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N° 4143

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ASSEMBLÉE NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 mai 2021.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle,

 

 

PAR Mme Marie-Pierre Rixain,

 

Députée.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  4000 rect.

 

    

 


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  SOMMAIRE

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Pages

Avant-propos

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Articles 1er et 2 Versement des salaires et des prestations sociales individuelles sur des comptes dont le bénéficiaire est le titulaire

Article 1er bis (nouveau) Amélioration du droit au compte pour les victimes de violences conjugales

Article 3 Accès des bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant à des dispositifs de formation professionnelle

Article 3 bis (nouveau) Droit au télétravail pour les salariées enceintes

Article 4 Favoriser l’accès des familles monoparentales aux modes de garde collectifs

Article 4 bis Rapport relatif à l’accueil des enfants de parents engagés dans un parcours d’insertion professionnelle

Article 5 Favoriser la parité au sein de l’enseignement supérieur

Article 5 bis (nouveau) Intégration dans la formation des conseillers d’orientation des contenus relatifs à l’égalité entre les femmes et les hommes

Article 5 ter (nouveau) Dispositions relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les filières d’enseignement

Article 5 quater (nouveau) Prise en compte des critères de représentativité dans l’avis de la commission des titres d’ingénieur

Article 6 Améliorer la transparence de l’index de l’égalité professionnelle

Article 6 bis (nouveau) Remise d’un rapport au Parlement sur l’équité salariale

Article 7 Étendre l’objectif de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes aux instances dirigeantes des entreprises

Article 8 Permettre un meilleur accès des femmes aux fonds d’investissement

Article 8 bis (nouveau) Extension des objectifs de mixité à tous les fonds d’investissement

Article 9 Gage financier

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion générale

II. Examen des articles

Annexe 1 : liste des personnes auditionnées par la rapporteure

ANNEXE 2 : TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À l’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI


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   Avant-propos

La présente proposition de loi est issue de plusieurs mois de travail, sanctionnés par l’organisation de trois colloques et tables rondes au sein de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale.

Ces évènements, consacrés à la place des femmes sur le marché du travail, aux dix ans de la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle, dite « Copé-Zimmermann » ([1]), et à la lutte contre les violences économiques au sein du couple, ont largement nourri votre rapporteure.

Ce texte s’inscrit dans une pluralité d’enjeux et vise autant de moments dans une vie : l’autonomie financière et bancaire, l’accompagnement des plus éloignées de l’emploi en raison de la maternité notamment, et la juste représentation des femmes au sein de l’économie et du monde professionnel.

28,5 % : voilà l’écart de revenu entre les femmes et les hommes. Un chiffre qui cristallise l’ensemble des obstacles qui se dressent dans la vie d’une femme, et qui cache une série de disparités parfois plus accrues encore. Au sein du couple, par exemple, les femmes gagnent en moyenne 42 % de moins que leur conjoint. De même, les inégalités de patrimoine, bien loin de diminuer, se sont creusées entre les hommes et les femmes, passant de 9 % en 1998 à 15 % en 2015. Les raisons qui expliquent ces écarts sont multiples et celles qui relèvent d’une vision encore archaïque du rôle des femmes dans la société sont nombreuses.

Même lorsque les femmes participent pleinement au marché du travail, un certain nombre de blocages constitutifs de notre organisation collective contraignent encore leur marge de manœuvre économique, entraînant une cascade de conséquences qui, bien souvent, entravent le développement de leurs carrières et entérinent définitivement ces inégalités de destin. En 2021, les femmes doivent encore conquérir leur statut de sujet économique, libre et autonome.

Cette proposition de loi comprend autant de solutions à même d’accompagner toutes les femmes, quelle que soit leur situation économique et professionnelle, dans la conquête de leur autonomie économique, préalable, indispensable, à l’exercice plein et entier de leurs droits.

Les deux premiers articles visent à parachever la loi du 13 juillet 1965 ([2]) qui a supprimé l’autorisation préalable du conjoint avant qu’une femme puisse ouvrir un compte en banque. Il s’agit maintenant de garantir à chaque individu la jouissance des revenus de son travail ainsi que des prestations individuelles décidées par la solidarité nationale. C’est pourquoi ces deux articles imposent le versement des salaires et des prestations sociales individuelles sur un compte bancaire dont le bénéficiaire est le titulaire ou le co-titulaire. Ce dispositif, qui présente le mérite de la simplicité, garant de son efficacité, doit permettre la stricte adéquation entre l’identité de la personne qui bénéficie du versement et celle qui doit disposer de cette ressource. Le délai proposé pour la mise en œuvre de ces dispositions permettra d’accompagner les services de ressources humaines des entreprises comme les caisses de sécurité sociale pour prendre en compte cette nouvelle obligation.

Inspirée du colloque de la délégation aux droits des femmes sur la lutte contre les violences économiques au sein du couple, cette mesure a été saluée à de nombreuses reprises lors des auditions préparatoires comme un acte fort et nécessaire en matière d’autonomie financière et de sensibilisation des acteurs financiers à ce sujet.

L’article 3 propose d’apporter de nouvelles solutions aux mères de jeunes enfants bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE). En effet, 95 % des bénéficiaires, soit une écrasante majorité, sont des femmes. A ce titre, la réforme de 2014 ([3]), qui avait pour objectif d’encourager le partage du congé parental entre les deux parents, semble avoir manqué son but.

Il s’agit de femmes majoritairement en emploi précaire ou peu qualifié, comme en témoigne la surreprésentation des employées et ouvrières parmi les bénéficiaires, mais aussi des femmes dites inactives ou au chômage avant la naissance de leur enfant. C’est donc un public qui doit appeler toute notre attention en ce que le taux de chômage des mères de jeunes enfants a augmenté de 40 % entre 2014 et 2018.

Cet article propose donc de progresser dans l’offre de formation qui peut être proposée aux bénéficiaires de la PreParE, au moment où leurs droits expirent. Il s’agit du chemin le plus sûr pour permettre à celles qui le souhaitent de retrouver un emploi.

Votre rapporteure estime par ailleurs à ce sujet que la coordination et les initiatives locales sont clés, comme le montrent des associations telles que Social Builder ou même les initiatives menées par Mme Sophie Viger, à la tête de l’école 42. A ce titre, les Caisses d’allocations familiales (CAF) et Pôle Emploi devront coopérer de manière à limiter au maximum les démarches déclaratives des femmes et notamment celles qui souhaitent retrouver le bénéfice de la prestation après une formation qui n’a pas abouti à un retour immédiat à l’emploi.

Dans le même esprit, l’article 4 vient étendre le bénéfice du « berceau social » aux familles monoparentales. Ce dispositif, qui a désormais quinze ans, permet aux crèches et aux services d’accueil de la petite enfance de réserver une place par tranche de vingt aux enfants de parents qui sont engagés dans un parcours d’insertion sociale et professionnelle. Alors que les familles monoparentales, qui sont à 85 % composées autour d’une mère célibataire, sont plus exposées que les autres familles aux risques de précarité, cet article s’inscrit dans la droite ligne des réflexions du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, pour favoriser l’accès des mères d’enfants en bas âge, et en recherche d’emploi, à des modes de garde leur permettant de poursuivre leur insertion professionnelle. Viser plus spécifiquement les familles monoparentales dans ce dispositif parait d’autant plus pertinent que 35 % des enfants d’une famille monoparentale ont leur parent au chômage, contre 9 % pour les familles recomposées et 6 % pour les familles dites « traditionnelles ».

L’article 5, quant à lui, relève davantage, comme les articles 6 et 7, d’un effort en faveur d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans la société. La parité au sein de l’enseignement supérieur avance, dans certains pans et notamment à l’université, à grands pas, en raison notamment de la loi dite « Sauvadet » de 2012 ([4]). Toutefois, alors que les jurys de thèse et les instances gouvernantes sont de plus en plus paritaires et s’approchent très sensiblement du seuil de 40 % de chaque sexe, il demeure un certain nombre de formations presque aveugles à cette évolution. Qu’il s’agisse des sciences dites « dures » comme les mathématiques ou, plus encore, les sciences de l’ingénierie, ces effectifs peinent à se féminiser alors même que ces filières, souvent très rémunératrices, planchent sur les usages et métiers de demain. L’enseignement supérieur – et plus généralement le système éducatif – doit se sentir investi d’une responsabilité particulière et se trouver au premier rang dans la lutte contre les stéréotypes sexués car celle-ci sera d’autant plus efficace qu’elle sera engagée dès le plus jeune âge.

Dans la lignée des lois précédentes, et notamment de la loi sur l’enseignement supérieur de 2013 ([5]), cet article vise donc à soumettre un certain nombre d’établissements supplémentaires – un peu plus de 80 dans l’état actuel de la proposition de loi – à une obligation de représentation minimale de 30 % du sexe le moins représenté dans leurs jurys d’admission.

Il vise également à encourager les établissements de l’enseignement supérieur, y compris les universités, à mettre en place un baromètre de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes et à mener, le cas échéant, des mesures correctrices.

L’orientation professionnelle est très largement conditionnée par l’orientation scolaire et universitaire : les établissements éducatifs doivent jouer un rôle actif dans le rééquilibrage des différentes filières. Les inégalités professionnelles y trouvent directement leurs sources. Les efforts demandés par l’article 7 de cette proposition de loi ne fonctionneront donc qu’en appui à des politiques éducatives volontaristes en la matière.

L’article 6 s’inscrit dans cette même volonté d’objectiver les inégalités économiques et professionnelles qui perdurent entre les femmes et les hommes. Nous ne pourrons en effet parvenir à l’égalité sans mesurer, sans quantifier les écarts de traitement entre les femmes et les hommes de manière à s’appuyer sur des données tangibles à même de transcrire, le cas échéant, le sexisme parfois impalpable qui imprègne nos habitudes. Cet outil, nous l’avons déjà au travers de l’index de l’égalité professionnelle introduit par la loi « Avenir professionnel » ([6]) de 2018, qui nous a permis de passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultats. Désormais, les entreprises d’au moins 50 salariés doivent publier, chaque année, leur note sur 100 en matière d’égalité salariale.

Cet index commence à faire ses preuves, comme en témoigne la progression très nette pour les entreprises de plus de 1 000 salariés dont la moyenne est passée de 82,9 en 2019 à 88,3 en 2021. Il est sans nul doute perfectible, comme l’ont montré les auditions menées par votre rapporteure et de nombreuses publications, mais il est encore trop tôt pour revoir entièrement sa structure trois ans seulement après sa mise en œuvre et alors que les plus petites entreprises peinent déjà à se l’approprier comme l’ont également montré les auditions préparatoires. Il convient d’abord d’en stabiliser l’usage.

Cela étant, dans le sillage des obligations de transparence imposées aux entreprises bénéficiant du plan de relance ([7]) , votre rapporteure propose de renforcer les obligations de publication non seulement de chacun des indicateurs de l’index mais aussi des objectifs de progression et des mesures de rattrapage que doivent mettre en place les entreprises pour corriger leurs trajectoires. C’est un effort de transparence nécessaire à la négociation collective, qui permet également de rappeler le caractère dynamique de l’index : un bon score ne doit pas exonérer de progrès.

Dix ans après la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance, nous ouvrons une nouvelle page avec l’article 7 de cette proposition de loi. La France peut aujourd’hui s’enorgueillir d’être la championne de l’Union européenne en matière de parité au sein de ces conseils. Avec 46 % de femmes, elle se situe juste derrière l’Islande au niveau mondial. Cette réussite, nous la devons au volontarisme politique sans faille d’une parlementaire comme Marie-Jo Zimmermann.

Catherine MacGregor, Christel Bories, Stéphane Pallez, Marie Cheval, voilà d’autres noms que l’on peut mais que l’on préférerait ne plus avoir à citer. Mme MacGregor est la seule femme dirigeante d’une entreprise du CAC 40. Si on élargit le spectre aux entreprises du SBF 120, nous n’y trouvons que trois femmes présidentes directrices générales, respectivement d’Eramet, de la Française des jeux et de Carmila.

Nous ne pouvons pas nous satisfaire de compter les femmes occupant des postes à très forte responsabilité sur les doigts d’une seule main. C’est pourquoi cette proposition de loi comprend un nouveau dispositif ambitieux : mesurer la part des femmes au sein des instances dirigeantes des entreprises de plus de 1 000 salariés et fixer des objectifs chiffrés à ces entreprises, selon un tempo réaliste, pour parvenir à une juste représentation de chaque sexe. 30 % de femmes d’ici cinq ans, 40 % d’ici huit ans, voilà le rythme qui permettra d’insuffler cette dynamique paritaire au sein des entreprises.

Pour y parvenir, nous devons mettre au point un dispositif clair dans son objectif, simple dans son application et juste dans son déploiement. Votre rapporteure rejoint ainsi les propos de Mme Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), qui, devant la délégation présidée par votre rapporteure, a appelé à veiller à la granularité du dispositif, c’est-à-dire à descendre de manière fine dans l’organisation de l’entreprise pour qu’une femme ne cache pas cent hommes.

De même, la question de la sanction est inévitable. Bien qu’il ne s’agisse pas de punir les entreprises, mais tout au contraire de faire de la féminisation de leur gouvernance autant d’opportunités économiques, un tel dispositif a malheureusement besoin d’une sanction pour être opérant.

Actuellement source d’injustice et d’aberration économique, le partage du pouvoir économique appelle à être réinventé de manière active au sein des entreprises. La mixité de la gouvernance économique, et donc des instances dirigeantes des entreprises, est certes un enjeu d’égalité professionnelle et de justice sociale, mais également un levier de performance et de croissance pour les entreprises.

Le soutien apporté par de grands dirigeants, lors des travaux préparatoires à la présente proposition de loi, comme M. Gérald Karsenti, président directeur général (PDG) de SAP France, M. Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF ou encore Mme Hélène Bernicot, directrice générale du Crédit mutuel Arkéa, conforte notre ambition politique.

Enfin, l’article 8 de cette proposition de loi s’adresse aux femmes qui ont la volonté d’entreprendre dans notre pays et se trouvent trop souvent découragées dans leur démarche. Les femmes ont tout autant que les hommes la volonté de créer, d’innover, d’inventer les emplois de demain mais à la différence de ces derniers, elles peinent à trouver des financements pour faire naître et grandir leur projet. Seuls 4 % des startups nouvellement financées en 2020 ont été fondées par une ou plusieurs femmes, et 17 % par une équipe mixte. Ce qui signifie que 79 % des startups nouvellement financées en 2020 ont été fondées par une équipe totalement masculine. La recherche de financements ne doit donc plus être une course d’obstacles sans fin pour les femmes.

C’est pourquoi l’article 8 propose de faire de la Banque publique d’investissement le moteur de l’entreprenariat des femmes. Le soutien à l’entreprenariat des femmes fait déjà partie intégrante des missions de Bpifrance ; pourtant les résultats ne sont pas là. En tant que bras armé de l’État dans le financement de l’économie, Bpifrance a un devoir d’exemplarité en la matière. Parce que Bpifrance est un acteur central de l’écosystème de fonds français, il y a toutes les chances d’espérer que sa capacité d’impulsion rayonnera sur toute la place financière.

Comme l’indique le mantra du collectif SISTA, qui vise à réduire les inégalités de financement entre les femmes et les hommes entrepreneurs, il faut « compter les femmes pour que les femmes comptent. ». C’est ce que propose cet article : d’une part, compter les femmes présentes dans les comités d’investissement qui sélectionnent et financent les projets ; d’autre part, compter les femmes bénéficiaires des actions de Bpifrance.

Là encore, il ne s’agit pas de déstabiliser tout un écosystème en imposant des obligations inatteignables mais bien de se fixer des objectifs chiffrés de bonne gouvernance, tout à fait réalisables en quelques années, et surtout collectivement sollicités par les acteurs eux-mêmes.

En conclusion, le travail transpartisan mené depuis le dépôt du texte reflète la volonté sincère de la représentation nationale d’avancer sur le sujet. L’effectivité des droits des femmes requiert des politiques volontaristes qui constituent autant d’opportunités pour les individus, les entreprises et la société.

 

 


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   COMMENTAIRE DES ARTICLES

Articles 1er et 2
Versement des salaires et des prestations sociales individuelles sur des comptes dont le bénéficiaire est le titulaire

 

Adoptés par la commission avec modifications

Les articles 1er et 2 visent à contraindre le versement des salaires et des prestations sociales individuelles sur le compte dont les bénéficiaires sont titulaires ou co-titulaires. Ce faisant, il s’agit de favoriser l’autonomie financière des femmes et leur maîtrise de leurs comptes bancaires, mais aussi de lutte contre l’emprise éventuelle que peuvent faire peser les conjoints ou les proches.

I.   Le droit existant : une maîtrise de leur compte bancaire par les femmes à renforcer

A.   La titularité des comptes bancaires : un levier vers l’autonomie financière des femmes

La maîtrise par les femmes de leurs sources de revenus est intimement liée chronologiquement avec leur émancipation politique. La première loi du 13 juillet 1907 sur le libre salaire de la femme mariée et la contribution aux charges du ménage, permettant aux femmes de librement disposer de leur salaire, résultait ainsi d’une large mobilisation préalable ([8]). Les pratiques résultant de cette première loi démontraient pourtant son caractère largement inappliqué.

Ce n’est vraiment qu’avec la loi n° 65-570 du 13 juillet 1965 portant réforme des régimes matrimoniaux qu’a été réellement reconnue la capacité de chacun des époux à ouvrir un compte bancaire et disposer librement de ses ressources. Plus précisément, la loi est venue consacrer la présomption de pouvoirs en matière bancaire de chacun d’entre eux, légèrement réformée par la suite ([9]). L’article 221 du code civil prévoit désormais que « chacun des époux peut se faire ouvrir, sans le consentement de l’autre, tout compte de dépôt ou tout compte de titres en son nom personnel ». Cette autonomie a été renforcée par la loi nº 85-1372 du 23 décembre 1985 relative à l’égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs, et l’article 225 du même code prévoit désormais que « chacun des époux administre, oblige et aliène seul ses biens personnels ».

Ce régime d’autonomie a rapidement eu des conséquences concrètes pouvant engager la responsabilité civile des époux, mais aussi des établissements bancaires. Particulièrement intéressante s’agissant de la prévention des actes de violence économique, la jurisprudence a reconnu un devoir de vigilance des banques face à ce qui pourrait être qualifié d’ « anomalie intellectuelle », à la différence des anomalies matérielles telles que les falsifications de signature ou les modifications de sommes a posteriori ([10]). À ce titre, l’autorisation d’encaissement d’un chèque au nom de l’un des époux par l’autre époux, en dépit de la présence de la signature et des indications manuscrites de ce dernier sur le chèque, constitue une légèreté constitutive d’une faute susceptible d’engager la responsabilité de l’établissement bancaire ([11]).

Le Gouvernement a également permis des avancées significatives récentes en faveur de l’émancipation économique des femmes victimes de violence. Il en va ainsi de la possibilité ouverte aux femmes victimes de violences conjugales, par voie de décret ([12]), depuis juin 2020, de bénéficier d’une liquidation anticipée de leur participation aux résultats de l’entreprise.

L’autonomie économique des femmes a donc connu une véritable avancée par le biais de la loi de 1965, leur ouvrant la possibilité d’ouvrir un compte bancaire ou de signer un chèque sans l’autorisation de leur mari ([13]),. Cette avancée issue d’une lutte de plusieurs décennies pour la possibilité pour les femmes de librement disposer de leurs revenus, y compris au sein de leur couple, n’a toutefois pas permis d’éliminer l’emprise que peuvent exercer certains conjoints sur les ressources de leurs compagnes.

B.   La titularité des comptes bancaires : une arme contre les violenceS economiques

La délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale a organisé, à l’occasion du 25 novembre dernier, journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, un colloque, ouvert par le Président de l’Assemblée nationale, au sujet de la lutte contre les violences économiques au sein du couple, sur lequel votre rapporteure a rendu compte auprès de la délégation ([14]).

Si l’on se réfère aux données issues des appels au 3919, numéro national de référence pour les femmes victimes de violences, 20 % des femmes qui appellent ont fait état de violences économiques à leur égard, sous diverses formes.

1.   Une violence multiforme qui se fait au détriment de l’autonomie financière des victimes

Les violences économiques relèvent de mécanismes comparables à ceux des violences conjugales, mais s’en distinguent par leur visibilité. Elles procèdent le plus souvent d’un phénomène d’emprise, dont les effets sont désormais bien documentés. Dans la sphère économique se retrouvent des mécanismes similaires aux violences conjugales physiques ou psychologiques : la victime subit des pressions qui la conduisent à intérioriser la contrainte, à s’isoler et à se laisser envahir par la crainte et la honte.

L’isolement, en premier lieu, peut aboutir à un enfermement spatial et physique, aboutissant à empêcher la victime de se rendre sur son lieu d’emploi et donc à la priver, à terme, des moyens de son autonomie financière. La dépossession de ses moyens de subsistance peut également entraîner des formes de surendettement, fragilisant la situation des femmes concernées et augmentant d’autant leur sentiment de dépendance à l’égard de leur conjoint.

Ces violences économiques peuvent s’étendre à des sphères qui vont au‑delà de la perception des revenus immédiats : en témoigne la question des pensions alimentaires, qui peuvent être assimilées à un harcèlement administratif, voire parfois judiciaire, aboutissant à décourager à terme les mères récipiendaires.

L’absence de versement des pensions alimentaires : une violence économique souvent injustifiée par le niveau de revenus du parent débiteur

Le refus de versement d’une pension alimentaire constitue le prolongement des violences économiques intraconjugales après la séparation. Celle-ci se traduit par une baisse de niveau de vie, pour la moitié des mères qui ont la garde de l’enfant, d’au moins 20 % l’année de la séparation ([15]) et les pensions alimentaires représentent près d’un cinquième des revenus des familles monoparentales, lorsqu’elles en reçoivent.

Or, la part des parents solvables qui ne déclarent pas de pensions alimentaires est loin d’être négligeable. Selon une récente étude de la DREES ([16]), un quart des parents qui n’assument pas la garde des enfants ne déclarent pas de pensions alimentaires dans leur impôt sur le revenu ([17]). Parmi ces derniers, on compte 95 % d’hommes, entraînant une instabilité financière et juridique pour leurs conjoints, qui sont en grande majorité des mères célibataires. Si ce taux diminue avec l’augmentation des revenus dont bénéficie le parent non gardien, ce taux demeure à hauteur de 10 % pour ceux qui ont des revenus supérieurs à 2 300 euros par mois. S’ajoutent à cela les parents non gardiens qui déclarent des versements de manière irrégulière, à hauteur de 13 % d’entre eux.

Ce sont donc 38 % des parents solvables qui n’ont pas la garde de leurs enfants qui ne versent pas ou uniquement de manière irrégulière des pensions au parent qui a la garde de l’enfant.

Un dernier phénomène contribue à la précarité financière des parents qui ont la garde de l’enfant : le paiement systématique de pensions inférieures au barème fixé par le ministère de la justice. Un parent gardien sur deux verse des pensions d’un montant inférieur d’au moins 15 % par rapport à ce qui est prévu par le barème. Cet écart grandit avec les ressources dont dispose le parent non gardien : 58 % des parents non gardiens dont les ressources mensuelles excédaient 2 000 euros avant la rupture déclarent un montant inférieur d’au moins 15 % par rapport au barème, contre 41 % de ceux dont les ressources étaient inférieures à 2 000 euros par mois.

À l’inverse, ce sont les femmes les plus précaires qui souffrent le plus de ce phénomène, puisqu’elles dépendent fortement des pensions alimentaires dans la distribution de leurs revenus. En moyenne, les pensions alimentaires représentent 18 % des revenus des personnes qui les touchent, mais la distributtion du paiement de ces pensions indique également le lien entre familles monoparentales et pension alimentaire. À cet égard, une étude effectuée par l’INSEE dans la région Auvergne-Rhône-Alpes ([18]) démontre que les mères de famille monoparentale sont proportionnellement plus nombreuses à percevoir une pension alimentaire (26 % d’entre elles contre 5 % en moyenne pour l’ensemble des ménages).

Ainsi que le décrivait Mme Rosanna Talarico dans le colloque précité, les violences économiques « s’installent progressivement et insidieusement » par plusieurs étapes qui recoupent la diminution progressive du champ d’action financière des femmes, progressivement restreint :

– la mainmise administrative, par le biais d’une gestion exclusive des démarches par le conjoint de la victime, des plus anodines à celles qui engagent le couple le plus loin, comme les décisions d’investissement ;

– la prise de contrôle des ressources du couple et de leur emploi, en exigeant notamment le versement du salaire de la conjointe sur un compte qu’il maîtrise ;

– la privation des ressources subséquentes, qui place la femme dans la situation de quémander et donc de dépendre de son conjoint ;

– la mise en danger du patrimoine familial et personnel de la victime, aboutissant, par la signature d’hypothèques ou de crédits à la consommation visant principalement à satisfaire les besoins à court terme du conjoint, à des situations potentielles de surendettement.

2.   Une violence mitigée par les dispositions protectrices encadrant les modes formels de couples

Le régime légal matrimonial, qui est celui de la communauté de biens en l’absence de tout contrat de mariage, est réputé favorable au membre du couple qui dispose du patrimoine le moins important, puisque celui-ci, en cas de séparation du couple, est divisé en deux parts égales indépendamment de l’apporteur initial du bien. S’il n’est pas exempt de biais, en ce qui concerne notamment la part des dépenses de chacun des membres du couple qui ont été investies dans les biens immobiliers, ce régime apparaît relativement protecteur.

Le régime matrimonial de séparation des biens ne prévoit, quant à lui, aucune mise en commun du patrimoine du couple. Il permet toutefois, au titre de l’article 270 du code civil, la mise en œuvre d’une prestation compensatoire à la suite d’un divorce, afin de « compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ». Son montant est fixé par le juge. Celui-ci doit prendre en considération ([19]) des éléments tels que « les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ». Les personnes auditionnées par la rapporteure ont toutefois fait part de la difficulté de recouvrer ces prestations, notamment auprès des conjoints insolvables ou pour estimer correctement la perte de chances que subissent les femmes qui ont fait face à une ou plusieurs formes de violence économique.

Par ailleurs, la diminution de la part du mariage au sein des couples diminue la prévalence de ces régimes protecteurs face aux violences économiques que peuvent subir les femmes et laisser place à des formes de domination économique plus insidieuses, qui constituent encore aujourd’hui l’un des points aveugles de l’action du législateur.

De même, au-delà du seul couple, les violences économiques intrafamiliales peuvent intervenir à plusieurs niveaux, notamment au moment de la succession, pendant lequel les hommes peuvent être privilégiés dans la transmission des biens immobiliers, directement ou par le biais d’actions en réduction.

3.   Un objet encore mal appréhendé par le droit

a.   Une reconnaissance du concept en droit international conventionnel

La France a ratifié en 2014 la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique de 2011, dite « convention d’Istanbul ». Cette dernière, qui n’a pas encore été ratifiée par l’ensemble des États membres de l’Union européenne, inclut dans le champ des violences auxquelles les femmes pourraient être exposées. En particulier, selon la convention, la définition de « violence à l’égard des femmes » comprend les violations des droits de l’homme et une forme de discrimination à l’égard des femmes, et désigne en particulier les actes de violence fondés sur le genre, « susceptibles d’entraîner pour les femmes, des dommages ou souffrances de nature physique, sexuelle, psychologique ou économique, y compris la menace de se livrer à de tels actes ».

Les violences économiques participent ainsi à ce même niveau aux violences domestiques, infligées par les membres de la famille, du foyer ou les anciens membres.

Pour lutter contre ces violences, la convention prévoit en particulier que les parties « visent l’autonomisation et l’indépendance économique des femmes victimes de violence ([20]) ». Bien que la ratification de cette convention oblige l’État en la matière, les violences économiques ne sont pas encore reconnues dans leurs spécificités, mais participent plus généralement, en droit français, des violences psychologiques conjugales.

b.   Une absence de prise en compte en droit français

i.   Une notion initialement inscrite dans la jurisprudence civile récente

Il convient dans un premier temps de distinguer évidemment ce qu’on peut entendre aujourd’hui par violence économique en droit civil du sujet qu’aborde le présent article.

La « violence économique » s’entend en effet aujourd’hui en droit civil comme une technique de contrôle des rapports contractuels devant se rattacher au cercle des vices du consentement, détachée du régime de la lésion, qui signale un rapport de force économique entre les parties, marqué par la contrainte ([21]). Même si, par certains de ces aspects, la violence économique contractuelle se rapproche des situations que peuvent subir les femmes victimes de violence économique – rapport de force contraignant, biais du consentement, situation de faiblesse économique – la notion inscrite dans la convention d’Istanbul s’en détache comme étant à la fois plus large (l’ensemble des actes aboutissant à priver les femmes de leur légitime autonomie financière) et plus « intentionnelle » – engage la lutte contre ce type de violence ne vise pas simplement à rétablir l’équilibre entre les parties d’un contrat.

ii.   Le spectre des violences conjugales comprend les violences économiques sans les citer explicitement

Les violences conjugales sont inscrites, au sein du code pénal, par deux biais principaux :

– les violences physiques, au sein desquelles sont notamment punies :

 – les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours, dont la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsqu’elle est commise par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ([22]) ;

 – les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant une durée inférieure ou égale à huit jours, dont la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsqu’elle est commise par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ([23]) ;

 – les violences psychologiques, reconnues comme susceptibles de sanctions équivalentes aux violences physiques ([24]) ;

– le harcèlement moral, qui prévoit une disposition spécifique quand il s’agit du harcèlement du conjoint, depuis la loi de 2010 ([25]). Modifié par la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes et la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, le code pénal ([26]) prévoit aujourd’hui :

 – une peine de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende pour des faits de harcèlement d’un conjoint, d’un partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou d’un concubin, par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ;

 – une peine de cinq ans d’emprisonnement pour les mêmes faits ayant causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ou ayant été commis alors qu’un mineur était présent et y a assisté ;

 – une peine de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende lorsque le harcèlement a conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider.

Si les violences économiques participent bien des catégories plus larges que peuvent représenter le harcèlement moral ou les violences psychologiques, des actions de prévention et de protection des victimes potentielles, telles que le proposent présents les articles, doivent permettre d’identifier le caractère spécifique de ce type de violences.

L’achèvement du mouvement initié par la loi de 1965 comme l’amélioration de la prévention des violences économiques justifient les deux présents articles.

II.   Le droit proposé : Une véritable maÎtrise des bénéficiaires sur leurs revenus

L’article 1er de la présente proposition de loi modifie l’article L. 3241-1 du code du travail relatif au mode de paiement des salaires, dont l’origine remonte à l’article 1er de la loi du 7 décembre 1909 sur le payement des salaires des ouvriers et employés. Les dispositions de cet article contraignent les employeurs à payer leurs salariés dont le salaire est supérieur à 1 500 euros par mois par chèque bancaire ou virement. Les autres salariés peuvent, quant à eux, être payés en espèces dans les locaux de l’entreprise à leur demande.

La modification introduite par la proposition de loi consiste à prévoir que le versement du salaire par chèque barré ou par virement se fasse sur un compte bancaire dont le salarié est le titulaire ou le co‑titulaire. Cette disposition ne s’oppose donc en rien à ce que le salaire soit versé sur un compte joint dont les deux membres du couple sont titulaires.

L’article 2 de la présente proposition de loi applique le même principe à certaines prestations sociales, toutes individuelles. Devront donc versées au bénéficiaire, sur un compte dont il est titulaire ou co‑titulaire :

– les indemnités journalières versées par l’assurance maladie pour les « congés maladie », le congé maternité, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant et le congé de deuil en cas de décès d’un enfant, pour les salariés comme pour les indépendants ;

– les pensions d’invalidité, les prestations d’assurance décès pour les salariés ainsi que les prestations du régime invalidité-décès des indépendants ;

– l’allocation d’assurance versée aux travailleurs aptes au travail et qui recherchent un emploi, inscrite à l’article L. 5422-1 du code du travail.

Le versement des salaires et des prestations sociales uniquement sur le compte bancaire dont le bénéficiaire est titulaire est complémentaire au droit à l’ouverture d’un compte de dépôt ([27]). Celui-ci, ouvert à toute personne physique ou moral domiciliée en France, permet à la Banque de France, en cas de refus d’ouverture de compte par un établissement de crédit, d’en désigner un qui soit à proximité du domicile du demandeur.

III.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel de Mme Annie Chapelier à l’article 1er ainsi que des amendements identiques de Mme Marie‑Noëlle Battistel et ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, de M. Stéphane Viry ainsi que de Mme Annie Chapelier, Mme Agnès Firmin Le Bodo et M. Paul Christophe, avec avis favorable de la rapporteure, diminuant le délai d’entrée en vigueur de deux ans à un an.

Elle a également sensiblement modifié l’article 2 en adoptant, avec avis favorable de la rapporteure :

– un amendement de la rapporteure intégrant dans le dispositif de versement au titulaire du compte les indemnités et prestations liées à l’arrêt de travail en raison d’une maladie ou d’un accident de travail, à l’accompagnement en fin de vie ou encore à l’indemnisation d’un préjudice en raison d’une exposition aux pesticides pour les salariés du régime général ;

– un amendement de Mme Perrine Goulet et ses collègues du groupe du Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés intégrant les pensions d’invalidité dans le dispositif ;

– un amendement de Mme Marie-Noëlle Battistel et ses collègues du groupe Socialistes et apparentés intégrant les indemnités retraites et veuvage dans le dispositif ;

– un amendement identique de Mme Annie Chapelier, Mme Agnès Firmin Le Bodo et M. Paul Christophe intégrant les prestations retraite, maladie et retraite complémentaire des indépendants dans le même dispositif ;

– un amendement de Mme Jacqueline Dubois et de ses collègues du groupe La République en Marche intégrant dans le dispositif les indemnités journalières et les pensions de retraite de base et complémentaire des personnes affiliées à la Mutualité sociale agricole.

 

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Article 1er bis (nouveau)
Amélioration du droit au compte pour les victimes de violences conjugales

 

Introduit par la commission

Cet article vise à ouvrir aux personnes titulaires d’un compte collectif le droit à l’ouverture d’un autre compte bancaire, sans que puisse leur être opposée la titularité d’un autre compte. Cette dérogation aux conditions habituelles d’application du droit au compte vise en particulier à protéger les femmes victimes de violences conjugales.

Cet article, issu d’amendements identiques de la rapporteure et de Mme Monique Limon et ses collègues du groupe de La République en Marche, crée une dérogation à l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

Celui-ci régit en effet ce qu’il est convenu d’appeler un « droit au compte », à savoir le droit pour toute personne physique ou morale domiciliée en France, ainsi que toute personne physique et nationalité française ou résidant légalement sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne n’agissant pas pour des besoins professionnels de disposer d’un compte de dépôt.

En pratique, un établissement de crédit peut refuser d’ouvrir un compte de dépôt, mais doit fournir au demandeur gratuitement, sur support papier, et sur un autre support durable lorsque celui-ci en fait la demande expresse, les motifs de ce refus et, surtout, les modalités d’application du droit à l’ouverture d’un compte.

Le demandeur peut en effet, à la suite de ce refus, saisir la Banque de France afin qu’elle lui désigne un établissement de crédit situé à proximité de son domicile ou d’un autre lieu de son choix dans un délai d’un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises. Le demandeur peut ainsi se prévaloir d’une attestation de refus fournie gratuitement par l’établissement de crédit.

Dans un second temps, l’établissement désigné par la Banque de France est tenu d’offrir au titulaire du compte des services bancaires de base et d’ouvrir un compte de dépôt dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l’ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet.

Ce droit s’exerce toutefois en l’état sous réserve d’être dépourvu d’un compte de dépôt en France. De nombreuses femmes victimes de violence, sous prétexte qu’elles ont déjà un compte joint, ne peuvent bénéficier de cette procédure et ne peuvent pas ainsi individualiser leur compte et la gestion de leurs ressources.

Le présent article doit donc permettre, notamment à ces femmes, de bénéficier d’un compte individuel sans que leur titularité d’un compte joint ne s’y oppose.

 

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Article 3
Accès des bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant à des dispositifs de formation professionnelle

 

Adopté par la commission avec modifications

L’article 3 vise à permettre aux bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE), qui sont des femmes dans leur grande majorité, d’être éligibles à des actions de formation professionnelle dans le cadre de conventions entre Pôle emploi et les caisses d’allocations familiales. Ce dispositif ne s’adresse donc pas aux personnes qui bénéficient d’un congé parental, et, partant, d’un droit au retour à l’emploi dans des conditions similaires à celles dont elles bénéficiaient quand elles ont pris leur congé, mais principalement aux femmes inactives, afin de faciliter leur insertion ou leur réinsertion professionnelle.

I.   Le droit existant : Un dispositif de soutien à l’accueil de l’enfant aux effets désincitatifs sur le marché du travail

A.   la prepare : une prestation dont sont essentiellement bénéficiaires les femmes qui souhaitent garder leur enfant après le terme de leur congé maternité

1.   Une prestation qui complète l’offre des modes de garde d’enfants

La prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE) constitue l’un des modes publics de soutien à l’accueil de la petite enfance et qui complète l’offre de garde offerte en France. Plus précisément, elle fait partie de l’ensemble des prestations intégrées dans la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), créée en 2004.

Cette prestation consiste dans le versement d’une aide financière aux personnes qui travaillent à temps partiel ou cessent leur activité professionnelle ou renoncent temporairement à une telle activité pour élever leur(s) enfant(s) de moins de trois ans ([28]).

La durée de versement de cette prestation, qui dépend du rang de l’enfant, est également liée à son partage entre les parents, afin de concilier deux objectifs : le soutien des familles dans l’accueil de leur enfant mais aussi l’augmentation du taux d’emploi des femmes par le biais d’un meilleur partage des tâches domestiques entre les deux membres du couple.

2.   Un public composé quasiment exclusivement de femmes

a.   Une prestation d’un montant faible, qui n’est pas susceptible de cumul, sauf exception

Alors que des versions précédentes de la prestation de congé parental pouvaient représenter un taux de remplacement de l’ordre de 0,5 fois la valeur du salaire minimum ([29]), le montant forfaitaire de la PreParE entraîne un taux de remplacement relativement faible :

Montant de la PreParE selon la quotité de travail

(en euros)

Situation du parent

Montant mensuel versé en 2021

Activité totalement interrompue

389,80

Temps partiel (50 % maximum)

257,80

Temps partiel compris entre 50 % et 80 %

148,71

Source : données recueillies sur le site service-public.fr.

Ce montant place la France parmi les États membres de l’Union européenne qui offrent un congé parental le moins bien rémunéré. Ainsi, en Allemagne, dans les pays scandinaves, en Roumanie, en Slovénie ou encore au Portugal, la prestation versée pendant le congé parental est égale ou supérieure à 66 % du salaire ([30]).

Cette prestation est enfin susceptible, lorsqu’elle est prise à temps plein, de quasiment aucun cumul avec les autres prestations familiales. Ce cumul est en particulier impossible avec le complément familial, l’indemnisation des autres congés familiaux, l’indemnisation des congés de maladie, d’accident du travail ou encore avec les indemnités servies aux travailleurs qui ne disposent pas d’un emploi. Cette interdiction du cumul subit toutefois un certain nombre d’amodiations, notamment pendant les mois d’ouverture ou de clôture des droits, dont la diversité dépasse le champ du présent commentaire ([31]).

b.   Une prestation qui concerne presque uniquement les femmes : l’échec de la politique du partage

Alors que le complément de libre choix d’activité (CLCA) faisait déjà l’objet d’un moindre recours, l’objectif de la réforme de cette prestation en 2014 ([32]) était double : partager les prestations entre le père et la mère au sein des couples de sexe différent et limiter le recours à une longue période d’inactivité, principalement pour les mères. Ces deux objectifs se cumulaient dans le sens d’une amélioration du retour à l’emploi des mères après la naissance ou l’adoption, en diminuant, d’une part, l’écart de perception entre les femmes et les hommes sur le marché de l’emploi et en incitant à un retour plus rapide des femmes à l’emploi, d’autre part.

Pour ce faire, les deux principaux points de la réforme furent :

– la transformation de la durée maximale de partage du bénéfice de la PreParE de six mois pour le couple à six mois pour chacun des parents, au moment du premier enfant ;

– à partir du deuxième enfant, la réduction de la période d’indemnisation maximale pour un même parent à deux ans, pour encourager le recours à la troisième année par le deuxième parent.

Ces objectifs ont connu des réalisations contrastées. Le résultat le plus frappant a été l’absence de partage de la charge de l’éducation de l’enfant entre le père et la mère. Alors que, selon l’exposé de motifs de la loi de 2014 ([33]), l’objectif était de permettre à 25 % des pères, soit 100 000 pères par an, de solliciter la prestation et donc de partager ce congé avec les mères, le recours des pères est passé de 0,5 à 0,8 %, quel que soit le rang de l’enfant ([34]). S’agissant du congé à temps partiel, les données sont légèrement supérieures mais statistiquement négligeables, puisque le recours des pères d’un premier enfant est passé de 0,7 à 0,9 %. Le taux de non-recours atteint presque 80 % pour les pères d’un premier enfant et 70 % pour ceux ayant deux enfants ou plus.

Plusieurs raisons expliquent le biais genré dans le recours aux prestations :

– le faible taux de remplacement, vu supra, incite les couples, dans leur stratégie financière, à préserver le salaire du père, d’autant plus que, selon Céline Bessière et Sibylle Gollac ([35]), auditionnées par votre rapporteure, les inégalités de revenu au sein des couples sont bien plus grandes que les inégalités de revenu à l’extérieur du couple. Ainsi, alors que ces écarts de revenus entre femmes et hommes sont de 27 % à l’avantage des derniers en moyenne, ils sont de 42 % au sein des couples ;

– les stéréotypes genrés. La faible attractivité financière ne constitue en effet pas la seule variable explicative de l’absence de recours des pères à la PreParE. Ainsi que le notent avec surprise les auteurs de l’étude de l’OFCE précitée ([36]), 70 % des pères qui travaillent à temps partiel renoncent à percevoir l’allocation de congé parental, contre seulement 25 % des mères, et refusent ainsi de modifier leur comportement. « Cette faible augmentation du recours des pères est d’autant plus étonnante que les pères travaillant à temps partiel sont éligibles à la prestation sans modifier leur comportement d’activité. Or la réforme leur permet de prendre un congé parental à temps partiel sans réduire le droit de leur conjointe, puisque celleci n’est plus éligible la troisième année. » ([37]). Des facteurs psychologiques liés au caractère genré de la prestation expliquent ce non-recours, qui suppose en retour que la seule augmentation du montant de la prestation ne suffirait pas à augmenter significativement le nombre de pères qui y auraient recours.

B.   Une situation différente en fonction de la situation du bénéficiaire au regard du marché du travail

1.   Des effets globaux de désinsertion professionnelle

Les effets de la prestation conditionnée à l’absence presque totale d’exercice d’une activité professionnelle pour en bénéficier à taux plein à des effets attendus de désincitation professionnelle.

Cet effet avait déjà été identifié lors de la réforme de l’allocation parentale d’éducation au deuxième enfant en 1994, qui avait entraîné, en l’espace de trois ans, une diminution d’environ 100 000 à 150 000 mères de deux enfants du marché du travail, essentiellement dans des emplois peu qualifiés ([38]), auxquels se sont ajoutés environ 50 000 retraits de mères de trois enfants.

La durée du congé, ses modalités de rémunération comme la garantie de retrouver un emploi ont un impact nécessairement déterminant sur la désinsertion professionnelle des femmes qui y ont recours. À partir des exemples autrichien, allemand et français, l’OCDE a conclu que les congés de plus de deux années aboutissaient à une détérioration rapide des compétences et à une plus grande difficulté de retourner à l’emploi ([39]).

2.   Des effets différentiels selon l’activité professionnelle

Ainsi que le notait déjà le Haut Conseil de la famille au moment où des réflexions avaient lieu sur la réforme du CLCA, « les conditions de travail difficiles expliquent largement le choix des mères qui prennent un CLCA à taux plein » ([40]). Cette donnée, déjà relevée dans des études anciennes ([41]), se retrouve dans le dernier rapport du HCFEA ([42]) sur le sujet, qui expose, notamment à partir des travaux de Karine Briard ([43]), que les conditions d’emploi, le secteur d’activité et le type d’employeur déterminent fortement le choix des mères de recourir à un congé parental. Ce sont notamment les femmes travaillant dans des secteurs comme les services à la personne ou occupant des contrats à durée déterminée, généralement peu qualifiées, qui sont le plus susceptibles de prendre un congé parental total, en dépit des craintes que ce choix peut faire peser sur la stabilité de leurs revenus ou leurs perspectives professionnelles à moyen terme.

Or, la part des mères d’enfants de moins de 3 ans qui ont recours au congé parental est bien moins importante que celle des mères en situation d’inactivité ou au chômage. Le tableau ci-dessous, issu du rapport du HCFEA précité, démontre en effet que cette dernière catégorie est six fois plus importante que celle du congé parental à temps plein.

Au sein de ces catégories doivent être distinguées :

– les mères qui se déclarent inactives ou au chômage et qui perçoivent la PreParE, au nombre de 140 000 en 2015, soit environ 7 % des mères ;

– les mères qui se déclarent inactives ou au chômage et qui ne perçoivent pas la PreParE, au nombre de 569 000 en 2015, soit environ 28 % des mères. Au sein de cette dernière catégorie, il apparaît que :

 – 178 000, soit 9 % de l’ensemble des mères, n’ont jamais travaillé ;

 – 312 000, soit 15 % de ce même ensemble, n’avaient pas travaillé dans les deux années précédant la naissance ou l’adoption ;

– 80 000, soit 4 % de ce même ensemble, ont eu une activité professionnelle pendant les deux ans précédant la naissance ou l’adoption, mais peuvent ne pas y être éligibles en raison d’une activité professionnelle trop heurtée, ou préférer d’autres allocations dont elles bénéficient, telles que le revenu de solidarité active (RSA) ou les allocations chômage.

