission européenne aura déclaré le dispositif conforme au droit européen. En Corse, tout tremble mais rien ne bouge, et nos décisions de l’an dernier ne sont pas encore appliquées, faute de retour. Si vous pouviez faire quelque chose, ce serait bienvenu !

M. Charles de Courson. L’exposé sommaire de l’amendement de M. Dufrègne est exact, mais si nous le votons, cela aura pour conséquence de pénaliser les pépites de l’industrie française que sont les secteurs de l’aéronautique et de l’automobile. Voilà pourquoi on ne l’a jamais fait. L’intérêt du pays est, en l’espèce, de ne pas passer au groupe, même si cela a sa logique intellectuelle.

M. le président Éric Woerth. On peut aussi penser au secteur du médicament.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1479 et II-CF1257.

Article additionnel après l’article 49
Aménagement des modalités de sous-traitance dans le cadre du crédit dimpôt recherche

Elle en vient à lexamen de lamendement II-CF1563 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit du principe de la sous-traitance en cascade dont j’ai parlé plus haut. Dans le cadre du CIR, la sous-traitance d’opérations de recherche et développement à des organismes publics ouvre droit, pour le donneur d’ordres, à une prise en compte des dépenses exposées pour le double de leur montant. Cela, et plus généralement le principe même de la sous-traitance, a conduit à des abus et à des contournements.

Pour lutter contre la sous-traitance en cascade abusive, qui pourrait conduire par exemple à ce que la même dépense soit prise en compte plusieurs fois au travers du recours à un sous-traitant de deuxième niveau privé et non agréé, je vous propose de limiter la prise en compte des dépenses engagées par le donneur d’ordres aux opérations réalisées par des organismes publics ou privés agréés, et de réserver le système de doublement d’assiette de la sous-traitance publique à la part des dépenses liées aux opérations effectivement réalisées par l’organisme public sous-traitant.

C’est une réponse mesurée face à des abus et dévoiements absolument inadmissibles. Elle préserve le CIR et l’incitation à la sous-traitance, tout en corrigeant les lacunes constatées lors de récents contrôles par les services de l’État, qui ont démontré que cette pratique abusive était développée.

Mme Olivia Grégoire. Je soutiens ardemment l’amendement du rapporteur général. En tant que rapporteure spéciale sur le développement des entreprises, j’ai eu connaissance de dévoiements en cascade : certaines entreprises se font une spécialité de dupliquer des demandes de CIR sans se préoccuper de la qualité des emplois ni de la compétence des personnes recrutées dans ce cadre.

Mme Véronique Louwagie. Il n’est pas admissible que des dépenses soient prises en compte plusieurs fois, en cascade. Nous soutiendrons donc votre amendement.

Pouvez-vous, monsieur le rapporteur général, nous donner une indication des montants en cause ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne dispose pas du montant de tous les contrôles ayant été effectués, mais beaucoup de contrôles sont en cours, qui démontrent que la pratique est largement développée.

M. Charles de Courson. Le problème de fond soulevé par cet amendement doit être abordé dans le cadre du rapport. Il est donc contradictoire d’anticiper sur le rapport, qui doit nous éclairer sur ce point.

Ces pratiques existent, mais sont-elles volontaires ? Certaines entreprises nous disent que non : elles ont simplement recours à un très bon organisme habilité, qui sous-traite par la suite. Le système tel qu’il est conçu peut aboutir à des doubles bénéfices sur la même dépense, mais ce n’est pas forcément un choix de l’entreprise.

La commission adopte lamendement II-CF1563 (amendement II-2525).

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Après l’article 49

Elle examine ensuite lamendement II-CF1276 de Mme Natalia Pouzyreff.

Mme Natalia Pouzyreff. Le présent amendement a pour objet de renforcer l’incitation à une coopération entre secteur privé et secteur public en relevant le plafond de prise en compte des dépenses à 10 millions d’euros, ce qui permettrait aux entreprises d’investir jusqu’à 20 millions dans des collaborations réalisées avec des organismes de recherche agréés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est un sujet intéressant qui doit être étudié dans le rapport précité – vous avez d’ailleurs cosigné l’amendement s’y rapportant. Compte tenu du coût potentiellement important de la mesure que vous proposez, il serait préférable de réaliser une étude globale afin de mettre en place un système « propre », évitant les abus éventuels dont nous venons de parler. Je souhaiterais que vous retiriez votre amendement.

M. Laurent Saint-Martin. Il est très complexe de corriger les abus liés au CIR, comme le démontre l’amendement du rapporteur général, rédigé de manière très fine. Derrière, c’est l’attractivité des investissements qui est en jeu. S’il ne s’agissait que de lutter contre des abus, nous serions tous d’accord.

Je rejoins le rapporteur général, attendons les conclusions des études ; ne votons pas précipitamment des amendements qui risquent d’envoyer des signaux très néfastes pour l’attractivité de notre pays en matière d’investissements dans la R&D.

La commission rejette lamendement II-CF1276.

Puis elle passe à lamendement II-CF1480 de Mme Sabine Rubin.

M. Éric Coquerel. Cet amendement est dans le même esprit que le précédent. Il concerne surtout les très grands groupes, tel Sanofi. Entre 2008 et 2012, cette société a reçu 2 milliards d’euros de crédit d’impôt recherche, tout en supprimant 2 400 emplois dans ses laboratoires. Elle a également détruit un bâtiment neuf, le DI 50, à Montpellier parce qu’il ne correspondait plus à sa stratégie. Il faut pénaliser les entreprises qui suppriment des postes de chercheurs alors qu’elles bénéficient du CIR ; tel est le propos de cet amendement à travers une pénalité dissuasive, égale à 100 % du montant de CIR touché.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Défavorable. Avec votre amendement, si un chercheur démissionne, l’entreprise perd la totalité du CIR et doit régler une amende égale à 100 % de ce même CIR.

M. Éric Coquerel. Nous parlons de suppressions de postes, pas de départs !

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous visez bien toute « baisse de dépenses de personnel ».

M. Éric Coquerel. Déposez un sous-amendement ! Vous ne pouvez balayer notre amendement sur cet unique motif. Vous ne pouvez pas, non plus, nier que certains groupes bénéficiant d’un crédit d’impôt recherche pratiquent des suppressions d’emplois importantes dans notre pays, uniquement pour des raisons boursières. Il faut limiter ces pratiques !

M. le président Éric Woerth. Le sujet revient tous les ans…

La commission rejette lamendement II-CF1480.

Elle en vient à lamendement II-CF309 de M. Marc Le Fur.

M. Fabrice Brun. Il s’agit d’étendre le principe du contradictoire en matière de contrôle fiscal aux expertises diligentées par le ministère de la recherche sur le crédit d’impôt recherche, en créant un droit à la rencontre entre le contribuable et l’agent du ministère.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Votre amendement est satisfait par l’article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales. Je vous propose de le retirer.

M. Fabrice Brun. Cet amendement a été rédigé par Marc Le Fur, je ne me permettrai donc pas de le retirer. Il est issu de situations concrètes rencontrées sur le terrain. Il y aurait apparemment un « trou dans la raquette » dans la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance.

La commission rejette lamendement II-CF309.

*

*     *

Article additionnel après l’article 49
Rapport sur les évolutions du crédit dimpôt recherche relatives au forfait de fonctionnement et aux dépenses ne relevant pas de la recherche et développement

Elle examine ensuite lamendement II-CF1550 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne suis pas le plus fervent supporter des demandes de rapport, mais celui-ci concerne les évolutions envisageables du CIR relatives au forfait de fonctionnement et à la prise en compte des dépenses ne relevant pas de la R&D. Il me semble indispensable de disposer de ces données, ce qui n’est actuellement pas le cas.

La commission adopte lamendement II-CF1550 (amendement II-2526).

 


Article 50
Rationalisation de la réduction dimpôt en faveur du mécénat

Résumé du dispositif proposé

Le présent article procède à une rationalisation du mécénat d’entreprise prévu à l’article 238 bis du CGI, dans le cadre duquel les dons en numéraire ou en nature effectués par les entreprises à certains organismes d’intérêt général ouvrent droit à une réduction d’impôt.

Il prévoit à cet effet :

– de ramener le taux de la réduction d’impôt de 60 % à 40 % pour la fraction de dons excédant 2 millions d’euros – ce qui devrait concerner moins de 80 entreprises ;

– d’encadrer le mécénat de compétence en limitant, pour chaque salarié mis à disposition, la rémunération et les charges sociales retenues pour la valorisation du don à trois fois le montant du plafond de la sécurité sociale.

La modulation proposée du taux de la réduction d’impôt ne concerne pas les dons faits aux organismes qui fournissent aux personnes en difficulté des repas, favorisent leur logement et leur procurent des soins – ces dons n’étant par ailleurs pas pris en compte pour apprécier l’éventuel dépassement du plafond de 2 millions d’euros.

Ces modifications s’appliqueront aux dons effectués au cours d’exercices clos à compter du 31 décembre 2020. Le gain annuel n’est pas chiffré en tant que tel mais est estimé, en hypothèse haute, à 130 millions d’euros par an à compter de 2021.

Dernières modifications intervenues

Le mécénat d’entreprise a été introduit par la loi « Aillagon » du 1er août 2003 et son économie générale n’a que peu évolué depuis.

Les articles 148 et 149 de la loi de finances pour 2019 ont apporté deux modifications importantes au dispositif : l’article 148 a mis en place un plafonnement des dons fixe, à 10 000 euros, alternatif au plafonnement à 5 ‰ du chiffre d’affaires, et l’article 149 a prévu une nouvelle obligation déclarative permettant un meilleur suivi des dons effectués.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

En plus de trois amendements de précision et de coordination du Rapporteur général, la commission des finances a adopté :

– à l’initiative du Rapporteur général, un amendement incluant dans le champ des dons ouvrant droit à une réduction d’impôt de 60 % quel que soit leur montant, les dons faits aux organismes dont l’activité principale est la fourniture à des personnes en difficulté de produits de première nécessité, tels que des produits de protection hygiénique féminine, des couvertures et vêtements et des produits d’hygiène corporelle ;

– à l’initiative de Mme Racon-Bouzon et de plusieurs de ses collègues, un amendement relevant de 10 000 à 20 000 euros le plafond alternatif des dons ouvrant droit à la réduction d’impôt ;

– à l’initiative du Rapporteur général, un amendement sollicitant la remise d’un rapport consacré à l’articulation du mécénat et des obligations résultant de la « loi Garot ».

I.   L’état du droit

Miroir, pour les entreprises, de la réduction d’impôt accordée au titre des dons faits par les particuliers prévue à l’article 200 du code général des impôts (CGI), la réduction d’impôt en faveur du mécénat prévue à l’article 238 bis du même code est un dispositif nécessaire, mais qui appelle certains aménagements mis en évidence par de récents travaux d’évaluation.

A.   La réduction d’impôt en faveur du mécénat des entreprises

Prévue à l’article 238 bis du CGI, la réduction d’impôt en faveur du mécénat consiste en un avantage fiscal égal à 60 % des versements faits en faveur de certains organismes d’intérêt général par les entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu (IR) ou à l’impôt sur les sociétés (IS). Ces entreprises doivent relever d’un régime réel d’imposition, celles exonérées partiellement ou temporairement en application d’un abattement étant également éligibles au dispositif.

1.   Les organismes bénéficiaires des dons

Pour ouvrir droit à la réduction d’impôt, les dons effectués par les entreprises doivent être faits au bénéfice d’organismes limitativement énumérés aux 1, 4, 4 bis et 5 de l’article 238 bis du CGI.

Ces organismes doivent, sauf exceptions limitativement prévues, être établis et exercer leurs activités en France ou dans l’espace européen, comprenant les États membres de l’Union européenne et les États parties à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) liés à la France par une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, ainsi qu’en dispose le 4 bis de l’article 238 bis du CGI.

Pour l’application du mécénat, les organismes bénéficiaires des dons établis dans une collectivité régie par l’article 74 de la Constitution ou en Nouvelle‑Calédonie sont assimilés à des organismes établis en France – il est rappelé que, au sens fiscal, la France s’entend du territoire métropolitain et des collectivités régies par l’article 73 de la Constitution.

a.   Les organismes mentionnés au 1 de l’article 238 bis

Le 1 de l’article 238 bis décline à ses a à g la liste des organismes éligibles aux dons réalisés dans le cadre du mécénat.

● Peuvent prétendre, en vertu du a du 1, à des dons ouvrant droit pour les entreprises les réalisant à la réduction d’impôt, les œuvres ou organismes :

– à caractère philanthropique, tel qu’un organisme chargé de la collecte de fonds pour assister les victimes d’un sinistre ;

– à caractère éducatif, comme les associations gestionnaires d’établissements n’étant pas sous contrat simple ou d’association avec l’État, ou scientifique, tels que les organismes effectuant des recherches médicales ;

– à caractère social ou familial, incluant les hôpitaux (y compris privés s’ils ne poursuivent pas un but lucratif), les auberges de jeunesse ou encore les centres communaux d’action sociale ;

– à caractère humanitaire, assistant les personnes en situation de détresse et de misère à travers, par exemple, une aide alimentaire ou en matière de logement, ou qui interviennent lors de catastrophes naturelles ou technologiques, de guerres ou encore de famines ;

– à caractère sportif, comme les clubs de sport amateurs et, plus généralement, les organismes chargés de la promotion de la pratique sportive ;

– valorisant le patrimoine artistique national, régional ou local à travers la sauvegarde, la conservation et la mise en valeur de biens ;

– participant à la défense de l’environnement naturel, qu’il s’agisse de la préservation de la biodiversité, de la prévention des risques ou de la lutte contre la pollution ;

– concourant à la diffusion de la culture et de la langue françaises et des connaissances scientifiques nationales, notamment à travers des expositions à l’étranger.

Les fondations d’entreprise sont incluses dans cette catégorie d’organismes éligibles aux dons.

Les organismes relevant des activités humanitaires ou concourant à la diffusion et à la mise en valeur du patrimoine, de la culture et de la langue françaises ou des sciences, de même que ceux agissant en matière de protection environnementale, ne sont pas soumis à l’exigence d’exercer leur activité au sein de l’espace européen – exception logique compte tenu de l’objet même de leurs activités.

De la même manière, et là encore logiquement, peuvent ouvrir droit au mécénat les dons faits à des organisations internationales auxquelles la France est partie – incluant ainsi, à titre d’exemple, les dons faits au bénéfice du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).

● Les organismes bénéficiaires des dons ne doivent pas avoir d’activités lucratives – ou, lorsqu’ils en ont en parallèle de leurs activités non lucratives, une sectorisation doit être faite et les dons doivent être directement et exclusivement affectés aux activités non lucratives.

En outre, leur gestion doit être désintéressée, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas procurer d’avantages matériels aux fondateurs ou dirigeants de l’organisme
– cette condition n’empêchant naturellement pas la rémunération du personnel salarié de l’organisme.

La règle des « 4 P »

La règle dite des « 4 P » permet d’apprécier les conditions dans lesquelles un organisme, tel qu’une association, exerce ou non une activité économique. Il s’agit de la troisième et dernière étape d’un processus d’analyse, les deux premières portant sur la nature désintéressée de la gestion et sur le fait de savoir si l’organisme concurrence une entreprise. Si la réponse aux deux premières questions est positive (gestion désintéressée, concurrence d’une entreprise), la règle des « 4 P » intervient.

Les « 4 P » sont :

– le produit proposé ;

– le public ciblé par le produit ;

– le prix pratiqué ;

– la publicité réalisée.

Avec ces critères, il est possible de voir si l’organisme exerce son activité dans des conditions similaires à celles d’une entreprise sur un marché.

Enfin, le fonctionnement de ces organismes ne doit pas concerner un cercle restreint de personnes, sans quoi la dimension d’intérêt général serait méconnue. Ainsi, les organismes ne doivent pas poursuivre des intérêts particuliers de personnes individualisables : une association de soutien à des sinistrés, à vocation générale, pourrait être éligible aux dons ouvrant droit au mécénat, à l’inverse d’une association soutenant une victime en particulier – en revanche, le soutien d’une zone géographique précise n’exclut pas l’éligibilité au dispositif.

● Sont également éligibles aux termes du b du 1 de l’article 238 bis du CGI, si elles répondent aux conditions prévues au a du même 1, les fondations reconnues d’utilité publique (FRUP) et les associations reconnues d’utilité publique (ARUP) ou relevant des musées de France.

Enfin, toujours aux termes du même b, les associations cultuelles ou de bienfaisance et les établissements publics des cultes reconnus d’Alsace-Moselle entrent dans le champ des organismes éligibles aux dons.

La deuxième grande catégorie d’organismes éligibles aux dons ouvrant droit à la réduction d’impôt concerne les structures et projets liés à l’enseignement et la recherche.

● D’une part, aux termes des c et c bis du 1 de l’article 238 bis du CGI, sont éligibles certains établissements d’enseignement revêtant un caractère d’intérêt général et à but non lucratif :

– établissements d’enseignement supérieur publics ou privés, tels que les universités, les écoles normales supérieures et les grandes écoles et établissements bénéficiant d’un statut fixé par décret – Conservatoire national des arts et métiers, Institut d’études politiques de Paris, École nationale des Chartes, etc. ;

– établissements d’enseignement artistiques publics ou privés, dispensant les enseignements définis aux articles L. 216‑2, L. 216‑3, L. 312‑6, L. 312‑8 et L. 361‑5 du code de l’éducation ;

– établissements d’enseignement supérieur consulaire, gérés par des chambres de commerce et d’industrie et définis à l’article L. 711‑17 du code de commerce.

● D’autre part, peuvent prétendre aux dons :

– les sociétés ou organismes bénéficiant d’un agrément ministériel leur permettant de bénéficier de dons d’entreprises imposées à l’IR ou à l’IS, en vertu de l’article 4 de l’ordonnance du 25 septembre 1958 relative à la fiscalité en matière de recherche scientifique et technique ([93]), en vertu du d du 1 de l’article 238 bis du CGI ;

– les projets de thèses proposés au mécénat de doctorat par les écoles doctorales dans les conditions prévues aux articles D. 612‑42 à D. 612‑47 du code de l’éducation ; dans le cadre du mécénat de doctorat, l’entreprise contribue au financement de la recherche doctorale (e bis du même 1).

Les e, e ter et e quater du 1 de l’article 238 bis rendent éligibles aux dons relevant du mécénat différents organismes chargés de représentations d’œuvres ou d’expositions au public.

● D’une part, et en vertu du e, sont concernés les organismes publics ou privés (dont les sociétés de capitaux ayant pour actionnaires l’État ou des établissements publics nationaux, le cas échéant en association avec des collectivités territoriales) dont l’activité consiste principalement en la présentation au public d’œuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, de cirque, audiovisuelles ou cinématographiques, ou encore en l’organisation d’expositions d’art contemporain, sous réserve que les œuvres et expositions soient dépourvues de caractère pornographique ou incitant à la violence.

Pour que les dons ouvrent droit au mécénat, ils doivent être affectés à l’activité éligible.

● D’autre part, sont éligibles les dons faits aux sociétés dont lÉtat est lunique actionnaire et qui assurent la représentation de la France au sein des expositions universelles, en application du e ter du 1.

● Enfin, le e quater vise les dons faits au profit des sociétés nationales de programme mentionnées à l’article 44 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ([94]), lorsque ces dons sont affectés au financement de programmes audiovisuels culturels.

Sont ainsi concernées :

– France Télévisions (I de l’article 44 de la loi précitée) ;

– Radio France (III du même article 44) ;

– la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France (IV dudit article 44), c’est-à-dire, aujourd’hui, France Médias Monde.

Les f et g du 1 de l’article 238 bis du CGI rendent éligibles aux dons ouvrant droit au mécénat :

– la Fondation du patrimoine ;

– les fondations ou associations affectant, de manière irrévocable, les dons reçus à la Fondation du patrimoine ;

– les fonds de dotation, si leur gestion est désintéressée et qui reversent les dons reçus à la Fondation du patrimoine ou à d’autres organismes éligibles, à savoir ceux mentionnés aux a à e bis du 1 de cet article – c’est-à-dire à l’ensemble des organismes éligibles à l’exception des sociétés nationales de programme et des sociétés représentant la France aux expositions universelles.

b.   Les organismes agréés intervenant dans un cadre réglementaire européen

En plus de ceux qui viennent d’être mentionnés, le mécénat permet d’effectuer des dons à des organismes agréés par le ministre chargé du budget qui ont pour objet exclusif le versement d’aides financières aux petites et moyennes entreprises (PME) dans le respect des règlements européens en matière d’aides d’État.

Les aides doivent porter, aux termes du 4 de l’article 238 bis du CGI :

– sur des investissements relatifs à des actifs corporels ou incorporels se rapportant à la création ou l’extension d’un établissement, à la diversification ou à l’évolution de la production, ou enfin à l’acquisition d’actifs, dans les conditions prévues au 3 de l’article 17 du règlement général d’exemption par catégorie du 17 juin 2014 ([95]) relatif aux aides à l’investissement en faveur des PME ;

– si les aides ne relèvent pas du 3 de cet article 17, sur des aides à la création, à la reprise ou au fonctionnement de PME, sous réserve du respect du règlement relatif aux aides de minimis pertinent ([96]).

Ces organismes doivent avoir une gestion désintéressée et verser des aides non rémunérées utilisées dans l’intérêt direct des entreprises qui en bénéficient. Le montant des aides versées chaque année à une entreprise ne peut excéder 20 % des ressources de l’organisme. Sont exclues du champ de ce dispositif les aides versées à des PME dont l’activité principale consiste en l’achat-revente d’immeubles.

c.   Les organismes ayant pour objet la sauvegarde du patrimoine en danger

Enfin, le 5 de l’article 238 bis rend éligibles aux dons ouvrant droit au dispositif du mécénat les organismes agissant pour sauvegarder des biens culturels contre les effets de conflits armés.

Les biens concernés sont ceux mentionnés à l’article 1er de la Convention de La Haye du 14 mai 1954 ([97]), notamment :

– les biens meubles et immeubles présentant une grande importance pour le patrimoine culturel des peuples (monuments, sites archéologiques, collections importantes d’ouvrages, œuvres d’art, manuscrits, etc.) ;

– les édifices affectés à la conservation des biens meubles et immeubles précédemment mentionnés ;

– les centres monumentaux comprenant un nombre considérable de biens culturels.

Ces organismes doivent avoir leur siège en France ou dans un État membre de l’Union européenne ou, à défaut, dans un État lié à la France par une convention d’assistance en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. En outre, pour qu’ils puissent être éligibles aux dons, la France doit avoir voix délibérative au sein des instances dirigeantes de l’organisme.

2.   Les modalités de versement des dons

Les dons que versent les entreprises, quelle que soit leur forme, font l’objet d’un plafonnement.

a.   Les formes de dons

Les dons que les entreprises peuvent faire dans le cadre du mécénat d’entreprises peuvent prendre deux formes : en numéraire ou en nature.

Les dons en numéraire sont ceux correspondant à des versements d’argent ; leur valorisation est simple dans la mesure où le montant retenu est celui effectivement versé.

Ce type de dons peut également prendre la forme d’abandons de recettes, dans le cadre desquels l’entreprise donatrice sollicite de son client le versement pour son compte du produit de la vente à un organisme éligible aux dons.

Les entreprises peuvent également consentir des dons en nature au profit des organismes bénéficiaires : dons de matériels, de biens immobiliers, dons alimentaires ou prestations de services sans contrepartie.

● La valorisation de ces dons en nature incombe à l’entreprise donatrice et est réalisée à partir du coût de revient du bien ou du service donné, c’est-à-dire, aux termes de l’article 38 nonies de l’annexe III du CGI :

– pour les biens acquis par l’entreprise, au prix d’achat minoré des éventuels rabais et remises et majoré des frais de transport ;

– pour les biens produits par l’entreprise, au coût de production.

Les coûts administratifs ne sont pas inclus.

● Lorsque le don en nature prend la forme d’une mise à disposition d’un salarié – « mécénat de compétence » –, la valorisation correspond aux rémunérations et charges sociales afférentes, desquelles sont déduits les éventuels dédommagements versés à l’entreprise – par exemple ceux versés par un service départemental d’incendie et de secours à l’entreprise qui met à sa disposition des salariés sapeurs-pompiers volontaires.

Le prêt de main-d’œuvre à but non lucratif

Le mécénat de compétence ne doit pas être confondu avec le prêt de main-d’œuvre à but non lucratif prévu à l’article L. 8241‑2 du code du travail, dans le cadre duquel l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, auprès de laquelle un salarié est mis à disposition, que les salaires, charges sociales afférentes et frais professionnels remboursés.

Ce type de prêt est également possible, en vertu de l’article L. 8241‑3 du code du travail, entre des entreprises ou groupes employant au moins 5 000 salariés, d’une part, et des petites et moyennes entreprises (PME), d’autre part. L’objectif de ce dispositif est de soutenir les PME à travers le renforcement de leurs qualifications professionnelles et la constitution de partenariats d’affaires.

Dans le cadre de l’article L. 8241‑3, l’entreprise utilisatrice peut ne pas avoir à acquitter les salaires et charges pour leurs montants réels : la refacturation par l’entreprise prêteuse peut ne revêtir qu’une dimension partielle. L’entreprise prêteuse est admise à déduire la totalité des rémunérations des salariés mis à disposition, même en l’absence de refacturation totale, en vertu du 1° du 1 de l’article 39 du CGI complété à cet effet par l’article 13 de la seconde loi de finances rectificative pour 2017 (1).

Le prêt de main-d’œuvre à but non lucratif se distingue du mécénat, d’une part, en raison des gains retirés par l’entreprise prêteuse en termes de compétences, d’enrichissement de carrière et de développement des réseaux commerciaux, d’autre part, compte tenu d’un champ d’application organique ciblé sur certaines entreprises, non sur des organismes d’intérêt général.

(1) Loi n° 20171775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

b.   Le plafonnement des dons

Les dons ouvrant droit au mécénat sont plafonnés à cinq pour mille du chiffre d’affaires de l’entreprise donatrice. Ce plafond est celui retenu pour calculer la réduction d’impôt imputable au titre d’un exercice, et ne fait naturellement pas obstacle à ce que l’entreprise qui le souhaite puisse donner plus.

Un second plafond a été introduit par l’article 148 de la loi de finances pour 2019 ([98]) ; il consiste en un montant fixe de 10 000 euros et s’applique aux dons effectués au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2019 – soit, pour les exercices de douze mois, au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.

Les deux plafonds sont alternatifs : le plus élevé des deux est retenu.

Illustration des modalités de plafonnement des dons

Deux entreprises A et B réalisent, au cours d’un exercice N, un chiffre d’affaires respectif de 1,5 million d’euros et 40 millions d’euros.

Le plafond reposant sur le chiffre d’affaires est de :

– pour A, 5 ‰ de 1,5 million d’euros, soit 7 500 euros ;

– pour B, 5 ‰ de 40 millions d’euros, soit 200 000 euros.

Le plafond à retenir pour l’entreprise B est celui du chiffre d’affaires, supérieur au plafond fixe de 10 000 euros. Ce sera en revanche ce dernier qui sera retenu pour A.

c.   Le strict encadrement des contreparties

Le mécénat suppose, par principe, une absence de contrepartie aux dons effectués par l’entreprise, ce qui le distingue du parrainage. L’entreprise donatrice n’est donc pas censée attendre de contrepartie équivalente aux dons, ni a fortiori obtenir une telle contrepartie.

● La doctrine fiscale indique ainsi que, dans l’hypothèse où une forme de contrepartie serait constatée à travers une valorisation de la prestation rendue par l’organisme qui bénéficie des dons, doit exister, pour que l’avantage fiscal puisse être ouvert, une « disproportion marquée » entre les dons et la valorisation ([99]).

Il est précisé que l’association du nom de l’entreprise donatrice aux activités des organismes bénéficiaires ne remet pas en cause le bénéfice du mécénat, dans la mesure où elle est expressément permise par la dernière phrase du a du 1 de l’article 238 bis du CGI. Une telle association ne doit cependant pas correspondre à une prestation publicitaire au profit de l’entreprise donatrice.

La notion de valorisation manifestement disproportionnée n’est pas explicitement quantifiée dans le cadre du mécénat, la doctrine fiscale fournissant plusieurs exemples et cas-types permettant de distinguer ce qui relève du mécénat de ce qui a trait au parrainage ([100]). Il est cependant admis que la limite supérieure de valorisation corresponde à un rapport de un pour quatre, par analogie avec ce qui est prévu en matière de dons des particuliers : l’intention libérale de l’entreprise donatrice ne sera pas remise en cause si la valorisation de la contrepartie fournie par l’organisme bénéficiaire des dons n’excède pas le quart du montant de ces derniers ([101]).

● L’article 149 de la loi de finances pour 2019 précitée a complété l’article 238 bis du CGI d’un nouveau 6 mettant en place, à partir des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, une nouvelle obligation déclarative incombant aux entreprises qui effectuent plus de 10 000 euros de dons au cours du même exercice.

Devront ainsi être déclarés le montant et la date des dons ainsi que l’identité de leurs bénéficiaires, permettant un meilleur suivi par l’administration fiscale. L’obligation contient également un volet dédié aux contreparties, dans le cadre duquel les entreprises donatrices seront tenues de déclarer la valeur des biens et services reçus en contrepartie des dons effectués.

Les premières informations devraient être disponibles en 2020, lors du dépôt par les entreprises concernées de leur déclaration annuelle de résultat, en vertu de l’article 49 septies X de l’annexe III du CGI.

3.   Le calcul et l’imputation de la réduction d’impôt

a.   Une réduction d’impôt égale à 60 % des dons

La réduction d’impôt au titre du mécénat des entreprises est égale à 60 % des dons effectués, sous réserve du plafonnement précédemment mentionné.

En outre, ainsi qu’en dispose l’avant-dernier alinéa du 1 de l’article 238 bis du CGI, les dons effectués dans le cadre du mécénat ne sont pas déductibles du résultat imposable. Cette non-déductibilité, qui est logique dans la mesure où les dons ne correspondent généralement pas à des charges supportées dans l’intérêt de l’activité économique de l’entreprise, suppose une réintégration extra-comptable des versements.

Illustration du calcul de la réduction d’impôt « mécénat »

Au cours d’un exercice N, une entreprise effectue des dons éligibles au mécénat pour un total de 30 000 euros. Le plafond n’est pas atteint.

La réduction d’impôt au titre du mécénat est égale à :

60 % × 30 000 = 18 000 euros.

b.   Le report en avant encadré des dons excédant le plafond

Les dons dépassant le plafond peuvent faire l’objet d’un report en avant sur les cinq exercices suivants celui au cours duquel les dons ont été effectués, en application du vingt-et-unième alinéa du 1 de l’article 238 bis du CGI. L’imputation de ces excédents intervient après la prise en compte des dons effectués au titre de chacun de ces exercices ultérieurs, et ne peut en tout état de cause conduire à un dépassement du plafond.

Illustration du report en avant des dons excédentaires

● Au cours d’un exercice N, une entreprise réalisant un chiffre d’affaires de 20 millions d’euros effectue 150 000 euros de dons.

En application du plafond de 5 ‰ du chiffre d’affaires, le montant maximum ouvrant droit au mécénat au titre de l’exercice N est de 100 000 euros.

L’excédent de 50 000 euros peut être utilisé au titre des exercices N + 1 à N + 5.

● Au titre de l’exercice N + 1, durant lequel le chiffre d’affaires n’a pas évolué, les dons s’élèvent à 75 000 euros pour un plafond de 100 000 euros.

L’entreprise peut donc imputer 25 000 euros supplémentaires prélevés sur l’excédent des dons de l’exercice N.

● Au titre de l’exercice N + 2, le chiffre d’affaires est de 30 000 millions d’euros et les dons de 150 000 euros, soit la limite maximale : les 25 000 euros d’excédent ne peuvent être imputés.

● Au titre de l’exercice N + 3, le chiffre d’affaires est inchangé et les dons sont de 140 000 euros : 10 000 euros prélevés sur l’excédent peuvent être imputés, laissant en report un total de 15 000 euros.

● Si l’entreprise ne dégage pas de marge d’imputation au titre des exercices N + 4 et N + 5, l’excédent en report sera perdu.

c.   Le report en avant de la réduction d’impôt excédant l’impôt dû

L’avantage fiscal offert dans le cadre du mécénat étant une réduction d’impôt et non un crédit d’impôt, il est limité au montant d’impôt effectivement dû. Dès lors, la réduction d’impôt peut excéder l’impôt.

Dans une telle hypothèse, le CGI prévoit à ses articles 200 bis – pour l’IR – et 220 E – pour l’IS – un mécanisme de report en avant de l’excédent de réduction d’impôt, imputable sur l’IR ou l’IS dû au titre des cinq exercices suivant celui au titre duquel la réduction d’impôt a été constatée.

Aux termes de l’article 49 septies XB de l’annexe III du CGI, l’imputation de l’excédent éventuel sur l’impôt dû au titre d’un exercice ultérieur se fait après celle de la réduction d’impôt constatée au titre de cet exercice. Lorsqu’une entreprise dispose de plusieurs excédents en report, ces derniers s’imputent par ordre d’ancienneté.

Les avantages fiscaux spécifiques à certains biens culturels

Parallèlement au mécénat prévu à l’article 238 bis du CGI, d’autres dépenses fiscales existent pour favoriser l’acquisition et le maintien en France de certaines œuvres culturelles.

● L’article 238 bis‑0 A du CGI prévoit ainsi une réduction d’impôt au profit des entreprises qui ont effectué des versements en faveur de l’achat de trésors nationaux, lorsque ces derniers ont fait l’objet d’un refus de délivrance d’un certificat d’exportation et que l’État a proposé d’acheter.

Cette réduction d’impôt est égale à 90 % des versements effectués par l’entreprise, dans la limite de 50 % de l’impôt dû. Elle vise à inciter les entreprises à participer à l’acquisition par l’État de trésors nationaux.

● L’article 238 bis‑0 AB du CGI prévoit une réduction d’impôt égale à 40 % des sommes consacrées par une entreprise à l’achat de certains biens culturels ayant fait l’objet d’un refus de délivrance d’un certificat d’exportation, sous les conditions suivantes :

– l’État n’a pas fait une offre d’achat du bien ;

– l’entreprise s’engage à consentir au classement du bien comme monument historique ou archive historique ;

– le bien ne doit pas être revendu dans les dix ans qui suivent l’acquisition et doit, pendant cette période, être placé en dépôt auprès d’un musée de France, d’un service public d’archives ou de certaines bibliothèques.

L’article 7 du présent projet de loi de finances prévoit la suppression de cette réduction d’impôt en raison de son inefficience et de l’existence du dispositif voisin prévu à l’article 238 bis‑0 A, jugé plus efficace.

● Enfin, l’article 238 bis AB du CGI permet aux entreprises qui font l’acquisition d’œuvres originales d’artistes vivants de déduire une somme égale au prix d’acquisition du résultat de l’exercice d’acquisition et des quatre exercices suivants, par fractions égales (soit une déduction d’un cinquième du prix pour chaque exercice).

La somme déduite ne doit pas excéder le plafond des dons faits dans le cadre du mécénat (soit 10 000 euros ou 5 ‰ du chiffre d’affaires), minoré des dons faits au titre du mécénat.

Enfin, l’entreprise doit exposer l’œuvre ainsi acquise dans un lien accessible au public ou aux salariés.

B.   Une dépense fiscale généreuse, concentrée et dynamique que la cour des comptes appelle à mieux encadrer

Le mécénat est une dépense fiscale très dynamique qui bénéficie principalement aux grandes entreprises. Ces considérations, alliées au caractère particulièrement généreux de l’outil par rapport à ceux qui existent à l’étranger, militent pour une évolution du dispositif, ainsi que le suggère la Cour des comptes.

1.   Un dispositif qui n’a pas d’équivalent dans les pays comparables à la France

● Comme la France, nombreux sont les États à prévoir dans leur droit des incitations fiscales en faveur du mécénat d’entreprise. Cependant, une comparaison avec les dispositifs qui existent dans les pays comparables au nôtre montre que la réduction d’impôt française constitue l’outil le plus avantageux.

Les autres pays retiennent en effet généralement une déduction des dons de l’assiette imposable, là où la France prévoit une réduction d’impôt. Parmi les pays étudiés par la Cour des comptes, seule l’Espagne propose une réduction d’impôt générale (de 35 % ou 40 %) – le crédit d’impôt italien ne ciblant très limitativement que certains dons. En outre, les plafonds qui existent à l’étranger sont souvent adossés au bénéfice, non au chiffre d’affaires.

Le tableau suivant dresse la synthèse de certains des dispositifs en vigueur dans d’autres pays.

Comparaison internationale des incitations fiscales au mécénat

Pays

Mécanisme

Plafonnement

France

Réduction d’impôt de 60 % des dons

5 ‰ du chiffre d’affaires ou 10 000 euros

Allemagne

Déduction de l’assiette (impôt sur les bénéfices et taxe professionnelle)

20 % de l’assiette imposable ou 2 % du chiffre d’affaires

Belgique

Déduction de l’assiette

5 % de l’assiette imposable et 500 000 euros

Espagne

Réduction d’impôt de 35 % des dons (40 % pour le financement des programmes gouvernementaux prioritaires)

10 % de l’assiette imposable

États‑Unis

Déduction de l’assiette

10 % de l’assiette imposable

Italie

Déduction de l’assiette

Crédit d’impôt de 65 % des dons, exclusivement ouvert au titre de la sauvegarde du patrimoine culturel

2 % de l’assiette imposable

 

 

5 % de l’assiette imposable
 

Pays‑Bas

Déduction de l’assiette

50 % de l’assiette et 100 000 euros
(150 % et 105 000 euros pour les dons aux institutions culturelles)

Royaume‑Uni

Déduction de l’assiette

Suisse

Déduction de l’assiette

20 % de l’assiette imposable

Source : commission des finances, à partir des données de la Cour des comptes.

Il ressort de ces données que la réduction d’impôt française de 60 % des dons, plafonnée à 5 ‰ du chiffre d’affaires avec possibilité de report en avant sur cinq exercices, non seulement des dons excédentaires mais aussi de la fraction de réduction d’impôt non imputée, est plus incitative que les outils étrangers.

● Ce constat est corroboré par l’exemple suivant, qui indique l’avantage fiscal retiré au titre du mécénat par une entreprise réalisant un chiffre d’affaires de 20 000, un bénéfice imposable de 1 000 et qui effectue un don de 100.

Le taux d’imposition n’est mentionné que pour les pays retenant une déduction d’assiette, afin de calculer l’avantage fiscal retiré.

illustration de l’avantage fiscal retiré du mécénat
dans chaque pays étudié

Pays

Taux dimposition (1)

Plafond

Déduction admise
(don de 100, bénéfice de 1 000)

Avantage fiscal

Rang

France

5 ‰ CA

60,00

1er

Allemagne

29,89 %

20 % assiette

100

29,89

3e

Belgique

29,58 %

5 % assiette

50

14,79

8e

Espagne

10 % assiette

35,00
ou 40,00

2e

États‑Unis

25,89 %

10 % assiette

100

25,89

4e

Italie (hors sauvegarde du patrimoine culturel)

27,81 %

2 % assiette

20

5,56

9e

Pays‑Bas

25,00 %

50 % assiette

100

25,00

5e

Royaume‑Uni

19,00 %

100

19,00

7e

Suisse

21,15 %

20 % assiette

100

21,15

6e

(1) : Le taux mentionné est celui figurant, pour 2019, dans les tables comparatives de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ; il tient compte d’éventuelles contributions additionnelles et d’impositions locales sur les bénéfices ou assimilées.

Source : commission des finances, à partir des données de la Cour des comptes et de l’OCDE.

Logiquement, les deux pays les plus généreux, la France et l’Espagne, sont ceux proposant des réductions d’impôt et non des déductions d’assiette.

● Les données produites par la Cour des comptes semblent en décalage avec celles figurant dans un rapport de mai 2016 de la Charities Aid Foundation, à la lecture duquel il peut sembler que l’avantage fiscal français est l’un des moins généreux du monde ([102]).

En réalité, ce rapport compare le montant de l’avantage fiscal au regard du montant des dons effectués, sans tenir compte de la nature de cet avantage
– réduction d’impôt ou déduction d’assiette.

L’analyse est ainsi trompeuse, une réduction d’impôt étant plus avantageuse qu’une déduction d’assiette, et ce même si le montant net de l’avantage est inférieur, ce que l’exemple précédent démontre.

2.   Un outil très dynamique et concentré

La réduction d’impôt au titre du mécénat d’entreprise a vu son coût augmenter de façon significative pour atteindre un montant voisin du milliard d’euros, tout en profitant principalement aux plus grandes entreprises.

a.   La forte progression du coût du mécénat

Le coût du mécénat d’entreprise s’est substantiellement accru au cours du temps, passant de 170 millions d’euros en 2006 à un montant de l’ordre de 800 à 900 millions d’euros ces dernières années. Le nombre d’entreprises bénéficiaires de l’outil, quant à lui, a connu une progression continue, ainsi que l’illustrent les tableau et graphique ci-après.

Évolution du coût et du nombre de bénéficiaires du mécénat d’entreprise (2006-2020)

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019 (P.)

2020 (P.)

Coût (M€)

170

235

285

326

331

570

667

675

695

676

930

902

817

nc

nc

Bénéficiaires

7 400

12 000

14 700

19 400

21 295

25 130

32 070

37 260

43 925

48 704

58 787

68 930

77 086

Source : Évaluations des voies et moyens annexées aux projets de loi de finances pour 2008 à 2020, tome II : Dépenses fiscales.

La hausse du coût du dispositif résulte de l’augmentation des bénéficiaires de la réduction d’impôt, mais traduit également un accroissement du montant des dons effectués dans la mesure où les deux courbes ne connaissent pas une évolution parallèle. À cet égard, deux importants ressauts peuvent être constatés, le premier entre 2010 et 2011, le second entre 2015 et 2016. Après chacun de ces sursauts, l’évolution du coût s’est stabilisée, voire s’est faite à la baisse s’agissant des années 2017 et 2018.

En remontant jusqu’à 2004, année durant laquelle le coût budgétaire du mécénat s’établissait à 90 millions d’euros, le montant de la dépense fiscale a été multiplié par dix.

En 2018, le mécénat d’entreprise était la cinquième dépense fiscale la plus coûteuse concernant la fiscalité des bénéfices des entreprises, derrière :

– le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), dont le fait générateur est désormais éteint ;

– le crédit d’impôt recherche (CIR), qui fait l’objet de modifications à l’article 49 du présent projet de loi ;

– l’exonération d’IS bénéficiant aux organismes d’habitations à loyer modéré au titre de leur activité d’intérêt général ;

– le prêt à taux zéro, qui bénéficie fiscalement aux entreprises mais économiquement aux ménages.

b.   L’augmentation continue des créances de mécénat

Si l’analyse porte, non sur le coût budgétaire de la dépense fiscale, mais sur les créances fiscales détenues par les entreprises, le constat tiré est celui d’une augmentation des montants. Il est en effet rappelé que la créance fiscale au titre du mécénat peut ne pas s’imputer en une fois, mais être reportée sur cinq ans. Il existe donc un décalage entre le coût budgétaire constaté au titre d’une année et le montant des créances du millésime correspondant, à l’image de ce qui existe dans le cadre du CIR.

Le tableau et le graphique suivants témoignent de cette progression continue du montant des créances au titre de chaque millésime depuis 2012.

Évolution du montant des créances de mécénat (2012-2017)

(en millions d’euros)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

685

758

870

958

1 065

1 1172

1 230

Source : DGFiP, en réponse aux questionnaires du Rapporteur général sur le présent projet de loi de finances et sur le rapport sur l’application des mesures fiscales 2019, et au questionnaire du groupe de travail de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur le mécénat des entreprises.

Si, depuis 2016, le coût de la dépense fiscale connaît une diminution, la progression des créances fiscales, elle, se maintient à la hausse, ce qui démontre un accroissement du recours au dispositif de mécénat par les entreprises. L’analyse sur le montant des créances met donc en évidence le dynamisme du mécénat et permet d’éviter de tirer des conclusions partielles à partir d’une étude reposant uniquement sur le coût budgétaire.

c.   Un champ d’application varié mais inégalement réparti

Les domaines d’activité éligibles au mécénat d’entreprises sont variés, ainsi que l’illustre le tableau suivant, portant sur l’évolution de la répartition des dons par domaine d’activités entre 2014 et 2018.

Évolution de la répartition des dons des entreprises
par domaines d’activité

Domaines dactivité

2014

2016

2018

Social

38 %

17 %

28 %

Culture et patrimoine

13 %

15 %

25 %

Éducation (enseignement et formation)

5 %

14 %

23 %

Santé et recherche médicale

16 %

10 %

11 %

Urgence et post-urgence humanitaire

2 %

7 %

Solidarité internationale et aide au développement

8 %

8 %

3 %

Sport

5 %

12 %

2 %

Recherche scientifique et enseignement supérieur

12 %

11 %

< 1 %

Environnement, développement durable, biodiversité

3 %

6 %

< 1 %

Accompagnement entrepreneurs sociaux, développement entrepreneuriat social

5 %

Source : Cour des comptes, Le soutien public au mécénat des entreprises  Un dispositif à mieux encadrer, novembre 2018.

Trois domaines concentrent plus des trois quarts des dons : social, culture et patrimoine, éducation. La part des deux derniers a connu en quatre ans une progression significative, tandis que celle des dons au domaine social a diminué de dix points. D’une manière générale, il est difficile de tirer des conclusions de l’évolution de la répartition des dons par domaine d’activité en raison de son caractère erratique et, comme le souligne la Cour des comptes, de la variabilité des résultats d’une enquête à l’autre ([103]).

d.   Une dépense fiscale très concentrée

● Ouvert à l’ensemble des entreprises quelle que soit leur catégorie, le mécénat reste concentré sur les plus grandes d’entre elles, bien que la très grande majorité des mécènes soient des TPE et PME réalisant des dons inférieurs à 500 000 euros, ainsi qu’en attestent le tableau et le graphique suivants.

Il est précisé que le montant des dons indiqués est une reconstruction réalisée à partir des créances déclarées par les entreprises mécènes.

Répartition par tranche de dons du nombre d’entreprises mécènes

Tranche de dons (D)
(en euros)

Nombre dentreprises IR et IS

Montant des dons de la tranche
(en millions deuros)

2016

2017

2018

2016

2017

2018

D≤100 000

79 664

90 402

97 728

383

427

461

100 000<D≤250 000

886

980

1 145

135

150

175

250 000<D≤500 000

284

341

356

97

117

122

500 000<D≤750 000

91

80

111

56

48

67

750 000<D≤1 000 000

41

50

43

35

44

37

1 000 000<D≤1 500 000

39

46

45

47

55

53

1 500 000<D≤2 000 000

27

26

31

46

47

53

2 000 000<D≤3 000 000

29

32

27

69

79

66

3 000 000<D≤5 000 000

26

26

32

97

98

127

5 000 000<D≤10 000 000

17

20

19

106

143

135

10 000 000<D

22

22

21

707

751

754

TOTAL

81 126

92 025

99 558

1 778

1 959

2 050

Source : DGFiP, en réponse au questionnaire du Rapporteur général.

● La concentration sur les grandes entreprises du montant des créances de mécénat est un constat récemment dressé par la Cour des comptes dans son rapport de novembre 2018.

Ainsi, la part des entreprises de taille intermédiaires (ETI) et des grandes entreprises – c’est-à-dire les entreprises qui, respectivement, réalisent annuellement un chiffre d’affaires compris entre 50 millions et 1,5 milliard d’euros et un chiffre d’affaires supérieur à 1,5 milliard d’euros – est très importante en termes de créances, alors qu’elle est beaucoup plus réduite en termes de nombre de bénéficiaires.

Les tableau et graphiques suivants illustrent cette ventilation par catégorie d’entreprises et de l’impôt auquel elles sont assujetties (IS ou IR). Il est précisé que le nombre d’entreprises mentionné correspond à celui des entreprises ayant déclaré, au titre du millésime 2018, une créance de mécénat, et non à celui ayant bénéficié, au titre de l’année budgétaire 2018, de la dépense fiscale.

mécénat des entreprises – mILlésime 2018

Catégorie

Nombre dentreprises ayant déclaré une créance de mécénat

Montant des créances de mécénat déclarées
(en millions deuros)

IS

IR

Total

IS

IR

Total

TPE

53 105

7 289

60 394

54

3

57

PME

35 926

0

35 926

252

0

252

ETI

2 980

0

2 980

265

0

265

GE

258

0

258

656

0

656

Total

92 269

7 289

99 558

1 227

3

1 230

Source : DGFiP, en réponse au questionnaire du Rapporteur général.

Ce constat n’est pas surprenant dans son principe dans la mesure où les plus grandes entreprises sont celles qui disposent des moyens financiers les plus importants et, par conséquent, de la faculté d’effectuer des dons conséquents. Néanmoins, la concentration est particulièrement appuyée, ainsi qu’il ressort du graphique suivant consacré à la part des grandes entreprises entre les années 2010 et 2016

Source : commission des finances, à partir des données de la Cour des comptes.

La Cour des comptes a également relevé, s’agissant du montant total de la réduction d’impôt en 2016, que :

– près de la moitié de l’avantage fiscal a bénéficié à trente-six entreprises ;

– les cinq principales entreprises donatrices réunissent à elles seules environ 27 % du montant total ([104]).

En outre, les données fournies par l’administration fiscale au Rapporteur général au printemps dernier mettent en évidence une forte progression des montants imputés par les vingt plus gros donateurs : alors que ces montants étaient de 283 millions d’euros en 2015, ils se sont élevés à 402 millions d’euros en 2016, soit une hausse de 42 % en une année.

3.   Les pistes d’ajustement proposées par la Cour des comptes

● Tirant les conséquences des constats dressés en novembre 2018, la Cour des comptes a mis en avant plusieurs pistes pour rationaliser le mécénat d’entreprise ([105]) :

– la transformation de l’outil en une déduction d’assiette, permettant un gain budgétaire annuel maximal de 390 millions d’euros ;

– la réduction du taux de l’avantage fiscal, permettant un gain budgétaire annuel de 340 millions d’euros pour un taux de 40 %, et de 170 millions d’euros pour un taux de 50 % ;

– la mise en place d’une modulation du taux en fonction de la nature des bénéficiaires des dons, en maintenant le taux de 60 % pour les ARUP, les FRUP et les organismes publics (gain non chiffré) ;

– le plafonnement en valeur des dons ou de l’avantage fiscal (gain non chiffré).

● L’impact des différentes pistes varie considérablement, non seulement en termes budgétaires, mais aussi sous l’angle économique et social. Ainsi, si la substitution d’une déduction d’assiette à la réduction d’impôt actuelle rapprocherait la France des autres pays, elle risquerait toutefois de se révéler très brutale et pourrait conduire à un tarissement des dons.

De la même manière, la diminution générale du taux de la réduction d’impôt pourrait être excessivement pénalisante vis-à-vis de certains secteurs.

Les deux dernières pistes semblent plus séduisantes, mais :

– la modulation du taux en fonction de la nature juridique de l’organisme bénéficiaire peut laisser dubitatif si la finalité poursuivie est de soutenir, non une forme juridique, mais un domaine d’activité ou une population. Un critère reposant sur la finalité du don correspond au demeurant à la recommandation faite par le Rapporteur général en juillet 2019 ([106]) ;

– le plafonnement en valeur des dons ou de la réduction d’impôt pourrait, comme les premières pistes, être brutal et substantiellement réduire l’incitation des plus grands donateurs.

● Une solution équilibrée, alliant plafonnement des dons et modulation du taux et consistant à réduire ce dernier pour la fraction des dons excédant un plafond, paraît à cet égard opportune.

C’est une solution de ce type que propose le présent article.

II.   Le dispositif proposé

Tirant les conséquences du très fort dynamisme de la dépense fiscale et de la concentration de cette dernière, le présent article rationalise le mécénat d’entreprise tout en veillant à en préserver l’essence et à maintenir son caractère incitatif, particulièrement pour les dons présentant un intérêt saillant en matière de cohésion sociale.

Il permet ainsi de mettre en œuvre certaines des recommandations faites par la Cour des comptes en novembre 2018. Rappelons que la Cour identifiait alors le mécénat comme une « dépense fiscale croissante, à lefficience mal évaluée et peu contrôlée » ([107]), constat relativement sévère qui appelait une action politique et juridique sans remettre fondamentalement en cause l’outil.

A.   Une rationalisation ciblée et mesurée de la réduction d’impôt en faveur du mécénat

Le présent article met en place un encadrement rationnel et ciblé du mécénat d’entreprise, tout en opérant un réagencement formel des dispositions applicables.

1.   La fixation d’un plafond de dons au-delà duquel le taux de la réduction d’impôt est réduit

La principale mesure du présent article, prévue au  du A de son I, est la fixation, à l’article 238 bis du CGI, d’un plafond de dons au-delà duquel le taux de la réduction dimpôt « mécénat » est réduit.

Ce plafond, prévu au 2 rétabli de l’article 238 bis du CGI, est fixé à 2 millions deuros, le taux applicable à la fraction des dons excédant ce montant étant ramené de 60 % à 40 %.

Le plafond de 2 millions d’euros ne s’apprécie pas par dons, mais bien sur l’ensemble des dons effectués par l’entreprise donatrice.

2.   L’exclusion du plafonnement des dons destinés aux organismes aidant à titre gratuit les personnes en difficulté

● Le même 2 de l’article 238 bis du CGI prévoit toutefois une mesure de tempérament concernant les dons faits au profit des organismes sans but lucratif aidant à titre gratuit les personnes en difficulté :

– en leur fournissant des repas à titre gratuit ;

– en favorisant leur logement ;

– ou en procédant, à titre principal, à la fourniture gratuite de soins mentionnés au 1° du 4 de l’article 261 du CGI, c’est-à-dire :

La fourniture de ces soins à titre principal suppose que l’organisme consacre à cette activité plus de 50 % des dons reçus.

Le champ des dons exclus du plafond de 2 millions deuros correspond à celui de la « réduction dimpôt Coluche » prévu au 1 ter de larticle 200 du CGI dans le cadre de la réduction d’impôt ouvert aux particuliers au titre des dons qu’ils effectuent, et qui ouvrent droit à une réduction d’impôt majorée au taux de 75 %, contre un taux de droit commun de 66 %.

La doctrine fiscale retient une interprétation relativement souple du champ de ce dispositif, en considérant qu’un organisme dont l’activité principale n’est pas la fourniture des soins visés demeure dans le champ dès lors qu’il fournit par ailleurs des repas à titre gratuit aux personnes en difficulté ou contribue à faciliter leur logement ([108]).

● Le dispositif proposé introduit donc une distinction en fonction de la destination des dons qui est objective et s’appuie sur un cadre déjà existant, éléments de nature à écarter une atteinte au principe d’égalité.

Ces dons sont non seulement en dehors du champ du plafond de 2 millions deuros, mais ne sont en outre pas retenus pour la détermination de ce plafond, en application du second alinéa du 2 rétabli de l’article 238 bis du CGI :

– la réduction dimpôt au titre des dons destinés à lassistance gratuite de personnes en difficulté sera donc de 60 % quel que soit le montant de ces dons ;

– ces dons ne seront pas pris en compte pour apprécier l’atteinte du plafond de 2 millions d’euros, conduisant à ce qu’une entreprise puisse bénéficier du taux plein de 60 % si ses dons autres que ceux destinés à lassistance gratuite aux personnes en difficulté nexcèdent pas 2 millions d’euros.

Le tableau suivant fournit des illustrations de la mise en œuvre du mécanisme de plafonnement prévu par le présent article et compare le montant final de réduction d’impôt qui en résulterait par rapport au droit existant.

réduction d’impôt « mécénat »
illustration des effets du mécanisme de plafonnement proposé

(en millions d’euros)

Entreprise

Dons

Réduction dimpôt « mécénat »

Dons hors assistance aux personnes en difficulté
(A)

Dons pour l’assistance aux personnes en difficulté
(B)

Total

Taux applicable

Montant de la
réduction dimpôt

Différence
(2  1)

Droit existant

Droit proposé

Droit existant
(1)

Droit proposé
(2)

E1

10

0

10

60 %

60 % sur 2 (A)
40 % sur 8 (A)
 

6,0

1,2
+ 3,2
= 4,4

– 1,6

E2

8

2

10

60 %

60 % sur 2 (A)
40 % sur 6 (A)
60 % sur 2 (B)
 

6,0

1,2
+ 2,4
+ 1,2
= 4,8

– 1,2

E3

5

5

10

60 %

60 % sur 2 (A)
40 % sur 3 (A)
60 % sur 5 (B)
 

6,0

1,2
+ 1,2
+ 3,0
= 5,4

– 0,6

E4

2

8

10

60 %

60 % sur 2 (A)
60 % sur 8 (B)
 

6,0

1,2
+ 4,8
= 6,0

0

Source : commission des finances.

Il ressort de ces exemples que plus le montant des dons destinés à l’assistance gratuite de personnes en difficulté est élevé, plus la réduction d’impôt le sera également : un tel constat est logique dans la mesure où ces dons ne sont pas concernés par le plafond. Par ailleurs, dès lors que les dons autres que ceux relevant de cette catégorie n’excèdent pas 2 millions d’euros, la réduction d’impôt résultant du dispositif proposé est identique à celle actuellement prévue, et ce indépendamment du montant des dons destinés à assister les personnes en difficulté.

3.   L’encadrement du mécénat de compétence à travers le plafonnement des rémunérations et charges sociales retenues

Le c du 1° du A du I du présent article introduit un encadrement du mécénat de compétence à travers la mise en place d’un plafonnement des montants susceptibles d’être retenus dans ce cadre.

Pour mémoire, le mécénat de compétence consiste, pour une entreprise, à mettre à disposition d’un organisme éligible aux dons ouvrant droit au mécénat un ou plusieurs de ses salariés. Dans ce cadre, sous l’empire du droit existant, le coût de revient retenu pour valoriser le don correspond aux rémunérations et charges sociales supportées par l’entreprise mécène.

Le dispositif d’encadrement prévu au présent article, qui est inscrit dans un nouvel alinéa complétant le 1 de l’article 238 bis, consiste à limiter, pour chaque salarié mis à disposition, les rémunérations et charges sociales retenues à trois fois le plafond de la sécurité sociale mentionné à l’article L. 241‑3 du code de la sécurité sociale.

Le plafond de la sécurité sociale

Mentionné à l’article L. 241‑3 du code de la sécurité sociale, le plafond de la sécurité sociale détermine le montant maximum des rémunérations ou gains à retenir pour calculer certaines cotisations sociales.

Ce plafond, régulièrement revalorisé et décliné en fonction de la périodicité de paie, s’appuie sur une valeur mensuelle et une valeur journalière, les autres périodicités dépendant de ces valeurs selon les modalités prévues aux articles D. 242‑17 et D. 242‑19 du code de la sécurité sociale.

Les valeurs pour l’année 2019 ont été fixées par un arrêté du 11 décembre 2018, pour une valeur mensuelle de 3 377 euros et une valeur journalière de 186 euros (1).

(1) Arrêté du 11 décembre 2018 portant fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2019.

Le tableau suivant précise le plafond de la sécurité sociale 2019 en fonction de la périodicité retenue et la limite correspondante de valorisation du mécénat de compétence prévue par le dispositif proposé.

plafonnement de la valorisation du mécénat de compétence
en fonction de la périodicité de paie – base 2019

(en euros)

Périodicité

Plafond de la sécurité sociale

Limite proposée de valorisation du mécénat de compétence par salarié

Année

40 524

121 572

Trimestre

10 131

30 393

Mois

3 377

10 131

Quinzaine

1 689

5 067

Semaine

779

2 337

Jour

186

558

Heure

25

75

Source : code de la sécurité sociale ; Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF).

4.   Les précisions et coordinations apportées

Les autres modifications apportées par le présent article consistent, pour l’essentiel, en des précisions et coordinations, notamment à travers un réagencement de l’article 238 bis.

a.   La consécration législative des modalités d’imputation de la réduction d’impôt pour les sociétés de personnes et groupements assimilés

Le  du A du I du présent article introduit à l’article 238 bis du CGI un nouveau 7 qui précise les modalités d’imputation de la réduction d’impôt « mécénat » pour les sociétés de personnes et les groupements assimilés ne relevant pas de l’IS.

Dans une telle configuration, en effet, ce n’est pas l’entreprise – ou le groupement – qui bénéfice de la réduction d’impôt, en raison de la translucidité fiscale.

Le nouveau 7 de l’article 238 bis indique que, dans une telle hypothèse, la réduction d’impôt est transférée aux associés des sociétés de personnes ou groupements assimilés, à hauteur pour chacun de sa part au sein de la société.

Ce transfert est subordonné au fait que ces associés bénéficiant de la réduction d’impôt :

– soient eux-mêmes assujettis à l’IS ;

– ou soient des personnes physiques participant à l’exploitation de la société ou du groupement au sens du 1° bis du I de l’article 156 du CGI – c’est-à-dire à travers une participation personnelle, continue et directe à l’accomplissement des actes nécessaires à l’activité.

Les précisions ainsi apportées par ce nouveau 7 sont opportunes, bien que ne présentant pas de caractère inédit : elles figurent déjà dans la doctrine fiscale, et ce 7 se borne à consacrer dans la loi une partie du BOFiP ([109]).

Ces précisions peuvent enfin être rapprochées de celles apportées en première partie, à l’initiative du Rapporteur général, aux modalités d’application du régime préférentiel d’imposition des revenus tirés de certains actifs incorporels pour les sociétés de personnes et groupements assimilés ([110]) – amendement devenu l’article 13 nonies du présent projet de loi de finances.

b.   Le réaménagement formel de l’article 238 bis aux fins d’une meilleure lisibilité du dispositif

Le a du 1° du A du I du présent article réécrit le premier alinéa du 1 de l’article 238 bis du CGI afin que celui-ci pose simplement le principe de la réduction d’impôt ouverte au titre des dons effectués, en y supprimant le plafonnement des dons (plafond fixe de 10 000 euros et plafond proportionnel de 5 ‰ du chiffre d’affaires) pour le transférer dans un 3 rétabli de l’article 238 bis.

Le b du même 1°, quant à lui, supprime les vingt-et-unième à vingt‑troisième alinéas du 1 de l’article 238 bis relatifs au report en avant des dons excédant le plafonnement prévu, aux précisions sur l’application de ce plafonnement et à la non-déductibilité des dons.

Ces dispositions ne sont pas supprimées mais déplacées.

Une partie d’entre elles sont insérées dans un 3 rétabli de larticle 238 bis, qui précise ainsi :

– à son premier alinéa, les modalités d’application du plafonnement des dons, reprenant le contenu du vingt-deuxième alinéa de l’article 238 bis dans sa rédaction actuellement en vigueur et consacrant ainsi les plafonds alternatifs de 10 000 euros ou 5 ‰ du chiffre d’affaires ;

– à son second alinéa, le principe du report en avant, sur cinq exercices, des dons excédant le plafonnement, correspondant au vingt‑et-unième alinéa de l’article 238 bis dans sa rédaction actuellement en vigueur. Ce second alinéa donne à la possibilité de report qui prévalait jusque-là un caractère impératif. En outre, il précise que le taux de la réduction d’impôt applicable aux dons excédentaires en report est celui auquel ces dons ont ouvert droit, soit 60 % ou 40 % selon les cas.

Le reste est inscrit dans un nouveau 8 de larticle 238 bis du CGI introduit par le  du A du I du présent article, qui consacre la non‑déductibilité du résultat des dons effectués par l’entreprise mécène.

c.   Les précisions rédactionnelles et de conséquence

Le 4° du A du I du présent article apporte des précisions au 4 de l’article 238 bis relatif aux dons faits aux organismes versant des aides à certaines entreprises dans un cadre réglementaire européen.

● Le a de ce 4 supprime la référence à la réduction d’impôt prévue au 1 ainsi que la mention selon laquelle les dons faits à ces organismes ouvrent droit à cette réduction dans les mêmes conditions que celles prévues au 1.

Cette seconde mention apparaît désormais inutile, voire erronée, dès lors que les conditions relatives à la réduction d’impôt ne figureront plus au 1 de l’article 238 bis, mais à ses 3 et 8.

Au demeurant, la rédaction actuelle peut en tout état de cause sembler maladroite dans la mesure où si les conditions visées étaient entendues comme celles relatives aux organismes éligibles et à leurs modalités de fonctionnement, il y aurait eu une contradiction et une inapplicabilité du dispositif – rappelons que le 4 de l’article 238 bis prévoit lui-même les modalités que doivent suivre les organismes et les aides qu’ils versent.

● Le b du même 4° du A du I du présent article apporte une précision bienvenue quant à l’absence de rémunération des aides que versent à des entreprises les organismes bénéficiaires des dons, en indiquant que ce sont les entreprises bénéficiaires des aides versées qui ne doivent pas rémunérer celles-ci.

● Enfin, le B du I du présent article tire les conséquences du réaménagement formel de l’article 238 bis en apportant une coordination à l’article 238 bis AB du CGI, afin d’y actualiser la référence au plafonnement des dons, qui figure désormais non au premier alinéa du 1 de l’article 238 bis, mais au premier alinéa de son 3.

5.   Un dispositif applicable aux dons effectués à partir de 2020

Les modifications apportées au mécénat d’entreprise par le présent article seront, aux termes du II de ce dernier, applicables aux dons effectués au cours d’exercices clos à compter du 31 décembre 2020.

En conséquence, les nouvelles règles s’appliqueront dès les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020 s’ils portent sur une durée de douze mois.

B.   L’impact budgétaire et économique

L’impact du présent article sera positif en termes budgétaires, eu égard à l’encadrement prévu de la réduction d’impôt « mécénat ». Ce dernier, sous l’angle économique et social, ne devrait pas avoir de conséquences négatives compte tenu de son caractère mesuré et ciblé et dans la mesure où il reste, même ainsi modifié, plus favorable que les dispositifs existant dans les autres pays comparables.

1.   Un gain budgétaire de l’ordre de 130 millions d’euros par an à compter de 2021 en hypothèse haute

● L’impact budgétaire du présent article n’est pas chiffré dans l’évaluation préalable produite par le Gouvernement.

En effet, si la baisse à 40 % du taux de la réduction d’impôt au-delà de 2 millions d’euros de dons conduira à un surcroît de recettes fiscales, les conséquences du maintien du taux de 60 % pour les dons faits à des organismes aidant des personnes en difficulté ne sont pas quantifiables « dans la mesure où les données ne permettent pas de distinguer » ces dons des autres ([111]).

En outre, l’encadrement du mécénat de compétence à travers le plafonnement à trois fois le montant du plafond de la sécurité sociale devrait, là aussi, conduire à la réalisation d’un gain budgétaire, mais ce dernier ne peut en l’état être chiffré.

● Néanmoins, malgré ces précisions – voire précautions – méthodologiques, il est possible d’évaluer, en hypothèse haute, le montant du gain budgétaire susceptible d’être tiré du présent article.

L’évaluation préalable le chiffre à 130 millions deuros par an, indiquant qu’il s’agit d’un majorant. Ce chiffrage est en adéquation avec celui figurant dans le dossier de présentation du présent projet de loi de finances, fixé à 100 millions d’euros ([112]).

La chronique de l’impact budgétaire du présent article, reposant sur ces données, est présentée dans le tableau suivant.

impact budgétaire de l’encadrement du mécénat d’entreprise
(hypothèse haute)

(en millions d’euros)

2020

2021

2022

2023

0

+ 130

+ 130

+ 130

Source : évaluation préalable du présent article.

L’encadrement proposé n’aura pas d’impact en 2020 dans la mesure où il ne s’appliquera qu’aux dons effectués aux cours d’exercices clos à compter du 31 décembre 2020. Or, la réduction d’impôt « mécénat » s’imputant sur le solde de l’impôt dû, cette imputation n’interviendra pas avant 2021.

Dans la mesure où le mécénat d’entreprise reposera désormais sur une distinction en fonction de la nature et de la destination des dons, le Rapporteur général estime nécessaire une évolution des systèmes informatiques et des données à la disposition de l’administration fiscale, à défaut de quoi le suivi de cette dépense fiscale sera vain.

● En retenant le chiffrage majorant de 130 millions d’euros de gain annuel, le présent article permettrait de réduire le coût de la dépense fiscale en faveur du mécénat de façon substantielle : sur la base du montant constaté pour 2018, soit 817 millions d’euros, le coût s’établirait à 687 millions d’euros.

Le présent article s’inscrit donc pleinement dans la volonté de rationaliser les dépenses fiscales, tout en garantissant un fort soutien aux dons, une dépense fiscale de l’ordre de 700 millions d’euros par an ne pouvant être perçue comme négligeable et marginale.

2.   Une mesure qui ne devrait pas excessivement affecter l’ampleur des dons faits par les entreprises mécènes

Dès l’annonce par le Gouvernement d’un encadrement du mécénat d’entreprise à travers la mise en place d’un plafond de dons au-delà duquel le taux de l’avantage fiscal serait réduit, des inquiétudes se sont fait jour sur la pérennité et le volume des dons effectués par les entreprises.

Si de telles inquiétudes sont parfaitement légitimes, de nombreux éléments sont de nature à les apaiser, sinon à les faire disparaître.

a.   Un encadrement ciblé qui devrait concerner moins de 100 entreprises

● Le plafond de 2 millions deuros de dons ne touchera quun nombre très réduit dentreprises mécènes : d’après l’évaluation préalable, seules 78 entreprises seront concernées. Rapporté aux 77 086 entreprises ayant bénéficié du dispositif en 2018, la mesure proposée par le présent article ne portera donc que sur 0,1 % des bénéficiaires de la réduction dimpôt, soit un sur mille.

D’après les données fournies par l’administration fiscale en réponse au Rapporteur général, 99 entreprises ont, en 2018, effectué des dons pour plus de 2 millions d’euros – à l’aune de la reconstruction réalisée à partir du montant des créances déclarées précédemment mentionnée. Ces données corroborent le constat selon lequel le nombre d’entreprises concernées par le dispositif proposé sera particulièrement faible au regard du nombre total d’entreprises ayant déclaré une créance de mécénat en 2018, c’est-à-dire 99 958. Le rapport de un pour mille se retrouve ici.

Compte tenu du niveau du plafond, les TPE et PME ne seront pas concernées : seules les plus grandes entreprises effectuent des dons pour un montant total supérieur à 2 millions d’euros. Or, ces grandes entreprises sont généralement les plus sensibles aux questions de réputation et d’image, qui constituent des leviers importants dans la décision d’effectuer des dons (cf. infrac). Dès lors, il n’est pas établi qu’un abaissement du taux de la réduction d’impôt conduise à ce qu’elles diminuent leurs dons, sauf à montrer que l’avantage fiscal constituait une motivation plus forte que ce qu’elles pouvaient admettre, à rebours de l’image du mécène classiquement admise.

● Par ailleurs, les données transmises par l’administration fiscale montrent que le montant moyen des dons effectués par des entreprises qui ont effectué des dons pour un total supérieur à 2 millions d’euros s’élève, en 2018, à 11 millions d’euros environ. Ainsi qu’il ressort de l’exemple fourni dans le cadre de la présentation du dispositif proposé, la diminution du montant de l’avantage fiscal sera de l’ordre de 1,6 million d’euros – par rapport à un montant actuel de l’ordre de 6 millions d’euros –, et ce sans tenir compte du maintien du taux de 60 % indépendamment du montant des dons pour ceux relevant du champ de la réduction d’impôt « Coluche ».

b.   Une rationalisation du mécénat avantageusement neutralisé par la baisse du taux normal de l’IS

Au demeurant, il ne paraît pas inutile de rappeler que le taux normal de l’IS diminue et atteindra 25 % à compter de 2022. Dans ces conditions, réduire l’intensité d’un avantage fiscal n’est pas incohérente, d’autant plus si cet avantage, bien que formellement une réduction d’impôt, peut s’apparenter à un crédit d’impôt à travers le mécanisme de report de l’excédent de réduction d’impôt non imputé.

L’exemple suivant, résumé dans le tableau ci-après illustre l’impact de la baisse du taux normal de l’IS sur celui du mécénat pour deux entreprises A et B dont le chiffre d’affaires excède 250 millions d’euros :

– en 2019 et 2020, l’entreprise A réalise un bénéfice de 50 millions d’euros et effectue 5 millions d’euros de dons, dont un million à des organismes aidant les personnes en difficulté ;

– en 2019 et 2020, l’entreprise B réalise un bénéfice de 100 millions d’euros et effectue 10 millions d’euros de dons, aucun n’étant éligible au champ proposé par le Gouvernement de maintien du taux à 60 % indépendamment du montant des dons.

L’IS est calculé en appliquant aux premiers 500 000 euros de bénéfice un taux de 28 %, puis le taux normal sur le reste, soit 33 1/3 % en 2019 et 31 % en 2020. S’y ajoute la contribution sociale de 3,3 % assise sur l’IS.

impact de la baisse du taux normal d’IS
sur la modification apportée au mécénat d’entreprise

(en euros)

Entreprise

2019

2020

Différence 2020-2019

IS

Mécénat

Charge finale
(IS  mécénat)

IS

Mécénat

Charge finale
(IS  mécénat)

A

17 189 120

3 000 000

14 189 120

15 996 005

2 600 000

13 396 005

793 115

B

34 405 787

6 000 000

28 405 787

32 007 505

4 400 000

27 607 505

798 282

Source : commission des finances.

Il ressort de cet exemple que, malgré la diminution de l’intensité de la réduction d’impôt « mécénat » en 2020, pour la fraction de dons excédant 2 millions d’euros et hors dons relevant du champ de la « réduction d’impôt Coluche », la charge fiscale des entreprises sera significativement moins élevée en 2020 qu’en 2019 – de l’ordre de 800 000 euros dans les deux exemples.

La baisse du taux de l’IS a donc pour effet de nettement plus que neutraliser la mesure relative au mécénat. Ce taux devant poursuivre sa trajectoire de baisse après 2020, la neutralisation sera plus marquée encore et aboutira à un gain net pour les entreprises plus prononcé.

c.   Une incitation fiscale qui reste l’une des plus généreuses au monde

● En deuxième lieu, le dispositif proposé ne supprime pas lavantage fiscal attaché au mécénat dentreprise au-delà du plafond de 2 millions d’euros de dons : lavantage est maintenu, seule son ampleur est diminuée.

Or, même avec un taux de 40 % sur la fraction de dons dépassant 2 millions d’euros, le mécénat d’entreprise français reste l’un des outils les plus généreux au regard de ce qui existe chez nos principaux partenaires, sinon le plus généreux, ainsi qu’il a été vu :

– en Europe, la France est le seul pays pratiquant une réduction d’impôt dont le taux dépasse 50 % ;

– si l’Italie a un crédit d’impôt de 65 % des dons, ce dernier, d’une part, est plafonné à 5 % du bénéfice net, d’autre part, est cantonné à la sauvegarde du patrimoine culturel – les autres dons n’ouvrant droit qu’à un abattement sur l’assiette ;

– l’Espagne retient elle aussi un mécanisme de réduction d’impôt, mais son taux de 35 % reste inférieur au taux minoré de 40 % prévu par le présent article, et l’avantage est en outre plafonné à 10 % du bénéfice, là où le plafonnement français repose sur le chiffre d’affaires ;

– les autres pays appliquent un système de déduction d’assiette systématiquement moins avantageux que la réduction d’impôt française.

Dès lors, le mécénat français résultant du dispositif proposé demeure un outil fiscal plus généreux que ceux prévus par nos voisins et partenaires, ce que démontre le graphique suivant, reprenant les données de l’exemple précédemment fourni (cf. supra, I, B, 4). Pour la France, sont présentées une borne haute et une borne basse, cette seconde étant au demeurant systématiquement dépassée dans la mesure où elle repose sur un taux unique de 40 % et ne tient ainsi compte, ni du maintien du taux de 60 % pour la fraction des dons n’excédant pas 2 millions d’euros, ni de la mesure relative aux dons relevant du champ de l’actuelle réduction d’impôt « Coluche ».

N.B. : pour l’Italie et l’Espagne, ne sont pas retenus les dispositifs spécifiques ciblés sur certains secteurs particuliers.

Il ressort clairement de ce graphique que le dispositif français restera le plus généreux au regard des autres outils étudiés. Ces considérations sont, à elles seules, de nature à substantiellement réduire les craintes éventuelles d’un tarissement des dons.

● S’agissant de l’encadrement du mécénat de compétence, là encore les modalités prévues sont mesurées et adaptées : la limitation à trois fois le montant du plafond de la sécurité sociale, soit plus de 120 000 euros annuels, ne devrait pas grever à l’excès les mises à disposition de salariés, la limite restant à un niveau relativement élevé.

La mesure n’a ainsi nullement pour objectif de réduire le recours au mécénat de compétence, dont l’utilité n’est plus à démontrer, mais simplement d’éviter certains abus manifestes.

d.   Une incitation fiscale qui n’est pas la seule motivation des dons

En troisième lieu, il n’est pas inutile de rappeler que si l’existence d’un avantage fiscal est un facteur favorisant les dons, la motivation pour effectuer ceux-ci ne repose pas exclusivement, voire principalement, sur une telle incitation.

● Le fait, pour une entreprise, d’effectuer des dons et de devenir ainsi mécène ne constitue en aucun cas une démarche en pure perte mais présente au contraire de nombreux avantages indépendants du volet fiscal :

– la motivation et le bien-être des salariés de l’entreprise est accrue, la raison d’être de l’entreprise s’élargissant au-delà du simple champ économique pour revêtir une dimension d’intérêt général ;

– l’image de marque de l’entreprise bénéficie de la qualité de mécène et des œuvres d’intérêt général au financement et au développement desquels l’entreprise contribue : sa réputation s’en trouve améliorée, point essentiel pour de nombreuses entreprises, comme en témoigne l’importance prise par les aspects de responsabilité sociale et environnementale. Cet aspect est d’ailleurs expressément mentionné par la Cour des comptes dans son rapport de 2018, qui souligne la montée en puissance des retombées en termes d’image et de notoriété que l’association du nom de l’entreprise mécène aux opérations de mécénat favorise ([113]).

● Ces considérations sont également mises en avant par l’association Admical dans son Baromètre d’octobre 2018. Admical recense, parmi les motivations des mécènes ([114]) :

– « la contribution à lintérêt général qui reste la première raison des mécènes » ;

– l’« expression et lincarnation des valeurs de lentreprise », le mécénat apparaissant « comme un moyen de donner vie, de matérialiser lADN de lentreprise, une dimension très importante pour les dirigeants qui cherchent à marquer leur identité » ;

– « lancrage territorial », qui serait la troisième motivation des mécènes ;

– « la valorisation de limage et de la réputation de lentreprise » ;

– le fait d’assurer « la cohésion interne de lentreprise », motivation nourrie principalement par les grandes entreprises.

S’agissant de l’incitation fiscale, le Baromètre d’Admical publié en octobre 2018 indique, sous le titre évocateur de « Mécénat et fiscalité, entre mythe et réalité », que la réduction d’impôt, bien qu’avantageuse, « nest pas pour autant la première raison de faire du mécénat, et toutes les entreprises mécènes ny ont pas recours » ([115]) :

– Admical évalue les dons effectués par les entreprises en 2017 à un total compris entre 3 et 3,6 milliards d’euros, pour 2 milliards d’euros déclarés au titre du dispositif prévu à l’article 238 bis du CGI ([116]). L’écart entre le montant déclaré pour obtenir l’avantage fiscal associé et le montant total estimé par Admical peut certes traduire une méconnaissance du dispositif en faveur du mécénat, mais il témoigne également d’une générosité désintéressée des entreprises – ou en tout état de cause d’une générosité qui n’est pas motivée par la perspective d’un avantage fiscal ;

– moins de la moitié des entreprises mécènes (49 %) ont déclaré leurs dons à l’administration fiscale en 2017, et seules 35 % les ont déclarés en totalité ([117]).

3.   Un dispositif préservant les dons destinés à soutenir les personnes en difficulté qui pourrait utilement être enrichi

a.   La nécessaire sanctuarisation des dons portant sur l’aide aux personnes en difficulté

Le fait que le dispositif prévu au présent article préserve le taux de 60 % pour l’ensemble des dons destinés à aider les personnes en difficulté à travers la fourniture à titre gratuit d’une assistance pour le logement, de soins et de nourriture, renforce la pertinence du ciblage de l’encadrement proposé :

– l’avantage fiscal pour ces dons est sanctuarisé ;

– ces dons ne seront pas pris en compte pour apprécier si le plafond de 2 millions d’euros est dépassé ou non.

Le choix du Gouvernement est pertinent ; il correspond d’ailleurs aux préconisations faites dès juillet 2019 par le Rapporteur général dans son rapport sur l’application des mesures fiscales ([118]).

Ainsi que l’indique l’évaluation préalable, le maintien du taux à 60 % quel que soit le montant de ces dons est justifié par la « situation différente des autres entités bénéficiaires de dons, compte tenu notamment des spécificités de leur action en matière daide durgence et de leur rôle éminent en faveur de la cohésion sociale » ([119]).

b.   L’opportunité d’une extension de la sanctuarisation prévue aux dons permettant la fourniture de produits de première nécessité

Le Rapporteur général ne peut que partager ce constat, puisqu’il l’a lui‑même dressé au début de l’été. Ledit constat peut d’ailleurs militer pour une extension ciblée du maintien du taux de 60 % sans plafonnement à d’autres services d’urgence fournis aux personnes en difficulté portant sur la fourniture de produits de première nécessité non alimentaires, parmi lesquels peuvent être mentionnés :

– les vêtements et les duvets ;

– les produits d’hygiène de base tels que le savon, le dentifrice, les produits de protection hygiénique féminine ou encore les couches ;

– les matériels et ustensiles de cuisine ;

– les fournitures scolaires.

● Il serait en effet pour le moins paradoxal de maintenir un taux de 60 % pour l’alimentation des personnes en difficulté sans que la fourniture de vêtements connaisse le même traitement : les deux sont pourtant indispensables, le défaut de vêtements chauds pouvant constituer un lourd tribut humain en période de froid, tandis que l’absence de vêtements propres ou tout simplement en état relativement correct est nécessaire, ne serait-ce que pour la dignité des personnes.

Le paradoxe est encore plus saillant si l’on considère qu’en l’état du dispositif, certains soins qui ne relèvent pas nécessairement d’une urgence impérieuse sont inclus dans le champ du maintien du taux à 60 %. À titre d’exemple, les soins d’ostéopathie ou de kinésithérapie – dont l’intérêt n’est nullement remis en cause – peuvent apparaître moins nécessaires et urgents que l’accès aux produits de protection hygiénique féminine, dont le coût est parfois prohibitif pour des personnes en difficulté alors qu’il s’agit d’un impératif physiologique naturel.

● Le champ retenu par le Gouvernement, ainsi qu’il a été vu, est celui de la réduction d’impôt « Coluche » prévue au 1 ter de l’article 200 du CGI. Il a donc sa cohérence, mais cette dernière ne serait en aucun cas remise en cause par une extension à la fourniture à titre gratuit aux personnes en difficulté de produits de première nécessité : au contraire, en ce que ces dons poursuivent la même finalité que ceux de la réduction d’impôt « Coluche », ils ont toute leur place dans le dispositif maintenant le taux de 60 % de l’avantage fiscal.

Le Rapporteur général considère donc logique et naturelle l’extension proposée portant sur les dons faits au profit d’organismes à but non lucratif qui procèdent à la fourniture à titre gratuit de produits de première nécessité aux personnes en difficulté, si ce champ n’était pas déjà couvert par celui de la réduction d’impôt « Coluche » tel qu’interprété par la doctrine fiscale.

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*     *

L’ensemble de ces éléments permet de relativiser de façon importante les éventuelles inquiétudes qu’une réduction de l’avantage fiscal pourrait entraîner :

– le volet fiscal n’est pas la principale motivation des dons ;

– même avec un taux de 40 % au-delà de 2 millions d’euros, le dispositif français reste particulièrement généreux et incitatif ;

– l’écrasante majorité des entreprises mécènes continueront à bénéficier de l’avantage maximal de 60 % des dons, n’étant pas concernées par le plafond ;

– le taux maximal est maintenu pour les dons en faveur des personnes en difficulté.

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*     *

La commission examine les amendements identiques II-CF1272 du président Éric Woerth, II-CF54 de M. Julien Dive, II-CF163 de Mme Nadia Ramassamy, II-CF942 de M. Charles de Courson, II-CF950 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1132 de M. Fabrice Brun.

M. le président Éric Woerth. L’amendement II-CF1272 vise à supprimer l’article 50. Certes, la réduction d’impôt en faveur du mécénat coûte cher, mais le coût est stable depuis trois ans. Certes, le dispositif est plus généreux que dans la plupart des autres pays, mais il fonctionne en raison du niveau d’imposition des entreprises encore très élevé par rapport aux autres pays.

M. Laurent Saint-Martin. Il n’a pas autant baissé dans les autres pays qu’en France !

M. le président Éric Woerth. Croyez-le, si cela vous satisfait.

Quoi qu’il en soit, il ne faut pas toucher à ce dispositif. La réduction de la dépense publique ne passe pas par une telle chasse, mais par une révision complète des politiques.

Vous avez exclu de ces modifications le mécénat pour la fourniture de repas ou le logement de personnes en difficulté, dit « périmètre Coluche ». Mais qu’en est-il de la culture et de l’enseignement ? Pourquoi les exclure ? Je le redis, cet article n’est pas opportun.

M. Charles de Courson. Je ne crois pas faire partie des plus laxistes au sein de cette commission, mais je trouve cette mesure mal calibrée et brutale. A-t-on évalué ses conséquences sur l’enseignement supérieur ? Les écoles d’ingénieurs ou de commerce, par exemple, qui subissent déjà la réduction des dotations des chambres de commerce et d’industrie, vont devoir augmenter leurs frais de scolarité.

Le mécénat va s’effondrer. Les grandes entreprises mécènes, qui disposent d’un budget dédié, que feront-elles si la réduction d’impôt passe de 60 à 40 % ? Nombre d’entre elles nous ont dit qu’elles réduiront leurs interventions d’un tiers !

Dans le domaine social, censé être préservé, d’autres problèmes vont se poser, car la disposition prévue est incomplète. D’où l’amendement II-CF942 de suppression de l’article 50.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement II-CF950 est identique. Alors que la dépense globale est de 900 millions d’euros, cet article met le feu pour 100 millions d’euros d’économies ! Je crains les conséquences pour le secteur de l’aide alimentaire – nous ne disposons d’aucune étude d’impact précise. Soyons prudents avant de faire bouger les lignes.

M. Fabrice Brun. Pourquoi déstabiliser des dispositifs fiscaux qui fonctionnent ? Pourquoi appauvrir de nombreuses organisations, notamment dans le secteur de l’enseignement supérieur ?

Tous les acteurs associatifs de la générosité nous le disent : depuis deux ans, ils subissent les effets pervers des réformes sociales et fiscales – suppression des contrats aidés, transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI). Voilà pourquoi, à travers l’amendement II-CF1132, nous vous invitons à ne pas toucher au mécénat d’entreprise.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’article 50 ne vise pas à remettre en cause le mécénat d’entreprise. Il s’agit d’une dépense fiscale très dynamique, dont le coût a décuplé depuis sa création et qui frôle désormais le milliard d’euros. Encadrer le mécanisme est donc non seulement légitime, mais aussi responsable.

En lisant les exposés sommaires des amendements, j’ai l’impression que cela va tarir tous les dons et donc supprimer le mécénat. Tel n’est pas le cas ! On ne change rien jusqu’à 2 millions d’euros de dons par entreprise – et non par groupe –, ce qui correspond à la quasi‑totalité des dons. Au-delà de ce plafond, on ne supprime pas l’avantage, mais on en réduit simplement l’intensité, qui restera tout de même de 40 %.

En outre, les dons relevant du « périmètre Coluche » ne sont pas concernés par ce plafond, et continueront à ouvrir droit à une réduction d’impôt de 60 %, quel que soit leur montant. Dans ces conditions, on ne peut pas dire que le mécénat est sur la sellette.

L’impact budgétaire maximal est évalué entre 100 et 130 millions d’euros. Cela revient à maîtriser le coût du mécénat à son niveau de 2015. Or, en 2015, on ne disait pas que le mécénat était en danger !

Concernant l’impact du dispositif, moins de cent entreprises seront concernées –soixante-dix-huit d’après l’évaluation préalable –, soit un millième des entreprises mécènes. Toutes les très petites (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) continueront à bénéficier d’un avantage fiscal de 60 %. Seules certaines grandes entreprises seront concernées par le plafond. En outre, parmi ces dernières, celles qui font des dons à des organismes aidant des personnes en difficulté bénéficieront toujours de l’avantage de 60 %, même si ces dons dépassent 2 millions d’euros, selon la « logique Coluche ». Il faut donc vraiment relativiser l’impact !

J’ajoute – et je cite les documents des organismes actifs dans le mécénat – que l’avantage fiscal n’est pas la principale motivation des entreprises mécènes, surtout pour les plus grandes. Je vous renvoie au baromètre de l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical) : ce qui compte avant tout, c’est l’image de l’entreprise, ainsi que d’autres éléments comme la contribution à l’intérêt général ou l’ancrage territorial. L’avantage fiscal n’est donc pas la première raison du mécénat et beaucoup d’entreprises n’y ont pas recours sur tout ou partie de leurs dons. En 2017, sur 3,6 milliards de dons, seuls 2 milliards ont été déclarés au titre du mécénat. Autrement dit, certaines entreprises ne demandent pas l’avantage fiscal.

Quant aux inquiétudes exprimées pour les associations d’aide aux personnes en difficulté, je rappelle que les dons qui sont destinés à ces dernières ne sont pas plafonnés. Je proposerai d’ailleurs un amendement qui étend raisonnablement le champ des dons aux organismes aidant les personnes en difficulté. Je pense que nous serons nombreux à nous retrouver sur cette proposition.

À toutes fins utiles, je rappelle également que le taux de l’impôt sur les sociétés (IS) diminue. En conséquence, il n’est pas absurde que les avantages fiscaux qui permettaient d’une certaine façon de compenser un taux élevé diminuent aussi. Ainsi, une entreprise qui a payé 33,3 millions d’euros d’IS en 2019 et se voit appliquer une réduction d’impôt de 6 millions – payant in fine 27,3 millions d’euros –, sera toujours gagnante de 700 000 euros en 2020 avec le même niveau de dons, même si la réduction passe à 40 %.

Le dispositif français de mécénat est le plus généreux au monde. Même en réduisant le taux à 40 %, nous sommes toujours devant l’Espagne et bien loin devant les autres pays d’Europe. Ainsi, en Italie, le dispositif fiscal du mécénat ne prévoit qu’une déduction de 2 % de l’assiette imposable. Pourtant, les entreprises italiennes sont parmi celles qui donnent le plus !

La réforme est donc équilibrée et utile, au moment où le rapport de la Cour des comptes démontre les abus liés au mécénat. Il s’agit de moraliser le système.

M. le président Éric Woerth. Ces allers-retours fiscaux sont pénibles !

M. Gilles Carrez. Je soutiens le rapporteur général. Je pense que mon nom a été inscrit par erreur sur l’amendement de suppression.

Je suis à l’origine d’une demande de rapport à la Cour des comptes en 2018 en la matière. En tant que rapporteur spécial sur les crédits du patrimoine, j’ai constaté des abus manifestes, non pas sous forme de détournements, mais par une utilisation excessive du mécénat d’entreprise, à cause de la conjonction de plusieurs phénomènes.

Le premier découle de la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, dite loi Aillagon. Celle-ci était absolument indispensable, car notre pays accusait un très gros retard en la matière. Le dispositif mis en place était donc extraordinairement généreux pour encourager le mécénat. L’étude d’impact de la loi évaluait le coût du mécénat d’entreprise à 200 millions d’euros par an au maximum ! Mais c’était sans compter d’autres dispositions favorables, comme la possibilité pour les fondations d’entreprise de porter le nom de l’entreprise fondatrice ou le fait que, deux ans après l’adoption de la loi Aillagon, on a favorisé la création de fondations.

Le système fiscal extraordinairement favorable, conjugué avec ces facilités de création de fondations, puis avec la création des fonds de dotation, est à l’origine de l’effet boomerang que nous constatons et qui est parfaitement illustré dans le rapport de la Cour des comptes par l’exemple de la Fondation LVMH. Allez la visiter au bois de Boulogne, c’est extraordinaire ! Mais vous ne saurez jamais que le contribuable français a payé 60 % de la facture ! À l’origine du projet, il y a quinze ans, le coût de la fondation était évalué à 100 millions d’euros. Elle a finalement coûté 900 millions, dont le contribuable a payé 60 %. Or il n’y en a trace absolument nulle part ! Le Louvre a commencé à s’inquiéter lorsque des expositions ont été organisées, avec des moyens extraordinaires, car elles bénéficient aussi de la réduction fiscale de 60 %… Je ne nie pas l’intérêt du mécénat, mais cet exemple, dans le domaine culturel, est saisissant.

Le rapport de la Cour des comptes est excellent. Il démontre que 44 % de la dépense fiscale est accaparée par vingt-quatre entreprises. Cette hyperconcentration pose question. Si l’on diminue ces avantages qui se sont accumulés, les grandes entreprises vont‑elles cesser de pratiquer le mécénat ? Je ne le crois pas. Avec le rapporteur général et le président de la commission des finances, nous avons créé un groupe de travail sur ce sujet et procédé à des auditions qui ont permis d’établir le diagnostic énoncé par le rapporteur général.

À titre personnel, plutôt que de prévoir deux taux, l’un à 40 %, l’autre à 60 %, j’aurais choisi un taux unique à 50 %, mais ce n’est pas le sujet. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser dériver des dépenses fiscales dont le montant a été multiplié par quatre ou cinq en quelques années et sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle.

Dans le secteur de la culture, la dépense fiscale est exactement équivalente à la dépense budgétaire ! Le ministère de la culture, se rendant compte qu’il n’avait pas suffisamment de crédits budgétaires, a multiplié les dépenses fiscales, pour le cinéma ou d’autres politiques. On ne peut pas, d’un côté, être très rigoureux dans la gestion des crédits budgétaires et, de l’autre côté, laisser les vannes des dépenses fiscales complètement ouvertes. Je soutiens donc l’article 50.

Monsieur le président, entre 2007 et 2012, souvenez-vous, nous avons essayé de maîtriser cette dépense, en collaboration avec le ministre du budget de l’époque, mais des forces particulièrement puissantes nous en ont empêchés… Enfin, les dons du « périmètre Coluche » ne sont pas concernés.

Mme Christine Pires Beaune. Je soutiens également le rapporteur général et cet article du projet de loi qui vise le mécénat. Les constats sont identiques pour le mécénat et le CIR : inflation de la dépense fiscale, nombre de petites et moyennes entreprises bénéficiaires très élevé, mais pour un volume très faible. En matière de mécénat, vingt entreprises captent les trois quarts de la dépense fiscale !

Le rapport de la Cour des comptes est clair, et je remercie M. Carrez de l’avoir résumé. Nous disposons de tous les éléments pour légiférer et encadrer, dans le droit fil de notre philosophie qui consiste à réduire les niches fiscales pour diminuer le taux d’imposition facial. Nous devrions même aller plus loin : la loi créant les fondations d’entreprise commence à dater, et nous serions bien inspirés de demander un rapport d’évaluation.

M. le président Éric Woerth. Aucune niche et des impôts bas, c’est une sorte de paradis artificiel : peut-être y arrivera-t-on un jour… Le Gouvernement a tous les moyens pour le proposer – c’est plus compliqué pour le Parlement.

Je ne suis pas tout à fait d’accord avec mon ami Gilles Carrez, une niche fiscale n’est pas comparable à une dépense : c’est une moindre recette et, en fonction de l’évolution du taux, la dépense fiscale peut ne pas se réaliser.

Mme Sarah El Haïry. Monsieur le président, je vous rejoins et je propose de changer de prisme. Outre le patrimoine ou l’enseignement supérieur, beaucoup d’associations sont bénéficiaires de ces fonds. La tribune qui nous a alertés est signée par Médecins du Monde, la Croix-Rouge, les Apprentis d’Auteuil, la Fondation Abbé Pierre. C’est à eux qu’il faut penser !

On ne peut pas passer notre temps à réclamer la stabilité fiscale et s’amuser à réaliser un tel coup de rabot ! Une niche fiscale n’est pas une dépense. Certes, les dons du « périmètre Coluche » sont exclus de la réforme, mais pourquoi ne pas traiter tout le monde de la même façon ? Les deux premiers bénéficiaires des dépenses fiscales de mécénat sont les urgences sociales et l’éducation. Il s’agit d’investissements dans notre société ! La brutalité de la décision ne me convient pas. Bien sûr, comme la Cour, je ne dis pas qu’il ne faut pas mieux contrôler, assurer la transparence et lutter contre les abus, mais ce coup de rabot n’y contribuera pas !

M. Charles de Courson. L’étude d’impact de cet article est intéressante : elle n’évoque que des donateurs, en oubliant les bénéficiaires finaux. On estime l’économie fiscale à 130 millions d’euros. Cela fera 200 millions de dons en moins…

Mme Émilie Cariou. Rien n’empêche de faire des dons !

M. Charles de Courson. Que va-t-il se passer pour les bénéficiaires ? Dans l’enseignement supérieur, les grandes écoles d’ingénieurs ou de commerce ont vu leurs ressources réduites du fait simultanément de la réforme de la taxe d’apprentissage et de la réduction des budgets des chambres de commerce et d’industrie. Si, maintenant, elles perdent des dons, quelle sera la variable d’ajustement ? Elles vont augmenter les frais de scolarité, déjà élevés.

Dans le secteur social, après une baisse aussi brutale, ce n’est pas vers l’État impécunieux qu’on va se retourner, mais vers les collectivités locales.

Je ne suis pas contre la réduction de cet avantage, mais faisons-le progressivement, afin de protéger les secteurs les plus fragiles. Je proposerai des amendements. C’est la brutalité de la mesure gouvernementale qui est problématique, d’autant que l’étude d’impact n’analyse pas les conséquences sur les bénéficiaires.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1272, II-CF54, IICF163, II-CF942, II-CF950 et II-CF1132.

 

Elle en vient aux amendements identiques II-CF115 de M. Fabrice Brun, IICF581 de M. Bertrand Sorre, II-CF1231 de Mme Sarah El Haïry, II-CF1263 de M. Benoit Simian et II-CF1442 de Mme Naïma Moutchou.

M. Fabrice Brun. Dans le même esprit que les précédents, l’amendement II‑CF115 vous invite à ne pas toucher au dispositif actuel du mécénat d’entreprise. J’entends les arguments du rapporteur général et de Gilles Carrez, mais, comme Mme El Haïry, j’entends aussi l’appel lancé par les acteurs associatifs de la générosité : le Téléthon, France Handicap, la Fondation Abbé Pierre, la Ligue contre le cancer, l’institut Pasteur, le Secours catholique, la Croix-Rouge, Vaincre la mucoviscidose, l’Unicef, etc. Dans leur grande diversité, ils nous disent avoir besoin des petits comme des grands donateurs. Nous ne pouvons rester insensibles à leur appel.

M. Bertrand Sorre. Un amendement a été voté dans le PLF 2019 obligeant les entreprises mécènes à déclarer les montants et les bénéficiaires de leur mécénat. Les premiers chiffres seront disponibles en 2020. Il est essentiel de les analyser avant de modifier le dispositif.

En outre, le Premier ministre a confié une mission sur l’évolution du cadre de la philanthropie, toujours en cours, à Sarah El Haïry et Naïma Moutchou. Il paraît prématuré de tirer des conclusions législatives avant de disposer de leurs constats et propositions. L’amendement II-CF581 en tire les conséquences.

Mme Sarah El Haïry. L’amendement II-CF1231 vise à supprimer la baisse de 60 à 40 % de la réduction d’impôt. Je souhaite être garante de la volonté du Président de la République, qui écrivait en 2017 que le mécénat des entreprises était positif. Avec ma collègue Naïma Moutchou, nous sommes missionnées afin d’évaluer comment mieux contrôler et limiter les abus liés au mécénat. S’il importe d’améliorer la transparence et de rétablir de la confiance, adopter l’article en l’état servira seulement à déstabiliser les entreprises qui s’engagent auprès de nos associations, dans une période où notre pays a besoin de solidarité et de lien social.

L’impact de l’instabilité de la fiscalité des particuliers sur les dons est déjà constaté ; ne reproduisons pas la même erreur avec les entreprises mécènes ! La stabilité des ressources est fondamentale pour nos associations. Puisque nous avons pour principe de faire ce que nous disons, j’invite mes collègues à adopter cet amendement.

M. Benoit Simian. En adoptant l’article en l’état, nous affaiblirons le Parlement. À quoi servirait, dès lors, la mission confiée par le Premier ministre à nos deux collègues El Haïry et Moutchou ?

Laissons le temps au temps. En Gironde, 10 % des dépenses de fonctionnement de la Cité du vin sont financées par le mécénat. Nous prenons le risque de mettre en danger ces structures.

Bien sûr, j’ai lu le rapport de la Cour des comptes, mais il faudrait prévoir une sortie en sifflet. L’amendement II-CF1263 poursuit cet objectif. Sinon, cela risque de nous laisser le triste goût du gazole non-routier.

Mme Naïma Moutchou. L’amendement II-CF1442 est un amendement d’appel. Il faut ouvrir le dialogue sur ce sujet essentiel. Depuis le début de nos débats, j’entends parler de fiscalité, mais qu’en est-il des bénéficiaires ? Le mécénat, c’est aussi une vision de la société de l’engagement, au service de l’intérêt général.

Bien sûr, je m’inscris dans l’objectif de lutte contre les effets d’aubaine du mécénat d’entreprise, mais le rabot fiscal n’y changera rien. Des abus, il y en aura toujours avec une réduction d’impôt de 60 % comme aujourd’hui, ou de 50 ou 40 % demain. En revanche, le renforcement des contrôles et des règles de transparence donnerait de bien meilleurs résultats.

Vous parlez de dérives, mais, en fait, n’est ici visée que la Fondation LVMH. Ce cas particulier doit-il nous faire prendre le risque d’un coup de frein brutal au mouvement positif de la générosité en France ? Il y a quelques jours, j’ai été informée qu’une grande université parisienne, en phase de création de sa fondation, vient de perdre deux dons de 300 000 euros. Ces 600 000 euros étaient destinés à la recherche scientifique et à la formation. Pourquoi deux grands groupes sont-ils revenus sur leur promesse ? En raison de l’annonce du changement des règles fiscales et alors même que nous n’avons rien voté !

Si la fiscalité n’est pas le déclencheur, elle reste un amplificateur. En rabotant, nous envoyons un signal de défiance au monde du mécénat, à l’opposé des appels à l’engagement du Président de la République et de la mission que nous menons avec Sarah El Haïry.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous ne sommes pas en train de supprimer le mécénat, contrairement à ce que laissent entendre vos propos ! J’espère que vous excuserez mon moralisme parpaillot, mais la philanthropie ne se limite pas au prisme fiscal.

S’agissant des dérives, je vous invite à lire le rapport de la Cour des comptes commandé par notre commission. Il ne s’agit pas d’une seule fondation et d’une seule entreprise !

Concernant l’enseignement, imaginez-vous que des entreprises donatrices et partenaires d’universités ou de grandes écoles, au sein desquelles elles recrutent ensuite leurs propres cadres, vont revenir du jour en lendemain sur ces partenariats ? Je ne le crois pas. Avis défavorable.

Mme Émilie Cariou. Je partage les propos du rapporteur général, de M. Carrez et de Mme Pires-Beaune. Nous suivons ces dispositifs depuis des années et avons pu constater les dérives. En outre, il ne s’agit pas d’une extinction du mécénat en France. La réduction toucherait soixante-dix-huit entreprises qui verront leur réduction d’impôt passer de 60 à 40 % au-delà de 2 millions d’euros de dons. Cela reste un taux extrêmement élevé, d’autant plus que le taux d’impôt sur les sociétés a baissé.

M. Carrez a raison, non seulement la fondation en question a réussi à construire son établissement avec de l’argent public, mais elle fonctionne sur le même principe, sans aucune vision de politique culturelle et sans aucun contrôle du ministère de la culture. C’est de l’argent public qu’on ne maîtrise absolument pas.

Bien évidemment, nous soutenons le mécénat, pour la recherche, le secteur caritatif ou culturel. Le passage de 60 à 40 % de la réduction d’impôt pour ces soixante‑dix‑huit entreprises ne va pas les pénaliser. Nous l’avons toujours dit, la baisse du taux d’IS va de pair avec l’assainissement des assiettes et des niches.

La commission rejette les amendements identiques II-CF115, II-CF581, IICF1231, II-CF1263 et II-CF1442.

Elle examine lamendement II-CF337 de Mme Cathy Racon-Bouzon.

Mme Cathy Racon-Bouzon. Mon amendement vise à permettre à la société de programmes Radio France de bénéficier du mécénat d’entreprise pour ses activités de formation musicale. Les orchestres de Radio France – l’Orchestre national de France, l’Orchestre philharmonique de Radio France, ainsi que le chœur et la maîtrise – ont vocation à se produire dans nos territoires pour favoriser l’accès de tous à la musique. Cette nouvelle mission de service public de Radio France doit pouvoir être soutenue par la générosité des entreprises et des particuliers, comme c’est le cas pour la Philharmonie de Paris.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le sujet soulevé est légitime et intéressant. La totalité des concerts de l’Orchestre national de France est diffusée sur France Musique et s’inscrit donc, à mon sens, dans la programmation audiovisuelle éligible aux dons.

Votre mesure est peut-être de portée plus générale. Nous allons effectuer les vérifications nécessaires. Dans l’attente, je vous invite à retirer l’amendement afin que nous en discutions en séance publique avec le ministre et que votre demande soit examinée.

Lamendement II-CF337 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF1536 de M. Benoit Potterie.

M. Benoit Potterie. Le présent amendement vise à exclure de l’assiette du mécénat le financement d’installations artistiques temporaires en milieu urbain. Ces dernières années, différentes polémiques ont mis en lumière le fait que les dépenses fiscales de mécénat sont parfois affectées à des œuvres dont on peut questionner l’intérêt général.

En 2014, l’artiste Paul Mc Carthy a installé une œuvre haute de vingt-quatre mètres représentant un plug anal. L’année suivante, Anish Kapoor a conçu une œuvre représentant un vagin pour les jardins du Palais de Versailles. Ces deux œuvres ont été financées par des mécènes. Il s’agit donc de dépenses fiscales. Si le droit n’a pas vocation à émettre de jugement sur la qualité artistique des œuvres d’art – ce principe est essentiel –, on peut légitimement s’interroger sur la contribution de telles œuvres à l’intérêt général, et sur la pertinence de leur financement par une dépense fiscale.

N’oublions pas le coût d’installation de telles œuvres : Bouquet of Tulips de Jeff Koons ne visait pas à provoquer, mais elle a ému un grand nombre de Français par le coût de son installation – 4,5 millions d’euros, dont 3,5 ont été financés par de la dépense fiscale.

Je ne remets pas en cause le financement de telles œuvres par les mécènes, mais nous devons nous interroger sur la défiscalisation de tels investissements. Mon amendement vise seulement à exclure du mécénat les installations artistiques temporaires en milieu urbain.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je n’aime pas la censure d’État. Défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1536.

Elle en vient à la discussion commune des amendements II-CF1232 et II-CF1233 de Mme Sarah El Haïry, des amendements identiques II-CF944 de M. Charles de Courson., IICF1125 de M. Marc Le Fur, II-CF1133 de M. Fabrice Brun et II-CF1264 de M. Benoit Simian, ainsi que des amendements II-CF164 de Mme Nadia Ramassamy et II-CF1010 de M. Charles de Courson.

Mme Sarah El Haïry. Les amendements II-CF1232 et II-CF1233 proposent d’augmenter le plafond au-delà duquel la réduction passe de 60 à 40 %, de 2 millions à 10 millions d’euros pour le premier amendement et à 5 millions pour le deuxième. Ainsi, seules quelques entreprises seraient concernées.

Monsieur le rapporteur, vous nous répétez qu’il est nécessaire d’évaluer et de disposer d’études d’impact. Comme vous, cela nous tient à cœur et nous ne voulons pas que notre travail soit vain. Nous le vivons mal. Toutes nos propositions visent à ce que l’on repousse d’un an la réforme.

M. Charles de Courson. L’amendement II-CF944 est plus modéré et propose un relèvement du plafond à 4 millions pour éviter un choc brutal. Nous ne disposons pas de la répartition des dons, mais M. le rapporteur général l’a certainement.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement II-CF1125 est de repli.

M. Charles de Courson. Dans le même esprit, l’amendement II-CF1010 propose un lissage dans le temps du plafond : 3 millions en 2021, 2,5 millions en 2022 et 2 millions en 2023.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon avis est défavorable. Le dispositif a été concerté, je ne vous laisserai pas dire le contraire.

Mes propos étaient très clairs dans le rapport d’application de la loi fiscale. Gilles Carrez a également rappelé les initiatives et rapports antérieurs. Il faut saluer la constance des rapporteurs généraux sur le sujet !

La commission rejette successivement les amendements II-CF1232, II-CF1233, les amendements identiques II-CF944, II-CF1125, II-CF1133 et II-CF1264, ainsi que les amendements II-CF164 et II-CF1010.

Puis elle rejette lamendement II-CF862 de Mme Laure de La Raudière, suivant lavis défavorable du rapporteur général.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques IICF943 de M. Charles de Courson, II-CF1124 de M. Marc Le Fur et II-CF1134 de M. Fabrice Brun, ainsi que les amendements II-CF1009 de M. Charles de Courson, IICF1265 de M. Benoit Simian et II-CF1544 de Mme Sarah El Haïry.

M. Charles de Courson. L’amendement II-CF943 augmente la réduction de 40 à 60 %, pour montrer ma mauvaise humeur.

M. Fabrice Brun. L’amendement II-CF1134 vise à préserver l’enseignement supérieur. Les étudiants sont d’importants bénéficiaires du mécénat, qui finance la recherche, l’innovation et la mobilité internationale.

M. Charles de Courson. L’amendement II-CF1009 vise à effectuer un lissage sur trois ans : 57 % en 2021, 54 % en 2022 et 50 % en 2023. Cela représente tout de même une baisse de 5 à 7 % par an !

M. Benoit Simian. L’amendement II-CF1265 prévoit aussi une sortie en sifflet.

Mme Sarah El Haïry. J’adhère aux propos de notre collègue Charles de Courson. J’avais deviné ses pensées puisque l’amendement II-CF1544 propose également un taux de 50 %.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon avis est défavorable. Monsieur de Courson, tel qu’il est rédigé, le lissage que vous proposez reviendrait à supprimer les avantages fiscaux liés au mécénat après 2023. Je préférerais donc que vous retiriez l’amendement II-CF1009.

La commission rejette successivement les amendements identiques II-CF943, IICF1124 et II-CF1134, ainsi que les amendements II-CF1009, II-CF1265 et II-CF1544.

Elle adopte ensuite lamendement rédactionnel II-CF1551 du rapporteur général (amendement II-2527).

Elle en vient à la discussion commune des amendements II-CF1188 de Mme Florence Provendier, II-CF1560 du rapporteur général, II-CF1216 de Mme Lise Magnier, II-CF1266 de M. Charles de Courson, II-CF1407 de M. Jean-Louis Bricout, IICF1279 de Mme Natalia Pouzyreff et II-CF1191 de Mme Florence Provendier.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. L’amendement II-CF1188 vise à exclure du plafond les dons de produits d’hygiène aux banques alimentaires. C’est en pratique déjà le cas, mais ce n’est pas précisé dans la loi.

L’amendement II-CF1191 vise également à exclure les dons d’équipements de première nécessité. En effet, l’article 50 prévoit une exclusion de la fourniture de logements, mais l’équipement des logements n’est pas évoqué.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Plusieurs amendements proposent d’étendre le champ du taux de 60 % au-delà de 2 millions d’euros à différents types de dons pour aider les personnes en difficulté. L’amendement II-CF1560 se veut un amendement de synthèse et de consensus. En l’adoptant en commission des finances, nous pourrons dialoguer en séance publique avec le ministre. La doctrine fiscale doit être précisée : il est difficile de comprendre que l’accès à un ostéopathe soit dans le champ du dispositif Coluche, quand on se pose encore des questions sur l’hygiène féminine. C’est indécent ! On me dit que c’est inclus, mais les interprétations divergent. Je préfère que ce soit clair, car il s’agit d’éléments essentiels de la dignité humaine.

M. Charles de Courson. L’amendement II-CF1266 vise à assurer une cohérence avec la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, adoptée en septembre 2018. Le système dérogatoire de la dotation d’action territoriale (DAT) a été créé, qui rend possibles des actions de mécénat visant à lutter contre la pauvreté dans la zone d’emploi du territoire où est installée l’entreprise, à l’échelle du bassin de vie. Il faut à tout le moins maintenir cette disposition, sauf à être en contradiction avec la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.

Mme Natalia Pouzyreff. L’amendement II-CF1279 vise à élargir le dispositif Coluche aux dons en nature de produits de première nécessité.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Puisque nous sommes tous sur la même longueur d’onde, je propose que nous devenions tous cosignataires de l’amendement II‑CF1560 et que nous l’adoptions. Cela permettrait d’avoir une discussion efficace en séance avec le ministre sur la question.

Mme Olivia Grégoire. Monsieur le rapporteur général, nous approuvons toutes votre amendement, en vertu du principe selon lequel ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et doit donc être écrit tout aussi clairement dans la loi. Je vous remercie de votre initiative. Nombre de femmes, indépendamment des groupes parlementaires, se battent en faveur des femmes sans abri.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nombre d’hommes aussi !

Mme Olivia Grégoire. En effet, et c’est l’occasion de le rappeler. Je remercie également les autres groupes qui soutiendront l’amendement II-CF1560. Cela aurait du sens que nous cosignions unanimement le même amendement.

Les amendements nos II-CF1279, II-CF1188 et II-CF1191 sont retirés.

M. Charles de Courson. Je suis prêt, moi aussi, à retirer mon amendement II‑CF1266 et à soutenir votre amendement, monsieur le rapporteur général, mais êtes-vous d’accord pour inclure de nouveau les DAT ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le problème est que votre amendement vise les organismes « qui luttent contre la pauvreté dans la zone d’emploi du territoire d’une de leur commune d’implantation ». Sur le plan de la définition fiscale, cela pose problème ; je ne peux donc pas intégrer cette notion dans mon amendement. Si vous mainteniez votre amendement, je ne pourrais qu’émettre un avis défavorable.

M. Charles de Courson. Le concept de DAT figure bien dans la stratégie de lutte contre la pauvreté, n’est-ce pas ? Êtes-vous favorable à cette idée, monsieur le rapporteur général ? Après, nous pourrons étudier la manière dont il faut rédiger la disposition.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous verrons cela en séance ; il faut en discuter avec le ministre. Je vous invite à déposer de nouveau votre amendement en vue de la séance.

Mme Christine Pires Beaune. Je voterai, bien entendu, l’amendement de M. le rapporteur général, mais je rejoins M. de Courson : les DAT ne sont absolument pas dans le champ de l’amendement II-CF1560. Nous pourrons donc avoir la discussion sur la question en séance, et je déposerai, moi aussi, un amendement y faisant référence.

Les amendements II-CF1188, II-CF1216, II-CF1266, II-CF1407, II-CF1279 et IICF1191 sont retirés.

La commission adopte lamendement II-CF1560 (amendement II-2528).

Elle examine lamendement II-CF854 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Dans le même esprit que l’ajout qui vient d’être fait concernant les produits d’hygiène, je propose d’étendre le dispositif aux actions et organismes qui favorisent la rénovation énergétique des logements : se loger et pouvoir se chauffer sont des besoins fondamentaux. Compte tenu de notre volonté collective de lutter contre la précarité énergétique, il me paraît important d’apporter cette précision.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce que vous proposez ne relève pas nécessairement du champ du mécénat, même si je comprends votre objectif et le partage. Pour les activités que vous visez, mieux vaut recourir aux outils destinés à aider à la rénovation énergétique, notamment le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), que le Gouvernement a transformé en prime. Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Rien, me semble-t-il, ne s’oppose au développement du mécénat privé pour lutter contre la précarité énergétique – non pas à la place de l’action publique, bien sûr, mais en plus. Je maintiens évidemment mon amendement.

La commission rejette lamendement II-CF854.

Elle en vient à lamendement II-CF55 de M. Julien Dive.

Mme Véronique Louwagie. Il s’agit d’élargir la dérogation de la réduction d’impôt au taux de 60 % à tous les organismes sans but lucratif qui accompagnent des personnes en situation de handicap, notamment les enfants, ou luttent contre l’exclusion sociale. Il y a un véritable problème d’accompagnement de ces personnes, et il est important de soutenir les associations qui œuvrent dans ce sens.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’exclusion sociale et la question du handicap sont inclus dans le champ de l’amendement II-CF1560 que nous venons d’adopter. Je vous invite donc à retirer votre amendement à son profit. Je pense que c’est la bonne solution.

Lamendement II-CF55 est retiré.

La commission est saisie des amendements identiques II-CF165 de Mme Nadia Ramassamy et II-CF951 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Véronique Louwagie. Nous vous proposons également l’extension de la dérogation au taux de 60 % pour tous les dons versés aux organismes d’intérêt général qui procèdent au réemploi ou au recyclage des produits non alimentaires, qui sont, eux aussi, des problèmes importants.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Les domaines que vous mentionnez sont partiellement couverts par l’amendement II-CF1560, auquel je vous invite encore une fois à vous rallier, quitte à déposer un autre amendement en séance relatif à tel ou tel point particulier.

Les amendements identiques II-CF165 et II-CF951sont retirés.

La commission examine lamendement II-CF1011 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. J’ai voulu aborder la très délicate question de l’enseignement supérieur – universités, écoles d’ingénieur et écoles de commerce. Les écoles d’ingénieur et les écoles de commerce, tout particulièrement, sont pénalisées d’une triple façon : d’abord, du fait de cet article, puisque les grandes entreprises, surtout celles qui représentent la plus grande part des dons, vont contribuer moins – grosso modo, cela va diminuer d’un tiers ; ensuite, en raison de la réforme de la taxe d’apprentissage ; enfin, du fait de la contraction des moyens des chambres de commerce, qui a pour conséquence qu’elles ont tendance à réduire les subventions à l’enseignement supérieur. Tout cela contribue à la diminution sensible des moyens de l’enseignement supérieur, ce qui est un véritable problème. Est-ce vraiment ce que l’on souhaite ?

L’enseignement supérieur bénéficie de 15 % à 17 % des dons. Si l’on retient la proportion de 15 %, à raison de 200 millions d’euros, cela représente 30 millions en moins.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai déjà indiqué ce que j’en pensais, notamment à propos de l’enseignement supérieur : je vois mal des entreprises mécènes retirer leurs dons aux écoles qui constituent leur vivier de recrutement. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1011.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements II-CF1490 et II-CF1491 de M. Olivier Serva.

Puis elle adopte lamendement rédactionnel II-CF1552 du rapporteur général (amendement II-2529).

Elle passe à lexamen, en discussion commune, des amendements II-CF330 de Mme Cathy Racon-Bouzon et II-CF1267 de M. Charles de Courson.

Mme Cathy Racon-Bouzon. Les échanges que nous venons d’avoir montrent, me semble-t-il, à quel point nous partageons l’idée selon laquelle la philanthropie fait partie intégrante du contrat social français : en complément de l’action publique, elle est un élément incontournable de notre cohésion sociale. Si le mécénat doit être l’affaire de tous, il est encore, pour l’essentiel, sur le plan financier, le fait des grandes entreprises. En effet, si 96 % des mécènes sont des TPE-PME, celles-ci ne représentent que 22 % des dons ; les 78 % restants sont apportés par les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises. Par ailleurs, selon une étude d’Admical, les entreprises mécènes privilégient, pour 89 % d’entre elles, des projets au niveau local ou régional. Sans opposer, bien sûr, les acteurs économiques de nos territoires, dont l’action est parfaitement complémentaire, il me semble important de déplacer le curseur et de libérer la capacité de don du plus grand nombre, en favorisant la générosité des petites entreprises, pour développer le mécénat local.

L’amendement II-CF330 a donc pour objet de développer le mécénat des TPE‑PME, car celles-ci atteignent plus rapidement que les grandes entreprises la limite des versements, fixée à 5 ‰ du chiffre d’affaires. La loi de finances pour 2019 avait d’ores et déjà instauré une limite alternative fixée à 10 000 euros. Par cet amendement, nous vous proposons d’aller plus loin en augmentant la franchise à 20 000 euros, afin d’envoyer un signal fort aux TPE‑PME, et surtout de réaffirmer clairement notre soutien au développement de la philanthropie partout dans nos territoires. Cette mesure doit donc permettre de développer le mécénat de proximité et de renforcer ainsi l’impact social de la générosité dans nos territoires.

M. Charles de Courson. Je suis plus modéré : je propose, à travers l’amendement II-CF1267, de relever le plafond de 10 000 à 15 000 euros. Les entreprises visées peuvent déduire les dons dans la limite de 5 ‰ de leur chiffre d’affaires, ce qui veut dire que celui-ci est de 200 000 euros : ce ne sont donc pas de grandes entreprises. Si on relevait le plafond à 15 000 euros, cela correspondrait à un chiffre d’affaires de 300 000 euros. On favoriserait ainsi les dons des petites et moyennes entreprises, qui atteignent rapidement le plafond de 5 ‰.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Non seulement l’effet de ces amendements serait limité, mais ce serait un signal favorable envoyé aux PME. Je propose donc que tous les amendements qui relèvent de la même logique soient retirés au profit de celui qui tourne le mieux et qui est le plus favorable, à savoir l’amendement II-CF330 de Mme Racon-Bouzon, étant entendu que les auteurs en deviendraient cosignataires. S’agissant de celui-ci, je m’en remets à la sagesse de la commission, car il envoie un signal adéquat.

M. Charles de Courson. J’accède d’autant plus volontiers à la demande de M. le rapporteur général que l’amendement de notre collègue est plus favorable encore que le mien. J’aimerais bien, toutefois, que le rapporteur général mouille un peu plus la chemise en disant clairement qu’il est favorable à cet amendement, plutôt que de s’en remettre à notre sagesse.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est une sagesse extrêmement bienveillante, qui relève de l’avis favorable. J’espère que cet amendement arrivera en séance et que nous parviendrons à convaincre le ministre.

Mme Sarah El Haïry. Je rejoins l’avis du rapporteur général. Notre amendement II‑CF1181 à venir participe du même esprit, puisque nous proposons de relever le plafond à 20 000 euros.

M. le président Éric Woerth. Je veux bien qu’on change tous les ans le plafond, mais l’année prochaine, à coup sûr, vous aurez un débat pour le porter à 25 000 euros, voire à 30 0000.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’année prochaine, il n’y aura pas d’article 50.

M. le président Éric Woerth. Certes, mais il y aura des amendements portant article additionnel : il y en a toujours.

Lamendement II-CF1267 est retiré.

La commission adopte lamendement II-CF330 (amendement II-2530).

Lamendement II-CF1181 de Mme Sarah El Haïry est retiré.

La commission en vient à lamendement II-CF331 de Mme Cathy Racon-Bouzon.

Mme Cathy Racon-Bouzon. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec celui qui vient d’être adopté, pour relever également le plafond de l’obligation déclarative de dons et de versements, qui avait été instaurée l’année dernière.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce n’est pas un amendement de cohérence, et je ne pense pas qu’il soit utile de l’adopter.

La commission rejette lamendement II-CF331.

Elle examine ensuite lamendement II-CF1447 de Mme Dominique David.

Mme Dominique David. Cet amendement concerne les contreparties prévues dans le contrat entre le mécène et le bénéficiaire, par exemple la mise à disposition de billets d’entrée, de salles pour l’organisation de manifestations et d’événements de relations publiques – tout ce qui contribue à une politique d’image, dans laquelle nous savons que les entreprises investissent, car cela les intéresse plus qu’un quelconque avantage fiscal. Ces contreparties font l’objet d’une tolérance de l’administration fiscale, dans la limite de 25 % des dons. Je propose de l’inscrire dans la loi pour conforter à la fois les mécènes et les structures bénéficiaires.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement aurait pour conséquence de figer le mécénat dans une logique qui ne devrait pas être la sienne, à savoir l’attente d’avantages accordés en retour du don. Le mécénat devrait être essentiellement désintéressé. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1447.

Elle adopte ensuite lamendement de coordination II-CF1561 du rapporteur général (amendement II-2531).

Puis elle passe à lamendement II-CF1553 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je demande, à travers cet amendement, la remise d’un rapport, comme je l’avais déjà annoncé lorsque nous avions travaillé sur le sujet : je veux tout simplement m’assurer que, s’agissant des dons alimentaires, il n’y a pas d’abus découlant des obligations imposées par la loi Garot en matière de gaspillage alimentaire. Je ne voudrais pas qu’on retrouve dans l’assiette du mécénat des choses qui seraient des obligations légales par ailleurs : ce serait un détournement du mécénat. Pour m’en assurer, je demande la remise d’un rapport au Parlement. Ainsi, nous serions éclairés sur la question.

M. le président Éric Woerth. J’ai l’impression que vous avez utilisé en totalité votre droit de tirage en matière de demandes de rapport, monsieur le rapporteur général…

M. Charles de Courson. Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mes chers collègues, mais dans ma circonscription, les Restos du Cœur m’ont alerté sur des détournements du dispositif que nous avions mis en place concernant les dons d’articles dont les enseignes de la grande distribution n’ont plus l’usage. Certaines personnes arrivent à l’antenne des Restos du Cœur et demandent aux responsables de signer pour l’ensemble des produits qu’elles leur apportent, sans en indiquer la valorisation financière. Chez moi, les Restos du Cœur refusent de signer. D’ailleurs, ils sont incapables de faire un pointage exact – par exemple, en signalant les produits abîmés. Après, les personnes en question vont voir l’administration fiscale, valorisent les dons au niveau de leur tarif de marché. Ainsi s’enrichissent certains, grâce aux dons, ce qui constitue un détournement du dispositif.

Il faut que le système soit modifié, car il ne fonctionne pas. Je suis allé voir, on m’a montré les papiers : il y a vraiment un problème. La question est de savoir comment on le résoudra une fois que le rapport aura été remis, quelles solutions on trouvera pour éviter des détournements liés soit aux prix, soit au fait que les produits livrés ne valent rien, alors qu’ils permettent de bénéficier d’un crédit d’impôt. Il faut donc vraiment que nous mettions notre nez là-dedans.

La commission adopte lamendement II-CF1553 (amendement II-2532).

Puis elle adopte larticle 50 ainsi modifié.

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Après l’article 50

La commission examine, en discussion commune, lamendement II-CF1069 de Mme Christine Pires Beaune, les amendements identiques II-CF430 de M. Stéphane Peu, IICF636 de M. François Pupponi et II-CF718 de Mme Sylvia Pinel, lamendement II-CF773 de Mme Stéphanie Do, les amendements identiques II-CF1277 du président Éric Woerth, IICF444 de Mme Lise Magnier, II-CF920 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1047 de Mme Sylvia Pinel, ainsi que lamendement II-CF1335 de Mme Lise Magnier.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II-CF1069 concerne le prêt à taux zéro (PTZ) dans les zones non tendues : il s’agit de rétablir la disposition qui a été supprimée dans le PLF 2018, car elle serait utile dans les territoires ruraux et périurbains, notamment dans les villes moyennes.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’amendement II-CF430 est extrêmement important. M. Peu, son premier signataire, s’est fait le porte-parole de notre groupe, qui est unanime pour demander que l’on revienne sur la disposition consistant à réserver le PTZ aux zones A et B1, et à le supprimer pour les zones non tendues, c’est-à-dire les zones B2 et C. Cette limitation a pour conséquence d’exclure du financement une immense partie du territoire – 93 % des communes métropolitaines –, sachant par ailleurs que le prêt à taux zéro est le principal dispositif de financement de l’accession sociale à la propriété.

La diminution du nombre de PTZ accordés dans ces territoires a déjà commencé ; elle a un impact très fort sur la construction. Au recentrage progressif du dispositif sur le neuf et les zones dites tendues, s’ajoutent le dispositif Pinel dans ces mêmes zones et la suppression de l’APL accession : ce sont autant de coups majeurs portés à la construction et à la réservation de logements dans l’immense majorité des territoires.

Il convient donc de maintenir au-delà du 31 décembre 2019 l’accès à ce financement pour les accédants à la propriété installés dans les territoires ruraux ou les villes moyennes, ce qui participera également à la redynamisation et à la revitalisation de ces villes, ainsi que des centres-bourgs. Je peux vous dire que l’exclusion de ces territoires est très mal vue : leurs habitants se sentent, une fois de plus, abandonnés et ignorés.

Mme Sylvia Pinel. J’ajouterai quelques arguments à ceux qui ont été donnés par mes collègues qui viennent d’évoquer la nécessité de revenir au prêt à taux zéro tel qu’il existait avant le 1er janvier 2018. D’abord, la mesure en question a des conséquences en termes de croissance et d’emploi dans de nombreux territoires, notamment ruraux et périurbains. Les professionnels nous font part régulièrement de leur inquiétude. Ensuite, nous avons besoin d’un outil qui permette l’accession à la propriété, pour désengorger un certain nombre de parcs sociaux. L’accession à la propriété permet justement de fluidifier le parcours résidentiel, qui est actuellement bloqué. Enfin, le dispositif permettait de favoriser la mixité sociale – notion dont on n’entend jamais parler lorsqu’il est question de politique du logement, et c’est dommage. Or on a besoin de soutenir à la fois le logement social, l’investissement locatif dans les zones tendues, mais aussi l’accession à la propriété, notamment l’accession sociale à la propriété. Pour toutes ces raisons, mon groupe a déposé l’amendement II-CF718 ; l’amendement II-CF1047 participe du même esprit.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le droit actuel est issu de la loi de finances pour 2018, qui a resserré le bénéfice du PTZ sur son cœur de métier, c’est-à-dire les zones qui se caractérisent par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement – pour dire les choses clairement, ce que l’on appelle les zones tendues.

Je suis défavorable à la prorogation du PTZ dans le neuf pour l’ensemble du territoire, parce que le PTZ n’est pas un outil d’aménagement du territoire : il favorise l’accession à la propriété. De fait, il n’a pas vocation à soutenir la construction de logements neufs sur l’ensemble du territoire. En revanche, il aide les ménages à acquérir un logement dans les zones où les prix sont les plus élevés et où les logements sont les moins nombreux. Dans ce cas, le PTZ pour le neuf soutient la demande, donc l’offre de logements dans ces zones.

Dans les zones rurales ou dans les zones détendues, en 2020 et en 2021, les ménages pourront bénéficier d’un PTZ pour l’acquisition d’un logement ancien – ce qui signifie de plus de deux ans : ce n’est pas si vieux que cela –, à condition de réaliser des travaux. Le PTZ n’est donc pas supprimé dans ces zones ; il peut être mobilisé pour acquérir un logement ancien, ce qui participe à la rénovation des centres-bourgs. Certes, les logements neufs ne pourront pas en bénéficier, mais une dérogation existera pour les communes qui sont couvertes par un contrat de redynamisation de site de défense (CRSD) – elles sont assez nombreuses, notamment dans les zones touchées par les problèmes que vous soulevez.

Par conséquent, l’extinction progressive du PTZ me semble être un dispositif équilibré, alors même, je le rappelle, que le PTZ a coûté 850 millions d’euros en 2018 en un crédit d’impôt sur les bénéfices octroyé aux banques qui les distribuent.

Mme Christine Pires Beaune. Ce n’est pas très fréquent, mais je ne suis pas d’accord avec M. le rapporteur général. En fait, en réservant le PTZ à une certaine catégorie d’achats dans une zone bien particulière, vous avez créé deux catégories de citoyens. Je trouve cela dommage, notamment pour l’accès au logement, parce qu’il y avait évidemment des conditions pour accéder au PTZ.

Mme Sylvia Pinel. Moi non plus je ne suis pas d’accord avec le rapporteur général. On voit bien l’impact positif, notamment sur l’accession sociale à la propriété, du PTZ dans le neuf et dans l’ancien, tel qu’il existait avant le coup de rabot.

J’appelle également votre attention, monsieur le rapporteur général, sur le fait qu’un certain nombre de territoires connaissent une augmentation démographique extrêmement forte. C’est le cas, par exemple, de la région Occitanie. Certes il est important de rénover le bâti existant ; je m’étais d’ailleurs battue pour qu’on élargisse le prêt à taux zéro à l’ancien, justement pour encourager les rénovations. Mais, dans certains territoires, la rénovation de l’ancien ne suffit pas. Qui plus est, on ne dispose d’aucun autre outil pour permettre l’accession à la propriété dans le neuf. Je suis donc au regret de vous dire, monsieur le rapporteur général, que, de mon point de vue, vos arguments ne tiennent pas.

M. Jean-Paul Dufrègne. On ne peut pas se réfugier derrière la rénovation de l’ancien, à laquelle je suis tout à fait favorable, du reste, notamment dans les centres bourgs. Mais il faut trouver un équilibre. On ne peut pas réserver aux territoires ruraux la rénovation de l’ancien et ne proposer aucun dispositif permettant d’y construire aussi du neuf. En faisant cela, on resserre ces territoires sur une seule option. Selon moi, c’est vraiment une politique en faveur des métropoles. C’est un mauvais coup porté aux territoires ruraux. Ne vous étonnez pas après que certains réagissent.

La commission rejette successivement lamendement II-CF1069, les amendements identiques II-CF430, II-CF636 et II-CF718, lamendement II-CF773, les amendements identiques II-CF1277, II-CF444, II-CF920 et II-CF1047, ainsi que lamendement II-CF1335.

Elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF24 de M. Lionel Causse, II-CF1487 de M. Daniel Labaronne et II-CF1111 de Mme Sandra Marsaud.

M. Lionel Causse. L’amendement II-CF24 vise à étendre le dispositif du PTZ aux zones couvertes par une opération de revitalisation de territoire (ORT). Cet amendement poursuit deux objectifs : d’une part, intégrer et accompagner parfaitement la volonté du Gouvernement, à travers les ORT, créées par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) ; d’autre part, lutter contre l’étalement urbain et permettre une densification. Les ORT permettent de renforcer la mixité. Qui plus est, ces opérations sont préparées et voulues par les élus locaux.

M. Daniel Labaronne. L’amendement II-CF1487 a pour objet de maintenir l’accès au PTZ pour les acquéreurs de logements neufs situés en territoire rural, dès lors que le logement se trouve dans un centre-ville couvert par une convention d’opération de revitalisation de territoire. L’ORT est un outil, créé par la loi ELAN, qui est à la disposition des collectivités locales pour lutter contre la dévitalisation des centres-villes en facilitant notamment la rénovation du parc de logements. La proposition que je formule figurait dans le rapport « Ruralité : une ambition à partager – 200 propositions pour un agenda rural ».

Mme Sandra Marsaud. L’amendement II-CF1111 porte sur le même sujet : il s’agit de défendre l’idée du prêt à taux zéro pour les opérations de revitalisation de territoire. Comme l’ont rappelé les orateurs précédents, cela aurait plusieurs vertus, notamment celle de compléter le dispositif dit Denormandie, qui concerne les locations dans les territoires dévitalisés, mais aussi, bien sûr, de renforcer l’accession à la propriété, sans oublier la reconquête des centres par les jeunes couples, la lutte contre l’étalement urbain et l’artificialisation des sols. Ce faisant, on accompagne les politiques déterminées par les élus qui défendent leurs quartiers à revitaliser : on est vraiment dans le concret.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il est ici question des zones ORT, qui visent avant tout la dimension commerciale, tandis que le PTZ vise à développer l’accession à la propriété. La classification en zone ORT, qui est effectivement un outil procuré par la loi ELAN, a pour objectif d’éviter la dévitalisation des centres-villes. Or certaines ORT sont situées en zone tendue, par exemple Ajaccio, Avignon et Bastia, et peuvent déjà bénéficier d’un PTZ. Pour ces raisons, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, avis défavorable.

M. Robin Reda. Thibault Bazin n’a pas pu être présent pour défendre son amendement II-CF1316. Je me permets donc de prendre la parole pour soutenir cette possibilité de conserver le PTZ en zone ORT. J’entends bien ce que dit M. le rapporteur général, mais la revitalisation commerciale des centres-villes est le fait des consommateurs. Or ces derniers viennent parce qu’il y a un habitat sur place et une zone de chalandise. Une des causes de la désertification des centres-villes réside dans le fait que l’habitat ancien dégradé est fui, notamment par les classes moyennes, qui ont le pouvoir d’achat pour vivifier le commerce local. Tout cela se tient donc, et il est évidemment nécessaire de mener une politique de l’habitat.

Mme Sandra Marsaud. Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le rapporteur général, ce que vous dites est faux : comme on vient de le dire, cela concerne aussi des zones dévitalisées. Les ORT, en fait, traduisent l’idée d’un nouveau zonage qui pourrait tout à fait remplacer les zones A, B et C, sachant qu’aux termes de la loi ELAN, les ORT ne sont pas seulement dans les territoires en cœur de ville : les élus des zones périurbaines, qu’elles soient proches des métropoles ou pas, peuvent en définir ; cela relève vraiment de leur choix. En Charente, nous avons Cognac et Angoulême, mais il y en a dans tous les territoires, dans les Landes aussi bien que dans l’Est.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je tiens à préciser que l’habitat ancien dégradé est toujours dans le périmètre du PTZ ; c’est le neuf qui en est sorti. Or je rappelle qu’un logement est considéré comme ancien au bout de deux ans. L’argument concernant l’habitat ancien dégradé ne tient donc pas.

M. Daniel Labaronne. L’amendement II-CF1487 porte sur la question des logements neufs, mais pas du tout dans les zones tendues. Il vise les zones rurales détendues, dans lesquelles il est nécessaire de revitaliser les centres-bourgs, dans le cadre d’une opération de revitalisation de territoire. Je ne sais pas si nous parlons de la même chose.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je parlais des zones détendues, en réponse à une remarque qui m’avait été faite.

M. François Pupponi. En ce qui concerne le PTZ dans le neuf, il faudrait que la commission des finances fasse une évaluation. Depuis qu’on l’a arrêté, combien d’accédants à la propriété a-t-on perdu ? Combien l’État a-t-il perdu de recettes – car les achats entraînent des recettes. Nous, nous pensons que c’est une erreur de l’avoir supprimé, mais il faut regarder, sur le plan économique, et en termes d’accession à la propriété, si nous avons tort ou raison. Ne pourrait-on pas faire une mission flash pour voir ce qu’il en est ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Monsieur Pupponi, vous avez tout à fait raison : c’est la raison pour laquelle le Gouvernement a demandé un rapport à l’Inspection générale des finances (IGF), qui sera publié dans quelques jours.

M. François Pupponi. On sait ce qu’il en est des rapports de l’IGF !

La commission rejette successivement les amendements II-CF24, II-CF1487 et IICF1111.

Elle en vient aux amendements identiques II-CF437 de M. Stéphane Peu et IICF637 de M. François Pupponi.

M. Jean-Paul Dufrègne. S’agissant toujours du PTZ, cet amendement vise à permettre l’accès à ce financement pour les accédants à la propriété ayant signé un contrat de location-accession, y compris en 2020 et 2021, ou un contrat de bail réel solidaire. Cela participera également à la redynamisation et à la revitalisation des villes et centres-bourgs, dont on parle tant et pour lesquels on fait si peu.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je comprends la logique de ces amendements et, comme je voudrais que nous ayons une discussion en séance sur le sujet dans un sens favorable vis-à-vis du Gouvernement, je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission rejette les amendements identiques II-CF437 et II-CF637.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF439 de M. Stéphane Peu et II-CF638 de M. François Pupponi, ainsi que lamendement II-CF823 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. L’amendement II-CF823 a pour objet de faire en sorte que le PTZ permettant des opérations de prêt social location-accession (PSLA) ne soit pas soumis à des obligations de localisation, ce qui revient à l’élargir.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Défavorable aux amendements identiques. S’agissant de l’amendement II-CF823, qui s’inscrit dans la logique de ce qui précédait, sagesse très bienveillante.

La commission rejette successivement les amendements identiques II-CF439 et IICF638 et lamendement II-CF823.

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Article additionnel après l’article 50
Bornage temporel de certaines dépenses fiscales relevant de la catégorie des « trous noirs fiscaux »

La commission examine lamendement II-CF1554 du rapporteur général, faisant lobjet des sous-amendements II-CF1568 et II-CF1567 de Mme Sarah El Haïry.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement II-CF1554 vise à borner dans le temps, aux fins d’évaluation, certaines dépenses fiscales qui sont qualifiées de « trous noirs », c’est-à-dire, je le rappelle, sur lesquelles aucune information n’est disponible – ni le nombre de bénéficiaires ni le coût –, et qui ne sont pas limitées dans le temps.

Mme Sarah El Haïry. Je souhaite appeler votre attention sur les organismes à but non lucratif qui reçoivent des legs et des dons. Certaines personnes donnent leur maison ou lèguent un patrimoine immobilier pour créer un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) associatif. Notre majorité a exonéré ces dons et legs des droits de mutation. Par conséquent, monsieur le rapporteur général, ce que vous proposez suscite l’inquiétude des acteurs et des associations : si une association n’a pas les moyens de payer ces droits, elle est dans l’obligation de vendre le bien immobilier, et l’EHPAD associatif voulu par le donateur ne voit pas le jour, ce qui est bien dommage.

C’est pourquoi je soumets à votre choix deux sous-amendements, monsieur le rapporteur général. Le premier vise à supprimer les alinéas 15 à 17. Le second a pour objet de borner le dispositif – car je comprends et partage votre souhait de l’analyser –, mais en prévoyant sa fin en 2050, et non en 2023. Ce faisant, on envoie un signal, mais sans fragiliser les associations. Un legs, cela prend dix ans pour se concrétiser, monsieur le rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Votre premier sous-amendement ne porte pas sur l’ensemble de la dépense fiscale à laquelle vous faites référence, mais uniquement la moitié. Si votre objectif est de viser toute cette dépense fiscale, je vous invite à déposer un autre sous-amendement en séance. Reste la question du bornage du dispositif. Je suis prêt à ce que nous en discutions avec le Gouvernement en séance mais, en tout état de cause, je suis opposé à ce que l’on renvoie la fin du dispositif à 2050.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur général, sur le fond de la démarche, je suis tout à fait d’accord avec vous. Toutefois, il se trouve que je suis à l’origine de l’exonération des droits de mutation à titre gratuit des dons et legs faits à certains organismes publics. Un jour, j’ai découvert que, quand on faisait un legs à une commune, à un département ou à un hôpital, il fallait payer des droits de succession comme si le legs était fait à un tiers, c’est-à-dire à hauteur de 60 %, ce qui était aberrant. C’est pourquoi, à l’unanimité, toutes tendances confondues, nous avons considéré qu’il fallait faire sauter ce dispositif et prévoir une exonération de droits en cas de legs ou de don à une collectivité publique. Je ne voudrais pas que votre amendement soit interprété comme une remise en cause du dispositif.

En effet, dans l’exposé des motifs, vous relevez qu’il a obtenu du comité d’évaluation « une note nulle dans la mesure où le dispositif n’était pas incitatif ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Bien sûr qu’il est incitatif ! Je vous le dis franchement, monsieur le rapporteur, je ne partage pas votre opinion sur ce point.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La note nulle en question a été donnée par l’Inspection générale des finances. Je me suis contenté de le rappeler. Par ailleurs, quand je demande le bornage, je l’ai bien précisé tout à l’heure, je ne demande pas la suppression : il s’agit de procéder à une évaluation. À l’heure actuelle, le dispositif n’est pas évalué, comme l’ensemble de ceux qui sont visés par cet amendement. Bornage signifie évaluation, et non pas suppression.

Mme Sarah El Haïry. Mon premier sous-amendement comporte peut-être une erreur de rédaction ; je le retire et le déposerai de nouveau en séance. En ce qui concerne le bornage, plus il est lointain mieux c’est – 2023, c’est extrêmement angoissant pour les associations et les personnes qui veulent donner. Cela dit, je comprends votre intention. Rendez-vous, donc, en séance.

Les sous-amendements II-CF1568 et II-CF1567 sont retirés.

La commission adopte lamendement II-CF1554 (amendement II-2533).

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Après l’article 50

Elle est saisie de lamendement II-CF1456 de M. Hervé Pellois.

M. Hervé Pellois. Cet amendement vise à étendre le suramortissement en faveur de la robotique, que nous avons mis en place l’an passé pour l’industrie, aux activités agricoles. Ce dispositif permettrait aux agriculteurs de s’engager dans la voie d’une production agricole plus respectueuse de l’environnement, notamment grâce aux outils de désherbage mécanique. Ce serait en totale cohérence avec la politique agricole que nous cherchons à conduire, c’est‑à-dire utilisant moins de chimie.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le débat a déjà eu lieu en première partie ; je maintiens mon avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1456.

