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N°4893

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 janvier 2022.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi visant à encourager l’usage du contrôle parental sur certains équipements et services vendus en France et permettant d’accéder à Internet,

 

 

 

Par MBruno STUDER,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro : 4646.

 


 

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

avant-propos

Principaux apports de la commission

commentaires des articles

Article 1er Pré-installation obligatoire d’un dispositif de contrôle parental sur les appareils connectés

Article 2 Compétence de l’Agence nationale des fréquences

Article 3 Gratuité des dispositifs de contrôle parental mis à disposition par les fournisseurs d’accès à internet

Article 4 Gage

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion générale

II. Examen des articles

annexe n° 1 : Liste des personnes entendues par le rapporteur

Annexe  2 : textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 

 


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   avant-propos

 

Indéniablement, les plus jeunes générations sont nées avec le numérique et l’apprentissage de l’usage des équipements terminaux est probablement aussi naturel pour elles que l’acquisition de la parole et de la marche. L’âge moyen d’obtention du premier smartphone était, en 2019, de 9 ans et neuf mois, quand celui des tablettes était même, lui, de 6 ans et neuf mois ([1]). Sans jeter l’opprobre sur ce qui constitue vraisemblablement un nouveau mode de vie, l’usage des services numériques permis par ces appareils ne saurait être analysé naïvement.

Si le numérique est vecteur de progrès indéniables, il est également porteur de certains risques. Combien d’enfants sont tombés, accidentellement, sur des contenus pornographiques ou violents après une recherche anodine sur un moteur de recherche ? Combien sont exposés au cyber-harcèlement, à la désinformation et à la haine en ligne en s’inscrivant à des réseaux sociaux ? Combien sont entrés en contact avec des inconnus par le biais de sites de rencontre ? Combien ont reproduit des comportements dangereux pourtant vantés par leurs pairs sur les services de vidéos à la demande ?

Si les parents ont, pour certains, conscience de ces risques, un nombre encore insuffisant recourent de façon effective aux outils mis à leur disposition par des nombreux acteurs – à commencer par les géants du numérique eux-mêmes. En 2019, seuls 44 % des parents avaient paramétré l’appareil de leur enfant, et 38 % seulement recouraient à des dispositifs dits de contrôle parental ([2]). De fait, ils craignent avant tout une dépendance aux écrans et recourent de ce fait principalement à des mesures de contrôle du temps d’écran ([3]), sans percevoir les dangers liés à l’exposition à des contenus inappropriés.

Face à ce constat, le Gouvernement n’est pas resté inactif. Depuis deux ans, par le prisme de l’accès aux contenus pornographiques notamment, il a réuni l’ensemble des acteurs formant la chaîne de valeur du numérique, des fournisseurs d’accès à internet, mobilisés de longue date, aux moteurs de recherche et aux réseaux sociaux, qui ont investi plus récemment le sujet sous la pression des associations et des gouvernements, pour favoriser le recours aux outils de contrôle parental. Le site internet Jeprotègemonenfant.gouv.fr, né de cette initiative, devrait d’ailleurs bientôt s’étoffer pour traiter de l’ensemble des contenus préjudiciables aux enfants.

La présente proposition de loi vise, dans ce contexte, à soutenir et amplifier l’action du Gouvernement en créant une incitation forte à proposer aux parents les dispositifs appropriés leur permettant d’assurer pleinement leur rôle de protection et d’accompagnement de l’enfant, y compris dans l’espace numérique. Il ne s’agit pas de doter ces derniers d’outils infaillibles, capables de les suppléer dans l’exercice de cette responsabilité, ni de porter atteinte à la vie privée de l’enfant, mais bien de donner aux responsables de l’enfant toutes les clés pour protéger au mieux ce dernier et instaurer un véritable dialogue au sein du foyer sur la question numérique.

L’article 1er de la présente proposition de loi vise ainsi à rendre obligatoire, pour l’ensemble des appareils connectés vendus en France, la pré-installation d’un dispositif de contrôle parental dont l’activation devra être proposée à l’utilisateur dès la mise en service de l’équipement. L’Agence nationale des fréquences (ANFR), en application des dispositions de l’article 2 de la présente proposition de loi, sera chargée du contrôle du respect de cette obligation, comme elle le fait aujourd’hui pour une série de normes techniques auxquelles les appareils radioélectriques doivent répondre. Enfin, le dispositif applicable depuis 1996 aux fournisseurs d’accès à internet, pour ce qui concerne les moyens techniques de restriction d’accès, est toiletté par l’article 3 de la présente proposition de loi, afin de le rendre encore plus pertinent.

Le rapporteur se félicite que ces dispositions aient reçu un accueil globalement positif de la part des différents acteurs qu’il a pu entendre dans le cadre de ses travaux préparatoires, en dépit des conséquences industrielles qu’une telle mesure peut avoir au niveau mondial pour la plupart d’entre eux : de fait, l’engagement de chacun des acteurs de la chaîne est indispensable pour limiter au mieux l’exposition des plus jeunes à des contenus préjudiciables.

 

 

 

 

 

 


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   Principaux apports de la commission

 

Lors de sa réunion du mercredi 12 janvier 2022, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation a adopté la présente proposition de loi en première lecture, à l’unanimité, en opérant les modifications suivantes.

À l’article 1er, outre des modifications rédactionnelles, la commission a adopté un amendement tendant à clarifier le champ des équipements terminaux concernés par l’obligation de pré-installation d’un dispositif de contrôle parental. Notamment, les box des opérateurs télécoms ou encore les appareils domotiques connectés ne permettant pas la navigation sur internet en sont exclus.

Elle a également adopté plusieurs amendements tendant à préciser les modalités d’application de l’obligation prévue au nouvel article L. 34-9-3 du code des postes et des communications électroniques aux entreprises de reconditionnement d’équipements terminaux.

Elle a adopté un amendement de clarification relatif à la gratuité du dispositif de contrôle parental proposé à l’utilisateur, ainsi qu’un amendement permettant au ministre compétent de prononcer l’interdiction de mise sur le marché ou le retrait des équipements non conformes.

Enfin, elle a apporté plusieurs précisions quant aux personnes soumises à l’obligation de certification et de vérification de la présence d’un dispositif de contrôle parental sur les équipements terminaux.

À l’article 3, la commission a précisé que le décret fixant les fonctionnalités minimales et les caractéristiques techniques du dispositif de contrôle parental proposé par les fournisseurs d’accès à internet à leurs abonnés devait tenir compte de la nature de leur activité.

 


—  1  —

   commentaires des articles

Article 1er
Pré-installation obligatoire d’un dispositif de contrôle parental sur les appareils connectés

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article tend à rendre obligatoire la pré-installation d’un dispositif de contrôle parental sur les équipements terminaux permettant l’accès à internet, dont l’activation serait proposée à l’utilisateur dès la première mise en service de l’appareil.

I.   le droit existant

La mise sur le marché des équipements radioélectriques est aujourd’hui soumise au respect d’un certain nombre de règles, à la fois techniques et administratives, concernant par exemple le débit d’absorption spécifique (DAS) des appareils ou leur marquage « CE ».

Au plan technique, ces appareils doivent notamment répondre à plusieurs « exigences essentielles » posées par le 12° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, dans le but d’assurer :

– la protection de la santé, de la sécurité des personnes, des animaux domestiques et des biens,

– de permettre une utilisation efficace et optimisée des fréquences radioélectriques,

– de maintenir un niveau adéquat de compatibilité entre équipements et installations de communications électroniques.

Au-delà, ces exigences essentielles portent également, pour certains équipements, sur la protection des données à caractère personnel des utilisateurs, la compatibilité avec des accessoires universels tels que les chargeurs, l’accès aux services d’urgence ou encore la capacité des personnes en situation de handicap à les utiliser.

Ces obligations s’imposent à tous les acteurs économiques concernés
– fabricant, importateur, distributeur – lors de la mise sur le marché de l’équipement. Il appartient ensuite à l’Agence nationale des fréquences (ANFR), établissement public administratif, de contrôler le respect de ces normes par les équipements vendus en France et d’appliquer, le cas échéant, des sanctions administratives à l’issue d’une mise en demeure de l’opérateur de se conformer à ces exigences essentielles.

II.   les dispositions de la proposition de loi

Le présent article introduit, au sein de la section 5 du chapitre II du titre Ier du livre II du code des postes et des communications électroniques, relative aux équipements radioélectriques et aux terminaux, un nouvel article L. 34-9-3 tendant à rendre obligatoire la pré-installation d’un dispositif de contrôle parental sur les équipements terminaux vendus en France.

Constitue un équipement terminal, en application de l’article L. 32 du code précité, « tout équipement qui est connecté directement ou indirectement à l’interface d’un réseau public de communications électroniques pour transmettre, traiter ou recevoir des informations ». Parmi ces équipements, seuls les terminaux permettant l’accès à des services de communication au public en ligne seraient concernés par le présent article, soit les ordinateurs, téléphones portables, tablettes, consoles de jeux ou objets connectés, tels que les téléviseurs, les enceintes ou les montres.

Le dispositif dont la pré-installation serait requise doit permettre de restreindre ou de contrôler l’accès de personnes mineures à des services ou contenus susceptibles de porter atteinte à leur intégrité morale ou physique, tels que les sites pornographiques, les services véhiculant des images violentes, des propos haineux ou des comportements harcelants, ceux permettant l’accès à des jeux d’argent, propageant de fausses informations ou incitant à la consommation de drogues par exemple. La nature – texte, son, image, etc. – du contenu ou du service importe peu, dès lors qu’il est susceptible d’être préjudiciable à un mineur.

Pour faciliter l’utilisation de ce dispositif par les responsables de l’enfant, ce dispositif devra être aisément accessible, d’une part ; son activation devra nécessairement être proposée à l’utilisateur dès la première mise en service de l’appareil, d’autre part.

Pour s’assurer du respect de cette obligation, le présent article prévoit, conformément aux procédures applicables s’agissant, par exemple, du respect des exigences essentielles (cf. supra), que les fabricants devront certifier que leurs appareils intègrent un tel dispositif. Leurs distributeurs devront, quant à eux, vérifier que le produit fait bien l’objet de cette certification.

Enfin, les fonctionnalités minimales et les caractéristiques techniques auxquelles le dispositif de protection de l’enfant devra répondre seront précisées par décret afin d’assurer un standard minimum commun à tous les fabricants.

III.   la position du rapporteur

Le rapporteur avait initialement souhaité qu’une activation par défaut soit imposée à l’ensemble des appareils connectés vendus en France. Néanmoins, compte tenu des obstacles tant juridiques que techniques qu’une telle mesure connaîtrait, il estime que la pré-installation d’un dispositif de contrôle parental, associée à la proposition de son activation lors de la première mise en service, constitue d’ores et déjà une avancée notable et devrait faciliter le recours à ce type de moyens techniques par de nombreux utilisateurs.

Le rapporteur estime opportun qu’un décret définisse plus précisément les contours de ces outils, qu’il s’agisse, par exemple, du filtrage des contenus, de l’établissement de listes noires et blanches de sites internet ou d’applications, de l’existence de profils par âge, du filtrage des données personnelles susceptibles d’être envoyées par l’enfant à un tiers, mais aussi, par exemple, de leur robustesse face à des tentatives de contournement ou à des opérations de mise à jour, de réinitialisation ou de restauration, ou encore de leur interopérabilité avec d’autres dispositifs de cette nature, dans le respect des droits de l’enfant et, en particulier, du droit à la vie privée.