Si l’on se concentre sur les seules femmes qui exercent une activité professionnelle réduite, enfin, soit 1 272 000 mères d’enfants de moins de 3 ans (62 % du total) :

– 45 % d’entre elles restent fortement attachées à leur activité professionnelle, par le biais du maintien d’un temps partiel, du passage d’un temps complet à un temps partiel ou d’un congé parental ;

– 40 % d’entre elles bénéficient de la PreParE ;

– 45 % d’entre elles ne bénéficient d’aucune aide spécifique liée à leur situation de parentalité (PreParE) ni ne maintiennent leurs liens avec un emploi ([44]).

Le graphique ci-dessous résume ainsi la répartition de l’activité professionnelle des mères d’au moins un enfant de moins de 3 ans : in fine, parmi les mères qui bénéficient de la PreParE sans travailler, la moitié d’entre elles étaient en congé parental à temps plein et l’autre moitié était au chômage ou inactive.

Le graphique ci-dessous résume ainsi la répartition de l’activité professionnelle des mères d’au moins un enfant de moins de 3 ans : in fine, parmi les mères qui bénéficient de la PreParE sans travailler, la moitié d’entre elles étaient en congé parental à temps plein et l’autre moitié était au chômage ou inactive.

3.   Un congé pris plus souvent par des mères peu diplômées

Le niveau de diplômes, qui conditionne souvent les revenus ultérieurs ainsi que les ressources du parent, interagit également avec la capacité des mères de prendre un congé parental. Selon la DREES ([45]), les ouvrières et employées représentent 55 % des enfants de moins de 3 ans, mais 75 % des bénéficiaires du CLCA ou de la PreParE en 2015 à temps plein, et seulement 40 % de la même prestation délivrée à temps partiel.

Ces données sont confirmées par l’INSEE, selon le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de 2019 ([46]), puisque, suite à une naissance, 47 % des mères titulaires d’un diplôme équivalent ou inférieur au niveau CAP-BEP ont interrompu leur activité, contre 29 % des mères titulaires d’un diplôme de niveau supérieur à bac + 2. S’agissant du temps partiel, ces taux s’établissent respectivement à 23 % et à 45 %.

Une étude datant de 2012 confirme cette tendance lourde, en vertu de laquelle les femmes non diplômées cumulent un retour en emploi plus difficile. Ainsi, « 71 % des femmes non diplômées sont en emploi un an après la naissance, contre 86 % des bachelières ou diplômées du supérieur. 11 % seulement des diplômées du supérieur n’ont pas repris un emploi deux ans après la seconde naissance, contre 24 % des bachelières ou diplômées de l’enseignement supérieur court, 36 % des diplômées d’un CAP, BEP ou BEPC et 43 % des nondiplômées » ([47]). Selon la même étude, 80 % des femmes qui occupaient un emploi long avant la première naissance sont à nouveau en emploi six mois après, contre 50 % de celles qui avaient un emploi court, 27 % des chômeuses et 29 % des inactives.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette segmentation sociale :

– des perspectives de carrière moins évidentes pour les personnes en situation précaire et un taux de remplacement plus favorable entre le montant de la prestation et des salaires proches ou égaux du salaire minimum, voire inférieur pour les mères qui étaient en temps partiel. Ce premier facteur est évidemment encore plus probable pour les mères inactives ;

– les conditions de travail des travailleuses précaires peuvent également constituer une incitation forte au recours au congé parental, d’autant que la PreParE peut demeurer, dans certains cas et malgré son faible montant, une trappe à inactivité. Selon une étude du Conservatoire national des arts et métiers ([48]), les difficultés organisationnelles et/ou financières liées à la garde des enfants s’accentuent au fur et à mesure que les enfants grandissent, aboutissant à faire renoncer plus facilement ce mode lors de la troisième année après leur naissance ;

– une économie proportionnellement plus importante du non-recours aux modes de garde alternatifs, collectifs ou individuels, notamment pendant les deuxième et troisième années après la naissance de l’enfant, années où le rapport entre le coût et le bénéfice des services que représentent ces modes de garde formels a tendance à baisser ([49]).

À l’inverse, selon la même étude, le détail fin des professions exercées par les femmes diplômées permet d’identifier un biais selon lequel le recours au congé parental est négativement corrélé au degré d’encadrement des mères d’enfants de moins de 3 ans ([50]).

4.   Les effets paradoxaux de la PreParE : une augmentation du taux d’activité mais aussi du taux de chômage des jeunes mères

Ainsi que la récente étude de l’OFCE précitée le remarque, la réforme a permis d’augmenter substantiellement le revenu d’activité des mères, à hauteur de 14 % trois ans après la naissance de l’enfant. « Avant la réforme, l’arrivée d’un enfant était associée à une baisse des revenus d’activité des mères de 800 euros l’année des trois ans de l’enfant par rapport à leur niveau deux ans avant la naissance, soit une baisse de 6 % de leurs revenus. Après la réforme, au contraire, les revenus des mères reviennent à leur niveau initial dès la troisième année de l’enfant. Si l’écart avec les pères reste important, il se réduit notablement : avant la réforme, les revenus du travail des pères durant la troisième année de l’enfant représentaient 1,9 fois ceux des mères, sous l’effet de la réforme, ils représentent 1,7 de celui des mères. » ([51])

Cet effet ne signifie toutefois pas nécessairement que les mères ont retrouvé un emploi. En effet, le montant d’allocations chômage perçues par les mères a bondi de 40 % en augmentant de 240 euros la troisième année de l’enfant, passant de 600 à 840 euros, ce qui suggère que nombre d’entre elles ont eu des difficultés à retrouver du travail. Cette augmentation est cohérente avec les données fournies par l’Union nationale des associations familiales (UNAF) à la rapporteure, selon lesquelles le taux de chômage des mères de jeunes enfants a augmenté de 40 % entre 2014 et 2018, passant d’un taux de 10 %, comparable avec celui du reste des salariés en vie active, à 14 %.

La PreParE a donc eu, s’agissant de l’emploi des jeunes mères, des effets contrastés. Si la réduction du congé pour un seul parent à deux ans est cohérente avec les indications de nombreuses études s’agissant des effets délétères d’une trop longue période sur l’emploi des femmes, l’augmentation du taux d’activité des jeunes mères ne doit pas masquer l’augmentation parallèle du nombre d’entre elles au chômage.

En termes de probabilité, la réforme « a réduit la probabilité de prendre un congé parental à temps plein l’année suivant la naissance de 9,2 points de pourcentage parmi les salariées occupant un emploi stable au moment de la naissance. Ainsi, la réforme a eu un effet légèrement plus bénéfique à court terme sur l’emploi salarié des mères de deux enfants ou plus que sur leur participation au marché du travail. » ([52])

C.   Un dispositif actuel de formation qui n’offre pas les conditions nÉcessaires au retour À l’emploi

a.   Les mères de retour de congé parental constituent un public spécifique pour les acteurs de l’insertion professionnelle

Pôle emploi prend évidemment en compte le profil spécifique des personnes qui s’y inscrivent après une période plus ou moins longue d’inactivité. Ainsi, Mme Firmine Duro, directrice des partenariats et de la territorialisation de Pôle emploi, auditionnée par votre rapporteure, a rappelé que les solutions offertes par Pôle emploi dépendent :

– de la durée de l’inactivité ;

– du degré de qualification, de formation, ainsi que leur adéquation avec le type d’emploi recherché ;

– de manière plus spécifique, s’agissant des mères célibataires, de leur mobilité, de leur connaissance de leur bassin professionnel ainsi que, selon les retours des conseillers de Pôle emploi, de leur confiance en elles. Des actions spécifiques en la matière, comme le programme « Osez les femmes » à Toulouse, a permis des taux de retour à l’emploi qui selon les profils peut aller de 40 à 80 %. L’enjeu est donc de leur permettre, notamment à travers d’ateliers spécifiques, de valoriser les compétences qu’elles ont pu mettre en œuvre pendant leur période de mère au foyer, elles que « des capacités organisationnelles, de gestion, de résolution de conflit, de développement de réseaux ».

S’agissant enfin des modalités de garde d’enfant, Mme Duro a estimé que permettre des solutions de garde souples était un enjeu crucial pour accompagner les femmes dans leur sortie du congé parental, ce qui est en grande partie l’objet de l’article 4 de la présente proposition de loi.

b.   Un accompagnement déficient pour les personnes qui bénéficient du revenu de solidarité active

Parmi les mères de jeunes enfants en situation d’inactivité, une part non négligeable bénéficie du revenu de solidarité active (RSA). Bien que celles-ci ne soient pas concernées, par définition, par le dispositif prévu par le présent article, la rapporteure souhaite attirer l’attention sur leurs situations, comparables à celles des mères inactives qui bénéficient de la PreParE. Un tiers des bénéficiaires du RSA étaient des parents isolés en 2015.

Bien que l’accompagnement des personnes qui touchent le RSA soit une obligation légale ([53]), une étude menée par la Dares montre que 23 % des bénéficiaires n’étaient suivis par aucun organisme et seuls 52 % d’entre eux étaient suivis par le référent unique prévu par la loi. Parmi le quart des bénéficiaires restants, 15 % étaient suivis par une caisse d’allocations familiales (CAF), et ce, notamment par le biais de programmes spécifiquement dédiés aux familles monoparentales.

Dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté 2013-2016, les CAF ont certes mis en place des « parcours spécifiques destinés aux ménages les plus fragiles, notamment les familles monoparentales bénéficiaires du RSA majoré et ayant de jeunes enfants, celles en situation de séparation ou de divorce et tout parent primigeste » ([54]) dans le prolongement des précédentes conventions d’objectifs et de gestion (COG). Il semble toutefois que les données liées à cette action du fonds social de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) soient trop parcellaires pour pouvoir juger de l’efficacité de ce dispositif ([55]).

Dans le cadre de la nouvelle COG signée pour la période 2018-2022, qui a visiblement orienté les dispositions d’insertion sociale et professionnelle vers les familles les plus vulnérables ([56]), le fonds d’action sociale de la CNAF a mis en place deux types d’aides dont le public est principalement composé de bénéficiaires du RSA majoré :

– une aide à l’accueil d’un enfant lors d’un projet professionnel, versée en priorité aux tiers, pour les familles dont le quotient familial est inférieur ou égal à 800 euros. Le montant de l’aide, limité à 250 euros par mois et par enfant de moins de onze ans, est déterminé par le travailleur social de la CAF en charge du suivi du parent bénéficiaire ;

– une aide à l’insertion professionnelle spécifiquement réservée aux familles monoparentales bénéficiant du RSA, afin de couvrir la prise en charge de frais directs ou indirects liés aux démarches d’insertion professionnelle (accès à une formation professionnelle, retour à l’emploi ou évolution structurelle des conditions d’emploi). Accordée sous forme de subventions aux familles dont le quotient familial est inférieur à 800 euros, l’aide couvre notamment les frais de transport nécessaires à l’exercice de l’activité professionnelle ou au bénéfice de la formation, les frais de formation ainsi que des outils professionnels, notamment informatiques.

La rapporteure estime que la coordination des acteurs de l’insertion professionnelle à l’échelle locale, qu’il s’agisse du département dans son rôle de chef de file, des CAF dans leur rôle d’accompagnement des personnes qui bénéficient du RSA qu’elles servent, et notamment les familles monoparentales, ou encore du service public de l’emploi, doivent permettre d’orienter prioritairement les mères de famille célibataires éloignées de l’emploi vers des formations prenant en compte leurs besoins spécifiques. En particulier, ces femmes bénéficiaires du RSA pourraient profiter, si des besoins étaient identifiés de ce point de vue, de formations qualifiantes, y compris en matière d’amélioration de la maîtrise des outils numériques. Le cas échéant, ces formations pourraient également permettre l’acquisition ou l’approfondissement de savoirs de base ([57]), tels qu’elles sont proposées déjà par certains conseils départementaux ([58]).

II.   Le droit proposÉ : donner le choix aux femmes qui le souhaitent de retrouver un emploi

Le présent article s’attache à lier la fin des droits à la PreParE avec la proposition aux bénéficiaires d’actions de formation, afin de leur laisser, en toute autonomie, la possibilité de retrouver un emploi.

Pour ce faire, le dispositif complète l’article L. 531‑4‑1 du code de la sécurité sociale afin que la convention conclue entre Pôle emploi et la CNAF, déclinée à l’échelle locale, ne se borne pas uniquement à permettre aux personnes qui s’apprêtent à ne plus bénéficier de la PreParE de bénéficier d’aides au retour à l’emploi, mais également à leur faire bénéficier d’actions de formation professionnelle à l’expiration de leurs droits.

La rapporteure estime en effet que de trop nombreuses femmes éloignées de l’emploi à l’occasion de la naissance ou de l’adoption d’un enfant ne peuvent bénéficier aujourd’hui d’une offre suffisante en matière de formations pour leur permettre de s’adapter à un marché du travail en mutation. Elle souhaite souligner à ce titre le dynamisme de certaines associations ou écoles travaillent dans le sens d’une réinsertion professionnelle efficace des femmes éloignées de l’emploi. Ainsi, une association comme Social Builder accompagne 55 000 femmes depuis dix ans, dont 80 % de demandeuses d’emploi de longue durée. Le design d’une formation, en lien avec Pôle Emploi, a ainsi permis, selon les représentantes de l’association qui ont été auditionnées, à 90 % des femmes qui s’y sont inscrites de reprendre une formation dans le domaine du numérique.

III.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement de la rapporteure, modifié par un sous-amendement de Mme Monique Limon et ses collègues du groupe La République en Marche, avec avis favorable de la rapporteure.

Cet amendement ainsi sous-amendé vise à :

– étendre le dispositif dans le temps comme pour le public bénéficiaire. Pour ce qui est du délai d’éligibilité, celui-ci est explicitement porté à une période de deux ans, à savoir un an avant jusqu’à un an après expiration des droits à la prestation, dans le but notamment d’éviter que les bénéficiaires n’aient à mettre en balance le bénéfice de la prestation avec un retour à l’emploi ;

– imposer à Pôle emploi et aux CAF concernées de s’assurer que les personnes qui ont bénéficié d’une formation dans ce cadre sans pouvoir revenir en emploi retrouvent le versement de la prestation sans déclaration administrative inutile à cet égard ;

– en vertu du sous-amendement, à s’assurer du degré de suivi de cette convention et notamment de son efficacité auprès du public visé, à savoir le retour en emploi des bénéficiaires du dispositif.

 

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Article 3 bis (nouveau)
Droit au télétravail pour les salariées enceintes

 

Introduit par la commission

Cet article vise à permettre aux salariées enceintes de bénéficier à leur demande jusqu’à douze semaines de télétravail en amont de leur congé de maternité, à la condition que ce télétravail soit praticable.

Cet article est issu d’un amendement de Mme Céline Calvez et plusieurs de ses collègues du groupe La République en Marche, adopté avec avis défavorable de la rapporteure.

Il complète les dispositions relatives aux autorisations d’absence et au congé de maternité au sein du code du travail en général et à l’article L 1225-17 du code en particulier.

Il permet aux salariées qui le souhaitent de demander, sous réserve que leurs missions puissent être exécutées en dehors des locaux de l’employeur, à bénéficier du télétravail dans les douze jours qui précèdent le début de leur congé de maternité, soit six semaines avant la date présumée de l’accouchement. Les salariées pourraient ainsi bénéficier de ce télétravail seize semaines avant cette dernière date, soit aux alentours de la moitié du quatrième mois de grossesse.

Le critère principal du bénéfice du télétravail, à savoir la possibilité d’exécuter son travail à l’extérieur des locaux de l’employeur, est donc respecté.

Ceci étant dit, en cohérence avec l’avis rendu en commission, la rapporteure, qui partage entièrement l’esprit de cet amendement, souhaite alerter sur les points suivants :

– cet amendement vient en premier lieu ajouter une disposition relative au télétravail alors que les partenaires sociaux ont conclu, le 26 novembre 2020, un accord national interprofessionnel sur ce sujet, destiné à adapter le fonctionnement des entreprises aux nouvelles modalités de recours accru à cette forme particulière de travail ;

– cet amendement, qui ne prévoit pas de seuils relatifs au nombre de salariés dans les entreprises qui devront mettre en œuvre ces nouvelles modalités, pourrait peser particulièrement sur les plus petites d’entre elles ;

– l’application de cette disposition, enfin, ne doit pas conduire à faire peser une nouvelle forme de pression sur les salariées. En effet, bien que les auteurs de l’amendement soulignent l’effet positif que l’augmentation du télétravail aurait pu avoir sur les grossesses pathologiques et le taux d’enfants nés prématurément, la rapporteure estime qu’il faudra être attentif à ce que cette incitation à télétravailler ne se traduise, en aucun cas, par une pression exercée sur ces mêmes salariées les incitant à renoncer aux arrêts de travail justifiés par une éventuelle évolution pathologique de leurs grossesses.

 

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Article 4
Favoriser l’accès des familles monoparentales aux modes de garde collectifs

 

Adopté par la commission avec modifications

L’article 4 vise à permettre aux familles monoparentales éligibles à l’allocation de soutien familial (ASF) de bénéficier du dispositif permettant actuellement aux services et établissements d’accueil du jeune enfant de réserver une place sur vingt aux enfants de parents engagés dans un parcours d’insertion sociale et professionnelle.

I.   Le droit existant : les familles monoparentales prÉcaires en voie d’insertion professionnelle se heurtent aux dÉficiences des modes de garde

A.   Les familles monoparentales : un quart des familles françaises

1.   Les causes de la monoparentalité : la séparation de parents vivants

L’une des évolutions les plus marquantes du phénomène de la monoparentalité au sein des familles françaises relève de l’évolution structurelle de leurs causes. L’un des changements les plus marquants tient certes à l’augmentation de la part de familles monoparentales au sein des familles françaises, de 9,4 % en 1975 à 13,3 % en 1990 et 24,5 % en 2015, soit 2,3 millions de familles. Mais, alors qu’en 1962, 55 % des parents à la tête d’une famille monoparentale étaient veufs, en 2011, ils n’étaient plus que 6 %. Les familles monoparentales sont donc désormais très majoritairement issues de séparations.

2.   Les conséquences : des familles monoparentales dont les cheffes sont majoritairement des femmes, plus exposées au risque de pauvreté

Statistiquement, les mères de jeunes enfants cumulent plusieurs fragilités plus grandes que la moyenne des autres familles. L’impact de la séparation, qui diminue les économies d’échelle dont bénéficient les couples mais constitue surtout un révélateur des inégales trajectoires socio-professionnelles, est à cet égard particulièrement parlant. Ainsi, un an après la séparation, 50 % des mères isolées ayant la garde de leurs enfants connaissent une baisse de leur niveau de vie de 24 % par rapport à l’année précédant la rupture ([59]), contre 12 % pour les pères dans la même situation. Quatre ans après la rupture, bien que l’écart soit en partie compensé, la moitié des mères conserve un niveau de vie inférieur de 11 % par rapport à l’année précédant la rupture. Enfin, 30 % des parents qui conservent la garde de leur enfant basculent dans la pauvreté. Si 87 % d’entre eux retrouvent des revenus supérieurs à ce seuil quatre ans après la rupture, 13 % demeurent durablement sous le seuil de pauvreté ([60]).

S’agissant de la formation initiale, d’abord, les mères de jeunes enfants n’étaient, en 2013, que 17 % à avoir un diplôme de l’enseignement supérieur, contre 50 % pour les mères qui vivent en couple.

S’agissent de leur situation professionnelle ensuite, ainsi que le montre le commentaire de l’article 3 de la présente proposition de loi, les mères célibataires sont plus souvent inactives ou au chômage que les mères en couple. En 2013, toujours, 31 % d’entre elles étaient au chômage, soit trois fois plus que la moyenne nationale de l’ensemble de la population active, contre 12 % des mères en couple. Quand elles sont en emploi, même si le taux de salariat est comparable entre les mères seules et les mères vivant en couple, les premières ont plus souvent recours à une forme d’emploi précaire, telles que le placement en agence d’intérim ou un stage rémunéré (20 % contre 14 % des autres mères). Elles subissent par ailleurs un temps partiel d’une quotité inférieure à celle d’un mi-temps pour 12 % d’entre elles.

S’agissant du temps qu’elles passent dans leur emploi, enfin – facteur qui a naturellement un impact direct sur les modes de garde retenus pour leurs enfants – les mères seules ont plus souvent des horaires alternants ou changeants, pour près d’un tiers d’entre elles, tandis que près de la moitié d’entre elles déclare travailler régulièrement le week-end, contre des proportions de l’ordre respectivement du cinquième et du tiers pour les mères en couple ([61]).

L’ensemble de ces caractéristiques en défaveur de la situation sociale des mères seules aboutit à un niveau de vie plus faible en moyenne et une plus grande exposition à la pauvreté. 55 % de ces femmes font ainsi partie de 20 % des ménages avec enfants de moins de 3 ans les plus modestes, et 42 % d’entre elles déclaraient percevoir le revenu de solidarité active (RSA).

La faiblesse des ressources entraîne également une plus forte prégnance de la fragilité financière : 30 % des femmes surendettées sont des mères célibataires.

À la fin de l’année 2013, près de 12 % des enfants de moins de 3 ans vivaient dans une famille monoparentale, principalement avec leurs mères, appelant à une réponse spécifique que les modes d’accueil ont déployée depuis déjà plusieurs dizaines d’années.

B.   Un accÈs privilégiÉ des familles monoparentales aux crÈches qu’il convient de nuancer

a.   Un recours privilégié aux modes de garde collectifs...

Les familles monoparentales ont moins recours aux modes de garde formels que les couples. Alors que ces derniers y ont recours à hauteur de 55 % des cas, les enfants de parents isolés n’y ont accès que pour 41 % d’entre eux ([62]). Si cette situation s’explique relativement aisément s’agissant des chefs de famille monoparentale inactifs, qui peuvent consacrer davantage de temps à l’éducation de leurs enfants, ce raisonnement pourrait apparaître moins évident s’agissant des familles monoparentales actives. Il ressort cependant que même dans ce cas, le recours à un mode de garde formel est inférieur de 14 % à celui auquel ont recours des couples de parents biactifs.

Au sein de ces modes de garde, il apparaît néanmoins que les établissements d’accueil des jeunes enfants (EAJE) comptent parmi ceux auxquels les familles monoparentales ont plus recours, en comparaison des familles biparentales. En témoigne le tableau suivant.

Le taux de recours des parents isolés actifs aux EAJE, de 38 %, soit le plus élevé de toutes les configurations familiales, s’explique en raison de facteurs sociologiques – les familles monoparentales vivent plus souvent dans de grands centres urbains bien pourvus en EAJE – mais aussi en raison des tarifs pratiqués par les différents modes de garde.

En comparaison avec les assistantes maternelles, les EAJE présentent l’avantage d’être moins onéreux, mais aussi de ne pas nécessiter d’avance de frais. Le barème du coût d’une heure d’accueil en EAJE dépend de deux facteurs : le nombre d’enfants à charge et le niveau de ressources du ménage dont l’enfant accueilli est issu. À l’inverse, les familles qui recourent à une assistante maternelle doivent lui verser un salaire. Elles perçoivent par la suite un complément de mode de garde, qui a été augmenté de 30 % pour les familles monoparentales depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 ([63]).

Malgré cette augmentation bienvenue, qui aboutit à rapprocher le reste à charge pour les familles monoparentales pour chacun des modes de garde, le recours à une assistante maternelle suppose toujours une avance de frais. De plus, le taux d’effort pour les familles monoparentales qui font le choix d’une garde à temps plein comme à temps partiel demeure largement plus important s’agissant des assistantes maternelles par rapport aux EAJE.

Source : rapport du HCFEA, L’accueil des enfants de moins de trois ans. Tome II Orientations, adopté par consensus par le Conseil de la famille et le Conseil de l’enfance et de l’adolescence le 10 avril 2018.

Enfin, alors que les couples qui subissent des horaires alternants ou changeants ont tendance à reporter leurs modes de garde des EAJE aux assistantes maternelles, les familles monoparentales, plus exposées encore à ce type d’horaires quand elles sont actives, ont tendance à accentuer leur recours aux grands-parents.

b.   ... lié à la différence des tarifs pratiqués par les différents modes de garde

À situation comparable, et alors même que les mères de jeunes enfants ont moins de ressources en moyenne que les couples, et particulièrement les couples biactifs, celles-là confient avant tout leurs enfants aux grands-parents ou à leur famille proche. Au cours d’une semaine de référence du lundi au vendredi de 8 heures à 19 heures, 27 % des enfants de mères seules sont gardés par ce biais, contre 20 % pour les enfants issus d’autres configurations familiales. Cette différence se vérifie indépendamment de la situation professionnelle des mères seules, puisque ces taux augmentant respectivement, dans ce cas, à 36 % et 29 %. Ce schéma est évidemment facilité par la proximité de la mère seule avec sa famille proche. Dès lors, à situation équivalente, les familles monoparentales auront moins souvent recours à des modes de garde payants ([64]).

Cette situation se recoupe avec les différences de revenus entre les familles. Ainsi, s’agissant des familles qui travaillent, les enfants des 25 % des familles les plus modestes (premier quartile de niveau de vie) ont une probabilité 6,4 fois plus forte que les enfants des 25 % des familles les plus aisées de ne pas avoir de mode d’accueil payant ([65]).

Cet accès relativement homogène ne doit toutefois pas cacher de réelles disparités selon la situation professionnelle des mères. Ainsi, les mères seules sans emploi vont diminuer de moitié leur recours aux EAJE comme mode d’accueil principal, par rapport aux mères seules en emploi, et vont privilégier largement le mode de garde par les parents.

Les données relatives à l’accès spécifique des familles monoparentales aux EAJE semblent globalement disparates. Ainsi, en 2016, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) estimait que 27 % des enfants de mères seules fréquentent au moins une fois un EAJE au cours de la semaine, contre 22 % des enfants dont les parents vivent en couple. Ce recours plus important aux EAJE restait également vrai à activité des parents comparable. Ainsi, 38 % des enfants de mères seules en emploi fréquentent un EAJE, contre 27 % des enfants dont les deux parents en couple travaillent ([66]).

Pourtant, selon les données fournies par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) à votre rapporteure, s’agissant de l’ensemble des allocataires, la Caisse identifie une sous-représentation des parents inactifs à la tête de familles monoparentales : alors que sont recensées 11 % de ce type de familles, seules 6 % de celles-ci fréquenteraient une crèche pendant au moins une heure en semaine. À l’inverse, les familles dont les parents sont en couple et sont tous deux actifs seraient surreprésentées : alors qu’elles représentent 46 % des familles, elles correspondraient à 58 % des familles fréquentant une crèche.

Source : Danielle Boyer, Sophie Villaume, Les mères seules confient plus souvent leurs enfants de moins de 3 ans aux crèches et aux grands-parents, DREES, Études et résultats, mai 2016.

 

C.   les modes de garde prÉvus spÉcifiquement pour aider les familles prÉcaires À l’insertion professionnelle sont susceptibles d’amÉlioration

a.   Des initiatives et des réseaux utiles

Mme Marine Jeantet, déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, a insisté sur la socialisation que représentent les accueils hybrides, à l’égard des mères célibataires. Les atouts de ces structures consistent à permettre aux mères de bénéficier d’un peu de répit, mais aussi de nouer des liens sociaux avec les personnels ou les autres parents, éviter ainsi les conséquences psychiques parfois lourdes du « burn-out » parental ou de la charge mentale que représente la charge d’un ou plusieurs enfants en bas âge.

Les crèches à vocation d’insertion professionnelle (AVIP)

 

Création de Mme Mara Maudet, fondatrice de l’Institut d’éducation et des pratiques citoyennes (IEPC), la première crèche AVIP a vu le jour en 2003. On compte aujourd’hui 104 crèches AVIP, dans vingt-quatre départements ([67]), dont 13 qui sont gérées par l’IEPC en Île‑de‑France, soit 568 berceaux et un taux d’occupation de 50 %. Les personnes qui détiennent ces berceaux sont composées notamment de familles monoparentales dans une démarche d’insertion professionnelle. Ces crèches tiennent compte, en outre, des horaires parfois élargis des parents en insertion professionnelle, en étant généralement ouvertes de 7 heures à 19 heures 30.

À cet égard, ces crèches disposent d’une personne chargée de l’accompagnement à l’emploi et de l’insertion professionnelle, dont l’objectif est d’aider les parents à élaborer un projet professionnel, qu’il s’agisse d’un emploi lorsque ce projet est déjà bien défini ou d’une formation, dans un premier temps. Par ce biais, les crèches travaillent avec les conseillers de Pôle emploi, des missions locales, des plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi (PLIE), ainsi que des assistantes sociales de la CAF ou des départements.

Ces crèches proposent également l’intervention d’un « référent famille » qui mène des ateliers d’aide à la parentalité ou d’aide à la confiance en soi.

Les données fournies au cours de l’audition de l’IEPC sont particulièrement intéressantes. Au cours des années 2019 et 2020, parmi les parents d’enfants accueillis dans ces crèches, 30 % ont bénéficié d’une formation qualifiante et 50 % sont actuellement en insertion professionnelle.

D’autres initiatives plus locales peuvent être relevées, à l’instar de l’expérimentation lancée dans les quartiers prioritaires de la ville de Nantes à destination des familles monoparentales bénéficiaires du RSA. Identifiées par la CAF ou par le conseil départemental, ces familles sont orientées vers le relais municipal afin que leur soit proposée une solution d’accueil adaptée. Dans le même temps, des travailleurs sociaux accompagnent les familles dans leur parcours d’insertion professionnelle. Ce dispositif a ainsi permis d’accompagner cinquante familles depuis 2014 ([68]).

b.   Un accompagnement global des familles en voie d’insertion professionnelle à densifier

Le manque de places dans les établissements et services d’accueil de la petite enfance demeure toutefois un handicap majeur pour l’insertion professionnelle des parents, notamment lorsque ces derniers sont dans une situation professionnelle précaire antérieurement.

C’est dans cette perspective que le Gouvernement avait missionné, le 6 septembre 2019, un groupe de travail dans le cadre de la « mobilisation nationale pour l’emploi et la transition écologique et numérique ». Animé par son président, M. Michel Villac, le groupe avait ainsi constaté que 150 000 à 160 000 personnes qui étaient, à une date donnée, au chômage et en recherche active d’emploi, ne pouvaient le faire, faute de solution d’accueil pour l’enfant de moins de 3 ans dont ils avaient la charge.

Ainsi que l’audition des représentants de l’IEPC l’a confirmé, les familles monoparentales sont particulièrement exposées à la désinsertion professionnelle. Alors que 60 % des couples de parents d’enfants accueillis dans les crèches AVIP sont en emploi, seules 10 % des personnes à la tête de familles monoparentales le sont, alors même que 72 % de ces mêmes personnes percevaient des revenus inférieurs au seuil de pauvreté.

Votre rapporteure estime donc crucial que les personnes à la tête de familles monoparentales, principalement des femmes, puissent disposer du temps et de l’espace nécessaires à la reprise d’un emploi, grâce à des modes de garde adaptés.

II.   Le droit proposé : Ouvrir le « berceau social » aux familles monoparentales

Le présent article propose de modifier l’article L. 214-7 du code de l’action sociale et des familles, qui commande le dispositif selon lequel les EAJE et les services d’accueil du jeune enfant réservent une proportion de leurs places, selon un taux fixé par voie réglementaire, aux personnes engagées dans un parcours d’insertion sociale et professionnelle.

Cette modification consiste à ajouter les familles monoparentales éligibles à l’allocation de soutien familial mentionnée à l’article L. 532-2 du code de la sécurité sociale aux personnes pouvant bénéficier du dispositif ouvert principalement aux familles précaires. En effet, selon la Fédération française des entreprises de crèches, entendue par votre rapporteure, 25 % des familles accueillies paient moins de 1 euro de l’heure et 19 % moins de 75 centimes, selon des tarifs fixés par la CNAF en fonction des revenus.

III.   Les modifications apportées par la commission

Outre un amendement rédactionnel de la rapporteure et Mme Annie Chapelier, la commission a adopté deux amendements substantiels :

– un amendement de Mme Annie Chapelier, M. Paul Christophe et Mme Agnès Firmin Le Bodo, avec avis favorable de la rapporteure, visant à prendre en compte, parmi les bénéficiaires du « berceau social » destinés à reprendre un emploi, les personnes qui s’engageaient dans des parcours de formation initiale ou continue. Le parcours d’insertion professionnelle doit en effet être ouvert aux personnes qui reprennent des études pour retrouver un emploi notamment dans les filières professionnelles en mutation rapide ;

– un amendement de Mme Monique Limon et ses collègues du groupe La République en Marche, sous-amendé par la rapporteure et adopté avec un avis favorable, qui insère dans le même article L. 214-7 du code de l’action sociale et des familles, le dispositif des crèches « AVIP ». Ce dispositif est en effet apparu au cours des auditions comme un complément très utile au dispositif de « berceau social » que renforce déjà le présent article.

Cet ajout dans la loi du dispositif y insère néanmoins également une convention entre ministères chargés de la famille et ceux qui sont chargés de l’emploi, qui permettra notamment de déterminer :

– le mode de fonctionnement de ces crèches et en particulier les contreparties auxquelles elles pourront avoir droit en échange de leur engagement ;

– la manière dont ces crèches pourront essaimer à travers les territoires. Les auditions ont effectivement mis en lumière là encore le déploiement trop faible de ces établissements pourtant particulièrement utiles en matière de réinsertion professionnelle ;

– les modalités de suivi du développement de ces crèches, et notamment de la part des familles monoparentales, qui auront pu en bénéficier.

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Article 4 bis
Rapport relatif à l’accueil des enfants de parents engagés dans un parcours d’insertion professionnelle

Introduit par la commission

Cet article vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, un rapport relatif aux modalités d’accueil des enfants dont les parents sont engagés dans un parcours d’insertion sociale et professionnelle.

Cet article, issu d’un amendement M. Didier Martin et ses collègues du groupe La République en Marche, avec avis favorable de la rapporteure, vient compléter utilement les dispositions adoptées à l’article 4 de cette proposition de loi.

Il vient en effet répondre notamment aux demandes du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, qui déplorait, dans une note de 2019 ([69]), que les dispositifs dévolus à l’accueil des enfants de parents souhaitant retrouver un emploi, ne fassent actuellement l’objet d’un suivi par trop lacunaire : « On constate en effet que beaucoup d’initiatives prises par le passé, par défaut d’animation et de suivi, ne concernent qu’un public limité. Par ailleurs, beaucoup d’initiatives locales éventuellement prometteuses restent limitées à un bassin d’emploi, à défaut d’une réflexion organisée et suivie sur leur bilan et les conditions éventuelles de leur développement à une échelle plus large. Cela suppose de mettre en place, au niveau national, un dispositif de pilotage, d’animation, de suivi et d’évaluation qui permette de conduire cette politique dans la durée, en l’adaptant au cours du temps en fonction des difficultés et des succès rencontrés. »

Le rapport demandé au Gouvernement et qui devra être remis au Parlement un an après la publication de cette loi permettra de répondre à ce besoin, puisqu’il comprendra :

– une évaluation de l’ensemble des aides et dispositifs qui permettent d’accueillir les enfants dont les parents sont engagés dans un parcours d’insertion professionnelle ou sociale ;

– un bilan des expérimentations locales menées en la matière, dont participent notamment les crèches « AVIP » mais aussi les initiatives associant les CAF, Pôle emploi et les départements pour viser spécifiquement un public en désinsertion professionnelle ;

– des propositions destinées à répondre aux problématiques spécifiques que posent ces parents mais aussi à diffuser les modèles de réussite sur l’ensemble des territoires, de manière adaptée à la typologie des éventuels bénéficiaires.

 

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Article 5
Favoriser la parité au sein de l’enseignement supérieur

Adopté par la commission avec modifications

L’article 5 vise à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes à l’enseignement supérieur, ainsi qu’une représentation paritaire au sein des jurys d’admission dans certaines formations de l’enseignement supérieur.

À cette fin, il met en place, au sein des établissements d’enseignement supérieur, des indicateurs destinés à mesurer l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et à mettre en oeuvre des mesures correctives, le cas échéant. Il impose par ailleurs aux jurys de sélection ou de concours mis en place par un certain nombre d’établissements et écoles de l’enseignement supérieur de respecter une proportion minimale de 30 % de personnes de chaque sexe, à l’exception des concours donnant accès aux formations de fonctionnaire stagiaire, elles-mêmes soumises à des obligations paritaires propres.

I.   Le droit existant : malgré une action résolue du législateur en matière de représentation équilibrée des femmes et des hommes dans la fonction publique, la parité dans l’enseignement supérieur et la recherche demeure parcellaire

A.   Le législateur a engagé des actions visant à favoriser l’egal accès des femmes et des hommes À diverses fonctions professionnelles

1.   Une habilitation constitutionnelle claire

Les dispositions législatives visant à favoriser la parité au sein de la fonction publique et notamment dans l’enseignement supérieur datent désormais d’une vingtaine d’années, dans la lignée de l’inscription dans la Constitution d’un premier principe d’encouragement par la loi d’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ([70]). L’inscription de ce premier principe de parité a été renforcée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 ([71]), qui a complété l’article 1er de la Constitution prévoyant désormais que la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales.

Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la composition de la formation restreinte du conseil académique des universités, le Conseil constitutionnel a estimé que ce principe de parité permettait « au législateur d’instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales [...]. À cette fin, il est loisible au législateur d’adopter des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant. Il lui appartient toutefois d’assurer la conciliation entre cet objectif et les autres règles et principes de valeur constitutionnelle auxquels le pouvoir constituant n’a pas entendu déroger. » ([72])

Pour autant, l’habilitation constitutionnelle vise à concilier l’objectif de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes avec la prise en compte des talents et des mérites. À ce titre, cet objectif ne saurait avoir pour effet de faire prévaloir, lors de la constitution du jury, la considération du genre sur celle des compétences, des aptitudes et des qualifications ([73]). Ce principe se décline de la façon suivante : à mérite égal entre deux agents publics désireux de participer à un jury, l’administration doit choisir celui des agents qui permet d’atteindre l’objectif de représentation équilibrée entre les sexes. Les agents pressentis pour faire partie du jury peuvent être du même sexe si seuls des hommes ou des femmes sont les plus aptes à assurer les fonctions que cette participation suppose. Dans ce cas de figure, la charge de la preuve de la satisfaction de l’obligation relative aux moyens d’assurer une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes repose sur l’administration (impossibilité de trouver, à compétence égale, des hommes ou des femmes ayant la disponibilité suffisante pour faire partie du jury).

2.   Une action résolue du législateur dans les dix dernières années en faveur de la parité au sein de la fonction publique

Dans la lignée de l’habilitation constitutionnelle, le législateur a initié, il y a vingt ans, une première disposition en faveur de la parité au sein de l’enseignement supérieur. L’article 19 de la loi n° 2001-397 du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes avait ainsi :

– établi l’absence de distinction entre les fonctionnaires en raison de leur sexe, mais également la possibilité de recrutements distincts entre les sexes lorsque cette distinction constitue une condition déterminante de l’exercice des fonctions ;

– identifié les jurys de concours comme une priorité et l’un des leviers majeurs de transformation de la répartition entre sexes dans l’enseignement supérieur.

Ces actions se sont notamment poursuivies par le biais de la Charte pour l’égalité dans l’enseignement supérieur et la recherche en 2009, renouvelée et étendue aux écoles d’ingénieurs en 2013.

Un certain nombre d’enceintes au sein de l’enseignement supérieur en général et au sein des universités en particulier sont déjà soumises au respect d’une représentation paritaire. Ces obligations, issues de la loi de 2013 ([74]) se déclinent de la façon suivante :

– au titre de l’article L. 719-1 du code de l’éducation, chaque liste de candidats aux conseils des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, des universités, des instituts et des écoles, qui comprennent les écoles normales supérieures et les écoles françaises à l’étranger, est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe. Ces conseils comprennent notamment les conseils d’administration des universités et de leurs regroupements ;

– au titre de l’article L. 114-3-3 du code de la recherche, le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), comprend, parmi ses trente membres, autant d’hommes que de femmes, charge à chacune des instances proposant des membres à ce conseil de répartir par sexe les candidats pressentis ;

– au titre de l’article L. 120-1 du code de la recherche, le Conseil stratégique de la recherche placé auprès du Premier ministre comprend autant d’hommes que de femmes ;

– au titre de l’article L. 952-6-1 du code de l’éducation, le comité de sélection pour recruter un enseignant chercheur en cas d’emploi vacant « concourt à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes lorsque la répartition entre les sexes des enseignants de la discipline le permet ».

En outre, la loi de 2012 dite « Sauvadet » ([75]) a prévu plusieurs mesures aux fins d’assurer l’égalité entre les femmes et les hommes au sein de la fonction publique en général et singulièrement au sein de l’enseignement supérieur. En vertu de cette loi, il est désormais prévu :

– au titre de l’article 6 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 qu’elle crée, le Gouvernement présente devant le Conseil commun de la fonction publique un rapport annuel, également remis au Parlement, sur les mesures mises en œuvre pour assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Ce rapport « comprend notamment des données relatives au recrutement, à la féminisation des jurys, à la formation, au temps de travail, à la promotion professionnelle, aux conditions de travail, à la rémunération et à l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle » ;

– au titre de l’article 6 quater de cette même loi du 13 juillet 1983, les nominations dans les emplois supérieurs de la fonction publique de l’État, mais aussi dans les emplois de direction des régions, des départements ou des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de plus de 40 000 habitants, ainsi que dans la fonction publique hospitalière, « doivent concerner, à l’exclusion des renouvellements dans un même emploi ou des nominations dans un même type d’emploi, au moins 40 % de personnes de chaque sexe » ;

– au titre de l’article 53 de la loi « Sauvadet », à l’exception des « membres représentant des organisations syndicales de fonctionnaires et des représentants des employeurs territoriaux, les membres respectifs du Conseil commun de la fonction publique, du Conseil supérieur de la fonction publique de l’État, du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière sont désignés, dans chacune des catégories qu’ils représentent, en respectant une proportion minimale de 40 % de personnes de chaque sexe ». Cette disposition a ensuite été modifiée en 2016 ([76]) pour intégrer dans le champ de cette obligation, à partir du 1er janvier 2019, les représentants des organisations syndicales de fonctionnaires détenant, pour chacune d’entre elles, plus d’un siège ;

– enfin, au titre de l’article 55 de la même loi, est prévue une obligation, à compter du 1er janvier 2015, pour tous les jurys et comités de sélection constitués pour le recrutement ou la formation dans l’ensemble des trois fonctions publiques, de respecter une proportion minimale de 40 % de chaque sexe. Les seules dérogations, à titre exceptionnel, doivent s’appuyer sur les contraintes de recrutement et les besoins propres des corps ou cadres d’emploi.

Ces dispositions ont été complétées par des mesures spécifiques sectorielles. S’agissant des jurys d’examens, les articles L. 335-5 et L. 613-4 du code de l’éducation précisent uniquement que les jurys constitués dans le cadre de la validation des acquis de l’expérience sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. Ce même principe est appliqué pour les jurys de thèse ([77]) .

Les obligations qui s’exercent donc autant dans la fonction publique que, plus spécifiquement, au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche devaient garantir, à une échelle décennale propre aux mécanismes de nomination, une parité effective aux postes de direction comme aux postes qui avaient fait l’objet d’une nomination depuis l’entrée en vigueur de ces dispositions.

3.   Des obligations récentes en faveur de plans d’action pour l’égalité professionnelle

a.   Pour l’ensemble de la fonction publique

La loi de transformation de la fonction publique ([78]) portée par le Gouvernement et cette majorité a inscrit dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 un article 6 septies portant obligation pour l’État, ses établissements publics administratifs, les collectivités territoriales et les EPCI de plus de 20 000 habitants ainsi que les hôpitaux d’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action pluriannuel d’une durée maximale de trois ans renouvelables, comportant des mesures visant à :

– évaluer, prévenir et, le cas échéant, traiter les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ;

– garantir l’égal accès des femmes et des hommes aux corps, cadres d’emplois, grades et emplois de la fonction publique, en agissant notamment dès qu’il y a disproportion dans la répartition sexuée entre les agents susceptibles d’être promus et les agents titulaires du grade auquel la promotion donne accès ;

– favoriser l’articulation entre activité professionnelle et vie personnelle et familiale ;

– prévenir et traiter les discriminations, les actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel ainsi que les agissements sexistes.

Ce plan, décliné par la voie réglementaire ([79]), s’applique à l’ensemble des opérateurs sous la tutelle du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche, et de l’innovation (MESRI) ([80]). Il s’est déjà traduit par un premier état des lieux des politiques en matière d’égalité, sur la base de questionnaires adressés aux établissements ainsi que par un plan d’action propre au MESRI.

b.   Pour l’enseignement supérieur et la recherche spécifiquement

La loi de programmation de la recherche pour la décennie à venir ([81]) comprend également des dispositions propres à favoriser la parité au sein des procédures de recrutement. Son article 4 a ainsi créé une nouvelle procédure de « chaire de professeur junior », dont la composition de la commission de recrutement ne peut être composée de plus de 60 % de membres du même sexe.

En outre, la même loi a conduit à renforcer les obligations d’information qui s’imposent :

– au Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), chargé d’évaluer la mise en œuvre des mesures visant à favoriser l’égalité entre les femmes et les hommes dans les établissements ;

– aux présidents d’université, qui doivent désormais présenter chaque année au conseil d’administration un rapport sur l’exécution du plan d’action pluriannuel en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, transmis, après approbation par le conseil d’administration, aux ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la recherche ainsi qu’au HCERES.

Le rapport annexé à la loi a enfin prévu le lancement d’une campagne nationale d’information sur les filières et métiers des sciences, technologies, ingénieries et mathématiques (STEM) et leur utilité sociale à destination des filles en priorité, mais aussi de leurs familles, et plus largement du grand public, en réfutant les idées fausses couramment admises et en valorisant les parcours atypiques.