Elle examine ensuite lamendement II-CF1281 de Mme Lise Magnier.

Mme Lise Magnier. Il s’agit d’accompagner la transition écologique dans la profession agricole. En première partie, nous avons supprimé l’exonération pour les engins fonctionnant au gazole non routier (GNR) pour une partie des professionnels qui en bénéficiaient, et on peut imaginer que, dans les années à venir, cette niche fiscale, dite marron, sera supprimée pour ceux qui en bénéficient encore. L’objectif de cet amendement est tout simplement d’anticiper en proposant un mécanisme de suramortissement, comparable à celui que nous avons créé dans le cadre de la suppression de l’exonération sur le GNR, pour inciter nos agriculteurs à investir dans des agroéquipements plus respectueux de l’environnement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est un amendement que nous avons déjà examiné. Je rappelle que la déduction pour épargne de précaution (DEP), qui vient d’être créée, permet aux exploitants de réaliser plus facilement tous les investissements qu’ils souhaitent. En outre, certains éléments de votre amendement sont trop imprécis. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1281.

Elle en vient à lamendement II-CF1455 de M. Hervé Pellois.

M. Hervé Pellois. Cet amendement vise à aligner le régime fiscal des fusions de sociétés civiles agricoles sur celui des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, afin d’encourager le regroupement des agriculteurs, dans le but d’améliorer leurs conditions de travail et de rendre leurs exploitations plus résilientes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour les mêmes motifs que l’an dernier et qu’en première partie, avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1455.

Elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF954 et II-CF955 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Ce sont deux amendements très importants. M. le rapporteur général connaît très bien le sujet : nous en avons discuté bien des fois. Il s’agit d’une partie de la fiscalité en Corse, à savoir celle des zones de développement prioritaire (ZDP). Ce dispositif d’exonération d’impôt pour les entreprises, qui est entré en vigueur en 2019, a eu un effet très bénéfique sur la création d’entreprises, et sera plus certainement encore bénéfique pour leur pérennité, donc pour la vitalité économique de la Corse. Les deux amendements visent à augmenter la durée du dispositif en l’étendant à 2021.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme je l’ai déjà dit, les zones de développement prioritaire ont moins d’un an d’existence : il n’y a donc pas encore d’évaluation. Il me semble logique de proroger le dispositif seulement une fois qu’il aura été évalué, d’autant que nous avons le temps, puisqu’il se termine à la fin de l’année prochaine. Nous aurons tous les éléments à ce moment-là pour juger. Je vous demande de retirer vos amendements. À défaut, avis défavorable.

M. Charles de Courson. Nous ne disposons certes pas des éléments d’évaluation pour l’instant, mais si nous ne faisons rien, la disposition cessera de s’appliquer à la fin de l’année 2020. Nous aurons à décider de son maintien ou de sa suppression deux ou trois mois avant la fin du dispositif, ce qui n’est pas de bonne politique. Je soutiens donc la demande de M. Castellani : si le Gouvernement n’est pas capable de nous fournir une évaluation, nous devons lui dire que nous prolongeons d’un an, de manière à prendre le temps de juger. Sinon, comme d’habitude, nous aurons les éléments au dernier moment. Or, si les investisseurs et créateurs d’entreprise ne savent pas où ils vont, ils décideront de geler toutes les opérations. Dans la logique de ce que nous avons toujours défendu à la commission des finances, il faudrait voter l’amendement II-CF954.

M. Michel Castellani. Les arguments de Charles de Courson sont de bon sens. Le débat sur le sujet est récurrent. À chaque fois, on nous oppose des arguments et des contre‑arguments ; moi, je veux aller au fond des choses. Nous ne réclamons pas des avantages indus. Nous voulons simplement que soient prises en compte les difficultés spécifiques que connaissent les entreprises dans leur fonctionnement quotidien en Corse, liées à des surcoûts de toutes sortes, à l’importation comme à l’exportation. Je ne parle même pas de la situation globale de la Corse, notamment dans le domaine social, qui mériterait d’être améliorée. Or nous pouvons le faire grâce au dispositif visé : il fonctionne, et il est donc tout à fait logique que nous le soutenions.

Non seulement je ne retire pas mes amendements, mais je demande à M. le rapporteur général, qui connaît le sujet, de soutenir notre démarche.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous venons de proroger le dispositif des jeunes entreprises innovantes, qui prend fin dans très peu de temps. Le dispositif dont il est question a été créé par la loi de finances de 2019, ce qui signifie qu’il est encore plus jeune. Il ne me semble pas aberrant d’attendre d’avoir des éléments d’évaluation, d’autant qu’ils montreront les articulations entre les aides déjà existantes en matière de zonage. Cette évaluation peut sembler tardive, mais elle est cohérente, par exemple, avec l’évaluation de la fin des zones de revitalisation rurale (ZRR), prévue pour la fin de l’année 2020.

La commission rejette successivement les amendements II-CF954 et II-CF955.

Elle est saisie de lamendement II-CF1448 de M. Xavier Pellois.

M. Hervé Pellois. Cet amendement propose de réviser la fiscalité appliquée aux travaux à façon en agriculture, afin de favoriser le maintien de la compétitivité et de la transmission des exploitations.

J’avais déjà défendu cet amendement l’année dernière. J’ai rencontré des éleveurs confrontés à de réelles difficultés de transmission de leur exploitation. En effet, certains élevages sont très vieillissants en matière de travail à façon. L’avenir de plusieurs filières, comme celle du veau de boucherie, est en jeu.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour la troisième fois sur cet amendement, mon avis est défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1448.

Article additionnel après l’article 50
Extension du dispositif de lissage de limposition de certains revenus agricoles aux éléments de stocks bloqués

Elle passe à lamendement II-CF1449 de M. Xavier Pellois.

M. Hervé Pellois. L’année dernière, nous avions facilité le passage à l’impôt sur les sociétés pour les entreprises agricoles. Cet amendement, validé par le ministère, propose d’élargir le champ d’application du mécanisme de paiement étalé de l’impôt sur le revenu aux frais de fermage des avances aux cultures et aux charges afférentes aux stocks de produits ou d’animaux.

Suivant lavis favorable du rapporteur, la commission adopte lamendement IICF1449 (amendement II-2534).

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Article additionnel après l’article 50
Plafonnement et bornage temporel de limposition des revenus des artistes et sportifs selon une moyenne pluriannuelle

Elle examine lamendement II-CF1555 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement ne propose pas de supprimer une dépense fiscale, mais prévoit une rationalisation mesurée et différée d’une niche qui engendre de nombreuses difficultés. Il s’agit du mécanisme optionnel d’imposition des revenus des artistes et sportifs selon une moyenne pluriannuelle. Nous disposons d’une évaluation exhaustive et très sévère du comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales.

Cet amendement ne remet pas en cause le principe du mécanisme, mais son application généralisée. En l’état, comme le démontre l’évaluation, ce mécanisme profite essentiellement aux artistes et sportifs percevant de très hauts revenus, sans bénéficier à ceux pour lesquels il serait le plus utile. Je cite l’évaluation : « il profite surtout aux artistes touchant des revenus importants […]. Il nest pas adapté au travailleur culturel moyen […]. Il induit un pur effet daubaine […]. Le dispositif crée une iniquité par rapport aux autres contribuables […]. Il favorise les comportements de pure optimisation. » L’évaluation conclut au réexamen de ce dispositif.

Je propose de fixer, pour encadrer sa mise en œuvre, une borne haute à la deuxième tranche du barème de l’impôt sur le revenu, soit 73 369 euros par an en moyenne sur la période choisie – trois ou cinq ans. Cette moyenne équivaut à un revenu mensuel de plus de 6 000 euros, ou à un revenu nul pendant deux ans mais égal à 220 000 euros la troisième année, ou encore à un revenu nul pendant quatre ans mais égal à 360 000 euros la cinquième année. En d’autres termes, ce plafond me semble encore relativement élevé et raisonnable concernant ce dispositif, que je qualifierais de trou noir.

Mme Olivia Grégoire. J’entends l’exposé des motifs, mais je crains que cet amendement n’ait un effet contre-attractif pour certains artistes et sportifs. Comment pouvons-nous articuler cet amendement à notre action en matière de lutte contre l’évasion fiscale ? Je crains que les artistes et les sportifs, ne bénéficiant plus de ce dispositif, ne s’installent et ne payent leurs impôts ailleurs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est précisément le mécanisme qui crée de l’optimisation fiscale. Du reste, l’amendement prévoyant une application en 2021, les contribuables concernés disposent d’un temps d’adaptation suffisant.

Il s’agit de mettre fin à l’optimisation fiscale autorisée par ce mécanisme, qui est utilisé, en raison de leurs très hauts revenus, par des personnes faisant appel à des avocats fiscalistes spécialisés. L’amendement vise à rétablir le droit commun. Nous mégotons parfois sur des mesures pluriannuelles pour des revenus assez bas, notamment pour des professions agricoles. Compte tenu des revenus concernés ici, je n’imagine pas que vous souteniez un dispositif favorisant l’optimisation fiscale des contribuables les plus riches. Comme l’a dit le ministre Franck Riester, lorsque l’argent public est en jeu, il convient de regarder pour quelle mission d’intérêt général il est utilisé. La dimension de l’intérêt général me semble ici douteuse.

Mme Émilie Cariou. Il ne s’agit pas d’un mécanisme d’exonération, mais d’un mécanisme d’étalement des revenus. En effet, les revenus des sportifs et des artistes fluctuent très fortement d’une année sur l’autre, et le dispositif ne concerne pas uniquement des artistes très fortunés. Vous trouverez certes des sommes importantes en volume, mais elles ne sont pas représentatives. Dans le secteur de la création artistique, il n’est pas rare de passer plusieurs années sans revenu, après avoir perçu ponctuellement une somme importante.

L’évaluation que vous évoquez avait particulièrement pointé des problèmes de sortie du territoire, notamment de la part de sportifs, qui quittent la France avant d’avoir payé le solde de leurs impôts. Il aurait été préférable de se concentrer sur un dispositif visant les abus constatés lors de la sortie du dispositif. Je suggère de reprendre cette discussion en séance publique avec le ministre.

L’évaluation visait les personnes qui quittent le pays ; cet amendement risque d’en dissuader d’autres d’y venir. Or ce dispositif a le mérite d’attirer des talents en France.

M. le président Éric Woerth. Le rapporteur propose un seuil, qui couvre les revenus moyens.

Mme Émilie Cariou. Il s’agit d’un bornage.

M. Charles de Courson. Je souscris aux propos de Mme Cariou : il s’agit d’un mécanisme non pas d’exonération mais de lissage dans le temps, qui me semble tout à fait logique. Par ailleurs, nous souffrons d’une moindre attractivité par rapport aux pays voisins. Or il est relativement facile, pour un artiste, de se délocaliser. Souvenez-vous de Johnny Halliday, qui s’était installé en Suisse en oubliant qu’il devait y résider au moins six mois pour être considéré comme résident fiscal ; il a dû verser une dizaine de millions d’euros – soit une année de revenus – au titre d’un redressement fiscal.

Il me semble que l’idée de M. le rapporteur général n’est pas bonne. Il faut s’attaquer aux dispositions spécifiques mais pas à l’étalement dont bénéficient certains artistes dans le traitement de leurs revenus.

Mme Christine Pires Beaune. Je soutiens l’amendement de M. le rapporteur général, qui ne met pas fin à un dispositif mais instaure un plafond de revenus moyens.

Néanmoins, les propos de Mme Cariou sont justes : il serait judicieux de réfléchir à un mécanisme anti-abus pour certaines professions.

M. le président Éric Woerth. Le plafond est-il annuel ou pluriannuel ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit du montant annuel moyen des revenus sur la période choisie.

La commission adopte lamendement II-CF1555 (amendement II2535).

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Article additionnel après l’article 50
Suppression de la condition dinscription au registre du commerce et des sociétés dans le cadre de la location meublée à titre professionnel

Elle passe à lamendement II-CF1556 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement a pour but de tirer les conclusions d’une décision du Conseil constitutionnel. Il propose la suppression de la condition tenant à l’inscription au registre du commerce des sociétés (RCS) pour la location meublée à titre professionnel : cette condition n’était en effet pas opérante.

La commission adopte lamendement II-CF1556 (amendement II2536).

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Après l’article 50

Elle en vient à lamendement II-CF1526 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit d’aménager l’assiette du crédit d’impôt cinéma, en limitant à 800 000 euros la prise en compte des rémunérations des réalisateurs et en plafonnant les dépenses de restauration et de transport par décret.

La commission rejette lamendement II-CF1526.

Elle examine lamendement II-CF1558 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Les impôts de production grèvent une partie de la compétitivité du pays. Nous proposons qu’une fraction du total de ces impôts fasse naître un crédit d’impôt au titre de l’impôt sur les sociétés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je vous demande le retrait de cet amendement d’appel au profit d’une discussion en séance publique avec le ministre.

Mme Christine Pires Beaune. J’appelle l’attention sur les impôts de production. Un bon diagnostic est indispensable pour apporter le remède adéquat. Nous devons avant tout nous mettre d’accord sur ce qu’est un impôt de production, ce qui n’est pas encore le cas.

Les impôts de production représentent un peu plus de 70 milliards d’euros, qui aboutissent pour une partie dans les caisses des collectivités territoriales. La concertation à leur sujet doit donc avoir lieu aussi avec ces dernières.

Mme Olivia Grégoire. Ce matin, la secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher a rappelé le travail en cours du Gouvernement pour diminuer l’impôt de production produisant le plus de distorsions, à savoir la C3S. Elle a aussi évoqué une possible trajectoire de baisse des impôts de production entre 2021 et 2025. Le Gouvernement semble donc en train d’activer les choses, notamment dans le cadre du pacte productif.

M. le président Éric Woerth. Le Gouvernement est toujours d’accord concernant ce point, ce qui ne l’empêche pas d’agir à rebours.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, j’en appelle à votre prudence. La C3S a commencé à être supprimée par la hausse des seuils, mais cette hausse a été arrêtée. Aujourd’hui, qui bénéficierait de la suppression ? Ce sont essentiellement les banques et les assurances. S’agit-il d’une priorité pour le pays ?

Lamendement II-CF1558 est retiré.

Article additionnel après l’article 50
Prorogation du crédit dimpôt en faveur des métiers dart

La commission est saisie des amendements identiques II-CF691 de M. Fabrice Brun, II-CF921 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1387 de M. Philippe Huppé.

M. Fabrice Brun. J’associe Mme Véronique Louwagie à cet amendement et je reprends une proposition de M. Philippe Huppé, auteur d’un excellent rapport sur les métiers d’art. Celui-ci préconise de maintenir et de stabiliser le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art au-delà de l’année 2019. La dynamique des projets que nous constatons dans nos circonscriptions ne fait que renforcer cette conviction, au service de la création et de l’emploi.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’Institut national des métiers d’art a sondé les professionnels concernés des entreprises du patrimoine vivant. Il souligne l’intérêt de ce dispositif pour favoriser le rayonnement et l’excellence d’un secteur français davantage reconnu à l’étranger. Le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art a été créé en 2006 ; il est donc relativement récent dans le cadre fiscal. Son maintien au moins jusqu’en 2022 est l’objet de cet amendement.

M. Philippe Huppé. Je souscris aux propos de M. Brun et de Mme Dalloz. Il serait judicieux de proroger d’au moins trois ans ce crédit d’impôt, qui a bénéficié à 1 588 entreprises, leur permettant d’innover, d’embaucher et de transmettre leur savoir-faire.

M. Joël Giraud, rapporteur général. À ses débuts, ce crédit d’impôt n’avait pas fait la preuve de son efficacité. Cependant, la situation a évolué puisqu’en 2018, nous constatons un quadruplement des bénéficiaires, qui sont désormais au nombre de 1 773, pour un coût de 25 millions d’euros. L’outil s’est démocratisé et n’est plus élitiste.

Tout en gardant en tête la note initiale du comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, je formule un avis de sagesse très bienveillante.

La commission adopte les amendements identiques II-CF691, II-CF921 et IICF1387 (amendement II-2537).

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Après l’article 50

Elle examine lamendement II-CF1284 de Mme Barbara Pompili.

M. Philippe Chassaing. Cet amendement prévoit la possibilité, pour les sociétés de tiers financement, de distribuer l’éco-prêt à taux zéro, qui l’est insuffisamment. Il serait donc utile, pour en accélérer la diffusion, d’en confier la distribution aux sociétés de tiers financement.

Suivant lavis défavorable du rapporteur, la commission rejette lamendement IICF1284.

Elle passe à lamendement II-CF1285 de Mme Barbara Pompili.

M. Philippe Chassaing. L’amendement vise à créer une expérimentation pour encourager la rénovation des bâtiments pour atteindre un niveau de basse consommation, à travers un aménagement de l’éco-prêt à taux zéro. Il serait judicieux de porter le plafond de ce prêt à 60 000 euros et d’en allonger la durée jusqu’à vingt-cinq ans. Cette expérimentation aurait, en outre, l’intérêt de montrer que la distribution d’une aide unique serait de nature à massifier la rénovation de type bâtiment basse consommation (BBC).

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis défavorable à cet amendement. La condition relative au bouquet de travaux a été supprimée, afin de permettre au plus grand nombre de bénéficier de l’éco-prêt à taux zéro. Par conséquent, réintroduire une condition de performance globale revient, d’une certaine manière, sur cette suppression. Certains de nos concitoyens, qui ne sont pas en mesure de réaliser un bâtiment labellisé BBC, en seraient pénalisés.

M. Philippe Chassaing. Il serait opportun de mener à bien cette expérimentation, qui n’engendrerait pas de coûts supplémentaires, afin de vérifier son éventuel impact sur une accélération des rénovations de ce type.

La commission rejette lamendement II-CF1285.

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Article additionnel après l’article 50
Aménagement de la condition relative à la part des logements faisant lobjet de prêts locatifs sociaux dans le total des logements sociaux
livrés dans le cadre du crédit dimpôt en faveur
de linvestissement locatif outremer

Elle est saisie de lamendement II-CF1557 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit d’aménager la condition prévue dans le cadre du crédit d’impôt investissement locatif outre-mer s’agissant des logements PLS (prêts locatifs sociaux), condition qui est liée à la part de ces logements par rapport au total des logements sociaux livrés.

La commission adopte lamendement II-CF1557 (amendement II-2538).

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Après l’article 50

Elle examine lamendement II-CF1492 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. L’amendement demande un rapport d’information visant à chiffrer l’impact budgétaire, économique et social d’une taxe sur l’hôtellerie de luxe qui permettrait d’abonder le fonds national d’aide au départ en accueil collectif de mineurs, pour les enfants issus des classes populaires et moyennes.

Sur la seule année 2016, le nombre d’enfants concernés a diminué de 43 000. Parallèlement, il est très difficile de réduire le nombre d’enfants qui ne partent jamais en vacances. L’instauration d’une taxe sur l’hôtellerie de luxe, de l’ordre de 2 % à 6 %, rapporterait, selon nos calculs, 100 à 200 millions d’euros sur les 600 millions d’euros nécessaires au départ des trois millions d’enfants qui ne partent pas en vacances.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’intention est louable, mais je crains que l’idée d’une telle taxe se heurte au principe de l’égalité devant la loi, puisqu’elle ne cible que l’hôtellerie de luxe. Par ailleurs, je ne suis pas certain qu’un énième rapport soit le meilleur vecteur pour faire aboutir votre intention. Une discussion en séance publique sur les différents moyens d’abonder le fonds national d’aide au départ en accueil collectif de mineurs serait plus utile. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Éric Coquerel. J’entends avec satisfaction l’intérêt du rapporteur. En revanche, je ne comprends pas très bien en quoi une taxe sur l’hôtellerie de luxe, qui peut être précisément définie, irait à l’encontre du principe d’égalité devant la loi.

La commission rejette lamendement II-CF1492.

 

 


Article 51
Création dune taxe forfaitaire
sur les contrats à durée déterminée dits dusage

Résumé du dispositif proposé

Le présent article prévoit l’instauration d’une taxe de 10 euros due par l’employeur au titre de chaque contrat à durée déterminée dit d’usage (CDDU) conclu en application du 3° de l’article L. 1242‑2 du code du travail.

Certains CDDU ne seront pas concernés par la taxe :

– les CDDU des intermittents du spectacle et des ouvriers dockers occasionnels, qui font déjà l’objet d’une sur-contribution de 0,5 % ;

– les CDDU conclus par les associations intermédiaires d’insertion professionnelle, compte tenu de l’objectif particulier d’intérêt général et de cohésion sociale qu’ils poursuivent.

Le produit annuel de cette taxe est estimé par le Gouvernement à 50 millions d’euros à compter de 2020 et sera affecté à l’Unédic.

L’objectif de cette mesure, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme de l’assurance chômage du 26 juillet 2019, est de favoriser les relations de travail plus longues en limitant les embauches en CDDU très courts, qui contribuent à la précarité salariale et nuisent à l’équilibre financier de l’assurance chômage.

Dernières modifications intervenues

En 2013, les partenaires sociaux ont décidé la mise en place d’une sur-contribution sur la contribution patronale d’assurance chômage touchant les CDD. Elle a été cantonnée en 2017 aux seuls CDDU, pour un taux de 0,5 %, et s’est appliquée jusqu’en mars 2019.

La réforme de l’assurance chômage prévue par le décret du 26 juillet 2019, qui introduit notamment un système de « bonus-malus » en fonction du taux de séparation au sein de l’entreprise, a rétabli à compter de 2020 la sur-contribution de 0,5 % uniquement pour les CDDU des intermittents du spectacle et des ouvriers dockers occasionnels.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

En plus d’un amendement rédactionnel du Rapporteur général, la commission :

– à l’initiative de Mme Verdier‑Jouclas, a introduit un nouveau cas d’exonération de la taxe, non pour un secteur d’activité en particulier, mais pour les CDDU conclus dans le cadre d’un accord de branche étendu prévoyant une durée minimale pour chaque CDDU et une durée à partir de laquelle la requalification en CDI est de droit ;

– a prévu, à l’initiative du Rapporteur général, une évaluation complète de la nouvelle taxe et de ses effets à travers la production d’un rapport au premier semestre 2022.

 

I.   L’état du droit

L’embauche des salariés se fait en principe en contrat à durée indéterminée (CDI) et, dans certaines hypothèses, en contrat à durée déterminée (CDD). Parmi ces derniers figurent une catégorie spéciale, les CDD dits d’usage (CDDU), qui ont fait l’objet de mesures financières spécifiques destinées à en encadrer le recours, sans résultats tangibles jusque-là.

A.   Les contrats à durée déterminée dits d’usage (CDDU), catégorie particulière de CDD

Les CDD, a fortiori les CDDU, ne peuvent être conclus que dans certaines hypothèses. En revanche, le régime des deux types de contrats diffère substantiellement, le CDDU apparaissant plus souple.

1.   Les hypothèses de recours et le régime des CDD

Dans la mesure où l’embauche d’un salarié en CDD déroge au principe prévu à l’article L. 1221‑2 du code du travail selon lequel le CDI est la « forme normale et générale de la relation de travail », cette embauche ne peut intervenir que dans des cas limitativement énumérés par la loi. Un régime spécial est prévu, dont la méconnaissance peut conduire à requalifier le contrat en CDI.

a.   Les hypothèses de recours à un CDD

Les articles L. 1242‑1 à L. 1242‑4 du code du travail fixent les hypothèses dans lesquelles une embauche peut se faire en CDD, étant entendu qu’une telle embauche ne saurait avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

● Les hypothèses de recours au CDD sont :

– le remplacement d’un salarié, lorsque ce dernier est absent, est passé provisoirement à temps partiel – par exemple dans le cadre d’un congé parental partiel –, voit son contrat suspendu, est définitivement parti avant la suppression définitive du poste ou a définitivement quitté l’entreprise ou a été muté, dans l’attente de l’entrée en service du salarié embauché en CDI pour le remplacer (1° de l’article L. 1242‑2) ;

– l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, qui inclut la survenance d’une commande exceptionnelle, la réalisation d’une tâche occasionnelle non durable ne relevant pas de l’activité normale de l’entreprise ou encore la réalisation de travaux urgents dont l’exécution immédiate est nécessaire pour la sécurité des personnes (2° de l’article L. 1242‑2) ;

– les emplois à caractère saisonnier, ainsi que les emplois dans certains secteurs définis dans lesquels il est d’usage constant de ne pas embaucher en CDI du fait de la nature de l’activité et du caractère par nature temporaire de l’emploi – cette seconde catégorie correspondant aux CDDU – (3° de l’article L. 1242‑2) ;

– le remplacement d’un chef d’entreprise, d’une personne exerçant une profession libérale, de son conjoint s’il participe effectivement à titre professionnel à l’activité de l’entreprise ou de l’associé non salarié d’une société exerçant une profession libérale, ainsi que le remplacement du chef d’une exploitation agricole, d’un aide familial, d’un associé ou du conjoint participant effectivement à l’activité (4° et 5° de l’article L. 1242‑2) ;

– le recrutement d’ingénieurs ou cadres dans certaines conditions – il s’agit des CDD à objet défini – (6° de l’article L. 1242‑2) ;

 le recrutement de certaines catégories de personnes dans le cadre de la politique de lemploi (article L. 1242‑3) ;

– le recrutement de personnes pour la réalisation de vendanges (article L. 718‑5 du code rural et de la pêche maritime) ;

– le contrat conclu avec un joueur professionnel salarié de jeu vidéo compétitif (article 102 de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique ([120])).

● Par ailleurs, et aux termes des articles L. 1242‑5 et L. 1242‑6 du code du travail, le recours à un CDD est expressément exclu :

– pour faire face à un accroissement temporaire d’activité dans les six mois suivant un licenciement pour motif économique, sous réserve de certaines exceptions ;

– pour remplacer des salariés grévistes ;

– pour exécuter des travaux dangereux mentionnés à l’article D. 4154‑1 du code du travail.

b.   Les principales caractéristiques du régime des CDD

La durée d’un CDD est encadrée dans une durée totale, variable selon le type de CDD et les stipulations de la convention ou de l’accord de branche et prévue aux articles L. 1242‑8 et suivants du code du travail. Elle est comprise entre 9 et 36 mois selon le motif de conclusion du CDD : à titre d’exemple, elle ne peut excéder 18 mois dans le cas du remplacement d’un salarié.

Cette durée tient compte des éventuels renouvellements du contrat – limités à deux aux termes de l’article L. 1243‑13‑1, sauf stipulations conventionnelles différentes.

En application des articles L. 1244‑3 et suivants, un délai de carence doit être respecté entre deux renouvellements de CDD ; il varie en fonction de la durée du contrat. Ce délai n’est toutefois pas applicable à certaines situations, tels que le remplacement temporaire d’un salarié ou le CDDU, ainsi que le prévoit l’article L. 1244‑4‑1 du code du travail.

Lorsqu’un CDD arrive à son terme et que le salarié n’est pas embauché en CDI, celui-ci a droit, en vertu de l’article L. 1243‑8 du code du travail, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.

Enfin, la méconnaissance des règles précédemment exposées, telle qu’un recrutement en CDD en dehors des hypothèses prévues, une durée totale supérieure aux maximums prévus, ou encore un renouvellement sans respect du délai de carence, entraîne la requalification du contrat en CDI aux termes de l’article L. 1245‑1 du même code.

2.   Les CDDU

Le principe des CDDU, ainsi qu’il a été vu, est prévu au 3° de l’article L. 1242‑2 du code du travail, tandis que le 3° de l’article L. 1244‑1 du même code permet la conclusion de CDDU successifs avec le même salarié.

a.   Les secteurs d’activités dans lesquels peuvent être conclus des CDDU

Le CDDU est ouvert dans les secteurs dans lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI, en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois.

Le CDDU ne doit pas être confondu avec le CDD conclus :

– le CDD conclu pour pourvoir un emploi à caractère saisonnier qui, s’il est lui aussi mentionné au 3° de l’article L. 1242‑2 du code du travail, se distingue des contrats conclus dans des secteurs d’activité dans lesquels « il est d’usage constant » de ne pas recruter en CDI ;

– le contrat de travail temps partiel prévu à l’article L. 3123‑6 du code du travail, le temps partiel pouvant concerner aussi bien les CDD que les CDI.

● Trente secteurs d’activités sont éligibles aux CDDU : la moitié le sont en vertu de dispositions réglementaires – l’article D. 1242‑1 du code du travail –, l’autre moitié en vertu de conventions collectives. En effet, le champ des secteurs d’activité éligibles aux CDDU peut être étendu par une convention collective ou un accord collectif de branche étendu. À titre d’exemple, un accord professionnel conclu le 29 avril 2016 a ajouté le secteur des agences de voyage et de tourisme ([121]), dont les dispositions ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et salariés compris dans son champ d’application par un arrêté du 4 mai 2017 ([122]).

● Le tableau suivant dresse la liste des quinze secteurs pour lesquels le recours au CDDU est possible en application du code du travail.

secteurs d’activité éligibles aux CDDU
en vertu de l’article D. 1242‑1 du code du travail

Exploitations forestières

Entreposage et stockage de la viande

Réparation navale

Bâtiments et travaux publics pour les chantiers à l’étranger

Déménagement

Activités de coopération, d’assistance technique, d’ingénierie et de recherche à l’étranger

Hôtellerie et restauration, centres de loisirs et de vacances

Activités d’insertion par l’activité économique exercées par des associations intermédiaires

Sport professionnel

Recrutement de travailleurs mis à la disposition, à titre onéreux, de personnes physiques

Spectacles, action culturelle, audiovisuel, production cinématographique, édition phonographique

Recherche scientifique réalisée dans le cadre d’une convention ou d’un arrangement international ou par des chercheurs étrangers résidant temporairement en France

Enseignement

Activités foraines

Information et activités d’enquête et de sondage

 

● Dans le secteur de la manutention portuaire, il est également possible de recruter en CDDU des ouvriers dockers occasionnels en application de l’article L. 5343‑6 du code des transports, qui renvoie au 3° de l’article L. 1242‑2 du code du travail.

Ces ouvriers dockers occasionnels, qui constituent avec les ouvriers dockers professionnels les deux catégories d’ouvriers dockers mentionnées à l’article L. 5343‑2 du code des transports, constituent une « main-dœuvre dappoint à laquelle il nest fait appel quen cas dinsuffisance du nombre douvriers dockers professionnels », aux termes du second alinéa de l’article L. 5343‑6 du même code.

● La liste réglementaire des secteurs d’activité éligibles aux CDDU ne correspond pas à la nomenclature normale prévue par les codes NAF (Nomenclature d’activités françaises). Une évolution sur ce point, afin d’établir une correspondance plus lisible, serait à cet égard bienvenue. L’opacité de cette liste, conjuguée à l’absence de recensement centralisé et aisément accessible de l’ensemble des conventions collectives ouvrant l’embauche en CDDU, avait d’ailleurs été critiquée par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) dans un rapport paru en 2015 ([123]).

b.   Les spécificités du régime des CDDU

Les CDDU constituent une dérogation à l’encadrement des CDD, eux‑mêmes dérogatoires aux CDI.

● La durée d’un CDDU varie en fonction des emplois et secteurs d’activité, pouvant aller de quelques heures à plusieurs journées consécutives. Elle est fixée par l’usage du secteur concerné. Ainsi, la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants (HCR) du 30 avril 1997 prévoit à son article 14 qu’un travailleur se voyant confier par le même établissement des missions pendant plus de 60 jours au cours d’un trimestre civil peut demander à ce que son CDDU soit requalifié en CDI.

Par ailleurs, sont fixées des durées maximales de présence sur le lieu de travail, incluant les heures supplémentaires éventuelles. La convention collective nationale HCR précitée prévoit ainsi à son article 21 les durées de travail et durées maximales figurant dans le tableau suivant, qui dépendent de la nature de l’emploi occupé par le travailleur.

durées de travail prévues pour les CDDU
par la convention collective nationale HCR

Emploi

Durée hebdomadaire

Durée maximale journalière

Durée maximale hebdomadaire
(moyenne sur 12 semaines)

Cuisiniers

43 h 00

11 h 00

50 h 00

Veilleurs de nuit

43 h 00

12 h 00

50 h 00

Autres salariés

43 h 00

11 h 30

50 h 00

N.B. : les durées indiquées sont celles applicables après la plus longue période d’application de la convention (qui, en fonction des cas, est de une, deux ou trois années).

Source : Convention collective nationale HCR du 30 avril 1997, article 21.

Est également prévue dans cette convention collective une durée maximale hebdomadaire absolue fixée à 52 heures.

● À la différence des CDD classiques, un CDDU peut être reconduit successivement avec le même salarié sans limitation, conformément à l’article L. 1244‑1 du code du travail, et sans délai de carence, en application de l’article L. 1244‑4‑1 du même code.

● La fin d’un CDDU n’ouvre pas droit à l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243‑8 du code du travail, en vertu du 1° de l’article L. 1243‑10 du même code. En revanche, le salarié peut percevoir une indemnité de congés payés : dans le cadre de la convention collective nationale HCR précitée, et aux termes du 1 de son article 14, elle est égale à 10 % de la rémunération totale brute perçue dans le cadre de l’exécution du CDDU.

B.   L’absence d’effets tangibles des sur-contributions mises en place sur les CDDU

Compte tenu des externalités négatives du recours excessif aux CDDU, des sur-contributions ont été mises en place à compter de 2013, sans pour autant atteindre leurs objectifs. La récente réforme de l’assurance chômage propose une refonte des règles applicables et devrait produire des résultats beaucoup plus probants.

1.   Les externalités négatives de l’excès des CDDU : la précarité des travailleurs et les risques financiers pour l’assurance chômage

Les CDD, tout particulièrement les CDD courts et les CDDU, sont de nature à favoriser la précarité salariale des travailleurs qu’ils concernent. La multiplication de contrats de courte durée se succédant sans interruption, tout en pouvant être vue comme un détournement des règles pour éviter des embauches en CDI, place le travailleur dans une situation professionnelle et sociale délicate, voire inacceptable. La visibilité à moyen terme, sans même parler de celle à long terme, est inexistante, seule une prévisibilité à très court terme étant offerte.

● Les abus des CDDU, qui résultent d’une définition large et obscure – notamment de la notion d’« usage constant » – et d’une absence de contrôle suffisant, ont été mis en évidence par l’IGAS en 2015 ([124]), qui soulignait trois traits saillants des CDDU pour les salariés :

– la discontinuité de l’emploi, facteur de précarité professionnelle, tant s’agissant de l’emploi occupé un instant t qu’au sujet de l’espérance d’emploi ;

– la faible rémunération ;

– la non qualité d’emploi, le CDDU pouvant conduire à un « harcèlement à la productivité » à travers la pression mise sur le salarié, à une moindre distinction entre temps de travail et temps de repos et à de nombreux autres problèmes évidents pour le salarié ([125]).

D’une manière générale, il ressort du rapport de l’IGAS un recours excessif aux CDDU, utilisés dans des cas où l’usage professionnel du secteur n’est pas manifeste et, en tout état de cause, dans des situations d’emploi du même travailleur pendant une période cumulée longue, à travers une multiplication élevée de contrats courts.

● Par ailleurs, sous l’angle de l’équilibre financier du régime d’assurance chômage, la multiplication des CDDU peut poser problème.

Si les contrats longs soutiennent les contrats plus courts en raison de contributions plus importantes, l’importance de la part des CDDU dans les contrats courts accentue le déséquilibre généré par ces derniers : les périodes non productives des travailleurs en CDDU sont externalisées à l’assurance chômage, et le faible niveau de pénalisation des CDDU très courts n’est pas assez incitatif (cf. infra, 2).

● Il ne s’agit donc pas de contester le principe du CDDU, ce dernier pouvant tout à fait se justifier dans certaines situations : l’objectif est de mieux encadrer le dispositif pour en éviter les dérives. Comme le relève l’IGAS, « sans remettre en cause le CDDU, dont lutilité a été explicitée […] pour certaines organisations productives quil conviendra de bien recadrer, il semble légitime et nécessaire que le régime dassurance chômage prévoit aussi les garde-fous indispensables pour modérer les dérives générées par des modèles économiques très attractifs au niveau de lentreprise ou de la branche mais désastreux pour léconomie globale du régime. » ([126])

2.   La multiplication des CDDU malgré la mise en place d’une sur‑contribution sur les CDD et CDDU en 2013

Pour lutter contre les abus des recours aux CDD, particulièrement aux CDDU, et les externalités négatives qu’ils produisent, a été mise en place en 2013 une sur-contribution sur les contributions d’assurance chômage dues par les employeurs (dont le taux normal est de 4 %). Malgré cela, le nombre de CDD courts, et notamment de CDDU, a connu depuis 2013 une hausse significative.

a.   La sur-contribution prévue par l’ANI de 2013

● Un accord national interprofessionnel (ANI) conclu le 11 janvier 2013 a prévu de majorer les contributions d’assurance chômage selon les modalités présentées dans le tableau suivant.

majorations de contributions d’assurance chômage pour les CDD
(ANI du 11 janvier 2013)

Type de CDD

Sur-contribution

Taux consolidé majoré

CDD saisonnier

Aucune

4 %

CDD pour remplacer un salarié absent

Aucune

4 %

CDD pour faire face à un accroissement d’activité

 

 

Dune durée inférieure ou égale à un mois

3 %

7 %

Dune durée supérieure à un mois et inférieure ou égale à trois mois

1,5 %

5,5 %

Dune durée supérieure à trois mois

Aucune

4 %

CDDU d’une durée inférieure ou égale à trois mois

0,5 %

4,5 %

Ces majorations ont été reprises par l’article 52 du règlement général d’assurance chômage annexé à la convention du 14 mai 2014.

Par ailleurs, et aux termes de l’article L. 5424‑20 du code du travail, une contribution spécifique supplémentaire est due s’agissant des intermittents du spectacle. Aux termes de l’article 60 des annexes VIII et X du règlement annexé à la convention du 14 mai 2014, la part due par les employeurs au titre de cette contribution spécifique était de 4,50 % à compter du 1er août 2016, et de 5 % à compter de 2017.

● Le calibrage de cette sur-contribution a été sévèrement critiqué par l’IGAS en 2015 ([127]) :

– le ciblage aurait dû privilégier la consommation des droits à chômage et se concentrer sur les entreprises dont la gestion humaine coûte le plus cher à l’assurance chômage ;

– la majoration du coût du travail, pourtant essentielle afin de rendre dissuasif le dispositif, s’est révélée très faible ;

– elle n’a pu réellement participer au rééquilibrage entre contrats courts et contrats longs.

D’une manière générale, s’agissant des CDDU, le faible niveau de la sur‑contribution, de 0,5 %, rend celle-ci symbolique et n’a pu constituer un facteur efficace pour lutter contre les recours excessifs à cette forme contractuelle, comme en témoigne l’augmentation du nombre de ces contrats.

b.   L’augmentation significative des CDD courts et singulièrement des CDDU

● Le constat général tiré des dernières années est une augmentation des CDD courts et des CDDU, un raccourcissement de la durée moyenne et médiane des CDD – participant à l’augmentation précitée – et une hausse des réembauches en CDD de salariés précédemment en CDD :

– la durée moyenne d’un CDD est passée de 253 jours en 2011 à 61 jours en 2014 ;

– la durée médiane, sur la même période, a été divisée par trois, passant de 31 jours à 10 jours ;

– 70 % des embauches en CDD en 2011 étaient des réembauches, alors que ce taux était inférieur de vingt points en 2000 ;

– toujours en 2011, 35 % des CDD portaient sur une période de moins de trois mois, un niveau très largement supérieur à celui d’autres pays comparables : 19 % en Italie, 13 % au Danemark et seulement 4 % en Allemagne.

● S’agissant plus spécifiquement des CDDU, les données fournies par le Gouvernement montrent l’augmentation du nombre de ces contrats et la place prépondérante des engagements inférieurs à une semaine :

– la part des CDDU de moins d’une semaine est passée entre 2014 et 2017 de 50 % à 64 % ;

– deux tiers de ces 64 % de CDDU portent sur une durée inférieure ou égale à une journée, représentant ainsi près de 43 % du total des CDDU ;

– 85 % des CDDU de moins d’une semaine concernent un même salarié embauché par la même entreprise.

La montée en puissance des CDDU fait que 8 millions d’embauches en 2017 ont été réalisées avec ce type de contrat, soit plus de 20 % des 37 millions d’embauches totales constatées cette année-là ([128]).

● Enfin, certains secteurs font un usage plus important que d’autres des CDDU, ce qu’illustrent le tableau et les graphiques suivants – les données y figurant ne portant que sur ces secteurs, non sur la totalité des CDDU.

principaux secteurs utilisant les CDDU en 2017

Secteur

CDDU

CDDU dun jour

Part pour chaque secteur des CDDU dun jour dans le total des CDDU

Nombre

Part du secteur dans le total des CDDU

Nombre

Part du secteur dans le total des CDDU dun jour

Activités de services administratifs et de soutien

1 404 664

24,7 %

433 739

22,9 %

30,9 %

Hébergement et restauration

1 056 228

18,6 %

380 470

20,1 %

36,0 %

Arts, spectacles et activités récréatives (hors intermittents)

771 114

13,6 %

404 464

21,4 %

52,5 %

Autres activités spécialisées, scientifiques et techniques

533 714

9,4 %

170 367

9,0 %

31,9 %

Édition, audiovisuel et diffusion

508 457

9,0 %

208 878

11,0 %

41,1 %

Hébergement médico-social et social et action sociale sans hébergement

487 188

8,6 %

96 093

5,1 %

19,7 %

Enseignement

316 121

5,6 %

75 797

4,0 %

24,0 %

Autres activités de services

304 662

5,4 %

70 728

3,7 %

23,2 %

Source : évaluation préalable du présent article.

 

Il ressort de ces données que les principaux secteurs ayant recours aux CDDU utilisent intensément des contrats d’une durée d’une journée : en moyenne, plus d’un CDDU sur trois porte sur une journée, cette moyenne étant dépassée dans les secteurs de l’hébergement et de la restauration, des arts, spectacles et activités récréatives hors intermittents et de l’édition, de l’audiovisuel et de la diffusion.

Pour mémoire, sur la totalité des contrats conclus – et donc sans se limiter aux seuls secteurs précédemment étudiés –, les CDDU d’une journée ou moins représentent entre 42 % et 43 % du total des CDDU conclus en 2017.

3.   Les évolutions de la sur-contribution et la réforme de l’assurance chômage de 2019

Face aux résultats décevants de la sur-contribution mise en place en 2013, les partenaires sociaux et l’État ont fait évoluer le dispositif en 2017. Plus récemment, la réforme de l’assurance chômage prévue par le Gouvernement propose d’ambitieuses actions pour favoriser les changements de comportements, améliorer la situation des travailleurs et pour renforcer l’équilibre du régime.

a.   Le ciblage accru des CDDU en 2017

La convention d’assurance chômage du 14 avril 2017 ([129]), agréée par un arrêté du 4 mai 2017 ([130]) et qui retranscrit l’accord conclu par les partenaires sociaux le 28 mars 2017, a substantiellement réformé l’ANI de 2013 sur le volet des contributions d’assurance chômage.

● Son article 4, précisé par l’article 50 du règlement général qui lui est annexé, prévoit ainsi, à compter du 1er octobre 2017 :

– la mise en place d’une majoration exceptionnelle de 0,05 % de la contribution d’assurance chômage à la charge des employeurs (article 50, § 1er du règlement général annexé) ;

– la suppression de la sur-contribution pesant sur les CDD autres que les CDDU de moins de trois mois (article 50, § 2 du règlement général annexé) ;

– le maintien de la sur-contribution de 0,5 % pour les seuls CDDU de moins de trois mois, pendant une période de 18 mois, soit entre le 1er octobre 2017 et le 31 mars 2019 (article 50, § 2 du règlement général annexé).

La contribution spécifique concernant les intermittents du spectacle et dont le principe est prévue à l’article L. 5424‑20 du code du travail a été consacrée par l’article 60 des annexes VIII et X du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017, au taux de 5 % pour les employeurs.

● Par ailleurs, de façon plus globale, les branches professionnelles ont été invitées à engager des négociations pour encadrer et modérer le recours aux CDD de courte durée afin de mieux lutter contre les situations d’emploi précaire et de chômage fréquent, la régulation du recours aux CDDU étant expressément mise en avant.

Ainsi, plusieurs branches professionnelles ont établi une liste des emplois susceptibles de faire l’objet d’un CDDU ou mis en place un encadrement juridique plus ferme en prévoyant une durée minimale de travail et une requalification en CDI si les CDDU successifs dépassent une certaine durée appréciée au cours d’une période définie.

b.   Les modifications prévues par la réforme de l’assurance chômage de 2019

La sur-contribution de 0,5 % sur les CDDU de moins de trois mois a pris fin à partir d’avril 2019, au terme de la période de 18 mois prévue par la convention du 14 avril 2017.

Cependant, le décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage ([131]) a rétabli cette sur-contribution :

– pour les employeurs d’ouvriers dockers occasionnels, en vertu du deuxième alinéa de l’article 50‑1 du règlement d’assurance chômage annexé au décret ;

– pour les employeurs de salariés intermittents du spectacle :

Ce rétablissement sera effectif à compter du 1er janvier 2020, ainsi que le prévoit le dernier alinéa du 6° de l’article 5 du décret. Le gain annuel estimé sera de l’ordre de 10 millions d’euros par an, provenant de la sur-contribution sur les CDDU d’intermittents du spectacle ([132]).

Par ailleurs, la contribution spécifique de 5 % dont le principe est prévue à l’article L. 5424‑20 du code du travail, s’agissant des intermittents du spectacle, est consacrée à l’article 50 des annexes VIII et X précitées. En conséquence, les contributions dues par les employeurs d’intermittents du spectacle s’élèvent à 9,55 % :

– 4,05 % au titre de la contribution de droit commun ;

– 0,50 % au titre de la sur-contribution rétablie ;

– 5 % au titre de la contribution spécifique.

La réforme de l’assurance chômage de 2019 comprend trois axes complémentaires constitutifs d’une stratégie cohérente pour améliorer la situation des demandeurs d’emploi, des travailleurs, des employeurs et de l’Unédic.

● D’une part, est prévue une refonte des règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi afin de mettre un terme aux pratiques susceptibles d’inciter le recours privilégié aux contrats courts (par exemple à travers un fractionnement des contrats), notamment à travers :

– une modification des conditions d’ouverture de droit à compter du 1er novembre 2019 ;

– une modification des modalités de calcul du salaire de référence retenu pour calculer l’allocation à compter du 1er avril 2020.

● D’autre part, sera mis en place, pour les employeurs, un système de « bonus-malus » à compter de 2021, consistant en une modulation à la hausse ou à la baisse du taux de la contribution chômage en fonction du taux de séparation de l’employeur, c’est-à-dire du rapport entre le nombre de ruptures de contrats de travail ayant donné lieu à une inscription à Pôle Emploi et l’effectif total de l’entreprise.

Le système de « bonus-malus »

Prévu aux articles 50‑2 à 50‑15 du règlement d’assurance chômage annexé au décret du 26 juillet 2019, le système de « bonus-malus » s’appliquera à compter du 1er mars 2021 aux entreprises de onze salariés et plus des secteurs d’activité dans lesquels le taux de séparation est supérieur à un certain seuil. Sept secteurs seront ainsi concernés :

– fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac ;

– autres activités spécialisées, scientifiques et techniques ;

– hébergement et restauration ;

– production et distribution d’eau-assainissement, gestion des déchets et dépollution ;

– transport et entreposage ;

– fabrication de produits en caoutchouc et en plastique, et d’autres produits non métalliques ;

– travail du bois, industrie du papier et imprimerie.

Le « bonus-malus » consiste à faire varier le taux de la contribution patronale – normalement fixé à 4,05 % – dans une fourchette comprise entre 3 % et 5,05 %, en fonction du taux de séparation de l’entreprise par rapport au taux de séparation médian du secteur d’activité.

La formule de calcul du taux de contribution de l’entreprise est la suivante :

Où TCE correspond au taux de contribution de l’entreprise, TSE au taux de séparation de l’entreprise et TSMS au taux de séparation médian du secteur.

En vertu de cette formule, si le TSE est égal au TSMS, le taux de la contribution sera de 4,05 %. Si le TSE est supérieur au TSMS, le taux de la contribution sera modulé à la hausse, et inversement s’il lui est inférieur.

● Enfin, est prévue l’instauration d’une taxe fixe de 10 euros due au titre de la conclusion d’un CDDU. C’est ce troisième axe, complémentaire du reste de la réforme et qui, parallèlement aux mesures visant à inciter les allocataires à privilégier les contrats plus longs, entend inciter cette fois les employeurs, que met en œuvre le présent article, dans un souci d’équilibre général de la réforme.

II.   Le dispositif proposé

Le présent article crée une taxe forfaitaire de 10 euros sur les CDDU afin de lutter contre la multiplication des contrats courts et la précarité salariale qu’elle induit, dans le cadre de la réforme de l’assurance chômage de juillet 2019. Certains CDDU sont néanmoins exclus du champ de la nouvelle taxe.

A.   La création d’une taxe forfaitaire de 10 euros sur chaque CDDU

1.   La taxe proposée

Le principe de la nouvelle taxe figure au I du présent article, qui prévoit que chaque CDDU conclu sur le fondement du 3° de larticle L. 12422 du code du travail fait lobjet dune taxe forfaitaire de 10 euros.

Pour mémoire, le 3° de l’article L. 1242‑2 du code du travail vise les emplois à caractère saisonnier et les CDDU.

2.   Les CDDU exclus de l’assujettissement à la nouvelle taxe

Tous les CDDU ne sont pas dans le champ de la nouvelle taxe : le II du présent article prévoit trois exceptions, motivées par deux types de considérations.

a.   Les exclusions prévues

● En premier lieu, ne sont pas concernés par la taxe :

– aux termes du  du II, les CDDU conclus avec les intermittents du spectacle, définis par renvoi à l’article L. 5424‑20 du code du travail qui vise les travailleurs des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel ou du spectacle.

– aux termes du  du même II, les CDDU conclus avec les ouvriers dockers occasionnels mentionnés à l’article L. 5343‑6 du code des transports – qui, ainsi qu’il a été vu, ne peuvent être recrutés qu’en qualité de main-d’œuvre d’appoint.

Ces deux exclusions sont justifiées par le fait que ces CDDU font l’objet de la sur-contribution de 0,5 % rétablie, pour ces deux secteurs, par la réforme de l’assurance chômage de 2019 :

– en application de l’article 50‑1 du règlement annexé au décret du 26 juillet 2019 précité, s’agissant des ouvriers dockers occasionnels ;

– en application de l’article 50 des annexes VIII et X du même règlement, s’agissant des intermittents du spectacle.

Dans la mesure où les CDDU de ces professions sont déjà touchés par une majoration spécifique, y ajouter la nouvelle taxe de 10 euros serait excessif. S’agissant des ouvriers dockers occasionnels, en outre, l’application de la taxe aurait été en décalage avec l’objectif de la mesure qui est de limiter le recours à des contrats courts précaires : ces ouvriers, en effet, ne peuvent qu’être recrutés en CDDU, et dans des conditions et hypothèses spécifiques précisément déterminées par la loi, ce qui limite les risques d’abus.

● En second lieu, et en application du  du II du présent article, ne seront pas concernés par la taxe les CDDU conclus par les associations intermédiaires prévues à l’article L. 5132‑7 du code du travail agissant en matière d’insertion par l’activité économique.

Ces associations intermédiaires, conventionnées par l’État, ont pour objet l’embauche et la mise à disposition à titre onéreux auprès de particuliers, d’entreprises ou d’associations, de personnes sans emploi en difficulté sociale et professionnelle. Elles poursuivent donc un objectif d’intérêt général et le recours aux CDDU vise à faciliter l’insertion professionnelle des personnes : le risque d’abus est ainsi limité.

b.   La question de la compatibilité des exclusions prévues avec le droit de l’Union européenne

Ces exclusions du champ d’application de la nouvelle taxe n’apparaissent pas constitutives d’aides d’État en faveur des secteurs concernés.

● L’exclusion des CDDU conclus avec des intermittents du spectacle, si elle peut de prime abord être vue comme procurant à ce secteur d’activité un avantage sélectif, est indissociable de l’existence, pour ces contrats, de la sur‑contribution de 0,5 %. Les deux mesures – taxe et sur-contribution – poursuivent le même objectif et sont en rapport direct ; c’est d’ailleurs en raison de l’existence de la sur-contribution que la taxe n’est pas appliquée à ces CDDU.

En conséquence, la charge induite par la sur-contribution doit être déduite de l’avantage induit par l’exonération de taxe et l’ensemble ne paraît pas constituer un « déséquilibre entre, dune part, les charges à subir par les entreprises ou productions intéressées et, dautre part, les bénéfices résultant de lattribution de laide » ([133]).

Au demeurant, il n’est pas inutile de rappeler que les employeurs de ce secteur d’activité sont soumis à une contribution spécifique supplémentaire de 5 %.

● L’exclusion des CDDU conclus avec des ouvriers dockers occasionnels s’inscrit dans le même cadre juridique, ces contrats faisant également l’objet de la sur‑contribution de 0,5 %.

En outre, un second élément permet d’appuyer la compatibilité de cette exclusion avec le droit européen en matière d’aides d’État : l’absence de sélectivité à travers la fourniture d’un avantage à un secteur.

En effet, il est admis qu’une exemption « dun secteur industriel particulier des charges pécuniaires découlant de lapplication normale dun système général de prévoyance sociale » puisse se justifier « par la nature ou léconomie de ce système » ([134]).

Ici, l’exclusion ne concernera pas un secteur en tant que tel, ni même une ou plusieurs entreprises, mais une catégorie de travailleurs constituant une main-d’œuvre d’appoint recrutée lorsque les ouvriers dockers professionnels ne sont pas en nombre suffisants. Il n’y a donc pas de rupture de concurrence compte tenu de l’encadrement des conditions d’embauche des ouvriers dockers occasionnels, et faire peser sur leurs CDDU la taxe ne serait au demeurant pas cohérent avec son objectif eu égard à l’obligation légale de recrutement en CDDU et aux hypothèses limitatives d’un tel recrutement, ainsi qu’il a été vu.

● Enfin, l’exclusion relative aux CDDU conclues par les associations intermédiaires d’insertion par l’emploi relève du règlement général européen d’exemption par catégorie (RGEC) du 17 juin 2014 ([135]), dont l’article 32 autorise les aides à l’embauche de travailleurs défavorisés sous forme de subventions salariales. Les personnes embauchées et mises à disposition par les associations intermédiaires semblent en effet répondre à la définition de la notion de « travailleur défavorisé » prévue au 4 de l’article 2 du RGEC, qui vise notamment toute personne :

– qui n’exerce aucune activité régulière rémunérée depuis les six derniers mois ;

– qui a achevé ses études depuis deux ans et n’exerce pas encore d’activité régulière rémunérée ;

– qui n’a pas obtenu de qualifications professionnelles suffisantes ;

– ou qui a besoin de renforcer sa formation ou son expérience professionnelle pour augmenter ses chances d’obtention d’un emploi stable.

● Ces considérations montrent en revanche qu’une autre exclusion, même motivée par des éléments d’opportunité économique ou sociale, serait vraisemblablement qualifiée d’aide d’État, nonobstant la circonstance qu’elle profiterait à tout un secteur ([136]).

Une exclusion sectorielle pourrait également entraîner une différence de traitement injustifiée, constitutive d’une rupture d’égalité.

● Il en irait en revanche autrement s’agissant d’une exclusion portant non sur un – ou plusieurs – secteurs identifiés, mais sur les contrats conclus dans le cadre d’accords collectifs prévoyant certains garde-fous contre la précarité salariale. Une telle exclusion, en effet, ne viserait pas un secteur donné mais une pratique contractuelle professionnelle, et serait au demeurant parfaitement cohérente avec la finalité de la taxe proposée.

Les garde-fous envisageables pourraient être :

– l’existence, dans l’accord collectif, d’une durée minimale pour chaque CDDU ;

– et le principe d’une requalification du CDDU en CDI après une certaine durée.

Ces deux conditions devraient être cumulatives, et porter sur des durées suffisamment raisonnables pour ne pas vider de sa substance l’exclusion et faciliter les contournements abusifs. Un moyen de garantir un tel contrôle pourrait consister en la subordination de l’exclusion au fait que l’accord collectif soit étendu, permettant à l’État de garder une marge de manœuvre.

3.   La liquidation, le recouvrement et l’affectation de la nouvelle taxe

a.   Le paiement de la taxe

La nouvelle taxe est due, pour chaque CDDU dans son champ, lors de la conclusion du contrat – précision du fait générateur figurant à la seconde phrase du premier alinéa du I du présent article.

Son règlement effectif, ainsi qu’en dispose le  du III du présent article, intervient au plus tard à la première échéance normale de paiement des cotisations et contributions sociales qui suit la date de conclusion du CDDU, soit en principe :

– le 5 du mois suivant la période d’emploi rémunérée pour les entreprises d’au moins cinquante salariés qui effectuent la paie au cours du même mois que la période de travail ;

– le 15 du mois suivant la période d’emploi rémunérée pour les autres entreprises (entreprises de moins de cinquante salariés ou entreprises avec paie décalée).

Le règlement devrait se faire au moyen de la déclaration sociale nominative (DSN).

b.   Le recouvrement de la taxe

Les modalités de recouvrement sont définies aux  et 2° du III du présent article. Ce recouvrement incombe :

– aux unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf), dont la mission générale est prévue à l’article L. 213‑1 du code de la sécurité sociale ;

– aux caisses générales de sécurité sociale en outre-mer prévues à l’article L. 752‑1 du même code ;

– aux organismes de mutualité sociale agricole mentionnés à l’article L. 723‑1 du code rural et de la pêche maritime ;

– et, en vertu du  du III du présent article, à Pôle emploi s’agissant des CDDU conclus avec des travailleurs salariés français expatriés mentionnés à l’article L. 5422‑13 du code du travail.

Tout contentieux lié au recouvrement de la nouvelle taxe relève, en vertu du  du III du présent article, du contentieux de la sécurité sociale : un recours préalable devant la commission de recours amiable est obligatoire, et en première instance le tribunal de grande instance sera compétent – se substituant aux tribunaux des affaires de sécurité sociale.

c.   L’affectation de la taxe

Le produit de la nouvelle taxe sur les CDDU est affecté à l’organisme de droit privé chargé, par les organisations représentatives d’employeurs et de salariés, de la gestion du régime d’assurance chômage en vertu du premier alinéa de l’article L. 5427‑1 du code du travail.

Il s’agit donc de l’Unédic.

4.   L’absence de précision sur l’entrée en vigueur

Le présent article ne précise pas les modalités d’entrée en vigueur de la nouvelle taxe.

Néanmoins, cela ne devrait pas doter celle-ci d’une portée rétroactive : son fait générateur étant la conclusion du CDDU, la nouvelle taxe ne pourra s’appliquer qu’aux contrats conclus à compter de l’entrée en vigueur de la loi résultant de l’adoption du présent projet de loi, soit au lendemain de sa promulgation.

B.   L’impacT budgétaire et économique

La nouvelle taxe forfaitaire sur les CDDU devrait augmenter les ressources financières de l’Unédic de plusieurs dizaines de millions d’euros par an à compter de 2020 tout en permettant de lutter plus efficacement contre les multiplications excessives des contrats très courts.

1.   Un gain de plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour l’Unedic

L’instauration de la taxe de 10 euros sur les CDDU, hors intermittents du spectacle, ouvriers dockers occasionnels et associations intermédiaires d’insertion par l’emploi, devrait permettre la réalisation d’un gain annuel de 50 millions deuros à compter de 2020 d’après les données figurant dans l’évaluation préalable du présent article.

Cette estimation se fonde sur le nombre de CDDU concernés par la taxe, qui s’élèverait en 2017 à 5,1 millions.

Néanmoins, lUnédic retient une estimation différente du gain tiré de la nouvelle taxe. Sa note d’impact de la réforme de l’assurance chômage de septembre dernier évalue ce gain à 40 millions deuros par an. Le montant de 50 millions d’euros est, d’après cette note d’impact, atteint en cumulant la taxe et la sur-contribution de 0,5 % maintenue sur les CDDU des intermittents du spectacle ([137]).

Le tableau suivant dresse la synthèse de l’impact budgétaire de la nouvelle taxe, à partir des éléments figurant dans l’évaluation préalable et des calculs de l’Unédic.

impact budgétaire de la taxe sur les CDDU

(en millions d’euros)

Source

Mesure

2019

2020

2021

2022

PLF 2020

Taxe de 10 

0

+ 50

+ 50

+ 50

Unédic

Taxe de 10 €

0

+ 40

+ 40

+ 40

Sur-contribution de 0,5 %

0

+ 10

+ 10

+ 10

Total

0

+ 50

+ 50

+ 50

Source : évaluation préalable du présent article, Unédic.

Le fait que le produit de la taxe soit affecté à l’Unédic, et non à l’État, justifie le placement du présent article en seconde partie du projet de loi de finances pour 2020, malgré un impact financier dès cette année-là.

2.   Une taxe destinée à améliorer la lutte contre la précarité salariale et à renforcer l’équilibre financier de l’assurance chômage

● Le caractère forfaitaire de la nouvelle taxe est destiné à rendre celle-ci beaucoup plus incitative, et donc efficace, que la sur-contribution proportionnelle introduite en 2013, cantonnée aux CDDU en 2017 et rétablie à compter de 2020 pour les seuls CDDU d’intermittents du spectacle et d’ouvriers dockers occasionnels.

Cette sur-contribution était en effet symbolique, ainsi que l’a qualifiée l’IGAS ([138]), et ne permettait pas une réelle atteinte de l’objectif qui lui était assignée, à savoir inviter les employeurs à moins recourir aux contrats courts, en particulier aux CDDU successifs.

Le fait de taxer de la même manière les CDDU indépendamment de leur durée et de la rémunération versée va avoir pour effet de peser plus lourdement sur les contrats les plus courts, et à l’inverse de moins grever les contrats plus longs prévoyant une rémunération plus élevée, l’impact devenant nul ou quasiment nul lorsque la durée du contrat approche un mois, ainsi que l’illustre le tableau et le graphique suivants reposant sur les données disponibles pour 2017.

impact de la taxe forfaitaire proposée sur la rémunération brute
en fonction de la durée du CDDU

Durée en jours

Part dans le total des CDDU

Impact sur la rémunération brute de la taxe proposée

Durée en jours

Part dans le total des CDDU

Impact sur la rémunération brute de la taxe proposée

1

42 %

9 %

17

1 %

1 %

2

11 %

5 %

18

1 %

1 %

3

6 %

3 %

19

1 %

1 %

4

2 %

2 %

20

1 %

1 %

5

3 %

2 %

21

1 %

1 %

6

1 %

2 %

22

2 %

1 %

7

1 %

1 %

23

1 %

1 %

8

1 %

2 %

24

1 %

1 %

9

1 %

1 %

25

1 %

1 %

10

1 %

1 %

26

1 %

0 %

11

1 %

1 %

27

1 %

0 %

12

1 %

1 %

28

1 %

0 %

13

1 %

1 %

29

2 %

0 %

14

1 %

1 %

30

4 %

0 %

15

1 %

1 %

31 et > 31

10 %

0 %

16

2 %

1 %

 

 

 

Source : Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, évaluation préalable du présent article.

La dimension incitative est maximale pour les CDDU les plus courts, d’une durée d’un jour. Elle décroît progressivement pour se stabiliser à partir de neuf jours, l’impact sur la rémunération brute étant alors de 1 %, et s’éteint à partir de 26 jours.

L’incitation pour embaucher des salariés en CDDU d’une durée d’une semaine ou plus est donc particulièrement forte, faisant de cette taxe un dispositif a priori efficace contre la précarité salariale.

● Le fait que certains secteurs d’activité mettent en avant leur volonté de réaliser des efforts contre la précarité salariale et critiquent ainsi l’absence de délai pour que ces efforts produisent leurs effets en raison de l’application immédiate de la taxe n’apparaît pas constituer un motif suffisant pour reporter l’application de celle-ci.

Ces secteurs, en effet, ont été sollicités depuis de nombreuses années pour faire évoluer leurs pratiques contractuelles s’agissant des CDDU, sans que cela ne produise de résultats tangibles – comme en témoigne le caractère symbolique de la sur-contribution de 0,5 % mise en place dès 2013 et l’explosion du nombre d’embauches en CDDU.

Un changement de méthode apparaît donc indispensable et opportun, et c’est ce à quoi s’emploie le Gouvernement à travers la nouvelle taxe. L’incitation financière qu’elle induit devrait faire substantiellement évoluer les pratiques et améliorer la lutte contre la précarité salariale.

En tout état de cause, il semble évident que le Gouvernement reste ouvert au dialogue et pourra, en fonction des évolutions apportées par les secteurs professionnels, décider des aménagements. À cet égard, une exclusion ciblée sur certaines pratiques, telles que celle précédemment évoquée s’agissant d’un accord collectif étendu contenant des garde-fous adaptés, constituerait une motivation supplémentaire pour les secteurs d’activité à faire évoluer leurs pratiques.

3.   L’indispensable évaluation des effets de la nouvelle taxe

Pour efficace qu’il soit, au moins en théorie, le nouveau dispositif d’incitation financière à limiter les CDDU très courts devra impérativement faire l’objet d’une évaluation.

Le dispositif n’est pas borné dans le temps, mais devrait s’appliquer jusqu’au 1er novembre 2022, date du terme des dispositions prévues dans le décret du 26 juillet 2019 précité, en application de l’article 6 de ce dernier.

Il semble indispensable que le Parlement puisse disposer avant cette date d’une évaluation du dispositif et des effets de ce dernier sur les points suivants, qui ne sont au demeurant pas nécessairement exhaustifs :

– effets de la taxe sur le recours aux CDDU, en particulier s’agissant des CDDU très courts et de leurs reconductions successives ;

– impact budgétaire de la taxe pour l’Unédic :

– efficacité du contrôle – ce dernier pouvant utilement s’appuyer sur une analyse des données qui figurent dans la DSN ;

– impact du dispositif sur les embauches non déclarées (« travail au noir »), dans la mesure où il n’est pas possible d’écarter a priori et de façon péremptoire le risque que le renchérissement du coût du travail des salariés embauchés en CDDU très courts se traduise par un accroissement des embauches non déclarées.

*

*     *

La commission discute des amendements identiques II-CF1540 du président Éric Woerth, II-CF459 de Mme Véronique Louwagie, II-CF922 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF1079 de M. Francis Vercamer.

M. le président Éric Woerth. L’amendement concerne les contrats à durée déterminée dits d’usage (CDDU). À l’issue d’une longue négociation, un dispositif de bonus-malus a été arrêté, qui s’appliquera à compter du 1er janvier 2020 à des secteurs d’activité relativement nombreux. Les CDDU sont nécessaires. Mieux vaut que les titulaires de ces contrats travaillent, plutôt qu’ils ne travaillent pas. Taxer ces contrats les rend moins nécessaires et moins attractifs, mais aussi plus coûteux. Par ailleurs, le dispositif n’est pas uniforme puisque vous exemptez certains secteurs du dispositif de bonus-malus.

Cet article présente une curieuse façon d’envisager le marché du travail. Je ne comprends pas pourquoi vous mettez ainsi un frein au travail, qui est une valeur fondamentale, alors même que le discours tenu par Bruno Le Maire consiste à dire que le travail doit payer. Ce type de contrat est utile et les entreprises qui en abusent sont probablement déjà rattrapées par les dispositifs de bonus-malus, quand ce n’est pas par le droit du travail. Cette mesure est, à mon sens, une mesure de rendement ; c’est pourquoi j’en propose la suppression.

Mme Véronique Louwagie. Alors que nous avons actuellement un problème de coût du travail, le dispositif du bonus-malus contribue à le majorer. Si les entreprises ont recours à des contrats de cette nature, ce n’est pas par plaisir mais parce qu’ils correspondent à des situations bien précises. Je pense en particulier au secteur de la restauration et aux traiteurs, dont les marchés sont très courts. À l’inverse de ce qui est proposé, j’estime que nous devons soutenir les CDDU. En outre, dans un contexte où les entreprises ont des difficultés à trouver du personnel, ce dispositif constitue presque un frein supplémentaire. C’est la raison pour laquelle l’amendement II-CF459 tend à supprimer l’article 51.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le bonus-malus n’a pas encore été appliqué et n’a donc pas fait l’objet d’une évaluation. Néanmoins, en contradiction avec l’objectif pourtant affiché de stabilité fiscale, une pénalité est créée concernant les contrats courts.

Dans le Haut-Jura, qui est un territoire industriel reconnu, les sous-traitants et les emplois saisonniers sont nombreux, tant dans le secteur automobile que dans celui du jouet. Les employeurs ont nécessairement recours à des contrats de court terme, afin de faire face aux surcharges de travail. Dans ce contexte, je ne comprends pas la volonté de pénaliser des secteurs d’activité qui, par nature, ne sont pas en mesure de planifier leur surcroît de travail.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne reviendrai pas sur les CDDU ultérieurement. N’étant pas un spécialiste du droit du travail, je me suis interrogé sur l’effet de cet article dans des régions où l’emploi est saisonnier. Moi-même issu d’une région où 80 % de l’emploi privé est saisonnier, j’y ai questionné des entreprises afin de mieux cerner le problème. Les employeurs m’ont indiqué ne pas avoir recours aux CDDU, mais plutôt aux contrats saisonniers. En effet, qu’il s’agisse du secteur de l’hôtellerie, de la restauration ou des remontées mécaniques, ils considèrent que les CDDU attirent des personnes non formées en trop grand nombre.

Un CDDU est un CDD dérogatoire qui peut accentuer, à mon sens, la précarité salariale, qui peut ne porter que sur une durée très courte, sans avoir à justifier d’un motif de conclusion contrairement aux autres CDD. Le CDDU peut être reconduit sans limite et sans délai de carence entre le terme d’un contrat et le début du suivant. Ainsi, de nombreux travailleurs sont employés pendant plusieurs années par le même employeur, par le biais de la reconduction de CDDU de quelques jours, voire d’une seule journée. De plus, nous ne pouvons ignorer le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié en 2015 à ce sujet.

L’article 51 propose une taxe de 10 euros par contrat, car la sur-contribution de 0,5 % au titre de la contribution chômage des employeurs, instaurée en 2013, s’est révélée inefficace. Le rapport de l’IGAS préconise, afin d’être véritablement efficace, de cibler les contrats les plus courts. Tel est le rôle de la taxe forfaitaire, qui se concentre sur les CDDU très courts, d’une ou deux journées. Il est urgent d’agir, car les CDDU sont très dérogatoires et peuvent entraîner une précarité absolue. Aucune visibilité n’est possible lorsque l’on vit pendant plusieurs années avec un CDDU renouvelé quotidiennement. De plus, la part des CDDU dans les embauches a explosé : ils représentaient un contrat sur cinq en 2017, et les CDDU d’une journée représentent 42 % du total des CDDU.

Quant aux secteurs exonérés par l’article 51, je rappelle que les employeurs des intermittents et des ouvriers dockers occasionnels sont les seuls à continuer à supporter la sur-contribution de 0,5 %. Les employeurs des intermittents sont en outre soumis à une contribution spécifique supplémentaire de 5 %. Par ailleurs, la loi impose le recrutement en CDDU des ouvriers dockers occasionnels, qui constituent une main-d’œuvre d’appui. Enfin, les associations intermédiaires d’insertion par l’emploi relèvent du cadre général du règlement général d’exemption par catégorie (RGEC), et sont exemptées pour ce motif.

En allant plus loin dans la direction des exonérations, le risque existe de retomber dans le problème des aides d’État, qui nous causerait préjudice. Par conséquent, je suis défavorable aux amendements de suppression et aux amendements qui sortent certains secteurs du champ.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Je remercie M. le rapporteur général d’avoir donné la définition exacte du CDDU. En effet, lorsqu’il est question de contrats courts, ce sont les contrats saisonniers qui viennent à l’esprit ; or le CDDU n’a rien à voir avec les contrats saisonniers.

L’article 51 ne constitue pas un frein au travail, mais un frein à la précarité. Taxer ces contrats pour obliger les employeurs à cesser leurs abus est une bonne chose. Cela les incitera à recourir à d’autres contrats, qu’ils sous-utilisent, par exemple le CDI de chantier, le CDI d’intérim et le CDD de date à date. Ces trois outils placent l’employé, non pas dans la précarité, mais dans une situation stable. Pour l’employeur, il s’agit simplement d’un changement de méthode.

Dans la lutte contre le chômage et contre la précarité, il me semble pertinent de taxer les CDDU, dont les durées sont indécentes, et d’inciter les employeurs qui les utilisent à recourir à d’autres contrats.

Des exonérations ont été instaurées, car elles sont logiques d’un point de vue juridique. S’agissant des traiteurs par exemple, je défendrai un amendement visant à exclure ce secteur d’activité à partir du moment où la branche professionnelle aura créé une convention répondant à certaines conditions. Ainsi, si la branche de la restauration crée une telle convention, l’amendement que je défendrai permettra aux traiteurs de bénéficier d’une exonération.

M. le président Éric Woerth. Si les CDDU sont indécents, il faut les interdire ; l’outil fiscal n’a rien à y voir. S’ils ne sont pas interdits, il s’agit simplement d’une mesure de revenus.

Mme Cendra Motin. Vous avez parlé, monsieur le président, d’un frein au travail. Pour ma part, je parlerai d’un dispositif créant un frein au travail de mauvaise qualité. Bien sûr, il est important de travailler. Toutefois, ne pas savoir la veille si l’on va travailler le lendemain n’est pas une situation normale. Je rappelle que La Poste fut, un temps, coutumière de ce genre de pratiques : elle a été lourdement condamnée aux prud’hommes. Nous avons tous applaudi cette condamnation, car cette manière de traiter des salariés n’était pas normale.

Il existe suffisamment de contrats de travail pour que les entreprises s’adaptent lorsque cela est nécessaire. En outre, nous avons libéré les accords relatifs au temps de travail. Ainsi, une entreprise peut proposer des contrats de travail annualisés aux employés lorsqu’elle ne sait pas avec exactitude à quel moment et pour quelle durée elle en aura besoin.

Par ailleurs, il est question, dans la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite PACTE, de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et de leur raison d’être. Il est nécessaire que les employeurs, du secteur privé comme du secteur associatif, aient en tête qu’une embauche est un acte citoyen et social : ils doivent se montrer responsables vis-à-vis de leurs employés et leur offrir une bonne qualité d’emploi.

M. le président Éric Woerth. Tous les contrats que vous évoquez ne datent pas de 2017. Encore une fois, si les CDDU sont indécents, le Gouvernement doit avoir le courage de les interdire plutôt que d’instaurer une taxe de 10 euros et de rester ainsi au milieu du gué.

M. Charles de Courson. Pour pouvoir signer un contrat d’usage, trois conditions sont nécessaires. La première est d’appartenir à l’un des secteurs définis par voie réglementaire ou conventionnelle, c’est-à-dire résultant d’un accord passé entre les partenaires sociaux. La deuxième est qu’il soit d’usage de recourir à ce contrat pour l’emploi concerné. La troisième condition est liée à la nature spécifique de l’activité et au caractère par nature temporaire de l’emploi. Par conséquent, cette taxe ne sert à rien et surtout pas à lutter contre la précarité, puisque les partenaires sociaux eux-mêmes se sont mis d’accord pour reconnaître l’utilité des CDDU dans certains secteurs.

Si vous souhaitez que les employeurs n’aient plus recours aux CDDU, supprimez les quinze secteurs qui, par voie réglementaire, ont été considérés comme éligibles aux CDDU et convainquez les partenaires sociaux de ne pas faire figurer dans les conventions collectives la possibilité d’y recourir. Cette taxe ne sert donc à rien. Qui plus est, les 50 millions d’euros correspondants alimenteront l’assurance-chômage, alors que cela n’a aucun rapport.

M. Fabien Di Filippo. Je suis toujours très mal à l’aise lorsqu’il s’agit de déterminer quels sont les bons et les mauvais employeurs. À mon sens, la première responsabilité sociétale de l’entreprise consiste à ne pas déposer le bilan.

Monsieur le rapporteur général, prendre l’exemple de la montagne et des zones touristiques comme valeur absolue ne me semble pas pertinent. Par ailleurs, vous envisagez de faire bénéficier les traiteurs d’une exonération ; il sera, par la suite, facile de trouver d’aussi bonnes raisons concernant d’autres secteurs d’activité et la situation deviendra kafkaïenne. Enfin, en voulant, par cette mesure, réduire la précarité, vous semblez oublier que plus les salaires sont chargés, plus l’impact sur les rémunérations est important. Finalement, la précarité augmentera en raison de cette pression à la baisse sur les salaires.

Mme Véronique Louwagie. Monsieur le rapporteur général, vous nous dites que le nombre de CDDU n’a pas diminué et qu’il faut combattre cette situation. Nous pouvons, à l’inverse, nous en réjouir, car peut-être que certaines personnes n’auraient pas eu de travail sans ces contrats.

Plus généralement, je ne suis pas certaine que nos débats soient un fidèle reflet de la vie réelle. Lorsque nous écoutons les besoins des entreprises, nous n’entendons pas les mêmes propos. Plus les entreprises sont petites, plus elles ont besoin de procédures allégées et d’une grande réactivité pour obtenir des marchés. Avec cette taxe, vous mettez en difficulté les TPE et les PME.

Enfin, ces contrats présentent certes des inconvénients, mais ils permettent à des personnes participant à des dispositifs d’insertion sociale de retrouver du travail. Or il n’est pas facile de s’inscrire dans une telle démarche lorsque l’on a été exclu du monde du travail pendant très longtemps.

La commission rejette les amendements de suppression II-CF1540, II-CF459, IICF922 et II-CF1079.

Suivant lavis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements identiques IICF175 de M. Nicolas Forissier et II-CF1085 de M. Francis Vercamer.

Elle est saisie de lamendement II-CF1145 de M. Fabien Roussel.

M. Jean-Paul Dufrègne. Nous ne sommes pas favorables à la suppression de la taxe de 10 euros sur les CDDU, car nous estimons que l’encadrement de ces contrats est devenu incontournable. En raison d’un encadrement législatif et réglementaire défaillant, ces contrats courts et précaires se sont fortement développés ces dernières années dans les secteurs d’activité concernés, à tel point qu’ils représentent 22 % de toutes les embauches annuelles. Du reste, il nous semble que la taxe forfaitaire de 10 euros est insuffisante et, par cet amendement, nous proposons de la porter à 50 euros.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je salue votre soutien à l’article, mais la taxe doit conserver un caractère incitatif. En pénalisant à l’excès, nous risquons d’être contre‑productifs et de favoriser le travail au noir, ce qui n’est pas souhaitable. Un montant de 10 euros présente un équilibre qui me semble satisfaisant.

M. Charles de Courson. Un montant de 10 euros n’a aucun caractère dissuasif ni incitatif. Voyez dans quelle aberration nous nous trouvons ! Lorsque les partenaires sociaux se mettent d’accord dans le cadre d’une convention collective pour reconnaître l’utilité du CDDU, je respecte leur choix, car ils connaissent mieux que nous la réalité du terrain. Cet article reflète une conception jacobine, dans laquelle tout vient d’en haut. Pour ma part, je fais confiance aux partenaires sociaux.

La commission rejette lamendement II-CF1145.

Elle examine, en discussion commune, lamendement II-CF20 de M. Richard Ramos et les amendements identiques II-CF36 de Mme Pascale Fontenel-Personne et IICF110 de M. Christophe Blanchet.

M. Richard Ramos. Concernant les restaurateurs, je ne comprends pas que vous puissiez envisager une telle taxe. Dans les zones rurales notamment, il faut parfois un peu plus de personnel le dimanche, en particulier à l’occasion d’un baptême ou d’une communion dans un petit restaurant. Il est impossible, pour un restaurateur, de fonctionner sans ce supplément de personnel. La réalité du terrain n’est pas prise en compte et finalement, le travail au noir se développera.

Dans les zones touristiques, certaines saisons nécessitent également plus de personnel. Les restaurateurs aimeraient embaucher en CDI, mais ils ne trouvent pas de candidats. L’amendement II-CF20 permettrait de ne pas favoriser le travail au noir plutôt que de le fabriquer. Nous devons protéger les petits restaurateurs, qui ont besoin de ces surplus temporaires de personnel.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme je l’ai dit préalablement, j’exclus de donner un avis favorable à tout ajout à la liste d’exclusion, celle-ci ayant été calibrée en fonction de critères bien particuliers.

Par ailleurs, j’ai consulté les employeurs du secteur de l’hôtellerie et de la restauration dans ma circonscription ; ils m’ont répondu que le CDDU n’était pas une solution et qu’ils avaient besoin de professionnels.

M. Richard Ramos. Ce n’est pas vrai !

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon avis est donc défavorable.

M. le président Éric Woerth. Il s’agit là d’une profonde erreur, car les contraintes peuvent varier selon les régions.

M. Charles de Courson. Je conteste les propos de M. le rapporteur général. Pourquoi les partenaires sociaux dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration se sont-ils mis d’accord, dans le cadre d’une convention collective, pour autoriser les CDDU ? Ils savent mieux que nous, ce dont ils ont besoin. Je voterai en faveur de cet amendement et j’espère qu’autant d’amendements que de secteurs concernés seront déposés ! Nous devons cesser de nous substituer à l’intelligence des partenaires sociaux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’article 51 ne critique pas le principe des CDDU, il critique les abus que ce dispositif peut entraîner. Reconduire des CDDU d’une journée pendant plusieurs semaines relève de la même logique que celle dénoncée par Mme Cendra Motin lorsqu’elle a évoqué la condamnation de La Poste ; cela n’est pas acceptable.

M. le président Éric Woerth. Je ne crois pas que vous aboutirez à ce type de situations, puisque tout excès est interdit par la loi et par le code du travail. Tout cela ne fonctionne pas – on est bien loin de la vraie vie. En France, nous avons besoin d’accumuler les heures de travail et non pas de rejeter les travailleurs qui étaient à l’aise avec ce système et qui procèderont autrement.

La commission rejette successivement lamendement II-CF20 et les amendements IICF36 et II-CF110.

Elle est saisie des amendements identiques II-CF37 de Mme Pascale FontenelPersonne et II-CF111 de M. Christophe Blanchet.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable. Par ailleurs, j’appelle votre attention sur le fait qu’exclure certains secteurs risquerait fortement de relever d’une aide d’État au sens du droit de l’Union européenne.

La commission rejette les amendements II-CF37 et II-CF111.

Elle en vient aux amendements identiques II-CF1039 de Mme Jeanine Dubié, IICF1064 de Mme Véronique Louwagie et II-CF1075 de M. Marc Le Fur.

M. Michel Castellani. Notre amendement II-CF1039 vise à exempter de la taxe forfaitaire de 10 euros les contrats à durée déterminée d’usage conclus avec les guides, conférenciers, interprètes et accompagnateurs. Leur imposer cette taxe ne contribuera pas au développement de l’économie du tourisme.

Mme Véronique Louwagie. Il s’agit également d’exclure du champ d’application de l’article 51 les contrats conclus avec les guides, conférenciers, interprètes et accompagnateurs, dans le secteur du tourisme.

Quelle est, du reste, la cohérence de cet article 51 avec l’article 6, qui supprime des taxes à faible rendement, et sur lequel nous avons travaillé de longues heures ? Alors que la suppression de ces taxes est un objectif affiché du Gouvernement, l’adoption de cet article va en créer une nouvelle.

M. le président Éric Woerth. Faible rendement fiscal, mais fort rendement social, au mauvais sens du terme…

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable, pour les motifs déjà cités, au premier rang desquels le risque de qualification en aide d’État.

Par ailleurs, il s’agit d’une taxe non pas à faible rendement, mais comportementale. Non seulement nous n’avons pas supprimé les taxes comportementales, mais il m’est arrivé de demander au Gouvernement d’en rétablir, spécifiquement celle qui porte sur les publicités sur papier que nous recevons par tonnes dans nos boîtes aux lettres.

Mme Émilie Cariou. Le rapporteur général a raison, c’est une taxe comportementale afin d’inciter certains secteurs d’activité à utiliser les nouveaux types de contrats de travail, à annualiser le temps de travail et à conclure des conventions collectives en ce sens.

M. Charles de Courson. La majorité pourrait-elle expliquer en quoi, dans le secteur du tourisme, cette taxe va modifier le comportement des agences qui recrutent des interprètes ou des conférenciers pour une journée ? Elle n’aura aucun effet incitatif sur le recours aux CDDU, par ailleurs prévus par la convention collective de la branche.

Mme Cendra Motin. La question n’est pas d’empêcher le recours aux CDDU, c’est d’éviter qu’il y soit recouru de manière abusive. Ainsi, pour trois jours de travail consécutifs, plutôt que de faire trois contrats d’une journée, l’employeur aura tout intérêt à n’en faire qu’un pour payer 10 euros de taxe forfaitaire au lieu de 30. De la sorte, on suscite l’usage raisonné du CDDU.

Certes, madame Louwagie, nos petites entreprises manquent parfois de visibilité et les CDDU sont utiles dans ces situations, mais rallonger ces contrats peut parfois être utile. Pour reprendre l’exemple, cité par M. Ramos, d’un baptême ou d’une communion dans un petit restaurant, ce sont des événements programmés à l’avance. Pour les personnes embauchées, il est préférable de conclure un seul contrat de trois jours au lieu de trois contrats d’une journée, et c’est un premier pas pour mieux gérer le temps de travail du personnel en extra.

Mme Sylvia Pinel. J’admets que le CDDU est parfois abusif, mais la rédaction de l’article n’est pas efficace. La somme forfaitaire porte sur chaque contrat alors qu’elle devrait viser uniquement les renouvellements abusifs. Une entreprise touristique qui a besoin d’un interprète sera taxée chaque fois qu’elle aura recours à ses services. Pour limiter l’abus, il faudrait taxer les renouvellements au-delà d’un certain nombre, pas chaque contrat. Les conférenciers et les interprètes seront taxés à chaque fois qu’ils concluront un contrat alors que vous cherchez à limiter le renouvellement abusif. Vous vous trompez de cible.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1039, II-CF1064 et IICF1075.

Elle en vient à lamendement II-CF293 de M. Fabien Matras.

Mme Sereine Mauborgne. Je suis ravie de présenter un amendement qui ne concerne pas un secteur économique particulier. Il a trait à l’objectif gouvernemental de former 80 % de la population aux gestes qui sauvent, dans lequel s’inscrit la proposition de loi votée par notre assemblée créant le statut de citoyen-sauveteur, et que le Sénat est en passe d’adopter.

Cet amendement ne crée pas de charges ; il exclut du champ d’application de la taxe les CDDU des associations agréées pour les formations aux premiers secours, mission d’intérêt général s’il en est.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme précédemment, la logique d’extension du champ des exceptions n’est pas acceptable. De nombreuses associations ont des formateurs réguliers ou permanents, et le CDDU n’est pas nécessairement la forme d’embauche la plus adaptée, et dans le domaine du secourisme d’autant moins.

M. Fabien Di Filippo. Les voilà, les discussions que je vous annonçais : pourquoi les traiteurs et pas les secouristes qui interviennent ponctuellement pour faire des formations ? La mesure n’aura plus aucun sens !

M. le président Éric Woerth. Nous pourrons débattre avec le ministre et lui expliquer tout le mal que nous pensons de l’enfer bureaucratique et des bonnes intentions dont il est pavé.

La commission rejette lamendement II-CF293.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements en discussion commune II-CF1083 et II-CF1084 de M. Francis Vercamer, ainsi que son amendement II-CF1081.

Elle en vient à lamendement II-CF1101 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Cet amendement tend à exonérer de la taxe tous les secteurs dans lesquels les partenaires sociaux ont conclu un accord incluant des primes de précarité dans les CDDU, ce qui résout le problème auquel s’attache cet article.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je comprends l’esprit de cette proposition, mais je crains qu’elle ne soit trop facile à contourner. L’amendement II-CF1521 de madame Verdier-Jouclas, que nous examinerons ensuite, me semble suivre une logique comparable, mais à la différence du vôtre, il ne viderait pas la mesure de sa substance. Je vous propose de retirer cet amendement.

Lamendement II-CF1101 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques II-CF1120 de Mme Véronique Louwagie et II-CF1122 de M. Marc Le Fur.

Elle en vient à lamendement II-CF1521 de Mme Marie-Christine VerdierJouclas.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Si j’ai dit plus tôt que cet amendement allait exonérer les traiteurs, c’est parce que cette profession avait été citée par un autre intervenant, mais elle n’est pas la seule concernée par ma proposition. Seraient exonérées les professions qui arriveraient à formaliser un contrat définissant une durée minimale, et prévoyant l’obligation de transformer le CDDU en CDI au terme d’une durée de travail effectif.

Cette proposition va dans le bon sens. Pour reprendre l’exemple des traiteurs – j’en connais aussi –, ils ont toujours recours aux mêmes personnes en extra. Pourquoi ne pas leur proposer un CDD ou un CDI annualisé, comme l’a indiqué Mme Cariou, plutôt qu’un CDDU ? Quand, entre deux secteurs de taille comparable, les taux de séparation varient de un à quarante, on doit vraiment s’interroger.

Cette mesure d’exonération de la taxe de 10 euros pour tous ceux qui s’engageront à conclure un contrat de travail à durée indéterminée au terme d’une durée cumulée de travail effectif est bien de nature à supprimer la précarité et à valoriser le travail à long terme.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avec la requalification en CDI, cet amendement pose un garde-fou supplémentaire par rapport aux précédents. L’accord doit être étendu, ce qui permet à l’État de garder la main, notamment pour éviter les abus consistants à prévoir une durée minimale ridiculement faible et une requalification en CDI après une durée excessivement longue.

L’avantage ne concerne pas un secteur particulier et me semble cohérent avec la volonté de lutter contre la précarité salariale. Avis favorable.

Mme Émilie Cariou. Nous soutenons cet amendement, sachant que certains secteurs d’activité ont déjà conclu ce type d’accord et de convention collective. Il est donc tout à fait réaliste.

Certains secteurs, tels que le transport ou les entreprises de déménagement, se sont engagés à changer le type de contrat au-delà d’un nombre de jours travaillés. Les nouveaux contrats de travail avec temps de travail annualisé sont tout à fait indiqués à cette fin.

Mme Véronique Louwagie. Les exemples que vous donnez peuvent convenir à de grandes entreprises dont les volumes d’activité leur permettent de réguler le temps de travail. Mais les petites entreprises n’ont pas de visibilité à moyen ou long terme, à l’image du traiteur qui n’a qu’un ou deux salariés et ne prend pas plus de deux extras à la fois.

On en vient à se demander si vous ne voulez pas mettre fin à ce type de contrat. Les traiteurs qui n’ont pas beaucoup d’activité ne prendront plus d’extras ; ils travailleront seuls ou ne travailleront plus. Et ceux qui doivent partir à la retraite ne trouveront pas de repreneurs. C’est la situation que vous êtes en train de créer, et c’est fort regrettable.

La commission adopte lamendement II-CF1521 (amendement II-2539).

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements II-CF1240 de Mme Sylvia Pinel, II-CF113 et II-CF112 de M. Christophe Blanchet, les amendements identiques II-CF88 de M. Christophe Blanchet et II-CF341 de Mme Émilie Bonnivard, ainsi que lamendement II-CF1373 de M. Christophe Blanchet.

Elle est saisie de lamendement II-CF785 de Mme Frédérique Lardet.

Mme Frédérique Lardet. J’ai mené, pendant six mois, une mission sur les emplois et formations dans les métiers du tourisme. Le rapport qui en est issu préconisait, pour répondre à la problématique des CDD d’usage, l’accélération des créations de groupements d’employeurs, qui offrent de la flexibilité aux employeurs et de la sécurité aux salariés.

Partant de cette préconisation, j’ai tenté de lancer une première expérimentation dans mon territoire du bassin annécien, où la demande d’emplois salariés dans le secteur des cafés, hôtels et restaurants est élevée. J’en ai conclu que la création d’un groupement d’employeurs demande au moins six mois. Pour éviter de trop punir les métiers de ce secteur, je propose de leur laisser le temps nécessaire pour créer ces groupements. D’où cet amendement, qui tend à ramener à 5 euros le montant de la taxe sur les CDD d’usage pendant un an.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF785.

Les amendements II-CF89 à II-CF109 de M. Christophe Blanchet sont retirés.

La commission adopte lamendement rédactionnel II-CF1547 du rapporteur général (amendement II-2540).

Elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF1362 de Mme Patricia Lemoine et II-CF1548 du rapporteur général.

Mme Patricia Lemoine. Alors que les mesures de la réforme de l’assurance chômage prévues dans le décret du 26 juillet 2019 sont limitées dans le temps, au 1er novembre 2022, la taxe sur les CDDU, également inscrite dans cette réforme, n’est assortie d’aucun terme.

De plus, si l’évaluation préalable des articles fait référence à une hypothétique évaluation du dispositif et des autres mesures de la réforme de l’assurance chômage fin 2022, aucune disposition de cet article ne prévoit d’évaluation concrète de l’efficacité et des conséquences du dispositif.

Mon amendement II-CF1362 a pour but, d’une part, de limiter dans le temps cette taxe de 10 euros, en limitant son champ d’application temporel au 1er novembre 2022, et, d’autre part, de demander au Gouvernement d’évaluer concrètement l’efficacité du dispositif au regard des objectifs poursuivis ainsi que des conséquences économiques pour les secteurs d’activité concernés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon amendement II-CF1548 est légèrement plus ambitieux, car il fixe une date de remise du rapport plus proche, et les informations demandées couvrent un domaine plus large.

Je pense comme Mme Lemoine qu’il est nécessaire qu’un rapport sur les effets de la taxe sur les CDDU soit remis au Parlement le plus rapidement possible. Je lui suggère donc de retirer son amendement et de cosigner le mien.

M. le président Éric Woerth. Vous avez donc un doute sur l’efficacité de la mesure, monsieur le rapporteur général !

M. Joël Giraud, rapporteur général. Non, je veux qu’elle fasse l’objet d’un rapport.

Mme Patricia Lemoine. Monsieur le rapporteur général, je vous propose plutôt de vous rallier à mon amendement, puisque le mien a en plus l’avantage de limiter la mesure dans le temps.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Non, ce n’est pas un avantage !

La commission rejette lamendement II-CF1362 puis adopte lamendement IICF1548 (amendement II-2541).

Elle adopte ensuite larticle 51 ainsi modifié.

 

 

 


Article 52
Révision des valeurs locatives des locaux dhabitation (RVLLH) et simplification des procédures dévaluation des locaux professionnels

Résumé du dispositif et effets principaux

La révision des valeurs locatives des locaux professionnels et à usage d’habitation et la réforme des conditions de leur évaluation sont unanimement demandées par le Parlement et les associations d’élus locaux depuis 2006. Une première étape a été franchie en 2017, avec l’entrée en vigueur de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels (RVLLP) et la détermination des valeurs locatives à partir d’une méthode tarifaire, et en 2019, avec l’entrée en vigueur du mécanisme de mise à jour permanente de ces valeurs locatives. Toutefois, des mécanismes de neutralisation, de planchonnement et de lissage atténuent les effets de la RVLLP dans l’attente de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation (RVLLH). Cette dernière a toutefois fait l’objet d’une expérimentation menée en 2015 dans cinq départements.

Dans ce contexte, le présent article organise la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux à usage d’habitation ou servant à l’exercice d’une activité salariée à domicile. Il propose :

– de mettre en place en 2023 une nouvelle procédure de déclaration des montants des loyers auprès des propriétaires bailleurs et d’exploiter les données collectées en remettant en 2024 au Parlement un rapport d’évaluation sur les conséquences financières et fiscales de la RVLLH ;

– de mobiliser en 2025 les commissions départementales des valeurs locatives et les commissions communales des impôts directs en vue de délimiter géographiquement les secteurs d’évaluation et fixer les tarifs, et d’intégrer les nouvelles valeurs locatives dans les rôles d’impositions locales à compter de 2026 ;

– d’instituer un système permanent de mise à jour annuelle de ces nouvelles valeurs locatives afin de prévenir définitivement leur obsolescence.

Il procède enfin, en matière de détermination des valeurs locatives des locaux professionnels et d’habitation, à des mesures de simplification des travaux des commissions locales. En outre, la première mise à jour des paramètres d’évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels à la suite du prochain renouvellement des conseils municipaux est reportée d’une année, soit un report en 2022.

Dernières modifications législatives intervenues

La loi de finances rectificative pour 2010 a fixé les conditions de la révision des valeurs locatives des locaux commerciaux et de ceux affectés à une activité professionnelle non commerciale (activité libérale). Cette révision comportait deux volets : une révision initiale des valeurs locatives, qui devait entrer en vigueur en 2014, reflétant les situations à cette date des locaux concernés, et un dispositif de mise à jour permanente des évaluations permettant de prendre en compte les évolutions du marché.

La loi de finances rectificative pour 2012 a repoussé à 2015 la prise en compte de la RVLLP pour l’établissement des bases.

La loi de finances rectificative pour 2013 a mis en place le cadre légal permettant de mener une expérimentation de la RVLLH dans cinq départements. Elle a donné lieu à la remise d’un rapport au Parlement en 2015.

La loi de finances rectificative pour 2014 a repoussé à 2016 la prise en compte de la RVLLP pour l’établissement des bases.

La loi de finances rectificative pour 2015 a repoussé à 2017 la prise en compte de la RVLLP pour l’établissement des bases et a précisé les modalités de calcul du coefficient de neutralisation et du mécanisme de lissage.

La seconde loi de finances rectificative pour 2017 a codifié les dispositions relatives à la RVLLP dans le code général des impôts.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

La valeur locative d’un local constitue l’assiette de plusieurs impositions directes locales, en particulier la taxe d’habitation (TH), la cotisation foncière des entreprises (CFE), la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ou encore les taxes additionnelles comme la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Elle est également utilisée, dans une moindre mesure, pour calculer la répartition territoriale de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) pour une entreprise multiétablissements.

Les règles d’évaluation de la valeur locative constituent ainsi un enjeu essentiel de la fiscalité locale. Elles varient suivant la nature du local :

– les locaux d’habitation ou les locaux servant à l’exercice d’une activité salariée à domicile (article 1496 du code général des impôts – CGI) : il s’agit principalement de logements réservés à l’habitation. Le calcul de leur valeur locative revient à multiplier une surface pondérée, obtenue après de nombreuses opérations, par le tarif de la catégorie dans laquelle est classé le bien. Le nombre des locaux à usage d’habitation est évalué à 49 millions de locaux, soit 93 % de l’ensemble des locaux ;

– les locaux industriels (article 1500 du CGI) sont des bâtiments servant à l’exercice d’une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers qui nécessite d’importants moyens techniques, ou des bâtiments servant à l’exercice d’autres activités qui nécessitent non seulement d’importants moyens techniques, mais aussi dans lesquelles le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant. La valeur des installations techniques, matériels et outillages présents dans les bâtiments et destinés à l’activité doit être supérieure à 500 000 euros. Le calcul de leur valeur locative se fonde sur une méthode comptable (article 1499 du CGI), à savoir le prix de revient des différents éléments (terrain, constructions), revalorisé annuellement par les coefficients prévus en matière de révision des bilans. Le nombre des locaux industriels est évalué à 100 000 locaux ;

– les locaux qui ne sont ni des locaux d’habitation ou servant à l’exercice d’une activité salariée à domicile ni des locaux industriels sont des locaux professionnels (article 1498 du CGI) : ils regroupent les locaux commerciaux (les magasins, les ateliers, les restaurants, etc.), les locaux à usage professionnel, les locaux divers (les associations, les administrations publiques, etc.) et les locaux spécialement aménagés pour l’exercice d’une activité particulière (les salles de spectacle, les équipements sportifs, etc.). Le calcul de leur valeur locative se fonde depuis 2017 sur une méthode tarifaire qui consiste en l’application, à la surface pondérée du local, d’un tarif par mètre carré déterminé sur la base des loyers moyens constatés dans chaque secteur d’évaluation par catégorie de propriétés. Le nombre des locaux professionnels est évalué à 3,5 millions ;

– enfin, de manière résiduelle, certains locaux particuliers sont évalués au barème (article 1501 du CGI), regroupant notamment les postes d’amarrage dans les ports de plaisance ou les autoroutes. Le calcul de leur valeur locative est forfaitaire (par exemple 4,85 euros par mètre linéaire pour les voies de circulation des autoroutes ; 110 euros par poste d’amarrage pour les ports maritimes de la Méditerranée). Le nombre des locaux au barème est réduit à quelques dizaines de milliers.

La révision des valeurs locatives des locaux professionnels et à usage d’habitation et la réforme des conditions de leur évaluation sont unanimement demandées par le Parlement et les associations d’élus locaux depuis 2006. Une première étape a été franchie en 2017, avec l’entrée en vigueur de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels (RVLLP) et la détermination des valeurs locatives à partir d’une nouvelle méthode dite tarifaire, et en 2019, avec l’entrée en vigueur du mécanisme de mise à jour permanente de ces valeurs locatives. Toutefois, des mécanismes de neutralisation, de planchonnement et de lissage atténuent les effets de la RVLLP dans l’attente de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation (RVLLH). Cette dernière a toutefois fait l’objet d’une expérimentation menée en 2015 dans cinq départements qui doit désormais être généralisée.

A.   La révision des valeurs locatives des locaux professionnels et la mise À jour permanente des tarifs depuis 2019

La dernière loi de finances rectificative pour 2010 ([139]), dont les dispositions sont codifiées et ont été modifiées par la seconde loi de finances rectificative pour 2017 ([140]), a procédé à la révision des valeurs locatives foncières des locaux commerciaux et de ceux affectés à l’exercice d’une activité libérale. Cette révision comportait deux volets : une révision initiale des valeurs locatives entrée en vigueur en 2017, reflétant les situations à cette date des locaux concernés, et un dispositif de mise à jour permanente des évaluations entré en vigueur en 2019, permettant de prendre en compte les évolutions du marché au fur et à mesure qu’elles se produisent.

1.   La révision des valeurs locatives des locaux professionnels est effective depuis l’établissement des bases de 2017

Les résultats de la RVLLP ont été pris en compte pour l’établissement des bases au titre de l’année 2017 et pour la répartition territoriale de la CVAE au titre de l’année 2018. L’effet de la réforme est toutefois atténué par des mécanismes de neutralisation, de planchonnement et de lissage, dans l’attente de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation.

a.   La révision des valeurs locatives des locaux professionnels et l’utilisation d’une méthode tarifaire

Avant la réforme mise en place par la loi de finances rectificative pour 2010, l’une des trois méthodes suivantes était utilisée pour calculer la valeur locative des locaux commerciaux :

– la méthode des baux, qui consiste à relever la valeur locative du local sur un bail de location sous réserve que le local ait été loué à des conditions de prix normales au 1er janvier 1970 ;

– la méthode de l’évaluation par comparaison, qui consiste à attribuer à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d’autres biens de même nature pris comme cas types et existant en 1970, sous réserve qu’une telle comparaison soit possible ;

– enfin, la méthode de l’appréciation directe, qui consiste à déterminer la valeur locative à partir de la valeur vénale du local appréciée en valeur de l’année 1970, affectée d’un taux d’intérêt.

Dans ce contexte, les conditions de la révision des valeurs locatives des locaux commerciaux et de ceux affectés à une activité professionnelle non commerciale (activité libérale) ont été fixées par l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010 ([141]). Cette révision a été déterminée en fonction de l’état du marché locatif à la date de référence du 1er janvier 2013, alors que la date de référence des évaluations foncières était auparavant fixée au 1er janvier 1970 en France métropolitaine et au 1er janvier 1975 dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion.

Cette opération visait à corriger le décrochement existant entre les valeurs locatives utilisées et les valeurs du marché locatif actuel. Le calendrier de la RVLLP s’est déroulé comme suit :

– une expérimentation sur cinq départements (Hérault, Bas-Rhin, Pas-de-Calais, Paris et Haute-Vienne) menée en 2011, qui a permis d’étudier des conséquences de la RVLLH pour les contribuables, les collectivités territoriales et l’État, et dont les conclusions ont été présentées dans un rapport élaboré par la direction générale des finances publiques (DGFiP) remis au Parlement le 17 janvier 2012 ;

– une généralisation des opérations de collecte des informations auprès des propriétaires de locaux professionnels au cours de l’année 2013 permettant le classement des locaux entre différentes catégories ;

– une exploitation des informations collectées par la DGFiP afin de déterminer les paramètres d’évaluation des valeurs locatives dans chaque département (détermination des secteurs d’évaluation, mise au point des grilles tarifaires et délimitation des parcelles pour l’application des coefficients de localisation) en lien avec les commissions départementales créées pour cette opération, au cours des années 2014 et 2015 ;

– une nouvelle simulation pour compléter les travaux réalisés du fait des inquiétudes exprimées par les commissions départementales, et dont les conclusions remises par la DGFiP en novembre 2015 ont conduit à un report de la prise en compte de la réforme, à de nouvelles modalités de calcul du coefficient de neutralisation et à un renforcement du mécanisme de lissage ([142]) ;

– une intégration des valeurs locatives révisées dans les bases d’imposition à compter de l’année 2017 et pour la répartition territoriale de la CVAE à compter de l’année 2018.

En parallèle à cette révision de l’année de référence des valeurs locatives, l’article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010 met en place un nouveau mode de calcul de la valeur locative des locaux professionnels. Cette nouvelle méthode, codifiée à l’article 1498 du CGI ([143]), repose essentiellement sur une méthode tarifaire qui consiste en l’application, à la surface pondérée du local, d’un tarif par mètre carré déterminé sur la base des loyers moyens constatés dans chaque secteur d’évaluation par catégorie de propriétés. Ces différentes catégories sont déterminées en fonction de la nature, de la destination, de l’utilisation, des caractéristiques physiques, de la situation et de la consistance de la propriété ou de la fraction de propriété.

Un décret du 10 octobre 2011 ([144]) a défini 10 sous-groupes de locaux à usage commercial ou professionnel, chaque sous-groupe se subdivisant ensuite en plusieurs catégories. Au total, 39 catégories de locaux ont été codifiées à l’article 310 Q de l’annexe 2 de la partie réglementaire du CGI.

LES CATÉGORIES DE LOCAUX PROFESSIONNELS POUR LA DÉTERMINATION
DES VALEURS LOCATIVES

Sous-groupes

Catégories

Sous-groupe I : magasins et lieux de vente (MAG)

Catégorie 1 : boutiques et magasins sur rue

Catégorie 2 : commerces sans accès direct sur la rue

Catégorie 3 : magasins appartenant à un ensemble commercial

Catégorie 4 : magasins de grande surface (surface principale comprise entre 400 et 2 500 m²)

Catégorie 5 : magasins de très grande surface (surface principale supérieure ou égale à 2 500 m²)

Catégorie 6 : stations-service, stations de lavage et assimilables

Catégorie 7 : marchés

Sous-groupe II : bureaux et locaux divers assimilables (BUR)

Catégorie 1 : locaux à usage de bureaux d’agencement ancien

Catégorie 2 : locaux à usage de bureaux d’agencement récent

Catégorie 3 : locaux assimilables à des bureaux, mais présentant des aménagements spécifiques

Sous-groupe III : lieux de dépôt ou de stockage et parcs de stationnement (DEP)

Catégorie 1 : lieux de dépôt à ciel ouvert et terrains à usage commercial ou industriel

Catégorie 2 : lieux de dépôt couverts

Catégorie 3 : parcs de stationnement à ciel ouvert

Catégorie 4 : parcs de stationnement couverts

Catégorie 5 : installations spécifiques de stockage

Sous-groupe IV : ateliers et autres locaux assimilables (ATE)

Catégorie 1 : ateliers artisanaux

Catégorie 2 : locaux utilisés pour une activité de transformation, de manutention ou de maintenance

Catégorie 3 : chenils, viviers et autres locaux assimilables

Sous-groupe V : hôtels et locaux assimilables (HOT)

Catégorie 1 : hôtels « confort » (4 étoiles et plus, ou confort identique)

Catégorie 2 : hôtels « supérieur » (2 ou 3 étoiles, ou confort identique)

Catégorie 3 : hôtels « standard » (1 étoile, ou confort identique)

Catégorie 4 : foyers d’hébergement, centres d’accueil, auberges de jeunesse

Catégorie 5 : hôtels-clubs, villages de vacances et résidences hôtelières

Sous-groupe VI : établissements de spectacles, de sports et de loisirs (SPE)

Catégorie 1 : salles de spectacles et locaux assimilables

Catégorie 2 : établissements ou terrains réservés à la pratique d’un sport ou à usage de spectacles sportifs

Catégorie 3 : salles de loisirs diverses

Catégorie 4 : terrains de camping confortables (3 étoiles et plus, ou confort identique)

Catégorie 5 : terrains de camping ordinaires (1 ou 2 étoiles, ou confort identique)

Catégorie 6 : établissements de détente et de bien-être

Catégorie 7 : centres de loisirs, centres de colonies de vacances, maisons de jeunes

Sous-groupe VII : établissements denseignement et locaux assimilables (ENS)

Catégorie 1 : écoles et institutions privées exploitées dans un but non lucratif

Catégorie 2 : établissements d’enseignement à but lucratif

Sous-groupe VIII : cliniques et établissements du secteur sanitaire et social (CLI)

Catégorie 1 : cliniques et établissements hospitaliers

Catégorie 2 : centres médico-sociaux, centres de soins, crèches, haltes-garderies

Catégorie 3 : maisons de repos, maisons de retraite (médicalisées ou non)

Catégorie 4 : centres de rééducation, de thalassothérapie, établissements thermaux

Sous-groupe IX : carrières et établissements industriels non évalués selon la méthode comptable (IND)

Catégorie 1 : établissements industriels nécessitant un outillage important autre que les carrières et assimilés

Catégorie 2 : carrières et établissements assimilables

Sous-groupe X : établissements présentant des caractéristiques exceptionnelles

Catégorie 1 : locaux ne relevant d’aucune des catégories précédentes par leurs caractéristiques sortant de l’ordinaire

Source : article 310 Q de l’annexe 2 du CGI.

Les tarifs par mètre carré sont déterminés sur la base des loyers moyens constatés dans chaque secteur d’évaluation par catégorie de propriétés. Ces secteurs d’évaluation regroupent les communes ou sections cadastrales de communes qui, dans un département, présentent un marché locatif homogène. À défaut, lorsque les loyers sont en nombre insuffisant ou ne peuvent être retenus, ces tarifs sont déterminés par comparaison avec les tarifs fixés pour les autres catégories de locaux du même sous-groupe du même secteur d’évaluation ou, à défaut, dans des secteurs d’évaluation présentant des niveaux de loyers similaires dans le département ou dans un autre département.

Les tarifs peuvent ensuite être majorés de 1,1, 1,15, 1,2 ou 1,3 ou minorés de 0,7, 0,8, 0,85 ou 0,9 par application d’un coefficient de localisation destiné à tenir compte de la situation particulière de la parcelle d’assise de la propriété au sein du secteur d’évaluation.

La surface pondérée d’un local est obtenue à partir de la superficie de ses différentes parties, réduite, le cas échéant, au moyen de coefficients pour tenir compte de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques respectives. L’article 324 Z de l’annexe 3 de la partie réglementaire du CGI précise les modalités d’application de cette pondération : lorsque l’une des parties d’un local « a une valeur dutilisation réduite par rapport à laffectation principale du local, la superficie de cette partie est réduite par application dun coefficient fixé à 0,5 lorsque cette partie est couverte et à 0,2 dans le cas contraire ».

Enfin, les locaux exceptionnels qui ne peuvent être rattachés à aucune des catégories de la grille tarifaire sont évalués par voie d’appréciation directe, en appliquant un taux de 8 % à la valeur vénale de la propriété ou fraction de propriété, telle qu’elle serait constatée si elle était libre de toute location ou occupation. À défaut, la valeur vénale de la propriété est déterminée en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée à la date de référence par comparaison avec celle qui ressort de transactions relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction de la propriété à la date de référence. La valeur locative des propriétés est, sous réserve de la mise à jour, déterminée au 1er janvier 2013 ou, pour celles créées après le 1er janvier 2017, au 1er janvier de l’année de leur création.

b.   Les mécanismes de neutralisation, de planchonnement et de lissage de la RVLLP

Afin d’atténuer les effets de transfert d’imposition entre contribuables, et dans l’attente de la RVLLH, plusieurs mécanismes correctifs ont été mis en place par la loi de finances rectificative pour 2010 précitée, renforcés par la loi de finances rectificative pour 2015 ([145]) puis codifiés par la seconde loi de finances rectificative pour 2017 ([146]).

En premier lieu, en vue de l’établissement des impôts directs locaux uniquement (et non la répartition territoriale de la CVAE), les valeurs locatives des locaux professionnels sont corrigées par un coefficient de neutralisation visant à maintenir constantes les proportions des locaux professionnels et des locaux d’habitation dans l’assiette des taxes locales perçues par chaque collectivité territoriale, dans l’attente de la RVLLH. Ce coefficient est égal, pour chaque taxe et chaque collectivité territoriale, au rapport entre les valeurs locatives non révisées au 1er janvier 2017 et celles révisées au 1er janvier 2013 (I et II de l’article 1518 A quinquies du CGI).

En second lieu, les variations de valeur locative des locaux professionnels sont réduites de moitié (III de l’article 1518 A quinquies du CGI – mécanisme de planchonnement) et les variations de cotisations d’impôts directs locaux font l’objet d’un lissage (article 1518 E du CGI). Ces mécanismes sont applicables de 2017 à 2025. Ils ne s’appliquent pas aux locaux créés après le 1er janvier 2017 ou ayant fait l’objet après cette date d’un changement de consistance de plus de 10 % de la surface d’affectation ou d’utilisation.

2.   La mise à jour permanente des évaluations des valeurs locatives est effective depuis les impositions de 2019

La loi de finances rectificative pour 2010 prévoit également un mécanisme de mise à jour permanente des paramètres d’évaluation des valeurs locatives afin d’éviter une nouvelle désynchronisation des bases fiscales avec la réalité du marché locatif. Initialement prévue pour entrer en vigueur dès 2018, la mise à jour annuelle des tarifs a été reportée d’un an puis codifiée à l’article 1518 ter du CGI par la seconde loi de finances rectificative pour 2017 ([147]).

Cet article dispose que les tarifs « sont mis à jour par ladministration fiscale à partir de lévolution des loyers constatés dans les déclarations prévues à larticle 1498 bis » du CGI. Ce dernier dispose que les contribuables professionnels sont tenus de transmettre à l’administration fiscale les informations relatives à chacun des locaux professionnels dont ils sont locataires au 1er janvier de l’année. Ces tarifs sont mis à jour chaque année dans les conditions fixées par le décret du 5 décembre 2018 portant mise à jour annuelle des tarifs et des valeurs locatives des locaux professionnels ([148]).

Ce dernier, codifié à l’article 334 A de l’annexe 2 de la partie réglementaire du CGI, a précisé la méthode de mise en œuvre de la mise à jour permanente des tarifs. Il est désormais prévu que les tarifs sont mis à jour chaque année, en vue de l’établissement des impositions de l’année suivante, en appliquant aux derniers tarifs publiés un coefficient d’évolution calculé, pour chaque catégorie dans chaque secteur d’évaluation, en faisant la moyenne des coefficients d’évolution annuelle des trois années précédant l’année de la mise à jour (par exemple, pour la grille tarifaire 2019, détermination des coefficients d’évolution constatés entre 2015/2016, 2016/2017 et 2017/2018, puis calcul de la moyenne des trois coefficients). Lorsque ces loyers sont en nombre insuffisant ou ne peuvent être retenus, ils sont mis à jour par application d’un coefficient départemental qui est calculé en faisant la moyenne des coefficients d’évolution départementaux annuels des trois années précédant l’année de la mise à jour.

En moyenne, le coefficient d’évolution appliqué aux tarifs 2017 pour obtenir les tarifs 2019 était ainsi de + 0,2 % au niveau national. Il n’est pas tenu compte de la progression forfaitaire de ces valeurs en 2018. Il est en effet rappelé que, en l’absence de revalorisation au réel en 2018 du fait de difficultés de collecte des informations, les bases imposables ont été revalorisées selon l’inflation constatée (+ 1,2 %), soit à un niveau supérieur à celui qui aurait résulté de l’application de la méthode de mise à jour au réel.

Les tarifs par catégorie et secteur d’évaluation ne sont pas les seuls éléments à faire l’objet d’une mise à jour permanente. L’article 1518 ter du CGI dispose également que les commissions départementales des valeurs locatives des locaux professionnels (CDVLLP), créées par la loi de finances rectificative pour 2010 et dont la composition est définie par l’article 1650 B du CGI, peuvent modifier chaque année l’application des coefficients de localisation, après avis des commissions communales ou intercommunales des impôts directs (CCID ou CIID), respectivement prévues aux articles 1650 et 1650 A du même code.

Enfin, l’article 1518 ter du CGI prévoit, l’année qui suit celle du renouvellement des conseils municipaux, une mise à jour des secteurs d’évaluation, des grilles tarifaires par catégorie et par secteur d’évaluation, des parcelles auxquelles s’appliquent un coefficient de localisation ainsi que la possibilité de créer de nouveaux sous-groupes et catégories de locaux.

Cette révision générale doit être effectuée dans les conditions fixées par l’article 1504 du CGI qui dispose que la CDVLLP dispose d’un délai de deux mois, à compter de la date à laquelle lui sont remis les avant-projets élaborés par l’administration fiscale, pour établir des projets de délimitation des secteurs d’évaluation, de tarification par catégorie et de délimitation des parcelles auxquelles s’applique un coefficient de localisation. À l’expiration du délai de deux mois, les projets ou, à défaut, les avant-projets sont transmis aux CCID et aux CIID qui disposent d’un délai de trente jours pour transmettre leur avis à la CDVLLP. En cas d’accord entre la CCID, la CIID et la CDVLLP, les projets sont arrêtés par la CDVLLP puis publiés et notifiés. En cas de désaccord pendant plus d’un mois ou de décision non conforme aux projets approuvés par la CCID et la CIID consultées, l’administration fiscale saisit la commission départementale des impôts directs locaux (CDIDL). Cette dernière dispose d’un délai de trente jours pour statuer. À défaut, les secteurs d’évaluation, les tarifs et les parcelles des coefficients de localisation sont arrêtés par le représentant de l’État dans le département.

Lorsque les décisions relatives aux tarifs prises par la CDVLLP ou la CDIDL sont manifestement illégales, l’administration fiscale saisit, avant leur notification ou leur publication, la CDIDL afin qu’elle élabore de nouveaux tarifs. À défaut de nouveaux tarifs conformes dans un délai de trente jours, le représentant de l’État dans le département arrête les tarifs.

Comitologie applicable À la dÉtermination des valeurs locatives
des locaux professionnels

 

Source : commission des finances.

La comitologie applicable à la détermination des valeurs
locatives des locaux professionnels

Commission communale des impôts directs (CCID) article 1650 du CGI :

« Dans chaque commune, il est institué une commission communale des impôts directs composée de sept membres, à savoir : le maire ou ladjoint délégué, président, et six commissaires.

« Dans les communes de plus de 2 000 habitants, le nombre de commissaires siégeant à la commission communale des impôts directs ainsi que celui de leurs suppléants est porté de six à huit.

« Les commissaires doivent être de nationalité française ou ressortissants dun État membre de lUnion européenne, être âgés de 25 ans au moins, jouir de leurs droits civils, être inscrits aux rôles des impositions directes locales dans la commune, être familiarisés avec les circonstances locales et posséder des connaissances suffisantes pour lexécution des travaux confiés à la commission.

« Un commissaire doit être domicilié en dehors de la commune.

« Lorsque le territoire de la commune comporte un ensemble de propriétés boisées de 100 hectares au minimum, un commissaire doit être propriétaire de bois ou forêts. »

Commission intercommunale des impôts directs (CIID) – article 1650 A du CGI :

« Dans chaque EPCI […], il est institué une commission intercommunale des impôts directs composée de onze membres, à savoir le président de lEPCI ou un vice-président délégué et dix commissaires. […]

« Les commissaires doivent remplir les mêmes conditions que celles édictées […] pour être membres de la commission communale des impôts directs [et] doivent être inscrits aux rôles des impositions directes locales de lEPCI ou des communes membres.

« Un des commissaires est domicilié en dehors du périmètre de lEPCI. »

Commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels (CDVLLP) – article 1650 B du CGI

« Il est institué dans chaque département une commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels comprenant deux représentants de ladministration fiscale, dix représentants des collectivités territoriales et des EPCI à fiscalité propre, neuf représentants des contribuables désignés par le représentant de lÉtat dans le département ainsi que lensemble des députés et sénateurs élus dans le département lorsque celui-ci compte moins de onze parlementaires. Lorsque le département compte onze parlementaires ou plus, les députés et sénateurs sont désignés, respectivement, par lAssemblée nationale et le Sénat au prorata du nombre de députés et de sénateurs élus dans le département, dans la limite totale de dix membres. Le nombre de parlementaires nest pas pris en compte pour le calcul dun quorum. »


Commission départementale des impôts directs locaux (CDIDL) – article 1650 C du CGI :

« Il est institué dans chaque département une commission départementale des impôts directs locaux présidée par le président du tribunal administratif territorialement compétent ou un membre de ce tribunal délégué par lui. Cette commission comprend trois représentants de ladministration fiscale, six représentants des collectivités territoriales et des EPCI à fiscalité propre, ainsi que cinq représentants des contribuables désignés par le représentant de lÉtat dans le département. »

B.   L’expÉrimentation de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation

L’absence de RVLLH, en dépit de majorations forfaitaires annuelles, est génératrice de nombreuses difficultés. Elle conduit à des inégalités entre contribuables, en particulier pour les locaux d’habitation anciens dans la mesure où la date de référence des évaluations foncières est toujours fixée au 1er janvier 1970 en France métropolitaine et au 1er janvier 1975 dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion. En conséquence, ces valeurs locatives sont désormais éloignées de la réalité du marché locatif immobilier. Cette déconnexion croissante crée des iniquités entre locaux sous-évalués et surévalués.

De plus, si la suppression de la TH sur les résidences principales à l’horizon 2023 pour l’ensemble des contribuables doit permettre de résoudre une partie du problème relatif au décrochement des bases, le Rapporteur général souligne que ces dernières seront toujours utilisées pour l’établissement de la TFPB, de la TH sur les résidences secondaires et de l’ensemble des taxes annexes telles que la TEOM. De plus, les locaux à usage d’habitation et les locaux professionnels sont soumis à la TFPB : or, depuis le 1er janvier 2017, de nouveaux principes d’évaluation s’appliquent aux locaux professionnels alors que le système d’évaluation non révisée continue de s’appliquer aux locaux à usage d’habitation.

Dans ce contexte, le Rapporteur général estime qu’il est impératif de procéder au lancement de la RVLLH, afin de mettre un terme aux modalités actuelles de détermination de la valeur locative de ces locaux, jugées particulièrement complexes et obsolètes. Cette révision est d’autant plus justifiée qu’elle a déjà fait l’objet d’une expérimentation menée par la DGFiP en 2015 dans cinq départements (Charente-Maritime, Nord, Orne, Paris et Val‑de‑Marne).

1.   Les modalités complexes de détermination de la valeur locative des locaux à usage d’habitation

Les valeurs locatives des locaux à usage d’habitation sont évaluées selon un processus d’une grande complexité qui fait obstacle à la fois à la lisibilité, à l’acceptabilité et à l’équité des impôts locaux pour lesquels elles sont utilisées comme base d’imposition.

L’évaluation des locaux d’habitation en application de l’article 1496 du CGI permet de déterminer une valeur locative cadastrale (VLC) qui représente, en théorie, le loyer annuel que pourrait produire le local. Cette VLC est calculée par référence au marché locatif à la date du 1er janvier 1970 en France métropolitaine et au 1er janvier 1975 dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion.

La VLC est déterminée par comparaison avec celle de locaux de référence choisis, dans la commune, pour chaque nature et catégorie de locaux, en fonction du loyer des locaux loués librement à des conditions de prix normales et de manière à assurer l’homogénéité des évaluations dans la commune et de commune à commune. Un tarif particulier au mètre carré de surface pondérée est ainsi établi, par comparaison à un local de référence, par commune ou secteur de commune, pour chaque nature de construction (maison individuelle, immeuble collectif, dépendances bâties isolées) et catégorie de locaux (caractéristiques physiques générales) représentés dans la localité.

Ce tarif est ensuite appliqué à une surface pondérée du local de référence, déterminée en affectant la surface réelle de correctifs destinés à tenir compte de la nature des différentes parties du local, ainsi que de sa situation, de son importance, de son état et de son niveau d’équipement.

Ainsi, afin de déterminer la VLC, l’administration suit treize étapes successives qui sont retracées dans le tableau ci-dessous.

LES DIFFÉRENTES ÉTAPES DE LA DÉTERMINATION DE LA VALEUR LOCATIVE d’un local d’habitation pour le calcul de la TFPB

1

La propriété à usage d’habitation est d’abord classée dans une catégorie en fonction des éléments de confort qu’elle est supposée détenir. Il existe huit catégories elles-mêmes subdivisées en sous-catégories allant du local très dégradé (catégorie 8) au grand luxe (catégorie 1). Les critères à considérer sont liés au caractère architectural de l’immeuble, à la qualité de la construction, à la distribution du local (pièces de réception, locaux d’hygiène) et aux équipements (eau, sanitaires, chauffage, ascenseur, tapis d’escalier). Ces derniers doivent être adaptés aux circonstances locales pour tenir compte des caractéristiques traditionnelles de l’habitat et des modes particuliers de construction. Il est rappelé que des locaux de référence sont choisis par nature de construction pour illustrer chacune des catégories de la classification communale et servir de termes de comparaison.

2

Une surface pondérée comparative est ensuite calculée. L’administration fiscale part de la surface réelle au sol du local qui est ensuite pondérée par un correctif d’importance variant en fonction de l’appartenance à plusieurs catégories de locaux : pour une maison individuelle, les 20 premiers mètres carrés sont affectés d’un coefficient variant de 3 (en catégorie 1) à 1,1 (en catégorie 8) ; les mètres carrés suivants sont affectés d’un coefficient uniforme de 0,9 jusqu’à un plafond correspondant à la norme de la catégorie ; les mètres carrés supplémentaires sont affectés d’un coefficient de 0,75. Enfin, un coefficient de pondération variable de 0,2 à 0,6 est appliqué à la surface de certains éléments pour tenir compte du service rendu dans le cadre de la valeur d’usage du local (garages, buanderies, caves, greniers, celliers, etc.), en fonction de la qualité des matériaux employés, de la nature des éléments secondaires en cause ainsi que de l’importance plus ou moins grande de ces éléments.

3

La surface pondérée nette est ensuite déterminée grâce à un correctif d’entretien appliqué à la surface pondérée comparative, pour tenir compte de l’état d’entretien de la partie principale. Ce dernier varie de 0,8 (construction ayant besoin de grosses réparations dans toutes ses parties) à 1,2 (construction n’ayant besoin d’aucune réparation).

4

Un coefficient de situation générale et puis un coefficient de situation particulière sont ensuite affectés à la surface pondérée nette en fonction de la situation générale du bien dans la commune (proximité ou éloignement du centre-ville, cadre tranquille, risques d’inondation, proximité de promenades ou de lieux de loisir, etc.) et de sa situation particulière (exposition, présence d’espaces verts, présence ou absence de dépendances non bâties, présence de vues de qualité, très bonne exposition du local, présence d’odeurs, etc.). Ce correctif d’ensemble doit également tenir compte de la présence ou de l’absence d’un ascenseur, en fonction du niveau du local (entre + 0,05 et – 0,15).

5

Le confort de l’habitation est ensuite examiné pour obtenir une équivalence superficielle. Les divers éléments, supposés illustrer un surcroît ou une déficience de confort, ajoutent ou retranchent des mètres carrés à la surface pondérée. Ainsi, une salle de bain augmente la surface de 5 m2. Chaque pièce de l’habitation bénéficiant d’un chauffage central accroît la surface de 2 m2. Un vide-ordures compte pour 3 m2 et l’eau courante pour 4 m2.

6

Les mêmes calculs sont effectués pour les dépendances telles que les garages, les places de stationnement, les hangars, etc. Un garage ou une place de stationnement dans un garage collectif doté d’une prise d’eau courante est, par exemple, davantage taxé que la même dépendance qui n’en bénéficie pas.

7

Le total de ces pondérations successives donne la surface pondérée totale.

8

La surface pondérée totale est multipliée par le tarif d’évaluation de la catégorie dans la partie de commune concernée pour donner la valeur locative cadastrale de 1970, date de la dernière révision des bases pour la France métropolitaine. Ce tarif est déterminé à partir d’un local de référence. Le descriptif et les valeurs locatives des locaux de référence sont déterminés au moyen des actes de location et sont consignés dans des procès-verbaux établis pour chaque commune, en concertation avec les CCID. Les nouvelles évaluations ainsi que les procès-verbaux complémentaires sont présentés chaque année pour avis à la CCID.

9

Cette valeur locative de 1970 est ensuite actualisée en valeur de 1980, année de la dernière et unique actualisation intervenue pour tenir compte de l’évolution locale du prix des loyers, qui s’était faite au moyen de coefficients départementaux.

10

La valeur locative de 1980 est enfin revalorisée chaque année par un coefficient fixé au niveau national par la loi de finances et à compter de 2018, selon les modalités prévues au dernier alinéa de l’article 1518 bis du CGI, qui prennent en compte l’indice d’évolution des prix à la consommation harmonisé (IPCH) de l’année précédente.

11

Cette VLC revalorisée est divisée par deux pour donner le montant du revenu net cadastral, pour tenir compte des frais de gestion, d’assurance, d’amortissement, d’entretien et de réparation.

12

Le revenu cadastral se voit affecter un taux de taxe foncière sur les propriétés bâties voté par chaque collectivité concernée (commune, intercommunalité et département), auquel s’ajoute la part de la TEOM et diverses taxes annexes. Le produit du revenu cadastral par le taux détermine l’impôt dû à chaque collectivité territoriale.

13

Le total de l’impôt, toutes collectivités territoriales confondues, est majoré d’un taux de 3 % représentant le prélèvement de l’État pour frais de gestion.

Source : commission des finances.

Par dérogation, les locaux d’habitation qui présentent un caractère exceptionnel sont évalués selon les méthodes applicables aux locaux professionnels avant la RVLLP, c’est-à-dire par bail ou à défaut, par comparaison ou, le cas échéant, par voie d’appréciation directe en fonction de leur valeur vénale.

Enfin, les changements affectant les locaux sont pris en compte annuellement : l’article 1406 du CGI dispose que les constructions nouvelles, ainsi que les changements de consistance ou d’affectation des propriétés, sont portés par les propriétaires à la connaissance de l’administration fiscale, dans les quatre-vingt-dix jours de leur réalisation définitive. L’article 1517 du CGI dispose également que l’administration fiscale procède annuellement à la constatation des constructions nouvelles et des changements de consistance ou d’affectation des propriétés bâties ainsi qu’à la constatation des changements d’utilisation des locaux. Il en va de même pour les changements de caractéristiques physiques ou d’environnement. Les valeurs locatives résultant de ces changements restent appréciées à la date de référence de la précédente révision générale, soit le 1er janvier 1970 pour la France métropolitaine.

Au-delà de la complexité du dispositif et de l’obsolescence des bases de référence, qui suscitent par construction des inégalités entre contribuables pourtant situés dans une situation comparable, cette méthode de détermination de la valeur locative est peu transparente pour le contribuable.

2.   L’expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation menée en 2015 dans cinq départements

En application de l’article 74 de la loi de finances rectificative pour 2013, une expérimentation de la RVLLH a été menée dans cinq départements et a donné lieu à la remise d’un rapport d’évaluation au Parlement en 2015 ([149]).

a.   Les modalités de calcul de la valeur locative des locaux à usage d’habitation dans le cadre de l’expérimentation

La loi de finances rectificative pour 2013 dispose que la date de référence pour déterminer la révision des valeurs locatives dans les départements soumis à l’expérimentation est fixée au 1er janvier 2015. Elle détermine également de nouvelles modalités de détermination de la valeur locative des propriétés bâties à usage d’habitation : la valeur locative de chaque propriété ou fraction de propriété est déterminée en fonction de l’état du marché locatif et tient compte de la nature, de la situation et de la consistance de la propriété. La valeur locative des locaux présentant un caractère exceptionnel est déterminée par voie d’appréciation directe.

Sont distingués quatre sous-groupes de locaux d’habitation par nature : les maisons individuelles ; les appartements situés dans les immeubles collectifs ; les locaux d’habitation qui présentent un caractère exceptionnel ; les dépendances isolées telles que garage, cave, grenier, piscine, terrain de tennis, etc. Les propriétés de chaque sous-groupe sont classées par catégorie en fonction de leur consistance, sauf le sous-groupe relatif aux habitations qui présentent un caractère exceptionnel, qui fait l’objet d’un classement en fonction de leur utilisation.

L’article prévoit également que soient institués dans chacun des cinq départements d’expérimentation des secteurs d’évaluation représentant un marché locatif homogène et un tarif au mètre carré fixé pour chaque catégorie de locaux, à partir des loyers constatés dans chaque secteur d’évaluation. Pour la détermination de ces loyers, il n’est pas tenu compte des loyers des habitations à loyer modéré ni des loyers sous le régime de la loi de 1948 ([150]), afin d’approcher au mieux l’état réel du marché locatif. Dans le cas où les loyers sont en nombre insuffisant ou non significatifs, les tarifs sont déterminés par comparaison avec ceux qui sont appliqués pour des propriétés de la même catégorie ou, à défaut, du même sous-groupe dans des secteurs d’évaluation présentant des niveaux de loyers similaires.

Il est ensuite précisé que la valeur locative des propriétés est obtenue par application du tarif par mètre carré à la consistance du local. Cette dernière s’entend comme la superficie des planchers des locaux en application de la méthode dite « Carrez » ([151]), majorée de la superficie au sol des dépendances affectée de coefficients. Dans le cas où il est impossible d’utiliser cette méthode, la valeur locative est déterminée par voie d’appréciation directe, en appliquant un taux à définir dans le cadre de l’expérimentation à la valeur vénale de l’immeuble.

Enfin, l’article prévoit que les propriétaires étaient tenus de souscrire une déclaration relative à chacune des propriétés détenues dans les départements où a été menée l’expérimentation, permettant à l’administration de disposer des données nécessaires dont notamment le montant annuel du loyer exigible au 1er janvier 2015 pour les propriétés données en location. Cette déclaration était souscrite par voie dématérialisée pour le département de Paris. L’absence de production de la déclaration dans les délais, tout comme les omissions ou inexactitudes, conduisaient à l’application d’une amende de 150 euros.

b.   Les principales conclusions du rapport remis au Parlement à l’issue de l’expérimentation menée en 2015

L’expérimentation s’est déroulée dans cinq départements représentatifs de la diversité des territoires français : la Charente-Maritime, le Nord, l’Orne, Paris et le Val-de-Marne ([152]). Pour rappel, l’article 74 de la loi de finances rectificative pour 2013 prévoyait :

– le classement des locaux d’habitation dans un des quatre sous-groupes suivants : les maisons individuelles, les appartements situés dans les immeubles collectifs, les locaux d’habitation présentant un caractère exceptionnel et les dépendances isolées ;

– le classement des trois premiers sous-groupes par catégorie en fonction de leur consistance, c’est-à-dire de leur superficie pondérée, et le classement des dépendances isolées par catégorie en fonction de leur utilisation.

Ce classement s’est traduit pour l’expérimentation par la création de 16 catégories pour le sous-groupe des maisons (de 50 mètres carrés à 250 mètres carrés par rang de 15 mètres carrés), de 18 catégories pour le sous-groupe des appartements (de 15 mètres carrés à 200 mètres carrés par rang de 5 mètres carrés), de 2 catégories pour le sous-groupe des maisons exceptionnelles (plus ou moins de 60 mètres carrés) et de 6 catégories pour le sous-groupe des dépendances isolées (garage, box, parking privé ; cave, cellier, buanderie ; grenier ; terrain de tennis ; piscine ; autres). Le rapport préconise toutefois de diviser par deux le nombre de catégories applicables pour les sous-groupes des maisons et des appartements, ce dernier étant dans l’expérimentation générateur d’un morcellement excessif.

Pour les simulations relatives aux calculs des cotisations, il est tenu compte de la révision des locaux à usage d’habitation, mais également de celle des locaux professionnels, puisque les mécanismes de neutralisation de la RVLLP doivent cesser une fois la RVLLH effectuée. La DGFiP a retenu trois hypothèses différentes :

– hypothèse 1 : purement théorique, elle détaille l’évolution de cotisation de TFPB qui résulterait de l’application aux valeurs locatives révisées brutes des taux d’imposition à leur niveau existant. Le produit fiscal des collectivités territoriales augmenterait fortement, allant à l’encontre de l’esprit de la loi en faveur d’une réforme à niveau global constant de fiscalité locale ;

– hypothèse 2 : elle détaille l’évolution de cotisation de TFPB qui résulterait de l’application aux valeurs locatives révisées brutes de taux corrigés d’un facteur inverse à l’augmentation constatée sur les valeurs locatives révisées, de manière à limiter les augmentations de cotisation constatées ;

– hypothèse 3 : elle détaille l’évolution de cotisation de TFPB qui résulterait de l’application aux valeurs locatives révisées brutes de taux corrigés et en complétant le dispositif d’un système de neutralisation des valeurs locatives des locaux non concernés par les révisions (locaux industriels et locaux évalués au barème) afin de neutraliser les baisses de ressources des collectivités territoriales.

Ces trois hypothèses sont déclinées en deux scénarios prévus par la loi :

– scénario 1 : les paramètres d’évaluation (sectorisation et tarifs) s’appuyant sur les données collectées du parc privé sont appliqués aux locaux du parc privé et à ceux du parc social :

– scénario 2 : deux sectorisations et deux grilles tarifaires sont utilisées selon la nature des locaux (privé ou social).

En effet, la question de la qualité et de la représentativité des loyers peut se poser, notamment au regard de la proportion de propriétaires bailleurs, et de la spécificité des baux ne relevant pas du marché locatif libre comme les logements sociaux.

La DGFiP conclut que, pour répondre à l’esprit de la réforme et assurer sa neutralité sur les ressources fiscales des collectivités territoriales, le calcul des cotisations devrait être réalisé dans le cadre de l’hypothèse 3, par défaut selon le scénario 1. Elle privilégie toutefois un nouveau scénario, non évoqué par la loi, pour le logement social : celui d’un abattement spécifique, par exemple de 50 %, sur les tarifs catégoriels pour la détermination des valeurs locatives des logements sociaux. Elle estime toutefois que la détermination de la valeur locative d’un local d’habitation n’a pas vocation à prendre en compte la situation personnelle de son occupant : la valeur locative est attachée au bien et à sa consistance foncière, et en aucun cas à la qualité de son propriétaire ou de son occupant.

Le rapport souligne également que, dans le cadre de ce scénario de référence, tous départements confondus, les trois niveaux de collectivités territoriales (communes, intercommunalités et départements) ont une ressource fiscale quasi inchangée.

Toutefois, les locaux d’habitation enregistrent une baisse moyenne de cotisation de – 2,6 %, tandis que les locaux professionnels augmentent de + 7,7 %. Toutefois, les logements d’habitation du parc privé augmentent de + 2,9 % tandis que les logements d’habitation du parc social enregistrent une baisse de – 50,4 %. Ainsi, hors logements sociaux, les valeurs locatives des locaux professionnels et celles des locaux d’habitation augmentent dans des proportions comparables, rendant plus acceptables l’entrée en vigueur de la RVLLH et la correction des taux d’imposition à cette échéance.

VARIATIONS DE COTISATION
(HYPOTHÈSE 3/SCÉNARIO alternatif)

(en milliers d’euros)

Nature du local

Nombre de locaux

Part des locaux

Cotisation système 1970

Cotisation révisée

Évolution des cotisations

Évolution des cotisations

Locaux dhabitation

5 159 619

94,1 %

2 897 407

2 821 268

– 76 138

– 2,6 %

dont locaux du parc privé

4 637 070

84,5 %

2 598 077

2 672 681

74 604

2,9 %

dont locaux du parc social

522 549

9,5 %

299 330

147 587

 150 742

 50,4 %

Locaux professionnels

302 286

5,5 %

986 079

1 062 269

76 189

7,7 %

Locaux industriels et au barème

23 202

0,4 %

262 991

262 991

0

0,0 %

Total

5 485 107

100 %

4 146 477

4 146 527

51

0,0 %

Source : DGFiP, Expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux dhabitation, Simulations relatives aux nouvelles modalités de détermination des valeurs locatives et aux impacts de la réforme, partie 2, 2017.

L’évolution des variations par catégorie laisse toutefois apparaître de plus fortes évolutions. Plus en détail, 58 catégories de locaux voient leur cotisation moyenne baisser et 49 catégories voient leur cotisation moyenne augmenter. Les plus fortes baisses s’observent pour les appartements de 35 à 39 mètres carrés
(– 54 % de variation de cotisation), tandis que les plus fortes hausses concernent les magasins dans un ensemble commercial (+ 122,5 %) et les lieux de dépôt à ciel ouvert (+ 200 %).

Il sera donc nécessaire de prévoir des mécanismes permettant d’atténuer et d’étaler dans le temps les transferts de charge afin de rendre acceptables les conséquences de la révision. Ces évolutions sensibles sur les locaux professionnels sont bien entendu liées à la suppression des dispositifs d’atténuation prévus pour l’entrée en vigueur de la RVLLP.

Pour les locaux professionnels, la DGFiP recommande en conséquence de maintenir le dispositif du planchonnement, et propose l’instauration de nouveaux mécanismes complémentaires :

– un dispositif de lissage des variations de cotisation à la hausse comme à la baisse dont les modalités et la durée sont à définir ;

– un système de minoration ou majoration des tarifs catégoriels par des coefficients de localisation afin de tenir compte de la situation générale de certains quartiers d’habitation (par exemple, éloignement des transports en commun, nuisance ponctuelle liée à de grands travaux, développement particulièrement attractif de certaines infrastructures ou certains moyens de transport, etc.).

Le rapport préconise également quelques grands axes de réflexion en vue de la généralisation de la RVLLH :

– une collecte des informations limitée aux seuls loyers, dans la mesure où les données individuelles attachées aux locaux d’habitation (nature du local et consistance) sont déjà connues de manière fiable par les systèmes d’information de la DGFiP ;

– un allégement de la comitologie applicable à la détermination des valeurs locatives, en diminuant le nombre de commissions consultées, en rallongeant les délais dans lesquels les travaux sont conduits par les commissions et en précisant le rôle ainsi que la composition des différentes commissions ;

– un dispositif de mise à jour permanente des tarifs, de la sectorisation et des parcelles des coefficients de localisation.

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article procède au lancement de la généralisation de la RVLLH : à cette fin, il reprend presque intégralement les nouvelles modalités de calcul mises en œuvre lors de l’expérimentation menée en 2015, tout en tirant les principaux enseignements des simulations réalisées. Il procède également à un allégement de la comitologie applicable pour la détermination des valeurs locatives des locaux commerciaux et à usage d’habitation.

A.   Le lancement de la RVLLH et la simplification des procÉdures DE DÉTERMINATION DES VALEURS LOCATIVES

Le présent article organise la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux à usage d’habitation ou servant à l’exercice d’une activité salariée à domicile. Il propose en conséquence :

– de mettre en place en 2023 une nouvelle procédure de déclaration des montants des loyers auprès des propriétaires bailleurs et d’exploiter les données collectées en remettant en 2024 au Parlement un rapport d’évaluation sur les conséquences financières et fiscales de la RVLLH ;

– de mobiliser en 2025 les commissions départementales des valeurs locatives (CDVL) et les commissions communales des impôts directs (CCID) en vue de la fixation des secteurs d’évaluation et des tarifs, et d’intégrer les nouvelles valeurs locatives dans les rôles d’impositions locales à compter de 2026 ;

– d’instituer un système permanent de mise à jour annuelle de ces nouvelles valeurs locatives afin de prévenir définitivement leur obsolescence.

Il procède également, en matière de détermination des valeurs locatives des locaux professionnels et d’habitation, à des mesures de simplification des travaux des commissions locales. En outre, la première mise à jour des paramètres d’évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels à la suite du prochain renouvellement des conseils municipaux est reportée d’une année.