Il estime néanmoins souhaitable que le pouvoir règlementaire préserve au décret une certaine souplesse dans la mise en œuvre des dispositions du présent article, notamment en ce qui concerne la forme que prendra la proposition faite à l’utilisateur lors de la mise en service de son équipement.

*

Article 2
Compétence de l’Agence nationale des fréquences

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article confie à l’Agence nationale des fréquences la mission de contrôler le respect des obligations prévues à l’article 1er et d’en sanctionner, le cas échéant, le non‑respect.

I.   le droit existant

L’article L. 43 du code des postes et des communications électroniques fixe les missions et le cadre d’intervention de l’Agence nationale des fréquences (ANFR), établissement public administratif. Elle assure notamment, en application du quatrième alinéa du I de cet article, le contrôle du respect des dispositions relatives à la mise sur le marché des équipements radioélectriques mentionnés à l’article L. 34-9 du même code relatif aux exigences essentielles auxquels ils doivent se conformer.

Le II de l’article L. 43 précité confère à l’ANFR, pour effectuer ce contrôle, le pouvoir de recueillir, notamment auprès des personnes fabriquant, important ou distribuant ces équipements, les informations nécessaires pour s’assurer du respect des obligations relatives à la mise sur le marché des équipements radioélectriques, mais aussi de procéder à des enquêtes auprès de ces mêmes personnes. Des agents de l’ANFR, assermentés à cet effet, peuvent ainsi constater, par procès-verbal, les éventuels manquements aux obligations relatives à la mise sur le marché des équipements et procéder à un contrôle sur place au sein des locaux professionnels des fabricants, importateurs ou distributeurs.

Le II bis de l’article précité permet à l’ANFR, en cas de non-respect des dispositions relatives à la mise sur le marché des équipements radioélectriques, de mettre en demeure, après une procédure contradictoire et dans un délai qu’elle détermine, la personne responsable de se conformer à ses obligations et de cesser tout agissement illicite.

Si la personne visée par la mise en demeure ne se conforme pas aux prescriptions formulées par l’ANFR, alors l’Agence peut, après avoir informé par écrit la personne des sanctions qu’elle envisage de prendre et l’avoir invitée à présenter des observations écrites dans un délai d’un mois, prononcer, par une décision motivée, une amende administrative dont le montant ne peut excéder 1 500 euros pour une personne physique et 7 500 euros pour une personne morale. L’ANFR peut également demander au juge civil d’ordonner, le cas échéant sous astreinte, toute mesure de nature à mettre un terme au manquement constaté.

Par ailleurs, s’agissant du respect des exigences essentielles, l’ANFR peut également saisir le procureur de la République des non-conformités constatées, la personne responsable pouvant ainsi être sanctionnée d’une contravention de la 5ème classe pour chaque équipement non conforme en application de l’article R. 20‑25 du code des postes et des communications électroniques. L’ANFR peut également demander au ministre chargé des communications électroniques d’interdire, par arrêté, la commercialisation des appareils incriminés en application du 9° de l’article L. 34-9 du même code.

II.   les dispositions de la proposition de loi

Le présent article étend les dispositions des I, II et II bis de l’article L. 43 précité aux obligations imposées par le nouvel article L. 34-9-3 créé par l’article 1er de la présente proposition de loi (cf. supra).

Ainsi, l’ANFR serait compétente pour contrôler la conformité des équipements terminaux visés à l’article L. 34-9-3 ainsi qu’au décret fixant notamment les fonctionnalités minimales et les caractéristiques techniques du dispositif de contrôle parental préinstallé sur ces appareils (1° du présent article).

Elle pourrait ainsi faire usage de ses pouvoirs d’information et d’enquête (2° du présent article) mais également de ses pouvoirs de sanction administrative à l’encontre des éventuels contrevenants, notamment en demandant au juge civil d’ordonner toute mesure utile visant à mettre fin au manquement ( du présent article).

III.   la position du rapporteur

Comme cela est prévu pour les exigences essentielles, le rapporteur estime souhaitable de préciser par amendement que le ministre compétent pourra, en cas de non-respect des obligations imposées à l’article 1er de la proposition de loi, ordonner le retrait du marché des appareils contrevenants. Dans le cas contraire, le quantum de la sanction administrative prévue par l’article L. 43 du code précité apparaît trop faible pour être réellement dissuasif.

*

Article 3
Gratuité des dispositifs de contrôle parental mis à disposition par les fournisseurs d’accès à internet

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article tend à préciser que la fourniture d’un dispositif de contrôle parental par le fournisseur d’accès à internet doit se faire sans surcoût pour l’abonné et répondre à un socle de fonctionnalités et caractéristiques minimales.

I.   le droit existant

Le I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique dispose aujourd’hui que les « personnes dont l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne informent leurs abonnés de l’existence de moyens techniques permettant de restreindre l’accès à certains services ou de les sélectionner et leur proposent au moins un de ces moyens. » Ainsi, deux obligations s’imposent aux fournisseurs d’accès à internet : d’une part, informer leurs abonnés de l’existence de dispositifs de contrôle parental ; d’autre part, leur proposer l’un de ces moyens.

Lors de l’adoption de cette disposition, en 2004, issue du déplacement d’une disposition similaire qui figurait depuis 1996 au sein de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le Sénat observait que « dans la pratique, les fournisseurs d’accès satisfont à cette obligation de deux manières. Certains proposent simplement sur leurs sites des liens vers d’autres sites présentant divers logiciels de contrôle parental. D’autres incluent dans leurs offres commerciales (« packs ») de tels logiciels. Dans ce cadre, il s’agit parfois d’un argument de vente à faire valoir devant les utilisateurs, dans le cadre d’une forte concurrence entre les prestataires techniques. »

La loi du 21 juin 2004 précitée n’a pas apporté de modification à ces obligations. Néanmoins, dès 2005, une charte a été conclue entre les fournisseurs d’accès à internet et le gouvernement afin de proposer l’activation d’un tel dispositif à titre gratuit, précision qui n’est pas apportée par l’article 6 de la loi précitée. Aujourd’hui, les quatre principaux opérateurs proposent, à titre gratuit, un dispositif propre de contrôle parental ; l’un d’entre eux propose également une version premium payante, tandis qu’un autre offre son dispositif à l’ensemble des internautes.

Les acteurs du numérique, dont les fournisseurs d’accès à internet, se sont engagés dès 2019, sous l’égide du Gouvernement, à améliorer la lutte contre l’exposition des mineurs à la pornographie. Dans ce cadre, ils ont signé, début 2020, un protocole d’engagements pour la prévention de l’exposition des mineurs aux contenus pornographiques tendant à favoriser et simplifier le recours aux outils de contrôle parental. En février 2021, une plateforme d’information commune, recensant les différents outils existants, a été créée ([4]).

II.   les dispositions de la proposition de loi

Le présent article complète le premier alinéa du I de l’article 6 de la loi du 21 juin 2004 précitée afin de prévoir que la mise à disposition d’un dispositif de contrôle parental se fait sans surcoût pour l’utilisateur, conformément à la pratique actuelle des opérateurs.

Il prévoit par ailleurs qu’un décret précise les fonctionnalités minimales et les caractéristiques techniques auxquelles ces outils doivent répondre, afin de garantir un standard minimum de qualité à leurs utilisateurs.

III.   la position du rapporteur

Le rapporteur estime opportun de clarifier, par décret, les exigences minimales auxquelles ces dispositifs de contrôle parental devront répondre. En effet, le rapporteur a pu constater, lors de ses travaux préparatoires à la rédaction de la présente proposition de loi, que ces outils, bien que gratuits, n’étaient pas tous accessibles depuis les principaux systèmes d’exploitation existants et qu’ils n’offraient pas le même niveau de protection, certains fonctionnant également en dehors du domicile, d’autres ne protégeant que le réseau domestique.

S’agissant des fonctionnalités auxquelles ces outils devront répondre, le rapporteur souhaite préciser qu’elles seront nécessairement en lien avec le service proposé – l’accès à internet – et qu’il ne pourra être exigé des opérateurs des fonctions avancées sans rapport avec la nature de leur activité. Dans le cas contraire, cela serait redondant avec les obligations imposées par l’article 1er aux fabricants des équipements permettant l’accès aux services et contenus numériques et pourrait poser des problèmes d’interférence, allant à l’encontre de l’objectif du législateur de faciliter le recours à des dispositifs de contrôle parental.

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Article 4
Gage

Adopté par la commission sans modification

Le présent article prévoit un gage tendant à assurer la recevabilité financière de la présente proposition de loi.

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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 12 janvier 2022, la commission des affaires culturelles et de l’éducation a examiné la proposition de loi visant à encourager l’usage du contrôle parental sur certains équipements et services vendus en France et permettant d’accéder à Internet (n° 4646) ([5]).

I.   Discussion générale

M. Stéphane Testé, président. Mes chers collègues, l’ordre du jour appelle l’examen de deux propositions de loi. Le président Bruno Studer est rapporteur de la première.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Le titre de la proposition de loi que j’ai l’honneur de vous présenter me semble explicite. Elle s’inscrit dans une réflexion plus large, menée au sein de notre commission depuis 2017, sur les rapports du jeune public aux usages permis par le développement du numérique. Elle poursuit les mêmes objectifs de protection et de responsabilisation ayant prévalu lors de l’examen, il y a deux ans, de la proposition de loi visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image des enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne.

Elle repose tout d’abord sur le constat que de plus en plus d’enfants accèdent de plus en plus tôt à internet, puisque l’âge du premier smartphone est d’environ dix ans, et que la rencontre avec certains contenus réservés aux adultes a lieu, d’après plusieurs études qui nous sont parvenues, vers l’âge de onze ans. J’ai donc entamé, dans la continuité de l’impulsion donnée par le Président de la République il y a deux ans, un travail de longue haleine sur le contrôle parental et les moyens d’en développer l’usage. Initialement, j’en envisageais l’activation par défaut. Mais de nombreux obstacles – notamment, mais pas uniquement, de nature juridique – s’y opposent.

Le texte prévoit donc d’interdire à tout fabricant d’un objet permettant de se connecter à internet et d’accéder à des contenus ou à des services susceptibles de porter préjudice à nos enfants de commercialiser de tels objets en l’absence d’un outil de contrôle parental pré‑installé, dont l’activation doit être systématiquement proposée lors du parcours utilisateur, qui rassemble les démarches que l’on effectue lors de la première utilisation de l’appareil. Nul ne pourra échapper à un message lui demandant s’il souhaite activer le contrôle parental.

Chacun doit prendre conscience de la situation : de même qu’on ne pose pas un magazine pornographique sur la table basse de son salon, on ne donne pas un téléphone portable dépourvu de contrôle parental à un enfant de six ou sept ans. Un enfant qui mène innocemment des recherches sur internet peut tomber sur des contenus qui n’ont rien d’innocent. Les exemples sont nombreux de rencontres, souvent accidentelles, avec des contenus dont le caractère violent et pornographique peut par lui-même poser des problèmes et en provoquer d’autres. Cela a été largement documenté au cours des dernières années.

