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N° 3879

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 février 2021.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi, rejetée par lE sénat, visant à renforcer le droit à l’avortement,

 

 

 

Par Mmes Albane GAILLOT et Marie-Noëlle BATTISTEL,

 

 

Députées.

 

——

 

 

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale :  1re lecture : 3292, 3383 et T.A. 488.

  2e lecture : 3793.

Sénat : 1re lecture : 23, 263, 264 et T.A. 45 (2020-2021).

 

 


 

 


—  1  —

SOMMAIRE

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 Pages

Avant-propos

I. La nÉcessitÉ de renforcer le droit À l’avortement

1. Des difficultés structurelles dans l’accès à l’IVG

2. Des difficultés aggravées par un contexte de crise

II. Le renforcement du droit À l’avortement : des avancÉes enrichies lors de l’examen du texte À l’assemblÉe nationale

1. Présentation de la proposition de loi initiale

a. L’allongement du délai de recours à l’IVG

b. La suppression de la clause de conscience spécifique à l’IVG

2. Principales modifications apportées au cours de la première lecture

III. Une proposition de loi malheureusement rejetée par le Sénat

1. Le rejet de la proposition de loi en commission

2. L’adoption, en séance publique, de la motion opposant la question préalable à la délibération de cette proposition de loi

IV. Principales modifications adoptÉes par la commission en deuxième lecture

Commentaire DEs articles

Article 1er Allongement du délai de recours à l’interruption volontaire de grossesse de douze à quatorze semaines de grossesse

Article 1er bis Extension de la compétence des sages-femmes à la méthode chirurgicale d’interruption volontaire de grossesse jusqu’à la dixième semaine de grossesse

Article 1er ter A Systématisation de la pratique du tiers payant pour les actes en lien avec l’interruption volontaire de grossesse et protection du secret pour la prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse

Article 1er ter Suppression du délai de réflexion de deux jours pour confirmer une demande d’interruption volontaire de grossesse en cas d’entretien psychosocial préalable

Article 2 Suppression de la clause de conscience spécifique relative à l’IVG et création d’un répertoire recensant les professionnels de santé et les structures pratiquant l’interruption volontaire de grossesse

Article 2 bis A Garantie de la délivrance d’un contraceptif en urgence dans les conditions prévues par le code de la santé publique

Article 2 bis Rapport du Gouvernement sur l’application de la législation relative au délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse

Article 2 ter Rapport du Gouvernement sur l’évaluation du dispositif sur l’accès des femmes à l’interruption volontaire de grossesse

Article 3 Compensation financière

EXAMEN EN COMMISSION

I. Discussion générale

II. examen des articles

Annexe : LISTE DES TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI


  1  

 

Avant-propos

Le 8 octobre 2020, l’Assemblée nationale a adopté, de manière transpartisane, la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement, présentée par la rapporteure Albane Gaillot et plusieurs de ses collègues issus de différents groupes politiques.

Enrichie à l’occasion de son examen en commission des affaires sociales et ensuite en séance publique, cette proposition de loi, adoptée puis transmise au Sénat, comporte neuf articles. Elle vise à garantir que toute femme souhaitant avoir recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG) puisse trouver une solution adaptée dans un laps de temps adéquat. Elle prévoit notamment pour cela d’allonger le délai de recours à l’IVG instrumentale, de supprimer la clause spécifique à l’IVG tout en réaffirmant le principe d’une clause de conscience générale, ou encore d’étendre la compétence d’IVG chirurgicale aux sages-femmes jusqu’à dix semaines de grossesse.

Réunie le mercredi 13 janvier 2021, la commission des affaires sociales du Sénat n’a toutefois pas adopté de texte sur la proposition de loi. C’est donc le texte voté en première lecture à l’Assemblée nationale qui a ensuite été inscrit en séance publique le mercredi 20 janvier 2021 et rejeté par le biais d’une motion opposant la question préalable à la délibération de la proposition de loi.

S’inscrivant dans la continuité des travaux conduits par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale, présidée par Mme Marie-Pierre Rixain, et s’inspirant notamment du rapport d’information sur l’accès à l’IVG réalisé par Mmes Marie‑Noëlle Battistel et Cécile Muschotti au nom de la délégation ([1]), les rapporteures estiment nécessaire de renforcer le droit à l’IVG, un droit fondamental, reconnu par la loi et essentiel pour la vie et la liberté des femmes.

Les rapporteures se félicitent donc que cette proposition de loi continue son chemin à travers la navette parlementaire et soit ainsi examinée en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

I.   La nÉcessitÉ de renforcer le droit À l’avortement

1.   Des difficultés structurelles dans l’accès à l’IVG

Le droit à l’interruption volontaire de grossesse est un droit fondamental qui a révolutionné mais également protégé la vie de nombreuses femmes depuis son introduction en 1975. Pourtant, le recours à l’avortement continue de se heurter à des obstacles et difficultés qui affectent directement le parcours des femmes concernées.

Le rapport d’information sur l’accès à l’IVG réalisé par Mmes Marie‑Noëlle Battistel et Cécile Muschotti ([2]) fait état de ces difficultés, se fondant pour cela sur plusieurs études, ainsi qu’un travail d’analyse approfondi réalisé par les rapporteures dans le cadre d’auditions et de déplacements. Il montre ainsi qu’en certains cas avorter peut aujourd’hui encore être un véritable « parcours du combattant » ([3]). Une telle situation n’est pas acceptable s’agissant d’un droit fondamental, reconnu par la loi et essentiel à la liberté de chaque femme.

Comme l’a montré le rapport d’information précité sur l’accès à l’IVG, des disparités territoriales persistent en matière d’accès à l’IVG ([4]) et sont notamment causées par un nombre insuffisant de professionnels de santé ou de services adaptés pratiquant cet acte dans certains territoires. « Cette offre de soins contrastée suivant les territoires se traduit par un allongement des délais de rendez-vous et de prise en charge, notamment dans les établissements de santé et par des trajets importants pour les femmes qui ne peuvent pas être prises en charge au plus près de leur domicile. » ([5]) Ce droit peut en outre se voir parfois entravé par des actions militantes ou par des phénomènes de désinformation volontaire.

Ce rapport met en avant plusieurs solutions pour améliorer les conditions concrètes d’accès à l’IVG et faire évoluer les mentalités : clarifier la réglementation afin de garantir le droit à l’anonymat et à la confidentialité de l’IVG, revaloriser l’activité médicale d’IVG, créer un annuaire de praticiens réalisant les IVG, ouvrir la pratique de l’IVG chirurgicale aux sages-femmes, supprimer la clause de conscience spécifique à l’IVG, envisager l’allongement du délai d’accès à l’IVG, améliorer la prise en compte des éléments psycho‑sociaux de nature à représenter un péril grave pour la femme enceinte souhaitant recourir à une interruption médicale de grossesse (IMG), respecter le choix des femmes entre les différentes méthodes d’IVG ([6]).

Tant de pistes d’amélioration qui sont aujourd’hui, à l’occasion de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale, presque toutes proposées dans le cadre des différents articles de la présente proposition de loi.

2.   Des difficultés aggravées par un contexte de crise

Le caractère prioritaire du renforcement du droit à l’avortement a été mis en avant à travers l’exacerbation des problèmes d’accès à l’IVG par la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19. Dès le printemps dernier, les rapporteures de la délégation aux droits des femmes, Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti, faisaient ce constat : le parcours d’IVG pendant la période de crise sanitaire, et plus particulièrement encore pendant les périodes de confinement, a été complexifié par des difficultés supplémentaires pour les femmes.

Les rapporteures ont quant à elles pu rencontrer le Planning familial et Mme Véronique Séhier, membre du Conseil économique, social et environnemental, qui ont confirmé cette situation. Ainsi, durant la période du premier confinement, de mi-mars à mi-mai, le numéro vert national « Sexualité contraception IVG » a vu, par rapport à la même période en 2019, une augmentation de 330 % des appels concernant des difficultés d’accès à l’IVG et une augmentation de 100 % des appels concernant une demande d’aide ou d’information pour avorter hors délais à l’étranger.

La crise sanitaire aggrave en effet des difficultés déjà existantes dans l’accès à l’avortement :

– les difficultés liées à la mobilité, que ce soit à l’intérieur du pays avec une réduction voire une suppression de certains moyens de transport, ou avec les pays frontaliers pour les femmes ayant besoin d’une IVG hors délais ;

– les difficultés liées à l’accès à l’information : le Planning familial a vu se renforcer les problèmes de compréhension du parcours d’accès à l’IVG, ainsi que la diffusion des fausses informations sur ce sujet, en particulier sur internet ;

– les difficultés liées au contexte sanitaire, avec notamment une forme de peur de déranger les professionnels de santé ou les structures hospitalières ou encore la peur d’être contaminée par le virus ;

– les difficultés liées à la pénurie de professionnels ou de structures de santé pratiquant l’IVG qui peut exister sur certains territoires et qui a été encore accentuée pendant la crise compte tenu de la grande sollicitation de ceux-ci ou encore de la réquisition des blocs hospitaliers ;

– les difficultés liées aux situations personnelles et à la confidentialité : dans le cadre d’un confinement, les femmes souhaitant cacher leur grossesse et leur IVG à leurs proches se sont par exemple retrouvées dans des situations bien plus délicates.

Certaines mesures ont été mises en œuvre, notamment l’accès à l’IVG en télémédecine et l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville : les rapporteures saluent ces mesures tout en tenant à souligner leur caractère insuffisant pour répondre à toutes les difficultés rencontrées sur le terrain par les femmes souhaitant recourir à un avortement.

Elles considèrent en outre que la durée de la crise sanitaire, qui frappe notre pays depuis une année maintenant, invite à repenser la notion même de « crise » et de « mesures temporaires » : cette situation s’installe en effet dans la durée et fait craindre la résurgence des mêmes types de difficultés et de conséquences sur l’accès à l’IVG dans toute autre situation de crise. Il convient donc d’anticiper les crises à venir, en pérennisant les mesures qui ont été prises ces derniers mois et en agissant fermement pour renforcer durablement le droit à l’avortement.

II.   Le renforcement du droit À l’avortement : des avancÉes enrichies lors de l’examen du texte À l’assemblÉe nationale

1.   Présentation de la proposition de loi initiale

Le droit à l’IVG, pourtant acquis il y a déjà quarante-cinq ans en France, souffre ainsi d’une application à géométrie variable sur notre territoire. L’ambition de la présente proposition de loi est d’apporter un certain nombre de solutions pour remédier à ces inégalités et renforcer l’effectivité du droit à l’IVG en facilitant le parcours des femmes souhaitant y avoir recours.

Pour cela, cette proposition de loi visait, dans sa rédaction initiale, deux mesures prioritaires proposées par les articles 1er et 2.

a.   L’allongement du délai de recours à l’IVG

L’article 1er prévoit d’allonger de deux semaines le délai légal de recours à l’IVG, afin notamment de répondre l’absolue nécessité de permettre aux femmes françaises souhaitant recourir à une IVG de trouver une solution adéquate sur le territoire national.

Chaque année, des obstacles et difficultés empêchent plusieurs milliers de femmes de trouver une solution, notamment lorsqu’elles dépassent le délai légal de douze semaines après lequel il est aujourd’hui impossible de recourir à une IVG en France.

Parmi ces femmes, certaines se retrouvent forcées de poursuivre leur grossesse contre leur gré, d’autres de mettre leur santé en danger en avortant de manière clandestine. D’autres décident quant à elles de se rendre à l’étranger pour pratiquer une IVG au-delà de douze semaines de grossesse.

Les associations estimaient au début des années 2000 qu’entre 3 000 et 5 000 femmes seraient contraintes de se rendre chaque année à l’étranger pour avoir recours à un avortement. Le rapport de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur l’accès à l’IVG fait état de données récoltées durant les déplacements des rapporteures : « le ministère [de la santé espagnol] ne dispose pas des données par nationalité, mais estime que cela ne concernerait qu’entre 80 et 200 Françaises [...] ; l’association des cliniques accréditées à la pratique de l’IVG considère quant à elle qu’il est possible qu’environ 1 000 femmes françaises recourent chaque année à une IVG en Espagne. [… Aux Pays-Bas,] les cliniques, comme le ministère en charge de la santé, de même que les associations de santé sexuelle et reproductive ont pu affirmer qu’en 2018 ce sont 810 femmes françaises qui se sont rendues au PaysBas pour avoir recours à une interruption volontaire de grossesse » ([7]). Le récent travail du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), produit sur saisine du Gouvernement en lien avec la présente proposition de loi ([8]), estime qu’en 2018, ce serait entre 1 500 et 2 000 femmes qui se seraient rendues aux Pays-Bas, au Royaume-Uni ou en Espagne pour avoir recours à un avortement ([9]). Si ces chiffres ne permettent pas de fournir une donnée parfaitement exacte, ils constituent toutefois un ordre de grandeur, cohérent quelles que soient les sources : environ 2 000 femmes doivent aujourd’hui encore se rendre à l’étranger pour être en mesure de recourir à une interruption volontaire de grossesse.

