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N° 4899

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 janvier 2022.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi visant à lutter contre la précarité des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation,

 

 

 

Par Mme Michèle VICTORY,

 

 

Députée.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro : 4781.

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

 Pages

AVANT-PROPOS

commentaires des articles

Article 1er Statut des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH)

Article 2 Statut des assistants d’éducation (AED)

Article 3 Gage

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion générale

II. Examen des articles

ANNEXES

Annexe n° 1 : liste des personnes entendues par la rapporteure

Annexe  2 : textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi


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   AVANT-PROPOS

Si les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et les assistants d’éducation (AED) exercent des fonctions distinctes au sein de notre système d’enseignement et d’éducation, leurs statuts respectifs se caractérisent par une même précarité. Ainsi, les lacunes de la formation initiale et continue de ces personnels, la difficulté d’accéder à des emplois stables ou encore le très faible niveau de leurs rémunérations, constituent autant d’obstacles à l’attractivité de leurs fonctions et à la professionnalisation de ceux qui les exercent.

Ce constat est d’autant plus frappant que les missions de ces agents, telles que les définit le code de l’éducation, sont indispensables aux élèves. Aux termes de l’article L. 917-1 dudit code, les AESH ont vocation à exercer des fonctions « d’aide à l’inclusion scolaire » des élèves, qui comportent aussi bien l’assistance dans les actes de la vie quotidienne que l’appui au déroulement des apprentissages. Ainsi, l’aide individuelle ou mutualisée d’un AESH est souvent, pour un enfant en situation de handicap, la condition de son accès au système d’enseignement. Cet accompagnement participe de la réalisation concrète de la notion d’école inclusive, qui elle-même conditionne l’accession de tous les élèves à la vie sociale et à la citoyenneté prévue par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Le rôle des assistants d’éducation est également essentiel. Loin de se limiter aux tâches d’encadrement des surveillants d’autrefois, les AED exercent aussi, aux termes de l’article L. 916-1 du code susmentionné, des « fonctions d’assistance à l’équipe éducative en lien avec le projet d’établissement ». Cette formulation générale témoigne de la grande polyvalence de ces personnels, laquelle s’est vue renforcée par la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance. Cette dernière a en effet permis que des AED inscrits dans une formation préparant aux concours des métiers de l’enseignement et de l’éducation puissent assumer de véritables fonctions pédagogiques, à l’instar des personnels enseignants. Ainsi, les missions des assistants d’éducation s’étendent des rapports avec les familles – dont ils constituent souvent le premier contact dans les établissements – à la réalisation de tâches administratives, en passant par la surveillance des élèves et le signalement des situations qui portent atteinte à la sérénité du climat scolaire ([1]).

Les manifestations de cette précarité sont nombreuses. Elles résultent de la reconnaissance tardive de ces fonctions comme des professions à part entière. Celle-ci s’est engagée pour les AESH avec la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, portée par la majorité précédente, qui a instauré un statut autonome pour cette catégorie d’agents, désormais recrutés par des contrats de droit public à durée indéterminée au terme de six années de travail en CDD. Toutefois, les données statistiques ([2]) portant sur les 120 000 AESH (dont 93 % sont des femmes) qui relèvent du ministère de l’éducation nationale ([3]) font état d’une précarité persistante. Leur rémunération moyenne n’est ainsi que de 760 euros ([4]) par mois, sous l’effet cumulatif du recours généralisé aux emplois à temps partiel et d’une distribution des rémunérations concentrée à des niveaux proches du SMIC (voir tableau n° 1). Seulement 2 % d’entre eux disposent d’un emploi à temps complet, la quotité horaire moyenne n’étant que de 62 %, alors même que les besoins d’accompagnement s’accroissent. À la fragmentation du temps de travail s’ajoute celle des carrières, qui s’effectuent dans la grande majorité des cas sous forme de contrats à durée déterminée. Ainsi, 16,3 % des effectifs sont employés en CDI, contre 83,7 % en CDD, soit une répartition par nature des contrats inversée par comparaison avec l’ensemble de la population en emploi ([5]).

 

Tableau n° 1 : répartition des effectifs entre les échelons de la grille indiciaire applicable aux accompagnants des élèves en situation de handicap (aesh)

Échelon

Effectifs d’AESH en CDD

Effectifs d’AESH en CDI

Effectifs totaux

NC

1 065

162

1 227

1

53 176

14

53 190

2

46 889

166

47 055

3

6

8 109

8 115

4

0

6 980

6 980

5

0

4 238

4 238

6

0

1

1

Total

101 136

19 670

120 806

Source : direction générale des ressources humaines (DGRH) du ministère de l’éducation nationale.

 

La situation des 65 000 assistants d’éducation sous contrat avec l’éducation nationale comporte des difficultés semblables à celle des AESH. Ainsi, la limitation de leur engagement à une période maximale de six années constitue une limite à leur professionnalisation et présente un risque de dispersion des compétences acquises dans l’exercice des fonctions d’AED. Héritière du statut des surveillants d’externats (SE) institué en 1938, la catégorie des assistants d’éducation s’en démarque toutefois par la diversité croissante de leurs missions et la part limitée d’étudiants parmi les agents qui la constituent. Or, si le recours à des contrats de travail à temps partiel et d’une durée limitée pouvait être justifié à une époque où ces emplois avaient vocation à être occupés par des étudiants, il n’en va pas de même de fonctions mobilisant de plus en plus des compétences spécifiques et exercées par des personnes souhaitant y consacrer une partie plus importante de leur carrière. De fait, le recours généralisé à des emplois à temps partiel et l’impossibilité d’obtenir un contrat à durée déterminée témoignent de la professionnalisation inachevée de ces fonctions.

tableau n° 2 : quotités horaires des assistants d’éducation (aed) sous contrat avec l’éducation nationale

 

Effectifs d’AED

Moins de 50 %

11 414

Entre 50 et 60 %

24 113

Entre 60 et 70 %

1 539

Entre 70 et 80 %

8 500

Entre 80 et 90 %

2 194

Entre 90 et 100 %

1 181

100 %

16 120

Total

65 061

Source : direction générale des ressources humaines (DGRH) du ministère de l’éducation nationale.

Sur le fondement de ces différentes constatations, l’article 1er de la présente proposition de loi tend à lutter contre la précarité des AESH de trois manières. Il permet d’abord leur recrutement par CDI : cette mesure se justifie par le besoin d’effectifs stables, composés de personnels formés et expérimentés. Le même article apporte également une première réponse au problème de la rémunération des AESH, en prévoyant que les temps consacrés à la préparation et aux recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d’accompagnement soient pris en compte dans le calcul du temps de travail effectif au moyen d’un coefficient de pondération. Enfin, l’article 1er prévoit le versement d’une indemnité de sujétions aux AESH qui exercent dans au moins un établissement appartenant aux dispositifs « réseau d’éducation prioritaire » ou « réseau d’éducation prioritaire renforcé ».

En outre, l’article 2 vise à réduire la précarité des assistants d’éducation et à accroître leur présence dans les établissements. Il permet d’abord le recrutement des AED par CDI, soit dans le cadre d’un premier contrat, soit au terme de six ans d’exercice en CDD. Il prévoit également la définition par voie réglementaire d’un taux d’encadrement minimal des élèves par les AED, afin de garantir la présence pérenne d’effectifs suffisants. Enfin, à l’instar des dispositions de l’article 1er concernant les AESH, l’article 2 prévoit le versement d’une indemnité de sujétions aux AED exerçant dans les établissements concernés par les programmes « REP » et « REP + ».

 

Tableau n° 3 : comparaison de l’état du droit et des dispositions de la proposition de loi relatives À la nature et à la durée des contrats

 

Dispositions en vigueur

Dispositions de la proposition de loi

 

AESH

AED

AESH

AED

Nature des contrats

Durée totale de service inférieure à 6 ans : CDD

 

Après 6 ans en CDD : CDI

CDD

CDI

Recrutement par CDI possible sans condition d’engagement préalable

 

CDI obligatoire pour un renouvellement de contrat après 6 ans en CDD

 

Durée des contrats

CDD de 3 ans maximum, renouvelables dans la limite d’une durée totale de 6 ans ; au-delà, CDI obligatoire si le contrat est renouvelé

 

CDD de 3 ans maximum, renouvelables dans la limite d’une durée totale de 6 ans ; pas de possibilité de conclure un CDI

Indéterminée

Indéterminée

 

Ou :

 

CDD de 3 ans au maximum, renouvelables dans la limite d’une durée totale de 6 ans ; au-delà, CDI obligatoire si le contrat est renouvelé

 

 

 


–– 1 ––

   Modifications apportées par la commission

 

Lors de sa réunion du mercredi 12 janvier 2022, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation a adopté la présente proposition de loi en première lecture, en opérant les modifications suivantes.

À l’article 1er, la commission a adopté plusieurs amendements tendant à modifier ou à supprimer certaines dispositions de la proposition de loi. Ainsi, ni le versement d’une indemnité de sujétions aux AESH exerçant dans un établissement appartenant aux programmes « REP » et « REP + », ni la prise en compte des temps de préparation et de recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d’accompagnement, n’ont été retenus. Au recrutement des AESH par contrat à durée indéterminée sans condition d’exercice préalable a été préféré la faculté, conférée à l’administration, de conclure un CDI au terme d’une période initiale de trois années de travail en CDD. La définition des conditions dans lesquelles l’accès à un CDI sera possible dès trois années d’exercice est renvoyée à un décret.

De façon analogue, l’article 2 a vu certaines de ses dispositions supprimées ou substantiellement modifiées. Ainsi, le recrutement des assistants d’éducation par contrat à durée indéterminée sans condition d’exercice préalable a notamment été supprimé, de même que la définition d’un taux minimal d’encadrement des élèves par ces agents, et que le versement d’une indemnité de sujétions à ceux d’entre eux qui exercent dans un établissement classé « REP » ou « REP + ». Si la possibilité d’un recrutement par contrat à durée indéterminée après six années d’exercice a été en revanche conservée, la rédaction adoptée prévoit la définition, par décret, des conditions dans lesquelles l’accès à un CDI sera possible. Le caractère obligatoire de l’embauche par CDI au terme de la période susmentionnée de six ans se voit ainsi substituer une simple faculté.

 


–– 1 ––

   commentaires des articles

Article 1er
Statut des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH)

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article modifie les dispositions du code de l’éducation relatives à l’embauche et aux conditions de travail des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). Il tend à garantir le recrutement pérenne d’effectifs suffisants en prévoyant l’embauche de ces agents uniquement par contrat à durée indéterminée (CDI). Il modifie par ailleurs les modalités de calcul du temps de travail de ces personnels, de façon à mieux valoriser les temps de recherches personnelles et de préparation nécessaires à la qualité de l’accompagnement. Il prévoit enfin le versement d’une indemnité de sujétions aux AESH exerçant dans les établissements appartenant aux programmes « réseaux d’éducation prioritaire » et « réseaux d’éducation prioritaire renforcé » (« REP » et « REP + »), mettant ainsi fin à une disparité entre les AESH et d’autres agents de l’éducation nationale.

I.   le droit existant

Le statut des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) est régi par l’article L. 917-1 du code de l’éducation ainsi que par des dispositions réglementaires, notamment le décret n° 2014-724 du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi des accompagnants des élèves en situation de handicap.

1.   Les AESH, agents nécessaires à la scolarisation des enfants en situation de handicap

Pour la réalisation de l’objectif d’inclusion scolaire de tous les enfants, défini à l’article L. 111-1 du code de l’éducation, le bénéfice du droit à l’éducation est garanti aux enfants, aux adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant. En application de l’article L. 112-1 du même code, ce droit porte sur l’accès à « une formation scolaire, professionnelle ou supérieure ». En découle notamment le principe d’une prise en charge des besoins spécifiques des élèves en situation de handicap, énoncé à l’article L. 351-1 du même code. Ce dernier prévoit la scolarisation des enfants en situation de handicap ou présentant un trouble invalidant au sein des établissements d’enseignement, éventuellement au moyen de dispositifs adaptés, lorsque ce mode de scolarisation répond aux besoins des élèves. Pour garantir l’effectivité du droit à l’éducation au profit des élèves en situation de handicap, le même article prévoit que « dans tous les cas et lorsque leurs besoins le justifient, les élèves bénéficient des aides et accompagnements complémentaires nécessaires ». Outre l’exercice du droit à l’éducation dont bénéficient les enfants en situation de handicap, la scolarisation de ces derniers, le cas échéant avec l’aide d’un AESH, découle également du caractère obligatoire de l’instruction aux termes de l’article L. 131-1 du code de l’éducation. Il résulte de la combinaison de ce droit et de cette obligation une exigence de moyens mise à la charge de l’État : l’article L. 112-1 du même code dispose ainsi que « dans ses domaines de compétence, l’État met en place des moyens financiers et humains nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants » en situation de handicap ([6]).

L’article L. 351-3 du code précité définit les conditions dans lesquelles un élève peut bénéficier d’un accompagnement en milieu scolaire de la part d’un ou de plusieurs professionnels spécialisés. Ainsi, aux termes du premier alinéa de cet article, lorsque la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ([7]), après avis de l’équipe pluridisciplinaire compétente ([8]), constate que la scolarisation d’un élève requiert une aide individuelle dont elle définit la quotité horaire, cette aide peut être apportée par un AESH. Cette formulation ouverte permet que l’accompagnement individuel soit confié à « une association ou un groupement d’associations ayant conclu une convention avec l’État », comme le prévoit l’alinéa 3 du même article. Initialement, le caractère facultatif du recours à un AESH visait aussi à ce que des assistants d’éducation (AED), recrutés notamment dans le cadre de contrats aidés, puissent continuer d’assurer l’aide individuelle avant que les établissements ne disposent d’un nombre suffisant d’AESH. En application de l’article D. 351-16-2 du code de l’éducation, l’aide individuelle est attribuée à un élève nécessitant un accompagnement « soutenu et continu » pour une quotité horaire déterminée.

Le second alinéa de l’article L. 351-3 du code de l’éducation prévoit en outre que la CDAPH peut décider d’une aide mutualisée lorsque les besoins de l’élève le justifient. L’article D. 351-16-2 du même code précise que cette aide est attribuée lorsqu’un accompagnement soutenu et continu n’est pas requis. À la différence de l’accompagnement individuel, qui peut être prodigué par une association ou un groupement d’associations agréées, cette fonction est nécessairement confiée à un AESH.

Un troisième cas de figure concerne les AESH affectés au sein des unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS). Ceux-ci peuvent être amenés à apporter leur concours à l’ensemble des élèves de l’unité. À la différence de l’octroi d’une aide individuelle ou mutualisée, l’inscription au sein d’une unité locale d’inclusion scolaire ne requiert pas de décision de la CDAPH.

La circulaire n° 2017-084 du 3 mai 2017 de la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche décrit les activités des personnels chargés de l’accompagnement d’élèves en situation de handicap. Celles‑ci comprennent l’aide apportée à l’occasion :

– des actes de la vie quotidienne (assurer les conditions de sécurité et de confort, observer et transmettre les signes révélateurs d’un problème de santé, aider à la prise des repas…) ;

– du déroulement ou de l’accès aux activités d’apprentissage à caractère éducatif, culturel, sportif, artistique ou professionnel (rappel des règles à appliquer, aide à la prise de notes…) ;

– de la conduite de la vie sociale et relationnelle (sensibiliser l’environnement de l’élève au handicap, favoriser sa participation aux activités prévues dans les différents lieux de vie…).

