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N° 266 rectifié

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2017.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LAMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018 (n° 235)

TOME X

RECHERCHE ET
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

RECHERCHE DANS LES DOMAINES DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DE LA GESTION DES MILIEUX ET DES RESSOURCES

PAR M. Gérard MENUEL

Député

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 Voir les numéros : 235, 273 (Tome III, annexe 33).


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  SOMMAIRE

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Pages

INtroduction

I. Un budget de rattrapage plus que de progrès

A. Des programmes 172 et 193 en hausse pour couvrir les engagements déjà pris

1. Programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires : des investissements qui traduisent une mobilisation croissante autour des défis « environnementaux »

a. Laugmentation des crédits dédiés au développement durable

b. La montée en puissance des investissements pour une « croissance verte »

2. Programme 193 Recherche spatiale : la reconnaissance du caractère stratégique des observations satellitaires

3. Mais les propositions pour 2018 sont avant tout des rebasages budgétaires

a. La confirmation du financement des nouvelles infrastructures

b. Le ralentissement de lendettement de la France auprès de lESA

c. Des marges financières pour lANR moins ouvertes quil ny paraît

B. la stagnation des dotations du programme 190, hors aéronautique

C. Mais des opérateurs temporairement plus sécurisés

II. La REcherche française face à deux enjeux cruciaux

A. Construire un mix énergétique plus durable

1. La situation actuelle

2. Les contraintes à résoudre

3. Les résultats en gestation de la recherche française

4. Les difficultés à lever pour atteindre les objectifs

5. Des réponses gouvernementales ambitieuses – mais réalisables ?

B. Assurer la sécurité et la sûreté alimentaires

1. Des enjeux multiples

2. Lactualité des recherches

3. Les moyens de la recherche française - à la hauteur des besoins ?

EXAMEN EN COMMISSION

liste des personnes auditionnées


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   INtroduction

Tornades dévastatrices, scandales sanitaires, villes suffoquant de leurs atmosphères surpolluées…, l’acuité des enjeux environnementaux est plus évidente que jamais face à la multiplication des crises. La recherche scientifique et technologique a un rôle essentiel à jouer pour comprendre les phénomènes à l’œuvre et mettre au point les mesures de prévention et les solutions de demain.

Au sein de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur, trois programmes sont fortement, voire exclusivement, mobilisés sur ces problématiques de développement durable, qu’il s’agisse de lutter contre le changement climatique ou de gérer en toute responsabilité les milieux et les ressources.

Le premier d’entre eux par son poids budgétaire (plus de 6,7 Mds€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement prévus en 2018), le programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires couvre le plus vaste champ d’études : qu’il finance les moyens consacrés au pilotage de la stratégie nationale de la recherche, le principal bailleur de la recherche sur projets – l’Agence nationale de la recherche –, les « très grandes infrastructures de recherche » (TGIR), ainsi que les plus gros opérateurs publics de la recherche française. Enfin, outre le fait que les autres disciplines peuvent apporter d’utiles éléments de réflexion aux questions complexes posées par l’adaptation aux bouleversements écologiques en cours, le programme 172 dédie deux de ses actions aux thématiques suivies par le présent avis : l’action 17 Recherches scientifiques et technologiques dans le domaine de lénergie et l’action 18 Recherches scientifiques et technologiques dans le domaine de lenvironnement. Votre Rapporteur relève avec satisfaction que les dotations proposées pour le programme 172 devraient sensiblement progresser (+ 3,2 % en autorisations d’engagement et + 5,4 % en crédits de paiement), en particulier celles qui seront allouées aux actions 17 et 18 (de, respectivement, + 15,2 et + 20,3 % pour l’action 17 et de + 2,4 % pour l’action 18).

Ce sera également le cas du programme 193 Recherche spatiale dont les crédits augmenteront de 10,6 % en 2018 pour atteindre 1,62 Mds€ en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Ses financements sont fondamentaux pour l’étude des transformations de la Terre et de son climat.

Enfin, le troisième programme examiné, le programme 190 Recherche dans les domaines de lénergie, du développement et de la mobilité durables est quant à lui totalement dédié aux travaux de recherche et d’innovation pour l’environnement et le développement durable. Le ciblage des secteurs et l’approche moins générique et plus opérationnelle des travaux qu’il soutient font que ces crédits et les opérateurs qui lui sont rattachés relèvent de la responsabilité directe du ministère de la Transition écologique et solidaire – et non du ministère en charge de la recherche comme les deux premiers.

Le programme 190 serait renforcé de + 3,3, % en autorisations d’engagement et + 1,4 % en crédits de paiement avec, respectivement, 1,76 et 1,74 Mds€ de dotations demandées pour 2018.

Votre Rapporteur ne peut que se féliciter de ces différents efforts budgétaires dans un contexte que lon sait contraint. Néanmoins, dans le détail, la situation de la recherche « environnementale » est plus nuancée et les marges de progrès plus serrées quil ny paraît.

Au-delà de l’analyse budgétaire proprement dite, l’avis budgétaire est l’occasion d’évaluer la mise en œuvre de politiques publiques en lien avec les crédits d’une mission ou d’un programme.

Pour ce premier avis budgétaire de la législature consacré à la recherche, votre Rapporteur a souhaité étudier de façon plus approfondie deux thématiques :

– à l’aune des connaissances et des technologies disponibles à ce jour, comment la Recherche évalue-t-elle les objectifs de mix énergétique inscrits dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 et comment y contribue-t-elle, en particulier s’agissant des énergies renouvelables ?

– quels enjeux de sécurité et de sûreté alimentaires identifie-t-elle ? Les opérateurs publics, et notamment l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), ont-ils les moyens de leurs missions ?

 

 


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I.   Un budget de rattrapage plus que de progrès

Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit une progression des dotations des trois programmes examinés. Ce renforcement est en soi notable au sein d’un budget de l’État en réduction. Il l’est aussi par son ampleur : les crédits demandés pour 2018 dépasseraient les montants votés en loi de finances initiale pour 2017 de + 211 M€ en autorisations d’engagement (AE) et + 346,9 M€ en crédits de paiement (CP) pour le programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires, + 155,4 M€ en AE et CP pour le programme 193 Recherche spatiale, enfin, + 59,9 M€ en AE et + 23,6 M€ pour le programme 190 Recherche dans les domaines de lénergie, du développement et de la mobilité durables. Même ramenées à des budgets initialement déjà substantiels, ces revalorisations représentent des hausses sensibles.

Leffort financier est réel. C’est la raison pour laquelle votre Rapporteur donnera un avis favorable au projet de budget pour la mission Recherche et enseignement supérieur.

Pour autant, ces renforts budgétaires ne traduisent pas nécessairement une augmentation des moyens mis à la disposition de la recherche publique française.

A.   Des programmes 172 et 193 en hausse pour couvrir les engagements déjà pris

1.   Programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires : des investissements qui traduisent une mobilisation croissante autour des défis « environnementaux »

a.   L’augmentation des crédits dédiés au développement durable

Avec 6,72 M€ en AE et 6,77 Mds€ en CP demandés pour 2018, le programme 172 est le plus important de la mission par ses dotations, qui représentent 24,4 % des 27,7 Mds€ d’AE et CP totaux prévus par le projet de loi de finances, et parce qu’il est le principal soutien budgétaire des plus importants opérateurs de la recherche publique – excepté le Centre national d’études spatiales. Il sera aussi le principal bénéficiaire des renforts budgétaires accordés à la mission en 2018 : le projet de loi de finances (PLF), en augmentant ses AE de 3,2 % et ses CP de 5,4 % par rapport aux dotations votées pour 2017, mobilisera 37,8 % du supplément d’AE (+ 557,5 M€) et 48,3 % du complément de CP (+ 717, 9 M€) proposés pour 2018.

Cette hausse générale recouvre cependant des évolutions plus contrastées de chacune de ses actions.

Les crÉdits du Programme 172 en 2017 et 2018

(en millions d’euros)

 

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

Total programme 172

6 513,9

6 724,9

+ 211 M€

+ 3,2 %

6 423,9

6 770,8

+ 346,9 M€

+ 5,4 %

01 Pilotage et animation

176,9

176,5

- 0,4

- 0,2 %

175,2

175,9

+ 0,8

+ 0,4 %

02  Agence nationale de la recherche

703,4

736,1

+ 32,7

+ 4,7 %

639,4

773,3

+ 133,9

+ 20,9 %

11 Recherches interdisciplinaires et transversales

62,7

62,7

- 0,7

- 0,1 %

62,7

62,7

- 72

- 0,1 %

12 Diffusion, valorisation et transfert des connaissances et des technologies

149

149

+ 0,2

-

149

149

+ 0,2

-

13 Grandes infrastructures de recherche

239,4

257,3

+ 17,9

+ 7,5 %

239,4

257,3

+ 17,9

+ 7,5 %

14 Moyens généraux et d’appui à la recherche

847,5

889,4

+ 41,9

+ 4,9 %

847,5

889,4

+ 41,9

+ 4,9 %

15 Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie et de la santé

1 219,8

1 215,9

- 3,8

- 0,3 %

1 214,5

1 216,3

+ 1,9

+ 0,2 %

16 Recherches scientifiques et technologiques en sciences et techniques de l’information

983,2

982,6

- 0,6

- 0,1 %

983,2

982,6

- 0,6

- 0,1 %

17 Recherches scientifiques et technologiques dans le domaine de lénergie

630,4

726,4

+ 96

+ 15,2 %

611,5

735,4

+ 123,9

+ 20,3 %

18 Recherches scientifiques et technologiques dans le domaine de lenvironnement

1 096,5

1 122,8

+ 26,3

+ 2,4 %

1 096,5

1 122,8

+ 26,3

+ 2,4 %

19 Recherches scientifiques et technologiques en sciences humaines et sciences sociales

405,1

405,1

+ 0,2

-

405,1

405,1

+ 0,2

-

Source : projet annuel de performances 2018. Dotations sans attribution de produits ni fonds de concours.

Plusieurs actions n’augmenteront que très marginalement, voire diminueront légèrement, telles :

– l’action 01 Pilotage et animation qui, avec 176,5 M€ d’AE (– 0,2 %) et 175,9 M€ de CP (+ 0,4 %), finance les frais de fonctionnement (22,4 M€), d’études et d’animations scientifiques assurés par les services ministériels et déconcentrés. Il finance également les programmes d’équipement scientifique et les transferts de technologie opérés dans le cadre des contrats de projets État-régions (CPER) 2015-2020 pour 40,7 M€ ainsi que 52,8 M€ pour le dispositif des conventions industrielles de formation pour la recherche (CIFRE) qui offrent une première expérience professionnelle aux doctorants ;

– l’action 12 Diffusion, valorisation et transfert de connaissances et de technologies sera stabilisée à 149 M€ en AE et CP. Il s’agit de poursuivre les projets de mutualisation des ressources électroniques et de faire évoluer la « Bibliothèque scientifique numérique » afin d’accompagner l’édition scientifique française face au développement national et international de l’open Science ;

– par ailleurs, plusieurs domaines de recherche verront leurs moyens étatiques au mieux stabilisés, un peu rationnés dans certains cas : les crédits de l’action 11 Recherches interdisciplinaires et transversales diminueront de – 0,1 % pour s’établir à 62,7 M€ en AE et CP ; les AE de l’action 15 Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie et de la santé baisseront de – 0,3 % à 1 215,9 M€, mais ses CP progresseront de + 0,2 % à 1 216,3 M€ ; avec 982,6 M€ de dotations, l’action 16 Recherches scientifiques et technologiques en sciences et techniques de linformation reculera de – 0,1 % ; et l’action 19 Recherches scientifiques et technologiques en sciences humaines et sciences sociales sera seulement stabilisée à 405,1 M€.

En revanche, les autres actions du programme connaîtront des progressions significatives :

– Les AE de l’action 02 Agence nationale de la recherche (ANR) seront renforcées de 32,7 M€ (+ 4,7 %) et les CP de 133,9 M€ (+ 20,9 %) portant ses crédits à, respectivement, 736,4 et 773,3 M€ en 2018 ;

– 17,9 M€ supplémentaires sont demandés en AE et CP pour l’action 13 Grandes infrastructures de recherche pour atteindre des dotations de 257,3 M€ en hausse de + 7,5 % ;

– 41,9 M€ viendront compléter les AE et CP de l’action 14 Moyens généraux et dappui à la recherche qui s’élèverait à 889,4 M€ en 2018, progressant de + 4,9 % ;

– enfin, les thématiques de la recherche dans les domaines de l’énergie et du développement sont les seules à bénéficier d’un renforcement des moyens budgétaires qui leur sont spécifiquement consacrés (actions 17 et 18). De manière substantielle, au demeurant, puisque leurs crédits devraient augmenter de + 96 M€ en AE et + 124 M€ en CP pour l’action 17, soit une hausse de, respectivement, + 15,2 % et + 20,3 %, et de + 26,3 M€ en AE et CP pour l’action 18, en progression de + 2,4 %.

b.   La montée en puissance des investissements pour une « croissance verte »

Atteignant ainsi 726,4 M€ en AE et 735,4 M€ en CP pour l’action 17 et 1 122,8 M€ en AE et CP pour l’action 18, ces dotations représenteront désormais à elles seules, respectivement, 10,8 % et 16,9 % des crédits demandés pour le programme 172, contre 9,7 % et 9,5 % des crédits votés en 2017.

Ces renforcements budgétaires confirment et accentuent la redéfinition des priorités de la recherche publique, dessinée ces dernières années aux niveaux européen et national, qui donne une nouvelle et large place aux grands objectifs environnementaux.

Conformément à l’article 182 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), l’Union européenne (UE) s’est dotée d’un programme-cadre de recherche et d’innovation « Horizon 2020 » pour la période 2014‑2020. Principal instrument de financement de la recherche de l’UE, son budget pour les sept années est de 70,2 milliards d’euros. Il sarticule autour de trois axes prioritaires : lexcellence scientifique, la primauté industrielle et les défis sociétaux, dont le dernier cible tout particulièrement les différentes thématiques du développement durable et de la transition écologique : « énergies sûres, propres et efficaces », « sécurité alimentaire et bioéconomie », « transports intelligents, verts et intégrés », « climat, environnement, matières premières »…

Pour décliner les priorités stratégiques de la politique européenne de la recherche, la stratégie nationale de recherche (ou SNR ([1])) « France Europe 2020 » arrêtée fin 2015 a retenu parmi 10 grands défis sociétaux pour les prochaines décennies les défis suivants :

– Défi n° 1. Gestion sobre des ressources et adaptation au changement climatique ;

– Défi n° 2. Une énergie propre, sûre et efficace ;

– Défi n° 3. Stimuler le renouveau industriel (qui intègre les thèmes de la chimie durable et de l’économie circulaire pour les matériaux) ;

– Défi n° 5. Sécurité alimentaire et défi démographique ;

– Défi n° 6. Transports et systèmes urbains durables ;

– Défi n° 9. Une ambition spatiale pour l’Europe (avec, notamment, des enjeux de surveillance de la terre et de son climat).

Cette stratégie est mise en œuvre (hors le volet spatial) par la programmation de l’Agence nationale de la recherche (ANR) et celle des autres financements publics qui coordonnent les stratégies nationales et régionales ([2]). Interrogée par votre Rapporteur, l’Agence nationale de la recherche, principal opérateur de l’État pour le financement de la recherche sur projets, anticipe pour 2018 (mais en se fondant sur un budget d’intervention au niveau de l’exécuté de 2016 à 596 M€) d’injecter 40 à 45 M€ sur des projets en lien avec la thématique du développement durable et répondant aux défis n° 2, 3 et 6, environ 28 M€ pour le défi n° 1 et 18 M€ pour le défi n° 5. En outre, elle envisage de mettre l’accent, dans son futur appel à projets générique, sur un nouvel enjeu transversal : la bioéconomie qui croisera les défis n° 2, 3 et 5. L’ANR a notamment pour mission de favoriser le développement du travail collaboratif entre équipes et entre organismes, en se fondant sur le constat que ces rapprochements ont beaucoup contribué à l’appropriation des sujets complexes posés par le développement durable.

