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N° 2298

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2019.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2020 (n° 2272)

TOME XIII

RECHERCHE ET
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

GRANDS ORGANISMES DE RECHERCHE

PAR M. Richard LIOGER

Député

——

 

 

 

 

 Voir les numéros : 2272 et 2301 (tome III, annexe 33).

 


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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

première partie :  une progression globalement satisfaisante des crédits alloués aux organismes financés sur le programme 172

I. La relative stabilisation des capacités dintervention de lAgence nationale de la recherche (ANR) dans lattente de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche

II. Le budget du CEA : des moyens nouveaux pour mettre en œuvre les orientations fixées par le comité de lénergie atomique

III. LINSERM : la problématique récurrente du financement des grands plans de santé

IV. Le CNRS et INRIA : une progression encore mesurée des dotations détat

1. Le budget du CNRS : la question du financement des dépenses contraintes

2. INRIA : un opérateur au service de la souveraineté numérique de la France qui mériterait dêtre plus largement soutenu

V. INRAE : lémergence dun nouvel acteur de lexcellence scientifique française issu de la fusion INRA-IRSTEA

deuxième partie :  les situations toujours aussi contrastées du CNES (programme 193) et de LIFP-EN (programme 190)

I. IFP-Énergies nouvelles : un acteur essentiel DE LA TRANSITION énergétique de nouveau pénalisé

II. Le Centre national détudes spatiales (CNES) : la France au cœur de leffort européen de recherche dans le domaine spatial

troisième partie :  laffirmation progressive des satt comme des acteurS clef de la valorisation dans lécosystème de la recherche publique

I. le potentiel des satt dans la valorisation des résultats de la recherche publique

1. Le positionnement des SATT au regard des autres structures de valorisation issues du PIA

2. La montée en puissance du dispositif au cours des dernières années

II. Un dispositif dont le positionnement vis-à-vis des établissements de recherche doit encore être conforté

1. Les difficultés des SATT à être pleinement intégrées à lécosystème public de la valorisation

2. Les perspectives de renforcement du dispositif au travers de la mise en œuvre de la loi PACTE

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES auditionnées

 


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   INTRODUCTION

Avec ses 65 prix Nobel, dont 14 en physique, 9 en chimie et 13 en médecine, la France a su démontrer, au cours de son histoire, sa capacité à contribuer au progrès scientifique mondial. Tout récemment encore, une femme française, Mme Esther Duflo, a reçu le 14 octobre dernier le « prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel » surnommé « prix Nobel d’économie » pour ses travaux sur la pauvreté.

La recherche française offre à voir plusieurs facettes. D’un côté, notre pays tient son rang dans la compétition mondiale : il reste, en 2018, le deuxième dépositaire européen à l’Office européen des brevets (10 317) derrière l’Allemagne (26 734) et conserve la seizième place internationale pour la qualité de son innovation selon les données de l’indice mondial de l’innovation publiées en 2018 ([1]). Dans le domaine spatial, la France joue un rôle central dans la mise en œuvre des programmes qui permettent à l’Europe de s’affirmer par rapport à ses concurrents américains, russes et asiatiques. Le système de géolocalisation européen Galileo, concurrent direct du GPS américain, équipe aujourd’hui plus d’un milliard d’utilisateurs dans le monde. Enfin, pour la deuxième année consécutive, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) a été classé parmi les 100 premiers « innovateurs » de niveau mondial toutes catégories confondues par la société américaine Clarivate Analytics.

Derrière ces succès, la réalité quotidienne des unités de recherche est parfois plus nuancée. Les moyens matériels et humains ne sont pas toujours à la hauteur des attentes et il n’est désormais pas rare de voir certains organismes, notamment l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), procéder à des recrutements de personnels permanents ayant cumulé deux, voire trois contrats de chercheur postdoctoral (« postdoc »). Une note d’analyse de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publiée en mai 2019 ([2]) sur la capacité de différents pays à attirer les travailleurs titulaires d’un master ou d’un doctorat positionnait la France au 22ème rang derrière le Portugal et la Slovaquie.