Il convient de relever que le bénéfice de cet accompagnement n’est pas limité à l’enseignement scolaire : en application de l’alinéa 2 du même article, des AESH peuvent être également recrutés pour assister des étudiants fréquentant un établissement d’enseignement supérieur. De même que pour les élèves relevant de l’enseignement scolaire, l’attribution d’une aide à un étudiant est subordonnée à une décision de la CDAPH.

C’est parce que ces tâches se distinguent des missions exercées par les assistants d’éducation ([9]) que le besoin s’est fait sentir d’un statut propre aux agents chargés de l’accompagnement des élèves en situation de handicap.

2.   Le statut d’AESH, une professionnalisation inachevée

L’évolution du statut des agents chargés de l’accompagnement d’élèves en situation de handicap se caractérise depuis près de vingt ans par une tendance à la spécialisation de leurs emplois, qui s’est notamment traduite par la prolongation de leurs contrats. Ainsi, la loi n° 2003-400 du 30 avril 2003 relative aux assistants d’éducation prévoyait déjà – à son article 2 créant les articles L. 351-3, L. 916-1 et L. 916-2 du code de l’éducation – le recrutement d’AED spécialement aux fins d’accompagner ces élèves. Devant le besoin de plus en plus manifeste de qualifications particulières pour l’accomplissement de cette tâche, les modifications successives des articles susmentionnés ont notamment permis le recrutement de ces agents pour une durée supérieure à celle prévue pour les autres contrats d’AED ([10]).

La professionnalisation de ces personnels a franchi une nouvelle étape lors de la création du statut d’AESH. Celle-ci résulte de l’article 124 de la loi n° 20131278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, qui a notamment introduit l’article L. 917-1 du code de l’éducation. Ce dernier, seul concerné par les modifications prévues à l’article premier de la présente proposition de loi, détermine les conditions de recrutement et d’emploi des AESH. Aux termes de son premier alinéa, ceux-ci sont recrutés pour « exercer des fonctions d’aide à l’inclusion scolaire des élèves ». Il est précisé que ces missions ne sont pas limitées au temps scolaire, de sorte qu’un besoin d’accompagnement au cours des activités périscolaires et des temps de restauration peut être également notifié par la CDAPH.

3.   Des conditions de recrutement et d’emploi qui entraînent une précarité

Les conditions de recrutement de ces agents sont définies par l’article L. 917-1 du code de l’éducation et par les articles 2 à 7 du décret du 27 juin 2014 susmentionné. Aux termes du premier alinéa de l’article L. 917-1 précité, le recrutement d’AESH incombe à plusieurs personnes morales : l’État, les établissements d’enseignement publics et les établissements privés sous contrat d’association disposent de cette faculté. Pour cette dernière catégorie d’établissements, le recrutement d’AESH est conditionné à l’accord du directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN).

Pour tenir compte de la variation des besoins de scolarisation d’enfants en situation de handicap au sein de plusieurs établissements d’enseignement, l’alinéa 3 de l’article L. 917-1 précité dispose que les AESH peuvent exercer leurs fonctions aussi bien dans l’établissement qui les a recrutés que dans une ou plusieurs autres structures. Le même alinéa prévoit également qu’un AESH peut être affecté dans une ou plusieurs écoles primaires ou maternelles, en fonction des besoins appréciés par l’autorité administrative. Dans ce cas de figure, le ou les directeurs d’école concernés peuvent être associés à la procédure de recrutement. L’article 5 du décret du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi des AESH prévoit que les fonctions de ces agents et les établissements dans lesquels ils sont appelés à les exercer figurent dans le contrat qui les lie à l’autorité administrative. En cas d’affectation au sein d’un pôle inclusif d’accompagnement localisé (PIAL), l’exercice des fonctions d’AESH peut en principe concerner l’ensemble des établissements appartenant à ce pôle. Il en résulte un risque de dispersion sous l’effet de sollicitations parcellaires et multiples émanant d’établissements parfois éloignés les uns des autres.

L’alinéa 4 de l’article L. 917-1, dans sa rédaction issue de l’article 25 de la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, prévoit en outre que l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation et les collectivités territoriales peuvent s’associer par voie de convention afin de recruter conjointement ces personnels. La mise à disposition d’AESH auprès de collectivités territoriales est également possible, dans les mêmes conditions que pour les assistants d’éducation, pour permettre la participation de l’ensemble des élèves aux activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires prévues par l’article L. 216-1 du code de l’éducation, ainsi qu’aux activités périscolaires mentionnées à l’article L. 212-15 du même code.

Plus encore que la mise à disposition, le cumul d’activité constitue le moyen privilégié de recrutement d’AESH par les collectivités territoriales ([11]). Ainsi, la circulaire du 3 mai 2017 précitée préconise que les AESH recrutés par les services de l’éducation nationale soient autorisés à exercer une activité accessoire, pour qu’ils se voient proposer par une collectivité territoriale un contrat portant sur l’accompagnement d’élèves en situation de handicap. La même circulaire prévoit aussi que les collectivités territoriales identifient, parmi les AESH employés par l’éducation nationale, des agents qui pourraient, au terme du contrat qui les lie avec l’État, être recrutés par des collectivités dans le cadre d’un nouveau CDD ou d’un CDI.

La coopération des services de l’État et des collectivités territoriales en vue du recrutement et de l’emploi d’AESH est particulièrement importante, compte tenu de la répartition des compétences en matière d’éducation entre les différentes catégories de personnes publiques. En effet, si l’article L. 917-1 du code de l’éducation prévoit que le bénéfice de l’accompagnement peut s’étendre « hors du temps scolaire », ses dispositions ne préjugent pas de l’identité de la personne publique soumise à l’obligation de moyens qui en découle. Or, si les charges liées à l’exercice par l’État de sa compétence générale d’organisation du service public de l’éducation impliquent que l’éducation nationale assume le coût de l’emploi d’un AESH durant le temps scolaire, il n’en va pas nécessairement de même en d’autres circonstances : c’est notamment le cas de la pause méridienne, en vue de laquelle les collectivités territoriales peuvent prévoir un service de restauration, ou encore des activités périscolaires mentionnées ci-dessus. Aussi, afin de garantir la continuité de l’aide dans l’intérêt de l’enfant, le Conseil d’État a-t-il jugé qu’il « appartient à l’État de déterminer avec la collectivité territoriale qui organise ce service et ces activités si et, le cas échéant, comment [une] même personne peut intervenir auprès de l’enfant durant ce service et ces activités » ([12]).

II.   LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

L’article 1er de la présente proposition de loi modifie l’article L. 917-1 du code de l’éducation en poursuivant trois objectifs complémentaires dans le sens d’une diminution de la précarité qui caractérise actuellement la situation des AESH : ses dispositions prévoient le recrutement de ces personnels exclusivement par contrat à durée indéterminée, l’application d’un coefficient de pondération pour le calcul de leur temps de travail et le versement d’une indemnité de sujétion aux AESH exerçant dans les établissements relevant des programmes « Réseau d’éducation prioritaire » et « Réseau d’éducation prioritaire renforcé ».

1.   L’obligation de recruter les AESH par contrat à durée indéterminée

Le 1°, le 2° et la première phrase du deuxième alinéa du 3° concernent le recrutement des AESH exclusivement par contrat à durée indéterminée. La création d’un statut autonome des AESH par la loi de finances pour 2014 a permis un recul de la précarité de ces personnels, en ouvrant la possibilité de leur recrutement par CDI. Un tel contrat ne peut toutefois être conclu qu’au terme de six années de travail en CDD. Dans l’intervalle de temps compris entre leur embauche en CDD et le renouvellement de leur contrat sous forme de CDI, la collaboration de ces agents au service public de l’éducation est donc susceptible de s’achever :

-         lorsque l’autorité administrative choisit de ne pas renouveler leur premier CDD à la fin de ce dernier, dont la durée ne peut excéder trois ans ;

 

-         lorsque cette autorité choisit de ne pas procéder à leur recrutement en CDI après six années d’emploi en CDD.

La précarité induite par l’impossibilité d’un recrutement d’AESH directement par CDI n’est pas seulement préjudiciable aux agents concernés : elle pénalise le fonctionnement des établissements d’enseignement en limitant les effectifs de personnels formés et expérimentés dont ils disposent afin de remplir leurs obligations en matière d’accueil des élèves en situation de handicap.

*

C’est pourquoi l’article 1er de la présente proposition de loi tend à favoriser la présence pérenne d’effectifs suffisants d’AESH, et cela de deux manières.

D’une part, le 1° et le 2° de l’article 1er (alinéas 2 à 3) renforcent le caractère contraignant du recrutement d’AESH par les pouvoirs publics. En effet, ils substituent à l’expression d’une faculté – « peuvent être recrutés » – celle d’une obligation s’imposant aux autorités publiques, puisque cette modification est introduite par l’emploi du présent de l’indicatif du verbe être, qui revêt en droit une valeur impérative. Il s’agit de mettre l’accent sur les exigences qu’imposent à l’État les dispositions combinées des articles L. 111-1 et L. 351-3 du code de l’éducation, qui définissent respectivement l’objectif d’inclusion scolaire de tous les enfants sans distinction et le principe d’un accompagnement des élèves en situation de handicap.

D’autre part, l’alinéa 5 de l’article 1er prévoit le recrutement des AESH exclusivement par contrat à durée indéterminée. Cette disposition tire les conséquences de la professionnalisation de ces agents entreprise au moment de la création de leur statut en 2014. Elle vise notamment à éviter que des personnels disposant des qualifications requises pour l’exercice de fonctions spécialisées d’accompagnement ne se voient opposer un refus de prolonger leur contrat ou ne soient dissuadés de s’engager dans une carrière d’AESH en raison de la précarité qui s’y attache. C’est par exemple le cas des AESH maîtrisant la langue des signes française (LSF), nécessaires à la scolarisation des enfants atteints de surdité, ou de personnels possédant une spécialisation dans l’usage des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE).

2.   L’intégration des temps de préparation et des recherches préalables au calcul du temps de travail

L’alinéa 5 du premier article consacre, en le dotant d’une valeur législative, le principe d’une pondération du temps de travail des AESH pour tenir compte des temps de préparation, de recherche et de concertation avec la communauté pédagogique auxquels ces agents sont astreints en dehors des horaires consacrés à l’accompagnement. Si l’article 7 du décret du 27 juin 2014 mentionné ci-dessus prévoit que la durée annuelle de travail des AESH se répartit sur une période d’une durée comprise entre 39 et 45 semaines, l’accompagnement d’un élève s’interrompt en principe durant les vacances scolaires, soit après 36 semaines. La durée annuelle de travail prévue par les contrats d’AESH étant le plus souvent de 41 semaines, cinq semaines sont généralement consacrées à des temps de formation et permettent de tenir compte des activités complémentaires mentionnées ci‑dessus dans le calcul du temps de travail effectif.

Par la modification de l’article L. 917-1 du code de l’éducation proposée par le présent article, il s’agit d’inscrire dans les dispositions législatives se rapportant aux AESH les conditions de calcul du temps de travail effectif de ces derniers, en prévoyant qu’un coefficient de pondération de 1,2 soit appliqué au nombre d’heures hebdomadaires d’accompagnement prévu par leur contrat. Le niveau de ce coefficient serait ainsi légèrement supérieur à la valeur obtenue en divisant le nombre de semaines défini par le contrat de travail et le nombre de semaines consacrées à des missions d’accompagnement (41/36 = 1,138). Dans la mesure où ce coefficient de pondération doit, pour accroître la rémunération des agents concernés, s’appliquer à une durée annuelle de travail au moins égale à sa valeur actuelle, il est également précisé que la quotité horaire de travail des AESH est définie sur la base de la durée annuelle légale, soit 1 607 heures pour un taux plein. Il s’agit là encore d’asseoir la portée normative de l’application de cette durée légale aux contrats d’AESH, qui n’est actuellement prévue que par une disposition réglementaire (article 5 du décret du 27 juin 2014 mentionné plus haut).

3.   Le versement d’une indemnité de sujétions aux AESH exerçant dans le cadre des programmes « REP » et « REP + »

Les alinéas 6 et 7 prévoient le versement d’une indemnité de sujétions aux AESH affectés au sein d’un ou de plusieurs établissements appartenant aux dispositifs « Réseau d’éducation prioritaire » (« REP ») et « Réseau d’éducation prioritaire renforcé » (« REP + »). Sans prétendre répondre de manière exhaustive au besoin de revalorisation du statut des AESH, ces dispositions visent à mettre fin à une inégalité de traitement entre ces derniers et les autres agents de l’éducation nationale concourant aux programmes d’éducation prioritaire. En effet, les articles 1 et 6 du décret n° 2015-1087 du 28 août 2015 portant régime indemnitaire spécifique en faveur des personnels exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes « REP » et « REP + » prévoient le versement d’une indemnité de sujétions aux personnels enseignants, aux conseillers principaux d’éducation, aux personnels de direction, aux personnels administratifs et techniques et aux psychologues de l’éducation nationale de la spécialité « éducation, développement et apprentissage » ainsi qu’aux personnels sociaux de santé. Il paraît difficilement justifiable de refuser le bénéfice de cette indemnité aux AESH – de même qu’aux AED – compte tenu de leur importance en vue de la scolarisation de l’ensemble des élèves sans distinction. Deux amendements prévoyant le versement de cette prime respectivement aux AESH et aux AED ont ainsi été adoptés par la commission durant l’examen du projet de loi de finances pour 2022, avant d’être rejetés en séance publique.

III.   la position de la rapporteure

Au regard de la nature réglementaire des dispositions précisant l’intitulé des programmes « réseau d’éducation prioritaire » et « réseau d’éducation prioritaire renforcé » ainsi que les conditions de travail et de rémunération des agents qui concourent à leur fonctionnement, il serait opportun de modifier la rédaction de l’alinéa 5 en adoptant une formulation plus générale. Il s’agit d’éviter que des mesures de caractère réglementaire ne soient intégrées à la partie législative du code de l’éducation, alors même qu’une telle modification de l’ordonnancement juridique n’est pas l’objet de la présente proposition de loi. La modification proposée pourrait porter sur le remplacement de la mention de dispositifs en vigueur par une référence à l’éducation prioritaire. La rapporteure propose un amendement en ce sens.

D’autres enjeux liés à la rémunération des AESH ont été soulevés à plusieurs reprises au cours des auditions réalisées par la rapporteure. Ainsi, l’absence de versement aux AESH de la prime d’équipement informatique délivrée par le ministère de l’éducation nationale en 2021 a suscité des critiques émanant de ces personnels, compte tenu du besoin de tels équipements pour l’accompagnement de certains élèves. Il s’agit cependant d’une mesure réglementaire, qui ne saurait par conséquent faire l’objet de dispositions législatives.