Les rapporteures considèrent que cette situation n’est pas acceptable : aucune femme en France ne devrait se retrouver sans solution lorsqu’elle souhaite interrompre sa grossesse. Il est intolérable qu’elles soient réduites à se rendre à l’étranger pour faire valoir leur droit fondamental à l’IVG. Elles soulignent en outre que cette situation est non seulement contraignante et coûteuse mais également injuste et inégalitaire.

Dans sa récente opinion, le CCNE reconnaît qu’un « faisceau de facteurs [...] peut contribuer à la difficulté de sa réalisation durant le délai légal autorisé, conduisant ainsi des femmes à ne pas pouvoir réaliser leur décision personnelle, sauf à solliciter un déplacement à l’étranger pour en concrétiser la réalisation » ([10]).

C’est tout à fait pour cette principale raison que les rapporteures proposent d’allonger le délai légal d’accès à l’IVG : toutes les situations n’en seront certes pas réglées et il faudra accompagner cela d’autres mesures pratiques, principalement d’ordre réglementaire, mais une grande partie d’entre elles trouveront ainsi une solution.

Les rapporteures tiennent en outre à indiquer que le CCNE affirme que « la réalisation des IVG comporte des risques qui sont faibles, augmentent avec l’âge gestationnel, mais différent peu entre 12 et 14 semaines de grossesse » et conclut en considérant « qu’il n’y a pas d’objection éthique à allonger le délai d’accès à l’IVG de deux semaines, passant ainsi de 12 à 14 semaines de grossesse » ([11]).

b.   La suppression de la clause de conscience spécifique à l’IVG

L’article 2 supprime la clause de conscience spécifique à l’IVG, une disposition superfétatoire, du fait de l’existence de la clause de conscience générale, qui contribue « à faire de l’acte médical d’IVG un acte simplement toléré et non un droit à part entière, comme la loi le prévoit » ([12]).

Cette clause n’a donc pas de raison pratique d’exister encore aujourd’hui dans notre droit, comme le soulignait déjà le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes en 2013, recommandant sa suppression ([13]). De graves difficultés avaient également été pointées par le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la prise en charge de l’IVG ([14]).

Le rapport précité de la délégation aux droits des femmes a bien montré ces difficultés inacceptables : « [cette clause de conscience spécifique] n’apporte rien en ce qui concerne la liberté d’un professionnel de santé de pratiquer un acte médical, puisque ce droit lui est déjà reconnu par la clause générale. En revanche, elle contribue à faire de l’acte médical d’IVG un acte simplement toléré et non un droit à part entière, comme la loi le prévoit. Audelà de la liberté de chaque médecin ou sage-femme de pratiquer, ou non, à titre individuel, l’acte d’IVG, cette double clause peut conforter le peu d’empressement d’un chef de service défavorable à la réalisation de l’IVG, qui sans en entraver l’exercice, n’y affectera que des moyens et personnels minimaux » ([15]).

Si l’existence de cette clause en 1975 se justifiait par le contexte politique et sociétal de l’époque, elle n’a plus lieu d’être aujourd’hui alors que « l’avortement est, c’est un fait, un acte courant de la vie des femmes qui concernera une femme sur trois au cours de sa vie sexuelle et reproductive » comme le rappellent, entre autres, Véronique Séhier et Nathalie Bajos, directrice de recherche à l’Inserm ([16]).

Les rapporteures ont pris note de ce que l’opinion du CCNE sur l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG prenait également position sur le sujet de la clause de conscience spécifique en faveur de son maintien. Elles considèrent toutefois que cette prise de position reflète une volonté, d’ailleurs clairement affirmée, de maintenir l’avortement dans « la singularité de l’acte médical que représente l’IVG » ([17]) alors qu’il s’agit avant tout d’un droit des femmes à ne pas poursuivre une grossesse lorsqu’elles ne le désirent pas. Le maintien d’une clause spécifique conduit à culpabiliser ces femmes et à stigmatiser le recours à l’avortement.

Adhérant pleinement à la recommandation n° 17 du rapport de la délégation aux droits des femmes, les rapporteures estiment nécessaires de protéger et de faire progresser le droit à l’avortement et « d’en finir avec une vision archaïque d’un acte médical spécifique, tout en apportant ainsi des garanties suffisantes aux professionnels de santé qui ne souhaiteraient pas pratiquer l’acte d’IVG, en assurant également l’information et la réorientation des femmes par le médecin ou la sage-femme lorsqu’il ne souhaite pas pratiquer l’IVG » ([18]).

2.   Principales modifications apportées au cours de la première lecture

L’article 1er a été adopté en commission sans modification. Il a été complété en séance par un alinéa prévoyant de systématiser l’information des femmes sur les méthodes abortives possibles et sur leur droit de choix de la méthode d’IVG.

L’article 1er bis a été introduit lors de l’examen de la proposition de loi en commission des affaires sociales. Il permet l’extension de la compétence des sagesfemmes, autorisées depuis 2016 à pratiquer des IVG médicamenteuses ([19]), aux IVG par voie chirurgicale jusqu’à dix semaines de grossesse. Cette disposition permettrait, par l’augmentation mécanique du nombre de professionnels habilités à pratiquer cet acte, de renforcer l’effectivité du droit à l’avortement, en renforçant le maillage territorial et en réduisant les délais de prise en charge. Cet article a ensuite été enrichi, à l’occasion de l’examen en séance publique, d’une clarification sur le statut des sages‑femmes afin de souligner la dimension médicale de leur profession.

L’article 1er ter A, prévoyant la pratique systématique du tiers payant pour les frais des actes en lien avec une IVG, a été voté en séance publique. Néanmoins, cette disposition a depuis été incluse au sein de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 ([20]) et est donc pleinement satisfaite.

L’article 1er ter, introduit en commission, supprime le délai de réflexion de deux jours pour confirmer une demande d’IVG imposé aux femmes ayant réalisé une consultation psychosociale préalable. Cette disposition permettrait de fluidifier le parcours des femmes et de supprimer une disposition considérée comme infantilisante pour les personnes concernées.

L’article 2 a fait l’objet, en commission, d’une reformulation de sa rédaction globale, inspirée de celle retenue par l’article 21 du projet de loi relatif à la bioéthique, adopté conforme en seconde lecture à l’Assemblée nationale. Il a par ailleurs été complété par une disposition prévoyant la publication par les agences régionales de santé d’un répertoire recensant les professionnels de santé et les structures pratiquant l’IVG. En séance, dans un souci de clarté et de lisibilité, cette disposition a été déplacée à l’article L. 2212-3 du code de la santé publique, consacré à l’information des femmes quant aux modalités de l’IVG.

L’article 2 bis A, introduit en séance publique, vise à clarifier l’obligation faite aux professionnels de santé de délivrer un moyen de contraception en urgence, ainsi que les sanctions associées à un manquement à cette obligation de non‑discrimination.

L’article 2 bis a été adopté par la commission des affaires sociales et prévoit un rapport du Gouvernement au Parlement sur l’application de la législation relative au délit d’entrave à l’IVG dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.

L’article 2 ter, adopté quant à lui en séance publique, prévoit la remise d’un rapport par le Gouvernement au Parlement sur l’évaluation de l’accès des femmes à l’IVG, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi.

III.   Une proposition de loi malheureusement rejetée par le Sénat

1.   Le rejet de la proposition de loi en commission

Réunie le 13 janvier 2021, la commission des affaires sociales du Sénat a rejeté la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement estimant, comme le résume le rapport de Mme Laurence Rossignol, que « l’amélioration de l’accès à l’IVG passe par le renforcement de la prévention et de l’information sur la contraception et les dispositifs existants pour garantir une prise en charge précoce des femmes souhaitant interrompre leur grossesse » ([21]).

Si la rapporteure plaide pour une « refonte globale du pilotage de l’activité d’IVG, et plus largement de notre politique de santé sexuelle et reproductive », elle a défendu l’allongement du délai d’accès à l’IVG, prévu par l’article 1er, considérant qu’il permettrait de « prendre en charge des situations d’urgence auxquelles le système de soins actuel n’offre pas de réponse satisfaisante » ([22]). Elle s’est en outre appuyée sur des éléments de l’opinion du CCNE ([23]) en rappelant notamment que le ratio du nombre d’IVG rapporté annuellement au nombre total de naissances vivantes s’est établi en France à 0,31 en 2019, soit un ratio similaire si ce n’est inférieur à des pays autorisant des délais d’accès à l’IVG significativement plus longs ([24]).

Elle a également pointé l’incohérence de la position de la commission des affaires sociales du Sénat sur le sujet de la clause de conscience spécifique. Ainsi, la commission a, dans cette proposition de loi, rejeté la suppression de la clause de conscience spécifique relative à l’IVG, tandis qu’à l’occasion de l’examen en première lecture du projet de loi relatif à la bioéthique, en février 2020, elle avait refusé l’introduction d’une clause de conscience spécifique du même type mais relative à l’IMG, arguant qu’une clause de conscience générale permet déjà aux professionnels de santé concernés de ne pas accomplir un acte contraire à leurs convictions.

Concernant l’extension de la compétence des sages‑femmes à la pratique des IVG par voie chirurgicale, la commission s’y est opposée frontalement et « a rappelé que cette extension n’est pas accueillie favorablement par les représentants des gynécologuesobstétriciens et a souligné la technicité requise pour un geste endo-utérin pratiqué sous anesthésie et susceptible d’emporter des complications sérieuses » ([25]). À l’inverse, la rapporteure du Sénat souscrit au dispositif proposé par cet article.

Les rapporteures saluent la pertinence et la richesse du travail mené par la rapporteure du Sénat, Mme Laurence Rossignol.

2.   L’adoption, en séance publique, de la motion opposant la question préalable à la délibération de cette proposition de loi

La proposition de loi a été rejetée en séance publique via l’adoption d’une question préalable présentée par le groupe Les Républicains, qui a notamment justifié cette démarche par l’idée que l’allongement du délai de recours à l’IVG « ne saurait être la solution pour pallier les déficiences de notre politique de santé reproductive, qui ne garantit pas suffisamment la prise en charge précoce des IVG ».

Les rapporteures regrettent le rejet de cette proposition de loi par le Sénat et, encore plus, le refus du débat sur un sujet aussi important que l’accès à l’IVG par le vote de la motion opposant la question préalable.

Elles rappellent que les différentes mesures de la présente proposition de loi n’ont pas l’ambition de répondre de manière exhaustive à l’ensemble des enjeux relatifs au parcours de l’IVG mais plutôt d’accroître l’effectivité d’un droit auquel l’accès est aujourd’hui inégal en fonction des territoires. Après quarante-cinq ans, « l’IVG apparaît en effet bien souvent comme simplement "tolérée" en France mais pas toujours garantie » ([26]).

Améliorer l’effectivité de ce droit fondamental doit se traduire par des mesures concrètes telles que l’allongement du délai de recours ou l’extension de la compétence des sages-femmes, mais également par des changements de mentalité, tels que la suppression de la clause spécifique à l’IVG ainsi que celle du délai de réflexion obligatoire à la suite de l’entretien psychosocial.

Les rapporteures se réjouissent donc de l’inscription à l’ordre du jour, pour une deuxième lecture, à l’occasion de la « niche parlementaire » du groupe Socialistes et apparentés, de cette proposition de loi porteuse d’une amélioration substantielle pour le quotidien, la liberté et le droit à disposer de leur corps de nos concitoyennes.

IV.   Principales modifications adoptÉes par la commission en deuxième lecture

La commission a maintenu la rédaction adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale des articles 1er, 1er ter et 3.

La rédaction de l’article 1er bis a été complétée par trois amendements. Deux amendements de Mme Perrine Goulet apportent des précisions quant à l’extension des compétences des sages-femmes à la pratique de l’IVG chirurgicale. Un amendement présenté par les rapporteures pérennise l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville de cinq à sept semaines de grossesse.

L’article 2 a été modifié par un amendement de Mme Catherine Fabre portant sur le libre accès du répertoire recensant les professionnels et structures de santé pratiquant l’IVG.

La commission a également modifié les articles 2 bis A, 2 bis et 2 ter par trois amendements rédactionnels des rapporteures.

La commission a par ailleurs supprimé l’article 1er ter A. Présenté par les rapporteures, l’amendement de suppression vise à tenir compte de l’adoption des mesures initialement prévues par cet article dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.

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  1  

Commentaire DEs articles

Article 1er
Allongement du délai de recours à l’interruption volontaire de grossesse de douze à quatorze semaines de grossesse

Origine de l’article : proposition de loi initiale.

Position de la commission : maintien de la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   La disposition de la proposition de loi

L’article 1er, dans sa rédaction initiale, prévoit la modification de l’article L. 2212-1 du code de la santé publique afin de fixer à quatorze semaines de grossesse (soit seize semaines d’aménorrhée) le délai autorisé pour avoir recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG).

