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N° 3125

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 juin 2020

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION
ET DE LADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI ORGANIQUE
 

portant report de lélection de six sénateurs
représentant les Français établis hors de France
et des élections partielles pour les députés et les sénateurs
représentant les Français établis hors de France
( 3121)

PAR M. Guillaume VUILLETET

Député

——

 

Voir les numéros :

  Sénat : 473, 513, 514 et T.A. 101 (2019‑2020).

 Assemblée nationale : 3121.

 


1

SOMMAIRE

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Pages

avant-propos............................................... 5

examen des articles

Article 1er Report des élections sénatoriales dune année

1er bis Sécurisation des obligations déclaratives des parlementaires

Article 2 Report des élections législatives et sénatoriales partielles

Article 3 Champ dapplication

COMPTE-RENDU DES DÉBATS

 


1

 

 

 

 

 

Mesdames, Messieurs,

Les élections sénatoriales reposent, depuis la loi organique du 30 juillet 2003 ([1]), sur un renouvellement par moitié des sénateurs répartis en deux séries : les 170 sièges de la série 1 ont été renouvelés en septembre 2017, les 178 sièges de la série 2 doivent l’être en septembre 2020. ([2])

L’élection mobilise un collège électoral constitué de près de 162 000 grands électeurs, qui représente, dans chaque département, les différentes catégories de collectivités territoriales ainsi que la diversité des communes. Les douze sénateurs représentant les Français établis hors de France sont, quant à eux, élus par un collège électoral spécifique, composé des conseillers et délégués consulaires et des députés représentant les Français de l’étranger.

Le présent projet de loi organique a pour objet de tirer les conséquences des effets de l’épidémie de Covid-19 sur ce calendrier électoral.

Les incertitudes pesant sur la date d’organisation du second tour des élections municipales et communautaires, prévues par décret le 28 juin ([3]), ainsi que des élections consulaires, dans un contexte de circulation active du virus sur le territoire national et à l’échelle internationale, ont en effet amené le Gouvernement à envisager différentes hypothèses pour être en capacité de prendre rapidement les décisions les plus adaptées tant au regard du calendrier électoral que de la sécurité des élus et des citoyens.

Ce projet de loi organique a ainsi été présenté par le Gouvernement, le 27 mai dernier, concomitamment au projet de loi ordinaire portant annulation du second tour des élections municipales et report des élections consulaires. ([4])

Cette démarche pragmatique a été saluée par le Conseil d’État dans son avis sur ce dernier texte ([5]). Celui-ci a considéré « quil est de bonne méthode, dans la situation dincertitude qui prévaut quant à lévolution de lépidémie, danticiper sur les éventuelles nouvelles mesures législatives quil conviendrait dadopter rapidement à une échéance proche ».

De fait, l’organisation de ce second tour au plus tard en janvier 2021, pour les communes dans lesquelles le conseil municipal n’a pas été élu au complet à l’issue du premier tour le 15 mars dernier, aurait conduit à ce que les collèges électoraux des sénateurs renouvelés en septembre prochain soient composés pour partie d’élus dont le mandat aurait été prorogé. Les six sénateurs des français établis hors de France, renouvelés à cette même occasion, seraient dans une situation analogue en cas de report des élections consulaires à mai 2021. Le collège électoral de certains départements ou circonscriptions aurait ainsi pu être composé en majorité de représentants dont le mandat a été prorogé du fait de limpossibilité de tenir des élections dans le contexte épidémiologique actuel.

Or, une telle situation aurait entraîné un risque d’inconstitutionnalité au regard de la décision du Conseil constitutionnel du 15 décembre 2005 portant sur les règles relatives aux élections sénatoriales, dans laquelle il considère qu’il convient d’éviter que les sénateurs soient désignés « par un collège en majeure partie composé délus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal ». ([6]) Pour résoudre cette difficulté, le projet de loi organique prévoyait, dans sa version initiale :

– la prorogation d’une année du mandat des sénateurs de la série 2, soit jusqu’en septembre 2021. Ce délai aurait laissé le temps nécessaire au renouvellement des collèges électoraux. Afin de ne pas décaler le calendrier des élections sénatoriales suivantes, le mandat des sénateurs élus en 2021 aurait été de cinq ans au lieu de six et le prochain renouvellement de cette même série serait intervenu en septembre 2026 (article 1er) ;

– le report, par cohérence, des élections législatives et sénatoriales partielles jusqu’à la tenue du renouvellement des conseils municipaux et communautaires au plus tard en janvier 2021 (article 2) ;

– une précision sur le champ d’application de la mesure, notamment en outre-mer (article 3).

Depuis, le contexte a changé.

Le comité des scientifiques, mentionné à l’article L. 3131-19 du code de la santé publique, a tout d’abord rendu plusieurs avis publics, notamment les 8 et 14 juin derniers, selon lesquels la circulation du virus en France serait fortement ralentie et l’épidémie contrôlée, même si une reprise des contaminations demeure possible.

Le Président de la République s’est également exprimé, le 10 juin dernier, sur l’amélioration de la situation sanitaire et les suites du déconfinement.