1.   Le lancement de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation et l’institution d’un système permanent de mise à jour annuelle

Le I dispose que le présent article fixe les conditions de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation et des locaux servant à l’exercice d’une activité salariée à domicile retenues pour l’assiette des impositions directes locales et de leurs taxes additionnelles.

a.   Les nouvelles modalités de calcul des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation

Le A du II reprend le classement des locaux d’habitation institué lors de l’expérimentation menée en 2015, c’est-à-dire un classement en quatre sous-groupes : les maisons individuelles, les appartements situés dans les immeubles collectifs, les locaux d’habitation qui présentent des caractéristiques exceptionnelles et les dépendances isolées. Les deux premiers sous-groupes sont classés par catégorie en fonction de leur consistance, le dernier sous-groupe en fonction de leur utilisation (aucun classement par catégorie ne sera ainsi effectué pour les locaux exceptionnels en raison de leur faible nombre).

Le 1 du B du II dispose que la valeur locative de chaque propriété ou fraction de propriété sera ensuite déterminée en fonction de l’état du marché locatif à la date de référence du 1er janvier 2023. Des modalités de calcul identiques à celles des locaux professionnels et à celles mises en œuvre pour l’expérimentation menée en 2015 sont ensuite retenues : la valeur locative est obtenue par application d’un tarif par mètre carré à la consistance du local.

Le 2 du B du II précise qu’il est constitué dans chaque département, un ou plusieurs secteurs d’évaluation qui regroupent les communes ou sections cadastrales de communes qui, dans le département, présentent un marché locatif homogène. Dans chaque secteur d’évaluation, les tarifs par mètre carré sont déterminés sur la base des loyers moyens constatés par catégorie de propriétés. Le IX du présent article précise que le territoire de la métropole de Lyon additionné au territoire du département du Rhône, ainsi que le territoire de la Ville de Paris, sont assimilés au territoire d’un département.

Comme en 2015, il n’est pas tenu compte, pour la détermination des tarifs, des loyers des locaux donnés en location par des organismes d’habitations à loyer modéré ainsi que des locaux bénéficiant de la réglementation des loyers établie par la loi du 1er septembre 1948 ([153]). Aucune solution nouvelle n’est ainsi mise en œuvre pour ces logements par rapport à la simulation menée en 2015. Toutefois, le VII du présent article dispose que le rapport de simulation du Gouvernement devra examiner « les solutions alternatives à lapplication à ces locaux des tarifs déterminés en application du II ».

Lorsque les loyers sont en nombre insuffisant ou ne peuvent être retenus, les tarifs sont déterminés par comparaison avec les tarifs fixés pour les autres catégories de locaux du même sous-groupe du même secteur d’évaluation, ou à défaut, par comparaison avec ceux qui sont appliqués pour des propriétés de la même catégorie dans des secteurs d’évaluation présentant des niveaux de loyer similaires dans le département ou dans un autre département.

Afin de tenir compte des conclusions du rapport de 2015, et de manière analogue que pour les locaux professionnels, les tarifs par mètre carré pourront ensuite être majorés ou minorés par application d’un coefficient de localisation de 1,1, 1,15, 1,2 ou 1,3 ou de 0,7, 0,8, 0,85 ou 0,9 destiné à tenir compte de la situation particulière de la propriété au sein du secteur d’évaluation.

Le 3 du B du II du présent article dispose ensuite que la consistance des propriétés ou fractions de propriété pour les maisons individuelles et les appartements s’entend de la surface réelle au sol « majorée de la superficie au sol de leurs dépendances, affectée de coefficients fixés par décret, pour tenir compte de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques ». Pour les dépendances isolées, la consistance des propriétés s’entend de la superficie au sol.

Enfin, le C du II précise que la valeur locative des locaux d’habitation qui présentent des caractéristiques exceptionnelles est déterminée par voie d’appréciation directe, en appliquant un taux de 8 % à la valeur vénale de la propriété, telle qu’elle serait constatée si elle était libre de toute location ou occupation. À défaut, la valeur vénale de la propriété est déterminée en ajoutant à la valeur vénale du terrain, par comparaison avec celle qui ressort de transactions relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction de la propriété. Il est précisé que la valeur locative de ces propriétés est déterminée au 1er janvier 2023 ou, pour celles créées après cette date, au 1er janvier de l’année de leur création.

b.   La mise à jour permanente des nouvelles valeurs locatives des locaux à usage d’habitation

Le IV du présent article met en place une procédure de mise à jour permanente des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation, similaire à celle utilisée pour les locaux professionnels et définie à l’article 1518 ter du CGI.

Le A du IV dispose que les tarifs de chaque catégorie dans chaque secteur d’évaluation sont mis à jour par l’administration fiscale à partir de l’évolution des loyers constatés dans les déclarations prévues à l’article 1496 ter du CGI. Ce nouvel article est créé au B du IX. Il dispose que, à compter de 2024, les propriétaires de locaux à usage d’habitation doivent déclarer à l’administration fiscale, avant le 1er juillet de chaque année, les informations relatives aux biens loués et au montant du loyer au 1er janvier de l’année de déclaration. Cette déclaration est souscrite par voie électronique, à l’exception des propriétaires dont la résidence principale n’est pas équipée d’un accès internet. Le VI du présent article prévoit toutefois la mise en œuvre exceptionnelle de cette procédure en 2023 afin de permettre l’élaboration des nouvelles valeurs locatives par l’administration fiscale. Enfin, le J du X prévoit l’application à cette déclaration des dispositions de l’article 1729 C du CGI, qui applique une sanction de 150 euros en cas de défaut de production dans le délai prescrit de la déclaration, ou encore en cas d’omissions ou d’inexactitudes.

En cohérence avec cette mise à jour annuelle des tarifs, le D du IV dispose que la valeur locative des locaux à usage d’habitation est mise à jour chaque année par application du tarif par mètre carré actualisé à la surface pondérée du local.

Le B du IV précise ensuite que la troisième et la cinquième année qui suivent celle du renouvellement général des conseils municipaux, la CDVL peut se réunir afin de modifier l’application des coefficients de localisation après avis des CCID. Pour rappel, cette procédure de révision est annuelle pour les locaux professionnels. En conséquence, le D du IX du présent article rend également biennale la mise à jour des coefficients de localisation pour les locaux professionnels en modifiant l’article 1518 ter du CGI.

Ensuite, le C du IV précise qu’à compter de 2029, chaque année qui suit le renouvellement général des conseils municipaux, il est procédé à une nouvelle délimitation des secteurs d’évaluation, détermination des tarifs et délimitation des parcelles auxquelles s’applique un coefficient de localisation, dans les nouvelles conditions de comitologie décrites ci-dessous.

Enfin, le E du IV dispose que les décisions prises dans le cadre de ces procédures de mise à jour des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation ne peuvent pas être contestées à l’occasion d’un litige relatif à la valeur locative d’une propriété bâtie (définition des secteurs d’évaluation, des coefficients de localisation par parcelle, des tarifs d’évaluation). En revanche, les décisions prises par les CDVL ou l’administration fiscale pourront toujours faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir dans les délais légaux (deux mois). De même, les critères individuels de détermination de la valeur locative d’un bien (consistance du bien, classement dans une catégorie du bien) pourront toujours faire l’objet d’une contestation dans le cadre d’un litige relative à la valeur locative d’une propriété bâtie.

c.   L’évaluation des conséquences de la révision avant septembre 2024 pour une entrée en vigueur en 2026

Le V du A dispose que les résultats de la RVLLH seront pris en compte à compter de l’établissement des bases au titre de l’année 2026. Dans ce cadre, et pour l’établissement de la TFPB, de la CFE, de la TH sur les résidences secondaires et de la TEOM, la valeur locative des propriétés bâties sera corrigée par un coefficient de neutralisation.

Ce dernier est égal, pour chaque taxe et chaque collectivité territoriale, au rapport entre, d’une part, la somme des valeurs locatives calculées en « non révisé » au 1er janvier 2026 des propriétés bâties dans son ressort territorial et, d’autre part, la somme des valeurs locatives révisées de ces mêmes propriétés à la même date. Il s’agit ainsi de neutraliser au niveau de chaque collectivité territoriale les effets de la révision.

Ainsi, le présent article ne tire que partiellement les conclusions de l’expérimentation menée en 2015, qui souhaitait la mise en place de nouveaux mécanismes de lissage et de planchonnement. À ce titre, le rapport d’évaluation prévu au VII du présent article doit proposer « les modalités de mise en place et de sortie des dispositifs de neutralisation et datténuation de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels et dhabitation ».

En effet, le VII prévoit que « le Gouvernement transmet au Parlement, au plus tard le 1er septembre 2024, un rapport retraçant les conséquences de la révision des valeurs locatives des locaux dhabitation pour les contribuables, les collectivités territoriales, les EPCI et lÉtat. Ce rapport examine les modalités selon lesquelles la révision seffectue à produit fiscal constant pour les collectivités territoriales ». Le rapport devra notamment mesurer les transferts de fiscalité entre les catégories de contribuables, et mesurer l’impact de la révision sur les potentiels financier et fiscal des collectivités territoriales, la répartition des dotations de l’État et les instruments de péréquation. Il devra enfin examiner « lopportunité et les conséquences de la mise en place dun dispositif qui adapte lévaluation de la propriété ou fraction de propriété en fonction de ses spécificités ».

2.   L’allégement de la comitologie applicable pour la détermination des valeurs locatives et le report d’une année de la première mise à jour des locaux professionnels

Le présent article procède à une simplification de la comitologie applicable à la détermination des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation, et procède en conséquence aux mêmes modifications pour celle applicable à la détermination des valeurs locatives des locaux professionnels. Il repousse également d’une année la mise à jour applicable pour la première fois aux locaux professionnels à la suite du prochain renouvellement des conseils municipaux. Enfin, il modifie les règles relatives à la composition de ces commissions.

a.   L’allégement de la comitologie utilisée pour la détermination des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation et professionnels

Le III du présent article institue une nouvelle comitologie pour la détermination des valeurs locatives des locaux d’habitation. La commission départementale des valeurs locatives (CDVL), anciennement commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels (CDVLLP), dispose d’un délai de trois mois (au lieu de deux mois auparavant) à compter de la date à laquelle lui sont remis les avant-projets élaborés par l’administration pour établir des projets de délimitation des secteurs d’évaluation, de détermination des tarifs et de délimitation des parcelles auxquelles s’applique un coefficient de localisation.

Au plus tard à l’expiration du délai de trois mois, les avant-projets sont transférés aux commissions communales des impôts directs (CCID). En effet, la saisine des CIID n’est pas nécessaire dans la mesure où la RVLLH n’a pas d’impacts en matière de fiscalité économique. La CCID dispose d’un délai de deux mois (au lieu d’un mois auparavant) pour transmettre son avis à la CDVL. En cas d’accord, cette dernière arrête les secteurs d’évaluation, les tarifs applicables et les parcelles des coefficients de localisation. En cas de désaccord persistant pendant plus de deux mois (contre un mois auparavant), ces derniers sont arrêtés par le représentant de l’État dans le département (sans saisine préalable de la CDIDL).

Aussi, les délais d’examen des paramètres d’évaluation des locaux à usage d’habitation sont rallongés afin de permettre un temps d’échange plus approfondi entre les différentes commissions. En effet, lors de la phase initiale de mise en place de la RVLLP, le délai d’un mois laissé à la CDVLLP pour examiner les demandes des commissions locales ne permettait pas un échange suffisant avec l’ensemble des commissions pour résoudre tous les désaccords.

De plus, la CDIDL est supprimée par le I du IX du présent article afin de simplifier le processus de révision. Cette dernière intervenait à titre subsidiaire en cas de désaccord persistant entre la CDVLLP et au moins une des commissions communales ou intercommunales des impôts directs du département. Or, il a été constaté que, dans la plupart des départements, les CDIDL ont suivi systématiquement les avis des CDVLLP. Il est donc proposé de renforcer le rôle de la CDVL en lui laissant un délai plus long (deux mois au lieu d’un seul) pour statuer sur ces désaccords, tout en supprimant la CDIDL.

Ensuite, lorsque les décisions relatives aux secteurs et aux tarifs de la CDVL sont manifestement illégales, l’administration fiscale saisit, avant leur notification ou leur publication, la CDVL pour une nouvelle délibération. À défaut de nouveaux secteurs ou de nouveaux tarifs conformes dans un délai de deux mois (contre un mois auparavant), le représentant de l’État dans le département arrête ces secteurs ou ces tarifs.

Il est enfin, précisé que cette comitologie applicable à la détermination des valeurs locatives des locaux à usage d’habitation entre en vigueur à compter du 1er janvier 2025. Le C du IX procède dès 2020 à des modifications similaires pour la comitologie applicable à la détermination des valeurs locatives des locaux professionnels, en modifiant en conséquence l’article 1504 du CGI.

Nouvelle Comitologie applicable À la dÉtermination des valeurs locatives des locaux d’habitation

Les anciennes durées applicables sont indiquées entre parenthèses et en italique.

Source : commission des finances.

b.   Le report d’une année de la première mise à jour des valeurs locatives des locaux professionnels

Pour rappel, le III de l’article 1518 ter du CGI prévoit, l’année qui suit le renouvellement général des conseils municipaux, une nouvelle délimitation des secteurs d’évaluation, fixation des tarifs et délimitation des parcelles auxquelles s’applique un coefficient de localisation, le tout dans le respect de la comitologie relative à la détermination des valeurs locatives. Par exception, le B du X du présent article dispose que ces opérations, qui doivent normalement être réalisées à la suite du prochain renouvellement des conseils municipaux (soit 2021), seront finalement réalisées la deuxième année suivant ce renouvellement (soit 2022).

Ce report semble justifié compte tenu de l’entrée en vigueur récente de la révision (2017) et permettra de mieux préparer la phase de concertation avec les nouvelles commissions.

c.   La modification des règles de composition des commissions départementales et communales

Enfin, les F, G et H du IX modifient certaines règles relatives à la composition des CDVL, des CCID et des CIID. Ainsi, l’obligation pour chaque CCID et CIID d’être composée d’un commissaire domicilié en dehors de la commune est supprimée. Il en est de même de l’obligation d’un commissaire propriétaire de bois ou forêts lorsque le territoire de la commune comporte un ensemble de propriétés boisées de 100 hectares au minimum. En effet, l’évaluation préalable du présent article souligne que « ces règles sont difficiles à mettre en œuvre en pratique ». Lors des derniers renouvellements des conseils municipaux en 2014, « les services de ladministration ont ainsi rencontré des difficultés pour assurer la désignation de certains membres des CCID et CIID, notamment pour que la commune ou lintercommunalité parvienne à proposer des personnes extérieures à la commune ou lintercommunalité et des propriétaires de bois ».

Ensuite, l’âge minimum des commissaires (25 ans) est aligné sur l’âge minimum fixé pour être maire (18 ans).

Enfin, pour les CDVL, la limite maximale de onze parlementaires par commission est supprimée. Pour rappel, l’ensemble des députés et sénateurs élus dans le département sont membres de la CDVL. Toutefois, lorsque le département compte onze parlementaires ou plus, les députés et sénateurs sont désignés, respectivement, par l’Assemblée nationale et le Sénat au prorata du nombre de députés et de sénateurs élus dans le département, dans la limite totale de dix membres. Cette disposition relative à la participation des députés et des sénateurs aux CDVLLP avait été introduite au Sénat par un amendement de son Rapporteur général, lors de l’examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2017.

B.   L’impact BudgÉtaire et Économique

Il est difficile d’établir à ce stade les conséquences budgétaires et économiques du présent article, dans la mesure où ces éléments doivent spécifiquement faire l’objet de simulations qui seront présentées au Parlement avant le 1er septembre 2024.

Au niveau micro-économique, la révision se traduira par des transferts de charge fiscale entre contribuables. Le rapport qui sera remis au Parlement avant le 1er septembre 2024 permettra de décrire précisément ces effets et d’examiner les mesures qui pourraient être prises pour les limiter. Toutefois, le principe d’une réforme à produit constant pour les collectivités locales permettra de ne pas alourdir globalement la fiscalité.

Pour les collectivités locales, la révision a vocation à être neutre sur le plan des ressources fiscales tout en permettant une meilleure adéquation entre l’assiette des impôts directs locaux et la réalité du marché locatif. À ce titre, la réforme corrigera les disparités actuelles au sein des mêmes catégories de locaux. Il conviendra toutefois de porter une attention particulière aux conséquences de la réforme sur les potentiels financier et fiscal des collectivités territoriales, la répartition des dotations de l’État ainsi que les instruments de la péréquation.

Enfin, la mise à jour permanente des valeurs locatives des locaux d’habitation favorisera une prise en compte rapide des évolutions du marché. De même, le renforcement des obligations déclaratives favorisera la prise en compte rapide des changements affectant les locaux.

*

*     *

La commission est saisie de lamendement II-CF1415 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Il est ici question des commissions communales et intercommunales des impôts directs. Nous proposons d’adopter quelques ajustements suggérés par l’association France urbaine, tendant notamment à désigner un remplaçant lorsque le président de la commission n’est pas présent, et à radier d’office les membres qui ne siègent pas trois fois de suite, car leur absence pose des problèmes de quorum.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ayant pris part à de telles commissions dans mes fonctions de maire, il me semble que votre proposition sur la présidence de la CCID est satisfaite. Je vous invite toutefois à redéposer cet amendement en séance pour en avoir confirmation de la part du Gouvernement.

En revanche, je ne suis pas favorable à la révocation d’office. Il serait trop compliqué de révoquer des personnes puis d’en désigner d’autres. Il me paraît préférable de revoir les règles de quorum. Je vous suggère donc de retirer cet amendement.

Lamendement II-CF1415 est retiré.

La commission passe à lamendement II-CF1414 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement porte également sur les commissions communales et intercommunales des impôts directs. Il vise à renforcer leur rôle, notamment à réintroduire leur avis pour l’évaluation des bases des locaux professionnels.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il me semble que cet amendement est satisfait. Je vous invite à le retirer et à le redéposer pour que le ministre le confirme en séance.

Lamendement II-CF1414 est retiré.

La commission adopte larticle 52 sans modification.

 

 


Article 53
Transposition de la directive (UE) 2017/2455 du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à transposer en droit interne les dispositions de la directive (UE) 2017/2455 du Conseil du 5 décembre 2017 relatives au commerce électronique, applicables à compter du 1er janvier 2021.

À titre principal, le présent dispositif :

– apporte une définition modernisée de la vente à distance intracommunautaire de biens ;

– généralise le principe de la taxation selon le principe de destination dès le franchissement d’un seuil de 10 000 euros, apprécié sur une année et au niveau de l’ensemble des pays de l’Union européenne ;

– créé un nouveau régime particulier portant sur la vente à distance de biens importés ;

– soumet les interfaces (place de marché, plateforme, portail ou dispositif similaire) à de nouvelles obligations en matière de redevabilité de la TVA et de tenue de registre ;

– étend le champ des guichets uniques européens existants, et créé un nouveau guichet destiné aux ventes à distance de biens importés.

Ces éléments sont de nature à réduire les comportements frauduleux qui, en matière de TVA touchant aux ventes en ligne, sont sans doute d’une ampleur considérable.

Corrélativement, l’extension du mini-guichet unique TVA est favorable à la réduction des charges administratives pesant sur les entreprises qui réalisent des ventes en ligne intracommunautaires.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 258 A du CGI, qui détermine notamment le lieu d’imposition des livraisons de biens meubles corporels expédiés depuis la France à destination d’une personne morale non assujettie établie dans un autre État membre de l’Union européenne, a été modifié par l’article 5 de l’ordonnance n° 2015-681 du 18 juin 2015 portant simplification des obligations déclaratives des entreprises en matière fiscale, s’agissant des conditions de dénonciation de l’option exercée par un vendeur réalisant des livraisons intracommunautaires.

L’article 258 B du CGI, qui détermine notamment le lieu d’imposition des livraisons de biens meubles corporels expédiés depuis un autre État membre de l’Union européenne à destination d’une personne non assujettie établie en France, a été modifié par la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 qui abaisse le seuil des livraisons de biens à 35 000 € en deçà duquel les livraisons mentionnées sont taxables en France.

L’article 259 D du CGI, qui détermine le lieu d’imposition des prestations de télécommunication, des services de radiodiffusion et de télévision ainsi que des services fournis par voie électronique au profit de personnes non assujetties a été modifié par l’article 72 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 et prévoit que ces prestations sont taxables au lieu d’établissement du preneur et peuvent, par dérogation, être taxées au lieu d’établissement du prestataire lorsque la valeur totale de ses prestations n’a pas excédé 10 000 € hors taxe sur la valeur ajoutée.

L’article 293 A du CGI relatif au fait générateur, à l’exigibilité et aux redevables de la TVA lors de l’importation a été modifié par l’article 27 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 et prévoit que la taxe à l’importation est solidairement due par le déclarant en douane qui agit dans le cadre d’un mandat de représentation indirecte.

L’article 298 sexdecies F du CGI, relatif au régime particulier applicable aux services de télécommunications, de radiodiffusion et de télévision ou aux services électroniques fournis par des assujettis non établis sur le territoire de l’Union européenne a été modifié par l’article 102 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, qui prévoit l’élargissement du champ d’application.

L’article 298 sexdecies G du CGI, relatif au régime particulier applicable aux services de télécommunications, de radiodiffusion et de télévision ou aux services électroniques fournis par des assujettis établis sur le territoire de l’Union européenne, mais non dans l’État membre de consommation, a été créé par l’article 102 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 et prévoit des facilités de déclaration et de paiement de la taxe sur la valeur ajoutée pour tout assujetti qui réalise les prestations mentionnées lorsqu’il n’est pas établi dans l’État membre de consommation, en vigueur depuis le 1er janvier 2015.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Cet article a été adopté sans modification.

I.   le régime actuel de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) portant sur les ventes en ligne, qui n’est plus adapté aux usages des consommateurs, conduit à des pertes fiscales considérables pour les États membres de l’union européenne

A.   la tva est un impôt Français devenu européen, qui tente de s’adapter aux évolutions du commerce

1.   La taxe sur la valeur ajoutée par l’Europe

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est définie comme « un impôt général sur la consommation, exactement proportionnel au prix des biens et services, perçu à chaque stade du processus de production et de distribution, mais uniquement sur la valeur ajoutée des biens et des services à chacun des stades, grâce au mécanisme de la déduction de la taxe acquittée en amont par lopérateur, et qui est répercutée sur le consommateur final » ([154]).

La TVA, dont l’origine est française, a logiquement été bouleversée par l’évolution de la construction européenne.

La première étape de l’européanisation de la TVA a été franchie lors de l’adoption, par le Conseil européen, des deux directives du 11 avril 1967 : la première ([155]) est essentielle, en ce qu’elle a imposé aux États membres de supprimer leur système de taxation du chiffre d’affaires pour le remplacer par un système commun de TVA ; la seconde ([156]), plus technique, visait à en préciser les notions fondamentales. La sixième directive, du 17 mai 1977, a ensuite réalisé une harmonisation poussée de la taxe dans de nombreux domaines ([157]).

La suppression des frontières physiques entérinée par l’Acte unique de 1987, qui s’est faite sans harmonisation préalable de l’assiette et des taux de TVA, a eu pour conséquence de créer un terreau fertile à la fraude.

En effet, la mise en place effective de l’Acte unique, en 1993, s’est traduite, en matière de fiscalité indirecte, par l’adoption d’un régime transitoire de TVA, toujours en vigueur.

Ce régime « transitoire » prévoit que les échanges entre assujettis ([158]) sont taxables selon le principe de destination : ainsi, un opérateur livrant un bien à destination d’un autre État membre de l’Union européenne effectue une livraison intracommunautaire exonérée de TVA.

Cette exonération présente la particularité de permettre à l’opérateur de déduire la TVA qu’il a supportée sur l’acquisition de la marchandise. Ainsi, les entreprises qui réalisent essentiellement des livraisons intracommunautaires se trouvent en situation de crédit de TVA permanent, pouvant faire l’objet d’un remboursement.

A contrario, l’acquéreur de la marchandise effectue une acquisition intracommunautaire, qui doit faire l’objet d’une autoliquidation. Ce procédé, qui permet de déclarer le montant de la TVA et de le déduire immédiatement, produit une rupture dans la chaîne des paiements de la TVA, qui permet aux fraudeurs d’abuser de ce régime pour développer des montages transfrontaliers frauduleux, notamment les « carrousels » de TVA ([159]).

Les risques de fraude ont encore été accrus par la numérisation de l’économie.

2.   La numérisation du commerce face à l’Europe

a.   La genèse de l’instauration d’une réglementation adaptée en matière de commerce électronique

En 1997, la Commission européenne déclarait, dans sa première communication dédiée au commerce électronique, que « la vitesse, labsence de traces et lanonymat potentiels qui caractérisent les communications électroniques offrent de nouvelles possibilités dévasion et de fraude fiscales » ([160]).

À cette date, la réglementation applicable relevait de la sixième directive du 17 mai 1977. Or, selon ce texte, les livraisons de biens meubles corporels étaient imposables au lieu de livraison tandis que les prestations de services étaient taxables au lieu d’établissement du prestataire. Cette dissonance était accrue en matière de services immatériels : la taxation s’effectuait alors au lieu d’établissement du preneur pour les assujettis, et au lieu d’utilisation des services pour les non-assujettis.

Le 8 juin 1999, la Commission européenne a publié un document de travail qui visait à modifier la législation applicable aux services : l’objectif était d’adapter la réglementation de la TVA pour la rendre compatible avec le commerce électronique ; il s’agissait de la première proposition de modification de la législation européenne tendant à prendre en compte les particularités d’un secteur ([161]). Les propositions de la Commission visant à renforcer le respect des obligations fiscales des opérateurs s’articulaient autour de deux propositions : l’instauration d’une obligation d’identification de l’assujetti dans l’État membre de destination dans les relations B2C ([162]) et l’obligation de recourir à l’autoliquidation dans les relations B2B ([163]).

La directive du 7 mai 2002 est une étape importante de l’évolution normative des règles de TVA visant le commerce électronique, singulièrement s’agissant du lieu d’imposition ([164]).

Selon cette directive, les services électroniques fournis par un opérateur établi dans un État tiers à l’Union européenne à destination d’un État membre de l’Union doivent être taxés dans l’État de destination, selon les taux applicables dans cet État ; symétriquement, les opérations réalisées depuis un État membre de l’Union à destination d’un État tiers sont taxables au lieu d’établissement du client. À l’inverse, lorsqu’un opérateur situé dans un État membre de l’Union fournit un service électronique à un particulier situé dans un autre État membre, la taxation s’effectue au lieu d’établissement du prestataire.

Il s’agissait alors du seul cas de maintien du principe de taxation selon le pays d’origine.

C’est avec la directive du 12 février 2008 ([165]) qu’est intervenue une remise en cause définitive de cette notion. Modifiant en cela la directive TVA du 28 novembre 2006 ([166]), le texte garantit la consécration du principe de destination en permettant de taxer les transactions dans lÉtat détablissement du preneur.

Le principe de taxation dans le pays de destination

Le principe de neutralité, élément essentiel du système de TVA, dépend principalement du lieu d’imposition des échanges internationaux. Ainsi, l’OCDE fait de la taxation dans le pays de destination une norme de référence.

Dans les relations B2C, l’objectif est de déterminer le lieu où le client consomme le bien ou le service ; dans les relations B2B, l’objectif est d’assurer une neutralité des transactions afin de faciliter la répercussion de la charge fiscale sur le consommateur final.

Le fournisseur est normalement responsable du paiement de la taxe. Pour autant, cette situation peut s’avérer délicate lorsqu’il se situe dans un État différent du lieu de consommation de l’opération. La réglementation peut alors prévoir que le fournisseur établi dans un pays tiers a l’obligation de s’enregistrer dans l’État d’imposition afin d’y payer la taxe ; cette obligation génère des coûts administratifs.

Ainsi, les pouvoirs publics doivent trouver le juste équilibre entre la simplification de l’identification des fournisseurs et la nécessité d’éviter la fraude.

Prévue, à l’origine, pour 2010, l’entrée en vigueur de ce texte a été reportée au 1er janvier 2015 ([167]), avec une période de transition courant jusqu’au
1er janvier 2019.

Le mini-guichet unique TVA (MOSS – mini-one stop shop)

Pour simplifier le traitement de l’impôt dans le cadre d’une imposition dans le pays de destination, un mini-guichet unique a été installé dans chaque État membre. Il permet à l’opérateur de réaliser la déclaration et le paiement de l’ensemble des prestations réalisées dans l’Union européenne auprès d’un seul correspondant. En pratique, l’inscription s’effectue dans l’État membre où l’opérateur a le siège de son activité économique. Lorsque le prestataire n’a pas le siège de son activité au sein de l’Union européenne, il a la possibilité de s’identifier dans l’État dans lequel il dispose d’un établissement stable.

À la suite de cette inscription, l’opérateur déclare la TVA trimestriellement sur le portail prévu à cet effet. La déclaration concerne l’ensemble des prestations réalisées dans l’Union européenne : l’État d’identification doit ensuite répartir les déclarations et reverser les sommes à chaque État concerné.

b.   Commerce électronique direct et commerce électronique indirect

i.   Les opérations de commerce électronique indirect

Les opérations de commerce électronique indirect se traduisent par des achats en ligne conduisant à un envoi physique de la marchandise. Dans ce cas, le recours à l’informatique constitue seulement un moyen de capter la clientèle et d’effectuer la commande ; le bien est ensuite livré de manière classique, par envoi postal. Cette catégorie de vente est opérée par les entreprises de vente à distance, mais également par les particuliers qui vendent des biens en ligne.

Les ventes à distance effectuées à destination des particuliers, non assujettis, situés dans un autre État membre d’Union européenne, obéissent à un régime d’imposition particulier.

L’expression vente à distance, dont le régime est prévu par les articles 258 A et 258 B du CGI, désigne des échanges intracommunautaires présentant simultanément trois caractéristiques :

– la livraison porte sur des biens expédiés ou transportés par le vendeur, ou pour son compte, à destination de l’acquéreur ;

– la livraison est faite de France vers un autre État membre, ou inversement d’un autre État membre vers la France ;

– l’acquéreur est un particulier – c’est-à-dire une personne physique non assujettie – ou une personne bénéficiant d’un régime dérogatoire (PBRD) ([168]).

Par principe (cf. l’article 258 A du CGI), ces opérations sont taxables selon le taux applicable dans le pays où est établi le vendeur.

Ce principe possède un inconvénient majeur en ce qu’il encourage les entreprises à délocaliser leur activité dans les pays bénéficiant des taux de TVA les plus faibles afin de pratiquer des prix plus bas. Pour éviter ce cas de figure, le régime de taxation selon le pays dorigine a été aménagé (cf. l’article 258 B du CGI) : il ne vient s’appliquer que lorsque le total des ventes hors taxe de lentreprise à destination dun pays est inférieur à un seuil, fixé par cet État.

Le franchissement du seuil renverse alors le lieu de taxation : le bien devient taxable dans le pays de destination de la marchandise, de manière analogue aux livraisons intracommunautaires traditionnelles ([169]).

Les sociétés ont la possibilité d’opter, dès le premier euro de ventes à distance, pour le principe de destination.

L’article 34 de la directive TVA ([170]) contraint les États à prévoir un seuil compris entre 35 000 et 100 000 euros.

La France a fait le choix de mettre en place un seuil de 35 000 euros depuis 2016 ([171]), codifié à l’article 258 B du CGI.

Ainsi, deux situations se rencontrent lorsqu’une entreprise située dans un autre État membre effectue une vente en France :

– soit le total des ventes effectuées en France est inférieur à 35 000 euros, et la taxation de toutes les opérations correspondantes a lieu dans le pays de départ des biens ;

– soit le total des ventes effectuées en France est supérieur à 35 000 euros, et l’imposition de ces opérations s’effectue en France.

Exemple 1 : Si un vendeur français a réalisé, l’année N – 1, des ventes à distance à destination de l’Allemagne – pays qui a fixé le seuil à 100 000 euros – pour un montant supérieur à ce seuil, le lieu des ventes à distance qu’il effectue l’année N est situé en Allemagne.

Si, l’année N – 1, le montant des ventes du vendeur français est inférieur ou égal au seuil allemand, le lieu de ses ventes à distance vers l’Allemagne réalisées dans le courant de l’année N est situé en France tant que le seuil n’est pas atteint.

La vente à distance effectuée l’année N qui a pour effet le dépassement du seuil, ainsi que les ventes à distance ultérieures, seront situées en Allemagne.

Exemple 2 : Si un vendeur allemand a réalisé, l’année N – 1, des ventes à distance à destination de la France – pays qui a fixé le seuil à 35 000 euros – pour un montant supérieur à ce seuil, le lieu des ventes à distance qu’il effectue l’année N est situé en France.

Si, l’année N – 1, le montant des ventes du vendeur allemand est inférieur ou égal au seuil français, le lieu fiscal de ses ventes à distance vers la France réalisées dans le courant de l’année N est situé en Allemagne tant que le seuil n’est pas atteint.

La vente à distance effectuée l’année N qui a pour effet le dépassement du seuil, ainsi que les ventes à distance ultérieures, seront situées en France.

Dans tous les cas d’imposition en France, le vendeur qui n’y est pas établi doit personnellement s’identifier à la TVA – ou par l’intermédiaire d’un mandataire fiscal – auprès de l’administration, lorsqu’il est établi dans l’Union européenne ou dans un pays tiers ayant conclu une convention d’assistance au recouvrement des créances fiscales avec la France. Le cas échéant, l’opérateur d’un pays tiers doit désigner un représentant fiscal en France. Ce représentant, assujetti établi en France, s’engage à remplir les formalités incombant à l’opérateur étranger et, en cas d’opérations imposables, à acquitter la taxe à sa place ([172]).

Le montant total, hors TVA, des ventes à distance réalisées à partir de la France et taxables dans l’État d’arrivée des biens doit être identifié dans la déclaration de chiffre d’affaires du 5° de l’article 287 du CGI.

Les ventes à distance réalisées à partir de la France et taxables dans l’État d’arrivée des biens doivent donner lieu à l’établissement de factures, que le client soit assujetti ou non.

ii.   Les opérations de commerce électronique direct

Ces opérations concernent les échanges qui sont entièrement dématérialisés. Dans ce cas, la commande, le paiement et la livraison se réalisent entièrement en ligne. Ces opérations figurent à larticle 1er de la directive du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique ([173]), dont la transposition devait être effective au 1er janvier 2019.

Avant le 1er janvier 2019, ces prestations étaient réputées ne pas se situer en France lorsqu’elles étaient fournies à une personne non assujettie n’étant pas établie en France. L’article 72 de la loi de finances pour 2019 ([174]), transposant pour partie la directive du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique, a modifié cette règle.

Désormais, l’article 259 D du CGI localise en France le lieu des prestations de services intracommunautaires lorsqu’elles sont effectuées, d’une part, en faveur d’une personne non assujettie établie en France et, d’autre part, par un prestataire établi en France en faveur d’un preneur non assujetti établi dans un autre État membre de l’Union européenne, lorsque la valeur totale de ces prestations n’a pas excédé, pendant l’année civile précédente, le seuil de 10 000 euros hors taxe.

Un prestataire pourra opter pour que le lieu de ces prestations effectuées en faveur de personnes non assujetties se situe dans l’État membre de consommation ; cette option couvre une période de deux ans.

tableau récapitulatif du lieu d’imposition des services fournis
par voie Électronique À des personnes non-assujetties Établies
ou domiciliÉes en France depuis le 1er janvier 2019

 

Lieu détablissement du prestataire

Lieu détablissement du preneur non assujetti

Lieu de taxation

Application combinée des articles 259, 259 B et 259 D nouveau du CGI

France

France

France

Autre État membre

France (si la valeur totale des prestations servies par le prestataire n’a pas excédé 10 000 euros HT au cours de l’année écoulée ou en cours)

Pays tiers

Non imposable en France

Autre État membre

France

Autre État membre (si la valeur totale des prestations servies par le prestataire n’a pas excédé 10 000 euros HT au cours de l’année écoulée ou en cours)

Pays tiers

France

France

Source : commission des finances

Corrélativement, les règles de facturation des articles 289-0 et 298 sexdecies F du CGI ont été modifiées, dans le même esprit de simplification.

Ainsi, un opérateur qui se prévaut d’un régime particulier des articles 298 sexdecies F ou G du CGI, identifié à cette fin auprès du portail de l’administration fiscale française, est soumis aux seules règles de facturation françaises, même si le lieu dimposition de ces prestations nest pas situé en France.

B.   le développement considérable du commerce en ligne rend oBsolète les règles portant sur la tva auxquelles il est censé être soumis

1.   Le développement considérable du commerce en ligne

Le rapport Lorentz du 8 janvier 1998 définit le commerce électronique comme « lensemble des échanges électroniques liés aux activités commerciales » ([175]). Le champ de cette définition est particulièrement large : des ventes par correspondance B2C, aux ventes entre particuliers C2C ([176]), en passant par les traditionnelles transactions inter-entreprises B2B, le commerce électronique innerve l’ensemble de l’économie.

En 2018, le chiffre d’affaires lié aux ventes à distance s’est élevé à 92,6 milliards d’euros en France ; le cap des 100 milliards d’euros devrait être franchi en 2019 ([177]).

Or, la taxation du commerce électronique repose sur une réglementation fractionnée et non spécifique ; si internet représente une « vitrine » pour les entreprises, en leur permettant de diffuser leurs produits, il s’agit également d’un outil qui aboutit au transport de biens et services, directement au consommateur.

2.   Un régime actuel propice à la fraude

a.   Les limites du régime des ventes à distance intracommunautaire

La technique habituelle consiste, pour une société établie dans un État disposant d’un faible taux de TVA, à ne pas appliquer la TVA du pays de destination même lorsque le seuil prévu par celui-ci est dépassé. Ce détournement est simple à mettre en pratique dans la mesure où l’application et le paiement de la TVA du pays de destination nécessitent une démarche volontaire de la part de l’entreprise.

Ainsi, en 2015, un rapport sénatorial remarquait que le seuil des ventes à distance, alors de 100 000 euros HT, « nest pratiquement pas contrôlé par les administrations fiscales des États membres », ce qui conduit à « des fraudes énormes » ([178]). Ce rapport constatait notamment que seulement 979 entreprises étaient alors immatriculées à la direction des résidents à l’étranger et des services généraux – la DRESG, qui a depuis été remplacée par la direction des impôts des non-résidents, la DINR – alors que le nombre d’entreprises de commerce électronique était, à la même date, de 715 000 en Europe. Le franchissement de ce seuil appelle une démarche volontaire de la part de l’entreprise, qui n’a pas toujours connaissance de cette obligation, sinon la volonté de s’y conformer.

Actuellement, les interfaces – c’est-à-dire une « place de marché, une plateforme, un portail ou un dispositif similaire » ([179]) – ne sont pas assujetties à de quelconques obligations en matière de perception de la TVA sur les ventes en ligne qu’elles ont facilitées.

b.   La problématique des envois à valeur négligeable

L’essor de l’économie numérique a significativement augmenté le nombre de livraisons de colis, limitant par là même les possibilités de contrôle des douanes ([180]).

Il s’agit ici de préciser que le régime des importations diffère de celui des opérations intracommunautaires. Ainsi, lorsqu’un opérateur situé en dehors de l’Union européenne effectue une vente à distance à destination d’un État membre de l’Union, lopération est soumise aux droits de douane de lÉtat de destination ainsi quà sa TVA.

En pratique, la direction générale des douanes et des droits indirects est chargée d’assurer le recouvrement des droits, dus par le destinataire, au moment du dédouanement de la marchandise ; le vendeur n’est pas tenu de s’immatriculer. L’assiette des taxes est la valeur des droits déclarés en douane.

Nonobstant cette architecture de droit commun, un régime de simplification, mis en place en 1983 ([181]), exonère de taxes les envois de faible valeur, afin de simplifier les échanges portant sur un faible montant. Le seuil de la franchise de TVA est fixé à 22 euros quand celui de la franchise des droits de douane est fixé à 150 euros.

Si le dispositif a été introduit à une époque où le commerce électronique n’existait pas, l’essor de ce secteur pose désormais de graves difficultés dans la mesure où un bien importé ayant une faible valeur est exonéré de TVA alors qu’il est soumis à cet impôt s’il provient d’un autre État membre de l’Union.

La Commission européenne a récemment publié un rapport concernant « lévaluation de lapplication et de limpact de lexonération de TVA pour les importations de petits envois » ([182]). À cette occasion, la Commission a pu constater que les importations d’envois à valeur négligeable ont connu une augmentation moyenne de 286 % entre 1999 et 2013.

Or, face au développement des échanges, les moyens des États ne permettent pas d’assurer un contrôle effectif de l’ensemble des colis. Comme le calcul et le paiement de la TVA reposent sur la valeur déclarée lors du dédouanement, les vendeurs en ligne peuvent sous-évaluer leurs envois, ce qui permet de pratiquer des prix hors taxe, plus attractifs.

L’évolution du régime particulier concernant le commerce électronique, entré en vigueur au 1er janvier 2015, a permis de recenser plusieurs domaines pouvant faire l’objet d’améliorations : ce recensement a justifié l’élaboration de la directive du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique.

II.   une transposition qui adapte notre droit aux nouveaux comportements d’achats, de nature à limiter la fraude à la tva sur le commerce en ligne

A.   un profond remaniement des ventes à distance à compter du 1er janvier 2021

L’article 1er de la directive du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique devait être transposé au plus tard le 1er janvier 2019 ; une telle transposition a été réalisée par l’article 72 de la loi de finances pour 2019, précité.

L’article 2 de cette même directive doit être transposé au plus tard le 1er janvier 2021 : le présent article réalise cette transposition, décrite ci-après, qui entrera en vigueur à cette date.

1.   Une réforme de la vente à distance intracommunautaire

a.   La nouvelle définition de la vente à distance intracommunautaire de biens est transposée en droit national

Selon le nouveau II bis de l’article 258 du CGI, une vente à distance intracommunautaire de biens s’entend « dune livraison de biens expédiés ou transportés par le fournisseur ou pour son compte, y compris lorsque le fournisseur intervient indirectement dans le transport ou lexpédition des biens, à partir dun État membre autre que celui darrivée de dexpédition ou du transport à destination de lacquéreur », lorsque la livraison de biens est effectuée au profit d’un non assujetti ou d’une personne bénéficiant du régime dérogatoire (PBRD) de l’article 256 bis, I-2° du CGI.

b.   Une généralisation de la taxation selon le principe de destination, sauf pour les assujettis qui réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 10 000 euros dans l’État membre considéré

Les dispositions qui visent la territorialité de l’impôt, à l’article 258 A du CGI, sont réécrites.

Ainsi, le seuil de chiffre d’affaires de 10 000 euros, déjà applicable aux prestations de service intracommunautaires de télécommunications, de radiodiffusion et de télévision – article 259 D du CGI, v. supra – est étendu aux livraisons à distance intracommunautaire de biens. Lorsque ce seuil de chiffre d’affaires est dépassé par le fournisseur, la taxation de la vente à distance s’effectue dans le pays du consommateur final.

Contrairement au régime en vigueur en matière de calcul du seuil de vente à distance intracommunautaire à partir de la France – compris entre 35 000 et 100 000 euros –, ce seuil n’est plus calculé par rapport aux seules ventes effectuées dans l’État considéré, mais au niveau de l’Union européenne.

Ainsi, à compter du 1er janvier 2021, toute entreprise française devra appliquer la TVA de lÉtat membre de destination de la vente à distance intracommunautaire de biens dès lors que le produit de telles ventes dépasse en cours dannée ou pendant lannée civile précédente la somme de 10 000 euros appréciée dans toute lUnion européenne.

À l’inverse, pour les ventes à distance d’une société établie dans un autre État membre à destination de la France, c’est la TVA française qui s’appliquera dès lors que les ventes à distance intracommunautaires de la société considérée dépassent, au cours de l’année ou pendant l’année civile précédente, la somme de 10 000 euros, appréciés à l’échelle de l’Union européenne.

Par dérogation à ces dispositions le fournisseur pourra opter pour une taxation selon le principe de destination, même si le seuil de 10 000 euros n’est pas dépassé.

2.   La création d’un nouveau régime particulier : la vente à distance de biens importés

Le nouvel article 298 sexies H du CGI créé un régime particulier applicable aux ventes à distance de biens importés de territoires ou de pays tiers, dont pourront se prévaloir les assujettis.

Faire le choix de ce nouveau guichet unique nécessite la réunion de plusieurs conditions, liées à la notion de vente à distance de bien importé ainsi qu’au lieu de livraison de celui-ci.

Constitue une telle vente à distance de biens importés la livraison de biens expédiés ou transportés par le fournisseur – ou pour son compte – y compris lorsque le fournisseur intervient directement dans le transport ou l’expédition des biens, à partir d’un territoire tiers à l’Union européenne, à destination d’un État membre de cette même Union, lorsque la livraison de biens est effectuée au profit d’une personne non assujettie ou d’une PBRD.

Le lieu de livraison des biens importés en provenance de territoires tiers ou de pays tiers dans le cadre de ventes à distance est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France :

– au moment de l’arrivée de lexpédition, ou, si le bien a été importé au préalable dans un autre État membre, du transport, des biens à destination de l’acquéreur ;

– au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport des biens à destination de l’acquéreur si le bien a été importé en France lorsque la TVA est déclarée dans le cadre du régime particulier de déclaration et de paiement de la TVA applicable aux ventes à distance de biens importés, c’est-à-dire le nouveau guichet unique mis en place en la matière (v. infra). Cette hypothèse ne vise que les envois dont la valeur ne dépasse pas 150 euros ;

– au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport de biens à destination de l’acquéreur, lorsque le bien a été importé en France par une plateforme ou un portail électronique. Cette hypothèse ne concerne, également, que les envois dont la valeur ne dépasse pas 150 euros.

Ce nouveau régime permettra de collecter la TVA auprès du vendeur au moment de la réalisation de la vente.

Un nouveau régime visant la déclaration et le paiement de la TVA à limportation est également créé

L’article 60 du présent projet de loi réforme le régime de la TVA à l’importation.

Ce régime, déterminé par l’article 293 A du CGI, est destiné à s’appliquer en l’absence de choix du guichet de l’article 298 sexies H du CGI, précédemment évoqué.

Ainsi, lorsque, pour l’importation de biens faisant l’objet d’une vente à distance de biens importés et contenus dans des envois dont la valeur ne dépasse pas 150 euros, le régime particulier de l’article 298 sexies H du CGI n’est pas utilisé, la personne qui présente les marchandises en douane pour le compte de la personne destinataire des biens sera autorisée à déclarer et acquitter la TVA à l’importation pesant sur les biens expédiés à destination de la France, au nom et pour le compte du destinataire final.

C’est à elle qu’il appartiendra de prendre les mesures appropriées pour percevoir la TVA auprès du destinataire des biens, préalablement à son acquittement auprès du service des douanes.

Pour les envois supérieurs à 150 euros, le présent article ne modifie pas la situation actuelle : seule la TVA à l’importation sera due ([183]).

3.   Les interfaces seront soumises à de nouvelles obligations

a.   Les interfaces qui facilitent les ventes à distance vont devenir redevables du paiement de la TVA

Le 2° du V de l’article 256 nouveau introduit une présomption à légard des plateformes : les intermédiaires opaques seront désormais réputés avoir acquis et livré les biens. Aussi, ces intermédiaires deviennent redevables de la TVA sur les ventes si :

– l’assujetti facilite, par l’utilisation d’une interface électronique telle qu’une place de marché, une plateforme, un portail ou un dispositif similaire, les ventes à distance de biens importés de territoires tiers ou de pays tiers contenus dans des envois d’une valeur ne dépassant pas 150 euros ;

– l’assujetti facilite, par l’utilisation d’une interface électronique telle qu’une place de marché, une plateforme, un portail ou un dispositif similaire, la livraison d’un bien dans l’Union européenne par un assujetti non établi sur le territoire de l’Union, à une personne non assujettie. Il peut s’agir d’une livraison domestique ou d’une vente à distance intracommunautaire. Dans cette hypothèse, la livraison du bien à destination de la plateforme est exonérée, quand bien même celle-ci est redevable de la taxe.

Par dérogation au principe selon lequel la TVA due à l’importation doit être acquittée par la personne désignée comme destinataire réel des biens sur la déclaration d’importation, la plateforme devient redevable de la TVA due sur les opérations de ventes à distance de biens importés, même si le destinataire réel des biens demeure solidairement tenu au paiement de la taxe.

Cette disposition s’applique quelle que soit la valeur de la vente à distance, c’est-à-dire y compris même lorsque la valeur du bien importé excède 150 euros (sauf s’il s’agit d’une vente à distance de bien importé dont le lieu d’imposition est situé dans un autre État membre de l’Union européenne).

Pour les livraisons de biens réalisés par ces plateformes, ainsi que pour celles à destination de ces plateformes, le fait générateur et l’exigibilité de la TVA interviendra au moment de l’acceptation du paiement.

b.   Les interfaces qui facilitent les livraisons de biens ou les prestations de services à des personnes non assujetties seront tenues de consigner ces opérations dans un registre

À des fins de contrôle, les plateformes qui facilitent des ventes à distance de biens ou des prestations de service seront astreintes à la tenue d’un registre, qui devra être conservé 10 ans à compter du 31 décembre de l’année au cours de laquelle l’opération a été effectuée, afin de permettre aux États membres où ces livraisons et prestations sont imposables de vérifier que la TVA a été correctement appliquée.

Ce registre sera mis à la disposition de l’administration, à sa demande, par voie électronique.

4.   Le champ des guichets uniques est étendu, et un nouveau guichet concernant les ventes à distance de biens importés est créé

a.   Une extension du guichet à l’ensemble des services et aux ventes à distance intracommunautaires

Selon l’article 298 sexdecies G du CGI, tel que rédigé par le présent article, la possibilité d’opter pour le régime du mini-guichet unique TVA
– « MOSS » – concernera, en 2021, l’ensemble des prestataires fournissant des services à des personnes non-assujetties, mais également les opérateurs réalisant des ventes à distance intracommunautaires de biens, ainsi que les plateformes pour certaines livraisons.

Le fonctionnement de ce guichet unique reposera sur l’identification des assujettis en France – lorsque la France est « État membre d’identification » – ce qui leur permettra de déclarer à ce guichet l’ensemble des opérations de ventes à distance et de prestations de service intracommunautaires. Ce guichet sera ouvert aux plateformes qui réalisent de telles ventes.

Les assujettis devront souscrire une déclaration trimestrielle indiquant, pour chaque État membre de destination, les opérations réalisées en valeur et en montant de TVA, ventilées par taux d’imposition. Cette déclaration devra être souscrite avant la fin du mois qui suit le trimestre considéré, et acquittée au même instant.

Les entreprises qui se prévalent du régime particulier de déclaration et de paiement de la TVA sur les ventes à distance intracommunautaires de biens seront dispensées de l’obligation d’émettre une facture pour ce type d’opération.

La taxe supportée par l’assujetti au titre des opérations couvertes par ce régime spécifique ne pourra ouvrir droit à déduction : seule la procédure de remboursement leur sera ouverte.

b.   Une extension à l’ensemble des services pour le régime « hors Union européenne »

Le champ du régime de guichet unique, prévu à l’article 298 sexdecies F du CGI, sera étendu, au 1er janvier 2021, à tous les services fournis par les assujettis non établis au sein de l’Union européenne à des non-assujettis établis dans l’Union.

c.   La création d’un guichet unique pour les ventes à distance de biens importés

Le présent article créé, au nouvel article 298 sexies I du CGI, un nouveau régime particulier de déclaration et de paiement de la TVA à l’importation.

Ce nouveau régime couvrira les biens importés en provenance de pays ou de territoires tiers, faisant l’objet d’une vente à distance, lorsque la valeur de l’envoi n’excède pas 150 euros.

Pour de tels envois, il est prévu que limportation pourra être exonérée de TVA si l’assujetti a présenté son numéro individuel d’identification – attribué aux fins de l’application de ce régime – au plus tard au moment du dépôt en douane de la déclaration d’importation.

Pourront se prévaloir d’un tel régime :

– les assujettis établis sur le territoire de l’Union européenne qui réalisent des ventes à distance de biens importés de pays tiers ;

– les assujettis non établis dans l’Union européenne qui effectuent des ventes à distance de biens importés, à condition d’être représentés par un intermédiaire établi sur le territoire de l’Union ;

– les assujettis établis sur le territoire d’un pays tiers avec lequel l’Union européenne a conclu un accord d’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts et droits.

L’assujetti qui se prévaudra de ce régime particulier devra souscrire une déclaration mensuelle et tenir un registre reprenant ses opérations taxables, qui devra être conservé pendant 10 ans à compter du 31 décembre de l’année de l’opération.

Comme pour les autres régimes particuliers de guichet unique, la TVA supportée par l’assujetti dans le cadre de son activité ne pourra pas faire l’objet d’une déduction, mais d’un remboursement.

La suppression de la notion européenne denvoi de valeur négligeable

La création du régime particulier de déclaration et de paiement de la TVA à l’importation s’accompagne de la suppression de la possibilité offerte aux États membres d’admettre en exonération les importations dont la valeur globale est inférieure à 23 euros.

Cette possibilité était offerte par le titre IV de la directive 2009/132/CE du Conseil du 19 octobre 2009.

L’article 3 de la directive 2017/2455 du 5 décembre 2017 supprime les dispositions correspondantes, avec effet au 1er janvier 2021.

En France, cette exonération est prévue au II-2° de l’article 291 du CGI, qui renvoie à une liste figurant à l’annexe IV du même code.

Il reviendra donc au pouvoir réglementaire de supprimer, avant le 1er janvier 2021, le 5° de l’article 50 octies de l’annexe IV du CGI.

B.   un allÉgement des charges pour les entreprises et une réduction des risques de fraude à la tva indéniablement favorables aux finances publiques

1.   Un allégement des charges pesant sur les entreprises

Selon l’exposé des motifs du présent article, « la complexité des obligations en matière de TVA est recensée comme lun des principaux freins au développement du commerce électronique transfrontière, notamment pour les entreprises les plus petites. Selon les calculs de la Commission européenne, les coûts du respect des obligations en matière de TVA sélèvent en moyenne à 8 000 euros par an pour chaque État membre dans laquelle une entreprise fournit des biens et services ».

Pour les plus petites entreprises, notamment celles qui bénéficient du régime de franchise en base et qui interviennent dans le secteur des ventes à distance, de telles ventes demeureront soumises à la fiscalité du pays de départ si le seuil de 10 000 euros de ventes annuelles n’est pas atteint.

Pour les autres, l’extension du mini-guichet unique à l’ensemble des ventes à distance intracommunautaires de biens, en plus des services, constitue une indéniable simplification en ce qu’il permettra aux entreprises de déclarer et de payer dans un seul État membre la TVA due dans l’ensemble de l’Union européenne.

Les entreprises qui se prévalent du régime de ce mini-guichet seront dispensées de l’obligation d’émettre une facture pour ce type d’opération, ce qui est également de nature à réduire leurs coûts administratifs.

2.   Une évolution normative favorable à la réduction de la fraude fiscale

a.   En matière de vente à distance intracommunautaire de biens

À l’aune du droit en vigueur, où le principe de taxation à la destination n’est applicable qu’en cas de dépassement de seuils compris entre 35 000 et 100 000 euros, certains opérateurs ont structuré leurs opérations de manière à dissocier la vente du transport des biens, tout en conservant cette dernière prestation au sein de leur groupe, afin de ne devoir la TVA que dans l’État membre de départ des biens.

Pour éviter cette dissociation artificielle, le présent article affine la définition de la vente à distance intracommunautaire et incluant le cas du fournisseur qui « intervient directement dans le transport ou lexpédition des biens ».

De même, la généralisation d’un seuil de 10 000 euros, apprécié en cumulant l’ensemble des transactions intracommunautaires, rend bien plus facile son franchissement et donc la réelle application du principe de taxation de la TVA à la destination. La généralisation du mini-guichet TVA constitue le pendant destiné à faciliter cette bascule.

b.   En matière de vente à distance de biens importés de territoires tiers

En matière d’importations, les modalités de perception de la TVA devraient être facilitées par l’instauration d’un mini-guichet spécifique, pour les biens dont la valeur est inférieure à 150 euros.

Pour les encourager à respecter leurs obligations, les opérateurs qui s’identifient à la TVA pour bénéficier de ce système de guichet pourront bénéficier d’une exonération de la TVA à l’importation.

La tenue d’un registre sera de nature à permettre le contrôle des obligations fiscales de tels opérateurs.

Les dispositions spécifiques qui visent les plateformes doivent permettre de lutter contre la fraude à la perception de la TVA de la part de vendeurs établis dans des pays tiers à l’Union européenne. Ces dispositions sont notamment l’imputation à la plateforme de la livraison ou du transport de tels biens, ainsi que le fait de les rendre redevables de la taxe. La concentration de ces obligations sur quelques plateformes participe de l’objectif d’un meilleur recouvrement des recettes TVA dans l’Union.

Enfin, selon la Commission européenne, il existe « de nettes distorsions de concurrence qui peuvent être directement attribuées aux exemptions des envois de valeur négligeables. Les conséquences de telles distorsions incluent de considérables pertes de recettes de TVA pour les États membre ainsi que des faillites dentreprises et des délocalisations » ([184]). À cet égard, la suppression de cette catégorie des envois de valeur négligeable par la directive du 5 décembre 2017, qui devra être traduite en droit interne au niveau réglementaire, apparaît bienvenue.

*

*     *

La commission adopte larticle 53 sans modification.

 


Article 54
Obligation dinformation à la charge des exploitants dentrepôts logistiques

Résumé du dispositif et effets principaux

Le I du présent article crée une obligation, à la charge des exploitants d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique, de mise à disposition de l’administration fiscale, de diverses informations relatives à l’identité des propriétaires des biens stockés.

Le II institue en miroir un droit de communication en vertu duquel les exploitants d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique doivent communiquer à l’administration, sur sa demande, les informations précitées relatives à l’identité des propriétaires des biens stockés.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article, modifié par un amendement rédactionnel du Rapporteur général.

Le présent article doit être mis en relation avec l’article 53 qui transpose la directive 2017/2455 du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique.

I.   L’État du droit

A.   L’absence de responsabilité fiscale des exploitants de centres logistiques en matière de tva sur les ventes qu’ils facilitent

Le développement du e-commerce a notamment été permis par les centres logistiques de stockage dans lesquels les biens transitent avant d’être livrés au consommateur final.

Les centres logistiques sont des entrepôts gérés par des tiers à la transaction de vente et chargés de la manutention des marchandises pour le compte du vendeur.

Or, les exploitants d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique ne sont pas redevables de la TVA sur les biens en transit. En effet, ils ne sont pas propriétaires des biens et leurs prestations se limitent à une opération de livraison. Ils ne sont pas intermédiaires de la vente.

Dans ses évaluations préalables, le Gouvernement souligne que l’OCDE a constaté que « des centres logistiques ont aidé des fournisseurs étrangers à ne pas payer la TVA due sur les biens quils vendaient » ([185]).

En effet, il est aisé pour l’exploitant d’un entrepôt de prétendre ne pas connaître la situation du bien en transit au regard de la TVA. Ainsi, il peut arriver qu’un bien vendu à un résident français par un vendeur établi hors de l’Union européenne ne soit pas taxé à la TVA du fait de son pré-positionnement dans un centre de stockage en France.

Dans son rapport de mars 2019 consacré à la thématique des plateformes numériques, l’OCDE a estimé qu’on pouvait « mettre fin à ces abus en imposant aux sociétés gérant un centre logistique de demander une autorisation dexercice/un numéro dimmatriculation et en les soumettant à une obligation deffectuer des diligences raisonnables sur les entreprises utilisant leurs installations et tenir un registre des flux de biens à lentrée et à la sortie du centre de traitement ».

B.   Les limites du droit de communication

Le principe général du droit de communication dont bénéficie l’administration fiscale auprès des tiers pour réaliser ses opérations de contrôle est posé à l’article L. 81 du livre des procédures fiscales (LPF).

Il permet « aux agents de ladministration, pour létablissement de lassiette et le contrôle des impôts, davoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés » aux articles L. 82 A à L. 96 I du LPF.

Parmi ces articles, l’article L. 96 G permet à l’administration fiscale d’obtenir des informations auprès des opérateurs de communication électronique.

Toutefois, ce droit de communication ne s’exerce pas auprès des exploitants d’entrepôt.

En outre, comme le fait valoir le Gouvernement dans les évaluations préalables, ce droit de communication est limité aux informations qui ont moins d’un an et n’a pas de portée extraterritoriale.

Il est donc insuffisant pour appréhender les flux de marchandise qui transitent par les centres logistiques de stockage.

C.   Les limites des obligations d’information des plateformes en ligne

L’article 10 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a actualisé et renforcé le contenu des obligations spécifiques pesant sur les plateformes, relatives à l’information des utilisateurs et à la transmission à l’administration fiscale du montant de leurs transactions.

Ainsi, depuis le 1er janvier 2019, en vertu du 2° de l’article 242 bis du code général des impôts, les plateformes sont tenues de fournir un certain nombre d’informations fiscales et sociales à leurs utilisateurs.

Elles sont tenues de les informer de leurs obligations fiscales et sociales et « de mettre à disposition un lien électronique vers les sites des administrations permettant » de s’y conformer.

En cas de manquement à cette obligation d’information, les plateformes encourent une amende forfaitaire globale fixée dans la limite d’un plafond de 50 000 euros (article 1731 ter du code général des impôts).

Par ailleurs, les plateformes doivent adresser annuellement à leurs utilisateurs un document mentionnant divers éléments d’identification et surtout « le nombre et le montant total brut des transactions réalisées par lutilisateur au cours de lannée civile précédente ». Cette transmission doit être mise en œuvre pour la première fois avant le 31 janvier 2020 au titre des transactions réalisées au cours de l’année 2019.

Les informations contenues dans le document annuel adressé à l’utilisateur sur le montant de ses transactions doivent également être transmises à l’administration fiscale avant le 31 janvier N+1 au titre des opérations de l’année N, par application du 3° de l’article 242 bis du code général des impôts.

Par exception, les plateformes ne sont pas tenues de transmettre ces informations à l’administration fiscale :

– pour les ventes entre particuliers de biens qui font l’objet d’une exonération (cas des biens mobiliers d’occasion) ;

– pour les prestations de services dont bénéficie également le particulier qui les propose, sans objectif lucratif et avec partage de frais avec les bénéficiaires (par exemple, le covoiturage) ;

– et à condition, dans les deux cas, que le total des montants perçus par un même utilisateur ou que le nombre de transactions réalisées dans l’année n’excède pas un seuil annuel fixé par arrêté ; un arrêté du 27 décembre 2018 ([186]) a fixé les seuils à 3 000 euros pour le montant total annuel des transactions et à 20 pour le nombre total annuel des transactions.

Enfin, l’administration fiscale dispose en tout état de cause d’un droit de communication, prévu à l’article L. 82 AA du livre des procédures fiscales, qui lui permet d’obtenir ces informations auprès de la plateforme, quand bien même elles porteraient sur des montants et un nombre de transactions inférieurs aux seuils précités.

Toutefois, cet arsenal est insuffisant dans la mesure où les informations recueillies ne peuvent pas être recoupées avec les flux réels de marchandises se déroulant au sein des centres de stockage.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   La création d’une obligation pour les centres logistiques

1.   Une mise à disposition d’informations relatives aux propriétaires des biens stockés

Le I du présent article crée une obligation, à la charge des exploitants d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique, de mise à disposition de l’administration fiscale de diverses informations relatives à l’identité des propriétaires des biens stockés.

Cette nouvelle obligation est codifiée à l’article 298 sexdecies J du code général des impôts.

Art. 298 sexdecies J du code général des impôts (nouveau)

I. – L’exploitant d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique de stockage de biens destinés à faire l’objet d’une livraison au sens du 1° du II de l’article 256 ou d’une opération assimilée mentionnée au III du même article tient à la disposition de l’administration des informations relatives, notamment, à l’origine, la nature, la quantité et la détention des biens stockés ainsi qu’aux propriétaires de ces biens, lorsque les conditions suivantes sont remplies :

1° Les biens stockés sont destinés à faire l’objet d’une vente réalisée par l’entremise d’une plateforme de mise en relation par voie électronique ;

2° Les biens stockés ont fait l’objet d’une importation en France ou dans un autre État membre de l’Union européenne en provenance d’un pays ou territoire tiers à l’Union européenne ;

3° Les biens stockés sont la propriété d’un assujetti qui a établi le siège de son activité économique en dehors de l’Union européenne ou qui, à défaut d’un tel siège, a son domicile ou sa résidence habituelle en dehors de l’Union européenne ;

4° Les biens stockés n’ont pas fait l’objet d’une livraison au sens du 1° du II de l’article 256 ou d’une opération assimilée mentionnée au III du même article depuis leur introduction en France.

II. – Pour l’application des dispositions du I du présent article, est considérée comme plateforme l’entreprise, quel que soit son lieu d’établissement, qui met en relation à distance, par voie électronique, des personnes en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service.

III. – Les informations tenues à la disposition de l’administration mentionnées au premier alinéa sont fixées par arrêté du ministre chargé du budget.

Ces informations sont conservées jusqu’au 31 décembre de la sixième année suivant celle durant laquelle a eu lieu l’opération d’importation.

IV. – L’exploitant est tenu de faire toute diligence afin de s’assurer de l’identité des propriétaires des biens mentionnés au premier alinéa du I. Il informe par tous moyens ces propriétaires de leurs obligations en matière de taxe sur la valeur ajoutée en France.

L’exploitant d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique de stockage doit ainsi tenir à la disposition de l’administration des informations définies par arrêté sur les biens lorsque :

– ils sont destinés à être vendus par une plateforme électronique ; la plateforme électronique est définie comme une entreprise, quel que soit son lieu d’établissement, qui met en relation à distance, par voie électronique, des personnes en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service ;

– la vente est susceptible d’entrer dans le champ d’application de la TVA ;

– ils ont été importés d’un pays ou territoire situé hors Union européenne (UE) ;

– ils sont la propriété d’un assujetti installé hors UE ;

– ils n’ont pas encore donné lieu depuis leur importation à une opération soumise à la TVA.

Autrement dit, l’obligation de mise à disposition des informations porte sur un périmètre restreint aux biens susceptibles de donner lieu à la perception d’une TVA en France, qui ont une provenance extérieure à l’Union européenne et qui appartiennent à une entité également située hors de l’Union européenne.

Le contenu des informations devant être mises à la disposition de l’administration fiscale doit être précisé par arrêté mais portera, comme l’indique le projet d’article, sur l’identité des propriétaires ainsi que sur l’origine, la nature, la quantité et la détention des biens stockés.

Ces informations doivent en outre être conservées par l’exploitant d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique jusqu’au 31 décembre de la sixième année suivant celle durant laquelle a eu lieu l’opération d’importation.

2.   Un nouveau droit de communication

Le II du présent article institue en miroir un droit de communication en vertu duquel les exploitants d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique doivent communiquer à l’administration, sur sa demande, les informations précitées relatives notamment à l’identité des propriétaires des biens stockés.

L. 96 K du livre des procédures fiscales (nouveau)

L’exploitant d’un entrepôt ou d’une plateforme logistique de stockage de biens destinés à faire l’objet d’une livraison au sens du 1° du II de l’article 256 du code général des impôts ou d’une opération assimilée mentionnée au III du même article communique à l’administration fiscale, sur sa demande, les informations prévues à l’article 298 sexdecies J du même code.

Le droit de communication institué permet de rendre effectives les obligations de mise à disposition des informations prévues par le I du présent article. Il permet le cas échéant l’application d’une sanction. En effet, l’article 1734 du code général des impôts sanctionne par une peine d’amende de 10 000 euros l’opposition à un droit de communication.

B.   La lutte contre les fraudes permises par le pré‑positionnement

Le dispositif proposé doit permettre de mieux lutter contre les fraudes permises par le pré-positionnement des biens dans les centres de stockage.

L’amende de 10 000 euros en cas d’absence de réponse au droit de communication est suffisamment dissuasive pour inciter les exploitants d’entrepôts et de centres logistiques à réunir les informations nécessaires relatives aux biens extra-européens.

Les informations recueillies pourront utilement être recoupées avec celles transmises à l’administration fiscale en vertu du 3° de l’article 242 bis du code général des impôts, portant notamment sur les montants et le nombre de transaction des utilisateurs de plateforme en ligne.

Le dispositif proposé constitue dès lors un complément utile à l’ensemble de l’arsenal prévu en matière de lutte contre la fraude à la TVA apparue avec l’émergence du e-commerce et des plateformes en ligne.

L’enjeu est important sur le plan budgétaire puisque, selon les évaluations préalables du Gouvernement, « 41 % des acheteurs français ont, au cours des douze derniers mois, commandé par internet des biens ou services auprès de vendeurs dautres pays ».

Le dispositif proposé, outre sa finalité fiscale, permet aussi de favoriser les conditions d’une concurrence équitable entre les vendeurs localisés au sein de l’Union européenne et les vendeurs hors Union européenne, ces derniers devant désormais avoir plus de difficultés à échapper à la TVA.

*

*     *

La commission adopte lamendement rédactionnel II-CF1337 du rapporteur général (amendement II-2542).

Puis elle adopte larticle 54 ainsi modifié.

 

 


Article 55
Publication de la liste des plateformes
qui ne coopèrent pas avec ladministration fiscale

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article crée une procédure permettant la publication sur internet du nom des plateformes qui ont manqué à leurs obligations de coopération avec l’administration fiscale.

La publication nécessite deux manquements préalables, au cours d’une période glissante de douze mois, et ayant conduit :

– soit à la mise en œuvre, après signalement et mise en demeure, du mécanisme de solidarité de TVA, institué par la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, lorsque l’administration présume une fraude de l’un des utilisateurs de la plateforme ;

– soit à l’application d’une amende pour absence de réponse à un droit de communication ;

– soit à l’application d’une amende pour absence de transmission annuelle des informations relatives aux transactions des utilisateurs, telles que définies par la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude ;

– soit à la taxation doffice à la TVA, en cas de défaut de déclaration, au titre de certaines ventes que la plateforme a facilitées et dont elle sera redevable par application de l’article 53 du présent projet de loi de finances (biens importés de moins de 150 euros et livraisons domestiques ou ventes à distance intracommunautaires par un vendeur non établi dans l’Union européenne) ;

– soit enfin à la taxation doffice au titre de la taxe sur les services numériques (TSN) créée par la loi du 24 juillet 2019, en cas de défaut de déclaration.

La publication est également subordonnée à un avis conforme et motivé de la commission des infractions fiscales (CIF). Une copie de la saisine de la CIF doit être adressée à l’opérateur de la plateforme qui dispose alors de 30 jours pour faire valoir ses observations.

Une fois l’avis conforme de la CIF rendu, et si l’administration souhaite maintenir la publication, la décision doit être notifiée à l’opérateur. La publication ne peut alors intervenir qu’à l’issue d’un nouveau délai de 60 jours, délai durant lequel il peut faire valoir ses observations.

La publication ne peut excéder une année et est retirée si la plateforme s’acquitte des impositions ou des amendes mises à sa charge.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 18 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a institué un mécanisme permettant à l’administration fiscale, après avis conforme et motivé de la CIF, de publier sur son site internet les amendes ou majorations appliquées à l’encontre de personnes morales à raison de manquements graves portant sur un montant minimum de droits fraudés de 50 000 euros et ayant donné lieu à une majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses. Cette procédure dite du « name and shame » est codifiée à l’article 1729 A bis du code général des impôts.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article modifié par plusieurs amendements du Rapporteur général, quatre présentant une portée rédactionnelle, et un prévoyant de rendre publique sur le site internet de l’administration toute décision juridictionnelle prononçant la décharge d’une imposition ou annulant une amende ayant fait l’objet d’une publication.

Le présent article est à mettre en lien avec l’article 53 du présent projet de loi de finances dont l’objet est la transposition de la directive (UE) 2017/2455 du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique.

I.   L’État du droit

Récemment, des obligations fiscales spécifiques ont été créées pour les plateformes en ligne (A). Celles-ci ont vocation à être renforcées avec la transposition de la directive du 5 décembre 2017 relative au régime de TVA du commerce électronique (B).

Par ailleurs, en l’état du droit, il existe depuis peu une procédure permettant la publication des sanctions administratives fiscales (« Name and shame ») qui n’est pas spécifique aux plateformes en ligne (C).

A.   Les obligations fiscales spÉcifiques aux plateformes en ligne

1.   La notion de plateforme en ligne

a.   La notion en droit de la consommation

L’émergence des plateformes en ligne a bouleversé de nombreux secteurs d’activité (locations saisonnières, véhicules de transport avec chauffeur, petites annonces, vente de produits culturels, etc.). Elles ont connu un essor considérable au cours des années 2010 grâce à la diffusion et l’utilisation croissante d’internet.

Diversité des plateformes en ligne

Les plateformes en ligne sont très variées. Il peut s’agir de multinationales ou de micro-entreprises. Certaines ont acquis un poids économique et une notoriété considérables (Amazon, Airbnb, Blablacar, Booking, Le bon coin, Uber, etc.).

Si elles ont pour point commun d’utiliser internet comme mode d’interaction, leurs modèles économiques sont en réalité très divers.

Certaines plateformes se bornent à valoriser des contenus, des biens ou des services proposés par des tiers, tels que les moteurs de recherche, réseaux sociaux ou comparateurs (Lilligo, Lesfurets, etc.). D’autres publient des avis de consommateur (Tripadvisor, Google +, par exemple).

Certaines relèvent de léconomie du partage et sont caractérisées par des échanges entre particuliers sans but lucratif (tel est le cas du partage de frais de véhicules avec Blablacar).

D’autres visent à lappariement de prestataires professionnels de services et de clients (c’est le modèle d’Uber qui propose des véhicules de transport avec chauffeur disponibles à proximité de l’utilisateur).

D’autres encore sont qualifiées de places de marché, pouvant mettre en relation des particuliers mais aussi des professionnels (Le Bon Coin, Airbnb). Dans ce dernier cas, elles peuvent ou non être intermédiaires de la transaction.

De nombreuses problématiques ont été soulevées par l’apparition de ces nouveaux acteurs : conditions d’une concurrence équitable avec les secteurs traditionnels, protection des données personnelles, régime de responsabilité des intermédiaires, perturbations du marché immobilier, etc.

La notion d’opérateur de plateforme en ligne – ci-après « la plateforme » – a été introduite dans le code de la consommation par l’article 49 de la loi n° 2016‑1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique (codifié à l’article L. 111-7 du code de la consommation).

L’objectif recherché était d’améliorer l’information du consommateur. C’est la raison pour laquelle la définition de l’article L. 111-7 du code de la consommation est assez large. Les plateformes sont définies comme « toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne reposant sur :

 Le classement ou le référencement, au moyen dalgorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers ;

 Ou la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente dun bien, de la fourniture dun service ou de léchange ou du partage dun contenu, dun bien ou dun service. ».

b.   La notion fiscale (article 242 bis du code général des impôts)

Des problématiques spécifiquement fiscales sont apparues.

Les plateformes ont en effet permis l’essor de transactions réalisées par des particuliers qui n’avaient pas toujours conscience de leurs obligations fiscales (en particulier s’agissant des locations saisonnières).

De même, elles ont favorisé des ventes à distance réalisées par des opérateurs établis hors de l’Union européenne auprès de particuliers résidents en France. La TVA due sur ce type de vente n’est pas toujours acquittée.

C’est la raison pour laquelle, parallèlement, le besoin a été ressenti d’inscrire dans le code général des impôts une définition fiscale des plateformes pour pouvoir leur conférer des obligations spécifiques.

Avant même l’entrée en vigueur de la définition du code de la consommation, le législateur a donc introduit dans le code général des impôts, à l’occasion la loi de finances pour 2016, un nouvel article 242 bis définissant les plateformes comme les entreprises « qui mettent en relation à distance, par voie électronique, des personnes en vue de la vente dun bien, de la fourniture dun service ou de léchange ou du partage dun bien ou service ».

La définition fiscale des plateformes est recentrée sur le rôle d’intermédiaire dans les transactions. Elle diffère de celle du code de la consommation en ce qu’elle exclut les plateformes de partage de contenus.

Cette définition est plus opérante du point de vue de la matière fiscale, dont l’objet est de lever un impôt.

2.   Les obligations issues de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude

La première version de l’article 242 bis du code général prévoyait l’application au 1er janvier 2019 d’obligations spécifiques pour les plateformes, relatives à l’information des utilisateurs et à la transmission à l’administration fiscale du montant de leurs transactions.

L’article 10 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a actualisé et renforcé le contenu de ces obligations.

L’article 11 de cette même loi a institué un mécanisme de solidarité de paiement de la TVA.

a.   L’information des utilisateurs (2° de l’article 242 bis du code général des impôts)

Depuis le 1er janvier 2019, en vertu du 2° de l’article 242 bis du code général des impôts, les plateformes sont tenues de fournir un certain nombre d’informations fiscales et sociales à leurs utilisateurs.

Elles sont tenues de les informer de leurs obligations fiscales et sociales et « de mettre à disposition un lien électronique vers les sites des administrations permettant » de s’y conformer.

En cas de manquement à cette obligation d’information, les plateformes encourent une amende forfaitaire globale fixée dans la limite d’un plafond de 50 000 euros (article 1731 ter du code général des impôts).

Par ailleurs, les plateformes doivent adresser annuellement à leurs utilisateurs un document mentionnant divers éléments d’identification et surtout « le nombre et le montant total brut des transactions réalisées par lutilisateur au cours de lannée civile précédente ». Cette transmission doit être mise en œuvre pour la première fois avant le 31 janvier 2020, au titre des transactions de l’année 2019.

b.   La transmission à l’administration d’informations relatives aux utilisateurs (3° de l’article 242 bis du code général des impôts)

Les informations contenues dans le document annuel adressé à l’utilisateur sur le montant de ses transactions doivent également être transmises à l’administration fiscale avant le 31 janvier de l’année N au titre de l’année N‑1, par application du 3° de l’article 242 bis du code général des impôts.

Par exception, les plateformes ne sont pas tenues de transmettre ces informations à l’administration fiscale :

– pour les ventes entre particuliers de biens qui font l’objet d’une exonération (cas des biens mobiliers d’occasion) ;

– pour les prestations de services dont bénéficie également le particulier qui les propose, sans objectif lucratif et avec partage de frais avec les bénéficiaires (par exemple, le covoiturage) ;

– et à condition, pour chacun des deux cas précédents, que le total des montants perçus par un même utilisateur ou que le nombre de transactions réalisées dans l’année par cet utilisateur n’excède pas un seuil annuel fixé par arrêté ; un arrêté du 27 décembre 2018 ([187]) a fixé les seuils à 3 000 euros pour le montant total annuel des transactions et à 20 le nombre total annuel des transactions.

Enfin, l’administration fiscale dispose en tout état de cause d’un droit de communication, prévu à l’article L. 82 AA du livre des procédures fiscales, qui lui permet d’obtenir ces informations auprès de la plateforme, quand bien même elles porteraient sur des montants et un nombre de transactions inférieurs aux seuils précités.

Le droit de communication spécifique aux plateformes prévu par larticle L. 82 AA du livre des procédures fiscales

Le principe général du droit de communication dont bénéficie l’administration fiscale auprès des tiers pour réaliser ses opérations de contrôle est posé à l’article L. 81 du livre des procédures fiscales (LPF).

Il permet « aux agents de ladministration, pour létablissement de lassiette et le contrôle des impôts, davoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés » aux articles L. 82 A à L. 96 I du LPF.

Parmi ces articles, la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a inséré l’article L. 82 AA. Celui-ci prévoit que les opérateurs de plateforme – mentionnés à l’article 242 bis du code général des impôts – communiquent à l’administration fiscale, sur sa demande, les informations transmises annuellement à leurs utilisateurs relatives aux nombre et montant total brut des transactions réalisées au cours de l’année civile précédente.

L’article 1734 du code général des impôts sanctionne par une peine d’amende de 10 000 euros l’opposition au droit de communication. Une amende de même montant est applicable en cas d’absence de tenue de ces documents.

Le III de l’article 1736 sanctionne également par une amende égale à 5 % des sommes non déclarées le non-respect de l’obligation de notification annuelle à l’utilisateur et à l’administration fiscale des informations.

c.   Le mécanisme de solidarité de paiement de la TVA (articles 283 bis et 293 A ter du code général des impôts)

Les envois d’un vendeur professionnel destinés à un particulier sont soumis à la TVA par application des règles de droit commun de territorialité de la TVA. Elle doit être déclarée et collectée par le vendeur établi hors de l’Union européenne.

L’article 11 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a institué un mécanisme de solidarité de paiement de la TVA entre le vendeur et la plateforme en ligne qui a permis la transaction.

Les articles 283 bis et 293 A ter du code général des impôts prévoient en effet une procédure qui permet à l’administration fiscale de rendre solidaire la plateforme du paiement de la TVA due par un assujetti au titre des transactions réalisées via la plateforme.

Cette procédure se déroule en trois étapes : un signalement, une mise en demeure, puis la mise en œuvre de la solidarité.

Tout d’abord, l’administration doit procéder à un signalement à la plateforme lorsqu’elle présume un manquement de l’un de ses utilisateurs assujettis à la TVA afin que celle-ci « puisse prendre les mesures de nature à permettre à cet assujetti de régulariser sa situation ».

Ensuite, si les présomptions de fraude persistent, l’administration doit adresser une mise en demeure à la plateforme « de prendre des mesures supplémentaires ou, à défaut, dexclure lassujetti concerné ».

Enfin, à défaut de mise en œuvre de mesures ou de l’exclusion de l’assujetti, la TVA dont est redevable l’assujetti est solidairement due par la plateforme.

d.   La taxe sur les services numériques (article 299 du code général des impôts)

i.   Description de la taxe

La loi n° 2019-759 du 24 juillet 2019 a créé une taxe sur les services numériques (TSN), dite taxe GAFA ([188]). Cette taxe est codifiée à l’article 299 du code général des impôts.

S’inspirant d’une proposition de directive de la Commission européenne du 21 mars 2018, la TSN porte sur certains services numériques d’intermédiation et de publicité ciblée fournis à des annonceurs, incluant la vente de données des utilisateurs à des fins publicitaires.

Les plateformes en ligne sont donc parmi les principales visées par la TSN.

Toutefois, seules sont assujetties les entreprises, quel que soit leur lieu d’établissement, qui disposent d’une forte empreinte numérique, caractérisée par deux seuils des recettes tirées des services taxables :

– 750 millions d’euros au niveau mondial ;

– ou bien 25 millions d’euros en France.

Le taux de la TSN est de 3 %.

ii.   Procédure de taxation d’office ad hoc (article L. 70 A du livre des procédures fiscales – LPF)

La loi du 24 juillet 2019 a également créé une procédure de taxation d’office ad hoc.

Ainsi, l’article L. 16 C du LPF prévoit que l’administration fiscale peut demander au redevable de la TSN des justifications sur tous les éléments servant de base au calcul de cette taxe. Le délai de réponse fixé ne peut être inférieur à deux mois.

Lorsque le redevable n’a pas répondu ou a répondu de façon insuffisante à la demande de justifications, l’administration fiscale peut lui adresser « une mise en demeure de produire ou de compléter sa réponse dans un délai de trente jours, en précisant, le cas échéant, les compléments de réponse souhaités ».

À défaut de réponse, une procédure de taxation d’office peut être mise en œuvre sur le fondement de l’article L. 70 A du LPF.

B.   les apports de la directive du 5 décembre 2017 relative au régime de tva du commerce électronique

1.   Une transposition prévue par l’article 53 du présent projet de loi de finances

La directive n° 2017/2455 du 5 décembre 2017 ([189]) prévoit de nouveaux mécanismes permettant de lutter contre la fraude à la TVA en lien avec le développement du commerce électronique.

Ceux-ci sont détaillés dans le commentaire de l’article 53 dont l’objet est la transposition de la directive.

2.   Des plateformes bientôt redevables de la TVA pour certaines ventes qu’elles ont facilitées (2° du V de l’article 256 et 1 de l’article 293 A du code général des impôts)

Du point de vue du présent article 55, il convient de souligner qu’en vertu de la nouvelle rédaction du quatrième alinéa du 1 de larticle 293 A et de l’insertion d’un 2° du V de larticle 256 du code général des impôts prévues par l’article 53 du présent projet de loi, les plateformes électroniques seront redevables de la TVA lorsque celles-ci facilitent :

– les ventes à distance de biens importés de moins de 150 euros ;

– et les livraisons domestiques ou les ventes à distance intracommunautaires de biens réalisées par leur intermédiaire par un vendeur non établi dans l’Union européenne.

Une taxation d’office pourra dès lors intervenir si les opérateurs de plateforme ne respectent pas leurs obligations déclaratives concernant ces nouveaux cas pour lesquels ils seront redevables de la TVA.

En effet, le 3° de l’article L. 66 du livre des procédures fiscales permet à l’administration de taxer d’office « les personnes qui nont pas déposé dans le délai légal les déclarations quelles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables ».

C.   Le « Name and Shame » issu de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude

Jusqu’à récemment, en matière de fiscalité, la publicité des sanctions administratives n’existait pas. Seules les sanctions pénales pouvaient donner lieu au prononcé de la peine complémentaire d’affichage et de publication.

Sur le modèle de la procédure de publication de sanctions administratives prononcées par certaines autorités administratives (AMF, CNIL, Autorité de la concurrence), l’article 18 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a institué un mécanisme permettant à l’administration fiscale de publier sur son site internet les amendes ou majorations appliquées à l’encontre de personnes morales à raison de manquements graves.

Cette procédure dite du « name and shame » est codifiée à l’article 1729 A bis du code général des impôts.

Les manquements doivent présenter une gravité particulière, caractérisée par un montant minimum de droits fraudés de 50 000 euros ainsi que le recours à une manœuvre frauduleuse, laquelle entraîne une majoration de 80 %.

La publication est effectuée sur le site internet de l’administration fiscale pendant une durée qui ne peut excéder un an. La publication porte sur « la nature et le montant des droits fraudés et des amendes et majorations appliquées, la dénomination du contribuable ainsi que, le cas échéant, lactivité professionnelle et le lieu dexercice de cette activité ».

Cette procédure n’est pas cumulable avec le dépôt de plainte pour fraude fiscale par l’administration.

La décision de publication est prise par l’administration après avis conforme et motivé de la commission des infractions fiscales (CIF).

Une copie de la saisine de la CIF est adressée au contribuable, qui est invité à présenter ses observations écrites dans un délai de trente jours.

La commission des infractions fiscales (CIF)

La commission des infractions fiscales (CIF) a été créée par l’article 1er de la loi n° 77‑1453 du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédure aux contribuables en matière fiscale et douanière. Cette disposition a été codifiée par la suite à l’article L. 228 du livre des procédures fiscales.

Son rôle a été considérablement modifié par la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude.

Il a été réduit pour le déclenchement des poursuites pénales pour fraude fiscale en lien avec la réforme du « verrou de Bercy ». Désormais, son avis conforme n’est requis pour le dépôt de plaintes que pour les dossiers qui ne sont pas dénoncés automatiquement au procureur de la République ou qui ne font pas l’objet de présomptions caractérisées de fraude avec un risque de dépérissement des preuves.

Dans le même temps, son rôle a été élargi. En effet, l’avis conforme de la CIF est désormais requis lorsque l’administration envisage de rendre publiques des sanctions administratives, en application de l’article 1729 A bis du code général des impôts (« name and shame »).

La CIF est placée sous la présidence d’un conseiller d’État, en activité ou honoraire, élu par l’assemblée générale du Conseil d’État. Elle est également composée de :

– huit conseillers d’État, en activité ou honoraires, élus par l’assemblée précitée ;

– huit conseillers maîtres à la Cour des comptes, en activité ou honoraires, élus par la chambre du conseil en formation plénière de la Cour des comptes ;

– huit magistrats honoraires à la Cour de cassation, élus par l’assemblée générale de la Cour de cassation ;

– deux personnalités qualifiées, désignées par le président de l’Assemblée nationale ;

– et deux personnalités qualifiées, désignées par le président du Sénat.

La décision de publication doit être notifiée au contribuable. Celui-ci dispose alors d’un délai de soixante jours pour exercer un recours.

Ce recours a pour effet de neutraliser la décision de publication. En effet, « les recours portant sur les impositions et les amendes ou majorations correspondantes présentés avant lexpiration de ce délai ont pour effet de suspendre la publication tant que les impositions et les amendes ou majorations ne sont pas devenues définitives ». De même, en cas de recours après l’expiration de ce même délai, « la publication est retirée du site internet de ladministration fiscale tant que nest pas intervenue une décision juridictionnelle confirmant de manière définitive le bien-fondé de la décision de publication » (article 1729 A bis du code général des impôts).

En tout état de cause, l’administration est tenue de rendre publique sur son site internet toute décision juridictionnelle revenant sur les impositions et les amendes ou majorations ayant fait l’objet d’une publication.

Selon les renseignements recueillis par le Rapporteur général auprès du Gouvernement, à ce jour, aucune saisine de la CIF n’est intervenue concernant ce nouveau dispositif et donc aucune publication n’a eu lieu à ce jour. En effet, le dispositif est entré en vigueur le 25 octobre 2018. Dès lors, il ne peut concerner que des revenus déclarés au plus tôt en 2019. Ces périodes commencent à faire l’objet de contrôles fiscaux qui s’achèveront pour la plupart en 2020. Les premières sanctions de publication seront donc prononcées en 2020 au plus tôt.

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article crée une procédure permettant la publication sur internet du nom des plateformes qui ont manqué à leurs obligations de coopération avec l’administration fiscale. Il s’agit donc d’un mécanisme de « name and shame » spécifique aux plateformes, qui s’inspire de celui prévu à l’article 1729 A bis du code général des impôts pour les manquements graves.

L’objectif recherché est de jouer sur l’effet réputationnel afin d’inciter les plateformes à coopérer et, à défaut, d’améliorer le recouvrement des impositions et amendes en cas de manquements aux obligations de coopération.

A.   la mise en place d’un « name and shame » spécifique aux plateformes

Le I du présent article insère un nouvel article au code général des impôts, numéroté 1740 D, et ayant pour objet la publication de l’identité des opérateurs de plateforme non coopératifs.

Le II du présent article procède à deux coordinations au sein du livre des procédures fiscales, respectivement à l’article L. 16 C et à l’article L. 228.

Article 1740 D du code général des impôts (nouveau)

I. – Si un opérateur de plateforme au sens du premier alinéa de l’article 242 bis fait l’objet, en moins de douze mois, d’au moins deux mesures parmi celles mentionnées au II du présent article, la mise en œuvre de la seconde mesure peut être accompagnée de la publication, sur une liste des opérateurs de plateformes non coopératifs, de la dénomination commerciale de l’opérateur de plateforme ainsi que, le cas échéant, de son activité professionnelle et de son État ou territoire de résidence.

II. – Les mesures mentionnées au I consistent en la mise en recouvrement : 

1° De la taxe dont l’opérateur est solidairement redevable en application du IV des articles 283 bis ou 293 A ter. La mise en demeure prévue aux IV des articles précités mentionne la sanction prévue au présent article ; 

2° De l’amende prévue au premier alinéa de l’article 1734 pour absence de réponse à une demande de communication d’informations fondée sur le deuxième alinéa de l’article L. 81 ou sur l’article L. 82 AA du livre des procédures fiscales. La demande de communication d’informations mentionne la sanction prévue au présent article ; 

3° De l’amende prévue au III de l’article 1736 au titre du non-respect des obligations prévues aux 2° ou 3° de l’article 242 bis ; 

4° D’une imposition résultant de l’application de la procédure de taxation d’office prévue au 3° de l’article L. 66 du livre des procédures fiscales, lorsque la taxe sur la valeur ajoutée est due par l’opérateur sur le fondement du quatrième alinéa du 1 de l’article 293 A ou du 2° du V de l’article 256. La notification prévue à l’article L. 76 du livre des procédures fiscales mentionne la sanction prévue au présent article ; 

5° D’une imposition résultant de l’application de la procédure de taxation d’office prévue à l’article L. 70 A du livre des procédures fiscales.

III. – La décision de publication prévue au I est prise par l’administration après avis conforme et motivé de la commission prévue au II de l’article L. 228 du livre des procédures fiscales qui apprécie, au vu des manquements et des circonstances dans lesquels ils ont été commis, si la publication est justifiée. Lorsque la commission est saisie, une copie de la saisine de la commission est adressée à l’opérateur de plateforme, qui est invité à présenter à la commission ses observations écrites dans un délai de trente jours.

La décision de publication prise par l’administration est notifiée à l’opérateur de plateforme.

La publication ne peut être effectuée avant l’expiration d’un délai de soixante jours à compter de la notification du document par lequel l’administration a fait connaître à l’opérateur de plateforme concerné la sanction qu’elle se propose d’appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l’intéressé de présenter dans ce délai ses observations.

La publication est effectuée sur le site internet de l’administration fiscale pendant une durée qui ne peut excéder un an. Lorsque l’opérateur de plateforme a acquitté l’intégralité des impositions ou amendes ayant motivé la publication, celle-ci est retirée sans délai du site internet de l’administration fiscale.

IV. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article.

1.   Les conditions cumulatives à la publication

Quatre conditions cumulatives sont exigées pour permettre la publication sur internet du nom de la plateforme non coopérative.

a.   Un cumul de manquements

La publication nécessite, tout d’abord, deux manquements préalables à une ou plusieurs des cinq types d’obligations de coopération des plateformes.

Les manquements pouvant donner lieu à publication visés par le II de l’article 1740 D du code général des impôts (nouveau)

 

Type de manquement

Fondement de l’obligation

Sanction

Absence de mesures nécessaires à la régularisation d’un utilisateur suspecté de fraude

Articles 283 bis et 293 A ter du CGI

Solidarité de la TVA due par l’assujetti suspecté de fraude

Absence de réponse au droit de communication

Articles L. 81 et L. 82 AA du LPF

Amende de l’article 1734 du CGI

Absence de transmission annuelle des informations relatives aux transactions des utilisateurs

2° et 3° de l’article 242 bis du CGI

Amende du III de l’article 1736 du CGI

Absence de déclarations de TVA

1 de l’article 293 A et 2° du V de l’article 256 du CGI dans leur rédaction issue de l’article 53 du présent PLF

Taxation d’office à la TVA au titre de certaines ventes

(3° de l’article L. 66 et article L. 76 du LPF)

Absence de déclarations de la TSN

Article 299 du CGI

Taxation d’office à la TSN

(Article L. 70 A du LPF)

CGI : code général des impôts ; LPF : Livre des procédures fiscales ; PLF : projet de loi de finances ; TSN : Taxe sur les services numériques.

Source : d’après le présent article 55 du PLF.

Autrement dit, ces manquements doivent avoir donné lieu :

– soit à la mise en œuvre, après signalement et mise en demeure, du mécanisme de solidarité de TVA, institué par la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, lorsque l’administration présume une fraude de l’un des utilisateurs de la plateforme ;

– soit à l’application d’une amende pour absence de réponse à un droit de communication ;

– soit à l’application d’une amende pour absence de transmission annuelle des informations relatives aux transactions des utilisateurs, telles que définies par la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude ;

– soit à la taxation d’office à la TVA au titre de certaines ventes que la plateforme a facilitées et dont elle sera redevable par application de l’article 53 du présent projet de loi de finances (biens importés de moins de 150 euros, et livraisons domestiques ou ventes à distance intracommunautaires par un vendeur non établi dans l’Union européenne) ;

– soit enfin à la taxation d’office au titre de la taxe sur les services numériques (TSN) créée par la loi du 24 juillet 2019.

b.   Un cumul réalisé sur une période de 12 mois

Le cumul d’au moins deux manquements doit être intervenu sur une période de 12 mois.

Autrement dit, la sanction consécutive au second manquement doit être prise moins d’un an après la décision de sanction consécutive au premier manquement.

c.   Un avis conforme de la commission des infractions fiscales

Il est exigé un avis conforme de la commission des infractions fiscales.

Dans ses évaluations préalables, le Gouvernement précise que le décret en Conseil d’État prévu par le présent article précisera « les conditions dans lesquelles la commission des infractions fiscales rendra son avis sur la publication envisagée par ladministration ».

Le présent article prévoit simplement qu’une copie de la saisine de la CIF doit être adressée à la plateforme qui dispose alors de 30 jours pour faire valoir ses observations. Il semble donc que la procédure devant la CIF respecterait le principe du contradictoire.

Sur ce point, le dispositif proposé s’inscrit dans la lignée de la loi relative à la lutte contre la fraude et du nouveau rôle qu’elle a confié à la CIF en matière de « name and shame ».

d.   Un délai de 60 jours pour faire valoir ses observations

Si la CIF rend un avis conforme et que l’administration fiscale souhaite maintenir l’application de la sanction, elle doit en informer l’opérateur par un document spécifique. Celui-ci dispose alors d’un nouveau délai de soixante jours pour présenter ses observations à l’administration fiscale.

Ce délai est donc indépendant de la procédure suivie devant la CIF. La publication ne peut être effectuée qu’à l’issue de ce second délai.

2.   Les différences par rapport au « name and shame » de l’article 1729 A bis du code général des impôts

On observe plusieurs différences par rapport à la procédure de « name and shame » prévue à l’article 1729 A bis du code général des impôts.

En premier lieu, il est exigé un cumul de manquements quand la procédure existante ne nécessite qu’un seul manquement.

Toutefois, cette différence n’est qu’apparente car, dans les deux cas, il est exigé une certaine gravité. Dans le dispositif ici proposé, la gravité résulte d’un cumul de manquements tandis que dans le dispositif existant la gravité résulte du montant des droits fraudés (au moins 50 000 euros) et de l’application de la pénalité de 80 % pour manœuvres frauduleuses.

En deuxième lieu, le dispositif ici proposé ne prévoit pas de suspension de la publication en cas de recours au fond. C’est là une différence majeure entre les deux dispositifs de « name and shame ».

Labsence de suspension de la publication en cas de recours

Par comparaison avec les acteurs économiques traditionnels, les opérateurs de plateformes électroniques sont dans une situation particulière :

– de par leur rôle d’intermédiation souvent incontournable ;

– de par leur présence à l’échelle mondiale ;

– de par les responsabilités particulières que leur a confiées l’administration en matière fiscale (obligation d’information prévue à l’article 242 bis du code général des impôts ou redevabilité de la TVA pour un tiers en application des articles 256 ou 293 A du même code).

Compte tenu de ces responsabilités particulières, la mesure proposée au présent article vise à inciter les opérateurs de plateformes électroniques à se mettre en conformité avec leurs obligations fiscales le plus rapidement possible. Donner un caractère suspensif au recours de l’opérateur de plateforme s’opposerait à l’objectif incitatif de la mesure : la publication pourrait n’intervenir, compte tenu des délais entraînés par les différents recours administratifs et juridictionnels, que plusieurs années après la réalisation du manquement. La plateforme est d’autant plus incitée à se mettre en conformité avec ses obligations fiscales qu’à la différence de l’article 1729 A bis du CGI, le dispositif proposé prévoit que la publication cesse sans délai dès que l’opérateur de plateforme a respecté les obligations dont la violation avait motivé la publication.

À l’inverse, lorsque s’applique l’article 1729 A bis du CGI, la sanction n’a une finalité incitative que pour les autres contribuables ou, s’agissant du contribuable concerné, que pour l’avenir. Dans ce cas, il est alors préférable que les sanctions infligées soient définitives avant de les rendre publiques.

Source : Réponse du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

De même, le présent dispositif ne prévoit pas, contrairement au dispositif existant, que l’administration soit tenue de rendre publique sur son site internet toute décision juridictionnelle revenant sur les impositions et les amendes ou majorations ayant fait l’objet d’une publication

En revanche, le dispositif proposé prévoit un retrait immédiat de la publication en cas de paiement de l’imposition résultant de la taxation d’office ou de l’amende. Dans le dispositif existant au contraire, la publication intervient à titre de sanction complémentaire quand bien même le contribuable régulariserait très vite sa situation.

Il apparaît donc que le dispositif proposé n’est pas un simple « name and shame » mais a également pour vocation d’être un outil de pression pour le recouvrement.

B.   la recherche d’un effet réputationnel

L’objectif affiché du Gouvernement est de faire des plateformes en ligne de véritables « auxiliaires de ladministration fiscale ». Voilà pourquoi le dispositif proposé est centré sur les manquements à l’obligation de coopération.

Dans ses évaluations préalables, le Gouvernement souligne que la procédure du « name and shame » est particulièrement adaptée pour cela, contrairement aux sanctions pénales et fiscales.

En effet, « la localisation de certains opérateurs de plateforme à létranger, notamment les plus importants dentre eux, limite la capacité de ladministration à sassurer de leur pleine coopération ». Il convient donc de rechercher un « effet réputationnel immédiat » qui sera « identique quel que soit le lieu de localisation de la plateforme ».

De ce point de vue, le dispositif proposé constitue un outil complémentaire à l’arsenal législatif mis en place pour inciter les plateformes en ligne à coopérer avec l’administration fiscale.

*

*     *

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels II-CF1340 (amendement II-2543), II-CF1341 (amendement II-2544) et IICF1343 (amendement II2545) du rapporteur général.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement IICF1417 de Mme Christine Pires Beaune.

Elle en vient à lamendement II-CF1367 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement impose que l’administration rende public sur son site internet les décisions juridictionnelles revenant sur les impositions et les amendes ayant fait l’objet d’une publication. Par cohérence, puisque la décision d’imposer une amende est publiée, la décision contraire doit aussi l’être.

La commission adopte lamendement II-CF1367 (amendement II2546).

Elle adopte ensuite lamendement rédactionnel II-CF1352 du rapporteur général (amendement II-2547).

Puis elle adopte larticle 55 ainsi modifié.

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*     *

Article additionnel après l’article 55
Transmission aux établissements habilités à le délivrer de linformation permettant de vérifier léligibilité dun souscripteur au livret dépargne populaire

La commission est saisie de lamendement II-CF1559 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit d’une mesure de simplification prévoyant la transmission automatique aux banques des informations permettant de vérifier l’éligibilité d’un client au livret d’épargne populaire.

La commission adopte lamendement II-CF1559 (amendement II2548).

 


Article 56
Mise en œuvre de la facturation électronique dans les relations interentreprises et remise dun rapport sur les conditions
de cette mise en œuvre

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article institue l’obligation d’émettre par voie électronique les factures entre assujettis à la TVA. Il prévoit également que les données figurant sur la facturation électronique soient transmises à l’administration.

L’entrée en vigueur du dispositif est prévue entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2025 selon un calendrier fixé par décret qui devra prendre en compte la taille et le secteur d’activité des entreprises concernées. Il est également prévu que l’entrée en vigueur soit subordonnée à l’autorisation du Conseil de l’Union européenne.

Enfin, le présent article prévoit la remise au Parlement avant le 1er septembre 2020 d’un rapport sur les conditions de mise en œuvre de l’obligation de facturation électronique.

Dernières modifications législatives intervenues

L’ordonnance n° 2014-697 du 26 juin 2014 a créé une obligation de facturation électronique pour les transactions entre les entreprises et l’administration selon un calendrier qui s’étale du 1er janvier 2017 au 1er janvier 2020 en fonction de la taille de l’entreprise. Elle est aujourd’hui codifiée aux articles L. 3133-1 et suivants du code de la commande publique.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article modifié par deux amendements rédactionnels du Rapporteur général.

I.   L’État du droit

A.   le rôle de la facture en matiÈre de tva

Le TVA est un impôt sur la consommation collecté par le vendeur. Elle ne frappe que la valeur ajoutée et repose dès lors sur le régime des déductions : l’assujetti à la TVA peut déduire de la TVA qu’il a collectée auprès de l’acheteur la TVA qu’il a lui-même acquittée en amont pour produire le bien ou le service vendu.

TVA à reverser = TVA collectée (en aval) –TVA déductible (en amont)

Le droit à déduction de la TVA est subordonné à la détention par l’assujetti d’un justificatif. Le plus souvent, il s’agit d’une facture ([190]).

La facture doit répondre aux conditions fixées par l’article 289 du code général des impôts.

Cet article prévoit l’obligation faite aux assujettis à la TVA de délivrer des factures à leurs clients, les modalités d’émission des factures et les mentions qui doivent figurer sur ces factures.

Pour éviter les fraudes, il est notamment prévu :

– que l’assujetti doit conserver un double de toutes les factures émises ;

– et que l’authenticité de l’origine, l’intégrité du contenu et la lisibilité de la facture doivent être assurées à compter de son émission et jusqu’à la fin de sa période de conservation.

B.   le développement de la facture Électronique au cours des deux dernières dÉcennies

1.   La faculté de recourir à la facturation électronique dans les relations inter-entreprises

La possibilité d’émettre une facture par voie électronique a été introduite par l’article 17 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002.

Deux solutions techniques étaient envisagées : la signature électronique et les messages structurés (ou échanges de données informatisées « EDI »).

Dix ans plus tard, l’article 62 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 a admis toutes les formes électroniques de facture, pourvu qu’elles soient conformes à certaines exigences. L’article a ainsi précisé les conditions auxquelles devait répondre la facture électronique.

L’article 289 du code général des impôts dispose ainsi désormais que l’assujetti peut émettre ou recevoir des factures :

– sous forme électronique « dès lors que des contrôles documentés et permanents sont mis en place par lentreprise et permettent détablir une piste daudit fiable entre la facture émise ou reçue et la livraison de biens ou prestation de services qui en est le fondement » ;

– ou en « recourant à la procédure de signature électronique » définie par la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

– ou encore « sous la forme dun message structuré selon une norme convenue entre les parties, permettant une lecture par ordinateur et pouvant être traité automatiquement et de manière univoque ».

Conformément à l’article 232 de la directive du 28 novembre 2006([191]), l’article 289 précité prévoit que l’accord du destinataire est requis pour la mise à disposition des factures par voie électronique.

Il s’ensuit que la facturation électronique entre les entreprises en France s’y développe en théorie sur la base du volontariat. En pratique, comme le souligne le Gouvernement dans ses évaluations préalables, « dans le cas des entreprises les plus importantes, la facturation électronique est souvent imposée contractuellement » aux fournisseurs.

Pour autant, la facturation électronique entre entreprises n’est pas formellement, en l’état du droit, obligatoire.

L’article 395 de la directive interdit d’ailleurs à un État membre de rendre obligatoire la facturation électronique dans les rapports interentreprises sans avoir obtenu préalablement l’autorisation du Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission.

Toujours selon les évaluations préalables du Gouvernement, l’Italie a obtenu une dérogation lui permettant de généraliser le recours obligatoire à la facturation électronique pour les transactions interentreprises à compter du 1er janvier 2019.

2.   L’obligation de recourir à la facture électronique dans les rapports entre les entreprises et la sphère publique

Depuis le 1er janvier 2012, l’État a l’obligation d’accepter les factures électroniques émises par ses fournisseurs ([192]).

En effet, à l’inverse de la règle applicable pour les entreprises, l’article 218 de la directive du 28 novembre 2006 prévoit que les États membres ont l’obligation d’accepter la remise d’une facture électronique dans leurs relations avec leurs fournisseurs.

L’article 1er de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 ([193]) a par ailleurs habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi afin de permettre « le développement de la facturation électronique dans les relations de lÉtat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics avec leurs fournisseurs ».

L’ordonnance n° 2014-697 du 26 juin 2014 relative au développement de la facturation électronique a ainsi posé l’obligation de transmettre leur facture par voie électronique pour les titulaires ainsi que les sous-traitants admis au paiement direct de contrats conclus par l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics, selon le calendrier suivant :

– à compter du 1er janvier 2017, pour les grandes entreprises (GE) et les personnes publiques ;

– à compter du 1er janvier 2018, pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

– à compter du 1er janvier 2019, pour les petites et moyennes entreprises (PME) ;

– et à compter du 1er janvier 2020, pour les microentreprises ([194]).

Ces dispositions sont désormais codifiées aux articles L. 3133-1 et suivants du code de la commande publique.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, depuis le 1er janvier 2017, 450 000 entreprises et 190 000 personnes et structures publiques se sont enregistrées sur le portail de facturation mis en place, ce qui a permis l’échange de 64 millions de factures par voie électronique.

Pour utiliser la facturation électronique, les entreprises et structures publiques doivent créer un compte sur la plateforme Chorus Pro (lien). Cette plateforme a été créée par l’agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE). Elle est mise gratuitement à la disposition de l’ensemble des fournisseurs de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics.

II.   Le dispositif proposÉ

Sous réserve de l’obtention de l’autorisation du Conseil de l’Union européenne, le présent article généralise le recours obligatoire à la facturation électronique dans les relations interentreprises.

Le dispositif proposé doit permettre un meilleur recouvrement de la TVA et des simplifications pour les entreprises dans la gestion de cet impôt.

A.   La gÉnÉralisation de la facturation ÉlectronIQue

Le présent article comprend trois alinéas qui prévoient respectivement :

– l’obligation d’émettre les factures entre assujettis à la TVA par voie électronique ;

– l’entrée en vigueur de cette obligation entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2025 selon un calendrier fixé par décret prenant en compte la taille et le secteur d’activité des assujettis ;

– la remise d’un rapport au Parlement avant le 1er septembre 2020.

1.   Un nouveau développement de la facturation électronique

Le premier alinéa du présent article dispose que :

« Les factures des transactions entre assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée sont émises sous forme électronique et les données y figurant sont transmises à ladministration pour leur exploitation à des fins, notamment, de modernisation de la collecte et des modalités de contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée. ».

a.   Une obligation de facturation électronique entre assujettis à la TVA

En premier lieu, le premier alinéa du présent article pose le principe du caractère obligatoire de la facturation électronique dans les relations entre assujettis à la TVA, c’est-à-dire essentiellement dans les relations interentreprises (sous réserve du cas des associations ayant une activité économique soumise à la TVA).

L’obligation de recourir à la facturation électronique s’appliquerait donc tant aux personnes physiques qu’aux personnes morales dès lors qu’elles sont assujetties à la TVA. Cela peut donc également concerner certaines associations.

Le Rapporteur général s’est interrogé sur le choix du Gouvernement de ne pas avoir proposé une codification à l’article 289 du code général des impôts. L’adoption du présent article abrogerait implicitement, à compter de son entrée en vigueur, certaines dispositions de l’article 289 précité, en particulier les dispositions du VII qui permet à un assujetti à la TVA d’éditer ses factures sous format papier.

Le Gouvernement a répondu au Rapporteur général qu’ « il na pas paru opportun de codifier la mesure demblée dans le code général des impôts » dans la mesure où « les modifications à apporter à ce code, notamment dans son article 289, ne pourront être déterminées précisément quaprès lexamen du rapport par le Parlement, qui devra être transmis à lAssemblée nationale le 1er septembre 2020 ».

Le Rapporteur général en prend acte. Il conviendra de procéder à une mise à jour du code général des impôts dans les meilleurs délais pour éviter que n’y subsistent des dispositions contradictoires avec celles du présent article.

b.   Une transmission des données à l’administration

En second lieu, l’alinéa précité énonce que les données figurant sur les factures électroniques sont transmises à l’administration. Toutefois, l’alinéa ne précise pas quels types de données sont transmis.

Selon les renseignements recueillis par le Rapporteur général auprès du Gouvernement, ces éléments seront précisés dans le rapport prévu à l’alinéa 3 du présent article.

Le Rapporteur général souligne que la transmission des données des factures constitue un renversement de la règle selon laquelle l’administration n’a accès aux pièces justificatives que dans le cadre d’un contrôle fiscal a posteriori.

Il a interrogé le Gouvernement pour savoir si des conséquences en seront tirées sur les règles relatives aux vérifications de comptabilité prévues par le livre des procédures fiscales.

Le Gouvernement lui a répondu que des précisions et des pistes seront évoquées dans le rapport prévu à l’alinéa 3 du présent article. Ce rapport étudiera « les différentes options possibles et, notamment, leurs implications potentielles en matière de contrôle fiscal ». Il a précisé que « ce nest que dans le cas où le Gouvernement opterait, à lissue de lexamen de ce rapport, pour un dispositif selon lequel les factures sont transmises à ladministration au moment de leur émission que lon pourrait considérer quune dérogation serait instaurée à la règle selon laquelle ladministration na accès aux pièces justificatives que dans le cadre dun contrôle fiscal a posteriori. Dans le cas contraire, la mesure naboutirait pas à instaurer un droit daccès de ladministration à des pièces justificatives hors des procédures de contrôle fiscal externe ».

Le Rapporteur général souligne toutefois que l’accès facilité aux factures présente le risque d’inciter les contrôleurs fiscaux à procéder à des vérifications de comptabilité sans respecter le principe du contradictoire.

Le Rapporteur général rappelle que, depuis une décision importante rendue en 1976, le Conseil d’État a posé le principe selon lequel la vérification de comptabilité devait avoir lieu sur place afin d’assurer au contribuable des « possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur » ([195]).

L’emport de documents par le vérificateur est d’ailleurs interdit, sous peine de nullité de la procédure. L’emport prive, en effet, le contribuable d’un dialogue oral et contradictoire lors de l’examen du document au bureau de l’administration.

Par conséquent, le dispositif proposé par le Gouvernement pose un sujet de compatibilité avec les principes généraux applicables au contrôle fiscal.

2.   Une entrée en vigueur différée selon un calendrier fixé par décret

Le deuxième alinéa du présent article dispose :

« Les dispositions du premier alinéa sappliquent à compter du 1er janvier 2023 et au plus tard au 1er janvier 2025, selon un calendrier et des modalités fixés par décret en fonction, notamment, de la taille et du secteur dactivité des entreprises concernées, et après obtention de lautorisation prévue au 1 de larticle 395 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ».

Autrement dit l’entrée en vigueur du dispositif est différée à deux titres.

En premier lieu, il doit obtenir l’autorisation du Conseil de l’Union européenne, statuant à l’unanimité sur proposition de la commission, conformément à l’article 395 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006.

En effet, l’article précité interdit à un État membre de rendre obligatoire la facturation électronique sans l’autorisation du Conseil de l’Union européenne.

En second lieu, un décret doit établir un calendrier d’entrée en vigueur s’échelonnant du 1er janvier 2023 au 1er janvier 2025 selon la taille et le secteur d’activité des entreprises.

Le Rapporteur général relève que le calendrier prévu est plus resserré que celui qui avait prévalu pour la généralisation de la facturation électronique dans les rapports entre les entreprises et la sphère publique. Celui-ci s’étalait en effet sur trois années, de 2017 à 2020, au lieu de deux années dans le cas présent.

En l’état du droit, les microentreprises ne sont pas soumises à une obligation de facturation électronique dans leurs relations avec la sphère publique (obligation à compter du 1er janvier 2020). Avec le dispositif proposé, elles disposeraient de cinq années au maximum pour se préparer à la généralisation du caractère obligatoire de la facturation électronique pour toutes leurs relations de marché.

Dans les réponses à son questionnaire, le Gouvernement a répondu au Rapporteur général que le calendrier serait précisé dans le rapport prévu et que le calendrier resserré se justifiait par le fait que la mise en œuvre de la facturation électronique obligatoire avec la sphère publique « a dores et déjà permis de faire entrer un nombre significatif dentreprises dans un schéma de facturation électronique ». Selon le Gouvernement, « lenvironnement est donc plus favorable à une mise en œuvre de la nouvelle obligation, ce qui permet denvisager un calendrier plus resserré ».

3.   Un rapport au Parlement

Le troisième alinéa du présent article dispose :

« Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er septembre 2020 un rapport sur les conditions de mise en œuvre, à compter du 1er janvier 2023 et au plus tard le 1er janvier 2025, de lobligation de facturation électronique dans les relations interentreprises. Ce rapport identifie et évalue les solutions techniques, juridiques et opérationnelles les plus adaptées, notamment en matière de transmission des données à ladministration fiscale, en tenant compte des contraintes opérationnelles des parties prenantes. Il évalue, pour chacune des options examinées, les gains attendus en matière de recouvrement de la taxe sur la valeur ajoutée et les bénéfices attendus pour les entreprises ».

Autrement dit, le Gouvernement ne propose pas de légiférer immédiatement sur les solutions techniques relatives à la mise en œuvre de la généralisation du recours obligatoire à la facture électronique. Il propose en revanche que les solutions envisagées soient transmises au Parlement par la voie d’un rapport qui serait remis avant l’examen du prochain projet de loi de finances.

B.   L’impact

Il ressort des évaluations préalables que le Gouvernement attend trois grands types d’impact de l’adoption du dispositif proposé :

– une amélioration du recouvrement de la TVA de plusieurs milliards d’euros ;

– une simplification pour les entreprises grâce notamment au pré‑remplissage de leurs déclarations de TVA ;

– et un encadrement des initiatives qui se développent en matière de développement de la facturation électronique.

Le Rapporteur général s’interroge toutefois sur certains coûts et inconvénients qui ne sont pas illustrés dans les évaluations préalables du Gouvernement.

1.   Une amélioration du contrôle fiscal pouvant accroître le rendement de la TVA de plusieurs milliards d’euros

Le régime de déduction de la TVA est générateur de fraudes que l’administration ne peut déceler qu’a posteriori.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, il existerait un écart de 8 milliards d’euros entre le montant que l’État perçoit et le montant de TVA que l’État devrait percevoir si l’on se fie aux statistiques économiques qui mesurent la valeur ajoutée.

Ce chiffre est issu d’un rapport fourni à la Commission européenne le 4 septembre 2019 ([196]). Il convient par ailleurs de préciser que les estimations de l’écart TVA pour la France ont été revues à la baisse par rapport à celles présentées dans le rapport de 2017, du fait de l’utilisation de données plus détaillées (il était estimé à 12 milliards d’euros pour 2017).

Le dispositif proposé doit permettre de résorber en tout ou partie cet écart de TVA (« VAT GAP ») grâce à une meilleure connaissance de l’ensemble des facturations entre entreprises.

2.   Une simplification des déclarations de TVA

La connaissance en temps réel des facturations interentreprises doit permettre à terme à l’administration fiscale de procéder – à l’instar de ce qui existe pour l’impôt sur le revenu – au pré-remplissage des déclarations de TVA.

Il en résulterait un gain de temps précieux pour les entreprises.

3.   Un encadrement du développement de la facturation électronique

Le Gouvernement soutient dans ses évaluations préalables que le dispositif proposé permettra d’encadrer le développement de la facturation électronique.

Une norme commune pourrait ainsi être définie en remplacement de multiples dispositifs mis en place volontairement par les entreprises qui procèdent déjà à une facturation électronique sur une base volontaire ou contractuelle.

Le Gouvernement craint que ne se développent, en l’absence de législation, de nombreux « outils incompatibles entre eux » ce qui « réduirait les avantages attendus de la dématérialisation ».

Il indique que le Conseil national de l’ordre des experts-comptables a d’ailleurs prévu la création d’un portail de dématérialisation des factures qui a été présenté le 6 février 2019 à la DGFIP. Le Rapporteur général souhaiterait dès lors que le rapport remis au Parlement explique comment ce portail se coordonnera avec la mise en œuvre de l’obligation de facturation électronique prévue par le présent article.

4.   Une probable sous-estimation des coûts et inconvénients de la généralisation de la facturation électronique

Tout en soutenant l’orientation générale du dispositif, le Rapporteur général considère que les évaluations préalables auraient dû également prendre en compte, au titre des coûts et inconvénients du dispositif proposé :

– les risques de vulnérabilité sur les finances publiques en cas d’attaques informatiques ;

– le coût environnemental du stockage sur les serveurs des factures électroniques ;

– et la proportionnalité au regard de la taille de leur activité du coût supporté par les petites structures en termes d’équipement informatique, de formation ou bien en honoraires d’expert-comptable du fait de la généralisation de la télédéclaration, du télérèglement et de la facturation électronique.

Le Gouvernement a indiqué au Rapporteur général que le rapport prévu examinerait ces différents aspects.

Ces coûts et inconvénients pourraient en tout état de cause être largement compensés par la réduction attendue de l’écart entre le recouvrement de la TVA et le potentiel mesuré de recouvrement, qui s’élèverait à 8 milliards d’euros selon l’évaluation précitée du rapport remis à la commission européenne.

*

*     *

La commission adopte les amendements rédactionnels II-CF1353 (amendement II2549) et II-CF1354 (amendement II-2550) du rapporteur général.

Elle adopte ensuite larticle 56 ainsi modifié.


Article 57
Possibilité pour les administrations fiscales et douanières de collecter et exploiter les données rendues publiques sur les sites internet des réseaux sociaux et des opérateurs de plateforme

Résumé du dispositif et effets principaux

Le I du présent article autorise, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, la direction générale des finances publiques (DGFIP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) à collecter en masse des données personnelles publiques rendues librement accessibles par les utilisateurs de certaines plateformes en ligne.

Le délai de conservation des données est fixé à :

– une durée maximale de trente jours lorsqu’elles ne sont pas de nature à concourir à la constatation d’un manquement fiscal ou d’une infraction douanière visé « aux b et c du 1 de larticle 1728, aux articles 1729, 1791, 1791 ter, aux 3°, 8° et 10° de larticle 1810 du code général des impôts, ainsi quaux articles 411, 412, 414, 414-2 et 415 du code des douanes » ;

– une durée maximale d’une année lorsqu’elles sont de nature à « concourir à la constatation » d’un manquement fiscal ou d’une infraction douanière parmi la liste précitée ;

– jusqu’au terme de la procédure si une procédure pénale, fiscale ou douanière est engagée.

Au titre des garanties, il est prévu :

– que les traitements des données sont réalisés par des agents spécialement habilités ;

– qu’un droit d’accès aux informations collectées puisse être exercé dans les conditions prévues par la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ; le droit d’opposition prévu par la loi précitée est en revanche expressément exclu.

Un décret d’application en Conseil d’État doit fixer les modalités d’application du dispositif.

Le II du présent article prévoit une évaluation, six mois avant le terme de l’expérimentation, transmise au Parlement et à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article modifié par de nombreux amendements qui, outre les 7 amendements rédactionnels et de précision, ont renforcé les garanties et restreint le champ d’application de l’expérimentation.

Les amendements adoptés prévoient :

– un resserrement du champ d’application de l’expérimentation aux activités occultes, aux domiciliations fiscales frauduleuses, à certains manquements sur les alcools, le tabac et des métaux précieux, et à certains délits douaniers ;

– une limitation de la collecte aux contenus manifestement rendus publics par les utilisateurs des plateformes ;

– une limitation, pour la conservation au-delà de 30 jours, aux contenus strictement nécessaires à la caractérisation des manquements et infractions recherchés ;

– une interdiction de la sous-traitance pour la collecte et la conservation des données ;

– une destruction dans un délai de 5 jours des données sensibles et des autres données manifestement sans lien avec les manquements et les infractions recherchés ;

– un rappel de l’application des garanties en matière de contrôle fiscal ;

– un rappel du nécessaire respect du principe de proportionnalité par le décret d’application ;

– et un bilan d’étape intermédiaire dix-huit mois avant la fin de l’expérimentation.

I.   L’État du droit

A.   Le traitement automatisÉ des donnÉes personnelles

1.   Définition

Les traitements automatisés des données à caractère personnel sont régis par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dite « loi informatique et liberté ».

Le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, dit « règlement RGPD » définit les notions de « donnée personnelle » et de « traitement » auxquelles fait référence la loi informatique et liberté.

Une donnée personnelle est définie comme étant une « information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable ».

Le traitement est constitué par « toute opération ou tout ensemble dopérations effectuées ou non à laide de procédés automatisés et appliquées à des données ou des ensembles de données à caractère personnel, telles que la collecte, lenregistrement, lorganisation, la structuration, la conservation, ladaptation ou la modification, lextraction, la consultation, lutilisation, la communication par transmission, la diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou linterconnexion, la limitation, leffacement ou la destruction ».

2.   Garanties

La loi informatique et liberté prévoit les cas pour lesquels un traitement automatisé de données personnelles est licite. Il en est ainsi notamment pour les traitements nécessaires « à lexécution dune mission dintérêt public ou relevant de lexercice de lautorité publique dont est investi le responsable du traitement » (5° de l’article 5).

Des nombreuses garanties sont prévues.

La loi informatique et liberté interdit par exemple le traitement de données sensibles qui « révèlent la prétendue origine raciale ou lorigine ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou lappartenance syndicale dune personne physique ». De même, elle interdit « de traiter des données génétiques, des données biométriques aux fins didentifier une personne physique de manière unique, des données concernant la santé ou des données concernant la vie sexuelle ou lorientation sexuelle dune personne physique » (article 6).

La loi informatique et libertés prévoit également un droit d’accès et d’opposition.

Ainsi, toute personne physique peut s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement. Cependant, ce droit d’opposition ne s’applique pas « lorsque le traitement répond à une obligation légale ou lorsque lapplication de ces dispositions a été écartée par une disposition expresse de lacte instaurant le traitement » (article 110).

La personne concernée par le traitement peut également accéder aux données ainsi qu’aux informations relatives aux « finalités du traitement », aux « catégories », aux « destinataires », à la « durée de conservation » des données (article 105). En complément de ce droit d’accès, la loi prévoit également un droit de rectification (article 106).

Pour les traitements mis en œuvre par les administrations publiques et les personnes privées chargées d’une mission de service public qui ont pour mission de contrôler ou recouvrer des impositions, les droits d’accès et de rectification peut s’exercer auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (articles 52 et 118).

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL)

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) est une autorité administrative indépendante instituée par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Elle joue le rôle d’autorité de contrôle nationale au sens et pour l’application du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, dit « règlement RGPD ».

Elle a notamment pour mission de veiller à la légalité des traitements automatisés de données à caractère personnel. À ce titre, elle répond aux demandes d’avis des pouvoirs publics et conseille les organismes qui envisagent de mettre en œuvre des traitements automatisés de données à caractère personnel. Elle est consultée sur tout projet de loi ou de décret ou toute disposition de projet de loi ou de décret relatifs à la protection des données à caractère personnel ou au traitement de telles données.

Elle est composée de dix-huit membres comprenant des parlementaires, des membres du Conseil économique, social et environnemental,
des membres ou anciens membres du Conseil d’État, de la Cour de cassation, de la Cour des comptes, des personnalités qualifiées ainsi que
le président de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), ou son représentant. Elle comprend en outre, avec voix consultative, le Défenseur des droits ou son représentant.

Les membres et agents de la CNIL disposent de prérogatives importantes et notamment de la possibilité d’accéder de 6 heures à 21 heures, pour l’exercice de leurs missions, aux lieux, locaux, enceintes, installations ou établissements servant à la mise en œuvre d’un traitement de données à caractère personnel.

B.   Les traitements de donnÉes opÉrÉs par la dgfip et la dgddi

1.   Les traitements de données personnelles publiques réalisés par des agents

La recherche d’informations sur internet est régulièrement utilisée par l’administration lorsqu’elle constitue un faisceau de preuves pour étayer une suspicion de manquements fiscaux ou d’infraction douanière. Dans ces situations, les informations figurant sur internet sont recueillies humainement par la consultation ponctuelle de sites internet.

Tel est le cas lorsque l’administration entend révéler le caractère anormal d’une opération pourtant formellement justifiée par des documents comptables ou lorsqu’elle cherche à déterminer le lieu d’imposition d’une personne ou d’une entreprise.

Dans ces situations, les informations figurant sur Internet sont recueillies par la consultation ponctuelle de sites Internet par les agents de contrôle. Ces informations ne constituent pas à elles seules, en général, des éléments de preuve, mais elles peuvent être indispensables pour corroborer les éléments obtenus par l’examen des documents économiques et financiers.

À titre d’exemple, l’examen de la réalité de l’existence d’un établissement stable en France d’une entreprise étrangère peut s’appuyer sur les éléments de communication indiqués par l’entreprise sur Internet (présence à des foires et expositions, rapport d’activité, brochures de présentation, organigramme et offres de services, etc.). Ces éléments peuvent être également utilisés pour analyser les transactions au sein d’un groupe ou la réalité des fonctions des différentes entités d’un groupe. De même, les prix et les conditions de ventes affichés sur Internet sont souvent utilisés lors de reconstitution de recettes.

Par ailleurs, les services spécialisés de recherche de la direction générale des finances publiques (DGFIP) et de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) ont déjà parmi leurs missions de détecter des fraudes à partir de données accessibles en source ouverte (presse, publicités, annonces diverses…), notamment sur internet.

La volumétrie des données publiées chaque jour, leur traitement par des agents rend la recherche de renseignement particulièrement difficile et le ciblage des dossiers à enjeux hypothétique.

2.   Les traitements automatisés

Selon l’exposé des motifs du présent article, la DGFIP et la DGDDI ont développé récemment des outils de traitements automatisés des données.

Depuis 2013, la DGFIP a mis en place un traitement automatisé de données dénommé « ciblage de la fraude et valorisation des requêtes » (CFVR). Les informations traitées sont issues des applications de la DGFIP (sur la base des informations dont elle dispose à divers titres), de données provenant de bases privées payantes, de données issues d’organismes sociaux, et de données d’autres administrations, nationales et étrangères. Les traitements automatisés, mis en place par un arrêté du 21 février 2014 ([197]), alimentent la programmation des contrôles fiscaux.

Par ailleurs, depuis 2016, la DGDDI exploite ses propres données dématérialisées au sein de son service d’analyse de risque et de ciblage (SARC).

3.   L’absence de traitements automatisés portant sur des données personnelles publiées par les utilisateurs de plateforme en ligne

En l’état, les traitements automatisés de la DGFIP et de la DGDDI ne portent pas sur des données personnelles rendues publiques par des utilisateurs de plateformes en ligne.

Or, dans les années 2010, les plateformes en ligne ont connu un essor considérable grâce à la diffusion et l’utilisation croissante d’internet. Leur émergence a bouleversé de nombreux secteurs d’activité (locations saisonnières, véhicules de transport avec chauffeur, petites annonces, vente de produits culturels, etc.) et a pu faciliter divers types de fraude, en particulier les activités occultes.

Les plateformes ont en effet facilité les transactions réalisées par des particuliers qui n’avaient pas toujours conscience de leurs obligations fiscales (en particulier s’agissant des locations saisonnières).

De même, elles ont favorisé des ventes à distance réalisées par des opérateurs établis hors de l’Union européenne auprès de particuliers résidents en France. La TVA due sur ce type de vente n’est pas toujours acquittée.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, « ladministration est aujourdhui largement démunie pour identifier ces fraudeurs, lexploitation de ces informations ne pouvant être réalisée manuellement quà un coût humain disproportionné ».

Diversité des plateformes en ligne

Les plateformes en ligne sont très variées. Il peut s’agir de multinationales ou de micro-entreprises. Certaines ont acquis un poids économique et une notoriété considérables (Amazon, Airbnb, Blablacar, Booking, Le bon coin, Uber, etc.).

Si elles ont pour point commun d’utiliser internet comme mode d’interaction, leurs modèles économiques sont en réalité très divers.

Les plateformes de réseaux sociaux, dont l’accès pour les utilisateurs est généralement gratuit, valorisent les données personnelles collectées (Facebook, Linkedin, Instagram, Twitter, etc.) et procèdent à de la publicité ciblée. Certaines d’entre elles se sont spécialisées dans le partage de vidéos (Youtube, Dailymotion).

Certaines plateformes se bornent à valoriser des contenus, des biens ou des services proposés par des tiers, tels que les moteurs de recherche ou comparateurs (Lilligo, Lesfurets, etc.). D’autres publient des avis de consommateur (Tripadvisor, Google +, par exemple).

Certaines relèvent de léconomie du partage et sont caractérisées par des échanges entre particuliers sans but lucratif (tel est le cas du partage de frais de véhicules avec Blablacar).

D’autres visent à lappariement de prestataires professionnels de services et de clients (c’est le modèle d’Uber qui propose des véhicules de transport avec chauffeur disponibles à proximité de l’utilisateur).

D’autres encore sont qualifiées de places de marché, pouvant mettre en relation des particuliers mais aussi des professionnels (Le Bon Coin, Airbnb). Dans ce dernier cas, elles peuvent ou non être intermédiaires de la transaction.

La notion d’opérateur de plateforme en ligne a été introduite dans le code de la consommation par l’article 49 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique (codifié à l’article L. 111-7 du code de la consommation).

L’objectif recherché était d’améliorer l’information du consommateur. C’est la raison pour laquelle la définition de l’article L. 111-7 du code de la consommation est assez large. Les plateformes sont définies comme « toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne reposant sur :

 Le classement ou le référencement, au moyen dalgorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers ;

 Ou la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente dun bien, de la fourniture dun service ou de léchange ou du partage dun contenu, dun bien ou dun service. ».

Les moteurs de recherche et annuaires (tels Google ou Qwant) relèvent du 1° de l’article précité. Les autres plateformes, et en particulier les réseaux sociaux sur lesquels de nombreuses données personnelles sont publiées par les utilisateurs, relèvent du 2°.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Une expérimentation de collecte en masse de donnÉes personnelles publiques pour une durÉe de trois ans

L’expérimentation proposée est encadrée par le présent article. Les modalités d’application seront précisées par un décret en Conseil d’État.

1.   Une collecte des données personnelles publiques, publiées par leurs utilisateurs sur certaines plateformes en ligne

Le I du présent article autorise, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, l’administration fiscale et l’administration des douanes et droits indirects à collecter en masse, « au moyen de traitements informatisés et automatisés », les « contenus librement accessibles, publiés sur internet » par les utilisateurs de certaines plateformes en ligne.

Autrement dit, les données collectables sont l’ensemble des données personnelles publiques figurant sur des plateformes en ligne sans saisie préalable d’un mot de passe ou création d’un compte d’utilisateur.

Les données publiées en mode privé ou en accès restreint à un cercle de contacts ne seront pas accessibles à l’administration, qui ne pourra pas non plus s’infiltrer dans ces cercles restreints en utilisant de faux profils ou des pseudonymes.

La notion de plateforme en ligne est celle retenue par le 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation. Les plateformes relevant du 1° du I de l’article L. 117-7 du code de la consommation sont en revanche exclues. Il s’ensuit que les données des annuaires et moteurs de recherche, que l’activité de classement et de référencement fait relever du 1° du I de l’article L. 111-7 précité, ne seraient pas collectables par le système de traitement automatisé autorisé par le dispositif proposé.

Au titre des garanties, il est précisé que lesdits traitements automatisés ne devront utiliser « aucun système de reconnaissance faciale ». Pour autant, la collecte de photographies n’est pas prohibée.

Toujours au titre des garanties, le dispositif proposé prévoit que seuls des « agents spécialement habilités » pourront procéder aux traitements automatisés. Il pourrait s’agir, selon les évaluations préalables du Gouvernement, des agents actuellement en charge du CFVR au sein de la DGFIP et du SARC au sein de la DGDDI.

2.   Un délai de conservation qui varie selon la nature et l’utilisation des données collectées

a.   Le champ des manquements et infractions recherchés

Les manquements fiscaux et infractions douanières recherchés sont définis très largement comme ceux visés « aux b et c du 1 de larticle 1728, aux articles 1729, 1791, 1791 ter, aux 3°, 8° et 10° de larticle 1810 du code général des impôts, ainsi quaux articles 411, 412, 414, 414-2 et 415 du code des douanes ».

i.   Les manquements fiscaux

Le champ du dispositif proposé couvre la quasi-totalité des manquements fiscaux. Il vise en effet l’ensemble des impôts qui font l’objet d’une obligation déclarative ainsi que l’ensemble des contributions indirectes.

Les articles 1728 et 1729 du code général des impôts sont susceptibles de s’appliquer à tous les impôts qui font l’objet d’obligations déclaratives, dont l’impôt sur le revenu, la taxe sur la valeur ajoutée, l’impôt sur la fortune immobilière, l’impôt sur les sociétés ou encore les divers droits de mutation.

A contrario, sont exclues du champ de l’article les recherches relatives à l’application de la taxe d’habitation ou de la taxe foncière puisque ces deux impositions ne donnent pas lieu à l’accomplissement d’obligations déclaratives.

Le dispositif proposé vise en effet les inexactitudes ou omissions relevées dans une déclaration (article 1729 du code général des impôts), ce qui constitue en pratique le fondement juridique principal de la plupart des majorations appliquées lors d’un contrôle fiscal, outre l’intérêt de retard.

Article 1729 du code général des impôts

Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’État entraînent l’application d’une majoration de :

a. 40 % en cas de manquement délibéré ;

b. 80 % en cas d’abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ; elle est ramenée à 40 % lorsqu’il n’est pas établi que le contribuable a eu l’initiative principale du ou des actes constitutifs de l’abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire ;

c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation d’une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d’application de l’article 792 bis.

Seules les inexactitudes ou omissions susceptibles de donner lieu à une majoration sont visées. Toutefois, en pratique, il serait difficile de déterminer, dès le stade de la collecte de l’information, si la majoration peut être écartée ou au contraire si elle peut être appliquée. Les majorations de l’article 1729 reposent en effet sur un critère d’intentionnalité (manquement délibéré, activité occulte, manœuvres frauduleuses) qui ne peut être ni caractérisé ni écarté par la simple collecte d’une donnée personnelle. Par conséquent, le dispositif proposé ouvre la voie à la collecte de toutes les données de nature à caractériser une inexactitude ou une omission relevée dans une déclaration.

Le dispositif proposé vise également la découverte d’une activité occulte ou le défaut de déclaration dans les trente jours suivant la réception d’une une mise en demeure (b et c du 1 de l’article 1728 du code général des impôts). Il s’agit de l’hypothèse du défaut ou du retard de déclaration. En revanche, n’est pas visé le retard en l’absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l’acte dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure.

1 de larticle 1728 du code général des impôts

Le défaut de production dans les délais prescrits d’une déclaration ou d’un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt entraîne l’application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l’acte déposé tardivement, d’une majoration de :

a. 10 % en l’absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l’acte dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai ;

b. 40 % lorsque la déclaration ou l’acte n’a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai ;

c. 80 % en cas de découverte d’une activité occulte.

Par ailleurs, le dispositif proposé vise l’article 1791 du code général des impôts qui couvre l’ensemble des contributions indirectes du même code, c’est-à-dire les contributions sur les alcools, les boissons alcooliques, les tabacs manufacturés, et les garanties des matières d’or, d’argent et de platine.

Le dispositif proposé vise également l’article 1791 ter du code général des impôts qui porte sur la fabrication, la détention, la vente ou le transport illicite de tabac.

Enfin, il vise certains délits à la réglementation sur les alcools, le tabac et certains métaux précieux (3°, 8° et 10° de l’article 1810 du code général des impôts).

ii.   Les infractions douanières

En matière douanière, le dispositif proposé vise les contraventions de deuxième et troisième classes, qui s’apparentent à des tromperies envers l’administration des douanes, ainsi que certains délits douaniers de première et deuxième classes, que sont la contrebande et le blanchiment douaniers.

Le dispositif proposé vise tout d’abord l’article 411 du code des douanes dont le champ est large puisqu’il porte sur « toute infraction aux dispositions des lois et règlements que ladministration des douanes est chargée dappliquer lorsque cette irrégularité a pour but ou pour résultat déluder ou de compromettre le recouvrement dun droit ou dune taxe quelconque ».

Ensuite, le dispositif proposé vise :

– l’article 412 qui porte sur un ensemble de contraventions douanières de troisième classe (amende de 150 euros à 1 500 euros) ;

– l’article 414 relatif à un délit douanier de première classe puni de trois ans d’emprisonnement (contrebande, importation ou exportation sans déclaration de marchandises prohibées ou de produits du tabac manufacturé) ;

– l’article 414-2 relatif à divers délits douaniers de deuxième classe punis de cinq ans d’emprisonnement (contrebande, fausse déclaration, etc.) ;

– l’article 415 relatif à un délit douanier de deuxième classe puni de deux à dix ans d’emprisonnement (opération financière internationale de blanchiment d’un délit douanier ou d’infractions sur les stupéfiants).

Un champ dapplication très large mais des axes prioritaires de recherche plus limités

Le champ d’application de l’expérimentation lui apparaissant très large, le Rapporteur général a interrogé le Gouvernement pour connaître les axes prioritaires de recherche parmi les types de fraude.

Le Gouvernement lui a répondu que les axes prioritaires de recherche sont l’activité occulte et la fausse domiciliation à l’étranger en matière fiscale, ainsi que la contrebande et la vente de produits contrefaits en matière douanière. Ceux-ci sont donc beaucoup plus restreints que ne le laisse supposer la rédaction du présent article.

« En matière fiscale, le traitement de données envisagé doit permettre, dune part, de mieux lutter contre léconomie souterraine en facilitant la détection dactivités occultes, cest-à-dire réalisées par lintermédiaire dentreprises non immatriculées et ne déclarant pas leurs revenus, ou sous couvert de sociétés en sommeil qui, bien quimmatriculées, sabstiennent de déposer leurs déclarations. Ces entreprises portent non seulement atteinte aux finances publiques, mais créent une concurrence déloyale au détriment des acteurs économiques qui respectent leurs obligations fiscales.

« Dautre part, le traitement de données aura pour objectif de détecter plus facilement les fausses domiciliations à létranger de personnes physiques. Les données publiques présentes sur les réseaux sociaux ou les plateformes de mise en relation en vue de léchange dun bien ou dun service peuvent en effet permettre de mettre en évidence quune personne prétendument domiciliée à létranger séjourne en fait la plupart du temps en France.

En matière douanière, le traitement aura pour but de détecter les réseaux de commercialisation de marchandises importées non déclarées ou dont la valeur est sous-évaluée, mais également de marchandises de fraude – comme les contrefaçons, les produits stupéfiants – ou encore de tabac.

Ces activités illicites créent un préjudice important pour la société et nuisent au recouvrement de limpôt et au financement de la protection sociale. »

Source : Réponse du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

b.   Les trois types de délai de conservation

La conservation des données est autorisée :

– pour une durée maximale de trente jours lorsqu’elles ne sont pas de nature à « concourir à la constatation » d’un manquement fiscal ou d’une infraction douanière visé ;

– pour une durée d’une année lorsqu’elles sont de nature à « concourir à la constatation » d’un manquement fiscal ou d’une infraction douanière visé ;

– jusqu’au terme de la procédure si une procédure pénale, fiscale ou douanière est engagée.

En pratique, il semble donc que les données collectées feraient l’objet d’un premier tri dans les 30 jours pour déterminer si elles sont dans le champ des manquements et infractions recherchés.

Puis, elles seraient conservées une année, le temps de permettre le cas échéant l’engagement d’une procédure pénale, fiscale ou douanière.

Dans cet intervalle, les données peuvent ainsi servir à la programmation d’un contrôle fiscal ou faire l’objet d’une transmission au parquet sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale.

3.   Un droit d’accès et une exclusion du droit d’opposition

a.   Le droit d’accès

Le dispositif proposé prévoit expressément un droit d’accès aux informations collectées qui s’exerce auprès du service auquel seront affectés les agents habilités à procéder aux traitements automatisés.

Ainsi, les contribuables pourront demander si des données les concernant ont été traitées, connaître les finalités du traitement, les catégories de données, les destinataires de ces données, ou encore la durée de leur conservation.

Ce droit d’accès s’exerce dans les conditions prévues par la loi informatique et liberté. Autrement dit, il peut s’exercer auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (articles 52 et 118).

b.   L’exclusion du droit d’opposition

En revanche, et conformément à l’objet du dispositif, le présent article exclut expressément le droit d’opposition prévu par la loi informatique et liberté.

Cette exclusion se justifie par le fait qu’il serait contraire à l’objectif de lutte contre la fraude fiscale de permettre à des contribuables de s’opposer à la collecte d’informations les concernant.

B.   Une Évaluation six mois avant le terme de l’expÉrimentation

Le II du présent article prévoit une évaluation, six mois avant le terme de l’expérimentation, transmise au Parlement et à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

L’exposé des motifs du présent article précise que le rapport aura notamment pour objet « dévaluer si lamélioration de la détection des fraudes est proportionnée à latteinte portée au respect de la vie privée ».

III.   les amÉnagements proposÉs par le rapporteur gÉnÉral

A.   Les prÉoccupations exprimÉes sur le dispositif proposÉ

1.   L’avis de la CNIL

La CNIL a été saisie par le Gouvernement du projet d’article dès le 28 août 2019. Elle a rendu un avis le 12 septembre 2019 ([198]), faisant état de nombreuses réserves tant sur le contour du dispositif que sur son efficience et sa faisabilité.

La CNIL a souligné que les traitements envisagés constituaient « un changement déchelle significatif » et « une forme de renversement des méthodes de travail des administrations », en raison du passage d’une logique de traitement ciblé de données à la suite d’un doute préexistant sur une personne à un système de collecte générale et préalable de données en vue de cibler des actions ultérieures de contrôle.

Elle relève notamment que « les traitements envisagés visent à cibler une population, selon le Gouvernement, inconnue de ladministration fiscale, à légard de laquelle aucune procédure nest en cours ».

Elle appelle dès lors à une « grande prudence » au regard des « questions inédites » que soulèvent les traitements automatisés envisagés.

En premier lieu, elle considère que les utilisateurs des plateformes doivent être informés de la collecte de masse de leurs données. En effet, « la seule circonstance que les données soient accessibles sur internet, et que les personnes aient éventuellement conscience quun potentiel risque daspiration de leurs données existe, ne suffit pas pour que les administrations qui souhaitent les exploiter soient exonérées de lobligation de collecter ces données de manière loyale et licite ».