Le délai légal pour recourir à une IVG a déjà fait l’objet d’un allongement de dix à douze semaines de grossesse en 2001 ([27]), sans que cela ne se traduise par une modification du comportement des femmes vis-à-vis du délai de recours à l’IVG. L’allongement du délai a alors simplement permis de prendre en charge celles qui étaient concernées par un avortement entre dix et douze semaines et qui auparavant se trouvaient sans solution.

Dans la même logique, l’article 1er vise à permettre la prise en charge des femmes concernées par une IVG entre douze et quatorze semaines et qui, pour l’heure, n’ont pas la possibilité de réaliser cette IVG en France.

2.   Les modifications apportées par l’Assemblée nationale en première lecture

En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté deux amendements identiques présentés par Mme Marie-Noëlle Battistel (groupe Socialistes et apparentés) et par Mme Marie‑Pierre Rixain (groupe La République en Marche) et plusieurs députés membres de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Ayant reçu un avis favorable de la rapporteure, ces amendements renforcent l’obligation d’information de toute personne sur les différentes méthodes abortives. Cette disposition est issue d’une recommandation du rapport d’information sur l’accès à l’IVG de la délégation aux droits des femmes ([28]). Elle se justifie, entre autres, par un taux d’insatisfaction vis-à-vis de la méthode employée plus élevé lorsque les femmes n’ont pas eu le choix de cette méthode (ce taux n’est que de 5 % pour les femmes ayant pu choisir leur méthode d’IVG contre 22 % pour celles n’ayant pas pu exercer ce choix). La présentation systématique par le médecin des différentes méthodes vise ainsi à améliorer l’information des femmes sur leur droit au choix de la méthode.

3.   La position de la commission

La commission n’a apporté aucune modification.

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Article 1er bis
Extension de la compétence des sages-femmes à la méthode chirurgicale d’interruption volontaire de grossesse jusqu’à la dixième semaine de grossesse

Origine de l’article : amendements adoptés en première lecture à l’Assemblée nationale.

Position de la commission : modifications apportées à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   Une disposition introduite en commission en première lecture

Cet article résulte de l’adoption d’amendements identiques, auxquels la rapporteure avait donné un avis favorable, présentés par Mme Marie-Noëlle Battistel (groupe Socialistes et apparentés), par Mme Cécile Muschotti et les membres du groupe La République en Marche, ainsi que par Mme Marie-Pierre Rixain et plusieurs députés membres de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Ils modifient l’article L. 2212-2 du code de la santé publique afin d’autoriser les sages-femmes à pratiquer les IVG chirurgicales jusqu’à la fin de la dixième semaine de grossesse (soit douze semaines d’aménorrhée).

Cette nouvelle disposition est la traduction de la recommandation n° 13 du rapport d’information précité de la délégation qui préconise d’autoriser la pratique de l’IVG chirurgicale sous anesthésie locale par les sages-femmes, dans les établissements et les centres de santé habilités, sur la base du volontariat.

Les rapporteures relèvent que l’objectif de cet article 1er bis a été repris dans le cadre d’une expérimentation prévue par l’article 70 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. L’adoption du présent article permettrait toutefois d’aller plus loin qu’une simple expérimentation. Les sages‑femmes, plus nombreuses que les médecins en France, peuvent pratiquer les IVG par voie médicamenteuse depuis 2016 ([29]) et leur champ de compétences comprend d’ores et déjà nombre de gestes intra-utérins. Leur permettre de pratiquer des IVG par voie chirurgicale pourrait ainsi favoriser l’accès à l’avortement et lutter contre la pénurie de praticiens qui existe sur certains territoires.

2.   Les modifications apportées par l’Assemblée nationale en première lecture

Lors de son examen en séance publique, cet article a été complété par un amendement de Mme Annie Vidal (La République en Marche), ayant reçu un avis de sagesse de la rapporteure. Cet amendement vise à apporter une clarification quant au statut des sages-femmes en insistant sur la dimension médicale de leur profession.

3.   La position de la commission

Les rapporteures soulignent que l’expérimentation votée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 est un premier pas, mais considèrent que cette disposition est une avancée absolument impérative pour améliorer l’accès à l’avortement dans notre pays. Elles préconisent donc la généralisation et la pérennisation de cette expérimentation. C’est en ce sens qu’elles soutiennent le maintien de cette disposition au sein du présent article.

La commission a adopté trois amendements, complétant ainsi la rédaction retenue en première lecture par l’Assemblée nationale :

– un amendement des rapporteures pour pérenniser l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville de cinq à sept semaines de grossesse qui a été mis en place depuis le début de la crise sanitaire ;

– un amendement de Mme Perrine Goulet (apparentée au groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés) qui prévoit la publication d’un décret pour préciser notamment les modalités de mise en œuvre relatives à la formation et à la rémunération des sages-femmes dans le cadre de l’extension de leur compétence à l’IVG chirurgicale ;

– un amendement de Mme Perrine Goulet prévoyant la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement portant sur l’application des dispositions permettant aux sages-femmes de réaliser des IVG chirurgicales.

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Article 1er ter A
Systématisation de la pratique du tiers payant pour les actes en lien avec l’interruption volontaire de grossesse et protection du secret pour la prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse

Origine de l’article : amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Position de la commission : article supprimé par la commission.

1.   Une disposition introduite en séance publique par l’Assemblée nationale en première lecture

Cet article résulte de l’adoption d’un amendement, auquel la rapporteure avait donné un avis favorable, présenté par Mme Cécile Muschotti et les membres du groupe La République en Marche. Le I prévoit l’extension du tiers payant intégral à toutes les assurées pour les frais relatifs à une IVG. Le II protège cette prise en charge du secret afin de pouvoir préserver, le cas échéant, l’anonymat de l’intéressée.

Depuis 2013 ([30]), les femmes ayant recours à une IVG bénéficient d’une prise en charge à 100 % par l’assurance maladie, indépendamment de leur âge ou de la méthode d’IVG utilisée. Toutefois, la pratique du tiers payant intégral ne s’applique que pour les mineures non émancipées, les femmes bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire et les femmes bénéficiaires de l’aide médicale de l’État.

Or, le rapport d’information précité de la délégation aux droits des femmes souligne que « la nécessité pour une majorité de femmes de devoir avancer les frais de leur IVG constitue un frein à leur accès à ce droit, notamment pour les femmes en situation de précarité ». La première recommandation de ce rapport est donc de « mettre en place une exonération généralisée d’avance de frais pour les femmes souhaitant recourir à une IVG ». En outre, la pratique systématique du tiers payant intégral garantit également le respect de l’anonymat des femmes concernées souhaitant garder leur parcours confidentiel.

L’article 1er ter A prévoit donc la systématisation de la pratique du tiers payant pour la prise en charge des frais relatifs à une IVG par la modification de l’article L. 162-1-21 du code de la sécurité sociale prévoyant déjà la pratique du tiers payant pour les bénéficiaires de l’assurance maternité et les personnes atteintes d’une affection longue durée.

Est également créé un article L. 2212-10 au sein du code de la santé publique afin d’inscrire dans la loi le principe de la protection du secret de la prise en charge de l’IVG ainsi que l’anonymat des femmes concernées.

Enfin, l’article 1er ter A étend ces mesures aux régimes de sécurité sociale de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les rapporteures adhèrent pleinement aux objectifs poursuivis par le présent article dont les dispositions sont toutefois d’ores et déjà satisfaites par l’article 63 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.

2.   La position de la Commission

Une disposition identique ayant été introduite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, les rapporteures ont présenté un amendement de suppression de cette disposition devenue inutile. Elles tiennent à saluer cette avancée, pragmatique, qui permet d’améliorer de manière concrète le parcours des femmes pour accéder à une IVG.

La commission a adopté l’amendement des rapporteures et a donc supprimé le présent article.

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Article 1er ter
Suppression du délai de réflexion de deux jours pour confirmer une demande d’interruption volontaire de grossesse en cas d’entretien psychosocial préalable

Origine de l’article : amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Position de la commission : maintien de la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   Une disposition introduite en commission en première lecture

Cet article résulte de l’adoption d’un amendement, auquel la rapporteure avait donné un avis favorable, présenté par Mme Cécile Muschotti et les membres du groupe La République en Marche. Il prévoit la suppression du délai de réflexion de deux jours imposé aux femmes ayant réalisé une consultation psychosociale préalable avant de pouvoir confirmer leur demande d’IVG.

Cette consultation, prévue à l’article L. 2212-4 du code de la santé publique, est systématiquement proposée aux femmes souhaitant recourir à une IVG afin de leur apporter une éventuelle assistance et des conseils adaptés à leur situation, mais n’est obligatoire que pour les femmes mineures non émancipées. Aux termes de l’article L. 2212-5 du même code, une femme souhaitant avorter doit renouveler sa demande par confirmation écrite, mais dans le cas où elle a réalisé une consultation préalable, cette confirmation ne peut intervenir qu’après un délai de réflexion de deux jours.

L’article 1er ter supprime la seconde phrase de l’article L. 2212-5 prévoyant ce délai et donne ainsi la possibilité aux femmes de confirmer par écrit leur demande d’IVG dans le délai qu’elles auront choisi.

2.   Les modifications apportées par l’Assemblée nationale en première lecture

Aucune modification n’a été adoptée en séance publique.

3.   La position de la commission

La commission n’a apporté aucune modification.

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Article 2
Suppression de la clause de conscience spécifique relative à l’IVG et création d’un répertoire recensant les professionnels de santé et les structures pratiquant l’interruption volontaire de grossesse

Origine de l’article : proposition de loi initiale.

Position de la commission : modifications apportées à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   La disposition de la proposition de loi

L’article 2 prévoit la suppression de la redondance de la clause de conscience spécifique à l’interruption volontaire de grossesse.

Outre une clause de conscience générale, valable pour tout acte de soin ([31]), les professionnels de santé qui pratiquent ou concourent à la réalisation d’une IVG jouissent en effet d’une clause supplémentaire et spécifique à cet acte. Aux termes de l’article L. 2212‑8 du code de la santé publique, aucun médecin ou aucune sage‑femme n’est ainsi tenu de pratiquer une IVG, de même qu’aucune sage‑femme, aucun infirmier, aucun auxiliaire médical n’est tenu d’y concourir. Cette clause de conscience spécifique à l’IVG est également reprise dans le code de déontologie médicale, codifié par voie réglementaire dans le code de la santé publique ([32]).

L’article 2 prévoit de supprimer l’inscription législative de cette clause tout en maintenant :

– d’une part, son inscription au niveau réglementaire ;

– l’obligation de réorientation, non prévue pour la clause de conscience générale, contraignant le médecin ou la sage-femme refusant de pratiquer une IVG d’en informer sans délai l’intéressée et de lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou sages-femmes susceptibles de réaliser l’intervention.

2.   Les modifications apportées par l’Assemblée nationale en première lecture

● La commission des affaires sociales a adopté un amendement de rédaction globale, présenté par Mme Cécile Muschotti et plusieurs de ses collègues du groupe La République en Marche. La nouvelle écriture de l’article permet :

– de reformuler la rédaction de l’obligation de réorientation selon celle retenue par l’article 21 du projet de loi relatif à la bioéthique, adopté conforme en seconde lecture à l’Assemblée nationale ;

– de prévoir la publication par les agences régionales de santé d’un répertoire recensant, sous réserve de leur accord, les professionnels de santé et les structures pratiquant l’IVG.

Les rapporteures estiment que la mise en place d’un tel répertoire, comme le recommandait d’ailleurs le rapport de la délégation aux droits des femmes ([33]), est une initiative permettant une meilleure effectivité du droit à l’avortement en ce qu’elle facilitera l’accès à un praticien pratiquant l’IVG et évitera ainsi que des femmes dépassent le délai légal, faute d’avoir trouvé un praticien à temps.

● Lors de l’examen de cet article en séance publique, un amendement de Mme Cécile Muschotti et du groupe La République en Marche a été adopté, avec avis favorable de la rapporteure, et vise à clarifier la disposition concernant la publication du répertoire susdit. Cette modification, insérant un II dans l’article 2 de la présente proposition de loi, place ainsi ce dispositif au sein de l’article L. 2212‑3 du code de la santé publique consacré à l’information des femmes quant aux modalités de l’IVG.

3.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement de Mme Catherine Fabre (groupe La République en Marche) afin de garantir que l’accès au répertoire référençant les professionnels et établissement de santé pratiquant l’IVG sera effectivement libre d’accès.

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Article 2 bis A
Garantie de la délivrance d’un contraceptif en urgence dans les conditions prévues par le code de la santé publique

Origine de l’article : amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Position de la commission : modifications apportées à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   Une disposition introduite en séance publique par l’Assemblée nationale en première lecture

Cet article résulte de l’adoption en séance publique d’un amendement présenté par Mme Aurore Bergé et plusieurs de ses collègues du groupe La République en Marche. Cet amendement avait reçu un avis favorable de la rapporteure à titre personnel. Il vise à clarifier l’obligation faite aux professionnels de santé de délivrer un moyen de contraception en urgence.