Cette première disposition, qui figure à l’article 1er, est un pari, non pas technologique, mais humain. L’esprit de la proposition de loi vise à faire du contrôle parental un outil du dialogue familial. Il ne faut pas être naïf sur les compétences technologiques de nos enfants, ni sur la précocité de leur exposition à certaines images. Il reste qu’il nous revient de les protéger. Il faut se donner les moyens de rendre la rencontre accidentelle avec de telles images toujours plus accidentelle, et assumer qu’un outil de contrôle parental se transforme en outil de dialogue familial. Si j’en avais eu la possibilité, j’aurais intitulé la proposition de loi « Du contrôle parental au dialogue familial ».

Il faut amener les gens à prendre conscience de ce qui se passe sur internet et à ouvrir, au sein des familles, un dialogue sur ces sujets. Assortir l’acquisition et la mise en route d’un appareil tel qu’un smartphone, une tablette, un ordinateur ou un téléviseur connecté, d’une mise en garde incitant l’utilisateur à faire attention à ce qu’il fait et à le faire en responsabilité, est en soi un acte de prévention. De même, certains contenus sont déconseillés à certains âges, mais leur accès est laissé à la décision des parents. Cette proposition de loi est donc éminemment un texte de prévention et répond, en cela, aux préoccupations des associations de protection de l’enfance.

On trouve sur internet le pire et le meilleur. Il faut toujours se donner les moyens d’utiliser le meilleur et d’éviter le pire. S’agissant de l’accès aux contenus et aux services proposés sur internet, nos marges de manœuvre, au sein du droit européen, sont limitées. Nous sommes notamment tenus de respecter la liberté de commerce et d’industrie. C’est pourquoi les dispositions que j’ai l’honneur de vous présenter, notamment celles de l’article 1er, ont été notifiées à la Commission européenne qui, j’espère, s’agissant des contenus dont nous voulons protéger nos enfants, donnera son accord.

Ces mesures sont complétées par celles de l’article 3, relatif aux fournisseurs d’accès à internet (FAI), que la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique oblige d’ores et déjà à informer leurs abonnés de l’existence de dispositifs de contrôle parental. Le présent texte précise que cette obligation n’entraîne aucun surcoût. Les deux articles prévoient que le pouvoir réglementaire, par le biais de décrets, fixera les fonctionnalités minimales de ce que l’on appelle communément le « contrôle parental ». On pourrait évoquer un « outil de protection de l’enfance », mais ce n’est pas l’expression qui s’est imposée dans le langage courant. L’article 2 attribue à l’Agence nationale des fréquences (ANFR) le contrôle du respect de l’obligation introduite à l’article 1er.

La présente proposition de loi est courte et resserrée. Elle complète, comme une brique supplémentaire, les différents dispositifs adoptés par le Parlement et ceux impulsés par le Gouvernement. Citons notamment la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, sur le fondement de laquelle l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) peut mettre en demeure les sites pornographiques de se mettre en conformité avec la loi, en soumettant l’accès à leurs contenus à davantage qu’un simple avertissement. Parmi les mesures adoptées par le Gouvernement, la plus notable est l’ouverture du site jeprotegemonenfant.gouv.fr, sous l’impulsion forte d’Adrien Taquet et de Cédric O, que je remercie de leur travail.

Il ne s’agit en aucun cas d’un pari technologique. La technologie existe d’ores et déjà. Il faut simplement la rendre plus accessible. C’est d’autant plus important qu’une minorité d’enfants seulement est protégée aujourd’hui par un système de contrôle parental. Aucun parent ne doit être exclu de l’usage de cet outil de protection faute de disposer des moyens et des connaissances techniques nécessaires pour l’installer, le paramétrer et le faire évoluer. Nous faisons ainsi savoir aux fabricants qui vendent leurs téléphones en France, en Europe et ailleurs dans le monde que la protection des enfants contre l’exposition à des contenus inappropriés susceptibles de porter atteinte à leur intégrité physique ou psychique n’est pas un problème franco-français. Cela dépasse nos frontières et c’est l’honneur de l’Assemblée nationale de légiférer sur ce point.

Je remercie les administrateurs de la commission, avec lesquels je travaille depuis cinq ans sur ces sujets. Je remercie tous les groupes, qui m’ont d’ores et déjà accordé leur intérêt et dont j’espère le soutien.

Certains amendements devront être retravaillés d’ici à l’examen du texte en séance publique. Je propose que nous consolidions juridiquement le texte dès aujourd’hui, pour disposer d’une base nous permettant d’aller plus loin en séance publique. D’autres ne relèvent pas de la loi, d’autres encore auraient pour effet de retarder l’entrée en vigueur du texte : j’en suggérerai le retrait. En tout état de cause, vous avez appelé fort justement mon attention sur plusieurs points. Je suis persuadé que nous parviendrons à avancer ensemble.

Mme Cathy Racon-Bouzon (LaREM). « Est-ce que je suis obligé de… ? » : telle est la question qu’entend de plus en plus souvent la sexologue Margot Fried-Filliozat, qui anime des ateliers en classe, dont la toile de fond est la pornographie, laquelle modifie le rapport au réel des enfants et des adolescents. D’après les chiffres recueillis par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en 2021, 82 % des enfants de dix à quatorze ans indiquent aller régulièrement sur internet sans leurs parents. Ces navigations de plus en plus précoces induisent une exposition du même ordre à des contenus inappropriés. À douze ans, près d’un enfant sur trois a déjà été exposé à des contenus pornographiques.

Face à ces dangers, la priorité, depuis 2017, est de renforcer l’arsenal législatif pour encadrer les premiers pas des jeunes sur internet, et de développer un véritable accompagnement des parents et des encadrants des enfants sur le volet de la protection de l’enfance. Cette proposition de loi, qui porte plus précisément sur l’outil du contrôle parental, qu’il faut ancrer dans les pratiques, comme un élément certes de blocage, mais aussi de dialogue, s’inscrit dans la lignée de plusieurs avancées.

Encadrer et éduquer, tel est l’équilibre que nous avons choisi dès le départ, en adoptant la proposition de loi relative à l’encadrement de l’utilisation du téléphone portable dans les établissements d’enseignement scolaire, qui prévoit aussi l’apprentissage de la citoyenneté numérique. Pour protéger les mineurs sur internet, nous avons fixé la majorité numérique à quinze ans dans la loi du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles. Par ailleurs, la loi renforçant l’action contre les violences sexuelles et sexistes a durci les sanctions applicables aux auteurs de cyberharcèlement visant des mineurs de moins de quinze ans, et élargi la définition du harcèlement en ligne afin de réprimer les phénomènes de meute.

Protéger les enfants dans l’espace numérique, c’est les protéger des contenus pornographiques, violents et haineux, mais c’est aussi garantir que leur image ne sera pas utilisée à des fins malveillantes. La loi du 19 octobre 2020 visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne réprime ainsi l’extorsion de contenu à caractère sexuel. Dans ce cadre, un délit de « sextorsion » a été créé au printemps dernier.

La lutte pour une navigation plus sereine des enfants et des adolescents sur internet comporte plusieurs étapes et concerne tous les acteurs de l’éducation. À l’école, le Gouvernement a généralisé à tous les établissements d’enseignement scolaire, depuis le mois de septembre dernier, le programme pHARe de lutte contre le harcèlement à l’école, qui prévoit plusieurs dispositions visant à prévenir plus spécifiquement le harcèlement en ligne.

Elle concerne aussi les acteurs du numérique. Un protocole d’engagement pour la prévention de l’exposition des mineurs à la pornographie, élaboré par MM. Adrien Taquet et Cédric O, a été signé en 2020 par trente-deux acteurs, dont le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP). Sensibiliser les parents à l’exposition de leurs enfants à la pornographie, informer sur le contrôle parental et faciliter le dialogue entre parents et enfants : tel est le sens de la plateforme jeprotegemonenfant.gouv.fr.

Continuer à sensibiliser et à responsabiliser les acteurs de l’enfance, tel est l’objet de la proposition de loi de Bruno Studer. Elle prévoit l’obligation, pour les fabricants, d’installer un système de contrôle parental et de proposer à l’utilisateur son activation lors de la première mise en service de l’appareil. Elle charge l’ANFR du contrôle du respect de cette obligation. Elle permet l’harmonisation des fonctionnalités et des caractéristiques techniques des outils de contrôle parental proposés par les FAI à titre gratuit.

Ce texte fait le pari de l’humain, de la discussion et d’une technique placée au service d’une société éclairée sur le champ des possibles comme sur celui des dangers de la navigation numérique pour les plus jeunes. Comment ? En rendant les parents, et plus généralement les adultes, acteurs de la démarche permettant d’activer le contrôle parental. Il s’agit de faciliter et non de démobiliser. Tel aurait été le piège d’un contrôle parental par défaut : priver les adultes éloignés de cette question de l’opportunité de s’en saisir et d’en comprendre les ressorts.

Pour compléter le dispositif, notre groupe défendra un amendement visant à préciser que les appareils reconditionnés y sont inclus. Souvent mis entre les mains des plus jeunes, ils s’inscrivent dans une démarche écologique que nous soutenons, et que nous souhaitons compatible avec celle de la protection des enfants.

Ce texte protège l’enfant tout en garantissant sa liberté de découverte, de recherche et de construction de soi, ainsi que de son esprit critique, qui en est aussi une priorité. Par le biais de cette proposition de loi, nous participons de l’ambition évoquée par le Président de la République en 2019 à l’UNESCO : permettre aux enfants d’être ou de redevenir innocents et heureux. Tel est notre devoir, surtout pour les enfants les plus fragiles.

Mme Maud Petit (Dem). La proposition de loi de notre collègue Studer a pour objectif premier de renforcer l’usage du contrôle parental, à l’heure où l’évolution des pratiques numériques et l’apparition de nouveaux outils connectés permettent à nos enfants un accès à internet itinérant, donc permanent.

Le numérique se développe à une vitesse phénoménale. Les pratiques évoluent perpétuellement. Notre temporalité législative est bien distincte. Ce texte offre l’occasion de rappeler l’absolue nécessité d’adapter régulièrement la législation encadrant ces pratiques. Il y a vingt ans, Snapchat et TikTok n’existaient pas. Aujourd’hui, ces plateformes, et tant d’autres, impactent le quotidien de nos jeunes, parfois de façon dramatique – troubles de la dysmorphie corporelle, cyberharcèlement, accès à des contenus pornographiques. Le virtuel provoque des maux bien réels, que notre société ne peut ignorer.

Nos enfants sont des digital natives, qui grandissent avec les objets connectés, dont il faut bien reconnaître qu’ils nous dépassent parfois. L’étude publiée par Médiamétrie en 2019 révèle que l’âge moyen d’utilisation du premier smartphone correspond à la fin de l’école primaire, soit en moyenne neuf ans et neuf mois. Cette tendance a de multiples causes. Quoi qu’il en soit, nous devons tirer les conséquences de ce constat et mettre en œuvre les politiques publiques nécessaires pour garantir la santé psychique et physique de nos enfants.