En deuxième lieu, elle évoque une atteinte à la liberté d’opinion et d’expression. La collecte pourrait modifier « le comportement des internautes qui pourraient alors ne plus être en mesure de sexprimer librement sur les réseaux et plateformes ».

En troisième lieu, elle considère que le volume des données collectées porte une atteinte au droit au respect de la vie privée. Il estime qu’il convient de « garantir la stricte proportionnalité des données collectées au regard de la finalité poursuivie ». Par ailleurs, elle estime qu’il faudra « faire preuve dune vigilance particulièrement importante sagissant des mesures de sécurité et de confidentialité mises en œuvre afin de pallier au maximum la survenance de risques liés à une violation de données ».

En quatrième lieu, elle émet des réserves sur le périmètre des infractions visées. Celui-ci lui apparaît large et suggère qu’il soit précisé et restreint dans le décret d’application.

En cinquième lieu, elle estime que « le champ des plateformes concernées par le projet darticle est particulièrement étendu » et sinterroge « sur la nécessité de viser lensemble des plateformes mentionnées à larticle L. 111-7-I-2° du code de la consommation ».

En sixième lieu, elle recommande que l’exploitation des photographies soit expressément exclue du dispositif.

Enfin, elle suggère que le bilan prévu au II du présent article comprenne :

«  une description des conditions de mise en œuvre techniques et opérationnelles des traitements créés sur ce fondement ;

«  la liste précise des catégories de données, des indicateurs et des informations utilisés ;

«  la liste exhaustive des sites/sources internet sur lesquels les données auront été collectées ;

«  le détail des algorithmes éventuellement implémentés, de leur paramétrage et de leur fonctionnement ;

«  les résultats quantifiés obtenus, comprenant notamment les recettes estimées et les coûts engendrés résultant du dispositif mis en œuvre ;

«  une description du protocole dévaluation mis en œuvre pour lappréciation de la qualité de la méthode ;

«  des éléments chiffrés sur lexercice des droits ;

«  les mesures de sécurité mises en place afin dassurer la confidentialité et lintégrité des données collectées ;

«  des éléments de conclusion généraux relatifs au fonctionnement des traitements, aux éventuelles difficultés rencontrées, aussi bien éthiques, juridiques et techniques. »

La question de la compétence du législateur
et du rattachement au domaine de la loi de finances

La question de la compétence du législateur pour mettre en œuvre un tel dispositif peut se poser dans la mesure où la loi informatique et liberté et le règlement RGPD autorisent tous deux les pouvoirs publics à mettre en œuvre des traitements automatisés. Le II de l’article 31 de la loi informatique et liberté prévoit d’ailleurs que les traitements automatisés portant sur des données sensibles sont autorisés par décret en Conseil d’État après avis de la CNIL.

Dans son avis relatif au présent projet d’article, la CNIL considère au contraire que le dispositif proposé, par son ampleur et les atteintes aux libertés publiques qu’il est susceptible de porter, doit relever de la compétence du législateur.

La question du rattachement au domaine de la loi de finances se pose également dans la mesure où le dispositif proposé se borne à autoriser la collecte et l’exploitation de données, sans créer de prérogatives spécifiques relevant du contrôle et du recouvrement des impôts. Pour autant, on peut soutenir à l’inverse que le dispositif se rattache bien au recouvrement des impositions puisqu’il traite de la collecte de données susceptibles d’alimenter la programmation des contrôles fiscaux et douaniers.

2.   L’avis de la commission des lois de l’Assemblée nationale

De manière inédite, la commission des lois de l’Assemblée nationale s’est saisie pour un avis du présent article non rattaché de la seconde partie du projet de loi de finances.

Dans son rapport ([199]), le rapporteur pour avis a partagé les préoccupations formulées par la CNIL. Il a relevé, comme elle, « le changement profond des méthodes de travail dans la lutte contre la fraude que sous-tend larticle 57 » et s’est interrogé « sur la proportionnalité du dispositif envisagé ».

Il a estimé qu’en dépit de leur caractère public, « les informations susceptibles dêtre collectées nen demeurent pas moins des données à caractère personnel qui exigent des protections particulières ».

Il a souligné que « les traitements envisagés pourraient concerner plusieurs millions de personnes et conduire à collecter des données dune certaine sensibilité, a fortiori lorsquelles se rattachent à des personnes qui ne sont pas à lorigine de leur publication sur la plateforme ou nen sont pas des utilisateurs ».

Éclairée par cet avis, la Commission des lois a adopté une série d’amendements visant à renforcer les garanties prévues par le dispositif proposé.

Un premier amendement a restreint les données pouvant être collectées à celles publiées sur des plateformes de commerce, c’est-à-dire celles « dont lactivité repose sur la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente dun bien, de la fourniture dun service ou de léchange ou du partage dun bien ou dun service ».

Un deuxième amendement a interdit la sous-traitance des opérations de collecte et de conservation des données.

Un troisième amendement a précisé le contenu du décret d’application en prévoyant qu’il devra déterminer « les conditions dans lesquelles la mise en œuvre des traitements [..] est, à toutes les étapes de celle-ci, proportionnée aux finalités poursuivies ».

Un quatrième amendement a prévu une évaluation annuelle du dispositif au lieu d’une évaluation six mois avant le terme de l’expérimentation.

Enfin, deux autres amendements ont corrigé des erreurs de référence à la loi informatique et liberté dans le présent article.

B.   La nécessitÉ de prÉvoir davantage de garanties et de restreindre le champ de l’expÉrimentation

Le Rapporteur général soutient l’orientation générale de cet article. Il rappelle que la lutte contre la fraude fiscale est un objectif à valeur constitutionnelle ([200]).

Le Rapporteur général se félicite que le Gouvernement ait proposé une expérimentation – encadrée par le législateur – alors même que ce dernier aurait pu créer par voie réglementaire un tel traitement automatisé.

Pour autant, le Rapporteur général considère qu’il convient de prévoir davantage de garanties et surtout de restreindre le champ de l’expérimentation afin de prévenir au mieux les atteintes à la vie privé.

Il rappelle à ce titre que le Conseil constitutionnel a jugé que « la collecte, lenregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif dintérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à lobjectif poursuivi » ([201]).

Le Rapporteur général propose donc d’adopter plusieurs amendements, dont plusieurs de ceux adoptés par la commission des lois.

1.   Renforcer les garanties

Le Rapporteur général souscrit à l’interdiction de la sous-traitance proposée par la commission des lois. Il s’agit ainsi d’éviter la violation des données collectées et de s’assurer que seuls des agents publics spécialement habilités pourront y avoir accès.

Par ailleurs, le Rapporteur général propose d’apporter deux garanties supplémentaires quant à la nature des données collectées.

En premier lieu, le Rapporteur général propose que seules les données manifestement rendues publiques puissent être collectées. Il reprend en cela les termes de l’article 9 du règlement RGPD et entend ajouter ce critère à celui proposé par le Gouvernement qui vise les « contenus librement accessibles ».

En deuxième lieu, le Rapporteur général propose que seules les données « strictement nécessaires » soient conservées au-delà d’un délai de trente jours, et non pas toutes les données « de nature à concourir » à la constatation d’un manquement fiscal ou d’une infraction douanière visés par l’article.

Le Rapporteur général propose en outre qu’un bilan intermédiaire soit réalisé au milieu de l’expérimentation, soit dix-huit mois avant son terme. 

Concernant les photographies en revanche, le Rapporteur général ne partage pas l’avis de la CNIL selon lequel il conviendrait de les exclure de la collecte des données. En effet, une telle exclusion offrirait des solutions de contournement aisées aux fraudeurs les mieux informés. Il suffirait aux personnes souhaitant conserver une activité occulte de mettre leurs tarifs, leur numéro de contact, ou encore les prestations qu’ils proposent dans des photographies pour empêcher l’administration de collecter et d’analyser ces données.

De même, le Rapporteur général ne souhaite pas restreindre le dispositif aux plateformes de commerce, ce qui le priverait en pratique de toute efficacité. Pour autant, il propose une restriction du champ de l’expérimentation de nature à éviter des collectes massives sur des plateformes de partage de contenus.

2.   Restreindre le champ de l’expérimentation

Le Rapporteur général propose de restreindre le champ de l’expérimentation, en matière d’impositions donnant lieu à des obligations déclaratives, à la recherche des activités occultes et des domiciliations fiscales frauduleuses.

Ceci permettrait de recentrer le dispositif sur les cas les plus graves relatifs à l’économie souterraine et de soustraction volontaire à l’impôt français. A contrario, cela permet d’exclure du champ de l’expérimentation 97 % des manquements fiscaux concernant les impositions donnant lieu à des obligations déclaratives.

En effet, selon les renseignements recueillis par le Rapporteur général auprès du Gouvernement, sur la période 2015 à 2018, l’activité occulte représente en moyenne 1,8 % des redressements effectués. Par ailleurs, il y a en moyenne 160 à 170 contrôles fiscaux externes par an qui portent sur une domiciliation fiscale frauduleuse à l’étranger d’une personne physique.

Sur la base de ces chiffres, l’amendement proposé par le Rapporteur général écarte donc bien l’essentiel des manquements fiscaux donnant lieu à des redressements. Cela devrait être de nature à limiter de manière importante la collecte des données.

L’amendement du Rapporteur général maintient bien, en revanche, l’ensemble des manquements et infractions concernant les commerces illicites de tabac, d’alcools ou de métaux précieux. Ceci permettra de lutter notamment contre des trafics préjudiciables aux buralistes. Les trafiquants, qui publient des annonces qui sont ensuite relayées via des groupes publics sur divers réseaux sociaux, resteront dans le champ d’application de l’article.

En outre, s’agissant des infractions douanières, le Rapporteur général propose d’exclure du dispositif les infractions les moins graves et les plus nombreuses visées aux articles 411 et 412 du code des douanes.

Le Rapporteur général tient à saluer l’implication du Gouvernement et de la commission des lois de l’Assemblée nationale dans la préparation des amendements pour améliorer le dispositif. Il considère que ce travail préparatoire permet d’envisager un juste équilibre entre les moyens utilisés pour lutter contre la fraude et le respect des libertés.

*

*     *

La commission discute des amendements identiques II-CF1273 de Mme Véronique Louwagie et II-CF1425 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement proposé par le groupe Les Républicains tend à supprimer l’article 57, qui donne à l’administration fiscale la possibilité de surveiller les réseaux sociaux pour détecter la fraude fiscale.

Depuis 2014, l’administration fiscale peut passer au crible une vingtaine de bases de données de l’État pour détecter les fraudeurs, notamment les fichiers de comptes bancaires ou de la taxe d’habitation.

Cet article propose un changement d’échelle qui pourrait avoir des conséquences sur la vie privée des personnes. Il nous semble donc nécessaire de protéger les données privées. D’ailleurs, la CNIL a estimé qu’il s’agissait « d’un changement d’échelle significatif » puisque l’administration pourra procéder à « une collecte générale préalable de données ». Le Congrès américain, qui avait autorisé une procédure de cette nature, y a renoncé compte tenu des menaces qu’elle fait peser sur la vie privée des citoyens.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement tend à supprimer l’article 57, qui autorise l’administration, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, à collecter en masse et exploiter, au moyen de traitements informatisés, les données rendues publiques par les utilisateurs des réseaux sociaux et des plateformes de mise en relation par voie électronique.

Si nous sommes évidemment favorables aux mesures de lutte contre les comportements frauduleux, certaines garanties fondamentales doivent être apportées aux contribuables.

Dans sa délibération du 12 septembre 2019 portant avis sur le projet d’article 57, la CNIL estime « qu’il y a lieu, par principe, de faire preuve d’une grande prudence quant au développement de “traitements informatisés” permettant de collecter les contenus librement accessibles et publiés sur internet, qui pose des questions inédites en matière de protection de données à caractère personnel », et « qu’il revient au législateur d’apprécier l’opportunité d’un tel dispositif ».

Sur la forme, la CNIL « regrette vivement d’avoir à se prononcer dans des conditions d’urgence sur la mise en œuvre de tels traitements compte tenu des enjeux associés à la collecte massive de données sur les plateformes en ligne et les impacts substantiels s’agissant de la vie privée des personnes concernées qui en résultent ».

Au regard de ces arguments très circonstanciés de la CNIL, notre groupe demande la suppression de cet article.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Sur ces amendements de suppression, je vais prendre quelques minutes pour un propos liminaire.

L’administration procède déjà à de nombreuses recherches de renseignements sur internet. Ces recherches sont faites par des êtres humains, qui utilisent des moyens informatiques. La nouveauté qu’introduit cet article, c’est la possibilité de faire exécuter ces recherches par des robots, avec des algorithmes. C’est la seule différence, l’ancien inspecteur de Tracfin que je suis peut vous le confirmer.

Ne nous trompons pas de débat. Il ne s’agit pas de déterminer si l’administration a le droit d’utiliser des données personnelles publiques – elle a ce droit, elle l’a toujours eu, et c’est heureux au vu de certains cas que j’ai eu à connaître. Il s’agit de savoir comment ces données sont collectées, et de déterminer les moyens en fonction du principe de proportionnalité entre détection de la fraude et respect de la vie privée.

Cet article a suscité des nombreuses préoccupations : la CNIL a émis plusieurs réserves dans son avis et la commission des lois s’est saisie pour avis et je l’en remercie, en particulier son rapporteur, Philippe Latombe. Cela nous a permis d’engager ces derniers jours un dialogue constructif avec le Gouvernement en vue de l’amélioration du dispositif, ce qui n’avait pas eu lieu avant. J’en remercie d’autant plus le Gouvernement qu’il lui était possible de mettre en place cette expérimentation sans recourir à la loi. Les traitements automatisés de données sont du domaine réglementaire, pas du domaine de la loi. Le Gouvernement a inséré cet article dans le PLF parce qu’il voulait avoir l’avis du Parlement. Autant je critique parfois le Gouvernement, notamment pour l’écrasement des amendements adoptés par le Parlement par le BOFIP, autant je préfère que passent par le Parlement des questions d’importance qui auraient pu être réglées par voie réglementaire.

L’article 57 a pour objet la lutte contre la fraude fiscale, objectif à valeur constitutionnelle, que nous partageons tous. Pour autant, je ne l’aurais pas accepté dans sa rédaction initiale, car son champ d’application était beaucoup trop large et pouvait de ce fait porter atteinte aux libertés publiques. Le rapporteur pour avis Philippe Latombe l’a d’ailleurs souligné lorsque je l’ai reçu. Le travail que nous avons mené nous a permis de trouver le bon équilibre entre lutte contre la fraude fiscale et respect de la vie privée. Vous comprendrez donc que je donnerai un avis défavorable aux amendements de suppression.

La modification la plus importante à mes yeux consiste à limiter le champ d’application aux cas les plus graves, relatifs à l’économie souterraine et à la soustraction volontaire à l’impôt français par une domiciliation fiscale frauduleuse à l’étranger. Si nous adoptons l’amendement que je propose, qui restreint le dispositif aux activités occultes et aux domiciliations fiscales frauduleuses, nous exclurons du dispositif 97 % des manquements fiscaux classiques, ce qui limitera le champ des données pouvant être conservées. De même, s’agissant des infractions douanières, le même amendement tend à limiter le champ d’application aux seuls délits, excluant les contraventions.

J’entends aussi donner un avis favorable à plusieurs amendements de la commission des lois, notamment celui relatif à l’interdiction de la sous-traitance, particulièrement important.

Je proposerai également d’apporter deux garanties supplémentaires quant à la nature des données collectées. Tout d’abord, seules les données « manifestement rendues publiques » pourront être collectées, pour reprendre les termes de l’article 9 du règlement général sur la protection des données (RGPD). Ensuite, uniquement les données « strictement nécessaires » seraient conservées, pour une durée maximum d’un an, et non plus toutes les données « de nature à concourir » à la constatation des manquements fiscaux ou douaniers. Enfin, je propose qu’un bilan intermédiaire soit réalisé au milieu de l’expérimentation, dix-huit mois avant son terme.

D’autres amendements proposés par le groupe LaREM pourraient aussi utilement être adoptés.

En adoptant l’ensemble de ces amendements, nous donnerons des garanties aux citoyens et nous resserrons le champ d’application de l’expérimentation, et dans ce cas, je soutiendrai l’article sans réserve.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet article a fait l’objet de longs débats en commission des lois, qui s’est saisie pour la première fois d’un article non rattaché d’un projet de loi de finances pour avis. J’avais déposé un amendement de suppression que j’ai retiré lors de ces débats, car il semblait que le Gouvernement souhaitait limiter le champ de l’article. Constatant aujourd’hui qu’il n’en est rien, bien que je ne puisse pas voter en commission des finances, je soutiendrai les amendements de suppression et j’en déposerai un en séance.

On peut discuter de la nécessité de recourir à la loi. Le Conseil d’État semblait penser que ce n’était pas nécessaire, mais il considérait aussi que cette mesure constituait un cavalier législatif et n’avait rien à faire dans la loi de finances. Il semble, par ailleurs, que la CNIL et les constitutionnalistes estiment que le recours à la loi est nécessaire, mais pas obligatoirement dans le PLF. Le Gouvernement n’a pas retenu ma proposition de faire autrement.

Dans un domaine différent, l’agence Frontex a voulu faire exactement la même chose pour lutter contre les filières d’immigration clandestine et les réseaux de passeurs. Un appel d’offres a été lancé à cette fin le 19 octobre, mais il vient d’être retiré en urgence après un feu rouge du comité européen de protection des données personnelles. Il existe donc bel et bien un souci ; on n’a pas le droit de faire tout et n’importe quoi avec les données personnelles, fût‑ce au nom de la lutte contre la fraude fiscale, même si c’est un objectif que nous partageons. L’article n’est pas suffisamment borné.

Nous avons regretté, au sein de la commission des lois, l’absence d’étude d’impact claire. Nous ne savons pas quel type de données va être collecté, quel en sera le volume, quels contrôles seront lancés sur leur fondement et quels redressements seront décidés. L’expérimentation est prévue pour trois ans, et la question de la proportionnalité des moyens employés au regard de la finalité poursuivie est clairement posée. Malgré les garanties et les premières propositions d’encadrement, nous ne pensons pas que ce dispositif permette d’assurer la protection des données personnelles et de la vie privée de nos concitoyens.

M. Charles de Courson. Notre groupe s’intitule « Libertés et territoires ». En l’état, cet article est liberticide. D’ailleurs, j’ai le sentiment qu’il ne passera pas le contrôle du Conseil constitutionnel, soit pour des raisons de forme excellemment rappelées par notre collègue de la commission des lois, soit pour des raisons de fond.

Si on encadre cet article pour le rendre à peu près convenable, c’est-à-dire respectueux des libertés publiques, il sera peut-être possible de le voter. Mais en l’état, c’est impossible – à moins que certains ne veuillent l’envoyer au Conseil constitutionnel, que nous nous ferons un plaisir de saisir !

Nous pouvons attendre de savoir quelles modifications seront apportées avant de nous prononcer pour ou contre cet article. La CNIL, pour sa part, a donné un avis très dur. Je suis étonné que nous soyons saisis d’un texte aussi vague. Le rapporteur pour avis de la commission des lois l’a dit, on ne sait pas quel type de données peut être collecté, aucune garantie n’est apportée. Je ne suis même pas sûr qu’il soit compatible avec le droit européen.

M. le président Éric Woerth. Le champ n’est pas défini à ce stade, les questions au ministre seront nombreuses.

M. Charles de Courson. Le rapporteur général prétend qu’il est possible de passer par la voie réglementaire, mais ce n’est pas le cas. Le Gouvernement lui-même le reconnaît, dans l’étude d’impact : « aucun dispositif juridique ne prévoit actuellement la possibilité pour les administrations fiscales et douanières de collecter en masse et d’exploiter au moyen de traitement automatisé les données librement accessibles des utilisateurs des plateformes de mise en relation en ligne. » Il constate donc qu’une disposition législative est indispensable.

M. le président Éric Woerth. Nous poursuivrons ce débat en séance, et la présence du ministre sera extrêmement importante. La durée de l’expérimentation, fixée à trois ans, est également assez longue.

Mme Cécile Untermaier. J’ai été sensible aux avancées du Gouvernement sur cette question extrêmement importante. La lutte contre la fraude fiscale est essentielle, mais elle doit viser les fraudes fiscales caractérisées. Or les amendements du rapporteur général ne me semblent pas limiter le champ de collecte des données, qui constitue le problème central.

La commission rejette les amendements de suppression II-CF1273 et II-CF1425.

Mme Marie-Christine Dalloz remplace M. Éric Woerth à la présidence de la séance.

La commission adopte lamendement de précision II-CF1524 du rapporteur général (amendement II-2551).

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF1518 du rapporteur général et II-CF1379 de Mme Émilie Cariou ainsi que lamendement II-CF1428 de Mme Cécile Untermaier.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Par l’amendement II-CF1518, il est proposé de restreindre le champ de l’expérimentation en matière d’impositions donnant lieu à des obligations déclaratives à la recherche exclusive des activités occultes et des domiciliations fiscales frauduleuses. De la sorte, le dispositif serait recentré sur les cas les plus graves, relatifs à l’économie souterraine et à la soustraction volontaire à l’impôt français, ce qui permettrait d’exclure du champ de l’expérimentation 97 % des manquements fiscaux concernant les impositions donnant lieu à des obligations déclaratives. C’est donc une restriction très importante du champ.

Selon les renseignements que j’ai recueillis auprès du Gouvernement, sur la période allant de 2015 à 2018, l’activité occulte représente en moyenne 1,8 % des redressements effectués. Par ailleurs, il y a en moyenne 160 à 170 contrôles fiscaux externes par an qui portent sur une domiciliation fiscale frauduleuse à l’étranger d’une personne physique. Sur la base de ces chiffres, les amendements écartent donc bien l’essentiel des manquements fiscaux donnant lieu à des redressements. Cela devrait être de nature à limiter de manière importante la collecte des données, ce qui préserve donc les libertés publiques.

S’agissant des infractions douanières, il s’agit d’exclure du dispositif les infractions les moins graves et les plus nombreuses, visées aux articles 411 et 412 du code des douanes.

Mme Émilie Cariou. L’article 57 a pour objet d’apporter des informations dans la lutte contre la fraude fiscale, mais aussi douanière puisqu’il va faciliter la lutte contre le commerce illicite de tabac ou de médicaments. Le groupe majoritaire partage complètement cet objectif, mais considère qu’à ce stade, l’article n’est pas assez précis.

C’est pourquoi notre amendement II-CF1379 tend à recentrer cette expérimentation sur les faits les plus graves : la lutte contre l’économie souterraine et la recherche des infractions aux règles de domiciliation des personnes physiques.

Mme Cécile Untermaier. L’amendement II-CF1428 vise à réduire le périmètre de l’expérimentation permettant à l’administration de collecter en masse et d’exploiter, au moyen de traitements informatisés, les données rendues publiques par les utilisateurs des réseaux sociaux et des plateformes de mise en relation par voie électronique.

Nous nous appuyons sur les observations de la CNIL selon lesquelles « la mise en œuvre d’une telle collecte, particulièrement intrusive, conduisant à la collecte d’un nombre très important de données, n’apparaît pas à ce stade précisément justifiée pour les infractions portant sur des contraventions de deuxième et troisième classes ».

Cette collecte est susceptible de modifier de manière significative le comportement des internautes, portant atteinte au principe de proportionnalité. Priver les internautes de liberté d’expression pour rechercher la fraude fiscale par des moyens particulièrement intrusifs pose de réelles difficultés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon avis est favorable aux trois amendements. Les deux amendements identiques sont plus complets, l’amendement de Mme Untermaier ne porte que sur l’aspect douanier mais il est compatible avec les précédents.

M. François Pupponi. Je partage tout à fait la volonté du rapporteur général de restreindre le champ de l’expérimentation. Je me demande cependant si cette restriction n’est pas trop importante. Les activités occultes et la domiciliation sont certes des questions très importantes, mais nous devrions également intégrer le recyclage de l’argent de la fraude fiscale. Dans le cadre d’un contrôle personnel, par exemple, on a besoin de savoir si le contribuable n’a pas utilisé des abus de biens sociaux pour s’enrichir. Des moyens existent déjà : l’administration fiscale a le droit de sonoriser certains logements, ce qui va déjà très loin au regard des libertés publiques. D’ici à la séance, il faudra peut-être ajouter au champ de l’expérimentation une infraction fiscale permettant à l’administration de connaître, dans le cadre d’un contrôle personnel, d’un enrichissement sans cause anormal.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Je me réjouis que soit reprise la proposition, discutée en commission des lois mais non retenue, de restreindre le champ de l’expérimentation.

Je regrette toutefois que nous décidions de cette limitation sans étude d’impact, et sans savoir ce que les services fiscaux souhaitent obtenir par cette expérimentation. Il y a quelques années, ils avaient demandé l’extension des entreprises aux particuliers du traitement automatisé dit de ciblage de la fraude et valorisation des requêtes (CFVR). Ils devaient remettre un rapport à la CNIL dans un délai de deux ans, et il n’a pas encore été rendu. Il y a donc un problème d’évaluation.

S’il s’agit d’une expérimentation, elle doit rester aussi resserrée que possible pour que nous puissions en vérifier l’intérêt, car ces moyens de répression des infractions menacent les libertés publiques. Prendre les données n’est pas anodin.

Nous discuterons ensuite de la notion de données « manifestement rendues publiques », mais l’expérimentation doit être de courte durée, porter sur un champ réduit, et faire l’objet d’un rapport très détaillé pour savoir si l’opportunité et la proportionnalité sont compatibles.

M. Charles de Courson. Si nous votons l’amendement du rapporteur général, ne seront plus concernées que la recherche d’activités occultes et la domiciliation fiscale frauduleuse. Mais il est également fait mention d’un troisième secteur : les impositions donnant lieu à des obligations déclaratives. De quoi s’agit-il ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est un critère commun dans les deux cas, ce n’est pas un troisième secteur.

En réponse à M. Pupponi, pour tout ce qui relève du blanchiment, du blanchiment aggravé et du blanchiment de fraude fiscale, les services correspondants disposent déjà de moyens assez importants à l’heure actuelle, mais il est légitime de s’en assurer.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1518 et II-CF1379 (amendement II-2552).

En conséquence, lamendement II-CF1428 tombe.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement de Mme Untermaier était similaire aux amendements adoptés ; elle peut tout à fait, si elle le souhaite, en être inscrite comme cosignataire.

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques IICF1515 du rapporteur général et II-CF1375 de Mme Émilie Cariou, ainsi que les amendements identiques II-CF1155 de Mme Sarah El Haïry et II-CF1209 de M. Philippe Latombe.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme je l’ai indiqué au tout début de mon intervention sur ce sujet, l’amendement II-CF1515 vise à préciser que les traitements rendus possibles par l’article 57 porteront sur des contenus manifestement rendus publics par les utilisateurs des plateformes en ligne. Je préfère cette notion aux contenus librement accessibles visés par la rédaction actuelle de l’article, car elle reprend les termes de l’article 9 du RGPD européen. Mieux vaut que nous nous calions sur les dispositions existantes en la matière.

Mme Émilie Cariou. L’amendement identique II-CF1375 du groupe La République en marche tend à mettre le premier alinéa en conformité avec le RGPD.

Mme Sarah El Haïry. L’amendement II-CF1155 vise à substituer, au premier alinéa, au mot : « publiés » les mots : « manifestement rendus publics ».

Cette substitution permettrait, en effet, de se conformer à l’article 9 du RGPD, car certaines données pourraient être incidemment collectées au moyen du dispositif proposé par le Gouvernement : l’on pense évidemment aux opinions politiques, aux convictions religieuses ou philosophiques, à l’orientation sexuelle ou à la vie personnelle.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF1209, qui avait été examiné en commission des lois, clarifie la nature des données collectées : il s’appuie effectivement sur l’article 10 de la directive associée au RGPD, qui est déjà utilisé à des fins pénales. Une telle clarification est absolument nécessaire.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ces quatre amendements aboutissent exactement au même résultat ; seule la rédaction diffère. Je propose donc que les amendements II-CF1155 et II-CF1209 soient retirés au profit des amendements II-CF1515 et II-CF1375, étant entendu que les auteurs des premiers deviendraient cosignataires des seconds de sorte que nous adopterions un texte commun.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Pour des raisons techniques, mieux vaudrait que notre rédaction soit adoptée, en ce qu’elle permettrait d’être sûr que les contenus visés seront manifestement rendus publics par les personnes concernées. Demeure, en effet, entier le problème des tags et des commentaires, qui restent librement accessibles. La substitution des mots : « manifestement rendus publics » au mot : « publiés » avait d’ailleurs recueilli l’assentiment de tous les groupes, à l’exception du groupe majoritaire – ce qui n’avait pas permis d’adopter l’amendement correspondant –, en commission des lois.

M. Charles de Courson. Notre collègue a raison. Dans la mesure où il reprend les termes de l’article 9 du RGPD, il serait préférable de voter son amendement plutôt que celui du rapporteur général.

D’ailleurs, si nous adoptons l’amendement du rapporteur général, serons-nous alors en conformité avec le RGPD ? Je pense en particulier à l’avant-dernier alinéa du I de l’article 57, qui est inquiétant dans la mesure où il prévoit que « le droit d’opposition, prévu par l’article 38 de la même loi, ne s’applique pas aux traitements mentionnés au deuxième alinéa. »

M. Joël Giraud, rapporteur général. La discussion sur cette question d’importance pourra se poursuivre en séance avec le ministre.

La commission adopte les amendements II-CF1515 et II-CF1375 (amendement II2553).

En conséquence, les amendements II-CF1155 et II-CF1209 tombent.

La commission en vient aux amendements identiques II-CF1182 de la commission des lois et II-CF1156 de Mme Sarah El Haïry.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. L’idée qui sous-tend l’amendement II-CF1182 est de limiter le champ de l’expérimentation aux plateformes de commerce, en excluant les plateformes de partage de vidéos, comme Youtube, les réseaux sociaux et les forums de discussion. Si l’on en croit l’étude d’impact, ces trois dernières catégories ne faisaient d’ailleurs pas partie, dans l’esprit du Gouvernement, de celles au sein desquelles des infractions, telles qu’elles sont dorénavant déterminées, pourraient faire l’objet d’une recherche.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vos amendements me posent un problème en ce qu’ils restreignent les données collectées à celles publiées sur les plateformes de commerce, c’est-à-dire à celles « dont l’activité repose sur la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service ». Pour le coup, leur adoption priverait le dispositif de toute efficacité. Il vaut mieux restreindre, comme nous le faisons, le champ de l’expérimentation en fonction des fraudes recherchées plutôt qu’en fonction du type de sites internet où elle sera menée.

Adopter vos amendements constituerait, à mon avis, le meilleur moyen de passer à côté de problèmes graves. Avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry. Twitter, Facebook ou Dailymotion sont des plateformes d’expression, et les amendements visent à protéger la liberté d’expression.

Mme Émilie Cariou. Il y a aussi du commerce sur ces sites.

M. Charles de Courson. Si l’on sort des échanges commerciaux en espèce ou en nature, et que l’on inclut dans le champ de cette expérimentation les forums d’expression, va se poser la question du respect de la liberté d’expression, avec le risque de porter clairement atteinte aux libertés publiques. Attention !

L’amendement de notre collègue de la commission des lois offre au moins le mérite de sécuriser l’affaire. Pour aller plus loin, il nous faut respecter la liberté d’expression et le principe de proportionnalité. Dans le cas contraire, on risque, en cas de saisine du Conseil constitutionnel, d’être censuré.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Cela recoupe exactement ce qui avait été dit en commission des lois : si nous ne restreignons pas le champ de cette expérimentation, nous nous heurterons à un problème de proportionnalité. La compatibilité du respect des libertés publiques avec l’objectif qui est prétendument visé pose problème. Dans l’étude d’impact du Gouvernement, qui ne nous a pas été communiquée, aucun élément ne permet, semble-t-il, d’expliquer en quoi, même par des moyens humains, des redressements ont déjà été opérés à partir des plateformes comme Dailymotion, où l’on échange, en exerçant la liberté d’expression, des opinions.

La question qui sous-tendait la discussion au sein de la commission des lois concernait l’objectif visé par le Gouvernement. Comme nous disposions de très peu d’éléments, j’ai proposé de supprimer l’article 57, car nous ignorons encore aujourd’hui quelle est la proportionnalité entre les moyens mis en œuvre et la finalité attendue.

M. François Pupponi. Si je peux comprendre l’aspect lié aux libertés publiques, s’interdire de rechercher des infractions sur de telles plateformes, c’est priver l’article 57 de toute raison d’être. Si quelqu’un a acheté une belle voiture, par exemple, comment les services fiscaux pourraient-ils le savoir s’ils ne peuvent pas aller consulter ces plateformes ? Il faudrait au moins qu’ils puissent le faire dans le cadre d’un contrôle, ce que l’adoption de ces amendements interdirait. Or, dans le cadre d’un contrôle, on peut consulter notamment les relevés bancaires.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je considère que ces amendements équivalent à des amendements de suppression. J’ai exercé ce type de métier par le passé ; clairement, ce n’est pas sur les plateformes commerciales que nous repérions les gens qui opéraient des ventes particulièrement crapuleuses et criminelles. Nous ne les tracions pas sur leboncoin.fr, mais précisément sur des forums cryptés. Si l’on veut être efficace, il ne faut pas vider le dispositif de sa substance.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1182 et II-CF1156.

Elle adopte lamendement rédactionnel II-CF1355 du rapporteur général (amendement II-2554).

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques IICF1519 du rapporteur général et II-CF1183 de la commission des lois, ainsi que lamendement IICF1157 de Mme Sarah El Haïry.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement II-CF1519 vise à interdire la sous-traitance en matière de collecte et de conservation des données, ce qui constituerait une garantie contre toute violation de ces mêmes données. Seuls des agents habilités pourraient prendre part à l’expérimentation.

Cet amendement est issu de la commission des lois et je l’ai repris à mon compte car il me semble nécessaire. On ne peut pas se permettre, dans le cadre d’une telle expérimentation, de pratiquer ce type de sous-traitance qui viderait l’expérimentation de son sens régalien.

Mme Sarah El Haïry. L’amendement II-CF1157 tend à poser une interdiction absolue de sous-traitance.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis favorable aux amendements identiques qui satisfont celui de Mme El Haïry. Peut-être pourriez-vous, chère collègue, le retirer et vous porter cosignataire des deux premiers ?

Lamendement II-CF1157 est retiré.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1519 et II-CF1183 (amendement II-2558).

Elle examine lamendement II-CF1380 de Mme Émilie Cariou.

Mme Émilie Cariou. Il s’agit d’écourter la période durant laquelle l’administration fiscale et celle des douanes pourront conserver des données sensibles ou celles manifestement sans lien avec les infractions recherchées. Celles-ci devront être détruites au plus tard cinq jours après leur collecte.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Là est toute la difficulté s’agissant des données sensibles. Je rappelle que selon le RGPD, les données sensibles ne doivent pas, par principe, être collectées. Or parmi les données chalutées – c’est le terme approprié – par l’administration fiscale, figureront nécessairement des données sensibles et d’autres qui ne le seront pas ; certaines seront effectivement utiles aux contrôles fiscaux, mais d’autres auront trait à la liberté d’opinion ou à la liberté syndicale. Celles-là ne devraient pas être collectées et il faut donc qu’elles soient supprimées sans délai.

Laisser dans la loi un délai de cinq jours a ceci de problématique que cela contrevient au RGPD et à ce que nous avons adopté il y a plus d’un an dans le cadre de la loi relative à la protection des données personnelles. C’est un vrai problème de libertés publiques. Les données sensibles ne devant pas être collectées, elles doivent faire l’objet d’un traitement immédiat, au moyen d’un filtre qui permettra leur suppression par l’administration fiscale.

Je rappelle que de telles données comprennent tout ce qui touche à la liberté d’opinion, à la liberté syndicale, à la santé, à l’orientation sexuelle, c’est-à-dire tout ce dont l’État ne doit pas être propriétaire, fût-ce un instant. Prévoir un délai de cinq jours revient à fouler aux pieds le RGPD ainsi que toutes les dispositions que nous avons adoptées dans ce cadre. Ce délai ne me paraît pas constituer une bonne solution.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Si cela peut rassurer tout le monde, je m’en remets, s’agissant de ce délai de conservation des données sensibles, à la sagesse de la commission. Il sera cependant nécessaire, au cours de la navette, de remédier à un problème rédactionnel mineur.

M. Charles de Courson. Je suis d’accord avec l’amendement de Mme Cariou, si ce n’est qu’il faudrait reprendre la définition des données sensibles par la CNIL, à savoir les données qui sont « liées à la vie privée des personnes physiques, telles que l’âge, le lieu de naissance et les données d’identification, ainsi que les commentaires intégrant éventuellement des opinions ».

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est le problème rédactionnel que je viens d’évoquer.

M. Charles de Courson. Si Mme Cariou en est d’accord, je déposerai un sous‑amendement au moment de l’examen de l’article en séance publique.

Mme Émilie Cariou. Le RGPD définit la notion de donnée sensible. Au moins, commençons en prenant cette garantie, quitte à l’améliorer et à la renforcer d’ici à la séance publique.

La commission adopte lamendement II-CF1380 (amendement II-2559).

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF1158 de Mme Sarah El Haïry et II-CF1210 de M. Philippe Latombe, et les amendements identiques IICF1517 du rapporteur général et II-CF1377 de Mme Émilie Cariou.

Mme Sarah El Haïry. Il s’agit, encore une fois, de renforcer la proportionnalité du dispositif afin qu’il soit le moins liberticide possible.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF1210 est identique. Une censure constitutionnelle ne manquerait pas d’intervenir si nous conservions les mots : « renforcer la proportionnalité du dispositif », cette formulation étant trop vague par rapport à l’objectif visé.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement II-CF1517 suit rigoureusement la même logique, mais de manière renforcée. Les amendements précédents visaient à substituer aux mots : « de nature à concourir », les mots : « strictement nécessaires » ; je propose, pour ma part, de conserver les deux formules. Ainsi, seules les données « strictement nécessaires » pourraient être conservées au-delà du délai fixé à l’alinéa 3, et non pas toutes les données « de nature à concourir » à la constatation d’un manquement fiscal ou d’une infraction douanière visés par l’article. Il s’agit d’une habitude juridique stabilisatrice et importante.

Mme Émilie Cariou. L’amendement identique II-CF1377 vise également à restreindre aux données strictement nécessaires la conservation au-delà du délai fixé à l’alinéa 3.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je propose à mes collègues de nous retrouver tous cosignataires des amendements identiques II-CF1517 et II-CF1377, ce qui implique le retrait des amendements identiques II-CF1158 et II-CF1210.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. En l’état, l’amendement IICF1210 ne sera pas retiré. Nous réfléchirons ultérieurement à une évolution éventuelle de sa rédaction, car le cumul des deux termes posera un problème lié à l’utilisation et à la caractérisation de la donnée. Nous aurons le débat en séance publique. Comme nous touchons aux libertés publiques, il faut absolument que le dispositif puisse fonctionner.

Successivement, la commission rejette les amendements II-CF1158 et II-CF1210 et adopte les amendements II-CF1517 et II-CF1377 (amendement II-2560).

Elle adopte lamendement de précision II-CF1525 (amendement II-2561) et lamendement rédactionnel II-CF1356 (amendement II-2562) du rapporteur général.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF1427 de Mme Cécile Untermaier.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II-CF1427 porte sur la durée de conservation des données collectées par les moyens de traitements informatisés et automatisés. Dans sa délibération du 12 septembre 2019 portant avis sur le projet d’article 57, la CNIL a regretté « de ne pas avoir disposé d’éléments lui permettant d’apprécier de la pertinence et de la nécessité de conserver les données enregistrées dans le traitement pour une telle durée ». Je rappelle que celle-ci est d’un an. La CNIL propose que « les données considérées comme non pertinentes soient supprimées immédiatement à l’issue de leur collecte et que la durée de conservation soit significativement réduite, sauf à démontrer la nécessité d’une conservation d’un an ».

Dans la lignée de l’avis de la CNIL, l’amendement propose donc d’écourter le délai de conservation d’un an à six mois pour les données utiles, et de trente jours à quinze pour les données non pertinentes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous venons d’adopter un amendement tendant à appliquer un délai de cinq jours aux données sensibles, ce qui me semble correspondre à l’esprit du vôtre, que je vous invite, par conséquent, à retirer.

Lamendement II-CF1427 est retiré.

La commission adopte lamendement rédactionnel II-CF1357 du rapporteur général (amendement II-2563).

Elle est saisie des amendements identiques II-CF1159 de Mme Sarah El Haïry et IICF1211 de M. Philippe Latombe.

Mme Sarah El Haïry. L’amendement II-CF1159 est extrêmement important en ce qu’il précise que les données doivent être rendues publiques par la personne concernée elle-même.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF1211 est identique. Il vise à écarter les tags et autres commentaires, dans la mesure où ces données sont publiées par des tiers et pas par la personne concernée elle-même. Lorsque M. Dupont poste que M. Durand a été vu à l’aéroport en partance pour une certaine destination, il ne s’agit que d’un commentaire sur une personne ; ce n’est pas une donnée manifestement rendue publique par la personne elle-même. L’exploitation de tels tags ou commentaires ne serait pas compatible avec le RGPD en termes de données et de consentement à la publication. C’est pourquoi il nous faut absolument adopter cet amendement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je comprends, mes chers collègues, votre préoccupation. Néanmoins, ces amendements ont un revers : celui qui voudrait échapper à toute détection n’aurait qu’à demander à un tiers de promouvoir son activité occulte. Je trouve donc que ces amendements dénaturent le dispositif, au point de le rendre inefficace.

J’ai passé ma vie professionnelle à lutter contre la fraude. Les gens passent leur temps à essayer de contourner les dispositifs mis en place. À chaque fois, il a fallu s’adapter, car les truands sont plus rapidement adaptables que les administrations qui les suivent. Avis défavorable.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Je ne suis pas d’accord avec vous. Le texte prévoit que les données en question sont manifestement rendues publiques par des personnes que l’on peut identifier facilement, qui donc les publient en utilisant leurs nom et prénom. Cela signifie que sont exclues du champ les personnes qui utilisent des pseudonymes, sinon il faudrait engager des démarches en vue de lever l’anonymat de la personne dont on a collecté les données. Il faudrait demander aux opérateurs à qui correspond telle ou telle adresse Internet Protocol (IP). Or ce n’est pas prévu par le projet de loi, ce qui veut dire qu’aujourd’hui, on pourrait accepter de collecter les données d’un tiers à partir des données d’un compte d’une personne anonyme. Ce serait contraire à l’esprit de l’article. Ce serait un problème de ne pas adopter ces amendements.

La commission rejette les amendements II-CF1159 et II-CF1211.

Elle examine les amendements identiques II-CF1160 de Mme Sarah El Haïry et IICF1212 de M. Philippe Latombe.

Mme Sarah El Haïry. L’amendement II-CF1160 vise, afin de garantir la proportionnalité du dispositif, à ne pas conserver du tout les données collectées non pertinentes. Pas une journée, pas une minute : il ne faut pas les garder.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Comme je l’ai dit, nous faisons face, en matière de données sensibles, à un problème. Je rappelle que le RGPD nous impose de ne pas les collecter, sauf atteinte manifeste à la sécurité de l’État. Or le projet de loi ne prévoit pas une telle restriction.

La Cour de justice de l’Union européenne a une vision très restrictive de l’utilisation de ces mêmes données. Le RGPD vise, lui, à minimiser les collectes. Le « sans délai » doit donc s’appliquer aux données sensibles.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vos amendements ne portent pas uniquement sur les données sensibles, mais sur toutes les données qui ne permettent pas de suspecter un manquement ou une infraction. Or les administrations concernées ont besoin de temps pour faire le tri. En ce sens, l’amendement de notre collègue Émilie Cariou satisfait votre préoccupation.

Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF1160 et II-CF1212.

Elle en vient à lamendement II-CF1378 de Mme Émilie Cariou.

Mme Émilie Cariou. Les renseignements collectés doivent effectivement permettre d’identifier certains comportements frauduleux. Cela étant, le traitement envisagé ne doit pas conduire à la programmation automatique de contrôles fiscaux ou douaniers, ou à la notification automatisée de rectifications, de rappels ou de sanctions.

Nous proposons que les administrations fiscale et douanière ne puissent procéder à l’appréciation de la situation de la personne concernée sur le seul fondement d’un algorithme. Les informations recueillies devront donc être analysées par un service de contrôle compétent. La personne concernée pourra bénéficier de toutes garanties inhérentes aux procédures fiscales et douanières.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Suivant le vieil adage, cela va mieux en le disant, j’émets sur cet amendement, bien que superfétatoire, un avis de sagesse bienveillante.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Il est effectivement superfétatoire, car il n’est pas possible, dans ce cadre-là, de programmer des contrôles de façon automatique. L’insertion d’une telle disposition rassurerait nombre de nos concitoyens : à ce titre-là, l’adoption de cet amendement constituerait un bon signe en vue de la séance publique.

M. Charles de Courson. Même s’il a un petit caractère d’affichage, je suis favorable à cet amendement.

Mme Émilie Cariou. Il offre des garanties au contribuable !

M. Charles de Courson. Simplement, quelle est la portée juridique des termes « corroboration » et « enrichissement » ? Je ne sais pas d’où sortent ces concepts. Quelle en est la signification ?

Mme Émilie Cariou. Il s’agit des travaux qui seront réalisés sur la base des données collectées au moyen des traitements concernés.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. « Corroboration » est un synonyme de « confirmation ».

La commission adopte lamendement II-CF1378 (amendement II-2564).

Elle est saisie des amendements identiques II-CF1522 du rapporteur général et IICF1184 de la commission des lois.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je laisse le rapporteur pour avis de la commission des lois, qui avait à l’origine détecté l’erreur de référence en question, défendre cet amendement.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Il s’agit d’une erreur de référence qui figurait dans la rédaction proposée par le Gouvernement : elle visait une disposition erronée dans la mesure où celle-ci avait fait l’objet, le 12 décembre 2018, d’une recodification.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1522 et II-CF1184 (amendements II-2565).

Elle examine les amendements identiques II-CF1523 du rapporteur général et IICF1185 de la commission des lois.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit également d’une erreur de référence.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1523 et II-CF1185 (amendement II-2566).

Elle en vient à lexamen des amendements identiques II-CF1186 de la commission des lois et II-CF1161 de Mme Sarah El Haïry.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Il s’agit de sécuriser le dispositif en encadrant très précisément le contenu du décret en Conseil d’État, qui sera pris après avis de la CNIL, prévu à l’alinéa 7. Son adoption serait absolument nécessaire si l’article 57 était adopté.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La situation est similaire à celle que nous avons rencontrée avec l’amendement II-CF1378, qui était superfétatoire puisque les missions du Conseil d’État recoupent très largement celles qui sont énumérées dans les amendements. Compte tenu de la sensibilité de l’article, cette disposition étant, là encore, de nature à rassurer, j’émets un avis de sagesse extrêmement bienveillante.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1186 et II-CF1161 (amendement II-2567).

Elle passe aux amendements identiques II-CF1187 de la commission des lois et IICF1162 de Mme Sarah El Haïry.

M. Philippe Latombe, rapporteur pour avis. Nous allons considérer que l’article 57 n’est pas un cavalier législatif. Partant, nous proposons que l’évaluation prévue à l’alinéa 8 se fasse dans le cadre du projet de loi de finances, au moment de son dépôt, donc à un rythme annuel et non à son issue, c’est-à-dire au terme du délai de trois ans prévu, de façon à avoir une réelle évaluation du dispositif.

Si l’on considère, au contraire, qu’il s’agit d’un cavalier législatif, cet amendement n’a alors, évidemment, pas de raison d’être.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai, pour ma part, déposé un amendement II‑CF1516 que nous examinerons dans quelques instants. Il porte sur une durée qui me semble plus normale puisqu’il propose qu’un bilan intermédiaire soit réalisé au milieu de l’expérimentation, soit dix-huit mois avant son terme.

Je suggère donc que ces amendements soient retirés au profit de ce dernier.

La commission rejette les amendements identiques II-CF1187 et II-CF1162.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF1516 du rapporteur général et II-CF1376 de Mme Émilie Cariou, ainsi que lamendement II-CF1426 de Mme Cécile Untermaier.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement II-CF1516 porte sur le bilan intermédiaire que je viens d’évoquer. Je suggère à mes collègues de s’y rallier.

M. Jean-Louis Bricout. Par l’amendement II-CF1426, nous proposons que l’évaluation ait lieu un an avant le terme de l’expérimentation, et non six mois comme le prévoit l’alinéa 8.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis évidemment favorable aux deux amendements identiques II-CF1516 et II-CF1376, qui sont encore plus volontaristes que l’amendement II-CF1426. Je propose donc aux auteurs de ce dernier de s’y rallier et de les cosigner. À défaut, avis défavorable.

Lamendement II-CF1426 est retiré.

La commission adopte les amendements II-CF1516 et II-CF1376 (amendement II2568).

M. Charles de Courson. Le rapporteur de la commission des lois, qui vient de nous quitter, a eu accès à l’avis du Conseil d’État. Monsieur le rapporteur général, est-ce également votre cas ? Pouvez-vous nous confirmer qu’il considère l’article 57 comme un cavalier ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est le cas. Je n’ai cependant pas le droit, et c’est dommage, de vous faire lire cet avis. Je vous précise néanmoins qu’il est extrêmement nuancé et qu’en tout état de cause, il n’est pas orthogonal aux dispositions de l’article. Il considère, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, que la voie réglementaire aurait pu être utilisée.

La commission adopte larticle 57 ainsi modifié.

 


Article 58
Simplification des obligations déclaratives et des modalités détablissement des impositions en matière dimpôt sur le revenu

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article porte plusieurs mesures de simplification des obligations déclaratives en matière d’impôt sur le revenu :

– il supprime la règle selon laquelle l’imposition commune à l’impôt sur le revenu des personnes mariées est établie au nom de l’époux, précédée de la mention « Monsieur ou Madame » ;

– il repousse la date limite de dépôt de la déclaration de revenus du 1er mars au deuxième jour ouvré suivant le 1er avril. Il précise que ce délai peut être prorogé chaque année par l’administration sans que la date limite de dépôt qui en résulte ne puisse être postérieure au 1er juillet ;

– il met en place une déclaration de revenus tacite pour les contribuables dont l’administration a la raisonnable assurance de disposer des informations nécessaires à l’établissement de leur impôt sur le revenu. Cela concernerait environ 12 millions de foyers fiscaux, notamment ceux dont les revenus sont déclarés par des tiers. Les contribuables concernés pourront toujours déposer une déclaration de revenus faisant état des informations manquantes dans le délai légal de souscription ou, après ce délai, souscrire une déclaration rectificative ou effectuer une réclamation.

Un décret détermine les cas pour lesquels un contribuable n’est pas éligible à la déclaration tacite.

Dernières modifications législatives intervenues

Depuis plusieurs années, l’administration fiscale s’est engagée dans une démarche de simplification et de modernisation des relations avec les contribuables, notamment en ce qui concerne la campagne de déclaration des revenus. Ainsi, depuis 2006, les déclarations de revenus sont pré-remplies de l’identité des personnes composant le foyer fiscal, des traitements, salaires, pensions, allocations et revenus de capitaux mobiliers déclarés par les employeurs, les organismes sociaux ou les intermédiaires financiers par exemple.

L’article 242 bis du CGI, modifié par l’article 10 de la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018, prévoit que les revenus perçus par l’intermédiaire de plateformes de mise en relation de particuliers, en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service, sont transmis à l’administration fiscale. Ces dispositions s’appliquent à compter de l’imposition des revenus de 2019. Elles impliquent que ces revenus figureront sur la déclaration pré-remplie à partir de 2020.

De plus, l’article 76 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a généralisé progressivement à l’ensemble des contribuables l’obligation de souscrire en ligne leur déclaration de revenus.

Enfin, l’article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, modifié par l’ordonnance n° 2017-1390 du 22 septembre 2017 relative au décalage d’un an de l’entrée en vigueur du prélèvement à la source, a instauré un prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission des finances a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   L’obligation de dÉclaration de l’impôt sur le revenu

En 2017, 16 548 541 foyers fiscaux ont été imposés sur leurs revenus de 2016, sur les 37 889 181 foyers fiscaux existants en France.

Chaque foyer fiscal étant soumis à une imposition unique, les personnes mariées ou les partenaires dun pacte dunion de solidarité civile (Pacs) sont soumis à une imposition commune, sauf dans les cas limitativement fixés par la loi. D’après l’article 6 du CGI, les avis de situation déclarative et les avis d’imposition relatifs à l’impôt sur le revenu des personnes mariées sont établis au nom de l’époux, précédé de la mention « Monsieur ou Madame ». Ceux des contribuables pacsés sont établis au nom des deux partenaires, séparés par le mot « ou ».

1.   Champ d’application de l’obligation déclarative

En application de l’article 170 du CGI, toute personne imposable est tenue de souscrire et faire parvenir à ladministration une déclaration détaillée de ses revenus et bénéfices, de ses charges de famille et des autres éléments nécessaires au calcul de limpôt sur le revenu.

L’article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a ajouté aux obligations déclaratives du contribuable la mention du montant des plus-values en report d’imposition en application de l’article 150-0 B ter du CGI et le montant des plus-values exonérées en application du 1 bis du II de l’article 150 U du même code, ainsi que les éléments nécessaires au calcul du revenu fiscal de référence tel que défini au 1° du IV de l’article 1417.

L’article 170 bis du CGI prévoit que sont assujetties à l’obligation de dépôt d’une déclaration, quel que soit le montant de leurs revenus, les personnes fiscalement domiciliées en France et qui disposent de l’un des éléments de train de vie suivants : un avion de tourisme ou un véhicule de tourisme, un yacht ou un bateau de plaisance, un ou plusieurs chevaux de courses, un employé de maison, une ou plusieurs résidences secondaires en France ou hors de France, une résidence principale qui présente une valeur locative ayant excédé, au cours de l’année d’imposition, 150 euros à Paris et dans les communes situées dans un rayon de 30 kilomètres de Paris, et 114 euros dans les autres localités.

La déclaration annuelle de revenus se présente sous la forme d’une déclaration d’ensemble, accompagnée, le cas échéant de déclarations annexes. En effet, plusieurs types de revenus doivent faire l’objet d’une déclaration sur un formulaire séparé :

– les revenus fonciers réels (formulaire n° 2044) ;

– les revenus de toute nature encaissés hors de France (formulaire n° 2047) ;

– les plus-values sur cession de valeurs mobilières et droits sociaux et les profits assimilés (formulaire n° 2074) ;

– les comptes bancaires et assimilés ouverts ou utilisés à l’étranger (formulaire n° 3916).

De plus, les contribuables doivent souscrire, le cas échéant, des déclarations spéciales, en vue du contrôle de leurs bénéfices professionnels (bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles et bénéfices non commerciaux).

Les personnes non imposables et qui ne disposent pas d’un de ces éléments de train de vie ne sont pas soumises à l’obligation de souscrire une déclaration de revenus mais peuvent la produire volontairement. Cela permet à ces contribuables de disposer dun avis de non-imposition, utilisé comme justificatif de ressources pour loctroi de différents avantages fiscaux.

Larticle 175 du CGI fixe une date limite de dépôt de la déclaration de revenus, au plus tard le 1er mars ou, pour les déclarations souscrites par voie électronique, le 20 mars. Le délai du 1er mars est prolongé au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai pour les commerçants et industriels, les exploitants agricoles placés sous un régime réel d’imposition et les personnes exerçant une activité non commerciale, placées sous le régime de la déclaration contrôlée.

Au regard des données disponibles, le civisme fiscal, qui s’exprime par l’accomplissement volontaire par les contribuables de leurs démarches et obligations fiscales, atteint un niveau élevé en France, puisque le taux des usagers particuliers qui respectent leurs obligations déclaratives a atteint 97,5 % en 2018 ([202]). Une cible de 98,5 % est fixée pour 2022.

2.   Sanctions applicables en cas de manquements à l’obligation déclarative

L’administration fiscale dispose d’un pouvoir de vérification et de rectification des déclarations de revenus souscrites par les contribuables (article 175 A du CGI).

En cas de retard ou de défaut de souscription des déclarations, ainsi que d’omissions ou d’inexactitudes dans le contenu de la déclaration qui ont pour effet de minorer l’impôt pour le contribuable ou de majorer une créance à son profit, l’article 1758 A du CGI prévoit une majoration de 10 % de l’impôt dû ou de la créance indue, qui s’ajoute à l’intérêt de retard (0,2 % par mois à partir du 1er juillet de l’année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est établie). La majoration est portée à 20 % en cas de dépôt tardif effectué dans les trente jours d’une mise en demeure.

Cependant, cette majoration de 10 % n’est pas applicable en cas de régularisation spontanée du contribuable ou dans un délai de trente jours à la suite d’une demande de l’administration. Elle n’est pas non plus applicable dans le cas d’une imposition d’office ou de l’application d’une majoration supérieure, prévue par les articles 1728 et 1729 du CGI :

– l’article 1728 prévoit une majoration de 40 % lorsque la déclaration n’est pas déposée dans les trente jours suivant la réception de la mise en demeure et de 80 % en cas de découverte d’une activité occulte ;

– l’article 1729 prévoit une majoration de 40 % en cas de manquement délibéré pour les inexactitudes et omissions relevées dans une déclaration. Cette majoration est portée à 80 % en cas de manœuvre frauduleuse.

L’administration fiscale peut procéder à une imposition d’office en cas de défaut ou de retard de production de la déclaration d’ensemble des revenus, trente jours après la notification d’une mise en demeure (articles L. 65 à L. 74 du livre des procédures fiscales).

B.   une dÉmarche de simplification des dÉclarations initiÉe depuis plus de dix ans

L’administration fiscale s’est engagée dans une démarche de simplification des déclarations de revenus.

Depuis 2006, les déclarations de revenus sont pré-remplies de lidentité des personnes composant le foyer fiscal, des traitements, salaires, pensions, allocations et revenus de capitaux mobiliers déclarés par les employeurs, les organismes sociaux ou les intermédiaires financiers par exemple. Les contribuables vérifient les informations inscrites et les complètent ou les corrigent le cas échéant. 90 % des contribuables bénéficient aujourd’hui d’une déclaration pré-remplie.

L’article 242 bis du CGI, modifié par l’article 10 de la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018, prévoit que les revenus perçus par l’intermédiaire de plateformes de mise en relation de particuliers, en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service, sont transmis à l’administration fiscale. Ces dispositions s’appliquent à compter de l’imposition des revenus de 2019. Elles impliquent que ces revenus figureront sur la déclaration pré-remplie à partir de 2020.

De plus, larticle 76 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a étendu progressivement à lensemble des contribuables dont la résidence principale est équipée dun accès à internet lobligation de souscrire la déclaration de revenus par voie électronique. La télédéclaration a été généralisée pour les déclarations souscrites en 2019 au titre des revenus de l’année 2018. Cependant, cette disposition ne s’applique pas aux contribuables dont la résidence n’est pas équipée d’un accès à internet, qui ne sont pas en mesure de souscrire leur déclaration en ligne ou, jusqu’au 31 décembre 2024, qui résident dans des zones blanches.

Enfin, la mise en place du prélèvement à la source au 1er janvier 2019, par l’article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, modifié par l’ordonnance n° 2017-1390 du 22 septembre 2017 relative au décalage d’un an de l’entrée en vigueur du prélèvement à la source, permet l’acquittement de l’impôt de façon contemporaine. Elle implique que les collecteurs de la retenue à la source de l’impôt ont l’obligation de transmettre à l’administration fiscale le montant des salaires, des pensions versées et des retenues à la source précomptées, à travers la déclaration sociale nominative (DSN) ou la déclaration « prélèvement à la source pour les revenus autres » (PASRAU). Ainsi, l’administration fiscale sera en capacité de collecter plus d’informations pour les déclarations pré-remplies, ce qui diminue d’autant la nécessité pour les contribuables de les modifier.

II.   dispositif proposÉ

A.   L’adaptation du droit en vigueur À la pratique

1.   La suppression de l’établissement de l’imposition commune des personnes mariées au nom du mari

Le présent article vient mettre en adéquation le droit existant avec la pratique actuelle de gestion, concernant les règles régissant l’utilisation du nom des personnes mariées soumises à une imposition commune.

Il met fin à la règle selon laquelle, lors de l’imposition commune à l’impôt sur le revenu des personnes mariées, l’imposition est établie au nom de l’époux. Il prévoit ainsi que l’imposition est désormais établie au nom des deux époux. Il supprime la mention « Monsieur ou Madame » qui précède le nom de l’époux. Il supprime également, pour l’imposition commune des partenaires liés par un pacte civil de solidarité, la séparation des deux noms par le mot « ou » lors de l’établissement de l’imposition.

En pratique, le nom des deux époux figure déjà sur la déclaration et permet soit de retenir le nom d’usage, soit le nom de naissance.

Cette modification permet de prendre en compte la situation résultant de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.

2.   Le recul du délai de dépôt limite des déclarations de revenus

Le présent article repousse le délai limite de dépôt sous format papier ou de souscription en ligne des déclarations de revenus du 1er mars au deuxième jour ouvré suivant le 1er avril. Le présent article précise que ce délai pourra être prorogé chaque année selon un calendrier et des modalités fixés par l’administration et publiés sur son site internet, ce qui est le cas chaque année dans les faits aujourd’hui. Cependant, il instaure une date limite à cette prorogation, fixée au 1er juillet.

Dans la pratique, la date limite de dépôt de la déclaration de revenus est postérieure à la date inscrite à l’article 175 du code général des impôts et dépend du département de résidence du contribuable pour les souscriptions en ligne. Par exemple, la date limite de déclaration en ligne des revenus 2018 était fixée du 21 mai au 4 juin 2019 en fonction du département de résidence, et celle de dépôt sous format papier était fixée au 16 mai 2019.

B.   la mise en place d’une dÉclaration de revenus tacite

1.   Procédure applicable

Dans le cadre de la démarche de simplification des déclarations de revenus, le présent article met en place une déclaration tacite des revenus pour les contribuables dont la déclaration se résume à la validation des informations pré-remplies sans ajout ni modification.

Cette mesure concerne les contribuables dont les revenus sont entièrement déclarés par des tiers (employeurs, organismes de sécurité sociale, etc.) et dont la déclaration pré-remplie mise à disposition par ladministration fiscale est exhaustive et correcte. Le contribuable sera alors réputé comme ayant souscrit ou déposé sa déclaration, sans action de sa part. Lévaluation préalable ([203]) estime à environ 12 millions le nombre de contribuables potentiellement concernés par cette dispense de déclaration, ce qui représente plus de 70 % des foyers fiscaux imposables en 2017.

Les contribuables éligibles à la dispense de déclaration fiscale seront choisis en fonction de la catégorie de revenus déclarés l’année précédente. Ils seront explicitement informés de cette faculté par l’administration fiscale au moment de la campagne de déclaration :

–  les déclarants en ligne seront informés par courrier électronique et par un message d’information lors de leur connexion sur leur espace particulier sur le site impôts.gouv.fr, qui les invitera à vérifier l’exactitude et la complétude du document mis à disposition ;

– une déclaration de revenus modifiée, dont la première page concentrera les informations connues de l’administration pour vérification par le contribuable, sera adressée aux déclarants papier.

Les contribuables concernés pourront toujours déposer une déclaration de revenus faisant état des informations manquantes ou erronées dans le délai légal de souscription ou, après ce délai, souscrire une déclaration rectificative ou effectuer une réclamation, dans un délai de deux ans après la réception de l’avis d’imposition.

Les mesures proposées sappliquent à limposition des revenus perçus ou réalisés à partir du 1er janvier 2019, pour les déclarations des revenus souscrites à compter de 2020.

2.   Un régime de sanctions adapté

Le régime de sanction applicable pour les contribuables éligibles à la déclaration tacite est modifié : la majoration de 10 % en cas de défaut ou de retard de déclaration, prévue à l’article 1758 A du CGI, ne pourra plus s’appliquer sauf dans le cas où ces contribuables doivent aussi souscrire une déclaration spéciale de bénéfices professionnels et ne respectent pas les délais imposés.

Cependant, plusieurs sanctions seront toujours applicables :

– la majoration de 10 % en cas d’omission ou d’inexactitudes, prévue par l’article 1758 A du CGI, si le contribuable ne corrige pas spontanément sa déclaration ou dans un délai de trente jours à la suite d’une demande de l’administration (voir supra) ;

– la majoration de 40 % prévue à l’article 1729 du CGI, en cas d’omissions ou d’inexactitudes délibérées, et celle de 80 % prévue au même article en cas de manœuvre frauduleuse ;

– la majoration de 80 % prévue par l’article 1728 du CGI en cas de découverte d’une activité occulte.

L’administration fiscale pourra, en effet, toujours demander des renseignements et des justifications aux contribuables concernés par la déclaration tacite et, le cas échéant, rectifier les déclarations dans les conditions prévues par l’article 175 A du CGI.

3.   L’exclusion de certains profils de contribuables

Un décret déterminera les cas pour lesquels un contribuable ne sera pas éligible à la déclaration tacite et devra, par conséquent, continuer à souscrire une déclaration en ligne ou déposer une déclaration en version papier.

L’évaluation préalable précise que cela concernera au moins les contribuables qui, l’année précédente, étaient redevables de l’impôt sur la fortune immobilière, ceux qui n’étaient pas fiscalement domiciliés en France ou ceux dont les revenus ne sont pas déclarés par des tiers (bénéficiaires de revenus fonciers, travailleurs indépendants) ([204]). Cela sera aussi le cas des contribuables qui remplissent leur première déclaration fiscale.

Les foyers fiscaux rattachés aux territoires de Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Monaco, ainsi que les non-résidents, ne seront pas éligibles à cette dispense de déclaration.

C.   impact des mesures

La déclaration tacite est une mesure de simplification qui concernera environ 12 millions de foyers fiscaux. Elle n’aura pas d’impact financier pour les contribuables éligibles.

Cette mesure permettra un traitement plus rapide des déclarations des contribuables concernés par la mesure. Dans un premier temps, ce gain pourrait être compensé par une charge supplémentaire liée aux contentieux qui pourrait exister le temps de l’appropriation du dispositif par les contribuables. Cette mesure permettra aussi de réduire l’activité de relance des contribuables défaillants qui omettaient de déclarer spontanément leurs revenus, alors même que la déclaration pré-remplie était exacte et exhaustive

*

*     *

La commission adopte larticle 58 sans modification.


Après l’article 58

La commission examine lamendement II-CF1280 de M. Éric Coquerel.

M. Jean-Paul Mattei. Faisant suite au rapport que nous avons produit avec Éric Coquerel sur l’impôt universel ciblé, cet amendement a pour objet d’instaurer une forme d’impôt universel que je qualifierais plutôt d’obligation fiscale étendue indirecte sur dix ans. C’est un mode de taxation qui a fait ses preuves, notamment en Allemagne. Pour ce qui nous concerne, il ne s’appliquerait que pour les pays pratiquant des taux d’imposition sur les revenus du travail inférieurs de plus de 50 % aux taux français.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’avais déjà émis un avis défavorable à cet amendement et je persiste, bien que vous ayez modifié, comme je l’avais suggéré, la date d’entrée en vigueur de cette disposition. Votre proposition est très stimulante intellectuellement, mais elle impliquerait un bouleversement total de notre droit fiscal, qui repose sur la domiciliation et non sur la nationalité.

M. Jean-Paul Mattei. Il s’agit surtout d’un amendement d’appel, pour que nous réfléchissions à ce type d’évolution.

La commission rejette lamendement II-CF1280.

Puis elle examine lamendement II-CF1106 de M. Bruno Duvergé.

M. Bruno Duvergé. J’avais déjà déposé cet amendement au titre de l’examen de la première partie du PLF, mais il manquait des précisions. Il s’agit, je vous le rappelle, d’élargir le dispositif de suramortissement applicable aux moteurs à gaz aux moteurs à gaz qui s’enflamment au diesel, ce dernier étant utilisé, à raison de 5 à 10 % du mélange, pour la seule mise à feu.

En termes d’émission de CO2 la performance de ces moteurs est en effet supérieure de 20 %, c’est-à-dire qu’ils sont beaucoup plus propres – ils ont d’ailleurs obtenu le certificat Crit’Air 1 ; en outre, utilisés avec du gaz liquéfié, ils ont une autonomie de 1 000 kilomètres, ce qui en fait vraiment une solution intéressante.

Concernant les informations complémentaires que vous m’aviez demandées, monsieur le rapporteur général, ce moteur devrait équiper, la première année, deux cents camions qui tournent déjà au gaz avec un moteur bénéficiant du suramortissement. Quant à la question de savoir si ces moteurs pourraient fonctionner au seul diesel, la réponse est non : cela réduirait leur puissance de 90 % – avec 50 CV, les camions ne pourraient même plus tirer leurs remorques – et abaisserait leur vitesse à 20 kilomètres heure.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Même si ces moteurs dual fuel sont intéressants, nous restons malgré tout dans le domaine des hybrides puisqu’ils utilisent du gaz et un hydrocarbure fossile, plus précisément du diesel. Or, l’article 39 decies A du code général des impôts (CGI) vise les motorisations qui fonctionnent sans carburant fossile.

Dans la mesure où nous ne maîtrisons pas encore les rejets polluants de ce type de moteur, il ne me semble pas opportun de les ranger dans la même catégorie que les moteurs qui fonctionnent à l’électricité ou à l’hydrogène. Je maintiens donc mon avis défavorable.

M. Bruno Duvergé. Je persiste à dire que ce moteur est très performant. Quant à vos arguments sur la pollution, ils ne tiennent pas puisque la direction générale de l’énergie et du climat lui a décerné le Crit’Air 1. C’est donc un moteur propre.

La commission rejette lamendement II-CF1106.

Puis elle en vient à lamendement II-CF1319 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. Aujourd’hui, la mise en société d’une entreprise individuelle, c’est-à-dire l’apport d’une entreprise individuelle à une société, peut bénéficier d’un report d’imposition des plus-values prévu par l’article 151 octies du code général des impôts (CGI). Néanmoins, le problème du dispositif est que, dans le cas où l’entreprise individuelle, par exemple un fonds de commerce, perd de la valeur, le montant de la plus-value taxable n’est pas révisé. Je vous rappelle que la transmission d’une entreprise individuelle, même à titre gratuit, est taxée mais qu’elle bénéficie des dispositions de l’article 41 du CGI, qui permet une purge de la plus-value au bout de cinq ans d’exploitation, ce qui n’est pas le cas lors de la mise en société. C’est pourquoi nous demandons au moins la réduction du montant de la plus-value taxable au montant de la valorisation de la valeur vénale du bien lors de sa cession à titre onéreux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Votre amendement rompt avec la logique qui prévaut en matière de report d’imposition et qui consiste à figer la plus-value imposable lors de l’apport à la nouvelle société, pour une imposition ultérieure.

Si l’on établit un parallèle avec un particulier qui détiendrait une action, cela reviendrait à considérer que la collectivité prendrait en charge la baisse du cours de cette action après sa cession : ce n’est pas vraiment opportun, vous en conviendrez. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei. Cet amendement mérite davantage qu’une réponse lapidaire. Il faut distinguer entre le sursis, qui ne fixe pas la valeur, et le report, qui fixe la valeur. Sans aller jusqu’à ce que propose l’article 41 du CGI, je demande simplement qu’on limite la plus-value taxable au prix de vente effectif de l’affaire au moment de sa cession. C’est important, car cela faciliterait la mise en société de l’entreprise individuelle et cela sécuriserait les transmissions d’entreprise.

Mme Véronique Louwagie. Je soutiens cet amendement. Il y a quelques semaines, à l’occasion de l’examen d’un amendement sur les plus-values d’entreprises passées en location-gérance, nous avons tous admis qu’il y avait un problème et décidé de créer un groupe de travail pour revoir le dispositif. Dans le cas qui nous occupe, il y a également une vraie difficulté car, lorsqu’une entreprise apporte son fonds de commerce à une société, le chef d’entreprise ne dégage aucune trésorerie. Le report d’imposition de la plus-value repose donc sur l’idée qu’il pourra payer l’impôt au moment où il dégagera de la trésorerie, c’est-à-dire lors de la vente. Mais lorsque la vente ne se réalise pas dans les conditions initiales prévues au moment de l’apport, le chef d’entreprise ne dégage pas de trésorerie et il est donc contraint d’acquitter un impôt sur une plus-value virtuelle. Cette difficulté pèse sur le dispositif d’apport des entreprises individuelles aux sociétés, alors qu’il faudrait au contraire le faciliter.

Mme Émilie Cariou. Je comprends tout à fait l’objectif de votre amendement, monsieur Mattei, mais il revient à sortir de la logique du report d’imposition, applicable aux personnes physiques qui acquittent l’impôt sur le revenu – notamment au titre des plus-values professionnelles soumises à l’impôt sur le revenu – pour s’inscrire dans une logique de sursis d’imposition, qui prévaut dans les cas d’apport d’actifs, d’échange ou de cession de titres – lesquels figurent dans les bilans –, ou encore de fusion, pour l’impôt sur les sociétés acquitté par les personnes morales.

Or cette logique du sursis d’imposition, qui s’appuie sur le suivi des valeurs comptables inscrites à l’actif et le suivi des valeurs fiscales, avec tous les états déclaratifs qui vont avec, n’est pas forcément transposable à l’impôt sur le revenu acquitté par les personnes physiques. Les régimes dits « de faveur » en matière de restructuration – apport ou échanges de titres – relèvent, pour les personnes physiques, de la logique du report d’imposition et non du sursis d’imposition. Modifier cet état de fait nécessite selon moi une réforme globale de tous les dispositifs de restructuration d’entreprises individuelles qui prévoirait également les régimes déclaratifs qui les accompagnent. Il y a aujourd’hui des maillons manquants dans la chaîne, et il est très difficile de suivre des plus-values en sursis d’imposition.

M. Jean-Paul Mattei. Je ne partage pas du tout votre analyse. Je vous rappelle qu’il s’agit d’un dispositif prévu par l’article 41 du CGI, aux termes duquel, en matière de donation d’entreprise, il existe un système de purge de la plus-value au bout de cinq ans d’exercice. Ce n’est donc pas un problème de sursis ou de report, puisqu’à l’origine l’article mentionnait d’ailleurs le sursis et non le report.

Quant au sursis que vous évoquez en matière d’apport de titres, ce n’est pas la même chose, puisqu’on calcule la valeur de cession sur la valeur des titres que l’on cède ; on ne fige pas la plus-value au moment de l’apport. Je veux bien que l’on en rediscute globalement, mais il y a réelle urgence car cela bloque la mise en société des entreprises individuelles.

Mme Véronique Louwagie. Madame Cariou, vous évoquez les difficultés juridiques qu’il y aurait à passer de la logique du report à celle du sursis, mais vous admettez également que la situation n’est pas satisfaisante. Or notre rôle de législateur est d’apporter des solutions. Si nous sommes tous d’accord pour admettre qu’il y a un problème, mettons-nous donc autour de la table et incluons cette question dans la réflexion d’un groupe de travail

M. Joël Giraud, rapporteur général. Un tel groupe de travail doit en effet nous permettre de trouver des solutions. Cet amendement, lui, ne va faire qu’aggraver la confusion entre report et sursis. Je maintiens mon avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1319.

Puis elle est saisie de lamendement II-CF1082 de M. Marc Le Fur.

M. Fabrice Brun. Le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur, Laurent Nunez, avait annoncé, le 19 décembre 2018, un calendrier pour payer aux policiers et aux gendarmes les 274 millions d’euros en heures supplémentaires que l’État leur doit. À ma connaissance ce calendrier n’a pas encore été défini, mais l’objet du présent amendement est de prévoir que ces heures supplémentaires soient défiscalisées, selon le régime social et fiscal en vigueur depuis le 1er janvier 2019.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous avons déjà évoqué ce sujet en première partie et l’effet d’aubaine que pourrait entraîner votre proposition. Des négociations sont en cours. Attendons leur conclusion pour en reparler. Je vous demande donc le retrait de cet amendement.

M. Fabrice Brun. En ce qui concerne le calendrier, il me semble que notre commission est compétente pour interroger le ministre ou le secrétaire d’État afin d’obtenir des précisions.

M. Charles de Courson. Dois-je comprendre que l’objectif de notre collègue est de faire parler le ministre sur le paiement de ces heures supplémentaires ? Car, dans le secteur privé, le tribunal aurait déjà été saisi pour non-paiement de salaires… De là cependant à vouloir défiscaliser ces heures supplémentaires, c’est une autre paire de manches, car pourquoi ne défiscaliser ces heures que pour les policiers et les gendarmes ? Pourquoi pas pour les militaires ?

La commission rejette lamendement II-CF1802.

Elle en vient à lamendement II-CF960 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. C’est un amendement d’appel qui vise à créer une contribution de 5 % sur les revenus supérieurs à 150 000 euros, acquittable par les contribuables résidant à l’étranger. S’il s’avérait que le montant global de cette contribution ajouté à celui des impositions sur le revenu acquittées dans l’État de résidence fiscale du contribuable est supérieur à ce que le ressortissant français aurait dû payer si ses revenus avaient été imposés en France, la contribution ne serait pas due.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme l’a très bien dit M. Mattei, cet amendement est un amendement d’appel. Comme tout amendement d’appel, il est donc destiné à être retiré pour que l’idée puisse être soumise au ministre.

M. Charles de Courson. Cela favorise l’exil…

Lamendement II-CF960 est retiré.

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Article additionnel après l’article 58
Mention du taux moyen et du taux marginal sur lavis dimposition
à limpôt sur le revenu

La commission est saisie de lamendement II-CF6 de M. Marc Le Fur.

Mme Marie-Christine Dalloz. La principale caractéristique de l’impôt sur le revenu français, c’est qu’il est progressif, c’est-à-dire que le taux évolue en fonction des tranches. Or nos concitoyens ne sont pas tous des fiscalistes en puissance, et ils peuvent confondre le taux moyen d’imposition et le taux marginal d’imposition. Serait-il envisageable de faire figurer ces données sur l’avis d’imposition ? Cela permettrait notamment à chacun de comprendre ce que représentent, en part de l’impôt, les revenus additionnels, par exemple, qui sont, par définition, imposés au taux marginal. C’est une mesure de clarification, qui ne coûte rien à l’État.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il est vrai que le taux moyen d’imposition est indiqué. Quant au taux marginal d’imposition, je l’ai cherché mais je ne l’ai pas trouvé. Je suis donc favorable à cet amendement qui permet une clarification importante.

M. Charles de Courson. Pourquoi pas, en effet, mais il y a plusieurs taux marginaux, puisqu’il y a plusieurs sources de revenus. Il peut s’agir de valeurs mobilières ou de revenus du travail…

Mme Marie-Christine Dalloz. Ne confondons pas tout. L’amendement, de Marc Le Fur est suffisamment précis et vise explicitement l’article 170 du code général des impôts et les taux d’imposition moyen et marginal, au titre de l’article 204 H du même code.

La commission adopte lamendement II-CF6 (amendement II-2569).

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Article additionnel après l’article 58
Demi-part des veuves des anciens combattants

La commission en vient à lexamen, en discussion commune, des amendements IICF57 de Mme Catherine Osson, II-CF1412 de M. Régis Juanico, des amendements identiques II-CF152 de M. Fabrice Brun et II-CF573 de Mme Marie-Christine Dalloz, et des amendements II-CF1370 de M. Jean-Paul Dufrègne et II-CF1411 de M. Régis Juanico.

Mme Catherine Osson. Le régime fiscal des anciens combattants accorde une demi-part supplémentaire, au titre de l’impôt sur le revenu, mais uniquement à partir de 74 ans ; il en va de même pour leurs veuves. Compte tenu de l’effet des carrières militaires sur l’espérance de vie après 55 ans, cette condition d’âge aboutit à ce que certains anciens combattants et leurs veuves ne puissent pas bénéficier de cette mesure, qui est pourtant une juste reconnaissance pour leurs services rendus à la Nation.

Aussi, cet amendement vise-t-il à aligner, pour les titulaires de la carte du combattant, l’âge d’octroi de la demi-part fiscale et l’âge d’obtention de la retraite du combattant, à 65 ans. Cela permettrait de limiter les cas dans lesquels les veuves d’anciens combattants ne peuvent bénéficier de la demi-part, leur conjoint étant décédé avant d’y avoir droit.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II-CF1412 vise à permettre à toutes les veuves des titulaires de la carte du combattant ou d’une pension servie en vertu des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre de bénéficier d’une demi-part fiscale supplémentaire, et ce quel que soit leur âge ou l’âge de décès de leur époux.

Aujourd’hui, la très grande majorité des anciens combattants, notamment ceux d’Algérie, de Tunisie et du Maroc, ainsi que 85 % des bénéficiaires de la retraite du combattant, sont âgés de plus de 75 ans. Néanmoins, il demeure une injustice majeure entre les veuves d’anciens combattants. Ces dernières peuvent, elles aussi, bénéficier de cette demi-part, mais à condition d’être âgées de plus de 74 ans et que leur conjoint soit décédé après son soixante-quatorzième anniversaire. Par conséquent, les veuves dont le mari décède avant 74 ans ne peuvent se la voir attribuer. Cela concerne 40 % des veuves d’anciens combattants. Il convient de corriger cette injustice liée à un critère d’âge.

M. Fabrice Brun. L’amendement II-CF152 entend réparer une injustice majeure pour les veuves d’anciens combattants dont le mari est décédé avant 74 ans. Parce que ce droit à réparation doit s’affranchir de la discrimination par l’âge, nous vous proposons d’abaisser cet âge et d’ouvrir un droit un peu plus large pour ces veuves.

Mme Marie-Christine Dalloz. Pour qu’un ancien combattant ait droit à une demi-part supplémentaire, il doit avoir plus de 74 ans. Quant à sa veuve, elle ne pourra la toucher que si son mari en a été bénéficiaire pendant au moins un an. C’est une mesure profondément injuste, et nous proposons donc d’abaisser l’âge d’ouverture du droit à cette demi-part.

M. Jean-Paul Dufrègne. Selon les dispositions de l’article 195 du code général des impôts, les titulaires de la carte du combattant ou d’une pension servie en vertu des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité, âgés de plus de 74 ans, bénéficient d’une demi-part fiscale supplémentaire. Cette demi-part fiscale est également octroyée aux veuves de ces personnes, si celles-ci ont plus de 74 ans et que leurs conjoints ont pu en bénéficier de leur vivant.

Cette disposition crée une différence de traitement entre les veuves de plus de 74 ans, en fonction de l’âge auquel leur époux est décédé. Pour bien comprendre, prenons l’exemple de deux veuves de 80 ans : l’une bénéficie de la demi-part supplémentaire, son mari étant décédé à 78 ans ; l’autre n’en bénéficie pas, car son mari est décédé à 72 ans.

Nous voulons corriger cette anomalie, et notre amendement permet donc à toutes les veuves ayant atteint l’âge de 74 ans de bénéficier de la demi-part additionnelle, dès lors que leur mari a touché la retraite du combattant.

La soutenabilité financière de cette mesure, dont le coût est estimé à environ 30 millions d’euros, est assurée, étant donné la baisse tendancielle des effectifs éligibles. Les crédits de paiement de la mission Anciens combattants diminuent structurellement d’une année sur l’autre – de 130 millions dans la loi de finances pour 2019 et de 141 millions dans le projet de loi de finances pour 2020. Quant à cette dépense fiscale, elle a coûté 560 millions en exécution 2018 et est chiffrée à 540 millions pour 2019, soit une baisse de 20 millions d’euros.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Parmi ces amendements, certains touchent aux bornes d’âge, ce qui aggrave les inégalités entre les veuves.

L’amendement présenté par M. Jean-Paul Dufrègne, rapporteur spécial des crédits de la mission Anciens combattants a, quant à lui, l’avantage de ne pas toucher aux bornes d’âge, puisque les anciens combattants, comme leurs veuves, auront droit à la demi-part à partir de 74 ans, tout en résolvant les inégalités de traitement liées, pour les veuves, à l’âge du décès de leur mari. Par ailleurs, il est soutenable financièrement et n’entre en vigueur qu’en 2021.

D’ici là, compte tenu de l’évolution tendancielle des crédits propres à la mission Anciens combattants, les crédits budgétaires et les dépenses fiscales afférentes auront baissé de 200 millions, soit sept fois le coût de l’amendement, estimé à 30 millions.

Je propose donc que nous adoptions cet amendement.

M. Charles de Courson. Le ministre s’est montré favorable à cette disposition et a reconnu que la situation actuelle était probablement anticonstitutionnelle. Comment expliquer en effet qu’une veuve de 74 ans ait droit à cette demi-part si son mari est mort à 76 ans mais pas s’il est mort à 73 ans ? C’est une rupture d’égalité manifeste, qui concerne à la fois le « stock », c’est-à-dire les veuves âgées de plus de 74 ans dont le mari est mort avant 74 ans, et le « flux » annuel des personnes éligibles, qui induirait, nous a-t-on dit, une dépense fiscale annuelle de 6 millions. C’est tout à fait raisonnable et nous évite une question prioritaire de constitutionnalité : pour être tout à fait honnête, j’avais personnellement encouragé les fédérations nationales d’anciens combattants à déposer une QPC, et je pense qu’ils auraient gagné, comme ont gagné nos malheureux ex-compatriotes des anciennes colonies françaises, qui se sont battus sous le drapeau de la République française et qu’on traitait de façon discriminatoire. Je suis donc tout à fait favorable à cet amendement.

M. le président Éric Woerth. Pour résumer, grâce à cet amendement, toutes les veuves d’anciens combattants bénéficieront, à partir de 74 ans, de la demi-part supplémentaire, quel que soit l’âge auquel est mort leur mari, et cette mesure s’appliquera y compris aux veuves qui ont aujourd’hui plus de 74 ans.

M. Jean-Louis Bricout. Il s’agit de corriger une injustice, en termes de flux comme en termes de stock. La question du critère d’âge obéit à des considérations budgétaires, mais nous acceptons de retirer nos amendements au bénéfice de celui de M. Dufrègne.

M. le président Éric Woerth. Nous nous rallions donc de manière unanime à l’amendement de M. Dufrègne. Peut-on dès lors considérer qu’en séance cet amendement sera cosigné par les signataires des amendements retirés ?

M. Jean-Paul Dufrègne. Absolument.

Les amendements II-CF57, II-CF1412, II-CF152, II-CF573 et II-CF1411 sont retirés.

La commission adopte lamendement II-CF1370 (amendement II-2570).

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Après l’article 58

La commission en vient à lamendement II-CF1253 de M. Christophe Naegelen.

Mme Patricia Lemoine. Cet amendement a pour objet de réparer une injustice dont sont victimes les couples d’anciens combattants. À ce jour en effet, seule une demi-part supplémentaire leur est accordée, comme aux ménages dont un seul conjoint est un ancien combattant.

Nous proposons de mettre fin à cette règle du non-cumul et qu’à compter du 1er janvier 2021 soit accordée aux couples composés de deux anciens combattants une part supplémentaire.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous venons de régler le principal problème afférent à la demi-part, et je me demande s’il y a vraiment des couples concernés par votre amendement. Je propose que vous le retiriez.

M. de Charles de Courson. Il peut y avoir des femmes, anciennes combattantes, qui ont épousé un ancien combattant. On peut leur accorder ce petit cadeau, sachant qu’on touche là au problème plus général des demi-parts cumulables et de celles qui ne le sont pas.

La commission rejette lamendement II-CF1253.

Elle en vient à lexamen, en discussion commune, des amendements II-CF1104 de M. Jean-Noël Barrot et II-CF1105 de Mme Nathalie Elimas.

M. Jean-Noël Barrot. Je vais défendre ces deux amendements, qui visent à relever, à l’horizon 2021, le plafond du quotient familial de 100 euros. Les députés du groupe MoDem considèrent en effet que son abaissement en 2012 a largement défavorisé les familles.

L’amendement II-CF1104 propose de financer ce relèvement du plafond grâce à un nouveau barème de l’impôt sur le revenu, plus progressif, et doté de taux plus élevés pour les tranches les plus hautes.

L’amendement II-CF1105 propose de le financer par un abaissement du seuil d’entrée dans les deux dernières tranches.

Grâce au simulateur fiscal LexImpact, nous avons pu vérifier que, dans l’un et l’autre cas, les recettes supplémentaires compensaient exactement la hausse de ce plafond en 2021.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le principal problème de notre système fiscal n’est pas celui de son absence de redistributivité mais celui de son niveau d’imposition. Or vos amendements accroissent la redistributivité en augmentant l’impôt de certaines catégories de contribuables, puisque vous créez deux nouvelles tranches dont le taux marginal est supérieur à celui en vigueur. C’est contraire à la règle que nous nous sommes fixée, selon laquelle nous n’augmenterions pour personne l’impôt sur le revenu. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1104 et IICF1105.

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur, elle rejette lamendement II-CF1112 de Mme Justine Benin.

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Article additionnel après l’article 58
Prorogation jusquau 31 décembre 2022 de la déduction spécifique
au titre des revenus fonciers, dite « Cosse », et ajout dune condition relative à la performance énergétique pour en bénéficier

La commission examine les amendements identiques II-CF1512 du rapporteur général, II-CF770 de Mme Stéphanie Do et II-CF1381 de Mme Émilie Cariou.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il s’agit de prolonger la déduction spécifique au titre des revenus fonciers, dite « Cosse » jusqu’au 31 décembre 2022, et d’y rajouter une clause de respect d’un niveau donné de performance énergétique.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1512, II-CF770 et IICF1381 (amendement II-2571).

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Après l’article 58

Puis elle examine lamendement II-CF1464 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. Nous redéposons cet amendement de suppression du dispositif Pinel. Cette niche fiscale est en effet coûteuse pour l’État et inefficace en termes d’accroissement du nombre de logements locatifs accessibles, autant de critiques que partagent d’ailleurs notre rapporteur général et la Cour des comptes. Cette niche est par ailleurs très inégalitaire, puisque ce sont les ménages les plus fortunés qui en profitent pour accroître leur patrimoine. On a tenté à plusieurs reprises, de corriger et d’améliorer ce dispositif, mais sans succès ; d’où cet amendement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Critiquer un dispositif dans un rapport d’application des mesures fiscales (RALF) ne veut pas dire qu’on veut le supprimer. D’autres amendements en discussion proposent un recentrage qui me paraît intéressant. Avis défavorable.

Mme Sabine Rubin. En quoi consiste ce recentrage ?

M. Joël Giraud. Je vous renvoie aux amendements que nous allons examiner, notamment à ceux qui portent sur le logement collectif.

Mme Sylvia Pinel. Je vous invite à regarder les chiffres de la construction entre 2014 et 2017 dans les zones très tendues, où le dispositif a montré son efficacité. Que la Cour des comptes puisse émettre un certain nombre de réserves sur son application dans certaines zones où des promoteurs malveillants l’utilisent à d’autres fins, je veux bien l’entendre et je suis d’accord pour qu’on améliore ce dispositif et qu’on le rende plus performant. Je ne peux en revanche laisser dire qu’il est inefficace.

M. Jean-Louis Bricout. Ce dispositif a en effet des vertus pour les zones tendues, mais il cause parfois certains dégâts ailleurs, car les gens qui ont de l’argent n’investissent pas forcément là où le besoin s’en fait sentir.

Mme Sabine Rubin. L’offre créée par ce dispositif ne représenterait que 10 % de la production totale de logements, ce qui n’est pas très efficace. En revanche, c’est très coûteux, puisque l’on estime à 7 milliards le coût du dispositif entre 2019 et 2035.

La commission rejette lamendement II-CF1464.

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Article additionnel après l’article 58
Prorogation jusquen 2022 de la réduction dimpôt pour la restauration immobilière dans certains quartiers anciens dégradés

La commission est saisie des amendements identiques II-CF1068 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1382 de Mme Émilie Cariou.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement vise à proroger jusqu’en 2022 la déclinaison du dispositif Malraux dans les zones d’habitat dégradé visées par le Programme national de requalification des quartiers anciens dégradés ou dans les quartiers faisant l’objet d’une convention pluriannuelle de renouvellement urbain.

Suivant lavis du rapporteur, la commission adopte les amendements identiques IICF1068 et II-CF1382 (amendement II-2572).

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Après l’article 58

La commission examine ensuite lamendement II-CF855 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Nous proposons de recentrer le dispositif Pinel sur les zones urbaines dites « zones U » dans les plans locaux d’urbanisme. Il s’agit de lutter contre l’artificialisation des sols, conformément à nos engagements qui sont, pour l’instant, étayés par trop peu de mesures concrètes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je tenais à signaler que trois amendements n’ont pas pu être examinés car leurs auteurs n’étaient pas là pour les défendre. C’est regrettable, car il s’agissait justement de modifier le dispositif Pinel en faveur de l’habitat collectif, ce à quoi j’étais favorable.

Quant à l’amendement de M. Orphelin, j’y suis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF855.

Elle examine les amendements II-CF940 et II-CF941 de M. Philippe Dunoyer.

Mme Lise Magnier. L’amendement II-CF940 vise à porter le plafond annuel d’investissements applicables par contribuable et par année d’imposition à 400 000 euros pour les investissements réalisés dans le secteur du logement intermédiaire en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, pour mieux y accompagner la construction de logements.

L’amendement II-CF941 vise à majorer de 11 points les taux de réduction d’impôt en faveur des investissements dans le secteur du logement intermédiaire réalisés dans ces mêmes territoires, en les portant respectivement à 34 % et 40 %, selon que l’engagement de location du logement porte sur six ou neuf ans.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il existe déjà quelques avantages complémentaires en la matière dans les territoires concernés. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements II-CF940 et IICF941.

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Article additionnel après l’article 58
Exclusion des installations de stockage dénergie recourant à des batteries du champ de la réduction dimpôt pour investissements productifs en outre-mer

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF1114 et IICF1113 de Mme Justine Benin, ainsi que lamendement II-CF898 de M. Philippe Dunoyer.

M. Jean-Paul Mattei. L’amendement II-CF1114 vise à intégrer les panneaux photovoltaïques dans le cadre du dispositif d’aide fiscale pour les territoires ultramarins. Une telle mesure s’inscrit pleinement dans la trajectoire outre-mer 5.0 promue par le Gouvernement, qui souhaite faire de ces territoires des régions à la pointe du développement durable et de la transition écologique et solidaire.

Quant à l’amendement II-CF1113, il tend à favoriser de nouveaux modes de stockage de l’énergie.

Mme Lise Magnier. L’amendement II-CF898 vise à rétablir les bénéfices fiscaux relatifs aux investissements dans le stockage photovoltaïque outre-mer.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable sur le photovoltaïque. En revanche, l’amendement II-CF1113 relatif au stockage me semble bienvenu. Sagesse.

M. le président Éric Woerth. Je partage l’opinion du rapporteur.

La commission rejette lamendement II-CF1114.

Elle adopte lamendement II-CF1113 (amendement II-2573).

En conséquence, lamendement II-CF898 tombe.

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Après l’article 58

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements II-CF1049 de M. Philippe Dunoyer et II-CF1489 de M. Olivier Serva.

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF333 et IICF334 de M. Erwan Balanant.

M. Erwan Balanant. L’amendement II-CF333 tend à aligner le régime des dons faits aux associations réalisant des actions concrètes pour venir en aide aux victimes de violences domestiques, en permettant une réduction d’impôt de 75 %. Il s’agit tout simplement de permettre aux donateurs de bénéficier de la même déduction que dans le cas des dons en faveur de la grande pauvreté. L’amendement s’inscrit au cœur de la grande cause du quinquennat et serait en parfaite cohérence avec la proposition de loi d’Aurélien Pradié.

L’amendement II-CF334 propose une expérimentation pour deux ans en la matière.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le sujet est délicat. Hier ont été dévoilées les propositions du Grenelle contre les violences conjugales. À ce stade, en l’absence d’analyse des effets de votre mesure, je vous suggère de retirer votre amendement pour le redéposer en séance, afin de discuter de ce sujet important avec le ministre.

M. Erwan Balanant. Je les retire, afin de bien positionner la mesure dans le dispositif global en discussion. Cela permettrait aux associations de recevoir des dons supplémentaires, mais également de communiquer sur leurs actions.

Les amendements II-CF333 et II-CF334 sont retirés.

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Article additionnel après l’article 58
Dégressivité du taux de la réduction dimpôt au titre des dons
pour le financement dune campagne électorale

La commission est ensuite saisie, en discussion commune, des amendements IICF1363 du rapporteur général et II-CF1394 de M. Éric Coquerel.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement vise à rendre dégressive la réduction d’impôt pour le financement des campagnes électorales. Il a été largement inspiré par un amendement d’Éric Coquerel déposé en première partie, qui était certes plus radical que le mien, mais dont je partageais la philosophie générale. Les dons consentis par une personne physique pour le financement de la campagne d’un ou plusieurs candidats ne peuvent excéder 4 600 euros et bénéficient d’une réduction d’impôt de 66 %. L’amendement rend dégressif le taux de cette réduction, ramené à 50 % pour la fraction des dons comprise entre 1 000 et 2 300 euros et à 33 % pour la fraction qui excède 2 300 euros. Cela me paraît plus juste, dans une perspective de moralisation de la vie politique.

M. le président Éric Woerth. Je ne crois pas que ce sont des critères moraux qui sont au fondement du dispositif existant.

Mme Sabine Rubin. L’amendement représente un pas. Les contribuables les plus modestes ne bénéficient de rien, étant donné qu’ils ne paient pas d’impôt. Pour aller encore plus loin et faire en sorte que même les personnes les plus modestes bénéficient de la mesure, l’idée serait de transformer la réduction d’impôt en crédit d’impôt. Nous le proposerons ultérieurement.

M. le président Éric Woerth. Il faut peut-être que la démocratie cesse de s’excuser sans arrêt de coûter un peu d’argent. Un don à une campagne électorale vaut bien un don à une association. Il n’y a pas de critères moraux là-dedans : c’est extrêmement transparent.

Mme Sabine Rubin. Il n’y a pas de critères moraux, vous avez raison. En revanche, certaines personnes vont soutenir un candidat simplement pour bénéficier d’une défiscalisation.

M. le président Éric Woerth. Mais non ! Ils le font parce qu’ils partagent ses idées !

Mme Véronique Louwagie. Je m’inquiète des conséquences possibles d’un tel dispositif. En diminuant le taux de la réduction d’impôt, n’allez-vous pas assécher les dons et priver des candidats moins fortunés de la possibilité de se présenter ? Votre dispositif va à l’encontre du principe d’égalité entre les citoyens. Nous savons bien qu’une campagne coûte cher. Sans dons, tous les Français ne pourront pas être candidats. C’est un très mauvais amendement, à mon sens.

M. François Pupponi. La démocratie a un coût. Il faut arrêter de faire croire que les donateurs cherchent seulement à profiter d’une réduction fiscale ; certains ont des convictions et des moyens et supportent des candidats. Une campagne électorale coûte cher, d’autant que nous ne sommes pas si bien remboursés que cela. Le risque, avec vos amendements, est de limiter la démocratie, en limitant la pluralité des candidats.

Mme Christine Pires Beaune. Je soutiens l’amendement du rapporteur général. La réduction d’impôt demeure : elle est seulement un peu allégée. Par ailleurs, je voudrais savoir si cette réduction d’impôt entre ou non dans le plafonnement global.

M. le président Éric Woerth. Vous parlez d’alléger un peu, mais il s’agit tout de même de diminuer par deux le pourcentage de la réduction d’impôt ! Ce n’est pas rien ! Si l’on n’assume jamais que tout cela a un coût, on finira par travailler pour rien. Chaque fois que nous avons voté de telles mesures, elles se sont retournées contre nous… L’enfer est pavé de très bonnes intentions.

Mme Christine Pires Beaune. Je suis d’accord avec vous pour dire que la démocratie a un coût et que le système actuel est bon. Les campagnes sont remboursées, pour peu que l’on atteigne un certain score, avec un plafond assez large.

Mme Sabine Rubin. Le problème n’est pas le coût de la démocratie. Nous proposons de mieux répartir les réductions d’impôt, et non pas de ne plus donner d’argent à la démocratie.

M. Jean-Paul Mattei. Je suis assez d’accord avec l’interprétation de Mme Louwagie. Seuls ceux qui en auront les moyens pourront faire des campagnes électorales. Par ailleurs, les dons sont déjà encadrés. Nous sommes en train de nous donner bonne conscience… Je ne voterai pas ces amendements.

M. Charles de Courson. Si c’était l’argent qui faisait les élections, cela se saurait !

M. Jean-Paul Dufrègne. Ça aide !

M. Charles de Courson. Il y a un plafond. Nous sommes remboursés dans la limite de 47,5 % de ce plafond. Tous les partis un peu organisés garantissent les prêts. Avec 47,5 %, on fait déjà une petite campagne. Si l’on peut mettre un peu de son argent personnel, avoir des amis et des soutiens, on y arrive. Votre amendement, madame Rubin, ne ferait que renforcer la ploutocratie, comme on disait au Grand siècle.

Mme Christine Pires Beaune. J’aimerais que nous réfléchissions à un engagement qui avait été pris par le Président Macron, pendant sa campagne, sur la banque de la démocratie. Ce qui m’a posé le plus problème, quand je me suis présentée, c’est de trouver une banque qui veuille bien me faire un prêt.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour répondre à la question de Mme Pires Beaune, la réduction n’entre pas dans le plafond des avantages fiscaux. Par ailleurs, mon amendement a une portée toute relative, puisque pour un don de 4 600 euros, la réduction d’impôt passera à 2 075 euros contre 3 036 euros aujourd’hui, et il ne changera rien pour la majorité des dons qui sont inférieurs à 1 000 euros.

M. le président Éric Woerth. C’est une pierre qui roule !

La commission adopte lamendement II-CF1363 (amendement II-2574).

En conséquence, lamendement II-CF1394 tombe.

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Après l’article 58

La commission examine lamendement II-CF1118 de M. Jean-Paul Lecoq.

M. Fabien Roussel. L’amendement nous vient de la Seine-Maritime, à la suite de la catastrophe de l’usine Lubrizol. Il vise à conserver jusqu’en 2024 le dispositif de crédit d’impôt permettant la réalisation de travaux prévus dans le cadre du plan de prévention des risques technologiques (PPRT), qui doit s’éteindre dans un an.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Dans l’annexe Voies et moyens, le coût global du crédit d’impôt pour dépenses d’équipement est estimé à 52 millions d’euros, mais la part spécifique aux PPRT n’est pas indiquée. Voyons l’année prochaine, puisque le dispositif doit expirer le 31 décembre 2020, et faisons une vraie évaluation du coût de votre amendement.

La commission rejette lamendement II-CF1118.

Elle est saisie de lamendement II-CF1372 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Nous avons déjà discuté de cet amendement en première partie. Il vise à introduire un crédit d’impôt « revenu climat », afin de créer un dispositif d’accompagnement et de redistribution centré sur les ménages les plus précaires et les classes moyennes inférieures, afin de contrer l’effet anti-redistributif de la fiscalité écologique.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Monsieur Orphelin, je vous avais dit deux choses : de le placer en deuxième partie, mais surtout d’attendre les résultats de la convention citoyenne pour le climat. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1372.

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Article additionnel après l’article 58
Rapport sur la pertinence des zonages pour lapplication du dispositif dinvestissement locatif dit Pinel et du prêt à taux zéro (PTZ)

La commission examine lamendement II-CF648 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. L’amendement vise à demander un rapport sur les zonages, afin de savoir où nous en sommes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne suis pas favorable à un rapport de plus sur le sujet. Nous avons un problème de chiffrage à la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), pour appeler un chat un chat. En effet, dès que l’on veut des informations un peu fiables, on ne les obtient jamais.

Mme Sylvia Pinel. Je tiens beaucoup à cette demande de rapport. On nous fait souvent le procès des différents dispositifs, que ce soit du prêt à taux zéro (PTZ) ou du dispositif d’investissement locatif dit Pinel. On ne peut pas souhaiter améliorer des dispositifs sans connaître la réalité du marché. Lorsque je suis arrivée au ministère du logement en 2014, j’ai revu le zonage, parce qu’il ne correspondait plus à la réalité du marché. Sur la base de cette refonte, j’ai ensuite créé le dispositif d’investissement locatif, afin de le cibler sur les zones tendues ayant un besoin de logements intermédiaires, lorsqu’il y avait un écart entre le logement social et le logement privé. J’ai fait de même avec le prêt à taux zéro dans l’ancien. Depuis 2014, le zonage n’a pas été revu. Or, dans certains territoires, il y a eu des évolutions : des tensions sont apparues à la suite de l’arrivée de certaines infrastructures ou, au contraire, une désertification. La définition du zonage est très importante, dans la mesure où elle détermine grandement la politique du logement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Eu égard aux arguments de Sylvia Pinel et parce que son groupe demande bien peu de rapports, je vais transformer mon avis défavorable en avis de sagesse.

Mme Émilie Cariou. Je suis favorable à une évaluation du Pinel et du PTZ. Mais cet amendement me paraît trop large. Peut-être serait-il possible de recentrer son périmètre avant la séance ? Il est nécessaire de disposer d’une évaluation sur le zonage pour l’année prochaine.

Mme Sylvia Pinel. L’intérêt de ce rapport serait précisément d’offrir une vision globale sur l’ensemble des dispositifs de la politique du logement. Pour qu’elle réussisse, il faut fluidifier les parcours. Or, si l’on regarde les choses catégorie par catégorie, on ratera notre cible. La réflexion doit être large.

M. le président Éric Woerth. Comme l’a dit le rapporteur général, nous avons du mal à obtenir des informations suivies, cohérentes et exploitables auprès de la DHUP. Il faudrait pouvoir y voir clair, de façon globale.

La commission adopte lamendement II-CF648 (amendement II-2575).

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Après l’article 58

Puis la commission examine lamendement II-CF721 de Mme Sylvia Pinel.

Mme Sylvia Pinel. L’amendement vise à ouvrir la zone B2 au bénéfice du dispositif Pinel, à titre expérimental, dans dix communes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Dans la mesure où un rapport va être rendu, sans doute n’est-il pas besoin d’ajouter une expérimentation. Je souhaite le retrait.

Lamendement II-CF721 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF7 de M. Marc Le Fur.

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Article additionnel après l’article 58
Rapport sur le crédit dimpôt pour lemploi dun salarié à domicile

Puis la commission examine lamendement II-CF47 de Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. L’amendement est en corrélation avec un amendement qui a été déposé sur la mission Travail et emploi, visant à rétablir l’exonération des cotisations sociales pour les aides à domicile, à la suite de l’engagement pris par le Premier ministre. C’est ce soir que l’article 79 va ainsi être supprimé. Convaincus qu’il faut regarder dans le détail ce qui se passe, nous demandons un rapport sur cette question, afin de statuer correctement l’année prochaine

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je pense que les éléments que vous demandez sont largement disponibles dans le rapport d’application de la loi fiscale (RALF).

Mme Émilie Cariou. Non !

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il me semble que si… Vous pourriez retirer votre amendement pour le déposer en séance.

Mme Émilie Cariou. Il s’agit d’une demande très exhaustive de documents sur les services à la personne. L’état déclaratif actuel mélange tous les services à la personne. Nous souhaitons voir plus clair sur un crédit d’impôt qui a explosé, pour coûter bientôt 5 milliards d’euros, et que les politiques publiques ne sont pas en mesure de piloter. Nous souhaitons obtenir la répartition des crédits par type de service, pour savoir comment la niche fiscale est utilisée.

Mme Christine Pires Beaune. Je vais soutenir l’amendement. Néanmoins, je trouve dommage que le rapport n’aille pas plus loin concernant les salariés à domicile et qu’il ne fasse pas de demande concernant les crédits d’impôt et les exonérations de charges, pour disposer d’une vision globale de tout l’emploi à domicile.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il y a une certaine incohérence à insister sur le fait qu’il faut accompagner les personnes à domicile, avant de reprocher le coût que cela représente. La prise en charge de la dépendance a un coût.

Mme Émilie Cariou. Il ne s’agit pas que de la dépendance !

M. Benjamin Dirx. Madame Dalloz, vous avez tout à fait raison quand vous parlez de la dépendance. L’un des problèmes, c’est que nous ne savons pas identifier son coût. Nous ne savons pas, dans cette niche fiscale qui coûte 4,7 milliards, combien vont au jardinier, combien à la femme de ménage, combien à la dépendance. La seule chose que nous savons identifier, c’est la garde d’enfant. Il est donc important de connaître ce qu’il en est, notamment pour aller encore plus loin dans les aides à la dépendance. Vous avez tout à fait raison, madame Dalloz, et c’est pour cela que vous voterez, j’en suis sûr, cet amendement.

M. le président Éric Woerth. Ce n’est qu’un rapport. Il serait en effet utile d’éclairer la situation.

Mme Christine Pires Beaune. Nous connaissons le coût des salariés pour le maintien à domicile des personnes dépendantes : 2,1 milliards.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Dans la mesure où c’est la rapporteure spéciale elle-même qui a présenté l’amendement, avis favorable ! (Sourires.)

La commission adopte lamendement II-CF47 (amendement II-2576).

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Article 59
Obligation de télédéclaration et de télépaiement de la taxe spéciale sur les conventions dassurances et des contributions assimilées

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article instaure l’obligation de télédéclarer et de télépayer la taxe sur les conventions d’assurance (TCA), diverses taxes assimilées à la TCA, la contribution forfaitaire annuelle sur les professionnels de santé et la taxe sur les contrats euro-croissance.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 123 de la loi de finances pour 2019 a supprimé, pour les contrats conclus à compter du 1er janvier 2019, l’exonération de TCA dont bénéficiaient les assurances en cas de décès souscrites en garantie du remboursement d’un prêt.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

En l’état du droit, le champ de la télédéclaration et du télérèglement obligatoire (A) est très étendu mais ne comprend pas diverses taxes spécifiques au secteur de l’assurance dont la taxe sur les conventions d’assurance (TCA), les taxes assimilées à la TCA, la contribution forfaitaire sur les professionnels de santé, et la taxe sur les contrats euro-croissance (B).

A.   Le champ de la télédéclaration et du télérèglement obligatoire

La télédéclaration est une procédure permettant de remplir ses obligations déclaratives fiscales sans produire de formulaire papier, par voie électronique.

Le télérèglement est une procédure qui permet de payer les impôts en ligne par internet ou par transmission de fichiers.

1.   La souscription obligatoire par voie électronique de certaines déclarations fiscales

L’article 1649 quater B quater du code général des impôts fixe la liste des déclarations qui doivent être souscrites par voie électronique. La liste est très large et vise les principales impositions dues par des professionnels. Doivent ainsi être souscrites par voie électronique :

– les déclarations d’impôt sur les sociétés et leurs annexes ;

– les déclarations de bénéfices industriels et commerciaux, de bénéfices non commerciaux et de bénéfices agricoles ainsi que leurs annexes ;

– les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, leurs annexes et les demandes de remboursement de crédit de cette taxe, ainsi que les déclarations de taxes assimilées aux taxes sur le chiffre d’affaires et leurs annexes ;

– les déclarations de cotisation sur la valeur ajoutée ;

– l’état récapitulatif des clients redevables de la TVA et établis hors de l’Union européenne auxquels un redevable de la TVA a fourni des services ;

– les déclarations de résultats des sociétés immobilières non soumises à l’impôt sur les sociétés ainsi que leurs annexes ;

– les déclarations ou relevés relatifs à certaines impositions dues sur les alcools, les boissons alcooliques et tabacs ;

– les déclarations relatives à l’impôt sur les maisons de jeux ;

– les déclarations relatives aux prélèvements sur les dividendes, aux intérêts des comptes courants d’associés et aux intérêts dus par les offices notariaux ;

– les déclarations de prélèvements et retenues à la source afférents aux dividendes, produits, intérêts ou certains titres dont les bénéficiaires n’ont pas leur domicile réel ou leur siège en France ;

– les déclarations récapitulatives de réductions et crédits d’impôts prévues en matière d’impôt sur les sociétés, de bénéfices industriels et commerciaux, de bénéfices non commerciaux et de bénéfices agricoles ;

– les déclarations relatives à la taxe sur la valeur vénale des immeubles possédés en France par des entités juridiques ;

– les déclarations de crédit d’impôt pour dépenses de recherche ;

– et les déclarations de taxe sur les salaires.

2.   Le télérèglement obligatoire de certaines impositions

L’article 1681 septies du code général des impôts fixe la liste des impositions qui doivent être acquittées par voie de télérèglement.

Cette liste comprend :

– l’impôt sur les sociétés, ses acomptes, ainsi que les impositions recouvrées dans les mêmes conditions ;

– la cotisation foncière des entreprises et ses taxes additionnelles ;

– la taxe sur les salaires ;

– les taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties et leurs taxes additionnelles et annexes pour les contribuables qui ont opté, pour ces taxes, pour le paiement auprès du service chargé des grandes entreprises ;

– et la cotisation sur la valeur ajoutée.

B.   Les taxes spécifiques dues par les sociétés d’assurance

Diverses taxes spécifiques dues par les sociétés d’assurance n’entrent pas, en l’état du droit, dans le champ d’application de la télédéclaration ou du télérèglement obligatoire.

Parmi elles figurent les taxes suivantes visées par le présent article :

– la taxe sur les conventions d’assurance (TCA) et trois types de contributions additionnelles (contributions additionnelles en faveur du fonds national de gestion des risques en agriculture – FNGRA, prélèvement en faveur du fonds Barnier et contribution forfaitaire annuelle pour le fonds de garantie des dommages consécutifs à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins –FAPDS) ;

– le prélèvement sur les sommes versées aux bénéficiaires d’assurance-décès ;

– et la taxe sur les contrats euro-croissance.

1.   La taxe sur les conventions d’assurance (TCA)

a.   Assiette et taux

La taxe sur les conventions d’assurance (TCA) a été instaurée par l’article 21 de la loi du 31 janvier 1944 ([205]).

Elle est régie par les articles 991 à 1004 du code général des impôts.

Article 991 du code général des impôts

Toute convention d’assurance conclue avec une société ou compagnie d’assurances ou avec tout autre assureur français ou étranger est soumise, quels que soient le lieu et la date auxquels elle est ou a été conclue, à une taxe annuelle et obligatoire moyennant le paiement de laquelle tout écrit qui constate sa formation, sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont, quel que soit le lieu où ils sont ou ont été rédigés, enregistrés gratis lorsque la formalité est requise.

La taxe est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l’assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l’assuré.

Son assiette est constituée par l’ensemble des sommes stipulées au profit de l’assureur, soit la valeur de la prime.

Son taux par défaut est de 9 %.

Plusieurs exceptions sont prévues faisant varier le taux applicable de 7 % (par exemple pour les assurances contre l’incendie relatives à des risques agricoles non exonérés) à 33 % (assurance obligatoire automobile).

Les tarifs sont réduits de moitié dans le Département de Mayotte.

Une quinzaine d’exonérations sont cependant prévues, étant précisé que l’article 123 de la loi de finances pour 2019 a supprimé, pour les contrats conclus à compter du 1er janvier 2019, l’exonération de TCA dont bénéficiaient les assurances en cas de décès souscrites en garantie du remboursement d’un prêt.

cas d’exonÉRATION DE LA TSCA

Nombre

Conventions exonérées

1

Réassurances

2

Assurances bénéficiant de l’exonération de droits d’enregistrement

3

Assurances sur corps, marchandises transportées et responsabilité civile du transporteur, des navires de commerce et des navires de pêche souscrits contre les risques de toute nature de navigation maritime ou fluviale

4

Assurances sur corps, marchandises transportées et responsabilité civile du transporteur, des aéronefs souscrits contre les risques de toute nature de navigation aérienne

5

Assurances sur les risques de gel et de tempêtes sur récoltes ou sur bois sur pied

6

Assurances sur marchandises transportées et responsabilité civile du transporteur des transports terrestres

7

Assurances des crédits à l’exportation

8

Garanties souscrites auprès d’entreprises d’assurances relatives aux fonds communs de créances

9

Assurances souscrites par le Centre national de transfusion sanguine

10

Assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur utilitaires d’un poids total autorisé en charge supérieur à 3,5 tonnes

11

Assurances couvrant les risques de toute nature afférents aux récoltes, cultures, cheptel vif, cheptel mort, bâtiments affectés aux exploitations agricoles et exclusivement nécessaires au fonctionnement de celles-ci

12

Assurances dépendance

13

Cotisations versées par les exploitants de remontées mécaniques dans le cadre du système mutualiste d’assurance contre les aléas climatiques

14

Assurances maladie assujetties à la taxe de solidarité additionnelle aux cotisations d’assurance maladie complémentaire

15

Assurances sur les installations d’énergie marines renouvelables

Source : commission des finances.

b.   Rendement et affectation

Le produit de la taxe est affecté aux départements et à la métropole de Lyon, à l’exception :

– d’une fraction affectée à la Caisse nationale des allocations familiales correspondant à une fraction du taux applicable aux conventions d’assurance en matière de véhicules terrestres à moteur ; le rendement prévisionnel de cette fraction est estimé à 1,046 milliard d’euros pour 2020 ;

– d’une fraction de 140 millions d’euros pour 2019 affectée à Action Logement Services (ALS) ; l’article 27 du présent projet de loi relève à 290 millions d’euros ce plafond d’affectation ;

– d’une fraction de 45 millions d’euros affectée au Conseil national des barreaux au titre des contrats d’assurance de protection juridique.

Sous déduction de ces diverses affectations, la part revenant aux départements et à la métropole de Lyon est d’environ 7,3 milliards d’euros.

Le rendement prévisionnel de la taxe s’élève ainsi à 8,7 milliards d’euros pour 2020.

affectation de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance

(en millions d’euros)

Année

2018

2019

2020

Départements et métropole de Lyon

7 295

7 295

7 295

Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)

1 025

1 030

1 046

Action Logement Services (ALS)

140

290

Conseil national des barreaux

45

45

45

Total Taxe sur les conventions dassurance

8 365

8 510

8 676

Source : d’après le tome I de l’annexe Évaluations des voies et moyens.

c.   Modalités de paiement

La date d’échéance des primes ou cotisations constitue le fait générateur de la taxe. Ainsi, la taxe est normalement liquidée et versée chaque mois, soit par l’assureur lui-même, soit par le courtier ou l’intermédiaire, soit par l’assuré lui-même lorsque l’assurance est souscrite directement à l’étranger auprès d’un assureur étranger n’ayant pas de représentant en France. La taxe est versée dans les quinze jours qui suivent la fin du mois considéré (article 385 de l’annexe III au code général des impôts).

Les redevables doivent s’acquitter de leur cotisation par virement lorsque son montant dépasse 1 500 euros conformément à l’article 1723 quindecies du code général des impôts.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, les sociétés relevant de la direction des grandes entreprises (DGE) peuvent également procéder à un télérèglement.

2.   Les taxes assimilées à la TCA

Plusieurs taxes sont assimilées à la TCA au regard du fait que leurs règles en matière de recouvrement sont les mêmes que celles applicables en matière de TCA et qu’elles sont spécifiques au secteur de l’assurance.

a.   Les contributions additionnelles en faveur du FNGRA

Le fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) a été institué afin de participer au financement des dispositifs de gestion des aléas climatiques, sanitaires, phytosanitaires et environnementaux dans le secteur agricole (article L. 361-1 du code rural et de la pêche maritime).

Il est financé notamment par des contributions additionnelles – régies par l’article L. 361-2 du code rural et de la pêche maritime – aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d’assurance couvrant :

– pour les exploitations agricoles conchylicoles ([206]), le risque incendie des bâtiments d’exploitation, des ateliers de triage et d’expédition, du matériel et des stocks, ainsi que les risques nautiques desdites exploitations ;

– pour les exploitations agricoles non conchylicoles, les dommages aux bâtiments et au cheptel mort et les risques de responsabilité civile et de dommages relatifs aux véhicules utilitaires.

L’article 1635 bis A du code général des impôts prévoit que ces contributions sont affectées au FNGRA dans la limite du plafond prévu par l’article 46 de la loi de finances pour 2012, soit 60 millions d’euros en l’état du droit. Le présent projet de loi ne prévoit pas de modifier ce plafond pour 2020. Selon les évaluations préalables du Gouvernement, les encaissements relatifs à ce prélèvement ont atteint 65,86 millions d’euros en 2018.

Ces contributions ont pour assiette la totalité des primes ou cotisations versées. Leur taux est fixé à 5,5 % pour les exploitations agricoles non conchylicoles et à 100 % pour les exploitations conchylicoles.

b.   Le prélèvement en faveur du fonds Barnier

L’article 13 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement a institué un fonds de prévention des risques naturels majeurs – ci-après « Fonds Barnier ».

Le Fonds Barnier est chargé de financer les dépenses liées à l’indemnisation des expropriations des biens exposés à ces risques, à la limitation de l’accès à ces biens et à leur démolition éventuelle.

Il est alimenté par un prélèvement prévu à l’article 1635 bis AD du CGI.

Ce prélèvement a pour assiette les primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie contre le risque de catastrophes naturelles.

Le taux de ce prélèvement, fixé par arrêté ([207]), est de 12 %, soit le taux maximal autorisé par l’article L. 561-3 du code de l’environnement.

Le prélèvement est affecté au Fonds Barnier dans la limite du plafond prévu par l’article 46 de la loi de finances pour 2012, soit 137 millions d’euros en l’état du droit. Selon les évaluations préalables du Gouvernement, les encaissements relatifs à ce prélèvement ont atteint 203,54 millions d’euros en 2018.

c.   Le prélèvement sur les sommes versées aux bénéficiaires d’une assurance vie.

Les sommes versées aux bénéficiaires d’une assurance-vie ne sont soumises aux droits de succession qu’à concurrence de la fraction des primes versées par l’assuré après l’âge de soixante-dix ans qui excède 30 500 euros.

Sous cette réserve, les capitaux versés aux bénéficiaires d’une assurance-vie ne sont pas frappés par les droits de succession.

En revanche, ils sont soumis – dès lors qu’ils résultent de versements postérieurs au 13 octobre 1998 – à un prélèvement spécifique institué par la loi de finances pour 1999, codifié à l’article 990 I du code général des impôts.

Le prélèvement a pour assiette les capitaux versés aux bénéficiaires, après application d’un abattement par bénéficiaire de 152 500 euros. La loi de finances rectificative pour 2013 a créé un abattement supplémentaire de 20 % pour les capitaux provenant des contrats « Vie génération » ([208]), qui s’applique sur la part transmise à chaque bénéficiaire avant l’abattement de 152 500 euros.

Son taux est progressif. Il est de 20 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire inférieure ou égale à 700 000 euros, puis de 31,25 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire excédant cette limite.

Le prélèvement est effectué directement par l’établissement financier.

Divers cas d’exonération sont prévus. Le conjoint survivant et le partenaire lié au défunt par un PACS sont exonérés de ce prélèvement, comme pour les droits de succession. Il est de même des personnes morales ou organismes bénéficiaires des dons et legs exonérés de droits de mutation à titre gratuit. Sont aussi exonérés du prélèvement les capitaux provenant de contrats d’assurance garantissant le versement du capital ou d’une rente viagère à un enfant infirme, ou encore de contrats d’assurance de groupe souscrits dans le cadre d’une activité professionnelle.

Le prélèvement doit être versé par les organismes d’assurance ou assimilés dans les quinze jours qui suivent la fin du mois au cours duquel les capitaux ont été versés aux bénéficiaires.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, les encaissements relatifs à ce prélèvement ont atteint 177,14 millions d’euros en 2018.

3.   La contribution forfaitaire annuelle pour le FAPDS

L’article L. 426-1 du code des assurances institue un fonds de garantie des dommages consécutifs à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins (FAPDS) afin de garantir l’indemnisation en responsabilité civile professionnelle des professionnels de santé libéraux lorsque les plafonds d’intervention de l’assureur sont dépassés ou quand la période de garantie est épuisée.

Il est financé par une contribution forfaitaire annuelle à la charge des professionnels de santé. Son montant est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de l’économie entre 15 et 25 euros par an et peut être modulé en fonction de la profession exercée.

Elle est recouvrée suivant les mêmes règles que la TCAS.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, les encaissements relatifs à cette contribution forfaitaire ont atteint 8,4 millions d’euros en 2018.

4.   La taxe sur les contrats euro-croissance

L’article 9 de la loi de finances rectificative pour 2013 ([209]) a créé le contrat d’assurance-vie « euro-croissance », un type de contrat qui se veut une alternative aux deux autres types de contrat, en euros et en unités de compte. Il repose sur le principe d’une garantie en capital (comme les fonds euros), qui ne s’applique qu’après un délai d’au moins 8 ans après la souscription du contrat (pour permettre des investissements sur des valeurs plus risqués).

Le contrat « euro-croissance »

Le fonds euro-croissance est défini juridiquement comme des « engagements donnant lieu à la constitution dune provision de diversification ». Ces engagements sont exprimés en euros et en parts de diversification. Pour la partie exprimée en euros, le capital ou la rente ne sont garantis (totalement ou partiellement) qu’à compter d’une échéance définie dans le contrat au moins égale à huit ans à compter du premier versement. Pour les engagements exprimés en « parts de diversification », l’assureur doit garantir une valeur minimale non nulle, en euros, de chaque part.

 

Les différents supports des contrats en assurance-vie qui préexistaient au contrat « euro-croissance »

– contrats en euros : à l’échéance du contrat, le souscripteur reçoit une somme égale aux primes versées, diminuées des frais de gestion et augmentées des produits capitalisés. Il n’est pas exposé au risque en capital ;

– contrats en unités de compte (actions, obligations, parts de SICAV, de FCP, de SCI, de SCPI, etc.) : à l’échéance du contrat, l’assureur garantit le nombre d’unités de compte mais pas leur valeur. Le souscripteur d’un contrat en unités de compte est exposé à un risque de placement ;

– contrats en euros diversifiés : les contrats en euros diversifiés créés en 2005 sont des contrats de groupe qui disposent d’une garantie de capital à leur terme et d’un moteur de performance : une partie de l’actif est placée en obligations pour préserver le capital garanti à terme, l’autre partie est investie en produits de diversification afin de dynamiser le rendement. L’assureur gère les fonds dans une optique de moyen long terme de 8 à 10 ans pendant lesquels le contrat n’est pas rachetable ;

– contrats à annuités variables : ces contrats multi-supports sont présentés comme de nouvelles solutions d’investissement. Des garanties particulières protègent le capital et assurent, en outre, un revenu viager minimum. Ce revenu peut être revalorisé selon les rendements obtenus.

Source : Rapport de la Cour des comptes, La politique en faveur de l’assurance-vie, janvier 2012, p. 20, 21 et 24.

Le législateur a prévu que les contrats euro-croissance pourront résulter de la transformation d’un contrat de capitalisation ou d’assurance-vie en cours, ce qui permet d’en conserver l’antériorité fiscale. Ainsi, la sortie de l’ancien contrat n’est pas considérée comme un dénouement et permet de reporter les plus ou moins-values latentes sur le nouveau contrat.

Ce dispositif de transformation, initialement prévu jusqu’à fin 2018, a été prolongé jusquà la fin de lannée 2021 ([210]).

En contrepartie de cet avantage, la transformation d’un contrat en contrat euro-croissance donne lieu à une taxe de 0,32 % conformément au IV de l’article 9 de la loi de finances rectificative pour 2013 ([211]).

Elle est exigible le premier jour du mois suivant chaque trimestre civil, au titre des primes réaffectées au cours dudit trimestre. Elle est déclarée et liquidée le mois suivant son exigibilité et est recouvrée et contrôlée dans les mêmes conditions que la taxe sur la valeur ajoutée.

Selon les évaluations préalables du Gouvernement, les encaissements relatifs à cette taxe ont atteint 0,41 million d’euros en 2018.

II.   Le dispositif proposé

A.   l’extension aux taxes spécifiques au secteur de l’assurance du champ de la télédéclaration et du télérèglement obligatoires

Le présent article porte sur les modalités de déclaration et de paiement de la taxe sur les conventions dassurances (TCA), des taxes assimilées à la TCA, de la contribution forfaitaire annuelle sur les professionnels de santé et de la taxe sur les contrats euro-croissance.

Le A du I du présent article complète l’article 1649 quater B quater du code général des impôts pour rendre obligatoire la télédéclaration de ces différents impôts.

Le B du I complète l’article 1681 septies du code général des impôts pour rendre obligatoire pour ces mêmes impôts le télérèglement.

Le C du I abroge en conséquence l’article 1723 quindecies du code général des impôts qui prévoit l’obligation du paiement par virement de la taxe sur les conventions d’assurance à partir de 1 500 euros.

Le II prévoit que la taxe sur les contrats euro-croissance est déclarée sur le formulaire utilisé en matière de taxe sur les conventions d’assurance.

Enfin, le III prévoit une entrée en vigueur à compter d’une date fixée par décret et au plus tard aux impositions dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2022.

B.   La poursuite de la modernisation des relations entre l’administration fiscale et les contribuables

Selon l’annexe Évaluations préalables, le dispositif proposé s’inscrit dans les « objectifs de dématérialisation fixés par le Gouvernement ». La télédéclaration permettra d’économiser 1 100 jours de travail, soit l’équivalent de 5 équivalents temps plein.

Le dispositif proposé permet aussi d’élargir le périmètre du télérèglement obligatoire à plus de 8 milliards d’euros supplémentaires de recettes fiscales.

Le Gouvernement a par ailleurs chiffré le gain procuré aux entreprises par la disparition du formulaire papier. Il estime à 450 000 euros l’économie permise sur l’affranchissement et le temps de remplissage des formulaires.

Ce dernier chiffre doit être pris comme un ordre de grandeur qui illustre le fait que la dématérialisation des déclarations et des paiements a également pour effet de procurer des gains aux contribuables.

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La commission adopte larticle 59 sans modification.

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Après l’article 59

La commission examine lamendement II-CF1121 de M. Philippe Dunoyer.

Mme Lise Magnier. Alors que la France compte le plus grand nombre de conventions fiscales bilatérales au monde, l’amendement vise à demander au Gouvernement un rapport remis au Parlement tous les cinq ans, afin d’analyser les moyens de préserver l’équilibre de l’assiette fiscale taxable en France, mais aussi dans les collectivités d’outre-mer compétentes en matière de fiscalité et liées à la France par une convention.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avant de me prononcer sur le fond, j’avoue mon scepticisme à inscrire une telle demande dans le code général des impôts. Qui plus est, pourquoi avoir choisi l’article sur le régime des sociétés étrangères contrôlées ? Retrait ou avis défavorable.

Lamendement II-CF1121 est retiré.

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Article additionnel après l’article 59
Instauration dun dispositif dautoliquidation de la taxe sur la valeur ajoutée pour les transferts de certificats de garantie dorigine et les garanties de capacité

La commission est saisie de lamendement II-CF1514 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon amendement vise à instaurer un mécanisme d’auto-liquidation de la TVA pour les transferts de certificat, afin de prévenir les risques de fraude.

La commission adopte lamendement II-CF1514 (amendement II-2577).

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Article additionnel après l’article 59
Transfert aux agences de leau de la perception du droit de timbre acquitté par les titulaires du permis de chasser

La commission examine les amendements identiques II-CF1110 du rapporteur général et II-CF723 de M. Martial Saddier.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement tend à organiser le transfert de la perception du droit de timbre acquitté par les titulaires du permis de chasser aux agences de l’eau.

M. Martial Saddier. La délivrance du permis de chasser débloque une redevance cynégétique, ainsi que des droits de timbre. L’article 27 du PLF prévoyant le recouvrement par les agences de l’eau de la seule redevance cynégétique, l’amendement vise à leur transférer la perception du droit de timbre, par cohérence. Il tend également à augmenter la contribution des agences de l’eau à l’Office français de la biodiversité (OFB) à due proportion du montant annuel du droit de timbre, à savoir environ 5,5 millions.

M. Charles de Courson. Je ne comprends pas cet amendement. Actuellement, les taxes cynégétiques vont aux fédérations départementales des chasseurs, n’est-ce pas ? On enlève donc des fonds à ces fédérations pour les donner aux agences de l’eau ?

M. le président Éric Woerth. Les agences de l’eau redistribuent l’argent à l’Office français de la biodiversité.

M. Martial Saddier. C’est seulement un changement de tuyau ! Auparavant, les redevances finançaient l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), qui a été intégré à l’OFB. C’est pourquoi il a été décidé que les agences de l’eau prélèveraient l’ensemble des redevances biodiversité, à l’exception – par oubli – du droit de timbre. L’ancien ONCFS, à l’intérieur de l’OFB, recevra le « même argent » qu’auparavant, par l’intermédiaire d’un seul collecteur, les agences de l’eau. N’ayez donc aucune inquiétude quant au financement des fédérations de chasse et de l’OFB !

M. le président Éric Woerth. Un financement direct à l’OFB serait quand même plus simple…

La commission adopte les amendements identiques II-CF1110 et II-CF723 (amendement II-2578).

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Article additionnel après l’article 59
Suppression de tarifs dérogatoires de la redevance pour pollution de leau
au titre de certains rejets en mer

La commission passe à lexamen des amendements identiques II-CF1109 du rapporteur général et II-CF722 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Sur le pourtour méditerranéen, les redevances de pollution de plusieurs entreprises avaient été allégées en échange d’un plan d’investissement ciblant les émissions polluantes, cofinancé par l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse. Or, alors que les entreprises ont tenu parole et que les pollutions sont passées sous les seuils définis par les objectifs initiaux, les exonérations partielles subsistent. L’amendement vise à les supprimer.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis favorable, étant donné que j’ai déposé le même amendement.

M. Charles de Courson. Quel sera le coût pour Alteo ? C’est bien cette entreprise qui exploitait de la bauxite et polluait la Méditerranée avec des boues rouges ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je n’ai pas le chiffre.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1109 et II-CF722 (amendement II-2579).

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Article additionnel après l’article 59
Extension du champ des redevances de leau dont la gestion peut être mutualisée au sein dune agence de leau

La commission examine les amendements identiques II-CF1096 du rapporteur général et IICF720 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Les six agences de l’eau prélèveront demain l’ensemble des redevances biodiversité. L’amendement vise à leur permettre de mutualiser et de mettre en œuvre un système unique de collecte nationale des redevances. À terme, une agence sera spécialisée dans le prélèvement des redevances, afin de rationaliser l’organisation.

M. le président Éric Woerth. Je me pose tout de même la question de la transparence des agences de l’eau vis-à-vis du Parlement… Localement, c’est trouble à tout le moins. Je ne suis pas sûr que la centralisation au sein du système des agences de l’eau soit une bonne nouvelle…

La commission adopte les amendements identiques II-CF1096 et II-CF720 (amendement II-2580).

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Après l’article 59

La commission examine les amendements II-CF1396 et II-CF1398 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. L’amendement II-CF1396 tend à renforcer la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, en portant à 150 %, au lieu de 80 %, la pénalité de majoration des droits frappant les individus qui s’essaient à des manœuvres frauduleuses ou à des abus de droit, la majoration actuelle n’étant pas dissuasive.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’amendement a déjà été rejeté, lors de l’examen de la loi relative à la lutte contre la fraude. Avis défavorable.

Mme Sabine Rubin. Certes, l’amendement avait déjà été examiné ; mais il nous semblait utile de l’étudier de plus près.

L’amendement II-CF1398 vise à augmenter les sanctions applicables aux intermédiaires complices de fraude fiscale. J’ai oublié les arguments que vous aviez avancés à l’époque, monsieur le rapporteur général, contre cet amendement. L’amende actuellement infligée aux intermédiaires coupables de prestations frauduleuses doit être portée à 50 % de l’ensemble des revenus tirés des prestations fournies. Une telle mesure, qui pénaliserait les complices, permettrait de lutter plus efficacement contre la fraude.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Déjà vu et déjà rejeté ! Avis défavorable.

Mme Sabine Rubin. Je le sais bien ! Mais quels sont vos arguments ?

Mme Émilie Cariou. Une loi entière a été dédiée à la lutte contre la fraude fiscale.

M. le président Éric Woerth. Ce n’était pas la première, d’ailleurs…

Mme Émilie Cariou. Nous avons renforcé toutes les sanctions, rendu automatiques les transmissions d’information auprès des parquets et créé une amende pour pénaliser les intermédiaires. Tout cela est en train d’entrer en vigueur. Je ne peux pas vous laisser dire que l’impunité règne, Mme Rubin.

M. le président Éric Woerth. Compte tenu du nombre de lois votées depuis dix ans sur le sujet, c’est presque un miracle qu’il y ait encore des fraudeurs !

Mme Sabine Rubin. Cela veut bien dire qu’il faut sans cesse faire des progrès. Nous vous proposions une piste pour progresser encore.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1396 et IICF1398.

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Article additionnel après l’article 59
Protection des agents de ladministration fiscale en charge des relations
avec les aviseurs fiscaux

La commission passe à lexamen des amendements identiques II-CF1332 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1334 de M. Xavier Roseren.

Mme Christine Pires Beaune. Mes trois prochains amendements sont issus de la réflexion menée lors de la mission d’évaluation, conduite en juin 2019 avec Mme Dalloz, M. de Courson, M. Roseren, M. Roussel, M. Ledoux et Mme Rubin, sur un dispositif instauré dans la loi de finances pour 2017 concernant les aviseurs fiscaux. Le présent amendement reprend la proposition numéro 4 du rapport visant à protéger les agents de la direction des finances publiques, en leur accordant, si besoin, l’anonymat grâce à l’attribution d’un numéro. Des agents nous ont fait part de menaces subies dans le cadre du dispositif actuel.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Excellent amendement anti-fraude ! Avis favorable.

M. Charles de Courson. Je tenais à préciser que je suis cosignataire de l’amendement, même si cela n’apparaît pas, à cause d’un petit problème.

M. le président Éric Woerth. Disons que vous y êtes favorable.

La commission adopte ces amendements identiques II-CF1332 et II-CF1334 (amendement II-2581).

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Après l’article 59

La commission étudie lamendement II-CF1395 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. L’amendement vise à instaurer une démarche préventive dans l’attribution des numéros de TVA pour lutter contre la fraude, à l’image de ce qui se fait en Belgique notamment. Lors de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude, madame la rapporteure avait répondu que l’administration était déjà en droit de procéder à cette petite enquête. Nous souhaitons la rendre obligatoire.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne souhaite pas que le contrôle soit rendu obligatoire. Cela serait complètement contre-productif, dans la mesure où le contrôle se concentre sur les opérateurs à haut risque, à moins de vouloir mettre un agent derrière chaque déclaration de TVA…

La commission rejette lamendement II-CF1395.

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Article additionnel après l’article 59
Codification et extension à la taxe sur la valeur ajoutée du dispositif relatif aux aviseurs fiscaux

La commission examine les amendements identiques II-CF1331 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1333 de M. Xavier Roseren.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement reprend deux propositions de la mission d’information sur les aviseurs fiscaux. Il vise à étendre le champ du dispositif d’indemnisation aux opérations de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée. En effet, dans la quarantaine de dossiers classés sans suite, avons-nous appris lors des auditions, sept l’ont été parce qu’ils avaient trait à la TVA. Je tiens à préciser que nous sommes allés, avec M. Roseren, au ministère pour travailler sur ces amendements. L’amendement vise également à codifier le dispositif dans le livre des procédures fiscales. Il ramène enfin à un an la fréquence de publication du rapport, au lieu de deux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cette série d’amendements est la démonstration qu’un très bon travail parlementaire produit des dispositifs efficaces.

M. le président Éric Woerth. Vous y êtes favorable, monsieur de Courson ?

M. Charles de Courson. Tout à fait, puisque nous l’avons élaboré collectivement ! Quant à la grande lutte contre la fraude, ne vous faites pas d’illusion : sans l’achat d’informations, vous n’y arriverez pas. Une telle possibilité existe déjà en matière douanière. Ces sommes sont exonérées d’impôt et versées dans la plus grande discrétion.

M. le président Éric Woerth. Tous les autres pays dédommagent en effet les aviseurs fiscaux.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1331 et IICF1333 (amendement II-2582).

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Article additionnel après l’article 59
Extension aux plus-values de cessions dactifs numériques de la procédure de demande de justifications dont le défaut peut entraîner la taxation doffice

La commission passe à lexamen des amendements identiques II-CF1384 de Mme Émilie Cariou et II-CF1564 du rapporteur général.

Mme Émilie Cariou. L’année dernière, nous avons créé un régime fiscal applicable aux particuliers réalisant des plus-values sur les cessions d’actifs numériques, notamment les crypto-actifs. En l’état actuel du droit, si un contribuable ne répond pas ou répond d’une façon insuffisante à une demande de l’administration, celle-ci ne dispose pas d’outils juridiques lui permettant de le taxer d’office ou de le mettre en demeure de répondre. C’est pourquoi l’amendement vise à compléter le champ d’application de l’article L. 16 du livre des procédures fiscales, afin de permettre à l’administration de formuler des demandes d’information contraignantes sur ces plus-values.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Mon amendement étant identique, l’avis est nécessairement favorable.

La commission adopte les amendements identiques II-CF1384 et II-CF1564 (amendement II-2583).

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Article additionnel après l’article 59
Suppression de la mission de recouvrement de diverses taxes par lOffice français de limmigration et de lintégration (OFII)

La commission est saisie de lamendement II-CF1173 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Cet amendement tend à retirer à l’Office français de l’immigration et de l’intégration la mission de collecter diverses taxes et droits.

Suivant lavis favorable du rapporteur général, la commission adopte lamendement II-CF1173 (amendement II-2584).

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Article additionnel après l’article 59
Modification du contenu de lannexe générale sur les instruments économiques, fiscaux et budgétaires au service de lenvironnement

Puis elle examine lamendement II-CF1351 de Mme Bénédicte Peyrol.

Mme Bénédicte Peyrol. L’amendement II-CF1351 vise à rationaliser différents documents dans la perspective de la présentation du « budget vert ». En effet, nous disposons désormais d’un jaune budgétaire qui présente de manière synthétique les dépenses consacrées à la transition écologique et les recettes de fiscalité écologique. Quant au « budget vert », il retracera les dépenses et les recettes défavorables à l’environnement. Je propose donc, par cet amendement, de fusionner ces deux documents à compter de l’an prochain.

M. le président Éric Woerth. C’est ce qui avait été annoncé par le Gouvernement, n’est-ce pas ?

Mme Bénédicte Peyrol. Oui.

Suivant lavis favorable du rapporteur, la commission adopte lamendement IICF1351 (amendement II-2585).

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Après l’article 59

Puis la commission examine en discussion commune les amendements IICF1465, IICF1466 et II-CF1467 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Sabine Rubin. Le rapport d’information du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la lutte contre la délinquance financière, présenté par MM. Ugo Bernalicis et Jacques Maire, préconise une politique interministérielle de lutte contre la délinquance économique et financière reposant sur un dispositif partagé de mesure et de suivi statistique et sur un document de politique transversale annexé au projet de loi de finances.

Par les amendements II-CF1465, II-CF1466 et II-CF1467, nous proposons donc que le Gouvernement remette au Parlement un rapport retraçant l’effort financier de l’État dans le domaine de la lutte contre les infractions économiques et financières sous la forme d’un jaune budgétaire, en lieu et place du Document de politique transversale (DPT) intitulé « Lutte contre l’évasion et la fraude fiscale ».

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce DPT ayant été créé par Mme Cariou, je vous propose de retirer ces amendements et d’y retravailler avec cette dernière, à moins qu’elle n’approuve l’extension proposée, que l’on peut comprendre.

Mme Sabine Rubin. N’étant pas la première signataire de ces amendements, je vais les maintenir, mais je ferai part de la proposition du rapporteur général à M. Bernalicis.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1465, IICF1466 et IICF1467.

Elle est ensuite saisie des amendements II-CF1457 et II-CF1458 de Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin. Ces amendements, qui reprennent une recommandation contenue dans le rapport d’Oxfam France intitulé « Impôt sur le revenu : la réforme qui valait 5 milliards », visent à renforcer la transparence concernant les bénéficiaires des niches fiscales portant sur l’impôt sur les sociétés et sur l’impôt sur le revenu.

En effet, selon la Cour des comptes, le montant des niches fiscales a augmenté de 6,7 milliards entre 2017 et 2018 et dépassait 100 milliards en 2018. Non seulement elles perdurent en dépit de leur inefficacité et de leur coût, mais l’obscurité qui les entoure soulève un problème de transparence. Nous souhaitons donc que la liste des principaux bénéficiaires de ces niches fiscales ainsi que les montants perçus soient rendus publics.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’article 32 de la loi de finances pour 1980 auquel vous faites référence n’est plus en vigueur. Par ailleurs, vous exprimez le souhait de connaître les bénéficiaires des dépenses fiscales. Or, le secret fiscal s’y oppose. Je vous suggère donc de retirer ces amendements ; sinon, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements II-CF1457 et IICF1458.