L’article modifie pour cela :

– l’article L. 1110-3 du code de la santé publique pour y préciser que l’interdiction de la discrimination dans l’accès à la prévention ou au soin concerne également l’accès à un moyen de contraception en urgence ;

– l’article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale énumérant des cas de sanctions dont les professionnels de santé peuvent faire l’objet pour y préciser que peut être sanctionner une discrimination dans l’accès à la prévention ou aux soins, y compris dans l’accès à un moyen de contraception en urgence.

2.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel des rapporteures.

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Article 2 bis
Rapport du Gouvernement sur l’application de la législation relative au délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse

Origine de l’article : amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Position de la commission : modifications apportées à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   Une disposition introduite en commission en première lecture

Cet article résulte de l’adoption de trois amendements identiques présentés par Mme Cécile Muschotti et les membres du groupe La République en Marche, par Mme Marie‑Noëlle Battistel et plusieurs de ses collègues membres du groupe Socialistes et apparentés, ainsi que par Mme Marie‑Pierre Rixain et plusieurs de ses collègues membres de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. La rapporteure avait donné un avis favorable à ces amendements.

Le présent article prévoit la remise d’un rapport par le Gouvernement au Parlement sur la mise en œuvre de la législation relative au délit d’entrave à l’IVG identifiant, le cas échéant, des pistes d’amélioration du dispositif.

Ce délit est caractérisé, aux termes de l’article L. 2223‑2 du code de la santé publique, par le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher de pratiquer ou de s’informer sur une IVG ou les actes préalables à cet acte, par tout moyen, y compris par voie électronique ou en ligne, notamment par la diffusion ou la transmission d’allégations ou d’indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d’une interruption volontaire de grossesse. Introduit en 1993 puis progressivement renforcé, le délit d’entrave à l’IVG est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

2.   Les modifications apportées par l’Assemblée nationale en première lecture

Aucune modification n’a été adoptée en séance publique.

3.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel des rapporteures.

 

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Article 2 ter
Rapport du Gouvernement sur l’évaluation du dispositif sur l’accès des femmes à l’interruption volontaire de grossesse

Origine de l’article : amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Position de la commission : modifications apportées à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   Une disposition introduite en séance publique par l’Assemblée nationale en première lecture

Cet article résulte de l’adoption d’un amendement, présenté par Mme Agnès Firmin Le Bodo et ayant reçu un avis défavorable de la rapporteure. Il prévoit la remise, par le Gouvernement au Parlement, d’un rapport d’évaluation du dispositif sur l’accès des femmes à l’IVG. Le rapport sera remis dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, dont les dispositions et leurs effets seront intégrés à son champ d’évaluation.

2.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel des rapporteures.

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Article 3
Compensation financière

Origine de l’article : proposition de loi initiale.

Position de la commission : maintien de la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

1.   La disposition de la proposition de loi

L’article 3 précise les modalités de compensation des charges et des moindres recettes engendrées, pour les organismes publics, par les dispositions de la proposition de loi.

L’allongement du délai légal de recours à l’interruption volontaire de grossesse, qui est prise en charge en totalité par l’assurance maladie, aura un impact direct sur la charge pour les organismes de sécurité sociale.

Le présent article pose le principe d’une compensation financière de la charge pour les organismes de sécurité sociale, qui repose sur la création, à due concurrence, d’une taxe additionnelle aux droits sur le tabac mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

2.   Les modifications apportées par l’Assemblée nationale en première lecture

Aucune modification n’a été adoptée en commission et en séance publique.

3.   La position de la commission

La commission n’a apporté aucune modification.

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  1  

   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa deuxième réunion du mercredi 10 février 2021, la commission a examiné, en deuxième lecture, la proposition de loi, rejetée par le Sénat, visant à renforcer le droit à l’avortement (n° 3793) ([34]).

I.   Discussion générale

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Je suis ravie de vous présenter, en deuxième lecture, cette proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement, avec Marie-Noëlle Battistel pour corapporteure. Il s’agit de proposer des solutions afin de renforcer le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) en facilitant le parcours des femmes souhaitant y recourir. Ce sujet est primordial à mes yeux ; aux vôtres aussi, je le sais.

Initialement articulée en deux articles, cette proposition de loi a été particulièrement enrichie en première lecture, en commission comme en séance, grâce à une véritable mobilisation transpartisane que je tiens une nouvelle fois à saluer. Aujourd’hui, elle se compose de neuf articles. D’emblée, je précise que deux articles ont vocation à être supprimés : l’article 1er ter A, parce qu’il a déjà été adopté dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, et l’article 3, qui est le gage que nous devrons demander au Gouvernement de lever en séance publique.

Cette proposition de loi a un seul et unique objectif : améliorer l’effectivité de ce droit fondamental qu’est l’avortement. Cette ambition se traduit par des mesures concrètes et d’autres de nature à favoriser un changement de mentalité. L’un ne va pas sans l’autre.

Commençons par les deux mesures très concrètes visant à renforcer le droit à l’avortement.

D’abord, l’article 1er permet d’allonger le délai légal d’IVG de douze à quatorze semaines de grossesse. Vous avez à maintes reprises entendu mes arguments en faveur de cet allongement. Je citerai aujourd’hui l’avis du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), saisi sur ce sujet par le Gouvernement à l’occasion de la première lecture de cette proposition de loi : « En définitive, si la liberté d’avorter en France n’est pas remise en cause à ce jour, un faisceau de facteurs (découverte tardive de la grossesse, insuffisance de l’information et des mesures préventives, inégalité territoriale dans la prise en charge, non-respect de la loi...) peut contribuer à la difficulté de sa réalisation durant le délai légal autorisé, conduisant ainsi des femmes à ne pas pouvoir réaliser leur décision personnelle, sauf à solliciter un déplacement à l’étranger pour en concrétiser la réalisation. »

On estime aujourd’hui qu’au moins 2 000 femmes sont, chaque année, contraintes de se rendre à l’étranger pour faire valoir leur droit fondamental à l’IVG. Mais d’autres situations sont moins bien connues : combien de femmes doivent continuer une grossesse non désirée, dont on connaît l’impact délétère tant sur elles-mêmes que sur l’enfant à naître ? Combien ont recours à une IVG de manière clandestine, mettant ainsi en danger leur propre santé ? Nous ne pouvons pas accepter ces situations. En France, en 2021, une femme doit pouvoir avorter si elle le souhaite ! Et le CCNE vient de l’affirmer : « il n’existe que peu, voire pas de différence entre douze et quatorze semaines de grossesse ». Aussi paraît-il incompréhensible de pérenniser cette situation aussi injuste qu’inégalitaire.

Ensuite, l’article 1er bis étend le champ de compétences des sages-femmes à la pratique de l’IVG par voie instrumentale. Cette disposition permettra de renforcer le maillage territorial des professionnels habilités à pratiquer une IVG. À la lumière des disparités territoriales existantes, elle représente une avancée majeure pour les femmes souhaitant avorter. Je tiens, d’ailleurs, à apporter mon soutien aux sages-femmes et à leurs revendications pour une meilleure rémunération et un meilleur statut.

Pour que ces mesures soient efficaces, il faut aussi faire changer les mentalités et cesser de voir l’IVG comme un acte médical à part. Les femmes souhaitant recourir à un avortement ne doivent plus être infantilisées et stigmatisées pour un acte loin d’être rare, puisqu’une femme sur trois y a recours durant sa vie.

Trois mesures vont en ce sens. L’article 1er ter supprime le dernier délai infantilisant : celui de deux jours de réflexion imposé aux femmes, après la consultation psychosociale préalable, pour confirmer une demande d’IVG. Laissons aux femmes le choix de leur temps de réflexion !

L’article 2 supprime la clause de conscience spécifique à l’IVG. D’une part, l’existence de la clause de conscience générale rend cette disposition superfétatoire. Elle résulte d’un équilibre politique vieux de quarante-cinq ans et n’a donc plus sa place aujourd’hui dans le code de la santé publique. D’autre part, la clause de conscience spécifique perpétue également une vision arriérée de l’IVG : en refusant à celle-ci le statut de soin apporté aux femmes, elle contribue à en faire un acte médical simplement toléré, et non un droit à part entière énoncé par la loi. Cet article prévoit également la création d’un répertoire recensant les professionnels et les structures de santé pratiquant l’IVG, de manière à gagner en transparence. Quand une femme souhaite recourir à une IVG, elle doit savoir vers qui se tourner.

Enfin, l’article 2 bis A clarifie l’obligation faite aux professionnels de santé de délivrer un moyen de contraception en urgence, ainsi que les sanctions associées au manquement à cette obligation de non-discrimination.

Par ailleurs, cette proposition de loi contient également deux demandes au Gouvernement de présenter un rapport au Parlement, qui permettront d’enrichir les connaissances sur l’accès à l’IVG et de mieux mesurer la nécessité de continuer à faire valoir ce droit.

En conclusion, cette proposition de loi est transpartisane. Son contenu n’est pas le fruit de l’idéologie mais de la nécessité de renforcer le droit à l’IVG face tant aux difficultés rencontrées par nos concitoyennes, une fois prise leur décision d’avorter, qu’aux inégalités constatées par les acteurs de santé dans l’accès à ce droit. Quand la vie des femmes est en jeu, nous nous devons de dépasser nos clivages politiques afin de faire évoluer notre système vers un accès à l’IVG effectif et plus juste.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Je me réjouis qu’après avoir adopté cette proposition de loi en première lecture le 8 octobre 2020, nous poursuivions le processus législatif en l’examinant en deuxième lecture au sein de notre assemblée. Je salue l’initiative de notre groupe Socialistes et apparentés qui, dans une logique transpartisane en faveur des droits des femmes, a choisi de l’inscrire dans sa niche parlementaire, d’abord au Sénat puis à l’Assemblée nationale. Ainsi continuons-nous le combat en faveur des droits des femmes.

C’est d’ailleurs un honneur pour moi d’être aujourd’hui la corapporteure de ce texte aux côtés de ma collègue Albane Gaillot. J’ai beaucoup travaillé sur l’avortement dans le cadre de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, notamment en rédigeant, avec notre collègue Cécile Muschotti, un rapport sur l’accès à l’IVG dans notre pays. Ce travail de longue haleine a été l’occasion de constater, en allant à la rencontre des acteurs de terrain, que, plus de quarante-cinq ans après l’obtention de ce droit, le bilan de l’accès à l’IVG est alarmant.

Professionnels de santé, médecins, sages-femmes, travailleurs sociaux, associations, plannings familiaux, tous font état de plusieurs difficultés dans le parcours d’accès à l’IVG, plus ou moins accrues selon des situations locales parfois très différentes. Il s’agit de difficultés pour accéder à une information claire et exacte, pour savoir à qui s’adresser, pour trouver un professionnel. Certains des praticiens qui refusent de pratiquer l’IVG réorientent les femmes vers un confrère qui l’accepte, mais d’autres ne le font pas. Certains autres, opposés à l’IVG, ne le disent pas et font leur possible pour retarder la prise en charge de sorte que les délais soient dépassés.

Trouver des rendez-vous rapidement et être prise en charge dans les délais impartis sont encore d’autres difficultés liées à l’éloignement des structures de santé, voire à une forme de désertification médicale, encore accrue en matière d’IVG dans certains territoires. D’une région à l’autre, l’offre de soins est contrastée et le délai de prise en charge peut varier du simple au quadruple. Dans les zones rurales, notamment, le nombre des services d’orthogénie se réduit avec la fermeture progressive des petites maternités.

Ces difficultés touchent encore plus frontalement les femmes les plus vulnérables : celles qui n’ont pas de moyen de locomotion, celles qui ne peuvent pas s’absenter de leur travail, celles qui n’ont que peu de moyens pour organiser la garde de leurs enfants afin de se rendre aux consultations obligatoires.

Comment justifier une application à géométrie variable d’un droit absolument fondamental ? De surcroît, ces difficultés ont été exacerbées par la crise sanitaire. Au cours du premier confinement, sur la période allant de mi-mars à mi-mai, le numéro vert national « Sexualité contraception IVG » a connu une augmentation spectaculaire du nombre d’appels par rapport à 2019 : de 330 % pour ceux concernant des difficultés d’accès à l’IVG, et de 100 % pour ceux portant sur une demande d’aide ou d’information pour avorter hors délais à l’étranger. Peur de déranger des soignants déjà débordés, peur d’attraper le virus, impossibilité de se déplacer en France comme à l’étranger, difficulté pour maintenir le secret et l’anonymat dans certaines situations, difficulté d’accès à l’information : la crise sanitaire a renforcé les difficultés d’accès des femmes à l’avortement.

Toutefois, cette crise aura prouvé qu’en cas de nécessité, le système peut être réformé. La généralisation de la téléconsultation, ainsi que l’allongement de cinq à sept semaines de grossesse du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville démontrent la nécessité et la volonté partagée de renforcer l’effectivité du droit à l’IVG.

