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N° 2298

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2019.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour (n° 2272)

TOME VIII

ÉCONOMIE

COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES ET ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

PAR Mme Christine Hennion

Députée

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 Voir les numéros : 2272 et 2301 (Tome III, annexe 20).

 


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

PremiÈre partie : Analyse budgÉtaire

I. PrÉsentation gÉnÉrale

A. Le programme 134  DÉveloppement des entreprises et rÉgulations

B. Le programme 343 – Plan France très haut dÉbit

II. Le budget des principales entitÉs des programmeS

A. lARCEP : un budget EN PROGRESSION POUR FAIRE FACE À DE NOUVELLES MISSIONS

B. LAgence nationale des frÉquences : un budget EN AUGMENTATION POUR RÉPONDRE AUX ENJEUX DE LA 5G

1. Des missions en augmentation

2. Lactualité de lANFR sera essentiellement marquée par le déploiement de la 5G

3. Un budget en augmentation après une forte consolidation budgétaire

SECONDE PARTIE : ANALYSE THÉMATIQUE

I. Le plan France Très Haut Débit : un pari en passe dÊtre réussi à condition de mettre les moyens sur le « dernier kilomètre »

A. Le dÉploiement de la fibre a connu une forte accÉlÉration grâce à la mobilisation de tous les acteurs concernÉs

1. Lannée 2018 a permis une forte accélération du déploiement de la fibre

2. Les chiffres de 2019 semblent confirmer cette tendance

3. Une forte mobilisation des acteurs sur le terrain a permis de nourrir cette dynamique

B. Cette dynamique RestE nÉanmoins RELATIVEMENT inÉgale selon les territoires concernÉs et CERTAINS ENGAGEMENTS DOIVENT FAIRE lOBJET dun suivi attentif

1. En dépit de laccélération forte constatée, il convient dêtre vigilant pour assurer le respect des objectifs fixés par le Plan France Très Haut Débit

a. La zone très dense devrait être couverte en fibre sans difficulté

b. La situation est plus complexe pour les zones moins denses dinitiative privée

c. Les zones dinitiative publique se situent dans une situation intermédiaire puisquelles portent laccélération des déploiements de la fibre tout en conservant un retard certain

2. Le mix technologique, qui doit permettre dassurer laccès au très haut débit pour tous en 2022, est une solution de transition qui présente néanmoins certaines limites

3. Les rythmes différenciés du déploiement de la fibre doivent être pris en compte dans les années à venir

4. La faible concurrence du « marché entreprise » risque de priver certains acteurs économiques des fruits de ce déploiement

C. les dÉcisions annoncÉes RÉCEMMENT par les pouvoirs publics devraient permettre lachÈvement du plan France très haut dÉbit dans de bonnes conditions

1. Le choix de sanctuariser les crédits non utilisés au profit du plan France Très Haut Débit est une décision favorable pour aider les départements les plus en difficulté

2. La régulation du « marché entreprise » doit également devenir une vraie priorité pour les pouvoirs publics

3. Une refonte de la fiscalité des télécommunications apparaît indispensable alors que leur modèle économique évolue rapidement

II. La couvErture mobile du territoire : coordonner la généralisation de la 4G au déploiement dans les meilleures conditions de la 5G

A. Le New Deal Mobile a permis de donner un nouveau rythme aux déploiements de la 4G dans les territoires français

1. La généralisation de la 4G progresse sur lensemble du territoire national

2. Une meilleure qualité de service le long des axes routiers

3. Tous les opérateurs mobiles proposent désormais des offres pour assurer une couverture in-door

B. Néanmoins, il existe plusieurs points de vigilance sérieux qui doivent être suivis attentivement pour respecter les objectifs fixés dans ce cadre

1. Le dispositif de couverture ciblé fait face à plusieurs difficultés

2. Les obligations de transparence, en dépit daméliorations, ne sont pas complètement respectées en pratique

3. La 4G fixe apparaît comme une solution limitée pour généraliser la couverture 4G

C. Le succès de la 5g se fera autour des usages. son dÉmarrage ne doit pas masquer la nécessité de généraliser la 4G en france

1. La 5G constitue une véritable rupture technologique et un enjeu de compétitivité pour la France et lEurope

2. Les déploiements prévus de la 5G apparaissent particulièrement ambitieux

3. La recherche du « juste prix » est indispensable pour inciter efficacement les opérateurs à déployer rapidement la 5G sur le territoire national

4. Pour réussir la 5G il est impératif dachever la généralisation de la 4G et de la fibre sur lensemble du territoire national

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉes

 


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   Introduction

L’année 2020 s’annonce décisive pour le secteur des télécommunications en France. Fibre, 4G, 5G, régulation des marchés fixes, les sujets sont nombreux pour cette année charnière à plusieurs titres.

En 2020, le plan France Très Haut Débit fixe comme objectif l’accès de tous les Français au bon débit (> 8 Mbits/s), qui est désormais indispensable pour accéder à des services publics de plus en plus dématérialisés. Le respect de cet objectif constitue un jalon indispensable, afin de mesurer les progrès réalisés et de nourrir une dynamique d’accélération pour atteindre le très haut débit (> 30 Mbits) en 2022. À cet égard, l’accélération des déploiements de la fibre en 2019 est de bon augure et doit être poursuivie au profit de l’ensemble des territoires.

En 2020, les premiers sites 4G de couverture ciblée doivent également être déployés, conformément aux engagements des opérateurs dans le cadre du New Deal mobile. Garantie de l’égal accès de tous les citoyens à un réseau mobile de qualité, cette obligation doit être suivie avec attention. De façon générale, près d’un an après la prise d’engagements des différents opérateurs en juillet 2018, l’heure est à un premier bilan pour s’assurer à terme du respect des objectifs fixés. Sur ce sujet, le rythme est bon mais peut être amplifié pour assurer en temps et en heure la livraison des sites de couverture ciblée aux collectivités.

Enfin, l’année 2020 sera celle du démarrage de la 5G, conformément aux objectifs ambitieux fixés par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Elle s’ouvrira sur les enchères 5G qui définiront l’état du marché de la 5G en France. Elle mobilisera fortement l’ARCEP (procédure d’attribution des fréquences 5G par enchères) et l’Agence nationale des fréquences (réaménagement du spectre des fréquences). Cet impératif trouvera d’ailleurs une traduction budgétaire pour ces deux acteurs, via une augmentation de leurs moyens au sein du présent projet de loi de finances.

Face à ces enjeux, votre rapporteure se propose de dresser un état des lieux sur ces différents sujets. La réussite du Plan France Très Haut Débit et du New Deal mobile sont en effet indispensables pour assurer à nos concitoyens un accès de qualité à l’Internet fixe et mobile et préparer efficacement le déploiement de la 5G. Il en va du développement de nos territoires, de l’accès aux services comme de la modernisation de notre industrie. Elle est également indispensable pour que la France réaffirme sa place de puissance numérique en Europe.

Votre rapporteure remercie chaleureusement l’ensemble des organismes et personnes ayant participé aux auditions.

*

*     *

Votre rapporteure émet un avis favorable à ladoption des crédits de la mission « Économie » en ce qui concerne les communications électroniques et léconomie numérique.

 

 

 


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   PremiÈre partie : Analyse budgÉtaire

Après une présentation générale des crédits des deux programmes concernés de la mission « Économie » (I), le budget de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et celui de l’Agence nationale des fréquences (ANFR) seront présentés plus en détail (II).

I.   PrÉsentation gÉnÉrale

Deux programmes sont porteurs de crédits, au sein de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2020, à destination des communications électroniques : le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » (A) et le programme 343 « Plan France très haut débit » (B). Bien entendu, de nombreux autres programmes, appartenant à d’autres missions budgétaires, contribuent au développement et à la régulation de la filière numérique, sous ses différents aspects.

A.   Le programme 134 – DÉveloppement des entreprises et rÉgulations

Le programme 134 porte l’ensemble des politiques publiques visant à développer la compétitivité des entreprises et à favoriser un environnement économique favorable à la croissance économique. Il contient différents crédits portant sur les communications électroniques au travers de deux actions particulières.

Laction n° 4 porte sur le développement des postes, des télécommunications et du numérique. Cette action est mise en œuvre par la Direction générale des entreprises (DGE). Y sont notamment regroupés :

– les crédits à destination de l’Agence nationale des fréquences (ANFR), qui seront analysés spécifiquement ci-dessous ;

– les marchés de prestations de l’Agence du numérique, pôle en charge de la French Tech, portant sur la promotion de la marque French Tech et le financement de programme de soutien en faveur des start-up en France et à l’international (6,69 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement)

– les crédits relatifs à l’initiative France Num pour la transformation numérique des TPE/PME, qui correspondent notamment au financement de la plateforme numérique (francenum.gouv.fr), à l’animation d’un réseau d’experts du numérique et à la création d’un dispositif de valorisation et de mentorat des TPE/PME championnes de leur transformation numérique (0,70 M€ en AE et en CP)

– les crédits d’intervention affectés au commissariat aux communications électroniques de défense (14,63 M€ en AE et en CP). Il s’agit d’un service à compétence nationale rattaché au service de l’économie numérique, chargé notamment du lien avec les opérateurs dans les missions de défense non militaire et de la gestion de crise en matière de communications électroniques ;

– les crédits versés aux organismes internationaux en matière de communications électroniques, notamment l’Union internationale des télécommunications (UIT), la Conférence européenne des postes et télécommunications (CEPT) et l’Institut européen des normes de télécommunication (ETSI). Ces contributions sont fixées dans des cadres annuels ou pluriannuels (8,50 M€ en AE et en CP).

Laction n° 13 porte, pour sa part, sur le budget de lAutorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Ces crédits, qui représentent 22,9 millions d’euros en crédits de paiement seront spécifiquement étudiés ci-dessous.

Autorisations d’engagement et crédits de paiement
relatifs aux communications électroniques du programme 134

(en euros)

 

PLF 2017

PLF 2018

PLF 2019

PLF 2020

Action n° 4

 

 

 

 

Dépenses de fonctionnement [diffusion de lheure légale depuis le site dAllouis]

n.a

5 490 000 CP

25 490 000 AE

n.a.

[intégré à la subvention de lANFR]

n.a.

[intégré à la subvention de lANFR

Subventions pour charges de service public [dotation de fonctionnement de lANFR]

31 303 492

32 000 000

34 950 000 CP

39 930 000 AE

40 050 000 CP

40 050 000 AE

Dépenses dintervention – transferts aux autres collectivités

10 267 184

11 468 000

8 345 495

8 500 000

Action n° 13

 

 

 

 

Dotation de fonctionnement de lARCEP (dont T2)

23 214 090

27 045 779

22 596 386 CP

20 758 833 AE

22 900 579 CP

21 063 026 AE

Note : sauf mention contraire, tous les crédits présentés sont en AE et en CP.

Source : données des projets annuels de performance successifs

B.   Le programme 343 – Plan France très haut dÉbit

Le programme 343 « Plan France Très haut débit » est placé sous la responsabilité de la direction générale des entreprises. Il est le support budgétaire du plan du même nom, qui a été initié en 2013 et qui vise une couverture complète du territoire :

– en bon haut débit d’ici 2020 (débit pic descendant supérieur ou égal à 8 Mbit/s) ;

– en très haut débit d’ici 2022 (débit pic descendant supérieur ou égal à 30 Mbit/s).

Ce plan est financé par l’État, les collectivités territoriales et le secteur privé. Ainsi, pour l’État, ce sont 3,3 milliards deuros (Md€) qui y seront consacrés d’ici à 2022, soit environ la moitié du financement public, lequel représente environ un tiers du financement total, lequel se chiffre à plus de 20 milliards d’euros ([1]).

Durant les années passées, l’État a conclu des conventions avec les collectivités territoriales en vue du déploiement des réseaux d’initiative publique (RIP). Cela s’est traduit par une accumulation d’autorisations d’engagement dans les lois de finances précédentes. Depuis le projet de loi de finances 2019, la phase de décaissement est initiée.

Au 1er juillet 2019, 84 projets soutenus par des collectivités territoriales ont reçu un accord préalable de principe de l’État. 53 projets ont reçu une décision de financement en vue d’établir leur réseau de desserte en fibre optique et 31 sont en phase d’exécution de la convention de financement.

Ce programme fait l’objet d’une ouverture nouvelle d’autorisations d’engagements à hauteur de 3,3 millions d’euros, montant inférieur aux engagements ouverts au sein du PLF 2019. Ces ouvertures correspondent de fait, comme pour l’année précédente, à la compensation effectuée au sein du programme 343 du financement via les crédits PIA du Fonds national pour la société numérique (FSN) des frais de gestion correspondants aux travaux effectués par la Caisse des dépôts et consignations pour le suivi administratif et financier du plan (voir encadré relatif au financement du Plan France Très Haut Débit).

La phase de décaissement des crédits de paiement dans le cadre du financement des réseaux d’initiative publique s’accélère, avec 440 millions d’euros de crédits de paiement inscrits pour 2020 contre 175 millions en 2019. On notera néanmoins que ces décaissements sont fortement inférieurs aux prévisions présentes au sein du PLF 2019 (559 millions d’euros). Ces décalages s’expliquent essentiellement par des contraintes opérationnelles inhérentes aux chantiers lourds que sont les déploiements de réseaux fixes.


Autorisations dengagement (AE) relatives aux communications
électroniques du programme 343

(en euros)

 

PLF 2016

PLF 2017

PLF 2018

PLF 2019

PLF 2020

Programme 343

 

 

 

 

 

Action n° 1 - Réseaux dinitiative publique

188 000 000

409 500 000

220 000 000

5 000 000

3 300 000

Crédits de paiements associés

0

0

0

163 367 510

440 000 000

Source : données des projets annuels de performances successifs.

Au total, les crédits de paiement devront être ouverts de manière progressive jusqu’en 2022, selon l’échéancier présenté ci-après. Par ailleurs, une partie des financements a initialement été assurée par le fonds national pour la société numérique (FSN), géré par la Caisse des dépôts et consignations (et désormais, par Bpifrance).

Échéancier des crÉdits de paiements (CP) à voter pour couvrir les AE

(en euros)

 

2020

2021

2022

Après 2022

Cumul dAE votées

2 307 988 638

2 311 288 638

2 311 288 638

2 311 288 638

CP ouverts (prévisions)

440 000 000

622 300 000

447 700 000

801 288 638

Cumul de CP ouverts

440 000 000

1 062 300 000

1 510 000 000

2 311 288 638

Taux de couverture des AE

(En %)

19

46

65

100

Source : projet annuel de performances 2020.

 

 

Le financement du Plan France Très Haut Débit

Jusquen 2014, le Plan France Très Haut Débit a été financé à hauteur de 900 M€ sur les autorisations dengagement du Fonds national pour la société numérique (FSN), gérées par la Caisse des dépôts et consignations pour le compte de l’État dans le cadre des Programmes d’investissement d’avenir.

Opérationnel dès le printemps 2013, le dispositif « RIP », a été très actif dès 2013, à tel point que le niveau d’engagement possible sur les 900 M€ du FSN a été considéré comme dépassé courant 2014.

La loi de finances initiale de 2015 a permis la création du programme « Plan France Très Haut Débit » afin de prendre le relais des crédits PIA. en instaurant le principe de fongibilité des crédits entre programme budgétaire et PIA. Cela signifie que des AE ouverts sur le programme 343 pourront être payées par des crédits PIA et que des engagements ouverts sur les crédits PIA pourront être payés par des CP du programme 343). En pratique, lensemble des crédits de ce programme 343 a vocation à venir abonder le FSN. Cette procédure budgétaire atypique est strictement cadrée par la convention entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations relative à la gestion du fonds programme d’investissements d’avenir (action « développement de l’économie numérique ») et  du plan « France très haut débit » (version en date du 28 décembre 2016 modifié par avenant en date du 7 décembre 2018).

Initialement réservée au financement du déploiement du numérique, de nouvelles dépenses distinctes du guichet RIP ont été imputées depuis 2016 sur les 900 M€ du FSN. Cette enveloppe finance ainsi des actions de couverture mobile du territoire, le projet de continuite territoriale numérique (CTN), les dépenses de fonctionnement du programme (frais de gestion de la CDC) et depuis 2018, le guichet Cohésion numérique territoriale (CNT) ainsi que des actions de couverture mobile en Outremer. Cette ponction de ressources sur les crédits FSN est compensée sur le programme 343 afin dhonorer la complétude des engagements de lEtat à hauteur de 3,3 Md€ pour le PFTHD.

Les crédits ouverts sur le P343 viennent donc compléter les besoins sur les RIP et compenser les dépenses autres que RIP imputées sur les crédits PIA. Les crédits de paiement sont d’abord consommés sur les 900 M€ déjà disponibles sur le FSN avant de recourir aux CP du programme 343.

