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N° 2031

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 juin 2019.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LAMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, après engagement de la procédure accélérée, relatif à lénergie et au climat (n° 1908).

PAR Mme Nathalie SARLES

Députée

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 Voir le numéro : 1908.

 


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  SOMMAIRE

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Pages

Avant-Propos

Synthèse

Commentaires des articles du projet de loi

Chapitre Ier Objectifs de la politique énergétique

Article 1er (article L. 100-4 du code de lénergie) Modification des objectifs de la politique énergétique

Article additionnel après larticle 1er (article L. 111-9 du code de la construction et de lhabitation) Méthode de calcul du facteur de conversion en énergie primaire de lélectricité utilisée pour les bâtiments neufs

Article additionnel après larticle 1er (article L. 31155 du code de lénergie) Création dun plafond de capacité nucléaire installée en 2030 et 2035

Article additionnel après larticle 1er (article L. 311-5-7 du code de lénergie) Extension du plan stratégique des exploitants aux deux périodes de la programmation pluriannuelle de lénergie

Article additionnel après larticle 1er Rapport annuel du Gouvernement sur la compatibilité du projet de loi de finances avec lobjectif international de limitation du réchauffement climatique

Chapitre II Dispositions en faveur du climat

Article 2 (chapitre II bis du titre III du livre Ier et article L. 222-1 D du code de lenvironnement, articles L. 141-4 et L. 145-1 du code de lénergie) Création du Haut Conseil pour le climat

Article additionnel après larticle 2 (article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales) Prise en compte des avis du Haut Conseil pour le climat par les schémas régionaux daménagement, de développement durable et dégalité des territoires

Article 3 (article L. 311-5-3 du code de lénergie) Limitation des émissions liées à la production délectricité

Article additionnel après larticle 3 Soutien, à titre expérimental, au déploiement de technologies propres dans les zones couvertes par un plan de protection de latmosphère

Article additionnel après larticle 3 (article L. 111-10-4 du code de la construction et de lhabitation) Incitation à la rénovation énergétique des logements mal isolés lors dune mutation

Article additionnel après larticle 3 (article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) Ajout dun plafond de consommation énergétique aux critères définissant un logement décent

Article additionnel après larticle 3 (article 5 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte) Interdiction de location des passoires énergétiques

Article additionnel après larticle 3 (article L. 321-1 du code de la construction et de lhabitation) Accès de lAgence nationale de lhabitat aux données du diagnostic de performance énergétique et des caisses dallocations familiales

Article additionnel après larticle 3 (article L. 121-46 du code de lénergie) Prévention de la concurrence entre réseaux de chaleur et de gaz

Chapitre III Mesures de simplification relatives à lévaluation environnementale

Article 4 (articles L. 122-1 et L. 122-3-4 du code de lenvironnement) Définition de lautorité chargée de lexamen au cas par cas dans le cadre de lévaluation environnementale

Article additionnel après larticle 4 (article L. 512-7-2 du code de lenvironnement) Élargissement des critères permettant de substituer la procédure dautorisation à la procédure denregistrement pour les installations classées pour la protection de lenvironnement

Chapitre IV Lutte contre la fraude aux certificats déconomies dénergie

Article 5 (articles L. 222-2 et L. 222-10 [nouveau] du code de lénergie, article L. 56131 du code monétaire et financier) Mise en place de nouveaux outils de lutte contre la fraude en matière de certificats déconomies dénergie

Article additionnel après larticle 5 (article L. 221-13 [nouveau] du code de lénergie) Publication dun référentiel de contrôle des certificats déconomies dénergie

Article additionnel après larticle 5 (article L. 221-14 [nouveau] du code de lénergie) Clarification des conditions dapplication des règles relatives à la délivrance des certificats déconomies dénergie

Article additionnel après larticle 5 (article L. 222-6 du code de lénergie) Publication de la motivation des sanctions relatives aux certificats  déconomies dénergie

Article additionnel après larticle 5 (section 16 [nouvelle] du chapitre IV du titre II du livre II du code de la consommation) Obligation dinformation des consommateurs de prestations déconomies dénergie

Chapitre V Mise en œuvre du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens »

Article 6 Autorisation de transposition de textes européens : habilitation à légiférer par ordonnances

Chapitre VI Régulation de lénergie

Article 7 (article L. 132-2 du code de lénergie) Mesures diverses relatives à la Commission de régulation de lénergie

Article 8 (article L. 336-5 du code de lénergie) Calcul des compléments de prix du mécanisme ARENH

Article additionnel après larticle 8 (article L. 336-2 du code de lénergie) Relèvement du plafond de lARENH

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion générale

II. Examen des articles

1. Réunion du mercredi 5 juin 2019

2. Réunion du mercredi 12 juin 2019

Liste des personnes auditionnées


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   Avant-Propos

 

Votre rapporteure pour avis souhaite en introduction souligner une nouvelle fois l’urgence à faire face aux changements climatiques par des mesures touchant toutes les activités humaines qui soient à la fois rapides et décisives.

Comme le rappelait le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de septembre 2018 relatif au réchauffement global de 1,5°C, les effets d’un réchauffement maintenu à un niveau de 1,5°C en 2100 seront majeurs ; or, les engagements pris par les États parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques à ce stade peuvent laisser présager une augmentation des températures de l’ordre de 3°C.

Lancement du plan climat dès juillet 2017, création du Conseil de défense écologique, qui définit les orientations en matière de transition écologique, ou encore création du Haut Conseil pour le climat, sont autant de mesures importantes pour accélérer la lutte contre les changements climatiques et l’adaptation à ces changements.

Par ailleurs, ce projet de loi apporte des réponses concrètes à plusieurs des freins à la transition énergétique.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est saisie pour avis de ce projet de loi. Elle a reçu délégation « sur le fond », de la part de la commission des affaires économiques, des articles 2 et 4, relatifs au Haut Conseil pour le climat et à l’évaluation environnementale.

En un peu moins de deux semaines, votre rapporteure pour avis a procédé à une trentaine d’auditions, et participé à six tables rondes, pour partie communes avec M. Anthony Cellier, rapporteur au fond de la commission des affaires économiques, au cours desquelles elle a pu entendre les différentes parties prenantes : associations, industriels, organismes publics et syndicats.

La quasi-totalité de ces acteurs a confirmé la pertinence des nouveaux objectifs fixés à l’article 1er du projet de loi, dont certaines mesures gagneraient toutefois à être complétées, comme le détaille le présent rapport.

Ce projet de loi traite de façon relativement technique et sectorielle des questions relatives à la nécessaire évolution de notre production d’énergie, pour répondre à l’urgence climatique. Si l’ambition du Gouvernement a été déclinée dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), le Parlement doit être partie prenante de toute décision ayant un impact sur le climat. Aussi votre rapporteure pour avis aurait-elle souhaité que ces textes réglementaires régis par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte soient soumis au pouvoir législatif.

Alors que le ministre de la transition écologique et solidaire vient de présenter la Convention citoyenne sur la transition écologique en Conseil des ministres, qui permettra de donner toute sa place à l’expression de nos concitoyens, votre rapporteure pour avis souhaite insister sur le rôle de la représentation nationale.

Les enjeux relatifs au transport ont fait l’objet d’un projet de loi spécifique actuellement en examen. Cependant, le secteur du logement est aussi un contributeur majeur aux émissions de gaz à effet de serre. Or les dispositions relatives à ce secteur mériteraient d’être renforcées pour améliorer l’équilibre du texte. À cet égard, l’Europe engage ses membres à décliner les directives du paquet « pour une énergie propre pour tous les Européens » dont la plupart d’entre elles auraient également mérité une étude législative pour leur transposition dans les mois à venir.

 


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   Synthèse

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a été saisie pour avis du projet de loi n° 1908 relatif à l’énergie et au climat. Elle a bénéficié d’une délégation au fond, conférée par la commission des affaires économiques, pour les articles 2 et 4.

Ce projet de loi traite de façon relativement technique et sectorielle des questions relatives à la nécessaire évolution de la production française d’énergie pour répondre à l’urgence climatique.

Larticle 1er présente de nouveaux objectifs ambitieux : l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050, en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à 6 entre 1990 et 2050, et la réduction de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 40 % en 2030 par rapport à 2012. Par souci de réalisme, il reporte également de 2025 à 2035 la réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité. La commission a émis un avis favorable à l’adoption de cet article après l’avoir complété par deux dispositions relatives à l’adjonction à la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) d’une feuille de route de la rénovation énergétique des bâtiments et à la présentation au Parlement d’un rapport sur les usages superflus ou non prioritaires de l’énergie.

La commission a également souhaité faciliter l’atteinte des différents objectifs définis en adoptant, après cet article, quatre amendements portant articles additionnels, destinés à améliorer leur suivi opérationnel, en étendant le plan stratégique d’EDF à la deuxième période de la PPE, en créant, pour 2030 et 2035, des plafonds de capacité nucléaire installée, en définissant une méthode de calcul réaliste du facteur de conversion en énergie primaire, et en introduisant un rapport sur le « budget vert », destiné à éclairer l’examen des projets de loi de finances.

Larticle 2 du projet de loi crée le Haut Conseil pour le climat. Cette instance autonome dont la légitimité reposera sur le haut niveau d’expertise et la variété des compétences de ses membres, ainsi que sur les moyens de fonctionnement qui lui seront attribués, devra donner un nouveau souffle à l’analyse des questions climatiques en France.

Outre trois amendements rédactionnels ou de coordination, la commission en a adopté trois autres destinés à inscrire dans la loi certaines dispositions essentielles, pour y préciser les réponses et l’écho institutionnel qui devront être donnés aux travaux du Haut Conseil. Le lien avec le Parlement est particulièrement renforcé puisque les deux commissions compétentes en matière d’environnement et d’énergie seront chargées d’auditionner le candidat à la présidence du Haut Conseil avant sa nomination et recevra le président pour la présentation du rapport annuel de l’institution.

Après cet article, un amendement vise à assurer l’indispensable prise en compte des avis du Haut Conseil dans les stratégies et plans régionaux.

S’agissant de la fermeture des centrales à énergies fossiles les plus émettrices de gaz à effet de serre, préparée par larticle 3 du projet de loi, la commission s’est inquiétée des conséquences sociales et économiques de celles-ci, en adoptant un amendement destiné à donner de meilleures garanties aux salariés et aux territoires concernés.

À la suite de l’article 3, la commission a adopté six amendements, dont trois encadrant la disparition progressive, mais incontournable, des passoires énergétiques, à l’occasion de la mutation ou de la mise en location d’un logement.

Larticle 4 relatif à la définition de l’autorité compétente pour prendre les décisions de cas par cas dans le cadre de l’autorité environnementale doit permettre d’assurer le régime juridique des projets, la situation d’examen actuelle ne pouvant être que temporaire. La commission a constaté que l’organisation proposée par le Gouvernement permet de répondre aux préconisations formulées par le Conseil d’État, et a donc émis un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

S’agissant du renforcement de la lutte contre la fraude sur les certificats d’économies d’énergie, dont traite larticle 5 du projet de loi, la commission s’est montrée convaincue de sa pertinence et a émis un avis favorable à l’adoption de ce dernier sans modification.

Par ailleurs, après cet article, la commission a adopté trois amendements destinés à mieux encadrer le régime juridique applicable à ces certificats, et un amendement visant à mieux informer les consommateurs concernés par ceux-ci.

Larticle 6 autorise le Gouvernement à transposer en droit français les directives et règlements afférents au paquet « pour une énergie propre pour tous les Européens ». Plusieurs des directives auraient mérité un débat législatif en bonne et due forme. Néanmoins, compte tenu des délais contraints pour une partie des textes à transposer, la commission a émis un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

Il en va de même pour larticle 7 du projet de loi, comportant diverses mesures relatives à la Commission de régulation de l’énergie, et pour larticle 8, consacré au calcul des compléments de prix du mécanisme d’accès régulé à l’énergie nucléaire historique, dit ARENH.

La commission a enfin adopté, après ce dernier, un amendement relevant le plafond de l’ARENH de 100 à 150 TWh, afin de prévenir de nouvelles hausses tarifaires défavorables au pouvoir d’achat des Français.

 


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   Commentaires des articles du projet de loi

Chapitre Ier
Objectifs de la politique énergétique

Article 1er
(article L. 100-4 du code de lénergie)
Modification des objectifs de la politique énergétique

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

I.   le droit existant

Les objectifs quantitatifs assignés à la politique énergétique sont fixés par l’article L. 100-4 du code de l’énergie.

Ces objectifs, conformes à la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, sont notamment les suivants :

– diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 ;

– réduire la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 30 % en 2030 par rapport à l’année de référence 2012 ;

– réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2025.

II.   Les Évolutions proposÉes

A.   Les dispositions envisagÉes

L’article 1er du projet de loi fait évoluer trois des objectifs de la politique énergétique mentionnés à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, notamment pour les mettre en cohérence avec ceux de la dernière stratégie nationale bas carbone :

– à l’objectif de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050, il substitue celui de l’atteinte de la neutralité carbone en 2050, en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six entre 1990 et 2050 ;

– il renforce l’objectif de réduction de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles en 2030 par rapport à l’année de référence 2012, en faisant passer celle-ci de 30 % à 40 % ;

– il reporte la réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité de 2025 à 2035. Selon l’étude d’impact du projet de loi, ce choix répond à la volonté du Gouvernement de décarboner totalement la production d’énergie, selon une trajectoire réaliste qui impliquera la fermeture de 14 réacteurs, dont les deux de Fessenheim, tout en assurant la sécurité d’approvisionnement électrique.

B.   Des objectifs À suivre et dÉcliner au niveau rÉgional et local

Sur la première période d’engagement, de 2015 à 2018, consécutive à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, les objectifs fixés en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre n’ont pas été atteints. À l’avenir, un pilotage fin, à partir d’indicateurs, permettrait de prendre, sous le contrôle du Parlement, les mesures correctives éventuellement nécessaires.

Plusieurs des personnes entendues lors des auditions, ont relevé le besoin d’une mise en cohérence des objectifs nationaux avec ceux des plans régionaux, notamment en articulant la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) avec les schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDET).

III.   Les travaux de votre commission

Votre commission a adopté l’amendement CD122 présenté par la présidente Mme Barbara Pompili, et le sous-amendement CD160 de votre rapporteure pour avis, visant à annexer à la programmation pluriannuelle de l’énergie « une feuille de route de la rénovation énergétique des bâtiments déclinant lobjectif de réduction de la consommation énergétique du bâtiment ».

Par ailleurs, votre commission a adopté à l’unanimité l’amendement CD123 de la présidente Mme Barbara Pompili demandant qu’« avant le 1er janvier 2021, le Gouvernement présente un rapport au Parlement sur les usages superflus ou non prioritaires de lénergie qui pourraient faire lobjet de restrictions », afin d’atteindre les objectifs, définis à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, de réduction de la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la référence 2012, avec un objectif intermédiaire de 20 % en 2030.

Article additionnel après l’article 1er
(article L. 111-9 du code de la construction et de lhabitation)
Méthode de calcul du facteur de conversion en énergie primaire de lélectricité utilisée pour les bâtiments neufs

Introduit par la commission

Votre commission a adopté l’amendement CD138, portant article additionnel après l’article 1er, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert visant à définir une « méthode de calcul du facteur de conversion en énergie primaire de lélectricité utilisée pour les bâtiments neufs, définie de façon transparente en sappuyant sur les éléments de la structure effective du mix électrique ».

Le coefficient de conversion de l’électricité en énergie finale joue un rôle majeur dans le calcul de la consommation énergétique des bâtiments neufs, en lien avec la réglementation thermique 2012, et dans le diagnostic de performance énergétique (DPE), qui renseigne sur la performance énergétique des logements existants. Cet amendement définit une méthode de calcul de ce coefficient conforme au bouquet électrique français, ainsi qu’aux nouvelles règles européennes.

Article additionnel après l’article 1er
(article L. 31155 du code de lénergie)
Création dun plafond de capacité nucléaire installée en 2030 et 2035

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD128 portant article additionnel après l’article 1er, présenté par la présidente Mme Barbara Pompili, visant à fixer un plafond de capacité nucléaire installée de 57,8 gigawatts en 2030 et 50,6 gigawatts en 2035.

La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a plafonné à 63,2 gigawatts la capacité nucléaire installée. Cet amendement prévoit d’ajuster ce plafond en 2030 et en 2035, pour prendre en compte l’objectif de baisse à 50 % en 2035 de la part de l’électricité d’origine nucléaire.

Article additionnel après l’article 1er
(article L. 311-5-7 du code de lénergie)
Extension du plan stratégique des exploitants aux deux périodes de la programmation pluriannuelle de lénergie

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, les amendements identiques CD126 et CD135, portant article additionnel après l’article 1er, respectivement présentés par la présidente Mme Barbara Pompili et Mme Marjolaine Meynier-Millefert, visant à étendre le plan stratégique des exploitants produisant plus du tiers de la production nationale d’électricité aux deux périodes de la programmation pluriannuelle de l’énergie.

Ce plan stratégique ne porte actuellement que sur la première période de la PPE, ce qui ne permet pas de disposer d’une visibilité suffisante pour préparer l’accompagnement des fermetures d’installations de production d’électricité. Cet amendement vise à étendre le plan stratégique aux deux périodes de la PPE, à prendre en compte dans celui-ci non seulement les conséquences économiques et financières, mais aussi sociales de ces évolutions, à le rendre public, et à y intégrer un calendrier prévisionnel des fermetures.

Article additionnel après l’article 1er
Rapport annuel du Gouvernement sur la compatibilité du projet de loi de finances avec lobjectif international de limitation du réchauffement climatique

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD136 portant article additionnel après l’article 1er, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, demandant au Gouvernement de soumettre au Parlement, au plus tard le 1er octobre de chaque année à compter de 2019, un rapport sur la compatibilité du projet de loi de finances avec l’objectif international de limitation du réchauffement climatique.

Cette évaluation sera établie notamment au regard des objectifs définis dans les stratégies nationales relatives au développement durable, à la biodiversité et au développement de la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises ainsi que la stratégie bas-carbone. Au titre du projet de loi de finances pour 2020, le rapport se concentrera essentiellement sur les impacts climatiques en privilégiant, si nécessaire, l’évaluation de l’un des secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre. Le Haut Conseil pour le climat, mentionné à l’article L. 132-4 du code de l’environnement, devra rendre un avis sur ce rapport, qui sera transmis par voie électronique au Parlement.

Chapitre II
Dispositions en faveur du climat

Article 2
(chapitre II bis du titre III du livre Ier et article L. 222-1 D du code de lenvironnement, articles L. 141-4 et L. 145-1 du code de lénergie)
Création du Haut Conseil pour le climat

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

Le présent article vise à traduire au plan législatif la création du Haut Conseil pour le climat qui a été installé le 27 novembre 2018 par le Président de la République et pour lequel le décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat est paru, précisant ses modalités d’organisation et de fonctionnement.

Ce Haut Conseil, bénéficiant d’une grande visibilité, est bâti sur un modèle ayant déjà fait ses preuves au Royaume-Uni depuis dix ans avec le Committee on Climate Change et, plus récemment, avec l’institution en Allemagne, en Suède, en Norvège et en Finlande de comités indépendants dédiés au climat. Le Committee on Climate Change a très rapidement acquis une place centrale dans les débats relatifs aux changements climatiques et aux émissions de gaz à effet de serre. Le statut législatif de cette institution, créée par le Climate Change Act de 2008, a largement contribué à asseoir son autorité et sa stabilité, comme l’a souligné son secrétaire général, M. Chris Stark, au cours de son audition par votre rapporteure pour avis.

Parallèlement, le comité d’experts pour la transition énergétique (CETE), est supprimé par le présent article.

Votre commission examine cet article dans le cadre d’une délégation au fond conférée par la commission des affaires économiques.

I.   Le haut Conseil pour le climat a été institué

Il convient de rappeler que la Cour des comptes, dans son rapport sur le soutien aux énergies renouvelables de 2018, souligne le manque de lisibilité des instances consultatives en matière de politique énergétique.

Le tableau suivant, extrait de l’étude de l’Institut de développement durable et des relations internationales (IDDRI) sur le comité pour le changement climatique au Royaume-Uni de juillet 2018, souligne les difficultés d’identification des différents acteurs consultatifs pouvant intervenir à un titre ou à un autre dans le champ du climat et de l’énergie.

Instances consultatives publiques compétentes pour la loi sur lA transition énergétique et la croissance verte, la révision de la stratégie nationale bas carbone et de la programmation pluriannuelle de l’énergie

Instance consultative

Date de création

Composition

Budget

Travaux récents de suivi
sur loi TECV

Comité dexperts pour la transition énergétique (CETE)

2015

8 experts issus de la recherche

-

Avis sur les projets de SNBC (2015), et de PPE

Conseil économique, social et environnemental (CESE)

1943

233 membres issus de la société civile

38,13 M€ (2016)

Avis sur la mise en œuvre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (2018)

Conseil national de la transition écologique (CNTE)

2013

50 membres répartis en 6 collèges : collectivités, parlementaires, syndicats salariés et employeurs, associations de protection de lenvironnement, société civile

--

Avis sur les projets de SNBC (2015), et de PPE, avis sur le Plan rénovation énergétique des bâtiments (2018), suivi de la révision des scénarios de long terme (Comité dinformation et d’orientation)

Accélérateur de la transition écologique (AcTE)

2018

16 personnalités qualifiées issues de la recherche et des entreprises

 

 

Séminaire de haut niveau sur la neutralité carbone (2018).

Autorité Environnementale (AE)

2009 2002

11 membres du CGEDD et 6 personnes qualifiées

N.C.

Avis sur les projets de SNBC (2015) et de PPE (2016)

Conseil supérieur de lénergie

 

 

38 membres répartis en 7 collèges (parlementaires, Conseil dÉtat, ministères, collectivités territoriales, consommateurs et associations environnementales, entreprises du secteur énergétiques, personnel des industries électrique et gazière)

 

 

N.C.

Avis sur les projets de SNBC (2015) et de PPE (2016) et de nombreux décrets en lien avec l’énergie

Comité de gestion de la CSPE

2016 2016

11 membres (parlementaires, Cour des Comptes, CRE, ministère de lÉnergie, ministère de lÉconomie, ministère du Budget, ministère de lOutre-Mer, trois personnalités qualifiées)

 

Pas de travaux publiés à ce stade

Comité du système de distribution publique délectricité

 

 

12 membres

 

Pas de travaux publiés à ce stade

Commission nationale du débat public

1995

24 membres

2 M€ (2017)

Débat public sur la PPE 2018 (mars à juin 2018)

Source : Le Comité pour le changement climatique au Royaume-Uni, IDDRI Study, n° 06/18 juillet 2018.

A.   Les travaux du comité d’experts pour la transition énergétique

L’article L. 145-1 du code l’énergie, inséré par l’article 177 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), a créé le comité d’experts pour la transition énergétique (CETE). Le décret n° 2015-1222 du 2 octobre 2015 relatif au comité d’experts pour la transition énergétique a précisé ses modalités d’organisation et de fonctionnement.

Il est composé de huit membres désignés à raison de leurs compétences, pour un mandat de deux ans renouvelables.

Il est consulté dans le cadre de l’élaboration du budget carbone et de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), ainsi que de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

Il rend un avis sur le respect des budgets carbone fixés et la mise en œuvre de la stratégie bas-carbone, six mois avant l’échéance en cours.

Avant l’échéance de la première période de PPE en cours, le CETE rend un avis sur cette programmation et réalise une synthèse des schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE). Il a ainsi rendu un avis sur la synthèse de ces schémas le 18 septembre 2018 (sur la base des travaux réalisés par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement – CEREMA).

Le projet de PPE est soumis au CETE pour avis, ainsi qu’au Comité national de la transition écologique (CNTE). Une fois approuvée, la PPE est présentée au Parlement par le Gouvernement.

Le dernier avis du CETE a été publié, le 24 décembre 2018, sur le premier budget carbone 2015-2018, la révision de la stratégie nationale devant intervenir avant le 1er juillet 2019. Cet avis a été transmis aux commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de l’énergie et de l’environnement.

Les dix avis rendus par le CETE depuis sa création, sur différents documents de programmation, sont publics.

Le CETE ne dispose pas de moyens de fonctionnement propres et le secrétariat du CETE est assuré par la direction générale de l’énergie et du climat du ministère de la transition écologique et solidaire.

B.   La création du haut Conseil pour le climat pour Redonner une visibilité à la gouvernance stratégique

Le constat dressé est celui d’un manque de visibilité du CETE, alors même que le dépassement du premier budget carbone, qui est conséquent, impose de redonner toute sa place à la transition énergétique.

Le Haut Conseil pour le climat bénéficie d’une visibilité renforcée, du fait du portage politique important auquel a donné lieu sa création. Il est directement placé auprès du Premier ministre, et devrait ainsi être à même de représenter le caractère transversal du pilotage de la lutte contre les changements climatiques. Après son installation le 27 novembre 2018 par le Président de la République, son fonctionnement a été précisé par le décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat. Il a vocation à exercer sa mission sur la base des compétences de ses experts et à devenir l’instance de référence sur la question des émissions de gaz à effet de serre en France, au-delà des instances spécifiques créées par les différents textes au fil du temps. Sa place particulière doit lui permettre de participer aux travaux de transformation de la société dans son ensemble.

Le Haut Conseil est présidé par Mme Corinne Le Quéré, climatologue de renom. Ses membres, dont le nombre est limité à douze, sont choisis en raison de leur expertise scientifique, technique et économique dans le domaine des sciences du climat et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est un organisme indépendant, placé auprès du Premier ministre. Il est inspiré d’exemples étrangers d’instances indépendantes dédiées aux questions climatiques et ayant vocation à éclairer l’action des pouvoirs publics et à apporter une nouvelle dimension au débat public, tels que le Committee on Climate Change (CCC) au Royaume-Uni.

Ses membres, dont les domaines d’expertise sont très riches et diversifiés, sont M. Michel Colombier, directeur scientifique de l’IDDRI, Mme Marion Guillou, présidente du conseil l’institut agronomique, vétérinaire et forestier de France AGREENIUM, M. Jean-Marc Jancovici, associé fondateur de Carbone 4 (société de conseil sur la transition énergétique) et président fondateur de The Shift Project, les économistes M. Alain Grandjean, co-fondateur et associé de Carbone 4, Mme Céline Guivarch, économiste au Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (CIRED), et Mme Katheline Schubert, professeure d’économie, M. Benoît Leguet, directeur général d’I4CE, Mme Valérie Masson-Delmotte, paléo climatologue, co-présidente du groupe de travail n° 1 du GIEC, M. Jean-François Soussana, vice-président de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), et Mme Laurence Tubiana, qui a été l’une des principales architectes de l’Accord de Paris. La parité est respectée en application de l’article 74 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, relatif aux commissions administratives et instances consultatives ou délibératives placées auprès du Premier ministre ([1]).

Les membres du Haut Conseil sont nommés par décret. La durée de leur mandat est de cinq ans, renouvelable une fois. Dans l’exercice de leurs missions au titre du Haut Conseil pour le climat, ses membres ne peuvent solliciter ou recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée.

Les missions de cette instance vont au-delà de celles dévolues au CETE, en ce qu’elle est en charge de rendre un rapport annuel sur « le respect de la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre, eu égard aux budgets carbone définis en application de larticle L. 222-1 A du code de lenvironnement », « la mise en œuvre et lefficacité des politiques et mesures décidées par lÉtat et les collectivités locales pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, développer les puits de carbone, réduire lempreinte carbone et développer ladaptation au changement climatique, y compris les dispositions budgétaires et fiscales » et sur « limpact socio-économique et environnemental, y compris pour la biodiversité, de ces différentes politiques publiques ».

Il convient de souligner l’intérêt de la mention des questions relatives à la biodiversité, qui doivent bien être considérées comme étant intrinsèquement liées aux questions climatiques.

Le Haut Conseil a la faculté de s’autosaisir dans un champ incluant les questions sectorielles relatives au financement des mesures de mise en œuvre de la stratégie nationale bas-carbone ou relatives à la mise en œuvre territoriale des politiques climatiques. Le Haut Conseil pour le climat peut également être saisi sur ces questions par le Gouvernement, le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat (nouvel article D. 132-4 du code de l’environnement).

Le Haut Conseil aura donc un rôle proactif. Il aura un lien particulier avec le Parlement. Il adressera son rapport annuel à l’Assemblée nationale et au Sénat, ainsi qu’au Conseil économique, social et environnemental, et le Gouvernement apportera une réponse à ce rapport devant le Parlement. Ainsi, le Gouvernement répondra à ses analyses tous les ans, cette séquence étant à même de rythmer les débats, en complément de la discussion du projet de loi de finances qui constitue un moment clé de l’élaboration des politiques de transition écologique.

Le décret n° 2019-449 du 15 mai 2019 relatif au conseil de défense écologique, qui définit les orientations en matière de transition écologique, et notamment de lutte contre le changement climatique, de préservation de la biodiversité et de protection des milieux et ressources naturels, prévoit que le Haut Conseil sera entendu chaque année par le conseil de défense écologique après la remise de son rapport annuel.

L’avis du Haut Conseil rendu, un an avant l’échéance de la période en cours, sur le respect des budgets carbone et sur la mise en œuvre de la stratégie bas-carbone, sera également transmis aux commissions permanentes chargées de l’énergie et de l’environnement de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Son règlement intérieur est en cours d’élaboration ; le Haut Conseil devrait fonctionner sur la base du consensus en creusant très précisément les points de débat, afin de donner le plus de force possible à ses recommandations et analyses, étant entendu qu’il ne devra pas s’agir du plus petit dénominateur commun et qu’il n’a pas été décidé de quelle manière les différentes réflexions pourraient être présentées.

Il convient de souligner que le Committee on Climate Change publie ses travaux sur la base du consensus, qu’il approfondit très précisément les points de désaccord et que les travaux du Committee sont soutenus par l’ensemble de ses membres.

Le Haut Conseil pour le climat, organisme indépendant, est hébergé par France Stratégie qui met à sa disposition un appui administratif, informatique et de communication. La spécificité de cette nouvelle instance relève à la fois de sa création et de son indépendance. Il conviendra de s’assurer qu’il bénéficie réellement de toutes les garanties d’une indépendance complète, notamment matérielle. Votre rapporteure pour avis note que la perception de son indépendance sera cruciale pour l’écho qui sera donné à ses travaux.

Le Haut Conseil dispose d’un budget propre et son président décide de l’emploi des crédits nécessaires à l’accomplissement de ses missions. Il dispose en particulier d’un secrétariat qui assure, sous l’autorité de son président, le suivi et l’organisation de ses travaux. Ce budget propre serait fixé entre 500 000 euros et 2 millions d’euros selon l’étude d’impact et à 1,2 million d’euros selon les informations disponibles sur le site de France stratégie. Il sera inscrit sur le programme 129 du budget général (direction de l’action du Gouvernement).

Votre rapporteure pour avis, suite à l’audition du Haut Conseil, estime que ces moyens, s’ils devaient demeurer au niveau arbitré de 1,2 million d’euros, pourraient trouver rapidement leurs limites. Elle rappelle l’enjeu que constituera la capacité budgétaire de l’organisme. Elle alerte en particulier sur le fait que l’adaptation aux changements climatiques est, au Royaume-Uni, du ressort d’un sous-comité propre.

Pour la réalisation de ses missions, le Haut Conseil peut également solliciter l’appui des services de l’administration compétents en matière de climat, avec leur accord. Il peut enfin passer commande de travaux ou études à des experts ou des organismes extérieurs à l’administration.

Les membres peuvent percevoir une indemnité pour leur engagement dont le montant est arrêté par le Premier ministre. Ils bénéficient de défraiements, le cas échéant.

À titre de comparaison, on peut relever que le CCC au Royaume-Uni dispose d’un budget 4 millions d’euros, comprend 14 experts et un secrétariat de 40 personnes, ce qui laisse à penser qu’il conviendra que le Parlement veille à reconsidérer à la hausse le budget initial du Haut Conseil pour le climat dès la prochaine loi de finances, au regard de l’importance de ses missions et de leur évolution souhaitée.

II.   les évolutions devant prendre place dans le cadre législatif

Au niveau législatif, le Haut Conseil pour le climat, organisme indépendant, serait défini à l’article L. 132-4 nouveau, au sein du nouveau chapitre II bis du titre III du livre Ier du code de l’environnement. Les dispositions législatives ne couvriraient que celles relatives aux déclarations d’intérêt et à la substitution au CETE, qui avait lui-même été créé par la loi, conformément à l’avis rendu par le Conseil d’État sur le présent projet de loi. Ainsi, mis à part le suivi de la stratégie bas carbone et des budgets carbone, qui figure dans la loi et y demeure, et les dispositions relatives aux déclarations d’intérêts des membres, le reste des dispositions relatives aux compétences du Haut Conseil pour le climat figure dans le volet réglementaire du code de l’environnement.

Il serait rappelé qu’il est placé auprès du Premier ministre, par le nouvel article L. 132-4.

Les membres du Haut Conseil pour le climat adresseraient, comme ceux du comité d’expert pour la transition énergétique, à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique une déclaration d’intérêts, telle qu’elle est définie au III de l’article 4 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. La déclaration d’intérêts porte sur les activités professionnelles donnant lieu à rémunération ou gratification exercées au cours des cinq dernières années, les activités de consultant, les participations aux organes dirigeants d’un organisme public ou privé ou d’une société, les participations financières directes dans le capital d’une société à la date de la nomination, les activités professionnelles exercées à la date de la nomination par le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin, les fonctions bénévoles susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts, et les fonctions et mandats électifs.

Les incompatibilités qui sont prévues pour les membres du CETE ne seraient pas reprises (en application des dispositions de l’article L. 145-1 du code de l’énergie, les fonctions de membre du comité d’experts sont incompatibles avec toute fonction d’agent public exerçant une responsabilité de contrôle ou de décision dans le secteur de l’énergie et avec la détention, directe ou indirecte, d’intérêts dans une entreprise du secteur de l’énergie). Il a été estimé qu’une interprétation très stricte de telles dispositions, si elles devaient être reprises pour le Haut Conseil pour le climat, risquerait de ne pas permettre d’ouvrir sa composition autant que cela était souhaité. Le choix a donc été fait de ne pas reprendre cette disposition.

Le Haut Conseil se substituerait au CETE : il émettrait l’avis sur le respect des budgets carbone qui serait rendu, non pas six mois avant l’échéance de la publication du budget carbone suivant, mais un an avant, pour permettre d’ajuster au mieux la trajectoire à suivre ; les projets de budget carbone et de stratégie bas-carbone, ainsi que le rapport rendu par le Gouvernement quatre mois avant l’échéance de la publication du budget carbone, lui seraient soumis pour avis ainsi qu’au Conseil national pour la transition écologique (article L. 222-1 D du code de l’environnement).

Toutefois, s’agissant de la PPE, votre rapporteure pour avis regrette qu’il ne soit plus prévu d’avis spécifique sur la programmation en cours, ni de synthèse des SRCEA, ni de soumettre pour avis le projet de PPE au Haut Conseil (II du présent article). Le projet de PPE demeurerait soumis pour avis au CNTE ([2]).

Votre rapporteure pour avis souligne le risque que les préoccupations en matière d’énergie ne se trouvent trop diluées au sein de l’ensemble des questions climatiques, même s’il est acquis que le Haut Conseil doit s’intéresser à toutes les politiques sectorielles consommatrices d’énergie, au titre de sa compétence générale. Il sera centré sur le climat et par conséquent sur la SNBC, mais la PPE en constitue une déclinaison.

Il convient également de relever que les questions régionales ne feront plus l’objet d’un rapport spécifique, ce qui peut poser question, au regard du rôle central des collectivités territoriales, au premier rang desquelles les régions, dans la lutte contre les changements climatiques, l’adaptation et la transition.

Interrogées à ce sujet au cours de leur audition par votre rapporteure pour avis, Mmes Corinne Le Quéré et Laurence Tubiana ont rappelé que les aspects territoriaux sont un point critique en termes de suivi. Un meilleur rapportage des efforts menés au plan local, par la mise en œuvre d’indicateurs de suivi communs, serait probablement pertinent. Il n’appartiendrait en tout état de cause pas au Haut Conseil d’évaluer, région par région, les résultats des politiques menées. Il a également été relevé que le Committee on Climate Change présente un point faible en ce que son approche est essentiellement nationale au Royaume-Uni (l’Écosse, le Pays de Galles et l’Irlande du Nord étant toutefois traitées de façon différenciée).

Il sera également intéressant de connaître l’analyse du Haut Conseil sur les lacunes des évaluations quantitatives des politiques publiques (rénovation thermique des logements par exemple) et le manque d’indicateurs des changements sociétaux à l’œuvre.

Le premier rapport du Haut Conseil est attendu pour le 25 juin 2019.

Le Conseil national de la transition écologique (CNTE) est maintenu. Composé de 50 membres répartis en différents collèges, il constitue une instance de dialogue sur la transition écologique. Il est consulté sur les projets de loi concernant, à titre principal, l’environnement ou l’énergie et sur les stratégies nationales relatives au développement durable, à la biodiversité et au développement de la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises ainsi que la stratégie bas-carbone. Il convient par ailleurs de rappeler que la révision constitutionnelle engagée transformerait le Conseil économique, social et environnemental en Chambre de la société civile, avec des missions enrichies.

Le CNTE a émis des réserves dans son avis du 21 février 2019, portant sur le fait que les rapports du Haut Conseil ne lui seraient pas transmis, sur le manque de transparence concernant les rémunérations des membres du Haut Conseil et sur le fait que ce dernier ne puisse pas s’autosaisir sur tout projet de loi relatif au climat. S’agissant de la rémunération des membres, l’étude d’impact précise bien qu’une indemnité de 1 000 euros par jour pourrait être allouée sur demande et que douze jours de travail annuels étaient planifiés.

III.   Les travaux de votre commission

Votre rapporteure pour avis estime qu’un certain nombre de dispositions dont il est prévu, dans le projet de loi, qu’elles figurent dans un décret, ont vocation à être placées dans la loi. Elle souhaite également que les réponses et l’écho institutionnel donnés aux travaux du Haut Conseil soient précisément décrits dans la loi. Elle souhaite tout particulièrement renforcer les liens entre le Parlement et le Haut Conseil.

Votre commission a adopté plusieurs amendements présentés par votre rapporteure pour avis, ayant recueilli un avis de sagesse de la part de la ministre pour les trois premiers et un avis favorable pour les trois derniers :

– l’amendement CD103 visant à reprendre plusieurs dispositions centrales du décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat et précisant que, outre son président, le Haut Conseil pour le climat « comprend au plus douze membres choisis en raison de leur expertise scientifique, technique et économique dans le domaine des sciences du climat et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ». Ces membres sont nommés par décret. La durée du mandat des membres est de cinq ans, renouvelable une fois. Il est également prévu que, « dans lexercice de leurs missions au sein du Haut Conseil pour le climat, les membres du Haut Conseil pour le climat ne peuvent solliciter ni recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée. »

Par rapport au texte du décret, votre rapporteure pour avis a souhaité ajouter que « la personne devant exercer la présidence du Haut Conseil pour le climat est auditionnée par les commissions permanentes chargées de lenvironnement de lAssemblée nationale et du Sénat avant sa nomination. » Cette audition constituera un moment important dans les échanges réguliers qui doivent avoir lieu entre le Parlement et le Haut Conseil pour le climat ;

– l’amendement CD102 visant à reprendre les dispositions du décret du 14 mai 2019 précité définissant le contenu du rapport annuel présenté par le Haut Conseil. Ces éléments doivent en effet figurer au rang des dispositions législatives. Par rapport au texte du décret, votre rapporteure pour avis a souhaité, s’inspirant des dispositions régissant le Committee on climate change au Royaume-Uni, ajouter que le Haut Conseil, dans ce rapport, émet des recommandations (texte du décret) et des propositions. Ces dernières visent à améliorer l’action de la France (texte du décret) mais également à améliorer « les contributions des différents secteurs dactivité économique au respect des budgets carbone ainsi que la régulation des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports aéronautique et maritime internationaux ». L’analyse du Haut Conseil sera en effet centrale sur les questions sectorielles. Il est important que le Haut Conseil puisse également traiter des émissions liées aux transports aéronautiques et maritimes internationaux, ces deux domaines relevant, pour ce qui touche à leur régulation, de l’Organisation maritime internationale et de l’Organisation de l’aviation civile internationale, mais ne pouvant demeurer plus longtemps à l’écart du traitement des enjeux climatiques au niveau national.