Si des mesures importantes ont donc été prises, elles ne sont que provisoires et ne sauraient répondre aux difficultés structurelles d’accès au droit à l’IVG. C’est cette même ambition qui nous amène, Albane Gaillot et moi-même, à vous soumettre cette proposition de loi dont de nombreuses dispositions sont issues du rapport sur l’accès à l’IVG. Dans celui-ci, nous recommandions, avec Cécile Muschotti, l’allongement du délai de recours à l’IVG, la suppression de la clause de conscience spécifique, l’extension de la compétence des sages‑femmes à la pratique d’une IVG par voie instrumentale, la mise en place d’un répertoire des professionnels pratiquant l’IVG géré et mis à jour par les agences régionales de santé (ARS), un bilan sur l’application de la législation relative au délit d’entrave, ainsi que l’amélioration de l’information des femmes sur leur droit au choix de la méthode d’IVG. Je ne peux donc que me féliciter de voir l’ensemble de ces recommandations intégrées dans la proposition de loi.

Ces mesures font d’ailleurs l’objet d’un consensus très important, et tous les récents travaux sur le sujet, qu’ils émanent du Conseil économique, social et environnemental (CESE), de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) ou du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEFH), font des recommandations dans le même sens. Ces recommandations, d’ordre législatif, devront évidemment être complétées par des mesures réglementaires, notamment dans le domaine de la formation des professionnels de santé. Les médecins, généralistes comme gynécologues, ne sont pas suffisamment formés à l’acte d’avortement – il existe même une forme de désinformation à son sujet. Il faut faire évoluer les mentalités et les pratiques des médecins. Il n’est plus possible que des services de gynécologie soient encore dirigés par des médecins opposés à l’avortement !

Il ne s’agit d’ailleurs pas que des médecins : tous les personnels médicaux doivent être mieux sensibilisés et formés à l’accueil et à l’accompagnement des femmes souhaitant recourir à une IVG. Nous devons agir résolument en ce sens afin de garantir le droit fondamental qu’est l’avortement et faciliter le parcours des femmes pour y avoir accès. Les débats d’aujourd’hui en commission, puis en séance publique la semaine prochaine, en seront l’occasion.

Alors, soyons tous ambitieux : nous ne devrions jamais hésiter lorsqu’il s’agit de protéger nos concitoyennes et les droits des femmes dans notre société. Comme le dit la professeure de droit Diane Roman : « L’interruption volontaire de grossesse est perçue comme une simple dérogation au droit à la vie. » Mes chers collègues, il est temps de rendre ce droit effectif. Nous comptons sur votre entier soutien.

Mme Cécile Muschotti. Adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, le 8 octobre 2020, la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement a été rejetée par le Sénat, en commission, le 13 janvier dernier. Elle est chère à nombre de parlementaires, pas tous membres de la majorité, puisqu’elle avait été déposée à l’origine par feu le groupe Écologie Démocratie Solidarité à l’Assemblée, puis reprise par le Groupe Socialiste, Écologiste et Républicain au Sénat pour être enfin inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée par le groupe Socialistes et apparentés dans le cadre de sa niche parlementaire. Elle revient donc aujourd’hui en commission des affaires sociales pour son examen en deuxième lecture.

Entre-temps, le 12 novembre, le CCNE, saisi par le ministre des solidarités et de la santé le 2 octobre, c’est-à-dire une semaine avant son examen en première lecture dans l’hémicycle, a rendu son avis sur la question de savoir si l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG de douze à quatorze semaines était envisageable. Il le conclut par ces mots : « [...] en axant sa réflexion sur les principes d’autonomie, de bienfaisance, d’équité et de nonmalfaisance à l’égard des femmes, le CCNE considère qu’il n’y a pas d’objection éthique à allonger le délai d’accès à l’IVG de deux semaines, passant ainsi de 12 à 14 semaines de grossesse ». Le Gouvernement ayant, lors de l’examen de ce texte en première lecture, opposé publiquement cet avis à sa décision de soutenir l’allongement du délai de deux semaines, nous pouvons tous considérer que le débat en deuxième lecture sera serein et nous permettra de continuer efficacement la navette parlementaire.

Je rappelle que l’examen d’une proposition de loi, s’il s’achève après adoption du même texte par les deux chambres, peut faire l’objet, lorsque la procédure accélérée n’a pas été engagée par le Gouvernement, d’un nombre indéterminé d’allers-retours entre l’assemblée et le Sénat, sauf si le Gouvernement convoque une commission mixte paritaire pour provoquer une lecture définitive par la seule Assemblée. À ce stade, il nous appartient « simplement » de rétablir le texte que nous avions adopté en première lecture afin de veiller au respect de l’équilibre obtenu par notre assemblée. Il est même possible, sans rompre celui‑ci, d’enrichir encore légèrement le dispositif.

Je remercie les députés du groupe La République en Marche d’avoir soutenu ce texte, en particulier les membres de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, ainsi que nos corapporteures, Albane Gaillot et Marie Noëlle Battistel. Continuons d’œuvrer pour l’effectivité du droit à l’avortement, et donc pour le droit des femmes à disposer de leur propre corps dans notre pays !

Mme Geneviève Levy. Promouvoir l’allongement du délai de recours à l’IVG de douze à quatorze semaines de grossesse est, à mon sens, une solution inappropriée. Donne‑t‑on aux femmes les moyens de choisir librement leur grossesse lorsqu’il est établi que la probabilité du recours à une IVG décroît avec l’augmentation du niveau de vie ? Les aide‑t‑on lorsqu’année après année, le nombre des établissements de santé la pratiquant se réduit, créant de véritables déserts médicaux pour les femmes dans nos campagnes ? Aide‑t‑on nos femmes et nos fils lorsque 25 % des établissements scolaires ne dispensent pas de cours d’éducation à la sexualité et que la majorité des établissements ne respecte pas les trois séances par an prévues par la loi en la matière ?

Ces deux semaines supplémentaires empêcheront-elles que quelque 2 000 femmes partent chaque année à l’étranger pour avorter, alors que, pour 70 % d’entre elles, la cause est l’absence de diagnostic de grossesse ou de signes cliniques, ou une tendance à cycle de menstruation irrégulier ?

On ne peut nier la dimension éthique d’un tel allongement : l’avortement n’est pas un acte médical anodin et sa pratique est sensible. Seulement 37 % des professionnels interrogés par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français déclarent qu’ils réaliseront des IVG à ce stade. Il y a là de quoi s’interroger.

Entre les deux lectures, ma conviction n’est allée qu’en se renforçant, notamment à la lumière des avis du CCNE et de l’Académie de médecine. Cette proposition n’offre pas de solution ni de garanties d’amélioration. J’y vois une réponse inappropriée au manque d’information, d’éducation et de moyens qui ne peut plus être ignoré. Sans effort en la matière, nos successeurs se retrouveront, dans quelques années, dans cette même salle pour examiner un texte visant à nouveau à allonger le délai de recours à l’IVG, qui ne constituera toujours pas une avancée pour les femmes.

Mme Perrine Goulet. Comme en première lecture, ce texte demeure sensible parce qu’il touche à l’intime. Les membres du groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés voteront donc librement. À titre personnel, j’y reste favorable.

En première lecture, notre assemblée a accompli des avancées, comme l’autorisation pour les sages-femmes de pratiquer les IVG chirurgicales préconisée par le rapport de la délégation aux droits des femmes. Je proposerai un amendement visant à préciser cette disposition, qui demeure primordiale tant la question de l’accès à l’IVG demeure prégnante. La réalité de certains de nos territoires, c’est que les médecins ne sont pas toujours accessibles, ou qu’il n’y en a tout simplement plus. C’est aussi que certains d’entre eux, par convenance ou par conviction, refusent de pratiquer l’avortement. La loi a tenté d’y remédier, sans donner de résultat probant, à voir les chiffres.

Ces situations sont autant d’obstacles à la liberté des femmes. Quand elles se combinent, ceux-ci sont encore plus difficiles à franchir. Dans notre pays, nous ne pouvons tolérer de telles situations. Lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, nous avons voté une expérimentation permettant aux sages-femmes de pratiquer de telles IVG. Mon groupe l’avait accompagnée de nombreux garde-fous en matière de formation, d’assurance et de rémunération, renvoyant ces décisions à des actes réglementaires. Quatre mois plus tard, ces dispositions n’ont toujours pas été prises. C’est peut-être peu à l’échelle de l’administration, mais c’est beaucoup trop dans la vie d’une femme. Je saurai le rappeler dans l’hémicycle.

Mme Annie Chapelier. Je vous remercie, mesdames les rapporteures, pour ce texte qui constitue une avancée majeure pour les droits des femmes, comme je remercie nos collègues Cécile Muschotti et Marie-Noëlle Battistel pour la qualité de leur rapport.

Cette proposition de loi répond certes à un véritable besoin sociétal et correspond à la maturité collective de notre pays sur ce sujet, mais elle ne peut pas tout résoudre. Les problèmes d’accès et d’information qui subsistent sont réels, comme la carence en matière d’éducation à la sexualité, qui constitue pourtant un levier majeur. Ainsi, aux Pays-Bas, où le délai légal pour avorter est de vingt-quatre semaines, le taux de recours à l’IVG, comme celui des grossesses précoces et des maladies sexuellement transmissibles chez les jeunes, est le plus bas d’Europe, simplement parce que, dès la maternelle, une éducation à la sexualité est dispensée, qui implique les garçons.

Cette proposition de loi restera un levier, un élan commun qu’il nous faudra soutenir pour renforcer l’effectivité du droit d’accès à l’IVG et de l’avortement pour toutes. On sait, en effet, que les droits des femmes ne sont jamais acquis et qu’ils sont parmi les premiers à disparaître en cas de crise, comme nous l’avons vu au cours de la crise sanitaire, de conflits ou de montée des populismes – on pense spontanément, en Europe, à la Pologne ou à la Hongrie.

Face à cela, nous devons affirmer en France ce droit intangible par le soutien ferme et collégial de tous les groupes à nos concitoyennes. Si certains membres du groupe Agir ensemble ont exprimé des réserves à l’égard de quelques articles, celui-ci se prononcera néanmoins en faveur de la proposition de loi.

Je nous souhaite que cette deuxième lecture se déroule dans un climat apaisé, car l’enjeu est essentiel pour la liberté et les droits des femmes.

Mme Valérie Six. Le groupe UDI et Indépendants est très attaché au droit à l’IVG, fondement du droit, si durement acquis, des femmes et de leur émancipation. Nous pouvons nous réjouir de ce que ce droit progresse dans le monde – l’IVG est autorisée depuis deux mois en Argentine, où plusieurs dizaines de milliers de femmes étaient encore hospitalisées chaque année après avoir dû recourir à une IVG clandestine. L’IVG n’est pas une décision facile à prendre ni une solution de confort : il s’agit d’un choix libre mais difficile, et nous devons faire preuve d’humilité.

Ce qui motive cette proposition de loi, ce sont les près de 2 000 femmes qui continuent chaque année à partir à l’étranger pour y subir une IVG tardive. Or c’est aussi ce qui avait motivé l’allongement du délai à douze semaines par la loi de 2001. S’il est toujours difficile de fixer une limite, notre groupe pense que le problème n’est pas une question de délai qu’il faudrait rallonger mais plutôt l’accessibilité de l’IVG dans les territoires du fait du manque de praticiens et de structures hospitalières, ainsi que d’une prévention encore bien défaillante.

La publication d’un fichier dressant la liste des praticiens pratiquant des IVG, qui revient à dresser a contrario la liste de ceux qui s’y refusent en usant de leur liberté de conscience, constitue, pour nous, une ligne rouge qui nous conduit à voter contre cette proposition de loi.

Mme Martine Wonner. Je remercie le groupe Socialistes et apparentés d’avoir inscrit la deuxième lecture de cette proposition de loi à l’ordre du jour, nous permettant ainsi d’avancer sur ce sujet important, malgré le rejet du Sénat. Je salue également le travail des rapporteures ainsi que celui de la délégation aux droits des femmes, dont le rapport sur l’accès à l’IVG a formulé un grand nombre de recommandations, certaines ayant été reprises dans ce texte. Cet enrichissement est la preuve des bienfaits des démarches transpartisanes que nous devons sans cesse encourager.

Grâce à la proposition de loi, le délai d’accès à l’IVG sera allongé et la double clause de conscience supprimée ; la compétence des IVG chirurgicales sera étendue aux sages‑femmes et la pratique du tiers payant pour les actes en lien avec l’IVG rendue obligatoire : autant d’avancées que nous saluons.