B.   La parité au sein des etablissements de l’enseignement supérieur et de la recherche demeure perfectible

1.   Une parité parfois « en trompe-l’œil » à la direction des universités

Le rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes relatif à la fonction publique dresse toutefois un bilan contrasté de la parité au sein de l’enseignement supérieur, la qualifiant d’effective mais fragile ([82]).

Parmi les éléments prouvant l’efficacité de la loi, les données recueillies par le Haut Conseil montrent que le pourcentage des femmes dans les conseils d’administration des universités a augmenté de 15,4 %, aboutissant à un taux de 47,3 % après la loi de 2013. Les postes de président d’université demeurent toutefois très majoritairement masculins, puisque, en janvier 2020, seuls 12 % de ces postes étaient occupés par des femmes, un taux qui évolue par ailleurs de manière erratique depuis 2008, sans réel mouvement vers la parité.

S’agissant des grandes écoles, le baromètre de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE) de 2020, portant sur 77 établissements ([83]), soit 167 145 étudiants en formation initiale et 11 912 personnes en formation continue, montre que le taux de féminisation dans cet échantillon est là encore en deçà des objectifs de 40 % de mixité. Comme le montre le tableau ci-dessous, ces taux peuvent parfois même évoluer récemment à la baisse, pour ce qui est des comités scientifiques :

Taux dé féminisation des instances de direction des grandes ecoles

 

Instance concernée

Taux de féminisation moyen en 2020

Minimum

Maximum

Taux de féminisation moyen en 2019

Comité pédagogique

40,5 %

11,8 %

68,4 %

37 %

Comité scientifique interne

34,2 %

5,6 %

59,1 %

35 %

Comité scientifique externe

28 %

0 %

57,1 %

31 %

Source : Baromètre 2020 de la Conférence des grandes écoles.

Votre rapporteure s’étonne tout particulièrement de l’existence de comités scientifiques externes où la part des femmes est de 0 % et s’inquiète de la tendance récente, dans ces organes, à la diminution de la part des femmes.

2.   Globalement paritaires, les jurys de sélection demeurent majoritairement composés d’hommes

La composition des jurys, comme vu ci-dessus, a été rapidement l’un des principaux leviers de l’amélioration de l’accès des femmes à l’enseignement supérieur. Certes, l’article 1er du décret du 3 mai 2002 ([84]) qui prévoit que, parmi les membres des jurys et comités de sélection constitués pour le recrutement de fonctionnaires de l’État, « l’administration chargée de l’organisation du concours doit respecter une proportion minimale d’un tiers de personnes de chaque sexe justifiant des compétences nécessaires », créait une exception pour les chercheurs. Mais il concernait bien les établissements publics, et donc les maîtres de conférence et les professeurs des universités. L’application de la loi « Sauvadet » de 2012 a permis d’aboutir à une proportion de 53 % de maitresses de conférences et 43 % de professeures au sein des comités de sélection ([85]) du Centre national de recherche scientifique (CNRS). Cette parité ne s’étend toutefois pas aux postes de direction, en particulier en médecine, où seules 14 % des femmes sont présidentes de ces comités.

Il demeure enfin un véritable « plafond de verre » au sein de l’université, puisque, si 45 % des maîtres de conférences sont des femmes, c’est le cas pour seuls 26 % des professeurs, en augmentation lente de 14 points depuis 1992 ([86]). Ces données qui soulignent l’absence de perspective professionnelle, encore, pour de nombreuses enseignantes-chercheurs, sont corrélées à une sous-représentation globale des femmes dans la profession d’enseignants-chercheurs. Alors qu’elles sont 45 % au Royaume-Uni, 41 % en Italie, 39 % en Allemagne, elles ne sont que 35 % en France ([87]).

L’accès aux fonctions exécutives reste, enfin, largement hors de portée des femmes au sein de l’université : « De nombreux espaces de pouvoir, parmi les plus déterminants, ne sont pas concernés par ces mesures coercitives (conseil académique restreint en formation de rang A, postes exécutifs des universités, gouvernance des laboratoires et des programmes de recherche, etc.) » ([88]).

3.   Un biais sectoriel

Les progrès en matière d’égal accès des femmes et des hommes à l’université sont également contrastés en fonction des disciplines. C’est le cas, en premier lieu, au sein des établissements universitaires, puisque 19 % seulement des enseignants-chercheurs dans les sciences de l’ingénieur et 22 % en physique, sont des femmes, contre 63 % en langues et littérature. Cette disparité transparaît dès le début des carrières académiques, dès le doctorat.

Ces disparités se retrouvent, parfois à un niveau plus frappant encore, concernant les grandes écoles. Le baromètre de la CGE précité aboutit aux constats suivants :

– dans les écoles d’ingénieurs, 32,8 % des étudiants sont des femmes, contre 50 % en école de management. Ce taux particulièrement faible est toutefois en voie d’augmentation régulière, puisqu’on comptait 24 % de femmes en 2015 ;

 dans les écoles d’ingénieurs, ce taux de féminisation moyen cache des écarts massifs, puisque ce taux varie d’un minimum de 11,3 % à un maximum de 78,4 % ;

– s’agissant des débouchés et de l’accès à l’emploi des jeunes diplômés, là encore, des inégalités apparaissent dès le premier emploi. Alors que ce taux, à la sortie des écoles d’ingénieurs, est de 90 % pour les hommes pour l’ensemble des emplois et de 87 % pour la part de CDI au sein de ce premier ensemble, ils ne sont respectivement, pour les femmes, que de 87,1 % et de 74,1 %. Ces inégalités se reproduisent, à une échelle moindre, pour les écoles de management, à la sortie desquelles le salaire brut moyen hors prime était de 3 000 euros inférieur pour les femmes par rapport aux hommes ;

– enfin, en ce qui concerne la formation tout au long de la vie, les inégalités sont là encore manifestes, même si elles peuvent tenir de la répartition actuelle par sexe des emplois dans ces secteurs. Ainsi, seuls 32,5 % des participants à la formation continue dans le domaine de l’ingénierie et 35,3 % dans le domaine du management sont des femmes.

Ces taux et proportions dans les filières techniques et scientifiques demeurent donc largement insatisfaisants au regard des objectifs d’égale représentation des femmes et des hommes et de leur égal accès aux études supérieures, quelles qu’elles soient.

II.   Le droit proposé : renforcer la parité par une composition équilibrée entre les sexes des jurys de recrutement et la publication d’indicateurs relatifs à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes

A.   Une obligation de publication d’indicateurs destinée à favoriser la parité dans un vaste champ de l’enseignement supérieur et de la recherche

Le du I complète l’article L. 612-1 du code de l’éducation relatif au déroulement des études supérieures et à son organisation en cycles, ainsi qu’aux modalités de sanction des formations par un diplôme d’études supérieures.

Un champ d’application vaste

Le champ visé par cet article L. 612-1 est particulièrement large, puisque, outre les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel mentionnés aux articles D. 711-1 à D. 711-6-1 du code de l’éducation et les autres établissements publics d’enseignement supérieur à caractère administratif relevant du ministre chargé de l’enseignement supérieur mentionnés aux articles D. 723-1, D. 741-5, D. 741-7, D. 741‑9 et D. 741-12 du même code, cet article concerne également les établissements publics d’enseignement supérieur relevant d’autres départements ministériels pour lesquels le ministre chargé de l’enseignement supérieur exerce une cotutelle pédagogique conformément à l’article L. 123-1 de ce code, les établissements public de coopération culturelle constitués par les collectivités territoriales ainsi que les écoles de commerce et de gestion créées et administrées par les chambres consulaires et relevant de l’article L. 753-1.

Il inclut également les établissements d’enseignement supérieur privés qui peuvent revêtir plusieurs statuts : les écoles techniques relevant de l’article L. 641-3 et les établissements mentionnés à l’article L. 731-1.

Ces établissements dispensent des formations conduisant à la délivrance de diplômes nationaux ou de diplômes propres de premier, de second ou de troisième cycle ou de certificats auxquels peut être attribué un grade universitaire.

Il comprend aussi les formations dispensées dans les lycées et conduisant à la délivrance de diplômes de premier cycle (brevets de technicien supérieur par exemple), les instituts de formation paramédicaux relevant du code de la santé publique (diplôme d’État d’infirmier par exemple) et les établissements agréés préparant aux diplômes du travail social (diplôme d’État d’assistant de service social) relevant du code de l’action sociale et des familles ([89]).

La proposition de loi impose ainsi à ces établissements susceptibles de délivrer un diplôme d’études supérieures une obligation complémentaire en vue de favoriser l’égalité des chances entre les femmes et les hommes, à savoir la publication d’indicateurs relatifs à cet objectif. La publication comprendrait également les actions mises en œuvre aux fins de réduire les inégalités que permettront de constater les indicateurs.

Le même renvoie au décret les modalités de définition de ces indicateurs comme la méthodologie à retenir pour les rattacher à l’objectif général de lutte contre les inégalités de sexe.

B.   Un objectif renforcé de parité dans les jurys

Le du même I crée un nouveau chapitre préliminaire au sein du titre VII du livre VI de la troisième partie du même code visant à assurer une proportion minimale de 30 % de personnes de chaque sexe dans les jurys de sélection ou de concours permettant l’accès à des formations spécifiques.

Le champ retenu, à savoir celui du titre VII, est plus restreint que celui qui a été retenu au . Il comprend l’enseignement supérieur agricole et vétérinaire, les écoles supérieures militaires et les écoles sanitaires et sociales, soit un ensemble d’établissements qui sont sous la cotutelle du MESRI et d’un autre ministère. Ce champ comprend un peu plus de 80 établissements.

Le même prévoit d’exclure l’accès aux formations de fonctionnaire stagiaire de cette obligation, en raison des dispositions spécifiques relatives aux concours de la fonction publique exposées ci-dessus, et en particulier l’existence d’une proportion de 40 % de chaque sexe dans les jurys de recrutement des fonctionnaires.

Le du même I comprend des dispositions de coordination pour les îles Wallis et Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle‑Calédonie, tandis que le II prévoit que l’ensemble des dispositions prévues au I entrent en vigueur deux ans après la publication de la présente proposition de loi, afin de laisser aux établissements concernés par les mesures relatives aux quotas le temps d’adaptation nécessaire à l’organisation académique et au bon fonctionnement des jurys d’examen et de concours.

III.   les modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement de la rapporteure conduisant à la réécriture de cet article, afin de renforcer les dispositions relatives à la composition paritaire des jurys. Pour ce faire, cet amendement :

– renforce les obligations relatives à la parité dans les établissements qui sont sous la cotutelle du ministère de l’enseignement supérieur et d’autres ministères. Ce champ concerne notamment les grandes écoles d’ingénieurs ou de travaux publics, dans lesquelles les auditions menées par votre rapporteure l’ont conduite à constater qu’il demeurait une grande différence entre la part des femmes et la part des hommes ;

– met en place des dérogations pour les filières dans lesquelles un sexe est sous-représenté. Ainsi, les filières dans lesquelles moins de 10 % de personnes d’un sexe sont présentes, les jurys pourront non pas être astreints à une représentation d’au moins 30 % de chaque sexe, mais à la représentation d’une personne a minima du sexe sous-représenté ;

– intègre enfin de nouvelles dispositions relatives à l’observatoire de l’insertion professionnelle au sein des universités. Ce dernier, qui accompagne les étudiants vers leurs stages et leur premier emploi, ne comprend aujourd’hui aucune disposition relative à un accompagnement paritaire. Or, comme toutes les phases de transition, il est crucial d’accompagner les étudiantes comme les étudiants dans le choix d’une orientation qui leur correspond, indépendamment de leurs propres préjugés ou de ceux des recruteurs.

Cet amendement a été sous-amendé, avec un avis favorable de la rapporteure sur l’ensemble de ces sous-amendements, selon la distribution suivante :

– un sous-amendement de Mme Perrine Goulet et ses collègues du groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés, visant à compléter l’article L. 322-5 du code de l’éducation. Celui-ci, qui traite des dispositions générales relatives à la formation de l’ensemble des élèves des collèges, est ainsi complété par une disposition selon laquelle, notamment en ce qui concerne l’orientation professionnelle, cette formation doit permettre de lutter contre les stéréotypes de genre. Le même sous-amendement renvoie à un arrêté conjoint des ministres de l’éducation et du travail les précisions de mise en œuvre de cette mesure ;

– deux sous-amendements de Mme Carole Grandjean et ses collègues du groupe La République en Marche. Le premier vise à restreindre le champ des obligations de représentation d’un minimum de 30 % de personnes de chaque sexe aux jurys comportant plus de trois personnes. Cette restriction est cohérente avec les objections soulevées pendant les auditions pour éviter que les personnes sous-représentées dans certaines filières ne soient sollicitées à l’excès pour participer aux jurys, au moins dans un premier temps, et notamment dans les domaines où la pratique informelle ne réclame la présence que de deux membres de jury a maxima. Le second sous-amendement visait à étendre l’obligation de représentation minimale de 30 %, telle que prévue par l’amendement de la rapporteure, aux établissements de formation à l’issue du baccalauréat. Pour ce faire, le sous-amendement complète le VI de l’article L. 612-3 du code de l’éducation, relatif aux sections de techniciens supérieurs, aux grands établissements ainsi qu’à l’ensemble des établissements soumis à un concours national ou concours de recrutement de la fonction publique. S’agrègent également à ce champ les formations de l’enseignement supérieur dispensées dans les lycées, les cycles préparatoires intégrés ou encore les diplômes d’études universitaires scientifiques et techniques ;

– un sous-amendement rédactionnel porté par Mme Annie Chapelier, Mme Agnès Firmin Le Bodo et M. Paul Christophe ainsi que par Mme Marie‑Noëlle Battistel et ses collègues du groupe Socialistes et apparentés.

 

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Article 5 bis (nouveau)
Intégration dans la formation des conseillers d’orientation des contenus relatifs à l’égalité entre les femmes et les hommes

Introduit par la commission

Cet article vise à ajouter à la formation des conseillers d’orientation des éléments relatifs à la question de l’égalité entre les femmes et les hommes ainsi qu’à la prévention et la sensibilisation aux stéréotypes de genre.

Cet article, issu d’un amendement Mme Annie Chapelier, Mme Agnès Firmin Le Bodo et M. Paul Christophe (Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés) ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure, vient ajouter des dispositions à l’article L. 313-1 du code de l’éducation relatives à la formation des conseillers d’orientation.

Celle-ci devra à ce titre comprendre des « contenus relatifs à l’égalité entre les femmes et les hommes et à la prévention et la sensibilisation aux stéréotypes de genre ». Les auteurs de l’amendement estiment en effet à raison que la lutte contre les stéréotypes de genre et leurs conséquences doit se faire dès le collège et que les conseillers d’orientation, notamment dans la perspective d’éviter les biais dans les futurs choix professionnels et d’études supérieures qui seront faits, ont évidemment un rôle clé dans ce domaine.

 

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Article 5 ter (nouveau)
Dispositions relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les filières d’enseignement

Introduit par la commission

Cet article vise à prévoir que les accords de coopération entre établissements scolaires et universitaires puissent comporter des dispositions pour favoriser la représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les futures filières de formation.

Cet article est issu de trois amendements identiques déposés par Mme Laurence Trastour-Isnart et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains (LR), Mme Élodie Jacquier-Laforge (Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés) et Mmes Josiane Corneloup et Isabelle Valentin (LR), adoptés avec un avis favorable de la rapporteure.

Les accords de coopération visés par cet article sont issus de la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 ([90]), dite « Loi Jospin », qui s’inscrivait dans la volonté générale d’ « assouplir les parcours scolaires et universitaires par l’instauration de recours multiples, de passerelles, de trajets personnalisés », selon les travaux préparatoires à la loi ([91]).

L’ambition de ce présent article est de faire en sorte que ces conventions puissent prendre en compte les biais de genre en raison desquels certains élèves peuvent ne pas se sentir légitimes à intégrer telle ou telle filière de formation initiale universitaire. C’est pourquoi les accords devront désormais veiller à contribuer, dans l’esprit de l’article 5 de la présente proposition de loi, à une représentation équilibrée de chaque sexe dans chaque filière de formation.

 

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Article 5 quater (nouveau)
Prise en compte des critères de représentativité dans l’avis de la commission des titres d’ingénieur

Introduit par la commission

Cet article vise à obliger les avis émis par la commission des titres d’ingénieur à prendre en compte divers critères tels que la juste représentation des femmes et des hommes, la diversité d’origine géographique et sociale et les personnes en situation de handicap. Le champ de ces critères concerne les écoles, les instituts, les universités mais aussi les grands établissements de formation en ingénierie.

Cet article est issu d’un amendement de Mme Céline Calvez et de ses collègues du groupe La République en Marche, ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

Le code de l’éducation prévoit, en ce qui concerne les formations technologiques longues destinées à former notamment des ingénieurs, un système d’accréditation des écoles, des instituts, des universités et autres établissements qui souhaitent mettre en place de telles formations ([92]). Cette accréditation est délivrée par une commission des titres d’ingénieur, dont les membres sont nommés par le ministre chargé de l’enseignement supérieur et qui comprend notamment une représentation des universités, des instituts, des écoles et des grands établissements ainsi que des organisations professionnelles.

Cette commission décide, sur leur demande, si des écoles techniques privées légalement ouvertes présentent des programmes et dispensent un enseignement suffisant pour délivrer des diplômes d’ingénieur et statue en premier et dernier ressort, par des décisions motivées, sur les demandes dont elle est saisie.

Cette commission joue donc un rôle crucial, par le biais de l’évaluation périodique de toutes les formations d’ingénieurs des établissements français, dans un secteur où les femmes représentent 28 % des effectifs selon la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs.

Cet article vise donc à orienter les avis de cette commission dans le sens d’une plus grande égalité, non seulement dans le champ de la parité entre les femmes et les hommes, mais aussi dans celui de la diversité sociale, géographique et à la part des élèves et étudiants en situation de handicap au sein de ces écoles, établissements, instituts et universités.

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Article 6
Améliorer la transparence de l’index de l’égalité professionnelle

Adopté par la commission avec modifications

L’article 6 généralise les dispositions relatives à l’index de l’égalité professionnelle en prévoyant la publication à la fois de l’ensemble des indicateurs constitutifs du score global et des mesures et objectifs de correction.

I.   L’INDEX DE L’ÉGALITE PROFESSIONNELLE, UN OUTIL PERFORMANT QUI INSTAURE UNE OBLIGATION DE RÉSULTAT

A.   L’INDEX POSE UN DIAGNOSTIC GLOBAL DES ÉCARTS DE rÉmunÉrations ENTRE FEMMES ET HOMMES DANS l’ENTREPRISE

L’index de l’égalité professionnelle a été introduit par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ([93]). Obligatoire pour toutes les entreprises d’au moins cinquante salariés, il prend la forme d’une note sur 100, calculée à partir de plusieurs indicateurs visant à comparer les écarts de rémunérations entre hommes et femmes dans l’entreprise. La mise en œuvre de ce dispositif s’est effectuée progressivement : au 1er mars 2019, seules étaient concernées les entreprises d’au moins mille salariés, puis au 1er septembre 2019, celles d’au moins deux-cent cinquante salariés l’ont été et enfin, celles d’au moins cinquante salariés le sont depuis le 1er mars 2020.

La méthodologie de calcul de l’index est définie par décret ([94]). Pour les entreprises de cinquante à deux cent cinquante salariés, il est composé de quatre indicateurs tandis que pour les entreprises de plus de deux cent cinquante salariés, un cinquième indicateur doit être pris en compte.

Les indicateurs constitutant l’index de l’égalité professionnelle femmes-hommes

Quatre indicateurs composent le score final de l’entreprise, toutes tailles d’entreprises confondues :

        L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, calculé à partir de la moyenne de la rémunération des femmes comparée à celles des hommes, par tranche d’âge et par catégorie de postes équivalents ;

        L’écart de taux d’augmentations individuelles de salaire entre les femmes et les hommes ;

        Le pourcentage de salariées ayant bénéficié d’une augmentation dans l’année suivant leur retour de congé maternité, si des augmentations sont intervenues au cours de la période pendant laquelle le congé a été pris ;

        Le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les dix salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations.

Pour les entreprises de plus de 250 salariés, un cinquième indicateur est pris en compte dans le calcul de la note finale : l’écart de taux de promotion entre les femmes et les hommes.

Les résultats sont exprimés en pourcentage, puis convertis en nombre de points :

        L’absence d’écart de rémunération rapporte 40 points. Au-delà d’un écart de rémunération supérieur à 20 %, cet indicateur ne rapporte aucun point ;

        Un écart de taux d’augmentations individuelles de salaire entre les femmes et les hommes inférieur ou égal à 2 points de pourcentage rapporte 20 points pour les entreprises de plus de 250 salariés et 35 points pour celles de 50 à 249 salariés ;

        Si l’intégralité des salariées revenues de congé maternité bénéficient d’une augmentation, le nombre de points obtenu est de 15 ;

        La présence de quatre ou cinq salariées parmi les dix salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations rapporte 10 points ; 5 points si elles sont deux ou trois.

Pour les entreprises de plus de 250 salariés, un écart de taux de promotion inférieur ou égal à 2 points de pourcentage rapporte 15 points.

Les indicateurs sont calculés chaque année par l’employeur, au plus tard le 1er mars de l’année en cours, à partir des données de la période de référence annuelle choisie par l’employeur, qui précède l’année de publication des indicateurs. Ces indicateurs sont calculés au niveau de l’entreprise, sauf dans le cas où un comité social et économique a été constitué au sein d’une unité économique et sociale. L’unité économique et sociale devient alors le niveau de calcul pertinent. Le résultat est publié sur le site internet de l’entreprise lorsqu’il en existe un. À défaut, l’article D. 1142-4 du code du travail prévoit que le score soit porté à la connaissance des salariés par tout moyen.

Les entreprises doivent également communiquer le détail des différents indicateurs au comité social et économique à travers la base de données économiques et sociales (BDES). Les résultats doivent être accompagnés de toutes les informations utiles à leur compréhension, notamment la méthodologie employée. En cas d’impossibilité de calculer certains indicateurs, l’information doit être portée à la connaissance du comité social et économique.

L’article L. 1142-10 du code du travail prévoit une pénalité financière pour les entreprises qui ne parviendraient pas à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes. Concrètement, lorsque la note finale obtenue se situe en deçà de 75 points, l’entreprise dispose d’un délai de trois ans pour se mettre en conformité. Elle doit instaurer des mesures de rattrapage, annuelles ou pluriannuelles, pour atteindre au moins 75 points dans un délai de trois ans. Ces mesures doivent être définies dans le cadre de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle, ou, à défaut d’accord, par décision unilatérale de l’employeur et après consultation du comité social et économique. À l’expiration du délai de trois ans, si les résultats obtenus ne sont toujours pas satisfaisants, l’entreprise peut se voir appliquer une pénalité financière dont le montant est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains assujettis à cotisations sociales (article L. 1142-10 du code du travail). Toutefois, un délai supplémentaire d’un an peut être accordé en fonction des efforts constatés dans l’entreprise.

Au 1er mars 2021, 7 % des entreprises ayant déclaré en 2021 leur index ont une note inférieure à 75/100 ([95]).

B.   LE BILAN POSITIF de L’INDEX A CONDUIT À L’AMORCE DE SA gÉnÉralisation

D’après les données du ministère du Travail, la note moyenne, toutes entreprises confondues, s’élève au 1er mars 2021 à 85/100, soit une augmentation d’un point par rapport à 2020 ([96]). La progression est encore plus nette pour les entreprises de plus de mille salariés concernées par le dispositif depuis le 1er mars 2019 puisque leur note moyenne est passée de 82,9 en 2019 à 88,3 en 2021. La dynamique de réduction des inégalités salariales est donc bien à l’œuvre grâce à la mise en lumière des inégalités qui perdurent dans les entreprises. La diffusion par le ministère du Travail des scores obtenus par les grandes entreprises, selon la pratique dite du « name and shame », joue, sans conteste, un rôle incitatif. Obtenir une note élevée est aujourd’hui gage d’une bonne réputation de l’entreprise en matière de diversité et de mixité ([97]).

Le succès de l’index de l’égalité professionnelle se mesure également à l’aune de l’amélioration notable du taux de répondants : le taux des entreprises publiant leur index s’est nettement amélioré, passant de 59 % en 2020 à 70 % au 1er mars 2021. Toutefois, ainsi que l’ont rappelé les auditions préparatoires, les petites entreprises rencontrent plus de difficultés à calculer leur index que les très grandes puisque la moitié d’entre elles n’avaient pas publié d’index au 1er mars 2021 ([98]).

Un décret du 10 mars 2021 complète désormais les obligations inhérentes à la publication de l’index ([99]).

En premier lieu, le décret prévoit qu’au plus tard le 1er juin 2021, les entreprises seront tenues de publier sur leur site internet les résultats obtenus à chaque indicateur de l’index et non plus la seule note finale sur 100. Il précise que les résultats incluant la note globale et les indicateurs doivent être publiés de « manière visible et lisible », au plus tard le 1er mai 2021, afin d’éviter que les entreprises ne communiquent ces informations sur des pages peu consultées de leur site.

En second lieu, le décret porte application des dispositions adoptées en loi de finances pour 2021 ([100]) concernant les entreprises de plus de cinquante salariés bénéficiant du plan de relance. Dès lors que leur note globale est inférieure à 75 points, ces entreprises sont tenues, au plus tard au 1er mai 2022, de fixer et de publier leurs objectifs de progression pour chacun des indicateurs de l’index ainsi que les mesures de correction et de rattrapage qu’elles envisagent de mettre en œuvre.

II.   LA CONSOLIDATION DE l’INDEX Comme levier de rÉduction des inÉgalitÉs salariales passe dÉsormais par une plus grande transparence de Ses indicateurs

A.   la publication systÉmatique de l’ENSEMBLE DES INDICATEURS

Si l’index est un outil performant pour rendre visibles les situations d’inégalités au sein de l’entreprise, la note globale peut occulter une partie de la situation réelle de l’entreprise. Comme le souligne l’étude de la fondation Terra Nova sur l’index de l’égalité professionnelle, « la question de la transparence est fondamentale » ([101]).

La force de l’index réside dans l’instauration d’une méthodologie commune à toutes les entreprises. Comme le rappelle une étude de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du ministère du travail sur l’égalité professionnelle de 2019, avant la mise en place de l’index, « l’analyse des écarts s’avér[ait] souvent frustre, même « sophistiquée » par des logiciels, car elle n’[était] ni structurelle, ni dynamique et n’interroge[ait] jamais les possibles biais discriminants des conventions collectives ou des outils de GRH » ([102]).

Aussi, le présent article prévoit la publication de l’ensemble des indicateurs composant l’index en complétant l’article L. 1142-8 du code du travail qui obligera désormais que « dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, l’employeur publie chaque année l’ensemble des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et aux actions mises en œuvre pour les supprimer, selon des modalités et une méthodologie définies par décret » ().

Il s’agit d’inscrire, au niveau législatif, l’extension de l’obligation de publication de l’ensemble des indicateurs prévue par le décret susmentionné. Il serait regrettable que les bonnes performances mesurées par la note globale cachent, en réalité, des disparités profondes entre indicateurs. Votre rapporteure ne souhaite pas revoir la structure de l’index de l’égalité professionnelle car le recul manque encore pour mesurer les éventuels contournements de la part de certaines entreprises. L’index de l’égalité professionnelle est un outil que les entreprises doivent s’approprier dans le temps. Il n’est pas qu’une simple photographie à un instant précis mais a vocation à mesurer l’évolution dans le temps des statistiques de chaque entreprise. Bouleverser sa structure priverait de ce suivi précieux pour mesurer les progrès – ou les reculs – accomplis. Toutefois, une transparence accrue ne peut être qu’un gage supplémentaire de réussite.

B.   la publication des plans de progression PAR INDICATEUR

Depuis que la loi « Génisson » ([103]) a fait de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes un thème de la négociation obligatoire en entreprise, les indicateurs ont une fonction d’éclairage quant aux actions correctives que doit mener l’entreprise. L’index n’a pas simplement vocation à publier une photographie statique de l’état des écarts de rémunérations entre femmes et hommes, mais bien à servir de diagnostic pour améliorer la situation salariale des femmes dans l’entreprise. Le présent article vise à renforcer, en ce sens, les obligations de transparence pour chacun des indicateurs ().

Le dispositif proposé complète l’article L. 1142-8 du code du travail qui prévoira que « lorsque les résultats obtenus par les entreprises se situent en deçà d’un niveau défini par décret, l’employeur est tenu de fixer des objectifs de progression de chacun de ces indicateurs. L’employeur publie chaque année ces objectifs et les mesures de correction retenues, selon des modalités définies par décret. ».

Reprenant les contreparties exigées des entreprises bénéficiant du plan de relance, le présent article étend les obligations de publication des plans de progression à tous les indicateurs composant l’index afin de mesurer plus finement les écarts persistants au sein de l’entreprise. Il vise les entreprises se situant en deçà d’un niveau défini par décret, en cohérence avec les dispositions actuelles de l’index. Néanmoins, il est primordial de rappeler qu’obtenir une bonne note ne dispense pas de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle et la mise en œuvre de plans d’actions. À ce titre, rappelons que seules 2 % des entreprises atteignent la note maximale de 100/100 au 1er mars 2021.

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

La commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui précise que la publication de la note de chaque indicateur et des objectifs de progression sont applicables à compter de la publication des indicateurs effectuée en 2022.

Dans l’optique d’une transparence accrue, elle a adopté, avec avis favorable de la rapporteure, un sous-amendement de Mme Carole Grandjean et ses collègues du groupe La République en Marche précisant que les objectifs de progression et les mesures de correction font l’objet d’une communication interne et externe de la part de l’entreprise.

 

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Article 6 bis (nouveau)
Remise d’un rapport au Parlement sur l’équité salariale

Introduit par la commission

L’article 6 bis prévoit que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’équité salariale.

Cet article, issu d’un amendement déposé par Mme Annie Chapelier et Mme Laurence Gayte, avec un avis favorable de votre rapporteure, s’inscrit dans la logique d’analyser de plus en plus finement les écarts salariaux qui persistent au sein de l’entreprise entre les femmes et les hommes.

L’équité salariale dont il sera question dans ce rapport vise à faire reconnaître les emplois à prédominance féminine. Au Québec, l’équité salariale est reconnue comme le droit des travailleurs et travailleuses occupant un emploi typiquement féminin de recevoir un salaire égal à celui d’une personne occupant un emploi typiquement masculin de valeur équivalente dans la même entreprise.

L’équité salariale a donc pour objet de comparer la valeur et le salaire d’emplois différents, la valeur étant fondée sur le niveau de diplôme et de responsabilité, l’expérience ou la pénibilité. Alors que la crise sanitaire a mis en lumière le rôle central joué par les « travailleuses de la première ligne », qu’elles soient infirmières ou caissières, ce rapport permettra d’introduire une nouvelle culture de l’égalité et d’apporter des pistes de réflexion afin de valoriser les fonctions dites féminines.

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Article 7
Étendre l’objectif de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes aux instances dirigeantes des entreprises

Adopté par la commission avec modifications

L’article 7 prévoit la publication d’un indicateur concernant la répartition genrée des 10 % de postes à plus forte responsabilité dans les entreprises d’au moins mille salariés et fixe un objectif progressif de représentaion équilibrée de chaque sexe au sein de ces postes.

I.   L’INSTAURATION DE QUOTAS DANS LES CONSEILS D’ADMINISTRATION N’a PAS EU L’EFFET DE RUISSELLEMENT ESCOMPTÉ SUR LA FÉMINISATION DES INSTANCES DIRIGEANTES

A.   dix ans aprÈs son adoption, LA RÉUSSITE DE LA LOI RELATIVE À LA REPRÉSENTATION ÉQUILIBRÉE DES FEMMES ET DES HOMMES AU SEIN DES CONSEILS D’ADMINISTRATION ET DE SURVEILLANCE EST INDÉNIABLE

1.   Briser le « plafond de verre » : la genèse de la loi Copé-Zimmermann

« La loi ne peut tout résoudre, mais elle peut induire un changement dans les mentalités et les pratiques. » Ce propos introductif à la proposition de loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance ([104]) pose d’emblée l’engagement volontariste qui guide toute initiative en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Alors que la loi relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes de 2006 ([105]) avait été partiellement censurée par le Conseil constitutionnel ([106]), seule l’inscription au rang constitutionnel du principe selon lequel « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales » ([107]) a rendu possible l’intervention du législateur en matière de parité au sein de l’entreprise.

L’ambition de la loi dite « Copé-Zimmermann » repose sur la conviction forte que l’ouverture des conseils d’administration – incarnation, par excellence, du lieu de décision au sein de l’entreprise – mettra en lumière les inégalités qui touchent les femmes actives en général. En brisant le « plafond de verre », ces femmes joueront un rôle moteur et entraîneront, dans leur sillage, toutes les autres.

La loi dite Copé-Zimmermann a instauré la mise en œuvre, par paliers, de quotas au sein des conseils d’administration et de surveillance des sociétés cotées et des sociétés non cotées employant au moins cinq cents salariés et réalisant un chiffre d’affaires ou un total de bilan d’au moins 50 millions d’euros ([108]). Elle vise les sociétés anonymes à conseil d’administration (article L.225-18-1 du code de commerce), les sociétés anonymes à directoire (article L. 225-68-1 du même code) et les sociétés en commandite par actions (article L. 226-4-1 du même code).

La mise en œuvre progressive de la loi Copé-Zimmermann

Afin de tenir compte de l’état de la représentation des femmes dans les conseils d’administration et de surveillance au moment de la promulgation de la loi, l’article 5 de la loi Copé-Zimmermann a prévu l’échéancier suivant :

– Les sociétés cotées disposaient, tout d’abord, d’un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi pour parvenir à un taux minimal de 20 % de membres issus du même sexe ;

– Ce taux a été porté à 40 % des membres du même sexe dans un délai de six ans, à compter de la promulgation de la loi.

Cet échéancier a été introduit sur l’initiative de la rapporteure lors des travaux de la commission puisqu’initialement, la proposition de loi prévoyait un quota de 20 % au terme d’un délai de dix-huit mois, puis un quota de 40 % au bout de quatre ans, avant d’atteindre, in fine, 50 %, cinq ans après la promulgation de la loi.

Le respect de ces quotas concerne les conseils d’administration ou de surveillance de plus de huit membres. Pour les conseils de huit membres au plus, l’écart entre le nombre de membres de chaque sexe ne peut être supérieur à deux. Un conseil de six membres doit ainsi être composé, au minimum, de deux femmes.

La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a abaissé le seuil de cinq cents salariés à deux cent cinquante à compter du 1er janvier 2020 ([109]).

Les sanctions encourues en cas de non-respect des dispositions de la loi Copé-Zimmermann ont récemment été renforcées par la loi pour la croissance et la transformation des entreprises du 22 mai 2019, dite loi « Pacte ». Initialement, la loi Copé-Zimmermann prévoyait que toute nomination d’un administrateur au mépris des règles de représentation des deux sexes était nulle mais que cette nullité n’entraînait pas celle « des délibérations auxquelles a pris part l’administrateur irrégulièrement nommé » (art. L. 225-18-1 du code de commerce). La loi « Pacte » a supprimé cette mention afin de renforcer le caractère coercitif du dispositif ([110]). À cette première sanction s’ajoute la suspension du versement des jetons de présence en cas de composition irrégulière du conseil.

2.   Le succès non démenti des quotas pour accélérer la progression des femmes au sein des conseils d’administration et de surveillance

Le succès de la loi Copé-Zimmermann est très net concernant les grandes entreprises cotées. Le pourcentage de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance est passé de 10 % en 2009 à 44,6 % en 2020 dans les entreprises du CAC 40. Il atteint 45,3 % dans les entreprises du SBF 120.

PART DES FEMMES AU SEIN DES CONSEILS d’ADMINISTRATION DES ENTREPRISES
DU CAC 40 ET DU SBF 120

ff

 Source : Ethics & Boards, 2020

Ces résultats font de la France la championne de l’Union européenne en matière de parité et la situent en deuxième place au niveau mondial, juste après l’Islande ([111]).

PART DES FEMMES AU SEIN DES CONSEILS d’ADMINISTRATION ET DE SURVEILLANCE DES ENTREPRISES COTÉES DANS LE MONDE

pp

Source : Ethics & Boards, mars 2021

Le bilan reste plus mitigé pour les autres entreprises visées par le dispositif puisque d’après les données du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes ([112]), les objectifs chiffrés ne seraient pas atteints pour un certain nombre d’entre elles :

– les femmes ne seraient que 31,4 % au sein des plus petites entreprises capitalisées, cotées en deçà du SBF 120 ;

– elles seraient 23,8 % au sein des entreprises non cotées de 500 salariés ;

– pour les entreprises de 250 salariés concernées par le dispositif depuis le 1er janvier 2020, le taux serait bien éloigné de l’objectif de 40 % avec seulement 21,7 % de femmes au sein des conseils d’administration et de surveillance.

Au-delà du simple aspect quantitatif, il est primordial de souligner l’apport qualitatif de cet arsenal juridique car l’accession des femmes aux conseils d’administration et de surveillance a engendré un profond renouvellement de ces instances, désormais plus jeunes et plus internationalisées ([113]). Le récent rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes souligne que « trois comportements sont observés chez les nouvelles administratrices : leur assiduité aux réunions, leur volonté de comprendre les enjeux (elles posent plus de questions que leurs homologues masculins) et leurs compétences en matière stratégique et financière. Contrairement aux idées reçues, les administratrices apportent non seulement de la diversité, mais aussi de l’expertise au sein des conseils([114]) »

La féminisation de ces conseils a, sans conteste, entraîné une professionnalisation de la gouvernance. Comme le note M. Denis Roth-Fichet dans son rapport sur la féminisation des instances de gouvernance et de direction des entreprises, « si cela constitue dans certains pays, comme le Royaume-Uni, un prérequis, avoir suivi un parcours certifiant ou des formations dédiées n’en constitue pas moins un atout en France pour devenir administrateur ou administratrice. Ces formations dont les coûts d’inscription ne sont pas négligeables sont de plus en plus jugées indispensables par les cabinets de chasseurs de tête pour constituer leur vivier, et sont désormais regardés de très près par les conseils d’administration ou de surveillance lors du recrutement d’un nouvel administrateur quel que soit son sexe. ([115]) ». Pour répondre à cette professionnalisation, des formations spécialisées se sont ouvertes à un public plus large, certains ciblant spécifiquement les femmes comme le programme « Women Be Board Ready » créé par la professeure Mme Viviane de Beaufort à l’ESSEC pour « armer les femmes » ([116]) qui souhaitent accéder aux mandats sociaux.

 

B.   TOUTEFOIS, LA PROGRESSION DE LA PARITÉ DANS LES CONSEILS D’ADMINISTRATION N’a PAS eu d’EFFET D’ENTRAÎNEMENT SUR L’ACCESSION DES FEMMES AUX POSTES À PLUS FORTE RESPONSABILITÉ

La performance française en termes de mixité dans les conseils d’administration et de surveillance n’a, malheureusement, pas enclenché la dynamique paritaire dans les instances de direction qu’il était permis d’espérer.

part DE FEMMES DANS LES instances dirigeantes des sociÉtÉs du sbf 120

e

CAC 40 pour les années 2010 et 2011

Source : Ethics & Boards, données de chaque année post-AG 2010-2017 et mars 2021.

Il apparaît clairement que l’écart entre les conseils d’administration et de surveillance et les comités stratégiques se creuse en termes de représentation des femmes. Dix ans après la promulgation de la loi Copé-Zimmermann, les femmes ne représentent que 22,4 % des membres des comités exécutifs et de direction des entreprises cotées. Une enquête réalisée par l’Association nationale des directeurs des ressources humaines auprès de ses adhérents, en 2019, sur la parité dans les instances de gouvernance révèle que pour 72 % d’entre eux, la loi Copé-Zimmermann n’a eu qu’un faible impact, voire aucun impact sur l’accès des femmes à des postes de responsabilité ([117]). Selon les calculs d’Ethics & Boards, « il faudrait encore trente-trois ans – à ce rythme-là – pour atteindre la parité dans les comités exécutifs et de direction des entreprises du CAC 40 » ([118]).

L’observatoire de la féminisation des entreprises publie, dans son édition 2021, des données éloquentes ([119]) :

– le CAC 40 ne compte aucune femme présidente-directrice générale, aucune femme présidente de conseil d’administration et seulement une femme directrice générale ;

– cinq entreprises du CAC 40 ne comptent aucune femme dans leur comité exécutif ;

– les femmes ne représentent que 20,37 % des comités exécutifs du CAC 40 alors qu’elles représentent 33,72 % de la population des cadres, vivier traditionnel de recrutement des dirigeants.

Cet écart entre le nombre de femmes cadres et le nombre de femmes qui parviennent à accéder aux postes à responsabilité témoigne de l’épaisseur du plafond de verre. L’argument, régulièrement avancé par les détracteurs de l’instauration de quotas, selon lequel les entreprises manqueraient de vivier pour promouvoir des femmes est démenti par les faits.

Lorsque les femmes réussissent à accéder aux postes à responsabilité, les représentations stéréotypées perdurent. Aujourd’hui, seul un tiers d’entre elles occupent des postes opérationnels. La moitié des femmes se regroupent sur trois fonctions supports, éloignées du pouvoir de décision et d’influence au sein des entreprises : marketing et communication, ressources humaines, finance et juridique. Seuls 10 % des directeurs de centre de profit sont des femmes ([120]).

Au-delà de la promotion des femmes aux postes à responsabilité, il s’agit bien d’assurer une plus grande mixité au sein de ces fonctions. Face à l’insuccès des dispositions législatives existantes à insuffler cette dynamique paritaire, un nouvel arsenal juridique semble désormais incontournable pour favoriser l’accession des femmes aux postes stratégiques.

II.   FAVORISER l’ÉgalitÉ D’ACCÈS AUX POSTES STRATÉGIQUES, UNE NOUVELLE ÉTAPE de L’ÉgalitÉ professionnelle

A.   RENDRE VISIBLES LES INÉGALITÉS ACTUELLES POUR MIEUX LES CORRIGER GRÂCE À DES OBJECTIFS CONTRAIGNANTS

1.   Un nouvel indicateur pour mesurer les écarts de représentation entre femmes et hommes parmi les postes stratégiques

Sur le modèle de l’index de l’égalité professionnelle, le présent article entend, tout d’abord, instaurer un indicateur afin d’établir un état des lieux de la situation des femmes au sein des postes à forte responsabilité dans les entreprises d’au moins mille salariés (I).

Cette photographie de la place des femmes est un préalable nécessaire pour se prémunir des idées préconçues qui pourraient émerger. Ainsi il n’y a, par exemple, pas de corrélation entre le pourcentage de femmes dans les comités exécutifs et le nombre de femmes cadres au sein de l’entreprise. Certaines entreprises du CAC 40 connaissent une parité parfaite au sein de leurs cadres mais ne comptent, pour autant, aucune femme au comité exécutif. La féminisation des comités dirigeants ne dépend pas non plus du secteur d’activité puisque dans un même secteur d’activité, le nombre de femmes présentes au conseil exécutif peut varier du simple au double selon la société. De la même manière, certaines entreprises réputées intervenir dans des secteurs « masculins » sont parmi celles qui comptent le plus de femmes dans leur comité exécutif. Au total, pour reprendre les mots de Mme Corinne Hardy, présidente de l’Alliance pour la mixité en entreprise, « la place des femmes dans l’entreprise et dans sa direction dépend uniquement de la culture de l’entreprise et de la volonté des dirigeants » ([121]).

Le dispositif proposé complète les dispositions du code du travail visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l’entreprise afin d’établir un diagnostic dans chacune des entreprises visées par le dispositif. Un nouvel article L. 1142-11 prévoit que « dans les entreprises d’au moins mille salariés, l’employeur publie chaque année un indicateur relatif aux écarts de représentation entre les femmes et les hommes aux postes à plus forte responsabilité. ».

La détermination du périmètre idoine n’est pas sans poser difficulté et la notion de « postes à plus forte responsabilité » a fait l’objet d’échanges nourris lors des auditions préparatoires à l’examen du texte. Ainsi que le préconisent Mme Viviane de Beaufort et M. Martin Richer ([122]), les « instances de direction des entreprises » doivent être, indiscutablement, ciblées. Néanmoins, votre rapporteure ne souhaite pas s’en tenir aux seuls comités exécutifs et de direction pour deux raisons.

En premier lieu, ces organes bénéficient d’une définition juridique floue, source d’insécurité juridique. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ([123]) a amorcé un début de définition, à l’article L. 22-10-10 du code de commerce, précisant que les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementaire décrivent « la manière dont la société recherche une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein du comité mis en place, le cas échéant, par la direction générale en vue de l’assister régulièrement dans l’exercice de ses missions générales et sur les résultats en matière de mixité dans les 10 % de postes à plus forte responsabilité. ».

Dans son rapport précité, le Haut Conseil à l’égalité préconise d’ajouter que ce comité assiste également le directeur général dans l’exercice de ses missions « de suivi de l’activité de l’entreprise et de mise en œuvre de la stratégie économique et financière, sans prétendre à l’exhaustivité([124]) »

Le code de gouvernement d’entreprise AFEP-MEDEF ([125]) indique que « la notion d’instances dirigeantes vise les comités exécutifs, les comités de direction et plus largement l’encadrement supérieur. Il appartient à chaque conseil de déterminer un périmètre pertinent et ambitieux. Ce périmètre intègre a minima le comité exécutif ou de direction ou tout comité similaire. ».

L’imprécise définition des instances dirigeantes fait courir un risque non négligeable d’affaiblissement de la portée du dispositif prévu par le présent article.

En second lieu, l’accession des femmes à ces postes à responsabilité ne pourra se faire sans la constitution d’un « vivier » de cadres à même d’y parvenir. Les entreprises ne manquent pas de femmes cadres mais elles manquent aujourd’hui de volonté pour leur faire franchir une marche supplémentaire vers les postes à forte responsabilité. C’est pourquoi il apparaît nécessaire que le dispositif proposé ne concerne pas que les comités exécutifs et de direction mais vise plus largement les managers et dirigeants intermédiaires afin d’établir un état des lieux précis de la situation réelle des entreprises.