Aujourd’hui, en sus de ces projets ponctuels, un certain nombre de nouvelles structures, créées grâce aux investissements d’avenir (PIA) gérés par ailleurs par l’ANR, œuvrent également sur ces thématiques : qu’il s’agisse de LABEX (laboratoires d’excellence) ou d’IDEX (Initiatives d’excellence), d’instituts de recherche technologique (IRT), des instituts pour la transition énergétique (ITE) et plus récemment d’instituts Convergence, le ministère en charge de la recherche évalue à environ 500 M€ (260 M€ en dotations consommables et 240 M€ d’intérêts de dotations non consommables) les investissements déjà engagés au titre des PIA 1 et 2 sur ces sujets (au sens large).

Notamment les 11 ITE ([3]), campus de recherche-développement public-privé créés en 2012-2013, seraient dotés de 1 Md€ sur 10 ans (les deux-tiers en non consommables). Les programmes de recherche qu’ils développent répondent aux objectifs de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte : bâtiment et rénovation durable, efficacité énergétique dans la ville, mobilité durable et véhicule électrique, chimie verte, production d’énergies renouvelables etc. L’ANR y finance environ 290 projets de recherche pour un montant de 154,1 M€ décaissés au 1er octobre 2017 sur une dotation totale autorisée de 367,3 M€.

Mais la Stratégie nationale de la recherche est d’abord mise en œuvre par le biais des contrats d’objectifs et de performance conclus avec les organismes de recherche et les établissements d’enseignement supérieur, chaque organisme de recherche organisant ensuite la programmation annuelle de ses activités selon ces orientations. En outre, des alliances, créées par les organismes de recherche avec le soutien du ministère en charge de la Recherche, favorisent la coordination entre opérateurs pour la planification de leurs travaux. Sur les sujets suivis par le présent avis, on citera :

– l’AllEnvi, l’Alliance dans le domaine de la recherche environnementale qui réunit les acteurs de la recherche française autour de quatre enjeux : « nourrir 9,5 milliards dêtres humains à horizon 2050 en produisant plus et mieux ; garantir laccès à leau et aux ressources naturelles, en quantité et en qualité, sur le plan mondial ; faire face aux changements climatiques et à lérosion de la biodiversité et respecter limpératif de qualité environnementale » ;

– et l’Ancre, l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie.

Quoi qu’il en soit, le plus grand opérateur de la recherche publique française n’a pas attendu ces nouvelles orientations pour optimiser ses compétences et ses travaux sur les questions environnementales : à l’occasion de sa réorganisation officialisée en 2009, le Centre national de recherche scientifique (CNRS) leur a consacré deux de ses dix nouveaux instituts. Avec pour mission de promouvoir et animer des travaux de pointe dans leurs réseaux d’unités de recherche, l’Institut Écologie et environnement (INEE) travaille sur l’écologie globale, autour de thématiques incluant la biodiversité, l’environnement, les interactions Hommes-milieux etc. ; et l’Institut national des sciences de l’ingénieur et des systèmes (INSIS) encadre l’ensemble des recherches dans le secteur de l’énergie ou visant la mise au point de procédés et systèmes technologiques plus durables.

Lors de ses auditions, votre Rapporteur a pu constater que même des acteurs intervenant historiquement dans des secteurs d’activité qui ne paraissent pas de prime abord les plus sensibles aux enjeux environnementaux s’inscrivent désormais activement dans le développement de solutions durables pour la transition énergétique. Ainsi, depuis une dizaine d’années, le Commissariat à l’énergie atomique et l’Institut français du pétrole s’investissent fortement dans les recherches sur les énergies renouvelables au point de l’afficher dans leurs noms (voir partie II).

2.   Programme 193 Recherche spatiale : la reconnaissance du caractère stratégique des observations satellitaires

Le programme 193 finance la conception, le développement et la mise en œuvre (quand ils ne sont pas commercialisés) des différents types de satellites (météorologiques, d’observation, de géolocalisation ou de télécommunication), des lanceurs spatiaux, des ballons atmosphériques, des instruments embarqués et autres technologies associées, mais aussi des plateformes d’exploitation des données recueillies.

Troisième programme budgétaire du volet Recherche de la mission avec 1,62 Mds€ demandé en AE et CP pour 2018, il sera renforcé à hauteur de 155,4 M€ en AE et en CP, soit une progression de 10,6 % par rapport aux crédits votés pour 2017.

Dans des proportions diverses, toutes ses actions seront revalorisées. L’augmentation la plus importante en valeur absolue concerne l’action 04 Maîtrise de laccès à lespace qui passera de 517,1 M€ à 577,5 M€ entre 2017 et 2018 (+ 11,7 %).

Mais en valeur relative, la hausse la plus sensible toucherait l’action 07 Développement des satellites de météorologie qui croîtra de + 43,3 % ou + 25,2 M€ pour atteindre un montant de 83,3 M€.

L’action 02 Développement de la technologie spatiale au service de lobservation de la terre progresserait pour sa part de 17,9 M€ (+ 6,4 %) s’élevant à 298 M€ en AE et CP. Il s’agit de la deuxième action du programme 193 par son poids budgétaire.

Les crÉdits du Programme 193 en 2017 et 2018

(en millions d’euros)

 

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

Total programme 193

1 466,6

1 622

+ 155,4

+ 10,6 %

1 466,6

1 622

+ 155,4

+ 10,6 %

01 Développement de la technologie spatiale au service de la science

184,4

202,2

+ 17,8

+ 9,6 %

184,4

202,2

+ 17,8

+ 9,6 %

02 Développement de la technologie spatiale au service de l’observation de la terre

280,1

298

+ 17,9

+ 6,4 %

280,1

298

+ 17,9

+ 6,4 %

03 Développement de la technologie spatiale au service de la recherche en science de l’information et de la communication

119,3

133,5

+ 14,2

+11,9 %

119,3

133,5

+ 14,2

+ 11,9 %

04 Maîtrise de l’accès à l’espace

517,1

577,5

+ 60,4

+ 11,7 %

517,1

577,5

+60,4

+ 11,7 %

05 Maîtrise des technologies orbitales et de l’innovation technologique

223,3

240,5

+ 17,1

+ 7,7 %

223,3

240,5

+ 17,1

+ 7,7 %

06 Moyens généraux et d’appui à la recherche

84,2

87

+ 2,8

+ 3,4 %

84,2

87

+2,8

+ 3,4 %

07 Développement des satellites de météorologie

58,1

83,3

+ 25,2

+43,3 %

58,1

83,3

+ 25,2

+ 43,3 %

Source : projet annuel de performances 2018. Dotations sans attribution de produits ni fonds de concours.

De fait, si le programme répond à des objectifs divers (sécurité, développement économique, aménagement du territoire, recherche…), sa contribution à la recherche en matière de développement durable est autant substantielle quessentielle. En effet, plus de la moitié des cinquante variables climatiques essentielles (ECV) définies par les agences intergouvernementales et utilisées par le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) dans ses rapports sont principalement calculées à partir de données satellitaires. Parmi ces vingt-six paramètres fondamentaux du climat étudiés depuis l’espace, se trouvent la température de surface, le niveau, la salinité et la couleur des océans, la couverture neigeuse, l’humidité des sols.

Les deux opérateurs du programme 193 que sont le Centre national d’études spatiales (CNES) et Météo France jouent un rôle central dans létude des phénomènes climatiques, mais aussi de toutes les transformations de notre planète.

Pour ce faire, ils s’appuient sur des flottilles de satellites d’observation et de surveillance européens, développés par l’organisation européenne pour l’exploitation des satellites météorologiques, EUMETSAT, le programme européen « Copernicus » de surveillance mondiale pour l’environnement et la sécurité, ou dans divers cadres bilatéraux (comme les satellites SPOT) et parfois nationaux (généralement des micro- ou mini-satellites). Les satellites du programme Copernicus sont en effet pourvus de radars capables de surveiller la banquise, les marées noires, l’utilisation des terres, la déforestation, et l’évaluation des besoins en eau ou en engrais des récoltes. De plus, les modèles lancés à partir de 2018 s’intéresseront à la topographie, la température et la couleur des surfaces maritimes et terrestres ainsi qu’aux données atmosphériques et météorologiques. L’instrument IASI (Interféromètre Atmosphérique de Sondage Infrarouge), présent à bord des satellites météorologiques européens Metop A et Metop B, mesure, pour sa part, plus de vingt‑cinq composants atmosphériques dont l’ozone, le méthane et le monoxyde de carbone.

L’année 2018 verra le CNES poursuivre ses projets liés au changement climatique, tels les missions MicroCarb et Merlin dédiées à l’étude des gaz à effet de serre, et approfondir sa coopération avec la NASA en réalisant la mission SWOT (Surface Water and Ocean Topography) pour améliorer l’observation des océans, hauturiers et côtiers.

3.   Mais les propositions pour 2018 sont avant tout des rebasages budgétaires

a.   La confirmation du financement des nouvelles infrastructures

Quand on examine le détail des actions du programme 172 qui bénéficieront des renforts budgétaires, on constate que les subventions allouées aux opérateurs ne seront pas, ou peu, revalorisées, hormis des mesures salariales "héritées" (comme la hausse du point de la fonction publique ou la compensation du Glissement-Vieillissement-Technicité) dont le coût est répercuté sur l’action 14 – qui recouvre les versements consacrés à leurs frais de fonctionnement.

Lessentiel des compléments budgétaires est destiné au financement de grandes infrastructures dont les projets ont été décidés et lancés ces dernières années :

– L’action 13, qui finance la construction et l’exploitation des Très grandes infrastructures de recherche (TGIR) nationales ou internationales, augmentera de près de 18 M€ pour consolider divers projets en cours. Mais des déploiements de crédits sont simultanément opérés au détriment d’installations comme la base scientifique polaire franco-italienne de l’Institut polaire Paul-Émile Victor dont la subvention diminuera de 14,3 à 5,9 M€. Si l’IFREMER obtiendra un renfort de 19,2 M€, notamment pour le maintien et l’entretien de la flotte océanique française, aucune solution na encore été trouvée pour renouveler cette flotte alors que les ministères en reconnaissent le besoin ;

– L’action 17 consacrée aux recherches scientifiques et technologiques dans le domaine de l’énergie drainera la plus grande part des suppléments budgétaires à raison de + 96 M€ en AE et + 124 M€ en CP, qui se répartiront pour l’essentiel entre la contribution au centre de physique de particules CERN, portée à 149 M€ (+ 53 M€) soit 14,1 % de son budget global, et celle apportée par l’intermédiaire du CEA au Réacteur thermonucléaire expérimental international ITER en construction à Cadarache en France (+ 70 M€). L’Agence ITER-France verrait ainsi sa subvention nationale plus que doubler pour atteindre 132 M€ en 2018 ;

– Enfin sur l’action 18, spécialement ciblée sur les recherches environnementales et dont les dotations augmenteront de 26,3 M€, 13 M€ de ces compléments financiers iront à l’Observatoire européen austral (ESO) pour la construction du Téléscope géant européen E-ELT au Chili, près de 8 M€ pour la mise en service du nouvel inféromètre ALMA de l’institut international de radioastronomie millimétriques IRAM et environ 5 M€ pour la pré-construction d’un réseau de téléscopes optiques au sol dédiés à l’observation de rayons gamma à haute énergie dans le cadre du CTA (Cherenkov Telescope Area).

Au sein du programme 193, c’est également pour suivre la montée en charge des nouveaux programmes (Meteosat Third generation et Eumesat Polar system second generation) de l’Organisation européenne de satellites météorologiques EUMETSAT, dont le budget prévisionnel pour 2018 passerait de 625,4 à 719,6 M€, que la contribution française – via Météo France – sera revalorisée.

La consolidation des engagements, notamment internationaux, de la France est en soi une avancée après plusieurs exercices marqués par de fortes tensions sur ses règlements.

b.   Le ralentissement de l’endettement de la France auprès de l’ESA

LEuropean Space Agency (ESA) est lagence intergouvernementale coordonnant les projets spatiaux (hors météorologiques) menés en commun par les vingt-deux pays européens. Son budget sétablit à 3 556,1 M€ en 2017. Il est constitué :

 des contributions appelées auprès des États membres, destinées à financer les activités et programmes en cours auxquels ils ont souscrit ;

 d’autres recettes, majoritairement constituées des recettes en provenance de contributeurs autres que les États membres (Union européenne notamment).

En 2017, la contribution française devait représenter 25 % des contributions directes des États membres. Cependant, depuis plusieurs années, une partie des subventions versées annuellement par l’intermédiaire du CNES (au titre du programme 193, principalement, et du PIA) est utilisée pour rembourser les dettes de la France à légard de lESA : celles accumulées dans les années 2000 à l’occasion du retour en vol d’Ariane 5 devaient être soldées fin 2015 ; mais dès la fin de l’exercice, la programmation pluriannuelle des contributions françaises créait de nouvelles dettes. Le Conseil ministériel de l’ESA a prévu en conséquence le report à trois ans de l’apurement de cette dette, à l’horizon 2024, avec une croissance régulière des encours d’arriérés jusqu’en 2021, suivi d’un reflux rapide au cours des exercices 2022-2024, selon le tableau ci-après :

Prévisions pour la Contribution française à l’ESA
et l’Évolution de sa dette à fin 2015

(en millions d’euros courants)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Subvention P193

799

763

777

824

833

875

875

875

888

901

915

929

943

PIA - Contribution au financement Ariane 6

39

31

86

6

 

Dépenses des programmes ESA (part France)

651

778

845

934

1 020

1 053

988

983

895

631

570

850

943

Dette de financement au 31/12/N ([4])

33

17

0

103

289

468

581

688

695

424

79

0

0

Source : réponse du MESR au questionnaire de la commission en 2015.

Par rapport à ces projections, si la loi de finances pour 2016 a encore réduit de 70 M€ la subvention inscrite au programme 193, la France a versé en contrepartie 86 M€ sur le produit des cessions de titres d’Arianespace. En revanche, sa part dans les dépenses de l’ESA a été réévaluée de 934 à 1 001 M€, pour tenir compte de nouveaux engagements que notre pays a jugés indispensables, sans qu’un complément de contribution ne soit versé. La dette a donc progressé de + 152 M€ en 2016 (151 M€ en cumulé). Le Conseil ministériel de l’ESA a accepté cette nouvelle « dette de financement » en contrepartie de l’engagement de la France à en accélérer la résorption, car la trésorerie de l’Agence ne lui permet plus de combler la différence alors que le nouveau lanceur Ariane 6 doit fortement alourdir ses dépenses entre 2017 et 2020.

En 2017, 833,4 M€ ont donc été prévus sur le programme 193, complétés par 42 autres M€ issus des cessions de titres d’Arianespace et du solde de 1 M€ sur le PIA. Le total doit modérer l’accroissement de la « dette ESA » à + 149 M€, représentant un total en cumulé de 300 M€  à la condition que la mise en réserve de 66,7 M€ soit levée en fin d’année. Même s’il n’est pas encore annoncé, il serait incohérent qu’il n’y ait pas dégel total.

De fait, les prévisions budgétaires pour 2018 permettent d’espérer un assainissement de la situation plus rapide. La totalité des versements à l’ESA annoncés par le projet annuel de performances s’élèverait à 965 M€ en 2018, soit + 16 % par rapport à 2017 (avant mise en réserve). Il s’agit notamment de permettre à la France de financer ses engagements envers le programme Ariane 6 et de mettre en application les décisions prises lors du Conseil ministériel de Lucerne fin 2016 (en particulier la prolongation de la participation européenne à la Station spatiale internationale). Cette subvention reste inférieure aux besoins puisque la révision du « plan à moyen terme multilatéral 2015-2025 » (PMT) de l’ESA prévoyait en juin dernier des dépenses à hauteur de 1 064,1 M€ en 2018 sur la part des programmes souscrits par la France. Interrogé par votre Rapporteur, le CNES indique que les contributions françaises des prochaines années devraient être encore renforcées pour « limiter le montant de la dette française et prévoir sa résorption à lhorizon 2020 » selon le scénario suivant  qui doit être présenté au Conseil d’administration du CNES en décembre :

nouveau scÉnario proposé pour la dette française envers l’ESA

(en millions d’euros courants)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Subvention P193

799

763

777

754

833

965

1175

1376

1033

1033

915

929

943

PIA - Contribution au financement Ariane 6

39

31

83

9

1

-

-

-

-

-

-

-

-

Produit cession titres Arianespace

-

-

-

86

42

-

-

-

-

-

-

-

-

Dépenses des programmes ESA (part France)

651

778

842

1001

1025

1064

1019

995

746

655

606

873

943

Dette de financement au 31/12/N

33

17

-1

151

300

399

244

< 0

 

 

 

 

 

Source : réponse du MESR à votre Rapporteur

Cette trajectoire permettrait de dégager des marges budgétaires à compter de la fin 2020 pour financer les nouveaux programmes qui seront définis lors de la réunion du Conseil ministériel de l’ESA en 2019. L’exercice budgétaire 2018 resterait néanmoins tendu pour l’ESA, qui sera probablement amenée à ralentir certains programmes. La France s’est donc engagée à faire tous ses efforts pour anticiper ses versements dans les phases critiques.