En conséquence, les dispositions du projet de loi ordinaire précité ont évolué lors de leur examen. Dans un premier temps, l’Assemblée nationale a inscrit dans la loi le principe selon lequel le second tour du renouvellement des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers de la métropole de Lyon aurait lieu en juin 2020, conditionnant à l’évolution de la situation sanitaire le report prévu par les autres dispositions de la loi, devenues subsidiaires. Dans un second temps, la situation continuant à s’améliorer, le Sénat a pu aller au terme du raisonnement : l’hypothèse d’un nouveau scrutin en janvier 2021 a été écartée, tandis que les conditions d’organisation du second tour des élections municipales, le 28 juin prochain, ont été précisées. Des incertitudes demeurant sur l’évolution de la situation sanitaire dans le reste du monde, les élections consulaires ont, quant à elles, été reportées à mai 2021. ([7])

Dans ce contexte, les dispositions du présent projet de loi organique ont été modifiées au cours de leur examen par le Sénat, avec l’accord du Gouvernement :

– le report d’un an du renouvellement de la série 2 prévu par l’article 1er ne s’appliquerait plus qu’aux six sénateurs représentants les Français établis hors de France de cette série dont le collège électoral ne sera renouvelé qu’à l’occasion des élections consulaires de mai 2021 (article 1er) ;

– par cohérence, le report des élections partielles ne s’appliquerait qu’aux députés et sénateurs des Français établis hors de France (article 2) ;

– les coordinations outre-mer, devenues inutiles, seraient supprimées (article 3).

Enfin, une disposition visant à sécuriser les obligations déclaratives des parlementaires auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a été adoptée (article 1er bis).

Suivant l’avis du rapporteur, la Commission a adopté ce texte sans modification.

Calendrier électoral envisagé

en cas de reprise de l’épidémie au niveau national et international

 

Calendrier électoral envisagé en cas d’amélioration de la situation sanitaire et retenu par le projet de loi organique adopté par le sénat

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*     *

 

 


1

   examen des articles

Article 1er
Report des élections sénatoriales dune année

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Dans sa version initiale le présent article reportait d’une année le renouvellement des sénateurs de la série 2, prévu en septembre 2020. Cette mesure prenait en compte le report :

– du second tour des élections municipales, prévues le 28 juin prochain, dans l’hypothèse d’une reprise de l’épidémie de Covid-19 sur le territoire national ;

– des élections consulaires du fait des incertitudes sur l’évolution de cette épidémie au niveau international.

       Modifications apportées par le Sénat

L’évolution de la situation sanitaire rend possible la tenue du second tour des élections municipales à la date prévue. Par conséquent, le Sénat a reporté à septembre 2021 la seule élection des six sénateurs représentant les Français établis hors de France de la série 2. En effet, leur collège électoral ne sera renouvelé qu’à la suite des élections consulaires de mai 2021.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

1.   Les effets de la crise sanitaire sur la tenue des prochaines élections sénatoriales

a.   La nécessité de renouveler le collège électoral avant les élections sénatoriales

Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect pour un mandat de six ans et renouvelés par moitié tous les trois ans. Leur mandat commence à l’ouverture de la session ordinaire qui suit l’élection, traditionnellement organisée au mois de septembre.

Leur collège électoral est constitué, dans chaque département, des députés et des sénateurs, des conseillers régionaux élus dans le département, des conseillers départementaux et des délégués des conseils municipaux : ces derniers représentent 95 % des quelques 162 000 grands électeurs le composant.

Comme cela a été rappelé, les douze sénateurs représentant les Français établis hors de France sont, quant à eux, élus par un collège électoral composé des conseillers et délégués consulaires et des députés représentant les Français de l’étranger ([8]).

Or, à la suite du premier tour de scrutin des élections municipales qui s’est déroulé le dimanche 15 mars 2020, l’aggravation de la situation épidémiologique a rendu nécessaire le report de la tenue du second tour initialement prévu le 22 mars ([9]).

Ladaptation du calendrier des élections municipales et des élections consulaires

à lévolution de lépidémie de Covid-19

L’article 19 de la loi du 23 mars 2020 ([10]) dispose que le second tour des élections municipales doit se tenir au plus tard en juin 2020 mais prévoit les conditions dans lesquelles il sera reporté dans l’hypothèse où la situation sanitaire ne le permettrait pas.

Pour s’en assurer, le conseil des scientifiques précité rend un avis public permettant d’apprécier cette situation et l’opportunité de maintenir les opérations électorales. En cas de persistance d’une menace épidémiologique, il revient au Parlement de prendre les mesures nécessaires à la reprogrammation de l’ensemble de l’élection municipale pour les communes où le premier tour organisé le 15 mars dernier n’a pas été conclusif ou n’a pas permis de renouveler le conseil municipal intégralement.

De manière à prévoir toutes les hypothèses à la suite du déconfinement, le Gouvernement a présenté, le 27 mai dernier, un décret de convocation des électeurs au second tour des élections municipales le dimanche 28 juin prochain, ainsi que le projet de loi ordinaire précité permettant une reprogrammation du scrutin en janvier 2021 pour les communes concernées et reportant les élections consulaires à mai 2021, conformément à la préconisation du comité scientifique ([11]) selon laquelle « limpossibilité danticiper la situation épidémiologique dans lensemble du monde en juin, voire au-delà, empêche dévaluer les risques sanitaires, de sorte quil paraît opportun de reporter les élections consulaires initialement prévues au mois de mai 2020. » ([12]) Ces deux textes se sont accompagnés du présent projet de loi organique tirant les conséquences des modifications du calendrier électoral sur l’organisation des élections sénatoriales.

Il a toujours été considéré, toutefois, que les résultats du premier tour resteraient acquis : les conseillers municipaux dans les communes dont le conseil a été intégralement renouvelé sont entrés en fonction le 18 mai dernier et ont pu procéder à la désignation de leur maire et de ses adjoints entre les 23 et 28 mai, conformément au décret du 14 mai pris à cette fin ([13]). Tel est le cas de 30 168 communes, secteurs et circonscriptions sur 35 065, soit 86 % du total.