De façon analogue, les modalités de calcul du temps de travail des AESH se rapportent au contenu de leurs missions et aux conditions de leur accomplissement, dont la définition incombe au pouvoir réglementaire. En revanche, il semble que le principe d’une meilleure prise en compte de l’activité réelle de ces agents présente un caractère de généralité tel qu’il puisse figurer dans la loi. Au surplus, les échanges avec certains interlocuteurs, dont les organisations syndicales, conduisent la rapporteure à juger que la valeur du coefficient de pondération devrait être plus élevée. En effet, l’objectif poursuivi à travers cette pondération est d’instaurer pour la définition du temps de travail effectif des AESH des modalités de calcul analogues à celles applicables aux enseignants, soit l’octroi d’une rémunération complète pour un temps de présence hebdomadaire auprès des élèves inférieur à la durée légale de 35 heures. Aussi, en retenant un nombre d’heures d’accompagnement par semaine correspondant à la quotité de travail moyenne des contrats d’AESH (c’est-à-dire 24 heures), atteindre une rémunération correspondant à un temps complet nécessiterait un coefficient de pondération égal à 35/24 = 1,46. Toutefois, un tel calcul suppose la définition d’un temps de travail hebdomadaire qui ne soit pas seulement (comme l’est la durée de 24 heures) le résultat d’une opération statistique, mais qui procède d’une réflexion préalable sur les besoins en matière d’accompagnement des élèves. En effet, selon l’hypothèse d’une intégration croissante des activités périscolaires et de la pause méridienne dans le temps d’accompagnement, et face à l’augmentation du nombre d’élèves requérant une aide à l’inclusion scolaire, un arbitrage doit être effectué entre le recrutement de nouveaux AESH et l’allongement de la durée hebdomadaire de présence auprès des élèves. Au vu du besoin de formation et de professionnalisation des effectifs, il semble préférable de maintenir une durée d’accompagnement proche de son niveau actuel (soit 24 heures hebdomadaires en moyenne) et, en conséquence, de recourir à un coefficient de pondération plus élevé (soit 1,46 pour cette quotité horaire). Compte tenu de l’étendue des domaines respectifs du règlement et de la loi, il paraît opportun d’inscrire à l’article L. 917-1 du code de l’éducation le principe d’une pondération, sans en définir la valeur. La rapporteure propose aussi un amendement en ce sens.

 

 

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Article 2
Statut des assistants d’éducation (AED)

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article tend à lutter contre la précarité des assistants d’éducation en modifiant l’article L. 916-1 du code de l’éducation, qui définit leurs conditions de recrutement et d’emploi. En premier lieu, cet article vise à permettre le recrutement de ces personnels par contrat à durée intéterminée. Il dispose ensuite qu’un taux d’encadrement minimal des élèves par des assistants d’éducation doit être défini par décret. Il prévoit enfin, en cohérence avec les dispositions de l’article 1er concernant les accompagnants des élèves en situation de handicap, le versement d’une indemnité de sujétions aux assistants d’éducation affectés dans les établissements qui relèvent des programmes « Réseau d’éducation prioritaire » et « Réseau d’éducation prioritaire renforcé ».

I.   le droit existant

1.   Des personnels aux fonctions plus diverses que celles des surveillants d’autrefois, et qui tendent à se professionnaliser

La création du statut de ces agents résulte de la loi n° 2003-400 du 30 avril 2003 relative aux assistants d’éducation, qui a notamment introduit l’article L. 916-1 du code de l’éducation dont la présente proposition de loi modifie certaines dispositions. Dans sa rédaction initiale, antérieure à la création d’un statut autonome des personnels chargés de l’accompagnement des élèves en situation de handicap, le même article prévoyait que ces dernières fonctions soient dévolues à des AED ayant bénéficié d’une formation spécifique.

Le premier alinéa de l’article L. 916-1 précité énumère de façon non limitative les fonctions des AED, en prévoyant que celles-ci comprennent « l’encadrement et la surveillance des élèves », sans nécessairement s’y limiter. Le caractère ouvert de la formulation retenue dans la loi du 30 avril 2003 marquait ainsi une première inflexion par rapport à la définition de l’activité de surveillant d’externat (SE) contenue dans le décret du 27 octobre 1938 portant statut de cette catégorie d’agents. Ainsi, l’article 4 de ce décret mentionnait exclusivement des tâches se rapportant à la « surveillance » ou à la « garde ». Affectés au sein des « collèges modernes », les surveillants d’externat devaient être recrutés parmi des candidats « se destinant aux carrières de l’enseignement », ces postes étant même réservés à certaines catégories d’étudiants dans les établissements proches des facultés. Leurs fonctions prenaient fin de plein droit à l’âge de vingt-neuf ans. Aussi, dès 1999, l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale (IGAEN) constatait-elle que « la qualité du service susceptible d’être assuré par de jeunes étudiants n’est plus compatible avec les exigences posées par l’encadrement des élèves dans la plupart des établissements actuels » ([13]).

La création du statut d’assistant d’éducation répondait donc en premier lieu à l’évolution des conditions d’accueil des élèves dans les établissements d’enseignement, l’encadrement de la population scolaire hors des temps d’apprentissage cessant d’être conçu sur la base d’une approche uniquement disciplinaire. L’article 1er du décret n° 2003-484 du 6 juin 2003 fixant les conditions de recrutement et d’emploi des assistants d’éducation prévoit que les tâches confiées à ces agents comprennent notamment, en plus de la surveillance, « l’appui aux personnels enseignants pour le soutien et l’accompagnement pédagogiques », « l’aide à l’utilisation des nouvelles technologies », ou encore la « participation à toute activité éducative, sportive, sociale, artistique ou culturelle complémentaire aux enseignements ». De telles fonctions requièrent des compétences particulières que ne possèdent pas toujours des étudiants pour lesquels ces emplois devraient constituer une première expérience professionnelle au sein d’un établissement d’enseignement. L’évolution statutaire qu’a représenté le remplacement des surveillants d’externats par les assistants d’éducation, résultant des modifications de leur activité, visait donc également à renouveler le profil des personnes exerçant ces fonctions.

2.   Un statut qui ne tient pas compte du besoin de professionnalisation et de stabilité des effectifs d’AED

L’article L. 916-1 du code de l’éducation dans sa rédaction actuelle ne répond qu’imparfaitement au besoin de professionnalisation des AED.

L’évolution des tâches incombant à ces personnels est affirmée au premier alinéa, qui dispose que ceux-ci occupent des « fonctions d’assistance à l’équipe éducative en lien avec le projet d’établissement ». Cependant, l’apport de compétences supplémentaires que nécessitent ces activités ne repose pas tant sur la constitution d’une catégorie de personnels spécialisés qu’en la mobilisation d’étudiants se destinant aux carrières de l’enseignement, perpétuant ainsi les conceptions sous-jacentes à l’ancien statut des surveillants d’externat. En effet, dans la rédaction issue de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, l’alinéa 2 prévoit que « les assistants d’éducation inscrits dans une formation […] préparant au concours d'accès aux corps des personnels enseignants ou d’éducation peuvent se voir confier progressivement des fonctions de soutien, d’accompagnement, d’éducation et d’enseignement ». De manière analogue, l’alinéa 6 dispose que « le dispositif des assistants d’éducation est destiné à bénéficier en priorité à des étudiants boursiers ». Le statut d’assistant d’éducation procède donc moins de l’appréhension des besoins des établissements que de la volonté d’apporter une première expérience de l’éducation ou de l’enseignement à des personnes qui s’y destinent. En dehors du cas particulier que constitue cette dernière catégorie de candidats aux fonctions d’AED, celles-ci ont aussi pu être occupées par des personnes bénéficiant de contrats aidés, souvent à titre transitoire pour accompagner leur retour à l’emploi.

L’absence de professionnalisation des fonctions d’AED se traduit par l’impossibilité de leur recrutement par CDI. Ainsi, aux termes de l’alinéa 5 de l’article L. 916-1 précité, les assistants d’éducation sont recrutés exclusivement par CDD d’une durée maximum de trois ans, renouvelable dans la limite d’une période totale de six ans. Une fois cette durée atteinte, l’embauche par un établissement d’enseignement privé peut constituer, pour un AED, l’unique alternative au changement ou à la cessation de son activité professionnelle. Dans les établissements d’enseignement publics, le recrutement par CDI n’est envisageable que pour des AED ayant exercé des fonctions d’accompagnement d’élèves en situation de handicap. L’alinéa 7 de l’article L. 917-1 du code de l’éducation prévoit en effet que la qualité d’AESH est conférée par l’exercice d’une « aide à l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap » et ouvre ainsi droit à une embauche en CDI dans ces fonctions au terme de six années d’accompagnement.

II. les dispositions de la proposition de loi

Le présent article modifie l’article L. 916-1 du code de l’éducation pour lutter contre certaines des causes de la précarité des assistants d’éducation. Ainsi, l’article 2 de la proposition de loi prévoit le recrutement des AED par CDI au terme de six années de travail dans le cadre de CDD, la définition d’un taux minimum d’encadrement des élèves par des assistants d’éducation et le versement d’une indemnité de sujétions aux personnels des établissements appartenant aux programmes « REP » et « REP + ».

1.   Le recrutement des assistants d’éducation par CDI

La professionnalisation des emplois d’AED justifie que soit rendu possible leur recrutement par CDI. Pour maintenir une certaine souplesse de gestion au profit des établissements, qui doivent être en mesure d’évaluer régulièrement leurs besoins en effectifs, et tenir compte de la présence d’une part significative quoique minoritaire – proche de 30 % ([14]) – d’étudiants parmi les AED, le présent article n’assortit pas de caractère obligatoire le recours à des personnels recrutés par CDI. L’embauche d’un assistant d’éducation pourra ainsi prendre la forme :

– soit d’un contrat à durée déterminée, conclu pour une période maximale de trois ans et renouvelable dans la limite de six années, au terme desquelles toute prolongation de contrat ne pourra intervenir que dans le cadre d’un CDI ;

– soit d’un contrat à durée indéterminée, conclu sans condition d’emploi préalable par CDD.

2.   La définition d’un taux minimum d’encadrement

Dans le but de garantir la présence pérenne d’effectifs suffisants d’assistants d’éducation dans les établissements, l’alinéa 9 du présent article prévoit que le décret mentionné au dernier alinéa de l’article L. 916-1 susmentionné définit « un taux d’encadrement minimal des élèves par les assistants d’éducation proportionnellement au nombre d’élèves accueillis dans les établissements scolaires ».

3.   Le versement d’une indemnité de sujétions aux personnels relevant des dispositifs « REP » et « REP + »

À l’instar des dispositions de l’article 1er de la présente proposition de loi et pour les mêmes motifs, l’alinéa 11 de l’article 2 prévoit que les assistants d’éducation exerçant au sein des établissements appartenant aux programmes « REP » et « REP + » perçoivent une indemnité de sujétions.

III.   La position de la rapporteure

De même que pour l’article 1er de la présente proposition de loi, la rapporteure propose deux amendements qui prévoient respectivement le versement de l’indemnité de sujétions mentionnée à l’alinéa 11 de l’article 2 à tout assistant d’éducation exerçant dans au moins un établissement bénéficiant du dispositif « REP » ou « REP + », et à substituer à la mention de ces programmes particuliers une référence plus générale à l’éducation prioritaire.

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Article 3
Gage

Adopté par la commission sans modification

Le présent article a pour objet d’assurer la recevabilité financière de la proposition de loi.

Le présent article prévoit que les charges résultant, pour l’État, de l’application de la loi sont compensées par une majoration du taux d’imposition des plus-values sur les biens meubles incorporels.

Il prévoit aussi que les charges pour les collectivités territoriales sont compensées par une majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par une majoration du taux d’imposition susmentionné.

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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 12 janvier 2022, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation a examiné la proposition de loi visant à lutter contre la précarité des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation (n° 4781) ([15]).

I.   Discussion générale

M. le président Bruno Studer. Nous examinons à présent la proposition de loi visant à lutter contre la précarité des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) et des assistants d’éducation (AED), inscrite à l’ordre du jour de la journée réservée au groupe Socialistes et apparentés, le 20 janvier prochain.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Mes chers collègues, je suis heureuse de vous présenter cette proposition de loi, car elle a trait à deux catégories de personnels indispensables à la réalisation d’objectifs que nous partageons tous : d’une part, l’accueil de l’ensemble des élèves et des étudiants, sans distinction, dans les établissements d’enseignement public, privé et agricole ; d’autre part, l’instauration d’un climat scolaire propice à la sérénité nécessaire aux apprentissages et à l’épanouissement de nos jeunes.

Je dois également vous dire l’émotion ressentie lorsque je me suis entretenue avec plusieurs de ces personnes, que ce soit au cours des auditions ou lors d’échanges dans des établissements de ma circonscription. Beaucoup ont exprimé la grande difficulté de leur situation et leur découragement dans l’exercice de leurs missions : l’aide à l’inclusion scolaire d’élèves en situation de handicap pour les AESH, l’encadrement des élèves et l’appui aux équipes éducatives pour les AED. Des AESH notamment ont évoqué leurs conditions de travail : des déplacements quotidiens entre différents établissements, un emploi à temps partiel, une rémunération mensuelle inacceptable, l’incertitude que fait peser sur leur avenir le possible non-renouvellement de leur contrat et, en définitive, le sentiment que, souvent, leur engagement n’est pas pris en considération à sa juste valeur.

Nous avons choisi de traiter conjointement le statut des AESH et celui des AED, pour deux raisons principales.

Premièrement, les fonctions dévolues aux AESH étaient auparavant exercées par des AED, souvent appelés auxiliaires de vie scolaire (AVS), plus particulièrement chargés de l’accueil d’enfants en situation de handicap. Cette spécialisation interne à la catégorie des assistants d’éducation a justifié la création, en 2014, d’un statut distinct. En introduisant l’article L. 917-1 dans le code de l’éducation, la majorité précédente a ainsi prévu notamment le recrutement des AESH par CDI au terme de six années de travail. Il s’agissait là d’un premier pas vers la professionnalisation de ces agents.

Deuxièmement, les statuts respectifs des AESH et des AED se caractérisent par leur précarité. Les causes et les manifestations de celle-ci sont nombreuses : d’abord, les lacunes de l’offre de formation initiale et continue, qui freinent la professionnalisation de ces agents et limitent leurs perspectives de carrière ; ensuite, la difficulté et, dans le cas des AED, l’impossibilité d’accéder à des contrats à durée indéterminée, favorisent l’instabilité des effectifs et le gaspillage des compétences acquises durant plusieurs années d’exercice au plus près des élèves ; enfin, les niveaux de rémunération de ces personnels indispensables sont tels qu’il leur est impossible de vivre décemment de leur profession, ce qui réduit fortement son attractivité.

Les données statistiques sont impressionnantes. Ainsi, la rémunération mensuelle moyenne d’un AESH s’élève à 760 euros, revenu dont la valeur réelle s’effondre dans le contexte inflationniste actuel. Seulement 2 % d’entre eux – ou d’entre elles, puisqu’il s’agit de femmes dans 93 % des cas – disposent d’un emploi à temps complet alors que les besoins d’accompagnement s’accroissent dans des proportions vertigineuses. En outre, 16,3 % des effectifs sont employés en CDI et 83,7 % en CDD, soit un ratio pratiquement inverse de celui observé dans les différentes catégories de salariés. Ce ne sont là que les principaux obstacles à l’attractivité de ces fonctions et à la professionnalisation de celles qui les exercent.