Par ailleurs, l’amendement adopté prévoit qu’« à loccasion de la transmission de ce rapport, le président du Haut Conseil pour le climat est auditionné par les commissions permanentes de lAssemblée nationale et du Sénat chargées de lenvironnement et de lénergie ». Il s’agit ici d’assurer un temps d’échange annuel institutionnalisé entre le Parlement et le Haut Conseil ;

– l’amendement CD107 rectifié visant à reprendre les dispositions relatives à la saisine du Haut Conseil figurant dans le décret précité ([3]) en ne les limitant pas aux questions de financement des mesures de mise en œuvre de la SNBC ou aux questions de mise en œuvre territoriale, et en permettant en outre une saisine sur un projet ou une proposition de loi ;

– deux amendements rédactionnels CD104 et CD105 et un amendement de coordination CD106.

Article additionnel après l’article 2
(article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales)
Prise en compte des avis du Haut Conseil pour le climat par les schémas régionaux daménagement, de développement durable et dégalité des territoires

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de la ministre et de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD144 portant article additionnel après l’article 2, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, visant à inscrire dans le code général des collectivités territoriales que les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) prennent en compte, dans la définition des objectifs énergétiques et environnementaux, les avis du Haut Conseil pour le climat.

Cette insertion permettra une meilleure articulation des politiques publiques, qui devront prendre en compte les analyses du Haut Conseil dans la stratégie bas-carbone et les budgets carbone élaborés au niveau national, ainsi que dans les SRADDET en cours d’adoption (lesquels doivent tenir compte des objectifs de la stratégie bas-carbone).

Article 3
(article L. 311-5-3 du code de lénergie)
Limitation des émissions liées à la production délectricité

Avis favorable de la commission à une adoption avec modifications

Cet article vise à limiter les émissions de gaz à effet de serre liées à la production d’électricité en autorisant l’autorité administrative à fixer un plafond annuel d’émission. Ce dernier conduirait à la fermeture, en 2022, des quatre dernières centrales au charbon françaises. Par ailleurs, l’article 3 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures d’accompagnement des salariés des entreprises exploitant ces installations ainsi que de leurs sous-traitants.

I.   LE DROIT EXISTANT

Conformément à l’article L. 311-1 du code de l’énergie, « lexploitation de toute nouvelle installation de production délectricité est subordonnée à lobtention dune autorisation administrative ». L’article L. 311-5-3 de ce même code précise que cette dernière peut être limitée à un nombre annuel maximum d’heures de fonctionnement, pour respecter les valeurs limites d’émissions de gaz à effet de serre fixées par voie réglementaire.

L’article 3 du projet de loi étend cette possibilité de limitation de durée de fonctionnement aux installations existantes.

II.   LES ÉVOLUTIONS ENVISAGÉES

D’une part, l’article 3 modifie l’article L. 311-5-3 du code de l’énergie pour permettre à l’autorité administrative de fixer « un plafond démissions applicable, à compter du 1er janvier 2022, aux installations de production délectricité à partir de combustibles fossiles situées en métropole continentale et émettant plus de 0,550 tonne déquivalents dioxyde de carbone par mégawattheure ».

D’autre part, il habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance « toute mesure relevant du domaine de la loi permettant la mise en place dun accompagnement spécifique » pour les salariés des entreprises exploitant les installations susceptibles de fermer affectées à celles-ci et les sous-traitants de celles-ci.

A.   La validitÉ juridique du dispositif

Dans son avis sur le projet de loi en date du 25 avril 2019, le Conseil d’État note que l’extension du principe de plafonnement des émissions à des centrales régulièrement autorisées aura pour effet de porter atteinte à des situations légalement acquises, mais que « cette atteinte trouve sa justification dans un motif dintérêt général », la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

De ce fait, il estime que ce dispositif est juridiquement valide, en soulignant qu’il « appartiendra au Gouvernement de sassurer que larrêt des centrales à charbon au 1er janvier 2022 ne soit pas de nature à compromettre, à cette date, la sécurité dapprovisionnement » et que celle-ci est subordonnée à l’existence d’un délai suffisant entre l’adoption du texte et sa date d’entrée en vigueur, « pour garantir la sécurité juridique des exploitants ».

Ce délai doit « tenir compte des mesures techniques préparatoires à larrêt des centrales et, surtout, du temps nécessaire à la prise de mesures de toute nature concernant les personnels des centrales qui se trouveront privés de leur emploi ».

Plusieurs des interlocuteurs auditionnés, aussi bien syndicats qu’industriels, ont souligné que le délai de fermeture des centrales leur apparaissait insuffisant pour envisager une conversion industrielle, ce type de projets nécessitant en général plus de cinq ans. Néanmoins, la fermeture des centrales à charbon est annoncée depuis 2016, avec une échéance à 2023.

B.   Les consÉquences sur les installations industrielles

Le seuil de 550 gC02equ/kWh visé par l’article 3 est dépassé par toutes les centrales à flamme du parc français alimentées au charbon, au fioul ou au gaz, à l’exception des onze centrales à cycle combiné gaz (appelées CCGT pour Combined Cycle Gas Turbine), dont le facteur d’émission est de l’ordre de 350 gCO2equ/kWh.

Le plafond annuel d’émissions de gaz à effet de serre envisagé par le Gouvernement à partir du 1er janvier 2022, de 0,7 kilotonne de CO2 équivalent émis par mégawatt de puissance installée, conduirait à la fermeture des quatre dernières centrales à charbon françaises, d’une puissance cumulée d’environ 3 gigawatts, équivalente à celle de trois réacteurs nucléaires.

Deux de ces centrales appartiennent à la société Uniper France :

– Émile Huchet, à Saint-Avold–Carling, dans le département de la Moselle, dotée d’une tranche de 600 mégawatts au charbon et de deux tranches cycle combiné au gaz naturel de 860 mégawatts cumulés ;

– Provence, à Meyreuil, proche de Gardanne, dans le département des Bouches-du-Rhône, avec quatre tranches au charbon et une tranche convertie à la biomasse, pour une puissance cumulée de 595 mégawatts.

La société EDF est propriétaire des deux autres centrales :

– Cordemais, en Loire-Atlantique, constituée de deux tranches au charbon, d’une puissance cumulée de 1 200 mégawatts ;

– Le Havre, en Seine-Maritime, comportant trois tranches au charbon, d’une capacité totale de 600 mégawatts.

Ces deux dernières ne comportant que des tranches au charbon pourraient être, à terme, complètement fermées, alors que les deux centrales d’Uniper France pourraient continuer à fonctionner en partie, avec de la biomasse ou du gaz.

D’après le bilan 2017 du gestionnaire de réseau de transport RTE, ces quatre centrales au charbon, utilisées principalement pour faire face aux pointes de consommation d’électricité en hiver, ont produit 1,8 % de l’électricité française, en générant 35 % des émissions du secteur. Ce dernier pourcentage doit toutefois être remis en perspective, la production d’électricité représentant environ 8 % des émissions des différentes activités en 2017.

C.   La question de la gestion de la pointe de consommation

Compte tenu de la nécessité de disposer de capacités de production ou d’importation d’électricité suffisantes pour faire face aux pointes de consommation, lors de son audition, le directeur général de l’énergie et du climat a indiqué que la possibilité de fermer en 2022 les dernières centrales à charbon est soumise à la réalisation, à cette date, de trois conditions : la mise en service de l’EPR de Flamanville, celle de la centrale à gaz de Landivisiau, (l’Ouest disposant à ce jour de capacités de production limitées), et le renforcement, via le tunnel sous la Manche, des interconnexions avec le Royaume-Uni.

La réalisation d’ici 2022 de l’ensemble de ces conditions n’est à ce jour par acquise. Par exemple, les contrôles effectués fin 2018 par l’Autorité de sûreté nucléaire sur l’EPR de Flamanville ont mis à jour des défauts affectant les soudures réalisées sur le circuit secondaire principal du réacteur. Si ces soudures, pour certaines difficilement accessibles, doivent être refaites, ce qui correspond à ce jour à l’hypothèse la plus probable, cela pourrait retarder significativement la mise en service de ce nouveau réacteur nucléaire.

Néanmoins, comme l’a indiqué le directeur général de l’énergie et du climat lors de son audition, un retard éventuel pourrait tout au plus conduire à prolonger, le temps nécessaire, le fonctionnement de la centrale de Cordemais, afin d’éviter un déséquilibre régional, pour un nombre limité d’heures de fonctionnement par an.

Une autre option consisterait à mettre en œuvre le projet Ecocombust, proposé par EDF, de conversion à la biomasse. Celui-ci vise à produire sur site un combustible sous forme de pellets de biomasse densifiée, à partir de déchets verts et de bois déclassé provenant d’un rayon de 150 kilomètres autour de la centrale. Toutefois, les précédentes conversions de ce type se sont heurtées à des difficultés techniques et d’approvisionnement. Surtout, la programmation pluriannuelle de l’énergie exclut de nouvelles installations de production d’électricité à partir de biomasse, celle-ci étant orientée en priorité vers d’autres usages, tels que la chaleur, permettant de meilleurs rendements.

D.   La gestion des consÉquences Économiques et sociales de la fermeture des centrales au charbon

Votre rapporteure pour avis s’est tout particulièrement inquiétée des conséquences sociales et économiques des différentes fermetures d’installations envisagées.

Leurs impacts pourraient s’avérer, suivant les cas, plus ou moins marqués pour les salariés et les territoires concernés.

Ainsi, compte tenu de la taille du groupe EDF, les salariés des centrales de Cordemais et du Havre devraient être reclassés en son sein, éventuellement au prix d’une relocalisation. Mais le territoire lui-même sera d’autant plus durement touché que la fermeture de ces centrales devrait être complète.

A contrario, la possibilité d’une poursuite de l’activité, même réduite, dans les deux centrales Émile Huchet et Provence appartenant à Uniper France pourrait limiter l’impact sur les territoires, mais le reclassement des salariés s’effectuera plus difficilement au sein de l’entreprise, compte tenu de sa taille.

S’agissant du soutien aux territoires affectés par ces fermetures complètes ou partielles de centrales électrique, votre rapporteure pour avis regrette qu’il ne soit pas explicité à l’article 3. De même, les dispositions en faveur des salariés mériteraient d’être précisées. Par exemple, leur restriction aux seuls salariés affectés à l’exploitation des installations ne semble pas justifiée, d’autres risquant de subir les conséquences de ces fermetures. De même, la priorité donnée au maintien dans le bassin d’emploi mériterait d’être mentionnée.

Néanmoins, comme l’a indiqué lors de son audition M. David Coste, délégué interministériel à l’avenir des territoires de Fessenheim et des centrales à charbon, le Gouvernement a bien tiré les conséquences de sa responsabilité vis-à-vis des salariés et des territoires affectés par la fermeture de ces installations.

La démarche adoptée pour les quatre territoires concernés par la fermeture des centrales à charbon tire les enseignements de celle mise en œuvre à Fessenheim, dans le cadre d’un « contrat de transition écologique ». L’État étant à l’origine de la fermeture des centrales, il sera pertinent qu’au-delà des CTE, des projets de territoires puissent être co-construits pour envisager des reconversions économiques locales. L’intervention de l’État ne se limite plus à prévoir un fond dédié, même si celui-ci devra être prévu dans le cadre de la prochaine loi de finances. Elle consiste à accompagner les projets proposés par les parties prenantes au sein des territoires, afin de recréer de nouvelles activités économiques, notamment via les projets de territoire.

S’agissant des salariés qui ne pourront être reclassés au sein de leur entreprise, ainsi que l’a rappelé M. Hervé Leost, sous-directeur mutations économiques et sécurisation de l’emploi au sein du ministère du travail, ils bénéficieront d’un bilan de compétence suivi d’une aide à la recherche d’emploi. Pour les plus âgés, un décret prévoit déjà la possibilité, pour les salariés bénéficiant du statut des industries électriques et gazières (IEG), d’une prise en compte des périodes de chômage pour compléter les droits à la retraite.

La question de la reconversion au sein des bassins de vie reste un enjeu à construire dès aujourd’hui.

III.   Les travaux de votre commission

Votre commission a adopté l’amendement CD159, présenté par votre rapporteure pour avis, qui précise que les mesures d’accompagnement du reclassement des salariés, suite aux fermetures des centrales à énergies fossiles fortement émettrices de CO2, cibleront en priorité le bassin d’emploi concerné, afin de donner de meilleures garanties aux salariés et aux territoires.

Article additionnel après l’article 3
Soutien, à titre expérimental, au déploiement de technologies propres dans les zones couvertes par un plan de protection de latmosphère

Introduit par la commission

Votre commission a adopté l’amendement CD54 présenté par M. Martial Saddier, portant article additionnel après l’article 3, visant à soutenir « à titre expérimental, dans les zones géographiques couvertes par un plan de protection de latmosphère, toutes les initiatives visant au déploiement des énergies renouvelables et toutes les initiatives en lien avec les technologies limitant les émissions de gaz à effet de serre ou la pollution atmosphérique ».

Un plan de protection de l’atmosphère définit, pour un territoire donné, des objectifs à atteindre, ainsi que des mesures réglementaires ou portées par les acteurs locaux visant à respecter les valeurs limites fixées par l’Union européenne. Ce document est obligatoire pour les agglomérations de plus de 250 000 habitants et les zones où les valeurs limites de qualité de l’air sont dépassées ou risquent de l’être.

Article additionnel après l’article 3
(article L. 111-10-4 du code de la construction et de lhabitation)
Incitation à la rénovation énergétique des logements mal isolés lors dune mutation

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD152 portant article additionnel après l’article 3, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, prévoyant la mise sous séquestre d’une part du produit de la vente de tout « bien immobilier dont le niveau de performance énergétique correspond à une consommation supérieure à 330 kilowattheures dénergie primaire par an et par mètre carré ».

La part mise sous séquestre « correspond au coût des travaux nécessaires pour atteindre un niveau de performance énergétique correspondant à une consommation inférieure à 331 kilowattheures dénergie primaire par an et par mètre carré » et « ne peut excéder 5 % du produit total de la vente. Cette somme est débloquée au profit de lacquéreur ou dune entreprise choisie par lui pour mener lesdits travaux ».

Cette incitation à la rénovation énergétique à l’occasion d’une mutation cible les logements qualifiés de « passoires thermiques », correspondant aux classes F et G du diagnostic de performance énergétique (DPE), dont le nombre s’élève de 7 à 8 millions dans le parc immobilier français. Le secteur du bâtiment représente 45 % de la consommation énergétique française.

Article additionnel après l’article 3
(article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986)
Ajout dun plafond de consommation énergétique aux critères définissant un logement décent

Introduit par la commission

Votre commission a adopté l’amendement CD164 portant article additionnel après l’article 3, présenté par votre rapporteure pour avis, qui vise à intégrer aux critères de définition d’un logement décent un plafond de consommation d’énergie primaire par mètre carré et par an.

La mise en location d’un logement situé dans une zone d’habitat dégradé pouvant être soumise à l’obtention d’une autorisation préalable ou au dépôt d’une déclaration de conformité, ce critère supplémentaire peut inciter le propriétaire à améliorer l’isolation du logement avant de le louer.

Pour les logements loués, ce plafond permet de renforcer l’arsenal juridique au profit du locataire, qui peut saisir le juge pour contraindre le bailleur à réaliser les travaux nécessaires, à réduire le loyer ou à lui verser des dommages et intérêts.

Article additionnel après l’article 3
(article 5 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique
pour la croissance verte)
Interdiction de location des passoires énergétiques

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, les amendements identiques CD121 et CD151 portant article additionnel après l’article 3, respectivement présentés par la présidente Mme Barbara Pompili et Mme Marjolaine Meynier-Millefert, ainsi que le sous-amendement CD165 de votre rapporteure pour avis et de M. Matthieu Orphelin, visant à interdire, à partir de 2025 en zones tendues et de 2028 dans le reste de la France, la conclusion d’un nouveau bail de location pour les logements privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowattheures par mètre carré et par an.

Cette disposition permet de prendre en compte la situation parfois difficile des locataires de logements des classes F et G du diagnostic de performance énergétique (DPE), qui doivent s’acquitter de factures énergétiques lourdes, alors qu’ils ne disposent en général que de peu de possibilités d’action pour réduire celles-ci, sauf à renoncer à se chauffer correctement.

Le sous-amendement présenté par votre rapporteure pour avis indique que le décret précisant les modalités d’application devra notamment prévoir « les dispositifs financiers mis en place pour accompagner, sous conditions de ressources, les propriétaires non-occupants ». En effet, certains bailleurs modestes ne disposent pas de ressources suffisantes pour assumer la rénovation d’un logement mis en location, qui peut par ailleurs constituer une part significative de leur revenu.

Article additionnel après l’article 3
(article L. 321-1 du code de la construction et de lhabitation)
Accès de lAgence nationale de lhabitat aux données du diagnostic de performance énergétique et des caisses dallocations familiales

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD139 portant article additionnel après l’article 3, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, visant à donner à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) une possibilité d’accès aux données du diagnostic de performance énergétique et des caisses d’allocations familiales.

La possibilité de prendre en compte ces informations permettra à l’ANAH de cibler les ménages à revenus modestes disposant d’un logement de faible performance énergétique, afin de leur proposer en priorité des aides permettant d’améliorer celle-ci, donc de réduire leur facture énergétique.

Article additionnel après l’article 3
(article L. 121-46 du code de lénergie)
Prévention de la concurrence entre réseaux de chaleur et de gaz

Introduit par la commission

Votre commission a adopté l’amendement CD156, présenté par votre rapporteure pour avis, portant article additionnel après l’article 3, visant à mettre fin à la concurrence entre réseaux de chaleur et de gaz.

À cette fin, il ajoute à l’objectif relatif à « lamélioration de la desserte en gaz naturel du territoire » défini au 9° du II de l’article L. 121-46 du code de l’énergie, la condition que « celle-ci ne concurrence pas le développement de la chaleur renouvelable ».

En effet, dans le cadre de leur contrat avec l’État, les gestionnaires de réseau de distribution de gaz sont incités à améliorer la desserte en gaz naturel du territoire, donc à raccorder de nouveaux utilisateurs. L’expérience conduit à constater que les futurs abonnés d’un nouveau réseau de chaleur reçoivent souvent des offres avantageuses d’installation d’un chauffage au gaz. Ces démarches peuvent perturber l’équilibre économique des futurs réseaux de chaleur, alors même que ceux-ci utilisent plus de 50 % d’énergies renouvelables et sont soutenus financièrement par l’État, via le Fonds chaleur piloté par l’ADEME.

Chapitre III
Mesures de simplification relatives à lévaluation environnementale

Suivant l’avis favorable de la ministre et de votre rapporteure pour avis, votre commission a adopté l’amendement CD113 présenté par Mme Laure de La Raudière tendant à supprimer les mots « de simplification » au titre du présent chapitre III, afin de le mettre en cohérence avec les dispositions du chapitre.

Article 4
(articles L. 122-1 et L. 122-3-4 du code de lenvironnement)
Définition de lautorité chargée de lexamen au cas par cas dans le cadre de lévaluation environnementale

Avis favorable de la commission à une adoption sans modification

L’objet de l’évaluation environnementale est de décrire et d’apprécier les incidences notables directes et indirectes d’un projet sur la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l’eau, l’air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, le paysage, et les interactions entre tous ces facteurs.

Elle relève d’une démarche d’information des autorités et du public sur les effets sur l’environnement et la santé d’un projet ou d’un plan ou programme, en amont de sa réalisation, afin notamment de pouvoir traiter les éventuelles difficultés soulevées et de limiter ensuite les risques de contentieux. Elle est fondamentale pour décliner concrètement le triptyque « éviter, réduire, compenser » les atteintes à l’environnement. Elle se définit comme un « processus constitué de lélaboration, par le maître douvrage, dun rapport dévaluation des incidences sur lenvironnement, dénommé ci-après « étude dimpact », de la réalisation des consultations prévues […], ainsi que de lexamen, par lautorité compétente pour autoriser le projet, de lensemble des informations présentées dans létude dimpact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître douvrage » (article L. 121-1 du code de l’environnement).

Son cadre juridique découle en particulier de deux directives européennes : la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement et la directive n° 2014/52/UE du 16 avril 2014 modifiant la directive 2011/92/UE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement.

L’évaluation environnementale a été récemment réformée par l’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016. Cette ordonnance a été ratifiée par la loi n° 2018-148 du 2 mars 2018 ratifiant les ordonnances n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes et n° 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement.

L’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 modifie et complète la section du code de l’environnement relative aux « études d’impact des projets de travaux, d’ouvrages et d’aménagement » ainsi que la section relative à l’« évaluation de certains plans et documents ayant une incidence notable sur l’environnement ».

L’article L. 122-1 du code de l’environnement dispose que tous les projets « qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles davoir des incidences notables sur lenvironnement ou la santé humaine font lobjet dune évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains dentre eux, après un examen au cas par cas effectué par lautorité environnementale. Pour la fixation de ces critères et seuils et pour la détermination des projets relevant dun examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à lannexe III de la directive » du 13 décembre 2011 modifiée en 2014.

Un décret en Conseil d’État définit la nomenclature des projets, par catégorie de projets, donnant lieu systématiquement à une étude d’impact ou ne donnant lieu à une étude d’impact qu’à l’issue d’un examen au cas par cas (tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, modifié récemment par le décret du 11 août 2016 ([4]) puis celui du 25 avril 2017 ([5])).

Le présent article vise à redéfinir lautorité chargée de lexamen au cas par cas, suite à une jurisprudence du Conseil dÉtat du 6 décembre 2017. Votre commission examine cet article dans le cadre d’une délégation au fond conférée par la commission des affaires économiques.

I.   le droit existant

L’article R. 122-6 du code de l’environnement définit l’autorité environnementale compétente pour chaque type de projet (demandes d’examen au cas par cas et évaluations environnementales systématiques). Elle peut être :

– le ministre chargé de l’environnement, sur proposition du Commissariat général au développement durable (CGDD), notamment lorsque le projet donne lieu à une autorisation par décret, par un autre ministre ou par une autorité administrative indépendante ;

– la formation d’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), autorité indépendante instituée il y a dix ans, compétente notamment pour les projets qui donnent lieu à une décision du ministre chargé de l’environnement ou sont réalisés sous maîtrise d’ouvrage du ministère chargé de l’environnement ou d’un organisme placé sous sa tutelle ;

– les missions régionales d’autorité environnementale du CGEDD (MRAe, au nombre de 19) instituées il y a trois ans, pour les projets qui ont fait l’objet d’une saisine obligatoire de la Commission nationale du débat public, sans relever de la formation d’autorité environnementale du CGEDD, et qui doivent être réalisés sur le territoire de la région concernée. Les MRAe disposent d’une autonomie fonctionnelle ;

– dans tous les autres cas, les préfets de région.

Il ressort de ces dispositions que le préfet de région, s’il est compétent pour autoriser un projet, lorsqu’il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région, ou dans les cas où il est en charge de l’élaboration ou de la conduite d’un projet au niveau local, peut en outre exercer la compétence consultative en matière environnementale.

Suite à des recours exercés par France nature environnement, le Conseil d’État, dans un arrêt rendu le 6 décembre 2017 (n° 400559), puis dans un arrêt rendu le 28 décembre 2017 (n° 407601) a annulé certaines des dispositions de l’article 1er du décret du 28 avril 2016 car celles-ci maintenaient la désignation du préfet de région en qualité d’autorité environnementale (l’annulation ne portant pas explicitement sur les décisions au cas par cas).

Rappelant notamment la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, le Conseil d’État a souligné qu’« il résulte clairement des dispositions de larticle 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que lautorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise douvrage soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce quune entité administrative, interne à celle-ci, dispose dune autonomie réelle, impliquant notamment quelle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné. »

Il convient de relever que la séparation fonctionnelle n’est pas la séparation organique mais implique que l’autorité en question dispose d’une véritable autonomie, soit pourvue de moyens administratifs et humains propres, et soit en mesure de donner un avis objectif.

L’autonomie fonctionnelle des MRAe a été validée par le Conseil d’État dans son arrêt du 6 décembre 2017 précité, dès lors que le service de la DREAL appuyant la MRAe dispose de moyens suffisants et est placé sous l’autorité fonctionnelle du président de la MRAe (et bien que la DREAL exerce ses fonctions sous l’autorité du préfet de région).

En conséquence, le 20 décembre 2017, instruction a été donnée aux préfets de saisir la MRAe pour se substituer au préfet pour les avis d’autorité environnementale. Afin d’assurer la sécurité juridique des procédures en cours, les avis d’autorité environnementale qui n’avaient pas encore été rendus ont été proposés par les DREAL aux MRAe depuis la fin de l’année 2017. L’Ae et les MRAe ont assuré la continuité de la mission d’autorité environnementale pour les projets.

Les préfets de région ont apprécié la situation des projets sur lesquels un avis avait déjà été rendu.

Les examens au cas par cas sont demeurés du ressort des préfets.

Pour les plans et programmes, l’article R. 122-17 du code de l’environnement définit l’autorité environnementale, qui est (aussi bien pour les demandes d’examen au cas par cas sur la nécessité d’une évaluation environnementale, que pour les évaluations environnementales systématiques) :

– la formation d’autorité environnementale du CGEDD pour les plans et programmes dont le périmètre excède les limites territoriales d’une région, ceux qui donnent lieu à une approbation par décret ou à une décision ministérielle, et ceux qui figurent sur une liste fixée par le IV de l’article R. 122-17 du code de l’environnement (notamment les plans de gestion des risques d’inondation, la programmation pluriannuelle de l’énergie, les schémas régionaux de biomasse, les chartes de parc naturel régional) ;

– Les MRAe pour les autres plans et programmes.

En 2017, l’Ae et les MRAe ont pris 2 271 décisions et ont rendu 964 avis ([6]), les MRAe ayant été mises en place dans le cours de l’année 2016. À titre de comparaison, 1 196 décisions avaient été prises et 444 avis avaient été rendus en 2016 sur une période d’environ six mois.

Les avis ont concerné 886 plans ou programmes et 78 projets. Les décisions sur les plans-programmes ont concerné 2 271 dossiers. Environ 1 770 décisions ont été signées ([7]). 504 décisions ont été délibérées collégialement. 445 dossiers ont été soumis à évaluation environnementale, soit environ 20 % des dossiers.

En 2018, l’Ae et les MRAe ont pris 2 894 décisions sur les plans ou programmes et ont rendu 1 868 avis (708 concernant les plans ou programmes et 1 160 concernant les projets). Environ 2 400 décisions ont été signées. 495 décisions ont été délibérées collégialement. 368 dossiers ont été soumis à évaluation environnementale, soit environ 12,5 % des dossiers.

II.   Les évolutions proposées

Quelle que soit la présentation de l’étude d’impact du présent projet de loi, il convient au préalable de souligner que le présent article a trait à l’examen au cas par cas et à l’autorité environnementale compétente pour les projets pour lesquels une évaluation environnementale peut être demandée, quel que soit le secteur concerné (énergie, transports, etc.). Son périmètre n’est donc pas, loin s’en faut, circonscrit aux seuls projets relatifs aux énergies renouvelables.

Il tire les conséquences de la jurisprudence récente du Conseil d’État (supra) et vise à assurer la sécurité juridique des procédures suivies, la situation découlant des instructions données le 20 décembre 2017 ne pouvant pas perdurer.

Le présent article distingue, dans la partie législative du code de l’environnement, l’autorité chargée de l’examen au cas par cas de l’autorité environnementale.

Le Gouvernement souhaite que les préfets de région demeurent compétents pour prendre des décisions dans le cadre de l’examen au cas par cas. Il serait toutefois ajouté un alinéa au IV de l’article L. 122-1 du code de l’environnement précisant que ne peut être désignée autorité chargée de l’examen au cas par cas « une autorité dont les services ou les établissements publics relevant de sa tutelle sont chargés de lélaboration du projet ou assurent sa maîtrise douvrage ». Cette disposition vise à prévenir les conflits d’intérêts.

Au cours de la table ronde du 28 mai 2018 sur l’évaluation environnementale organisée par la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, l’Autorité environnementale du CGEDD a souligné l’incohérence qu’il y aurait à séparer l’autorité chargée de prendre une décision au cas par cas de celle chargée de donner un avis sur l’évaluation environnementale, puisque toute la démarche s’analyse suivant une progressivité et implique un véritable suivi. Elle a en outre plaidé pour que l’organisation retenue pour les plans et programmes vaille également pour les projets. Elle a aussi constaté que, s’agissant de la question spécifique de la nécessité de l’actualisation d’une étude d’impact, l’examen au cas par cas et l’avis sur l’étude d’impact sont des questions extrêmement liées.

Partageant cette analyse, France Nature Environnement a souligné pour sa part les grandes difficultés, dans le régime maintenant l’autorité du préfet de région, à garantir l’absence de conflit d’intérêts, alors même que le texte de la directive européenne réglemente explicitement cet enjeu. Les risques de recours seraient nombreux. Les décisions tranchant en faveur d’une dispense d’évaluation environnementale pourraient être attaquées, au stade de l’autorisation du projet, au motif de l’existence d’un conflit d’intérêts ([8]).

Le Gouvernement indique prendre en compte les arrêts du Conseil d’État et les dispositions de la directive relatives à l’absence de conflit d’intérêts ([9]).

Le Gouvernement a précisé à votre rapporteure pour avis avoir présenté au Conseil d’État un projet de décret en septembre 2018, prévoyant la pérennisation du dispositif transitoire, dans lequel les MRAe ne disposent que de la compétence pour rendre un avis sur l’évaluation environnementale, l’examen au cas par cas demeurant de la compétence des préfets de région. Le Conseil d’État n’a pas émis d’objection sur cette orientation du Gouvernement, mais a conditionné cette disposition à la modification de la loi (articles L. 122-1 et L. 122-3-4 du code de l’environnement). Le Conseil d’État n’a pas remis en cause la rédaction proposée par le Gouvernement lors de son examen du présent projet de loi.

L’Autorité environnementale fonctionne sur la base de la collégialité, ainsi que les MRAe. Cela implique que les procédures peuvent prendre un certain temps, raccourcissant d’autant les délais d’instruction par les DREAL. Les décisions au cas par cas doivent être rendues dans un certain délai (35 jours) et être motivées (bien que les décisions tacites de soumission puissent être rendues, elles sont très peu utilisées). Le Gouvernement a estimé que la collégialité est un élément essentiel du fonctionnement des MRAe et que le délai pour rendre une décision motivée sur la nécessité ou non de produire une étude d’impact apparaît trop contraignant dans ce cadre. Pour les projets, le nombre d’examens au cas par cas est nettement plus élevé (3 753 décisions en 2017) que pour les plans ou programmes (2 197 décisions en 2017. Depuis 2016, pour les plans et programmes, l’Autorité environnementale ou les MRAe sont les autorités compétentes pour l’examen au cas par cas). Cela plaide également, selon le Gouvernement, pour le maintien de la compétence actuelle des préfets de région en matière de cas par cas.

La démarche itérative de l’évaluation environnementale n’est, selon le Gouvernement, pas remise en cause. Votre rapporteure pour avis estime à cet égard que la procédure de cadrage préalable devrait être encouragée et plus diffusée (le pétitionnaire peut, en application de l’article L. 122-1-2, demander à l’autorité compétente pour prendre la décision d’autorisation ou d’approbation, un avis, dénommé « cadrage préalable », sur le champ et le degré de précision des informations à fournir dans l’étude d’impact. L’autorité environnementale est alors consultée).

Le dernier alinéa du IV de l’article L. 122-1 dispose que l’autorité de police de l’environnement compétente pour certains projets peut être compétente pour décider, dans le cadre de l’examen au cas par cas, s’il y a lieu de procéder à une évaluation environnementale ou non. Cette dérogation spécifique a été adoptée dans le cadre de la loi pour un État au service d’une société de confiance ([10]). Elle vise certains projets qui consistent en une modification ou une extension d’activités, installations, ouvrages ou travaux (IOTA, ICPE, canalisations de transport de gaz ou d’hydrocarbures, installations nucléaires de base).

Il convient de relever que, alors que le Conseil d’État préconisait de supprimer ce dernier alinéa, le projet de loi le maintient, compte tenu notamment du caractère récent de cette mesure.

III.   Les travaux de votre commission

Votre rapporteure pour avis estime qu’il est nécessaire de prendre une mesure législative afin de sécuriser le régime juridique de l’évaluation environnementale des projets. Elle constate que l’organisation proposée par le Gouvernement permet de répondre aux préconisations formulées par le Conseil d’État.

Votre commission a émis un avis favorable à l’adoption du présent article sans modification.

Article additionnel après l’article 4
(article L. 512-7-2 du code de lenvironnement)
Élargissement des critères permettant de substituer la procédure dautorisation à la procédure denregistrement pour les installations classées pour la protection de lenvironnement

Introduit par la commission

Votre commission a adopté l’amendement CD158 présenté par votre rapporteure pour avis, portant article additionnel après l’article 4, suivant l’avis favorable de la ministre, visant à étendre les possibilités de dérogation à la procédure d’enregistrement (procédure simplifiée pour certaines installations classées pour la protection de l’environnement) sur la base de critères plus largement définis qu’ils ne le sont aujourd’hui.

Le préfet peut décider que la demande d’enregistrement sera instruite selon les règles de procédure prévues pour les autorisations environnementales :

– si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés au point 2 de l’annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ;

– ou si le cumul des incidences du projet avec celles d’autres projets d’installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ;

– ou si l’aménagement des prescriptions générales applicables à l’installation, sollicité par l’exploitant, le justifie.

Dans les deux premiers cas, le projet est soumis à évaluation environnementale.

Il convient, dans le premier cas visé, de mentionner l’annexe III à la directive de 2011, et non seulement le point 2 de cette annexe, qui ne traite que des critères de localisation des projets. Les critères sont ainsi élargis aux caractéristiques du projet et aux types d’impacts potentiels.

Cette mesure est donc plus protectrice de l’environnement.

Chapitre IV
Lutte contre la fraude aux certificats déconomies dénergie

Article 5
(articles L. 222-2 et L. 222-10 [nouveau] du code de lénergie, article L. 56131 du code monétaire et financier)
Mise en place de nouveaux outils de lutte contre la fraude en matière de certificats déconomies dénergie

Avis favorable de la commission à une adoption sans modification

Le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE) a été créé par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (dite loi POPE).

Il repose sur une obligation de réalisation d’économies d’énergie imposée aux fournisseurs d’énergie, appelés obligés, les incitant à promouvoir l’efficacité énergétique auprès des utilisateurs d’énergie.

Un objectif pluriannuel est défini et réparti entre les obligés, au prorata de leurs ventes d’énergie aux consommateurs finaux. En fin de période, ils doivent justifier de l’accomplissement de leurs obligations. À défaut, ils sont tenus de verser une pénalité. La quatrième période des certificats d’économies d’énergie a commencé au 1er janvier 2018 et devrait se terminer, sauf prolongation, en 2020.

Les certificats d’économies d’énergie sont obtenus à la suite d’actions entreprises en propre par les acteurs, par l’achat de certificats d’économies d’énergie auprès de tiers, sur le marché, ou par des contributions financières à des programmes d’accompagnement. Les obligés peuvent aussi choisir de déléguer, partiellement ou entièrement, leur obligation à une structure tierce, appelée délégataire.

La croissance rapide des volumes de certificats d’économies d’énergie a conduit, notamment durant la troisième période, jusqu’en 2017, au développement massif de fraudes aux CEE, de nature diversifiée. Aussi est-il apparu nécessaire d’adapter la législation pour mieux y faire face.

I.   LE DROIT EXISTANT

La loi du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique a fixé, au travers de son article 17, les modalités de sanction de la délivrance ou tentative de délivrance frauduleuse de ces certificats.

La loi prévoit notamment l’application des peines prévues aux articles 441-6 et 441-10 du code pénal : pour les personnes physiques, deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, l’interdiction d’exercice, l’exclusion des marchés publics, et la confiscation du produit de l’infraction ; pour les personnes morales, l’interdiction d’exercer une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales.

Le rapport Tendances et analyse des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme en 2017-2018 publié par le ministère de l’action et des comptes publics souligne, au sujet des CEE : « La troisième phase, qui sest tenue de 2015 à 2017, a été marquée par une expansion des fraudes, reposant sur lobtention de CEE sur la base de travaux fictifs. Le risque portait principalement sur le statut de délégataire, qui permettait à certaines sociétés de présenter des dossiers fictifs pour obtenir auprès du ministère de lÉcologie des CEE, quelles revendaient ensuite à des courtiers ou à des groupes du secteur de lénergie obligés de remplir leurs quotas. »

Ce même rapport signale plusieurs évolutions réglementaires qui ont permis de mieux encadrer ce dispositif depuis le début, en 2018, de la quatrième période des CEE. Ainsi, au 1er juin 2018, les critères d’obtention du statut de délégataire ont été resserrés. Parallèlement, les moyens d’investigation accordés au pôle national des certificats d’économies d’énergie (PNCEE) ont été renforcés. Depuis le 1er janvier 2019, les distributeurs de fuel, cibles des délégataires malveillants, ne font plus partie des obligés, excluant ainsi de fait un certain nombre de délégataires du statut. Par ailleurs, la procédure de délivrance des CEE a été renforcée : le contenu des dossiers de délivrance a été précisé, de manière à mieux identifier les auteurs des travaux effectués, et certains types de travaux vulnérables aux fraudes devraient être exclus de la liste des opérations éligibles. Enfin, les sanctions prononcées contre les sociétés fraudeuses sont publiées au Journal officiel, sans toutefois que le motif de la condamnation ne soit rendu public.

Dans ce même rapport, TRACFIN présente d’autres outils de lutte envisageables contre la fraude : « renforcement des moyens et de lautonomie du PNCEE dans la planification et la conduite des contrôles ; dispositif de recueil des plaintes de particuliers en cas de travaux non faits ou mal exécutés afin de cibler les délégataires fautifs ; possibilité de placer les C2E sous séquestre en cas de fraude ; suppression des plafonds damende ; renforcement des modalités déchange dinformation entre les acteurs publics concernés… ».