En ce qui concerne les circonscriptions des sénateurs de la série 2 (hors sénateurs représentant les Français de l’étranger), 18 449 communes ont vu leur conseil municipal entièrement renouvelé, soit 87 % du total. Par ailleurs, les élus de 1 970 communes de moins de 1 000 habitants ont également été partiellement renouvelés au 1er tour.

75 % du bloc municipal du collège électoral des sénateurs de cette série a ainsi été renouvelé. Toutefois, ces résultats masquent des disparités selon les départements. Les plus urbanisés enregistrent des taux de renouvellement sensiblement plus bas : 41 % dans les Bouches-du-Rhône ; 49 % dans le Rhône ; 58 % dans l’Hérault ; 62 % dans le Var ; 69 % en Gironde. Au contraire, dans les départements plus ruraux, les résultats sont en moyenne plus élevés : 89 % dans l’Ain, 91 % dans l’Ariège et 85 % dans le Cantal.

Par conséquent, le corps électoral partiellement renouvelé à l’issue du premier tour des élections municipales présenterait, en l’absence de second tour et si les élections sénatoriales de septembre 2020 étaient maintenues, d’importantes inégalités de représentation entre grandes et petites communes au sein de chaque département et entre départements.

Par ailleurs, l’étude d’impact du projet de loi souligne que « dans le département du Rhône, même si les conseillers de la métropole de Lyon ne représentent que 150 personnes au sein du collège électoral des sénateurs du Rhône composé denviron 3 800 personnes, la métropole de Lyon serait entièrement représentée par des élus non seulement prolongés mais, qui plus est, issus de lancien établissement public de coopération intercommunale. »

Or, cela aurait fait peser deux risques dinconstitutionnalité en cas de tenue des élections sénatoriales avant le renouvellement complet des conseils municipaux et communautaires.

En premier lieu, comme cela a été précédemment rappelé, le Conseil constitutionnel a considéré, dans une décision du 15 décembre 2005, que « dans la mesure où il assure la représentation des collectivités territoriales de la République, le Sénat doit être élu par un corps électoral qui soit lui-même lémanation de ces collectivités ». Il en résulte qu’une série ne peut être « désignée par un collège en majeure partie composé délus exerçant un mandat au-delà de son terme normal. » ([14])

Par ailleurs, dans une décision du 6 juillet 2000, le Conseil constitutionnel a estimé qu’il découle de l’article 24 de la Constitution que toutes les catégories de collectivités territoriales doivent être représentées au sein du collège électoral du Sénat et « quen outre, la représentation des communes doit refléter leur diversité. » ([15]) Des disparités trop importantes entre communes urbaines et rurales fragiliseraient ainsi les résultats obtenus.

Il en résulte que les élections sénatoriales ne peuvent se tenir quau terme des élections municipales et communautaires de manière à assurer la légitimité des sénateurs élus.

Une même conclusion simpose pour lélection des sénateurs représentant les Français établis hors de France : dans une décision du 6 juin 2013, le Conseil constitutionnel a ainsi validé la prorogation du mandat d’élus de l’Assemblée des Français de l’étranger, tout en observant que cette prorogation « ne conduira pas à ce que des élus de lAFE exerçant leur mandat au-delà de son terme normal participent au prochain renouvellement des sénateurs, ce dernier étant postérieur à la date limite de prorogation du mandat. » ([16]) Cette décision souligne en creux que, dans le cas contraire, le Conseil aurait examiné avec vigilance les conséquences de cette prorogation.

b.   Les dispositions proposées

Prenant en compte ces décisions du Conseil constitutionnel, le présent article repoussait dune année, dans sa version initiale, la tenue des élections sénatoriales pour permettre, au préalable, l’organisation dans les communes concernées d’un nouveau scrutin pour les élections municipales et communautaires, au plus tard en janvier 2021, dès lors que la situation sanitaire le nécessiterait, et la tenue des élections consulaires en mai 2021.

Le mandat des sénateurs en exercice de la série 2 aurait alors été prolongé jusqu’à l’ouverture de la session ordinaire de 2021 (alinéa 1). Celui des sénateurs élus en septembre 2021 expirerait à l’ouverture de la session ordinaire de 2026 (alinéa 2). La réduction d’un an du mandat de ces derniers, par dérogation à l’article LO 275 du code électoral, devait permettre de retrouver le rythme du renouvellement triennal par série et de l’élection du Président du Sénat. ([17])

Ces dispositions ont toutefois été reformulées lors de leur examen par le Sénat à la suite de l’amélioration de la situation sanitaire et de la confirmation par le Gouvernement de la tenue du second tour des élections municipales le 28 juin prochain.

2.   Le report de l’élection des six sénateurs représentant les Français établis hors de France

a.   L’évolution globalement favorable du contexte sanitaire

Les derniers avis du comité des scientifiques laissent transparaître une amélioration sensible de la situation sanitaire sur le territoire national, à l’exception de quelques territoires encore en difficulté, dont principalement les trois départements du Grand‑Est (Meuse, Meurthe-et-Moselle, Marne), Mayotte et la Guyane, et malgré l’apparition de plus de 200 clusters depuis la mise en œuvre du déconfinement.