Si la loi du 21 juin 2004 a permis de contraindre les FAI à offrir à leurs abonnés un outil de contrôle parental, il est de notre devoir d’aller plus loin. La récente étude publiée par la CNIL sur la pratique numérique des jeunes révèle que celle-ci est de moins en moins encadrée par les parents. Plus de 80 % des 10-14 ans se rendent régulièrement sur internet sans eux, et seulement 46 % des parents affirment avoir installé des outils de suivi de l’activité de leurs enfants. La responsabilité du problème ne peut décemment pas être entièrement attribuée aux parents, qui sont confrontés à une multiplication rapide des outils connectés, ainsi qu’à des interfaces de contrôle parental dont les fonctionnalités et les caractéristiques varient, et nécessitent parfois une manipulation informatique vis-à-vis de laquelle nombre d’entre eux peuvent vite se sentir dépassés.

La présente proposition de loi entend fixer des obligations renforcées pour les équipements et les services permettant d’accéder à internet, afin de faciliter le recours des parents aux outils de contrôle parental. Grâce à l’article 1er, qui prévoit que leur installation doit être proposée dès la première utilisation de l’appareil, les parents seront avertis de leur existence, et la démarche ne reposera donc pas uniquement sur leur propre initiative. De même, l’harmonisation des caractéristiques et des fonctionnalités des outils de contrôle parental inscrite à l’article 3 permettra, j’en suis certaine, de faciliter le recours à ces derniers, en simplifiant des procédures informatiques complexes, et de ce fait souvent décourageantes.

Par ailleurs, l’obligation, pour les fabricants, d’intégrer un dispositif de contrôle parental facilement accessible, et, pour les distributeurs, de vérifier les certificats des fabricants, prévues à l’article 2, permettront de s’assurer qu’aucun objet connecté n’échappe au contrôle parental, à l’heure où ils ne cessent de se multiplier. Un récent reportage sur le développement de lunettes connectées par une start-up grenobloise m’incite à penser que le progrès numérique nous dépasse parfois. S’il est de notre devoir de parents d’intégrer dans l’éducation de nos enfants un volet numérique, il est de celui de l’État de nous accompagner dans cette évolution.

Le groupe MoDem est très favorable à la proposition de loi.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). L’utilisation des écrans par les enfants est un sujet de société majeur. L’étude réalisée en janvier 2021 par la CNIL sur les pratiques numériques des jeunes est édifiante. Elle révèle notamment que l’utilisation autonome d’internet se généralise et qu’elle a lieu de plus en plus tôt, en conséquence directe de la multiplication des nouveaux équipements permettant l’accès à internet. Il en résulte un phénomène de surexposition aux écrans. Les enfants âgés d’un à six ans passent en moyenne 14 000 minutes par an sur internet, soit plus de quatre heures et demie par semaine. Or il s’agit d’une période cruciale, pendant laquelle l’enfant doit enchaîner de multiples apprentissages, tels que la marche, la parole, la concentration et la motricité, qui seront freinés par la surexposition aux écrans.

L’autre danger majeur est l’accès des jeunes à un contenu inapproprié. En moyenne, les enfants s’inscrivent sur leur premier réseau social à huit ans et demi. À douze ans, un tiers d’entre eux ont déjà été exposés à du contenu pornographique, et ont facilement accès à des contenus haineux et violents, ainsi qu’à des actions de réseaux criminels terroristes ou de réseaux pédophiles. Auparavant, les parents pouvaient aisément contrôler ce que regardaient leurs enfants à la télévision, généralement placée dans le salon. De nos jours, les smartphones, tablettes et autres équipements nomades rendent le contrôle parental bien plus difficile.

Si la majorité des parents se déclarent favorables aux dispositifs de contrôle parental, seuls 46 % d’entre eux indiquent avoir installé des solutions de suivi de l’activité de leur enfant. Il y a deux raisons à ce phénomène : une méconnaissance croissante, par les parents, des pratiques numériques de leurs enfants, et des outils de contrôle parental nécessitant parfois une manipulation informatique qui peut s’avérer difficile, voire décourageante.

Il est donc essentiel d’agir pour protéger nos enfants des dangers du monde hyper‑connecté dans lequel nous vivons. Tel est, sans aucun doute, l’objectif de la présente proposition de loi, qui amplifie les mesures de lutte contre les risques auxquels ils sont exposés. L’article 1er introduit l’obligation, pour les fabricants d’« équipements terminaux permettant l’accès à des services de communication au public en ligne », d’intégrer un système de contrôle parental aisément accessible et de le proposer à l’utilisateur dès la première mise en service de l’appareil. Le distributeur devra en vérifier l’existence lors de la commercialisation du produit. L’article 2 prévoit que le contrôle du respect de ces nouvelles obligations par le fabricant et les distributeurs sera assuré par l’ANRF. L’article 3 impose des fonctionnalités et des caractéristiques techniques minimales aux outils de contrôle parental proposés par les FAI et confirme la gratuité de ces services, afin de garantir un même standard de qualité pour tous les foyers.

Si ces mesures restent en deçà des annonces faites par le Président de la République en 2019 lors du trentième anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, elles constituent tout de même une avancée notable. Désormais, chaque utilisateur d’appareil connecté se verra proposer l’activation du contrôle parental pré-installé.

Le groupe Les Républicains votera le texte.

Mme Michèle Victory (SOC). Chacun et chacune de nous l’a rappelé : la consommation liée aux écrans a largement augmenté, et ce dès le plus le plus jeune âge. L’enquête menée en 2021 par la CNIL démontre en effet que l’accès au téléphone portable a désormais lieu en CM1, et non plus à l’entrée au collège.

Cette mutation des modes de consommation oblige à une certaine vigilance, compte tenu du potentiel tout à fait néfaste de l’exposition à la pornographie, du cyberharcèlement et de l’accès à des contenus choquants ainsi qu’à des fausses nouvelles. Toutefois, elle ne peut être désignée comme responsable de tous les maux de notre société. Les médias, sous toutes leurs formes, sont aussi une source d’accès à la culture, au service public et à l’éducation, ainsi qu’une forme d’épanouissement pour les enfants. Comme tous les outils, c’est de leur utilisation qu’il faut débattre. Au demeurant, la crise sanitaire a été un révélateur des usages des outils numériques, s’agissant notamment de la continuité pédagogique et du dispositif « École à la maison », qui ont certes bien fonctionné lorsque les conditions matérielles, technologiques et humaines étaient réunies, mais qui ont soulevé de nombreuses questions parmi les enseignants, les parents et les élèves.

Ces remarques générales appellent plusieurs constats : la nécessité de protéger les mineurs face aux éventuels dangers associés au numérique, récemment mis en lumière par plusieurs faits divers ; la nécessité d’étendre la formation au numérique aux adultes, afin qu’ils ne soient pas de simples spectateurs des usages de leurs enfants, mais puissent les accompagner ; la nécessité d’assurer l’accès au numérique à tous et toutes, indépendamment de l’origine sociale et de la localisation sur le territoire.

Si la proposition de loi répond en partie à l’enjeu de réduction des risques, celui-ci ne peut être décorrélé des deux autres : la formation et l’accès au numérique. Le texte oblige les fabricants à pré-installer un système de contrôle parental et à en proposer l’activation dès la mise en service de l’appareil, tout en harmonisant les fonctionnalités du contrôle parental, qui doit demeurer gratuit. Je salue cette mesure, qui est de nature à constituer un premier pas vers un renforcement de la sécurité des usages numériques par les jeunes, ainsi que votre engagement sur ces questions, monsieur le rapporteur.

Vous avez choisi de ne pas imposer l’activation par défaut du contrôle parental, par souci matériel, et de vous contenter de la proposer lors de la première mise en service, ce qui est une bonne chose. Nous regrettions que les appareils reconditionnés, qui constituent une part de moins en moins négligeable des ventes dans notre pays, ne soient pas inclus dans le champ du texte, mais cet oubli devrait être réparé par amendement. Par ailleurs, nous souhaiterions que les fabricants et les FAI soient contraints de proposer des contenus de formation et d’accompagnement à long terme pour ces outils, dont tous et toutes ne sont pas familiers. Certains le font par le biais de tutoriels, mais cela reste bien insuffisant au regard des difficultés techniques que certains d’entre nous rencontrent.

Enfin, la proposition de loi, qui certes n’est pas relative à l’illectronisme, n’évoque pas la question des inégalités grandissantes en matière d’accès aux outils numériques, notamment la charge inégale des collectivités territoriales dans les efforts pour doter les élèves en matériel et faire face, parfois, aux manques de l’État.

Cela étant, nous sommes favorables à texte, que nous concevons également comme un outil de dialogue au sein de la famille. J’imagine que les manques que nous avons détectés seront comblés par voie d’amendement.

M. Pierre-Yves Bournazel (Agir ens). Le groupe Agir ensemble se réjouit de l’inscription à l’ordre du jour de la présente proposition de loi, que nous avons cosignée, visant à encourager le recours aux outils de contrôle parental. Je salue le travail du président Bruno Studer.

Une récente étude de la CNIL indique que 70 % des enfants regardent seuls des vidéos en ligne, et que 60 % des parents n’utilisent pas d’outil de contrôle parental, notamment parce qu’ils trouvent le dispositif trop complexe et difficile d’accès. Par ailleurs, les enfants sont exposés de plus en plus jeunes aux écrans, donc aux contenus inappropriés qu’ils peuvent rencontrer sur internet. On estime qu’un tiers des enfants de douze ans a déjà été exposé à des images pornographiques ou violentes. En outre, l’usage massif du numérique par les enfants, sans contrôle parental, contribue au développement du cyberharcèlement. Il ressort d’une récente étude commandée par l’association E-enfance que 20 % des enfants et des adolescents disent avoir été confrontés à une situation de cyberharcèlement.

Nous devons donc agir résolument pour la protection de nos enfants, compte tenu du risque d’une mauvaise utilisation du numérique. Notre mobilisation est d’autant plus indispensable que la pandémie a entraîné une hausse sans précédent du temps d’écran chez les plus jeunes. La multiplication des supports numériques
– tablettes, ordinateurs, consoles – a eu un double effet : renforcer l’exposition des enfants aux écrans et complexifier les solutions de contrôle parental. Ce texte propose des solutions.

Il s’inscrit pleinement dans l’appel lancé par M. Emmanuel Macron aux acteurs du numérique en 2019, à l’occasion du trentième anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant. Il s’agit d’obliger les fabricants de terminaux connectés à y installer un système de contrôle parental et à en proposer l’activation au moment de leur première utilisation. Nous prévoyons également l’adoption d’un unique standard de qualité et confirmons la gratuité des outils de contrôle parental éventuellement procurés par les FAI. Nos propositions s’inscrivent dans la stratégie globale du Gouvernement et de la majorité en la matière.

Plusieurs actions ont déjà été entreprises afin de lutter contre les violences numériques à l’égard des mineurs. Le 9 février dernier, le Gouvernement a ainsi créé, en lien avec l’ARCOM, les acteurs du numérique et les associations travaillant sur l’accompagnement à la parentalité numérique, le portail unique d’information jeprotegemonenfant.gouv.fr, pour sensibiliser les parents aux dispositifs de contrôle parental. Depuis la rentrée 2018, la loi interdit aux élèves d’utiliser leurs portables dans les écoles primaires et les collèges.