Du point de vue des grandes masses financières, les dépenses intérieures de recherche et de développement (DIRD) de la France, qui mesurent l’effort de recherche de l’ensemble des acteurs, restent, pour le moment, à un niveau élevé : elles représentaient 2,22 % du produit intérieur brut en 2016, ce qui classait notre pays au huitième rang mondial derrière les États-Unis (2,75 %) et l’Allemagne (3,09 %). Paradoxalement, le retour de la croissance économique en 2017 et en 2018 devrait ramener ce ratio sous le seuil des 2,2 %.

Depuis deux ans, l’État a joué son rôle en positionnant son effort budgétaire à un niveau suffisamment élevé pour limiter les risques de « décrochage ». Les crédits inscrits dans les lois de finances (PLF) en 2018 et en 2019 pour les programmes 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » et 193 « Recherche spatiale » se sont accrus de 933 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 1,24 milliard d’euros en crédits de paiement pour s’établir respectivement à 22,18 milliards d’euros (AE) et à 22,35 milliards d’euros (CP).

Le projet de loi de finances pour 2020 confirme la volonté du Gouvernement de poursuivre cet effort de consolidation : les crédits inscrits pour les trois programmes s’élèvent globalement à 22,73 milliards d’euros (AE) et 22,74 milliards d’euros (CP), en hausse respective de 553,49 millions d’euros (+ 2,50 %) et de 389,45 millions d’euros (+ 1,74 %). Bien que la progression des crédits de paiement soit moindre que celles des deux années précédentes, elle reste significative et correspond à un rééquilibrage des crédits alloués à l’Agence nationale de la recherche (ANR) – cf. partie I infra. La hausse des autorisations d’engagement reste, pour sa part, soutenue sur les trois exercices, comme en témoigne le graphique ci-après :

Source : Analyse de la LFI 2019 et du PLF 2020.

L’effort budgétaire reste donc important, mais, comme les années précédentes, la progression globale recouvre une réalité complexe selon létablissement ou lorganisme considéré. S’agissant des grands organismes de recherche, si certains d’entre eux (CNES, CEA et INRAE ([3])) voient le niveau des crédits alloués s’accroître dans des proportions satisfaisantes, les autres (notamment le CNRS, l’INSERM et INRIA) doivent poursuivre leurs efforts de maîtrise de leur masse salariale avec des moyens parfois contraints.

Sous réserve de la possibilité pour le ministère de recourir à des dotations complémentaires sur « marge de gestion » en 2020, comme en 2018 et en 2019, tous les organismes devraient, toutefois, pouvoir faire face à leurs échéances (cf. partie I infra). À l’instar des années précédentes, un seul organisme (IFP-EN) apparaît clairement sous-doté en dépit d’efforts de gestion significatifs et de son positionnement central dans la transition énergétique (cf. partie II infra).

Indéniablement, le budget 2020 consacre la fin d’un cycle de consolidation mais ne traduit pas encore l’enclenchement d’une nouvelle dynamique. Soucieux de préparer l’avenir, le Premier ministre a engagé au début de l’année 2019 une réflexion afin de dessiner les contours d’une future loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR).

Trois groupes de travail composés de personnalités françaises ([4]) et étrangères (parlementaires, scientifiques, dirigeants d’organismes, présidents d’université, acteurs industriels) ont été chargés d’approfondir les thématiques suivantes : recherche sur projet, financement compétitif et financement des laboratoires (groupe 1) ; attractivité des emplois et des carrières scientifiques (groupe 2) ; innovation et recherche partenariale (groupe 3). Les trois groupes de travail ont remis leurs rapports au Premier ministre, en présence de la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, le 23 septembre 2019. Parmi les propositions les plus marquantes figurent :

– l’attribution à l’ANR de la gestion de tous les appels à projets de recherche portés au niveau national et, consécutivement, le renforcement des capacités financières d’intervention de l’Agence (groupe 1) – cf. partie II infra ;