Ainsi que l’a souligné Mme Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, lors de son audition devant la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, « on ne peut pas se contenter de quotas généraux, il faut descendre de manière très granulaire dans l’organisation. Il faut fixer la cible à atteindre pour tous les grades : direction, sous-direction, etc. […] Mais il faut aussi se donner du temps pour constituer cette chaîne au sein de l’entreprise et ne pas multiplier les contraintes administratives pour rendre le dispositif opérationnel. ([126]) » Nombre d’entreprises se sont déjà attachées à faire grandir leur vivier de femmes à chaque échelon de l’entreprise. Les auditions préparatoires à l’examen de ce texte ont fait la lumière sur le fonctionnement exemplaire et inspirant de certaines entreprises. Ainsi, sous l’impulsion de sa présidente directrice générale, qui a fait de la mixité une priorité, le pourcentage de femmes managers (43 %) est désormais équivalent au pourcentage de femmes employées par la Française des jeux, y compris au sein du comité de direction générale ([127]). Des actions de sensibilisation des managers et une politique volontariste permettent de constituer, très rapidement, un vivier de femmes appelées à intégrer des fonctions d’exécution. La promotion interne joue un rôle majeur dans l’ascension des femmes au sein de l’entreprise car elle est un facteur de motivation. Faire confiance aux femmes pour leur faire gravir des échelons qu’elles n’auraient jamais pensé atteindre en entrant dans l’entreprise est un pari gagnant, ainsi que l’a constaté Clara Gaymard dans la société d’investissement qu’elle a cofondée ([128]).

2.   Des objectifs chiffrés pour initier une évolution structurelle

Au-delà de la mesure des inégalités actuelles au sein de l’entreprise, le présent article prévoit une obligation de correction de ces inégalités par la fixation d’objectifs chiffrés (II). L’article L. 1142-11 du code du travail, nouvellement créé, précise que l’indicateur « décrit les actions mises en œuvre pour permettre une représentation minimale de 30 % de chaque sexe selon des modalités et une méthodologie définies par décret. Ce décret prend en compte la répartition par sexe des postes au premier alinéa à la date de publication de la présente loi. », cette disposition s’appliquant à compter d’un délai de cinq ans après la publication de la présente proposition de loi (V). Au terme d’un délai de huit ans, la représentation minimale exigée est portée à 40 % (III et VI).

Parvenir à cette représentation de 30 % puis de 40 % de femmes est un objectif à la fois ambitieux et soutenable.

Il est ambitieux, par nature, car l’accession des femmes aux postes stratégiques et opérationnels ne reposera désormais plus sur la seule bonne volonté de chaque entreprise mais sera un impératif légalement défini. Le succès des quotas de la loi Copé-Zimmermann ne peut qu’inciter aujourd’hui à activer ce levier pour corriger les disparités de situation entre les femmes et les hommes.

Il reste néanmoins soutenable au vu de la situation actuelle. Avec 22,4 % de femmes au sein des comités exécutifs et de direction des entreprises du SBF 120, il y a fort à parier que l’objectif de 30 % sera atteint par bon nombre d’entre elles d’ici cinq ans. Certaines entreprises parmi les plus volontaristes du CAC 40 atteignent déjà l’objectif de 40 % de femmes au sein des comités exécutifs et de direction ([129]).

Ces entreprises ont bien compris que la mixité au sein des instances dirigeantes accroît leur performance économique.

Depuis 2007, la série d’études « Women Matter » menées par McKinsey établit une corrélation très claire entre mixité et meilleure performance économique et tend à évaluer le coût de la sous-exploitation du potentiel des femmes. Pour le cabinet de conseil, se priver des femmes est un manque à gagner de poids : une meilleure exploitation des compétences des femmes permettrait de faire augmenter le produit intérieur brut (PIB) mondial de 12 milliards de dollars ([130]). Recruter plus de femmes permet d’élargir la taille du marché du travail et accroît ainsi la probabilité de recruter des talents de meilleure qualité.

Une étude de M. Michel Ferrary, professeur de management à l’origine de l’observatoire de la féminisation des entreprises, démontre que les entreprises comptant plus de 35 % de femmes dans leur encadrement affichent une croissance de 23,5 % de leur chiffre d’affaires, contre 14% pour les autres. Les premières atteignent une rentabilité de 19,5 %, contre 10% pour les secondes. Enfin, la productivité du travail des premières est supérieure de 34 % aux secondes ([131]).

Dans l’édition 2021 de l’observatoire de la féminisation des entreprises, M. Michel Ferrary constate que plus l’encadrement de l’entreprise est féminisé, meilleure est la rentabilité, mesurée par le taux de marge opérationnelle sur cinq ans.

FÉMINISATION DE l’encadrement et performance Économique

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Source : Observatoire Skema de la féminisation des entreprises, mars 2021.

Comme l’a souligné Mme Sandra Sancier-Sultan, directrice associée de McKinsey & Company, lors de la table ronde relative à la place des femmes sur le marché du travail organisée par la Délégation aux droits des femmes, dans le contexte économique difficile que nous connaissons, il est aujourd’hui irrationnel pour une entreprise de se priver de la moitié de l’humanité : « 50 % du potentiel de notre économie est lié à la mixité et donc à la plus forte présence de femmes au travail : 25 % de cet impact est lié aux nombres d’heures travaillées puisque le temps partiel reste majoritairement féminin, les 25 % restants sont liés à la présence de femmes parmi les métiers les mieux rémunérés. » ([132])

Porteuses économiquement, les mesures proposées par le présent article, en mêlant la philosophie de l’index de l’égalité professionnelle, par la création d’un nouvel indicateur, et la politique de quotas de la loi Copé-Zimmermann, ont l’ambition de développer les synergies pour accélérer l’égalité professionnelle.

B.   une mise en œuvre ÉCHELONNÉE ET PRAGMATIQUE, assortie de sanctions POUR GARANTIR l’EFFECTIVITÉ DE LA LOI

1.   Une entrée en vigueur différée

À l’instar de la mise en œuvre par paliers de la loi Copé-Zimmermann, le présent article entend tenir compte de la situation actuelle des entreprises afin de fixer des objectifs atteignables. Votre rapporteure est convaincue qu’une mise en œuvre graduelle, avec des étapes intermédiaires déterminées par le législateur, est le gage d’une évolution durable et solide des pratiques. Il s’agit ici d’accompagner les entreprises dans leur transition et non de leur assigner un but inaccessible, qui serait contreproductif.

Le dispositif du présent article porte à cinq ans, à compter de la promulgation de la loi, le délai au terme duquel la représentation minimale de chaque sexe devra atteindre 30 % des cadres dirigeants visés (II et V). Un taux minimal de 40 % devra être atteint, au plus tard huit ans, après la promulgation de la loi (III et VI).

Un nouvel article L. 1142-12 du code du travail prévoit que « lorsque les résultats obtenus par l’entreprise, au regard de l’indicateur mentionné à l’article L. 1142-11, se situent en deçà d’un niveau défini par décret, l’entreprise dispose d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité. À l’expiration de ce délai, si les résultats obtenus sont toujours en deçà du niveau défini par décret, l’employeur se voit appliquer une pénalité financière. » ; cette disposition s’applique à compter d’un délai de huit ans après la publication de la présente proposition de loi (IV et VII).

Ce souci de progressivité est d’autant plus justifié au regard du fonctionnement des instances dirigeantes visées. À la différence des conseils d’administration et de surveillance qui accueillent souvent en leur sein des personnalités extérieures et des membres élus pour une durée déterminée, fixée par leur mandat, les instances dirigeantes visées par le présent article concernent directement les cadres internes de l’entreprise. Le renouvellement de personnel y est donc, par conséquent, moins fréquent qu’au sein des conseils d’administration et de surveillance puisque fondé sur le contrat de travail qui est, bien souvent, un contrat à durée indéterminée. L’efficacité du dispositif proposé repose sur la capacité des sociétés visées à recruter et à promouvoir des cadres du sexe actuellement sous-représenté. Il ne s’agit, en aucun cas, de pénaliser les hommes ou les femmes aujourd’hui en poste mais bien de diversifier, à terme, les profils pour parvenir à une réelle mixité.

2.   Des sanctions financières en cas de non-respect des objectifs

L’effectivité de la loi passe par la sanction des comportements qui ne s’y conformeraient pas. Votre rapporteure n’entend pas proposer des dispositions qui auraient une valeur purement symbolique, dénuée de portée normative. Dans l’optique d’une convergence avec les outils existants en termes d’égalité professionnelle, le dispositif reprend les sanctions prévues à l’article L. 1142-10 du code du travail concernant l’index de l’égalité professionnelle (IV).

L’article L. 1142-12 du code du travail prévoira une pénalité financière pour l’entreprise, ne pouvant excéder 1 % des rémunérations et des gains versés aux travailleurs salariés au cours de l’année civile précédente. Afin de tenir compte de la situation propre à chaque entreprise, « en fonction des efforts constatés dans l’entreprise en matière d’égalité salariale entre les femmes et les hommes ainsi que des motifs de sa défaillance, un délai supplémentaire de deux ans peut lui être accordé pour se mettre en conformité. ». Comme l’a très justement souligné Jean‑Pierre Farandou, président directeur général de la SNCF, lors de son audition, « il faut mettre en place des obligations contraignantes avec des trajectoires, c’est-à-dire avec une durée et des étapes intermédiaires – il faut « déformer » une population, donc il faut laisser le temps de le faire car c’est une démarche très complexe. » ([133])

En définitive, par cet article, la démarche de votre rapporteure s’inscrit résolument dans la voie ouverte à la fois par la loi Copé-Zimmermann et par la création de l’index de l’égalité professionnelle.

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

La commission a adopté un amendement de rédaction globale de votre rapporteure introduisant les modifications suivantes :

– au vu des échanges nourris lors des travaux préparatoires sur la question du périmètre concerné par le dispositif de l’article 7 et la constitution du vivier, votre rapporteure a privilégié une nouvelle définition en lieu et place des « 10 % de postes à forte responsabilité » en faisant, d’une part, référence aux cadres dirigeants définis à l’article L. 3111-2 du code du travail et en introduisant, d’autre part, une nouvelle notion de cadres membres des « instances dirigeantes » définies dans le code de commerce comme « toute instance mise en place au sein de la société par tout acte ou toute pratique sociétaire aux fins d’assister régulièrement les organes chargés de la direction générale dans l’exercice de leurs missions » ;

– votre rapporteure a tenu à ajouter que le montant de la sanction financière serait fixé non seulement en tenant compte des efforts constatés dans l’entreprise et des motifs de sa défaillance, mais aussi de la situation initiale de l’entreprise ;

– enfin, un nouvel article L. 1142-13 du code du travail précise que lorsque le résultat obtenu par l’entreprise se situe en deçà du taux fixé, la négociation sur l’égalité professionnelle porte sur les mesures de correction et qu’en l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci sont déterminées par décision de l’employeur, après consultation du comité social et économique. La décision est déposée auprès de l’autorité administrative qui peut présenter des observations sur ces mesures.

*

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Article 8
Permettre un meilleur accès des femmes aux fonds d’investissement

 

Adopté par la commission avec modifications

L’article 8 vise à encourager l’entrepreneuriat des femmes en introduisant des objectifs de mixité dans la politique de soutien à la création et au développement d’entreprises menée par Bpifrance. En tant que groupe public ayant comme missions de financer et de développer les entreprises, notamment dirigées par des femmes, Bpi a un devoir d’exemplarité en matière d’accès des femmes aux fonds de financement.

I.   FACE AUx difficultÉs D’accÈs au financement rencontrÉes par les femmes, LES CHARTES DE BONNEs pratiques se sont multipliÉes

A.   L’ENTREPRENeURIAT DES FEMMES RESTE AUJOURD’HUI TRÈS PEU DEVELOPPÉ

1.   Une progression des femmes dirigeantes de très petites entreprises et de startups encore contenue

Les femmes représentent 40 % des créations d’entreprises en 2019 ([134]). Après trois décennies de progression, ce taux reste stable depuis 2015. D’après l’indice entrepreneurial de Bpifrance, les femmes feraient, néanmoins, preuve d’un « dynamisme entrepreneurial » moins important que les hommes puisque 23 % d’entre elles seraient engagées dans cette démarche contre 37 % des hommes ([135]). Lorsqu’elles s’orientent vers la création d’entreprises, les femmes se dirigent davantage que les hommes vers la reprise de l’entreprise familiale ou conjugale. Paradoxalement, elles restent pénalisées dans la transmission des biens fonciers et entreprises lors de la répartition de l’héritage. Les fils continuent d’hériter majoritairement de l’entreprise, les sœurs recevant des compensations financières souvent sous-évaluées pour ne pas contraindre leurs frères à vendre ([136]).

Le réseau « Femmes Business angels » souligne dans son Livre blanc que « si la part des femmes dans la création d’entreprise a significativement augmenté ces dernières années, les fondatrices de startups innovantes restent peu nombreuses » ([137]). L’indice Next 40, créé en 2019 pour distinguer quarante startups à fort potentiel de développement économique et d’impact humain et environnemental, ne compte ainsi qu’une seule startup dirigée par une femme ([138]).

Néanmoins, le faible nombre de startups créées par des femmes est moins dû à un manque d’appétence supposé des femmes pour l’innovation qu’aux obstacles qu’elles rencontrent dans l’accès au financement. À ce titre, le témoignage de certaines femmes entrepreneures, lors des travaux préparatoires à l’examen de cette proposition de loi, est absolument révélateur des chemins semés d’embûches que traversent les femmes pour accéder au financement. Ainsi, Mme Floriane de Saint Pierre, co-fondatrice d’Ethics & Boards, cabinet leader sur le marché européen dans l’analyse de données des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) des entreprises, a été contrainte de s’autofinancer, il y a dix ans, pour fonder ce cabinet, face à la multiplication des refus qui lui ont été opposés ([139]).

Si certains secteurs d’activité restent privilégiés par les femmes, comme le domaine de la santé, ils n’en sont pas moins extrêmement innovants. Dans la filière des technologies médicales, l’apport du numérique ne cesse de progresser. Dans la biotechnologie, c’est la nature même des médicaments en développement qui évolue. Comme l’ont rappelé certaines auditions ([140]), le développement d’une innovation dans le secteur de la santé est très exigeant car d’une part ces projets sont très capitalistiques et demandent un investissement privé important, d’autre part, la filière de la santé est soumise à des normes réglementaires extrêmement rigoureuses pour garantir la sécurité sanitaire des produits développés. La place des femmes dans ce secteur d’avenir démontre, s’il en était besoin, que le flux d’affaires potentielles existe dans l’entrepreneuriat des femmes et ne demande qu’à être financé.

Le baromètre SISTA ([141]) sur les conditions d’accès au financement des femmes dirigeantes de startups est, sur ce point, extrêmement révélateur :

– 21 % des startups fondées en 2020 le sont par des équipes féminines ou mixtes, une hausse de 4 points de pourcentage par rapport à 2019 ;

– 75 % des femmes qui se lancent dans l’entrepreneuriat s’associent à un homme alors que seuls 14 % des hommes s’associent à une femme ;

– les équipes masculines représentent 85 % des startups financées et 90 % des fonds levés en 2020. Au-dessus de 100 millions d’euros, 100 % des startups financées sont masculines ;

– les startups portées par des femmes ont 40 % de moins de chance d’accéder aux séries A, 80 % d’accéder aux séries B et 100 % aux séries C ([142]).

Au total, au rythme actuel, il faudrait attendre 2090 pour atteindre la parité dans l’entrepreneuriat français.

2.   La persistance de visions stéréotypées

Une récente étude du Conseil économique, social et environnemental sur les femmes et l’entrepreneuriat ([143]) fait le point sur les caractéristiques de l’entrepreneuriat des femmes et les freins culturels auxquels elles sont confrontées. Il ne s’agit, bien sûr, pas ici « d’essentialiser » les spécificités de l’entrepreneuriat des femmes en les enfermant dans une manière d’entreprendre mais de dresser, à grands traits, leur profil type.

Tout d’abord, les entreprises dirigées par les femmes sont significativement plus petites que celles des hommes. Les auditions préparatoires à l’examen de ce texte l’ont rappelé : 95 % des entreprises créées par des femmes sont des très petites entreprises qui le restent ([144]). Le montant de capital initial mobilisé par les femmes entrepreneures est également moindre. Agissant en « bonnes gestionnaires » ([145]), elles vont chercher l’argent dont elles ont besoin, pas plus.

Deux raisons peuvent expliquer ce développement plus modeste des entreprises créées par les femmes. En premier lieu, les femmes ont tendance à s’investir dans des secteurs d’activité moins rémunérateurs. Les biais de genre sont encore à l’œuvre dans le choix du secteur d’activité puisque les femmes sont plus présentes dans l’enseignement, la santé et l’action sociale, qui font appel à des qualités relationnelles réputées plus féminines, alors qu’elles sont très peu présentes dans les secteurs industriels et numériques perçus comme plus masculins.

CRÉATEURS D’ENTREPRISE SELON L’ACTIVITÉ ET LE SEXE EN 2018

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Champ : France, entreprises créées au cours du 1er semestre 2018, exerçant des activités marchandes non agricoles, hors micro-entrepreneurs.

Source : INSEE, Enquête SINE, septembre 2020.

En second lieu, les femmes semblent manifester une plus grande réticence face au risque financier. Pour reprendre les mots des économistes Gunther Capelle-Blancard, Jézabel Couppey-Soubeyran et Antoine Rebérioux, les femmes « se disent plus prudentes, tandis que les hommes sont plus nombreux à aimer l’aventure, la nouveauté et les défis. […] Les choix de placements s’orientent plus vers des placements sûrs pour les femmes.([146]) ». Les femmes se situent davantage dans la perspective de créer leur propre emploi que de faire grandir une entreprise en embauchant de plus en plus de salariés et salariées. Aussi, 70 % des dirigeantes gagnent aujourd’hui moins de 1 500 euros par mois ([147]).

Cette réalité est sans doute à mettre en relation avec la question de l’entrepreneuriat par nécessité. D’après le rapport 2018 du Global Entrepreneurship Monitor, la part d’entrepreneures par nécessité est évaluée à 23,9 % des femmes en France contre 16,6 % au Royaume-Uni et 7,7 % aux États-Unis ([148]). Comme le note la chercheuse Mme Christel Tessier-Dargent, derrière ce chiffre se dessinent des situations extrêmement variées, de la mère de famille divorcée vivant de minima sociaux qui crée son entreprise de nettoyage à la quinquagénaire licenciée quelques années avant la retraite contrainte d’ouvrir un petit commerce en tant qu’auto-entrepreneure, faute d’une meilleure alternative d’emploi ([149]). Toutefois, ce taux assez élevé de femmes contraintes de créer leur propre entreprise pour subvenir à leurs besoins doit être relativisé car 3 % seulement des entrepreneurs, tous genres confondus, créeraient leur entreprise pour répondre à une nécessité purement économique ([150]).

Pour autant, les entreprises créées par des femmes ont tendance à être plus performantes et pérennes. Une étude menée, en 2015, sur plus de 32 000 petites et moyennes entreprises françaises notait une « surperformance » de celles dirigées par des femmes ([151]). Le constat est similaire concernant les entreprises innovantes : les startups fondées par les femmes réalisent un chiffre d’affaires supérieur de 10 % à celui des hommes au bout de cinq ans ([152]).

Ainsi que l’affirme Mme Chiara Corazza, « notre monde est en pleine transformation : la plupart des usagers et des métiers s’inventent et se réinventent tous les jours. Tout va très vite et si nous n’y prenons pas garder, le risque est de laisser aux hommes, seuls, comme par le passé, l’opportunité de façonner le monde([153]) ». Les stéréotypes de genre encore à l’œuvre doivent impérativement être surmontés car l’absence durable des femmes dans les secteurs innovants aurait des conséquences dramatiques sur l’économie de demain. Nous ne pouvons envisager une société qui se priverait de la moitié de l’humanité pour répondre aux défis de santé, de sécurité, de développement durable qui se poseront demain avec plus d’acuité encore.

B.   UNE PRISE DE CONSCIENCE DES INÉGALITÉS QUI MOBILISE LES ACTEURS DE L’ENTREPRENEURIAT

1.   « Compter les femmes pour que les femmes comptent » : la charte SISTA

Face aux difficultés rencontrées par les femmes pour accéder au financement, des dispositifs de droit souple se sont développés, à l’instar de la charte d’engagement pour favoriser la mixité dans le numérique établie par le collectif SISTA et le Conseil national du numérique, qui se fixe comme objectif de parvenir à 25 % de startups fondées ou-cofondées par des femmes financées dans le numérique en 2025, 30 % en 2030 et 50 % en 2050.

Les engagements de la charte SISTA

La charte d’engagement pour favoriser la mixité dans le numérique, aujourd’hui ratifiée par cinquante‑six fonds d’investissement et acteurs financiers dont la Banque publique d’investissement, repose sur quatre axes :

– mesurer la place du genre dans les portefeuilles, en suivant notamment le nombre de dossiers portés par des femmes ;

– adopter des pratiques de recrutement plus inclusives, en se fixant un objectif minimun de 30 % de partners femmes et 50 % au sein des équipes d’investissement ;

– adopter des pratiques d’investissement plus inclusives, en s’appuyant notamment sur une liste indicative de questions non genrées ;

– faire rayonner les bonnes pratiques dans l’écosystème en faisant appel à plus de femmes expertes et en soutenant les réseaux de femmes dédiés à l’entrepreneuriat.

D’après le baromètre SISTA de 2021, les premiers résultats commencent à voir le jour concernant la progression de la mixité. Les fonds signataires de la charte sont trois fois plus nombreux à mesurer la place du genre qu’en 2019 dans les dossiers de financement ([154]). 76 % des fonds signataires de la charte ont adopté des pratiques d’investissements plus inclusives et ils tendent à accroître la part de femmes au sein des équipes d’investissement qui représentent, en 2020, 35 % des équipes.

Il est à noter que d’autres chartes de bonne gouvernance, à l’image de la charte pour favoriser la parité chez les acteurs du capital-investissement français et dans les entreprises qu’ils accompagnent, rédigée en mars 2020 par France Invest, se fixent des objectifs chiffrés ambitieux pour faire progresser la mixité dans l’accès au capital.

2.   Les engagements de Bpifrance en matière de mixité

Signataire des chartes SISTA et France Invest, Bpifrance est également partie prenante de l’accord-cadre triennal 2021-2023 pour développer et promouvoir la création et la reprise d’entreprises par des femmes avec le ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances. En tant que groupe public au service du financement et du développement des entreprises, agissant en appui des politiques publiques conduites par l’État et les régions, la Banque publique d’investissement a un devoir d’exemplarité. Le soutien à l’entrepreneuriat des femmes fait partie intégrante des missions qui lui sont assignées (article 1 A de l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement).

Les missions de Bpifrance

L’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement fixe un certain nombre de missions à cet investisseur public :

        En vue de soutenir la croissance durable, l’emploi et la compétitivité de l’économie, la Banque publique d’investissement favorise l’innovation, l’amorçage, le développement, l’internationalisation, la mutation et la transmission des entreprises, en contribuant à leur financement en prêts et en fonds propres.

        Elle oriente en priorité son action vers l’entrepreneuriat féminin, les très petites entreprises, les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire, en particulier celles du secteur industriel et celles du secteur touristique.

        Elle investit de manière avisée pour financer des projets de long terme.

        Elle accompagne la politique industrielle nationale, notamment pour soutenir les stratégies de développement de filières.

        Elle participe au développement des secteurs d’avenir, de la conversion numérique et de l’économie sociale et solidaire.

        Elle contribue au développement des innovations technologiques et managériales.

        Elle apporte son soutien à la mise en œuvre de la transition écologique et énergétique.

        Elle favorise une mobilisation de l’ensemble du système bancaire sur les projets qu’elle soutient.

        Elle mène son action en coopération, en tant que de besoin, avec la Banque européenne d’investissement.

        Elle développe une offre de service et d’accompagnement des entreprises depuis leur création et tout au long de leur développement.

        Elle peut stabiliser l’actionnariat de grandes entreprises porteuses de croissance et de compétitivité pour l’économie française.

Bpifrance produit déjà un nombre important d’études sur la place des femmes dans l’entrepreneuriat, à l’instar de sa récente enquête sur les femmes entrepreneures des quartiers ([155]). Elle fournit également des données de répartition par sexe pour l’octroi de certains crédits. Ainsi Bpifrance, qui gère l’octroi des prêts garantis par l’État, note une forte disparité puisque 72 % des prêts sont octroyés à des hommes, contre 24 % à des femmes ([156]).

Aussi, par son rôle et ses missions dans le financement des entreprises, à chaque étape de leur développement, Bpifrance doit jouer un rôle moteur dans la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes.

II.   FAIRE DU FINANCEMENT PUBLIC EN SOUTIEN À L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE UN LEVIER DE RÉDUCTION DES INÉGALITÉS D’ACCÈS AU FINANCEMENT

A.   ACCROÎTRE LA MIXITÉ DANS LES COMITÉS DE SELECTION ET PARMI LES BÉNÉFICIAIRES DES ACTIONS DE SOUTIEN

Le présent article a vocation à renforcer les objectifs de promotion de l’entrepreneuriat des femmes fixés à la Banque publique d’investissement. Une précision sémantique doit, au préalable, être opérée puisqu’il ne s’agit pas de viser « l’entrepreneuriat féminin » qui essentialise l’action des femmes entrepreneures mais bien « l’entrepreneuriat des femmes » (). Ainsi, au troisième alinéa de l’article 1 A de l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement, le mot : « féminin » sera remplacé par les mots : « des femmes ». Enjeu d’égalité, le soutien à l’entrepreneuriat des femmes est également une opportunité économique tant le manque à gagner de la sous-exploitation du potentiel est fort.

Le dispositif proposé entend fixer un objectif chiffré, à la fois concernant la part de femmes devant composer les comités d’investissement et parmi les bénéficiaires des actions de Bpifrance ().

Il est proposé d’introduire un nouvel article 1 B au sein de l’ordonnance du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement, précisant que « les actions de soutien de la Banque d’investissement sont menées en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes, d’une part, parmi les bénéficiaires de ces actions et, d’autre part, au sein des comités de sélection des projets, dont la proportion des membres de chaque sexe ne peut être inférieure à 30 %. ».

En premier lieu, le dispositif proposé instaure une obligation de mixité au sein des comités qui sélectionnent les projets à financer. Les tables rondes tenues sur l’entrepreneuriat et l’investissement pour la préparation de l’examen de ce texte l’ont toutes mis en avant : la très forte présence des hommes parmi les décisionnaires les incite à recruter des profils qui leur ressemblent, donc des profils masculins. Comme l’explique Mme Marie Adeline-Peix, directrice exécutive des partenariats régionaux et de l’action territoriale de Bpifrance, « il existe une forme de reproduction sociale qui incite à investir dans des équipes qui vous ressemblent et avec qui on a des affinités. » ([157]) L’ambition du dispositif est donc de contraindre les équipes d’investissement à la mixité afin de déconstruire les stéréotypes et de veiller à supprimer les biais de genre dans la sélection.

En 2019, 21 % des membres votants des comités d’investissement de Bpifrance Investissement étaient des femmes. L’objectif de 30 % de femmes au sein de ces comités est donc loin d’être inatteignable.

Les principales étapes de financement

Bpifrance intervient à chaque étape du financement d’une entreprise innovante.

La première étape est la phase d’amorçage qui permet d’introduire le projet. Cette étape permet d’apporter les fonds nécessaires au soutien à la création de l’entreprise. Les fondateurs, les « business angels » et les entreprises de capital-amorçage sont les principaux acteurs impliqués. Bpifrance intervient, en fonds propres, dans le fonds d’amorçage dans le cadre notamment du programme d’investissements d’avenir.

Le financement en série A intervient pour optimiser le développement du produit sur différents marchés grâce à un plan d’action clair et chiffré. Les investisseurs impliqués lors de séries A sont les entreprises de capital-risque.

La série B vise à élargir la portée commerciale du projet et à en évaluer la rentabilité et la profitabilité. Les acteurs impliqués sont généralement similaires à ceux présents au tour de table précédent.

Enfin, la série C est la levée de fonds qui permet aux investisseurs de faire fructifier leur investissement initial. Cette phase permet de perfectionner et d’accroître l’activité déjà établie des entreprises.

En second lieu, le présent article vise à favoriser le financement d’entreprises plus inclusives et à flécher l’investissement et les aides publiques, par l’intermédiaire de Bpifrance, vers ces entreprises dirigées par des femmes. Aujourd’hui, seuls 2 % des fonds d’amorçage des startups, cofinancés par Bpifrance, vont vers des équipes uniquement féminines ([158]). Sans parler d’éga-conditionnalité, notamment défendue par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes qui propose de conditionner le financement public investi par Bpifrance dans les entreprises innovantes et les fonds d’investissement à une proportion de femmes dans les instances de gouvernance et de direction ainsi que parmi les détentrices de capital ([159]), votre rapporteure souhaite fixer des objectifs accessibles en matière de mixité.

L’objectif politique poursuivi est d’assigner à Bpifrance un objectif de progression afin d’être en conformité avec les engagements pris en droit souple avec les chartes SISTA et France Invest dans l’écosystème des fonds d’investissement. Seuls des plans d’actions ambitieux permettront d’élargir le flux d’affaires potentielles. Afin de ne pas bouleverser la chaîne d’investissement, ces dispositions ont vocation à s’appliquer uniquement sur les nouveaux investissements réalisés par Bpifrance.

En se fondant sur la démarche de la charte SISTA dont Bpifrance est le premier signataire, un taux de 30 % de femmes parmi les bénéficiaires de ses actions n’a rien d’irréaliste puisque la charte prévoit, pour rappel, un taux de 25 % d’ici 2025, 30 % d’ici 2030 avant d’atteindre 50 % en 2050.

B.   RENFORCER LE SUIVI CHIFFRÉ DES INVESTISSEMENTS À DESTINATION DES FEMMES

L’article 8 a vocation à inciter Bpifrance à développer un suivi chiffré précis des investissements effectués dans des entreprises dirigées par des femmes (). Il prévoit de préciser à l’article 1 B, nouvellement introduit, qu’un « décret détermine les objectifs de progression de la part des femmes et des hommes bénéficiant des actions de soutien en faveur de l’entrepreneuriat et du développement des entreprises ainsi que les modalités permettant de parvenir à une représentation équilibrée parmi les bénéficiaires. »

Bpifrance finance aujourd’hui près de 90 % de l’écosystème de fonds français et joue, par-là, un rôle moteur dans l’objectivation des difficultés d’accès des entrepreneures au financement. L’étude du Conseil économique, social et environnemental sur les femmes et l’entrepreneuriat ([160]) préconise « une obligation de transparence sur les différents indicateurs de répartition des financements entre femmes et hommes (nombre de dossiers reçus, analysés, nombre de prêts octroyés) » qui s’appliquerait à Bpifrance. Parce que Bpifrance est un acteur pivot dans la sphère des fonds d’investissement, il y a fort à parier qu’un effet de ruissellement conduira mécaniquement les autres fonds d’investissement privés à féminiser à la fois leurs comités et leurs bénéficiaires, en symbiose avec les engagements de la Banque publique d’investissement.

Pour votre rapporteure, la publication de ce suivi statistique s’inscrit résolument dans une démarche de bonne gouvernance. Il est de la responsabilité sociale d’une entreprise comme Bpifrance de contribuer à la progression des femmes dans la création d’entreprises, et en particulier, d’entreprises innovantes.

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

À l’initiative de votre rapporteure, et outre un amendement rédactionnel et un de coordination, trois amendements de précision ont été adoptés :

– le premier détermine que le dispositif concerne les actions de la Banque publique d’investissement en fonds propres ;

– le deuxième substitue au terme de « comités de sélection des projets » celui de « comités d’investissement » qui correspond mieux au fonctionnement de la Banque publique d’investissement ;

– le dernier prévoit qu’un décret déterminera les objectifs assignés à la Banque publique d’investissement pour faire progresser la part de femmes bénéficiaires des actions en flux entrants de financements.

Un amendement de Mme Céline Calvez, adopté avec avis favorable de votre rapporteure, prévoit que la Banque publique d’investissement publie, chaque année, les données réparties par sexe relatives aux bénéficiaires de ses actions. Dans le même ordre d’idées, un second amendement de Mme Céline Calvez et ses collègues du groupe La République en Marche prévoit le même type de publication pour les membres des comités d’investissement.

 

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Article 8 bis (nouveau)
Extension des objectifs de mixité à tous les fonds d’investissement

Introduit par la commission

L’article 8 bis étend à l’ensemble des fonds d’investissement les objectifs de mixité fixés à Bpifrance pour parvenir à une meilleure représentation des femmes et des hommes au sein des comités d’investissement.

Cet article, issu d’un amendement déposé par Mme Sophie Panonacle et l’ensemble de ses collègues du groupe La République en Marche, adopté avec un avis favorable de votre rapporteure, vise à renforcer les obligations de mixité au sein des comités d’investissement.

S’inspirant des engagements de la charte SISTA, ratifiée par 56 fonds d’investissement, ou encore de la charte France Invest, cet amendement fixe, d’une part, des objectifs de mixité parmi les obligations des fonds d’investissement à vocation générale et de leurs sociétés de gestion et d’autre part, vise à compléter les informations que doit contenir le rapport annuel publié pour chacun des fonds d’investissement à vocation générale.

Si la Banque publique d’investissement joue un rôle central dans l’écosystème français de financement, il est primordial que les autres fonds d’investissement suivent, dans son sillage, la dynamique paritaire. Ce nouvel article entend donc pérenniser les engagements pris en droit souple par ces acteurs.

 

Article 9
Gage financier

Adopté par la commission sans modifications

Cet article vise à prévoir un mécanisme de compensation de la charge, pour les organismes de sécurité sociale, qui résulterait de l’adoption de la présente proposition de loi.

 

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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Au cours de ses séances du mercredi 5 mai 2021 ([161]), la commission des affaires sociales a examiné la proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle (n° 4000 rectifié) (Mme Marie-Pierre Rixain, rapporteure).

I.   Discussion générale

Mme la présidente Fadila Khattabi. Mes chers collègues, 289 amendements à la proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle seront mis en discussion, vingt ayant été considérés comme irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, et quarante‑quatre au titre de l’article 45.

Le texte ne portant pas globalement sur l’égalité entre les femmes et les hommes, il n’a pas été possible de considérer comme recevables des amendements relatifs au régime des élections, à la politique familiale, au congé parental ou aux modes d’accueil de la petite enfance. Ces sujets, si importants soient-ils, n’ont pas de lien direct avec le texte. La proposition de loi ne constitue pas davantage une réforme du droit du travail, ce qui exclut de son champ la question du temps partiel, même si celle-ci, j’ai à cœur de le rappeler, concerne principalement les femmes.

En revanche, les amendements relatifs aux quotas de femmes dans la fonction publique ainsi que dans les instances professionnelles et consulaires, à la lutte contre les stéréotypes de genre dans l’enseignement, et au télétravail des femmes enceintes m’ont semblé indissociables des dispositions du texte, donc recevables.

Mme Marie-Pierre Rixain, rapporteure. La présente proposition de loi est issue de plusieurs mois de travail, sanctionnés par l’organisation de trois colloques et tables rondes au sein de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, que j’ai l’honneur de présider. Ces événements, respectivement consacrés à la place des femmes sur le marché du travail, aux dix ans de la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance, dite « loi Copé-Zimmermann », et à la lutte contre les violences économiques au sein du couple, ont largement nourri la mission d’information sur l’égalité économique et professionnelle, dont je suis rapporteure, ainsi que la présente proposition de loi.

Celle-ci s’inscrit dans une pluralité d’enjeux et vise autant de moments de la vie : l’autonomie financière et bancaire, l’accompagnement des plus éloignées de l’emploi, notamment en raison de la maternité, et la juste représentation des femmes au sein de l’économie et du monde professionnel.

Entre les femmes et les hommes, l’écart de revenu est de 28,5 %. Ce chiffre cristallise les obstacles qui se dressent dans la vie d’une femme, et cache nombre de disparités parfois plus importantes. Ainsi, au sein du couple, les femmes gagnent en moyenne 42 % de moins que leurs conjoints. Quant aux inégalités de patrimoine entre les hommes et les femmes, bien loin de diminuer, elles augmentent, passant de 9 % en 1998 à 15 % en 2015. Multiples sont les raisons de ces écarts ; nombreuses sont celles qui relèvent d’une conception archaïque du rôle des femmes dans la société.

Même lorsque les femmes participent pleinement au marché du travail, plusieurs blocages, constitutifs de notre organisation collective, contraignent leurs marges de manœuvre économiques, entraînant des conséquences en cascade qui, bien souvent, entravent le développement de leur carrière et entérinent définitivement ces inégalités de destin. En 2021, les femmes doivent encore conquérir leur statut de sujet économique libre et autonome !

Le texte que je vous propose formule plusieurs solutions en vue d’accompagner toutes les femmes, quelle que soit leur situation économique et professionnelle, dans la conquête de leur autonomie économique, préalable indispensable à l’exercice plein et entier de leurs droits.

Les articles 1er et 2 parachèvent la loi du 13 juillet 1965, qui a supprimé l’autorisation préalable du mari permettant à une femme de travailler et d’ouvrir un compte en banque. Il s’agit à présent de garantir à chaque individu la jouissance des revenus de son travail, ainsi que des prestations individuelles décidées par la solidarité nationale. À cette fin, ces deux articles garantissent, par des dispositions contraignantes, le versement des salaires et des prestations sociales individuelles sur un compte bancaire dont le ou la titulaire ou le ou la cotitulaire en est le ou la bénéficiaire.

Cette disposition présente le mérite de la simplicité, garante de son efficacité. Elle doit permettre la stricte adéquation entre l’identité de la personne recevant le versement et celle qui dispose de la ressource. Le délai proposé pour la mise en œuvre de ces dispositions permettra aux services des ressources humaines des entreprises et des caisses de sécurité sociale de s’organiser pour prendre en compte cette nouvelle contrainte.

Inspirée du colloque de la délégation aux droits des femmes sur la lutte contre les violences économiques au sein du couple, cette mesure a été saluée à de nombreuses reprises, lors de nos auditions préparatoires, comme un acte fort et nécessaire en matière d’autonomie financière et de sensibilisation des acteurs financiers à ce sujet. Au cours de nos débats, je vous proposerai d’aller plus loin en levant un blocage, identifié par la Banque de France, en matière de droit au compte dans les situations de violences conjugales.

L’article 3 apporte de nouvelles solutions aux bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE), dont l’écrasante majorité – 95 % – est constituée de femmes. À cet égard, la réforme de 2014 visant à encourager le partage du congé parental entre les deux parents semble avoir manqué son but. La plupart de ces femmes sont en emploi précaire ou peu qualifié, comme en témoigne la surreprésentation des employées et des ouvrières parmi les bénéficiaires ; d’autres sont sans activité ou au chômage avant la naissance de leur enfant. Ce public doit appeler toute notre attention, le taux de chômage des mères de jeunes enfants ayant augmenté de 40 % entre 2014 et 2018. L’objet de l’article 3 est de faire progresser l’offre de formation proposée aux bénéficiaires de la PreParE à l’expiration de leurs droits. Il s’agit du chemin le plus sûr pour celles qui souhaitent retrouver un emploi. Je présenterai un amendement permettant d’inclure dans ce dispositif tous les bénéficiaires de la PreParE, indépendamment du nombre de leurs enfants, pour une durée d’un an avant l’expiration des droits et d’un an après.

En la matière, la coordination et les initiatives locales sont décisives, comme le démontrent notamment des associations telles que Social Builder et les initiatives menées par Mme Sophie Viger à la tête des écoles 42. La caisse d’allocations familiales (CAF) et Pôle emploi devront coopérer, afin de limiter au maximum les démarches déclaratives des femmes, notamment de celles qui souhaitent retrouver le bénéfice de la prestation après une formation n’ayant pas abouti à un retour immédiat à l’emploi.

Dans le même esprit, l’article 4 étend le bénéfice du « berceau social » aux familles monoparentales. Ce dispositif, qui a désormais quinze ans, permet aux crèches et aux structures d’accueil de la petite enfance de réserver des places, par tranches de vingt, aux enfants dont les parents sont engagés dans un parcours d’insertion sociale et professionnelle. Les familles monoparentales, dont je rappelle qu’elles sont composées à 85 % d’une mère célibataire, sont plus exposées que les autres au risque de précarité. Cet article s’inscrit dans la droite ligne des réflexions du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) visant à favoriser l’accès des mères d’enfants en bas âge à des modes de garde leur permettant de poursuivre leur insertion professionnelle. Viser plus spécifiquement les familles monoparentales semble d’autant plus pertinent que 35 % des enfants de ces familles ont leur parent au chômage, contre 9 % de ceux des familles recomposées et 6 % de ceux des familles dites traditionnelles.

L’article 5, comme les articles 6 et 7, relève davantage d’un effort en faveur d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans la société, notamment dans l’économie. Au sein de l’enseignement supérieur, la parité avance, en particulier à l’université, en raison notamment de la « loi Sauvadet » de 2012, relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique. Toutefois, si les jurys de thèse et les instances gouvernantes sont de plus en plus paritaires et s’approchent sensiblement du seuil de 40 % pour chaque sexe, certaines formations demeurent presque aveugles à cette évolution. Tel est notamment le cas des sciences dites dures, comme les mathématiques et plus encore les sciences de l’ingénierie, dont les effectifs peinent à se féminiser, alors même que ces filières sont très rémunératrices et planchent sur les usages et métiers de demain. L’enseignement supérieur et le système éducatif en général doivent se sentir investis d’une responsabilité particulière et se placer au premier rang de la lutte contre les stéréotypes sexués, qui sera d’autant plus efficace qu’elle sera engagée dès le plus jeune âge.

Dans la lignée des lois précédentes, notamment la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche de 2013, l’article 5 vise à soumettre un peu plus de quatre-vingts établissements supplémentaires à une obligation de représentation minimale de 30 % du sexe le moins représenté dans leurs jurys d’admission. Il vise également à encourager les établissements d’enseignement supérieur, universités comprises, à adopter un baromètre de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes, et à prendre le cas échéant des mesures correctrices.

L’orientation professionnelle est très largement subordonnée à l’orientation scolaire et universitaire. Les établissements d’éducation doivent jouer un rôle actif dans le rééquilibrage des différentes filières. Les inégalités professionnelles y trouvent directement leur source. J’irai même plus loin : les efforts demandés en la matière par les dispositions de l’article 7 de la présente proposition de loi ne porteront leurs fruits qu’associés à des politiques éducatives volontaristes.

L’article 6 s’inscrit dans cette même volonté d’objectiver les inégalités économiques et professionnelles qui perdurent entre les femmes et les hommes. Je suis convaincue qu’on ne peut parvenir à l’égalité sans mesurer ni quantifier les écarts de traitement entre les femmes et les hommes, afin de disposer de données tangibles permettant de transcrire le sexisme parfois impalpable qui est ancré dans nos habitudes. Tel est l’objet de l’index de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, introduit par la loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Il a permis de passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultat : désormais, les entreprises d’au moins cinquante salariés doivent publier chaque année leurs notes – sur 100 – en matière d’égalité salariale.

Cet index commence à faire ses preuves, comme en témoigne la progression très nette des notes des entreprises de plus de 1 000 salariés, dont la moyenne est passée de 82,9 en 2019 à 88,3 en 2021. Il est sans nul doute perfectible, comme l’ont démontré nos auditions et de nombreuses publications, mais, trois ans après son introduction, il est trop tôt, me semble-t-il, pour revoir entièrement sa structure, alors même que les plus petites entreprises peinent à se l’approprier, comme l’ont également démontré nos auditions. Il convient d’en stabiliser l’usage. En outre, son évaluation doit être menée par le Parlement très prochainement ; il ne me semble pas opportun de nous mettre en travers du travail de la représentation nationale.

En revanche, je propose, dans le sillage des obligations de transparence imposées aux entreprises bénéficiant du plan de relance, de renforcer les obligations de publication non seulement de chaque indicateur composant l’index précité, mais aussi des objectifs de progression et des mesures de rattrapage que doivent prendre les entreprises pour corriger leur trajectoire. Cet effort de transparence, nécessaire à la négociation collective, permettra de rappeler le caractère dynamique de l’index. Un bon score ne doit pas dispenser de progrès.

Dix ans après l’adoption de la loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance, nous ouvrons, avec l’article 7 de la présente proposition de loi, une nouvelle page dans ce domaine. La France peut s’enorgueillir d’être la championne de l’Union européenne en matière de parité au sein de ces conseils. À l’échelle mondiale, elle se situe, avec une proportion de femmes de 46 %, juste derrière l’Islande. Cette réussite, nous la devons au volontarisme politique sans faille d’une parlementaire que je tiens à saluer très chaleureusement pour son précieux soutien : Marie-Jo Zimmermann.

Catherine MacGregor, Christel Bories, Stéphane Pallez, Marie Cheval, voilà d’autres noms que je souhaite citer devant vous, ou plutôt que j’aimerais ne pas avoir à citer. Catherine MacGregor est la seule femme dirigeante d’une entreprise du CAC 40. Il m’a fallu élargir le spectre de ma recherche aux entreprises du SBF120 pour parvenir à citer trois femmes occupant le poste de présidente-directrice générale (PDG), respectivement d’Eramet, de La Française des Jeux et de Carmila. Nous ne pouvons nous satisfaire de compter les femmes occupant des postes à très forte responsabilité sur les doigts d’une seule main. Je propose donc une disposition ambitieuse consistant à fixer aux entreprises de plus de 1 000 salariés des objectifs chiffrés de juste représentation de chaque sexe au sein de leurs instances dirigeantes, selon un tempo réaliste : 30 % de femmes d’ici à cinq ans et 40 % d’ici à huit ans me semble un bon rythme pour insuffler une dynamique paritaire au sein de ces entreprises.