Les difficultés d’accès sont nombreuses et se manifestent à différents niveaux, ce qui nous impose d’agir sur tous les plans, technique comme symbolique. Dans trop de cas, l’accès à l’IVG n’est pas effectif à cause du manque de médecins, d’inégalités territoriales persistantes ou du désintérêt à l’égard de cet acte médical, ou encore à cause de pressions sociales ou familiales. Le premier confinement et la crise sanitaire nous ont brutalement rappelé le parcours du combattant imposé à des femmes bien souvent trop seules et trop vulnérables. Renforcer l’accès à l’IVG, c’est lutter contre ces inégalités et aplanir tous ces obstacles qui portent atteinte aux choix des femmes, à leur droit de disposer de leur corps et à leur santé.

Adopter cette proposition, c’est continuer le long combat pour les droits et la dignité des femmes. C’est envoyer le signal qu’il n’est jamais fini et que nous devons toujours demeurer vigilants.

Mme Caroline Fiat. Je remercie nos rapporteures Albane Gaillot et MarieNoëlle Battistel ainsi que Cécile Muschotti et tous nos collègues qui ont travaillé sur ce texte à la délégation aux droits des femmes, sans oublier le groupe Socialistes et apparentés, de n’avoir rien lâché. Espérons qu’enfin, en 2021, on y arrive !

En première lecture, on nous opposait toutes les cinq secondes l’absence de l’avis du CCNE. Bonne nouvelle, maintenant nous l’avons, et puisqu’il est favorable, nous pourrons avoir des débats sereins !

Merci encore au groupe Socialistes et apparentés d’avoir inscrit ce texte dans sa niche parlementaire – on sait comme elles offrent peu de place.

M. Pierre Dharréville. Ce sujet essentiel mobilise les femmes et les hommes ; c’est un combat que nous devons mener en commun. Je remercie également nos deux rapporteures, Albane Gaillot et Marie-Noëlle Battistel, ainsi que Cécile Muschotti et toutes celles et tous ceux qui ont permis à ce texte de continuer, malgré ses difficultés de parcours.

Le droit à l’IVG est une conquête essentielle pour les femmes, qui mérite toujours d’être défendu et protégé, non pas comme un droit théorique mais comme un droit réel, compte tenu des difficultés rencontrées pour le faire valoir. Les propositions qui sont sur la table permettent de remédier à un certain nombre d’entre elles. Disposer librement de son corps constitue une dimension essentielle de l’émancipation des femmes.

Nous sommes bien conscients de la nécessité de prendre des mesures concrètes, mais également symboliques, qui ne sont d’ailleurs pas sans effet sur cette clause de conscience spécifique dont notre groupe de la Gauche démocrate et républicaine demande la suppression depuis fort longtemps. Prendre une telle décision aujourd’hui représente donc une victoire et enracine encore plus ce droit, de façon tout à fait nécessaire à voir comme il est remis en cause un peu partout en Europe et dans le monde.

Nous serons donc favorables à ces dispositions.

M. Régis Juanico. Je me réjouis de l’examen aujourd’hui de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement, dans le cadre de la niche du groupe Socialistes et apparentés. Ce texte, présenté par Albane Gaillot et s’inspirant du rapport d’information sur l’accès à l’IVG rédigé notamment par ma collègue Marie-Noëlle Battistel au nom de la délégation aux droits des femmes, avait été adopté de manière transpartisane par l’Assemblée nationale, le 8 octobre 2020. Défendu par notre collègue Laurence Rossignol et les sénateurs socialistes et apparentés, il a ensuite été rejeté au Sénat par le biais d’une question préalable. Parce qu’il est nécessaire de consolider et de rendre effectif l’accès à ce droit fondamental reconnu par la loi et essentiel pour la vie comme pour la liberté des femmes, je me félicite donc que cette proposition de loi continue son chemin à travers la navette parlementaire et arrive en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

Cette proposition de loi vise à garantir que toute femme souhaitant recourir à une interruption volontaire de grossesse puisse trouver une solution adaptée, dans un laps de temps adéquat. Elle prévoit, pour cela, d’allonger le délai de recours à l’IVG instrumentale, de supprimer la clause de conscience spécifique tout en réaffirmant le principe d’une clause générale, ou encore d’étendre la compétence d’IVG chirurgicale aux sages-femmes jusqu’à dix semaines de grossesse.

En raison de toutes ces avancées en faveur des droits et des libertés des femmes, le groupe Socialistes et apparentés votera cette proposition de loi. Que tous ceux qui craindraient qu’elle ne fasse exploser le taux d’avortement se rassurent : au Canada, alors qu’il n’existe pas de délai, 90 % des avortements ont lieu avant la douzième semaine. Cela montre bien que lorsqu’une femme souhaite avorter, elle le fait au plus vite.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Je remercie tous nos collègues qui sont intervenus dans un esprit de consensus pour soutenir cette avancée pour les femmes.

Je dirai à Mme Levy qu’effectivement, le seul allongement du délai ne permettra pas un accès total à l’IVG en France. Notre rapport a bien montré qu’il fallait lever plusieurs difficultés au travers d’un panel de mesures. Cet allongement en fait partie. Comme mon collègue Régis Juanico vient de l’indiquer, allonger les délais n’entraîne pas une augmentation du nombre d’IVG. Nous l’avions aussi constaté lorsque nous les avions allongés à douze semaines. L’exemple du Canada, où il n’existe plus de délais et où quasiment toutes les IVG sont pratiquées avant les douze semaines, est extrêmement parlant : il montre bien que lorsque la femme a fait ce choix, elle veut aller le plus vite possible. Elle n’a d’ailleurs aucun intérêt à faire traîner les choses.

L’allongement non seulement n’entraînera pas une augmentation considérable du nombre d’IVG mais, surtout, il permettra à toutes les femmes en France d’accéder à celle-ci. C’est le moins que l’on puisse faire s’agissant d’un droit. Il n’est pas acceptable que des femmes n’y aient pas accès, qu’elles soient 2 000 ou 200.

Je remercie Perrine Goulet pour son soutien. Nous sommes évidemment favorables aux avancées en matière de formation et de reconnaissance des métiers, que notre rapport a d’ailleurs identifiées. Il faut effectivement travailler dans ce sens en adoptant certains amendements.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Chère Annie Chapelier, nous sommes bien conscientes que la proposition de loi ne résoudra pas toutes les difficultés d’accès à l’IVG. Oui, il y a quelque chose à faire en matière d’éducation à la sexualité, car elle n’est pas dispensée de la même manière sur tout le territoire et dans tous les établissements scolaires, alors qu’elle est prévue par la loi. Je travaille sur ce sujet, comme certains d’entre vous, depuis le début de mon mandat.

Vous avez raison, madame Six, de soutenir l’IVG tout en relevant le caractère difficile de la décision d’y recourir : il ne s’agit pas de quelque chose que l’on fait de gaîté de cœur, mais parce que l’on y est obligée.

J’aimerais, en revanche, vous convaincre de l’utilité du répertoire, qui faciliterait grandement l’accès à l’IVG et raccourcirait considérablement le délai de prise en charge. Pour avoir visité hier matin, avec des collègues, un centre d’orthogénie, je peux vous assurer que sa création répondrait à un réel besoin et ne mettrait pas en porte-à-faux des médecins qui ne voudraient pas y figurer.

Comme vous l’avez souligné, madame Wonner, on pourrait, s’agissant de la disparité territoriale, tendre la perche au Gouvernement afin que des mesures soient prises, comme la création de centres d’orthogénie et d’IVG sur l’ensemble du territoire. Il n’est pas normal qu’une jeune femme n’ait pas, selon qu’elle habite dans la Nièvre ou à Paris, la même possibilité d’accès à un centre d’IVG.

Enfin, j’ai bien entendu le soutien plein et entier de nos collègues Pierre Dharréville et Caroline Fiat.

II.   examen des articles

La commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Allongement du délai de recours à l’interruption volontaire de grossesse de douze à quatorze semaines de grossesse

La commission examine les amendements de suppression AS1 de M. Thibault Bazin et AS15 de Mme Josiane Corneloup.

M. Thibault Bazin. En complément des arguments avancés par ma collègue Geneviève Levy, je m’interroge : si les délais représentaient un obstacle majeur pour accéder à l’IVG, comment expliquer l’augmentation constatée du nombre d’IVG ? Ce sont plutôt les disparités territoriales, en particulier dans les départements et territoires d’outre-mer, qui devraient nous interroger. Deux semaines supplémentaires apporteront-elles une solution à celles qui partent à l’étranger, dont le nombre est d’ailleurs très faible par rapport au nombre total d’IVG ? J’en doute.

Contrairement à ce qui est allégué, des arguments médicaux et scientifiques permettent de s’opposer à un tel allongement, qui ne fait consensus ni dans l’ensemble de la sphère médicale ni dans la société, sans remettre en cause le droit à l’IVG. Si des délais encadrent ce droit, c’est bien en raison d’incidences au fur et à mesure du déroulement de la grossesse : durant ces deux semaines, l’embryon évolue, comme le corps de la femme.

Compte tenu de ces différents éléments, il ne me semble pas opportun de maintenir l’article.

Mme Josiane Corneloup. Je ne suis pas certaines que l’allongement des délais permette de réduire le nombre d’IVG. Aujourd’hui, 95 % des femmes demandent une IVG avant la dixième semaine ; seules 5 % y recourent au cours des deux dernières semaines. On voit donc que l’allongement ne concerne qu’une proportion assez peu importante d’entre elles.

Il me semble que cette proposition pallie les conséquences plutôt que les causes. Il faut plutôt que nous nous attaquions aux disparités territoriales d’accès à l’IVG et à la déficience de l’éducation à la vie sexuelle et affective. D’où l’amendement de suppression.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Effectivement, les inégalités territoriales nous interrogent, notamment dans les territoires ultramarins, tout comme les aspects de la formation, de l’information et de l’accompagnement.

L’allongement vise non pas à faire baisser le nombre d’IVG, mais à rendre le droit effectif. Il ne l’est pas en France puisque certaines femmes sont contraintes, dans le meilleur des cas, de se rendre à l’étranger.

L’exposé sommaire de vos amendements invoque des contre-indications techniques ou éthiques à l’allongement des délais. En première lecture, vous aviez réclamé avec insistance l’avis du CCNE. Eh bien, celui-ci établit qu’il n’existe que peu, voire pas de différence entre douze et quatorze semaines de grossesse, et qu’il n’y a pas d’objection éthique à allonger de deux semaines le délai d’accès à l’IVG.

Nous pouvons donc, en conscience et de manière tout à fait éthique, proposer un tel allongement, dont je répète qu’il n’est pas la seule mesure à prendre pour rendre effectif le droit d’accès à l’IVG.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission rejette l’amendement AS13 de M. Fabien Di Filippo.

Elle adopte ensuite l’article 1er, sans modification.

Article 1er bis : Extension de la compétence des sages-femmes à la méthode chirurgicale d’interruption volontaire de grossesse jusqu’à la dixième semaine de grossesse

La commission examine l’amendement de suppression AS2 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. L’article 70 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a validé une expérimentation de trois ans de la pratique de l’IVG instrumentale par les sages-femmes. Il me semble donc prématuré de voter une extension générale.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Nous comprenons votre demande, mais nous voulons aller vite, parce que tous les jours des femmes ont du mal à accéder à l’IVG et, on le sait, la mise en application de cette disposition va être longue. Permettre aux sages-femmes de pratiquer l’IVG instrumentale répond, qui plus est, à l’obstacle des disparités territoriales que vous avez soulevé.

M. Jean-Louis Touraine. Il n’y a aucune raison de ne pas accorder aux sages‑femmes une telle possibilité, d’autant plus qu’elles ont le droit d’accomplir des gestes endo‑utérins. Il ne s’agit donc de rien d’autre que de leur permettre de faire ce qu’elles savent faire. Comme par ailleurs elles ont le droit de procéder à des IVG médicamenteuses, c’est assez absurde de leur refuser des IVG par gestes endo‑utérins, alors que, je le répète, elles ont le droit de les pratiquer. Il faut le permettre le plus vite possible, parce que, dans certaines parties du territoire, l’accès à l’IVG est très difficile et les délais d’attente sont de dix à onze jours. Or c’est souvent, dans ces cas, le manque de gynécologues qui est en cause. C’est nécessaire pour les femmes qui attendent et pour les sages-femmes. C’est une forme de reconnaissance que nous leur devons. Elles devraient d’ailleurs, à mon sens, bénéficier d’une reconnaissance salariale pour les missions additionnelles que nous leur confions et qu’elles réalisent très bien.

Mme Caroline Fiat. Les sages-femmes s’occupent des mamans pendant les naissances, souvent sans les gynécologues, sans que cela inquiète personne. Elles font des points chirurgicaux extérieurs mais aussi intérieurs, sans médecin. Or personne ne leur demande d’arrêter ! Si c’était le cas, tout le monde serait bien embêté, puisqu’il n’y aurait pas assez de gynécologues pour s’occuper de toutes les mamans. Elles savent très bien s’occuper de leurs patientes. Faisons-leur confiance.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Avons-nous déjà des retours de l’expérimentation en cours ?

Mme Albane Gaillot, rapporteure. L’expérimentation n’a pas réellement démarré. Seuls les travaux d’études préalables ont commencé.