Ce constat est d’autant plus frappant que ces agents font face à des besoins croissants en matière de scolarisation d’élèves en situation de handicap – la représentation nationale devra, du reste, se pencher sur cette progression vertigineuse. Dès lors que 70 % des notifications concernent des troubles « dys », il n’est pas absurde de penser qu’une formation plus solide des enseignants permettrait de remédier à un certain nombre de difficultés. Le nombre d’enfants faisant l’objet d’une notification de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) leur attribuant une aide individuelle ou mutualisée augmente inlassablement ; qui plus est, ces notifications interviennent en cours d’année, ce qui représente un véritable casse-tête pour les référents et les chefs d’établissement. Or l’augmentation des effectifs d’AESH – le ministre ayant annoncé 4 000 recrutements – paraît d’ores et déjà compromise par la piètre reconnaissance et la faible attractivité de leurs fonctions.

Face à la précarité dont souffrent ces personnels, les mesures adoptées par la majorité actuelle paraissent très insuffisantes, tant pour les AESH que pour les AED. S’agissant des premiers, le versement d’une prime annuelle de 600 euros ne concerne que les 285 AESH référents recensés dans les différentes académies – auxquels on confie, en outre, de nouvelles missions –, soit environ 0,02 % des effectifs. La création des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL), qui s’inscrit dans une logique de mutualisation des moyens entre établissements, conduit des AESH à intervenir au sein de plusieurs établissements, ce qui leur impose des déplacements quotidiens et entraîne une prise en charge dégradée des élèves.

Quant aux assistants d’éducation, la principale mesure prise par le Gouvernement dans la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance consiste à associer certains d’entre eux à l’exercice de fonctions pédagogiques. Cette possibilité est offerte aux AED qui se destinent aux carrières de l’enseignement ou de l’éducation. Or la part d’étudiants dans les effectifs n’est que de 30 % ; qui plus est, tous ne préparent pas les concours de l’éducation nationale et aucun n’exerce en milieu rural. Cette disposition, qui peut être utile dans certains cas, ne correspond pas à la professionnalisation des assistants d’éducation, qui s’est opérée de facto.

Nous peinons toujours à tirer les conséquences de la loi du 30 avril 2003 relative aux assistants d’éducation qui, en réponse aux demandes répétées d’acteurs associatifs, amorçait la transformation des surveillants d’autrefois en une nouvelle catégorie d’agents appelés à exercer plus longtemps des fonctions de plus en plus variées – allant de la surveillance des élèves à l’appui aux enseignants et à l’encadrement de la vie scolaire, en passant par l’accompagnement de projets culturels et citoyens –, bref : à prendre en charge tout ce qui se déroule hors des heures de cours. Notons que, dans les établissements disposant d’un internat – comme c’est souvent le cas en milieu rural –, ils jouent, aux côtés des conseillers principaux d’éducation (CPE), un rôle essentiel dans le quotidien de nos élèves.

La crise sanitaire et les absences qu’elle a entraînées ont conduit à solliciter davantage encore les effectifs d’AED pour pallier le manque de personnels d’encadrement et de direction. La proviseure du lycée Boissy d’Anglas d’Annonay m’a dit récemment combien il était regrettable de devoir se séparer au bout de six ans de personnes formées, compétentes et motivées. Aussi ne devons-nous pas concevoir les fonctions d’AED comme la phase initiale d’une carrière appelée à se dérouler dans d’autres emplois ; il faut, au contraire, organiser la montée en compétence et la professionnalisation de ces agents, tout en conservant une souplesse de gestion qui corresponde à la diversité des profils d’AED. Mais, à l’évidence, l’image de pions que l’on déplace au gré des besoins a la peau dure !

Face à la diversité de ces enjeux, pour partie communs aux deux catégories d’agents concernées, la présente proposition de loi est conçue comme une première étape, nécessairement modeste, vers une véritable reconnaissance de ces professions.

Son article 1er tend à lutter contre la précarité des AESH en actionnant trois leviers.

Premièrement, il permet leur recrutement en CDI. Cette mesure se justifie par le besoin d’effectifs stables, composés de personnels formés et expérimentés. Selon les informations que nous ont communiquées les services du ministère de l’éducation nationale, l’ancienneté moyenne des AESH actuellement en fonction est de trois ans et trois mois. Or nous devrions veiller à ce que les personnes ayant acquis une expérience précieuse exercent leurs compétences sur la longue durée. Certains AESH possèdent des compétences particulières dont le besoin se fait durablement sentir ; c’est, par exemple, le cas des agents formés à la langue des signes française, indispensables à la scolarisation des enfants atteints de surdité.

Deuxièmement, il apporte une première réponse au problème de la rémunération des AESH, en prévoyant que le temps consacré à la préparation et aux recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d’accompagnement soit pris en compte dans le calcul du temps de travail effectif afin d’atteindre les 35 heures hebdomadaires légales. En effet, compte tenu de l’insuffisance de l’offre de formation – 60 heures –, de nombreux AESH sont contraints, pour s’adapter à la diversité des situations de handicap, de se former par leurs propres moyens en vue d’acquérir une compréhension suffisante de chaque handicap.

Enfin, l’article 1er prévoit le versement d’une indemnité de sujétion aux AESH qui exercent dans au moins un établissement classé en réseau d’éducation prioritaire (REP) ou en réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+). Il s’agit de réparer ce que nous nous accordons tous à reconnaître comme une injustice. C’est du moins ce que l’on peut supposer depuis que notre commission a adopté un amendement au projet de loi de finances défendu par le président Studer et par Cécile Rilhac et visant à instaurer cette mesure ; celle-ci ayant été rejetée en séance publique, nous vous proposons de l’adopter de nouveau.

L’article 2 de la présente proposition de loi comporte plusieurs dispositions tendant à réduire la précarité des assistants d’éducation et à accroître leur présence dans les établissements. Il permet d’abord, sans le rendre obligatoire, le recrutement des AED en CDI, soit dans le cadre d’un premier contrat, soit au terme de six ans d’exercice en CDD. Il prévoit ensuite la définition d’un taux d’encadrement minimal des élèves par les AED, pour répondre à un besoin pérenne d’effectifs suffisants. Enfin, à l’instar des dispositions de l’article 1er relatif aux AESH, il prévoit le versement des primes « REP » et « REP+ » aux AED exerçant dans les établissements concernés par ces dispositifs.

En conclusion, il est évident que les mesures que nous vous proposons n’apportent qu’une réponse partielle aux différents problèmes que rencontrent ces deux catégories d’agents ; elles ne sont que de petites pierres qui doivent contribuer à l’édification d’un véritable statut des AESH et des AED. Ce faisant, nous nous inscrivons dans le droit fil de l’implication des parents, des associations et des députés qui ont mis ces questions en lumière avant moi ; je pense notamment à Jacqueline Dubois, Sébastien Jumel, Aurélien Pradié, François Ruffin... À ce propos, je tiens à remercier tout particulièrement notre ancien collègue Christophe Bouillon, dont la proposition de loi, beaucoup plus exhaustive, a contribué, en 2018, à la prise en compte d’un postulat d’importance : nous devons passer d’une accessibilité universelle, que nous sommes loin d’avoir atteint, à une pleine citoyenneté pour tous et toutes.

J’espère, mes chers collègues, que vous serez attentifs aux exigences liées à la situation et que vous accorderez à ces hommes et à ces femmes la reconnaissance qu’ils méritent.

Mme Jacqueline Dubois (LaREM). La proposition de loi que nous examinons a trait aux conditions de recrutement, d’emploi et de rémunération de personnels qui contribuent au bon fonctionnement du système éducatif, à savoir les accompagnants d’élèves en situation de handicap, auxquels est consacré l’article 1er, et les assistants d’éducation, visés à l’article 2.

Les AESH, qui facilitent la scolarisation des élèves en situation de handicap, sont au nombre de 125 500, soit une augmentation de 26 500 équivalents temps plein (ETP) en cinq ans. On compte, par ailleurs, plus de 400 000 élèves à besoins éducatifs particuliers scolarisés dans les établissements des premier et second degrés.

Parmi les évolutions en faveur de l’école inclusive, il nous semble utile de souligner l’important travail de structuration du métier d’accompagnant d’élèves en situation de handicap réalisé sous cette législature. Ainsi, la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a permis la création d’un service public de l’école inclusive grâce à l’installation d’un service gestionnaire dédié aux AESH : leur place au sein de l’éducation nationale – ils disposent d’une adresse de courriel personnelle – et leur rôle au sein des équipes éducatives sont mieux reconnus, ils ont la possibilité de compléter leur formation initiale en accédant aux modules de formation continue de l’éducation nationale, enfin, des AESH référents ont été recrutés dans chaque département. Par ailleurs, il a été mis fin à l’extrême précarité des contrats aidés. Depuis la rentrée 2019, les AESH sont recrutés dans le cadre de contrats publics de trois années puis, après six ans, en CDI. Entre juin 2019 et juin 2021, les effectifs d’AESH en CDI ont ainsi progressé de 30 %. Enfin, une nouvelle échelle de rémunération permet un avancement automatique tous les trois ans, selon une grille qui compte onze échelons au lieu de huit auparavant.

En 2020, a paru un guide national, source d’information précieuse sur les droits des AESH. Élaboré en concertation avec les organisations syndicales, il précise leurs conditions d’emploi et leur environnement d’exercice ainsi que leurs droits et avantages sociaux. En effet, un nouveau cadre de gestion clarifie les missions des AESH et le décompte de leur temps de travail, afin d’assurer la reconnaissance de toutes les activités effectuées et d’améliorer leur rémunération. Ainsi, alors que l’année scolaire compte 36 semaines, leur temps de service est calculé sur 41 semaines afin d’inclure l’accompagnement des élèves, les activités préparatoires et les réunions ou formations suivies pendant et hors temps scolaire.

L’article 2 a trait aux assistants d’éducation, qui contribuent tout au long de l’année au bon déroulement de la vie scolaire de nos collégiens et lycéens. Le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports est attentif au fait que ces personnels, souvent des étudiants, puissent valoriser leur expérience et bénéficier de réelles perspectives professionnelles. Différents concours des métiers de l’enseignement – internes, sous conditions, ou externes – leur sont ouverts, de même que le concours interne de conseiller principal d’éducation, en raison de leur pratique et de leur connaissance de la vie scolaire. Ils peuvent demander une validation de leur expérience à l’issue de leur contrat. Depuis la rentrée 2019, ceux qui se destinent à l’enseignement peuvent bénéficier d’un dispositif de préprofessionnalisation, véritable tremplin vers le professorat. Par ailleurs, dans l’objectif constant d’améliorer la situation des AED, l’ouverture d’heures supplémentaires leur permettra, à compter du mois de janvier 2022, de compléter leur contrat en contribuant davantage à la continuité pédagogique au sein de leurs établissements.

Depuis le début du quinquennat, une meilleure prise en compte de la situation des personnels de l’éducation, dont font partie les accompagnants des élèves en situation de handicap et les assistants d’éducation, est un enjeu essentiel de la gestion des personnels du ministère de l’éducation nationale et fait l’objet d’un travail global dans le cadre du Grenelle de l’éducation. Visant un objectif constant d’amélioration de leurs conditions de recrutement et d’emploi, nous soutiendrons les évolutions qui rendent possible la « CDIsation » après trois ans pour les AESH et après six ans pour les AED, évolutions qui s’inscrivent dans la continuité du travail engagé depuis 2017.

Mme Emmanuelle Anthoine (LR). Le nombre des enfants handicapés au sein de l’institution scolaire ne cesse de croître : ils sont désormais plus de 400 000. Ces chiffres nous obligent à agir, afin de donner tout son sens à l’école de la République, qui ne saurait laisser ces enfants de côté.

C’est l’honneur de la République française d’avoir créé, par la loi du 11 février 2005, l’obligation de scolarité pour les enfants en situation de handicap. Mais, pour donner corps à ce principe, il faut des accompagnants qui se dévouent chaque jour pour permettre à ces élèves de bénéficier de l’égalité des chances. Les AESH jouent un rôle essentiel à cet égard. Ils souffrent néanmoins d’un cadre d’emploi trop rigide et d’un défaut de reconnaissance, notamment financière – signe du manque de considération dont ils pâtissent : ils n’ont bénéficié d’aucune mesure de sécurité sanitaire spécifique lors du déconfinement du printemps 2020. De fait, ils ne disposent d’aucun statut, leur formation n’est pas suffisante et ils exercent un métier peu attractif et faiblement rémunéré. Surtout, ils ne sont pas suffisamment nombreux pour répondre aux demandes légitimes des familles d’enfants handicapés. Nous ne pouvons continuer dans cette voie.

C’est pourquoi les députés du groupe Les Républicains ont défendu, à l’automne 2018, une proposition de loi déposée par Aurélien Pradié relative à l’inclusion des élèves en situation de handicap. Celle-ci prévoyait la création d’un statut d’aidant à l’inclusion scolaire, statut qui aurait ouvert le droit à une formation dédiée et aurait supprimé l’obligation d’avoir effectué deux CDD avant d’obtenir un CDI. Mais la majorité présidentielle a choisi d’empêcher l’examen de ce texte, en votant une motion de rejet préalable ; ce choix demeure incompréhensible. Aussi, je me félicite que le sujet soit à nouveau abordé dans notre assemblée et j’espère que, cette fois-ci, nous ne serons pas privés de débat. Les AESH méritent en effet toute notre considération et une meilleure reconnaissance. Le texte que nous examinons comporte plusieurs avancées intéressantes en ce sens.

Celui-ci concerne également le devenir des assistants d’éducation. Ces acteurs essentiels de la communauté éducative pâtissent en effet de la précarité de leur statut. Le 23 mars dernier, j’ai adressé une question écrite au ministre de l’éducation nationale pour l’interpeller à ce sujet ; j’attends toujours sa réponse…

Les assistants d’éducation sont recrutés au moyen de contrats précaires d’un an renouvelables pour une durée maximale de six ans. Cette situation ne leur offre aucune perspective professionnelle sur le long terme et prive les chefs d’établissement de la faculté de conserver des éléments dont ils sont satisfaits. L’incertitude qui pèse sur l’avenir de ces personnels est encore renforcée par la précarité de leur CDD, qui doit être renouvelé chaque année, si ce n’est plus souvent. Leurs missions sont multiples et se multiplient : on leur demande tout, pour une rémunération trop faible. Ils sont rétribués en fonction du nombre d’heures effectuées, mais de nombreuses heures de travail ne sont pas prises en compte ; ils ne sont payés qu’à 75 % du SMIC horaire et seulement 45 % des contrats sont à temps complet.

Ces contractuels de l’éducation nationale assurent pourtant un accompagnement nécessaire des élèves. Leur mission qui est de faire respecter les règles de vie au sein des établissements fait partie intégrante des apprentissages que reçoivent les élèves au cours de leur parcours scolaire. Ces enseignements implicites sont en effet formateurs, et c’est à ces assistants d’éducation, dont les fonctions sont insuffisamment reconnues, que nous les devons. Alors que la crise sanitaire a souligné la nécessité de mieux valoriser les métiers utiles, il convient de revaloriser le statut des assistants d’éducation comme celui des AESH. Cette proposition de loi nous en offre l’opportunité, saisissons-la !

Mme Géraldine Bannier (Dem). Cette proposition de loi tend à atteindre un objectif auquel notre groupe souscrit pleinement. En effet, conscients de la fragilité de ces statuts, les auteurs du texte s’inscrivent dans la politique menée par le Gouvernement en faveur de ces personnels, indispensables à la vie des établissements et à la réussite des élèves.