En contrepartie du renforcement de la contribution à l’ESA, les subventions prévues pour les activités multilatérales du CNES seront certes stabilisées, mais ne connaîtront pas la croissance initialement prévue dans son contrat d’objectifs et de performance 2016-2020.

c.   Des marges financières pour l’ANR moins ouvertes qu’il n’y paraît

Le programme 172 devrait certes renforcer les dotations accordées à l’ANR en 2018 (action 02) : inscrites dans le projet de loi de finances à hauteur de 736,1 M€ en AE et de 773,3 M€ en CP, elles progresseraient de, respectivement, + 32,7 M€ et + 133,9 M€. La part consacrée aux dépenses de fonctionnement de l’agence (sa subvention pour charges de service public) restant fixée à 30,2 M€ comme en 2017, cette revalorisation se traduira automatiquement par une augmentation des crédits d’intervention que l’ANR verse pour financer ses appels à projets.

Toutefois, interrogée par votre Rapporteur, lagence sest montrée prudente sur ses futures marges daction.

Ses recettes propres restent marginales, et pour partie fluctuantes : les remboursements de trop-perçus sur les aides allouées se stabilisent autour de 5,5 à 7,5 M€ par an ; le remboursement par le Commissariat général à l’investissement des frais de gestion des PIA représente environ 3 M€ annuels ; mais les cofinancements et fonds européens qui complètent le financement des projets varient selon les échéances des aides allouées. L’essentiel de ses ressources provient des subventions du programme 172 qui ont subi des diminutions importantes et successives entre 2008 et 2015, non seulement lors de la fixation de leur montant en loi de finances initiale mais aussi par la répétition des annulations en cours d’exercice des crédits mis en réserve.

Évolution des dotations allouées à l’aNR au titre des interventions

(en millions d’euros)

 

LFI 2012

LR 2012

LFI 2013

LR 2013

LFI 2014

LR 2014

LFI 2015

LR 2015

LFI 2016

LR 2016

AE

728,9

716,6

656,2

534,8

575,2

534,9

555,2

459,7

555,2

555,1

CP

728,9

580,1

656,2

446,8

575,2

419,6

560,0

464,2

560,0

495,7

Source : ANR

En conséquence, sur la seule période 2012 à 2015, les moyens d’action de l’agence auront reculé de près de 30 %, comme le montre le tableau ci-après qui inclut les cofinancements :

Évolution du budget d’intervention de l’aNR

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Budget global

710

588,5

553,7

527,2

595,9

dont l’appel à projets générique

555,6

432,5

414,3

389,2

457,4

Source : ANR

L’année 2016 aura finalement marqué un renversement de cette tendance grâce à une revalorisation de la dotation en AE de l’ANR en cours d’exercice qui a neutralisé la mise en réserve. Son budget d’intervention aura ainsi atteint 596 M€ en AE contre 527,2 M€ en 2015. La dotation budgétaire a de nouveau augmenté en 2017, à 673,2 M€ d’AE pour les interventions (soit une hausse faciale de + 118 M€), mais la réserve de précaution en a suspendu 8 % et un décret du 20 juillet 2017 a d’ores et déjà annulé 15,5 M€ en AE (et 25,5 M€ en CP). Le budget initial des interventions de l’agence en 2017 n’a donc été fixé en AE qu’à hauteur de 643,5 M€ au global et 500 M€ pour l’appel à projets générique, soit une progression de seulement + 47,6 et 43,6 M€. Or, non seulement il n’est pas envisagé de libérer les fonds mis en réserve sur la dotation de l’ANR, mais il lui a été demandé de reporter le « préciput » ([5]) de 2017 sur 2018.

Le projet de loi de finances pour 2018 propose daccentuer leffort financier en faveur des interventions de lANR en les portant à 705,9 M€ en AE et 743,1 M€ en CP. Cette perspective est encourageante pour la recherche française. Néanmoins lors de son audition, lagence navait pas encore reçu notification des montants exacts qui lui seront versés après mise en réserve. De son côté, le ministère en charge de la recherche a reconnu que lessentiel de ces nouveaux crédits, particulièrement les CP, est déjà fléché sur les engagements pris (le préciput) et certains projets en gestation déjà validés. Selon ses déclarations, la marge financière pour de nouveaux développements serait « limitée ».

Certes, en parallèle, le « Grand plan dinvestissement 2018-2022 » (GPI), présenté par M. Jean Pisani-Ferry en septembre dernier, a retenu l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation comme champ sectoriel prioritaire en intégrant le PIA 3 ([6]) et devrait permettre de sécuriser le financement de ce troisième volet des programmes d’investissement d’avenir à un niveau total de 10 Mds€. Sur cette enveloppe, 3,5 Mds€ sont prévus pour l’orientation « Soutenir lexcellence dans lenseignement supérieur et la recherche », et 3,6 Mds€ pour l’orientation « Soutenir linnovation et les grands défis » du 3e axe du GPI « Ancrer la compétitivité sur linnovation », mais les actions envisagées visent plutôt le développement des universités ou le soutien à l’innovation des entreprises, dans la continuité des instruments développés par les différents PIA. Dans ce 3e axe, s’inscrit également une enveloppe (hors PIA) de 700 M€ pour accompagner les filières stratégiques, en commençant par l’aéronautique civile (voir commentaire du programme 190 ci-après).

Le 1er axe du GPI « Accélérer la transition écologique » prévoit aussi des enveloppes financières pour la recherche et l’innovation « de rupture » dans son orientation « Développer les énergies renouvelables et linnovation environnementale ». Cependant, à ce jour, seul lappel à projets « Make our planet great again » (initiative 7) est clairement ciblé sur la recherche proprement dite, les autres initiatives prévoyant des investissements en recherche et développement ou dans la mise en œuvre opérationnelle des nouvelles technologies durables. Cette initiative disposerait tout de même d’un budget de 30 M€ pour attirer les chercheurs ne résidant pas sur le territoire national mais désirant développer en France et en collaboration avec des partenaires français des projets de recherche de haut niveau pour faire face aux changements climatiques et planétaires. Il est piloté par le CNRS.

B.   la stagnation des dotations du programme 190, hors aéronautique

Les crÉdits du Programme 190 en 2017 et 2018

(en millions d’euros)

 

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

Total programme 190

1 707

1 763,9

+ 56 ,9

+ 3,3 %

1 713

1 736,6

+ 23,6

+ 1,4 %

10 Recherche dans le domaine de l’énergie

619,3

608,4

- 10,9

- 1,8 %

619,3

608,4

- 10,9

- 1,8 %

11 Recherche dans le domaine des risques

177,3

177,3

-

177,3

177,3

-

12 Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l’aménagement

100,5

101,6

+ 1,1

+ 1,1

100,5

101,6

+ 1,1

+ 1,1

13 Recherche partenariale dans le développement et l’aménagement durable

1,6

1,6

-

7,6

6,6

- 1

- 13,2 %

14 Recherche et développement dans de domaine de l’aéronautique civile

68,3

135

+66,7

+ 97,7 %

68,3

102,7

+ 34,4

+ 50,4 %

15 Charges nucléaires de long terme des installations du CEA

740

740

-

740

740

-

Source : projet annuel de performances 2018. Dotations sans attribution de produits ni fonds de concours.

Pris dans sa globalité, le programme 190 Recherche dans les domaines de lénergie, du développement et de la mobilité durable affiche une progression de 3,3 % en AE (+ 56,9 M€) et 1,4 % en CP (+ 23,6 M€). 1 763,9 M€ d’AE et 1 736,6 M€ de CP sont en effet prévus pour 2018.

En fait, seule son action 14 Recherche et développement dans le domaine de laéronautique civile verra ses dotations augmenter de manière significative  et même substantielle puisque les AP seront presque doublées par rapport à 2017, passant de 68,3 M€ votés pour 2017 à 135 M€, et les CP croîtront de 50,4 % pour atteindre 102,7 M€ en 2018. Au surplus, lintégralité de ces crédits, en AE comme en CP, sera issue du Grand plan dinvestissement 2018-2022. Le rapport remis au Premier ministre en septembre 2017 prévoit de mobiliser sur la période 700 M€ pour « soutenir (…) certaines filières particulièrement stratégiques pour notre économie » (3e axe dengagement, initiative 16). Il identifie à ce titre les « domaines émergents » (intelligence artificielle, capacités de calcul, cybersécurité et nanoélectronique) et la filière aéronautique. Le rapport rappelle que la France est un des rares pays à disposer dune filière complète, de la conception à la production et quelle est la première filière exportatrice de notre pays. Les objectifs du soutien apporté par le GPI à la recherche et développement du secteur sont de « développer la compétitivité de cette filière, daccélérer le potentiel technologique des PME et ETI ([7]) du secteur et dancrer durablement les emplois qualifiés qui y sont associés ».

De fait, la filière française, dont le chiffre daffaires a atteint 41 Mds€ en 2016 et qui a représenté 60 000 nouvelles embauches sur les cinq dernières années, est soumise à une très forte concurrence mondiale. Dans ce contexte international, tous les États sont amenés à soutenir, directement ou indirectement, la recherche et développement de leur industrie aéronautique caractérisée par la longueur de ses cycles de recherche (de 5 à 15 ans) puis dexploitation des matériels produits (plusieurs décennies) et lintensité capitalistique de ses projets. En France, le secteur a bénéficié jusqualors des PIA 1 et 2, en particulier de laction Démonstrateurs technologiques aéronautiques mais sa dotation sera entièrement versée en fin dannée. Les défis ne manquent pas, notamment sur les thématiques environnementales : réduire le bruit, les émissions de gaz à effet de serre, développer des carburants plus « verts » ou des systèmes de propulsion hybrides… Le Conseil pour la Recherche Aéronautique Civile (CORAC) préconise justement une accélération de la maturation de ces nouvelles technologies. Le projet annuel de performances propose ainsi 100 M€ en AE et 88,8 M€ en CP (contre 60 M€ en 2017) pour soutenir les projets de recherche industriels, escomptant quune trentaine de nouveaux soient retenus en 2018. Par ailleurs, le projet de loi de finances prévoit 35 M€ en AE et environ 14 M€ en CP pour accompagner (sous forme davances remboursables) les équipementiers dans leur transformation comme partenaires stratégiques des avionneurs, afin quils passent dun rôle de sous-traitants façonniers à celui de fournisseurs de solutions techniques matures.

L’ensemble de ces investissements doit permettre aux filières et usines françaises de se situer au plus haut niveau de compétitivité. Il s’agit tout à la fois de contrecarrer la pression intra-européenne pour la localisation des sites de conception et de production des aéronefs, et de permettre aux acteurs de la filière de diversifier leurs clients – une nécessité accentuée par les difficultés actuelles d’EADS-Airbus.

Les autres actions du programme 190 devraient au contraire peu évoluer par rapport au budget voté pour 2017 et certaines reculeraient.

Dans le meilleur des cas, leurs dotations sont stabilisées par rapport à lexercice en cours – ce qui reste notable dans un contexte déconomies budgétaires. Laction 11 Recherche dans le domaine des risques, qui recouvre les subventions pour charges de service public de lInstitut national de lenvironnement industriel et des risques (INERIS) et de lInstitut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), sera reconduite à 177,3 M€ en AE et CP.

À 101,6 M€ d’AE et CP en 2018, l’action 12 Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de laménagement gagnerait 1,1 M€ par rapport aux crédits votés pour 2017, en faveur du seul Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (IFSTTAR), l’autre opérateur qu’elle finance, le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), restant au même niveau de dotation.

Les AE de l’action 13 Recherche partenariale dans le développement et laménagement durable seront maintenues à 1,6 M€, mais ces CP diminueront d’1 M€ par rapport à 2017. Il ne s’agit toutefois que de restes à payer sur des conventions pluriannuelles de projets en extinction depuis 2014. La subvention d’1,6 M€ en AE et CP versée à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) est préservée. Bien que ne représentant qu’une très faible partie de ses ressources, l’agence comme le ministère de la transition écologique et solidaire sont attachés à cette contribution : elle rappelle la cohérence du positionnement de l’ANSES avec les missions de préservation du vivant d’autres opérateurs du programme 190 et elle permet de l’inscrire dans le réseau des interlocuteurs techniques du ministère, ce qui est particulièrement utile pour le partage des données.

En revanche, une nouvelle fois, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) ne recevra aucun versement de l’action 13 du programme 190 malgré son rôle dans le suivi et même la production des connaissances sur les problématiques environnementales. L’opérateur est rattaché à titre principal au programme 181 Prévention des risques de la mission Écologie, développement et mobilité durables. Jusqu’à cette année, l’essentiel de ses ressources venait de l’affectation d’une fraction (de 448,7 M€ par an) de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Le projet de loi de finances pour 2018 supprime cette affectation (article 19) et inscrit en contrepartie 612,7 M€ de dotations budgétaires nouvelles.

Enfin, l’action 15 Charges nucléaires de long terme des installations du CEA est logiquement reconduite à 740 M€ en AE et CP en 2018, comme pour les précédents exercices, mettant en œuvre la convention cadre signée le 19 octobre 2010 entre l’État et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) pour la couverture des charges nucléaires de long terme de ses installations et le financement des opérations de démantèlement et d’assainissement en cours. Cela étant, le ministère reconnaît être plutôt en retard de paiement sur les prestations réalisées.

A contrario laction 10 Recherche dans le domaine de lénergie verra ses dotations reculer de 10,9 M€ en 2018 par rapport aux crédits votés pour 2017 ( 1,8 %) pour sétablir à 608,4 M€ en AE et CP. Leffort déconomie sera partagé entre le CEA – en particulier sa branche Nucléaire civil qui perdrait 6,9 M€ ( 1,4 %) et lInstitut français du pétrole-Énergies nouvelles (IFPEN).

En valeur absolue, la diminution subie par l’IFPEN ne serait que de 4 M€, mais elle représenterait une nouvelle perte de 3 % sur la subvention pour charges de service public versée l’opérateur. Le ministère a confirmé à votre Rapporteur la baisse régulière de la dotation allouée à l’IFPEN depuis plusieurs années, parfois dans des proportions plus fortes que l’évolution du programme 190. L’institut dispose en effet d’importantes ressources propres qui suffisaient généralement à compléter. Et si l’IFPEN a également subi un prélèvement (de 7 M€) du Budget de l’État sur son fonds de roulement en 2016, il a été moins mis à contribution que d’autres organismes et l’opération est restée exceptionnelle. Enfin, la réduction des dotations publiques portera sur ses activités « pétrolières » matures. Néanmoins, cette stratégie budgétaire pourrait atteindre ses limites (voir partie II.A).

En outre, le recul de laction 10, tout limité quil soit, pourrait brouiller le message gouvernemental sur les thématiques soutenues. Car cette action finance non seulement la recherche sur le nucléaire civil mais aussi sur lefficacité énergétique et les nouvelles technologies de lénergie. Il est toutefois contrebalancé – au moins facialement  par la hausse des dotations de laction 17 du programme 172 dédiée au même secteur et par les annonces du Grand plan dinvestissement relatives à linitiative 6 « Augmenter notre production dénergie renouvelable », même si les 700 M€ promis seront ciblés sur les innovations industrielles.

Enfin, une mesure budgétaire exceptionnelle devrait minimiser la contrainte pesant sur les dépenses d’intervention des opérateurs.

C.   Mais des opérateurs temporairement plus sécurisés

Hormis l’Agence nationale pour la recherche, les hausses de dotations bénéficiant aux opérateurs des programmes 172, 190 et 193 traduiront uniquement la consolidation du financement de grandes infrastructures de recherche et l’impact de mesures salariales antérieures. Dans la mesure où ces renforts budgétaires compenseront, pour la première fois depuis longtemps (à raison d’un total global de 50 M€), les coûts induits sur la masse salariale des personnels fonctionnaires par les évolutions GVT (Glissement-Vieillissement-Technicité), ils desserreront un peu la contrainte financière sur les opérateurs.