Malgré ce récent renforcement de l’encadrement du dispositif des CEE, TRACFIN conclue : « Cependant, les méthodes de fraude évoluent pour sadapter. Les sociétés fraudeuses ne recherchent plus directement le statut de délégataire, mais passent des contrats de partenariat ou de sous-traitance avec des délégataires ou des obligés » et souligne « les risques présentés par les chaînes de sous-traitance qui permettent de contourner le statut de délégataire. »

Fraude aux CEE via les chaÎnes de sous-traitants
utilisÉs par les sociÉtÉs dÉlÉgataires

Source : TRACFIN

II.   LES ÉVOLUTIONS PROPOSÉES

A.   Les dispositions envisagÉes

D’une part, l’article 5 modifie l’article L. 222-2 du code de l’environnement, relatif aux sanctions pouvant être prononcées directement par le ministre en cas de manquement, pour permettre leur application dans le cas général des certificats délivrés sur la base de dossiers simplifiés.

En effet, dans sa version en vigueur, cet article est adapté à la délivrance de certificats après contrôle, sur la base de demandes comportant l’ensemble des pièces justificatives (devis, factures, etc.), situation qui ne correspond plus aux pratiques actuelles en la matière. Désormais, les contrôles sont effectués a posteriori, sur un échantillon d’opérations, après la délivrance des certificats.

D’autre part, l’article 5 crée un cadre juridique pour l’échange d’informations entre les différents services de l’État parties prenantes à la lutte contre la fraude.

B.   Les CeE : un enjeu majeur pour les consommateurs et la rÉnovation ÉnergÉtique

Votre rapporteure pour avis est d’autant plus convaincue de la nécessité de renforcer et d’accélérer la lutte contre la fraude sur les certificats d’économies d’énergie que ceux-ci représentent désormais un effort financier substantiel, de l’ordre de 9 milliards d’euros pour la quatrième période, représentant, d’après l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), de « 3 à 4 % des dépenses énergétiques des Français ». Par ailleurs, les CEE constituent désormais l’un des principaux outils de la politique d’efficacité énergétique française. Il apparaît donc essentiel que les consommateurs puissent non seulement être bien informés de ce dispositif et en bénéficier facilement, mais aussi y faire appel en toute confiance.

Plusieurs propositions de simplification et de clarification des procédures afférentes formulées lors des auditions, de nature à fluidifier et donc à faciliter la lutte contre la fraude, ont retenu l’attention de votre rapporteure pour avis, par exemple concernant l’information sur les motifs de condamnation en la matière.

Au-delà de cette question essentielle de la lutte contre la fraude, il conviendrait d’améliorer l’information du Parlement sur le dispositif des certificats d’économie d’énergie. A minima, la remise au Parlement d’un rapport annuel présentant un bilan des gains d’efficacité énergétique obtenus au travers des CEE pourrait donner l’occasion d’un débat sur le sujet.

III.   Les travaux de votre commission

Votre commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 5 sans modification.

Article additionnel après l’article 5
(article L. 221-13 [nouveau] du code de lénergie)
Publication dun référentiel de contrôle des certificats déconomies dénergie

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD149 portant article additionnel après l’article 5, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, prévoyant la publication annuelle d’un « référentiel présentant les modalités de contrôle pour lensemble des opérations standardisées déconomie dénergie ».

Cet amendement vise à instaurer un cadre national pour les contrôles relatifs aux travaux de rénovation énergétique réalisés dans le cadre des certificats d’économies d’énergie (CEE), afin d’assurer l’unité des pratiques dans la lutte contre les fraudes et les manquements. Ce cadre serait fixé par l’administration, qui est à même de déterminer, à partir de l’expérience passée, les modalités d’une base de contrôle efficace et applicable de manière générale par tous les acteurs de la rénovation à leur niveau.

Article additionnel après l’article 5
(article L. 221-14 [nouveau] du code de lénergie)
Clarification des conditions dapplication des règles relatives à la délivrance des certificats déconomies dénergie

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD148 portant article additionnel après l’article 5, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, visant à permettre aux acteurs du dispositif des certificats d’économies d’énergie de « demander, à partir dune situation écrite, au pôle national des certificats déconomies dénergie de prendre formellement position sur lapplication à leur situation des règles de droit donnant lieu à la délivrance des certificats déconomies dénergie. » Cette réponse doit intervenir dans un délai de deux mois et elle est « opposable par le demandeur au pôle national des certificats déconomies dénergie jusquà ce que survienne un changement de fait ou de droit qui en affecte la validité ou jusquà ce que le pôle national des certificats déconomies dénergie notifie au demandeur une modification de son appréciation. »

Article additionnel après l’article 5
(article L. 222-6 du code de lénergie)
Publication de la motivation des sanctions relatives aux certificats
déconomies dénergie

Introduit par la commission

Votre commission a adopté l’amendement CD157, présenté par votre rapporteure pour avis, portant article additionnel après l’article 5, prévoyant la publication au Journal Officiel de la motivation d’une sanction administrative ou pénale consécutive à un manquement aux dispositions relatives aux certificats d’économies d’énergie.

En effet, les sanctions sont actuellement publiées, conformément à l’article L. 222-6 du code de l’énergie, mais sans explication sur les motivations de la sanction, ce qui peut nuire aux acteurs concernés lorsque leur bonne foi n’est pas en cause.

Article additionnel après l’article 5
(section 16 [nouvelle] du chapitre IV du titre II du livre II du code de la consommation)
Obligation dinformation des consommateurs de prestations
déconomies dénergie

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD147 portant article additionnel après l’article 5, présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, imposant à tout « professionnel qui contacte un consommateur en vue de conclure un contrat portant sur la vente dun bien ou sur la fourniture dun service permettant de bénéficier de certificats déconomies dénergie » de lui communiquer les coordonnées de la structure en activité sur son territoire chargée de lui fournir, au titre du service public de la performance énergétique de l’habitat, une information gratuite et indépendante ou, à défaut, vers le dispositif national correspondant.

La montée en puissance du dispositif des certificats d’économies d’énergie a conduit à l’émergence de nombreuses structures qui contactent les consommateurs pour leur proposer des biens ou des services permettant de bénéficier de celui-ci. Toutefois, ces structures ne fournissent pas nécessairement une information complète et objective au consommateur sur les dispositifs les plus pertinents pour leur logement.

En créant une obligation d’informer les consommateurs de l’existence d’une structure d’information publique sur les économies d’énergie, cet amendement permet de donner au consommateur accès à une source d’information indépendante et complète.

Chapitre V
Mise en œuvre du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens »

Article 6
Autorisation de transposition de textes européens :
habilitation à légiférer par ordonnances

Avis favorable de la commission à une adoption sans modification

I.   le droit existant

Un ensemble de directives et de règlements, regroupés sous le nom de paquet « Une énergie propre pour tous les Européens », adoptés par la Commission européenne et le Parlement, à la fin de l’année 2018 et au début de l’année 2019, organisent une nouvelle gouvernance de la politique énergétique et de l’action pour le climat au sein de l’Union européenne.

II.   LES ÉVOLUTIONS PROPOSÉES

A.   Les dispositions envisagÉes

L’article 6 vise à autoriser le Gouvernement à transposer par ordonnance les quatre directives et trois règlements du Parlement européen et du Conseil suivants du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens » (le délai accordé au Gouvernement est indiqué entre crochets après chacun des textes) :

– directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (refonte) [délai de 12 mois] ;

– directive (UE) 2018/2002 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 modifiant la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique [délai de 8 mois] ;

– directive (UE) 2018/844 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018, modifiant la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments et la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique [délai de 6 mois] ;

– directive sur le marché intérieur de l’électricité révisée (en cours d’adoption) [délai de 12 mois].

– règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat [délai de 3 mois] ;

– règlement européen sur la préparation aux risques dans le secteur de l’électricité (en cours d’adoption) [délai de 12 mois] ;

– règlement européen sur le marché européen de l’électricité révisé (en cours d’adoption) [délai de 12 mois].

De plus, l’article 6 prévoit qu’un projet de loi de ratification doit être déposé devant le Parlement pour chacune des ordonnances dans un délai de trois mois à compter de sa publication.

B.   Une transposition aux consÉquences lÉgislatives difficiles À Évaluer

L’article 6 propose de transposer par ordonnances l’ensemble du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens », à l’exception du règlement instituant une agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie, en cours d’adoption.

Cet ensemble de textes comporte de nombreuses dispositions nouvelles, dans des domaines aussi diversifiés que :

– les énergies renouvelables : objectif global d’une part de 32 % dans la consommation brute d’énergie en 2030, d’au moins 23 % en 2020 pour la France, possibilité de soutien transfrontalier, simplification des procédures d’obtention des permis, limitation de l’utilisation des biocarburants, etc. ;

– l’efficacité énergétique : objectif global d’au moins 32,5 % en 2030, modification du calcul du coefficient de conversion de l’énergie, prise en compte de la lutte contre la précarité énergétique et du rôle des territoires, amélioration de la comptabilisation individuelle des consommations, etc. ;

– la performance énergétique des bâtiments : obligation d’élaboration d’une stratégie nationale de rénovation, déploiement de système d’automatisation, entretient des systèmes de chaleur, de froid et de ventilation, prise en compte de la qualité de l’air intérieur, etc. ;

– l’organisation du marché de l’électricité : fluidification du marché, limitation des tarifs réglementés, création de communautés d’énergies renouvelables ou de communautés énergétiques locales, etc.

L’étude d’impact du projet de loi justifie le recours à une habilitation à légiférer par ordonnance par l’imbrication des différentes directives et règlements, les délais de transposition prévus, et le caractère très prescriptif des textes qui « ne laissent quune faible marge de manœuvre aux États membres ».

Jugeant difficile d’effectuer, à ce stade, une analyse détaillée des incidences des mesures envisagées, l’étude d’impact se propose de la reporter au stade du projet de loi d’habilitation

Cependant, les dispositions envisagées conduiraient a minima à modifier le code de l’énergie, et éventuellement celui de la consommation. Par ailleurs, « lensemble des entreprises du secteur énergétique seraient impactées à des niveaux divers suivant les dispositions ». Enfin, « Les missions de la Commission de régulation de lénergie et du ministre en charge de lénergie pourraient être modifiées ».

Votre rapporteure pour avis estime que les enjeux soulevés par certains de ces textes européens, pour lesquels le délai de transposition prévu est de 8 ou 12 mois, justifieraient que le Parlement puisse en examiner les modalités de transposition.

Par exemple, les règles applicables aux communautés énergétiques locales prévues par la directive sur le marché intérieur de l’électricité devront être mises en cohérence avec celles applicables aux communautés d’énergies renouvelables, créées par la directive sur l’énergie renouvelable. Les décisions prises à cette occasion auront certainement un impact majeur sur le développement de ces communautés et un débat au Parlement permettrait d’identifier les solutions les mieux adaptées.

Votre rapporteure pour avis regrette que le Parlement ne soit pas saisi directement d’un projet de loi de transposition sur les questions touchant à l’énergie qui sont un point central des discussions sur le présent projet de loi.

Au cours des auditions, votre rapporteure pour avis a pu constater à quel point les questions de rénovation énergétique des bâtiments étaient stratégiques, du point de vue de la justice sociale et de l’efficience énergétique. Or, trois des directives traitent directement de ce sujet. Il aurait donc été pertinent qu’elles soient soumises à débat au Parlement.

III.   Les travaux de votre commission

Votre commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 6 sans modification.

Chapitre VI
Régulation de lénergie

Article 7
(article L. 132-2 du code de lénergie)
Mesures diverses relatives à la Commission de régulation de lénergie

Avis favorable de la commission à une adoption sans modification

I.   le droit existant

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) est une autorité administrative indépendante, créée par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, à l’occasion de l’ouverture à la concurrence des marchés de l’énergie. Celle-ci lui a confié pour mission principale de concourir « au bon fonctionnement des marchés de lélectricité et du gaz naturel au bénéfice des consommateurs finals et en cohérence avec les objectifs de la politique énergétique ».

L’activité de régulation de la CRE s’appuie, d’une part, sur le collège de la commission, composé de huit membres nommés pour une durée de six ans non renouvelable, et, d’autre part, le comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS), créé par la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006, composé de deux conseillers d’État et deux conseillers à la Cour de cassation, également nommés pour une durée de six ans.

II.   LeS ÉVOLUTIONS PROPOSÉES

A.   Les dispositions proposÉes

L’article 7 supprime une disposition contradictoire sur les modalités de renouvellement du collège de la Commission de régulation de l’énergie introduite à l’article L. 132-2 du code de l’énergie par la loi du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes : le deuxième alinéa de cet article L. 132-2 prévoit que le collège de la CRE est renouvelé par tiers tous les deux ans, tandis que son onzième alinéa dispose qu’il est renouvelé par moitié tous les trois ans. Le projet de loi prévoit que c’est cette dernière modalité qui sera désormais retenue pour le renouvellement du collège.

Par ailleurs, l’article 7 autorise le Gouvernement à modifier par ordonnance le code de l’énergie, afin de clarifier les différentes étapes de la procédure du CoRDiS en matière de règlement de différends et de sanctions, notamment en vue de renforcer les droits de la défense et de sécuriser les décisions sur le plan juridique.

Enfin, l’article 7 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour autoriser le président de la CRE à transiger afin de permettre un traitement non juridictionnel de quelque 15 000 requêtes en remboursement de tout ou partie de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) actuellement pendantes devant le tribunal administratif de Paris.

B.   Des dispositions de nature technique

Lors des différentes auditions menées par votre rapporteure pour avis, aucun des interlocuteurs rencontrés n’a soulevé d’objection sur ces dispositions.

Toutefois, sur la question des litiges pendants au tribunal administratif, votre rapporteure pour avis regrette de ne pas avoir pu avoir communication du projet d’ordonnance correspondant, pour mieux pouvoir en évaluer les implications.

Plusieurs des propositions d’évolution de la législation suggérées par la Commission de la régulation de l’énergie à l’occasion de son audition ont retenu l’attention de votre rapporteure pour avis. Ces propositions concernent des évolutions portant sur l’expérimentation en matière réglementaire, la participation des ministres des finances et de l’industrie aux décisions sur les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables, les modalités de soutien aux énergies renouvelables innovantes, l’uniformisation des systèmes d’information des régies municipales, l’affichage déporté des consommations, les zones non interconnectées et enfin le suivi des fournisseurs d’énergie.

III.   Les travaux de votre commission

Votre commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 7 sans modification.

Article 8
(article L. 336-5 du code de lénergie)
Calcul des compléments de prix du mécanisme ARENH

Avis favorable de la commission à une adoption sans modification

La loi du 7 décembre 2010 portant organisation du marché de l’électricité, dite « loi NOME », assure aux fournisseurs alternatifs, de manière transitoire et limitée en volume, un droit d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) à des conditions équivalentes à celles dont bénéficie le fournisseur historique EDF.

Ce mécanisme permet une réelle concurrence entre les fournisseurs d’énergie tout en faisant bénéficier l’ensemble des consommateurs des coûts de production bas du nucléaire historique, à hauteur d’environ 70 %.

I.   le droit existant

L’article L. 336-1 du code de l’énergie ouvre aux fournisseurs alternatifs, jusqu’au 31 décembre 2025, un accès régulé et limité à l’électricité nucléaire historique, produite par les centrales nucléaires mises en service avant le 8 décembre 2010. Cet accès régulé est consenti à des conditions économiques équivalentes à celles résultant pour Électricité de France de l’utilisation de ses centrales nucléaires. Il ne peut dépasser un plafond global d’ARENH fixé par voie réglementaire, lequel ne peut excéder 100 térawattheures.

Larticle L. 336-5 du code de lénergie énonce les modalités selon lesquelles un fournisseur alternatif peut exercer son droit daccès régulé à lélectricité nucléaire historique. Il prévoit notamment que lorsque la consommation réelle des clients savère inférieure au volume dARENH demandé par un fournisseur alternatif, celui-ci verse à EDF un complément de prix au moins égal à la partie positive de lécart moyen entre les prix observés sur les marchés de gros et le prix daccès régulé à lélectricité nucléaire historique.

II.   LeS ÉVOLUTIONS PROPOSÉES

A.   Les dispositions envisagÉes

L’article 8 du projet de loi modifie l’article L. 336-5 du code de l’énergie afin de préciser, dans le cas particulier de l’atteinte du plafond global d’ARENH, le mode de calcul et de répartition du complément de prix versé par un fournisseur ayant fait une demande excédentaire.

D’une part, ce complément de prix est réalloué aux fournisseurs pénalisés par cette demande excédentaire, à EDF et à la collectivité. D’autre part, la part du complément de prix excédant la partie positive de l’écart moyen entre les prix observés sur les marchés de gros et le prix d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique est reversée à la collectivité.

B.   Des points de vue divergEntS sur l’augmentation du plafond

À l’occasion des différentes auditions menées, votre rapporteure pour avis a constaté que les points de vue étaient divergents sur l’opportunité d’une augmentation du plafond de l’ARENH.

Lors de son audition, l’UFC-Que choisir a en particulier considéré qu’une augmentation du plafond serait dans l’intérêt des consommateurs.

D’après les informations transmises par la Commission de régulation de l’énergie, l’atteinte du plafond de l’ARENH a fortement contribué à l’augmentation récente des tarifs réglementés de l’électricité, à hauteur d’environ 3 % sur les 5,9 % appliqués.

Si l’objectif de réduction de consommation de l’électricité doit rester prioritaire, la limitation du plafond de l’ARENH contribue à faire augmenter le prix final pour le consommateur. Aussi, en augmenter le plafond permettrait de prévenir de nouvelles hausses tarifaires défavorables au pouvoir d’achat des Français.

III.   Les travaux de votre commission

Votre commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 8 sans modification.

Article additionnel après l’article 8
(article L. 336-2 du code de lénergie)
Relèvement du plafond de lARENH

Introduit par la commission

Votre commission a adopté, suivant l’avis favorable de votre rapporteure pour avis, l’amendement CD153 portant article additionnel après l’article 8, présenté par Mme Meynier-Millefert, visant à relever de 100 térawattheures à 150 térawattheures le plafond de l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (ARENH).

Conformément à l’article L. 336-2 du code de l’énergie, le volume global maximal d’électricité nucléaire historique pouvant être cédé est déterminé par un arrêté des ministres chargés de l’économie et de l’énergie, pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie. Ce même article limite à un plafond de 100 térawattheures par an ce volume global maximal.


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de ses réunions des mercredis 5 et 12 juin 2019, la commission du développement durable et de laménagement du territoire a examiné, sur le rapport de Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis, le projet de loi relatif à lénergie et au climat (n° 1908).

I.   Discussion générale

Mme la présidente Barbara Pompili. Mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner, pour avis, le projet de loi relatif à l’énergie et au climat. Je rappelle que la commission des affaires économiques nous a délégué l’examen au fond des articles 2 et 4, pour lesquels elle reprendra donc nos conclusions.

Nous avons le plaisir d’accueillir Mme Emmanuelle Wargon, qui suivra nos travaux aujourd’hui. Aussi, après la discussion générale, vous proposerai-je d’examiner, par priorité, les articles 2 et 4, ainsi que les amendements portant articles additionnels après ces articles, pour mettre à profit sa présence parmi nous.

Une fois ces articles examinés, Mme la secrétaire d’État nous quittera, et nous reprendrons l’examen des autres articles du projet de loi sur lesquels nous n’avons pas de délégation au fond, dans leur ordre normal.

Pour ce qui est des cavaliers législatifs, comme cela vous avait été indiqué dans un courrier que j’ai cosigné avec M. Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques, le dépôt des amendements ne présentant pas de lien, même indirect, avec les dispositions du projet de loi, n’a pas été accepté, pour respecter l’article 45 de la Constitution. Nous sommes tenus, en la matière, par la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Cela ne relève en rien d’une volonté de ma part d’empêcher les dépôts d’amendement – j’ai dû écarter un amendement que j’avais moi-même déposé –, mais il me paraît dommage de passer du temps à débattre de sujets qui seront ensuite censurés par le Conseil constitutionnel. J’appelle chacun à être particulièrement attentif. N’hésitez pas à revenir vers moi si certains de vos amendements vous paraissent poser problème sur ce point.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Le principal objectif de ce texte est de traduire dans la loi le renforcement de nos objectifs, pour répondre à l’urgence climatique, parfois de les clarifier, et de créer ou de renforcer certains moyens pour y parvenir. Ce projet de loi est indispensable pour adopter les projets de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et de stratégie nationale bas-carbone (SNBC), que nous avons mis en consultation.

Vous connaissez le contexte d’urgence à agir : dans le prolongement de l’Accord de Paris, le Gouvernement a voulu, dès le début du mandat, rehausser notre ambition, en fixant, au sein du Plan climat de juillet 2017, l’objectif d’atteindre, à l’échelle du territoire national, la neutralité carbone à l’horizon 2050. Cet objectif de neutralité carbone est plus ambitieux que le précédent, qui visait à diviser les émissions de gaz à effet de serre par quatre entre 1990 et 2050, puisqu’il correspond à une division des émissions par un facteur supérieur à six.

Le projet de nouvelle stratégie nationale bas-carbone, publié en décembre dernier, intègre cette ambition renforcée et dessine le chemin de la transition écologique et solidaire dans tous les secteurs : transports, bâtiments, agriculture, forêts, énergie, industrie, déchets, etc., ainsi que de nombreuses politiques transversales.

La PPE, qui définit la trajectoire que le Gouvernement se fixe pour les dix prochaines années, est également en cours de révision. Les travaux, menés en concertation avec l’ensemble des acteurs, ont montré la nécessité de revoir certains des objectifs climatiques et énergétiques fixés par la loi de transition énergétique : celui d’une réduction à 50 % la part de nucléaire dès 2025 n’apparaissant pas accessible, il est proposé de porter ce délai à 2035, ce qui permettra d’engager une transition réaliste et pilotée, qui accompagnera la baisse de la consommation d’électricité. À l’inverse, il apparaît possible d’accélérer la baisse des consommations d’énergies fossiles, en se fixant un objectif de moins 40 % en 2030 au lieu de moins 30 %.

Le projet de loi vise également à fournir des outils concrets pour rendre effective la transition écologique et atteindre nos objectifs. Le Gouvernement s’est engagé à l’arrêt de la production d’électricité à partir de charbon d’ici à 2022, ce qui constitue l’objet de l’article 3, en garantissant un accompagnement spécifique pour les salariés et les sous-traitants des entreprises, ainsi que pour les territoires affectés par la fermeture de ces centrales.

La transformation doit également s’appuyer sur des outils plus nombreux dans tous les domaines, notamment pour simplifier les différentes procédures administratives, limiter nos moyens de production les plus polluants et lutter contre les fraudes aux certificats d’économies d’énergie (CEE) : c’est l’objet des articles 4 et 5.

Est également prévue, à l’article 6, la transposition des textes européens sur l’énergie et le climat qui ont récemment été adoptés.

Le projet de loi sera enfin complété dans les prochains jours, après les articles 7 et 8, relatifs à la régulation des tarifs de l’énergie, par des dispositions sur les tarifs réglementés de vente de gaz naturel et d’électricité, qui ont fait l’objet d’une saisine rectificative du Conseil d’État. Ces dispositions, adoptées dans la loi dite « PACTE », avaient été censurées par le Conseil constitutionnel au motif qu’elles ne présentaient pas de lien, même indirect, avec les dispositions du projet de loi déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale. Il est donc nécessaire de les réintroduire dans ce cadre. Ce seront bien les mêmes articles que ceux que vous avez déjà votés.

Concernant plus spécifiquement les articles que votre commission examine sur le fond, l’article 2 prévoit la création du Haut Conseil pour le climat. Pour accompagner la stratégie nationale bas-carbone et atteindre l’objectif d’une neutralité carbone à l’horizon 2050, nous avons besoin d’une gouvernance renforcée. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a souhaité la mise en place d’un Haut Conseil pour le climat. L’objectif est de réunir et de faire se croiser des expertises reconnues, qui produiront des avis et des recommandations légitimes et indépendantes en matière de climat. L’expertise du Haut Conseil sera mobilisée en premier lieu pour donner un avis sur le projet de nouvelle stratégie nationale bas-carbone. Elle sera également attendue pour dresser le bilan annuel de notre politique climatique, de sa mise en œuvre concrète et opérationnelle dans tous les secteurs et de ses faiblesses, de sorte que le Gouvernement ne soit pas juge et partie. Enfin, il pourra faire des recommandations permettant de redresser la trajectoire dans tous les domaines. La force du Haut Conseil tiendra à son indépendance, à son expertise reconnue par tous et à ses moyens, que nous avons souhaités à la hauteur des enjeux et des missions qui lui sont confiées.

L’article 2 du projet de loi ancre l’existence du Haut Conseil pour le climat dans la loi, tandis que ses missions et ses modalités de fonctionnement sont précisées par décret. Afin de rendre l’instance opérationnelle le plus vite possible, le décret en question a été adopté par anticipation le 14 mai dernier. Le Parlement jouera un rôle central dans cette nouvelle gouvernance : le décret prévoit, en particulier, que le rapport annuel du Haut Conseil lui soit transmis et que, dans les six mois, le Gouvernement lui présente les suites données au rapport. Ainsi, chaque année, le Parlement sera au centre du débat sur la mise en œuvre de nos engagements climatiques et les mesures à prendre pour renforcer l’action dans ce domaine.

Ce Haut Conseil sera un outil fort, un aiguillon. Ainsi, le Président de la République a souhaité que le nouveau Conseil de défense écologique, qu’il réunit régulièrement autour de lui, puisse entendre le Haut Conseil, qui lui présentera son premier rapport. Le but est de disposer au plus vite d’éclairages que nous prendrons en compte dans la définition et la mise en œuvre des politiques publiques, qui sont toutes touchées par la lutte contre le changement climatique.

S’agissant de l’article 4, accélérer notre lutte contre le dérèglement climatique, c’est aussi sécuriser juridiquement le développement des projets d’énergies renouvelables, notamment dans le champ de l’évaluation environnementale. Les projets les plus importants font l’objet d’une étude d’impact, sur laquelle un avis est rendu par une autorité appelée autorité environnementale : c’est le cas, par exemple, des projets d’éoliennes. D’autres projets, dont l’impact est supposé moindre, sont soumis à un examen très succinct, à l’issue duquel il est décidé s’ils doivent néanmoins être soumis à une étude d’impact ; c’est notamment le cas des projets de panneaux photovoltaïques sur les toitures ou sur les ombrières de parking.

Jusqu’à la fin de 2017, le préfet de région était l’autorité environnementale en charge de l’examen au cas par cas, mais aussi l’autorité chargée de rendre les avis sur les études d’impact réalisées, si l’examen au cas par cas en avait fait ressortir la nécessité. Cette dernière compétence a été annulée par l’arrêt du Conseil d’État du 6 décembre 2017, ce qui a créé un vide juridique pour les projets. Tirant les conséquences de cet arrêt, un dispositif transitoire a été mis en place par le Gouvernement : le préfet de région conserve, comme c’était le cas jusqu’à présent, l’examen au cas par cas, tandis que les avis sur les études d’impact sont rendus par les missions régionales d’autorité environnementale (MRAE), qui dépendent directement du ministère de la transition écologique et solidaire.

Si ce dispositif transitoire permet de répondre à l’urgence des projets en cours d’instruction, il est nécessaire de le pérenniser et de le sécuriser juridiquement, d’une part en modifiant la loi qui prévoit actuellement, dans le cas général, une seule autorité pour ces deux missions et, d’autre part, en désignant, par décret, les deux autorités distinctes : le préfet pour l’examen au cas par cas et la MRAE pour rendre l’avis sur l’étude éventuellement décidée par le préfet. Il est urgent d’aboutir pour sécuriser définitivement les projets, dans le respect des décisions et des interprétations du Conseil d’État. L’insécurité juridique affecte de nombreux projets dans le domaine de la transition énergétique : projets éoliens en mer ou à terre, méthaniseurs, photovoltaïque, hydroélectricité, hydroliennes, etc., et, partant, notre capacité à respecter les engagements pris pour lutter contre le réchauffement climatique.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre commission est saisie, pour avis, du projet de loi relatif à l’énergie et au climat, et, au fond, sur deux articles, les articles 2 et 4, à la suite d’une délégation conférée par la commission des affaires économiques.

En tant que rapporteure pour avis, j’ai procédé, en un peu moins de deux semaines, à une trentaine d’auditions, et participé à six tables rondes, pour partie communes avec M. Anthony Cellier, rapporteur au fond pour la commission des affaires économiques. Ces auditions m’ont permis d’entendre les différentes parties prenantes : associations, industriels, organismes publics et syndicats.

Vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, il convient de souligner, une nouvelle fois, l’urgence à faire face aux changements climatiques par des mesures touchant toutes les activités humaines, qui soient à la fois rapides et décisives. Comme le rappelait le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de septembre 2018, il est important de veiller à contenir le réchauffement à un niveau de 1,5 degré. Or les engagements pris par les États parties à la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques laissent, à ce stade, présager une augmentation des températures de plus de trois degrés en 2100.

Lancement du plan climat dès juillet 2017, création du Conseil de défense écologique, qui définit les orientations en matière de transition écologique, ou encore création du Haut Conseil pour le climat, sont autant de mesures proposées pour accélérer la lutte contre les changements climatiques et l’adaptation à ces changements.

Le projet de loi traite de façon essentiellement technique et sectorielle des questions relatives à la nécessaire évolution de notre production française d’énergie pour répondre à l’urgence climatique. Si l’ambition du Gouvernement a été déclinée dans la programmation pluriannuelle de l’énergie et la stratégie nationale bas-carbone, le Parlement doit être partie prenante de toute décision ayant un impact sur le climat. Aussi aurions-nous souhaité que les textes réglementaires régis par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte soient soumis au pouvoir législatif, tout particulièrement la PPE et la SNBC.

Alors que le ministre de la transition écologique et solidaire a présenté en Conseil des ministres, lundi dernier, la convention citoyenne sur la transition écologique qui permettra de donner toute sa place à l’expression citoyenne, je souhaite insister sur le rôle de la représentation nationale.

Les enjeux relatifs au transport font actuellement l’objet d’un projet de loi spécifique en cours d’examen en séance publique. Cependant, le secteur du logement est aussi un contributeur majeur à l’émission de gaz à effet de serre. Or, les dispositions relatives à ce secteur mériteraient d’être renforcées pour améliorer l’équilibre du texte.

Pour autant, ce projet de loi présente, dans son premier article, de nouveaux objectifs ambitieux pour notre pays, notamment celui d’atteindre la neutralité carbone en 2050, avec une division des émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six entre 1990 et 2050, alors que le précédent objectif retenait une division par quatre. De plus, il renforce l’objectif de réduction de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles en 2030 par rapport à l’année de référence 2012, en la faisant passer de 30 % à 40 %.

Certes, s’agissant de la réduction de la part de l’énergie nucléaire dans notre production d’électricité, il repousse l’atteinte de cet objectif de 2025 à 2035. Ce report répond à un souci de réalisme, avec une trajectoire qui implique la fermeture de quatorze réacteurs, dont les deux de Fessenheim, tout en assurant la sécurité de l’approvisionnement électrique et la réduction effective de nos émissions de gaz à effet de serre.

La création du Haut Conseil pour le climat doit être saluée. Cette instance autonome, dont la légitimité reposera à la fois sur le haut niveau d’expertise et la variété des compétences de ses membres, ainsi que sur les moyens de fonctionnement qui lui seront attribués, devra donner un nouveau souffle à l’analyse des questions climatiques en France. Je vous proposerai un certain nombre d’amendements pour mieux ancrer la définition de ses missions dans la loi, ainsi que ses relations avec le Parlement. Il nous reviendra, ainsi qu’au Gouvernement, de veiller à préserver puis à accroître rapidement le budget de ce Haut conseil, afin qu’il puisse pleinement jouer son rôle.

L’article 4, relatif à la définition de l’autorité compétente pour prendre les décisions au cas par cas dans le cadre de l’autorité environnementale, doit permettre d’assurer le régime juridique des projets, la situation d’examen actuelle ne pouvant être que temporaire.

La fermeture, inévitable, des centrales à énergies fossiles les plus émettrices de gaz à effet de serre – en pratique, il s’agit des quatre dernières centrales à charbon situées sur le territoire métropolitain –, est préparée par l’article 3 du projet de loi. Je me suis évidemment inquiétée des conséquences sociales et économiques des fermetures d’installations envisagées, plus ou moins marquées suivant les cas pour les salariés et les territoires concernés. Le Gouvernement a bien tiré les conséquences de sa responsabilité à leur égard. Néanmoins, la question de la reconversion au sein des bassins de vie doit être considérée dès aujourd’hui.

Pour ce qui est de la lutte contre la fraude sur les certificats d’économies d’énergie (CEE), dont traite l’article 5, je suis d’autant plus convaincue de sa pertinence que ces certificats représentent désormais un effort financier substantiel, de l’ordre de 9 milliards d’euros pour la quatrième période. D’après l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), cela correspond à 3 à 4 % des dépenses énergétiques des Français. Par ailleurs, les CEE constituent désormais l’un des principaux outils de la politique d’efficacité énergétique française. Il apparaît donc essentiel que les consommateurs puissent non seulement être bien informés de ce dispositif et en bénéficier facilement, mais aussi y faire appel en toute confiance.

Au-delà de la question essentielle de la lutte contre la fraude, se pose celle des progrès – ou de l’absence de progrès constatée ces dernières années – en matière de performance énergétique des bâtiments. Son amélioration est un enjeu majeur pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050. Les dispositions du projet de loi ne suffisant pas, à elles seules, pour traiter cette question, il m’apparaît incontournable de prévoir des mesures complémentaires.

LEurope engage ses membres à décliner les directives du paquet « une énergie propre pour tous les Européens ». La plupart auraient mérité, à mon sens, un débat législatif en bonne et due forme préalablement à leur transposition. Le délai de transposition des quatre directives en question, qui va de six à douze mois, aurait pu permettre au Parlement den examiner, pour une partie dentre elles au moins, les modalités. Ainsi, les règles applicables aux communautés énergétiques locales prévues par la directive sur le marché intérieur de lélectricité devront être mises en cohérence avec celles applicables aux communautés dénergies renouvelables, créées par la directive sur lénergie renouvelable. Les décisions prises à cette occasion auront certainement un impact majeur sur le développement de ces communautés. Un débat au Parlement permettrait didentifier les solutions les mieux adaptées.

S’agissant de l’article 7 du projet de loi, il comporte diverses mesures relatives à la Commission de régulation de l’énergie (CRE), pour l’essentiel techniques, ainsi qu’une autorisation à légiférer par ordonnance, afin d’autoriser le président de la CRE à transiger, pour permettre un traitement non juridictionnel des quelque 15 000 requêtes en remboursement de tout ou partie de la contribution au service public de l’électricité (CSPE). Dans la mesure où il s’agit d’une innovation juridique, je considère qu’il aurait été souhaitable que le Parlement puisse avoir communication du projet d’ordonnance correspondant, pour mieux pouvoir en évaluer les implications.

Enfin, le dernier article est consacré au calcul des compléments de prix du mécanisme d’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (ARENH). Il est lui aussi assez technique, puisqu’il modifie le mode de calcul et de répartition du complément de prix versé par un fournisseur ayant fait une demande excédentaire. Néanmoins, c’est un sujet d’une actualité brûlante, puisque, d’après les informations transmises par la Commission de régulation de l’énergie, l’atteinte du plafond de l’ARENH a fortement contribué à l’augmentation récente des tarifs réglementés de l’électricité, à hauteur d’environ 3 %. Si l’objectif de réduction de la consommation de l’électricité doit rester prioritaire, la limitation du plafond de l’ARENH contribue à faire augmenter le prix final pour le consommateur. Aussi, en augmenter le plafond devrait-il permettre de prévenir de nouvelles hausses tarifaires défavorables au pouvoir d’achat des Français.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous allons maintenant entendre les représentants des groupes.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Je souhaite d’abord saluer un texte de loi efficace et pragmatique. Alors que, depuis six mois, les sujets relatifs à l’énergie et au climat sont dans nos rues, au cœur des mobilisations des gilets jaunes, des marches pour le climat, de la mobilisation de la jeunesse, y compris devant et dans cette assemblée, la tentation aurait pu être grande de reprendre la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, d’ajuster ses objectifs à dix ou vingt ans et de se féliciter collectivement d’une ambition accrue, dont la mise en œuvre aurait été laissée à d’autres. Mais la question n’est plus là désormais : les ambitions sont globalement partagées, et la PPE validée.

Il s’agit maintenant de les ancrer dans le réel, en privilégiant aux lois d’objectifs des actes concrets de suivi, notamment budgétaire – j’en profite pour saluer Mme Bénédicte Peyrol pour son travail –, les objectifs intermédiaires plutôt que des objectifs finaux toujours plus ambitieux et lointains, et les mesures concrètes, comme la feuille de route pour la rénovation énergétique par exemple ; en partageant avec confiance ces exigences avec les territoires, dans une coopération accrue, afin que les objectifs territoriaux soient en phase avec les objectifs nationaux ; en construisant la confiance par la transparence et le respect des engagements pris.

Les sujets relatifs au climat et à la transition énergétique sont au cœur des préoccupations de nos concitoyens, qui doivent pouvoir être directement acteurs de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique. Cela passe par un accès à une information fiable et de qualité, dès le plus jeune âge. Le Haut Conseil pour le climat pourrait y contribuer, grâce à la qualité des experts qui le composent. De manière générale, notre ambition sera aussi de faire de ce Haut Conseil une structure ambitieuse, dotée de moyens à la hauteur des enjeux et de ses missions. Gouvernement et Parlement ont besoin d’une structure de qualité, experte et critique, face à un enjeu majeur qui concerne tous nos concitoyens.

Ce texte possède aussi une ambition forte : la neutralité carbone à l’horizon de 2050, conformément aux engagements internationaux de la France. Si notre pays s’apprête à montrer l’exemple en affichant ses ambitions, il doit aussi le faire en montrant clairement les moyens qu’il y consacrera.

Des questions politiques de fond se posent : faut-il aller jusqu’à changer notre mode de vie ? Aller brutalement, comme certains le pensent, vers la décroissance ? La saisine complémentaire des commissions du développement durable et des affaires économiques, ainsi que le travail réalisé ensemble depuis plusieurs semaines, traduisent la vision partagée d’une politique climatique ambitieuse, couplée à une croissance économique positive et maîtrisée, qui bénéficie au présent sans compromettre le futur. Cette réconciliation est notamment possible grâce à l’idée de sobriété – plusieurs amendements iront en ce sens, pour la rénovation ou les CEE.

La rénovation énergétique est aujourd’hui le seul sujet qui réunit aussi clairement fin du monde et fin du mois, climat et pouvoir d’achat, qualité de vie présente et préservation des générations futures. Aussi le groupe LaREM défendra‑t‑il des engagements forts. L’interdiction de la mise en location des passoires thermiques est inévitable, pour assurer le respect des engagements pris et pour rester crédibles. Pour être membre du comité de pilotage du plan de rénovation, je sais que le sujet est complexe. La mention de ces passoires thermiques évoque aussitôt les marchands de sommeil, alors qu’en réalité un tiers des propriétaires bailleurs sont pauvres ou modestes – nous devrons garder cela à l’esprit. Il faudra aussi prendre en compte la définition des zones, tendues ou détendues. La consignation d’un budget rénovation à la vente permettra de profiter des mutations des biens pour inciter à leur rénovation. Enfin, une feuille de route pour la rénovation énergétique détaillée et attachée à la PPE est nécessaire, car sur ce sujet la loi ne suffit pas : il faut une volonté politique forte traduite par un pilotage effectif sur le terrain.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la secrétaire d’État, nous sommes satisfaits de constater que cette « petite loi énergie » vient devant l’Assemblée, sachant que la programmation pluriannuelle de l’énergie se fera sans elle. Pour bien comprendre, commençons par un état des lieux : l’année dernière, nous avons produit 550 térawattheures d’électricité et en avons consommé 474. La consommation d’électricité en France est stable et a même baissé de 0,8 % entre 2017 et 2018. La production se compose à 71 % de nucléaire, une part que vous souhaitez faire passer à 50 % en 2035, au lieu de 2025. Nous saluons cette initiative qui témoigne d’un certain réalisme. Mais arrêter des réacteurs n’est envisageable que si l’on a une électricité décarbonée à proposer, avec des tarifs maîtrisés, de façon à ne pas faire augmenter la CSPE et par voie de conséquence le prix de l’électricité. Nous avons tous été informés de sa récente augmentation de 6 %. Si nous voulons une électricité pas chère, il faut rester en mesure d’en maîtriser le prix.