Puis elle examine lamendement II-CF1474 de Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin. Par cet amendement, nous proposons, pour assurer la clarté des comptes de l’État, que les engagements annuels ou pluriannuels relevant de partenariats public-privé (PPP) soient visibles et lisibles. En effet, divers rapports, notamment de la Cour des comptes, soulignent combien ces contrats conclus dans l’urgence pour de très longues périodes plombent les finances de l’État.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La clarté que vous réclamez existe déjà. En effet, en comptabilité générale, les engagements financiers de l’État en matière de PPP sont retracés à la ligne 11.2.2 du compte général de l’État. Quant aux PPP en cours de négociation à la date de clôture de l’exercice, ils sont mentionnés dans l’annexe 34 du compte général de l’État.

La commission rejette lamendement II-CF1474.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF961 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. Par cet amendement, qui reprend la proposition n° 10 de la mission d’information sur l’impôt universel, nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la possibilité de créer un registre financier unique au niveau mondial.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Si vous souhaitez que le Gouvernement prenne l’engagement d’accompagner la mise en œuvre d’un tel registre dans les instances internationales, je vous suggère de retirer l’amendement et de le redéposer en séance publique afin d’interroger le ministre sur ce point.

Lamendement II-CF961 est retiré.

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Article additionnel après l’article 59
Rapport dévaluation des effets de la fiscalité applicable aux transmissions de capitaux à raison du décès de lassuré dune assurance-vie

La commission examine lamendement II-CF1094 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Nous avons fait un certain nombre de propositions sur la question des transmissions et des successions, notamment sur l’avantage successoral des contrats d’assurance-vie. Cependant, nous avons bien compris que le débat était reporté à plus tard. Néanmoins, nous proposons, par cet amendement, de préparer ce débat en demandant au Gouvernement de remettre au Parlement, en 2021, un rapport sur l’impact économique de cet avantage successoral, dont le Conseil des prélèvements obligatoires déplore qu’on ne connaisse ni le coût pour les finances publiques ni le nombre des bénéficiaires.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Bien que je ne sois pas favorable de manière générale aux rapports, j’émets un avis favorable à cet amendement car, sur ce sujet, le manque d’informations est tel que c’est le seul moyen de faire progresser le débat.

La commission adopte lamendement II-CF1094 (amendement II-2586).

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Après l’article 59

Puis la commission est saisie des amendements II-CF1282 et II-CF1283 de M. Éric Coquerel.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

Les amendements II-CF1282 et II-CF1283 sont retirés.

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Article additionnel après l’article 59
Rapport sur le plafonnement des indemnisations versées aux aviseurs fiscaux

La commission examine lamendement II-CF1330 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement demande un rapport en vue d’étudier la proposition de notre mission d’information de supprimer le plafond applicable à l’indemnité versée aux aviseurs fiscaux, plafond dont je rappelle qu’il n’avait pas été voulu par le législateur.

Suivant lavis favorable du rapporteur général, la commission adopte lamendement II-CF1330 (amendement II-2587).

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Après l’article 59

Puis elle est saisie de lamendement II-CF1397 de M. Éric Coquerel.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La TVA, en particulier son poids pour les ménages, a fait l’objet d’études très nombreuses et documentées, notamment du Conseil de prélèvements obligatoires, de la Cour des comptes et de l’Inspection générale des finances. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1397.

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Article 60
Simplification du recouvrement de la TVA
à limportation auprès des entreprises

Résumé du dispositif et effets principaux

L’introduction de biens en provenance d’États tiers à l’Union européenne donne lieu à perception de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) par les services de la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), au moment du dédouanement de l’opération d’importation.

Les entreprises importatrices peuvent déduire cette TVA dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire auprès de la Direction générale des finances publiques (DGFiP).

Cette disjonction temporelle entre déclaration et déduction de la TVA, auprès de deux interlocuteurs, est source de difficultés pour les entreprises.

Le présent article simplifie le recouvrement de la TVA à l’importation en achevant le guichet unique de TVA pour les entreprises, auprès de la DGFiP.

En outre, de nouvelles règles pour désigner le redevable de la TVA à l’importation sont établies.

L’ensemble de ces dispositions sera effectif à compter du 1er janvier 2022.

Dernières modifications législatives intervenues

Le dispositif de paiement-déduction simultané à l’importation, du II de l’article 1695 du code général des impôts (CGI), a été introduit par l’article 52 de la loi n° 2014-1655 de finances rectificative pour 2014, puis modifié en dernier lieu par l’article 193 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

L’article 193 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a modifié le dispositif des régimes suspensifs en l’étendant aux produits pétroliers.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission des finances a adopté, à l’initiative du Rapporteur général, un amendement rédactionnel.

I.   le régime de la tva à l’importation emporte complexitÉ administrative et coÛts pour les entreprises

A.   la compétence de l’administration des douanes en matière de perception de la TVA à l’importation empÊche les entreprises de la déduire immédiatement selon le mécanisme de droit commun

Les échanges intracommunautaires s’effectuent au sein de l’Union européenne quand les échanges extracommunautaires résultent d’opérations avec les pays tiers : c’est seulement pour ces échanges avec un pays tiers que l’on retrouve, en droit fiscal, les notions « d’importation » et « d’exportation » ([212]).

1.   La TVA à l’importation

a.   Principe de la TVA à l’importation

L’introduction en France de biens en provenance de pays tiers à l’Union européenne donne lieu à perception de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) par le service des douanes, lors de l’importation.

Aux termes du I-2 de l’article 291 du code général des impôts (CGI), l’importation est constituée par :

– lentrée du bien sur le territoire de lUnion, lorsque ce bien est mis à la consommation en France – ou, éventuellement, placé sous un entrepôt fiscal : dans cette hypothèse, l’importation est effectuée en suspension de taxes, v. infra ;

– la mise à la consommation du bien en France précédemment placé sous l’un des régimes douaniers suspensif suivants : conduite en douane, installations de stockage temporaire, zone franche, entrepôt d’importation, admission temporaire en exonération totale de droits, transit.

Dès lors que le bien est considéré comme importé – et ne fait pas l’objet d’une exonération selon des dispositions particulières – la TVA s’applique, qu’il y ait ou non transfert de propriété et que l’opération soit faite, ou non, à titre onéreux.

Il est à noter que le lieu de dédouanement d’un bien en provenance d’un pays ou d’un territoire tiers, entré dans l’Union européenne par un autre État membre et à destination de la France, est laissé au choix de l’entreprise.

b.   Perception et recouvrement de la TVA à l’importation

La base d’imposition à l’importation, selon l’article 292 du CGI, est la « valeur définie par la législation douanière conformément aux règlements communautaires en vigueur ». Cette valeur, donnée par le code des douanes de l’Union, se fonde sur la notion de valeur transactionnelle, constituée par le prix facturé ([213]).

Lors de limportation, la TVA est acquittée auprès des services de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), sous réserve du bénéfice de la procédure d’autoliquidation (v. infra).

Ainsi, le premier alinéa de l’article 1695 du CGI dispose que « la taxe sur la valeur ajoutée est perçue, à limportation, comme en matière de douane ».

Symétriquement, l’article 285 du code des douanes dispose que : « ladministration des douanes est également chargée, sans préjudice du II de larticle 1695 du code général des impôts, de recouvrer et de faire garantir la perception des taxes sur le chiffre daffaires, des taxes intérieures prévues par la législation des contributions indirectes et de tous autres droits et taxes exigibles à limportation ou à lexportation ».

Contrairement à la TVA intracommunautaire, la TVA à limportation est due par le destinataire réel de la marchandise, mentionné sur la déclaration d’importation. Toutefois, cette taxe est solidairement due par le déclarant en douane qui agit dans le cadre d’un mandat de représentation indirect du destinataire réel.

Les opérateurs qui sont établis dans un pays tiers n’ayant pas conclu de convention d’assistance au recouvrement des créances fiscales avec la France sont tenus, en application de l’article 289 A du CGI, de désigner et de faire accréditer auprès de l’administration un représentant fiscal chargé d’accomplir à leur place les formalités déclaratives et de paiement de la TVA à l’importation.

Les entreprises importatrices peuvent déduire la TVA, dans les conditions de droit commun, sous réserve que les documents justificatifs de la perception de la TVA les désignent comme destinataires réels des biens au titre desquels ils revendiquent la déduction. Cette déduction – soit par imputation, soit par remboursement – est ainsi opérée au vu du document d’importation, d’un extrait de déclaration, voire d’une facture datée et signée du commissionnaire en douane.

En revanche, cette déduction s’effectuant dans les conditions de droit commun, cest auprès de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) que les entreprises exportatrices qui ne bénéficient pas du régime dautoliquidation doivent opérer cette déduction.

De fait, ces entreprises sont soumises à des formalités duales, auprès dadministrations différentes  dédouanement par la DGDDI, déduction auprès de la DGFiP ; cette disjonction temporelle est source de décalages de trésorerie.

En 2018, 6,7 milliards de TVA à limportation ont été perçues par la DGDDI (en baisse de 8,2 % par rapport à 2017), pour 10,4 milliards de TVA auto-liquidée (v. infra([214]).

c.   Contentieux de la TVA à l’importation

Pour rappel, le contentieux de la TVA relève – par exception au sein des impositions indirectes ([215]) – de la compétence du juge administratif ([216]), après exercice d’un recours administratif préalable ([217]).

Néanmoins, aux termes de l’article 1790 du CGI, « les infractions commises en matières de taxes sur le chiffre daffaires et de taxes assimilées perçues à limportation sont punies comme en matière de douane ».

L’article L 234 du livre des procédures fiscales (LPF) précise que « les infractions relatives à lapplication des taxes sur le chiffre daffaires et taxes assimilées à limportation sont poursuivies et jugées selon la procédure et par les tribunaux compétents en matière douanière ».

Il résulte de ces dispositions que lensemble des règles se rapportant au contentieux douanier est applicable au contentieux de la TVA perçue à limportation.

Par conséquent, les recours exercés en matière de TVA à l’importation, dont la compétence relève de la DGDDI, échoient aux tribunaux de l’ordre judiciaire ([218]).

2.   Divers régimes viennent corriger cette dualité de compétence entre la DGDDI et la DGFIP

Des régimes spécifiques ont été créés pour faciliter les conditions d’activité d’opérateurs à l’import-export.

a.   L’achat en franchise de TVA de l’article 275 du CGI

Selon l’article 275 du CGI, lachat en franchise permet à des assujettis de recevoir ou d’importer en franchise de TVA des biens qu’ils destinent à une livraison :

– à l’exportation ;

– exonérée en vertu du I de l’article 262 ter du CGI, c’est-à-dire s’agissant d’une livraison intracommunautaire ;

– dont le lieu est situé sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne en application des dispositions de l’article 258 A du CGI, qui concerne les ventes à distance dont le lieu n’est pas réputé se trouver en France ;

– située hors de France en application du III de l’article 258 du CGI, qui vise les livraisons de gaz et d’électricité ainsi que le montage d’installations dont le lieu est situé dans un autre État membre de l’Union européenne.

Pour bénéficier de ces dispositions, les intéressés doivent, selon les cas, adresser à leurs fournisseurs ou remettre au service des douanes une attestation ou un avis d’importation dit « A12 » – si les biens commandés sont exportés hors de l’Union européenne – , visée par le service des impôts dont ils relèvent, certifiant que les biens sont destinés à faire l’objet – en l’état ou après transformation – d’un type de livraison prévu par l’article 275 du CGI. Cette attestation doit également comporter l’engagement d’acquitter la TVA au cas où les biens ne recevraient pas la destination qui a motivé une telle franchise.

Ce régime permet donc de dispenser les contribuables qui projettent de vendre hors de France une marchandise importée, du paiement et de la déclaration de TVA auprès du centre des impôts. De telles entreprises peuvent donc facturer leurs clients au prix hors taxe.

Ce régime s’applique également aux organismes sans but lucratif dont la gestion est désintéressée, qui exportent des biens à l’étranger dans le cadre de leur activité humanitaire, charitable ou éducative.

L’achat en franchise de TVA est destiné à alléger la trésorerie des exportateurs. Il convient néanmoins de noter que cette possibilité est limitée à un certain contingent, puisque le montant des achats en franchise ne peut excéder la valeur des exportations – et livraisons intracommunautaires – des biens effectuées au cours de l’année N – 1 ; si, au cours d’une année, l’entreprise atteint le contingent annuel autorisé, le bénéfice d’achat en franchise de TVA ne s’applique plus, et les achats supplémentaires sont soumis à la taxe : la taxe grevant ainsi les achats pourra être récupérée par imputation auprès du client ou, le cas échéant, par remboursement auprès de l’administration fiscale.

b.   Le régime douanier 42

Le régime douanier 42 est un mécanisme auquel recourt un importateur au sein de l’Union européenne pour obtenir une exonération de TVA.

Déterminé au III du 4° de l’article 291 du CGI, il vise « les importations de biens expédiés ou transportés en un lieu situé sur le territoire dun autre État membre de la Communauté européenne et qui font lobjet par limportateur dune livraison exonérée en vertu du I de larticle 262 ter ».

En d’autres termes, il s’applique lorsque les marchandises importées de l’extérieur de l’Union au sein d’un État membre sont destinées à être transportées dans un autre État membre. Dans cette situation, la TVA est due dans l’État membre de destination.

Pour bénéficier de ce régime, l’assujetti importateur doit se conformer aux conditions prévues à l’article 96 P de l’annexe III du CGI. Il doit ainsi fournir, au moment de l’importation :

– son numéro d’identification à la TVA ;

– le numéro d’identification à la TVA attribué dans un autre État membre à l’assujetti auquel les biens sont livrés en exonération de TVA ;

– un élément de preuve justifiant que les biens importés sont destinés à être transportés ou expédiés vers un autre État membre.

Ce régime a pour objet de faciliter, pour les assujettis à la TVA, les opérations de récupération de TVA liées à la constitution d’un crédit de taxe résultant de la TVA exigible lors d’une importation. À ce moment-là, la livraison intracommunautaire immédiatement subséquente ne fait donc pas l’objet d’un paiement de TVA par le vendeur.

En plaçant limportation sous le régime 42, la TVA dans lÉtat membre de dédouanement est suspendue.

c.   L’autoliquidation de la TVA à l’importation ou le
« paiement-déduction » simultané

Par exception, certains opérateurs peuvent, sur autorisation du service des douanes, autoliquider la TVA due au titre des opérations d’importation sur leur déclaration de chiffre d’affaires. Cette possibilité a été ouverte par l’article 87 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([219]), codifiée au II de l’article 1695 du CGI.

L’autoliquidation de la TVA à l’importation consiste, pour l’opérateur, à déclarer et déduire la TVA due au titre de ses importations – ainsi que sur celle due au titre de la sortie d’un régime suspensif – sur sa déclaration de TVA « CA3 » déposée mensuellement ou trimestriellement auprès de la direction générale des finances publiques (DGFiP). Le paiement et la déduction de la TVA, par un simple jeu décritures comptables, sont donc « simultanés ».

En application du II larticle 1695 du CGI, cette exception requiert des conditions, qui doivent être cumulativement remplies :

– avoir effectué au moins 4 importations au cours des 12 mois précédant la demande ;

– disposer d’un système de gestion des écritures douanières et fiscales permettant le suivi des opérations d’importation ;

– justifier de l’absence d’infractions graves ou répétées aux dispositions douanières et fiscales ;

– justifier de sa solvabilité financière permettant de s’acquitter de ses engagements au cours des 12 mois précédant la demande.

Selon l’évaluation préalable du présent article, il a été constaté que 59 % de la TVA acquittée en 2018 au titre des opérations d’importation l’avaient été en utilisant le mécanisme de paiement-déduction simultané.

Au 31 janvier 2019, environ 9 000 assujettis avaient opté pour ce mécanisme.

B.   l’existence de deux guichets en matière de tva à l’importation engendre coûts de trésorerie et complexité administrative pour les entreprises concernées

Pour les opérations internes et les opérations intracommunautaires, la TVA est déclarée et acquittée par une entreprise auprès du service des impôts dont elle dépend : chaque mois ou chaque trimestre, cette société récapitule sur sa déclaration de chiffre d’affaires le montant de l’ensemble de la TVA due au titre du mois précédent – sur ses ventes – ainsi que le montant de celle qu’elle a le droit de déduire – celle facturée sur ses achats – puis, sur cette base, acquitte la différence. Ce paiement et cette déduction simultanés limitent les charges de trésorerie et les décaissements multiples entre l’administration et l’entreprise.

Comme il a été évoqué, la situation est sensiblement différente pour les importations : la TVA est acquittée auprès du service des douanes, puis déduite auprès du service des impôts.

Ce double guichet représente des coûts administratifs et une charge de trésorerie pour les entreprises, ce qui explique la mise en place de dispositifs simplificateurs : achats en franchise, régime douanier 42, paiement-déduction simultanés. Pour autant, ces mécanismes sont, en pratique, réservés à des acteurs de taille importante, ayant une forte exposition au commerce international, d’où une double inégalité en la matière selon la taille de la société : plus la société est de taille modeste, plus elle devra assumer le décalage, sur sa trésorerie, lié au double guichet de la TVA à limportation.

Dans le cadre du Comité action publique 2022, il a été décidé d’assurer l’unification, autant que possible, des guichets auprès desquels les entreprises doivent acquitter leurs impôts.

Du point de vue des entreprises, la mise en place d’un guichet unique est de nature à alléger leurs charges administratives du fait de la présence d’un interlocuteur unique pour la gestion de l’ensemble de la TVA. En l’espèce, cette unification permettrait la suppression du décalage temporel, nuisible à la trésorerie, entre acquittement et déduction de la TVA.

Du point de vue de l’administration, une telle unification du recouvrement de la TVA est de nature à permettre aux différents services de se concentrer sur leur cœur de métier respectif : la DGFiP sur le recouvrement de l’impôt et l’administration des douanes sur ses missions de contrôle matériel. En cela, l’existence d’un guichet unique pour la gestion d’un même impôt peut contribuer à lutter plus efficacement contre la fraude.

II.   la compétence de la dgfip en matière de perception de la tva à l’importation simplifie la gestion de la tva pour les entreprises

A.   le régime de la tva à l’importation est substantiellement modifié

1.   De nouvelles règles pour désigner le redevable de la TVA à l’importation

Les dispositions de l’article 293 A du CGI, qui désignent le redevable de la taxe afférente à l’importation, sont modifiées par l’article 53 du présent projet de loi de finances, à compter du 1er janvier 2021, afin de rendre redevable de la TVA les plateformes facilitant les ventes à distance de biens importés ou les livraisons de biens dans l’Union européenne par un assujetti non établi dans l’Union.

Ces dispositions seront à nouveau modifiées, à compter du 1er janvier 2022, par le présent article.

Ainsi, il est prévu que le redevable de la taxe sera :

– la personne qui réalise la livraison, lorsque le bien fait l’objet d’une livraison située en France ou d’une vente à distance de biens importés, expédiés ou transportés vers un autre État membre ;

– la plateforme assujettie qui réalise la livraison, lorsque le bien fait l’objet d’une vente à distance de biens importés autres que celles mentionnées au paragraphe précédent ;

– dans les autres situations, le destinataire des biens indiqué sur la déclaration d’importation.

Par dérogation, il sera prévu, pour certaines personnes, la possibilité d’opter pour devenir redevable de la taxe due à l’importation. Ainsi, conformément à l’article 293 A quater créé par le présent article, pourront opter pour ce régime de redevabilité :

– lorsque le bien fait l’objet d’une vente à distance de biens importés, l’assujetti réalisant cette livraison ; ou,

– dans les autres situations, tout assujetti réalisant une activité économique pour les besoins de laquelle l’importation est réalisée.

2.   Un transfert de compétence de la DGDDI à la DGFIP qui refonde le régime et le contrôle de la TVA à l’importation

a.   Un transfert partiel de compétence en matière de TVA à l’importation de la DGDDI à la DGFiP

Le N du I du présent article supprime, en matière de TVA à l’importation, la compétence de la DGDDI pour les assujettis.

La DGDDI demeure en revanche compétente pour les non assujettis qui réalisent de telles opérations (v. infra).

Ainsi, la TVA due à limportation, ainsi que celle due lors de la sortie d’un régime douanier ou lors de la sortie ou du retrait de l’autorisation d’ouverture d’un régime fiscal suspensif, sera gérée comme la TVA de droit commun,
cest-à-dire déclarée, acquittée et déduite auprès du service de la DGFiP dont relève la société redevable.

b.   La suppression du dispositif d’autoliquidation de la TVA à l’importation

Le 2° du N du I du présent article supprime le dispositif d’autoliquidation de la TVA à l’importation, qui devient sans objet du fait de la compétence attribuée à la DGFiP, au 1er janvier 2022, en matière de TVA à l’importation.

c.   La déductibilité, dans les conditions de droit commun, de la TVA acquittée par les redevables eux-mêmes pour les importations ou les sorties de régimes suspensifs

Le mécanisme de la déductibilité de la TVA pour les importations ou les sorties de régimes suspensifs s’effectueront dans les conditions de droit commun. À cette fin, le B du I du présent article modifie l’article 271 du CGI.

d.   La compétence des juridictions administratives, et non plus judiciaires, pour le contentieux du contrôle de la TVA à l’importation

La compétence de la DGFiP en matière de TVA à l’importation, qui est alignée sur le droit commun, emporte mécaniquement compétence des juridictions administratives. En dernier ressort, la compétence ratione materiae bascule donc de la Cour de cassation au Conseil d’État.

3.   Des éléments maintenus de compétence de l’administration des douanes en matière de TVA à l’importation

a.   En matière de détermination de la base d’imposition à la TVA des opérations d’importation

Conformément à l’article 292 du CGI dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 2020, la base d’imposition des opérations d’importation continuera d’être « constatée par ladministration des douanes et des droits indirects ».

Le I du présent article ajoute à cette rédaction que l’administration des douanes possède, en la matière, « des pouvoirs prévus par le code des douanes pour létablissement, le recouvrement et le contrôle des droits de douane ».

b.   En matière de perception de la TVA due lors des importations de biens pour lesquelles le redevable est une personne non assujettie à la TVA

Le 1° du I de l’article 1695 du CGI, dans sa version en vigueur au
1er janvier 2021, dispose que la taxe sur la valeur ajoutée est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les droits de douane.

Le N du I du présent article complète cet alinéa en le limitant aux opérations pour lesquelles « le redevable est une personne non assujettie ».

Pour rappel est assujetti à la TVA, au sens de l’article 256 A du CGI, toute personne qui exerce de façon indépendante une activité économique, quels qu’en soient les buts ou les résultats ([220]).

Ainsi, un particulier qui importe un bien en France pour sa consommation personnelle devra s’acquitter de la TVA, qui sera perçue par l’administration des douanes.

B.   L’impact BudgÉtaire et Économique

1.   Un effet positif pour les entreprises qui importent

Les assujettis concernés par la TVA à l’importation pourront désormais acquitter et déduire la TVA au cours d’une opération comptable unique, auprès de la DGFiP, dans la déclaration mensuelle de chiffre d’affaires.

Cette opération unique empêche les décaissements successifs et les décalages de trésorerie, ce qui est favorable aux entreprises.

La nouvelle compétence de la DGFiP en la matière est de nature à simplifier les interactions entre les entreprises et l’administration fiscale : la DGFiP sera l’interlocuteur unique en matière de perception de la TVA à l’importation.

Enfin, la compétence de la DGFiP, qui emporte compétence des juridictions administratives, est favorable à l’assujetti justiciable. Le « plein contentieux ([221]) » fiscal ne se borne pas à annuler la décision de l’administration fiscale et à renvoyer le requérant devant l’administration pour qu’elle tire les conséquences de cette annulation. Ainsi, le juge administratif peut lui-même prononcer la décharge de l’imposition, sa réduction, voire permettre au contribuable de bénéficier d’un droit à déduction.

2.   Une administration des douanes recentrée sur ses missions de contrôle

La Cour des comptes, dans un rapport consacré à l’action de l’administration des douanes de janvier 2015, relevait que la DGDDI, confrontée à des « limites dans le contrôle du commerce déclaré, a tendance à ne pas faire de la lutte contre les fraudes aux droits et taxes, en particulier à la TVA, un objectif de premier plan, dautant que ses résultats en la matière apparaissent modestes ; elle préfère corrélativement mettre laccent sur la lutte contre la contrebande, qui donne les résultats les plus tangibles, et peut le plus immédiatement justifier son existence ou le besoin de moyens » ([222]).

Aussi, la présente refonte du régime de la TVA à l’importation est de nature à recentrer la DGDDI sur ses missions naturelles, de contrôle, et non de recouvrement.

Cette généralisation d’un paiement et d’une déduction simultanés en matière de TVA à l’importation achève la mise en place du guichet unique de TVA pour les entreprises.

Cette évolution implique des investissements substantiels, pour faire évoluer les systèmes déclaratifs, et développer et sécuriser les échanges automatisés d’informations entre les services fiscaux et les services douaniers. Ces éléments justifient une entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2022.

Le présent projet de loi de finances, au sein de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », prévoit un accroissement des crédits destinés à de telles missions. Ainsi, 4,9 millions d’euros – en autorisations d’engagement – seront alloués à l’investissement interne nécessaire à la qualité du dédouanement, afin d’adapter les services d’information aux réformes de la TVA.

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La commission adopte lamendement rédactionnel II-CF1566 de M. Joël Giraud (amendement II-2588).

Puis elle adopte larticle 60 ainsi modifié.

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Après l’article 60

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF9 de M. Marc Le Fur et II-CF1059 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. L’amendement II-CF1059 a trait à la première recette fiscale de l’État : la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Celle-ci est payée sur la quasi-totalité des biens et services achetés, mais elle frappe également certaines taxes acquittées par les consommateurs, principalement sur l’énergie ; je pense, par exemple, à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ou à la contribution au service public de l’électricité. L’an dernier, les consommateurs ont ainsi payé 4,6 milliards au titre de cette taxe sur la taxe.

Les montants en jeu sont d’autant plus inacceptables qu’ils concernent des dépenses contraintes. De fait, les ménages n’ont pas la possibilité d’échapper à la hausse des prix de l’énergie : se chauffer ou se déplacer ne relève pas d’un choix mais de la nécessité. Qui plus est, la TVA sur les taxes ne sert en aucun cas à financer la transition vers la sobriété énergétique, puisque son produit est versé au budget général de l’État sans être orienté vers des dispositifs destinés à accompagner les consommateurs vers d’autres choix énergétiques.

Par cet amendement, nous proposons de mettre fin à cette double peine en introduisant dans le code général des impôts l’article 267 ter qui exclut de la base d’imposition de la TVA les taxes pour la fourniture d’électricité, de gaz et d’eau.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’article 267 du code général des impôts est en réalité une traduction de l’article 78 de la directive 2006/112/CE, qui s’impose aux États membres. Ainsi, adopter votre amendement supposerait que l’on modifie préalablement le droit européen. Je vous suggère donc de le retirer.

M. Fabrice Brun. Je maintiens l’amendement, car il s’agit d’une véritable question et les montants en jeu sont importants.

La commission rejette successivement les amendements II-CF9 et IICF1059.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF1078 de M. Marc Le Fur.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Demande de retrait. Le Gouvernement va procéder à une mention au Bulletin officiel des finances publiques, mention qui paraît suffisante et qui satisfera l’amendement.

La commission rejette lamendement II-CF1078.

Puis elle examine lamendement II-CF1359 de Mme Patricia Lemoine.

Mme Patricia Lemoine. Dans son rapport de 2019, la Cour des comptes relève un certain nombre de dépenses fiscales au montant particulièrement élevé et à l’efficacité discutable, dont le taux de TVA réduit de 5,5 % sur les travaux d’amélioration de la qualité énergétique des locaux à usage d’habitation achevés depuis plus de deux ans ainsi que sur les travaux induits qui leur sont indissociablement liés.

Selon la Cour des comptes, ce dispositif représente une dépense de plus de 3 milliards en 2019. Or, souligne-t-elle, il est matériellement difficile de mesurer l’efficacité de ce dispositif de TVA à taux réduit au regard des objectifs affichés. En effet, outre le fait qu’aucun véritable contrôle n’est exercé pour vérifier le gain énergétique concret permis par les travaux effectués, aucune étude sérieuse sur l’efficacité du dispositif n’a été réalisée depuis son entrée en application.

Cet amendement a donc pour objet de rehausser, à compter du 1er janvier 2021, le taux de TVA de 5,5 % à 10 %, dans un premier temps, comme l’a recommandé notamment la direction de la législation fiscale (DLF).

M. le président Éric Woerth. Il est rare que l’on demande l’augmentation d’un taux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Votre amendement rapporterait 2 milliards à l’État, ce dont je vous félicite. Toutefois, je doute que la DLF ait fait une telle recommandation, car elle n’a pas à formuler ce type de préconisations. En tout état de cause, compte tenu du signal qu’une telle mesure enverrait aux citoyens et aux entreprises du secteur, je vous suggère de retirer l’amendement ; sinon, avis défavorable.

Lamendement II-CF1359 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1077 de M. Marc Le Fur.

Puis, suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements II-CF58 et II-CF60 de Mme Catherine Osson.

Lamendement II-CF1360 de Mme Patricia Lemoine est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF61 de Mme Catherine Osson et II-CF1358 de Mme Patricia Lemoine.

Mme Patricia Lemoine. Dans l’un de ses rapports, la Cour des comptes relève qu’en Corse, trois taux de TVA différents s’appliquent aux alcools : un taux de 0 % pour les vins produits en Corse et vendus directement aux consommateurs, un taux de 10 % pour les boissons alcoolisées à consommer sur place et un taux de 20 % pour les alcools autres que le vin corse vendus directement aux consommateurs.

L’amendement II-CF1358 a pour objet d’aligner progressivement la fiscalité de l’alcool en Corse sur le taux de 20 % appliqué en France continentale. Je rappelle, à cet égard, que l’article 63 du projet de loi de finances tend à aligner la fiscalité appliquée au tabac en Corse sur celle qui a cours en France continentale.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Nous augmentons déjà la fiscalité sur le tabac à l’article 63. Alcool, tabac : ne manque que la charcuterie pour que la trinité de la santé publique soit complète… Plus sérieusement, le taux réduit de TVA a, en l’espèce, une double justification : d’une part, il compense les sujétions liées à l’insularité ; d’autre part, il permet de soutenir la petite production locale des vins et bières corses. Avis défavorable.

M. Michel Castellani. Cette offensive est totalement injustifiée. La viticulture corse a failli disparaître à plusieurs reprises : d’abord, lorsque le monde rural corse s’est effondré de manière dramatique et que la Corse a perdu la moitié de sa population ; ensuite, lorsque des abus ont été commis en matière de chaptalisation après la guerre d’Algérie. Depuis, des efforts considérables ont été consentis pour améliorer la qualité de ces produits. Des centaines de personnes y travaillent très dur et nous écoutent avec inquiétude en se demandant à quelle sauce elles vont être mangées.

Les allégements en question correspondent à de nombreux surcoûts. Ainsi, il n’existe pas, en Corse, de sites de production de bouteilles, ni de grands entrepôts, ni de marché de l’occasion. Les intrants y coûtent beaucoup plus cher. Bref, les entreprises corses ne sont pas sur un pied d’égalité avec leurs concurrentes sur le continent. Je transmettrai aux auteurs de l’amendement le rapport de Goodwill Management, qui estime que le surcoût lié à l’insularité représente 9 % du chiffre d’affaires. Toutes les entreprises corses sont concernées. Plutôt que de les pénaliser, il faut les aider à affronter la concurrence. Or, si la fiscalité est un moyen d’assurer le bien commun, elle est aussi un moyen de procéder à un rééquilibrage sur le plan social et sur le plan économique.

M. François Pupponi. Nous avons déjà eu ce débat en séance publique l’an dernier et l’année précédente. Quoi qu’il en soit, les auteurs de l’amendement devraient relire les textes, car les taux qu’ils mentionnent ne sont pas ceux prévus dans le code général des impôts.

Les amendements II-CF61 et II-CF1358 sont retirés.

*

*     *

Article additionnel après l’article 60
Possibilité pour lInstitut de France et les académies de passer
des conventions de mandat avec des prestataires privés pour sécuriser
la gestion de certaines prestations en encaissement et décaissement

La commission est saisie de lamendement II-CF1511 de M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’État, ses établissements publics, ses groupements nationaux d’intérêt public et les autorités publiques indépendantes ont le droit de conclure des conventions de mandat avec des prestataires privés afin de sécuriser la gestion de certaines prestations en encaissement et en décaissement. Or, l’Institut de France et les académies n’entrent pas dans ces catégories en raison de leur statut spécial, puisqu’elles sont placées sous la protection exclusive du Président de la République. Cet amendement vise donc à étendre le régime applicable aux établissements publics de l’État à l’Institut de France et aux académies afin de simplifier leur gestion.

M. le président Éric Woerth. Je suppose que l’Institut est d’accord ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Oui, nous avons déposé cet amendement à sa demande.

La commission adopte lamendement II-CF1511 (amendement II-2589).

*

*     *

Après l’article 60

Puis la commission examine lamendement II-CF296 de M. Dominique Potier.

M. Jean-Louis Bricout. Par cet amendement, nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la taxation différenciée des produits alimentaires en fonction de leur intérêt nutritionnel, sanitaire et environnemental. Il s’agit de créer ainsi un signal-prix afin que les agents économiques tiennent compte de la qualité nutritionnelle et sanitaire et des impacts environnementaux des denrées alimentaires qu’ils achètent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable. Non seulement il me paraît difficile d’établir un taux de TVA en fonction de l’intérêt nutritionnel, sanitaire et environnemental des aliments, mais je ne suis pas convaincu qu’il soit pertinent d’agir sur la TVA en la matière.

La commission rejette lamendement II-CF296.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF566 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. L’article 269 du code général des impôts dispose que les entreprises sont tenues de reverser au Trésor le montant de TVA collecté à compter de la délivrance de la facturation. Or, le délai de règlement des factures est généralement supérieur à celui du versement de la TVA, de sorte que les TPE-PME sont contraintes de procéder à des avances de trésorerie, voire à des emprunts, pour pouvoir reverser la TVA à l’État. Qui plus est, les délais de paiement des administrations publiques sont régulièrement dénoncés par les entreprises. Celles-ci ont, de ce fait, souvent recours à des sociétés d’affacturage pour financer leur trésorerie et sécuriser leur poste clients, ce qui représente des frais.

Les TPE et les PME assument ainsi gratuitement le portage financier de la TVA pour le compte des finances publiques. C’est pourquoi nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement – au 30 septembre 2020, afin que ses préconisations puissent être prises en compte dans le PLF pour 2021 –, un rapport qui étudie des modalités de collecte de la TVA réduisant la charge de trésorerie sur les TPE et PME.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le sujet est, certes, intéressant mais, plutôt que de rédiger un énième rapport, il me paraît préférable d’interroger le ministre en séance publique sur ce point. Je vous suggère donc de retirer votre amendement et de le redéposer en séance publique.

Lamendement II-CF566 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF1361 de Mme Patricia Lemoine.

Mme Patricia Lemoine. Par cet amendement, nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement, au plus tard le 1er septembre 2021, un rapport évaluant le coût précis des dispositifs de TVA à taux réduit afin de mesurer leur efficacité concrète.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Un jaune est déjà consacré à ce sujet, ainsi qu’un rapport de la Cour des comptes de novembre 2016. Le rapport demandé serait donc superflu. Demande de retrait.

Lamendement II-CF1361 est retiré.


Article 61
Unification des modalités de déclaration et de recouvrement de certaines impositions indirectes et amendes

Résumé du dispositif et effets principaux

Le I et le II du présent article transfèrent à la direction générale des finances publiques (DGFiP) le recouvrement de certaines impositions et amendes actuellement recouvrées par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) et par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), selon le calendrier suivant :

– à compter de 2021, pour la taxe spéciale sur les véhicules routiers – dite aussi « taxe à lessieu » – la taxe sur les entrées en salles de cinéma (TSA), la taxe sur les éditeurs et les distributeurs de services de télévision (TST), et les cotisations professionnelles dues par les entreprises de production, de distribution, d’exportation d’œuvres cinématographiques et par les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques ;

– à compter de 2022, pour le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN), le droit de passeport sur les navires, la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN), la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes (TICC) et la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) ;

– à compter de 2023, pour les amendes autres que de nature fiscale prévues par le code des douanes ;

– et à compter de 2024, pour les droits de circulation et de consommation sur les alcools et sur les tabacs, et pour le droit spécifique sur les bières.

Le III du présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :

– mettre en œuvre ce transfert ;

– harmoniser les règles des impositions concernées relatives à leur liquidation, recouvrement, remboursement et contrôle, y compris le fait générateur et l’exigibilité ;

– améliorer à droit constant la lisibilité des dispositions concernées ;

– et assurer le respect de la hiérarchie des normes en adaptant les dispositions concernées au droit européen et international et en adaptant les renvois au pouvoir réglementaire selon la nature et l’objet des mesures d’application.

Enfin, le présent article prévoit que l’ordonnance devra être prise dans les dix mois de la promulgation du présent projet de loi et que le projet de loi de ratification devra être déposé au Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 199 de la loi de finances pour 2019 a transféré de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) à la direction générale des finances publiques (DGFiP) le recouvrement des taxes sur les boissons non alcooliques.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article modifié par plusieurs amendements rédactionnels ainsi que par un amendement reportant du 1er janvier 2021 au 1er janvier 2022 le transfert du CNC à la DGFiP du recouvrement de la taxe sur les entrées en salles de cinéma (TSA), de la taxe sur les éditeurs et les distributeurs de services de télévision (TST) et des cotisations professionnelles dues par les entreprises de production, de distribution, d’exportation d’œuvres cinématographiques et par les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques.

Le présent article est à mettre en lien avec :

– l’article 60 du présent projet de loi qui simplifie le recouvrement de la TVA à l’importation auprès des entreprises et instaure ainsi un guichet unique de déclaration, de paiement et de déduction de la TVA ;

– et l’article 62 qui procède à un rééquilibrage des taxes affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

I.   L’État du droit

Les impositions et amendes qui font l’objet du présent article sont actuellement recouvrées par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) et par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

Le transfert de ce recouvrement à la direction générale des finances publiques (DGFiP) est une recommandation formulée de manière récurrente (Cour des comptes, Conseil des prélèvements obligatoires, rapports parlementaires, Comité Action publique 2022, etc.).

A.   Les impositions et amendes visées par l’article

1.   La taxe spéciale sur les véhicules routiers

La taxe spéciale sur certains véhicules routiers est régie par les articles 284 bis à 284 sexies du code des douanes. Elle est plus communément désignée sous l’appellation « taxe à lessieu » ([223]).

Elle s’applique aux véhicules de transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge (PTAC) est supérieur à douze tonnes. Son tarif dépend du PTAC et du type de suspension du véhicule. Il est dégressif selon le nombre d’essieux. L’existence de cette taxe se justifie par le fait que le passage sur la chaussée des véhicules les plus lourds occasionne des coûts importants pour l’entretien des routes.

Son rendement est estimé à 189 millions d’euros pour 2020.

Conformément à l’article 284 quater du code des douanes, « lassiette et le recouvrement de la taxe sont assurés par les services de la direction générale des douanes et droits indirects, selon les règles, garanties et sanctions applicables en matière douanière ».

2.   Les impositions affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC)

Le CNC, opérateur de l’État, est un établissement public à caractère administratif qui assure, sous l’autorité du ministre chargé de la Culture, l’unité de conception et de mise en œuvre de la politique de l’État dans les domaines du cinéma et des autres arts et industries de l’image animée, notamment ceux de l’audiovisuel, de la vidéo et du multimédia, dont le jeu vidéo.

Le CNC est principalement financé par trois taxes affectées non comptabilisées dans le budget général de l’État :

– la taxe sur les entrées en salles de cinéma (TSA) ; la taxe est calculée en appliquant sur le prix des entrées un taux de 10,72 %, multiplié par 1,5 en cas de représentation à caractère pornographique ou d’incitation à la violence ;

– la taxe sur les éditeurs et les distributeurs de services de télévision (TST) ; pour les éditeurs de services de télévision, la taxe est calculée en appliquant un taux de 5,65 % sur une assiette qui comprend essentiellement les recettes publicitaires, après un abattement de 11 millions d’euros ; pour les distributeurs de services de télévision, la taxe est calculée en appliquant un barème progressif de 0,5 à 3,5 % sur une assiette qui comprend essentiellement les sommes acquittées par les clients au titre des abonnements à un ou plusieurs services de télévision, après un abattement de 10 % ;

– et la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne des contenus audiovisuels (TSV) ; son taux est de 2 % (porté à 10 % pour les vidéos à caractère pornographique ou d’incitation à la violence) sur une assiette qui comprend à la fois les sommes versées par les clients et les revenus de la publicité.

Les deux premières taxes (TSA et TST) sont recouvrées directement par le CNC (article L. 115-23 du code du cinéma et de l’image animée), qui est également chargé de leur contrôle. La TSV est, en revanche, recouvrée et contrôlée par la DGFiP.

Le CNC perçoit également, au titre de ses ressources propres, des cotisations professionnelles dues par les entreprises de production, de distribution, d’exportation d’œuvres cinématographiques et les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques.

À l’exception de la TSV qui relève de l’article 1609 sexdecies B du code général des impôts, ces impositions et cotisations sont régies par les articles L. 115-1 et suivants du code du cinéma et de l’image animée.

En 2018, le produit des taxes encaissé par le CNC s’est élevé à plus de 670 millions d’euros. Les cotisations professionnelles se sont élevées, quant à elles, à 10,58 millions d’euros ([224]).

produit des taxes affectées au cnc

(en millions d’euros)

 

Exécution 2018

Prévision actualisée 2019

Prévision 2020 intégrant la réforme* du PLF

Prévision 2020 sans réforme* du PLF

Taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne des contenus audiovisuels (TSV)

25,7

29,2

66

30,5

Taxe sur les entrées en salles de cinéma (TSA)

146

151,2

146,7

146,7

Taxe sur les distributeurs de services de télévision (TST-D)

203,2

195,7

201,9

203,8

Taxe sur les éditeurs de services de télévision (TST-E)

296,8

298,7

260,8

293

Total

671,7

674,8

675,5

674

* voir article 62 du présent projet de loi de finances.

Source : d’après le document stratégique de performance du CNC.

Ainsi que l’a relevé la Rapporteure spéciale Mme Marie-Ange Magne dans le cadre de ses travaux de contrôle, les taxes affectées constituent l’essentiel des ressources du CNC (95 %) et représentent 2,3 fois le montant des crédits budgétaires du programme 334 Livre et industries culturelles ([225]).

3.   Le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) et le droit de passeport sur les navires

Le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) et le droit de passeport sur les navires sont recouvrés par la DGDDI par application des articles 227 et 239 du code des douanes.

a.   Le DAFN

La francisation d’un bateau ou d’un navire lui confère le droit de porter le pavillon de la République française avec les avantages et les obligations qui s’y rattachent.

L’article 223 du code des douanes prévoit un droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) qui s’applique aux propriétaires de navires francisés dont la longueur de coque est supérieure ou égale à 7 mètres ou dont la puissance administrative des moteurs est supérieure ou égale à 22 CV, ainsi qu’aux véhicules nautiques à moteur francisés dont la puissance réelle des moteurs est supérieure ou égale à 90 kW.

Le rendement du DAFN est estimé à 43,6 millions d’euros pour 2020. Il fait l’objet de plusieurs affectations dans les limites prévues par l’article 46 de la loi de finances pour 2012.

Rendement et affectation du DAFN pour 2020

(en millions d’euros)

Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres

37 440

Organismes de secours et de sauvetage en mer agréés

815

Filière de responsabilité élargie du producteur (REP) relative aux navires de plaisance et de sport hors d’usage (NPSHU)

900

DAFN Corse

4 460

Total

43 615

Source : Réponse du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

b.   Le droit de passeport sur les navires

Conformément à l’article 237 du code des douanes, tout navire battant pavillon étranger de plaisance ou de sport dont des personnes physiques ou morales, quelle que soit leur nationalité, ayant leur résidence principale ou leur siège social en France, sont propriétaires ou ont la jouissance et qui prend la mer doit avoir à bord un passeport délivré par le service de douanes.

L’article 238 du code des douanes institue un droit de passeport à la charge du propriétaire ou de l’utilisateur du navire, calculé dans les mêmes conditions, selon la même assiette, le même taux et les mêmes modalités d’application que le DAFN.

Le rendement prévisionnel du droit de passeport est estimé pour 2020 à 103 000 euros. Il est affecté aux organismes de secours et de sauvetage en mer dans la limite d’un plafond fixé à 4 millions d’euros par l’article 46 de la loi de finances pour 2012.

c.   La DAFN et le droit de passeport sur les navires en corse

Des règles spécifiques sont prévues pour les navires de plaisance francisés dont le port d’attache est situé en Corse et qui ont stationné dans un port corse au moins une fois au cours de l’année écoulée. Le taux du droit est fixé par la collectivité de Corse et doit être compris entre 50 % et 90 % du taux de droit commun.

Les recettes sont affectées à la collectivité de Corse. Elles sont estimées à 4,46 millions d’euros pour 2020.

d.   La « surtaxe Yacht »

Le barème du DAFN et du droit de passeport a été fortement réévalué pour les navires de plaisance et de sport d’une longueur supérieure ou égale à 30 mètres et à la puissance supérieure ou égale à 750 kW (« surtaxe yacht » de 30 000 à 200 000 euros).

Dans son rapport d’application de la loi fiscale (RALF) ([226]), le Rapporteur général a souligné et critiqué la faiblesse du rendement de cette surtaxe.

Il a relevé qu’au 16 mai 2018, le produit collecté au titre de la surtaxe yacht était de 82 500 euros, dont 75 000 euros de droit de passeport et 7 500 euros de DAFN.

Les réponses apportées au Rapporteur général en juillet 2019 font état d’un accroissement du rendement de la surtaxe : à la même période de l’année, le montant collecté a été de 86 700 euros, dont 79 200 euros de droit de passeport et 7 500 euros de DAFN.

Ainsi, à période identique, le rendement sest accru de seulement 4 200 euros alors même que le montant minimal de la surtaxe « yacht » est de 30 000 euros…

Ceci a conduit le Rapporteur général à procéder le 18 septembre 2019 à un contrôle sur place et sur pièces à la DGDDI, dont les éléments sont à analyser.

4.   Les taxes intérieures de consommation sur le gaz naturel, le charbon et l’électricité

Les articles 266 quinquies, 266 quinquies B et 266 quinquies C régissent respectivement trois taxes intérieures de consommation :

– la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) ;

– la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes (dite aussi « taxe intérieure de consommation sur le charbon ») (TICC) ;

– et la taxe intérieure sur la consommation finale délectricité (TICFE).

Ces diverses taxes sont recouvrées par l’administration des douanes. Elles représentent à elles trois un rendement global de près de 10,5 milliards d’euros et constituent à ce titre un pan important de la fiscalité écologique.

Rendement de la TICGN, TICC et de la TICFE

(en millions d’euros)

Année

2018

2019

2020

Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE)

7 710

7 840

7 971

Taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN)

2 205

2 430

2 461

Taxe intérieure sur la consommation de charbon (TICC)

13

13

13

Source : Évaluations des voies et moyens, tome I.

5.   Les accises sur les tabacs et les alcools

Les alcools, les boissons alcooliques et les tabacs manufacturés sont soumis à des droits d’accises par application de l’article 302 B du code général des impôts.

Il s’agit de droits indirects de divers tarifs comprenant un droit de circulation (article 438 du CGI), des droits de consommation (articles 402 bis, 403, 575, et 575 E bis du même code) et un droit spécifique sur les bières (article 520 A du même code).

Le rendement prévisionnel des droits de consommation est estimé pour 2020 à :

– 1,1 milliard d’euros sur les bières et les boissons non alcoolisées ;

– 2,15 milliards d’euros pour les alcools ;

– et 13,1 milliards d’euros pour les tabacs.

Le rendement prévisionnel du droit de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels ([227]) est de 110,8 millions d’euros et est affecté à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA).

6.   Les amendes douanières

L’amende est une sanction pénale qui consiste à payer une somme d’argent au Trésor public.

L’amende douanière obéit à un régime juridique dérogatoire du droit commun. Son originalité « réside dans le fait que son montant, fixe ou proportionnel, peut ne pas dépendre de latteinte causée à lordre public mais de la valeur de la marchandise en cause » ([228]). Elle présente ainsi un caractère indemnitaire comme le révèle l’article 382 du code des douanes qui dispose que les amendes douanières « se prescrivent dans les mêmes conditions que les dommages et intérêts », c’est-à-dire comme une créance civile de nature indemnitaire.

Le code des douanes prévoit par ailleurs un certain nombre d’amendes autres que de nature fiscale.

Toutefois, la distinction entre amende de nature fiscale et les autres amendes n’est pas évidente. C’est pourquoi, le Rapporteur général a demandé au Gouvernement de préciser le champ des amendes visées par l’article, et de lui en fournir la liste.

Le Gouvernement a répondu que :

« Les premières expertises, conduites dans le cadre de réunions techniques bilatérales entre la DGFiP et la DGDDI sur les modalités de ce transfert, ont abouti à mettre en question la pertinence dun transfert global de la gestion des amendes au regard de contraintes métiers fortes, notamment pour les amendes liées à des taxes dont le recouvrement est maintenu à la DGDDI. En tout état de cause, la large majorité des montants recouvrés au titre des amendes ou sanctions le seront par la DGFiP à partir de lannée 2023 ».

En l’état, et compte tenu de la rédaction du présent article, le champ précis des amendes qui seront transférées à la DGFiP ne peut être apprécié par le Rapporteur général.

Au surplus, le recouvrement des amendes douanières présentant un caractère indemnitaire, et pouvant faire l’objet de transactions douanières, nécessiterait beaucoup d’adaptations de la législation s’il devait être effectué par la DGFiP. En effet, en application, de l’article 350 du Code des douanes « ladministration des douanes est autorisée à transiger avec les personnes poursuivies pour infraction douanière ou pour infraction à la législation et à la réglementation relatives aux relations financières avec létranger ». Il est précisé au même article qu’après mise en mouvement par l’administration des douanes ou le ministère public d’une action judiciaire, l’administration des douanes ne peut transiger que si l’autorité judiciaire admet le principe d’une transaction. Il conviendrait alors que l’ordonnance procède à une articulation de ces dispositions avec l’éventuel transfert à la DGFiP.

B.   Les recommandations de regroupement du RECOUVREMENT AU SEIN DE LA DGFiP

1.   Les recommandations relatives à la DGDDI

À la suite de la disparition d’une partie de son activité avec l’entrée en vigueur du marché intérieur communautaire en 1993, l’administration des douanes a reçu en compensation des missions en matière de fiscalité indirecte transférées de l’ancienne direction générale des impôts (DGI), et a pris le nom de direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI).

Ce transfert de compétence est aujourd’hui remis en cause notamment par des recommandations du Comité Action publique 2022 et de la Cour des comptes.

a.   Les recommandations du Comité Action publique 2022

Le Comité Action publique 2022, installé par le Premier ministre dès le début de la législature en octobre 2017, s’est penché sur vingt-et-une politiques publiques.

Il a formulé, dans son rapport de juin 2018, vingt-deux propositions ([229]).

La proposition n° 15 a porté sur la simplification et la diminution du coût du dispositif de recouvrement des prélèvements obligatoires. À ce titre, le comité a recommandé « le transfert du recouvrement de lensemble des taxes à la Direction générale des finances publiques (DGFiP) alors quaujourdhui la direction des douanes (DGDDI) en recouvre certaines ». L’objectif poursuivi est de renforcer l’efficience des organismes en charge du recouvrement.

La recommandation formulée par le comité va dans le sens des observations récurrentes de la Cour des comptes.

b.   Les recommandations de la Cour des comptes

Dans son rapport annuel de 2014 ([230]), la Cour des comptes a préconisé de regrouper au sein de la DGFiP la fonction de recouvrement de l’ensemble des impôts et taxes recouvrés par la DGDDI. Elle a jugé que l’existence de deux réseaux de recouvrement des impôts et taxes était inadaptée, et a rappelé que la plupart des pays de l’OCDE ont rapproché leurs administrations fiscales et douanières afin de rechercher des économies d’échelle (exemples du Royaume-Uni, des pays scandinaves, de l’Espagne, de l’Irlande ou encore des Pays-Bas).

Selon le rapport public annuel de la Cour des comptes de 2018 ([231]), la mission de recouvrement de la DGDDI occupait 3 000 agents sur un effectif total de près de 17 000 agents pour un produit total d’environ 76 milliards d’euros en 2016.

CatÉgories des Recettes fiscales
dont le recouvrement est assurÉ par la DGDDI

(en milliards deuros et en %)

Source : Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : des coûts trop élevés, une modernisation et une simplification à mettre en œuvre », Rapport public annuel 2018, février 2018.

Selon la Cour des comptes, l’essor des procédures dématérialisées permet désormais aux contribuables de s’acquitter de leurs impôts et taxes en ligne, ce qui ne justifie plus l’existence de deux réseaux de recouvrement distincts. En particulier, les proximités géographiques entre redevables et administration de recouvrement ne sont plus pertinentes. C’est pourquoi, sans remettre en cause les missions de contrôle des douanes, la Cour des comptes a proposé le transfert du recouvrement de certaines taxes vers la DGFiP. Elle souligne que cette orientation rend nécessaires d’importants investissements dans le développement des systèmes informatiques, mais devrait permettre à plus long terme un redéploiement des agents vers des missions prioritaires de contrôle et de lutte contre la fraude.

En conclusion, la Cour des comptes a recommandé d’ « organiser le transfert de la fonction de recouvrement de la douane à la DGFiP ».

Le transfert du recouvrement devrait permettre, selon la Cour des comptes, de mettre à disposition des redevables une offre de service dématérialisée et de mutualiser les frais de gestion de l’administration générés par la collecte de ces taxes.

c.   La mise en œuvre des recommandations

Une première traduction de ces recommandations a eu lieu en loi de finances pour 2019.

i.   Le transfert à la DGFiP du recouvrement des taxes sur les boissons non alcooliques

L’article 199 de la loi de finances pour 2019 a transféré à la DGFiP le recouvrement des taxes sur les boissons non alcooliques à compter du 1er janvier 2019.

Désormais, la DGFiP est en charge du recouvrement de quatre droits d’accise sur les boissons non alcooliques pour un rendement global d’environ 500 millions d’euros en 2018. Il s’agit de la contribution sur les boissons sucrées, la contribution sur les boissons édulcorées, le droit spécifique sur les boissons non alcooliques, et la surtaxe sur les eaux minérales.

Cette réforme a toutefois nécessité, selon les termes de l’exposé des motifs de l’article, des « ajustements techniques, précisant le fait générateur et lexigibilité de ces impositions, apportant des compléments spécifiques à la surtaxe sur les eaux minérales, qui est renommée « contribution locale sur les eaux minérales », et regroupant le droit spécifique sur les boissons non alcooliques et la contribution sur les boissons contenant des édulcorants, compte tenu de leur finalité budgétaire commune ».

En raison de ces ajustements, la version finale de l’article comportait 91 alinéas et plus de 3 200 mots, adoptés dans une version identique par l’Assemblée nationale et le Sénat dès la première lecture en raison du caractère consensuel de la réforme.

ii.   Le transfert à la DGFiP du recouvrement de trois composantes de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)

La TGAP est régie par les articles 266 sexies à 266 duodecies du code général des impôts. Elle est due par les entreprises dont l’activité ou les produits sont considérés comme polluants. Son montant ou le taux applicable varient selon les catégories d’activité et de produit.

L’article 193 de la loi de finances pour 2019 a transféré à la DGFiP trois composantes de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) : la TGAP « huiles », la TGAP « lessives » et la TGAP « granulats ».

Pour ce faire, l’article a aligné les procédures déclaratives sur celles de la TVA et prévu un recouvrement et un contrôle « selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, sûretés, garanties et privilèges que les taxes sur le chiffre daffaires ».

 

iii.   Le transfert à la DGFiP du recouvrement de la TVA sur les produits pétroliers

La TVA à l’importation de biens provenant de pays hors Union européenne est perçue par la DGDDI lors du dédouanement. L’article 1695 du CGI dispose ainsi que « la TVA est perçue, à limportation, comme en matière de douane ». Toutefois, certaines entreprises peuvent, sous conditions, autoliquider la TVA due à l’importation. Il s’agit d’un régime optionnel qui permet aux entreprises, plutôt que d’acquitter la TVA à l’importation auprès de la DGDDI pour ensuite la déduire auprès de la DGFiP au titre du droit à déduction, de déclarer directement le montant de la TVA constaté par la DGDDI sur la déclaration de TVA déposée auprès de la DGFiP, et d’éviter ainsi tout décaissement.

L’article 193 de la loi de finances pour 2019 a prévu le transfert à la DGFiP, à compter du 1er janvier 2021, du dispositif d’autoliquidation de la TVA afférente aux livraisons de produits pétroliers.

Au final, compte tenu de cette réforme et de celle relative à la TGAP, cet article comportait 142 alinéas pour procéder aux ajustements nécessaires. Il dépasse les 3 600 mots. Malgré sa longueur, il a été adopté en des termes identiques par les deux Assemblées, seul un amendement rédactionnel du Sénat ayant été adopté en première lecture.

2.   Les recommandations relatives au CNC

Dans le cadre du précédent printemps de l’évaluation, la Rapporteure spéciale de la mission Médias, livre et industries culturelles avait recommandé que soit étudiée la question du transfert à la DGFiP du recouvrement des impositions des taxes affectées au CNC ([232]).

À l’instar du Conseil des prélèvements obligatoires ([233]), elle a souligné les risques du système actuel de recouvrement par le CNC en raison des « problématiques de conflits dintérêts lorsque le collecteur de la taxe est aussi le décideur en matière dattribution des aides ».

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article prévoit tout à la fois un calendrier de transfert du recouvrement de certaines impositions à la DGFiP ainsi qu’une habilitation du Gouvernement à procéder aux ajustements nécessaires par ordonnance.

A.   Un calendrier de transfert de la dgddi a la dgfip du recouvrement de diverses impositions et amendes

Le I du présent article définit un calendrier de transfert à la DGFiP du recouvrement de diverses impositions et des amendes actuellement recouvrées par la DGDDI.

Le transfert est ainsi prévu :

– au 1° du I, à compter du 1er janvier 2021, pour la taxe spéciale sur les véhicules routiers – dite aussi « taxe à lessieu » – la taxe sur les entrées en salles de cinéma (TSA), la taxe sur les éditeurs et les distributeurs de services de télévision (TST), et les cotisations professionnelles dues par les entreprises de production, de distribution, d’exportation d’œuvres cinématographiques et les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques ;

– au 2° du I, à compter du 1er janvier 2022, pour le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN), le droit de passeport sur les navires, la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN), la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes (TICC) et la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) ;

– au 3° du I, à compter du 1er janvier 2023, pour le recouvrement des amendes autres que de nature fiscale ;

– et au 4° du I, à compter du 1er janvier 2024, pour les droits de circulation et de consommation sur les alcools, sur les tabacs et pour le droit spécifique sur les bières.

Le II précise pour chacune des impositions s’il faut prendre en compte le fait générateur ou l’exigibilité pour apprécier la date effective du transfert. Ainsi, il convient de retenir :

– la date du fait générateur pour la taxe spéciale sur les véhicules routiers, les impositions affectées au CNC, le DAFN et le droit de passeport sur les navires ;

– la date du fait générateur et de l’exigibilité pour les accises sur les énergies dites de réseau (gaz naturel et électricité) et sur le charbon ;

– et la date de l’exigibilité pour les accises sur les tabacs et les alcools.

B.   Une habilitation À prendre par ordonnance les mesures nécessaires À ce transfert

Le III du présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :

– mettre en œuvre ce transfert ;

– harmoniser les règles des impositions concernées relatives à leur liquidation, recouvrement, remboursement et contrôle, y compris le fait générateur et l’exigibilité ;

– améliorer à droit constant la lisibilité des dispositions concernées ;

– et assurer le respect de la hiérarchie des normes en adaptant les dispositions concernées au droit européen et international et en adaptant les renvois au pouvoir réglementaire selon la nature et l’objet des mesures d’application.

Enfin, le III du présent article prévoit que l’ordonnance devra être prise dans les dix mois de la promulgation du présent projet de loi et que le projet de loi de ratification devra être déposé au Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

C.   Un dispositif bienvenu mais dont l’impact est peu documenté

Selon l’exposé des motifs du présent article, le recours à l’ordonnance a été décidé « afin de ne pas alourdir le projet de loi de finances ». De ce point de vue, le Rapporteur général admet parfaitement le recours à l’ordonnance.

Les articles 193 et 199 de la précédente loi de finances – organisant le transfert de seulement trois types d’impositions de la DGDDI à la DGFiP – contenaient au total 243 alinéas et près de 8 000 mots compte tenu des ajustements nécessaires. Pourtant, ni les assiettes ni les taux n’étaient modifiés. Seuls les modalités de recouvrement, les faits générateurs et l’exigibilité, relevant du domaine de la loi, devaient être adaptés.

La traduction législative du transfert des cinq types d’impositions visées par le présent article nécessiterait au moins autant de dispositions, et probablement davantage alors que le débat parlementaire se concentre sur le principe du transfert du recouvrement, davantage que sur les ajustements techniques nécessaires.

Sur le principe, le recours à l’ordonnance apparaît dès lors acceptable. Il permet au Parlement de se prononcer en amont sur un article bref qui fixe le calendrier et les objectifs de la réforme. Il lui garantit, ensuite, lors de l’examen du projet de loi de ratification, de contrôler les dispositifs techniques retenus, et le cas échéant de les amender.

Cependant, tout en approuvant les orientations générales de la réforme, le Rapporteur général estime qu’un tel dispositif aurait mérité d’être éclairé par davantage d’informations dans les évaluations préalables du Gouvernement sur son impact, en particulier sur le personnel et les missions de la DGDDI.

Le Rapporteur général a donc interrogé le Gouvernement pour connaître le nombre d’agents et de sites concernés.

Il lui a été répondu que « les travaux menés ne permettent pas, à ce jour, de chiffrer avec précision les impacts en matière demploi » et « quil nest pas possible pour linstant dindiquer le nombre dagents concernés par ces transferts au sein de la DGDDI, hormis partiellement pour la TGAP et la [taxe à lessieu] ».

Selon le Gouvernement, « pour la TGAP, actuellement gérée au sein du bureau de douane de Nice Port, cinq agents sont concernés par ce transfert, et un agent est concerné au sein de la recette interrégionale de Marseille ». Le transfert de la taxe à l’essieu « concerne une quarantaine dagents au sein du service national douanier de la fiscalité routière (SNDFR) à Metz […] et 25 agents de la recette interrégionale de Metz, qui est chargée du recouvrement, de la gestion des garanties et du suivi des procédures collectives ».

En tout état de cause, « le nombre dagents concernés ne préjuge pas du nombre dETP qui sera transféré, le cas échéant, à la DGFiP, dans la mesure où il devra être tenu compte des gains de productivité qui résulteront préalablement des modernisations en cours ».

Le Gouvernement a ajouté que « le transfert de ces missions ne remet pas en cause la mission de lutte contre la fraude de la DGDDI, qui constitue lune des priorités de la douane et de ses agents. De même, la douane poursuivra sa mission daction économique, au plus près des territoires, auprès des opérateurs du commerce extérieur et pétroliers comme de la filière viticole et des débitants de tabac ».

Au final, les réponses apportées au Rapporteur général ne sont pas de nature à appréhender les effets de la réforme sur l’organisation des services. Il conviendra dès lors au Parlement, dans le cadre de ses divers travaux de contrôle, d’être attentif à sa mise œuvre.

Cela ne remet pas en cause, pour autant, le bien-fondé des évolutions proposées.

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La commission est saisie de lamendement II-CF1459 de Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin. Cet amendement de suppression de l’article vise à empêcher que les missions des douanes ne soient transférées à la direction générale des finances publiques sans les emplois correspondants. Si l’unification des modalités de déclaration et de recouvrement de l’impôt présente des avantages, elle ne doit pas servir de prétexte à la suppression de postes et à des coupes budgétaires qui mettraient à mal l’objet de l’administration des douanes et menaceraient ses personnels. En outre, ce transfert constituerait une surcharge pour la DGFiP, alors même que son affaiblissement est programmé par des coupes sans précédent.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable à la suppression de l’article. L’article 61 reprend une préconisation de la Cour des comptes.

La commission rejette lamendement II-CF1459.

Puis elle examine lamendement II-CF1513 de Mme Émilie Cariou.

Mme Émilie Cariou. L’article 61 vise à transférer à la DGFiP le recouvrement d’un certain nombre de taxes, notamment celles qui sont affectées au Centre national du cinéma (CNC). Les services ayant fait état de difficultés techniques à ce sujet, nous proposons que le transfert du recouvrement de ces taxes soit reporté au 1er janvier 2022.

Suivant lavis favorable du rapporteur général, la commission adopte lamendement II-CF1513 (amendement II-2590).

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels de M. Joël Giraud II-CF848 (amendement II-2591), II-CF849 (amendement II-2592), IICF850 (amendement II-2593), II-CF851 (amendement II-2594) et II-CF852 (amendement II-2595).

Elle adopte ensuite larticle 61 ainsi modifié.

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Article additionnel après l’article 61
Augmentation de la taxe sur certaines dépenses de publicité

La commission est saisie de lamendement II-CF1527 de M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La taxe sur certaines dépenses de publicité devait être supprimée, mais nous sommes prononcés, en première partie, en faveur de son maintien, car j’estime qu’il s’agit d’une taxe comportementale – je rappelle qu’elle vise ces tracts que chacun reçoit par milliers dans sa boîte aux lettres. J’avais alors indiqué qu’il conviendrait, en deuxième partie, d’améliorer son rendement. Tel est l’objet de cet amendement, qui tend à porter son taux à 2 % pour la fraction des dépenses qui excède 175 000 euros, soit le montant moyen des dépenses du neuvième décile des redevables. Cette mesure, qui ne concerne donc que les très grandes entreprises, permettrait de porter le rendement global de la taxe à 40 millions.

La commission adopte lamendement II-CF1527 (amendement II-2596).

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Après l’article 61

Puis la commission examine lamendement II-CF1091 de Mme Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot. Le financement de l’expérimentation initiale a permis de valider le fonctionnement du matériel PARAFE (Passage automatisé rapide aux frontières extérieures) et d’installer le système d’information. Si celui-ci demeure géré par l’État au titre de sa compétence en matière de contrôle de police aux frontières, les sas constituent un outil qui facilite le parcours des passagers et améliore la qualité de service dont bénéficient ces derniers et les exploitants d’aéroports. Ils ne relèvent cependant ni de dispositifs de sécurité ou de sûreté nécessaires à la protection du transport aérien ni d’une obligation réglementaire imposée par la puissance publique. Aussi la charge financière induite par l’installation de ces dispositifs de contrôle, au-delà du cadre expérimental précité, n’a-t-elle plus vocation à être financée au moyen de la taxe d’aéroport. L’amendement tend donc à supprimer la contribution de la part de la taxe d’aéroport reversée aux exploitants d’aérodromes ou de groupements d’aérodromes relative au financement de ces matériels.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis favorable à cette disposition, qui me semble intéressante.

Mme Émilie Cariou. Je vous propose, madame Cattelot, que nous examinions cet amendement en séance publique avec le ministre, car le champ législatif relatif aux aéroports est en cours d’évolution.

Lamendement II-CF1091 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF1213 de Mme Lise Magnier.

Mme Lise Magnier. Cet amendement vise à corriger une anomalie qui pénalise les entreprises de distribution automobile. En effet, celles-ci sont assujetties à une taxe affectée sans pour autant être éligibles aux formations financées par cette taxe, puisque celles-ci sont dispensées dans le domaine de la réparation et de l’entretien automobile.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Après avoir pris connaissance de votre amendement, je comptais m’en remettre à la sagesse de la commission. Mais je me suis renseigné auprès de la DLF, qui m’a indiqué que les entreprises de distribution bénéficiaient indirectement des actions financées par cette taxe. Je vous suggère donc de retirer l’amendement et d’interroger le ministre à ce sujet en séance publique.

Mme Lise Magnier. J’avais déposé un amendement analogue l’an dernier. En commission, vous aviez émis un avis favorable mais, en séance publique, l’amendement a été examiné à une heure tardive et je me suis vu opposer un simple : « Défavorable » de la part du ministre et de vous-même, sans plus d’explications. J’ai donc retravaillé le sujet, et je persiste : les entreprises de distribution automobile ne bénéficient pas des formations financées par l’Association nationale pour la formation automobile (ANFA), à laquelle le produit de cette taxe est affecté.

M. le président Éric Woerth. Il y a manifestement une erreur…

M. Joël Giraud, rapporteur général. Si, en séance publique, le ministre ne nous explique pas clairement en quoi ces entreprises bénéficient de ces formations, je donnerai un avis favorable à votre amendement.

M. le président Éric Woerth. Le mieux serait, monsieur le rapporteur général, que vous interrogiez le Gouvernement pour obtenir une réponse la plus claire possible avant la séance publique.

Lamendement II-CF1213 est retiré.

La commission examine lamendement II-CF1401 de M. Dominique Potier.

M. Jean-Louis Bricout. Par cet amendement, qui s’inscrit dans le prolongement de la création du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, nous proposons que l’État, et non plus l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), recouvre la taxe sur les produits phytopharmaceutiques bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché ou d’un permis de commerce parallèle, dite taxe « phytopharmacoviligance ».

Son taux est plafonné à 0,3 % du chiffre d’affaires des ventes réalisées, à l’exclusion des ventes des produits exportés hors de l’Union européenne, ou à 0,1 % lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur un produit de biocontrôle. Le produit de la taxe est affecté à l’ANSES, dans la limite d’un plafond fixé à 6,3 millions. Toutefois, les modifications apportées par l’article 46 du PLFSS pour 2020 relatif à la création d’un fonds d’indemnisation des victimes de pesticides nécessitent de revoir les modalités de recouvrement de la taxe, puisque cet article rehausse le taux plafond de la taxe de 0,3 % à 3,5 % et affecte 90 % de son produit à la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole pour la prise en charge des victimes de ces pesticides.

L’ANSES n’a pas vocation à recouvrer une taxe dont elle ne bénéficie pas, ou dont elle ne bénéficie que très partiellement. Pour sécuriser son rendement, il est donc souhaitable qu’elle soit collectée par l’État. Tel est l’objet de cet amendement.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1401.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF288 de M. Julien Dive.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à créer une contribution additionnelle à la taxe sur les produits phytopharmaceutiques afin de dégager des fonds supplémentaires pour financer la recherche et l’accompagnement matériel et financier des agriculteurs au cours de la phase de transition vers la fin de l’utilisation du glyphosate, annoncée par le Gouvernement pour 2021. Cette mesure avait été évoquée lors des débats parlementaires sur la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire, dite EGALIM.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous souhaitez orienter cette taxe vers la recherche. Or, le plafond d’affectation à l’ANSES est déjà dépassé. Ainsi, le produit de cette taxe abonderait le budget général. Je ne crois pas que tel soit votre objectif. Je vous propose donc d’y retravailler d’ici à la séance publique.

Lamendement II-CF288 est retiré.

La commission examine les amendements identiques II-CF692 de M. Fabrice Brun et II-CF923 de Mme Marie-Christine Dalloz.

M. Fabrice Brun. Par l’amendement II-CF692, nous proposons que le taux de la taxe affectée à la filière française du cuir puisse être révisé chaque année, sur proposition des organisations professionnelles, par arrêté du ministre chargé de l’industrie, et ce afin de répondre aux besoins des entreprises et de garantir des ressources adaptées au centre technique industriel.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je tiens à rappeler que la filière du cuir française est une filière d’excellence. Nous estimons que le taux de la taxe doit faire l’objet d’une concertation préalable avec le ministre compétent et être fixé en fonction des besoins réels du centre technique industriel de la filière.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai le cuir dur. J’émets donc le même avis qu’à chaque fois que cette question est évoquée : défavorable.

Mme Anne-Laure Cattelot. J’ajoute que, dès lors que la filière s’engage dans un contrat d’objectifs et de performance – ce qui devrait être fait d’ici à la nouvelle lecture –, il n’est plus nécessaire que le taux évolue.

M. le président Éric Woerth. Je crois que les règles du jeu sont désormais plus claires ; nous n’aurons donc plus à traiter cette question chaque année.

La commission rejette les amendements II-CF692 et II-CF923.

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Article 62
Rééquilibrage des taxes affectées
au Centre national du cinéma et de limage animée

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article procède à des modifications paramétriques, d’une part, de la taxe sur les services de télévision (TST), qui se décline en une composante « éditeurs » (TST-E) et une composante « distributeurs » (TST-D), et, d’autre part, de la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV) dite « taxe YouTube », toutes deux affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Les dispositions proposées ont pour but de rééquilibrer la charge fiscale entre les secteurs imposés en tenant compte des évolutions technologiques, des dynamiques de marché et des nouveaux usages. Elles ont également pour objet de sécuriser les recettes du CNC.

Le taux de la TST-E, assise sur les recettes issues des messages publicitaires télévisés et de parrainage, sur les recettes issues des SMS et appels surtaxés liés à la diffusion des programmes et sur la contribution à l’audiovisuel publique et les autres ressources publiques des chaînes, serait ainsi abaissé de 5,65 % à 5,15 %. Dans le même temps, l’abattement de 11 millions d’euros dont bénéficient les redevables de cette taxe serait abaissé à 10 millions d’euros.

Les modalités de recouvrement de la TST seraient modifiées au titre de l’année 2020 afin que les redevables bénéficient de l’allégement fiscal dès 2020.

Parallèlement, le taux de la TSV, assise, d’une part, sur le prix payé par les utilisateurs pour l’achat et la location de vidéos physiques ou en ligne et, d’autre part, sur les sommes versées par les annonceurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires sur un service gratuit ou payant de contenus audiovisuels, serait augmenté pour passer de 2 % à 5,15 %, soit le même taux que celui proposé pour la TST-E.

Plusieurs dispositions de l’article visent à prendre en compte la situation particulière de certains redevables de la TST ou de la TSV :

– l’assiette déclarée par la société France Télévisions au titre de la TST-E ferait l’objet d’un abattement de 8 % pour prendre en compte les exigences de service public qui s’imposent à elle ;

– l’abattement dont bénéficient les chaînes ne diffusant pas de message publicitaire au titre de la TST-E serait porté de 16 à 30 millions d’euros ;

– la majoration de taux de la TST applicable aux éditeurs de services de télévision qui s’auto-distribuent serait diminué, passant de 3,75 à 3,3 points de pourcentage, pour prendre en compte les contraintes qui pèsent sur eux liées à la gestion d’un parc d’abonnements ;

– les vendeurs et loueurs de vidéos physiques, affectés par l’augmentation de la TSV, bénéficieraient d’un abattement de 65 % sur la base d’imposition pour tenir compte des coûts particuliers que suppose la gestion d’un stock physique de vidéos.

L’impact budgétaire global serait neutre en 2020.

Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2017-1775 de finances rectificative pour 2017 a :

– tiré les conséquences de plusieurs décisions du Conseil constitutionnel ([234]) en assimilant aux éditeurs de services de télévision, pour l’application de la TST, toutes les personnes qui encaissent les sommes versées par les annonceurs – principalement les régisseurs – et en clarifiant l’exigibilité de la taxe entre l’éditeur lui‑même et son éventuel régisseur (article 37) ;

– tiré les conséquences de la décision du 30 mars 2017, Société EDI-TV ([235]) du Conseil constitutionnel, par laquelle ce dernier a déclaré contraire à la Constitution une partie de la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision, régie par l’article 302 bis KG du CGI ([236]), faisant apparaître les fragilités juridiques de dispositions similaires relatives à la TSV (article 36).

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Cet article a été adopté sans modification.

I.   L’État du droit

Le présent article porte sur deux taxes affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) : la taxe sur les services de télévision (TST), qui se décompose en une part due par les éditeurs (TST‑E) et une part due par les distributeurs (TST‑D), et la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV).

Ces taxes font partie d’un ensemble plus vaste des taxes portant sur le secteur du cinéma et de l’audiovisuel, présenté ci‑dessous.

Les taxes du secteur du cinéma et de l’audiovisuel

Intitulé

Référence législative

Produit 2018
(en millions deuros)

Affectation

Taxe sur les entrées en salle

1609 duovicies du CGI

146

CNC

Taxe sur les services de télévision due par les éditeurs (TST-E)

L. 115-6 du CCIA

296,8

Taxe sur les services de télévision due par les distributeurs (TST‑D)

L. 115-6 du CCIA

203,2

Taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV) (1)

1609 sexdecies B du CGI

25,7

Contribution à l’audiovisuel public (ex-redevance télé)

1605 bis du CGI

3 307,6 (1)

Compte de concours financiers à l’audiovisuel

(1)   Hors dégrèvements.

Source : CGI, code du cinéma et de limage animée (CCIA), direction du budget.

La présentation de l’état du droit concernant la TST et la TSV reprend des développements issus du rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017 ([237]).

A.   La taxe sur les services de télévision

La taxe sur les services de télévision (TST) se décompose en une composante due par les éditeurs (TST‑E) et une composante due par les distributeurs (TST‑D). En 2018, le rendement de la TST s’est élevé à 500 millions deuros, dont 296,8 millions deuros pour la TSTE et 203,2 millions deuros pour la TSTD.

Les dispositions législatives relatives à la TST ont fait l’objet de diverses recodifications récapitulées ci-dessous, le dispositif en vigueur figurant désormais dans le code du cinéma et de l’image animée (CCIA).

Codifications successives des dispositions relatives à la TST

Article 28 de la loi n° 971239
du 29 décembre 1997 de finances rectificative pour 1997

Décret n° 2009-389 du 7 avril 2009 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code

Ordonnance n° 2009-901 du 24 juillet 2009 relative à la partie législative du code du cinéma et de limage animée

Articles du CGI :

302 bis KB,

302 bis KC,

1693 quater

et 1788 nonies

 

Article L. 102 AA du LPF

Articles du CGI :

1609 sexdecies,

1609 sexdecies A,

1609 sexdecies B

et 1693 quater du CGI

Articles L. 115‑6 à L. 115‑13 du code du cinéma et de l’image animée

CGI : code général des impôts. LPF : Livre des procédures fiscales.

1.   La genèse de la taxe

● Créée par la loi de finances pour 1984 ([238]), la taxe sur les services de télévision (TST) pesait initialement sur :

– les abonnements et autres rémunérations acquittés par les usagers, afin de recevoir les services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre ou distribués par câble ;

– le produit des messages publicitaires diffusés dans le cadre de ces services de télévision.

Le tarif de la taxe était initialement fixé à partir d’un barème progressif en fonction des sommes encaissées hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) par les sociétés de télévision. Dans son rapport annuel pour 1993, la Cour des comptes avait souligné le fait que, s’agissant du produit des messages publicitaires, l’assiette de la taxe n’était pas suffisamment clairement définie par la loi, en visant, sans plus de précisions, les sommes encaissées par les chaînes de télévision au titre de ces messages publicitaires.

Or, le développement important des régies publicitaires gérant pour le compte de ces chaînes leurs espaces publicitaires a introduit une incertitude importante sur les conditions d’application de la taxe. En l’absence de précision du législateur, le ministère de tutelle l’a d’office appliquée aux recettes de publicité effectivement perçues par les sociétés redevables et non aux sommes encaissées par leurs régies publicitaires.

Il en a résulté une incitation évidente, pour les sociétés débitrices, à transférer une partie de leurs recettes publicitaires à ces régies afin de minorer l’assiette taxable.

● Dans le but d’apporter une solution à ce problème, l’article 28 de la loi de finances rectificative pour 1997 ([239]) a procédé à l’insertion, dans le CGI, de quatre articles reprenant de manière plus précise le principe de la taxe sur les services de télévision (articles 302 bis KB, 302 bis KC, 1693 quater et 1788 nonies du CGI). L’assiette de la taxe, faisant l’objet de l’article 302 bis KB, visait plus clairement :

– le montant hors TVA des abonnements et autres sommes versées en rémunération d’un service de télévision par les usagers ou par les exploitants d’un réseau câblé ;

– les sommes versées par les annonceurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires aux sociétés redevables ou aux régisseurs de messages publicitaires ou de parrainages, après application d’un abattement forfaitaire de 4 % ;

– le produit de la redevance d’usage des appareils de télévision (ex‑redevance télé).

L’article 302 bis KC a prévu l’application à cette assiette d’un barème progressif, sappliquant indistinctement aux éditeurs ou aux distributeurs de service de télévision. Cette version de la taxe issue de la loi de finances rectificative pour 1997 a connu de nombreuses évolutions, affectant notamment son assiette, afin de suivre les évolutions technologiques du secteur :

– l’article 120 de la loi de finances pour 2005 ([240]) a permis d’inclure les sommes tirées de l’exploitation de nouveaux services interactifs payants proposés aux téléspectateurs (SMS, appels surtaxés, services télématiques) ;

– l’article 165 de la loi de finances pour 2006 ([241]) a ajouté aux recettes publicitaires les recettes de parrainage, c’est-à-dire le fait pour un annonceur d’associer sa marque à une émission ;

– l’article 90 de la loi de finances rectificative pour 2007 ([242]) a profondément rénové le régime de la taxe en distinguant plus clairement les deux catégories de redevables que sont les éditeurs et les distributeurs de services de télévision, le taux de l’imposition étant dès lors différent pour ces deux catégories ;

– l’article 35 de la loi de finances pour 2011 ([243]) a inclus les offres composites dans l’assiette de la TST‑D ;

– l’article 79 de la dernière loi de finances rectificative pour 2012 ([244]) a introduit une distinction entre les abonnements proposés par les distributeurs, ceux permettant l’accès uniquement à des services de télévision faisant l’objet d’une déduction de 10 % et les offres composites faisant l’objet d’une déduction de 66 % ;

– l’article 30 de la loi de finances rectificative pour 2013 ([245]) a élargi l’assiette de la TST‑E aux produits de la télévision de rattrapage, autrement dit des programmes visibles gratuitement sur internet en « replay », pour une durée déterminée, qui produisent des recettes publicitaires significatives ;

– l’article 37 de la loi de finances rectificative pour 2017 ([246]) a tiré les conséquences de plusieurs décisions du Conseil constitutionnel ([247]) en assimilant aux éditeurs de services de télévision, pour l’application de la taxe, toutes les personnes qui encaissent les sommes versées par les annonceurs – principalement les régisseurs – et en clarifiant l’exigibilité de la taxe entre l’éditeur lui‑même et son éventuel régisseur.

Les décisions du Conseil constitutionnel censurant des dispositions relatives aux redevables et à l’assiette de la TST‑E

Dans sa décision n° 2013684 du 29 décembre 2013, Loi de finances rectificative pour 2013, le Conseil constitutionnel a jugé que l’extension de l’assiette de la TST‑E aux sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion de leurs messages publicitaires ou de parrainage aux redevables de la taxe « ou à toute personne en assurant lencaissement » conduisait à faire peser la taxe sur des personnes qui ne disposent pas en fait des revenus ou des ressources qui y sont soumises (a du 1° de l’article L. 115‑7 du CCIA).

Dans sa décision n° 2013-362 QPC du 6 février 2014, TF1 SA [Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision], le Conseil a censuré, pour la même raison, le fait que cette même taxe soit assise sur les sommes versées par les opérateurs de communications électroniques « ou aux personnes en assurant lencaissement » à raison des appels téléphoniques à revenus partagés, des connexions à des services télématiques ou des envois de minimessages qui sont liés à la diffusion de leurs programmes.

Enfin, dans sa décision n° 2017-669 QPC du 27 octobre 2017, Société EDI-TV [Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision II], le Conseil a censuré, pour un motif semblable à ceux qui ont conduit aux décisions décrites ci-dessus, le fait que la TST–E soit assise sur les sommes versées par les annonceurs ou les parrains, pour la diffusion de leurs messages publicitaires ou de parrainage y compris sur les services de télévision de rattrapage, aux redevables concernés par la taxe « ou aux régisseurs de messages publicitaires et de parrainage ». Ces dispositions conduisaient à soumettre un contribuable à une imposition dont l’assiette peut inclure des revenus dont il ne dispose pas.

2.   Le dispositif actuel

a.   Les redevables (article L. 115‑6 du CCIA)

● La TST pèse d’une part sur les éditeurs de services de télévision au sens de l’article 2 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ([248]), c’est-à-dire « tout service de communication au public par voie électronique destiné à être reçu simultanément par lensemble du public ou par une catégorie de public ».

À ce titre, sont redevables de la taxe les entreprises publiques ou privées qui programment des émissions de télévision nationales, régionales ou locales, quel que soit le support de diffusion de ces émissions.

L’article L. 115‑6 du CCIA précise qu’« est regardée comme éditeur de services de télévision toute personne qui encaisse les sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion par un éditeur ». Ainsi, un régisseur qui encaisse les sommes versées par les annonceurs et les parrains en vue de la diffusion par un éditeur est « pour lapplication de cette taxe », regardé comme un éditeur redevable de la TST‑E.

● Elle pèse, d’autre part, sur les distributeurs de services de télévision au sens de l’article 2‑1 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, c’est-à-dire les personnes qui établissent avec des éditeurs de services de télévision ou avec d’autres distributeurs des relations contractuelles en vue de constituer une offre de services de communication audiovisuelle mise à disposition du public par un réseau de communication électronique.

La TST-E et la TST-D ne pèsent que sur les éditeurs et distributeurs établis en France lorsqu’ils ont programmé, au cours de l’année civile précédente, des œuvres audiovisuelles ou cinématographiques éligibles aux aides du CNC. Il s’agit des éditeurs qui ont en France le siège de leur activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu. Le siège de l’activité s’entend du lieu d’exploitation où l’intéressé exerce l’ensemble de son activité et l’établissement stable de tout centre d’activité où la personne effectue de manière régulière des prestations imposables.

b.   L’assiette (article L. 115-7 du CCIA)

L’assiette en vigueur de la TST est différente selon que la taxe s’applique aux éditeurs ou aux distributeurs de services de télévision.

● La TSTE s’applique aux sommes :

– versées par les annonceurs et les parrains, pour la diffusion de leurs messages publicitaires et de parrainage y compris sur les services de télévision de rattrapage ([249]), aux redevables concernés. Il est précisé que les sommes reversées par un régisseur ([250]) à un éditeur sont comprises dans l’assiette taxable de l’éditeur et non du régisseur ;

– résultant de la contribution à laudiovisuel public (CAP) (exredevance) encaissée par les redevables concernés, à l’exception de la société France Télévisions au titre de ses services de télévision spécifiques à l’outre-mer, et des autres ressources publiques ;

– versées directement ou indirectement par les opérateurs de communications électroniques aux redevables concernés, à raison des appels téléphoniques à revenus partagés, des connexions à des services télématiques et des envois de minimessages qui sont liés à la diffusion de leurs programmes, à l’exception des programmes servant une grande cause nationale ou d’intérêt général.

● La TST–D s’applique aux abonnements et aux autres sommes acquittés par les usagers en rémunération :

– d’un ou plusieurs services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l’objet d’une déduction de 10 % ;

– de services souscrits dans le cadre doffres destinées au grand public, composites ou de toute autre nature, donnant accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l’objet d’une déduction de 66 %.

Un éditeur de services de télévision dont le financement fait appel à une rémunération de la part des utilisateurs et qui encaisse directement le produit des abonnements est à la fois redevable de la TST‑E et de la TST‑D, selon le deuxième alinéa de l’article L. 115‑6 du CCIA.

c.   Le taux (article L. 115-9 du CCIA)

● La TSTE est calculée en appliquant un taux de 5,65 % au montant des encaissements bruts, après application d’un abattement de 11 millions deuros qui ne s’applique pas aux sommes provenant de la télévision de rattrapage. Dans le cas où intervient un régisseur qui serait alors une personne « regardée comme éditeur de services de télévision » pour l’application de la TST‑E, cet abattement est réparti entre l’éditeur et le régisseur au prorata de l’assiette respective établie pour chacun d’eux.

Lorsque l’éditeur ne bénéficie d’aucune ressource publicitaire, le montant de l’abattement est porté à 16 millions deuros. Cet abattement spécifique, instauré par l’article 20 de la loi de finances pour 2012 ([251]), bénéficie en particulier aux chaînes parlementaires, à la chaîne Arte et à la chaîne France Info TV.

Il est actuellement prévu que le montant de la taxe est réduit de 50 % pour la société France Télévisions au titre de ses services spécifiques à l’outre-mer ou pour les services de télévision dont l’éditeur est établi dans les départements d’outre-mer. Cette réduction vient donc en supplément de celle, mentionnée ci‑dessus, prévoyant que le montant de la CAP encaissé par cette société au titre de ses services de télévision spécifiques à l’outre-mer n’est pas compris dans l’assiette de la taxe.

● La TST–D est calculée en appliquant à la fraction des encaissements bruts annuels hors TVA excédant la somme de 10 millions d’euros le barème suivant :

– 0,5 % pour la fraction supérieure à 10 millions d’euros et inférieure à 250 millions d’euros ;

– 2,1 % entre 250 et 500 millions d’euros ;

– 2,8 % entre 500 et 750 millions d’euros ;

– 3,5 % au-delà de 750 millions d’euros.

● Les éditeurs qui s’auto‑distribuent sont à la fois redevables de la TSTE et de la TSTD. Ils se voient appliquer une majoration de 3,75 points de pourcentage pour la fraction du montant des encaissements excédant 750 millions d’euros, soit un taux de 7,25 % au lieu de 3,5 %.

d.   Les modalités de recouvrement (article L. 115‑10 et L. 115‑11 du CCIA)

La TST présente la particularité d’être acquittée auprès de l’agent comptable du CNC par acomptes mensuels ou trimestriels. À cet effet, les redevables doivent remplir chaque année une déclaration conforme à un modèle agréé par le CNC.

Ils versent des acomptes mensuels ou trimestriels, selon la périodicité de leur déclaration de TVA, respectivement égaux au douzième ou au quart du montant de la taxe due au titre de lannée civile précédente. Une régularisation intervient ensuite, dans les mêmes conditions que pour la TVA, au mois d’avril de l’année suivant celle du versement des acomptes.

Sans modification des modalités de versement des acomptes, l’avantage d’une disposition favorable aux redevables modifiant les paramètres de la TST au titre de l’année N n’entraînera un gain pour ces derniers qu’à partir du mois d’avril de l’année N+1.

L’article 61 du présent projet de loi de finances modifie les modalités de recouvrement de la TST en transférant à la DGFiP la mission de recouvrement à compter de 2021 ([252]).

B.   La taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV)

1.   La genèse de la taxe

Initialement créée par l’article 49 de la loi de finances pour 1993 ([253]) pour les ventes sur supports physiques, cette taxe a fait l’objet d’une réforme dans le cadre de la loi du 18 juin 2003 relative à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque ([254]) visant à létendre à la diffusion en ligne avec « pour objet de tirer parti de la forte croissance que connaît le secteur de la vidéo afin de dégager des ressources supplémentaires pour le financement de la production cinématographique et audiovisuelle » ([255]).

Depuis 2003, la taxe est donc due par les personnes qui vendent ou louent des vidéogrammes à une autre personne n’ayant pas elle-même pour activité la vente ou la location de vidéogrammes à raison de deux types d’opérations :

– la vente ou la location en France de vidéogrammes destinés à l’usage privé du public, c’est-à-dire sur un support physique ;

– la mise à disposition du public d’un service offrant l’accès à titre onéreux à des œuvres cinématographiques ou audiovisuelles, sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique, c’est-à-dire en vidéo à la demande.

Le taux de la taxe est depuis cette date de 2 % du montant des opérations hors TVA ; un taux spécifique de 10 % s’applique pour la vente ou la location d’œuvres ou documents pornographiques ou d’incitation à la violence.

L’article 30 de la loi de finances rectificative pour 2013 ([256]) a, par ailleurs, étendu cette taxe aux opérateurs établis à létranger. Cette extension a été intégrée dans la nouvelle rédaction de l’article 1609 sexdecies B prévue par la loi de finances rectificative pour 2016 exposée ci-dessous.

2.   La réforme issue de la loi de finances rectificative pour 2016 et les modifications apportées par la loi de finances rectificative pour 2017

● Le régime de cette taxe a été profondément revu par l’article 56 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([257]).

Issu de l’adoption d’un amendement de la commission des finances de l’Assemblée nationale ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, cet article a modifié l’intitulé même de la taxe : auparavant dénommée « taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes destinés à lusage privé du public », elle a été rebaptisée en « taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels » et généralement désignée au cours des débats à l’Assemblée nationale sous le raccourci de « taxe YouTube ».

L’objectif de cette réécriture était en effet, pour l’essentiel, d’élargir la taxe à la publicité associée à des contenus audiovisuels diffusés gratuitement en ligne. Conformément à l’article 56 précité, ces nouvelles dispositions devaient entrer en vigueur à une date fixée par décret, ne pouvant être postérieure de plus de six mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne validant ce nouveau dispositif au regard du droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État.

Ce décret ayant été pris le 20 septembre 2017 ([258]), les nouvelles dispositions sont en vigueur depuis le 22 septembre 2017, soit, comme le prévoit le décret, le lendemain de sa publication au Journal officiel du 21 septembre. Celui-ci a également permis l’entrée en vigueur des précédentes dispositions issues de la loi de finances rectificative pour 2013 mentionnées ci-dessus.

Selon l’évaluation préalable du présent article, par une lettre du 18 juillet 2017, la Commission européenne a informé les autorités françaises qu’elles « nont plus à notifier la prolongation ou modification des trois taxes affectées au CNC », dans la mesure « où ces taxes ne sont plus considérées comme faisant partie intégrante dune mesure daide ».

En outre, le Conseil d’État a confirmé pour le passé que les taxes affectées au CNC ne faisaient pas partie intégrante d’un régime d’aide d’État au sens du droit de l’Union européenne ([259]).

● Dans sa décision du 30 mars 2017, Société EDI-TV ([260]), le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution une partie de la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision, régie par l’article 302 bis KG du CGI ([261]), faisant apparaître les fragilités juridiques de dispositions similaires relatives à la TSV.

La question prioritaire de constitutionnalité portait sur le fait que la taxe était assise sur le montant brut des sommes versées par les annonceurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires, aux éditeurs de services de télévision « ou aux régisseurs de messages publicitaires ». Les redevables de la taxe – les éditeurs – étaient donc imposables au titre d’une taxe assise sur des sommes perçues par des tiers – les régisseurs de messages publicitaires. Le législateur avait donc méconnu le principe d’égalité devant les charges publiques.

Sans que la requête vise la TSV, celle‑ci comportait les mêmes faiblesses. L’article 36 de la loi de finances rectificative pour 2017 a donc modifié la liste des redevables de la taxe ([262]).

3.   Le dispositif actuel

a.   Les opérations taxables (I de l’article 1609 sexdecies B du CGI)

La TSV est due à raison :

– de la vente ou de la location en France de vidéogrammes destinés à l’usage privé du public ;

– de la mise à disposition du public en France de services donnant accès à titre onéreux à des œuvres cinématographiques ou audiovisuelles, sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique ;

 de la mise à disposition du public en France de services donnant ou permettant laccès à titre gratuit à des contenus audiovisuels, sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique.

Sont exonérés les services dont les contenus audiovisuels sont secondaires, les services dont l’objet principal est consacré à l’information, ainsi que les services dont l’objet principal est de fournir des informations relatives aux œuvres cinématographiques ou audiovisuelles.

L’assiette de la taxe conserve donc le principe de destination, selon lequel seules les opérations proposées à des particuliers établis en France entrent dans le champ de la taxe. Sont réputés mis à disposition du public en France les services effectués en faveur des personnes physiques qui ont leur domicile ou leur résidence habituelle en France.

b.   Les redevables (II de l’article 1609 sexdecies B du CGI)

Sont redevables de la taxe les personnes établies en France ou à létranger :

– qui vendent ou louent en France des vidéogrammes à toute personne qui n’a pas pour activité la vente ou la location de tels vidéogrammes (sur support physique) ;

– qui mettent à la disposition du public en France des services donnant accès à titre onéreux à des œuvres cinématographiques ou audiovisuelles sur demande individuelle ;

– qui mettent à la disposition du public en France les services donnant accès gratuitement à des contenus audiovisuels, sur demande individuelle, « notamment [les personnes] dont lactivité est déditer des services de communication au public en ligne ou dassurer pour la mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne le stockage de contenus audiovisuels » ;

– qui encaissent les sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion de messages publicitaires et de parrainage sur les services de mise à disposition du public de vidéos à la demande à titre gratuit ou onéreux, c’est‑à‑dire les régisseurs publicitaires.

c.   L’assiette (III de l’article 1609 sexdecies B du CGI)

Le III de l’article 1609 sexdecies B prévoit que la TSV est assise :

– sur le prix acquitté lors de la vente de vidéogrammes sur support physique ou de la mise à disposition de services donnant accès à des œuvres cinématographiques ou audiovisuelles en ligne à titre onéreux ;

– sur les « sommes versées par les annonceurs et les parrains, pour la diffusion de leurs messages publicitaires et de parrainage » sur les services permettant d’accéder en ligne à des contenus audiovisuels, à titre gratuit ou onéreux. Ces sommes font l’objet d’un abattement de 66 % pour les services donnant accès à des contenus audiovisuels créés par des utilisateurs privés à des fins de partage et déchanges au sein de communautés dintérêt.

Un abattement de 100 000 euros est de plus applicable dans le cadre des sommes versées par les annonceurs à raison de la publicité en ligne. Il est réparti entre l’éditeur et le régisseur au prorata de l’assiette de la taxe.

Pour assurer la cohérence entre cette taxe et la TST‑E (article L. 115‑7 du CCIA), le IV de l’article 1609 sexdecies B exclut de l’assiette de la TSV les sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion de leurs messages publicitaires ou de parrainage sur les services de télévision de rattrapage, qui sont déjà soumises à la taxe sur les éditeurs de services de télévision.

Sont également exclues de l’assiette les sommes acquittées par les redevables établis en France au titre d’une taxe dans un autre État membre de l’Union européenne autre que la TVA, à raison des opérations taxables au titre de la TSV.

d.   Le taux (V de l’article 1609 sexdecies B du CGI)

Le taux de la taxe est fixé à 2 %. Il est porté à 10 % lorsque les opérations concernent des œuvres ou documents à caractère pornographique ou d’incitation à la violence.

e.   Les modalités de recouvrement (V de l’article 1609 sexdecies B du CGI)

La taxe est recouvrée dans les mêmes conditions que celles applicables en matière de TVA, définies à l’article 287 du CGI. À la différence de la TST, la TSV n’est donc pas recouvrée par le CNC mais par la direction générale des finances publiques (DGFiP).

C.   L’affectation de la TST et de la TSV au Centre national du cinéma et de l’image animée

● Le CNC est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de la culture. Ses missions sont définies à l’article L. 111‑2 du CCIA. Elles consistent à :

– observer l’évolution des professions et activités du cinéma et des autres arts et industries de l’image animée, leur environnement technique, juridique, économique et social ainsi que les conditions de formation et d’accès aux métiers concernés ;

– contribuer, dans l’intérêt général, au financement et au développement du cinéma et des autres arts et industries de l’image animée et d’en faciliter l’adaptation à l’évolution des marchés et des technologies ;

– contrôler les recettes d’exploitation des œuvres et documents cinématographiques ou audiovisuels réalisées par les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques et par les éditeurs de vidéogrammes destinés à l’usage privé du public ;

– tenir les registres du cinéma et de l’audiovisuel et, dans ce cadre, à centraliser et communiquer aux titulaires de droits tous renseignements relatifs aux recettes d’exploitation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles ;

– collecter, conserver, restaurer et valoriser le patrimoine cinématographique ;

– participer à la lutte contre la contrefaçon des œuvres cinématographiques et audiovisuelles et des œuvres multimédia.

La mission de contribution au financement du cinéma du CNC

L’article L. 111‑2 du CCIA dispose, qu’au titre de sa mission de financement du cinéma, le CNC soutient par l’attribution d’aides financières :

« a) La création, la production, la distribution, la diffusion et la promotion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles et des œuvres multimédia, ainsi que la diversité des formes dexpression et de diffusion cinématographique, audiovisuelle et multimédia ;

b) La création et la modernisation des établissements de spectacles cinématographiques, ainsi que ladaptation des industries techniques aux évolutions technologiques et linnovation technologique dans le domaine du cinéma et des autres arts et industries de limage animée ;

c) Les actions en faveur de léducation à limage et de la diffusion culturelle par limage animée ;

d) Les actions à destination des professions et activités du cinéma et des autres arts et industries de limage animée, ainsi que celles susceptibles de favoriser la promotion et le développement du cinéma et des autres arts et industries de limage animée en France et à létranger ;

e) La création et la production cinématographiques, audiovisuelles et multimédia dans les pays en développement, notamment par la mise en place dactions et de programmes de coopération et déchanges ;

f) La formation professionnelle, initiale et continue ;

g) La collecte, la conservation, la restauration, la diffusion et la promotion du patrimoine cinématographique ;

h) Les œuvres sociales, ainsi que les organisations et syndicats professionnels ; »

Selon ce même article, le CNC « peut, dans le cadre de conventions conclues avec lÉtat, les établissements publics de lÉtat et avec toute association et organisme soumis au contrôle de la Cour des comptes, assurer la centralisation de tout ou partie des crédits ouverts à leurs budgets, consacrés à la création, à la production et à la diffusion dœuvres cinématographiques et audiovisuelles et dœuvres multimédia. »

● Pour assurer ses missions, le CNC bénéficie de ressources de diverses natures, listées à l’article L. 114‑1 du CCIA. Parmi elles figurent celles provenant des taxes et prélèvements qui lui sont affectés, à savoir :

– la taxe sur le prix des entrées aux séances organisées par les exploitants détablissements de spectacles cinématographiques (TSA), codifiée aux articles L. 115‑1 à L. 115‑5 du CCIA ;

– la TST, dans chacune de ses deux composantes (la TST‑E et la TST‑D), codifiée aux articles L. 115‑6 à L. 115‑13 du même code ;

– la TSV, codifiée à l’article 1609 sexdecies B du CGI, et dont l’affectation est prévue à l’article L. 116‑1 du CCIA ;

– diverses autres taxes dont la taxe spéciale sur la distribution de films pornographiques ou d’incitation à la violence (article L. 116‑2 du CCIA), les prélèvements spéciaux sur la fraction des bénéfices industriels et commerciaux résultant d’opérations portant sur des œuvres à caractère pornographique ou d’incitation à la violence (articles L. 116‑3 et L. 116‑4 du CCIA).

En 2018, le produit des principales taxes (TSA, TST, TSV) qui financent le CNC s’est élevé à 671,7 millions deuros selon le tome I de l’annexe Voies et moyens du présent projet de loi de finances. Il a représenté, hors régularisations et recettes diverses, 83 % des ressources totales du CNC hors reprises sur provision ([263]).

Les recettes publiques du CNC

(en millions d’euros)

Recettes

2012(4)

2013(4)

2014(4)

2015(4)

2016(4)

2017(4)

2018(3)

2019(3)

Taxe sur les entrées en salle

144,0

130,2

143,9

140,3

151,6

148,3

146,0

151,2

Taxe sur les services de télévision

574,5

532,4

498,5

504,3

509,4

510,5

500,0

494,4

 dont taxe sur les éditeurs de services de télévision (TSTE)

295,5

308,8

269,1

286,9

274,5

290,2

296,8

298,7

 dont taxe sur les distributeurs de services de télévision (TSTD)

279 (1)

223,6

229,5

217,5

234,9

220,3

203,2

195,7

Taxe sur la diffusion de contenus audiovisuels (2)

31

25,8

22,6

19,4

17,7

16,2

25,7

29,2

Total recettes du CNC (hors prélèvements ou régulations)

749,5

688,4

665

664

678,7

675

671,8

674,8

Prélèvement sur le fonds de roulement du CNC

– 150

– 90

– 30

Mesures d’écrêtements du produit des taxes affectées

– 50

Total général

699,5

538,4

575

664

678,7

645

671,8

674,8

(1) Le produit de cette taxe a été plafonné à 229 millions d’euros, 50 millions d’euros ayant été reversés au budget général de l’État.

(2) Cette taxe a été ainsi renommée par l’article 56 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016. Avant l’entrée en vigueur de cet article le 22 septembre 2017, cette taxe était intitulée : « taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes destinés à l’usage privé du public ».

(3) Ces chiffres sont issus du document stratégique de performance du CNC dans le cadre du PLF 2020.

(4) Exécution des taxes affectées au CNC

Source : direction du budget, CNC.

Par dérogation au II de l’article 18 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ([264]), les taxes affectées au CNC ne sont pas soumises au mécanisme de plafonnement de l’article 46 de la loi de finances pour 2012.

Le Rapporteur général constate que le Gouvernement na pas présenté en annexe au projet de loi de finances les raisons pour lesquelles les taxes affectées au CNC ne sont pas plafonnées, alors même que cette justification est prévue par le même article 18 de la LPFP 2018-2022, cette disposition ayant pourtant été introduite à linitiative du Gouvernement lui-même.

En réponse à un questionnaire du Rapporteur général, le ministère de la culture a fourni plusieurs justifications à cette absence de plafonnement, notamment l’absence de risque de pilotage de la dépense par des recettes croissantes et la nécessité de conserver le lien entre les taxes et le régime des aides.

● Ces ressources financent principalement des dépenses de soutien vers les secteurs cinématographiques et audiovisuels. Au total, les dépenses de soutien engagées par le CNC en 2018 ([265]) se sont élevées à 732 millions d’euros ([266]).

D.   La nécessité de pallier un défaut d’équité et de neutralité économique

1.   Un problème général de défaut d’équité et de neutralité économique

● En l’état, l’ensemble fiscal exposé ci-dessus entraîne un défaut déquité et de neutralité économique.

Les paramètres de la TST‑E et de la TSV laissent en effet apparaître un défaut déquité entre les acteurs éditant des contenus audiovisuels en ce que les éditeurs linéaires – notamment hertziens – acquittent la première au taux de 5,65 % et que les services de médias audiovisuels à la demande acquittent la seconde au taux près de trois fois inférieur de 2 %. La matière taxable de ces deux taxes est pourtant proche, puisqu’il s’agit, pour l’essentiel, de ressources issues de messages publicitaires liés à la diffusion de contenu audiovisuel.

De plus, ces paramètres de taux favorisent le secteur le plus dynamique, le taux le plus élevé étant appliqué au marché le moins dynamique. Il est d’ailleurs probable que la croissance des secteurs dynamiques affecte celle des secteurs plus mûrs. Des effets de reports entre le visionnage de la télévision et le visionnage de la vidéo en ligne semblent exister. Une étude quantitative du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de janvier 2018 ([267]) sur les habitudes de consommation des jeunes publics montre ainsi que l’accès aux contenus vidéo sur internet pèse à la baisse sur la consommation de télévision. Entre 2012 et 2016, chaque hausse d’un million du nombre d’abonnements à une offre internet fixe ou mobile qui permet d’accéder aux contenus en ligne s’est accompagnée d’une diminution de la durée d’écoute de la télévision (DEI) de l’ordre de quatre minutes en moyenne pour les 4 – 14 ans. Plus généralement, la consommation de contenus vidéo pèse à la baisse sur les autres activités des jeunes publics, comme les activités sportives ou le temps de sommeil, témoignant de l’essor du marché.

● Plusieurs mesures ou initiatives ont été prises récemment pour favoriser un rééquilibrage entre les secteurs mûrs ou traditionnels et les activités de service proposées par des acteurs plus récents, reposant sur le numérique, comme le souligne l’exposé des motifs du présent article. L’article 26 de la loi de finances pour 2019 ([268]) a ainsi supprimé trois taxes pesant sur les messages publicitaires diffusés à la radio et à la télévision :

– la taxe sur la publicité télévisée (article 302 bis KA du CGI) ;

– la taxe sur la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision (article 302 bis KD du CGI) ;

– la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision (article 302 bis KG du CGI).

Ces trois taxes, dont le rendement agrégé était d’environ 50 millions d’euros, frappaient les revenus issus de la publicité et les mêmes redevables, à savoir les éditeurs et régies publicitaires.

2.   La nécessité de prendre en compte des situations particulières

Au regard de l’équité fiscale devant la TST, certains redevables sont dans des situations particulières qu’il convient de prendre en compte.

● C’est le cas pour France Télévisions et des redevables de la TST‑E qui ne peuvent pas bénéficier de ressources publicitaires.

France Télévision supporte des sujétions pour charges de service public qui ne sont pas prises en compte dans le calcul du montant de la TST‑E. Certes, il existe deux dispositifs d’allégements pour atténuer les coûts de France Télévisions liés aux services de télévisions spécifiques à l’outre-mer, mais ils ne portent que sur une partie des surcoûts de la société. France Télévisions assume en effet des coûts liés à plusieurs missions qui figurent au titre III de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ([269]) :

– elle assure la promotion des langues régionales et met en valeur la diversité du patrimoine culturel et linguistique de la France (article 43‑11) ;

– elle conçoit et diffuse en région des programmes qui reflètent la diversité de la vie économique, sociale et culturelle en région et proposent une information de proximité sur l’ensemble du territoire (article 44) ;

– elle consacre un temps d’émission aux formations politiques et aux organisations syndicales et professionnelles (article 55) ;

– elle programme des émissions à caractère religieux consacrées aux principaux cultes en France (article 56).

Le cahier des charges de France Télévisions lui impose en outre la programmation de plusieurs émissions, listées au II du chapitre Ier de l’annexe au décret du 23 juin 2009 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme France Télévisions ([270]). Il y a lieu de noter que les sujétions pour charge de service public sont un critère de répartition du produit de la contribution à l’audiovisuel public, alloué à France Télévisions, Arte, l’INA, TV5 Monde, Radio France et France Médias Monde.

C’est le cas également des chaînes de télévision qui ne peuvent pas bénéficier de ressources publicitaires. Elles bénéficient, comme vu ci-avant, d’une majoration de 5 millions d’euros de l’abattement applicable à la base de la TST‑E.

 Les éditeurs de services de télévision qui sautodistribuent sont dans une situation particulière au regard de la TST, dans la mesure où ils sont redevables de chacune de ses deux composantes, conformément au deuxième alinéa de l’article L. 115‑6. Le taux de la tranche supérieure du barème de la TST‑D est en outre majoré, pour eux, de 3,75 points. L’introduction de cette majoration par la loi de finances pour 2011 ([271]) avait été présentée, lors des débats, comme une contrepartie au maintien du taux de TVA réduit de 10 % sur les abonnements de télévision souscrits par les clients, prévu actuellement par le b octies de l’article 279 du CGI.

Néanmoins, l’évaluation préalable souligne que les éditeurs qui s’auto‑distribuent sont dans une situation particulière en ce qu’ils doivent supporter des contraintes liées à la gestion d’un parc d’abonnés à un service qui est disponible sur l’ensemble des réseaux de diffusion.

● Enfin, les vendeurs et loueurs de vidéos physiques (DVD et Blue-Ray) doivent supporter des coûts de gestion de stock, à la différence des autres redevables de la TSV.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   L’alignement des taux de la taxe sur les services de télévision et de la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels

● Le du B du I du présent article modifie l’article L. 115‑9 du CGI pour :

– fixer à 5,15 % le taux de la TST‑E au lieu de 5,65 %, opérant ainsi une diminution du taux de 8,7 % ;

– diminuer d’un million d’euros le montant de l’abattement dont bénéficient les redevables de l’assiette pour l’établir à 10 millions d’euros, pour un impact estimé à 1,2 million d’euros ([272]) ;

– augmenter de 16 à 30 millions d’euros l’abattement dont bénéficient les éditeurs de services de télévision qui ne bénéficient pas de ressources procurées par la diffusion de messages publicitaires.

● Le B du II modifie les règles de taux et d’assiette de la TSV définies au V de l’article 1609 sexdecies B.

Le établit à 5,15 % le taux de la taxe au lieu de 2 %, pour l’aligner sur le taux proposé de la TSTE, ce qui représente une augmentation de 157,5 % du taux. Parallèlement, il porte le taux particulier de 10 % pour les opérations concernant les œuvres ou documents à caractère pornographique ou d’incitation à la violence à 15 %, soit une augmentation de 50 %.

B.   La prise en compte de situations particulières

Le présent article propose plusieurs dispositions pour alléger la charge fiscale résultant de la TST‑E ou de la TSV afin de tenir compte des situations particulières de plusieurs contribuables.

1.   Un abattement spécifique en faveur de la société France Télévisions

● Le A du I du présent article modifie le b du 1° de l’article L. 115‑7 du CCIA afin que la société France Télévisions bénéficie d’un abattement de 8 % sur la part de l’assiette de la TST‑E constituée du produit de la contribution à l’audiovisuel public (ex‑redevance télévision) qu’encaissent les redevables de la TST‑E. Il s’agit de prendre en compte les sujétions particulières présentées ci‑dessus auxquelles est soumise la société France Télévisions. Le montant de l’avantage ainsi octroyé n’est pas précisé par l’évaluation préalable de l’article.

● La disposition proposée confère à France Télévisions un avantage qu’elle n’aurait pas pu obtenir en l’absence d’intervention de l’État, c’est-à-dire un avantage au sens de l’article 107 paragraphe 1 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) susceptible de constituer une aide d’État. Le droit de l’Union européenne prévoit toutefois des dispositions particulières pour les entreprises chargées de la gestion de services dintérêt économique général (SIEG). L’article 106 du TFUE dispose en effet qu’elles sont soumises aux règles de concurrence « dans les limites où lapplication de ces règles ne fait pas échec à laccomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie ».

Pour ces entreprises les mesures avantageuses dont elles bénéficient peuvent être qualifiées de compensations de service public et échapper ainsi à la qualification d’aides d’État dès lors que quatre conditions cumulatives dégagées par la jurisprudence de la Cour européenne de justice ([273]) sont satisfaites :

– l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies. Ce critère semble respecté s’agissant de France Télévisions ;

– les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente pour éviter qu’elle comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport aux entreprises concurrentes ;

– la compensation ne peut dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes qui y sont relatives et d’un bénéfice raisonnable. Il ne s’agit pas, selon le droit européen, d’établir les paramètres de compensation au moyen d’une formule, mais que l’on sache exactement, dès le départ, comment la compensation est déterminée ([274]). Lorsqu’une révision de la compensation est prévue, l’acte correspondant doit préciser les modalités de la révision et son incidence éventuelle sur le montant total de la compensation ;

– lorsque le choix de l’entreprise en charge de l’exécution du service public n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée, aurait encourus pour exécuter ces obligations.

Si le montant de l’aide est inférieur au seuil spécifique pour les SIEG de 500 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux, l’aide est qualifiée d’aide de minimis. Elle n’affecte pas les échanges et échappe donc à la qualification d’aide d’État ([275]). Dans le cas où ces conditions ne sont pas réunies, l’avantage peut être qualifié d’aide d’État incompatible avec le droit de l’Union européenne.

Le Rapporteur général a interrogé le Gouvernement sur la constitutionnalité du dispositif au regard du principe d’égalité devant la loi et sur sa compatibilité avec les règles du droit de l’Union européenne relatives au régime des aides d’État.

Celui-ci a répondu que la mesure est compatible avec le droit de l’Union européenne, au regard notamment de la communication de la Commission européenne du 27 octobre 2009 concernant l’application aux services publics de radiodiffusion des règles relatives aux aides d’État ([276]). Il rappelle ainsi que la Commission a autorisé le mécanisme annuel de financement de France Télévisions comme étant conforme aux règles de l’Union européenne sur les aides d’État ([277]) en vigueur en 2008. Plusieurs recours formés devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) par des concurrents de France Télévisions ont été rejetés entre 2005 et 2008, approuvant diverses mesures de financement en faveur de la société ([278]).

En l’espèce, l’abattement de TST constitue une nouvelle modalité de financement de France Télévisions qu’il n’est pas nécessaire de notifier à la Commission, tant qu’elle n’induit pas une surcompensation de ses obligations de service public. Tel ne serait pas le cas, d’autant plus que les recettes de France Télévisions issues de la contribution à l’audiovisuel public diminueront en 2020 de plus de 60 millions d’euros ([279]).

S’agissant de la conformité de cette disposition au principe d’égalité, le Gouvernement estime que les sujétions de service public de France Télévisions constituent des critères objectifs et rationnels permettant de prévoir un traitement fiscal particulier sans qu’il soit dérogé au principe d’égalité.

2.   La majoration de l’abattement en faveur des chaînes ne disposant pas de ressources publicitaires

Comme mentionné ci‑dessus, le  du B du I porte l’abattement dont bénéficient les éditeurs de services de télévision qui ne bénéficient pas de ressources publicitaires de 16 à 30 millions deuros. Selon l’évaluation préalable, cette disposition bénéficiera notamment à la chaîne Arte, au titre des sujétions qu’elle supporte du fait de ses missions de service public, précisées par le contrat de formation du groupement européen d’intérêt économie (GEIE) Arte ([280]). Selon l’article 19 de ce contrat, les ressources d’Arte ne peuvent provenir de messages publicitaires.

Selon le Gouvernement, l’augmentation de l’abattement de 16 à 30 millions d’euros est justifiée par la croissance de la part des audiences d’Arte France qui est passée de 1,5 % en 2011 à 2,5 % en 2018. Le coût d’opportunité de l’absence de publicité aurait donc crû proportionnellement à l’audimat de la chaîne. D’après ce raisonnement, le montant de l’abattement de 30 millions d’euros correspondrait donc à une audience de 2,8 %, « niveau susceptible dêtre rapidement atteint » selon l’évaluation préalable.

Il y a toutefois lieu de remarquer que la création de cet abattement particulier en 2011 résulte d’une initiative parlementaire ([281]) dont la cible principale n’était pas la chaîne Arte, mais les chaînes parlementaires, comme le montrent d’ailleurs les débats lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012 ([282]). Les chaînes ne bénéficiant pas de ressources publicitaires bénéficieraient donc à la fois de la baisse du taux proposée et d’une augmentation de 87,5 % du montant de l’abattement.

● Le du B du I diminue la majoration du taux de la tranche du barème de la TST‑D applicable à la fraction des encaissements supérieure à 750 millions d’euros pour les éditeurs qui sautodistribuent. Fixée à 3,75 points de pourcentage dans le droit en vigueur, elle serait ramenée à 3,30 points. Ces redevables se verraient donc appliquer un taux de 6,80 % sur cette fraction, au lieu du taux actuellement applicable de 7,25 %. Il y a lieu de remarquer que le taux proposé resterait un taux majoré par rapport au taux de 3,50 % applicable sur cette tranche aux éditeurs qui n’exercent pas l’activité de distributeur.

● Le du B du II atténue l’effet de l’augmentation du taux de la TSV pour les loueurs ou vendeurs de vidéo sur support physique par la création dun abattement de 65 % sur la base dimposition. Sont toutefois exclues du champ de l’abattement les opérations concernant des œuvres ou documents à caractère pornographique ou d’incitation à la violence.

C.   Les dispositions de coordination et de transition

Le présent article procède à une mise en cohérence des règles de lassiette de la TSV avec des dispositions proposées par ailleurs par le présent projet de loi de finances et instaure un dispositif transitoire pour l’entrée en vigueur des dispositions relatives à la TST.

● Le du A du II précise les règles de territorialité de l’article 1609 sexdecies B du CGI pour l’assujettissement des opérations de vente et location en France de vidéos sur support physique. Il ajoute en effet un alinéa au I de cet article afin que ces opérations soient réputées être réalisées en France lorsqu’elles le sont au titre de la TVA. Cette disposition introduit donc une différence de forme dans la définition du champ territorial de la taxe entre la vente et la location sur support physique et la mise à disposition de contenu audiovisuel en ligne, à titre onéreux ou gratuit.

Elle s’explique par la nécessité de coordonner les règles de territorialité de livraisons de biens avec celles relatives à la TVA, lesquelles sont réformées par les articles 10 et 53 du présent PLF, afin de transposer la directive 2018/1910 du Conseil du 4 décembre 2018 ([283]) et la directive 2017/2455 du Conseil du 5 décembre 2017 ([284]).

Les règles de territorialité des ventes réalisées à distance sont ainsi modifiées ([285]) et seraient définies dans de nouvelles versions des articles 258 et 258 A du CGI. Le  tire les conséquences légistiques de ces modifications au dernier alinéa du I de l’article 1609 sexdecies B du même code.

● Le III met en place des règles dérogatoires de calcul des acomptes versés par les redevables de la TSTE et de la TSTD pour lannée 2019, afin qu’ils puissent bénéficier de manière anticipée des gains engendrés par les modifications apportées à ces dispositifs.

Le A prévoit donc que les acomptes mensuels ou trimestriels versés en 2020 au titre de la TST‑E soient respectivement au moins égaux au douzième ou au quart du montant de l’assiette de la TST‑E après l’abattement de 10 millions d’euros constaté en 2019, auquel on applique le taux de 5,15 %. Sans cette modification législative, la lecture combinée des articles L. 115–7, L. 115‑9 et L. 115‑10 conduirait à ce que les acomptes mensuels ou trimestriels versés en 2020 soient au moins égaux au douzième ou au quart du montant de la taxe acquittée en 2019, année où est applicable le taux de 5,65 %. De cette manière, les entreprises bénéficieront dès 2020 de la baisse du taux, nonobstant la modification de l’abattement, et n’auront pas à attendre l’opération de régularisation en 2021.

Symétriquement, le B prévoit que les acomptes versés selon les mêmes modalités au titre de la TST‑D soient au moins égaux en 2020 au douzième ou au quart de l’assiette de cette taxe constatée en 2019, pour la partie excédant 10 millions d’euros – montant correspondant à l’entrée dans le barème – auquel on applique les taux du barème et notamment le taux majoré applicable aux éditeurs qui s’auto‑distribuent que le présent article propose de modifier.

D.   L’impact économique et budgétaire et les perspectives

● Les dispositions du présent article n’auront pas d’impact sur le montant total des produits de la TST et de la TSV, le taux unique de la TST‑E et de la TSV ayant été déterminé pour que l’impact soit neutre sur les recettes du CNC selon l’évaluation préalable de l’article.

Dans son document stratégique de performance présenté dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2020 ([286]), le CNC a publié ses prévisions de rendement des trois principales taxes qui lui sont affectées, après prise en compte des modifications législatives proposées par le présent article.

Prévision de produits des principales taxes affectées au CNC
après les modifications prévues par l’article 62

(en millions d’euros, à l’arrondi près)

 

2018

2019
(p)

2020
(p)

2021
(p)

2022
(p)

2023
(p)

Taxe sur les entrées en salle (TSA)

146

146

147

148

150

150

Taxe sur les services de télévision (TST)

500

500

463

448

442

442

– dont taxe sur les éditeurs de services de télévision (TST E)

297

297

261

254

252

254

– dont taxe sur les distributeurs de services de télévision (TST D)

203

203

202

194

190

188

Taxe sur la diffusion de contenus audiovisuels (TSV)

26

30

66

73

75

76

Total

672

676

676

669

667

668

Source : tome I de l’annexe Voies et moyens du présent projet de loi de finances pour les années 2018 et 2019, document stratégique de performance du CNC pour les années 2020 à 2023.

On constate ainsi qu’en 2023, la somme des produits prévisionnels de la TST et de la TSV serait inférieure de 10,9 millions d’euros à la même somme attendue en 2020 (517,9 millions d’euros au lieu de 528,7 millions d’euros).

Selon ce rapport, les prévisions retenues de rendement de la TST-E pour les années 2019 à 2023 reposent sur les hypothèses suivantes :

– un recul de l’ordre de 160 millions d’euros de la contribution à l’audiovisuel public affecté aux chaînes du groupe France Télévisions à horizon 2022 ;

– une croissance globale du chiffre d’affaires publicitaire des chaînes de la TNT et des chaînes thématiques de 2 % par an en 2019 et en 2020 et de 1 % par an en 2021 et 2022 ;

– une progression globale du chiffre d’affaires de la publicité sur le replay de 8 % en 2019, puis une moindre croissance les années suivantes avec un taux de 7 % en 2020, de 6 % en 2021 et de 5 % en 2022 ;

– une stabilité sur la période du chiffre d’affaires du segment « SMS et appels surtaxés ».

S’agissant des prévisions de rendement de la TST-D, il est supposé :

– que l’assiette imposable pour les opérateurs de télévision payante reculerait de 4 % en 2019, puis de 5 % par an de 2020 à 2022 ;

– que le chiffre d’affaires des fournisseurs d’accès à internet augmenterait de 0,5 % en 2019 sous l’effet de la réintégration du chiffre d’affaires au titre des offres de presse de certains fournisseurs d’accès à internet, puis de 0,8 % en 2020, de 0,7 % en 2021 et enfin de 1 % en 2022 avec un marché mobile stable et une croissance du fixe en lien avec le développement de la fibre.

Enfin, sagissant de la TSV, il est indiqué dans le rapport du CNC que les prévisions de rendement s’appuient sur le chiffre d’affaires déclaré en 2018 auquel est appliquée une hypothèse de croissance pour les années suivantes au vu des évolutions de chaque segment de l’assiette.

Le secteur de la vidéo physique reculerait tendanciellement : la baisse du chiffre d’affaires serait de 15 % en 2020, puis de 10 % par an entre 2021 et 2023, étant précisé que le secteur a accusé une baisse de 16,4 % en valeur en 2018.

En matière de vidéo à la demande, le chiffre d’affaires de la vidéo à la demande transactionnelle reculerait de 3 % en 2020 avant de progresser de 1 % en 2021, de 2 % en 2022 et de se stabiliser en 2023. Cette dynamique contrastée s’explique par l’évolution contraire des segments de la location (en baisse) et de la vente (en hausse).

Le marché de la vidéo à la demande par abonnement progresserait de 16 % en 2020, de 9 % en 2021, de 4 % en 2022 et de 3 % en 2023.

Enfin, les recettes publicitaires tirées de la diffusion de vidéo en ligne progresseraient de 15 % en 2020, de 10 % par an en 2021 et en 2022 et de 5 % en 2023.

Le Rapporteur général note que l’évolution complexe et rapide des secteurs redevables de la TST et de la TSV rend délicates les prévisions à horizon 2023.

● D’après l’évaluation préalable de l’article, le dispositif proposé par le présent article na pas vocation à être permanent. Il a en effet pour inconvénient :

– de ne pas garantir une neutralité totale entre les différents modes de diffusion ;

– de ne pas simplifier pleinement le système de financement de la création cinématographique et audiovisuel ;

– de ne pas permettre non plus de sécuriser les recettes du CNC à leur niveau actuel de 680 millions d’euros à compter de 2021.

La solution proposée est une solution de court terme qui n’implique pas l’abandon d’une réforme structurelle que le Gouvernement prévoit pour le projet de loi de finances pour 2021. Il souhaiterait en effet proposer au Parlement la fusion des taxes affectées au CNC pour taxer, d’une part, l’activité de contenus, qu’elle soit linéaire ou non linéaire et, d’autre part, la fourniture d’accès aux contenus audiovisuels. Cette option assurerait l’équité fiscale entre les acteurs de la diffusion en les taxant de la même manière quel que soit le mode d’accès à des contenus comparables et le modèle économique retenu. Elle aurait également pour avantage de sécuriser davantage les recettes du CNC.

Néanmoins, le Gouvernement indique que la mise en œuvre de cette option est complexe en ce qu’elle suppose de distinguer la part de l’assiette relevant de l’édition de contenus de celle relevant de l’accès aux contenus, s’agissant notamment des chaînes payantes et de leurs distributeurs. Il est donc nécessaire de poursuivre les consultations pour progresser vers cette solution.

Dans son document stratégique de performance précité, le CNC indique qu’il « continuera à instruire, dans la perspective notamment du projet de loi de finances pour 2021, une réforme densemble de la fiscalité affectée, afin de la rendre plus neutre technologiquement, en distinguant la taxation de lactivité dédition de contenus et la taxation de lactivité daccès aux contenus » ([287]).

À court terme, le dispositif que le Gouvernement propose semble le plus souhaitable.

*

*     *

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements II-CF1208, II-CF1207 et II-CF1422 de M. Éric Bothorel.

Puis elle examine lamendement II-CF1546 de M. Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. L’article 62 tend à rééquilibrer un peu la charge fiscale représentée par les taxes affectées au CNC, et ce en faveur des acteurs historiques. Toutefois, il ne va pas jusqu’au bout puisqu’il n’allège pas suffisamment la fiscalité qui pèse sur les éditeurs qui s’auto-distribuent – en France, il s’agit essentiellement du groupe Canal Plus – et qui doivent faire face à la concurrence des sociétés numériques, en particulier Netflix.

Cet amendement tend donc à égaliser le taux marginal de la taxe sur les services de télévision Distributeurs (TST-D) avec le taux facial de la taxe sur les services de télévision Éditeurs (TST-E) et de la taxe sur les services de vidéo (TSV), dorénavant de 5,15 %. Je pourrais entrer dans le détail de la fiscalité applicable aux services de télévision, mais elle est assez complexe. Nous pourrons y revenir en séance publique.

Mme Émilie Cariou. Il faudrait revenir sur l’historique des taux…

M. le président Éric Woerth. Et sur celui des acteurs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne peux pas être accusé d’être un zélateur du CNC, mais force est de constater que votre amendement aurait pour conséquence d’amputer ses ressources de plus de 7 millions. Nous sommes parvenus à un équilibre entre l’allégement de la fiscalité qui pèse sur ces acteurs et la nécessité de stabiliser les recettes du CNC. Il convient, me semble-t-il, de s’y tenir.

M. le président Éric Woerth. Je crois, quant à moi, qu’il convient d’aller jusqu’au bout des choses. Le fait est que les nouveaux acteurs bénéficient d’une fiscalité plus avantageuse que celle d’un certain nombre de groupes implantés depuis longtemps en France.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur général, l’amendement, avez-vous dit, diminuerait les recettes du CNC de 7 millions. Mais, de mémoire, nous sommes sur plafond mordant.

M. le président Éric Woerth. Non, car le produit des taxes est directement versé au CNC. L’ensemble n’est donc pas sous plafond.

Mme Émilie Cariou. Les taxes affectées au CNC frappent les chaînes de télévision, les distributeurs, notamment les opérateurs téléphoniques, ainsi que toutes les nouvelles plateformes. L’article 62 procède à un rééquilibrage. En effet, jusqu’à présent, les diffuseurs, c’est-à-dire les chaînes de télévision, étaient davantage imposés que les nouveaux acteurs, notamment les plateformes de service vidéo à la demande (SVOD). Je crois qu’il faut que nous en restions à l’équilibre proposé dans le texte. Sachez que chaque modification de ces taxes affecte les mécanismes de financement de la création, notamment les obligations des contributeurs en matière de coproduction.

Par ailleurs, je rappelle que l’acteur dont il s’agit ici bénéficie de certains autres avantages, notamment en matière de chronologie de médias ; il faut en tenir compte. Cet acteur a eu, à une certaine époque, une position privilégiée dont il continue de profiter dans certains domaines. Je fais confiance au ministère de la culture s’il pense être parvenu à un bon équilibre, à ce stade. Cet article marque un progrès, qu’il faut saluer.

M. le président Éric Woerth. C’est ce que j’ai fait, du reste. Mais lorsqu’on dit qu’un texte est équilibré, cela signifie, en fait, qu’il ne va pas assez loin. Je ne comprends pas pourquoi on ne va jamais jusqu’au bout des choses.

Mme Émilie Cariou. Il s’agit essentiellement de Canal Plus.

M. le président Éric Woerth. Oui, je l’ai dit. Il existe quelques groupes français dans ce secteur et il faut s’efforcer de les protéger un tant soit peu. Canal Plus a très peu d’avantages en matière de chronologie des médias.

La commission rejette lamendement II-CF1546.

Puis elle adopte larticle 62 sans modification.

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*     *

 


Article 63
Alignement progressif de la fiscalité du tabac applicable en Corse sur celle applicable sur le continent, à compter de 2022, sur une période de cinq ans

Résumé du dispositif et effets principaux

Les niveaux de fiscalité portant sur le tabac vendu en Corse sont inférieurs à ceux qui sont applicables en France continentale.

Cette fiscalité dérogatoire, justifiée par l’insularité Corse, est contraire au droit européen : des prorogations ont plusieurs fois été accordées mais, en l’espèce, la France n’est plus en conformité avec les normes européennes portant sur les accises depuis le 1er janvier 2016.

Le présent article programme une mise en conformité progressive. Il réalise un alignement graduel de la fiscalité du tabac applicable en Corse – droit de consommation et minimum de perception – sur celle applicable sur le continent, à partir de 2022.

L’affectation du produit du droit de consommation perçu en Corse à la collectivité de Corse est maintenue.

Le présent article clarifie également, pour l’ensemble du territoire métropolitain, le moment de la perception du droit de licence versé par le fournisseur à l’administration pour le compte du buraliste, en contrepartie du monopole d’État sur la vente de tabac. L’exigibilité de ce droit de licence interviendra au moment de la mise à la consommation et non plus à la livraison au débitant, conformément au régime traditionnel des accises.

Dernières modifications législatives intervenues

Les barèmes fiscaux relatifs au tabac vendu en Corse ont été modifiés par l’article 207 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, qui a instauré une trajectoire d’augmentation.

L’article 17 de la loi n° 2017-1836 de 30 décembre 2017 portant financement de la sécurité sociale pour 2018 a augmenté le droit de consommation sur les produits du tabac et a procédé à une amorce de rapprochement avec les tarifs continentaux des tarifs applicables à la Corse.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Cet article a été adopté sans modification.

 

I.   la fiscalité du tabac en corse, dérogatoire, doit être mise en conformité avec le droit européen des accises

A.   la fiscalité du tabac en vigueur en corse déroge à celle APPLICABLE sur le continent

1.   La structure de la fiscalité du tabac

Le droit fiscal soumet les produits de tabac à un droit de consommation dual, prévu aux articles 575 et 575 A du code général des impôts (CGI) :

– d’une part, un droit spécifique, exprimé en valeur absolue en euros par millier d’unités (cigarettes, cirages et cigarillos) ou millier de grammes (tabac à rouler et autres tabacs à fumer) ;

– d’autre part, un droit proportionnel, qui résulte de l’application d’un taux au prix de vente toutes taxes comprises.

Ce droit de consommation doit, au minimum, atteindre un plancher : c’est le « minimum de perception ». Ce dernier :

– est fixé par millier d’unités ou par millier de grammes ;

– peut être majoré de 10 % au plus, par arrêté des ministres du budget et de la santé ;

– ne s’applique pas aux tabacs à priser ou à mâcher.

Ce droit de consommation sur le tabac, qui correspond à un droit d’accise, est dû mensuellement, par les fournisseurs, pour les produits mis à la consommation ou importés en France.

Il est recouvré par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI).

Le taux proportionnel, la part spécifique et le minimum de perception sont présentés, s’agissant de la France métropolitaine, dans le tableau suivant.

droit de consommation sur le tabac et minimum de perception associé,
en France continentale

Période

Du 1er mars 2019 au 31 octobre 2019

Du 1er novembre 2019 au 29 février 2020

Du 1er mars 2020 au 31 octobre 2020

À compter du 1er novembre 2020

Cigarettes

Taux proportionnel (en %)

51,7

52,7

53,6

54,6

Part spécifique pour mille unités (en euros)

61,1

62,0

62,5

62,7

Minimum de perception pour mille unités (en euros)

279

297

314

333

Cigares et cigarillos

Taux proportionnel (en %)

30,0

32,3

34,3

36,1

Part spécifique pour mille unités (en euros)

30,0

35,3

41,5

46,0

Minimum de perception pour mille unités (en euros)

176

205

237

266

Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes

Taux proportionnel (en %)

45,6

46,7

47,7

48,7

Part spécifique pour mille unités (en euros)

72,5

76,2

79,3

82,1

Minimum de perception pour mille unités (en euros)

239

260

281

302

Autres tabacs à fumer

Taux proportionnel (en %)

49,0

49,9

50,6

51,3

Part spécifique pour mille unités (en euros)

23,4

25,3

27,2

29,1

Minimum de perception pour mille unités (en euros)

108

117

126

134

Tabacs à priser

Taux proportionnel (en %)

55,0

56,2

57,1

58,0

Tabacs à mâcher

Taux proportionnel (en %)

38,5

39,3

40,0

40,6

Source : commission des finances à partir de l’article 575 A du CGI.

2.   Une fiscalité dérogatoire pour la Corse

Une fiscalité dérogatoire s’applique aux produits de tabac mis à la vente en Corse : elle est définie à l’article 575 E bis du CGI.

Ce cadre spécifique est censé être justifié par la spécificité insulaire de la Corse.

La France a été autorisée, par deux directives du 19 octobre 1992 ([288]), à appliquer jusqu’au 31 décembre 2002, pour les cigarettes et les produits du tabac vendus en Corse, des taux dérogatoires minorés par rapport à ceux pratiqués en métropole.

La France a sollicité, dans le mémorandum « Pour une reconnaissance de la spécificité insulaire de la Corse dans lUnion européenne », daté du 26 juillet 2000, de pouvoir appliquer jusqu’au 31 décembre 2009 ce régime fiscal dérogatoire. Cette dérogation a été accordée par la directive 2003/117/CE du Conseil du 5 décembre 2003 ([289]).

Cette directive a considéré que « lactivité économique liée aux tabacs manufacturés contribue au maintien de léquilibre économique et social en Corse. En effet, cette activité procure notamment de lemploi à environ 350 détaillants, lesquels emploient un nombre à peu près équivalent de salariés. Un bon nombre de ces détaillants est établi dans des zones de montagne très peu peuplées, où ils assurent un service de proximité, contribuant donc ainsi indirectement au maintien sur place de la population » ([290]).

La dernière prorogation européenne de cette fiscalité dérogatoire a été actée par la directive du 21 juin 2011 concernant la structure et les taux des accises applicables aux tabacs manufacturés ([291]). Selon cette directive, « afin déviter de porter préjudice à léquilibre économique et social de la Corse, il est à la fois essentiel et justifiable de prévoir une dérogation jusquau 31 décembre 2015 en vertu de laquelle la France peut appliquer un taux daccise inférieur à celui appliqué au niveau national aux cigarettes et autres tabacs manufacturés mis à la consommation dans lîle. À cette date, les dispositions fiscales applicables devront être pleinement alignées sur les dispositions fiscales du continent ».

La persistance d’une tarification dérogatoire sur le territoire Corse étant contraire au droit européen, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 ([292]) a procédé à un rapprochement des tarifs applicables.

L’augmentation appliquée à la Corse a été légèrement supérieure à celle appliquée sur le continent, afin de permettre une convergence.

Les tarifs portés par l’actuelle rédaction de l’article 575 E bis du CGI sont les suivants.

droit de consommation sur le tabac et minimum de perception associé,
en Corse

Période

Du 1er mars 2019 au 31 octobre 2019

Du 1er novembre 2019 au 29 février 2020

Du 1er mars 2020 au 31 octobre 2020

À compter du 1er novembre 2020

Cigarettes

Taux proportionnel (en %)

44,4

45,8

47,3

48,8

Part spécifique pour mille unités (en euros)

36,3

40,1

43,9

47,6

Cigares et cigarillos

Taux proportionnel (en %)

17,8

20,4

22,9

25,5

Part spécifique pour mille unités (en euros)

31,9

36,4

40,9

45,4

Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes

Taux proportionnel (en %)

25,1

28,5

31,9

35,2

Part spécifique pour mille unités (en euros)

40,4

43,6

52,3

58,3

Autres tabacs à fumer

Taux proportionnel (en %)

32,9

35,5

38,1

40,8

Part spécifique pour mille unités (en euros)

8,7

11,6

14,5

17,5

Tabacs à priser

Taux proportionnel (en %)

31,4

35,2

39,0

42,8

Tabacs à mâcher

Taux proportionnel (en %)

22,7

25,2

27,8

30,4

Source : commission des finances à partir de l’article 575 E bis du CGI.

Pour les cigarettes, le prix de vente au détail appliqué en Corse doit être au moins égal à 75 % des prix de vente continentaux des mêmes produits, en vertu du II de larticle 575 E bis du CGI.

Pour les cigares et les cigarillos, le prix de vente au détail appliqué en Corse doit être au moins égal à 85 % des prix continentaux des mêmes produits.

Selon le V de l’article 575 E bis du CGI, le produit du droit de consommation est « affecté à la collectivité de Corse pour le financement de travaux de mise en valeur de la Corse ».

Pour l’année 2019, le montant de cette ressource affectée s’élève à
103,02 millions deuros, ce qui correspond à 9,5 % des ressources de la collectivité de Corse ([293]).

B.   un alignement de la fiscalité corse sur le tabac avec celle du continent rendue impérative par le droit européen

Le rattrapage des tarifs amorcé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 devait, selon l’étude d’impact attachée alors au PLFSS pour 2018, être complété par un processus de « convergence totale ». Ainsi, il était prévu qu’« à partir de 2021, des mesures supplémentaires devront être mises en œuvre pour rendre notre droit fiscal conforme au droit de lUnion européenne et ne plus exposer la France à des sanctions » ([294]).

Selon l’évaluation préalable associée au présent projet de loi de finances pour 2020, son article 63 prévoit un alignement progressif sur cinq ans de la fiscalité corse sur celle du continent, à partir de 2022, « pour se mettre en conformité avec le droit européen et conformément aux engagements pris par le Gouvernement dans le cadre des travaux préparatoires de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 ».

II.   un dispositif qui aligne progressivement la fiscalité du tabac corse sur celle du continent

A.   un alignement de la fiscalité du tabac corse sur celle du continent à horizon 2026, et un ajustement technique pour l’ensemble du territoire national

1.   À titre principal, un alignement progressif à partir de 2022 de la fiscalité corse sur le tabac avec celle applicable sur le continent

En premier lieu, l’article 575 E bis est modifié à compter du 1er janvier 2022 et prévoit jusqu’en 2025 une trajectoire d’augmentation de la fiscalité sur les tabacs en Corse présentée dans le tableau suivant.

droit de consommation sur le tabac et minimum de perception associé, en Corse, à partir de 2022 ET JUSQU’EN 2025

Période

Du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2022

Du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2023

Du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2024

Du 1er janvier 2025 au 31 décembre 2025

Cigarettes

Taux proportionnel (en %)

50,0

51,1

52,3

53,4

Part spécifique pour mille unités (en euros)

50,6

53,6

56,7

59,7

Cigares et cigarillos

Taux proportionnel (en %)

27,6

29,7

31,9

34,0

Part spécifique pour mille unités (en euros)

45,5

45,6

45,8

45,9

Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes

Taux proportionnel (en %)

37,9

40,6

43,3

46,0

Part spécifique pour mille unités (en euros)

63,1

67,8

72,9

77,3

Autres tabacs à fumer

Taux proportionnel (en %)

42,9

45,0

47,1

49,2

Part spécifique pour mille unités (en euros)

19,8

22,1

24,5

26,8

Tabacs à priser

Taux proportionnel (en %)

45,8

48,9

51,9

55,0

Tabacs à mâcher

Taux proportionnel (en %)

32,4

34,5

36,5

38,6

Source : article 575 E bis du CGI tel que modifié par le présent article.

En second lieu, les taux minimaux de prix de vente en Corse font également l’objet d’un rapprochement progressif avec ceux du continent, sur cinq ans.

prix de vente minimaux en corse pour la période 2022-2025

Groupe de produits

Du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2022

Du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2023

Du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2024

Du 1er janvier 2025 au 31 décembre 2025

Cigarettes

80 %

85 %

90 %

95 %

Cigares et cigarillos

85 %

91 %

94 %

97 %

Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes

80 %

85 %

90 %

95 %

Autres tabacs à fumer

80 %

85 %

90 %

95 %

Tabacs à priser

80 %

85 %

90 %

95 %

Tabacs à mâcher

80 %

85 %

90 %

95 %

Source : article 575 E bis du CGI tel que modifié par le présent article.

Le III du présent article parachève cet alignement en prévoyant, à compter du 1er janvier 2026, une suppression des tarifs dérogatoires de larticle 575 E bis du CGI. Ainsi, le niveau de la fiscalité portant sur le tabac en Corse sera régi à compter de cette date par les mêmes dispositions que celles applicables sur le territoire continental, (articles 575 et 575 A du CGI). La trajectoire définie à l’article 575 A du CGI ne prévoyant pas de barème après les tarifs prévus à compter du 1er novembre 2020, il n’est actuellement pas possible de connaître l’augmentation de fiscalité portant sur le tabac vendu en Corse au 1er janvier 2026, en cas d’augmentation de la fiscalité portant sur le tabac vendu sur le continent, dans l’intervalle.

En revanche, laffectation de la fiscalité sur le tabac perçue en Corse est préservée : le produit du droit de consommation continuera d’être affecté à la collectivité de Corse pour le financement de travaux de mise en valeur de la Corse.