Le cumul à date des AE ouvert sur le programme 343 à fin 2018 sélève à un peu plus de 2 390 M€. Les premiers CP consommés sur le programme 343 l’ont été en 2019.

Source : Direction générale des entreprises

II.   Le budget des principales entitÉs des programmeS

Deux entités principales interviennent, dans le cadre des crédits précédemment étudiés, en matière de communications électroniques et d’économie numérique. Elles ont un statut différent mais sont toutes les deux dotées de l’autonomie financière. Il s’agit de l’ARCEP, qui est une autorité administrative indépendante, chargée de la régulation du secteur des télécoms (A), et de l’ANFR, qui est un établissement public administratif ayant pour objet de gérer les fréquences radioélectriques (B).

A.   l’ARCEP : un budget EN PROGRESSION POUR FAIRE FACE À DE NOUVELLES MISSIONS

L’ARCEP est le régulateur du secteur des télécoms et des postes. Il s’agit d’une autorité administrative indépendante, qui dispose à ce titre de garanties statutaires importantes destinées à la préserver de toute interférence ([2]). En particulier, elle dispose d’une autonomie de gestion dans le cadre du budget qui lui est affecté chaque année par le Parlement.

En 2019, l’ARCEP a été amenée à assurer un certain nombre de missions supplémentaires récemment attribuées (infra). En plus de l’accélération des contrôles menés dans le cadre du plan France Très Haut Débit et du New Deal mobile, elle a posé les premiers jalons du déploiement de la 5G en France. Cette mission l’a conduite notamment à préparer l’attribution des fréquences dans la bande de 3,5 GHZ, a lancé un appel à projet pour la création de plateformes d’expérimentations 5G en bande 26 GHZ et a engagé les travaux préparatoires à l’attribution de nouvelles fréquences (bande 700 MHz). Enfin, l’ARCEP a engagé en 2019 des travaux préparatoires relatifs à la régulation des marchés fixes des télécommunications et à l’application du code européen des télécommunications.

Le budget de l’ARCEP pour 2020 est en croissance avec une hausse de 2,04 % pour les autorisations d’engagements demandées (21 millions euros pour 2020 contre 20,6 millions d’euros en 2019) et de 1,88 % en ce qui concerne les crédits de paiement (22,9 millions d’euros de crédits de paiement en 2020 contre 22,5 millions d’euros en 2019).

Ces moyens supplémentaires correspondent notamment à l’attribution de deux nouvelles missions :

– une mission de contrôle de l’action de l’ANSSI en matière d’exploitation des sondes sur les réseaux des opérateurs de communications électroniques, à la suite de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 ;

– une nouvelle mission de régulation de la distribution de la presse confiée à l’ARCEP pour 2020 (transfert d’un montant de 225 000 euros en AE et en CP en provenance du programme 308 « Protection des droits et libertés », à la suite de la fusion de l’autorité de régulation de distribution de la presse en son sein), conformément au projet de loi de modernisation de la distribution de la presse (accord sur un texte commun dans le cadre de la commission mixte paritaire du 25 juillet 2019).

Une nouvelle mission de régulation de la distribution de la presse

Le Gouvernement a déposé un projet de loi, en cours d’adoption, afin de moderniser la distribution de la presse et d’en confier la régulation à l’ARCEP. Cette réforme vise à doter le secteur d’une régulation à même de lui permettre de surmonter ses difficultés structurelles (décroissance des volumes) en plaçant la notion d’efficacité au cœur des objectifs de la régulation.

Dans ce cadre, l’ARCEP aura pour responsabilité de :

– proposer au Ministre le cahier des charges que devront respecter les sociétés candidates à l’agrément les autorisant à distribuer la presse ;

– procéder à l’analyse des dossiers de candidature et, le cas échéant, agréer les entreprises de distribution de la presse ;

– contrôler les sociétés agréées pour veiller au respect du cahier des charges ;

– définir et faire vivre le schéma territorial d’orientation de la distribution de la presse.

En outre, l’Arcep devra également :

– contrôler et, si besoin, encadrer les conditions techniques et tarifaires des messageries de presse actuelles, puis des sociétés agréées, afin de veiller au respect des principes de non-discrimination, d’orientation vers les coûts d’un opérateur efficace et de concurrence loyale ;

– analyser et, si besoin, faire modifier, rendre opposable et contrôler le schéma d’orientation territoriale des messageries de presse actuelles ;

– mettre en place, le cas échéant, une comptabilité réglementaire des acteurs de la distribution de la presse ;

– établir chaque année les règles de répartition des coûts spécifiques induits par la distribution des quotidiens ;

– évaluer la conformité de l’accord interprofessionnel concernant les règles d’assortiment des titres et de détermination des quantités servies aux points de vente et, le cas échéant, en cas de non-conformité ou d’absence d’accord interprofessionnel, définir ces règles ;

– établir les modalités de rémunération des distributeurs de presse.

Source : ARCEP

Les effectifs de l’ARCEP vont également augmenter pour lui permettre de faire face à ses nouvelles missions comme le montre le tableau suivant :

Évolution des effectifs de l’ARCEP 2016-2020

(ETPT)

 

2016

2017

2018

2019

2020

Effectifs

171

171

172

173

176

Source : Ministère de l’économie et des finances

 

Le plafond d’emplois de l’ARCEP est fixé à 176 ETP en 2020. Comme le révèlent les données du jaune budgétaire relatif aux autorités administratives publiques et indépendantes, cette hausse concerne uniquement des emplois de catégorie A prenant la forme de contrats à durée déterminée (CDD).

Source : jaune budgétaire PLF 2020

De façon générale, les nouvelles missions correspondant à une extension du champ de compétences de l’ARCEP ont donné lieu :

– à un transfert pérenne de deux emplois pour le contrôle de l’ANSSI à partir de 2019 ;

– à la création de cinq emplois pour assurer la régulation de la distribution de la presse prévue à partir de 2020.

L’ARCEP a de son côté identifié un besoin minimum de 8 ETP supplémentaires par rapport à 2019 (5 en 2020 et 3 en 2021, soit 178 ETP pour 2020) pour pouvoir mettre en œuvre l’ensemble de ses nouvelles missions. Il conviendra donc d’analyser dans la durée si les besoins en termes d’effectifs apparaissent suffisants pour remplir de façon adaptée ses différentes missions.

En 2020, les principaux sujets de travail de l’ARCEP, au-delà de sa mission essentielle de régulation des communications électroniques et du secteur postal, seront les suivants :

– l’intensification du suivi des déploiements de la fibre optique et de la couverture fixe des territoires en très haut débit, qui se traduit par le contrôle du respect des engagements pris par les opérateurs d’une part, et le prononcé d’avis auprès du gouvernement sur les projets d’Appel à Manifestation d’Engagements Locaux (AMEL) FttH des collectivités (6 avis ont été rendus en 2019) ;

– la poursuite de la mise en œuvre du « New Deal » mobile et de la feuille de route « monreseaumobile » ;

– le maintien d’une qualité de service adaptée sur le réseau cuivre ;

– l’attribution des autorisations d’utilisation des fréquences dédiées à la 5G (bande 3,5GHZ), l’élaboration de solutions logicielles afin de permettre des mécanismes d’attribution localisés (bande 2,6 GHZ) et l’accompagnement des porteurs de projets dans le cadre des plateformes d’expérimentations 5G (bande 26 GHZ). Des travaux préparatoires sont également en cours pour attribuer de nouvelles fréquences dans la bande 700 MHZ, notamment en Outremer ;

– la réouverture du cycle d’analyse des marchés fixes, qui conduira à l’adoption d’une décision d’analyse des marchés avant la fin de l’année 2020 ;

– l’intensification des missions liées à la régulation postale, à la suite de l’entrée en vigueur du règlement européen (UE) 2018/644 du 18 avril 2018 relatif aux colis transfrontières. Cette nouvelle mission nécessite notamment la mise en œuvre d’une collecte statistique d’informations sur les offres et tarifs ainsi que les coûts relevant du service universel et la création d’un dispositif de déclaration et de gestion des opérateurs de colis transfrontières ;

– la poursuite pour 2 ans des activités de régulation du marché de gros de la diffusion de la TNT ;

– la présidence du réseau francophone de la régulation des télécommunications (Fratel) et l’entrée en vigueur du nouveau code européen sont déjà lancées et font l’objet de travaux supplémentaires. L’ARCEP participe ainsi à chacun des 10 groupes de travail de l’ORECE (Organe des régulateurs européens des communications électroniques, BEREC en anglais).

B.   L’Agence nationale des frÉquences : un budget EN AUGMENTATION POUR RÉPONDRE AUX ENJEUX DE LA 5G

L’Agence nationale des fréquences (ANFR) a été créée par la loi n° 96‑659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications. Sur le fondement de l’article L. 97-1 du code des postes et des communications électroniques, elle a pour mission « dassurer la planification, la gestion et le contrôle de lutilisation, y compris privative, du domaine public des fréquences radioélectriques ».

Elle exerce son activité en concertation avec les 11 administrations et autorités affectataires de fréquences radioélectriques, qui sont représentées à son conseil d’administration. Elle est organisée en 6 directions sur 11 implantations en métropole et 4 outre-mer.

1.   Des missions en augmentation

Les missions de l’Agence se sont progressivement renforcées, au fil des lois successives ([3]). À titre principal, elle exerce les missions suivantes :

– la planification du spectre. Ainsi, elle répartit, après accord du Premier ministre, les bandes de fréquences. Elle coordonne également la position française en la matière, dans le cadre des négociations internationales. À ce titre, une conférence mondiale des radiocommunications doit se tenir à la fin de l’année 2019, ce qui générera une activité supplémentaire importante pour l’Agence ;

– la gestion des fréquences. L’Agence assigne les fréquences et elle gère l’implantation des stations radioélectriques, afin d’assurer l’utilisation la plus optimale possible des sites disponibles ;

– le contrôle des fréquences. L’Agence contrôle l’utilisation des fréquences et dispose à ce titre de pouvoirs d’inspection des sites. Elle est destinataire des réclamations portant sur les cas de brouillage et instruit ces dernières. Par ailleurs, elle s’assure du respect, par les terminaux, des normes européennes en matière radioélectrique. Ainsi, il s’agit de l’une des seules agences publiques européennes à effectuer des tests aléatoires portant sur le débit d’absorption spécifique des téléphones portables.

L’Agence nationale des fréquences s’est également vu confier des missions dans les domaines suivants :

– la continuité de la réception des services de télévision, en lien avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). À ce titre, l’ANFR a repris une partie des activités du GIP France Télé Numérique, après le passage à la TNT, notamment le centre d’appels et le traitement des plaintes en brouillage des téléspectateurs. Elle gère le plan d’accompagnement du transfert de la bande des 700 MHz (2015-2019), qui comprend les actions de communication et la distribution d’aides financières (aides aux téléspectateurs et professionnels du spectacle). Dans le cadre de cette mission, l’ANFR gère également le fonds d’accompagnement de la réception télévisuelle (FARTV), qui aide les téléspectateurs à s’adapter au passage à la TNT, par l’acquisition d’équipements ou par l’adaptation de leur antenne, individuelle ou collective ([4]) ;

– lexposition du public aux ondes électromagnétiques. Il s’agit d’une mission nouvellement confiée en 2014 et renforcée par la loi dite « Abeille » ([5]). L’Agence gère ainsi le dispositif national de surveillance et de mesure des ondes, qui, adossé à un fonds, permet à toute personne de faire mesurer l’exposition aux ondes électromagnétiques. L’ANFR est notamment chargée de publier des lignes directrices pour harmoniser la présentation des résultats des simulations de l’exposition générée par l’implantation d’une installation radioélectrique soumise à accord ou avis de l’ANFR, de mettre à la disposition des communes une carte des antennes-relais, de définir, recenser puis traiter les points atypiques et d’animer le Comité national de dialogue pour assurer l’information de toutes les parties prenantes.

– la diffusion par voie hertzienne terrestre, en France métropolitaine, de données horaires du temps légal français, mission confiée en 2019 à l’ANFR à la suite de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dit ELAN).

2.   L’actualité de l’ANFR sera essentiellement marquée par le déploiement de la 5G

Deux chantiers lancés par le Gouvernement mettent à contribution l’ANFR dès à présent et pour les prochaines années sur ce sujet :

– la libération et attribution des fréquences : l’ANFR s’attachera à finaliser l’harmonisation européenne et internationale des fréquences pour la 5G, à modifier le tableau nation de répartition des banques de fréquence (TNRBF) pour mettre à disposition de l’ARCEP ces fréquences, et à contribuer à la définition des modalités de réaménagement dans ces bandes, avec le Fonds de réaménagement du spectre (FRS) le cas échéant ;

– la transparence et le dialogue sur les déploiements et lexposition du public : la feuille de route du Gouvernement, publiée en juillet 2018, prévoit un chantier visant à assurer la transparence et le dialogue sur les déploiements et l’exposition du public. L’ANFR jouera ainsi un rôle important dans les trois dimensions suivantes : la mise en place d’un protocole de mesure des champs électromagnétiques adapté à cette nouvelle technologie, la participation aux expérimentations 5G et l’accompagnement du débat public au niveau national et local.

Par ailleurs, l’Agence nationale des fréquences radio poursuivra ses travaux sur la Blockchain des fréquences, service inédit dans le secteur public, qui permet d’expérimenter un mode innovant de gestion des fréquences adapté aux enjeux du futur.

3.   Un budget en augmentation après une forte consolidation budgétaire

Le budget de l’ANFR, dont la subvention pour charges de service publique est la recette principale, couvre les dépenses de ses activités, y compris la gestion de trois dispositifs, individualisés comptablement :

– la surveillance et mesure des ondes (SMO) ;

– le plan d’accompagnement de la bande des 700 MHz (B700) ;

– l’accompagnement de la réception télévisuelle (FARTV).

Sur la période 2015-2019, l’ANFR s’est adaptée à un contexte budgétaire exigeant en réduisant ses effectifs de 312 à 297 agents (344 en 2004), en stabilisant ses dépenses de personnel (autour de 24,5 M€ sur la période) et en diminuant ses dépenses d’investissements (de 4,955 M€ en 2015 à 4,6 M€ en 2019 en AE).

En 2019, la subvention pour charge de service public (SCSP) de l’ANFR avait été revue à la hausse à compter de 2019 (39 930 000 € en LFI 2019) pour tenir compte :

– de la nouvelle mission de diffusion du signal horaire au 1er janvier 2019. Cette hausse de subvention doit être maintenue pour financer le marché de prestation de radiodiffusion du signal horaire dont le montant contractuel est de 4,980 M€ par an ;

– de la budgétisation (2,5 M€ en base PLF 2019) dans la subvention du financement du dispositif national de surveillance et de mesure des ondes ([6]).

En 2020, cette augmentation se poursuit, puisque la SCSP atteint 40,05 millions d’euros.

Le plafond d’emplois rémunérés par l’opérateur diminue de 2 ETPT pour atteindre 297 ETPT (sous plafond). Il ne s’agit néanmoins que d’une correction technique. Les deux emplois concernés sont en effet rémunérés par l’État sur d’autres programmes budgétaires (Ministère des armées).

Au total, les effectifs réels de l’ANFR resteraient stables, prévus à 305 ETPT (hors et sous plafond), ce qui doit être noté, alors que le schéma d’emploi 2020 pour les opérateurs de cette mission conduit à une réduction de 22 ETPT en PLF 2020.

 

 

 

 

 

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LANFR 2015-2020

(ETPT)

 

2015

2016

2017

2018

2019

Prévision 2020

Total des effectifs sous plafond

309

307

305

302

297

297

dont fonctionnaires

112

103

95

90

84

80

dont contractuels

190

198

206

209

213

217

dont militaires

7

6

4

3

0(1)

 

Effectifs hors plafond demplois (2)

3

5

4

5

8

8

Total des effectifs de lANFR

312

312

309

307

305

305

(*)

Source : ANFR

Le financement des nouvelles missions confiées à l’ANFR

La mission de recueil et de traitement des réclamations des téléspectateurs, relatifs aux brouillages causés par le déploiement des stations radioélectriques dans les bandes 800 et 700 MHz, est financée par une taxe sur les opérateurs télécoms destinée à couvrir les coûts complets engagés par l’opérateur (dans la limite de 2 M€ pour chaque bande) ([7]).

La gestion de l’accompagnement des téléspectateurs (volet communication et aides) lors du transfert de la bande 700 MHz aux services mobiles a été financée par un prélèvement sur le produit attendu des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l’utilisation de la bande 700 MHz (LFI 2016), soit 54,7 M€ au total (81,9 M€ prévus initialement, dont 27,2 M reversés au budget de l’Etat). L’impact sur les dépenses de l’Agence a été particulièrement fort en 2016 (campagne de communication nationale) et les années 2017 à 2019 (campagnes de communication régionales et paiement d’aides à la réception).