L’énergie hydraulique, dont la part s’élève à 12 % en 2018, est la meilleure en matière de décarbonation et de pilotage. Il convient de la maîtriser, en conservant la propriété et la gestion des barrages et en permettant à la petite hydroélectricité de se développer sur nos différents cours d’eau. Je pense aux barrages des moulins, qui permettraient de produire une électricité locale.

L’éolien a produit 28 térawattheures l’an dernier, alors que nous avons consommé beaucoup moins que nous n’avons produit, puisque nous avons exporté 60 térawattheures. En grossissant le trait, on peut donc considérer que la totalité de l’éolien a été exportée. Cela signifie concrètement qu’en 2018, l’éolien n’a pas permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Au groupe Les Républicains, nous sommes très soucieux du réchauffement climatique et souhaitons que nous puissions maîtriser les émissions de gaz à effet de serre et les réduire. Malheureusement, la production éolienne en 2018 n’y a pas contribué. Au contraire, elle a fait augmenter le prix de l’électricité. Nous appelons à la plus grande précaution face aux énergies nouvelles : elles ne sont pas un but, mais un moyen pour être plus efficaces, tout en maintenant des prix de l’électricité relativement bas.

M. Bruno Duvergé. Nous étions nombreux dans cette commission, mais aussi, plus largement, dans l’hémicycle, à attendre ce projet de loi relatif à l’énergie et au climat, sujet dans lequel nombre d’entre nous sont investis et que, personnellement, je considère comme le plus important de ce siècle. Les résultats des dernières élections nous ont montré que cette question était devenue une grande préoccupation pour une partie significative des citoyens européens, des jeunes en particulier. Vous comprendrez, madame la secrétaire d’État, que nous attendons beaucoup de ce projet de loi.

L’article 1er est tout à fait en ligne avec les attentes du groupe MODEM et apparentés : il est essentiel de se donner des objectifs ambitieux et atteignables. Nous pensons que la neutralité carbone en 2050, à l’échelle du territoire national, est un objectif que nous devons et pouvons atteindre. L’article 2 est aussi très important : le Haut Conseil pour le climat nous permettra de contrôler de façon permanente si nous sommes bien sur la bonne trajectoire.

Mais nous pensons qu’il manque un élément important pour que la transition puisse se réaliser. La transition énergétique dans laquelle nous nous sommes engagés va, en trente ans, en une génération, ce qui est très rapide, totalement changer nos modes de vie, notre habitat et la façon de nous chauffer, celle de nous déplacer ainsi que nos méthodes de travail. Pour réussir une telle révolution, il faut y associer toute la nation. Chaque Français doit comprendre pourquoi on le fait. Il faut que chacun puisse s’imaginer dans ce nouveau monde, qui sera très différent, et identifier les chemins qui vont nous y conduire. Les premiers embarqués dans cette immense transformation doivent d’abord être les représentants de la nation que nous sommes. Or, nous ne sommes impliqués que dans des bribes de la discussion.

Notre mix de consommation d’énergie est le suivant : 63 % d’énergies fossiles, 20 % d’énergie nucléaire et 17 % d’énergies renouvelables. Réduire le débat parlementaire à la seule part du nucléaire dans ce mix n’est pas suffisant. Le débat sur le nucléaire est très important, mais aussi important que celui sur les 63 % d’énergies fossiles que nous allons devoir remplacer, en trente ans, par des énergies renouvelables. L’Assemblée nationale doit pouvoir échanger et se prononcer sur les sujets suivants : combien d’énergie éolienne et solaire pouvons‑nous produire sur le territoire national et à quels endroits ? Comment devons‑nous structurer nos énergies hydraulique et nucléaire pour équilibrer les fluctuations des énergies renouvelables ? Où diriger l’argent public pour isoler nos habitats et améliorer l’efficacité énergétique ? Combien d’énergie la biomasse peut-elle produire, sans utiliser pour autant les surfaces agricoles alimentaires ? Comment voulons‑nous utiliser les biogaz : pour la mobilité ou le chauffage ? Comment pouvons‑nous développer rapidement une filière hydrogène propre ?

Au groupe MODEM et apparentés, nous croyons à la diversification des énergies. Parler dans ce texte uniquement du nucléaire ne permet de traiter la thématique de l’énergie et du climat que sous un seul aspect. Nous espérons que, dans le cadre de l’examen en commission, puis en séance, nous parviendrons à introduire dans ce texte des dispositions aussi importantes que le biogaz, l’hydrogène, l’hydraulique, l’éolien ou le solaire. Tous ces sujets sont d’une importance capitale. Les discuter dans notre assemblée permettrait de montrer à nos concitoyens qu’ils sont au centre de nos préoccupations et que nous nous posons les bonnes questions pour réussir cette transition énergétique, qui est aussi une transformation de nos façons de vivre et, partant, de notre société.

M. Guillaume Garot. À l’instar de Mme la rapporteure pour avis et de nombreux collègues, je regrette que la PPE ne soit pas débattue ici. Qu’est-ce qui justifie que le Parlement ne soit pas saisi de cette question fondamentale pour la politique énergétique de notre pays ? L’enjeu de ce texte est, d’abord, de préciser et d’actualiser l’ambition de la loi de 2015. Répond-il pour autant à l’exigence, rappelée en permanence, d’accélérer la transition écologique ? Hélas non ! Il procède seulement à une adaptation, plutôt à la baisse, de l’ambition de 2015, à laquelle est ajoutée la fermeture des centrales à charbon d’ici à 2022. Son ambition est minimale. Rien de volontariste, rien d’ambitieux, rien de sérieux en fait, sur le changement de mode de production d’énergie, sur la transition énergétique des bâtiments et des logements, et trop peu sur la transition industrielle.

Le Gouvernement envoie des signaux contradictoires : on ne peut pas proclamer certaines intentions, comme c’est le cas ce matin, et refuser, dans l’hémicycle, des dispositions volontaristes contre l’impact carbone du trafic aérien, ou sur la fin des véhicules à carburant fossile. Les députés socialistes veulent remettre du volontarisme et de l’ambition, de façon raisonnable et réaliste, dans ce texte. Nous défendrons en particulier l’idée d’une transition énergétique du parc de logements à l’horizon non pas 2050, mais 2035. Il y a trop de passoires énergétiques dans notre pays, il faut prendre le taureau par les cornes.

De la même façon, nous vous proposerons de ramener l’interdiction de la vente de véhicules à carburant fossile à 2030, pour atteindre nos objectifs de réduction de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre. Nous avons également déposé un amendement sur une disposition qui relève peut-être à vos yeux du détail – mais c’est souvent là que le diable se niche : il vise à restreindre la portée d’un allégement de la procédure d’enquête environnementale aux seuls projets de production d’énergie renouvelable, alors que la rédaction proposée de l’article 4 prévoit de l’alléger pour tout type de projet.

M. Guy Bricout. Nous nous retrouvons à examiner un texte qui a connu moult soubresauts, entre tricotages et détricotages, première et seconde moutures, et qui risque d’en connaître encore quelques­-uns, au vu des retours du Conseil d’État et des précisions que le Parlement devra lui apporter.

Une remarque préalable : il est quand même assez désagréable pour le législateur que nous sommes de se voir imposer, via un décret, la nouvelle PPE, autrement dit les choix énergétiques de notre pays. Compte tenu des enjeux que cela représente en termes de stratégie économique, sociale et environnementale, je trouve que c’est assez léger et, à long terme, contre-productif.

Bien sûr, les députés du groupe UDI, Agir et indépendants peuvent reconnaître un certain nombre de points positifs à ce projet de loi. L’objectif de réduction de la consommation énergétique finale n’est pas revu à la baisse : il reste fixé à 20 % pour 2030, au lieu du taux de 17 % qui était envisagé dans la première version du texte. Il est également positif de créer un Haut Conseil pour le climat et de passer d’un facteur 4, comme le préconisent les experts du GIEC, à un facteur d’au moins 6 pour la division des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050. Il faut néanmoins mettre un bémol : la notion de neutralité carbone paraît peu sécurisante car elle n’est pas définie clairement en droit. Ce projet de loi acte enfin, après des années de tergiversations, l’arrêt du fonctionnement des quatre dernières centrales au charbon en 2022. Je me félicite aussi tout particulièrement de l’article 5, qui vise à renforcer la lutte contre la fraude aux certificats d’économies d’énergie : j’ai régulièrement eu l’occasion de souligner la nécessité de renforcer les contrôles, ce dispositif étant entaché par nombre de fraudes et de travaux bâclés. Dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2018, j’avais déposé un amendement préconisant de faire appel à des thermiciens agréés pour valider les travaux accomplis dans le cadre du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE).

Derrière les ambitions toujours plus grandes qui sont affichées, on observe néanmoins un certain nombre de rétropédalages et d’incertitudes regrettables quand on entre dans le détail. Ce texte est attendu depuis si longtemps que l’on était en droit d’espérer le voir beaucoup plus abouti et, surtout, concret. Malheureusement, nous restons face à un entre-deux qui ne rassurera personne, ni les professionnels, ni les particuliers. À titre d’exemple, les mesures d’efficacité énergétique, passant principalement par une baisse de la consommation d’électricité, ne sont toujours pas au rendez-vous. Contre toute attente, ce texte fait aussi tout bonnement l’impasse sur la réforme du mécanisme de calcul des tarifs de l’électricité, alors qu’il est urgent de trouver une réponse viable à la hausse de 5,9 % décidée par la Commission de régulation de l’énergie au premier semestre 2019 et qui aura de lourds effets pour de nombreux concitoyens. Qu’il s’agisse des moyens financiers ou des leviers d’incitation, les outils ne sont pas clairement affichés. Les objectifs sont de plus en plus ambitieux, mais il n’y a pas, en face, de réel dispositif pour les atteindre. Certains secteurs ne sont pas assez favorisés – je pense notamment à l’éolien offshore et à la méthanisation. En outre, il n’y a toujours rien au sujet de la transformation du crédit d’impôt transition énergétique en prime.

Mme Mathilde Panot. Si je devais résumer ce projet de loi en une phrase, je dirais que derrière les grandes ambitions affichées, comme d’habitude, ce sont de petits moyens qui sont mis en œuvre. Cela vaut globalement pour la politique écologique menée par ce Gouvernement. Mais nous y sommes habitués et nous ne sommes donc pas surpris par le caractère manifestement insuffisant de ce projet de loi. Ce n’est pas seulement le groupe La France insoumise qui le dit : de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) l’ont pointé du doigt, notamment Réseau Action Climat, qui juge ce projet de loi « dénué de mesures concrètes alors que les attentes sont fortes concernant la mobilité ou le logement, en particulier la rénovation des passoires énergétiques ».

Le premier problème avec ce texte, et quiconque a fréquenté des cercles écologistes devrait le savoir, tient au fait que la notion de neutralité carbone est hautement problématique. Nous alertons sur le risque du côté des entreprises si ce concept n’est pas associé à de stricts objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. De plus, il laisse la porte ouverte à des visions technicistes de l’atténuation du changement climatique, ce qui n’est ni à la hauteur des enjeux, ni porteur d’avenir. L’atténuation du changement climatique passe par la sobriété et l’efficacité énergétique, et elle ne saurait en aucun cas résider dans d’improbables instruments de capture du carbone. L’introduction d’un tel concept dans la loi laisse penser que cette idée est possible et même souhaitable. Nous ne le pensons pas, et c’est l’une des raisons de notre opposition à ce texte.

Les reculades à propos du nucléaire sont une autre raison, extrêmement forte. Le report à 2035 de la réduction à 50 % de la part de la production d’électricité d’origine nucléaire n’est pas sérieux, d’autant que vous ne prévoyez aucun pas conséquent pour assurer une évolution substantielle dans ce domaine. Nous allons donc utiliser encore longtemps cette énergie complètement archaïque.

Quant à l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre que vous avez fixé pour 2030, il est inférieur aux engagements que la France a pris à l’occasion de l’accord de Paris. Dans ces conditions, comment voulez-vous mériter nos félicitations ?

Enfin, le Haut Conseil pour le climat que vous proposez est une coquille vide. Nous défendons, pour notre part, la création d’un Haut Commissariat à la planification écologique. On sait, car beaucoup d’exemples l’ont prouvé, que ce n’est pas le marché laissé à lui-même, dans un climat de confiance absolue et déraisonnable, qui réglera le problème écologique. Si l’on veut créer une autorité ayant un rôle important dans ce domaine, elle doit être dotée d’un pouvoir réel, notamment pour faire prévaloir l’intérêt écologique sur les intérêts économiques à court terme. Votre Haut Conseil ressemble fort à un énième comité Théodule : il n’est pas à la hauteur du problème que nous devons affronter.

On ne doit plus avoir un marché absolument libre et dérégulé : c’est la contradiction fondamentale au sein de votre politique énergétique, que l’on retrouve dans votre soutien renouvelé aux certificats d’économies d’énergie, qui sont bien en deçà des mesures qu’il faut désormais prendre. On devrait mettre en place, par exemple, comme le propose France nature environnement, une interdiction de location des passoires énergétiques. Nous serions ainsi bien davantage à la hauteur.

M. Hubert Wulfranc. Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine pourraient tout à fait partager les objectifs que vous dites vouloir renforcer et clarifier dans la perspective d’une neutralité carbone en 2050. Si l’on s’en tenait aux mots que vous employez et aux objectifs de long terme, on pourrait adhérer à ce que vous proposez : passer à 50 % de nucléaire en 2035 paraît un socle raisonnable pour assurer notre mix énergétique.

Ce qui nous pose problème, c’est que cette loi n’est faite que de bribes, comme l’a dit notre collègue du MODEM. Comment peut-on avancer sur le terrain législatif sans voir quels sont les outils concrets et opérationnels qui permettront d’atteindre les objectifs à long terme ? Je pense en premier lieu à l’avenir d’EDF. Nous savons que des mutations se préparent, mais elles n’ont pas été portées à notre connaissance à ce stade. Or, s’il existe un outil en la matière, c’est bien cette entreprise et ses capacités sur le terrain, par exemple dans le domaine hydroélectrique. Sur ce point, et ce n’est pas le seul, nous restons dans l’expectative la plus complète.

Il en est de même pour l’action prévue dans des domaines majeurs tels que le logement. Nous avons tous eu des bribes d’informations sur la première réunion du Conseil de défense écologique, mais nous sommes dans l’incertitude quant aux efforts que vous souhaitez engager. Incertitude majeure également dans le domaine économique et social : la transition à réaliser doit s’accompagner d’une volonté politique en ce qui concerne la reconversion professionnelle et la réindustrialisation des territoires. Là encore, on reste totalement dans le flou. Par ailleurs, les objectifs tarifaires pour les usagers manquent cruellement dans cette loi. Bref, beaucoup de bribes, mais peu de questions de fond sont abordées dans le texte législatif qui nous est proposé aujourd’hui.

M. Bertrand Pancher. Ce projet de loi relatif à l’énergie et au climat est, pour un grand nombre de militants écologistes et de personnes qui défendent l’environnement, à la limite de la provocation. C’est vraiment un sentiment de grande déception qui anime celles et ceux d’entre nous qui ont exigé ce texte, arrivé très tardivement. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons déposé peu d’amendements en commission, mais je promets que M. François-Michel Lambert va se rattraper en séance avec des amendements soutenus par les grandes organisations.

Pourquoi ce texte est-il à la limite de la provocation ? Pour commencer, on l’a dit, nous avons failli ne pas l’examiner ; ensuite, on repousse l’objectif de réduction de la part du nucléaire, au grand émoi des militants écologistes, même si, pragmatisme oblige, on répétait depuis longtemps que ce n’était pas atteignable. Du coup, on se fixe de nouveaux objectifs aussi ambitieux que lointains – c’est un grand classique en France depuis des années et des années : et comme on ne les atteindra pas davantage, on refera la même chose dans quelque temps.

On se rassure en créant un Haut Conseil, un « machin » : les Hauts Conseils, cela fait des années et des années que l’on en crée, et cela se passe toujours de la même façon : on les installe en grande pompe avec tous les numéros un des organisations, six mois plus tard, on n’y voit plus que les numéros deux, et un an après, il n’y a plus personne… On ne renforce réellement aucun des moyens qui permettraient de répondre à deux objectifs stratégiques pour tous : la diminution de la consommation énergétique – on aurait voulu un vaste plan de rénovation thermique mais aussi de décentralisation des actions menées, une interdiction des passoires thermiques, une stabilité de la réglementation et de la fiscalité dans ce domaine, comme on le réclame depuis toujours. Enfin, rien n’est fait pour augmenter la production d’énergie et surtout de chaleur renouvelables. On rêvait d’une démultiplication du Fonds chaleur de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) : vous allez me dire que cela relève du budget, mais on aurait quand même pu fixer des objectifs. On consacre 200 millions d’euros à la chaleur renouvelable…

M. Jean-Charles Colas-Roy. Non, 350 millions d’euros : le montant a beaucoup augmenté !

M. Bertrand Pancher. … et 6 milliards d’euros pour l’électricité renouvelable. Il faudrait entre trois et cinq fois plus. Il aurait également fallu augmenter les tarifs de rachat du gaz renouvelable. Bref, beaucoup de rendez-vous ont été manqués. Nous espérons que ce sera corrigé, mais pour l’instant, ce projet de loi reste pour nous une très grande déception.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous allons maintenant entendre les autres orateurs.

M. Gérard Menuel. Tout le monde reconnaît que la réduction des émissions de gaz à effet de serre est la toute première priorité, qu’il faut faire partager au niveau mondial. Tous les secteurs doivent se sentir concernés, car ils le sont : l’industrie, les transports, le logement mais aussi l’agriculture. Il est bon d’inscrire des obligations de résultat dans la loi, mais il est également nécessaire d’avoir des obligations de moyens plus claires et plus ambitieuses, par exemple pour l’isolation des bâtiments, dans l’industrie et dans l’agriculture. L’arrivée ou la suppression d’une molécule utilisée par les agriculteurs devrait être accompagnée d’une étude d’impact en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Ne faudrait-il pas que chaque loi, chaque action publique et chaque orientation, dans tous les domaines, fassent l’objet d’une étude d’impact ?

M. Matthieu Orphelin. Le projet de loi prévoit la création d’un Haut Conseil pour le climat, ce qui est une bonne idée. Il est prévu, pour l’instant, que cet organisme soit une instance autonome rattachée au Premier ministre. Pourquoi ne pas en faire plutôt une autorité indépendante ? Cela présenterait beaucoup d’avantages, y compris pour le Gouvernement, car cela permettrait de garantir que les travaux menés soient considérés comme fiables et indépendants par l’ensemble des parties prenantes et des acteurs politiques. J’avais proposé un amendement jugé irrecevable au motif qu’il constituerait une charge pour l’État, mais j’aimerais avoir votre avis sur cette question.

M. Vincent Descoeur. Plusieurs collègues ont déjà parlé des différentes sources de production d’énergies renouvelables et les moulins ont été évoqués. J’ai déposé plusieurs amendements sur ce sujet, mais ils ont curieusement été considérés comme des cavaliers législatifs, ce dont je m’étonne.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en reparlerons plus tard, cher collègue.

Mme Delphine Batho. Je vous remercie de m’accueillir dans votre commission. Le projet de loi est-il à la hauteur de l’état d’urgence écologique dans lequel nous nous trouvons ? La réponse est non. Le rapport SR15 du GIEC, publié en octobre, montre que nous ne faisons plus face à un enjeu de long terme. D’un certain point de vue, le débat relatif à 2050 n’a strictement aucun intérêt. Il faut procéder en urgence à des changements rapides et radicaux de notre consommation énergétique et de nos modes de vie, afin de diviser par trois les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 en France. Est-ce ce que prévoit ce projet de loi ? Pas du tout. Votre texte s’inscrit en fait dans la continuité des exercices précédents, qui ont échoué, à savoir le Grenelle de l’environnement et la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dont aucune leçon n’est tirée. Un débat a eu lieu à l’occasion de ce dernier texte sur le recul que constituait le fait qu’elle ne soit pas une loi de programmation et sur l’absence de tout droit de regard du Parlement sur la PPE. Même la fermeture des centrales au charbon est reportée dans ce texte au-delà de 2022.

M. Jean-Pierre Vigier. Ce projet de loi va dans le bon sens : il est évidemment important de lutter contre le dérèglement climatique et de réduire notre dépendance énergétique en atteignant la neutralité carbone en 2050. Nous devons accélérer le développement des énergies renouvelables : panneaux photovoltaïques, méthanisation, éoliennes, à condition de ne pas en installer partout, au détriment de nos paysages. J’ai bien noté la réduction de la part du nucléaire à 50 % de la production d’énergie électrique d’ici à 2035. Prenons garde, toutefois, durant les périodes climatiques difficiles, notamment l’hiver où la consommation d’énergie électrique est élevée, à ne pas dépendre de nos voisins, car nous ne pourrions pas maîtriser le prix de l’énergie. Qu’en pensez-vous, madame la secrétaire d’État ?

M. François-Michel Lambert. Je vais me contenter d’évoquer un sujet sur lequel je suis totalement impliqué : la fermeture d’une des quatre centrales au charbon que compte notre pays, celle de Gardanne-Meyreuil. On demande un sacrifice à un territoire et à un millier de personnes, mais je crains que ce ne soit qu’une forme d’affichage de la part du Gouvernement et que la volonté ne soit pas réellement à la hauteur des défis en matière d’énergie. Alors que nous travaillons en ce moment sur la mobilité, on n’aborde pas la question de l’aménagement du territoire et on ne s’interroge pas sur les fondamentaux de notre modèle de société : il s’agit de sortir d’une société productrice de CO2. On fait de la fermeture de quatre centrales et du sacrifice de quelques milliers de personnes un totem de notre engagement. Je souhaiterais que l’on ne se trompe pas de combat.

M. David Lorion. L’article 3 du projet de loi tend à fermer les centrales au charbon d’ici à 2022 dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur de la production d’électricité de la France continentale. Je n’ai pas vu de dispositifs spécifiques aux territoires d’outre-mer. Or je pense que les usines thermiques réunionnaises qui utilisent du charbon, par exemple, doivent aussi se tourner vers d’autres sources d’énergie, comme le bois : la bagasse, produite localement, est déjà utilisée. Aujourd’hui, le mix énergétique de La Réunion comprend 38 % de charbon. Il n’est pas question de l’outre-mer dans le texte, on ne sait donc pas à quelle date les usines concernées seront transformées. Si l’on remplaçait le charbon par du bois venant de Scandinavie ou des États-Unis, son transport produirait autant de gaz carbonique que l’importation de charbon et sa combustion émettrait autant de CO2. Ne serait-il pas plus judicieux de trouver une autre source d’énergie ?

M. Martial Saddier. Je voudrais remercier M. Jean-Marie Sermier pour son intervention : je souhaite que l’on profite de ce texte pour clarifier la position du Gouvernement sur la fin de la concession des barrages hydroélectriques. Nous sommes un certain nombre à penser que ces grands barrages, qui représentent 7 milliards de mètres cubes d’eau douce, doivent être déclarés d’intérêt général, pour la Nation, à l’instar d’autres grandes infrastructures.

Comme l’a dit Mme Delphine Batho, on n’en est plus au stade du constat, mais de l’urgence. À titre personnel, je souhaiterais que l’on identifie des zones géographiques : on connaît très bien, dans notre pays, celles à forte consommation et à fortes émissions, qui ont aussi une incidence sur la qualité de l’air. Peut-être devrait-on prévoir des dispositifs spécifiques pour ces zones géographiques.

En ce qui concerne le volet international, n’oublions pas que des pays voisins et amis expliquent, la main sur le cœur, qu’ils arrêtent leurs centrales nucléaires alors que la vérité est qu’ils achètent notre énergie nucléaire. C’est aussi un sujet que l’on pourrait aborder dans le cadre de ce texte.

M. Sébastien Nadot. J’ai entendu Mme la secrétaire d’État présenter le Haut Conseil pour le climat comme un aiguillon et Mme la rapporteure pour avis, qui a réalisé un travail considérable, parler d’un objectif carbone ambitieux pour 2050. Rappelons que nous sommes en 2019… Le politique se voit souvent reprocher de ne réagir que dans l’instantanéité sans jamais penser au long terme : comment se fait-il que, que sur ces aspects environnementaux, on ne pense qu’au long terme, en oubliant demain ?

M. Jean-Yves Bony. Réduire la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité d’ici à 2030 est un objectif louable, mais on ne peut pas le faire à n’importe quel prix. Je voudrais vous interpeller sur la méthanisation. J’ai déjà eu l’occasion de le signaler en commission : les méthaniseurs fleurissent un peu partout sur notre territoire. Ils devaient à l’origine valoriser des déchets produits sur place. On constate malheureusement une dérive : les déchets utilisés parcourent des centaines de kilomètres. On voit un ballet de camions dans nos territoires. Cela pose aussi clairement un problème agricole : des agriculteurs se mettent à cultiver des dizaines d’hectares de maïs dans le seul but d’alimenter ces méthaniseurs. Il va falloir à un moment donné fixer des priorités : ou bien l’agriculture, ou bien les méthaniseurs.

M. Pascal Lavergne. Se pose également le problème de l’installation de fermes photovoltaïques : encore faut-il trouver des parcelles sur lesquelles l’installation de panneaux solaires est autorisée, ce qui suppose bien souvent de réviser les plans locaux d’urbanisme (PLU). Il serait bon de prévoir dans la loi des dispositions permettant de raccourcir les procédures et d’être plus volontariste sur le terrain. Je ne sais si le Haut Conseil pourra se saisir de ces questions.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Je vais apporter quelques éléments de réponse, étant entendu que nous reviendrons par la suite sur les sujets qui font l’objet des articles 2 et 4 du projet de loi.

Je voudrais reclarifier de quoi l’on parle et revenir sur le débat concernant le court terme et le long terme. La loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte est le texte dans lequel les objectifs et le cadre d’action ont été adoptés : elle a fixé d’une manière assez précise les objectifs en matière de décarbonation et de réduction des énergies fossiles. Elle a notamment arrêté l’objectif d’une réduction de 30 % des énergies fossiles en 2030. Le texte que vous examinez aujourd’hui le porte à 40 % : il s’agit donc bien d’une accélération.

Il était également prévu de réduire de 20 % l’énergie consommée en 2030. Vous savez que nous avons hésité à revoir cet objectif ; nous avons finalement souhaité le laisser inchangé. Nous en parlerons dans le cadre de la discussion sur la rénovation des bâtiments.

Il avait également été prévu une diminution par quatre du CO2 émis en 2050 ; nous allons passer à un facteur 6. Je voudrais réagir à ce qui a été dit à propos de la captation du CO2. Le texte que nous proposons aujourd’hui est plus ambitieux en ce qui concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre et ne compte en aucun cas sur la captation pour réaliser la majeure partie du chemin.

Les énergies renouvelables devront représenter 40 % de la production d’électricité en 2030 et 38 % de la consommation finale de chaleur. Il faut également parvenir, à la même date, à 15 % de carburants renouvelables et à 10 % de biogaz, tout en portant à 32 % la part moyenne des énergies renouvelables.

Les objectifs de moyen terme et de long terme figurent donc dans la loi de 2015, telle qu’elle a été adoptée par le Parlement. La PPE en découle. Je rappelle que l’article L. 141-1 du code de l’énergie, issu de l’article 176 de cette loi, dispose que « la programmation pluriannuelle de l’énergie, fixée par décret, établit les priorités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental, afin d’atteindre les objectifs définis aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 du présent code ». Vous ne trouvez pas normal que la PPE soit de niveau réglementaire : nous sommes pourtant bien dans le cadre tel qu’il a été validé par le législateur.

La discussion daujourdhui concerne des objectifs qui ne portent pas tous sur 2050. Certains dentre eux sont fixés à 2030, voire à une date antérieure. La PPE est loutil de planification, dorganisation du travail et des filières qui permettra datteindre les objectifs : tout cela est bien évidemment in fine financé, et les financements seront présentés dans le cadre du projet de loi de finances. La question nest donc pas uniquement de savoir si les quelques objectifs modifiés par le projet de loi donnent une vision, un plan daction et une prise en compte de lurgence suffisants, mais bien de revoir le cadre global dans lequel nous nous situons.

S’agissant du nucléaire, nous sommes tous conscients que l’objectif de 2025, tel qu’il avait été fixé par la loi de 2015, n’était tout simplement pas atteignable. La PPE établit un chemin, avec la fermeture de quatorze tranches nucléaires qui commencera en 2020, en commençant par les deux tranches de Fessenheim, ce qui avait été promis à plusieurs reprises, mais n’avait jamais été fait. Le projet de territoire a été signé et EDF connaît les dates précises de la fermeture, à savoir mars et août 2020.

En ce qui concerne l’éolien et la question de savoir s’il sert à la consommation française ou à l’export, et donc à la décarbonation de qui il contribue, nous sommes globalement, vous l’avez dit, un exportateur net, et la PPE nous permet d’augmenter ces exportations. À certains moments, les interconnexions sont nécessaires pour gérer la pointe. La PPE, par les objectifs fixés pour les différents segments, nous permet de ne pas être dépendants grâce à l’augmentation des capacités et à la réduction de la consommation. Je voudrais également souligner que l’éolien n’augmente pas le prix de l’électricité. Il joue plutôt à la baisse car les aides sont payées en dehors du marché. L’éolien contribue à baisser le taux de CO2 dans notre mix électrique, à réduire nos émissions et celles de nos voisins. C’est notamment grâce à l’éolien que l’on peut fermer les centrales au charbon.

Je tiens à revenir sur ce dernier point, qui est important et que je suis avec les parlementaires concernés dans chacun des quatre sites. En termes d’émissions de gaz à effet de serre, ces centrales équivalent à 4 millions de voitures : ce n’est donc pas seulement un totem, mais vraiment quelque chose qui a un impact majeur en France. Il y a des projets de territoire et le texte qui vous est soumis renforce les possibilités d’accompagnement social et territorial. EDF reclassera de toute façon ses propres salariés ; mais ceux d’Uniper à Gardanne et à Saint-Avold comme ceux des sous-traitants pourront se voir proposer une nouvelle activité.

Au-delà du débat portant sur les objectifs, ce projet de loi a pour avantage de mettre sur la table des outils pour les différents segments lorsque d’autres textes ne l’ont pas fait. J’ai déjà parlé des centrales au charbon. En ce qui concerne la rénovation, je partage le sentiment général selon lequel il faut aller plus vite et être plus efficace. J’en ai discuté avec beaucoup d’entre vous, en particulier avec Mme Marjolaine Meynier-Millefert, qui coanime le plan de rénovation et d’efficacité énergétique du bâtiment. Le projet de loi comporte un outil relatif aux CEE et à la lutte contre la fraude dans ce domaine. Au-delà, je pense qu’il faut mettre en place un plan d’action pour la rénovation des bâtiments et nous sommes prêts à y travailler afin que nous ayons les mesures les plus concrètes possibles.

On ne peut pas détacher ce projet de loi d’autres textes présentés par le Gouvernement. Je pense notamment au projet de loi d’orientation des mobilités, où tout ce qui touche précisément aux mobilités est en cours de traitement ; quant à la fusion et la simplification des aides à la rénovation, elles seront présentées en projet de loi de finances, notamment le rapprochement entre les aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE). Vous avez également évoqué la question de la décentralisation et la nécessité de donner plus de marge de manœuvre aux territoires en la matière : cela fera l’objet d’une discussion avec les collectivités territoriales dans le cadre des textes de décentralisation.

Doit-on faire du Haut Conseil pour le climat une autorité administrative indépendante (AAI) ? Précisons qu’il ne s’agira pas d’une instance chargée de prendre des décisions, mais d’une instance scientifique, de conseil. Son indépendance sera assurée par la compétence scientifique de ses membres et la reconnaissance de leur expertise, mais ce ne sera pas une AAI au sens juridique du terme. Sa vocation sera d’éclairer l’action du Gouvernement et du Parlement. En faire une AAI, avec les conséquences juridiques que cela impliquerait en matière de gestion opérationnelle, ne répondrait pas vraiment à la question. C’est la nomination et les compétences de ses membres qui donneront son indépendance au Haut Conseil.

L’outre-mer enfin fera l’objet d’une PPE révisée spécifique. Notre objectif est de verdir le mix énergétique, notamment électrique, le plus rapidement possible en faisant appel à tous les moyens – la biomasse, locale en priorité, mais aussi le photovoltaïque, l’éolien et l’hydroélectricité, notamment en Guyane. L’horizon de sortie du charbon et du fuel ne peut pas être fixé à 2022 pour l’outre-mer : il faudra regarder la question pour chacun des territoires, en avançant dans des conditions qui améliorent globalement le bilan carbone.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en venons à l’examen des articles du projet de loi.


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II.   Examen des articles

1.   Réunion du mercredi 5 juin 2019

Chapitre II
Dispositions en faveur du climat

Article 2 (chapitre II bis du titre III du livre Ier et article L. 222-1 D du code de l’environnement, articles L. 141-4 et L. 145-1 du code de l’énergie) : Création du Haut Conseil pour le climat

La commission examine lamendement CD96 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Notre amendement vise à substituer au Haut Conseil pour le climat un Haut Commissariat à la planification écologique qui organiserait réellement l’adaptation et l’atténuation nécessaires face à l’urgence écologique et climatique et ferait prévaloir, dans le cadre de décisions, les intérêts écologiques sur les intérêts financiers. Comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État, l’instance que vous proposez de créer donnera des conseils mais ne prendra pas de décisions. Je vais vous donner un « scoop » : les objectifs prévus ne sont pas respectés, les scientifiques le disent absolument partout et ils lancent l’alerte. Il ne sert à rien de créer un soixante-deuxième conseil ou comité dans le domaine de l’environnement ; il faut réellement inverser les normes afin de rompre avec notre modèle économique : c’est lui qui est mis en cause par les scientifiques, notamment dans le dernier rapport sur l’effondrement de la biodiversité. Il faut en finir avec cette prévalence de l’économique sur l’intérêt général, humain et écologique.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. J’émets un avis défavorable. Nous parlons d’un conseil constitué de scientifiques ; les choix de modèle économique et les choix structurants relèvent du Gouvernement et du Parlement. Il ne s’agit pas de créer un conseil qui aurait un rôle de planification, mais une instance qui pourra guider ces choix démocratiques sur une base scientifique, à partir des travaux du GIEC et de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES).

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Avis défavorable. La dénomination actuelle du Haut Conseil est pertinente et traduit bien la mission qui lui est confiée ainsi que la place particulière qui lui est dévolue. Pour avoir entendu l’équivalent du Haut Conseil français au Royaume-Uni, le Comitee on Climate Change, je peux vous assurer que si le HCC s’empare de ses missions, il sera reconnu au sein de la société française.

M. Matthieu Orphelin. Pour ma part, je préfère la dénomination retenue par le projet de loi. Cela étant, l’indépendance du Haut Conseil doit être garantie ; certaines autorités indépendantes rendent des avis, mais ne prennent pas de décisions. La question a été posée dès le début de nos échanges, madame la secrétaire d’État. L’indépendance de cette autorité est essentielle si nous voulons qu’elle prenne toute son ampleur ; il y va de l’intérêt de toutes les parties prenantes comme de l’ensemble des représentants politiques, Gouvernement compris.

M. François-Michel Lambert. La réponse de Mme la secrétaire d’État est très juste sur le plan technique, mais ne me paraît pas à la hauteur des enjeux. Plutôt qu’un Haut Conseil pour le climat, ne pourrait-on pas imaginer un Haut conseil de la transition écologique ou du développement durable ? La question du climat n’est pas la seule qui se pose à nous ; Mme la présidente de la commission est très engagée dans le combat pour la biodiversité, et au-delà. En son temps, elle a d’ailleurs porté la très belle loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

M. Sébastien Nadot. J’ignore s’il faut changer la dénomination du Haut Conseil ni s’il doit être plus ou moins indépendant, mais cet amendement pose à mon sens une question essentielle. En matière de planification, pouvons-nous faire appel et écouter les scientifiques ou ai-je entendu la secrétaire d’État nous dire qu’ils n’interviendraient pas du tout sur ce sujet ?

Mme Mathilde Panot. Vous avez bien compris, madame la secrétaire d’État, qu’il s’agissait d’un amendement d’appel. Nous sommes bien évidemment conscients qu’il faut une véritable volonté politique pour être à la hauteur des enjeux : inscrire la nécessité d’une planification et d’un État stratège marquerait pour le coup la volonté politique du Gouvernement.

Or les politiques actuellement menées traduisent une incroyable perte de compétences. Depuis 2013, 13 250 postes ont été supprimés dans votre propre ministère et les agences qui lui sont liées, et le mouvement se poursuit à Météo France et au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA). Partout on continue à perdre de l’expertise publique et en plus, voilà qu’on va privatiser les barrages ! L’État n’a plus les compétences nécessaires pour être à la hauteur de l’enjeu écologique ; c’est ce que nous voulions montrer avec cet amendement.

La commission rejette lamendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CD103 de la rapporteure pour avis, CD118 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et CD114 de Mme Laure de La Raudière.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. L’amendement CD103 va répondre à certaines de vos préoccupations, puisqu’il propose d’inscrire dans la loi et non plus au niveau du décret les garanties tenant à l’expertise et à l’indépendance des membres du Haut Conseil pour le climat, afin d’asseoir plus fortement leur légitimité. Il prévoit également que la personnalité pressentie pour exercer la présidence du Haut conseil soit entendue par les commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de l’environnement préalablement à sa nomination.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Je défendrai par avance, en même temps que mon amendement CD118, les amendements CD119 et CD120, puisqu’ils tendent tous trois à inscrire dans la loi les principales règles de fonctionnement du Haut Conseil pour le climat, qui figuraient jusqu’à présent dans le seul décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat.

L’amendement CD119 propose par ailleurs que le rapport du Haut Conseil pour le climat ne soit pas transmis, mais présenté au Parlement et fasse l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Il précise également que le Haut Conseil contribue à la formation des citoyens par ses rapports et ses avis publics. L’idée est de faire en sorte que les parlementaires soient largement associés au débat et aux travaux du HCC.

Mme Sophie Auconie. Dans le même esprit, l’amendement CD114 vise à garantir le bon fonctionnement et la qualité des travaux du Haut Conseil en prévoyant qu’il soit composé au moins pour un tiers de personnalités reconnues pour leurs compétences scientifiques et leur expertise dans ce domaine.