Pour y parvenir, nous devons mettre au point un dispositif clair dans son objectif, simple dans son application et juste dans son déploiement. Nous devons aussi veiller, comme nous y a appelés Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), devant la délégation aux droits des femmes, à la granularité du dispositif, en descendant de façon fine dans l’organisation de l’entreprise pour éviter qu’une femme ne cache cent hommes.

Définir un périmètre idoine n’est pas chose aisée. Sur cette question épineuse, nous avons beaucoup consulté pour parvenir à une définition claire et ambitieuse que je vous proposerai lors de la discussion des amendements. De même, la sanction me semble un aspect inévitable à aborder. Bien entendu, il ne s’agit pas de sanctionner les entreprises, mais au contraire de faire de la féminisation de leur gouvernance une source d’opportunités économiques. Malheureusement, pour être opérante, une telle disposition doit être assortie de la possibilité d’une sanction. Nous ne manquerons pas d’y revenir lors de nos débats.

À la fois injustice et aberration économique, le partage du pouvoir économique doit être réinventé de façon active au sein des entreprises. La mixité de la gouvernance économique, donc des instances dirigeantes des entreprises, est non seulement un enjeu d’égalité professionnelle et de justice sociale, mais aussi un fort levier de performance et de croissance pour les entreprises. De nombreuses études abondent en ce sens. Citons notamment celle de McKinsey démontrant que les entreprises comptant le plus de femmes dans leurs instances de direction affichent un écart positif de rendement de capitaux propres de 47 %. Également, les travaux de Michel Ferrary, menés dans le cadre de l’observatoire SKEMA de la féminisation des entreprises, produisent chaque année des données allant en ce sens.

Le soutien dont a bénéficié d’emblée l’article 7 de la part de grands dirigeants tels que Gérald Karsenti, PDG de SAP France, Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF, et Hélène Bernicot, directrice générale du Crédit mutuel Arkéa, doit nous conforter dans notre ambition politique. L’objectif, je crois, est collectivement partagé : allons-y !

L’article 8 vise les femmes de notre pays qui ont la volonté d’entreprendre, dont la démarche est trop souvent découragée. Les femmes ont, autant que les hommes, la volonté de créer, d’innover et d’inventer les emplois de demain, mais, à la différence de ces derniers, elles peinent à trouver des financements pour faire naître et grandir leur projet. Seules 4 % des start-up financées en 2020 ont été fondées par une ou plusieurs femmes ; 17 % d’entre elles l’ont été par une équipe mixte. Cela signifie que 79 % des start-up financées en 2020 ont été fondées par une équipe totalement masculine. Doit-on y voir la persistance de stéréotypes de genre dans l’écosystème du financement de l’innovation ?

Ce que je sais, c’est que la recherche de financements ne doit plus être une course d’obstacles sans fin pour les femmes. Je propose donc, par le biais de l’article 8, de faire de Bpifrance le moteur de l’entrepreneuriat des femmes. Le soutenir fait d’ores et déjà partie intégrante de ses missions, mais les résultats, disons-le, ne sont pas là. En tant que bras armé de l’État comme financeur de l’économie, Bpifrance a un devoir d’exemplarité en la matière. Parce que Bpifrance est un acteur central de l’écosystème français du capital investissement, il y a toutes les raisons d’espérer que sa capacité d’impulsion rayonnera sur toute la place financière.

Je reprendrai à mon compte le mantra du collectif Sista, qui œuvre à la réduction des inégalités de financement entre les femmes et les hommes entrepreneurs : il faut compter les femmes pour que les femmes comptent. Tel est l’objet de l’article 8 : compter les femmes présentes dans les comités d’investissement qui sélectionnent et financent les projets, d’une part, et compter les femmes bénéficiaires des actions de Bpifrance, d’autre part. Il ne s’agit pas de déstabiliser tout un écosystème en imposant des obligations hors d’atteinte, mais de fixer des objectifs chiffrés de bonne gouvernance, tout à fait réalisables en quelques années, et surtout collectivement demandés par les acteurs eux-mêmes, par le biais de la signature de deux chartes, en 2019 et en 2020.

Mes chers collègues, c’est avec un grand enthousiasme que j’aborde nos débats. Je me réjouis du travail d’emblée transpartisan mené sur ce texte, qui reflète, je le crois, la volonté sincère de la représentation nationale d’avancer sur ce sujet. L’effectivité des droits des femmes requiert des politiques volontaristes, qui constituent autant d’opportunités pour les individus, pour les entreprises et pour notre société, ce dont je vous crois convaincus.

Mme Monique Limon. Je tiens à saluer notre collègue Marie-Pierre Rixain pour ses travaux, ainsi que pour les nombreuses et passionnantes auditions que nous avons menées.

Dès 2017, le Président de la République a pris la responsabilité de faire de l’égalité entre les femmes et les hommes la grande cause du quinquennat. Réitéré en 2019, dans le cadre du G7 de Biarritz, cet engagement a été tenu à travers l’organisation d’un Grenelle des violences conjugales, la création d’un service d’intermédiation financière pour le recouvrement des pensions alimentaires, l’augmentation du complément de mode de garde en soutien aux mères isolées et la création d’une politique publique contre le harcèlement de rue.

La place des femmes dans l’entreprise est un sujet crucial. Plus de dix ans après l’adoption de la loi Copé-Zimmermann, et en dépit d’avancées notables récentes telles que l’allongement à venir du congé paternité qui constitue un jalon décisif vers une parentalité équilibrée, nous sommes amenés à nous interroger sur l’émancipation économique et professionnelle des femmes. Les inégalités économiques de genre perdurent et frappent les femmes dans leur quotidien. Notre ambition est donc de lever les obstacles de parité en agissant sur plusieurs leviers dans les domaines de l’enseignement supérieur, de la gouvernance économique et du financement de l’entrepreneuriat féminin.

Le texte fixe des quotas de femmes au sein des instances dirigeantes des grandes entreprises, renforce l’index de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, en crée d’autres pour de nouvelles structures dont on sait qu’elles sont fondamentales pour le parcours des femmes, impose des quotas dans les jurys universitaires et fixe des objectifs aux structures de financement. Par ailleurs, elle vise à faciliter les modes de garde pour les familles monoparentales, majoritairement composées de femmes, et pour les parents en parcours d’insertion professionnelle ou sociale.

Cette proposition de loi du groupe La République en Marche constitue incontestablement un grand progrès des politiques publiques en faveur d’une meilleure égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Je ne doute pas que les débats que nous aurons permettront de compléter ses belles dispositions.

M. Stéphane Viry. Madame la rapporteure, votre texte aurait sans doute pu faire l’objet d’un consensus encore meilleur en amont, sur la base des travaux de la mission d’information sur l’égalité économique et professionnelle. À défaut, nous avons un texte qui fait un pas complémentaire, par le biais de mesures techniques permettant de mener la conquête et le combat que vous avez rappelés.

Cette conquête et ce combat sont menés par tous les partis politiques. Je ne reviendrai pas sur les lois adoptées par la droite en 2006, en 2008, en 2010 et en 2011. Vous avez eu l’élégance et la sincérité, je le sais, d’évoquer la loi Copé‑Zimmermann, qui permet à la France de figurer en tête s’agissant de la place des femmes dans les conseils d’administration des grandes entreprises. Et il y a eu bien d’autres choses. De toute évidence, il fallait faire un pas au cours de ce quinquennat. Ne pas le faire aurait été, à mes yeux, une faute politique de la majorité.

La présente proposition de loi prévoit des mesures techniques complémentaires. Il ne s’agit pas d’un texte global sur l’égalité entre les femmes et les hommes, mais d’un texte visant à accélérer la formulation de réponses en matière d’égalité économique et professionnelle. Comment peut-on admettre qu’à travail identique les salaires ne soient pas identiques ? Comment peut-on admettre qu’à responsabilité professionnelle identique la considération et l’influence ne soient pas identiques ?

Plusieurs articles du texte permettent d’apporter une réponse. Nous aurons l’occasion d’en débattre dans le cadre de nos travaux. Je me contenterai de relever que vous allez dans la bonne direction en offrant davantage d’aide aux familles monoparentales en matière de modes de garde d’enfant. Vous apportez également des réponses pour rééquilibrer les filières d’enseignement et lutter contre les biais de genre. J’y vois le fruit du travail que j’ai mené avec notre collègue Nathalie Elimas dans le cadre de la mission d’information sur l’adaptation de la politique familiale française aux défis de la société du XXIe siècle. J’y vois également un complément bienvenu à la loi Copé-Zimmermann.

L’article 7, qui vise à améliorer la transparence de l’index de l’égalité professionnelle, demeure pour nous un point de vigilance. Il ne faut pas que nos entreprises y perdent en compétitivité, ni que cette dernière soit amoindrie par la bureaucratie.

Quoi qu’il en soit, ce texte place ces sujets au cœur de nos débats, ce dont je vous remercie.

Mme Perrine Goulet. Cette proposition de loi de la majorité parlementaire est un marqueur de notre volonté politique, ainsi que du travail actif et proactif de la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

La crise sanitaire, plus précisément le confinement, a révélé l’extrême fragilité de la condition des femmes, au premier rang desquelles les « premières de corvée » – infirmières, caissières, agricultrices – et les mères en télétravail. Ces situations et cette expérience que notre nation a vécues doivent nous amener à faire évoluer le droit pour garantir la place des femmes dans notre société.

Votre proposition de loi prévoit plusieurs dispositions susceptibles de contribuer à faire avancer cette cause humaniste. Citons notamment celles visant à compléter certaines dispositions de la loi Copé-Zimmermann, afin d’améliorer l’accès des femmes aux conseils d’administration. Si le volontarisme des sociétés varie, on constate que leur volonté est majoritaire, et qu’elles affichent leurs réalisations ou leurs ambitions. Il s’agit à présent d’aller plus loin, en renforçant l’incitation des entreprises, dont je répète qu’elles sont en majorité convaincues et volontaristes pour mettre en œuvre la féminisation des postes à responsabilité. Un défi de taille demeure : aller au-delà des fonctions, vers le cœur des métiers des entreprises.

Comme vous l’avez rappelé dans le cadre des auditions, vous abordez ce texte avec humilité. Il ne pourra pas résoudre toutes les difficultés rencontrées par les femmes dans leur vie sociale et professionnelle. Il s’agit d’un pas de plus sur une route que nous devons inlassablement continuer d’arpenter.

Je formule un regret : l’amendement, déposé par notre groupe, visant à rendre obligatoire l’entretien professionnel à l’issue du congé parental pris dans le cadre de la PreParE a été déclaré irrecevable. Ses dispositions auraient pourtant été bienvenues.

Notre groupe aura à cœur de défendre des amendements et des sous-amendements visant globalement deux objectifs : contribuer à briser les stéréotypes de genre le plus tôt possible et proposer une gradation pour les entreprises concernées par les mesures prévues. Nous abordons les débats avec confiance.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Le 25 novembre 2017, Emmanuel Macron a déclaré l’égalité entre les femmes et les hommes grande cause nationale du quinquennat. Le 3 décembre 2019, Bruno Le Maire et Marlène Schiappa ont lancé une grande consultation publique intitulée « Agir ensemble pour l’égalité femmes-hommes dans l’économie », qui devait aboutir en 2020 à un projet de loi traduisant cet objectif.

La crise sanitaire, ainsi que le choix de prioriser d’autres réformes législatives en cette fin de législature, auront eu raison de cette ambition. Cet état de fait est d’autant plus regrettable que la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, qui aborde de nombreux domaines de la vie économique, n’a pas permis d’avancer sur ces questions, en dépit des nombreuses propositions que nous avons formulées lors de son examen, et s’en est tenue au renforcement des obligations de représentation dans les organes paritaires et à la création du statut du conjoint du chef d’entreprise.

Madame la rapporteure, ce n’est pas à vous que cette critique s’adresse. Je connais votre engagement sur ces questions. La présente proposition de loi, dont vous êtes la première signataire, en témoigne. Nous regrettons simplement que cette grande cause du quinquennat n’ait pas été défendue directement par le Gouvernement, plus tôt et plus largement.

Sur la proposition de loi elle-même, notre groupe se positionne plutôt favorablement, compte tenu des dispositions proposées. Il s’efforcera d’en rehausser l’ambition et surtout d’en accélérer le calendrier de mise en œuvre.

À cet égard, nous proposerons notamment un renforcement des dispositions de l’article 7, qui prévoit d’imposer aux entreprises de plus de 1 000 salariés la publication annuelle d’une photographie genrée des 10 % de postes aux responsabilités les plus élevées et d’atteindre une proportion minimale de représentation de chaque sexe parmi ces postes, de 30 % en cinq ans et de 40 % en huit ans. Nous proposerons une accélération de ce calendrier, ainsi que la suppression de la dérogation permettant de prolonger de deux ans le délai imposé aux entreprises, qui s’ajoute au délai d’entrée en vigueur de la proposition de loi. Nous proposerons aussi de relever à 40 %, puis à la parité, les objectifs de la représentation de chaque sexe dans le calendrier proposé. Enfin, nous proposerons d’instaurer une pénalité financière accrue incluant un plancher, afin de garantir une mise en œuvre effective de cette obligation.

Mme Annie Chapelier. Rien, en ce monde, n’est parfait ni exhaustif. Je ne retiendrai donc de la présente proposition de loi que ce qu’elle apporte de positif et de bon.

Notre groupe se réjouit réellement et sincèrement de son examen. Elle a été cosignée par tous les membres de la majorité. Madame la rapporteure, je tiens à vous remercier d’avoir adopté une approche collaborative tout au long de la rédaction du texte, et d’avoir réussi à en amener l’examen en commission dans les conditions que nous connaissons.

Nos discussions, j’en suis certaine, auront un seul et même objectif : améliorer la place et la reconnaissance due aux femmes de notre pays. Nous savons que la présente proposition de loi s’insère dans un calendrier parlementaire restreint et dans un contexte national difficile.

Non sans en mesurer les conséquences, je souhaite rappeler un autre contexte, qui n’aura échappé à personne : le contexte international. Les droits des femmes régressent partout dans le monde, y compris en Europe, où aucun pays n’a atteint l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, où l’on estime que la crise du covid-19 en a fait reculer l’avènement de trente-six ans, de sorte qu’elle ne devrait pas être réalisée avant la fin du siècle prochain, et où, tout au long de cette crise, la place et la parole des femmes, dont le rôle est pourtant essentiel, ont été minimisées, voire ignorées.

L’examen de la présente proposition de loi arrive vraiment au bon moment. Dans ce contexte, les femmes qui, une fois de plus, ont démontré leur force et leur résilience pour tenir depuis un an et demi, ont été sollicitées à l’excès. Elles ont été au front, et y sont toujours, pour lutter contre la pandémie à l’hôpital, notamment auprès des plus fragiles. En cette journée du 5 mai, nous célébrons la Journée internationale des sages-femmes, profession on ne peut plus féminine qui correspond à tout ce que ce texte permettra d’amener.

J’espère que ce travail sera enrichi, au fil de nos débats, par des articles additionnels et des amendements permettant d’étoffer le cadre que vous nous offrez. Ce combat est continu. Mené sans violence, il vise à créer un monde meilleur pour tous, où l’égalité, qui est l’une des trois valeurs essentielles de notre République, je l’espère – j’en suis même certaine –, un peu plus réelle. Pour tout cela, je vous remercie.

Mme Valérie Six. Je tiens à remercier Marie-Pierre Rixain de la qualité de son travail. Les auditions étaient très instructives et riches en messages d’espoir.

En 1791, Olympe de Gouges proclamait : « La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits ». Nous avons encore du chemin à parcourir pour atteindre l’égalité entre les hommes et les femmes. En dépit de droits égaux et de l’accès des femmes au marché du travail, l’inégalité entre les femmes et les hommes augmente. Les femmes réussissent mieux à l’école que les hommes, font plus d’études qu’eux ; pourtant, ce sont les hommes qui occupent les postes de responsabilité les plus élevés.

L’article 7 de la proposition de loi tend à améliorer la représentativité dans les entreprises, ce dont je me réjouis. Les femmes occupent les métiers les moins rémunérés, souvent dans le secteur social et l’aide à domicile. En moyenne, les femmes gagnent 42 % de moins que leurs conjoints. Nous constatons que les stéréotypes de genre persistent, notamment dans le choix des carrières professionnelles. Ainsi, les métiers du numérique et de l’informatique attirent peu de femmes ; or ce sont les métiers de demain.

Nous devons agir. Je proposerai des amendements visant à favoriser la mixité des filières. Dans d’autres filières, au contraire, telles que l’accueil de la petite enfance et le secteur paramédical, il y a très peu d’hommes. Si nous revalorisons les métiers occupés par les femmes, les hommes seront davantage attirés par eux. Par ailleurs, je partage la volonté du texte de s’attaquer à la mixité des jurys d’admission dans les établissements supérieurs.

S’agissant de la gestion de la vie de famille et de la vie professionnelle, les mères ont davantage recours au congé parental, à l’issue duquel elles ont davantage de difficultés à trouver un emploi. La garde de l’enfant constitue un frein à leur recherche d’emploi. Je regrette que mes amendements relatifs aux places en crèche aient été considérés comme des cavaliers législatifs. À mes yeux, le nombre de places en crèche et la vie professionnelle sont liés.

Enfin, je salue l’esprit du texte, qui tend à accroître la mixité en milieu professionnel. J’espère que nos débats permettront de l’enrichir.

Mme Martine Wonner. L’égalité des droits entre les femmes et les hommes est un combat permanent. Nos efforts ne doivent pas faiblir, notamment dans un contexte de crise sanitaire et économique.

Sur les plans économique et professionnel, les inégalités sont encore très marquées. Si la loi Copé-Zimmermann a été un succès à l’échelon des conseils d’administration, le ruissellement attendu des instances de gouvernance vers les instances de direction ne s’est pas véritablement produit. Le plafond de verre existe toujours. Par ailleurs, la sous-représentation des femmes aux postes de direction ne doit pas faire oublier leur surreprésentation dans les emplois précaires.

Face à de telles inégalités, la présente proposition de loi demeure modeste. Impossible de s’attaquer au partage inégal de la richesse et du pouvoir sans s’attaquer aux représentations de genre ! Toutefois, nous souscrivons aux objectifs du texte, qui vise à améliorer l’accès des femmes à l’emploi, à la formation, à l’enseignement supérieur, à l’investissement et au pouvoir économique. Des difficultés d’application sont d’ores et déjà à prévoir ; elles appellent la mise en œuvre simultanée de politiques publiques ambitieuses. Comment réserver des places de crèches pour les familles monoparentales sans mener une véritable politique d’ouverture de places sur tout le territoire ?

S’agissant de l’enseignement supérieur, le texte traite surtout de l’étape de l’admission par le biais des jurys. Or nous savons que les inégalités se dessinent bien en amont. L’amélioration de la coopération entre l’enseignement scolaire et l’enseignement supérieur nous semble nécessaire.

Par ailleurs, nous nourrissons des doutes sur la définition des quotas de femmes dans les postes à haute responsabilité. Mme la rapporteure a déposé des amendements visant à la modifier ; nous y reviendrons. Cet aspect du texte est primordial. Sans définition adéquate, la mesure prévue sera inégalement appliquée. Enfin, la question du périmètre des entreprises concernées doit être abordée pour définir un objectif à la fois ambitieux et réaliste.

Mme Bénédicte Taurine. Madame Rixain, nous sommes d’accord pour déplorer le constat suivant : il n’existe toujours pas d’égalité économique entre les femmes et les hommes.

Malheureusement, l’index Pénicaud n’est pas en capacité de combler ces lacunes. Nous nous attendions à ce que cette proposition de loi y remédie, mais, de notre point de vue, elle ne va pas suffisamment loin. Par exemple, les entreprises pourront continuer à augmenter de 1 euro les salariées femmes en cours de carrière ou à leur retour de congé maladie, et bénéficier ainsi de la note maximale pour ces deux indicateurs. Quant à celui évaluant l’égalité salariale, il ne tient pas compte des emplois à temps partiel. Il passe donc littéralement à côté des grandes vulnérabilités des femmes dans le monde économique. Malheureusement, la présente proposition de loi, en l’état, n’y change pas grand-chose.

S’agissant du nombre de places en crèche, l’extension proposée se limite aux bénéficiaires de l’allocation de soutien familial. Moins d’un quart des parents isolés – lesquels sont à 85 % des femmes – en bénéficieront donc. Près de quatre familles monoparentales sur dix vivent sous le seuil de pauvreté. Par ailleurs, près d’une mère célibataire sur deux ne travaille pas à temps complet. Ce sont ces mères isolées qu’il aurait fallu cibler prioritairement.

Enfin, une fois de plus, les mesures ne viendront pas contrarier les grands chefs d’entreprise, puisque les quotas de femmes parmi les cadres ne concernent toujours pas les postes les plus stratégiques. Or ce n’est pas l’accès aux postes de cadres intermédiaires ou supérieurs qui pose problème, mais celui aux plus hauts postes. S’ils étaient inquiets, les hommes peuvent se rassurer : leur prédominance dans ces postes, en l’état actuel des choses, ne sera toujours pas bousculée.

M. Pierre Dharréville. Les inégalités dans le monde du travail demeurent criantes : une femme gagne en moyenne 25 % de moins qu’un homme ; à contrat, diplômes, expérience et responsabilités égaux, une femme gagne en moyenne 10 % de moins qu’un homme ; 82 % des salariés à temps partiel et les deux tiers des travailleurs pauvres sont des femmes.

Ces dernières années, pas moins de huit lois spécifiques ont été votées. La législation n’en demeure pas moins faible à l’égard des employeurs, car elle n’ose pas remettre en cause le libéralisme et son fondement inégalitaire. Si l’ouverture de négociations en matière d’égalité professionnelle est obligatoire dans les entreprises, sous peine de sanctions, il n’y a d’obligation ni de conclure un accord ni d’obtenir des résultats.

Le combat en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes doit être mené avec davantage de volonté politique. Hélas, cette proposition de loi, si elle traduit de bonnes intentions, n’élargit pas véritablement la palette. Nous soutiendrons malgré tout l’essentiel de ses dispositions, et je salue l’engagement de notre rapporteure dans cette cause. Il n’en demeure pas moins qu’aucune contrainte nouvelle n’est réellement imposée aux entreprises : la seule obligation concerne l’information.

La crise a révélé, si tant est qu’il en soit besoin, que nombre de métiers peu reconnus étaient massivement exercés par des femmes. Il s’agit souvent des métiers de première nécessité, à forte dimension sociale, qui sont aussi les plus précaires en termes de conditions de travail et de rémunération : santé, médico-social, grande distribution, propreté, aide à domicile et enseignement. Notre société reconnaît bien mal les métiers, les qualifications et le travail, et encore moins quand il s’agit des femmes. Agir pour l’égalité professionnelle implique donc la revalorisation de toutes ces professions.

L’État doit donner l’exemple, envoyer une impulsion. Il faut encadrer le recours au temps partiel, qui reste le premier facteur des inégalités salariales et la forme de sous-emploi la plus courante – et il continue à augmenter. Certaines entreprises en ont fait un mode ordinaire de gestion. Le temps partiel subi concerne 32 % des femmes à temps partiel et près de 10 % des travailleuses. Il faudrait également en finir avec la baisse des moyens alloués à l’inspection du travail.

M. Bernard Perrut. Vouloir accélérer l’égalité économique et professionnelle est bien évidemment essentiel, et je partage totalement votre engagement dans la cause des femmes, madame la rapporteure.

Vous avez évoqué la loi Copé-Zimmermann, que nous sommes un certain nombre ici à avoir votée en 2011. Elle imposait la reconnaissance des femmes – je n’aime pas, pour ma part, parler de « quotas ». Ce texte a largement contribué à augmenter la part des femmes dans les conseils de surveillance et les conseils d’administration, mais n’a pas eu beaucoup d’autres effets ; on peut le regretter.

Les lois successives ont posé un certain nombre de principes : à travail égal, salaire égal ; non-discrimination à l’embauche ; droits maternité ; volonté de faire en sorte que les femmes accèdent aux postes de direction. Au-delà de celui de la performance, qui a souvent été avancé, le principal argument en faveur de la mixité dans les instances dirigeantes tient à l’égalité et à la justice dans une démocratie moderne. C’est la raison pour laquelle nous partageons tous l’objectif de cette proposition de loi.

Toutefois, j’ai quelques interrogations. Vous préconisez un pourcentage obligatoire de femmes aux postes à responsabilité dans les entreprises. Dix ans après la loi Copé-Zimmermann, faut-il encore des quotas pour briser le plafond de verre ? Comment dépasser cet outil qui a eu certains effets pervers ? Comment faire dans certaines entreprises spécifiques, notamment celles du bâtiment et des travaux publics (BTP), où les quotas ne sont pas adaptés ?

Depuis la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, les entreprises ont l’obligation de publier un index sur l’égalité femmes-hommes, avec un certain nombre de critères. Quel bilan tirez-vous de cette initiative ? L’égalité progresse-t-elle grâce au dispositif ? De manière générale, je ne suis pas favorable à ce que l’on impose des sanctions financières aux entreprises qui, en dépit de leurs efforts, n’atteignent pas leurs objectifs en la matière. Comment adapter les dispositifs d’index ? Que proposez-vous aux différentes entreprises selon leur taille ? Comment les encourager à tendre vers de meilleures notes ?

Enfin, il n’existe pas, à ma connaissance, de définition claire, en droit, de ce que sont les « instances dirigeantes ». Êtes-vous favorable à ce que les entreprises puissent définir elles-mêmes les postes à plus forte responsabilité, ou tendez-vous vers une clarification législative de la notion d’instances dirigeantes, comme certains le demandent ?

Mme Isabelle Valentin. Les femmes réussissent plus dans leurs études. Pourtant, dans leur vie professionnelle, elles sont souvent moins bien rémunérées – en moyenne, à diplômes et responsabilités égales, leur salaire est inférieur de 10 % à celui des hommes. Les inégalités sont très marquées dans le milieu économique et professionnel.

De nombreuses femmes créent leur entreprise. La proposition de loi contient plusieurs dispositions visant à régler un certain nombre de problèmes auxquels elles sont confrontées, qui font que leur vie économique apparaît dégradée par rapport à celle des hommes.

Lutter efficacement contre les inégalités économiques et professionnelles suppose avant tout de déconstruire dès le plus jeune âge certains stéréotypes. N’est-ce pas là la première mesure à engager, notamment dans les écoles et les établissements du secondaire ?

Mme Josiane Corneloup. L’égalité entre les hommes et les femmes est un combat permanent, et nous sommes encore éloignés du but. La proposition de loi vise à accélérer l’égalité économique et professionnelle entre les hommes et les femmes. Je partage pleinement cet objectif. Toutefois, plus de dix ans après la loi Copé-Zimmermann, qui visait à rééquilibrer la proportion d’hommes et de femmes dans les conseils d’administration, il est compliqué de faire un copier-coller de cette loi dans les entreprises. À la différence des conseils d’administration, les instances de direction des sociétés ne sont pas régulièrement renouvelables, ce qui rend inapplicable ce système de quotas. Il paraît donc difficile de procéder de manière aussi brutale s’agissant des comités exécutifs (COMEX) qu’on l’a fait pour les conseils d’administration.

Ne vaudrait-il pas mieux proposer un plan, avec un calendrier et un suivi, de manière à atteindre, à terme, l’égalité ? Ne pensez-vous pas également que, pour aller vers l’égalité entre les hommes et les femmes en entreprise, il convient d’abord d’agir sur les processus structurants en matière de ressources humaines pour faire évoluer les choses – révision des contrats de travail, promotion de la parentalité auprès des hommes, ou encore obligation pour les recruteurs de proposer des profils féminins ?

Mme la rapporteure. S’agissant des inégalités économiques touchant les familles monoparentales, la mise en place de l’Agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires, notamment, permettra d’y remédier. Avec l’allongement du congé de paternité, dont une partie sera obligatoire, les hommes prendront leur juste part de la charge parentale.

L’article 5 est directement issu des travaux que nos collègues Viry et Calvez ont menés avec brio ; ils ont éclairé la délégation aux droits des femmes sur ces différentes questions. Je les en remercie.

Les agricultrices ne sont pas oubliées : l’article 2, en particulier, leur est directement destiné. Par ailleurs, la réforme du congé de maternité les satisfait. Elle leur a permis d’avoir des droits équivalents à ceux des salariées et des indépendantes.

Je salue également le travail de Marie-Noëlle Battistel au sein de la délégation aux droits des femmes. La mise en œuvre d’un certain nombre de ces dispositions, notamment celles qui concernent les universités, suppose des adaptations. Il faudra donc prévoir des délais d’application raisonnables.

La mixité des jurys, que nous appelons de nos vœux, permettra de lutter contre les représentations de genre, qui sont un élément déterminant.

Je salue également le travail actif de Bénédicte Taurine au sein de la délégation aux droits des femmes. En ce qui concerne les places en crèche, les personnes éligibles à l’allocation de soutien familial sont parmi les plus précaires. Nous n’oublions donc pas les personnes les plus en difficulté. Nous voulons faire en sorte de lutter pleinement contre les inégalités économiques qu’elles subissent.

Nous avons porté une attention particulière, notamment dans le cadre des auditions, aux difficultés que pourraient rencontrer les entreprises pour mettre en place les dispositifs que nous proposons. Le délai prévu me paraît raisonnable. La proposition de loi tient également compte de la situation de départ des entreprises et de leur capacité à rattraper leur retard.

Il est absolument déterminant de dire aux jeunes femmes de notre pays qu’elles ont pleinement leur place dans les fonctions de direction d’entreprises, y compris dans le BTP. Les jeunes femmes brillantes, étudiant dans de grandes écoles susceptibles de les conduire à de hautes responsabilités dans ces entreprises sont nombreuses. Elles sont même un facteur de croissance et de bénéfices supplémentaires.

Il me paraît indispensable de fixer des objectifs chiffrés : nous avons vu que cette méthode portait ses fruits, grâce au travail de Marie-Jo Zimmermann, qui reste très attentive à l’application de la loi portant son nom. Les comités directeurs et les COMEX comptent seulement 18 % de femmes : il est temps de franchir une étape supplémentaire.

II.   Examen des articles

La commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Versement du salaire sur un compte dont le bénéficiaire est le titulaire

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l’amendement rédactionnel AS72 de Mme Annie Chapelier.

Puis elle en vient à l’amendement AS184 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Il nous paraît important de préciser que le salaire ne peut être versé que sur un compte joint dont le bénéficiaire a la jouissance sans que le contreseing du cotitulaire soit nécessaire.

Mme la rapporteure. Avis défavorable.

Si cet amendement procède d’une bonne intention et s’inscrit dans la logique de l’article 1er de faire en sorte que les revenus d’une personne soient versés sur un compte bancaire dont elle peut se déclarer titulaire, le dispositif proposé entre dans un degré de détail qui risquerait de rendre la mesure ineffective. Les employeurs devront déjà s’assurer de l’identité entre le titulaire du compte bancaire – dans la grande majorité des cas par le biais d’un relevé d’identité bancaire – et la personne qui détient le droit à la rémunération. Ajouter à cette obligation formelle importante une vérification du fonctionnement du compte joint ajouterait une charge qui me semble déraisonnable. Du reste, les comptes joints permettent à chaque cotitulaire de faire fonctionner le compte – en déposant ou en retirant de l’argent ou en faisant un chèque, par exemple – avec sa seule signature.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS6 de M. Grégory Labille.

Mme Valérie Six. L’objectif de lutte contre la tutelle implicite qu’exercerait une autre personne à travers la possession du compte bancaire pourrait se trouver contrecarré par la durée de deux ans prévue avant l’entrée en vigueur du dispositif. En effet, une personne utilisant abusivement le compte bancaire d’une autre pourrait, à la suite de l’annonce du vote de cette proposition de loi, lui intimer de créer un compte bancaire. La tutelle implicite perdurerait alors. En imposant une durée minimale de deux années de possession du compte, on réduirait ce risque.

Mme la rapporteure. Cet amendement m’étonne quelque peu, car il conduirait à diminuer le nombre de personnes susceptibles de bénéficier de la mesure visée, que je crois protectrice. Je ne vois pas à quel titre une personne qui ouvrirait prochainement un compte ne pourrait pas en bénéficier. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement AS64 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. L’article 1er prévoit l’obligation de verser le salaire sur un compte bancaire ou postal dont le salarié est le détenteur ou le codétenteur. Il n’apparaît pas nécessaire de fixer un délai de deux ans après la promulgation de la loi pour son entrée en vigueur.

Mme la rapporteure. Je partage le sentiment qu’il est urgent de lutter contre les violences économiques, comme cela a été rappelé lors du colloque organisé par la délégation aux droits des femmes, qui justifie d’ailleurs les deux premiers articles de la proposition de loi. Toutefois, il faut accorder un délai aux entreprises pour qu’elles s’adaptent à cette nouvelle obligation. Je privilégierai donc la diminution du délai à un an, dont nous allons discuter dans un instant. Cela me paraît constituer un meilleur équilibre. Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie, en discussion commune, de l’amendement AS243 de M. Stéphane Viry ainsi que des amendements identiques AS185 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS242 de M. Stéphane Viry et AS253 de Mme Annie Chapelier.

M. Stéphane Viry. Un délai de deux ans me paraît, effectivement, un peu trop long. J’ai noté, madame la rapporteure, que vous acceptiez de le réduire. L’amendement AS243 vise à le fixer à dix-huit mois, l’amendement AS242 à un an. Il s’agit de faire en sorte que cette mesure utile soit efficace dès que possible.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Mon amendement vise, lui aussi, à accélérer l’entrée en vigueur de l’article 1er en fixant le délai à un an après la publication de la loi. Nous considérons que la mesure n’implique pas d’adaptations complexes pour les bénéficiaires comme pour les organismes bancaires.

Mme la rapporteure. Avis favorable aux amendements identiques. Il me semble en effet qu’une durée d’un an constitue un bon équilibre entre la nécessité de faciliter la mise en œuvre rapide de la mesure et celle d’accorder un délai aux entreprises pour leur permettre de s’adapter.

L’amendement AS243 est retiré.

La commission adopte les amendements identiques.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 1er bis (nouveau) : Amélioration du droit au compte pour les victimes de violences conjugales

La commission est saisie des amendements identiques AS232 de la rapporteure et AS328 de Mme Monique Limon.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’apporter un élément complémentaire pour favoriser l’autonomie financière des femmes, notamment celles qui pourraient être victimes de violences économiques, psychologiques ou physiques.

Les échanges avec la Banque de France ont fait apparaître une faille dans la mise en œuvre du droit au compte, qui permet à toute personne physique résidant sur le territoire de disposer d’un compte bancaire. Après intervention de la Banque de France, un établissement de crédit est tenu, sans pouvoir s’y opposer, d’ouvrir un compte de dépôt dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l’ensemble des pièces nécessaires. Cette disposition du code monétaire et financier, qui permet de lutter contre l’exclusion bancaire, est conditionnée au fait de ne disposer d’aucun compte de dépôt, sans qu’il soit précisé, pour les personnes physiques, s’il s’agit d’un compte personnel ou d’un compte joint. Ainsi, de nombreuses femmes victimes de violences, sous prétexte qu’elles ont déjà un compte joint, ne peuvent bénéficier de cette procédure et se voient dans l’impossibilité d’individualiser leur compte et la gestion de leurs ressources.

Cet amendement a donc pour objet de ne pas opposer au droit au compte le fait d’être titulaire d’un compte collectif. Cela permettra notamment aux victimes de violences conjugales de disposer de leurs revenus sur un compte autonome.

Mme Monique Limon. Au regard de l’importance du sujet, le groupe La République en Marche a souhaité déposer un amendement identique à celui de Mme la rapporteure. Il s’agit d’affirmer le caractère individuel du droit à détenir un compte de dépôt, afin de garantir à chaque personne une pleine autonomie dans la gestion de ses ressources.

La commission adopte les amendements.

Article 2 : Versement des prestations sociales sur un compte dont le bénéficiaire est le titulaire

La commission étudie l’amendement AS351 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’amendement vise à intégrer dans le dispositif les indemnités et prestations liées à l’arrêt de travail en raison d’une maladie ou d’un accident de travail, à l’accompagnement d’une personne en fin de vie ou encore à l’indemnisation d’un préjudice en raison d’une exposition aux pesticides pour les salariés du régime général. Ce faisant, nous complétons cet article qui vise à protéger les bénéficiaires de ces prestations contre les violences économiques qu’ils pourraient subir.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS279 de Mme Perrine Goulet.

Mme Perrine Goulet. Il s’agit d’ajouter au dispositif les prestations d’invalidité.

Mme la rapporteure. Il est tout à fait justifié d’intégrer ces prestations dans le champ du dispositif. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS234 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. L’amendement vise également à compléter le dispositif de l’article, en y intégrant les indemnités de retraite et l’allocation de veuvage.

Mme la rapporteure. Je suis tout à fait favorable à cet ajout : il convient effectivement que les personnes retraitées ou veuves puissent être protégées de l’emprise des personnes de leur entourage qui pourraient exercer une pression à leurs dépens.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS295 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. L’amendement a pour but donc d’intégrer les prestations de retraite, de maladie et de retraite complémentaire des indépendants.

Mme la rapporteure. Avis favorable. Cet amendement étend opportunément aux indépendants le bénéfice de la protection de leurs prestations vieillesse et accidents du travail.

La commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS329 de Mme Jacqueline Dubois.

Mme Monique Limon. L’amendement vise à intégrer les indemnités journalières et les pensions de retraite de base et complémentaires des personnes affiliées à la Mutualité sociale agricole (MSA) dans le champ des obligations créées par cet article.

Mme la rapporteure. Il me semble en effet très important de porter les agricultrices – je sais l’attachement que leur porte notre collègue Jacqueline Dubois – au même niveau que les salariées. Les agriculteurs et les agricultrices affiliés à la MSA bénéficieront donc du même régime de versement des prestations sur le compte dont ils sont titulaires que les salariés affiliés à la caisse primaire d’assurance maladie.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AS186 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je crains que cet amendement ne recueille un avis défavorable, car il est parallèle à celui que j’avais déposé à l’article 1er : il s’agit de faire en sorte que le versement des prestations puisse être effectué sur un compte joint à condition que le bénéficiaire ait la jouissance de celui-ci sans le contreseing du cotitulaire.

Mme la rapporteure. J’émettrai, en effet, un avis défavorable sur celui-ci : il conduirait à un degré de technicité préjudiciable à l’effectivité de la mesure.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement AS7 de M. Grégory Labille.

Mme Valérie Six. Je retire l’amendement de mon collègue, ainsi que celui qui suit immédiatement, car il sera satisfait par la fixation d’un délai d’un an.

L’amendement est retiré, de même que l’amendement AS65 de Mme Valérie Six.

La commission est saisie, en discussion commune, des amendement AS245 de M. Stéphane Viry ainsi que des amendements identiques AS244 de M. Stéphane Viry et AS254 de Mme Annie Chapelier.

M. Stéphane Viry. La logique est à la même qu’à l’article 1er : je souhaite raccourcir le délai prévu. L’amendement AS245 vise à le fixer à dix-huit mois, l’amendement AS244 à douze mois. Compte tenu du vote intervenu précédemment, je présume que Mme la rapporteure émettra un avis favorable sur le second.

Mme la rapporteure. Par cohérence avec ce que nous avons voté à l’article 1er, j’émets effectivement un avis favorable sur les amendements identiques, de manière que le dispositif entre en vigueur un an après la publication de la loi.

L’amendement AS245 est retiré.

La commission adopte les amendements identiques.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Avant l’article 3

La commission examine l’amendement AS45 de M. Michel Castellani.

Mme Martine Wonner. La PreParE peut être versée en cas d’interruption totale d’activité ou dans le cadre d’une formation professionnelle non rémunérée. En revanche, si une personne décide de débuter une formation rémunérée, elle perd son allocation. Les auditions ont permis de démontrer que les bénéficiaires n’entamaient pas de démarche pour recourir à une formation professionnelle rémunérée par crainte de perdre leur allocation. L’objectif de l’amendement est donc de remédier à cette situation.

Mme la rapporteure. Votre proposition rejoint l’une des préoccupations exprimées durant les auditions, et dont traite également l’article 3, à savoir la manière de faire en sorte que les bénéficiaires de la PreParE puissent entamer une formation sans que leur droit à la prestation soit interrompu. L’audition de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) nous a rassurés sur ce point : la PreParE est fractionnable. Un parent qui en bénéficie à temps plein et qui s’engage dans une formation d’un mois pourra donc retrouver la prestation au même niveau à l’issue de cette formation. De ce point de vue, votre amendement me semble donc satisfait.

Je pense, en revanche, et c’est l’objet de la nouvelle rédaction de l’article 3 que je m’apprête à vous proposer, qu’il nous faut être attentifs à ce que les démarches déclaratives des parents pour bénéficier à nouveau de la prestation soient aussi limitées que possible. Je vous propose donc de retirer cet amendement : dans les faits, il est déjà satisfait.

L’amendement est retiré.

Article 3 : Accès des bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant à des dispositifs de formation professionnelle

La commission est saisie de l’amendement AS233 de la rapporteure, faisant l’objet du sous-amendement AS356 de Mme Monique Limon.

Mme la rapporteure. Cette réécriture de l’article 3 est largement issue des auditions que nous avons menées en vue de l’examen de cette proposition de loi. Le but demeure exactement le même, à savoir permettre aux parents – principalement des femmes – qui se sont éloignés de l’emploi en raison de leur congé parental, d’avoir le choix de reprendre une activité.

Une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques a démontré, à partir des exemples français, allemand et autrichien, une détérioration rapide des compétences et une plus grande difficulté à retourner vers l’emploi. La réforme de l’allocation parentale d’éducation, en 1994, qui avait pour but de rendre le recours à cette prestation plus aisé, s’est ainsi traduite par une diminution de 100 000 à 150 000 du nombre de mères de deux enfants sur le marché du travail.

La réforme de la PreParE, en 2014, si elle s’est soldée par un échec pour ce qui concerne le partage de la prestation au sein du couple, a tout de même permis un retour plus rapide des femmes sur le marché de l’emploi. À une écrasante majorité, les personnes bénéficiant de la PreParE sont des femmes, surtout peu qualifiées. Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et de la santé, les ouvrières et employées représentent 55 % des mères d’enfants de moins de 3 ans, mais 75 % des bénéficiaires de la PreParE.

L’objectif de cet article est donc de viser en priorité les femmes peu qualifiées, qui sont fortement exposées au risque de désinsertion professionnelle à l’issue de leur congé. Pour ce faire, l’amendement vise à renforcer une convention déjà existante entre la CNAF et Pôle emploi pour étendre le champ des bénéficiaires des formations. Alors que cette convention se concentrait sur les mères de plus de deux enfants dont les droits à la PreParE allaient s’éteindre dans un an, la convention visera cette fois l’ensemble des bénéficiaires, indépendamment du nombre d’enfants. Par ailleurs, la durée d’éligibilité a été fixée à deux ans : un an avant l’expiration des droits à la PreParE et jusqu’à un an après. Il s’agit de faire en sorte que les bénéficiaires n’aient pas à mettre en balance leur prestation et leur formation.

L’ambition du dispositif est également de faire des CAF et de Pôle emploi, à l’échelle locale, les responsables de la réussite de cette convention. Il leur reviendra non seulement d’échanger des informations sur les bénéficiaires de la PreParE, comme ils doivent déjà le faire au titre de la convention existante, mais aussi de s’assurer que les bénéficiaires puissent, en cas d’échec de leur formation, retrouver le bénéfice de la PreParE sans engager de démarches administratives inutiles ou potentiellement décourageantes.

Il s’agit de permettre aux mères d’enfants de moins de 3 ans de bénéficier d’un dispositif plus efficace dans tous les territoires afin de retrouver un emploi si elles le souhaitent. L’objectif est donc de lutter contre une forme d’assignation que subissent encore trop souvent ces femmes.

Je dirai quelques mots, pour finir, des amendements qui tomberaient du fait de l’adoption du mien.

Ceux qui visent à faire démarrer le dispositif avant l’expiration des droits à la PreParE sont satisfaits par la nouvelle rédaction que je propose. Il convient toutefois d’avoir bien en tête les difficultés techniques liées à l’estimation correcte du moment où la PreParE doit expirer, puisque celui-ci varie selon les conditions dans lesquelles la prestation est prise au sein du couple ou encore de la possibilité pour les parents d’enfants qui vont avoir 3 ans de trouver un mode de garde avant l’entrée à l’école de ces derniers. Dans les cas où une mère prend seule la prestation, elle peut en bénéficier tout au plus jusqu’aux 2 ans de l’enfant. L’informer de ses droits à la formation au premier anniversaire de l’enfant me semble constituer un bon équilibre.

S’agissant de l’amendement AS47 de M. Castellani, la convention englobe bien l’information des bénéficiaires relative au catalogue des formations qualifiantes ou de réinsertion professionnelle à la disposition du conseiller de Pôle emploi.

Mme Monique Limon. L’objet de mon sous-amendement est de prévoir le suivi des modalités de mise en œuvre de la convention signée entre la CNAF et Pôle emploi, afin de vérifier le nombre de personnes bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant, ou d’anciennes bénéficiaires qui ont retrouvé un emploi à la suite de l’interruption de leur activité. Ce sous-amendement s’inscrit donc dans une démarche d’émancipation de ces personnes, qui sont souvent des femmes éloignées de l’emploi.

Mme la rapporteure. Je suis favorable au sous-amendement, qui me paraît compléter utilement le suivi de cette expérimentation et permettra en effet de vérifier concrètement son efficacité auprès du public qu’il vise prioritairement, à savoir les bénéficiaires de la PreParE éloignés de l’emploi.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sousamendé. En conséquence, l’article 3 est ainsi rédigé et les amendements identiques AS26 de Mme Laurence Trastour-Isnart, AS46 de M. Michel Castellani, AS83 de Mme Emmanuelle Anthoine, AS123 de Mme Élodie JacquierLaforge, AS163 de M. Bertrand Bouyx, AS265 de Mme Pascale FontenelPersonne, AS274 de Mme Isabelle Valentin et AS338 de Mme Coralie Dubost ainsi que les amendements AS187 de Mme MarieNoëlle Battistel et AS47 de M. Michel Castellani tombent.