Par ailleurs, une expérimentation sera lancée auprès des élèves de classes de sixième à partir de la rentrée 2022, pour les aider à mieux utiliser les réseaux, en leur délivrant une certification de sensibilisation au numérique. Enfin, la transposition de la directive « Services de médias audiovisuels » (SMA) impose aux plateformes de partage de vidéos l’adoption de mesures visant à protéger les mineurs, notamment de l’accès aux contenus pornographiques, par la classification des contenus, la vérification de l’âge, la mise en œuvre d’outils de contrôle parental et le développement de l’éducation aux médias.

Le groupe Agir ensemble votera cette proposition de loi avec beaucoup de conviction et de détermination. Monsieur Studer, nous vous remercions de votre engagement et de votre travail.

M. Grégory Labille (UDI-I). Monsieur le président, je vous remercie de votre engagement sur la protection de nos enfants. Nous vivons dans un monde où la technologie entraîne de rapides évolutions des pratiques, surtout chez les plus jeunes. Il est parfois nécessaire de procéder à de petites mais utiles retouches de la loi pour s’adapter.

Les enfants sont en contact, de plus en plus jeunes, avec des outils numériques qui leur ouvrent grand les portes du tout et du n’importe quoi que l’on peut trouver sur internet. Malheureusement, fougue de la jeunesse oblige, c’est plus souvent vers le n’importe quoi qu’ils se dirigent, une fois que les parents ont détourné le regard.

Il s’agit donc, pour le législateur, de donner aux parents les outils qui leur permettront de protéger leurs enfants des contenus pornographiques et violents, sans les empêcher, ce faisant, de moduler le contrôle des usages, notamment en fonction de l’âge des enfants. Surtout, ils doivent garder la main pour pouvoir mener si nécessaire une action pédagogique, afin notamment d’expliquer leur démarche et le caractère dangereux de certains contenus que les enfants peuvent rencontrer sur internet.

Toutefois, la nécessité de l’action parentale se heurte à une limite. De nombreux parents maîtrisent en effet les outils numériques moins bien que leurs enfants, voire pas du tout. Monsieur le rapporteur, vous défendez la proposition de loi comme une possibilité supplémentaire offerte à ceux qui souhaitent accroître la protection de leurs enfants. Je m’interroge sur ceux qui n’en ont pas la capacité, faute d’être familiers avec le danger que constitue un accès sans limite à internet pour les enfants, ou de maîtriser les rudiments de l’informatique que suppose la mise en œuvre d’un contrôle.

Dans ces situations, et même si l’État ne peut pas être partout, existe-t-il des dispositifs d’accompagnement pour les parents leur permettant de mieux maîtriser l’environnement numérique et ses enjeux ? La plateforme jeprotegemonenfant.gouv.fr pourrait, par exemple, faire le lien avec les associations en mesure d’aider les parents qui le souhaitent.

Cela étant, la responsabilité confiée aux parents ne doit pas occulter les devoirs de ceux qui commercialisent les équipements et des plateformes sur lesquelles les enfants sont à même de rencontrer des contenus inappropriés. Si la proposition de loi constitue une première avancée importante à l’échelle nationale, une généralisation à l’échelle européenne est-elle faisable ou souhaitable ?

Je m’interroge sur la possibilité de généraliser un dispositif dans le cadre des règlements Digital Markets Act (DMA) et Digital Services Act (DSA) en cours de discussion, dont j’ai toutefois bien conscience qu’ils portent surtout sur les obligations faites aux plateformes. Le règlement DSA renforcera les obligations de groupes comme Facebook ou Google en matière de vigilance s’agissant des contenus illicites. Ces règlements semblent cependant faire peu de cas de la nécessaire protection des plus jeunes et des actions qu’ils pourraient mener en matière de prévention, voire d’accompagnement des parents.

Le contrôle parental pré-installé sur les terminaux permettra-t-il de cibler des applications précises pour limiter leur usage dans le temps ? Faudra-t-il directement se rapprocher des plateformes pour ce faire ? Les nouvelles obligations pourraient-elles leur permettre de prévenir des parents que leurs enfants ont été en contact avec des contenus inadaptés à leur âge ? Le sujet est complexe, car il mêle protection contre les contenus inappropriés et limitation du temps d’écran.

En tout état de cause, les membres du groupe UDI-I soutiendront la proposition de loi.

Mme Muriel Ressiguier (FI). Très présents dans les foyers et de plus en plus utilisés à l’école, les outils numériques ont envahi le quotidien de nos enfants et bousculé les habitudes, au point de nous amener régulièrement à nous interroger sur nos usages et sur notre cadre juridique. Le rôle du législateur est de mettre en place des outils permettant de protéger les enfants des risques liés aux nouvelles technologies. Tel est le sens de la présente proposition de loi, dont l’objet est de renforcer l’usage du contrôle parental.

Par-delà la démultiplication des supports, les outils numériques sont accessibles à nos enfants de plus en plus tôt. Les raisons de ce recours précoce au numérique sont diverses. Les principales sont la pression sociale des enfants et des parents ainsi que le marketing publicitaire. L’âge moyen d’équipement des enfants en outils numériques est de six ans et neuf mois pour les tablettes, de sept ans et trois mois pour les consoles de jeux et de neuf ans et neuf mois pour les téléphones portables.

Les parents sont confrontés à l’ampleur d’un phénomène qu’ils ne maîtrisent pas entièrement, et sans cesse tiraillés entre les opportunités offertes par internet et les dangers liés à certains contenus, à l’exclusion sociale et à la consommation des écrans. D’après une étude de l’Union nationale des associations familiales (UNAF), 44 % des parents ne se sentent pas assez accompagnés dans l’encadrement de la pratique numérique de leurs enfants. Seulement 46 % des parents ont mis en place des solutions pour suivre l’activité des enfants mineurs sur internet. Nous défendrons un amendement visant à obliger les fabricants à informer l’utilisateur des risques liés aux usages numériques et des moyens de prévention.

Par ailleurs, 82 % des 10-14 ans vont régulièrement sur internet sans leurs parents. Ce chiffre est de 95 % pour les 15-17 ans. En moyenne, 70 % des enfants de tout âge indiquent regarder seuls des vidéos sur internet et 82 % des mineurs ont déjà été exposés à du contenu pornographique en ligne. Bien souvent, les parents n’ont pas conscience du temps passé par leurs enfants sur internet, ni du contenu qu’ils y visionnent. Nous défendrons des amendements visant à contrôler la durée d’utilisation des équipements et des services.

Outre les règles établies au sein des foyers, 56 % des parents ont recours à au moins une solution technique pour contrôler l’utilisation d’internet par leurs enfants. Rendre obligatoire l’installation d’un système de contrôle parental, dont la fonction est de limiter l’accès des enfants à certains contenus et de donner accès à leur historique de connexion, permet d’apporter une protection supplémentaire. En ce sens, la présente proposition de loi comble une lacune technique et juridique.

Toutefois, il faut aller plus loin. Le texte ne détaille pas les caractéristiques techniques des outils de contrôle parental. Il ne permet pas de limiter les publications sur les réseaux sociaux, le recours à la géolocalisation et la reconnaissance faciale. Il ne dit rien non plus sur le ciblage publicitaire des enfants ni sur la protection des données, qui sont des sujets importants auxquels nous devons réfléchir ensemble.

En somme, la proposition de loi, si elle est intéressante et bienvenue, gagnerait à être étoffée. Nous défendrons des amendements en ce sens, dont j’espère qu’ils trouveront un écho favorable.

Mme Stéphanie Kerbarh (LT). Internet est une source impressionnante d’opportunités éducatives, culturelles ou encore sociales. Il n’en demeure pas moins que nous devons nous prémunir contre les dangers et les risques associés à ses usages.

Parce que les usagers mineurs sont de plus en plus nombreux et de plus en plus précoces, leur exposition à des contenus dangereux, violents ou inappropriés doit nous inquiéter. Vous rappelez à juste titre les chiffres : 9 ans pour le premier smartphone, 6 ans pour la première tablette et 12 ans pour l’exposition à des contenus pornographiques. Je ne m’étends pas sur les méfaits de l’exposition précoce à de tels contenus – nous les connaissons tous. Toutefois, nous sommes aujourd’hui dans une impasse : depuis la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, l’éditeur d’un site pornographique ne peut pas se contenter d’une case à cocher pour que le visiteur atteste de sa majorité. Plusieurs sites font d’ailleurs l’objet d’une mise en demeure de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM). Pour autant, la loi ne propose pas d’autre méthode pour vérifier l’âge des utilisateurs. Il nous paraît essentiel de poursuivre la réflexion sur le sujet, la piste d’un tiers certificateur méritant d’être étudiée.

Le contrôle parental est certainement l’un des outils à privilégier pour assurer une navigation autonome des mineurs plus sereine. La vigilance des parents ne suffit pas et l’exposition aux contenus est parfois involontaire. Les sites illégaux de jeux vidéo et de streaming sont des sources importantes d’exposition à la pornographie par le biais de bandeaux publicitaires ou fenêtres pop-up. La proposition de loi permettra d’harmoniser les outils et d’inciter à recourir au contrôle parental, lequel constitue une aide précieuse en complément de la vigilance des parents.

L’ANFR aura-t-elle les moyens d’assurer le contrôle dont elle est chargée ?

Le groupe Libertés et Territoires insiste sur le fait que le contrôle parental ne peut être qu’une mesure parmi d’autres. Soyons lucides, certains enfants savent comment contourner ou supprimer les filtres, et certains réseaux sociaux et applications de messagerie instantanée peuvent échapper à ces derniers. Le contrôle parental ne doit donc pas se substituer à la vigilance des parents.

Plus largement, la sensibilisation des parents et l’éducation des enfants doivent demeurer la priorité, d’autant plus que d’autres risques doivent être pris en considération tels que la collecte massive de données personnelles, très importante sur les réseaux sociaux ou les plateformes de jeux en ligne – les mineurs doivent être sensibilisés aux enjeux de la protection de leurs données personnelles, de leur vie privée et de leur image. Il convient aussi de lutter contre la surexposition aux écrans dont les effets sur la concentration, l’apprentissage et les relations sociales sont avérés. En la matière, les recommandations de la CNIL sont très pertinentes.

Un équilibre doit être trouvé entre l’autonomie et la protection des mineurs. Cela implique d’appréhender différemment les usages des enfants selon leur âge ; les enjeux et les risques ne sont pas les mêmes à 6 ou à 16 ans. Le dialogue, fondé sur l’information des parents et des enfants, joue un rôle clé.

Mme Elsa Faucillon (GDR). Le phénomène n’est pas nouveau, mais le temps passé devant les écrans par les enfants de 10 à 14 ans aurait doublé pendant la crise sanitaire. Je fais mienne l’analyse de Mme Ressiguier sur la tension entre les dangers et les opportunités d’internet.