2.   À titre subsidiaire, l’introduction de l’exigibilité du droit de licence au moment de la mise à la consommation par le fournisseur agréé est destinée à en sécuriser la perception, pour l’ensemble du territoire national

Actuellement, et selon les dispositions de l’article 568 du CGI, « le droit de licence est exigible à la livraison des tabacs manufacturés au débitant ».

Le droit de licence est versé par le fournisseur à l’administration, pour le compte du débitant, en contrepartie du monopole de l’État sur la vente de tabac.

Il est liquidé par les fournisseurs et acquitté par eux auprès de l’administration pour le compte des débitants.

Le C du I du présent dispositif remplace cette mention par une exigibilité auprès du fournisseur agréé lors de la « mise à consommation des tabacs manufacturés » par le débitant.

Cette mesure vise à sécuriser juridiquement la perception du droit de licence. En effet, le terme « livraison », qui désigne le transfert du droit de disposer d’un bien comme propriétaire, est utilisé en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Or, en matière d’accises, la notion de « livraison » n’est normalement pas employée : l’ensemble des critères de taxation se rattachent à des mouvements physiques de biens, sans égard à la notion de propriété. Le concept utilisé dans ses situations, visées par l’article 302 D du CGI, est donc celui de « mise à la consommation ».

Le présent dispositif clarifie donc cet élément.

B.   une augmentation des prix du tabac en corse qui aboutit à un gain budgétaire potentiel pour la collectivité de corse, mais dont l’amplitude dépend de l’Évolution de la demande

L’augmentation progressive des prix du tabac en Corse à partir de 2022 doit aboutir à un accroissement du produit du droit de consommation affecté à la collectivité de Corse, pour le financement des travaux de mise en valeur de l’île.

Pour autant, il convient de rappeler que la hausse de la fiscalité sur le tabac obéit avant tout à des considérations de santé publique. Des hausses répétées et importantes de la fiscalité du tabac ont pour objectif de diminuer la prévalence de la consommation de tabac sur le territoire. Or, on estime que la consommation de tabac en Corse par habitant est supérieure de 25 % à celle constatée sur le continent.

De fait, la hausse de la fiscalité prévue par le présent article, plus importante que sur le continent, pourrait aboutir à une diminution du nombre de fumeurs plus importante que sur ce dernier.

Les prévisions de recettes budgétaires supplémentaires pour la collectivité de Corse ne peuvent donc être estimées que de manière approximative et ne constituent que des estimations économétriques.

Ainsi, l’évaluation préalable du présent article estime que le gain budgétaire généré par la mesure n’est pas chiffrable avec précision mais pourrait être estimé à environ 25 millions d’euros entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025.

*

*     *

La commission est saisie de lamendement II-CF1520 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Nous savons que l’on va vers un alignement des prix du tabac en Corse sur ceux qui ont cours sur le continent, ce qui fera sans doute plaisir à ceux qui souhaitent « normaliser » la fiscalité applicable en Corse. Ainsi, le prix du tabac va quasiment doubler et, de ce fait, le produit des taxes qui lui sont appliquées va diminuer. C’est pourquoi nous souhaiterions que les recettes issues de cette fiscalité, qui sont versées à la collectivité de Corse, soient remplacées par une part de TVA.

Par ailleurs, les buralistes vont perdre une partie de leurs recettes. Il faudrait donc sans doute, au-delà du programme d’accompagnement national, étudier la possibilité d’offrir un accompagnement spécifique à ceux qui sont implantés dans les zones frontalières.

Quoi qu’il en soit, cet amendement a pour objet de faire en sorte que l’alignement de la fiscalité du tabac sur celle du continent – que nous n’avons pas combattu, eu égard aux impératifs de santé publique qui sous-tendent cette politique – se fasse progressivement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement, présenté comme rédactionnel, ne l’est pas vraiment, puisqu’il vise à supprimer les mots « au moins » dans la phrase : « Pour les différents produits du tabac, le prix de vente appliqué en Corse est au moins égal à un pourcentage des prix de vente continentaux des mêmes produits. » Je suis désolé, mais mon avis est donc défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1520.

Puis elle examine lamendement II-CF1502 de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Cet amendement vise à transférer la fiscalité des tabacs en Corse à l’État et à compenser ce transfert par l’affectation d’une fraction de TVA au budget de la Collectivité de Corse. En effet, l’alignement du prix du tabac en Corse sur celui appliqué sur le continent entraînera certainement pour le budget de la région une perte de recettes que nous souhaitons voir compensée.

Sur la forme, je rappelle que l’Inspection générale des finances a formulé la même proposition et que, lors d’un déplacement à Ajaccio, Bruno Le Maire s’est dit favorable à une telle mesure. Nous croyions, du reste, qu’elle figurerait dans le projet de loi de finances pour 2020.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’évaluation préalable de l’article 63 table sur un surcroît de recettes de 20 millions pour la Collectivité de Corse, sur la période. Toutefois, vous avez raison de le citer, le rapport de l’inspection générale des finances de l’an dernier prévoit un scénario différent. Je sais que le Gouvernement ne semble pas opposé à un rapatriement de la fiscalité du tabac perçue en Corse à l’État et à sa compensation, mais il ne l’a pas prévu dans l’immédiat. Je vous suggère donc de retirer l’amendement et de le redéposer en séance publique afin que le ministre nous apporte une réponse sur cet écart de prévision.

M. Charles de Courson. Sur le fond, l’article 63 va dans la bonne direction : il convient, pour des raisons de santé publique, de mener une politique de lutte contre le tabagisme, en Corse comme sur le continent. Du reste, les indicateurs relatifs à l’épidémiologie du cancer sont, en Corse, supérieurs à la moyenne nationale.

Par ailleurs, la recette de la taxe sur le tabac est affectée à la Collectivité de Corse. Or, certains craignent que cette politique ait pour conséquence une chute de ces recettes. Toutefois, si l’élasticité constatée dans l’étude d’impact en 2017 et 2018 se maintient, ces recettes devraient augmenter de 25 millions. Je crois donc que cette mesure n’aura que des aspects positifs, et pour la Collectivité de Corse et, surtout, pour la santé de nos concitoyens habitant en Corse.

Toutefois, l’étude d’impact a omis de se pencher sur le problème soulevé par la proximité de la Sardaigne, car si le prix du tabac y est sensiblement inférieur à celui qui est pratiqué en Corse, on risque d’être confronté au même phénomène que celui qu’on observe dans les autres régions frontalières françaises, en particulier dans le sud-ouest.

La commission rejette lamendement II-CF1502.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF1501 de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Par cet amendement, nous proposons que la possibilité soit offerte à l’Assemblée de Corse de demander, de façon effective, la faculté de soumettre au Parlement le transfert du produit de la fiscalité du tabac applicable en Corse au budget de l’État en échange d’une part de TVA.

Lamendement II-CF1501 est retiré.

La commission adopte larticle 63 sans modification.

*

*     *

Après l’article 63

La commission examine lamendement II-CF1400 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. Par cet amendement, nous entendons revenir sur la suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires, qui a été votée lors de la loi de finances pour 2018. Cette taxation des employeurs sur les très hauts salaires doit être rétablie, selon nous, dans sa version en vigueur avant l’arrivée de ce gouvernement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable. Cet amendement n’est pas nouveau.

La commission rejette lamendement II-CF1400.

Elle en arrive à lamendement II-CF1399 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. L’argument selon lequel notre amendement n’était pas nouveau me semble vraiment léger, monsieur le rapporteur général. L’amendement II-CF1399 n’est peut-être pas nouveau lui non plus, mais nous le présentons quand même. Nous proposons d’encourager les entreprises à encadrer les écarts de rémunération en leur sein, dans un rapport de un à vingt, en prenant en compte l’ensemble des rémunérations issues de l’activité de l’entreprise. En cas de non-respect de l’écart, la taxe sur les salaires acquittée par l’entreprise serait doublée.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Votre amendement ne double que le taux de base de la taxe sur les salaires. Je ne vois pas bien le lien entre la rémunération du dirigeant et la taxe sur les salaires. Enfin, le dispositif pourrait, en cas de diminution des rémunérations pour réduire l’écart, avoir des effets pervers, notamment celui de diminuer les recettes de la sécurité sociale du fait de la réduction de la taxe sur les salaires et des cotisations, ce qui pose problème… Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1399.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF1239 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. Cet amendement vise à augmenter la taxe sur les boissons sucrées, pour une raison toute simple : instaurée en 2012, puis renforcée par notre majorité en 2018, elle porte ses fruits, puisque les producteurs et les industriels ont diminué le taux de sucre de leurs boissons. Notre proposition consiste à augmenter la taxe, mais en faisant très attention à ne pas l’alourdir trop pour les taux de sucre les plus bas, de manière à ne pas pénaliser les industriels qui ont joué le jeu – car certains ont baissé le taux de sucre de 70 %. En revanche, d’autres n’ont pas fait le moindre effort pour progresser ; nous proposons donc d’alourdir la taxe pour les taux de sucre les plus élevés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est un sujet qui relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale, car le produit de la taxe finance l’assurance maladie. Je ne peux que demander le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF1239.

Elle examine les amendements identiques II-CF32 de Mme Émilie Bonnivard, IICF1029 de M. Mohamed Laqhila et II-CF1329 de Mme Lise Magnier.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à corriger une distorsion fiscale : les établissements de santé privés d’intérêt collectif sont exclus du dispositif d’abattement appliqué à la taxe sur les salaires, contrairement aux associations, fondations et unions mutualistes dans le champ de la santé, de la perte d’autonomie et du handicap. L’objectif de l’amendement est de faire en sorte que les établissements de santé privés bénéficient de l’abattement.

M. Mohamed Laqhila. J’ajoute à ce que vient de dire Mme Louwagie que M. le rapporteur général est sensible à l’équité fiscale : il va donc répondre favorablement à notre demande.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je n’en suis pas sûr… Je comprends bien l’intention. Toutefois, je vous rappelle que les membres des établissements de santé visés peuvent être non seulement des structures éligibles à l’abattement, telles que des mutuelles, des fondations et des associations, mais aussi des coopératives ou des sociétés d’assurance mutuelle relevant du code des assurances. Cette seconde catégorie d’entités n’est pas dans le champ de l’abattement : l’amendement reviendrait à contourner cela en opérant un large regroupement. Ce motif justifie à lui seul que j’émette un avis défavorable, mais ce n’est pas le seul.

La commission rejette les amendements II-CF32, II-CF1029 et II-CF1329.

Elle examine ensuite les amendements II-CF1174 et II-CF1175 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Nous avons déjà évoqué le sujet tout à l’heure ; ces amendements ne seront peut-être pas adoptés cette année, mais ils le seront l’année prochaine ou celle d’après.

M. le président Éric Woerth. Ils finiront bien par être adoptés…

M. Jean-Noël Barrot. Il faut soit sortir de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) en sifflet, en baissant progressivement le taux – c’est l’objet du premier amendement –, soit, au moins dans un premier temps, poursuivre l’œuvre entamée lors de la précédente législature, en rehaussant de 19 à 50 millions l’abattement sur le chiffre d’affaires, ce qui permet d’exonérer complètement les PME du paiement de la C3S – c’est l’objet du second amendement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme vient de le laisser entendre M. Barrot lui-même, ce sont des amendements d’appel, destinés à susciter le débat avec le ministre en séance. Je vous invite donc à retirer ces amendements.

Les amendements II-CF1174 et II-CF1175 sont retirés.

*

*     *

 


Article 64
Compensation des revalorisations exceptionnelles
du revenu de solidarité active (RSA)

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article précise que les dispositions de la loi de finances pour 2014 prévoyant des ressources supplémentaires pour les départements visaient à compenser la charge nouvelle pour ces derniers résultant des revalorisations exceptionnelles du revenu de solidarité active (RSA) intervenues entre le 1er septembre 2013 et le 31 août 2019 par une succession de cinq décrets.

En effet, la loi de finances pour 2014 a prévu un triple mécanisme de ressources supplémentaires affectées aux départements :

– la création d’un dispositif de compensation péréquée (DCP) consistant à transférer aux départements la totalité des frais de gestion auparavant perçus par l’État au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et à répartir cette recette entre les départements en fonction des restes à charge qu’ils supportent au titre du RSA, de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH) ;

– la possibilité pour les départements de relever le taux plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 3,8 % à 4,5 % ;

– la création d’un fonds de solidarité en faveur des départements (FSD) alimenté par un prélèvement forfaitaire sur les recettes de DMTO égal à 0,35 % des bases des DMTO perçus en année n – 1 par les départements. Les ressources du fonds sont ensuite redistribuées entre les départements en fonction des restes à charge au titre du RSA, de l’APA et de la PCH et du potentiel fiscal moyen par habitant.

L’attribution de ces ressources supplémentaires aux départements avait pour objet de les soutenir financièrement notamment face au dynamisme des dépenses de RSA qu’ils financent. Le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion, adopté le 21 janvier 2013 lors du comité interministériel de lutte contre les exclusions, prévoyait en particulier une revalorisation exceptionnelle du RSA de 10 % sur cinq ans.

Cinq décrets de revalorisation exceptionnelle du RSA ont donc été pris entre le 30 août 2013 et le 4 mai 2017 : le décret n° 2013-793 du 30 août 2013 ; le décret n° 2014-1127 du 3 octobre 2014 ; le décret n° 2015-1231 du 6 octobre 2015 ; le décret n° 2016-1276 du 29 septembre 2016 ; et le décret n° 2017-739 du 4 mai 2017.

Estimant avoir supporté les surcoûts liés à ces revalorisations exceptionnelles du RSA sans avoir été compensés financièrement, plusieurs départements ont introduit des recours indemnitaires et pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative. En effet, si les travaux préparatoires à la loi de finances pour 2014 montrent que le législateur a affecté de nouvelles ressources aux départements, notamment en raison des revalorisations exceptionnelles du RSA, les départements soutiennent à l’inverse que ces dispositifs ne visaient pas à compenser spécifiquement ces dépenses nouvelles.

Compte tenu du risque juridique, cet article :

– précise que les ressources attribuées aux départements en application des trois dispositifs mentionnés précédemment assurent désormais, pour chaque département, la compensation des dépenses exposées au titre des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA ;

– précise, pour la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2019, que les trois dispositifs mentionnés précédemment avaient bien pour objet la compensation des dépenses exposées du 1er septembre 2013 au 31 août 2019 par les départements au titre des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA.

Dans l’hypothèse où l’ensemble des départements serait amené à introduire des recours indemnitaires et que les ressources créées par la loi de finances pour 2014 ne seraient pas considérées comme des compensations, le coût indemnitaire pour l’État pourrait s’élever à environ 5,5 milliards d’euros au titre de la période 2013-2019, dont 1,35 milliard d’euros au titre de l’année 2019. Selon l’évaluation préalable du présent article, grâce aux trois dispositifs mis en place par la loi de finances pour 2014, l’État aurait toutefois surcompensé les départements de 1,4 milliard d’euros sur la période 2013-2019.

Dernières modifications législatives intervenues

Les décrets du 30 août 2013, du 3 octobre 2014, du 6 octobre 2015, du 29 septembre 2016 et du 4 mai 2017 ont procédé à des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA pour une hausse de 10 % sur cinq ans.

La loi de finances pour 2014 a prévu un triple mécanisme de ressources supplémentaires affectées aux départements : le DCP, le relèvement pendant deux ans du taux plafond des DMTO et le FSD.

La loi de finances pour 2015 a pérennisé la hausse du taux plafond des DMTO à 4,5 % ainsi que le FSD.

La loi de finances pour 2019 a codifié dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) le DCP en y précisant que le dispositif a pour mission « la compensation des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du revenu de solidarité active ».

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   Les revalorisations exceptionnelles du revenu de solidaritÉ active dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvretÉ et pour l’inclusion sociale

Financé par le département selon l’article L. 262-24 du code de l’action sociale et des familles (CASF), le revenu de solidarité active (RSA) a été créé par la loi du 1er décembre 2008 généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion ([295]), par le biais de la fusion du revenu minimum d’insertion (RMI), de l’allocation pour parent isolé (API) et des dispositifs d’intéressement à la reprise d’activité qui leur étaient associés. Au 31 décembre 2017, 1,88 million de foyers bénéficiaient du RSA en France. Avec les conjoints et les enfants à charge, 3,82 millions de personnes sont couvertes par le RSA en France en 2018, soit 5,7 % de la population française.

Les règles relatives à l’attribution du RSA, fixées aux articles L. 262-2 et suivants du CASF, sont décrites, au sein du Tome II du rapport sur le projet de loi de finances pour 2020, dans le commentaire de l’article 25 relatif à la recentralisation du RSA et du revenu de solidarité à La Réunion et du revenu de solidarité en Guyane ([296]).

Le montant forfaitaire servant de base de calcul au RSA est fixé par décret et fait l’objet d’une revalorisation au 1er avril de chaque année (article L. 262-3 du CASF). Au 1er avril 2019, le montant forfaitaire pour une personne seule et sans enfant est de 559,74 euros, et de 839,61 euros pour un couple sans enfant. En cas de majoration pour isolement, il est de 958,37 euros pour une personne avec un enfant ([297]). Un forfait logement (de 66,17 euros mensuels pour une personne seule, 134,34 euros pour un foyer de deux personnes, 166,24 euros pour un foyer de trois personnes ou plus) est déduit de l’allocation si le bénéficiaire est logé gratuitement, s’il est propriétaire sans remboursement d’emprunt ou s’il reçoit une aide au logement.

Montants forfaitaires du RSA au 1er avril 2019

(en euros)

Nombre denfants
ou de personnes à charge

Personne
vivant seule

Personne
vivant en couple

Personne bénéficiant
de la majoration

Sans enfant

559,74

839,61

718,78

Un enfant

839,61

1 007,53

958,37

Deux enfants

1 007,53

1 175,45

1 197,97

Par enfant supplémentaire

223,90

223,90

239,59

Source : caisses d’allocations familiales (CAF).

À l’occasion de l’adoption du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, lors du comité interministériel de lutte contre les exclusions du 21 janvier 2013, le Gouvernement s’était engagé à ce que le montant forfaitaire du RSA soit revalorisé de 10 % sur cinq ans, en sus de l’inflation. Conformément à cet engagement, cinq décrets ont procédé à des revalorisations exceptionnelles du RSA qui se sont ajoutées aux revalorisations annuelles en fonction de l’inflation constatée.

Revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA
entre 2013 et 2017 (hors Mayotte)

(en euros et en pourcentage)

Décrets

Date dapplication

Montant après revalorisation

Coefficient de revalorisation appliqué

Coefficients de revalorisation

cumulés

Décret  2013-793 du 30 août 2013

1er septembre 2013

492,90

+ 2 %

+ 2 %

Décret n° 2014‑1127 du 3 octobre 2014

1er septembre 2014

509,30

+ 2 %

+ 4,04 %

Décret n° 2015‑1231 du 6 octobre 2015

1er septembre 2015

524,16

+ 2 %

+ 6,12 %

Décret n° 2016‑1276 du 29 septembre 2016

1er septembre 2016

535,17

+ 2 %

+ 8,24 %

Décret n° 2017‑739 du 4 mai 2017

1er septembre 2017

545,48

+ 1,6 %

+ 10 %

Source : commission des finances.

B.   Les modalitÉs de compensation aux dÉpartements des charges liÉes aux revalorisations exceptionnelles du revenu de solidaritÉ active

Les revalorisations exceptionnelles du RSA prises dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale ont donné lieu à une compensation spécifique en loi de finances pour 2014, conformément aux engagements pris dans le cadre du Pacte de confiance et de responsabilité entre lÉtat et les collectivités territoriales.

1.   Le Pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités territoriales et la compensation aux départements des revalorisations exceptionnelles du RSA

D’après le Pacte de confiance et de responsabilité entre lÉtat et les collectivités territoriales, signé le 16 juillet 2013 entre l’État et les associations représentant les élus locaux, dont l’Assemblée des départements de France (ADF), les départements devaient bénéficier, à compter de 2014, « dun meilleur financement des allocations de solidarité nationale ». L’amélioration du financement des allocations de solidarité nationale (RSA, APA, PCH) devait advenir par l’affectation de deux ressources complémentaires.

D’une part, le pacte prévoyait la création d’un « fonds de compensation péréquée » alimenté par la recette des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Selon le relevé de conclusions de la réunion du 16 juillet 2013 : « cette ressource est répartie entre les départements de manière péréquée, afin de contribuer à garantir à lensemble des conseils généraux un meilleur financement du revenu de solidarité active (RSA), de lallocation personnalisée pour lautonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH) ». Le texte prévoyait ensuite que les critères et modalités de répartition du fonds seraient définis entre l’ADF et l’État « en vue de la loi de finances de fin dannée » ([298]).

D’autre part, il envisageait le relèvement pendant deux années (2014 et 2015) du plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 3,8 % à hauteur maximale de 4,5 %, afin de permettre aux départements de dégager des ressources supplémentaires.

Le document précisait enfin, de manière explicite, que : « la loi de finances pour 2014 mettra en œuvre lengagement pris par le Gouvernement en clôture de la conférence nationale contre la pauvreté et pour linclusion sociale, le 11 décembre dernier, que les charges qui résulteront de la revalorisation du RSA soient intégralement compensées par lÉtat. Cette compensation est effectuée par les ressources complémentaires évoquées cidessus (DMTO et frais de gestion) ».

2.   Les dispositions de la loi de finances pour 2014 relatives à la compensation aux départements des dépenses liées aux allocations individuelles de solidarité

Les principes du pacte présentés supra ont été traduits au niveau législatif par la loi de finances pour 2014 ([299]). Cette dernière a institué un dispositif de compensation péréquée (DCP), un relèvement du taux maximal des DMTO, ainsi qu’un fonds de solidarité en faveur des départements (FSD).

a.   Le dispositif de compensation péréquée (DCP)

En premier lieu, l’article 42 de la loi de finances pour 2014 a créé un dispositif de compensation péréquée (DCP), codifié à l’article L. 3334-16-3 du CGCT par la loi de finances pour 2019 ([300]). Ce dispositif est financé par le transfert aux départements de l’ensemble des recettes, alors affectées à l’État, correspondant aux frais d’assiette, de recouvrement, d’admission en non-valeurs et de dégrèvement (c’est-à-dire les frais de gestion) de la TFPB perçue par les départements, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les communes. Il s’agissait, selon le commentaire de l’article du projet de loi proposant ce dispositif, de « garantir aux départements des ressources pérennes et suffisantes pour le financement des allocations individuelles de solidarité (RSA, APA, PCH) » ([301]).

Le DCP est composé de deux fractions :

– une fraction socle correspondant à 70 % des ressources, répartie entre les départements proportionnellement à leurs restes à charge des trois allocations individuelles de solidarité (c’est-à-dire le solde constaté pour chaque département entre, d’une part, les dépenses exposées par le département au titre du RSA, de l’APA et de la PCH et, d’autre part, des montants de compensation dus au département) ;

– une fraction de péréquation correspondant à 30 % des ressources, répartie par le biais d’un indice synthétique établi à partir de quatre critères cumulés selon différentes pondérations : 30 % pour la proportion de bénéficiaires de l’APA du département ; 30 % pour le revenu moyen par habitant du département ; 20 % pour la proportion de bénéficiaires du RSA ; 20 % pour la proportion de bénéficiaires de la PCH.

Pour chaque département, le montant obtenu par la somme des deux fractions qui lui reviennent est pondéré par le rapport entre le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements et le revenu par habitant du département en question. Cette dernière étape du calcul a pour effet de traiter « en quelque sorte au carré le problème décart des revenus » entre les départements, selon l’expression employée par M. Gilles Carrez, alors Président de la commission des finances, lors de l’examen de cette disposition en séance publique à l’Assemblée nationale ([302]).

Enfin, la loi de finances pour 2019 a précisé que le dispositif a pour mission « la compensation des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du revenu de solidarité active » ([303]).

Montants du dispositif de compensation pÉrÉquÉE
en faveur des dÉpartements

(en millions d’euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

841

866

900

932

957

994

Source : Rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), Les finances des collectivités locales en 2019, état des lieux, juillet 2019.

Le montant du DCP est passé de 841 millions d’euros en 2014 à 994 millions d’euros en 2019. Au total, l’État aurait versé aux départements près de 5 490 millions d’euros par le biais du DCP sur la période 2014-2019.

b.   Le relèvement du taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO)

En deuxième lieu, l’article 77 de la loi de finances pour 2014 a accordé aux départements la possibilité de relever le taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui leur sont affectés au-delà du taux normal de 3,8 % et dans la limite d’un plafond fixé à 4,5 % pour les actes passés entre le 1er mars 2014 et le 29 février 2016. Cette mesure visait, selon le commentaire de l’article du projet de loi de finances pour 2014, à « contribuer à réduire le reste à charge des départements en matière dallocations individuelles de solidarité » ([304]). La loi de finances pour 2015 a pérennisé cette possibilité ([305]).

Il est rappelé qu’il revient aux conseils départementaux de fixer chaque année le tarif des DMTO pour la période du 1er juin de l’année au 31 mai de l’année suivante (article 1594 E du code général des impôts – CGI). À la fin du 1er semestre 2014, 90 départements avaient augmenté leur taux à 4,5 % ou 4,45 %. Au 1er janvier 2015, quatre départements supplémentaires ont augmenté leur taux à 4,5 %, puis deux autres au 1er janvier 2016 (Paris et Mayenne) puis encore deux départements au 1er juin 2017 (Côte-d’Or et Martinique). Au 1er juin 2019, les départements ayant déjà relevé leur taux à 4,5 % le maintiennent. On recense donc à cette date, comme au 1er juin 2018, 97 départements ayant leur taux à 4,5 % et 4 départements ayant maintenu leur taux à 3,8 % (Indre, Isère, Morbihan et Mayotte). Le montant des DMTO affectés au département est évalué à 11,85 milliards d’euros en 2019 contre 7,84 milliards d’euros en 2014 ([306]).

Montants DES DMTO en faveur
des dÉpartements

(en milliards d’euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

7,84

8,85

9,55

11,15

11,52

11,85

Source : Rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), Les finances des collectivités locales en 2019, état des lieux, juillet 2019.

Selon l’évaluation préalable, le surplus de recettes des DMTO lié à l’augmentation des taux par les départements est passé de 779 millions d’euros en 2014 à 1 810 millions d’euros en 2019, permettant aux départements de dégager des marges de manœuvre pour financer les revalorisations exceptionnelles du RSA. Cette même évaluation précise que le relèvement des taux des DMTO par les départements leur a permis d’augmenter leurs recettes de 7,07 milliards d’euros entre 2013 et 2018 et de 1,81 milliard d’euros au titre de l’année 2019.

c.   Le fonds de solidarité en faveur des départements (FSD)

En troisième et dernier lieu, l’article 78 de la loi de finances pour 2014 a créé l’article L. 3335-3 du CGCT pour mettre en place un fonds de solidarité en faveur des départements (FSD). Initialement limité à l’année 2014, le dispositif a été pérennisé par la loi de finances pour 2015 ([307]). Il est alimenté par un prélèvement sur les recettes revenant aux départements correspondant à 0,35 % des bases des DMTO des départements perçus l’année précédente. Ce taux correspond à la moitié de la hausse du taux de DMTO permise par l’article 77 de la loi de finances pour 2014 (0,7 point). Pour chaque département, le prélèvement est plafonné à 12 % du montant des recettes de DMTO perçues.

La répartition des sommes de ce fonds de péréquation est calculée selon la méthode suivante :

– une première fraction de 30 % des ressources du fonds bénéficie à une sélection de départements éligibles selon un critère de potentiel fiscal ou de revenu par habitant. Cette fraction est ensuite répartie selon les restes à charge par habitant supportés par chaque département sélectionné (solde entre les dépenses exposées par le département au titre des allocations individuelles de solidarité et les compensations dues par l’État) ;

– une seconde fraction de 70 % des ressources du fonds bénéficie à la première moitié des départements dont les restes à charge par habitant au titre des allocations individuelles de solidarité sont les plus élevés. Cette fraction est ensuite répartie entre les départements éligibles en fonction de la population et du montant des restes à charge constatés.

Toutefois, les départements dont le montant par habitant des DMTO est supérieur de 40 % au montant par habitant des DMTO de l’ensemble des départements ne sont pas éligibles au fonds ; ceux dont il est supérieur de 10 % subissent un abattement de 50 % de l’aide versée par le fonds.

Montants du Fonds de solidaritÉ en faveur
des dÉpartements

(en millions d’euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

559

536

423

434

485

586

Source : Rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), Les finances des collectivités locales en 2019, état des lieux, juillet 2019.

Le fonds a permis de redistribuer 586 millions d’euros en 2019 contre 559 millions d’euros en 2014. Sur la période 2014-2019, près de 3 023 millions d’euros cumulés ont ainsi été affectés aux départements éligibles selon l’évaluation préalable.

C.   La nÉcessitÉ de prÉciser le cadre juridique des ressources allouÉes pour la compensation des revalorisations exceptionnelles du RSA

1.   Le principe de compensation des compétences transférées et des charges induites par les modifications réglementaires relatives à ces compétences

Corollaire du principe d’autonomie financière des collectivités territoriales, l’article 72-2 de la Constitution garantit le principe de compensation financière des transferts, création ou extension de compétences : « Tout transfert de compétences entre lÉtat et les collectivités territoriales saccompagne de lattribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence daugmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. »

La création du RSA a constitué à la fois un transfert de compétences aux départements en ce qu’il a substitué le RSA au RMI et l’API et une création ou extension de compétences en ce qu’il a remplacé le revenu minimum d’activité (RMA) ([308]). À ce titre, ce transfert a été financièrement compensé, notamment par l’affectation aux départements de plusieurs fractions de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur les carburants.

Le législateur a par la suite complété cette exigence : aux termes du second alinéa de l’article L. 1614-2 du CGCT, « toute charge nouvelle incombant aux collectivités territoriales du fait de la modification par lÉtat, par voie réglementaire, des règles relatives à lexercice des compétences transférées est compensée », étant précisé que « cette compensation nintervient que pour la partie de la charge qui nest pas déjà compensée par laccroissement de la dotation générale de décentralisation ». Le Conseil d’État déduit de ces dispositions que les mesures réglementaires exigeant une compensation par l’État des collectivités territoriales sont celles qui présentent un caractère obligatoire et sont propres aux compétences transférées ([309]). Ainsi, ne sont pas concernées par une telle compensation les charges nouvelles résultant notamment de la modification de règles de portée générale ayant une incidence financière sur l’exercice par les collectivités territoriales de leurs compétences (par exemple une revalorisation générale du point d’indice pour l’ensemble de la fonction publique).

Dès lors qu’il convient de compenser des charges supplémentaires résultant de mesures réglementaires en vertu de l’article L. 1614-2 du CGCT, les conditions de la compensation sont fixées à l’article L. 1614-1 de même code qui exige que :

– tout accroissement de charges résultant des transferts de compétences aux collectivités territoriales est accompagné du transfert concomitant par l’État aux collectivités territoriales des ressources nécessaires à l’exercice normal de ces compétences ;

– les ressources de compensation soient équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par l’État au titre des compétences transférées (notion de compensation intégrale des coûts historiques).

2.   Un risque juridique et budgétaire pour l’État du fait de la contestation de la compensation par plusieurs départements

Au regard de l’obligation faite par l’article L. 1614-2 du CGCT de compenser le supplément de charges pour les collectivités territoriales induit par une mesure réglementaire relative à une compétence transférée, il était nécessaire de prévoir un dispositif de compensation pour les revalorisations exceptionnelles du RSA décidées par voie réglementaire. Le triple mécanisme de la loi de finances pour 2014 a eu pour objet de soutenir financièrement les dépenses sociales des départements, compte tenu en particulier des revalorisations exceptionnelles du RSA. L’exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2014 indique que le transfert aux départements de 0,8 milliard d’euros – correspondant au montant transféré par le biais du DCP – a pour objet de répondre aux difficultés financières qu’ils connaissent, liées « au financement des allocations individuelles de solidarité, notamment le RSA qui a fait lobjet dune revalorisation dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté et pour linclusion sociale » ([310]).

Cette motivation se retrouve aussi dans l’évaluation préalable de l’article du projet de loi de finances pour 2014 qui institue le DCP : « La réforme vise à corriger leffet ciseau […] ainsi quà contribuer au financement de la revalorisation exceptionnelle du RSA décidée dans le cadre de la conférence de lutte contre la pauvreté et pour linclusion sociale le 11 décembre 2012 (revalorisation exceptionnelle de 2 % intervenue au 1er septembre 2013, dans le cadre de la revalorisation de la prime exceptionnelle du barème du RSA de 10 % sur 5 ans, en plus des indexations annuelles fondées sur linflation prévisionnelle). » ([311]) Les travaux préparatoires font ainsi référence non seulement à la revalorisation intervenue avant le dépôt du projet de loi de finances, mais également à celles à venir après.

Lors des débats parlementaires, la question de la revalorisation exceptionnelle du RSA a été évoquée. Lors de l’examen par la commission des finances de l’article du projet de loi de finances instituant le DCP, M. Christian Eckert, alors Rapporteur général, justifiait le dispositif par « leffet ciseau » subi par les départements, provoqué par la concomitance entre la « baisse de leurs ressources et la revalorisation des allocations individuelles de solidarité » ([312]).

Toutefois, plusieurs départements réclament à l’État des compensations au titre des revalorisations exceptionnelles du RSA, estimant que les dispositifs créés par la loi de finances pour 2014 ne satisfont pas l’obligation législative de compenser les charges qu’elles font peser sur eux.

En 2017 et en 2018, le Calvados, la Manche, l’Eure et l’Orne ont en effet introduit des recours pour excès de pouvoir contre le décret du 29 septembre 2016 portant revalorisation exceptionnelle du montant forfaitaire du RSA. Rappelant le cadre constitutionnel et législatif en vigueur, le Conseil d’État n’a pas annulé le décret ([313]), mais il n’a pas pour autant jugé que les revalorisations exceptionnelles du RSA aient été correctement compensées eu égard à ce cadre. Il a estimé que l’obligation faite par l’article L. 1614-2 du CGCT de compenser les charges induites par une modification réglementaire relative à des compétences transférées n’entraînait pas en elle-même l’illégalité de ladite modification.

Le Conseil d’État a ensuite rappelé que, de manière générale, les articles L. 1614-3 et L. 1614-5-1 du CGCT faisaient obligation au Gouvernement de constater par arrêté le montant des dépenses résultant de l’accroissement ou des diminutions de charges induites par voie réglementaire liées à des compétences transférées dans les six mois suivants la publication de la précision réglementaire en question. Sans se prononcer sur le défaut de compensation, le Conseil d’État a donc indiqué qu’il appartenait aux départements qui s’estimaient lésés de contester l’absence de compensation en demandant l’annulation du refus des ministres compétents de prendre cet arrêté. Sur ce point, l’évaluation préalable du présent article précise qu’un « arrêté interministériel de compensation pris après avis de la commission consultative sur lévaluation des charges (CCEC) permettra de constater les charges nettes résultant des revalorisations exceptionnelles du RSA sur la période 20132019 ».

Pourtant, d’après l’évaluation préalable du présent article, « certains départements ont poursuivi leur action contentieuse auprès des tribunaux administratifs dans le cadre dun recours indemnitaire et dun recours pour excès de pouvoir ». Il s’agit des départements du Calvados, de l’Orne et de la Manche. En cas de généralisation des recours, le risque financier pour l’État s’élève selon l’évaluation préalable à près de 5,5 milliards d’euros au titre de la période 2013‑2019, dont 1,35 milliard d’euros au titre de l’année 2019.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Une prÉcision juridique des modalitÉs de compensation des revalorisations exceptionnelles du revenu de solidaritÉ active

Le présent article vise à lever l’incertitude juridique qui pèse actuellement sur les modalités de compensation des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA, tant pour le passé (cinq décrets de revalorisation exceptionnelle) que pour l’avenir.

1.   La définition rétroactive des modalités de compensation des revalorisations exceptionnelles du revenu de solidarité active

Le III du présent article dispose que les revalorisations exceptionnelles adoptées par décrets successifs sur la période allant du 1er septembre 2013 au 31 août 2019 ont été compensées par les trois ressources de la loi de finances pour 2014 versées annuellement du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2019 et issues :

– du dispositif de compensation péréquée (DCP) ;

– de la hausse du taux plafond des DMTO de 3,8 % à 4,5 % ;

– du fonds de solidarité en faveur des départements (FSD).

L’article prévoit ainsi explicitement que les charges nouvelles résultant des revalorisations exceptionnelles ont été compensées par les ressources versées annuellement aux départements entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2019 au titre des trois dispositifs de compensation créés par la loi de finances pour 2014. Il entend ainsi lever définitivement le doute sur l’intention du législateur en présentant de manière explicite, dans la loi, ces dispositifs comme les modalités de compensation des revalorisations exceptionnelles du RSA.

La date du 31 août 2019 correspond à celle retenue pour l’établissement des coûts annuels cumulés des charges nettes induites par les revalorisations exceptionnelles du RSA, c’est-à-dire au terme des effets financiers produits par le dernier décret de revalorisation exceptionnelle du 4 mai 2017. Elle correspond à la date, arrêtée par la caisse nationale des allocations familiales (CNAF), à laquelle il est possible de mesurer la totalité du coût de la mesure de revalorisation exceptionnelle du RSA sur les cinq ans. Elle permet de prendre en compte également le coût de la mesure de revalorisation exceptionnelle pour l’année 2019.

Les modifications proposées au III du présent article ont manifestement une portée rétroactive et sont motivées par un risque contentieux aux impacts budgétaires importants. Il s’agit de dispositions de validations législatives. Ce type de dispositions doit respecter plusieurs conditions que le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de préciser par le passé, notamment dans une décision du 14 février 2014 ([314]).

D’abord, les dispositions de validation doivent poursuivre un motif impérieux d’intérêt général, le Conseil constitutionnel prenant en compte à la fois l’incidence financière de l’irrégularité faisant l’objet de la validation et le trouble apporté à la continuité des services publics du fait de la multiplicité des réclamations. Dans sa décision du 14 février 2014, le Conseil constitutionnel a considéré qu’un motif impérieux d’intérêt général pouvait résider essentiellement dans la volonté du législateur de mettre fin à une incertitude juridique, source d’abondant contentieux, et à éviter les nombreuses réclamations. Il a de plus constaté que les dispositions contestées dans le cas d’espèce tendaient à prévenir les conséquences financières qui auraient résulté pour certains syndicats mixtes en cause de l’obligation de remboursement des contribuables. Comme il en a été fait mention précédemment, le risque financier pour l’État s’élèverait dans le cas présent à environ 5,5 milliards d’euros.

Ensuite, les dispositions de validation ne doivent pas permettre de porter atteinte aux droits nés de décisions de justice passées en force de chose jugée. Tel ne semble pas être le cas. Le Conseil d’État, dans sa décision du 21 février 2018, n’a d’ailleurs pas fait droit à la demande des départements requérants d’annuler le décret de revalorisation du RSA du 29 septembre 2016.

Elles doivent également ne pas porter atteinte au principe de non‑rétroactivité des textes à caractère répressif, ce qui n’est pas le cas.

L’acte validé ne doit en outre méconnaître aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d’intérêt général visé par la validation est lui-même valeur constitutionnelle. Or, le présent article vise justement à assurer le respect de l’article 72-2 de la Constitution qui dispose que toute « extension de compétences ayant pour conséquence daugmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

Enfin, la portée de la validation doit être strictement définie, ce qui semble le cas dans le présent article.

2.   La sécurisation pour l’avenir du dispositif de compensation des dépenses exposées du fait des revalorisations exceptionnelles du revenu de solidarité active

Le I du présent article prévoit que les ressources attribuées aux départements au titre du DCP et du FSD, ainsi que les recettes résultant du relèvement au-delà de 3,8 % du taux des DMTO assurent désormais, pour chaque département, la compensation des dépenses exposées au titre des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA résultant des cinq décrets de revalorisations intervenus entre 2013 et 2017.

Enfin, le II du présent article procède à une clarification de l’objet du FSD, en cohérence avec les dispositions précédentes. Il précise au I de l’article L. 3335-3 du CGCT que les ressources de ce fonds sont allouées aux départements au titre de la compensation des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA. Il est rappelé que cette précision existe déjà pour le DCP depuis la loi de finances pour 2019 ([315]).

B.   L’impact BudgÉtaire et Économique

L’adoption du présent article serait neutre sur le déficit public. En revanche, son rejet pourrait avoir un impact important sur le solde de l’État et sur les finances des départements. En l’absence d’adoption de cette disposition et si la juridiction administrative estimait que les mécanismes de transferts aux départements prévus par la loi de finances pour 2014 ne constituent pas des compensations des revalorisations exceptionnelles du RSA, l’État pourrait avoir à transférer aux départements un montant pouvant s’élever jusqu’à 5,5 milliards d’euros au titre de la période 2013-2019. Il correspond aux coûts cumulés pour l’ensemble des départements des revalorisations exceptionnelles.

L’évaluation préalable du présent article estime toutefois que l’État a surcompensé d’environ 1,4 milliard d’euros ces surcoûts sur cette période. Si cette estimation est exacte, une compensation supplémentaire n’a pas lieu d’être.

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La commission examine les amendements identiques II-CF1065 de Mme Véronique Louwagie, II-CF1066 de Mme Sylvia Pinel, II-CF1088 de Mme Marie-Christine Dalloz, II-CF1349 de Mme Lise Magnier et II-CF1477 de Mme Sabine Rubin.

Mme Véronique Louwagie. Nous vous proposons de supprimer l’article 64, dont l’objet est, selon l’exposé des motifs, de « clarifier l’intention initiale du législateur afin de préciser les ressources de compensation allouées au financement des revalorisations exceptionnelles du revenu de solidarité active (RSA) ». En 2013, à travers trois mesures, de nouvelles ressources avaient été affectées aux départements pour les aider à mieux financer les allocations individuelles de solidarité. Or, sous couvert de préciser les choses, la rédaction de l’article 64 indique que l’intention initiale du législateur était de ne compenser, par ces mesures, que les revalorisations exceptionnelles du RSA. Nous craignons que le véritable objectif de cet article soit de lier les trois recettes mentionnées au RSA, avec l’intention évidente de récupérer ces financements, dans l’hypothèse d’une recentralisation du revenu de solidarité active. On se demande vraiment pourquoi, plusieurs années après, le Gouvernement voudrait clarifier la volonté initiale du législateur – ou plutôt, cela ne s’explique que par l’intention de récupérer ces financements.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je n’arrive pas à comprendre en quoi il faut clarifier la volonté du législateur s’agissant du dispositif en question. La perspective d’une récupération des fonds du RSA, que soulignait ma collègue Véronique Louwagie, m’inquiète beaucoup. En revanche, il serait intéressant que l’État décide de compenser à l’euro près les sommes que les départements doivent allouer au titre de la politique de l’insertion. Quoi qu’il en soit, je ne comprends pas l’objectif de cet article.

Mme Lise Magnier. Je fais miennes les questions de Marie-Christine Dalloz, car on a du mal à comprendre à quoi sert réellement cet article. On nous dit que son objet est de clarifier l’intention initiale du législateur. Mais peut-être, comme tout à l’heure, pouvez-vous nous apporter vos lumières, monsieur le rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2014 indiquait que le transfert aux départements de ces financements avait pour objet de répondre aux difficultés financières qu’ils connaissaient, liées au financement des allocations individuelles de solidarité, notamment le RSA, qui allait faire l’objet de plusieurs revalorisations successives dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. En dépit du fait qu’un accord avait été formalisé entre les départements et l’État, des recours ont été déposés par certains départements. Compte tenu de ce risque juridique, l’article 64 précise que les ressources attribuées aux départements en application des trois dispositifs de compensation de la loi de finances pour 2014 ont assuré et assurent pour chaque département la compensation des dépenses exposées au titre des revalorisations exceptionnelles du montant forfaitaire du RSA. Il s’agit donc bien d’apporter ce que l’on appelle une précision juridique. Chacun appréciera et pourra demander des raisons complémentaires – davantage au ministre qu’à moi, d’ailleurs, car il me semble que ma réponse est extrêmement claire. Je suis donc défavorable aux amendements de suppression.

M. Charles de Courson. Vous connaissez tous le concept de « déconcentralisation ». Eh bien, le RSA, c’est exactement cela. L’État tient tout, ce ne sont même pas les départements qui versent l’allocation – pour l’essentiel ce sont les caisses d’allocations familiales (CAF) et un peu la Mutualité sociale agricole (MSA), et après on demande au département de rembourser ces organismes. Vous avouerez que c’est ubuesque. C’est tellement vrai que certains départements en difficulté – la Guyane et La Réunion, notamment – ont voté quasiment à l’unanimité le principe selon lequel l’État devait reprendre le versement du RSA. De fait, c’est la seule solution – à l’exclusion de ce qui concerne l’insertion, qui doit rester au niveau des départements. L’État avait d’ailleurs proposé aux départements d’endosser à nouveau le versement. Ce serait la sagesse, plutôt que de continuer à faire fonctionner toutes ces usines à gaz auxquelles plus personne ne comprend rien, qui déresponsabilisent les départements et sont très injustes, car les départements les plus en difficulté sont souvent ceux dans lesquels, en plus, la croissance des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) est faible, voire nulle.

La commission rejette les amendements II-CF1065, II-CF1066, IICF1088, IICF1349 et II-CF1477.

Elle adopte ensuite larticle 64 sans modification.

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Article 65
Contribution de lAssociation de gestion du fonds pour linsertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) à la transformation des entreprises adaptées

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article met à contribution l’Association de gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) au soutien financier des entreprises adaptées. Il crée une contribution annuelle de lAGEFIPH au financement des entreprises adaptées d’un montant de 50 à 55 millions deuros par an pour les années 2020 à 2022, ce montant étant annuellement fixé par arrêté.

Le versement de la contribution serait opéré au profit de l’Agence de services et de paiement (ASP) qui est actuellement en charge du versement des aides financières aux entreprises adaptées.

Le soutien financier de l’État aux entreprises se matérialise actuellement par des aides au poste financées par la sous-action 2-2 de l’action 2 du programme 107 « Accès et retour à l’emploi » de la mission Travail et emploi. Le présent projet de loi de finances propose d’ouvrir pour 2020 402,9 millions deuros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au titre du financement des aides au poste par cette sous-action, un montant en augmentation de 7,5 millions d’euros par rapport à la prévision pour 2019. Le produit de la contribution, qui ne serait pas retracée dans le budget général, viendrait donc s’ajouter à ce montant.

L’objectif de création de 40 000 emplois supplémentaires en entreprises adaptées dans le cadre de l’engagement national « Cap vers lentreprise inclusive 2018-2022 » et les dispositions de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel créant plusieurs expérimentations pour favoriser la mobilité des travailleurs handicapés et l’inclusion dans les entreprises adaptées rendent nécessaires la mobilisation de moyens supplémentaires et peuvent justifier une contribution de l’AGEFIPH.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 273 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 avait instauré une contribution similaire, d’un montant de 25 millions d’euros et pour la seule année 2019.

Amendement adopté par la commission des finances

À l’initiative du Rapporteur général, la commission des finances a adopté l’amendement CF1569 qui :

– supprime la contribution que l’article propose de créer ;

– supprime l’article 273 de la loi de finances pour 2019, devenu caduc.

Il s’agit de permettre que le financement des entreprises adaptées par l’AGEFIPH soit prévu dans le cadre d’une convention pluriannuelle, actuellement négociée, pour les années 2020 à 2022. Cette convention doit prévoir un financement des entreprises adaptées par un versement au budget général prenant la forme d’un fonds de concours. Ces modalités de financement permettraient d’adapter le montant du versement au besoin des entreprises adaptées et à la situation financière de l’AGEFIPH. Elles seraient par ailleurs plus respectueuses des principes budgétaires, protecteurs des droits du Parlement.

I.   L’ÉTAT DU DROIT

A.   LES ENTREPRISES ADAPTÉES ET L’AGEFIPH

1.   Les entreprises adaptées

a.   La définition et les missions des entreprises adaptées

● Les entreprises adaptées (EA) sont des entreprises dites inclusives dont la spécificité est d’employer des proportions minimale et maximale de travailleurs handicapés. Elles sont régies par les articles L. 5213-13 à L. 5213-19-1 du code du travail. On compte environ 780 EA. Elles assurent environ 3 % de l’emploi des travailleurs handicapés.

Alors qu’elles sont constituées par des collectivités territoriales ou par des organismes publics ou privés, l’article L. 5213-13 du code du travail disposent qu’elles sont agréées par l’État dès lors qu’elles satisfont plusieurs critères fixés à l’article L. 5213-13-1 du même code. Depuis la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ([316]), l’agrément prend la forme de contrats pluriannuels dobjectifs et de moyens (CPOM), signé entre le préfet de région et la structure en question, selon l’article R. 5213-62 ([317]) du code du travail.

● En vertu de l’article L. 5213-13-1, créé par la loi du 5 septembre 2018 précitée, les EA ont pour mission de contribuer au développement des territoires et de promouvoir un environnement économique inclusif favorable aux femmes et aux hommes en situation de handicap. Pour ce faire, elles concluent des contrats de travail avec des travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées qui se trouvent sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap. Par leur action, elles permettent à leurs salariés d’exercer une activité professionnelle dans un environnement adapté à leurs possibilités, afin qu’ils obtiennent ou conservent un emploi.

Les EA doivent nécessairement comporter une proportion minimale de travailleurs handicapés que l’article D. 5213‑63 du code du travail, créé par le décret du 23 janvier 2019 ([318]) a fixée à 55 %.

b.   Les aides en faveur des entreprises adaptées

Les travailleurs handicapés employés par des entreprises adaptées bénéficient d’aides financières « contribuant à compenser les conséquences du handicap et des actions engagées liées à leur emploi », en vertu de l’article L. 5213‑19 du code du travail. Elles sont attribuées « dans la limite des crédits fixés annuellement par la loi de finances ». Elles prennent la forme d’une aide au poste unique, mais dont le montant diffère selon le cadre de mise en emploi au sein de l’EA. Hors expérimentation, le montant de l’aide peut également être modulé pour prendre en compte l’impact du vieillissement sur l’emploi, comme décrit infra.

Les formes que peut prendre l’aide au poste sont notamment exposées par le projet annuel de performance (PAP) du programme n° 102 « Accès et retour à l’emploi » de la mission Travail et emploi du projet de loi de finances pour 2020. Selon le PAP 2020, le financement par l’État de ces mesures s’établirait l’année prochaine à 402,86 millions deuros en autorisations dengagement et en crédits de paiement.

● L’aide au poste finance notamment lembauche en CDI de salariés dans les entreprises adaptées. Conformément à l’article R. 5213‑76 du code du travail ([319]), le montant de l’aide varie pour tenir compte de l’impact du vieillissement des travailleurs qui y sont éligibles.

Montant annuel de l’aide financière pour un poste occupÉ À temps plein

Âge

France hors Mayotte

Moins de 50 ans

15 661 euros

De 50 ans à 55 ans

15 864 euros

De 56 ans et plus

16 271 euros

Note : le montant de l’aide à Mayotte fait l’objet d’un barème spécifique non retracé dans le PAP.

Source : PAP 2020 de la mission Travail et emploi.

● L’aide au poste peut également financer laccompagnement par les entreprises adaptées des travailleurs mis à disposition des entreprises du milieu ordinaire en vertu de l’article D. 5213-81 du code du travail. Elle s’élève dans ce cas à 4 169 euros annuels.

● L’aide au poste finance aussi les « accompagnements tremplins ». Il s’agit d’une expérimentation créée par l’article 78 de la loi du 5 septembre 2018, qui a pour objectif de favoriser les transitions professionnelles des travailleurs handicapés vers les autres entreprises.

L’article 5 du décret du 14 novembre 2018 relatif à l’expérimentation par les entreprises adaptées d’un accompagnement des transitions professionnelles des travailleurs handicapés vers les autres employeurs ([320]) précise les modalités de calcul de cette aide au poste. Elle s’élève à 10 699 euros en 2020, dont 9 726 euros de socle et 973 euros de part variable versée en fonction de critères liés aux caractéristiques des personnes embauchées, aux actions et moyens mis en œuvre pour accompagner la réalisation du projet professionnel et des résultats constatés à la sortie de l’entreprise adaptée.

● Laide au poste finance laccompagnement réalisé par les EA de travail temporaire (EA-TT), dispositif expérimental créé par l’article 79 de la loi du 5 septembre 2018 pour faciliter l’émergence d’un spécialiste de l’intérim dédié aux travailleurs handicapés.

Dans ce cas, son montant, fixé à l’article 5 du décret du 24 avril 2019 relatif à l’expérimentation des entreprises adaptées de travail temporaire portant modalités de mise en œuvre, de financement et d’évaluation ([321]), est de 4 548 euros en 2020.

● Enfin, l’aide au poste peut prendre la forme d’une aide finançant les équivalents temps plein dans un nouveau type dentreprise adaptée innovante et expérimentale dite « entreprise adaptée pro-inclusive ».

Le montant de l’aide s’élèvera dans ce cas à 12 183 euros en 2020.

L’aide au poste, sous ses différentes formes, est versée et contrôlée par l’Agence de services et de paiement (ASP) en vertu de l’article R. 5213-78 du code du travail.

L’Agence de services et de paiement (ASP)

L’ASP est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle de l’État. Elle a pour but d’assurer la gestion administrative et financière d’aides publiques.

Elle assure également des missions d’assistance technique et administrative à la mise en œuvre de politiques publiques et de formation ou d’assistance aux administrations gestionnaires d’aides publiques.

Aux termes de l’article L. 313-1 du code rural et de la pêche maritime, l’agence exerce ses missions, notamment dans les domaines suivants :

– l’agriculture, l’aquaculture, la forêt, la pêche et les industries qui leur sont liées ;

– l’emploi, l’éducation et la formation professionnelle ;

– l’insertion, l’intégration, la solidarité et l’action sociale ;

– l’aménagement du territoire, le développement local et rural ;

– la protection de l’environnement et la promotion du développement durable ;

– l’aménagement foncier outre-mer.

En 2018, l’ASP a versé des aides publiques européennes, nationales et locales à 6 millions de bénéficiaires, pour plus de 200 dispositifs représentant un total d’environ 19 milliards deuros.

c.   Le soutien des entreprises adaptées par des crédits budgétaires

● L’aide au poste dans les entreprises adaptées (EA) est financée par les crédits du programme 102 de la mission Travail et emploi. Conformément à l’article L. 5213-19 du code du travail, elles sont attribuées « dans la limite des crédits fixés annuellement par la loi de finances ».

Le programme 102 finançait également, jusqu’au 1er janvier 2019, une subvention spécifique qui était destinée au suivi social, à l’accompagnement et à la formation spécifiques de la personne handicapée, pour favoriser son adaptation à son poste de travail. La loi du 5 septembre 2018, qui a refondu le système du soutien aux entreprises adaptées, a supprimé cette aide. Les aides au poste, réformées par la loi du 5 septembre 2018, sont désormais la ligne budgétaire unique du soutien du budget général de l’État aux entreprises adaptées.

Parallèlement, le nombre d’emplois financés par les aides au poste a progressivement augmenté.

Financement des entreprises adaptÉes
par le programme 102 de la mission Travail et emploi

(en millions d’euros, sauf mention contraire)

 

2015

2016

2017

2018

2019 (p)

2020 (p)

Aide au poste

294,4

317,3

324,21

349,8

395,4

402,9

Subvention spécifique

41,0

40,5

43,3

42,7

Emplois financés (en ETP)

21 775

22 529

23 161

23 781

29 500

33 486

Source : rapports annuels de performance de la mission Travail et emploi pour les années 2015 à 2018 ; projets annuels de performance pour les années 2019 et 2020.

● Pour la seule année 2019, l’article 273 de la loi de finances pour 2019 ([322]) a institué une contribution de lAssociation de gestion du fonds de développement pour linsertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) en faveur des entreprises adaptées, d’un montant de 25 millions deuros. Cette contribution, qui n’est pas retracée dans le budget général de lÉtat, est destinée au financement des aides au poste.

Selon la réponse du Gouvernement au questionnaire écrit du Rapporteur général, en 2019, au-delà de cette contribution de 25 millions d’euros, l’AGEFIPH a attribué dans le cadre de son budget rectificatif une dotation supplémentaire de 25 millions d’euros au titre du financement de la réforme des EA, portant son soutien financier aux EA à hauteur de 50 millions d’euros.

2.   L’AGEFIPH

a.   Les missions de l’AGEFIPH

● L’AGEFIPH a été créé par la loi du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des personnes handicapées ([323]). Elle a pour mission la gestion du fonds de développement pour linsertion professionnelle, dont l’objet est d’accroître les moyens consacrés à l’insertion des handicapés en milieu ordinaire de travail, aux termes de l’article L. 5214-1 du code du travail. Les relations entre l’État et l’AGEFIPH sont régies par une convention triennale en vertu de l’article L. 5214‑2 du même code.

● Cette mission générale se décline en plusieurs missions particulières : L’AGEFIPH doit ainsi :

– se prononcer de manière explicite sur toute demande d’un employeur ayant pour objet de connaître l’application à sa situation des règles relatives à l’obligation d’emploi par les entreprises de vingt salariés ou plus, d’au moins 6 % de travailleurs handicapés – obligation prévue aux articles L. 5212-2 et L. 5212‑13 ;

– décider de l’attribution d’une aide visant à ce que le salaire des bénéficiaires de cette obligation d’emploi ne soit pas inférieur à celui qui résulte de l’application des dispositions légales ou des stipulations conventionnelles ;

– décider de l’attribution et du montant de la prime aux travailleurs handicapés ayant effectué un stage de réadaptation, de rééducation ou de formation professionnelle pour faciliter leur reclassement.

● Les dépenses du fonds de développement pour linsertion professionnelle des handicapés dont la gestion est confiée l’AGEFIPH financent :

– la compensation du coût supplémentaire des actions de formation et des actions d’innovation et de recherche dont bénéficient les intéressés dans l’entreprise ;

– des mesures nécessaires à l’insertion professionnelle, au suivi durable et au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés dans l’objectif de favoriser la sécurisation de leurs parcours professionnels ;

– tout ou partie des actions de formation professionnelle préqualifiantes et certifiantes des demandeurs d’emploi handicapés.

b.   Les ressources et les dépenses de l’AGEFIPH

● Les ressources du fonds géré par l’AGEFIPH sont constituées par le produit de la contribution annuelle mentionnée plus haut dont s’acquittent les employeurs occupant au moins vingt salariés, prévue à l’article L. 5219-9 du code du travail, au titre de leur obligation d’emploi de travailleurs handicapés.

Son montant est précisé à l’article D. 5212-20 du code du travail. Il est égal au produit du nombre de travailleurs handicapés manquant dans l’entreprise au regard de l’obligation d’emploi de 6 % multiplié par :

– 400 fois le SMIC horaire brut pour les entreprises de vingt à moins de 250 salariés ;

– 500 fois le SMIC horaire brut pour les entreprises de 250 à moins de 750 salariés ;

– 600 fois le SMIC horaire brut pour les entreprises de 750 salariés et plus.

● En 2018, les recettes de l’AGEFIPH se sont élevées à 449,9 millions deuros, dont 435 millions d’euros au titre de la contribution. Selon son rapport annuel d’activité d’avril 2019, 41 837 établissements se seraient acquittés totalement ou partiellement de leur obligation d’emploi en versant une contribution à l’AGEFIPH.

● Les dépenses totales de l’AGEFIPH et du fonds se sont établies à 435,5 millions deuros. Elles ont principalement financé l’accompagnement vers l’emploi et l’insertion professionnelle (54 % des dépenses d’intervention) et l’accompagnement dans l’emploi et l’évolution professionnelle (40 % des dépenses d’intervention).

Au 31 décembre 2018, les fonds propres de l’AGEFIPH s’établissaient à 154,8 millions deuros. Ils s’étaient établis à 145,3 millions d’euros au 31 décembre 2017 ([324]).

B.   LA NÉCESSITÉ DE FAIRE CONTRIBUER L’AGEFIPH AU SOUTIEN DES ENTREPRISES ADAPTÉES DANS LE CONTEXTE DE LA MISE EN ŒUVRE DE LA RÉFORME DE LA LOI DU 5 SEPTEMBRE 2018

1.   La participation des entreprises adaptées à l’effort de maîtrise des dépenses budgétaires

Il est indiqué dans l’évaluation préalable du présent article que les entreprises adaptées participent à l’effort de maîtrise budgétaire du fait de l’instauration d’une limitation du montant global d’aides versées en fonction de l’effectif salarié de l’entreprise.

L’article R. 5213-76 du code du travail, créé par l’article 1er du décret du 28 décembre 2018 ([325]), pris pour préciser les modalités d’application du nouveau cadre contractuel entre l’État et les EA, précise en effet que l’aide financière unique est limitée par le montant de l’enveloppe financière fixée par un avenant au CPOM conclu avec le préfet de région.

2.   Le renforcement à venir du rôle des entreprises adaptées

Le rôle des EA est appelé à se renforcer dans les années à venir, dans le cadre de l’engagement « Cap vers lentreprise inclusive 2018-2022 », qui fixe un objectif de création de 40 000 emplois supplémentaires dans les EA entre 2018 et 2022.

La loi du 5 septembre 2018 a ainsi conforté le modèle des entreprises adaptées et a créé la possibilité de recourir à des expérimentations.

● Elle a réaffirmé la vocation économique et sociale des EA en :

– renforçant leur responsabilité économique par une moindre dépendance aux subventions publiques ;

– renforçant la mixité au sein des EA par un remplacement de la proportion minimale de travailleurs handicapés égale à 80 % des effectifs de production par une proportion minimale fixée, en fonction de l’effectif total annuel de l’entreprise, à 55 % actuellement ;

– simplifiant le cadre de conventionnement au moyen des CPOM, d’une durée maximale de cinq ans au lieu de trois ans dans le précédent cadre conventionnel ;

– simplifiant l’architecture financière avec la mise en place d’une aide financière « contribuant à compenser les conséquences du handicap et des actions engagées pour lemploi » ([326]), dont le montant est modulé en fonction du cadre de mise en emploi.

● Elle a institué trois expérimentations sur la base du volontariat, dont les aides associées ont été présentées supra. Elles ont pour objet de favoriser l’employabilité des bénéficiaires du dispositif des EA à d’autres emplois.

L’expérimentation du CDD dit « tremplin », démarrée au cours du quatrième trimestre 2018, a pour but de favoriser les mobilités professionnelles vers les employeurs autres que les EA. Les EA autorisées expérimentent la mise en œuvre d’un parcours d’accompagnement individualisé dans le cadre d’un contrat conclu pour une durée comprise entre quatre mois minimum et 24 mois maximum, hors cas de dérogations prévus par la loi. Ces contrats ont pour but de « dynamiser les parcours et transitions professionnelles et favoriser le développement de lemploi des travailleurs handicapés par lacquisition dune expérience professionnelle, laccès à des formations notamment préqualifiantes et qualifiantes selon leurs besoins ([327]) ».

Visant le même objectif d’encourager les transitions professionnelles, la loi a aussi permis le recours au contrat de mission de travail temporaire dans le cadre des EA de travail temporaire (EATT). Depuis le premier semestre 2019, les EA volontaires peuvent créer un établissement juridique distinct ayant pour activité exclusive de faciliter l’accès à l’emploi durable des travailleurs handicapés sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap. Ces EATT mettent en œuvre un accompagnement professionnel renforcé durant le contrat de mission ou le CDI intérimaire, et durant les intermissions. Elles proposent des parcours individualisés tenant compte des capacités et des besoins des intérimaires reconnus handicapés qu’elles emploient.

Enfin, la loi a instauré une expérimentation de lentreprise adaptée « proinclusive » ou « pro-inclusion », applicable depuis le deuxième trimestre 2019. Elle est ouverte aux EA existantes ou nouvellement créées pour expérimenter un modèle d’EA fondée sur la parité et la mixité entre les profils de bénéficiaires. La part de travailleurs handicapés est limitée à 50 %. Le régime de ces entreprises sera défini par voie réglementaire. D’après les éléments transmis au Rapporteur général, des travaux sont en cours avec les représentants du secteur adapté pour définir le cahier des charges de l’expérimentation. Un décret doit être pris à cet effet au début de l’année 2020.

Ces expérimentations prennent fin le 31 décembre 2022. Elles rendent nécessaire la mobilisation de moyens supplémentaires.

II.   LE DROIT PROPOSÉ

A.   LA CRÉATION D’UNE NOUVELLE CONTRIBUTION DE L’AGEFIPH DESTINÉE AU FINANCEMENT DES ENTREPRISES ADAPTÉES

1.   La création d’une contribution de l’AGEFIPH pour les années 2020 à 2022

● Sur le modèle de la contribution créée par l’article 273 de la loi de finances pour 2019, la première phrase du premier alinéa du présent article crée une contribution annuelle de l’AGEFIPH au bénéfice de l’ASP pour les années 2020 à 2022. Son montant varierait entre 50 et 55 millions deuros par an.

La seconde phrase précise que cette contribution est affectée par l’ASP au financement de l’aide au poste, laquelle fait par ailleurs, comme vu supra, l’objet d’un financement par les crédits du programme 102 « Accès et retour à l’emploi » de la mission Travail et emploi.

● Le deuxième alinéa de l’article renvoie à un arrêté conjoint du ministre chargé du travail et du ministre chargé du budget le soin de fixer chaque année le montant de la contribution dans les bornes prévues par le premier alinéa.

● Le troisième alinéa fixe les règles relatives au versement annuel de la contribution : il sera effectué en deux échéances semestrielles, la première avant le 1er juin et la seconde avant le 1er décembre.

● Le dernier alinéa aligne les modalités de recouvrement, de contentieux, de garanties et de sanctions de la contribution sur celles relatives à la taxe sur les salaires.

Compte tenu du niveau de l’écart entre les emplois et les ressources de l’AGEFIPH en 2018 (9,4 millions d’euros) et du montant de ses fonds propres au 31 décembre 2018 (154,8 millions d’euros), le montant de la contribution paraît supportable. Il semble dailleurs avoir été calibré pour réduire au minimum le fonds de roulement de lorganisme à horizon 2022.

2.   L’objectif de renforcer la synergie entre les différents acteurs du secteur des entreprises adaptées

L’évaluation préalable justifie la création de cette contribution par l’encouragement d’une « synergie entre les différents acteurs concernés, en permettant à lAGEFIPH de contribuer au financement des entreprises adaptées ». Selon les éléments transmis au Rapporteur général par le Gouvernement, la participation de l’AGEFIPH au financement de la réforme des entreprises adaptées a déjà permis de créer des partenariats constructifs. Elle a ainsi récemment signé une convention avec l’Union nationale des entreprises adaptées (UNEA) pour développer des actions opérationnelles dans le cadre de l’objectif de création de 40 000 emplois supplémentaires en EA d’ici 2022.

En outre, dans le cadre du Plan d’investissement dans les compétences, il est prévu de soutenir les EA dans leurs actions de formation des salariés handicapés en « CDD tremplins » et en contrat d’intérim pour un montant global de 50 millions d’euros sur la période 2019-2022. L’État a donc missionné l’AGEFIPH pour verser les aides financières correspondantes aux EA et les accompagner dans la mise en œuvre d’une ingénierie de formation adaptée.

Enfin, l’AGEFIPH travaille avec Pôle emploi et finance le réseau des Cap emploi, partenaires importants des entreprises adaptées, à la fois pour répondre aux besoins de recrutement de ces entreprises, mais aussi pour accompagner vers les autres employeurs les salariés handicapés des EA dont le projet professionnel est de rejoindre un employeur classique, à l’instar des salariés en « CDD tremplins » et en contrat d’intérim.

B.   UN CONTOURNEMENT DES PRINCIPES BUDGÉTAIRES ET DE LA NORME DE DÉPENSES

Bien que conforme juridiquement aux dispositions organiques, la présence de cet article dans le projet de loi de finances nest pas sans soulever des interrogations quant au respect des principes budgétaires et de la norme de dépenses.

1.   Le contournement des principes budgétaires

Cet article pose question quant au respect des principes budgétaires et de la norme de dépenses, puisque 402,9 millions d’euros sont inscrits au programme 102 dans le présent projet de loi de finances pour le financement des EA. La contribution de l’AGEFIPH au soutien des EA ne serait pas retracée dans le budget général.

Or, le respect des principes budgétaires n’est pas un impératif théorique. Il garantit concrètement lexercice des pouvoirs du Parlement en matière budgétaire.

● En instaurant un financement par l’AGEFIPH des actions en faveur des entreprises adaptées par le biais d’une contribution créée pour les années 2020 à 2022, le présent article contourne le principe dannualité. Aux termes de l’article 1er de la loi du 1er août 2001 relatif aux lois de finances (LOLF) ([328]), « les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et laffectation des ressources et des charges de lÉtat, ainsi que léquilibre budgétaire et financier qui en résulte », étant précisé que « lexercice sétend sur une année civile ».

Par le présent article, indirectement, le Gouvernement propose au Parlement de voter le financement dune dépense pour les trois prochaines années. Une fois cette disposition adoptée, ne sera pas requise l’autorisation parlementaire de dépenser dans le cadre de l’examen des projets de loi de finances pour 2021 et pour 2022. Le principe d’annualité permet pourtant au Parlement d’opérer des arbitrages chaque année sur les priorités de la dépense.

La contribution de 25 millions d’euros de l’AGEFIPH au financement des EA instaurée par l’article 273 de la loi de finances pour 2019 avait été introduite par le Gouvernement par un amendement ([329]) portant article additionnel rattaché à la mission Travail et emploi en première lecture à l’Assemblée nationale. Elle ne portait que sur la seule année 2019.

● Le présent article contourne le principe dunité budgétaire en ce qu’il propose une débudgétisation. Aux termes de l’article 6 de la LOLF, « le budget décrit, pour une année, lensemble des recettes et des dépenses budgétaires de lÉtat ». Or, il est ici proposé de faire financer hors du budget général, par un tiers, une partie d’une dépense qui, actuellement, est quasiment intégralement financée par le budget général.

Il y a en outre lieu de remarquer que l’article L. 5213-19 du code du travail prévoit que les aides au poste « sont attribuées dans la limite des crédits fixés annuellement par la loi de finances ». La disposition proposée par le présent article paraît doublement contradictoire avec cette disposition : la contribution affectée aux dépenses n’est pas annuelle et n’est pas retracée en loi de finances.

Enfin, cette contribution brouille le financement des EA dont il n’est pas évident d’obtenir une vision claire de l’ensemble du soutien financier public.

● Le présent article contourne le principe duniversalité. Il découle du même article 6 de la LOLF que lensemble des recettes de lÉtat assure lexécution de lensemble des dépenses. Or, cet article propose la création d’une contribution qui aurait pu être versée au budget général – le cas échéant sous la forme d’un prélèvement sur fonds de roulement – ce qui aurait permis de majorer le montant des crédits du programme 102 à due concurrence, laissant ainsi aux parlementaires la possibilité de réallouer ces dépenses au sein de la mission Travail et emploi, conformément à l’esprit de la LOLF.

La multiplication des recettes affectées à des dépenses nuit par ailleurs à la lisibilité densemble des financements des politiques publiques, à la force de l’autorisation parlementaire de dépenser et à la capacité pour les parlementaires de contrôler la dépense.

2.   Le contournement de la norme de dépenses

Pour prendre en compte plusieurs recommandations de la Cour des comptes, le législateur a procédé à une transformation des normes de dépenses à l’article 9 de la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ([330]). Il existe désormais une norme de dépenses pilotables et un objectif total de dépenses de lÉtat.

Cette refonte a permis d’améliorer la lisibilité des normes de dépenses en programmation et en exécution en distinguant une enveloppe qu’en théorie le Gouvernement peut piloter en gestion (la norme de dépenses pilotables) et une enveloppe contenant cette première enveloppe et des dépenses dont la dynamique est indépendante des choix du Gouvernement et du législateur parce qu’elle résulte de choix passés ou de facteurs exogènes.

Les dépenses du budget général et donc celles de la mission Travail et emploi sont incluses dans le champ de la norme de dépenses pilotables.

Norme de dépenses de l’État entre 2017 et 2020

(en milliards d’euros)

 

Exécution

2017

Exécution

2018

LFI 2019

PLF 2020

(constant)

Écart PLF 2020/

LFI 2019

Crédits des ministères

238,3

240,0

246,6

251,1

+ 4,6

Taxes affectées plafonnées

9,8

9,2

9,5

10,2

+ 0,8

Comptes spéciaux pilotables et budgets annexes*

12,2

12,4

12,7

12,5

– 0,2

Retraitements des flux internes au budget de l’État

– 5,8

– 5,8

– 5,8

-5,8

Norme de dépenses pilotables

254,5

255,8

262,9

268,0

+ 5,1

Transferts aux collectivités territoriales

46,5

47,2

47,4

48,1

+ 0,7

Dépenses du CAS Pensions*

55,8

56,7

57,3

58,0

+ 0,7

Autres dépenses des comptes spéciaux

1,3

1,6

2,0

1,2

– 0,8

Prélèvement sur recettes au profit de l’UE

16,4

20,6

21,4

21,3

– 0,1

Charge de la dette de l’État

41,7

41,5

42,1

38,6

– 3,5

Investissements d’avenir

-

1,1

1,0

2,2

+ 1,1

Objectif de dépenses totales de lÉtat

416,2

424,6

434,1

437,4

+ 3,3

* Hors pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.

Source : présent projet de loi de finances.

Pour 2020, la norme de dépenses pilotables a été fixée à 268,0 milliards deuros. La création d’une contribution de l’AGEFIPH à des dépenses par ailleurs financées par le budget général permet d’accroître des dépenses sans inclure cette contribution dans la norme de dépenses pilotables, ce qui permet :

– en programmation, d’afficher une norme de dépenses inférieure à celle qui aurait résulté de la majoration des crédits de la mission Travail et emploi ;

– en exécution, à norme constante de dépenses, de ne pas conditionner son respect par la gestion d’une dépense supplémentaire sous norme.

Pour ces raisons, il aurait sans doute été souhaitable de majorer le montant des crédits du programme 102 de la mission Travail et emploi. Au besoin, il aurait pu être procédé à un prélèvement annuel sur le fonds de roulement de l’AGEFIPH au profit du budget général en première partie du présent projet de loi de finances.

C.   L’IMPACT BUDGÉTAIRE ET ÉCONOMIQUE

Cette disposition concourt à l’objectif de création de 40 000 emplois supplémentaires dans les EA d’ici 2022. Elle permet ainsi de favoriser l’emploi des personnes en situation de handicap et d’accompagner la réforme du secteur.

Elle n’a pas d’impact budgétaire.

*

*     *

La commission examine lamendement II-CF1424 de M. Boris Vallaud.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement vise à supprimer l’article 65, qui ponctionne plusieurs millions à l’AGEFIPH, alors même que des discussions sont en cours avec l’association et qu’une convention avec l’État doit être établie, qui inclura des dispositions financières. Je trouve cet article malvenu.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je vous inviterais volontiers, madame Pires Beaune, à retirer votre amendement. Comme vous pouvez le constater, nous allons examiner juste après un amendement dont je suis l’auteur – car moi non plus je ne comprenais pas le dispositif proposé. Pour vous convaincre de vous rallier à l’amendement II‑CF1569, je me propose de le présenter dès maintenant, avec l’autorisation de notre président.

Comme vous l’avez dit, madame Pires Beaune, l’article 65 institue une contribution pluriannuelle de l’AGEFIPH au financement des entreprises adaptées, à hauteur de 50 à 55 millions par an entre 2020 et 2022, via l’Agence de services et de paiement, qui est un opérateur de l’État. L’amendement II-CF1569 revient en fait à supprimer l’article, tout en procédant à un nettoyage légistique par la suppression d’une disposition désormais caduque.

Le circuit de financement va être modifié de sorte qu’il soit plus conforme au droit budgétaire classique. Au lieu de passer par une contribution de l’AGEFIPH à l’Agence des services et de paiement, laquelle verse ensuite des aides aux entreprises adaptées, le financement serait établi par une convention pluriannuelle entre l’État et l’AGEFIPH, avec un versement de l’AGEFIPH retracé dans le budget général, via un fonds de concours, de manière on ne peut plus classique. En outre, le Parlement serait ainsi informé, en programmation et en exécution, de l’utilisation des fonds. Je crois que c’est la bonne façon de sortir du système de caisse intermédiaire, que je ne comprenais pas.

Mme Christine Pires Beaune. Je me rallie à l’amendement du rapporteur général. Si je comprends bien, les discussions entre l’AGEFIPH et l’État ont abouti ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Elles sont sur le point d’aboutir, et le montant du versement de l’AGEFIPH, qui est d’environ 50 millions, sera précisément calibré, en fonction des besoins des entreprises adaptées et des ressources de l’AGEFIPH.

M. Charles de Courson. Je suis tout à fait favorable à la proposition du rapporteur général. Les besoins en matière d’insertion des personnes handicapées sont très importants : le taux de 6 % n’a toujours pas été atteint. Il faut donc vraiment aider les entreprises à adapter les postes de travail, de manière à employer des salariés handicapés. Or, globalement, monsieur le rapporteur général, l’AGEFIPH fait bien son boulot.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Tout à fait !

Lamendement II-CF1424 est retiré.

La commission adopte ensuite lamendement II-CF1569 du rapporteur général (amendement II-2597).

En conséquence, larticle 65 est ainsi rédigé et les amendements IICF1041 et IICF1040 du rapporteur général tombent.

*

*     *

 


Article 66
Garantie par lÉtat des emprunts de lUnédic émis en 2020

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article autorise l’État à accorder sa garantie aux emprunts contractés par l’Unédic au cours de l’année 2020, en principal et en intérêts, dans la limite d’un plafond global en principal de 2 milliards d’euros.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 213 de la loi de finances initiale pour 2019 a autorisé l’État à accorder sa garantie aux emprunts contractés par l’Unédic au cours de l’année 2019, en principal et en intérêts, dans la limite d’un plafond global en principal de 2,5 milliards d’euros.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Le présent article a été adopté par la commission sans modification.

I.   L’ÉTAT DU DROIT

A.   LA GARANTIE DE L’ÉTAT SUR L’ENDETTEMENT DE L’UNÉDIC

1.   L’endettement de l’Unédic : 38 milliards d’euros en 2019

a.   Présentation de l’Unédic

Créée en 1958, l’Unédic ([331]) est une association chargée, par délégation de service public, de la gestion de l’assurance chômage en France, aux termes de l’article L. 5427-1 du code du travail. Elle exerce cette gestion sous la responsabilité des organisations représentatives, au plan national et interprofessionnel, des salariés (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT et CGT-FO) et des employeurs (MEDEF, CPME et U2P).

Les partenaires sociaux négocient de façon régulière une convention et un règlement d’assurance chômage qui détaillent les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi, le taux des contributions des salariés et des employeurs, les conditions d’ouverture des droits des allocataires, le montant et la durée des allocations, et la nature des aides à la reprise d’emploi. Ces règles deviennent obligatoires après l’agrément de la convention par l’État : c’est le principe du paritarisme. En cas d’échec des négociations entre les partenaires sociaux, l’État impose la modification des règles de façon unilatérale, par la voie réglementaire. Cette situation s’est produite en février 2019, après l’échec des négociations entamées en novembre 2018.

b.   Situation financière de l’Unédic

La situation financière de l’Unédic est, pour partie, liée à la conjoncture économique et, en particulier, à l’évolution des niveaux d’emploi et du taux de chômage. L’assurance chômage réagit davantage à la conjoncture que les autres régimes de protection sociale.

En phase basse du cycle économique, le ralentissement de l’activité et la hausse du chômage conduisent à une baisse des recettes de contributions mais aussi à un surcroît des dépenses d’indemnisation. À l’inverse, une croissance élevée entraîne à la fois un surplus des recettes et de moindres dépenses.

Le dernier excédent de l’Unédic remonte à 2008. L’Unédic est en déficit depuis 2009, jouant ainsi un rôle de stabilisateur social consécutif à la crise financière de 2008.

Résultat financier de lUnédic depuis 2008

(en milliards deuros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Résultat

+ 4,6

– 0,6

– 2,8

– 2,4

– 2,7

– 3,8

– 3,7

– 4,3

– 4,3

– 3,4

– 1,8

Source : Unédic.

Le déficit pour 2018 s’est élevé à 1,8 milliard d’euros.

Les dépenses ont été de 40,1 milliards d’euros, dont notamment :

– 33,9 milliards d’euros au titre du versement d’allocations et d’aides en faveur des demandeurs d’emploi ;

– 3,4 milliards d’euros au titre du financement de Pôle emploi ;

– 2,1 milliards d’euros de cotisations aux caisses de retraite complémentaire pour le compte des demandeurs d’emploi ;

Les recettes se sont limitées à 38,3 milliards d’euros dont 37,1 milliards d’euros de contributions des employeurs et des salariés (+ 3,8 % par rapport à 2017 du fait du dynamisme de la masse salariale).

L’Unédic recourt à des emprunts pour couvrir le besoin de financement nécessaire à la continuité de l’indemnisation du chômage. Au 31 décembre 2018, l’Unédic était endettée à hauteur de 35,5 milliards d’euros (+ 2 milliards d’euros par rapport à 2017). Ses charges financières s’élevaient, en 2018, à 365 millions d’euros.

L’amélioration de la situation financière de l’Unédic, particulièrement marquée en 2018 par rapport à 2017 (baisse du déficit financier de 1,6 milliard d’euros), s’explique par des effets de trésorerie qui auront un contrecoup en 2019 ([332]). Selon les dernières données disponibles ([333]), le déficit de l’Unédic devrait se maintenir à – 1,8 milliard d’euros en 2019. En 2020, les premiers effets de la réforme de l’assurance chômage permettraient de conduire l’Unédic à une situation proche de l’équilibre (– 0,3 milliard d’euros) puis de dégager des excédents importants entre 2021 (+ 3,0 milliards d’euros) et 2022 (+ 5,3 milliards d’euros).

La réforme de l’assurance chômage de 2019

La réforme de l’assurance chômage prévue par la loi  2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel entre en vigueur au 1er novembre 2019. Le décret d’application n° 2019-797 du 26 juillet relatif au régime d’assurance chômage précise les nouvelles règles d’indemnisation du chômage. Ce décret prévoit :

– de nouvelles modalités d’ouverture de droits, faisant passer à 6 mois (au lieu de 4 mois pour les ouvertures de droit et de 150 heures pour les rechargements) la durée d’affiliation requise, et à 24 mois (au lieu de 28) la période sur laquelle les contrats sont recherchés pour vérifier cette affiliation (la période reste de 36 mois pour les 53 ans et plus) ;

– de la dégressivité, pour les allocataires de moins de 57 ans qui avaient un salaire supérieur à 4 500 euros brut ; au bout de 6 mois d’indemnisation (183 jours d’allocation consommés) leur allocation sera diminuée de 30 %, cette baisse étant limitée par un plancher du montant de l’allocation (2 261 euros net) ;

– de nouvelles modalités de détermination du salaire de référence à partir du 1er avril 2020, calculé non plus sur les jours travaillés dans les 12 derniers mois mais sur l’ensemble de la période allant du début du premier contrat à la fin du dernier contrat occupé dans les 24 derniers mois, ;

– une indemnisation au titre de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) pour les salariés qui démissionnent pour un projet de reconversion ou de création d’entreprise. Ce nouveau droit ne pourra être ouvert qu’aux personnes ayant été salariées durant les 5 années précédentes de manière continue ;

– une allocation pour les travailleurs indépendants dont l’activité cesserait pour redressement ou liquidation judiciaire, sous certaines conditions, notamment le constat de revenus antérieurs d’au moins 10 000 euros par an sur les deux années précédentes ;

– un système de bonus-malus pour les entreprises de 11 salariés ou plus de sept secteurs parmi ceux où les entreprises se séparent le plus fréquemment de leurs salariés ; la modulation des contributions d’assurance chômage qui pourront varier entre 3 % et 5,05 % sera effective à partir du 1er mars 2021 ; d’ici là pour toutes les entreprises, puis après cette date pour les entreprises non concernées par le bonus-malus, le taux de contribution demeure fixé à 4,05 % ;

– des contributions spécifiques pour les CDD d’usage à compter du 1er janvier 2020 : une sur-contribution de 0,5 point pour les CDD d’usage de moins de 3 mois d’intermittents du spectacle et une taxe forfaitaire de 10 euros pour les autres CDD d’usage (hors contrats d’intermittents du spectacle). Cette dernière disposition est précisée par l’article 51 du présent projet de loi de finances ;

– le passage, dès 2020, de 10 % à 11 % de la part des contributions dont bénéficie l’Unédic consacrée au financement de Pôle emploi.

Source : Unédic, Impact de la réforme de lassurance chômage 2019, septembre 2019

Le tableau ci-après isole les effets financiers de la réforme de l’assurance chômage.

Impact financier de la réforme de l’assurance chômage

Soldes nets

(en millions d’euros)

 

2019

2020

2021

2022

Hausse des contributions

0

+ 130

+ 370

+ 370

Moindres dépenses liées aux nouvelles règles dindemnisation

+ 10

+ 1 170

+ 2 240

+ 2 520

Surcroît de dépenses liées aux nouveaux droits

0

– 440

– 440

– 440

Surcroît de financement de Pôle emploi

0

– 380

– 380

– 400

Impact consolidé sur le solde

+ 10

+ 480

+ 1 790

+ 2 050

Source : commission des finances, d’après données Unédic

Dans ces conditions, en 2019, l’Unédic a prévu de couvrir ses besoins de financement en émettant 2,5 milliards d’euros d’emprunts obligataires. L’endettement total devrait atteindre 37,4 milliards d’euros en 2019, devrait se stabiliser à 37,7 milliards d’euros en 2020 puis amorcer sa décrue à compter de 2021, notamment grâce aux ressources financières issues de la réforme entrant progressivement en vigueur à compter de 2019.

Solde et endettement prévisionnels de l’UNédic

(en milliards d’euros)

 

2019

2020

2021

2022

Solde prévisionnel

– 1,8

– 0,3

+ 3,0

+ 5,3

dont effet de la réforme 2019

+ 0

+ 0,5

+ 1,8

+ 2,1

Endettement net prévisionnel

– 37,4

– 37,7

– 34,7

– 29,4

Source : commission des finances, d’après données Unédic

c.   Règles d’endettement de l’Unédic

Le besoin de financement de l’Unédic est assuré par trois types d’instruments :

– des emprunts obligataires ;

– des billets de trésorerie ;

– et des bons à moyen terme négociables.

L’Unédic peut, en effet, émettre des obligations sur les marchés financiers dans les conditions de droit commun. En tant qu’association, elle est toutefois soumise aux dispositions des articles L. 213-8 et suivants du code monétaire et financier, dont l’objet est de protéger les souscripteurs d’un emprunt obligataire.

L’article L. 213-15 du code précité prévoit qu’une association dont « les fonds propres ont diminué de plus de la moitié par rapport au montant atteint à la fin de lexercice précédant celui de lémission » est tenue de reconstituer ses fonds propres dans un délai de deux ans. À défaut, cette association perd le droit d’émettre de nouveaux titres obligataires et tout porteur de titres déjà émis peut demander en justice le remboursement immédiat de la totalité de l’émission.

Or, l’Unédic se trouve historiquement dans cette situation compte tenu de la dégradation de sa situation financière. En conséquence, l’article 107 de la loi de finances rectificative pour 2004 ([334]) a exonéré les émissions de titres de l’Unédic des dispositions précitées du code monétaire et financier, dès lors que ces émissions bénéficient de la garantie de l’État.

En d’autres termes, en l’état du droit et compte tenu de sa situation financière, l’Unédic ne peut pas émettre de nouvelles obligations sans la garantie de l’État, tant qu’elle n’a pas reconstitué ses fonds propres.

2.   La garantie de l’État

L’État peut apporter une garantie à des emprunts en application du 5° du II de l’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Entre 2010 et 2017, la loi de finances rectificative de fin d’exercice a été systématiquement l’occasion d’autoriser le ministre chargé de l’économie à accorder la garantie de l’État aux emprunts contractés par l’Unédic pour l’année N+1 ([335]). Toutefois, pour 2019, cette autorisation a été prévue en loi de finances initiale ([336]).

Au 31 décembre 2017, l’encours de dette garantie par l’État s’élevait à 29,740 milliards d’euros ([337]), soit près du triple que celui constaté au 31 décembre 2012.

Encours de la dette de lUnÉdic garantie par lÉtat

(en millions deuros)

Date

Montant de la dette garantie

31 décembre 2012

9 711

31 décembre 2013

14 826

31 décembre 2014

20 490

31 décembre 2015

23 902

31 décembre 2016

25 522

31 décembre 2017

29 049

31 décembre 2018

29 746

Source : compte général de lÉtat, de 2012 à 2018.

Pour l’année 2019, l’article 213 de la loi de finances pour 2019 a autorisé l’État à accorder sa garantie aux emprunts contractés par l’Unédic, en principal et en intérêts, dans la limite d’un plafond global en principal de 2,5 milliards d’euros.

II.   LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Comme en 2019, la situation financière de l’Unédic rendra indispensable en 2020 l’émission de nouveaux titres de dette. À défaut de reconstitution de ses fonds propres, lUnédic ne dispose pas du droit démettre de nouvelles obligations par application de larticle L. 21315 du code monétaire et financier susmentionné.

Le présent article autorise donc l’octroi, à titre gratuit, de la garantie de l’État aux emprunts émis par l’Unédic en 2020 dans la limite d’un plafond en principal de 2 milliards d’euros.

Cette nouvelle garantie ne devrait pas accroître significativement les engagements de l’État concernant la dette de l’Unédic. En effet, la majorité de cette garantie couvrirait la part de l’emprunt obligataire qui servira à rembourser des titres obligataires arrivant à échéance en 2020, à hauteur de 1,5 milliard d’euros.

En d’autres termes, le renouvellement de la garantie couvrirait le besoin de financement du déficit de 2020 de l’Unédic à hauteur de 500 millions d’euros et permettrait principalement le refinancement de la dette antérieure.

Cette disposition n’emporte aucune conséquence budgétaire pour l’État tant que l’Unédic ne fait pas défaut sur sa dette et que la garantie n’est pas appelée.

*

*     *

La commission adopte larticle 66 sans modification.

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*     *


Article 67
Augmentation maîtrisée de certaines prestations sociales et suppression de lindexation de la réduction de loyer de solidarité (RLS)

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article procède à une moindre revalorisation de certaines prestations sociales par rapport à ce que prévoit le droit actuellement en vigueur et à une désindexation des plafonds d’éligibilité de la réduction de loyer de solidarité (RLS).

Selon le droit en vigueur :

– plusieurs paramètres de calcul des aides personnelles au logement sont revalorisés au 1er octobre sur l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) (article L. 823-4 du code de la construction et de l’habitation) ;

– le montant de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) est revalorisé au 1er avril en fonction de l’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation (IPC) hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels publiés au mois de février (article L. 821-3-1 du code de la sécurité sociale) ;

– le montant forfaitaire et le montant maximal de la bonification de la prime d’activité (PA) sont revalorisés au 1er avril en fonction de l’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation (IPC) hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels publiés au mois de février (article L. 842-3 du code de la sécurité sociale) ;

– le montant des plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la réduction de loyer de solidarité (RLS) est indexé sur l’évolution en moyenne annuelle de l’IPC hors tabac constatée l’avant-dernière année précédant la revalorisation (article L. 442-2-1 du code de la construction et de l’habitation).

Cet article introduit une dérogation à ces dispositions en prévoyant que les paramètres des aides personnelles au logement, le montant de l’AAH et le montant forfaitaire de la prime d’activité ainsi que le montant maximal de sa bonification seront revalorisés à hauteur de 0,3 % en 2020. Ces dispositions entraîneront un gain pour l’État de 0,4 milliard d’euros en 2020.

Ces moindres revalorisations doivent être appréhendées dans un contexte de mise en œuvre de plusieurs revalorisations exceptionnelles de la PA et de l’AAH et d’une réforme globale des aides au logement.

Le montant des plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la RLS ne sera pas indexé sur l’IPC hors tabac en 2020. afin de parvenir à un objectif d’économies des aides personnalisées au logement (APL) pesant sur les bailleurs de 1,3 milliard d’euros en 2020, conformément au Pacte d’investissement pour la période 2020-2022 signé le 25 avril 2019 entre l’État et les représentants des bailleurs sociaux. La mise en œuvre de cet engagement impliquera également des mesures d’ordre réglementaire relatives à la revalorisation du montant lui-même de la RLS.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 210 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 avait procédé pour l’année 2019 à une revalorisation à hauteur de 0,3 % des paramètres de calcul des aides personnelles au logement, du montant forfaitaire et du montant maximal de la bonification de la PA, ainsi que du montant de l’AAH.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Cet article a été adopté sans modification.

I.   Les principes de revalorisation annuelle de certaines prestations sociales et de l’indexation de la réduction de loyer de solidarité

A.   Les aides personnelles au logement

1.   L’aide personnalisée au logement, l’allocation de logement familiale et l’allocation de logement sociale

Il existe trois aides personnelles au logement :

– l’aide personnalisée au logement (APL) ;

– l’allocation de logement familiale (ALF) ;

– l’allocation de logement sociale (ALS).

Principales aides en faveur du logement

Régime

Aide personnalisée au logement (APL)

Allocation de logement familiale (ALF)

Allocation de logement sociale (ALS)

Création

Loi n° 77-1 du 3 janvier 1977 portant réforme de l’aide au logement

Loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement

Loi n° 71-582 du 16 juillet 1971 relative à l’allocation de logement

Codification

Articles L. 831-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation

Articles L. 841-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation

Calcul

Barème défini par voie réglementaire, en prenant notamment en compte la situation de famille du demandeur, les ressources et la valeur de son patrimoine ainsi que le montant du loyer. Les paramètres des aides sont différenciés au niveau réglementaire.

Champ d’application

Parc de logements déterminé, quelles que soient les caractéristiques familiales du bénéficiaire

Prestation familiale versée aux ménages ayant des personnes à charge, sous condition de ressources

Allocation versée aux personnes aux revenus modestes (attribution sous condition de ressources)

Financement

Fonds national d’aide au logement (FNAL) depuis le 1er janvier 2006

FNAL

FNAL

Source : commission des finances.

Chacune des trois aides personnelles comporte un volet accession et un volet locatif. L’article 126 de la loi de finances pour 2018 a mis en extinction le volet accession de ces aides ([338]).

En 2018, 6,6 millions de personnes bénéficiaient d’une aide au logement au titre de l’APL, de l’ALF ou de l’ALS, ce qui a représenté environ 17 milliards deuros de prestations versées sur l’année, dont 14,3 milliards d’euros pris en charge par l’État ([339]). En 2020, la contribution de l’État au Fonds national d’aide au logement (FNAL) ([340]), au titre du financement de ces aides est attendue à 12 milliards d’euros, après 13 milliards d’euros attendus pour 2019. Ce montant est en léger repli, l’article 75 du présent projet de loi de finances prévoyant un financement par Action Logement du FNAL à hauteur de 500 millions d’euros pour l’année 2020.

Au cours des dix dernières années, le nombre de bénéficiaires est relativement constant, bien qu’en hausse tendancielle. En revanche, le montant des prestations servies est plus variable. Il est passé de 15,2 milliards d’euros en 2008 à 18,01 milliards d’euros en 2017.

Évolution du nombre de bénéficiaires au 31 décembre des aides personnelles au logement

(en milliers)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

APL

2 620

2 619

2 621

2 681

2 724

2 774

2 803

2 818

2 831

2 870

2 949

ALF

1 351

1 356

1 335

1 332

1 323

1 318

1 320

1 300

1 277

1 260

1 230

HÂLE

2 345

2 364

2 353

2 388

2 374

2 409

2 419

2 403

2 374

2 387

2 427

Ensemble

6 316

6 339

6 309

6 401

6 421

6 501

6 541

6 521

6 482

6 517

6 606

Source : direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) et direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP).

Évolution du nombre de bénéficiaires des aides personnelles au logement

(en milliers)

Source : commission des finances.

Évolution du montant des prestations versées au titre des aides personnelles au logement

(en milliards d’euros)

Prestation

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

APL

6,57

6,72

6,87

7,14

7,42

7,77

7,99

8,22

8,36

8,43

7,64

ALF

3,91

4,07

4,16

4,21

4,24

4,37

4,42

4,47

4,45

4,36

4,22

ALS

4,72

4,82

4,91

5,00

5,08

5,25

5,30

5,33

5,30

5,22

5,1

Ensemble

15,20

15,62

15,93

16,36

16,73

17,39

17,71

18,01

18,11

18,01

16,96

dont part prise en charge par lÉtat

5,08

5,50

5,55

5,53

5,73

5,14

5,17

10,74

15,34

15,50

14,3

Source : DGALN/DHUP.

2.   Le régime de revalorisation

a.   Une revalorisation d’ordre législatif sur l’indice de référence des loyers et des revalorisations d’ordre réglementaire sur l’indice des prix à la consommation hors tabac

i.   La prise en compte de l’impact de l’augmentation des prix sur le pouvoir d’achat des ménages

Versées dans des conditions différentes, l’aide personnalisée au logement (APL), l’allocation de logement familiale (ALF) et l’allocation de logement sociale (ALS) font toutes trois l’objet d’une revalorisation annuelle de leur montant ainsi que de leurs différents paramètres. Elles ont pour but « de tenir compte de leffet du taux dinflation sur le pouvoir dachat des ménages » ([341]).

Le montant des aides au logement est établi par application d’un barème réglementaire qui dépend des ressources du demandeur, de sa situation familiale et du montant du loyer acquitté. En secteur locatif, le montant mensuel des aides personnelles au logement est calculé selon la formule prévue à l’article D. 823‑16 du CCH et précisée par un arrêté du 27 septembre 2019 ([342]) « Af = L + C – Pp » où :

– « Af » est l’aide mensuelle ;

– « L » est le loyer éligible ;

– « C » est le montant forfaitaire au titre des charges, dépendant de la composition familiale ;

– « Pp » est la participation personnelle du ménage qui est égale à la somme d’une participation minimale et d’un montant fonction des ressources du ménage et d’un abattement forfaitaire.

Ces paramètres sont eux-mêmes dépendants d’autres paramètres dans des conditions définies par l’arrêté du 27 septembre 2019 relatif au calcul des aides personnelles au logement et de la prime de déménagement. Le résultat obtenu est ensuite diminué d’un montant de cinq euros, selon l’article 11 de cet arrêté.

ii.   Une revalorisation sur l’indice de référence des loyers prévue par la loi

La révision annuelle du barème de calcul de l’APL, de l’ALF et de l’ALS au 1er octobre est dordre législatif. Elle est en effet prévue à l’article L. 823-4 du CCH. Selon cet article, sont indexés sur l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) :

– les plafonds de loyers ;

– le montant forfaitaire des charges ;

– les plafonds des charges de remboursement des contrats de prêts dont la signature est postérieure à la date de révision du barème ;

– les équivalences de loyer et de charges locatives ;

– le terme constant de la participation personnelle du ménage.

Redéfini en 2008 ([343]), l’IRL « correspond à la moyenne, sur les douze derniers mois, de lévolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers ». Il constitue la référence pour réviser les loyers des logements vides ou meublés ainsi que pour le plafond des augmentations annuelles de loyers que les propriétaires sont autorisés à exiger de leurs locataires.

L’indice, dont la valeur est publiée chaque mois sur le site de l’INSEE, connaît une tendance haussière.

Évolution de l’IRL entre 2008 et 2019

(indice de référence des loyers, base 100 au quatrième trimestre 1998)

Source : INSEE.

iii.   Des revalorisations en fonction des prix à la consommation

En sus de cette revalorisation, les précisions réglementaires prévoient une revalorisation au 1er janvier de plusieurs paramètres des aides liées aux ressources en fonction de l’évolution d’indices de prix :

– les ressources prises en compte pour l’établissement des aides personnelles au logement selon le taux d’évolution en moyenne annuelle de l’indice général des prix à la consommation des ménages, pour l’année civile de référence, figurant dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances (article R. 822-5 du CCH) ;

– l’évaluation forfaitaire des ressources s’agissant des conditions d’attribution des aides selon l’indice général des prix à la consommation des ménages hors tabac pur l’année civile précédente figurant dans le RESF (article R. 822-18 du CCH) ;

– l’abattement forfaitaire appliqué aux ressources du ménage dans la formule de calcul de la participation personnelle du ménage selon l’évolution en moyenne annuelle de l’indice des prix à la consommation des ménages hors tabac constatée pour l’avant-dernière année précédant cette revalorisation (article D. 823-17 du CCH).

revalorisation des aides personnelles au logement

Nature de la revalorisation

Revalorisation réglementaire

Revalorisation légale

Date de la revalorisation

1er janvier

1er octobre

Indice de référence

Indexation sur un indice d’inflation de référence

Indexation sur l’IRL

Champ de la revalorisation

– Ressources prises en compte pour l’établissement de l’aide personnelle au logement ; – Évaluation forfaitaire des ressources ;

– Abattement forfaitaire dans le calcul du montant de l’aide.

– Plafonds de loyer ;

– Plafonds des charges de remboursement de contrats de prêts dont la signature est postérieure à la date de révision du barème ;

– Montant forfaitaire des charges ;

– Équivalences de loyer et de charges locatives ;

– Terme constant de la participation personnelle du ménage.

Source : commission des finances.

b.   Des revalorisations irrégulières

Élément central de la politique du logement, les aides personnelles au logement visent notamment à favoriser l’accès à un logement décent et le maintien dans le logement pour les ménages aux revenus modestes. Traduisant ces objectifs, les barèmes et paramètres intervenant dans la détermination de leur montant prennent en compte une part de la dépense de logement d’autant plus importante que les revenus des bénéficiaires sont faibles. Les révisions régulièrement opérées en application des dispositions légales applicables à chacune de ces aides participent ainsi de la volonté de ne pas augmenter la charge pesant sur les ménages.

Depuis 2008, l’indexation des paramètres utilisés pour déterminer le montant des aides personnelles au logement se fait, par principe, au même rythme que l’inflation. À titre d’illustration, en 2017, les paramètres du barème des aides personnelles au logement ont été revalorisés de + 0,75 %, soit l’évolution de l’IRL au deuxième trimestre 2017.

Leur évolution n’est toutefois pas toujours strictement corrélée à celle du niveau des prix. Ainsi, la loi de finances pour 2018 ([344]) a gelé la revalorisation des paramètres du barème de l’APL, de l’ALF et de l’ALS.

Les paramètres relatifs aux ressources, dont la revalorisation est effectuée par voie réglementaire au 1er janvier, ont également connu une moindre progression, voire un gel depuis 2017.

Les tableaux ci-dessous rappellent les revalorisations effectuées, par voie légale ou réglementaire depuis 2017.

revalorisation des paramètres des aides personnelles au logement
(hors paramètres de ressources)

Année

Taux de la revalorisation
au 1er octobre

Taux dévolution de lIRL

2016

0 %

0 %

2017

0,75 %

0,75 %

2018

Gel

1,25 %

2019

0,3 %

1,53 %

2020

0,3 %

1,05 %

Source : réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

revalorisation des paramètres de ressources
des aides personnelles au logement

Année

Taux de la revalorisation
au 1er janvier

Taux dinflation de référence

2016

0,4 %

0 %

2017

0 %

0 %

2018

Gel

0,2 %

2019

0,3 %

1,0 %

2020

0,3 %

1,1 %

Source : réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

Il y a d’ailleurs lieu de rappeler que l’article 210 de la loi de finances pour 2019 prévoyait une revalorisation à hauteur de 0,3 % pour les années 2019 et 2020 des paramètres du calcul de l’APL, de l’ALF et de l’ALS. Tout en validant ces dispositions pour l’année 2019, le Conseil constitutionnel a décidé que la moindre revalorisation de ces prestations pour lannée 2020 était contraire à la Constitution. L’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances ([345]) qui définit le champ des lois de finances dispose que la seconde partie de la loi de finances peut comporter « des dispositions affectant directement les dépenses budgétaires de lannée ». Il en a déduit que les dispositions dérogatoires proposées pour l’année 2020 n’avaient pas leur place dans le texte et n’étaient donc pas conformes à la Constitution.

Il a déclaré contraire à la Constitution, selon le même raisonnement, les dispositions relatives aux moindres revalorisations de l’AAH et de la PA pour 2020.

B.   la réduction de loyer de solidarité

1.   Un mécanisme de modération du montant des loyers

a.   Un effet de neutralisation de la baisse de l’APL

Instituée par l’article 126 de la loi de finances pour 2018 ([346]), la réduction de loyer de solidarité (RLS) est un mécanisme de diminution du loyer destiné à neutraliser la diminution de l’aide personnalisée au logement (APL). Il ne s’agit pas en tant que telle d’une baisse du loyer, le montant de celui-ci étant fixé dans le bail, mais d’une remise sur le loyer acquitté par le locataire concerné ([347]). Elle est prise en charge par les bailleurs.

● À la différence des allocations logement (AL), régies par le titre IV du livre VIII de la partie législative du CCH, le champ d’application de l’APL est d’abord déterminé par le type de logements occupé (articles L. 831-1 et L. 831-2 du CCH). C’est la convention conclue entre l’État et l’OLS régissant l’octroi des financements aidés pour la production de logements qui constitue le fait générateur de l’aide.

Seuls les logements conventionnés en vertu des dispositions de l’article L. 831-1 du CCH ouvrent droit à l’APL. Dans le secteur locatif, il s’agit des logements conventionnés financés par des prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI) et par des prêts locatifs aidés (PLA) auxquels ont succédé les prêts locatifs à usage social (PLUS), des logements conventionnés à l’occasion de l’attribution de subventions à l’amélioration (PALULOS ou ANAH), ainsi que des logements existants, conventionnés sans travaux, appartenant à des organismes d’habitation à loyer modéré, à des sociétés d’économie mixte (SEM) ou à d’autres bailleurs.

Pour les locataires bénéficiant de la RLS, l’article L. 832-3 du CCH prévoit que le montant de lAPL calculé selon les modalités présentées cidessus, est diminué dune fraction comprise entre 90 et 98 % du montant de la RLS et fixée par voie réglementaire (voir infra). En application de cette disposition, l’article D. 823-16 prévoit que cette fraction est fixée à 98 %.

b.   Les logements visés

La réduction de loyer est appliquée par tous les organismes de logement social (OLS) visés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation (CCH) :

– les offices publics de l’habitat ;

– les sociétés anonymes d’habitation à loyer modéré ;

– les sociétés anonymes coopératives de production et les sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif d’habitations ;

– les fondations à loyer modéré.

Le champ de la RLS s’étend également aux logements gérés par les sociétés d’économie mixte, d’après l’article L. 481-1 du même code.

Parmi les logements détenus ou gérés par les OLS, seuls les logements à usage locatif ouvrant droit à laide personnalisée au logement sont visés.

Sont en revanche exclus du champ de la RLS les logements-foyers, qui accueillaient environ 262 000 bénéficiaires de l’APL en 2016 ([348]).

c.   Les locataires visés

La RLS est applicable « aux locataires dont les ressources sont inférieures à un plafond, fonction de la composition du foyer et de la zone géographique », aux termes de l’article L. 442-2-1 du CCH. Ce plafond est fixé par arrêté dans la limite de montants maximaux fixés par ce même article.

Limite maximale pour 2018 des plafonds mensuels de ressources ouvrant droit à la RLS selon l’article L. 442-2-1 du CCH

(en euros)

Désignation

Montant maximal

Zone I

Zone II

Zone III

Bénéficiaire isolé

1 294

1 209

1 171

Couple sans personne à charge

1 559

1 474

1 426

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

1 984

1 880

1 823

Bénéficiaire isolé ou couple ayant deux personnes à charge

2 361

2 239

2 173

Bénéficiaire isolé ou couple ayant trois personnes à charge

2 890

2 749

2 654

Bénéficiaire isolé ou couple ayant quatre personnes à charge

3 334

3 173

3 069

Bénéficiaire isolé ou couple ayant cinq personnes à charge

3 712

3 532

3 410

Bénéficiaire isolé ou couple ayant six personnes à charge

4 109

3 910

3 778

Personne à charge supplémentaire

400

375

350

Source : article L. 442-2-1 du code de la construction et de l’habitat.

Ce plafond de ressources a été déterminé en fonction des revenus dexclusion de lAPL de telle manière que tous les allocataires dAPL dans le parc locatif social bénéficient de la réduction de loyer ([349]). En revanche, certains bénéficiaires de la RLS ne sont pas éligibles aux APL, les plafonds de ressources des dispositifs n’étant pas strictement alignés. Le Conseil constitutionnel a jugé que ce décalage n’était pas contraire à la Constitution ([350]).

D’après les données de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) ([351]) 2,5 millions de foyers bénéficiaient de l’APL au logement dans le secteur locatif social, hors foyers en 2016. Selon l’Union sociale pour l’habitat (USH), environ 100 000 locataires étaient éligibles à la RLS alors qu’ils ne bénéficient pas de l’APL ([352]). Interrogé sur ce sujet par le Rapporteur général, le Gouvernement a répondu que le recensement des personnes ne bénéficiant pas des APL, mais bénéficiant de la RLS relève directement des bailleurs sociaux. L’USH estimerait à 2 % le surcoût engendré pour le secteur.

d.   Le montant maximal de la RLS

Le montant mensuel de la RLS est fixé chaque année par arrêté conjoint des ministres chargés du logement et du budget, dans la limite de montants fixés à larticle L. 442-2-1 précité, étant précisé que le zonage appliqué est celui utilisé pour le calcul des aides au logement.

Montant maximal pour 2018 du montant mensuel de la RLS

(en euros)

Désignation

Montant maximal

Zone I

Zone II

Zone III

Bénéficiaire isolé

50

44

41

Couple sans personne à charge

61

54

50

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

69

60

56

Par personne à charge supplémentaire

10

9

8

Source : article L. 442-2-1 du code de la construction et de l’habitat.

En 2020, le montant total de la RLS est fixé à 1,3 milliard deuros, d’après le projet annuel de performance de la mission Cohésion des territoires et l’évaluation préalable du présent article.

2.   Les mécanismes d’indexation et de revalorisation de la réduction de loyer de solidarité

● Le montant mensuel de la RLS est fixé chaque année par arrêté conjoint des ministres chargés du logement et du budget, dans la limite des montants fixés à larticle L. 442-2-1 et présentés supra.

En application du septième alinéa de ce même article, ces montants maximaux de niveau législatif sont indexés chaque année au 1er janvier à hauteur au moins de lindice de référence des loyers.

Cette revalorisation des montants plafonds de la RLS n’emporte pas automatiquement de revalorisation du montant de la RLS lui-même puisque ce dernier est fixé par arrêté. Néanmoins, le huitième alinéa prévoit que le montant mensuel de la RLS est lui aussi revalorisé au 1er janvier d’un montant correspondant au moins à lévolution de lindice de référence des loyers. Un arrêté du 27 décembre 2018 est ainsi venu modifier l’arrêté du 27 février 2018 relatif au montant de la réduction de loyer de solidarité, en application de cette disposition.

Montant mensuel de la RLS en 2019

(en euros)

Désignation

Zone I

Zone II

Zone III

Bénéficiaire isolé

32,33

28,18

26,41

Couple sans personne à charge

38,99

34,48

32,01

Personne seule ou couple ayant une personne à charge

44,06

38,8

35,89

Par personne à charge supplémentaire

6,39

5,65

5,14

Source : arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la revalorisation des plafonds de ressources et des montants de réduction de loyer de solidarité applicables, modifiant l’arrêté du 27 février 2018 relatif à la réduction de loyer solidarité.

● De même, les plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la RLS sont fixés par arrêté, dans la limite des montants prévus par la loi et présentés supra. Le douzième alinéa de l’article L. 441-2-1 prévoit que :

– les montants maximaux prévus par la loi sont indexés chaque année au 1er janvier en fonction de l’évolution en moyenne annuelle de l’indice des prix à la consommation des ménages hors tabac, constatée pour l’avant-dernière année précédant cette revalorisation ;

– les plafonds de ressources eux-mêmes sont indexés selon les mêmes modalités.

Les plafonds des ressources ouvrant droit au bénéfice de la RLS ont également été fixés par l’arrêté du 27 février 2018 relatif à la réduction de loyer de solidarité, modifié par l’arrêté du 27 décembre 2018 ([353]).

Plafonds de ressources mensuelles apPlicables en 2019
pour le bénéfice de la RLS

(en euros)

Désignation

Zone I

Zone II

Zone III

Bénéficiaire isolé

915

854

828

Couple sans personne à charge

1 102

1 042

1 008

Bénéficiaire isolé ou couple ayant une personne à charge

1 403

1 329

1 289

Bénéficiaire isolé ou couple ayant deux personnes à charge

1 669

1 583

1 536

Bénéficiaire isolé ou couple ayant trois personnes à charge

2 043

1 943

1 877

Bénéficiaire isolé ou couple ayant quatre personnes à charge

2 357

2 243

2 169

Bénéficiaire isolé ou couple ayant cinq personnes à charge

2 624

2 497

2 411

Bénéficiaire isolé ou couple ayant six personnes à charge

2 905

2 764

2 671

Par personne à charge supplémentaire

283

266

247

Source : arrêté du 27 février 2018 relatif à la réduction de loyer de solidarité.

C.   La prime d’activité

1.   Une prestation sociale financée par l’État

● Créée par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi ([354]) pour encourager l’activité professionnelle ([355]), la prime d’activité (PA) remplace, depuis le 1er janvier 2016, le volet « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et la prime pour l’emploi (PPE). Considérée comme une prestation sociale, la PA est attribuée, servie et contrôlée pour le compte de l’État par les caisses d’allocations familiales (CAF) ou par les caisses de mutualité sociale agricole (MSA) selon la situation des bénéficiaires, conformément à l’article L. 843-1 du code de la sécurité sociale. Elle est financée par l’État ([356]).

● Le calcul du montant de la PA répond à des modalités complexes, définies à l’article L. 842-3 du code de la sécurité sociale et précisées par l’article D. 843‑1 du même code. Il prend en compte :

– un montant forfaitaire, dont le niveau varie en fonction de la composition du foyer et du nombre d’enfants à charge ;

– une fraction des revenus professionnels des membres du foyer, qui complète ce montant forfaitaire ;

– une bonification individuelle établie « pour chaque travailleur, membre du foyer, compte tenu de ses revenus professionnels » ([357]).

De ce total est déduit l’ensemble des ressources du foyer, réputées au moins égales au montant forfaitaire. Si le foyer bénéficiaire de la PA est propriétaire de son logement, logé à titre gratuit ou bénéficiaire des aides au logement, un forfait logement est également déduit du total.

composantes au calcul de la prime d’activité

Montant forfaitaire

(majoré en fonction de la composition du foyer)

+

61 % des revenus professionnels de l’ensemble du foyer

+

Bonification individuelle

-

Ressources du foyer (supposées au moins égales au montant forfaitaire) et forfait logement

● Depuis le 1er août 2018, le montant forfaitaire s’élève à 551,51 euros pour une personne seule sans enfant ([358]).

Ce montant forfaitaire est majoré de 50 % lorsque le foyer comporte deux personnes, selon l’article D. 843-1 du code de la sécurité sociale. Il est ensuite majoré de 30 % pour chaque personne supplémentaire au sein du foyer et à la charge de l’intéressé. Cette majoration est portée à 40 % à partir de la troisième personne lorsque le foyer comporte plus de deux personnes à charge, à l’exception du conjoint.

majorations de la Pa selon la composition du foyer du bénéficiaire

Composition du foyer

Majoration par rapport au montant forfaitaire

Barème applicable à compter du mois daoût 2018
(en euros)

2 personnes

+ 50 %

827,265

3 personnes (dont un enfant)

+ 50 % + 30 %

992,72

4 personnes dont deux enfants ou personnes de moins de 25 ans à charge

+ 50 % + 30 % + 30 %

1 152,17

5 personnes dont trois enfants ou personnes de moins de 25 ans à charge

+ 50 % + 30 % + 30 % + 40 %

1 372,77

Source : commission des finances.

En vertu de l’article L. 842-7 du code de la sécurité sociale, le montant forfaitaire de la prime est majoré pour les parents isolés et pour les femmes isolées en état de grossesse ; ces majorations s’appliquent pour une durée maximale de douze mois, conformément à l’article R. 842-5 du code de la sécurité sociale. Leur montant est précisé à l’article D. 843-1 du code de la sécurité sociale.

majorations de la PA selon la situation du bénéficiaire

Composition du foyer
de la personne isolée

Majoration par rapport
au montant forfaitaire

Barème applicable à compter
du mois daoût 2018
(en euros)

1 personne

+ 28,412 %

708,21

1 personne + 1 enfant ou 1 personne à charge

+ 28,412 % + 42,804 %

944,28

Source : commission des finances.

● En cohérence avec l’engagement du Président de la République d’augmenter le pouvoir d’achat des travailleurs sans augmenter les charges des entreprises, le montant de la bonification individuelle de la prime d’activité a été sensiblement augmenté par un décret du 21 décembre 2018 ([359]).

Évolution de la bonification individuelle selon le revenu d’activité

Revenus professionnels mensuels

Bonification individuelle

Inférieurs ou égaux 0,5 SMIC

0 euro

De 0,5 à 1 SMIC

Bonification croissante avec les revenus

À partir de 1 SMIC

Plafond de la bonification égal à 29,101 % du montant forfaitaire

Source : commission des finances.

Compte tenu des modalités de son calcul, la PA est versée à chaque membre du foyer bénéficiaire dont les revenus professionnels sont supérieurs à 0,5 SMIC et inférieurs à un « point de sortie » qui correspond au montant au-delà duquel le foyer n’est plus éligible à la PA. Il s’élève à 1,5 SMIC pour une personne seule, à 1,9 SMIC pour une personne seule avec enfant, à 2,1 SMIC pour un couple mono-actif sans enfant et à 2,9 SMIC pour un couple biactif avec deux enfants.

Montant mensuel de la bonification individuelle avant et après la revalorisation opérée par le décret du 21 décembre 2018 pour une personne seule sans enfant

(montant mensuel de la bonification individuelle d’activité, en euros)

Note : SMIC net mensuel de 1 204 euros

Lecture : pour une personne seule gagnant le SMIC, le montant de la bonification individuelle d’activité était de 70 euros avant la réforme ; il a été augmenté de 90 euros par la réforme pour atteindre 160 euros.

Source : évaluation de la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité par le Gouvernement, juillet 2019.

Les modifications paramétriques dans le calcul de la PA opérées par le décret du 21 décembre 2018 ont eu pour conséquence à la fois d’augmenter le montant moyen des primes d’activité versées, mais aussi d’élargir le champ des bénéficiaires du dispositif.

Au total, la dotation budgétaire dédiée à la prime d’activité dans la mission Solidarité, insertion et égalité des chances a été portée à 8,8 milliards deuros, dont 2,8 milliards d’euros au titre du financement des mesures nouvelles au titre du décret précité. Le nombre de foyers allocataires supplémentaires éligibles à la PA a augmenté de 1,25 million en trois mois, après l’entrée en vigueur de la réforme.

Prime d’activité en fonction du salaire, avant et après la revalorisation de décembre 2018 pour un couple avec deux enfants

Note : il est supposé que le couple n’a pas d’autre ressource que ses revenus d’activité, qu’il est locataire en zone 2 et que l’un des membres du couple perçoit des revenus égaux au SMIC.

Source : évaluation de la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité par le Gouvernement, juillet 2019.

● Le montant de la PA est calculé sur la base des ressources perçues par les personnes au cours des trois derniers mois, puis versé de manière stable durant les trois mois suivants, selon l’article R. 843-1 du code de la sécurité sociale. Elle est versée mensuellement par les caisses d’allocations familiales ou celles de la mutualité sociale agricole (MSA), après une déclaration trimestrielle des revenus.

2.   Le mécanisme de revalorisation de la prime d’activité

En vertu de l’article L. 842-3, le montant forfaitaire de la PA et le montant maximal de la bonification sont revalorisés le 1er avril de chaque année par application dun coefficient égal à lévolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l’INSEE au mois de février. Ce coefficient, mentionné à l’article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale, s’applique pour la revalorisation de plusieurs prestations (voir infra).

Afin de ne pas répercuter l’inflation négative sur le montant des prestations, dont la revalorisation lui est indexée, il est prévu que la valeur du coefficient soit, dans pareils cas, portée à un ([360]).

Évolution du montant forfaitaire de la prime d’activité
pour une personne seule sans enfant hors Mayotte

Date dapplication de la revalorisation

Montant forfaitaire (en euros)

Évolution

Janvier 2016 (1) *

524,16

­

Avril 2016 (2) *

524,68

+ 0,09 %

Avril 2017 (3) *

526,25

+ 0,3 %

Avril 2018 (4) *

531,51

+ 1 %

Août 2018 (5) **

551,51

+ 20 €

(1) Décret n° 2015-1710 du 21 décembre 2015 relatif à la prime dactivité.

(2) Décret n° 2016-536 du 27 avril 2016 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime dactivité.

(3) Décret n° 2017-740 du 4 mai 2017 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime dactivité.

(4) Décret n° 2018-323 du 3 mai 2018 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime dactivité.

(5) Décret n° 2018-836 du 3 octobre 2018 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime dactivité et réduction de labattement appliqué aux revenus professionnels.

* Revalorisation légale.

** Revalorisation exceptionnelle.

Source : commission des finances.

D.   l’allocation aux adultes handicapés

1.   Un minimum social pour les personnes handicapées

Prestation non contributive et différentielle, l’allocation aux adultes handicapés (AAH) vise à garantir à ses bénéficiaires un niveau minimum de ressources. Régie par les articles L. 821-1 et suivants du code de la sécurité sociale, elle est attribuée sous conditions d’incapacité, d’âge, de résidence et de ressources.

L’AAH n’est pas exclusive d’autres aides : ses bénéficiaires peuvent également percevoir le complément de ressources (CR) ([361]) et la majoration pour la vie autonome (MVA) ([362]), dont les montants sont fixés par décret et s’élèvent respectivement, depuis le 1er avril 2018, à 179,31 euros et 104,77 euros par mois ([363]).

Entre 2009 et 2018, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 31,5 % et la dépense associée de près de 60 % : s’élevant à plus de 6 milliards d’euros en 2009, elle a atteint 9,73 milliards deuros en 2018. Pour 2020, le montant de la dotation du programme 157 « Handicap et dépendance » de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances qui finance la prestation s’élève à 10,6 milliards deuros.

Évolution du nombre de bénéficiaires de l’AAH et de la dépense associée

Année

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

(p)

Nombre de bénéficiaires au 31 décembre (en milliers)

(données DREES)

997

1 023

1 042

1 063

1 092

1 130

1 161

1 190

Montant total des dépenses

(en milliards deuros)

7,80

8,20

8,50

8,83

9,05

9,03

9,73

10,3

DREES : direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, ministère des solidarités.

Source : documents budgétaires et tome III du rapport n° 1302 de M. Joël Giraud sur le projet de loi de finances pour 2019, p. 493.

2.   Le régime de revalorisation

À l’instar de la PA, la revalorisation annuelle de l’AAH se fait au 1er avril ([364]), par application du coefficient mentionné à l’article L. 161‑25 du code de la sécurité sociale.

Le montant de l’AAH est ainsi revalorisé dans les mêmes proportions que « la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix » ou est inchangé lorsque l’inflation sur la période de référence est négative.

Entre 2009 et 2018, le montant de l’AAH a connu une progression de 22,8 %, portant son montant de 666,96 euros à 819 euros en avril 2018.

Évolution du montant de lAAH

Fondement juridique

Date dapplication de la revalorisation

Montant forfaitaire

(en euros)

Décret n° 2009-353 du 31 mars 2009 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er avril 2009

666,96

1er septembre 2009

681,63

Décret n° 2010-307 du 22 mars 2010 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er avril 2010

696,63

1er septembre 2010

711,95

Décret n° 2011-658 du 10 juin 2011 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er avril 2011

727,61

1er septembre 2011

743,62

Décret n° 2012-486 du 13 avril 2012 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

Avril 2012

759,98

Septembre 2012

776,59

Décret n° 2013-831 du 17 septembre 2013 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

Septembre 2013

790,18

Décret n° 2014-1129 du 3 octobre 2014 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

Septembre 2014

800,45

Décret n° 2015-1233 du 6 octobre 2015 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er septembre 2015

807,65

Décret n° 2016-535 du 27 avril 2016 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er avril 2016

808,46

Décret n° 2017-710 du 3 mai 2017 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er avril 2017

810,89

Décret n° 2018-328 du 4 mai 2018 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés

1er avril 2018

819

Décret n° 2018-948 du 31 octobre 2018 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés et à la modification du plafond de ressources pour les bénéficiaires en couple

Novembre 2018

860

Décret n° 2019-1047 du 11 octobre 2019 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés et à la modification du calcul du plafond de ressources pour les bénéficiaires en couple

Novembre 2019

900

Source : commission des finances.

Évolution du montant mensuel de l’AAH

(en euros)

Source : commission des finances.

II.   Une revalorisation maÎtrisÉe de certaines prestations sociales et la suppression de l’indexation de la rÉduction du loyer de solidaritÉ

A.   La désindexation de la réduction de loyer de solidaritÉ

● Par dérogation aux règles d’indexation de la RLS, le I du présent article dispose que pour l’année 2020, le montant des plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la RLS n’est pas indexé sur l’évolution moyenne de l’IPC des ménages hors tabac constatée en 2018.

Selon le douzième alinéa de l’article L. 442-2-1 en vigueur, les montants des plafonds de ressources ouvrant droit à la RLS, devraient être indexés, au 1er janvier 2020, sur l’évolution de l’IPC hors tabac constatée en 2018, soit + 1,6 % ([365]).

● À la différence de la revalorisation maîtrisée de l’APL, de la PA et de l’AAH, le Gouvernement n’avait pas proposé en projet de loi de finances pour 2019 de désindexer les plafonds de ressources ouvrant droit à la RLS. Il justifie cette disposition du présent projet de loi de finances par la mise en œuvre « des engagements passés entre lÉtat et les représentants des bailleurs sociaux dans le cadre du Pacte dinvestissement pour le logement social pour la période 20202022 » signé le 25 avril 2019. D’après ce pacte ([366]), l’État s’engage à stabiliser « le montant global de RLS et en conséquence, lors de la loi de finances pour 2020, à supprimer les règles de lindexation annuelle automatique des forfaits de RLS (plafond et montant mensuels) et des plafonds de ressources déligibilité ».

Le mécanisme de la RLS conduit en effet, de façon automatique :

– à réduire les dépenses de l’État au titre des APL, puisque le montant des APL des bénéficiaires de la RLS est diminué chaque année de 98 % du montant de la RLS ([367]) ;

– à faire prendre en charge par les bailleurs la RLS.

Jusqu’au Pacte précité, la trajectoire de finances publiques intégrait jusqu’à présent une réduction des APL de 800 millions d’euros en 2018, de 900 millions d’euros en 2019 et de 1,5 milliard d’euros à compter de 2020. Dans le Pacte, l’État a révisé à 1,3 milliard deuros limpact à compter de 2020, ce qui justifie les règles de désindexation.

L’indexation automatique du montant des plafonds conduit à élargir le champ des bénéficiaires de la RLS. La désindexation limite donc cet élargissement et limite le nombre de bénéficiaires éligibles à la RLS sans être éligible aux APL.

Selon lévaluation préalable, « la suppression de lindexation du montant des plafonds de ressources ouvrant droit à la RLS entraîne un coût supplémentaire pour lÉtat, par rapport à la situation dans laquelle la RLS aurait été indexée conformément au droit existant » ([368]). A priori, il s’agirait d’une erreur, cette mesure en elle-même n’induisant pas de coût pour l’État. En revanche, couplée à la revalorisation du montant de la RLS qui interviendra au niveau réglementaire, la mesure entraînera bien un coût de 0,2 milliard d’euros pour l’État au bénéfice des bailleurs, par rapport à la trajectoire prévisionnelle des économies engendrées sur le montant des APL.

● Par le présent article, le Gouvernement propose en effet d’introduire une dérogation pour 2020 à la seule règle dindexation du montant des plafonds de ressources mensuelles déligibilité à la RLS, sans prévoir de dérogation à lindexation du montant lui-même de la RLS. Il est d’ailleurs précisé que l’article propose une dérogation au douzième alinéa de l’article L. 442-2-1, sans mentionner de dérogation au huitième alinéa de ce même article. Ce dernier prévoit en effet que « chaque année au 1er janvier, la revalorisation du montant mensuel de la réduction de loyer de solidarité correspond au moins à lévolution de lindice de référence des loyers ».

Selon l’exposé des motifs du présent article, l’indexation automatique des montants mensuels de la RLS n’est pas supprimée en 2020 « car ceux-ci seront revalorisés au-delà de lindice de référence des loyers, afin que le rendement des économies consécutives à la RLS puisse être porté de 0,9 milliard deuros à 1,3 milliard deuros en 2020 par voie réglementaire, conformément au Pacte dinvestissement pour le logement social ».

B.   uNe revalorisation de + 0,3 % des prestations relatives au logement, de la PA et de l’AAH en 2020

1.   Une revalorisation moins importante que l’évolution anticipée des prix

Par dérogation aux modalités de revalorisation légales applicables aux aides en faveur du logement, à l’AAH et à la PA, le présent article prévoit que :

– les paramètres de calcul de l’APL, de l’ALF et de l’ALS seront revalorisés de + 0,3 % le 1er octobre 2020 et non indexés sur l’évolution de l’IRL (II) ;

– le montant de l’AAH sera revalorisé de + 0,3 % le 1er avril 2020 (III).

– le montant forfaitaire de la PA et le montant maximal de sa bonification principale seront revalorisés de + 0,3 % le 1er avril 2020 (IV).

comparaison de l’évolution des revalorisations des prestations sociales avec ou sans mesure de moindre revalorisation pour 2020

 

2020

Revalorisation attendue en l’absence de mesure de revalorisation maîtrisée

Revalorisation proposée dans le présent PLF

Aides personnelles au logement

Revalorisation au 1er octobre

+ 1,05 %

+ 0,3 %

Prime d’activité

Revalorisation au 1er avril

+ 1,0 %

+ 0,3 %

Allocation aux adultes handicapés

Revalorisation au 1er avril

+ 1,0 %

+ 0,3 %

N.B. Le tableau ci-dessous est établi sur la base des prévisions dinflation utilisées pour la préparation des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2020.

Source : commission des finances.

2.   L’impact budgétaire

L’impact budgétaire du dispositif s’agissant du volet relatif à l’augmentation maîtrisée des prestations sociales est évalué sur les hypothèses d’inflation sous-jacentes au PLF 2020 pour les mois de janvier et d’avril des années 2019 et 2020 pour établir les trajectoires prévisionnelles toutes choses égales par ailleurs.

Au total, il constituera une économie pour l’État en 2020 de 0,4 milliard deuros.

économies associées à l’augmentation maîtrisée
des prestations sociales

Prestation

Taux de revalorisation
en 2020

Effet 2020

(en milliard deuros)

Aides personnelles au logement

+ 0,3 %

0,2

Prime d’activité

+ 0,3 %

0,1

Allocation aux adultes handicapés

+ 0,3 %

0,1

Total

0,4

Source : évaluation préalable.

Par ailleurs, les dispositions de l’article 52 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 prévoient une moindre revalorisation des pensions de retraite et d’invalidité pour les pensions supérieures à 2 000 euros par mois, ce qui a un impact de 0,3 milliard d’euros sur les dépenses de l’État au titre des pensions de la fonction publique.

Le même article 52 du PLFSS prévoit une moindre revalorisation :

– de l’ensemble des pensions de retraite supérieures à 2 000 euros mensuels, pour un gain de 0,4 milliard d’euros pour la sécurité sociale ;

– des prestations familiales, pour un gain de 0,1 milliard d’euros pour la sécurité sociale ([369]).

C.   De moindres revalorisations à mettre en perspective avec des revalorisations exceptionnelles de la prime d’activité et de l’allocation aux adultes handicapés

1.   Une hausse sensible de l’allocation aux adultes handicapés en 2019

Conformément aux engagements du Gouvernement, l’AAH a fait l’objet de plusieurs revalorisations exceptionnelles de sorte que son montant plafond atteint désormais 900 euros mensuels.

Fixé à 819 euros depuis le mois d’avril 2018, le montant mensuel de la prestation a été porté à 860 euros par un décret 31 octobre 2018 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés et à la modification du plafond de ressources pour les bénéficiaires en couple ([370]), puis à 900 euros à compter du mois de novembre 2019 par un décret du 11 octobre 2019 ([371]).

Selon le projet annuel de performance de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, les prévisions de dépenses d’AAH à horizon 2023 estiment l’effet des revalorisations exceptionnelles à 42 millions d’euros pour 2018, 512 millions d’euros pour 2019 et 362 millions d’euros pour 2020.

Parallèlement aux revalorisations exceptionnelles, les règles d’appréciation des revenus des bénéficiaires de l’AAH en couple, qui représentent 24 % des allocataires en 2019, sont modifiées pour que soient pris en compte les revenus du conjoint dans le calcul de la prestation. Ils sont calculés de manière favorable et font l’objet d’un abattement spécifique de 20 %.

Au total, ces mesures de revalorisations exceptionnelles et la modification du plafond pour les bénéficiaires en couple constituent un effort financier de 2,5 milliards deuros sur lensemble du quinquennat.

2.   Des augmentations exceptionnelles du montant de la prime d’activité

La prime d’activité a fait l’objet de plusieurs revalorisations exceptionnelles.

Son montant forfaitaire a été augmenté de 20 euros en octobre 2018 ([372]), applicable à compter d’août 2018, pour le porter à 551,50 euros, soit une hausse de 3,8 % par rapport au montant revalorisé en avril 2018. Parallèlement, la fraction des revenus professionnels incluse dans le calcul de la prestation a été abaissée d’un point et s’établit depuis le mois d’août 2018 à 61 %.

Surtout, dans le cadre des mesures annoncées par le Président de la République en décembre 2018, le décret n° 2018-1197 du 21 décembre 2018 a augmenté de 90 euros le montant maximal de la bonification individuelle de la prime d’activité (voir supra) et porté le niveau de revenu auquel le montant maximal est perçu à 1 SMIC au lieu de 0,8 SMIC auparavant.

En mars 2019, le nombre de foyers allocataires de la prime d’activité a atteint 4,1 millions, soit une hausse de près de 52 % sur un an. Au total, la prime d’activité concerne 8,23 millions de personnes.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, le coût de cette mesure avait été évalué à 2,8 milliards deuros.

*

*     *

La commission examine les amendements identiques II-CF918 de Mme Christine Pires Beaune, II-CF1142 de M. Fabien Roussel, II-CF1241 de M. Philippe Vigier, II-CF1275 du président Éric Woerth et II-CF1463 de M. Éric Coquerel.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II-CF918 vise à supprimer l’article 67, qui procède à une sous-revalorisation en 2020 de la prime d’activité, de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et des aides personnelles au logement (APL). En effet, ces dispositifs seront revalorisés de seulement 0,3 %, ce qui est bien loin de l’inflation attendue – autour de 1 %, hors tabac. Avec ces sous-revalorisations, le Gouvernement espère dégager 400 millions d’euros d’économies sur le dos des plus modestes. Il est donc pour le moins étonnant que l’évaluation préalable souligne que l’augmentation maîtrisée des prestations sociales « devrait avoir un effet macro-économique positif », au motif qu’elle favoriserait « une augmentation du pouvoir d’achat des bénéficiaires de nature à soutenir la consommation ».

M. Fabien Roussel. L’amendement II-CF1142 vise à réindexer sur l’inflation les prestations sociales servies par l’État. En 2020, elles ne seront ainsi revalorisées que de 0,3 %. À la suite du mouvement des gilets jaunes, vous aviez réparé cette injustice pour les pensions inférieures à 2 000 euros ; nous demandons qu’il en aille de même pour les bénéficiaires des prestations sociales.

M. Michel Castellani. L’amendement II-CF1241 vise lui aussi à réindexer les aides personnelles au logement, la prime d’activité et l’allocation aux adultes handicapés sur l’inflation. La revalorisation prévue est de 0,3 %, ce qui ferait prendre énormément de retard par rapport au coût de la vie et pénaliserait les plus précaires.

Mme Véronique Louwagie. L’amendement II-CF1275 vise lui aussi à supprimer l’article 67, qui ne prévoit qu’une revalorisation de 0,3 %, alors que l’inflation est de 1 % – autrement dit, les prestations telles que les APL, l’AAH ou la prime d’activité augmentent trois fois moins vite que le coût de la vie, ce qui n’est pas admissible : cela représente une importante perte de pouvoir d’achat pour les bénéficiaires.

Mme Sabine Rubin. Nous souhaitons nous aussi supprimer cet article parce que nous nous opposons à la désindexation sur l’inflation de la revalorisation des aides et allocations – l’APL, l’allocation de logement familiale, l’allocation de logement sociale, la prime d’activité et l’allocation aux adultes handicapés. Quand ces aides ne sont pas revalorisées annuellement à hauteur de l’inflation, cela veut dire, concrètement, qu’elles baissent, alors que leurs bénéficiaires sont des personnes précaires.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je tiendrai un propos global sur les amendements de suppression mais également sur ceux qui visent à supprimer l’article alinéa par alinéa, ce qui revient un peu au même.

Je rappelle d’abord que l’AAH vient d’être portée à 900 euros par mois et que les règles d’appréciation des revenus des bénéficiaires de l’AAH en couple ont été revues pour être rendues plus favorables. Ces revalorisations exceptionnelles représentent un effort financier de 2,5 milliards sur le quinquennat. Ensuite, la prime d’activité a été augmentée de 90 euros en décembre dernier, et cette revalorisation faisait suite à une revalorisation exceptionnelle intervenue en octobre 2018. Ce sont 2,8 milliards supplémentaires qui ont été débloqués en loi de finances pour 2019 pour financer ces mesures. Enfin, le système des aides au logement fait l’objet d’une refonte globale dans le cadre du système de la réduction de loyer de solidarité (RLS), l’effort étant principalement porté par les bailleurs.

Certes, la mesure visée permet de dégager des économies, mais – je vous le dis avec franchise –, compte tenu des efforts qui ont été faits, j’estime qu’elle est plus que raisonnable. J’émets donc un avis défavorable sur tous les amendements de suppression, ainsi que sur les amendements visant à supprimer un par un les alinéas de l’article. Je répondrai plus précisément au sujet de deux autres amendements ayant un objet différent de celui-ci.

M. le président Éric Woerth. C’est une politique un peu étrange : vous faites du stop and go. Vous donnez un coup de pouce, puis vous décidez de ne pas réindexer au motif que, précédemment, vous avez donné ce coup de pouce. Or ce sont deux sujets différents. On indexe sur la base du coup de pouce qu’on a donné, ou bien on donne un coup de pouce moins important, ou bien encore on reprend une partie de ce qu’on a donné.

M. Fabien Roussel. Je suis désolé de vous le dire, monsieur le rapporteur général, mais votre argument ne tient pas : la revalorisation de certaines de ces allocations, dont l’AAH, n’a rien à voir avec l’indexation sur l’inflation, laquelle a pour effet que l’allocation évolue chaque année en fonction des prix. Revaloriser, c’est une chose ; indexer sur l’inflation, c’en est une autre.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur général, pourriez-vous nous expliquer la cohérence de la politique gouvernementale en matière de prestations sociales ? En effet, vous revalorisez les pensions de 1,3 % dans la limite de 2 000 euros, et de 0,3 % au-delà, mais, pour d’autres prestations, c’est 0,3 % au premier euro. Quelle est la cohérence ? Pourquoi ce qui est vrai pour les retraités ne l’est-il pas pour tout le monde ? Je voudrais comprendre.

La commission rejette les amendements II-CF918, II-CF1142, II-CF1241, II-CF1275 et II-CF1463.

La commission examine lamendement II-CF418 de M. Stéphane Peu.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’article 126 de la loi de finances pour 2018 a créé un dispositif de réduction de loyer de solidarité, la RLS, applicable aux logements ouvrant droit à l’aide personnalisée au logement, l’APL, et géré par les organismes HLM, à l’exception des logements foyers conventionnés.

Au-delà des conséquences dénoncées par l’Union sociale de l’habitat sur la capacité des organismes HLM à maintenir un niveau d’investissement en production neuve, en rénovation et en entretien, la mise en œuvre de la RLS s’avère fort complexe et coûteuse, alors même que les modalités de calcul de l’APL seront modifiées prochainement. Cet amendement vise à recentrer le champ d’application de la RLS sur les seuls bénéficiaires de l’APL.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Dans sa décision sur la LFI pour 2018, le Conseil constitutionnel a indiqué que le dispositif de la RLS ne créait pas d’inégalité de traitement à l’égard des bénéficiaires des APL. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF418.

Elle examine les amendements identiques II-CF419 de M. Stéphane Peu et IICF932 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Jean-Paul Dufrègne. La RLS a permis à l’État de réaliser des économies importantes s’agissant des dépenses d’APL. Compensées par les bailleurs sociaux, elles n’ont pas d’impact sur les locataires du parc social. En outre, les nombreuses mesures d’économies prises depuis 2017 pèsent sur les taux d’effort des ménages modestes, qu’ils soient dans le parc social ou dans le parc privé. Nous proposons de ne pas réduire davantage les APL des ménages et d’appliquer l’article L. 823‑4 du code de la construction et de l’habitat, qui prévoit une indexation, au 1er octobre 2020, des paramètres du barème sur l’indice de référence des loyers, l’IRL.

Mme Christine Pires Beaune. Nous proposons de supprimer l’alinéa 2, qui vise à revaloriser les APL de seulement 0,3 %, alors que l’inflation est attendue à 1 %, hors tabac.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne reviendrai pas sur les nombreuses mesures qui ont été prises pour améliorer le pouvoir d’achat. Sur les amendements visant à supprimer des articles ou des alinéas, mon avis reste le même : défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF419 et II-CF932.

Puis elle examine successivement les amendements identiques II-CF930 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1144 de M. Fabien Roussel et lamendement II-CF931 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Les deux amendements dont je suis la cosignataire sont des amendements de repli : l’amendement II-CF930 vise à supprimer l’alinéa 3, qui procède à une sous-revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, par rapport à l’inflation ; l’amendement II-CF931 vise à supprimer l’alinéa 4, qui procède à une sous-revalorisation du montant forfaitaire de la prime d’activité par rapport à l’inflation.

M. Jean-Paul Dufrègne. En dépit des revalorisations exceptionnelles des 1er novembre 2018 et 2019, les 1,13 million de bénéficiaires de l’AAH resteront pour les deux prochaines années sous le seuil de pauvreté, estimé à 1 026 euros.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques II-CF930 et II-CF1144.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement IICF931 de Mme Christine Pires Beaune.

La commission adopte larticle 67 sans modification.

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Article 68
Interdiction de loctroi de garantie de lÉtat au commerce extérieur pour la recherche, lextraction et la production de charbon

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article prévoit d’exclure du champ des garanties de l’État accordées pour le commerce extérieur les opérations portant sur la recherche, l’extraction et la production de charbon.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 84 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 a élargi le périmètre des garanties de l’État applicables aux opérations concourant au développement du commerce extérieur de la France. Il a également précisé le champ de la délégation de la gestion des garanties publiques à l’export confiée à Bpifrance Assurance Export.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Outre un amendement rédactionnel du Rapporteur général, la commission a adopté les 9 amendements suivants :

– à l’initiative de M. Anthony Cellier l’extension du champ d’application de l’interdiction des garanties publiques à l’export aux opérations recourant aux méthodes d’extraction non conventionnelle des hydrocarbures interdites sur le territoire national (comme la fracturation hydraulique) ;

– à l’initiative du même auteur, l’extension du champ d’application de l’interdiction des garanties publiques à l’export aux opérations recourant au torchage de routine des gaz émis lors de l’extraction d’hydrocarbures liquides ;

– à l’initiative du même auteur, la précision du champ d’application de l’interdiction des garanties publiques à l’export concernant la production de charbon : l’exploitation et la production d’énergie à partir de charbon sont explicitement exclues ;

– à l’initiative de Mme Bénédicte Peyrol, le fait qu’un représentant du ministère chargé de l’énergie et de l’environnement siège au sein de la commission des garanties lors de l’octroi de garanties publiques portant sur des opérations ayant un impact environnemental négatif significatif.

En outre, plusieurs amendements visant à compléter et améliorer l’information du Parlement en matière de garanties publiques à l’export ont été adoptés :

– à l’initiative de M. Anthony Cellier, une demande de rapport au Parlement sur la stratégie de soutien à l’export des activités liées aux énergies renouvelables ;

– à l’initiative de Mme Bénédicte Peyrol, un rapport annuel au Parlement sur les garanties publiques à l’export accordées en matière énergétique ;

– à l’initiative de Mme Bénédicte Peyrol, une publication par Bpifrance Assurance Export des projets soutenus présentant un impact environnemental négatif significatif ;

– à l’initiative de Mme Bénédicte Peyrol, une demande de rapport au Parlement portant sur la définition de normes de performances en matière d’émissions de gaz à effet de serre pour conditionner l’octroi des garanties publiques à l’export ;

– à l’initiative de Mme Bénédicte Peyrol, une demande de rapport au parlement portant sur l’analyse des scénarios d’arrêt d’octroi des garanties publiques à l’export pour des projets de recherche et d’exploitation de nouveaux gisements d’hydrocarbures.