Mme Josiane Corneloup. Il me semble tout de même que qui dit expérimentation dit évaluation. Je trouve regrettable que nous généralisions avoir d’avoir évalué.

Mme Perrine Goulet. Je vais proposer des amendements concernant la rémunération et l’évaluation. Comme l’administration traîne, il faut la booster un petit peu.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS18 de Mme Josiane Corneloup.

Mme Josiane Corneloup. Il est urgent de rétablir le principe selon lequel une IVG ne peut être pratiquée que par un médecin, aussi bien pour des raisons de sécurité évidentes qu’eu égard à la nature même de la mission des sages‑femmes.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS19 des rapporteures.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Il est issu de la recommandation n° 6 du rapport d’information de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, qui préconise de pérenniser l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville de cinq à sept semaines de grossesse, conformément à ce qui est déjà autorisé pour l’IVG médicamenteuse réalisée en milieu hospitalier. L’amendement vise à rendre pérenne une mesure pour le moment temporaire et qui n’a posé aucun problème.

La commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements AS8 et AS9 de Mme Perrine Goulet.

Mme Perrine Goulet. Dans de nombreux territoires, les sages‑femmes remplacent les gynécologues. En plus du suivi de grossesse, elles accomplissent des actes gynécologiques et assurent le suivi des femmes tout au long de leur vie. Il est important qu’elles puissent également accompagner les femmes au moment de la délicate décision de procéder à une IVG. Puisqu’elles remplacent les médecins, il faut les accompagner dans leur montée en compétences, pour ce qui est de leur formation, des assurances dont elles ont besoin pour exercer et de leur niveau de rémunération. C’est pourquoi je propose de demander au ministre de préciser par décret la mise en œuvre concrète de cette nouvelle compétence.

Le second amendement vise à demander un rapport pour évaluer l’application des nouvelles dispositions.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Nous vous remercions pour vos deux amendements, qui tendent à préciser et à encadrer les nouvelles dispositions et ne manqueront pas de rassurer les députés qui pourraient se poser des questions sur cette pratique de l’IVG instrumentale par les sages‑femmes. Préciser les missions, le statut et les rémunérations associées par décret répond à notre ambition de rassurer les sages‑femmes. Elles manifestaient cette semaine parce qu’elles s’interrogent sur leurs missions et veulent être rassurées sur l’évolution de leur rémunération. Le rapport permettrait aussi de répondre aux interrogations relatives au suivi et à l’efficience du dispositif.

Avis favorable.

Mme Annie Chapelier. Je remercie Perrine Goulet pour ses deux amendements. Je travaille depuis un an avec les sagesfemmes qui se posent beaucoup de questions sur leur statut, leur domaine de compétences, leur formation, l’organisation des soins et l’accompagnement global en maternité ainsi que leur rôle en tant que professionnelles de santé sexuelle et reproductive, qui est largement sous-estimé. Nous avons l’occasion d’augmenter leurs compétences, en leur permettant d’accéder à un geste qu’elles peuvent assez facilement acquérir avec une formation adaptée. Mais il est essentiel que cela s’accompagne d’un dispositif particulier.

La commission adopte successivement les amendements.

Puis elle adopte l’article 1er bis modifié.

Article 1er ter A : Systématisation de la pratique du tiers payant pour les actes en lien avec l’interruption volontaire de grossesse et protection du secret pour la prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS20 des rapporteures.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Les dispositions ayant d’ores et déjà été adoptées au travers de l’article 63 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, elles peuvent être retirées de ce texte.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 1er ter A est supprimé.

Article 1er ter : Suppression du délai de réflexion de deux jours pour confirmer une demande d’interruption volontaire de grossesse en cas d’entretien psychosocial préalable

La commission examine les amendements de suppression AS3 de M. Thibault Bazin et AS12 de M. Fabien Di Filippo.

M. Thibault Bazin. L’article vient supprimer le délai de quarante‑huit heures prévu entre l’entretien psychosocial préalable et le recueil du consentement. Il ne me semble pas opportun de revenir sur l’un des éléments de l’équilibre de la loi de Simone Veil. C’est pourquoi je vous propose de maintenir cet ultime délai.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Cet entretien est seulement proposé aux femmes majeures et n’est obligatoire que pour les mineures non émancipées. Nous considérons ce délai de réflexion comme inutile, parce que la femme a très largement réfléchi lorsqu’elle prend sa décision. C’est un peu contradictoire avec votre souhait de ne pas prolonger le délai : plus on prend du temps, moins on peut rester dans le délai des douze semaines. Nous respectons l’autonomie des femmes qui ont décidé bien avant leur rendez-vous ce qu’elles ont à faire.

Avis défavorable.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Si la femme veut prendre un délai pour réfléchir, malgré cet article, elle le pourra toujours. C’est seulement que nous ne l’obligeons pas à le prendre. Si elle est prête, qu’elle a passé son entretien psychologique, qu’elle a reçu les informations et qu’elle a décidé de le faire, elle le fait. Aujourd’hui, elle ne le peut pas, elle doit attendre quarante-huit heures. Demain, elle pourra faire le choix : manifester tout de suite sa décision ou attendre.

M. Thibault Bazin. Madame Battistel, vous avez évoqué la question des délais et la spécificité de traitement des femmes mineures. Cela me fait penser à nos précédents débats : il me semble que, selon les statistiques, le nombre d’IVG concernant des moins de 18 ans a plutôt baissé, alors qu’il a plutôt augmenté pour les femmes de plus de 30 ans. Il serait intéressant de savoir si, parmi les 5 % de femmes qui vont à l’étranger parce qu’elles ont dépassé le délai légal, les mineures sont les plus concernées ou non.

Par ailleurs, j’ai bien compris qu’elles auront toujours la faculté de prendre du temps pour réfléchir. Mais pourquoi supprimer le délai de réflexion qui faisait partie de l’équilibre initial de la loi ? Avez‑vous remarqué dans vos travaux que ces quarante-huit heures sont l’une des raisons qui conduisent les femmes à partir à l’étranger ?

M. Jean-Louis Touraine. Je suis sûr que M. Bazin a un infini respect pour ses collègues féminines et pour les femmes en général. Je sais donc qu’il comprendra que, pour une femme, c’est un peu une humiliation de s’entendre dire qu’elle doit réfléchir avant de prendre la décision. C’est un peu comme si on vous disait, monsieur Bazin, lorsque vous déciderez de faire un enfant avec votre femme que vous aurez un délai de réflexion avant de pouvoir entreprendre votre acte procréatif...

Mme Valérie Six. C’est tout de même un sujet douloureux...

Pourquoi enlever ces deux jours de réflexion, à moins d’avoir eu la preuve qu’ils sont un frein et que des femmes n’ont pas pu avorter dans les délais à cause d’eux ?

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Un avortement n’est pas anodin. C’est un fait qui marque la vie d’une femme. Donner ce temps, si court soit-il, c’est laisser une place à la réflexion. Il me semble qu’il a une réelle valeur. Mais s’il y a des preuves que ces deux jours entravent l’avortement, il faut en effet se poser la question de les supprimer. Parfois l’avortement se fait sous la pression du conjoint, de l’entourage. La femme ne choisit pas toujours d’avorter. Dans de tels cas, ces deux jours ont d’autant plus leur place.

Mme Perrine Goulet. Ce débat est intéressant, mais je pense que, lorsqu’une femme va voir un gynécologue pour demander une IVG, elle y a déjà réfléchi. Il faut arrêter de complexifier. Ces réserves n’existent que lorsqu’il s’agit du choix des femmes, comme si elles n’étaient pas capables d’être sûres d’elles au premier rendez-vous. Quant à la pression, ces quarante-huit heures peuvent, au contraire, laisser du temps à la famille pour faire pression sur la jeune femme pour garder l’enfant. La pression existe avec ou sans le délai : ce n’est pas un argument.

Une femme n’a pas besoin de ces quarante-huit heures. Soit sa décision est prise avant son rendez-vous chez le gynécologue, soit elle se donnera elle-même un temps de réflexion, une fois que le médecin lui aura donné toutes les informations. C’est infantiliser les femmes de leur dire qu’elles sont obligées d’attendre quarante-huit heures, même si elles ont pris leur décision. Pensez à une femme qui est enceinte de dix semaines, qui n’a pas envie de garder plus longtemps cet enfant en elle, qui a vraiment besoin de recourir à une IVG parce qu’elle n’est pas bien psychologiquement et qui s’entend dire qu’il va encore falloir attendre ! Il faut laisser aux femmes la capacité de faire ce qu’elles veulent. Elles auront toujours loisir de prendre le temps qu’elles veulent, mais on n’a pas à leur imposer ces quarante-huit heures.

Mme Annie Chapelier. Le délai de quarante-huit heures, rappelons-le, n’est obligatoire que pour les mineures. Nos collègues, à juste titre, s’interrogent pour savoir si un grand nombre de femmes sont concernées par le dépassement de délai. La réponse n’est pas simple, du fait d’une très grande hétérogénéité territoriale. Dans chaque milieu géographique et dans chaque région, l’accès à l’IVG est différent. Outre-mer, il est encore plus compliqué qu’ailleurs. Les taux d’IVG y sont relativement importants et beaucoup de mineures tombent enceintes.

Lorsque ces jeunes filles se rendent compte qu’elles sont enceintes, il y a des délais d’attente pour obtenir les rendez-vous, parce qu’il n’y a pas assez de personnels, même pour réaliser les entretiens. Donner quarante-huit heures de plus, alors qu’elles sont déjà inscrites dans une démarche d’IVG et qu’elles ont déjà fait leur choix, c’est leur faire courir le risque de dépasser le délai. Il ne s’agit pas réellement d’une infantilisation, comme certaines l’ont dit, à mes yeux. Mais il faut dépassionner la question : lorsqu’une femme, qu’elle ait 15 ou 35 ans, décide d’avorter, elle le fait généralement après une réflexion très poussée et ce ne sont pas quarante-huit heures qui y changeront quelque chose, alors qu’elle y pense vingt‑quatre heures sur vingt-quatre.

M. Thibault Bazin. Autant je peux entendre certains arguments, même si je n’y adhère pas forcément, autant le parallèle de Jean-Louis Touraine se situe un peu à la limite... J’espère qu’il fait la différence entre avorter et donner naissance. Cela me fait penser à un autre débat et à une remarque qui m’avait profondément heurté, lorsque quelqu’un m’avait dit qu’il espérait que je finirais dans un centre hospitalier régional universitaire pour comprendre leur utilité. Pour un débat apaisé, mieux vaut éviter ce genre de réflexions. Et laissons ma femme de côté...

Mme la présidente Fadila Khattabi. C’était de l’humour, monsieur Bazin !

Mme Caroline Fiat. Une femme est encore capable de réfléchir par elle-même. Elle est également dotée de la parole. Si elle considère, après son entretien psychosocial, qu’elle souhaite réfléchir, elle saura par elle-même, sans être accompagnée par un homme, prendre ce délai. Si, au contraire, elle souhaite recourir à l’IVG, elle saura aussi l’exprimer.

N’oublions pas que l’IVG implique toute une organisation parallèle. Les rendez‑vous ont lieu en journée, ce qui signifie, quand vous travaillez, poser une après-midi. Ce sont parfois, du fait de ce délai supplémentaire, deux jours de congés à poser dans la même semaine. Supprimer ce délai permettrait de ne poser qu’une journée et d’éviter des soucis supplémentaires avec son employeur, par exemple.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Faisons confiance aux femmes. L’article n’interdit pas une réflexion supplémentaire, c’est seulement qu’il ne l’impose pas.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 1er ter, sans modification.

Article 2 : Suppression de la clause de conscience spécifique relative à l’interruption volontaire de grossesse et création d’un répertoire recensant les professionnels de santé et les structures pratiquant l’interruption volontaire de grossesse

La commission examine les amendements de suppression AS4 de M. Thibault Bazin et AS16 de Mme Josiane Corneloup.

M. Thibault Bazin. L’article 2 supprime la clause de conscience spécifique, ce qui ne fait pas consensus dans notre société. Le Conseil national de l’ordre des médecins a rappelé son opposition à cette suppression. La loi de 1975 était, sur ce point également, parvenue à un équilibre. La clause spécifique, inscrite dans la loi, est d’ailleurs différente de la clause générale, d’ordre réglementaire. Elle possède, par sa nature législative, une force plus importante. Qui plus est, la clause spécifique existe pour tous les autres personnels soignants, ce qui n’est pas anodin.