Article 3 bis (nouveau) : Droit au télétravail pour les salariées enceintes

La commission est saisie de l’amendement AS297 de Mme Céline Calvez.

Mme Céline Calvez. Il a été constaté que le recours contraint au télétravail, lié à la situation sanitaire, avait des effets bénéfiques pour les femmes enceintes et leurs enfants. Ainsi, une diminution du nombre de naissances prématurées a été observée. Les femmes sont également plus calmes, moins épuisées. Des études l’ont montré, l’un des rares aspects positifs de la crise a été de mettre en évidence les effets bénéfiques de l’aménagement du poste en télétravail pour les femmes enceintes dans les semaines qui précèdent leur congé de maternité. C’est pourquoi l’amendement vise à faire en sorte qu’une salariée puisse bénéficier du télétravail dans les douze semaines précédant son congé de maternité.

En outre, le recours au télétravail permettrait de réduire le nombre important de congés dits pathologiques, qui sont une manière de prévenir l’aggravation de certaines grossesses, souvent liée à l’utilisation des transports pour aller au travail. Cela allégerait une charge qui pèse aussi bien sur la collectivité que sur la carrière des femmes elles-mêmes, ainsi que sur leur retraite.

Mme la rapporteure. Je partage, sur le fond, votre attention à permettre aux femmes de concilier au mieux leur grossesse et leur travail.

La possibilité pour les femmes enceintes de pratiquer le télétravail avant le congé prénatal existe déjà. Compte tenu notamment de la part prise par le télétravail durant la crise sanitaire, le nouvel accord national interprofessionnel (ANI) conclu le 26 novembre dernier permet d’encourager la dynamique de négociation collective en la matière. Il prend également en compte les spécificités, en particulier les raisons médicales et familiales – ainsi, le télétravail est facilité pour les salariés en situation de handicap.

Par ailleurs, de nombreux accords collectifs contiennent des mesures liées à la protection de la maternité. Le télétravail est bien entendu un levier important qui doit être utilisé lorsque le poste le permet.

En outre, il me paraît délicat de bouleverser, comme vous le proposez à travers cet amendement, sans concertation avec les organisations syndicales et patronales, les équilibres trouvés par les partenaires sociaux dans l’ANI.

Pour ces raisons, je vous demande de retirer votre amendement.

M. Pierre Dharréville. Je suis assez sensible à la proposition de Mme Calvez, car elle vise à créer une sorte de droit au télétravail. Or nous avons constaté, lors des nombreuses auditions organisées par la commission sur la question du télétravail, qu’il y avait nécessité de légiférer en la matière pour mieux garantir les droits des salariés, même si l’ANI cherche à l’éviter.

J’ai été un peu gêné, en revanche, par la fin de votre argumentation, madame Calvez, car il ne faudrait pas culpabiliser les femmes ayant recours au congé pathologique, même si telle n’était sans doute pas votre intention. Le congé pathologique existe et il est fondé. La mesure ne doit pas non plus avoir pour objectif de réduire les coûts. L’enjeu est bien, à mes yeux, de créer un nouveau droit pour s’adapter à un certain nombre de situations.

M. Gaël Le Bohec. Je n’ai pas, pour ma part, ressenti de remise en cause du droit au congé pathologique, mais simplement la mise en évidence de la charge supplémentaire que pouvaient représenter les transports pour une femme enceinte.

Pour ce qui est de l’amendement, j’ai, bien entendu, toute confiance dans les accords collectifs dont je reste un fervent défenseur mais, sans les attendre, la loi peut aussi permettre d’avancer. C’est ce qu’il s’est passé dans le domaine de la législation du travail ou de la fonction publique. Ce serait une façon de faire passer le message aux entreprises, d’autant plus que, nous l’avons constaté, le télétravail facilite le passage au congé de maternité. Je soutiendrai cet amendement.

Mme Catherine Fabre. Notre collègue propose une piste intéressante pour l’avenir. Si le confinement nous a permis de constater les limites du télétravail, il a aussi montré que celui-ci représentait une solution à certaines situations particulières. Le troisième trimestre de la grossesse en est une.

Par cet amendement, Mme Calvez tire les enseignements de la crise que nous vivons depuis un an, en s’inscrivant dans la continuité des mesures que nous avons adoptées en faveur du télétravail. Le moment est peut-être mal choisi en raison des négociations en cours, mais cette discussion et le vote favorable de certains d’entre nous pourraient inciter les partenaires sociaux à prendre rapidement position, publiquement, sur un sujet qui, me semble‑t‑il, devrait recueillir un large consensus.

Mme Annie Chapelier. Cette proposition est un exemple des leçons que nous pouvons tirer de la crise sanitaire. Mme Calvez a souligné le recul des accouchements prématurés chez les femmes en télétravail. C’est l’un des bénéfices que nous pouvons retenir de ce nouveau mode de travail. La mesure proposée prévoit un cadre extrêmement souple qui permettrait à toutes les entreprises de l’organiser.

Mme Perrine Goulet. Le groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés soutiendra cet amendement très intéressant. Cependant, j’aimerais que, d’ici à la séance publique, nous réfléchissions aux modalités de travail de celles qui ne peuvent pas travailler à distance. En effet, cet amendement ne concerne que les femmes qui travaillent dans les bureaux, souvent des cadres. Que pourrions-nous proposer aux autres, les caissières par exemple ? Nous devons aller plus loin pour permettre à toutes les femmes de vivre sereinement leur grossesse, y compris celles qui se retrouvent en première ou deuxième ligne.

Mme Monique Limon. Le télétravail est un sujet majeur, particulièrement pour les femmes. Les auditions que vous avez menées, madame la présidente, ont mis en évidence les risques de dérive, le télétravail pouvant être perçu comme un moyen de rester à son poste tout en gardant les enfants. Du fait des nombreuses questions qu’il pose, ce sujet mériterait d’être abordé dans sa globalité par notre commission.

Mme Valérie Six. Je suis sensible à la finalité de l’amendement mais la question devrait être réglée par un accord avec l’employeur plutôt que par la loi. En effet, l’inscription de cette disposition dans la loi pourrait être comprise comme une obligation, pour la femme, dans les dernières semaines de la grossesse, de demander à travailler à distance. Quant à celles qui ne peuvent pas télétravailler, elles ont toujours la possibilité d’être en arrêt maladie si leur état de santé l’impose. Ne mélangeons pas tout.

M. Philippe Chalumeau. Je soutiendrai cet amendement, qui représente une avancée. Le télétravail s’est largement développé à l’occasion de la pandémie et il est normal que le législateur en débatte, d’autant plus qu’une personne qui travaille à distance, rappelons‑le, travaille réellement. Elle ne saurait, en même temps, garder ses enfants. Notre commission devrait se saisir de ce sujet pour l’encadrer et réfléchir aux conséquences de l’isolement ou aux risques de burnout.

Mme Nicole Trisse. Vous dites que le télétravail concerne les personnes qui travaillent dans les bureaux mais comment fonctionneront, dans ce cas, ceux qui accueillent du public ? Que deviendront les services publics si les fonctionnaires travaillent à distance ? Comment les personnes seront-elles renseignées ? Nous devons trouver un équilibre entre les besoins des uns et des autres ; aussi me semble-t-il risqué d’inscrire le principe dans la loi, car les entreprises, comme les femmes concernées, pourraient se retrouver contraintes.

M. Stéphane Viry. La rédaction de cet amendement me semble satisfaisante et équilibrée. La rapporteure a beau considérer qu’il est satisfait, il serait souhaitable de l’adopter, d’autant plus qu’il s’inscrit dans l’esprit de ce texte destiné à accélérer l’égalité économique et professionnelle entre les hommes et les femmes.

Mme Karine Lebon. « À sa demande, et sous réserve que ses missions puissent être exécutées hors des locaux de l’employeur » sont des mots clés qui doivent nous conduire à adopter cet amendement, lequel n’est pas contradictoire avec les mesures qui peuvent être prises pour réduire le temps de travail des femmes au cours du dernier trimestre de leur grossesse.

Mme Céline Calvez. Beaucoup d’intervenants ont souhaité que notre commission se saisisse du sujet du télétravail. Un petit coup de pression ne fera pas de mal, cependant. Nous avons pris soin de rédiger l’amendement de telle sorte qu’aucune obligation ne soit faite à la femme enceinte de demander à passer en télétravail, ni à l’employeur de le lui accorder. Nous proposons simplement une nouvelle modalité de travail pour permettre aux femmes de mener de front carrière professionnelle et grossesse, et favoriser ainsi leur émancipation économique.

La commission adopte l’amendement.

Article 4 : Favoriser l’accès des familles monoparentales aux modes de garde collectifs

La commission est saisie de l’amendement AS189 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Cet amendement, proposé par Sciences-Po au féminin, vise à étendre le bénéfice des places réservées pour la garde d’enfant aux personnes qui souhaitent poursuivre leurs études afin de leur permettre d’approfondir leur projet professionnel.

Mme la rapporteure. Je partage votre intention mais je préfère l’amendement de Mme Chapelier, qui me semble plus large que le vôtre et prévoit notamment d’intégrer dans le dispositif les personnes en formation initiale, ce qui correspond à un parcours d’études supérieures mais aussi de formation continue. Je vous invite à retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte les amendements rédactionnels identiques AS350 de la rapporteure et AS73 de Mme Annie Chapelier.

Puis elle examine, en discussion commune, l’amendements AS296 de Mme Annie Chapelier, l’amendement AS27 de Mme Laurence TrastourIsnart, faisant l’objet du sous-amendement AS354 de M. Stéphane Viry, ainsi que les amendements identiques AS267 de Mme Pascale Fontenel-Personne, AS275 de Mme Isabelle Valentin et AS280 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Annie Chapelier. Mon amendement tend à préciser que le parcours d’insertion professionnelle et sociale dans lequel s’engagent les personnes éligibles à ce dispositif peut comprendre des périodes de formation continue, en particulier au sein des établissements universitaires, écoles et instituts.

Mme Laurence Trastour-Isnart. Il s’agit d’étendre le bénéfice des places réservées pour la garde d’enfants aux personnes qui souhaitent poursuivre leurs études afin de leur permettre de concilier leur projet avec leur vie de famille. Je pense aux très jeunes mamans qui sont parfois encore lycéennes.

M. Stéphane Viry. Certaines femmes, en effet, qui souhaitent reprendre leurs études ou améliorer leur situation professionnelle, sont parfois contraintes de s’inscrire à des cours par correspondance. Je propose de le préciser dans l’amendement de ma collègue Trastour‑Isnart.

Mme Isabelle Valentin. Il s’agit d’étendre le bénéfice des places réservées pour la garde d’enfants aux personnes déjà engagées dans un parcours universitaire ou d’enseignement supérieur, qui souhaitent poursuivre leurs études, afin de leur permettre d’approfondir leur projet professionnel.

Mme Perrine Goulet. L’objectif de l’amendement AS280 est le même : permettre aux femmes qui poursuivent ou reprennent des études, par exemple dans le cadre de la formation tout au long de la vie, de bénéficier de places réservées en crèches.

Mme la rapporteure. Je préfère l’amendement de Mme Chapelier, car il vise à prendre en compte, dans le dispositif destiné aux personnes en parcours d’insertion professionnelle, celles qui reprennent des études ou les poursuivent, en vue d’intégrer le marché du travail. Il me semble plus large que l’ensemble des autres amendements déposés à ce sujet.

Rappelons que l’interprétation qui doit être faite de cet article reste inchangée : le « berceau social » est réservé aux personnes en situation précaire, qui pourraient ne pas retrouver d’emploi faute de mode de garde pour leur enfant. C’est ce qui justifiait notamment l’intégration des familles monoparentales uniquement sous l’angle de celles qui sont en insertion professionnelle et sous conditions de ressources.

Sous cette réserve, je suis favorable à l’amendement, qui tend à préciser utilement que les parcours de réinsertion professionnelle peuvent passer par la reprise d’études, comme c’est le cas à l’école 42, dirigée par Sophie Viger, en partenariat avec Pôle emploi.

La commission adopte l’amendement AS296.

En conséquence, les autres amendements tombent.

La commission en vient à l’amendement AS330 de Mme Monique Limon, faisant l’objet du sous-amendement AS373 de la rapporteure.

Mme Monique Limon. Cet amendement tend à reconnaître dans la loi l’existence des crèches à vocation d’insertion professionnelle, dites crèches AVIP, et à en encourager la création. Il est devenu nécessaire de déployer plus largement les crèches AVIP dans tout le territoire et de leur garantir une assise législative. C’est pourquoi le groupe La République en Marche propose de définir dans la loi les critères constitutifs d’une structure AVIP et les publics ciblés, en particulier les familles monoparentales. L’amendement vise également à ce qu’une convention entre l’État, Pôle emploi et la CNAF détermine les obligations auxquelles ces établissements et services sont soumis, les avantages qu’ils reçoivent en contrepartie et leurs modalités de déclinaison locale.

Mme la rapporteure. À la notion de réservation, potentiellement trop rigide s’agissant des places en crèche, nous préférons celle d’accueil d’une proportion donnée d’enfants dont les parents seraient engagés dans un parcours d’insertion professionnelle.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Après l’article 4

La commission est saisie, en discussion commune, des amendements AS156 et AS157 de Mme Valérie Six ainsi que des amendements AS178 et AS268 de Mme Bénédicte Taurine.

Mme Valérie Six. Par l’amendement AS156, nous souhaitons appeler l’attention sur le problème du nombre de places en crèche pour la petite enfance. L’article 4 prévoit de réserver des places en crèches aux familles monoparentales bénéficiaires de l’allocation de soutien familial. Or c’est le nombre de places en crèche qui pose problème ainsi que leur répartition dans le territoire. Aujourd’hui, on ne dénombre que 145 000 places en crèche chaque année. Autrement dit, seul un enfant sur huit peut y être accueilli. L’insuffisance du nombre de places engendre des problèmes de mode de garde pour de nombreux parents, ce qui accroît les inégalités entre les sexes.

J’en profite pour dire un mot de la gestion de la vie de famille et de la vie professionnelle. Les mères étant plus nombreuses que les pères à demander un congé parental, j’ai proposé de créer un congé familial partageable entre les deux parents. Hélas, cet amendement a été déclaré irrecevable alors que la réforme des modes de garde est un vrai sujet. Les mères souhaitent s’investir davantage dans leur vie professionnelle et les pères, dans l’éducation de leur enfant et la cellule familiale. De même, la désertification des services de la petite enfance au sein de certains territoires est un fléau contre lequel nous devons lutter.

Quant à l’amendement AS157, il vise à appeler l’attention sur l’opportunité, pour les entreprises, de proposer des places de crèches à leurs salariés. Le dispositif existe mais il reste méconnu alors qu’il serait gagnant-gagnant : en réservant des places en crèches pour ses salariés, l’entreprise leur permettrait de se rendre au travail plus sereinement, d’autant plus que les crèches sont souvent situées à proximité du lieu de travail. L’entreprise fidéliserait ainsi le salarié bénéficiaire et se prémunirait contre d’éventuelles absences liées au mode de garde. Pour dynamiser ce dispositif et inciter les entreprises à y recourir, il conviendrait de le rendre incitatif.

Mme Bénédicte Taurine. Mes deux amendements visent à ce que le Gouvernement remette des rapports au Parlement.

Le premier permettrait d’estimer le nombre de places nécessaires et qui resteraient donc à construire, afin d’éviter aux mères de quitter leur emploi en raison de la déficience de la puissance publique. Réserver des places aux familles monoparentales qui bénéficient de l’allocation de soutien familial ne suffit pas. Nous souhaitons accélérer la création du nombre de places en crèche afin que l’ensemble des familles soient accompagnées entre leur vie privée et leur vie professionnelle.

Le second rapport concernerait l’extension à toutes les familles monoparentales du bénéfice d’une place en crèche, sans avoir à justifier de la perception de l’allocation de soutien familial. En 2017, cette allocation a été versée à environ 836 000 foyers dont seul un quart représentait une famille monoparentale. Cette disposition ne concernerait donc que 200 000 personnes, sachant que peu d’entre elles ont un enfant en bas âge. À 85 %, les parents isolés sont des femmes. La monoparentalité pose des difficultés d’organisation et nous devons nous saisir de ce sujet.

Mme la rapporteure. Pour ce qui est du nombre de places en crèche, je vous renvoie à l’évaluation qui sera bientôt faite, sous forme de bilan, de la convention d’objectifs et de gestion de la CNAF, qui court entre 2018 et 2022. Je vous encourage, par ailleurs, à consulter le rapport du HCFEA, rendu en 2018 au sujet de l’accueil des enfants de moins de 3 ans. Cette invitation vaut également pour les députés qui ont demandé que le Gouvernement leur remette des rapports.

Il est de notoriété publique que les objectifs de la convention d’objectifs et de gestion, à savoir la création nette de 30 000 places de crèches, ce qui tient compte des mouvements comparables de fermeture, ne seront sans doute pas atteints, bien qu’on soit en droit d’espérer la satisfaction d’un objectif de 25 000 places supplémentaires au cours de cette période. Cette situation est due, en partie, à la crise sanitaire, en partie à la faible lisibilité des compétences dans ce domaine. Plutôt que de demander un rapport à ce sujet, il vaudrait mieux orienter les équipements d’accueil du jeune enfant (EAJE) vers les familles monoparentales et accorder une attention particulière aux personnes qui ont le plus de difficultés à trouver, par l’intermédiaire du site monenfant.fr.

Je vous invite, par conséquent, à retirer ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 4 bis : Rapport relatif à l’accueil des enfants de parents engagés dans un parcours d’insertion professionnelle

La commission est saisie de l’amendement AS331 de M. Didier Martin.

Mme Monique Limon. L’amendement vise à ce que, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de ce texte, le Gouvernement remette au Parlement un rapport qui évalue les aides et les dispositifs ayant vocation à garantir l’accueil des jeunes enfants dont les parents sont engagés dans un parcours d’insertion professionnelle ou sociale. Ce rapport devra comprendre un bilan des aides et dispositifs existants, des expériences menées sur la base du volontariat, ainsi que des données relatives à leur articulation, leur accessibilité dans tous les territoires et à la typologie des publics bénéficiaires. Il devra enfin formuler des propositions en vue de faciliter leur diffusion et de répondre aux besoins des parents de jeunes enfants dont la situation sociale et professionnelle justifie un accueil spécifique.

Mme la rapporteure. Contrairement aux réponses que j’ai apportées jusqu’à présent aux demandes de rapport, j’ai envie de vous donner un avis favorable. Comme le déplore le HCFEA dans sa note de 2019 relative au développement de solutions ponctuelles et durables de garde d’enfants pour les demandeurs d’emploi et les nouveaux embauchés, la manière dont est respecté le dispositif du berceau social fait l’objet d’un suivi encore trop lacunaire. Le Haut Conseil proposait ainsi de réaliser une étude sur le respect de ces dispositions par les EAJE et la manière dont celui-ci est contrôlé par les autorités de tutelle.

De la même manière, le dispositif spécifique des crèches AVIP doit faire l’objet d’un travail de la CNAF sur l’exercice 2020-2021. Les conclusions de ce travail pourront utilement être remises à notre assemblée dans le cadre du rapport que vous proposez.

La commission adopte l’amendement.

Article 5 : Favoriser la parité au sein de l’enseignement supérieur

La commission est saisie de l’amendement AS263 de la rapporteure et des sous-amendements AS364 de Mme Perrine Goulet, AS377 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS357 de Mme Carole Grandjean, AS378 et AS374 de Mme Marie-Noëlle Battistel, des sous-amendements identiques AS371 de Mme Annie Chapelier et AS375 de Mme Marie-Noëlle Battistel, ainsi que des sous-amendements AS376 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS370 de Mme Annie Chapelier, AS358 de Mme Carole Grandjean et AS369 de Mme Annie Chapelier.

Mme la rapporteure. Il s’agit de réécrire l’article 5, relatif à l’égalité professionnelle dans l’enseignement supérieur et la recherche grâce, notamment, à la composition paritaire des jurys.

Il est ainsi prévu de renforcer les obligations relatives à la parité dans les établissements qui relèvent de la cotutelle du ministère de l’enseignement supérieur et d’autres ministères. Ce champ concerne notamment les grandes écoles d’ingénieurs ou de travaux publics. Les auditions que nous avons menées ont mis en évidence la persistance de grandes différences entre la part des femmes et celle des hommes. Qu’il s’agisse des 15 % de femmes dans les filières mathématiques ou des 28 % de femmes qui embrassent aujourd’hui la carrière d’ingénieure après une grande école, les résultats ne sont pas satisfaisants. Je suis donc heureuse de pouvoir compter sur le soutien de la Conférence des grandes écoles ainsi que de celui de la Conférence des écoles d’ingénieurs, à ceci près que cette dernière nous a alertés quant au souci pour les femmes professeures de ne pas multiplier les activités de jury afin de ne pas pénaliser leur propre travail de fond.

J’en viens au deuxième point. Cet article prévoirait, par ailleurs, des dérogations pour les filières au sein desquelles un sexe serait sous-représenté. Ainsi, pour les filières dans lesquelles moins de 10 % d’un sexe est présent, les jurys pourront non pas être astreints à une représentation d’au moins 30 % de chaque sexe mais à la représentation d’une personne a minima du sexe sous-représenté. Cette mesure me semble être un bon équilibre, pour respecter les spécificités de certaines filières, sans pour autant les laisser de côté dans le progrès vers une juste représentation des femmes et des hommes.

Enfin, l’article prévoit de nouvelles dispositions relatives à l’observatoire de l’insertion professionnelle au sein des universités. Ce dernier, qui accompagne les étudiants et les étudiantes vers leur stage et leur premier emploi, ne comprend actuellement aucune disposition relative à un accompagnement paritaire. Or, comme toutes les phases de transition, il est crucial d’accompagner les étudiantes comme les étudiants dans le choix d’une orientation qui leur correspond, indépendamment de leurs préjugés et de ceux des recruteurs, ou de stéréotypes.

Mme Perrine Goulet. Mon sous-amendement AS364 reprend le contenu d’un amendement qui pourrait tomber en cas d’adoption de celui de la rapporteure. Les auditions menées ont mis en évidence les difficultés à trouver des femmes pour occuper certains postes à responsabilité, en raison notamment des stéréotypes persistants que nous devons combattre. Devons-nous agir dès l’école maternelle, primaire, ou seulement à partir du collège ? Chaque solution présente des avantages et des inconvénients. Le collège nous semble une bonne solution, car c’est à ce moment que l’adolescent commence à réfléchir à son avenir. Notre groupe vous propose ainsi d’insérer un nouvel alinéa pour que les formations dispensées aux élèves de collège s’attachent, notamment en ce qui concerne l’orientation et la découverte des métiers, à lutter contre les stéréotypes de genre qu’ils peuvent induire et favoriser ainsi une répartition plus équilibrée des genres dans l’enseignement supérieur.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Il s’agit également de reprendre dans les sous-amendements le contenu des amendements susceptibles de tomber.

Nous vous proposons, tout d’abord, avec le sous-amendement AS374, de compléter le dispositif relatif aux indicateurs d’égalité des chances entre les femmes et les hommes en précisant qu’ils rendent compte tant des parcours eux-mêmes que des modalités d’accès, qu’il s’agisse d’un concours ou d’une admission sur dossier.

Nous souhaitons également que, par le sous-amendement AS377, soit supprimée la dérogation accordée à la fonction publique pour les modalités d’accès aux formations de fonctionnaires stagiaires qui imposent de respecter une proportion minimale de 30 % de chaque sexe au sein des jurys.

Le sous-amendement AS378 tend à imposer la parité au sein des jurys de sélection ou de concours des établissements d’enseignement supérieur. Nous proposons par ailleurs que les établissements d’enseignement supérieur publient l’ensemble des indicateurs fixés par décret, avec le sous-amendement AS375. Enfin, les indicateurs relatifs à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes doivent non pas être des indicateurs globaux mais rendre compte de l’évolution de cette égalité tout au long du parcours de formation, ainsi que des parcours eux-mêmes aussi bien que des modalités d’accès à ceux-ci, qu’il s’agisse d’un concours ou d’une admission sur dossier, comme le propose le sous-amendement AS376.

Mme Annie Chapelier. Le sous-amendement AS371 vise à préciser que les établissements doivent publier l’ensemble des indicateurs relatifs à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes et aux actions menées pour réduire les inégalités. Par ailleurs, il convient de doubler l’effort de publication d’indicateurs relatifs à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes d’une obligation de transparence quant aux actions menées en cas de résultats insatisfaisants, afin d’assurer la progression de l’établissement, comme le propose le sous-amendement AS370.

Enfin, le sous-amendement AS369 propose de passer de deux à un an après la publication de ce texte le délai d’entrée en vigueur de l’obligation de publier l’index d’égalité dans les établissements du supérieur et de la proportion minimale de 30 % de membres de chaque sexe dans les jurys de sélection ou de concours. Pour cette année, les sélections sont déjà en cours. Cet article a donc, de fait, un délai d’un an avant sa mise en application.

Au passage, j’indique que je présenterai, après l’article 5, deux amendements qui poursuivent le même objectif que le sous-amendement de Mme Goulet, que je soutiendrai.

Mme Carole Grandjean. L’amendement de réécriture de l’article 5 prévoit que, lorsqu’un jury de sélection ou de concours est constitué pour l’accès aux formations dispensées par certains établissements d’enseignement supérieur, sa composition respecte une proportion minimale de 30 % de personnes de chaque sexe. Il s’agit d’une réelle avancée pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’enseignement supérieur. Cependant, cette obligation peut apparaître difficile à appliquer quand le jury ne comporte que deux membres. Afin d’assurer l’effectivité du dispositif, nous proposons, avec le sous-amendement AS357, de préciser qu’il ne s’appliquera qu’aux jurys composés d’au moins trois membres.

Par ailleurs, par le sous-amendement AS358, nous proposons d’étendre l’exigence d’une proportion minimale de 30 % de chaque sexe aux jurys de sélection pour l’accès aux sections de techniciens supérieurs, instituts, écoles et préparations à celles-ci, grands établissements, établissements où l’admission est subordonnée à un concours national ou un concours de recrutement de la fonction publique, ainsi que pour l’accès aux formations de l’enseignement supérieur dispensées dans les lycées, aux cycles préparatoires intégrés, aux formations préparant au diplôme de comptabilité et de gestion ou aux diplômes d’études scientifiques et techniques, etc.

Mme la rapporteure. Je donne un avis favorable au sous-amendement AS364 de Mme Goulet qui permettra de lutter contre les préjugés liés au genre et de mieux sensibiliser aux enjeux de l’orientation.

Avis défavorable au sous-amendement AS377. L’exception introduite à cet article se justifie par les obligations propres aux fonctionnaires stagiaires. En vertu de la loi portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, les jurys composés pour leur admission comprennent au minimum 40 % de personnes issues de chaque sexe. Il ne s’agirait donc pas de créer une exception pour la fonction publique qui est déjà soumise à des contraintes plus élevées.

Avis favorable au sous-amendement AS357. Je ne souhaite pas, en effet, contrarier le fonctionnement habituel des jurys mais favoriser une juste représentation des femmes et des hommes en leur sein. Pour éviter tout effet pervers, en particulier une sollicitation excessive des femmes au sein des jurys, ce seuil minimal me semble une bonne solution.

Avis défavorable au sous-amendement AS378 : je ne suis pas favorable à l’instauration d’une parité stricte dans les jurys. La proportion de 30 % serait une avancée importante, notamment pour les filières déjà déséquilibrées. Surtout, cette mesure conduirait à solliciter excessivement des femmes dans des filières où elles sont encore en nombre insuffisant, au détriment de leur travail de recherche.

J’invite Mme Battistel à retirer le sous-amendement AS374, qui est satisfait par la notion même d’indicateurs relatifs à l’égalité des chances, qui comprendront les modalités d’admission ainsi que les comparaisons entre les personnes admises et les personnes en emploi à la suite de leurs études, par exemple. Par ailleurs, ce baromètre est complété par des améliorations du fonctionnement de l’observatoire de l’insertion professionnelle, qui fournira des données dans ce domaine.

Je donne un avis favorable aux sous-amendements rédactionnels AS371 et AS375, et demande le retrait du sous-amendement AS376. Il est satisfait par la rédaction proposée, qui englobe l’ensemble des aspects de l’égalité des chances au sein de ces établissements, pendant toute la formation. Nous prêterons une attention particulière à ce que le décret précisant la méthode d’élaboration du baromètre prenne en compte l’ensemble des paramètres susceptibles de renforcer l’égalité des chances.

Le sous-amendement AS370 me semble s’éloigner de l’esprit dans lequel cet article a été rédigé. Nous souhaitons mettre en place un baromètre dressant un instantané de la situation de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes dans les établissements de l’enseignement supérieur. Si ce sous-amendement est en effet inspiré par l’index de l’égalité entre hommes et femmes dans l’entreprise, la solution proposée me semble trop lourde, au regard de l’ensemble des obligations qui seront prévues dans cet article. Avis défavorable.

Je suis favorable au sous-amendement AS358. Il permet d’étendre à une partie des formations post-bac les obligations de représentation équilibrée dans les jurys, que l’article 5 prévoit actuellement pour un périmètre différent d’établissements de l’enseignement supérieur. Je souhaite que des formations comme les IUT ou les BTS fonctionnent avec des jurys assurant une représentation équilibrée des femmes et des hommes, tout en faisant en sorte que les filières dans lesquelles le déséquilibre est trop important ne soient pas handicapées.

Quant au sous-amendement AS369, je ne suis pas partisane d’une réduction du délai d’entrée en vigueur de cet article. Les obligations prévues sont suffisamment lourdes pour que leur application se fasse selon un échéancier adéquat. La formation de jurys se fait parfois plusieurs mois à l’avance, il est naturel de prévoir une durée d’un an et demi, notamment dans la perspective de réorganisation que les nouvelles obligations imposeront aux établissements de filières dans lesquelles l’un des sexes est particulièrement sous-représenté.

Mme Marie-Noëlle Battistel. J’ai entendu les arguments de la rapporteure m’appelant à retirer le sous-amendement AS376, mais il introduit une précision qui évite de laisser place à l’interprétation. Je préfère le maintenir.

Mme Annie Chapelier. Je maintiens le sous-amendement AS369. Il s’applique aux établissements de l’enseignement supérieur, dont nous pouvons espérer qu’ils aient une meilleure capacité de réaction que les autres structures.

Le sous-amendement AS374 est retiré.

Successivement, la commission adopte le sous-amendement AS364, rejette le sous-amendement AS377, adopte le sous-amendement AS357, rejette le sous-amendement AS378, adopte les sous-amendements identiques AS371 et AS375, rejette les sous-amendements AS376 et AS370, adopte le sous-amendement AS358 et rejette le sous-amendement AS369.

Elle adopte l’amendement AS263 sous-amendé et l’article 5 est ainsi rédigé.

En conséquence, tous les autres amendements se rapportant à l’article 5 tombent.

Après l’article 5

La commission est saisie de l’amendement AS298 de Mme Céline Calvez.

Mme Céline Calvez. Dans les métiers des sciences, technologies, ingénieries et mathématiques (STEM), la place des femmes est en régression. C’est notamment le cas dans le domaine de la programmation informatique et de l’intelligence artificielle. Les travaux que nous avons menés avec Stéphane Viry au sein de la délégation aux droits des femmes en 2018, consacrés à la place des femmes dans les sciences, ont montré qu’il était important d’encourager l’orientation des jeunes filles vers ces filières. Nous devons les convaincre que ces carrières peuvent être une source d’épanouissement, mais aussi convaincre leurs familles et la société tout entière.

Nous avons intégré au rapport annexé à la loi de programmation pour la recherche le principe d’une campagne de sensibilisation aux métiers du STEM. Nous proposons que les écoles, les collèges et les lycées concourent à l’information sur ces filières et métiers et leur utilité sociale.

Mme la rapporteure. Intégrer à ce texte la campagne de sensibilisation prévue par la loi de programmation sur la recherche ne semble pas pertinent. La loi n’est pas l’outil juridique requis pour mettre en place des campagnes de sensibilisation – ces dispositions sont davantage de nature réglementaire. Sur le fond, mener une campagne spécifique à ces matières pourrait se faire au détriment des autres. Je demande le retrait de cet amendement.

Mme Céline Calvez. Nous pourrons interroger le Gouvernement en séance afin de lui faire préciser que les écoles, les collèges et les lycées concourront à cette information.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AS318 de Mme Sonia Krimi.

Mme Sonia Krimi. Je fais partie de la délégation aux droits des femmes, qui a beaucoup travaillé sur ces sujets. Un des amendements tombés à l’article 5 appelait à étudier les manières d’inciter les établissements scolaires à favoriser une meilleure parité dans les classes préparatoires.

Par cet amendement, je m’attaque à cette inégalité à la racine. Souvent, évoquer le rapport de l’UNICEF sur les jeux des enfants déclenche des sourires. Le sujet peut paraître anecdotique, mais il révèle l’intériorisation des stéréotypes. Mme Calvez y a beaucoup travaillé. Nous proposons d’intégrer l’éducation à l’égalité économique et professionnelle aux programmes d’enseignement scolaire.

Les enseignements ont un rôle primordial pour éveiller les consciences. Les femmes ne sont pas faites que pour les études littéraires – elles y représentent 75 % des effectifs – et les hommes ne sont pas faits pour devenir ingénieurs. Ces stéréotypes doivent être combattus dès le plus jeune âge.

Mme la rapporteure. Votre amendement semble satisfait. Je suis favorable à la démarche de sensibilisation aux stéréotypes de genre, et j’aurai l’occasion de le rappeler dans un instant.

À l’école primaire, l’article L. 312-17-1 du code de l’éducation prévoit déjà qu’une information consacrée à l’égalité entre les hommes et les femmes et à la lutte contre les préjugés sexistes doit être dispensée à tous les stades de la scolarité.

Les établissements scolaires, y compris les établissements français d’enseignement scolaire à l’étranger, peuvent s’associer à cette fin avec des associations de défense des droits des femmes et promouvant l’égalité entre les hommes et les femmes.

L’application de ces dispositions rejoint donc parfaitement l’objectif de votre amendement, que je vous propose de retirer.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AS258 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. Il s’agit de compléter la formation des conseillers d’orientation intervenant dans les collèges et lycées par des modules relatifs à l’égalité entre les femmes et les hommes et à la prévention et la sensibilisation aux stéréotypes de genre.

L’enseignement à l’école primaire sur l’égalité entre les femmes et les hommes se fait dans des conditions très inégales selon les territoires. L’orientation est un moment clé dans le parcours de chaque élève. La plupart des conseillers d’orientation, même s’ils sont accompagnés de psychologues, n’ont pas reçu de formation aux stéréotypes de genre et aux biais d’orientation. Dans la réalité, on envoie très facilement les filles vers les CAP dédiés à la petite enfance, et les garçons vers la plomberie. Les stéréotypes agissent de façon inconsciente, et il est essentiel de former les conseillers d’orientation pour briser ces mécaniques.

Mme la rapporteure. Avis favorable, il me semble que cet amendement contribue clairement à la lutte contre les stéréotypes de genre à travers la formation des conseillers d’orientation. Des auditions menées par la délégation aux droits des femmes ont montré à quel point ce sujet est déterminant.

La commission adopte l’amendement.

Puis la commission est saisie de l’amendement AS67 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Cet amendement et l’amendement AS66 ont tous deux pour objet de promouvoir la mixité dans les établissements d’enseignement technologique et professionnel du secondaire. Nous proposons de leur faire publier chaque année les indicateurs relatifs à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, et les actions menées pour réduire les inégalités.

Cette mesure permettrait d’insuffler une dynamique. Les établissements peuvent organiser des rencontres avec les jeunes des collèges afin de déconstruire les idées reçues sur des filières choisies majoritairement par des hommes ou par des femmes.

L’amendement AS67 concerne spécifiquement les formations en alternance.

Mme la rapporteure. Je demanderai le retrait de l’amendement AS66. Il me semble trop lourd d’étendre l’obligation de publication d’indicateurs à l’ensemble des établissements scolaires. La restriction aux seules filières technologiques et professionnelles me semble très contraignante pour ces établissements, d’autant que le code de l’éducation les soumet aux mêmes obligations que les autres établissements scolaires en matière de lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes, ou contre les préjugés. Il n’apparaît donc pas nécessaire de leur imposer une obligation supplémentaire de publication d’indicateurs.

Quant à l’amendement AS67, j’y suis défavorable. Il n’est pas praticable de faire peser sur tous les établissements scolaires de notre pays une charge comparable à celle que je propose pour l’ensemble d’une université.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS115 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. Le code de l’éducation mentionne déjà l’information et l’éducation à l’égalité entre les femmes et les hommes, mais il paraît important d’ajouter la formule : stéréotypes de genre. Il faut y sensibiliser tous les élèves, de l’école primaire au lycée.

Mme la rapporteure. Au vu des obligations déjà existantes dans le code de l’éducation, je propose le retrait de cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis de la rapporteure, elle rejette l’amendement AS66 de Mme Valérie Six.

La commission est ensuite saisie des amendements identiques AS38 de Mme Laurence Trastour-Isnart, AS131 Mme Élodie Jacquier-Laforge et AS271 de Mme Josiane Corneloup.

Mme Laurence Trastour-Isnart. Le code de l’éducation prévoit la possibilité, pour les établissements scolaires, de conclure des accords de coopération avec les établissements universitaires. Nous proposons de prévoir des dispositions dans ces accords de coopération visant à favoriser une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes parmi les filières d’enseignement.

De fortes différences subsistent entre les établissements, et certaines filières reçoivent très peu de jeunes femmes. Nous souhaitons favoriser l’accès des jeunes femmes aux filières où elles sont très peu présentes.

Mme Isabelle Valentin. Selon les établissements, on constate une grande disparité entre hommes et femmes. Cet amendement vise à renforcer, dès l’enseignement secondaire, la prise en compte de l’objectif d’un meilleur équilibre de représentation entre les femmes et les hommes dans les filières de l’enseignement supérieur.

Mme la rapporteure. Il faudra peut-être modifier la rédaction de cet amendement en séance publique, mais le dispositif proposé est bon. Il est indispensable que la période de transition entre l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur puisse s’appuyer sur une orientation indépendante des préjugés sexistes, qui empêchent encore parfois une partie des élèves, quel que soit leur sexe, de s’orienter vers une formation universitaire. Avis favorable.

La commission adopte les amendements.

La commission est saisie de l’amendement AS337 de Mme Céline Calvez.

Mme Céline Calvez. Cet amendement est présenté par l’ensemble du groupe La République en Marche. Il porte sur la commission des titres d’ingénieur, qui délivre les titres aux écoles, instituts, universités et grands établissements dispensant des formations d’ingénierie, dont les femmes ne représentent que 28 % des effectifs. Les commissions des titres d’ingénieur doivent veiller à la juste représentation des femmes et des hommes, mais aussi à la diversité des origines géographiques ou sociales et à la prise en compte des situations de handicap. Il importe d’encourager la diversité dans ces établissements qui forment ceux qui dessineront les solutions de demain.

Mme la rapporteure. Cette disposition vient renforcer l’attention portée à l’égalité au sein des commissions des titres d’ingénieur. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS305 de Mme Céline Calvez.

Mme Céline Calvez. Nous proposons d’étendre les indicateurs relatifs à l’égalité au terrain de la recherche. Il existe des plans d’action « égalité professionnelle » qui sont récoltés en ce moment par le ministère en charge de l’enseignement supérieur. Nous proposons de définir quelques indicateurs clés pour déterminer à quel niveau agir pour que l’égalité entre les femmes et les hommes au sein de la recherche soit la meilleure possible, plutôt que de retenir différents indicateurs, comme c’est actuellement le cas dans les plans d’action « égalité professionnelle ».

Mme la rapporteure. Cet amendement poursuit une intention louable, dans l’esprit de l’article 5. Mais sa rédaction n’est pas satisfaisante à ce stade, la loi ne peut faire référence au plan d’action d’un ministère, par définition provisoire. Pour des raisons de hiérarchie des normes et de stabilité juridique, je demande le retrait.

Mme Céline Calvez. Nous reverrons la rédaction pour en discuter dans l’hémicycle.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie des amendements identiques AS35 de Mme Laurence Trastour-Isnart, AS196 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS228 de Mme Cécile Delpirou, AS276 de Mme Isabelle Valentin, AS283 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Nous proposons d’étendre aux communes de plus de 20 000 habitants l’obligation de nommer 40 % de personnes de chaque sexe dans les emplois supérieurs. Cette mesure, actuellement en vigueur dans les communes de plus de 40 000 habitants, concernerait alors 262 communes supplémentaires, dans lesquelles vit 10 % de la population française.

Mme Perrine Goulet. La loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dite loi Le Pors, prévoit que les emplois de direction des régions, des départements, des communes et établissements publics de coopération intercommunale de plus de 40 000 habitants doivent compter au moins 40 % de personnes de chaque sexe.

Cet amendement propose d’abaisser le seuil d’application de cette obligation à 20 000 habitants. L’exigence de mixité dans les postes à responsabilité des collectivités et des établissements publics attenants doit pouvoir être atteinte dans l’ensemble du territoire.

Mme la rapporteure. Instaurée en 2012 pour les collectivités de plus de 80 000 habitants, l’obligation visée a été étendue aux collectivités de plus de 40 000 habitants par la loi de transformation de la fonction publique de 2019. Mes échanges avec le Gouvernement laissent entendre que l’application de ce nouveau seuil n’a pas encore permis une comptabilisation et une objectivation véritables de ces mesures. De plus, ce premier abaissement a conduit la fonction publique territoriale à intégrer des agents, attachés ou directeurs, qui ne relèvent pas de la catégorie A+.

Il me paraît donc prématuré d’abaisser ce seuil moins de deux ans après l’avoir porté à 40 000 habitants. Avis défavorable.

Mme Cécile Delpirou. Refuser d’étendre cette mesure à des communes moins peuplées car nous n’avons pas de résultats depuis deux ans dans les communes plus importantes n’est pas un bon argument : plus tôt nous étendrons l’obligation, plus tôt les résultats se feront sentir.

L’amendement AS283 est retiré.

La commission rejette les amendements restants.

La commission est saisie de l’amendement AS324 de Mme Sonia Krimi.

Mme Sonia Krimi. Il s’agit d’inverser une tendance qui, pour une fois, n’est pas favorable aux hommes. Parmi les 8 537 magistrats en 2018, 66 % sont des femmes, et elles sont 77 % au second grade. Une ancienne magistrate, nommée haute fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes au sein du ministère de la justice, a dénoncé ce déséquilibre et demande que plus d’hommes soient recrutés au sein de l’ordre judiciaire.

Je ne suis pas juriste, mais j’aime la justice, et je considère qu’elle doit être très proche de la composition de notre société. C’est pourquoi je propose de rééquilibrer son recrutement.

Mme la rapporteure. Votre amendement appliquerait à des corps constitués par la voie de concours des dispositions relatives aux emplois de direction dans la fonction publique. Ce n’est pas praticable. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie des amendements identiques AS36 de Mme Laurence Trastour-Isnart, AS107 de Mme Karine Lebon, AS128 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et AS197 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Laurence Trastour-Isnart. La fonction publique doit être exemplaire en matière de parité, et la féminisation doit se poursuivre pour atteindre 50 % des primo‑nominations. En 2019, Marlène Schiappa, alors secrétaire d’État à l’égalité femmes‑hommes, entendait relever à 50 % le quota des femmes dans la fonction publique.

Mme Perrine Goulet. Nous souhaitons faire passer le taux de primo-nominations de 40 % à 50 % dans la fonction publique dès 2023. Il ne faut pas avoir d’ambitions pour le seul secteur privé, nous devons aussi en avoir pour le secteur public.

Mme la rapporteure. Même si ces amendements prévoient une entrée en vigueur différée à 2023, je ne suis pas favorable à la mise en place d’une parité absolue. Un tel seuil ne laisse aucune marge de manœuvre dans les procédures de nomination, ce qui pourrait susciter un vaste contentieux dans cette matière sensible.

Le respect du seuil de 40 % me semble compatible avec le bon fonctionnement de l’ensemble des pans de la fonction publique concernés, dont le champ couvre toutes les collectivités territoriales, l’État et la fonction publique hospitalière. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

La commission est saisie des amendements identiques AS129 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et AS147 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Perrine Goulet. Nous proposons d’abaisser le seuil de population à partir duquel il est obligatoire pour une commune de publier un plan d’action pour l’égalité femmes-hommes, en le portant de 20 000 à 10 000 habitants. Les inégalités de parcours n’existent pas que dans les communes de plus de 20 000 habitants. Dans mon département, seule une commune dépasse le seuil de 20 000 habitants, mais trois dépassent 10 000 habitants. Il est important que l’égalité femmes-hommes se fasse dans les territoires moins denses.

Mme la rapporteure. Je comprends totalement l’intention des auteures de ces amendements, et la publication de plans d’action fait partie des obligations les plus légères envisagées par l’ensemble des amendements qui ont été déposés au sujet de la fonction publique.

Toutefois, mon avis n’est pas favorable à ce stade. Je vous propose de retirer ces amendements afin que nous échangions avec le Gouvernement pour identifier la charge que représenterait cette obligation supplémentaire pour les collectivités territoriales qui comptent entre 10 000 et 20 000 habitants.

L’amendement AS129 est retiré.

La commission rejette l’amendement AS147.

La commission est saisie des amendements identiques AS37 de Mme Laurence Trastour-Isnart, AS130 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et AS198 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Laurence Trastour-Isnart. Le secteur public doit participer à l’accélération de l’égalité professionnelle et économique. Cette action doit être réelle, et c’est l’objet de cet amendement.