I.   L’État du droit

A.   La garantie publique À l’export

L’article L. 432-1 du code des assurances dispose que : « le ministre chargé de léconomie est autorisé à accorder la garantie de lÉtat, pour les opérations concourant au développement du commerce extérieur de la France ». Les bénéficiaires de cette garantie sont, aux termes du même article :

– les entreprises françaises exportatrices ainsi que les personnes morales de droit étranger qu’elles contrôlent seules ou conjointement lorsque le recours à une entité de droit local est nécessaire ;

– les entreprises françaises importatrices ou investissant à l’étranger ;

– dans des conditions précisées par décret, pour des opérations de construction navale ou de construction d’engins spatiaux civils, les entreprises françaises en concurrence avec une personne étrangère bénéficiant d’un soutien public ;

– les établissements de crédit, sociétés de financement, entreprises d’assurance et de réassurance, mutuelles et institutions de prévoyance, de droit français ou étranger ;

– les organismes de placement collectif.

Le dispositif de garantie à l’export, anciennement géré par la Coface, relève désormais de la compétence de Bpifrance. L’article L. 432-2 du code des assurances dispose qu’un organisme est désigné par l’État pour « gérer et délivrer sous son contrôle, pour son compte et en son nom, les garanties publiques pour le commerce extérieur prévues à larticle L. 432-1 ». L’État a, sur ce fondement, désigné la filiale Bpifrance Assurance Export ; cette dernière instruit les demandes de garanties mais elles sont bien octroyées et supportées par l’État.

La garantie à l’export constitue l’un des outils que l’État met à la disposition des entreprises exportatrices françaises afin de renforcer leur compétitivité.

B.   Le champ de la garantie publique À l’export

La garantie publique permet à l’exportateur de se prémunir contre les différents risques de marché qui pèsent sur ce segment de son activité. Il s’agit, pour l’État, d’encourager les potentiels exportateurs à franchir le pas du risque pris en contractant à l’étranger grâce à un soutien public adapté et, ainsi, de faire progresser leurs parts de marché à l’international et de promouvoir les intérêts stratégiques de la France.

La garantie couvre également les établissements financiers qui accordent des prêts ou des soutiens financiers à l’exportation. La garantie peut prendre plusieurs formes décrites par l’article L. 432-2 du code des assurances, et déclinées sous une forme commerciale par Bpifrance Assurance Export :

– une assurance des crédits contractés pour exporter son activité, aussi dénommée assurance-crédit export – la principale en volume –, qui permet de se prémunir contre l’interruption ou le non-paiement d’un contrat avec une entreprise étrangère ;

– une assurance prospection, qui permet à un potentiel exportateur d’engager de premières démarches à l’exportation tout en étant couvert sur le risque commercial pesant sur ces démarches ;

– une garantie des cautions remises par l’exportateur au client étranger ou une garantie des préfinancements nécessaires pour gérer les difficultés de trésorerie de l’activité export ;

– une assurance des investissements réalisés sur les territoires étrangers qui présentent des risques politiques ;

– une garantie des financements de projets présentant un intérêt stratégique pour l’économie française ;

– une assurance contre les risques de change, c’est-à-dire les pertes que peuvent subir les exportateurs du fait de brutales variations du taux de change entre l’euro et la monnaie du pays concerné.

C.   la responsabilitÉ environnementale du soutien À l’exportation

Le soutien de l’État à l’exportation s’inscrit dans le cadre de l’Arrangement sur les crédits à lexportation bénéficiant dun soutien public conclu en 1978 dans le cadre de l’Organisation de coopération et le développement économiques (OCDE) ([373]). Cet Arrangement ne concerne que la garantie appelée assurance-crédit export.

Cet Arrangement ne prévoit pas, initialement, de conditionner l’octroi de garanties publiques à des exigences environnementales. Toutefois, son annexe IV constitue un Accord sectoriel, adopté en 2005 et intégré de façon permanente à l’Arrangement ([374]), qui encourage l’exportation de technologies environnementales propices à la transition écologique et de projets contribuant à l’atténuation du changement climatique. En outre, dans le cadre de cet Arrangement, un autre Accord sectoriel a été trouvé en 2015 pour prévoir l’interdiction de l’octroi de soutiens publics dans le cadre de projets visant à exporter certains types de centrales thermiques fonctionnant à partir de charbon ([375]).

Enfin, le Conseil de l’OCDE a adopté en 2012, puis révisé en 2016, une Recommandation sur des approches communes pour les crédits à lexportation bénéficiant dun soutien public et le devoir de due diligence environnementale et sociale.

Cette Recommandation encourage les États à mettre en œuvre des mesures permettant d’évaluer et de signaler, notamment, l’impact environnemental des projets faisant l’objet d’une garantie publique à l’exportation ([376]).

Dans ce cadre de ce processus de due diligence, Bpifrance Assurance Export mène une évaluation sociale et environnementale de toute demande d’assurance-crédit. Les entreprises portant des projets dont les impacts environnementaux ou sociaux potentiels sont significatifs doivent fournir une analyse approfondie de ces risques. L’organisme s’engage à prévoir la transparence des résultats :

– ex ante : avant la décision de prise en garantie, les éléments d’évaluation environnementaux et sociaux sont rendus publics à l’attention de la société civile et des populations locales concernées, sous réserve du secret des affaires ;

– ex post : après la décision de prise en garantie, un suivi des risques et des impacts est réalisé sur une base trimestrielle.

II.   Le dispositif proposÉ

Pour des raisons de cohérence entre l’octroi des garanties de l’État et sa politique en matière de transition énergétique et écologique, le présent article modifie l’article L. 432-1 du code des assurances pour exclure explicitement du périmètre des garanties publiques à l’export les « opérations ayant pour objet la recherche, lextraction et la production de charbon ».

Par exemple, l’exportation de pelles mécaniques destinées à l’extraction de charbon ne pourra plus bénéficier d’un octroi de garantie publique. De même, la « production » de charbon comprend les étapes de préparation et de traitement des minerais extraits pour en permettre l’utilisation à des fins énergétiques. En revanche, le périmètre de l’article ne comprend pas les technologies d’exploitation ou de combustion de charbon – notamment les centrales à charbon.

Le Gouvernement rappelle d’ailleurs, dans l’évaluation préalable du présent article, que Bpifrance a déjà fortement réduit son exposition financière aux projets entrant dans ce périmètre et cessé, depuis plusieurs années, d’accorder de nouvelles garanties en la matière. Selon un rapport du Gouvernement remis au Parlement en octobre 2019 et portant propositions de pistes de modulation des garanties publiques pour le commerce extérieur, l’encours d’assurance-crédit export comprenait, au 31 mai 2019, près de 4 milliards d’euros de projets relatifs à des énergies fossiles. Ce montant représente près de 6 % de l’encours actuel d’assurance-crédit de Bpifrance Assurance Export. Cet encours se décompose comme suit : 50 % de projets liés au gaz naturel (exploitation de champs gaziers, usines de liquéfaction, infrastructures de transport et centrales thermiques à gaz), 30 % liés au pétrole et aux hydrocarbures liquides (complexes de raffinage et de pétrochimie pour le pétrole et les condensats issus de l’exploitation gazière, centrales thermiques fonctionnant au fuel et exploitation de champs pétroliers), et 20 % d’exposition résiduelle sur des centrales à charbon (prises en garantie entre 2005 et 2009).

Le Gouvernement propose donc d’initier une démarche de maîtrise des garanties publiques à l’export dans le secteur des énergies fossiles. Les garanties concernées par le présent article représentent une part marginale, sinon nulle, des garanties en cours, puisqu’il ne porte que sur le charbon. Toutefois, il pourrait constituer un premier pas pour aller à l’avenir au-delà de cette seule source d’énergie. Il peut également constituer une référence dans la doctrine que la France souhaite porter à l’international pour encourager ses partenaires commerciaux à adopter des dispositions similaires et s’engager dans une stratégie partagée. Le Gouvernement vise notamment un aménagement de l’Accord sectoriel de l’OCDE de 2015 sur les centrales à charbon (voir ci-dessus) à l’horizon de l’été 2020.

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La commission est saisie, en discussion commune, des amendements IICF35 de Mme Delphine Batho, II-CF1410 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1033 de M. Anthony Cellier.

Mme Delphine Batho. Merci de m’accueillir dans votre commission. Lors des débats sur le projet de loi énergie-climat, la commission des affaires économiques a adopté mon amendement visant à supprimer les aides apportées par l’État, sous forme de garanties à l’export, aux projets favorisant les énergies fossiles. Le Gouvernement est revenu sur cette disposition en séance, au motif qu’elle devait être adoptée en loi de finances. Un rapport a été demandé au Gouvernement. Depuis, le Président de la République, à l’ONU, a appelé à l’arrêt de toute aide aux énergies fossiles, notamment sous forme d’aide à l’export.

L’article 68 se contente de conforter ce qui se pratique déjà : il n’y a plus de garanties publiques à l’export venant soutenir la filière du charbon. Cet amendement vise à mettre fin aux garanties à l’export en faveur de toutes les énergies fossiles.

M. Jean-Louis Bricout. Nous souhaitons interdire l’octroi de garanties de l’État pour la recherche, l’extraction et la production de pétrole et de gaz de schiste.

M. Anthony Cellier. Pour être en phase avec la loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures, qui utilise les termes de « recherche et d’exploitation de charbon », je propose que soient également exclues les garanties accordées à l’exploitation et à la production d’énergie à partir de charbon. Ainsi, les garanties à l’export ne favoriseront pas les projets qui polluent et augmentent les émissions de CO2.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Maximalistes, ou plus proches de l’esprit du texte, ces amendements abordent une question importante. Pour éviter les effets collatéraux sur l’économie de notre pays, j’émettrai un avis défavorable aux deux premiers et favorable au dernier, sous réserve que nous vérifiions, d’ici l’examen en séance, si des effets de marge auraient pu échapper à notre attention.

Mme Émilie Cariou. Doit-on octroyer des garanties de crédits à des industries usant de procédés par ailleurs interdits sur notre propre sol ? La question est d’importance. Le groupe La République en marche votera en faveur de l’amendement II-CF1033. Les deux autres amendements soulèvent des questions que nous devrons examiner cette année, car il importe de progresser dans ce domaine.

Mme Christine Pires Beaune. Je remercie Émilie Cariou de cette ouverture car l’on ne peut pas se contenter de l’article 68, même s’il constitue un premier pas. Il ne s’agit pas d’attribuer des aides ou des subventions, mais des garanties de l’État. On ne peut pas pleurer sur le changement climatique et continuer à accorder des garanties, par exemple, pour l’extraction du charbon ou du gaz de schiste !

Mme Delphine Batho. Ce qui est maximaliste, ce sont les températures relevées dans le département de l’Hérault cet été – 46 °C –, l’arrêt d’une ligne de train dans le Sud de la France en raison des intempéries, ou la fonte des glaciers de montagne, que M. le rapporteur général connaît bien.

Nous sommes dans une situation d’urgence absolue. Une tonne équivalent pétrole d’énergie produite à partir de gaz naturel dégage 651 kg de CO2. Le rapport du GIEC, l’Agence internationale de l’énergie, l’AIE, disent « stop ! ». Il faut arrêter d’ajouter de nouvelles capacités de production d’énergies fossiles – de toutes les énergies fossiles.

Pardonnez-moi, mais on se moque du monde. Alors qu’Emmanuel Macron a expliqué à l’ONU que la France avait choisi d’arrêter les aides publiques sous forme de garanties à l’export à toutes les énergies fossiles, ce projet de loi de finances contient une mesure déjà appliquée par Bpifrance depuis 2015 et la COP21. Concrètement, cette disposition ne change rien à la pratique actuelle. Des garanties de l’État, à hauteur de 9 milliards, ont été accordées à des projets d’infrastructures dans les énergies fossiles ces dernières années. On ne peut pas continuer ainsi !

M. le président Éric Woerth. Nous ne disposons pas d’étude d’impact.

Mme Bénédicte Peyrol. Suite aux amendements défendus par Delphine Batho et Matthieu Orphelin dans le cadre de l’examen du projet de loi énergie-climat, nous avons demandé qu’un travail soit mené sur les modulations des garanties export en fonction de l’impact environnemental. Nous partons de zéro, la question n’a jamais été posée. L’OCDE a proposé des lignes directrices, invitant les États à mesurer l’impact environnemental, mais le sujet n’a pas vraiment été étudié. La DG Trésor a publié un rapport évoquant l’impact social de telles mesures et devrait nous apporter de nouveaux éléments d’ici l’examen en séance. On ne peut pas fermer du jour au lendemain des entreprises et des filières : il convient de placer, en regard de notre ambition environnementale, les conséquences sociales que pourrait entraîner une restriction du champ des garanties export.

M. Anthony Cellier. Je vois dans notre conversation la démonstration des raisons qui font que cela n’a jamais fonctionné. On peut multiplier les incantations, dire que l’on va droit dans le mur et que ce sera terrible ; notre approche, elle, se veut pragmatique. Il s’agit d’examiner, point par point, la façon de traiter la transition, pour en faire une accélération écologique.

Les garanties à l’export représentent 60 000 emplois. Vous ne pouvez pas, du jour au lendemain, sauter dans le précipice au nom de l’environnement et de l’arrêt des gaz à effet de serre. La France serait le seul pays vertueux qui s’exonérerait des effets socio-économiques collatéraux, un îlot sur la scène internationale. Cette majorité fait le pari, et je suis sûr que nous le gagnerons, d’embarquer les autres pays. Il faut pour cela être exemplaire, ce qui implique de prendre en compte les conséquences de ce que nous décidons sur ceux qui travaillent dans ce domaine. Allons-y pas à pas, mais sans nous arrêter maintenant.

M. Laurent Saint-Martin. Anthony Cellier a raison, la France serait isolée dans une démarche maximaliste. Or notre solde commercial est, parmi ceux des pays avancés, le plus mauvais ; nous ne parvenons toujours pas à résorber le déficit correspondant, qui reste de 50 milliards. Nous sommes devant une équation à plusieurs urgences. C’est le défi difficile que nous devons relever. Le budget vert, auquel travaille Bénédicte Peyrol, nous permet d’avancer et cet amendement est une étape. La dynamique est la bonne.

Mme Delphine Batho. Pour l’information de nos collègues, une garantie de 500 millions a été accordée l’année dernière au groupe Total pour un projet très destructeur, en matière de biodiversité, de climat, de conditions de vie, au Mozambique, l’un des pays les plus victimes du réchauffement climatique.

Je veux préciser que le rapport de la DG Trésor ne mentionne aucun élément lié à l’impact climatique des projets soutenus, pas davantage le rapport du GIEC ou la décision de l’AIE appelant à l’arrêt de toute construction d’infrastructures dans les énergies fossiles.

La France est le deuxième pays exportateur d’industries extractives d’énergies fossiles. Que notre pays décide de renoncer à ses aides à l’export aurait un effet d’entraînement. La France a autre chose à vendre au monde que sa participation à l’accélération du changement climatique, dont l’impact social, chers collègues, se chiffre en millions de morts et de réfugiés climatiques.

La commission rejette successivement les amendements II-CF35 et II-CF1410.

Puis elle adopte lamendement II-CF1033 (amendement II-2598).

Elle passe à lexamen de lamendement II-CF1034 de M. Anthony Cellier.

M. Anthony Cellier. Les opérations ayant pour objet la recherche, l’exploitation et la production d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique ou par toute autre méthode non conventionnelle ne doivent pas bénéficier des garanties de l’État.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous proposez simplement que les techniques d’exploitation de gisements interdites sur le territoire national ne puissent être soutenues publiquement à l’exportation. C’est une position de bon sens. Avis favorable.

La commission adopte lamendement II-CF1034 (amendement II-2599).

Elle examine lamendement II-CF1036 de M. Anthony Cellier.

M. Anthony Cellier. Une étape de plus, et une fierté supplémentaire : nous proposons que la garantie de l’État ne puisse être accordée aux projets de production d’hydrocarbures liquides prévoyant un torchage de routine du gaz. Cette technique contribue fortement au réchauffement climatique et gaspille de l’énergie.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Favorable à cet amendement.

M. Charles de Courson. Il existe des gisements où le gaz produit ne peut être utilisé : le torchage de routine n’est pas toujours un choix économique.

M. Anthony Cellier. Nous prévoyons que la garantie peut être accordée aux projets intégrant une technologie de capture du gaz émis lors de l’exploitation du gisement. Par ailleurs, l’amendement ne concerne pas le torchage non routinier, pour des opérations de sécurité ou d’urgence par exemple.

Mme Delphine Batho. Chers collègues, ces dispositions que l’on vous demande d’adopter sont de l’affichage pur ! Depuis un certain nombre d’années, l’essentiel des aides à l’export sont consacrées à des projets gaziers. On n’avancera pas tant que l’on ne remettra pas en cause les aides concernant toutes les énergies fossiles !

La commission adopte lamendement II-CF1036 (amendement II-2600).

Elle en vient à lexamen de lamendement II-CF1435 de M. Anthony Cellier.

M. Anthony Cellier. Décidément, nous avançons aujourd’hui en matière d’écologie et d’environnement ! Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le soutien à l’export des énergies renouvelables via l’octroi de garanties de l’État.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne suis habituellement pas enclin à accepter les demandes de rapport mais il est des domaines où il est nécessaire d’éclairer la représentation nationale. Avis favorable.

Mme Bénédicte Peyrol. La part des garanties accordées aux projets de production d’énergie renouvelable est de 1 % seulement. Nous devons poursuivre la réflexion sur la modulation des garanties en fonction de l’impact environnemental du projet et voir comment cet outil, très puissant, peut être mis au service du développement des filières renouvelables françaises et contribuer à l’extinction des activités d’exploitation des énergies fossiles.

La commission adopte lamendement II-CF1435 (amendement II-2605).

Puis elle examine successivement les amendements II-CF1437, II-CF1439, II-CF1436, II-CF1440 et II-CF1441 de Mme Bénédicte Peyrol.

Mme Bénédicte Peyrol. Le premier amendement vise à renforcer l’information du Parlement sur le suivi des garanties d’État à l’export, aujourd’hui trimestrielle et à l’attention des commissions des finances. Le rapport devra comprendre la liste détaillée des opérations ayant bénéficié de la garantie de l’État dans le domaine de l’énergie, réparties par type d’opérations et par type de ressources. Il devra préciser les volumes financiers engagés et la durée des garanties octroyées, les entreprises directement ou indirectement bénéficiaires, les pays dans lesquels ont lieu les opérations et leurs principaux impacts sociaux et environnementaux.

Par le deuxième amendement, nous demandons un renforcement de la transparence et de l’information du public. Le site de Bpifrance Export fait état des garanties accordées mais nous souhaitons aller plus loin, afin que les citoyens et les ONG puissent exercer leur travail de suivi et de contrôle.

L’amendement II-CF1436 propose d’intégrer une représentation du ministère de la transition écologique et solidaire au sein de la commission des garanties et du crédit au commerce extérieur.

L’amendement suivant propose un rapport sur la mise en place de normes de performance en matière d’émissions de GES ayant pour finalité de conditionner l’octroi de garanties publiques. C’est l’une des pistes de travail proposées dans son rapport par la DG Trésor.

Enfin, l’amendement II-CF1441 prévoit que le Gouvernement remet un rapport sur des scénarios de cessation d’octroi des garanties publiques au commerce extérieur pour des projets de recherche et d’exploitation de nouveaux gisements d’hydrocarbures.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je donne un avis favorable aux différentes demandes de rapport en considérant qu’il ne s’agit là que des différents thèmes à aborder dans un rapport de synthèse.

J’émets également un avis favorable à l’amendement II-CF1436. Le ministère de la transition écologique et solidaire peut donner un avis éclairé sur ces questions.

Mme Delphine Batho. Faut-il en rire ou en pleurer ? Lors de l’examen du projet de loi énergie-climat, on nous a expliqué qu’il fallait un rapport et que la décision serait prise lors de l’examen de la loi de finances. Désormais, on nous dit qu’il faut commander de nouveaux rapports pour disposer d’éléments de décision l’année prochaine !

Pour ce qui est de la transparence, j’ai demandé, en mai, que me soit transmis l’ensemble des informations sur les projets garantis. Le rapporteur général m’a orientée vers le rapporteur spécial sur le commerce extérieur, qui m’a orientée en juillet vers la rapporteure spéciale pour le commerce. À ce jour, je n’ai toujours pas de réponse. Si le Parlement souhaite disposer de toutes les informations concernant les projets garantis, il peut les obtenir. À condition d’en avoir la volonté politique.

Permettez-moi d’insister : ce que dit la communauté scientifique internationale aujourd’hui, c’est qu’il ne s’agit pas de polluer moins vite, de faire un petit peu moins mal, mais d’arrêter les énergies fossiles. Or les aides dont nous sommes en train de discuter concernent des projets de construction de nouvelles centrales à gaz. Durant les trente ou quarante prochaines années, elles rejetteront en quantité considérable du CO2 dans l’atmosphère, alors que l’on a déjà dépassé les 415 parties par million (ppm).

La commission adopte les amendements II-CF1437 (amendement II-2604), IICF1439 (amendement II-2603), II-CF1436 (amendement 2601), et II-CF1440 et IICF1441 (amendement II-2607).

Puis elle adopte lamendement rédactionnel II-CF844 du rapporteur général (amendement II-2608).

Elle adopte larticle 68 ainsi modifié.

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*     *

Article 69
Octroi de la garantie de lÉtat au titre de prêts de lAgence française de développement (AFD) au Fonds vert pour le climat (FVC)

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à autoriser le ministre chargé de l’économie à accorder, à titre gratuit, à l’Agence française de développement (AFD), la garantie de l’État au titre de prêts qu’elle prévoit de proposer au Fonds vert pour le climat, pour les sommes portant sur le principal et sur les intérêts et dans la limite d’un plafond de 310 millions d’euros en principal.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 216 de la loi de finances pour 2019 a autorisé le ministre chargé de l’économie à accorder, à titre gratuit, à l’Agence française de développement (AFD), la garantie de l’État au titre de prêts consentis à l’Association internationale de développement (AID) et au Fonds international de développement agricole (FIDA).

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   Le fonds vert pour le climat

1.   Origine et fonctionnement

Le Fonds vert pour le climat (FVC) a été créé en 2011, à la suite des engagements pris lors de la conférence des Parties à Copenhague en 2009 (COP 15). Il s’agit d’un des instruments du mécanisme financier de la Convention cadre des Nations unis sur les changements climatiques (CCNUCC), depuis l’adoption de l’Accord de Paris en 2015. En effet, ce dernier a conduit à placer le FVC parmi les principaux outils devant permettre de réaliser les engagements qui le structurent, en particulier celui de maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2 degrés Celsius.

L’objet du Fonds est de financer des actions d’atténuation (réduction des émissions de CO2) et d’adaptation (notamment des populations les plus vulnérables) aux changements climatiques dans les pays en développement. Ces actions peuvent porter sur :

– des aides financières (dons, prêts, investissements en fonds propres, garanties), en particulier en direction des États les moins développés, des petites îles en développement et des États africains, qui sont les principaux affectés par les changements climatiques ;

– des co-financements de projets d’atténuation ou d’adaptation, de façon équilibrée entre ces deux objectifs. Le conseil d’administration du FVC a identifié huit « secteurs à résultats » dans lesquels les projets doivent s’inscrire pour être soutenus.

Les projets doivent être instruits puis proposés au FVC par des entités nationales agréées. La France a désigné à ce titre l’Agence française de développement.

Secteurs à résultats identifiés par le fonds vert pour le climat

Atténuation

Adaptation

Gestion soutenable des forêts et des terres

Résilience des écosystèmes et des services écosystémiques

Bâtiments, villes, industries et appareils efficaces énergétiquement

Santé, alimentation, accès à l’eau

Production et accès à l’énergie sobre en carbone

Résilience des infrastructures et du bâti

Transports sobres en carbone

Niveau de vie des personnes et des communautés vulnérables

Source : Fonds vert pour le climat, Identification des secteurs à résultats où les investissements du Fonds auraient le plus dimpact, février 2018 (en anglais).

Entre fin 2015, date de lancement opérationnel des premières aides financières du Fonds, et 2019, le FVC avait approuvé 111 projets pour un montant total de 5,2 milliards de dollars. Aujourd’hui, le FVC est le principal fonds multilatéral ([377]) consacré au financement de la transition écologique des pays en développement.

Historique du Fonds vert pour le climat (FVC)

2009 : Le principe du FVC est décidé à Copenhague (COP 15) ;

2010 : L’établissement du FVC est décidé à Cancun (COP 16) ;

2012 : Lancement de la gouvernance du FVC. Le conseil d’administration se compose, de façon paritaire, de représentants de pays développés et en développement ;

2013 : Établissement des locaux du FVC à Songdo (Corée du Sud) ;

2014 : Première mobilisation des ressources du fonds, avec l’objectif de lever 10 milliards de dollars de promesses de dons ou de prêts, jusqu’en 2018 ;

2015 : Lancement des premières décisions d’investissement en matière d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques. L’Accord de Paris transforme le FVC en mécanisme financier de la CCNUCC ;

2016 :Première année opérationnelle complète. 35 projets soutenus, pour une enveloppe globale de 1,5 milliard d’euros.

2.   Financement du Fonds et reconstitution pluriannuelle de son capital

En 2014, au moment de la première mobilisation des ressources du Fonds, la dotation originelle du FVC devait être de 10,3 milliards de dollars. La part française s’établissait à 1 milliard de dollars (774 millions d’euros), dont un don de 489 millions d’euros et un prêt très concessionnel ([378]) de 285 millions d’euros, progressivement décaissés entre 2015 et 2018 ([379]). Les ressources du FVC sont largement issues des États. Toutefois, plusieurs régions et une ville (Paris) ont également contribué à son financement.

Le capital du FVC est reconstitué de façon périodique, sur un rythme quadriennal. Vu le rythme de décaissement des aides du FVC, il n’a été nécessaire de prévoir une deuxième période de reconstitution qu’à partir de 2020, jusqu’en 2023. Au 1er mars 2019, 322 propositions soumises au FVC sont encore en cours de traitement (dans la « pipeline » du Fonds), pour un besoin total de financement de près de 15 milliards de dollars – chaque projet n’ayant pas vocation à prospérer.

besoin de financement des nouveaux projets soumis au Fvc

Atténuation

Projets soumis

(en millions de dollars)

Adaptation

Projets soumis

(en millions de dollars)

Gestion soutenable des forêts et des terres

2 957

Résilience des écosystèmes et des services écosystémiques

2 562

Bâtiments, villes, industries et appareils efficaces énergétiquement

2 286

Santé, alimentation, accès à l’eau

2 056

Production et accès à l’énergie sobre en carbone

1 543

Résilience des infrastructures et du bâti

1 519

Transports sobres en carbone

1 131

Niveau de vie des personnes et des communautés vulnérables

1 096

Total

7 917

Total

7 233

Source : commission des finances, d’après la programmation stratégique du FVC en vue de sa première reconstitution de capital, mars 2019 (en anglais)

Comme pour la première période de dotation du Fonds, la part française de la reconstitution entre 2020 et 2023 du capital du FVC prendrait deux formes : un don de 1,238 milliard d’euros, supporté par le budget général (programme Aide économique et financière au développement de la mission Aide publique au développement) et un prêt très concessionnel de 310 millions d’euros sur 25 ans ([380]). Ce prêt sera délivré par l’Agence française de développement (AFD) et sera couvert par l’octroi d’une garantie que le présent article a pour objet d’autoriser.

La France conduit une politique d’évaluation de ses contributions financières aux organismes internationaux. Un contrôle de la Cour des comptes sur les crédits transférés au FVC a eu lieu pour les exercices 2012 à 2017, et a donné lieu à la transmission au Premier ministre d’un référé en juillet 2019 ([381]). La Cour des comptes signale une « triple nécessité : améliorer la gouvernance du Fonds, rationaliser les financements français dans les domaines du climat et de lenvironnement ainsi que leur suivi budgétaire, renforcer la coordination interministérielle et linfluence de la France ».

En outre, dans le contexte des négociations autour de la première reconstitution des ressources du FVC, la DG Trésor a confié au cabinet Baastel la réalisation d’une évaluation sur la dotation française à ce fond sur la période 2015-2018.

Les objectifs de l’évaluation ont été les suivants :

– tirer le bilan de la participation de la France au FVC après ses premières années d’activité et apporter des éléments d’analyse pour soutenir les orientations françaises dans le cadre du processus de reconstitution du fonds ;

– apprécier le degré d’influence de la France dans la gouvernance du FVC et ses leviers pour porter les modes d’action, thématiques et zones d’intervention qu’elle juge prioritaires et les plus pertinents ;

– porter un jugement évaluatif sur l’articulation du FVC avec les autres instruments multilatéraux et bilatéraux agissant dans le secteur du climat auxquels la France contribue.

Les recommandations de cette évaluation ont été transmises à la DG Trésor et sont en cours de traitement – elles n’ont pas été rendues publiques à ce stade.

B.   LE rÔle de l’Agence française de développement

L’AFD joue un double rôle dans les relations qu’entretient la France avec le Fonds vert pour le climat.

1.   L’octroi de prêts

L’AFD a été mobilisée dans le cadre du premier prêt très concessionnel de la France au FVC. Le montant du prêt, de 285 millions d’euros, a été décaissé fin 2017.

L’AFD intervient pour le compte de l’État dans le cadre de ses missions réglementaires, fixées par le code monétaire et financier. Aux termes de l’article R. 515-5 de ce code, l’AFD « exerce une mission permanente dintérêt public au sens de larticle L. 511-104 [du même code]. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission ». En outre, l’article R. 515-12 dispose que « lagence gère pour le compte de lÉtat et aux risques de celui-ci des opérations financées sur le budget de lÉtat ».

Le montant du nouveau prêt accordé au FVC par l’AFD représentera une part modeste de ses engagements financiers, qui représentent, fin 2018, 11,4 milliards d’euros, dont 83 % sont consentis sous forme de prêts. Si de nombreux prêts sont concessionnels, l’AFD prête aux conditions de marché.

2.   La présentation de projets au Fonds vert pour le climat

L’AFD est l’entité accréditée auprès du FVC par la France. Elle a proposé puis obtenu le soutien du Fonds pour plusieurs projets :

– en 2016, un projet de gestion des inondations en milieu urbain au bénéfice du Sénégal (83 millions de dollars, co-financés à hauteur de 17,6 millions de dollars par le FVC) ;

– en 2017, un projet de système d’irrigation agricole au bénéfice du Maroc (89 millions de dollars, dont 23,4 millions par le FVC) ;

– en 2018, un projet multilatéral de transformation des systèmes financiers locaux, au bénéfice de 17 pays, dont 16 en Afrique. Le FVC a contribué à cette initiative à hauteur de 240 millions d’euros, ce qui constitue son deuxième décaissement en volume depuis sa création.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 69 du projet de loi de finances dispose que le ministre chargé de l’économie est autorisé à accorder, à titre gratuit, la garantie de l’État à l’Agence française de développement au titre du prêt consenti par cet établissement au FVC dans le cadre de la première reconstitution 2020-2023 des ressources de ce fonds. Cette garantie porte sur le principal et les intérêts dans la limite d’un plafond de 310 millions d’euros en principal (soit le montant du prêt très concessionnel qu’il est envisagé de consentir au bénéfice du FVC).

La contribution française au FVC va permettre de conserver la place de la France parmi les premiers contributeurs du Fonds. L’effort cumulé en don et prêt concessionnel s’élèvera, in fine, à 1,548 milliard d’euros, soit le double de la première contribution versée au Fonds entre 2015 et 2018.

Le présent article n’a pas d’impact sur le budget général de l’État, sauf si le remboursement du prêt sous-jacent fait défaut. La garantie sera retracée en tant qu’engagement hors bilan de l’État au sein du compte général de l’État.

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*     *

La commission adopte larticle 69 sans modification.

Article 70
Octroi de la garantie de lÉtat à la Banque africaine de développement dans le cadre du dispositif dit AFAWA
 Affirmative finance action for women in Africa »)

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit l’autorisation d’octroi, à titre gratuit, de la garantie de l’État à la Banque africaine de développement au titre du partage des risques institué dans le cadre du dispositif destiné à favoriser l’accès des femmes au financement de l’entreprenariat en Afrique dit AFAWA (« Affirmative Finance Action for Women in Africa »), dans la limite d’un plafond total de 45 millions d’euros.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission des finances a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   L’initiative pour favoriser l’accès des femmes au financement en afrique

L’initiative dite « AFAWA » (Affirmative Finance Action for Women in Africa) a été lancée par la Banque africaine de développement en mai 2016. Selon les estimations de cette Banque, le déficit de financement de l’entreprenariat des femmes africaines est estimé à 42 milliards de dollars – dont 16 milliards de dollars dans le seul secteur agricole. Pourtant, l’entreprenariat féminin est particulièrement développé en Afrique : selon un rapport du Moniteur de l’entreprenariat mondial ([382]), 26 % des femmes adultes vivant en Afrique subsaharienne lancent ou gèrent une entreprise – contre 10 % en moyenne au niveau mondial.

Les priorités d’actions de l’initiative AFAWA reposent sur trois volets :

– le financement (AFAWA Finance) : renforcer l’accès au financement pour les entreprises détenues et dirigées par des femmes. L’octroi des prêts aux femmes est souvent perçu comme étant plus risqué, ce qui entraîne l’application de taux d’intérêt majorés, voire prohibitifs ; en outre, elles disposent en moyenne de moins de garanties bancaires que les hommes ;

– la formation (AFAWA Assistance technique) : renforcer les capacités des femmes entrepreneures et des institutions financières qui les soutiennent. Il s’agit de développer les compétences financières et de gestion d’entreprises qui pourront aider les femmes à répondre aux exigences des institutions financières, et accompagner ces dernières dans l’élaboration de produits financiers adaptés ;

– le plaidoyer (AFAWA Environnement des affaires) : mobiliser et soutenir les gouvernements africains afin qu’ils adoptent les réformes juridiques, institutionnelles et réglementaires nécessaires au développement de l’entreprenariat féminin. Il s’agit de lever les freins institutionnels qui limitent l’accès des femmes au monde de l’entreprise.

Selon les données de la Banque africaine de développement, en 2018, l’initiative AFAWA Finance a permis de prêter 50 millions de dollars à des entrepreneures et de soutenir le développement du fonds d’investissement privé Alitheia, qui investit dans des PME à forte croissance détenues et dirigées par des femmes en Afrique (apport en capital de 12,5 millions de dollars).

B.   L’appui de la France à l’initiative AFAWA

La France est le neuvième actionnaire de la Banque africaine de développement et, par le truchement de l’Agence française du développement (AFD), participe au capital du fonds africain de garantie.

Dans le cadre de la présidence française du G7, le Président de la République a inscrit l’initiative AFAWA parmi ses priorités et a annoncé, le 25 août 2019 à Biarritz, le renforcement de sa capacité financière. Les nouvelles contributions des gouvernements, dont 45 millions d’euros à la charge de la France, devront permettre de prêter 251 millions de dollars supplémentaires à la Banque africaine de développement, dans un horizon de temps de cinq ans, pour soutenir cette initiative.

Concrètement, AFAWA Finance s’appuiera sur un mécanisme de garantie et de partage des risques qui fera intervenir le fonds africain de garantie, lequel est refinancé par la Banque africaine de développement et plusieurs bailleurs, dont les États du G7. Ce fonds fournit ensuite ses garanties aux banques privées qui consentent les prêts. Près de 300 millions de dollars de garanties pourront donc être mobilisés. Avec un effet de levier attendu d’environ 10 dollars prêtés à partir d’1 dollar garanti par les États ([383]), l’initiative AFAWA devrait permettre de débloquer jusqu’à 3 milliards de dollars de prêts.

L’aide française s’élève, dans son ensemble, à 135 millions d’euros sur cinq ans et prend trois formes :

– un don au fonds de garantie de la Banque africaine de développement (apport en capital de 45 millions d’euros) via le programme 209 Solidarité à légard des pays en développement ;

– une contribution en assistance technique (subvention de 45 millions d’euros) également via le programme 209 ;

 l’octroi d’une garantie, prévue par le présent article, de 45 millions d’euros également.

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article dispose que le ministre chargé de l’économie est autorisé à accorder, à titre gratuit, la garantie de l’État à la Banque africaine de développement au titre du partage des risques institué dans le cadre du dispositif destiné à favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique dit AFAWA, dans la limite d’un plafond total de 45 millions d’euros. L’octroi de la garantie sera effectué par arrêté ministériel.

L’impact budgétaire de la disposition est nul, sauf si la garantie est appelée, en cas de défaut de remboursement des prêts consentis. L’impact serait alors au maximum de 45 millions d’euros.

Le mécanisme de partage des risques présenté ci-dessus permet d’estimer dans quelles circonstances une situation d’appel de la garantie pourrait se produire. Les situations de défaut conduisent à des pertes, qui seront réparties de la façon suivante : les banques privées assument 25 % des pertes, car la garantie du Fonds africain de garantie, et par ricochet celle des États bailleurs, ne porte que sur 75 % des prêts. Ensuite, sur le volume des pertes restantes, le Fonds africain de garantie assume immédiatement 15 % des pertes puis appellerait, si nécessaire, la garantie des États bailleurs. Le reste des pertes demeure pris en charge, in fine, par le Fonds africain de garantie, qui conserve donc une exposition financière globale de 50 %.

Toutefois, une clause du mécanisme prévoit de protéger les États bailleurs pour limiter le risque d’appel de leur garantie : dans un premier temps, la Banque africaine de développement couvre la première tranche de pertes, à hauteur de 2 % ([384]) ; dans un deuxième temps, les contributions des États apportées sous forme de dons ([385]) et que la Banque africaine de développement a mobilisées pour apporter sa garantie au Fonds africain de garantie sont consommées prioritairement pour couvrir les pertes éventuellement restantes, avant l’appel des garanties des États bailleurs. Le risque d’appel de la garantie prévue au présent article est donc faible.

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La commission adopte larticle 70 sans modification.

 


Article 71
Prorogation de la garantie des prêts à taux zéro du dispositif « Nouvel accompagnement pour la création ou la reprise dentreprise » (NACRE)

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise :

– à prolonger d’un an, jusqu’au 31 décembre 2020, la garantie octroyée par l’État aux prêts à taux zéro (PTZ) accordés aux personnes sans emploi, qui créent ou reprennent une entreprise ;

– à relever de 550 à 600 millions d’euros le niveau de la garantie de l’État en la matière ;

– à tirer les conséquences juridiques du transfert du mandat de gestion des PTZ et du Fonds de cohésion sociale, de la Caisse des dépôts et consignations à Bpifrance.

Dernières modifications législatives intervenues

La garantie avait été prolongée d’un an en loi de finances initiale pour 2019. Le niveau de la garantie avait été remonté de 500 à 550 millions d’euros.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

Le présent article tend à prolonger d’un an, jusqu’au 31 décembre 2020, la garantie octroyée par l’État au titre des prêts à taux zéro accordés aux personnes sans emploi ou rencontrant des difficultés pour s’insérer durablement dans l’emploi, qui créent ou reprennent une entreprise. Ces prêts sont accordés dans le cadre du dispositif de nouvel accompagnement à la création ou la reprise d’entreprise (NACRE). La garantie porte sur 80 % du montant des prêts et n’est pas rémunérée.

Le présent article permet également le transfert effectif de la gestion du Fonds de cohésion sociale (FCS) ([386]), fonds sans personnalité juridique qui gère la première garantie de ces prêts à hauteur de 20 % des montants accordés, de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à Bpifrance.

I.   L’État du droit

A.   Le dispositif NACRE

1.   Historique et fonctionnement

Instauré le 1er janvier 2009, le dispositif NACRE est prévu à l’article L. 5141-5 du code du travail.

Celui-ci prévoit que « la région participe, par convention, au financement dactions daccompagnement et de conseil organisées avant la création ou la reprise dune entreprise et pendant les trois années suivantes ».

Lesdites actions bénéficient à « des personnes sans emploi ou rencontrant des difficultés pour sinsérer durablement dans lemploi, pour lesquelles la création ou la reprise dentreprise est un moyen daccès, de maintien ou de retour à lemploi ».

Initialement de la compétence de l’État, le dispositif NACRE a été transféré aux régions à compter du 1er janvier 2017, aux termes de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRE) ([387]).

Dans le cadre de ce transfert de compétence, la loi de finances initiale pour 2017 a prévu l’affectation aux régions d’une fraction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) ([388]).

Le dispositif NACRE inclut trois phases, qui peuvent être suivies en tout ou partie pour chaque cas individuel :

– une aide au montage du projet de création ou de reprise de l’entreprise (durée de quatre mois pour un projet de création et de six mois pour un projet de reprise) ;

– une aide à la structuration financière et à l’intermédiation bancaire (durée de quatre mois pour un projet de création et de six mois pour un projet de reprise) ;

– et un accompagnement au démarrage et au développement de l’activité (durée de trente-six mois au total, répartis en trois périodes de douze mois, à compter de l’immatriculation de l’entreprise).

Selon une enquête de l’INSEE de 2018, il apparaît que 27 % des créations d’entreprises étaient le fait de demandeurs d’emploi et 13 % de personnes éloignées de l’emploi au cours du premier semestre 2014, soit 40 % des créateurs d’entreprises au total ([389]). Cette statistique illustre la pertinence du dispositif qui aide et accompagne les demandeurs d’emploi ou les personnes éloignées de l’emploi à créer ou reprendre une entreprise.

2.   Le mécanisme des prêts à taux zéro

Outre l’accompagnement décrit ci-dessus, le dispositif NACRE propose aux bénéficiaires des avances remboursables personnelles, sans intérêt, afin de leur permettre de constituer un apport en capital au lancement de leur activité. En d’autres termes, le dispositif NACRE fournit des prêts à taux zéro (PTZ).

Actuellement, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) propose des prêts à taux zéro d’un montant maximum de 8 000 euros et d’une durée maximale de cinq ans aux personnes inscrites dans le dispositif NACRE. Dans la logique d’un apport en capital, le prêt doit être couplé à un prêt complémentaire, dont le montant et la durée doivent être supérieurs ou égaux à ceux du prêt à taux zéro.

L’évaluation préalable du présent article indique que 94 631 prêts ont été octroyés dans le cadre du dispositif NACRE depuis 2009, pour un montant moyen de près de 5 000 euros.

Les prêts à taux zéro bénéficient d’une double garantie :

– celle du Fonds de cohésion sociale (FCS) susmentionné, à hauteur de 20 % des montants des prêts. Ce Fonds a pour objet de garantir des prêts afin de faciliter l’accès au crédit bancaire des publics en difficulté, ce qui comprend les publics visés par le dispositif NACRE. En outre, la loi de finances rectificative pour 2016 a autorisé le FCS à garantir les prêts accordés dans le cadre des actions d’accompagnement et de conseil financées par les régions, ce qui a permis la garantie des PTZ NACRE ([390]). Le présent projet de loi de finances inscrit 18 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au bénéfice du FCS au titre des différentes garanties qu’il octroie ([391]).

– la garantie de l’État, objet du présent article, à hauteur de 80 % des montants des prêts. Cette garantie intervient de façon subsidiaire, si le taux de défaut des prêts dépasse les 20 % – il est inférieur à 14 % depuis 2009. En d’autres termes, la garantie de l’État couvre 80 % du montant total des prêts mais elle n’est appelée que si la première garantie du FCS, qui couvre, lui, un cinquième de l’encours, est épuisée.

B.   La garantie octroyÉe par l’État

1.   Le fondement juridique

L’article 101 de la loi de finances rectificative pour 2009 autorise l’octroi de la garantie de l’État pour les prêts à taux zéro accordés « aux personnes sans emploi ou rencontrant des difficultés pour sinsérer durablement dans lemploi qui créent ou reprennent une entreprise » ([392]). Celle-ci ne peut être appelée qu’après épuisement des ressources du fonds de garantie constitué au sein du FCS.

En outre, le même article encadre l’évolution de l’encours des prêts à taux zéro octroyés par la CDC. Celui-ci ne doit pas dépasser un multiple de la dotation budgétaire totale effectivement versée au FCS et affectée au fonds de garantie. Ce multiple a été fixé à cinq par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie, de l’emploi et du budget du 31 mars 2010 ([393]).

2.   Les prorogations successives de la garantie de l’État

Les lois de finances rectificatives ont successivement étendu le montant de la garantie de l’État et prorogé la période couverte par celle-ci.

prorogation et extension de la garantie de l’État

Référence

Montant de la garantie
(en millions deuros)

Période couverte par la garantie

LFR 2009

400

Avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2012

LFR 2012

400

Avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2013

LFR 2013

500

Avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2017

LFR 2017

500

Avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2018

LFI 2019

550

Avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2019

PLF 2020

600

Avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2020

Source : commission des finances.

Ainsi, avec le vote du présent article, la garantie de l’État couvrirait le montant des avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2020 dans la limite de 600 millions d’euros.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Les modifications apportÉes

Le présent article modifie l’article 101 de la loi de finances rectificative pour 2009, précitée.

Le et le tirent les conséquences juridiques du transfert du mandat de gestion des PTZ NACRE. En effet, jusqu’à fin 2019, la CDC assume la double mission de gérer la distribution de ces PTZ ([394]) et de gérer le Fonds de cohésion sociale. Ces deux missions de gestion et de garantie seront reprises, à compter du 1er janvier 2020, par Bpifrance.

Le renouvelle la garantie en prévoyant qu’elle porte sur les avances remboursables octroyées avant le 31 décembre 2020.

En outre, le même 2° relève le montant de cette garantie de 550 à 600 millions d’euros. La nécessité de relever ce montant tient au fait que 490 millions d’euros de prêts ont été décaissés au 30 juin 2019. Les crédits supplémentaires augmentent donc la limite de garantie afin d’assurer la couverture de l’ensemble des futurs prêts accordés jusqu’à l’expiration de la garantie.

B.   L’impact BudgÉtaire et Économique

Le présent article aura pour effet d’accroître l’encours des garanties de l’État, recensées au sein de ses engagements hors bilan dans le compte général de l’État. Au-delà de cet élément, le présent dispositif n’emporte pas de conséquence budgétaire, ni sur les dépenses, ni sur le déficit, ni sur la dette publics.

En effet, dans la mesure où le taux de défaut des prêts demeurerait proche du niveau constaté depuis 2009, à 14 %, l’appel de la garantie prévue au présent article est peu probable.

L’exposé sommaire de l’article précise qu’une mission d’évaluation du dispositif NACRE a lieu à l’automne 2019 afin d’observer les effets économiques du dispositif. Une première évaluation du dispositif NACRE avait été menée en octobre 2013 par l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) ([395]). Celle-ci avait relevé des résultats globalement positifs de NACRE.

La prorogation d’un an proposée par le présent article s’inscrit dans une logique d’attente des conclusions de la nouvelle mission d’évaluation, qui devraient être connues avant l’été 2020.

*

*     *

La commission adopte larticle 71 sans modification.

 


Article 72
Création dune aide à laccession sociale et à la sortie de linsalubrité spécifique à lOutre-mer

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article ouvre la possibilité à l’État d’attribuer une aide à l’accession et à la sortie de l’insalubrité en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

En seront bénéficiaires les personnes éligibles à une aide personnelle au logement qui accèdent à la propriété d’un logement constituant leur résidence principale à compter du 1er janvier 2020, ou qui l’améliorent. Les conditions de bénéfice de l’aide seront précisées par un décret par référence aux dispositions du code de la construction et de l’habitation relatives aux aides personnelles au logement.

L’aide sera financée par la mission Cohésion des territoires.

Son impact budgétaire est estimé à 2,2 millions d’euros par an.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

A.   Les aides personnelles au logement À l’accession dans les outre-mer

Il existe trois catégories d’aides personnelles au logement :

– l’aide personnalisée au logement (APL) ;

– l’allocation de logement familiale (ALF) destinée aux familles ;

– l’allocation de logement sociale (ALS) attribuée sous conditions de ressources aux personnes qui ne bénéficient ni de l’APL ni de l’ALF.

L’ordonnance du 17 juillet 2019 ([396]) a procédé à des modifications dans la codification de ces dispositions. Elles sont désormais régies par le livre VIII de la partie législative du code de la construction et de l’habitation (CCH), soit ses articles L. 811-1 à L. 863-5. Le titre VI de ce livre VIII régit les dispositions particulières aux outre‑mer.

Codification des dispositions relatives
aux aides personnelles au logement

 

Jusquau
1er septembre 2019

À compter du
1er septembre 2019

Aide personnalisée au logement (APL)

L. 351-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation

Livre VIII de la partie législative du code de la construction et de l’habitation

(articles L. 811-1 à L. 863-5)

Allocation de logement familiale (ALF)

L. 542-1 et suivants du code de la sécurité sociale

Allocation de logement social (ALS)

L. 831-1 et suivants du code de la sécurité sociale

1.   L’extinction des aides personnelles au logement à l’accession par la loi de finances pour 2018

a.   Les aides à l’accession avant la loi de finances pour 2018

Jusqu’à la loi de finances pour 2018 ([397]), ces trois aides, qui ne peuvent pas se cumuler, avaient un volet locatif et un volet accession. Les accédants à la propriété pouvaient en effet bénéficier de l’une de ces aides au logement dès lors que le logement en question constituait leur résidence principale. Elles étaient financées par le Fonds national d’aide au logement (FNAL), sous conditions de ressources, et versées par les caisses d’allocation familiale (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (CMSA) et avaient pour objet de prendre en charge une partie des mensualités de remboursement des emprunts contractés pour acquérir un logement neuf ou ancien.

Le barème des aides personnelles à l’accession dépendait des revenus des propriétaires, de leur situation matrimoniale, du nombre d’enfants dans le ménage et du niveau de la mensualité de l’emprunt immobilier contracté. Les plafonds des mensualités variaient en fonction de la date et de la nature de l’opération et de la nature du prêt.

 L’APL accession était accordée aux propriétaires dont le prêt faisait l’objet d’une convention, c’est-à-dire aux particuliers :

– ayant souscrit un prêt conventionné créé en 1977 ([398]) ou un prêt d’accession sociale dont les conditions d’octroi sont alignées sur celles du prêt à taux zéro ;

– titulaires d’un logement faisant l’objet d’un prêt social de location‑accession (PSLA), détenu par le bailleur puis par l’accédant et dédié au financement des opérations de location-accession.

Elle était également ouverte au titre des opérations de construction, d’acquisition et d’amélioration d’une résidence principale financées par un prêt aidé ou réglementé par l’État.

Elle était versée par la banque prêteuse, ce qui avait pour effet de diminuer la mensualité du crédit payée par l’emprunteur.

● Les AL s’appliquaient également dans le cas de l’accession à la propriété, sous conditions de ressources et de montant de mensualités :

– l’ALF accession était attribuée aux ménages ayant des personnes à charge et non éligibles à l’APL ;

– l’ALS accession était attribuée à toute personne, sous seule condition de ressources, qui ne satisfaisait pas les conditions fixées pour bénéficier de l’ALF ou de l’APL.

b.   L’extinction de l’aide personnelle au logement à l’accession par la loi de finances pour 2018

L’article 126 de la loi de finances pour 2018 ([399]) a éteint le dispositif d’aide personnelle à l’accession en prévoyant que l’APL accession n’était pas applicable pour les prêts ou contrats de location-accession signés à compter du 1er janvier 2018.

Par exception il a prévu qu’elle restait applicable pour ces prêts et contrats conclus jusqu’au 1er janvier 2020 lorsque le logement est ancien, dans les communes ne se caractérisant pas par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement dans le parc résidentiel existant, c’est-à-dire en zone III ([400]).

Les dispositifs de l’ALF accession et de l’ALS accession ont été éteints au 1er janvier 2018 par le même article 126, sans qu’il soit prévu de disposition spécifique pour la zone III.

2.   Les exceptions introduites pour certains logements en outre-mer par la loi de finances pour 2019

L’article 227 de la loi de finances pour 2019 ([401]) a modifié les articles L. 542‑2 et L. 831-1du code de la sécurité sociale – désormais abrogés – pour rétablir l’ALF et l’ALS en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion pour les prêts permettant d’accéder à la propriété de l’habitation signés avant le 1er janvier 2020 dès lors que l’opération d’accession à la propriété a fait l’objet d’une décision favorable de financement du préfet prise avant le 31 décembre 2018.

De même, il a modifié l’article 10 de l’ordonnance du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte ([402]) et l’article 42-1 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ([403]) pour permettre les mêmes dispositions à Mayotte.

Introduite dans le texte à l’initiative du Gouvernement ([404]), ce dernier a justifié le dispositif devenu l’article 227 de la loi de finances pour 2019 par la « présence importante dun habitat insalubre ou indigne, ainsi que des niveaux de revenus significativement plus bas quen métropole ».

Ce dispositif était conçu comme temporaire, dans l’attente du dispositif pérenne d’aide à l’accession proposé par le présent article.

B.   La nécessité d’augmenter les financements alloués à l’accession sociale et à la lutte contre l’habitat insalubre dans les outre-mer

La situation du logement dans les outre-mer justifie des dispositions particulières pour favoriser l’accès au logement et résorber les problèmes d’insalubrité.

Comme l’indique l’évaluation préalable du présent article, les problèmes d’insalubrité des logements rencontrés dans les outre-mer sont sans commune mesure avec ceux de l’hexagone : 12,5 % du parc de logements dans les outre-mer, soit 110 000 logements, est considéré comme insalubre et indigne, contre 1,2 % dans l’hexagone.

Ce constat a conduit le Gouvernement et les collectivités territoriales à engager plusieurs projets de résorption de l’insalubrité des logements, dans le cadre en particulier du plan logement outre-mer 2015-2020 ou encore du partenariat liant le ministère des outre-mer, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et l’Agence nationale pour l’habitat (ANAH).

Il n’existe toutefois pas de dispositif spécifique pour accompagner les locataires qui désirent quitter un logement insalubre en accédant à la propriété ou qui améliorent le logement dont ils sont propriétaires.

II.   Le droit proposÉ

A.   La création d’une aide à l’accession sociale et à la sortie de l’insalubrité spécifique aux outre-mer

● Le présent article ouvre la possibilité à l’État d’accorder une aide à l’accession sociale et à la sortie de l’insalubrité en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

● Elle est destinée à prendre en charge les dépenses assimilées au loyer visées à l’article L. 823-3 du CCH, c’est-à-dire :

– les mensualités acquittées au titre des charges de remboursement des prêts contractés pour l’acquisition du logement ou son amélioration ;

– la redevance payée par l’accédant au vendeur jusqu’à la date de levée de l’option du contrat de location-accession ;

– la rémunération d’un opérateur de maîtrise d’ouvrage de travaux dans le cas où la copropriété est mise sous administration provisoire lorsque sa situation financière ne lui permet pas de réaliser les travaux nécessaires à la mise en sécurité de l’immeuble ;

– l’indemnité d’occupation versée en cas d’expropriation selon la procédure prévue à l’article L. 615-9 du CCH ;

– la redevance pour servitude que les copropriétaires sont tenus de verser à un opérateur auquel une commune ou un établissement public de coopération intercommunale a confié l’entretien de parties communes de copropriétés d’immeubles qu’elle a expropriées ;

– l’indemnité représentative de mise à disposition des pièces réservées à toute personne accueillie au domicile par un accueillant familial.

● Elle est ouverte aux personnes éligibles à une aide personnelle au logement selon les critères mentionnés à l’article L. 822-2 du CCH qui accèdent à la propriété d’un local à usage exclusif d’habitation et constituant leur résidence principale à compter du 1er janvier 2020 ou qui améliorent ce local.

Il est renvoyé à un décret le soin de préciser les conditions dans lesquelles cette aide peut être accordée. Ces conditions devront être fixées « par référence » aux dispositions de la partie législative du CCH relatives aux aides personnelles au logement. Autrement dit, le cadre de distribution de la future aide devra s’inspirer de celui des aides personnelles au logement.

D’après les éléments transmis par le Gouvernement au Rapporteur général, toutes les personnes éligibles à l’une des aides personnelles au logement dans les territoires concernés seront éligibles à cette aide. Il ne sera toutefois pas possible de cumuler l’AL accession – qui reste mobilisable pour les prêts signés avant le 31 décembre 2019 – et le nouveau dispositif.

● Il est enfin précisé que les dispositions de l’article entrent en vigueur au 1er janvier 2020.

B.   L’impact économique et budgétaire

Selon l’évaluation préalable, la création de cette aide devrait avoir un impact positif sur le secteur de la construction privée.

Elle sera financée par la mission Cohésion des territoires pour un coût d’environ 2,2 millions deuros par an.

D’après les éléments transmis au Rapporteur général par le Gouvernement, le flux annuel de nouvelles opérations ouvrant droit à l’AL accession dans les outre-mer était de l’ordre de 1 000 dont :

– 500 opérations d’accession à des logements évolutifs sociaux bénéficiant d’aides à la pierre financées par la mission Outre-mer ;

– 200 opérations d’accession autres que pour des logements évolutifs sociaux, sans bénéfice d’aides à la pierre ;

– 300 opérations d’amélioration.

L’aide mise en place par le présent article concernera à peu près le même nombre de bénéficiaires.

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*     *

La commission adopte larticle 72 sans modification.


Après l’article 72

La commission est saisie de lamendement II-CF78 de M. Fabrice Brun.

M. Dino Cinieri. Il s’agit de permettre le financement du plan de reboisement et du plan d’opération agricole captant du CO2 en attribuant une partie de la taxe payée par les émetteurs.

M. Joël Giraud, rapporteur général. En première partie, nous avons voté la suppression du CAS Transition énergétique en 2021. Cet amendement risque fort d’être un coup d’épée dans l’eau. Avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. L’idée générale est pourtant de reverser une partie du produit au fonds stratégique de la forêt et du bois.

La commission rejette lamendement II-CF78.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF975 de Mme Véronique Louwagie et II-CF924 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet amendement vise à accorder aux collectivités une franchise de TGAP correspondant à la part de déchets résiduels inévitables. Le volume de déchets sur lequel cette franchise serait appliquée sera établi par décret tous les deux ans, de manière évolutive, afin de tenir compte des nouvelles filières de recyclage.

Cette mesure est facile à mettre en place pour les exploitants et à contrôler par les douanes. Elle a également le mérite de maintenir le signal prix voulu par le Gouvernement sur l’élimination des déchets, qui justifie l’augmentation de la TGAP.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable aux deux amendements. Je continue de penser qu’il s’agit d’une taxe comportementale qui vise à orienter les comportements en direction des méthodes de valorisation les plus vertueuses, dans le respect de la hiérarchie des déchets.

La commission rejette successivement les amendements II-CF975 et II-CF924.

Elle en vient à lexamen de lamendement II-CF956 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Nous avons déjà eu l’occasion de débattre de la fameuse taxe camping-car. Le statut fiscal que nous réclamons pour la Corse vise à compenser les surcoûts, à améliorer la situation sociale, mais aussi à aménager le territoire. Nous souhaitons mettre un peu d’ordre dans le trafic annuel des 30 000 camping-cars, dont beaucoup stationnent n’importe où, avec les conséquences environnementales que l’on sait. Les personnes qui ont un comportement sain et choisissent les zones aménagées seront remboursées, les autres auront acheté une sorte de droit à s’installer où bon leur semble et à faire de la Corse leur Far‑West. J’ajoute que l’Assemblée de Corse a adopté cette taxe à l’unanimité.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il y a risque de rupture d’égalité dans la mesure où les propriétaires corses qui ont acheté leur camping-car chez un concessionnaire de l’île seront exemptés. En outre, vous liez le niveau de taxation au niveau d’émission de CO2. Il semble que le poids du véhicule soit le vecteur pertinent, dans la mesure où il s’agit de taxer l’utilisation et la détérioration des routes. Avis défavorable.

M. Michel Castellani. Ce qui est valable pour les uns est valable pour les autres. Tout le monde sera contrôlé et il n’y a pas de rupture d’égalité.

Mme Christine Pires Beaune. Monsieur le rapporteur général, seriez-vous favorable à cet amendement s’il concernait l’ensemble du territoire ? Nous avions déposé un amendement instaurant une écotaxe sur les camping-cars au PLF pour 2018, car ce qui est vrai pour la Corse l’est aussi pour les communes françaises très touristiques.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il est certain qu’alors, au moins, il n’y aurait plus de rupture d’égalité !

M. Charles de Courson. Nous avons le même problème sur le lac du Der, dont les rives sont fréquentées par des centaines de camping-cars. Nous avons construit des parkings dédiés, le prix de la place a été fixé à 7 euros la nuit. Il n’y a pas de rupture d’égalité et ce n’est pas une taxe, mais une rémunération de service rendu.

M. le président Éric Woerth. Il est vrai qu’une telle taxe doit concerner tout le monde, ou personne.

La commission rejette lamendement II-CF956.

Elle en vient à lexamen de lamendement II-CF971 de Mme Véronique Louwagie.

M. Dino Cinieri. Afin de pouvoir créer les conditions d’un débat apaisé sur la fiscalité écologique, et d’éviter les accusations d’incohérence et de manque de transparence, cet amendement vise à créer une loi de programmation de la fiscalité écologique. Cette loi viserait à refonder les règles de la fiscalité écologique, et ainsi à créer les règles d’une fiscalité écologique plus juste, plus efficace, plus incitative que punitive, et plus cohérente.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il me semble judicieux d’attendre les résultats de la Convention citoyenne sur le climat, de laquelle pourront émerger des décisions similaires. Au-delà, il existe déjà des lois de programmation en matière écologique, je pense notamment à la loi de transition énergétique sur la croissance verte, accompagnée par des plans d’actions. Je pense également aux programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE), qui pilotent la politique énergétique.

La commission rejette lamendement II-CF971.

Elle examine ensuite les amendements identiques II-CF973 de Mme Véronique Louwagie et II-CF1044 de M. Bertrand Pancher.

M. Dino Cinieri. Le présent amendement propose de doter les EPCI et les régions ayant conclu certains documents de planification, comme le leur demande la loi, d’une partie des recettes générées par l’augmentation de la fiscalité sur le carbone. Cette dotation donnerait droit à un versement de 10 euros par habitant aux EPCI ayant adopté un PCAET, ou de 5 euros par habitant aux régions ayant adopté un SRCAE ou un SRADDET. Son versement pourrait être conditionné par des engagements concrets des collectivités bénéficiaires sur leurs actions en faveur de la transition énergétique. Cette mesure a été adoptée à deux reprises par le Sénat en 2016 et 2017.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cette mesure a déjà été déposée et rejetée à de nombreuses reprises. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF973 et II-CF1044.

Elle examine ensuite les amendements identiques II-CF929 de Mme MarieChristine Dalloz et II-CF1045 de M. Bertrand Pancher.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement vise à apporter de la cohérence dans l’élaboration du plan énergie climat. En effet, l’élaboration d’un plan ou d’un schéma coûte environ un euro par habitant ; son application, à l’échelle d’un territoire, coûte de 100 à 200 euros par habitant. L’amendement a pour ambition de prendre une partie de la TICPE pour aider les collectivités territoriales à mener à bien ces programmations. Afin de disposer de véritables moyens, nous ne pouvons pas nous contenter de vœux pieux, nous devons fournir un accompagnement budgétaire.

M. Michel Castellani. L’amendement II-CF1045 est identique.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ces amendements ont d’ores et déjà été rejetés dans le cadre de la première partie de la loi de finance. Le niveau de soutien demandé à raison de dix euros par habitant me semble excessif. À titre de comparaison, je rappelle que la dotation d’intercommunalité par habitant s’élève à quinze euros ; par ailleurs, les régions reçoivent soixante euros par habitant en matière de TVA.

Vous souhaitez mobiliser 700 millions : j’y suis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF929 et II-CF1045.

Elle examine lamendement II-CF282 de M. Fabrice Brun.

M. Dino Cinieri. Entre le budget actuel de l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), d’un montant de 2,5 milliards d’euros, et le budget visé, d’un montant de 3 milliards d’euros, 500 millions d’euros font défaut. La TICPE dégage une recette très élevée. L’amendement vise à orienter 500 millions d’euros issus de la TICPE vers l’AFITF.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Défavorable. Ce débat a déjà eu lieu et je vous rappelle que les 3 milliards prévus pour l’AFITF figurent dans le PLF 2020, par le biais de l’affectation de trois taxes. Il me semble inutile de complexifier davantage une situation qui n’est déjà pas simple.

La commission rejette lamendement II-CF282.

Elle examine lamendement II-CF689 de M. Fabrice Brun.

M. Dino Cinieri. Il est essentiel que le doublement du fonds chaleur permette d’améliorer le niveau de soutien apporté à chaque projet de réseau de chaleur renouvelable, afin de leur donner une rentabilité suffisante pour attirer les investisseurs. L’amendement entrerait en application à compter de 2021.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le débat a déjà eu lieu dans le cadre de la première partie du PLF. Défavorable pour les mêmes raisons.

M. Laurent Saint-Martin. D’un point de vue strictement méthodologique, comment se fait-il que ces amendements soient à nouveau débattus, alors qu’ils ont été traités par ailleurs ? Ces discussions manquent d’efficacité.

M. le président Éric Woerth. Il ne s’agit pas d’un simple problème d’efficacité, mais d’un problème de droit : il est possible de déposer des amendements de nature identique qui s’appliquent sur des années différentes.

M. Laurent Saint-Martin. Il y a matière à mener une réflexion à ce sujet. Ainsi, le financement de l’AFITF a déjà été largement débattu.

M. le président Éric Woerth. Certes, mais il s’agit là du financement de l’AFITF en 2021. Le rapporteur lui-même avait appelé à déposer des amendements dans le cadre de la seconde partie de la loi de finances, car s’ils étaient rejetés s’agissant de l’année à venir, ils pouvaient néanmoins faire l’objet d’un examen pour les années suivantes.

La commission rejette lamendement II-CF689.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement IICF1062 de M. Fabrice Brun.

Elle examine lamendement II-CF1413 de M. Olivier Faure.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement avait déjà été défendu par Olivier Faure l’année dernière. Le Président de la République s’est engagé à ce que l’aide publique au développement (APD) soit égale à 0,55 % du revenu national brut (RNB) à la fin de son mandat. Elle en représente aujourd’hui 0,43 %. En 2020, la taxe sur les transactions financières rapportera un peu plus de 1,6 milliard d’euros, dont 528 millions seront affectés à l’APD. L’amendement prévoit en 2021 une accélération indispensable pour respecter l’engagement pris par le Président de la République et réitéré à maintes reprises.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le débat relatif au financement de l’APD a déjà eu lieu. Dans le cadre de la première partie de la loi de finances, l’article 27 et les plafonds de taxes affectées ont été discutés en commission et en séance. Lors de la discussion relative à la seconde partie, un débat relatif aux crédits en commission et en séance a concerné la mission APD. Le Gouvernement a réaffirmé l’objectif de 0,55 % du RNB. Avis défavorable.

M. Michel Castellani. L’amendement soulève la question très importante de la responsabilité des pays du Nord quant aux poches de misère grandissantes dans les pays du Sud. Cette question s’intègre dans le débat relatif à la politique migratoire. En effet, nous ne réglerons pas les questions migratoires sur le fond sans élaborer une difficile politique de codéveloppement. Nous sommes favorables à cet amendement.

La commission rejette lamendement II-CF1413.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1403 de Mme Sylvie Tolmont.

Elle en vient à lamendement II-CF12 de M. Marc Le Fur

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement concerne les conséquences pour les comptes publics d’une mesure permettant de rendre éligible à un taux réduit de TICPE le biocarburant avancé produit à base de graisses de flottation. Nous souhaiterions disposer d’éléments précis quant au coût que représenterait cette éligibilité. En effet, on peut parler d’écologie, mais il convient de prendre des décisions en fonction de connaissances précises, ainsi que des coûts éventuels. L’amendement, monsieur le rapporteur, n’est ni ambitieux ni coûteux, à tout le moins dans un premier temps.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous souhaitez contraindre le Gouvernement à un énième rapport sur ces mesures. Je rappelle que le biogaz issu du processus de méthanisation, donc potentiellement issu des graisses de flottation – dont je suis devenu un spécialiste par nécessité – bénéficie d’ores et déjà d’un taux de TICPE huit fois inférieur aux carburants traditionnels. Avis défavorable si l’amendement est maintenu.

La commission rejette lamendement II-CF12.

Elle examine lamendement II-CF297 de M. Dominique Potier.

M. Jean-Louis Bricout. Il s’agit d’une demande de rapport sur la taxation de la publicité en faveur des produits alimentaires ayant un effet néfaste pour la santé et l’environnement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Une discussion à ce sujet aurait davantage sa place en séance publique avec le ministre. Par ailleurs, je suis dubitatif quant à la transformation de la fiscalité en un outil hygiéniste. Enfin, une telle taxe pèserait sur le consommateur. Avis défavorable.

Lamendement II-CF297 est retiré.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement II-CF1261 de M. Benoit Simian.

 


II. ‑ Autres mesures

Action extérieure de l’État

Avant l’article 73

Lors de sa réunion du 25 octobre 2019 après-midi, la commission examine lamendement IICF983 de la rapporteure spéciale.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. Le présent amendement demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la possibilité de créer un fonds de garantie, dont le financement reste à déterminer, en cas de défaillance d’une compagnie de transport aérien. Pour l’heure, les voyageurs n’ont aucun moyen de se faire rembourser leur billet, ce qui ne sécurise pas les acteurs du tourisme. Un travail est mené sur ce sujet au niveau européen, mais il conviendrait également que le Gouvernement s’engage à créer un fonds de garantie. Les cas de défaillance que nous avons connus au cours des derniers mois ont montré qu’il nous manquait un outil pour faire face à ce type de situation.

M. Vincent Ledoux, rapporteur spécial. Sagesse.

La commission rejette lamendement II-CF983.

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Administration générale et territoriale de l’État

Article additionnel avant l’article 73
Rapport relatif à la carte délecteur

Lors de sa réunion du 24 octobre 2019 matin, la commission examine lamendement II-CF907 du rapporteur spécial.

M. Jacques Savatier, rapporteur spécial. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport évaluant l’utilité de conserver la carte d’électeur. J’aurais pu également faire des propositions similaires dans d’autres domaines.

En étudiant le PPNG, comme la Cour des comptes est vraisemblablement en train de le faire, je me suis demandé si nous étions parvenus à optimiser la mise en œuvre des moyens alloués aux procédures de délivrance des titres sécurisés. Celles-ci comprennent à la fois un processus de réorganisation des guichets de l’État, une décentralisation auprès des collectivités territoriales et un mouvement très important de dématérialisation.

La réorganisation aurait dû conduire à une transformation importante du dispositif, dont l’efficacité se serait trouvée renforcée. Si je ne suis pas tout à fait convaincu de l’efficacité budgétaire, ni de l’amélioration de la qualité de service aux usagers, j’attends pour me prononcer définitivement sur ce sujet de disposer des évaluations globales des moyens engagés dans cette transformation qui s’est déroulée sur trois ans, ainsi que des éléments consolidés de la Cour des comptes.

Bien que cette transformation n’ait pas été engagée sous ce quinquennat, mais sous le précédent, nous l’avons encouragée et nous pouvons aujourd’hui en tirer les enseignements. On aurait dû réfléchir à la simplification des procédures, mais également se poser la question de l’utilité de certains documents qui, par le fait qu’ils cohabitent désormais avec des procédures dématérialisées, représentent des sources non négligeables de fraudes : la signification du permis de conduire papier, par exemple, n’est plus évidente depuis l’avènement du permis à points. De même, le système d’immatriculation aurait pu évoluer depuis que le nouveau numéro minéralogique est conservé tout au long de la durée de vie de du véhicule. Enfin, la carte électorale pourrait être modifiée, notamment du fait de l’existence du répertoire électoral unique, qui permet de s’inscrire dans une nouvelle commune un mois avant l’élection alors que la carte électorale est émise pour l’année.

Cet amendement vise donc à demander au ministère de l’intérieur d’étudier l’opportunité de conserver ces dispositifs, coûteux et potentiellement sources de fraudes, dans un contexte plus dématérialisé. Si l’on veut amener les jeunes électeurs à exercer leur devoir électoral, il n’est pas inutile d’utiliser les bons moyens de les informer des conditions de son exercice. Le ministère pourra alors faire des propositions pour déterminer s’il est opportun de continuer à mettre en œuvre ces dispositifs.

M. le président Éric Woerth. Il faut sans doute y réfléchir. On peut du reste dès à présent voter sans carte d’électeur, après vérification sur le répertoire électoral unique. C’est une bonne idée.

M. Jacques Savatier, rapporteur spécial. Nous nous inscrivons dans une démarche plus large et posons la question pour l’ensemble des titres.

La commission adopte lamendement II-CF907 (amendement II-848).

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Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

Avant l’article 73

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 soir, la commission examine lamendement II-CF263 de M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Cet amendement vise à réparer une injustice concernant la valorisation des pensions militaires d’invalidité (PMI). Beaucoup de retard a été accumulé sur cette question, et les précédentes revalorisations du point PMI qui ont été faites n’ont pas réussi à effacer les pertes de pouvoir d’achat. Ce rapport permettra donc de mesurer le retard du point PMI et de définir les moyens de le combler, avec l’objectif de préparer une prochaine revalorisation, devant s’opérer par la voie réglementaire.

M. Jean-Paul Dufrègne, rapporteur. Je note dans mon rapport la baisse de 53 millions d’euros des crédits consacrés à la PMI, alors qu’aucune mesure de revalorisation n’a été décidée depuis 2018. C’est donc un avis favorable.

La commission rejette lamendement II-CF263.

Mme Marie-Christine Dalloz. Les crédits sur cette mission – et notamment sur le programme 169 – diminuent à la fois en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Je rappelle qu’en crédits de paiement, nous baissons de 5,79 % de l’année 2019 à l’année 2020, et que sur les autorisations d’engagement, nous allons être en 2021 en dessous de la barre des deux milliards. C’est cela, la réalité. Nous avons eu une grande discussion lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances 2020 sur l’absence de demi-part fiscale pour les veuves d’anciens combattants lorsque le mari est décédé sans avoir été bénéficiaire de la retraite du combattant pendant au moins un an. Nous avions l’an dernier abaissé de 75 à 74 ans l’âge à compter duquel la veuve peut en bénéficier, mais il y a cette condition de perception de la retraite d’ancien combattant par le mari décédé.

Reconnaissons que c’est d’une complexité extraordinaire. Lors de la discussion en séance, l’amendement de Régis Juanico a failli être adopté à deux voix près, mais comme le ministre a répondu que nous n’avions pas d’évaluation de son coût budgétaire, cette discussion me permet de demander que le Gouvernement remette un rapport. Nous pouvons faire des calculs, des simulations des cohortes de veuves concernées par le non-bénéfice de cette demi-part. Je pense que le rapport pourrait nous éclairer et nous permettre de discuter de cette mesure.

M. Jean-Paul Dufrègne, rapporteur. Madame Dalloz a été très claire et je souscris totalement à sa demande. Ce sera un avis favorable.

La commission rejette lamendement II-CF576.

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CCF Avances à l’audiovisuel public

Avant l’article 73

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 soir, la commission examine en discussion commune les amendements II-CF563 et II-CF-561 de Mme Sylvie Tolmont.

Mme Sylvie Tolmont. Par l’amendement II-CF563, nous demandons au Gouvernement de remettre un rapport d’information au Parlement sur la situation de l’audiovisuel public dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit plus de 70 millions d’euros de coupe budgétaire pour l’audiovisuel public. France Télévisions prend à son compte la quasi-intégralité des efforts demandés, avec 61 millions d’euros. Suivent Radio France avec 5 millions, Arte France avec 2 millions et enfin, France médias monde et l’INA à hauteur d’un million d’euros chacun. Seul TV5 Monde voit son budget inchangé. Voilà pourquoi nous demandons qu’un rapport soit remis pour nous faire part des intentions du Gouvernement en matière d’audiovisuel public français.

L’amendement II-CF561 est défendu.

Mme Marie-Ange Magne, rapporteure spéciale. Ce sera un avis défavorable, dans la mesure où la situation de l’audiovisuel public français va être profondément modifiée par le projet de loi qui arrive au premier semestre 2020, et que ce projet de loi sera accompagné d’une étude d’impact qui nous donnera de la visibilité sur la situation de l’audiovisuel public.

Mme Émilie Cariou. Je comprends vos préoccupations. Nous avons quand même des efforts budgétaires très importants qui sont demandés à l’audiovisuel public. Évidemment, nous sommes demandeurs d’une étude d’impact. Il y a beaucoup de choses qui bougent, notamment ce que vous avez évoqué sur France Télévisions, des chaînes qui deviennent purement numériques, l’INA qui a une direction très technique avec beaucoup de développements informatiques qui sont assez coûteux et qui font référence dans le monde entier.

Je pense que le projet de loi de réforme de l’audiovisuel public sera l’occasion de creuser tout le sujet, d’avoir la vision exacte du ministre de la culture. Je rejoins l’avis de la rapporteure. Je pense qu’il faut attendre la venue de cette loi, mais avec une étude d’impact sérieuse sur le sujet. Nous serons attachés à savoir comment est traité notre audiovisuel public, auquel la France tient.

La commission rejette successivement les amendements II-CF563 et IICF561.

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Cohésion des territoires

Article 73
Prise en charge par « Action Logement » dune partie des contributions des bailleurs sociaux au financement des aides à la pierre

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Cohésion des territoires, qui ont été examinés par la Commission le 24 octobre 2019 soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans les rapports spéciaux relatifs à cette mission et annexés au présent rapport général (M. François Jolivet, rapporteur spécial) ([405]).

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La commission adopte larticle 73 rattaché, sans modification.

Article 74
Renforcement des mesures daccompagnement vers et dans le logement

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Cohésion des territoires, qui ont été examinés par la Commission le 24 octobre 2019 soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. François Jolivet, rapporteur spécial) ([406]).

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La commission adopte larticle 74 rattaché, sans modification.

Article 75
Financement complémentaire du Fonds national daide au logement (FNAL) par Action Logement

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Cohésion des territoires, qui ont été examinés par la Commission le 24 octobre 2019 soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans les rapports spéciaux relatifs à cette mission et annexés au présent rapport général (M. François Jolivet, rapporteurs spéciaux) ([407]).

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La commission adopte larticle 75 rattaché, sans modification.

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Article additionnel après l’article 75
Plancher de reste à charge pour les locataires bénéficiant de lAPL

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF645, IICF644 et II-CF643 de M. François Pupponi, portant article additionnel après larticle 75.

M. François Pupponi. Il n’est pas acceptable, dans un pays comme le nôtre, que des ménages bénéficient d’une gratuité de fait de leur loyer. Je propose donc que les allocataires de l’APL s’acquittent d’une part correspondant à 10, 15 ou 20 % de leur loyer. Certes, cela n’est pas neutre pour leur pouvoir d’achat mais il s’agit là d’une mesure de justice.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Nous avons déjà eu ce débat l’année dernière et je vous ferai la même réponse. En 2015, la Cour des comptes a considéré que cette mécanique serait compliquée à mettre en œuvre pour la CNAF. Depuis, la réduction de loyer de solidarité (RLS) a ajouté un degré de complexité. J’estime moi aussi que les locataires doivent assumer une part de leur loyer, mais j’émettrai un avis défavorable sur ces amendements car je doute de la faisabilité pour la CNAF.

Mme Cendra Motin. Vous avez raison, monsieur Pupponi, c’est, après tout, une mesure de justice, et ce qui est gratuit n’a pas de valeur. Lorsque la Cour des comptes a rendu son avis sur la faisabilité de cette mesure, la contemporénisation des APL n’était alors pas à l’ordre du jour. Et pourtant, nous allons l’instaurer. Je vois là l’occasion d’envoyer un message cohérent.

Mme Nadia Hai. Je ne critique pas le bien-fondé de ces amendements, mais je doute que nous puissions procéder ainsi à un changement du mode de calcul des APL. Il me semble prématuré de prendre position et je ne me prononcerai qu’après avoir entendu la réponse du ministre en séance.

M. François Pupponi. Ces amendements ne visent pas à modifier le calcul des APL. Ils prévoient que leur montant doit être fixé de telle manière que le reste à charge de loyer ne peut être inférieur à 10, 15 ou 20 % du loyer.

Mme Véronique Louwagie. Ces amendements nous renvoient à un autre débat, celui de la participation de tous à l’impôt sur le revenu. Le loyer est une charge de la vie courante et il est important que les allocataires en acquittent une part, ne serait-ce que minime. Les aides et les prestations diverses doivent permettre à tous d’assumer ce reste à charge. Je voterai donc en faveur du premier amendement.

La commission adopte lamendement II-CF645 (amendement II-906).

En conséquence, les amendements II-CF644 et II-CF643 tombent.

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Après l’article 75

Les amendements II-CF827, II-CF828 et II-CF646 de M. François Pupponi sont retirés.

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Article additionnel après l’article 75
Rapport sur les modalités dune gestion différenciée des moyens de la politique de la ville

La commission examine lamendement II-CF642 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Je demande au Gouvernement un rapport sur les modalités d’une gestion différenciée des moyens de la politique de la ville.

Suivant lavis favorable du rapporteur spécial, la commission adopte lamendement II-CF642 (amendement II-907).

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Conseil et contrôle de l’État

Article additionnel après l’article 75
Dispense du paiement préalable à lexercice dun recours devant la commission nationale du contentieux du stationnement payant

Lors de sa réunion du 25 octobre 2019 après-midi, la commission examine les amendements IICF863, IICF864 et IICF865 du rapporteur spécial.

M. Daniel Labaronne, rapporteur spécial. La Commission nationale du contentieux du stationnement payant (CCSP), installée à Limoges, a été créée à la suite de la réforme du stationnement payant mise en œuvre à partir du 1er janvier 2018. Elle était conçue pour absorber 100 000 contentieux. Ce chiffre a été largement dépassé. Or, certains contentieux reviennent de manière récurrente devant cette instance qui fait très largement droit aux automobilistes faisant appel. Le problème est que, pour faire appel, il faut avoir payé au préalable l’amende, dont le montant peut être élevé.

Les amendements que je vous propose visent à exonérer de ce paiement préalable trois catégories d’automobilistes : les personnes victimes d’un vol ou de la destruction de leur véhicule ou d’une usurpation de la plaque d’immatriculation – amendement II-CF863 ; les personnes ayant cédé leur véhicule sans que le changement de propriétaire ait été pris en compte du fait d’un dysfonctionnement du système d’immatriculation des véhicules – amendement II‑CF864 ; enfin les personnes en situation de handicap dont le macaron apposé sur le pare-brise n’a pas été pris en compte par les systèmes de lecture automatisée – amendement II‑CF865.

Mme Olivia Grégoire, présidente. Je dois dire que j’ai une tendresse particulière pour l’amendement concernant les personnes en situation de handicap. Je sais d’expérience que ces problèmes d’amendes sont une véritable plaie pour elles.

M. Jean-Paul Dufrègne. Ce sont de bons amendements ! Et quand la majorité propose de bons amendements, nous les votons.

Mme Sabine Rubin. La réciproque serait sympathique !

M. Alexandre Holroyd. Oui, mais nous attendons toujours vos bons amendements !

La commission adopte successivement les amendements IICF863, IICF864 et IICF865 (amendement II-903).

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Défense

Après l’article 75

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 soir, la commission examine lamendement II-CF970 de la commission de la défense.

Mme Lise Magnier. Je vous rappelle que la LPM précédente a organisé beaucoup d’opérations de restructuration des sites de défense, qui ont eu des conséquences non négligeables pour un certain nombre de territoires.

Si je prends l’exemple de ma circonscription de la Marne, à Châlons-en-Champagne, les opérations de restructuration représentent 1 200 emplois militaires supprimés pour une ville de 47 000 habitants et 130 hectares de friches militaires laissées par l’État. Pour accompagner les territoires qui ont été particulièrement impactés, la loi de finances pour 2015 prévoit un dispositif permettant la cession à l’euro symbolique de ces friches militaires jusqu’en 2021.

Cet amendement vise à repousser cette date à 2024, afin de permettre aux collectivités territoriales de s’organiser et de trouver des porteurs de projets économiques pour reconquérir ces friches.

Je précise que cet amendement ne représente pas une charge supplémentaire pour l’État. En effet, si ces friches devaient être vendues au prix normal du marché ou au prix fixé par le service des domaines, elles seraient tout simplement invendables et resteraient ad vitam æternam à la charge de l’État, avec l’ensemble des frais de gardiennage, de sécurisation, etc. Tel est l’objet de cet amendement qui a été adopté tout à l’heure à l’unanimité par la commission de la Défense.

M. Olivier Gaillard, rapporteur spécial. J’entends bien votre volonté d’assouplir la condition de cession des immeubles à l’euro symbolique. Il serait cependant nécessaire d’avoir une étude d’impact pour savoir quels seraient les immeubles concernés. En l’état, je vous invite plutôt à retirer l’amendement et à saisir le ministère du sujet. À défaut, j’émets un avis défavorable.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur spécial. Je n’ai pas tout à fait le même avis. Je suis issu des mêmes territoires que madame Magnier et je sais que les porteurs de projet ne s’y précipitent pas. La cession à l’euro ne représente pas un manque à gagner pour le ministère, il n’y a pas d’effet négatif sur le budget des armées. Les cessions ont pu se faire dans les territoires riches. Dans les territoires moins riches, nous sommes pénalisés par cette règle. Pour moi, il n’y a pas de danger à adopter cet amendement comme l’a fait la commission de la Défense.

Mme Lise Magnier. Il y a d’autant moins d’impact budgétaire que lorsque l’État cède ces friches militaires à l’euro symbolique, il se défait de ses obligations de dépollution. Si je prends l’exemple de mon territoire, nous avons repris 30 hectares sur les 130 libérés depuis 2015. Si demain l’État devait dépolluer ces terrains, cela lui coûterait énormément d’argent avant de pouvoir les céder dans le cadre d’une vente normale. La disposition est donc source d’économie pour l’État.

Il s’agit aussi de poursuivre l’accompagnement des territoires. Dans un bassin économique du Grand Est, avec une démographie en déclin, vous imaginez bien que ce n’est pas simple de trouver des porteurs de projets économiques. Évidemment, les collectivités territoriales ne reprennent pas des terrains à l’euro symbolique tant qu’elles n’ont pas de porteurs de projets qui sont en capacité de les reprendre.

J’ajoute que la longueur des procédures de reprise de ces friches nous pénalise beaucoup, alors que nous avons des projets importants.

Je n’ai pas expliqué le deuxième aspect de mon amendement. Dans certains territoires, la cession à l’euro symbolique était conditionnée à la cession au profit d’organismes logeurs. L’amendement prévoit de lever cette clause pour les territoires qui sont concernés, parce que l’État se rend compte que dans ces bassins de vie, il n’y a pas tant besoin de logements que cela. De ce fait, les bailleurs n’ont pas repris non plus les friches militaires.

Nous proposons donc de lever cette clause d’obligation de cession à l’euro symbolique au profit de certains organismes, parce qu’il s’agit de bassins où la demande de logement n’est pas en tension. L’amendement a ainsi un double impact qui me semble important pour les territoires concernés par ces dispositifs d’accompagnement.

La commission rejette lamendement II-CF970.

La commission en vient à lamendement II-CF256 de M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Cet amendement a pour objectif de demander un rapport d’information qui détaille en quoi le PLF inscrit dans les faits la coopération européenne et en quoi cette dernière participe pleinement à la stratégie française d’autonomie, dans un contexte de montée des risques internationaux. Si la capacité de la France à entraîner ses partenaires européens vers plus de convergence dépend étroitement de l’ampleur et de la qualité de son propre effort de défense, notamment en bouchant ses « trous » capacitaires, la coopération européenne doit désormais être pleinement intégrée dans la stratégie de défense nationale. Nous donnons deux exemples : un dans le secteur de l’industrie et un dans le secteur de la recherche et du développement.

M. Olivier Gaillard, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement qui avait été déjà déposé pour le PLF 2019. Il avait été rejeté dans la mesure où, aujourd’hui, nous ne manquons pas d’informations sur les projets de coopération en cours. Avis défavorable.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur spécial. Cet amendement m’étonne. Le Gouvernement nous remettra forcément des rapports qui concluront que tout va très bien. C’est au Parlement d’examiner comment fonctionnent les coopérations européennes. Je crois vraiment que monsieur Pueyo se trompe de destinataire. C’est à nous de faire ce travail. Le Gouvernement ne nous apprendra pas grand-chose. On nous a dit pendant des années que la coopération pour l’A400M se passait très bien, alors que cela se passait très mal. C’est le Parlement qui peut dire si cela se passe mal. Sur les futurs programmes, je pense que cela sera pareil. Nous trouverons dans ces rapports des éléments de langage, mais aucune information.

M. Joaquim Pueyo. Il est également important que les parlementaires soient très bien informés, avec beaucoup de précision. Le rôle de contrôle du Parlement consiste également à demander des rapports. Si nous avions la possibilité de les faire nous-mêmes, nous le ferions, mais cela ne va pas de soi.

La commission rejette lamendement II-CF256.

Elle passe à lamendement II-CF257 de M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Il s’agit d’un amendement qui tend à évaluer la politique d’équipement de la France, notamment ses coûts, par comparaison avec nos alliés européens au sein de l’OTAN. Il devient indispensable, étant donné l’augmentation substantielle des crédits décidés par la LPM, de contrôler la bonne utilisation des deniers publics et l’efficacité de la dépense en direction des groupes industriels partenaires du ministère.

Il semblerait que des marges de manœuvre existent. La question est donc de savoir si les contrats d’équipements initiaux ne sont pas surévalués, par rapport aux prix pratiqués pour des matériels de même gamme dans des pays alliés. Je pense que c’est une étude qui peut être très intéressante.

M. Olivier Gaillard, rapporteur spécial. À mon avis, la remise d’un rapport gouvernemental n’est pas la meilleure méthode à adopter. C’est aux députés qu’il appartient de contrôler et d’évaluer. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF257.

Elle examine ensuite lamendement II-CF258 de M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Il s’agit d’un amendement qui demande un rapport ayant pour objectif de proposer des améliorations quant à la coordination logistique entre l’emploi des personnels et l’utilisation des matériels, compte tenu des contraintes existantes au sein des armées.

Il établira notamment les causalités entre d’une part, les indisponibilités des matériels liées au maintien en condition opérationnelle et, d’autre part, le taux d’occupation des personnels lié à l’augmentation du nombre de missions réalisées et aux heures de formation programmées.

M. Olivier Gaillard, rapporteur spécial. Ce sujet est au cœur de la LPM. Au travers du suivi d’exécution des programmes, ainsi que des différentes auditions auxquelles nous participons toutes et tous, nous avons déjà accès à beaucoup d’informations. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF258.

Elle examine enfin lamendement II-CF680 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je suis très impressionné d’aborder devant des stratèges financiers la question de l’indépendance stratégique. Mais le fait qu’il s’agisse d’un rapport me désinhibe : cela ne vous coûtera pas trop cher, vos finances seront épargnées ! Je ne reprendrai pas l’exposé sommaire, me contentant de quelques observations pour faire un peu votre éducation.

Tout d’abord, il n’y a pas d’autonomie de communication radio sur les avions Rafale français, qui sont directement reliés à l’état-major de l’OTAN, y compris dans la définition des cibles. Ensuite, les catapultes propulsant les avions embarqués sur le Charles-de-Gaulle sont de fabrication américaine. Les États-Unis ont même dit qu’ils n’en assureraient plus la maintenance si nous ne soutenions pas l’intervention en Irak. Je rappelle aussi que le contrat dotant l’armée de fusils allemands en remplacement des Famas est assorti d’une clause de maintenance de 30 ans. Naval Group produit désormais des petites frégates qui n’intéressent pas la marine française, mais qui sont vendables à l’export. Les États-Unis prêtent des drones Reaper, et les techniciens qui vont avec, pour illuminer les cibles de l’aviation française dans ses bombardements au Sahel depuis Niamey…

Cette démonstration fulgurante vous aura certainement convaincus : nous avons besoin d’un rapport pour essayer de définir ce que coûterait le rétablissement de l’indépendance stratégique de la France.

M. Olivier Gaillard, rapporteur spécial. Cet amendement, que nous connaissons déjà, vise surtout à marquer votre désaccord avec un principe fondamental de l’autonomie stratégique de la France. Avis défavorable.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur spécial. Il faut s’entendre sur ce que l’on appelle « l’autonomie stratégique ». Il n’y aurait pas de sens à vouloir tout produire comme avant, et cela ne serait même pas vraiment de l’autonomie. Dans certains cas, acheter à l’étranger ne pose pas de problème. En revanche, confier le transport stratégique aux Russes et aux Ukrainiens posait quelques problèmes, comme je l’ai montré dans un rapport d’information. Je ne pense pas que nous puissions tout renationaliser. En revanche, un débat sur les externalisations que nous pratiquons peut-être à tort est nécessaire.

M. André Chassaigne. Notre intention n’est évidemment pas de rétablir l’Armée rouge en France ou de créer des kolkhozes militaires. Il s’agit tout simplement de regagner en indépendance stratégique. Nous avons les mains liées, notamment par rapport aux Américains. Évitons de parler d’indépendance du pays dans ces conditions !

La commission rejette lamendement II-CF680.

 

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Écologie, développement et mobilité durables

Article 76
Reprise par lÉtat de la dette de SNCF Réseau à hauteur de 25 Md€

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables, qui ont été examinés par la Commission le 24 octobre 2019 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (Mme Anne-Laure Cattelot et M. Benoit Simian, rapporteurs spéciaux) ([408]).

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La commission adopte larticle 76 rattaché sans modification.

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Après l’article 76

Lors de sa réunion du 24 octobre 2019 après-midi, la commission examine lamendement II-CF193 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Il s’agit également de lisibilité : si un outil sert un seul objectif, il est plus simple à expliquer aux gens. En l’occurrence, le chèque énergie sert à 99,98 % à régler des factures d’énergie et à 0,02 % à financer des travaux. Par cet amendement, je propose de recentrer le chèque énergie uniquement sur le paiement de factures, de façon à simplifier la présentation de cet outil.

La commission rejette lamendement II-CF193.

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Article additionnel après l’article 76
Remise dun rapport au Parlement sur lopportunité pour lÉtat de créer
une société anonyme à capitaux publics pour la gestion des autoroutes
à la fin des concessions actuelles

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF967 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot et II-CF731 de M. Christophe Bouillon.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Il s’agit d’une demande de rapport au sujet des concessions autoroutières, qui prendront fin entre 2031 et 2036. Les modèles économiques de ces concessions, ainsi que la perte potentielle de recettes pour l’État au terme de celles-ci, sont en effet des problématiques qui doivent être étudiées. Il serait donc opportun que le ministère en charge des transports puisse remettre à la représentation nationale un rapport d’évaluation pour décider ce qu’il conviendrait de faire concernant ces concessions.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II-CF731 va dans le même sens, puisqu’il propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les concessions autoroutières. Une littérature importante est d’ores et déjà disponible sur ce sujet, mais cette demande est un peu particulière, et l’adoption de cet amendement serait pertinente.

M. Benoit Simian, rapporteur spécial (Infrastructures et services de transports et Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par lÉtat, budget annexe Contrôle et exploitation aériens et compte daffectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs). À partir de 2032, les concessions autoroutières parviendront à leur terme. Nous avons abordé le sujet au sein du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), et Jean-Baptiste Djebbari, devenu secrétaire d’État chargé des transports, soutenait la pertinence d’un rapport. Il pourrait être question de 2 milliards d’euros de recettes générées dès 2032, et 11,5 milliards d’ici à 2037. On peut les anticiper en lançant dès maintenant des emprunts sur les grands projets, sachant que ces recettes substantielles pourraient, demain, alimenter l’AFITF.

Nous savons depuis quelques jours que s’agissant de la qualité du réseau routier non concédé, la France est passée de la septième à la dix-huitième place. On voit bien à quel point ce type de financement innovant peut constituer une piste sérieuse pour investir notamment dans la régénération de nos réseaux routiers.

M. Christophe Jerretie. Nous devions nous voir remettre, au mois de juillet, au moment de la discussion de la LOM, un rapport portant sur les 10 000 kilomètres de voirie non concédée, c’est-à-dire sur les routes nationales. Ce rapport est-il paru ? Dans la négative, peut-on demander qu’il nous soit communiqué ?

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Votre mémoire est plus précise que celles des rapporteurs spéciaux ! Je propose que nous en demandions communication afin d’en disposer au moment de l’examen en séance publique.

La commission adopte lamendement II-CF967 (amendement II-896).

En conséquence, lamendement II-CF731 tombe.

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Après l’article 76

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF119 de la commission du développement durable et II-CF387 de M. Loïc Prudhomme.

M. Matthieu Orphelin. L’amendement II-CF119 vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport relatif à la mise en œuvre d’un plan d’investissement pour le climat.

Pour la première fois cette année, grâce à l’adoption d’un amendement de notre collègue Bénédicte Peyrol, un jaune budgétaire a été consacré à la transition écologique. On y constate notamment l’écart de financement existant entre les investissements publics et privés attendus de ce budget 2020 et l’investissement jugé nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale bas carbone (SNBC). Cet écart est d’au moins 15 milliards d’euros pour les prochaines années, la part relevant des investissements publics représentant en gros la moitié de cet investissement ; cet écart aura même tendance à se creuser à partir de 2024, puisqu’il s’élèvera alors à plus de 30 milliards d’euros d’investissements publics et privés.

Le rapport demandé devra identifier des facteurs de réduction de ces écarts à travers un plan d’investissement, et développer une réflexion globale sur les investissements privés et publics à mobiliser pour atteindre les objectifs fixés par la SNBC.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis réservé mais pas opposé à un tel rapport, dans la mesure où son intérêt est réel. Ma crainte est cependant que son contenu soit redondant avec d’autres travaux parus en 2019. Je pense notamment au rapport d’information sur les outils publics encourageant l’investissement privé dans la transition écologique, remis le 30 janvier, au nom de la mission d’évaluation et de contrôle, par nos collègues Bénédicte Peyrol et Christophe Bouillon, ainsi qu’à l’édition 2019 du Panorama des financements climat de l’Institute for climate economics (I4CE). Vous avez vous-même cité le projet de loi de finances pour 2020 et le nouveau jaune budgétaire portant sur la transition écologique – on peut rappeler que l’an dernier il n’était arrivé à l’Assemblée qu’une heure avant le début de l’examen du PLF en séance publique, ce que j’avais déploré, attribuant un carton jaune au Gouvernement.

Je ne suis donc pas opposé à un nouveau rapport, sous réserve que son périmètre se distingue vraiment des rapports précédents. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission pour les deux amendements.

M. Matthieu Orphelin. Le rapport objet de l’amendement est bien complémentaire de tous les travaux qui viennent d’être mentionnés : il porte vraiment sur les solutions permettant de s’engager dans une réduction de l’écart.

M. Jean-Louis Bricout. J’ai envie de soutenir cet amendement, mais je signale également que nous avons des solutions à proposer. Lors de la prochaine niche parlementaire réservée au groupe Socialistes et apparentés, nous allons présenter un dispositif de lutte contre la précarité énergétique consistant en un investissement important sur la base d’un remboursement. La parution d’un tel rapport me paraît donc une bonne chose, surtout s’il est suivi d’effet.

La commission rejette successivement les amendements II-CF119 et II-CF387.

Elle examine ensuite lamendement II-CF580 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Je retire cet amendement, tout en faisant part de mon incompréhension s’agissant du vote de l’amendement II-CF119. Disons plutôt clairement que nous ne ferons pas la transition ! Comment peut-on refuser de prendre cet écart en considération ?

Lamendement II-CF580 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF755 de Mme Émilie Cariou.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis défavorable à cet amendement, dans la mesure où le débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, organisé par la Commission nationale du débat public, vient de prendre fin il y a quelques semaines. Nous sommes dans l’attente du retour sur ses travaux, et l’on ne peut exclure que le rapport réponde aux questions posées par les auteurs de l’amendement.

Par ailleurs, je rappelle que j’ai été l’auteur, en 2013, d’un rapport sur la gestion des matières et déchets radioactifs, qui évoque ces questions. Je ne suis pas certain que le sujet ait profondément changé en six ans.

La commission rejette lamendement II-CF755.

Elle examine ensuite lamendement II-CF792 de Mme Jennifer De Temmerman.

Mme Jennifer De Temmerman. Nous avons fêté, le 24 septembre dernier, les quatre ans de l’Agenda 2030 des Nations unies qui a été adopté par 173 États, dont la France. Quatre jours auparavant, notre pays présentait sa feuille de route pour l’ensemble des ministères en vue de parvenir en 2030 à respecter cet agenda. Ce matin, au Conseil national de la transition écologique, la ministre de la transition écologique et solidaire Élisabeth Borne a été interpellée par plusieurs associations sur l’opportunité d’évaluer le budget de l’État au regard de son impact sur les objectifs de développement durable. L’année dernière, en réaction au mouvement des gilets jaunes, nous avions proposé un budget vert, ce qui constituait certes une avancée mais demeurait insuffisant et revenait surtout à ignorer la réelle demande de nos concitoyens.

Rares sont aujourd’hui les climatosceptiques, mais nombreux sont ceux qui ne veulent pas sacrifier le social et l’économie à l’écologie. Or c’est exactement ce que propose l’Agenda 2030 : s’appuyer sur ces trois piliers et dégager la synergie qui peut les lier afin d’avancer. Il s’agit d’un enjeu de société. Les entreprises, les collectivités locales, les associations sont capables de s’organiser ; serons-nous, nous, politiques, capables de répondre à l’appel de cet agenda ?

L’amendement II-CF792 est cosigné par des membres de différents groupes politiques puisqu’il émane du groupe d’études « Objectifs de développement durable » que je copréside avec Dominique Potier. Il est donc transpartisan et répond à une demande citoyenne. Son examen constitue une belle opportunité de donner une image positive, d’ouverture et d’écoute de notre assemblée, mais également de réconcilier nos concitoyens avec le budget.

Laurent Saint-Martin a tout à l’heure plaidé en faveur du renforcement des liens entre missions. L’Agenda 2030 étudie précisément les synergies entre les différents objectifs sociaux, économiques et environnementaux ; il pourrait donner matière à un jaune budgétaire extrêmement intéressant pour l’année prochaine.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis défavorable à la création d’une nouvelle annexe budgétaire « Objectifs de développement durable et mesures budgétaires », car votre demande devrait être en partie satisfaite par deux rapports attendus prochainement : d’une part, en application d’une disposition de la loi relative à l’énergie et au climat, actuellement soumise au contrôle du Conseil constitutionnel, le PLF 2021 devrait être complété par un rapport sur les incidences positives ou négatives du projet de loi de finances sur le réchauffement climatique, d’autre part, les travaux du Haut Conseil pour le climat recoupent une partie de votre demande. Enfin, l’actuel fascicule budgétaire relatif aux évaluations préalables apporte des éléments d’information utiles dans ce domaine.

Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

Mme Jennifer De Temmerman. Vous venez d’apporter la preuve que cette annexe est nécessaire : le développement durable ne se résume pas à l’écologie et au changement climatique, il inclut aussi le social et l’économie.

M. le président Éric Woerth. En tout cas, un travail important est mené sur cette question, qui conduira à une nouvelle présentation budgétaire dès 2021.

La commission rejette lamendement II-CF792.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF911 de la commission du développement durable et II-CF386 de Mme Mathilde Panot.

M. Adrien Morenas, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF911 vise, d’une part, à geler les réductions d’effectifs de certains opérateurs – le CEREMA, l’OFB, les agences de l’eau, les parcs nationaux et l’ADEME – et, d’autre part, à demander un rapport gouvernemental mettant en regard les missions dévolues à ces opérateurs et les effectifs nécessaires à leur accomplissement.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. L’amendement II-CF386 vise également à demander au Gouvernement un rapport sur les conséquences, en termes de transmission des compétences et des savoir-faire, des baisses d’effectifs du ministère chargé de l’écologie. J’ai suffisamment exprimé, dans mon propos introductif, en dehors de toute logique partisane, mon incompréhension quant à la baisse des effectifs d’opérateurs et d’un ministère agissant dans la sphère écologique et environnementale.

Je conseille à nos collègues de se référer au rapport du ministère publié aujourd’hui même, qui dresse un tableau alarmant de la situation, tant au regard des émissions de gaz à effet de serre que de la qualité des eaux. Dans ce contexte, baisser les effectifs des opérateurs et du ministère me semble aberrant. Je suis bien évidemment favorable à l’amendement de la commission du développement durable, qui propose, en outre, un gel des réductions d’effectifs qui me semble vraiment nécessaire.

Je comprendrais mal que l’on n’adopte pas au moins la demande de rapport introduite par l’amendement II-CF386, en guise de signal de notre préoccupation concernant la situation du ministère.

La commission rejette successivement les amendements II-CF911 et IICF386.

Elle en vient à lamendement II-CF968 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. N’ayant pas le pouvoir d’augmenter les effectifs, je demande aussi un rapport sur les besoins en ETPT de l’Autorité de régulation des transports, ex ARAFER (Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières), au regard des deux nouvelles missions qui lui ont été assignées : la régulation du secteur aérien et celle du réseau de la Régie autonome des transports parisiens (RATP).

La commission rejette lamendement II-CF968.

Puis elle passe à lamendement II-CF984 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. On demande à Voies navigables de France de faire un effort à hauteur de 112 ETPT, alors que cet opérateur commencera prochainement à exécuter un contrat d’objectifs et de performances (COP), qui donnera des résultats assez incroyables. Or une grande partie de ses dépenses de personnel est strictement liée au fonctionnement et à l’exploitation du réseau, c’est-à-dire qu’elles correspondent aux frais structurels. Les fonctions support ne représentent que 25 % de la masse salariale, ce qui est extrêmement vertueux.

Sans préjuger du nombre d’ETPT qui serait nécessaire à Voies navigable de France, je demande un rapport qui permettrait d’évaluer les moyens dont cet opérateur dispose aujourd’hui. La suppression de 112 ETPT va, à mon sens, nuire à sa performance et par conséquent à la trajectoire qui sera prévue par le COP.

La commission rejette lamendement II-CF984.

Elle est ensuite saisie de lamendement II-CF912 de la commission du développement durable.

M. Adrien Morenas, rapporteur pour avis. Il s’agit d’une demande de rapport en vue d’intégrer les investissements hydrauliques dans les contrats de plan État-région, notamment pour ce qui concerne les travaux d’irrigation, en lien avec les investissements réalisés par le Fonds européen agricole pour le développement rural pour ce qui concerne le maillage du territoire.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Je ne doute pas de l’intérêt de cette proposition sur le fond, mais il me semble qu’elle est plus du ressort de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales. Je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer dans le cadre de l’examen en séance publique des articles rattachés à cette mission.

Lamendement II-CF912 est retiré.

La commission examine lamendement II-CF959 de la commission des affaires économiques.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteur pour avis. Il s’agit aussi d’une demande de rapport examinant l’opportunité de renforcer, dans le cadre du futur projet de loi de finances pour 2021, les aides finançant l’assistance à la maîtrise d’ouvrage. On sait, en effet, comme il peut se révéler extrêmement compliqué de réaliser des travaux de rénovation énergétique pour les particuliers, qui ne disposent souvent pas d’expertise technique solide en la matière.

Pour pouvoir déposer des amendements relatifs à la nouvelle prime résultant de la transformation du CITE, il faut que nous disposions d’un rapport dressant un état des lieux, faute de quoi on nous opposera l’absence d’étude d’impact les accompagnant.

Je précise que cet amendement a été adopté par la commission des affaires économiques.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Les auteurs de cet amendement gagneraient à préciser, en vue de la séance publique, en quoi l’assistance à la maîtrise d’ouvrage souhaitée diffèrerait du Service d’accompagnement pour la rénovation énergétique (SARE), dont le Gouvernement a annoncé le lancement prochain. Selon un arrêté publié le 5 septembre 2019, ce service vise à aider et à conseiller les particuliers en matière de travaux de rénovation énergétique. Il bénéficie d’un financement à hauteur de 200 millions d’euros par le recours aux certificats d’économie d’énergie (CEE).

Une première lecture de l’amendement me donne à penser que le rapport demandé recoupe ce programme ; j’invite donc à son retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette lamendement II-CF959.

Elle examine ensuite lamendement II-CF969 de la rapporteure spéciale Anne-Laure Cattelot.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Je trouve étonnant que des amendements proposant des rapports aient été rejetés, alors qu’il s’agissait de demander au Gouvernement de prendre du recul sur un certain nombre de sujets. Notre commission a une solide culture d’évaluation des politiques publiques, et nous en sommes garants. Il est, par conséquent, dommage que nous n’ayons pas retenu ces propositions – les miennes ou d’autres, peu importe. Demander des comptes sur des trajectoires d’ETPT ne signifie pas forcément qu’il faudra augmenter les effectifs des organismes concernés ; nous demandons par ce biais un état des lieux objectif. Nos pouvoirs de rapporteurs spéciaux nous offrent, bien sûr, la possibilité d’établir de tels états des lieux, mais il est parfois opportun de conduire cette démarche de façon collective.

Par ailleurs, monsieur le président, Christophe Jerretie ayant mis en lumière mon défaut de mémoire s’agissant d’un rapport demandé l’an dernier, le secrétariat de la commission pourrait-il mettre à notre disposition un suivi des rapports demandés au Gouvernement ? Au-delà de chacune de nos thématiques, un tel tableau de suivi me paraît tout à fait pertinent.

M. le président Éric Woerth. C’est tout à fait possible, dans la mesure où le secrétariat de la commission assure d’ores et déjà un tel suivi.

M. Benoît Simian, rapporteur spécial. J’abonde dans le sens de ma collègue Anne-Laure Cattelot. Il est vrai que ce type de rapport constitue un outil d’aide à la décision pour tout rapporteur spécial. Ainsi, s’agissant de l’élargissement des compétences de l’Autorité de régulation des transports au secteur aéroportuaire – ce qui n’est pas rien –, un tel outil nous aurait été utile. Nous y reviendrons donc en séance publique.

Pour ce qui est de l’amendement II-CF969, il s’agit d’une demande de rapport sur l’avancée du plan de déploiement de l’hydrogène. Nous avons tous en mémoire l’annonce, le 1er juin 2018, par le ministre Nicolas Hulot, du plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique. Nous nous souvenons aussi de l’annonce faite sur le même sujet, en juillet de la même année, par le Président de la République devant le Congrès à Versailles.

J’ai moi-même rédigé un rapport, à la suite d’une mission qu’Édouard Philippe m’avait confiée sur le verdissement du parc ferroviaire dans l’objectif de déployer des trains à hydrogène sur le territoire national d’ici à 2022. À l’heure où je vous parle, quinze de ces trains ont été commandés par des régions, sous l’égide de la SNCF. Pour autant, le rapport demandé à travers l’amendement II-CF969 nous serait utile au-delà de l’aspect ferroviaire. Il faut également s’intéresser à la production, au déploiement des stations ainsi qu’au soutien à la filière. Et celle-ci peut concerner aussi la voiture et le vélo.

Nous avons du mal à obtenir des informations de la part du Gouvernement sur ce sujet, dont nous sentons qu’il se heurte à certaines résistances – je parle sous le contrôle de mes collègues de la commission du développement durable. Ce rapport constituerait donc un formidable moyen de savoir où nous en sommes. Les annonces doivent être suivies d’actes, et le sujet est trop important pour nos concitoyens pour le garder sous couvert.

Mme Nadia Hai. Il me semble effectivement justifié de disposer de l’ensemble de ces informations. Madame la rapporteure spéciale, vous avez rappelé qu’il entre dans vos prérogatives de les obtenir de la part du Gouvernement – même si ce n’est pas chose facile.

Le groupe La République en marche ne pourra pas donner une suite favorable à votre amendement. Mieux vaudrait le retirer pour le redéposer en séance publique afin d’entendre le Gouvernement. Ainsi pourrons-nous prendre une décision. Pour l’heure, à titre personnel, je suis défavorable à cet amendement.

Mme Perrine Goulet. Certes, il ne s’agit que de rapports, mais trop de rapports tuent le rapport. Il faut, après, savoir comment les exploiter.

Entre les bleus, les jaunes, les oranges, les analyses et les Voies et moyens qui nous sont communiqués dans le cadre de l’examen de ce projet de loi de finances, nous disposons largement de moyens d’information. Les rapporteurs spéciaux disposent également de prérogatives. Si le besoin se faisait sentir de creuser, par exemple, la totalité des sujets ayant trait à l’écologie, la mission d’évaluation et de contrôle, qui dépend de notre commission, pourrait être sollicitée en vue de mener un travail plus global et une véritable analyse. Demander des rapports un par un ne me semble pas très utile.

Mme Christine Pires Beaune. L’année dernière, j’avais demandé si nous disposions, à la commission, d’un état des lieux de tous les rapports qui doivent être produits. Vous aviez répondu positivement, monsieur le président. Cet état des lieux est-il accessible sous forme d’un tableau en ligne permettant d’identifier chacun d’entre eux, son auteur, sa périodicité et sa date de remise ? Il serait utile d’y avoir accès, y compris pour en éliminer certains, dans la mesure où les effectifs ne vont pas en augmentant.

M. le président Éric Woerth. Les rapports déchaînent bien des passions ! Je sais, pour signer les courriers, que le secrétariat de la commission envoie systématiquement aux rapporteurs spéciaux les rapports de la Cour des comptes ou d’autres autorités publiques, si une disposition législative l’impose – ils sont nombreux. Peut-être devrions-nous, en début de discussion budgétaire, communiquer la liste de l’ensemble des rapports qui ont été demandés en faisant le point sur ceux qui n’ont pas été remis. Du reste, si vous souhaitez, en cours d’année, des informations concernant lesdits rapports, il vous suffit de le demander secrétariat de la commission.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Nous pourrions peut-être plafonner le nombre de rapports par an, ce qui permettrait de mieux les ventiler.

Par ailleurs, l’hydrogène est un sujet très intéressant, mais dans la mesure où il reste aujourd’hui une énergie chère, il devrait être analysé en complément des énergies électriques intermittentes qui ont leur propre coût et que nous subventionnons. La question des infrastructures doit aussi être analysée. La France n’a pas les moyens d’investir dans trois réseaux, l’un dédié au pétrole, l’autre à l’électricité et un autre encore à l’hydrogène. Il serait vraiment intéressant de comparer ce dernier aux autres solutions et de voir comment un minimum d’investissement pourrait offrir à notre système de transport un maximum de flexibilité.

Mme Anne-Laure Cattelot, rapporteure spéciale. Je vous remercie, monsieur le président, d’avoir accédé à ma demande relative au suivi des rapports.

Ceux qui ont été demandés au travers des amendements avaient un caractère prospectif. Il s’agissait d’avoir des projections sur les répercussions, à plafond d’emplois stable, de nouvelles missions confiées à des opérateurs ou de la mise en œuvre de nouvelles politiques publiques. Typiquement, le cas du plan hydrogène, qui a été lancé mais dont l’exécution reste stable, requiert un rapport. Il me semblait qu’il était bon de demander de tels rapports collectivement plutôt qu’individuellement, dans le cadre de nos rapports spéciaux.

En l’espèce, je suis d’accord pour retirer l’amendement II-CF969, car je comprends votre position, madame Hai. Nous le redéposerons sans doute en séance publique afin de provoquer un débat avec la ministre concernée.

Lamendement II-CF969 est retiré.

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CAS Transition énergétique

Après l’article 76

Lors de sa réunion du 24 octobre 2019 après-midi, la commission examine lamendement II-CF194 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Lors du dernier printemps de l’évaluation, j’ai présenté un rapport sur le sujet de l’éolien. J’y avais intégré une étude de la Commission de régulation de l’énergie chiffrant le coût des dépenses de soutien à l’éolien entre 72,7 milliards d’euros et 90 milliards d’euros.

L’éolien, et surtout l’éolien terrestre, coûte cher ; trop cher, à mon sens. Pour limiter ce coût, je propose que le Parlement décide un moratoire sur les aides à l’éolien terrestre à compter du 1er janvier 2020. Les contrats déjà signés seraient honorés, mais plus aucun nouveau contrat ne pourrait bénéficier d’un soutien public. Les représentants de l’éolien terrestre proclament sans cesse que l’énergie éolienne est compétitive. Très bien. Qu’ils le prouvent et que l’éolien terrestre se passe enfin de subventions !

La commission rejette lamendement II-CF194.

Puis elle examine lamendement II-CF198 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Cet amendement propose qu’un exploitant d’éoliennes terrestres ne puisse bénéficier que d’un seul contrat d’achat garanti de l’électricité produite.

À l’heure actuelle, au terme d’un premier contrat de soutien, qui dure de dix à quinze ans, l’exploitant peut postuler à un nouveau contrat de soutien dès lors qu’il a apporté certaines modifications à son installation. Il ne s’agit pas d’un cas d’école, puisque deux sites parvenus au terme de leur premier contrat d’achat ont été sélectionnés pour bénéficier d’un second contrat d’achat.

Cette situation n’est pas satisfaisante au regard de la concurrence puisque les intéressés pourront réutiliser certains aménagements déjà effectués et amortis sur des fonds publics, par exemple des postes électriques ou les routes d’accès aux sites. Surtout, on peut considérer qu’après avoir été soutenu pendant quinze ou vingt ans, un site doit pouvoir se passer de soutien public. En Allemagne, un exploitant éolien ne peut bénéficier que d’un seul contrat d’obligation d’achat.

Je crois raisonnable de s’inspirer de ce qui se fait en Allemagne, pays de l’éolien, en introduisant une règle équivalente dans notre droit.

M. Charles de Courson. L’objectif est-il qu’il n’y ait plus ou quasiment plus d’éolien, c’est-à-dire qu’on se contente de produire 5 % de notre électricité par ce moyen ?

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Non, pas exactement. Ces amendements ne concernent que l’éolien terrestre, à l’exclusion de l’éolien maritime.

M. Charles de Courson. Aujourd’hui, 100 % de la production d’électricité éolienne est terrestre. Il faudra attendre encore un peu avant que l’éolien offshore ne produise de l’électricité.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Premièrement, mon amendement ne concerne pas toute la production éolienne. Deuxièmement, alors que nous ne cessons de chercher à grappiller quelques millions d’euros, que la France engage entre 73 milliards d’euros et 90 milliards pour soutenir une industrie devrait tout de même nous faire réfléchir.

D’autres pays ont limité le soutien qu’ils apportent à cette industrie, en définissant des plafonds budgétaires. J’estime que nous devons aussi limiter notre soutien public si l’on veut avoir des fonds pour financer le logement. La commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l’acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique ne rendra son rapport que fin novembre, mais on sait déjà que certains acteurs de l’éolien terrestre réalisent d’excellentes marges. Grâce à l’argent public versé, ils ont constitué des réserves importantes.

Il s’agit, à l’avenir, de limiter le coût budgétaire de l’éolien terrestre.

M. Charles de Courson. Vous plaidez donc, de manière implicite, en faveur du maintien de la part nucléaire actuelle dans le mix énergétique. Si vous abaissez le soutien public de 73 % à 50 %, comme certains l’ont voté ici, comment comblera-t-on le différentiel ?

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Il n’y a pas que l’éolien terrestre en France ; il y a aussi l’éolien offshore ou encore l’énergie photovoltaïque. En outre, notre problème de décarbonation ne se pose pas dans le domaine de l’électricité, qui ne représente que 20 % de l’énergie. Si on doit avoir une politique écologique de réduction du dioxyde de carbone, c’est bien en dehors de l’électricité qu’il faudra la chercher.

M. Charles de Courson. Il faut donc maintenir la part du nucléaire. C’est une thèse.

M. Jean-Louis Bricout. Il y a un problème d’implantation des projets éoliens, car on observe une sorte de mitage des territoires. Les implantations viennent parfois, en fin de compte, s’opposer à des projets de développement culturel ou touristique. Il faudrait donc plutôt de la régulation. Les retombées fiscales ont pu naguère séduire des communes, mais l’insatisfaction grandit aujourd’hui sur le territoire.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je veux appuyer ce que dit mon collègue Jean-Louis Bricout. Ce qu’il nous faut dans notre pays, c’est un vrai service public de l’énergie. Encore une fois, on a laissé faire le marché au niveau de l’éolien et c’est une véritable catastrophe. Dans le département où je suis élu, il y a des gens qui ne se parlent plus dans les villages, tandis que des pétitions circulent. Des sociétés vont démarcher les élus en leur faisant miroiter la fortune à venir, qui viendra compenser les baisses de dotations. Il faudra penser aussi à la contribution des différents territoires. De la tour Eiffel, je n’ai jamais vu une éolienne. Pourquoi les éoliennes seraient-elles implantées dans des territoires sans qu’ils aient leur mot à dire ? C’est intolérable !

M. le président Éric Woerth. Je vous propose de ne pas rouvrir le débat sur les éoliennes.

La commission rejette lamendement II-CF198.

Puis elle examine lamendement II-CF195 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Cet amendement vise à contraindre le Gouvernement à renégocier une deuxième fois, ou à résilier, les six premiers contrats éoliens en mer attribués entre 2011 et 2013 et très mal renégociés en 2018.

Permettez-moi de vous livrer deux chiffres. Après renégociation, le prix de l’électricité produite par ces six premiers parcs coûtera 144 euros par mégawattheure. Par comparaison, sur le septième parc attribué cette année au large de Dunkerque, ce prix s’élèvera à 44 euros par mégawattheure. À six mois d’intervalle, l’État a consenti un écart de 100 euros. C’est excessif et c’est surtout pénalisant pour nos finances publiques.

Sur vingt ans, le soutien public aux six premiers parcs a été estimé à 22 milliards d’euros par la Commission de régulation de l’énergie, alors que, pour le septième parc, cette même commission a estimé que le soutien public devrait coûter au maximum 540 millions d’euros et pourrait même se traduire par un reversement de 266 millions d’euros au budget de l’État.

En juillet 2019, la Commission européenne a considéré que le niveau de coûts des six premiers parcs est « a priori élevé au regard dautres projets éoliens en mer développés à lheure actuelle avec des technologies plus récentes ». Soyons économes et raisonnables, renégocions ou résilions ces six premiers contrats ! Quand quelqu’un achète une maison à 200 000 euros et que, six mois plus tard, la même maison se vend 100 000 euros, on peut penser qu’on peut en renégocier le prix.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Monsieur Aubert évoque un vrai problème. En Allemagne ou aux Pays-Bas, on met à peu près quatre à cinq ans pour faire naître un projet offshore, alors qu’en France, il faut une quinzaine d’années, du fait de la succession des recours possibles et faute de guichet unique. En outre, l’appel d’offres de départ est figé et ne laisse pas à la technique la possibilité d’évoluer.

La solution ne saurait cependant être de résilier les six projets qui ont déjà été lancés, parce que, dans la situation actuelle, cela voudrait dire qu’il faut recommencer à zéro.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Il s’agit non de résilier, mais de renégocier.

La commission rejette lamendement II-CF195.

Puis elle examine lamendement II-CF196 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Le code de la voirie routière comporte un article L. 122-4 prévoyant un dispositif de modération des tarifs de péages ou de réduction de la durée de la concession lorsque les revenus des péages ou les résultats financiers excèdent les prévisions initiales. La Cour des comptes regrette que ce mécanisme intéressant ne soit pas appliqué comme il le devrait.

Cependant, le principe de ce mécanisme est séduisant et je propose de l’introduire dans le code de l’énergie pour prévenir la constitution de sur-rentabilité dans les contrats soutenant les énergies renouvelables. Aujourd’hui, un contrat de soutien aux énergies renouvelables est conclu pour une durée de quinze à vingt ans. Si des progrès techniques bouleversent la donne en cours de route, la collectivité n’en profite pas. Le titulaire peut donc bénéficier d’une sur-rentabilité indue, ce qui a été le cas pour certains sites éoliens terrestres, selon la Commission de régulation de l’énergie.

Je propose donc d’introduire une forme de garantie permettant à la collectivité soit de ne pas être lésée par un soutien mal défini à l’origine, soit de bénéficier du produit d’une évolution technologique.

La commission rejette lamendement II-CF196.

Elle examine ensuite lamendement II-CF197 du rapporteur spécial Julien Aubert.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je ne renonce pas à faire faire des économies au budget de l’État.

Cet amendement concerne les contrats photovoltaïques antérieurs au moratoire de 2010 et demande au Gouvernement d’étudier les possibilités de résiliation des contrats signés avant ce moratoire de 2010.

Concernant le photovoltaïque, il faut distinguer deux périodes différentes : avant le moratoire de 2010 et après. La période après le moratoire de 2010 n’appelle pas de remarque particulière. Le soutien est bien organisé, il fonctionne et je le soutiens. En revanche, avant le moratoire de 2010, les prix accordés étaient déraisonnables. Le prix d’achat s’établissait ainsi en moyenne à 505 euros le mégawattheure, alors qu’aujourd’hui les prix sont très inférieurs à 100 euros le mégawattheure. Le comité de gestion des charges du service public de l’énergie parle de « bulle spéculative ».

Ces contrats, signés pour vingt ans, représentent une charge de 40 milliards d’euros. Sur ces 40 milliards d’euros, nous en avons payé 15 et 25 milliards d’euros restent à payer. Je crois qu’il nous faut envisager sérieusement de résilier ces contrats, en indemnisant leurs titulaires. Il nous reviendrait moins cher de racheter des installations en les nationalisant que de continuer à ce train. Le nombre de contrats concernés est élevé : 225 000. Il serait bon d’y voir plus clair. Pour cela, je crois que le Gouvernement pourrait commander un rapport à un corps de contrôle, pour identifier les possibilités juridiques et l’intérêt financier de cette démarche.

M. Benoît Simian. Que vous demandiez un rapport, après avoir voté contre notre demande tout à l’heure, c’est le comble ! D’ailleurs, quand on demande un rapport, il ne faut pas forcément imaginer un gros pavé. Sur la question de l’hydrogène tout à l’heure, trois pages auraient pu suffire.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Vous ne pourrez pas financer la voiture électrique, l’hydrogène ou toutes les autres technologies dont vous parlez, plus les 500 000 logements, si 90 milliards d’euros sont gelés parce qu’emportés par la vague d’optimisme de l’époque, nous n’avons pas été capables de conclure des contrats raisonnables.

Là, il y a 25 milliards d’euros à récupérer. Imaginez, si l’on arrivait à renégocier et en récupérer 10, ce que cela signifierait ensuite pour financer l’hydrogène. Rappelez-vous que nous en sommes parfois réduits à rechercher quelques dizaines de millions d’euros. Si le Parlement veut jouer son rôle, il ne peut pas regarder ailleurs. Il y a des lobbies qui profitent de cette situation. Maintenant vous êtes au courant ; que chacun assume ses votes !

La commission rejette lamendement II-CF197.

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Enseignement scolaire

Après l’article 76

Lors de sa réunion du 22 octobre 2019 soir, la commission examine les amendements II-CF243, II-CF244 et II-CF380.

La commission est saisie de lamendement II-CF243 de Mme Michèle Victory.

Mme Michèle Victory. Il s’agit d’une demande de rapport sur la situation des enseignants contractuels. Cette question ne vous semble pas importante, mais elle l’est à nos yeux.

Nous souhaitons connaître la situation des contractuels au sein de l’éducation nationale. Nous savons qu’il reste des maîtres auxiliaires, sans que le ministre n’en connaisse le nombre, qui sont en poste depuis vingt, vingt-cinq ou trente ans. Il faut accorder une reconnaissance réelle aux personnes qui travaillent ; un rapport sur cette question serait bienvenu.

M. le président Éric Woerth. Je n’ai pas voulu dire que je me désintéressais de leur situation, simplement l’on peut exercer un métier de façon contractuelle. Il suffit de hausser le niveau des contractuels. Il n’y a pas d’obligation absolue de travailler sous statut, heureusement.

Mme Catherine Osson, rapporteure spéciale. Tous les contractuels ne sont pas dans une situation précaire, mais il est vrai que certaines situations peuvent être très difficiles. Je vous conseille la lecture du rapport de la Cour des comptes, publié en 2017, sur la gestion des enseignants, et notamment des contractuels. Par ailleurs, certains titulaires craignent que la titularisation des contractuels ne dévalorise le concours. Avis défavorable.

Mme Anne-Laure Cattelot. On oublie souvent que l’exercice en tant que contractuel permet souvent de découvrir un métier. Beaucoup de jeunes qui n’ont pas prévu de passer les concours de l’éducation nationale découvrent plus tard une vocation. La période contractuelle peut être une phase de test du métier. Ainsi, il manque de nombreux enseignants en langues étrangères, et, heureusement, des passionnés de langues étrangères décident de prendre un poste de contractuel.

S’agissant de la revalorisation des contractuels, il m’a été dit qu’un chef d’entreprise dans le bâtiment qui souhaiterait mettre ses compétences et son expérience professionnelle de dix ou quinze ans au service de l’éducation nationale est recruté au bas de l’échelle ; l’expérience privée n’est pas du tout valorisée. Il serait intéressant de valoriser ces partages d’expérience, notamment pour les métiers qui ont pu abîmer le corps du fait des contraintes et de la pénibilité particulière du travail.

M. le président Éric Woerth. Nous avons commandé à la Cour des comptes un rapport sur les heures supplémentaires dans la fonction publique. Nous étudierons l’emploi de ces heures supplémentaires dans l’éducation nationale, les professeurs qui y recourent, ce qui apportera des éléments importants en plus de ceux que nous aurons sur la médecine scolaire.

Mme Sarah El Haïry. J’interviens en réponse à madame Cattelot : si nous souhaitons en finir avec la fracture dans les esprits entre le public et le privé, il serait utile de valoriser toute l’histoire et les compétences de ceux que l’on accueille au sein de l’éducation nationale. On impose à ceux qui arrivent les mêmes contraintes que s’ils venaient de passer le CAPES. Or, s’agissant souvent de jeunes parents, les contraintes de mobilité géographique peuvent devenir un vrai frein. De la sorte, dans certaines filières – je pense en particulier aux professeurs de technologie – les manques sont criants.

La commission rejette lamendement II-CF243.

Puis elle passe à lamendement II-CF244 de Mme Michèle Victory.

Mme Michèle Victory. Il s’agit d’une demande de rapport sur le développement des dispositifs ULIS.

Mme Catherine Osson, rapporteure spéciale. L’accélération de la création des ULIS fait suite à de nombreux rapports documentant les mesures en faveur de l’inclusion scolaire. Je vous conseille, par exemple, la lecture du rapport de notre collègue Sébastien Jumel, rendu en conclusion des travaux de la commission d’enquête sur l’inclusion des élèves handicapés dans l’école et l’université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005. Il consacre des développements aux ULIS. Avis défavorable.

Mme Sabine Rubin. Je connais bien ce rapport et il précise que quatre ou cinq fois plus d’ULIS seraient nécessaires pour les élèves en situation de handicap. Un rapport serait donc utile.

La commission rejette lamendement II-CF244.

Enfin, elle examine lamendement II-CF380 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Cet amendement vient en réponse aux propos de la rapporteure spéciale sur la revalorisation du statut des médecins scolaires et aux questions de nos collègues Michel Lauzzana et Charles de Courson. Il s’agit d’une demande de rapport au Gouvernement sur les missions qu’il convient de confier aux médecins scolaires, et l’opportunité d’apporter des changements à leur statut et leur ministère de tutelle, afin d’optimiser l’évolution de cette profession.

Mme Catherine Osson, rapporteure spéciale. Le Parlement a demandé à la Cour des comptes un rapport sur la médecine scolaire, qui sera rendu au mois d’avril. Je vous propose donc de retirer votre amendement, quitte, si vous n’êtes pas satisfaite à la suite de ce rapport, à le déposer à nouveau l’année prochaine.

M. le président Éric Woerth. Je vous invite à assister à la remise de ce rapport par la Cour des comptes, au printemps prochain.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Ce rapport abordera l’ensemble des questions soulevées par cet amendement ?

M. le président Éric Woerth. Le cahier des charges a déjà été transmis à la Cour des comptes. Je vous en ferai parvenir la lettre de commande.

Lamendement II-CF380 est retiré.

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Immigration, asile et intégration

Article additionnel après l’article 76
Suppression de dispositions caduques du code lentrée et du séjour des étrangers et du droit dasile

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 matin, la commission examine lamendement II-CF45 du rapporteur spécial Jean-Noël Barrot.

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial. Il s’agit de toiletter le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, en supprimant le titre III du livre III, qui contient des articles qui n’ont pas d’application concrète depuis plus de vingt ans.

La commission adopte lamendement II-CF45 (amendement II-731).

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Investissements d’avenir

Après l’article 76

Lors de sa réunion du 25 octobre 2019 après-midi, la commission examine lamendement IICF521 de M. Sébastien Jumel.

M. Jean-Paul Dufrègne. Il est défendu.

Mme Marie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale. Vous demandez un rapport sur le fonds de fonds de retournement (FFR), créé en 2016. Dans le jaune budgétaire relatif à ces questions, vous trouverez l’état d’avancement du projet et ses perspectives. Plutôt que de multiplier les études au fil de l’eau et au cas par cas, il me semblerait plus utile de faire une analyse globale de l’ensemble des projets financés par le PIA, en répondant à un questionnaire complet. Qui finance ? Pourquoi ? Avec quel objectif ? Sur quelle durée ?

Dans la mesure où les conventions avec les opérateurs finaux se multiplient aujourd’hui, il me semble prématuré de demander un rapport. Pour toutes ces raisons, je suis contrainte d’émettre un avis défavorable sur votre amendement.

La commission rejette lamendement II-CF521.

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Justice

Article additionnel après l’article 76
Prolongation de lexpérimentation relative
à la médiation familiale préalable obligatoire

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 matin, la commission examine lamendement IICF908 de la commission des lois.

M. Dimitri Houbron, rapporteur pour avis. L’amendement vise à prolonger d’une année l’expérimentation relative à la tentative de médiation familiale préalable obligatoire, laquelle n’a été réellement lancée qu’en 2018, alors que son terme est prévu pour la fin de l’année 2019. Compte tenu de ses premiers résultats encourageants et de la demande unanimement exprimée par les expérimentateurs, il convient de la prolonger d’une année, afin de pouvoir disposer du recul nécessaire pour tirer les conclusions sur une éventuelle généralisation à toutes les juridictions, avec comme objectif de favoriser la diffusion de la médiation familiale et de diminuer le nombre de saisines contentieuses.

M. Patrick Hetzel, rapporteur spécial. Vous avez raison de vouloir étendre la durée de l’expérimentation, pour toutes les raisons avancées dans votre exposé sommaire. Avis favorable.

La commission adopte lamendement II-CF908 (amendement II-728).

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Outre-mer

Après l’article 76

Lors de sa réunion du 24 octobre 2019 après-midi, la commission examine lamendement II-CF993 du rapporteur pour avis Max Mathiasin.

M. Max Mathiasin, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF993 vise à ce que le Gouvernement dépose un projet de rapport devant le Parlement d’ici à six mois sur les conditions de la formation des prix et la vie chère, après que la mission conjointe de l’inspection des finances et de l’administration sur l’octroi de mer aura rendu ses conclusions.

L’avis n° 19-A-12 concernant le fonctionnement de la concurrence en outre-mer, rendu par l’Autorité de la concurrence le 4 juillet dernier, a mis en évidence que les coûts d’approche avaient un rôle crucial dans le renchérissement de la vie chère. Par coûts d’approche, on entend le fret, mais également les taxes, dont l’octroi de mer qui représente 12 % de ces coûts.

Si l’octroi de mer permet de protéger le développement de la production locale, et doit, à ce titre, être conservé, il importe d’actualiser la modulation de ses taux en fonction des priorités locales. À ce titre, le Gouvernement devra présenter dans son rapport les conclusions de la mission conjointe IGA-IGF qu’il a mandatée à cette fin.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. La problématique de la vie chère en outre-mer est une question centrale et fondamentale, fréquemment évoquée par le Gouvernement et le Président de la République. La délégation des outre-mer de l’Assemblée nationale s’en est saisie et a désigné pas moins de trois co-rapporteurs, à qui nous faisons confiance pour nous éclairer et nous permettre d’aboutir à des solutions concrètes. Dans l’immédiat, nous souhaitons le retrait de cet amendement.

La commission rejette lamendement II-CF993.

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Recherche et enseignement supérieur

Article additionnel après l’article 76
Indicateur de gestion du patrimoine immobilier des universités

Lors de sa réunion du 22 octobre 2019 soir, la commission examine lamendement II-CF354 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. Cet amendement d’appel, que j’ai déposé avec le rapporteur spécial Fabrice Le Vigoureux, est issu des travaux que j’ai menés dans le cadre du printemps de l’évaluation budgétaire sur le patrimoine immobilier des universités. Il vise à demander au Gouvernement un rapport afin de proposer, dans le cadre du prochain projet de loi de finances, un indicateur de performance de gestion conditionnant les subventions publiques à la bonne gestion du parc immobilier des universités. Cet indicateur pourrait reposer sur le ratio entre la gestion du patrimoine immobilier et le niveau de subvention alloué par le budget du ministère.

J’ai pu constater que certains biens de prestige, sous-utilisés et mal exploités, causaient des pertes à certaines universités, les privant de moyens propres que le budget de l’État venait abonder pour assurer l’exercice de leurs missions. Je pense, en particulier, au patrimoine immobilier de la chancellerie des universités de Paris, et notamment aux biens d’apparat sous-exploités qui ne bénéficient que marginalement au public universitaire, que sont le domaine de Richelieu, dont l’équilibre n’est assuré que par la perception de subventions de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC), et la villa Finaly à Florence, cette dernière accusant un déficit de près de 200 000 euros par an.

Ces biens avaient déjà suscité, en 2014, les critiques sévères de la Cour des comptes quant aux frais d’entretien qu’ils généraient et qui grevaient le budget de la chancellerie des universités, alors que celle-ci bénéficie de subventions publiques pour entretenir son patrimoine. De plus, la chancellerie n’a pas été capable de présenter un schéma directeur de stratégie immobilière.

Même si ce sujet recouvre aussi celui de l’acceptation des legs conditionnés, que je suggère d’interdire purement et simplement car ils limitent la valorisation qui peut en être faite, des marges de manœuvre existent néanmoins, sachant qu’une mauvaise gestion, par effet de vases communicants, implique une mauvaise consommation des deniers publics. Cet indicateur permettrait donc de responsabiliser les acteurs sur la gestion de leurs biens de prestige, d’avoir connaissance du taux de bonne gestion et d’inciter les universités à améliorer la gestion de ces biens de prestige.

M. Fabrice Le Vigoureux, rapporteur spécial. Cet amendement va dans le sens d’une diversification des sources de financement en mobilisant au mieux l’actif de nos établissements. Avis favorable.

La commission adopte lamendement II-CF354 portant article additionnel après larticle 76 (amendement II-253).

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CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État

Articles additionnels après l’article 76
Dispositions relatives au patrimoine immobilier
des universités et des ministères

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 matin, la commission examine les amendements II-CF409, II-CF408 et II-CF410 du rapporteur spécial.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. L’amendement II-CF409 est issu des travaux que j’ai menés, dans le cadre du printemps de l’évaluation budgétaire, sur le patrimoine immobilier des universités, et qui ont donné lieu au dépôt d’une proposition de résolution. Il se veut une réponse aux difficultés que j’avais constatées concernant le patrimoine de la chancellerie des universités de Paris. Celui-ci, constitué de biens d’apparat légués à la chancellerie, tels le domaine de Richelieu où la villa Finaly à Florence, très peu utilisés et créant d’importants déficits comblés par des subventions publiques, avait déjà été la cible de sévères critiques de la Cour des comptes en 2014. Ces critiques ont été renouvelées par le Conseil de l’immobilier de l’État en 2015 et en 2018. Cinq ans après le constat de la Cour, la gestion de ces biens pose de façon toujours aussi criante la question de leur devenir et de leur utilité pour les universités parisiennes, sans qu’aucune solution économiquement viable ait encore été trouvée.

Aux termes des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques, la vigilance à l’égard de l’utilité de tels biens relève certes de la responsabilité des établissements eux-mêmes et des autorités de tutelle. Toutefois, compte tenu des risques encourus pour les finances publiques, tenues de combler les déficits et charges ainsi générés – près de 200 000 euros de déficit annuel et plus de 400 000 euros de travaux à financer pour la villa Finaly –, il me semble indispensable de durcir le régime en imposant une nouvelle restriction à la liberté d’acceptation de tels dons et legs. L’amendement II-CF409 vise donc à interdire l’intégration dans le patrimoine des universités de biens immobiliers grevés de charges financières et de restrictions d’utilisation qui limiteraient leur libre usage au bénéfice de l’établissement universitaire concerné.

L’amendement II-CF408 est un amendement d’appel qui vise à ouvrir aux universités la possibilité de recourir aux formes de sociétés publiques ou privées pour la gestion et la valorisation de leur patrimoine immobilier – pistes de réflexion qui doivent être approfondies dans le cadre des trois missions engagées par le Gouvernement sur le sujet.

L’amendement II-CF410 vise, quant à lui, à modifier les règles d’affectation du CAS afin que les ministères occupant le patrimoine immobilier de l’État soient incités à privilégier le mode de valorisation de ce patrimoine le plus avantageux pour l’État, en les intéressant aux gains de gestion réalisés.

M. Charles de Courson. En ce qui concerne le troisième amendement, je pense que des dispositions ont été déjà prises afin d’inciter certains ministères – notamment la défense et les affaires étrangères – à céder des actifs qu’ils n’utilisaient plus. L’idée de notre rapporteur est donc de généraliser ce système. Pourquoi pas ? Au demeurant, l’amendement II-CF410 n’est pas très impératif puisqu’il renvoie à un arrêté ministériel le soin de fixer le taux, dans la limite de 50 %.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. Par dérogation à la règle d’affectation du CAS, je propose en effet, à travers cet amendement, lorsque l’octroi de droits à caractère immobilier sur un immeuble de l’État apparaît susceptible de dégager un produit supérieur à celui de son éventuelle cession, que seuls 50 % des recettes tirées de ces droits soient inscrits au compte d’affectation spéciale. Des crédits supplémentaires correspondant à 50 % du produit de ces droits peuvent être ouverts, par arrêté du ministre chargé des finances, au bénéfice du programme assurant le financement des dépenses immobilières du service administratif ou de l’établissement public auquel l’immeuble était précédemment affecté. Je prévois également un décret précisant les modalités d’application de l’article.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il est surprenant d’inscrire à la fin de l’alinéa que le produit d’une cession doit tenir compte des prix enregistrés lors du paiement des droits de mutation dans la même commune ou le même arrondissement au cours des deux années précédant l’opération.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. Il s’agit seulement d’une précision, pour que l’intention du législateur soit claire. Sont visés les prix constatés soit de la commune, soit dans l’arrondissement dans le cas de Paris, Lyon et Marseille.

M. Charles de Courson. L’amendement II-CF408 est un amendement « anti-châteaux », si je comprends bien ! Il s’agit d’éviter l’acceptation de donations entraînant des charges telles qu’elles risquent de ruiner l’établissement bénéficiaire.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. On a constaté, notamment pour le domaine de Richelieu, que certaines contraintes liées à l’acte de donation en limitent l’utilisation. Cela pose un réel problème ! Le domaine pourrait accueillir de nombreux projets, de campus universitaire ou d’animations, notamment sportives. L’objectif est d’éviter qu’à long terme une donation ou un legs ne se révèle un piège. Il s’agit donc d’inciter les personnes prêtes à faire ces dons ou legs à ne pas les assortir de trop de limites. En tant qu’élu local, j’ai souvent refusé des donations à ma commune qui auraient entraîné trop de contraintes.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur spécial, étant notaire de profession, vous savez qu’il est possible de se faire relever d’une partie des charges par une décision du tribunal de grande instance.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. Vous avez raison, mais ce n’est pas aussi évident : cela peut donner lieu à des contestations, notamment de la part d’héritiers, visant à remettre en cause le don ou le legs. De ce fait, les services hésitent souvent à entamer la démarche. J’ai bien conscience que ma proposition peut constituer une limitation dans les dons et legs, mais il s’agit de sécuriser les bénéficiaires quant à leur capacité de les recevoir.

La commission adopte successivement les amendements II-CF409 (amendement II-899), II-CF408 (amendement II-901) et II-CF410 (amendement II-902).

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Relations avec les collectivités territoriales

Article 77
Décalage de la date dentrée en vigueur de lautomatisation du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la Commission le 24 octobre 2019 matin.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (MM. Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([409]).

La commission examine les amendements identiques II-CF650 de M. François Pupponi et II-CF799 de Mme Christine Pires Beaune.