Mme Josiane Corneloup. La plupart des ARS ne déclarent pas de difficultés majeures d’accès à l’IVG, qui seraient spécifiquement liées à l’exercice d’une clause de conscience. Les professionnels de santé qui ne souhaitent pas pratiquer cet acte informent la patiente sans délai et lui communiquent le nom d’un autre professionnel de santé acceptant de pratiquer une IVG. Le geste médical nécessaire pour une IVG après douze semaines n’est plus le même et le protocole doit être révisé compte tenu des risques importants pour la femme enceinte. Cette clause de conscience est d’autant plus nécessaire si les délais sont allongés. De plus, sa présence dans le code de la santé publique est liée à la nature particulière de l’acte qu’est l’interruption d’une grossesse. Il est donc justifié qu’elle soit distincte de la clause générale.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. La suppression de la clause de conscience spécifique est une disposition importante de la proposition de loi. La clause de conscience générale, qui s’applique aux médecins, sera maintenue. On nous a rétorqué que les gynécologues seraient obligés de pratiquer les IVG. Non, ils auront toujours leur clause de conscience générale et pourront toujours les refuser. Précisons d’ailleurs que ce sont surtout les médecins généralistes qui pratiquent les IVG. On connaît le pourcentage exact de médecins ne souhaitant pas pratiquer l’IVG. Les professionnels nous disent tous que la clause de conscience spécifique fait de l’IVG un acte à part. Pourquoi la santé des femmes ferait-elle l’objet d’une mesure spécifique, qui les infantiliserait, alors que la clause de conscience générale suffit à cette pratique médicale volontaire, où le médecin choisit de pratiquer une IVG ?

Quant aux risques, madame Corneloup, selon le CCNE, il n’y a pas plus de risques à quatorze semaines qu’à douze. La responsable du centre d’orthogénie du Kremlin‑Bicêtre nous a expliqué hier qu’il y avait aussi une question de matériel et de technique. Les professions médicales sont mal formées aux pratiques de l’IVG instrumentale. Dans d’autres pays, on la pratique jusqu’à vingt-quatre voire vingt‑huit semaines, sans risque pour la femme. Je ne dis pas que nous allons vers cela, mais j’insiste sur le fait qu’il n’y a pas plus de risques à quatorze qu’à douze semaines.

Avis défavorable.

Mme Perrine Goulet. Madame Corneloup, la double clause de conscience pose bien des difficultés d’accès à l’IVG. Dans mon hôpital public, sur sept gynécologues, un seul pratique l’IVG. Les six autres, de nationalité étrangère, refusent de la pratiquer, alors même qu’ils sont dans un hôpital public et payés par l’État. Cette double cause de conscience appartient à la société des années 1970. Notre société a changé. Tous les jours, dans notre hémicycle, nous adaptons nos lois à son évolution. Ne restons pas à côté du chemin et supprimons la double clause de conscience.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je soutiens globalement le fond de votre proposition de loi. En revanche, j’ai des réticences concernant l’article 2, même si j’entends que, territorialement, il y a des soucis. J’ai vu que c’était le cas dans la Sarthe, par exemple. Néanmoins, il faudrait résoudre ce problème d’une autre manière, peut-être en imposant aux directeurs d’établissement de s’assurer que, parmi les médecins recrutés, ils aient une part suffisante de praticiens acceptant de pratiquer l’IVG. Pour moi, l’acte de soin est un acte d’amour. Si l’on accomplit un acte qui va à l’encontre de ses convictions, la femme risque de ressentir du mépris et peut-être même que l’acte s’accompagnera d’une certaine malveillance.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Je ne comprends pas très bien l’intention derrière la suppression de la clause de conscience spécifique. D’une part, elle demande au praticien d’assurer le suivi de la femme qui le consulte – cet engagement obligatoire, qui n’est pas dans la clause de conscience réglementaire, me semble très important. D’autre part, au nom de la liberté des femmes, comment peut-on ne pas respecter la liberté de conscience des professionnels ? J’entends, dans vos propos, une volonté de pression sur des professionnels de santé, dont la culture peut être heurtée. Il faut que les libertés des deux parties soient respectées. En opposant l’intérêt de l’un à celui de l’autre et en faisant prévaloir l’intérêt des unes sur les consciences des autres, je ne vois pas comment on parviendra à un accompagnement respectant la liberté des uns et des autres.

Mme Catherine Fabre. L’assurance du suivi est garantie par cette loi, qui a été sécurisée lors de la première lecture. La clause de conscience générale permet toujours au médecin de ne pas accomplir cet acte s’il le gêne. Il me semble utile de regarder les chiffres. L’IVG concerne à peu près une femme sur trois. C’est un fait assez stable dans le temps. J’en tire comme conclusion que l’IVG fait partie de la santé et de la vie sexuelles des femmes et cela me semble d’autant plus étonnant qu’un grand nombre de gynécologues fassent valoir leur clause de conscience. Supprimer cette clause spécifique pourrait permettre de changer la conviction des gynécologues réticents. C’est une question de culture. Le regard que l’on a sur l’avortement et surtout sur la santé des femmes qui ont accès à l’IVG mérite de changer. Les femmes ont le droit qu’un gynécologue considère leur demande comme faisant partie de leur parcours de vie. Il est temps de faire évoluer notre culture, tout en continuant à respecter la clause de conscience des médecins.

La commission rejette les amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement AS11 de M. Fabien Di Filippo.

Elle examine ensuite l’amendement AS21 des rapporteures.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Rédactionnel.

Mme Catherine Fabre. À notre sens, il ne s’agit pas vraiment d’un amendement rédactionnel, dans la mesure où « structures » semble moins restrictif que « établissements et centres ». Il nous paraît plus prudent de conserver la rédaction actuelle.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Pouvez-vous préciser votre point de vue, chère collègue ? Qu’y aurait-il comme structures qui ne seraient ni un établissement ni un centre ?

Mme Catherine Fabre. « Structures » est, par définition, plus large.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. J’ai seulement repris la terminologie du code de la santé publique.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS14 de Mme Catherine Fabre.

Mme Catherine Fabre. Je souhaite m’assurer que le répertoire de référencement des professionnels de santé et des établissements pratiquant l’IVG est accessible par tous les moyens. Il faudrait que les femmes qui n’ont pas accès à internet puissent néanmoins avoir accès à ces informations par le biais d’un numéro vert, par exemple.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. C’est un amendement de bon sens. Même si je ne suis pas sûre que cela relève du domaine de la loi, pourquoi ne pas l’écrire ?

Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2, modifié.

Article 2 bis A : Garantie de la délivrance d’un contraceptif en urgence dans les conditions prévues par le code de la santé publique

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS5 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Tant la Haute Autorité de santé (HAS), le 17 septembre 2019, que l’assurance maladie, le 24 février 2020, considèrent qu’il n’est pas recommandé de prendre deux fois dans le même cycle la pilule du lendemain. Au regard de la sécurité des femmes, il semble donc que la délivrance de la contraception d’urgence devrait rester contrôlée.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. La HAS précise que la contraception d’urgence hormonale est, en règle générale, dénuée d’effets indésirables, qu’elle ne rend pas stérile et qu’elle peut être prise chaque fois qu’il y a un risque de grossesse non prévue. L’utilisation répétée au cours d’un même cycle est possible, même si elle n’est pas recommandée. La HAS insiste sur le rôle de conseil et d’information du pharmacien, ainsi que sur le fait qu’en aucun cas un pharmacien ne peut refuser la délivrance d’une contraception d’urgence ou d’une contraception au nom de ses convictions morales ou religieuses. C’est bien ce type de situation qui est visé à l’article : il s’agit de préciser à l’article L. 11103 du code de la santé publique que l’interdiction de la discrimination dans l’accès à la prévention ou au soin concerne également l’accès à un moyen de contraception en urgence.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS22 des rapporteures.

Elle adopte ensuite l’article 2 bis A, modifié.

Article 2 bis : Rapport du Gouvernement sur l’application de la législation relative au délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse

La commission examine les amendements identiques AS6 de M. Thibault Bazin et AS17 de Mme Josiane Corneloup.

Mme Josiane Corneloup. Il s’agit d’établir un rapport qui ferait suite à une véritable étude épidémiologique, analysant les causes, les conditions et les conséquences de l’avortement, afin de mettre en œuvre une réelle politique de prévention de l’IVG.

Mme Albane Gaillot, rapporteure. Je comprends qu’on puisse demander des rapports lorsqu’il n’y en a pas, mais, pour rédiger notre proposition de loi, nous nous sommes appuyées sur plusieurs rapports : celui de la délégation aux droits des femmes, celui du CESE, celui de l’IGAS et celui du HCEFH. Nous avons déjà beaucoup de données.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS23 des rapporteures.

Puis elle adopte l’article 2 bis, modifié.

Article 2 ter : Rapport du Gouvernement sur l’évaluation du dispositif sur l’accès des femmes à l’interruption volontaire de grossesse

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS24 des rapporteures.

Puis elle est saisie de l’amendement AS7 de M. Thibault Bazin.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure. Avis défavorable, puisque l’accompagnement est déjà prévu et qu’évaluer l’accès à l’IVG permettra aussi de l’évaluer dans toutes ses composantes.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Nous nous heurtons à l’impossibilité d’intégrer dans cette proposition de loi d’importance, ou au moins dans la réflexion qui l’entoure, tout ce qui pourrait concourir à la prévention ou à la levée de certains obstacles, qui me semble un peu trop réduite au seul allongement du délai. Nombre de leviers, tels que la couverture du territoire ou la prévention chez les jeunes femmes, par exemple, auraient mérité d’être évalués pendant la préparation de ce texte, ou peut-être au travers d’un rapport.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 ter, modifié.

Article 3 : Compensation financière

La commission adopte l’article 3, sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi, modifiée.

*

*     *

La commission des affaires sociales a adopté la proposition de loi, modifiée. En conséquence, elle demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3879_texte-adopte-commission).

 


  1  

   Annexe :
LISTE DES TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de la santé publique

L. 2212-1

1er bis [nouveau]

Code de la santé publique

L. 2212-2

1er ter A [nouveau]

Code de la sécurité sociale

L. 162-1-21

1er ter A [nouveau]

Code de la santé publique

L. 2212‑5 et L. 2212-10

1er ter A [nouveau]

Ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique

20‑4

1er ter A [nouveau]

Ordonnance n° 77‑1102 du 26 septembre 1977 portant extension et au département de Saint‑Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales

9

2

Code de la santé publique

L. 2212‑3 et L. 2212‑8

2 bis A [nouveau]

Code de la santé publique

L. 1110‑3

2 bis A [nouveau]

Code de la sécurité sociale

L. 162‑1-14‑1

 

 

 

 

 


([1]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), 16 septembre 2020.

([2]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), 16 septembre 2020.

([3]) Ibid.

([4]) À ce sujet, voir également le rapport Droits sexuels et reproductifs en Europe : entre menaces et progrès, CESE, Véronique Séhier, 2019.

([5]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti précité.

([6]) Voir la synthèse des propositions du rapport d’information n° 3343.

([7]) Ibid.

([8]) Saisine du ministre des solidarités et de la santé en date du 2 octobre 2020.

([9]) Comité consultatif national d’éthique, Opinion sur l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse, 8 décembre 2020.

([10]) Ibid.

([11]) Ibid.

([12]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti précité.

([13]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Rapport n° 2013-1104-SAN-009 relatif à l’accès à l’IVG, volet 2 accès à l’IVG dans les territoires, 7 novembre 2013.

([14]) IGAS, Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud, La prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse, octobre 2009.

([15]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti précité.

([16]) Nathalie Bajos, directrice de recherche à l’Inserm ; Anne-Marie Leroyer, professeure de droit, Paris I ; Laurence Meyer, professeure de santé publique, Paris Sud ; Véronique Séhier, coprésidente du Planning familial et membre du CESE, IVG : de la clause de conscience au contrôle de la sexualité des femmes, tribune publiée dans Le Monde le 19 septembre 2018.

([17]) Comité consultatif national d’éthique, Opinion sur l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse, 8 décembre 2020.

([18]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti précité.

([19]) Article 127 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([20]) Article 63 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([21]) Sénat, rapport n° 263 (2020-2021) fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à renforcer le droit à l’avortement, par Mme Laurence Rossignol.

([22]) Ibid.

([23]) Comité consultatif national d’éthique, Opinion sur l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse, 8 décembre 2020.

([24]) Ibid.

([25]) Ibid.

([26]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti précité.

([27]) Loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception.

([28]) Rapport d’information n° 3343 de Mmes Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti précité.

([29]) Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([30]) Loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.

([31]) Article R. 4127-47 du code de la santé publique pour les médecins et article R. 4127-328 du même code pour les sages-femmes.

([32]) Article R. 4127-18 pour les médecins et article R. 4127-324 pour les sages-femmes.

([33]) Recommandation n° 12 : « mettre en place d’un répertoire des professionnels pratiquant l’IVG sur le modèle du site ivglesadresses.org, géré et mis à jour par les ARS. Chaque ARS aurait à sa charge la mise en place d’un tel réseau sur le territoire relevant de sa compétence, selon des modalités laissées à sa discrétion ou déterminées par voie réglementaire ».

([34]) http://videos.assemblee-nationale.fr/video.10318467_6023d6b68e054.commission-des-affaires-sociales--renforcer-le-droit-a-l-avortement---creation-d-une-aide-individu-10-fevrier-2021