Dans son avis du 14 juin dernier, confirmant celui rendu le 8 juin, le comité soulignait ainsi que : « Lensemble des indicateurs épidémiologiques indiquent une poursuite de la diminution de la circulation du SARS-CoV-2 sur lensemble du territoire métropolitain et ne témoignent pas dune reprise épidémique ».

Cette évolution a conduit le Gouvernement à confirmer la tenue du second tour de scrutin des élections municipales et communautaires le 28 juin prochain. Par conséquent, l’hypothèse de l’organisation d’un nouveau scrutin en janvier 2021 a été supprimée du projet de loi ordinaire ([18]) examiné concomitamment au présent texte.

La persistance, à moyen terme, des incertitudes sur l’évolution de la circulation du virus dans certains pays a conduit le comité des scientifiques à recommander le report des élections consulaires.

Ces dernières, déjà reportées de mai à juin 2020 ([19]), sont désormais fixées à mai 2021 par le projet de loi ordinaire.

b.   Les dispositions adoptées par le Sénat

Le Sénat a tiré les conséquences de l’évolution des dispositions du projet de loi ordinaire sur le présent article en prévoyant le report de l’élection des seuls sénateurs pour lesquels le collège électoral n’aura pas été renouvelé en septembre prochain, à savoir les six sénateurs représentant les Français établis hors de France de la série 2.

Selon le rapporteur du Sénat, si cette disposition déroge à l’article 1er de la loi organique n° 83-499 du 17 juin 1983 qui prévoit que six sénateurs représentants les Français de l’étranger sont élus lors de chaque renouvellement partiel du Sénat, « lélection en 2021 [de ces six sénateurs] ne constituerait quun ajustement transitoire, dampleur limitée et strictement proportionné aux circonstances exceptionnelles qui le justifient. Ses conséquences juridiques seraient les mêmes que celles délections partielles organisées entre deux renouvellements partiels du Sénat pour pourvoir un ou plusieurs sièges vacants. » ([20])

Cette situation inédite serait, par ailleurs, justifiée par un motif dintérêt général tenant à ladaptation du calendrier électoral pour des motifs strictement liés au contexte sanitaire actuel et dans des délais les plus rapprochés possibles des échéances initialement prévues.

Suivant l’avis du rapporteur, la Commission a adopté cet article sans modification.

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*     *

1er bis
Sécurisation des obligations déclaratives des parlementaires

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit à l’initiative du rapporteur du Sénat, cet article a pour objet de :

– sécuriser les conditions dans lesquelles les députés et sénateurs transmettent leurs déclarations d’intérêts ou de situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) dans le contexte actuel de crise sanitaire ;

– adapter les règles applicables aux six sénateurs représentant les Français établis hors de France dont le renouvellement est reporté à septembre 2021 par l’article 1er.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Afin de tenir compte de la situation sanitaire exceptionnelle liée à l’épidémie de Covid-19, la HATVP a assoupli, dans deux communications en date du 31 mars et du 18 mai derniers, les conditions dans lesquelles les responsables publics doivent accomplir leurs obligations déclaratives.

Dans sa dernière communication, la Haute Autorité rappelle ainsi que : « Lordonnance du 25 mars 2020, telle que modifiée par lordonnance du 13 mai 2020, prévoit désormais que toute déclaration prévue par la loi à peine de sanction ou dapplication dun régime particulier, qui aurait dû être accomplie entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020, sera réputée avoir été faite à temps si elle a été effectuée " dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois ". »

Elle en déduit donc que les délais légaux impartis aux responsables publics pour souscrire à leurs obligations déclaratives auprès d’elle doivent être prorogés pour toutes les déclarations dues entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus, jusqu’au 24 août 2020.

Si le Sénat a validé cette interprétation de la HATVP, il convenait toutefois que le législateur organique le prévoit expressément pour les parlementaires en application de l’article 25 de la Constitution et de l’article L.O. 135-1 du code électoral ([21]). C’est le premier objet du présent article (alinéa 1).

En second lieu, ce dernier prévoit des dispositions spécifiques pour les six sénateurs représentant les Français établis hors de France dont l’élection est reportée à septembre 2021 par l’article 1er. Afin de simplifier leurs démarches, les déclarations de situation patrimoniale de fin de mandat transmises entre le 12 mars et le 23 juin à la Haute Autorité resteraient valables (alinéa 2). Ces sénateurs devraient toutefois lui adresser, entre le 1er mars et le 31 mars 2021, « une présentation des évènements majeurs ayant affecté la composition de leur patrimoine ainsi quune récapitulation de lensemble des revenus perçus » au cours de leur dernière année de mandat.

Suivant l’avis du rapporteur, la Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 2
Report des élections législatives et sénatoriales partielles

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de reporter les élections législatives et sénatoriales partielles qui pourraient intervenir avant le renouvellement complet des conseillers municipaux et communautaires.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a modifié cet article de manière à ne « geler » que les élections partielles des députés et sénateurs représentant les Français établis hors de France jusqu’à la tenue des élections consulaires prévues en mai 2021.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Tirant les conséquences de l’organisation éventuelle d’un nouveau scrutin, au plus tard en janvier 2021, pour les communes dans lesquelles le premier tour des élections municipales et communautaires organisé le 15 mars dernier n’aurait pas été conclusif, le présent article prévoyait, dans sa rédaction initiale, de reporter la tenue des élections législatives et sénatoriales partielles jusqu’à ce terme. En effet, si la situation sanitaire ne permettait pas la tenue de ce scrutin, des élections partielles ne pouvaient pas davantage être organisées.