La gestion du dispositif de surveillance et de mesure des ondes était financée jusqu’en 2018 par une taxe additionnelle à l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau, ou TA-IFER. Elle l’est désormais par la subvention pour charges de service publique (2,5 M€ en base PLF 2019).

Plusieurs nouvelles missions confiées à l’Agence à la suite de la loi Abeille sont réalisées à moyens constants, comme le Comité national de dialogue mis en place en 2019. Le fonds d’accompagnement de la réception télévisuelle (FARTV) a été doté par un prélèvement d’une partie (4 M€) du produit des redevances acquittées par les opérateurs mobiles au titre de la bande 700 MHz fléchées pour l’accompagnement des téléspectateurs.

 

 


—  1  —

 

SECONDE PARTIE : ANALYSE THÉMATIQUE

I.   Le plan France Très Haut Débit : un pari en passe d’Être réussi à condition de mettre les moyens sur le « dernier kilomètre »

Lancé en 2013, le plan France Très Haut Débit vise à couvrir l’ensemble du territoire en très haut débit d’ici 2022. L’objectif est de rendre raccordable à la fibre optique 80 % des foyers français, dont 100 % des foyers situés dans les zones denses et 50 % des foyers présents dans les zones peu denses.

Les objectifs du plan France Très Haut Débit

Source : Agence du numérique

Ce plan entre en 2020 dans sa dernière phase qui est décisive pour assurer le déploiement ambitieux de la fibre qu’il porte depuis son origine. Grâce à une forte accélération sur l’année 2019, votre rapporteure observe que ce pari apparaît en passe d’être gagné, à condition de mettre les moyens sur le « dernier kilomètre ».

 

LE plan France trÈs haut dÉbit au 1ER JANVIER 2019

(Pourcentage du territoire couvert, toutes zones confondues)

 

01/01/2019

Objectif 2020

Objectif 2022

Objectif européen 2025

Haut débit (8 Mbits ou plus)

85

100

X

X

Très haut débit (30 Mbits ou plus)

56

X

100

X

FttH (100 Mbits ou plus)

37

X

80

100

Source : ARCEP (2019)

A.   Le dÉploiement de la fibre a connu une forte accÉlÉration grâce à la mobilisation de tous les acteurs concernÉs

1.   L’année 2018 a permis une forte accélération du déploiement de la fibre

L’année 2018 a été marquée par une forte accélération du déploiement de la fibre optique jusqu’à l’abonné. 3,2 millions de locaux ont ainsi été rendus raccordables. Les opérateurs y ont contribué, à hauteur de 2,5 millions de lignes. Les collectivités territoriales ont pour leur part permis la construction de 750 000 lignes en Ftth en 2018.

Fin 2018, 13,5 millions de locaux étaient raccordables à la fibre. Au total, 56 % du territoire était couvert en très haut débit ([8]) (> 30 Mbits/s) et 85 % en bon débit (> 8 Mbit/s).

2.   Les chiffres de 2019 semblent confirmer cette tendance

Le 5 septembre dernier, l’ARCEP a publié de nouveaux chiffres relatifs aux abonnements et au déploiement de la fibre dans le cadre du plan France Très Haut Débit. Ce second trimestre confirme la progression continue du nombre dabonnements et de déploiement de la fibre, avec un nombre record de 1,13 million de prises supplémentaires. Sur les 4 derniers trimestres, 3,79 millions de locaux supplémentaires ont été rendus raccordables.

Au 30 juin 2019, 15,58 millions de locaux étaient éligibles aux offres Ftth, ce qui constitue une augmentation de 32 % sur un an. La croissance de la couverture en fibre optique est principalement portée par les zones AMII d’Orange et SFR, avec environ deux tiers des déploiements observés. En ce qui concerne la zone d’initiative publique, le rythme de déploiement augmente avec plus de 100 000 locaux rendus raccordables par mois.

Le nombre daccès à très haut débit a dépassé pour sa part la barre des 10 millions, grâce aux progrès de la fibre optique de bout en bout (Ftth). Ce rythme traduit aussi une accélération puisque, sur une année, 2,2 millions d’abonnements supplémentaires ont été enregistrés, contre 1,7 million l’année dernière. Plus d’un tiers des abonnés en France disposent dorénavant d’un accès internet au très haut débit.

Au total, le nombre dabonnements à haut et très haut débit atteint désormais 29,4 millions, en croissance de 690 000 sur un an.

3.   Une forte mobilisation des acteurs sur le terrain a permis de nourrir cette dynamique

Cette dynamique est la conséquence de la forte mobilisation des acteurs sur le terrain.

Pour l’année 2018, la main-d’œuvre mobilisée par les entreprises du secteur correspond à 14 500 équivalents temps plein (ETPT) selon InfraNum. Afin d’atteindre la capacité de production de 4 millions de prises en 2019, plusieurs milliers de personnes ont été recrutées (6 400 ETPT pour 2019). D’ici 2022, ce seront près de 30 000 personnes qui seront mobilisées par ces entreprises pour mettre en œuvre le plan France Très Haut Débit.

Enfin, les collectivités ont fait preuve d’un dynamisme fort sur ces sujets. Les réseaux d’initiative publique ont largement contribué à l’accélération du déploiement de la fibre en 2019 et à l’accès des entreprises à celle-ci. Les RIP représentent ainsi près de 50 % des liens en fibre optique vendus sur le marché de gros pour les professionnels.

B.   Cette dynamique RestE nÉanmoins RELATIVEMENT inÉgale selon les territoires concernÉs et CERTAINS ENGAGEMENTS DOIVENT FAIRE l’OBJET d’un suivi attentif

Au sein du plan France Très Haut Débit, les déploiements de la fibre optique sont organisés selon des logiques différentes en trois grandes zones :

– dans les zones très denses (grandes villes), l’incitation économique à déployer est suffisante pour garantir un niveau d’investissement satisfaisant de la part des opérateurs. Ce sont donc les opérateurs privés seuls qui doivent déployer chacun leur réseau (6,6 millions de locaux) ;

– dans les zones peu denses (petites villes, zones rurales), deux solutions ont été mises en œuvre. Il existe d’abord des zones AMII (appels à manifestation d’intention d’investissement) sur lesquelles les opérateurs ([9]), à raison d’un par plaque FttH, ont manifesté leur intérêt pour déployer ou financer ensemble un réseau en fibre optique jusqu’à l’abonné (14,2 millions de locaux). Il existe également des zones « réseaux dinitiative publique » (RIP) au sein desquelles le réseau est directement déployé sous la supervision des collectivités locales, ce qui mobilise des financements publics, faute de manifestation d’intérêt de la part des opérateurs privés (16,4 millions de locaux).

Dans les zones RIP, les appels à manifestation d’engagement local (AMEL) sont intervenus depuis 2017 pour accélérer les déploiements.

Les Appels à Manifestation d’engagement local (AMEL)

À la suite de la mise en œuvre des premiers déploiements en zone peu dense, certains opérateurs ont manifesté leur intérêt pour effectuer des déploiements au sein de zones « RIP ».

Cela a donné lieu à la création des appels à manifestation d’engagement local (AMEL) en 2017 afin de permettre aux collectivités d’accélérer le rythme de déploiement de la fibre FttH.

En 2018, plus de 30 départements ont entrepris une dynamique en ce sens, qui a abouti aux déploiements d’AMEL dans 17 départements, pour plus d’1,5 million de lignes complémentaires.

L’ARCEP a été saisie par le gouvernement et a rendu, à la date de fin juillet 2019, des avis à propos de six propositions d’engagements L.33-13 dans le cadre AMEL, concernant environ 841 000 lignes. Elle a été saisie par le gouvernement sur quatre nouveaux projets d’AMEL fin juillet et début septembre 2019 (Haute-Vienne/Orange, Nièvre/SFR, Landes/Altitudes, Vienne-Deux-Sèvres/Orange) sur lesquels le travail d’instruction est encore en cours.

 

 

 

Source : Agence du Numérique

Toutes zones confondues, 59 % des locaux sont couverts en très haut débit et 42 % des locaux le sont en fibre optique, au second trimestre 2019, contre respectivement 50 % et 32 % au second trimestre 2018.

BILAN DES DÉPLOIEMENTS FTTH EN France (T2 2019)

(en millions)

Zone

Nombre total de locaux

Nombre de locaux raccordables

Pourcentage de locaux raccordables

Zone très dense

6,6

5,6

86

Zone AMII

14,2

7,5

54

Zone RIP

16,4

2,5

15

TOTAL

37,2

15,6

X

Source : ARCEP (2019)

L’accélération indéniable du déploiement de la fibre optique dans le cadre du plan France Très Haut Débit apparaît néanmoins inégale en fonction des différentes zones concernées, comme le montre le graphique ci-dessous.

 

État du déploiement de la fibre dans les différentes zones du plan FTHD

Source : ARCEP (2019)

1.   En dépit de l’accélération forte constatée, il convient d’être vigilant pour assurer le respect des objectifs fixés par le Plan France Très Haut Débit

a.   La zone très dense devrait être couverte en fibre sans difficulté

Au sein des zones très denses (ZTD), où seuls les acteurs privés sont financeurs, 86 % des locaux sont couverts en Ftth, ce qui représente 5,6 millions de locaux raccordables. Cela constitue une augmentation de 8 % par rapport à l’année dernière (78 % au 2e trimestre 2018). Au total, 96 % des locaux sont couverts en très haut débit, contre 90 % il y un an (2e trimestre 2018). La probabilité que la zone très dense soit couverte dans le temps imparti est importante.

Sur le terrain, Paris est la zone ayant bénéficié du plus grand nombre de prises supplémentaires pendant le second trimestre 2019 avec 11 449 nouveaux locaux raccordables. Ivry-sur-Seine, Vaucresson et Vénissieux viennent de dépasser la barre des 50 % de locaux raccordables. Des progrès doivent encore être réalisés notamment à Bobigny, Clermont-Ferrand, Lille, Rosny-sous-Bois, Saint-Denis et Toulon.

b.   La situation est plus complexe pour les zones moins denses d’initiative privée

Au sein des zones moins denses d’initiative privée (AMII), la situation apparaît en revanche plus problématique. Orange et SFR se sont en effet engagés à rendre accordables 92 % des locaux des communes concernées dici fin 2020 (les 8 % restants étant raccordables à la demande). Un an et demi après cet engagement, seuls 56 % des locaux ont été raccordés par Orange et 44 % pour SFR. Au total, 69 % des locaux sont couverts en très haut débit (9,7 millions de locaux) et 54 % des locaux sont raccordables à la fibre (7,5 millions de locaux raccordables). Il apparaît que certains opérateurs ont pu prendre du retard sur les déploiements au sein de cette zone. Cette situation constitue un point d’alerte pour l’ARCEP, qui doit rester vigilante sur ce sujet. Par ailleurs, il conviendra d’être attentif à ce que les collectivités soient en capacité d’effectuer leurs derniers raccordements à des tarifs abordables.

c.   Les zones d’initiative publique se situent dans une situation intermédiaire puisqu’elles portent l’accélération des déploiements de la fibre tout en conservant un retard certain

Au sein des zones moins denses d’initiative publique (RIP), le bilan est mitigé. Ces zones connaissent en effet une dynamique forte dans les déploiements tout en conservant un retard certain.

Source : ARCEP (2019)

Plusieurs éléments démontrent quune dynamique positive est enclenchée au sein des zones RIP.

La commercialisation des réseaux dinitiative publique est forte. Depuis mai 2017, près d’1,6 milliard d’euros de décisions de financement ont été signées par le Premier ministre en soutien aux collectivités territoriales. Le 22 mars dernier, à l’occasion d’un déplacement dans le Gers, le Premier ministre a d’ailleurs signé 8 nouvelles décisions de financement pour un montant total de 243 millions d’euros ([10]). Par ailleurs, le taux de présence d’au moins deux opérateurs est actuellement en nette progression, à 44 % et avec + 15 points sur les six derniers mois. Il reste néanmoins largement inférieur par rapport à celui des zones d’initiative privée (90 %).

Les zones RIP se caractérisent aussi par un niveau de complétude de la fibre important dans certains territoires. C’est le cas notamment pour le Valde-Marne (100 %), la Seine-Saint-Denis (88 %), lOise (86 %) et la Loire (74 %). LAisne, lEure-et-Loir et le Val dOise ont passé, de leur côté, la barre des 60 %.

Néanmoins, ces zones accusent parfois un retard certain en termes de déploiement qui pourrait être problématique, à terme, pour respecter les engagements prévus dans le cadre du plan France Très Haut Débit. Actuellement, seuls 15 % des locaux sont couverts en 2019 en Ftth (contre 11 % il y a un an), ce qui représente un total de 2,5 millions de locaux raccordables. De même, seuls 35 % des locaux (5,7 millions) ont accès au très haut débit en 2019 (contre 29 % il y a un an). Cette zone est pourtant la plus ample à couvrir (45 % des locaux, 90 % du territoire).

Les difficultés des RIP sexpliquent à la fois par la complexité des montages juridiques (limites de la renégociation possible des contrats de droit public), la durée des procédures, et enfin le poids économique pour les collectivités (qui est le double de celui initialement prévu, comme l’a relevé la Cour des comptes dans son rapport en 2017).

2.   Le mix technologique, qui doit permettre d’assurer l’accès au très haut débit pour tous en 2022, est une solution de transition qui présente néanmoins certaines limites

Dans certains territoires, l’arrivée de la fibre peut parfois prendre plusieurs années. Conscient de cette problématique, les pouvoirs publics ont mis en œuvre des solutions pour garantir l’accès de tous les Français au très haut débit dès 2022.

Le plan France Très Haut Débit mobilisera en effet l’ensemble des technologies disponibles pour garantir le respect de cet objectif. C’est le mix technologique, c’est-à-dire l’utilisation de technologies alternatives pour accéder au très haut débit rapidement

Capture

Ce mix technologique repose principalement sur les technologies suivantes :

– le « THD radio » : ce réseau utilise les mêmes technologies que les réseaux mobiles de 4e génération (4G)  mais n’accueille que des clients fixes et utilise une bande de fréquences différente et dédiée ;

– la « 4G fixe », qui désigne la réutilisation d’un réseau mobile 4G par un opérateur mobile pour proposer un accès fixe à Internet. Le réseau mobile fournit alors une connexion à la fois aux clients mobiles et aux clients fixes de l’opérateur.

– les technologies satellitaires, qui permettent de fournir des services d’accès fixe à internet, notamment dans les territoires particulièrement mal connectés. Les offres fournies par les opérateurs présentent cependant à ce jour certaines limites techniques et de capacités ;

– la montée en débit sur le réseau cuivre, qui permet d’augmenter les débits pour l’utilisateur. L’opération consiste à remplacer un lien du réseau en cuivre d’Orange par de la fibre afin de limiter l’affaiblissement des signaux DSL.

Le recours au mix technologique, indispensable pour assurer le très haut débit pour tous, présente néanmoins certaines limites (risques de saturation) pouvant conduire à des qualités de débit différentes selon les zones concernées. La prolongation du guichet THD Radio de l’ARCEP jusqu’en 2020 pourrait être pertinente, au regard du faible nombre de collectivités s’étant porté candidat. Actuellement, 8 départements ont déposé une demande en cours de traitement et 4 ont obtenu le traitement de leur dossier (3 accords et un refus).

3.   Les rythmes différenciés du déploiement de la fibre doivent être pris en compte dans les années à venir

Le déploiement des réseaux dinitiative publique semble seffectuer à des rythmes variés, en fonction des situations initiales des collectivités d’une part et des choix effectués pour fibrer leur territoire d’autre part. À titre d’exemple, alors que le département de l’Eure accélère les déploiements sur son territoire en ciblant 2021 pour une couverture intégrale en fibre, d’autres départements, notamment en Bretagne, accusent un certain retard.

En l’état actuel des déploiements, plusieurs points doivent légitimement faire l’objet d’une vigilance accrue pour respecter les objectifs prévus :

 la complétude des réseaux fibrés est un véritable enjeu pour assurer une égalité daccès à la fibre. Le régulateur a d’ailleurs conscience de cette problématique. Après avoir constaté des manquements sur certains points de mutualisation (PM), l’ARCEP a ainsi demandé aux opérateurs Orange, SFR et Free Infrastructures de respecter leurs obligations sur respectivement 460, 15 et 6 PM, ce qui revient à rendre raccordables 180 000 locaux (sur 460 zones) pour Orange, 17 000 locaux (sur 15 zones) pour SFR d’ici le 31 décembre 2019.et enfin 37 000 locaux pour Free infrastructures d’ici le 31 décembre 2020.

 lactualisation des données relatives au nombre de locaux particuliers et professionnels doit aussi être prise en compte pour mesurer les résultats des déploiements de la fibre. À défaut, le risque d’un écart entre les statistiques et la réalité vécue sur le terrain peut exister. La problématique du « débit réel » doit être prise en compte dans ce cadre.