M. François Pupponi. L’amendement II-CF650 demande un rapport sur l’impact des restrictions d’assiette d’éligibilité du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), avant le 30 septembre 2020, pour bien comprendre les conséquences de cette réforme.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II-CF799 demande aussi un rapport à la suite de la mise en œuvre opérationnelle de l’automatisation du fonds de compensation de la TVA.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous émettons un avis favorable sur ces amendements : cela fait trois ans que l’on repousse cette réforme. Cela permettra à la commission des finances d’évoquer clairement le sujet.

La commission adopte les amendements II-CF650 et II-CF799 (II-856).

Puis, elle adopte larticle 77 rattaché ainsi modifié.

 

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Article 78
Répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la Commission le 24 octobre 2019 matin.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (MM. Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([410]).

La commission examine lamendement II-CF474 de Mme Véronique Louwagie.

M. Damien Abad. L’amendement est défendu.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales. Si nous sommes favorables au développement des communes nouvelles, nous ne souhaitons pas que l’incitation financière soit trop importante. C’est pourquoi nous donnerons un avis défavorable à tous les amendements qui iront dans ce sens. La commune nouvelle doit être un projet de territoire.

Par ailleurs, changer le seuil de 150 000 habitants, dont la modification ne remonte qu’à un an, n’aurait pas de sens. Les collectivités territoriales nous demandent de la stabilité : n’allons pas modifier les dispositions adoptées l’année dernière.

La commission rejette lamendement II-CF474.

Puis, elle est saisie des amendements identiques II-CF370 de Mme Émilie Bonnivard et II-CF590 de M. Charles de Courson.

M. Damien Abad. L’amendement II-CF370 est défendu.

M. Charles de Courson. L’amendement II-CF590 est un peu technique. Depuis la création du dispositif permettant aux communes de se regrouper pour créer une commune nouvelle, les montants de dotation de solidarité rurale perçus par les communes fondatrices étaient garantis sans limitation de durée, selon le taux d’évolution de la DSR.

Cette garantie, adoptée dès la première lecture, n’avait jamais été remise en cause jusqu’à l’adoption finale du texte, ni ultérieurement lors de la discussion des projets de loi de finances pour 2015 et pour 2016. Cependant, l’article 151 de la loi de finances pour 2018 a supprimé cette garantie, en la limitant à une période de trois ans.

Cela a conduit de nombreuses communes à renoncer à leur projet de créer une commune nouvelle, car elles ont découvert qu’elles perdraient des sommes trop élevées de DSR du fait du dépassement des seuils d’éligibilité à cette dotation au-delà des trois ans. Le dispositif peut en effet entraîner des pertes très significatives. Or l’adoption de cette garantie visait à ce que les communes rurales ne soient ni pénalisées ni encouragées par leur transformation en commune nouvelle.

L’amendement II-CF590 a donc pour objet de rétablir cette garantie, qui concerne des communes rurales, parfois fragiles, notamment lorsque deux communes pauvres s’allient avec une commune plus riche pour fonder une commune nouvelle. On a fait une erreur en ne mesurant pas les conséquences de la suppression de la garantie au-delà de trois ans. Je propose de la rétablir afin de favoriser la création de communes nouvelles, sans pour autant donner d’encouragement financier. Le dispositif est donc neutre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Pas tout à fait : si vous maintenez le dispositif au-delà de trois ans, cela aura forcément des conséquences pour les autres dans la mesure où nous sommes dans le cadre d’une enveloppe fermée.

La période de trois ans laisse un temps d’adaptation, durant lequel les communes peuvent créer des synergies et se réorganiser. Mais, à un moment donné, on doit acter que la commune nouvelle est créée, avec sa richesse et son organisation. Il n’y a pas lieu d’augmenter l’incitation financière à la création de communes nouvelles ; il faut conserver le dispositif actuel.

M. Charles de Courson. Il ne s’agit pas de créer une dépense supplémentaire, mais de maintenir le dispositif en l’état car notre système défavorise la création de communes nouvelles.

L’enveloppe fermée n’est pas non plus un argument car, en l’espèce, le montant vient en moins, non en plus. Veut-on au moins assurer la neutralité financière, en cas de création d’une commune nouvelle ? Actuellement, au-delà des trois ans, l’impact de cette création n’est pas neutre, mais négatif. Il s’agit non pas d’encourager mais de ne pas décourager.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. À un moment donné, on doit acter qu’il y a une commune, et non pas trois. Nous avons décidé de conserver cet avantage pendant trois ans ; n’allons pas figer, une fois de plus, certains paramètres au sein de la DGF, en n’actant pas la commune nouvelle créée.

M. Charles de Courson. Qu’allez-vous répondre aux communes qui voudraient créer une commune nouvelle, mais qui se disent bloquées par le fait qu’elles perdront des ressources par rapport à leur situation actuelle ? Je ne demande pas un encouragement, mais la neutralité, ni plus ni moins.

Mme Christine Pires Beaune. Nous avons rendu obligatoire un rapport financier sur les communes nouvelles, qui expose notamment la situation avant leur création. Ce document pourrait mettre en exergue ce que vous dites. Je n’ai toutefois pas eu connaissance d’une commune nouvelle récemment créée qui aurait été pénalisée.

S’agissant des incitations financières, le dispositif prévoit un fonds d’amorçage, mais qui n’a pas vocation à se poursuivre ad vitam aeternam. Je vous invite à lire le rapport du Comité des finances locales (CFL), qui décompose ces éléments. Je n’y ai pas trouvé de cas de désincitation financière à la création d’une commune nouvelle – même si cette création ne doit pas être liée à des raisons financières.

M. Charles de Courson. Je peux vous citer un cas très précis de communes dans la Marne : ce sont elles qui m’ont fait découvrir le problème. Je ne demande pas un encouragement mais la neutralité, pour des communes qui veulent se regrouper mais qui découvrent que cela fera baisser leur dotation au bout de trois ans. Il ne s’agit pas d’un plus, mais de supprimer un moins.

M. le président Éric Woerth. Nous avons déjà eu ce débat. Tout ne peut pas être lié au seul aspect financier : un regroupement de communes doit se fonder aussi sur des projets communs. Si une phase de transition est nécessaire, elle ne peut durer éternellement.

La commission rejette ces amendements II-CF370 et II-CF590.

La commission est saisie, en discussion commune, des amendements identiques IICF49 de Mme Émilie Bonnivard, II-CF131 de Mme Jeanine Dubié et II-CF201 de Mme Frédérique Lardet ainsi que des amendements identiques II-CF149 de M. Xavier Roseren, II-CF209 de Mme Émilie Bonnivard et II-CF376 de M. Fabrice Brun.

M. Damien Abad. L’amendement II-CF49 vise à porter de un à deux le nombre d’habitants par résidence secondaire pris en compte pour le calcul de la DGF car la majoration actuellement prévue ne traduit pas suffisamment la diversité des modes d’hébergement dans les communes touristiques et l’augmentation du nombre de résidences secondaires constaté. J’en souligne l’importance pour les communes de montagne, dont les dépenses par habitant sont très supérieures, notamment dans les stations de sport d’hiver. C’est pourquoi ma collègue Émilie Bonnivard a déposé l’amendement II-CF49.

M. Charles de Courson. J’ignore pourquoi le calcul de la DGF intègre un habitant par résidence secondaire… Pourquoi pas 0,5, pourquoi pas deux ? Nos rapporteurs ont peut-être trouvé une explication là-dessus. Il est vrai que son incidence n’est pas très grande lorsque le territoire considéré ne compte que 2 ou 3 % de résidences secondaires. Il n’en va pas de même pour des communes, comme certaines dans la Marne, qui en recensent 50 ou 60 %. En Corse, il y a en moyenne 32 % de résidences secondaires ; dans les Hautes-Alpes, la moyenne départementale est de 33 % mais certaines communes en comptent jusqu’à 70 %.

Notre amendement II-CF131 vise donc à préciser ce point. Nos rapporteurs ont-ils lu des études sur le sujet du coût d’une résidence secondaire par rapport à celui d’une résidence principale, pour fonder ce coefficient sur des éléments objectifs ?

M. le président Éric Woerth. Cela doit correspondre au nombre d’habitants dans le logement divisé par le nombre de jours d’utilisation des services publics…

Mme Frédérique Lardet. L’amendement II-CF201 vise également à éclaircir ce point. Les charges des stations de montagne notamment sont très élevées.

M. Xavier Roseren. L’amendement II-CF149 a pour objet de mieux prendre en compte la part de la population non permanente dans le calcul de la DGF pour les communes touristiques. L’an dernier, grâce au travail du rapporteur général, une première avancée avait été réalisée en ce sens. Cependant, le dispositif actuel pose une condition relative au potentiel fiscal. Pour bénéficier de la majoration de la population par résidence secondaire, le potentiel fiscal de la commune doit en effet être inférieur au potentiel fiscal moyen par habitant des communes de même strate.

Cette limite, bien que compréhensible, porte préjudice aux communes touristiques comme les stations de montagne : celles-ci peuvent percevoir des recettes fiscales supérieures à la moyenne des autres communes et se voir de ce fait exclues de cette majoration. Pourtant, bien qu’elles perçoivent des recettes supérieures, elles ont des investissements et des charges bien supérieurs aux autres communes, pour permettre d’accueillir cette population touristique nombreuse.

L’amendement II-CF149 vise à répondre à ces problèmes en supprimant la condition de potentiel fiscal pour bénéficier de la majoration de la population.

M. Damien Abad. L’amendement II-CF209 a le même objet.

M. Fabrice Brun. L’amendement II-CF376 vise à mieux prendre en compte la réalité des charges pesant sur les communes touristiques, en particulier les petites communes, en améliorant le dispositif de majoration de la population pris en compte dans le calcul de la DGF.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Ce sujet est un marronnier : nous en avons discuté dans tous les projets de lois de finances des années précédentes. Le Gouvernement a publié un rapport l’année dernière, qui rappelle que si la présence de résidences secondaires occasionne pour ces communes des charges supplémentaires, elle leur procure également, mais j’en entends moins parler, des ressources, qu’elles soient fiscales – taxe de séjour, taxe sur les remontées mécaniques, redevance sur les produits des jeux, taxe d’habitation sur les résidences secondaires – ou qu’elles soient liées à l’activité économique supplémentaire.

La DGF de ces communes est déjà majorée d’un habitant par résidence secondaire. L’enveloppe étant fermée, augmenter ce coefficient reviendrait à diminuer les montants alloués à d’autres communes. Il s’agit là d’un compromis satisfaisant, car on ne peut pas considérer que ces habitants, présents une partie de l’année, pèsent autant que des résidents permanents.

L’année dernière, je le rappelle, nous avions fait un geste important, en portant le coefficient à 0,5 habitant supplémentaire pour les communes de moins de 3 500 habitants, avec une condition de potentiel fiscal. Il ne me paraît pas équitable de supprimer cette condition de potentiel fiscal. Le dispositif n’ayant qu’un an, je vous propose de le conserver en l’état pour en assurer la stabilité.

C’est pourquoi je donne un avis défavorable à l’ensemble des amendements.

M. le président Éric Woerth. Il y a tout de même un petit côté illogique : lorsque l’État est lui-même en cause, il considère la résidence secondaire comme une moitié de résidence, mais quand c’est la taxe d’habitation, la commune ne perçoit pas une moitié de taxe…

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Les communes ont tout loisir de baisser le taux de la taxe d’habitation.

M. le président Éric Woerth. C’est la seule qui reste ! On pourrait en effet inscrire dans la loi qu’il s’agit de demi-résidences, devant acquitter une demi-taxe d’habitation.

Mme Frédérique Lardet. On ne peut plus dire que les résidences secondaires sont inoccupées une grande partie de l’année : c’est de plus en plus faux. Et cette fréquentation ne fera qu’augmenter du fait des plateformes de location, comme Airbnb. J’habite dans une commune où les résidences secondaires sont très nombreuses. Il y a dix ans, elles étaient occupées seulement un à deux mois par an ; aujourd’hui, elles le sont toute l’année. On s’en aperçoit notamment au niveau du traitement des déchets : il a fallu multiplier par deux le nombre de poubelles.

M. Charles de Courson. Le rapporteur a rappelé l’effort consenti en 2019 en majorant le coefficient de 0,5 habitant supplémentaire pour les communes de moins de 3 500 habitants. Les services du ministère de l’intérieur ont-ils pu mesurer l’incidence de la modification du dispositif ? Je souhaiterais que ces éléments figurent dans le rapport.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Nous pourrons demander ces éléments ultérieurement car, pour l’instant, nous ne connaissons pas l’impact de cette disposition : nous avons moins d’un an de recul. Il est également permis de se demander s’il revient à l’État de payer des dotations supplémentaires à des communes dont les habitants se sont engagés dans une démarche de location saisonnière via Airbnb… Je ne suis pas sûr que ce soit son rôle.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous revenons là encore à la logique d’une dotation sur enveloppe fermée : si l’on rend à un, on prend aux autres. Nous devons rester modérés, d’autant que nous avons déjà pris des crédits l’an dernier, ce qui avait fait l’objet d’une discussion nourrie. Évitons de revenir sur les mêmes sujets tous les ans. La décision qui a été prise l’année dernière était mesurée. Nous en demanderons l’impact. En tout état de cause, il n’y a pas lieu de revenir sur l’équilibre trouvé l’an dernier.

La commission rejette successivement les amendements identiques II-CF49, IICF131 et II-CF201, ainsi que les amendements identiques II-CF149, II-CF209 et IICF376.

La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques IICF653 de M. François Pupponi et IICF800 de Mme Christine Pires Beaune, ainsi que les amendements IICF652 et IICF651 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. L’amendement II‑CF653 a pour objet de majorer la progression de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR) de 90 millions d’euros.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II‑CF800, identique, vise à consacrer 180 millions d’euros à la DSU et à la DSR au lieu de 90 millions. Il s’agit de faire financer la péréquation par l’État et non par les communes par écrêtement de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

M. François Pupponi. Les amendements II‑CF652 et II‑CF651 sont défendus.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. S’il n’y a pas d’accélération des dotations DSU et DSR, elles n’en sont pas moins en augmentation notable. La péréquation s’élève à 40 % dans la DGF des communes : c’est très important.

Monsieur Pupponi, en Seine-Saint-Denis, la DGF avait baissé de 26 % entre 2013 et 2017 ; elle a augmenté de 5 % sur les deux dernières années. Dans le Val-d’Oise, sur les mêmes périodes, après avoir chuté de 20 %, elle a augmenté de 2 %. On peut toujours discuter de la vitesse à laquelle la péréquation a lieu, mais l’inversion de la dynamique est réelle, vous-même l’avez reconnu tout à l’heure. Sarcelles perçoit une DGF par habitant de 731 euros, soit significativement plus que la moyenne nationale.

La stabilité des dotations que nous avions promise a permis l’amélioration des comptes des collectivités territoriales, en termes de capacité d’autofinancement comme de niveau d’investissement. Il n’est pas raisonnable d’aller plus loin. La nécessaire solidarité avec la ruralité et avec les quartiers prioritaires de la politique de la ville doit se faire au sein de cette enveloppe normée.

M. François Pupponi. Il faudra un jour que vous vous penchiez réellement sur ce dossier ! Je vous ai envoyé tous les rapports de la chambre régionale des comptes d’Île-de-France : ils montrent que les communes concernées par les conventions avec l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ne sont pas en capacité financière de faire face aux demandes de l’ANRU et de l’État dans ce domaine – c’est la chambre régionale des comptes qui le dit !

Il existait une solidarité francilienne avec le fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF), qui augmentait tous les ans. Vous l’avez gelé l’an dernier : il n’y a plus d’augmentation. Or ce n’est pas l’État qui payait, mais les communes riches, qui participaient ainsi à la solidarité à l’intérieur de l’Île-de-France. Vous avez refusé l’augmentation alors que ce n’est pas votre argent ! Expliquez-nous la logique !

Il existait un système de péréquation régional et national, horizontal et vertical : vous avez décidé d’arrêter l’horizontal – c’est votre choix. Mais lisez les rapports de la Cour des comptes sur l’ANRU : l’État ne peut pas dire qu’il faut rénover sans donner les moyens aux communes concernées de le faire. Ce ne sont pas les communes qui le disent, mais la chambre régionale des comptes et la Cour des comptes !

M. Charles de Courson. Je ne suis pas d’accord avec ces amendements mais ils soulèvent un vrai problème, que l’on pourrait résoudre en Île-de-France par l’accentuation du FSRIF. Pourquoi l’avoir gelé ? Êtes-vous d’accord avec cela ? Tout cela parce que les riches et les puissants de ce monde crient comme si on les écorchait vifs, alors qu’ils ont un potentiel fiscal énorme ! La ville de Paris représente 7 % des bases de la contribution foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), alors qu’elle ne pèse que 3 % de la population : c’est énorme. Que l’on fasse jouer un peu la solidarité à l’intérieur des grandes agglomérations, en Île-de-France et ailleurs !

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous examinerons tout à l’heure des amendements concernant la métropole du Grand Paris (MGP) et le FSRIF : nous en parlerons à ce moment-là et peut-être ferons-nous évoluer notre position.

La commission rejette les amendements identiques IICF653 et IICF800.

Elle rejette ensuite successivement les amendements IICF652 et IICF651.

Puis elle se saisit des amendements identiques IICF50 de Mme Émilie Bonnivard, IICF64 de Mme Annie Genevard, IICF132 de Mme Jeanine Dubié et IICF203 de Mme Frédérique Lardet.

M. Damien Abad. L’amendement II‑CF50 vise à supprimer le plafonnement de la population à partir duquel sont déterminés l’éligibilité à la fraction bourg-centre de la dotation de solidarité rurale et le montant de l’attribution. La perte de la fraction bourg-centre menace la pérennité des services publics de proximité. De plus, le plafonnement a engendré un effet de seuil très brutal, excluant une dizaine de communes du dispositif, dont plus de la moitié est située en zone de montagne.

M. Thibault Bazin. L’amendement II‑CF64 pose deux questions sur cet effet de seuil : l’éligibilité à la fraction bourg-centre et le montant de l’attribution. Nous étions convenus d’en rediscuter lors de la réforme de la DGF : cette réforme verra-t-elle enfin le jour ?

M. François Pupponi. L’amendement II‑CF132 est défendu.

Mme Frédérique Lardet. L’amendement II‑CF203 également.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Ce plafonnement a été introduit dans le projet de loi de finances pour 2017 pour éviter une majoration excessive de la DSR bourg-centre dans un certain nombre de communes avec une toute petite population mais une population DGF nettement supérieure du fait de nombreuses résidences secondaires. Il s’agit en fait de faux bourgs-centres, qui n’ont pas de charges de centralité. Dans la mesure où nous sommes dans une enveloppe fermée, si nous supprimons cette règle, l’argent que nous donnerons à ces communes sera pris à d’autres.

Nous sommes tous conscients de la nécessité de réformer la DGF. Cette année, la réforme de la fiscalité locale a empêché que l’on se penche sérieusement sur ce sujet mais ses conséquences mécaniques sur les dotations et les péréquations nous placent collectivement dans l’obligation de les refondre ; j’espère que le Parlement jouera son rôle.

M. Thibault Bazin. Il est assez hasardeux de ne pas mener les deux de front : avec le potentiel fiscal, les effets de bord seront dramatiques sur les dotations. Il faudrait tout étudier en même temps. C’est une vraie aventure que vous nous proposez !

M. le président Éric Woerth. En tout cas, l’illisibilité ne peut pas être la norme dans ce domaine. Il nous arrivera toujours de modifier telle ou telle disposition technique, et ainsi de provoquer des complications ailleurs : c’est insupportable pour les élus, et probablement pour tout le monde ! Il n’y a aucune raison à cela, à moins de vouloir masquer quelque chose ; mais je ne crois pas que cela soit l’objectif.

La commission rejette les amendements identiques IICF50, IICF64, IICF132 et IICF203.

Puis elle examine lamendement IICF801 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Je souhaite tout d’abord demander à nos deux rapporteurs de bien vouloir insister pour que nous ayons les rapports avant la séance, notamment ceux qui concernent les collectivités territoriales, tels que le rapport sur les compensations, le rapport sur le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), que l’on attend toujours, ou encore le rapport qui devait être produit pour la première fois sur le coefficient logarithmique et son incidence sur la dotation forfaitaire – et j’en oublie certainement ! Si nous ne les avons pas d’ici la séance, ce ne sera pas la peine d’en demander de nouveaux puisque, de toute façon, nous ne les obtiendrons pas !

Concernant le présent amendement, nous avions mis en place l’année dernière une réalimentation de l’enveloppe pour la dotation d’intercommunalité pour les EPCI ayant une dotation de moins de 5 euros. Il se trouve que l’année dernière, deux ex-syndicats d’agglomération nouvelle (SAN), déjà bien privilégiés, en avaient bénéficié. Cet amendement vise donc à empêcher que des ex-SAN ne bénéficient à nouveau de cette réalimentation.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Je veux faire un point rapide sur les SAN. Les sept SAN ont tous perdu 2,2 % de dotation de compensation. La dotation d’intercommunalité avait en effet été réalimentée pour deux d’entre eux : Saint-Quentin-en-Yvelines et Val d’Europe, cette dernière étant la seule à augmenter en dotation générale.

Concernant votre amendement en particulier, j’ai vérifié : il s’agissait d’une mesure ponctuelle, qui ne sera pas renouvelée cette année – j’espère que ma parole vous suffira. Nous nous en tenons à la dynamique évoquée, à savoir la baisse de 2,2 % jusqu’à l’échéance finale que nous avions votée il y a deux ans. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

Lamendement IICF801 est retiré.

La commission adopte ensuite larticle 78 rattaché sans modification.

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Après l’article 78

La commission examine lamendement IICF816 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Certaines communes ne participent pas du tout à la progression de la péréquation car elles ne touchent pas de DGF. L’objet du présent amendement est de les faire participer à cette péréquation via une ponction sur la fiscalité. Celle-ci existe déjà avec la contribution au redressement des finances publiques (CRFP), certaines communes sont déjà ponctionnées sur leur fiscalité. Il faut donc faire en sorte que les communes les plus riches soient tenues de participer à la péréquation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. La question de la solidarité de ces communes est parfaitement justifiée et devra être traitée dans le cadre de la réforme de la DGF. Ainsi, 338 communes ont une DGF négative du fait de la CRFP.

L’inconvénient de votre amendement est qu’il créerait une augmentation mécanique de la DGF et donc de la dépense publique, alors que nous souhaitons rester à enveloppe constante. C’est un vrai sujet, que nous devrons aborder dans le cadre de la refonte de la dotation, mais nous ne pouvons pas en l’état accepter votre amendement.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement n’étant pas gagé, il ne crée pas de dépenses. Il ne s’agit pas d’augmenter l’enveloppe de la DGF mais de mettre à contribution les communes les plus riches, afin de diminuer les contributions de celles qui participent aujourd’hui : nous serions donc bien à iso-enveloppe.

M. Charles de Courson. Quelle est la position de nos rapporteurs sur la DGF négative ? Êtes-vous sûrs qu’elle est constitutionnelle ? Nous sommes en effet à la merci d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. C’est le Conseil constitutionnel qui répondra !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Il n’y a pas de risque de ce point de vue puisqu’il n’y a pas de nouvelle commune en DGF négative. Quant à celles qui le sont déjà, le problème se pose depuis trois ans : s’il y avait eu un risque constitutionnel, quelqu’un n’aurait pas manqué de le soulever et nous aurions la réponse !

M. Charles de Courson. Pour vous dire la vérité, je connais un exemple incroyable : celui de la communauté de communes de Vertus, qui a fusionné avec Épernay pour ne plus avoir de DGF négative. Mais je connais d’autres collectivités qui sont encore en DGF négative : je les avais poussées à faire une QPC…

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est un problème de champagne…

M. Charles de Courson. Non, c’est un problème de fond : expliquer à des conseils municipaux ou à des conseils intercommunaux qu’on lève l’impôt local pour le reverser à l’État, c’est assez surréaliste !

M. le président Éric Woerth. Le cumul FPIC et DGF négative est assez redoutable pour certaines communes, et totalement anormal.

La commission rejette lamendement II-CF816.

Puis elle examine lamendement IICF766 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Mohamed Laqhila. Cet amendement a pour objet de demander aux communes bénéficiant de la dotation nationale de péréquation (DNP) d’assurer un suivi analytique et de rendre un rapport annuel permettant d’évaluer l’utilisation de cette dotation. Nous ne pouvons en effet contrôler que ce qui est mesurable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Je pense qu’il y a une confusion, donc je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. La DNP est libre d’emploi, c’est une dotation comme les autres : elle relève de la libre administration des collectivités territoriales. Elle est versée dans un pot commun : il n’y a pas de dépense liée à la DNP. Je ne vois pas comment on pourrait répondre à cette demande.

Mme Christine Pires Beaune. Je vous rejoins mais cela pose une question intéressante sur l’avenir de la DNP : compte tenu de l’augmentation de la DSR et de la DSU, son poids relatif dans les dotations de péréquation diminue très fortement. Nous pourrions répondre à cette question en ventilant son produit actuel dans les deux autres enveloppes DSR et DSU au prorata de la population rurale et de la population urbaine : cela simplifierait le système.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous sommes d’accord, avec Jean-René Cazeneuve, sur l’évolution que propose Christine Pires-Beaune ; nous l’avons d’ailleurs écrit dans le rapport du Printemps de l’évaluation. Il est certain que la DNP doit trouver une place autre ; nous devons éviter d’avoir encore une dotation de 150 millions qui traîne quelque part. J’espère que, dans le prochain PLF, nous pourrons travailler sur la DNP et la réintégrer dans les dotations existantes, ce qui évitera ce problème.

M. le président Éric Woerth. Nous ne pouvons pas réfléchir à la DNP sans réfléchir aussi aux mécanismes de solidarité horizontale : c’est le principe même des péréquations qui pose une vraie question.

La commission rejette lamendement II-CF766.

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Article additionnel après l’article 78
Critères déligibilité des communes à la dotation déquipement
des territoires ruraux

La commission examine ensuite les amendements IICF806 et IICF807 de Mme Christine Pires Beaune, qui font lobjet dune discussion commune, ainsi que lamendement IICF805 de Mme Christine Pires Beaune et lamendement IICF997 de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II‑CF806 concerne la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). L’an dernier, nous avions adopté des amendements sans simulation, ce qui ne pouvait manquer de donner des surprises. Dans le cas de la DETR, il y en a effectivement eu : nous sommes passés d’une assiette éligible à la DETR de 28 millions d’habitants à presque 32 millions. On a gardé le même gâteau mais les convives à table se sont multipliés… Conclusion : de nombreux départements ont vu leur enveloppe diminuer, d’où l’instauration d’un effet cliquet limitant l’évolution à 5 %, à la hausse comme à la baisse. Pour le département du Puy-de-Dôme, cela représente une diminution de la DETR de 800 000 euros ; et nous pouvons citer beaucoup d’autres exemples ! Alors que le Président de la République avait promis que l’on ne diminuerait pas les dotations d’investissement, certains départements ont subi une baisse drastique.

Je propose donc de revenir partiellement sur l’évolution des critères d’éligibilité intervenue en 2016. L’idée d’une nouvelle carte intercommunale, avec des intercommunalités plus grandes, était bonne mais le seuil retenu pour l’éligibilité, beaucoup trop large, est à l’origine de ces effets néfastes. Alors qu’il avait été augmenté en 2016, passant de 50 000 à 75 000 habitants, je propose de le rabaisser à 62 500 habitants. De même, le seuil pour la commune la plus habitée était passé de 15 000 habitants à 20 000 : je propose de le ramener à 17 500 habitants.

Mme Olivia Grégoire remplace M. Éric Worth à la présidence.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement II‑CF807 a pour objet de supprimer le critère de la densité, introduit par un amendement du Gouvernement l’année dernière. Là aussi, cela a eu des effets un peu curieux !

Enfin, l’amendement II‑CF805 concerne lui aussi la DETR : des communes en métropole y sont éligibles alors que cette dotation ne concerne, comme son nom l’indique, que les territoires ruraux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Je souhaite faire une proposition intermédiaire. Nous avions eu cette discussion l’année dernière : est-il légitime qu’une commune membre d’une métropole soit également éligible à la DETR ? Non : c’est l’un ou l’autre, car les mécanismes de solidarité au sein de la métropole sont satisfaisants.

Cela étant, certaines très grandes métropoles intègrent de très petites communes ayant un caractère vraiment rural. L’amendement II‑CF997 vise donc à exclure de la liste des communes pouvant bénéficier de la DETR les communes de plus de 2 000 habitants situées au sein d’une métropole, afin de ne conserver que les petites communes.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Concernant l’amendement II‑CF807, j’avais donné un avis défavorable, l’année dernière, à l’amendement du Gouvernement proposant une évolution de la DETR, dont j’appréhendais les conséquences. Les chiffres sont venus confirmer mes craintes : certains départements perdent des dizaines, des centaines, voire des millions d’euros. Je vous propose donc de retirer cet amendement et de travailler avec nous, en vue de la séance, à un nouvel amendement déterminant des critères clairs et précis, afin de réduire les conséquences de l’amendement du Gouvernement adopté l’année dernière.

L’amendement II‑CF806 était un amendement d’appel dans la même logique : je vous propose donc de le retirer pour traiter le sujet globalement.

Concernant l’amendement II‑CF805, nous avions eu la même discussion l’an dernier sur les métropoles : quelque 600 communes au sein de métropoles percevaient de la DETR, ce qui n’était pas très logique.

Avec le rapporteur général, nous avons donc tenté de trouver un compromis. Notre amendement préserve les petites communes éloignées de la ville centre, qui peuvent bénéficier d’un peu de DETR. Je vous propose donc de retirer vos amendements et de défendre avec nous, en séance, l’amendement II‑CF997.

Mme Christine Pires Beaune. Je retire mes trois amendements au profit d’un travail commun d’ici la séance. Je veux simplement faire une remarque : lorsqu’on est dans une métropole, on bénéficie déjà du pacte métropolitain et surtout de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Je vous invite à regarder ce qu’il se passe dans vos départements : cette dotation, lorsque nous l’avions créée, devait profiter à toutes les communes. Aujourd’hui, c’est fini car on lui demande d’assurer les cœurs de ville, bientôt les territoires d’industrie, etc. Reprenez la liste et vous verrez que plus aucune commune rurale isolée n’émarge à la DSIL. À la limite, pourquoi pas, après tout ? Il y a, d’un côté, une dotation d’investissement qui va plutôt au monde urbain et, de l’autre, la DETR, qui a toujours existé et qui doit être destinée aux territoires ruraux.

Dernière remarque : il serait intéressant d’étudier la DETR par habitant en ne retenant que la population rurale, pour voir si la fourchette est à peu près homogène. Nous devons faire ce travail ; j’ai demandé à l’Association des maires ruraux de France de bien vouloir me donner toute la population rurale par département : nous pourrons faire ces simulations.

Les amendements IICF806, IICF807 et IICF805 sont retirés.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous avons une semaine pour faire ce travail et clarifier notre position collective avant l’examen en séance.

M. François Pupponi. La réponse des rapporteurs démontre que ce sujet est important. L’État doit-il continuer à être solidaire avec des collectivités riches qui ne seraient pas solidaires de leur propre territoire ? Les métropoles et les grandes intercommunalités ont été créées sur le principe de la solidarité des territoires les plus riches ; le problème, c’est que l’on n’est pas allé jusqu’au bout. On a fait le pari de l’intelligence en postulant que les territoires riches seraient solidaires avec les pauvres… Vu d’ici, peut-être, mais pas dans la vraie vie !

La DETR est-elle là pour suppléer l’absence de solidarité au sein d’une intercommunalité riche ? Si la réponse est non, alors il faut obliger les territoires riches à être solidaires avec les petites communes rurales. Si nous avions réformé les intercommunalités en augmentant leur taille, c’était justement pour imposer une solidarité locale et territoriale. Allons jusqu’au bout de la logique : on sait bien qu’il existe des intercommunalités riches qui n’ont aucune solidarité avec leurs territoires pauvres.

M. Charles de Courson. Cela fait vingt-cinq que l’on parle de tout cela ! Le problème sociologique est simple : les puissants de la classe politique sont à la tête des collectivités les plus riches et ont empêché toute évolution ! Si l’on a créé le FSRIF et toutes sortes d’usines à gaz en Île-de-France, c’est parce qu’on n’a jamais voulu imposer la création d’une communauté urbaine à Paris ! Voilà ! Je parle de Paris, parce que c’est le top du top, mais qu’ils soient de gauche ou de droite, ce sont tous les mêmes : surtout ne pas être solidaires des autres ! Ils crient comme des orfraies ! Au moins, à Lyon et à Marseille, il y a une communauté urbaine : si on augmente leurs compétences, alors il y aura une véritable péréquation en leur sein. Mais l’Île-de-France est un cas symbolique !

Mme Olivia Grégoire, présidente. Ce sera répété et amplifié, monsieur de Courson…

Mme Christine Pires Beaune. Une fois n’est pas coutume, je ne suis pas favorable à l’idée de bouleverser encore une fois les critères d’attribution de la DETR, qui est une subvention d’investissement. Mais M. Pupponi a entièrement raison de dire qu’il faut regarder tout cela d’une manière globale. Nous serons obligés de faire ce travail dès l’année prochaine, quand nous nous intéresserons aux critères du potentiel fiscal et financier.

Une des solutions serait de raisonner non plus en potentiel mais en produits. Nous avons intérêt à recenser tous les produits, toutes les recettes d’un EPCI, y compris les dotations de péréquation : quand vous recevez de la péréquation pendant des années, cela fait augmenter le produit. Il serait donc nécessaire d’analyser cela au niveau du territoire, et donc d’envisager une DGF territoriale. Il ne s’agirait pas de verser la DGF à un EPCI qui se chargerait ensuite de la reverser aux communes – je n’y crois pas et je n’en veux pas –, mais de calculer la DGF en fonction de la richesse de l’ensemble du territoire, en prenant en compte les ressources et les charges des communes et des EPCI. M. Pupponi dit vrai quand il souligne que certains EPCI ne mettent pas en place de solidarité alors qu’ils en ont les moyens.

M. Daniel Labaronne. Dans mon département, l’Indre-et-Loire, deux tiers de la DSIL sont effectivement versés à la métropole de Tours, et un tiers aux territoires ruraux.

Mme Christine Pires Beaune. Mais pas aux communes !

M. Daniel Labaronne. Si ! Amboise pour l’aménagement sécuritaire d’un pont, Artannes-sur-Indre pour la rénovation d’un groupe scolaire, etc. Les subventions DSIL destinées à la métropole financent des investissements qui profitent également aux habitants des territoires ruraux. Ainsi, une subvention DSIL est consacrée à la réhabilitation et à la sécurisation du pont Napoléon, lequel est indispensable car il relie les territoires ruraux du nord à la métropole. Il faudrait donc nuancer lorsque vous dites que la DSIL va prioritairement aux métropoles. Ce n’est pas tout à fait vrai, en tout cas pas dans mon département.

Mme Olivia Grégoire, présidente. Si chacun se met à parler de son département ou de son EPCI, nous allons avoir du mal à conclure…

M. Francis Chouat. Il est nécessaire d’avoir une vision globale et consolidée de ce qu’il se passe dans les métropoles et les communautés d’agglomération, car les métropoles sont loin de recouvrir le territoire national. Mais il faut également avoir une vision réelle, concrète des mécanismes de péréquation qui existent d’ores et déjà, y compris à Paris. Il est faux de dire que Paris ne participe pas aux mécanismes de péréquation : simplement, c’est loin d’être suffisant. Toutes les grandes intercommunalités et les grandes métropoles signent des contrats financiers, qui doivent intégrer des mécanismes de péréquation internes. Si des améliorations doivent être apportées, alors il ne faut pas se contenter de partir du haut : il faut regarder ce qu’il se passe dans les intercommunalités concernées.

M. François Pupponi. M. Labaronne a évoqué le pont Napoléon : heureusement qu’à une époque, les Corses étaient là pour structurer la France ! (Sourires.)

Ce que dit notre collègue sur la DSIL est important. C’est comme pour la DETR : l’État va-t-il continuer à distribuer des dotations aux intercommunalités et aux communes riches ? La question doit être posée.

M. Francis Chouat. Cela dépend de la manière dont elles redistribuent !

M. François Pupponi. Il faudra donc revoir la manière dont les dotations spécifiques de l’État sont utilisées dans les territoires.

M. Jean-Louis Bricout. Les dispositifs de développement alloués à la ruralité – contrats de développement, contrats de ruralité, territoires d’industrie, contrats de transition écologique – font tous appels à des fonds fléchés, ce qui complexifie tous les dossiers de financement. La solidarité et la péréquation en matière d’investissement pourraient prendre la forme de fonds dédiés et fonctionner en mode « projet » plutôt qu’en mode « enveloppe », dont la répartition n’est pas toujours équitable.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis favorable à l’amendement II‑CF997. J’ajoute que la meilleure péréquation est celle qui est faite localement. Le FPIC et le FSRIF sont les principaux outils de la péréquation, au-delà des dotations de l’État : il convient donc de les développer.

Par ailleurs, la DSIL a été ciblée sur des contrats et des thématiques spécifiques, raison pour laquelle peu de communes rurales en ont bénéficié. Cela ne veut pas dire qu’elles ne touchent pas de DSIL mais, quand elles en ont, cela concerne souvent les écoles.

Enfin, je pense très sincèrement que les discussions que nous aurons sur le potentiel fiscal répondront à l’évolution de la péréquation nationale et locale, et permettront d’aboutir à un vrai système de péréquation nationale.

La commission adopte lamendement IICF997 (amendement II-857).

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Article additionnel après l’article 78
Encadrement des variations de la dotation déquipement
des territoires ruraux

La commission en vient à lexamen de lamendement IICF839 du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le présent amendement vise à modifier les modalités d’encadrement des variations de la DETR, afin de répartir de manière plus équitable le reliquat de dotation. Cela permet d’éviter que les départements dont la variation spontanée de DETR est supérieure à 5 %, à la hausse comme à la baisse, ne captent à eux seuls tout le reliquat, ce qui constitue aujourd’hui un effet d’aubaine et tend à les éloigner de leur dotation tendancielle. Si je n’ai pas été clair, tant pis !

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis favorable : je ne veux pas ajouter d’explications aux explications !

La commission adopte lamendement II-CF839 (amendement II-858).

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Après l’article 78

La commission se saisit ensuite de lamendement IICF812 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Jean-Louis Bricout. Le présent amendement a pour objet de demander un examen par la commission départementale de tous les projets de subventions supérieurs à 100 000 euros sur l’ensemble des fonds d’aide à l’investissement, et pas seulement de la DETR.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous avons eu cette discussion l’année dernière : avis défavorable une nouvelle fois, tout en espérant que la transmission des informations par les préfectures fonctionnera de mieux en mieux.

M. Éric Woerth, président. C’est tout de même clairement dans la main des préfets… La vérité, c’est que c’est une recentralisation !

La commission rejette lamendement II-CF812.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements IICF658, IICF659, IICF660, IICF661, IICF662 et IICF663 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. L’objet de tous ces amendements est de faire évoluer la dotation politique de la ville (DPV), qui deviendrait une vraie dotation et non plus une subvention, et de faire évoluer les critères.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous avions déjà évoqué ce sujet l’année dernière. Nous n’y sommes pas favorables car nous souhaitons conserver la DPV. Nous avons auditionné les préfets ainsi que des élus locaux : cet outil est intéressant dans le cadre d’appels à projet. Peut-être faudra-t-il en augmenter le montant mais, sur le fond, cette dotation spécifique fonctionne plutôt bien et tout le monde en est plutôt satisfait, même les élus locaux. Il n’y a donc pas lieu de la remettre en cause. Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements IICF658, IICF659, IICF660, IICF661, IICF662 et IICF663.

La commission en vient à lamendement IICF654 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Le présent amendement propose d’inscrire le dispositif gouvernemental de dédoublement des classes de CP et de CE1 dans les missions relevant de la DSIL.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Votre amendement me semble satisfait, monsieur Pupponi. La loi prévoit que la DSIL peut subventionner la création, la transformation et la rénovation des bâtiments scolaires. La circulaire du 7 mars 2018 aux préfets de région a déjà fait de cette éligibilité juridique une grande priorité thématique « notamment dans le cadre du dédoublement des classes dans les zones REP + – réseau d’éducation prioritaire – afin de préparer la rentrée dans les meilleures conditions possibles ».

M. François Pupponi. L’année dernière, nous avions eu un débat un peu houleux sur ce point en séance. La loi prévoit une possibilité et non une obligation pour les préfets. Il arrive qu’ils acceptent pour certaines communes défavorisées et refusent pour d’autres pourtant voisines. En leur laissant une telle latitude, nous prenons un risque.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Cette possibilité est mise à profit dans certains départements : en Seine-Saint-Denis, 50 millions sont prévus sur deux ans pour l’immobilier scolaire. Dans le Vaucluse, un grand projet immobilier a été financé à 80 % par cette dotation.

La commission rejette lamendement II-CF654.

Elle examine ensuite lamendement IICF811 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement vise à confier au préfet de département, et non au préfet de région, l’attribution des subventions au titre de la DSIL. En outre, il prévoit le renforcement de l’information des parlementaires sur les projets ainsi subventionnés et la rédaction d’un rapport dressant un bilan pour chaque exercice.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. La DETR et la DSIL sont deux outils complémentaires qui répondent à des problématiques bien distinctes. L’an dernier, nous avions montré dans notre rapport que la DSIL était consacrée à des projets trois à quatre fois plus importants financièrement, souvent d’intérêt régional, et qui s’inséraient dans des cycles plus longs de mise en place. Du reste, les préfets auditionnés ont souligné que le système actuel fonctionnait très bien, grâce à la coopération entre préfets de région et préfets de département. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout. Je ne partage pas votre position, même si je reconnais que la DSIL est plutôt consacrée à de gros projets aux effets plus structurants. Malgré tout, dans mon département, on trouve des projets subventionnés par la DETR dépassant les 100 000 euros, ce qui nécessite d’ailleurs l’avis d’une commission d’élus. Dans les contrats mis en place sur mon territoire, qu’il s’agisse des contrats de ruralité ou des pactes de développement, les deux dotations sont mobilisées. Comme les crédits sont fléchés et non pas dédiés, cela permet d’optimiser les deux dispositifs, mais les petites communes en font les frais, car il ne reste plus de DETR pour elles.

La commission rejette lamendement II-CF811.

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Article additionnel après l’article 78
Dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité

La commission examine, en discussion commune, lamendement IICF840 du rapporteur général et les amendements identiques IICF62 de Mme Annie Genevard, IICF130 de Mme Jacqueline Dubié et IICF200 de Mme Frédérique Lardet, et lamendement IICF797 de Mme Bérangère Abba.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’an dernier, nous avons entamé un processus de verdissement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour les communes dont 75 % du territoire est classé Natura 2000 – classement imposé aux collectivités locales, rappelons-le. Nous avions instauré un critère lié au potentiel fiscal afin d’éviter que des communes trop riches ne bénéficient de ces avantages. Mon amendement II‑CF840 vous propose de remplacer cette DGF verte par une dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité incluant non seulement les surfaces Natura 2000, mais également les parcs nationaux et des parcs naturels marins, dont le périmètre est également imposé par l’État. Pour les sites Natura 2000, le critère du potentiel fiscal serait calqué sur celui de la dotation de solidarité rurale (DSR) qui semble plus cohérent que celui retenu auparavant. L’enveloppe globale serait portée de 5 millions à 10 millions d’euros.

Un tel élargissement irait dans le sens des préconisations de Daniel Labaronne dans son rapport, Ruralités : une ambition à partager. Il permettrait en effet de prendre en compte les aménités rurales, qui sont autant de plus-values environnementales.

Par ailleurs, nous savons que le groupe de travail consacré aux parcs nationaux, parcs naturels régionaux et aires protégées présidé par Bérangère Abba a milité pour la création de nouveaux parcs nationaux avec une DGF qui leur serait adaptée. J’ajouterai qu’une telle DGF devrait aussi valoir pour les parcs existants à la faveur du renouvellement de leur charte, prévu dans la loi de 2006.

M. Thibault Bazin. Notre amendement II-CF62 vise à abaisser le plafond du nombre d’habitants des communes éligibles au dispositif Natura 2000 de 10 000 à 5 000 afin de permettre aux collectivités concernées de disposer d’une dotation plus importante.

M. François Pupponi. L’amendement II‑CF130 est défendu.

M. Xavier Roseren. De même que l’amendement II-CF200.

Mme Bérangère Abba. Je soutiens ardemment la proposition du rapporteur général. Elle correspond aux réflexions que nous avons menées au sein de notre groupe d’études.

Toutefois, alors que la France va se doter d’un onzième parc national, au terme d’un long processus de gestation, il apparaît nécessaire d’allouer aux communes situées en son cœur une dotation budgétaire. Rien n’est aujourd’hui prévu pour elles alors que les communes situées au cœur des dix premiers parcs nationaux de France disposent toujours d’un bonus intégré à leur dotation forfaitaire. Une étude d’impact serait d’ailleurs nécessaire pour évaluer les effets cumulés de ces diverses mesures.

Cela dit, je suis prête à retirer cet amendement pour le retravailler avec le rapporteur général d’ici à la séance.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Nous sommes plutôt favorables à la contribution au verdissement des dotations proposé par le rapporteur général. Inclure les parcs nationaux répond à une certaine logique, car les communes dont le territoire est compris dans un cœur de parc national supportent des coûts supplémentaires. Il faut simplement espérer que la dotation, calculée à partir du potentiel fiscal par habitant, sera équilibrée et qu’il n’y aura pas trop d’écarts avec les communes environnantes.

Je propose le retrait des divers amendements au profit de l’amendement du rapporteur général.

Mme Christine Pires Beaune. Je partage l’objectif de verdissement mais j’aimerais que nous disposions d’une liste des communes concernées. L’année dernière, rappelons-le, nous avons dû procéder à des ajustements à partir de la première liste des communes éligibles situées en zone Natura 2000.

Nous n’avons plus la mémoire des dotations passées car tout a été figé. Certaines communes bénéficiaient par exemple d’une grosse enveloppe au titre de la dotation touristique mais, même si son montant a été sanctuarisé, on ne sait plus à quoi elle correspond. Il serait bon de procéder à un examen plus détaillé d’ici à la séance.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il importe de distinguer les communes qui relèvent des sites Natura 2000 et celles qui sont situées au cœur des parcs naturels. Quand très peu de communes bénéficient d’un dispositif, il faut examiner les choses de près. Il importe également d’envisager de manière plus générale les problématiques liées au verdissement et leurs impacts sur les territoires. D’ici à la séance, je disposerai de simulations complémentaires que j’ai d’ores et déjà demandées.

M. Daniel Labaronne. Je ne peux que souscrire à la démarche du rapporteur général qui se situe dans le droit fil des propositions que nous avons formulées pour l’agenda rural. Les territoires ruraux sont porteurs d’aménités écologiques et environnementales qui ne sont pas reconnues à leur juste valeur, qu’il s’agisse des paysages, de l’eau, de la biodiversité, des services écologiques rendus par les écosystèmes. Nous devons vraiment mener une réflexion sur les paiements pour services environnementaux (PSE).

Après les sites Natura 2000 et les parcs naturels, nous pourrions nous interroger sur les communes qui aménagent et entretiennent des zones humides, notamment en prenant appui sur l’excellent rapport de notre collègue Frédérique Tuffnell Terres deau, Terres davenir.

M. le président Éric Woerth. À force de vouloir faire du sur-mesure pour chaque commune, pour des raisons toujours parfaitement légitimes – verdissement, compensations, etc. –, on multiplie des sous-enveloppes dans les dotations globales, ce qui aboutit à des dispositifs d’une complexité inouïe. Je n’ai pas l’impression que la démocratie sorte renforcée d’une telle illisibilité.

Lamendement II-CF797 est retiré.

La commission adopte lamendement IICF840 (amendement II-860).

En conséquence, les amendements IICF62, IICF130 et IICF200 tombent.

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Après l’article 78

La commission examine ensuite, en discussion commune, lamendement II-CF655 de M. François Pupponi et II-CF817 de Mme Christine Pires Beaune.

M. François Pupponi. L’amendement II-CF655 est défendu.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II-CF817 vise à relancer la péréquation horizontale, en relevant les ressources du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) à hauteur de 1,3 % des recettes réelles de fonctionnement des communes et de leurs groupements dotés d’une fiscalité propre.

De 2012 à 2015, nous avions beaucoup augmenté l’enveloppe du FPIC – de 150 millions à 780 millions mais la loi de finances pour 2016 a ensuite limité sa progression. Or, pour les communes les plus pauvres, la péréquation est la seule recette dynamique. Avec une péréquation verticale qui progresse plus lentement que sous le précédent quinquennat, une péréquation horizontale gelée et un recours continu aux variables d’ajustement, ces communes voient leurs moyens figés, ce qui contribue à renforcer les déséquilibres entre territoires riches et pauvres.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Les mêmes amendements concernant le FPIC ont été déposés l’année dernière et notre position est à nouveau défavorable. Nous allons revoir toute la logique de la péréquation et les mécanismes du FPIC en lien avec la réforme de la taxe d’habitation, si elle aboutit.

M. le président Éric Woerth. Monsieur Pupponi, sur le FPIC, il faut tout de même calmer le jeu. Certains multiplicateurs ont pratiquement suivi une trajectoire de fusée… Je ne sais pas si cela a contribué à enrichir des communes pauvres, mais ce qui est sûr, c’est que cela a appauvri des communes qui n’étaient pas si riches que cela. À cela s’ajoutent une imprévisibilité totale et la difficulté à expliquer aux habitants d’une commune qu’une partie de la fiscalité qu’ils versent, et dont ils attendent un retour, va au financement de services d’autres communes. Je sais bien que c’est la solidarité, mais à certains niveaux d’augmentation, cela pose problème. Sans doute faudra-t-il revoir tout cela.

La commission rejette successivement les amendements II-CF655 et IICF817.

Elle en vient aux amendements identiques IICF66 de Mme Annie Genevard, IICF133 de Mme Jacqueline Dubié et IICF204 de Mme Frédérique Lardet.

M. Thibault Bazin. L’amendement II‑CF66 vise à déduire du potentiel financier agrégé (PFIA) le prélèvement au titre du FPIC.

M. François Pupponi. L’amendement II-CF133 est défendu.

M. Xavier Roseren. L’amendement II‑CF204 également.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF66, II-CF133 et II-CF204.

Elle en vient à lamendement IICF809 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Je vais retirer cet amendement qui concerne les ensembles intercommunaux composés d’un groupement comprenant un ancien syndicat d’agglomération nouvelle (SAN) pour le retravailler d’ici à la séance.

Lamendement II-CF809 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF146 de M. Jean-Pierre Vigier.

M. Thibault Bazin. Vous l’avez souligné à juste titre, monsieur le président, le FPIC est marqué par l’imprévisibilité et il a pénalisé des communes qui n’étaient pas si riches que cela.

Afin de corriger ces injustices, le présent amendement vise à intégrer un deuxième critère pour définir l’éligibilité au reversement du FPIC. L’effort fiscal agrégé (EFA) ne suffit pas. Il faut aussi prendre en compte la densité de population. Ainsi, pour une densité de moins de 15 habitants au km², l’EFA serait de 0,8 et pour une densité entre 15 et 25 habitants, il serait de 0,9.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable. Je ne vais pas revenir sur ce débat.

La commission rejette lamendement II-CF146.

Elle en vient à lamendement IICF150 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. Cet amendement vise à mieux prendre en compte dans les règles de répartition du FPIC les charges réelles qui pèsent sur les communes touristiques de moins de 3 500 habitants. Leur potentiel fiscal élevé les défavorise. Depuis la création du fonds, les prélèvements ont été ainsi multipliés pratiquement par dix dans les petites stations de ski contre six en moyenne pour les autres communes.

Cet amendement propose donc de majorer de 0,5 la part de la population prise en compte dans le calcul du montant de contribution au FPIC des communes touristiques de moins de 3 500 habitants.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous nous sommes déjà exprimés sur les communes touristiques. Les ressources fiscales propres aux communes touristiques de montagne – taxe de séjour, taxe sur les remontées mécaniques – ne font pas partie du panier de ressources utilisé pour évaluer la richesse des territoires. Plus on modifiera les mécanismes du FPIC, plus l’imprévisibilité augmentera. Restons-en là.

La commission rejette lamendement II-CF150.

Elle est saisie de lamendement II-CF657 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Le présent amendement vise à mieux répartir le prélèvement du FPIC entre les établissements publics territoriaux et leurs communes membres.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Je ne souhaite pas que l’on modifie les mécanismes du FPIC, je le répète, même pour la métropole du Grand Paris (MGP).

M. Thibault Bazin. Finalement, vous êtes un conservateur…

La commission rejette lamendement II-CF657.

Elle examine lamendement IICF656 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Je vous invite, monsieur le rapporteur, à examiner de près cet amendement. Quand la métropole du Grand Paris a été créée, certaines communes très riches, au motif qu’elles étaient associées à des communes pauvres, ont été exonérées de versements au FPIC, ce qui est revenu à faire payer l’addition à des communes plus pauvres de l’Île-de-France, situées hors métropole du Grand Paris. Il y a vraiment lieu de réparer cette injustice.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. L’année dernière, je m’étais engagé en séance publique à travailler sur cette question. La réforme de la taxe d’habitation nous a détournés de cette tâche mais nous nous y attellerons en 2020, par la force des choses. Nous savons que certaines communes sont exclues de droit.

M. le président Éric Woerth. Quand une commune rejoint un EPCI, elle ne peut pas avoir non plus tous les inconvénients et aucun avantage. D’autres règles s’appliquent, au-delà même des règles fiscales.

La commission rejette lamendement II-CF656.

Elle en vient à lamendement IICF655 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Cet amendement a pour but de dispenser la collectivité de Corse de prélèvement au titre du fonds de péréquation des ressources régionales.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Je propose de ne pas faire de nouvelles exceptions, mais d’examiner les critères. Peut-être les retravaillerez-vous avec vos collègues corses dans le cadre de la négociation globale du « package corse ». Je vous demande de bien vouloir le retirer, mais je le garde sous le coude…

Lamendement II-CF655 est retiré.

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Article additionnel après l’article 78
Progression du Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France

La commission est saisie de lamendement CF664 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Le présent amendement propose de rétablir la progression du Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF) de 20 millions par an observée depuis 2012, afin de le porter à 350 millions en 2020. Les communes riches d’Île‑de-France contribueront ainsi à la péréquation horizontale.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous avions émis un avis défavorable l’année dernière, mais favorable l’année précédente. Cette année, notre avis sera à nouveau favorable. Nous examinerons les impacts de cette disposition d’ici à la séance.

M. le président Éric Woerth. Une année sur deux, c’est une règle comme une autre… Pourquoi pas une année sur trois, ou une demi-année sur cinq ? C’est la même logique que celle relative à la prise en compte des résidences secondaires…

Mme Christine Pires Beaune. J’aimerais savoir si cette augmentation a un impact sur la contribution des communes au FSRIF et au FPIC. Nous savons en effet qu’elles sont ponctionnées d’abord au titre du FSRIF puis du FPIC, mais qu’il y a un plafond global.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Il n’y aura pas d’incidences cette année dans la mesure où le calcul se fera sur l’année n-1. En revanche, l’année prochaine, il faudra se pencher sur la question : nous devrons peut-être augmenter le plafond. Nous attendons la validation de certains chiffres que nous vous fournirons en séance.

La commission adopte lamendement II-CF664 (amendement II-861).

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Après l’article 78

La commission est saisie de lamendement IICF804 de Mme Christine Pires-Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement demande que l’État finance pour moitié la hausse annuelle de 30 millions de la dotation d’intercommunalité, en accord avec les conclusions du Comité des finances locales (CFL) de juillet 2018.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Cette majorité n’a pas inventé les variables d’ajustement.

M. François Pupponi. Certes, mais elle ne les a pas fait disparaître non plus !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Les retours des intercommunalités sur la réforme de la DGF sont extrêmement positifs. Avec un an de recul, nous pouvons nous en féliciter. Son enveloppe est restée stable ; mieux vaut en rester là puisque la règle est que le DGF paie la DGF.

La commission rejette lamendement II-CF804.

Elle est saisie de lamendement IICF808 de Mme Christine Pires-Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Je vais laisser à M. Bricout le soin de défendre cet amendement.

M. Jean-Louis Bricout. Les dotations d’intercommunalité varient selon les strates d’intercommunalité – métropoles, communautés urbaines, communautés d’agglomération et intercommunalités rurales – en fonction de critères très variés qui nous paraissent source d’injustices. Cet amendement entend revenir dessus.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. L’année dernière, tenant compte de vos remarques, nous avions fait baisser le poids des métropoles dans la répartition. Nous avons trouvé un équilibre entre les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les métropoles, qu’il serait tout à fait prématuré de modifier. Cette habitude de remettre en cause les réformes sans leur laisser le temps de produire leurs pleins effets ne me paraît pas une bonne chose.

Mme Christine Pires Beaune. Il me semble au contraire nécessaire de remettre en cause certaines protections. Il n’est pas normal que certaines catégories d’EPCI bénéficient de garanties supérieures à d’autres. J’avais déposé cet amendement l’année dernière et il se justifie encore cette année.

La commission rejette lamendement II-CF808.

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF670, IICF671, IICF675, IICF672, IICF673 et IICF674 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Depuis la loi Lamy de 2014 qui a introduit les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), tout EPCI signataire d’un contrat de ville a l’obligation, sous peine de sanction, de voter un pacte financier et fiscal incluant une dotation de solidarité communautaire (DSC), dont le montant est fixé à la majorité des deux tiers. Certains EPCI contournent cette sanction en votant a posteriori un pacte financier ne prévoyant aucune évolution de la DSC.

La prolongation des contrats de ville de 2020 à 2023, adoptée l’année dernière à la demande du Gouvernement, pose par ailleurs un problème juridique. Les pactes financiers et fiscaux qui ont été votés ne vont pas au-delà de 2020. Il convient donc d’adapter les textes et d’obliger les EPCI qui ont des communes éligibles à la DSC à voter un nouveau pacte financier et fiscal allant jusqu’en 2023. Tel est le but de ces amendements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Dans le rapport que nous avons fait sur le projet de loi de règlement cet été, nous avons évoqué la DSC et formulé quelques propositions. Celle que vous faites ne me satisfait pas pleinement et je pense qu’il faut continuer à réfléchir. Vous avez bien rappelé la situation : lorsqu’un contrat de ville est signé, un pacte financier doit être voté par deux tiers des communes de l’EPCI. Si ce pacte financier n’est pas voté dans le délai imparti, une DSC intervient automatiquement. Nous n’avons pas relevé de dysfonctionnement majeur, ni de contournement caractérisé de la loi. La solution que vous proposez pourrait aboutir à des blocages, puisqu’une seule commune pourrait s’opposer à la signature du pacte financier. Cela n’est pas de nature à simplifier la gestion des EPCI.

M. François Pupponi. Ce que je propose, c’est qu’un vote ait lieu au niveau de l’intercommunalité, et que les communes éligibles à la DSC donnent leur accord sur le montant de celle-ci. Je pense aux intercommunalités où les communes très riches sont majoritaires et imposent leur choix. Les communes bénéficiaires de la dotation de solidarité communautaire devraient avoir leur mot à dire, or ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Je répète par ailleurs que la prolongation des contrats de ville, si elle ne s’accompagne pas de l’obligation de voter un pacte financier, va poser un problème juridique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Je n’ai pas examiné ce dernier point : je vous propose d’interroger le ministre en séance.

M. le président Éric Woerth. J’imagine que les communes sont toujours d’accord pour percevoir une dotation…

M. François Pupponi. Je vais prendre un exemple que je connais bien : mon intercommunalité a décidé de ne pas augmenter la DSC, et les communes les plus concernées n’ont pas eu leur mot à dire. L’intercommunalité a détourné la loi et les communes pénalisées ne peuvent rien faire.

La commission rejette successivement les amendements IICF670, IICF671, IICF675, IICF672, IICF673 et IICF674.

La commission examine ensuite lamendement IICF666 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Le présent amendement vise à réintroduire la compensation intégrale par l’État des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) dans les communes DSU cible. D’ailleurs, savez-vous si nous aurons bientôt le rapport promis par le ministre ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Avis défavorable. Votre amendement, dont le coût n’a pas été évalué, coûterait probablement très cher, et son adoption remettrait en cause les équilibres qui ont été trouvés. Comme vous le savez, les précédentes lois de finances ont réduit cette compensation.

La commission rejette lamendement II-CF666.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements IICF44 et IICF43 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Thibault Bazin. Ces amendements de mon collègue Raphaël Schellenberger, qui concernent le Fonds national de garantie individuelle des ressources communales et intercommunales (FNGIR), entendent prendre en compte la situation des communes qui perdent brutalement une part importante de leurs recettes, du fait du départ d’une entreprise ou de la fermeture d’une centrale, par exemple.

L’amendement II‑CF44 propose une mise à jour en temps réel de la contribution de ces communes au FNGIR – dans le même esprit que la contemporanéisation des APL – puisqu’il précise qu’un prélèvement sur les recettes de l’État compense la perte pour le FNGIR. L’amendement II‑CF43, qui est un amendement de repli, propose une simple mise à jour des données, sans compensation automatique.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Ces amendements de M. Raphaël Schellenberger sont très ciblés et concernent essentiellement le projet d’avenir du territoire de Fessenheim. Je rappelle que ce projet, qui a été soigneusement élaboré et calibré, associe les collectivités, le Gouvernement, EDF et la Caisse des dépôts et qu’il représente 20 millions d’euros d’investissements. Je suis plutôt défavorable à vos amendements et je vous invite à les retirer. Votre collègue pourra demander des informations plus complètes au ministre en séance. Par ailleurs, je rappelle que le FNGIR a toujours été figé et que s’il n’était plus figé pour certains, il ne le serait plus non plus pour les autres, ce qui serait tout à fait nouveau.

M. Thibault Bazin. L’exposé sommaire de ces amendements mentionne Fessenheim, mais le dispositif qui vous est proposé est plus général et peut concerner tout le monde. Ces amendements ont le mérite de révéler un problème de fond dans votre démarche : certains critères varient d’une année sur l’autre, ce qui pose un vrai problème de visibilité et de lisibilité, tandis que d’autres éléments restent figés, ce qui peut créer des injustices. Il faut être cohérent : soit on fait tout varier, en fonction de critères lisibles, soit on fige tout, pour garantir la lisibilité des dispositifs. Le manque de visibilité nuit à l’investissement et au portage des projets au niveau local.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Tout n’est pas variable : le FNGIR n’est pas variable et il ne l’a jamais été. C’est peut-être un problème, mais c’est ce qui a été décidé au moment de la suppression de la taxe professionnelle, et nous n’allons pas revenir sur ce principe aujourd’hui. Les autres variables, elles, ont toujours été intégrées dans les variables générales. C’est d’ailleurs pour cela qu’on ne crée pas un FNGIR pour compenser la suppression de la taxe d’habitation, mais un « CoCo ».

M. le président Éric Woerth. J’admire cet effort de simplification…

La commission rejette successivement les amendements II-CF44 et IICF43.

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Article additionnel après l’article 78
Financement des établissements publics territoriaux
de la métropole du Grand Paris

La commisson examine ensuite les amendements identiques IICF782 de M. Christophe Jerretie, IICF803 de Mme Christine Pires Beaune et IICF829 de M. Laurent Saint-Martin.

M. Christophe Jerretie. L’amendement II‑CF782 concerne les flux financiers et fiscaux entre la métropole du Grand Paris (MGP) et les établissements publics territoriaux (EPT). Nous avions longuement débattu de cette question l’année dernière et je vous propose de reconduire le mécanisme qui a été défini en loi de finances pour 2019. Je vais laisser à M. Laurent Saint-Martin, qui a déposé un amendement identique, le soin d’entrer dans les détails.

M. Jean-Louis Bricout. On n’a trouvé que moi pour défendre cet amendement très parisien… L’amendement II‑CF803 vise à reconduire pour 2020 le dispositif de neutralité financière entre la métropole du Grand Paris et les établissements publics territoriaux.

M. Laurent Saint-Martin. L’amendement II‑CF829 concerne la répartition des dotations et des ressources entre les différentes collectivités du Grand Paris : c’est une question dont nous débattons chaque année depuis l’adoption de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRE). Dès l’année dernière, le versement aux EPT de la dotation d’intercommunalité (DI), d’un montant de 55 millions d’euros, aurait dû prendre fin. Dans la loi de finances pour 2019, nous avions défini un schéma temporaire prévoyant, pour une année supplémentaire, le versement de la DI aux EPT – dont je rappelle qu’ils ne sont pas des EPCI à fiscalité propre. Pour préserver la croissance des ressources de la métropole du Grand Paris, nous avions par ailleurs suspendu, pour une année également, le versement de la dotation de soutien à l’investissement territorial (DSIT) aux EPT.

Dans la mesure où nous n’avons toujours pas de visibilité sur l’avenir institutionnel du Grand Paris, et puisque la MGP, les EPT, la région, les départements et les communes continuent de cohabiter, ces amendements proposent de reconduire ce schéma transitoire.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous avions hésité à adopter d’emblée ce dispositif pour deux ans l’année dernière.

M. François Pupponi. Il est urgent de savoir ce que va devenir la métropole du Grand Paris. On ne peut pas rester dans le flou artistique. Nous avons déjà eu un débat en séance sur le financement de la MGP : il est urgent de savoir ce qui va se passer dans la région capitale, afin de prendre des décisions pérennes.

M. le président Éric Woerth. C’est une bonne idée, mais très complexe.

La commission adopte les amendements identiques II-CF782, II-CF803 et II-CF829 (amendement II-863).

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Après l’article 78

La commission examine ensuite lamendement IICF591 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. François Pupponi. Cet amendement propose que les droits du tabac qui alimentent la collectivité de Corse soient remplacés par une fraction de TVA.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable. Vous pourrez éventuellement interroger le ministre sur ce sujet en séance…

La commission rejette lamendement II-CF591.

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Article additionnel après l’article 78
Rapport au Parlement

La commission examine lamendement IICF810 de Mme Christine Pires Beaune, qui fait lobjet dun sous-amendement IICF999 des rapporteurs spéciaux.

Mme Christine Pires Beaune. Le Gouvernement aurait dû remettre au Parlement, avant le 30 septembre 2019, un rapport relatif au coefficient logarithmique utilisé pour le calcul du potentiel agrégé par habitant. Nous demandons que ce rapport soit remis au Parlement avant le 2 janvier 2020 : cette date peut paraître provocatrice, mais nous aurions déjà dû avoir ce rapport.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Dans la mesure où la réforme de la fiscalité locale aura des effets sur une vingtaine de dotations locales, il est effectivement essentiel que le Parlement dispose d’une information précise sur les indicateurs financiers. Le sous-amendement II‑CF999 demande des informations complémentaires, dont les parlementaires ont absolument besoin pour préparer la réforme de la fiscalité locale.

M. le président Éric Woerth. Vous pensez à l’impact de la taxe d’habitation, ou votre préoccupation est plus large ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Elle est plus large.

Mme Christine Pires Beaune. Je suis évidemment favorable à ce sous-amendement, qui complète la liste des informations demandées au Gouvernement, mais je doute que celui-ci soit en mesure de nous les fournir d’ici le 2 janvier 2020. Le Gouvernement devrait pouvoir nous remettre à cette date le rapport qu’il aurait dû nous remettre en septembre, mais sans doute pas le rapport enrichi que vous demandez.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Je suis très favorable à l’amendement de Mme Pires Beaune : il est vrai que la date retenue est provocatrice, mais il faut parfois l’être. Et l’adoption du sous-amendement est un moyen de mettre la pression sur le Gouvernement, car le Parlement a besoin de ces informations pour travailler. Je rappelle qu’il s’agit d’une réforme fiscale à 20 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 26 milliards de dotations.

La commission adopte le sous-amendement IICF999.

Elle adopte ensuite lamendement IICF810 ainsi sous-amendé (amendement II-810).

M. le président Éric Woerth. Certains de nos collègues ont demandé la parole.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je n’ai pas beaucoup parlé ce matin : j’ai écouté le débat sur les dotations et vos propos sur la nécessaire solidarité entre riches et pauvres, pour faire court… Ce qui saute aux yeux, c’est que non seulement les grandes métropoles concentrent les richesses, la croissance, l’emploi et le développement économique, mais qu’en plus, elles reçoivent davantage en proportion que les territoires ruraux. Ces territoires, plus fragiles, subissent souvent la double peine : alors qu’ils ont moins de moyens que les autres, ils doivent en consacrer une partie à la mise au niveau de leurs équipements. Les infrastructures numériques sont un bon exemple de cette situation. On ne m’enlèvera pas de l’idée que les territoires ruraux sont les territoires oubliés de la République. Or je n’ai pas ressenti ce matin, de votre part, une vraie volonté de corriger cette injustice. La prise de conscience est loin d’être acquise et la pensée qui, dans ce pays, vient toujours d’en haut, reste profondément urbaine : les riches resteront riches et les pauvres resteront pauvres. Tout cela, en somme, est parfaitement cohérent avec votre ligne politique.

M. François Jolivet. Je ne comptais pas prendre la parole, mais je ne peux pas ne pas réagir à vos propos, cher collègue. Ce dont vous nous faites part, ce sont des intuitions. Il me semblerait donc utile que le président de notre commission, le rapporteur général ou l’un de nos rapporteurs spéciaux dépose un amendement en séance pour demander un rapport sur le volume de deniers publics qui arrivent sur chaque territoire, que ces deniers viennent de l’État ou du département. Cela fait une trentaine d’années que des parlementaires et de ministres essaient d’obtenir ces informations de l’administration, et personne ne les a jamais obtenues. Elles permettraient pourtant de répondre à notre collègue Jean-Paul Dufrègne et d’éclairer la représentation nationale sur la réalité des mécanismes de solidarité nationale dans notre pays. Intuitivement, on a le sentiment que certains territoires concentrent beaucoup de deniers publics, mais peut-être n’est-ce pas vrai : avant de porter des jugements de ce genre, il faudrait disposer de données certaines.

M. le président Éric Woerth. Je crois que notre collègue François Cornut-Gentille a fait un rapport sur le département de la Seine-Saint-Denis. Quelques membres courageux de la commission des finances pourraient essayer de se lancer dans le même type de travail, par exemple sur un département rural et un département urbain.

Mme Christine Pires Beaune. Je souscris totalement à cette demande, même si les choses ont déjà beaucoup évolué au cours des deux dernières années : on trouve, par exemple, beaucoup d’informations sur le site du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET). Je note néanmoins qu’elles ne sont pas toujours très cohérentes. Une carte présentée sur ce site fait par exemple le total des subventions d’investissement au titre de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Le problème, c’est que la DETR concerne les territoires ruraux : faire une telle carte sans tenir compte des populations auxquelles ces dotations s’adressent n’a pas grand sens… Quoi qu’il en soit, votre proposition est excellente, monsieur le président, car de nombreuses dotations passent aujourd’hui sous les radars. Cela étant, le projet de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), au départ, était de réunir toutes les agences sous une même coupe. Et on a vu ce que cela a donné…

M. le président Éric Woerth. Je vous propose d’en reparler en bureau. Nous pourrions demander un rapport à la Cour des comptes ou lancer une mission d’information.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Je suis certain que nous aurons en séance un débat passionnant, démocratique et respectueux, mais opposer les territoires ruraux aux métropoles, c’est de la vieille politique, monsieur Dufrègne !

M. Jean-Paul Dufrègne. Je ne fais que constater les choses !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Vous savez pertinemment que les métropoles doivent faire face à des défis considérables, en matière de mobilités et de transition énergétique, par exemple. On ne peut pas, comme vous le faites, opposer les territoires et présenter les métropoles comme des paradis.

Mme Christine Pires Beaune. Mais on ne les oppose pas !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Par ailleurs, ce que nous venons de voter est à l’opposé de ce que vous avez dit, puisque nous avons encore renforcé la solidarité à l’égard des territoires ruraux : plus de 35 % de la dotation bénéficie aux territoires les plus fragiles, grâce aux mécanismes de péréquation.

Quand on compare la DGF moyenne dans les territoires ruraux et dans les villes de plus de 100 000 habitants, on s’aperçoit qu’elle est supérieure dans les territoires ruraux. L’idée, que l’on entend parfois, selon laquelle il n’y aurait pas de péréquation, est donc fausse.

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Remboursements et dégrèvements

Article additionnel après l’article 78
Rapport sur les remises gracieuses et transactions

Lors de sa réunion du 23 octobre 2019 matin, la commission examine lamendement II-CF872 de la rapporteure spéciale.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Il s’agit d’étendre le champ du rapport sur les remises gracieuses et transactions, en y incluant les règlements d’ensemble et les conventions judiciaires d’intérêt public. Il fait suite aux travaux menés au printemps.

La commission adopte lamendement II-CF872 (amendement II-888).

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Articles additionnels après l’article 78
Rapports sur les contentieux fiscaux et non fiscaux de lÉtat

Elle examine ensuite les amendements IICF322 et IICF323 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Ces deux amendements font suite à la mission d’information relative à la gestion du risque budgétaire associé aux contentieux fiscaux et non fiscaux de l’État, que nous avons menée avec Romain Grau.

L’amendement II‑CF322 reprend la proposition 18, qui recommandait de transmettre chaque semestre, aux présidents et aux rapporteurs généraux des commissions des finances des deux assemblées, un rapport présentant l’état des risques budgétaires associés aux contentieux fiscaux, devant les juridictions nationales et européennes, et de prévoir une information de la commission à huis clos, sous la forme d’une audition du ministre chargé du budget. La mission d’information avait, en effet, constaté le faible niveau d’information du Parlement concernant les dépenses contentieuses, elles-mêmes insuffisamment budgétées.

L’amendement II‑CF323 reprend la proposition 7 de la mission, qui recommandait de mieux prendre en compte les risques et leurs éventuelles conséquences budgétaires dès le stade de l’autorisation, en joignant au projet de loi de finances une annexe présentant, de manière synthétique, les éventuelles conséquences budgétaires associées aux procédures contentieuses et quasi contentieuses en cours. L’annexe pourrait prendre la forme d’un jaune budgétaire, et couvrirait l’ensemble des risques contentieux pesant sur le budget de l’État.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Avis favorable à ces deux amendements issus du rapport d’information de madame Louwagie et de monsieur Grau. Cela nous sera très utile.

M. Joël Giraud, rapporteur général. S’agissant de l’amendement II‑CF322, il s’agit d’une information extrêmement utile que nous n’avons pas. En revanche, pour ce qui est du jaune budgétaire, la mesure sera beaucoup plus difficile à mettre en œuvre, à mon sens.

La commission adopte successivement les amendements II-CF322 (amendement II-889) et II-CF323 (amendement II-890).

Article additionnel après l’article 78
Rapport sur les difficultés denregistrement des transactions immobilières

La commission examine lamendement IICF873 de la rapporteure spéciale.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. L’amendement vise à demander un rapport sur les difficultés d’enregistrement des transactions immobilières. Les représentants des services fonciers nous ont fait part, en audition, de problèmes pour lesquels il faudrait identifier des solutions.

M. Charles de Courson. Nous avons la chance d’avoir un notaire à la commission des finances. Les droits d’enregistrement sur les transactions immobilières, ce sont les notaires qui les perçoivent lors de la vente. Y aurait-il des problèmes de transfert entre les offices et l’administration fiscale ?

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Le problème ne porte pas sur les droits d’enregistrement mais sur le délai de publication des mutations, qui conduit à de nombreux dégrèvements de taxes foncières – 1,3 milliard d’euros en 2018 –, les avis d’imposition étant adressés aux anciens propriétaires, qui font ensuite l’objet d’une régularisation.

M. Jean-Paul Mattei. L’acte de vente doit être publié dans le mois. Il est ensuite traité par le service de la publicité foncière. C’est là qu’il prend un grand retard, que je suis bien en peine d’expliquer, alors même que cela passe par des procédures dématérialisées via Téléactes.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Lors des auditions, des solutions semblaient se profiler, notamment en matière de dématérialisation. La situation devrait s’améliorer.

M. François Pupponi. Au niveau budgétaire, s’agit-il bien d’une opération neutre, dans la mesure où si l’on dégrève un contribuable, on en impose un autre ?

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Effectivement, budgétairement, c’est neutre, puisque, à la fin, quelqu’un paiera la taxe foncière. Mais cela crée un flux très important de dégrèvements, et engendre des coûts de gestion importants.

La commission adopte lamendement II-CF873 (amendement II-891).

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Santé

Après l’article 78

Lors de sa réunion du 25 octobre 2019 matin, la commission est saisie de lamendement II-CF904 de la rapporteure spéciale.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Je vous propose une réécriture de l’article L. 251-2 du code de l’action sociale et des familles, afin de recentrer le dispositif de l’AME sur les soins vitaux.

Certes, il faut voir l’AME à travers le prisme de la santé et non sous son seul aspect économique. Mais il faut aussi prendre en compte le fait que les crédits alloués à l’AME sont en augmentation et qu’ils ne couvrent pas toutes les dépenses qui bénéficient aux personnes en situation irrégulière. Ainsi, les personnes déboutées du droit d’asile bénéficient, pendant les douze mois qui suivent, du dispositif PUMA ; pour les personnes qui se présentent au service des urgences des hôpitaux sans être bénéficiaires de l’AME, les soins ne peuvent pas être facturés ou se retrouvent en créances irrécouvrables. Il convient donc d’avoir une analyse globale du dispositif, ce que nous proposons au travers de cet amendement visant à recentrer l’aide médicale d’État sur les soins vitaux.

La commission rejette lamendement II-CF904.

Puis elle passe à lamendement II-CF903 de la rapporteure spéciale.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Cet amendement vise à fixer un droit de timbre de 30 euros pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’État.

La commission rejette lamendement II-CF903.

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Article additionnel après l’article 78
Annexe générale relative aux actions de prévention

La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF875 et II-CF874, tous deux de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. La stratégie nationale de santé et le plan prévention présenté au mois de mars 2018 marquent un tournant en consacrant la politique de prévention comme pierre angulaire de notre système de santé. Un élément important de ce plan de prévention réside dans l’approche transversale des actions de prévention, y compris au regard de leur financement. Cela nécessite de clarifier et de mettre en cohérence les différents types de financement.

Comme le notait le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie en juin 2017, il y a autant de périmètres d’action en matière de santé publique que de types d’interlocuteurs. Il y a ainsi des acteurs étatiques, des acteurs de la sécurité sociale, des collectivités locales ou des acteurs privés. Bref, l’organisation de la prévention est dispersée, de même que son financement.

La création d’un jaune budgétaire relatif à la prévention permet d’étayer la programmation financière et d’apprécier les moyens d’intervention réellement mobilisables de façon pluriannuelle.

L’an dernier, avec le soutien de madame la ministre, un document de politique transversale qui retraçait les dépenses de l’État en la matière a permis un premier pas avec une possible clarification. L’obtention du jaune, qui est également souhaitée par madame la ministre – j’espère qu’elle le précisera en séance –, permet d’embrasser la vision globale des financements de l’ensemble de notre politique de prévention et ainsi une possibilité de contrôle par le Parlement.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Vous souhaitez qu’un jaune budgétaire soit annexé au projet de loi de finances pour l’ensemble de l’effort public en faveur de la politique de prévention et de promotion de la santé.

Comme vous l’avez indiqué, l’année dernière, un document de politique transversale sur ce sujet a été adopté, qui retrace l’effort financier du budget de l’État en faveur de cette politique publique. Cependant, ce document ne retrace pas les financements publics hors budget de l’État. Vous proposez donc, au travers de cet amendement, d’y remédier, notamment en prenant en compte les interventions des collectivités territoriales. Il est important, effectivement, de pouvoir disposer d’un tel document.

Vous faites également état des organismes complémentaires d’assurance maladie, qui sont des acteurs privés. Ce ne sont donc pas forcément des financements publics qui participent aux actions de prévention, et il pourrait être difficile d’obtenir des renseignements et des informations de la part de ces organismes. Il serait donc plus cohérent d’adopter l’amendement II-CF874, qui exclut les organismes complémentaires d’assurance maladie.

Avis défavorable à l’amendement II-CF875 et favorable à l’amendement II-CF874.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. L’amendement II-CF874 est un amendement par défaut. Il y a des financements publics qui vont aux organismes complémentaires. Il me paraît intéressant de connaître l’ensemble des dépenses publiques dédiées à la prévention et ce qui est engagé et utilisé par le secteur privé. C’est pourquoi je maintiens l’amendement II‑CF875.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. J’entends bien que des fonds publics peuvent passer par des organismes complémentaires d’assurance maladie. Il n’en demeure pas moins que ces organismes sont des acteurs privés. Obtenir des renseignements ou des informations de leur part me semble donc difficile.

Mme Émilie Cariou. Nous allons suivre l’avis de madame Louwagie, étant entendu que la discussion aura lieu sur l’amendement plus complet avec la ministre, en séance publique. De fait, madame Tamarelle-Verhaeghe, ce que vous proposez cette année est cohérent avec ce que vous avez obtenu l’année dernière. Cela permettrait d’avoir une vision exhaustive et de savoir où il y a encore des leviers d’action.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Qui peut le plus peut le moins : demander le retour des financements qui vont vers des organismes privés, si tant est qu’il soit difficile à obtenir, ne met pas en défaut le jaune budgétaire. Comme des fonds publics servent à ces organismes complémentaires, il est juste qu’ils aient des comptes à rendre et qu’on puisse en avoir l’appréhension.

M. le président Éric Woerth. Par principe, les jaunes budgétaires récapitulent des politiques publiques, mais n’intègrent jamais des politiques privées. Celles-ci peuvent venir en supplément dans des missions d’ordre général, mais ce n’est pas à l’État de publier dans un jaune le récapitulatif de dépenses qui sont hors de la sphère publique.

Successivement, la commission rejette lamendement II-CF875 et adopte lamendement II-CF874 (amendement II-898).

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Après l’article 78

La commission examine lamendement II-CF906 de la rapporteure spéciale.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Il s’agit de demander au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 1er septembre 2020, un rapport sur l’évolution du coût total de la couverture des soins des étrangers en situation irrégulière, en incorporant tous les crédits budgétaires relevant de l’aide médicale d’état de droit commun, du dispositif soins urgents, du dispositif en vigueur à Mayotte, du dispositif de la PUMA pour les demandeurs d’asile et déboutés du droit d’asile, et les créances irrécouvrées dans les hôpitaux qui concernent des personnes en situation irrégulière.

Sans état des lieux de l’ensemble du dispositif, appréhendé sous l’angle économique aussi bien que sanitaire, nous ne pourrons pas avoir la vision globale indispensable.

La commission rejette lamendement II-CF906.

Elle en vient à lamendement II-CF905 de la rapporteure spéciale.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Cette fois, le rapport qu’il est demandé au Gouvernement de remettre au Parlement avant le 1er septembre 2020 porte sur le coût des dépenses de santé des étrangers en situation irrégulière à Mayotte.

Mme Christine Pires Beaune. Avant que nous ne votions sur ce dernier amendement, je souhaite faire part de mon approbation concernant l’appréciation de madame Louwagie sur l’existence même de la mission. Il convient, en effet, de s’interroger sur l’intégration de ces deux programmes dans le budget de la sécurité sociale.

Les pages 12 et 13 du bleu budgétaire ne mentionnent pas d’indicateurs sur l’année 2018. Or l’espérance de vie en bonne santé, par exemple, est un indicateur important dans la perspective d’une réforme sur les retraites.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Votre remarque est tout à fait pertinente. C’est un débat que nous avons eu ici, il y a quelques jours, lors de l’examen de l’article 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous devons nous interroger sur les transferts qui peuvent exister, sur le maintien ou non des compensations, sur le fait que le transfert des crédits affectés à des opérateurs ne pèse plus, un jour peut-être, sur les dépenses de l’État mais sur les dépenses de la sécurité sociale et que ces dépenses ne soient pas financées de la même manière. C’est une vraie interrogation quand nous voyons des crédits budgétaires évoluer entre le projet de loi et le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Je partage votre deuxième remarque. Chaque année, je fais état des éléments d’information qui nous manquent dans ce que nous fournit l’État. Un diagnostic sur un sujet délicat comme celui de l’aide médicale d’État serait nécessaire, et je regrette ce manque d’information.

La commission rejette lamendement II-CF905.

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Solidarité, insertion et égalité des chances

Après l’article 78

Lors de sa réunion du 25 octobre 2019 matin, la commission est saisie de lamendement II-CF1024 de la rapporteure spéciale.

Mme Stella Dupont. Cet amendement d’appel propose une expérimentation pour que le dispositif d’aide sociale à la réinsertion des migrants trouve enfin son public. C’est un dispositif très peu sollicité alors que le public auquel il s’adresse a besoin de cet accompagnement social.

La commission rejette lamendement II-CF1024.

Elle est saisie de lamendement II-CF492 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

M. Bruno Duvergé. Cet amendement vise à demander la création d’un jaune budgétaire consacrée à la politique de prise en charge de la perte d’autonomie et de la dépendance. À l’heure où s’ouvrent les débats sur ces sujets qui feront bientôt l’objet d’un projet de loi, il apparaît nécessaire de disposer d’une réelle lisibilité des dépenses engagées pour lutter contre la perte d’autonomie et prendre en charge la dépendance, afin de piloter efficacement ce sujet stratégique.

Mme Stella Dupont, rapporteure spéciale. Cet amendement sollicite la création d’une nouvelle annexe au PLF portant sur la prise en charge de la perte d’autonomie et la dépendance. À titre personnel, j’estime cette proposition intéressante, car nous avons besoin d’améliorer la lisibilité des politiques conduites. Cependant, ces politiques sont partagées entre de nombreuses collectivités et, au sein de l’État, réparties entre le PLF et le PLFSS. L’essentiel figure d’ailleurs dans le PLFSS, le PLF ne contient que peu de mesures.

Il serait intéressant que vous exposiez cet amendement au ministre présent en séance pour qu’il vous dise quelles évolutions il est possible d’engager, mais votre proposition est techniquement complexe, car PLF et PLFSS sont indépendants.

Mme Christine Pires Beaune. Une annexe budgétaire sur la dépendance serait beaucoup plus justifiée au PLFSS qu’au PLF.

La commission rejette lamendement II-CF492.

Elle passe à lamendement II-CF876 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement tend à instaurer une nouvelle annexe au PLF pour évaluer ex ante l’impact du budget sur les inégalités socio-économiques au sein de la population.

Ce jaune budgétaire, complétant celui récemment consacré à la transition écologique, éclairerait les parlementaires et la société civile quant aux effets des choix budgétaires sur le pouvoir d’achat – et plus globalement le pouvoir de vivre – des ménages. Comportant une analyse par centile et un gros plan sur les 10 % de citoyens les plus pauvres, il détaillerait l’influence des mesures budgétaires sur leur accès aux droits fondamentaux.

Un tel document serait essentiel dans un contexte où la transition écologique implique le bouleversement de certains équilibres socio-économiques – tout le monde a en tête la crise des gilets jaunes – dont les conséquences doivent être anticipées au mieux au moment de l’examen du texte par le Parlement.

Cette mesure a été travaillée avec plusieurs organisations du pacte du pouvoir de vivre, notamment Oxfam, ATD quart-monde, Réseau action climat et le Secours catholique. Elle marquerait une avancée vers la transition écologique et solidaire.

Mme Stella Dupont, rapporteure spéciale. Il s’agit d’un amendement intéressant, très ambitieux, peut-être trop exigeant, qui interroge la distinction entre une mesure de pouvoir d’achat des ménages et une mesure de solidarité. Ainsi, les augmentations de l’allocation pour adulte handicapé et de la prime d’activité sont-elles des mesures de solidarité ou de pouvoir d’achat ?

En l’état, la rédaction de cet amendement me semble manquer de précision, il faudrait creuser la question, étudier les données, car je crains qu’il ne permette pas d’aboutir à un rendu utile.

Mme Christine Pires Beaune. Je soutiens cet amendement. Je pense justement que son intérêt est de porter un regard sur les effets du PLF et du PLFSS dans leur globalité.

Il serait intéressant de l’adopter pour que le Gouvernement donne sa position en séance à un amendement de la commission des finances. Tous les ans, au moment du débat budgétaire, nous attendons la sortie des statistiques de l’INSEE, des rapports de l’Institut des politiques publiques et de différents think tanks. Il serait intéressant de disposer d’un rapport remis par le Gouvernement.

M. Matthieu Orphelin. La proposition est effectivement de mesurer l’ensemble de l’impact du PLF et du PLFSS sur le pouvoir de vivre des citoyens, sans s’en tenir aux mesures définies comme mesures de pouvoir d’achat, mais en analysant toutes les mesures importantes dont l’impact sur le budget de l’État est supérieur à 50 millions d’euros.

Pourrions-nous travailler ensemble à une meilleure rédaction en vue de la séance ? Nous avons besoin de ces outils méthodologiques statistiques et de l’analyse au centile, et d’un vrai outil de pilotage de la globalité des politiques publiques.

Mme Émilie Cariou. Je partage l’avis de la rapporteure spéciale, cet amendement est intéressant, mais trop ambitieux. Nous disposons déjà de l’expertise apportée par les missions d’évaluation et de contrôle, et des rapports de la Cour des comptes, dont les analyses pourraient être enrichies d’un regard sociologique.

Par ailleurs, sous la législature précédente, il a été décidé d’ouvrir les données publiques aux chercheurs. Il peut être intéressant d’associer les chercheurs aux travaux du Gouvernement, comme le fait l’Institut des politiques publiques, auquel la commission des finances a déjà commandé des études. À ce stade, cet amendement est trop ambitieux, nous devrions d’abord renforcer les outils dont nous disposons en apportant une vision sociologique de l’effet des mesures.

M. le président Éric Woerth. De nombreuses données sont disponibles aujourd’hui, comme l’a rappelé madame Pires Beaune. Traditionnellement, l’Institut des politiques publiques fait ce travail, de même que l’INSEE, dont le directeur général a déjà eu l’occasion de nous présenter certaines analyses.

Mais le retraitement de ces données peut exiger un travail de recherche approfondi.

Mme Stella Dupont, rapporteure spéciale. Je comprends l’intérêt d’une vision transversale englobant le PLF et le PLFSS, nous l’évoquions à propos de la dépendance, bien que dans ce cas, l’essentiel des mesures se trouve dans le PLFSS. Mais la rédaction de votre amendement va très loin. Il est certainement intéressant d’enrichir ce qui existe déjà, comme le propose madame Cariou. Je veux bien en discuter avec vous, sans garantir que nous aboutirons à une rédaction finalisée pour la séance, car il faut que la proposition soit concrètement faisable. Aujourd’hui, la définition même des mesures de pouvoir d’achat requiert un important travail, beaucoup doit encore être fait avant d’aboutir.

M. Matthieu Orphelin. Je vous remercie, et je retire l’amendement dans l’espoir d’aboutir à une rédaction satisfaisante en séance.

Lamendement II—CF876 est retiré.

La commission est saisie de lamendement II-CF774 de M. Gaël Le Bohec.

Mme Stella Dupont, rapporteure spéciale. Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur la mise en place de la tarification sociale des cantines par les collectivités territoriales, décidée dans la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.

J’ai cosigné cet amendement, intéressant, mais il me semble que l’échéance au 1er septembre 2020 est très rapprochée.

Mme Nadia Hai. C’est trop tôt !

M. le président Éric Woerth. Dans quel budget trouve-t-on les 2 euros que verse l’État pour cette mesure ?

Mme Stella Dupont, rapporteure spéciale. Dans cette mission budgétaire, au programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes. C’est d’ailleurs intéressant en termes de lisibilité : la totalité des crédits consacrés à la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté sont regroupés dans cette mission.

M. Christophe Jerretie. Très peu de communes bénéficient de cette mesure, nous connaissons la liste.

Mme Stella Dupont. En effet, peu de communes sont concernées, puisque la mesure ne s’applique qu’aux communes DSR-cible, donc les communes rurales les plus pauvres. Mais cette mesure est récente, il est encore tôt pour évaluer son application. C’est pourquoi je ne suis pas sûre que l’échéance du 1er septembre 2020 soit pertinente.

La commission rejette lamendement II-CF774.

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*     *

Travail et emploi

Article 79
Recentrage des dispositifs dexonération spécifique en faveur des aides à domicile intervenant auprès de publics fragiles

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Travail et emploi, qui ont été examinés par la Commission le 22 octobre 2019 soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (Mme Marie-Christine Verdier‑Jouclas, rapporteure spéciale) ([411]).

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*     *

La commission est saisie des amendements de suppression II-CF5 de M. Vincent Descoeur, II-CF53 de la rapporteure spéciale, II-CF312 de M. Mohamed Laqhila et IICF426 de Mme Lise Magnier.

M. Jean-Louis Masson. Après la hausse de la contribution sociale généralisée sur les retraites et la désindexation des pensions de retraite, l’article 79 prévoit de supprimer l’exonération des cotisations sociales dont bénéficient les personnes âgées de plus de 70 ans pour l’emploi d’une personne à domicile. Cette mesure représente une nouvelle atteinte aux revenus et au pouvoir d’achat des retraités. Elle nous paraît contre-productive, puisqu’elle risque de provoquer le licenciement d’aides à domicile et qu’elle entre en contradiction avec la volonté politique de maintenir les personnes âgées à domicile.

Le 24 septembre, en réponse à Gilles Lurton qui l’alertait sur les conséquences de cette mesure, le Premier ministre s’est engagé à la retirer du projet de loi. L’amendement II‑CF5 vise à faire respecter cet engagement.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, rapporteure spéciale. L’amendement II‑CF53, comme les amendements identiques déposés par tous les groupes, vise à concrétiser l’engagement pris par le Premier ministre lors des questions au Gouvernement. Lors de la séance, nous laisserons à la ministre du travail le soin de proposer une contrepartie. Aujourd’hui, nous prenons date en supprimant cet article.

La commission adopte les amendements de suppression II-CF5, II-CF53, II-CF312 et IICF426 (amendement II-876).

En conséquence, larticle 79 est supprimé.

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*     *

Article 80
Recentrage de laide aux créateurs et repreneurs dentreprises sur son public cible

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Travail et emploi, qui ont été examinés par la Commission le 22 octobre 2019 soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (Mme Marie-Christine Verdier‑Jouclas, rapporteure spéciale) ([412]).

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*     *

La commission adopte larticle 80 rattaché, sans modification.

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*     *

Au cours de sa séance du 7 novembre 2019, la commission adopte la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 ainsi modifiée.

Puis elle adopte lensemble du projet de loi de finances pour 2020 ainsi modifié.

 


—  1  —

ANNEXE :

LISTE DES RAPPORTS SPÉCIAUX ANNEXÉS AU RAPPORT GÉNÉRAL SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2020

 

Rapports spéciaux PLF 2019

Rapporteurs

Date de la réunion de la commission des finances

1. Action extérieure de lÉtat

M. Vincent LEDOUX

Vendredi 25 octobre
15 h 00

2. Action extérieure de lÉtat : Tourisme

Mme  Émilie BONNIVARD

Vendredi 25 octobre
15 h 00

3. Administration générale et territoriale de lÉtat

M. Jacques SAVATIER

Jeudi 24 octobre
9 h 30

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales :

4. Politiques de l’agriculture, forêt, pêche et aquaculture ; Développement agricole et rural

5. Sécurité alimentaire

 

 

M. Hervé PELLOIS

 

M. Michel LAUZZANA

Mardi 22 octobre
18 h 30

6. Aide publique au développement ; Prêts à des États étrangers

M. Marc LE FUR

Mercredi 23 octobre
9 h 30

7. Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

M. Jean-Paul DUFRÈGNE

Mercredi 23 octobre
21 h 00

Cohésion des territoires :

8. Logement et hébergement d’urgence

9. Politique des territoires

 

M. François JOLIVET

M. Mohamed LAQHILA

Jeudi 24 octobre
21 h 00

10. Conseil et contrôle de lÉtat

M. Daniel LABARONNE

Vendredi 25 octobre
15 h 00

Culture :

11. Création ; transmission des savoirs et démocratisation de la culture

12. Patrimoines

 

Mme Dominique DAVID

 

M. Gilles CARREZ

Mercredi 23 octobre
21 h 00

Défense :

13. Préparation de l’avenir

14. Budget opérationnel de la défense

 

M. François CORNUT-GENTILLE

M. Olivier GAILLARD

Mercredi 23 octobre
21 h 00

15. Direction de laction du Gouvernement ; Publications officielles et information administrative. Investissements davenir

Mme Marie-Christine DALLOZ

Vendredi 25 octobre
15 h 00

Écologie, développement et mobilité durables :

16. Paysage, eau et biodiversité ; Prévention des risques ; Expertise, information géographique et météorologie ; Conduite et pilotage des politiques

17. Affaires maritimes

18. Énergie, climat et après-mines ; Service public de l’énergie ; Financement des aides aux collectivités pour lélectrification rurale ; Transition énergétique

19. Infrastructures et services de transports ; Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ; Aides à lacquisition de véhicules propres ; Contrôle et exploitation aériens

 

 

M. Éric COQUEREL

 

 

M. Saïd AHAMADA

 

 

M. Julien AUBERT

 

 

 

Mme Anne-Laure CATTELOT

M. Benoit SIMIAN

 

Jeudi 24 octobre
15 h 00

Économie :

20. Développement des entreprises et du tourisme ; Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

21. Commerce extérieur

22. Statistiques et études économiques ; Stratégie économique et fiscale ; Accords monétaires internationaux

 

 

Mme Olivia GRÉGOIRE

M. Xavier ROSEREN

 

Mme Nicolas FORISSIER

 

M. Benoît POTTERIE

M. François ANDRÉ

Mercredi 23 octobre
15 h 00

23. Engagements financiers de lÉtat

Mme Bénédicte PEYROL

Mercredi 23 octobre
15 h 00

24. Enseignement scolaire

Mme Catherine OSSON

Mardi 22 octobre
21 h 00

Gestion des finances publiques et des ressources humaines :

25. Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local ; Facilitation et sécurisation des échanges. Conduite et pilotage des politiques économiques et financières ; Action et transformation publiques

26. Fonction publique ; Crédits non répartis

 

27. Gestion du patrimoine immobilier de lÉtat

 

 

 

 

M. Laurent SAINT-MARTIN

 

 

 

M. Philippe CHASSAING

Mme Valérie PETIT

 

M. Jean-Paul MATTEI

Mercredi 23 octobre
9 h 30

28. Immigration, asile et intégration

M. Alexandre HOLROYD

M. Jean-Noël BARROT

Mercredi 23 octobre
9 h 30

29. Justice

M. Patrick HETZEL

Mercredi 23 octobre
9 h 30

30. Médias, livre et industries culturelles ; Avances à laudiovisuel public

Mme Marie-Ange MAGNE

Mercredi 23 octobre
21 h 00

31. Outremer

M. Olivier SERVA

Jeudi 24 octobre
15 h 00

32. Pouvoirs publics

M. Patricia LEMOINE

Vendredi 25 octobre
15 h 00

Recherche et enseignement supérieur :

33. Recherche

 

34. Enseignement supérieur et vie étudiante

 

M. Francis CHOUAT

M. Benjamin DIRX

M. Fabrice LE VIGOUREUX

Mardi 22 octobre
21 h 00

35. Régimes sociaux et de retraite ;
Pensions

M. Olivier DAMAISIN

Vendredi 25 octobre
9 h 30

36. Relations avec les collectivités territoriales ; Avances aux collectivités territoriales

M. Jean-René CAZENEUVE

M. Christophe JERRETIE

Jeudi 24 octobre
9 h 00

37. Remboursements et dégrèvements

Mme Christine PIRES BEAUNE

Mercredi 23 octobre
9 h 30

38. Santé

Mme Véronique LOUWAGIE

Vendredi 25 octobre
9 h 30

Sécurités

39. Police, gendarmerie, sécurité routière, Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

40. Sécurité civile

 

 

M. Romain GRAU

Mme Nadia HAI

 

Mme Bruno DUVERGÉ

Vendredi 25 octobre
9 h 30

41. Solidarité, insertion et égalité des chances

Mme Stella DUPONT

Vendredi 25 octobre
9 h 30

42. Sport, jeunesse et vie associative

Mme Perrine GOULET

Mme Sarah EL HAÏRY

Jeudi 24 octobre
21 h 00

43. Travail et emploi ; Financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage

Mme Marie-Christine VERDIER‑JOUCLAS

Mardi 22 octobre
21 h 00

44. Participations financières de lÉtat ; Participation de la France au désendettement de la Grèce ; Avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

Mme Valérie RABAULT

Mercredi 23 octobre
15 h 00

45. Affaires européennes

M. Xavier PALUSZKIEWICZ

 

 


([1]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([2]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([3]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([4]) Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

([5]) Loi n° 73-1150 du 27 décembre 1973 de finances pour 1974.

([6]) Arrêté du 24 janvier 2011 portant abrogation des arrêtés des 3 mars 1982 et 30 avril 1999 modifiés fixant la liste des établissements et organismes de diffusion culturelle et d’enseignement dotés de l’autonomie financière.

([7]) Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, article 72.

([8]) Loi précitée, article 106.

([9]) Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. L’article 52 de cette loi a abrogé l’article 106 de la loi de finances pour 2012.

([10]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([11]) Article 1er de l’ordonnance n° 2019-761 du 24 juillet 2019 relative au régulateur des redevances aéroportuaires.

([12]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

([13]) Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.

([14]) Communication de la Commission relative aux lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale pour la période 2014-2020, du 23 juillet 2013, n° 2013/C 209/01.

([15]) Décision de la Commission n° C (2014) 2609 du 7 mai 2014 relative à la carte française des aides à finalité régionale pour la période 2014-2020 et décision de la Commission n° C (2017) 723 du 10 février 2017 relative à la deuxième utilisation de la réserve de population, modifiant la carte des zones d’aide à finalité régionale pour la période 2014-2020.

([16]) Décret n° 2017-648 du 26 avril 2017 modifiant le décret n° 2014-758 du 2 juillet 2014 relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des petites et moyennes entreprises pour la période 2014-2020.

([17]) Ces zones sont dites « a » car elles relèvent du point a) du paragraphe 3 de l’article 107 du traité de fonctionnement de l’Union européenne : « les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi (…) compte tenu de leur situation structurelle, économique et sociale ».

([18]) Ces zones sont dites « c » car elles relèvent du point c) du paragraphe 3 de l’article 107 du traité de fonctionnement de l’Union européenne : « les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun ».

 

([19]) Décret n° 2014-758 du 2 juillet 2014 relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des petites et moyennes entreprises pour la période 2014-2020, article 3.

([20]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, article 2.

([21]) Loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire, article 42.

([22]) Loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, annexe.

([23]) Décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes et décret n° 96-1155 du 26 décembre 1996 portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes des départements d’outre-mer.

([24]) Décret n° 97-1323 du 31 décembre 1997 modifiant le décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes et décret n° 97-1322 du 31 décembre 1997 modifiant le décret n° 96-1155 du 26 décembre 1996 portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes des départements d’outre-mer.

([25]) Décret n° 2001-706 du 31 juillet 2001 complétant le décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 modifié portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes.

([26]) Décret n° 2004-219 du 12 mars 2004 portant délimitation des zones franches urbaines créées en application de l’article 23 de la loi du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

([27]) Décret n° 2006-1623 du 19 décembre 2006 portant délimitation des zones franches urbaines créées en application de l’article 26 de la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances.

([28]) Loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, article 26.

([29]) Décret n° 2007-894 du 15 mai 2007 modifiant le décret n° 96-1154 du 26 décembre 1996 et le décret n° 2004-219 du 12 mars 2004 portant délimitation de zones franches urbaines dans certaines communes.

([30]) Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, article 5.

([31]) Décret n° 2014-767 du 3 juillet 2014 relatif à la liste nationale des quartiers prioritaires de la politique de la ville et à ses modalités particulières de détermination dans les départements métropolitains.

([32]) Décret n° 2014-1750 du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les départements métropolitains.

([33]) Décret n° 2014-1751 du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les départements d’outre-mer, à Saint-Martin et en Polynésie française.

([34]) Décret n° 2015-1138 du 14 septembre 2015 rectifiant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville.

([35]) Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, article 50.

([36]) Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, article 45.

([37]) Arrêté du 16 mars 2017 constatant le classement de communes en zone de revitalisation rurale et arrêté du 22 février 2018 modifiant l’arrêté du 16 mars 2017 constatant le classement de communes en zone de revitalisation rurale.

([38]) Loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, article 7.

([39]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, article 27.

([40]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 19.

([41]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 135.

([42]) Arrêté du 11 mars 2019 constatant le classement de communes en zone de développement prioritaire.

([43]) Décret n° 2007-228 du 20 février 2007 fixant la liste des bassins d’emploi à redynamiser et les références statistiques utilisées pour la détermination de ces bassins d’emploi.

([44]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 21.

([45]) Arrêté du 14 février 2018 constatant le classement de communes en bassin urbain à dynamiser et arrêté du 11 avril 2019 modifiant l’arrêté du 14 février 2018 constatant le classement de communes en bassin urbain à dynamiser.

([46]) Conseil d’État, 29 avril 2002, n° 234133.

([47]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, article 11.

([48]) Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.

([49]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

([50]) Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.

([51]) Cf. commentaire, dans le présent rapport général, de l’article 47 relatif à l’exonération de contribution économique territoriale et de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des activités commerciales situées dans des communes rurales isolées.

([52]) Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, article 157.

([53]) Circulaire du 4 février 2019 relative à l’accompagnement par l’État des projets d’aménagement des territoires.

([54]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 226.

([55]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, annexe I, article 2.

([56]) Conseil d’État, 29 avril 2002, n° 234133.

([57]) Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.

([58]) Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et Inspection générale des finances (IGF), La revitalisation commerciale des centres-villes, n° 2016-M-022 (IGF) et n° 010404-01 (CGEDD), juillet 2016.

([59]) Fédération pour la promotion du commerce spécialisé, Palmarès Procos 2019 des centres-villes commerçants, février 2019.

([60]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, point 1 de l’article 2 de l’annexe I.

([61]) Loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 150.

([62]) Voir ainsi BOFiP, BOI-BIC-RICI-10-10-20-30, § 225 et 227.

([63]) OCDE, Manuel de Frascati  Méthode type proposée pour les enquêtes sur la recherche et le développement expérimental, 2002, pages 35‑37.

([64]) Loi n° 2017‑1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([65]) Loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 151.

([66]) Joël Giraud, Rapport dinformation sur l’application des mesures fiscales, Assemblée nationale, XVe législature,  2169, 17 juillet 2019, pages 143‑152.

([67]) France Stratégie, Commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation, Limpact du crédit dimpôt recherche, mars 2019.

([68]) EY, Baromètre de lattractivité de la France  La France résiste aux chocs, juin 2019.

([69]) Cour des comptes, Lévolution et les conditions de maîtrise du crédit dimpôt en faveur de la recherche, juillet 2013, page 154.

([70]) Cour des comptes, rapport précité, page 156.

([71]) Assemblée nationale, XVe législature, session extraordinaire de 2018-2019, compte rendu intégral de la séance du jeudi 11 juillet 2019.

([72]) Joël Giraud, rapport précité, pages 156‑157.

([73]) Joël Giraud, Rapport d’information sur l’application des mesures fiscales, Assemblée nationale, XVe législature,  1172, 18 juillet 2018, pages 234‑236.

([74]) Joël Giraud, rapport précité n° 2169, page 154.

([75]) BOFiP, BOI-BIC-RICI-10-10-60, § 80 et 90, version du 13 février 2019, et BOI-RIC-RICI-10-10-60, version du 17 avril 2019.

([76]) Loi n° 2017‑1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

([77]) Joël Giraud, rapport précité n° 2169, pages 156‑157.

([78]) Joël Giraud, rapport précité n° 2169, pages 154‑156.

([79]) Cour des comptes, rapport précité, page 158.

([80]) Cour des comptes, rapport précité, pages 159‑160.

([81]) Joël Giraud, rapport précité n° 2169, pages 156‑157 ; Joël Giraud, rapport précité n° 1172, pages 234‑235.

([82]) Cour des comptes, rapport précité, page 62.

([83]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 précité, point 2 de l’article 2 de l’annexe I.

([84]) Cf. supra, I, A, 2, c.

([85]) Cour des comptes, rapport précité, pages 143‑144.

([86]) Joël Giraud, rapport précité n° 2169, pages 161‑163.

([87]) Joël Giraud, rapport précité n° 2169, pages 158‑161.

([88]) CAA Paris, 29 novembre 2018, Société Hays France, n° 18PA00276.

([89]) BOFiP, BOI-BIC-RICI-10-10-20-30, § 240.

([90]) Amendement n° II‑CF1563  du Rapporteur général.

([91]) Amendement n° II‑CF1550  du Rapporteur général.

([92]) Amendement n° II‑CF1431 du Rapporteur général et de Mme Natalia Pouzyreff.

([93]) Ordonnance n° 58‑882 du 25 septembre 1958 relative à la fiscalité en matière de recherche scientifique et technique 

([94]) Loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

([95]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

([96]) Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis ; règlement (UE) n° 1408/2013 de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis dans le secteur de l’agriculture ; règlement n° 717/2014 de la Commission du 27 juin 2014 concernant l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture.

([97]) Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture, Convention du 14 mai 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé.

([98]) Loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([99]) Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP), BOIBICRICI20301020, § 120.

([100]) Id., § 180.

([101]) BOFiP, BOIIRRICI25020, § 90.

([102]) Charities Aid Foundation, Donation States  An international comparison of the tax treatment of donations, mai 2016.

([103]) Cour des comptes, Le soutien public au mécénat des entreprises  Un dispositif à mieux encadrer, novembre 2018, page 63.

([104]) Cour des comptes, rapport précité, pages 35‑36.

([105]) Id., pages 105‑112.

([106]) Joël Giraud, Rapport sur l’application des mesures fiscales, XVe législature,  2169, 17 juillet 2019, page 176.

([107]) Cour des comptes, rapport précité, page 79.

([108]) BOFiP, BOI-IR-RICI-250-30, § 50.

([109]) BOFiP, BOIBICRICI20-30-30, § 90 à 120.

([110]) Amendement  I2993 présenté par M. Giraud, Rapporteur général au nom de la commission des finances.

([111]) Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2020, article 50, page 367.

([112]) PLF 2020 : Baisser les impôts, préparer lavenir, 27 septembre 2019, page 70.

([113]) Cour des comptes, rapport précité, pages 71‑73.

([114]) Admical, Le mécénat d’entreprise en France  Baromètre Admical, octobre 2018, page 6.

([115]) Id., page 16.

([116]) Id., page 4.

([117]) Id., page 17.

([118]) Joël Giraud, rapport précité, page 176.

([119]) Évaluation préalable du présent article, page 364.

([120]) Loi n° 2016‑1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.

([121]) Accord professionnel Agents de voyages et de tourisme du 29 avril 2016 relatif aux salariés sous contrat à durée déterminée d’usage.

([122]) Arrêté du 4 mai 2017 portant extension d’un accord relatif aux salariés employés sous contrat à durée déterminée d’usage dans le secteur des agences de voyage et de tourisme.

([123]) IGAS, Évaluation du contrat à durée déterminée dit d’usage, Étienne Marie et Vincent Jaouen,  2015049R, décembre 2015, pages 20‑32.

([124]) IGAS, rapport précité, pages 75‑78.

([125]) Id., pages 63‑66.

([126]) Id., page 70.

([127]) Id. page 85.

([128]) Évaluation préalable du présent article.

([129]) Convention du 14 avril relative à l’assurance chômage.

([130]) Arrêté du 4 mai 2017 portant agrément de la convention du 14 avril 2017 relative à l’assurance chômage et de ses textes associés.

([131]) Décret n° 2019‑797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage.

([132]) Unédic, Impact de la réforme de l’assurance chômage 2019, septembre 2019, page 5.

([133]) Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), 25 juin 1970, Gouvernement de la République française c. Commission des Communautés européennes, 47/69, point 7.

([134]) CJCE, 17 juin 1999, Royaume de Belgique c. Commission des Communautés européennes, C-75/97, point 33.

([135]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

([136]) CJCE, affaire C-75/97 précitée, point 33.

([137]) Unédic, document précité, page 5.

([138]) IGAS, rapport précité, synthèse, point 9, page 4.

([139]) Loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, article 34.

([140]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, article 30.

([141]) Loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, article 34.

([142]) Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, article 48.

([143]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, article 30.

([144]) Décret n° 2011-1267 du 10 octobre 2011 fixant les sous-groupes et catégories de locaux professionnels en vue de l’évaluation de leur valeur locative, codifié par le décret n° 2018-535 du 28 juin 2018 codifiant les dispositions relatives à la révision des valeurs locatives des locaux professionnels et aux commissions départementales des valeurs locatives des locaux professionnels à l’article 310 Q de l’annexe 2 du code général des impôts.

([145]) Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, article 48.

([146]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, article 30.

([147]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, article 30.

([148]) Décret n° 2018-1092 du 5 décembre 2018 portant mise à jour annuelle des tarifs et des valeurs locatives des locaux professionnels pris pour l’application de l’article 1518 ter du code général des impôts.

([149]) Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013, article 74.

([150]) Loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement.

([151]) Loi n° 96-1107 du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété, article premier, et décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, article 4-1.

([152]) Arrêté du 18 décembre 2014 fixant la liste des départements d’expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation prévue à l’article 74 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

([153]) Loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement.

([154]) J. Lamarque, O. Négrin, L. Ayrault, Droit fiscal général, LexisNexis, 4ème éd., 2016.

([155]) Première directive 67/227/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires.  

([156]) Deuxième directive 67/228/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires.  

([157]) Sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires.

([158]) Est assujetti, au sens de la TVA, une personne physique ou morale qui exerce une activité économique indépendante, en agissant en tant que tel, à titre habituel (art. 256 du CGI).

([159]) La fraude « carrousel » consiste, pour un opérateur, à réaliser une acquisition intracommunautaire détaxée suivie d’une revente interne taxable. Le montant de TVA perçu sur la revente n’est pas reversé à l’administration, car il est frauduleusement déduit d’une TVA amont qui n’a pas existé. En pratique, l’opérateur réitère cette opération de facturation plusieurs fois afin de dissimuler sous une cascade de déduction l’origine détaxée de l’acquisition du bien via l’acquisition intracommunautaire initiale.

([160]) Commission des Communautés européennes, Communication du 15 avril 1997, COM (97) 157.

([161]) Commission des Communautés européennes, Groupe de travail n°1 : harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires « impôts indirects et commerce électronique », Bruxelles, XXI/99/1201-FR-final, 8 juin 1999.

([162]) Business to consumer.

([163]) Business to business.

([164]) Directive 2002/38/CE du Conseil du 7 mai 2002 modifiant, en partie à titre temporaire, la directive 77/388/CEE en ce qui concerne le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux services de radiodiffusion et de télévision et à certains services fournis par voie électronique.

([165]) Directive 2008/9/CE du Conseil du 12 février 2008 définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par la directive 2006/112/CE, en faveur des assujettis qui ne sont pas établis dans l’État membre du remboursement, mais dans un autre État membre.

([166]) Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.  

([167]) Article 259 D du CGI.

([168]) Cf. l’article 256 bis, I-2° du CGI : à savoir une personne morale non assujettie, un assujetti qui ne réalise que des opérations ouvrant droit à déduction ou un exploitant agricole placé sous le régime du remboursement forfaitaire prévu aux articles 298 quater et 298 quinquies du CGI.

([169]) Le régime des ventes à distance ne s’applique ni aux moyens de transport neufs, ni aux produits soumis à accises, qui sont toujours taxables dans l’État d’arrivée, sans égard à un quelconque seuil.

([170]) Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.  

([171]) Loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, article 9.

([172]) Article 289 A du CGI.

([173]) Directive (UE) 2017/2455 du Conseil du 5 décembre 2017 modifiant la directive 2006/112/CE et la directive 2009/132/CE en ce qui concerne certaines obligations en matière de taxe sur la valeur ajoutée applicables aux prestations de services et aux ventes à distance de biens.

([174]) Loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([175]) Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, F. Lorentz, Commerce électronique, une nouvelle donne pour les consommateurs, les entreprises, les citoyens et les pouvoirs publics, 1998.

([176]) Consumer to consumer. 

([177]) Fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD), Les chiffres-clés 2019.

([178]) Sénat, Rapport d’information n°691 fait au nom de la commission des finances sur le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source, 2015.

([179]) Directive 2017/2455 du Conseil du 5 décembre 2017 précitée, §7.

([180]) D. Falco, La fraude à la TVA, Dalloz, 2019.

([181]) Directive n°83/181/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, déterminant le champ d’application de l’article 14 paragraphe 1 sous d) de la directive 77/388/CEE en ce qui concerne l’exonération de la valeur ajoutée de certaines importations définies de biens.  

([182]) European Commission, Assessment of the application and impact of the VAT exemption for importation of small consignments, may 2015.

([183]) Plus précisément, seule la situation des plateformes est modifiée dans ce cas : ces assujettis particuliers deviendront, à compter du 1er janvier 2021, redevables de la TVA à l’importation, sans préjudice de la responsabilité solidaire du destinataire réel des biens (v. infra).

([184]) Assessment of the application and impact of the VAT exemption for importation of small consignments, EY & Commission européenne, mai 2015.

([185])  Organisation de coopération et de développement économiques, Le rôle des plateformes numériques dans la collecte de la taxe sur la valeur ajoutée et la taxe sur les produits et services sur les ventes en ligne, mars 2019 (lien).

([186])  Arrêté du 27 décembre 2018 pris pour l’application de l’article 242 bis du code général des impôts (lien).

([187])  Arrêté du 27 décembre 2018 pris pour l’application de l’article 242 bis du code général des impôts (lien).

([188]) Joël Giraud, Rapport sur le projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés, XVème législature, n° 1838, 3 avril 2019 (lien).

([189]) Directive n° 2017/2455 du conseil du 5 décembre 2017 modifiant la directive 2006/112/CE et la directive 2009/132/CE en ce qui concerne certaines obligations en matière de taxe sur la valeur ajoutée applicables aux prestations de services et aux ventes à distance de biens (lien).

([190])  Dans certains cas, il peut également s’agir d’un acte notarié (en matière de TVA immobilière) ou encore de documents douaniers (en cas d’importation).

([191]) Directive n° 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA.

([192]) Article 25 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.

([193]) Loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

([194]) Les notions de GE, ETI, PME et microentreprises sont définies par l’article 3 du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique.

([195])  Conseil d’État, 21 mai 1976, n° 94052.

([196])  Study and Reports on the VAT Gap in the EU-28 Member States : 2019 Final Report (TAXUD / 2015 / CC / 131).

([197])  Arrêté du 21 février 2014 portant création par la direction générale des finances publiques d’un traitement automatisé de lutte contre la fraude dénommé « ciblage de la fraude et valorisation des requêtes » (lien).

([198]) Commission nationale informatique et libertés (CNIL), délibération n° 2019-114 du 12 septembre 2019 portant avis sur le projet d’article [57] du projet de loi de finances pour 2020 (lien).

([199]) M. Philippe Latombe, Rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2020, XVe législature, n° 2368, 30 octobre 2019 (lien).

([200]) Décision n° 99-424 DC du 29 décembre 1999, Loi de finances pour 2000, cons. 52.

([201])  Décision n° 2012-652 DC du 22 mars 2012, Loi relative à la protection de l’identité, cons. 8.

([202]) Le taux de déclaration et de recouvrement spontanés fait l’objet d’un indicateur de performance sur la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines

([203]) Évaluations préalables annexées au projet de loi de finances pour 2020, p. 432.

([204]) Évaluations préalables annexées au projet de loi de finances pour 2020, p. 433.

([205])  Loi du 31 janvier 1944 porte réforme de certaines dispositions du code général des impôts directs et du code de l’enregistrement.

([206]) La conchyliculture est étymologiquement l’élevage des coquillages, tels les huîtres et les palourdes.

([207])  Arrêté du 4 mars 2009 fixant le taux de prélèvement du fonds de prévention des risques naturels majeurs.

([208]) Il s’agit d’un contrat monosupport libellé en unités de compte dont au moins 33% de l’actif doit être investi dans le financement de PME ou ETI, le logement social ou encore l’économie sociale et solidaire (ESS). Les unités de compte peuvent être des FCPR (fonds commun de placement à risque), des OPC (organismes de placement collectif), des SCPI (sociétés civiles de placement immobilier) finançant le logement social. Les actifs éligibles pour bénéficier de l’abattement de 20 % prévu pour les contrats d’assurance vie dits Vie-Génération ainsi que les modalités d’appréciation et de contrôle des quotas d’investissement dans le cadre de ce nouveau contrat sont définis par le décret n° 2014-1011 du 5 septembre 2014.

([209])  Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

([210]) Décret n° 2018-1303 du 28 décembre 2018 modifiant le décret n° 2016-959 du 13 juillet 2016 relatif aux transferts d’actifs vers des engagements donnant lieu à constitution d’une provision de diversification.

([211])  Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

([212])  En matière communautaire, les notions idoines sont celles d’acquisition et de livraison intracommunautaires. Elles ne sont pas concernées par le présent commentaire.

([213]) Code des douanes de l’Union, article 70.

([214]) Projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2020, Mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Programme 302, Facilitation et sécurisation des échanges.  

([215]) Les contributions indirectes, depuis la loi des 7 et 11 septembre 1790, relèvent de la compétence du juge judicaire, traditionnellement considéré comme le juge protecteur du droit de propriété.

([216]) Article L 199 du livre des procédures fiscales, premier alinéa.

([217]) Article L 190 du livre des procédures fiscales.  

([218]) Article L 199 du livre des procédures fiscales, second alinéa ; article 357 bis du code des douanes.

([219]) Loi n°2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016

([220]) La notion d’assujetti n’est aucunement liée au fait que les opérations effectuées par un tel assujetti donnent lieu ou non à paiement effectif de la TVA : elle diffère en cela de la notion de redevable. Ainsi, une société qui bénéficie du régime de la franchise en base de TVA, si elle n’en est pas redevable, n’en constitue pas moins une entreprise assujettie.

([221]) Les recours en matière fiscale relèvent « par nature » du plein contentieux : CE, Sect., 29 juin 1962, Société des aciéries de Pompey.

([222]) Cour des comptes, Laction de la Douane dans la lutte contre les fraudes et les trafics, communication au Président de l’Assemblée nationale pour le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, janvier 2015.

([223])  L’essieu est l’axe d’un véhicule supportant deux roues à ses extrémités.

([224])  Centre national du cinéma et de l’image animée, rapport d’activité 2018 (lien).

([225])  Marie-Ange Magne, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2019, annexe n° 30, XVe législature, n° 1302, 11 octobre 2018 (lien).

([226])  Joël Giraud, Rapport d’information sur l’application des mesures fiscales, XVe législature, n° 2169, 17 juillet 2019 (lien).

 

([227])  L’hydromel est une boisson fermentée faite d’eau et de miel.

([228])  Rozenn Cren, Poursuites et sanctions en droit pénal douanier, thèse de doctorat soutenue le 16 novembre 2011 (lien).

([229])  Comité Action Publique 2022, Service public, se réinventer pour mieux servir, juin 2018 (lien).

([230]) Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : un rôle et une organisation à repenser », Rapport public annuel 2014, février 2014.

([231])  Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : des coûts trop élevés, une modernisation et une simplification à mettre en œuvre », Rapport public annuel 2018, février 2018.

([232])  Marie-Ange Magne, Rapport sur le projet de loi de règlement pour 2018, annexe n° 30, XVe législature, n° 1302, 5 juin 2019 (lien).

([233])  Conseil des prélèvements obligatoires, Les taxes affectées : des instruments à mieux encadrer, juillet 2018, p. 99.

([234]) Conseil constitutionnel, décision n° 2013-684 du 29 décembre 2013, Loi de finances rectificative pour 2013 et décision n° 2013-362 QPC du 6 février 2014, TF1 SA [Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision].

([235]) Conseil constitutionnel, décision n° 2016-620 QPC du 30 mars 2017, Société EDI-TV [Taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision].

([236]) L’article 26 de la loi n° 2019‑117 de finances pour 2019 a supprimé cette taxe pour les encaissements intervenant à compter du 1er janvier 2020.

([237]) M. Joël Giraud, rapport n° 432 sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017 (n° 384), Assemblée nationale, XVe législature, novembre 2017, pp. 429 et suivantes.

([238]) Loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 de finances pour 1984.

([239]) Loi n° 97‑1239 du 29 décembre 1997 de finances rectificative pour 1997.

([240]) Loi n° 2004–1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

([241]) Loi n° 2005‑1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

([242]) Loi n° 2007–1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007.

([243]) Loi n° 2010‑1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

([244]) Loi n° 2012‑1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

([245]) Loi n° 2013‑1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

([246]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

([247]) Conseil constitutionnel, décision n° 2013-684 du 29 décembre 2013, Loi de finances rectificative pour 2013 et décision n° 2013-362 QPC du 6 février 2014, TF1 SA [Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision].

([248]) Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

([249]) Ces services sont communément appelés « Replay ».

([250]) Pour mémoire, pour l’application de la TST‑E, un régisseur est une personne « regardée comme éditeur de services de télévision » d’après le troisième alinéa de l’article L. 115­6 du CCIA.

([251]) Article 20 de la loi n° 2011‑1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

([252]) Voir le commentaire de l’article 61 du présent rapport.

([253]) Loi n° 92-1376 du 30 décembre 1992 de finances pour 1993.

([254]) Loi n° 2003-517 du 18 juin 2003 relative à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs.

([255])  M. Daniel Eckenspieller, Rapport fait sur le projet de loi, modifié en première lecture par lAssemblée nationale, relatif à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque, Sénat, session ordinaire 2001-2002, n° 337, 4 juin 2003.

([256]) Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

([257]) Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([258]) Décret n° 2017-1364 du 20 septembre 2017 fixant l’entrée en vigueur des dispositions du III de l’article 30 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 et des I à III de l’article 56 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([259]) Conseil d’État, décision n° 376193 et suivantes, SAS Carrefour Hypermarchés et autres, 12 avril 2019.

([260]) Conseil constitutionnel, décision n° 2016-620 QPC du 30 mars 2017, Société EDI-TV [Taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision].

([261]) L’article 26 de la loi n° 2019‑117 de finances pour 2019 a supprimé cette taxe pour les encaissements intervenant à compter du 1er janvier 2020.

([262]) Loi n° 2017‑1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

([263]) Mme Marie‑Ange Magne, Annexe (n° 30) au rapport (n° 1990) de M. Joël Giraud sur le projet de loi de règlement du budget pour 2018 (n° 1947), Assemblée nationale, XVe législature, p. 27.

([264]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([265]) Selon le rapport précité de Mme Marie‑Ange Magne, le CNC retrace ses dépenses de soutien en engagements, donc au moment de la naissance de la créance.

([266]) Document stratégique de performance du CNC dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, Rapport et perspectives 2018-2020, octobre 2019.

([267]) Conseil supérieur de l’audiovisuel, Vidéos en ligne ou télévision chez les jeunes publics : une étude économétrique, janvier 2018.

([268]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([269]) Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

([270]) Décret n° 2009-796 du 23 juin 2009 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme France Télévisions.

([271]) Article 35 de la loi n° 2010‑1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

([272]) Réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

([273]) Affaire C-280/00, Altmark trans GmbH et Regierungspräsidium Magdeburg/Nahverkehersgesellschaft Altmark Gmbh. Les critères dégagés ont été précisés par la Communication de la Commission 2012/C 8/02 relative à l’application des règles de l’Union européenne en matière d’aides d’État aux compensations octroyées pour la prestation de services d’intérêt économique général.

([274]) Selon la communication 2012/C 8 /02 précitée.

([275]) Règlement (UE) n° 360/2012 de la Commission du 25 avril 2012 relatif à l’application des articles 107 et 108 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis accordées à des entreprises fournissant des services d’intérêt économique général.

([276]) Communication (2009/C 257/01) de la Commission concernant l’application aux services publics de radiodiffusion des règles relatives aux aides d’État.

([277]) Aide d’État N 279/2008 – France – Dotation en capital pour France Télévisions.

([278]) Ordonnance du 9 juin 2011, TF1, M6, Canal+/Commission, C-451/10 P ; arrêt du Tribunal du 1er juillet 2010, M6 et TF1/Commission, T-568/08 et T-573/08.

([279])  Voir le commentaire de l’article 31 du tome II du présent rapport, pp. 932 et suivantes.

([280]) Contrat de formation du 30 avril 1991 du Groupement européen d’intérêt économique de l’Association relative à la télévision européenne (Arte).

([281]) Sous-amendement n° 336 de M. Louis Giscard d’Estaing à l’amendement n° 298 du Gouvernement au projet de loi de finances pour 2012 (n°s 4028, 4071).

([282]) Compte rendu intégral, deuxième séance du mercredi 14 décembre 2011, Assemblée nationale, XIIIe législature, session ordinaire de 2011‑2012.

([283]) Directive (UE) 2018/1910 du Conseil du 4 décembre 2018 modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne l’harmonisation et la simplification de certaines règles dans le système de taxe sur la valeur ajoutée pour la taxation des échanges entre les États membres

([284]) Directive (UE) 2017/2455 du Conseil du 5 décembre 2017 modifiant la directive 2006/112/CE et la directive 2009/132/CE en ce qui concerne certaines obligations en matière de taxe sur la valeur ajoutée applicables aux prestations de services et aux ventes à distance de biens.  

([285]) Voir le commentaire de l’article 53, dans le tome I du présent rapport.

([286]) Document stratégique de performance du CNC dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, Soutien au cinéma, à l’audiovisuel et au multimédia : rapport et perspectives 2018-2020, p. 18.

([287])  Document stratégique de performance du CNC dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, Soutien au cinéma, à l’audiovisuel et au multimédia : rapport et perspectives 2018-2020, p. 4.

([288]) Directive 92/79/CEE du 19 octobre 1992 concernant le rapprochement des taxes frappant les cigarettes et directive 92/80/CEE du 19 octobre 1992 concernant le rapprochement des taxes frappant les tabacs manufacturés autres que les cigarettes.

([289])  Directive 2003/117/CE du Conseil en vue d’autoriser la République française à proroger l’application d’un taux d’accise réduit sur les produits du tabac mis à la consommation en Corse.  

([290]) Ibid. §3.

([291]) Directive 2011/64/UE du Conseil du 21 juin 2011 concernant la structure et les taux des accises applicables aux tabacs manufacturés.  

([292]) Loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 portant financement de la sécurité sociale pour 2018.

([293]) Collectivité de Corse, Rapport du président du conseil exécutif de Corse sur le budget primitif 2019.

([294]) Assemblée nationale, Olivier Veran, Rapporteur général, rapport n° 316 fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

([295]) Loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion.

([296]) M. Joel Giraud, Rapport fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2020, Tome II, n° 2272, XVe législature, Assemblée nationale, 10 octobre 2019.

([297]) Décret n° 2019-400 du 2 mai 2019 portant revalorisation du montant forfaitaire du revenu de solidarité active.

([298]) Relevé de conclusions de la réunion du mardi 16 juillet 2013 organisée à l’Hôtel de Matignon.

([299]) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, articles 42, 77 et 78.

([300]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 81.

([301]) M. Christian Eckert, Rapport fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2014, Assemblée nationale, XIV législature, tome II, n° 1428, 10 octobre 2013.

([302]) Compte rendu intégral des débats, deuxième séance du lundi 21 octobre 2013, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 119, 2013.

([303]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 81.

([304]) M. Christian Eckert, Rapport fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2014, Assemblée nationale, XIV législature, tome II, n° 1428, 10 octobre 2013.

([305]) Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, article 116.

([306]) Rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), Les finances des collectivités locales en 2019, état des lieux, juillet 2019.

([307]) Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, article 116.

([308]) Décision n° 2011-142/145 QPC du 30 juin 2011, Départements de la Seine-Saint-Denis et autres [Concours de lÉtat au financement par les départements du RMI, du RMA et du RSA].

([309]) Conseil d’État, n° 409286, 21 février 2018.

([310]) Projet de loi de finances pour 2014 renvoyé à la commission des finances, exposé général des motifs, texte n° 1395, 25 septembre 2013.

([311])  Annexe au projet de loi de finances pour 2014, Évaluations préalables des articles, article 26.

([312]) Compte rendu de la commission des finances, jeudi 10 octobre 2013, séance de 14 heures 30, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 8, 2013.

([313]) Conseil d’État, n° 409286, 21 février 2018.

([314]) Décision n° 2013-366 QPC du 14 février 2014, SELARL PJA, ès qualités de liquidateur de la société Maflow France [Validation législative des délibérations des syndicats mixtes instituant le « versement transport »].

([315]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, article 81.

([316]) Article 76 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([317]) Créé par le décret n° 2018-1334 du 28 décembre 2018 relatif aux conditions d’agrément et de financement des entreprises adaptées ainsi qu’aux modalités d’accompagnement spécifique de leurs salariés en situation de handicap.

([318]) Décret n° 2019‑39 du 23 janvier 2019 relatif à la détermination des proportions minimale et maximale de travailleurs reconnus handicapés dans l’effectif salarié des entreprises adaptées, à la mise à disposition de ces travailleurs dans une autre entreprise.

([319]) Modifié par le décret n° 2018-1334 du 28 décembre 2018 précité.

([320]) Décret n° 2018-990 du 14 novembre 2018 relatif à l’expérimentation par les entreprises adaptées d’un accompagnement des transitions professionnelles des travailleurs handicapés vers les autres employeurs.

([321]) Décret n° 2019-360 du 24 avril 2019 relatif à l’expérimentation des entreprises adaptées de travail temporaire portant modalités de mise en œuvre, de financement et d’évaluation.

([322]) Article 273 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([323]) Loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des personnes handicapées.

([324]) Rapport d’activité 2018, avril 2019, p. 5.

([325]) Décret n° 2018-1334 du 28 décembre 2018 relatif aux conditions d’agrément et de financement des entreprises adaptées ainsi qu’aux modalités d’accompagnement spécifique de leurs salariés en situation de handicap.

([326]) Article L. 5213-19 du code du travail.

([327]) Instruction n° DGEFP/METH/2019/42 du 21 février 2019 relative au nouveau cadre de référence des entreprises adaptées issu de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 : agrément, conventionnement, accompagnement, expérimentations.

([328])  Loi n° 2001‑692 du 1er août 2001 relatif aux lois de finances.

([329]) Amendement du Gouvernement n° II‑1766 au projet de loi de finances pour 2019 (N° 1255).

([330]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([331]) Initialement, l’Unédic désignait l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce.

([332]) Des problèmes de temporalité de certains décaissements et encaissements ont créé des variations de trésorerie qui ont artificiellement gonflé le déficit 2017 et, dans le sens contraire, réduit le déficit de 2018.

([333]) Unédic, Perspectives financières de l’assurance-chômage 2019-2022, septembre 2019.

([334]) Loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004.

([335]) Loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, article 97 ; loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011, article 85 ; loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, article 80 ; loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013, article 75 ; loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, article 111 ; loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, article 105 ; loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, article 122 ; loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, article 82.

([336]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances initiale pour 2019, article 213.

([337])  Compte général de l’État, 2018.

([338])  Voir le commentaire de l’article 72 du présent rapport.

([339]) Le reliquat est pris en charge par les employeurs, par une contribution de la taxe sur les bureaux et par la surtaxe sur les plus-values immobilières.

([340]) Le FNAL est l’organisme financeur des aides personnelles au logement selon l’article L. 811-1 du code de la construction et de l’habitation.

([341]) Évaluations préalables des articles du projet de loi, page 485.

([342]) Arrêté du 27 septembre 2019 relatif au calcul des aides personnelles au logement et de la prime de déménagement.

([343]) Article 9 de la loi n° 2008-111 du 8 février 2008 pour le pouvoir d’achat.

([344]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, article 126.

([345]) Loi organique n°  2001-697 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([346]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([347]) Voir M. François Jolivet, annexe n° 8 au rapport n° 273 de M. Joël Giraud sur le projet de loi de finances pour 2018 (N° 235), octobre 2017, pp. 63 et suivantes.

([348]) M. François Jolivet, annexe n° 8 au rapport n° 273 de M. Joël Giraud sur le projet de loi de finances pour 2018 (N° 235), octobre 2017, p. 27.

([349]) Idem.

([350]) Décision n° 2017-758 DC du 28 décembre 2018, Cons. 117.

([351]) Ibidem.

([352]) Idem.

([353]) Arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la revalorisation des plafonds de ressources et des montants de réduction de loyer de solidarité applicables, modifiant l’arrêté du 27 février 2018 relatif à la réduction de loyer solidarité.

([354]) Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, article 57.

([355]) Titre IV de la loi du 17 août 2015 précitée.

([356]) Article L. 843-6 du code de la sécurité sociale.

([357]) Article L. 842-3 du code de la sécurité sociale.

([358]) À Mayotte, le montant forfaitaire de la prime est réduit de moitié par rapport à l’hexagone, conformément au décret n° 2016-866 du 26 juin 2016 relatif à la prime d’activité à Mayotte. Il a été augmenté de 10 euros par le décret n° 2018-837 du 3 octobre 2018 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime d’activité à Mayotte.

([359])  Décret n° 2018-1197 du 21 décembre 2018 relatif à la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité.

([360]) Conformément au deuxième alinéa de l’article L. 161-25 du code de la sécurité sociale.

([361]) Article L. 821-1-1 du code de la sécurité sociale.

([362]) Article L. 821-1-2 du code de la sécurité sociale.

([363]) Article D. 821-3 du code de la sécurité sociale.

([364]) Conformément au deuxième alinéa de l’article L. 821-3-1 du code de la sécurité sociale.

([365]) Rapport économique social et financier annexé au présent projet de loi de finances, p. 79, d’après l’INSEE.

([366]) Conclusion de la clause de revoyure pour le logement, et engagement des parties (2020-2022).

([367]) Article L. 832-3 du CCH.

([368]) Évaluation préalable des articles du projet de loi de finances pour 2020, article 67, 4. 2. 1, p. 491.

([369]) Voir le commentaire de l’article 52 du rapport n° 2340 de M. Olivier Véran sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, pp. 435 et suivantes.

([370]) Décret n° 2018-498 du 31 octobre 2018 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés et à la modification du plafond de ressources pour les bénéficiaires en couple.

([371]) Décret n° 2019-1047 du 11 octobre 2019 relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés et à la modification du calcul du plafond de ressources pour les bénéficiaires en couple.

([372]) Décret  n° 2018-836 du 3 octobre 2018 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime d’activité et réduction de l’abattement appliqué aux revenus professionnels.

([373]) Cet Arrangement a une valeur juridique contraignante depuis qu’il a été rendu applicable dans l’Union européenne par le règlement (UE) n° 1233/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 relatif à l’application de certaines lignes directrices pour les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public et abrogeant les décisions du Conseil 2001/76/ CE et 2001/77/ CE.

([374])  Accord sectoriel sur les crédits à l’exportation pour des projets dans les domaines des énergies renouvelables, de l’atténuation et de l’adaptation au changement climatique et des ressources en eau.

([375]) L’Accord sectoriel sur les crédits à lexportation pour les projets de production délectricité à partir de charbon a été approuvé par les États participants à l’Arrangement sur les crédits à lexportation bénéficiant dun soutien public lors de leur réunion du 17 novembre 2015.

([376]) Les impacts sociaux de tels projets, notamment en matière de respect des droits de l’Homme, sont également pris en compte par cette Recommandation.  

([377]) D’autres fonds existent, souvent plus anciens mais de moindre ampleur budgétaire : le Fonds pour l’environnement mondiale (FEM, 4,1 milliards de dollars en cumulé) ou le Fonds multilatéral pour la mise en œuvre du Protocole de Montréal de 1985 (FMPM, 540 millions de dollars en cumulé). Par ailleurs, le Fonds pour les technologies propres (CTF, 500 millions de dollars en cumulé) a été créé en attendant le lancement opérationnel du Fonds vert pour le climat. Il pourrait être fusionné au FVC prochainement.

([378])  Cette faculté a été ouverte par les négociations portant sur la mobilisation des ressources du FVC qui se sont achevées en 2014. Un prêt très concessionnel signifie qu’une part du prêt fait l’objet d’une bonification – une réduction des intérêts dus par le débiteur. Dans le cas d’espèce, la bonification du prêt est supportée par le budget général.

([379]) La France serait 4e contributrice du Fonds, après les États-Unis (3 milliards de dollars, mais 1 seul a effectivement été décaissé à ce jour), le Japon (1,5 milliard de dollars) et le Royaume-Uni (1,2 milliard de dollars) et l’Allemagne (1 milliard de dollars, entièrement en dons).

([380]) La bonification liée au caractère concessionnel du prêt sera d’un montant de 185 millions d’euros, supporté par le budget général au sein de la mission Aide publique au développement.

([381])  Cour des comptes, référé n° 2019-1866, « La contribution de la France au Fonds vert pour le climat, exercices 2012 à 2019 », 19 juillet 2019.

([382]) Global Entrepreneurship Monitor, « Women’s Entrepreneurship 2016-17 Report », septembre 2017.

([383]) Ce mécanisme multiplicateur repose sur une logique de partage de risques complexe. Les bailleurs, comme la France, apportent une garantie ferme à la Banque africaine de développement – c’est l’objet du présent article – ainsi qu’un apport en capital au fonds africain de garantie. La garantie bailleur permet à la Banque africaine de développement de garantir une somme supérieure au fonds africain de garantie, lequel garantit lui-même une somme supérieure aux banques privées, qui va permettre de couvrir les prêts qu’elles consentent aux PME africaines visées par le dispositif. 10 dollars investis par les banques privées sont couverts par une garantie de 7,5 dollars du fonds africain de garantie, elle-même couverte par une garantie de 2,5 dollars de la Banque africaine de développement, cette dernière étant couverte par une garantie bailleur de 1 dollar, d’où le facteur 10.

([384]) Il s’agit donc de 2 % des encours de prêts ayant fait défaut, uniquement sur la partie garantie (soit 75 % des prêts). Les banques privées ne bénéficient pas de protection particulière au-delà de la garantie publique : l’objet du dispositif n’est pas d’anesthésier complètement le risque de marché des prêts accordés. Il s’agit aussi d’inciter les établissements financiers à avoir une pratique de prêt responsable et proche des pratiques de marché.

([385]) Comme vu précédemment, ce don s’élève, pour la France, à 45 millions d’euros. Il devrait être versé pendant 5 ans par tranche de 9 millions d’euros.

([386]) Créé par le III de l’article 80 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

([387]) Article 7 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

([388]) Article 34 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([389]) INSEE, « Les créateurs d’entreprises : la frontière entre salariat et entreprenariat s’atténue », Insee Première, n° 1701, juin 2018.

([390]) Article 144 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([391]) Annexe au projet de loi de finances pour 2020, Projet annuel de performances Mission Travail et emploi.

([392]) Loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009.

([393]) Arrêté du 31 mars 2010 pris pour lapplication de larticle 101 de la loi  2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009.

([394]) Selon le circuit suivant : la CDC refinance l’opérateur France Active Financement, organisme centralisateur de prêts qui décaisse les sommes des PTZ conclus entre des opérateurs conventionnés « NACRE » (par exemple, des chambres de commerce et d’industrie ou des associations comme l’ADIE) et les bénéficiaires des prêts. Le coût de la bonification du prêt (le taux 0 %) est supporté par les financeurs du dispositif – les régions – et par la CDC.

([395]) Inspection général des finances, inspection générale des affaires sociales, Évaluation du dispositif NACRE, octobre 2013.

([396]) Ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019 relative à la partie législative du livre VIII du code de la construction et de l’habitation.

([397]) Voir notamment le commentaire de l’article 52 à l’annexe n° 8 de M. François Jolivet au rapport n° 273 de M. Joël Giraud sur le projet de loi de finances pour 2018 (n° 235), pp. 57 et suivantes, dont est présentement inspirée une partie de la description de la réforme de la loi de finances initiale pour 2018.

([398]) Décret n° 77-1287 du 22 novembre 1977 modifié relatif aux prêts conventionnés.

([399]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([400]) Arrêté du 27 février 2018 relatif au maintien dérogatoire de l’aide personnalisée au logement destinée à l’accession à la propriété pour les logements anciens et dans certaines communes.

([401]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([402]) Ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte.

([403]) Ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte.

([404]) Amendement n° II-1908 au projet de loi de finances pour 2019 (N° 1255).

([405]) Rapport n° 2301, annexe n° 8 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a8.asp.

([406]) Rapport n° 2301, annexe n° 8 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a8.asp.

([407]) Rapport n° 2301, annexe n° 8 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a8.asp.

([408]) Rapport n° 2301, annexe n° 19 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a19.asp.

([409]) Rapport n° 2301, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a36.asp.

([410]) Rapport n° 2301, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a36.asp.

([411]) Rapport n° 2301, annexe n° 43 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a43.asp.

([412]) Rapport n° 2301, annexe n° 43 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2020/b2301-tIII-a43.asp.