Le Gouvernement ayant confirmé l’organisation du second tour des élections municipales le 28 juin prochain, ce dispositif a été remplacé, à son initiative, par des dispositions spécifiques aux parlementaires représentants les Français établis hors de France. Le Gouvernement a rappelé, à cette fin, qu’« il convient de geler les élections partielles pour les députés et les sénateurs qui représentent les Français établis hors de France, dans la mesure où la situation sanitaire ne sera pas nécessairement propice à la tenue dun tel scrutin. En effet, les circonscriptions des députés des Français établis hors de France sont particulièrement vastes et comprennent de nombreux pays, où la situation sanitaire peut être plus ou moins rétablie. Quant aux sénateurs des Français établis hors de France, ils sont élus dans une unique circonscription mondiale. » ([22])

Les élections partielles des députés et sénateurs concernés seraient ainsi reportées jusquà la tenue des élections consulaires en mai 2021.

Suivant l’avis du rapporteur, la Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 3
Champ dapplication

Suppression maintenue

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 3 précise que la présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République.

       Modifications apportées par le Sénat

Cet article a été supprimé par cohérence avec les dispositions adoptées aux articles précédents qui ne concernent plus que les six sénateurs représentant les Français établis hors de France de la série 2, dont le renouvellement du mandat est reporté à septembre 2021.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a maintenu la suppression de cet article.

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   COMPTE-RENDU DES DÉBATS

Lors de sa réunion du mercredi 24 juin 2020, la Commission examine le projet de loi organique portant report de lélection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France (M. Guillaume Vuilletet, rapporteur) (n° 3121).

Lien vidéo :

http://assnat.fr/JYjerc

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Nous examinons les dernières mesures tirant les conséquences de l’épidémie de Covid-19 sur notre calendrier électoral.

Si cette épidémie a profondément affecté nos relations sociales et professionnelles, elle a également perturbé les échéances électorales de ce printemps et notre vie démocratique, comme nous l’avons mesuré dans le projet de loi ordinaire portant sur le second tour des élections municipales et le report des élections consulaires. Notre préoccupation constante a été d’assurer la sécurité des candidats, des électeurs et de tous ceux qui participent aux opérations de vote.

Je ne reviens pas sur les avancées ayant fait l’objet d’accords entre les groupes à l’Assemblée nationale et avec le Sénat. La tenue d’une élection dans les circonstances actuelles impose que chacun s’adapte, au nom de l’intérêt général et, à cet égard, nous avons fait œuvre utile lors de nos précédents travaux.

Ce projet de loi organique concerne le dernier volet des mesures à prendre en matière électorale, et non les moindres, puisqu’il s’agit des conditions de la tenue des élections sénatoriales de septembre prochain.

Des incertitudes entouraient la date du second tour des élections municipales – prévues par décret le 28 juin prochain, sous réserve d’une amélioration de la situation sanitaire – et des élections consulaires dans un contexte de circulation active du virus à l’échelle internationale. Le Gouvernement a choisi, et nous l’assumons, d’envisager différentes hypothèses pour prendre rapidement les décisions les plus adaptées au regard du calendrier électoral et de la sécurité des élus et des citoyens. Ce projet de loi organique a ainsi été présenté le 27 mai dernier, concomitamment au projet de loi ordinaire adopté la semaine dernière.

Dans l’hypothèse d’un nouveau scrutin municipal en janvier 2021 et du report des élections consulaires en mai 2021, dans certains départements ou circonscriptions, le collège électoral des sénateurs de la série 2 aurait majoritairement été composé de représentants dont le mandat aurait été prorogé. Or le Conseil constitutionnel a jugé, en 2005, que les sénateurs ne peuvent être désignés « par un collège en majeure partie composé délus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal. » Il existait donc un risque d’inconstitutionnalité.

Pour résoudre cette difficulté, la version initiale du projet de loi organique prévoyait la prorogation du mandat des sénateurs de la série 2 jusqu’en septembre 2021, de manière à laisser le temps nécessaire au renouvellement des collèges électoraux, ainsi que le report, par cohérence, des élections législatives et sénatoriales partielles jusqu’à cette date. Depuis la présentation de ce texte, le contexte a changé.

Le comité des scientifiques a rendu plusieurs avis publics, notamment les 8 et 14 juin derniers, faisant état d’un ralentissement de la circulation du virus en France, bien qu’une reprise des contaminations demeure possible. Je rappelle que près de deux-cents clusters ont été répertoriés depuis le déconfinement et que la situation dans certains départements du Grand-Est, à Mayotte et en Guyane doit nous inviter à la prudence. Le Président de la République s’est également exprimé le 10 juin dernier sur l’évolution de la situation sanitaire, qui demeure globalement positive, et les suites du déconfinement.

Par conséquent, le Gouvernement a confirmé la tenue du second tour des élections municipales le 28 juin prochain, dans des conditions sanitaires limitant au maximum l’exposition au virus. En raison de la situation plus incertaine dans nombre de pays, le report des élections consulaires à mai 2021 a, quant à lui, été confirmé.

Le Sénat a donc modifié ce projet de loi organique pour tirer les conséquences de ces constats plutôt positifs. Le report d’un an du renouvellement de la série 2 ne s’appliquerait plus qu’aux six sénateurs représentants les Français établis hors de France, dont le collège électoral ne sera renouvelé qu’à l’occasion des élections consulaires de mai 2021. C’est l’objet de l’article 1er. Le report des élections partielles ne s’appliquerait, par cohérence, qu’aux seuls députés et sénateurs des Français établis hors de France, comme le prévoit l’article 2. Enfin, une disposition visant à sécuriser les obligations déclaratives des parlementaires auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a également été adoptée dans un article 1er bis.