Il n’en reste pas moins que ces hausses occultent les importants efforts déconomies réalisées par tous les organismes de recherche sur leurs frais de fonctionnement ces dernières années. Le CEA indique ainsi prévoir d’opérer 14 M€ d’économies supplémentaires en 2018, en réduisant les frais de fonctionnement de ses agents et en optimisant ses politiques d’achats, alors même qu’il lui faut intégrer des surcoûts imprévus liés au renforcement de la sécurité de ses sites contre les risques terroristes... Comme les autres opérateurs, il s’est toutefois attaché à préserver autant que possible ses capacités humaines de recherche car il faut du temps pour réunir et former les compétences utiles.

S’agissant des budgets d’intervention, ils étaient voués à stagner en 2018, voire à reculer dans les cas de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), l’IFPEN et de l’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV) qui doivent subir une réduction de leurs subventions (de 1,6 à 36,3 %).

Mais les ministères responsables des programmes ont indiqué à votre Rapporteur que les opérateurs de recherche ne devraient supporter quune mise en réserve de 3 %, au lieu des 8 % habituels, sur les crédits dintervention qui leur seront alloués en 2018. Même si l’opération sera un peu contrebalancée par un calcul inverse pour les dépenses de fonctionnement, elle leur permettrait de fonder leurs budgets sur un niveau de financement quasi assuré ([8]) plus généreux que les années précédentes.

Cest en effet sur les dotations votées mais après imputation de la réserve de précaution que sont construits les programmes prévisionnels dintervention des opérateurs publics. Au cours de lexercice, cette réserve peut être levée en tout ou partie (dégel), permettant une révision du budget prévisionnel. Mais elle peut aussi faire lobjet dannulation de crédits. En tout état de cause, il ny a aucune assurance sur le reversement des fonds mis en réserve. De fait, nombre des organismes ont régulièrement reçu moins que ce quannonçaient les lois de finances. Ces pratiques font peser une vraie incertitude sur la réalisation des programmes.

 

 

 

 

 

Les crÉdits alloués aux principaux Opérateurs de recherche dans le développement durable et la gestion des ressources en 2017 et 2018

(en millions d’euros)

 

Progr. Budget État

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

LFI 2017

PLF 2018

2018/2017

CNRS Centre nat. de la recherche scientifique

172

2 645,2

2 670,4

+ 25,2
+ 1 %

2 644,2

2 670,9

+ 26,7
+ 1 %

Autres progr.

0,1

0,1

-

0,1

0,1

-

CEA Commissariat à lénergie atomique et aux énergies alternatives

172

612

666,6

+ 54,6
+ 8,9 %

594,2

675,2

+ 80,9
+13,6 %

190.10

484,4

477,5

- 6,9
- 1,4 %

484,4

477,5

- 6,9
- 1,4 %

190.15

740

740

-

740

740

-

Autres progr.

35,2

35,2

 

35,2

35,2

 

ANR Agence nat. de la recherche

172

703,4

736,1

+ 32,7
+ 4,7 %

639,4

773,3

+ 133,9
+ 20,9 %

Autres crédits (PIA)

2 850

-

-

-

72,5

-

INRA Institut national de la recherche agronomique

172

687,8

693,5

+ 5,7
+0,8 %

687,8

693,5

+5,7
+0,8 %

Autres progr.

1,5

3,5

 

1,5

3,5

 

INSERM Institut nat. de la santé et de la recherche médicale

172

625,9

632,7

+ 6,9
+ 1,1 %

625,9

632,7

+6,9
+ 1,1 %

ADEME Agence de lenviron. et de la maîtrise de lénergie

190.13

0

0

-

0

0

-

Autres progr.

taxe affectée

612,7

 

taxe affectée

612,7

 

IRD Institut de recherche pour le développement

172

207,7

204,4

- 3,3
- 1,6 %

207,7

204,4

- 3,2
- 1,6 %

INRIA Institut nat. de recherche en informa-tique et en automatique

172

172,7

173,7

+ 1
+ 0,6 %

172,7

173,7

+ 1
+ 0,6 %

IRSN Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

190.11

170,9

170,9

-

170,9

170,9

-

Autres progr.

3,7

3,7

-

3,7

3,7

-

IFREMER Institut français de recherche pour lexploitation en mer

172

150,9

170,6

+ 19,7
+ 13,1 %

150,9

170,6

+ 19,7
+ 13,1 %

Autres progr.

6,6

2,6

 

6,6

2,6

 

CIRAD Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement

172

130,4

130,3

-

130,4

130,3

-

Autres progr.

0,6

1

-

0,6

1

-

IFPEN Institut français du pétrole et des énergies nouvelles

190

134,4

130,4

- 4
- 3 %

134,4

130,4

- 4
- 3 %

ANSES Agence nat. chargée de la sécurité sanitaire de lalimenta-tion, de lenvironnement et du travail

190.13

1,6

1,6

-

1,6

1,6

-

Autres progr.

91,6

95,1

-

91,1

94,9

 

IFSTTAR Institut français des sciences et technologies des transports, de laménage-ment et des réseaux

190.12

86

86,9

+ 0,9
+ 1,1

85,8

86,9

+ 1,1
+ 1,3 %

IRSTEA Institut national de recherche en sciences et technologies pour lenvironnement et lagriculture (ex-CEMAGREF)

172

60,4

60,9

+ 0,5
+0,8 %

60,4

60,9

+ 0,4
+ 0,8 %

Autres progr.

23,9

24,3

 

23,9

24,3

-

BRGM Bureau de recherches géologiques et minières

172

49,5

49,5

-

49,5

49,5

-

Autres progr.

33,1

25,6

 

33,1

25,6

 

INERIS Institut national de lenvironn. industriel et des risques

190.11

6,4

6,4

-

6,4

6,4

-

Autres progr.

28

28

-

28

28

-

IPEV Institut polaire français Paul-Émile Victor

172

23,4

14,9

- 8,5
- 36,3 %

23,4

14,9

- 8,4
- 36,3 %

CSTB Centre scientifique et technique du bâtiment

190.12

14,7

14,7

-

14,7

14,7

-

CNES Centre national détudes spatiales

193

1 408,4

1 538,6

+ 130,2
+ 9,2 %

1 408,4

1 538,6

+ 130,2
+ 9,2 %

Autres progr.

152,8

152,8

 

152,8

152,8

 

Météo France

193

69,6

83,3

+ 13,7

+ 19,6 %

69,6

83,3

+ 13,7

+19,6 %

Source : projets annuels de performances 2018. Dotations sans attribution de produits ni fonds de concours.

Dès lors, non seulement l’opération de gestion envisagée pour 2018 donnerait une meilleure visibilité aux opérateurs des programmes 172 et 190, mais elle pourrait leur offrir une marge financière supplémentaire.

Cela étant, les prévisions pour la fin de gestion 2017 du programme 190 incitent à la prudence : en effet, votées à 1,7 Md€, les AE ouvertes sur le programme 190 risquent d’être arrêtées à 1,5 Md€ en fin d’année. Votre Rapporteur insiste donc sur limportance de sécuriser les montants promis car ils sont la condition nécessaire dune recherche dynamique sur des enjeux stratégiques pour notre avenir.


—  1  —

II.   La REcherche française face à deux enjeux cruciaux

A.   Construire un mix énergétique plus durable

Les enjeux sont immenses et assez largement partagés aujourd’hui : il s’agit pour chacun de contribuer à la lutte contre le dérèglement climatique et la préservation de l’environnement en réduisant à la fois les émissions de gaz à effet de serre et la consommation des énergies fossiles ; il s’agit aussi pour notre pays de renforcer son indépendance énergétique tout en assurant à sa population et à ses entreprises la fourniture de l’énergie dont ils ont besoin à un coût sinon compétitif du moins accessible.

L’Europe en a fait une cause commune : depuis 2009, la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables assigne à ses États membres un objectif de 20 % (23 % pour la France) d’énergie renouvelable dans leur bouquet énergétique en 2020. Comme vu précédemment, la programmation européenne pour la Recherche retient depuis 2014 les travaux sur les « énergies propres, sûres et efficaces » parmi ses priorités.

En 2015, la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a repris et décliné cette exigence, en fixant plusieurs objectifs à moyen et long termes pour notre pays. Outre des objectifs « universels » de réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation énergétique finale, elle vise ainsi :

– la réduction de la consommation énergétique primaire d’énergies fossiles de 30 % en 2030 par rapport à la référence 2012 ;

– l’augmentation de la part des énergies renouvelables (EnR) à 23 % de la consommation finale brute d’énergie en 2020 et à 32 % en 2030 ;

– l’abaissement de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2025.

Enfin, la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) définie par décret du 26 octobre 2016 a proposé d’accélérer ces transitions en matière de consommation électrique finale en visant une part des EnR de 27 % en 2020 et 40 % en 2030.

Les pistes de travail sont multiples : stratégies bas carbone, efficacité énergétique et usages responsables, développement d’alternatives durables aux énergies fossiles dans les différents secteurs de consommation… Votre Rapporteur s’est particulièrement attaché aux perspectives d’évolution de la fourniture d’électricité en France. Peut-on raisonnablement espérer atteindre l’objectif des 23 % en 2020 ? La promesse pour 2025 n’est-elle pas trop radicale au regard des besoins et des capacités de l’offre ? Quelle analyse en a la recherche française et quelles réponses propose-t-elle ?

1.   La situation actuelle

Les objectifs de la PPE de 2016 supposaient d’augmenter de plus de 70 % la capacité installée des énergies renouvelables électriques par rapport à 2014 (41 GW) pour atteindre 71 à 78 GW en 2023.

Or, début septembre 2017, le Commissariat général au développement durable (CGDD) a publié un « Bilan physique et monétaire de lélectricité en France sur la période 2011-2015 ». Il apparaît que :

– La production nette d’électricité en France est assez stable depuis le milieu des années 2000. Elle s’établissait à 553 TWh (térawatts-heure) en 2015, dont 544 TWh pour la seule France continentale.

– Son parc nucléaire assure les trois-quarts de sa production nationale : les 58 réacteurs actuellement en service ont une capacité de 63 GW ; ils ont produit 417 TWh nets en 2015 ;

– Les volumes d’électricité hydraulique et thermique arrivent en deuxième position. La première filière dépend fortement de la pluviométrie. Après deux années de recul, sa production atteignait 59 TWh en 2015, soit 10,8 % de la production totale nette en France continentale.

La production thermique classique, dont les installations peuvent être rapidement activées ou arrêtées, constitue en général la variable d’ajustement pour équilibrer l’offre à la demande. Elle suit une tendance à la baisse depuis plusieurs années avec la fermeture de centrales à charbon. Mais la relance des centrales au gaz naturel l’a fait remonter à 39 TWh en 2015 ;

Les centrales thermiques utilisant des énergies renouvelables et de récupération (biomasse, biogaz, déchets) ainsi que celles mettant en œuvre des techniques performantes en termes d’efficacité énergétique comme la cogénération d’électricité et de chaleur peuvent bénéficier, sous conditions, du mécanisme d’obligations d’achat. En 2015, ces productions ont représenté 11 TWh rachetés pour 1,3 Md€ ;

– Les filières éolienne et solaire photovoltaïque représentent désormais près de 5 % de la production nationale à elles deux. Leur développement est essentiellement soutenu par le mécanisme d’obligations d’achat. La première filière est en constante augmentation, en moyenne de 15 % par an entre 2011 et 2015. Avec 21 TWh, la part de l’éolien (hors ZNI) s’établissait à 3,9 % de la production totale nette d’électricité en France continentale en 2015.

La filière solaire photovoltaïque connaît le plus fort développement depuis le début de la décennie : + 37 % chaque année entre 2011 et 2015. Pour autant, avec 7 TWh produits en 2015, elle ne représentait encore que 1,3 % du total, tout en restant la production dont le soutien par l’État est le plus onéreux (2,7 Mds€). Toutefois, le tarif de rachat auprès des installations nouvellement raccordées a fortement baissé ;

– Dans les zones non interconnectées (ZNI) au réseau métropolitain continental, l’application du principe de péréquation tarifaire permet de subventionner les producteurs sans répercuter sur les consommateurs finaux les surcoûts de production liés aux contraintes physiques. Ces productions locales ont représenté 1,7 % du volume total en France en 2015.

La France produit en moyenne plus d’électricité qu’elle n’en consomme. En exportant le surplus, elle en a tiré un bénéfice net de 2,3 Mds€ en 2015. Toutefois aux heures de pointe en hiver, elle est amenée à importer de l’électricité de ses voisins : une dizaine de TWh en 2015.

La consommation finale (c’est-à-dire hors consommation à des fins de transformation d’énergie) d’électricité en France s’est élevée à 432 TWh en 2015, répartie principalement entre le résidentiel (36 %), le tertiaire (35 %) et l’industrie (25 %). S’y ajoutent 16 TWh pour la production ou la transformation d’énergie.

Au total, les productions que l’on peut qualifier de renouvelables et écologiques (hydraulique, thermiques durables, éolien et solaire) représentaient fin 2015 17,7 % de la production électrique nationale

Fin 2016, cette part aurait progressé à 19,1 % selon les calculs du Syndicat des énergies renouvelables (SER). De son côté, EDF Énergies nouvelles constate bien une croissance des filières EnR les plus matures – hors l’hydraulique qui ne pourrait se développer davantage. L’éolien terrestre aurait gagné + 1,3 GW de capacité par an entre 2014 et 2016 pour atteindre 11,7 GW ; le solaire photovoltaïque aurait progressé de + 0,75 GW par an sur la même période atteignant 7,7 GW. Mais aucun éolien mer posé n’aura été lancé à ce jour et les autres déploiements sont encore trop lents – et plus encore dans les ZNI. EDF Énergies nouvelles considère donc que pour rejoindre les objectifs de la PPE, il faudrait presque doubler le rythme de développement annuel des infrastructures, soit une croissance souhaitable de + 2 GW à + 3-4 GW (pour loffshore) selon les filières.

Même ramenée à la consommation actuelle d’électricité en France, la part atteinte par les EnR en 2015 ne serait encore que de 21,9 %, sans tenir compte des importants aléas qui marquent des productions variant selon l’ensoleillement, la force du vent, le niveau des eaux… Or, il ne s’agit pas seulement de substituer une source d’énergie à une autre ; il faut rester en capacité de fournir, autant que possible, le niveau d’énergie dont ont besoin la population et l’économie de notre pays.

Dès lors que cette priorité est admise, quand bien même on obtiendrait une décroissance sensible de la consommation française d’électricité, eu égard aux volumes en jeu, au retard pris par la France sur la trajectoire de développement des EnR, aux délais nécessaires pour que les investissements à venir (s’ils viennent) soient opérationnels, et à l’intermittence des productions renouvelables, il apparaît dores et déjà peu vraisemblable que notre pays soit en capacité de ramener la part du nucléaire à 50 % dès 2025, sauf à envisager des importations plus conséquentes ou la réactivation des centrales thermiques classiques…

Il n’est, pour autant, pas question de renoncer à accélérer le développement des énergies nouvelles qui répond au double objectif de diversifier nos sources de production et de proposer des solutions plus « écologiques ». Notre pays devrait a minima pouvoir rattraper les niveaux d’EnR atteints par les mix énergétiques de nos voisins : à situations comparables, l’Allemagne produit une électricité à 6 % d’origine solaire et à 12 % éolienne ; en Grande Bretagne, les proportions respectives sont de 3,5 et 12 %.

2.   Les contraintes à résoudre

Divers facteurs contraignent ou compliquent objectivement le potentiel de développement des EnR.

Certains sont dordre financier et sont en pleine évolution. La demande française pour une électricité durable se développe : les contrats de fourniture proposant un mix électrique plus « vert » connaissent un succès grandissant, même s’ils peuvent être un peu plus coûteux ; et un nombre croissant de nos concitoyens investissent dans l’équipement photovoltaïque de leurs résidences, encouragés par la baisse continue du coût des installations et l’amélioration de leurs performances. Néanmoins cela ne touche à ce jour que 2 % des maisons individuelles, lesquelles représentent seulement 15 % des capacités photovoltaïques totales en France. Et parmi ces foyers équipés, seul le quart fait de l’autoconsommation. L’avenir du solaire photovoltaïque repose donc avant tout sur le développement des centrales, au sol ou sur les bâtiments professionnels (hangars et serres agricoles, ombrières de parking, immeubles de bureaux…).

Si les préoccupations citoyennes ne lui sont pas étrangères, à un certain niveau d’investissements, l’initiative privée doit trouver un intérêt financier - un équilibre budgétaire a minima. Il lui faut une demande et un tarif de vente suffisants. Les acteurs du secteur le confirment : la prise de conscience de nos compatriotes est sensible. Mais tout le monde ne veut ou ne peut payer l’électricité beaucoup plus chère. Or, les nouvelles EnR sont des technologies encore très onéreuses. Pour encourager les premiers investissements, l’État a imposé le rachat obligatoire des productions par les opérateurs nationaux à des tarifs très élevés, sans leur permettre de reporter ces coûts sur les consommateurs. Censée compenser ces suppléments de charge, la contribution au service public de l’électricité (CSPE) est restée longtemps largement insuffisante, faisant peser le différentiel sur les comptes des opérateurs. Un processus de « rattrapage » a été initié, mais il reste très progressif car il a un impact immédiat sur les factures des consommateurs. L’État a donc entrepris parallèlement de réduire les tarifs de rachat : selon les informations communiquées par EDF Énergies nouvelles, en 2013, le MWh d’éolien terrestre était racheté à 85,5 €, le solaire photovoltaïque à 128,4 € et l’éolien en mer était envisagé à un prix de 180-200 €. Aujourd’hui, il est envisagé de fixer les tarifs des futurs appels à projets à, respectivement, 50-60 €, 45-50 € et 60-100 €.

De fait, les coûts des installations sont en nette diminution, particulièrement dans la filière solaire. À tel point que les appels à projets dans le solaire ou l’éolien terrestre dans d’autres pays ne prévoient pas systématiquement d’obligation de rachat ou à des tarifs très inférieurs. En dehors de l’éolien en mer, qui se trouve encore dans une phase presque expérimentale, les nouvelles filières EnR deviendraient donc de plus en plus compétitives.

Dautres facteurs sont techniques. Pour les acteurs interrogés, la géographie française ne présenterait pas de difficultés supérieures à celles de ses voisins. Grâce à l’étendue de son domaine maritime, elle est même très bien placée pour développer des installations offshore. Son ensoleillement serait plutôt meilleur qu’en Allemagne et en Angleterre ; et son exposition aux vents plus favorable et mieux répartie sur son territoire qu’outre-Rhin. Pourtant, la densité de son parc éolien est très inférieure : l’Allemagne dispose d’une densité de 139 kW/km2 ; elle est de 63 kW/km en Grande Bretagne et de seulement 21 kW/km2 en France. La densité des populations, qui aurait pu gêner le développement des parcs, n’explique pas non plus ces différences de situation : notre voisin allemand compte 231 habitants au km2 pour 123 en France.

La France a donc bien des marges de progrès. Pour autant, passer à un stade où ces énergies nouvelles se substitueraient aux capacités existantes suppose de traiter plusieurs contraintes matérielles et technologiques majeures et complexes :

– Dans la mesure où les nouvelles installations ne pourront atteindre ni les volumes de production, ni la régularité des centrales nucléaires ou thermiques, les sites devront être multipliés. Cela imposera de nouveaux modes de distribution : avec des sources plus locales, les réseaux seront plus décentralisés. Dans le même temps, le réseau national devra continuer à fournir des compléments quand cette production locale ralentit. Enfin, un nouveau modèle économique devra être mis en place pour garantir le développement et la pérennité de ce réseau quand bien même les recettes des fournisseurs reculeraient avec l’essor de l’autoconsommation… ;

– Il faut aussi travailler les capacités de stockage, collectives d’abord, mais aussi individuelles. La gestion de l’intermittence des EnR est un enjeu qui deviendra crucial quand elles représenteront 30 % des sources d’électricité. Des avancées techniques ont été obtenues, mais la fiabilité de ces technologies doit être évaluée sur la durée.

Il faudra également mesurer leurs contraintes d’usage (localisation optimale, matériaux nécessaires, gestion des réseaux…). De même pour toutes les autres nouvelles technologies : par exemple quelle serait la taille critique d’une station de recharge en hydrogène pour qu’elle soit viable économiquement ? La recyclabilité des matériaux et la gestion des déchets devront aussi être étudiés dès le début des processus de développement ;

– L’ampleur des besoins à venir, et surtout leur localisation seront des données également déterminantes. Or, l’impact de l’électrification des usages est aujourd’hui impossible à mesurer précisément.

Sur ces différents sujets, ainsi que sur les nouvelles pistes scientifiques et technologiques à explorer, les nouvelles solutions à mettre au point, la recherche publique française doit jouer et joue un rôle fondamental.

3.   Les résultats en gestation de la recherche française

Pour éclairer les débats (publics) qui seront organisés courant 2018, sous l’égide de la Commission nationale du débat public, en vue de la révision en 2019 de la Programmation pluriannuelle de l’énergie, les experts français travaillent à identifier différents scénarios. Mais le ministère en charge de la recherche reconnaît qu’il est difficile aujourd’hui de définir des projections fiables concernant l’avancée de la recherche et des innovations disponibles en France.

Pourtant, votre Rapporteur a pu constater que les grands opérateurs publics français sont à la pointe des travaux et nouveaux développements réalisés dans les différents domaines énergétiques.

À la base, la recherche scientifique et technologique en matière d’énergie est l’un des secteurs les mieux dotés en France – indépendamment des problématiques de défense. En recherche fondamentale, recherche appliquée ou recherche-innovation, on y retrouve tous les grands opérateurs publics français : le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l’Institut français du pétrole-Énergies nouvelles (IFPEN), ainsi que le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) à travers son institut INSIS.

Le CEA s’appuie sur 16 000 salariés et 1 400 doctorants et post-doctorants et un budget de 4,5 Mds€ dont 2,2 Mds€ pour ses activités civiles et 0,7 Md€ pour le démantèlement nucléaire.

Il est l’organisme public de recherche qui consacre le plus de moyens au développement des énergies renouvelables, en particulier à travers son laboratoire CEA-LITEN. Environ un quart de ses ressources leur est dédié. Le LITEN dispose en propre de 125 M€ de budget, dont 73 % sont des recettes externes, notamment issues de la valorisation de ses 1 424 brevets.

Au sein du CNRS, avec ses 32 000 personnels, ses 11 000 unités de recherche et de service et son budget de 3,2 Mds€, l’Institut national des sciences de l’ingénieur et des systèmes (INSIS) encadre plus de 15 880 personnes au sein de 169 structures de recherche. Le budget consolidé de ses laboratoires s’élève à 1 020 M€ dont 186 M€ sur subvention de l’État au CNRS. L’énergie est l’un de ses principaux domaines de recherches. Ses équipes en étudient toutes les dimensions dans tous les secteurs d’activité. Une cellule dédiée coordonne ces travaux, en participant à la définition des stratégies annuelles et pluriannuelles des autres grands opérateurs du champ de l’Énergie et en lançant des appels à projets ciblés.

L’IFPEN emploie 1 652 salariés, dont 1 149 chercheurs, ainsi que 156 post-docs, thésards et stagiaires. Sur un budget total de 284,8 M€ en 2017, 146,5 M€ sont consacrés à la recherche-innovation dans les nouvelles technologies de l’énergie (NTE). Acteur internationalement reconnu dans les technologies relatives aux hydrocarbures, l’institut « verdit » ses activités depuis plusieurs années. Son dernier contrat d’objectifs et de performances (COP) signé avec l’État pour 2016-2020 définit trois priorités stratégiques : la mobilité durable, la production dénergies à partir de ressources renouvelables et la réduction de l’impact environnemental de la production et de l’utilisation du pétrole et du gaz naturel. L’institut a par ailleurs identifié comme nouveaux territoires de croissance le stockage de l’énergie, l’économie circulaire, l’écologie industrielle et la valorisation du CO2.

La dotation budgétaire de lÉtat, de 123,2 M€ en 2017 (après mise en réserve), est entièrement consacrée aux missions dintérêt général de linstitut : le développement des NTE, la recherche fondamentale mais aussi celles qui lui sont confiées par l’article L. 142-2 du code de l’énergie, à savoir la formation (notamment à travers son école d’application pour Bac+4-+5 et professionnels, l’IFP School), l’information et le soutien à la compétitivité des PME et ETI. À l’inverse, son COP prévoit que toutes ses activités « Hydrocarbures » matures devront être financées sur ressources propres en 2020.

Plus en aval dans la chaîne, intervient aussi l’Agence pour l’environnement et la maîtrise de l’énergie (Ademe) et son Fonds Chaleur, sur les bio-énergies notamment.

Les dépenses publiques en recherche et développement dans le domaine de lénergie ont considérablement augmenté depuis 2002, même si elles se sont un peu tassées ces dernières années sous la contrainte budgétaire.

Sur l’ensemble, la thématique nucléaire reste prépondérante dans les budgets, mais celle des EnR sest progressivement imposée comme le deuxième volume de dépenses, avant les questions d’efficacité énergétique et les recherches sur les autres sources comme l’hydrogène. Elles font partie des priorités qui ont été assignées au CEA et à l’IFPEN par la Direction générale de l’énergie et du climat.

Au reste, le CEA affirme poursuivre ses recherches sur le nucléaire autant pour améliorer encore davantage les performances de ses usages et la sécurité de ses dispositifs, pour entretenir aussi les parcs, que pour préparer les démantèlements et recyclages à venir. Notamment selon lui, la prolongation des cuves serait la seule impossibilité technique ; de nombreux produits et matériaux peuvent être réinjectés dans de nouvelles infrastructures.

S’agissant du CNRS, la thématique des EnR est même devenue le premier axe de recherche depuis plusieurs années, avec 28 % du budget de 364 M€ consacré à l’énergie par le CNRS et ses partenaires en 2016 (dont 129 M€ apportés par le CNRS).

Deux autres orientations fortes de la Stratégie nationale de la recherche sur l’énergie arrêtées en décembre 2016 sont :

– Le développement de technologies de rupture, telles la batterie sodium-ion, les cellules photovoltaïques à porteurs chauds, le stockage solide de l’hydrogène etc.

Ces divers champs d’études sont explorés par les grands opérateurs publics, avec certaines spécialisations selon les expériences et les opportunités de chacun, avec surtout des résultats à fort potentiel. Le CEA-LITEN est un acteur de référence au niveau européen sur les « technologies cœur » photovoltaïques (matériau, cellules, modules à très haut rendement, système électrique et intégration au réseau). Il joue un rôle moteur dans la mise en place d’une filière française et européenne complète de batteries au lithium pour le stockage et la conversion d’énergie et a également investi la recherche et développement dans le solaire thermique, la filière hydrogène et la transformation des bioressources en énergie. Il s’attache à privilégier les procédés ayant la plus faible empreinte environnementale et est un des leaders mondiaux sur les questions de gestion des pollutions ainsi que de densité et d’alternance des productions d’énergie. L’INSIS explore plusieurs pistes, mais mène en particulier un programme très volontariste sur le stockage et la distribution de l’énergie. La moitié des 200 brevets déposés en moyenne chaque année par l’IFPEN concerne les NTE. L’institut travaille plus logiquement sur la mobilité durable, les moteurs et les biocarburants ; il finalise actuellement des travaux sur les batteries électriques qui intéressent vivement des investisseurs chinois. En matière d’EnR électrique plus précisément, il mène des recherches pour renforcer les performances de l’éolien offshore et exploiter les énergies marines et aborde le stockage de l’énergie comme un important secteur de croissance.

– L’amplification de la recherche et développement et des innovations en lien avec le tissu industriel.

Mais s’il existe des structures de recherche partagées avec l’industrie, comme le laboratoire commun CNRS-Chimie ParisTech-EDF, on constate plus globalement un recul de la Recherche et développement privée en France depuis 2016 – et ce, malgré le soutien du crédit d’impôt-recherche (CIR). La plupart des études montrent ainsi qu’après un essor important à la suite de sa réforme en 2008, le CIR n’a aujourd’hui plus aucun effet multiplicateur sur la recherche ([9]).

C’est une des premières difficultés de la recherche française, y compris sur les thématiques porteuses : les organismes publics doivent très souvent compter sur leurs seules ressources pour mener à bien un projet non immédiatement commercialisable. Même quand des travaux sont à un stade technologiquement avancé, les étapes de modélisation, d’hybridation pour adapter les projets aux différents usages et de monitoring pour les tester en conditions réelles d’utilisation mobilisent difficilement les partenaires industriels. C’est ainsi que l’IFPEN a mis au point un nouveau procédé de production de biocarburant de deuxième génération, mais ne trouve, pour en expérimenter le prototype final, qu’une PME qui n’aura jamais la taille suffisante pour assurer ensuite son lancement commercial.

De fait, tous les grands opérateurs de la recherche française dans le domaine sont amenés à créer ou à favoriser la création de start-up.

L’INSIS, par exemple, a lancé ou accompagné le lancement de 319 start-up depuis 2000, dont 13 en 2016. 76 unités de recherche ont une start-up à leur actif. 22 sont toujours actives dans les domaines de l’« ingénierie verte », essentiellement sur les EnR, mais pas exclusivement.

Le CEA participe à la création d’en moyenne 12 start-up par an.

L’IFPEN est dans une situation différente puisque le code de l’énergie (articles L. 142-2 et suivants) lui permet toutes formes de valorisation des résultats de ses recherches, dont la création de filiales industrielles.

Enfin, à chaque étape d’un projet de recherche et d’innovation, les organismes doivent réinterroger ses espérances de valorisation et être prêts à suspendre un processus mené depuis plusieurs années si le contexte ne paraît plus assez porteur. Certes, ces réflexions relèvent d’une bonne gestion des fonds publics. Néanmoins, elles menaceraient directement les investissements en recherche fondamentale si les grands opérateurs français ne s’attachaient à lui réserver volontairement une partie de leurs budgets (20 à 25 % à l’IFPEN par exemple, 25 % au CEA). Elles les amènent aussi parfois à perdre le bénéfice d’une avancée technologique au risque d’être rattrapés par la concurrence internationale.

Car si les dépenses publiques de recherche dans les nouvelles technologies de l’énergie ont crû depuis 10 ans, la part des subventions de lÉtat a plutôt suivi une tendance inverse alors même qu’une « énergie propre, sûre et efficace » constitue le défi n° 2 de la Stratégie nationale de recherche et de l’ANR (qui a encore sélectionné en 2016 200 nouveaux projets sur ces thématiques pour un total d’environ 90 M€, dont un quart sur les EnR). Ces financements étatiques ne couvrent plus aujourd’hui que 25 à 30 % des coûts des projets de recherche-innovation, soit moins que les charges en personnels « sous autorisation de plafonds » investis sur ces chantiers. Elles ne permettent donc généralement pas de financer la maturation industrielle, ni a fortiori son lancement.

Les opérateurs qui disposent d’une surface budgétaire assez large et de nombreux brevets valorisables réussissent malgré tout à maintenir leurs efforts de recherche et développement. Le jeu déquilibriste est plus complexe pour les petits organismes (un constat encore plus criant pour les secteurs non énergétiques – voir la deuxième thématique). Et les plus gros peuvent être contraints dabandonner certains projets prometteurs. L’INSIS et le CEA ont ainsi chacun exprimé leur inquiétude quant au manque de visibilité sur les moyens qu’ils pourront ultérieurement allouer à leurs travaux sur l’hydrogène et les piles à combustibles, très porteurs selon eux, mais dont les financements PIA viennent d’être suspendus. Aussi votre Rapporteur réitère-t-il sa recommandation de mieux sécuriser les recherches menées dans un secteur aussi stratégique.

Enfin, tous disent atteindre leurs limites financières, ne pouvant supporter à la fois des coûts qui s’alourdissent malgré leurs efforts et une plus large prise en charge des développements industriels de leurs découvertes.

Le cas particulier de l’IFPEN

L’IFP Énergie nouvelles n’est pas à proprement parler un petit organisme. À 123,2 M€ (après gel et surgel opérés sur les 134,4 M€ inscrits en LFI pour 2017), la dotation qu’il reçoit du programme 190 reste la quatrième en volume de ce programme. L’institut bénéficie par ailleurs d’abondantes recettes propres (146,5 M€ prévus en 2017), en provenance non seulement de partenaires publics ou institutionnels (ANR, Ademe, Union européenne…), de la taxe d’apprentissage perçue par son école IFP School, de prestations diverses, mais aussi des redevances payées pour l’exploitation de ses 11 000 brevets vivants ainsi que des dividendes versés par ses multiples filiales. En effet, l’IFPEN privilégie historiquement la création de filiales et les prises de participations financières pour valoriser ses travaux.

Mais ces ressources propres varient d’une année à l’autre : les dividendes se sont élevés à 45 M€ en 2016 pour redescendre à 31 M€ en 2017 et les redevances sont passées de 49 M€ à 59 M€ sur la même période. Ces variations se contrebalancent souvent, mais pas toujours et elles ne suffisent plus à compenser la baisse continue de la subvention allouée par le programme 190 qui a reculé de 26,5 % entre 2006 et 2017.

En conséquence, depuis quelques années, cette dotation ne couvre plus l’intégralité des frais de personnel (150 M€). L’institut a réussi à réduire de 34 M€ ses charges de fonctionnement (hors masse salariale) sur la période 2010-2016, mais a dû également diminuer de 17 M€ ses dépenses de recherche fondamentale et augmenter le recours aux personnels temporaires ou sous contrat à durée déterminée. En dépit de ces efforts, ses recettes propres diminuant avec le fort ralentissement actuel de l’industrie pétrolière et parapétrolière, l’institut rencontrera des difficultés de trésorerie début 2018 si le solde du gel 2017 de 3,4 M€ n’est pas débloqué d’ici la fin de l’année. Convaincue, la Direction générale de l’énergie et du climat a fait une demande en ce sens.

Cette gestion budgétaire de lÉtat semble donc atteindre ses limites. Votre rapporteur s’interroge sur la cohérence de la stratégie de l’État à l’égard de l’institut. Après avoir non seulement toléré mais encouragé la création de filiales industrielles par ses établissements publics, le ministère en charge de l’économie a constaté certaines dérives et mesuré les risques qu’elles comportent. Aussi tendrait-il désormais à inciter les opérateurs publics à réduire leurs filiales dans un souci de plus grande transparence de leurs comptes, et pour diminuer les risques que des sociétés en difficulté ne contraignent leurs maisons-mères – et l’État en dernier ressort – à les sauver à grands frais.

La pertinence de ces préoccupations est indiscutable ; il y a toutefois une relative contradiction à compter toujours plus sur les dividendes apportés par ces filiales pour couvrir l’accomplissement des missions fondamentales de l’organisme. L’institut a déjà pratiqué des cessions sans conséquence majeure. Il n’en reste pas moins que le COP 2016-2020 se fonde aussi sur le doublement du chiffre d’affaires du groupe IFPEN d’ici 2025 !

Quoi qu’il en soit, on peut penser que la priorité serait déviter que ce rationnement public ne réduise les investissements de lIFPEN dans les activités à risque parce que positionnées sur les innovations de rupture et des segments précisément peu matures industriellement. Or, l’institut considère que « toute nouvelle baisse de la dotation budgétaire se traduirait par une réduction des effectifs, notamment des personnels de chercheurs, et par une limitation des moyens daction dIFPEN en contradiction avec les ambitions du COP 2016-2020 entérinées par les cinq ministères de tutelle ».

4.   Les difficultés à lever pour atteindre les objectifs

La deuxième difficulté majeure pour le déploiement des EnR dans notre pays est que, même lorsque les organismes de recherche sont allés jusqu’au bout du processus de conception, de mise au point des prototypes et d’expérimentation des nouveaux procédés, ils ne trouvent pas nécessairement de relais industriels en France. Plus exactement, ils trouvent assez aisément des entreprises françaises pour travailler sur les équipements et récupérer les techniques développées. Mais, hors des marchés haut de gamme ou de niches, il y a souvent peu d’appétence pour l’intégration des nouveaux procédés ou la production de matériaux innovants.

Les résultats de la recherche publique française ont ainsi du mal à être valorisés dans notre propre pays. C’est d’autant plus étonnant qu’il y a, en revanche, une forte « prédation de létranger pour les brevets français », observent opérateurs et ministères.

Votre Rapporteur a ainsi découvert plusieurs projets prometteurs que des entreprises étrangères suivent de près quand les industriels français disent préférer « consolider leurs acquis », rapporte un opérateur. Ces recherches sont certes longues, coûteuses, très capitalistiques et comportent une part de risque, mais elles sont également très rentables quand elles réussissent, à l’exemple du photovoltaïque qui était à l’origine une invention française.

Non seulement cette frilosité limite les investissements dans les EnR et fait rater des occasions d’améliorer les performances productives, de résoudre les contraintes, de réduire les coûts de développement et de faire émerger des filières industrielles nationales, mais elle aboutit aussi à faire perdre à la France des inventions dont elle a financé lémergence. BPi France commence à s’impliquer dans le soutien aux infrastructures de start-up innovantes, accompagnant leur déploiement grâce à son plan pour l’innovation NOVA et aux dotations en fonds propres qu’il lui permet d’accorder. Mais pour le moment ce sont surtout des investisseurs américains, chinois ou russes qui récupèrent les fruits de la recherche publique française !

Quels sont les blocages français ? Que faire pour les lever ? Comment faire mieux profiter nos concitoyens des retombées des réussites de nos laboratoires publics ? Autant de sujets de réflexion qui pourraient mériter la constitution d’une mission d’information parlementaire.

Interrogés, les acteurs évoquent des univers scientifique et industriel qui ont encore du mal à s’articuler, même si les chercheurs évoluent, encouragés par le déploiement, sous l’impulsion des PIA, de nouvelles structures de valorisation comme les SATT (sociétés d’accélération de transfert et de technologies), auxquels s’ajoutent les efforts de tous les organismes publics de recherche pour multiplier les coopérations public-privé.

Le manque d’établissements industriels de taille intermédiaire, capables de prendre le relais des start-up, est aussi un réel obstacle en France.

D’aucuns constatent également le peu de réflexion et de vision sur les produits et les services aux usagers et citoyens de demain de la part des acteurs privés français.

Les observateurs évoquent surtout un positionnement des entreprises qui attendent que les innovations de rupture fassent leurs preuves avant de se les approprier. La tendance est mondiale, mais serait plus marquée dans notre pays. Les ministères constatent que nos industriels renâclent à suivre, même lorsque lÉtat propose de porter la moitié des investissements.

Dans ce contexte, le soutien de lÉtat aux étapes intermédiaires de la recherche-innovation, voire jusquaux premiers développements, nen est que plus crucial pour conserver la propriété des brevets développés, s’assurer d’un retour sur investissement et passer enfin à la concrétisation des progrès attendus. En dépit de solides capacités propres, le CEA, par exemple, estime ses besoins en subventions complémentaires à 30 à 40 M€ pour travailler à la maturation des recherches industrielles.

Cela étant, indépendamment des questions de matériels à produire ou d’appropriation des innovations de rupture, les investisseurs énergéticiens dénoncent aussi divers obstacles sopposant au développement de leurs parcs. En matière d’éolien par exemple, ils se trouvent confrontés à l’ampleur des zones réservées ou contraintes (par l’armée, les radars civils, la protection de la biodiversité etc.) ou les réticences des populations locales, la multiplication des recours, les procédures complexes et l’instabilité réglementaire…

Il apparaît enfin qu’au-delà des enjeux d’une recherche dynamique et correctement valorisée, la première condition pour accéder concrètement au mix électrique souhaité est, de lavis de tous les acteurs rencontrés, la mobilisation dinvestissements substantiels dans le développement des capacités.

5.   Des réponses gouvernementales ambitieuses – mais réalisables ?

Le 6 juillet dernier, le Gouvernement a présenté son Plan climat pour la France, avec des annonces potentiellement structurantes telles la fermeture des cinq dernières centrales à charbon d’ici 2022 et la fin des véhicules thermiques en 2040 « pour accélérer la mise en œuvre de laccord de Paris », mais aussi l’encouragement de l’autoconsommation d’électricité dans les quartiers et les zones rurales et la « fin des énergies fossiles », visant « une électricité sans carbone ». Des perspectives qui pourraient représenter autant d’incitations au développement des EnR.

La présentation du Grand plan dinvestissement (GPI), en septembre, a précisé ensuite les moyens que le Gouvernement promet de mobiliser pour « développer les énergies renouvelables » :

– il s’engage à « sanctuariser les investissements dans les énergies renouvelables sur la durée du quinquennat » ;

– et à « investir 4,9 Mds€ supplémentaires dans la production dénergie renouvelable ». L’objectif est de l’augmenter de 70 % par rapport au niveau de 2016 pour que, notamment, la production annuelle d’électricité renouvelable atteigne 77 TWh en 2022 contre 32 TWh. Elle représenterait alors environ 30 % de notre consommation totale.

Cette enveloppe sera utilisée en particulier pour financer la construction de trois parcs éoliens offshore et de près de 10 000 mats d’éoliennes en plus.

– Enfin, 700 M€ viendraient soutenir le « développement des projets très innovants dans la transition énergétique permettant de démontrer lintérêt commercial dune technologie » à travers le PIA 3.

Ces crédits seraient destinés aux « technologies résolument nouvelles » qui doivent être testées pour éprouver leur efficacité avant d’être commercialisées et déployées à grande échelle.

Au regard des précédents constats, ces annonces sont bienvenues. Elles portent en outre un message clair sur la volonté affichée par le Gouvernement de faire avancer la transition énergétique.

Cela étant, les observateurs estiment que ces moyens restent insuffisants pour atteindre les objectifs annoncés. Ils soulignent aussi l’absence de calendrier d’engagements précis. Enfin, pour la recherche publique française, la mesure devrait avoir peu d’impact positif car ces fonds seront surtout destinés aux projets des entreprises ; les opérateurs pourraient même devoir réviser la programmation de leurs travaux avec le redéploiement des enveloppes du PIA 3. À suivre donc.

B.   Assurer la sécurité et la sûreté alimentaires

Lancés en juillet 2017, les États généraux de l’alimentation doivent aborder leur deuxième chantier en novembre sur la thématique : « Une alimentation saine, sûre, durable et accessible à tous ». De fait, ce ne sont pas les seuls enjeux de notre agriculture, mais ils sont centraux et même vitaux pour chacun d’entre nous.

Votre Rapporteur a souhaité voir quelles problématiques la recherche française explore plus particulièrement en matière de sécurité et de sûreté alimentaires et quelles réponses elle apporte, mais aussi si ses moyens sont à la hauteur des missions qui lui sont assignées.

1.   Des enjeux multiples

Les notions de « sécurité et sûreté alimentaires » recouvrent des objectifs divers. Tous les acteurs scientifiques et professionnels n’en donnent pas nécessairement les mêmes définitions.

Mais, comme le fait l’Agence nationale de la recherche, on peut rapporter l’idée de sécurité alimentaire à la définition posée en 1996 par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) : « La sécurité alimentaire est assurée quand toutes les personnes, en tout temps, ont économiquement, socialement et physiquement accès à une alimentation suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour leur permettre de mener une vie active et saine. »

Plus qu’une simple question d’adéquation entre l’offre et la demande, la sécurité alimentaire repose donc sur quatre piliers :

– laccès, autrement dit la capacité de produire sa propre alimentation ou de l’acheter, et donc de disposer d’un pouvoir d’achat suffisant pour le faire ;

– la disponibilité, qui reste un problème dans les zones où la production alimentaire est insuffisante pour couvrir les besoins et qui interroge sur la capacité de charge de la planète pour nourrir une population croissante et de plus en plus consommatrice ;

– la régularité, à la fois des disponibilités, des moyens d’accès à l’alimentation et de sa qualité : ce troisième pilier intègre ainsi la question de la nécessaire stabilité des prix et des revenus des populations vulnérables ;

– enfin, la qualité de lalimentation, des points de vue tant nutritionnel, sanitaire, sensoriel que socio-culturel. La sécurité alimentaire (food security) intègre ainsi la sécurité sanitaire ou, autrement dit, la salubrité des aliments (food safety), mais aussi l’objectif d’un apport adéquat en nutriments et énergie. Le concept de sécurité nutritionnelle vient compléter celui de sécurité alimentaire avec d’autres objectifs, comme l’accès de la population aux pratiques d’une alimentation équilibrée.

Même si certains peuvent les considérer comme des conditions indispensables, il n’est question ni d’autosuffisance alimentaire, ni de souveraineté alimentaire.

La sûreté alimentaire est, quant à elle, associée à la sécurité sanitaire de l’alimentation. Elle appelle à surveiller spécialement les sources de contamination d’origine microbiologique, chimique ou physique des aliments « de la fourche à la fourchette ».

Toutefois, une approche plus large de la sûreté alimentaire tend à se développer depuis les années 2000 intégrant également l’idée d’assurer à sa population une « nourriture saine », c’est-à-dire non inductrice de pathologies pouvant découler de produits anormalement chargés en sucre, sel ou lipides et d’une alimentation déséquilibrée (quantitativement et qualitativement).

Au niveau international dès le début des années 60, la FAO et l’OMS ont décidé de créer ensemble la commission du Codex Alimentarius chargée d’énoncer des normes de qualité des aliments (taux acceptables de contamination de l’alimentation par des organismes ou des produits chimiques, additifs autorisés, normes de production-transformation...). Plus récemment, les affaires de contamination de la nourriture par la dioxine (comme la contamination de bétail en Belgique en 1999 et en Italie en 2007), de la vache folle (encéphalopathie spongiforme bovine-ESB au cours des années 90), la grippe aviaire (depuis 2006) et les multiples épisodes de contamination par Escherichia coli, Listeria, Salmonella et d’autres micro-organismes ont fortement sensibilisé les consommateurs à ces questions. Les États ont alors mis en place des réglementations et des autorités de contrôle pour réduire les risques. Mais au-delà des contaminations « externes », se pose aussi la question de l’innocuité des nouvelles variétés de productions alimentaires. C’est ainsi que la question des OGM est également devenue un problème de sécurité sanitaire en Europe...

En matière de sécurité et de sûreté alimentaires, les points de vigilance sont donc nombreux et les champs d’études vastes. Les acteurs publics et privés, nationaux et internationaux sont aussi nombreux. Mais la recherche publique française nest pas la moins impliquée et influente.

2.   L’actualité des recherches

D’abord, la recherche publique française participe activement aux grands programmes mondiaux et européens menés sur ces questions. Notamment lANR, à travers ses appels à projets, a toujours soutenu des programmes totalement ou partiellement dédiés aux problématiques de la sécurité alimentaire et de la sécurité sanitaire des aliments, entre autres :

– ERA-NET Susfood et Susfood2 sur la production et la consommation alimentaires durables ;

– ERA-NET Arimnet et Arimnet2 qui concernent la recherche agricole en Méditerranée ;

– ERA-NET LEAP-AGRI sur l’agriculture et l’aquaculture durables pour la nutrition et la sécurité alimentaire en Afrique ;

– Programme spécifique entre les JPI FACCE (Joint programming initiative on agriculture, food security and climate change) et le Belmont Forum ([10]) sur la sécurité alimentaire et les changements d’utilisation des terres ;

– ERA-Net COFASP pour une coopération sur la pêche, l’aquaculture et la transformation des produits de la mer ;

– ERANET WaterWorks2015 pour une gestion durable des ressources en eau dans les secteurs de l’agriculture, la foresterie et l’aquaculture en eau douce.

L’ANR est souvent leader sur ces projets. Entre 2005 et 2016, le soutien spécifique à ces thématiques s’est élevé à 35,5 M€ : 7,27 M€ pour la sécurité alimentaire et 28,23 M€ pour la sécurité sanitaire. De plus, l’agence s’est engagée à participer au programme international PRIMA (Article 185 pour un partenariat pour la recherche et l’innovation en Méditerranée), à hauteur de 40 M€ sur dix ans, où les thèmes de la sécurité et de la sûreté alimentaires sont prépondérants. D’autres grands projets internationaux sur la durabilité des systèmes en lien avec les changements globaux sont en train d’être montés.

Des moyens substantiels sont également investis sur des programmes nationaux :

– le Programme national de recherche en alimentation et nutrition humaine (PNRA) à hauteur de 41,8 M€ sur 2005-2007 ;

– Alimentation et industries alimentaires (ALIA, 24,7 M€ sur 2008-2010) ;

– Systèmes alimentaires durables (ALID, 15,4 M€ sur 2011-2013).

Depuis 2014, dans les plans d’action annuels de l’ANR, un axe du défi n° 5 « Sécurité alimentaire et défi démographique » est dédié à l’alimentation et à la sécurité alimentaire. Cependant, des travaux de recherche sont également menés sur les questions plus globales de durabilité des systèmes (notamment alimentaire et productifs) relevant du défi n° 1 « Gestion sobre des ressources et adaptation au changement climatique », et d’autres encore dans des programmes non dédiés, tel le programme Contaminants et santé. En 2016, 27,5 M€ ont été alloués à des projets nationaux s’inscrivant dans le défi n° 1 et 10,2 millions d’euros à des projets internationaux. Dans le cadre du défi n° 5, ce furent respectivement 17,8 M€ et 6,8 M€.

En 2018, en sus des appels à projets européens (qui mobilisent des enveloppes d’environ 15 M€ en 2017), l’ANR propose de soutenir, dans la continuité de 2017, les projets nationaux sur les thématiques globales ou ciblées suivantes :

– Exploration de la biodiversité et analyse de l’écologie, de l’évolution et de la dynamique des espèces, des populations et des communautés (8 M€ dédiés en 2017) ;

– Dynamiques des écosystèmes et de leurs composants en vue de leur gestion durable (5 M€) ([11]) ;

– Biologie des animaux, des organismes photosynthétiques, des micro-organismes d’intérêt pour les ressources biologiques et leurs modèles dédiés (13 M€) ([12]) ;

– Biologie de la nutrition, alimentation, systèmes alimentaires sains et durables, et sécurité alimentaire mondiale (5 M€) ;

– Contaminants, écosystèmes et santé (6 M€) ([13]) ;

– Bioéconomie : technologies (chimie, biotechnologie, procédés) spécifiques et approches système ;

– Interactions Homme-environnement : sociétés, changements climatiques, développement durable des territoires et sécurité alimentaire (4 M€) ;

– enfin, Innovations scientifiques et technologiques pour accompagner la transition écologique (5 M€).

Ces travaux visent à accompagner la mutation de l’agriculture et de l’élevage vers plus de durabilité, à permettre une valorisation accrue des bio-ressources (par les biotechnologies notamment) et à favoriser une gestion plus durable des écosystèmes, de la biodiversité et des bio-ressources. On est aujourd’hui au stade de la publication des travaux issus des programmes de recherche initiés ces dix dernières années. Cependant, les résultats de certains projets concernant la sécurité sanitaire des aliments soutenus par lANR ont déjà eu un effet sur les législations comme l’interdiction du Bisphénol A dans les contenants alimentaires en France ou la mise en place d’une stratégie nationale de gestion des risques sanitaires sur les produits de la pêche au Maroc. Par ailleurs, le soutien de l’agence à des projets de recherche en partenariat public-privé facilite le transfert des résultats de la recherche dans l’industrie agro-alimentaire pour modifier les pratiques et renforcer la sécurité sanitaire.

Les objectifs de sécurité et de sûreté alimentaires sont par ailleurs au cœur des missions de plusieurs opérateurs des programmes 172 et 190 de la mission Recherche et enseignement supérieur.

L’Institut national de recherche agronomique (INRA) est le premier d’entre eux. Avec ses 13 000 agents, il est le deuxième organisme de recherche agronomique international, acteur incontournable de la recherche mondiale pour l’agro-alimentaire, la forêt, l’aquaculture, les biotechnologies, l’agro-écologie, l’environnement et les productions animales et végétales. Il gère un portefeuille de 354 brevets, 470 variétés végétales, 429 licences de brevets, savoirs faire et bases de données et 1019 licences sur variétés. En 2016, plus 50 % de ses travaux ont été co-publiés avec un pays tiers. Son document d’orientation #Inra2025 s’articule autour de cinq priorités scientifiques : sécurité alimentaire dans un contexte de transitions, multi-performance des agricultures, adaptation des systèmes agricoles au dérèglement climatique, systèmes alimentaires sains et durables et usages des bio-ressources.

Sur la première thématique, l’INRA est très actif sur la scène internationale à travers ses méta-programmes pour comprendre les déterminants, les processus et les conséquences des transitions en cours, à des échelles spatiales complémentaires de celles de ses autres priorités thématiques. Mené conjointement avec le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), et en collaboration avec l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le programme Transition pour la sécurité alimentaire mondiale ou Glofoods explore de nouvelles questions aux interfaces des différents aspects de la sécurité alimentaire : comment évolueront les surfaces agricoles dans les prochaines décennies ? Sous l’influence de quels facteurs ? Comment s’exprimeront les tensions entre sécurité alimentaire et lutte contre le changement climatique ? Leur étude prospective Agrimonde-Terra tente de répondre à ces questions grâce à cinq scénarios d’évolution des usages des terres et de la sécurité alimentaire.

L’INRA a également participé à une vaste étude, menée dans 12 pays pendant cinq ans, relative à l’impact des insectes pollinisateurs sur la sécurité alimentaire mondiale. Publiée en 2016, elle a montré que les cultures pollinisées par les insectes assurent plus du tiers de notre alimentation à l’échelle mondiale, et qu’en augmentant le nombre et la diversité des insectes pollinisateurs, on accroît aujourd’hui le rendement de ces cultures de plus de 20 % en moyenne à l’échelle mondiale.

Concernant la thématique Systèmes alimentaires sains et durables, l’INRA explore différentes pistes pour améliorer les performances nutritionnelles des productions agricoles. Par exemple, son projet Agralid confirme que le mode de production des filières animales est un levier efficace d’amélioration des apports en acides gras dans la population française. De nouvelles matières premières alimentaires sont testées dans le but à la fois d’optimiser la qualité nutritionnelle des produits et de réduire l’impact environnemental et le coût de production.

Une autre étude s’attache à déterminer sous quelle forme un aliment devrait être consommé pour limiter la sensibilisation allergique à celui-ci. C’est un enjeu de santé publique alors que la fréquence des allergies alimentaires augmente (5 % des adultes et 8 % des enfants). Elle a permis de montrer que les traitements thermiques peuvent réduire la capacité déclenchante des allergènes.

Parmi les opérateurs du programme 172, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) agit à un niveau plus global. La plupart de ses travaux de recherche contribuent directement ou indirectement à l’objectif de sécurité alimentaire mais à un échelon mondial :

– par l’augmentation de la production agricole (amélioration génétique, lutte contre les maladies, amélioration des systèmes de culture, réduction des pertes etc.) ;

– par l’amélioration de la compétitivité des productions paysannes et des revenus des agriculteurs et des acteurs des filières agro-alimentaires (amélioration de la qualité, réduction des coûts) ;

– par l’amélioration de la qualité des aliments, notamment sanitaire, mais aussi nutritionnelle et sensorielle, et par la valorisation des produits locaux traditionnels.

Il reçoit une subvention pour charges de service public de 130,4 M€ du programme 172 qui sera reconduite en 2018. Elle est complétée par 0,6 M€ en provenance du programme 206 Sécurité et qualité sanitaires de lalimentation.

L’Institut Écologie et environnement (INEE) du CNRS a également une approche globale. Il assure l’interface des travaux intégrant les problématiques des sciences biologiques, des géosciences et des sciences humaines et sociales pour permettre d’apporter « une réponse aux problématiques liées au changement global, à la mondialisation des activités humaines, aux conséquences des actions de lhomme sur lenvironnement et à ses effets sur la santé ».

Pour ce faire, 89 unités et 17 groupements de recherche lui sont rattachés à titre principal, rassemblant 7 029 personnels. L’INEE dispose d’un budget de fonctionnement d’environ 14 M€.

L’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’agriculture et l’environnement (IRSTEA, ex-CEMAGREF) est un organisme de recherche qui intervient dans les domaines de la gestion des ressources naturelles et des risques associés, des systèmes écologiques aquatiques et terrestres et des territoires à dominante rurale, montagnards et péri-urbains. Il travaille par ailleurs sur les technologies autour de l’eau, les déchets, les agro-systèmes et la sûreté des aliments. Sur cette dernière thématique, l’institut étudie notamment les répercussions des ruptures de température dans les chaînes de conservation des aliments et met au point, dans son projet Flexifroid (2015-2019), un outil pour aider les industriels à optimiser la gestion de leurs installations frigorifiques dans l’objectif de concilier efficacité énergétique et préservation de la qualité et de l’hygiène des aliments.

Enfin, la sûreté alimentaire est une des premières missions de lAgence nationale de sécurité sanitaire de lalimentation, de lenvironnement et du travail (ANSES). L’établissement public résulte de la fusion, en 2010, de l’AFSSA (l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments) et de l’AFSSET (l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail). Il doit contribuer à la sécurité sanitaire des aliments, de l’environnement et du travail, ainsi qu’à la protection de la santé et du bien-être des animaux et à celle de la santé des végétaux. Pour ce faire, l’ANSES réalise l’évaluation des risques qui sont repérés, fournit aux autorités compétentes toutes les informations sur ces risques ainsi que l’expertise et l’appui scientifique et technique nécessaires à l’élaboration des dispositions législatives et réglementaires et à la mise en œuvre des mesures de gestion des risques. L’agence assure par ailleurs des missions de veille, d’alerte, de vigilance et de référence. En 2016, elle a procédé au déploiement du dispositif de phyto-pharmacovigilance. Elle assure également la gestion et le suivi des autorisations de mise sur le marché de produits réglementés (notamment les produits phytosanitaires et matières fertilisantes depuis 2015 et les substances biocides à compter de 2016). Elle finance enfin, à raison de 5 M€ par an, certains travaux de recherche très ciblés pour documenter des sujets insuffisamment explorés par ailleurs.

Dans son actualité récente, l’ANSES a publié, le 12 juillet 2017, une étude sur l’alimentation des Français et a par ailleurs lancé un travail d’évaluation des risques associés à la présence de nanomatériaux dans l’alimentation.

Est également attendu le bilan qui doit comparer les bénéfices et les risques liés aux usages des produits phytopharmaceutiques autorisés en France contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes avec ceux liés aux usages de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles et ce, afin de préparer l’interdiction de ces produits à compter du 1er septembre 2018. Les dégâts qu’ils provoquent parmi les insectes pollinisateurs (notamment) ont en effet de considérables impacts sur les productions agricoles, et donc potentiellement sur la sécurité alimentaire. L’ANSES n’a jusqu’à présent publié qu’un avis « relatif à la méthode didentification des alternatives existantes et à son application à une étude de cas » le 8 mars dernier.

Le dynamisme de la recherche publique nationale ne doit pas cependant occulter la faiblesse de la recherche privée dans lindustrie agro-alimentaire française. Elle est en effet considérée comme peu innovante avec une faible intensité de recherche ([14]). La part des dépenses d’innovation dans le chiffre d’affaires 2012 était proche de 1 % alors qu’elle est de 4,5 % dans les autres industries manufacturières en France ([15]). Cela étant, le développement des LABEX, grâce aux PIA, a tout de même fait beaucoup évoluer les collaborations public-privé sur des secteurs comme les bio-technologies.

Enfin, la recherche publique rencontre elle-même plusieurs limites :

– En dépit des constants progrès de la science, les phénomènes étudiés se compliquent avec les changements en cours. On commence par exemple à percevoir des « effets cocktail » des différentes substances qui ont été diffusées, sans que l’on soit capable d’en mesurer les conséquences précises car celles-ci ne sont pas seulement l’addition des effets de chaque substance, mais aussi le fruit des mélanges ;

– Quels que soient la qualité de ses travaux et l’intérêt des résultats obtenus, il faut du temps pour en transférer les enseignements et diffuser les connaissances aux utilisateurs intermédiaires (agriculteurs, éleveurs, artisans…) et plus encore aux utilisateurs finaux que sont les consommateurs.

Une étude menée par l’INRA sur l’évaluation des coûts et des bénéfices de diverses recommandations alimentaires et nutritionnelles fait néanmoins apparaître que pour bon nombre de recommandations, les politiques dinformation des consommateurs présentent un bilan coût-bénéfice favorable, suggérant qu’il est pertinent d’intensifier ces campagnes ;

– L’appropriation des nouvelles données est parfois compliquée par des rumeurs ou des polémiques. Si le monde de la science ne parvient pas toujours à s’entendre immédiatement sur les analyses d’une situation ou d’un phénomène, c’est souvent dans la confrontation des approches que ses progrès se sont construits. Divers scandales récents montrent toutefois que la contradiction est quelques fois montée de toutes pièces, par exemple pour semer le doute sur les résultats d’une étude qui viennent contrarier des intérêts économiques puissants. Ces discours contraires entretiennent une grande confusion.

Face à ces dérives, face aux peurs alimentées par les rumeurs, ou tout simplement par les rapides transformations que vit notre époque, il y a un enjeu à documenter correctement les problématiques émergentes. C’est un des rôles fondamentaux de la recherche que de rationaliser les discussions entre consommateurs et producteurs ou ensemenciers. Bénéficiant d’une présomption d’indépendance intellectuelle et de souci de l’intérêt général grâce à son financement institutionnel, la recherche publique est particulièrement désignée pour assurer ce rôle ;

– Mais cela pose avec d’autant plus d’acuité le problème des tensions financières que subissent certains des opérateurs les plus concernés.

3.   Les moyens de la recherche française - à la hauteur des besoins ?

La situation de l’INRA paraît plutôt confortée dans le contexte budgétaire actuel. L’institut fait partie des plus grands organismes de la recherche publique française. En 2016, son budget s’est élevé à environ 852 M€, largement financé par des subventions pour charges de service public représentant un total de 670 M€ (dont 668,6 M€ du programme 172) complété par 129 M€ de produits de ses contrats de recherche (143,5 M€ en 2017), 9 M€ de redevances pour ses brevets, 13 M€ pour des prestations de services et quelques ressources financières.

La dotation du programme 172 devait progresser de + 12,6 M€ entre les crédits votés pour 2016 et ceux pour 2017. Il est prévu qu’elle augmente encore de 5,7 M€ en 2018 (+ 0,8 %) – pour couvrir des mesures salariales.

L’ANSES ne perçoit du programme 190 que 1,6 M€, montant qui sera reconduit en 2018 (voir commentaires en partie I) ; mais elle est principalement financée par les programmes 206 Sécurité et qualité sanitaire de lalimentation, 181 Prévention des risques et 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins desquels il devait recevoir un total de 92,3 M€ en 2016, ramené à 91,6 M€ en 2017.

Ces dotations sont complétées par des taxes relatives aux médicaments vétérinaires, aux produits phytopharmaceutiques, biocides... (25,7 M€ en 2016, 35 M€ prévus en 2017), ainsi que par des subventions issues de conventions avec l’État, des collectivités territoriales, l’Union européenne et d’autres établissements publics de recherche. L’ANSES a pu ainsi atteindre 138,9 M€ de ressources en 2016. Toutefois ses dépenses se sont élevées à 140,8 M€ sur le même exercice, lui imposant un résultat déficitaire de 2,3 M€.

À l’instar des autres opérateurs, l’agence s’est attachée à réaliser des économies sur ses frais de fonctionnement. Cependant, la loi et l’État lui ont assigné plusieurs missions nouvelles sans toujours leur associer de nouveaux moyens. En 2016, l’ANSES a pu obtenir une augmentation de la part qui lui est affectée sur la taxe sur les produits phytosanitaires de 4,2 à 6,8 M€ pour financer l’instruction des demandes de mise sur le marché des produits réglementés (produits phytopharmaceutiques, biocides, fertilisants, médicaments vétérinaires et produits du tabac). Mais son plafond d’emplois est resté limité et a même été réduit de 6 ETP en 2017.

Or, dans ces domaines d’activités, la charge de travail, qui dépend du nombre des demandes déposées par les industriels, va fortement s’alourdir dans les années à venir pour chacun de ces produits : le prochain renouvellement des autorisations communautaires pour de nombreuses substances actives entraînera le renouvellement d’un plus grand nombre d’autorisations de produits phytosanitaires les intégrant ; de même avec l’arrivée de nouvelles substances biocides et le renouvellement progressif des autorisations en cours ; enfin, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne imposera de répartir les dossiers relatifs aux médicaments vétérinaires aujourd’hui évalués par l’agence anglaise. La capacité de lANSES à sadapter aux variations des flux des dossiers est un problème structurel qui se pose depuis les débuts de lagence. Lenjeu devient aujourdhui crucial si l’on veut éviter d’augmenter les stocks à traiter et les délais, voire de remettre en cause sa position dagence de référence (sur 92 mandats) non seulement pour la France mais aussi pour tout le Sud de l’Europe. La loi de finances pour 2015 avait autorisé l’ANSES à dépasser ses plafonds d’emplois pour traiter les stocks, mais la mesure était temporaire.

Pour 2018, l’agence a obtenu une nouvelle hausse de ses emplois autorisés, comme une « correction technique » admise par les ministères de l’économie et de tutelle. Les dotations qu’elle recevra, hors programme 190, progresseront en conséquence à 95,1 M€. Mais elle espère une solution plus durable en étant autorisée à indexer le plafond des emplois consacrés au traitement des demandes de mise sur le marché à l’évolution des volumes des taxes affectées. Ceux-ci variant en fonction du nombre des dossiers déposés, la corrélation serait légitime et opérationnelle. Au surplus, il serait logique que les industriels payent l’intégralité du service qui leur est rendu – qu’ils apprécient d’autant plus que le système leur évite de payer des évaluations scientifiques. L’agence rejette en revanche l’idée d’un financement direct de ces services qui pourrait lui valoir d’être soupçonnée d’avoir partie liée aux intérêts privés.

LANSES sinquiète par ailleurs de ses capacités à faire face au volume grandissant des saisines lui demandant d’explorer les nouvelles problématiques scientifiques. Elle n’en a jamais refusé jusqu’à présent, quand bien même ses moyens d’expertise n’augmentent pas. Mais ses délais d’études s’allongent ; elle commence à prioriser ses travaux et n’exclut pas de finir par refuser des sollicitations.

Au-delà de la question de ses moyens, l’ANSES milite pour la promotion dun axe de recherche européen sur les sujets de sécurité sanitaire. Les États-Unis ont un programme fédéral (le National Toxicology Program ou NTP) doté de 140 M€ ; il n’a pas d’équivalent en Europe et, en France, l’agence ne peut consacrer que 5 à 6 M€ à ces travaux.

De fait, observe-t-elle, entre les études financées par les industriels et des travaux de recherche publique aux moyens plus limités et qui ne visent pas nécessairement à investiguer des effets sanitaires potentiels ou qui prennent mal en compte les enjeux sanitaires des technologies émergentes, il y a un réel manque de connaissances scientifiques sur les sujets majeurs de sécurité sanitaire dans un contexte de fortes incertitudes et d’attente sociétale aiguë en matière de recherche publique indépendante. Le débat de société sur ces enjeux de santé publique y gagnerait si, dans les cas spécifiques où les connaissances sont insuffisantes, des moyens publics dédiés pouvaient être mobilisés par les agences sanitaires pour mener des études d’envergure, en toute indépendance, et dans des délais compatibles avec leurs travaux d’expertise. L’Agence appelle donc à la mobilisation au niveau européen de financements publics consacrés à la réalisation de ces travaux inter-agences.

L’IRSTEA se trouve confronté, pour sa part, à des pratiques de financement institutionnel plutôt dysfonctionnelles qui pèsent fortement sur les organismes de recherche de dimensions plus modestes.

Issu des fusions successives de plusieurs anciens opérateurs, non seulement l’institut a peu dégagé d’économies d’échelle de ces réformes, malgré d’importants efforts de réduction des effectifs (– 74 ETPT entre 2011 et 2016 sur un plafond d’emplois initialement fixé à 997) ; mais il a hérité d’un réseau de sites et d’équipes très étendu sur l’ensemble du territoire national. Il n’a pas les ressources suffisantes pour entretenir correctement ce patrimoine immobilier, mais n’a pu fermer une seule de ces installations face au refus de la collectivité concernée.

Ses dotations ont bien été légèrement renforcées ces dernières années : progressant de 58,98 M€ en 2016 à 60,4 M€ en 2017 sur le programme 172, elles seront stabilisées à 60,86 M€ en 2018 (+ 0,8 %). Elles sont complétées par des subventions des programmes 142 et 181, évoluant aussi positivement sur la même période : de 23,76 M€ à 23,89 M€ et 24,34 M€ en 2018. L’institut dispose également de ressources propres, à hauteur de 27,8 M€ en 2016. Celles-ci sont issues pour l’essentiel de contrats de recherche. Le total a représenté environ 108 M€ en 2016, permettant de financer, après prélèvement de 4,9 M€ sur la trésorerie, 113 M€ de dépenses.

Or, les contributions d’origine publique tendent à baisser, réduisant ses marges d’action. Mais le problème est plus structurel, découlant du sous-financement des appels à projets ministériels : les ministères opérationnels qui le saisissent de leurs demandes de recherche ne payent toujours qu’une faible partie des coûts réels de ces travaux. Aujourd’hui, l’IRSTEA et d’autres opérateurs de recherche ne parviennent même pas à couvrir les frais de fonctionnement et de personnels correspondants. Ce déséquilibre financier, associé à l’absence de prise en compte des coûts induits par le GVT dans la fixation de sa subvention pour charges de service public, a créé des difficultés budgétaires qui ont contraint l’institut à réduire ses emplois : il a ainsi perdu en moyenne 10 postes permanents chaque année, jusqu’à 14 en 2016. Aujourd’hui, même en ne remplaçant pas les prochains départs à la retraite (environ une quinzaine), il ignore s’il pourra payer l’ensemble des personnels en fonction. Il est pourtant seul à assurer certaines missions comme le suivi de la qualité des milieux aquatiques ou celui des risques d’inondations, d’avalanches ou d’incendies de forêts.

Le déséquilibre est devenu si criant que l’ANR a mis en place deux mécanismes pour prendre en charge une partie des coûts indirects des établissements publics quand ces contrats relèvent d’appels à projet qu’elle suit :

– quand un établissement public est lui-même porteur d’un projet financé par l’ANR, il reçoit pour ses « frais d’environnement » (les coûts de fonctionnement induits pour la structure mais aussi les frais de fonctionnement du cadre de travail propice aux recherches de haut niveau qu’il offre) un forfait global, complémentaire à l’enveloppe budgétaire du projet (l’aide allouée), équivalent à 8 % de l’ensemble des coûts admissibles à cette aide ([16]) ;

– et quand l’établissement « héberge » seulement le porteur de projet, il reçoit un « préciput » ([17]) (en reconnaissance également de la qualité de l’environnement de travail qu’il apporte aux recherches) à hauteur de 11 % de l’enveloppe d’aide attribuée. Seuls les établissements publics de recherche et les fondations reconnues d’utilité publique peuvent en bénéficier.

Le passage à un système de coûts indirects forfaitaires remplaçant le préciput a été évoqué à plusieurs reprises et réclamé par de nombreux bénéficiaires. La notion d’hébergeur dans le cadre du préciput n’est pas toujours très claire. De plus, son montant ne couvre pas l’intégralité des frais de fonctionnement pris en charge par la structure. De nombreux établissements soulignent qu’ils doivent puiser dans leur subvention pour charges de service public pour assumer les coûts induits supplémentaires inhérents aux projets de recherche. Un alignement sur le mécanisme du programme européen Horizon 2020, qui a été simplifié et repose sur un coût forfaitaire d’un montant de 25 %, est en particulier réclamé.

Toutefois, l’ANR considère que cette solution se heurte à certaines difficultés : contrairement à une subvention forfaitaire, le préciput doit être justifié (un compte rendu annuel d’utilisation doit notamment être transmis à l’agence). Un dispositif de coûts indirects forfaitaires entrerait en contradiction avec le principe de justification au premier euro exigé par la LOLF et nécessaire à toute utilisation des fonds publics.

Au demeurant, il serait légitime de réinterroger les pratiques de financement des ministères.

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné pour avis, sur le rapport pour avis de M. Gérard Menuel, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (voir compte rendu officiel de la commission élargie du mardi 24 octobre 2017, sur le site Internet de l’Assemblée nationale) ([18]).

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*     *

À l’issue de la commission élargie, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a délibéré sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

M. Gérard Menuel, rapporteur pour avis. Comme je l’ai déjà souligné, les crédits des programmes 172, 190 et 193 augmenteront significativement. Je déplore que bon nombre d’organismes de recherche n’aient pas les moyens correspondants à leurs besoins réels. Mais au regard de l’effort financier qui est proposé pour 2018, je donne un avis favorable.

*

La commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

 

 

 


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   liste des personnes auditionnées

 

Ministère de lEnseignement supérieur, de la recherche et de linnovation - Direction générale de la recherche et de linnovation

– M. Pierre Valla, adjoint au directeur général

– Mme Marie-Hélène Tusseau-Vuillemin, directrice scientifique du secteur Environnement univers, agronomie, écologie, sciences du système terre et de l’univers

– M. Frédéric Ravel, directeur scientifique du secteur Énergie, développement durable, chimie et procédés

– M. Thierry Bergeonneau, chef du service Performance, financement et contractualisation avec les organismes de recherche

Ministère de la Transition écologique et solidaire - Commissariat général au développement durable

– M. Serge Bossini, directeur de la recherche et de l’innovation

– M. Clément Seitz, chef du bureau du budget, des affaires financières et des marchés

Agence nationale de la recherche (ANR)

– M. Arnaud Torres, président-directeur-général par intérim et directeur des investissements d’avenir et de la compétitivité

– M. Frédéric Monot, responsable du département scientifique EERB (Environnements, écosystèmes, ressources biologiques)

– M. Olivier Spalla, responsable du département scientifique SPICE (Sciences physiques, ingénierie, chimie, énergie)

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

– Mme Stéphanie Thiébault, directrice de l’Institut national de l’écologie et de l’environnement (INEE)

– M. Abdelilah Slaoui, directeur adjoint scientifique en charge de la cellule Énergie de l’Institut des sciences de l’ingénierie et des systèmes, responsable de la cellule énergie (INSIS)

– M. Antony Aly, chargé des affaires publiques

 

Commissariat à lénergie atomique et aux énergies renouvelables (CEA)

– M. Christophe Gégout, administrateur général adjoint

– Mme Marie-Astrid Ravon-Berenguer, directrice des finances et des programmes

– M. Jean-Pierre Vigouroux, chef de service des affaires publiques

Et lors de la visite des sites du CEA Tech-LITEN à Grenoble et Chambéry

– Mme Hélène Burlet, adjointe directrice en charge des programmes au Laboratoire d’innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (LITEN)

– ainsi que les responsables et les équipes Hydrogène, Technologies solaires, Batteries, Efficacité énergétique…

Institut français du pétrole-Énergies nouvelles (IFPEN)

– M. Didier Houssin, président

– M. Georges Picard, directeur général adjoint chargé de l’administration et des filiales

– M. P.-H. Bigeard, directeur général adjoint chargé de la recherche et de l’innovation

– Mme Armelle Sanière, responsable des relations publiques

Et lors de la visite du site de l’IFPEN à Rueil-Malmaison

– M. S. Henriot, directeur des Systèmes moteurs et véhicules

– Mme V. Ruffier-Meray, directrice Physico-chimie appliquée

– M. Th. Becue, directeur Mécanique appliquée

– ainsi que les responsables et les équipes Mécatronique, Biotechnologie et chimie de la biomasse, énergies nouvelles…

Agence nationale de sécurité sanitaire, de lalimentation, de lenvironnement et du travail (ANSES)

– M. Roger Genet, directeur général

– Mme Caroline Gardette, directrice générale adjointe

– Mme Alima Marie, Directrice de cabinet et directrice de la communication et des relations institutionnelles

– Mme Marthe-Louise Boye, chef de cabinet

Institut national de recherche en sciences et technologies pour lenvironnement et lagriculture (IRSTEA)

– M. Pierrick Givone, président par intérim

– Mme Laurence Fournaison, directrice de l’Unité de recherche Génie des procédés frigorifiques

– M. Pierre-Yves Saint, conseiller du président

– Mme Aliette Maillard, directrice de la communication

EDF-Énergie nouvelles

– M. Antoine Cahuzac, directeur général

– M. Bruno Fyot, directeur général délégué

– M. Tristan Zipfel, directeur de cabinet

 

 


([1]) Définie par la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.

([2]) Tel le Fonds unique interministériel – FUI – qui associe les collectivités territoriales pour financer des projets collaboratifs publics-privés au sein des pôles de compétitivité.

([3]) Dont 2 ont arrêté leur activité en 2015 et 2016.

([4]) Selon les rapports annuels de performance, les arriérés de contribution française à l’ESA sont affichés au passif du bilan du CNES - couverts à l’actif par une créance sur l’État d’un montant équivalent – à des montants supérieurs : 213 M€ en 2013, 218,6 M€ en 2014 et 209,4 M€ en 2015 (encore 375 M€ en 2016). Mais depuis 2010, cette « dette » est évaluée par l’ESA selon le nouveau règlement financier de l’Agence qui la définit comme la différence entre le montant cumulé des contributions effectivement versées par un État et sa part de la consommation effective cumulée de chaque programme. La consommation des programmes est calculée sur la base des paiements effectifs. Ce sont les chiffres retenus dans le présent tableau.

([5]) Terme désignant la partie de l’enveloppe de financement allouée par l’ANR à un projet qui revient à l’organisme de recherche dans lequel le chercheur ou l’équipe portant le projet exerce ses fonctions. C’est la reconnaissance du rôle joué par l’organisme « hébergeur » dans la mise en place d’un environnement de travail favorisant l’excellence des recherches.

([6]) Dont l’ANR suit 8 des actions pour un budget initial de 2,85 Mds€.

([7]) Entreprises de taille intermédiaire.

([8]) Les versements étant effectués par trimestre, de nouvelles mises en réserve (surgels) voire des annulations supérieures à la mise en réserve peuvent encore survenir.

([9]) Cf. Le rapport Études d’impact du CIR. Revues de littérature, remis par l’OFCE au ministre en charge de la recherche, M. Thierry Mandon, en début d’année.

([10]) Le Belmont forum est un groupe de bailleurs de fonds internationaux promouvant la recherche sur les changements environnementaux et intervenant dans les conseils scientifiques internationaux.

([11]) L'enjeu est de mieux comprendre comment les changements globaux, qu’ils concernent l’utilisation des terres, l’exploitation des ressources océaniques et continentales, la biodiversité ou le climat, vont interagir pour affecter le devenir des écosystèmes d’intérêt agronomique, forestier, halieutique et aquacole en relation ou non avec les écosystèmes peu ou pas anthropisés. Il s’agit, sur cette base, d’élaborer des stratégies de gestion et d’adaptation dans des situations économiques, sociales et culturelles différenciées et de répondre à des questions importantes sur l’impact de modes de gestion des milieux et des ressources sur l’environnement et les services écologiques, sur l’évolution vers des modes de gestion durables, sur les complémentarités à rechercher entre écosystèmes naturels et écosystèmes à vocation de production pour favoriser la disponibilité de services écosystémiques et de proposer des stratégies d’accompagnement politique de la transition écologique dans ces écosystèmes de production.

([12]) Leur connaissance plus approfondie devrait participer à la sécurité alimentaire et à la durabilité des écosystèmes agricoles, forestiers, aquacoles. Il s’agit également de favoriser des projets plus finalisés, notamment pour définir les caractéristiques d’adaptation des variétés et des races aux évolutions globales, développer et évaluer des modèles de production renouvelés ou alternatifs plus adaptés aux conditions locales, soucieux d’éthique et de durabilité et assurant le bien-être animal.

([13]) Il s'agit d’améliorer les connaissances sur la caractérisation et le devenir des contaminants physiques, chimiques (dont les pesticides) ou biologiques ainsi que leurs effets sur la santé humaine, animale et végétale et sur les écosystèmes dans le concept « One Health ». Sur ce thème, sont notamment attendus des projets sur :

i) la détermination de l'exposome (incl. cocktail de contaminants) ;

ii) les contaminants, la métrologie environnementale, les bio-indicateurs et bio-marqueurs ;

iii) les effets des contaminants sur la santé et les écosystèmes ;

iv) l’éco-dynamique des contaminants et interactions ;

v) les mécanismes adaptatifs chez les organismes exposés ;

vi) l’évaluation de nouveaux outils de gouvernance des risques liés aux contaminations.

([14]) Cf. Mémento IAA 2013, Agreste, ministère de l’Agriculture.

([15]) Cf. Panorama des industries agroalimentaires, édition 2016, ministère de l’Agriculture.

([16]) Sans compter les frais d’environnement.

([17]) Cf. la définition du dispositif en page 19 du présent rapport.

([18]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/cr/c002.asp