Par ailleurs, la France connaît des agences, des Hauts conseils, des structures diverses et variées, qui sont au nombre de 1 244 d’après un rapport publié il y a quelques semaines, ce qui représente un coût de 50 milliards d’euros pour le pays. Ne serait-il pas opportun de profiter de la création du Haut Conseil pour regarder si certaines d’entre elles ne pourraient pas y être intégrées afin de rationaliser l’ensemble de ces coûts ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Les préoccupations qui ont motivé le dépôt de ces amendements sont déjà satisfaites de façon anticipée du fait de la création du Haut Conseil pour le climat par le décret publié le 15 mai dernier, qui reprend pratiquement in extenso les éléments que vous proposez d’insérer dans la loi. D’un point de vue purement technique, ils relèvent donc du domaine réglementaire.

Animée par la volonté politique de bien clarifier ce que l’on veut faire de ce Haut Conseil, je donnerai globalement un avis de sagesse à l’amendement CD103 de la rapporteure pour avis. Je reste toutefois en désaccord avec le principe de l’audition préalable de la personne pressentie pour exercer la présidence du HCC par les commissions parlementaires compétentes. Dans notre esprit, le président du Haut Conseil est désigné par ses membres ; et cette souplesse dans la procédure doit être conservée.

En revanche, mon avis est défavorable à l’amendement CD118, qui me semble satisfait par l’amendement CD103, ainsi qu’à l’amendement CD114, qui prévoit un tiers de personnalités scientifiques alors que nous souhaitons que tous les membres du Haut Conseil soient des personnalités scientifiques.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je précise, madame la secrétaire d’État, que le président du Haut Conseil peut certes être désigné par ses membres, mais que cela n’empêche pas qu’il soit entendu par le Parlement.

Je rappelle par ailleurs que l’amendement CD114 est plus que satisfait dans les faits.

Mme Sophie Auconie. Certes, mais cela n’est écrit nulle part !

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. En tout état de cause, il ne me semble pas nécessaire de l’écrire dans la loi.

Mme la présidente Barbara Pompili. Il ne nous a en effet pas échappé que le décret était déjà paru ; il nous a du reste semblé curieux de ne pas avoir attendu la promulgation de la loi. Certes, le Gouvernement a parfaitement le droit de le faire, mais nous aimons bien de temps en temps que l’on nous fasse des bonnes manières…

M. François-Michel Lambert. On n’en est plus à cela près…

La commission adopte lamendement CD103 de la rapporteure pour avis.

En conséquence, les amendements CD118 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et CD114 de Mme Laure de La Raudière tombent.

La commission examine lamendement CD112 de Mme Laure de La Raudière.

Mme Sophie Auconie. L’article L. 145-1 du code de l’énergie, relatif au comité d’experts pour la transition énergétique (CETE), prévoit des critères d’incompatibilité pour ses membres. Or si ce comité d’expert est remplacé par le Haut Conseil pour le climat, la question des incompatibilités n’a pas été prévue par l’article 2 du présent projet de loi ni par le décret n° 2019‑439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat. Cet amendement propose donc de corriger cet oubli afin de garantir le bon fonctionnement du HCC.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Cet amendement propose de rendre incompatible le fait d’exercer une responsabilité de contrôle ou de décision dans le secteur de l’énergie ou d’y détenir des intérêts avec la qualité de membre du HCC.

Nous sommes tous attachés à l’indépendance du Haut Conseil ; le projet de loi prévoit déjà que chaque membre du HCC adresse à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique une déclaration d’intérêts.

Par ailleurs, votre amendement ne vise que les activités exercées dans le seul secteur de l’énergie, alors que beaucoup d’autres devraient être pris en compte : les transports, l’agriculture, etc. Du coup, ces critères d’incompatibilité, en s’appliquant à quasiment tous les secteurs, conduiraient à l’exclusion de pratiquement tous les membres du Haut Conseil ; la déclaration d’intérêts auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, éventuellement assortie d’un règlement intérieur de l’instance, me paraît plus adaptée. C’est pourquoi mon avis est défavorable.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Cet amendement reprend des dispositions applicables au CETE, précisément remplacé par le Haut Conseil pour le climat.

Dans la mesure où la déclaration d’intérêts pose suffisamment de garde-fous, il serait regrettable de se priver d’expertises : ces critères d’incompatibilité risqueraient de restreindre la composition du HCC aux seuls universitaires, déjà présents dans de nombreux organismes. La vision transverse des experts de terrain présente un intérêt certain en termes de compétences. Pour ces raisons, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette cet amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CD102 de la rapporteure pour avis, CD52 de Mme Stéphanie Kerbarh, CD119 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et CD64 de M. Raphaël Schellenberger.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. L’amendement CD102 reprend des mesures prévues par le décret, mais qu’il me semble important de graver dans le marbre de la loi dans la mesure où les missions premières du Haut Conseil doivent pouvoir perdurer, quel que soit l’avenir politique de notre pays.

Par ailleurs, le HCC ne doit pas devenir un comité Théodule, comme certains peuvent le craindre. Sa présidente, Mme Corinne Le Quéré, a d’ailleurs annoncé que le Haut Conseil émettrait son premier avis d’ici au 25 juin, dans lequel il formulera des recommandations auxquelles le Gouvernement devra apporter des réponses. À ce titre, je pense que le HCC a déjà un rôle particulier par rapport à d’autres structures existantes.

Cet amendement propose également que le Haut Conseil étudie les contributions des différents secteurs d’activité économique au respect des budgets carbone ainsi que la régulation des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports aéronautiques et maritimes internationaux.

Il est enfin prévu qu’à l’occasion de la transmission de ce rapport, le président du Haut Conseil serait auditionné par les commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de l’environnement, mais aussi de l’énergie. Cela nous a paru un oubli dans le projet de loi.

Mme la présidente Barbara Pompili. L’amendement CD119 a déjà été défendu.

Mme Stéphanie Kerbarh. Mon amendement CD52 va dans le même sens que celui de la rapporteure pour avis : il prévoit que, dans un délai de six mois à compter de la publication du rapport du HCC, le Gouvernement présentera au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental un avis motivé portant sur les propositions et recommandations formulées par le Haut Conseil pour le climat et expliquant pourquoi il les aura retenues ou pas.

M. Michel Vialay. L’amendement CD64 est défendu.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Encore une fois, l’amendement CD102 de la rapporteure pour avis reprend la rédaction du décret. Mais j’ai bien entendu la remarque de Mme la présidente sur le timing de la publication du décret par rapport à la loi : dans ces conditions, je m’en tiendrai à un avis de sagesse, puisque nous sommes d’accord sur le fond. En revanche, mon avis est défavorable aux autres amendements.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Mon amendement CD102 reprend l’ensemble des propositions formulées ; c’est pourquoi je propose son adoption.

M. Martial Saddier. Cet amendement n’est pas anodin ; mais de quels moyens financiers et humains disposera le Haut Conseil pour mettre en œuvre ce qui est proposé ? Ce n’est pas une mince affaire… Le Parlement, madame la secrétaire d’État, doit être informé des moyens alloués au HCC si on souhaite qu’il soit efficace.

M. Matthieu Orphelin. La question des moyens mis à la disposition du Haut Conseil pour le climat est très pertinente. C’est un argument de plus pour en faire une autorité indépendante, avec une ligne budgétaire spécifique dans le projet de loi de finances, ce qui nous permettrait de suivre annuellement l’évolution de ses moyens et de nous assurer de leur efficacité.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Nous créons bien ce Haut Conseil pour qu’il puisse guider l’action du Gouvernement et l’évaluer ; à cet effet, il doit disposer des moyens de fonctionner.

Les moyens que nous envisageons sont de l’ordre de six équivalents temps plein (ETP) et de 1 million d’euros de budget de fonctionnement. Le HCC s’appuiera par ailleurs sur les différentes instances administratives existantes, notamment France Stratégie, qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, ou encore le Commissariat général du développement durable (CGDD) au sein du ministère de la transition écologique et solidaire. En tout état de cause, les moyens alloués garantiront une autonomie, une équipe et la capacité à produire les éléments de diagnostic, d’évaluation et de recommandation dont nous avons besoin.

La commission adopte lamendement CD102 de la rapporteure pour avis.

En conséquence, les amendements CD52 de Mme Stéphanie Kerbarh, CD119 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et CD64 de M. Raphaël Schellenberger, tombent.

La commission se saisit de lamendement CD120 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Les amendements précédents ont déjà largement précisé la mission et le fonctionnement du Haut Conseil. Avis défavorable.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Même avis ; nous avons déjà bien inscrit dans la loi les éléments relatifs au fonctionnement et à la mission du HCC.

La commission rejette cet amendement.

Puis elle examine lamendement CD143 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Cet amendement vise à permettre au Haut Conseil de s’organiser en chambres et, dans quelques années, d’en créer une consacrée à l’adaptation au changement climatique. Nos politiques sont principalement orientées vers la notion d’atténuation du changement climatique, que nous essayons d’empêcher, mais la question se pose de l’adaptation au changement climatique dont on ressent déjà les effets.

Le Haut Conseil pourrait donc aider le Gouvernement en rendant des avis portant sur des politiques d’adaptation aux changements climatiques, comme c’est le cas en Grande-Bretagne ; il est permis de s’inspirer de ce qui fonctionne ailleurs…

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Le Haut Conseil sera bien compétent pour tout ce qui a trait au climat, y compris l’adaptation, ce qui est évidemment un point très important ; il ne paraît pas nécessaire de prévoir la possibilité de créer des chambres spécialisées, sachant qu’il ne compte que douze membres… Avis défavorable.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. La question des moyens est essentielle à nos yeux. Une fois le Haut Conseil installé et prêt à démarrer ses travaux, il appartiendra aux parlementaires de rester très attentifs à la montée en puissance des moyens qui lui sont alloués afin qu’il puisse effectivement remplir ses missions.

Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Après avoir entendu la secrétaire d’État, je retire mon amendement, mais je ne voudrais pas que l’on inverse les sujets. Nous partageons tous l’ambition de voir le Haut Conseil prendre toute sa place ; je comprends que nous commencions sur la base d’un modèle sobre – la sobriété me paraissant être d’une parfaite actualité –, mais il faudra toutefois lui assurer progressivement les moyens d’être plus actif et d’élargir ses missions à d’autres sujets ; et j’espère qu’il pourra constituer une deuxième chambre.

Lamendement est retiré.

La commission examine lamendement CD140 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Cet amendement vise à faire en sorte que les citoyens, très intéressés, on l’a vu, par le sujet du changement climatique ainsi qu’aux moyens de s’y adapter, puissent avoir accès aux travaux du Haut Conseil. L’objectif n’est pas de rendre publics tous les débats du Haut Conseil, mais de faire en sorte que les citoyens puissent régulièrement avoir accès à des séances diffusées publiquement, sur internet par exemple, afin de s’assurer que les travaux avancent, et en toute transparence.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Je partage évidemment la volonté de faire en sorte que ce Haut Conseil prenne toute sa place, qu’il dispose bien des moyens de fonctionner et de répondre à l’ambition qui lui est assignée. Il doit aussi trouver sa place dans le débat public, à propos de sujets sur lesquels il doit donner des avis, proposer des actions au Gouvernement, rendre compte au Parlement et interagir avec les citoyens.

Dans la mesure où le Haut Conseil, qui a déjà commencé ses travaux, a bien l’intention d’organiser des réunions de travail publiques, je suis portée à demander le retrait de cet amendement, ces dispositions ne relevant pas du domaine législatif.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Même avis que Mme la secrétaire d’État, quand bien même je partage la sensibilité de Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Réunir ses membres une fois par trimestre en séance plénière filmée me paraît beaucoup, mais je pense que cette pratique fera aussi partie des missions du HCC qu’il faudra développer.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Dans la mesure où Mme la secrétaire d’État a expliqué que son intention était bien d’associer d’une façon ou d’une autre les citoyens aux travaux du Haut Conseil, mais qu’elle préférait lui laisser la main pour définir les moyens de le faire, je retire mon amendement.

Lamendement est retiré.

La commission est saisie de lamendement CD142 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

M. Jean-Charles Colas-Roy. Nous nous réjouissons de la création de trois grandes instances : le Haut Conseil pour le climat, le Conseil de défense écologique, et l’assemblée des cent cinquante citoyens.

Le Haut Conseil pour le climat a vocation à apporter une approche scientifique, à objectiver les faits ; le Conseil de défense écologique est nécessaire pour sortir de la démarche en « silo » et associer l’ensemble des ministres et des administrations sur le sujet de la transition écologique ; enfin, cette assemblée des cent cinquante citoyens répond à un souhait et une nécessité, afin que nos concitoyens puissent être associés aux décisions publiques afin d’apporter une nouvelle strate de légitimation de nos décisions.

S’agissant du Haut Conseil pour le climat, le Grand débat national a fait apparaître une volonté de renforcer la sensibilisation et l’éducation de nos concitoyens à des faits scientifiques et aussi de sortir des « fake news ». Cet amendement vise à assurer la diffusion des travaux du Haut Conseil, qui se voudront irréprochables, auprès de l’éducation nationale : on pourrait imaginer des kits pédagogiques, des outils de sensibilisation pour les plus jeunes, mais aussi, plus largement, pour l’ensemble de nos concitoyens.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Cet amendement se situe un peu dans la philosophie du précédent. Je partage le besoin de voir cette sensibilisation aller jusqu’aux scolaires. Nous avons entrepris des travaux avec le ministre de l’éducation nationale et mon ministère afin d’étudier comment les sujets de transition écologique et de développement durable pourraient être mieux intégrés aux programmes. Nous réfléchissons également à comment pour faire en sorte que chaque établissement se dote d’un projet d’établissement avec les élèves pour construire un projet concret au service de la transition écologique, que les jeunes puissent investir en tant qu’acteurs et pas simplement dans la relation d’enseignement.

Les travaux du Haut Conseil seront très importants pour consolider cette prise de conscience, et travailler à ce que vous proposez, à savoir des kits pédagogiques puisque, bien entendu, les travaux du Haut Conseil seront des travaux scientifiques à destination des décideurs, mais devront pouvoir être déclinés à destination des plus jeunes. J’aurais tendance à considérer que vous nous présentez un amendement d’appel dans la mesure où, cette fois encore, il ne me semble pas relever du domaine législatif. C’est pourquoi j’en demande le retrait, mais au profit d’un engagement du ministère de la transition écologique et solidaire à travailler avec le ministère de l’éducation nationale, et bien sûr le Haut Conseil, pour réaliser cette jonction indispensable.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je précise que l’article 8 de la Charte de l’environnement proclame le droit à une éducation à l’environnement, laquelle est notamment assurée en pratique par l’éducation nationale, qui doit mobiliser à cet effet tous les outils existants. Cet outil sera donc un parmi d’autres ; c’est pourquoi je partage l’avis de Mme la secrétaire d’État sur cet amendement.

M. Jean-Charles Colas-Roy. Je remercie Mme la secrétaire d’État et Mme la rapporteure pour avis pour les précisions qu’elles ont apportées.

Lamendement est retiré.

La commission étudie lamendement CD107 rectifié de la rapporteure pour avis.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Le Haut Conseil pour le climat doit certes formuler un avis et des recommandations sur la politique nationale menée dans les domaines du climat et de l’énergie. Mais il doit également pouvoir être saisi par le Gouvernement, le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat pour rendre des rapports portant sur des projets, des propositions de loi ou des questions sectorielles, en particulier relatifs au financement des mesures de mise en œuvre de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) ou à la mise en œuvre territoriale des politiques climatiques. Il sera ainsi à même de porter un regard sur la dimension territoriale des projets de loi susceptibles d’avoir un effet direct sur le climat.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Toujours dans l’esprit de mes interventions précédentes, je rappelle que cette proposition est très proche de la rédaction du décret, donc du domaine réglementaire. C’est pourquoi j’émettrai un avis de sagesse.

M. Martial Saddier. J’invite Mme la rapporteure pour avis et Mme la secrétaire d’État à vérifier avant l’examen du texte en séance publique la cohérence du dernier paragraphe de l’amendement CD103 de Mme la rapporteure pour avis, adopté au début de cette séance, avec un certain nombre d’autres amendements. On a parlé de prendre l’avis du public en organisant des réunions, d’impliquer le ministère de l’éducation nationale, et maintenant d’une saisine éventuelle du HCC par le Gouvernement ou le Parlement. Mais le dernier paragraphe de cet amendement CD103 a clairement inscrit dans le projet de loi que les membres du Haut Conseil pour le climat ne pourront solliciter ni recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée. Si l’on souhaite parler avec le grand public, mobiliser des ministères ou être saisi sur des sujets particuliers, il faut tout de même faire attention à ce que l’on écrit dans la loi au sujet de ce que les membres du Haut Conseil pourront faire ou pas.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je vous remercie pour cette remarque, monsieur Martial Saddier ; je pense que tout le monde va regarder cela de près.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Effectivement, monsieur Martial Saddier, nous étudierons ces termes. Mais vous vous rappelez que l’amendement CD103 prévoit que le Haut conseil ne peut solliciter ni recevoir aucune instruction, c’est-à-dire aucun ordre. La saisine, ce n’est pas tout à fait la même chose. Cela étant, je veux bien vérifier cette rédaction avant la séance publique.

Mme la présidente Barbara Pompili. Effectivement, la nuance entre saisine et instruction est importante.

M. Martial Saddier. De même qu’il existe une différence entre personne publique et personne privée. Le Gouvernement n’est pas une personne privée : organisez une réunion avec des gens, et vous verrez la différence.

Mme la présidente Barbara Pompili. Il n’en demeure pas moins qu’il ne s’agit pas d’instruction ; nous en reparlerons d’ici à la séance publique, je crois que Mme la rapporteure pour avis vous a répondu.

La commission adopte lamendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD104 et CD105 et lamendement de coordination CD106, tous de la rapporteure pour avis.

Ella émet enfin un avis favorable à ladoption de larticle 2 modifié.

Article additionnel après larticle 2 (article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales) : Prise en compte des avis du Haut Conseil pour le climat par les schémas régionaux daménagement, de développement durable et dégalité des territoires

La commission examine lamendement CD144 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Cet amendement vise à permettre aux régions, à l’occasion de la rédaction du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), de prendre en compte les avis du Haut Conseil sur la politique climatique.

Le SRADDET constitue une norme ayant notamment pour mission de traiter de la politique énergétique et climatique de la région. De son côté, le Haut Conseil pour le climat a pour ambition de traiter ces mêmes politiques à l’échelle nationale ; il nous paraît important que les deux échelles se croisent à cette occasion. Il s’agit d’étudier comment l’échelle nationale peut être coordonnée avec l’échelle régionale.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Cet amendement vise à permettre la prise en compte des avis du Haut Conseil par les régions lorsqu’elles définissent leurs objectifs énergétiques et environnementaux par les SRADDET.

Le Gouvernement soutient tout à fait la mise en place d’un dialogue entre les régions et l’État pour faciliter la convergence des ambitions des politiques territoriales avec les objectifs nationaux et encourager les territoires à contribuer en fonction de leur potentiel à l’effort national. Le Haut Conseil pour le climat pourra effectivement apporter sa contribution à ces échanges dans ses rapports.

En tout état de cause, le Haut Conseil devra évaluer dans ses rapports l’adéquation entre les politiques décidées et mises en œuvre par les collectivités et les objectifs climatiques. Il semble donc tout à fait pertinent d’envisager un lien dans l’autre sens entre les avis du Haut Conseil et la façon dont les régions définissent leurs objectifs dans les SRADDET.

L’article L. 4251-2 du code général des collectivités territoriales prévoit déjà que les SRADDET doivent prendre en compte la stratégie nationale bas-carbone. Par ce biais, ils doivent déjà tenir compte des avis du Haut Conseil dans la mesure où celui-ci s’exprimera également sur la SNBC.

J’émettrai toutefois un avis de sagesse bienveillante pour cet amendement, car tout ce qui permet de renforcer le lien entre la planification régionale et la planification nationale va dans le bon sens, celui de la cohérence et de l’opérationnalité des objectifs.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Avis favorable : il est toujours important de s’assurer d’une bonne coordination entre les politiques nationales et régionales.

J’ajouterai pour ma part que les avis que le Haut Conseil pourra émettre seront certes éclairés, mais que la question de la prise en compte de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et de la stratégie nationale bas-carbone par les SRADDET pourrait aussi nous interroger.

M. Martial Saddier. Je prévoyais de faire la remarque en séance publique, mais je vais la faire ici ; ce qui ne m’empêchera d’ailleurs pas de la refaire dans l’hémicycle…

Nous parlons de coordination ; or, au cours des trente dernières années, les pouvoirs publics, toutes majorités confondues, ont commis de graves erreurs, tout simplement parce que le climat et la qualité de l’air ont été cloisonnés.

Pour ma part, madame la secrétaire d’État, je forme le vœu que demain ce Haut Conseil ait bien à l’esprit d’éclairer les pouvoirs publics afin que toutes les décisions prises soient bonnes à la fois pour le climat et pour la qualité de l’air. Nous en avons souvent discuté, madame la présidente ; je crois d’ailleurs que s’il s’était appelé « Haut Conseil pour le climat et la qualité de l’air », cela aurait été encore mieux. Cela fait dix ans que je milite dans cette maison pour que l’on s’assure que toute décision prise soit bonne à la fois pour le climat et pour la qualité de l’air.

Car ce n’est pas la même chose : certaines émissions sont très mauvaises pour le climat sans avoir d’incidence sur d’autres polluants que nous respirons, alors que d’autres décisions peuvent avoir l’effet contraire. Je ne reviendrai pas sur certaines motorisations et sur certaines décisions prises par les pouvoirs publics au cours des trente dernières années où nous savons avoir quelquefois encouragé des motorisations qui étaient bonnes pour le climat, mais mauvaises pour la qualité de l’air ou inversement. Nous avons l’impérieux devoir, les uns et les autres, pouvoirs publics et Parlement, de ne pas répéter les mêmes erreurs ; et pour ne pas les refaire, il faut que le Haut Conseil éclaire les décideurs publics et privés sur les incidences de certaines décisions dans le domaine du climat, mais également sur celles qu’elles sont susceptibles d’avoir sur la qualité de l’air.

Mme Yolaine de Courson. Je voudrais simplement rappeler que la transition écologique et solidaire ne se fera pas sans les territoires ruraux ; au contraire, c’est avant tout sur ces territoires qu’elle se fera.

La Commission adopte lamendement.

Chapitre III
Mesures de simplification relatives à lévaluation environnementale

Avant larticle 4

La commission est saisie de lamendement CD113 de Mme Laure de La Raudière.

M. Guy Bricout. L’article 4, relatif à l’autorité environnementale, correspond à une actualisation des procédures d’évaluation suite à une décision du Conseil d’État. On ne peut donc pas parler de simplification des procédures. Aussi cet amendement quasi rédactionnel propose-t-il de supprimer les mots « de simplification » dans l’intitulé du chapitre III.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Comme vient de le dire M. Guy Bricout, l’article 4 correspond à une évolution de l’autorité environnementale, mais pas à une simplification stricto sensu. Je suis donc favorable à cet amendement.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Même avis.

La Commission adopte lamendement.

Article 4 (articles L. 122-1 et L. 122-3-4 du code de l’environnement) : Définition de lautorité chargée de lexamen au cas par cas

La commission examine lamendement CD97 de M. Loïc Prudhomme.

Mme Mathilde Panot. L’amendement CD97 vise à supprimer l’article 4, qui semble extrêmement problématique en ce qu’il rend le préfet juge et partie pour évaluer l’impact environnemental des projets. Comme vous le savez, il revient déjà au préfet d’autoriser ou non, in fine, un projet en tenant compte des aspects économiques et sociaux. Si on lui confie, comme le prévoit l’article 4, également la mission de déterminer si l’évaluation environnementale est nécessaire ou non au préalable, cela va évidemment aggraver la possibilité que surviennent des conflits d’intérêts, avec un préfet qui ne serait ni neutre ni impartial.

Il nous semble également inquiétant que cet article puisse constituer une régression pour l’environnement, qui fragilise les projets. Après deux projets de décret, l’un constituant un affaiblissement du rôle du Conseil national de la protection de la nature (CNPN) et l’autre une remise en cause de la protection des sites classés, le Gouvernement s’évertue à détricoter le droit au détriment de la protection de la biodiversité en s’arrangeant de manière variable avec le droit européen.

Si, d’après l’exposé des motifs, l’article 4 vise à simplifier les procédures applicables aux projets d’énergie renouvelable, il va en réalité modifier la procédure pour l’ensemble des projets soumis au cas par cas, et pas uniquement ceux liés aux énergies renouvelables : le dispositif s’appliquera aussi aux installations d’élevage, à la construction de certains aérodromes, à des barrages, à des rejets en mer, etc.

Autant de raisons qui nous conduisent à demander la suppression de cet article.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Je ne vous surprendrai pas en vous disant que le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 4.

Cet article porte sur la procédure d’évaluation environnementale des projets par opposition à la procédure d’évaluation environnementale des plans et des programmes. Les projets dont l’impact environnemental prévisible est important, c’est-à-dire ceux qui dépassent certains seuils, doivent obligatoirement faire l’objet d’une étude d’impact, sur laquelle une autorité environnementale donnera un avis ; c’était déjà le cas jusqu’alors et le projet de loi n’y change rien. Les projets ayant un impact prévisible moindre sont soumis à un examen succinct, à l’issue duquel le droit actuel prévoit que l’autorité environnementale peut néanmoins décider d’imposer la réalisation d’une étude d’impact, cette décision faisant l’objet d’un examen au cas par cas. Environ 10 % des projets soumis à cet examen au cas par cas seront par la suite soumis à une étude d’impact. Enfin, les projets dont l’impact environnemental n’est pas susceptible d’être significatif sont exemptés de ces deux procédures.

Contrairement aux plans et programmes soumis au même schéma général de procédure, l’État n’est que très rarement maître d’ouvrage de ces projets ; c’est pourquoi il a été historiquement fait le choix de confier la décision d’examen au cas par cas, et de soumettre l’avis sur les projets au préfet de région. La compétence du préfet en matière d’avis donné sur ces projets ayant été annulée par un arrêt du Conseil d’État de 2017, le régime juridique de l’évaluation environnementale des projets se trouve depuis fragilisé, ce qui met en difficulté la réalisation de certains projets, notamment dans le domaine des énergies renouvelables.

Nous avons donc souhaité tirer les conséquences de l’arrêt du Conseil d’État de 2017, en mettant en place un régime transitoire qui renforce l’indépendance des avis sur les projets : si le choix de l’examen au cas par cas est toujours confié au préfet, les avis rendus sur les projets passés par la procédure d’examen seront désormais rendus par les missions régionales de l’autorité environnementale, le préfet de région conservant cependant le pouvoir de décision.

L’article 4 permet donc simplement de sécuriser juridiquement la situation et de revenir, d’une certaine manière, à la situation antérieure, puisque les préfets ont toujours été en charge de la décision sur le cas par cas. Le progrès proposé par cet article consiste simplement à ce que, une fois que le préfet a décidé qu’il fallait ou non un examen au cas par cas, c’est une autorité environnementale directe, en l’espèce la mission régionale de l’autorité environnementale (MRAE), qui rendra l’avis sur la base duquel le préfet pourra ensuite prendre une décision.

J’insiste sur le fait que le préfet de région a toujours décidé et continuera à décider de l’examen au cas par cas, avant et après l’arrêt de 2017, avant et après le vote de cet article. Le maintien du préfet de région en tant qu’autorité décidant du cas par cas est conforme au droit européen, ce qui a été confirmé par le Conseil d’État et par la jurisprudence ; il permet d’éviter l’engorgement des MRAE par un nombre important de décisions au cas par cas – 3 753 ont été rendues en 2017 –, à rendre dans un délai très court ; elles pourront dès lors se concentrer sur la préparation des avis, puisque la valeur ajoutée de l’autorité environnementale est bien de donner des avis sur les projets pour lesquels il a été jugé nécessaire d’en rendre un. Enfin, ce sera un gage de simplicité pour les entreprises qui conserveront le guichet auquel elles ont l’habitude de s’adresser.

Pour conclure, je veux redire avec force que ce n’est pas un recul, mais un progrès et une sécurisation juridique ; le préfet ne sera pas juge et partie, d’abord parce que l’État n’est pas maître d’œuvre, ensuite parce que l’avis sur ses projets sera rendu directement par la MRAE sous l’autorité du ministère de la transition écologique et solidaire.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Nous nous trouvions face à un vide juridique qui plaçait les projets dans une situation instable et incertaine ; le régime temporaire actuel ne pouvait donc plus durer. Le régime proposé par le Gouvernement, en confiant la décision du cas par cas aux préfets de région, et en créant une nouvelle disposition visant à éviter les conflits d’intérêts, répond aux préconisations du Conseil d’État. L’article 4 doit être maintenu ; c’est pourquoi j’émets un avis défavorable à cet amendement de suppression.

Mme Delphine Batho. Cet article 4 constitue un cavalier législatif puisque, au sein d’un texte sur le climat et l’énergie, le Gouvernement insère une mesure supplémentaire de démantèlement du droit de l’environnement qui vient s’ajouter à la longue liste d’offensives actuellement menées contre les sites classés, les prérogatives du CNPN, etc.

J’ai toujours été contre les prérogatives des préfets et des préfets de région en matière d’examen au cas par cas, que ce soit dans l’ordonnance de 2014 ou dans ce texte. En fait, vous cherchez à contourner l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi. J’invite d’ailleurs tout le monde à bien le lire : il y est dit que le dispositif de type « usine à gaz » que vous montez va induire une grande complexité pour les porteurs de projets, dans la mesure où c’est à eux qu’il appartiendra de déterminer, pour chaque projet, quelle est l’autorité compétente pour l’examiner au cas par cas. Ce n’est en rien une simplification.

Par ailleurs, ce dispositif n’est absolument pas limité aux projets d’énergie renouvelable – c’est une gentille histoire racontée aux enfants, madame la secrétaire d’État, mais nous n’y croyons pas un instant ! Le Conseil d’État dit : « sous réserve de son autonomie fonctionnelle ». En réalité, la seule question juridique posée de façon récurrente, depuis plusieurs années, par le Conseil d’État, au sujet de l’article 9 bis de la directive, c’est celle de l’autonomie fonctionnelle de l’autorité environnementale pour ce qui est de l’examen au cas par cas, pas seulement par rapport au maître d’ouvrage, mais par rapport à l’autorité qui autorise le projet. De votre côté, vous cherchez clairement à contourner la décision du Conseil d’État. C’est pourquoi je soutiens l’amendement de suppression de l’article 4, et déposerai un amendement identique en commission des affaires économiques afin qu’il soit débattu en séance publique.

Ce sujet peut sembler très technique, mais il est loin d’être anodin.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Votre argumentation me paraît incompréhensible en plusieurs points.

Premièrement, le porteur de projet s’adresse, comme c’était le cas précédemment, au préfet de région, qui décide ou non d’un examen au cas par cas avant que la MRAE rende un avis et que le préfet de région prenne une décision. Il est faux de prétendre que nous créons un élément de complexité, puisque le préfet de région reste le guichet unique pour les porteurs de projet.

Deuxièmement, le texte constitue bien un progrès par rapport à la situation actuelle puisque, tenant compte de l’avis du Conseil d’État qui estime qu’il n’est pas possible que la même entité – en l’occurrence le préfet de région – soit à la fois l’autorité décisionnaire de l’examen au cas par cas et celle sous l’autorité de laquelle était rendu l’avis, nous avons fait en sorte que le préfet de région reste l’autorité décidant de l’examen au cas par cas, l’avis sur la décision finale étant, lui, rendu par la MRAE. Vous nous dites que la vraie question est celle de l’autonomie fonctionnelle de la MRAE : or celle-ci est prévue…

Mme Delphine Batho. Ah non !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. … puisque la MRAE rapporte au ministère de la transition écologique et solidaire : les dossiers sont instruits par les agents des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), et ce sont les membres de la MRAE, nommés par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) sous l’égide du ministre, qui prennent la décision.

Le dispositif proposé constitue donc bien un progrès, qui nous permet de nous conformer à la décision rendue par le Conseil d’État.

Enfin, l’article 4 a été validé par le Conseil d’État lors de l’examen du projet de loi. Vous ne pouvez donc pas nous dire que cet article n’est pas conforme au droit et que le Conseil d’État est contre.

Mme Delphine Batho. Le Conseil d’État dit bien : « sous réserve de son autonomie fonctionnelle » !

Mme la présidente Barbara Pompili. Sans me prononcer sur le fond, d’un point de vue strictement juridique, je précise que la disposition dont nous débattons ne constitue pas un cavalier, puisqu’elle figure dans le projet de loi initial.

La Commission rejette lamendement.

Elle est saisie de lamendement CD133 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Gisèle Biémouret. L’amendement CD133 vise à faire coïncider la rédaction de l’article 4 avec l’objectif poursuivi par le Gouvernement et ainsi à limiter cette adaptation législative aux seuls projets d’installations de production d’énergie à partir de sources renouvelables.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Avis défavorable. Il me semble important d’unifier les procédures et de ne pas avoir de régimes spécifiques en fonction des sujets sur lesquels porte l’autorisation. En l’occurrence, la procédure nous paraît équilibrée.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure. Il ne devrait pas y avoir de régime juridique distinguant certains projets ENR par rapport aux autres dans l’évaluation environnementale. J’émets donc également un avis défavorable.

M. Martial Saddier. Alors que mon collègue M. Vincent Descoeur et moi-même avions déposé des amendements portant sur l’hydroélectricité, nous avons eu la désagréable surprise de les voir tous déclarés irrecevables. Comment est-il possible que des amendements relatifs à la première source d’énergie renouvelable dans notre pays, et de loin, soient déclarés irrecevables, ce qui nous interdit d’en débattre au cours de l’examen de ce texte intitulé « Énergie et climat » ? Cette incompréhension nous abat, madame la présidente ; nous espérons que nous aurons tout de même le droit de parler d’hydroélectricité avant la séance publique…

Mme la présidente Barbara Pompili. L’article 45 de la Constitution pose clairement le principe selon lequel les amendements, pour être recevables, doivent avoir un lien direct ou indirect avec le texte de loi.

En l’occurrence, de mémoire, certains de vos amendements portaient sur la continuité écologique de certains cours d’eau, et d’autres sur la possibilité d’augmentation de la puissance d’une installation hydraulique : dans les deux cas, ces propositions n’étaient pas en lien avec le texte de loi.

J’avais moi-même déposé des amendements portant sur certains aspects qui me paraissaient très proches de la loi mais, après les avoir examinés attentivement …

M. Martial Saddier. Vous vous êtes autocensurée, madame la présidente !

Mme la présidente Barbara Pompili. Exactement, je me suis autocensurée ! En même temps qu’il était source de déconvenues pour les auteurs des amendements visés, l’examen de textes antérieurs a été l’occasion pour le Conseil constitutionnel de constituer, au fil des décisions qu’il a rendues, une jurisprudence de plus en plus claire et constante. Que l’on soit d’accord ou non avec cette position, on ne peut désormais plus prétendre l’ignorer : nous sommes désormais bien au fait, nous savons désormais à peu près quand telle ou telle proposition a toutes chances d’être censurée par le Conseil constitutionnel. Dans ces conditions, dois-je prendre la responsabilité, en tant que présidente de cette commission, de nous faire débattre longuement sur des amendements dont on a la quasi-certitude qu’ils vont être retoqués par le Conseil constitutionnel ?

M. Martial Saddier. Il faut leur laisser du travail, aux membres du Conseil constitutionnel !

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous pourrons en débattre en une autre occasion, mais j’estime pour ma part agir en tenant compte de la façon dont nos institutions fonctionnent. Je suis extrêmement attachée au droit d’amendement et j’estime qu’il y a là une problématique dont nous pourrions débattre, mais ce n’est pas ici le lieu ni le moment pour le faire : peut-être une future révision de la Constitution le permettra-t-elle…

Au demeurant, la réforme du règlement va entraîner la systématisation du contrôle…

M. Vincent Descoeur. C’est bien pour cela que nous voulions en profiter avant !

Mme la présidente Barbara Pompili. En l’état actuel des choses, l’article 45 de la Constitution a vocation à s’appliquer.

Mme Delphine Batho. Je ne pense pas que le fait de mettre des dispositions sur l’hydraulique dans le code de l’énergie puisse être considéré comme un cavalier législatif. Pour ce qui est des amendements de nos collègues Les Républicains, peut-être le problème provenait-il du fait qu’ils étaient présentés sous l’angle de la gestion de l’eau, mais s’ils étaient présentés sous l’angle de l’énergie, ils auraient bien un lien direct avec le projet de loi…

Mme la présidente Barbara Pompili. Je sais par expérience que ce n’est pas le cas. Je l’ai moi-même vécu comme vous : alors que la loi ÉGALIM avait pour objet de permettre une alimentation plus saine, les amendements que nous avions déposés, visant à promouvoir l’utilisation de semences paysannes, ont été retoqués par le Conseil constitutionnel. Pour être recevables, les amendements déposés doivent présenter un lien, non seulement avec l’objet général du texte, mais avec ses articles. Or, en l’occurrence, aucun article de ce projet de loi ne porte sur l’hydroélectricité.

M. Martial Saddier. Donc, c’est la faute du Gouvernement !

Mme la présidente Barbara Pompili. Le Gouvernement a mis ce qu’il voulait dans sa loi. Si son texte avait comporté un article sur l’hydroélectricité, vos amendements auraient été parfaitement recevables.

M. Martial Saddier. Je ne remets en cause ni l’article 45 de la Constitution ni votre présidence, mais il me semble que nous ne devrions pas systématiquement devancer les décisions du Conseil constitutionnel : laissons ses membres travailler un peu… Par ailleurs, le Gouvernement peut encore, d’ici à la séance, insérer dans son texte un article sur l’hydroélectricité qui nous permettrait de débattre de ce sujet extrêmement important : j’insiste à nouveau sur le fait qu’il s’agit de la première source d’énergie renouvelable, et que ce sujet très important comporte des enjeux allant bien au-delà de l’hydroélectricité proprement dite.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je ne voudrais pas avoir l’air de donner des cours de droit constitutionnel et parlementaire, mais je rappelle que le Gouvernement lui-même est soumis à l’article 45 de la Constitution : il ne peut pas déposer un amendement qui serait considéré comme un cavalier législatif par rapport à son propre texte, tel qu’il a été soumis à l’examen en Conseil des ministres et à celui du Conseil d’État pour avis.

M. Jean-Yves Bony. On ne peut pas croire que ce soit un oubli !

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. L’hydroélectricité fait bien partie de nos objectifs globaux en matière d’énergies renouvelables. C’est la première source d’énergie renouvelable en France ; à ce titre, elle figure en bonne place dans la récente programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Par ailleurs, nous sommes extrêmement attentifs au débat sur ce thème en cours à Bruxelles, car nous souhaitons que l’hydroélectricité puisse être mise en œuvre en France dans les meilleures conditions possibles.

Cela dit, il est exact que ce projet de loi ne comporte pas d’article relatif à l’hydroélectricité, tout simplement parce qu’il n’a pas vocation à balayer toutes les sources d’énergie renouvelables, mais à nous doter d’outils concrets tels que les certificats d’économies d’énergie ou des mécanismes d’accompagnement pour les centrales à charbon. Il ne serait donc pas logique d’écrire un article sur l’hydroélectricité si nous n’avons pas l’intention d’apporter des modifications législatives sur ce point – d’autant qu’on nous appelle régulièrement à produire des lois plus sobres, et à éviter les lois trop bavardes. En revanche, je vous le répète, nous avons à cœur de faire en sorte que l’hydroélectricité garde sa place dans notre pays, et d’être en position de mener à ce sujet une négociation équilibrée avec Bruxelles – je ne peux guère vous en dire plus à ce stade.