Je souhaiterais saluer le travail effectué par le rapporteur du Sénat, M. le président Philippe Bas, avec l’ensemble des groupes politiques et le Gouvernement, pour parvenir à cette solution de bon sens. Si cette dernière est inédite en ce qu’elle permettra de renouveler la série 2 sans faire de même pour les six sénateurs des Français de l’étranger qui en font partie, elle se justifie par un motif d’intérêt général suffisant tenant à l’adaptation du calendrier électoral pour des motifs strictement liés au contexte sanitaire actuel, et dans des délais les plus rapprochés possible des échéances initialement prévues. Cette solution constitue, comme le soulignait le rapporteur du Sénat, « un ajustement transitoire, dampleur limitée et strictement proportionné. »

Au regard du travail effectué par le Sénat, il convient donc d’en rester au texte qui nous est proposé et je vous invite donc à adopter conforme le projet qui nous a été transmis.

M. Sacha Houlié. Ce texte tire en effet les ultimes conséquences des reports électoraux. La tenue des élections municipales le 28 juin étant désormais acquise, les élections sénatoriales pourront se tenir en septembre 2020, à l’exception de celles concernant six sénateurs des Français de l’étranger de la série 2 - les élections consulaires qui désignent le corps électoral de ces sénateurs ayant été reportées au mois de mai 2021. Il est donc proposé de reporter l’élection de ces six sénateurs au mois de septembre 2021, prorogeant de fait leur mandat jusqu’à cette échéance.

De plus, le projet de loi organique intègre des observations de la HATVP s’agissant notamment des déclarations de situation patrimoniale adressées à cette dernière par les sénateurs des Français de l’étranger.

Par ailleurs, le corps électoral étant figé pour une année supplémentaire, toutes les élections impliquant les Français de l’étranger – y compris celles des députés – sont gelées car il serait inopportun d’organiser des élections dans ces circonstances.

Le Sénat, qui a eu la primeur de ce texte, a tiré les conséquences des échanges au sein de la commission mixte paritaire sur le projet de loi ordinaire. Nous devons à présent achever le travail, et le groupe La République en marche votera ce texte conforme.

M. Raphaël Schellenberger. Le projet initial prévoyait de rendre hypothétique tout le renouvellement des sénateurs de la série 2 de septembre prochain dans le contexte d’incertitude sur la tenue du second tour des élections municipales le 28 juin. Heureusement, les conditions sanitaires se sont stabilisées et le scrutin pourra se tenir à cette date. Il n’y a donc pas lieu d’imaginer le report des élections sénatoriales de la série 2 et le Sénat a modifié ce projet de loi organique en conséquence. L’examen d’un projet de loi formulant une hypothèse était choquant pour une commission aussi attachée à la rigueur du droit que la nôtre : il est heureux que nous n’ayons pas à le faire pour un projet de loi organique.

Ce texte très technique ne soulève aucune difficulté mais il permet de rappeler que nous ne traiterons pas la sortie de la crise en bouleversant le calendrier électoral. Ces derniers jours, nous avons perçu, dans certains discours, l’idée que la relance économique et sociale impliquait de placer la relance démocratique entre parenthèses. Pour le groupe Les Républicains, c’est impossible : pour relancer nos territoires et notre économie, il faut aussi relancer la vie démocratique et la renouveler. L’année 2021 est importante : les élections départementales et régionales doivent pouvoir se tenir. Même si la crise que nous sommes en train de traverser a été l’une des plus fortes que nous ayons connues, la vie démocratique ne peut ployer le genou.

Nous voterons ce texte conforme et il n’est pas question, au prétexte d’une crise dont nous commençons à sortir, de bousculer la démocratie.

M. Vincent Bru. Le projet de loi organique initial présenté par le Gouvernement visait principalement à reporter d’un an l’élection de 178 sénateurs prévue au mois de septembre 2020. Toutefois, l’organisation du second tour des élections municipales dimanche prochain, le 28 juin, étant désormais fort heureusement acquise, rien ne justifie le report des élections sénatoriales. Celui des élections consulaires a en revanche été acté. Il importe donc de régler la question du renouvellement des sièges des six sénateurs représentant les Français de l’étranger élus en septembre 2014.

Le projet de loi organique a été largement réécrit par le Sénat et prévoit désormais la prolongation d’un an du mandat de ces mêmes sénateurs. Leurs successeurs seront par conséquent élus en septembre 2021 pour cinq ans – et non plus six.

C’est la solution qui comporte le plus de garanties constitutionnelles : il est en effet impossible de procéder à une nouvelle élection sans que le collège électoral ait été renouvelé, les conseillers consulaires représentant 95 % des grands électeurs des sénateurs représentant les Français de l’étranger. Nous considérons, comme le Sénat, que la solution trouvée constitue un ajustement transitoire d’ampleur limitée et strictement proportionnée aux circonstances.

Par ailleurs, ce projet de loi présente deux dispositions complémentaires : le gel des élections partielles de députés et de sénateurs représentant les Français établis hors de France jusqu’en mai 2021, et la sécurisation des obligations déclaratives des parlementaires concernés vis-à-vis de la HATVP.

Les dispositions de ce texte étant tout à fait appropriées, le groupe Mouvement Démocrate et apparentés est favorable à son adoption conforme.