Rappelons l’action et l’engagement forts de la majorité pour améliorer l’inclusion au sein de nos écoles et les conditions de travail des AESH et des AED. Afin de sécuriser les emplois des AESH, nous avons pris des mesures pour que ces personnels ne soient plus recrutés en contrat aidé mais en CDD, transformables en CDI après six années d’exercice. Outre une progression de leur formation, une nouvelle échelle de rémunération, sujet majeur de préoccupation, a été instaurée en septembre, avec une revalorisation automatique de leur carrière et un changement d’indice de rémunération tous les trois ans.

L’indice applicable en début de carrière a également été revalorisé pour dépasser le SMIC. De même, les référents AESH peuvent dorénavant bénéficier de 600 euros par an d’indemnités de fonction. Quant aux AED, nous avons répondu à leur demande de pouvoir assurer des heures supplémentaires. Nous avons aussi tenu à valoriser l’expérience qu’ils ont pu acquérir auprès des élèves en leur ouvrant la voie de nouvelles perspectives professionnelles. Ils peuvent ainsi se présenter aux concours internes de recrutement des professeurs et des conseillers principaux d’éducation.

Nous devons continuer à réfléchir à l’amélioration des conditions de vie et de travail de ces personnels. Si la CDIsation directe, prévue par cette proposition de loi, n’est pas souhaitable du fait de la difficulté à mesurer de prime abord la capacité d’une personne à remplir une fonction très spécifique, nous souhaitons tout de même sécuriser leur statut. C’est pourquoi nous sommes favorables à la CDIsation des AED au bout de six ans et des AESH au bout de trois ans. L’instauration de CDI de mission pour les AESH est une autre piste.

Faciliter l’accès aux CDI rendra possible la professionnalisation d’une partie de ces personnels qui représentent un véritable atout en termes d’expérience pour les établissements scolaires et de stabilité des équipes. Cette mesure permettra de compléter le vivier d’étudiants qui sera toujours présent.

Ces dispositions témoignent de notre ambition de lutter toujours plus contre la précarité de ces personnels. Chacun sait qu’il est plus facile de contracter un emprunt ou de louer un logement lorsqu’on bénéficie d’un CDI.

La proposition d’accorder une indemnité pour les AESH qui travaillent dans les établissements relevant des programmes REP et REP+ est difficile à appliquer pour le moment mais la majorité continuera à porter une attention particulière à ces personnels, dans le sens de l’orientation déjà prise.

Mme Sylvie Tolmont (SOC). Notre groupe a souhaité inscrire ce texte à l’ordre du jour de sa dernière niche parlementaire de la législature. Je salue le travail et l’engagement de la rapporteure.

Pas moins de 120 806 AESH et 65 252 AED sont concernés par ce texte. Ils ont en commun la précarité de leur statut, qui n’a pas évolué depuis le début de ce quinquennat, mais aussi de leur salaire dont le niveau est si bas qu’ils sont en dessous du seuil de pauvreté, sans parler des temps de travail partiels imposés.

Ces deux métiers ont beau être des maillons essentiels, ils restent invisibles au sein de l’éducation nationale. Ainsi, alors que Jean Castex promettait, il y a quelques jours, de distribuer des masques chirurgicaux à tous les enseignants d’ici à la fin du mois, il oubliait l’existence des AESH et des AED. Or, ces professionnels jouent un rôle déterminant auprès des élèves qu’ils accompagnent et avec lesquels ils nouent une relation de confiance, essentielle pour leur bien-être au sein de l’école.

Ce que prévoit ce texte est très simple : la reconnaissance de ces métiers passe par une réforme des procédures de recrutement et le versement d’une indemnité de sujétions pour les personnels qui exercent dans un établissement relevant des programmes REP ou REP+. À ces deux mesures s’ajoute une modification du calcul du temps de travail afin de mieux valoriser les temps de recherche personnelle et de préparation, nécessaires pour assurer un accompagnement de qualité ainsi que la définition d’un taux d’encadrement minimal des élèves par des AED.

Si la création d’un statut autonome des AESH en 2014, sous le quinquennat de François Hollande, avait permis de réduire en partie leur précarité, il est devenu nécessaire d’autoriser leur recrutement en CDI, en mettant fin à l’obligation préalable d’avoir signé deux CDI de trois ans. Il s’agit d’éviter que des personnels disposant des qualifications requises pour l’exercice des fonctions spécialisées d’accompagnement ne se voient opposer un refus de prolonger leur contrat ou hésitent à s’engager dans cette carrière en raison de la précarité qui s’y attache.

Le salaire moyen des AESH s’élève à 760 euros par mois. Si le Gouvernement se targue d’une augmentation de 600 euros par an, celle-ci ne concerne que les AESH référents, chargés d’accueillir les nouveaux accompagnants dans les PIAL, soit 285 AESH sur les 120 806 en poste.

Nous ne prétendons pas, par cette proposition de loi, répondre aux besoins de revalorisation salariale des AESH et des AED, mais nous souhaitons mettre fin à une inégalité. Il nous paraît difficile de leur refuser le bénéfice de l’indemnité de sujétion versée aux enseignants qui exercent dans les établissements relevant d’un programme REP ou REP+, car ils jouent un rôle tout aussi important auprès des élèves. Le versement de cette indemnité avait été adopté par la commission des affaires culturelles lors de l’examen du dernier projet de loi de finances avant de recevoir l’avis défavorable du Gouvernement en séance.

Quant aux AED, l’évolution du profil de recrutement et le souhait de nombre d’entre eux de s’engager dans une voie professionnelle qui sécuriserait leur parcours témoigne de l’intérêt de la CDIsation. À quelques semaines de la fin de la législature, nous pouvons valoriser ces professionnels qui souffrent d’un manque de reconnaissance alors qu’ils sont des rouages essentiels de l’éducation nationale.

M. Benoit Potterie (Agir ens). Je remercie la rapporteure de nous permettre de débattre de ce sujet important et sensible. Les AED et les AESH sont essentiels au bon fonctionnement des établissements scolaires. Les premiers apportent un soutien indispensable à l’équipe éducative pour encadrer et surveiller les élèves. Les seconds font vivre le service public de l’école inclusive que nous avons bâtie pour que chaque élève, quel que soit son handicap, puisse être scolarisé. Chacun d’entre nous mesure, à travers son expérience et les échanges qu’il entretient avec la communauté éducative de son territoire, à quel point nous pouvons compter sur le dévouement de ces personnels, bien souvent des femmes, pour accueillir nos enfants, chaque jour, à l’école. La reconnaissance de ces métiers n’est pas à la hauteur. Cependant, rappelons les mesures prises par la majorité et le Gouvernement depuis 2017 pour améliorer les conditions d’emploi et consolider la place des AESH et des AED au sein du système éducatif.

Pour ce qui est des AESH, nous n’avons pas à rougir de notre bilan. Pas moins de 27 000 postes supplémentaires ont été financés depuis 2017, dont 4 000 grâce à la dernière loi de finances. Nous avons créé 1 300 classes ULIS (unité localisée pour l’inclusion scolaire) et 250 structures dédiées à l’autisme. Enfin, nous avons revu l’organisation territoriale et généralisé les pôles inclusifs d’accompagnement localisé pour améliorer la coordination des moyens et renforcer la coopération avec le secteur médico-social, sans compter la création de postes d’AESH référents dans chaque département.

Nous avons également œuvré sans relâche pour sécuriser leur parcours professionnel : les contrats aidés ont été transformés en CDD, lesquels ont été requalifiés en CDI après six ans d’exercice suite à l’adoption de la loi pour une école de la confiance en 2019.

Depuis septembre 2021, la grille indiciaire des AESH a été revalorisée, ce qui représente un gain moyen de 650 euros par an et par AESH. Les AESH référents perçoivent, quant à eux, une prime annuelle de 600 euros.

Enfin, depuis le 1er octobre, le premier échelon de la grille indiciaire a été relevé pour qu’aucun AESH ne soit rémunéré en dessous du SMIC.

Concernant les AED, la loi pour une école de la confiance leur permet de bénéficier d’un parcours de professionnalisation pour exercer des fonctions dans l’enseignement ou l’éducation. Depuis le 1er janvier, ils peuvent assurer des heures supplémentaires mieux rémunérées, notamment pour améliorer l’accueil pédagogique des élèves. Toutes ces mesures ont été prises par notre majorité. Bien sûr, ce n’est pas suffisant, mais cette proposition de loi ne permettra pas davantage de répondre aux attentes de ces professionnels. La CDIsation ne changera rien à leur rémunération qui demeure leur première revendication. De surcroît, la proposition d’un CDI automatique dès la première embauche est excessive. Aucun secteur, dans le public comme dans le privé, ne recourt à une telle pratique. Il ressort d’ailleurs des auditions que nous avons menées que les acteurs eux-mêmes ne souhaitent pas que soit adoptée une telle mesure.

La prime accordée aux personnels exerçant dans les établissements relevant d’un programme REP ou REP+ ne concernerait qu’une minorité d’agents et sa nature ne serait pas adaptée à la situation des AESH et des AED.

Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre cette proposition de loi. Cependant, il est nécessaire d’améliorer encore les conditions de travail et la rémunération de ces professionnels. Le texte pose de bonnes questions mais les solutions prévues ne permettront pas d’y répondre. La période qui s’ouvre sera propice aux débats et j’espère que les candidats se saisiront de ce sujet.

Mme Béatrice Descamps (UDI-I). Je remercie Mme la rapporteure de nous permettre de débattre à nouveau de la situation des AESH et des AED. Ces sujets nous préoccupent grandement car il est urgent d’améliorer les conditions de travail de ces professionnels qui accompagnent notre jeunesse et représentent un maillon important de l’inclusion scolaire.

Les auditions que vous avez menées ont permis de poser la question de la notion même d’inclusion, à laquelle nous ne pourrons répondre aujourd’hui. Nous avançons ensemble pour améliorer peu à peu l’inclusion scolaire et les conditions de travail des AESH mais beaucoup reste à faire. Les AESH et les AED méritent notre considération et notre reconnaissance.

Notre groupe approuve nombre de vos propositions, comme l’attribution de primes aux personnels affectés dans les établissements relevant des programmes REP et REP+. Il faut lutter contre la précarité des accompagnants mais nous restons dubitatifs quant à l’application des mesures proposées.

Votre proposition de prévoir un coefficient de pondération de 1,2 affecté à chaque heure d’accompagnement pour le calcul du temps de travail effectif, afin de tenir compte des spécificités en matière de préparation et de recherches personnelles, semble juste mais pourrait défavoriser certains agents.

Le problème majeur demeure celui du temps considéré comme partiel alors qu’il correspond au temps travaillé d’un élève ou d’un enseignant et que de nombreuses heures de préparation ne sont pas prises en considération.

D’autre part, vous n’abordez pas le sujet de la formation des AESH, qui mériterait d’être mieux valorisée, par exemple grâce à une spécialisation, comme je l’avais proposé. Il serait tout autant essentiel de leur donner des perspectives d’avenir.

Une proposition de loi, aussi volontaire soit-elle, ne saurait résoudre les grands dysfonctionnements dans l’accompagnement de nos élèves en situation de handicap. Les PIAL, du fait de leur grande disparité, peuvent être facteurs de difficultés. On ne compte plus les AESH « échangés » entre deux établissements au détriment des élèves qu’ils quittent, ni ceux qui mettent plusieurs heures, chaque jour, pour parcourir la distance entre leur résidence et leur lieu de travail. Le manque d’attractivité du métier peut expliquer le manque de personnels. Tant que nos AESH seront payés en dessous du seuil de pauvreté et qu’une politique volontariste, soutenue par un budget important, ne sera pas menée, il sera difficile de recruter suffisamment de personnels pour que chaque élève en situation de handicap soit correctement accompagné.

Peut-être conviendrait-il, par ailleurs, de revoir les critères d’attribution. Un AESH pour cinq enfants est une aberration. Remarquons cependant que, dans certains départements, des candidats se présentent mais aucun poste n’est ouvert, non pas en raison de l’absence d’élève demandeur, mais du fait d’une mutualisation excessive.

La présence des AED est essentielle pour accompagner les élèves, je ne saurais que trop y insister.

Enfin, nombre des mesures de ce texte relèvent du règlement.

Notre groupe suivra attentivement les débats et votera en fonction de leur évolution.

Mme Sabine Rubin (FI). Je remercie nos collègues d’avoir déposé cette proposition de loi. Les AESH et les AED sont les grands oubliés de l’école de la République.

Pour ce qui est des AESH, le constat est partagé par tous ceux qui s’inquiètent de leur situation dramatique. Leur rémunération frôle l’indigence, leurs conditions de travail sont dégradées, le métier reste précaire, malgré les prétendues avancées du Gouvernement.

Citons quelques chiffres, pour vous en convaincre. Près de 91 000 AESH, surtout des femmes, s’occupent de près de 400 000 élèves en situation de handicap – chiffre qui ne cesse d’augmenter –, pour un salaire moyen de 760 euros net. Comment pourrions-nous nous en satisfaire ? Ce n’est pas la récente augmentation de quelques euros qui répondra aux attentes légitimes de ces travailleurs de l’ombre.

Ces 760 euros rémunèrent un temps de travail de plus en plus partiel car, malgré la hausse du nombre d’ETP, il semblerait que les nouveaux contrats soient de 21 heures contre 29 heures pour les anciens.

Quant aux conditions de travail, elles ont été dégradées suite à la création des PIAL puisque les AESH doivent s’occuper de plus d’élèves en même temps, parfois au sein d’établissements différents.

Bien évidemment, ces conditions de travail et de rémunération indécentes ne facilitent pas le recrutement des AESH. Le directeur académique de mon département avouait ainsi que le nombre de démissions de personnels en poste dépassait celui des recrutements qu’il tentait vainement d’organiser. Il manquait ainsi trente-trois postes dans trois des villes de ma circonscription.

Aussi, la CDIsation directe proposée par ce texte serait un premier pas pour réduire la précarité. Elle éviterait le parcours du combattant qui impose aujourd’hui d’avoir accumulé deux CDD de six ans avant d’obtenir un CDI. Elle pérenniserait également les recrutements si difficiles aujourd’hui à honorer.

D’autre part, la prise en considération du temps de réunion et de préparation par un coefficient de pondération permettrait d’aboutir à un temps plein légal. Enfin, l’indemnité versée à ceux qui exercent dans les établissements relevant des programmes REP et REP+ mettrait fin à la disparité de traitement entre les AESH et les autres agents de l’éducation nationale.

Si l’on veut que l’école inclusive le soit véritablement, il conviendra d’aller plus loin et de créer un véritable service d’accompagnement des élèves en situation de handicap, qui regrouperait un nouveau corps de fonctionnaires. Les AESH, formés et titularisés, pourraient offrir un service à temps plein de vingt‑quatre heures. Cette proposition, dont je suis à l’origine, figure dans le rapport de la commission d’enquête sur l’inclusion des élèves handicapés dans l’école et l’université de la République, présenté par Sébastien Jumel.

J’en viens aux AED. L’article 2 de ce texte prévoit la possibilité de recruter des AED en CDI. Cette CDIsation se justifie par l’évolution de leurs tâches. Il ne s’agit plus seulement de surveiller les élèves mais de participer à leur accueil et de réaliser des missions d’assistance éducative, ce qui suppose une certaine professionnalisation.