4.   La faible concurrence du « marché entreprise » risque de priver certains acteurs économiques des fruits de ce déploiement

Le marché entreprise des télécommunications doit devenir un sujet majeur de régulation pour les pouvoirs publics, au regard de son caractère faiblement concurrentiel. Il représente en effet plus de 9 Md€  d’euros au total (28 % de l’ensemble du marché des télécommunications), répartis entre les services fixes (4 milliards d’euros) et les services mobiles (2,5 milliards d’euros).

On distingue de façon générale deux types de marché :

 le marché de détail, qui comprend deux segments (offres classiques et offres de haute qualité) ;

 le marché de gros, qui est destiné aux opérateurs souhaitant acquérir des accès aux réseaux pour fournir des offres aux entreprises intéressées.

Ces marchés entretiennent des interactions fortes dans la mesure où certains opérateurs comme Orange et SFR sont intégrés, c’est-à-dire présents sur les marchés de détail et de gros. La régulation de ces marchés constitue un enjeu important pour permettre aux entreprises de bénéficier des déploiements de la fibre. En effet, malgré les progrès réalisés dans le cadre du plan France Très Haut Débit, le taux de pénétration de cette technologie reste faible, en particulier pour les TPE-PME (16 % en 2018), alors que la demande de services numériques de la part des entreprises est croissante.

C.   les dÉcisions annoncÉes RÉCEMMENT par les pouvoirs publics devraient permettre l’achÈvement du plan France très haut dÉbit dans de bonnes conditions

1.   Le choix de sanctuariser les crédits non utilisés au profit du plan France Très Haut Débit est une décision favorable pour aider les départements les plus en difficulté

Comme nous l’avons vu précédemment, certains départements ont des taux de couverture fibre encore relativement faibles. Selon l’avis de la Commission supérieure des postes et télécommunications de juillet 2019, si 72 départements devraient être en état de généraliser la Ftth d’ici 2025, d’autres continuent de montrer des retards rendant indispensable l’effet de levier du soutien financier de l’État.

La carte suivante, produite par l’Agence du numérique et la Direction générale des entreprises, présente ainsi un état théorique de la couverture FttH publique et privée à horizon 2025, aux termes des déploiements publics accompagnés par l’État.

Source : Agence du numérique

Le Gouvernement a pris conscience de cet enjeu et souhaite rétablir une équité territoriale. En conséquence, comme l’ont annoncé les ministres Julien Denormandie et Agnès Pannier-Runacher, 140 millions d’euros d’autorisations d’engagement seront ajoutés au programme 343, grâce aux reprises d’AE réalisées d’une part sur les appels à projet RIP (120 millions d’euros) et sur l’appel à projet « Continuité Numérique Territoriale » dédiés aux Outremer (20 millions d’euros), permettant ainsi de ré-ouvrir le guichet et d’étudier les dossiers des territoires suivant un nouveau cahier des charges qui sera présenté par l’ARCEP.

Votre rapporteure se félicite de cette décision, qui fait écho aux recommandations portées dans ses précédents avis budgétaires. Cela permet d’espérer que l’incitation européenne d’un objectif de 100 % de locaux raccordables en 2025 puisse être effectivement atteinte. Il conviendra néanmoins d’apprécier la dynamique des crédits non utilisés dans les années suivantes pour s’assurer qu’elle soit suffisante pour permettre de soutenir les collectivités territoriales rencontrant le plus de difficultés pour déployer la fibre sur l’ensemble de leur territoire. À ce jour, les acteurs estiment à environ 400 millions d’euros supplémentaires le montant nécessaire pour finir ce programme.

2.   La régulation du « marché entreprise » doit également devenir une vraie priorité pour les pouvoirs publics

L’ARCEP doit engager des travaux relatifs au nouveau cycle d’analyse des marchés fixes pour la période 2020-2023 afin de définir le cadre de régulation concurrentielle des réseaux fixes. Une consultation publique sur ce sujet, lancée le 11 juillet 2019, s’est achevée le 27 septembre dernier. Le régulateur devrait adopter une décision d’analyse de marché qui s’imposera aux opérateurs avant la fin de l’année de l’année 2020.

Ces travaux débutent alors que KOSC, opérateur de gros récent qui a permis de dynamiser le marché « entreprise » de détail, fait face à des contentieux juridiques importants engagés face à SFR et se trouve en grande difficulté financière.

Ce contexte apparaît propice pour faire évoluer le cadre de la régulation du marché entreprise, qui apparaît défaillant. Ce nouveau cycle doit être l’occasion de trancher de façon définitive entre les différentes options possibles sur le marché des télécommunications fixes. À ce titre, votre rapporteure souhaite que la création d’un groupe de travail « Couverture numérique et mobile du territoire » au sein de la commission des affaires économiques permette de faire la lumière sur les causes des difficultés que rencontre le marché entreprise et d’esquisser des pistes de solution sur ce sujet.

3.   Une refonte de la fiscalité des télécommunications apparaît indispensable alors que leur modèle économique évolue rapidement

La réforme de la fiscalité des télécommunications, au profit d’une plus grande lisibilité et d’une plus grande équité, doit être un sujet porté par les pouvoirs publics à moyen terme pour s’adapter à l’évolution du modèle économique des opérateurs de télécommunications.

La fiscalité des télécommunications

La fiscalité des télécommunications se compose principalement des impositions suivantes :

– l’impôt sur les sociétés (IS) ;

– l’imposition forfaitaire des entreprises de réseau sur le cuivre (IFER cuivre) et les antennes (IFER antennes) ;

– la taxe sur les opérateurs de télécommunications électroniques (TOCE) ;

– la taxe relative au Compte de soutien à l’industrie des programmes audiovisuels (COSIP) ;

– les redevances de mise à disposition des fréquences.

En 2017, cette fiscalité a représenté 1,2 milliard d’euros pour les trois opérateurs de télécommunications membres de la Fédération française des télécommunications (Orange, SFR, Bouygues Telecom).

La fiscalité des télécommunications en 2017 (périmètre FFT)

Source : Fédération française des télécommunications

Cette fiscalité apparaît perfectible à plusieurs titres.

En premier lieu, ses modifications nombreuses, souvent nécessaires, ont pu rendre certains dispositifs fiscaux complexes. C’est le cas notamment de l’IFER qui bénéficie d’un ensemble disparate de déductions qui viennent entamer son assiette sans donner satisfaction aux acteurs des télécommunications quant à son montant. Cette refonte apparaît d’autant plus indispensable que le dispositif actuel pourrait faire peser une charge nouvelle sur les opérateurs des télécommunications qui doivent réaliser le déploiement de la 5G sur le territoire national.

En second lieu, cette fiscalité est également perçue comme injuste au regard de l’inégalité de traitement et la distorsion de concurrence qu’elle crée entre les opérateurs de télécommunications d’une part et leurs concurrents de plus en plus directs que sont les acteurs d’internet que sont les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) d’autre part. À titre d’exemple, pour l’année 2017, le niveau d’imposition sur les sociétés pesant sur les opérateurs de télécommunications  ([11]) était près de 21 fois plus important que celui pesant sur les acteurs d’Internet précités.

Enfin, cette fiscalité doit être modifiée pour s’adapter au changement de modèle économique des opérateurs de télécommunications, qui fait notamment suite à leur perte de monopole sur les contenus grand public. En effet, l’accès croissant des consommateurs au très haut débit favorise le développement des services de contournement (OTT) au profit des plateformes numériques comme Netflix ou Amazon Prime Video. Les opérateurs ont donc intérêt à se reporter sur d’autres marchés, en tirant profit des opportunités ouvertes par les déploiements FttH. En effet, comme le relève une étude de l’IDATE publiée en 2018 ([12]), les opérateurs devraient tendre à monétiser de façon croissante les caractéristiques de la fibre (stabilité des connexions, débits montants accrus) auprès des entreprises sur le marché de gros et à entrer sur de nouveaux marchés (immobilier, BTP) auprès des « verticaux » de l’économie. Cette dynamique est par ailleurs accrue par la perspective de la 5G, qui pose la question de la répartition de la valeur ajoutée entre les opérateurs et les verticaux, au regard de l’ensemble des nouveaux usages envisageables grâce à cette nouvelle technologie.

Les atouts des réseaux FttH

Source : IDATE, FTTH: A Strategic Game-Changer for Telcos, décembre 2018

Ces différentes évolutions impliquent donc une fiscalité mobile et adaptative pour mieux prendre en compte ces différents enjeux.

S’il est difficile d’entreprendre des changements importants à très court terme, sans réfléchir au préalable à une nouvelle structure de la fiscalité des télécommunications, il est en revanche possible d’éviter certains effets de bord liés à son évolution. Dans cette optique, votre rapporteure portera dans le cadre du présent projet de loi de finances un amendement visant à bien distinguer la vidéo à la demande (VOD, paiement à l’acte) des services de vidéo à la demande (SVOD, paiement par abonnement), afin que le rééquilibrage des taxes affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) prévu à l’article 62 du PLF 2020, ne soit pas préjudiciable aux acteurs des télécommunications.

Les évolutions (en cours) du modèle économique des opérateurs de télécommunications

Le marché des télécommunications est soumis à des évolutions importantes au niveau mondial et européen, en raison, notamment, des opportunités offertes par la cinquième génération de télécommunications.

Les deux grandes tendances sur le marché français sont les suivantes :

– des cessions importantes d’actifs d’infrastructures en vue de générer du cash-flow pour financer d’autres investissements. Altice a ainsi vendu 49,99 % de ses tours de télécommunicatons en France à KKR (Kohlberg Kravis Roberts & Co), et a fait de même pour ses tours au Portugal à Morgan Stanley Infrastructures Partners et Horizon Equity Parners. Altice a également vendu 50 % de sa fibre en France à des fonds de pension. Illiad a fait de même avec ses actifs de tours en Italie et en France, en les vendant à Cellnex et Salt. L’objectif pour ces acteurs est à la fois de dégager des financements importants à court terme (cash-flow) et de mutualiser ces infrastructures (donc avoir un multiple de valorisation plus élevé) ;

– des opérations d’acquisitions « B to B » sur le marché Entreprise, résultant de la volonté de Free et de Bouygues Telecom de s’y implanter fortement. Bouygues Telecom a notamment réalisé deux acquisitions récentes dans ce domaine. Iliad a pour sa part racheté Jaguar Network. De façon plus générale, SFR, Bouygues Telecom et Illiard rachètent progressivement l’ensemble des petits opérateurs présents sur ce marché, ce qui participe à la consolidation de ce secteur ;

Les cessions importantes d’actifs à des tower corporations ont pour effet de produire des effets en comptabilité puisque les CAPEX, c’est-à-dire les dépenses d’investissements (capital expenditures), se transforment alors en OPEX (operating expenditures). En effet, les dépenses de location des infrastructures, ne sont pas considérées comme des dépenses d’investissement, quand bien même leur contenu est relativement approche en réalité. On parle ainsi d’OPEXISATION des CAPEX.

Lors de ses auditions, votre rapporteure a observé que les opérateurs souhaitaient que cette donnée soit davantage prise en compte lorsqu’il s’agit d’évaluer objectivement leur effort total d’investissement. Elle souhaite également que cette tendance lourde et structurante du marché français et européen des télécoms soit un point d’attention de la DGE et de l’ARCEP. Si cette dernière a vérifié que ces désinvestissements n’exonèrent en rien les opérateurs de leurs obligations, qu’ils seront bien capables de les remplir et si ces opérations dégagent bien à court terme de la capacité d’investissements dans les réseaux fibre et 5G, il est à surveiller que ceux-ci ne déstabilisent pas les opérateurs à plus long terme. Des fonds pourraient effectivement demander des rendements qu’un marché trop concurrentiel ne serait pas en mesure d’assurer.

 

 

II.   La couvErture mobile du territoire : coordonner la généralisation de la 4G au déploiement dans les meilleures conditions de la 5G

Un an après le New Deal mobile de juillet 2018, on ne peut que se réjouir de l’accélération des déploiements de la 4G constatée chez l’ensemble des opérateurs, conformément à leurs engagements. Dans un contexte marqué par le début des déploiements de la 5G à titre expérimental et le lancement du processus devant conduire à la répartition des fréquences de la bande 3,5 GHZ aux enchères, il est indispensable d’achever la couverture mobile en 4G du territoire pour préparer dans les meilleures conditions la rupture technologique de la cinquième génération des télécommunications mobiles.

A.   Le New Deal Mobile a permis de donner un nouveau rythme aux déploiements de la 4G dans les territoires français

1.   La généralisation de la 4G progresse sur l’ensemble du territoire national

Depuis la mise en place du New Deal mobile, plus de 10 7000 sites sont passés en couverture 4G d’après les chiffres de la Fédération française des télécommunications, pour un total de 66 000 sites mobiles 4G au 31 mars 2019. Il reste donc un peu moins de 15 000 sites à convertir en 4G d’ici 2022. Cette accélération est observable chez l’ensemble des opérateurs.

Au premier trimestre 2019 (31 mars 2019) :

Bouygues Telecom avait équipé 84 % de ses sites en 4G (17 231 sites sur 20 579 déployés), soit 5 points de plus qu’au T2 2018 ;

SFR avait équipé 82 % de ses sites en 4G (17 894 sur 21 834), avec une dynamique notable également (9 points de plus qu’au T2 2018) ;

Free avait équipé 82 % de ses sites en 4G (12 076 sur 14 718 déployés), soit 1 point de plus qu’au T2 2018 ;

Orange avait équipé 79 % de ses sites mobile en 4G (18 923 sites sur 23 834 déployés), avec une dynamique notable (10 points de plus qu’au T2 2018).

ÉTat des dÉploiements New deal mobile au premier trimestre 2019

 

 

T2 2018

T1 2019

Nombre de sites 4G supplémentaires

Bouygues Telecom

79 %

84 %

1 717

Free mobile

81 %

82 %

1 330

Orange

69 %

79 %

2 938

SFR

73 %

82 %

1 897

Source : ARCEP (2019)

Cela se traduit aujourd’hui par les taux de couverture en 4G en population et en surface suivants pour chacun des opérateurs métropolitains (dernières données disponibles) :

Source : ARCEP (2019)

Orange, SFR, et Bouygues couvrent à leur sens 99 % de la population en 4G, contre 93 % pour Free.

Enfin, la couverture du territoire en quadri-opérateurs est passée de 45 % en 2018 à 67 % en 2019. Le débit en zone rural a pour sa part presque doublé en passant de 14 Mbit/s à 27 Mbit/s sur la même période.

2.   Une meilleure qualité de service le long des axes routiers

D’ici 2020, Bouygues Telecom, Orange et SFR ont l’obligation de rendre disponibles les services de voix, SMS (2G/3G) et de très haut débit (4G) sur l’ensemble des axes routiers prioritaires (55 000 km) :

 les autoroutes ;

 les axes routiers principaux (reliant, au sein de chaque département, le chef-lieu de département aux chefs lieux darrondissement) ;

 les tronçons de routes sur lesquels circulent en moyenne annuelle au moins cinq mille véhicules par jour.

Cette obligation porte également sur le réseau ferré régional (TER hors Île-de-France et Corse, RER, trains du réseau de chemin de fer de la Corse), sur 23 000 km au total.

Les données sur cet item sont uniquement présentées sous la forme de cartes. Lors de l’audition de l’ARCEP réalisée dans le cadre de l’avis budgétaire « Communications électroniques et économie numérique », les progrès réalisés pour l’heure ont été considérés comme relativement satisfaisants.  En effet, alors qu’en 2018, le taux moyen de chargement des pages web en moins de 10 secondes sur les routes était de 78,9%, il est désormais de 87 % en 2019.

Concrètement, cette obligation sest traduite par le déploiement de sites 4G le long des axes routiers, ce qui a eu comme effet notable daméliorer la qualité de service sur le réseau routier.

3.   Tous les opérateurs mobiles proposent désormais des offres pour assurer une couverture in-door

Les engagements des opérateurs relatifs à la couverture mobile à l’intérieur des bâtiments concernent, d’une part, le grand public, et, d’autre part, les entreprises et personnes publiques :

 pour le grand public, les opérateurs mobiles ont une obligation de proposer sous certaines conditions le service Voix sur Wifi sur leur réseau, permettant d’améliorer la couverture à l’intérieur des bâtiments pour leurs clients éligibles. Depuis 2019, ils doivent également leur proposer une option SMS sur Wifi ;

 pour les entreprises et les personnes publiques qui en font la demande, les opérateurs mobiles ont l’obligation, depuis fin 2018 de commercialiser à tarif raisonnable une offre multiopérateurs à l’intérieur des bâtiments (occupants/visiteurs).