Mme George Pau-Langevin. Ce texte est en quelque sorte « résiduel » : il avait été en effet question de reporter d’un an les prochaines élections sénatoriales mais nous avons finalement décidé qu’elles se dérouleraient à la date prévue. La question des sénateurs élus par des délégués consulaires restait quant à elle en suspens et nous avons opté pour le report de l’élection.

Conséquence de textes que nous avons votés précédemment, ce projet de loi n’appelle pas d’observations ou d’oppositions de la part du groupe Socialistes et apparentés.

M. Paul Molac. La modification apportée par ce texte est limitée et justifiée par la pandémie. Le groupe Libertés et Territoires a voté la loi visant à annuler, le cas échéant, la tenue du second tour des élections municipales et il n’y a pas de raison qu’il en aille aujourd’hui différemment avec cette mesure de bon sens.

Nous nous félicitons toutefois que le second tour des élections municipales puisse se tenir le 28 juin car la respiration démocratique a son importance : toute modification du calendrier électoral doit être en effet justifiée par des motifs impérieux sans quoi elle pourrait s’apparenter à une manœuvre, ce qui ne manquerait pas d’avoir un effet délétère sur nos concitoyens. En l’occurrence, ce report est bienvenu et nous soutenons ce texte.

M. MJid El Guerrab. Il est de bon augure, en cette période, de citer le général De Gaulle, selon qui « La démocratie, cest le gouvernement du peuple exerçant sa souveraineté sans entraves ». L’élection est primordiale dans l’expression de notre souveraineté et il nous appartient d’opérer un contrôle strict sur tout changement en matière de calendrier électoral : il en va du bon fonctionnement de notre démocratie. À ce titre, l’organisation du second tour des élections municipales le 28 juin prochain est une bonne chose. Dans la foulée, le prochain renouvellement de 172 sièges de sénateurs aura bien lieu comme prévu en septembre 2020.

Il n’était cependant pas envisageable que les élections consulaires se tiennent dans les mêmes délais. Député des Français du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest, les conseillers consulaires de ma circonscription m’ont fait part depuis plusieurs semaines de leurs inquiétudes à ce sujet, de nombreux pays sortant à peine du confinement alors que, dans d’autres, la crise du Covid-19 s’aggrave de jour en jour. L’organisation des campagnes électorales et du vote n’était évidemment pas possible. Je salue donc la prolongation d’un an de la durée du mandat en cours de conseiller consulaire. Dès lors, il va de soi que le mandat des sénateurs qui ont été élus par ces mêmes conseillers devait être prolongé.

Une question se pose néanmoins quant à la majorité politique du Sénat, qui pourrait être modifiée par l’élection de six sénateurs un an après le dernier renouvellement. Le mandat du président du Sénat, deuxième personnage de l’État, sera renouvelé en septembre 2020, ainsi que son bureau, alors que les six sénateurs représentant les Français de l’étranger n’auront pas encore été élus. Ces six nouveaux élus n’auront donc pas l’occasion de se prononcer sur la présidence de leur chambre, ce qui soulève un problème quant à son fonctionnement. Ancien conseiller du président du Sénat, je rappelle qu’en 2011 la majorité de la chambre haute n’était que de six voix. J’imagine que le Sénat répondra à cette question par une nouvelle élection à l’ouverture de la session ordinaire de 2021.

Mon groupe soutiendra en tout cas ce projet de loi organique.

M. Philippe Gosselin. La décision du Conseil constitutionnel n° 2020-849 QPC du 17 juin 2020 rappelle que les calendriers électoraux doivent avoir un caractère normal et prévisible et que tout décalage dans le temps de scrutins ne peut se justifier que par « un motif impérieux dintérêt général », sans méconnaître le droit de suffrage et sans porter atteinte à la sincérité du scrutin. Manifestement, ces conditions sont en l’espèce réunies et il convient de prendre en considération ce qui s’est passé ces dernières semaines.

Il est cependant bon de rappeler que la fixation d’une date d’élection ne relève pas du fait du prince ou de marchandages parce que telle ou telle collectivité territoriale trouverait un intérêt à recevoir plus de financement ou que le Président de la République aurait intérêt à organiser certaines élections après les échéances présidentielles. Certes, cela relève de la politique-fiction mais il y a des échanges, en ce moment, qui m’incitent à rappeler que les règles électorales ne sauraient être manipulées selon le bon vouloir de l’exécutif. Nous saurons vous rappeler, chers collègues, que vous étiez d’accord avec nous à ce propos.

M. Éric Ciotti. Je m’étonne que vous n’ayez pas profité de ce texte pour reporter l’élection présidentielle de cinq ans. Au moins, vous auriez tout réglé ! (Sourires et exclamations sur divers bancs.)

M. Philippe Gosselin. Par un amendement en séance ! (Sourires.)

M. Éric Ciotti. Au-delà de cette boutade et dans la continuité de ce qu’a excellemment dit Raphaël Schellenberger, je suis très choqué par le tripatouillage qui s’annonce s’agissant du report des élections départementales et régionales. Il faut arrêter de jouer avec la démocratie et nos institutions : les élections, c’est le rendez-vous avec la démocratie, c’est le moment de vérité populaire. Il est choquant d’en avoir peur pour des motifs personnels. Je profite donc de la discussion de ce texte pour dénoncer cette aventure extraordinairement dangereuse qui fragilise notre démocratie : quand on porte atteinte tant à la justice qu’aux élections, il faut s’interroger sur la santé de celle-ci.