Selon une étude de l’IFOP, 82 % des enfants de 10 à 14 ans utilisent internet sans leurs parents – tous les parents ici présents peuvent en attester – ; les enfants seraient connectés dès l’âge de 7 ans pour jouer en ligne ou regarder des vidéos et seraient inscrits sur leur premier réseau social autour de 8 ans et demi ; à 12 ans, un tiers d’entre eux auraient été exposés à un contenu pornographique. Ces chiffres illustrent la réalité que nous connaissons chez nous ou autour de nous. Les dommages chez les enfants sont désormais identifiés : frein au développement cérébral, particulièrement chez les tout-petits, prise de poids, dégradation de la qualité du sommeil, entrave à la réussite scolaire. Ces maux peuvent être en partie atténués grâce au filtrage des contenus auxquels les enfants sont exposés mais nous devons aussi améliorer l’éducation et la prévention qui jouent un rôle primordial.

Les dispositifs de contrôle parental sont trop peu utilisés. Nous soutenons l’obligation imposée aux fabricants par l’article 1er d’en installer un ainsi que l’idée de ne pas rendre celui‑ci automatique car cela risquerait de porter atteinte à la neutralité d’internet. Comme pour tout autre logiciel de filtrage, l’utilisateur doit conserver la maîtrise totale, donc la possibilité d’activer ou non le contrôle parental.

Nous sommes également vigilants sur l’utilisation de certaines fonctionnalités qui peuvent être intrusives. Dans ses recommandations pour renforcer la protection des mineurs en ligne, publiées le 9 juin 2021, la CNIL rappelle que ces fonctionnalités tendent à transformer le contrôle parental en surveillance, au risque d’altérer la confiance entre les parents et les enfants, d’entraver l’émancipation du mineur ou pire encore de l’habituer à être sous contrôle constant, l’invitant par là même à reproduire certaines pratiques dignes d’un monde orwellien.

Nous regrettons que la proposition de loi soit muette sur les dangers des dispositifs de contrôle parental en matière de protection des données. Selon de nombreux chercheurs, la plupart d’entre eux partagent des informations personnelles avec des tiers et sont vulnérables aux attaques informatiques. Ils transmettent ainsi à des tiers inconnus les données des utilisateurs à des fins de marketing et de monétisation, nourrissant de ce fait le ciblage publicitaire des enfants. Je déplore que nous n’ayons pas réussi pendant la législature à avancer davantage sur ce dernier point. Au cours des dix dernières années, les dépenses de publicité digitale visant les enfants ont été multipliées par dix à l’échelle mondiale. Ce matraquage publicitaire aggrave les dégâts causés par une exposition trop importante aux écrans et par l’hyperconsommation. Une étude de 2019 a démontré que les enfants des milieux populaires, pour lesquels l’offre d’activités extérieures ou culturelles est plus limitée, sont soumis à une pression publicitaire plus forte que la moyenne. Or notre pays louvoie, incapable d’adopter des mesures efficaces pour lutter contre ce phénomène, contrairement à d’autres pays qui ont proscrit les publicités à destination des enfants de moins de 13 ans.

Nous défendrons des amendements sur ces divers points mais nous sommes favorables au texte.

Mme Emmanuelle Anthoine. L’article 1er vise à rendre obligatoire la pré-installation d’un dispositif de contrôle parental sur les équipements vendus en France, associée à la proposition de son activation lors de leur mise en service. Ce mécanisme est bienvenu mais il comporte de nombreuses failles. D’abord, les parents ne seront pas davantage incités à installer un tel dispositif. Rien ne dit qu’ils saisiront la possibilité qui leur est ouverte. Ensuite, l’activation des appareils n’est pas toujours effectuée par les parents. Ce sont souvent les enfants qui s’en chargent et ils ne verront aucun intérêt à l’instauration d’un contrôle parental. Enfin, l’éducation aux enjeux du contrôle parental n’est pas suffisamment prise en considération dans le texte. Pour être efficaces, les dispositions prévues ne devraient-elles pas s’accompagner d’une plus forte sensibilisation des parents ?

M. Fabien Di Filippo. L’exposition aux écrans commence de plus en plus jeune et le temps passé à les regarder ne cesse de croître. On ne peut qu’approuver des mesures qui compliquent l’accès des plus jeunes à des sites au contenu douteux ou pornographique. C’est essentiel tant l’usage du numérique s’est démocratisé.

En tant que jeune parent, je découvre encore des choses. Nous sommes dépassés, les progrès sont plus rapides que nous l’imaginons. J’ai été sidéré, comme certains d’entre vous, en regardant l’émission Zone interdite dimanche soir consacrée aux dangers d’internet. Il y a bien sûr des sites pornographiques mais on trouve aussi des contenus inappropriés sur des applications très classiques. Je rejoins ma collègue, la sensibilisation des parents et le volet éducatif doivent être considérablement renforcés.

M. Frédéric Reiss. Une belle unanimité semble se dessiner sur la proposition de loi et je tiens à féliciter le président-rapporteur pour le travail qu’il a réalisé. Les avancées en matière d’intelligence artificielle permettent de préserver les plus jeunes de l’exposition aux contenus pornographiques, haineux ou violents. La proposition de loi responsabilise les fabricants, les distributeurs et les utilisateurs. Je m’interroge cependant sur l’effectivité des contrôles introduits par l’article 2. Que prévoit le texte pour sanctionner ceux qui contournent ses dispositions ?

M. le président Bruno Studer, rapporteur. J’ai retenu des diverses interventions plusieurs expressions. Mme Petit a évoqué les maux bien réels du virtuel ; Mme Duby-Muller le découragement des parents face à la complexité des dispositifs de contrôle parental, raison pour laquelle nous souhaitons en faciliter l’accès et le maniement.

Je connais des parents qui, effectivement découragés par la complexité du dispositif, le soir de Noël, décident de remettre à plus tard l’installation d’un contrôle parental sur le nouveau téléphone de leur enfant et deux jours plus tard, voient celui-ci pleurer parce qu’il a été confronté à des images choquantes.

Il est normal qu’un enfant âgé de 12 ans cherche l’image d’une femme nue. Essayez de faire la recherche et vous serez surpris par la violence des images et des mots qui vous seront proposés. Cela doit nous interpeller tout comme le fait que la même recherche au sujet d’un homme aboutit, au lieu d’une ode à la femme dominée, à un hymne à l’homme viril. Les heures passées par les parents à éduquer leur enfant à l’égalité entre les femmes et les hommes ainsi que celles passées par les professeurs à préparer des séquences pédagogiques pour déconstruire des préjugés sont anéanties en quelques secondes par une vidéo ou une image. Il faut évidemment agir.

Monsieur Labille, vous avez défendu l’utilité des petites retouches. Vous connaissez, et vous le partagez, mon souci du développement de l’enfant dans l’univers numérique. En témoignent mes travaux sur les fausses informations, sur l’école dans la société du numérique, ainsi que sur les enfants youtubeurs. Nous n’examinons pas un texte sur la protection des enfants à l’ère du numérique – je salue toutes les dispositions prises en la matière. Nous ne pouvons malheureusement pas tout traiter, mais le débat sera l’occasion de quelques avancées complémentaires.

Le changement du parcours pour l’utilisateur que nous imposons aux fabricants ne vaudra pas que pour la France. Il s’appliquera aux produits vendus au moins en Europe et sans aucun doute pour le monde entier. Il s’agit donc d’une petite retouche, mais grande aussi, et utile. Je salue la responsabilité de nombreux acteurs que j’ai rencontrés lors des auditions et que nous soumettons à une contrainte dans l’intérêt de nos enfants.

J’ai beaucoup entendu qu’il faudrait aller plus loin mais nombre de sujets ne relèvent pas directement du contrôle parental. Toute restriction à la liberté du commerce et de l’industrie doit être justifiée par un motif impérieux, en l’espèce la protection des mineurs contre des contenus inappropriés. Le temps passé devant les écrans n’est pas une préoccupation nouvelle – on s’en inquiétait déjà pour la télévision– et ne constitue pas un motif impérieux.

En revanche, je vous rejoins sur un point : le contrôle parental ne doit pas être trop intrusif, c’est aussi la responsabilité des parents de le garantir. Madame Ressiguier, au sujet de votre amendement sur la reconnaissance faciale, je souhaite que la CNIL soit consultée avant la publication du décret en Conseil d’État qui établira les fonctionnalités minimales du contrôle parental. Je vous propose d’y travailler ensemble avant la séance.

Vous avez abondamment évoqué l’éducation et la prévention, mais nous nous heurtons toujours au même écueil : on ne peut pas éduquer les parents par la loi. Même si certains enfants le font seuls, nombre d’entre eux, en particulier les plus petits, ont besoin de leurs parents pour mettre en service leur équipement. Je ne suis pas favorable à une activation par défaut du contrôle parental car cela pourrait avoir pour effet pervers – Mme Racon-Bouzon l’a souligné fort justement – de dissuader les parents de maintenir leur vigilance alors même que, nous le savons, la rencontre avec certains contenus aura lieu. Monsieur Di Filippo, même à quelqu’un comme moi qui suis assez au fait d’internet, l’émission de dimanche soir a révélé des phénomènes que j’ignorais. C’est un fait, la sexualité à l’ère du numérique, comme bien d’autres choses, change. Il faut accompagner les parents. À cet égard, internet peut être une solution : en cas de difficulté, vous pouvez y trouver des conseils pour parler à votre enfant alors qu’auparavant il fallait commander un livre ou se rendre dans une bibliothèque pour obtenir les informations. Il y a le meilleur et le pire sur internet, sur ce sujet comme sur d’autres. Je n’ai jamais présenté le texte comme une solution miracle. L’un d’entre vous a parlé d’une aide précieuse pour mieux accompagner nos enfants.

Soyons honnêtes, les âges que nous avons tous mentionnés sont très certainement déjà dépassés. Les réponses dans les enquêtes ne reflètent pas toujours la réalité car ceux qui les donnent peuvent être embarrassés ou ignorer la vérité. La loi ne pourra jamais dire aux parents qu’il ne faut jamais laisser un objet connecté dans la chambre des enfants la nuit. Les chiffres sont édifiants à cet égard : combien d’enfants répondent à des messages la nuit ou jouent en ligne en cachette pour ne pas perdre leur rang dans le classement ? La première responsabilité est celle, non pas du législateur, mais des parents. En revanche, l’État peut intervenir pour mettre à disposition des parents des outils qui leur facilitent l’exercice de cette tâche ô combien difficile que d’assumer leur responsabilité de parent. Dans un monde numérique, nous devons tous prendre notre part. La sensibilisation des parents passe par des sites internet – vous avez fait référence à jeprotègemonenfant.gouv.fr – mais cela ne peut pas être la solution unique puisque certains parents n’utilisent pas internet. L’éducation populaire est nécessaire mais, une fois encore, la loi ne peut pas y contraindre.

Ce sujet comme d’autres qui se rapportent au numérique suscite un mouvement dans la société. C’est le rôle de l’Assemblée nationale que de s’en saisir afin de lancer le débat dans les médias puis dans l’opinion publique. Je vous remercie de soutenir cette proposition de loi sur laquelle je me réjouis, si ce n’est d’un consensus, de grandes convergences.

 

II.   Examen des articles

Article 1er : Pré-installation obligatoire d’un dispositif de contrôle parental sur les appareils connectés

Amendement AC31 de M. Bruno Studer.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Cet amendement de clarification vise à exclure de l’application de la loi les fournisseurs d’accès à internet, qui font l’objet d’une disposition spécifique, ainsi que les objets connectés qui ne présentent aucun risque pour les mineurs, tels que les appareils domotiques ne permettant pas la navigation sur internet ou encore les équipements qui, par construction, seraient sûrs.