Le bilan est positif sur le respect de cet engagement puisque les opérateurs proposent tous des offres assurant une couverture in-door :

 pour le grand public, Bouygues Telecom, Orange et SFR proposent chacun une offre Voix et SMS su Wifi, tandis que Free propose une offre femtocell (couverture mobile 3G).

 pour les entreprises et les personnes publiques qui en font la demande, les opérateurs Bouygues Telecom Entreprises, Orange Business Services et SFR Business proposent une solution de couverture in-door multi-opérateurs en Voix et SMS sur Wifi. Ils proposent également des solutions de systèmes d’antennes distribuées (D.A.S). De son côté, Free propose sur demande une offre femtocell intégrée à une offre fixe.

Les opérateurs doivent néanmoins travailler à proposer de véritables « solutions entreprises » pour faciliter leur accès à une couverture multi‑opérateurs. Il serait également souhaitable qu’un véritable parcours client mono-opérateur se mette en place pour avoir la couverture des 4 opérateurs concernés.

B.   Néanmoins, il existe plusieurs points de vigilance sérieux qui doivent être suivis attentivement pour respecter les objectifs fixés dans ce cadre

1.   Le dispositif de couverture ciblé fait face à plusieurs difficultés

Le dispositif de couverture ciblée vise à améliorer de manière localisée et significative la couverture de zones dans lesquelles un besoin d’aménagement numérique du territoire a été identifié par les collectivités et le gouvernement. Ainsi, chaque opérateur est tenu d’assurer la couverture de 5 000 nouvelles zones grâce à de nouveaux sites dont certains seront mutualisés (10 000 sites au total).

À ce jour, le Gouvernement a pris 4 arrêtés et identifié 1 171 zones qui devront être couvertes par les opérateurs au titre du dispositif de couverture ciblée.

Les opérateurs sont tenus de fournir des services de radiotéléphonie mobile et d’accès mobile à très haut débit, grâce à l’installation d’un nouveau site, sur chaque zone pour laquelle ils ont été désignés par arrêté au plus tard 24 mois après la date de publication de l’arrêté du ministre. La première échéance concernant le dispositif de couverture ciblée interviendra mi-2020.

La lenteur de la mise en œuvre de la couverture ciblée apparaît problématique au regard des besoins des territoires concernés par ce dispositif. Près d’un an après le premier arrêté, le nombre de sites en travaux reste très faible (74, soit 15 % des sites à construire), alors même que la plupart des sites concernés sont identifiés (80 % des sites où l’opérateur est leader).

À lheure actuelle, seul 1 site est en service daprès les dernières données fournies à lARCEP, et les travaux ne sont achevés que sur 4 sites. Cette situation risque de nourrir le ressentiment des collectivités et des élus ruraux, au regard des attentes de leur population.

En dépit des difficultés relevées par les opérateurs, au sujet du faible nombre de terrains viabilisés mis à leur disposition (délai de 12 mois), les points de blocage stricto sensu apparaissent limités (30 cas environ). Il est donc souhaitable que l’ensemble des moyens soient engagés pour assurer le déploiement de ces sites, avec des niveaux de débit satisfaisants pour l’ensemble des opérateurs lorsqu’ils sont mutualisés.

2.   Les obligations de transparence, en dépit d’améliorations, ne sont pas complètement respectées en pratique

Cet engagement implique pour les opérateurs de publier et maintenir à jour la liste des stations de base qui ne fournissent pas de service de radiotéléphonie ou de service d’accès mobile à très haut débit pour cause de maintenance ou de panne.

Selon l’ARCEP, des progrès ont été réalisés dans cette optique mais il existe encore une marge de manœuvre liée au fait que, sur les sites multiopérateurs, les opérateurs refusent de le faire au motif qu’ils ne sont pas leader sur le site concerné.

3.   La 4G fixe apparaît comme une solution limitée pour généraliser la couverture 4G

Depuis le 31 décembre 2018, les opérateurs mobiles sont tenus de fournir un service d’accès à Internet sur leurs réseaux mobiles à très haut débit (4G) dans les zones qu’ils identifient et rendent publiques.

Dans le cadre du New Deal mobile, 1 000 nouveaux sites pour la 4G fixe sont prévus (500 pour Orange, 500 pour SFR), identifiés par arrêté (consultation publique en cours).

Tous les opérateurs, à l’exception de Free, proposent désormais une offre d’accès fixe à Internet sur leur réseau mobile à très haut débit (4G).

C.   Le succès de la 5g se fera autour des usages. son dÉmarrage ne doit pas masquer la nécessité de généraliser la 4G en france

1.   La 5G constitue une véritable rupture technologique et un enjeu de compétitivité pour la France et l’Europe

La 5e génération de communications mobiles est une technologie de réseau mobile pour répondre à la très grande croissance des données. Cette technologie permettra plusieurs ruptures technologiques, comme le rappelle la feuille de route 5G du gouvernement ([13]) :

 un saut en matière de débit, puisque les débits perçus par l’utilisateur pourront être jusqu’à 10 fois supérieurs à ceux de la 4G ;

 une gestion de réseau intelligente, ce dernier étant capable de proposer différentes performances en fonction des besoins et des usages concernés (network slicing). La flexibilité de cette gestion permettra la virtualisation d’un certain nombre de réseaux ou composants réseaux.

Cette technologie s’appuie sur l’utilisation dantennes actives permettant d’optimiser les débits disponibles au sein des trois bandes de fréquences suivantes, qui ont chacune leurs caractéristiques propres.

Les trois bandes de fréquences 5G

Source : ARCEP (2019)

Son déploiement commercial s’organise en France dans le cadre du calendrier commun défini au sein du plan d’action lancé sur ce sujet par la Commission européenne en 2016.

La 5G représente un enjeu fort pour la France et l’Europe en matière de compétitivité par rapport aux autres pays, en particulier ceux ayant une certaine avance dans ce domaine (États-Unis, Corée du Sud). Elle permettra en effet le déploiement de nouvelles technologies dans différents secteurs de l’économie et intéresse en premier lieu les « verticaux ».

Les usages de la 5G : limiter les risques pour maximiser les opportunités

Le déploiement commercial de la 5G en France en 2020 n’était pas sans risques en raison, d’une part, des caractéristiques des antennes 5G (de plus courte portée, constituant de ce fait autant de points supplémentaires de vulnérabilité dans le réseau) et, d’autre part, des enjeux de la virtualisation des réseaux (remplacement d’équipements physiques par des solutions logicielles).

Le législateur a donc entrepris de fixer un cadre clair afin de mieux garantir la sécurité des réseaux de communications électroniques français et donc les intérêts économiques de notre pays.

La proposition de loi du 1er août 2019, visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles, a ainsi créé un nouveau régime d’autorisation préalable des équipements des réseaux de communications électroniques mobiles qui seront déployés pour diffuser la 5G. Leur déploiement est désormais soumis à une autorisation du Premier ministre. Ce dernier peut en refuser l’octroi sil estime quil existe un risque sérieux datteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale résultant du manque de garantie du respect des règles mentionnées aux a, b, e, f et f bis du I de larticle L. 33-1 relatives à la permanence, à lintégrité, à la sécurité, à la disponibilité du réseau, ou à la confidentialité des messages transmis et des informations liées aux communications.

Ces risques écartés, les usages de la 5G vont être nombreux et concerner en particulier le secteur industriel (marché des objectifs connectés). À titre d’exemple, SNCF Réseau pourrait accroître de 20 % la fréquence de passage des trains sur les voies par une gestion beaucoup plus fine du trafic.

Le 7 octobre dernier, Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances et Sébastien Soriano, président de l’ARCEP, ont présenté les 11 projets retenus dans le cadre de l’appel à la création de plateformes d’expérimentations 5G. Ceux-ci sont portés par des opérateurs et des verticaux sur des domaines très différents tels que la logistique, les villes intelligentes, la mobilité, ou encore la couverture d’événements sportifs.

2.   Les déploiements prévus de la 5G apparaissent particulièrement ambitieux

Conformément à la feuille de route 5G européenne, cosignée en 2017 par l’ensemble des ministres chargés des communications électroniques des États membres, la feuille de route nationale adoptée par le gouvernement français en 2018 prévoit le déploiement de la 5G en plusieurs étapes :

– le lancement de « pilotes 5G » sur un ensemble de territoires, qui a conduit au lancement en 2018 d’un « guichet pilote » par l’ARCEP puis en 2019 d’un appel à projet « plateformes d’expérimentations 5G » ;

– l’attribution des fréquences, suite à un processus d’enchères en 2020 et le déploiement commercial dans au moins une grande ville ;

– la couverture en 5G des principaux axes de transport français.

Dans le cadre des enchères 5G, prévues pour le début de l’année 2020, le projet de cahier des charges pour la bande 3,5 Ghz comprend les obligations suivantes pour les opérateurs en termes de déploiements :

● 3 000 sites en 2022,

● 8 000 sites en 2024,

● 12 000 sites en 2025.

L’ARCEP prévoit également que dès 2022, au moins 75 % des sites devront bénéficier du service 5G, qui sera progressivement généralisé à tous les sites jusqu’à 2030.

À terme, la totalité des sites devront fournir un service de type 5G, pouvant s’appuyer sur les fréquences de la bande cœur ou d’autres bandes. Ceci inclut en particulier l’ensemble des nouveaux sites que les opérateurs déploient actuellement en 4G, dans le cadre du New Deal mobile. L’ARCEP prévoit également un mécanisme de concomitance pour s’assurer que les zones non urbaines bénéficieront aussi de ces déploiements. Ainsi, une partie significative (de l’ordre de 20 à 25 %) des sites en bande 3,4 ‑ 3,8 GHz devra se situer en zones peu denses, en ciblant l’activité économique, notamment l’industrie.

3.   La recherche du « juste prix » est indispensable pour inciter efficacement les opérateurs à déployer rapidement la 5G sur le territoire national

Le déploiement de la 5G en France ne peut se faire de façon rapide et efficace qu’avec la pleine mobilisation des opérateurs de télécommunications concernés. Suite au succès du New Deal mobile, qui a permis une véritable accélération de la généralisation de la 4G, il apparaît que l’attribution des fréquences 5G dans le cadre des enchères doit se faire à un prix garantissant des ressources satisfaisantes pour l’État et un déploiement « 5G » rapide sur notre territoire.

Au sein du projet de loi de finances 2020, 600 millions d’euros sont envisagés comme recette minimale pour l’attribution de ces fréquences. Ce montant correspond à une simple estimation, comme l’a indiqué Madame Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, qui avait évoqué, en juin dernier, 1,5 milliard d’euros. Votre rapporteure considère que cette fourchette de recettes est pertinente et incitative en vue de l’objectif fixé ci-dessus. À titre de comparaison, le coût pour les opérateurs de ces attributions chez nos voisins européens apparaît en effet plus élevé (6,5 milliards d’euros en Allemagne et en Italie).

La publication du prix de réserve devrait intervenir au courant du mois de novembre.

Les enchères 5G : un processus en plusieurs phases

Les enchères « 5G » qui se dérouleront au début de l’année 2020, ont pour objet de répartir entre les opérateurs les fréquences de la bande 3,4-3,8 GHz. L’ARCEP a décidé d’attribuer 310 MHz de fréquences sur cette bande.

L’ARCEP a fixé la taille du bloc de fréquence minimal à 40 MHz. En dépit des débats relatifs à la taille optimale des blocs de fréquence pour faire une 5G de bonne qualité, il apparaît que ce choix est pertinent pour garantir l’attrait commercial des offres 5G pour les futurs clients.

Le processus d’enchères devrait avoir lieu en plusieurs phases.

Les acteurs intéressés prennent des engagements en vue de l’attribution de blocs de fréquence, qui seront retranscrits dans leurs autorisations d’utilisation des fréquences. Ces engagements concernent le déploiement de la 5G, mais aussi la couverture des axes routiers et les services différenciés (slicing). C’est le New Deal mobile, version 5G.

Deux options existent alors, en fonction du nombre de candidats qui se seront présentés : soit le nombre total de candidat est inférieur ou égal à 4, et chacun obtient un bloc de fréquences à prix fixe, soit ce n’est pas le cas, et les blocs sont disputés dans le cadre d’une enchère spécifique.

Dans un second temps, des enchères sont organisées pour permettre à chaque opérateur d’acquérir des fréquences additionnelles, encore disponibles après la phase d’engagements. Les fréquences sont attribuées par bloc de 10 MHz, en fonction d’un prix de réserver fixé par le Gouvernement.

4.   Pour réussir la 5G il est impératif d’achever la généralisation de la 4G et de la fibre sur l’ensemble du territoire national

Votre rapporteure souhaite insister sur les liens existants entre les initiatives actuellement mises en œuvre dans le cadre du plan France Très Haut Débit et du New Deal mobile et les déploiements futurs de la 5G. Souvent traitées séparément, ces actions sont au contraire largement complémentaires et indissociables si l’on souhaite que le déploiement de la 5G soit un succès en France.

L’achèvement du plan France Très Haut Débit est une priorité. En effet, en pratique, le déploiement de la 5G passera par la montée en débit des antennes 4G déjà présentes et l’installation d’antennes 5G ensuite. La généralisation de la 4G est donc une étape indispensable pour que le rythme ambitieux prévu par l’ARCEP et le gouvernement puisse être tenu, sans prendre un retard préjudiciable sur nos concurrents européens.

L’accès à la fibre est également une condition indispensable pour réussir la transition vers la 5G. Seule la fibre assurera en effet des niveaux de débit suffisants pour satisfaire l’ensemble des usages innovants qui intéressent les industriels et les citoyens français dans le cadre de la 5G.

En définitive, en raison notamment de l’énergie déployée par l’ensemble des acteurs de cette filière, l’achèvement dans de bonnes conditions du plan France Très Haut débit est un préalable important. Alors que certaines zones d’ombre demeurent sur la 5G, notamment sur la forme du marché entre opérateurs, une fois que les opérateurs auront pris part au processus de mises aux enchères, il s’agit de la condition nécessaire pour que les industriels et les citoyens puissent soutenir et comprendre la transition ambitieuse qui nous attend.

 

 


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EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 22 octobre 2019, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur les rapports de M. Rémi Delatte (Entreprises), de M. Sébastien Jumel (Industrie), de M. Antoine Herth (Commerce extérieur), et de Mme Christine Hennion (Communications électroniques et économie numérique), les crédits de la mission « Économie ».

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. Les crédits du budget « Communications électroniques » relèvent de deux programmes spécifiques.

Il s’agit, d’une part, du programme 134, qui comprend l’action n° 4 relative au développement des postes, des télécommunications et du numérique et l’action n° 13 « Régulation des communications électroniques et des postes ». Ces deux actions correspondent, respectivement, aux budgets de l’Agence nationale des fréquences radio (ANFR) et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Il s’agit, d’autre part, du programme 343 « Plan France très haut débit », qui porte la majeure partie des financements des réseaux d’initiative publique (RIP),

Le budget « Communications électroniques » est en hausse, conformément à la logique d’accélération des différents projets relatifs à ce secteur. Sur le programme 134, la baisse de crédits concernant l’action n° 4 « Développement des postes, télécommunications et du numérique » est uniquement faciale. Elle correspond au respect du contrat d’entreprise signé entre l’État et La Poste le 1er janvier 2018. L’ensemble des autres composantes de cette action sont en effet en augmentation. C’est le cas en particulier de la subvention pour charges de service public qui finance l’Agence nationale des fréquences radio. Celle-ci atteint la barre des 40 millions d’euros.

Le budget de l’ARCEP augmente lui aussi de 400 000 euros par rapport à la loi de finances de 2019, pour atteindre 22,9 millions d’euros en crédits de paiement, en lien avec les nouvelles missions de l’Autorité.

Enfin, le programme 343, qui porte le plan France très haut débit, ne fait pas exception, avec 440 millions d’euros de crédits de paiement, qui seront décaissés en 2020, contre 175 millions d’euros en 2019.

Mme Christine Hennion, notre rapporteure pour avis, a dressé un premier bilan de ce plan, ainsi que du New Deal mobile, sujet auquel nos collègues Laure de La Raudière et Éric Bothorel s’intéressent actuellement dans le cadre d’un groupe de travail.

Madame la rapporteure, le Gouvernement a annoncé que 140 millions d’euros de crédits non utilisés dans le cadre du plan France très haut débit seraient réemployés pour achever les déploiements. Pouvez-vous nous en dire plus et nous éclairer sur le caractère suffisant ou non de ces moyens pour garantir une égalité d’accès de tous nos concitoyens à des services numériques de qualité ?