M. Sacha Houlié. Première observation : une remarque a prévalu lorsque la commission mixte paritaire sur le projet de loi tendant à sécuriser l’organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires s’est réunie au Sénat. La majorité sénatoriale de droite a fait part de son opposition à toute mesure hypothétique. Or, les principaux arguments employés par les membres du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, aujourd’hui, sont des hypothèses, des racontars et des rumeurs quant à un éventuel report des élections départementales ou régionales. Je vous invite donc, par cohérence, à ne pas user ici d’arguments hypothétiques.

Seconde observation : vous vous êtes à juste titre inquiétés de la relance économique après la crise sanitaire. Pouvons-nous donc tomber d’accord sur le constat suivant : les collectivités, notamment les départements et les régions, qui seront au premier rang de la relance, devront disposer de tous les moyens nécessaires ? Tel sera précisément l’objet de la discussion que ces grands élus auront, en temps utile, avec le Gouvernement.

M. Philippe Gosselin. Ce ne sont plus des hypothèses : on nous prépare psychologiquement !

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je ne souhaite pas que notre collègue Éric Ciotti dépose l’amendement dont il vient d’être question car cela ne nous permettrait pas d’adopter un texte conforme (Sourires). J’apprécie toutefois son ouverture d’esprit et j’entends sa demande : nous saurons nous en faire l’écho !

Le Conseil d’État a souligné que la méthode du Gouvernement visant à procéder par hypothèses était la bonne au moment où les projets de loi concernés ont été présentés. Le cycle normal de l’examen parlementaire a aujourd’hui permis de rectifier les choses car nous savons désormais que le second tour des élections municipales aura lieu le 28 juin.

Je signale par ailleurs que le Gouvernement aurait pu faire fi des discussions avec le Sénat et tout reporter en septembre 2021, solution unique qui aurait d’ailleurs répondu aux objections de notre collègue M’Jid El Guerrab. Nous avons au contraire préféré respecter autant que possible le rythme normal des élections, tel qu’il avait été prévu. Le décalage d’un an concernant les sénateurs représentant les Français établis hors de France me paraît sage.

La Commission en vient à lexamen des articles.

Article 1er : Report des élections sénatoriales dune année

La Commission adopte larticle 1er sans modification.

Article 1er bis (nouveau) : Sécurisation des obligations déclaratives des parlementaires

La Commission adopte larticle 1er bis sans modification.

Article 2 : Report des élections législatives et sénatoriales partielles

La Commission adopte larticle 2 sans modification.

Article 3 : Champ dapplication

La Commission maintient la suppression de larticle 3.

Elle adopte ensuite lensemble du projet de loi organique sans modification.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de ladministration générale de la République vous demande dadopter le projet de loi organique portant report de lélection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France (n° 3121) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 


([1]) Loi organique n° 2003-696 du 30 juillet 2003 portant réforme de la durée du mandat et de l’âge d’éligibilité des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat.

([2]) Les douze sénateurs des Français de l’étranger sont répartis par moitié entre ces deux séries.

([3]) Décret n° 2020-642 du 27 mai 2020 fixant la date du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon, et portant convocation des électeurs.

([4]) Projet de loi nº 3021 portant annulation du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris, et des conseillers de la métropole de Lyon de 2020, organisation d’un nouveau scrutin dans les communes concernées, fonctionnement transitoire des établissements publics de coopération intercommunale et report des élections consulaires.

([5]) Avis n° 400230 du 26 mai 2020.

([6]) Décision n° 2005-529 DC du 15 décembre 2005 portant sur la loi organique modifiant les dates des renouvellement du Sénat.

([7]) Adopté en commission mixte paritaire le 11 juin, le titre de ce projet de loi a été modifié au cours de la navette parlementaire. Il s’agit désormais du projet de loi tendant à sécuriser l’organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires.

([8]) Soit 534 grands électeurs, comprenant 443 conseillers consulaires, 68 délégués consulaires, 12 sénateurs et 11 députés.

([9]) Par dérogation aux articles L. 56 du code électoral, selon lequel « en cas de deuxième tour de scrutin, il y est procédé le dimanche suivant le premier tour » et L. 227 du même code aux termes duquel : « Les conseillers municipaux sont élus pour six ans. Lors même quils ont été élus dans lintervalle, ils sont renouvelés intégralement au mois de mars à une date fixée au moins trois mois auparavant par décret pris en Conseil des ministres ».

([10]) Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

([11]) Avis du 18 mai 2020 relatif aux modalités sanitaires du processus électoral à la sortie du confinement.

([12]) Rapport du Gouvernement remis au Parlement le 23 mai 2020 sur le fondement de l’avis du comité scientifique précité.

([13]) Décret du 14 mai 2020 précité.

([14]) Décision n° 2005-529 DC du 15 décembre 2005 précitée.

([15]) Décision n° 2000-431 DC du 6 juillet 2000 portant sur la loi relative à l’élection des sénateurs.

([16]) Commentaire de la décision n° 2013-671 DC du 6 juin 2013 relative à la loi portant prorogation du mandat des membres de l’Assemblée des Français à l’étranger.

([17]) Conformément à l’article 32, ce dernier est en effet élu après chaque renouvellement partiel du Sénat.

([18]) Projet de loi tendant à sécuriser l’organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires, adopté en commission mixte paritaire le 11 juin.

([19]) Article 21 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

([20]) Objet de l’amendement n° COM-6 de M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat.

([21]) Cet article prévoit les obligations déclaratives des députés auprès de la HATVP. Il s’applique également aux sénateurs par un renvoi prévu par l’article L.O. 296 du même code.

([22]) Objet de l’amendement n° COM-3 du Gouvernement.