Son adoption ferait tomber plusieurs amendements dont l’amendement AC25 de Mme Provendier : le sujet des équipements reconditionnés sera abordé plus loin par des amendements de Mme Racon-Bouzon ; les amendements identiques AC1 de Mme Duby‑Muller et AC23 de Mme Bergé sont satisfaits par la nouvelle rédaction ; quant aux amendements AC14 et AC18 de Mme Ressiguier, je proposerai dans quelques instants un amendement sur la gratuité des dispositifs de contrôle parental.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement AC25, les amendements identiques AC1 et AC23 ainsi que les amendements AC14, AC18, AC6 et AC7 tombent.

Amendement AC8 de M. Gaël Le Bohec.

M. Gaël Le Bohec. L’amendement vise à maintenir le dispositif de contrôle parental accessible à tout moment. Il ne doit pas être verrouillé, il faut pouvoir en modifier les règles pour les renforcer ou les assouplir selon les besoins. Le dialogue doit être permanent au sein des familles sur les contenus accessibles ou non pour les enfants et sur le temps d’écran notamment.

Peut-être, monsieur le rapporteur, souhaiterez-vous préciser par un sous-amendement que la réactivation du dispositif est « aisément » accessible à tout moment, pour reprendre votre rédaction.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Il est en effet indiqué que le dispositif est aisément accessible, ce qui signifie qu’il l’est à tout moment. Je vous invite donc à retirer votre amendement qui est satisfait.

L’amendement est retiré.

Amendement AC15 de Mme Muriel Ressiguier.

Mme Muriel Ressiguier. L’amendement a pour objet d’interdire l’utilisation de la reconnaissance faciale des mineurs dans les outils de contrôle parental.

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a publié le 9 juin 2021 huit recommandations destinées à construire un environnement numérique adapté aux mineurs qui réponde à la fois à la nécessité de les protéger et à leur désir d’autonomie. Dans la septième recommandation intitulée : « vérifier l’âge de l’enfant et l’accord des parents dans le respect de sa vie privée », elle proscrit l’usage de la reconnaissance faciale. Selon elle, « un système de vérification de l’âge devrait être fonction des finalités envisagées, des publics visés, des données traitées, des technologies disponibles et du niveau de risque associé au traitement. Ainsi, un dispositif fondé sur un système de reconnaissance faciale devrait être jugé disproportionné ». La CNIL propose des alternatives, par exemple des systèmes de vérification de l’âge fondés sur l’intervention d’un tiers de confiance assurant un contrôle préalable de l’identité et de la qualité – l’attribution de l’autorité parentale – des personnes concernées.

Nous devons être particulièrement vigilants sur le recours à la technologie de la reconnaissance faciale. Vous m’avez proposé de travailler sur ce point en vue de la séance. Je saisis votre main tendue.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. La reconnaissance faciale, qui est d’ailleurs parfois utilisée pour la mise en service de l’appareil, est un sujet important. Je vous proposerai d’ici à la séance un amendement imposant la consultation de la CNIL sur la rédaction du décret prévu par l’article 1er.

Je vous invite donc à retirer l’amendement.

Mme Muriel Ressiguier. Avant de le retirer, je préfère attendre l’amendement sur lequel nous devons travailler. La confiance n’exclut pas le contrôle, selon les mots de Lénine. Je ne doute toutefois pas de votre parole puisque vous l’avez toujours respectée jusqu’à présent.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. L’amendement n’a pas encore été rédigé. Si vous souhaitez maintenir l’amendement pour qu’il reste dans le débat, je le comprends mais mon avis sera défavorable.

Mme Muriel Ressiguier. Je maintiens l’amendement pour la raison que vous avancez.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC16 de Mme Muriel Ressiguier.

Mme Muriel Ressiguier. L’amendement vise à inclure dans les dispositifs de contrôle parental un outil permettant de limiter le temps d’utilisation.

Si j’en crois vos propos, cela semble compliqué. Néanmoins, certaines applications proposent déjà de bloquer un appareil connecté la nuit ou après une certaine durée d’utilisation. Au vu des ravages causés par l’exposition excessive aux écrans, une réflexion sur le temps d’utilisation est indispensable. C’est grâce à l’acharnement de certains qu’une chose aussi bête que l’approbation, ou le refus, des cookies est devenue réalité. Notre amendement s’inscrit dans la même démarche. Votre proposition de loi ouvre une porte, allons plus loin.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Le temps d’écran est certainement la porte d’entrée la plus simple pour les parents. Toutefois, il ne permet pas de justifier l’entrave à la liberté du commerce et de l’industrie que constitue la contrainte nouvelle imposée aux fabricants. Il me semble risqué sur le plan juridique d’y faire référence.

Je comprends votre souci. L’exposition aux écrans est un problème ancien. Il appartient aux parents d’y être attentifs. L’application d’Apple dénommée « Temps d’écran » permet déjà de répondre à votre préoccupation tout en comportant un volet de contrôle parental. Des outils existent sans qu’il soit nécessaire de les inscrire dans le texte au risque de le fragiliser. Mon avis est donc défavorable.

Mme Muriel Ressiguier. J’adhère complètement à l’idée selon laquelle il ne revient pas aux plateformes ni aux fabricants d’éduquer les enfants à la place des parents. Mais ce n’est pas l’objet de l’amendement. Il s’agit d’offrir aux parents la possibilité de limiter le temps d’utilisation de l’appareil.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Le texte concerne l’exposition à certains contenus qui n’est pas liée au temps d’écran. En cinq minutes, vous pouvez être confrontés à des contenus problématiques.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC17 de Mme Muriel Ressiguier.

Mme Muriel Ressiguier. L’amendement vise à imposer une nouvelle obligation aux fabricants : la délivrance d’une information à l’utilisateur sur les risques liés aux usages numériques et les moyens de prévention. Les parents ont conscience d’être dépassés par la technologie et les moyens dont dispose les enfants de contourner certaines règles. L’amendement tend à donner aux parents la possibilité d’être formés afin qu’ils choisissent de manière éclairée d’instaurer ou non un contrôle parental.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Je propose que d’ici à la séance, nous travaillions sur ce sujet qui préoccupe plusieurs d’entre vous. Je dois m’assurer que cela n’implique pas une nouvelle notification auprès de la commission européenne qui retarderait l’application du texte. Il faut aussi réfléchir à la forme la plus efficace : je ne suis pas persuadé qu’un mail ou un flyer au moment de l’achat permette de convaincre les parents concernés. Je suis plutôt partisan de l’interaction humaine, de l’éducation populaire. De plus en plus d’établissements scolaires proposent des formations aux parents. Enfin, la rédaction pose problème car ce n’est pas un « dispositif » qui peut « délivrer une information », mais le fabricant lui-même.

Mme Muriel Ressiguier. J’ai bien noté que votre proposition de loi n’avait pas vocation à être révolutionnaire, je la salue malgré tout. Notre rôle est de vous pousser un peu. J’attends avec impatience les débats dans l’hémicycle.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques AC26 de Mme Aurore Bergé et AC2 de Mme Virginie DubyMuller.

Mme Aurore Bergé. Je suis évidemment favorable au texte destiné à renforcer le contrôle parental et à mieux accompagner les parents. Malgré l’amendement de clarification que nous venons d’adopter, il reste une incertitude sur le champ d’application de l’article 1er. L’amendement vise donc à préciser que ce n’est pas l’interface mais le service lui-même qui est visé.

Mme Virginie Duby-Muller. Dans un souci de clarification, l’amendement a pour objet d’exclure explicitement les équipements terminaux ne servant que d’interface pour accéder à des services de communication au public en ligne.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Vous avez raison, il n’est pas souhaitable que de tels équipements soient concernés par l’article 1er. Vos amendements sont satisfaits par le premier amendement que nous avons adopté aux termes duquel seuls les appareils « destinés à » l’utilisation de services numériques sont concernés – tout est dans la notion de destination. Je demande donc le retrait des amendements.

Les amendements sont retirés.

Amendement AC32 de M. Bruno Studer.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Il s’agit de soumettre les mandataires aux mêmes obligations que les fabricants. Il est parfois plus difficile de retrouver un fabricant sur un continent éloigné que son mandataire sur le sol national.

La commission adopte l’amendement.

La commission adopte les amendements rédactionnels AC35 et AC36 de M. Bruno Studer.

Amendement AC38 de M. Bruno Studer.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Cet amendement vise à garantir la gratuité des dispositifs de contrôle parental mis à la disposition des utilisateurs sur les équipements terminaux destinés à l’utilisation de services de communication.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC33 de M. Bruno Studer.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Cet amendement a pour objet d’étendre l’obligation de vérification de la certification du produit à tous les acteurs de la chaîne de valeur de la distribution des équipements terminaux.

Mme Frédérique Meunier. Je suppose que vous avez interrogé les fabricants sur la contrainte que représente pour eux l’obligation que vous instaurez ainsi que sur le temps nécessaire pour l’appliquer ?

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Nous assumons la contrainte que cela représente. Les fabricants ne sont pas ravis mais certains d’entre eux proposent déjà des dispositifs sur leurs appareils. Il s’agit de généraliser et de standardiser la protection des enfants.

L’ANFR disposera des moyens d’exercer son contrôle grâce au gage prévu par l’article 4. Elle est déjà chargée de vérifier les niveaux d’émission d’ondes électromagnétiques par les appareils connectés – le fameux débit d’absorption spécifique (DAS). Cette analyse technique effectuée sur les nouveaux appareils mis sur le marché sera désormais doublée d’une vérification de l’installation d’un contrôle parental et du respect des normes en la matière.

Les fabricants évaluent à dix-huit mois le temps nécessaire pour généraliser la présence du contrôle parental dans les futurs systèmes d’exploitation.

M. Jean-Jacques Gaultier. L’impact financier pour les fabricants a-t-il été chiffré ? En compensation, ces derniers pourront faire du contrôle parental un outil de marketing.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Ils ont perçu l’enjeu pour leur réputation, me semble-t-il. Je le répète, de nombreuses solutions techniques existent déjà. Chez les fournisseurs d’accès, le montant de l’abonnement conditionne la sophistication du contrôle parental. En vertu du texte, le dispositif devra être installé sans surcoût et en respectant des normes minimales. Le reste relève du secret des affaires.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC9 de M. Gaël Le Bohec.

M. Gaël Le Bohec. On a évoqué les échanges entre parents et enfants sur le temps d’exposition aux écrans et leur utilisation des écrans. À ce propos, j’ai été marqué par une étude de l’Observatoire régional de santé d’Ile-de-France qui révèle que 25 % des 13-14 ans programment leur réveil pour consulter, la nuit, les notifications de leur téléphone portable. Ce chiffre illustre le décalage qui peut exister entre ce que les parents croient et ce que les enfants font. L’intérêt de cette proposition de loi est également de susciter la discussion sur ces usages.