Ensuite, dans le cadre du New Deal mobile, les attentes de nos concitoyens sont grandes, en particulier pour ceux en zone rurale et qui ont besoin d’avoir une 4G de bonne qualité. Comment expliquez-vous que presque aucun site de couverture ciblée n’ait été déployé pour l’heure ? Y a-t-il matière à s’inquiéter ?

Mme Christine Hennion, rapporteure pour avis. L’année 2020 sera décisive pour notre pays en matière de télécommunications.

Elle constituera, d’abord, un point d’étape essentiel pour plusieurs programmes. Je pense au plan France très haut débit, qui doit garantir à tous les Français l’accès au bon débit fin 2020. Je pense également au New Deal mobile, puisque les 485 premiers sites de couverture ciblée doivent être livrés d’ici juillet prochain, pour garantir un égal accès de tous nos concitoyens à la 4G. L’année 2020 constituera, enfin, un véritable point de départ pour les déploiements de la 5G, puisque l’heure est désormais à l’organisation des enchères pour l’attribution des fréquences sur la bande 3,5 gigahertz et à l’expérimentation de ses différents usages.

Avant de revenir avec vous plus avant sur ces sujets, je voudrais vous décrire, en un mot, les principaux enjeux du budget des communications électroniques, qui concernent les deux agences.

Les crédits attribués à l’ARCEP et à l’ANFR sont en augmentation, afin de leur permettre de répondre à leurs nouvelles missions.

En 2020, l’ARCEP se verra ainsi confier une nouvelle mission de régulation du secteur de la presse. Elle contrôlera désormais les sociétés agréées autorisées à distribuer de la presse. Cinq nouveaux emplois seront créés à cette fin.

Au total, le budget de l’ARCEP pour 2020 atteindra 22,9 millions d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 400 000 euros par rapport à l’année 2019. Le plafond d’emplois de l’Autorité augmentera également. Il est fixé à 176 équivalents temps plein travaillé (ETPT) contre 171 dans la précédente loi de finances.

L’Agence nationale des fréquences radio suit une dynamique budgétaire sensiblement identique à celle de l’ARCEP. La subvention pour charges de service public (SCSP), qui la finance, augmentera en effet de 130 000 euros en crédits de paiement, pour atteindre 40 millions d’euros en 2020. Son plafond d’emplois diminue en apparence, mais il est en fait stable. Il est fixé à 300 ETPT.

L’augmentation du budget de l’ANFR correspond au rôle important qu’elle joue dans le cadre du déploiement de la 5G. Elle travaillera en effet au réaménagement des bandes de fréquences et élaborera des protocoles techniques pour la mesure de l’exposition du public aux ondes de cette nouvelle technologie. Au passage, je rappelle que loi sur l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi ELAN, prévoit la gestion par l’ANFR de la diffusion par voie hertzienne terrestre des données horaires du temps légal français.

Venons-en désormais aux trois sujets principaux, à savoir la couverture fixe, c’est‑à‑dire la fibre, la couverture mobile, c’est-à-dire la 4G, et, enfin, notre principal défi pour 2020, c’est-à-dire la 5G.

Figure 1 Objectifs du plan France très haut débit

Le plan France très haut débit a démarré en 2013. En 2017, il n’y avait pas eu beaucoup de progression pour les quatre niveaux de débit que montre ce graphique. C’est pourquoi un coup d’accélérateur a été mis pour atteindre de nouveaux objectifs : obtenir en 2020 un bon haut débit, c’est-à-dire au moins 8 mégabits pour tous ; atteindre en 2022 un très haut débit pour tous, avec au moins 100 mégabits pour l’ensemble des Français.

Figure 2 Le plan France très haut débit en janvier 2019

On peut en outre distinguer trois zones de mise en œuvre de ce plan : les zones très denses, les zones moins denses d’initiative privée et les zones moins denses d’initiative publique.

Figure 3 État du déploiement de la fibre au second trimestre 2019

Dans les zones moyennement denses d’appel à manifestation d’intention d’investissement, dites AMII, les opérateurs privés déploient ensemble un seul réseau en fibre optique : les obligations portent sur le raccordement de 92 % des locaux concernés, les 8 % restants étant raccordables à la demande. Il conviendra d’être attentif, car l’ARCEP constate à ce jour six mois de retard.

Il convient aussi de se montrer vigilant quant aux différences de rythme de déploiements selon les territoires et les zones concernées. J’avais déjà évoqué ce point l’an dernier, à travers un amendement d’un coût de 200 millions d’euros, destiné en fait à ouvrir un débat sur le sujet. Entre-temps, le Gouvernement a travaillé.

Madame la présidente, vous avez posé la question de l’emploi des 140 millions d’euros non utilisés dans le cadre du plan France très haut débit, qui coûte un petit peu moins cher que prévu. Au lieu d’être restituée au budget de l’État, cette somme sera utilisée pour relancer d’autres plans. Cela suffira-t-il ? Je ne le pense pas. M. Julien Denormandie a ainsi annoncé un chiffre avoisinant plutôt les 400 millions d’euros.

Les coûts de la fibre ayant baissé, certains opérateurs ont démarché les collectivités territoriales pour leur proposer de prendre en charge davantage de projets. Une trentaine est actuellement à l’étude. La carte ci-dessous montre les zones qui seront ainsi prises en charge par les opérateurs, ce qui permettra aux collectivités publiques de faire des économies.

 

 

Figure 4 Les appels à manifestation d’engagement locaux (AMEL), financements privés complémentaires de déploiement

La figure n° 5, établie par l’Agence du numérique, montre où nous en serons en 2025 sur la couverture fibre. Elle ne tient pas compte des 140 millions d’euros qui vont être à nouveau injectés dans les zones indiquées en plus clair, celles qui accusent le retard le plus important.

Ce sont les collectivités qui prennent leurs responsabilités et lancent leur programme. Certaines l’ont fait à leur rythme ; d’autres sont parties tôt et ont essuyé les plâtres. Les situations sont extrêmement différentes. L’Agence du numérique accompagne ces projets de la manière la plus serrée possible, pour qu’ils parviennent à des résultats. Ce qui manque aujourd’hui, c’est une carte où on superposerait ces technologies, ce qui nous permettrait d’avoir une meilleure compréhension de la situation.

 

 

 

 

Figure 5 État du déploiement de la fibre (FHH) jusqu’à l’abonné en 2025

Je termine par deux points. S’agissant d’abord de la 5G, il va tout de même falloir être prudent et faire en sorte qu’on permette aux opérateurs d’investir, grâce à des coûts de licence qui ne seront pas trop lourds. Ensuite, puisqu’on est en train de revoir toutes les taxes de production pesant sur les entreprises, je pense qu’il faudrait aussi faire un bilan des nombreuses taxes de la filière télécom, qui grèvent la situation des entreprises du secteur.

Mme Frédérique Lardet. Tout d’abord, je tiens à remercier notre rapporteure pour avis pour son travail sur un budget pour lequel les enjeux sont nombreux et stratégiques, les objectifs ambitieux et la trajectoire poursuivie cohérente.

Les objectifs sont ambitieux, notamment en ce qui concerne le déploiement du très haut débit sur l’intégralité du territoire d’ici à 2022.

Comme le rappelle la rapporteure pour avis, grâce à une forte accélération du déploiement sur l’année 2019, ce pari est en passe d’être gagné même si la couverture apparaît inégale entre les zones dites très denses, les zones moins denses d’initiative privée et les zones d’initiative publique.

Cette disparité a d’ailleurs été prise en compte par le Gouvernement. Je salue, à ce titre, la décision de sanctuariser les crédits non utilisés au profit du plan France très haut débit, à hauteur de 140 millions d’euros : ils profiteront aux départements les plus en difficulté.

La généralisation de la 4G est aujourd’hui essentielle, d’une part parce qu’il reste encore un peu moins de 15 000 sites à convertir en 4G d’ici 2022, mais aussi parce qu’il faut anticiper la rupture technologique que constituera le déploiement de la 5G.

Si, un an après le lancement du New Deal mobile en juillet 2018, nous pouvons nous réjouir de l’accélération des déploiements de la 4G constatée chez l’ensemble des opérateurs, je tiens à mettre en évidence la lenteur de la mise en œuvre de la couverture ciblée, qui apparaît problématique au regard des besoins des territoires concernés par ce dispositif. À l’heure actuelle, seul un site est en service, d’après les dernières données fournies par l’ARCEP, et les travaux ne sont achevés que pour quatre sites.

Au regard de cette situation, il conviendrait d’adapter le dispositif d’exonération de l’imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (IFER) prévue pour les stations radioélectriques installées dans le cadre du dispositif de couverture ciblée avec le déploiement effectif des nouvelles antennes, vraisemblablement au-delà du 31 décembre 2022. Madame la rapporteure, une prorogation de cette exonération jusqu’au 31 décembre 2024 a-t-elle été évoquée lors de vos auditions ? Cette exonération pourrait-elle concerner aussi le déploiement de la 5G ?

Par ailleurs, la loi Montagne 2 du 28 décembre 2016 prévoit que les stations de téléphonie mobile construites en zone de montagne entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2020 ne sont pas non plus imposées au titre de l’IFER. Depuis juin 2017, selon les chiffres de la fédération française des télécoms, 3 166 nouveaux sites 4G ont été activés en zone de montagne, pour atteindre un total de 6 258 sites 4G. L’exemption d’IFER a donc entraîné une accélération significative des déploiements de sites mobiles dans les territoires de montagne qui cumulent pourtant des contraintes liées au relief, à l’altitude et au climat. Afin de poursuivre et accélérer la généralisation de la 4G en montagne d’ici fin 2022, la prorogation de cette exonération devrait également être envisagée. Madame la rapporteure, ce sujet a-t-il été évoqué lors de vos travaux ?

Mme Marie-Noëlle Battistel. Madame la rapporteure pour avis, vous notez, dans une première partie, une bonne progression de la couverture au sein des zones très denses, où 86 % des locaux bénéficient désormais de la fibre optique au domicile, ou FTTH, contre seulement 78 % au deuxième trimestre 2018, tandis que 96 % des locaux sont couverts en très haut débit, contre 90 % l’an dernier. C’est effectivement une bonne progression, dont nous pouvons tous nous féliciter, comme nous pouvons imaginer que l’objectif 2020 sera atteint.

En revanche, au sein des zones moins denses d’initiative privée, Orange et SFR se sont engagés à rendre accordables 92 % des locaux des communes concernées d’ici fin 2020, mais, actuellement, seuls 56 % des locaux ont été raccordés par Orange et 44 % par SFR, portant à 69 % le taux des locaux couverts en très haut débit et 54 % celui des locaux raccordables à la fibre. On note donc qu’il reste effectivement un peu de chemin à faire pour atteindre les objectifs, notamment dans les zones très rurales ou dans les zones de montagne. Si on peut se réjouir de la bonne progression, il faut rester vigilant.

Dans le cadre de la loi ELAN, des aménagements au code de l’urbanisme ont été prévus pour faciliter le déploiement du très haut débit, notamment en contournant le contrôle des architectes des bâtiments de France (ABF). Cela sera-t-il suffisant pour rattraper le retard ?

La deuxième partie du rapport montre qu’il faut repenser la fiscalité des télécommunications pour tenir compte de l’évolution économique des entreprises de ce secteur, tout comme de la nécessité de préserver une concurrence face aux géants du numérique. Vous évoquez notamment le risque d’une monétisation accrue des services afférents au très haut débit tels que la stabilité de la connexion et la vitesse de connexion. Alors que Netflix, par exemple, représente 13 % de la bande passante mondiale, n’est-ce pas là un moyen de contraindre les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) à un plus grand civisme fiscal ?

Mme Sylvia Pinel. Nous savons tous l’importance d’internet dans nos vies, que ce soit dans nos démarches ou dans nos modes de consommation. Il est aussi est devenu une condition du développement de nos entreprises et de l’attractivité des territoires.

Pourtant, nous sommes loin d’être tous égaux face à son déploiement. Aujourd’hui, seuls 51,2 % du territoire ont accès au haut débit, tandis que 541 communes réparties dans six régions différentes ne disposent d’aucun accès internet.

Afin de remédier à cette fracture numérique, le plan France très haut débit a été lancé en 2013, avec une ambition simple : couvrir l’ensemble du territoire national à l’horizon 2022. Cela implique un investissement total de 20 milliards d’euros, partagé entre les opérateurs privés, les collectivités et l’État.

Aujourd’hui, la réalisation de cet objectif suppose le déploiement de 4 à 4,5 millions de prises chaque année d’ici 2022. Cet objectif semble accessible au vu de la nette accélération des déploiements de la fibre, mais ne pourra être atteint sans un réel accompagnement du déploiement dans les zones peu denses.

Nous avions déjà évoqué cette problématique à l’occasion de l’examen d’une proposition de résolution de Marie-Christine Dalloz, en juin dernier. À cette occasion, j’avais relevé que la décision du Gouvernement de suspendre le guichet fonds pour la société numérique (FSN) et de lancer, en 2018, les appels à manifestation d’engagement locaux (AMEL), mettait en péril la réalisation de l’objectif de couverture de 100 % du territoire. En effet, elle ne permettait pas d’assurer des solutions de financement pour les territoires peu denses.

Il semblerait que le Gouvernement ait entendu nos inquiétudes. Le 17 octobre dernier, il annonçait rouvrir le guichet du FSN en 2020 et y affecter 140 millions d’euros supplémentaires. Ces fonds additionnels sont-ils d’ores et déjà inclus dans le PLF 2020 ? Suffiront-ils à couvrir les besoins d’investissement des territoires ruraux ?

Autre question : le Président de la République a ajouté un objectif intermédiaire en haut ou très haut débit avant fin 2020 – dans un an. Ce délai sera-t-il tenu ?

Autre illustration de la fracture numérique : le déploiement de la 4G, sans parler de celui à venir de la 5G. Là aussi, les opérateurs peinent à remplir leurs engagements vis-à-vis des zones peu denses. À ce jour, les engagements pris, en janvier 2018, dans le cadre du New Deal mobile tardent à se concrétiser. Près d’un an après les premiers arrêtés pris par le Gouvernement délimitant les zones concernées par le dispositif de couverture ciblée, le nombre de sites en travaux reste très faible.

Savez-vous si le Gouvernement entend accélérer ces travaux ? En quoi l’attribution des fréquences 5G pourrait-elle être un levier pour améliorer l’aménagement numérique du territoire ?

Mme Christine Hennion, rapporteure pour avis. Vous avez relevé une très nette accélération des déploiements, au rythme de quatre millions de prises installées par an. L’ensemble des opérateurs télécoms consentent ainsi un gros effort, qui devrait permettre de résorber un certain retard.

L’ARCEP est vigilante aux zones AMII. Au regard des deux trimestres de retard, l’ARCEP a déjà annoncé aux opérateurs qu’elle risquait de les mettre en demeure. On espère que les délais pourront être tenus.

Le New Deal mobile comportait plusieurs volets. La mise en mutualisation des sites existants se passe bien, puisque 10 000 sites sont maintenant partagés entre les opérateurs. Ces derniers sont également en phase sur le volet aménagement des axes routiers. En revanche, la couverture ciblée pose problème, un seul site ayant aujourd’hui été livré, alors qu’on en attend plus de 400 d’ici le mois de juillet.

Les opérateurs disposent d’une année pour construire un site si la municipalité leur donne un site déjà aménagé. Or très peu de sites ont été livrés dans ces conditions, ce qui allonge les délais puisque, dès lors qu’ils partent de rien, les opérateurs disposent de deux ans pour livrer un site. Après un long travail préparatoire, ils soutiennent qu’ils seront capables de livrer les 485 sites annoncés pour la mi-2020. L’ARCEP est vigilante sur ce point.

Quant à l’IFER, elle est liée à l’investissement : plus les opérateurs investissent, plus ils vont payer de taxe. Le produit de la taxe va aux collectivités. C’est tout un équilibre à trouver. Je pense personnellement qu’il faut vraiment remettre à plat cette fiscalité.

S’y ajoute la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE), initialement destinée à France Télévisions, mais désormais versée au budget général. Cette taxe est une taxe sur le chiffre d’affaires. Il y a aussi une taxe pour le cinéma. Le secteur des télécoms est ainsi chargé d’un ensemble de taxes qui finissent par alourdir la facture. Beaucoup d’exemptions existent d’ailleurs. C’est donc en fait l’ensemble qui doit être repensé.

Mais, pour répondre à votre question, Madame Lardet, l’année dernière, un échéancier a déjà été prévu. Les installations de 2022 à 2024 seront encore exonérées cinq ans. Il n’y a donc pas besoin d’adopter une mesure particulière.