M. Vincent Descoeur. Notre collègue M. Martial Saddier a très efficacement défendu mon point de vue, mais je ne suis toujours pas satisfait par la réponse de Mme la secrétaire d’État. Pour ma part, j’avais déposé des amendements sur l’autoconsommation de petite puissance hydroélectrique, de nature à apporter une réponse à la question que pose l’objectif de réduction du nucléaire dans le respect des objectifs climatiques. J’insiste sur ce point : dès lors qu’on veut réduire le nucléaire, il faut bien prévoir ce qui va s’y substituer, et les amendements visant à l’indiquer ne sauraient donc constituer des cavaliers législatifs au sein d’un texte consacré à l’énergie et au climat.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous aurons probablement à nouveau ce débat en séance, et en commission des affaires économiques. J’avais moi-même déposé des amendements sur le nucléaire : vous imaginez quelle a pu être ma frustration de les voir déclarés irrecevables, et à quel point je peux comprendre la vôtre – pour ma part, j’ai cependant réussi à en déposer d’autres…

M. Vincent Descoeur. Nous allons nous rapprocher de vous, madame la présidente !

La Commission rejette lamendement CD133.

Elle se saisit des amendements CD116 et CD115 de Mme Mireille Robert.

Mme Mireille Robert. L’amendement CD116 vise à circonscrire au domaine des énergies renouvelables les projets soumis à une simplification des procédures d’évaluation applicables. Pour répondre à un impératif environnemental, il est nécessaire de réformer le processus d’évaluation, à ce jour imparfait. En effet, il s’avère que le processus actuel peut freiner la mise en place de projets éoliens et ainsi se révéler inefficace pour les porteurs de projets et constituer un obstacle à l’objectif d’accélération de la transition énergétique.

Pour autant, dans le cas de projets ne concernant pas les énergies renouvelables, il n’apparaît pas opportun de charger une nouvelle autorité de décider de l’opportunité de soumettre ou non un projet à évaluation environnementale. L’appréciation de recourir ou non à une évaluation doit demeurer le fait de l’autorité environnementale telle que définie actuellement par la loi, afin de ne pas risquer d’exclure certains types de projets des procédures d’évaluation des incidences sur l’environnement.

Aussi, cet amendement se propose de réserver aux seuls projets d’installations de production d’énergie à partir de sources renouvelables, la simplification du processus d’évaluation environnementale et de ne pas dépasser le domaine de l’énergie et du climat.

L’amendement CD115 vise quant à lui à garantir une meilleure stabilité juridique aux porteurs de projets ainsi que davantage d’indépendance au processus d’évaluation environnementale.

L’état du droit actuel génère une instabilité juridique importante, qui limite considérablement les porteurs de projets, notamment dans le domaine des énergies renouvelables, et plus spécifiquement des projets éoliens.

Ainsi, afin de réduire cette insécurité juridique, il est prévu que l’autorité visée chargée de l’examen au cas par cas soit indépendante de toute tutelle directe avec les services ou les établissements publics chargés de l’élaboration du projet ou d’en assurer sa maîtrise d’ouvrage, sans pour autant que cette nouvelle compétence soit assurée par le préfet de région. En effet, une telle situation risquerait de déplacer l’insécurité juridique à la première étape du processus d’évaluation environnementale et d’amplifier les possibilités de recours administratifs en cas de décision de ne pas soumettre un projet à une évaluation environnementale.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Il me semble que l’esprit de l’amendement CD116 est le même que celui de l’amendement CD133. Pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées, à savoir le souci d’unité de la procédure et de simplicité pour les porteurs de projets, mon avis est défavorable.

J’émets également un avis défavorable à l’amendement CD115 dans la mesure où il est déjà prévu que le préfet de région ne peut pas être autorité compétente pour un projet présenté par l’État ou pour lequel celui-ci est maître d’ouvrage.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Même avis.

Les amendements CD116 et CD115 sont retirés.

La commission est saisie de lamendement CD98 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. L’amendement CD98 est un amendement de repli qui fait suite à l’amendement CD97 que j’ai présenté tout à l’heure. Il vise à éviter les suspicions de conflit d’intérêts qui viendraient s’ajouter à celles pesant déjà sur la longue liste des projets inutiles que nous dénonçons en complétant la seconde phrase de l’alinéa 7 de l’article 4 par les mots : « ou une autorité susceptible d’être dans une position donnant lieu à un conflit d’intérêts ou ne disposant pas d’une autonomie fonctionnelle par rapport à l’autorité compétente pour autoriser le projet », afin d’éviter qu’une autorité environnementale puisse être désignée par décret.

Le 14 mai 2019, le Conseil d’État a affirmé pour la quatrième fois que le préfet ne pouvait pas être autorité environnementale car il n’avait pas l’autonomie requise pour cela. L’évaluation environnementale est un processus clé et, de ce point de vue, déterminer si elle est nécessaire constitue une compétence majeure, lourde de conséquences potentielles. C’est pourquoi je vous invite à adopter cet amendement qui vise à écarter toute suspicion de conflit d’intérêts en la matière.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Cet amendement me semble avoir le même objet que l’amendement CD115 qui vient d’être présenté. La question de la gestion des conflits d’intérêts est déjà traitée par la rédaction actuelle, puisqu’il est dit à l’alinéa 7 que ne peut pas être désignée une autorité dont les services ou les établissements publics relevant de sa tutelle sont chargés de l’élaboration du projet ou assurent sa maîtrise d’ouvrage. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Effectivement, l’alinéa 7 permet de répondre au besoin de prévention des conflits d’intérêts. Je suis donc moi aussi défavorable à cet amendement.

La commission rejette lamendement.

Elle examine lamendement CD66 de Mme Anne-France Brunet.

Mme Anne-France Brunet. L’article 4 généralise la distinction entre une autorité environnementale chargée de l’évaluation et une autorité administrative chargée d’examiner au cas par cas la nécessité de procéder à une évaluation. Or il existait déjà une disposition dérogatoire qui, dans certains cas, confiait l’examen du cas par cas à une autorité administrative dans le code de l’environnement. Ce système étant généralisé dans le cadre de l’article 4, le dispositif dérogatoire est devenu la norme et le Conseil d’État recommande donc de le supprimer. L’amendement CD66 vise à reprendre cette préconisation.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. L’avis rendu par le Conseil d’État recommandait effectivement la suppression de la disposition prise dans le cadre de la loi pour un État au service d’une société de confiance (ESSOC) d’août 2018 – non pas dans le but de la supprimer complètement, mais simplement de la faire passer au niveau réglementaire.

Pour des raisons de stabilité juridique, le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur cette disposition votée par le Parlement il y a moins d’un an et validés dans son contenu par le Conseil d’État. Cela se justifie par le fait que l’article 4 du présent projet de loi et la disposition de la loi ESSOC ne visent pas les mêmes projets. Le premier vise les nouvelles demandes d’autorisation, tandis que l’article de la loi ESSOC s’applique aux modifications d’installations existantes, pour lesquelles il apparaît essentiel pour la bonne articulation des procédures que l’autorité en charge du cas par cas dans de telles configurations soit la même que celle qui a à se présenter sur l’importance des modifications en termes de prévention des dangers et des inconvénients de l’installation.

Pour ces raisons, et parce que l’avis du Conseil d’État ne portait que sur le caractère législatif ou réglementaire de la norme, le Gouvernement souhaite dissocier le traitement de ces deux sujets et ne pas revenir sur la disposition votée dans le cas de la loi ESSOC. Je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. J’avais initialement déposé le même amendement mais, après avoir obtenu de la part du Gouvernement une explication sur la spécificité de ces projets, j’ai décidé de le retirer. Je vous invite à faire de même, madame Anne-France Brunet, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente Barbara Pompili. Maintenez-vous votre amendement, madame Anne-France Brunet ?

Mme Anne-France Brunet. Je le maintiens.

La Commission rejette lamendement.

Puis elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 4 modifié.

Article additionnel après larticle 4 (article L. 512-7-2 du code de l’environnement) : Élargissement des critères permettant de substituer la procédure dautorisation à la procédure denregistrement pour les installations classées pour la protection de lenvironnement

La commission se saisit de lamendement CD158 de la rapporteure pour avis.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Cet amendement corrige une imprécision de transposition de la directive 2011/92/UE sur l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Je suis favorable à cet amendement.

La commission adopte lamendement.

Mme la présidente Barbara Pompili. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les articles sur lesquels notre commission avait une délégation au fond. Je remercie Mme la secrétaire d’État pour sa participation et ses réponses à nos questions.

Chapitre Ier
Objectifs de la politique énergétique

Article 1er (article L. 100-4 du code de l’énergie) : Modification des objectifs de la politique énergétique

La commission est saisie de lamendement CD25 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement élève l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. La France s’était engagée à une réduction de 20 % lors de la COP21. Le rapport spécial du GIEC consacré à l’impact d’une hausse des températures de 1,5 °C établit que nous avons onze ans pour réduire de 45 % les émissions mondiales de gaz à effet de serre, ce qui requiert une division par trois des émissions pour un pays comme la France.

Cet amendement fixe donc un nouvel objectif de réduction des émissions, en cohérence avec cette nouvelle alerte donnée par les scientifiques, mais également avec les engagements importants du Président de la République : celui-ci a affirmé que la France allait réévaluer les engagements pris lors de l’Accord de Paris, avec une coalition de quatre-vingts pays. L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre serait donc porté à 57 % en 2030, au lieu des 40 % actuellement prévus, concrétisant l’engagement du Président de la République.

Les citoyens ont besoin de cette cohérence. Il serait logique que la commission du développement durable envoie ce signal en début d’examen du projet de loi relatif à l’énergie et au climat.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Monsieur Matthieu Orphelin, nous connaissons tous votre engagement sur ces questions et votre détermination. Nous partageons aussi votre souhait d’aller plus loin.

Cependant, porter l’objectif de réduction de la consommation primaire des énergies fossiles à 40 % au lieu de 30 % permet d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Ce taux est donc cohérent avec la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Il ne s’agit pas de traduire mon engagement personnel sur cette cause – que je vous remercie de souligner, madame la rapporteure pour avis – mais de concrétiser l’engagement pris par le Président de la République.

La commission rejette lamendement.

Elle est saisie de lamendement CD24 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il faut aujourd’hui changer de vocabulaire, et modifier notre manière d’appréhender le changement climatique. Les mots forts employés doivent se traduire dans les politiques publiques mises en œuvre. Le Président de la République a parlé d’état d’urgence climatique. Certains veulent que les termes de « crise climatique » soient utilisés. Ce n’est pas seulement une question de terminologie, mais de cohérence. Il faut prendre pleinement conscience de cette problématique de crise climatique ; si nous ne la résolvons pas, tous les autres sujets qui ont de l’intérêt à nos yeux disparaîtront.

D’autres pays ont décidé de prendre acte de cette crise par des dispositifs moins ambitieux, comme le Royaume-Uni, qui a récemment adopté une résolution. Inscrire les termes d’état d’urgence et de crise climatique démontrera que nous avons une nouvelle conscience des enjeux relatifs au climat et à la biodiversité.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Nous partageons cette préoccupation. D’autres pays se sont déjà engagés à graver ces termes dans le marbre de la loi. Cela étant, il faut être attentif aux implications juridiques de l’insertion de la notion d’état d’urgence dans le code de l’énergie. Je vous propose donc de retirer cet amendement afin de le retravailler en vue de la séance.

M. Matthieu Orphelin. Merci de proposer ce travail en commun ; peut-être faudra-t-il s’en tenir à la seule mention de la crise climatique. Je retire l’amendement.

Lamendement est retiré.

La commission en vient à lamendement CD26 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. La loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoyait une division par quatre des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050. L’avant-projet de loi prévoyait une division « au moins par quatre », ce qui a suscité des réactions des parties prenantes estimant que cet objectif n’était pas à la mesure du changement d’échelle nécessaire.

Un bon compromis a été trouvé dans le projet de loi, qui prévoit une division des émissions par un facteur d’au moins six, ce qui n’est pas encore tout à fait conforme aux avis scientifiques, il faut en avoir conscience. Je propose de compléter ce compromis en ajoutant que nous visons, si possible, une division par huit. Cet objectif est bien plus conforme aux conclusions des scientifiques.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Monsieur Matthieu Orphelin, vous soulignez la progression qui s’est opérée entre l’avant-projet de loi et le texte qui nous est soumis : nous sommes passés d’une division par quatre à une division par six, et il s’agit d’un minimum. Inscrire dans la loi que nous visons, si possible, un facteur huit, n’apporte rien au texte. Avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Nos actions au cours des trois prochaines années seront l’élément le plus important. Il me paraissait utile de débattre de ces objectifs. Je retire cet amendement et je le déposerai peut-être en commission des affaires économiques. Nous devons bien garder en tête les avis de la science sur ces questions, et les regarder droit dans les yeux.

Lamendement est retiré.

La commission examine lamendement CD27 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement porte sur le déploiement des nouvelles filières d’énergies renouvelables. La PPE est ambitieuse pour certaines filières, notamment le solaire et le photovoltaïque, mais d’autres mériteraient de voir leurs objectifs renforcés. Certains d’entre nous ont alerté le Premier ministre sur l’importance d’aller plus loin dans deux filières : le biogaz et la méthanisation agricole, pour lesquelles notre pays peut se prévaloir d’un potentiel fantastique, ainsi que les énergies marines, notamment l’éolien en mer, posé ou flottant. Ce renforcement mérite d’être inscrit dans cet article qui fixe les grands objectifs de la politique énergétique française.

Je note à ce propos la déclaration du ministre M. François de Rugy, qui a clairement ouvert la porte à un renforcement des objectifs de l’éolien marin dans la PPE : c’est un bon signal. Il existe une réelle volonté qui transcende les courants politiques pour inscrire ces deux nouvelles filières dans la loi. Celles-ci présentent également un grand intérêt en termes d’emplois.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Nous partageons aussi cette préoccupation. Cela étant, mettre au même niveau les énergies marines renouvelables, la méthanisation agricole et le biogaz n’est pas très cohérent : ces énergies ne sont pas prépondérantes pour atteindre les objectifs en matière d’énergies renouvelables et de neutralité carbone. Avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Je maintiens cet amendement ; ce signal est très attendu par les acteurs des territoires et les élus locaux.

Mme Sophie Auconie. Je m’apprêtais à reprendre cet amendement si M. Matthieu Orphelin l’avait retiré. On compte plus de 3 000 éoliennes en mer dans le nord de l’Europe, mais une seule est française ! La commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables a auditionné hier M. Bernard Aulagne, président de l’association Coénove. Alors qu’il y a plusieurs milliers d’unités de méthanisation en Allemagne, on n’en compte que quelques centaines en France. Nous savons pourquoi il y en a moins en France, mais ce chiffre n’est pas satisfaisant. Il faut envoyer un signal.

M. Martial Saddier. Certains territoires ont suffisamment de matières premières d’origine exclusivement urbaine pour mettre en place un projet de biogaz. D’autres en ont suffisamment d’origine exclusivement agricole. Mais dans de nombreux autres territoires, si l’on ne mêle pas les matières premières d’origines agricole et urbaine, il n’est pas possible de mener un projet.

Cette possibilité de mixer les matières premières dépend d’un décret dont nous attendons la signature depuis deux ans, mais qui reste bloqué en raison d’une guerre à laquelle se livrent le ministère de l’agriculture et celui de l’environnement. Si nous pouvions profiter de ce texte pour obtenir la signature de ce décret, cela aiderait beaucoup de projets dans les territoires périurbains.

Mme la présidente Barbara Pompili. J’espère que vous serez entendu !

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Nous sommes d’accord sur le fond ; reste à trouver une rédaction solide. Comme le propose la rapporteure pour avis, il faudrait travailler ensemble d’ici à la réunion de la commission des affaires économiques.

M. Matthieu Orphelin. Notre commission est saisie pour avis, nous ne modifions pas le texte, mais nous pouvons envoyer des signaux. J’aurai plaisir à travailler à des formulations plus acceptables, mais je maintiens néanmoins l’amendement.

La commission rejette lamendement.

Elle en vient à lamendement CD30 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Le développement des énergies renouvelables participatives est un enjeu phénoménal. Nous avons commencé à lencourager avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015. Il faut aller plus loin. Aujourdhui, pour investir dans un projet dénergie renouvelable près de chez soi ou permettre aux agriculteurs de se mobiliser autour dun projet, les montages financiers sont rodés et le cadre juridique est en place pour favoriser ce type dinvestissements particuliers ou collectifs dans les énergies renouvelables.

Cet amendement propose de fixer un objectif dans la loi. Il manque 20 milliards d’euros par an pour les investissements dans la transition écologique, et une grande partie viendra du secteur privé. Il faut parvenir à mobiliser l’argent privé dans les projets de développement des territoires ou dans des projets d’énergies renouvelables. Ce sont des investissements fabuleux pour l’avenir. Fixer un objectif y contribuera. Nous n’étions pas prêts il y a quatre ans, nous le sommes aujourd’hui.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Nous devons avancer sur la gouvernance de ces projets, notamment l’implication citoyenne. Lors du déplacement de la mission d’information sur les freins à la transition énergétique au Danemark, nous avons vu que l’acceptabilité des projets passe également par cette appropriation. Il faut la développer.

J’ai une réserve cependant, car si un objectif spécifique de financement participatif est fixé par la loi, l’atteinte des objectifs globaux pourrait être mise en péril s’il n’était pas rempli ; votre formulation risque donc d’être contre-productive. Je demande le retrait, sinon je donnerai un avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Si nous pouvons y travailler ensemble d’ici à la séance publique, je retire l’amendement avec plaisir.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. C’est entendu.

Lamendement est retiré.

La commission en vient à lamendement CD33 de M. Vincent Descoeur.

M. Vincent Descoeur. Le projet de loi repousse l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production électrique à 2035, en raison de l’incompatibilité de cette mesure avec les objectifs climatiques. Cet amendement propose d’introduire cette exigence de compatibilité dans le texte.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Le schéma a été construit en se fondant sur la montée en puissance des énergies renouvelables, ainsi qu’une baisse ou une stagnation de la consommation. Il ne faut pas le réécrire à ce stade, avis défavorable.

M. Vincent Descoeur. Tout en reportant la date, nous affichons à nouveau l’objectif de ramener la part de l’électricité nucléaire à 50 %, mais le texte ne dit pas comment nous y parviendrons.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je rappelle que le texte vient en appui à la PPE, qui est supposée prévoir les moyens d’y parvenir.

La commission rejette lamendement.

Elle en vient à lamendement CD44 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement vise à insérer dans le code de l’énergie le mot « performant », auquel chacun donne aujourd’hui un sens différent.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. J’y suis défavorable. La norme « bâtiment basse consommation » est aujourd’hui clairement définie : c’est une norme de référence en construction. Le mot « performant » n’apporte aucune précision supplémentaire. Je suis néanmoins prête à entendre d’autres membres de la commission à ce sujet.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Nous répétons régulièrement qu’il faut que les rénovations des bâtiments soient « performantes » sans définir le terme. Par conséquent, nous considérons que n’importe quel geste est performant. Cela ne répond pas à la volonté d’atteindre à terme des bâtiments à énergie zéro.

Je comprends bien la logique de fond, mais je vous propose de retravailler ensemble sur cet amendement, car je pense qu’il n’a pas été bien rédigé.

M. Matthieu Orphelin. C’est avec plaisir que j’accueille cette nouvelle proposition de retravailler d’ici à la commission des affaires économiques.

Lamendement est retiré.

La commission en vient à lamendement CD131 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Gisèle Biémouret. Cet amendement propose de ramener de 2050 à 2035 l’échéance pour réaliser la transition énergétique du parc de logements.

Dans mon département, je préside le fonds de solidarité pour le logement (FSL), qui gère des sommes considérables afin d’aider à maintenir dans leurs logements des personnes en situation précaire. Les dépenses énergétiques représentent le poste principal du FSL. Achever la transition énergétique du parc de logement dans un délai plus court aurait donc un intérêt pour le climat comme pour les occupants de ces logements.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Il faut travailler d’arrache-pied à des mesures permettant d’atteindre cet objectif en 2050, voire avant. Vous proposez d’avancer cet objectif à quinze ans, ce qui paraît vraiment peu réaliste et trop ambitieux. Avis défavorable.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Je serais ravie que nous arrivions à rénover l’ensemble du parc d’ici à 2035, mais cela ne paraît pas du tout réaliste. Je préfère travailler à trouver les moyens d’accélérer le rythme, pour l’instant vraiment insuffisant, plutôt que de fixer des objectifs que nous n’atteindrons pas et que nous serons obligés de remettre en cause en 2035.

Mme Gisèle Biémouret. La première signataire de cet amendement est Mme Marie‑Noëlle Battistel, je ne souhaite donc pas le retirer. Nous en reparlerons au moment du débat en séance publique.

La commission rejette lamendement.

Elle en vient à lamendement CD28 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Nous allons bientôt aborder la question essentielle de la rénovation énergétique. Il sera important de se fixer des objectifs, mais les actions pour y parvenir seront plus importantes encore.

Mettre un terme à la location des passoires énergétiques faisait partie du programme de la majorité présidentielle. C’est un très bel engagement. Il est important de l’inscrire dans la loi, au même titre que les objectifs concernant le développement des énergies renouvelables.

Les passoires énergétiques constituent un vrai problème. Un foyer sur cinq est en situation de précarité énergétique, alors que le rythme des travaux de rénovation n’est pas suffisant. C’est le cas depuis le Grenelle de l’environnement, dont j’étais rapporteur. Mon propos n’est donc pas de rejeter la faute sur les uns ou les autres. Il faut se fixer une échéance pour la fin des passoires énergétiques et se donner les moyens d’accompagner tous les propriétaires, notamment non occupants, qui n’ont pas les moyens de réaliser les travaux. Les derniers chiffres de l’INSEE rappellent que la part de l’énergie dans les dépenses des foyers français est proprement hallucinante. Nous devons aider les ménages à retrouver du pouvoir d’achat grâce à la lutte contre la précarité énergétique.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. L’objectif d’éradication des passoires thermiques a été fixé à 2025 par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ce qui nous préoccupe tous aujourd’hui est de trouver les moyens pour y parvenir. C’est un enjeu de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de protection sociale de nos concitoyens.

Plusieurs amendements prévoient des objectifs légèrement différents du vôtre, notamment des délais plus consensuels ; je vous propose de les étudier, et de retirer votre amendement.

M. Matthieu Orphelin. Les mesures permettant l’éradication des passoires thermiques sont effectivement fondamentales.

Le projet présidentiel que nous avons porté aux élections législatives comprenait plusieurs mesures très fortes pour aider à la transition énergétique des bâtiments. Elles n’ont pas encore été mises en œuvre, mais j’espère qu’elles le seront rapidement. Il s’agissait de la transformation du crédit d’impôt pour la transition énergétique en avance au moment des travaux, de la fin des passoires énergétiques, avec un nouveau dispositif pour avancer l’argent aux propriétaires qui n’avaient pas les moyens de réaliser les travaux, ainsi que du diagnostic gratuit pour les ménages en situation de précarité énergétique. Je vous rappelle nos débats à ce sujet lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2019 : nous avons finalement réussi à faire appliquer cette mesure à titre expérimental dans cinq départements. J’espère qu’elle sera bien mise en œuvre au milieu de l’année.

Il faut nous donner enfin les moyens de changer ; nous discuterons des différentes mesures plus loin mais, à ce stade, je maintiens cet amendement. Si nous trouvons d’autres solutions plus rassembleuses, tant mieux.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Il est dommage de le maintenir, cela nous amènera à le rejeter alors que nous allons adopter plus loin des mesures allant dans le même sens.

M. Matthieu Orphelin. Je tiens à rappeler les engagements que nous avons pris lors de l’élection présidentielle. La rénovation énergétique était l’un de nos grands sujets. Vous connaissez mieux que moi l’écart entre l’ambition affirmée et ce qui a été réalisé au cours des deux premières années de la législature. Nous pouvons aller plus loin. Je souhaite que les trois prochaines années soient marquées par un changement d’échelle et de méthode. Cela étant, je suis sensible à votre argument, je retire donc mon amendement.

Lamendement est retiré.

La commission examine lamendement CD46 rectifié de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il est défendu.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Cet amendement fait mention de seuils qui risquent de baisser à l’avenir. Il serait préjudiciable de les inscrire dans la loi. Avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Nous pouvons travailler ensemble à une meilleure rédaction, je retire l’amendement.

Lamendement est retiré.

La commission en vient à lamendement CD45 rectifié de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Depuis dix ans, nous ne parvenons pas à faire des rénovations énergétiques suffisamment performantes pour atteindre le niveau « bâtiment basse consommation ». C’est pourtant un enjeu fondamental. Nous avons ainsi appris des acteurs du secteur, venus à l’Assemblée nationale voici quelques mois, que trois fois sur quatre, les rénovations énergétiques ne font pas changer le bâtiment de classe dans le diagnostic de performance énergétique. Nous sommes confrontés à un réel problème d’efficacité des travaux. Si on les laisse se réaliser étape par étape, sans s’assurer de leur cohérence d’ensemble, nous continuerons à nous fourvoyer. La meilleure solution est la rénovation complète et performante. Nous disposons des outils, que nous pouvons encore améliorer, pour la réaliser, mais il faut aussi prévoir la possibilité de rénovations par étapes, pour peu que chacune soit compatible avec l’objectif final.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Votre amendement propose des options techniques, de niveau réglementaire. Vous fixez dans les deux cas des délais. Neuf mois pour achever une rénovation complète performante, n’est-ce pas un peu restrictif ? Cela me semble être de nature à figer l’évolution possible d’un chantier. Et cela me paraît plus réglementaire que législatif.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Je comprends l’intérêt de réfléchir à ces pistes et de remettre du concret derrière des termes galvaudés, mais je partage l’avis de la rapporteure pour avis : il ne me paraît pas logique de fixer une durée pour la rénovation. Cela ne me paraît pas opérant.

M. Matthieu Orphelin. J’entends votre argument. La durée proposée de neuf mois signifiait que la rénovation doit être effectuée en une seule fois ; peut-être pourrait-on sous-amender mon amendement pour le préciser. Mais pour les rénovations menées en plusieurs fois, nous devons nous assurer que chaque étape est compatible avec l’objectif global.

Ce ne sont pas des dispositions d’ordre réglementaire. Je considère que c’est au législateur de donner une direction car depuis 2007, rien n’a été fait pour s’assurer du caractère performant des travaux de rénovation. Sinon, on ne s’en sortira jamais : les particuliers continueront à ne faire qu’une partie des travaux sans se préoccuper du reste, et refuseront de revenir sur ceux qu’ils ont effectués en premier.

Le chiffre de l’ADEME doit nous alerter : la majeure partie des travaux de rénovation énergétique, dans lesquels on engloutit des milliards d’euros d’argent privé et des centaines de millions d’euros d’argent public, n’ont amélioré que dans une faible mesure la performance énergétique des bâtiments. J’accepte de retirer mon amendement, mais dans le but de le retravailler.

M. Vincent Thiébaut. Les précaires énergétiques aujourd’hui ne sont pas forcément les gens les plus modestes. Leur revenu médian est de 2 200 euros et ils ne bénéficient pas d’aides – je pourrai vous communiquer une étude de la Chambre régionale du surendettement social (CRESUS) à ce sujet. Il faut donc bien réfléchir aux dispositions qui imposent des obligations supplémentaires. Quand il y a un reste à charge, on ne peut pas étrangler encore plus une population qui a déjà beaucoup de difficultés. L’objectif est louable, mais ne mettons pas plus à mal une population qui l’est déjà.

Lamendement CD45 rectifié est retiré.

La commission examine ensuite, en discussion commune, lamendement CD56 de M. Martial Saddier et lamendement CD29 de M. Matthieu Orphelin.

M. Martial Saddier. L’amendement CD56 vise à inscrire dans le code de l’énergie que la part de l’hydrogène bas carbone et de l’hydrogène renouvelable devra être portée à 30 % de la consommation totale d’hydrogène à l’horizon de 2030.

M. Matthieu Orphelin. Il importe de mettre en place un plan de développement du stockage de l’hydrogène, qui fait partie des solutions pour réussir la transition écologique. Le Gouvernement avait présenté un plan de déploiement de l’hydrogène qui prévoyait 100 millions d’euros par an. Nous attendons les évaluations pour l’année en cours, mais je crains que les soutiens publics n’aient atteint que la moitié de cette somme. Nous avons déjà eu un débat à ce sujet lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019.

Au-delà de ces questions financières, sur lesquelles je ne céderai en rien car il est décisif que la France ne rate pas le tournant du stockage et de l’hydrogène vert, il me paraît nécessaire d’inscrire un tel objectif dans la loi. Tel est le sens de mon amendement CD29.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Monsieur Martial Saddier, vous proposez de fixer un objectif de 30 % alors que le plan gouvernemental de déploiement de l’hydrogène retient un objectif de 20 % à 40 %.

S’agissant du stockage, monsieur Matthieu Orphelin, je suis d’accord avec vous : les objectifs doivent effectivement évoluer. Mais nos collègues de la commission des affaires économiques mènent en ce moment une réflexion sur l’hydrogène ; il me semble plus judicieux de travailler avec eux à des propositions communes. Adopter de tels amendements serait prématuré.

C’est la raison pour laquelle je vous demande, chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements. À défaut, je donnerai un avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Je retravaillerai sur cet amendement avec plaisir d’ici à l’examen du texte par la commission des affaires économiques. Je veux toutefois insister sur le problème posé par l’écart entre ce qui avait été prévu par le plan hydrogène et ce qui est réalisé. L’évaluation en cours des politiques publiques l’établira avec précision, mais j’ai bien peur que nous n’en soyons qu’à la moitié des sommes envisagées, et même largement en dessous des prévisions évoquées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019. C’est un sujet majeur pour notre pays.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Nous avons interpellé nos interlocuteurs au Gouvernement et les membres de la commission des affaires économiques à ce sujet. L’ensemble des crédits n’a pas été consommé et nous devons passer à la vitesse supérieure. C’est sur des propositions d’avenir que je souhaiterais que nous travaillions en vue de l’examen en séance publique.

Mme Sophie Auconie. Au-delà de l’intérêt que représente l’hydrogène en lui-même, il faut insister sur les enjeux liés au développement d’une filière en France. Je rappelle que nous avons des champions dans notre pays. Dans ma circonscription d’Indre-et-Loire, un centre d’études du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) mène des travaux extraordinaires sur le stockage de l’hydrogène.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Il me paraît plus important de travailler collectivement au renforcement de nos ambitions pour le développement de l’hydrogène au sein de la commission des affaires économiques qui est saisie au fond que de voter rapidement des amendements disparates en commission du développement durable.

Lamendement CD29 est retiré.

La commission rejette lamendement CD56.

Elle examine ensuite lamendement CD90 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Ce projet de loi fixe des objectifs ambitieux : réduction des consommations énergétiques finales de 50 % en 2050, neutralité carbone de la France en 2050, réduction de 40 % de la consommation des énergies fossiles en 2030. Toutefois, il apparaît nécessaire de sécuriser ces trajectoires. Pour ce faire, notre amendement propose de définir des objectifs intermédiaires et prévoit des rapports d’étape sur les moyens mis en œuvre pour atteindre ces objectifs.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. J’ai presque envie d’aller un peu plus loin dans cette voie. Les objectifs intermédiaires que vous proposez d’inscrire sont en réalité la déclinaison des différentes programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE), qui ont une durée de vie de cinq ans.

Ce qui doit retenir notre attention, c’est plutôt la façon dont la PPE est prise en compte : doit-elle rester un document réglementaire ou devenir un document validé par la représentation nationale ? Nous préconisons en réalité une solution plus ambitieuse.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Mais quelle serait cette solution plus ambitieuse ? C’est toute la question. Nous y travaillerons ensemble.

Je retire mon amendement.

Lamendement CD90 est retiré.

La commission en vient à lamendement CD122 de Mme la présidente Barbara Pompili, qui fait lobjet dun sous-amendement CD160 de la rapporteure pour avis.

Mme la présidente Barbara Pompili. Depuis plus de dix ans, les différents systèmes d’aide à la rénovation énergétique se sont empilés sans grande cohérence entre eux. Il y a de tels changements qu’il est impossible, tant pour les professionnels que pour les donneurs d’ordre, de prévoir des travaux d’une année sur l’autre, qu’il s’agisse des certificats d’économies d’énergie, du crédit d’impôt pour la transition énergétique, des aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) ou de l’ADEME, des programmes régionaux ou nationaux – la liste est longue.

Nous nous accordons tous sur le fait que la rénovation énergétique doit être l’un des piliers de notre transition énergétique, mais comment avancer efficacement si l’on est désorganisé ? De nombreux acteurs, notamment l’ADEME, ont démontré que la rénovation action par action a des effets extrêmement limités sur l’efficacité énergétique des bâtiments. Nous devons absolument créer plus de cohérence dans la façon dont sont conduits les travaux, donc dans l’attribution des aides.

Une feuille de route de la rénovation énergétique des bâtiments, déjà prévue par le plan de rénovation énergétique mais appliquée à la PPE, permettrait de mettre en cohérence nos objectifs de baisse de la consommation d’énergie avec les prévisions de rénovation et surtout avec les moyens que nous mettons en face. On ne peut pas faire l’impasse sur la nécessité d’une plus grande visibilité, et donc d’une plus grande cohérence.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Vous proposez de lier la feuille de route de la transition énergétique à la PPE ; cela paraît en effet nécessaire. Toutefois, la rédaction actuelle de votre amendement reviendrait à la lier à la PPE actuelle. Je propose par mon sous-amendement CD160 de la relier à la prochaine PPE, faute de quoi nous devrons revoir les objectifs de la PPE actuelle.

Mme la présidente Barbara Pompili. Rien ne l’interdit.

M. Matthieu Orphelin. Sans un plan d’action de rénovation énergétique plus ambitieux, nous ne tiendrons pas les objectifs de la PPE actuelle. Je trouve que la rédaction de l’amendement de la présidente est très intéressante. Dans le secteur du bâtiment, nous avons déjà dépassé de 22 % les seuils fixés dans la stratégie nationale bas-carbone.

M. Martial Saddier. Votre amendement va dans le bon sens, madame la présidente, et je le soutiendrai. Il faut aller vite.

Nous savons qu’il y a deux critères décisifs pour le succès ou l’échec d’une politique en matière énergétique : le reste à charge pour les particuliers et la simplicité du dispositif. Sur les dix dernières années, le seul dispositif qui a véritablement fonctionné, ce sont les aides financières pour le changement des appareils de chauffages défectueux. État, régions, départements, collectivités territoriales se sont fédérés autour d’un dispositif simple avec un reste à charge peu élevé.

Mme Sophie Auconie. Les citoyens français nous ont envoyé un signal lors des élections européennes. Ces hommes et ces femmes attendent de notre part que nos actions soient cohérentes avec les engagements que nous avons pris. On parle et communique beaucoup, il faut aussi agir. Si nous ne nous fixons pas une feuille de route ambitieuse, nous ne tiendrons pas ces engagements. Je trouve votre amendement très heureux, madame la présidente, car il va dans le sens de l’ambition qu’appellent de leurs vœux les Français.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Le groupe La République en Marche avait déposé un amendement quasi-identique, mais il a été refusé pour une raison que nous ignorons. Nous applaudissons donc des deux mains votre amendement qui lie feuille de route et PPE, madame la présidente.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je comprends votre sous-amendement, madame la rapporteure pour avis, mais je persiste à penser qu’il n’est pas impossible de demander au Gouvernement de lier feuille de route et PPE dès 2019. Je m’en remets à la sagesse de mes collègues.

La commission adopte le sous-amendement CD160.

Puis elle adopte lamendement CD122 sous-amendé.

Elle en vient à lamendement CD34 de M. Vincent Descoeur.

M. Vincent Descoeur. Comment concilier la réduction de la part du nucléaire avec l’augmentation prévisible de la demande liée au développement des véhicules électriques à l’horizon 2035 ? On s’emploie à nous rassurer régulièrement, mais un rapport circonstancié et étayé serait le bienvenu.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Avis défavorable. De nombreuses études sur la question ont déjà été publiées. Je vous renvoie en particulier à une étude de RTE – Réseau de transport d’électricité – sur l’intégration de l’augmentation des consommations due à la mise en service de véhicules électriques et sur la gestion de la pointe, à un document de réflexion de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et à un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).

M. Vincent Descoeur. Pour avoir assisté à diverses auditions sur ce sujet, je sais que les explications sont parfois contradictoires.

La commission rejette lamendement.

Elle examine ensuite lamendement CD123 de Mme la présidente Barbara Pompili.

Mme la présidente Barbara Pompili. Cet amendement demande que le Gouvernement présente un rapport au Parlement sur les usages superflus ou non prioritaires de l’énergie.

Les objectifs fixés pour la réduction de la consommation d’énergie finale, de 30 % en 2030 et 50 % en 2050, sont aussi ambitieux que nécessaires ; mais force est de constater que la consommation n’a baissé que de 0,4 % depuis 2012. Si l’on veut atteindre les objectifs que nous nous sommes assignés, il faut faire plus d’efforts et même changer de paradigme.

On ne peut pas non plus faire reposer tout l’effort de réduction des consommations d’énergie sur la rénovation des bâtiments et sur les ménages. Cet effort est l’affaire de tous. Il doit viser d’abord les usages qui ne servent pas réellement les besoins ou le confort des personnes.

Or, aujourd’hui, certains usages continuent à se développer, alors qu’ils s’apparentent à du gaspillage. Certaines obligations fixées dans des lois précédentes ne sont pas respectées, comme l’extinction des lumières dans les magasins la nuit. D’autres utilisations posent largement question : les lumières et les ordinateurs allumés dans les bureaux toute la nuit, les lumières sur les routes désertes, la prolifération des écrans publicitaires numériques, etc.

M. Martial Saddier. Sans parler des nouveaux téléphones de l’Assemblée nationale !

Mme la présidente Barbara Pompili. Absolument. Je pense qu’il faudra un jour demander un rapport sur l’Assemblée nationale et le développement durable. Il n’est qu’à voir les bouteilles en plastique dans les salles de réunion.

Chaque écran publicitaire numérique consomme, selon les associations, l’équivalent de trois foyers en électricité.

Cette demande de rapport a pour but d’entamer une réflexion nationale. Des organismes comme l’ADEME ou RTE ont déjà travaillé sur la question. RTE parle notamment de consommations superflues ou non prioritaires.

C’est maintenant au tour du Gouvernement et des parlementaires de se poser sérieusement la question, en réfléchissant notamment à l’enjeu très important que constituent les pics de consommation. Peut-on accepter que l’électricité très carbonée à laquelle nous faisons appel pendant ces périodes serve à alimenter les panneaux publicitaires ?

À plus long terme, cette étude concerne nos usages de l’énergie en général, et l’acceptabilité sociale et environnementale de certaines utilisations, au moment où chacun doit faire un effort.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Madame la présidente, je sais combien ce sujet vous préoccupe, à juste titre. Nous avons de meilleurs usages à faire de l’énergie que ceux qui sont faits actuellement. Je note d’ailleurs que les panneaux publicitaires lumineux se développent beaucoup dans le métro, ce qui est un phénomène relativement nouveau.

Toutefois, je ne sais pas si un rapport du Gouvernement serait le meilleur support pour cette réflexion. Je me demande dans quelle mesure il ne serait pas plus pertinent qu’une mission parlementaire se penche sur ce sujet.