Si l’image des AED reste associée à celle du surveillant, leurs missions les rapprochent aujourd’hui de l’éducateur. Leur professionnalisation et leur stabilisation au sein d’une équipe permettra de mieux lutter contre certaines violences, en particulier le harcèlement scolaire. Nous saluons également la proposition de fixer un nombre d’élèves par AED car il est indispensable de renforcer la présence d’adultes formés auprès des élèves.

Notre groupe votera pour cette proposition de loi.

Mme Stéphanie Kerbarh (LT). Je vous remercie à mon tour, madame la rapporteure, de nous donner l’occasion de débattre de ce sujet. Nous ne pouvons pas nous satisfaire des conditions de travail des AED et des AESH, que la crise sanitaire a encore aggravées. L’adoption de la loi pour une école de la confiance a amélioré le statut des AESH en permettant de les recruter par un CDD d’au moins trois ans, renouvelable une fois avant d’être transformé en CDI. Leur salaire a été augmenté, une grille indiciaire spécifique a été prévue et 4 000 AESH ont été recrutés. Néanmoins le salaire actuel moyen de 760 euros est trop faible. Souvent recrutés en temps partiel, les AESH doivent cumuler plusieurs emplois car leur activité au service des enfants en situation de handicap ne leur permet pas de percevoir un revenu décent.

D’autre part, la précarité de ces conditions de travail explique les difficultés à recruter dans certains départements, au détriment des élèves en situation de handicap qui ne peuvent être scolarisés, faute d’un accompagnement adapté.

La revalorisation du statut des AESH et la reconnaissance de cette profession passe par un recrutement en CDI.

La vie scolaire, au-delà du sujet des AESH, est le parent pauvre de l’éducation nationale. Depuis de nombreuses années, les établissements manquent d’assistants d’éducation alors qu’ils jouent un rôle essentiel dans la gestion du quotidien. La crise sanitaire a mis en lumière l’importance de leurs missions, qu’il s’agisse d’appliquer les protocoles ou de participer au fonctionnement des centres éphémères de vaccination installés dans les établissements.

Si des efforts budgétaires ont été consentis pour renforcer leur recrutement, lors des précédentes lois de finances, il est indispensable d’améliorer l’encadrement dans les établissements.

Lors de la rentrée de 2021, les collèges et les lycées ont rarement connu autant de difficultés pour recruter. Le statut des AED doit évoluer. Il ne s’agit plus seulement d’attirer des étudiants désireux de signer un contrat court, d’autant plus qu’il leur est de plus en plus difficile d’obtenir un statut dérogatoire pour travailler. Ils ne représentent d’ailleurs que 20 % des AED. Les AED veulent s’investir et évoluer dans cette carrière, ce que ne leur permet pas le statut actuel ni leur rémunération.

Pour réduire la précarité, le Gouvernement a permis aux AED d’assurer des heures supplémentaires, mais cette mesure ne répond pas au manque de personnel ni à leur volonté d’évoluer.

Enfin, qu’il s’agisse des AESH ou des AED, le versement de la prime à ceux qui exercent dans des établissements relevant des programmes REP ou en REP+ est légitime.

Ce texte nous offre l’occasion d’améliorer le statut et les conditions de recrutement de ces personnels essentiels à la scolarisation des élèves. Notre groupe le soutiendra.

Présidence de Mme Cathy Racon-Bouzon, vice-présidente de la commission.

Mme Elsa Faucillon (GDR). Au cours du premier confinement, nous avons applaudi toutes ces personnes, souvent des femmes, invisibles. Beaucoup ont réclamé que leur profession soit revalorisée mais nous attendons encore des mesures à la hauteur de l’enjeu. Je remercie donc Mme la rapporteure de nous permettre de débattre des moyens de lutter contre la précarisation grandissante de ces professions au sein de la fonction publique. Il est fait appel, de plus en plus, à des contractuels. Entre 2007 et 2017, déjà, nous sommes passés de 15,2 % à 18,4 % de contractuels, selon le rapport de la direction générale de l’administration et de la fonction publique. Je le dis pour montrer que le gouvernement actuel n’est pas le seul responsable de cette dérive même s’il a préféré aggraver la situation plutôt que d’y mettre fin. Jean-Michel Blanquer ne semble pas avoir l’intention de renforcer les moyens du service public de l’éducation ! Il a beau essayer de nous convaincre du caractère inédit de son budget, le nombre de postes a baissé et l’augmentation de celui des AESH ne suffit pas à répondre au nombre, toujours croissant, d’enfants qui en ont besoin.

Il est urgent de prendre des mesures car les contractuels se multiplient et leur statut se dégrade. À la différence des fonctionnaires, les contractuels ne peuvent pas gravir les échelons qui déterminent leur rémunération ni évoluer dans une carrière au sein de la fonction publique. Ils sont pieds et poings liés avec l’administration des établissements. L’adoption de l’article 1er de ce texte permettrait de valoriser ces métiers et de faciliter les recrutements. Leur manque d’attractivité n’est pas une fatalité. Lorsque j’étais conseillère départementale dans les Hauts-de-Seine, on m’expliquait qu’il manquait de médecins dans les centres de protection maternelle et infantile (PMI) parce que ces postes n’étaient pas attractifs. Au bout de dix ans, quand on n’a plus trouvé un seul médecin, des mesures salariales ont fini par être prises. De même, tant qu’on ne valorisera pas, par des mesures symboliques et concrètes, les métiers d’AESH, on continuera d’en manquer et les enfants en souffriront.

Mme Danièle Cazarian. Cette proposition de loi remet au cœur de nos débats la situation des AESH qui jouent un rôle essentiel pour accompagner les élèves en situation de handicap. Ce texte prévoit de sécuriser les parcours professionnels des AESH et d’améliorer leur rémunération afin de rendre leur métier plus attractif.

Les AESH, vous l’avez dit, accompagnent surtout des enfants atteints de troubles « dys », soit un enfant sur dix. Leur présence au sein des établissements scolaires est indispensable. La formation des AESH dure, à présent, au moins soixante heures, ce qui représente une réelle avancée. Cependant, un recrutement en CDI ne suppose-t-il pas de prévoir une formation initiale et continue plus importante ?

M. Grégory Labille. Votre proposition a le mérite de mettre en avant la cruelle réalité des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation. En tant qu’ancien directeur d’école et enseignant, durant plus de trente ans, en zone d’éducation prioritaire, je me réjouis de votre proposition de recruter les AESH en CDI mais aussi de prendre en considération les temps de préparation et de recherches personnelles dans le calcul du temps de travail ou de verser une indemnité de sujétion à ceux qui exercent dans les établissements relevant des programmes REP et REP+.

Cependant, de nombreux AESH craignent que la portée de ce texte reste limitée. Aujourd’hui, le champ de leurs missions demeure imprécis. Ils peuvent être contraints de s’occuper simultanément de plusieurs élèves dont les handicaps seraient différents au sein d’une même classe, voire dans des établissements différents, ce qui pose le problème du déplacement en milieu rural. Leur salaire reste trop faible. Quant au statut, il devra être revu.

Votre proposition de loi répondra-t-elle à ces préoccupations ? Quel serait le gain salarial pour les AESH ?

Mme Delphine Bagarry. Au bout de trois ans d’application, les PIAL ont‑ils répondu aux attentes ?

Mme Michèle Victory, rapporteure. Je remercie mes collègues pour l’intérêt qu’ils portent à cette proposition de loi. Beaucoup resterait à faire mais nous avons dû faire des choix, du fait des contraintes que nous impose l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de notre niche parlementaire.

Je connais l’engagement de Mme Dubois dans ce domaine. Personne ne nie les mesures prises précédemment mais nous sommes encore loin du compte. L’impossibilité de recourir à des contrats aidés n’est pas nouvelle puisqu’elle date de 2014. Si l’effectif avoisine les 119 000 postes, il ne représente que 72 258 ETP.

Les AED ne sont pas majoritairement des étudiants. Au contraire, ces derniers ne représentent que 30 % des effectifs. Le dispositif de la validation des acquis de l’expérience ne donne pas de bons résultats dans ce secteur. Quant à ceux qui tentent les concours de l’éducation nationale, leur taux de réussite n’est que de 15,8 %, ce qui témoigne du décalage entre l’image que l’on s’est forgée de ces AED qui pourraient devenir professeurs ou conseillers principaux d’éducation et la réalité puisque beaucoup voudraient faire de cet emploi, un métier. Les conseillers principaux d’éducation que nous avons auditionnés reconnaissent avoir besoin de personnes qui travaillent avec eux mais le métier d’AED ne débouche pas forcément sur celui de CPE.

Mme Anthoine a raison, les chiffres nous obligent, qu’il s’agisse des élèves concernés, d’accompagnants, du salaire, des semaines travaillées etc. Ces chiffres révèlent que nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux. Qui peut croire que l’on puisse vivre décemment avec 760 euros par mois ? Le temps choisi est un mythe. Beaucoup, au contraire, subissent ce temps, notamment parce que leur niveau de formation n’est pas suffisant. Surtout, l’augmentation du nombre de demandes témoigne de la souffrance qui perdure au sein des établissements spécialisés. Les parents n’ont plus d’autre choix que de s’adresser aux maisons départementales des personnes handicapées pour obtenir une prise en charge individuelle ou mutualisée. Or, ce n’est pas toujours la meilleure solution. Nous devrons nous poser la question de l’inclusivité à l’école et de la spécificité.

D’autre part, les AED sont rarement remplacés, notamment lorsqu’ils partent en congé maternité. La possibilité qui leur est offerte d’assurer des heures supplémentaires est un leurre car ils sont déjà submergés de travail. On les charge de missions diverses mais personne ne réclame d’heures supplémentaires. Seuls 25 %, et non 45 % des AED, travaillent à temps complet.

Mme Bannier a rappelé les avancées réalisées. Nous ne les nions pas mais beaucoup reste à faire pour améliorer les conditions de travail et de rémunération de ces professionnels. Les référents qui ont été nommés ont reçu des missions complémentaires. Dans ma circonscription, un référent gère 170 dossiers, dont plusieurs lui parviennent en cours d’année, ce qui complexifie d’autant l’organisation des emplois du temps. Quant aux reproches formulés à l’encontre du caractère automatique du CDI, rappelons que tout CDI prévoit une période d’essai. Le CDI protège, il n’attache pas. Or, nous devrions avoir à cœur de protéger ces professionnels qui exercent un métier difficile au service de nos enfants.

Je remercie Mme Tolmont pour ses propos et le groupe Socialistes et apparentés pour la confiance qu’il m’a accordée.

L’intervention de M. Potterie me surprend. Le Gouvernement a en effet dit que 4 000 postes d’AESH seraient ouverts en 2022. Encore faut-il parvenir à recruter 4 000 personnes. Surtout, le Président de la République avait parlé de 11 500 postes pour 2023. L’objectif ne sera pas atteint, ce qui est dommage.

La prime aux AED en REP et REP+ semblait devoir faire consensus. Je ne vois aucun argument pouvant justifier que des personnes qui accompagnent des élèves n’y soient pas éligibles, et celui qu’avait utilisé la rapporteure spéciale ne correspondait pas du tout à la situation. Chacun a le droit de penser différemment, mais cette position est incompréhensible. Tous les personnels qui travaillent ensemble dans des établissements scolaires doivent bénéficier de la même prime, dès lors qu’ils sont en REP ou REP+. La décision, soutenue par Mme Rilhac et par le président, avait été votée par la commission. Vous en connaissez la suite. Je suis assez fâchée de cette position, même si je la comprends.

Madame Descamps, je vous remercie de votre implication et de vos propos. Il est vrai qu’il faudrait toujours élargir. Vous avez d’ailleurs déposé des amendements sur la formation. Je souhaiterais que l’on puisse les examiner mais ils risquent en effet de tomber, ce qui est regrettable.

Le coefficient de pondération de 1,2 que nous avons envisagé, très proche du coefficient actuel de 1,14, serait insuffisant, puisqu’il conduirait à un gain moyen de 45 euros. La proposition n’est pas satisfaisante – les syndicats évoquent un coefficient d’au moins 1,6. C’est pourquoi nous proposions, dans un autre amendement qui tombera certainement, d’inscrire dans le texte uniquement le principe de la pondération et de laisser le Gouvernement travailler avec les syndicats, les partenaires sociaux et les intéressés, pour fixer un coefficient par décret. Il est dommage que la stratégie de la majorité nous prive de ce débat sur les amendements de Mme Anthoine ou de Mme Descamps. Si nous sommes tous d’accord pour reconnaître l’importance du sujet, il ne faut pas se cacher, et en discuter.

Mme Rubin a souligné qu’il fallait aller beaucoup plus loin et évoqué un corps de fonctionnaires. Lors des auditions, certains syndicats ont en effet préféré à la CDIsation un corps de fonctionnaires, qui ressemblerait à un corps d’enseignants et dont le temps de travail inclurait toutes les missions d’un enseignant durant l’année. Même si je vous rejoins sur ce point, nous n’en sommes malheureusement pas encore là.

La mission des AED a été alourdie, puisqu’ils doivent participer à la lutte contre le harcèlement scolaire. On ne peut pas leur demander en permanence d’effectuer des tâches nouvelles en heures supplémentaires.

Madame Kerbarh, il existe bien une possibilité d’augmenter les salaires, en cumulant les emplois, ce qui pose problème.

La proposition de loi ne peut aborder l’articulation entre les politiques des collectivités territoriales et celle de l’éducation nationale. Il faudra pourtant avancer sur ce sujet très intéressant car on est loin du compte.

Mme Faucillon a rappelé combien l’on avait applaudi les invisibles. Je partage son sentiment : il est indécent d’avoir autant applaudi et de traiter de la sorte les infirmières, les soignants et tous les gens qui exercent ces métiers si difficiles. Lorsque l’on connaît le handicap, on peut se demander qui d’entre nous accepterait de telles missions, avec si peu de reconnaissance.

Je partage aussi ses propos sur l’attractivité, un joli mot, mais qui mérite d’être concrétisé, avec le soin que chacun accorde à ces personnels.

Madame Cazarian, il faut bien sûr avancer sur les niveaux de recrutement et de formation, ainsi que sur la VAE. Chaque handicap est différent, et il y a beaucoup à travailler.

Monsieur Labille, concernant la portée réelle du champ, il y a ce qui sera voté, notamment les principes, et ce qui se décide par voie réglementaire. Beaucoup de choses, une fois inscrites dans la loi, doivent être discutées, pour voir jusqu’où l’on peut aller.

Il est encore un peu tôt pour dresser le bilan des PIAL, comme Mme Bagarry le souhaite. Plusieurs personnes ont regretté que le dispositif ait été déployé à marche forcée, surtout en période de crise. Dans la mesure où d’énormes inégalités existent sur le terrain, les PIAL devront être longuement étudiés. Plus ils sont grands, moins ils fonctionnent. C’est pourquoi une taille humaine doit être recherchée, ce qui signifie plus de pôles, donc davantage de personnels. On revient toujours à la même question.

Comme Mme Gaillot le soulignera dans un amendement, il nous faut davantage d’éléments, sur plusieurs questions. Des rapports pourraient être intéressants, pour les travailler.

II.   Examen des articles

Article 1er : Statut des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH)

Amendements identiques AC13 de Mme Géraldine Bannier et AC18 de Mme Jacqueline Dubois et sous-amendements identiques AC29 de Mme Michèle Victory et AC26 de Mme Béatrice Descamps. 

Mme Géraldine Bannier. L’amendement AC13 vise à définir par décret les conditions dans lesquelles le CDD d’un accompagnant d’élèves en situation de handicap peut être requalifié en CDI, dès trois ans d’exercice. Mon expérience auprès d’auxiliaires de vie scolaire (AVS) me conduit à n’être pas favorable à une CDIsation directe : il n’était pas rare que ces personnes, découvrant la réalité du métier d’accompagnant, décident quelques mois plus tard qu’elles n’étaient pas faites pour ce métier. Il faut en effet un certain temps pour cerner les compétences et les capacités requises.

En revanche, on ne peut pas rester sur un statut précaire. On peut garder une personne qui a été AESH pendant trois ans auprès d’élèves différents, et lui proposer un CDI. Cela lui donnera la capacité de mieux emprunter et d’accéder à un logement.

Dans un territoire comme le mien, où le chômage s’élève à 5 %, il est très difficile de trouver des AESH : très vite, ils abandonnent leurs tâches car ils trouvent un emploi mieux rémunéré et plus stable dans le privé. Il importe donc de leur offrir une stabilité par ce dispositif.

Mme Jacqueline Dubois. Contractuels de droit public depuis 2014, les accompagnants des élèves en situation de handicap bénéficient depuis 2019 de contrats d’une durée de trois ans, renouvelables une fois. Après six ans de services dans ces fonctions, tout renouvellement doit être conclu pour une durée indéterminée.

Dans l’objectif d’améliorer constamment les conditions de recrutement et d’emploi des AESH, l’amendement AC18 prévoit la possibilité que les AESH, dans des conditions fixées par décret, bénéficient d’un contrat à durée indéterminée, dès le terme de leur premier CDD de trois ans. Ils ont en effet démontré à ce moment leur intérêt pour la profession.

En complément des nombreuses mesures citées précédemment, l’amendement AC18 vise à proposer un premier contrat de trois ans et rend possible une CDIsation. C’est une avancée, qui s’inscrit à la fois dans la continuité des mesures adoptées durant la législature pour la professionnalisation de ces personnels et dans la perspective de la loi de transformation de la fonction publique de 2019.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Le sous-amendement AC29 vise à conserver les deux alinéas relatifs au versement d’une indemnité de sujétions aux AESH qui exercent dans le cadre des dispositifs REP et REP+. En effet, les amendements identiques n’ont pas seulement pour objet de réécrire les dispositions relatives aux modalités de recrutement des AESH : leur adoption priverait ces personnels de la prime à laquelle les autres agents de l’éducation nationale ont droit.

Mme Béatrice Descamps. Le sous-amendement identique AC26 vise à éviter la suppression des alinéas de l’article 1er concernant la prime en REP et REP+, qui pourrait être accordée aux AESH. Par mon expérience et mes observations, je peux vous assurer que le travail effectué dans les REP et les REP+ par les AESH est différent, et souvent beaucoup plus difficile, que dans d’autres établissements. Les AESH et les professeurs devraient donc être traités avec égalité.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Les arguments que je présente seront identiques pour les amendements relatifs aux AED.

Les amendements AC13 et AC18 réécrivent le texte, et le dénaturent, pour aboutir à une proposition très en deçà de notre dispositif. Certes, la forme est plus subtile que de simples amendements de suppression. Elle ne nous convient toutefois pas car elle supprime subrepticement la possibilité d’une indemnité de sujétions, mentionnée aux alinéas 6 et 7, que nous voulons réintégrer.

Une posture vous pousse à ne pas vous exprimer ouvertement contre l’article parce que ce sujet sensible intéresse nombre de Français. Par ailleurs, certains députés de la majorité ont à cœur de le faire avancer. Mais en supprimant les alinéas 4 à 7, vous refusez la possibilité d’examiner l’attribution de la prime de sujétions, alors que notre président lui-même en avait souligné la pertinence.

Le procédé est de bonne guerre mais il reste mystérieux voire agaçant pour moi, qui crois encore que nous pouvons nous retrouver sur des propositions d’amélioration des conditions de vie de nos concitoyens. Très souvent, chers collègues, vous utilisez le terme « pragmatique » alors que vos positions semblent partisanes et dogmatiques.

Je ne peux donc donner qu’un avis très défavorable à vos deux amendements qui, s’ils sont votés, constitueraient une toute petite avancée, mais je comprends mal les raisons de votre opposition. De plus, votre rédaction n’offre aucune certitude puisque la faculté qu’elle donne à l’administration de recruter un AESH par CDI après trois années d’exercice est discrétionnaire. On peut par ailleurs s’interroger sur la nécessité de renvoyer à un décret, plutôt que d’inscrire directement dans la loi les modalités de recrutement et d’emploi de ces personnels, comme c’est le cas aujourd’hui.

Avec plus de 80 % des AESH en CDD, un contrat précaire qui n’est pas sécurisant, je ne comprends pas que l’on empêche les quelque 100 000 AESH des premier et deuxième échelons, soit leur quasi-totalité – seuls moins de 10 ont atteint le dernier échelon ! – de bénéficier d’une amélioration de leurs conditions.

Mme Sabine Rubin. On a en effet l’habitude que la majorité dépose des amendements qui déshabillent d’un coup une proposition de loi. Cela n’est pas nouveau. Mais, là, les arguments sont assez faibles.

Vous dites qu’un CDD de trois ans serait un progrès important dans la lutte contre la précarisation. Vous le voyez, avancer la CDIsation, c’est lutter contre la précarisation. La proposition de loi avait bien pour objectif de faire un premier pas, ce que vous reconnaissez vous-même.

Ensuite, tout CDD ou CDI comporte une période d’essai. Rien n’empêche d’en fixer une de six mois.

Enfin, un grand nombre d’AESH démissionnent en évoquant l’absence de stabilité et de perspective de leur emploi. Pourquoi ne pas commencer par mettre en CDI ces personnes, dont on sait qu’elles aiment déjà ce métier ? Un amendement visant les personnes qui ont déjà une expérience d’AESH pourrait être déposé en ce sens. Cela serait plus conforme pour avancer, enfin. Car la manière dont vous déshabillez la proposition de loi empêche non seulement le débat mais, surtout, de résoudre une situation d’urgence.

Mme Albane Gaillot. Je remercie Michèle Victory de sa proposition de loi visant à lutter contre la précarité de professionnels, qui œuvrent au jour le jour auprès des élèves en situation de handicap et qui réclament des mesures contre leur précarisation.

Les AESH et tous les parents qui nous écoutent ont pu être heurtés par les propos de Mme Bannier, que je ne partage pas. La CDIsation est au cœur de notre modèle social, comme une protection des personnes qui travaillent. Un CDD qui concerne tout le monde, c’est peut-être votre modèle social, mais alors, appliquons‑le à tous – professeurs, banquiers, conseillers d’assurance…

Notre modèle social est plutôt celui de la lutte contre la précarité et la protection de toutes et tous. La proposition de loi va précisément dans le sens d’une lutte contre la précarisation. Les enfants en situation de handicap ont besoin de personnels associés. Les périodes d’essai existent dans tous les secteurs professionnels ; il n’y a pas de raison de distinguer les AESH, au motif qu’elles ne sont pas vraiment compétentes ou sûres.

La CDIsation est une mesure importante, que je soutiens. C’est pourquoi je voterai contre les amendements.

Mme Sylvie Tolmont. Je m’associe aux différents propos contre les amendements. Vous l’avez remarqué, je suis parfois moins douce que ma collègue Michèle Victory. Nous n’en partageons pas moins les mêmes convictions et les mêmes engagements.

Sur un tel texte, la majorité adopte un positionnement très politicien : comme d’habitude, tout ce qui est proposé, y compris ce qui rejoint les travaux et les convictions de certains députés de la majorité, est systématiquement balayé. Et avec quels arguments ? Madame Bannier, tout de même ! Je croyais que cette majorité voulait lutter contre les contrats courts. Là, il est question d’une période d’essai de trois ans : ces personnes doivent faire leurs preuves pendant trois ans, avant d’être enfin, peut-être, CDIsées ! On parle pourtant là de gens essentiels pour des enfants en situation de handicap. Écoutez les parents ! Être payé 760 euros par mois, et s’entendre dire que l’on a trois ans de période d’essai, que l’on doit faire ses preuves. C’est insupportable ! D’autres arguments, madame Bannier, mais pas ceux-là, s’il vous plaît !

Mme Géraldine Bannier. On comprend, par le ton utilisé, les accents politiciens qui s’expriment ce matin, et c’est bien dommage.

Je parle seulement d’expérience : j’ai travaillé de nombreuses années auprès d’auxiliaires de vie scolaire. En 2017, on partait de très loin, avec des contrats aidés, sans aucune formation ni expérience préalable. Aujourd’hui, les AESH concluent un CDD, transformable en CDI au bout de six ans. Nous proposons d’aller dans le sens de ce que fait la majorité depuis le début du quinquennat et d’améliorer la situation des AESH avec une CDIsation au bout de trois ans.

J’ai vu des AVS qui, au bout d’un an, considéraient qu’elles n’étaient pas faites pour ce métier. Il faut parfois un peu de temps. En outre, de nombreuses auxiliaires de vie scolaire travaillaient auprès d’un élève, avec un seul type de handicap. Or il est utile d’expérimenter différents contacts et plusieurs formes de handicap.

La CDIsation au bout de trois ans est donc un net progrès, qui va dans le bon sens. Nous ne disons pas que cela est suffisant – il faudra poursuivre le travail en faveur des AESH –, mais c’est déjà un pas important.

Mme Frédérique Meunier. Il faut arrêter avec cette valse à trois temps – un pas en avant, un pas en arrière, un pas sur le côté. Votre enquête l’a montré, il y a une urgence. Si l’on dit aux AESH qu’ils doivent faire leurs preuves, il faut le dire à toutes les autres professions. Nous avons suffisamment de recul pour constater qu’il y a une vraie difficulté et que ce CDI est une demande générale, que nous avons nous-même formulée.

La formation est aussi une garantie et elle devra apparaître dans les textes à un moment donné, mais le groupe LR est favorable à un CDI conclu directement, non dans trois ans, avec une réflexion imaginaire.

Mme Elsa Faucillon. J’espère, peut-être naïvement, que les personnes qui défendent ces amendements ne croient pas réellement à leurs arguments.

Lorsqu’une personne est recrutée dans un emploi, on regarde à la fois les besoins et ses expériences passées, ses aptitudes. Si la personne est embauchée mais qu’elle ne se sent pas bien dans le poste, elle peut bénéficier d’une formation, d’entretiens avec les responsables pour adapter son poste, ou partir – cela est possible en CDI.

Dans notre modèle social, le CDI est une protection, non un attachement. Cette protection est d’autant plus essentielle dans le cas des AESH car ils sont vulnérables, pour plusieurs raisons. D’abord, parce que ce sont des métiers féminisés, ceux qui sont les plus mal payés et présentent le plus de temps partiel subi. On parle de 97 % de femmes parmi les AESH. La vulnérabilité vient aussi des bas salaires, du type de métier – des métiers du lien et du soin. Toutes ces raisons font qu’il y a besoin de plus de protection, donc de CDI.

De plus, c’est parce que l’on installe des personnes dans des contrats durables, pérennes, que la formation pourra se développer.

Je veux bien que l’on se reproche d’être dans des postures, mais nous travaillons sur ces questions depuis cinq ans. Arrêtons les procès en électoralisme ! On a le droit d’avoir des convictions et de les défendre. Je veux bien que le groupe communiste adopte une posture quand il parle de CDI mais alors, cela fait cent ans que la posture dure !

Mme Michèle Victory, rapporteure. J’ai un grand respect pour Mme Bannier, que j’ai retrouvée sur différents textes.

La véhémence, qui est une façon d’avoir des convictions et de les défendre, n’est pas critiquable. Nous avons tous un style différent, et ma collègue s’exprime à sa manière.

Faire un procès en électoralisme n’est pas une bonne méthode parce que si l’on voulait vraiment entrer dans ce débat, il serait difficile de déterminer qui, de celui qui dépose l’amendement ou de celui qui ne le dépose pas, est politicien. Il vaudrait mieux accepter de reconnaître que nous avons des avis différents, parfois divergents, et des expressions différentes sur ces questions. Si elles sont défendues avec autant de force, c’est que les sujets passionnent.

La commission rejette les sous-amendements.

Elle adopte les amendements.

En conséquence, les amendements AC5 de Mme Emmanuelle Anthoine, AC22 et AC23 de Mme Michèle Victory, AC10 de M. Matthieu Orphelin, AC16 de Mme Béatrice Descamps et AC25 de Mme Michèle Victory tombent.

Amendement AC3 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Cet amendement vise à favoriser la professionnalisation et les perspectives d’avenir des accompagnants d’élèves en situation de handicap en leur permettant d’accéder aux masters des métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation par la voie de la validation des acquis de l’expérience.

Mme Michèle Victory, rapporteure. L’amendement est intéressant dans la mesure où le texte n’aborde pas la question de la formation des AESH.

Les représentants d’une association de parents remarquaient que le recrutement d’AVS – puis d’AESH – a été organisé dans des périodes de retour à l’emploi des personnes en difficulté d’emploi, par exemple dans les années 1970 ou 1980. Les choses ont beaucoup évolué : nous ne sommes plus dans ce cas de figure. À présent, pour atteindre les objectifs que l’on s’est fixés et avoir un accompagnement de qualité, on doit aller vers une formation supplémentaire. La question de la formation a donc toute son importance. Cela n’est pourtant pas simple, et il faudra voir comment on peut aller plus loin.

Je suis favorable à l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Statut des assistants d’éducation (AED)

Amendements identiques AC14 de Mme Géraldine Bannier et AC19 de Mme Jacqueline Dubois et sous-amendements AC28 de Mme Michèle Victory et AC27 Mme Béatrice Descamps (discussion commune).

Mme Géraldine Bannier. L’amendement AC14 ouvre la possibilité de requalifier le CDD d’un assistant d’éducation en CDI après six ans d’exercice. Dans ce cas, on part de rien, puisque les assistants d’éducation ne pouvaient pas être CDIsés.

La professionnalisation proposée est un gain majeur, qui permettra de disposer de personnes d’expérience, stables, au sein des équipes de vie scolaire, à côté des étudiants, qui seront toujours un vivier important d’AED. Certaines personnes ont envie de s’investir dans le milieu scolaire, mais elles n’ont pas nécessairement les capacités pour réussir les concours de l’enseignement. Il est important d’aller vers une professionnalisation des assistants d’éducation qui se plaisent dans ce métier.

Mme Jacqueline Dubois. Le dispositif d’assistant d’éducation, qui vise à faciliter la poursuite d’études supérieures, est d’abord destiné à des étudiants boursiers. Les personnes affectées à des fonctions d’appui aux personnels enseignants, pour le soutien et l’accompagnement pédagogiques, sont prioritairement recrutées parmi les étudiants se destinant aux carrières de l’enseignement. De tels postes sont supposés ne pas être définitifs et ne constituer qu’un moment dans la carrière de ceux qui les occupent.

Dans certaines situations liées à l’éloignement géographique de l’établissement scolaire par rapport aux établissements d’études supérieures, il peut pourtant être pertinent de permettre aux AED ayant exercé pendant six ans, de poursuivre leurs missions dans le cadre d’un CDI. Nous ouvrons donc là un nouveau droit.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Comme précédemment, le sous-amendement AC28 vise à conserver des alinéas supprimés par les amendements, portant d’une part sur le versement d’une indemnité de sujétions aux AED exerçant en REP et REP+, et, d’autre part, sur la définition d’un taux d’encadrement minimal des élèves par les AED. Les amendements de Mmes Bannier et Dubois non seulement réécrivent les modalités de recrutement des AED mais privent les personnels d’une prime à laquelle ils ont droit. Les AED sont en effet exposés à toutes les difficultés du climat scolaire, qu’ils ont pour tâche d’améliorer.

Certes, 30 % des AED sont des étudiants, mais seulement une partie d’entre eux se destinent à des carrières dans l’enseignement et sont pré-professionnalisés. Les chiffres qu’a donnés le ministre et que vous présentez dans les amendements ne répondent pas à la question et ne sont pas exacts.

Enfin, nous offrons la possibilité de recruter ceux qui veulent se lancer dans le métier en CDI dès le départ, tout en laissant la possibilité de procéder autrement. Il n’y a donc pas qu’une seule piste.

Quant au taux d’encadrement, il faut en fixer le principe dans la loi et réserver ses modalités à un décret, après travail et réflexion.

Mme Béatrice Descamps. Les AED méritent de toucher l’indemnité de sujétions, comme les autres personnels de l’éducation nationale, lorsqu’ils travaillent en réseau d’éducation prioritaire.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Je suis favorable au sous‑amendement AC27.

Mme Cécile Rilhac. Si les amendements de Mme Bannier et de Mme Dubois étaient adoptés, il serait utile de préciser des degrés pour éclaircir les missions des AED, qui sont très diverses. Cela est d’abord dû à la nature des établissements où ils exercent, ainsi qu’aux tâches qui leur sont confiées – soutien pédagogique, orientation. Dans les établissements dotés de classes relais, certains AED peuvent se spécialiser afin d’aider les équipes pédagogiques à lutter contre le décrochage scolaire voire devenir intervenant.

D’ici à la séance, il serait intéressant de recenser les missions des AED, pour en spécifier certaines, et distinguer les AED recrutés comme étudiants des AED spécialisés, en lien avec un projet d’établissement.

Tous les AED ne peuvent pas être CDIsés, d’une part parce qu’ils ne le souhaitent pas ; d’autre part, parce que les chefs d’établissement décident de leur spécialisation. La notion de possibilité paraît fondamentale.

Enfin, je suis favorable aux primes pour les AED en REP et REP+.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Nous ne contestons pas qu’il existe des réalités différentes et des spécificités. La définition des missions est toutefois laissée à la partie réglementaire. Nous aurions donc du mal à satisfaire votre demande.

Notre texte vise justement à laisser le choix, puisque la CDIsation des AED n’y est pas obligatoire. Vous défendez donc la même chose que nous.

Mme Elsa Faucillon. Je soutiens les sous-amendements qui permettent a minima de conserver l’indemnité de sujétions. À l’article 1er, nous ne nous sommes pas entendus sur une CDIsation immédiate et la prime a sauté pour les AESH.

Le choix de Mme Bannier, ou plutôt, de la majorité, est de renvoyer la CDIsation à plus tard. Assumez-vous en plus de refuser la prime REP et REP+ à ces personnels, qui travaillent dans des conditions identiques ou quasi identiques à celles des professeurs, pour les AESH, ou des CPE, pour les AED ? Le cas échéant, comment l’expliquez-vous ?

Mme Michèle Victory, rapporteure. J’ai relu nos débats budgétaires sur cette question, car la prime avait d’abord été proposée par la commission, puis refusée. La rapporteure spéciale avait indiqué : « De mon point de vue, la prime REP et REP+ a du sens pour les enseignants, qui ont un rôle d’encadrement et de surveillance pour de nombreux élèves, mais pas pour les AESH ».

En relisant cette explication, censée être une argumentation, je me suis demandé dans quel monde nous vivions. D’une part, considérer que les enseignants font de la surveillance est dépassé. D’autre part, on ne peut justifier une mesure tellement injuste avec si peu d’arguments. J’ai relu les interventions du ministre, qui propose des heures supplémentaires aux AED. Là n’est pas la question. Comment peut-on accepter qu’une prime ne soit valable que pour certaines catégories de personnels, alors que, dans les établissements scolaires, notamment durant la crise sanitaire, les AED ont été en toute première ligne, eux aussi. Avec l’ensemble de la communauté scolaire, ils sont garants d’un climat scolaire de qualité.

La position me semble incompréhensible.

Mme Emmanuelle Anthoine. Ces précisions montrent l’incohérence de la position. Aussi, le groupe Les Républicains soutiendra les sous-amendements.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Elle adopte les amendements.

En conséquence, les amendements identiques AC20 de Mme Michèle Victory et AC1 de Mme Béatrice Descamps ainsi que l’amendement AC21 de Mme Michèle Victory tombent.

La commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 : Gage

La commission adopte l’article 3 non modifié.

Après l’article 3

Amendements AC6 et AC7 de Mme Albane Gaillot.

Mme Albane Gaillot. Mme la rapporteure disait que, pour connaître un phénomène, il faut avoir des chiffres, des éléments. La demande de rapport vient répondre à mes interrogations ainsi qu’à celles des personnes auditionnées – parents d’élèves, directeurs d’établissement, entre autres. Tous ont dit qu’ils ne disposaient pas de tous les éléments.

On sait que l’inclusion pleine et entière des enfants en situation de handicap suppose un accompagnement sur le temps non seulement scolaire, mais périscolaire, notamment la cantine. En vue de favoriser un continuum d’inclusion des élèves en situation de handicap, l’amendement AC6 présente une demande de rapport, pour étudier l’inclusion du temps périscolaire dans la quotité horaire des AESH. L’amendement AC7 traite de la prise en charge des indemnités de transport des AESH. En effet, les AESH doivent payer leur transport, ce qui, avec un salaire de 750 euros par mois, pose problème, notamment en milieu rural.

Mme Jacqueline Dubois. Le secrétariat d’État chargé des personnes handicapées et le ministère délégué chargé des comptes publics copilotent une mission sur le temps périscolaire. S’agissant des transports, le guide RH, que j’ai évoqué, précise que le temps de transport entre deux établissements scolaires fait partie du temps de travail de l’AESH et qu’il peut faire une demande de prise en charge, en particulier lorsqu’aucun transport en commun n’est disponible.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Je suggère à Mme Gaillot de retirer un des deux amendements pour ne formuler en séance qu’une seule demande de rapport, comportant l’ensemble des éléments. Il s’agit de déterminer si le continuum que vous avez évoqué fonctionne.

S’agissant des temps de transport, il est vrai qu’ils sont pris en charge, dans certaines conditions. Il faut toutefois en faire la demande et attendre leur remboursement, parfois tardif. Pour les sorties scolaires et culturelles, les coûts de transport ne sont pas remboursés. Certaines zones d’ombre subsistent donc, qu’il faut éclaircir.

Le sujet est d’importance. Sur ces questions très vastes, on a à la fois une demande d’accessibilité individuelle de l’élève, qui n’est pas réalisée pleinement, et de compensation du handicap. Les deux piliers sont différents, et l’on s’aperçoit que l’on n’a pas assez travaillé sur chacun d’entre eux. On a besoin de davantage d’informations.

La demande de rapport est donc intéressante, même si elle doit être reformulée. On ne pourra pas continuer à faire des propositions qui vont dans le sens de ce que demandent la profession, les parents et les enfants, si l’on n’étudie pas tous ces sujets plus finement. Je ne remets pas en cause les nombreux rapports qui ont été rédigés et les propos des nombreux députés qui se sont penchés sur la question. Les chiffres ont explosé, les choses évoluent tellement vite que nous devrons nous pencher bien plus en profondeur sur ces sujets.

Mme Albane Gaillot. Je souscris à la demande de retravailler les amendements, et les retire.

Certes, des travaux et des missions sont en cours. La proposition de loi entend répondre à des problèmes concrets, de terrain. Les rapports visent à mobiliser et apporter des éléments chiffrés. On formule des demandes de rapport lorsque l’on ne dispose pas encore de ces éléments et qu’il y a urgence à les demander.

De même, on crée des missions sur l’éducation à la sexualité, mais rien n’avance. La demande de rapport permet du moins d’avancer un peu. Je la présenterai donc à nouveau en séance publique, en espérant que l’amendement sera adopté, car ce ne sont que des rapports.

Les amendements AC6 et AC7 sont retirés.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

Mme Michèle Victory, rapporteure. Je suis déçue du fonctionnement de notre assemblée. J’aurais souhaité que nous puissions aller plus loin. Ma naïveté n’ira pas jusqu’à me faire espérer que les choses évoluent d’ici à la séance. Chacun devrait se poser en son âme et conscience la question de sa motivation et de son vote, de ce qu’il fait avancer dans la vie des gens pour lesquels il s’est engagé et qu’il représente. Il serait sage que les positions évoluent et ne soient pas que des postures qui me désolent profondément.

*

*     *

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 Texte adopté par la commission :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4899_texte-adopte-commission#

 Texte comparatif :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-cedu/l15b4899-compa_texte-comparatif.pdf

 

 

 


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   ANNEXES

   Annexe n° 1 :
liste des personnes entendues par la rapporteure

(Par ordre chronologique)

                 Table-ronde des syndicats des personnels l’éducation nationale

– Syndicat des enseignants de l’UNSA (SE-UNSA) – Mme Laurence Hopp et Mme Émilie Thévenet-Kayser, déléguées nationales

 Syndicat national des enseignements du second degré - Fédération syndicale unitaire (SNES-FSU)  M. Emmanuel Sechet, secrétaire général adjoint

– Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC (SNUipp-FSU) – Mme Claire Billes, secrétaire nationale, et Mme Joëlle Noller, secrétaire départementale pour la Moselle

 Fédération Sud Éducation  Mme Sylvie Pichou, AESH

 Fédération nationale de l’enseignement, de la culture et de la formation professionnelle  Force ouvrière (FNEC FP-FO) – Mme Cécile Kohler, secrétaire fédérale, et M. Pascal Croizer, représentant syndical FO

– Syndicat général de l’Éducation nationale - Confédération française du travail (SGEN-CFDT) – M. Jean-Luc Evrard

 Fédération CGT de l’Éducation, de la Recherche et de la Culture – CGT Educ’action  Mme Elena Blond, secrétaire nationale, Mme Anne Falciola, et M. Jérôme Gayard

                 Table-ronde des associations de parents d’élèves

– Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) – Mme Pascale Durand, directrice de la vie fédérale

– Union des associations autonomes de parents d’élèves (UNAAPE) – M. Patrick Salaün, président

– Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) M. Bruno Ecard, président de l’Union académique de Dijon

– Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (APEL) – M. Christophe Abraham, secrétaire général et M. Paul Vitart, membre du Bureau national

                 Table-ronde des syndicats de directeurs d’établissements d’enseignement

– Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale (SNPDEN-UNSA) – Mme Valérie Quéric, secrétaire nationale, et M. François Resnais, membre de l’exécutif syndical national

– Indépendance et Direction-Syndicat indépendant des personnels de direction de l’éducation nationale (ID-FO) – Mme Agnès Prouteau, conseillère technique

                 Audition commune :

– Direction générale de l’enseignement scolaire, ministère de l’éducation nationale  Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval, cheffe du service de l’instruction publique et de l’action pédagogique

– Direction générale des ressources humaines (DGRH) du ministère de l’éducation nationale  M. Marc Estournet, chef de service des personnels enseignants de l’enseignement scolaire

– Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER), ministère de l’agriculture – M. Luc Maurer, directeur général adjoint, chef du service de l’enseignement agricole.

                 M. Christophe Bouillon, ancien député, et M. Elias Maaouia, conseiller auprès de l’Association des Petites Villes de France (APVF)

                 Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap (FNASEPH)  M. Nicolas Eglin, président, et Mme Marie-Christine Philbert, secrétaire

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 

 


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   Annexe n° 2 :
textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de l’éducation

L. 917‑1

2

Code de l’éducation

L. 916‑1

 

 

 


([1]) Le 1er décembre 2021, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture la proposition de loi n°4658, à l’initiative de la majorité, visant à lutter contre le harcèlement scolaire, dont l’article 3 dispose que plusieurs catégories de personnels, dont les assistants d’éducation, doivent être formés à la détection des cas de harcèlement et à la prise en charge des victimes et des auteurs.

([2]) Les données qui concernent le ministère de l’éducation nationale proviennent de la direction générale des ressources humaines (DGRH) de ce dernier.

([3]) Aux effectifs d’AESH au sein de l’éducation nationale s’ajoutent notamment ceux des établissements d’enseignement agricole, soit 972 personnes physiques (dont seulement 16 en CDI) pour l’année scolaire 2021/2022.

([4]) J. Dubois, « École et université inclusives : trajectoire », rapport d’information n° 4274, Assemblée nationale, juin 2021, p. 35. Ce résultat correspond au produit de la rémunération indiciaire aux premiers échelons (concentrés autour du SMIC) par la quotité horaire moyenne.

([5]) En 2020, 75,2 % des personnes en emploi étaient des salariés en CDI, contre 12,3 % de salariés en CDD, d’intérimaires et d’apprentis, auxquels s’ajoutaient 12,4 % de travailleurs indépendants (INSEE, enquête Emploi, 18 mars 2021).

([6]) La notion de milieu ordinaire désigne à la fois la scolarisation dans les mêmes classes que les autres élèves et au sein des unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS). Le milieu ordinaire se distingue des établissements spécialisés.

([7]) Aux termes de l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles, cette commission, rattachée à la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), est chargée, sur la base de l’avis d’une équipe pluridisciplinaire évaluant les besoins de compensation d’une personne porteuse d’un handicap, de prendre « les décisions relatives à l'ensemble des droits de cette personne, notamment en matière d'attribution de prestations et d’orientation ».

([8]) Aux termes de l’article L. 146-8 du code de l’action sociale et des familles, cette équipe pluridisciplinaire rattachée à la MDPH évalue « les besoins de compensation de la personne handicapée et son incapacité permanente sur la base de son projet de vie […] et propose un plan personnalisé de compensation du handicap ».

([9]) Ces missions sont définies par le décret n° 2003-484 du 6 juin 2003 (voir le commentaire de l’article 2).

([10]) L’appellation d’auxiliaire de vie scolaire (AVS), qui figure dans la circulaire n° 2003-093 du 11 juin 2003 relative à la scolarisation des enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant, a pu désigner des assistants d’éducation se consacrant à l’accompagnement d’élèves en situation de handicap. Il importe de relever qu’elle n’apparaît dans aucune disposition législative ou réglementaire.

([11]) Réponse de la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale aux questions adressées par la rapporteure. Voir également les conclusions de R. Chambon, rapporteur public, sur la décision n° 422248, « Ministre de l’Éducation Nationale c/ M. Fabrice B… », rendue par le Conseil d’État le 20 novembre 2020, p. 8.

([12]) CE, Section, 20 novembre 2020, 422248, « Ministre de l’Éducation Nationale c/ M. Fabrice B… ».

([13])  « Le recrutement et l'insertion des MI-SE », IGAEN, avril 1999

([14])  Information communiquée par les représentants de la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale durant leur audition par la rapporteure.

([15]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.11727018_61de9084a558a.commission-des-affaires-culturelles--controle-parental-sur-des-equipements-et-services-vendus-en-fr-12-janvier-2022