Mme Perrine Goulet. Cet amendement, proposé par l’association Science-Po au Féminin, impose que l’application du plan pluriannuel soit effective, faute de quoi son élaboration risque de ne devenir qu’une formalité, sans qu’aucune action réelle ne soit mise en place.

Mme la rapporteure. Je souhaite que nous avancions à ce sujet avec les réponses du Gouvernement, notamment sur la part des plans d’action qui ne sont pas mis en œuvre et l’application existante de sanctions à ce sujet.

Je propose un retrait, et à défaut, avis défavorable.

Les amendements AS130 et AS198 sont retirés.

La commission rejette l’amendement AS37.

La commission est saisie des amendements AS322 et AS323 de Mme Sonia Krimi.

Mme Sonia Krimi. Il s’agit de créer un index de l’égalité professionnelle et salariale de la fonction publique dans les collectivités territoriales de plus de 40 000 habitants.

Cette mesure répond à un enjeu démocratique. Si nous voulons imposer des femmes dans des communautés de communes ou des communes de plus de 40 000 habitants, c’est que leur désignation a un effet direct sur notre démocratie. On sait que la démocratie passe par nos collectivités territoriales ; on connaît la fracture territoriale qui divise notre pays, et la place des femmes dans ces administrations peut constituer un rempart contre le complotisme et le conspirationnisme. Je ne prends pas ces amendements à la légère. Je comprends que vous souhaitiez les retravailler avec le ministère, mais la présence des femmes dans ces instances est très importante.

Malgré tout l’effort législatif qui a été effectué depuis 2019, les femmes dans la fonction publique restent 17 % à 18 % moins bien payées que les hommes.

Mme la rapporteure. Avis défavorable à l’amendement AS322. Outre les problèmes de rédaction, son intention est satisfaite. Les quotas de 40 % prévus par la loi « Sauvadet » aboutissent, selon le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEFH), à un taux de 43 % de femmes primo-nominées. Le non-respect de cette règle spécifique a abouti à l’imposition d’amendes aux départements ministériels concernés pour un total de plus de 4 millions d’euros. De plus, depuis la loi de 2019, les dix salaires les plus élevés par collectivité publique sont publiés.

S’agissant de l’amendement AS323, je demande son retrait, car nous devons attendre les retours sur l’application d’une disposition qui date de la loi de transformation de la fonction publique de 2019 avant de décider une nouvelle baisse des seuils.

Les amendements sont retirés.

La commission est saisie de l’amendement AS320 de Mme Sonia Krimi.

Mme Sonia Krimi. À Nice, une journée « Boys’Day-Girls’Day » permet de sensibiliser les enfants âgés de 13 à 16 ans aux enjeux de la mixité des métiers en période d’orientation scolaire. Créé en 1993 aux États Unis, le « Boys’Day-Girls’Day » s’est étendu dans d’autres pays d’Europe, tel quel l’Allemagne et la Belgique, et s’adresse aux élèves des premier et second degrés.

Je propose la création d’une telle journée nationale, le 7 mars, la veille de la journée des droits des femmes, pour sensibiliser aux stéréotypes de genre concernant l’orientation scolaire et professionnelle.

Vous constatez que j’insiste : après l’enseignement primaire, puis secondaire, j’en viens aux lycées et je proposerai ensuite des mesures pour les grandes écoles. C’est à cet âge qu’il est très important de combattre ces inégalités, et j’espère que ma proposition recevra un avis favorable.

Mme la rapporteure. Pour des raisons de légistique, il n’est pas possible de prévoir dans la loi le déroulement d’une journée.

Sur le fond, je ne suis pas favorable à une multiplication des journées dédiées à l’égalité entre les femmes et les hommes. La journée internationale de lutte des femmes pour l’égalité de leurs droits, le 8 mars, a une longue, belle et tragique histoire avant son officialisation en 1982. La sensibilisation aux stéréotypes de genre doit se faire de manière quotidienne, sans référence à une journée particulière. Avis défavorable.

Mme Sonia Krimi. Que des hommes fassent le travail habituellement dévolu à des femmes, et inversement, est beaucoup plus important qu’une simple sensibilisation. Fixer cette date à la veille du 8 mars permet d’instaurer une continuité.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS68 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Cet amendement de repli prévoit que le Gouvernement remettra un rapport sur les mesures à mettre en œuvre pour favoriser la mixité entre les femmes et les hommes dans l’accès aux filières de formation.

Mme la rapporteure. Votre demande est satisfaite par les travaux du HCEFH, notamment le rapport de 2017 sur la formation à l’égalité filles‑garçons.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS176 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Il faut assurer la mixité du corps enseignant dans les filières technologiques et professionnelles, principalement composées d’hommes. Un rapport du Gouvernement pourrait formuler des propositions pour valoriser les enseignantes de ces filières.

Mme la rapporteure. Même si je partage l’ambition de cet amendement, je ne serai pas favorable à une demande de rapport – je vous renvoie au bilan de la réforme de la voie technologique de 2016. Comme vous, je crois nécessaire de renforcer la part des femmes dans ces filières. Il est inacceptable de constater que les filières d’ingénieur ne comptent aujourd’hui encore que 28 % de femmes, selon les chiffres fournis par la Conférence des grandes écoles. L’article 5, qui comporte des mesures concrètes pour améliorer la part des femmes dans ces disciplines, permettra de résoudre des difficultés.

Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS177 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Les auditions ont montré que les inégalités risquent de se creuser davantage. En effet, les femmes se dirigent plus facilement vers des filières à l’avenir incertain, alors que les hommes investissent majoritairement les filières formant aux emplois de demain, dans les secteurs du numérique et de la transition environnementale notamment. En outre, beaucoup de métiers, majoritairement exercés par des femmes – hôtesses de caisse, secrétaires médicales – risquent de disparaître. Afin d’éviter à des femmes d’être au chômage demain, nous devons encourager les femmes à choisir les filières d’avenir. La crise sanitaire nous oblige à modifier nos comportements et à penser le monde de demain : le plan de relance doit être mis à contribution pour favoriser la mixité dans les filières d’avenir.

Mme la rapporteure. Vous savez combien je suis sensible à la conditionnalité, en matière de parité, des aides du plan de relance ; nous en parlons régulièrement au sein de la délégation aux droits des femmes.

L’examen du projet de loi de finances au Parlement a permis d’intégrer des dispositions qui contraignent les entreprises bénéficiaires à des efforts en matière de parité. Aux termes de l’article 244, elles sont tenues de publier leur note globale obtenue à l’index de l’égalité professionnelle, le détail des indicateurs composant l’index et, le cas échéant, leurs objectifs de progression.

Nous pourrions réfléchir à la nécessité d’aller plus loin dans le sens d’une répartition équilibrée des aides entre les femmes et les hommes – c’est l’objet de l’article 8. Mais je ne pense pas qu’un rapport puisse faire évoluer cette question, qui relève davantage du projet de loi de finances.

La commission rejette l’amendement.

Article 6 : Améliorer la transparence de l’index de l’égalité professionnelle

La commission est saisie de l’amendement AS79 de Mme Albane Gaillot.

Mme Albane Gaillot. En n’intégrant pas d’indicateur relatif au nombre de femmes parmi les cadres dirigeants, l’index de l’égalité professionnelle fait l’impasse sur le « plafond de verre », qui empêche les femmes d’accéder aux plus hautes fonctions. S’inspirant des recommandations du HCEFH dans son rapport de janvier 2021 intitulé « De la parité à l’égalité professionnelle », notre amendement propose d’intégrer à l’index de l’égalité professionnelle la part des femmes dans les instances de direction.

Mme la rapporteure. Nous partageons le même objectif puisque la mesure des écarts de représentation entre les femmes et les hommes dans les instances dirigeantes figure à l’article 7 de la présente proposition de loi.

L’index de l’égalité professionnelle, tel qu’il est construit, vise à calculer les écarts de rémunération. Il est constitué des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, des écarts de taux d’augmentations individuelles de salaires, du pourcentage de salariées ayant bénéficié d’une augmentation dans l’année suivant leur retour de congé maternité et du nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les dix salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations.

La question de la place des femmes dans les instances de direction est moins une question de rémunération qu’une question de partage du pouvoir. C’est pourquoi il m’a semblé plus pertinent de décorréler cette mesure de l’index de l’égalité professionnelle et de l’inscrire dans un article consacré à une représentation plus équilibrée des femmes parmi les postes à forte responsabilité. Avis défavorable.

Mme Albane Gaillot. Il importe de renforcer l’efficience de cet index, qui ne remplit pas sa mission aujourd’hui. On voit bien que les résultats, parfois mirobolants, sont faussés. On sait, par ailleurs, que les inégalités ne tiennent pas qu’à la rémunération, mais aussi aux perspectives d’évolution et à la possibilité d’occuper un poste de direction dans l’entreprise.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS246 de la rapporteure et des sous-amendements AS365 de Mme Perrine Goulet et AS385 de Mme Carole Grandjean.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’étendre les mesures prévues par l’article 244 de la loi de finances de 2021, qui ne s’appliquent qu’aux entreprises bénéficiaires du plan de relance, à l’ensemble des entreprises assujetties à l’index de l’égalité professionnelle.

Lorsque la note globale de l’index est inférieure à un seuil défini par décret, l’entreprise doit être tenue de publier des objectifs de progression définis par la voie de la négociation collective ou, à défaut d’accord, au sein d’un plan d’action unilatéral, les mesures de correction et de rattrapage qui doivent d’ores et déjà être définies lorsque la note globale obtenue à l’index se situe sous le seuil de 75 points.

Ces nouvelles obligations entreront en vigueur à compter de la publication des indicateurs, en 2022.

Mme Perrine Goulet. Nous proposons de réserver cette disposition aux entreprises de plus de 250 salariés, une échelle plus pertinente pour atteindre cet objectif commun.

Mme Carole Grandjean. Par souci de transparence, les actions mises en œuvre pour réduire les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes doivent aussi faire l’objet d’une publication interne et externe.

Mme la rapporteure. Madame Goulet, j’ai conscience des difficultés que peuvent rencontrer les PME pour calculer les indicateurs et se fixer des objectifs de progression, mais l’index de l’égalité professionnelle a été élaboré en tenant compte des différentes tailles d’entreprises. Avis défavorable.

Madame Grandjean, vous souhaitez préciser que les objectifs de progression et les mesures de correction font l’objet d’une communication interne et externe. Je ne peux que souscrire à cette exigence de transparence. Avis favorable.

La commission rejette le sous-amendement AS365 et adopte le sous-amendement AS385.

Elle adopte l’amendement sous-amendé.

En conséquence, tous les amendements se rapportant aux alinéas 3 et 4 tombent.

La commission est saisie des amendements identiques AS39 de Mme Laurence Trastour-Isnart, AS108 de Mme Karine Lebon, AS132 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et AS148 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Laurence Trastour-Isnart. Le suivi des dispositifs paritaires, souvent insuffisant, ne permet pas de s’assurer que les mesures sont mises en œuvre. La connaissance la plus large possible des avancées en matière d’égalité professionnelle est une première étape vers la réalisation d’une égalité effective. S’inspirant d’une recommandation du HCEFH, cet amendement préparé avec l’association Science-Po au Féminin prévoit que le suivi annuel est assuré par une administration pilote désignée au sein du ministère de l’économie, des finances et de la relance.

Mme la rapporteure. L’obligation de publication des informations, que nous venons de renforcer à l’article 6, permet de mesurer la réalité de l’égalité professionnelle. Cette demande de rapport au Parlement ne me semble donc pas opportune.

L’amendement AS132 est retiré.

La commission rejette les amendements restants.

La commission est saisie de l’amendement AS116 de M. Raphaël Gérard.

Mme Laurence Vanceunebrock. Nous proposons d’intégrer l’index diversité dans le champ de l’index de l’égalité professionnelle afin que les entreprises volontaires puissent se doter des outils nécessaires pour prévenir les inégalités et anticiper les risques discriminatoires auxquelles certaines femmes sont surexposées.

Si le législateur a traité séparément les motifs de discrimination – sexe, orientation sexuelle ou origine –, dans la réalité, les expériences discriminatoires sont simultanées. Ainsi, les femmes afro-descendantes adoptant certaines coupes de cheveux sont exposées à des attitudes discriminatoires. Ces phénomènes tiennent à la surexposition des femmes aux discriminations fondées sur l’apparence physique mais aussi à des dynamiques racistes qui se traduisent par des difficultés à l’embauche ou des freins à la progression professionnelle.

L’étude sur le rôle des origines dans la persistance des inégalités d’emploi et de salaire, parue en juillet 2019, montre que les femmes avec une ascendance migratoire subissent des écarts en matière de taux d’activité et de rémunération vis-à-vis des hommes issus des mêmes groupes ethnoculturels mais aussi vis-à-vis de leurs homologues féminines qui appartiennent au groupe majoritaire. Si nous voulons que toutes les femmes puissent bénéficier des dispositions en faveur de leur émancipation et nous attaquer frontalement aux inégalités de salaires entre les hommes et les femmes, il ne faut plus traiter séparément les questions d’égalité professionnelle et les questions de diversité.

Mme la rapporteure. Vous proposez d’inscrire dans la loi que les entreprises volontaires peuvent publier des indicateurs pour rendre compte de leurs actions en faveur de la représentation de la diversité. Je salue et partage la démarche qui vise à mesurer les politiques de recrutement plus inclusives. Cela repose sur le volontariat et a vocation à essaimer au sein d’autres organisations, publiques ou privées. Mais je pense que l’inscrire dans le code du travail conduirait à en affaiblir et à en dénaturer la portée. Je vous propose de retirer cet amendement.

Mme Laurence Vanceunebrock. Je compte y retravailler en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6.

La commission est saisie de l’amendement AS69 de Mme Valérie Six.

Mme Valérie Six. Il s’agit de garantir une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des chambres de commerce et d’industrie en prévoyant que la proportion des délégués consulaires de chaque sexe ne peut être inférieure à 40 %. Il semble que ce soit déjà le cas dans la pratique, mais je préfère que cela soit inscrit dans la loi.

Mme la rapporteure. La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes prévoit que les candidats à la chambre de commerce et d’industrie aient un suppléant du sexe opposé. L’instauration d’un binôme paritaire devrait conduire à une meilleure représentation des femmes. Votre amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS204 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Nous proposons de réduire à deux ans le délai laissé à l’entreprise de plus de 50 salariés pour se mettre en conformité en matière d’égalité professionnelle, afin d’enclencher le changement sociétal et économique attendu depuis de nombreuses décennies. Cet amendement ne remet pas en cause le délai supplémentaire d’un an qui peut être accordé au titre de l’alinéa 3 de l’article L. 1142-10 aux entreprises qui seraient en mesure de justifier des résultats en deçà des attentes.

Mme la rapporteure. L’index a été conçu en tenant compte des situations propres à chaque taille d’entreprise. Les entreprises de 50 à 250 salariés ont bénéficié d’une année supplémentaire pour s’approprier ce nouvel outil. Elles intègrent progressivement ces mesures et une réduction du délai de mise en conformité bousculerait inutilement leur dynamique interne. Notre volonté n’est pas de pénaliser les entreprises, mais de les accompagner. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS80 de Mme Albane Gaillot.

Mme Albane Gaillot. Si l’on veut que les entreprises s’engagent réellement dans la réduction des inégalités professionnelles, la sanction en cas de non-respect de leurs obligations doit être à la hauteur des enjeux et suffisamment dissuasive. On a vu que certains partis politiques préfèrent payer les amendes plutôt que de présenter des listes paritaires : le même phénomène pourrait se produire au sein des entreprises. Nous proposons donc de prévoir que la pénalité pourra atteindre 10 % de la masse salariale de l’entreprise.

Mme la rapporteure. Les entreprises risquent une pénalité lorsque leur note demeure inférieure à 75/100 durant trois années consécutives. Ce ne sera donc qu’au 1er mars 2022, pour celles de plus de 250 salariés, et au 1er mars 2023, pour celles de plus de 50 salariés, que les entreprises encourront les premières sanctions. Il est trop tôt pour évaluer le caractère dissuasif de ces pénalités. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie des amendements identiques AS109 de Mme Karine Lebon, AS205 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS287 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Karine Lebon. Cet amendement vise à transformer en obligation la possibilité d’établir un plan pour l’égalité professionnelle, afin d’enclencher rapidement ce changement sociétal et économique attendu depuis si longtemps.

Le plan pour l’égalité professionnelle permet de diagnostiquer et d’analyser la situation comparée des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles de l’entreprise en matière d’embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de sécurité et de santé au travail, de rémunération effective et d’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ; les écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de l’âge, de la qualification et de l’ancienneté ; l’évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise ; la part des femmes et des hommes dans le conseil d’administration.

Mme la rapporteure. Vous proposez en fait de rétablir les obligations inhérentes au rapport de situation comparée, supprimées par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi.

Le contenu de ce rapport figure désormais dans la rubrique sur l’égalité professionnelle de la base de données économiques et sociales. Ces données se trouvent cependant diluées au milieu de toutes les autres obligatoirement collectées par l’employeur. Je partage votre objectif de faire la lumière dessus, car elles sont déterminantes, mais il apparaît que le plan n’est pas la meilleure entrée juridique pour y parvenir. Je vous propose de retirer vos amendements afin que nous les retravaillions ensemble.

Mme Karine Lebon. Je retire mon amendement dans cette optique, madame la rapporteure.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Rendez-vous est pris !

Les amendements sont retirés.

La commission est saisie des amendements AS11, AS12, AS10 et AS13 de M. Raphaël Gérard.

Mme Laurence Vanceunebrock. Ces quatre amendements ont le même objectif : lutter contre les inégalités dans le monde professionnel. Ils visent à doter les entreprises de nouveaux outils en matière de lutte contre les discriminations et le harcèlement discriminatoire.

Le constat est connu et a été documenté par de nombreuses instances, comme le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP) : les femmes sont surexposées à des risques discriminatoires dans le monde du travail, ce qui crée des écarts en matière d’embauche, de rémunération et de progression de carrière.

Le droit prévoit déjà un certain nombre d’outils pour lutter contre les discriminations subies par les femmes : il prévoit un principe de non-discrimination qui interdit les traitements différenciés, fondés sur des critères tels que le sexe ; il intègre la question du harcèlement sexuel et des agissements sexistes dans le plan de prévention des risques ; il identifie des référents pour accompagner les salariés qui s’estiment victimes de sexisme et proposer des modalités d’action pour prévenir ce type d’agissements ou de harcèlement.

Pourtant, il n’est pas complètement protecteur pour l’ensemble des salariés. Les femmes peuvent, en effet, subir des actes discriminatoires sur le fondement d’autres critères – j’ai évoqué le cas de femmes afro-descendantes dont la carrière peut pâtir de leur choix d’arborer une coupe afro. Les femmes trans sont particulièrement exposées aux attitudes discriminatoires, notamment lorsque leur apparence physique n’est pas conforme à l’imaginaire féminin défini par la société.

Pour l’ensemble de ces raisons, il nous semble opportun d’étendre le champ des dispositifs initialement pensés pour combattre le sexisme à l’ensemble des discriminations, qu’il s’agisse des référents au sein des comités sociaux d’entreprise, de l’identification du harcèlement discriminatoire comme risque professionnel ou encore de la prise en charge des victimes dans les grandes entreprises. Cela s’inscrit dans la continuité de l’action de notre majorité. Dans la mesure où nous avons adopté dans le cadre du projet de loi sur la réforme de la fonction publique des dispositifs similaires pour les salariés au sein des administrations publiques, il paraît cohérent d’offrir les mêmes garanties de protection aux salariés du privé.

Mme la rapporteure. Par les amendements AS11 et AS10, vous proposez de préciser que le référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes agisse également contre les discriminations. Cette fonction s’inscrit pleinement dans la démarche d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Sur le fond, je souscris à votre volonté de lutter contre les discriminations dans l’entreprise, mais il me semble superfétatoire de le préciser car les actions concrètes menées par le référent y contribuent déjà très largement.

L’amendement AS12 vise à ce que les négociations collectives obligatoires portent également sur les outils pour prévenir et agir contre les discriminations. L’article L. 2241-1 du code du travail précise déjà que ces négociations portent sur « les mesures tendant à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sur les mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées ainsi que sur la mise à disposition d’outils aux entreprises pour prévenir et agir contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. » Je propose de nous en tenir au droit existant.

Enfin, l’amendement AS13 vise à préciser que l’employeur met en œuvre les mesures nécessaires pour prévenir les risques liés aux agissements sexistes mais également pour lutter contre les discriminations. Je partage votre volonté de faire de la lutte contre les discriminations un principe général de prévention au sein de l’entreprise mais j’émettrai, comme sur les autres amendements, un avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

La commission est saisie de l’amendement AS117 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. J’espère vous convaincre d’adopter cet amendement essentiel, qui concerne l’équité salariale. Contrairement à l’égalité salariale, ce sujet n’est jamais abordé alors que l’article L. 3221‑2 du code du travail dispose que « tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. » L’équité salariale, c’est l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale.

Nous ne disposons pas d’outils pour mesurer l’équité salariale. C’est pourquoi je propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur cette question. Il y a une dizaine d’années, la province de Québec a publié un rapport de ce type, qui a permis de mettre en relief des écarts de salaires monumentaux entre des professions à prédominance féminine et des professions à prédominance masculine ayant la même valeur de travail. Ce rapport serait un outil de base essentiel pour identifier les discriminations et, dans un second temps, y remédier.

Mme la rapporteure. En cohérence avec les dispositions que nous venons d’adopter en faveur d’une transparence accrue, je suis favorable à ce rapport qui compilera efficacement l’ensemble des données relatives à l’égalité professionnelle et à l’équité salariale.

La commission adopte l’amendement.

Article 7 : Étendre l’objectif de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes aux instances dirigeantes des entreprises

La commission est saisie de l’amendement AS311 de la rapporteure, faisant l’objet des sous-amendements AS386 de Mme Albane Gaillot, AS379 et AS380 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS366 de Mme Annie Chapelier, AS363 de Mme Perrine Goulet, AS367 de Mme Annie Chapelier, AS362 de Mme Perrine Goulet, AS381 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS387 de Mme Albane Gaillot, AS368 de Mme Annie Chapelier, AS382 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS372 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS388 de Mme Albane Gaillot, AS383 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS389 de Mme Céline Calvez.

Mme Marie-Pierre Rixain, rapporteure. Je vous propose une réécriture globale de l’article 7 car la force et l’opérationnalité du dispositif reposeront sur la définition exacte du périmètre concerné.

Les nombreuses auditions que nous avons menées ont forgé ma conviction : la notion de « 10 % de postes à forte responsabilité » initialement prévue est trop ambiguë quant au public visé. Tant le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes que le code de gouvernement d’entreprise de l’AFEP-Medef ont tenté de définir la notion d’instance dirigeante, qui vise les comités exécutifs (Comex), les comités de direction (Codir) et, plus largement, l’encadrement supérieur. Aucune de ces propositions ne m’a paru satisfaisante. C’est pourquoi je vous propose d’introduire un nouvel article au sein du code de commerce définissant les instances dirigeantes concernées par le dispositif de l’article 7 de la façon suivante : « Est considérée comme instance dirigeante toute instance mise en place au sein de la société par tout acte ou toute pratique sociétaire aux fins d’assister régulièrement les organes en charge de la direction générale dans l’exercice de leurs missions. »

J’introduis également le vivier des cadres dirigeants, déjà définis à l’article L. 3111-2 du code du travail, afin de prendre en compte le vivier le plus large possible. Dans la mesure où je ne souhaite pas que les entreprises définissent elles-mêmes le périmètre à prendre en compte, l’article 7 précise que le dispositif s’applique aux cadres dirigeants et aux cadres membres des instances dirigeantes.

Cet amendement explicite également les modalités de contrôle et de respect du dispositif par l’inspection du travail dans un nouvel article L. 1142-13 du code du travail.

Enfin, je précise que l’application de l’éventuelle pénalité financière tiendra compte à la fois de la situation initiale de l’entreprise, des efforts qu’elle poursuit et des motifs éventuels de sa défaillance.

Je profite de cette présentation pour dire un mot de certaines propositions de mes collègues.

Je ne suis pas favorable à la prise en compte du nombre de cadres présents dans l’entreprise pour déterminer le vivier. Malheureusement, il n’existe aucune corrélation entre le pourcentage de femmes dans les comités exécutifs et de direction et le nombre de femmes cadres au sein de l’entreprise. Les données concernant les entreprises du CAC 40 sont sans appel : les femmes représentent 33,72 % des cadres alors qu’elles ne représentent que 20,37 % des comités exécutifs. Là se situe le plafond de verre empêchant les femmes cadres de gravir les derniers échelons de l’entreprise. Si nous instaurons des objectifs chiffrés tenant compte de la population des cadres, nous ne résoudrons en rien ce problème.

Par ailleurs, si je ne suis pas favorable à la suppression de la pénalité financière, je le suis à l’introduction d’un bilan de mi-étape dans le délai de deux ans de mise en conformité afin d’assurer un suivi et un accompagnement toujours plus fins de la trajectoire des entreprises.

Mme Albane Gaillot. Il convient d’étendre progressivement les objectifs paritaires aux instances de gouvernance de toutes les entreprises, quel que soit le nombre de leurs salariés, mais présentant un minimum de 50 millions de chiffre d’affaires : 20 % en 2023 et 40 % en 2025.

Cela permet de tenir compte des recommandations formulées par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes dans son rapport de janvier 2021 : De la parité à l’égalité professionnelle. Ainsi, ne sont pas concernées les entreprises d’au moins 1 000 salariés mais celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 50 millions d’euros ; les objectifs de représentation minimale de chaque sexe sont fixés à 20 % en 2023 plutôt qu’à 30 % en 2026 et à 40 % en 2025 plutôt qu’à 40 % en 2029.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Suite à une suggestion du mouvement Impact France, nous proposons d’abaisser le seuil d’effectif des entreprises devant publier une photographie genrée des 10 % de postes à plus forte responsabilité en leur sein de 1 000 à 50 salariés. Il convient en effet de renforcer fortement l’ambition de l’article 7 en étendant sa portée aux entreprises de plus de 50 salariés, ou de 250 salariés, soit le seuil des entreprises de taille intermédiaire.

Nous proposons également, avec le sous-amendement AS381, de fixer la proportion minimale de représentation de chaque sexe parmi les postes à forte responsabilité à 40 % à cinq ans et à la parité à huit ans, contre respectivement 30 % et 40 % dans le texte.

Il importe de durcir le montant de la pénalité prévue en cas de non-respect des obligations de représentation de chaque sexe au sein des postes à forte responsabilité en fixant celui-ci dans une fourchette comprise entre 1 % et 5 % des rémunérations et gains versés aux travailleurs salariés ou assimilés, comme le propose le sous-amendement AS382.

Enfin, il convient d’accélérer les différentes phases du calendrier d’entrée en vigueur des dispositions de l’article 7 en les fixant à trois et cinq ans, contre cinq et huit ans, ce que propose le sous-amendement AS383.

Mme Annie Chapelier. Par cohérence avec la loi Copé-Zimmermann, le seuil doit passer de 1 000 – soit 0,04 % des entreprises… – à 500 salariés, ainsi que le propose le sous-amendement AS366.

Le sous-amendement AS367 prévoit que dans les entreprises d’au moins 1 000 salariés, l’employeur publie chaque année un indicateur relatif aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes pour les 10 % des postes les moins rémunérateurs de l’entreprise, qui sont d’ailleurs les plus féminisés.

Le délai supplémentaire de deux ans accordé pour l’application de la loi, que le sous-amendement 368 propose de supprimer, est inique puisque les entreprises qui n’auront pas respecté le calendrier proposé pourront encore « jouer la montre » alors que d’autres auront « joué le jeu » en respectant la loi et en faisant des efforts.

Enfin, il convient de confier aux agents de contrôle de l’inspection du travail la mission de constater les résultats obtenus ; c’est l’objet du sous-amendement AS372.

Mme Perrine Goulet. Afin d’éviter les effets de seuil et d’impulser ce mouvement plus précocement, nous proposons, avec le sous-amendement AS363, une autre logique de graduation : dans les PME de plus de 250 salariés, l’employeur publie chaque année un indicateur relatif aux écarts de représentation entre les femmes et les hommes aux postes d’encadrement mais seulement à des fins de transparence et de pédagogie, sans qu’il y ait de sanction financière.

Il convient également de rehausser la trajectoire des taux de représentation minimale de chaque sexe afin de parvenir à une représentation minimale de 40 % de chaque sexe à cinq ans, puis 50 % à huit ans. Dans le cas où l’effectif des cadres dirigeants et des cadres membres des instances dirigeantes est un nombre impair, la différence de représentation entre chaque sexe ne peut excéder un.

M. Gaël Le Bohec. Il faut accélérer la représentation équilibrée des sexes au sein des entreprises appartenant à un groupe d’au moins 5 000 salariés tant, selon l’AFEP, les entreprises intégrées dans de tels groupes sont mieux à même d’appliquer cette mesure.

Selon des données de l’INSEE, on compte 287 grandes entreprises sur près de 4 millions. Elles emploient près de 4 millions de salariés en équivalent temps plein, soit 30 % du total de salariés. Depuis la loi de modernisation de l’économie de 2008, elles sont considérées comme telles dès lors qu’elles comptent au moins 5 000 salariés ou plus de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires et plus de 2 milliards d’euros de total de bilan.

Mme la rapporteure. Parce que le dispositif prévu par l’article 7 repose sur la capacité de l’entreprise à constituer un vivier de femmes dirigeantes, il me semble décisif de tenir compte du nombre de salariés, la loi Copé-Zimmermann faisant par ailleurs du montant du chiffre d’affaires un critère cumulatif à celui de la taille de l’entreprise. Afin de rendre ce dispositif simple, opérationnel et, surtout, lisible pour les entreprises, je vous propose de nous en tenir au seul critère des 1 000 salariés.

Dix ans après la promulgation de la loi Copé-Zimmermann, l’article 7 constitue une nouvelle étape ambitieuse en matière d’égalité professionnelle. Comme vous, je regrette que le succès de cette loi sur les quotas dans les conseils d’administration et de surveillance n’ait pas eu un effet de ruissellement sur l’accession des femmes à des postes à plus haute responsabilité : en 2021, les entreprises du CAC 40 ne comptent aucune femme présidente directrice générale (PDG), aucune femme présidente de conseil d’administration et seulement une femme directrice générale. Pourtant, le vivier existe puisque les femmes représentent plus d’un tiers de la population des cadres de ces entreprises. Comment dès lors expliquer qu’elles ne représentent que 20,37 % de leurs comités exécutifs, si ce n’est par l’épaisseur du plafond de verre ?

La réussite du nouvel arsenal législatif repose sur une définition réaliste du périmètre. Je rappelle qu’à l’origine, la loi Copé-Zimmermann avait vocation à s’appliquer aux sociétés cotées ou non cotées dès lors qu’elles emploient au moins 500 salariés et réalisent un chiffre d’affaires et un total de bilan d’au moins 50 millions d’euros. Le dispositif que nous proposons est beaucoup plus simple : il s’applique aux très grandes entreprises, de plus de 1 000 salariés. Ce seuil est à la fois ambitieux et réaliste : ambitieux, car les nouvelles obligations introduites ne seront pas minces ; réaliste, car ce seuil constitue une taille critique permettant des effets concrets sur la mixité dans les instances dirigeantes tout en prenant en compte la réalité des entreprises de moins de 1 000 salariés.

Nous avons toutes les raisons de penser que les entreprises de taille plus modeste seront entraînées dans ce mouvement et qu’elles seront amenées à diversifier le recrutement de leurs cadres. Un abaissement du seuil à 250 salariés ferait peser sur elles une charge trop lourde, ce à quoi je me refuse. Notre objectif n’est pas de sanctionner les entreprises mais de les accompagner et de faire en sorte que la représentation des femmes et des hommes soit meilleure au sein des instances de direction.

Je suis également défavorable au seuil de 500 salariés.

Je comprends la volonté d’abaisser le seuil prévu pour la publication de l’indicateur aux entreprises de 250 salariés mais, par cohérence avec l’ensemble du dispositif, je vous propose là encore d’en rester au périmètre de 1 000 salariés.

Je partage la volonté politique de faire la lumière sur les inégalités dont sont victimes les salariés les plus modestes mais l’introduction d’un nouvel indicateur ne me paraît pas opportune pour deux raisons.

Il s’agit du périmètre de l’article 7 tout d’abord. Nous devons concentrer nos efforts sur la question du partage du pouvoir et des responsabilités entre les femmes et les hommes au sein des entreprises, la question de la rémunération n’y étant pas totalement corrélée. La réduction des inégalités salariales grâce à cet outil qu’est l’index de l’égalité professionnelle – dont nous avons généralisé les dispositions à l’article 6 – est un progrès sans pour autant que celui-ci soit le gage d’une égalité parfaite entre les femmes et les hommes dans les entreprises.

Ensuite, d’après l’INSEE, les 10 % de femmes les moins bien rémunérées ont perçu un salaire inférieur de 5 % à celui des hommes. L’écart est donc faible au bas de l’échelle salariale. En revanche, les 10 % de femmes les mieux rémunérées ont touché un salaire inférieur de 19 % à celui des hommes. Plus on monte dans l’échelle des salaires, plus l’écart salarial se creuse.

Plusieurs sous-amendements proposent un échéancier en fixant un objectif de 40 % d’ici à cinq ans, contre huit ans dans la proposition de loi, et 50 % d’ici à huit ans. À l’instar de l’application par paliers de la loi Copé-Zimmermann, cet article tient compte de la situation présente des entreprises afin de fixer des objectifs qui ne soient pas déraisonnables, donc, inapplicables. Je rappelle que la loi Copé-Zimmermann prévoyait une application graduelle : une représentation minimale de 20 % dans les trois ans et de 40 % dans un délai de six ans. À la différence des conseils d’administration et de surveillance, qui accueillent en leur sein des personnalités extérieures à l’entreprise et des membres élus pour une durée déterminée, renouvelée, fixée par leur mandat, les instances dirigeantes visées par cet article concernent directement les cadres internes. Le mouvement n’est donc pas le même. Le renouvellement de personnels y est moins fréquent puisque fondé sur le contrat de travail, bien souvent à durée indéterminée.

L’efficacité du dispositif proposé repose sur la capacité des sociétés visées à recruter, mais également à promouvoir des cadres féminins. La progressivité est donc plus justifiée compte tenu du fonctionnement des entreprises, qui doivent s’approprier ces nouvelles obligations contraignantes. Je suis convaincue que les entreprises ont besoin de temps pour intégrer et appliquer ce dispositif.

Les entreprises doivent être en effet conscientes qu’il leur faut dès aujourd’hui s’atteler au problème de l’égalité entre les femmes et les hommes, mais seul un échéancier raisonnable permettra qu’il en soit durablement ainsi. Le dispositif envisagé prévoit qu’au terme d’un délai de huit ans, l’autorité administrative constate le non-respect des objectifs assignés à l’entreprise, à laquelle il ne serait pas réaliste de demander qu’elle se conforme immédiatement à ses préconisations, d’autant plus que la mesure proposée prévoit des sanctions financières non négligeables. Je vous propose donc de nous en tenir à un délai de mise en conformité de deux ans.

L’inspection du travail joué un rôle clé dans le contrôle des obligations assignées aux entreprises, en particulier concernant l’index de l’égalité professionnelle. Depuis 2019, près de 20 000 interventions ont été menées par ses services. La précision du sous-amendement AS372 me semble donc superflue et j’invite Mme Chapelier à bien vouloir le retirer.

La volonté d’augmenter le plafond de la pénalité financière entre 1 % et 5 % de la masse salariale illustre combien la représentation nationale ne manque pas d’ambition pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’entreprise mais le maintien à 1 % du plafond de la masse salariale me semble préférable pour deux raisons : le montant de la sanction financière est cohérent avec d’autres montants en matière d’égalité salariale, notamment celui de l’index de l’égalité professionnelle ; par ailleurs, je redoute qu’une trop forte coercition soit contre-productive. Notre objectif politique est de faire en sorte que les entreprises s’approprient cette nouvelle obligation et non qu’elles se sentent menacées, donc, paralysées par une épée de Damoclès qui les fragiliserait. Je vous rappelle, enfin, qu’il s’agit de fixer un plafond mais que l’autorité administrative restera souveraine dans son application. Imaginons qu’une sanction financière de plus de 1 % de la masse salariale menace la pérennité de l’entreprise : je doute fort que l’inspection du travail inflige une amende qui ferait courir un risque de faillite.

Il n’est pas déraisonnable d’imaginer que les grandes entreprises de 5 000 salariés disposent d’ores et déjà d’un vivier de femmes cadres plus important qui leur permettrait d’atteindre plus rapidement les objectifs mais je doute de la portée d’une différence de traitement par rapport aux entreprises de 1 000 salariés. Malheureusement, il n’y a pas de corrélation entre la présence de femmes cadres et parmi les instances dirigeantes. Les difficultés rencontrées pour les entreprises de 5 000 salariés pour féminiser l’ensemble de la chaîne seront similaires à celles éprouvées par les entreprises de 1 000 salariés. De surcroît, dans une perspective de lisibilité et d’efficacité, il me semble préférable de retenir un seul seuil.

J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces sous-amendements.

Mme Carole Grandjean. Nous sommes tous déterminés à changer la donne contre ces discriminations massives puisque les femmes représentent 52 % de la population française.

Leur représentation dans les entreprises du CAC 40 est en effet très en-deçà de ce que l’on pourrait attendre et le seuil de 1 000 salariés nous paraît intéressant pour engendrer un effet de ruissellement. La loi Copé-Zimmermann a changé les choses puisque les conseils d’administration comptent désormais 43 % de femmes mais, en l’occurrence, l’effet de ruissellement ne s’est pas produit et nous devons maintenant accélérer ce processus en visant des entreprises bien visibles sur les marchés et influentes : leurs acteurs pèsent sur les activités, sur les négociations de branches, sont en lien avec l’enseignement supérieur, et les femmes qui y travaillent ont un rôle exemplaire à jouer.

Le rythme proposé nous semble réaliste. Ces entreprises, quelles qu’elles soient, doivent pouvoir s’engager dans cette réforme qui, par ailleurs, est également lisible, les entreprises ayant besoin de clarté.

Je salue la précision dont Mme la rapporteure a fait preuve en ce qui concerne les sanctions : une mesure qui n’en comporterait pas serait sans effet, tout comme une sanction par trop disproportionnée. Un juste équilibre est donc nécessaire pour que la sanction soit à la fois efficace et incitative.

Si, depuis le chapitre « Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes » de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, les contrôles sont passés de 1 700 à 7 000, c’est qu’il est possible de mesurer les inégalités et de les sanctionner.

L’amendement de Mme la rapporteure me paraît donc être équilibré.

Mme Annie Chapelier. Je ne remets absolument pas en question l’échéancier, ni même l’idée du calendrier, mais je considère que la période de deux années supplémentaires introduit une inégalité entre les entreprises. En effet, certaines se feront un honneur d’atteindre l’objectif au bout de huit ans, quand d’autres feront traîner les choses deux années supplémentaires. Le même délai doit valoir pour tout le monde, et à son expiration, il faut que les sanctions tombent.

S’agissant de la demande de publication d’un indicateur supplémentaire portant sur les écarts de représentation, nous avons sciemment opté pour l’expression « postes les moins rémunérateurs » car, dans le monde du travail, il est difficile de s’entendre dire que l’on exerce un poste à plus faible responsabilité. Il est donc délicat d’inscrire cette expression en regard des « postes à plus forte responsabilité ». Il se trouve que, très souvent, les postes à plus faible responsabilité sont aussi les moins rémunérés. Quoi qu’il en soit, il me paraît important d’ajouter cet indicateur en miroir de l’autre.

Les chiffres que vous avanciez sont tout à fait pertinents : il y a effectivement peu de différences de salaire entre hommes et femmes dans les postes les moins rémunérateurs. La différence réside dans la proportion de ceux qui les exercent : à 95 %, il s’agit de femmes. Ce qui frappe et doit être montré, c’est le fait que les métiers dans lesquels on a le moins de responsabilités sont moins rémunérés et le plus souvent exercés par des femmes.

Si vous en êtes d’accord, je retirerai le sous-amendement AS367 pour le retravailler avec vous afin d’aboutir à une rédaction plus adaptée.

Mme Céline Calvez. Merci pour les précisions que vous nous avez données, madame la rapporteure. Vous avez raison : il faut un seuil. Vous proposez de le fixer à 1 000 salariés. Or certaines entreprises de cette taille appartiennent à des groupes bien plus grands, comptant parfois plus de 5 000 salariés. Tout en maintenant le seuil de 1 000 salariés, mon sous-amendement prévoit une accélération de la mise en œuvre du dispositif pour les entreprises intégrées à de grands groupes. Le vivier de femmes susceptibles d’exercer des responsabilités y est plus large, ce qui permet d’atteindre l’objectif plus facilement. Peut-être faudrait-il en clarifier la rédaction, mais ce sous-amendement me paraît de nature à tenir compte du fait qu’il existe des situations différentes.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Nous voudrions tous ici que la parité s’installe naturellement, mais ce n’est absolument pas le cas – on en fait le constat chaque jour. Vous avez dit en substance, madame la rapporteure, que la parité ne devait pas être une charge, qu’elle ne devait pas pénaliser les entreprises ; pour ma part, je la considère comme une chance.

En ce qui concerne le plafond prévu pour la pénalité dans le sous-amendement AS382, j’entends votre argument : selon vous, une sanction comprise entre 1 % et 5 % pourrait peser de manière trop importante sur les entreprises. Le problème est que l’article 7 ne prévoit pas de plancher. Il convient donc de préciser le dispositif.

Mme Albane Gaillot. Vous avez rappelé, madame la rapporteure, l’ampleur des inégalités qui perdurent entre les femmes et les hommes dans le monde de l’entreprise. Plusieurs études montrent que l’index dont nous avons voté la création n’est pas assez efficace.

La proposition de loi va dans le bon sens ; elle vise à donner un coup d’accélérateur, j’en ai pleinement conscience, et comporte de très bonnes mesures. Toutefois, s’agissant de l’article 7, je ne suis pas d’accord lorsque vous dites que certaines des propositions de sous-amendements vont trop loin et risqueraient de mettre les entreprises en faillite. Certaines de ces propositions sont de bon sens et permettraient d’avoir un dispositif beaucoup plus abouti et efficace. Comme Mme Battistel, je considère que l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est une chance pour toutes les entreprises. Nous devons accélérer en la matière et prendre des mesures plus concrètes et efficaces.

Mme Perrine Goulet. Je peux entendre vos arguments en ce qui concerne la fixation du seuil à 50 %. En revanche, je ne comprends pas pourquoi vous ne souhaitez pas prévoir une étape intermédiaire pour les entreprises situées entre 250 et 1 000 salariés. Non seulement cela permettrait d’éviter l’effet de seuil, mais de nombreux territoires où l’on ne trouve pas forcément des entreprises de plus de 1 000 salariés pourraient ainsi commencer à s’engager dans la direction de l’égalité femmes-hommes. On ne doit pas oublier les femmes qui vivent dans ces territoires. Dans le mien, par exemple, si l’on conserve le seuil de 1 000 salariés, aucune entreprise ne sera concernée. On peut le garder pour le déclenchement des pénalités, mais il faut prévoir une application du dispositif dès 250 salariés, pour commencer à impulser une dynamique dans ces entreprises.

M. Jean-René Cazeneuve. Si l’amendement de la rapporteure est adopté, il fera tomber tous les suivants. Je me permettrai donc d’expliquer certains de ceux que j’avais déposés.

D’abord, je salue cette proposition de loi et les objectifs qu’elle poursuit. Le fait que les femmes ne soient pas représentées de manière juste dans les instances de direction est un scandale pour notre pays. Il faut donc, sans aucune ambiguïté, travailler à y remédier. Cela dit, nous devons nous assurer du caractère opérationnel des mesures que nous prenons. Or, nous pourrions être un peu plus ambitieux en ajoutant un seuil de 200 cadres. En effet, beaucoup d’entreprises, notamment dans l’ingénierie et le conseil, ont de très fortes populations de cadres, sans pour autant atteindre les 1 000 salariés.

En ce qui concerne la définition des instances dirigeantes, la réécriture proposée me semble satisfaisante. Pourriez-vous toutefois me confirmer que, dans le dernier alinéa, vous visez bien les groupes ?

Fixer un objectif uniforme pour l’ensemble des entreprises ne me paraît pas adapté à la réalité. Vous avez parlé à juste titre de viviers. Notre objectif est de faire en sorte qu’ils soient plus larges. Toutefois, de fait, il existe de très fortes disparités entre les entreprises selon le secteur d’activité : elles n’ont pas toutes la même capacité à attirer des femmes de talent. Il serait plus adapté de fixer un objectif tenant compte de la proportion de femmes cadres dans chaque entreprise. Dans une entreprise qui compte 50 % de femmes cadres, l’objectif de 30 % dans les instances dirigeantes n’est pas assez ambitieux : il faudrait le fixer à 50 %. À l’inverse, dans une entreprise où la proportion n’est que de 10 % de femmes cadres, un objectif de 30 % puis de 40 % peut induire un certain nombre d’effets pervers, liés notamment au fait que le turn-over n’est pas très important. D’une façon générale, il convient d’être plus ambitieux, car la proportion moyenne est de 33 % de femmes cadres. L’objectif devrait donc être à tout le moins de 33 %. Cela dit, je le répète, il convient de l’adapter au vivier de chaque entreprise pour éviter les effets pervers.

Enfin, le fait de prévoir une pénalité correspondant à 1 % des rémunérations et gains me paraît disproportionné. Cela risque de nuire aux entreprises ayant une masse salariale très importante et produisant de la valeur ajoutée, tandis que celles dont le chiffre d’affaires est très important mais ayant une masse salariale faible seraient moins touchées. J’ai bien compris qu’une adaptation était prévue en fonction de la situation et des efforts consentis, ce qui va dans le bon sens ; il n’en reste pas moins que cette disposition me paraît disproportionnée et susceptible de produire des effets pervers.