J’en viens aux AMEL. L’année dernière, ils déséquilibraient le financement de projets déjà engagés, de sorte que tous les dossiers n’ont pas obtenu l’accord du Gouvernement, mais seulement à peu près la moitié d’entre eux. L’Agence du numérique vérifie que ces AMEL sont viables financièrement, tout en s’assurant que les opérateurs atteindront l’objectif de 100 % pour les AMII, où 92 % des locaux doivent être raccordés, tandis que les 8 % restants sont raccordables à la demande. Il faut donc aussi s’assurer que les conditions des derniers raccordements ne sont pas trop coûteuses.

Les 140 millions d’euros économisés et réemployés permettront de couvrir une partie des besoins qui sont en fait estimés à 400 millions d’euros pour atteindre 100 % de fibre optique. Grâce au New Deal, la 4G fixe est offerte par l’ensemble des opérateurs, ce qui permettra d’atteindre un très bon débit en 2022.

La 5G, quant à elle, ne doit absolument pas être déconnectée des progrès dans le domaine de la fibre et de la 4G. Pour avoir la 5G, vous devez en effet tout de même disposer de la fibre au pied du pylône. Il est donc indispensable de cultiver la complémentarité de ces déploiements. Même si on démarre rapidement la 5G, comme cela se fait dans certaines régions, il faut absolument continuer à réfléchir à ses usages. C’est ce qui permettra que cette technologie se déploie de manière satisfaisante. Il faut, en parallèle, continuer à déployer la fibre et la 4G, socle indispensable du déploiement futur de la 5G.

La commission en vient à l’examen des amendements sur la mission « Économie ».

Article 38 et État B

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques IICE48 de M. Sébastien Jumel et II-CE76 de M. Rémi Delatte, et l’amendement IICE49 de M. Sébastien Jumel.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE76 a pour objet de transférer 20 millions d’euros au programme 134, « Développement des entreprises et régulations », pour restaurer son action n° 20 « Financement des entreprises », supprimée dans le projet de loi de finances pour 2020.

Bpifrance garantit les banques à hauteur de 40 à 70 % pour encourager l’octroi de prêts aux très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME). Ces crédits financent des opérations de création, de développement et d’innovation qui couvrent des besoins de trésorerie et permettent le financement de projets qui n’auraient pu voir le jour en l’absence de ce dispositif. Il s’agit donc d’un outil qui permet de combler une faille de marché et constitue par là un soutien important à l’investissement, à l’innovation et à la croissance.

La suppression de la dotation budgétaire de l’État pour soutenir le financement de cette activité pose deux difficultés majeures. D’abord, la débudgétisation des moyens de Bpifrance amoindrit largement la capacité de contrôle parlementaire et paraît porter atteinte au principe de transparence budgétaire. Ensuite, la suppression de la ligne de crédits menace la pérennité de l’activité de garantie de Bpifrance.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE48 est identique à celui que vient de défendre M. Delatte.

Pour ma part, j’insisterai sur deux points. Premièrement, 90 % des entreprises qui bénéficient de la garantie de Bpifrance sont des TPE, dont l’accès au crédit reste difficile en dépit des faibles taux pratiqués actuellement. Deuxièmement, comme nous l’ont confirmé toutes les personnes que nous avons auditionnées, notamment en région, la garantie apportée par Bpifrance joue un rôle de levier important : un euro de dotation publique permet en effet de lever plus de vingt euros de financements pour les entreprises concernées. Ainsi, en 2018, ce sont 9 milliards d’euros qui ont pu être mobilisés pour les entreprises grâce à la garantie de Bpifrance, ce qui montre bien que cet amendement, d’un coût relativement peu élevé, et financé par des crédits prélevés sur des objets moins opérationnels, permettra d’apporter une aide bienvenue aux TPE dans des conditions d’efficacité reconnues par tous. J’espère donc que cet amendement fera consensus au sein de notre commission.

L’amendement II-CE49 est un amendement de repli, qui a pour objet de transférer 10 millions d’euros, au lieu de 20 millions dans les précédents amendements, au programme 134, « Développement des entreprises et régulations », pour restaurer son action n° 20 « Financement des entreprises », supprimée par le projet de loi de finances pour 2020.

Il s’agit de rétablir la dotation allouée à Bpifrance pour son activité de garantie aux prêts contractés par des entreprises. L’absence de rétablissement de l’action n° 20 contraindrait Bpifrance à financer cette activité par le recyclage de dividendes, ce qui n’est pas suffisant et ne peut pas être une solution de long terme. De plus, les moyens de Bpifrance, banque publique, doivent rester transparents et soumis au contrôle parlementaire.

J’insiste à nouveau sur le fait que le programme de garanties de Bpifrance est d’autant plus important qu’il permet de susciter un important effet de levier sur l’investissement privé.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. J’émets un avis favorable à ces trois amendements.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Dans le cadre du PLF pour 2019, le Gouvernement avait initialement souhaité supprimer cette action contribuant au développement des PME grâce à des interventions de Bpifrance ; cependant, face à l’inquiétude exprimée par les députés, il avait réintroduit en séance un amendement visant à maintenir cette ligne budgétaire.

Au sein de la commission des finances, les rapporteurs spéciaux Xavier Roseren et Olivia Grégoire mènent actuellement des travaux qui prendront en compte cette problématique en vue de l’examen de cette mission budgétaire en commission des finances et en séance publique. À ce stade, le groupe La République en Marche votera donc contre les amendements qui viennent d’être présentés, estimant qu’il convient de privilégier le travail qui sera effectué en commun avec la commission des finances.

La commission rejette les amendements identiques.

Puis elle rejette l’amendement II-CE49.

Elle examine l’amendement II-CE50 de M. Sébastien Jumel.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE50 a pour objet de transférer 3,5 millions d’euros à l’action n° 23 « Industrie et services » du programme 134 « Développement des entreprises et régulations ». Il s’agit en fait de rétablir, au même niveau que l’an dernier, les crédits centrés sur l’animation et la gouvernance des pôles de compétitivité, qui permettent à l’État de cofinancer avec les régions le fonctionnement de ces pôles. La baisse des crédits semble incohérente avec les objectifs du Gouvernement en matière de développement industriel et d’innovation annoncés dans le Pacte productif.

L’objectif de cet amendement est également de pousser le Gouvernement à prendre explicitement position. Lors de son discours du 1er octobre 2019 au 15e congrès des régions de France, le Premier ministre a confirmé le transfert des crédits de l’État en ce domaine aux régions dès 2020. Si telle est bien l’intention du Gouvernement, il faudra alors supprimer en ce domaine les crédits de l’État, et surtout prévoir une compensation financière pour les régions.

Comme nous l’ont confirmé toutes les régions auditionnées, le retrait des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) dans la mise en œuvre des politiques des pôles va entraîner une charge de travail et des coûts de fonctionnement supplémentaires pour les conseils régionaux.

L’amendement II-CE50 vise à amortir cet effet pour l’année qui vient.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Je suis désolé, Monsieur Jumel, mais le groupe La République en Marche sera défavorable à cet amendement, que je vous invite à redéposer en commission des finances ou en séance, afin d’avoir l’avis du ministre, que nous ne connaissons pas à ce jour.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Si tout n’est pas perdu, je ne peux que m’en féliciter. Cela dit, le Parlement est souverain, et notre commission peut parfaitement adopter cet amendement avant que le ministre ne fasse connaître son avis en séance. Dès lors que notre commission s’est saisie pour avis sur des sujets aussi importants que ceux que nous évoquons actuellement, nous devons émettre des avis, et non attendre que la commission des finances et le ministre donnent les leurs ! Si notre commission n’est saisie que pour faire croire que l’élaboration de la loi de finances se fait dans le cadre d’une concertation entre la commission des finances et les autres commissions, je ne vois pas bien pourquoi nous sommes réunis ce soir…

Mme Marie-Noëlle Battistel. Pour ce qui est de déposer des amendements en commission des finances, je crois que nous sommes déjà hors délais. Il n’y a guère qu’en séance que cela pourrait être fait…

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Je vous rassure, Monsieur Jumel, le Parlement est effectivement souverain, et nous prendrons nos décisions en conscience. Cependant, puisque votre amendement indique clairement que son objectif est de pousser le Gouvernement à prendre position sur le transfert de la gestion des pôles de compétitivité, il est logique que nous attendions de connaître la position du Gouvernement avant de nous prononcer.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. Le fait que le ministre n’ait pas donné d’avis ne signifie pas que notre commission n’a pas à faire connaître le sien. Au contraire, il me semble que nous pourrions utilement éclairer M. le ministre en donnant aujourd’hui un avis favorable à l’amendement de notre collègue Sébastien Jumel.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement II-CE51 de M. Sébastien Jumel.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE51, qui a pour objet de transférer 150 000 euros à l’action n° 23 du programme 134, est similaire dans son esprit aux amendements II-CE54 de Mme Rabault et II-CE55 de M. Potier qui, eux, portent sur l’action n° 24 du même programme 134.

L’objectif est d’augmenter les crédits alloués à la surveillance des marchés. Le Gouvernement nous a lui-même confirmé, dans sa réponse au questionnaire budgétaire que nous lui avons adressé, que trop de produits non conformes aux réglementations nationales ou européennes parviennent encore à pénétrer le marché français. Faire en sorte de se doter des moyens de contrôler ce phénomène constitue donc un véritable enjeu.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Les crédits relatifs à la surveillance des marchés qui permettent de lutter contre la concurrence déloyale et la non‑application des réglementations européennes sont en hausse cette année de 700 000 euros en crédits de paiement, soit 150 000 euros de plus sur un an. On ne voit pas ce qui justifierait d’y ajouter encore plusieurs dizaines de milliers d’euros, c’est pourquoi notre groupe votera contre cet amendement.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Si les crédits sont en hausse par rapport à l’an dernier, ils reviennent en fait à peine à leur niveau de 2018… Or, les enjeux relatifs à l’entrée de produits non conformes aux normes sont considérés comme une priorité par le Gouvernement lui-même : dès lors, il faut se doter de moyens supplémentaires par rapport à ceux qui avaient été identifiés en 2018. J’espérais que le nouvel état d’esprit présidant aux travaux de notre commission depuis quelque temps permettrait à certains amendements de prospérer, mais manifestement je me berçais d’illusions…

La commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement II-CE54 de Mme Valérie Rabault.

Mme Marie-Noëlle Battistel. L’amendement II-CE54 vise à renforcer les moyens de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de 100 équivalents temps plein (ETP) afin de lui permettre de faire face à l’accroissement de ses missions et des besoins de contrôle dans un contexte de multiplication des fraudes relevées sur la sécurité, la qualité ou la conformité des produits, notamment alimentaires.

Afin d’assurer la recevabilité du présent amendement au titre de l’article 40 de la Constitution, il est proposé d’abonder l’action n° 24 du programme 134 à hauteur de 6 millions d’euros par une diminution à due concurrence des crédits inscrits à l’action n° 5 du programme 220. Cependant, nous ne voulons évidemment pas diminuer ces crédits, c’est pourquoi nous demandons également au Gouvernement de lever le gage afin de ne pas pénaliser le programme 220.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. Comme vous, je note dans mon rapport les effets pervers que l’on peut craindre de la rédaction drastique des effectifs prévus dans le PLF. Cependant, on ne peut ignorer l’objectif de rationalisation de la dépense publique et, dans cette optique, le rétablissement de 100 ETP me semble très sincèrement hors de portée et même déraisonnable, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable à cet amendement.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Je soutiens cet amendement, car il faut savoir ce qu’on veut. Le budget qui nous est présenté prévoit la suppression de dix emplois à la DGCCRF, ce qui signifie que l’on va priver l’État de sa capacité à effectuer des contrôles. Nous devons donner à la DGCCRF les moyens, notamment humains, d’accomplir sa mission : à défaut, nous continuerons à entendre dire que l’État se contente de regarder passer les trains ou d’enregistrer les mauvais points. Utilement mobilisés, ces moyens peuvent se révéler extrêmement rentables, y compris pour les finances publiques.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement II-CE55 de M. Dominique Potier.

Mme Marie-Noëlle Battistel. L’amendement II-CE55 vise à créer une police unifiée de l’alimentation placée auprès de la DGCCRF.

Les crises sanitaires et médiatiques qui affectent le secteur agroalimentaire nuisent à l’image des filières de production et contribuent à entretenir une défiance des consommateurs à l’égard de leur alimentation. Si les exploitants sont les premiers responsables de la sécurité des produits mis sur le marché, il ne fait pas de doute que l’efficacité et la crédibilité des contrôles mis en place par les services de l’État sont des conditions essentielles de la confiance des consommateurs ainsi que de nos partenaires commerciaux.

La répartition des missions sanitaires entre la direction générale de l’alimentation (DGAL) et la DGCCRF découle de l’application de protocoles de coopération entre les deux ministères. Elle conduirait, par exemple, à confier le contrôle de la culture des pommes de terre et des tomates à la DGAL, alors que la DGCCRF surveillerait les frites et le ketchup… Dans ces conditions, le contrôle de l’utilisation des produits phytosanitaires et de la présence de leurs résidus dans les denrées alimentaires ne peut être efficient.

Cette organisation, qui s’appuie sur un morcellement des compétences entre plusieurs administrations, est une source de perte d’efficacité pour l’action de l’État. En mars 2000, la commission d’enquête parlementaire « sur la transparence et la sécurité sanitaire de la filière alimentaire en France » avait déjà recommandé une « unité de commandement » afin de mettre un terme à une situation « où nul n’est responsable en bloc et tous le sont dans le détail ».

Il est donc proposé par le présent amendement la création d’une police unifiée de l’alimentation – que les 100 ETP prévus par l’amendement précédent avaient vocation à venir renforcer.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. Si l’objectif de cet amendement est tout à fait intéressant, il me semble qu’il a vocation à faire l’objet d’un débat beaucoup plus large, ainsi que d’une étude d’impact. Passer par un simple amendement au PLF ne me semble pas être le moyen adéquat de mettre en œuvre la mesure proposée, d’autant que son enjeu ne réside pas tant dans les moyens disponibles que dans les attributions et compétences des administrations concernées. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Cette proposition, issue du rapport de la commission d’enquête chargée de tirer les enseignements de l’affaire Lactalis, semble de nature à répondre à plusieurs dysfonctionnements rencontrés au cours des dernières années. Cependant – je suis désolée de vous décevoir une fois de plus, Madame Battistel –, nous allons proposer de voter contre cet amendement car, comme l’a souligné le rapporteur à l’instant, il ne paraît pas souhaitable de décider de créer cette nouvelle police unifiée au détour d’un amendement au projet de loi de finances. Il est en effet indispensable de mener une large concertation avec les ministères concernés – finances, agriculture et santé –, mais également avec les agents des différentes directions aujourd’hui chargées de la sécurité alimentaire. C’est ce que fait actuellement notre collègue Grégory Besson‑Moreau : laissons-le mener ce travail et revenir vers nous une fois que toutes les parties prenantes auront été consultées.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Une commission d’enquête, c’est six mois de travail, d’investigations et de regards croisés, nourris par les avis des experts. Je rappelle que la commission d’enquête chargée de tirer les enseignements de l’affaire Lactalis a statué et émis des préconisations à l’unanimité : en d’autres termes, les groupes que nous représentons ont estimé, dans leur ensemble, qu’il était pertinent et même urgent, après l’affaire Lactalis, de constituer une police de sécurité sanitaire unifiée.

Si je comprends bien, on se fait plaisir en créant une commission d’enquête sous le coup de l’émotion et de l’agitation médiatique, ce qui peut laisser penser qu’on a saisi l’ampleur du problème, mais quand il s’agit de prendre des décisions dans le cadre de la loi de finances, il n’y a plus personne ! Les discussions ayant précédé la loi EGALIM ont montré que, face à des géants de l’industrie agroalimentaire tels que Lactalis, Bigard ou Danone, les services de l’État sont désarmés, mal organisés et incapables de contredire les expertises produites par ces groupes.

Faut-il attendre le prochain drame, qui sera seulement l’occasion de réunir une nouvelle commission d’enquête et de faire des ronds dans l’eau plutôt que d’avancer ? Pour moi, il n’est ni cohérent, ni responsable de ne pas rendre concrète une décision prise à l’unanimité par la commission d’enquête Lactalis.

Mme Marie-Noëlle Battistel. La majorité est défavorable à cet amendement au motif que la proposition émise aurait fait l’objet d’un travail insuffisant et ne reposerait pas sur une étude d’impact. Or, comme vient de le dire M. Jumel, un travail très important a été effectué dans le cadre de la commission d’enquête Lactalis, et l’amendement que je présente constitue l’aboutissement de ce travail plutôt que le début d’un processus qui aurait pour finalité d’étudier la pertinence de créer une police unifiée de l’alimentation. Je regrette donc beaucoup que cet amendement ne recueille pas l’accord du groupe La République en Marche.