En outre, il va falloir pousser le Gouvernement sur beaucoup d’autres sujets et celui que vous voulez mettre en avant n’est pas prioritaire, même s’il est important.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente Barbara Pompili. Pour moi, madame la rapporteure pour avis, c’est un sujet hautement prioritaire. Et si je demande un rapport au Gouvernement, c’est pour la bonne et simple raison qu’on a encore refusé des administrateurs supplémentaires à la commission du développement durable. Puisque nous n’avons pas les moyens de faire notre travail correctement, nous considérons que c’est au Gouvernement, qui a plus de moyens que nous, de se consacrer à cette réflexion.

M. Martial Saddier. Je vous soutiens aussi, madame la présidente, pour cette demande de rapport. N’oublions pas que la population et le produit intérieur brut augmentent. Pour que nous consommions moins, il va falloir faire des économies sérieuses. Ce gouvernement et ceux qui le suivront seront plus enclins à mettre en œuvre un rapport gouvernemental qu’un rapport parlementaire.

Mme la présidente Barbara Pompili. Le Gouvernement pourrait aussi missionner un parlementaire !

M. Martial Saddier. Il y a peu de chances que ce soit moi.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Je suis vraiment partagée, car nous sommes contraints des deux côtés : le Gouvernement peine à produire tous les rapports qui lui sont demandés ; de notre côté, nous sommes en sous-effectif et cela affecte le travail de nos commissions.

M. Vincent Thiébaut. La transition énergétique et l’acceptabilité des énergies reposent sur trois piliers : les énergies renouvelables, qui permettront d’atteindre un prix acceptable de l’énergie, la rénovation thermique et, surtout, les habitudes, les comportements et les us. Si nous ne prenons pas en compte cette troisième dimension, nous ne pourrons pas atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés. Demander un rapport au Gouvernement, c’est aussi appeler le Gouvernement à prendre ses responsabilités en matière de changement des pratiques.

Mme Sophie Auconie. Je trouve votre position extrêmement courageuse, madame la présidente, et je la soutiens. C’est une évidence qu’il nous faut responsabiliser le Gouvernement. Nous devons démontrer que nous avons compris combien il était utile de mettre en œuvre des moyens pour faire changer les pratiques. Si la commission du développement durable n’adopte pas un tel amendement, qui le fera ?

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Je soutiens également votre amendement, madame la présidente. Eu égard au peu de moyens dont nous disposons, il appartient effectivement au Gouvernement de prendre ses responsabilités en la matière. Sur un sujet aussi essentiel que celui-ci, faire participer les citoyens, quelle que soit la forme retenue, semble aller dans le sens de leurs attentes. C’est aussi favoriser l’émergence de mesures concrètes qui peuvent aussi faire avancer les choses.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Devant une telle unanimité, nous allons nous joindre à nos collègues et voter votre amendement, madame la présidente.

M. Matthieu Orphelin. Voter en faveur d’un amendement demandant un rapport au Gouvernement en commission pour avis, cela fait tout de même partie des choses que nous pouvons nous permettre ! (Rires.)

Mme la présidente Barbara Pompili. C’est un sujet dont on ne parle pas. Il faut absolument insister sur le fait que les économies d’énergie sont la base de la transition énergétique.

La commission adopte lamendement CD123 à lunanimité.

Elle émet ensuite un avis favorable à ladoption de larticle 1er modifié.

Article additionnel après larticle 1er (article L. 111-9 du code de la construction et de l’habitation) : Méthode de calcul du facteur de conversion en énergie primaire de lélectricité utilisée pour les bâtiments neufs

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD124 de Mme la présidente Barbara Pompili, CD38 de M. Matthieu Orphelin et CD138 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme la présidente Barbara Pompili. L’amendement CD124 est défendu.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. L’amendement CD138, pratiquement identique, porte sur la méthode de calcul et l’évolution du coefficient de conversion en énergie primaire. Actuellement, ce coefficient est fixé à 2,58. L’amendement vise à en approcher la valeur au plus près de la réalité actuelle du mix énergétique, en respectant la méthodologie européenne et en procédant à sa révision tous les quatre ans, pour tenir compte de l’évolution du mix. Lors de la révision, c’est le mix présent qui sera pris en compte, et non les anticipations, sachant que la fréquence de quatre ans reste faible par rapport au temps d’évolution du mix prévu sur vingt ans.

Le coefficient actuel de 2,58 et le coefficient proposé de 2,1 présentent l’un et l’autre des avantages et des inconvénients. Dans les bâtiments neufs, un coefficient élevé favorise le gaz, alors que l’électricité pourrait sembler plus adaptée dans ces bâtiments à basse consommation d’énergie, notamment au regard de l’objectif de neutralité carbone. Les bâtiments étant conçus pour durer plusieurs dizaines d’années, il pourrait être opportun de tenir compte d’un mix énergétique futur pour qu’ils produisent le moins d’émissions possible et que les choix d’aujourd’hui soient valables à long terme. Cependant, la question ne se pose pas dans les mêmes termes s’agissant de la rénovation énergétique. La modification du coefficient pourrait en effet avoir pour conséquence de sortir du champ actuel des passoires thermiques certains logements du parc existant, sans modification réelle des conditions de vie. Or, avec l’équivalent de 1 % de logements construits chaque année, le renouvellement complet du parc prendra du temps et la rénovation, de ce fait, est un enjeu social et environnemental central à court et moyen terme. En clair, l’enjeu du coefficient diffère selon qu’il s’agit de logements neufs ou de rénovation. C’est pourquoi nous sommes d’avis qu’il ne faut pas modifier le coefficient, même si nous pourrons éventuellement retravailler cette mesure d’ici à la séance.

M. Matthieu Orphelin. Ce sujet d’apparence technique est fondamental, car il a trait à l’équilibre entre les différentes sources d’énergie, notamment l’électricité et les énergies fossiles ; il est de nature éminemment politique et stratégique. Il y a dix ans déjà, les auteurs d’un rapport de l’OPECST avaient constaté que jamais auparavant le lobbying n’avait été aussi fort concernant l’objectif de 50 kilowattheures et le coefficient de 2,58. Il est très important d’en faire un réel enjeu de la politique énergétique. Mon amendement CD38 va dans le même sens que celui qui vient d’être présenté et vise à ce que le coefficient en question reste au plus près de la valeur de 2,58.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. C’est un sujet fort complexe. Nous avons du mal à trouver un coefficient qui vaille autant dans le secteur du neuf – où les critères vont évoluer – que dans les passoires thermiques, notamment les bâtiments classés F et G. Le coefficient actuel est plutôt prévu pour le neuf ; sa modification aurait pour effet de sortir les passoires thermiques du dispositif en vigueur. J’aborde donc ces amendements avec la plus grande prudence : je ne voudrais pas que l’on fasse mal en voulant faire le bien. De deux choses l’une : ou bien vous êtes sûrs de vos amendements, ou bien je vous propose de les retravailler en vue de la séance. Leurs incidences seraient considérables ; mieux vaut ne pas se tromper. Pour en mesurer les tenants et les aboutissants dans le neuf comme dans la rénovation, j’estime qu’ils ne sont pas assez mûrs.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je retire l’amendement CD124 au profit du CD138.

Lamendement CD124 est retiré.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Nous allons privilégier l’amendement CD138, dont la rédaction nous paraît plus sûre que celle de l’amendement CD38.

La commission rejette lamendement CD38.

Puis elle adopte lamendement CD138.

Article additionnel après larticle 1er (article L. 311‑5‑5 du code de l’énergie) : Création dun plafond de capacité nucléaire installée à 2030 et 2035.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD125 et CD128 de Mme la présidente Barbara Pompili.

Mme la présidente Barbara Pompili. En 2015, après des années de discussions, les ministères et les députés se sont accordés sur les objectifs fixés dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l’un d’entre eux consistant à ramener à 50 % la production d’électricité nucléaire d’ici à 2025, afin de diversifier la production, l’électricité étant actuellement à 75 % d’origine nucléaire. Cette diversification est nécessaire pour de multiples raisons. Elle n’est pas liée au fait d’être pour ou contre le nucléaire, mais répond à des considérations économiques, industrielles, de sûreté et autres. Mettre tous nos œufs dans le même panier est une mauvaise solution. En outre, le parc nucléaire est vieillissant. Il est donc absolument indispensable de lisser les fermetures de réacteurs pour éviter une situation d’approvisionnement très tendue et une explosion du prix de l’électricité, car c’est ce qui nous attend si nous fermons les yeux jusqu’au dernier moment sur l’âge des réacteurs, qui ont tous été construits à la même époque.

Le Gouvernement a choisi de décaler l’objectif de 50 % à 2035, car rien n’a encore été fait s’agissant de la fermeture de réacteurs. Ne commettons pas une nouvelle fois la même erreur. Nous devons cadrer la baisse, et veiller à ce que l’exploitant donne suite aux annonces successives. La PPE n’est pas contraignante ; la loi, si. Et surtout, la loi s’inscrit dans la durée.

L’amendement CD125 vise à instaurer des plafonds de capacité de production décroissants qui vont exactement dans le sens des annonces faites par le Gouvernement dans le cadre de la PPE – qui me semblent insuffisantes, mais sur lesquelles j’ai tout de même calé mon amendement – et permet d’inscrire nos engagements dans la durée.

L’amendement de repli CD128 ne fixe qu’un seul plafond en fin de période, pour au moins garantir qu’il soit respecté.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je serais plutôt favorable à votre amendement de repli ; l’amendement CD125, en effet, est très détaillé, année par année, et il sera difficile de s’y tenir.

Lamendement CD125 est retiré.

La commission adopte lamendement CD128.

Article additionnel après larticle 1er (article L. 111-9 du code de la construction et de l’habitation) : Extension du plan stratégique des exploitants aux deux périodes de la programmation pluriannuelle de lénergie

La commission examine les amendements identiques CD126 de Mme la présidente Barbara Pompili et CD135 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme la présidente Barbara Pompili. L’amendement CD126 porte sur le plan stratégique d’EDF concernant la visibilité des fermetures de réacteurs nucléaires. En vertu de la loi, le plan stratégique d’EDF, c’est-à-dire la déclinaison opérationnelle de la PPE, ne porte que sur la première période de la programmation. L’amendement vise à étendre l’obligation à toutes les périodes, car il n’y a aucune raison pour que cette visibilité ne soit donnée qu’entre 2019 et 2023. Ensuite et surtout, il vise à ce qu’EDF élabore un calendrier des fermetures de réacteurs devant être rendu public.

C’est indispensable : nous savons qu’il faudra fermer au moins quatorze réacteurs d’ici à 2035. Il n’est pas possible de laisser des territoires entiers, avec leurs milliers de travailleurs, leurs commerces, leurs PME et leurs centres de formation, dans le doute quant à l’avenir de leurs réacteurs.

Si les annonces sont faites clairement et très en amont des fermetures, les collectivités pourront anticiper et recréer des bassins d’emploi, en commençant par la filière du démantèlement, qui nécessite un personnel nombreux. Tous les acteurs de cette filière, qu’ils existent déjà ou qu’ils veuillent se développer, ont besoin de savoir où s’installer et où se trouve l’avenir immédiat de leur métier. Il s’agit de dizaines de milliers d’emplois nouveaux ou de reconversions professionnelles.

Je rappelle que l’industrie nucléaire française représente environ 220 000 emplois directs et indirects. Or la fermeture de nombreux réacteurs dans les dix à vingt prochaines années est une réalité ! Nous ne saurions fermer les yeux. Il faut penser reconversion et penser emploi. Tel est le but de cet amendement.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. L’amendement CD135, identique, est défendu.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Avis favorable.

M. Vincent Thiébaut. J’ai cosigné cet amendement car le calendrier prévisionnel est essentiel. Rappelons la situation de Fessenheim : l’État intervient parce que l’on vient de découvrir, comme par hasard, que la centrale fermerait un jour. Cet amendement permettra de responsabiliser les collectivités territoriales qui, ne l’oublions pas, ont touché beaucoup d’argent grâce à l’implantation d’une centrale, et qui, souvent, n’ont aucunement anticipé sa fermeture. Il est pourtant évident, dès la pose de la première pierre, qu’une centrale finira par fermer. L’amendement, que je soutiens fortement, permettra de leur rappeler leurs devoirs et d’éviter les situations que nous connaissons actuellement.

Mme la présidente Barbara Pompili. Précisons qu’il ne s’agit pas forcément de fermetures de centrales, mais simplement de réacteurs.

M. Vincent Thiébaut. Oui, mais il faut anticiper la diminution de personnel qui en découlera.

La commission adopte les amendements.

Article additionnel après larticle 1er : Création dun rapport sur la compatibilité du projet de loi de finances avec lobjectif international de limitation du réchauffement climatique

La commission examine lamendement CD136 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Bénédicte Peyrol. Cet amendement, que je présente avec M. Jean-Charles Colas-Roy, vise à concrétiser un engagement que le Gouvernement a pris à l’issue du Conseil de défense écologique et à l’occasion du « One Planet Summit » de 2017. Il s’agit de demander au Gouvernement de nous transmettre un document concrétisant le « budget vert », ou green budgeting. Il n’est plus possible que les parlementaires votent un budget dont ils ne peuvent pas vérifier la compatibilité avec l’Accord de Paris.

Cet amendement est complémentaire d’un amendement que j’ai fait adopter en loi de finances afin qu’un jaune budgétaire synthétise toutes les dépenses et recettes vertes. Le document demandé par le présent amendement nous permettra également d’évaluer les autres politiques publiques qui ne sont pas directement liées à la transition écologique, comme le budget de l’éducation nationale ou celui de la recherche, et de vérifier leur compatibilité avec nos objectifs environnementaux.

Je propose que ce document nous soit initialement remis le 1er octobre 2019. Peut-être pourrons-nous faire preuve de clémence à l’égard de l’administration en ce qui concerne le budget pour 2020, en faisant porter l’évaluation sur les seuls aspects liés aux changements climatiques. Mais par la suite, il couvrira toutes les dimensions environnementales, y compris la biodiversité. Enfin, je propose que le Haut conseil pour le climat donne un avis éclairé sur ce rapport, car il me semble utile que les parlementaires disposent d’un point de vue expert.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je sais que Mme Bénédicte Peyrol travaille depuis longtemps sur ces sujets. En l’occurrence, elle propose la solution indispensable pour mobiliser l’ensemble des parlementaires sur le caractère transversal de ces questions, qui irriguent toutes les politiques publiques et s’inscrivent dans le sillage des objectifs de développement durable de l’ONU.

Je la remercie d’avoir fait référence au Haut Conseil. Je défends justement un amendement à l’article 2, afin qu’il puisse être saisi par le Parlement de tout projet de loi, budgétaire ou non. Nous partageons donc le même état d’esprit ; avis favorable.

La commission adopte lamendement.

 


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2.   Réunion du mercredi 12 juin 2019

Article 3 (article L. 311-5-3 du code de l’énergie) : Limitation des émissions liées à la production délectricité

La commission examine lamendement CD49 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Mon amendement concerne la fermeture des centrales à charbon. Il en reste quatre en France, dont la fermeture d’ici 2022 a été actée dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), confirmée et reprise par le Président de la République.

Ces centrales rejettent dans l’atmosphère 10 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent des émissions de 4 millions de voitures. Les fermer constitue à la fois un message important envoyé à la communauté internationale et une action forte, témoignant du respect de nos engagements.

Il me semble que nous sommes tous d’accord sur l’accompagnement des salariés, tant ceux directement employés dans ces centrales que ceux des sous-traitants et de l’écosystème économique qui s’est développé tout autour. Cet accompagnement des salariés et des entreprises vers une reconversion sera d’ailleurs renforcé dans la loi.

L’amendement définit par ailleurs des exigences complémentaires, pour que cette fermeture devienne une réalité. Par exemple, il ne faudrait pas que des projets de centrales à bi-combustion, charbon et biomasse, soient poursuivis. Quand j’étais encore directeur à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), je m’étais penché sur de tels projets. Il peut sembler intéressant de substituer la biomasse au charbon dans une proportion de 80 %. Mais cela a-t-il un sens, aujourd’hui en France, de brûler de la biomasse pour produire uniquement de l’électricité, comme le fait la centrale de Cordemais ?

En résumé, mon amendement vise à garantir la fermeture des quatre centrales à charbon, tout en insistant sur le nécessaire accompagnement des salariés.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Monsieur Matthieu Orphelin, vous faites référence à un certain nombre d’analyses prospectives sur la fermeture des quatre centrales à charbon et de l’unité nucléaire de Fessenheim.

Vous savez que Réseau de transport d’électricité (RTE) a mené des analyses très précises sur la façon de parvenir à fermer ces unités tout en garantissant la gestion de la pointe. Pour ce faire, plusieurs conditions, liées à la mise en service de l’EPR de Flamanville, ainsi que de la centrale de Landivisiau, et à l’interconnexion avec le Royaume-Uni, doivent être remplies.

Bien évidemment, personne ne souhaite que ces centrales à charbon continuent de fonctionner. Cependant, si les circonstances étaient défavorables, il faudrait pouvoir faire face à la demande de pointe. Il me semble donc qu’inscrire dans la loi la décision de fermeture mettrait en péril la gestion de la pointe. Si nous souscrivons tous au désir de fermer ces centrales, je pense qu’il ne faut pas prendre ce risque. Avis défavorable.

M. Jean-Marie Sermier. Nous sommes très favorables à cet amendement, car l’engagement a été pris depuis de longues années, et même renouvelé par un certain nombre de responsables politiques.

Il est nécessaire aujourd’hui d’acter, de manière définitive, la fermeture des centrales à charbon. Nous passons beaucoup de temps, dans cette commission, à adopter des textes dont on nous dit qu’ils nous permettront de montrer l’exemple, de donner un signal. Eh bien, nous donnerions, pour le coup, un signal extrêmement fort : la France fermerait ses quatre dernières centrales à charbon.

Certes, la demande en heures de pointe nécessite de disposer d’autres possibilités, mais je pense que le nucléaire n’est pas, sans même parler de création de nouvelle centrale de ce type, au maximum de sa capacité.

On peut donc aujourd’hui optimiser le nucléaire, comme on peut optimiser les barrages hydrauliques. Ces derniers n’ont-ils pas produit 12 % de l’électricité nationale l’an dernier ?

En 2018, nous avons produit 549 térawattheures (TWh) d’électricité, nous en avons acheté 20 TWh et vendu 80 TWh, soit un solde excédentaire de 60 TWh. Certes, ce n’est pas forcément au moment du pic que nous avons besoin de cette production, mais cela veut tout de même dire que nous avons beaucoup plus produit que nous n’avons consommé. La consommation d’électricité stagne d’ailleurs, je crois qu’elle a même baissé de 0,8 % entre 2017 et 2018.

Par conséquent, nous disposons aujourd’hui d’une marge qui nous permet de fermer les centrales à charbon. Je vous rappelle que l’électricité que nous vendons, notamment à nos voisins allemands et suisses, est écoulée à des prix qui sont au-dessous de toute rentabilité économique : aux alentours, je crois, de 5,5 centimes d’euro le kilowattheure. Il y a donc un intérêt économique et écologique évident à fermer ces centrales.

Permettez-moi un simple parallèle avec l’arrêt des voitures utilisant des énergies fossiles. Pourquoi notre groupe n’a-t-il pas voté majoritairement l’article 26 AA du projet de loi d’orientation des mobilités (LOM) ? Parce que nous avons jugé insuffisant l’accompagnement de la filière automobile, génératrice de nombreux emplois dans notre pays.

Certains de nos collègues, fortement engagés dans la cause environnementale, qui ont des centrales à charbon dans leur propre circonscription, vont être confrontés à ces mêmes problèmes. Il faut accompagner ces fermetures. Nous voterons donc avec conviction en faveur de cet amendement.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Monsieur Jean-Marie Sermier, la loi permet déjà de fermer ces centrales à charbon – ce que nous souhaitons tous ! Mais, puisque vous parlez d’hydroélectricité, je tiens à redire que les scenarii de RTE me semblent fiables. L’entreprise a d’ailleurs réactualisé en avril 2019 ses études, où elle cite un certain nombre de conditions à remplir. Inscrire une disposition supplémentaire qui mettrait en danger la gestion de la pointe serait à mon avis inopportun, et je pense que les consommateurs ne l’apprécieraient pas non plus.

M. Jean-Marie Sermier. Légiférons-nous pour le consommateur ou en faveur du climat ?

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Cela étant, je respecte bien sûr tout à fait votre point de vue, mais je maintiens mon avis défavorable.

Mme la présidente Barbara Pompili. Monsieur Jean-Marie Sermier, nous avons pris bonne note de ce virage écologique très net de votre part. Je ne sais pas si vous avez lu attentivement l’amendement que vous défendez, mais je suis vraiment très heureuse de vous entendre. J’y vois la preuve que la fréquentation de notre commission a des vertus extraordinaires. (Sourires.)

M. Matthieu Orphelin. Je crois que la question de la pointe est une question importante. D’ailleurs, la centrale de Cordemais, l’une des quatre concernées, était principalement utilisée pour faire face à la demande en heures de pointe, avec ses tranches de production au fioul qui ont été ensuite mises sous cloche. Il faudrait au moins définir un nombre maximum d’heures de fonctionnement, disposition non prévue par le texte actuellement en discussion.

Pour l’instant, je maintiens donc mon amendement.

La commission rejette lamendement.

Puis elle examine lamendement CD159 de la rapporteure pour avis.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Comme M. Matthieu Orphelin l’a dit tout à l’heure, sont prévues dans le projet de loi un certain nombre de mesures d’accompagnement des salariés concernés par un reclassement à la suite de la fermeture des centrales.

Je propose un amendement précisant que ces mesures de reclassement cibleront prioritairement le bassin d’emploi touché. Il est en effet important de reclasser les personnels, mais aussi de les maintenir dans le territoire.

La commission adopte lamendement.

Puis elle se saisit de lamendement CD132 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Compte tenu des débats qui ont eu lieu dans l’hémicycle hier, il me semble qu’il serait mal venu d’adopter cet amendement. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement.

Elle émet un avis favorable à ladoption de larticle 3 modifié.

Article additionnel après larticle 3 : Soutien, à titre expérimental, au déploiement de technologies propres dans les zones couvertes par un plan de protection de latmosphère

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD7 et CD54 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Mon premier amendement vise à ce que dans les zones géographiques couvertes par un plan de protection de l’atmosphère (PPA), on puisse favoriser le développement des énergies renouvelables. Mon deuxième amendement est un amendement de repli, qui vise à assortir les dispositions de l’amendement précédent d’un droit à l’expérimentation.

Alors que nous sommes sur le point d’aborder ce soir en séance publique les articles 27 et 28 du projet de loi d’orientation des mobilités qui définit des contraintes, ou du moins des obligations très fortes, pour les zones couvertes par des PPA, instaurant notamment des zones de mobilité restreinte – lesquelles changent pour la quatrième fois de nom –, nous allons peut-être finir par parvenir à mettre à mettre en place ces PPA.

Cependant, il ne faut pas sous-estimer leurs incidences. Ils couvriront en effet près de la moitié de la population française : quasiment toutes les grandes agglomérations, mais aussi quelques autres zones géographiques, au nombre desquelles les zones de montagne qui connaissent des problèmes particuliers de qualité de l’air.

Ces deux amendements ont pour objet de proposer qu’en échange, ou en tout cas en parallèle, de ces obligations, le Parlement ouvre la possibilité à ces territoires d’aller plus vite en matière d’énergies renouvelables. D’où le dispositif du premier amendement, mais surtout de l’amendement de repli qui propose au moins, en ce domaine, un droit à l’expérimentation sur ces territoires.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je ne suis pas favorable à ce qu’on aide certains territoires plus que d’autres. Ces amendements présentent en outre un travers, dans la mesure où certaines énergies renouvelables, comme le biogaz, peuvent générer de la pollution locale. Inscrire l’émergence d’énergies renouvelables dans le texte, de façon imprécise, me conduit ainsi à émettre un avis défavorable.

M. Martial Saddier. J’avoue que je ne comprends pas bien l’argument de Mme la rapporteure pour avis. Si l’on identifie clairement des zones géographiques dans lesquelles seront appliquées des contraintes supplémentaires, je ne vois pas pourquoi il ne serait pas permis à ces mêmes zones géographiques de jouir de certaines facilités, y compris pour les énergies renouvelables.

Chaque territoire a des sources particulières d’émissions de polluants. Les PPA sont donc bâtis après toute une phase de concertation. Je rappelle à ceux qui ont participé aux débats sur les PPA que ce n’est tout de même pas rien. Il y a eu près de deux à trois ans de concertation avec tout le monde : société civile, associations environnementales, élus locaux… C’est le préfet, c’est-à-dire l’État, qui reste compétent in fine, après l’enquête publique. C’est lui qui signe définitivement la feuille de route et qui apporte des réponses spécifiques, en fonction des émissions de polluants.

Du reste, je n’ai pas bien compris pourquoi le biogaz peut éventuellement polluer. Mais soit. Mon amendement aurait pour seule conséquence que la concertation, l’enquête publique, puis l’arrêté du préfet favorisent l’énergie renouvelable adéquate pour chaque PPA, ce qui signifie qu’elle pourrait être différente d’une zone géographique à l’autre.

Si cette idée émerge de la concertation et de l’enquête publique, et que le préfet est d’accord, il n’y a pas de raison pour que la République ne donne pas un élan supplémentaire à certaines énergies renouvelables, en favorisant ainsi des gains d’émission. Je trouve que ce serait vraiment bien au regard des contraintes et des obligations qu’on va inscrire ce soir dans le projet de loi d’orientation des mobilités.

M. Matthieu Orphelin. Je pense que ce sont des amendements qui vont dans le bon sens. Il me paraît tout à fait intéressant de prioriser l’action de transition écologique dans les territoires qui en ont le plus besoin, notamment ceux où la pollution locale est importante.

Sans que cela n’enlève rien à personne ni aux autres territoires, je trouve que cette manière de lier les différentes politiques, climatique et de lutte contre la pollution, est de bon sens.

M. Bruno Millienne. Je suis d’accord avec M. Matthieu Orphelin et avec M. Martial Saddier. L’urgence climatique et la lutte contre la pollution exigent que nous acceptions ces amendements frappés au coin du bon sens. Je ne comprends pas le refus de la rapporteure pour avis.

La commission rejette lamendement CD7.

Elle adopte lamendement CD54.

Article additionnel après larticle 3 (article L. 111-10-4 du code de la construction et de l’habitation) : Incitation à la rénovation énergétique des logements mal isolés lors dune mutation

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD94 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, CD83 de Mme Florence Lasserre-David, CD152 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert et les amendements identiques CD53 de M. Matthieu Orphelin et CD95 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte avait mis en place un objectif ambitieux : la rénovation énergétique, avant 2025, de tous les bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowattheures d’énergie primaire par mètre carré et par an.

En l’absence de mesures d’application et d’un dispositif de contrôle et de sanction adapté, cet objectif apparaît aujourd’hui hors d’atteinte. Le présent amendement propose donc de repousser à 2029 l’échéance prévue. En contrepartie, il précise que les modalités d’application de cet article seront fixées par décret en Conseil d’État, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi. En outre, il confie au Gouvernement la réalisation d’un rapport sur les évolutions législatives et réglementaires nécessaires pour assurer le respect du présent article, à travers des dispositifs de contrôle et de sanction.

Mme Florence Lasserre-David. Le secteur du bâtiment représente 45 % des consommations énergétiques françaises, et un quart des émissions de gaz à effet de serre.

Le présent amendement prévoit que, lors de la vente d’un bien immobilier dont le niveau de performance correspond à une consommation supérieure à 330 kilowattheures (kWh) d’énergie primaire par mètre carré et par an, une part du produit de la vente soit mise sous séquestre. Ce montant correspond au coût des travaux nécessaires pour atteindre un niveau de performance énergétique inférieur à 231 kWh d’énergie primaire par an et par mètre carré.

Cette somme serait débloquée au profit de l’acquéreur, ou d’une entreprise qu’il choisirait, pour mener les travaux nécessaires.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. C’est une mesure de bon sens. Aujourd’hui, quand vous vendez un logement constituant une passoire thermique, l’acquéreur fait parfois baisser le prix de 10 % grâce à cet argument. Cependant, il convient de faire en sorte que les travaux aient bien lieu car, aujourd’hui, si la négociation fait baisser le prix, la mutation n’entraîne pas nécessairement leur réalisation. Et on reste avec une passoire thermique !

M. Matthieu Orphelin. Mon amendement va dans le même sens. Permettez-moi seulement de rappeler les six engagements qui avaient été pris par M. Emmanuel Macron pendant la campagne des élections présidentielles : proposer un audit gratuit à tous les propriétaires occupants en situation de précarité énergétique ; viser la rénovation de la moitié des passoires thermiques dès 2023 ; interdire de mettre en location les passoires énergétiques à compter de 2025 ; mettre en place un fonds public pour prendre intégralement en charge les travaux des propriétaires les plus précaires, avec remboursement au moment de la vente du bien ; permettre à tous de réaliser les travaux nécessaires ; transformer le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime versée au moment des travaux.

Mon amendement s’inscrit dans le cadre dessiné par cette perspective ambitieuse.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé comme objectif « de disposer d’un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments sont rénovés en fonction des normes "bâtiment basse consommation" ou assimilées, à l’horizon 2050 ».

Cet amendement vise à atteindre cet objectif, en rendant progressivement obligatoire la rénovation des logements lors des mutations, locations ou ventes, en priorisant d’abord les « passoires énergétiques », relevant des étiquettes F et G.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je crois que nous avons tous à cœur de trouver des solutions pour la rénovation thermique des bâtiments. Mais, bien entendu, il va falloir accompagner les mesures que nous souhaitons prendre, dans la mesure où des efforts financiers sont en jeu.

Il me semble préférable, au regard des différents amendements proposés, de vous engager à vous rallier à l’amendement CD152 présenté par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, dans la mesure où la mise sous séquestre d’un montant donné lors de la mutation peut être un outil qui profite à l’acquéreur du bien, sans pénaliser le vendeur. Ainsi, on engage un processus de travaux.

Je donne donc un avis favorable à l’amendement CD152, et demande le retrait des autres amendements.

Lamendement CD94 est retiré.

La commission rejette lamendement CD83.

Elle adopte lamendement CD152.

En conséquence, les amendements CD53 et CD95 tombent.

 

Article additionnel après larticle 3 (article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) : Ajout dun plafond de consommation énergétique aux critères définissant un logement décent

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD164 de la rapporteure pour avis et CD82 de Mme Florence Lasserre-David.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Mon amendement s’inscrit dans la continuité de ce qui a été voté précédemment. Il pose la question de savoir comment nous doter aujourd’hui d’outils qui aident à améliorer la performance énergétique des bâtiments.

Je propose à cette fin d’intégrer un critère de performance énergétique en kilowattheure d’énergie primaire par an dans les critères de définition d’un logement décent, afin de fixer de manière précise le niveau de performance à atteindre pour louer un logement.

Mme Florence Lasserre-David. L’article 12 de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a introduit, dans les critères de définition d’un logement décent ouvert à la location, un critère de performance énergétique.

Le décret d’application de cet article réduit toutefois significativement la portée de la mesure. Plutôt que de fixer un seuil de performance énergétique indiquant une consommation maximale par mètre carré et par an, ce décret fixe plusieurs critères flous et partiels. Cette mesure n’indique que des critères de décence non quantifiables, et n’incite pas à effectuer des travaux permettant d’améliorer significativement la performance énergétique.

Cet amendement vise donc à intégrer un critère de performance énergétique en kilowattheure d’énergie primaire par an dans les critères de définition d’un logement décent, afin de cibler de manière plus précise les logements qui doivent être rénovés pour être loués et le niveau de performance à atteindre.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je vous suggère de le retirer au profit du mien.

M. Martial Saddier. Madame la rapporteure pour avis, comment tenez-vous compte des différences climatiques entre les zones ?

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. C’est une vraie question, qui n’est effectivement pas traitée dans l’amendement, et qui devra sans doute l’être par décret.

La commission adopte lamendement CD164.

En conséquence, lamendement CD82 tombe.

Article additionnel après larticle 3 (article 5 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte) : Interdiction de location des passoires énergétiques

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD50 de M. Matthieu Orphelin, CD93 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, ainsi que les amendements identiques CD121 de Mme la présidente Barbara Pompili et CD151 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

M. Matthieu Orphelin. Mon amendement vise à mettre fin aux locations des passoires énergétiques. Par rapport à celui de ma Mme Marjolaine Meynier-Millefert, il ajoute cependant une définition des modalités de mise en œuvre et des dispositifs financiers mis en place pour accompagner les propriétaires non occupants, ayant des ressources modestes, ou n’ayant tout simplement pas les moyens de réaliser des travaux.

Je fais ainsi référence à l’engagement dont je vous parlais tout à l’heure : pour faire progresser les choses, il faut qu’il existe un fonds ou un dispositif permettant d’avancer, éventuellement intégralement le montant des travaux au propriétaire non occupant n’en disposant pas, quitte à le récupérer au moment de la transmission du bien ou de la succession. Cette disposition me paraît pouvoir être intégrée dans l’amendement qui sera adopté, si cela devait ne pas être le mien.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Mon amendement vise à accélérer la rénovation énergétique des logements locatifs du parc privé dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kWh d’énergie primaire par mètre carré et par an.

En rendant obligatoire une rénovation énergétique performante et complète au niveau « bâtiment basse consommation », cet amendement répond à une urgence écologique et sociale. Alors que les bâtiments représentent le principal poste de consommation énergétique finale, la rénovation énergétique constitue une solution pour l’amélioration de la qualité de vie des ménages et de leur facture énergétique.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Cet amendement vise à l’éradication des passoires thermiques F et G d’ici 2025 dans les zones tendues, et d’ici 2028 dans les zones non tendues. Il s’agit de respecter l’engagement pris par le Président de la République lors de la campagne pour l’élection présidentielle.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je donnerai un avis favorable aux amendements identiques de Mme la présidente Barbara Pompili et de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, dans la mesure où le séquençage proposé, 2025 pour les zones tendues, puis 2028 pour les autres me paraît intéressant et conforme en effet aux engagements du Président de la République, repris dans le plan de rénovation énergétique.

Je demande en revanche le retrait des trois autres amendements.

M. Bruno Millienne. Nous sommes très en retard en ce qui concerne la rénovation des bâtiments, malgré toutes les mesures qui existent déjà. Or, l’amendement de M. Matthieu Orphelin me paraît, de tous, le plus ambitieux. Je le soutiens, car nous devons aller plus vite et plus fort si nous voulons que les passoires thermiques cessent de consommer l’essentiel de l’énergie que nous utilisons.

M. Martial Saddier. Ces dispositions concernent-elles l’ensemble du parc touristique ? Par ailleurs, il me semble que le seuil proposé est identique, quelle que soit la zone où se situent les bâtiments. Or, compte tenu de la diversité des conditions géographiques dans notre pays, il me semble impossible de déterminer un seuil unique pour l’ensemble du territoire.

M. Matthieu Orphelin. Dans la mesure où la rapporteure pour avis a donné un avis favorable à l’amendement défendu par Mme Marjolaine Meynier-Millefert, ne pourrait-on sous-amender cet amendement pour y inscrire la nécessité de prévoir des dispositifs d’accompagnement pour les propriétaires non occupants qui n’ont pas les moyens de financer les travaux ?

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. C’est une proposition d’autant plus intéressante que le ministère de l’écologie et le ministère du logement mènent actuellement un travail conjoint pour avancer sur les mesures d’accompagnement. Je serais donc favorable à ce sous-amendement.

M. Matthieu Orphelin. Je propose de rédiger ainsi le dernier alinéa : « Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article, ainsi que les dispositifs financiers mis en place pour accompagner, sous conditions de ressources, les propriétaires non occupants, en leur avançant tout ou partie du coût des travaux et en récupérant cette avance au moment de la transmission du bien ou de la succession. »

Il me semble en effet qu’on ne peut imposer la réalisation de travaux sans fournir les moyens nécessaires.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je proposerais pour ma part une formulation plus courte, qui n’empiète pas sur le contenu du décret.

M. Matthieu Orphelin. Je me range à l’idée d’une rédaction plus condensée.

Mme Danielle Brulebois. J’appelle votre attention sur le coût des travaux à réaliser sur des logements situés en centre-ville, dans des périmètres classés. Il est très difficile d’isoler ces bâtiments lorsqu’il faut changer les portes et les fenêtres. Il me semble qu’avant d’adopter un tel amendement, il faudrait évaluer ces coûts.

Mme Huguette Tiegna. Compte tenu de la complexité de cette question, sans doute serait-il préférable de déposer une nouvelle proposition devant la commission des affaires économiques, et de prendre le temps d’en discuter.

Mme Pascale Boyer. Je reviens sur le cas des périmètres protégés : les contraintes imposées par l’architecte des bâtiments de France (ABF) engendrent des surcoûts qui empêchent certains propriétaires de réaliser les travaux. Il faut le prendre en compte.

M. Bruno Millienne. Nous sommes en train de nous faire des nœuds au cerveau pour rédiger un sous-amendement alors que l’amendement proposé par M. Matthieu Orphelin contient l’ensemble des éléments. Je ne vois pas pourquoi nous ne l’adoptons pas.

Mme la présidente Barbara Pompili. Les délais proposés ne sont pas les mêmes.

M. Martial Saddier. Je réitère ma question : cet amendement concerne-t-il le parc touristique ?

Par ailleurs, je répète que le seuil retenu me pose un problème : dans mon département, par exemple, certaines habitations sont à trois cents mètres d’altitude, et d’autres à mille huit cents ou deux mille mètres. Si elles sont soumises au même seuil de consommation, soit ce seuil sera trop élevé pour les habitations en plaine, soit il sera trop bas pour les bâtiments en altitude. À trois cents mètres d’altitude, le climat n’est pas tout à fait le même qu’à mille huit cents mètres, et d’ordinaire ce type de mesures énergétiques s’applique avec des modulations.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. J’entends ce que vous dites, mais nous parlons ici de logements de classe F ou G. Nous avons le devoir de protéger les personnes qui y vivent, qu’elles soient à trois cents mètres ou à mille huit cents mètres d’altitude, et de leur garantir un minimum de confort.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. M. Bruno Millienne veut que nous soyons plus ambitieux en matière de rénovation énergétique, mais nous sommes tous tombés d’accord sur le fait qu’en l’état actuel, ces ambitions n’étaient pas forcément tenables. C’est pour cela que je suis d’accord avec le sous-amendement proposé par M. Matthieu Orphelin, dont la rédaction doit en effet être simplifiée.

Quant à la question de la diversité des territoires, il existe toujours des raisons d’expliquer que la norme ne peut pas s’appliquer partout de la même manière, mais en l’occurrence, nous parlons d’éradiquer les passoires thermiques : on peut donc s’accorder sur un seuil plancher identique partout, quitte à adopter par la suite des mesures complémentaires.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Ces dispositions doivent-elles s’appliquer aux copropriétés et aux propriétaires d’un logement faisant partie d’un collectif de bailleurs sociaux ?

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Compte tenu du rythme des rénovations dans les parcs des bailleurs sociaux, ils ne seront pas concernés par ces interdictions qui doivent prendre effet dans les dix ans à venir.