M. Gaël Le Bohec. Pour en revenir à l’excellent sous-amendement de Céline Calvez, celui-ci fixe effectivement un seuil complémentaire. Celui de 1 000 salariés serait donc conservé. Moi-même, j’ai travaillé dans un groupe industriel comptant une dizaine d’usines en France. Chacune était indépendante, même s’il y avait des participations croisées, et comptait 300 personnes environ. Ces usines n’entreraient pas dans le périmètre du texte, alors que le groupe dans son ensemble avait largement les moyens de consentir une avancée comme celle qui est proposée. Cet exemple me permet également de rebondir sur l’excellent argument de Perrine Goulet concernant la parité dans les territoires, en particulier dans leurs industries. Je suis donc favorable, pour ma part, à ce sous-amendement.

Qu’entendez-vous par « instances dirigeantes » ? Autant la notion de « cadre » est factuelle et précise, autant celle-ci, que vous proposez dans cette nouvelle rédaction, me semble plus difficile à comprendre. Est-ce un comité de direction, un comité exécutif, un board ? J’ai reçu ce matin un bilan réalisé par la Banque de France, montrant une organisation par cercles. L’un d’entre eux comptait une quinzaine de personnes – je ne sais pas s’il s’appelle « comité exécutif ». Un autre cercle, recoupant en partie le premier, s’appelle « comité d’audit ». Ce comité d’audit serait-il considéré comme une « instance dirigeante » ?

Mme la rapporteure. Je ne crois pas que je considérerai jamais la parité comme une charge plutôt que comme une chance. Dans le cas contraire, je ne serais pas devant vous pour présenter ce texte.

Par ailleurs, je suis absolument convaincue que l’égalité économique entre les femmes et les hommes est une question non seulement de droit mais aussi de bénéfices et de croissance. Cela a été démontré : l’égalité constitue une source de bénéfices et de croissance pour les femmes, pour les entreprises et pour notre économie.

L’objectif de ce texte n’est ni d’aller trop lentement ni d’agir trop faiblement. Ce n’est pas non plus de sanctionner les entreprises. Il s’agit clairement de faire en sorte que les femmes puissent enfin accéder aux postes de direction dans les entreprises.

En ce qui concerne le volume qui doit être pris en considération, c’est bien le nombre de salariés concernés – je pense aux femmes susceptibles d’accéder à des postes de responsabilité et qui se heurtent au fameux plafond de verre, à savoir le mécanisme, lié à un certain nombre de phénomènes culturels à l’intérieur des entreprises, empêchant les femmes d’entrer dans un cercle de pouvoir.

Lors de son audition devant la délégation aux droits des femmes, Christine Lagarde, forte de son expérience personnelle à la tête d’un certain nombre d’entreprises et de sa situation en tant que femme dans un monde d’hommes, nous a alertés sur deux points : la lisibilité de la mesure et sa granularité. Ces deux éléments sont notre boussole.

S’agissant de la lisibilité, je suis absolument convaincue de la nécessité de fixer un seuil unique pour toutes les entreprises. Or, si nous l’abaissons en dessous de 1 000 salariés, la mesure ne sera plus opérationnelle dans un certain nombre d’entreprises ; en revanche, il faut conserver un seuil minimal de 1 000 salariés, sans quoi le volume total de femmes concernées sera trop faible, ce qui limitera l’impact du dispositif.

En ce qui concerne la granularité, il faut prendre en compte toutes les femmes ayant un statut de cadre dirigeant. À cet égard, seules la moitié environ des sociétés dont nous parlons ont des femmes cadres dirigeantes. C’est la raison pour laquelle nous proposons une définition de la notion d’instance dirigeante. Si nous ne le faisions pas, une partie des entreprises ne seraient pas concernées par la mesure. Je vous rappelle celle qui figure dans mon amendement : « Est considérée comme instance dirigeante toute instance mise en place au sein de la société par tout acte ou toute pratique sociétaire aux fins d’assister régulièrement les organes en charge de la direction générale dans l’exercice de leurs missions » – à savoir les comités exécutifs (COMEX) et les comités directeurs (CODIR).

Quant aux pénalités financières, je suis convaincue qu’en 2030, les entreprises ne seront pas obligées de les payer : d’ici là, elles auront compris la nécessité de permettre aux femmes d’accéder aux postes de direction. Dès lors, il n’y a pas lieu de considérer que l’amende prévue est trop élevée et risque de mettre en cause le fonctionnement même des entreprises. Un grand nombre d’entreprises ont déjà adopté une démarche volontariste. Par ailleurs, le fait de rendre publics leurs efforts et leur progression produira une forme d’émulation. S’agissant des entreprises cotées au SBF 120, l’indice environnemental, social et de gouvernance (ESG) est d’ores et déjà déterminant pour les investisseurs. Enfin, M. Cazeneuve, le texte que je vous soumets prévoit que l’autorité administrative doit prendre en compte les efforts réalisés par l’entreprise, le point de départ et les raisons de sa défaillance éventuelle. Si une entreprise, en raison de problèmes économiques liés à son fonctionnement ou de difficultés à recruter dans son vivier géographique, ne parvenait pas à remplir les objectifs que la loi lui assigne, l’amende pourrait être modulée. L’entreprise pourrait même être exemptée de son versement. Pour toutes ces raisons, je ne crois pas que cette mesure, qui est une mesure à la fois d’équité et de performance, mettra en péril le fonctionnement des entreprises françaises.

Les sous-amendements AS367, AS362 et AS372 sont retirés.

La commission rejette successivement les autres sous-amendements.

Puis elle adopte l’amendement AS311.

En conséquence, l’article 7 est ainsi rédigé et tous les autres amendements se rapportant à l’article 7 tombent.

Après l’article 7

La commission est saisie de l’amendement AS182 Mme Bénédicte Taurine.

M. Adrien Quatennens. Il reprend la définition, proposée par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, du groupe de postes soumis à l’exigence de quotas dans les sociétés anonymes avec conseil d’administration et dans celles avec conseil de surveillance. L’article 7, tel qu’il est rédigé, permettra toujours aux entreprises de ne pas nommer des femmes aux postes où s’exerce réellement le pouvoir, par exemple les dix plus hauts postes concentrés dans les COMEX et CODIR. Afin de remédier à cette inégalité dans la représentation aux postes les plus stratégiques, il est essentiel de mettre en place un quota plus fin.

Avec la fameuse loi Copé-Zimmermann, les femmes occupent 43,6 % des sièges d’administration dans les sociétés qui y sont soumises, mais ce taux n’était que de 18 % en 2017 dans les PME françaises cotées sur Euronext, qui ne sont pas soumises à la règle des quotas. C’est là la preuve que l’autorégulation ne fonctionne pas.

Mme la rapporteure. Comme vous, je pense que l’autorégulation ne fonctionne pas en la matière, malheureusement. C’est la raison pour laquelle je vous ai soumis l’article 7. Dans la version qui vient d’être adoptée, nous avons abandonné le périmètre qui était envisagé initialement, au profit des cadres dirigeants et des instances dirigeantes nouvellement définies à l’article L. 23-11-5 du code de commerce. Dès lors, votre amendement n’a plus d’objet. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie des amendements identiques AS230 de Mme Cécile Delpirou, AS266 de Mme Pascale Fontenel-Personne et AS273 de Mme Josiane Corneloup.

Mme Cécile Delpirou. Il s’agit de créer une autorité de contrôle indépendante de l’égalité économique et professionnelle entre les femmes et les hommes. Afin que les dispositions législatives et les outils qu’elles créent – parmi lesquels l’index salarial et l’indicateur de représentativité – soient mis en œuvre de façon fidèle et efficace, il convient de créer au sein de l’inspection générale du travail une instance spécifiquement dédiée au contrôle de leur bonne application. Cet amendement est issu du travail de l’association Sciences-Po au Féminin.

Mme Josiane Corneloup. Il s’agit effectivement de créer une autorité de contrôle indépendante de l’égalité économique et professionnelle entre les hommes et les femmes. Un organe de ce type fait défaut dans le droit du travail, ce qui diminue la portée et l’efficacité des dispositions adoptées.

Mme la rapporteure. J’entends votre volonté de garantir un contrôle effectif de toutes les mesures en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, mais je considère que ce contrôle est déjà largement assuré. À titre d’exemple, depuis 2019, plus de 20 000 interventions ont été menées par les services de l’inspection du travail pour s’assurer du respect de l’index de l’égalité professionnelle. L’action en matière d’égalité professionnelle est inscrite par ailleurs au titre des priorités nationales de l’inspection du travail, qui s’est fixé comme objectif d’étudier la situation de chaque entreprise en matière d’égalité professionnelle depuis l’entrée en vigueur de l’index. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis de la rapporteure, elle rejette l’amendement AS140 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

La commission est saisie de l’amendement AS118 de Mme Jacqueline Dubois.

Mme Annie Chapelier. Il s’agit de préciser que la proportion de femmes agricultrices au sein des instances dirigeantes des syndicats agricoles et organisations professionnelles agricoles ne peut être inférieure à un tiers, dans des conditions définies par décret.

Mme la rapporteure. La condition des femmes agricultrices a souvent été évoquée au cours de nos auditions tant elle reflète les nombreuses difficultés auxquelles sont confrontées les femmes, qu’elles soient elles-mêmes entrepreneures ou conjointes collaboratrices. Je ne peux que souscrire à l’objectif de les voir mieux représentées au sein des syndicats agricoles et des organisations professionnelles agricoles. Toutefois, votre amendement me semble excéder le champ de cette proposition de loi et je donnerai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 8 : Permettre un meilleur accès des femmes aux fonds d’investissement

La commission est saisie de l’amendement AS315 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de préciser que les actions visées par cet article concernent les actions en fonds propres de Bpifrance.

La commission adopte l’amendement.

Après avoir adopté l’amendement rédactionnel AS361 de la rapporteure, la commission est saisie de l’amendement AS316 de la rapporteure.

Mme Marie-Pierre Rixain. L’amendement vise à préciser la nature des comités décisionnaires sélectionnant les projets, plutôt appelés comités d’investissement chez Bpifrance.

La commission adopte l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS260 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. Nous proposons que la proportion des membres de chaque sexe au sein des comités de sélection des projets de la Bpifrance ne puisse être inférieure à 40 %. Il faut être le plus ambitieux possible.

Mme la rapporteure. Je comprends votre volonté d’accélérer la dynamique paritaire au sein de ces comités car toutes les tables rondes que nous avons organisées lors de nos travaux préparatoires sur l’investissement l’ont souligné : la très forte présence des hommes parmi les décisionnaires les incite à recruter des profils qui leur ressemblent et à exclure, par conséquent, les femmes de l’accès au financement.

L’objectif a été fixé à 30 % pour plusieurs raisons. De nombreuses études ont démontré que ce taux était le seuil critique à partir duquel le sexe sous-représenté dans n’importe quel comité peut commencer à faire entendre sa voix et à peser dans la prise de décision. Aujourd’hui, 21 % des membres qui votent au sein des comités d’investissement de Bpifrance sont des femmes, ce qui rend le taux de 30 % réaliste et ambitieux.

Relever le plafond minimal à 40 % semble, en revanche, difficilement atteignable à ce stade. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS346 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement prévoit qu’un décret détermine les objectifs de progression de la part des femmes et des hommes bénéficiant des actions en faveur de l’entrepreneuriat et du développement des entreprises, en flux entrants de financements. Il entrerait en vigueur à compter du 1er janvier de l’année suivant la deuxième année de publication de la présente loi.

La commission adopte l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS310 de Mme Céline Calvez.

Mme Céline Calvez. La Banque publique d’investissement joue un rôle essentiel pour soutenir l’entrepreneuriat et l’innovation dans notre pays. Hélas, les femmes ne sont pas encore assez présentes dans ce secteur alors qu’elles sont force de propositions. J’avais d’ailleurs déposé un amendement, déclaré irrecevable, pour que les élèves soient initiés à l’entrepreneuriat dès les premières années à l’école.

Cet amendement vise à appréhender de façon plus transparente la part des femmes à la tête des entreprises financées par Bpifrance, grâce à la publication annuelle de données. Il s’agit de favoriser les prises de conscience.

Mme la rapporteure. Pour reprendre le mantra de la charte SISTA dont Bpifrance est signataire, il faut compter les femmes pour que les femmes comptent. Aujourd’hui, seuls 2 % des fonds d’amorçage des startups, cofinancés par Bpifrance, sont versés à des équipes uniquement féminines. Incontestablement, des progrès peuvent, et doivent, être réalisés pour qu’un nombre croissant de femmes entrepreneures trouvent un financement grâce, notamment, à l’action de Bpifrance.

Pour s’assurer que cette part progresse, un suivi annuel des données est indispensable. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS333 de Mme Céline Calvez.

Mme Céline Calvez. Cet amendement, soutenu par l’ensemble des députés La République en marche, vise à insérer l’alinéa suivant : « La Banque publique d’investissement publie la répartition par sexe des membres composant les comités d’investissement. Un décret détermine les modalités de publication et les objectifs de progression de la part des femmes et des hommes au sein de ces comités. » Il s’agit d’étendre les obligations de transparence concernant la mixité au sein des comités d’investissement de Bpifrance.

Mme la rapporteure. Pour les mêmes raisons que précédemment concernant les bénéficiaires des actions de Bpifrance, avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

La commission adopte l’amendement de coordination AS347 de la rapporteure.

La commission est saisie, en discussion commune, des amendements AS261 de Mme Annie Chapelier et AS321 de Mme Sonia Krimi.

Mme Annie Chapelier. L’amendement AS261, qui vise à ce que la Banque publique d’investissement publie chaque année un indicateur relatif aux écarts de représentation entre les femmes et les hommes parmi les bénéficiaires de ses actions de soutien à l’entrepreneuriat et au développement des entreprises, est quasiment identique à l’amendement AS310 de Mme Calvez, que nous venons d’adopter. Je ne comprends pas, d’ailleurs, pourquoi ils n’étaient pas en discussion commune.

Mme la rapporteure. Votre amendement, en effet, est satisfait par les dispositions qui viennent d’être adoptées. Je vous invite à le retirer.

Les amendements sont successivement retirés.

La commission adopte l’article 8 modifié.

Après l’article 8

La commission est saisie de l’amendement AS334 de Mme Sophie Panonacle.

Mme Monique Limon. L’amendement vise à étendre les objectifs de mixité au sein des comités d’investissement fixés à Bpifrance, à l’ensemble des fonds d’investissement. Il est proposé, d’une part, de fixer des objectifs de mixité parmi les obligations des fonds d’investissement à vocation générale et leurs sociétés de gestion, d’autre part de compléter les informations que doit contenir le rapport annuel publié pour chacun des fonds d’investissement à vocation générale.

Mme la rapporteure. Votre amendement resserre le périmètre aux fonds d’investissement, ce qui me semble opportun au regard des chartes comme la charte SISTA ou la charte France Invest, dont ces fonds sont signataires. Si Bpifrance joue le rôle de locomotive, il est primordial que les autres fonds d’investissement suivent dans son sillage la dynamique paritaire. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement AS212 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. Cet amendement, en cohérence avec les objectifs de l’article 8, tend à évaluer et rééquilibrer les financements de l’entrepreneuriat entre les femmes et les hommes. Alors que l’article 8 se concentre sur la Banque publique d’investissement, il est important de rappeler qu’elle ne représente qu’une faible part des crédits engagés pour l’entrepreneuriat, la majorité des PME et TPE se tournant directement vers leur banque particulière pour leur prêt. La plupart des financements et des crédits accordés à nos concitoyens relèvent en réalité de l’action des banques dites classiques.

On a bien compris qu’il était difficile d’imposer aux banques de publier un indicateur relatif aux écarts de représentation entre les femmes et les hommes mais cette disposition est indispensable si l’on veut élargir le cercle des personnes qui investissent dans l’entrepreneuriat.

Mme la rapporteure. Je partage votre volonté que les obligations fixées à Bpifrance rayonnent sur tout l’écosystème de financement. Votre amendement est intéressant mais je vous invite à le retirer afin que nous puissions approfondir le sujet en séance publique.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AS71 de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq. Cet amendement est le fruit d’un travail concerté avec des entrepreneures et des entrepreneurs, auquel Mme la rapporteure a participé, et qui fait suite à la mise en garde de Yann Orpin, le nouveau président du Medef Lille Métropole, contre la très faible part des prêts accordés aux femmes chefs d’entreprise ou aux créatrices d’entreprises. Les témoignages de manque de confiance à l’endroit de ces femmes nous ont particulièrement frappés lors des réunions de ce groupe de travail.

L’article 8 vise à fixer des objectifs de mixité à la Banque publique d’investissement mais cette dernière intervient en deuxième rang, une fois qu’un établissement de crédit aura accordé sa confiance à ces femmes. Parce qu’il convient de mieux cibler l’ensemble des établissements bancaires, nous proposons que les établissements de crédit communiquent chaque année à la Banque de France les indicateurs relatifs à la part des prêts accordés à des femmes dirigeantes sur l’ensemble des prêts, ainsi qu’à la part des prêts accordés aux femmes pour créer une entreprise.

Mme la rapporteure. Je partage votre volonté. Les échanges avec les entrepreneurs de votre territoire étaient très éclairants. Je vous invite cependant à retirer votre amendement afin que nous puissions approfondir le sujet d’ici à l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AS262 de Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. Je regrette qu’aient été déclarés irrecevables d’autres amendements comparables, qui se rapportaient à la représentativité des femmes dans le secteur de l’audiovisuel, en particulier au cours d’émissions sportives ou politiques, et à l’éventualité d’un contrôle par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Nous déposerons de nouveaux amendements en ce sens, lors de la séance publique.

Cet amendement vise à préciser que la politique pour l’égalité entre les femmes et les hommes, menée par l’État et les collectivités territoriales, comporte des actions tendant à assurer un égal accès des femmes et des hommes à la promotion et aux postes à haute responsabilité. Il est cohérent avec les objectifs de cette proposition de loi.

Mme la rapporteure. Je comprends votre volonté d’étendre au secteur public les obligations qui viennent d’être adoptées à l’article 7 pour les entreprises privées de 1 000 salariés mais en l’absence d’un dispositif spécifique au secteur public, cette précision semble superfétatoire et dénuée de portée normative.

La commission rejette l’amendement.

Article 9 : Gage financier

La commission adopte l’article 9 sans modification.

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Je remercie la rapporteure pour la qualité de son travail, ainsi que tous les membres de cette commission dont les contributions ont permis d’améliorer le texte.

 

*

*     *

 

La commission des affaires sociales a adopté la proposition de loi. En conséquence, elle demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4143_texte-adopte-commission#

 


–  1  –

   Annexe 1 :
liste des personnes auditionnées par la rapporteure

 (Par ordre chronologique)

            Mme Marie-Jo Zimmermann

       Table ronde des réseaux de femmes :

– Women’s Forum – Mme Chiara Corazza, directrice générale

– Femmes cheffes d’entreprise (FCE) – Mme Anne-Sophie Panseri, présidente

            La Française des Jeux – Mme Stéphane Pallez, présidente directrice-générale

            Mme Clara Gaymard, co-fondatrice de RAISE

            BETC Groupe – Mme Mercedes Erra, présidente et fondatrice

            Table ronde sur les start-up et l’entreprenariat des femmes :

– Les Glorieuses – Mme Rebecca Amsellem, fondatrice

 Mampreneures – Mme Aurelie Ponzio, présidente

– Bouge ta boite Mme Marie Eloy, fondatrice

            Table ronde sur l’entreprenariat :

– Action’Elles – Mme Frédérique Montrésor, présidente nationale

 Femmes entrepreneures – Mme Céline Valensi, présidente

– Les premières – Mme Nadège Onderka, présidente de la Fédération Les Premières, et M. Grégory Fournier, délégué général

            Table ronde sur l’accès au crédit :

– France invest (*)  M. Dominique Gaillard, président et M. Alexis Dupont, directeur général

 Sista – Mme Déborah Loye, directrice générale

            Table ronde des banques :

– Groupe BPCE (*) – Mme Christine Meyer-Forrler, directrice du développement

 Crédit agricole (*) – Mme Véronique Faujour, secrétaire générale

 La Banque postale (*) – Mme Maud Vimeux, directrice des ressources humaines

            Table ronde des organisations patronales :

– Mouvement des entreprises de France (MEDEF) (*)  Mme Dominique Carlac’h, vice-présidente et porte-parole, Mme Céline Micouin, responsable du pôle nouveaux enjeux de l’entreprise, et Mme Fadoua Qachri, chargée de mission à la direction des affaires publiques

 Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) Mme Sophie Iborra, vice-présidente chargée de la place des femmes dans l’économie, M. Philippe Chognard, responsable du pôle conditions de travail, et M. Adrien Dufour, chargé de mission affaires publiques et organisation

            Table ronde des organisations syndicales :

– Confédération française démocratique du travail (CFDT) – Mme Béatrice Lestic, secrétaire nationale

– Confédération générale du travail (CGT)  Mme Sophie Binet, membre de la direction confédérale, Mme Frédérique Barlett, conseillère confédérale, et Mme Emmanuelle Lavignac, membre du collectif confédéral femme-mixité

– Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC) – M. Éric Freyburger, délégué national formation, égalité professionnelle

– Force ouvrière (FO) – Mme Béatrice Clicq, secrétaire confédérale en charge de l’égalité et du développement durable, et M. Gabriel Thoison, assistant technique

            Conférence des présidents d’université (CPU) (*) – M. Guillaume Gellé, vice-président de la Conférence des présidents d’université et président de l’université de Reims, et M. Kévin Neuville, conseiller en charge des relations institutionnelles et parlementaires

            Elles bougent – Mme Amel Kefif, directrice générale

            Social Builder – Mme Emmanuelle Larroque, fondatrice et déléguée générale, Mme Elise Moison, directrice de la formation et du développement, et Mme Lorraine Lenoir, directrice de la sensibilisation et de la communication

            Fédération française des entreprises de crèche (FFEC) (*)  Mme Elsa Hervy, déléguée générale, et Mme Thérèse Majnoni d’Intignano, dirigeante-fondatrice des Paradis de Jules et Juliette

            Table ronde des assistantes maternelles :

– Confédération des syndicats d’assistants familiaux et d’assistants maternels (CSAFAM) – Mme Marie-Christine Martin, chargée de communication et de formation, et Mme Nathalie Diore, secrétaire générale

– Fédération CGT du commerce, des services et de la distribution M. Stéphane Fustec, secrétaire fédéral

– Union nationale des syndicats autonomes UNSA FESSAD – Mme Liliane Delton, secrétaire fédérale

            Parent Solo – Mme Nathalie Guellier, fondatrice

            Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI) – M. Hervé Fernandez, directeur, et Mme Anaïs Borowiak, chargée du développement de la lutte contre l’illettrisme dans le monde du travail

            Mme Marine Jeantet, déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté

            Institut d’éducation et des pratiques citoyennes (IEPC)Mme Laurence Coz, directrice générale

            Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) (*)  Mme Isabelle Schöninger, directrice exécutive et M. Nicolas Speciale, chargé de mission Formation et société

            Association des maires de France (AMF)  Mme Élisabeth Laithier, adjointe au maire de Nancy, précédemment en charge de la petite enfance pour l’AMF, Mme Nelly Jacquemot, responsable du département action sociale, éducation, culture, et Mme Sarah Reilly, conseillère en charge des questions de la petite enfance

            Union nationale des associations familiales (UNAF) – Mme MarieAndrée Blanc, présidente, et M. Jean-Philippe Vallat, directeur des politiques et actions familiales et des études

            BPI France (*) –M. Nicolas Dufourcq, directeur général

            Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) Mme Odile Belinga, avocate

            Fondation des femmes Mme Cornélie Durrleman et Mme Mathilde Deydier, membres de la Force juridique de la Fondation des Femmes, et Mme Christine Muller

            Fédération bancaire française (FBF) (*)  Mme Maya Atig, directrice générale

            Assemblée des départements de France (ADF) Mme Michèle Berthy, vice-présidente du conseil départemental du Val d’Oise déléguée à l’égalité femmes-hommes, à l’enfance et à la famille, Mme Marylène Jouvien, conseillère égalité, et M. Jérôme Briend, conseiller fonction publique territoriale

            Alliance pour la mixité en entreprise  Mme Corinne Hardy, présidente

            Observatoire de la mixité – Mme Hélène Bernicot, directrice générale du Crédit Mutuel Arkea, M. Jean-Pierre Farandou, président directeur général de la SNCF, M. Gérald Karsenti, président de SAP France, et M. Michel Landel, ex-directeur général de Sodexo Group, administrateur référent Danone, administrateur indépendant

            Pôle emploi Mme Firmine Duro, directrice des partenariats et de la territorialisation, et M. Maxime Djian, chargé de mission relations institutionnelles

            2GAP – Mme Nathalie Pilhes, présidente, Mme Catherine Ladousse, co-fondatrice et présidente honoraire du Cercle InterElles, Mme Marie L’Hermitte, présidente de l’Association française des femmes juristes, Mme Agnès Saal, présidente de Cultur’Elles, Mme Dominique Lassus-Minvielle, présidente de PluriElles (ministères sociaux), Mme Dominique Poggi, TalentuElles (Banque de France), et Mme Carol Lambert, membre de Réseau Femmes – Deloitte

            Mmes Céline Bessière et Sibylle Gollac, auteures du livre Le genre du capital

            Mme Sabine Effosse, enseignante-chercheuse, professeure d’histoire économique et sociale contemporaine à l’université Paris Nanterre

            Association française des entreprises privées (AFEP) M. François Soulmagnon, directeur général, Mme Stéphanie Robert, directrice, Mme Odile de Brosses, directrice du service juridique, et Mme Julie Leroy, directrice des affaires sociales

     Table ronde sur l’investissement :

– AngelsquareM. Balthazar de Menthon, directeur général

– Kima Ventures – M. Jean de La Rochebrochard, directeur associé

  Mme Hélène Furnon-Petrescu, cheffe du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes, Mme Samira Touiti, cheffe du bureau égalité professionnelle, et M. Franck Charron, adjoint à la cheffe du bureau égalité professionnelle

  Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) – Mme Pauline Domingo, responsable du pôle enfance, jeunesse et parentalité, et Mme Patricia Chantin, directrice de cabinet adjointe du directeur général

     École 42 – Mme Sophie Viger, directrice générale

     Conférence des grandes écoles (CGE) – Mme Viviane de Beaufort, professeure de droit titulaire à l’Essec BS, référente égalité femmes-hommes à la CGE

     M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles

     Mme Elisabeth Moreno, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances

     Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation

 

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale

 

 


–  1  –

   ANNEXE 2 :
TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À l’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code du travail

L. 3241-1

1er bis

Code monétaire et financier

L. 312-1

3

Code de la sécurité sociale

L. 531-4-1

3° bis

Code du travail

L. 1225-17

4

Code de l’action sociale et des familles

L. 214-7

5

Code de l’éducation

L. 322-5

5

Code de l’éducation

L. 611-5

5

Code de l’éducation

L. 611-13 [nouveau]

5

Code de l’éducation

L. 612-1

5

Code de l’éducation

L. 612-3

5

Code de l’éducation

L. 681-1, L. 683-1 et L. 684-1

bis

Code de l’éducation

L. 313-1

ter

Code de l’éducation

L. 412-9

quater

Code de l’éducation

L. 642-1

6

Code du travail

L. 1142-8

7

Code du travail

L. 1142-11 [nouveau]

7

Code du travail

L. 1142-12 [nouveau]

7

Code du travail

L. 1142-1 [nouveau]

7

Code du travail

L. 2312-18

8

Ordonnance n° 2005‑722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement

1er A

8

Ordonnance n° 2005‑722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement

1er B [nouveau]

bis

Code monétaire et financier

L. 214-24-44

bis

Code monétaire et financier

L. 214-24-62

 

 

 


([1]) Loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle.

([2]) Loi n° 65-570 du 13 juillet 1965 portant réforme des régimes matrimoniaux.

([3]) Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([4]) Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

([5]) Loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche.

([6]) Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([7]) Traduit dans la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([8]) Florence Rochefort, « À propos de la libre-disposition du salaire de la femme mariée, les ambiguïtés d’une loi (1907) », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés [En ligne], 7 | 1998.

([9]) Loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 relative à l’égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs.

([10])  Jérôme Lasserre Capdeville, « Autonomie bancaire des époux et responsabilité du banquier », Revue Lamy Droit civil, Nº 178, 1er février 2020.

([11])  CA Paris, 21 juill. 2009, nº 08/01868.

([12]) Décret n° 2020-683 du 4 juin 2020 autorisant le déblocage anticipé de l’épargne salariale en cas de violences conjugales.

([13]) Loi n° 65-570 du 13 juillet 1965 portant réforme des régimes matrimoniaux.

([14]) Marie-Pierre Rixain, Rapport d’information fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur son colloque consacré à la lutte contre les violences économiques dans le couple, déposé le 26 janvier 2021.

([15]) Abbas, H., Garbinti, B. (2019, novembre). « De la rupture conjugale à une éventuelle remise en couple : l’évolution des niveaux de vie des familles monoparentales entre 2010 et 2015 ». Dans France, portrait social. Paris, France, Insee, coll. Insee Références.

([16]) Lardeux, R., (2021, janvier). « Un quart des parents non gardiens solvables ne déclarent pas verser de pension alimentaire à la suite d’une rupture de Pacs ou d’un divorce ». DREES, Études et Résultats, 1179.

([17]) Il existe plusieurs raisons qui peuvent expliquer ce non-versement (accord entre les conjoints en l’absence de passage devant le juge, insolvabilité du parent créancier, décision d’absence de fixation d’un montant de pensions par le juge aux affaires familiales).

([18]) Alexandre Tillatte, Aline Ferrante, « Les inégalités de niveau de vie entre les femmes et les hommes amplifiées par la monoparentalité », INSEE Flash Auvergne-Rhône-Alpes, n° 55, 7 mars 2019.

([19]) Article 271 du code civil.

([20]) Article 18 de la convention.

([21]) Cass.1e Civ, 30 mai 2000, Bull. civ. I, n° 169, p. 109 ; Cass.1e Civ., 3 avril 2002, D.2002., p. 1880.

([22]) Article 222-12 du code pénal.

([23]) Article 222-13 du même code.

([24]) Article 222-14-3 du même code.

([25]) Loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants.

([26]) Article 222-33-2-1 du code pénal.

([27]) Article L. 312-1 du code monétaire et financier.

([28]) Article L. 531-4 du code de la sécurité sociale.

([29]) Il en était ainsi de l’allocation parentale d’éducation, ancêtre de la PreParE, d’un montant de 2 929 francs par mois en 1994.

([30]) Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), « Voies de réforme des congés parentaux dans une stratégie globale d’accueil de la petite enfance », Rapport adopté par le Conseil de la famille le 13 février 2019, à partir des données de l’OCDE et de l’International Network on Leave Policies and Research.

([31]) Le lecteur curieux pourra toutefois se reporter aux IV et V de l’article L. 532-2 du code de la sécurité sociale.

([32]) Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([33]) Idem.

([34]) Hélène Périvier, Grégory Verdugo, « Cinq ans après la réforme du congé parental (PreParE), les objectifs sont-ils atteints ? », Observatoire français des conjonctures économiques, Policy brief, n° 88, 6 avril 2021.

([35]) Les deux sont auteures de Le Genre du capital. Comment la famille reproduit les inégalités. La Découverte, 2020.

([36]) Hélène Périvier, Grégory Verdugo, op. cit.

([37]) Idem.

([38]) Piketty, Thomas, 2003. L’impact de l’allocation parentale d’éducation sur l’activité féminine et la fécondité, CEPREMAP Working Papers (Couverture Orange) 0309, CEPREMAP.

([39]) OCDE (2011), « Réduire les freins à l’emploi parental », dans Assurer le bien-être des familles, Éditions OCDE, Paris.

([40]) Haut Conseil de la famille, Problématiques et voies de réformes du complément de libre choix d’activité, note adoptée le 11 février 2010.

([41]) D. Méda, M. Wierink, M.–O. Simon, Pourquoi certaines femmes s’arrêtent-elles de travailler à la naissance d’un enfant ?, Premières Synthèses Informations, juillet 2003, n° 29-2.

([42]) Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), op. cit.

([43]) Briard K. (2017), Continuer, réduire ou interrompre son activité professionnelle : le dilemme des mères de jeunes enfants», Revue française des affaires sociales, n° 2, pp. 149-168.

([44]) L’ensemble de ces données, issues du rapport du HCFEA précité, portent sur l’année 2015. L’impact de la crise sanitaire sur les activités professionnelles où les femmes sont majoritaires (services à la personne, etc.) comme la diminution réelle de la natalité ont pu avoir des effets contrastés sur la perception par les femmes en 2021 de ces mêmes prestations.

([45]) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistique (DREES), Enquête Revenus fiscaux et sociaux 2015, Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, traitements DREES.

([46]) Rapport établi par Geneviève Auzel, Erik Rance, Frédéric Remay, Mission d’évaluation du congé parental d’éducation et de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE), avril 2019.

([47]) A. Pailhé, A. Solaz, Durée et conditions de retour à l’emploi des mères après une naissance, Retraite et société, 2012.

([48]) Mathieu Narcy, Florent Sari, Effet d’une réduction de la durée d’indemnisation du congé parental sur l’activité des mères: une évaluation de la réforme de 2015, document de travail n° 197 du Centre d’études de l’emploi et du travail, décembre 2018.

([49]) La littérature confirme le coût proportionnellement plus important que représente un enfant lors de sa première année pour les modes de garde par rapport à ses années ultérieures.

([50])Iidem.

([51]) Hélène Périvier, Grégory Verdugo, op. cit.

([52]) Mathieu Narcy, Florent Sari, op.cit.

([53]) Article L. 262-27 du code de l’action sociale et des familles : « le bénéficiaire du revenu de solidarité active a droit à un accompagnement social et professionnel adapté à ses besoins et organisé par un référent unique ».

([54]) Bilan 2013-2016 plan pluriannuel contre la pauvreté et l’inclusion sociale, 2017.

([55]) HCFEA, op. cit.

([56]) Selon les termes de la COG 2018-2022, « la Branche renforcera le pilotage des interventions de travail social qu’elle adaptera aux évolutions des vulnérabilités familiales et veillera à l’évolution nécessaire des emplois et des compétences des professionnels du travail social en adéquation avec les problématiques des familles et le contexte institutionnel, notamment en mesurant les effets des interventions sur les publics accompagnés en matière d’accès aux droits et d’autonomisation ».

([57]) Lecture, écriture, calcul

([58]) On peut citer à ce titre l’action qu’a mené le Pôle départemental d’insertion de la Vienne, en lien avec l’association « L.E.C.R.I.T. » en faveur des personnes en difficultés sociales et en situation de désinsertion professionnelle

([59]) Abbas H. et Garbinti B., 2019, De la rupture conjugale à une éventuelle remise en couple : l’évolution des niveaux de vie des familles monoparentales entre 2010 et 2015, France portrait social, Insee Références, édition 2019.

([60]) Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, Les ruptures de couple avec enfants mineurs, Dossier adopté par le Conseil de la famille le 21 janvier 2020.

([61]) L’ensemble de ces données sont issues de l’enquête « Modes de garde et d’accueil des jeunes enfants », menée par la DREES en 2013.

([62]) HCFEA, L’accueil des enfants de moins de trois ans. Tome I : État des lieux, Rapport adopté par consensus par le Conseil de la famille et le Conseil de l’enfance et de l’adolescence le 10 avril 2018.

([63]) Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

([64]) Danielle Boyer, Sophie Villaume, Les mères seules confient plus souvent leurs enfants de moins de 3 ans aux crèches et aux grands-parents, DREES, Études et résultats, mai 2016.

([65]) Idem.

([66]) Idem.

([67]) L’ensemble de ces crèches représente 1 650 places.

([68]) Données issues du Vade-mecum « Attribution des places en crèche » publié par l’Association des maires de France en novembre 2018.

([69]) M. Michel Villac, Mme Catherine Collombet, M. Julien Rousselon et Mme Laurence Rioux : « Propositions sur le développement de solutions ponctuelles et durables de gardes d’enfants pour les demandeurs d’emploi et nouveaux embauchés », Rapport de mission, 28 novembre 2019.

([70]) Loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes.

([71]) Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.

([72]) Décision n° 2015-465 QPC du 24 avril 2015.

([73]) Décision n°2001-455 DC du 12 janvier 2002 sur la loi de modernisation sociale, considérant 115.

([74]) Loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche.

([75]) Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

([76]) Loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

([77]) Arrêté du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat.

([78]) Article 80 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

([79])  Décret n° 2020-528 du 4 mai 2020 définissant les modalités d’élaboration et de mise en œuvre des plans d’action relatifs à l’égalité professionnelle dans la fonction publique.

([80]) Sont donc concernés 185 opérateurs, dont 64 universités, 33 écoles d’ingénieurs, 27 Centres régionaux des Œuvres Universitaires Scolaires (CROUS), 12 établissements publics administratifs, 12 grands établissements, 8 Instituts d’études politiques, etc.

([81]) Loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur.

([82])  Rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Parité dans le secteur public : des avancées réelles mais lentes, un levier de transformation à saisir », 23 février 2021.

([83]) Ce qui représente environ un tiers du nombre d’établissements français membres de la CGE.

 

([84]) Décret n° 2002-766 du 3 mai 2002 relatif aux modalités de désignation, par l’administration, dans la fonction publique de l’État, des membres des jurys et des comités de sélection et de ses représentants au sein des organismes consultatifs.

([85]) Rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes précité.

([86]) Idem.

([87])  Pierre Deschamps, Anne Revillard, Marie Sautier, Mathieu Arbogast. « Les quotas de genre dans le monde académique ». Débats du LIEPP, 2020, pp.1 - 16. hal-02981592

([88])  Élise Lemercier, « À l’université : les dessous d’un consensus apparent », Travail, genre et sociétés, vol. 34, n° 2, 2015, pp. 175-180.

([89]) Ce champ a pu être déterminé avec précision grâce aux données fournies par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

([90]) Loi n°89-486 du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation.

([91]) Sylvie Aebischer, « Réinventer l’école, réinventer l’administration. Une loi pédagogique et managériale au prisme de ses producteurs », Politix, vol. 98, no. 2, 2012, pp. 57-83.

([92]) Article L. 642-1 du code de l’éducation.

([93]) Article 104 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([94]) Décret n° 2019-15 du 8 janvier 2019 portant application des dispositions visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l’entreprise et relatives à la lutte contre les violences sexuelles et les agissements sexistes au travail.

([95]) Données fournies par la direction générale du travail.

([96]) Communiqué de presse de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, Mme Élisabeth Borne, mars 2021.

([97]) Audition de Stéphane Pallez, présidente-directrice générale de La Française des jeux.

([98]) Audition de Sophie Iborra, vice-présidente de la Confédération des petites et moyennes entreprises.

([99]) Décret n° 2021-265 du 10 mars 2021 relatif aux mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l’entreprise et portant application de l’article 244 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([100]) Article 244 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([101]) Kenza Thari, « L’index de l’égalité professionnelle : occasion manquée ou outil prometteur ? », Terra Nova, janvier 2021, p.18.

([102]) Sophie Pochic, « L’égalité professionnelle est-elle négociable ? Enquête sur la qualité et la mise en œuvre d’accords et de plans égalité femmes-hommes élaborés en 2014-2015 », DARES, avril 2019.

([103]) Loi n° 2001-937 du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

([104]) Loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle.

([105]) Loi n° 2006-340 du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

([106]) Décision n° 2006-533 DC du 16 mars 2006.

([107]) Article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958.

([108]) Article L .225-18-1 du code de commerce.

([109]) Article 67 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([110]) Article 189 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([111]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « 10 ans de la loi Copé-Zimmermann 2011-2021, Accès des femmes aux responsabilités. De la parité à l’égalité professionnelle », janvier 2021.

([112]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Accès des femmes aux responsabilités et rôle levier des financements publics. Des nouveaux champs pour la parité. », décembre 2019, p. 10.

([113]) Audition de Clara Gaymard, co-fondatrice de Raise.

([114])  Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Accès des femmes aux responsabilités », op. cit., p. 38.

([115]) Denis Roth-Fichet, « La féminisation des instances de gouvernance et de direction des entreprises », mars 2019, p. 35.

([116]) Maquette pédagogique Advanced Certificate – Women Be Board Ready, ESSEC.

([117]) ANDRH, Enquête flash « Parité dans les instances de gouvernance », septembre 2019.

([118]) Communiqué de presse Grand prix de la mixité 2019, juillet 2019.

([119]) Michel Ferrary, « Diversité et inclusion au sein du CAC 40 : La mixité femmes-hommes est-elle associée à la responsabilité sociétale des entreprises et à leurs performances économiques et boursières ? », Observatoire Skema de la féminisation des entreprises, édition 2021.

([120]) Audition de Mme Corinne Hardy, présidente de l’Alliance pour la mixité en entreprise.

([121]) Audition de Corinne Hardy, présidente de l’Alliance pour la mixité.

([122]) Viviane de Beaufort et Martin Richer, « Pour un quota de femmes dans les instances de direction des entreprises », Terra Nova, mars 2021.

([123]) Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([124]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Accès des femmes aux responsabilités », op. cit., p. 107.

([125]) Le code AFEP-MEDEF est un ensemble de recommandations qui permet aux sociétés cotées d’améliorer leur fonctionnement et leur gestion.

([126]) Audition de Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, devant la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, 18 mars 2021.

([127]) Audition de Stéphane Pallez, présidente directrice générale de La Française des jeux.

([128]) Audition de Clara Gaymard, co-fondatrice de Raise.

([129]) Avec trois femmes sur sept dans son comité exécutif, Danone atteint ainsi un taux de 42,86 %, selon les données de l’Observatoire Skema, édition 2021.

([130]) McKinsey&Company, « The power of parity : How advancing women’s equality can add 12 trillion dollars to global growth », automne 2015.

([131]) Michel Ferrary, « Les femmes influencent-elles la performance des entreprises ? », CNRS-Revue Travail, Genre et Société, n°23, avril 2010.

([132]) Audition de Sandra Sancier-Sultan, directrice associée de McKinsey & Company, lors de la table ronde relative à la place des femmes sur le marché du travail et en matière de gouvernance économique organisée par la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, mars 2021.

([133]) Audition des dirigeants de l’Observatoire de la mixité.

([134]) INSEE Première, Les créations d’entreprises en 2019, n° 1790, janvier 2020.

([135]) Indice entrepreneurial français 2018, Bpifrance.

([136]) Audition de Céline Bessière et Sibylle Gollac, auteures du Genre du capital.

([137]) Femmes Business Angels, Livre blanc, « Investissement et actionnariat, leviers de la réussite économique des femmes », p. 13, mars 2020.

([138]) Mme Julia Bijaoui, co-créatrice et dirigeante de Frichti.

([139]) Audition de Mme Floriane de Saint Pierre, présidente d’Ethics & Boards, lors de la table ronde relative à la place des femmes sur le marché du travail et en matière de gouvernance économique organisée par la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, mars 2021.

([140]) Table ronde sur l’investissement réunissant M. Balthazar de Menthon, directeur général d’Angelsquare, et M. Jean de La Rochebrochard, directeur associé de Kima Ventures.

([141]) Baromètre SISTA x CNNum x BCG : « Une progression de la mixité dans la création et le financement de startups mais l’héritage de l’écosystème pèse encore », février 2021.

([142]) En processus de levée de fonds, les séries correspondent au nombre de levées de fonds déjà réalisées par l’entreprise. La série A est considérée comme la première levée de fonds d’ampleur d’une entreprise.

([143]) Eva Escandon, « Femmes et entrepreneuriat », étude du Conseil économique, social et environnemental, octobre 2020.

([144]) Audition de Mme Sophie Iborra, vice-présidente de la Confédération des petites et moyennes entreprises.

([145]) Audition de Mme Anne-Sophie Panseri, présidente de Femmes cheffes d’entreprise.

([146]) Gunther Capelle-Blancard, Jézabel Couppey-Soubeyran et Antoine Rebérioux, « Vers un nouveau genre de finance ? », mars 2019.

([147]) Audition de Mme Aurélie Ponzio, présidente de Mampreneur et Mme Marie Eloy, fondatrice de Bouge ta boite.

([148]) Rapport Global Entrepreneurship Monitor 2019, p. 23.

([149]) Christel Tessier-Dargent, « Les paradoxes de l’entrepreneuriat de nécessité : Strapontin ou tremplin ? », Entreprendre & Innover, n°20, janvier 2014, p. 25.

([150]) Rapport Global Entrepreneurship Monitor 2019, op. cit.

([151]) Women Equity Index, 2015.

([152]) Katie Abouzahr, Matt Krentz, John Harthorne, Frances Brooks Taplett, « Why women-owned startups are a better bet », juin 2018.

([153])  Chiara Corazza, « Les femmes au cœur de l’économie. La France pionnière du leadership au féminin dans un monde en pleine transformation. », janvier 2020, p. 2.

([154]) Baromètre SISTA. op. cit.

([155]) Bpifrance, Le lab, « Les femmes entrepreneures des quartiers : un profil spécifique au-delà des territoires », mars 2021.

([156]) Audition de Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance.

([157]) Femmes Business Angels, Livre blanc, « Investissement et actionnariat, leviers de la réussite économique des femmes », p. 21, op. cit.

([158]) Audition de Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance.

([159]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Accès des femmes aux responsabilités et rôle levier des financements publics. Des nouveaux champs pour la parité. », décembre 2019, p.129

([160]) Eva Escandon, « Femmes et entrepreneuriat », étude du Conseil économique social et environnemental, octobre 2020, p. 67.

([161])  https://videos.assemblee-nationale.fr/video.10720299_609247e8571fe.commission-des-affaires-sociales--accelerer-l-egalite-economique-et-professionnelle--5-mai-2021

https://videos.assemblee-nationale.fr/video.10725917_609293ce33cfd.commission-des-affaires-sociales--accelerer-l-egalite-economique-et-professionnelle-suite-5-mai-2021