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Si je trouve cet amendement extrêmement intéressant, je dois dire que je comprends mal la méfiance qu’il semble exprimer de façon sous-jacente à l’égard de notre industrie agroalimentaire. Certes, il est normal que des organismes soient chargés de contrôler les entreprises relevant de ce secteur, et que des réformes viennent modifier le système existant afin de le rendre plus performant. Cela dit, comme l’ont montré les réformes déjà mises en œuvre dans le domaine du commerce extérieur, cela peut se faire en fusionnant certains services ou en mettant leurs moyens en commun, donc sans forcément mettre en œuvre des moyens supplémentaires.

Afin que nous soyons en mesure de faire face aux conséquences du Brexit, le budget du ministère de l’agriculture prévoit la création de 320 ETP afin d’assurer le contrôle aux frontières, car le danger pour les consommateurs français se situe bien là, dans l’entrée de marchandises produites en dehors de nos frontières – et même de celles de l’Union européenne. C’est sur ce point que nous devons concentrer nos efforts et, de ce point de vue, l’amendement qui nous est présenté n’est pas à la hauteur de la situation. Je rappelle que, dans le cadre des débats que nous avons eus ici même au sujet du CETA (accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada) – lors desquels vous vous êtes montré particulièrement loquace, Monsieur Jumel –, c’est bien la méfiance à l’égard des produits importés qui s’était majoritairement exprimée, et c’est précisément à cela que nous devons répondre par des moyens supplémentaires.

En résumé, c’est un vrai sujet, mais votre amendement ne me semble pas y répondre de façon adéquate.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. Dans le cadre de cet examen pour avis, nous avons la possibilité d’octroyer plus de crédits, mais il ne nous appartient pas de créer une police unifiée de l’alimentation, si utile soit-elle : cela ne pourrait se faire qu’à l’issue d’une discussion s’appuyant sur une véritable étude d’impact. Je maintiens par conséquent mon avis défavorable.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Les postes créés au sein du budget de l’agriculture, que vient d’évoquer M. Herth, sont destinés à renforcer les services d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (SIVEP), notamment dans la zone transmanche. Cela n’a rien à voir avec la police unifiée de l’alimentation qu’il est ici proposé de créer afin d’établir des protocoles harmonisés et mieux imbriqués entre la DGAL et la DGCCRF. Il ne s’agit pas de faire preuve de suspicion à l’égard des industriels, mais simplement d’être mieux armés pour faire face à de nouvelles catastrophes alimentaires – un domaine dans lequel nos concitoyens sont de plus en plus exigeants. Considérer que le Parlement n’a pas vocation à s’emparer des conclusions d’une commission d’enquête – elle‑même constituée à la suite d’un scandale alimentaire aux conséquences dramatiques – pour coordonner et rendre plus efficaces les moyens de contrôle dans ce domaine, revient pour moi à prendre acte de l’inutilité de ce parlement.

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. C’est un débat passionnant…

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Vous le dites sur un ton qui laisse penser le contraire, Madame la présidente… Nous ressortirons la vidéo de cette séance lorsque surviendra le prochain drame alimentaire !

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. … mais nous devons passer au vote sur l’amendement II-CE55.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie des amendements identiques II-CE75 de M. Rémi Delatte et II-CE56 de Mme Valérie Rabault.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. Le fonds d’intervention pour la sauvegarde de l’artisanat et du commerce (FISAC) n’est plus abondé en autorisations d’engagement depuis la loi de finances pour 2019, le dispositif étant placé en gestion extinctive. Cette suppression est regrettée par les acteurs de terrain, le FISAC ayant largement fait montre de son efficacité en termes de préservation du tissu économique.

L’amendement II-CE75 vise donc à rétablir le FISAC dans les montants prévus en 2018, en procédant à une ouverture de crédits de 14 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 5 millions en crédits de paiement sur l’action n° 23 « Industrie et service » du programme 134 « Développement des entreprises et régulations ».

Mme Marie-Noëlle Battistel. L’amendement II-CE56 est identique à celui que vient de présenter M. Delatte. Nous sommes tous convaincus que, depuis sa création en 1989, le FISAC a joué un rôle déterminant en matière de lutte contre la désertification économique et commerciale en zone rurale, et contre la dévitalisation des centres-bourgs et des centres-villes, d’autant que l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) n’est pas encore pleinement opérationnelle.

Dans ces conditions, il nous semble essentiel de maintenir un dispositif de soutien au commerce et à l’activité de proximité dans le cadre du PLF pour 2020. Tel est l’objet de l’amendement II-CE56, qui vise à rétablir les moyens qui avaient reçu un avis favorable du rapporteur général, Joël Giraud, dans le cadre de l’examen de la loi de finances pour 2019, avant que le Gouvernement ne s’oppose à leur mise en œuvre. Dans le cadre de l’année de transition que nous abordons, il nous semble que maintenir ces crédits est la moindre des choses.

La commission rejette les amendements identiques.

Elle examine l’amendement II-CE80 de M. Rémi Delatte.

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE80 vise à rétablir les crédits de l’action n° 23, consacrée au soutien public des métiers d’art, à hauteur de 2,25 millions d’euros, soit le montant voté l’année précédente.

Les métiers d’art, reconnus par le législateur à l’occasion de la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, participent au rayonnement économique, culturel et touristique de notre pays, où ils représentent 60 000 entreprises, 120 000 emplois et 15 milliards d’euros – ce qui montre bien tout l’intérêt économique de ce secteur d’excellence.

La ligne « Actions du développement des PME » de l’action n° 23 « Industrie et services », prévue pour soutenir les organismes de formation et pour abonder le label « entreprises du patrimoine vivant » promu au cours des dernières années, est purement et simplement supprimée dans le cadre du présent projet de loi de finances.

La suppression de la dotation paraît largement dommageable pour l’avenir des métiers d’art. Les pouvoirs publics envoient des signaux tout à fait négatifs au secteur, dans un contexte où le Gouvernement n’a pas souhaité renouveler le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art (CIMA) en 2020.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. N’étant ni rancunier, ni sectaire, je soutiens cet amendement. Au-delà de ce qu’a dit M. Delatte au sujet de l’impact des métiers d’art sur l’économie réelle, je veux insister sur l’intérêt de la préservation de ces métiers du point de vue de l’attractivité touristique : un grand nombre de territoires profitent de l’existence de ces métiers, notamment grâce au label « Villes et pays d’art et d’histoire », qui repose sur la capacité des territoires à préserver les savoir-faire et à accompagner leur transmission aux nouvelles générations. Pour ma part, j’estime donc pertinent de maintenir les crédits consacrés à cet objectif.

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Je soutiens l’amendement de mon collègue Delatte. La reconstruction de Notre-Dame-de-Paris nous a fait redécouvrir l’importance de la transmission des savoir-faire ancestraux, en particulier dans le domaine des métiers d’art. Il est important de soutenir ces filières car ces chantiers s’inscrivent dans la très longue durée : des savoir-faire peuvent se perdre si ceux qui sont chargés de les transmettre n’en ont pas les moyens.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Cet amendement fait l’objet d’une belle unanimité car nous le soutenons également. Cela me donne l’occasion de saluer le travail de notre collègue Philippe Huppé sur les métiers d’art et les entreprises du patrimoine vivant.

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. M. Huppé, retenu en circonscription, aurait été ravi de voter avec nous cet amendement !

La commission adopte l’amendement.

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. Les rapporteurs peuvent-ils nous donner leur avis sur les crédits de la mission « Économie » ?

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

M. Sébastien Jumel, rapporteur pour avis. Nos amendements ayant été refusés, j’émets un avis défavorable.

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. La question du financement de Bpifrance n’est pas réglée. J’étudierai ce que la commission des finances décidera demain à ce propos ; peut-être la majorité souhaitera-t-elle aborder ce sujet. À défaut, je déposerai un amendement en séance pour remédier à la sous-dotation de Bpifrance. Dans cette attente, je m’en tiens à un avis de sagesse.

Mme Christine Hennion, rapporteure pour avis. Avis favorable.

La commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie » modifiés.

Après l’article 76

La commission examine l’amendement II-CE57 de Mme Valérie Rabault.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Cet amendement ne coûte rien : j’ai donc l’espoir que l’avis sera favorable ! Il a pour objet la remise d’un rapport au Parlement sur les conséquences du mode de collecte de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur la trésorerie des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises. Nous en avions longuement débattu lors de l’examen de la loi PACTE : le décalage entre le versement de la TVA à la facturation et l’encaissement des factures fait supporter aux entreprises une charge de trésorerie qui nuit très fortement à leur développement et entraîne des frais de gestion.

Outre un panorama précis de cette situation, le rapport aurait vocation à proposer des modalités de collecte de la TVA réduisant la charge de trésorerie des TPE et PME, par exemple en reportant son versement après le paiement effectif des prestations auxquelles elle est applicable. J’ose donc imaginer que cet amendement sera adopté, comme le précédent, à l’unanimité !

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. L’objectif de ce rapport est de mieux appréhender les conséquences du versement de la TVA pour les petites entreprises. La proposition que vous faites pourrait conduire à une réforme ayant un effet positif sur les trésoreries de petites et très petites entreprises. Avis favorable.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Je suis au désespoir de devoir dire une nouvelle fois à ma collègue que le groupe La République en Marche votera contre. Un rapport n’est pas nécessaire : il conviendrait plutôt d’engager, si tel est le souhait du groupe Socialistes et apparentés, une mission d’information commune à la commission des finances et à la commission des affaires économiques sur ce sujet.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Quand nous proposons des amendements de mise en œuvre, l’on nous répond qu’il faudrait réaliser au préalable une étude d’impact. Mais quand nous demandons un rapport afin de fonder nos propositions sur une étude d’impact, l’avis est défavorable ! J’invite mes collègues à prendre en considération le souci de la trésorerie des petites entreprises. Nous avons la possibilité de demander une étude d’impact et de trouver des solutions adaptées : il est regrettable que l’avis soit défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Après l’article 76

La commission examine l’amendement II-CE57 de Mme Valérie Rabault.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Cet amendement ne coûte rien : j’ai donc l’espoir que l’avis sera favorable ! Il a pour objet la remise d’un rapport au Parlement sur les conséquences du mode de collecte de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur la trésorerie des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises. Nous en avions longuement débattu lors de l’examen de la loi PACTE : le décalage entre le versement de la TVA à la facturation et l’encaissement des factures fait supporter aux entreprises une charge de trésorerie qui nuit très fortement à leur développement et entraîne des frais de gestion.

Outre un panorama précis de cette situation, le rapport aurait vocation à proposer des modalités de collecte de la TVA réduisant la charge de trésorerie des TPE et PME, par exemple en reportant son versement après le paiement effectif des prestations auxquelles elle est applicable. J’ose donc imaginer que cet amendement sera adopté, comme le précédent, à l’unanimité !

M. Rémi Delatte, rapporteur pour avis. L’objectif de ce rapport est de mieux appréhender les conséquences du versement de la TVA pour les petites entreprises. La proposition que vous faites pourrait conduire à une réforme ayant un effet positif sur les trésoreries de petites et très petites entreprises. Avis favorable.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Je suis au désespoir de devoir dire une nouvelle fois à ma collègue que le groupe La République en Marche votera contre. Un rapport n’est pas nécessaire : il conviendrait plutôt d’engager, si tel est le souhait du groupe Socialistes et apparentés, une mission d’information commune à la commission des finances et à la commission des affaires économiques sur ce sujet.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Quand nous proposons des amendements de mise en œuvre, l’on nous répond qu’il faudrait réaliser au préalable une étude d’impact. Mais quand nous demandons un rapport afin de fonder nos propositions sur une étude d’impact, l’avis est défavorable ! J’invite mes collègues à prendre en considération le souci de la trésorerie des petites entreprises. Nous avons la possibilité de demander une étude d’impact et de trouver des solutions adaptées : il est regrettable que l’avis soit défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉes

Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

M. Sébastien Soriano, président

Mme Cécile Dubarry, directrice générale

Agence nationale des fréquences (ANFR)

M. Gilles Brégant, directeur général

Mme Béatrice Durand, chef du service des affaires budgétaires et financières

Direction générale des entreprises (DGE)

M. Olivier Corolleur, sous-directeur des télécommunications

M. Thomas Hoarau, directeur de projets

Mme Chloé Desvilles, adjointe au chef de bureau des réseaux fixes et mobiles

Caisse des dépôts et consignations (CDC)

M. Laurent Depommier Cotton, directeur transition numérique

Mme Maud Franca, directrice adjointe Mandats et Investissements

M. Adil Taoufik, conseiller relations institutionnelles

Bouygues Telecom *

M. Didier Casas, directeur général adjoint, secrétaire général

M. Anthony Colombani, directeur des affaires publiques

Ministère de lIntérieur

M. Guillaume Lambert, préfet responsable du programme RRF

M. Vincent Niebel, directeur des systèmes d’information et de communication

M. Marc Boget, adjoint MGMSIC

M. Bruno Poirier-Coutansais, chef du Service des Technologies et des Systèmes d’Informations de la Sécurité Intérieure (ST(SI)2

Association des grands utilisateurs de réseaux radio dexploitation (AGURRE) *

M. Stéphane Chouet, président de l’Association des grands utilisateurs de réseaux radio d’exploitation

Mme Florence Erpelding, représentante déléguée

SFR *

Mme Marie-Georges Boulay, secrétaire générale adjointe

 

Orange *

M. Laurentino Lavezzi, directeur des affaires publiques

Mme Claire Chalvidant, directrice des relations institutionnelles à la direction des affaires publiques

Illiad Free *

Mme Maxime Lombardini, président

Mme Ombeline Bartin, responsable des relations institutionnelles

Fédération française des télécom (FFT) *

M. Michel Combot, directeur général

M. Olivier Riffard, directeur des affaires publiques

M. Anthony Colombani, directeur des affaires publiques de Bouygues Télécom

M. Pierre Petillault, directeur adjoint des affaires publiques Orange

Mme Claire Perset, directrice des affaires publiques et de la RSE du groupe SFR

M. Thibaud Furette, responsable régulation et études Stratégiques chez Euro Information Télécoms

Agence du numérique

M. Laurent Rojey, directeur

UFC Que Choisir *

M. Damien Barbosa, chargé de mission « relations institutionnelles »

M. Antoine Autier, responsable adjoint du département des études de l’UFC – Que Choisir

Commission nationale de linformatique et des libertés

Contribution écrite

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants dintérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale.

 


([1]) Pour la description des résultats de ce plan, cf. infra, deuxième partie

([2]) Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

([3]) Articles L. 43 et R. 20-44-10 du code des postes et des communications électroniques

([4]) Décret n° 2017-1048 du 10 mai 2017 relatif au fonds d'accompagnement de la réception télévisuelle

([5]) Loi n° 2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l'information et à la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques

([6]) Dans le cadre du mouvement engagé par le Gouvernement de suppression des taxes à faible rendement, la taxe additionnelle à l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) qui finançait jusque-là le dispositif national de surveillance et de mesure de l’exposition aux ondes créé par l’article 42 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009, lequel prévoyait la création d’un « fonds indépendant alimenté par la contribution des opérateurs de réseau émettant des ondes électromagnétiques » (), sera supprimée (). Cette perte de recettes, dont le rendement anticipé était de 2,85 M€ en 2018, sera compensée par une augmentation, à hauteur de 2,5 M€, de la subvention de l’État.

([7]) Mais la mission PRTV, qui s’est beaucoup étoffée depuis 2012, n’est que partiellement financée par la subvention, ce qui s’est traduit par des prélèvements sur le Fonds d’accompagnement du numérique (FAN) jusqu’à l’extinction de ce fonds fin 2015 et depuis,  par des prélèvements autorisés en budget initial sur le fonds de roulement de l’ordre de 800 k€ par an.

([8]) Le calcul de la couverture en très haut débit comprend pour l’essentiel l’accès à la fibre (FttH), mais aussi à d’autres technologies telles que le câble et le VDSL2.

([9]) Un partage du marché est en effet intervenu. 80 % des zones ont été attribuées à Orange, 20 % à SFR.

([10]) 9 départements sont concernés : l’Ariège (39 M€), la Haute-Garonne (12 M€), l’Indre-et-Loire et Loir‑et‑Cher (39 M€), le Maine-et-Loire (25 M€), les Pyrénées-Orientales (31 M€), la Seine-Maritime (54 M€), le Vaucluse (15 M€) et la Vendée (28 M€)

([11]) Périmètre FFT

([12]) IDATE, FTTH: A Strategic Game-Changer for Telcos, décembre 2018

([13]) 5G : Feuille de route ambitieuse pour la France, 16 juillet 2018.