En ce qui concerne les copropriétés, la mise en place de ces mesures doit s’accompagner d’un autre train de dispositions qui ne relèvent pas du texte que nous examinons. Les procédures permettant d’engager des travaux doivent être facilitées, notamment en empêchant que leur mise en œuvre puisse être bloquée par un vote minoritaire, comme c’est le cas aujourd’hui, et en faisant en sorte que les aides allouées au moment de la décision restent valables jusqu’au démarrage desdits travaux, même plusieurs années après.

Tout l’enjeu, là encore, est de tenir de manière très ferme les objectifs annoncés, tout en admettant avec humilité que nous ne sommes pas les premiers à nous être engagés dans cette voie, et qu’il faut donc des mesures d’accompagnement solides si nous voulons y parvenir.

M. Jean-Marie Sermier. M. Martial Saddier, qui connaît bien le problème des nuitées touristiques, a posé une question très claire : les logements à usage touristique sont-ils, oui ou non, concernés ? Si c’est le cas, ce sont quelques millions de logements qui pourraient être interdits à la location, ce qui bouleverserait l’économie touristique de territoires entiers.

Par ailleurs, lorsque jétais maire de Dole, qui est lune des 222 villes retenues pour lopération « Action cœur de ville, » il ma fallu consacrer énormément de temps à trouver des solutions permettant de réaliser des opérations de rénovation urbaine économiquement viables. Vous savez fort bien quaujourdhui il coûte moins cher de construire en dehors de la ville quen centre-ville. On peut tous le regretter et vouloir lutter contre létalement urbain – javais, en tant que maire, fait baisser de 40 % les surfaces constructibles dans mon plan local durbanisme intercommunal (PLUI) –, mais cela exige de trouver des solutions techniques et financières pour agir au cœur des villes. Techniquement, comme nous la expliqué le président du groupement du Mur Manteau, il nest déjà pas simple de faire de lisolation extérieure sur des façades qui nécessitent laccord de lABF, mais cest financièrement encore plus délicat.

Il est donc évident que nos concitoyens doivent bénéficier d’habitations bien isolées, mais cela nécessite des mesures d’accompagnement, sans quoi les propriétaires ne feront rien et renonceront à signer des baux, ce qui n’aboutira qu’à augmenter le prix de la location au mètre carré dans ces zones-là. Si nous sommes donc d’accord sur le principe de ces amendements, nous pensons qu’on ne peut se contenter de bonnes intentions, et qu’il faut que les mesures proposées soient réalistes.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Concernant les locations touristiques, notamment en zone de montagne, le problème est qu’il s’agit parfois également d’habitations principales à certaines périodes de l’année – c’est de plus en plus le cas avec Airbnb. Et je répète qu’il s’agit de logements de classe F ou G, émetteurs de gaz à effet de serre, que nous devons nous engager à faire disparaître d’ici à 2028, qu’il s’agisse de logements touristiques ou non.

M. Jean-Marie Sermier. Il faut que l’État en donne les moyens !

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Pour ce faire, je propose de sous-amender l’amendement CD151 en complétant le dernier alinéa par les mots : « dont les dispositifs financiers mis en place pour accompagner sous conditions de ressources, les propriétaires non occupants », formulation que l’on peut également compléter, en ajoutant « en leur avançant tout ou partie du coût des travaux et en récupérant cette avance au moment de la transmission de biens ou de la succession ».

M. Matthieu Orphelin. Le travail collectif va tout à fait dans le bon sens, car on ne pourra plus nous reprocher de dégrader la situation des propriétaires non occupants à faibles revenus qui louent leur bien pour un petit complément de revenu, et n’ont pas les moyens de réaliser des travaux. Je tiens donc à remercier la rapporteure pour avis, dont les deux propositions de rédaction me conviennent.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Je propose donc qu’on s’en tienne à la première formulation, la plus courte.

Mme la présidente Barbara Pompili. Pour montrer à quel point nous réalisons un beau travail de co-construction, ce sous-amendement ne pourrait-il pas être cosigné par la rapporteure pour avis et M. Matthieu Orphelin ?

M. Matthieu Orphelin. Quand bien même il ne serait signé que de la rapporteure pour avis, cela m’irait ; l’essentiel est vraiment ailleurs.

M. Martial Saddier. Madame la rapporteure pour avis, à aucun moment, ni moi ni M. Jean-Marie Sermier n’avons remis en cause le bien-fondé de cette disposition. Nous avons juste demandé à quatre reprises si elle s’appliquait aux locations touristiques, ce que je redemande une cinquième fois. Si c’est le cas, cela concerne plusieurs millions de logements, et le vote de cette loi aurait donc quelques incidences sur une activité économique essentielle pour notre pays.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Il me semble vous avoir répondu, notamment sur le cas des logements qui sont à la fois des résidences principales et des locations touristiques. Pour le reste, je m’engage à vous apporter des réponses plus précises pour la séance.

Les amendements CD50 et CD93 sont retirés.

La commission adopte le sous-amendement CD165.

Puis elle adopte les amendements identiques CD121 et CD151 sous-amendés.

Article additionnel après larticle 3 (article L. 321-1 du code de la construction et de l’habitation) : Accès de lAgence nationale de lhabitat aux données du diagnostic de performance énergétique et des caisses dallocations familiales

La commission examine lamendement CD139 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Cet amendement propose que les diagnostics de performance énergétique ainsi que les informations détenues par les caisses d’allocations familiales (CAF) soient accessibles à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), afin qu’elle puisse mieux cibler son action en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Avis favorable, dans la mesure où tout ce qui peut contribuer à améliorer les missions de l’ANAH doit être favorisé.

La commission adopte lamendement.

Après larticle 3

La commission examine lamendement CD42 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Cet amendement renvoie aux engagements pris pendant les campagnes électorales présidentielle et législative. Du fait de l’article 40 de la Constitution, une demande de rapport est le seul moyen de faire figurer dans la loi les dispositifs sur lesquels nous nous étions engagés et que je rappelle dans l’amendement.

En outre, je souligne qu’au-delà de la rénovation énergétique des logements dont nous venons de parler, se pose également la question des centaines de millions de mètres carrés de bâtiments publics, dont certains sont très énergivores. 2,5 milliards d’euros de prêts et d’avances directes ont été concédés aux collectivités dans le cadre du Grand plan d’investissement. Or, lors de mon dernier pointage, en février 2019, seul 0,3 % de cette somme avait été engagé, soit 6 millions d’euros de prêts, et aucune avance directe. Il faut donc un suivi mensuel ou trimestriel de ce plan de rénovation des bâtiments publics.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Votre amendement me pose un problème de séquençage. En effet, vous demandez la production d’un rapport dans un délai d’un mois après la promulgation de la présente loi, qui, en comptant le temps de la navette et d’une éventuelle commission mixte paritaire (CMP), plus celui de la promulgation, n’interviendra pas avant la fin de l’année. La transformation du crédit d’impôt pour la transition énergétique entrant en vigueur en janvier 2020, nous manquerons de recul pour évaluer ses effets. Avis défavorable, même si je vous accorde qu’un suivi est indispensable.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Pour ma part, je ne pense pas que ce soit d’un rapport que nous ayons besoin. En revanche, nous devons faire en sorte que la feuille de route concernant la rénovation énergétique soit mise en œuvre. C’est la raison pour laquelle nous avons voulu l’intégrer dans la prochaine PPE. Mais nous ne pouvons attendre, et il faut agir dès maintenant.

C’est la raison pour laquelle je milite pour la création, à l’Assemblée nationale, d’un groupe d’études sur la rénovation énergétique, qui pourrait assurer le suivi de la mise en œuvre du plan de rénovation énergétique des bâtiments, que j’ai l’honneur d’animer par ailleurs.

M. Matthieu Orphelin. Ce rapport n’était qu’un moyen d’engager la discussion, mais nous devons tenir les engagements pris, ce qui n’est pas le cas pour l’instant en ce qui concerne la rénovation énergétique – je pense en particulier à la transformation du CITE en avance directe au moment des travaux, qui doit être effective au moins pour les ménages précaires et les classes moyennes.

Je retire donc mon amendement, en espérant qu’un jour notre présidente parvienne à faire valoir que nous devons pouvoir faire des propositions budgétaires sans nous soucier de l’article 40 de la Constitution.

Lamendement est retiré.

Article additionnel après larticle 3 (article L. 121-46 du code de l’énergie) : Prévention de la concurrence entre réseaux de chaleur et de gaz

La commission en vient à lamendement CD156 de la rapporteure pour avis.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Dans le cadre de leur contrat avec l’État, les gestionnaires de réseau de distribution de gaz sont incités à améliorer la desserte en gaz naturel du territoire, en concertation avec les représentants des collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération, et donc à raccorder de nouveaux utilisateurs.

Lors du lancement d’un projet de réseau de chaleur, les collectivités territoriales sont amenées à indiquer le périmètre de ce réseau – donc les principaux futurs abonnés – dans les documents publiés dans le cadre des procédures. Or, l’expérience conduit à constater que ces futurs abonnés des réseaux de chaleur reçoivent souvent des offres avantageuses d’installation d’un chauffage au gaz, en lieu et place du raccordement au réseau de chaleur. Ces démarches peuvent perturber l’équilibre économique du futur réseau de chaleur. Or, les réseaux de chaleur utilisent plus de 50 % d’énergies renouvelables et sont soutenus financièrement par l’État, via le Fonds chaleur piloté par l’ADEME. Le niveau des aides financières est lui-même calculé en fonction d’un équilibre économique anticipé, fondé sur les futurs abonnés ayant annoncé leur intention de se raccorder au réseau.

Cet amendement vise donc à ne plus inciter financièrement les gestionnaires de réseau de gaz à démarcher commercialement les futurs abonnés potentiels de réseaux de chaleur soutenus financièrement par l’État.

La commission adopte lamendement.

Après larticle 3

La commission examine lamendement CD69 de Mme Sandrine Le Feur.

Mme Sandrine Le Feur. Cet amendement vise à lancer l’alerte en demandant l’établissement d’un rapport sur les externalités de la méthanisation.

Sans être défavorable à ce mode de production d’énergie, je souhaite qu’une vigilance particulière soit exercée sur les effets du digestat. Celui-ci est épandu sur les sols alors qu’il contient de l’azote soluble facilement lessivable qui, en s’infiltrant, pollue les nappes phréatiques. On y retrouve également de l’azote ammoniacal, qui au contact de l’air et du fait d’un manque de bactéries dans les sols, se transforme en oxyde d’azote (NOx), un polluant de l’air contribuant fortement au réchauffement climatique. Le manque de bactéries des sols est lui-même le résultat de l’utilisation d’engrais chimiques et de pesticides, comme nous l’ont rappelé M. Claude Bourguignon et Mme Lydia Bourguignon-Gabucci, lors d’une audition de la mission d’information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate.

Il faut également être vigilant quant au carbone. Certaines cultures intermédiaires telles que le maïs ou la paille de céréale alimentent les méthaniseurs, et des agriculteurs convertissent même des prairies à cette fin. Or, ces surfaces sont exclues du décompte pour l’application de la limite des 15 % de cultures à vocation énergétique ; j’y reviendrai dans un amendement en commission des affaires économiques. On déstocke donc le carbone des sols pour produire du gaz et de l’électricité. L’effet à long terme serait un manque de carbone dans les sols, matière pourtant indispensable à la production de cultures destinées à l’alimentation.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. La question se pose d’autant plus que les structures de méthanisation se multiplient aujourd’hui sur notre territoire. Des rapports ont toutefois déjà été publiés sur le sujet, qui est éminemment scientifique, et votre demande serait à adresser, par exemple, à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) ou à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) plutôt qu’au Gouvernement, qui ne me semble pas être le mieux placé pour y répondre. Si je conviens qu’il faut creuser le sujet compte tenu du développement à venir de la filière, l’avis est néanmoins défavorable.

M. Martial Saddier. Je souhaite, pour ma part, soutenir cet amendement. Tout d’abord, le Gouvernement peut missionner la structure qu’il souhaite pour l’établissement d’un rapport demandé par le Parlement. Ensuite, après les débats que nous avons eus ce matin sur le sujet, et compte tenu du nombre de politiques publiques visant à encourager la méthanisation, il serait plus que souhaitable que nous tranchions le problème une fois pour toutes et assez rapidement. Il a été dit que ce mode de production d’énergie avait des effets sur la qualité des eaux ; or, les onzièmes programmes des agences de l’eau promeuvent la méthanisation.

Mme Sandrine Le Feur. Avant de retirer l’amendement, par lequel je souhaitais surtout donner l’alerte, je tiens à apporter une précision : c’est sur les sols abîmés, détruits par les engrais chimiques et les pesticides, donc pauvres en bactéries, que l’azote du digestat n’est pas absorbé. Ce problème ne se pose pas sur les sols vivants riches en bactéries.

Lamendement est retiré.

La commission en vient à lamendement CD31 de M. Vincent Thiébaut.

M. Vincent Thiébaut. Il est proposé, par cet amendement, de mettre en place un cadre législatif et réglementaire pour promouvoir et valoriser l’hydrogène issu d’énergies renouvelables et le méthane de synthèse. Ce cadre est en cohérence avec le plan de déploiement de l’hydrogène présenté par le ministre d’État et annoncé par le Président de la République, ainsi qu’avec la feuille de route sur l’énergie qui avance un objectif de 10 % de gaz renouvelable à l’horizon de 2030.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Sur la question de l’hydrogène, je conserve la même ligne que précédemment : votre amendement est très complet, mais un important travail est mené en commission des affaires économiques, qui devrait aboutir au dépôt de plusieurs amendements. Je vous invite donc à retirer votre amendement et à le retravailler pour l’examen en commission des affaires économiques, car le sujet me semble relever de ses prérogatives.

M. Vincent Thiébaut. Dans quel sens faudrait-il le retravailler ?

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. J’entends par là qu’il faut vous concerter avec les membres de la commission des affaires économiques pour présenter une proposition collective.

Mme Huguette Tiegna. C’est à la commission des affaires économiques de traiter le sujet de l’hydrogène, et nous allons pouvoir l’examiner ensemble, monsieur Vincent Thiébaut.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je présenterais plutôt les choses ainsi : on peut traiter de n’importe quel sujet en commission du développement durable, mais une belle collaboration entre les commissions est préférable.

Lamendement est retiré.

La commission est saisie de lamendement CD20 de M. Vincent Thiébaut.

M. Vincent Thiébaut. Cet amendement vise à inscrire dans le plan stratégique défini à l’article L. 311-5-7 du code de l’énergie la prise en compte par les producteurs des périodes 2019-2023 et 2024-2028, ainsi que l’établissement d’un calendrier prévisionnel de fermeture pour chaque réacteur afin d’offrir une meilleure visibilité et de permettre un meilleur suivi. En effet, les collectivités territoriales ont tendance à oublier qu’un réacteur ou une centrale ont une durée de vie limitée, alors même que de telles fermetures ont un impact non négligeable sur la politique énergétique.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. La semaine dernière, nous avons adopté l’amendement CD135, qui est plus complet. Il prévoit, comme le vôtre, que le plan stratégique porte sur les deux périodes de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Il vise en outre à ce que le plan soit rendu public, et prenne en compte les conséquences socio‑économiques des évolutions proposées, et non plus seulement les conséquences économiques. Le plan stratégique ainsi modifié par l’amendement CD135, permet de renforcer la transparence pour tous, notamment pour les salariés. Il n’est donc plus nécessaire d’y apporter des modifications. Par conséquent, je vous demanderai de retirer votre amendement.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je précise que j’étais moi-même signataire de votre amendement, monsieur Vincent Thiébaut.

M. Vincent Thiébaut. Je ne l’ai pas oublié, madame la présidente, mais puisqu’il est satisfait, je le retire.

Lamendement est retiré.

La commission examine lamendement CD87 de M. Emmanuel Maquet.

M. Emmanuel Maquet. Cet amendement part du constat que nos concitoyens portent un regard critique sur la pertinence du développement des installations éoliennes dans notre pays ces dernières années. Leurs arguments visent principalement à l’amélioration des installations, à une meilleure utilisation de l’argent public, et à un accès facilité à l’information. Ce manque de transparence me semble être le problème le plus simple à résoudre. Aux yeux de nos concitoyens, les sociétés exploitantes seraient opaques et profiteraient d’un argent public dont l’utilisation serait mal contrôlée, et certains territoires seraient équipés au détriment des autres. Ces idées prospèrent, du fait de l’impossibilité de trouver des informations fiables sur le sujet. Je propose donc dans cet amendement la publication d’un rapport annuel sur l’énergie éolienne, afin de couper court aux rumeurs et aux fantasmes.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Votre proposition ne me paraît pas de nature à démystifier quoi que ce soit. Aujourd’hui, beaucoup d’informations sont déjà accessibles à tous en open data, par exemple via le registre national des installations de production d’électricité et de stockage ou les préfectures de département. La publication d’un nouveau rapport par le Gouvernement serait donc superflue. Le découpage par département ne me paraît d’ailleurs pas nécessairement le périmètre le plus pertinent à retenir. L’avis est défavorable.

M. Emmanuel Maquet. Nous recevions hier encore, au sein de la commission d’enquête sur les énergies renouvelables, des concitoyens qui se plaignent du manque de transparence sur les retombées fiscales de l’installation d’éoliennes dans les territoires ruraux. Il existe donc bien une attente dans les territoires sur ce sujet.

Mme la présidente Barbara Pompili. La transparence est souhaitable dans tous les domaines.

La commission rejette lamendement.

Elle en vient à lamendement CD92 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Cet amendement vise à identifier les freins, qu’ils soient législatifs, réglementaires ou économiques, au développement des générateurs de production d’énergie renouvelable pour l’autoconsommation, en particulier des trackers solaires bi-axes et bi-faces. Ils permettent souvent une solution d’autoconsommation intéressante pour les exploitations agricoles. Ils favorisent en effet l’autonomie énergétique, rapprochent production et consommation d’énergie sur la base de circuits courts et constituent ainsi une opportunité de diversification des modes de production d’énergie.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Votre amendement a pour objet un produit commercialisé par une seule entreprise en France, soit une cible très confidentielle, qui ne me paraît pas nécessiter la remise d’un rapport gouvernemental. Je vous demanderai donc de le retirer. À défaut, l’avis sera défavorable.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. L’idée est de développer ces sources d’énergies renouvelables et de favoriser l’autoconsommation. S’il s’agit aujourd’hui d’une niche, elle a vocation à prospérer à l’avenir. Je maintiens donc mon amendement.

La commission rejette lamendement.

Chapitre IV
Lutte contre la fraude aux certificats déconomies dénergie

Article 5 (articles L. 222-2 et L. 222-10 [nouveau] du code de l’énergie, article L. 561-31 du code monétaire et financier) : Mise en place de nouveaux outils de lutte contre la fraude en matière de certificats déconomies dénergie

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 5 sans modification.

Article additionnel après larticle 5 (article L. 221-13 [nouveau] du code de l’énergie) : Publication dun référentiel de contrôle des certificats déconomies dénergie

La commission est saisie des amendements CD149 et CD148 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. L’objectif de ces deux amendements est de faire en sorte que les entreprises qui utilisent les certificats d’économies d’énergie (CEE) et qui essaient de développer des méthodes pour accroître l’efficacité énergétique dans les territoires puissent avoir des réponses à leurs questions quand ils développent ces projets, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Les développeurs prennent ainsi le risque de voir les dispositifs annulés ou considérés irrecevables, et d’en payer le prix. L’objectif est de faciliter la mise en œuvre de projets d’économie d’énergie, et de faire en sorte que les règles soient clairement établies.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Toute information transparente et publiée peut faciliter l’utilisation de ce dispositif, qui a prouvé son efficacité mais qui mérite d’être perfectionné. J’émets donc un avis favorable sur ces deux amendements.

La commission adopte lamendement CD149.

Article additionnel après larticle 5 (article L. 221-14 [nouveau] du code de l’énergie) : Clarification des conditions dapplication des règles relatives à la délivrance des certificats déconomies dénergie

La commission adopte lamendement CD148 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, précédemment présenté, suivant lavis favorable de la rapporteure pour avis.

Article additionnel après larticle 5 (article L. 222-6 du code de l’énergie) : Publication de la motivation des sanctions relatives aux certificats déconomies dénergie

La commission examine lamendement CD157 de la rapporteure pour avis.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Le présent amendement a été déposé dans le même esprit que le précédent. Une entreprise qui obtient des CEE et qui est frappée de sanction pour non-conformité de la procédure voit son nom publié au Journal officiel, alors même qu’il peut s’agir d’un simple oubli ou d’une omission. Je propose donc que la nature du manquement soit ajoutée à la publication.

La commission adopte lamendement.

Article additionnel après larticle 5 (section 16 [nouvelle] du chapitre IV du titre II du livre II du code de la consommation) : Obligation dinformation des consommateurs de prestations déconomies dénergie

La commission examine lamendement CD147 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. De la même façon qu’on incite les particuliers à parler de certains médicaments à leur pharmacien ou à leur médecin, le présent amendement vise à s’appuyer sur la force de frappe des communicants pour les contraindre à indiquer au public l’existence d’une information neutre et gratuite sur le territoire.

Suivant lavis favorable de la rapporteure pour avis, la commission adopte lamendement.

Chapitre V
Mise en œuvre du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens »

Article 6 : Autorisation de transposition de textes européens : habilitation à légiférer par ordonnances

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 6 sans modification.

Chapitre VI
Régulation de lénergie

Avant larticle 7

La Commission est saisie de lamendement CD65 de Mme Anne-France Brunet.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à supprimer le comité de gestion des charges de service public de l’électricité (CGCSPE) et à intégrer ses missions au sein de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Ce comité de gestion a été installé récemment et va bientôt produire son premier rapport. Il regroupe les différentes parties prenantes, dont la CRE. Mon avis est donc défavorable.

La commission rejette lamendement.

Article 7 (article L. 132-2 du code de l’énergie) : Mesures diverses relatives à la Commission de régulation de lénergie

La commission examine lamendement CD134 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Le III de l’article 7 vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour ouvrir la possibilité d’un traitement non juridictionnel de près de 15 000 requêtes en remboursement de tout ou partie de la contribution au service public de l’électricité (CSPE), actuellement pendantes devant le tribunal administratif de Paris, auxquelles s’ajoutent 45 000 réclamations préalables engagées devant la CRE, afin de garantir un traitement rapide de ces demandes de remboursement.

Nous soutenons l’objectif poursuivi dans ce dossier. Cependant, le mode de fonctionnement envisagé ne fait l’objet d’aucune description, ni dans le dispositif de l’article, ni dans l’étude d’impact, laquelle renvoie à la fiche d’impact retraçant les dispositions des ordonnances prises sur le fondement du projet de loi d’habilitation. Le Conseil d’État avait pourtant souligné dans son avis l’insuffisance de l’étude d’impact, et avait enjoint le Gouvernement à préciser son dispositif, ce qu’il n’a pas encore fait. Or, au regard du court délai de quatre mois prévu par le projet d’habilitation pour la publication de l’ordonnance, tout laisse à penser que ce dispositif est d’ores et déjà connu du Gouvernement, et finalisé. En autorisant le Gouvernement à prendre certaines mesures législatives en application de l’article 38 de la Constitution, le Parlement délègue son pouvoir de légiférer au Gouvernement, ce qui suppose en contrepartie qu’il soit pleinement informé des dispositions que le Gouvernement entend prendre.

Le présent amendement est donc une forme d’appel, au stade de l’examen en commission, pour inciter le Gouvernement à se présenter en séance publique avec l’ensemble des éléments que le Conseil d’État a lui-même signalés comme manquants.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Il faudra transmettre votre requête au Gouvernement, madame Marie-Noëlle Battistel. Je rappelle qu’il s’agit d’une expérimentation, ce qui justifie le recours aux ordonnances. En outre, il me paraît nécessaire de traiter les 15 000 dossiers en attente. L’avis sera donc défavorable.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Si vous formuliez vous-même cette demande, madame la rapporteure pour avis, elle aurait plus de chance d’aboutir.

Mme Nathalie Sarles. Je m’y engage.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je vous remercie.

Lamendement est retiré.

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 7 sans modification.

Article 8 (article L. 336-5 du code de l’énergie) : Calcul des compléments de prix du mécanisme ARENH

La commission émet un avis favorable à ladoption de larticle 8 sans modification.

Article additionnel après larticle 8 (article L. 336-2 du code de l’énergie) : Relèvement du plafond de lARENH

La commission est saisie de lamendement CD153 de Mme Marjolaine MeynierMillefert.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Cet amendement vise à augmenter le plafond de l’accès régulé à l’énergie du nucléaire historique (ARENH), en le faisant passer de 100 à 150 térawattheures (TWh). L’Autorité de la concurrence avait en effet indiqué qu’un accès suffisant des fournisseurs alternatifs à l’ARENH aurait permis d’éviter 2 %, sur 5,9 % d’augmentation des tarifs réglementés de l’électricité en juin. Nous défendons ainsi le pouvoir d’achat des Français.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. C’est un sujet dont on a longuement débattu. La fixation du prix de l’ARENH s’appuie sur un dispositif complexe, et on a tendance à croire que quand on favorise le consommateur, c’est au détriment du contribuable. Avec le plafonnement actuel à 100 TWh, le dispositif a un impact notable sur le prix, comme l’a signalé la CRE lors de la dernière augmentation des tarifs de l’électricité. Cela étant dit, le Gouvernement mène actuellement une réflexion d’ensemble sur la tarification de l’électricité. L’instauration de l’ARENH a permis l’accès au marché d’opérateurs alternatifs engagés dans les énergies renouvelables. Ce dispositif est aussi susceptible de favoriser le consommateur. C’est pourquoi j’émets un avis favorable à ce stade de la discussion. Ce sujet sera de toute façon largement débattu, à la fois en commission des affaires économiques et en séance publique.

M. Vincent Thiébaut. Il me semble qu’il faut être prudent sur ce sujet. Comme l’a très justement souligné la rapporteure pour avis à l’instant, la question est de savoir si le coût de l’électricité nucléaire produite par EDF doit être supporté par le consommateur ou par le contribuable. Or, si l’on augmente le plafond de l’ARENH de 50 %, sachant que le tarif du mégawattheure (MWh) dans le cadre de ce dispositif a été fixé à 42 euros, et que le MWh de Flamanville pour un cycle complet s’élève à 70 euros, le coût sera supporté par le contribuable. Une vraie réflexion doit donc être menée sur le sujet, qui appelle une décision politique. À ce stade, je ne voterai pas cet amendement.

Mme Marjolaine Meynier-Millefert. Je partage votre souci de prudence, mais pour avoir mené de nombreuses auditions dans le cadre de la commission d’enquête sur les énergies renouvelables, il me semble qu’il n’est pas acceptable pour nos concitoyens aujourd’hui de ne pas augmenter ce plafond. Certes, l’amendement ne porte que sur une petite partie du débat, et je sais que nous travaillerons sur le sujet avec nos collègues de la commission des affaires économiques, mais il me paraît vraiment important de l’adopter dès à présent, pour nourrir la réflexion au sein de notre commission.

La commission adopte lamendement.

Après larticle 8

La commission en vient à lamendement CD79 de M. Jean-François Cesarini.

Mme Stéphanie Kerbarh. Le présent amendement a pour objet d’instaurer un mécanisme d’enchères une fois le volume de l’ARENH atteint. Le constat de départ est simple : le dispositif actuel ne contente ni EDF, qui considère que le tarif de 42 euros le MWh est trop faible, ni les fournisseurs alternatifs, qui jugent le volume de l’ARENH insuffisant, ni les consommateurs ayant souscrit aux tarifs réglementés, dont la facture a augmenté au début du mois de juin.

J’appelle votre attention sur les différents avantages que présente le mécanisme d’enchères ici proposé. En premier lieu, puisque la valeur des lots sera déterminée par des enchères, il garantira aux consommateurs finaux d’électricité une relative stabilité des prix, qu’ils aient ou non souscrits aux tarifs réglementés. Ensuite, il offrira au fournisseur historique une rémunération intéressante, surtout quand les lots de ces enchères concerneront une production hivernale ou infra-journalière, le matin. Enfin, ce mécanisme permet d’anticiper la fin de l’ARENH prévue en 2025, date à laquelle il pourra se substituer au dispositif actuel.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Cet amendement va à l’encontre de ce qui a été voté précédemment, car le principe de l’ARENH est de sortir du système de marché. Aussi mon avis est-il défavorable.

La commission rejette lamendement.

Elle examine enfin lamendement CD84 de Mme Véronique Riotton.

Mme Véronique Riotton. Les offres « vertes » sont, en réponse à la demande des consommateurs, de plus en plus nombreuses. Or, certaines sont alimentées en partie par l’électricité issue de l’ARENH, dont le tarif est particulièrement avantageux, en tout cas bien inférieur à celui du marché. Ces offres qualifiées de « vertes » contribuent en réalité davantage au financement de la production d’électricité nucléaire qu’au développement de nouvelles énergies renouvelables, contrairement à ce qu’elles laissent à penser au consommateur. Je propose donc que l’électricité issue de l’ARENH ne puisse pas alimenter les offres vertes, dont la qualité est certifiée par des garanties d’origine.

Mme Nathalie Sarles, rapporteure pour avis. Vous dites vrai, madame Véronique Riotton, mais les certificats d’électricité verte sont achetés au niveau européen. Le dispositif que vous proposez est de ce fait impossible à mettre en œuvre. J’émets donc un avis défavorable.

Mme Véronique Riotton. Je vais continuer de travailler sur le sujet, car je ne suis pas certaine que cela relève du droit européen, dès lors que c’est le dispositif de l’ARENH qui est concerné. Je reviendrai en séance avec un autre amendement.

Lamendement est retiré.

La commission émet un avis favorable à ladoption de lensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

 


—  1  —

   Liste des personnes auditionnées

(par ordre chronologique)

Réseau de transport délectricité (RTE)

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

M. Thomas Veyrenc, directeur stratégie et prospectives

M. Philippe Pillevesse, directeur des relations institutionnelles

Ministère de la transition écologique et solidaire (MTES)  Direction générale de lénergie et du climat (DGEC)

M. Laurent Michel, directeur général

M. Nicolas Clausset, adjoint au sous-directeur en charge des systèmes électriques et énergies renouvelables

Mme Nolwenn Briand, cheffe du pôle national des certificats d’économies d’énergie (PNCEE)

Ministère de la transition écologique et solidaire - Commissariat général au développement durable (CGDD)

M. Thomas Lesueur, commissaire général et délégué interministériel au développement durable

M. Patrick Deronzier, adjoint au sous-directeur de l’intégration des démarches de développement durable dans les politiques publiques

Association Coénove

Mme Florence Lievyn, déléguée générale

M. Bernard Aulagne, président

M. Simon Lalanne, directeur conseil chez Boury Tallon & Associés

Commission de régulation de lénergie (CRE)

M. Dominique Jamme, directeur général

Mme Olivia Fritzinger, responsable des relations institutionnelles

Autorité de la concurrence

M. Umberto Berkani, rapporteur général adjoint

Union pour une consommation intelligente et optimisée de lénergie (LUCIOLE)

M. Vincent Bryant, président de Deepki, membre

M. Romain Ryon, chargé des affaires publiques d’Effy, membre

Mme Audrey Zermati, directrice stratégie d’Effy, membre

Direction régionale de lenvironnement, de laménagement et du logement (DREAL) Hauts-de-France

M. Laurent Tapadinhas, directeur régional

Agence de lenvironnement et de la maîtrise de lénergie (ADEME)

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

M. Arnaud Leroy, président

Conseil économique, social et environnemental (CESE)

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

M. Guillaume Duval, conseiller

Syndicat des énergies renouvelables (SER)

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

M. Alexandre Roesch, délégué général

Mme Marion Lettry, déléguée générale adjointe

Mme Delphine Lequatre, responsable du service juridique

M. Alexandre de Montesquiou, consultant, directeur associé d’Ai2P

Association Équilibre des énergies

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

M. Brice Lalonde, président, ancien ministre de l’environnement

M. Jean Bergougnoux, président fondateur

M. Gilles Rogers-Boutbien, secrétaire général

Table ronde « Think tanks »
(conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur
au nom de la commission des affaires économiques)

 Association NégaWatt

M. Yves Marignac, porte-parole

 Cabinet Carbone 4

M. Sébastien Timsit, manager

M. César Dugast, consultant senior

 Fondation La Fabrique écologique

M. Géraud Guibert, président

Mme Géraldine Kuhn, chargée de mission

Table ronde « Forêt »
(conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur
au nom de la commission des affaires économiques)

 Centre national de la propriété forestière (CNPF)

M. Antoine d’Amecourt, président

Mme Claire Hubert, directrice générale

 Office national des forêts (ONF)

M. Patrick Falcone, adjoint au directeur général

M. Christophe Chapoulet, directeur général délégué Énergie

 Union de la coopération forestière française (UCFF)

M. Bertrand Servois, président

Table ronde « Chaleur renouvelable »
(conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur
au nom de la commission des affaires économiques)

 Association française pour la pompe à chaleur (AFPAC)

M. Thierry Nille, président

 Syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine (SNCU) / Fédération des services énergie environnement (FEDENE)

M. Pascal Roger, président

M. Frédéric Gharbi-Mazieux, responsable des affaires institutionnelles, juridiques et territoriales

Union française de lélectricité (UFE)

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

M. Damien Siess, directeur stratégie et prospective

Mme Charlotte Henkes, responsable des relations institutionnelles

Table ronde « Délégataires de CEE »
(conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur
au nom de la commission des affaires économiques)

 Caméo

Mme Isaure d’Archimbaud, chargée des relations institutionnelles

 Effy

Mme Audrey Zermati, directrice stratégie

 EnR Cert

Mme Florence Arnould, directrice des opérations

M. Bastien Resse, responsable des affaires publiques

 Géo PLC

M. Hugues Sartre, porte-parole

 Teksial

M. Matthieu-Gwen Paillot, président exécutif

Mme Marie Meyruey, consultante affaires publiques, Rumeur publique

 Groupement des professionnels des CEE (GPCEE)

Mme Virginie Létard, présidente

Table ronde « Obligés issus de la grande distribution »
(conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur
au nom de la commission des affaires économiques)

 Carfuel (groupe Carrefour)

M. Karim Benbrik, directeur des sociétés Carfuel et Carautoroutes

 Petrovex (groupe Auchan Retail France)

M. Bruno Lipczak, directeur d’Auchan carburant, gérant de Petrovex

 SCA Pétrole & dérivés (groupe Intermarché)

M. Alex Truchetto, directeur

M. Pierre Degonde, consultant senior, Euralia

 SIPLEC (groupe Leclerc)

M. Vincent Muller, directeur énergie

Table ronde réunissant des syndicats dagriculteurs
(conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur
au nom de la commission des affaires économiques)

 Confédération paysanne

M. Thierry Jacquot, secrétaire national

M. Olivier Lainé, membre du comité national

 Coordination rurale

M. Emmanuel Rizzi, président de la Coordination rurale du Jura

 Fédération nationale des syndicats dexploitants agricoles (FNSEA)

M. Olivier Dauger, membre du conseil d’administration et responsable du dossier « Énergie Climat »

Mme Carole Lejeune, chargée de mission « Énergie Climat »

 Jeunes agriculteurs

M. Nicolas Sarthou, vice-président de Jeunes Agriculteurs

Mme Margaux Pierret, conseillère environnement

Mme Claire Cannesson, responsable communication et affaires publiques

 Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef) national

M. Pierre Thomas, président

Agence nationale de lhabitat (ANAH)

(audition conjointe avec M. Anthony Cellier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques)

Mme Valérie Mancret-Taylor, directrice générale

M. Martin Lagane, chef de cabinet

Association nationale des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de lénergie et des réseaux de chaleur (AMORCE)

M. Nicolas Garnier, délégué général

Ministère de la ville et du logement – Direction générale de laménagement, du logement et de la nature (DGALN)

M. Paul Delduc, directeur général

M. Mickaël Thiery, adjoint au sous-directeur de la qualité et du développement durable dans la construction

Énergie et mines - Force ouvrière (FO)

Mme Sandrine Lhenry, secrétaire générale adjointe

M. Jacky Chorin, administrateur EDF

UNIPER France

M. Luc Poyer, président

Mme Emmanuelle Carpentier, directrice des affaires publiques et réglementaires

Mme Sivane Soumagnac, responsable des affaires publiques

Haut conseil pour le climat (HCC)

Mme Corinne Le Quéré, présidente

M. Olivier Fontan, directeur exécutif

Fédération des mines et de lénergie de la Confédération générale du travail (CGT)

M. Laurent Heredia, secrétaire fédéral

M. Julien Lambert, responsable fédéral sur les questions industrielles

Conseil économique, social et environnemental (CESE)

Mme Anne-Marie Ducroux, présidente de la section environnement

M. Guillaume Duval, conseiller

Mme Madeleine Charru, personnalité associée

Union fédérale des consommateurs - Que Choisir (UFC – Que choisir)

M. Antoine Autier, responsable adjoint du service des études

Ministère de la transition écologique et solidaire

M. David Coste, délégué interministériel à l’avenir des territoires de Fessenheim et des centrales à charbon

Ministère du travail - Délégation générale à lemploi et à la formation professionnelle (DGEFP)

M. Hervé Leost, sous-directeur des mutations économiques et de la sécurisation de l’emploi

M. Bastien Espinassous, chef de mission Droit des restructurations, reclassement et revitalisation

Committee on Climate Change (CCC)

M. Chris Stark, secrétaire général

 


([1]) Le décret n° 2015-354 du 27 mars 2015 précise ces dispositions.

([2]) Une fois approuvée, la PPE est présentée au Parlement par le Gouvernement.

([3]) « Le Haut Conseil pour le climat peut être saisi par le Gouvernement, le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat ou à sa propre initiative, pour rendre un rapport sur des questions sectorielles, relatives au financement des mesures de mise en œuvre de la stratégie nationale bas-carbone ou à la mise en œuvre territoriale des politiques climatiques. »

([4]) Décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes.

([5]) Décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 relatif aux procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement et modifiant diverses dispositions relatives à l’évaluation environnementale de certains projets, plans et programmes.

([6]) L’Ae et les MRAe : une communauté d’Autorités environnementales, Synthèse annuelle 2017 et synthèse annuelle 2018.

([7]) Signées par les présidents de l’Ae ou de la MRAe ou un membre permanent ayant reçu délégation, le plus souvent après consultation de tout ou partie des autres membres de la MRAe.

([8]) L’avis du Conseil d’État (n° 395916 du 6 avril 2016) souligne que la décision de dispense d’évaluation environnementale « a le caractère dune mesure préparatoire à lélaboration de ce plan, schéma, programme ou document, insusceptible dêtre déférée au juge de lexcès de pouvoir, eu égard tant à son objet quaux règles particulières prévues au IV de larticle R. 122-18 du code de lenvironnement pour contester la décision imposant la réalisation dune évaluation environnementale. La décision de dispense dévaluation environnementale pourra, en revanche, être contestée à loccasion de lexercice dun recours contre la décision approuvant le plan, schéma, programme ou document. »

([9]) Article 9 bis de la directive de 2014 précitée : « Les États membres veillent à ce que l’autorité ou les autorités compétentes accomplissent les missions résultant de la présente directive de façon objective et ne se trouvent pas dans une position donnant lieu à un conflit d’intérêts.

 « Lorsque l’autorité compétente est aussi le maître d’ouvrage, les États membres appliquent au minimum, dans leur organisation des compétences administratives, une séparation appropriée entre les fonctions en conflit lors de l’accomplissement des missions résultant de la présente directive. »

([10]) Loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance.