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N° 4381 et 4382

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 juillet 2021.

RAPPORT

FAIT

 

AU NOM DE LA COMMISSION spéciale ([1]) chargée d’examiner la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques
et la proposition de loi portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques ainsi que la proposition de loi organique
et la proposition de loi relatives aux lois de financement de la sécurité sociale,
APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, sur la proposition de loi Organique et sur la proposition de loi

 

relative à la modernisation de la gestion des finances publiques (n° 4110),

 

portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques (n° 4113),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

 

Député

 

——

 

 

Voir le numéro :

 Assemblée nationale :  4110 rect., 4113 rect. 4381, 4382

La commission spéciale est composée de :

M. Éric Woerth, président

MM. Thomas Mesnier et Laurent Saint-Martin, rapporteurs

M. Joël Aviragnet, M. Christophe Jerretie, Mme Fadila Khattabi, Mme Lise Magnier, vice-présidents

M. Jean-Carles Grelier, Mme Cendra Motin, Mme Stéphanie Rist, Mme Annie Vidal, secrétaires

Mme Delphine Bagarry, M. Belkhir Belhaddad, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Julien Borowczyk, M. Gilles Carrez Finances, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chalumeau, M. Francis Chouat, M. Paul Christophe, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Sophie Errante, Mme Caroline Fiat, Mme Pascale Fontenel-Personne, Mme Perrine Goulet, Mme Carole Grandjean, Mme Véronique Hammerer, M. Brahim Hammouche, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, M. Jean-Paul Mattei, Mme Catherine Osson, Mme Zivka Park, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Michèle Peyron, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Mireille Robert, Mme Claudia Rouaux, M. Olivier Serva, Mme Valérie Six, M. Jean-Louis Touraine, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Guillaume Vuilletet Lois, Mme Hélène Zannier et M. Michel Zumkeller.

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-Propos

Examen des articles de la Proposition de loi organique

Titre Ier  Dispositions relatives À la programmation  des finances publiques

Article 1er Révision du cadre pluriannuel des finances publiques

Titre II Dispositions relatives aux lois de finances

Article 2 Changement d’appellation de la loi de règlement et modification de la catégorisation des lois de finances

Article 3 Renforcement de la doctrine d’affectation des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale

Article 3 bis (nouveau) Fonds de concours

Article 3 ter (nouveau) Subventions pour charges d’investissement

Article 4 Clarification des exigences applicables aux prélèvements sur recettes et des modalités de débat parlementaire des finances locales

Article 5 Structure et contenu de la loi de finances de l’année

Article 6 Loi de finances de fin de gestion

Article 7 Avancement de la date de dépôt des annexes générales

Article 8 Printemps de l’évaluation

Article 9 Rapport sur la dette et consécration au rang organique du tiré-à-part

Article 9 A (nouveau) Inscription de la notion d’évaluation dans les intitulés de la LOLF

Article 9 bis Introduction d’un compteur des écarts

Article 10 Les annexes au projet de loi de finances

Article 11 Pouvoirs des commissions des finances

Article 11 bis (nouveau) Nouvelle annexe aux projets de loi de finances rectificative et de fin de gestion récapitulant les crédits consommés sur chaque programme et chaque action

Titre III Dispositions relatives À l’information du Parlement et au contrÔle sur les finances publiques

Article 12 Haut Conseil des finances publiques et mécanisme de correction

Article 13 (nouveau) Application de la loi organique

Examen des articles de la proposition de loi ordinaire

Titre Ier  Dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques

Article 1er Procédure de nomination des membres du Haut Conseil des finances publiques désignés par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat et les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat

I. L’état du droit

II. Le dispositif proposÉ

III. La position de la commission

Article 2 Audition du président du Haut Conseil des finances publiques  par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat

I. L’état du droit

II. Le dispositif proposÉ

III. La position de la commission

Article 3 Règlement intérieur du Haut Conseil des finances publiques

I. L’état du droit

II. Le dispositif proposÉ

III. La position de la commission

Titre II Dispositions relatives À l’information du Parlement lors de l’examen du projet de loi de finances sur les mesures fiscales adoptées depuis le dÉpÔt du projet de loi de finances de l’annÉe prÉcÉdente

Article 4 Annexe, jointe au projet de loi de finances de l’année, récapitulant  les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt  du projet de loi de finances de l'année précédente

I. L’état du droit

II. Le dispositif proposÉ

III. La position de la commission

Titre III Dispositions diverses

Article 5 (nouveau)

(art. L. 132-2 du code des juridictions financières et art. 53 de la loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) Intitulé de la loi relative aux résultats de gestion et portant approbation des comptes de l’année dans deux dispositions relatives à des rapports au Parlement

I. L’état du droit

II. La position de la commission

Article 6 (nouveau) (art. L. 331-3, L. 331-4, L. 331-5, L. 331-6, L. 331-8 et L. 331-9  du code des juridictions financières) Composition et missions du Conseil des prélèvements obligatoires

I. L’État du droit

II. Les modifications proposÉes par la commission

Article 7 (nouveau) Doctrine relative aux affectations du produit d’impositions de toute nature  et de plafonnement de telles affectations

I. L’État du droit

II. Les modifications proposÉes par la commission

Article 8 (nouveau) Rapport sur la présentation d’un projet de loi des investissements dans les secteurs de la culture et du patrimoine

I. L’État du droit

II. Les modifications proposÉes par la commission

Examen en commission

Annexe : avis du Conseil d’état


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   AVANT-Propos

La proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et la proposition de loi, ordinaire, portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques que j’ai déposées avec le président de la commission des finances, Eric Woerth, sont l’aboutissement d’un long travail engagé il y près de trois ans maintenant.

Nous avions alors décidé de ressusciter la mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, ou « MILOLF », qui, il y a 20 ans, avait eu pour objectif de suivre la mise en œuvre de la loi n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Cette mission avait publié une dizaine de rapports entre 2003 et 2011, portant, par exemple, sur la maquette budgétaire, les dispositifs de performance ou encore les systèmes informatiques.

Nous avons ainsi souhaité, au début de l’année 2019, relancer ce travail, afin de faire le bilan de notre « constitution financière » vingt ans après l’adoption de la LOLF. Nous souhaitions y apporter certains ajustements, à la lumière de la pratique budgétaire, mais sans en bouleverser l’architecture d’ensemble.

Nous avons modestement tenté d’inscrire nos pas dans ceux des « pères » de cette loi organique, Didier Migaud à l’Assemblée nationale et Alain Lambert au Sénat. La LOLF est d’abord et avant tout un outil parlementaire, et nous avons considéré qu’elle devait le rester.

La démarche adoptée se veut résolument transpartisane, pragmatique, éclairée par l’expérience et guidée par la volonté d’améliorer la qualité de nos discussions budgétaires et de consolider le rôle central du Parlement dans l’examen et le contrôle des finances publiques.

Les travaux de la MILOLF ont abouti en septembre 2019 à 45 recommandations ([2]) qui inspirent, à l’évidence, la proposition de loi organique et la proposition de loi ordinaire. Quatre grands axes avaient guidé nos propositions : rationaliser le calendrier et la procédures budgétaires pour plus de transparence et de lisibilité, renforcer la portée de l’autorisation parlementaire, renouveler la démarcher de performance et conforter la logique de résultats et, enfin, améliorer l’information et le contrôle du Parlement.

Il est évident que ces axes se voient aujourd’hui complétés et confortés par certains éléments issus de la crise sanitaire que nous vivons depuis un peu plus d’un an : il s’agit de se doter des outils à même de contribuer à mieux gérer, contrôler, programmer nos finances publiques que cette crise a profondément impactées.

Nous avons également été inspirés par les travaux de la Cour des comptes qui, rapport après rapport, a consacré beaucoup d’énergie à faire le bilan de la mise en œuvre de la LOLF, en dernier lieu dans très riche rapport intitulé « Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et de la gouvernance ».

La proposition de loi organique que nous proposons a, au demeurant, pris de l’épaisseur à mesure que nous avancions dans le processus d’initiative législative. Le Gouvernement l’a ainsi intégrée aux réformes structurelles présentées à la Commission européenne dans le cadre du programme de stabilité pour les années 2021-2027 et du programme national de reprise et de résilience
­ programmes sur la base desquels la commission européenne permet le déblocage des fonds du plan de relance européen. J’y vois l’importance de la réforme du cadre organique des finances publiques dans la réforme de l’État.

Nous avons également souhaité que le Conseil d’État soit saisi de ces textes comme le permet l’article 39, alinéa 5 de la Constitution. Plusieurs raisons à cela : d’abord, le Conseil d’Etat s’était déjà prononcée lors de l’élaboration de la LOLF, à l’initiative du Gouvernement puisque la saisine parlementaire n’était alors pas possible ; ensuite, le Conseil d’Etat est amené à se prononcer sur l’application de la LOLF lors de son examen des lois de finances et son expertise est grande ; enfin, les lois organiques étant, en application de l’article 46 de la Constitution, systématiquement soumises au contrôle du Conseil constitutionnel, il semblait indispensable de sécuriser juridiquement notre texte.

Le travail avec le Conseil d’Etat a été particulièrement fructueux et les échanges que nous avons eus lors de l’Assemblée générale le 1er juillet ont été d’une forte densité juridique. L’avis du Conseil d’Etat qui en a résulté ([3]) a été diffusé aux membres de la commission spéciale et a inspiré bon nombre d’amendements qui ont été adoptés par la commission spéciale.

A bien des égards, ces deux propositions de loi sont de bons exemples d’un travail parlementaire réussi : un travail de contrôle transpartisan qui permet d’évaluer une réforme et d’aller au fond des choses ; la rédaction d’une proposition de loi qui tire les conséquences de ce travail ; une analyse juridique du Conseil d’Etat afin d’en garantir la solidité constitutionnelle ; et enfin, une inscription à l’ordre du jour par le Gouvernement.

L’étape suivante sera celle du Sénat, avec lequel des échanges nourris ont déjà eu lieu : nous partagerons les même objectifs que nos collègues sénateurs et nous aboutirons certainement à un texte commun sans grande difficulté ([4]) .

 

Pour en venir maintenant au fond du texte, cette réforme de la LOLF s’articule autour de trois grands axes.

● Le premier est celui de l’amélioration du pilotage des finances publiques. Très présent au niveau européen, le principe de pluriannualité s’est imposé plus récemment au sein du droit budgétaire français comme vecteur de maîtrise des comptes publics. La présente proposition de loi organique vise à renforcer la portée des orientations pluriannuelles des finances publiques au sein du processus budgétaire annuel.

L’article 1er consolide ainsi, au sein de la LOLF, les dispositions de la loi organique de 2012 relative à la programmation et à la gestion des finances publiques. Il y apporte également des modifications importantes, avec l’introduction, en particulier, de nouvelles normes encadrant l’évolution de la dépense publique, définies au sein de la loi de programmation des finances publiques. Ces normes seraient relayées au sein de lois de finances annuelles et leur importance renforcée par l’introduction par la commission spéciale d’un compteur des écarts exprimé en milliards d’euros (article 9 bis). Ce nouvel outil doit permettre de donner une vision claire des écarts à la trajectoire pluriannuelle, le Gouvernement devant exposer les raisons expliquant ces écarts.

● Le renforcement de la transparence des finances publiques est notre deuxième préoccupation.

L’article 3 propose une doctrine volontariste pour rationaliser le paysage de la fiscalité affectée à des tiers autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale. Les fonds sans personnalité juridique qui constituent des véhicules financiers opaques ne pourront plus bénéficier de l’affectation de taxes. Par ailleurs, le seul intérêt de la fiscalité affectée étant le consentement à l’impôt qu’elle peut favoriser, la PPLO exige désormais que l’affectation d’une telle ressource à un tiers doit se justifier par l’existence d’un lien entre la taxe et la mission de service public dont elle assure le financement. 

Corrélativement aux modifications que la PPLO apporte par ailleurs en rendant plus lisible l’article d’équilibre et en créant une vision consolidée des moyens des politiques publiques (cf. infra), les articles 3 bis et 3 ter enrichissent la nomenclature comptable en prévoyant de distinguer les fonds de concours – recettes non fiscales tirées de la participation d’un tiers à une mission d’intérêt public – selon qu’ils financent des dépenses d’investissement ou d’autres dépenses, et en remettant en place la catégorie des subventions pour charges d’investissement, qui existait sous l’empire de l’ordonnance de 1959, en plus des seules subventions pour charges de service public actuellement.

 

 

L’article 4 renforce le contrôle parlementaire concernant les prélèvements sur recettes établis au profit des collectivités territoriales, en inscrivant dans la LOLF l’exigence d’une évaluation de leur incidence en termes de péréquation. Plus largement, il vise à distinguer un véritable « temps des finances locales » au sein de la discussion budgétaire, avec un rapport sur la situation d’ensemble des finances publiques locales et un débat de synthèse préalable au PLF.

S’agissant de la structure et des domaines obligatoire, exclusif et facultatif des lois de finances, dont le respect est contrôlé tant au stade de la discussion parlementaire qu’à celui de l’examen, le cas échéant, de ces textes par le Conseil constitutionnel, l’article 5 prévoit trois modifications pour la première partie et neuf modifications pour la seconde.

En première partie, les principaux apports sont le rapatriement de l’ensemble des dispositions relatives à la fiscalité d’État, quelle que soit leur année d’effet, la récapitulation de l’ensemble des impositions et taxes affectées à des tiers, alors que le budget traite aujourd’hui uniquement de celles que le Gouvernement ou les membres du Parlement entend réviser, et le départ entre les ressources et les charges de fonctionnement au sein de l’article d’équilibre.

En seconde partie, la PPLO ouvre la possibilité d’amender les objectifs et indicateurs de performance, insère une présentation de tous les crédits et mouvements en recettes qui contribuent à une politique publique au-delà de la mission budgétaire qui la porte et élargit le domaine facultatif aux charges pluriannuelles, à la péréquation horizontale entre collectivités territoriales, au transfert de certaines données fiscales et à la comptabilité de l’ensemble des administrations publiques, au lieu de celle de l’État exclusivement.

L’article 12 reprend les dispositions de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques pour les insérer dans la LOLF, confirmant l’intérêt pour la loi de finances de servir de support à une réflexion pluriannuelle et « toutes APU ».

Il étend les avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) au réalisme des prévisions de recettes et de dépenses des projets de loi de finances, de financement de la sécurité sociale, de finances rectificative, de financement rectificative de la sécurité sociale et de finances de fin de gestion, ainsi qu’à toute mesure nouvelle de ces projets et à la cohérence de leur article liminaire avec la norme en dépense créée par l’article 1er de la PPLO.

Cet article confie au HCFP l’analyse des projets de loi de programmation sectoriels, dont le rôle de cadrage des politiques publiques et des trajectoires financières indicatives associées est en progression, et étend à quinze jours, pour ces textes comme pour les projets de loi de programmation des finances publiques, le délai donné au HCFP pour se prononcer.

Par ailleurs, il renforce les obligations du Gouvernement aux fins d’indiquer les mesures de correction qu’il envisage dans l’hypothèse où le HCFP identifie des « écarts importants » du solde public par rapport à son objectif de moyen terme au sens du droit européen.

● La rationalisation et l’amélioration du travail parlementaire est la troisième ligne directrice de la PPLO.

Ainsi, les articles 2 et 6 instaurent une nouvelle catégorie de lois de finances, la loi de finances de fin de gestion, qui ne peut comporter aucune disposition fiscale nouvelle. Cette disposition consacre la pratique instaurée par le Gouvernement en 2018, et contribue ainsi à améliorer la qualité de la programmation et de la gestion budgétaires. Si dans sa version initiale, la proposition de loi restreignait le champ du collectif de fin d’année aux seules opérations de fin de gestion excluant ainsi tous les articles de « lettres », la commission spéciale a choisi de réintroduire dans ce champ les mesures relevant de l’autorisation de l’octroi de garanties de l’État et de la prise en charge de dettes de tiers afin de permettre de traiter l’hypothèse de circonstances exceptionnelles exigeant l’utilisation de telles dispositions en fin d’année.

La PPLO procède également à une rationalisation du calendrier parlementaire, dans une perspective de renforcement du « chaînage vertueux » entre l’exécution et la prévision.

Ainsi, l’article 1er prévoit la fusion des temps consacrés au programme de stabilité et au débat d’orientation des finances publiques en une séquence spécifique dédiée à l’orientation pluriannuelle des finances publiques, qui se déroulerait au mois d’avril.

De plus, le temps consacré à l’analyse de l’exécution du budget est élargi et la fonction d’évaluation du Parlement est réaffirmée :

– l’article 8 avance du 1er juin au 1er mai la date limite de dépôt du projet de loi de règlement et de ses annexes afin de donner plus de temps aux parlementaires pour se consacrer à leurs travaux d’évaluation et de contrôle dans le cadre du Printemps de l’évaluation, pratique observée ces quatre dernières années à l’Assemblée nationale et consacrée au rang organique par l’article 8 ;

– l’article 2 renomme la loi de règlement en « loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année » afin de mettre en avant l’importance des travaux liés à l’évaluation des politiques publiques à l’occasion de son examen et pour mieux rendre compte de la réalité de l’exercice ;

– afin de souligner l’importance du développement de la fonction d’évaluation des finances publiques du Parlement, la commission spéciale a adopté l’article 9 A, à l’initiative de Mme Véronique Louwagie et M. Jean-Noël Barrot, qui procède à l’inscription de la notion d’évaluation dans le titre et le chapitre de la LOLF dédiés au contrôle des finances publiques.

Enfin, la PPLO prévoit un enrichissement de l’information à disposition des parlementaires.

Les annexes générales aussi connues sous l’appellation de « jaunes et oranges budgétaires » devront être transmises au moment du dépôt du projet de loi de finances afin de permettre leur bonne appropriation par les parlementaires (article 7). Pour l’avenir, la commission spéciale a également ouvert la possibilité d’une transmission numérisée du projet de loi de finances et de ses annexes. 

L’article 9 matérialise dans la LOLF la transmission au Parlement du tiré-à-part issu de la pratique actuelle, qui prévoit notamment les plafonds de crédits par mission et par programme du budget général, avant le 15 juillet. Surtout, il crée un nouveau temps parlementaire dédié au sujet de la dette publique en prévoyant la transmission d’un rapport du Gouvernement sur la trajectoire, les conditions de financement et la soutenabilité de la dette publique et la possibilité d’organiser un débat sur le sujet.

L’article 10 propose, quant à lui, d’améliorer l’information communiquée au Parlement au sein des documents annexés au projet de loi de finances de l’année. Les dépenses fiscales seraient plus lisibles, avec la présentation d’un nombre plus important de données, relatives notamment aux bénéficiaires. Elles feraient l’objet d’un programme d’évaluation actualisé chaque année, exigence essentielle destinée à rationaliser notre fiscalité. Les documents concernés calculeraient également le ratio entre les dépenses fiscales rattachées aux programmes d’une même mission et les crédits budgétaires de cette mission. Les projets annuels de performances seraient, enfin, complétés avec une présentation indicative des crédits prévus sur trois années glissantes au niveau de chaque programme.

Dans le cadre de la modernisation des relations entre les parlementaires et l’administration, l’article 11 restreint le champ des questionnaires budgétaires envoyés en juillet par les rapporteurs spéciaux aux demandes de renseignement d’ordre budgétaire, financier ou relatif aux dépenses fiscales pour en alléger le volume. L’article 11 crée également un nouveau pouvoir de sollicitation générale des administrations administratives indépendantes et des administrations publiques indépendantes des commissions des finances pour l’obtention d’informations relatives aux finances publiques.

L’article 11 bis crée une nouvelle annexe aux projets de loi de finances rectificative et de fin de gestion récapitulant le montant des crédits consommés et disponibles à l’échelle de chaque programme et de chaque action du budget général, des comptes spéciaux et des budgets annexes. Cette nouvelle annexe doit permettre au Parlement de mieux apprécier la pertinence des demandes d’ouverture et d’annulation de crédits formulées par le Gouvernement, de favoriser l’initiative parlementaire et d’améliorer le contrôle de la recevabilité des amendements de crédits.


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   Examen des articles de la Proposition de loi organique

Titre Ier
Dispositions relatives À la programmation
des finances publiques

Article 1er
Révision du cadre pluriannuel des finances publiques

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article consolide la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (LOPGFP) au sein de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Il procède, dans le même temps, à des ajustements importants de ce cadre dans un triple objectif :

– la détermination, au sein des lois de programmation des finances publiques, de deux normes encadrant la dépense publique sur l’ensemble de la période de programmation. La première correspondrait à une norme d’évolution en volume alors que la seconde déclinerait l’ensemble de la dépense des administrations publiques en milliards d’euros courants ;

– l’amélioration de l’information présentée au sein des articles liminaires, qui rappelleraient les objectifs de solde structurel et effectif sur l’ensemble de la période de programmation, de même que les prévisions au titre des deux nouvelles normes en dépense. L’ensemble de ces informations seraient déclinées par sous-secteur d’administration publique ;

– la simplification du calendrier budgétaire et son harmonisation avec les échéances européennes, avec la fusion des débats au Parlement portant sur les perspectives pluriannuelles des dépenses publiques – et des rapports remis par le Gouvernement à ces deux occasions.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté six amendements suggérés par le Conseil d’État permettant de clarifier les rédactions des nouvelles normes en dépense, de rétablir des alinéas relatifs aux finances sociales au sein du rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques et de coordonner certains éléments liés à la fusion entre les débats sur le programme de stabilité et l’orientation des finances publiques.

Elle a également adopté un amendement du rapporteur afin de supprimer la déclinaison du solde structurel par sous-secteur d’administration publique au sein de l’article liminaire des lois de finances. 

I.   L’État du droit

Le principe d’annualité constitue l’un des principes cardinaux régissant le droit budgétaire auquel est soumis le fonctionnement de l’État. Nécessité pratique, il traduit également la nécessité de renouveler de façon régulière le consentement des citoyens, par leurs représentants, à la contribution commune. Le Conseil constitutionnel a rappelé que le principe découlait des articles 34 et 47 de la Constitution ([5]). L’article 1er de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), tout comme l’ordonnance organique du 2 janvier 1959 qu’elle a remplacée, prévoit que l’exercice budgétaire s’étend sur une année civile.

Ces principes induisent néanmoins des rigidités de gestion que la LOLF a essayé d’atténuer. En parallèle, pour répondre à l’impératif d’équilibre des comptes publics, le cadre pluriannuel français et européen des finances publiques a été enrichi.

A.   La LOLF, un cadre annuel non dÉpourvu d’une dimension pluriannuelle

La loi n° 2001-682 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe le régime juridique applicable aux lois de finances, qu’il s’agisse de la loi de finances de l’année, des lois de finances rectificatives, de la loi de règlement ou des lois spéciales prévues par l’article 47 de la Constitution, intervenant lorsque la loi de finances n’a pas été déposée en temps utile pour être promulguée avant le début de l’exercice. L’ensemble de ces textes s’inscrit dans un horizon annuel correspondant à l’année civile, entre le 1er janvier et le 31 décembre.

1.   La LOLF prévoit plusieurs outils pour dépasser le cadre annuel

Bien qu’elle donne un socle juridique solide au principe d’annualité, la LOLF s’est également attachée à inscrire le droit budgétaire de l’État dans une dimension pluriannuelle, gage de bonne gestion par l’anticipation des recettes et des charges à venir et par la possibilité de planifier les dépenses et les investissements. La dimension pluriannuelle s’y exprime à plusieurs moments du processus budgétaire, ainsi qu’au sein des documents annexés au projet de loi de finances. En effet, comme le soulignait l’ancien député et ministre de l’économie et des finances André Philip, « l’année civile peut être une réalité administrative ; ce n’est pas une réalité économique » ([6]). Le droit budgétaire de l’État ne peut donc s’exercer, pour des réalités pratiques, dans un cadre strictement annuel.

 

Aussi, la LOLF offre plusieurs outils qui, en gestion, atténuent la rigidité annuelle. La distinction entre autorisations d’engagement et crédits de paiement ([7]), qui préexiste à la LOLF mais que celle-ci a contribué à encadrer, offre une première souplesse aux gestionnaires publiques, qui peuvent programmer des investissements sur plusieurs exercices budgétaires. Les reports de crédits, régis par l’article 15 de la loi organique, permettent quant à eux d’éviter les effets néfastes d’une annualité trop stricte de la budgétisation.

Par ailleurs, la LOLF introduit un moment dédié à l’examen des perspectives pluriannuelles. Son article 48 prévoit ainsi un débat d’orientation des finances publiques (DOFP) portant sur les orientations pluriannuelles de finances publiques. En vue de l’organisation de ce DOFP, le Gouvernement doit présenter, au cours du dernier trimestre de la session parlementaire ordinaire, un rapport comprenant une description des grandes orientations de sa politique économique et budgétaire au regard des engagements européens de la France ainsi qu’une évaluation à moyen terme des ressources de l’État et de ses charges ventilées par grandes fonctions. Ce document et ce débat, qui a lieu au Parlement au mois du juillet, doivent permettre d’organiser un « chaînage vertueux » entre l’approbation des comptes de l’année précédente, intervenue peu avant, et la préparation de l’examen du budget pour l’année suivante, en l’inscrivant dans une perspective pluriannuelle. La présente PPLO propose de remonter la date de dépôt de ce rapport au moment de la transmission du programme de stabilité (voir infra).

2.   L’exigence de pluriannualité est marquée au sein des documents annexés au projet de loi de finances de l’année

Les documents annexés au projet de loi de finances portent également la trace de cette exigence pluriannuelle. L’article 50 de la LOLF prévoit ainsi qu’un rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation (RESF) est joint au projet de loi de finances de l’année. Le RESF exprime le cadre macroéconomique et financier retenu par le Gouvernement pour l’élaboration de son projet de loi de finances. Il doit ainsi présenter et expliciter les perspectives d’évolutions, pour au moins les quatre années suivant celles du dépôt du projet de loi de finances, des recettes, des dépenses et du solde de l’ensemble des administrations publiques détaillées par sous-secteurs et exprimées selon les conventions de la comptabilité nationale, au regard des engagements européens de la France. Enfin, le RESF retrace l’ensemble des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques ainsi que leur évolution et comporte l’évaluation financière, pour l’année en cours et les deux années suivantes, de chacune des dispositions de nature législative ou réglementaire relatives aux prélèvements obligatoires qui sont envisagées par le Gouvernement.

 

Le dispositif de performance doit, de même, être mis en œuvre dans une perspective pluriannuelle : les documents joints au projet de loi de finances comportent, selon le a) du 5° de l’article 51, une présentation des actions, des coûts associés, des objectifs poursuivis, des résultats obtenus et attendus pour les années à venir mesurés au moyen d’indicateurs précis dont le choix est justifié.

L’article 55 de la LOLF prévoit enfin que chaque disposition du projet de loi de finances affectant les ressources ou les charges de l’État fait l’objet d’une évaluation chiffrée de son incidence au titre de l’année considérée et, le cas échéant, des années suivantes.

La dimension pluriannuelle, marquée au sein des documents annexés au projet de loi de finances initiale, reste cependant absente des projets de lois de finances rectificative et des projets de lois de règlement.

B.   L’exigence pluriannuelle, vecteur de maÎtrise des comptes publics

Les développements récents du principe de pluriannualité ont avant tout été conçus comme des vecteurs de maîtrise des comptes publics.

1.   Le cadre européen a été relayé au niveau national par une loi organique dédiée à la programmation des finances publiques

Dès 1997 et l’entrée en vigueur du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) ([8]), les États membres de l’Union ont dû élaborer des trajectoires pluriannuelles de dépenses et de recettes au sein de programmes de stabilité (Pstab). Le règlement précisant le volet préventif du PSC ([9]) détermine ainsi le contenu des programmes de stabilité qui doivent fournir l’objectif à moyen terme d’une position budgétaire proche de l’équilibre ou excédentaire, ainsi que la trajectoire d’ajustement qui doit conduire à la réalisation de cet objectif.

Les programmes de stabilité transmis à la Commission européenne sont, dès lors, au cœur de l’encadrement européen des finances publiques nationales. Cet encadrement a alors été conçu comme une façon de faire respecter les critères de convergence (ou « critères de Maastricht »), dont les 3 % de déficit et 60 % de dette publique par rapport au PIB, dans un contexte de mise en place de la monnaie unique.

La loi constitutionnelle du 23 juin 2008 a donné une nouvelle impulsion à l’encadrement pluriannuel des finances publiques en introduisant un cadre de programmation spécifique. L’article 34 de la Constitution a ainsi été complété par un alinéa prévoyant que « les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ». Cette consécration constitutionnelle résulte d’un amendement parlementaire destiné à conforter la démarche suivie au niveau européen. Les LPFP devaient ainsi permettre de soumettre au vote du Parlement les objectifs pluriannuels du Gouvernement transmis aux institutions européennes. 

L’importance des LPFP s’est accrue avec la crise des finances publiques européennes en 2010 et 2011, qui a justifié le renforcement du cadre européen des comptes nationaux avec la signature du traité sur la stabilité, la coopération et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG), le 2 mars 2012 par vingt-cinq États de l’Union européenne. Le TSCG vient renforcer certaines règles du Pacte de stabilité et de croissance, telles que révisées par le « six-pack » et le « two-pack ». Il précise l’exigence d’équilibre des comptes publics, qui s’entend désormais comme l’atteinte d’un objectif de solde structurel proche de l’équilibre mais propre à chaque pays ([10]). Le TSCG prévoit que ses propres stipulations doivent être transposées en droit interne « au moyen de dispositions contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles, ou dont le plein respect et la stricte observance tout au long des processus budgétaires nationaux sont garantis de quelque façon ».

La loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques est venue transposer en droit interne les exigences fixées par le TSCG.

2.   La tentative avortée des lois-cadres d’équilibre des finances publiques

À la suite des recommandations d’un groupe de travail visant à réaliser l’objectif constitutionnel d’équilibre des finances publiques présidé par M. Michel Camdessus, dont les travaux ont été initiés par une lettre du Premier ministre datée du 1er mars 2010, le Gouvernement avait déposé un projet de loi constitutionnelle relatif à l’équilibre des finances publiques (n° 3253) à l’Assemblée nationale en mars 2011.

Ce projet de loi constitutionnelle cherchait à introduire des lois-cadres d’équilibre des finances publiques, qui auraient remplacé les lois de programmations des finances publiques. Le texte organisait une hiérarchie – incomplète, notamment en période de crise – entre ces lois-cadres et les lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale.

Malgré l’adoption d’un texte par l’Assemblée nationale en des termes identiques à ceux du texte issu d’une deuxième lecture au Sénat, le Président de la République n’a pas soumis le projet de texte au Parlement réuni en Congrès ou au référendum, comme le prévoit l’article 89 de la Constitution.

C.   Les lois de programmation des finances publiques, principal vecteur de l’exigence pluriannuelle

Après l’échec de la mise en place des lois-cadres d’équilibre des finances publiques, les lois de programmation des finances publiques ont été dotées d’un cadre organique spécifique en 2012. Ce cadre se distingue de celui de la LOLF à la fois par son approche pluriannuelle et par son champ couvrant l’ensemble des administrations publiques

1.   Une programmation soumise au contrôle d’un Haut Conseil des finances publiques

L’article 1er de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (ci-après « LOPGFP ») définit les éléments constitutifs d’une loi de programmation des finances publiques. Ainsi, afin de respecter les exigences européennes, les LPFP doivent fixer un objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques, tel que mentionné à l’article 3 du TSCG, et déterminer une trajectoire pour atteindre cet objectif. Cette trajectoire s’entend toutes administrations publiques confondues, conformément à l’approche retenue au niveau européen.

Selon cet article, la situation budgétaire des administrations publiques doit être en équilibre ou en excédent. Cette règle est considérée comme respectée si le solde structurel – c’est-à-dire le solde effectif corrigé de sa composante conjoncturelle et duquel les mesures ponctuelles et temporaires sont déduites – correspond à l’objectif à moyen terme spécifique à chaque pays, tel que défini dans le cadre du PSC, avec une limite inférieure de déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut. L’équilibre des comptes publics est donc essentiellement appréhendé comme la résorption progressive du déficit structurel. Cette notion est devenue l’un des principaux outils de pilotage et de contrôle des finances publiques nationales.

En plus de déterminer un objectif de moyen terme pour le retour à l’équilibre des comptes publics et une trajectoire pour y parvenir, les lois de programmation des finances publiques doivent déterminer un effort structurel pour chaque exercice de la période de programmation, représentant l’incidence des mesures nouvelles sur les recettes et la contribution des dépenses à l’évolution du solde structurel.

L’introduction de la notion d’effort structurel

L’article 1er de la LOPGFP introduit la notion d’effort structurel dans l’encadrement pluriannuel des finances publiques, définie comme l’incidence des mesures nouvelles sur les recettes et la contribution des dépenses à l’évolution du solde structurel. Cette notion, qui doit permettre de mieux refléter les choix budgétaires discrétionnaires, entre dans le calcul de la variation de solde structurel d’une année sur l’autre : cette variation correspond à la somme de l’effort structurel et d’une composante non discrétionnaire, qui décrit elle-même l’évolution des recettes non fiscales et l’effet d’élasticité des prélèvements obligatoires. L’effort structurel se décompose quant à lui en un effort en prélèvements obligatoires, un effort en dépenses et une contribution de la clé en crédits d’impôts. 

Ainsi, il est prévu que le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances de l’année présente, pour l’année à laquelle il se rapporte et pour l’ensemble des administrations publiques, l’évaluation prévisionnelle de l’effort structurel défini à l’article 1er de la LOPGFP et du solde effectif, détaillés par sous-secteur des administrations publiques, ainsi que les éléments permettant d’établir la correspondance entre la notion d’effort structurel et celle de solde structurel.

Dans la même logique, le rapport annexé au PLFSS mentionné au I de l’article
LO. 111-4 du code de la sécurité sociale présente, pour l’année à laquelle il se rapporte, l’évaluation prévisionnelle de l’effort structurel des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

En dernier lieu, la LPFP doit décliner la décomposition des soldes effectifs annuels par sous-secteur des administrations publiques. Dans une logique maastrichtienne, l’appréhension de l’équilibre des finances publiques doit en effet concerner l’ensemble des administrations publiques.

L’ensemble de ces données est soumis à l’avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), en tant qu’institution budgétaire indépendante nationale (voir le commentaire de l’article 12 de la présente PPLO).

2.   Le reste du domaine obligatoire des LPFP

En plus de celles mentionnées ci-dessus, l’article 2 de la LOPGFP ajoute cinq catégories de dispositions devant figurer au sein d’une LPFP :

– un montant maximal pour les crédits du budget général de l’État, pour les prélèvements sur les recettes (PSR) de l’État ainsi que pour les créations, suppressions ou modifications d’impositions de toutes natures affectées à des personnes publiques ou privées autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale. La loi doit préciser le champ de ces crédits, prélèvements et impositions ;

– l’objectif de dépense des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi que l’objectif national des dépenses d’assurance maladie de l’ensemble de ces régimes ;

– l’incidence minimale des dispositions nouvelles, législatives ou prises par le Gouvernement par voie réglementaire, relatives aux impositions de toutes natures et aux cotisations sociales ;

– les plafonds de crédits alloués aux missions du budget général de l’État ;

– l’indication de l’ampleur et du calendrier des mesures de correction pouvant être mises en œuvre en cas d’écarts importants au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel, ainsi que les conditions de prise en compte, le cas échéant, des circonstances exceptionnelles définies à l’article 3 du TSCG.

La LOPGFP adopte ainsi une vision extensive de la dépense soumise à l’encadrement pluriannuel.

La programmation pluriannuelle d’une LPFP doit s’étendre sur au moins trois années civiles, étant entendu que, pour chacune des orientations pluriannuelles, la loi de programmation doit définir la période de programmation couverte. 

L’avant-dernier alinéa de l’article 2 prévoit que la LPFP peut comporter des orientations pluriannuelles relatives à l’encadrement des dépenses, des recettes et du solde ou du recours à l’endettement de tout ou partie des administrations publiques, ce qui ouvre un champ assez large aux dispositions pouvant figurer dans ce type de loi de programmation.

Exercice de programmation financière, le champ d’une LPFP ne s’y limite donc pas. Elle peut, en effet, comporter des règles relatives à la gestion des finances publiques ne relevant pas du domaine exclusif des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale ainsi qu’à l’information et au contrôle du Parlement sur cette gestion.

Enfin, la LOPGFP étend aux LPFP l’exigence de sincérité fixée aux lois de finances par la LOLF, en précisant que la LPFP présente de façon sincère les perspectives de dépenses, de recettes, de solde et d’endettement des administrations publiques. Cette sincérité s’apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler.

3.   Un rapport annexé, voté par le Parlement, précise les orientations de la loi de programmation des finances publiques

Afin d’expliciter les hypothèses sur lesquelles repose la programmation présentée par un projet de loi de programmation des finances publiques, la LOPGFP prévoit un rapport annexé comprenant douze rubriques :

– les hypothèses et méthodes retenues pour établir la programmation ;

– les perspectives de recettes, de dépenses, de solde et d’endettement des administrations publiques et de chacun de leurs sous-secteurs ;

– l’estimation des dépenses d’assurance vieillesse et l’estimation des dépenses d’allocations familiales ;

– les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des régimes complémentaires de retraite et de l’assurance chômage, ;

–  les mesures de nature à garantir le respect de la programmation ;

– toute autre information utile au contrôle du respect des plafonds et objectifs mentionnés ci-dessus et encadrant la dépense de l’État (budget général, prélèvement sur recettes et impositions de toute nature affectées) et des organismes de sécurité sociale (objectif de dépense des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et objectif national des dépenses d’assurance maladie) ;

– les projections de finances publiques à politiques inchangées et la description des politiques envisagées pour réaliser l’OMT au regard de ces projections ;

– le montant et la date d’échéance des engagements financiers significatifs de l’État en cours n’ayant pas d’implication immédiate sur le solde structurel ;

– les modalités de calcul de l’effort structurel, la répartition de cet effort entre chaque sous-secteur des administrations publiques ;

– les hypothèses de produit intérieur brut potentiel retenues pour la programmation des finances publiques et les hypothèses ayant permis l’estimation des effets de la conjoncture sur les dépenses et les recettes publiques, avec une justification des différences éventuelles aux estimations de la Commission européenne ;

– les modalités de calcul du solde structurel annuel.

En dernier lieu, le rapport présente également la situation de la France au regard des objectifs stratégiques européens.

D.   L’article liminaire des lois de finances et de financement, relais des LPFP au sein des lois de finances

La création des lois de programmation des finances publiques s’est accompagnée de l’introduction d’un relais des orientations pluriannuelles qu’elles déterminent au sein des lois de finances annuelles. Dès lors, l’article 7 de la LOPGFP prévoit que la loi de finances de l’année, les lois de finances rectificatives et les lois de financement rectificatives de la sécurité sociale comprennent un article liminaire qui s’insère avant la première partie de la loi de finances. Les lois de financement de la sécurité sociale annuelles ne sont pas concernées : en effet, l’article liminaire de la loi de finances correspondante vaut pour les deux textes de loi. Les deux projets étant présentés presque concomitamment, les données présentées au sein de l’article liminaire n’ont pas vocation à évoluer.

Cet article liminaire présente un tableau de synthèse retraçant, pour l’année sur laquelle elles portent, l’état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, avec l’indication permettant d’établir le passage de l’un à l’autre. De même que les LPFP, l’article liminaire adopte une démarche toutes administrations publiques confondues, ce qui le distingue du reste du projet de loi financière : le tableau d’équilibre qu’il comporte ne porte, par exemple, que sur le champ de l’État.

Afin de faciliter la comparaison entre les exercices, la loi de finances de l’année doit également indiquer les soldes structurels et effectifs de l’ensemble des administrations publiques résultant de la dernière année écoulée et des prévisions d’exécution de l’année en cours.

Le dernier alinéa de l’article 7 prévoit que l’exposé des motifs du projet de loi concerné doit préciser si les hypothèses ayant permis le calcul du solde structurel sont les mêmes que celles ayant permis de le calculer pour cette même année dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques. Les calculs du solde structurel et de la composante conjoncturelle reposent en effet sur des hypothèses de croissance potentielle et d’écart de production déterminées par la loi de programmation des finances publiques et sur lesquelles sont construits les équilibres des lois de finances annuelles. La précision apportée au sein de l’exposé des motifs doit permettre de comparer les exercices en assurant que les chiffres présentés sont bien calculés sur la même base.

Les lois de règlement comprennent également un article liminaire présentant un tableau de synthèse retraçant le solde structurel et le solde effectif de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de l’année à laquelle elle se rapporte. Le tableau prévu est complété, pour ce type de loi de finances, par une indication des écarts éventuels entre la programmation de la LPFP et les chiffres présentés par la loi de règlement. L’exigence évoquée supra de présentation des hypothèses ayant permis le calcul du solde structurel leur est également applicable. 

II.   Le dispositif proposÉ

Afin de traduire les recommandations de la MILOLF, le présent article procède à plusieurs ajustements du cadre organique organisant la pluriannualité budgétaire.

A.   Les recommandations de la MILOLF

Le présent article a vocation à mettre en œuvre les recommandations de la MILOF concernant les lois de programmation des finances publiques. À ce propos, la mission avait formulé trois propositions :

– prévoir que les lois de programmation des finances publiques comportent un objectif de dépenses publiques exprimé en euros courants, déclinés chaque année dans les articles liminaires de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale ;

– compléter les articles liminaires des lois financières par une présentation actualisée de la trajectoire de programmation des ratios de soldes publics et structurels, de leurs décompositions par sous-secteurs, des ratios de dépenses publiques, de prélèvements obligatoires et de dette publique pour permettre une comparaison aisée à la trajectoire de la loi de programmation ;

– prévoir que la loi de programmation des finances publiques présente de manière plus détaillée qu’actuellement les agrégats et objectifs de dépenses dans le champ de chacun des sous-secteurs d’administrations publiques.

Le présent article procède à l’intégration, avec plusieurs ajustements, du chapitre Ier de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques au sein du texte de la LOLF. Le titre préliminaire « Dispositions relatives à la programmation des finances publiques » est ainsi inséré avant le titre Ier de la LOLF. Les articles actuels, numérotés de 1 à 10, deviennent ainsi les articles 1er A à 1er J de la LOLF. Dans la suite du présent commentaire, la nouvelle numérotation sera retenue, l’ancienne restant indiquée entre parenthèses.

B.   Les ajustements proposÉs au cadre organique des LPFP

Tout en consolidant la loi organique de 2012 au sein de la loi organique relative aux lois de finances, le présent article prévoit plusieurs ajustements afin de traduire les recommandations de la MILOLF. 

1.   L’introduction de normes d’évolution des dépenses des administrations publiques

● Le présent article complète l’article 1er A (ex-article 1er) par un alinéa prévoyant que la LPFP détermine, au titre de chacun des exercices de la période de programmation, un objectif de croissance de la dépense des administrations publiques exprimé en volume et un objectif de dépenses des administrations publiques au sens de la comptabilité nationale exprimé en milliards d’euros courants.

Cette double norme vise à rendre plus aisée et plus concrète l’évolution de la dépense publique. D’une part, la norme en volume permet de vérifier que le rythme de la dépense publique respecte bien celui fixé en LPFP, sans que la dynamique des prix ne vienne brouiller la lecture de la politique budgétaire menée. D’autre part, la présentation d’un objectif de dépenses en milliards d’euros courants permet d’intégrer l’évolution des prix et de mieux rapprocher l’exécution budgétaire année après année avec la programmation pluriannuelle en dépense. Alors que la première norme correspondrait à un flux de dépenses publiques d’année en année, la seconde retracerait, en milliards d’euros, l’ensemble du « stock » de la dépense des administrations publiques. La norme de croissance des dépenses en volume serait, pour sa part, déclinée par sous-secteur d’administration publique, à la suite de la modification de l’article 1er B (ex-article 2).

Ces nouvelles normes ont vocation à renforcer le contrôle de la dépense publique afin d’en freiner la progression. Alors que les lois de programmation des finances publiques portaient jusqu’alors, essentiellement, sur les objectifs de solde structurel et effectif, le présent article permettrait de donner à ces normes en dépense une valeur juridique, et peut-être politique, au moins égale.

● L’article 1er B (ex-article 2) prévoit par ailleurs de compléter les données présentées par la LPFP sur l’incidence minimale des dispositions nouvelles relatives aux impositions de toute nature et aux cotisations sociales en faisant apparaître l’incidence des dispositions portant sur les dépenses fiscales ainsi que sur les exonérations, abattements d’assiette et réductions de taux applicables aux cotisations sociales. Cette nouvelle information doit permettre de mieux appréhender et encadrer l’impact des mesures nouvelles en recettes sur la trajectoire des finances publiques.

2.   L’article liminaire des lois financières serait complété

Actuellement, l’article liminaire contient un tableau de synthèse qui décline l’état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, avec l’indication des calculs permettant d’établir le passage de l’un à l’autre. L’article 1er G (ex-article 5) prévoit que ces données seront également déclinées pour chacune des années à venir de la période de programmation fixée par la LPFP applicable. L’ensemble de ces prévisions de solde structurel et de solde effectif seront déclinées par sous-secteur d’administration publique. Enfin, l’état des prévisions sur les deux nouvelles normes de dépense des administrations publiques en volume et en valeur sera indiqué.

Afin d’affiner la lecture de la stratégie de finances publiques, les informations agrégées au sein de l’article liminaire des lois de finances de l’année, des lois de finances rectificative, des lois de financement rectificatives de la sécurité sociale et des lois de fin de gestion seraient également déclinées par sous-secteur d’administration publique.

L’article liminaire des lois mentionnées ci-dessus présenterait, de plus, l’état des prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et d’endettement de l’ensemble des administrations publiques, exprimées en pourcentage de produit intérieur brut.

 

Les évolutions mentionnées ci-dessus pour les lois de finances se répercuteraient, de façon symétrique, sur les lois de règlement (qui deviendraient lois d’approbation des comptes et de résultats de gestion, voir le commentaire de l’article 2). Ainsi, selon l’article 1er H de la PPLO (ex-article 8), l’article liminaire des lois de règlement, qui présente actuellement les soldes structurels et effectifs de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution, serait complété pour l’année à laquelle la loi se rapporte :

– par la dépense des administrations publiques résultant de l’exécution, exprimée en milliards d’euros courants, ainsi que la croissance de la dépense publique sur l’année en volume ;

– les prélèvements obligatoires, les dépenses et l’endettement de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution, exprimés en pourcentage de produit intérieur brut.

3.   La rationalisation du calendrier budgétaire

Le calendrier budgétaire prévoit actuellement deux moments au cours desquels les orientations pluriannuelles des finances publiques peuvent être débattues : à l’occasion, d’une part, de la transmission du Programme de stabilité à la Commission européenne fin avril et, d’autre part, du débat d’orientation des finances publiques organisé au mois de juillet. L’article 1er J (ex-article 10) prévoit la fusion de ces deux débats : à cette occasion, le Gouvernement devrait présenter au Parlement, au plus tard le 30 avril de chaque année, un rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques comportant :

– une analyse des évolutions économiques constatées depuis l’établissement du rapport économique, social et financier (RESF) annexé au PLF de l’année ;

– une description des grandes orientations de la politique économique et budgétaire du Gouvernement au regard des engagements européens de la France ;

– une évaluation à moyen terme des ressources de l’État ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions ;

– la liste des missions, des programmes et des indicateurs de performances associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de l’année ;

– l’évaluation pluriannuelle de l’évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale ainsi que de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie.

À l’exception de ce dernier point, l’énumération ci-dessus reprend l’ensemble des éléments mentionnés par l’article 48 actuel, qui est réécrit par l’article 9 de la présente PPLO. Le dernier alinéa permet d’élargir le champ de ce débat aux finances sociales avec, en particulier, des détails sur l’évolution prévue des dépenses d’assurance maladie.

III.   Les amendements adoptÉs par la commission spÉciale

La commission spéciale a adopté dix amendements modifiant l’article 1er, dont trois de nature rédactionnelle. Six amendements ont été suggérés par le Conseil d’État.

Un amendement du rapporteur et du président de la commission spéciale adapte la formulation relative aux nouvelles normes en dépense : elle renverrait désormais à « un objectif, exprimé en volume, d’évolution des dépenses des administrations publiques présentée selon les conventions de la comptabilité nationale et une prévision, exprimée en milliards d’euros courants, de ces dépenses en valeur ».

Cette précision à l’article 1er A est complétée par une coordination à l’article 1er B réalisée avec un amendement du rapporteur et du président, pour préciser que les deux normes de dépenses seraient déclinées par sous-secteur d’administration publique au sein de la loi de programmation des finances publiques.

La commission a également suivi l’avis du Conseil d’État en adoptant les amendements identiques du rapporteur et du président et de M. Zumkeller pour rétablir deux alinéas, supprimés par erreur, complétant le rapport annexé à la LPFP prévu par l’article 1er E et prévus par l’actuelle LOPGFP :

« 2°bis Pour chacun des exercices de la période de la programmation, l'estimation des dépenses d'assurance vieillesse et l'estimation des dépenses d'allocations familiales ;

« 2°ter Pour chacun des exercices de la période de la programmation, les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des régimes complémentaires de retraite et de l'assurance chômage, exprimées selon les conventions de la comptabilité nationale ; »

À propos de l’article liminaire des lois financières, la commission spéciale a adopté un amendement du rapporteur et du président précisant la récapitulation de la programmation prévue par la LPFP au sein de ces articles liminaires. L’ajout doit éviter toute ambiguïté en rappelant qu’il ne s’agit pas d’une programmation pluriannuelle glissante dans chaque texte financier – ce qui poserait des problèmes de constitutionnalité – mais bien d’un rappel de la prévision de la LPFP.

Avec un amendement du rapporteur et du président, la commission a adopté une recommandation du Conseil d’État tendant à supprimer le 3° et 4° de l’article 1er J. Cet article prévoit, au sein du rapport présenté en avril, une évaluation à moyen terme des ressources de l’État ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions. À la suite de la fusion entre le débat Pstab et le DOFP, ces informations ont plutôt vocation à figurer dans le « tiré à part » présenté au Parlement au mois de juillet. 

Enfin, la commission spéciale a repris, en adoptant un amendement du rapporteur et du président, une précision visant à faire correspondre le nom du rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques avec les dispositions prévues dans la LOLF relatives à ce rapport. 

En plus des amendements suggérés par le Conseil d’État et mentionnés ci-dessus, la commission spéciale a adopté une modification de fond de l’article 1er. Un amendement du rapporteur prévoit ainsi la suppression de la déclinaison du solde structurel par sous-secteur d’administration publique, comme initialement prévu dans la proposition de loi organique au sein des articles liminaires des différentes lois de finances. Des difficultés méthodologiques et de lisibilité risquent en effet de fausser la construction et la lecture de ces chiffres.

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*     *

 


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Titre II
Dispositions relatives aux lois de finances

Article 2
Changement d’appellation de la loi de règlement et modification
de la catégorisation des lois de finances

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article renomme, d’une part, la « loi de règlement » en « loi d’approbation des comptes et de résultats de gestion » dans le but d’accroître la visibilité des travaux d’évaluation lors de l’examen de cette loi (recommandation n° 44 du rapport de la MILOLF). D’autre part, il modifie la catégorisation des lois de finances pour tirer les conséquences de la création des lois de fin de gestion par l’article 6.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté trois amendements sur cet article : deux amendements rédactionnels du rapporteur et un amendement du rapporteur et du président qui modifie le nouveau nom de la loi de règlement.

I.   L’État du droit

A.   les diffÉrentes catÉgories de lois de finances

L’article 34 de la Constitution prévoit que « les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l’État dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».

L’article 1er de la LOLF précise ainsi que les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’État, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte.

Cet article dresse également une typologie des lois de finances. Ainsi, ont le caractère de lois de finances :

– la loi de finances de l’année et les lois de finances rectificatives ;

– la loi de règlement ;

– les lois prévues à l’article 45 de la LOLF, soit les lois spéciales autorisant le Gouvernement à continuer à percevoir les impôts existants jusqu’au vote de la loi de finances de l’année lorsque le projet de loi de finances n’a pas pu être déposé en temps utile par le Gouvernement, dans le cas prévu au quatrième alinéa de l’article 47 de la Constitution.

Le lecteur est invité à se référer aux commentaires de l’article 5 et de l’article 6 de la présente proposition de loi pour de plus amples informations sur le champ des lois de finances (défini à l’article 34 de la LOLF) et sur celui des lois de finances rectificatives (défini à l’article 35).

B.   La loi de rÈglement

Aux termes de l’article 1er de la LOLF, la loi de règlement a donc le caractère de loi de finances. L’article 37 de la LOLF en détaille le contenu : la loi de règlement est principalement un texte de constatation et d’approbation des différents comptes et d’ajustement de l’autorisation parlementaire initiale. Elle est également, grâce aux annexes qui l’accompagnent (prévues par l’article 54 de la LOLF) et à la pratique du Printemps de l’évaluation constatée depuis 2018 à l’Assemblée nationale, un support d’analyse de la gestion des différentes politiques publiques mises en œuvre au cours de l’année.

1.   Une loi de constatation et d’approbation des différents comptes

● L’article 37 de la LOLF prévoit que la loi de règlement :

– arrête le montant définitif des recettes et des dépenses du budget auquel elle se rapporte, ainsi que le résultat budgétaire qui en découle (I). Ainsi, un tableau récapitule à l’article 1er de la loi de règlement l’ensemble des opérations budgétaires effectivement comptabilisées pendant l’exercice ;

– arrête le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l’équilibre financier de l’année correspondante, présenté dans un tableau de financement (II) ;

– approuve le compte de résultat de l’exercice, établi à partir des ressources et des charges constatées et affecte au bilan le résultat comptable de l’exercice et approuve le bilan après affectation ainsi que ses annexes (III). L’approbation du compte de résultat de l’État, de son bilan et de l’annexe du compte général de l’État est une innovation de la LOLF qui apporte une vision de l’ensemble de la situation financière et patrimoniale de l’État (de ses biens, ses dettes, les engagements à honorer dans le futur). Cette comptabilité en droits constatés permet d’enrichir l’information disponible et de la rendre plus transparente dans l’objectif de mieux piloter les finances publiques.

Afin de s’assurer de la fiabilité des informations comptables, le législateur organique a confié à la Cour des comptes la mission de certifier les comptes de l’État (5° de l’article 58 de la LOLF). Depuis l’entrée en vigueur de la LOLF en 2006, les comptes de l’État ont été systématiquement certifiés, même si cette certification a toujours été assortie de réserves. Les premières années ont été marquées par des progrès significatifs, ce qui a permis, en dix ans, la levée de quatorze réserves. Depuis 2015, les comptes de l’État sont certifiés réguliers et sincères, sous quatre réserves substantielles invariantes.

Il est important de souligner que la mise en œuvre de la comptabilité générale de l’État a fait l’objet d’un bilan mitigé par la Cour des comptes en février 2016 ([11]). Si cette comptabilité générale a permis une meilleure transparence et connaissance du patrimoine de l’État ainsi qu’une modernisation des services financiers en favorisant des travaux communs entre les différents gestionnaires, son utilisation dans le débat public et par les gestionnaires publics reste très limitée.

● Aux termes de l’article 37, la loi de règlement peut également, le cas échéant, ratifier des décrets d’avance qui seraient intervenus après l’adoption de la dernière loi de finances rectificative, ajuster l’autorisation parlementaire initiale en ouvrant ou en annulant des crédits budgétaires en fonction des écarts constatés entre les résultats et les prévisions et procéder aux mêmes types de modifications sur les comptes spéciaux (ajustement du montant du découvert autorisé au niveau du découvert constaté, arrêt des soldes des comptes spéciaux non reportés sur l’exercice suivant, apurement des profits et des pertes survenus sur chaque compte spécial).

● Depuis 2012, l’article 37 précise également que la loi de règlement comprend l’article liminaire mentionné à l’article 8 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

● Enfin, l’article 37 de la LOLF indique que la loi de règlement peut comporter toutes dispositions relatives à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques, ainsi qu'à la comptabilité de l’État et au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics.

2.   Un support d’analyse de la gestion des résultats

● L’article 54 de la LOLF prévoit que le projet de loi de règlement est accompagné de plusieurs annexes qui permettent de compléter l’information du Parlement et d’analyser, de façon complète et approfondie, la mise en œuvre des politiques publiques financées au cours de l’année.

Ainsi, les annexes principalement utilisées, par les rapporteurs spéciaux notamment, sont les rapports annuels de performance (RAP) qui retracent, par programme, en mettant en évidence les écarts avec les prévisions des lois de finances, les objectifs et les résultats attendus et obtenus, les indicateurs et les coûts associés, la justification des mouvements de crédits et des dépenses constatées, la façon dont les autorisations d’emploi ont été gérées, la présentation des emplois effectivement rémunérés par les organismes bénéficiaires d’une subvention pour charges de service public ainsi que le montant des dépenses fiscales rattachées au programme concerné.

Ces rapports annuels de performance sont le reflet, en exécution, des projets annuels de performance joints au projet de loi de finance de l’année. Ils sont l’outil principal, pour les parlementaires, de l’analyse de la gestion des autorisations accordées par le Parlement au Gouvernement.

D’autres annexes complètent la panoplie des instruments à disposition du Parlement pour évaluer la mise en œuvre par le Gouvernement des politiques publiques au cours de l’année :

– le développement des recettes du budget général et le montant des dépenses fiscales ;

– des annexes explicatives du montant définitif des crédits ouverts et des dépenses constatées ;

– une annexe explicative présentant le budget exécuté en section de fonctionnement et section d’investissement ;

– des annexes explicatives développant pour chaque budget annexe et chaque compte spécial, le montant définitif des recettes et des dépenses constatées, des crédits ouverts ou du découvert autorisé, ainsi que les modifications de crédits ou de découvert demandées ;

– des annexes explicatives présentant les résultats de la comptabilité ;

– le compte général de l’État mentionné supra ;

– et l’avis du Haut Conseil des finances publiques identifiant les écarts importants entre les résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques.

● L’information à disposition du Parlement est renforcée par la publication, au moment du dépôt du projet de loi de règlement, de deux rapports de la Cour des comptes : un rapport relatif aux résultats de l’exécution de l’exercice antérieur et aux comptes associés, qui, en particulier, analyse par mission et par programme l’exécution des crédits dont le dépôt est conjoint à celui de la loi de règlement (4° de l’article 58 de la LOLF) et la certification des comptes de l’État mentionnée supra, annexée au projet de loi de règlement (5° de l’article 58 de la LOLF).

● L’examen du projet de loi de règlement a toujours souffert d’un déficit d’intérêt de la part des parlementaires et du grand public. Il est en effet très difficile pour les parlementaires d’amender le projet de loi de règlement puisque le texte se borne à constater l’existant. Les quelques amendements des parlementaires portent principalement sur le contrôle des finances publiques et le texte est généralement adopté en quelques heures, après des échanges qui se concentrent plutôt sur la discussion générale. À titre de comparaison, le projet de loi de finances fait l’objet de plusieurs milliers d’amendements et de plusieurs semaines de débats chaque automne.

Un regain d’intérêt pour le projet de loi de règlement a cependant été observé à l’Assemblée nationale et au Sénat ces dernières années, parallèlement à la revalorisation de la mission de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques du Parlement depuis 2008. Ainsi, en 2018, un Printemps de l’évaluation a été mis en place par la commission des finances de l’Assemblée nationale, initialement sans modification des textes réglementaires, législatifs ou organiques, dans l’objectif de rééquilibrer le calendrier budgétaire et revaloriser l’examen de la loi de règlement. Ce printemps consiste en l’évaluation, par chaque rapporteur spécial, d’une politique publique relevant de son champ de compétence. Ce temps consacré à l’évaluation se double de l’audition de chaque ministre en commission pour une justification de l’exécution des crédits, dans une perspective d’accountability (« rendre compte »).

Le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l’article 8 de la présente proposition de loi pour de plus amples informations sur le calendrier du dépôt du projet de loi de règlement et sur la pratique du Printemps de l’évaluation à l’Assemblée nationale. 

3.   Des modifications successives de l’appellation de la loi de règlement

Si l’intitulé de la loi de règlement n’a jamais été modifié dans le texte organique, en pratique, son nom a déjà évolué plusieurs fois.

Alors qu’elles s’intitulaient traditionnellement « loi portant règlement définitif du budget », cette appellation a été modifiée en 2006 à l’initiative du Sénat en « loi de règlement des comptes et rapport de gestion ».

Depuis 2013, cette loi s’appelle « loi de règlement du budget et d’approbation des comptes ». 

II.   Les modifications apportÉes par la proposition de loi

A.   De la loi de rÈglement À la loi d’approbation des comptes et de rÉsultats de gestion

Le I du présent article procède à un changement sémantique de l’appellation de la loi de règlement afin de mettre en avant l’importance des travaux liés à l’évaluation des politiques publiques à l’occasion de son examen et pour mieux rendre compte de la réalité de l’exercice.

Il est ainsi proposé de renommer la « loi de règlement du budget et d’approbation des comptes » en « loi d’approbation des comptes et de résultats de gestion » afin de mettre l’accent sur le sujet de la performance. Ce changement est effectué à toutes les occurrences des mots « de règlement » dans la LOLF, soit aux articles 1er, 37, 41, 46, 54 et 58 de la loi organique.

Cette disposition est la traduction de la proposition n° 44 du rapport de la MILOLF.

B.   La naissance de la loi de fin de gestion

Le II du présent article modifie la catégorisation des lois de finances prévue à l’article 1er de la LOLF pour tirer les conséquences de la création des lois de fin de gestion par l’article 6 (voir commentaire de l’article 6 infra).

III.   Les modifications apportÉes par la Commission

La commission spéciale a adopté trois amendements sur cet article.

Conformément aux recommandations du Conseil d’État, le premier amendement du rapporteur Laurent Saint-Martin et du président Éric Woerth clarifie le nouveau nom de la loi de règlement et remplace l’intitulé prévu dans le texte initial par l’appellation suivante : « loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année ». Cette nouvelle appellation permet d’insister sur l’objet principal de cette loi de finances : l’évaluation des résultats de la gestion du Gouvernement dans la mise en œuvre des politiques publiques telles que financées par l’autorisation parlementaire accordée en début d’année.

Les deux autres amendements adoptés sont des amendements rédactionnels du rapporteur : le premier complète la liste des références à la loi « de règlement » dont l’appellation est modifiée par l’article 2 ; le second rapatrie à l’article 2 la mention de la date d’entrée en vigueur du II de l’article 2, inscrite à l’article 6 dans la proposition de loi organique initiale.

*

*     *

 

 

Article 3
Renforcement de la doctrine d’affectation des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article élève au rang organique la doctrine d’affectation des impositions de toute nature à des tiers autres que l’État figurant à l’article 18 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

En plus des conditions et réserves actuellement fixées par les articles 2, 34, 36 et 51 de la LOLF, le présent article ajoute trois critères alternatifs à la possibilité d’affecter une imposition de toute nature à un tiers. Les organismes de sécurité sociale ainsi que les collectivités territoriales et leurs établissements publics sont exclus de cette doctrine qui vaut pour l’existant et pour l’avenir. Elle entrerait en vigueur lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2023.

Par ailleurs, l’article prévoit d’enrichir l’information du Parlement relative à l’affectation de ressources à des tiers qui est contenue dans l’annexe « Évaluation des voies et moyens ». Enfin, Il inscrit, dans l’article 2 de la LOLF, les dispositions prévues par son article 36 qui est donc abrogé.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

À la suite de l’avis du Conseil d’État, la commission spéciale a adopté un amendement tendant à modifier la doctrine d’affectation des taxes. Deux conditions devraient désormais être observées pour permettre l’affectation d’une taxe à un tiers autre que l’État, les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale : celui-ci doit disposer de la personnalité morale et un lien doit exister entre la taxe et la mission de service public qu’elle permet de financer.

La date d’entrée en vigueur de la doctrine a été repoussée au dépôt du projet de loi de finances pour 2025.

Malgré un encadrement de la pratique la fiscalité affectée par la LOLF et par les lois de programmation des finances publiques (LPFP), celle-ci demeure largement répandue, ce qu’a déploré la MILOLF.

Les auteurs de la présente proposition de loi ont entendu introduire une nouvelle doctrine d’affectation au sein de la LOLF afin de réduire le paysage des impositions de toute nature qui échappent au budget général. S’appliquant aux affectations existantes, elle ferait également l’objet à l’avenir d’une vérification par le Conseil d’État et par le Conseil constitutionnel.

Le Conseil d’État a, toutefois, estimé que la doctrine initialement retenue par le présent article n’était pas de nature à répondre à cet objectif.

I.   L’État du droit

A.   Le champ de la fiscalitÉ affectÉe demeure trÈs vaste malgrÉ un encadrement strict de cette pratique

La lecture des travaux préparatoires de la LOLF démontre que la fiscalité affectée devait demeurer exceptionnelle et dérogatoire. Son encadrement par la loi organique et par les lois de programmations n’a pourtant pas empêché un développement important au cours des deux dernières décennies.

1.   Genèse de la doctrine d’affectation de taxe

Les débats entourant la fiscalité affectée lors de l’adoption de la LOLF témoignent d’une volonté de circonscrire son champ. Comme l’explique le rapporteur du texte au Sénat, M. Alain Lambert : « les impositions de toute nature (…) sont la manifestation d’une « violence fiscale » que seul l’État a la légitimité d’exercer » ([12]).

La voie privilégiée lorsque l’on souhaite affecter une recette à une dépense est de faire figurer le produit de l’imposition concernée sur le budget de l’État et d’en verser la contrepartie aux affectataires finaux notamment par des dotations budgétaires ou, éventuellement, des prélèvements sur recettes.

Si l’affectation directe d’une recette à un tiers est tolérée, c’est à des conditions strictes qui sont celles figurant désormais dans la LOLF.

2.   La doctrine d’affectation prévue par la LOLF

L’affectation d’une recette à un tiers autre que l’État est subordonnée à une condition de fond et à trois conditions de forme.

a.   Une condition de fond : l’existence d’une mission de service public

Le second alinéa de l’article 2 de la LOLF dispose que « les impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu’à raison des missions de service public confiées à lui ».

La notion de service public ne fait pas l’objet d’une définition par la loi organique et n’a pas non plus été précisée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 juillet 2001 ([13]) relative à la LOLF.

Le contrôle de cette condition est donc laissé à l’appréciation du Conseil d’État dans son avis sur les lois de finances ainsi qu’à celle du juge constitutionnel, avant la promulgation de la loi. Sans être plus disert sur la notion même de service public, les deux juges s’accordent à dire que l’affectation d’impositions de toutes natures à une personne morale, qu’elle soit de droit public ou de droit privé, est possible pour autant qu’elle soit chargée d’une mission de service public ([14]).

b.   Trois conditions de forme

En sus de l’exigence d’une mission de service public, le second alinéa de l’article 2 de la LOLF conditionne la faculté d’affecter une imposition de toute nature à un tiers à trois réserves prévues par les articles 34, 36 et 51 de la LOLF.

En premier lieu, le 1° du I de l’article 34 impose que la loi de finances de l’année doit autoriser la perception des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’État. Dans la pratique, cette autorisation est assez formelle. Elle est votée à l’article premier de la loi de finances de l’année qui dispose rituellement que « la perception des ressources de l'État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État est autorisée pendant l'année 2020 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi ». 

Les auteurs de la présente proposition de loi entendent donner plus de portée à cette autorisation, ce dont le lecteur pourra se rendre compte à la lecture du commentaire de l’article 5 de la présente proposition de loi. 

En deuxième lieu, l’article 36 de la LOLF prévoit que « l’affectation, totale ou partielle d’une ressource établie au profit de l’État ne peut résulter que d’une loi de finances ». Il reprend une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel qui veut que le législateur peut créer et affecter une taxe dans le texte de son choix. En revanche, lorsque l’imposition concernée a été, préalablement, établie au profit de l’État, seule une loi de finances peut procéder à un changement d’affectation ([15]).

Enfin, le projet de loi de finances doit être accompagné d’une annexe explicative spécifique énumérant les impositions affectées et en présentant une évaluation (1° de l’article 51 de la LOLF). Ces informations figurent dans le tome I du fascicule « Évaluation des voies et moyens » annexé aux projets de lois de finances de l’année.

 

c.   Un encadrement supplémentaire par les lois de programmation des finances publiques

Parmi les règles relatives à la gestion des finances publiques pouvant figurer dans les lois de programmation de finances publiques en vertu de l’article 4 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques figurent les règles encadrant les taxes affectées.

Les taxes affectées ont été introduites dans le champ de la norme de dépenses de l’État par la LPFP 2012-2017 qui a, de plus, fixé un objectif de diminution annuelle du plafond des taxes affectées. La LPFP 2014‑2019 a enrichi ces règles en formalisant une doctrine d’emploi des taxes affectées, reprise par la LPFP 2018‑2022. Selon l’article 18 de la dernière LPFP, l’affectation d’une imposition de toute nature à des tiers autres que les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale et les organismes de sécurité sociale ne peut être instituée ou maintenue que si la ressource obtenue répond à l’un des trois critères alternatifs suivants :

– elle résulte d’un service rendu par l’affectataire à un usager et son montant s’apprécie sur des bases objectives ;

– elle finance au sein d’un secteur d’activité ou d’une profession des actions d’intérêt commun ;

– elle finance des fonds nécessitant la constitution régulière de réserves financières.

3.   Une pratique de la fiscalité affectée considérée comme excessive par la MILOLF

La MILOLF a considéré que la multiplication du nombre et du produit des taxes affectées « nuit à la lisibilité des finances publiques, affaiblit la portée de l’autorisation budgétaire et affecte l’efficacité du contrôle de l’exécution ». Elle avait donc enjoint « d’engager une démarche résolue de rationalisation » de leur paysage ([16]).

Le montant des taxes affectées atteint en 2020 près de 236 milliards d’euros d’après le tome I des « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances. Si l’affectation de taxes au secteur social et local ne soulève pas de difficulté, il n’en est pas de même pour les autres bénéficiaires (établissements publics, fonds sans personnalité juridique…) qui bénéficient par ce biais de près de 26 milliards d’euros.

Montant des taxes affectÉes selon les secteurs

(en millions d’euros)

 

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Exécution

2016

Exécution

2017

Exécution

2018

Prévision

2019

Prévision

2020

Évolution 2013/2020

Secteur social

152 945

156 794

171 362

173 767

178 515

193 667

223 968

236 338

+ 55%

Secteur local

54 504

55 649

56 144

58 859

60 853

63 698

63 282

62 544

+ 15%

ODAC et divers

35 287

38 105

34 667

24 943

28 193

26 797

27 739

26 075

 – 26%

Total

242 736

250 548

262 173

257 569

267 561

284 162

314 989

324 956

+ 34%

Source : données transmises par le Gouvernement.

La MILOLF a donc souhaité réaffirmer « le principe directeur selon lequel l’affectation d’impositions de toute nature doit être l’exception et le versement au budget de l’État doit être la règle ». L’affectation de taxes à des tiers autres que l’État n’a, selon les auteurs de la proposition de loi, véritablement d’intérêt que lorsqu’elle favorise le consentement à l’impôt, en allouant des recettes qui sont en lien avec les activités qu’elles permettent de financer.

Pour cela, la MILOLF a proposé de définir une doctrine d’emploi des taxes affectées au niveau organique, afin de permettre au Conseil constitutionnel de censurer toute disposition d’affectation de recettes à un tiers qui ne la respecterait pas ([17]) .

II.   Les modifications apportÉes par la proposition de loi

En plus du critère de la mission de service public figurant au second alinéa de l’article 2 de la LOLF, le I du présent article ajoute trois conditions de fond pour l’affectation de taxe à des tiers autres que l’État. Ainsi, son complète l’article 2 de la LOLF par un troisième alinéa qui prévoit que l’affectation d’une imposition de toutes natures à des tiers doit répondre aux trois critères alternatifs prévus par la loi de programmation précitée :

– elle résulte d’un service rendu par l’affectataire à un usager et son montant s’apprécie sur des bases objectives ;

– elle finance au sein d’un secteur d’activité ou d’une profession des actions d’intérêt commun ;

– elle finance des fonds nécessitant la constitution régulière de réserves financières.

Sont exclus de cette doctrine les organismes de sécurité sociale ainsi que les collectivités territoriales et leurs établissements publics dont les missions relèvent par nature du service public et qui peuvent être financés dans les mêmes conditions que l’État.

Par ailleurs, cette doctrine nouvelle vaut tant pour l’avenir que pour les affectations existantes qui devraient faire l’objet d’une revue pour vérifier leur conformité aux trois critères ainsi établis. Pour cette raison, le IV prévoit une date d’entrée en vigueur de l’article à l’occasion du dépôt du projet de loi de finances pour l’année 2023.

Les trois réserves prévues actuellement par l’article 2 de la LOLF et relatives à l’autorisation de la perception des taxes affectées par la loi de finances de l’année (1° de l’article 34 de la LOLF), au monopole confié à la loi de finances pour le changement d’affectation d’une taxe établie au profit de l’État (article 36) et à l’information du Parlement par une annexe au projet de loi de finances (1° de l’article 51) sont maintenues par le du I. Les deux dernières réserves font l’objet de modifications.

La première modification est formelle et porte sur la condition de fond relative au monopole confié à la loi de finances pour le changement d’affectation d’une taxe établie au profit de l’État. Elle figurera désormais dans l’article 2 de la LOLF conformément au dernier alinéa du I du présent article. En conséquence, le II du présent article prévoit une abrogation de l’article 36 de la LOLF.

La seconde modification porte sur l’information du Parlement et vise à permettre de disposer d’une vision plus complète de l’ensemble des recettes fiscales et non fiscales attribuées à des tiers autres que l’État. Aussi, le III du présent article modifie le mot « impositions de toute nature » par le mot « ressources » dans le 1° de l’article 51 de la LOLF. En plus de la présentation des impositions de toutes natures, le tome I du fascicule « Évaluation des voies et moyens » présentera également toutes les autres ressources directement affectées à ces tiers.

III.   Les Modifications adoptÉes par la commission

A.   Modifications suggÉRÉes par le Conseil d’État

Le Conseil d’État a pris acte de l’intention des auteurs de la proposition de loi de réduire le champ de la fiscalité affectée. Il estime toutefois que le moyen retenu, à savoir la consécration, au niveau organique, de la doctrine d’emploi des taxes affectées prévue à l’article 18 de la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, ne concourt qu’imparfaitement à cette fin.

Le Conseil d’État considère que la combinaison du maintien du critère préexistant d’affectation à raison des missions de service public confiées à un tiers (second alinéa de l’article 2 de la LOLF) avec les trois critères alternatifs de l’article 18 de la loi de programmation des finances publiques précitée comporte un risque de contradiction.

Ce risque porte sur les deux derniers d’entre eux à savoir le financement d’action d’intérêt commun et la constitution de réserves financières qui sont susceptibles de couvrir des activités ne relevant pas de missions de service public. Le Conseil d’État rappelle sa position constante, ainsi que la jurisprudence du Conseil constitutionnel précitée, qui n’autorise pas l’affectation de recettes à des tiers pour financer des activités qui ne relèvent pas du service public.

Pour atteindre l’objectif fixé par les auteurs de la proposition de loi, le Conseil d’État propose de renoncer à inscrire dans la loi organique la doctrine d’emploi issue de la LPFP pour les années 2018 à 2022 au profit d’une autre rédaction plus fidèle à leur intention.

Il estime que l’exclusion des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des organismes de sécurité sociale de la nouvelle doctrine d’affectation est légitime puisqu’ils exercent par définition des missions de service public.

Il estime qu’un encadrement plus strict de la fiscalité affectée pourrait passer par la réaffirmation du principe selon lequel les affectations de recettes ne peuvent s’opérer qu’au profit de tiers dotés de la personnalité morale. Ce principe qui se déduit de l’article 16 de la LOLF permettrait d’exclure la possibilité d’affectation à un fonds sans personnalité juridique. Cette suggestion rejoindrait une proposition analogue de la MILOLF qui avait estimé qu’une revue des fonds sans personnalité juridique devait être engagée pour limiter substantiellement leur nombre.

B.   Modifications adoptÉES par la commission

À l’initiative du rapporteur et du président, la commission a adopté un amendement qui a remplacé les critères initialement retenus pour l’affectation des taxes à des tiers. Se rangeant à l’analyse du Conseil d’État, elle a effectivement estimé que la doctrine fixée par l’article 18 de la loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022 ne permettait pas de poursuivre l’objectif fixé par la MILOLF.

Souhaitant à la fois rationaliser les affectations existantes qui dérogent le plus aux principes de bonne gestion budgétaire et se doter d’une discipline plus exigeante pour l’avenir, la commission spéciale a retenu deux nouvelles conditions de fond qui prolongent l’exigence de mission de service public figurant au second alinéa de l’article 2 de la LOLF.

L’amendement adopté par la commission remplace le second alinéa de l’article 2 de la LOLF par deux alinéas. Le premier exclut les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale de la nouvelle doctrine. Le second prévoit deux conditions de fonds pour permettre l’affectation d’une taxe à un tiers.

La première exige de ce tiers qu’il détienne la personnalité morale. Les fonds sans personnalité juridique sont visés par cette condition. Définis comme des « véhicules financiers contrôlés par l’État ou d’autres personnes publiques et dont la gestion est confiée à des tiers » ([18]), ces fonds sont au moins au nombre de 154 d’après une enquête de la Cour des comptes et leur trésorerie s’élèverait à plus de 30 milliards d’euros. La MILOLF avait déjà préconisé qu’une revue de ces fonds soit effectuée pour conduire à des rebudgétisations ([19]). D’après une première estimation réalisée par la commission spéciale, la condition proposée par l’amendement adopté pourrait conduire à rebudgétiser des taxes finançant une quinzaine de fonds sans personnalité juridique pour un montant annuel de plus de 4 milliards d’euros.

La seconde condition porte sur la nature de la taxe, qui doit avoir un lien avec la mission de service public qui justifie son affectation à un tiers. Le rapporteur estime que pour éviter d’éroder le consentement à l’impôt des redevables de la taxe, il faut qu’il puisse comprendre en quoi la contribution versée permet de financer un service public en retour : exemple des quasi-redevances ou des actions correctrices dans le cadre de la fiscalité incitative. Selon une estimation préliminaire de la commission spéciale, l’introduction de cette nouvelle condition pourrait conduire à remettre en cause une dizaine d’affectations de taxes dont le produit annuel s’élève à un peu moins de 3 milliards d’euros.

L’entrée en vigueur de cette nouvelle doctrine ne doit pas remettre en cause le financement des missions de services publics concernées. Seul le mode de financement sera modifié : des dotations budgétaires suppléeront les taxes qui seraient rebudgétisées. 

Pour permettre une revue de l’ensemble des taxes affectées à l’aune de ces deux nouvelles conditions et pour opérer les ajustements rendus nécessaires, la date d’entrée en vigueur de l’article a été repoussée au dépôt du projet de loi de finances pour 2025.

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Article 3 bis (nouveau)
Fonds de concours

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article modifie l’article 3 de la LOLF pour distinguer les fonds de concours suivant qu’ils servent à financer des dépenses d’investissement ou d’autres dépenses.

I.   L’État du droit

L’article 3 de la LOLF liste les ressources budgétaires de l’État : elles sont rappelées dans le commentaire de l’article 5 de cette PPLO.

Son 3° cite les fonds de concours, lesquels sont définis par le premier alinéa du II de l’article 17 de la LOLF comme les « fonds à caractère non fiscal versés par des personnes morales ou physiques pour concourir à des dépenses d’intérêt public » et les « produits de legs et donations attribués à l’État ».

Avec 5,7 milliards d’euros pour l’exercice en cours ([20]), la recette tirée des fonds de concours apporte une contribution significative aux différentes unités de vote du budget de l’État mais elle est présentée comme une masse homogène, sans départ entre la nature des charges auxquels ces fonds participent.

II.   Les modifications adoptÉes par la commission

Sur la suggestion du Conseil d’État et en cohérence avec les modifications qu’ils proposent de faire aux articles 5 (dépenses) et 34 (structure) de la LOLF, la commission a accepté l’amendement du rapporteur et du président complétant le 3° de l’article 3 de la LOLF et créant à sa suite à 3° bis, de sorte que soient distincts les fonds de concours finançant des dépenses d’investissements ou d’autres dépenses. Il reviendra à la direction du budget d’établir cette classification.

Une telle précision est de nature à rendre plus lisibles l’article d’équilibre de la loi de finances, son nouvel état législatif annexé sur les moyens des politiques publiques au-delà des crédits et ses diverses annexes.

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Article 3 ter (nouveau)
Subventions pour charges d’investissement

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article modifie l’article 5 de la LOLF pour y rétablir la notion de subventions pour charges d’investissement, qui a existé de 1959 à 2001.

I.   L’État du droit

L’article 5 de la LOLF liste les charges budgétaires de l’État : elles sont rappelées, avec les montants correspondant au titre de la loi de finances initiale pour 2021, dans le commentaire de l’article 5 de cette PPLO.

Le 3° de son I cite les dépenses de fonctionnement et le septième alinéa de son II précise qu’en font partie les subventions pour charges de service public.

Le 5° du même I mentionne les dépenses d’investissement, mais les treizième et quatorzième alinéas du même II ne font référence qu’aux dépenses pour immobilisations corporelles et incorporelles de l’État.

Ainsi, une subvention de l’État à un tiers à raison des missions de service public que ce dernier assure est actuellement toujours traitée comme une charge de fonctionnement, alors qu’elle constitue pour son bénéficiaire une recette qui, selon les cas, peut ou doit financer des postes d’investissement.

II.   Les modifications adoptÉes par la commission

Suivant une recommandation du Conseil d’État et corrélativement avec les nouvelles rédactions qu’ils suggèrent pour les articles 3 (ressources) et 34 (structure) de la LOLF, le rapporteur et le président ont souhaité recréer, dans l’article 5 de la LOLF, la catégorie des subventions d’investissement à l’intérieur du titre 5. Il convient de rappeler que cette catégorie de dépenses existait sous l’empire de l’ordonnance organique de 1959, mais avait été abandonnée en 2001.

Comme l’article 3 bis de la proposition de loi organique, cet article 3 ter participe de l’enrichissement de l’article d’équilibre, du nouvel état législatif annexé sur les moyens des politiques publiques et des programmes et rapports de performance autour de la mise en avant des opérations de fonctionnement et d’investissement.

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Article 4
Clarification des exigences applicables aux prélèvements sur recettes
et des modalités de débat parlementaire des finances locales

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article propose de clarifier les exigences applicables aux prélèvements sur recettes (PSR).

Il propose également un débat d’ensemble sur les finances locales, préalable à la discussion parlementaire de chaque disposition budgétaire ou fiscale relative aux collectivités territoriales du projet de loi de finances.

Principales modifications adoptées par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté trois amendements du rapporteur et du Président issus de recommandations du Conseil d’État, dont un rédactionnel, et :

– une simplification de la définition organique des PSR en précisant seulement dans le texte qu’ils peuvent être versés aux collectivités territoriales ou à l’Union européenne ;

– un recentrage de la nouvelle exigence organique d’évaluation des PSR sur leur impact en termes de péréquation.

I.   État du droit

Le financement des collectivités territoriales par des prélèvements sur les recettes de l’État (A) a des conséquences sur l’organisation de la discussion des finances locales au Parlement (B).

A.   Les prÉlÈvements sur les recettes de l’État

La nature particulière des PSR, opérations en recettes (1), conduit à un régime juridique plus souple (2) et à un contrôle parlementaire plus restreint (3).

1.   Les PSR ne sont pas des dépenses, mais des moindres recettes de l’État

Les prélèvements sur recettes consistent en une rétrocession directe d’un montant déterminé de recettes de l’État. Le Conseil constitutionnel a considéré que les PSR n’étaient pas contraires au principe d’universalité budgétaire, et n’étaient pas constitutifs d’une affectation de recettes. Il a précisé que « le mécanisme de ces prélèvements ne comporte pas, comme l’impliquerait un système d’affectation, l’établissement d’une corrélation entre une recette de l’État et une dépense incombant à celui-ci ».

En conséquence, il s’analyse comme une rétrocession de recettes et « ne saurait, dans ces conditions, donner lieu à une ouverture de crédits dans les comptes des dépenses du budget de l’État » ([21]). Le Conseil a en outre relevé que ce mécanisme « répond à des nécessités pratiques d’ailleurs reconnues par le Parlement. »

L’article 6 de la LOLF, tout en prévoyant la présentation du budget en recettes et en dépenses et la non‑contraction entre recettes et dépenses, consacre le mécanisme des PSR.

Le Conseil exige cependant que le législateur définisse chaque PSR de manière suffisamment précise : il a jugé que le mécanisme des PSR « satisfait aux objectifs de clarté des comptes et d’efficacité du contrôle parlementaire, dès lors que ces prélèvements sont, dans leur montant et leur destination, définis de façon distincte et précise dans la loi de finances, qu’ils sont assortis de justifications appropriées et qu’il n’y est pas recouru pour la couverture de charges de l’État » ([22]). Cette exigence est reprise par l’article 6 de la LOLF : il dispose que les PSR « sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte. »

Ainsi le Conseil a estimé que « s’il est loisible à la loi ordinaire ou à la loi de finances de prévoir un prélèvement sur les recettes de l’État au bénéfice de la Polynésie française, en l’espèce, en se bornant à prévoir qu’un tel prélèvement est destiné à couvrir les charges liées, pour cette collectivité d’outre-mer, aux déséquilibres d’ordre économique provoqués par l’arrêt des activités du centre d’expérimentation du Pacifique, sans indications suffisantes quant aux critères de détermination de ces charges, le législateur a méconnu l’article 6 de la loi organique du 1er août 2001. » En conséquence, il a censuré d’office la disposition instituant ce PSR.

 

La création des PSR

Les PSR ressortissent au domaine de la loi, et peuvent être créés par toute loi (loi de finances ou loi ordinaire). La fixation exacte du montant du PSR peut être renvoyée à une loi de finances ultérieure.

En effet, le 4° du I de l’article 34 de la LOLF précise que la loi de finances de l’année évalue le montant de chacun des PSR. Ayant par définition un impact, souvent important, sur le budget de l’État, cette évaluation doit figurer en première partie de la loi de finances.

En revanche, les critères de répartition des PSR aux collectivités relèvent de la seconde partie de la loi de finances (au sein des articles rattachés à la mission Relations avec les collectivités territoriales), comme le prévoit le c du 7° du II de l’article 34 de la LOLF. Ils sont codifiés dans le code général des collectivités territoriales. Ces critères peuvent aussi être modifiés par une loi ordinaire  ([23]) .

La création et la modification des PSR sont donc possibles en loi de finances et en lois ordinaires. La seule contrainte est de les définir précisément dès leur création, et d’en fixer précisément le montant dans la loi de finances de l’année concernée.

 

CrÉation et modification des PSR

 

Loi ordinaire

Loi de finances

Création

Oui

Oui

Fixation du montant

Oui, mais pas suffisante

Obligatoire, en 1re partie

Modification des critères de répartition

Oui

Oui, en 2nde partie

Aux termes de l’article 6 de la LOLF, les PSR peuvent être établis au profit des collectivités territoriales ou « des communautés européennes ».

Les bénéficiaires des PSR

La LOLF consacre au niveau organique les PSR au profit des bénéficiaires historiques de ces versements : les « collectivités territoriales » et les « communautés européennes ».

Les « collectivités territoriales » visées par la LOLF sont entendues largement. Elles incluent leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ([24]) voire des fonds de péréquation horizontale, qui n’ont pas de personnalité juridique mais ont pour objet de redistribuer des montants entre collectivités contributrices et bénéficiaires ([25]).

Les « communautés européennes » incluent théoriquement les communautés européennes existantes en 2005, à l’entrée en vigueur du texte (communauté économique européenne – CEE – et communauté européenne de l’énergie atomique – Euratom). Depuis 2009, la CEE est devenue l’Union européenne. En pratique, on constate que, depuis cette date, chaque loi de finances de l’année prévoit un PSR au profit de l’Union européenne. Il semble donc que Euratom n’a jamais bénéficié d’un PSR depuis le budget de l’État français.

Cette consécration de l’existant constitue en même temps une limitation, puisqu’un PSR ne pourrait être créé au profit d’une autre personne morale que celles énumérées par la LOLF. Ainsi, comme le relève le président Gilles Carrez dans son rapport sur la recevabilité financière des initiatives parlementaires, « la création d’un prélèvement sur recettes au profit d’une troisième catégorie de bénéficiaires [par amendement parlementaire], par exemple un organisme de sécurité sociale, ne serait pas recevable car contraire à la lettre de l’article 6 de la LOLF ([26]). »

Comme on l’a dit, les PSR doivent être définis et évalués de façon distincte, c’est-à-dire de manière individualisée par PSR. Ainsi, chaque loi de finances de l’année inclut :

– un article relatif au PSR à destination de l’Union européenne ;

– un article comportant un montant global de l’ensemble des PSR attribués aux collectivités territoriales, ainsi qu’un tableau récapitulatif précisant le montant de chacun de ces PSR.

Par ailleurs, le montant de chaque PSR est inscrit à l’état A annexé à la loi de finances.

L’article 6 de la LOLF précise que les PSR peuvent être établis « en vue de couvrir des charges incombant à ces bénéficiaires. » En pratique, les PSR établis au profit des collectivités territoriales peuvent revêtir un caractère général, comme la dotation globale de fonctionnement (DGF) ou le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), ou spécifique (une charge particulière ou une catégorie de collectivités comme, par exemple, les collectivités ultramarines).

Les PSR peuvent également avoir pour objet de « compenser des exonérations, des réductions ou des plafonnements d’impôts établis au profit des collectivités territoriales ». Cette hypothèse vise actuellement les dotations de compensation issues de la réforme de la taxe professionnelle, et les allocations compensatrices d’exonération d’impôts locaux (qui compensent les exonérations d’impôts directs locaux, taxes foncières, taxe d’habitation et cotisation foncière des entreprises, décidées par le législateur dans le cadre d’une politique nationale et sont regroupées au sein d’un PSR unique, dénommé Compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale). La loi de finances pour 2021 a en outre créé un PSR de compensation de la division par deux de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) des bâtiments industriels.

La LOLF n’est, en pratique, pas strictement limitative quant à l’objet des PSR établis au profit des collectivités, dans la mesure où la troisième loi de finances rectificative pour 2020 a créé plusieurs PSR destinés à compenser, pour les collectivités ou EPCI concernés, les moindres recettes fiscales et domaniales en 2020 liées à la crise sanitaire (par référence, pour l’essentiel, à la moyenne des recettes perçues entre 2017 et 2019). Il ne s’agit pas dans ces cas de la compensation d’une réduction, d’une exonération ou d’un plafonnement d’impôts locaux, mais d’une forme de soutien financier de l’État face à un affaiblissement conjoncturel du rendement des recettes de fiscalité locale qui résulte de la situation économique et, en l’occurrence, sanitaire.

 

PSR au profit des collectivitÉs territoriales (loi de finances pour 2021)

(en euros)

Prélèvement sur recettes (PSR)

Montant LFI 2021

Dotation globale de fonctionnement

26 758 368 435

Dotation spéciale pour le logement des instituteurs

6 693 795

Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

50 000 000

Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

6 546 000 000

Compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale

539 632 796

Dotation élu local

101 006 000

PSR au profit de la collectivité de Corse

62 897 000

Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

465 889 643

Dotation départementale d’équipement des collèges

326 317 000

Dotation régionale d’équipement scolaire

661 186 000

Dotation globale de construction et d’équipement scolaire

2 686 000

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle

2 905 213 735

Dotation pour transferts de compensations d’exonérations de fiscalité directe locale

413 003 970

Dotation unique des compensations spécifiques à la taxe professionnelle

0

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale percevant la taxe d’habitation sur les logements vacants

4 000 000

Dotation de compensation liée au processus de départementalisation de Mayotte

107 000 000

Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires

6 822 000

Dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle

284 278 000

Compensation des pertes de recettes liées au relèvement du seuil d’assujettissement des entreprises au versement transport

48 020 650

PSR au profit de la collectivité territoriale de Guyane

27 000 000

PSR au profit des régions au titre de la neutralisation financière de la réforme de l’apprentissage

122 559 085

PSR au profit de la Polynésie française

90 552 000

Soutien exceptionnel de l’État au profit des collectivités du bloc communal confrontées à des pertes de recettes fiscales et domaniales du fait de la crise sanitaire

510 000 000

PSR de soutien aux régions d’outre-mer confrontées à des pertes de recettes d’octroi de mer et de taxe spéciale de consommation du fait de la crise sanitaire

0

PSR de soutien à la Corse confrontée à certaines pertes de recettes fiscales spécifiques du fait de la crise sanitaire

0

PSR de soutien à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna confrontées à certaines pertes de recettes fiscales spécifiques du fait de la crise sanitaire

0

Compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de TFPB et de CFE des locaux industriels

3 290 000 000

Compensation des communes et EPCI contributeurs au Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) subissant une perte de base de cotisation foncière des entreprises

900 000

PSR de compensation du Fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO)

60 000 000

PSR exceptionnel au profit des collectivités territoriales et des groupements de communes qui procèdent à l’abandon ou à la renonciation définitive de loyers

10 000 000

Total

43 400 026 109

 

principaux PSR au bÉNÉfice des collectivitÉs locales
dans la loi de finances pour 2021

(en milliards d’euros)

Source : commission spéciale à partir de l’article 78 de la loi de finances pour 2021.

Note : les dotations de compensation incluent les lignes dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, dotation pour transferts de compensations d’exonérations de fiscalité directe locale et dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de la taxe professionnelle. Toutes ces dotations sont liées à la suppression de la taxe professionnelle.

Note : les allocations compensatrices correspondent à la ligne compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale, qui regroupe divers PSR qui compensent les exonérations d’impôts locaux décidées par le législateur dans le cadre d’une politique nationale.

Note : le montant définitif du filet de sécurité en 2021 n’est pas connu.

On observe le montant élevé des PSR qui sont liés à la compensation d’allègements d’impôts locaux décidés par le législateur : en 2021, la somme des allocations compensatrices, des dotations de compensation et du PSR de compensation de la réduction de CFE et de TFPB s’élève à 7,4 milliards d’euros. Certaines compensations historiques ont en outre été intégrées dans la DGF.

 

 

 

2.   Le régime des PSR est plus souple que celui des crédits

Les PSR peuvent être rapportés aux dépenses du budget général dans la mesure où ils dégradent le solde budgétaire de l’État de la même façon que des crédits budgétaires. En 2021, les PSR représentent ainsi 69,8 milliards d’euros, c’est-à-dire 13,8 % des « dépenses totales » de l’État (PSR et crédits).

 

part des psr au sein des dÉpenses totales du budget gÉnÉral
de l’État en 2021

(en milliards d’euros)

Source : commission spéciale à partir du projet de loi de finances rectificative pour 2021.

La Cour des comptes relevait ainsi qu’en 2020, « 14 % du total des recettes brutes de l’État sont ainsi directement « prélevées » sans constituer des dépenses budgétaires, contre 5,5 % lors de leur création en 1969. »  ([27])

Part des PSR dans le total des recettes brutes de l’État

Source : Cour des comptes, d’après les états A des lois de finances initiales de 1969 à 2020.

Note : le pic de 2008 correspond à la mise en œuvre de la réforme de la taxe professionnelle et la baisse récente au double effet des évolutions du PSR‑UE et de la mise sous contrainte des dotations de l’État aux collectivités territoriales.

D’un point de vue comptable et juridique, les PSR ne sont donc pas des dépenses, mais des moindres recettes pour l’État. En conséquence, toutes les règles applicables aux dépenses (prévues dans l’ordonnance de 1959, puis dans la LOLF) ne s’appliquent pas aux PSR. Ils se voient appliquer un régime simplifié, moins strict que celui applicable aux dépenses de droit commun, c’est-à-dire aux crédits budgétaires. La Cour a noté que « cette catégorie budgétaire, qui n’existe pas en comptabilité nationale, ni dans la grande majorité des autres pays européens, constitue un particularisme dont la justification est incertaine ».

Pour l’État, les justifications exigées sont moindres : les PSR ne sont pas soumis aux règles de présentation (en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, et en missions et en programmes) et d’évaluation (objectifs et indicateurs de performance) prévues pour les crédits budgétaires.

Pour les bénéficiaires, et notamment les collectivités territoriales, les montants inscrits en loi de finances sont préservés de la régulation budgétaire (gel ou annulation de crédits). Les sommes prévues sont ainsi versées à l’euro près, à une date fixe (mensuellement ou annuellement, selon le cas). En outre, les montants versés sont libres d’emploi. De ce point de vue, le mécanisme des PSR apparaît comme une garantie pour les collectivités. La seule contrainte est l’éventuelle imputation en section de fonctionnement (pour la DGF), ou en section d’investissement (pour le FCTVA)  ([28]) .

Par comparaison, les dotations de soutien à l’investissement, comme la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) ou la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), portées par des crédits budgétaires de la mission Relations avec les collectivités territoriales (RCT), sont :

– largement fléchées (les projets subventionnés doivent s’insérer dans des catégories juridiques instituées par la loi et des priorités politiques prévues par circulaire, et les projets subventionnés sont sélectionnés par les préfets de département ou de région) ;

– susceptibles de supporter des gels et des annulations de crédits, selon les choix budgétaires du Gouvernement ;

– ventilées en AE et en CP. Or, s’agissant d’opérations d’investissement, la consommation des AE et le décaissement des CP sont décalés, et certaines collectivités peuvent être confrontées à des retards de versement ou à des indisponibilités de CP.

Cette différence de régime peut se justifier par le caractère global et automatique des versements par PSR. L’essentiel des montants est dû soit en application de la loi (DGF, FCTVA…), de la Constitution (compensations de transferts de compétence aux collectivités) ou des engagements européens de la France (PSR UE). Dans ces conditions, l’État n’a pas réellement vocation à exercer de marges de manœuvre en gestion sur ces versements.

À noter toutefois que, comme l’avait relevé la MILOLF, le mécanisme du PSR pour l’UE se justifiait également par une contribution essentiellement assise sur des recettes fiscales, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

 

RÉpartition des ressources de l’Union europÉenne
selon le projet de budget 2021

Source : annexe budgétaire au PLF 2021 « Relations financières avec l’Union européenne ».

Lecture : on constate que la ressource liée au revenu national brut (RNB) des États membres, initialement conçue pour assurer l’équilibre du budget de l’UE, a largement supplanté les ressources d’origine fiscale.

Enfin, le mécanisme des PSR est favorable à l’initiative parlementaire. L’article 40 de la Constitution fait obstacle à la recevabilité de tout amendement parlementaire qui proposerait la création ou l’aggravation d’une « charge publique » (c’est-à-dire, essentiellement, l’aggravation d’une dépense publique existante ou la création d’une dépense publique nouvelle). Mais il autorise la réduction des recettes publiques, sous réserve de prévoir un « gage » dans l’amendement, c’est-à-dire la compensation du dispositif par l’accroissement d’une autre recette ou la création d’une recette nouvelle (le gage est essentiellement formel, afin de faciliter l’initiative).

Or, les PSR étant juridiquement regardés comme des moindres recettes pour l’État, un parlementaire peut proposer par amendement l’augmentation d’un PSR (typiquement, la DGF ou l’une de ses composantes), ou la création d’un nouveau PSR, à la simple condition de prévoir un gage.

3.   Le contrôle du Parlement sur l’exécution des PSR

Comme on l’a dit, les PSR ne font pas l’objet d’une présentation sous forme de mission/programme/actions. La LOLF n’exige pas non plus qu’ils soient dotés d’objectifs et d’indicateurs de performance.

Pour autant, comme le précise le rapport annuel de performance de la mission RCT, si la LOLF ne l’impose pas, les PSR aux collectivités « disposent néanmoins d’un dispositif de mesure de la performance adapté à leur spécificité, reflétant la manière dont ils sont mis en œuvre par l’administration centrale ou leur capacité à atteindre les objectifs généraux fixés par le législateur ».

Le Gouvernement a prévu deux objectifs pour les PSR : garantir une gestion des dotations adaptée aux contraints des collectivités locales (objectif 1) et assurer la péréquation des ressources entre collectivités (objectif 2).

Concrètement, l’objectif 1 est mesuré par deux indicateurs, d’abord le nombre, le montant moyen et le volume des rectifications du montant des dotations opérées en cours d’année (indicateur 1.1), et les dates de communication des dotations (indicateur 1.2).

L’objectif 2 est mesuré par un indicateur portant sur les volumes financiers relatifs consacrés à la péréquation verticale (indicateur 2.1) et les volumes financiers relatifs consacrés à la péréquation horizontale (indicateur 2.2).

Ces indicateurs apparaissent relativement sommaires.

Concernant l’objectif 1, si l’ampleur des rectifications opérées en cours d’année et les dates de communication des dotations ont un intérêt pour les collectivités bénéficiaires et les élus locaux gestionnaires, ces indicateurs ont une portée essentiellement administrative. Ils ne mesurent pas réellement l’effet de la dépense publique que constituent au fonds les PSR, malgré leur nature juridique dérogatoire.

Concernant l’objectif 2, la Cour des comptes a pu relever que la mesure de la péréquation verticale au sein de la DGF « ne fait que constater mécaniquement les choix de la représentation nationale »  ([29]). En effet, chaque loi de finances de l’année, notamment depuis 2015, augmente les composantes péréquatrices de la DGF  ([30]) , tout en finançant « en interne à la DGF » cette augmentation, par une baisse (« écrêtement ») de la dotation forfaitaire (qui regroupe d’anciennes composantes historiques figées de la DGF qui ne correspondent plus à la réalité économique actuelle du territoire national). Depuis 2018, la DGF est stable. La hausse des composantes péréquatrices et l’écrêtement de la dotation forfaitaire conduisent donc à une DGF structurellement plus péréquatrice.

 

La péréquation

Les ressources et les charges des collectivités locales sont inégalement réparties du fait de la diversité démographique, géographique, économique et sociale des territoires sur lesquels s’exercent leurs compétences.

La péréquation a pour objet d’atténuer les disparités de ressources et de charges entre les collectivités territoriales par une redistribution des ressources en fonction d’indicateurs physiques et financiers, au bénéfice des collectivités structurellement défavorisées.

La péréquation est une exigence constitutionnelle, inscrite à l’article 72‑2 de la Constitution. Elle vise à garantir à toute collectivité une possibilité de développement local, dans le cadre de son autonomie financière. Dans la jurisprudence constitutionnelle, la péréquation permet de concilier l’égalité des contribuables devant les charges publiques avec la libre administration des collectivités territoriales. La péréquation doit en effet compenser les disparités qui relèvent de l’histoire ou de la géographie sans interférer avec celles qui résultent de l’exercice de la libre administration.

La péréquation horizontale opère une redistribution financière entre les collectivités, à travers des mécanismes propres à chaque niveau de collectivité.

En revanche, la péréquation verticale transite par les concours financiers de l’État, via la DGF.

Source : rapport de Laurent Saint‑Martin, Rapporteur général, sur le projet de loi de finances pour 2021.

La Cour des comptes conclut donc que si la mesure de la péréquation verticale « peut être utile pour orienter le débat public, il ne s’agit donc pas d’un indicateur de performance, dans la mesure où le niveau atteint ne résulte pas d’une performance plus ou moins élevée des services de l’État, mais des montants arrêtés en loi de finances. »

Volumes financiers relatifs consacrÉs à la pÉrÉquation verticale

 

2018

Réalisation

2019
Réalisation

2020
Réalisation         

2022

Cible

Péréquation verticale communale (en % de la somme de la DGF des communes)

32,73 %

34,09 %

35,28 %

37,5 %

Péréquation verticale départementale (en % de la somme de la DGF des départements)

17,34 %

17,47 %

17,79 %

17,82 %

Source : rapport annuel de performance de la mission RCT.

Note : la DGF des régions a été remplacée par une fraction de TVA depuis 2018, ce qui rend l’indicateur sans objet pour cette strate de collectivités.

 

 

Enfin, on note que tous ces indicateurs portent soit sur la seule DGF, soit sur des fonds de péréquation horizontaux, qui ne sont pas des PSR (ce ne sont pas des flux financiers de l’État vers les collectivités, mais entre les seules collectivités elles‑mêmes).

La MILOLF, à défaut d’une suppression pure et simple des PSR en faveur des collectivités, avait recommandé de « clarifier la définition des PSR et mettre en place un dispositif de performance exigeant pour améliorer l’information du Parlement. » Elle avait recommandé la suppression du PSR‑UE, qui serait transformé en dépenses rassemblées dans une mission du budget général.

La Cour des comptes formule également de son côté des recommandations sur les PSR, qui rejoignent en partie celles de la MILOLF.

Dans ses observations définitives de mars 2020, elle a recommandé de transformer le PSR‑UE en une mission budgétaire mono‑programme Contribution au financement de l’Union européenne, ou en un nouveau programme budgétaire du même nom (doté de crédits évaluatifs) au sein de la mission existante Engagements financiers de l’État.

S’agissant des PSR‑CT, elle a proposé de les regrouper au sein d’une mission RCT élargie (voir ci‑dessous), et envisage l’évolution de la répartition des moyens entre dotations budgétaires et PSR, « dans le sens d’une rationalisation du financement des collectivités territoriales ». Cette proposition reste peu précise mais invite également à transformer certains PSR‑CT en crédits budgétaires.

L’information transmise au Parlement sur les PSR est cependant abondante. Le PSR‑UE et les PSR‑CT sont largement détaillés et analysés dans deux annexes générales (« jaunes budgétaires »).

Les jaunes budgétaires sur les PSR

L’article 51 de la LOLF prévoit que, en plus des annexes explicatives que sont notamment les « bleus budgétaires », peuvent également être jointes au PLF « des annexes générales prévues par les lois et règlements destinées à l’information et au contrôle du Parlement ». Cette disposition vise les « jaunes » et « oranges » budgétaires. Le rapport de la MILOLF présente l’ensemble de ces documents annexés.

Les jaunes budgétaires rassemblent l’ensemble de l’information financière d’une politique publique, sans être limitée à l’explicitation des dispositions contenues dans les lois de finances ou au cadre du budget de l’État. Ces documents permettent donc d’avoir une vision élargie d’une politique publique.

Appliquant une recommandation de la MILOLF, l’article 179 de la loi de finances pour 2020 recense l’ensemble de ces annexes et constitue une base juridique unifiée au niveau législatif pour cette catégorie de documents budgétaires.

Il prévoit ainsi d’annexer au PLF « un rapport sur les relations financières entre la France et l’Union européenne », ainsi qu’un « rapport relatif aux transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. »

Toutefois, le contenu du « jaune CT » est plus détaillé dans la loi que celui du « jaune UE ».

Le « jaune CT » doit récapituler, pour les cinq derniers exercices clos, l’exercice en cours et l’exercice à venir, le montant constaté ou prévu des PSR, des AE et CP au bénéfice des CT et de la fiscalité transférée aux CT (voir infra). Le rapport doit aussi présenter une évaluation des mécanismes de péréquation, préciser les hypothèses à partir desquelles sont évalués chacun des prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales et chaque compensation fiscale d’exonération. Enfin, pour les cinq derniers exercices clos, l’exercice budgétaire en cours et l’exercice à venir, il détaille les montants et la répartition entre l’État et les différentes catégories de collectivités territoriales des frais de gestion de la fiscalité directe locale. Le « jaune CT » comporte également de nombreuses informations non exigées par la loi, comme des analyses sur les réformes récentes des finances locales.

Si la loi précise ainsi étroitement le contenu du « jaune CT », le « jaune UE » est en pratique également très détaillé. Ainsi, le rapport annexé au PLF 2021 sur les relations financières entre la France et l’UE comporte 150 pages, et présente le cadre financier pluriannuel, le cadre annuel, notamment la contribution de la France et les retours français au titre des politiques de l’UE, ainsi que l’exécution et le contrôle des fonds. Il présente également les politiques de l’UE, la procédure budgétaire européenne, etc.

Au‑delà de la pertinence propre de l’outil juridique que sont les PSR, l’articulation des concours financiers entre PSR et crédits budgétaires pose également la question de l’organisation du débat parlementaire sur les finances publiques locales.

 

B.   La discussion des finances locales au Parlement

La discussion des finances locales au moment de l’examen du projet de loi de finances est complexe, car elle inclut des ensembles financiers distincts : essentiellement, les concours financiers de l’État et les impôts locaux (1) mais aussi, éventuellement, les impôts d’État transférés aux collectivités (2). La Cour des comptes a formulé des recommandations pour une présentation et une discussion des finances locales plus cohérentes (3).

1.   La discussion des impôts locaux et des concours financiers de l’État

Les finances locales constituent un champ politique cohérent, dans la mesure où le financement des collectivités est à la fois constitué de concours financiers de l’État (dotations budgétaires et PSR), de parts de fiscalité d’État transférées et du produit des impôts locaux. En effet, l’essentiel de ces ressources est libre d’emploi et peut contribuer de la même façon au financement des politiques publiques locales.  ([31]) 

Ressources de fonctionnement des collectivitÉs territoriales en 2020

(en milliards d’euros)

Source : commission spéciale ; données Observatoire des finances et de la gestion publique locales.

L’article 34 de la LOLF qui porte sur le domaine des lois de finances permet de discuter de l’essentiel des finances locales lors de l’examen du projet de loi de finances.

Cependant, le débat législatif et budgétaire au Parlement sur les finances locales est segmenté, du fait de la structure propre à la loi de finances. Elle est organisée selon un principe de bipartition qui implique la définition préalable d’un équilibre budgétaire qui fixe le niveau des recettes et le plafond des dépenses (première partie), plafond que la seconde partie (répartition des dépenses) doit ensuite respecter.

La première partie porte donc sur les recettes de l’État, ce qui inclut les dispositions relatives au montant des PSR (montant de la DGF ou du FCTVA, notamment), qui diminuent les recettes disponibles, et sur les affectations éventuelles de parts d’impôts d’État aux collectivités (voir infra). Les amendements sur ces sujets sont donc discutés avec les articles de la première partie.

La discussion parlementaire des dispositions de la seconde partie est elle‑même scindée en deux temps. En premier lieu, les parlementaires débattent des dépenses de l’État, ce qui inclut le débat des crédits de la mission RCT qui porte plusieurs dotations, comme la DSIL et la DETR (ainsi que, de manière plus accessoire, des crédits du compte de concours financiers Avances aux collectivités territoriales, qui retrace de manière mécanique la perception du produit des impôts locaux et de certains impôts d’État affectés aux collectivités).

Les articles rattachés à cette mission peuvent également comporter des dispositions relatives aux critères législatifs de répartition des dotations (essentiellement codifiés dans le code général des collectivités territoriales), qu’il s’agisse de dotations budgétaires ou de PSR (comme la DGF). La discussion des missions budgétaires est établie selon un ordre variable, pour des raisons d’opportunité ou, en séance publique, de disponibilité des ministres concernés ; les crédits de la mission RCT peuvent donc être discutés plus ou moins au début de la discussion de l’ensemble des missions.

À l’issue de la discussion budgétaire des missions, les parlementaires débattent, toujours en seconde partie, des articles « non rattachés » à une mission. Ces articles portent essentiellement sur la fiscalité qui n’affecte pas le budget de l’État pour l’année concernée, ce qui inclut des dispositions de pure fiscalité locale, sans mécanisme de compensation par l’État (typiquement, des facultés nouvelles d’exonération d’impôts locaux à la décision des assemblées délibérantes ([32])).

 

Le cas particulier des réformes de la fiscalité locale
qui affectent les recettes de l’État

La répartition exposée ci‑dessus entre première et seconde parties est compliquée par les réformes de la fiscalité locale qui affectent les recettes de l’État, par le biais des mécanismes de compensation, ce qui peut conduire le Gouvernement à les inscrire en première partie. Les amendements parlementaires déposés sur ces mesures sont donc discutés en première partie, quand bien même ils viseraient avant tout une mesure de fiscalité locale.

Ainsi, la suppression progressive de la taxe d’habitation a été compensée initialement par un dégrèvement pris en charge par l’État (dans cette hypothèse, le dégrèvement est juridiquement une moindre recette pour l’État, comme un PSR) puis par des transferts de TVA aux départements et aux EPCI. En conséquence, elle a été inscrite par le Gouvernement en première partie du projet de loi de finances pour 2018 (article 3 au dépôt), puis pour 2020 (article 5).

Dans le cadre de l’allègement des impôts de production, la suppression de la part régionale de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) a été compensée par une affectation de TVA, et la réduction par deux de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) des établissements industriels a été compensée aux communes et EPCI par un PSR. En conséquence, ces dispositions figuraient en première partie du projet de loi de finances pour 2021 (respectivement, articles 3 et 4).

De manière moins évidente, l’article 7 du projet de loi de finances pour 2019, qui portait plusieurs mesures relatives à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), figurait en première partie, dans la mesure où cet article réduisait les frais de gestion de cet impôt (ces frais sont perçus par l’État, qui se rémunère ainsi en tant que collecteur des impôts locaux).

Si la bipartition propre aux lois de finances se justifie du point de vue du budget de l’État, elle a donc pour effet de rendre plus complexe l’examen parlementaire des dispositions relatives aux finances locales.

discussion des finances locales en loi de finances

 

Première partie

Seconde partie

PSR

Évaluation du montant de chaque PSR et du montant global

Critères de répartition (articles rattachés à la mission RCT)

Crédits budgétaires aux collectivités

Plafond de dépenses de l’État

Vote sur les crédits de la mission RCT, et critères législatifs de répartition des PSR dans les articles rattachés à cette mission

Fiscalité locale

Allègement de fiscalité locale compensé par un PSR ou par un dégrèvement pris en charge par l’État

(ou autre effet sur le budget de l’État)

Mesures de fiscalité locale sans effet sur le budget de l’État (articles non rattachés)

 

Modification des mécanismes de péréquation horizontale (articles rattachés à la mission RCT)

Fiscalité transférée

Affectation nouvelle d’un impôt d’État aux collectivités (exemple : TICPE)

Modification des règles de taux ou d’assiette ou de la répartition entre collectivités d’un impôt entièrement transféré (exemple : TASCOM, DMTO)

 

Ainsi, pour l’examen du projet de loi de finances pour 2021 à l’Assemblée nationale, la discussion des finances locales s’est répartie sur quatre journées séparées de commission réparties sur un mois à l’automne 2020, et sur quatre séquences de six jours de séance réparties également sur environ un mois.

Calendrier de discussion des finances locales
pour le projet de loi de finances pour 2021 à l’AssemblÉe nationale

 

Commission des finances

Séance publique

Articles de fiscalité locale avec effet sur le budget de l’État (première partie)

6 octobre

15 octobre

Montants des PSR affectés aux collectivités (première partie)

7 octobre

16 et 19 octobre

Crédits et articles rattachés de la mission RCT

21 octobre

12 novembre

Articles de fiscalité locale non rattachés (seconde partie)

4 novembre

12 et 13 novembre

On note que l’ensemble des dispositions législatives relatives aux finances locales ne sont pas incluses dans le domaine des lois de finances. Ainsi, les dispositions relatives aux dépenses des collectivités locales ou à la comptabilité locale sont, en principe, considérées comme des cavaliers budgétaires : par exemple, lors de l’examen du PLF à l’Assemblée nationale, ont été considérés comme irrecevables des amendements parlementaires portant sur la programmation des dépenses locales (contrats dits « de Cahors ») ou sur le classement comptable des dépenses locales entre investissement et fonctionnement. Pourtant, ce sont les comptables de l’État qui sont chargés de la comptabilité des organismes publics locaux.

Enfin, si la modification des mécanismes de péréquation horizontale([33]) n'est pas formellement incluse dans le domaine des lois de finances, elle l’est en pratique. Le Gouvernement inclut régulièrement de telles dispositions dans le PLF, les amendements parlementaires afférents sont acceptés par les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, et le Conseil constitutionnel n’a jamais censuré ces dispositions comme cavaliers budgétaires ([34]).

 

2.   Le cas de la fiscalité nationale transférée aux collectivités

Il convient de noter que les impôts transférés par l’État en tout ou partie aux collectivités territoriales ne s’intègrent pas systématiquement dans ces modalités annuelles de débat annuel sur la loi de finances. Le principe du transfert du produit de la recette fiscale est discuté au Parlement lorsqu’il est acté, en loi de finances ou en loi ordinaire, mais l’affectation n’est pas rediscutée chaque année, ni le montant (dans ce cas, il serait prévisionnel) approuvé dans un article identifié de la loi de finances, au contraire des concours financiers (PSR et crédits).

Le législateur financier se borne à autoriser annuellement l’État à percevoir les impôts (qui lui sont affectés ou affectés à d’autres personnes morales que l’État, y compris par les collectivités territoriales et leurs groupements) dans l’article 1er de chaque PLF. Pourtant, les masses financières en jeu sont considérables et constituent des ressources importantes des budgets locaux. Toutefois, l’intérêt de revenir annuellement sur l’ensemble des affectations d’impôts d’État serait limité, dans la mesure où la fiscalité transférée est liée au financement des transferts de compétence (ces transferts de fiscalité ont suivi les actes de décentralisation) et aux réformes de la fiscalité locale (ils compensent les pertes de ressources résultant de réformes de fiscalité locale). Les marges de manœuvre concrètes sont donc faibles.

Les flux de fiscalité transférée, y compris l’historique des affectations, sont largement détaillés dans l’annexe budgétaire annuelle Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales (« jaune » budgétaire précité) ainsi que dans le rapport annuel de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL). Notons que la présentation de ces flux inclut des impositions sur lesquelles les collectivités ont des pouvoirs de taux, comme les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) des départements, et la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques (TICPE), sur laquelle les régions bénéficient d’une faculté de majoration supplémentaire des tarifs. La fiscalité transférée inclut également la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), donc les collectivités du bloc communal (communes et EPCI à fiscalité propre) fixent le taux, et dont l’assiette est entièrement territorialisée (elle résulte, pour chaque collectivité affectataire, des établissements assujettis à cet impôt sur son territoire).

FiscalitÉ transfÉrÉe dans le PLF pour 2021

(en milliards d’euros)

Source : commission spéciale à partir de l’annexe budgétaire au PLF pour 2021 Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales.

Comme le produit des impôts locaux, les produits de fiscalité transférée (TASCOM, fraction de TICPE, frais de gestion) sont pour l’essentiel reversés aux collectivités par le biais du compte de concours financiers Avances aux collectivités territoriales. Mais pas tous : la TSCA et les DMTO, notamment, ne transitent pas par ce compte.

Les amendements parlementaires portant sur la fiscalité transférée sont souvent relativement spécifiques, et visent notamment à accroître les recettes des collectivités par ce biais (par exemple en affectant aux régions une fraction supplémentaire de TICPE ou en assouplissant le pouvoir départemental de taux sur les DMTO). Si l’amendement tend à affecter un impôt depuis l’État aux collectivités (comme le transfert d’une part supplémentaire de TICPE), il trouve sa place en première partie. S’il tend à modifier la répartition entre collectivités d’un ancien impôt transféré (la TASCOM, par exemple) ou à modifier le taux d’un impôt qui est en fait local (les DMTO), il trouve sa place en seconde partie.

Globalement, la fiscalité transférée est dynamique. Elle peut même entraîner des « surcompensations » lorsque la dynamique de la recette conduit au dépassement du droit à compensation. Rappelons que le droit à compensation est calculé pour que le transfert de compétence respecte un principe de neutralité budgétaire et un principe de coût historique (les ressources attribuées pour accompagner le transfert de compétence doivent être équivalentes aux dépenses affectées, à la date du transfert, par l’État à l’exercice des compétences transférées, sans obligation de réévaluer dans le temps ce montant en fonction du coût d’exercice des charges transférées).

Notons que des fractions de fiscalité purement nationale transférées aux collectivités, comme les parts de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) transférées aux EPCI et aux départements dans le cadre de la suppression de la taxe d’habitation (loi de finances pour 2020), et aux régions dans le cadre de la suppression de leur part de DGF (loi de finances pour 2017) puis de leur part de CVAE (loi de finances pour 2021), ne sont pas retracées dans l’ensemble de la fiscalité transférée ([35]).

Fractions de TVA transfÉrÉes en 2021 aux collectivitÉs

(en milliards d’euros)

Source : commission spéciale.

Lecture : entre parenthèses la recette remplacée par la fraction de TVA transférée.

Note : les montants de TVA affectés aux EPCI et aux départements (en remplacement de la TH et de la TFPB) et aux régions (en remplacement de la CVAE) résultent des modalités de calcul prévues en lois de finances pour 2020 et 2021. Le montant affecté aux régions en remplacement de la DGF résulte du montant plancher de garantie, atteint en 2020 (4 025 millions d’euros) à laquelle on applique l’hypothèse de rebond de 5 % de cette fraction de TVA en 2021 formulée par Jean‑René Cazeneuve dans son baromètre n° 4. Lien

À compter de 2021, la TVA participe donc au financement de chaque catégorie de collectivités. C’est devenu un impôt largement partagé entre l’État, la sécurité sociale et les collectivités territoriales.

 

3.   Les recommandations de la Cour des comptes sur la discussion parlementaire des finances locales

Dans son rapport sur la réforme du cadre organique et de la gouvernance des finances publiques ([36]), la Cour des comptes a proposé, à cadre constitutionnel constant, de regrouper l’ensemble des transferts financiers de l’État au bénéfice des collectivités territoriales au sein d’une nouvelle mission budgétaire conservant le nom de l’actuelle mission Relations avec les collectivités territoriales :

– les crédits de l’actuelle mission RCT ;

– les crédits d’autres missions destinés aux collectivités (subventions d’autres ministères) ;

– les PSR destinés aux collectivités ;

– les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux ;

– la fiscalité transférée qui ne transite pas par le compte de concours financiers Avances aux collectivités territoriales ;

– et les crédits des comptes d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routier, et Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale.

La Cour estimait que l’examen de cette nouvelle mission serait l’occasion, lors de la discussion du PLF « d’une discussion générale sur les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, qui permettrait de préciser la stratégie et les objectifs portant sur les collectivités territoriales et, en particulier, l’examen de dispositifs du type de celui de la contractualisation dite « de Cahors » mise en place par la LPFP 2018-2022 ». Cette recommandation a toutefois l’inconvénient de n’envisager les finances locales que du point de vue du budget de l’État, ce qui exclut largement la fiscalité locale.

Si la Constitution devait être modifiée, la Cour des comptes avait même proposé l’adoption annuelle d’une loi de financement des collectivités territoriales ([37]).

Une loi de financement des collectivités territoriales aurait néanmoins l’inconvénient de fragmenter davantage le contrôle parlementaire et la législation sur les finances publiques entre sous‑secteur des administrations publiques, et poserait la question de son articulation avec la loi de finances, dans la mesure où une part essentielle des ressources locales est issue de transferts financiers depuis le budget de l’État (les transferts financiers de l’État aux collectivités (PSR, dotations budgétaires, subventions, dégrèvements d’impôts locaux et transferts d'impôts d’État) se sont élevés à 117,5 milliards d'euros dans le PLF 2021).

Pour autant, à défaut d’une véritable loi de financement des collectivités territoriales, et en l’absence de révision de la Constitution, la cohérence du débat parlementaire sur les finances publiques locales pourrait être renforcée en intervenant au niveau de la LOLF et des règlements de chaque assemblée.

II.   le dispositif proposÉ

Le I du présent article propose une mise à jour de la définition des PSR et modifie l’article 6 de la LOLF. Il prévoit ainsi de préciser que ce sont les collectivités territoriales et l’Union européenne (plutôt que les « communautés européenne ») qui peuvent être bénéficiaires de PSR. Le champ actuel des PSR est repris : ils peuvent être consentis en vue de compenser « des charges incombant à ces bénéficiaires, ou de compenser des exonérations, des réductions ou des plafonnements d’impôts établis au profit des collectivités territoriales. »

Le I ajoute que les PSR ne peuvent servir à couvrir des charges incombant à l’État ou être assortis d’un objectif déterminé dans le cadre d’une politique dont ce dernier a la charge. Cet alinéa vise à limiter le champ des PSR à l’existant, et faire obstacle à un éventuel recours au mécanisme des PSR plutôt qu’aux crédits pour financer des politiques publiques de l’État (donc, à empêcher une « débudgétisation » plus prononcée).

Le I précise que les PSR sont, « dans leur montant et leur destination, définis et évalués de façon précise et distincte dans la loi de finances. » Cet alinéa reprend le droit existant, en ajoutant que les caractéristiques du PSR doivent figurer en loi de finances.

Le II prévoit un monopole des lois de finances pour la création de nouveaux PSR. Cette modification poursuit un objectif de cohérence et de renforcement du contrôle parlementaire, dans la mesure où la création d’un nouveau PSR sera ainsi immédiatement assortie d’un montant, et son effet sur les recettes de l’État sera visible dans l’état A annexé à la loi de finances.

Le III prévoit un rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au projet de loi de finances de l’année.

Ce rapport pourra constituer le support d’un débat parlementaire sur l’ensemble des finances locales préalable à la discussion proprement dite des dispositions budgétaires et fiscales qui concernent les collectivités territoriales dans le projet de loi de finances.

Il pourrait permettre aux parlementaires de disposer, dans un document unique, non seulement des informations relatives aux transferts financiers de l’État aux collectivités présentées dans le « jaune budgétaire » (crédits de la mission RCT, PSR et fiscalité transférée, notamment) mais aussi, par exemple, d’évaluations des produits de fiscalité locale, d’éléments sur la situation financière globale de chaque strate de collectivités, de prévisions de dépenses locales, etc.

Sans modifier la structure de la loi de finances organisée selon le principe de bipartition, qui conduit à discuter des divers éléments des finances locales à différentes phases de l’examen du projet de loi de finances, un débat préalable sur l’ensemble des finances locales pourrait permettre de mieux identifier un « temps des finances locales » au sein de la discussion budgétaire. Les débats ultérieurs et plus spécifiques sur les concours financiers de l’État ou le régime des impôts locaux pourraient faire référence à cette discussion initiale.

Toutefois, c’est à chaque chambre, dans le respect de l’autonomie parlementaire, de décider le cas échéant le principe d’un tel débat, ainsi que ses modalités.

Le II du présent article propose également que ce rapport contienne une évaluation de l’efficacité des PSR établis au profit des collectivités. Il s’agit de mettre en œuvre une proposition de la MILOLF, qui incite à une évaluation plus fine des PSR attribués aux collectivités.

III.   la position de la commission spÉciale

La commission spéciale a adopté trois amendements du rapporteur et du Président issus de recommandations formulées par le Conseil d’État dans son avis sur la proposition de loi.

En premier lieu, la commission a adopté un amendement qui recentre l’évaluation des PSR sur leur effet en termes de péréquation. En effet, comme l’a relevé le Conseil d’État, la péréquation est une exigence constitutionnelle, alors que la mesure de « l’efficacité » des PSR semble imprécise. Concrètement, cela revient à inscrire dans la LOLF l’obligation de prévoir une évaluation de l’impact péréquateur de la DGF. Cette exigence n’empêche pas le Gouvernement, par ailleurs, d’élaborer d’autres indicateurs supplémentaires sur les PSR, si certains s’avéraient malgré tout pertinents.

En deuxième lieu, la commission spéciale a adopté un amendement pour simplifier la définition des PSR, en se bornant à inscrire dans la LOLF les bénéficiaires actuels (collectivités territoriales et Union européenne), sans préciser l’objet des PSR. En effet, le Conseil d’État a estimé que cette disposition suffira à empêcher d’éventuelles débudgétisations supplémentaires de dépenses de l’État, sans risquer de remettre en cause des PSR existants, ce qui correspond à l’intention des auteurs de la présente proposition de loi.

Enfin, la commission spéciale a adopté un amendement rédactionnel pour clarifier le nouveau monopole des lois de finances sur la création des PSR.

*

*     *

 

Article 5
Structure et contenu de la loi de finances de l’année

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article rapatrie dans la première partie de la loi de finances toutes les dispositions relatives aux ressources de l’État, que leur incidence ait lieu au cours de l’exercice n ou d’un exercice ultérieur.

Il vise à récapituler, dans la première partie, la liste de l’ensemble des impositions de toute nature dont le produit est affecté par l’État, le cas échéant sous plafond, à des personnes morales autres que les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou les organismes de sécurité sociale, ainsi que leur rendement prévisionnel.

Il prévoit que le tableau retraçant l’équilibre budgétaire dans l’article d’équilibre distingue les ressources et les charges de fonctionnement et d’investissement.

Il insère dans la loi de finances au lieu de ses annexes, et les rend amendables, les objectifs et indicateurs de performances associés aux missions et crée un nouvel état législatif annexé retraçant l’ensemble des moyens qui, au-delà des crédits budgétaires, concourent à la politique publique portée par chaque mission.

Il élève au niveau organique le plafonnement des emplois des opérateurs, établissements à autonomie financière et autorités administratives ou publiques indépendantes.

Il étend le champ de la seconde partie aux dispositions qui, sans modifier l’assiette, le taux ou les modalités de recouvrement d’une imposition de toute nature qui n’est pas affectée à l’État, conduisent à faire évoluer la répartition de son produit.

Il pose que peuvent être placées dans la seconde partie les dispositions relatives aux dépenses de l’État, sans qu’elles soient nécessairement imputées à l’exercice n.

Il intègre au domaine obligatoire de la loi de finances le plafond de la variation nette de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an.

Modifications adoptées par la commission

La commission a renforcé la portée normative de la récapitulation des taxes affectées, ajusté la classification des opérations de fonctionnement et d’investissement à l’article d’équilibre et exclu les fonds sans personnalité juridique du nouvel état législatif annexé sur les moyens des politiques publiques.

Elle a également déplacé de l’état B vers celui-ci la mise en avant des dépenses d’investissement, retenu une formulation plus proche de celle retenue par la proposition de loi organique de M. Mesnier sur les lois de financement de la sécurité sociale quant aux dépenses pluriannuelles.

Elle a enfin clarifié le fait que trouvent leur place en loi de finances la péréquation entre les collectivités territoriales, le transfert de certaines données fiscales et les règles de comptabilité de l’ensemble des administrations publiques, au lieu du seul État. 

 

 

I.   L’État du droit

L’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) définit à la fois la structure bipartite et les domaines obligatoires, exclusif et facultatif de la loi de finances de l’année, étant précisé que les lois de finances rectificatives doivent respecter, aux termes de l’article 35 de la LOLF, des formes et un contenu identiques ou proches.

Il vise, suivant des règles établies dès la Quatrième République, à organiser la discussion budgétaire d’après un principe démocratique et logique – les dépenses ne peuvent être autorisées qu’après que l’impôt a été consenti – et à protéger la loi de finances, dont la spécificité est prévue par le dix-huitième alinéa de l’article 34 de la Constitution et ses articles 47 et 47-2, tant contre ses propres incursions dans un périmètre extérieur à son objet que contre celles d’autres textes dans son monopole, tant la procédure applicable est expédiente ([38]).

Remplaçant les articles 1er et 31 de l’ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959, précitée, l’article 34 « figure parmi les dispositions les plus contraignantes de la loi organique », d’après la doctrine, qui note également que « sa portée dépasse le cadre des lois de finances, dans la mesure où, en donnant à celles-ci un contenu exclusif, il est opposable aux lois ordinaires » ([39]).

A.   La bipartition de la loi de finances

La présentation de la loi de finances dans un texte unitaire et sa structure bipartite ont des fondements antérieurs à la Cinquième République, qui procèdent respectivement du décret-loi organique n° 56-601 du 19 juin 1956 relatif au mode de présentation du budget de l’État et de la loi n° 48-1974 du 31 décembre 1948 fixant l’évaluation des voies et moyens pour l’exercice 1949 et relative à diverses dispositions d’ordre financier (dite « des maxima »).

Après un article liminaire, la loi de finances subordonne l’ouverture des crédits à la détermination préalable d’un plafond de ressources : ce principe a d’importantes conséquences procédurales.

1.   L’article liminaire

Aux termes de l’alinéa qu’a inséré, avant le I de l’article 34 de la LOLF, l’article 24 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (LOPGFP), la loi de finances de l’année, de même que les lois de finances rectificatives et les lois de financement rectificatives de la sécurité sociale, s’ouvre par un article liminaire.

Cet article prend la forme d’un « tableau de synthèse retraçant, pour l’année sur laquelle elles portent, l’état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, avec l’indication des calculs permettant d’établir le passage de l’un à l’autre », lequel indique également, mais pour la seule loi de finances de l’année, « les soldes structurels et effectifs de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de la dernière année écoulée et des prévisions d'exécution de l’année en cours ».

S’il est accompagné, comme chaque article figurant dans le PLF, d’un exposé des motifs, la LOLF impose de manière originale à ce dernier qu’il « indique si les hypothèses ayant permis le calcul du solde structurel sont les mêmes que celles ayant permis de le calculer pour cette même année dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques ».

Pour bref qu’il soit – un alinéa introductif et un tableau présentant les données requises en points de produit intérieur brut dans le dispositif, ainsi qu’entre une quinzaine et une vingtaine d’alinéas selon les années pour l’exposé –, l’article liminaire comporte ainsi les informations les plus fondamentales quant à la situation financière de l’ensemble des administrations publiques, et non du seul État.

Il fait l’objet d’une attention soutenue, tant de la part du Haut Conseil des finances publiques, qui apprécie les risques portant sur chaque composante du solde public, examine sa cohérence avec les orientations pluriannuelles en matière d’équilibre structurel et le reproduit en annexe de ses avis, que des rapporteurs généraux des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ou de la Commission européenne, au titre de la surveillance du respect par les États membres de leurs engagements tirés du Pacte de stabilité et de croissance, du TSCG et de textes d’application ultérieurs (cf. supra).

2.   La première partie

● Intitulée « conditions générales de l’équilibre financier » depuis la loi de finances pour 2004, la première partie ne porte pas sur les seules recettes, mais sur tous les déterminants du solde budgétaire de l’année, c’est-à-dire la façon dont les charges de l’État seront financées :

– l’autorisation de percevoir les ressources de l’État et les impositions affectées, encadrée par le principe d’annualité (1° du I de l’article 34) ;

– les dispositions relatives aux ressources de l’État qui affectent l’équilibre budgétaire, qu’il s’agisse de la fiscalité d’effet immédiat, de ses recettes non fiscales, y compris les fonds de concours (troisième alinéa du II de l’article 17), et des prélèvements pouvant être rétrocédés aux collectivités territoriales et à l’Union européenne, ainsi que leur évaluation (2°, 4° et 5° du I), leur rendement étant retracé dans l’état législatif A, annexé à l’article d’équilibre et voté avec lui ;

– l’affectation des recettes au sein du budget de l’État (3° du I) ;

– les plafonds des dépenses du budget général et de chaque budget annexe, ceux des charges de chaque catégorie de comptes spéciaux et de l’autorisation des emplois rémunérés par l’État, ces derniers étant exprimés en équivalents temps plein travaillé, une notion qui pondère les effectifs physiques par leur quotité de travail annuelle (6° du I) ;

– les données générales de l’équilibre budgétaire, présentées dans un tableau qui, de fait, clôt la première partie (7° du I) ;

– d’une part, les autorisations relatives aux emprunts et à la trésorerie de l’État, ainsi que les évaluations des ressources et des charges qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier, présentées dans un tableau, et, d’autre part, le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an, lesquelles informations sont en pratique dans le même article que celles qui précèdent (8° et 9° du I) ;

– les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l’année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l’État (10° du I), le Conseil constitutionnel ayant précisé, dans sa décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 sur la loi de finances pour 2006, que ne seraient pas conformes à la loi organique que des « règles spécifiques soient prévues pour l’utilisation du surplus constaté à partir d’une catégorie particulière de recettes » ([40]) puis, dans sa décision n° 2007-555 DC du 16 août 2007 sur la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, que le principe « n’a ni pour objet ni pour effet de modifier la capacité du législateur à décider, en cours d’année, de nouvelles mesures fiscales » ([41]).

● Il convient de distinguer les équilibres budgétaire et financier. Le premier se rapporte à la couverture des charges par les ressources mentionnées à l’article 3 de la LOLF, à savoir essentiellement les impôts et revenus courants de l’État ([42]), tandis que le second tient compte des flux mentionnés à l’article 25, lesquels ont notamment vocation à combler l’éventuel, mais chronique, déficit ([43]).

Leur complémentarité renforce sensiblement l’office du législateur financier par rapport au cadre de 1959, qui se plaçait sur le seul terrain du remboursement des emprunts antérieurs, sans aborder l’émission de nouveaux titres aux fins d’assurer les dépenses excédant les recettes budgétaires, ni les dérogations à l’obligation de dépôt, auprès de l’État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, ainsi qu’à celle de libérer les émissions en euros, ni enfin la limite de la variation de la dette émise par obligations assimilables du Trésor (OAT) et bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel (BTAN) – contrairement à ce que les articles L.O. 111-3 et L.O. 111-9-3 du code de la sécurité sociale prévoyaient depuis 1996 pour les régimes obligatoires de sécurité sociale.

3.   La seconde partie

● Sous le titre « moyens des politiques publiques et dispositions spéciales », également observé depuis l’exercice 2004, la seconde partie porte notamment, mais pas seulement sur les dépenses, puisqu’elle a pour objet :

– l’ouverture des crédits, c’est-à-dire le montant des autorisations d’engagement et des crédits de paiement par mission pour le budget général (1° du II de l’article 34) ou par budget annexe et par compte spécial, ainsi que les découverts pour ces derniers (3° du II), présentés dans les états législatifs annexés B, C et D, et pour ces catégories d’unités de vote, à la fois le montant du plafond, dans la limite de 3 %, applicable au report par la voie réglementaire, sur le même programme ou un autre poursuivant les mêmes objectifs, des crédits de paiement inscrits sur les autres titres que celui des dépenses de personnel disponibles sur un programme à la fin de l’année (4° du II) et les éventuelles dispositions affectant directement les dépenses budgétaires de l’année (b du 7° du II) ;

 les autorisations d’emplois par ministère et par budget annexe (2° du II) ;

– l’autorisation pour l’État d’octroyer des garanties, entendues comme englobant la couverture d’emprunts ou d’actifs, mais aussi des mouvements de stabilisation de taux d’intérêt ou de soutien au commerce extérieur (5° du II), ainsi que de prendre en charge les dettes de tiers ou de souscrire un engagement correspondant à une reconnaissance unilatérale de dette (6° du II), marquant sur ce point une novation par rapport au cadre organique de 1959, et la fixation du régime de ces opérations ([44]) ;

– les dispositions relatives à l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toute nature qui n’affectent pas l’équilibre budgétaire, à savoir la fiscalité de l’État dès lors que la modification n’a pas d’effet sur le produit perçu au cours de l’année sur laquelle porte la loi de finances, la fiscalité locale et la fiscalité affectée sans plafond, par exemple aux organismes de sécurité sociale (a du 7° du II) ;

– la répartition des concours aux collectivités territoriales (c du 7° du II) ;

– l’approbation de conventions financières (d du 7° du II) ;

– l’information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques (e du 7° du II) ;

– les règles relatives à la comptabilité de l’État et au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics (f du 7° du II).

● Si cette précision n’apparaît ni dans la LOLF, ni dans le règlement des deux assemblées parlementaires, les états législatifs annexés répartissant les dépenses entre les missions et programmes du budget général, les budgets annexes et les comptes spéciaux ([45]), ainsi que les mesures permanentes « rattachées » à un budget donné pour en prévoir les modalités d’utilisation, sont, en première lecture et uniquement pour le projet de loi de finances de l’année, les seules unités de vote pour lesquelles la rédaction du rapport de la commission des finances et la défense en séance de la position de cette dernière sur les crédits et les amendements correspondants relèvent de rapporteurs spéciaux, plutôt que du rapporteur général, compétent pour l’ensemble des autres articles et pour la suite de la navette.

Lors de l’examen du PLF pour 2021 en première lecture, quarante-six rapports avaient été confiés à cinquante-deux rapporteurs spéciaux à l’Assemblée nationale et trente-deux l’avaient été à quarante-huit rapporteurs spéciaux au Sénat. Leur répartition varie entre les deux chambres, à la fois parce qu’elle peut légèrement différer de la maquette retenue par le Gouvernement, même si elle la couvre in fine totalement, et parce que chaque commission s’efforce de les distribuer en respectant le poids respectif des forces politiques qui la composent.

Ces unités de vote peuvent également faire l’objet d’avis des autres commissions permanentes.

B.   Le pÉrimÈtre de la loi de finances

Certaines dispositions ne peuvent figurer dans aucun autre texte qu’une loi de finances, à titre obligatoire ou facultatif ; d’autres ont la faculté de s’insérer dans toute loi ; d’autres enfin constituent des cavaliers budgétaires.

1.   Le domaine obligatoire et exclusif

Aux termes du III de l’article 34 de la LOLF, la loi de finances de l’année doit nécessairement, faute d’encourir la censure du juge constitutionnel :

– dans sa première partie, autoriser la levée des impositions des ressources de l’État et des impositions affectées, contenir leur évaluation, prévoir les plafonds des dépenses et des charges de toutes les unités du budget, de même que ceux des emplois de l’État, arrêter les données générales de l’équilibre budgétaire et autoriser les mouvements de trésorerie concourant à l’équilibre financier ;

– dans sa seconde partie, fixer le montant des autorisations d’engagement et crédits de paiement, et le cas échéant des découverts, pour les missions, budgets annexes et comptes spéciaux, ainsi que les plafonds des autorisations d’emplois des ministères et budgets annexes.

Le deuxième alinéa de l’article 35 de la LOLF fixe le domaine obligatoire des lois de finances rectificatives, composé des plafonds des dépenses et des charges de toutes les unités du budget et de celui des emplois de l’État, ainsi que des données générales de l’équilibre budgétaire.

Enfin, l’article 55 de la LOLF impose aux projets de loi de finances de l’année et de loi de finances rectificative de prévoir une évaluation chiffrée de l’incidence, au titre de l’année considérée et, le cas échéant, des années suivantes, de chacune de leurs dispositions affectant les ressources ou les charges de l’État.

2.   Le domaine facultatif, mais exclusif

En plus, naturellement, des dispositions obligatoires précitées, il s’agit de celles qui ne peuvent résulter d’un autre texte que la loi de finances de l’année et ne peuvent être modifiées que par une loi de finances rectificative, même si ni l’une ni l’autre n’a l’obligation de les comporter :

– en première partie, la modification de l’autorisation de perception des ressources de l’État et des impositions de toute nature affectées à une autre personne morale, l’affectation à une autre personne morale d’une ressource établie au profit de l’État , la ratification des décrets établissant des rémunérations pour service rendu, l’affectation de recettes au sein du budget de l’État, l’évaluation des prélèvements sur recettes, la modification du plafond de la variation nette de la dette et l’utilisation des éventuels surplus du produit des impositions de toute nature ;

– en seconde partie, de la majoration du plafond des reports et des autorisations relatives à l’octroi de garanties de l’État et à la prise en charge de dettes de tiers, ainsi qu’à la fixation du régime de ces deux dernières opérations.

3.   Le domaine facultatif, mais partagé

Même si elles ont toute leur place dans la loi de finances et qu’il est de pratique courante de les y concentrer, sont susceptibles de figurer dans toute loi ordinaire les dispositions relatives à l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des ressources de l’État qui affectent ou non l’exercice et des impositions de toute nature ([46]), aux charges de l’État, à ses concours aux collectivités territoriales, à l’approbation de conventions financières, à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques, à la comptabilité de l’État et au régime de responsabilité pécuniaire des agents publics.

4.   Le domaine interdit, ou les cavaliers budgétaires

À l’occasion de son contrôle sur la LOLF, le Conseil constitutionnel a estimé, dans sa décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, précitée, que celle-ci avait « défini de façon complète et précise le contenu de la loi de finances de l’année », épuisant l’habilitation accordée par le Constituant.

Dès lors, les mesures insusceptibles de se rattacher aux domaines susvisés ont l’interdiction de se trouver dans une loi de finances. L’introduction des cavaliers dans le véhicule budgétaire qui ne leur appartient pas est censurée à avant leur mise en discussion ou après leur adoption (cf. infra).

Le Conseil constitutionnel définit ces cavaliers par la négative via un considérant de principe : « ces dispositions ne concernent ni les ressources, ni les charges, ni la trésorerie, ni les emprunts, ni la dette, ni les garanties ou la comptabilité de l’État ; elles n’ont pas trait à des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l’État ; elles n’ont pas pour objet de répartir des dotations aux collectivités territoriales ou d’approuver des conventions financières ; elles ne sont pas relatives au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics ou à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ; dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de finances ».

 

C.   Les incidences procÉdurales

L’examen des PLF par les deux assemblées, comme celui des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), de finances rectificatives (PLFR) et de financement rectificatives de la sécurité sociale (PLFRSS), est soumis à des contraintes de procédure plus fortes que celui des autres textes.

Tant au stade de la commission des finances, à l’examen de laquelle il est « immédiatement renvoyé » en application du premier alinéa de l’article 39 de la LOLF, qu’à celui de la séance publique et au cours de chaque lecture, une mesure relevant de la seconde partie ou modifiant sensiblement le solde ([47]) ne saurait être adoptée avant la fixation de l’équilibre par la première.

1.   La recevabilité des amendements parlementaires

Le dernier alinéa de l’article 47 de la LOLF dispose que « les amendements non conformes aux dispositions de la présente loi organique sont irrecevables », tandis que le cinquième alinéa de l’article 89 du Règlement de l’Assemblée nationale et le premier alinéa de l’article 45 du Règlement du Sénat prévoient que la LOLF est opposable aux amendements déposés par les membres du Parlement dans les mêmes conditions que l’article 40 de la Constitution, c’est-à-dire sur décision du président de la commission des finances, ou sur consultation de ce dernier par les présidents des commissions éventuellement saisies pour avis puis par le Président de l’Assemblée nationale et le Président du Sénat au stade de la séance publique, ses avis étant systématiquement suivis.

Dès lors, les amendements et sous-amendements déposés sur les PLF et PLFR par les députés et sénateurs doivent respecter aussi bien l’article 40 de la Constitution que l’intégralité des dispositions de la LOLF, au plan de sa bipartition comme de son domaine, tandis que ceux portant sur d’autres textes doivent se garder de tout empiétement sur le champ exclusif de la loi de finances ([48]).

● Premièrement, le principe de l’article 40 de la Constitution suivant lequel « les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d'une charge publique » s’applique, à une exception près, aux amendements déposés sur les articles des PLF et PLFR ou portant article additionnel à ces projets, de rang ordinaire.

Une particularité concerne la signification donnée au sens des mots « charge publique ». Définie par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et des présidents successifs des commissions des finances des deux assemblées, cette notion s’exprime avec une acuité particulière car « une loi ordinaire peut réduire ou aggraver une charge publique, mais ne détermine pas le montant de cette réduction ou aggravation ; les lois de finances constituent donc les seuls textes où la notion de charge publique doit être à la fois quantifiée et plafonnée » ([49]).

● Deuxièmement, le président de la commission des finances de chaque assemblée déclare irrecevables les amendements parlementaires méconnaissant la LOLF sur le fond, soit qu’ils empiètent sur le champ des dispositions réservées à l’initiative gouvernementale, telles la création d’une unité de vote, soit qu’ils soient placés dans la mauvaise partie.

● Troisièmement, se voient frappés d’irrecevabilité les amendements parlementaires qui constituent des cavaliers budgétaires, définis par le considérant de principe du Conseil constitutionnel cité supra ou comme des « dispositions qui s’introduisent de manière “impertinente” voire “sans gêne” dans un véhicule législatif qui ne leur appartient pas, sans respect des règles y afférentes » ([50]), conduisant le président de la commission des finances à « repousser les multiples charges de cavalerie, qui, sabre au clair et chevaux écumants, tentent de pénétrer dans la forteresse imprenable des lois de finances ». Il convient de préciser que ce dernier « ne peut pas se montrer “plus royaliste que le roi” [et] ne saurait reprocher à un amendement parlementaire de ne pas relever de la loi de finances quand le Gouvernement se serait affranchi des règles organiques en introduisant en loi de finances » un cavalier et que « certaines mesures qui [s’y] apparentent peuvent être jugées recevables si elles constituent des éléments indivisibles d’un dispositif financier déjà en discussion et relevant du domaine des lois de finances ».

Ne peuvent ainsi venir en discussion sur le PLF ou le PLFR les amendements sur les dépenses des collectivités territoriales – même rattachés à la mission Relations avec les collectivités territoriales – ou de la sécurité sociale. 

Si l’examen concomitant des PLF et PLFSS à l’automne peut inciter certains membres du Parlement à déposer sur le premier des amendements se rapportant aux cotisations sociales ou aux charges des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement, ces dispositions ont leur place, à titre exclusif ou non, dans le second en vertu de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

 

Le cas spécifique des amendements de crédits

Dans le seul cas des amendements visant à modifier les crédits, le premier alinéa de l’article 47 de la LOLF dispose que « la charge s’entend de la mission ». Le Conseil constitutionnel a relevé, dans sa décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, précitée, que cette assimilation a pour effet d’offrir aux membres du Parlement la « faculté nouvelle de présenter des amendements majorant les crédits d’un ou plusieurs programmes ou dotation inclus dans une mission, à la condition de ne pas augmenter les crédits de celle-ci ».

Le deuxième alinéa du I de l’article 47 de la LOLF prévoit que « seule une disposition de loi de finances d'initiative gouvernementale peut créer une mission », mais, en l’absence de mention explicite expresse de la loi organique ou d’éclairage du juge constitutionnel sur ce point, il est loisible aux membres du Parlement de créer, au sein d’une mission, un ou des programmes nouveaux, dotés de crédits prélevés sur ceux des autres programmes de la même mission.

En revanche, la réallocation de crédits entre unités de vote ou à l’intérieur d’un même programme – les actions n’ayant pas d’existence législature et figurant simplement dans les annexes budgétaires pour la bonne information du Parlement et la cohérence de la gestion – est proscrite.

Puisque les articles 18 et 20 de la LOLF disposent que les budgets annexes et les comptes spéciaux dotés de crédits, à savoir les comptes d’affectation spéciale et de concours financiers, constituent une « mission au sens des articles 7 et 47 », la recevabilité d’amendements procédant à des réallocations leur est étendue. Tel n’est pas le cas de ceux qui porteraient les comptes spéciaux dotés d’un découvert.

Le Conseil constitutionnel a aussi souhaité l’appliquer dans l’hypothèse où le Gouvernement, usant de la procédure d’urgence prévue par l’avant-dernier alinéa de l’article 47 de la Constitution et détaillée par l’article 45 de la LOLF, aurait pris des décrets ouvrant les crédits applicables aux services votés, ainsi qu’à celle ou les parlementaires rectifieraient, dans la loi de règlement, les annulations de crédits non consommés et les ouvertures de crédits comblant des dépassements.

Une telle dérogation à l’impossibilité, sur l’ensemble des autres textes et même sur les articles rattachés aux missions, de compenser une dépense par la baisse d’une charge sur un poste différent, manifeste un « changement considérable » ([51]), par rapport au cadre organique de 1959, dont l’article 42, n’autorisait que les initiatives « tendant à supprimer ou à réduire effectivement une dépense, à créer ou accroître une recette ou à assurer le contrôle des dépenses publiques » – même s’il avait vu sa rigueur tempérée par la décision n° 80-126 DC du 30 décembre 1980 du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 1981.

C’est enfin s’agissant de ces amendements de crédits que l’exigence de motivation posée par le même article 47 de la LOLF trouve son application la plus aiguë : ainsi que l’a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, précitée, sa satisfaction doit permettre, « dans le cadre des procédures d’examen de la recevabilité financière, de vérifier la réalité de la compensation », ce qui implique, d’une part, l’existence de crédits suffisants sur le programme minoré et, d’autre part, l’indication la plus claire possible dans l’exposé sommaire de l’amendement, des motifs de fond et de l’imputation – au niveau des actions, voire des titres – du mouvement proposé.

● Quatrièmement, les amendements déposés sur d’autres textes que la loi de finances par les députés ou sénateurs peuvent se voir opposer le domaine exclusif de celle-ci. Le cas le plus fréquent est celui de l’article 36 de la LOLF, précité, qui lui réserve la faculté de détourner vers un affectataire tiers le produit d’une ressource établie au profit de l’État.

2.   Le contrôle du Conseil constitutionnel

Si les dispositions de la LOLF s’appliquent tant aux amendements des membres du Parlement qu’à ceux du Gouvernement, seule la recevabilité de ces premiers est vérifiée par le président de la commission des finances.

En cas de saisine du Conseil constitutionnel, celui-ci veille à la fois à la conformité des dispositions qui lui sont déférées avec les normes de rang supérieur à la loi, mais aussi, en soulevant le cas échéant un moyen d’office, à celle de l’ensemble des articles du texte avec la LOLF.

Sur les trente-huit lois de finances ou lois de finances rectificatives dont il a été saisi depuis que la LOLF peut figurer dans ses visas ([52]), le Conseil constitutionnel a considéré que trois seulement étaient totalement conformes et a écarté jusqu’à dix-huit dispositions de la loi de finances pour 2013.

Le juge constitutionnel est donc susceptible de censurer des dispositions adoptées malgré le contrôle qu’effectuent les autorités parlementaires qui, dans le silence de la LOLF ou de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, accordent toujours le bénéfice du doute aux amendements qu’elles examinent et rendent, sur les budgets ultérieurs, des décisions plus éclairées.

Nombre de dispositions de lois de finances dÉclarÉes non conformes
par le Conseil constitutionnel depuis l’applicabilitÉ de la LOLF

Décision n° 2002-464 DC du 27 décembre 2002 sur la loi de finances pour 2003

8

Décision n° 2003-488 DC du 29 décembre 2003 sur la loi de finances rectificative pour 2003

7

Décision n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003 sur la loi de finances pour 2004

2

Décision n° 2004-511 DC du 29 décembre 2004 sur la loi de finances pour 2005

2

Décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 sur la loi de finances pour 2006

5

Décision n° 2005-531 DC du 29 décembre 2005 sur la loi de finances rectificative pour 2005

1

Décision n° 2008-574 DC du 29 décembre 2008 sur la loi de finances rectificative pour 2008

6

Décision n° 2009-599 DC du 29 décembre 2009 sur la loi de finances pour 2010

11

Décision n° 2009-600 DC du 29 décembre 2009 sur la loi de finances rectificative pour 2009

4

Décision n° 2010-622 DC du 28 décembre 2010 sur la loi de finances pour 2011

6

Décision n° 2010-623 DC du 28 décembre 2010 sur la loi de finances rectificative pour 2010

1

Décision n° 2011-638 DC du 28 juillet 2011 sur la loi de finances rectificative pour 2011

4

Décision n° 2011-644 DC du 28 décembre 2011 sur la loi de finances pour 2012

7

Décision n° 2011-645 DC du 28 décembre 2011 sur la loi de finances rectificative pour 2011

5

Décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012 sur la loi de finances pour 2013

18

Décision n° 2013-684 DC du 29 décembre 2013 sur la loi de finances rectificative pour 2013

9

Décision n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013 sur la loi de finances pour 2014

17

Décision n° 2014-699 DC du 6 août 2014 sur la loi de finances rectificative pour 2014

0

Décision n° 2014-707 DC du 29 décembre 2014 sur la loi de finances pour 2015

3

Décision n° 2014-708 DC du 29 décembre 2014 sur la loi de finances rectificative pour 2014

4

Décision n° 2015-725 DC du 29 décembre 2015 sur la loi de finances pour 2016

2

Décision n° 2015-726 DC du 29 décembre 2015 sur la loi de finances rectificative pour 2015

5

Décision n° 2016-743 DC du 29 décembre 2016 sur la loi de finances rectificative pour 2016

3

Décision n° 2016-744 DC du 29 décembre 2016 sur la loi de finances pour 2017

10

Décision n° 2017-755 DC du 29 novembre 2017 sur la loi de finances rectificative pour 2017

0

Décision n° 2017-758 DC du 28 décembre 2017 sur la loi de finances pour 2018

8

Décision n° 2017-759 DC du 28 décembre 2017 sur la loi de finances rectificative pour 2017

2

Décision n° 2018-775 DC du 10 décembre 2018 sur la loi de finances rectificative pour 2018

0

Décision n° 2018-777 DC du 28 décembre 2018 sur la loi de finances pour 2019

16

Décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019 sur la loi de finances pour 2020

17

Décision n° 2020-813 DC du 28 décembre 2020 sur la loi de finances pour 2021

7

Source : tables analytiques du Conseil constitutionnel.

II.   Le dispositif proposÉ

Aux 2° à 10° du II, le présent article :

– reprend les recommandations nos 4, 12 et 32 du rapport de la MILOLF, qui visent à ce que la première partie de la loi de finances comporte l’ensemble de la fiscalité d’État, récapitule toutes les taxes affectées et contienne un plafonnement des emplois des opérateurs conforme à la pratique observée depuis 2009 ;

– propose de faire apparaître dans la loi de finances, tant dans l’article d’équilibre qu’au sein des états législatifs annexés aux unités de vote, la distinction entre les ressources et les charges de fonctionnement et d’investissement ;

– tire les conséquences de décisions du Conseil constitutionnel en étendant le domaine facultatif de la seconde partie sur deux questions techniques concernant la répartition du produit de recettes et les dépenses dépassant l’exercice n ;

– donne suite à deux préconisations de la Cour des comptes, tendant à permettre aux objectifs et indicateurs de performance de faire l’objet de vote et à préciser, complémentairement aux crédits ouverts, la typologie des moyens, y compris fiscaux, que l’État consacre à la politique publique concernée.

Le 1° du I porte une coordination concernant l’article liminaire de la loi de finances : l’article 7 de la LOPGFP qui l’a institué obligatoirement devient en effet l’article 1er G de la LOLF (alinéas 34 à 39 de l’article 1er de la présente proposition de loi organique). Le II prévoit que les modifications apportées entrent en vigueur lors du dépôt du PLF pour 2023 et lui soient applicables.

A.   Les dispositions pouvant figurer dans la premiÈre partie

La présente proposition de loi organique élargit triplement le domaine de la première partie de la loi de finances.

1.   Les dispositions relatives aux ressources de l’État

Le 2° du I rapatrie au sein de la première partie de la loi de finances l’ensemble des dispositions relatives aux ressources de l’État, que leur incidence ait lieu au cours de l’exercice dont le solde est arrêté dans l’article d’équilibre (année n) ou d’un exercice ultérieur (année n + x).

● Il s’agit d’appliquer la recommandation n° 4 de la MILOLF.

D’une part, la proposition de la mission repose sur le constat du caractère sous-optimal de l’examen des dispositions fiscales du PLF au Parlement : « la structure actuelle a pour avantage d’amener logiquement la discussion de l’article d’équilibre et des plafonds de dépenses après l’examen des articles relatifs aux recettes de l’année de la loi de finances. Elle a en revanche pour inconvénient d’entraîner des redondances dans la discussion budgétaire entre la première et la seconde partie. Ainsi, tout amendement proposant une disposition relative à l’assiette, au taux ou aux modalités de recouvrement d’une imposition de toute nature dont le produit est affecté à l’État pourra être discuté en première partie, mais également en seconde partie pourvu que son auteur prévoie une entrée en vigueur différée d’au moins une année par rapport à la disposition discutée en première partie. Le débat a lieu deux fois quand bien même l’amendement discuté en première partie aurait été rejeté par l’une des chambres sur son principe même. »

Naturellement, de nombreux amendements fiscaux sont actuellement déposés en seconde partie pour la simple raison que leur mécanisme n’entraîne pas de conséquences sur l’équilibre de l’exercice n (assujettissement des bénéfices, crédit d’impôt, etc.) ou parce que leurs auteurs souhaitent laisser aux contribuables et à l’administration une année supplémentaire pour s’adapter à la norme.

 

En revanche, même s’il n’est pas possible de le mesurer précisément, il est communément admis et largement assumé qu’une part significative des amendements à caractère fiscal présentés en seconde partie ne sont que la solution de repli de propositions identiques – à la seule différence donc de leur entrée en vigueur – après leur rejet, leur chute ou leur absence de défense lors de la discussion de la première partie.

D’autre part, la MILOLF n’identifie pas de difficulté technique particulière quant à la conception et à l’actualisation du tableau d’équilibre : « le rapporteur est conscient que l’équilibre budgétaire arrêté à la fin de la première partie ne découlerait pas de l’ensemble des dispositions relatives aux recettes de la première partie, mais seulement de celles des dispositions qui ont un impact budgétaire sur l’année de la loi de finances. Il ne pense toutefois pas que cet obstacle soit dirimant. Il suffirait en effet d’accepter que l’équilibre budgétaire ne prenne en compte qu’une partie des dispositions adoptées avant le vote de l’article d’équilibre, tout comme il est aujourd’hui accepté que soient discutées dans la seconde partie des dispositions qui n’ont et n’auront aucun impact sur les finances de l’État ».

● Cette amélioration de « la fluidité des débats parlementaires et de leur bonne compréhension » aura des incidences procédurales : les règles de recevabilité (cf. supra) s’adapteront et le calendrier parlementaire sera aménagé.

2.   Les impositions et taxes affectées

Le 3° du I prévoit que soit récapitulée, dans la première partie, la liste de l’ensemble des impositions de toute nature dont le produit est affecté par l’État, le cas échéant sous plafond, à des personnes morales autres que les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou les organismes de sécurité sociale, ainsi que leur rendement prévisionnel.

● Il apparaît que, dans le cadre organique actuel, la marge d’information et d’action du Parlement est limitée à ce propos.

En l’absence de monopole de la loi de finances en matière fiscale, toute disposition législative, codifiée ou non, est susceptible de créer ou de modifier l’affectation de l’intégralité ou d’une fraction du produit d’une imposition de toute nature à une personne morale tierce à l’État et autre que les administrations publiques locales ou de sécurité sociale, certes sous la réserve de l’article 36 de la LOLF, précité, qui réserve au législateur financier la faculté de détourner tout ou partie d’une ressource déjà établie au profit de l’État.

Si l’article 1er de la loi de finances permet bien au législateur de renouveler, chaque année, l’autorisation de lever ces impositions, le PLF n’en fournit pas, pour autant, une appréciation complète. Le fait que toutes, qu’elles soient plafonnées avec un reversement à l’État au-delà de l’écrêtement, ou qu’elles ne le soient pas, figurent, avec l’évaluation de leur montant par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires dans le tome I de l’annexe Voies et moyens, conformément au 1° de l’article 51 de la LOLF, appelle deux tempéraments :

– d’une part, celles dont l’affectation à une personne tierce à l’État est totale n’apparaissent dans le dispositif du PLF que si le Gouvernement ou des membres du Parlement proposent de modifier les dispositions qui les concernent, de sorte que toutes les autres font de facto l’objet d’une reconduction tacite ;

– d’autre part, celles dont l’affectation est partielle sont exhaustivement récapitulées (avec la référence qui, dans une loi de finances ou un autre texte, les a instituées, ainsi que leur plafond) dans une disposition législative unique, à savoir le tableau figurant au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, mais celui-ci n’est pas repris in extenso année après année, de sorte que le PLF puis le texte définitif ne comporte que la mention des seules lignes que des dispositions introduites par le Gouvernement ou des membres du Parlement, au moyen d’ailleurs de leur numéro et non de leur objet ([53]).

L’exemple du PLF pour 2021 éclaire cette difficulté : d’une part, le tableau figurant au I de l’article 46 de la loi de finances pour 2012, précité, comportait soixante-dix-huit lignes avant son dépôt, mais l’article 24 du projet ne mentionnait que les trente lignes pour lesquelles le Gouvernement proposait une évolution (cinq suppressions, vingt-quatre modifications de plafond et un ajout), ce nombre passant à trente-deux dans l’article 82 de la loi (deux modifications de plafond supplémentaires) et, d’autre part, l’annexe Voies et moyens faisait état de deux cent quatre-vingt-six lignes d’affectation.

● La présente proposition de loi vise donc à donner suite à la recommandation n° 12 de la MILOLF : dans le but de « rendre son sens au principe d’universalité, […] il serait opportun de prévoir en loi de finances un vote sur l’ensemble des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale ; l’article sur lequel voteraient les parlementaires récapitulerait dans un tableau l’ensemble de ces taxes et leur rendement prévisionnel ; il permettrait de dresser un bilan de l’ensemble des taxes affectées créées hors loi de finances toute l’année ».

Toutefois le rapporteur constate que la rédaction du présent article ne permet pas de déterminer la forme que prendrait cette nouvelle disposition, ni la portée des amendements qui pourraient être déposés à son propos.

En effet, la MILOLF rappelait son intention que « les taxes affectées à des tiers et non plafonnées demeurent en seconde partie ».

Dès lors, la récapitulation proposée devrait distinguer deux tableaux :

– l’un procéderait, pour les taxes plafonnées, à une rédaction globale du I de l’article 46 de la loi de finances pour 2012, voire d’autres alinéas de ce dernier en fonction de ce qui apparaîtrait opportun ou nécessaire telle année, auquel cas la suppression d’une ligne par le Parlement aurait pour effet de déplafonner l’affectation, au détriment des recettes de l’État ;

– l’autre serait, pour les taxes non plafonnées, une simple insertion dans la loi d’informations figurant actuellement dans une annexe.

Pour conforme qu’elle soit à la lettre du rapport de la mission, cette méthode aurait deux inconvénients :

– elle créerait un double débat sur les impositions et taxes affectées sans plafond, dans chaque partie, alors qu’il n’y en a aujourd’hui qu’un et que, sur la fiscalité d’État, l’objectif est justement d’éviter toute redondance ;

– elle inscrirait en première partie des alinéas au statut mal défini, à la fois parce qu’ils n’auraient pas de réelle portée normative et parce que les amendements s’y rapportant, implicitement possibles, n’auraient aucun effet juridique.

Une alternative serait de prévoir un tableau qui confirmerait ou infirmerait lui-même les affectations et leur éventuel plafond, auquel cas la suppression d’une ligne reviendrait à annuler l’affectation, au profit de l’État, moyennant une coordination ultérieure pour abroger la disposition législative qui l’avait instituée.

Ce choix s’éloignerait de la préconisation de la MILOLF mais se rapprocherait de celle du Conseil des prélèvements obligatoires ([54]) dont elle s’inspirait et qui évoquait clairement un « vote du Parlement […] sur une autorisation de l’ensemble des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale ».

Il ne serait en revanche pas incompatible avec la proposition de retracer en seconde partie, dans les états législatifs annexés correspondant aux crédits au lieu des seuls programmes annuels de performance, l’ensemble des moyens, dont font partie les taxes affectées, concourant à telle ou telle politique publique.

Les travaux de la commission spéciale devront lever cette équivoque.

En tout état de cause, l’article d’équilibre clôturant la première partie ne prendrait en compte, s’agissant des recettes de l’année, que l’écrêtement escompté des impositions et taxes dont l’affectation est plafonnée.

3.   La distinction entre les ressources et les charges d’investissement et de fonctionnement dans l’article d’équilibre

Le 4° du I tend à rendre l’article d’équilibre plus clair en y faisant le départ entre les ressources et les charges selon qu’elles correspondent à des postes de fonctionnement ou d’investissement, de manière comparable à la présentation suivie par les collectivités territoriales et de nombreuses entreprises.

Les auteurs de la présente proposition de loi y voient une clarification du débat autour des choix politiques qui engageront notre pays en sortie de crise.

a.   Un schéma comptable de l’État précis mais peu lisible

Au nombre des ambitions portées en 2001 par le législateur organique, mais qui n’ont malheureusement connu une appropriation satisfaisante ni de la part du Parlement, ni de celle des responsables en gestion, figure le débat et la maîtrise sur la destination politique des crédits ouverts.

● Cette question avait donné matière à des prises de position concordantes.

Dans l’exposé des motifs de sa proposition de loi organique, M. Didier Migaud, rapporteur, affichait son souhait d’une « meilleure allocation des ressources publiques disponibles » grâce à une « classification plus opérationnelle des catégories de dépenses » et le 4° de l’article 31 de son texte initial – devenu, après des remaniements qui en ont amoindri la portée, la simple annexe du 3° de l’actuel article 51 – définissait les dépenses de fonctionnement comme celles couvrant les « opérations de consommation immédiate et répétitive de biens non durables, sans incidence sur le patrimoine de l’État, ainsi que les dépenses de transfert » et les dépenses d’investissement comme celles finançant les « opérations à l’origine de la production de biens durables, affectant le patrimoine de l’État, destinés à être immobilisés et amortis ».

Quelques mois plus tôt, M. Laurent Fabius, alors Président de l’Assemblée nationale, considérait qu’une telle nomenclature donnerait une « dimension stratégique aux débats budgétaires » et aiderait à « éclairer les enjeux de nos finances publiques, et notamment le premier d’entre eux : réduire notre dette » ([55]).

● Auparavant encore, M. Jean Arthuis, ministre de l’économie et des finances, estimait nécessaire d’adopter sur ce point la comptabilité des administrations publiques locales, qui suit les principes du plan comptable général, applicable aux sociétés privées : elle est tenue en droits constatés et en partie double, ce qui assure une correspondance entre les ressources et leurs emplois et distingue, pour les dépenses comme les recettes, les opérations de fonctionnement, tenant aux produits et aux charges réguliers, et d’investissement, affectant le patrimoine.

Cette règle est précisément déclinée par les chapitres Ier et II du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales et les instructions M14 pour les communes, M52 pour les départements et M76 pour les régions – mais aussi M4 pour les établissements publics locaux à caractère industriel et commercial, M22 pour les établissements sociaux et médico-sociaux, M31 pour les offices publics de l’habitat, etc. –, que complètent de nombreux guides pratiques établis par la direction générale des collectivités locales du ministère de l’intérieur, en collaboration avec les associations d’élus.

● Pourtant, les évolutions apportées au cadre organique de l’État en 2001 peuvent autant être considérées comme un enrichissement que comme une complexification par rapport à celui des débuts de la Cinquième République.

L’article 2 de la LOLF dispose que « les ressources et les charges de l’État comprennent les ressources et les charges budgétaires ainsi que les ressources et les charges de trésorerie ». À cette répartition, qu’il convient de rapprocher de la distinction entre les équilibres budgétaire et financier (cf. supra), s’ajoute, pour les seules dépenses budgétaires, une ventilation par nature.

Ventilation des dÉpenses de l’État au sens de l’ordonNAnce de 1959
et de la LOLF, appliquÉe À la loi de finances initiale pour 2021

Article 6 de l’ordonnance

organique de 1959

 

Article 5 de la LOLF

Titres

CP

Volume

Dépenses ordinaires

Dotations des pouvoirs publics (1)

1,0 Md€

0,2 %

Charges des dettes publiques

et viagères et dépenses en atténuation de recettes

Dépenses de personnel (2)

195,4 Md€

30,5 %

Dotation des pouvoirs publics

Rémunérations d’activité

79,0 Md€

12,3 %

Dépenses de personnel

et de matériel

Cotisations

et contributions sociales

57,8 Md€

9,0 %

Interventions, notamment en matière économique, sociale

et culturelle

Prestations sociales

et allocations diverses

58,6 Md€

9,1 %

Dépenses en capital

Dépenses de fonctionnement (3)

70,8 Md€

11,0 %

Investissements directs

Dépenses de fonctionnement

autres que celles de personnel

38,8 Md€

6,1 %

Subventions d’investissement

Subventions pour charges

de service public

32,0 Md€

5,0 %

Réparation des dommages

de guerre

Charges de la dette de l’État (4)

36,8 Md€

5,7 %

Prêts et avances

Intérêts de la dette financière négociable

34,8 Md€

5,4 %

Fonds de développement économique et social

Charges financières diverses

1,9 Md€

0,3 %

Prêts intéressant le logement

Charges financières diverses

1,9 Md€

0,3 %

Prêts divers

Dépenses d’investissement (5)

31,0 Md€

4,9 %

Avances

Immobilisations corporelles

30,6 Md€

4,8 %

 

Immobilisations incorporelles

0,4 Md€

0,1 %

Dépenses d’intervention (6)

160,0 Md€

24,9 %

Transferts aux ménages

59,8 Md€

9,3 %

Transferts aux entreprises

49,7 Md€

7,8 %

Transferts aux collectivités territoriales

18,3 Md€

2,9 %

Transferts aux autres collectivités

30,5 Md€

4,8 %

Appels en garantie

2,5 Md€

0,4 %

Opérations financières (7)

146,5 Md€

22,9 %

Prêts et avances

131,0 Md€

20,4 %

Dotations en fonds propres

1,0 Md€

0,2 %

Participations financières

14,6 Md€

2,3 %

Source : commission spéciale et loi de finances initiale pour 2021.

 

 

Quand l’article 6 de l’ordonnance de 1959 ventilait les « charges permanentes de l’État » en trois catégories et onze titres, l’article 5 de la LOLF mentionne, sous un vocabulaire inverse, sept titres et dix-huit catégories, d’une importance inégale parmi les crédits ouverts : les dotations des pouvoirs publics (Présidence de la République, assemblées parlementaires, Conseil constitutionnel et Cour de Justice de la République), les dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement, les charges de la dette de l’État, les dépenses d’investissement, les dépenses d’intervention et les opérations financières.

Conformément au principe de fongibilité asymétrique prévu au dernier alinéa du II de l’article 7 de la LOLF, les dépenses de personnel (titre 2) ne peuvent être augmentées par des mouvements en gestion, mais toutes les autres combinaisons sont possibles.

b.   Une contribution au débat sur la qualité des finances publiques

Ainsi qu’évoqué, l’annexe au PLF – et non aux projets de LFR ou de loi de règlement – prévue par le 3° de l’article 51 de la LOLF propose certes déjà une présentation des recettes et des dépenses budgétaires en une section de fonctionnement et une section d’investissement. Toutefois, comme le soulignait le rapport de la MILOLF, « elle est succincte et ne comporte que peu de précisions, alors que la méthodologie utilisée pour distinguer les dépenses d’investissement et les dépenses de fonctionnement est primordiale ».

Dans le but de renforcer le consentement à l’impôt et la lisibilité de l’autorisation donnée au Gouvernement de dépenser son produit, le 4° du I du présent article prévoit que le tableau qui clôt la première partie et « arrête les données générales de l’équilibre budgétaire » distingue (en divisant, concrètement, les actuelles deuxième et troisième colonnes en quatre sous-colonnes) :

– les ressources budgétaires de fonctionnement, constituées des impositions de toute nature, des revenus courants des activités industrielles et commerciales de l’État et des autres éléments mentionnés au 2° de l’article 3 de la LOLF ([56]), des fonds de concours et des dons et legs consentis à son profit, de ses revenus courants divers, du remboursement des prêts et avances accordés par lui, de ses produits exceptionnels divers et des prélèvements sur recettes européennes ;

– les ressources budgétaires d’investissement, constituées des produits de cession du domaine de l’État, de ses participations financières, ainsi que de ses autres actifs et droits, et enfin des émissions du Trésor ;

– les charges budgétaires de fonctionnement, constituées de la dotation des pouvoirs publics, des dépenses de personnel, de fonctionnement au sens strict du 3° de l’article 5 de la LOLF, d’intervention et des charges de la dette de l’État ;

– les charges budgétaires d’investissement, constituées des dépenses d’investissement au sens strict du 5° du même article et des dépenses d’opérations financières.

B.   Les dispositions pouvant figurer dans la seconde partie

Le  du I propose deux nouveautés à même de renforcer l’intérêt politique et la clarté de l’examen des unités de vote en dépenses.

1.   La sanctuarisation législative de la maquette de performance

Le premier alinéa du 5° du I crée un 1° A au début du II de l’article 34 de la LOLF et inscrit dans le dispositif de la loi de finances la définition des objectifs et indicateurs permettant de mesurer la performance des crédits, lesquels figurent aujourd’hui seulement dans des annexes au projet de loi de finances.

a.   Une démarche restée à mi-chemin depuis 2001

Il y a vingt ans, MM. Migaud et Lambert marquaient leur ambition de passer d’une logique de moyens à une culture de la performance : ainsi que le relevait la MILOLF, « la notion est introduite dès l’article 1er [de la LOLF] qui prévoit que les lois de finances “tiennent compte […] des objectifs et des résultats des programmes qu’elles déterminent” » mais « malgré des apports réels, la démarche de performance n’a pourtant pas pris l’ampleur initialement souhaitée ; elle demeure un mot d’ordre plutôt qu’une matrice des pratiques budgétaires ».

Certes, de nombreux éléments de la maquette contribuent à la mesure de la performance : le regroupement de la dépense par destination et sa justification au premier euro, le chaînage entre la loi de règlement, le DOFP et la loi de finances, rendu plus vertueux encore par le « printemps de l’évaluation », la fiabilisation de la gestion grâce aux différentes comptabilités et à des logiciels modernes, etc.

Néanmoins, le dispositif le plus important, à savoir les objectifs et indicateurs, souffre d’imperfections, également analysées par la MILOLF : il se prête maladroitement à des politiques publiques telles que la sécurité intérieure et extérieure ou l’égalité entre les femmes et les hommes, affiche un nombre d’items trop élevé pour garantir leur appropriation par le Parlement et leur renseignement complet par les administrations, et surtout présente à la représentation nationale des critères différents que ceux que les ministères utilisent dans leur audit interne, leurs relations avec le ministère chargé du budget, la tutelle de leurs opérateurs ou leur communication vis-à-vis des citoyens.

La MILOLF recommandait ainsi de distinguer des « objectifs de nature politique, essentiellement associés aux indicateurs sociaux économique », dont les membres du Gouvernement seraient comptables, et des « objectifs liés à la gestion administrative […] correspondant à l’efficience de la dépense et à la qualité des services publics », sous la responsabilité des directeurs d’administration centrale et secrétaires généraux des ministères, ainsi que d’harmoniser leur schéma au profit de celui soumis à l’examen parlementaire et de renforcer leur pilotage à l’échelle de la mission plutôt qu’à celui, moins stratégique, du programme.

b.   Une nouvelle étape à franchir

En 1999, M. Laurent Fabius, Président de l’Assemblée nationale jugeait que « quelque chose de vraiment nouveau se produira si les députés utilisent la connaissance acquise des résultats d’une action politique comme outil dans la discussion budgétaire, au nom de l’intérêt général qu’ils représentent ».

Or, en l’état actuel du droit, comme l’avait relevé le rapport de la MILOLF, « les parlementaires ne peuvent pas fixer ou modifier des objectifs ou des indicateurs de performance, la rédaction et la publication des annexes explicatives étant une prérogative du Gouvernement ; les amendements parlementaires proposant de modifier des objectifs ou indicateurs ne peuvent être déposés, les présidents successifs de la commission des finances ayant décidé qu’ils étaient irrecevables au titre de la LOLF ».

La présente proposition de loi organique lève ce verrou. Les objectifs et indicateurs de performance seraient regroupés dans un nouvel état législatif annexé, amendable et discuté en même temps que les unités de vote des crédits auxquels ils se rapportent.

Sans être inscrite dans la LOLF, l’instauration d’une revue régulière de ces objectifs et indicateurs associant les rapporteurs spéciaux et les services ministériels compétents, par exemple tous les trois ans comme en Suède ([57]), est souhaitable.

2.   La consolidation des moyens concourant aux politiques publiques

Le second alinéa du 5° du I crée un 1° B au II de l’article 34 de la LOLF et institue un nouvel état législatif annexé récapitulant, à titre indicatif, l’ensemble des moyens qui, en dépenses comme en recettes minorées ou affectées, concourent à une même politique publique.

La présente proposition de loi organique reprend sur ce point une recommandation de la Cour des comptes tendant à « compléter le périmètre des missions et programmes budgétaires en y faisant figurer l’ensemble des moyens de natures diverses concourant au financement de l’action publique et réexaminer sur une période de trois à cinq ans la pertinence des dispositifs de financement dérogeant aux principes d’unité et d’universalité (dépenses fiscales, opérateurs, taxes affectées, fonds sans personnalité juridique) » ([58]).

Si la seconde branche de cette préconisation relève de la pratique administrative et recueille tout le soutien politique du rapporteur, l’élargissement des missions relève d’une modification du cadre organique.

Actuellement, seule la consultation des programmes et rapports annuels de performances annexés fournit une vision consolidée – quoiqu’imparfaitement –de l’effort budgétaire et fiscal de l’État pour une politique publique donnée. Il s’agirait d’élever ce regroupement au niveau législatif.

Simulation d’une nouvelle mission budgÉtaire

Source : Cour des comptes.

Compte tenu de leur nature – estimations s’agissant des recettes et limitation pour les crédits budgétaires ; État ou personnes morales tierces – et donc de leur position différente dans la loi de finances, il n’est juridiquement pas possible, sans remettre en cause le principe de bipartition et au-delà même de l’éventuelle opportunité de cette solution, d’adopter l’ensemble de ces sommes lors de l’examen des missions.

Il est en revanche proposé de créer un état annexé retraçant l’intégralité des votes survenus à divers moments : comme l’état A sur les recettes, il porterait une simple récapitulation non amendable ; comme les états B, C, D et E, il ferait l’objet d’un appel partiel concomitant à celui de la mission de rattachement. 

3.   La distinction entre les charges d’investissement et fonctionnement dans les états législatifs annexés

Les  et  du I, en ligne avec son 4°, prévoient que les états législatifs annexés B, C, D et E fixant le montant des crédits ouverts ou des découverts autorisés pour les missions du budget général, les budgets annexes et les comptes spéciaux fassent le départ entre les charges de fonctionnement et d’investissement.

L’objectif des auteurs de la présente proposition de loi organique est à la fois d’offrir au citoyen prenant connaissance de la loi de finances une clef de lecture plus parlante que celle correspondant aux sept titres de l’article 5 de la LOLF – qui ne disparaîtrait naturellement pas et demeurerait un élément majeur des programmes annuels de performance et de l’exécution – et de fournir au débat parlementaire une nouvelle accroche, politique au sens le plus noble du terme, sur les dépenses qui couvrent des prérogatives régulières de l’État et de ses opérateurs et celles qui traduisent des choix pour l’amélioration de notre société dans l’avenir, aux plans économique, social, écologique, administratif, etc.

Les tableaux de ces états législatifs annexés seront enrichis comme suit.

PrÉsentation des États lÉgislatifs annexÉs (ici : État B)

Format actuel

Mission / programme

Autorisations d’engagement

Crédits
de paiement

Mission

x

x

Programme

x

x

éventuellement : dont titre 2

x

x

Programme

x

x

Nouveau format : première option

Mission / programme

Autorisations d’engagement

Crédits
de paiement

Fonct.

Invest.

Fonct.

Invest.

Mission

x

x

x

x

Programme

x

x

x

x

éventuellement : dont titre 2

x

s. o.

x

s. o.

Programme

x

x

x

x

 

Nouveau format : seconde option

Mission / programme

Fonctionnement

Investissement

AE

CP

AE

CP

Mission

x

x

x

x

Programme

x

x

x

x

éventuellement : dont titre 2

x

x

s. o.

s. o.

Programme

x

x

x

x

Source : commission spéciale.

Il ne revient pas au législateur organique d’imposer à l’exécutif un tel détail dans le format du PLF, mais la première option serait plus logique. En effet, l’article 8 de la LOLF accorde à la distinction entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement une portée juridique plus forte que la ventilation des dépenses par nature, sur le fondement des différentes étapes de leur consommation – engagement, liquidation, ordonnancement et paiement.

 

 

4.   Les autorisations d’emploi des opérateurs, établissements à autonomie financière et autorités publiques indépendantes

Le 7° du I élève au niveau organique les règles de plafonnement des autorisations d’emploi des autres périmètres que celui des ministères.

Dans le silence de la LOLF, le législateur financier pourrait se border à fixer les emplois de l’État, par ministère et par budget annexe, exprimé en équivalents temps plein travaillé (ETPT).

Cependant, la loi de finances comporte, en équivalents temps plein (ETP) :

– depuis 2009, un plafond pour les emplois des opérateurs de l’État, réparti par mission et par programme ([59]) ;

– depuis 2010, un plafond pour les emplois de droit local de certains établissements à autonomie financière, répartis sur un ou plusieurs programmes de la mission Action extérieure de l’État ([60]) ;

– depuis 2012, un plafond pour les emplois des autorités publiques indépendantes dotées de la personnalité morale et des autorités administratives indépendantes dont les effectifs ne sont pas inclus dans un plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État.

Il est proposé par le présent article de sanctuariser cette pratique.

5.   Les impositions de toute nature affectées aux personnes tierces

Le a) du 9° du I poursuit un double objectif. D’une part, par coordination avec le 2° du I, il prévoit que les dispositions relatives aux impositions de toute nature pouvant figurer dans la seconde partie sont celles qui sont affectées à une autre personne morale que l’État. D’autre part, il étend le champ de ces dispositions à l’affectation en elle-même, de sorte qu’il soit possible de faire figurer dans une loi de finances des opérations qui, sans modifier l’assiette, le taux ou les modalités de recouvrement d’une imposition de toute nature qui n’est pas affectée à l’État, conduisent à faire évoluer la répartition de son produit.

Il s’agit de tirer les conséquences de la décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019 sur la loi de finances pour 2020, au titre de laquelle le Conseil constitutionnel a jugé (considérants 117 à 122) que le prélèvement sur les droits de mutation à titre onéreux perçus par les quatre départements d’Île-de-France et la ville de Paris que l’article 217 de la loi déférée entendait instituer au profit de la Société du grand Paris – établissement public de l’État à caractère industriel et commercial dont les missions sont définies par l’article 7 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris – constituait un cavalier.

Cette décision retenait le quadruple motif que la disposition ne créait, modifiait ou supprimait aucune imposition de toute nature, ne concernait pas davantage l’assiette, le taux ou les modalités de recouvrement d’une telle imposition et n’était pas un prélèvement sur les recettes de l’État rétrocédé aux collectivités territoriales mais sur les celles de certaines de ces dernières et bénéficiait à une personne morale distincte de l’État ([61]).

6.   Les dépenses affectant un exercice ultérieur

Le b) du 9° du I prévoit que peuvent être placées dans la seconde partie les dispositions relatives aux dépenses de l’État, sans qu’elles soient nécessairement imputées à l’exercice dont le solde est arrêté par l’article d’équilibre.

Son objet est également d’adapter le cadre organique des finances publiques pour tenir compte de la jurisprudence constitutionnelle.

● Dans sa décision n° 2018-777 DC du 28 décembre 2018 sur la loi de finances pour 2019, le Conseil constitutionnel a relevé que l’article 210 du texte dont il était saisi instaurait des règles dérogatoires de revalorisation de certaines prestations sociales financées par l’État pour 2019 et 2020 ([62]) et estimé que « si, pour celles qui s’appliquent à l’année 2019, ces dispositions affectent directement les dépenses budgétaires de l’année, au sens du b) du 7 ° du paragraphe II de l’article 34 de la loi organique du 1er août 2001, tel n’est pas le cas de celles qui s’appliquent, au-delà de l’année à venir, à la seule année 2020 ». Par conséquent, les mots les mots « et 2020 », « et en 2020 » et « et est revalorisé de 0,3 % le 1er avril 2020 » ne pouvaient trouver leur place dans la loi de finances pour 2019.

A donc été précisé que les mots « affectant directement les dépenses budgétaires de l’année » figurant à l’article 34 de la LOLF n’autorisent la présence en seconde partie de mesures en dépenses dont l’incidence se prolonge au-delà de l’exercice dont le solde est arrêté par l’article d’équilibre, que si elles commencent lors de ce dernier et sont pérennes.

● Il convient de noter que le législateur organique avait retenu une formulation plus explicite en ce qui concerne les lois de financement de la sécurité sociale. En effet, le 2° du C du V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale dispose que peuvent figurer dans la quatrième partie de ce texte « les dispositions [...] ayant un effet sur les dépenses de l’année ou des années ultérieures des régimes obligatoires de base ou sur les dépenses des organismes concourant à leur financement qui affectent directement l’équilibre financier de ces régimes, à la condition qu’elles présentent un caractère permanent ».

C’est sur ce fondement que, dans sa décision n° 2018-776 DC du 21 décembre 2018 sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, le Conseil constitutionnel a jugé que les mots « et 2020 » figurant au premier alinéa de l’article 68 qui lui était déféré étaient contraires à la Constitution. Par dérogation à l’article L. 161-25 du code de la sécurité sociale qui prévoit la revalorisation annuelle de certaines prestations suivant le niveau de l’inflation, ledit alinéa fixait cette revalorisation à 0,3 % pour les années 2019 et 2020 : si l’exception au principe avait un effet direct sur l’équilibre financier du premier exercice visé, elle n’avait pas de caractère permanent et consistait, pour le second exercice, à la simple anticipation d’une décision de ne pas suivre la règle.

● Le présent article permettra au législateur financier d’anticiper l’adoption de mesures dont la charge pèsera sur des exercices ultérieurs ; leur incidence sera neutralisée dans l’article d’équilibre.

C.   L’extension du domaine obligatoire

Le 10° du I complète la liste des dispositions que la loi de finances de l’année doit obligatoirement comporter en y intégrant :

– dans la première partie, le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an, afin de renforcer le contrôle du Parlement sur son évolution qui, à défaut d’être prévue par la loi de finances, ne pourrait l’être par aucun autre texte et serait alors « curieusement » ([63]) sans limite, en complément du débat sur la soutenabilité de l’endettement (cf. supra) ;

– dans la seconde partie, les nouvelles dispositions faisant l’objet d’états législatifs annexés au sujet des objectifs et indicateurs de performances ainsi que de la récapitulation de l’ensemble des moyens concourant aux politiques publiques.

III.   Les modifications adoptÉes par la commission

La commission a adopté douze amendements.

● Tenant compte de l’avis du Conseil d’État, elle a d’abord, à l’initiative du rapporteur et/ou du président :

– renforcé la normativité de la disposition sur la récapitulation en première partie de l’ensemble des impositions et taxes affectées, afin de préciser qu’au-delà de la vue exhaustive qu’il fournira, ce tableau et les amendements dont il ferait l’objet pourront entraîner la réattribution de tout ou partie du produit des prélèvements concernés à l’État. La Haute assemblée note que les modifications que la seconde partie de la loi de finances apporterait à ces affectations sans effet sur l’équilibre nécessiteront un rappel pour coordination ;

– ajusté la nouvelle présentation du premier tableau de l’article d’équilibre, en y incluant (dons et legs, remboursement des prêts et avances, certains fonds de concours) ou excluant (émissions du Trésor) certains mouvements comme des ressources d’investissement et en y incluant d’autres encore (subventions d’investissement) comme des charges d’investissement, puis indiqué que les prélèvements sur recettes en seront déduits ;

– d’une part, introduit l’alinéa concernant le nouvel état législatif annexé sur les moyens des politiques publiques par le verbe « récapitule », dans le but de confirmer que cet état retracera à titre informatif des sommes qui résultent d’articles de portée juridique diverse et ne sera donc pas amendable et, d’autre part, décidé de ne pas y faire figurer les fonds sans personnalité juridique, à la fois pour ne pas consacrer une pratique au demeurant contraire aux grands principes budgétaires et pour éviter d’inscrire dans la loi des doubles comptes, puisque ces enveloppes sont alimentées soit par des ressources affectées soit par des subventions ;

– placé l’identification des dépenses d’investissement des missions dans le nouvel état législatif annexé plutôt qu’à l’état B, pour ne pas disperser les vecteurs de discussion parlementaire sur la qualité des dépenses comme des recettes publiques et parce que les lignes ou colonnes de l’état B correspondent toutes à des unités limitatives, l’intention des auteurs de la proposition de loi organique n’ayant jamais été de plafonner les crédits de titre 5, mais de les mettre en avant ;

– retenu une formulation de l’alinéa concernant les dépenses pouvant trouver leur place en seconde partie qui, en même temps, respecte l’avis du Conseil d’État, les décisions du Conseil constitutionnel précitées sur les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2019 et fait montre de cohérence avec la proposition de loi organique n° 4139 de M. Mesnier relative aux lois de financement de la sécurité sociale, en étendant le domaine facultatif aux charges concernant l’année et un nombre déterminé ou non d’années ultérieures, sans donc être nécessairement pérennes, ainsi qu’aux charges dont l’incidence commence une autre année que celle visée par la loi à titre principal tout en présentant un caractère permanent, mais en ne l’élargissant pas aux dépenses non pérennes d’un nombre déterminé d’exercices ultérieurs distincts de celui du texte.

● En outre, la commission a déplacé l’occurrence des deux nouveaux états législatifs annexés dans l’article 34 de la LOLF et a précisé que celui relatif à la maquette de performance concerne aussi les budgets annexes et l’ensemble des comptes spéciaux, au lieu des seuls comptes d’affectation spéciale.

● Par ailleurs, elle a apporté trois modifications techniques au sujet du domaine facultatif du texte budgétaire, en prévoyant que sa seconde partie puisse comporter des dispositions en matière de :

– péréquation entre collectivités territoriales, comme l’avaient progressivement admis les jurisprudences des présidents de la commission des finances des deux assemblées et du Conseil constitutionnel malgré le silence du cadre organique ;

– transfert de données fiscales lorsqu’ils permettent, par exemple en facilitant la vérification de ce que les bénéficiaires de dispositifs publics satisfont aux exigences applicables, des économies ou un rehaussement des recettes ;

– comptabilité « publique » et non seulement « de l’État », dans la double mesure où la LOLF habilitait déjà le législateur financier à traiter de la « responsabilité pécuniaire des agents des services publics » dans leur ensemble et où les comptables publics appartiennent tous au même corps, qu’ils travaillent pour l’État ou un autre organisme.

● Enfin, trois amendements du rapporteur sont d’ordre rédactionnel :

– l’un supprime une coordination déjà opérée à l’article 1er quant au remplacement de la référence à l’article 7 de la LOPGFP par celle au nouvel article 1er G de la LOLF sur l’article liminaire des lois financières ;

– le suivant précise que les « établissements à autonomie financière » visés au titre du plafonnement de leurs emplois sont ceux mentionnés à l’article 66 de la loi de finances pour 1974, qui est par conséquent cristallisé ;

– le dernier adapte la rédaction de l’entrée en vigueur du dispositif.

*

*     *

 

 

Article 6
Loi de finances de fin de gestion

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article 6 crée une nouvelle catégorie de loi de finances, la « loi de fin de gestion » et en détermine le champ de compétences.

Serait ainsi exclu des lois de finances de fin de gestion l’ensemble du domaine facultatif des lois de finances, en particulier toute disposition relative aux ressources de l’État et à la fiscalité affectée, une exception étant prévue pour les dispositions tendant à modifier pour l’année en cours l’affectation d’impositions de toute nature, mais aussi les dispositions relatives aux dépenses budgétaires, sauf celles qui affectent directement l’année en cours.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté six amendements sur cet article, dont trois amendements rédactionnels du rapporteur. Les trois autres amendements, suggérés par le Conseil d’État et portés par le rapporteur et le président, procèdent à la suppression d’un alinéa inutile, à la rectification d’une erreur matérielle et réintègrent les dispositions relatives à l’autorisation de l’octroi des garanties de l’État et de la prise de charge de dettes de tiers dans le champ des lois de finances de fin de gestion.

I.   L’État du droit

Si l’objet des lois de finances rectificatives est strictement défini par l’article 35 de la LOLF, la pratique observée jusqu’à récemment n’est pas conforme à l’esprit du législateur organique. Le Gouvernement s’est cependant engagé dans une démarche de sincérisation des lois de finances en recentrant la dernière loi de finances rectificative de l’année sur la régulation des crédits budgétaires.

A.   L’existence de lois de finances rectificatives en cours d’annÉe

1.   L’objet des lois de finances rectificatives

Les lois de finances rectificatives ou « collectifs budgétaires » sont des lois de finances ([64]) qui ont pour objet de modifier la loi de finances de l’année. L’article 35 de la LOLF leur en confère d’ailleurs le monopole.

Le contenu et la structure des lois de finances rectificative sont définis par référence au contenu et à la structure des lois de finances. Ainsi, comme la loi de finances, les lois de finances rectificatives sont structurées en deux parties. Elles sont précédées d’un article liminaire comportant un tableau de synthèse qui actualise la prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques.

Elles ont un domaine obligatoire, un domaine exclusif et un domaine partagé identiques à ceux des lois de finances, l’article 35 renvoyant à l’article 34 de la LOLF s’agissant de leur définition ([65]). Ainsi, les lois de finances rectificatives peuvent comporter des mesures, notamment fiscales, qui ne portent pas sur l’année en cours.

Le deuxième alinéa de l’article 35 de la LOLF fixe le domaine obligatoire des lois de finances rectificatives, composé des plafonds des dépenses et des charges de toutes les unités du budget et de celui des emplois de l’État, ainsi que des données générales de l’équilibre budgétaire.

Par ailleurs, la loi de finances rectificative dispose d’une compétence particulière – partagée avec la loi de règlement – de ratification des ouvertures de crédits opérées par les décrets d’avance prévus à l’article 13 de la LOLF. En cas d’ouverture de crédits par décrets d’avance en cours d’année, l’adoption par le Parlement d’une loi de finances rectificative les ratifiant permet de ne rendre que temporaire l’atteinte à l’autorisation parlementaire.

Il convient d’ailleurs de noter que dans le cas où le Gouvernement prend des décrets d’avance dits « non‑gagés », c’est‑à‑dire en cas d’urgence et de nécessité impérieuse d’intérêt national au sens du dernier alinéa de l’article 13 de la LOLF, il lui revient de déposer immédiatement ou à l’ouverture de la plus prochaine session du Parlement un projet de loi de finances portant ratification des crédits ainsi ouverts. Compte tenu des contraintes de calendrier et de forme – s’agissant en particulier des annexes budgétaires – qui s’attachent au dépôt des lois de finances initiales et des lois de règlement, l’existence des lois de finances rectificative donne au Gouvernement la possibilité de satisfaire relativement facilement cette exigence à tout moment de l’année civile.

Comme les lois de finances, les lois de finances rectificatives doivent prévoir une évaluation chiffrée de l’incidence, au titre de l’année considérée et, le cas échéant, des années suivantes, de chacune de leurs dispositions affectant les ressources ou les charges de l’État (article 55 LOLF).

On distingue généralement deux types de lois de finances rectificatives :

– les lois de finances rectificatives de fin d’exercice, qui sont traditionnellement utilisées pour régulariser les montants des crédits ouverts en fonction des prévisions les plus proches de l’exécution de la loi de finances initiale ;

les autres lois de finances rectificatives, qui peuvent être adoptées tout au long de l’année et qui sont généralement nécessaires à la suite d’un changement de conjoncture économique ou d’orientation de politique économique.

En 2020, quatre lois de finances rectificatives ont ainsi été adoptées : trois l’ont été suite au choc macroéconomique constitué par la crise sanitaire et aux mesures de soutien de l’activité prises par le Gouvernement et une a été votée en fin d’exercice.

Les lois de finances rectificatives permettent ainsi au Parlement de contrôler le respect de l’autorisation budgétaire accordée tout en laissant une certaine souplesse au Gouvernement en cas de modification des prévisions effectuées en début d’année. À ce titre, les lois de finances rectificatives sont des instruments concourant à l’affirmation du principe de sincérité budgétaire que la LOLF a consacré. Dans sa décision ([66]) sur la loi du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier ([67]), le Conseil constitutionnel a estimé que la Constitution et les dispositions organiques ([68]) exigeaient que le Gouvernement dépose un projet de loi de finances rectificative dans le cas où il apparaîtrait que « les grandes lignes de l’équilibre économique et financier définies par la loi de finances de l’année se trouveraient, en cours d’exercice, bouleversées ».

2.   Un usage dévoyé des lois de finances rectificatives

L’usage qui a été fait jusqu’à récemment des lois de finances rectificatives, tant par le Gouvernement que par les parlementaires, ne semble pas toujours avoir été en conformité avec l’esprit du législateur organique.

Deux types de dévoiement peuvent être relevés :

– en premier lieu, les ouvertures de crédits en lois de finances rectificatives ont souvent permis de combler des sous-budgétisations initiales, ce qui a par exemple été le cas en 2016 et 2017 et dénoncé par la Cour des comptes ([69]) ;

– en second lieu, les projets de loi de finances rectificative de fin d’année ont constitué à plusieurs reprises des véhicules législatifs commodes permettant au Gouvernement d’inscrire des dispositions de nature fiscale sans impact sur l’année en cours et qui auraient pu figurer dans le projet de loi de finances initiale si elles avaient été prêtes quelques semaines plus tôt dans l’année. À titre d’exemple, le projet de loi de finances rectificative pour 2017, déposé le 15 novembre 2017 ([70])(n° 384) comportait initialement 24 articles qui auraient pu figurer dans le projet de loi de finances initiale. Cette pratique conduit à examiner des mesures fiscales importantes dans des délais précipités puisque les projets de loi de finances rectificative ne bénéficient pas des délais inscrits aux articles 42 et 47 de la Constitution.

Les parlementaires euxmêmes ont participé au dévoiement des projets de loi de finances rectificative de fin d’année en les utilisant pour déposer des amendements de nature fiscale, dans certains cas identiques à des amendements qui avaient été déposés quelques semaines plus tôt au projet de loi de finances, ce qui entraîne une redondance très forte des débats. Par exemple, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017 précité, 180 amendements portant articles additionnels ont été déposés par des députés en première lecture.

B.   Une pratique depuis 2017 qui tend À recentrer la derniÈre loi de finances rectificative de l’annÉe sur la rÉgulation des crÉdits budgÉtaires

Compte tenu des objections faites par les parlementaires lors de la discussion du second projet de loi de finances rectificative pour 2017 et des critiques adressées par la Cour des comptes sur la gestion de l’exercice 2017 ([71]), le Gouvernement s’est engagé dans la voie de l’amélioration de la qualité de la programmation et de la gestion budgétaires.

D’une part, en 2018, pour la première fois depuis 1985, aucun décret d’avance n’a été pris et le montant des crédits ouverts en loi de finances rectificative de fin d’année net du montant des annulations a été relativement faible, s’établissant à 80 millions d’euros. Cette pratique a été réitérée en 2019 et en 2020. Les circonstances exceptionnelles de l’année 2021 ont cependant conduit le Gouvernement à ouvrir 7,2 milliards d’euros par décret d’avance en 2021 ([72]).

D’autre part, depuis 2018, le projet de loi de finances rectificative de fin d’année ne comporte pas de dispositions de nature fiscale, conformément à l’engagement du Gouvernement.

Cette amélioration ne dépend néanmoins que de la pratique et de la bonne volonté du Gouvernement. Par ailleurs, aucune disposition actuelle n’empêche les parlementaires de déposer des amendements de nature fiscale. Après l’examen remarqué de 295 amendements portant articles additionnels et de nature fiscale sur le PLFR 2018, malgré l’absence de disposition de nature fiscale dans le texte initial, et suite à la prise de position du Rapporteur général Joël Giraud en faveur de la suppression des amendements fiscaux sur le PLFR de fin d’année, seuls 33 amendements fiscaux ont été examinés en première lecture du PLFR de fin d’année 2019 par les députés. En revanche, le nombre d’amendements fiscaux examinés dans le PLFR de fin d’année a de nouveau augmenté en 2020 (119 amendements fiscaux en première lecture à l’Assemblée nationale) mais cette hausse peut être expliquée par le caractère exceptionnel de l’année 2020.

 

II.   LEs modifications portÉes par la proposition de loi

Afin de garantir la réitération de cette pratique de bonne gestion budgétaire, le présent article propose la création d’une nouvelle catégorie de loi de finances correspondant aux actuelles lois de finances rectificatives de fin d’année, dont le domaine serait réduit afin d’en faire une véritable loi de rectification des finances de l’année en cours.

Conformément à la proposition n° 5 de la MILOLF, l’objectif est de restreindre le champ du collectif de fin d’année aux opérations de fin de gestion et d’en exclure toute mesure fiscale. La loi de finances de fin de gestion serait donc constituée de seuls articles de « chiffres », et ne comporterait plus d’articles de « lettres ».

● En premier lieu, le présent article procède à l’insertion de la mention nouvelle des lois de finances de fin de gestion à l’article 35 de la LOLF (a du du I, 3° du I et du I).

● En deuxième lieu, l’article détermine le champ de compétence des lois de finances de fin de gestion.

Ainsi, les lois de finances de fin de gestion ont le même domaine obligatoire que les lois de finances rectificatives, composé des plafonds des dépenses et des charges de toutes les unités du budget et de celui des emplois de l’État, ainsi que des données générales de l’équilibre budgétaire ( du I).

Les lois de finances de fin de gestion peuvent, comme les lois de finances rectificatives, ratifier, le cas échéant, les modifications apportées aux crédits par décret d’avance ( du I).

Les lois de finances de fin de gestion ont un champ de compétence plus restreint que celui des lois de finances rectificatives. Il est important de souligner que l’exclusion de ces dispositions s’appliquerait, d’une part, au Gouvernement, qui ne pourrait insérer de telles dispositions dans le projet de loi de finances de fin de gestion initial, ou par amendement au cours de la navette, et, d’autre part, à l’ensemble des parlementaires qui ne pourraient plus déposer d’amendement portant sur des sujets exclus du champ de cette loi de finances de fin d’année.

Serait ainsi exclu de leur champ l’ensemble du domaine facultatif des lois de finances ( du I) soit :

– toute disposition relative aux ressources de l’État et à la fiscalité affectée, qu’elles affectent ou non l’équilibre budgétaire, une exception étant prévue pour les dispositions tendant à modifier pour l’année en cours l’affectation d’impositions de toute nature ;

– les dispositions relatives aux dépenses budgétaires, sauf celles qui affectent directement l’année en cours ([73]) ;

– et de façon plus accessoire, les modalités de répartition des concours de l’État aux collectivités territoriales, l’approbation des conventions financières, les dispositions relatives à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques, relatives à la comptabilité de l’État et au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics.

L’article prévoit également qu’une partie du domaine exclusif des lois de finances soit exclue du champ des lois de finances de fin de gestion :

– d’une part, les dispositions relatives à l’évaluation des recettes budgétaires et à la fixation des plafonds de dépenses et des plafonds d’emploi ( du I), cette exclusion relevant manifestement d’une erreur de plume puisque ces dispositions correspondent en partie à la raison d’être des lois de finances rectificatives et, a fortiori, des lois de finances de fin de gestion. À noter que la fixation des plafonds de dépenses et des plafonds d’emploi fait d’ailleurs partie du domaine obligatoire de la loi de finances de fin de gestion (voir supra) ;

– et, d’autre part, les dispositions relatives à l’autorisation de l’octroi des garanties de l’État et de la prise de charge de dettes de tiers (b et du c du du I).

Le présent article interdit également aux lois de finances rectificatives et aux lois de finances de fin de gestion de comporter toute autre disposition que celles prévues au I et au II de l’article 34 de la LOLF.

Il est important de préciser ici que l’intention du législateur n’est aucunement de priver le Gouvernement de la possibilité de prendre des mesures de « lettres » en fin d’année : le Gouvernement garderait en effet la possibilité de prendre des mesures fiscales nouvelles dans le cadre d’une loi ordinaire après avoir déposé un projet de loi de fin de gestion ou de présenter un projet de loi de finances rectificatives plutôt qu’un projet de loi de fin de gestion. Le Gouvernement reste donc libre d’user ou non de sa faculté de dépôt d’un projet de loi de fin de gestion.

● Enfin, le II du présent article prévoit que ces modifications de l’article 35 de la LOLF, ainsi que celles prévues au II de l’article 2 de la présente proposition de loi, entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2023.

 

III.   les Modifications adoptÉes par la commission

La commission spéciale a adopté six amendements sur cet article.

• Trois amendements sont issus des propositions de modifications du Conseil d’État et ont été portés par le rapporteur Laurent Saint-Martin et le président Éric Woerth :

– le premier amendement supprime l’erreur de rédaction relevée supra qui excluait du champ des lois de finances de fin de gestion une partie substantielle de leur raison d’être, soit les dispositions relatives à l’évaluation des recettes budgétaires et à la fixation des plafonds de dépenses et des plafonds d’emploi.

– le deuxième supprime l’interdiction, faite aux lois de finances rectificatives et aux lois de finances de fin de gestion, de comporter toute autre disposition que celles prévues au I et au II de l’article 34 de la LOLF qui apparaît inutile, dès lors que l’article 34, auquel renvoie l’article 35, limite déjà strictement le champ d’intervention possible des lois de finances.

– le troisième amendement reprend une modification plus substantielle proposée par le Conseil d’État qui porte sur le champ des lois de finances de fin de gestion.

S’il ne relevait pas de difficulté juridique et constitutionnelle concernant l’exclusion du domaine facultatif des lois de finances, le Conseil d’État considérait néanmoins dans son avis qu’il était préférable d’éviter au maximum la situation dans laquelle le Gouvernement serait obligé de déposer un nouveau projet de loi ordinaire, après avoir pris un projet de loi de fin de gestion. Ainsi, cet amendement réintroduit les mesures relevant de l’autorisation de l’octroi de garanties de l’État et de la prise en charge de dettes de tiers, qui font partie du domaine exclusif des lois de finances, dans le champ des dispositions pouvant figurer au sein d’une loi de finances de fin de gestion afin de permettre de traiter l’hypothèse de circonstances exceptionnelles exigeant l’utilisation de telles dispositions en fin d’année. Les deux crises traversées par la France en 2008 et 2020 ont en effet nécessité le recours à des garanties de l’État et cette nécessité pourrait se présenter à nouveau, dans la période de fin d’année.

Seul le domaine facultatif de la loi de finances serait donc exclu du champ de la loi de finances de fin de gestion, ce qui permettrait d’améliorer la lisibilité du dispositif. La loi de finances de fin de gestion pourrait donc comporter certains articles de « lettres » mais ni mesures fiscales, ni mesures relatives aux dépenses de l’année.

 

 

• La commission a adopté trois autres amendements du rapporteur : un amendement rédactionnel, un amendement de coordination qui procède à l’introduction de la notion de loi de finances de fin de gestion à l’ensemble des articles traitant des lois de finances rectificatives dans la LOLF, et un dernier amendement qui tire la conséquence du rapatriement à l’article 2 de la mention de la date d’entrée en vigueur du II de l’article 2, initialement inscrite à l’article 6 de la proposition de loi organique.

*

*     *

 


—  1  —

Article 7
Avancement de la date de dépôt des annexes générales

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article modifie l’article 39 de la LOLF pour prévoir le dépôt simultané du projet de loi de finances et de ses annexes générales prévues par le 7 ° de l’article 51. Il conduirait donc à avancer, au plus tard au premier mardi d’octobre, le dépôt de ces annexes.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté un amendement supprimant la mention de la « distribution » du projet de loi de finances et de ses annexes figurant à l’article 39.

L’article 39 de la loi organique porte sur la date et les modalités de dépôt du projet de loi de finances de l’année et de ses annexes. Il prévoit un dépôt du projet de loi de finances et de ses annexes explicatives antérieur à celui fixé pour les annexes générales. Ce décalage ne paraît plus justifié aux auteurs de la présente proposition de loi.

I.   L’État du droit

Le projet de loi de finances ainsi que les documents prévus par les articles 50 et 51 de la LOLF doivent être déposés au plus tard le premier mardi d’octobre. Une exception est faite pour les annexes générales du 7 ° de l’article 51 pour lesquelles des délais ad hoc sont prévus pour chacune d’entre elles.

A.   Le dÉpÔt du projet de loi de finances et de ses annexes

Les articles 50 et 51 de la LOLF recensent l’ensemble des informations et documents qui doivent faire l’objet d’une transmission au Parlement en vue de l’examen de la loi de finances de l’année.

Ceux-ci prennent la forme d’annexes qui relèvent de deux catégories : les annexes dites « explicatives » et les annexes considérées comme « générales ». Le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l’article 10 de la présente proposition de loi pour trouver une revue exhaustive de ces documents.

 

 

 

1.   Les annexes explicatives et les annexes générales

Les annexes explicatives sont prévues par les articles 50 et par les 1° à 6° et le 8°de l’article 51 de la LOLF. Il s’agit principalement du rapport économique social et financier (RESF), de l’ « évaluation des voies et moyens », des projets annuel de performance, ou « bleus » budgétaires, portant sur les dépenses du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux et, enfin, de l’évaluation préalable de certains articles de la LOLF.

Les annexes générales prévues par le 7° de l’article 51 de la LOLF ont une vocation informative plus large que l’explicitation du contenu de la loi de finances. Ils relèvent de deux catégories : les « jaunes » et les « oranges » budgétaires.

Les « jaunes budgétaires » rassemblent l’ensemble de l’information financière d’une politique publique donnée. Conformément à une recommandation de la MILOLF ([74]), l’article 179 de la loi de finances pour 2020 ([75]) recense désormais la liste des jaunes budgétaires.

Les documents de politique transversale, ou « oranges budgétaires », regroupent dans un document l’ensemble des financements qui concourent à une politique publique interministérielle. Les « oranges budgétaires » sont énumérés à l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.

2.   Un dépôt fixé au premier mardi d’octobre pour le projet de loi de finances et ses annexes explicatives

a.   Un délai de dépôt simultané pour le projet de loi de finances et ses annexes explicatives…

Le premier alinéa de l’article 39 de la LOLF dispose que le projet de loi de finances et ses annexes explicatives doivent être déposés « le premier mardi d’octobre de l’année qui précède celle de l’exécution du budget ».

À cette date, conformément à l’article 39 de la Constitution, le Gouvernement doit déposer sur le bureau de l’Assemblée nationale, qui en est saisie en priorité, le projet de loi de finances.

 

b.   …qui fait courir le délai d’examen de la loi fixé par la Constitution

i.   Un encadrement strict par la Constitution et la loi organique

L’échéance du premier mardi d’octobre permet au Parlement d’exercer ses prérogatives budgétaires sans préjudice du respect du délai d’examen encadré par l’article 47 de la Constitution et limité à soixante-dix jours. Comme l’a indiqué le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 juillet 2001 relative à la LOLF, le délai fixé pour le dépôt du projet de loi de finances et de ses annexes a pour objet d’assurer que « l’information nécessaire sera fournie aux membres du Parlement pour se prononcer en connaissance de cause sur le projet de loi de finances » ([76]).

Le dépôt et la distribution du projet de loi de finances et de ses annexes explicatives sur le bureau de l’Assemblée nationale font courir le délai d’examen de projet de loi de finances. Comme indiqué par le Conseil constitutionnel dans son interprétation de l’article 39 de la LOLF, le dépôt et la distribution du projet de loi de finances et de ses annexes explicatives constituent « le point de départ des délais fixés par les deuxièmes et troisièmes alinéas de l’article 47 de la Constitution » ([77]).

ii.   Une interprétation et une pratique plus souples

Toutefois, l’interprétation de ces contraintes par le juge constitutionnel permet en pratique de s’en écarter légèrement.

D’une part, le Conseil constitutionnel fait preuve d’une certaine souplesse dans l’appréciation de ces délais. Comme l’indique le considérant 75 de la décision précitée : « si, par suite des circonstances, tout ou partie d’un document soumis à l’obligation de distribution susmentionnée venait à être mis à la disposition des parlementaires après la date prévue, les dispositions de l’article 39 ne sauraient être comprises comme faisant obstacle à l’examen du projet de loi de finances ; que la conformité de la loi de finances à la Constitution serait alors appréciée au regard tant des exigences de la continuité de la vie nationale que de l’impératif de sincérité qui s’attache à l’examen de la loi de finances pendant toute la durée de celui-ci » ([78]). En conséquence, l’absence de dépôt de tout ou partie des annexes ne fait pas obstacle à l’examen du projet de loi de finances.

D’autre part, depuis le milieu des années 1990, le point de départ du délai d’examen repose sur l’envoi par le Gouvernement d’une lettre du secrétaire général du Gouvernement au président de l’Assemblée nationale qui, « en complément de dépôt », dresse la liste de toutes les annexes ayant un caractère obligatoire. Les délais constitutionnels commencent à courir le lendemain de la date de cette récapitulation.

Depuis le début de la mise en œuvre de la LOLF en 2005, cette liste porte sur l’ensemble des annexes explicatives du 1 ° au 6 ° et du 8 ° de l’article 51 de la LOLF. Seules n’y figurent donc pas les « annexes générales » (7 ° de l’article 51).

À titre d’illustration, pour l’examen du projet de loi de finances pour 2021, la date limite du dépôt du texte et de ses annexes explicatives était fixée au mardi 6 octobre. En revanche, la « lettre récapitulant la liste des documents distribués » n’a été reçue que le vendredi 9 octobre. Le samedi 10 octobre a constitué le point de départ du délai d’examen du texte qui expirait soixante-dix jours plus tard, soit le 18 décembre ([79]).

3.   Des délais adaptés pour chaque annexe générale

Le second alinéa de l’article 39 prévoit des délais particuliers pour les annexes générales. Il dispose que chaque annexe générale doit être déposée sur le bureau des assemblées « au moins cinq jours francs avant l’examen, par l’Assemblée nationale en première lecture, des recettes ou des crédits auxquels elle se rapporte ».

B.   Le dÉcalage du dÉpÔt des annexes gÉnÉrales ne permet pas une exploitation satisfaisante de ces documents

La MILOLF a estimé que les délais de transmission des annexes générales étaient « peu compatibles avec une analyse approfondie des données qu’ils présentent »  ([80]).

En premier lieu, le nombre et le volume des annexes générales n’ont cessé d’augmenter. L’appropriation de ces 21 documents, de plus de 3 000 pages au total, n’est pas toujours possible quelques jours avant le passage en séance.


ÉVOLUTION du nombre de jaunes et D’ORANGES budgÉtaires

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Évolution

Oranges

Nombre d’annexes

7

8

11

12

15

16

17

18

18

18

19

19

21

21

200 %

Nombre de pages

376

559

944

1 054

1 393

1 606

1 851

2 118

2 393

2 307

2 481

2 683

2 838

2 994

614 %

Jaunes

Nombre d’annexes

27

16

20

20

22

26

26

27

29

27

29

28

29

28

4 %

Nombre de pages

2 752

1 948

1 843

2 608

3 890

3 922

4 483

4 590

4 776

4 460

5 033

5 363

3 055

3 098

95 %

Total

34

24

31

32

37

42

43

45

47

45

48

47

50

49

44 %

Source : Commission des finances d’après le site performance publique

En second lieu, le délai de transmission des annexes générales n’a pas toujours été respecté. La mission d’information relative à la LOLF ([81]) citait l’exemple d’une annexe déposé le jour de l’examen en séance à l’Assemblée nationale des crédits auxquels elle se rapportait. Par ailleurs, certains oranges budgétaires, à l’image du rapport sur la « politique publique de lutte contre les drogues et les toxicomanies », ne se rapportent à aucune mission budgétaire en particulier rendant le délai de l’article 39 caduc.

Le Conseil constitutionnel ne sanctionne pas le non-respect du délai de transmission fixé par le second alinéa de l’article 39. Il a estimé en 2018 que la nature même des annexes générales conduit à ne pas considérer un éventuel dépôt tardif comme une atteinte « à la sincérité et à la clarté du débat parlementaire » ([82]). Les requérants faisaient valoir le fait que le document de politique transversale relatif à l’outre-mer, comportant 483 pages, avait été diffusé au cours de la séance relative à l’examen des crédits de la mission Outre-mer. Les requérants avaient, en outre, retracé en annexe de leur saisine les dates de réception des annexes générales. 

Le projet de loi de finances pour 2021 s’est caractérisé par un progrès substantiel. Plusieurs annexes générales ont été déposées simultanément au projet de loi de finances et toutes l’ont été avant le début de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances en séance publique.

II.   Les modifications apportÉes par la proposition de loi

Le I du présent article supprime le second alinéa de l’article 39 qui prévoit un délai particulier pour le dépôt des annexes générales. Par conséquent, leur dépôt deviendrait concomitant à celui du projet de loi lui-même et de ses annexes explicatives.

Le II prévoit l’entrée en vigueur de cette disposition pour le projet de loi de finances de l’année 2023.

III.   Les Modifications adoptÉes par la commission

Le Conseil d’État a considéré que cet article ne soulevait pas de difficulté constitutionnelle.

La commission a adopté un amendement sur proposition du rapporteur qui vise à supprimer la mention de la distribution du projet de loi de finances et de ses annexes à l’article 39.

Cette mention répond à une particularité des projets de loi de finances. En principe, l’impression d’un projet de loi relève de la responsabilité de l’assemblée sur le bureau de laquelle il est déposé. Au regard du volume et de la complexité des documents budgétaires accompagnant le projet de loi de finances, leur impression et leur distribution ont été dévolues au Gouvernement. Celui-ci doit les remettre en format papier à l’Assemblée nationale au plus tard le premier mardi d’octobre pour le projet de loi et les annexes explicatives, et selon le délai fixé par le second alinéa de l’article 39 de la LOLF pour les annexes générales.

Sans remettre en cause complètement cette pratique, la portée de l’amendement adopté par la commission est double. D’une part, il permet de ne plus lier le dépôt du projet de loi de finances et de ses annexes à leur impression ; cette dernière pouvant être légèrement décalée. D’autre part, il permet d’envisager à l’avenir une transmission dématérialisée de tout ou partie des documents budgétaires, en fonction des souhaits exprimés par les assemblées.

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Article 8
Printemps de l’évaluation

Adopté par la commission spéciale sans modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article avance du 1er juin au 1er mai la date avant laquelle le Gouvernement dépose et distribue le projet de loi de règlement et les documents qui lui sont joints.

Il prévoit également l’inscription d’un nouvel alinéa à l’article 46 de la LOLF indiquant que la Conférence des présidents de chaque assemblée peut décider qu’une semaine prévue à l’article 48, alinéa 4, de la Constitution est consacrée prioritairement au contrôle de l’exécution des lois de finances. Cette disposition donne une assise organique à la pratique du « printemps de l’évaluation » observée depuis 2018 à l’Assemblée nationale.

La commission spéciale a adopté cet article sans modification.

I.   L’État du droit

L’examen du projet de loi de règlement de l’année n-1 est un temps consacré, notamment depuis la naissance du Printemps de l’évaluation, à l’analyse de la gestion des politiques publiques mises en œuvre.

A.   Le calendrier du projet de loi de rÈglement

Aux termes de l’article 1er de la LOLF, la loi de règlement a le caractère de loi de finances. Elle se distingue des autres de lois de finances en raison de son objet : alors que les lois de finances initiales et rectificatives sont des lois de prévision, la loi de règlement est principalement un texte de constatation et d’approbation des différents comptes et d’ajustement de l’autorisation parlementaire initiale. Depuis quelques années, elle apparaît également comme un véritable support de l’analyse de la gestion des politiques publiques mises en œuvre au cours de l’année. Le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l’article 2 de la présente proposition de loi pour de plus amples informations sur l’objet de la loi de règlement et les documents qui lui sont annexés. 

L’article 46 de la LOLF prévoit que le Gouvernement dépose et distribue le projet de loi de règlement et tous les documents qui doivent lui être joints avant le 1er juin de l’année suivant celle de l’exécution du budget auquel il se rapporte. Cette date a été retenue en 2001 afin de laisser suffisamment de temps aux parlementaires pour examiner l’exécution du budget écoulé avant le dépôt du projet de loi de finances de l’année suivante (chaînage vertueux).

 

Dans la pratique, ce calendrier est décalé les années d’élections législatives. Depuis la mise en œuvre de la LOLF, trois législatures se sont achevées le 18 juin 2007 pour la XIIe, le 19 juin 2012 pour la XIIIe et le 20 juin 2017 pour la XIVe, ces dates ne donnant pas matériellement le temps à l’Assemblée nationale d’examiner le texte avant que la fin de la législature n’entraîne la caducité de ce texte en instance devant l’Assemblée nationale ([83]). Ainsi, les projets de loi de règlement du budget 2007, 2011 et 2016 ont été déposés respectivement les 27 juin 2007, 27 juin 2012 et 29 juin 2017.

Le Conseil constitutionnel a précisé que les délais d’examen prévus à l’article 47 de la Constitution pour les projets de loi de finances ne s’appliquaient pas aux projets de loi de règlement ([84]). De même, il a décidé que la procédure d’urgence ne s’appliquait pas de façon automatique aux lois de règlement ([85]).

Depuis l’examen du projet de loi de règlement du budget de 2005, plusieurs initiatives ont conduit à revaloriser progressivement l’examen du projet de loi de règlement : auditions des ministres, de responsables de programmes, rédaction de notes par les rapporteurs spéciaux puis de rapports sur l’exécution des crédits. Ces différentes initiatives ont débouché sur la mise en place d’un temps consacré au contrôle et à l’évaluation des politiques publiques menées par le Gouvernement, matérialisé depuis 2018 par la mise en place du Printemps de l’évaluation à l’Assemblée nationale (voir infra).

Afin de laisser suffisamment de temps aux parlementaires pour analyser les résultats de gestion du budget de l’année précédente, le Gouvernement a, accepté de déposer le projet de loi de règlement et ses annexes avant le 1er juin : les projets de loi de règlement du budget 2017, 2018, 2019 et 2020 ont respectivement été déposés les 23 mai 2018, 15 mai 2019, 2 mai 2020 et 14 avril 2021.

B.   La naissance du printemps de l’Évaluation

Face au constat unanimement partagé d’un déséquilibre entre le temps de l’autorisation parlementaire à l’automne et le temps de l’examen des résultats de l’action publique au printemps lors du vote de la loi de règlement, la commission des finances de l’Assemblée nationale a mis en place depuis 2018, à cadre constitutionnel et organique constant, un Printemps de l’évaluation, qui « devient le lieu de convergence de tous [les] travaux d’évaluation ([86]) ».

 

Ce Printemps de l’évaluation consiste en l’évaluation, au cours du premier semestre de l’année, d’une politique publique, par chaque rapporteur spécial, qui présente ses travaux en commission des finances, réunie sous la forme de commissions d’évaluations des politiques publiques (CEPP). Tous les ministres sont auditionnés par la commission des finances à cette occasion et répondent aux observations des rapporteurs spéciaux et de l’ensemble des députés présents portant d’une part sur la gestion de l’exercice précédent, et, d’autre part, sur les conclusions des travaux menés par les rapporteurs spéciaux.

Ces travaux d’évaluation font ensuite l’objet d’un examen en séance publique, au cours d’une semaine de contrôle, sous la forme de débats ou de l’adoption de propositions de résolution, à l’initiative des groupes politiques ou du temps consacré à la commission des finances.

Malgré les inconvénients intrinsèques à cet outil, les propositions de résolution ne pouvant pas faire l’objet d’amendements et étant soumises à un contrôle préalable du Gouvernement qui vérifie que leur adoption ou leur rejet ne serait pas « de nature à mettre en cause sa responsabilité » et qu’elles ne contiennent pas d’« injonctions à son égard », cet instrument a permis aux rapporteurs spéciaux de porter en séance publique leurs travaux et a traduit le consensus de l’Assemblée sur les conséquences à tirer des conclusions de certaines évaluations.

Un rapport d’information de la commission des finances regroupant l’ensemble des éléments synthétiques exposés dans les rapports spéciaux et lors des discussions en commission est ensuite publié.

Les quatre années de pratique du Printemps de l’évaluation ont donné lieu à des configurations différentes en séance :

– en 2018 et en 2019, la priorité a été donne à l’adoption de propositions de résolutions. Par exemple, en 2019, sept résolutions ont été adoptées, cinq inscrites sur proposition de la commission des finances et deux inscrites à la demande des groupes. Sur ces sept résolutions, deux sont issues du groupe d’opposition Les Républicains, ce qui démontre la logique transpartisane de l’exercice ;

– en 2020, en raison de la situation exceptionnelle liée à la pandémie de covid-19, les travaux d’évaluation ont été réorientés vers un thème unique : l’impact de l’actuelle crise sanitaire en termes de mobilisation des crédits budgétaires et de déploiement des politiques publiques. Les CEPP se sont déroulées en visioconférence et les ministres n’ont pas été auditionnés. Une séance publique a été consacrée à un débat sur le rapport d’information de la commission des finances sur le printemps de l’évaluation le mercredi 10 juin 2020 ;

– en 2021, les CEPP ont eu lieu en présentiel et les ministres ont été auditionnés à cette occasion, comme en 2018 et 2019. Un débat en séance publique a été consacré à la restitution des travaux des commissions des finances et des affaires sociales sur le Printemps de l’évaluation. Un printemps social de l’évaluation a en effet été mis en place depuis 2020 par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. Aucune résolution n’a été inscrite sur proposition de la commission des finances mais le groupe Les Républicains a inscrit une proposition de résolution sur son créneau réserve, qui a été rejetée par l’Assemblée nationale le mardi 15 juin 2021 ([87]).

Cette nouvelle organisation permet de renforcer la logique de responsabilisation des ministres, qui rendent compte de l’exécution des crédits de façon plus approfondie qu’auparavant, et contribue à la diffusion de la culture de l’évaluation au sein de la commission des finances. Ce dispositif permet également de rééquilibrer les temps d’examen dédiés à la prévision et à l’exécution.

Le Printemps de l’évaluation a été inscrit dans le Règlement de l’Assemblée nationale lors de sa réforme du 4 juin 2019. Le nouvel article 146-1-1 prévoit ainsi que « la Conférence des présidents peut décider qu’une semaine prévue à l’article 48, alinéa 4, de la Constitution est consacrée prioritairement au contrôle de l’exécution des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale » et qu’ « elle peut inscrire à l’ordre du jour de cette semaine des propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution et portant sur l’exécution des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale ».

II.   Droit proposÉ

Dans l’objectif d’asseoir les deux pratiques observées ces dernières années, le présent article avance au 1er mai le délai de dépôt du projet de loi de règlement et inscrit dans la LOLF la possibilité pour les assemblées d’instituer des séances consacrées à l’examen des travaux effectués pendant le Printemps de l’évaluation.

A.   Des dÉlais de dÉPÔt du projet de loi de rÈglement raccourcis

Le du présent article modifie l’article 46 de la LOLF en avançant du 1er juin au 1er mai la date avant laquelle le Gouvernement dépose et distribue le projet de loi de règlement et ses annexes. Il inscrit ainsi au rang organique la pratique observée ces dernières années d’un dépôt anticipé de ce texte afin de garantir aux parlementaires un temps suffisant pour l’analyse des documents budgétaires annexés à ce projet de loi avant son examen en séance publique.

L’avancée de la date de dépôt du projet de loi de règlement et de ces annexes participe ainsi à la revalorisation de la période du Printemps de l’évaluation. À terme, une simultanéité de l’examen parlementaire des textes d’approbation des comptes de l’État et de la sécurité sociale ([88]) pourrait être envisagée, pour consolider une séquence dédiée à un printemps de l’évaluation élargi. Un décalage d’un mois entre le dépôt de ces deux textes résulterait des rédactions actuelles des deux propositions de loi organiques examinées par la commission spéciale, l’article 3 de la proposition de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale prévoyant un dépôt avant le 1er juin.

Cette modification de la date de dépôt du projet de loi de règlement implique que la Cour des comptes soit en mesure de publier pour le 1er mai son rapport relatif aux résultats de l’exécution de l’exercice antérieur et aux comptes associés et la certification des comptes de l’État. Elle implique aussi que la publication de l’avis du Haut Conseil des finances publiques joint à ce texte soit avancée au 1er mai.

Ce nouveau calendrier budgétaire, tel que prévu par la présente proposition de loi organique, a pour conséquence de rapprocher dans le temps deux séquences distinctes : la discussion autour des orientations des finances publiques dans le cadre du débat sur le programme de stabilité, les rapports du Gouvernement et de la Cour des comptes sur ce sujet devant être déposés avant le 30 avril (voir commentaire de l’article 1er supra) et le dépôt du projet de loi de règlement et des différents rapports susmentionnés qui lui sont joints.

Si ces deux calendriers se superposeront en partie, le législateur organique a souhaité conserver le caractère spécifique de chacune de ces séquences. En aucun cas ce changement ne doit conduire à fusionner les rapports ou les débats ayant trait, d’une part, à l’orientation pluriannuelle des finances publiques et, d’autre part, à l’évaluation des résultats de gestion de l’année passée. 

B.   L’inscription du printemps de l’Évaluation au rang organique

Le du présent article complète l’article 46 de la LOLF en indiquant que : « la Conférence des présidents de chaque assemblée peut décider qu’une semaine prévue à l’article 48, alinéa 4, de la Constitution est consacrée prioritairement au contrôle de l’exécution des lois de finances », reprenant à l’identique la disposition prévue dans le Règlement de l’Assemblée nationale à son article 146-1-1.

 

 

Cet alinéa donne ainsi une assise organique à la pratique du Printemps de l’évaluation observée ces quatre dernières années au sein de l’Assemblée nationale. Cette disposition est issue de la recommandation n° 38 du rapport de la MILOLF.

La rédaction retenue permet de garder de la souplesse pour que l’exercice du printemps de l’évaluation puisse évoluer dans le temps, à l’épreuve de la pratique parlementaire.

III.   lES Modifications adoptÉes par la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

Pour rappel, le Conseil d’État a souligné dans son avis l’absence de caractère normatif de la disposition prévue au 2° du présent article qui se contente d’inscrire la possibilité pour chaque assemblée de consacrer une semaine d’ordre du jour dédiée au contrôle de l’action du Gouvernement au contrôle de l’exécution des lois de finances. Le Conseil d’État n’a pas identifié de problème constitutionnel mais a relevé que l’article 48 de la Constitution ne renvoie pas à une loi organique. Pour l’ensemble de ces raisons, il a suggéré la suppression de cet alinéa.

Si l’inscription au niveau organique n’apparaît pas indispensable pour permettre l’organisation du Printemps de l’évaluation, la pratique des quatre dernières années l’ayant bien démontré, le rapporteur considère que cette inscription, même symbolique, est indispensable pour revaloriser le temps consacré au contrôle de l’exécution des lois de finances.

Concernant les considérations juridiques relevées par le Conseil d’État, le rapporteur rappelle que la disposition retenue n’est qu’une simple possibilité donnée à chaque assemblée et que son inscription dans le règlement de l’Assemblée nationale a été validée par le Conseil constitutionnel. Par ailleurs, il estime que l’habilitation inscrite à l’article 47 de la Constitution qui prévoit que le Parlement « vote les projets de loi de finances dans les conditions prévues par une loi organique » couvre la possibilité pour le législateur organique de prendre ce type de mesures.

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Article 9
Rapport sur la dette et consécration au rang organique du tiré-à-part

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit, en premier lieu, la transmission, avant le 15 juillet, d’un rapport qui présente notamment les plafonds de crédits par mission pour le projet de loi de finances de l’année à venir, traduction dans la norme organique de la pratique actuelle du tiré-à-part.

En second lieu, il prévoit la présentation, par le Gouvernement, avant le début de la session ordinaire, d’un rapport analysant la trajectoire, les conditions de financement et la soutenabilité de la dette de l’ensemble des administrations publiques et de leurs sous-secteurs, qui peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté cet article modifié par trois amendements rédactionnels ou de coordination présentés par le rapporteur et du président.

I.   L’État du droit

La LOLF ne contient actuellement aucun article traitant de la transmission d’informations au Parlement sur le sujet la dette « toutes administrations publiques » et ne prévoit pas formellement la transmission du tiré-à-part, document indispensable pour le Parlement dans le cadre de la préparation des futurs débats sur le projet de loi de finances de l’année suivante.

A.   l’absence d’un temps consacrÉ au sujet de la dette publique

L’information à disposition des parlementaires sur la dette publique, qui comprend l’ensemble des emprunts publics contractés par l’État, la Sécurité sociale et les collectivités territoriales, est multiple mais partielle et dispersée. Surtout, aucun moment n’est consacré, au sein du Parlement, à un débat sur la dette publique, sujet qui a pourtant pris une importance de premier plan ces dernières années :

– les débats de l’automne budgétaire ou du printemps sur la mission Engagements financiers de l’État ne portent que sur les caractéristiques de la dette de l’État. Les documents budgétaires annexés à cette mission contiennent des informations riches sur les caractéristiques de cette dette mais ne permettent pas d’avoir de vision « toutes administrations publiques » ;

 

– le programme de stabilité, transmis chaque année à la Commission européenne au mois d’avril, comporte, entre autres, des éléments sur la trajectoire et la soutenabilité de la dette publique, mais la tenue d’un débat sur ce programme n’est pas obligatoire. En 2021, une même audition des ministres en commission des finances a porté à la fois sur le programme de stabilité et sur la loi de règlement et aucun débat n’a été organisé en séance publique sur le programme de stabilité ;

– la Cour des Comptes publie chaque année, en prévision du débat d’orientation sur les finances publiques qui a lieu en juillet, un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, dont une partie est consacrée à la trajectoire de la dette publique. Cette publication fait l’objet d’une audition de la Cour par chaque assemblée.

Le Parlement dispose, au même titre que tous les citoyens, d’autres sources d’informations sur la dette : l’Agence France Trésor publie notamment un bulletin mensuel et un rapport d’activité annuel qui donnent des précisions sur les caractéristiques de la dette de l’État et l’INSEE publie régulièrement des chiffres sur le niveau de la dette publique en France.

B.   La transmission d’un tirÉ-À-part au mois de juillet

L’article 48 de la LOLF prévoit la remise au Parlement, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, d’un rapport du Gouvernement sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, en vue de l’examen et du vote du projet de loi de finances de l’année suivante.

Traditionnellement composé de deux tomes, le rapport présente :

– une analyse des évolutions économiques (tome I) ;

– une description des grandes orientations de politique économique et budgétaire au regard des engagements européens de la France (tome I) ;

– une évaluation à moyen terme des ressources de l’État ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions (tome I) ;

– la liste des missions, programmes et indicateurs de performances associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de l’année suivante (tome II).

Depuis 2013, ce rapport comporte, en outre, un tiré à part, qui présentait en 2020 la répartition des crédits budgétaires envisagés par mission, la norme de dépenses pilotables, et le montant des concours aux collectivités territoriales. Ce tiré-à-part, qui retrace les grands arbitrages en dépenses du budget de l’année suivante, est un document indispensable à l’information budgétaire du Parlement, quelques mois avant le dépôt officiel du projet de loi de finances au plus tard le premier mardi d’octobre.

La transmission de ce document relève de la pratique, son contenu a évolué dans le temps et est laissé à l’appréciation du Gouvernement. L’article 48 de la LOLF ne prévoyant en effet qu’une transmission de la ventilation des charges par « grandes fonctions », rien n’oblige le Gouvernement à détailler la ventilation des dépenses par mission. Ainsi, par exemple, la ventilation des « grandes fonctions » présentée en juillet 2019 ne recoupait pas la nomenclature des missions budgétaires ([89]).

Évolution du contenu des « tirÉs-À-part »

Année de publication

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Contenu du tiré à part

Plafonds de dépenses par mission (hors PIA), schémas d’emploi de l’État, PSRUE et concours aux collectivités territoriales

Plafonds de dépenses par ministère, schémas d’emploi de l’État, PSRUE et concours aux collectivités territoriales

Plafonds de dépenses par ministère, schémas d’emploi de l’État, PSRUE et concours aux collectivités territoriales

Plafonds de dépenses par ministère, schémas d’emploi de l’État, PSRUE et concours aux collectivités territoriales

Pas de tiré à part

Plafonds de dépenses par mission (hors PIA) comparés à ceux retenus dans la LPFP, norme de dépense pilotable, concours financiers aux collectivités territoriales

Plafonds de dépenses par ministère, norme de dépense pilotable, concours financiers aux collectivités territoriales

Plafonds de dépenses par mission (hors PIA, et plan de relance en cours de création), norme de dépense pilotable, concours financiers aux collectivités territoriales

Source : commission des finances

Aux termes de l’article 48 de la LOLF, le rapport précité peut donner lieu à un débat sur l’orientation des finances publiques (DOFP) à l’Assemblée nationale et au Sénat, qui a traditionnellement lieu au mois de juillet. En 2020, le rapport a été transmis le 30 juin au Parlement et a fait l’objet d’un débat le 23 juillet à l’Assemblée nationale en matinée et au Sénat l’après-midi. Le tiré à part a été publié ce même jour. En 2021, le débat d’orientation des finances publiques est prévu le 15 juillet à l’Assemblée et au Sénat, le rapport a été transmis au Parlement le 30 juin et le tiré-à-part sera transmis le 15 juillet.

Ce débat, autrefois appelé débat d’orientation budgétaire, est issu d’une pratique bien ancrée au Parlement depuis 1996 mais sans fondement juridique écrit jusqu’à l’entrée en vigueur de la LOLF.

Le DOFP est un rendez-vous budgétaire annuel durant lequel le Gouvernement présente, d’une part, les orientations de sa politique budgétaire « toutes APU » et, d’autre part, les orientations du projet de loi de finances. Par nature, cet exercice est donc hybride, mais les débats qui ont eu lieu ces dernières années ont davantage porté sur la stratégie d’ensemble des finances publiques que sur les missions du budget de l’État ou sur la liste des indicateurs de performance que le Gouvernement présente dans son rapport préparatoire.

Le DOFP apparaît donc aujourd’hui redondant avec les débats qui ont lieu, lorsque le Gouvernement le décide, lors de sa présentation du programme de stabilité au mois d’avril (voir commentaire de l’article 1er de la présente proposition de loi organique).

II.   Droit proposÉ

Le présent article propose de réécrire l’article 48 de la LOLF (I) pour tirer les conséquences de la fusion du DOFP avec les débats prévus sur le programme de stabilité, prévue par l’article 1er de la présente proposition de loi organique.

Ainsi, cet article prévoit deux choses :

– d’une part, la consécration au rang organique de la pratique de la transmission du « tiré-à-part » dont le champ est précisément défini ;

– d’autre part, la présentation, par le Gouvernement, avant le début de la session ordinaire, d’un rapport portant sur la dette, qui peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Le II du présent article prévoit l’entrée en vigueur de ces dispositions au 1er janvier 2022.

A.   la consÉcration du tirÉ-À-part dans la norme organique

Le I du nouvel article 48 de la LOLF matérialise dans la LOLF la transmission du tiré-à-part issu de la pratique actuelle. Ce nouveau rapport, présenté par le Gouvernement en vue de l’examen du projet de loi de finances de l’année à venir, indique :

 – les plafonds de crédits envisagés pour l’année à venir pour chaque mission du budget général ;

– l’état de la prévision de l’objectif de croissance de la dépense des administrations publiques exprimée en volume et de la prévision de dépense de l’ensemble des administrations publiques exprimée en milliards d’euros courants, chacune déclinée par sous-secteur d’administration publique, ces deux objectifs étant créés par l’article 1er de la présente proposition de loi organique ;

– et les concours aux collectivités territoriales.

La présentation de ce rapport doit être effectuée avant le 15 juillet.

Cette rédaction, qui ne reprend pas la possibilité d’un débat sur ce rapport, supprime de facto le débat d’orientation des finances publiques dans son format actuel. Conformément à la proposition n° 6 du rapport de la MILOLF, ce débat est fusionné avec celui portant sur le programme de stabilité, qui se tient au mois d’avril. Le lecteur est invité à se référer au commentaire de l’article 1er de la présente proposition de loi pour de plus amples informations sur la tenue de ce nouveau débat.

B.   La remise d’un rapport sur les caractÉristiques de la dette publique

Le II du nouvel article 48 de la LOLF complète l’information du Parlement en prévoyant la remise par le Gouvernement, avant le début de la session ordinaire, d’un rapport sur la dette publique au sens « toutes administrations publiques », ainsi que la possibilité de tenir un débat sur ce rapport à l’Assemblée nationale et au Sénat. Cette disposition est issue de la proposition n° 2 du rapport de la MILOLF.

Ce rapport devra analyser la trajectoire, les conditions de financement et la soutenabilité de la dette de l’ensemble des administrations publiques et de leurs sous-secteurs, soit l’État et les organismes divers d’administration centrale, les administrations publiques locales et les administrations de sécurité sociale.

Le débat prévu sur ce sujet doit permettre d’éclairer la représentation nationale sur le niveau de la dette publique, sur son évolution et sa soutenabilité et sur les risques qui pèsent en cas de remontée des taux d’intérêt.

Cette thématique est d’autant plus importante que le niveau de la dette publique, au sens du traité de Maastricht ([90]), a connu une augmentation brutale en 2020 (+ 270,6 milliards d’euros) en raison des circonstances exceptionnelles liées à la pandémie de covid-19, s’établissant à 2 650,1 milliards d’euros à la fin de l’année 2020, soit 115,1 % du PIB (contre 97,6 % du PIB fin 2019), après des années de hausse continue. Les taux d’intérêt sont restés extrêmement bas durement cette période, le taux moyen de l’OAT à 10 ans s’établissant à – 0,12 % en 2020, en raison d’une inflation quasi-nulle et de la politique monétaire active des banques centrales. Une légère remontée des taux d’intérêt est cependant relevée en 2021 ([91]).

Évolution du ratio dette publique/PIB (en %)

Source : INSEE.

Ce débat pourrait être également l’occasion d’analyser les déterminants de la dette publique, en distinguant la part de l’augmentation de la dette qui s’explique par des dépenses que l’on pourrait qualifier « d’investissement » et celle s’expliquant par d’autres types de dépenses.

Le rapport de la MILOLF proposait deux possibilités concernant la date retenue pour la transmission du rapport sur la dette et la tenue du débat afférent : au mois de juillet, à la place de l’actuel DOFP, ou pendant l’examen du PLF, à la fin de la discussion de la première partie. Il s’est avéré que ni l’une ni l’autre de ces propositions n’était tout à fait satisfaisante : la première aurait conduit à la tenue d’un débat sur des données identiques à celles présentées au mois d’avril pour le programme de stabilité car en cours d’actualisation pour la présentation du projet de loi de finances, et la seconde en aurait limité la visibilité, ce débat se retrouvant « noyé » au milieu des débats budgétaires.

Ainsi, la proposition de loi propose une autre solution : la transmission du rapport avant le début de la session ordinaire doit permettre de donner le temps aux parlementaires d’analyser les informations qu’il contient et la tenue du débat sur ce rapport ouvrirait la séquence dédiée au projet de loi de finances.

 

 

III.   Modifications adoptÉes par la commission spÉciale

La commission spéciale a adopté trois amendements du rapporteur et du président sur cet article, issus des recommandations du Conseil d’État dans son avis :

– un amendement de coordination avec l’article 1er de la présente proposition de loi, relatif à l’objectif d’évolution de la dépense ;

– un amendement rédactionnel qui précise que le rapport sur le tiré-à-part présente les montants prévus des concours aux collectivités territoriales ;

– un amendement qui prévoit que la liste des missions, programmes et indicateurs envisagés pour le prochain projet de loi de finances soit fournie avec le rapport sur le « tiré-à-part » prévu par le présent article, et non avec le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques remis au Parlement avant le 30 avril.

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Article 9 A (nouveau)
Inscription de la notion d’évaluation dans les intitulés de la LOLF

Introduit par la commission spéciale

Cet article modifie le titre V et le chapitre II du titre V de la LOLF pour y introduire une référence à la fonction d’évaluation du Parlement.

La commission spéciale a adopté deux amendements identiques de Mme Véronique Louwagie et M. Jean-Noël Barrot qui tendent à affirmer la fonction d’évaluation du Parlement en modifiant l’intitulé du titre V et l’intitulé du chapitre II de ce même titre V de la LOLF pour y introduire une référence à l’évaluation.

Ainsi, le titre V de la LOLF s’intitulerait « De l’information, de l’évaluation et du contrôle sur les finances publiques » et son chapitre II « Du contrôle et de l’évaluation ».

Ces modifications mettent en évidence l’importance du développement de la fonction d'évaluation des finances publiques du Parlement.

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Article 9 bis
Introduction d’un compteur des écarts

Introduit par la commission spéciale

Cet article modifie l’article 50 de la LOLF pour y introduire un compteur des écarts à la norme en dépense exprimée en milliards d’euros courants.

Le présent article, issu d’un amendement du rapporteur et du président Woerth, vise à introduire un compteur des écarts à la norme en dépense des administrations publiques, exprimée en milliards d’euros courants, fixée par la loi de programmation des finances publiques.

Ce nouvel outil, issu notamment des travaux de la commission sur l’avenir des finances publiques, doit permettre d’une part, de renforcer la place des orientations pluriannuelles votées en LPFP au sein des discussions budgétaires annuelles et, d’autre part, de rendre mieux compte de l’évolution de la dépense de l’ensemble des administrations publiques. Ce compteur serait présenté au sein du rapport économique, social et financier (RESF) prévu par l’article 50 de la LOLF et annexé au projet de loi de finances de l’année.

Dans le même temps, le Gouvernement serait amené à présenter les raisons de ces écarts au sein du RESF ainsi que, le cas échéant, les mesures destinées à les réduire. Cette disposition s’inspire du mécanisme de correction sur le solde structurel de l’État, qui peut être déclenché par le Haut Conseil des finances publiques à l’occasion de la loi de règlement en cas d’écart important à la trajectoire de LPFP. Dans ce cas, le Gouvernement doit présenter les mesures d’ajustements concernées au sein du prochain projet de loi de finances. L’outil proposé ici adopte une approche plus souple qui permet à la fois de s’adapter aux évolutions macroéconomiques et d’expliquer les déviations des finances publiques à la programmation.

Alors qu’il n’est pas possible, à cadre constitutionnel constant, de rendre les LPFP contraignantes pour les lois de finances annuelles, le compteur des écarts offre un outil de suivi lisible pour les parlementaires et le citoyen.

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Article 10
Les annexes au projet de loi de finances

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article modifie l’article 51 de la LOLF portant sur les documents joints au projet de loi de finances de l’année.

Il propose quatre modifications principales :

– la consécration au niveau organique du rappel, au sein de l’annexe relative aux recettes fiscales, des dispositions relatives aux impositions de toute nature adoptée depuis le dépôt du projet de loi de l’année précédente ;

– le renforcement de l’information disponible au sein de l’annexe relative aux dépenses fiscales ;

–  l’indication, au sein de chaque projet annuel de performances, d’une programmation triennale glissante des crédits ;

– l’extension du domaine réservé des lois de finances à la création des annexes générales destinées à l’information et au contrôle du Parlement.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a précisé et étendu les informations mises à disposition du Parlement au sein du tome II de l’annexe relative aux Voies et moyens.

Elle a également adopté un amendement rédactionnel destiné à mettre l’expression « impositions de toutes natures » au pluriel, conformément aux deux occurrences de la Constitution, et non au singulier, comme le fait la LOLF.

Enfin, elle est revenue sur un ajout du texte initial de la PPLO, concernant la distinction des dépenses de fonctionnement et d’investissement, par coordination avec les amendements adoptés à l’article 5. 

I.   L’État du droit

L’article 51 de la LOLF précise la liste des informations jointes au projet de loi de finances de l’année, qui prennent différentes formes et s’insèrent à plusieurs endroits du projet de loi de finances. Il détaille, en particulier, la liste des documents annexés en distinguant les annexes explicatives, ou « bleus budgétaires », et les annexes générales, qui prennent la couleur jaune ou orange.

Le 1° prévoit une annexe explicative comportant la liste et l’évaluation, par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires, des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’État. Ces informations sont recensées au sein du tome I du Voies et moyens.

 

La présente annexe permet d’ailleurs de remplir une des conditions à l’affectation d’une imposition de toute nature, fixée par l’article 2 de la LOLF : la loi peut affecter directement un impôt à un tiers uniquement si ce dernier figure dans la liste et l’évaluation jointe au projet de loi de finances de l’année ([92]).

Le 2° impose la présentation d’une analyse des changements de la présentation budgétaire faisant connaître leurs effets sur les recettes, les dépenses et le solde budgétaire de l’année concernée. Cette disposition ne se traduit pas par une annexe spécifique mais ses exigences trouvent leur place au sein de l’exposé des motifs des projets de loi de finances de l’année.

Selon le 3°, les annexes jointes au PLF comprennent également une présentation des recettes et des dépenses budgétaires en une section de fonctionnement et une section d’investissement. La loi organique s’inspire, sur ce point, du droit budgétaire des collectivités territoriales, qui doivent présenter leurs budgets de cette façon. Néanmoins, il s’agit d’un simple élément d’information car, à la différence des collectivités, l’État n’est ainsi pas de présenter une section de fonctionnement à l’équilibre.

Le 4° prévoit la transmission d’une annexe explicative analysant les prévisions de chaque recette budgétaire et présentant les dépenses fiscales. Les tomes I et II du Voies et moyens détaillent cette information, en plus de comporter l’analyse des prévisions de chaque prélèvement sur recette, conformément à l’article 6 de la LOLF. Ces documents présentent également la récapitulation des mesures fiscales adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances de l’année précédente, comme le prévoit l’article 12 de la loi de règlement pour 2007 ([93]). Cette dernière disposition est élevée au rang organique par la présente PPLO (voir infra). 

Le 4° bis a été introduit par la loi organique du 12 juillet 2005 afin d’encadrer la pratique de la mise en réserve des crédits. L’alinéa appelle ainsi à une présentation des mesures envisagées pour assurer en exécution le respect du plafond global des dépenses du budget général voté par le Parlement. Cette présentation doit contenir, en particulier, pour les programmes dotés de crédits limitatifs, le taux de mise en réserve prévu pour les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel et celui prévu pour les crédits ouverts sur les autres titres. L’ensemble de ces éléments ne font pas l’objet d’une annexe spécifique mais sont présentés au sein de l’exposé des motifs du projet de loi de finances.

Le 4° ter met en œuvre le mécanisme de correction issu du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) et prévu au sein de l’article 23 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gestion des finances publiques ([94]).

En effet, si le Haut Conseil des finances publiques constate un écart important à la trajectoire de solde structurel de la loi de programmation des finances publiques, le Gouvernement doit en tenir compte au plus tard dans le prochain projet de loi de finances (PLF) de l’année ou de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de l’année. À cette fin, un rapport annexé au prochain PLF ou PLFSS de l’année doit analyser les mesures de correction envisagées, en vue de retourner aux orientations de pluriannuelles de solde structurel définies par la LPFP. Le 4° ter prévoit donc une annexe reprenant le contenu de ce rapport, lorsque ce dernier s’impose.

Le 5° détermine la présentation des crédits du budget de l’État. Ainsi, des annexes explicatives développent, par programme ou par dotation, le montant des crédits présentés par titre et présentent, dans les mêmes conditions, une estimation des crédits susceptibles d’être ouverts par voie de fonds de concours. Ces annexes doivent être accompagnées du projet annuel de performances (PAP) de chaque programme, couramment appelé « bleu budgétaire », qui précise :

– la présentation des actions, des coûts associés, des objectifs poursuivis, des résultats obtenus et attendus pour les années à venir mesurés au moyen d’indicateurs précis dont le choix est justifié ;

– l’évaluation des dépenses fiscales rattachées à chaque programme ;

– la justification de l’évolution des crédits par rapport aux dépenses effectives de l’année antérieure, aux crédits ouverts par la loi de finances de l’année en cours et à ces mêmes crédits éventuellement majorés des crédits reportés de l’année précédente, en indiquant leurs perspectives d’évolution ultérieure ;

– l’échéancier des crédits de paiement associés aux autorisations d’engagement ;

– par catégorie, présentée par corps ou par métier, ou par type de contrat, la répartition prévisionnelle des emplois rémunérés par l’État et la justification des variations par rapport à la situation existante.

Par commodité, les annexes et les PAP à proprement parler constituent néanmoins un seul et même document.

Le 6°étend les exigences du 5° aux budgets annexes et comptes spéciaux, en prévoyant que les annexes concernées développent le montant du découvert ou des recettes et des crédits proposés par programme ou par dotation et sont accompagnées du projet annuel de performances en justifiant les prévisions de recettes et, le cas échéant, le découvert du budget annexe ou du compte spécial.

 

 

Le 7° indique que des annexes générales prévues par les lois et règlements destinés à l’information et au contrôle du Parlement sont également jointes au projet de lois de finances. Ces annexes générales correspondent aux « jaunes » et « oranges » budgétaires, ces derniers prenant la forme de documents de politique transversale (DPT). De nature explicative, ils sont dotés d’un régime juridique spécifique, le Conseil constitutionnel jugeant qu’un retard dans le dépôt de ces annexes n’entraîne pas d’atteinte à la sincérité et la clarté du débat parlementaire ([95]). Le rapport de la mission d’information relative à la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (MILOLF) a dressé la liste de ces annexes ([96]).

En dernier lieu, le 8° prévoit qu’une évaluation préalable est jointe au projet de loi de finances de l’année, qui concerne uniquement les dispositions relatives aux ressources de l’État affectant l’équilibre budgétaire, ainsi que les dispositions évoquées au 7° du II de l’article 34 de la LOLF, à savoir :

– les dispositions relatives à l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toute nature qui n’affectent pas l’équilibre budgétaire ;

– les dispositions affectant directement les dépenses budgétaires de l’année ;

– les modalités de répartition des concours de l’État aux collectivités territoriales ;

– l’approbation des conventions financières ;

– les dispositions relatives à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ;

– les dispositions relatives à la comptabilité de l’État et au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics.

Liste des annexes générales

Le Gouvernement présente sous forme d’annexes générales au projet de loi de finances de l’année prévues au 7° de l’article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances :

1° Un rapport présentant l’exécution du programme pluriannuel d’intervention des agences de l’eau et faisant état des recettes et des dépenses réalisées dans le cadre de ce programme ;

2° Un rapport dressant un bilan des relations financières entre l’État et la protection sociale au cours du dernier exercice clos, de l’exercice en cours et de l’exercice à venir ;

3° Un rapport rendant compte de l’effort financier de l’État dans le domaine de la culture et de la communication ;

4° Un rapport relatif aux transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales ;

5° Un rapport rendant compte de l’ensemble de l’effort financier de l’État en faveur des petites et moyennes entreprises ;

6° Un rapport sur l’impact environnemental du budget ;

7° Un état récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits ;

8° Un rapport relatif à la politique de formation professionnelle ;

9° La liste des commissions et instances consultatives ou délibératives placées directement auprès du Premier ministre ou d’un ministre ;

10° Un rapport évaluant l’efficacité des dépenses fiscales en faveur du développement et de l’amélioration de l’offre de logements ;

11° Un rapport relatif à l’État actionnaire ;

12° Un rapport sur les politiques publiques de recherche et de formations supérieures ;

13° Un rapport sur l’état de la fonction publique et les rémunérations dans la fonction publique ;

14° Un rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique ;

15° Un rapport sur les relations financières entre la France et l’Union européenne ;

16° Un rapport sur l’effort financier de l’État en faveur des associations ;

17° Un rapport relatif à la mise en œuvre et au suivi des investissements d’avenir ;

18° Un rapport intitulé « Évaluation des grands projets d’investissement public » ;

19° Un rapport précisant pour le dernier exercice budgétaire clos, l’exercice en cours et l’exercice à venir, l’utilisation par l’Agence de financement des infrastructures de transport de France et par les collectivités territoriales des recettes du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » ;

21° Un rapport récapitulant pour l’exercice budgétaire en cours et l’exercice à venir de la participation des employeurs à l’effort de construction, au financement du programme national de rénovation urbaine et de l’Agence nationale de l’habitat ;

22° Un rapport portant sur le réseau conventionnel de la France en matière d’échange de renseignements ;

23° Un rapport portant sur les personnels affectés dans les cabinets ministériels ;

24° Un rapport retraçant l’effort financier public dans le domaine du sport ;

25° Un rapport sur les opérateurs de l’État ;

26° Un rapport sur la gestion des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ;

28° Un rapport relatif à la mise en œuvre et au suivi de la réforme des réseaux de l’État à l’étranger ;

29° Un rapport sur la prévention et la promotion de la santé.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Les recommandations de la MILOLF

Cet article met en œuvre quatre recommandations de la MILOLF.

● Le rapport de la mission a recommandé de prévoir dans la LOLF qu’une annexe explicative jointe au projet de loi de finances de l’année récapitule de manière exhaustive les dispositions fiscales adoptées hors loi de finances. Cela permettrait de consolider au niveau organique une pratique prévue actuellement par une loi de finance ordinaire.

● La MILOLF a également formulé plusieurs propositions afin d’améliorer l’information du Parlement à propos des dépenses fiscales. Elle recommandait, en particulier :

– d’améliorer significativement l’information relative aux dépenses fiscales dans le tome II Évaluation des voies et moyens ;

– de borner l’ensemble des dépenses fiscales dans le temps et de prévoir dans la LOLF l’évaluation obligatoire de toute dépense fiscale qui fait l’objet d’une prorogation ;

– d’établir une revue des dépenses fiscales sur la base d’un programme pluriannuel prioritaire d’évaluation.

● Dans le but de renforcer la dimension pluriannuelle associée à la loi de finances annuelle, la mission d’information avait également recommandé de prévoir dans la LOLF une présentation indicative, en annexe au projet de loi de finances, de la programmation triennale glissante des dépenses de l’État par programme. La pratique de cette programmation, parfois utilisée dans les négociations budgétaires en amont de la présentation du PLF, serait ainsi consacrée au niveau organique.

● En dernier lieu, afin de rationaliser les annexes générales au projet de loi de finances de l’année, la mission proposait de recenser dans un article de loi de finances la liste des jaunes budgétaires (ce qui a été fait par l’article 179 de la loi de finances pour 2020 ([97])) et d’en confier le monopole de la création à la loi de finances. Cet encadrement doit permettre de limiter la prolifération de ce type d’annexes.

B.   Les modifications portÉes par la proposition de loi organique

En cohérence avec les propositions de la MILOLF, le présent article modifie l’article 51 de la LOLF afin de préciser le contenu des annexes au projet de loi de finances de l’année.

Après le 1° de l’article 51, un 1° bis prévoirait ainsi une annexe explicative récapitulant les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances de l’année précédente. Cette annexe doit préciser, pour chacune de ces dispositions, la loi qui l’a créée, son objet, la période pendant laquelle il est prévu de l’appliquer et son effet, pour l’année de son entrée en vigueur et les trois années suivantes, sur les recettes de l’État, des collectivités territoriales et des tiers, autres que les organismes de sécurité sociale, bénéficiaires d’une ou de plusieurs impositions de toutes natures affectées. Les dispositions proposées reprennent l’essentiel du dispositif de l’article 12 de la loi de règlement pour 2007 précitée.

Le 2° procède à une correction matérielle en remplaçant la conjonction de coordination « et » par la préposition « en ».

Le 3° du présent article prévoit de compléter le 4° de l’article 51 précité à propos de l’annexe présentant les dépenses fiscales. Celle-ci évaluerait le montant, le nombre de bénéficiaire, la pertinence du rattachement à un programme et l’opportunité de la reconduction des dépenses fiscales dont la création ou l’extension résulte de la loi de finances afférente à l’année précédente ou est prévue par le projet de loi de finances de l’année, ainsi que de celles dont, aux termes de la disposition législative qui les a institués, l’application cessera au cours de l’année.

Le 4° du présent article vise à traduire la proposition de la MILOLF relative à une présentation triennale glissante des dépenses de l’État par programme. Il modifie, à ce titre, le 5° de l’article 51 en prévoyant une présentation des crédits par titre pour l’année en cours, l’année considérée « et, à titre prévisionnel, les deux années suivantes ». Par coordination, un a) bis est inséré afin de prévoir que cette présentation est également relayée au sein des projets annuels de performances et le 6° de l’article 51 est complété pour que les PAP des budgets annexes et comptes spéciaux présentent également ce budget triennal glissant.

Le 4° insère, par ailleurs, un c) bis pour prévoir que les PAP comprennent une présentation des dépenses de fonctionnement et d’investissement, au sens des charges définies au 7° du I de l’article 34.

Enfin, le 6° du présent article réserve aux lois de finances la création des annexes générales destinées à l’information et au contrôle du Parlement. Cette disposition étend ainsi le domaine réservé des lois de finances.

III.   Les amendements adoptÉs par la commission spÉciale

La commission spéciale a adopté trois amendements, dont un seul suggéré par le Conseil d’État.

Avec l’adoption d’un amendement du rapporteur, la commission spéciale a souhaité renforcer l’information sur les dépenses fiscales présentée au sein du tome II du Voies et moyens annexé au projet de loi de finances de l’année. Ce rapport afficherait ainsi le nombre de bénéficiaire de chaque dépense fiscale. Il présenterait également une liste de dépenses fiscales qui doivent faire l’objet d’une évaluation dans l’année. L’écart entre le chiffrage prévisionnel et l’exécution de ces dépenses fiscales serait également expliqué. Enfin, le document présenterait le ratio entre le montant prévisionnel des dépenses fiscales et le montant des crédits budgétaires pour chaque mission du budget.

La commission spéciale a également adopté un amendement, suggéré par le Conseil d’État, revenant sur un ajout de la proposition de loi organique concernant la présentation des dépenses de chaque action selon qu’elles relèvent du fonctionnement ou de l’investissement, par coordination avec les amendements adoptés à l’article 5.

Enfin, la commission spéciale a accepté un amendement de M. Charles de Courson consacrant l’expression « impositions de toutes natures » au pluriel, conformément au texte de la Constitution de 1958, et non au singulier, comme c’est l’usage au sein de la loi organique relative aux lois de finances.

*

*     *

 

 


—  1  —

Article 11
Pouvoirs des commissions des finances

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article modifie l’article 49 de la LOLF, conformément à la proposition n° 43 de la MILOLF, pour recentrer les questionnaires budgétaires envoyés à l’été au Gouvernement sur les problématiques d’ordre budgétaire.

De plus, il apporte une précision à l’article 57 de la LOLF en indiquant que les domaines d’attribution des rapporteurs spéciaux sont définis par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances.

Enfin, il crée un nouveau pouvoir de sollicitation général des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API), confié aux commissions chargées des finances au Sénat et à l’Assemblée nationale, qui porte sur toute question relevant de leurs compétences.

Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale a adopté cinq amendements sur cet article dont trois amendements rédactionnels du rapporteur et deux amendements issus des recommandations du Conseil d’État, le premier complétant le champ des questionnaires budgétaires et le second apportant une précision sur le champ d’application du pouvoir de sollicitation des AAI et API la commission des finances.

I.   L’État du droit

Si les pouvoirs des commissions des finances prévus par l’article 57 de la LOLF sont particulièrement larges, leur utilisation actuelle conduit à envisager certains ajustements.

A.   Les pouvoirs des commissions des finances prÉvus par l’article 57 de la LOLF

Initialement réduits lors de la mise en place de la Ve République et cantonnés à des dispositions de rang législatif, les pouvoirs d’information et de contrôle du Parlement dans la procédure budgétaire et financière mais aussi plus largement dans la procédure législative ont été progressivement renforcés par la LOLF et par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.

L’article 57 de la LOLF détermine les missions et prérogatives de contrôle de la commission des finances à l’Assemblée nationale et au Sénat. Le champ de compétence des commissions des finances retenu est large : en plus du suivi et du contrôle de l’exécution des lois de finances, ces dernières peuvent évaluer « toute question relative aux finances publiques », ce qui comprend les questions relatives aux collectivités locales, aux entreprises publiques, aux établissements publics ou aux finances sociales.

Cet article précise que cette mission est confiée au président, au rapporteur général et aux rapporteurs spéciaux, dans leurs domaines d’attributions, de chaque commission des finances. Elle peut aussi être confiée, chaque année, pour un objet et une durée déterminée à certains membres de la commission.

En plus du pouvoir d’investigation sur pièces et sur place, le président, le rapporteur général et les rapporteurs spéciaux ont un droit à communication de « tous les renseignements d’ordre financier et administratif qu’ils demandent », et des rapports des services d’inspection de l’administration, « réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical ».

Le président, le rapporteur général et les rapporteurs spéciaux peuvent procéder à « toutes auditions qu’ils jugent utiles » pour mener à bien leurs travaux. Ils peuvent convoquer de façon contraignante les personnes qu’ils souhaitent auditionner, sous condition de l’accord conjoint du président et du rapporteur général de la commission des finances de l’assemblée concernée. Seules les personnes convoquées de façon contraignante sont déliées du secret professionnel, sous réserve des sujets à caractère secret mentionnés précédemment.

En pratique, tous les ministres sont auditionnés par la commission des finances dans le cadre des commissions élargies ou, depuis 2018, dans celui des commissions d’évaluations des politiques publiques qui se déroulent à la fin du mois de mai.

Il est important ici d’insister sur la distinction entre le rapporteur général et le président des commissions des finances qui ont une compétence générale en matière de finances publiques tandis que les rapporteurs spéciaux exercent ces pouvoirs dans leurs domaines de compétence respectifs.

B.   Des questionnaires budgÉtaires en partie obsolÈtes

L’envoi de questionnaires budgétaires aux ministères est une pratique qui remonte à la IIIe République. Cette pratique a été consacrée à l’article 49 de la LOLF qui énonce que les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat et les autres commissions concernées transmettent au Gouvernement des questionnaires avant le 10 juillet dont les réponses écrites sont transmises avant le 10 octobre. En pratique, ces questionnaires budgétaires font généralement l’objet d’une mutualisation entre la commission des finances et les différentes commissions pour avis.

Les réponses à ces questionnaires, rédigées par les services du ministère ou les cabinets, sont une source utile d’information pour la rédaction des rapports spéciaux. Les délais indiqués doivent donc permettre aux rapporteurs spéciaux d’exploiter l’information demandée avant le débat sur le budget concerné en séance.

Ces délais sont généralement respectés et une amélioration globale des délais de réponses a été observée. D’après les chiffres du rapport de la MILOLF, le taux moyen de réponses par questionnaire était de 87 % en 2018 contre 82 % en 2013.

Face à l’accroissement du volume et de la qualité des informations contenues dans les différents documents budgétaires annexés aux projets de loi de finances et de règlement, le rapport de la MILOLF a mis en évidence la nécessité d’alléger significativement le volume des questionnaires budgétaires, malgré l’effort, encore insuffisant, observé en 2019.

C.   Un pouvoir de sollicitation partiel des autoritÉs administratives indÉpendantes PAR LA COMMISSION DES FINANCES

La loi du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API) identifie les 25 autorités ayant ce statut. Ces AAI ou API sont des institutions créées par la loi, dotées d’une autonomie par rapport à l’administration et qui sont chargées d’un service de régulation.

Les représentants des AAI ou API sont souvent auditionnés par le président, le rapporteur général ou les rapporteurs spéciaux en vertu des dispositions mentionnées supra (article 57, al. 3) qui font obligation aux personnes dont l’audition est jugée nécessaire de s’y rendre. À ce titre, une autorité administrative indépendante ou une autorité publique indépendante peut donc être entendue et faire l’objet d’un contrôle relatif à ses crédits, au même titre qu’un responsable de programme

De plus, le législateur a prévu, pour certaines d’entre elles, la possibilité d’être saisie ou consultées par des parlementaires, selon des modalités différentes. Ces données sont récapitulées dans le tableau ci-dessous.


ModalitÉ de saisine ou de consultation des AAI et API

AAI / API

Consultation ou saisine possible

Disposition

Modalités

1. Agence française de lutte contre le dopage

non

  

 

 

2. Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires

non

  

 

 

3. Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep)

non

 

 

4. Autorité de la concurrence

oui

Article L. 461-5 du code de commerce

 

Article L. 462-1 du code du commerce

 Les commissions du Parlement compétentes en matière de concurrence peuvent entendre le président de l’Autorité de la concurrence et consulter celle-ci sur toute question entrant dans le champ de ses compétences.

L’Autorité de la concurrence peut être consultée par les commissions parlementaires sur les propositions de loi ainsi que sur toute question concernant la concurrence.

5. Autorité de régulation de la distribution de la presse (abrogé)

 

 

 

 

6.- Autorité de régulation des transports

non

 

 

 

7. Autorité nationale des jeux

non

 

 

 

8. Autorité des marchés financiers (AMF)

non

  

 

 

9 Autorité de sûreté nucléaire

oui

Article L. 592-29 du code de l’environnement

À la demande du Gouvernement, les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ou de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, l'Autorité de sûreté nucléaire formule des avis ou réalise des études sur les questions relevant de sa compétence

10. Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires

non

  

 

 

11. Commission d'accès aux documents administratifs

non

  

 

 

12. Commission du secret de la défense nationale

oui

Article L. 2312-1 du code de la défense

L’avis de la Commission du secret de la défense nationale [sur une demande déclassification] est rendu à la suite de la demande d’une juridiction française, du président d'une des commissions permanentes de l’Assemblée nationale ou du Sénat chargées des affaires de sécurité intérieure, de la défense ou des finances.

 

13. Contrôleur général des lieux de privation de liberté

oui

Article 6 de la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est saisi […] les membres du Parlement

14. Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

non

 

 

 

 

15. Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement

oui

Article L. 833-11 du code de la sécurité intérieure

 

La commission répond aux demandes d’avis […] du président de l'Assemblée nationale, du président du Sénat et de la délégation parlementaire au renseignement

 

16. Commission nationale du débat public (CNDP)

oui

Article L. 121-8 du code de l’environnement

 

I.- La Commission nationale du débat public est saisie de tous les projets d'aménagement ou d'équipement qui, par leur nature, leurs caractéristiques techniques ou leur coût prévisionnel, tel qu'il peut être évalué lors de la phase d'élaboration, répondent à des critères ou excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'État.
[...] Pour ces projets, la commission peut être saisie par :
2° Dix parlementaires 

17. Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL)

non

  

  

18. Commission de régulation de l'énergie

oui

Article R. 134-6 du code de l’énergie

R. 134-6

 Les commissions du Parlement compétentes en matière d’énergie, le Conseil supérieur de l’énergie et le Conseil économique, social et environnemental peuvent entendre les membres de la Commission de régulation de l’énergie et consulter celle-ci sur toute question entrant dans le champ de ses compétences.

19. Conseil supérieur de l'audiovisuel

oui

Article 18 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986

 Le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut être saisi [...]  par le président de l’Assemblée nationale, par le président du Sénat ou par les commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat de demandes d’avis ou d’études pour l’ensemble des activités relevant de sa compétence.

20. Défenseur des droits

oui

Loi organique n° 2011-333

Art. 32

Il [le Défenseur des droits] peut également être consulté par le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale ou le président du Sénat sur toute question relevant de son champ de compétence.

21. Haute Autorité de santé (HAS)

non

  

 

22. Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres)

non

  

  

23. Haut Conseil du commissariat aux comptes

non

  

  

24. Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI)

oui

Article L. 331-13 du code de la propriété intellectuelle

 Elle peut également être consultée par le Gouvernement ou par les commissions parlementaires sur toute question relative à ses domaines de compétence.

25. Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP)

oui

Article 20 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013

 Elle répond aux demandes d’avis (des parlementaires)

26. Médiateur national de l'énergie

non

  

  

Source : commission spéciale.

Sur les vingt-cinq AAI et API existantes, les commissions des finances en tant que telles ne peuvent en solliciter, selon des modalités différentes, que six. Trois autres AAI ou API peuvent cependant être directement sollicitées par les parlementaires.

Si ces possibilités de consultation des AAI ou API ne sont que rarement utilisées par les membres des commissions des finances, quelques exemples récents montrent un regain d’intérêt des parlementaires pour cet outil à leur disposition. À titre d’exemple, en tant que rapporteur spécial du volet Énergie de la mission Écologie, développement et mobilités durables, Julien Aubert a sollicité la Commission de régulation de l’énergie dans le cadre du Printemps de l’évaluation 2019 pour obtenir un chiffrage sur le coût du soutien de l’État à l’éolien sur lequel baser ses travaux d’évaluation.

Enfin, il est important de souligner que l’article 22 de la loi du 20 janvier 2017 susmentionnée prévoit l’obligation pour toute AAI ou API de rendre compte annuellement de son activité à la demande des commissions permanentes compétentes de l’Assemblée et du Sénat. Ce même article indique que l’avis d’une AAI ou API sur tout projet de loi est rendu public.

Ces dispositions n’épuisent pas toutes les possibilités d’échanges, souvent informels en l’absence de disposition législative explicite, entre les AAI ou les API et les rapporteurs spéciaux. Dans le cadre de leurs pouvoirs de contrôle permanent, les rapporteurs sont en effet amenés à envoyer des questionnaires, demander des notes ou une assistance sur le chiffrage de certains amendements à ces institutions qui accueillent généralement plutôt positivement ces demandes.

II.   Droit proposÉ

Le présent article vise à préciser et renforcer les pouvoirs des commissions des finances.

A.   Recentrer les questionnaires budgÉtaires sur des thÉmatiques d’ordre budgÉtaire

En premier lieu, le présent article modifie l’article 49 de la LOLF pour recentrer le périmètre des questionnaires budgétaires sur des demandes de renseignement d’ordre budgétaire (I).

Cette disposition est issue de la proposition n° 43 de la MILOLF.

Cette nouvelle délimitation du périmètre des questionnaires budgétaires a pour objectif d’en alléger significativement le volume et d’éviter que ces questionnaires ne fassent l’objet de questions très générales portant sur les caractéristiques d’une politique publique n’ayant aucun lien avec des thématiques financières.

B.   la redÉfinition des champs d’attribution des rapporteurs spÉciaux

En deuxième lieu, le présent article modifie l’article 57 de la LOLF pour inclure la précision selon laquelle les domaines d’attribution des rapporteurs spéciaux sont définis par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances ( du II).

Cette disposition donne la possibilité aux bureaux des commissions des finances de préciser le champ de compétence de chaque rapporteur spécial qui porte, d’une part sur les crédits budgétaires du périmètre de son rapport et, d’autre part, sur les dépenses fiscales rattachées aux programmes dont il a la charge.

C.   la crÉation d’un pouvoir gÉNÉral de sollicitation des AAI

En troisième lieu, le présent article crée un nouveau pouvoir de sollicitation des AAI et des API des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ( du II). Ce pouvoir s’exerce sur toute question relevant des compétences des commissions chargées des finances.

L’ouverture de ce nouveau pouvoir de sollicitation doit permettre à la commission des finances de demander, de façon formelle, l’appui technique d’une AAI ou d’une API, qui pourrait prendre la forme d’une note, d’une étude ou d’un chiffrage spécifique. Cette disposition a pour objectif de favoriser le développement des relations entre ces institutions et les parlementaires.

Cette disposition viendrait s’ajouter aux dispositions législatives spécifiques déjà existantes qui ne permettent pas actuellement à la commission des finances de consulter toutes les AAI ou API dans son champ de compétence, en dehors du cadre des auditions prévues à l’article 57 de la LOLF (voir supra).

Ainsi, cette disposition impliquerait que les commissions des finances aient des relations nouvelles, lorsque les sujets ont un lien avec des questions d’ordre financier, avec : l’Agence française de lutte contre le dopage, l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l’Arcep, l’Autorité de régulation des transports, l’Autorité nationale des jeux, l’AMF, le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, la Commission d'accès aux documents administratifs, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNIL, le défenseur des droits, la HAS, le Hcéres, le Haut Conseil du commissariat aux comptes, et le Médiateur national de l’énergie.

III.   Les Modifications adoptÉes par la commission

Outre un amendement rédactionnel du rapporteur, la commission spéciale a adopté deux amendements du rapporteur et du président, issus des suggestions du Conseil d’État dans son avis.

• Le premier amendement complète le champ des questionnaires budgétaires pour y inclure, en sus des demandes de renseignement d’ordre budgétaire, celles d’ordre financier ou ayant trait aux dépenses fiscales. La rédaction d’origine apparaissait en effet trop restrictive, excluant une partie non négligeable du champ de compétences des rapporteurs spéciaux, ce qui est contraire à l’esprit de la présente proposition de loi organique.

• Le deuxième amendement précise le champ d’application du pouvoir de sollicitation des AAI et des API des commissions des finances, afin d’éviter une confusion que la rédaction d’origine pourrait provoquer. Ainsi, la sollicitation s’exerce « pour l’obtention d’informations entrant dans le champ des finances publiques », et non sur toute question relevant du champ de compétence de l’autorité sollicitée, ce que la rédaction initiale du présent article pouvait sous-entendre.

*

*     *

 

 

Article 11 bis (nouveau)
Nouvelle annexe aux projets de loi de finances rectificative et de fin de gestion récapitulant les crédits consommés sur chaque programme et chaque action

Introduit par la commission spéciale

Cet article crée une nouvelle annexe aux projets de loi de finance rectificative et de fin de gestion récapitulant le montant des crédits consommés et disponibles à l’échelle de chaque programme et de chaque action du budget général, des comptes spéciaux et des budgets annexes.

La commission spéciale a adopté un amendement du président Éric Woerth et du rapporteur Laurent Saint-Martin qui enrichit l’information transmise au Parlement lors du dépôt des projets de loi de finances rectificative et de fin de gestion, en créant une nouvelle annexe récapitulant le montant des crédits consommés et disponibles à l’échelle de chaque programme et de chaque action du budget général, des comptes spéciaux et des budgets annexes.

Cette nouvelle annexe a deux objectifs :

– permettre au Parlement de mieux apprécier la pertinence des demandes d’ouverture et d’annulation de crédits formulées par le Gouvernement ;

– favoriser l’initiative parlementaire et améliorer le contrôle de la recevabilité des amendements de crédits au regard des dispositions de l’article 47 de la LOLF. En effet, les amendements de crédits ne sont recevables que si les transferts qu’ils opèrent entre deux programmes sont possibles, c’est-à-dire lorsque le programme « amputé » dispose des crédits suffisants pour réaliser ce transfert.

*

*     *

 

 


—  1  —

Titre III
Dispositions relatives À l’information du Parlement et au contrÔle sur les finances publiques

Article 12
Haut Conseil des finances publiques et mécanisme de correction

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article transfère dans la LOLF les dispositions de la LOPGFP relatives au Haut Conseil des finances publiques (HCFP) et au mécanisme de correction, à l’exception de celles dont le Conseil constitutionnel a jugé qu’elles n’avaient pas de caractère organique (cf. proposition de loi n° 4410) et d’une précision sur les crédits du HCFP.

Outre cette intégration à droit constant et ces deux réserves, il prévoit :

– que le HCFP se prononce sur la cohérence de l’article liminaire avec les orientations de dépense des administrations publiques en volume et en valeur, instituées par la présente proposition de loi organique, le réalisme des prévisions de dépenses et de recettes retenues par le Gouvernement dans les textes financiers et les conséquences financières de toute disposition nouvelle de ces derniers ;

– que le Gouvernement indique dès l’examen du projet de loi d’approbation des comptes et de résultats de gestion par le Parlement les mesures de rétablissement nécessaires dans l’hypothèse où le HCFP identifie des « écarts importants » au sens du droit européen ;

– que le HCFP rende quatre nouveaux avis, concernant le rapport sur les caractéristiques de la dette publique (cf. article 9), les dispositions des projets de loi de programmation sectoriels ayant une incidence sur les finances publiques, le respect, par le projet de loi d’approbation des comptes et de résultat de gestion, des objectifs de dépense des administrations publiques fixé par la LPFP et, au moins une fois tous les quatre ans, les écarts entre les prévisions macroéconomiques, de recettes et de dépenses des lois de finances et de financement de la sécurité sociale et leur réalisation.

Modifications adoptées par la commission

Outre qu’elle a procédé à dix ajustements rédactionnels, la commission a précisé l’intention des auteurs sur le fait que le HCFP rende à l’automne deux avis distincts sur le PLF et le PLFSS. Elle a également procédé à deux coordinations avec la proposition de loi organique relative aux LFSS de M. Thomas Mesnier, laquelle crée un article liminaire dans les autres LFSS que les lois de financement rectificatives et institue une loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale.

Elle a en outre étendu les saisines du HCFP sur les nouveaux projets de loi de finances de fin de gestion, porté à quinze jours le délai qu’il a pour se prononcer sur les projets de loi de programmation des finances publiques et les projets de loi de programmation sectoriels et, enfin, rétabli une disposition assurant l’autonomie de gestion du président du HCFP sur les crédits nécessaires à ses missions.

I.   L’État du droit

● Désireux de créer les conditions d’une nouvelle étape d’intégration budgétaire après la crise qui a frappé la zone euro, en 2010, à raison des craintes sur la soutenabilité de la dette souveraine de certains pays, et singulièrement sur celle de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal, de l’Espagne et de Chypre, vingt-cinq des vingt-sept États alors membres de l’Union européenne, à la double exception du Royaume-Uni et de la Hongrie, réunis à Bruxelles le 2 mars 2012, ont signé le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’union économique et monétaire (TSCG), puis l’ont ratifié, le cas échéant avec des mesures de transposition, selon leurs procédures internes.

Cet accord international prévoit que des institutions budgétaires indépendantes vérifient, au niveau national, le respect des règles communes sur le solde public structurel et qu’un mécanisme de correction soit déclenché en cas d’écart important de ce dernier par rapport à son objectif de moyen terme ou à sa trajectoire d’ajustement.

● En France, la transposition de l’accord a pris la forme de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 (LOPGFP), précitée. Saisi le 13 juillet 2012 par le Président de la République de la question de savoir si l’autorisation de ratifier le TSCG devait être précédée d’une révision de la Constitution, le Conseil constitutionnel a en effet répondu par la négative et jugé qu’une loi organique était susceptible de permettre le respect des stipulations du traité.

Sa décision n° 2012-653 DC du 9 août 2012 sur le TSCG développe le raisonnement suivant :

– « dès lors que la France aura ratifié le traité et que celui-ci sera entré en vigueur, [elle] sera, en application de la règle pacta sunt servanda, liée par ses stipulations […] ; en application de l’article 55 de la Constitution […], le législateur sera tenu d’en respecter les stipulations lors de l’adoption des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale […] » ;

– « […] les États contractants s’engagent à ce que les règles [du traité] prennent effet dans leur droit national, soit “au moyen de dispositions contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles”, soit au moyen de dispositions “dont le plein respect et la stricte observance tout au long des processus budgétaires nationaux sont garantis de quelque autre façon” » ;

– sur le fondement des habilitations données par le vingt-deuxième alinéa de l’article 34 de la Constitution pour les lois de programmation des finances publiques et sur celui de ce même alinéa ainsi que des dix-huitième et dix-neuvième alinéa du même article pour les lois de finances et de financement de la sécurité sociale, « le législateur organique peut, pour que les règles énoncées au paragraphe 1 de l’article 3 du traité prennent effet dans les conditions prévues par cette seconde branche de l’alternative, adopter des dispositions encadrant ces lois relatives, notamment, à l’objectif de moyen terme ainsi qu’à la trajectoire d’ajustement de la situation budgétaire des administrations publiques, au mécanisme de correction de cette dernière et aux institutions indépendantes intervenant tout au long du processus budgétaire » (considérant 24).

En complément des dispositions relatives à la programmation des finances publiques – chapitre Ier regroupant les articles 1er à 9 – et au dialogue économique et budgétaire avec les institutions européennes – chapitre II composé du seul article 10 –, la LOPGFP, comporte une série de dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques (HCFP) – chapitre III regroupant les articles 11 à 22 – et au mécanisme de correction prévu par le e) du paragraphe 1 de l’article 3 du TSCG – chapitre IV composé du seul article 23.

A.   Le Haut Conseil des finances publiques

Le HCFP est l’institution budgétaire mise en place en France pour respecter les demandes du TSCG. Ses homologues sont par exemple le Conseil de stabilité en Allemagne, le Conseil supérieur des finances en Belgique, l’Autorité indépendante pour la responsabilité budgétaire en Espagne, l’Office budgétaire du Parlement en Italie et le Conseil national des finances publiques au Luxembourg.

● L’article 3 du TSCG prévoit simplement que « des institutions [sont] chargées, au niveau national, de vérifier le respect » des éléments suivants :

– la situation budgétaire équilibrée ou excédentaire des administrations publiques (APU), conforme dès lors que leur solde structurel annuel, corrigé des variations conjoncturelles, ainsi que des mesures ponctuelles et temporaires, correspond à l’objectif à moyen terme (OMT) spécifique de leur pays, avec une limite inférieure de déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut (PIB) aux prix de marché ou dès lors qu’est suivi le calendrier de la trajectoire d’ajustement vers cet objectif, proposé et évalué par la Commission européenne ;

– la possibilité de relever l’OMT pour atteindre un déficit structurel d’au maximum 1,0 % du PIB lorsque le rapport entre la dette publique et celui-ci est « sensiblement inférieur à 60 % et que les risques pour la soutenabilité à long terme des finances publiques sont faibles » ;

– la réunion de circonstances exceptionnelles et le déclenchement d’un mécanisme de correction (cf. infra).

● Aux termes de l’article 11 de la LOPGFP, le HCFP est présidé par le Premier président de la Cour des comptes et composé de dix autres membres, dont le directeur général de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), quatre magistrats de cette même Cour, cinq personnalités qualifiées désignées par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, ainsi que de leurs commissions des finances, et celui du Conseil économique, social et environnemental (CESE). La parité entre les femmes et les hommes est assurée.

Le mandat des membres du HCFP dure cinq ans et est renouvelable une fois pour les seuls magistrats. Hors vacances précoces (décès, démission, etc.), le collège est renouvelé par moitié tous les trente mois.

Les articles 18 et 20 à 22 de la LOPGFP sont relatifs à l’organisation du HCFP, lequel peut procéder à l’audition des administrations compétentes ou faire appel à des compétences extérieures à celles-ci, recevoir du Gouvernement les réponses aux demandes d’information qu’il lui adresse. Le président du HCFP convoque ses réunions, lesquelles revêtent un caractère secret, et « gère les crédits nécessaires à l’accomplissement de ses missions, […] regroupés au sein d’un programme spécifique de la mission Conseil et contrôle de l’État ».

Variation des moyens du programme 340 Haut Conseil des finances publiques
de la mission Conseil et contrÔle de l’État depuis 2013

(crédits de paiement en milliers d’euros)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021 (p)

LFI

172,4 *

818,7

816,5

522,8

454,1

467,5

428,3

479,8

1 103,1

LR

354,7

332,4

219,8

365,3

362,2

332,0

349,1

383,1

s. o.

Source : lois de finances initiales (LFI) pour les exercices 2014 à 2021 ; lois de règlement pour les exercices 2013 à 2020.
(*) Le programme 340 a été créé par la loi de finances rectificative pour 2013.

Le PLF pour 2021 envisageait une dotation de 1,5 million d’euros, mais l’examen parlementaire du texte avait conduit à réduire cette hausse.

Si une telle enveloppe place le HCFP parmi les institutions budgétaires indépendantes les moins dotées parmi les États comparables, au niveau du Conseil budgétaire consultatif irlandais, quand l’Office budgétaire du Congrès américain dispose de plus de 10 millions de dollars et emploie une centaine de personnes, il faut noter que les prérogatives de ces structures varient nettement.

Par ailleurs, la France dispose de comités ad hoc pour les trajectoires financières de certaines politiques publiques, à savoir le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS), le Conseil d’orientation des retraites (COR), le Haut Conseil sur l’avenir de l’assurance maladie (HCAM), la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) et le comité d’alerte sur l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (CADAM).

● La mission du HCFP est d’émettre des avis motivés et publics, énumérés aux articles 12 à 17 de la LOPGFP, sur les données sous-jacentes à certains textes dont il peut être « saisi » dans un délai défini ou « informé sans délai », à savoir :

– un avis sur les « prévisions macroéconomiques et l’estimation du produit intérieur brut potentiel sur lesquelles repose le projet de loi de programmation des finances publiques » (LPFP), dont il est saisi, ainsi que sur la « cohérence de la programmation envisagée au regard de l’objectif à moyen terme retenu et des engagements européens de la France », joint au projet lors de sa transmission au Conseil d’État puis lors de son dépôt au Parlement et rendu public par le Haut Conseil à cette dernière occasion ;

– un avis sur les « prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent le projet de loi de finances (PLF) de l’année et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de l’année », dont il est saisi, ainsi que sur la « cohérence de l’article liminaire du PLF au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la LPFP » ;

– un avis sur les « prévisions macroéconomiques » retenues par le Gouvernement « lorsque [ce dernier] prévoit de déposer à l’Assemblée nationale un projet de loi de finances rectificative (PLFR) ou un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) », ainsi que sur la « cohérence du PLFR ou du PLFRSS, notamment de son article liminaire, au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la LPFP » ;

– un avis sur la « révisi[on] des prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposait initialement » le projet de LPFP, le PLF ou le PLFR « au cours de [leur] examen par le Parlement » ;

– un avis sur les « prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de programme de stabilité » (cf. supra pour le commentaire de l’article 1er de la présente proposition de loi organique).

Deux précisions doivent être apportées sur le périmètre de ces avis.

En premier lieu, il convient de relever que si, en droit, le HCFP est « informé » plutôt que « saisi » des prévisions macroéconomiques sous-jacentes au PLFR ou au PLFRSS, ainsi que de la révision en cours d’examen de celles sur lesquelles reposent le projet de LPFP, le PLF ou le PLFR, le document qu’il publie alors utilise dans les faits les mots de saisine et d’avis.

En second, lieu, le HCFP « ne peut délibérer ni publier d’avis dans d'autres cas ou sur d’autres sujets que ceux prévus » par la LOPGFP, conformément à l’avant-dernier alinéa de son article 21.

● Cette dernière limitation constitue une importante différence avec la possibilité pour certaines institutions budgétaires indépendantes étrangères de s’autosaisir de toute question ou, à tout le moins, de publier de leur propre initiative et au moment de leur choix un rapport ou avis sur une liste de sujets déterminée, comme en Belgique ([98]), en Espagne ([99]) ou au Luxembourg ([100]).

 

Tant la commission chargée par le Premier ministre d’éclairer la réflexion sur les chantiers de la redéfinition d’une trajectoire de finances publiques et de la transformation de leur gouvernance, présidée par M. Jean Arthuis ([101]), que l’Organisation pour la coopération et le développement économiques ([102]) ont ainsi pu relever que le HCFP n’exerce que deux des six missions généralement assurées par les institutions budgétaires indépendantes.

En effet, il contrôle les prévisions budgétaires au regard des hypothèses macroéconomiques qui lui sont soumises, sans établir ces dernières ou au moins apprécier leur réalisme, et veille à ce que soient respectées règles budgétaires nationales ou européennes et signale que tel n’est pas le cas.

Toutefois, il n’analyse pas la soutenabilité budgétaire de long terme, ne soutient pas directement le Parlement pour l’analyse des textes financiers, même si ses avis sont d’une grande richesse pour celui-ci, n’évalue pas le coût des politiques publiques, lequel rôle est certes joué par la Cour des comptes dont il partage la présidence et le soutien administratif.

Enfin, il ne porte pas d’appréciation sur les programmes des candidats aux élections, mais, pour originale qu’elle soit, cette compétence ne semble exister qu’en Australie et au Pays-Bas et n’est pas, aux yeux du rapporteur, sans poser de questions politiques.

B.   Le mÉcanisme de correction

● Aux termes du e) du 1. de l’article 3 du TSCG, « un mécanisme de correction est déclenché automatiquement si des écarts importants sont constatés par rapport à l’objectif à moyen terme (OMT) ou à la trajectoire d’ajustement propre à permettre sa réalisation », entraînant l’obligation pour l’État concerné de « mettre en œuvre des mesures visant à corriger ces écarts sur une période déterminée ».

Le c) du 1. et le b) du 3. du même article autorisent un écart temporaire par rapport à cet OMT ou cette trajectoire dans le seul cas où interviennent des circonstances exceptionnelles, définies comme « des faits inhabituels indépendants de la volonté de [l’État] concerné et ayant des effets sensibles sur la situation financière des APU ou des périodes de grave récession économique telles que visées dans le pacte de stabilité et de croissance, pour autant que l’écart temporaire […] ne mette pas en péril sa soutenabilité budgétaire à moyen terme ».

 

 

● L’article 23 de la LOPGFP transpose ces deux points du traité.

Tout d’abord, il prévoit un chaînage entre les avis du HCFP sur le projet de loi de règlement et le PLF ou PLFSS suivant, entre lesquels s’intercale le débat d’orientation des finances publiques (DOFP).

Le HCFP effectue une « comparaison des résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation », au regard de la trajectoire de PIB potentiel retenue lors de l’élaboration de cette dernière.

Son avis peut constater que l’écart entre les solde prévisionnel et constaté est « important » : ce qualificatif s’applique lorsque le solde structurel s’éloigne de l’OMT d’au moins 0,5 % du PIB une année donnée ou d’au moins 0,25 % par an en moyenne pendant deux années consécutives.

Dans ce cas, le Gouvernement doit tout à la fois :

– « expose[r] les raisons de ces écarts lors de l’examen du projet de loi de règlement par chaque assemblée » ;

– « présente[r] les mesures de correction » dans le rapport prévu par l’actuel article 48 de la LOLF, lequel sert d’accroche pour le DOFP ;

– « [tenir] compte de l’écart important au plus tard dans le prochain PLF ou PLFSS » et expliquer les mesures envisagées, dans un rapport ad hoc annexé à ce(s) texte(s), lequel justifie le cas échéant « les différences apparaissant, dans l’ampleur et le calendrier de ces mesures de correction par rapport aux indications figurant dans la LPFP », si cette dernière avait elle-même été adoptée à un moment où soit un écart identiquement défini était constaté ou des circonstances exceptionnelles étaient réunies ;

– saisir de ces mesures le HCFP, dont l’avis sur le PLF et le PLFSS comportera alors une appréciation.

Constatant un écart de 1,5 point, le HCFP a déclenché ce mécanisme de correction en mai 2014 ([103]), mais, plutôt que de proposer des correctifs permettant de revenir à la trajectoire initiale, le Gouvernement avait fait adopter une nouvelle LPFP avec des hypothèses plus prudentes ([104]).

Compte tenu du traitement particulier de l’effet de la crise économique liée à l’épidémie de covid-19, ainsi que des mesures prises par le législateur ou le pouvoir réglementaire pour y faire face, sur les composantes conjoncturelle et structurelle du solde public, le mécanisme n’a pas été déclenché par le HCFP à l’appui de son avis sur le projet de loi de règlement pour 2020. Le HCFP avait d’ailleurs pu constater dans son avis sur le premier PLFR pour ce même exercice que les circonstances exceptionnelles prévues par le TSCG étaient réunies.

La Commission européenne a relevé que les dispositions organiques françaises « ménagent une certaine marge de manœuvre pour le fonctionnement du mécanisme de correction : premièrement, [le Gouvernement a] la possibilité de s’écarter des mesures de correction énoncées dans la loi de programmation à condition de fournir des justifications ; deuxièmement, la loi de programmation elle-même peut être révisée, et la définition de la trajectoire du solde structurel qui sert de référence pour la correction pourrait alors devenir incertaine » ([105]).

Par ailleurs, l’article 23 de la loi organique de 2012 prévoit que la réunion de ces circonstances exceptionnelles ou leur cessation peut être :

– constatée, sur demande du Gouvernement, par un avis du HCFP ;

– déclarée par l’article liminaire du premier PLF ou PLFR suivant la publication de cet avis.

La procédure n’a été appliquée qu’une fois en France : au printemps 2020, le HCFP a estimé que « la crise sanitaire et ses répercussions économiques et financières constituent des faits inhabituels indépendants de la volonté du Gouvernement et relèvent donc des “circonstances exceptionnelles” telles que mentionnées à l’article 3 du TSCG » ([106]), ce dont l’article liminaire des deuxième ([107]) et troisième ([108]) PLFR pour 2020 ont tenu compte et ce que confirme l’article liminaire du projet de loi de règlement pour 2020, non encore adopté au moment où le présent rapport est déposé.

En outre, sur proposition de la Commission européenne, le Conseil de l’Union européenne avait déclenché cette clause dérogatoire au bénéfice de l’ensemble des États membres, le 23 mars 2020, en application du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance ([109]).

 

 

II.   Le dispositif proposÉ

De manière cohérente avec l’intégration des chapitres Ier et II de la LOPGFP au sein de la LOLF (création, par l’article 1er de la présente proposition de loi organique, d’un titre préliminaire composé de nouveaux articles 1er A à 1er J), le I du présent article procède à celle de ses chapitres III et IV, dans un nouveau titre VI, qui comprenant les nouveaux articles 61 à 62. Le III abroge ces chapitres.

Par souci de lisibilité, le commentaire du présent article retrace une grande partie des informations sous forme de tableau comparatif.

A.   Les dispositions issues de la LOPGFP

Pour l’essentiel, le transfert des deux derniers chapitres de la LOPGFP est proposé à droit constant (sept anciens articles), mais certaines dispositions seraient modifiées (trois anciens articles), supprimées (un ancien article) ou réintroduites au rang ordinaire (un ancien article et trois alinéas de deux anciens articles) – au moyen, dans ce dernier cas, de la proposition de loi n° 4113 rectifiée, précitée.

1.   Les dispositions transférées sans changement

Sont concernés les articles 12, 13, 16, 17, 18, 19 et 23 de la LOPGFP, relatifs à la composition et aux actuels avis du HCFP.

 

Correspondance entre les articles de la LOPGFP et ceux du titre VI
de la LOLF introduit par la prÉsente PPL organique

Objet

LOPGFP

Art. 12 de la PPLO

LOLF modifiée

Composition du HCFP

Art. 11
à l’exception de vingt mots au 4ème alinéa

et du 7ème alinéa

Alinéas 4 à 17

I
de l’art. 61

Avis du HCFP sur l’estimation de PIB potentiel sur laquelle repose le projet de loi de programmation des finances publiques et sur la prévision de croissance

Art. 12

Alinéas 18 et 19

II
de l’art. 61

Saisine du HCFP par le Gouvernement sur les prévisions macroéconomiques et l’estimation du PIB potentiel sur lesquelles repose le projet de loi de programmation des finances publiques et avis du HCFP

Art. 13

Alinéas 20 et 21

III
de l’art. 61

Saisine du HCFP par le Gouvernement sur la révision, au cours de leur examen par le Parlement, des prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposaient initialement les projets de loi de programmation des finances publiques, de finances ou de financement de la sécurité sociale et avis du HCFP

Art. 16

Alinéa 36

VII
de l’art. 61

Saisine du HCFP par le Gouvernement sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent le projet de programme de stabilité et avis du HCFP

Art. 17

Alinéas 39 à 41

IX
de l’art. 61

Faculté pour le HCFP de procéder à des auditions de représentants de l’administration et d’organismes ou personnalités extérieurs à l’administration et réponses du Gouvernement aux demandes du HCFP

Art. 18

Alinéas 42 à 44

X
de l’article 61

Information du HCFP et du Parlement par le Gouvernement, à chaque examen d’un projet de loi de finances de l’année, des engagements financiers de l’État significatifs nouvellement autorisés n’ayant pas d’implication immédiate sur le solde structurel

Art. 19

Alinéa 45

XI
de l’art. 61

Convocation des réunions
et délibérations du HCFP

Alinéas 1 à 3
de l’art. 21

Alinéas 46 à 48

XII
de l’art. 61

Avis du HCFP sur le projet de loi de règlement au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques

Alinéas 1 et 2
du I
de l’article 23

Alinéas 49 à 51

I
de l’art. 62

Écart considéré comme important entre les résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques

II
de l’art. 23

Alinéa 52

II
de l’art. 62

Prise en compte par le Gouvernement de l’écart l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques et rapport annexé aux prochains projet de loi de finances et de financement de la sécurité sociale analysant les mesures de correction envisagées

III
de l’art. 23

Alinéas 53 et 54

III
de l’art. 62

Constat de la réunion ou non des conditions pour la définition des circonstances exceptionnelles mentionnées à l’art. 3 du TSCG

IV
de l’art. 23

Alinéas 56 à 58

IV
de l’art. 63

Trois substitutions légistiques ne sont pas tenues pour des modifications :

– celle des mots « d’approbation des comptes et de résultat de gestion » aux mots « de règlement » à l’alinéa 49 (coordination avec le I de l’article 2 de la présente proposition de loi organique) ;

– celle de la référence « 6° de l’article 1er B » ([110]) à la référence « 5° de l’article 2 » à l’alinéa 54 (coordination avec l’alinéa 15 de l’article 1er de la présente proposition de loi organique) ;

– celle de la référence « au IV de l’article 61 » aux mots « à l’article 14 » à l’alinéa 55 (coordination avec les alinéas 22 à 30 du présent article 12).

2.   Les dispositions de la LOPGFP modifiées

Sont concernés les articles 14, 15 et 23 de la LOPGFP.

Correspondance entre les articles de la LOPGFP et ceux du titre VI
de la LOLF introduit par la prÉsente PPL organique

Objet

LOPGFP

Art. 12 de la PPLO

LOLF modifiée

Avis du HCFP sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent les projets de loi de finances de l’année et de financement de la sécurité sociale de l’année

Art. 14

Alinéas 22 à 30

IV
de l’art. 61

Avis du HCFP sur les prévisions macroéconomiques retenues pour l’élaboration des projets de loi de finances rectificative et de financement rectificative de la sécurité sociale de l’année

Art. 15

Alinéas 32 à 35

VI
de l’art. 61

Justification par le Gouvernement des écarts importants par rapport à l’objectif de moyen terme identifiés par l’avis du HCFP sur le projet de loi de règlement

Dernier alinéa
du I

de l’art. 23

Alinéa 51

I de l’article 62

Les auteurs de la proposition de loi organique ont noté que la Cour des comptes a récemment préconisé de « conforter la surveillance de la sincérité des lois financières et de la trajectoire pluriannuelle en élargissant le mandat du Haut Conseil des finances publiques à l’appréciation du réalisme des prévisions de recettes et de dépenses, du chiffrage de certaines mesures nouvelles et à l’identification des risques d’écart à la trajectoire », même si la juridiction admet que « cette adaptation formaliserait une pratique déjà en partie suivie, le Haut Conseil soulignant les risques affectant la prévision de finances publiques » ([111]).

● Les alinéas 22 à 30 reprennent, au IV du nouvel article 61 de la LOLF, l’ancien article 14 de la LOPGFP, relatif à l’avis du HCFP sur les PLF et PLFSS.

En plus de l’appréciation qu’elle formule actuellement sur la « cohérence de l’article liminaire au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la LPFP », l’institution budgétaire se prononcera sur :

– la cohérence de cet article avec les orientations de dépense des administrations publiques en volume et en valeur, instituées par la présente proposition de loi organique, étant noté que les éléments transmis par le Gouvernement doivent permettre de justifier les éventuelles déviations ;

– le réalisme des prévisions de dépenses et de recettes retenues par le Gouvernement dans ces deux projets ;

– à la demande du Gouvernement, les conséquences financières de toute disposition de ces deux textes, de manière à éclairer la représentation nationale d’une analyse qui compléterait, sur le seul volet budgétaire et comptable, celle des annexes tenant lieu d’étude d’impact des articles (évaluations préalables pour le PLF et annexe IX pour le PLFSS), sans s’y substituer, sur le modèle des compétences par exemple dévolues au Conseil budgétaire consultatif autrichien ou au Conseil économique danois.

Concrètement, deux avis seraient rendus au lieu de l’actuel avis commun, au moment du dépôt respectif du PLF et du PLFSS à l’Assemblée nationale.

● Les alinéas 32 à 35 opèrent, au VI du nouvel article 61 de la LOLF qui correspond à l’actuel article 15 de la LOPGFP, le même triple élargissement en ce qui concerne l’avis du HCFP sur les projets de loi de finances rectificative et de lois de financement rectificative de la sécurité sociale.

● L’alinéa 51 prévoit, au I du nouvel article 62 de la LOLF qui se substitue à l’actuel article 23 de la LOPGFP, que le Gouvernement indique dès l’examen du projet de loi d’approbation des comptes et de résultats de gestion par le Parlement les mesures de rétablissement nécessaires dans l’hypothèse où le HCFP identifie des « écarts importants » au sens du TSCG.

La nouveauté tient à ce que, en l’état du droit, l’exécutif expose simplement les raisons de ces écarts lors de la discussion du projet de loi de règlement et présente les mesures de correction qu’il envisage dans le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques qui, au dernier trimestre de la session ordinaire, donne lieu au DOFP. Or l’article 9 de la proposition de loi organique supprime cette séquence pour la rapprocher de celle sur le projet de programme de stabilité (PSTAB).

 

3.   La disposition de la LOPGFP supprimée

Est concerné l’article 22 de la LOPGFP.

Correspondance entre les articles de la LOPGFP et ceux du titre VI
de la LOLF introduit par la prÉsente PPL organique

Objet

LOPGFP

Art. 12 de la PPLO

LOLF modifiée

Crédits du HCFP

Art. 22

s. o.

Cet article dispose que « le président du Haut Conseil des finances publiques gère les crédits nécessaires à l’accomplissement de ses missions. Ces crédits sont regroupés au sein d’un programme spécifique de la mission Conseil et contrôle de l’État ».

Les rapporteurs spéciaux de ladite mission expriment de vifs doutes sur cette disposition : à l’Assemblée nationale, il a pu être noté que « le constat [de cette enveloppe modeste et sous-consommée] ne peut que raviver les interrogations quant à la pertinence de son maintien et ne peut qu’encourager son rattachement au programme 164 Cour des comptes et autres juridictions financières » ([112]), puis que la loi organique pourrait être modifiée « de sorte que le programme 340 pourrait devenir une simple action du programme 164, [ce à quoi] adhèrent la direction du budget et la Cour des comptes » ([113]), tandis que la commission des finances du Sénat relevait que « le programme 340 a longtemps été le programme le moins doté du budget de l’État et demeure l’un des moins dotés ; il  n’est en  outre constitué que d’une seule action ; […] la  séparation des programmes 164 et 340 ne semble pas toujours pertinente » ([114]).

ExÉcution du programme 340 Haut Conseil des finances publiques
de la mission Conseil et contrÔle de l’État depuis 2013

(en pourcentage sur les crédits de paiement)

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

205,7

40,6

26,9

69,9

79,8

71,0

81,5

79,8

Source : lois de règlement pour les exercices 2013 à 2020.

Les auteurs de la présente proposition de loi organique notent que la suppression de cet ancien article ne contraint pas la maquette budgétaire : les moyens du HCFP pourront continuer à faire l’objet d’un programme spécifique, mais l’interdiction qu’ils soient fondus avec ceux de la Cour des comptes sera levée. L’autonomie de gestion du HCFP n’est nullement remise en cause : l’ordonnateur restera le même, son président étant le Premier président de la Cour.

4.   Les dispositions de la LOPGFP réintroduites au rang ordinaire

Le Conseil constitutionnel a jugé, dans sa décision n° 2012-658 DC du 13 décembre 2012, précitée, que la fin du quatrième alinéa de l’article 11 de la LOPGFP, le septième alinéa du même article, l’article 20 et le dernier alinéa de l’article 21 n’avaient pas de caractère organique.

Le rapporteur les commente dans le rapport sur la proposition de loi n° 4113 rectifiée, précitée.

Correspondance des articles de la LOPGFP
Avec ceux des PPL organique n° 4100 rect. et ordinaire n° 4113 rect.

Objet

LOPGFP

Art. 12 de la PPLO

PPL n° 4113 rect.

Audition préalable, par les commissions des finances et des affaires sociales de l’Assemblée nationale et du Sénat, des membres du HCFP nommés par les présidents de l’Assemblée, du Sénat et des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat

Vingt mots

au 4ème alinéa
de l’art. 11

s. o.

I
de l’art. 1er

Composition du HCFP paritaire entre les femmes et les hommes

7ème alinéa
de l’art. 11

II
de l’art. 1er

Audition, à tout moment, du président du HCFP par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat

Art. 20

Art. 2

Règlement intérieur du HCFP

Dernier alinéa
de l’art. 21

Art. 3

B.   Les dispositions nouvelles

● Le rapporteur partage certaines analyses de la commission sur l’avenir des finances publiques (CAFP), qui prolongent des constats ou préconisations déjà exprimés par la MILOLF ou la Cour des comptes.

Pour la CAFP, « le manque de fiabilité de nos trajectoires de moyen et long termes n’est pas dû à un problème technique », car « les administrations responsables de l’établissement des trajectoires sont d’un haut niveau ; les lois de finances et de financement de la sécurité sociale sont fiables et reposent sur des systèmes d’information de qualité […] ; les comptes publics sont certifiés par la Cour des comptes et celle-ci en assure un contrôle juridictionnel étroit ; les textes financiers sont globalement plus détaillés que dans les autres pays de l’OCDE […] ; les documents budgétaires sont de plus en plus détaillés ».

Dès lors, les biais et l’absence de réel suivi des projections à l’échelle de l’ensemble des administrations sur plusieurs exercices tiennent plutôt à « quatre facteurs institutionnels sur lesquels la France se positionne défavorablement : aucune institution budgétaire indépendante n’est chargée d’élaborer des trajectoires de long terme, contrairement à la majorité des pays de l’OCDE étudiés ; les trajectoires pluriannuelles ne s’imposent pas aux lois [financières] annuelles et il n’y a pas de mécanisme de contrôle ou de correction des trajectoires pluriannuelles des finances publiques ; la complexité et la fragmentation […] nuisent au pilotage global des dépenses publiques […] ; les trajectoires de moyen terme ne font pas l’objet d’un échange transpartisan approfondi avant leur adoption et ne sont pas précédées d’un éclairage neutre et indépendant ».

Certes, rendre plus contraignantes les normes financières nécessiterait une modification constitutionnelle, la fragmentation des administrations publiques ne sera pas réglée par une modification de la LOLF et de la LOPGFP et les débats entre les différents courants politiques doivent faire l’objet d’une appropriation par leurs représentants, plutôt que de dispositions juridiques.

Pour les autres difficultés identifiées, les modifications apportées par l’article 12 ont l’objectif de mieux éclairer la représentation nationale et de mettre les prérogatives du Haut Conseil des finances publiques en conformité avec celles de plusieurs de ses homologues européens.

● Au I, cet article crée un nouveau titre VI de la LOLF et fixe son intitulé aux alinéas 1 à 3, de même qu’il opère des substitutions légistiques aux alinéas 49, 54 et 55. Au II, les alinéas 60 et 61 effectuent des coordinations.

En complément de la transposition ou modifications présentées supra, le I instaure quatre nouveaux avis du Haut Conseil des finances publiques, respectivement au sujet :

– du rapport sur la soutenabilité de la dette, introduit à l’article 48 de la LOLF par l’article 9 de la présente proposition de loi organique ;

– des dispositions des projets de loi de programmation sectoriels ayant une incidence sur les finances publiques ;

– du respect, par le projet de loi d’approbation des comptes et de résultat de gestion, des objectifs de dépense des administrations publiques fixé par la LPFP ;

– au moins une fois tous les quatre ans, des écarts entre les prévisions macroéconomiques, de recettes et de dépenses des lois de finances et de financement de la sécurité sociale et leur réalisation.

1.   L’avis du Haut Conseil sur le rapport sur la soutenabilité de la dette

Le III de l’article 9 de la présente proposition de loi organique complète l’article 48 de la LOLF de sorte que soit présenté par le Gouvernement un « rapport analysant la trajectoire, les conditions de financement et la soutenabilité de la dette de l’ensemble des administrations publiques et de leurs sous‑secteurs », pouvant faire l’objet d’un débat au Parlement.

Les enjeux de la dette sont exposés dans le commentaire de cet article 9.

L’alinéa 31 du présent article prévoit, au V du nouvel article 61 de la LOLF, que le Haut Conseil des finances publiques rende un avis public sur ce rapport.

2.   L’avis du Haut Conseil sur les lois de programmation sectorielles

Le vingtième alinéa de l’article 34 de la Constitution dispose que « des lois de programmation déterminent les objectifs de l’action de l’État ».

● Succédant, depuis l’entrée en vigueur de la révision issue de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Cinquième République, aux lois de programme, ces lois de programmation ont pu intervenir dans des secteurs variés :

– loi n° 2009-928 du 29 juillet 2009 relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense ;

– loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement ;

– loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure ;

– loi n° 2012-409 du 27 mars 2012 de programmation relative à l’exécution des peines ;

– loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ;

– loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale ;

– loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ;

– loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale ;

– loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique ;

– loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense ;

– loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes ;

– loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ;

– loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur ;

– projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales (en cours d’examen parlementaire à la date de dépôt du présent rapport).

● Certaines de ces lois comportent une trajectoire pluriannuelle pour les moyens budgétaires de telle ou telle mission de l’État et les effectifs humains de tel ou tel ministère, déclinée le cas échéant dans un rapport d’orientation annexé : pour explicite que cette prévision soit, elle n’en reste pas moins dénuée de toute portée normative, puisqu’il revient à la seule loi de finances d’ouvrir des crédits et d’autoriser des plafonds d’emploi au profit des unités de vote concernées.

L’effet financier d’autres lois de programmation se lit moins clairement, soit qu’il paraisse malaisé à apprécier au regard des intentions générales que le législateur formule en les adoptant, soit que leur chiffrage par l’étude d’impact présente un caractère insuffisamment développé.

Pour ces raisons, les alinéas 37 et 38 du présent article prévoient, au VIII du nouvel article 61 de la LOLF, que le Haut Conseil des finances publiques soit saisi par le Gouvernement de dispositions des projets de lois sectorielles susceptibles d’avoir des conséquences financières et se voit transmettre, une semaine avant la saisine du Conseil d’État sur le même texte, les éléments lui permettant d’apprécier leur compatibilité avec les objectifs de croissance de la dépense publique en volume et en milliards d’euros fixés par la loi de programmation des finances publiques en vigueur – ces objectifs étant instaurés au dernier alinéa de l’article 1er A de la LOLF par l’alinéa 8 de l’article 1er de la présente proposition de loi organique.

Un tel élargissement est cohérent avec le soutien au Parlement pour l’examen des textes à enjeu financier et l’évaluation du coût des politiques qu’assurent les institutions budgétaires de plusieurs pays européens ([115]). Il fera de la LPFP une référence pour l’action publique et les arbitrages qu’elle demande.

3.   L’avis du Haut Conseil sur le respect des objectifs de dépenses

L’alinéa 59 complète le nouvel article 62 par un V et prévoit que le HCFP rende, au moment du dépôt du projet de loi d’approbation des comptes et de résultats de gestion, un avis sur le respect des objectifs de dépenses des administrations publiques instaurés, au dernier alinéa du nouvel article 1er A, par l’alinéa 8 de l’article 1er de la présente proposition de loi organique.

Une telle vérification enrichira l’avis actuellement rendu par le HCFP sur la loi de règlement : au lieu de porter sur la seule composante structurelle du solde public arrêté par cette loi au regard de son niveau anticipé par la LPFP pour l’exercice en question, la représentation nationale pourra s’appuyer sur un suivi régulier de la tenue ou non des évolutions prévisionnelles de la dépense publique en volume et en milliards d’euros courants, lui permettant le cas échéant de mesurer l’ajustement nécessaire en valeur, soit plus clairement qu’en points de PIB.

Le mécanisme de correction demeurerait centré sur le solde structurel.

4.   L’avis du Haut Conseil sur les écarts entre prévisions macroéconomiques, de recettes et de dépenses et leur réalisation

Le même alinéa 59 dispose que le contenu de l’avis précité sur le respect des objectifs de dépense est étendu, au moins une fois tous les quatre ans, à une analyse des écarts entre, d’une part, les prévisions macroéconomiques, de recettes et de dépenses des lois de finances et de financement de la sécurité sociale et, d’autre part, leur réalisation.

Deux raisons font que cette éventuelle détection des biais de projection, complémentaire à l’avis prévu, par les alinéas 40 à 62, au I de l’article 62, n’interviendrait pas chaque année :

– son périmètre inclut des déterminants dont l’ampleur et la technicité (PIB, consommation des ménages, investissement des entreprises et des administrations publiques indice des prix à la consommation, emploi et masse salariale du secteur privé, politique monétaire, commerce international, etc.) invitent à penser qu’une analyse moins fréquente pourra être plus approfondie ;

– sa périodicité correspond à celle retenue par le 6. de l’article 4 de la directive n° 2011/85/UE du Conseil du 8 novembre 2011 sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres ([116]), qui dispose que « les prévisions macroéconomiques et budgétaires établies aux fins de la programmation budgétaire sont soumises à une évaluation régulière, non biaisée et globale, reposant sur des critères objectifs, y compris à une évaluation ex post ; le résultat de cette évaluation est rendu public et dûment pris en compte dans les prévisions macroéconomiques et budgétaires ultérieures ; si l’évaluation met à jour une importante distorsion affectant les prévisions macroéconomiques sur une période d’au moins quatre années consécutives, l’État membre concerné prend les mesures nécessaires et les rend publiques ».

III.   Les modifications adoptÉes par la commission

La commission a adopté seize amendements.

● Elle a d’abord, sur proposition du rapporteur et du président, tiré les conséquences de l’avis du Conseil d’État sur quatre points :

– en précisant que le HCFP rend deux avis à l’automne, l’un sur les hypothèses communes au projet de loi de finances et au projet de loi de financement de la sécurité sociale ainsi que sur le réalisme des prévisions (et le cas échéant sur les conséquences de toute mesure nouvelle) concernant le PLF, l’autre sur le réalisme des prévisions (et le cas échéant sur les conséquences de toute mesure nouvelle) concernant le PLFSS, tout en tenant compte de l’insertion, par la proposition de loi organique n° 4111 de M. Mesnier, d’un article liminaire dans les LFSS de l’année au lieu des seules lois de financement rectificatives ([117]) ;

– en portant à quinze jours le délai d’analyse laissé au HCFP sur les projets de loi de programmation des finances publiques et les projets de loi de programmation sectoriels car, si l’exigence hebdomadaire se comprend pour les textes budgétaires, vu les contraintes procédurales fortes qui les entourent (la première étant d’entrer en vigueur au 1er janvier de l’année qui suit), tel n’est pas le cas pour ces cadrages pluriannuels pouvant soulever des questions de fond dont l’institution est moins immédiatement familière que la macroéconomie ;

– en étendant l’avis du HCFP sur les PLFR et PLFRSS aux projets de loi de finances de fin de gestion, rectifiant ainsi une erreur de plume.

● À l’initiative de M. Daniel Labaronne, rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission Conseil et contrôle de l’État, a été rétablie la mention suivant laquelle « le président du HCFP gère les crédits nécessaires à l’accomplissement de ses missions », garantissant le fait que l’éventuelle intégration de cette enveloppe dans celle de la Cour des comptes ne saurait avoir pour effet de priver le HCFP de l’autonomie de gestion sur ses moyens propres ([118]).

 

 

● Enfin, dix amendements du rapporteur effectuent des modifications légistiques concernant :

– la suppression d’un saut de ligne inutile ;

– la remise de trois alinéas dans un ordre plus logique à la lecture ;

– l’abrogation d’une disposition obsolète depuis 2013 à propos de la durée de mandat dérogatoire et du tirage au sort prévus pour l’installation des premiers membres du HCFP ;

– la périodicité de transmission par le Gouvernement d’une information sur certains engagements financiers de l’État ;

– les dispositions prises en compte dans la limitation des avis que le HCFP est habilité à produire ;

– l’intitulé exact du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’union économique et monétaire ;

– la correction d’une erreur de référence quant à l’indication par l’exécutif des mesures de correction qu’il entend prendre en cas d’écart avec les orientations pluriannuelles de solde structurel ;

– le constat de la réunion des circonstances exceptionnelles par le HCFP ou par le Parlement ;

– et la précision que la comparaison avec la loi de programmation des finances publiques et la nouvelle norme en dépense seront bien analysés, au stade du projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année, dans un avis unique du HCFP.

*

*     *

 


—  1  —

Article 13 (nouveau)
Application de la loi organique

Introduit par la commission spéciale

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article rétablit l’ancien article 68 de la LOLF, renuméroté 63, sur les mesures réglementaires nécessaires à son application.

I.   L’État du droit

L’article 68 de la LOLF dispose que « des décrets en Conseil d’État pourvoient, en tant que de besoin, à l’exécution de la présente loi organique ».

II.   Les modifications adoptÉes par la commission

À l’occasion de l’intégration des chapitres III et IV de la LOPGFP au sein des articles 61 et 62 de la LOLF, la présente proposition de loi organique abrogeait, sans que telle soit l’intention des auteurs, la disposition précitée sur les décrets d’application.

Suivant l’avis du Conseil d’État, la commission a adopté un amendement de M. de Courson rétablissant cette disposition sous la forme d’un nouvel article 63 de la LOLF.

Cette sécurité juridique est indispensable.

*

*     *


—  1  —

   Examen des articles de la proposition de loi ordinaire

Lors de son dépôt, cette proposition de loi comportait quatre articles visant, pour les trois premiers, à réintroduire au niveau ordinaire des dispositions dont le Conseil constitutionnel a estimé qu’elles n’avaient pas de caractère organique et, pour le dernier, à abroger en sens inverse une disposition figurant actuellement dans une loi ordinaire, compte tenu de son élévation au niveau organique par la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques (n° 4110 rect.), déposée et examinée conjointement.

● Il convient ici d’exposer les principes de la procédure au terme de laquelle le Conseil constitutionnel déclasse certaines de leurs dispositions à l’occasion du contrôle qu’il effectue sur les projets ou propositions de loi organique.

Le premier alinéa de l’article 61 de la Constitution prévoit que « les lois organiques, avant leur promulgation, […] doivent être soumis[es] au Conseil constitutionnel qui se prononce sur leur conformité à la Constitution ». Cet examen est systématique.

L’article 17 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel confirme cette obligation.

Dans ce cadre, l’examen du Conseil constitutionnel s’étend notamment à la vérification de ce que la loi organique ne comporte pas de disposition empiétant sur le domaine de la Constitution, c’est-à-dire qui ne bénéficierait pas d’une habilitation du Constituant à préciser la portée de l’un de ses propres articles, non plus que sur celui de la loi ordinaire ([119]), c’est-à-dire qui relèveraient du champ des règles ou principes fondamentaux mentionnés aux dix-sept premiers alinéas de l’article 34 de la Constitution, ainsi que des lois de finances, de financement de la sécurité sociale, de programmation et de programmation des finances publiques mentionnées aux trois alinéas suivants du même article.

Il a en effet jugé, dans sa décision n° 87-234 DC du 7 janvier 1988 sur la loi organique relative au contrôle du Parlement sur les finances des régimes obligatoires de sécurité sociale – au demeurant frappée de non-conformité totale –, qu’une loi organique « ne peut intervenir que dans les domaines et pour les objets limitativement énumérés par la Constitution », puis précisé, dans sa décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005 sur la loi organique relative aux LFSS (LOLFSS), que « l’introduction dans un texte de loi organique de dispositions n’ayant pas cette nature pourrait en fausser la portée ».

En cas d’empiétement sur le champ du Constituant, le Conseil constitutionnel censure les dispositions concernées, lesquelles ne peuvent, conformément au premier alinéa de l’article 62 de la Constitution, être promulguées ; en cas d’empiétement sur celui du législateur ordinaire et s’il ne constate aucune violation d’une autre règle du bloc de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel indique l’absence de caractère organique des dispositions concernées dans sa décision.

Certes, dans ce dernier cas, avec les autres dispositions de la loi organique qu’il a jugées conformes à la Constitution, celles qui relèvent de l’office du législateur ordinaire reçoivent la signature du Président de la République , figurent dans le texte publié au Journal officiel de la République française ([120]) et entrent en vigueur. Toutefois, elles ne peuvent être ultérieurement modifiées que par une loi ordinaire, y compris à la fin de leur abrogation.

Sur les cent soixante-et-onze décisions du Conseil constitutionnel sur des lois organiques, vingt-neuf ont emporté ce type de déclassement.

Liste des lois organiques dont le Conseil constitutionnel
a dÉclassÉ certaines dispositions

Décision n° 60-6 DC

du 15 janvier 1960

Loi organique portant promotion exceptionnelle des Français musulmans dans la magistrature et modifiant l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958

Décision n° 75-62 DC

 du 28 janvier 1976

Loi organique sur le vote des Français établis hors de France pour l’élection du Président de la République

Décision n° 87-228 DC

du 26 juin 1987

Loi organique relative à la situation des magistrats nommés à des fonctions du premier grade

Décision n° 88-242 DC

du 10 mars 1988

Loi organique relative à la transparence financière de la vie politique

Décision n° 92-305 DC

du 21 février 1992

Loi organique modifiant l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature

Décision n° 95-364 DC

du 8 février 1995

Loi organique modifiant la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998 et portant dispositions diverses relatives aux territoires d’outre-mer

Décision n° 96-372 DC

du 6 février 1996

Loi organique relative à la date du renouvellement des membres de l’assemblée territoriale de la Polynésie française

Décision n° 96-373 DC

du 9 avril 1996

Loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française

Décision n° 96-379 DC

du 16 juillet 1996

Loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale

Décision n° 97-390 DC

du 19 novembre 1997

Loi organique relative à la fiscalité applicable en Polynésie française

Décision n° 99-410 DC

du 15 mars 1999

Loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie

Décision n° 2001-445 DC

du 19 juin 2001

Loi organique relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature

Décision n° 2004-490 DC

du 12 février 2004

Loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française

Décision n° 2005-519 DC

du 29 juillet 2005

Loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale

Décision n° 2009-576 DC

du 3 mars 2009

Loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France

Décision n° 2009-587 DC

du 30 juillet 2009

Loi organique relative à l’évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et à la départementalisation de Mayotte

Décision n° 2010-611 DC

du 19 juillet 2010

Loi organique relative à l’application de l’article 65 de la Constitution

Décision n° 2010-616 DC

du 10 novembre 2010

Loi organique relative à la gestion de la dette sociale

Décision n° 2010-619 DC

du 2 décembre 2010

Loi organique relative au Département de Mayotte

Décision n° 2011-626 DC

du 29 mars 2011

Loi organique relative au Défenseur des droits

Décision n° 2011-628 DC

du 12 avril 2011

Loi organique relative à l’élection des députés et des sénateurs

Décision n° 2012-658 DC

du 13 décembre 2012

Loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques

Décision n° 2013-668 DC

du 16 mai 2013

Loi organique relative à l’élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux

Décision n° 2013-675 DC

du 9 octobre 2013

Loi organique relative à la transparence de la vie publique

Décision n° 2014-689 DC

du 13 février 2014

Loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur

Décision n° 2017-753 DC

du 8 septembre 2017

Loi organique pour la confiance dans la vie politique

Décision n° 2019-783 DC

du 27 juin 2019

Loi organique portant modification du statut d’autonomie de la Polynésie française

Décision n° 2020-812 DC

du 14 janvier 2021

Loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental

Décision n° 2021-815 DC

du 25 mars 2021

Loi organique portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République

Source : tables analytiques des décisions du Conseil constitutionnel.

● La décision n° 2012-658 DC du 13 décembre 2012 du Conseil constitutionnel concernant la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (LOPGFP), dont il avait été saisi le 23 novembre précédent par le Premier ministre, a prévu une telle procédure de déclassement à l’encontre de deux articles du texte dans leur intégralité, de deux alinéas de deux autres articles et de mots d’un de ces deux derniers.

Sont concernés la désignation de certains membres du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), les auditions de son président par les commissions des assemblées parlementaires et son règlement intérieur.

Celles-ci conservent toute leur pertinence sur le fond.

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L’examen de la proposition de loi en commission a permis d’apporter deux modifications rédactionnelles à l’article 1er et d’adopter quatre articles additionnels.

Le premier et le troisième procèdent à des coordinations.

Le deuxième concerne le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO).

Le quatrième et dernier formule une demande de rapport sur les investissements dans les secteurs de la culture et du patrimoine.

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Titre Ier
Dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques

Article 1er
Procédure de nomination des membres du Haut Conseil des finances publiques
désignés par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat et les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat

Adopté par la commission spéciale avec modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article réintroduit au rang ordinaire l’article 11 de la LOPGFP, déclassé par le Conseil constitutionnel.

Modifications adoptées par la commission

La commission a apporté deux précisions rédactionnelles.

I.   L’état du droit

● L’article 11 de la LOPGFP fixe la composition du HCFP, la durée des fonctions de ses membres, leur absence de rémunération, le régime des incompatibilités électives qui s’imposent à certains d’entre eux et la procédure de désignation de ceux qui, au contraire du Premier président de la Cour des comptes et du directeur général de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), n’y siègent pas de droit.

Ses 1° et 3° incluent, parmi les dix membres du Haut Conseil, « quatre magistrats de la Cour des comptes en activité à la Cour, désignés par son Premier président » et « un membre nommé par le Président du Conseil économique, social et environnemental en raison de ses compétences dans le domaine des prévisions macroéconomiques et des finances publiques ».

Son 2° y ajoute « quatre membres nommés, respectivement, par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat et les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat en raison de leurs compétences dans le domaine des prévisions macroéconomiques et des finances publiques » et dispose que « ces membres sont nommés après audition publique conjointe de la commission des finances et de la commission des affaires sociales de l’assemblée concernée [et] ne peuvent exercer de fonctions publiques électives ».

 

 

Son septième alinéa, outre la procédure de tirage au sort pour la constitution initiale du Haut Conseil des finances publiques, précise que « l’ensemble des membres nommés au titre du 1° et l’ensemble des membres nommés au titre du 2° comprennent autant de femmes que d’hommes » et que « lors de chaque renouvellement des membres nommés au titre des mêmes 2° et 3°, le membre succédant à une femme est un homme et celui succédant à un homme, une femme ; le remplaçant d'un membre nommé au titre des 1°, 2° ou 3° est de même sexe ».

● Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2012-658 DC, précitée, a déclassé les mots « ces membres sont nommés après audition publique conjointe de la commission des finances et de la commission des affaires sociales de l’assemblée concernée » figurant au 2° de l’article 11, ainsi que son septième alinéa.

Saisi le 13 juillet 2012 par le Président de la République de la question de savoir si l’autorisation de ratifier le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’union économique et monétaire (TSCG), signé à Bruxelles le 2 mars précédent, devait être précédée d’une révision de la Constitution, le Conseil constitutionnel a répondu par la négative.

Le considérant n° 24 de sa décision n° 2012-653 DC du 9 août 2012 sur le TSCG précise que, sur le fondement des habilitations données par le vingt-deuxième alinéa de l’article 34 de la Constitution pour les lois de programmation relatives aux orientations pluriannuelles des finances publiques et sur le fondement de ce même alinéa ainsi que des dix-huitième et dix-neuvième alinéa du même article pour les lois de finances et de financement de la sécurité sociale, « le législateur organique peut, pour que les règles énoncées au paragraphe 1 de l’article 3 du traité prennent effet […], adopter des dispositions encadrant ces lois relatives, notamment, à l’objectif de moyen terme ainsi qu’à la trajectoire d’ajustement de la situation budgétaire des administrations publiques, au mécanisme de correction de cette dernière et aux institutions indépendantes intervenant tout au long du processus budgétaire ».

Dès lors, si relèvent du domaine organique les modalités selon lesquelles le Haut Conseil est saisi de textes budgétaires, ainsi que les garanties de sa compétence et de son indépendance, tel n’est le cas de ni la parité entre les femmes et les hommes au sein de plusieurs catégories de ses membres, ni de la mention d’une audition par des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, laquelle concerne le fonctionnement des assemblées ([121]).

II.   Le dispositif proposÉ

Cet article réintroduit ces dispositions dans un texte de rang ordinaire distinct de celui qui porte le reste de la LOPGFP, désormais intégrée à la LOLF (cf. supra).

● Le I prévoit l’audition conjointe, par les commissions des finances et des affaires sociales de l’assemblée concernée, des membres du Haut Conseil dont la désignation est envisagée par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat et les présidents des commissions des finances de ces deux assemblées. Il procède à une coordination avec l’article 12 de la proposition de loi organique n° 4110, précitée.

Membres du HCFP NommÉs par les autoritÉs parlementaires compÉtentes

 

Autorité de nomination

Mandat

M. Jean Pisani-Ferry

M. Claude Bartolone,

Président de l’Assemblée nationale

Mars 2013 – juin 2013

M. Michel Aglietta

M. Gérard Larcher,

Président du Sénat

Mars 2013 – septembre 2015

Mme Marguerite Bérard-Andrieu

M. Gilles Carrez, président de la CF de l’Assemblée nationale

Mars 2013 – septembre 2015

Mme Mathilde Lemoine

M. Philippe Marini, président de la CF du Sénat

Mars 2013 – mars 2018

M. François Bourguignon

M. Claude Bartolone,

Président de l’Assemblée nationale

Mai 2013 – mars 2018

M. Christian Noyer

M. Gilles Carrez, président de la CF de l’Assemblée nationale

Septembre 2015 – septembre 2020

Mme Valérie Plagnol

M. Gérard Larcher,

Président du Sénat

Septembre 2015 – septembre 2020

Mme Maya Bacache-Beauvallet

M. François de Rugy,

Président de l’Assemblée nationale

Mars 2018 – octobre 2019

M. Éric Heyer

M. Vincent Éblé, président de la CF du Sénat

Depuis mars 2018

Mme Frédérique Bec

M. Richard Ferrand,

Président de l’Assemblée nationale

Depuis décembre 2019

M. Éric Doligé

M. Gérard Larcher,

Président du Sénat

Depuis septembre 2020

Mme Michala Marcussen

M. Éric Woerth, président de la

CF de l’Assemblée nationale

Depuis septembre 2020

Source : commissions des finances (ci-dessus : CF) de l’Assemblée nationale et du Sénat.

● Le II concerne la parité parmi les membres du Haut Conseil. 

Outre une coordination avec le même nouvel article 61 de la LOLF, son premier alinéa reprend les dispositions de la LOPGFP concernant l’équilibre entre les femmes et les hommes au sein des quatre membres du Haut Conseil désignés par le Premier président de la Cour des comptes et au sein de ses quatre membres nommés par les autorités parlementaires précitées.

Son second alinéa reprend les dispositions de la LOPGFP relatives :

– d’une part, à l’alternance entre une femme et un homme à chaque renouvellement des membres nommés par les autorités parlementaires et le Président du Conseil économique, social et environnemental ;

– d’autre part, au remplacement par une personne de même sexe qu’un membre qui viendrait, avant le terme de ses fonctions, à décéder, démissionner, cesser son activité à la Cour des comptes ou à voir son mandat interrompu « par l’autorité l’ayant désigné et après avis conforme émis à la majorité des deux tiers des autres membres constatant qu’une incapacité physique permanente ou qu’un manquement grave à ses obligations empêche la poursuite de son mandat », laquelle procédure actuellement prévue par le dernier alinéa de l’article 11 de la LOPGFP est transposée au dernier alinéa de l’article 61 de la LOLF.

III.   La position de la commission

À l’initiative du rapporteur et du président, la commission a adopté deux précisions rédactionnelles.

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Article 2
Audition du président du Haut Conseil des finances publiques
par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat

Adopté par la commission spéciale sans modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article réintroduit au rang ordinaire l’article 20 de la LOPGFP, déclassé par le Conseil constitutionnel.

I.   L’état du droit

L’article 20 de la LOPGFP, introduit lors de l’examen du projet de loi organique à l’Assemblée nationale à l’initiative de M. Pierre-Alain Muet, dispose que « le président du Haut Conseil des finances publiques est entendu à tout moment à la demande des commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat ».

● Le président du HCFP, parfois accompagné de fonctionnaires affectés à son secrétariat permanent, a ainsi été auditionné à vingt-trois reprises par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale et à quinze reprises par la commission des finances du Sénat depuis la mise en place de l’institution le 21 mars 2013.

Auditions du prÉsident du Haut Conseil des finances publiques
par les commissions des finances des deux assemblÉes depuis 2013

Assemblée nationale

16 avril 2013

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2013 à 2017

Assemblée nationale

28 mai 2013

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2012

Sénat

29 mai 2013

Assemblée nationale

25 septembre 2013

Projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014

Sénat

9 octobre 2013

Assemblée nationale

23 avril 2014

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2014 à 2017

Assemblée nationale

28 mai 2014

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2013

Sénat

3 juin 2014

Assemblée nationale

1er octobre 2014

Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 et projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015

Sénat

15 octobre 2014

Assemblée nationale

15 avril 2015

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2015 à 2018

Sénat

15 avril 2015

Assemblée nationale

27 mai 2015

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2014

Sénat

28 mai 2015

Assemblée nationale

30 septembre 2015

Projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016

Assemblée nationale

13 avril 2016

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019

Assemblée nationale

25 mai 2016

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2015

Assemblée nationale

28 septembre 2016

Projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2017

Sénat

28 septembre 2016

Assemblée nationale

12 avril 2017

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2017 à 2020

Assemblée nationale

27 septembre 2017

Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 et projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2018

Sénat

27 septembre 2017

Assemblée nationale

17 avril 2018

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2018 à 2022

Sénat

30 mai 2018

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2017

Assemblée nationale

24 septembre 2018

Projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2019

Sénat

26 septembre 2018

Assemblée nationale

10 avril 2019

Prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2019 à 2022

Sénat

10 avril 2019

Assemblée nationale

22 mai 2019

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2018

Assemblée nationale

27 septembre 2019

Projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2020

Sénat

2 octobre 2019

Assemblée nationale

10 juin 2020

Troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020

Sénat

10 juin 2020

Assemblée nationale

28 septembre 2020

Projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2021

Sénat

29 septembre 2020

Assemblée nationale

4 novembre 2020

Quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020

Sénat

15 avril 2021

Solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2020 et prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2021 à 2027

Assemblée nationale

15 avril 2021

Source : commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat.

● Dans sa décision n° 2012-658 DC, précitée, le Conseil constitutionnel a jugé que cette disposition n’avait pas un caractère organique.

Le commentaire de cette décision souligne que cette disposition est de rang ordinaire puisqu’elle « n’est relative ni à l’avis que doit délivrer le Haut Conseil, ni à ses garanties d’indépendance, mais au fonctionnement des assemblées » et que, du reste, l’article 5 bis de l’ordonnance n° 58-1100 du 17  novembre 1958  relative au fonctionnement des assemblées parlementaires prévoit déjà qu’« une commission spéciale ou permanente peut convoquer toute  personne dont elle estime l’audition nécessaire, réserve faite, d’une part, des sujets de caractère secret et concernant la défense nationale, les affaires étrangères, la sécurité intérieure ou extérieure de l’État, d’autre part, du  respect du principe de la séparation de l’autorité judiciaire et des autres pouvoirs ».

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 2 de la proposition de loi réintroduit ces dispositions dans un texte de rang ordinaire.

Le rapporteur salue l’intérêt et l’utilité des auditions du président du HCFP : désormais quasi-systématiques, elles fournissent à la représentation nationale, singulièrement aux membres des commissions des finances, un regard et des éléments chiffrés complémentaires de ceux que présentent le ministre chargé des finances et le ministre chargé du budget.

III.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

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Article 3
Règlement intérieur du Haut Conseil des finances publiques

Adopté par la commission spéciale sans modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article réintroduit au rang ordinaire le dernier alinéa de l’article 21 de la LOPGFP, déclassé par le Conseil constitutionnel.

I.   L’état du droit

Le dernier alinéa de l’article 21 de la LOPGFP, introduit lors de l’examen du texte au Sénat à l’initiative de M. François Marc, rapporteur, prévoit l’existence et la publication du règlement intérieur du Haut Conseil.

● Adopté par ses premiers membres le 21 mars 2013 et publié au Journal officiel de la République française le 29 mars suivant, le règlement intérieur du HCFP comporte vingt-huit articles et une annexe.

Les articles 1er et 2 prévoient que ceux-ci remettent une déclaration d’intérêt, dont le modèle est annexé, précisant les activités professionnelles exercées au moment de leur nomination et au cours des cinq années qui précèdent, leurs activités d’intérêt général aux membres périodes, leur participation à des organes dirigeants de toute personne morale, leurs participations financières directes dans le capital d’une société dont l’objet social est en relation avec les missions du HCFP, ainsi que d’autres informations qu’ils estimeraient librement utile de signaler.

Les articles 3 à 5 concernent la communication du HCFP : secret des délibérations et des documents, expression du seul président au nom du collège mais des autres membres en leur nom propre et possibilité pour un membre de représenter le président dans un organisme ou une manifestation.

Les articles 7 et 8 indiquent que le HCFP se réunit à la Cour des comptes et qu’un membre peut exceptionnellement prendre part aux débats au moyen d’un conférence téléphonique ou audiovisuelle, sans toutefois voter.

Les articles 9 à 17 précisent les modalités de convocation du HCFP et d’établissement de l’ordre du jour de ses réunions, l’absence de publicité de ces dernières malgré leur ouverture au rapporteur général, à ses adjoints et à certains collaborateurs désignés par le président, leur présidence par le magistrat de la Cour des comptes le plus ancien dans le grade le plus élevé en cas d’absence du président, la vérification du quorum – cinq membres dont au moins deux désignés par les autorités parlementaires ou le président du Conseil économique, social et environnemental, la procédure de vote, la faculté de demander une suspension de séance et la rédaction des procès-verbaux.

L’article 18 rappelle que le Gouvernement transmet au HCFP les informations qu’il sollicite pour la préparation de ces avis.

Les articles 19 à 24 disposent que les projets d’avis sont préparés et soutenus par le rapporteur général, adoptés à la majorité, puis transmis au secrétaire général du Gouvernement et publiés sur le site internet du HCFP, la même procédure étant suivie pour les communiqués de presse.

Les articles 25 et 26 traitent de la composition et de la direction du secrétariat permanent, ainsi que des obligations en matière de secret professionnel et de déontologie qu’ils sont tenus de respecter.

Les articles 27 et 28 concernent les crédits de fonctionnement du HCFP, ordonnancés par son président, et notamment le remboursement des frais de déplacement de ses membres ou de toute personne concourant à ses travaux.

● Dans sa décision n° 2012-658 DC, précitée, le Conseil constitutionnel a jugé que la mention de ce règlement intérieur n’avait pas un caractère organique.

Au demeurant, le Conseil constitutionnel avait déjà indiqué dans sa décision n° 2011-626 DC du 29 mars 2011 sur la loi organique relative au Défenseur des droits, que « les dispositions […] relatives aux services du Défenseur des droits et celles […] qui prévoient qu’il établit et rend public un règlement intérieur et un code de déontologie applicable aux personnels et aux collèges du Défenseur des droits » ne trouvaient leur fondement dans aucune habilitation du Constituant.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 3 de cette proposition de loi réintroduit ces dispositions dans un texte de rang ordinaire.

Le rapporteur partage l’analyse formulée en 2012 par M. Christian Eckert, rapporteur pour l’Assemblée nationale : « plutôt que de prévoir une audition annuelle du Haut Conseil ou une présentation systématique de ses avis devant les commissions des finances, [cette rédaction] privilégie la souplesse ; les commissions parlementaires jugeraient elles-mêmes de la nécessité d’auditionner le président du Haut Conseil. En outre, en mentionnant, sans plus de précision, les “commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat”, cet article pourrait s’appliquer non seulement aux commissions permanentes, mais aussi aux commissions des affaires européennes ».

 

 

 

Il note que M. Eckert avait également fait mention de la commission des affaires sociales et que M. Jean-Jacques Urvoas, alors président de la commission des lois, avait indiqué que cette dernière « n’exclu[ai]t pas d’auditionner un jour le Haut Conseil au sujet des finances locales » ([122]).

III.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

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Titre II
Dispositions relatives À l’information du Parlement lors de l’examen du projet de loi de finances sur les mesures fiscales adoptées depuis le dÉpÔt du projet de loi de finances de l’annÉe prÉcÉdente

Article 4
Annexe, jointe au projet de loi de finances de l’année, récapitulant
les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt
du projet de loi de finances de l'année précédente

Adopté par la commission spéciale sans modification

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article abroge l’article 12 de la loi n° 2008‑759 du 1er août 2008 de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007, dont les dispositions sont élevées au rang organique par l’article 10 de la proposition de loi organique n° 4110.

I.   L’état du droit

● Le I de l’article 12 de la loi n° 2008‑759 du 1er août 2008 de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007 a créé une annexe, jointe au projet de loi de finances de l’année, « récapitulant les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances de l’année précédente, [qui] précise, pour chacune de ces dispositions, la loi qui l’a créée, son objet, la période pendant laquelle il est prévu de l’appliquer et son effet, pour l’année de son entrée en vigueur et les trois années suivantes, sur les recettes de l’État, des collectivités territoriales et des autres personnes morales bénéficiaires d’une ou de plusieurs impositions de toute nature affectées ».

Il est prévu que son dépôt intervienne « au moins dix jours francs avant l’examen, par l’Assemblée nationale en première lecture, de l’article du projet de loi de finances de l’année qui autorise la perception des ressources de l’État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’État », soit, de fait, son article premier.

● Par exemple, entre le dépôt respectif des projets de loi de finances pour 2020 et 2021, la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 a procédé à quatre adaptations du cadre fiscal, concernant :

– la modification de la chronique de suppression du tarif réduit de taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE) sur le gazole non routier qui interviendrait en une seule fois au 1er juillet 2021 plutôt qu’en trois étapes les 1er juillet 2020, 1er janvier 2021 et 1er janvier 2022, qui entraînerait une perte de recettes de 696 millions d’euros en 2021, non compensée par un effet positif à hauteur de 26 millions d’euros sur l’impôt sur le revenu (IR) et de 12 millions d’euros sur l’impôt sur les sociétés (IS) ;

– la hausse de 2 euros par hectolitre du tarif de TICPE sur le gazole utilisé par les transporteurs routiers de marchandises, qui devrait procurer un produit supplémentaire de 913 millions d’euros, affecté à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ;

– l’instauration d’un crédit d’IR au titre du premier abonnement à un journal, à une publication périodique ou à un service de presse en ligne qui présente le caractère de presse d’information politique et généraliste, lequel devrait minorer le produit de l’IR à hauteur de 30 millions d’euros en 2021 ;

– la mesure de restitution des créances de report en arrière des déficits (carry back), qui devrait faire baisser le rendement de l’IS de 400 millions d’euros en 2020, puis de 700 millions d’euros en 2021.

II.   Le dispositif proposÉ

Dans la mesure où le 1° du I de l’article 10 de la proposition de loi organique n° 4110, précitée, mentionne cette annexe dans un nouveau 1° bis de l’article 51 de la LOLF, le présent article abroge l’actuelle disposition ordinaire.

La mission d’information de la commission des finances sur la mise en œuvre de la LOLF (MILOLF) soulignait en effet que, malgré l’absence de « monopole de la loi de finances et des lois de financement de la sécurité sociale pour traiter de la fiscalité » et les « difficultés que poserait » son instauration, il est « indispensable que les parlementaires disposent d’une vision claire au moment de l’examen du projet de loi de finances de l’ensemble des dispositions fiscales adoptées en cours d’année dans des lois autres que la loi de finances ».

Son rapporteur notait également que « concrètement, ces informations figurent dans le tome I de l’annexe Voies et moyens [mais] ne sont pas assez mises en valeur ; elles pourraient par exemple faire l’objet d’une annexe à part » et correspondre à une « exigence organique » ([123]).

III.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

Titre III
Dispositions diverses

Article 5 (nouveau)

(art. L. 132-2 du code des juridictions financières et art. 53 de la loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)
Intitulé de la loi relative aux résultats de gestion et portant approbation des comptes de l’année dans deux dispositions relatives à des rapports au Parlement

Introduit par la commission spéciale

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article tire les conséquences de la modification introduite à l’article 2 de la proposition de loi organique n° 4110 et substitue à l’intitulé « loi de règlement » l’intitulé « loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année » au sein de deux dispositions de rang ordinaire.

I.   L’état du droit

L’article L. 132-2 du code des juridictions financières et le I de l’article 53 de la loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication font référence :

– pour le premier, au « projet de loi de règlement du budget de l’État », aux fins de préciser que le rapport publié par la Cour des comptes à son propos sur le fondement du 4° de l’article 58 de la LOLF comprend la liste des communes ayant bénéficié des subventions dérogatoires prévues à l’article L. 2335-2 du code général des collectivités territoriales, ainsi que leur montant ;

– pour le second, au « projet de loi de règlement », dans le but de déterminer le délai de remise, aux commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des affaires culturelles et des finances, d’un rapport annuel concernant l’exécution de leur contrat d’objectifs et de moyens par l’Association relative à la télévision européenne (ARTE) et l’Institut national de l’audiovisuel (INA).

II.   La position de la commission

À l’initiative du rapporteur, la commission a inséré l’intitulé de « loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année » dans ces deux dispositions, en cohérence avec les modifications introduites à l’article 2 de la proposition de loi organique n° 4110.

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*     *

Article 6 (nouveau)
(art. L. 331-3, L. 331-4, L. 331-5, L. 331-6, L. 331-8 et L. 331-9
du code des juridictions financières)
Composition et missions du Conseil des prélèvements obligatoires

Introduit par la commission spéciale

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article ouvre au Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) la possibilité d’être saisi ex ante sur des modifications du droit fiscal, réaffirme la publicité de ses travaux, crée un vice-président en son sein, modifie plusieurs catégories de personnalités qualifiées y siégeant ou d’administrations pouvant y être représentées et porte à trois ans le mandat de ses membres.

I.   L’État du droit

Le décret n° 71-142 du 22 février 1971 avait créé un Conseil des impôts, placé auprès de la Cour des comptes, dont la mission était de « constater la part de l’impôt sur le revenu supportée par chaque catégorie socio-professionnelle et de mesurer l’évolution de cette part, compte tenu de la situation économique et démographique de la catégorie concernée ».

L’article unique de la loi n° 2005-358 du 20 avril 2005 l’a remplacé par le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), désormais « chargé d’apprécier l’évolution et l’impact économique, social et budgétaire de l’ensemble des prélèvements obligatoires, ainsi que de formuler des recommandations sur toute question relative aux prélèvements obligatoires ».

Ces derniers sont définis par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) comme « les impôts et cotisations sociales effectives reçus par les administrations publiques et les institutions européennes sans aucune contrepartie directe et immédiate », soit 1 086,6 milliards d’euros en 2020.

Les conditions de fonctionnement du CPO ont été précisées par le décret n° 2006-310 du 16 mars 2006, tandis que l’article 49 de l’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 a opéré diverses coordinations de références au sein du code des juridictions financières, sans changement sur le fond.

● Présidé par le Premier président de la Cour des comptes, laquelle en assure le secrétariat, le CPO comprend seize autres membres, dont :

– six fonctionnaires désignés respectivement par le vice-président du Conseil d’État, le Premier président de la Cour de cassation, le Premier président de la Cour des comptes, le ministre chargé de l’économie et des finances parmi les membres de l’Inspection générale des finances (IGF) et le ministre chargé des affaires sociales parmi les membres de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), pour « leurs compétences en matière de prélèvements obligatoires » ;

– deux professeurs agrégés des facultés de droit et de sciences économiques, désignés respectivement par les mêmes ministres à raison des mêmes compétences ;

– trois personnalités qualifiées désignées respectivement par les mêmes ministres, ainsi que celui chargé de l’intérieur, « à raison de leur expérience professionnelle » ;

– quatre personnalités qualifiées désignées respectivement par le Président de l’Assemblé nationale et le Président du Sénat, après avis du président et du rapporteur général de la commission chargée des finances de l’assemblée concernée pour les deux premières et du président de leur commission chargée des affaires sociales pour les deux secondes, en fonction de la même expérience, sans qu’elles puissent être député ou sénateur ;

– une personnalité qualifiée désignée par le Président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), sur le même critère et sous la même réserve qu’elle n’en soit pas membre.

Le mandat des seize membres est de deux ans, renouvelable une fois. Durant leurs fonctions, ceux-ci « ne peuvent solliciter ou recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée ». Les personnalités qualifiées et les éventuels rapporteurs (cf. infra), à la différence des membres ayant la qualité de fonctionnaire ou de magistrat, sont rémunérés.

Le CPO peut faire appel à toute compétence extérieure. D’une part, son président peut choisir un ou des rapporteurs « parmi les membres des corps recrutés par la voie de l’École nationale d’administration ou de l’École polytechnique, les administrateurs de l’Assemblée nationale, les administrateurs du Sénat et les professeurs et les maîtres de conférences des universités ». D’autre part, tant ses membres que les rapporteurs ont « libre accès aux services, établissements, institutions et organismes entrant dans leur champ de compétences » ; les agents de ces derniers sont non seulement « déliés du secret professionnel » à la faveur des études du CPO, mais encourent aussi une amende de 15 000 euros en cas d’obstruction à l’exercice des pouvoirs de ses membres.

Par ailleurs, peuvent être représentées aux réunions des CPO, sans voix délibérative, les directions du budget (DB), de la législation fiscale (DLF) et de la sécurité sociale (DSS) et les directions générales du Trésor (DG Trésor) et des collectivités locales (DGCL).

● Les travaux du CPO prennent la forme d’un rapport annuel, remis au Président de la République et au Parlement, ainsi que d’études confiées par le Premier ministre ou les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances ou des affaires sociales.

Certaines publications du CPO ont significativement marqué le débat public, au sujet de la fraude aux prélèvements obligatoires (2007), du patrimoine des ménages (2009), des dépenses fiscales et sociales au bénéfice des entreprises (2010), des différents prélèvements à la source (2012), de la taxe sur la valeur ajoutée (2015), de la fiscalité affectée (2018) – ce dernier rapport ayant particulièrement retenu l’attendu des auteurs de la proposition de loi organique n° 4110 rectifiée – ou de l’adaptation de la fiscalité des entreprises à une économie mondialisée et numérisée (2020).

II.   Les modifications proposÉes par la commission

À l’initiative du président et du rapporteur, la commission spéciale propose d’apporter, dans un article additionnel, huit modifications concernant l’office et la composition du Conseil des prélèvements obligatoires.

Le du I procède à une correction rédactionnelle.

Le a) de son ouvre au Premier ministre et aux commissions parlementaires compétentes la possibilité de saisir le CPO a priori afin qu’il rende un avis sur les incidences économiques et financières de toute modification de la législation ou de la réglementation en matière d’impositions de toute nature ou de cotisations sociales.

Au titre du b) du même , le code des juridictions financières indiquera expressément que les études dont la réalisation pouvait déjà lui être confiée et ces nouveaux avis soient rendus publics, ce qui relève aujourd’hui de la seule pratique.

Son dispose que, plutôt que par un président de chambre de la Cour des comptes, le président du CPO puisse se faire représenter par un membre ou un ancien membre de cette Cour, nommé en qualité de vice-président. Ce dernier ne sera toutefois pas membre du CPO et ne percevra aucune rémunération.

Conformément à son , les disciplines des professeurs susceptibles d’être nommés au CPO voient leur périmètre étendu.

Son porte à trois ans le mandat des membres du CPO.

Son prévoit que le président pourra désigner un nombre libre de personnalités qualifiées, mais pour un an seulement et sans voix délibérative.

Avec son , la liste des structures publiques pouvant être représentés aux réunions du CPO est élargie aux directions générales des finances publiques (DGFiP) et des entreprises, à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et au Haut Conseil des finances publiques (HCFP).

Le II concerne les échéances d’application de ces modifications.

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*     *

Article 7 (nouveau)
Doctrine relative aux affectations du produit d’impositions de toute nature
et de plafonnement de telles affectations

Introduit par la commission spéciale

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article abroge, avec une entrée en vigueur différée, l’article 18 de la loi n° 2018‑32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, dont les dispositions sont élevées au rang organique par la proposition de loi organique n° 4110.

I.   L’État du droit

L’article 18 de la loi n° 2018‑32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit une doctrine pour l’institution ou le maintien de l’affectation d’une imposition de toute nature à des tiers autres que les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale et les organismes de sécurité sociale, ainsi qu’un mécanisme de plafonnement de ces affectations.

Ses principes sont rappelés dans le commentaire de l’article 3 de la proposition de loi organique n° 4110, auquel le lecteur pourra se référer.

II.   Les modifications proposÉes par la commission

À l’initiative du rapporteur et en cohérence avec les dispositions des articles 3 et 5 de la proposition de loi organique n° 4110, qui les élèvent dans la hiérarchie des normes, la commission a abrogé l’article 18 de la loi n° 2018‑32 du 22 janvier 2018 précitée, de rang ordinaire, à compter du 1er janvier 2023.

*

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Article 8 (nouveau)
Rapport sur la présentation d’un projet de loi des investissements dans les secteurs de la culture et du patrimoine

Introduit par la commission spéciale

Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement examinant la possibilité de présenter un projet de loi de programmation des investissements dans les secteurs de la culture et du patrimoine.

I.   L’État du droit

Le vingtième alinéa de l’article 34 de la Constitution dispose que « des lois de programmation déterminent les objectifs de l’action de l’État ». Cette catégorie de texte créée par le 4° de l’article 11 de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Cinquième République a remplacé celle des lois de programme qui existait depuis 1958.

Dans le champ de compétences du ministère de la culture, aucun cadrage de la sorte n’est intervenu depuis l’adoption de la loi de programme n° 93‑1437 du 31 décembre 1993 relative au patrimoine monumental, qui ne concernait que la conservation des biens culturels d’intérêt public.

Trajectoire financiÈre de la loi de programme de 1993

(en millions de francs et en millions d’euros)

 

1994

1995

1996

1997

1998

Francs

1 508

1 538

1 569

1 601

1 633

Euros ([124])

229,9

234,5

239,2

244,1

248,9

Source : loi n° 93-1437 du 31 décembre 1993, précitée.

La thématique est demeurée une priorité, comme en témoignent les chiffres infra pour l’autorisation et l’exécution des crédits de la mission Culture.

Évolution des crÉdits de la mission CULTURE depuis 2017

(crédits de paiement en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

LFI

2,91

2,94

2,93

2,96

3,2

LR

2,85

2,91

2,95

3,20

s. o.

Source : lois de finances initiales et lois de règlement pour les exercices concernés.

II.   Les modifications proposÉes par la commission

À l’initiative de Mme David, rapporteure spéciale de la commission des finances sur les crédits de la mission Culture, et suivant l’avis de sagesse du rapporteur, la commission a adopté un article additionnel demandant que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la possibilité de présenter un projet de loi de programmation des investissements dans les secteurs de la culture et du patrimoine, sous trois mois à compter de sa promulgation.

Un horizon pluriannuel sécurisé paraît en effet opportun pour de grands chantiers, tels la rénovation du château de Villers-Cotterêts (Aisne), destiné à accueillir la cité internationale de la langue française, ou de plusieurs cathédrales.

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*     *

 


—  1  —

   Examen en commission

Lors de sa réunion du jeudi 15 juillet 2021, la commission spéciale examine, la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques (n° 4110 rect.) et la proposition de loi portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques (n° 4113 rect.) (M. Laurent-Saint Martin, rapporteur).

Lien vidéo :
http://assnat.fr/xaTeqP

M. le président Éric Woerth. Chers collègues, la commission spéciale que j’ai l’honneur de présider se réunit enfin pour examiner les quatre propositions de loi dont elle est saisie.

Depuis la réunion constitutive du 26 mai dernier, nous avons travaillé avec le Conseil d’État, saisi par le président de l’Assemblée nationale. Ce travail fut de grande qualité et nous avons été, les rapporteurs et moi, amenés à défendre nos textes devant l’assemblée générale du Conseil d’État, expérience nouvelle mais très enrichissante. Il faut bien avouer que l’ambiance studieuse y est sensiblement différente de celle qui règne dans notre hémicycle.

L’avis du Conseil d’État vous a été transmis et bon nombre d’amendements que nous vous proposerons avec Laurent Saint-Martin en sont issus.

Nous examinerons d’abord les textes relatifs à la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) puis ceux qui portent sur la loi organique relative au financement de la sécurité sociale (LOLFSS). Chaque examen sera précédé d’une discussion générale, et nous aurons à examiner 132 amendements pour la proposition de loi organique modifiant la LOLF, 6 pour la proposition de loi relative au Haut Conseil des finances publiques (HCFP), 73 pour la proposition de loi organique modifiant la LOLFSS et 1 pour la proposition de loi jointe.

L’examen de ces textes en séance publique a été avancé au lundi 19 juillet à 16 heures, ce qui nous conduira probablement à prévoir une réunion le même jour, à 15 h 30, pour examiner les amendements, en application de l’article 88 du règlement.

Si ces textes sont adoptés, ils seront ensuite examinés par le Sénat mais pas par une commission spéciale : chaque texte sera renvoyé à la commission des affaires sociales ou à la commission des finances. Cette dernière a d’ailleurs déjà nommé ses rapporteurs sur ses textes en les personnes de Jean-François Husson et Claude Raynal, respectivement rapporteur général et président de la commission. D’après les informations fournies par le ministère des relations avec le Parlement, le Sénat pourrait être saisi dès la fin septembre mais cela doit encore être confirmé.

La proposition de loi organique que nous avons déposée avec Laurent Saint-Martin s’inscrit dans le prolongement direct du dernier rapport de la mission d’information sur la loi organique relative aux lois de finances (MILOLF), en 2019. Cette mission avait rendu une dizaine de rapports entre 2003 et 2011, avant de faire une longue pause dans ses travaux. Elle comptait déjà, parmi ses membres, Gilles Carrez et Charles de Courson ! Cette proposition de loi organique représente probablement la réforme de la LOLF la plus ambitieuse depuis l’adoption de celle-ci, il y a maintenant vingt ans. Cela étant, ce que nous vous proposons n’est pas révolutionnaire. Nous n’avions aucune raison de renverser la table car le texte est solide. Il fallait simplement le faire évoluer. Si, comme le Conseil d’État le souligne, notre texte ne bouleverse pas le cadre de gouvernance de nos finances publiques, ce qui serait impossible sans préalablement modifier la Constitution, son adoption impliquera, néanmoins, des évolutions non négligeables de la LOLF, pour la première fois depuis son adoption.

Le Conseil d’État a dégagé trois lignes de force dans notre proposition.

La première est, dans un contexte où la dette publique est à son plus haut niveau depuis la dernière guerre mondiale, de faciliter un pilotage des finances publiques par la dépense, qui s’inscrive dans une dimension pluriannuelle et opère dans un cadre de référence, toutes administrations publiques confondues, avec une attention particulière portée à la dépense d’investissement.

La seconde est de circonscrire, sinon d’éliminer, les pratiques susceptibles d’altérer la transparence des finances publiques, à l’instar des affectations de taxes, des prélèvements sur recettes ou du développement des dépenses fiscales.

La troisième est enfin de rationaliser et d’améliorer le travail parlementaire en matière de finances publiques.

La question des dépenses d’investissement est fondamentale en sortie de crise. Si ce terme me paraît, à maints égards, préférable à celui de dépenses d’avenir, il reste qu’il ne peut être pleinement appréhendé dans la nomenclature qui encadre aujourd’hui la comptabilité de l’État. On saisit bien la différence entre les dépenses d’avenir et les dépenses d’investissement. Ainsi, les salaires des professeurs de l’éducation nationale sont des dépenses d’avenir mais pas des dépenses d’investissement, puisqu’ils relèvent du fonctionnement démocratique d’un pays, soucieux d’offrir à tous, gratuitement, un enseignement de qualité. Le remboursement des intérêts de la dette est une dépense liée au passé mais il représente tout de même une dépense de fonctionnement nécessaire. Je présenterai un amendement pour définir encore plus précisément les notions de dépense de fonctionnement et dépense d’investissement. Nous en discuterons avec le Gouvernement en séance.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Même si nous n’en sommes qu’au début de nos travaux, je suis heureux de vous présenter l’aboutissement d’un travail de trois ans, engagé avec le président Éric Woerth. Nous voici parvenus à un moment important puisque nous vous avons régulièrement annoncé l’arrivée de cette proposition de loi organique comme une pièce maîtresse de l’avenir de nos finances publiques, surtout depuis le début de la crise. Modifier le contenant pour mieux en maîtriser le contenu, c’est un débat qui nous anime depuis longtemps. Nous sommes extrêmement fiers de vous soumettre cette première modification substantielle de la LOLF depuis vingt ans.

Nous avons souhaité, au début de l’année 2019, relancer la mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances afin de dresser le bilan de notre constitution financière. Nous souhaitions y apporter certains ajustements à la lumière de la pratique budgétaire, mais sans en bouleverser l’architecture d’ensemble, ni l’esprit que nous voulons, au contraire, conforter.

Nous avons modestement tenté d’inscrire nos pas dans ceux des pères de la LOLF, Didier Migaud à l’Assemblée nationale et Alain Lambert au Sénat. La LOLF est, avant tout, un outil parlementaire, et nous avons considéré qu’elle devait le rester. C’est pourquoi il s’agit d’une proposition de loi et non d’un projet de loi.

La démarche adoptée se veut résolument transpartisane, pragmatique, éclairée par l’expérience, guidée par la volonté d’améliorer la qualité de nos discussions budgétaires et de consolider le rôle central du Parlement dans l’examen et le contrôle des finances publiques.

Les travaux de la MILOLF ont abouti en septembre 2019 à quarante-cinq recommandations qui inspirent, à l’évidence, la proposition de loi organique et la proposition de loi ordinaire que nous vous présentons aujourd’hui. Quatre axes avaient déjà guidé nos propositions : rationaliser le calendrier et la procédure budgétaire pour plus de transparence et de lisibilité, renforcer la portée de l’autorisation parlementaire, renouveler la démarche de performance et conforter la logique de résultats, améliorer l’information et le contrôle du Parlement. Il est évident que ces axes sont à présent complétés et confortés par certains éléments de la crise sanitaire que nous vivons depuis plus d’un an. D’ailleurs, je ne suis pas certain que cette proposition de loi aurait abouti sans la crise. Celle-ci a mis en évidence la nécessité de réviser la LOLF pour nous doter d’outils à même d’améliorer la gestion, le contrôle et la programmation de nos finances publiques.

Cette proposition de loi organique a pris de l’épaisseur à mesure que nous avancions dans le processus d’initiative législative. Le Gouvernement l’a ainsi intégrée aux réformes structurelles présentées à la Commission européenne dans le cadre du programme de stabilité pour les années 2021-2027 et du programme national de reprise et de résilience (PNRR). Ce n’est pas anodin : j’y vois l’importance de la réforme du cadre organique des finances publiques dans la réforme de l’État.

Le Conseil d’État, associé à nos travaux, nous a apporté un éclairage juridique très complet et précieux. Vous le constaterez, nombre d’amendements que je présenterai avec le président sont issus de ses analyses et suggestions.

Avant d’aborder le contenu du texte, je remercie le président Éric Woerth pour son engagement et son ouverture d’esprit dans le cadre des travaux menés ensemble depuis la MILOLF jusqu’aux propositions que nous portons aujourd’hui, en passant par les discussions que nous avons eues devant le Conseil d’État.

Sur le fond, nous souhaitons renforcer la place de la pluriannualité dans les discussions budgétaires. Elle s’est imposée à l’évidence pour appréhender la maîtrise et l’équilibre de nos comptes publics. Il s’agit d’un principe très important au niveau européen, que l’on retrouve moins dans notre droit budgétaire. Une stratégie de finances publiques conçue sur plusieurs années est pourtant essentielle, pour démontrer que la soutenabilité de notre dette est garantie et, ainsi, préserver la qualité de signature de la France auprès de ses créanciers présents et futurs.

Cet enjeu est encore plus fort en sortie de crise. Comme je l’ai évoqué ce matin en séance publique lors du débat d’orientation sur les finances publiques, nous devrons choisir une stratégie et une trajectoire dans l’année qui vient, afin de reprendre le contrôle de nos finances publiques. Devrons-nous recourir ou non à l’instrument des prélèvements obligatoires ? Devrons-nous instaurer des investissements d’avenir supplémentaires ? Comment définirons-nous une trajectoire de maîtrise et de modération propre aux dépenses publiques ? Toutes ces options politiques, qui sont sur la table, sont respectables, et les Français trancheront prochainement.

En tout état de cause, la proposition de loi organique introduit des outils pour mesurer l’évolution de la dépense publique, quels que soient les choix politiques. La loi de programmation des finances publiques fixerait ainsi une trajectoire d’évolution de la dépense publique, exprimée en milliards d’euros pour plus de lisibilité. Les déviations de cette trajectoire seraient mesurées par un compteur des écarts, présenté avec le projet de loi de loi de finances. Le Gouvernement serait tenu d’expliquer les raisons de ces écarts. Cet effort d’éclaircissement ne concerne pas seulement la dépense publique : nous vous proposerons également de renforcer l’information disponible sur les dépenses fiscales.

Par ailleurs, nous proposons une refonte du calendrier budgétaire de l’année. Les rendez-vous parlementaires sont multiples et se recoupent parfois. La proposition de loi organique suggère en particulier de fusionner les débats d’avril relatifs au programme de stabilité (PSTAB) et ceux d’orientation des finances publiques, en juillet. Peut-être avons-nous participé, ce matin, au dernier débat d’orientation des finances publiques.

Nous voulons, de surcroît, renforcer les grands principes budgétaires d’unité et d’universalité, fondements de la lisibilité de l’action publique et du consentement à l’impôt. Une nouvelle doctrine encadrant l’affectation de taxes à des tiers autres que les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales serait ainsi consacrée. Cette pratique des taxes affectées est trop souvent vue comme une protection alors que le mode de financement de droit commun des services publics est bien la dotation budgétaire, en tant qu’elle est autorisée par le Parlement sur la base d’une proposition motivée du Gouvernement. Nous souhaitons revenir à cette « pureté budgétaire » que la LOLF avait introduite.

D’ailleurs, autant le dispositif est étoffé pour ce qui est des dépenses, autant nous manquons de visibilité quant à l’utilisation des taxes affectées, qui contribuent au foisonnement et à l’éclatement de notre système fiscal, au détriment de la lisibilité nécessaire au consentement éclairé des citoyens.

La discussion budgétaire serait également simplifiée. Nous créons ainsi une nouvelle loi de finances de fin de gestion, qui inscrit dans le marbre la pratique engagée en 2018 des collectifs de fin d’année sans mesure fiscale.

Enfin, nous souhaitons appréhender différemment la dépense publique, afin d’identifier les investissements de long terme.

Je n’oublie pas, évidemment, que nous souhaitons consacrer le Printemps de l’évaluation au sein de la LOLF. Cet exercice, dont nous avons récemment terminé la quatrième édition, est une bonne pratique.

Ce n’est pas tous les jours que nous avons l’occasion de discuter du cadre organique de nos finances publiques et de corriger certaines difficultés que nous éprouvons dans notre examen parlementaire. Je me réjouis de cette occasion de réaffirmer la place du Parlement comme concepteur du cadre de nos finances publiques. Rappelons, à cet égard, que notre commission spéciale sera amenée à examiner une proposition de loi organique proposée par Thomas Mesnier, pour le volet des finances sociales. Elle contient des avancées majeures et je vous invite à l’adopter tout aussi largement que celle que j’ai cosignée avec Éric Woerth. C’est en menant ces travaux sérieux, au long cours, que le Parlement affirme sa place dans l’équilibre de nos institutions.

Mme Bénédicte Peyrol (LaREM). En effet, ce n’est pas anodin que de débattre d’une proposition de loi organique des finances publiques ou du financement de la sécurité sociale. C’est même un honneur pour la commission des finances et celle des affaires sociales. D’une certaine manière, ces textes sont le bilan de l’expérience des uns et des autres, certains ayant plus d’ancienneté que d’autres.

Il nous est proposé de renforcer notre rôle de parlementaires dans le contrôle et la gestion des finances publiques. Dans la pratique, le Printemps de l’évaluation nous a permis d’anticiper les mesures que vous prévoyez. Je salue le travail d’Amélie de Montchalin, de Jean-Noël Barrot mais aussi celui de l’ensemble des parlementaires, que vous avez soutenus, monsieur le président. Nous témoignons par là-même de la capacité du Parlement à travailler correctement.

La commission des finances n’a pas attendu la crise pour s’intéresser à la dette, à laquelle je consacre chaque année un rapport spécial, mais la crise a renforcé l’urgence d’en discuter. Certains ont évoqué l’annulation de la dette ou sa transformation en dette perpétuelle ; pour ma part, je pense qu’il est de la responsabilité politique de dire qu’une dette se gère et se rembourse. Il faut utiliser les outils à notre disposition pour la réduire.

Les articles 1er et 10 renforcent la prise en compte de la stratégie pluriannuelle des finances publiques. L’article 3 transcrit la doctrine d’emploi des taxes affectées, qui fait l’objet de longs débats chaque année. Le Conseil d’État a fait plusieurs remarques concernant les critères de choix de l’affectation, ainsi que sur la mise en œuvre de cette doctrine, car les opérateurs limitent parfois le pouvoir politique et la transparence de notre pilotage budgétaire. L’article 5 rassemble l’ensemble des dispositions fiscales qui ont un impact sur les recettes de l’État. J’espère qu’il nous permettra de gagner du temps et d’être efficaces en clarifiant le débat parlementaire.

Le président vient d’évoquer les dispositions sur la présentation des dépenses de fonctionnement et d’investissement dans l’article d’équilibre. Nous devons avancer sur ces sujets.

Au-delà du renouvellement du cadre budgétaire prévu par cette proposition de loi, la bonne gestion des comptes publics tient à des choix, que nous avons beaucoup de mal à faire en France. Nous devrons décider quelles dépenses maintenir, et à quelles dépenses mettre un terme.

M. Patrick Hetzel (LR). Cette réforme de la gouvernance de nos finances publiques est évidemment la bienvenue – il faut savoir reconnaître quand les choses vont dans le bon sens.

Ces propositions de loi, ordinaire et organique, entendent renforcer le rôle du Parlement pour le vote des lois de finances, le contrôle de l’action du Gouvernement et l’évaluation de l’efficacité des politiques publiques. Les avancées proposées, très intéressantes, méritent d’être saluées.

Le Printemps de l’évaluation, lancé à l’initiative du président Woerth, sera consacré dans la loi organique. L’importance de la pluriannualité dans les discussions budgétaires sera renforcée. Une programmation budgétaire triennale devra être présentée pour chaque programme budgétaire afin de donner au législateur une trajectoire indicative. La loi de programmation des finances publiques devra définir une trajectoire d’évolution de la dépense publique, en milliards d’euros et en pourcentages.

La présentation budgétaire sera plus lisible et plus simple par une distinction claire entre les dépenses d’investissement et les dépenses de fonctionnement. Par ailleurs, la fusion du débat d’orientation des finances publiques avec celui consacré au programme de stabilité devrait permettre de simplifier la cartographie annuelle des rendez-vous budgétaires. Le temps ainsi libéré devrait être consacré à un débat annuel sur le sujet fondamental de la dette.

Une loi de finances de fin de gestion sera votée chaque année. Elle permettra de s’assurer de la saine gestion des finances dans un collectif budgétaire spécifique au lieu de voter une profusion de projets de loi de finances rectificatives dont la lisibilité n’est pas garantie. Autre avancée, un débat propre aux collectivités territoriales sera garanti dans chaque loi de finances. Enfin, ces textes vont renforcer l’encadrement des recettes des opérateurs de l’État pour rendre plus lisible le budget global de l’État.

Le groupe Les Républicains votera ces propositions de loi ordinaire et organique, bienvenues et nécessaires pour améliorer la qualité de l’examen des projets de lois de finances, pour les rendre plus lisibles et améliorer l’information du Parlement. Nous espérons que le Gouvernement jouera le jeu, car c’est là que le bât risque de blesser : nous avons vu encore récemment que le garde des sceaux cherchait à se dérober au sujet de l’exécution budgétaire, en refusant de développer certains indicateurs.

Après l’adoption de ces textes, conçus de manière transpartisane, la discussion budgétaire aura plus de poids, en retrouvant une dimension plus politique, les enjeux de chaque loi de finances étant clairement posés dès le départ. Nous espérons que le débat budgétaire sera plus vivant.

M. Brahim Hammouche (Dem). Réformer l’État par son budget, comme ne cessait de le rappeler Philippe Séguin, et redonner tout son sens à l’autorisation parlementaire ; tels sont les deux objectifs de la loi organique sur les lois de finances, ou LOLF, adoptée en 2001 à l’initiative de Jean Arthuis et Didier Migaud.

Vingt ans après, ces objectifs n’ont pas tout à fait été atteints. La culture de l’évaluation ne s’est pas suffisamment implantée dans la gestion publique. Le Parlement s’est certes affirmé dans l’examen des lois de finances, mais son information par le Gouvernement reste trop erratique, les torts à ce sujet étant probablement partagés. Force est de reconnaître que de nombreux efforts doivent être réalisés en matière de maîtrise de la dépense publique, et notre situation budgétaire après la crise nous conduira à y faire plus attention encore.

Cette proposition de loi contribue largement à renouveler l’examen parlementaire des lois de finances, et ainsi à corriger ses défauts. Le Printemps de l’évaluation, grande réussite de cette législature, est inscrit dans le cadre organique. La loi de programmation des finances publiques et, en conséquence, l’article liminaire des projets de lois de finances, sont enrichis du vote d’une norme des dépenses en valeur et en volume. L’information du Parlement est renforcée et rationalisée. Enfin, les pouvoirs du Haut conseil des finances publiques sont élargis.

Nous nous réjouissons de ces propositions et nous voterons ces textes. Nous proposerons d’ailleurs de compléter ces avancées sur plusieurs sujets, et je sais que nous trouverons parmi nos collègues de nombreux soutiens. Nous regrettons néanmoins que cette réforme ne s’attaque qu’à un seul des objectifs de la LOLF et oublie la réforme en profondeur de l’État.

Mme Lise Magnier (Agir ens). Je tiens, moi aussi, à souligner que ces propositions de loi sont le fruit d’un travail transpartisan mené dans le cadre de la MILOLF. La LOLF n’a été que très légèrement modifiée depuis 2001 ; il était donc temps d’actualiser les pratiques afin de mieux prendre en compte les enjeux auxquels sont confrontées nos finances publiques : le besoin d’une plus grande lisibilité, d’une meilleure appropriation du débat sur l’endettement public et d’une meilleure association du Parlement. Je partage l’avis du rapporteur général, il est probable que la crise a permis d’accélérer l’aboutissement de ces travaux.

Cette proposition de loi organique ne révolutionne pas la LOLF ni la gouvernance des finances publiques, ce qui n’était d’ailleurs pas souhaitable, mais elle vient apporter des précisions et des améliorations bienvenues, issues d’un travail au long cours de la MILOLF et en cohérence avec les engagements de modernisation de la gouvernance des finances publiques pris par la France auprès de la Commission européenne. Nous partageons les priorités identifiées par les auteurs des propositions de loi : le renforcement du pilotage pluriannuel des finances publiques, l’amélioration de la transparence et la rationalisation du travail parlementaire.

Si la pluriannualité était déjà de mise depuis la loi organique du 17 décembre 2012, elle sera confortée par la présentation d’objectifs de dépenses exprimés en milliards d’euros, par sous-secteur.

La transparence des finances publiques sera également renforcée grâce à des ajustements de la structure du projet de loi de finances, à la clarification du cadre applicable aux taxes affectées et aux prélèvements sur recettes, qui nous occupe longuement chaque année, et à la modification de la nomenclature des lois de finances.

L’information et les droits du Parlement sont renforcés par la possibilité d’un débat sur la dette publique ou encore la création d’un pouvoir général de sollicitation des autorités administratives indépendantes au profit des commissions des finances de l’Assemblée et du Sénat. Le groupe Agir ensemble soutient ces deux textes.

M. Michel Zumkeller (UDI-I). Face à une crise sanitaire majeure aux conséquences économiques sans précédent, la France a réagi par des mesures exceptionnelles pour lutter contre l’épidémie, afin de soutenir à la fois le revenu des ménages et le tissu économique. Cette crise aura un impact durable sur nos finances publiques et doit nous amener à changer notre manière de voir les choses, en menant une réflexion en profondeur sur une nouvelle approche.

Les principes fondateurs de la LOLF tendaient à un changement de logique, à une confiance a priori, à une culture du résultat plutôt que des moyens, à un élan managérial et des pratiques innovantes. Ils ont été dévitalisés par un appareil bureaucratique bloquant, pour reprendre les termes d’Alain Lambert, l’un des pères de cette fameuse LOLF. Les conséquences de la crise sanitaire doivent nous permettre de retrouver l’esprit de ce texte en supprimant les obstacles administratifs et en nous engageant vraiment vers une nouvelle gouvernance fondée sur la confiance a priori et le contrôle a posteriori, comme le démontre cette proposition de loi organique.

C’est en ce sens que nous avons déposé des amendements afin d’accroître le contrôle du Parlement, qui vont plus loin que cette proposition de loi organique. Nous proposons, par exemple, la saisine de la Cour des comptes par les présidents de groupe ou l’envoi d’une étude d’impact par le Gouvernement lorsqu’il dépose des amendements après expiration du délai opposable aux parlementaires.

Nous tenons aussi à saluer l’instauration d’un débat annuel sur la dette publique et la remise d’un rapport par le Gouvernement sur les caractéristiques de cette dernière, prévus à l’article 9. Alors que notre dette progresserait de 190 milliards d’euros et s’établirait à 117,2 points de PIB en 2021, il devient urgent de penser aux générations futures, comme nous ne cessons de le rappeler avec d’autres groupes parlementaires depuis plusieurs mois. Il y a trois ans, le Président de la République soulignait déjà que la dette était de « l’impôt au carré ». Malheureusement, trois ans après, la dette a continué de s’accroître, principalement cette dernière année.

Nous nous étonnons de l’absence d’un volet propre aux finances locales. Nous sommes convaincus depuis la crise que la relance se fera d’abord par les territoires. Dans cette perspective, nous proposons un amendement visant à instaurer une loi de financement des collectivités territoriales, votée annuellement au Parlement, afin d’accroître la visibilité des différents transferts financiers et surtout de faciliter le pilotage des finances publiques locales. Même si cette crise a révélé tout ce que le centralisme bureaucratique français peut avoir d’absurde et de contre-productif, cette proposition de loi organique va dans le bon sens en s’efforçant de moderniser et de simplifier notre constitution financière. Notre groupe aborde donc favorablement son examen et salue le travail de ses rédacteurs ainsi que leur engagement pour qu’elle aboutisse rapidement.

M. Charles de Courson (LT). Nous sommes en plein dans le roman d’Alexandre Dumas « Vingt ans après ». Vingt ans après son adoption, nous allons réviser notre constitution financière. Il n’y a que deux auteurs à ses textes, deux mousquetaires budgétaires : Éric Woerth et Laurent Saint-Martin. Permettez-moi d’essayer d’être le troisième.

Je tiens à féliciter notre président et notre rapporteur pour le travail accompli. Pour retoucher un texte aussi important, il faut une certaine habilité et un grand doigté ; cela a globalement été le cas.

Ces textes permettent de concrétiser les travaux de la MILOLF et d’intégrer une partie de ses quarante-cinq recommandations. Face à la crise, il était urgent de rénover le cadre des finances publiques. Beaucoup d’éléments de ces deux textes vont dans la bonne direction, et le groupe Libertés et Territoires votera en leur faveur. Je pense en particulier à la création d’un débat sur la dette et sa soutenabilité ainsi que la mise en place d’objectifs de dépenses. Je plaide depuis longtemps pour un renforcement de la maîtrise de dépenses publiques dans les discussions budgétaires.

Il reste des voies d’amélioration. La présentation de la loi de finances pourrait gagner en simplicité et en cohérence afin que notre budget devienne réellement limpide et intelligible pour l’ensemble des citoyens. Il me semble essentiel de renforcer les pouvoirs des membres de la commission des finances et de respecter nos quatre grands principes budgétaires : l’universalité – qui inclut la règle de la non-contraction des recettes et des dépenses –, l’unité, la spécialité et l’annualité, sous réserve d’une pluriannualité indicative.

Je défendrai un amendement reprenant le texte de ma proposition de loi limitant le recours aux dispositions fiscales de portée rétroactive. Son objectif est de préciser et d’encadrer le concept de rétroactivité fiscale, dans le respect du principe de sécurité juridique, afin de ne pas laisser le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État légiférer à notre place. Ce sujet essentiel ne peut être ignoré plus longtemps.

La révolution commencée il y a vingt ans par la LOLF doit impérativement se poursuivre et, contrairement aux propos de Napoléon Bonaparte à propos de la Révolution française, elle ne doit pas être fixée aux principes qui l’ont commencée pour l’enterrer. Il est nécessaire d’aller au-delà, mais ne surestimons pas les capacités de la LOLF à résoudre nos problèmes budgétaires. Il s’agit d’un instrument aux mains des gestionnaires publics et du Parlement, encore faut-il qu’ils en fassent bon usage. Comme disait le baron Louis, le père des premières règles en matière de finances publiques : « Faites-moi de bonne politique et je vous ferai de bonnes finances. » Tel est le souhait que je formule depuis vingt-huit ans !

M. Éric Coquerel (FI). Je commencerai par adresser un satisfecit – rassurez-vous, nous passerons à autre chose par la suite ! Les articles 5, 7 et 10 renforcent l’information des parlementaires, comme nous le demandions. Depuis le début de la législature, nous critiquons l’impossibilité d’amender les objectifs ; l’article 5 répond à cette demande.

Le reste du texte me semble en contradiction avec la volonté de donner une place plus importante au Parlement. Je vois dans la proposition de loi organique un marchepied pour la norme de dépenses pluriannuelle contraignante recommandée par le rapport Arthuis et promise à Bruxelles par le Gouvernement dans le programme de stabilité transmis en avril. Nous nous y opposons, car d’un point de vue démocratique, appliquer au budget l’équivalent de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie des lois de financement de la sécurité sociale restreindrait encore le choix des politiques budgétaires ouvert aux parlementaires.

Cette proposition de loi prévoit de développer les prérogatives du Haut Conseil des finances publiques, certes de manière indicative, mais cela nous semble un pas vers l’adoption d’une norme contraignante au service d’une politique de maîtrise de la dépense publique. Cette dernière, qui a fait tant de mal au pays, semble vouloir s’imposer alors que la crise du covid impose de ne pas en faire l’alpha et l’oméga de la politique économique. Pour preuve, l’article 9 fait de la dette des administrations publiques un mal qu’il faudrait combattre pour mieux mettre en œuvre la politique d’austérité, alors que les plans de relance et différentes mesures assèchent les recettes fiscales – je pense notamment aux impôts de production. Il s’inscrit dans la logique du projet de loi de finances qui sera présenté en fin d’année, et à ceux des années suivantes si Emmanuel Macron était réélu. Mais nous ferons en sorte que ce ne soit pas le cas.

M. Jean-Paul Dufrègne (GDR). Ces deux propositions de loi, organique et ordinaire, sont largement inspirées du rapport de la MILOLF et des différents rapports commandés par le Gouvernement, auprès de la Cour des comptes et de la commission Arthuis.

Comme nous avions sévèrement critiqué ces rapports, nous nous dressons fermement contre les dispositifs de ces propositions de loi. Sous des aspects techniques, elles poursuivent une idéologie très libérale autour de deux axes : créer de nouveaux outils de pilotage centrés sur les dépenses publiques, afin de les diminuer ; affaiblir le pouvoir des parlementaires lors de l’examen et la construction du budget et faire de ce moment essentiel un débat technique plutôt que politique.

La principale des évolutions proposées est la mise en place de la norme de dépenses des administrations publiques déclinée sur plusieurs années, pour réaliser le rêve ultime de tous les libéraux : créer un outil qui deviendra à terme contraignant afin de diminuer d’année en année les dépenses publiques. Vous stigmatisez la dépense publique comme nuisible afin de mieux réduire le périmètre de l’État.

Vous poursuivez également la tendance, engagée en 2017, à réduire la principale prérogative du Parlement – faire la loi –, au profit de ses prérogatives de contrôle et d’évaluation. Certes, nous pourrons débattre du programme de stabilité, de la dette, et des missions budgétaires lors du Printemps de l’évaluation. Ce sera sûrement très intéressant, mais nos possibilités d’amendement seront encore plus contraintes.

Nous combattrons donc ce renforcement du carcan budgétaire, qui nuit à l’action de l’État. Nous regrettons, à ce propos, que certains de nos amendements aient été jugés irrecevables en application d’une interprétation très stricte de la recevabilité budgétaire, alors que nous étudions la loi organique qui en fixe le cadre. Ces amendements sur la fongibilité asymétrique ou les plafonds d’emplois auraient permis des débats politiques de fond.

M. le président Éric Woerth. J’ai été conduit à déclarer irrecevables, au regard de l’article 40 de la Constitution, onze des amendements déposés en vue de l’examen des quatre propositions de loi.

En ce qui concerne la proposition de loi organique relative à la modernisation des finances publiques, l’amendement CS37 était en contradiction directe avec l’article 40, dont les termes mêmes interdisent de gager les charges, mais le débat aura lieu puisque plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 8 proposent des solutions alternatives. Les amendements CS57, CS59, CS61 et CS62 prévoyaient de déplafonner certains crédits et ouvraient donc au Gouvernement une faculté de dépenser que la LOLF interdit. Ils ne peuvent pas être corrigés pour la séance. L’amendement CS55 proposait, quant à lui, cinq modifications, dont une seule n’était pas recevable. Il peut être réécrit d’ici à la séance. Le secrétariat de la commission a déjà apporté une explication à son auteur.

Le texte vise à offrir de nouveaux instruments. Chaque gouvernement et chaque majorité conduiront dans ce cadre la politique qu’ils souhaiteront. La qualité des instruments conditionne la clarté des débats, même s’ils ne sont pas une garantie absolue. On n’est pas un bon artisan si l’on n’a pas les bons outils.

Proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques (no 4110 rectifié) (M. Laurent Saint-Martin, rapporteur)

TITRE IER DISPOSITIONS RELATIVES À LA PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES

Article 1er : Révision du cadre pluriannuel des finances publiques

Amendements de suppression CS46 de M. Jean-Paul Dufrègne et CS60 de Mme Sabine Rubin.

M. Jean-Paul Dufrègne. Nous proposons de supprimer l’article 1er, qui intègre dans la LOLF l’article de la loi organique de 2012 relatif à la programmation des finances publiques, dans une version augmentée. Nous marquons notre opposition à la programmation budgétaire par des plafonds de crédits : cette démarche ne fonctionne pas, car elle pose comme principe que la politique budgétaire est neutre pour l’économie. Nous nous opposons encore plus fortement à la mise en place d’une norme de dépenses.

M. Éric Coquerel. Même si la plupart des dispositions visées existent déjà, nous y sommes opposés. La présentation d’objectifs de dépenses ouvre la porte à la norme contraignante en matière de dépenses publiques préconisée par le rapport Arthuis. Au-delà de la question de l’agrégation des objectifs de dépenses, nous contestons le principe même de ces objectifs, qui précisent la trajectoire du solde structurel. C’est un concept qui n’est ni pertinent d’un point de vue économique ni compréhensible pour les citoyens. Par ailleurs, nous refusons la logique d’austérité imposée par les règles européennes, qui motive ces dispositions.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. L’article 1er renforcera les instruments de pilotage des finances publiques, ce qui est nécessaire pour assurer la lisibilité. Il prévoit que l’évolution de la dépense publique sera exprimée en milliards d’euros. Je plaide également en faveur de l’instauration d’un « compteur des écarts » par rapport à la norme de dépenses, qui nous permettra de contrôler et évaluer réellement l’évolution de la dépense publique.

Par ailleurs, l’article 1er procède à des ajustements du calendrier budgétaire en créant une séquence importante consacrée notamment au débat sur la dette publique. Il s’agit là encore d’une avancée qui augmentera la qualité des débats au Parlement.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS65 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. À travers cet amendement de repli, nous entendons remplacer le plafond de dépenses inscrit dans la loi de programmation des finances publiques par un plancher de dépenses permettant de satisfaire les droits constitutionnels de chaque citoyen. Le budget doit être défini, non pas en vue de maîtriser les dépenses publiques mais en fonction des besoins des citoyens – ce que nous réclamons également pour l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM).

Du reste, il est paradoxal d’imposer une norme pluriannuelle contraignante en matière de dépenses publiques alors même que, selon la Banque de France, il faudra attendre la mi-2022 pour que le PIB retrouve son niveau d’il y a deux ans – contrairement à ce que ne cesse de répéter le Gouvernement. Il faut donc relancer l’activité en aidant les personnes précaires et en soutenant la consommation populaire, et non mener une politique de l’offre. L’amendement CS65 vise à préparer cette nouvelle politique.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. Fixer un plafond, ce n’est pas empêcher l’augmentation de la dépense publique. Nous l’avons constaté ce matin encore avec le tiré à part : il est toujours possible de dépasser les 3 %, notamment pour faire face aux besoins de financement des services publics. Même si le cadre de la programmation n’est pas contraignant, il n’en est pas moins nécessaire pour des raisons de lisibilité et d’amélioration du pilotage des finances publiques. Il s’agit d’éviter, non pas que celles-ci augmentent mais qu’elles dérapent.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS36 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Nous proposons d’ajouter la phrase suivante : « Les objectifs et recommandations formulés dans la loi de programmation des finances publiques n’ont qu’une portée purement informative et ne peuvent revêtir un caractère contraignant. »

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. Soit dit en passant, nous avons constaté ce matin encore que ce sont principalement les lois de programmation sectorielles qui sont responsables de l’augmentation de la dépense. Même si elles ne sont pas contraignantes, cela peut poser problème quant à la capacité à réduire la dépense publique en cours de législature.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CS47 de M. Jean-Paul Dufrègne, CS113 du rapporteur et CS30 de M. Michel Zumkeller (discussion commune).

M. Jean-Paul Dufrègne. L’amendement CS47 vise à supprimer la mise en place d’une norme de dépenses en euros prévue par la proposition de loi.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Mon amendement est rédactionnel.

M. Michel Zumkeller. L’amendement CS30 a pour objet de remplacer le terme « croissance » par le terme « évolution ». Employer le premier mot, c’est laisser entendre que les dépenses sont toujours en augmentation.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement CS47 : l’introduction dans la LOLF de la norme de dépenses en euros courants est intéressante, car elle facilitera les comparaisons entre les années.

Quant à l’amendement de M. Zumkeller, je propose à travers l’un de mes amendements une coordination plus précise. J’en demande donc le retrait.

L’amendement CS30 est retiré.

Successivement, la commission rejette l’amendement CS47 et adopte l’amendement CS113.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS114 du rapporteur.

Amendement CS48 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Il vise à supprimer le caractère contraignant des lois de programmation et à réduire leur portée.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. Les lois de programmation n’ont aucun caractère contraignant. De plus, le texte vise précisément à augmenter leur portée.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS131 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Il s’agit, là encore, de limiter le caractère contraignant des lois de programmation en supprimant les dispositions destinées à encadrer les dépenses ou les recettes.

Suivant l’avis, du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Elle adopte les amendements rédactionnels identiques CS115 du rapporteur et CS33 de M. Michel Zumkeller.

Amendements CS116 du rapporteur et CS132 de M. Jean-Paul Dufrègne (discussion commune).

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit de préciser que l’article liminaire rappelle la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’alinéa 34 prévoit que les lois de finances comprennent un article liminaire retraçant les niveaux de dépenses et de recettes pour l’année sur laquelle elles portent mais aussi des prévisions pour les années concernées par la loi de programmation, ce qui accroît la nécessité pour la loi de finances de se conformer à celle-ci. Compte tenu de notre opposition à la programmation des finances publiques et du carcan que représente la loi de programmation, nous demandons la suppression de ce nouveau dispositif.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable sur l’amendement CS132.

M. le président Éric Woerth. À un moment donné, il faudra sans doute instaurer un cadre pluriannuel glissant, avec une programmation pluriannuelle renouvelée chaque année.

La commission adopte l’amendement CS116.

En conséquence, l’amendement CS132 tombe.

Amendement CS135 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Nous proposons, à la suite d’allers-retours entre la MILOLF, le Gouvernement et les administrations, de supprimer la déclinaison par sous-secteurs du solde structurel des administrations publiques prévue dans la proposition de loi. La prévision de solde structurel est une construction macroéconomique. Force est de reconnaître qu’il est difficile de l’estimer pour chaque sous-secteur, notamment en raison des transferts entre administrations intervenant chaque année. Notre souhait s’est donc heurté à la réalité des chiffres et de la présentation budgétaire.

M. Charles de Courson. Permettez-moi de ne pas être d’accord avec cet amendement. Les problèmes méthodologiques que vous soulevez concernent essentiellement les collectivités territoriales. Il faudrait disposer au minimum d’une présentation distinguant les administrations de sécurité sociale (ASSO) et les administrations publiques centrales (APUC), à côté du résultat global « toutes administrations publiques (APU) » donné pour l’instant.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Vous avez raison, mais les transferts entre sous-secteurs, les compensations et les dégrèvements sont si nombreux que se pose la question du point de référence : à quel moment arrêtera-t-on le solde structurel ? Pour les ASSO comme pour les APUC, on peut faire porter le déficit sur qui l’on veut en fonction de la référence que l’on choisit. C’est la raison pour laquelle le solde structurel doit être considéré de manière globale. En définitive, quand il s’agit de présenter l’état financier du pays, c’est bien cela qui compte : le chiffre consolidé « toutes APU ». Cela n’empêche pas, d’ailleurs, les déclinaisons par sous-secteur pour un grand nombre d’informations.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CS117 et CS142 du rapporteur,

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS133 de M. Jean-Paul Dufrègne.

Amendement CS118 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination proposé par le Conseil d’État, qui vise à harmoniser le contenu du rapport présenté à l’occasion du nouveau débat du mois d’avril fusionnant le débat sur le programme de stabilité et le débat d’orientation des finances publiques.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS49 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Il vise à rendre obligatoire un débat sur le programme de stabilité, suivi d’un vote dans les deux chambres du Parlement.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Sur le fond, je partage votre point de vue, mais une loi organique ne peut déterminer l’ordre du jour des assemblées : celui-ci est régi par l’article 48 de la Constitution.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS119 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel. La proposition de loi modifie l’ensemble du calendrier, y compris s’agissant du rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques, d’habitude présenté au mois de juin : sa remise coïncidera avec la nouvelle séquence regroupant le débat sur le programme de stabilité et le débat d’orientation des finances publiques, dite PSTAB-DOFP.

Il ressort de nos échanges avec la Cour des comptes que ce nouveau calendrier pourrait être source de difficultés pour l’institution. Tout en vous proposant d’adopter cet amendement rédactionnel, nous nous assurerons, d’ici à la séance publique, que ce calendrier est acceptable pour la Cour, sur le plan tant technique que de la disponibilité des données.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 1er modifié.

TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES AUX LOIS DE FINANCES

Article 2 : Changement d’appellation de la loi de règlement et modification de la catégorisation des lois de finances

La commission adopte l’amendement rédactionnel CS91 du rapporteur.

Amendement CS90 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je propose que la loi de règlement devienne la « loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année », ce qui correspondrait davantage à son objet.

M. le président Éric Woerth. C’est en effet plus clair !

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS32 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Une loi de financement des collectivités territoriales aurait pour effet d’accroître la visibilité des transferts financiers et de discuter du pilotage des finances publiques locales. Elle donnerait une vue d’ensemble des relations financières entre les collectivités et l’État et permettrait de fixer annuellement, par catégorie de collectivités, les conditions de l’équilibre global.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat, notamment lors de l’examen du projet de révision constitutionnelle. À titre personnel, j’y suis défavorable, pour des raisons empiriques d’abord : les transferts entre l’État et les collectivités sont tels – 120 milliards d’euros annuels – qu’une telle loi n’aurait pas grand sens. Ensuite, sans autonomie fiscale, donc sans révision constitutionnelle préalable, il ne peut y avoir de loi de financement des collectivités territoriales.

M. le président Éric Woerth. C’est une idée qui circule depuis longtemps mais je suis d’accord avec le rapporteur : à la différence de la loi de financement de la sécurité sociale, qui traite un bloc, cette loi de financement concernerait des collectivités très différentes et, compte tenu des rapports entre l’État et les collectivités territoriales, cela tendrait à compliquer les choses.

Je pense, comme nous le proposons à l’article 3, qu’aborder de manière synthétique le sujet des collectivités locales au sein du débat sur le PLF permettra déjà de résoudre un bon nombre de questions.

M. Charles de Courson. Notre collègue a raison de soulever cette question, dont nous avons déjà beaucoup discuté. Cet amendement est inconstitutionnel dans la mesure où les mesures qui en découleraient – la fixation de plafonds, par exemple – porteraient atteinte à la libre administration des collectivités territoriales.

Dans l’état actuel de la Constitution, la seule solution est de consacrer, lors du PLF, un débat aux finances locales qui aille au-delà du simple examen de la mission Relations avec les collectivités territoriales.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS93 du rapporteur.

La commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 : Renforcement de la doctrine d’affectation des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale

Amendement CS134 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Le financement par taxes affectées est devenu à la fois excessif et problématique, car beaucoup trop de taxes dérogent aux principes d’annualité, d’universalité et de respect de l’autorisation budgétaire. Pour la visibilité, le pilotage et l’évaluation des finances publiques, il convient d’en réduire la portée et de le restreindre à des cas précis.

Après avoir longuement travaillé et échangé avec le Gouvernement et le Conseil d’État, nous proposons une nouvelle doctrine d’affectation des taxes.

Il s’agit d’abord d’interdire le financement des fonds sans personnalité juridique : il ne nous paraît plus légitime que l’impôt soit capté par des véhicules financiers pour lesquels les obligations de publicité et les facultés de contrôle sont limitées.

Ensuite, le lien entre la taxe affectée et la mission de service public qu’elle permet de financer doit être établi. L’objectif est de renforcer le consentement à l’impôt. Nous l’avons vu avec la crise des gilets jaunes, une contribution sans lien avec ce qu’elle permet de financer, conçue comme une atteinte au pacte démocratique, peut susciter incompréhension et colère.

Il convient donc de contraindre le recours à la fiscalité affectée et de le restreindre pour revenir à davantage d’universalité budgétaire.

M. le président Éric Woerth. Cette proposition est l’aboutissement d’un travail de longue haleine et d’échanges nourris avec le Gouvernement et le Conseil d’État. L’interdiction de l’affectation à des fonds sans personnalité juridique fait consensus dans notre commission, car nous estimons que la transparence et la possibilité de contrôle doivent s’imposer.

Nous avons procédé à un inventaire : la somme des taxes affectées qui seraient concernées atteint tout de même 4,8 milliards d’euros ! Par ailleurs, les taxes affectées sans lien avec la mission de service public qu’elles permettent de financer représentent aujourd’hui 2,9 milliards d’euros.

Cela nous a amenés à formuler cette proposition, qui reprend, pour une bonne partie, celle du Conseil d’État.

M. Charles de Courson. Je suis tout à fait d’accord avec l’interdiction de cette monstruosité juridique que sont les fonds sans personnalité juridique – l’administration centrale les adore car elle peut faire ainsi ce qu’elle veut… Mais je m’interroge sur la notion de « lien » entre taxe et mission de service public. Qu’entendez-vous par là ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Chaque cas mérite débat. Ainsi, que la taxe sur les transactions financières (TTF) alimente le Fonds de solidarité pour le développement (FSD) est politiquement discutable : on peut concevoir que les pratiques de la finance spéculative viennent compenser la non-redistributions dans des pays en développement ; on peut aussi considérer que, pour le contribuable initial, il n’y a pas de lien direct avec les missions du FSD.

Il ne s’agit pas de supprimer des financements au FSD, monsieur Dufrègne, mais de changer la tuyauterie. L’objet de cet amendement n’est pas de diminuer la dépense publique, mais de repréciser le sens de la taxe et de conforter le principe d’universalité budgétaire.

Pour reprendre l’exemple du FSD, lorsque notre collègue Le Fur fait son travail de rapporteur spécial sur l’aide publique au développement, il est obligé, pour que son évaluation soit complète, d’aller chercher l’information concernant la taxe affectée. L’idée est qu’il ait une vision à 360 degrés de ce qui finance cette politique publique.

M. le président Éric Woerth. Nous avons dressé une liste de ces taxes sans lien, elles représentent 2,9 milliards d’euros ! Bien sûr, notre propos n’est pas de supprimer les ressources d’un organisme comme le FSD, mais de les remplacer par une ressource budgétaire. Il reviendra au Gouvernement et à la direction du budget de déterminer s’il existe un lien, le Parlement pourra en discuter et cela sera soumis in fine au contrôle du juge.

M. Charles de Courson. En termes clairs, ce sont respectivement 4,8 milliards et 2,9 milliards d’euros que l’on va rapatrier dans le budget de l’État, étant entendu que la dépense budgétaire augmentera d’autant. Grosso modo, 7 milliards, soit 2 % du budget, seront rebudgétisés. Je trouve cela beaucoup plus transparent.

M. le président Éric Woerth. L’entrée en vigueur de cette doctrine est repoussée au projet de loi de finances pour 2025, pour permettre les modifications nécessaires.

Mme Cendra Motin. Le rapport Charpy-Dubertret, qui contient un graphique sur les affectations de recettes au régime obligatoire, pose les mêmes questions. Ce travail, salutaire, doit être aussi conduit pour le budget de la sécurité sociale.

M. Jean-Paul Dufrègne. Une suggestion, monsieur le rapporteur, qui concerne la TTF : si vous changez la tuyauterie, pensez à augmenter le diamètre du tuyau !

M. le président Éric Woerth. Toujours plus d’impôts !

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

Amendement CS9 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. L’article 3 de la LOLF, dans sa rédaction actuelle, établit la liste des éléments considérés comme des ressources budgétaires de l’État. Or, si cette liste inclut les produits résultant des opérations de trésorerie, elle exclut explicitement les primes à l’émission d’emprunts de l’État.

Faute de pouvoir interdire définitivement les primes d’émissions enregistrées par l’Agence France Trésor (AFT), je propose que ces primes soient considérées comme des opérations budgétaires.

Pour rappel, en 2020, un volume inédit de primes d’émission, nettes de décotes, a été reçu – 30,7 milliards, soit près de 10 milliards de plus qu’en 2019. Ces primes ont un effet direct sur la trésorerie de l’État et varient fortement d’année en année. Elles s’accumulent au point de constituer un stock très important : en juin 2021, celui-ci s’établissait, d’après l’AFT, à 105,2 milliards.

Or, en comptabilité maastrichtienne, la prise en compte de ces primes permet de faire apparaître une dette publique moins importante. Par une illusion comptable, le niveau de la dette est artificiellement diminué. Cela représente tout de même 4 % du PIB en stock !

Considérer ces primes comme des éléments budgétaires donnerait une vision plus claire des opérations d’endettement de l’État.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. C’est un débat que nous avons régulièrement. Je ne sais pas si votre proposition est techniquement possible et je ne suis pas certain qu’elle soit souhaitable. Les primes d’émission étant amorties sur la durée des titres, les budgéter aurait peu de sens. Mais elles apparaissent bien au bilan de l’État, en tant que ressource de trésorerie, et elles entrent dans le solde maastrichtien.

Mme Bénédicte Peyrol. Monsieur de Courson, vous me demandez régulièrement, en tant que rapporteure spéciale sur la charge de la dette, s’il existe une stratégie de l’État s’agissant de ces stocks de primes, un pilotage très précis de ce qu’on pourrait mettre en réserve. Je ne pense pas qu’il y ait de stratégie à proprement parler : la question porte davantage sur la qualité de la dette, sur la demande des investisseurs. Par ailleurs, je m’assure chaque année que l’État peut faire face : il faut en effet pouvoir rembourser des titres émis avec des taux d’intérêt supérieurs à ceux qui ont cours.

M. Charles de Courson. Techniquement, émettre une nouvelle souche qui était à 4 % à dix ans alors que le taux est à 0 % consiste à augmenter les intérêts de la dette dans les comptes de l’État. Mais cela peut aussi s’inverser.

En comptabilité privée, on constitue une provision, qui peut être en « plus » ou en « moins » selon que l’on est au-dessus ou en dessous du ratio PER. Je trouve que de telles écritures permettraient une lisibilité sur le stock de dettes. Actuellement, le montant de la dette, en comptabilité maastrichtienne, est réduit de 105 milliards, soit 4 % du PIB : ce n’est quand même pas rien et cela donne une vision peu sincère des comptes de l’État.

M. le président Éric Woerth. Actuariellement, c’est neutre.

M. Charles de Courson. Mais ça ne l’est pas dans la traduction budgétaire !

M. le président Éric Woerth. Et si on émettait des souches négatives…

M. Charles de Courson. On augmenterait les frais financiers.

M. le président Éric Woerth. Ce serait un choix.

M. Charles de Courson. Comme l’a dit Bénédicte Peyrol, il n’y a pas de stratégie annuelle : l’AFT nous a assuré que jamais un ministre ne leur a demandé quoi que ce soit ; l’Agence décide librement du volume et du type d’émissions. Mais notez que des pays, comme l’Allemagne, ont refusé de procéder ainsi. Je ne trouve pas cela correct tant pour la lisibilité du montant de la dette que pour celle des intérêts de la dette.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS92 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Nous proposons d’apporter à l’article 3 de la LOLF une précision dont la nécessité est apparue à la lumière de nos échanges avec le Conseil d’État et qui est cohérente avec d’autres dispositions de la PPLO.

Il s’agit de distinguer, parmi les fonds de concours, ceux qui servent à financer des dépenses d’investissement et ceux qui financent d’autres dépenses. Cette distinction, tout à fait bienvenue, nécessite que nous créions une doctrine qui soit la plus objective possible et qui ne soit pas susceptible d’être remise en question à chaque nouvelle gouvernance.

M. Charles de Courson. Vous soulevez à raison, monsieur le rapporteur, cette très difficile question. Pendant des années, on ne budgétait que partiellement les fonds de concours – on le voit en comparant la loi de règlement à la loi de finances initiale. La direction du budget aimait bien cette pratique, car elle permettait de faire rentrer de l’argent sous cette forme en cours d’exercice, et donc d’ouvrir des crédits sans passer devant le Parlement, ce que permet la loi organique. La première difficulté se situe donc en amont : il s’agit d’exiger de cette même direction la budgétisation des fonds de concours.

La seconde porte sur la distinction entre investissement et fonctionnement, la grande masse des fonds de concours correspondant à de l’investissement. Avez-vous une idée de ce qu’ils représentent en loi de règlement – 4 ou 5 milliards d’euros ? – et du partage que vous proposeriez entre investissement et fonctionnement ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je partage votre intuition que les fonds de concours correspondent essentiellement à de l’investissement. La direction du budget s’est engagée à nous fournir des éléments sur ce premier distinguo.

C’est surtout l’objet de l’amendement suivant du président Woerth : la vraie difficulté va être de s’accorder sur ces notions d’investissement et de fonctionnement dans le budget de l’État, ce qui n’a jamais été fait jusqu’à présent.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS144 du président.

M. le président Éric Woerth. Il existe déjà dans la LOLF une définition de l’investissement et du fonctionnement : les dépenses relatives au premier correspondent aux « immobilisations corporelles et incorporelles de l’État » quand relèvent du second les « dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel » et les « subventions pour charges de service public ». Cette définition est toutefois très comptable et assez peu opérationnelle pour les hommes et les femmes politiques que nous sommes, c’est-à-dire pour le Parlement 

Nous avons donc intégré cette distinction entre investissement et fonctionnement dans la structure même du budget. D’ailleurs, on ne peut débattre de la dette si l’on ne connaît pas ce qui, en son sein, finance l’un ou l’autre. En cette période de sortie de crise, on voit bien que cette distinction est partout. Le Gouvernement lui-même l’observe, avec ses missions Plan de relance et Plan d'urgence face à la crise sanitaire, correspondant, l’une à l’investissement, l’autre au fonctionnement. Nos collectivités locales identifient clairement leurs dépenses relevant de l’un ou de l’autre, puisqu’il leur est impossible de s’endetter pour financer leur fonctionnement. Finalement, et c’est presque dommage, c’est l’État qui fait figure d’exception de ce point de vue.

Je propose donc d’autres critères que ceux de la LOLF : sont des dépenses de fonctionnement celles correspondant aux missions que tout citoyen est en droit d’attendre d’un État moderne et tenant à la gestion de notre modèle économique, social et institutionnel, c’est-à-dire le tout-venant, tandis que gagneraient à être qualifiées de dépenses d’investissement celles qui concourent au renforcement de la croissance potentielle et mettent en œuvre des choix fondamentaux et structurants. Il existe bien une grosse différence entre des dépenses d’avenir et des dépenses de fonctionnement.

Si nous adoptions une telle définition, il reviendrait ensuite à l’État de mettre en œuvre de tels critères, qui sont évidemment perfectibles, par programme et par action, et de s’en justifier au travers des projets annuels de performances (PAP). Cela donnerait lieu à un débat politique extrêmement contrasté selon les sensibilités politiques.

À ce stade, il s’agit d’un amendement d’appel. Je souhaite avoir le débat avec le Gouvernement en vue d’améliorer encore notre texte et de faire mieux coller la réalité de la vie budgétaire et de la dépense publique à nos propositions, plutôt que de conserver une définition par trop comptable.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je fais mien votre appel, monsieur le président, même si, techniquement, je demande le retrait de l’amendement. Si Didier Migaud et Alain Lambert avaient déjà, en leur temps, essayé d’introduire cette distinction entre fonctionnement et investissement dans la LOLF, ils y avaient renoncé parce que l’État a un spectre de dépenses beaucoup plus large que les collectivités ou les entreprises.

Néanmoins, nous essayons d’apporter des précisions au-delà des sept titres qui permettent aujourd’hui un niveau de détail intéressant. Il faut aller le plus loin possible dans ce que l’État et l’administration peuvent nous proposer. Une telle clarification doit s’opérer au fur et à mesure.

Il s’agit d’une proposition qui doit, dans un premier temps, rester politique, et, à terme, devenir suffisamment objective pour que chaque gouvernement puisse la reprendre à son tour.

M. Charles de Courson. Derrière l’amendement de notre président, il y a deux questions. D’abord, respecte-t-on la définition des dépenses de fonctionnement et des dépenses d’investissement ? Je pense qu’il faut se caler sur celle qui prévaut dans tous les systèmes comptables : est une dépense d’investissement celle qui augmente la valeur du patrimoine, le reste étant, a contrario, du fonctionnement. Définir les dépenses de fonctionnement comme celles qui « assurent le financement régulier des services publics » ne me paraît pas satisfaisant.

Ensuite, il y a la question de la présentation du budget de l’État. Nous avions eu le débat avec Jean Arthuis, expert-comptable à l’origine. Nous étions partisans qu’il soit présenté comme celui des collectivités territoriales et des entreprises, c’est-à-dire notamment en budgétisant les opérations de dette. Nous n’avons obtenu qu’une seule chose : une annexe qui présente le budget de l’État en fonctionnement et en investissement. Personne ne la lit, hélas – quand on le fait, on est saisi d’effroi –, alors que cela permettrait de faire prendre conscience à nos concitoyens des difficultés de la situation.

M. le président Éric Woerth. La seule idée patrimoniale ne suffit pas ; l’État est bien plus complexe que cela. Le salaire des chercheurs est ainsi clairement une dépense qui, même si elle est risquée, a vocation à augmenter la croissance potentielle du pays : or il ne s’agit pas d’une dépense patrimoniale.

M. Charles de Courson. Si, monsieur le président. En comptabilité privée, lorsqu’une entreprise fait de la recherche, elle inscrit à son bilan l’immobilisation correspondante.

M. le président Éric Woerth. Ce n’est pas le cas aujourd’hui pour l’État.

M. Charles de Courson. C’est bien pourquoi il faut se caler sur la comptabilité privée et sur la comptabilité publique hors celle de l’État. Lorsque les collectivités locales effectuent des travaux en régie avec leur propre personnel, elles immobilisent les dépenses correspondantes.

M. Jean-Paul Mattei. Je me demande s’il est possible d’aboutir à une définition, car même une dépense de fonctionnement, par exemple des services bien organisés, peut augmenter la croissance potentielle. La limite est excessivement compliquée à trouver, ce qui explique peut-être que l’on tourne en rond depuis des années. C’est d’ailleurs également vrai en comptabilité privée, dans certains cas. Reste qu’une présentation conforme à cette dernière serait évidemment beaucoup claire et lisible pour l’ensemble des Français.

M. le président Éric Woerth. Nous verrons en séance, car c’est assez fondamental pour le débat politique.

L’amendement est retiré.

Amendement CS143 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit, dans la même logique et sur la suggestion du Conseil d’État, de recréer, à l’article 5 de la LOLF, la catégorie des subventions pour charges d’investissement, qui existait déjà sous l’empire de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959. L’idée est toujours de mieux distinguer fonctionnement et investissement.

La commission adopte l’amendement.

Article 4 : Clarification des exigences applicables aux prélèvements sur recettes et des modalités de débat parlementaire des finances locales

Amendements CS8 de M. Charles de Courson, CS121 du rapporteur et CS34 de M. Michel Zumkeller (discussion commune).

M. Charles de Courson. L'objectif de l’amendement CS8 est d’abroger définitivement les deux prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales et de l'Union européenne consacrés à l'article 6 de la loi organique relative aux lois de finances.

L'article 4 de la proposition de loi organique se borne à préciser le cadre de ces prélèvements sur recettes (PSR) : ce n'est pas suffisant. Il faut aller plus loin et abroger ces dispositifs, qui fournissent une très belle illustration, et pour des sommes considérables, de contraction des recettes et des dépenses.

Je n’ai ainsi jamais compris pourquoi le prélèvement au profit de l’Union européenne n’était pas budgétisé dans le cadre de la mission retraçant les crédits du ministère chargé des affaires européennes.

S’agissant de celui opéré au profit des collectivités territoriales, la Cour des comptes nous a maintes fois fait remarquer, dans son rapport annexé aux lois de règlement, que la distinction entre les aides d’investissement, voire de fonctionnement, imputées sur le budget d’un ministère, et celles qui sont imputées en prélèvements sur recettes n’était absolument pas claire.

De mon point de vue, les prélèvements sur recettes c’est la négation de la non-contraction des recettes et des dépenses. Or nombreux sont ceux qui souhaitent les maintenir parce qu’étant considérés comme des recettes, ils permettent de contourner l’article 40 et de déposer des amendements, par exemple sur la dotation globale de fonctionnement (DGF). Ce n’est cependant pas possible sur le prélèvement au profit de l’Union européenne – tous les amendements que j’ai pu déposer le concernant, par exemple afin de supprimer les crédits d’adhésion de la Turquie, ont toujours été déclarés irrecevables.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’amendement CS121 vise à simplifier la définition des prélèvements sur recettes, et non à les supprimer.

M. Michel Zumkeller. L’amendement CS34 reprend une recommandation du Conseil d’État visant à ce que les PSR soient mieux définis.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement qui propose de supprimer les PSR. Sans en être moi-même un grand fan et bien que nous en ayons recommandé la suppression dans le cadre de la MILOLF, nous faisons le choix de les conserver car nous souhaitons que la proposition de loi organique soit également adoptée par les sénateurs. La suppression des PSR, notamment ceux opérés au profit des collectivités, ne permettrait sûrement pas de la faire aboutir.

L’amendement CS34, qui reprend effectivement une recommandation du Conseil d’État, est satisfait par le texte ainsi que par notre amendement CS121. J’en demande donc le retrait.

M. le président Éric Woerth. Il s’agit clairement, pour le Sénat, d’un chiffon rouge. Or il s’agit d’aller les uns vers les autres.

L’amendement CS34 est retiré.

Successivement la commission rejette l’amendement CS8 et adopte l’amendement CS121.

Amendement CS122 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit de centrer l’évaluation des PSR sur la notion constitutionnelle de péréquation, et donc, concrètement, sur la DGF.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS50 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Il s’agit de supprimer la création exclusive des PSR dans les lois de finances.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS123 du rapporteur.

La commission adopte l’article 4 modifié.

Après l’article 4

Amendement CS15 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson. Compte tenu des dérives observées lors du dernier projet de loi de finances rectificative, l’amendement tend à mieux encadrer l’utilisation de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) en précisant l’intention du législateur organique dans la rédaction actuelle de l’article 7 de la LOLF.

Cette dotation ne devra concerner que les dépenses exceptionnelles et l’appréciation du caractère imprévisible devra se faire strictement. Cette nouvelle rédaction devrait permettre de limiter la marge de manœuvre du Gouvernement pour éviter tout abus dans la constitution et l’utilisation de cette dotation.

Il y a trente-trois ans, alors que j’étais chef de bureau en besoin de crédits, j’étais allé voir le responsable de la jurisprudence au sein de la direction du budget. Il m’avait dit grosso modo : « c’est nous qui faisons la jurisprudence en la matière, donc on s’arrange. De toute façon il n’y aura jamais de recours ». Je ne trouve pas cela normal.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. D’abord, pour une raison politique. Pour la première fois en 2020, la DDAI n’a pas été utilisée pour financer des sous-budgétisations ou des dépenses que l’on pouvait anticiper, comme celles des fonds spéciaux. Au contraire, elle a financé des dépenses uniquement liées à la crise sanitaire, comme l’achat de masques. Nous sommes, en définitive, précisément informés de son utilisation par des rapports annexés aux décrets de répartition dans les rapports et projets annuels de performances.

Ensuite, pour une raison juridique. De manière binaire, une dépense est imprévisible ou elle ne l’est pas. Je ne suis pas certain que l’ajout du mot strictement précise en droit la notion d’imprévisibilité.

M. Charles de Courson. La rédaction actuelle du texte est vague. Le caractère imprévisible d’une dépense s’apprécie en fonction de la date à laquelle nous votons. Or, dans toute une série de cas, et cela dure depuis des années, les gouvernements utilisent la DDAI pour financer certaines dépenses prévisibles. Voilà ce qui ne va pas.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS12 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson. Il s’agit de mettre en œuvre la proposition 28 du rapport de la MILOLF de 2019 en allongeant le délai d’examen par les commissions des finances des décrets d’avance de sept à dix jours : ce n’est pas tout à fait révolutionnaire.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Sous cette législature, il n’y a pas eu de décret d’avance, hormis celui intervenu au cours de la crise sanitaire, très important dans son montant mais très simple dans son contenu. Les ministres sont venus présenter en commission et chacun l’a validé sans grande difficulté.

Dans les faits, on se satisfait du délai actuel. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS18 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Selon les dispositions de l’article 13 de la LOLF, les décrets d’avance font systématiquement l’objet d’un avis du Conseil d’État. Cela a, bien sûr, été le cas pour le décret d’avance de mai 2021. Cependant, l’avis du Conseil n’est communiqué qu’à l’exécutif, qui est libre de ne pas le rendre public.

Faute de pouvoir enjoindre au Gouvernement de le transmettre au Parlement, cet amendement propose d’ouvrir la possibilité aux présidents des commissions des finances de chaque assemblée d’auditionner le président de la section des finances du Conseil d’État.

Cette audition aurait pour objet, sans transmettre explicitement l’avis sur le décret d’avance, de favoriser un échange entre la section consultative et le Parlement, sur le modèle des auditions déjà organisées avec la Cour des comptes ou le Haut Conseil des finances publiques. Cette proposition n’a rien de révolutionnaire.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. La commission des finances a tout loisir d’auditionner qui elle souhaite, nul besoin de l’inscrire dans un texte organique. Par ailleurs, le Conseil d’État examine le décret d’avance après réception des avis des commissions des finances de l’Assemblée et du Sénat. Votre amendement implique d’inviter le président de la section des finances à un stade où les commissions des finances ne l’ont pas encore examiné. Cela rendrait les choses un peu désordonnées.

M. Charles de Courson. Selon ma rédaction, il pourrait être invité « à tout moment ». Cela ne mange pas de pain de le préciser. En revanche, depuis vingt-huit ans que je suis ici, nous n’avons jamais fait une telle audition.

M. le président Éric Woerth. On le pourrait.

M. Charles de Courson. Ce n’est pas sûr. Le Conseil d’État est le conseil du gouvernement, pas du Parlement. Si on ne le prévoit pas explicitement, je ne pense pas qu’on puisse l’entendre si facilement.

M. le président Éric Woerth. Constitutionnellement, il est conseil du Gouvernement. J’imagine que nous pouvons l’auditionner dans un cadre général, mais peut-être pas pour connaître les positions précises qu’il a prises. Je vous propose d’en rediscuter en séance.

L’amendement est retiré.

Amendement CS13 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement a pour objet de renforcer l’encadrement des reports de crédits.

L’article 15 de la LOLF prévoit que les crédits disponibles à la fin de l’année peuvent être reportés dans la limite globale de 3 % de l’ensemble des crédits initiaux inscrits sur les mêmes titres du programme d’origine, à l’exception de celui des dépenses de personnel. Nous avons eu un exemple récent qui a fait beaucoup rire notre rapporteur général, puisqu’on atteignait 2,99 %, avec pour plafond l’ensemble du budget de l’État !

La dernière phrase du 2° du II de ce même article ouvre la possibilité de relever ce plafond de 3 % par une disposition de loi de finances. Ce déplafonnement n’est pas justifiable et peut conduire à une confusion des exercices budgétaires.

Face à la crise liée à la covid, les reports de 2020 à 2021 ont été inédits. Ils dépassent les 30 milliards d’euros – 28,8 milliards pour la seule mission Plan d’urgence face à la crise sanitaire – et ont concerné un grand nombre de programmes. Le Gouvernement a utilisé cette faculté de déroger au plafond de 3 %. Or les reports sur 2021 sont liés à une sous-consommation substantielle qui aurait pu être évitée en dépit de la crise. Le Gouvernement n’aurait pas dû procéder à des abondements aussi massifs dans son quatrième collectif budgétaire : il aurait pu plutôt majorer les crédits de la loi de finances initiale.

Dans son rapport sur le budget de l’État, la Cour des comptes recommande de se conformer strictement au plafond de 3 %. C’est l’objet du présent amendement.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je rappelle que ce sont les parlementaires qui votent le relèvement du plafond. Cette proposition de loi organique renforce le rôle du Parlement ; au Parlement ensuite d’assumer ses votes en connaissance de cause. La vraie question, c’est de savoir si nous votons ces déplafonnements de façon suffisamment éclairée. C’est peut-être à nous de faire ce travail d’investigation, de sous-amendement éventuel, au moment où le Gouvernement nous invite à déroger aux 3 %. Mais en soi, tout est fait de la façon la plus claire possible de la part du Gouvernement. C’est à nous d’aller chercher davantage d’informations.

Quant au niveau acceptable de reports de crédits – le taux de 3 % est-il le bon, faut-il le modifier, faut-il interdire toute forme de flexibilité ? – c’est un autre débat, par ailleurs très complexe.

M. Charles de Courson. L’argument tombe de lui-même. Si l’on accepte la possibilité de ces dérogations, cela veut dire que le budget de l’année suivante ne sera pas sincère et que le différentiel apparaîtra en loi de règlement. Il ne faudra pas s’étonner de voir qu’on a dépensé 110 alors qu’on avait ouvert 100.

M. le président Éric Woerth. Mais nous l’acceptons, en votant.

M. Charles de Courson. Est-il sain d’accepter de ne plus assumer sa fonction ?

M. le président Éric Woerth. On peut toujours refuser – même si c’est difficile dans le jeu des majorités… En tout cas, c’est valable pour tous les votes du Parlement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS14 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. C’est un vieux débat : je vous propose d’abroger l’article 18 de la LOLF.

La modification de la LOLF doit être l’occasion d’améliorer notre maquette budgétaire. Suivant la recommandation 14 du rapport de 2019 de la MILOLF, cet amendement propose la suppression définitive des budgets annexes. Il n’en reste que deux : Contrôle et exploitation aériens, qui d’après moi relève d’un établissement public administratif, et Publications officielles et information administrative, soit en gros les journaux officiels, qui devrait relever lui d’un établissement public industriel et commercial. Je pense que ces budgets annexes nuisent à la lisibilité du budget de l’État.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. S’agissant d’une recommandation de la MILOLF, je ne vous dirai pas que je ne la trouve pas pertinente, mais nous faisons le choix de ne pas supprimer les budgets annexes.

Ces derniers correspondent à des services qui sont d’abord économiques et commerciaux, à en juger par la nature de leur activité et de leurs recettes. Ils sont aujourd’hui considérés comme nécessaires. En creusant un peu, on se rend compte que leur suppression serait même paradoxalement préjudiciable au Parlement, puisque les budgets annexes s’accompagnent d’un accès privilégié à l’information.

Je suis donc d’accord avec vous sur le fond, mais je donne un avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. Il faut entendre les arguments du Gouvernement sur la question.

M. Charles de Courson. Il y a d’autres solutions. On peut réintégrer les journaux officiels dans le budget général et créer un établissement public industriel et commercial pour le service de la navigation aérienne.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CS10 et CS11 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. L’amendement CS10 devait tirer les conséquences de l'amendement relatif aux primes à l'émission, qui a été repoussé. Je pense qu’il n’a plus d’objet. Le second est satisfait par l’amendement du rapporteur à l’article 3 sur les taxes affectées.

Les amendements sont retirés.

Article 5 : Structure et contenu de la loi de finances de l’année

La commission adopte l’amendement de coordination CS79 du rapporteur.

Amendement CS94 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il précise la disposition sur la récapitulation des taxes affectées.

M. le président Éric Woerth. Une disposition très utile.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS52 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Avec cet amendement d’appel, nous relançons le débat sur la différenciation entre dépenses de fonctionnement et dépenses d’investissement.

L’article 5 de la LOLF énonce déjà une catégorisation des dépenses, que le présent article 5 regroupe en deux grandes catégories. Le classement de certaines dépenses ne nous semble pas justifié.

Ainsi, tout ce qui n’est pas une dépense d’investissement ou d’opérations financières au sens de l’article 5 de la LOLF devient une dépense de fonctionnement. Or nous pensons que les salaires de certains fonctionnaires ou certaines dépenses d’intervention, par exemple, peuvent être considérés comme des dépenses d’investissement, puisqu’ils contribuent à accroître les capacités de production futures. La catégorisation n’est pas inutile, mais la détermination de chacune des dépenses devrait faire l’objet d’un travail plus fin.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Ce n’est pas tant la distinction qui vous pose problème que le choix de ce qu’on met dans chaque catégorie. C’est le débat que nous avons depuis le début, et nous le poursuivrons en séance. Demande de retrait.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je le redéposerai en séance.

L’amendement est retiré.

Amendement CS95 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il prévoit que le tableau de l’article d’équilibre détaille la répartition entre les ressources de fonctionnement et d’investissement, et les charges de fonctionnement et d’investissement, selon les sept titres prévus dans la LOLF. Il permettra de clarifier le débat autour des choix politiques qui seront à faire sur cette distinction.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS96 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Le débat doit davantage porter sur la qualité de la dépense et l’efficacité de l’administration qui en est responsable. Nous proposons donc de créer un nouvel état législatif annexé, amendable, sur les objectifs et indicateurs de performance pour chaque unité de vote.

C’est assez important : cela permettra aux parlementaires, plutôt que de se contenter de voter des crédits ou des dispositions fiscales, de se saisir véritablement des notions d’objectifs et d’indicateurs de performance, d’en décider la portée et de mieux évaluer la culture du résultat.

M. le président Éric Woerth. Nous pourrons ainsi amender les indicateurs. C’est source d’inflation du nombre d’amendements, mais c’est une très bonne chose.

M. Charles de Courson. Je suis favorable à cet amendement, mais pourra-t-on aussi créer ou supprimer des indicateurs ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Oui.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS124 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il change symboliquement la place dans le texte du nouvel état législatif annexé sur l’ensemble des moyens qui concourent à la politique publique portée par une mission, et adapte son périmètre. Cela fait suite aux échanges que nous avons eus avec le Conseil d’État.

Dans notre proposition initiale, l'investissement apparaissait à l'état B. Le Conseil d'État nous recommande de le déplacer dans le nouvel état législatif annexé. D’une part, nous créons ainsi un outil appelé à devenir central dans l'appréciation de la qualité des dépenses publiques. D’autre part, toutes les lignes et toutes les colonnes de l'état B correspondent à des plafonds ; or nous n'avons jamais eu l'intention de figer les dépenses d'investissement, mais, au contraire, de les protéger. La bonne suggestion du Conseil d’État nous permet de rendre l’ensemble plus cohérent.

M. le président Éric Woerth. J’ai ici une petite divergence avec le rapporteur – ce doit être la seule. Je pense que l’état B est bien connu et assez central dans le dispositif d’examen du budget, et je préférerais en rester à la rédaction initiale qui faisait la différence entre fonctionnement et investissement dans cet état B.

J’ai bien compris les arguments du Conseil d’État, notamment s’agissant des crédits plafonnés. Nous n’avons aucunement l’intention de plafonner les crédits d’investissement, mais d’un autre côté, les crédits globaux sont de toute façon plafonnés – ou alors on ne vote pas de loi de finances ! Je trouve cet argument peu satisfaisant.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur, l’amendement vise les ressources affectées : est-il bien articulé avec celui que nous avons adopté tout à l’heure ? Qu’en est-il des fonds de concours ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Ils sont inclus.

M. Charles de Courson. Par ailleurs, il y est question des crédits des comptes spéciaux du trésor qui concourent à la mise en œuvre des politiques publiques financées par la mission. En a-t-on la liste ? Tous concourent-ils à des missions ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit de tous les comptes spéciaux qui ont une mission directement liée à la thématique, tel le CASDAR (compte d’affectation spécial Développement agricole et rural) pour l’agriculture.

M. Charles de Courson. Pour certains c’est facile, mais est-on capable de tous les affecter à une mission ? Je pense que non. Il y aura donc des comptes spéciaux orphelins.

M. Patrick Hetzel. Cet amendement soulève une question qui n’a pas été traitée dans l’amendement CS96 : il faudrait y revenir.

En tant que rapporteur spécial pour la mission Justice, je constate que le ministère n’a pas renseigné tous les indicateurs de performance. Cela pose un problème de fond, car, dès lors, comment faire objectivement une bonne évaluation ?

Il faut arriver à s’assurer que le ministère renseigne ces indicateurs. Aujourd’hui, nous n’avons pas vraiment de levier. Cela empêche le Parlement d’exercer pleinement son rôle d’évaluation et de contrôle des politiques publiques.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. C’est une très bonne remarque, et c’est l’une des raisons pour lesquelles nous voulons pouvoir être à l’origine des indicateurs. La difficulté aujourd’hui, je l’ai expérimentée en tant que rapporteur spécial, est que nous ne savons pas bien si le silence vient d’un manque d’informations ou d’un manque de transparence, par exemple. Quand nous aurons nous-mêmes, dans le cadre de nos évaluations de rapporteur spécial, souhaité un indicateur bien particulier, on peut imaginer que nous serons plus aptes à savoir s’il peut être renseigné ou pas par une administration donnée. Je pense que c’est une bonne évolution pour résoudre le problème que vous évoquez. Mais j’en profite pour rappeler que remplir les indicateurs n’est pas facultatif pour les administrations.

M. le président Éric Woerth. En tout cas, cela va mettre en lumière l’ensemble des indicateurs, qui sont aujourd’hui dispersés.

M. Charles de Courson. La solution, pour faire réagir l’administration, est de déposer des amendements de suppression : c’est l’administration qui a voulu un indicateur et elle ne le renseigne pas ? On le supprime. Y a-t-il déjà eu des amendements de suppression ?

M. le président Éric Woerth. Non, puisque la possibilité d’amender les indicateurs est une nouveauté.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS125 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. En complément du précédent, il s’agit de supprimer la précision en fonctionnement et en investissement dans l’état B.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS51 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Nous proposons de supprimer le principe de plafond d’autorisation des emplois, qui a largement contribué à la détérioration des services publics, à l’externalisation de plus en plus poussée vers la sphère privée ainsi qu’à la dégradation de l’emploi public.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit des plafonds d’emplois des opérateurs. Or je pense qu’il faut renforcer l’encadrement des opérateurs, notamment par le Parlement. Dans cette optique, cet amendement n’est pas souhaitable. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS126 du rapporteur.

Amendement CS141 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Cet amendement, qui est de coordination avec un amendement déposé par Thomas Mesnier sur la proposition de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, a trait aux dépenses budgétaires. Il permet de tenir compte de la décision du Conseil constitutionnel sur le PLF et le PLFSS pour 2019 et de l’avis du Conseil d’État sur les deux propositions de loi organiques.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS137 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Nous proposons que la seconde partie de la loi de finances puisse comporter des dispositions relatives à la péréquation entre collectivités territoriales.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS138 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. La loi de finances doit pouvoir comporter des dispositions relatives au transfert de données fiscales, notamment lorsque ces échanges sont favorables au solde public.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS139 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il vise à étendre le domaine facultatif de la loi de finances, actuellement limité à la comptabilité de l’État, à la comptabilité publique.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS64 de M. Ugo Bernalicis.

M. Éric Coquerel. Le rapporteur suggérait tout à l’heure de mieux encadrer les opérateurs ; je propose, quant à moi, de supprimer carrément les partenariats public-privé, qui sont à l’origine d’une véritable gabegie et sont insuffisamment contrôlés par le Parlement. Plusieurs rapports montrent combien ces contrats, passés dans l’urgence pour des dizaines d’années, ont plombé les finances de l’État. Outre qu’il illustre le fameux adage « socialiser les pertes, privatiser les profits », ce dispositif s’appuie sur la croyance libérale, que je ne partage pas, selon laquelle le privé travaillerait plus efficacement que l’État.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je ne suis pas certain que les libéraux croient que le privé travaille nécessairement mieux que le public : cela dépend du domaine concerné.

Avis défavorable, car j’estime que les partenariats public-privé peuvent être tout à fait positifs. En revanche, il faut – je suis d’accord avec vous sur ce point – que le Parlement ait un regard fin sur ces contrats. Le projet de loi de finances le permet, puisque les projets annuels de performances et les rapports annuels de performances comportent des informations sur la justification des crédits au premier euro. À nous de faire le travail d’évaluation nécessaire.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS80 du rapporteur.

La commission adopte l’article 5 modifié.

Article 6 : Loi de finances de fin de gestion

Amendements CS45 de M. Éric Coquerel, CS100 du rapporteur et CS53 de M. Jean-Paul Dufrègne (discussion commune).

M. Éric Coquerel. Nous souhaitons interpeller le Gouvernement sur la croissance des contraintes de recevabilité qui pèsent sur les propositions formulées par les parlementaires. Comme l’a montré une étude récente, les règles de recevabilité liées à l’objet de l’amendement sont floues et propices à l’exclusion de nombreuses propositions politiques qui ne peuvent être portées au débat. Cette situation tend à transformer le Parlement en une simple chambre d’enregistrement technique. Depuis deux ans, le taux d’irrecevabilité des « cavaliers » est passé de moins de 1 % à 10 %. Nous ne sommes pas opposés à la nécessité de respecter un lien au moins indirect entre un amendement et le texte auquel il se rattache, mais il ne faut pas que l’application de cette règle conduise le Parlement à s’autocensurer.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Nous proposons, quant à nous, de réintégrer dans le champ des lois de finances de fin de gestion les mesures relevant de l’autorisation de l’octroi de garanties de l’État et de la prise en charge de dettes de tiers. Nous nous sommes aperçus, notamment durant la crise, qu’une telle mesure était fortement souhaitable.

Avis défavorable sur l’amendement CS45. Quant au CS53, je demande à M. Dufrègne de bien vouloir le retirer ; à défaut, défavorable.

La commission rejette l’amendement CS45.

Elle adopte l’amendement CS100.

En conséquence, l’amendement CS53 tombe.

La commission adopte successivement les amendements CS101, CS102 et CS103, rédactionnels, CS104, de coordination, et CS105, rédactionnel, tous du rapporteur.

Elle adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6

Amendement CS2 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Nous discutons, depuis des années, de la rétroactivité des lois fiscales. Pourtant, nous n’avons jamais légiféré sur ce point au niveau organique, de sorte que ce sont le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État qui se sont prononcés sans que leurs jurisprudences soient toujours exactement identiques. Par cet amendement, je vous propose que nous définissions nous-mêmes ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, en la matière.

Inspiré de ma proposition de loi organique limitant le recours aux dispositions fiscales de portée rétroactive examinée par la commission des lois le 31 mars 2021, il vise ainsi à consacrer au niveau organique les règles encadrant la rétroactivité fiscale.

Le deuxième alinéa élève au niveau organique le principe prévu à l’article 2 du code civil s’agissant de l’application dans le temps des dispositions fiscales.

Le troisième alinéa définit la disposition fiscale à caractère rétroactif comme une disposition qui s’applique à un fait générateur de l’impôt survenu avant l’entrée en vigueur de cette disposition. Il précise que le fait générateur de l’impôt applicable aux opérations dont la réalisation donne lieu à déclaration et paiement immédiats de l’impôt, tels que les prélèvements forfaitaires obligatoires, correspond à la date de réalisation de l’opération.

Le quatrième alinéa clarifie les exceptions au principe de non-rétroactivité des dispositions fiscales.

D’une part, il intègre les solutions dégagées par les jurisprudences européenne, constitutionnelle et administrative s’agissant de la protection des garanties légales découlant des exigences constitutionnelles, des situations légalement acquises et des effets pouvant être légitimement attendus de telles situations. Le but est ici d’encadrer les conséquences de la « rétroactivité économique » des dispositions fiscales par laquelle celles-ci, bien que non rétroactives sur le plan strictement juridique, aboutissent à remettre en cause les bases de calcul microéconomiques sur lesquelles les contribuables ont fondé leurs décisions d’épargne ou d’investissement.

D’autre part, il renforce considérablement le contrôle déjà opéré par la jurisprudence des dispositions fiscales entraînant une véritable rétroactivité juridique. Il précise que ces dispositions ne sauraient justifier l’application d’un intérêt de retard aux contribuables ni s’appliquer aux procédures contentieuses en cours. En l’état actuel de la jurisprudence, il est simplement exigé que ces dispositions fiscales rétroactives ne portent pas atteinte aux seules décisions de justice passées en force de chose jugée, ce qui est inéquitable au regard des contentieux en cours.

Le quatrième alinéa prévoit également la justification du caractère rétroactif de ces dispositions et l’évaluation de leurs conséquences financières pour les contribuables.

Le cinquième alinéa garantit l’intangibilité des régimes fiscaux auxquels sont soumis les contrats d’une durée comprise entre un et quinze ans, dès lors que leur modification porterait une atteinte sensible à leur équilibre financier. Cette disposition renforcerait ainsi la stabilité des règles fiscales et réduirait les risques de la « rétroactivité économique » en protégeant le principe d’espérance légitime des contribuables consacré par la jurisprudence.

Enfin, le dernier alinéa garantit l’effectivité du contrôle parlementaire afin d’assurer le respect des dispositions prévues par le présent amendement.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Votre amendement pose un véritable problème démocratique puisqu’il tend à empêcher le Gouvernement et le Parlement de modifier une disposition fiscale. Certes, seuls certains produits d’épargne seraient concernés
– et je partage, au demeurant, votre souhait d’éviter le zigzag fiscal. Mais nous ne pouvons en aucun cas lier les mains du Parlement en l’empêchant de modifier une disposition fiscale, quelle qu’elle soit. Par ailleurs, la jurisprudence constitutionnelle protège déjà les consommateurs et les épargnants des excès que vous ciblez à très juste titre. Je ne peux donc pas être favorable à votre amendement.

M. le président Éric Woerth. Je suis plutôt d’accord avec le rapporteur. L’amendement est très habile puisqu’au lieu de jouer sur la rétroactivité elle-même, il vise à empêcher pendant plusieurs années la modification de certains textes, en particulier ceux relatifs à la fiscalité de l’épargne ou de l’investissement. De fait, il est contestable de changer les règles au cours du jeu. Mais il serait difficile pour un ministre des finances de décider de bloquer un dispositif pendant plusieurs années, à moins qu’il ne soit animé de très mauvaises intentions et ne prenne une telle décision pour gêner le gouvernement suivant. Toutefois, à cet égard, le rapporteur l’a dit, les épargnants sont déjà protégés par des dispositifs juridiques qui restreignent la liberté du Gouvernement de revenir sur les règles d’investissement.

M. Jean-Paul Mattei. Il s’agit d’un vieux débat. Je ne peux pas soutenir cet amendement qui lierait les mains du législateur. Qui plus est, en pratique, des aménagements sont intervenus, notamment en matière d’assurance vie : lorsque le Gouvernement a modifié la loi, il a précisé lui-même que les nouvelles mesures ne s’appliqueraient qu’aux contrats futurs. Les effets de la rétroactivité peuvent, certes, être pénibles et contribuer à une certaine insécurité fiscale, mais nous disposons d’outils qui nous permettent de les neutraliser.

M. Charles de Courson. L’amendement ne lierait pas du tout le futur Gouvernement : celui-ci pourrait modifier une disposition relative à un produit d’épargne, par exemple, mais uniquement pour l’avenir, la stabilité des règles applicables à ce produit ayant été garantie pour une certaine durée, fixée par le législateur. S’agissant de l’assurance vie, des annulations sont intervenues parce qu’on avait modifié rétroactivement les règles applicables aux produits en cours. C’est pourquoi je propose d’inscrire dans la loi organique les termes de la jurisprudence européenne, constitutionnelle et administrative.

La commission rejette l’amendement.

Article 7 : Avancement de la date de dépôt des annexes générales

Amendement CS129 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit de supprimer l’obligation de la distribution du PLF par le Gouvernement. Actuellement, celui-ci est chargé non seulement de déposer le PLF et ses annexes, mais aussi de les imprimer et de les distribuer. Je propose d’assouplir un peu le droit en maintenant l’obligation de dépôt mais en laissant le soin à la commission d’indiquer au Gouvernement les documents imprimés dont il a besoin. Je souhaite recueillir votre avis sur ce point, car certains d’entre vous sont peut-être attachés aux documents papier.

M. Charles de Courson. Lorsque j’étais chef de bureau à la direction du budget, il arrivait que l’on dépose les annexes au projet de loi de finances plusieurs jours après celui-ci ; cela provoquait la colère des rapporteurs spéciaux, mais aucune sanction n’est prévue. Or je crains que l’amendement du rapporteur n’accentue cette dérive. Il serait préférable d’imposer le respect d’un délai pour le dépôt tout en laissant la possibilité d’effectuer celui-ci électroniquement ou sous la forme d’un document papier.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 7 modifié.

Article 8 : Printemps de l’évaluation

La commission adopte l’article non modifié.

Après l’article 8

Amendement CS58 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. À défaut de pouvoir supprimer l’article 40, nous proposons d’assouplir son interprétation telle qu’elle figure à l’article 47 de la LOLF en précisant que la charge est appréciée au niveau, non plus de la mission, mais de l’ensemble des crédits ouverts par le projet de loi de finances. Cet amendement de repli offrirait aux parlementaires de véritables possibilités d’amender tout en maintenant l’enveloppe globale du budget à un niveau constant.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. La véritable question est celle de savoir si l’on est pour ou contre l’article 40 – mais nous ne discutons pas d’une révision constitutionnelle.

M. le président Éric Woerth. Pour ma part, je suis contre : l’examen des amendements prend un temps fou et on ne fait que des mécontents. Je suis pour la liberté des parlementaires.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS39 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Nous souhaitons garantir qu’un amendement déclaré irrecevable puisse néanmoins être publié et consultable par le public, même s’il n’est pas discuté lors de l’examen d’un texte. Cette proposition est justifiée par l’augmentation du taux d’irrecevabilité, qui est passé de 1 % à 10 %.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. La proposition de loi n’est pas le véhicule adapté pour discuter de l’article 40 et des questions de recevabilité. Cela dit, l’amendement soulèverait un problème constitutionnel : dès lors qu’un amendement n’est pas recevable, il n’est pas consultable.

M. le président Éric Woerth. Mais rien n’empêche un parlementaire d’en faire la publicité.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS40 de Mme Sabine Rubin.

M. Éric Coquerel. Cet amendement vise à instaurer une procédure d’appel en cas de litige quant à la recevabilité d’un amendement.

M. le président Éric Woerth. C’est d’une certaine manière déjà le cas, puisque des discussions ont systématiquement lieu avec l’auteur de l’amendement avant qu’une décision définitive d’irrecevabilité soit prise.

Je vous accorde qu’en l’espèce le juge d’appel, si l’on peut dire, est le même que celui de première instance, ce qui présente des limites.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS38 de M. Ugo Bernalicis.

M. Éric Coquerel. Comme d’autres groupes politiques, nous considérons que l’accroissement du nombre des amendements déclarés irrecevables constitue un problème. L’amendement prévoit de garantir qu’un amendement déclaré recevable dans le cadre de l’examen en commission ne puisse pas être considéré comme irrecevable lors de l’examen en séance, afin d’éviter les mauvaises surprises.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable. Je laisse le président répondre sur les questions de recevabilité.

M. le président Éric Woerth. À ma connaissance, le taux d’irrecevabilité des amendements au titre de l’article 40 n’a pas augmenté de manière générale, même s’il peut varier d’un texte à l’autre. En revanche, le nombre d’amendements déclarés irrecevables au titre de l’article 45 de la Constitution a lui progressé. C’est la conséquence de la décision du président de l’Assemblée, confirmée par la conférence des présidents, d’appliquer une nouvelle jurisprudence plus stricte, proche de celle du Conseil constitutionnel.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS41 de M. Ugo Bernalicis.

M. Éric Coquerel. À défaut de pouvoir supprimer l’article 40 de la Constitution dans le cadre de l’examen de cette proposition de loi organique, cet amendement propose qu’un rapport remis au Parlement par le Gouvernement étudie la possibilité d’assurer aux amendements la même tolérance que pour les propositions de loi.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Avant l’article 9

Amendements identiques CS4 de Mme Véronique Louwagie et CS74 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Patrick Hetzel. Cet amendement vise à affirmer la fonction d’évaluation du Parlement en modifiant l’intitulé du titre V de la LOLF et celui du chapitre II de ce même titre V. Le titre V deviendrait alors : « De l’information, de l’évaluation et du contrôle sur les finances publiques », tandis que son chapitre II serait désormais : « Du contrôle et de l’évaluation ».

M. Brahim Hammouche. Il s’agit d’affirmer la fonction d’évaluation du Parlement, prévue par l’article 24 de la Constitution, et d’inscrire dans la durée cette nouvelle culture de l’évaluation que nous avons mise en place depuis quatre ans, notamment avec le Printemps de l’évaluation.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis favorable.

La commission adopte les amendements

Article 9 : Rapport sur la dette et consécration au rang organique du tiré-à-part

La commission adopte successivement les amendements CS108, de coordination, CS107, rédactionnel, et CS109, de coordination, du rapporteur.

Amendement CS54 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. Cet amendement vise à préciser le champ du rapport sur la dette remis par le Gouvernement. Ce rapport devra comprendre une description de la composition de la dette, afin de distinguer la part provenant des déficits primaires de celle provenant de la charge des intérêts. L’ensemble des hypothèses ayant permis d’analyser la soutenabilité devront être explicitées et justifiées.

Enfin, l’amendement prévoit que ce débat ne soit plus facultatif mais bien obligatoire.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’amendement est entièrement satisfait par le dispositif de l’article 9. De fait, le rapport du Gouvernement traitera des questions de déficits primaires, de charges d’intérêts, de trajectoire de la dette et des conditions de son financement. Tel est bien l’intérêt d’instaurer ce débat. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS16 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement a pour objet d’inclure la question des primes à l’émission enregistrées par l’Agence France Trésor dans le rapport et le débat sur la dette.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’amendement est satisfait. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 9 modifié.

Après l’article 9

Amendement CS140 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Cet amendement propose d’établir un compteur des écarts à la norme de dépense des administrations publiques.

M. le président Éric Woerth. Cela facilitera le travail du Parlement.

La commission adopte l’amendement.

Article 10 : Annexes générales au projet de loi de finances

Amendement CS17 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il s’agit d’un amendement destiné à assurer la cohérence grammaticale de notre constitution financière.

L’appellation « impositions de toutes natures » voit son orthographe varier selon les textes. L’article 34 de la Constitution l’écrit : « impositions de toutes natures ». Il faut relever l’usage du pluriel. La LOLF, dans sa rédaction actuelle, préfère « impositions de toute nature ».

Cet amendement procède à une harmonisation, en retenant le pluriel choisi par le constituant.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’usage retient plutôt le singulier. Avis de sagesse.

L’amendement est adopté.

Amendement CS136 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’amendement permet de renforcer l’information du Parlement sur les dépenses fiscales, notamment au sein du tome II de l’annexe des voies et moyens. Cette amélioration est l’aboutissement de longs débats et d’un travail engagé par mon prédécesseur, Joël Giraud.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS120 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une disposition déjà satisfaite.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS67 de M. Pierre-Alain Raphan.

M. Pierre-Alain Raphan. L’objet de cet amendement est de proposer que le rapport prévu par la loi du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques soit ajouté aux annexes du projet de loi de finances.

Ce rapport comprend des indicateurs sur les inégalités, la qualité de vie et le développement durable. Alors qu’il doit être fourni chaque année, sa dernière parution remonte à 2018. L’annexer au projet de loi de finances permettra d’en assurer une meilleure publicité, tout en contribuant à éclairer les choix du Parlement.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Élever cette exigence au niveau organique n’est pas souhaitable, car nous pourrions être amenés à le faire pour tous les rapports qui ne nous sont pas fournis par le Gouvernement. Mais il est tout à fait possible de prévoir cette disposition dans la loi ordinaire. Je vous propose donc de déposer cet amendement lors de l’examen du prochain projet de loi de finances.

L’amendement est retiré.

Amendement CS71 de Mme Bénédicte Peyrol.

Mme Bénédicte Peyrol. L’amendement propose d’élever au niveau organique l’exigence d’associer au projet de loi de finances une annexe dite « budget vert ». Ce document a été publié pour la première fois l’année dernière. Il s’agit de mieux reconnaître ce bel exercice et de se l’approprier davantage.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Ce budget vert constitue une véritable avancée, que vous pouvez mettre à votre actif, madame Peyrol. Je suis d’accord avec la démarche proposée par l’amendement, mais je demande son retrait afin d’en parfaire la rédaction d’ici à la séance.

M. le président Éric Woerth. Il faudra d’ailleurs que la commission des finances se saisisse mieux du budget vert lors du prochain projet de loi de finances.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 10 modifié.

Après l’article 10

Amendement CS69 de Mme Bénédicte Peyrol.

Mme Bénédicte Peyrol. Cet amendement a pour objet d’annexer au projet de loi de finances un rapport sur la fiscalité environnementale. Cela doit permettre d’en clarifier la définition et de rationaliser nos débats sur ce sujet, en regroupant les articles qui le concernent. Le Gouvernement a déjà fait un effort sur ce dernier point lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021. Je retire cet amendement et je le redéposerai en séance pour en débattre avec le ministre.

L’amendement est retiré.

Article 11 : Pouvoirs des commissions des finances

Amendements CS19 de M. Charles de Courson et CS110 du rapporteur (discussion commune).

M. Charles de Courson. L’amendement CS19 a pour objet de préserver la portée actuelle des questionnaires budgétaires.

Dans son avis du 1er juillet 2021, le Conseil d’État a appelé l’attention des parlementaires sur le risque de restriction excessive du périmètre des questionnaires budgétaires par cet article 11, s’il était adopté en l’état.

Il existe un risque que ces questionnaires ne puissent par exemple plus porter sur les dépenses fiscales, même lorsqu’elles seraient rattachées aux programmes de la mission dont le rapporteur spécial aurait la charge. Les administrations continueront-elles à répondre à des questions portant sur l’évaluation des politiques publiques ? En prévoyant que les questionnaires portent « exclusivement sur des demandes de renseignements budgétaires », cette proposition de loi organique présente un véritable danger.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’amendement CS110 complète le champ des questionnaires budgétaires pour y inclure, en sus des demandes de renseignement d’ordre budgétaire, celles d’ordre financier ou ayant trait aux dépenses fiscales.

Le but poursuivi reste d’alléger le volume des questionnaires et d’éviter qu’ils comportent des questions très voire trop générales portant sur les caractéristiques d’une politique publique et n’ayant aucun lien avec des thématiques financières. Cela vise notamment les questionnaires relatifs au projet de loi de finances envoyés pendant l’été, qui sont trop volumineux.

Il est préférable de procéder à une évaluation au fil de l’eau, en interrogeant les administrations de manière plus régulière mais plus légère.

M. Charles de Courson. Je ne suis pas d’accord. Même améliorée par votre amendement, la rédaction de cet article permettra-t-elle aux rapporteurs spéciaux de continuer à poser des questions sur l’efficacité de la dépense et sur l’évaluation des politiques publiques, qui demeure l’aspect le plus intéressant de leur travail ?

Successivement, la commission rejette l’amendement CS19 et adopte l’amendement CS110.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CS111 du rapporteur.

Amendement CS20 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement doit permettre de compléter la gamme de compétences des membres de la commission des finances en étendant le spectre des renseignements qu’ils peuvent solliciter.

Actuellement, seul le président de la commission des finances et le rapporteur général sont en mesure d’avoir accès à des informations fiscales confidentielles. Pour des raisons d’équité, il est nécessaire de permettre aux rapporteurs spéciaux, dans leur domaine, et, de manière générale, aux membres de la commission des finances, d’avoir également accès à ces éléments.

Lors de leurs travaux, certains rapporteurs spéciaux se sont vus opposés par l’administration un refus d’accès à certaines informations fiscales confidentielles. Ces restrictions injustifiées sont de nature à limiter le champ d’action des parlementaires dans leurs missions.

Cet amendement met en œuvre la proposition n° 39 du rapport de la MILOLF de 2019.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. D’un point de vue juridique, dans leur domaine d’attribution les rapporteurs spéciaux disposent exactement des mêmes prérogatives à l’égard des administrations que le rapporteur général. L’amendement est donc satisfait.

M. le président Éric Woerth. Et si un rapporteur spécial est entravé dans sa mission, il lui suffit de le signaler au rapporteur général ou au président de la commission pour que la difficulté soit levée. L’objectif est bien que les rapporteurs spéciaux accèdent à l’information qui leur est nécessaire.

M. Charles de Courson. Cette disposition de la LOLF n’est pas toujours respectée. Mentionner explicitement les pouvoirs des rapporteurs spéciaux permettrait de ne pas avoir à recourir à l’intervention du président de la commission des finances ou du rapporteur général.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’article 57 de la LOLF est déjà parfaitement clair s’agissant des pouvoirs des rapporteurs spéciaux. Les difficultés pratiques d’accès à l’information constituent un problème de nature différente.

L’amendement est retiré.

Amendement CS112 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Afin d’éviter toute ambiguïté, le champ de la sollicitation des autorités publiques indépendantes et des autorités administratives indépendantes est explicitement circonscrit aux seules informations relevant des compétences des commissions des finances, à savoir les finances publiques.

M. le président Éric Woerth. Il s’agit en effet d’obtenir une information déjà disponible, pas de commander un véritable rapport sur un sujet déterminé.

La commission adopte l’amendement CS112.

La commission adopte l’article 11 modifié.

Après l’article 11

Amendements identiques CS3 de Mme Véronique Louwagie et CS75 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Patrick Hetzel. Depuis 2015, les avis du Conseil d’État sur les projets de loi sont communiqués au Parlement au moment du dépôt des textes, à l’exception des projets de loi financiers – le PLF, les projets de loi de finances rectificatives et les PLFSS –, mais aussi des projets de loi ratifiant des ordonnances et de ceux autorisant la ratification ou l’approbation d’engagements internationaux. Aucun texte ne codifie cette règle et ses exceptions, qui résultent simplement d’une décision du Président de la République et de la pratique gouvernementale. Nous proposons d’inscrire dans la LOLF le principe selon lequel les avis du Conseil d’État sur l’ensemble des textes financiers régis par cette loi organique doivent être communiqués. Un amendement similaire a été déposé s’agissant des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Brahim Hammouche. Aucun texte ne codifie la règle actuelle, qui relève de la pratique des gouvernements successifs. Nous avons communication des avis du Conseil d’État pour la plupart des projets de loi, mais pas pour ceux qui constituent le nerf de la guerre : il y a une sorte de discordance.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Ces amendements posent une difficulté compte tenu de l’article 39 de la Constitution, qui fait du Conseil d’État le conseil du Gouvernement. Imposer la communication de ses avis serait inconstitutionnel. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Je ne suis pas d’accord avec cette interprétation de la Constitution, et je ne pense pas qu’il y ait de jurisprudence en la matière. La Constitution ne dit rien et n’interdit rien. Comme ce texte sera de toute façon soumis au Conseil constitutionnel, nous verrons bien : s’il laisse passer ce dispositif, cela signifiera qu’il n’y a pas de problème ; s’il le censure, cela confirmera la thèse du rapporteur. J’ajoute qu’il y a une certaine contradiction avec l’argumentaire qui m’a été opposé précédemment à propos de l’audition du président de la section des finances du Conseil d’État.

M. Patrick Hetzel. S’agissant des autres projets de loi, la communication des avis du Conseil d’État a été considérée comme constitutionnelle. Je ne vois pas en quoi ce ne serait pas le cas pour les textes financiers. Si on raisonne par parallélisme des formes, on voit bien que le dispositif peut être étendu sans contradiction avec l’article 39 de la Constitution.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Cela constituerait malgré tout une injonction.

M. Charles de Courson. Nous pouvons avoir accès aux avis du Conseil d’État :  les rapporteurs spéciaux peuvent les demander à l’administration. Il vaut mieux prévoir leur communication en amont, afin d’améliorer la qualité de nos travaux. Nous ne risquons rien si ces amendements sont adoptés. Le Conseil constitutionnel confirmera ou infirmera la thèse du rapporteur.

M. le président Éric Woerth.

C’est le Président de la République qui a décidé, en 2015, de communiquer au Parlement les avis du Conseil d’État sur les textes non financiers. Cette décision peut être remise en cause à tout moment. Elle ne résulte pas d’un amendement ou d’une injonction du Parlement.

Ce qui nous est proposé ne me dérange évidemment pas. Néanmoins, je ne suis pas sûr qu’il serait très bon d’adopter une disposition dont le Conseil d’État dit qu’elle est inconstitutionnelle.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS106 du président.

M. le président Éric Woerth. Cet amendement demande que le Gouvernement présente l’état de consommation des crédits lors du dépôt des projets de loi de finances rectificatives. C’est extrêmement important, en particulier pour la vérification de la recevabilité des amendements de crédits.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Amendements identiques CS5 de Mme Véronique Louwagie et CS76 de M. Jean-Noël Barrot, amendement CS78 de M. Jean-Noël Barrot (discussion commune).

M. Patrick Hetzel. L’amendement CS5 vise à rendre un peu plus opérationnel l’article 59 de la LOLF en remplaçant la référence à la « juridiction compétente » par une référence explicite au Conseil d’État, en imposant au juge de se prononcer dans un délai de 48 heures, comme pour les référés-libertés, et en ne limitant pas ses pouvoirs à la prononciation d’une astreinte. Là encore, un amendement similaire sera déposé en ce qui concerne les projets de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Brahim Hammouche. L’amendement CS76 fait également référence au Conseil d’État. Le suivant, de repli, concerne le délai.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je n’ai pas beaucoup d’expérience dans cette maison mais, lorsque j’étais un rapporteur spécial, je n’ai jamais rencontré la difficulté évoquée dans les exposés sommaires. On doit parfois insister, mais j’ai toujours obtenu des éléments. Faire intervenir le juge dans la procédure ne me paraît pas acceptable. Cela créerait un précédent que je trouve dangereux, et je ne pense pas que ce soit justifié dans les faits
– nous ne rencontrons pas de situations de blocage. Je ne peux donc pas donner un avis favorable à ces amendements.

Les amendements CS76 et CS78 sont retirés.

La commission rejette l’amendement CS5.

TITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES À L’INFORMATION ET AU CONTRÔLE SUR LES FINANCES PUBLIQUES

Article 12 : Haut Conseil des finances publiques et mécanisme de correction

Amendement CS63 de Mme Sabine Rubin.

M. Éric Coquerel. Nous proposons de supprimer le Haut Conseil des finances publiques, qui a été imposé par le pacte budgétaire européen pour veiller à la cohérence de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques, c’est-à-dire la réduction du déficit public structurel des administrations publiques. Nous ne sommes d’accord ni avec cette approche, qui nous semble encore plus inadaptée compte tenu de la crise actuelle, ni avec le rôle contraignant, à l’égard du Parlement, qu’on veut faire jouer au HCFP – cela pose une question sur le plan de la démocratie. Au lieu de réformer cette instance, nous proposons de la supprimer, ce qui permettra, en plus, de faire des économies.

M. le président Éric Woerth. Le Haut Conseil ne coûte pas très cher.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendements CS6 de M. Daniel Labaronne et CS72 de Mme Bénédicte Peyrol (discussion commune).

M. Daniel Labaronne. Je propose d’intégrer au sein du collège du Haut Conseil des finances publiques quatre professeurs d’université ou directeurs de recherche dans les disciplines juridiques, politiques, économiques ou de gestion, qui seraient nommés par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat ainsi que par les présidents des commissions des finances. Cela permettrait d’enrichir les avis du Haut Conseil.

Mme Bénédicte Peyrol. Je propose, quant à moi, d’ajouter une personnalité spécialisée en économie environnementale. Mon amendement servira à engager un débat sur la possibilité d’un contrôle indépendant, qui pourrait être exercé par la Cour des comptes, sur le « budget vert » – je n’ai pas trouvé d’autre accroche dans le texte. M. Moscovici nous a dit que la Cour des comptes avait commencé à travailler sur ce sujet.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je vous propose d’en débattre en séance, et donc de retirer ces amendements.

Le HCFP peut déjà comporter des personnalités extérieures à l’administration. Ce que vous demandez est en partie satisfait. Des professeurs d’université, comme Mme Bec, sont membres du Haut Conseil.

Par ailleurs, je crois que des membres du Haut Conseil sont très sensibles à la question du budget vert, comme l’étaient, en leur temps, Jean Pisani-Ferry et Michel Aglietta.

Les amendements sont retirés.

La commission adopte successivement les amendements CS81 et CS82, rédactionnels, et CS83, de précision, du rapporteur.

Amendement CS97 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit de porter à quinze jours, au lieu d’une semaine, le délai donné au HCFP pour se prononcer sur les projets de loi de programmation des finances publiques.

M. Charles de Courson. Vous avez refusé tout à l’heure d’accorder deux ou trois jours supplémentaires…

Votre proposition est-elle compatible avec les délais prévus par la Constitution, et donc applicable ?

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. L’amendement concerne les lois de programmation des finances publiques : cela ne posera pas de problème.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CS128 du rapporteur et CS56 de M. Jean-Paul Dufrègne (discussion commune).

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Cet amendement tend à clarifier la rédaction des alinéas qui reprennent et élargissent les dispositions relatives à l’avis du HCFP sur le PLF et le PLFSS.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’amendement CS56 permettra aux parlementaires de saisir le HCFP à propos des conséquences financières de dispositions du PLF ou du PLFSS.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. La rédaction de votre amendement pose des problèmes : il ne « tourne » pas, comme on dit. Je vous demande donc de le retirer.

L’amendement CS56 est retiré.

La commission adopte l’amendement CS128.

Amendement CS77 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Brahim Hammouche. Cet amendement complète, d’une certaine façon, l’article 11, qui permet aux commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat de solliciter les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes. Nous souhaitons donner aux présidents et aux rapporteurs généraux de ces commissions le droit de saisir le HCFP. Un autre amendement concernant les commissions des affaires sociales a été déposé.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Je suis plutôt ouvert, mais je m’interroge sur la mise en pratique de cet amendement. Pourra-t-on prendre connaissance en temps utile de l’analyse du Haut Conseil ? Si sa suppression, demandée par M. Coquerel, ne permettrait pas de faire beaucoup d’économies, c’est parce qu’il s’agit d’une petite équipe. Je vous propose d’en discuter en séance avec le Gouvernement, et donc de retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement CS127 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Cet amendement prévoit que le HCFP remet un avis sur les projets de loi de finances de fin de gestion.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement CS130 du rapporteur.

Amendement CS98 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Il s’agit de porter également à quinze jours le délai donné au HCFP en ce qui concerne les projets de loi de programmation sectoriels.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CS84 et CS85 du rapporteur.

Amendement CS7 de M. Daniel Labaronne.

M. Daniel Labaronne. L’article 12 prévoit la suppression de l’article 22 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances, ce qui lèvera l’obstacle juridique empêchant la transformation du programme 340 en action du programme 164. En tant que rapporteur spécial de ces programmes, j’ai toujours plaidé en ce sens. Le programme 340 représente un peu plus de 1 million d’euros – voilà le coût du HCFP.

Mon amendement précise que le président du Haut Conseil gère les crédits nécessaires à l’accomplissement des missions de cette instance.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis favorable au rétablissement de cette disposition.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements CS86, rédactionnel, CS87, de coordination, CS88, CS99 et CS89, rédactionnels, du rapporteur.

La commission adopte l’article 12 modifié.

Après l’article 12

Amendement CS21 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. L’article 12, en réécrivant le titre VI de la LOLF, a omis de reprendre son actuel article 68 prévoyant de pourvoir à l’exécution de la loi organique par la voie de décrets en Conseil d’État. Cette abrogation implicite et involontaire a été relevée par ce dernier dans deux avis.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi organique modifiée.

Proposition de loi portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques (n° 4113 rectifié) (M. Laurent Saint-Martin, rapporteur).

TITRE IER - DISPOSITIONS RELATIVES AU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES

Article 1er : Procédure de nomination des membres du Haut Conseil des finances publiques désignés par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat et les présidents des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat

Amendement CS2 du rapporteur.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Amendement rédactionnel.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS3 du rapporteur.

La commission adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Audition du président du Haut Conseil des finances publiques par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Article 3 : Règlement intérieur du Haut Conseil des finances publiques

La commission adopte l’article 3 non modifié.

TITRE II - DISPOSITIONS RELATIVES À L’INFORMATION DU PARLEMENT LORS DE L’EXAMEN DU PROJET DE LOI DE FINANCES SUR LES MESURES FISCALES ADOPTÉES DEPUIS LE DÉPÔT DU PROJET DE LOI DE FINANCES DE L’ANNÉE PRÉCÉDENTE

Article 4 : Annexe, jointe au projet de loi de finances de l’année, récapitulant les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances de l'année précédente

La commission adopte l’article 4 non modifié.

Après l’article 4

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CS5 et CS7 du rapporteur.

Amendement CS6 du président.  

M. le président Éric Woerth. Les parlementaires doivent pouvoir saisir le Conseil des prélèvements obligatoires – dont les rapports sont remarquables – sur les conséquences de telle ou telle mesure fiscale. De nouvelles règles permettront également de faciliter sa gouvernance, la durée du mandat de ses membres étant notamment portée de deux à trois ans.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement de coordination CS4 du rapporteur.

Amendement CS1 de Mme Dominique David.

Mme Dominique David. Conformément à la recommandation que j’ai formulée en tant que rapporteure spéciale du programme « Création ; transmission des savoirs et démocratisation de la culture » dans le cadre du Printemps de l’évaluation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport examinant la possibilité de présenter un projet de loi de programmation des investissements dans les secteurs de la culture et du patrimoine. Cela me semble justifié en raison notamment du retour de la politique des grands travaux sur les joyaux de notre patrimoine mais aussi de l’élaboration de nouveaux grands projets. Il importe de sécuriser les crédits en renforçant le pilotage des dépenses, la prévisibilité des engagements et des décaissements.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur. Avis de sagesse sur cet amendement d’appel à l’endroit du Gouvernement.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.


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   Annexe : avis du Conseil d’état

 

CONSEIL D’ÉTAT

Assemblée générale

 

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Séance du jeudi 1er juillet 2021

 

Section des finances

 

 

N° 402909

N° 402910

 

 

EXTRAIT DU REGISTRE

DES DELIBERATIONS

 

 

 

Avis

sur la proposition de loi organique (n° 4110 rectifié) relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et sur la proposition de loi (n° 4113 rectifié) portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques

 

 

 

1. Le Conseil d’État a été saisi le 10 mai 2021 par le président de l’Assemblée nationale, sur le fondement de l’article 39, alinéa 5, de la Constitution et de l’article 4 bis de l’ordonnance no 58‑1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, de la proposition de loi organique (n° 4110 rectifié) relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et de la proposition de loi (n° 4113 rectifié) portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques (HCFP) et à l’information du Parlement sur les finances publiques, présentées par M. Eric Woerth et M. Laurent Saint-Martin, députés.

 

Ces deux textes, qui ont pour ambition de moderniser le cadre de gouvernance des finances publiques, s’inscrivent dans le prolongement direct d’un rapport, publié en septembre 2019 et dont les auteurs sont les mêmes que ceux des propositions de loi, réalisé dans le cadre des travaux d’une mission d’information, dite « MILOLF », constituée par la Commission des finances de l’Assemblée nationale pour suivre la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, la LOLF. La proposition de loi organique met en œuvre la plupart de celles des préconisations de ce rapport qui nécessitent une modification de la LOLF ou de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Les évolutions qui sont ainsi proposées apparaissent, par ailleurs, le plus souvent convergentes avec celles que recommandent deux autres documents récents, l’un issu de la Cour des comptes (novembre 2020, « Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et de la gouvernance »), l’autre de la commission pour l’avenir des finances publiques (mars 2021, « Nos finances publiques post-Covid 19 : pour de nouvelles règles du jeu »).

 

2. Les textes dont le Conseil d’État est saisi ne bouleversent pas le cadre de gouvernance de nos finances publiques, ce qui serait au demeurant impossible sans préalablement modifier la Constitution, mais leur adoption impliquera, néanmoins, des évolutions non négligeables de la LOLF, pour la première fois depuis son adoption. Si, en effet, celle-ci a déjà été modifiée à quatre reprises, en 2005, 2009, 2012 et 2013, ces précédentes modifications étaient ponctuelles, voire opérées à de simples fins de coordination, contrairement à celles qui sont proposées.

 

 

3. Trois lignes de force se dégagent de l’intention des auteurs des textes transmis au Conseil d’État.

 

Ils souhaitent, en premier lieu, dans un contexte où la dette publique est à son plus haut depuis la dernière guerre mondiale, faciliter un pilotage des finances publiques par la dépense, qui s’inscrive dans une dimension pluriannuelle et opère dans un cadre de référence « toutes administrations publiques » confondues, avec une attention particulière portée à la dépense d’investissement.

 

Ils entendent, ensuite, renforcer le rôle du Haut Conseil des finances publiques et circonscrire, sinon éliminer, les pratiques qui sont susceptibles d’altérer la transparence des finances publiques, à l’instar des affectations de taxes, des prélèvements sur recettes ou du développement des dépenses fiscales.

 

Enfin, le souci de rationaliser et d’améliorer le travail parlementaire en matière de finances publiques constitue la troisième ligne de force.

 

La fusion de la LOLF et de la loi organique du 17 décembre 2012

 

4. La proposition de loi organique abroge la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques et insère, dans la LOLF, l’ensemble du contenu de ce texte, à l’exception de celles de ses dispositions que le Conseil constitutionnel a regardées comme relevant de la loi ordinaire, qui font l’objet de la proposition de loi. Cette insertion se traduit par la création de deux titres nouveaux au sein de la LOLF : un titre préliminaire « Dispositions relatives à la programmation des finances publiques » et un titre VI « Dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et au mécanisme de correction », qui remplacerait l’actuel titre VI consacré aux dispositions transitoires d’entrée en vigueur de la LOLF qui ont épuisé leurs effets et peuvent, sans difficulté, être ainsi implicitement abrogées.

 

L’intégration de la loi organique de 2012 dans la LOLF permettra de regrouper en un texte unique les dispositions régissant les lois de programmation des finances publiques et les lois de finances et améliorera, donc, la lisibilité d’ensemble de notre dispositif de gouvernance financière publique.

 

La proposition de loi organique ne propose pas de modifier l’intitulé de la loi organique du 1er août 2001, qui resterait « loi organique relative aux lois de finances ». Ceci a pour inconvénient que le contenu du texte et son titre ne seront plus en totale adéquation. Une solution serait de compléter ce titre par tout ou partie de celui de l’actuelle loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, mais elle aurait pour inconvénient de déboucher sur un intitulé lourd, qui ferait de plus disparaître l’acronyme « LOLF », aujourd’hui consacré. Le Conseil d’État ne propose donc pas aux auteurs de la proposition de revenir sur le parti qu’ils ont retenu.

 

En revanche, il relève que le remplacement de l’actuel titre VI de la LOLF par de nouvelles dispositions fait disparaître le texte de son article 68, qui prévoit que d’éventuels décrets pris pour l’application de la loi le sont en Conseil d’État. Pour y remédier, il propose de créer dans la LOLF un titre VII « Application de la loi organique », reprenant le contenu de cet article.

 

 

 

 

La programmation des finances publiques et l’article liminaire des lois de finances (article 1er de la proposition de loi organique, insérant des articles 1er A à 1er J dans la LOLF)

 

5. L’article 1er de la proposition de loi organique reprend à droit constant la plupart des dispositions de la loi organique du 17 décembre 2012 relatives au contenu des lois de programmation des finances publiques et de l’article liminaire des lois de finances. Le Conseil d’État rappelle que ces dispositions ont été adoptées pour traduire, en droit interne, nos engagements résultant du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance du 2 mars 2012, dit TSCG : le choix de ne pas les bouleverser doit donc être approuvé.

 

6. La principale innovation consiste à prescrire qu’à l’avenir les lois de programmation des finances publiques contiennent, pour chaque année de la programmation, un objectif d’évolution en volume des dépenses des administrations publiques, qui serait décliné par sous-secteur des administrations publiques. Compte tenu d’hypothèses d’inflation, cette programmation en volume s’accompagnerait d’une prévision des dépenses des administrations publiques exprimée en euros courants, elle aussi déclinée par sous-secteur.

 

Cette innovation, inscrite au futur article 1er B de la LOLF, est destinée à faciliter un pilotage du redressement de nos finances publiques, une fois la crise sanitaire passée, par la maîtrise de la dépense publique, conformément aux recommandations déjà évoquées de la Cour des comptes et de la commission pour l’avenir des finances publiques. D’autre part, elle offrira la possibilité de mieux comparer les prévisions des lois de programmation et des lois financières annuelles dont toutes les données sont exprimées en euros courants, pour autant que soient fournies par le Gouvernement les clés détaillées qui permettent de passer des conventions de la comptabilité nationale, selon lesquelles sont présentées les dépenses des administrations publiques, à celles de la comptabilité budgétaire.

 

Le Conseil d’État recommande d’ajuster la rédaction proposée, en réservant le terme « d’objectif » aux évolutions en volume et d’utiliser de préférence celui de « prévision » pour les évolutions en euros courants, qui dépendent de la combinaison de l’objectif en volume et des prévisions de taux d’inflation.

 

7. En cohérence avec la création de ce nouvel outil de pilotage au sein des lois de programmation des finances publiques, la proposition de loi organique complète le contenu prescrit pour l’article liminaire des lois de finances par le futur article 1er G de la LOLF, en prévoyant d’y insérer, aux côtés d’une prévision de solde effectif et de solde structurel déjà prévue par la loi organique de 2012, une prévision de dépense des administrations publiques en euros courants. Le Conseil d’État, outre les mêmes ajustements rédactionnels que ceux mentionnés au point précédent, recommande de remplacer les mots « et pour chacune des années à venir de la programmation... » par les mots « en rappelant les prévisions de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) en vigueur pour l’année en question », afin de supprimer une mention qui pourrait laisser à penser que la programmation devrait, chaque année et de façon glissante, être révisée pour l’avenir au sein de l’article liminaire, ce qui ne correspond pas à l’objet de cet article.

 

8. Enfin, le Conseil d’État suggère de réintroduire, au sein du rapport annexé aux lois de programmation des finances publiques, d’une part, l'estimation des dépenses d'assurance vieillesse et des dépenses d'allocations familiales sur la période de programmation, d’autre part, les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des régimes complémentaires de retraite et de l’assurance chômage, qui semblent avoir été soustraites par une erreur de plume du champ de ce rapport.

 

Les dispositions relatives à l’affectation de recettes (article 3 de la proposition de loi organique, article 2 de la LOLF)

 

9. Outre des conditions de procédure, l’article 2 de la LOLF prévoit qu’un tiers ne peut se voir affecter une imposition qu’à raison des missions de service public qui lui sont confiées. Ces dispositions, si elles requièrent que l’affectataire soit chargé d’une mission de service public, n’ont en revanche pas été entendues comme impliquant l’existence d’un lien entre la nature de la recette affectée et celle du service rendu à l’usager. En pratique, les affectations ont été nombreuses, que ce soit au profit de personnes privées, à l’occasion de la disparition des anciennes taxes parafiscales lors de l’entrée en vigueur de la LOLF, de personnes publiques, opérateurs de l’État ou de fonds sans personnalité juridique.

 

10. Les auteurs de la proposition de loi organique entendent resserrer le champ de la fiscalité affectée. A cet effet, ils proposent de consacrer, au niveau organique, la doctrine d’emploi des taxes affectées prévue à l’article 18 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

 

Si la disposition selon laquelle une imposition ne peut être affectée qu’à raison d’une mission de service public subsisterait, une affectation à des tiers autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale ne pourrait, en outre, être instituée ou maintenue que si elle répond à l’un des critères suivants :

 

- la ressource assure le financement d'un service rendu par l'affectataire à un usager et son montant doit pouvoir s'apprécier sur des bases objectives ;

 

- la ressource finance, au sein d'un secteur d'activité ou d'une profession, des actions d'intérêt commun ;

 

- la ressource finance des fonds nécessitant la constitution régulière de réserves financières.

 

11. Le Conseil d’État considère que le maintien du critère préexistant d’affectation à raison des missions de service public confiées à un tiers, qui se combinerait désormais avec ces trois critères alternatifs, comporte un risque de contradiction s’agissant des deux derniers d’entre eux. En effet, les ressources affectées à l’un ou l’autre de ces deux titres sont susceptibles de couvrir des activités qui ne relèvent pas de missions de service public.

 

Par ailleurs, quant au deuxième critère, le Conseil d’État rappelle la position qui avait déjà été la sienne en 2000 dans le cadre de son avis sur la réforme de la loi organique relative aux lois de finances, dans lequel il indiquait que s’« il est loisible d’affecter une imposition de toute nature à un établissement public industriel ou commercial ou à une personne morale de droit privé chargée d’une mission de service public, (…) on ne saurait en revanche envisager de percevoir une telle imposition au profit d’une personne privée qui ne poursuit, conformément à son objet, qu’un intérêt propre à un secteur d’activité ou à une profession ».

 

12. Afin d’éviter une potentielle contradiction des critères encadrant le mécanisme de l’affectation de recettes à des tiers, le Conseil d’État recommande, pour les motifs exposés ci‑dessus, de renoncer à inscrire dans la loi organique la doctrine d’emploi issue de la LPFP pour les années 2018 à 2022. Il formule toutefois, pour traduire l’intention des auteurs de la proposition de loi organique de préciser et de resserrer les possibilités existantes d’affectation, deux observations et une proposition.

 

13. En premier lieu, la condition, prévue par l’article 2 de la LOLF, relative à l’existence d’une mission de service public, peut être présumée remplie pour les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale, qui ne sont d’ailleurs, à juste titre, pas concernés par l’encadrement souhaité par les auteurs de la proposition de loi organique.

 

En deuxième lieu, s’agissant des tiers autres que les affectataires précités, le Conseil d’État relève que le parti retenu par la proposition de loi organique, qui entend encadrer non seulement les créations de mécanismes d’affectation, mais aussi leur simple maintien, est d’ores et déjà de nature, en le combinant au critère actuel tiré de l’existence d’une mission de service public, à entraîner un resserrement des affectations existantes. L’introduction d’une telle exigence pour le maintien de ces dernières permet en effet de restreindre leur périmètre actuel, à la faveur d’une revue générale des ressources affectées à ce jour. Dans cette hypothèse, en effet, se verraient exclus du bénéfice de recettes affectées ceux des affectataires actuels qui ne seraient pas chargés d’une mission de service public.

 

En troisième lieu, l’encadrement plus strict de la pratique de l’affectation pourrait également passer par la réaffirmation du principe selon lequel les affectations de recettes ne peuvent s’opérer qu’au profit de tiers dotés de la personnalité morale, à l’exclusion des fonds sans personnalité juridique, dont certains bénéficient en pratique aujourd’hui de taxes affectées, pratique qui est en contradiction avec l’esprit de la LOLF.

 

Le Conseil d’État estime que, compte tenu de l’impact que sont susceptibles d’avoir les mesures exposées ci-dessus, leur entrée en vigueur devrait être différée à 2025 au plus tôt.

 

14. Dans l’hypothèse, enfin, où le législateur organique souhaiterait néanmoins aller encore plus loin dans la restriction des possibilités d’affectation, le Conseil d’État appelle l’attention sur le fait qu’un tel resserrement, qui pourrait par exemple consister à introduire une condition de lien strict entre la mission de service public confiée à un tiers et la recette qui lui est affectée à ce titre, emporterait des effets massifs sur un nombre important d’affectataires actuels, ce qui supposerait d’en décaler encore davantage la date d’entrée en vigueur.

 

Les dispositions relatives aux prélèvements sur recettes (article 4 de la proposition de loi organique, article 6 de la LOLF)

 

15. Les auteurs de la proposition de loi entendent également encadrer la pratique des prélèvements sur recettes, qui constitue une exception au principe d’universalité budgétaire.

 

L’existence des prélèvements sur recettes, qui a été consacrée par la LOLF, avait déjà été admise par le Conseil constitutionnel à deux reprises dans ses décisions n° 82-154 DC du 29 décembre 1982 et n° 98-405 DC du 29 décembre 1998, qui les a analysés comme « une rétrocession directe d’un montant déterminé de recettes de l’État au profit des collectivités locales ou des communautés européennes en vue de couvrir des charges qui incombent à ces bénéficiaires et non à l’État ». Leur constitutionnalité a néanmoins été soumise à quatre conditions : l’existence de bénéficiaires limitativement énumérés, en l’occurrence les collectivités territoriales et l’Union européenne ; la stricte circonscription de leur objet et l’interdiction d’y recourir pour la couverture de charges permanentes de l’État ; la définition distincte et précise de leur montant et de leur destination ; la justification financière de ce montant.

 

16. L’article 4 de la proposition de loi organique vise, en premier lieu, à améliorer l’information du Parlement, en créant un rapport sur la situation des finances publiques locales, qui serait annexé au projet de loi de finances de l’année et comporterait une évaluation de « l’efficacité » des prélèvements sur recettes affectés aux collectivités territoriales. Compte tenu de l’objectif poursuivi, qui est de mesurer l’impact de ces prélèvements en matière de péréquation, le Conseil d’État recommande de préciser que telle est la finalité de l’évaluation proposée.

 

La proposition de loi organique prévoit également de faire entrer la « définition » des prélèvements sur recettes dans le domaine réservé des lois de finances à l’article 34 de la LOLF. Le Conseil d’État observe que l’utilisation de ce terme pourrait conduire à basculer dans la première partie des dispositions qui relèvent en toute rigueur de la seconde partie, en particulier les modalités de répartition de la dotation globale de fonctionnement. Il préconise donc de remplacer le verbe « définit » par le verbe « institue ».

 

Enfin, la proposition de loi a pour ambition de restreindre le périmètre de ces prélèvements en précisant qu’ils « ne peuvent servir à couvrir des charges incombant à l’État ou être assortis d’un objectif déterminé dans le cadre d’une politique dont ce dernier a la charge ».

 

Cette rédaction reprend en partie la jurisprudence constitutionnelle de 1982 précitée qui, en interdisant la couverture de charges incombant à l’État, entendait prohiber la débudgétisation de charges par nature de celui-ci assortie de leur financement au moyen de prélèvements sur recettes. Elle la complète, en interdisant que ces prélèvements soient assortis d’un objectif déterminé dans le cadre d’une politique dont l’État a la charge.

 

Toutefois, la restriction du périmètre des bénéficiaires de prélèvements sur recettes aux seules collectivités territoriales et à l’Union européenne par la LOLF, postérieurement à la jurisprudence de 1982, permet déjà d’atteindre l’objectif poursuivi d’interdire les débudgétisations de charges par nature de l’État. La formulation retenue pourrait, en outre, conduire à remettre en cause des prélèvements sur recettes existants, qui correspondent à des compétences que l’État, qui en assumait auparavant la charge financière, a transférées aux collectivités territoriales en leur rétrocédant un montant de recettes déterminé, comme c’est le cas avec la dotation générale de décentralisation, depuis son intégration dans la dotation globale de fonctionnement.

 

17. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil d’État suggère de renoncer aux dispositions envisagées eu égard, notamment, au fait que la proposition de loi organique prévoit par ailleurs le principe de la définition et de l’évaluation précise et distincte des prélèvements sur recettes, dans leur montant et leur destination, dans le cadre de la loi de finances, ce qui reprend la jurisprudence constitutionnelle et répond efficacement à la volonté d’encadrer ce mécanisme.

 

Les modifications apportées au contenu de la loi de finances de l’année (article 5 de la proposition de loi organique, article 34 de la LOLF) 

 

18. L’article 34 de la LOLF recense les dispositions qui figurent en lois de finances de l’année. Ces dispositions sont de trois types : celles qui doivent figurer en loi de finances (domaine exclusif obligatoire), celles qui ne peuvent figurer qu’en loi de finances (domaine exclusif facultatif), celles qui peuvent figurer en loi de finances (domaine partagé, par construction facultatif). La place qu’elles occupent au sein de la loi de finances est également régie par cet article : sur les vingt-deux rubriques qu’il comporte, dix correspondent à des dispositions figurant en première partie, douze à des dispositions relevant de la seconde partie. L’article 34 a donc une triple fonction : il fixe la liste des votes émis par le Parlement sur la loi de finances, régit la structure et le contenu de cette loi et, enfin, par a contrario, détermine les dispositions qui constituent des cavaliers budgétaires et sont, dès lors, susceptibles d’être annulées d’office par le Conseil constitutionnel. Les auteurs de la proposition de loi organique y apportent de nombreuses modifications, qui peuvent être regroupées sous sept rubriques.

 

 

 

1° S’agissant des ressources, notamment fiscales, les champs des première et seconde parties seraient modifiés

 

19. L’article 34 actuel limite le champ de la première partie aux seules dispositions qui affectent l’équilibre et, donc, induisent des pertes ou des gains de ressources, notamment en matière fiscale. Cette limitation est contrôlée par le Conseil constitutionnel, qui censure les dispositions placées en première partie dépourvues d’impact sur l’équilibre (décision n° 2015-725 DC du 29 décembre 2015, point 15). Corrélativement, la seconde partie peut contenir toute disposition n’affectant pas l’équilibre relative à l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toute nature, y compris lorsqu’est en cause la fiscalité d’État.

 

La proposition de loi organique étend le champ de la première partie à toutes les dispositions concernant la fiscalité d’État, qu’elles aient ou non une incidence sur l’équilibre de l’année. La seconde partie serait, corrélativement, limitée aux dispositions relatives aux impôts affectés à des personnes autres que l’État, par construction sans incidence sur cet équilibre. L’intention des auteurs est d’éviter que les mêmes débats fiscaux, à la seule date d’effet près, se répètent lors des discussions de la première partie puis des articles non rattachés de la seconde partie.

 

La mesure proposée n’altère pas le principe selon lequel toutes les dispositions ayant une incidence sur l’équilibre figurent en première partie. Par ailleurs, il faut également prendre acte de la difficulté qu’il y a à classer certaines dispositions fiscales ayant un impact très faible ou difficile à quantifier. Au total, la modification proposée n’étant pas de nature à altérer la clarté et la sincérité du débat parlementaire et la jurisprudence de 2015 précitée du Conseil constitutionnel se fondant sur le texte actuel de la LOLF et non sur un principe constitutionnel, le Conseil d’État n’émet pas d’objection à ce qui est proposé.

 

2° Le Parlement examinerait, en première partie, toutes les affectations d’impositions de toutes natures à des personnes autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et la sécurité sociale

 

20. La proposition de loi organique prévoit que la loi de finances, en première partie, « présente » les impositions en question. L’intention des auteurs est de permettre au Parlement d’avoir une vue exhaustive de l’ensemble des taxes affectées, pour, le cas échéant, remettre en cause certaines affectations dans leur principe ou en modifier le quantum, dans l’un et l’autre cas au bénéfice du budget général. Il s’agit donc, à la fois, de donner une base organique à la pratique du plafonnement de certaines taxes, suivie depuis une dizaine d’années, et d’élargir potentiellement son champ à toutes les taxes affectées. Concrètement, la loi de finances contiendrait un tableau recensant ces taxes, en mentionnant pour chacune d’entre elles l’affectataire et le produit prévisionnel. Les lignes du tableau ne donneraient pas lieu à vote, mais pourraient constituer l’occasion d’amendements pour, le cas échéant, attribuer à l’État tout ou partie du produit des taxes concernées.

 

Cette proposition ne pose pas de difficulté de principe. Le Conseil d’État suggère de compléter son texte en y précisant expressément la possibilité qui sera ouverte au législateur financier de réallouer tout ou partie du montant des taxes en question au profit du budget général, ce qui correspond bien à l’intention des auteurs. Seule cette dernière partie du dispositif adopté chaque année aura, au demeurant, une portée normative : les lignes du tableau pour lesquelles aucune modification de l’affectation préexistante ne sera décidée, en effet, auront valeur de simple information, compte tenu de l’utilisation du verbe « présenter ». Il n’est pas proposé de remplacer ce dernier par le verbe « confirmer », eu égard aux difficultés qui s’ensuivraient, si tel était le choix retenu, quant à la possibilité de poursuivre la perception des taxes qui auraient, le cas échéant, été omises dans le tableau.

 

Par ailleurs, la proposition de loi précise expressément, s’agissant du champ des dispositions fiscales de seconde partie, que celle-ci peut contenir toute disposition relative aux affectations. Cette possibilité doit être articulée avec le dispositif de première partie exposé ci-dessus : les dispositions créant de nouvelles affectations, ou bien augmentant ou diminuant le produit de taxes sans impact sur la part attribuée à l’État par la première partie, seront celles qui pourront être débattues en seconde partie. Mais pour garantir l’exactitude du tableau adopté en première partie quant aux montants prévisionnels des différentes taxes, ce tableau devra, en ce cas, être rappelé pour coordination en fin de débat, sans impact sur l’équilibre.

 

3° L’article d’équilibre serait présenté en distinguant fonctionnement et investissement

 

21. Le tableau d’équilibre serait présenté en deux sections, l’une présentant les dépenses et les recettes de fonctionnement, l’autre les dépenses et les recettes d’investissement. La proposition de loi organique, en se fondant sur les différentes catégories prévues aux articles 3 et 5 de la LOLF, prévoit ce qui relève des unes et des autres.

 

Cette modification peut sembler faire double emploi avec une information dont la communication est déjà prévue par l’article 51 de la LOLF, qui prescrit d’annexer au projet de loi de finances une présentation du budget en une section de fonctionnement et une section d’investissement. Toutefois, le tableau en question n’est appelé à figurer que dans une annexe au projet de loi et pas dans la loi adoptée par le Parlement : il n’est, ainsi, pas formellement débattu par les parlementaires. La proposition formulée a donc une portée, et ne pose aucune difficulté de principe, pour autant que soit supprimée la référence faite par le texte de la proposition de loi organique aux obligations et bons du trésor émis par l’État, qui constituent une ressource du tableau de financement et pas du tableau d’équilibre.

 

4° Les objectifs de l’action de l’État et les indicateurs de performance mesurant leur atteinte feraient l’objet de votes au Parlement

 

22. L’insertion, dans les documents annexés au projet de loi de finances, d’un appareillage de mesure de la performance a constitué l’une des grandes innovations de la LOLF. Les éléments correspondants figurent dans les projets annuels de performance, documents présentant les crédits des missions et programmes, qui ont un caractère informatif.

 

La proposition de loi organique franchit un nouveau palier, en prévoyant que les objectifs et indicateurs puissent être votés et, en conséquence, amendés par le Parlement. Les auteurs en attendent une plus grande appropriation de la performance par le Parlement et, en retour, une prise en compte mieux affermie de celle-ci par les gestionnaires.

 

Le Conseil d’État considère que cette modification ne méconnaît pas les prérogatives que tient le Gouvernement de l’article 20 de la Constitution, dans la mesure où, même voté par le Parlement, ce cadre de mesure de la performance ne saurait entraver son action et être regardé comme une injonction qui lui serait faite, le vote portant, au demeurant, sur le choix des indicateurs et non sur la cible fixée par le Gouvernement dans le projet annuel de performance.

 

Par ailleurs, le Conseil d’État estime que la modification proposée ne méconnaît pas la disposition de l’article 34 de la Constitution aux termes de laquelle : « des lois de programmation déterminent les objectifs de l’action de l’État », dans la mesure où les objectifs et indicateurs dont sont assortis les crédits du budget ne sont pas de même nature que ceux que sont susceptibles de contenir les lois de programmation sectorielles, lesquelles ont une dimension pluriannuelle marquée, peuvent fixer des objectifs de politique publique dépourvus de caractère financier et ne couvrent pas nécessairement tous les domaines de l’action de l’État.

 

La disposition proposée, enfin, se rattache à l’objet des lois de finances tel que prévu par l’article 34 de la Constitution, qui est de déterminer les charges de l’État (ainsi que ses ressources), car la mesure de la performance entretient des liens certains avec la budgétisation des crédits, qui pourraient d’ailleurs se renforcer grâce à la disposition proposée.

 

5° Un nouvel état, retraçant toutes les ressources affectées aux politiques publiques financées par les missions budgétaires, serait présenté en loi de finances

 

23. Prenant acte de ce que l’état B, qui retrace les crédits des missions, ne donne qu’une vue tronquée de la réalité des ressources qui leur sont affectées, la proposition de loi organique demande que soient présentés, pour chaque mission, dans un nouvel état, non seulement les crédits, mais aussi les ressources issues des dépenses fiscales, des taxes affectées, des comptes spéciaux, des prélèvements sur recettes et des « moyens dont disposent les fonds sans personnalité juridique », qui concourent au financement des politiques publiques de la mission.

 

Concrètement, un nouvel état serait donc créé, mais il n’ouvrirait pas de droits à dépenser contrairement aux crédits de l’état B et les sommes qui y apparaîtraient seraient non fongibles ; cet état serait donc dépourvu de portée normative. L’intention des auteurs est, sur ce point, claire et la solution inverse serait, au demeurant, impossible à mettre en œuvre, compte tenu de la diversité de régime juridique des sources de financement en question. Bien que rompant avec la logique actuelle de l’article 34 de la LOLF, qui est de recenser des domaines de compétence de la loi de finances appelant des votes parlementaires et, donc, l’adoption de dispositions normatives, la proposition améliorera l’information des parlementaires et aura comme conséquence que le nouvel état figurera dans la loi adoptée.

 

Le Conseil d’État suggère deux modifications : d’une part, l’utilisation du verbe « récapitule », qui marque mieux la portée indicative de ce nouvel état, d’autre part, la suppression de la référence aux « moyens des fonds sans personnalité juridique » qui, outre qu’elle consacrerait dans la loi organique une pratique qui, en réalité, est contraire à ses principes, fausserait le montant réel des ressources des missions, dans la mesure où ces fonds sont alimentés soit par des taxes affectées soit par des subventions budgétaires, ce qui provoquerait des doubles comptes si leurs « moyens » étaient retenus.

 

Enfin, le Conseil d’État propose d’intégrer au nouvel état la distinction des crédits d’investissement et des autres crédits et de ne pas modifier l’état B en y isolant les crédits d’investissement, comme le proposent également les auteurs de la proposition. L’information souhaitée serait ainsi apportée, sans que soit perturbée la logique actuelle de l’état B, dont tous les chiffres correspondent à des montants limitatifs et sont susceptibles d’être amendés lors des débats, ce qui ne serait plus le cas si on y mentionnait, pour information, la part correspondant à des crédits d’investissement, sauf à rendre limitative cette part, ce qui ne correspond pas à l’intention des auteurs.

 

6° La seconde partie pourrait contenir des dispositions « affectant les dépenses », sans qu’il soit besoin qu’il s’agisse des dépenses « de l’année »

 

24. Le domaine facultatif des lois de finances comprend, aujourd’hui, les dispositions de nature à affecter directement le niveau des dépenses, soit à la baisse soit à la hausse, pour autant qu’il s’agisse des dépenses de l’année concernée par la loi de finances en débat, en application du b) du 7° du II de l’article 34 de la LOLF (en seconde partie, la loi de finances de l’année peut « comporter des dispositions affectant directement les dépenses budgétaires de l'année »). De ce fait, seules peuvent y être insérées des dispositions assorties d’un impact identifié sur les crédits ouverts au titre de l’année considérée, qu’elles aient par ailleurs un caractère ponctuel ou un caractère permanent. En revanche, des dispositions portant sur une année autre que celle en débat sont censurées par le Conseil constitutionnel (décision n° 2018-777 DC du 28 décembre 2018, points 66 et 67).

 

La proposition de loi élimine cette restriction, ce qui est de nature à élargir le champ des lois de finances.

 

Cette modification peut trouver une justification dans le souci des auteurs de mieux prendre en compte la dimension pluriannuelle des finances publiques. Elle permettrait au législateur financier, comme c’était le cas sous l’empire de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959, d’adopter des dispositions affectant directement les dépenses de l’État sans qu’il soit en outre nécessaire d’établir dans tous les cas, de façon parfois artificielle, une incidence sur l’année en cause.

 

Elle appelle cependant des réserves de la part du Conseil d’État.

 

Les lois de finances sont en effet soumises à des règles de procédure spéciales, qui enserrent la discussion parlementaire dans un cadre temporel contraint et confèrent au Gouvernement des prérogatives qu’il n’a pas dans le cadre de l’examen des lois ordinaires. En exigeant une incidence sur les dépenses « de l’année », la restriction apportée par le législateur organique en 2001 a permis de limiter le risque que les lois de finances servent de vecteur à des réformes susceptibles de soulever des questions délicates dont l’examen n'est pas compatible avec les délais et les règles de procédure régissant ces lois. La modification proposée n’est donc pas, en l’absence de jurisprudence du Conseil constitutionnel explicite sur la question en cause, dépourvue de risque constitutionnel.

 

Sans doute l’insertion en loi de finances de dispositions fiscales dépourvues d’impact sur les recettes de l’année n’a-t-elle pas été remise en cause par la LOLF, sans que ceci appelle de critique de la part du Conseil constitutionnel lorsqu'il l'a examinée. Mais le champ de la fiscalité est, par lui-même, circonscrit, alors que des dispositions législatives susceptibles d’avoir une incidence directe sur les dépenses peuvent concerner l’ensemble des politiques publiques.

 

Le Conseil d’État estime dans ces conditions préférables de ne pas étendre le champ de ces dispositions au-delà de celles qui ont un impact sur les crédits de l’année, le maintien d’une telle condition étant au demeurant plus cohérent avec le principe d’annualité budgétaire, issu des article 34 et 47 de la Constitution selon les termes du point 21 de la décision du 9 août 2012 du Conseil constitutionnel.

 

7° La LOLF prévoirait expressément le vote de plafonds d’autorisation des emplois des opérateurs, des autorités administratives et publiques indépendantes et des établissements à autonomie financière

 

25. Cette adjonction donne un fondement juridique à la pratique suivie et n’appelle pas d’observation. Au demeurant, le plafonnement des emplois en question, s’il ne trouvait, jusqu’à présent, aucune assise dans la LOLF, entretient néanmoins un lien avec le montant des crédits pour tous ceux des opérateurs qui bénéficient de subventions de l’État. Le Conseil d’État suggère une modification rédactionnelle, destinée à corriger une erreur de plume et à préciser que le plafond est, pour les établissements à autonomie financière, un plafond global et non un plafond pour chaque établissement, ce qui ne serait pas cohérent avec le fait que les emplois concernés sont au nombre de seulement un peu plus de 3 000 au total.

 

 

 

Les dispositions relatives aux lois de finances de fin de gestion (articles 2 et 6 de la proposition de loi organique, article 35 de la LOLF)

 

26. Conformément aux préconisations de la MILOLF, la proposition de loi organique entend cantonner le « collectif budgétaire » de fin d’année aux seules opérations de fin de gestion, à l’exclusion de toute disposition fiscale nouvelle. À cet effet, les articles 2 et 6 instaurent une nouvelle catégorie de lois de finances, les lois de finances de fin de gestion, que la proposition de loi organique vise à restreindre aux seuls « articles de chiffres », en excluant une série de dispositions relevant du champ traditionnel des lois de finances rectificatives, tel que défini par l’article 35 de la LOLF.

 

Seraient ainsi exclus des lois de finances de fin de gestion l’ensemble du domaine facultatif des lois de finances, en particulier toute disposition relative aux ressources de l’État ou à de la fiscalité affectée, ainsi que toute disposition relative aux dépenses budgétaires, à la seule exception de celles affectant directement l’année en cours. Serait également exclue une partie du domaine exclusif des lois de finances, à savoir, d’une part, les dispositions relatives à l’évaluation des recettes budgétaires et à la fixation des plafonds de dépenses et des plafonds d’emplois, d’autre part, les dispositions relatives à l’autorisation de l’octroi des garanties de l’État et de la prise en charge de dettes de tiers.

 

27. Le Conseil d’État observe, en premier lieu, que l’interdiction de comporter des dispositions relatives à l’évaluation des recettes budgétaires et à la fixation des plafonds de dépenses et d’emplois, qui correspondent à la raison d’être d’une loi de finances rectificative, a fortiori de fin d’année, relève d’une erreur de plume qui doit être corrigée.

 

Il considère, en deuxième lieu, que l’exclusion des dispositions relevant du domaine facultatif des lois de finances, qui conduit en pratique à interdire au Gouvernement d’introduire des mesures fiscales nouvelles dans une loi de finances de fin de gestion, n’est pas incompatible avec l’article 20 de la Constitution, aux termes duquel le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation, dès lors d’une part, qu’il reste loisible au Gouvernement de soumettre au Parlement de nouvelles mesures dans le cadre d’une loi ordinaire présentée en fin d’année et que, d’autre part, le Gouvernement n’est pas tenu par le texte de la proposition de loi organique de présenter un projet de loi de finances de fin de gestion, auquel il pourra, le cas échéant, préférer un projet de loi de finances rectificative de droit commun. Il lui sera même loisible, aucune interdiction n’étant formulée à cet égard, de déposer un projet de loi de finances rectificative quand bien même il aurait déjà soumis auparavant au Parlement un projet de loi de finances de fin de gestion.

 

Toutefois, il importe de prévenir une telle situation. À cet effet, le Conseil d’État suggère que les mesures, relevant du domaine exclusif, que sont l’autorisation de l’octroi de garanties de l’État et la prise en charge de dettes de tiers, soient réintroduites dans le champ des dispositions pouvant figurer au sein d’une loi de finances de fin de gestion, de façon à permettre de traiter au sein d’une telle loi l’hypothèse de circonstances exceptionnelles exigeant, notamment, la création d’un mécanisme de garantie.

 

En conséquence, seul le domaine facultatif de la loi de finances serait exclu du champ des lois de finances de fin de gestion. Si cette modification du texte impliquera de renoncer à l’interdiction totale de tout « article de lettres » au sein des lois de finances de fin de gestion, elle permettra néanmoins de répondre à l’objectif principal poursuivi, qui est d’empêcher que des mesures fiscales soient présentées au Parlement en fin d’année, dans des conditions précipitées.

 

28. Le Conseil d’État observe, enfin, que l’interdiction, par l’article 6 de la proposition de loi organique, faite aux lois de finances rectificatives et aux lois de finances de fin de gestion, de comporter toute disposition autre que celles prévues au I et au II de l’article 34 de la LOLF, apparaît inutile, dès lors que l’article 34, auquel renvoie l’article 35, limite déjà strictement le champ d’intervention possible des lois de finances.

 

Les dispositions relatives au calendrier budgétaire parlementaire et à l’information du Parlement (articles 1, 7, 8, 9 et 10 de la proposition de loi organique)

 

29. Dans un souci de rationalisation et de consolidation du rôle de contrôle et d’évaluation du Parlement, la proposition de loi organique entend renforcer le mécanisme de « chaînage vertueux » entre l’exécution et la prévision, en engageant une réforme du calendrier budgétaire parlementaire autour de deux séquences annuelles :

 

- la première, au printemps, qui débuterait au 30 avril avec le dépôt, avant cette date, d’un rapport du Gouvernement sur le programme de stabilité, qui serait désormais concomitant du dépôt du projet de loi de règlement, dont la date est avancée au 1er mai. Cette séquence, qui inclurait le « printemps de l’évaluation » issu de la pratique parlementaire, se clôturerait au 15 juillet avec le dépôt d’un rapport du Gouvernement indiquant notamment les plafonds de crédits envisagés par mission dans la perspective du projet de loi de finances de l’année suivante. Cette dernière mesure correspondrait à la pratique actuelle du « tiré à part » du rapport en vue du débat d’orientation des finances publiques ;

 

- la seconde, à l’automne, qui s’accompagnerait du dépôt, avant le début de la session ordinaire, d’un rapport du Gouvernement sur la dette publique, préalablement à l’examen des lois financières.

 

Ces modifications sont apportées par différentes dispositions de la proposition de loi organique.

 

30. Le Conseil d’État prend acte de la volonté des auteurs de celle-ci de rationaliser le travail parlementaire par une meilleure organisation des débats en amont et en aval des textes financiers et de leur souci de disposer de l’information la plus pertinente pour éclairer ces débats.

 

Il appelle néanmoins l’attention sur les contraintes qu’une telle réorganisation est susceptible d’engendrer en termes de délais pour le Gouvernement, la Cour des comptes et le Haut Conseil des finances publiques, qui sont le plus souvent tenus de joindre leurs propres rapports ou avis aux textes ou rapports gouvernementaux. Il observe, ainsi, que la Cour des comptes serait conduite à rendre son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques avant le 30 avril, soit près de deux mois avant la remise actuelle de ce rapport, qui intervient traditionnellement à la fin du mois de juin, tout en restant soumise à l’obligation de remettre avant le 1er mai son rapport conjoint au dépôt du projet de loi de règlement.

 

Il suggère ensuite, de supprimer la disposition prévoyant que le rapport prévu par l’article 1er J du futur texte de la LOLF une fois modifié, qui devra désormais être déposé avant le 30 avril, doit contenir « une évaluation à moyen terme des ressources de l’État ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions ». Cette disposition, reprise du droit existant, est en effet désormais satisfaite par l’obligation de fournir, dans le « tiré à part » de juillet, que consacre la proposition de loi organique, les plafonds envisagés pour les différentes missions du budget, la notion de « grandes fonctions » correspondant à une nomenclature ancienne, beaucoup plus agrégée. Il suggère, également, que ce soit ce même rapport devant être remis avant le 15 juillet qui fournisse la liste des missions, programmes et indicateurs, plutôt que celui remis avant le 30 avril, un tel calendrier étant, à cet égard, préférable.

 

Enfin, le Conseil d’État note que l’article 8 de la proposition de loi organique prévoit qu’une semaine réservée au contrôle parlementaire puisse être consacrée prioritairement au contrôle de l’exécution des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Sans être contraire à l’article 48, alinéa 4, de la Constitution, qui dispose qu’« Une semaine de séance sur quatre est réservée par priorité et dans l'ordre fixé par chaque assemblée au contrôle de l'action du Gouvernement et à l'évaluation des politiques publiques », ces dispositions établissent une procédure pour laquelle la Constitution ne prévoit pas de renvoi à une loi organique. Le Conseil d’État ne peut donc que recommander sa suppression.

 

31. L’article 10 de la proposition de loi complète la liste, déjà longue, des informations que le Gouvernement, en vertu des articles 50 et 51 de la LOLF, doit fournir au Parlement sous forme de documents annexés au projet de loi de finances.

 

32. La modification la plus importante consiste à prescrire l’insertion, dans les fascicules bleus retraçant les moyens des missions et des programmes, ainsi que les données relatives à la performance, d’une trajectoire, pour chaque programme, des crédits des deux années qui suivent celle de la loi de finances en débat. Cette information, purement indicative, ne contrevient en rien au principe d’annualité et est de nature à conforter la démarche de budgétisation pluriannuelle qu’entendent, depuis plus de dix ans, promouvoir les autorités budgétaires de l’État. Il conviendra toutefois, pour remplir cette nouvelle obligation d’information, que les arbitrages rendus chaque année au début de l’été prennent pleinement en compte le « triennal » au lieu des seuls crédits de l’année à venir.

 

33. Une deuxième modification prescrit une présentation des différentes actions des programmes qui identifie les crédits d’investissement. Cette modification paraît inutile, puisque la présentation par actions, lesquelles sont des subdivisions indicatives des programmes, s’opère déjà par titre, ce qui permet d’identifier l’effort d’investissement pour chaque action.

 

34. Les autres modifications portent sur les dépenses fiscales et n’appellent pas de commentaire particulier, hormis la disposition prescrivant que soit justifiée, dans le fascicule des « voies et moyens », « l’opportunité de la reconduction des dépenses fiscales dont la création ou l’extension résulte de la loi de finances afférente à l’année précédente ou est prévue par le projet de loi de finances de l’année, ainsi que de celles dont, aux termes de la disposition législative qui les a instituées, l’application cessera au cours de l’année ». Ceci fait double emploi avec les évaluations préalables du projet de loi de finances ou du projet de l’année précédente. Quant aux dépenses fiscales dont le terme échoit au cours de l’année à venir, soit elles font l’objet d’une reconduction par le projet de loi de finances, où cette reconduction doit être justifiée par l’évaluation préalable de la disposition correspondante, soit il est prévu de ne pas les reconduire, cas auquel il n’y a rien à justifier. 

 

Les dispositions relatives aux pouvoirs de contrôle du Parlement sur les finances publiques (article 11 de la proposition de loi organique)

 

35. L’article 11 de la proposition de loi organique, qui porte sur les pouvoirs de contrôle parlementaire sur les finances publiques, procède à trois modifications.

 

36. La première consiste à restreindre le champ des questionnaires budgétaires adressées au Gouvernement avant le 10 juillet en vue de l’examen du projet de loi de finances de l’année aux seules demandes de renseignements d’ordre budgétaire.

 

Le Conseil d’État appelle l’attention sur le risque de restriction excessive du périmètre des questionnaires budgétaires que comporte une telle disposition. Ces questionnaires, en effet, ne pourraient plus porter sur les dépenses fiscales, fussent-elles rattachées au programme de la mission dont les rapporteurs spéciaux auraient la charge.

 

37. Si la deuxième modification, qui vise à préciser que les domaines d’attribution des rapporteurs spéciaux sont définis par les commissions des finances de chacune des chambres, ne pose pas de difficulté, la troisième et dernière mesure, qui entend autoriser les commissions des finances de chaque chambre à solliciter les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes, appelle les observations suivantes.

 

Conformément à son article 57, la LOLF accorde d’ores et déjà des pouvoirs étendus aux membres des commissions des finances pour procéder « à toutes investigations sur pièces et sur place, et à toutes auditions qu'ils jugent utiles » dans leur champ de compétences. A ce titre, une autorité administrative indépendante ou une autorité publique indépendante peut donc être entendue et faire l’objet d’un contrôle relatif à ses crédits, au même titre qu’un responsable de programme. Des lois ordinaires ouvrent par ailleurs des modes de saisine spécifiques de ces autorités par les assemblées parlementaires.

 

En revanche, les dispositions existantes ne permettent pas aux commissions des finances de consulter une autorité administrative indépendante ou une autorité publique indépendante pour obtenir des informations qui relèvent du champ de compétences de cette dernière. La mesure proposée élargit donc le pouvoir de sollicitation de ces autorités par les commissions des finances de chaque chambre.

 

Le Conseil d’État estime que cette disposition, qui concerne des autorités indépendantes du Gouvernement, ne se heurte à aucun obstacle juridique dès lors qu’elle serait limitée à l’obtention d’informations incluses dans le strict périmètre de compétence des commissions des finances. Il préconise, pour éviter toute ambiguïté, que le champ de cette sollicitation soit donc explicitement circonscrit aux seules informations relevant des compétences de ces commissions, à savoir les finances publiques.

 

Les dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques (article 12 de la proposition de loi organique)

 

38. L’article 12 de la proposition de loi organique transfère dans la LOLF les chapitres 3 et 4 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, respectivement consacrés aux missions du Haut Conseil des finances publiques et au mécanisme de correction qui doit être enclenché en cas d’écart important à la trajectoire de solde structurel de la dernière loi de programmation au moment du dépôt du projet de loi de règlement. Les dispositions relatives au HCFP que le Conseil constitutionnel a considéré comme relevant du domaine de la loi ordinaire sont, pour leur part, reprises à l’identique dans la proposition de loi ordinaire, qui n’appelle aucun commentaire particulier du Conseil d’État.

 

Le dispositif organique reprend, lui aussi, en grande partie l’existant, mais apporte néanmoins plusieurs modifications importantes.

 

En particulier, il élargit le champ des missions du Haut Conseil des finances publiques en le rendant compétent pour apprécier :

 

- la cohérence de l’article liminaire du projet de loi de finances de l’année et du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année au regard des orientations pluriannuelles de dépense des administrations publiques définies dans la LPFP ;

 

- le réalisme des recettes et des dépenses des projets de loi de finances, des projets de loi de financement de la sécurité sociale, des projets de loi de finances rectificative et des projets de loi de financement rectificatives de la sécurité sociale ;

 

- à la demande du Gouvernement, les conséquences financières de toute disposition figurant dans ces quatre catégories de textes.

 

39. L’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) signé à Bruxelles le 2 mars 2012, prévoit que : « Les parties contractantes mettent en place, au niveau national, le mécanisme de correction visé au paragraphe 1, point e), sur la base de principes communs proposés par la Commission européenne et concernant en particulier la nature, l'ampleur et le calendrier des mesures correctives à mettre en œuvre, y compris en cas de circonstances exceptionnelles, ainsi que le rôle et l'indépendance des institutions chargées, au niveau national, de vérifier le respect des règles énoncées au paragraphe 1 ». Conformément au a) du point 1 de l’article 2 du règlement (UE) n° 473/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l'évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro, les organismes indépendants chargés de surveiller le respect des règles budgétaires européennes doivent notamment être « structurellement indépendants » ou jouir « d'une autonomie fonctionnelle par rapport aux autorités budgétaires de l'État membre », cette indépendance passant en particulier par « l’interdiction de prendre des instructions des autorités budgétaires de l’État membre concerné ou de tout autre organisme public ou privé », « la capacité de communiquer publiquement en temps utile », ainsi que « des ressources suffisantes et un accès approprié à l’information afin de mener à bien leur mission ».

 

L’attribution au Haut Conseil de la mission d’apprécier le réalisme des recettes et des dépenses des lois financières vient renforcer significativement les capacités de ce dernier pour assumer sa mission de surveillance de la trajectoire des finances publiques et de suivi de la cohérence du scénario macroéconomique.

 

S’agissant de la possibilité pour le Gouvernement de demander au Haut Conseil des finances publiques d’apprécier les conséquences financières de telle ou telle mesure nouvelle inscrite dans un projet de loi financier, le Conseil d’État observe qu’une telle modalité de saisine du Haut Conseil ne correspond pas, selon les standards européens, aux missions traditionnelles qui incombent aux comités budgétaires indépendants, lesquels ont vocation à se prononcer à échéances programmées, sur un cadre et des dispositions répondant à un format normalisé. Pour autant, ces dispositions ne sont pas de nature à nuire à l’indépendance du Haut Conseil, dès lors que l’examen des mesures nouvelles auquel il se livrerait à la demande du Gouvernement ne remet pas en cause le plein accès à l’information dont il dispose par ailleurs pour l’exercice général de ses missions.

 

40. Ces nouvelles missions confiées au Haut Conseil des finances publiques conduisent également, compte tenu de l’ampleur des travaux qu’elles impliquent, à s’interroger sur le maintien d’un délai d’une semaine entre la transmission par le Gouvernement au HCFP des éléments nécessaires des projets de lois financières ou des projets de LPFP, et la saisine du Conseil d’État sur ces textes. Si un tel délai peut se justifier pour les projets de lois financières, tel n’est pas le cas pour les lois de programmation des finances publiques. Ce délai paraît, enfin, encore moins justifiable pour la saisine du Haut Conseil des finances publiques sur les dispositions des projets de loi de programmation sectoriels ayant une incidence sur les finances publiques.

 

41. Le Haut Conseil serait également, en vertu de l’article 12 de la proposition de loi organique, tenu de rendre un avis sur le rapport sur la trajectoire, les conditions de financement et la soutenabilité de la dette, que le Gouvernement doit remettre au Parlement avant le début de la session ordinaire, dans la perspective d’un éventuel débat parlementaire. Cette mesure est cohérente avec le souci de renforcer le contrôle sur la soutenabilité des finances publiques à moyen et long termes.

 

42. L’article 12 de la proposition de loi organique rend également le Haut Conseil compétent pour apprécier les dispositions des projets de loi de programmation sectoriels ayant une incidence sur les finances publiques. Cette disposition contribue opportunément à consolider l’évaluation et le suivi au long cours par le Haut Conseil de la compatibilité de l’ensemble des politiques publiques mises en œuvre avec les objectifs de dépenses inscrits dans la LPFP.

 

43. Le mécanisme de correction en cas de constatation, au stade du projet de loi de règlement, d’écarts importants entre les résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel qui figurent dans la LPFP est repris pour l’essentiel à l’identique par la proposition de loi organique.

 

Néanmoins, le texte proposé renforce le suivi par le Haut Conseil du mécanisme de correction. Lorsque celui-ci identifie un écart important en amont du dépôt du projet de loi de règlement, le Gouvernement est actuellement simplement tenu d’exposer les raisons de cet écart lors de l’examen parlementaire de ce texte. Il serait désormais également tenu, dès ce stade, d’indiquer les mesures de correction envisagées, celles-ci n’étant pour l’heure apportées que dans la prochaine loi de finances ou loi de financement de l’année.

 

A l’occasion de la reprise à l’identique des dispositions relatives aux circonstances exceptionnelles, définies à l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) signé à Bruxelles le 2 mars 2012, de nature à justifier les écarts constatés, le Conseil d’État observe que la procédure de saisine du Haut Conseil des finances publiques pour constater qu’une situation de circonstances exceptionnelles est constituée ou que de telles circonstances n’existent plus, mériterait d’être clarifiée, la rédaction, inchangée, figurant au IV de l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et la gouvernance des finances publiques, étant peu claire sur la portée de l’avis du Haut Conseil et la marge de manœuvre laissée au Gouvernement dans un tel contexte.

 

44. L’article 12 prévoit également une mesure de nature à renforcer le suivi ex post du respect des règles budgétaires et des engagements pluriannuels, en prescrivant que l’avis du Haut Conseil des finances publiques joint au projet de loi de règlement porte désormais également sur le respect des objectifs de dépenses des administrations publiques et, au moins une fois tous les quatre ans, sur les écarts entre les prévisions macroéconomiques de recettes et de dépenses des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale et leur réalisation. Dès lors que la proposition de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale n° 4111 crée un projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale, le Conseil d’État recommande que l’avis du Haut Conseil, qui porte également sur les recettes et les dépenses des administrations de sécurité sociale (ASSO) soit également joint à ce projet.

 

45. Le Conseil d’État suggère, enfin de compléter les dispositions relatives à la saisine du HCFP dans le cadre des lois financière rectificatives, pour étendre cette saisine aux lois de finances de fin de gestion.

 


 

Annexe

Amendements traduisant les suggestions du Conseil d’État

 

Article premier (articles 1er A à 1er J de la LOLF)

 

Amendement

 

Dans le dernier alinéa du texte proposé pour l’article 1er A de la LOLF (alinéa 8 de l’article 1er), remplacer les mots : « un objectif de croissance de la dépense des administrations publiques exprimé en volume et un objectif de dépenses des administrations publiques au sens de la comptabilité nationale exprimé en milliards d’euros courants » par les mots : « un objectif, exprimé en volume, d’évolution de la dépense des administrations publiques présentée selon les conventions de la comptabilité nationale et une prévision, exprimée en milliards d’euros courants, de cette dépense en valeur » ;

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le texte proposé pour le 1° de l’article 1er B de la LOLF (alinéa 10 de l’article 1er) :

 

« 1° Une déclinaison, par sous-secteur d’administration publique, de l’objectif d’évolution en volume et de la prévision en milliards d’euros courants de la dépense des administrations publiques, mentionnés à l’article 1er A ; » 

 

Amendement

 

Après le troisième alinéa du texte proposé pour l’article 1er E de la LOLF (alinéa 23 de l’article 1er), insérer deux alinéas ainsi rédigés :

 

« 2°bis Pour chacun des exercices de la période de la programmation, l'estimation des dépenses d'assurance vieillesse et l'estimation des dépenses d'allocations familiales ;

 

« 2°ter Pour chacun des exercices de la période de la programmation, les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des régimes complémentaires de retraite et de l'assurance chômage, exprimées selon les conventions de la comptabilité nationale ; »

 

Amendement

 

Dans le 1er alinéa du texte proposé pour l’article 1er G de la LOLF (alinéa 34 de l’article 1er), remplacer les mots : « retraçant, pour l’année sur laquelle elles portent et pour chacune des années à venir de la période de programmation mentionnée à l’article 1er A de la présente loi organique : » par les mots : « retraçant, pour l’année sur laquelle elles portent, en rappelant les prévisions de la loi de programmation des finances publiques en vigueur pour l’année en question : » ;

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le troisième alinéa du texte proposé pour l’article 1er G de la LOLF (alinéa 36 de l’article 1er) :

 

« – l’état de réalisation, décliné par sous-secteur d’administration publique, de l’objectif d’évolution en volume et de la prévision d’évolution en milliards d’euros courants de la dépense des administrations publiques ; » 

 

Amendement

 

Supprimer le 3° du texte proposé pour l’article 1er J de la LOLF (alinéa 50 de l’article 1er) ;

 

Amendement

 

Supprimer le 4° du texte proposé pour l’article 1er J de la LOLF (alinéa 51 de l’article 1er) ;

En conséquence, à l’article 9 de la proposition de loi organique, compléter le I du texte proposé pour l’article 48 de la LOLF (alinéa 2 de l’article 9) par une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport indique, également, la liste des missions, des programmes et des indicateurs de performance associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de l’année suivante. » ;

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le D du paragraphe III de l’article 1er de la proposition de loi (alinéa 58 de l’article 1er) :

 

D. – Le 3° de l’article 58 de la LOLF est ainsi rédigé :

 

« 3° Le dépôt d’un rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques conjoint au dépôt du rapport mentionné à l'article 1er J ; ».

 

Article 2 (notamment, article 1er de la LOLF)

 

Amendement

 

A l’alinéa 1er de l’article 2 de la proposition de loi, substituer aux mots : « d’approbation des comptes et de résultats de gestion » les mots : « relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année ».

 

Article 3 (article 2 de la LOLF)

 

Amendement

 

Substituer aux 2° et 3° de cet article (alinéas 3 à 8 de l’article 3) un 2° ainsi rédigé :

 

2° Le second alinéa de l’article 2 de la LOLF est ainsi rédigé :

 

« II. – Les impositions de toutes natures peuvent être directement affectées aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics et aux organismes de sécurité sociale sous les réserves prévues par le III du présent article et par les articles 34 et 51.

 

« Les impositions de toutes natures ne peuvent, sous les mêmes réserves, être affectées à un tiers autre que ceux mentionnés à l’alinéa précédent, et leur affectation maintenue, que s’il est doté de la personnalité morale et à raison des missions de service public qui lui sont confiées. »

 

 

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le IV de cet article (alinéa 12 de l’article 3) :

 

« IV. – Les I et II entrent en vigueur lors du dépôt du projet de loi de finances pour l’année 2025. »

 

Article 4 (notamment, article 6 de la LOLF)

 

Amendement

 

Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par le I pour remplacer le quatrième alinéa de l’article 6 de la LOLF (alinéa 3 de l’article 4) ;

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le troisième alinéa du texte proposé par le I pour remplacer le quatrième alinéa de l’article 6 de la LOLF (alinéa 4 de l’article 4) :

 

« Ces prélèvements sur les recettes de l’État sont, dans leur montant et leur destination, définis et évalués de façon précise et distincte dans la loi de finances. » ;

 

Amendement

 

A l’alinéa 5 de la proposition de loi (4° du I de l’article 34 de la LOLF), substituer au mot : « définit » le mot : « institue » ;

 

Amendement

 

Compléter le texte proposé par le III pour l’article 51 bis nouveau de la LOLF (alinéa 7 de l’article 4) par une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport comporte une évaluation de l’impact des prélèvements sur recettes établis au profit des collectivités territoriales en matière de péréquation ».

 

Article 5 (article 34 de la LOLF)

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le texte proposé pour le 5° bis du I de l’article 34 de la LOLF (alinéa 5 de l’article5) :

 

« 5° bis. – Présente la liste et le produit prévisionnel de l’ensemble des impositions de toute nature dont le produit est affecté à une personne morale autre que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale et décide, le cas échéant, l'attribution, totale ou partielle, de ce produit au budget de l'État ; »

 

Amendement

 

Rédiger ainsi les deuxième et troisième phrases du texte proposé pour compléter le 7° du I de l’article 34 de la LOLF (alinéa 6 de l’article 5) :

 

« Les ressources de fonctionnement sont constituées des ressources mentionnées aux 1° à 4° et au 7° de l’article 3, déduction faite des prélèvements sur recettes. Les ressources d’investissement sont constituées des ressources mentionnées au 3° bis, au 5° et au 6° de l’article 3. » ;

 

Version alternative, présentant les prélèvements sur recettes comme des charges :

 

Rédiger ainsi les deuxième, troisième et quatrième phrases du texte proposé pour compléter le 7° du I de l’article 34 de la LOLF (alinéa 6 de l’article 5) :

 

« Les ressources de fonctionnement sont constituées des ressources mentionnées aux 1° à 4° et au 7° de l’article 3. Les ressources d’investissement sont constituées des ressources mentionnées au 3° bis, au 5° et au 6° de l’article 3. Les charges de fonctionnement sont constituées des charges mentionnées aux 1° à 4° et au 6° du I de l’article 5, ainsi que des prélèvements sur recettes. » ;

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le texte proposé pour le 1°B du II de l’article 34 de la LOLF (alinéa 9 de l’article 5) :

 

« 1° B. – Récapitule, pour chaque mission du budget général, d’une part, le montant des crédits de paiement de la mission, en distinguant les crédits de subvention aux opérateurs et ceux finançant des dépenses d’investissement, d’autre part, les montants respectifs des dépenses fiscales, des ressources affectées, des prélèvements sur recettes et des crédits des comptes spéciaux, qui concourent à la mise en œuvre des politiques publiques financées par cette mission ; » 

 

Amendement

 

Supprimer le 6° (alinéa 10) de l’article 5 (texte proposé pour compléter le 1° du II de l’article 34 de la LOLF) ;

 

Amendement

 

Dans le texte proposé pour le 5° bis du II de l’article 34 de la LOLF (alinéa 12 de l’article 5), remplacer les mots : « de chacun des établissements à autonomie financière » par les mots « des établissements à autonomie financière » ;

 

Article 6 (article 35 de la LOLF)

 

Amendement

 

Supprimer les alinéas 4 et 5 de l’article 6.

 

Amendement

 

A la première phrase de l’alinéa 11 de l’article 6, substituer aux mots : « aux 2°, 5° et 6° du I ainsi qu’ » les mots : « au 2° du I et » ;

 

Amendement

 

Supprimer l’alinéa 12 de l’article 6.

 

 

Article 8 (article 46 de la LOLF)

 

Amendement

 

Supprimer les alinéas 3 et 4 de l’article 8.

 

Article 9 

 

Amendement

 

A l’alinéa 2 de l’article 9 (article 48 de la LOLF), substituer aux mots : « et les » les mots : « ainsi que les montants prévus des ».

 

Article 10 (article 51 de la LOLF)

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le texte de la phrase proposée pour compléter le 4° de l’article 51 de la LOLF (alinéa 8 de l’article 10) :

 

« Cette annexe justifie le rattachement à un programme budgétaire et évalue le montant et le nombre de bénéficiaires de chaque dépense fiscale. Elle procède, chaque année, à l’évaluation d’une fraction des dépenses fiscales existantes. »

 

Amendement

 

Supprimer le texte proposé pour le c bis) du 5° de l’article 51 de la LOLF (alinéas 13 et 14 de l’article 10).

 

Article 11

 

(Article 49 de la LOLF)

 

Amendement

 

Après le mot : « ordre », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 1er de l’article 11 : « financier, budgétaire ou ayant trait aux dépenses fiscales ».

 

(Article 57 de la LOLF)

 

Amendement

 

Après le mot : « finances », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 5 de l’article 11 : « pour l’obtention d’informations entrant dans le champ des finances publiques ».


 

Article 12

 

(Article 61 nouveau de la LOLF)

 

Amendement

 

A la seconde phrase du premier alinéa du III et à la seconde phrase du premier alinéa du VIII du texte proposé pour l’article 61 de la LOLF (alinéas 20 et 37 de l’article 12), remplacer les mots : « une semaine » par les mots : « quinze jours ».

 

Amendement

 

Au 1° du IV du même texte (alinéa 23 de l’article 12), après les mots : « de l’année », insérer les mots : « et de l’article liminaire du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année ».

 

Amendement

 

Au 7ème alinéa du IV du même texte (alinéa 28 de l’article 12), remplacer le mot : « un » par le mot : « deux ».

 

Amendement

 

Rédiger ainsi les 8ème et 9ème alinéas du IV du même texte (alinéas 29 et 30 de l’article 12) :

 

« L’avis du Haut Conseil, qui comporte les éléments mentionnés au … est joint au PLF / PLFSS lors de sa transmission au Conseil d’État ainsi qu’au projet de loi déposé à l’Assemblée nationale. Il est rendu public lors de ce dépôt ».

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le V du même texte (alinéa 31 de l’article 12) :

 

« V. – Le Haut Conseil des finances publiques rend un avis sur le rapport prévu au II de l’article 48 de la présente loi organique. Cet avis est rendu public avant le début de la session ordinaire. »

 

Amendement

 

A la première phrase du VI, et aux 1°, 2° et 3° du même VI, après les mots : « finances rectificative » insérer les mots : « , un projet de loi de finances de fin de gestion » (alinéas 32 à 35 de l’article 12).

 

Amendement

 

A la seconde phrase du premier alinéa du VIII, substituer aux mots : « une semaine » les mots : « quinze jours » (alinéa 37 de l’article 12).

 

Amendement

 

Compléter le premier alinéa du VIII (alinéa 37 de l’article 12) par les mots suivants : « ou, à défaut, par la dernière loi de finances » ;

 

Amendement

 

A la seconde phrase du premier alinéa du VIII (alinéa 37 de l’article 12), remplacer la dernière occurrence des mots : « le projet de » par le mot : « la ».

 

(Article 62 nouveau de la LOLF)

 

Amendement

 

Rédiger ainsi le début du V du texte proposé pour l’article 62 de la LOLF (alinéa 59 de l’article 12) :

 

« V. – Le rapport mentionné au I du présent article porte également sur le respect des objectifs … (le reste sans changement) ».

 

Amendement

 

Supprimer la seconde phrase du texte proposé pour le V de l’article 62 de la LOLF (alinéa 59 de l’article 12).

 

Article additionnel après l’article 12

 

Amendement

 

La LOLF est complétée par un titre VII ainsi rédigé :

 

« Titre VII

« Dispositions d’application

 

« Art. 63. – Des décrets en Conseil d'État pourvoient, en tant que de besoin, à l'exécution de la présente loi organique. »

 

 

 

 

Cet avis a été délibéré et adopté par le Conseil d’État dans sa séance du jeudi 1er juillet 2021.

 


([1])  La composition de cette commission spéciale figure au verso de la présente page.

([2]) M. Laurent Saint-Martin, rapport d’information n° 2210 de la commission des finances en conclusion de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF, septembre 2019

([3]) Voir l’avis en en annexe.

([4]) Le conseil constitutionnel ayant fait évoluer sa jurisprudence depuis 2001, la LOLF n’est plus une loi organique relative au Sénat au sens de l’article 46, alinéa 4, de la Constitution.

([5])  CC, décision n° 212-653 DC du 9 août 2012. Néanmoins, l’article 47 de la Constitution fait référence à l’exercice budgétaire sans que la durée de cet exercice ne soit précisée, laissant ce soin à l’ordonnance organique de 1959 puis à la LOLF.

([6])  André Philip, La démocratie industrielle, 1955.

([7])  Prévue au premier alinéa de l’article 8 de la LOLF : « Les crédits ouverts sont constitués d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement ».

([8])  Le Pacte de stabilité et de croissance renvoie à un ensemble de trois textes : une résolution du Conseil européen, dépourvue de portée juridique en tant que telle, et deux règlements. Ces deux règlements instaurent respectivement les volets préventif et répressif du Pacte.

([9])  Règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques

([10])  Le solde structurel doit correspondre à l’objectif à moyen terme spécifique à chaque pays, avec une limite inférieure de déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut aux prix du marché.

([11]) Cour des comptes, La comptabilité générale de l’État, dix ans après : une nouvelle étape à engager, 22 février 2016..

([12]) La loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, travaux préparatoires, volume II – Sénat – Première lecture, commentaire de l’article premier, p. 41.

([13]) Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, considérant 10.

([14]) Conseil constitutionnel, décision n° 98-405 DC du 29 décembre 1998, considérant 67.

Conseil d’Etat, Section des finances, 21 décembre 2000, n° 365546, Avis "Réforme de la loi organique relative aux lois de finances".

([15]) Décision n° 93-328 DC du 16 décembre 1993, considérants 14 et 15.

([16]) M. Laurent Saint-Martin, rapport d’information n° 2210 de la commission des finances en conclusion de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF, septembre 2019, pp 95 et suivantes.

([17]) Cette proposition a été évoquée par M. Matias de Sainte Lorette, Rapport particulier n° 2 du CPO, L’évolution du cadre juridique de la fiscalité affectée et le suivi des propositions formulées par le rapport du CPO de juillet 2013, avril 2018, p 55.

([18]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2017, 2018, p. 147.

([19]) M. Laurent Saint-Martin, rapport d’information n° 2210 de la commission des finances en conclusion de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF, septembre 2019, recommandation numéro 17.

([20]) Tome II du rapport n° 4227 de M. Laurent Saint-Martin sur le PLF pour 2021, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2020.

([21]) 82-154 DC, 29 décembre 1982, cons. 21 à 23.

([22]) Même décision.

([23]) Par exemple, la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (loi « RCT ») et la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi « NOTRe ») ont modifié largement les critères de répartition de composantes de la DGF.

([24]) Les EPCI à fiscalité propre reçoivent la dotation d’intercommunalité ainsi que la dotation de compensation, qui sont une composante de la dotation globale de fonctionnement.

([25]) L’article 77 de la loi de finances pour 2021 instaure un PSR au profit des fonds départementaux de péréquation des DMTO. Ces fonds redistribuent en année n+1 les produits de taxe additionnelle aux DMTO perçus en année n, aux communes de moins de 5 000 habitants qui ne sont pas classées stations de tourisme dans le département.  

([26]) Rapport d’information n° 4546 du 22 février 2017, page 65.

([27]) Les finances publiques. Pour une réforme du cadre organique et de la gouvernance, novembre 2020. Lien

([28]) La DGF peut contribuer à l’investissement, dans la mesure où il est avant tout financé par l’autofinancement, c’est-à-dire l’excédent de la section de fonctionnement. La baisse de DGF entre 2014 et 2017 (dite « contribution au redressement des finances publiques » – CRFP) est ainsi corrélée à un recul marqué de l’investissement local sur la période. Pour autant, la DGF est assorti de plusieurs indicateurs de performance.

([29]) Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2020. PSR au profit des collectivités territoriales. Lien

([30]) Pour le bloc communal : dotation de solidarité rurale (DSR, communes), dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU, communes), dotation d’intercommunalité (EPCI à fiscalité propre).

([31]) L’emploi de certaines ressources fiscales ou de concours particuliers peut être davantage contraint, comme les dotations de soutien à l’investissement, qui sont attribuées à la décision des préfets, ou la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), qui peut être instaurée pour financer les services locaux de collecte et de traitement des déchets.

([32]) Par exemple, dans le projet de loi de finances pour 2021, l’article 42 instituait une nouvelle faculté d’exonération de CFE par les communes et EPCI à fiscalité propre, et l’article 43 réformait le régime de la taxe d’aménagement.

([33]) Divers mécanismes de redistribution financière sont prévus à chaque niveau de collectivités : bloc communal (notamment, le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales, FPIC), départements (par exemple, le fonds de péréquation des DMTO) et régions (fonds de péréquation des ressources des régions). L’ensemble de ces fonds sont présentés en détail dans l’annexe budgétaire « Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales » et dans le rapport annuel de l’OFGL.

([34]) La commission spéciale a adopté deux amendements du rapporteur pour inclure explicitement dans le domaine des lois de finances les dispositions relatives à la comptabilité publique et à la péréquation horizontale (voir commentaire de l’article 5).

([35]) Pour autant, les parts de TVA liées à la suppression de la TH et de la part régionale de CVAE sont bien versées également via le compte d’avances (mais pas la part de TVA liée à la suppression de la DGF des régions).

([36]) Les finances publiques, pour une réforme du cadre organique et de la gouvernance, novembre 2020, précité.

([37]) Les finances publiques locales, octobre 2014. Lien

([38]) Le point 24 de l’avis du Conseil d’État sur la proposition de loi organique faisant l’objet du présent rapport indique que « les lois de finances sont soumises à des règles de procédure spéciales, qui enserrent la discussion parlementaire dans un cadre temporel contraint et confèrent au Gouvernement des prérogatives qu’il n’a pas dans le cadre de l’examen des lois ordinaires ; […] le législateur organique en 2001 a permis de limiter le risque que les lois de finances servent de vecteur à des réformes susceptibles de soulever des questions délicates dont l’examen n'est pas compatible avec [ces] délais et [ces] règles de procédure ».

([39]) Jean-Pierre Camby, Michel Bermond, Philippe Dautry, Philippe Lamy et Gérald Sutter, La réforme du budget de l’État : la loi organique relative aux lois de finances, Librairie générale de droit et de jurisprudence (4ème édition), 2019.

([40]) https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2005/2005530DC.htm.

([41]) https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2007/2007555DC.htm.

([42]) « Les ressources budgétaires de l’État comprennent : 1° des impositions de toute nature ; 2° les revenus courants de ses activités industrielles et commerciales, de son domaine, de ses participations financières ainsi que de ses autres actifs et droits, les rémunérations des services rendus par lui, les retenues et cotisations sociales établies à son profit, le produit des amendes, les versements d’organismes publics et privés autres que ceux relevant des opérations de trésorerie, et les produits résultant des opérations de trésorerie autres que les primes à l’émission d’emprunts de l’État ; 3° les fonds de concours, ainsi que les dons et legs consentis à son profit ; 4° les revenus courants divers ; 5° les remboursements des prêts et avances ; 6° les produits de cession de son domaine, de ses participations financières ainsi que de ses autres actifs et droits ; 7° les produits exceptionnels divers. »

([43]) « Les ressources et les charges de trésorerie de l’État résultent des opérations suivantes : 1° le mouvement des disponibilités de l’État ; 2° l’escompte et l’encaissement des effets de toute nature émis au profit de l’État ; 3° la gestion des fonds déposés par des correspondants ; 4° l’émission, la conversion, la gestion et le remboursement des emprunts et autres dettes de l’État. Les ressources et les charges de trésorerie afférentes à ces opérations incluent les primes et décotes à l’émission. »

([44]) Dans sa décision n° 2005-574 DC du 29 décembre 2008 sur la loi de finances pour 2009, le Conseil constitutionnel a ainsi censuré une disposition législative qui accordait une garantie de l’État « en renvoyant la fixation de son plafond à un acte administratif prenant en compte une expertise postérieure à la loi sans évaluer cette charge ou en limiter le montant ».

([45]) L’article 19 de la LOLF dispose que « les catégories de comptes spéciaux sont les suivantes : 1° les comptes d’affectation spéciale ; 2° les comptes de commerce ; 3° les comptes d’opérations monétaires ; 4° les comptes de concours financiers ».

([46]) Sous la seule réserve prévue par l’actuel article 36 de la LOLF, commentée supra avec l’article 2 de la présente proposition de loi organique.

([47]) Le Conseil constitutionnel admet en effet que le Gouvernement propose en seconde partie une augmentation marginale des charges, soit en procédant à une dégradation du tableau de synthèse figurant à l’article d’équilibre de la même faible ampleur au moyen de son rappel par coordination postérieurement au vote des crédits et des articles rattachés, soit en corrigeant ce tableau devant l’assemblée saisie à la suite.

([48]) Rapports n° 4546 de M. Gilles Carrez sur la recevabilité financière des initiatives parlementaires, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 22 février 2017 et n° 263 de M. Philippe Marini sur la recevabilité financière des amendements et des propositions de loi, enregistré à la présidence du Sénat le 7 janvier 2014.

([49]) Jean-Pierre Camby et al., op. cit.

([50]) M. Gilles Carrez, op. cit.

([51]) Jean-Éric Schoettl, « La nouvelle constitution financière de la France », Les petites affiches (n° 183), 2001.

([52]) Les articles 65 à 67 de la LOLF échelonnaient l’entrée en vigueur de ses dispositions entre le 1er janvier 2002 et le dépôt du PLF pour 2005.

([53]) Dans sa rédaction issue des articles 64 et 82 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2020, ce tableau figurant au I de l’article 46 de la de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 comporte ainsi, outre celle dédiée au titre des colonnes, soixante-dix lignes, contre soixante-dix-huit dans celle résultant de l’article 81 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([54]) Conseil des prélèvements obligatoires, Les taxes affectées : des instruments à mieux encadrer, 2008.

([55]) Groupe de travail sur l’efficacité de la dépense publique et le contrôle parlementaire, 27 janvier 1999.

([56]) À savoir : « les revenus courants de ses activités industrielles et commerciales, de son domaine, de ses participations financières ainsi que de ses autres actifs et droits, les rémunérations des services rendus par lui, les retenues et cotisations sociales établies à son profit, le produit des amendes, les versements d’organismes publics et privés autres que ceux relevant des opérations de trésorerie, et les produits résultant des opérations de trésorerie autres que les primes à l'émission d’emprunts de l’État ».

([57]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2018¸ 2019.

([58]) Cour des comptes, Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et de la gouvernance, 2020.

 

([59]) Article 64 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008.

([60]) Article 76 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

([61]) https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019796DC.htm.

([62]) « Son paragraphe I fixe à 0,3 %, pour ces deux années, la revalorisation au 1er octobre des paramètres de calcul de l’aide personnalisée au logement, de l’allocation de logement familiale et de l’allocation de logement sociale. Son paragraphe II prévoit que le montant forfaitaire de la prime d’activité et le montant maximal de sa bonification principale ne font pas l’objet, en 2019 et en 2020, d’une revalorisation annuelle au 1er avril. Son paragraphe III dispose que le montant de l’allocation aux adultes handicapés n’est pas revalorisé le 1er avril 2019 et qu’il est revalorisé de 0,3 % le 1er avril 2020 » (https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019796DC.htm).

([63]) Jean-Pierre Camby et al., op. cit.

([64]) Article 1er de la LOLF, voir supra.

([65]) Le lecteur est invité à se référer au commentaire de l’article 5 de la présente proposition de loi pour des informations détaillées sur le domaine des lois de finances.

([66]) Décision n° 91-298 DC du 24 juillet 1991, cons. 9 et 10.

([67]) Loi n° 91-716 du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier.

([68]) Il s’agissait à l’époque de l’article 35 de l’ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959.

([69]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2017, mai 2018.

([70]) Lien vers le dossier législatif.

([71]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2017, mai 2018.

([72])  Décret n° 2021-620 du 19 mai 2021 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance

([73]) La précision selon laquelle les mesures affectant les dépenses budgétaires sont limitées à l’année N devient nécessaire en conséquence de la modification opérée à l’article 34 de la LOLF par l’article 5 de la présente proposition de loi organique qui autoriserait désormais la loi de finances à comporter des mesures en dépenses à impact différé.

([74]) M. Laurent Saint-Martin, rapport d’information n° 2210 de la commission des finances en conclusion de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF, septembre 2019, p. 145.

([75]) Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([76]) Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, considérant 74.

([77]) Id.

([78])Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, considérant 75.

([79]) Voit l’organisation de la discussion budgétaire pour 2021 sur le site de la commission des finances de l’Assemblée nationale (lien).

([80]) Rapport (n ° 2210, XVème législature) de M. Laurent Saint-Martin en conclusion de la mission d’information relative à la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, septembre 2019.

([81]) M. Laurent Saint-Martin, rapport d’information n° 2210 de la commission des finances en conclusion de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF, septembre 2019, p. 145.

([82]) Décision n° 2018-777 DC du 28 décembre 2018.

([83]) A noter cependant que le Gouvernement peut retransmettre au bureau de l’Assemblée nouvellement élue les projets de loi devenus caducs et dont il souhaite voir poursuivre la discussion.

([84]) Conseil constit., décision n° 83-161 DC du 24 juillet 1983 sur le projet de loi de règlement de 1981.

([85]) Conseil constit., décision n° 85-190 DC du 24 juillet 1985 sur le projet de loi de règlement de 1983.

([86]) M. Éric Woerth, Rapport d’information sur le Printemps de l’évaluation, juillet 2019

([87])Mme Véronique Louwagie et le groupe Les Républicains, proposition de résolution n°4190 relative à la couverture santé des étrangers en situation irrégulière et des demandeurs d’asile provenant de pays d’origine sûrs et au nombre d’étrangers en situation irrégulière, 25 mai 2021.

([88]) Créé par l’article 1 de la proposition de loi organique n°4111 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

([89]) Document « tiré à part » du tome I du rapport du Gouvernement préparatoire au DOFP (lien).

([90]) Le traité du 7 février 1992 sur l’Union européenne définit la dette publique comme celle l’ensemble des administrations publiques dans les comptes nationaux : l’État, les organismes divers d’administration centrale, les administrations publiques locales et les administrations de sécurité sociale.

([91]) Si le taux moyen de l’OAT à 10 ans reste négatif sur les six premiers mois de l’année 2021 (-0,026%), il est repassé en territoire positif depuis la fin du mois d’avril et s’établit à 0,17% pour la période du 3 mai au 5 juillet 2021.

([92])  Conseil constitutionnel, décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001.

([93])  Loi n° 2008-759 du 1er août 2008 de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007.

([94])  Cet article serait transféré, aux termes du présent projet de loi organique, à l’article 62 de la LOLF.

([95])  Conseil constitutionnel, décision n° 2018-777 DC du 28 décembre 2018.

([96])  MM. Laurent Saint-Martin et Éric Woerth, rapport d’information déposé par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire en conclusion des travaux d’une mission d’information relative à la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 septembre 2019, annexes 1 et 2, pp. 175 à 180.

([97])  Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([98]) Article 3 de l’arrêté royal du 23 mai 2018 relatif au Conseil supérieur des finances.

([99]) Article 23 de la loi organique n° 6-2013, du 14 novembre 2013, créant l’Autorité indépendante pour la responsabilité budgétaire ; articles 2, 5 et 22 du décret royal n° 215-2014 portant approbation du statut organique de l’Autorité indépendante pour la responsabilité budgétaire.

([100]) Article 8 de la loi du 12 juillet 2014 relative à la coordination et à la gouvernance des finances publiques et modifiant la loi modifiée du 8 juin 1999 sur le budget, la comptabilité et la trésorerie de l’État et la loi modifiée du 10 mars 1969 portant institution d’une inspection générale des finances.

([101]) Commission sur l’avenir des finances publiques, 18 avril 2021 (voir notamment l’annexe n° 2 concernant les comparaisons internationales des normes de pilotage et des institutions budgétaires).

([102]) OCDE, Designing effective independent fiscal institutions, 2017.

([103]) Avis n° HCFP-2014-02 du 23 mai 2014 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement pour 2013.

([104]) Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

([105]) Commission européenne, rapport n° 1201 en application de l’article 8 du TSCG, 2017.

([106]) Avis n° HCFP-2020-1 du 17 mars 2020 relatif au premier projet de loi de finances rectificative pour 2020.

([107]) Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([108]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([109]) Article 5 du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques.

([110]) La proposition de loi déposée mentionnait par erreur la référence « 7° » : elle a été corrigée à la faveur d’un amendement rédactionnel du rapporteur, adopté par la commission spéciale.

([111]) Cour des comptes, Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et de la gouvernance, 2020.

([112]) Annexe n° 10 de M. Daniel Labaronne au rapport n° 1302 de M. Joël Giraud, rapporteur général, sur le PLF pour 2019, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2018.

([113]) Annexe n° 10 de M. Daniel Labaronne au rapport n° 3011 de M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général, sur le PLR pour 2019, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 27 mai 2020.

([114]) Annexe n° 7 de M. Christian Bilhac au rapport n° 138 de M. Jean-François Husson, rapporteur général, sur le PLF pour 2021, enregistré à la présidence du Sénat le 19 novembre 2020.

([115]) OCDE, op. cit.

([116]) Cette directive fait partie du « six pack » aux côtés des règlements nos 1177/2011 du 8 novembre 2011 modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, 1173/2011 du 16 novembre 2011 sur la mise en œuvre efficace de la surveillance budgétaire dans la zone euro, 1175/2011 du même jour modifiant le règlement (CE) n° 1466/97 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, et 1174/2011 du même jour établissant des mesures d’exécution en vue de remédier aux déséquilibres macroéconomiques excessifs dans la zone euro, 176/2011 du même jour sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques.

([117]) Après s’être longuement interrogé, tant au stade de la section des finances qu’à celui de l’Assemblée générale, le Conseil d’État a finalement estimé que la disposition de la proposition de loi ordinaire suivant laquelle le HCFP pourrait se prononcer « à la demande du Gouvernement » sur telle ou telle mesure nouvelle des projets de lois financières qui lui sont transmis ne portait pas atteinte à l’indépendance qui doit être la sienne au regard du droit de l’Union européenne, puisque n’est pas remis en cause le plein accès à l’information dont il dispose par ailleurs, et se justifiait par des considérations de calendrier rendant évident le besoin d’une sélection des dispositions concernées.

([118]Cf. règlement (UE) n° 473/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro.

([119]) Symétriquement, lorsque qu’elles lui sont déférées, le Conseil constitutionnel déclare non conformes à la Constitution les dispositions du domaine organique figurant dans une loi ordinaire (incompétence).

([120]) Les services chargés des publications officielles et de l’information administrative insèrent en revanche, entre crochets, une précision à l’emplacement de chaque disposition déclarée non conforme à la Constitution.

([121]) La loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution n’a pu être promulguée que parce que ce dernier prévoit qu’« une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa (*), pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée ». (*) : « les conseillers d’État, le grand chancelier de la Légion d’honneur, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, les conseillers maîtres à la Cour des comptes, les préfets, les représentants de l’État dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, les officiers généraux, les recteurs des académies et les directeurs des administrations centrales ».

([122]) Rapport n° 244 de M. Christian Eckert, fait au nom de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de LOPGFP, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 3 octobre 2012.

([123]) Rapport n° 2210 de M. Laurent Saint-Martin, en conclusion d’une mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 11 septembre 2019.

([124]) L’article 1er du règlement (CE) nº 2866/98 du Conseil du 31 décembre 1998 concernant les taux de conversion entre l'euro et les monnaies des États membres adoptant l'euro dispose que « les taux de conversion irrévocablement fixés entre l'euro et les monnaies des États membres adoptant l'euro sont les suivants : […] 1 euro = 6,55957 francs français […] ».