L’amendement vise à appliquer les dispositions prévues par la présente proposition de loi aux appareils connectés anciens ou remis à neuf. Les fabricants proposant fréquemment à leurs utilisateurs la mise à jour des fonctionnalités de leurs appareils et des logiciels et applications installés, il leur est techniquement possible de proposer également des dispositifs de contrôle parental sur les anciens appareils connectés.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Il me semble que votre amendement est satisfait puisque la mise à jour rendue obligatoire par la loi sera aussi utilisée pour des appareils anciens, dès lors qu’ils sont compatibles avec cette nouvelle version. Par ailleurs, les récentes dispositions relatives à l’obsolescence logicielle, issues de la loi sur le gaspillage alimentaire et l’économie circulaire, devraient assurer la compatibilité des nouveaux systèmes d’exploitation avec une grande part du stock des équipements.

L’amendement est retiré.

Amendements AC21 de Mme Cathy Racon-Bouzon et AC24 de Mme Florence Provendier (discussion commune).

Mme Cathy Racon-Bouzon. Il s’agit d’impliquer l’ensemble de la chaîne de distribution dans l’effort de protection du public. Si l’outil technique qu’est le contrôle parental est indispensable à la sécurisation de l’espace numérique pour les mineurs, il a également vocation à susciter le dialogue au sein des familles, entre adultes et enfants, et à favoriser ainsi la prévention et l’éducation nécessaires à cette protection.

Nous proposons donc que les distributeurs informent les parents ou les adultes référents des dangers potentiels d’internet, des outils techniques existants, dont le contrôle parental, et des ressources disponibles pour s’informer sur les pratiques à risque ; je pense en particulier à la plateforme jeprotegemonenfant.gouv.fr, qui vise à lutter contre l’exposition des mineurs aux contenus pornographiques en ligne.

Mme Florence Provendier. L’amendement AC24 tend à imposer aux distributeurs de mettre à disposition les informations relatives aux conditions d’activation et d’utilisation du contrôle parental sur un support autre aisément accessible, afin que les adultes, souvent beaucoup moins à l’aise que les enfants dans l’utilisation des outils informatiques, puissent avoir accès à tout moment et de façon indépendante aux informations nécessaires à la bonne compréhension de l’intérêt de ce dispositif de protection des enfants et des modalités de son installation.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Cette question a été évoquée avec Mme Ressiguier. Je partage votre préoccupation, mais je vous demanderai de bien vouloir retirer vos amendements afin que nous travaillions ensemble à une synthèse entre les différentes propositions en vue de la séance. Cependant, je ne vous promets rien, car je doute qu’une telle disposition relève du domaine législatif. Mais si tel n’est pas le cas, nous pourrons éventuellement formuler des exigences concernant le contenu du décret mentionné à la fin du texte.

Mme Florence Provendier. Je vais retirer l’amendement, mais celui-ci est analogue à un amendement déposé sur un autre texte, relatif aux radios, qui précisait que les mentions légales devaient figurer sur un support distinct. Ce type de disposition peut donc tout à fait figurer dans la loi ; je suis prête à y travailler.

Les amendements sont retirés.

Amendement AC27 de Mme Cathy Racon-Bouzon.

Mme Cathy Racon-Bouzon. Cet amendement de clarification vise à inclure explicitement les équipements d’occasion dans le dispositif prévu par la proposition de loi. De fait, pour des raisons d’ordre économique et environnemental, les premiers appareils utilisés par le jeune public sont souvent des appareils reconditionnés.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Avis tout à fait favorable. Les reconditionneurs pouvaient déjà être considérés, pour certains, comme des fabricants, mais votre amendement a le mérite de clarifier le texte.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC34 de M. Bruno Studer.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Il s’agit, d’une part, de renvoyer à un décret en Conseil d’État la détermination des fonctionnalités et des caractéristiques du dispositif proposé par les fabricants, d’autre part, de permettre au ministre compétent d’interdire la mise sur le marché ou d’ordonner le retrait ou le rappel des produits non conformes.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC28 de Mme Cathy Racon-Bouzon.

Mme Cathy Racon-Bouzon. L’amendement tend à préciser les modalités d’introduction des appareils reconditionnés dans le dispositif en prévoyant un régime transitoire. En effet, les reconditionneurs n’ayant pas la main sur les systèmes d’exploitation d’origine, l’obligation de s’assurer qu’un dispositif de contrôle parental est aisément accessible et activable sur les équipements vendus ne pourra s’appliquer qu’aux appareils dont la première mise sur le marché est postérieure à l’entrée en vigueur du texte. Nous proposons donc que, dans l’intervalle, les reconditionneurs soient soumis à une obligation d’informer l’utilisateur de l’existence de tels dispositifs.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Compétence de l’Agence nationale des fréquences en matière de contrôle de l’obligation de pré-installation d’un dispositif de contrôle parental

La commission adopte l’amendement de coordination AC37 de M. Bruno Studer.

Elle adopte l’article 2 modifié.

Article 3 : Gratuité des dispositifs de contrôle parental mis à disposition par les fournisseurs d’accès à internet

Amendement AC13 de Mme Muriel Ressiguier.

Mme Muriel Ressiguier. Par cet amendement nous proposons que l’outil de contrôle parental soit assorti d’un dispositif permettant de contrôler la durée d’utilisation du service. En effet, l’article 6 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique prévoit déjà que les fournisseurs d’accès à internet offrent la possibilité de « restreindre l’accès à certains services ou de les sélectionner ». Or il convient également de lutter contre la surexposition des enfants aux écrans. Grâce à cette disposition, les parents comme leurs enfants pourront mesurer le temps passé sur l’écran et le limiter si nécessaire.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Avis défavorable, non pas sur le fond, mais parce que l’amendement me paraît juridiquement fragile. Au demeurant, la mesure du temps d’écran est déjà, de fait, proposée dans de nombreux outils de contrôle parental.

Mme Muriel Ressiguier. Il faut un peu d’audace. Je fais confiance à la qualité des juristes qui vous entourent, monsieur le rapporteur, pour contourner cet obstacle et garantir la viabilité juridique d’une telle disposition.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Précisément, les juristes qui m’entourent, dont je veux souligner à mon tour la grande qualité, me déconseillent vivement de donner un avis favorable à votre amendement… (Rires)

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques AC29 de Mme Virginie Duby-Muller et AC30 de M. Gaël Le Bohec.

Mme Virginie Duby-Muller. Les fonctionnalités et les caractéristiques techniques des solutions de contrôle parental peuvent différer selon les prestataires, les équipements ou les modalités d’activation. Ainsi, les outils proposés par les fournisseurs d’accès, activés sur le réseau pour le contrôle parental mobile, sont techniquement différents de ceux fournis par les constructeurs ou les fournisseurs de systèmes d’exploitation, qui sont implémentés directement dans l’équipement. Le décret doit tenir compte de ces disparités techniques pour ne pas imposer aux fournisseurs d’accès une solution unique qui pourrait être techniquement inadéquate.

M. Gaël Le Bohec. Le décret doit tenir compte des disparités techniques existant entre les différentes solutions de contrôle parental pour ne pas imposer aux fournisseurs d’accès une solution unique qui pourrait être techniquement inopérante.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Une caractéristique est ou n’est pas ; elle ne peut pas réellement être « minimale ». Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques AC3 de Mme Virginie Duby-Muller et AC20 de M. Gaël Le Bohec, et sous-amendement AC39 de M. Bruno Studer.

Mme Virginie Duby-Muller. Il s’agit d’un amendement de clarification. Cependant, je souscris à la rédaction proposée par notre rapporteur dans son sous-amendement, plus globale mais conforme à l’esprit de cet amendement.

M. Gaël Le Bohec. Les fonctionnalités et caractéristiques techniques déterminées par décret doivent constituer un socle commun minimal.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Avis favorable, sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement, qui vise à prendre en compte la nature de l’activité plutôt que les contraintes.

La commission adopte successivement le sous-amendement et les amendements sousamendés.

En conséquence, l’amendement AC22 de Mme Cathy Racon-Bouzon tombe.

Amendement AC19 de Mme Muriel Ressiguier.

Mme Muriel Ressiguier. Il s’agit d’interdire l’utilisation de la reconnaissance faciale des mineurs dans les outils de contrôle parental mis à disposition par les fournisseurs d’accès à internet.

M. le président Bruno Studer, rapporteur. Demande de retrait, sinon avis défavorable. Je vous donne rendez-vous en séance.

Mme Muriel Ressiguier. Je garde votre proposition en tête, en espérant que nous aboutirons. Mais je maintiens l’amendement pour la mémoire des débats.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4 : Gage

La commission adopte l’article 4 non modifié.

Elle adopte ensuite, à l’unanimité, l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

 

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

– Texte adopté par la commission : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4893_texte-adopte-commission.pdf

 

– Texte comparatif : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-cedu/l15b4893-compa_texte-comparatif.pdf

 

 


—  1  —

   annexe n° 1 :
Liste des personnes entendues par le rapporteur

(par ordre chronologique)

 

– Fédération française des Télécoms (FFT) *  M. Olivier Riffard, directeur des affaires publiques de la Fédération française des Télécoms, M. Thibaut Chaix, chargé des affaires publiques chez Bouygues Telecom, M. Frédéric Dejonckheere, responsable des affaires règlementaires chez Altice SFR, Mme Claire Chalvidant, directrice adjointe des affaires publiques du groupe Orange

– Google France  * M. Benoît Tabaka, directeur des relations institutionnelles et politiques publiques, et M. Olivier Esper, responsable des relations institutionnelles et gouvernementales

– Agence nationale des fréquences (ANFR)  M. Gilles Brégant, directeur général, et M. Christophe Digne, directeur général adjoint

 

       Table ronde :

- Alliance française des industries du numérique (AFNUM) * – Mme Stella Morabito, déléguée générale, M. Philippe de Cuetos, directeur des affaires techniques et réglementaires, et Mme Marie Santoli, chargée de mission affaires institutionnelles

Syndicat des entreprises de commerce international de matériel audio, vidéo et informatique grand public (SECIMAVI)  M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire général

– Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) – M. Roch-Olivier Maistre, président, M. Guillaume Blanchot, directeur général, et Mme Justine Boniface, directrice de cabinet

– Apple France *  Mme Julie Lavet, Government Affairs Senior Manager

 


 

       Table ronde :

Digital Parenting Foundation  Mme Marie Mayoud, présidente

Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (OPEN) – M. Thomas Rohmer, directeur exécutif

Respect zone  M. Philippe Coen, président

Union nationale des associations familiales (UNAF)  M. Olivier Gérard, coordonnateur du pôle médias et usages numériques et Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires

La Voix de l’Enfant Mme Martine Brousse, présidente

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 


—  1  —

   Annexe n° 2 :
textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code des postes et des communications électroniques

L. 34‑9‑3 (nouveau)

2

Code des postes et des communications électroniques

L. 43

3

Loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique

6

 


([1]) Médiamétrie, étude réalisée pour l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique et l’UNAF, « La parentalité à l’épreuve du numérique », février 2020.

([2]) Id.

([3]) Id.

([4]) www.jeprotegemonenfant.gouv.fr

 

([5]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.11727018_61de9084a558a.commission-des-affaires-culturelles--controle-parental-sur-des-equipements-et-services-vendus-en-fr-12-janvier-2022