– une réforme ambitieuse de la gestion des ressources humaines au moyen de la diversification des modes de recrutement (création d’un contrat à durée déterminée de mission scientifique, expérimentation de « chaires d’excellence junior » permettant à des doctorants d’être recrutés sur des postes permanents après une période de 5 à 7 ans) et d’une mise à niveau des rémunérations, surtout en début de carrière (groupe 2) ;

– la constitution de « pôles universitaires d’innovation » mutualisant sur un site donné les divers circuits de valorisation de la recherche publique et le renforcement des moyens alloués aux structures de recherche partenariale, notamment celles issues du Programme d’investissements d’avenir (groupe 3).

Au sein du programme 150, l’action n° 17 « Recherche », d’un montant de 3,95 milliards deuros (AE/CP) en 2020, n’est qu’un agrégat comptable. La quasi‑totalité des crédits est un sous-ensemble de la subvention pour charges de service public (SCSP) des opérateurs du programme, établi initialement à partir des charges de rémunération des enseignants-chercheurs titulaires, des ingénieurs de recherche titulaires, des doctorants, des attachés temporaires d’enseignement et de recherche (ATER) et des personnels techniques contractuels concourant à la recherche.

Si l’on excepte les effets de quelques ajustements mineurs d’ordre technique, la SCSP de laction n° 17 représente toujours 30 % de la SCSP du programme 150 (cf. tableau infra) et ne fera pas l’objet de développements spécifiques dans le présent rapport.

(En milliers d’euros)

 

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

SCSP programme 150

12 559 697

12 559 697

12 650 085

12 650 085

12 826 551

12 826 551

Action n° 17 « Recherche »

3 857 187

3 857 187

3 937 904

3 937 904

3 954 858

3 954 858

Dont SCSP action n° 17

3 770 173

3 770 173

3 791 985

3 791 985

3 816 860

3 816 860

 dans la SCSP du P 150 (%)

30

30

29,98

29,98

29,76

29,76

Sources : PLF 2020 et rapport annuel de performance 2018.

Au titre de la recherche partenariale, le présent rapport évoque, comme les deux années précédentes, les mécanismes mis en place à la faveur du programme d’investissements d’avenir (PIA) et met en valeur les potentialités offertes dans le domaine de la diffusion de linnovation et de la création de start-ups par les sociétés daccélération du transfert de technologies (SATT) – cf. partie III infra.

* * *

Dans l’attente des arbitrages qui découleront des propositions des groupes de travail sur la LPPR, le projet de budget pour la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES) pour 2020 apparaît réaliste et équilibré au vu des efforts demandés à l’ensemble des ministères et des personnes publiques.

AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT ET CRÉDITS DE PAIEMENT
DE LA MISSION « RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR »

(En milliers d’euros)

 

LFI 2019

PLF 2020

Évolution

(%)

Autorisations dengagement

27 954 734

28 669 847

+ 2,56

Crédits de paiement

28 147 270

28 681 609

+ 1,90

Source : PLF 2020.

Aussi, votre rapporteur vous propose de donner un avis favorable à ladoption des crédits pour 2020 des grands organismes de recherche sur les programmes 150, 172 et 193 et, plus généralement, des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

 


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   première partie :

une progression globalement satisfaisante
des crédits alloués aux organismes
financés sur le programme 172

Les autorisations d’engagement (AE) du programme 172 inscrites dans le projet de loi de finances pour 2020 s’établissent à 6,96 milliards deuros, contre 6,84 milliards deuros dans la loi de finances pour 2019 (+ 118,83 millions d’euros, soit + 1,74 %). Le rythme de progression est sensiblement le même que celui observé en 2019 par rapport à 2018 (+ 120,48 millions d’euros). Les crédits de paiement (CP) se stabilisent, pour leur part, à 6,94 milliards deuros en 2020, alors qu’ils avaient progressé de 174,47 millions d’euros en 2019.

(En milliers d’euros)

Programme 172

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Total du programme

6 649 810

6 696 859

6 841 168

6 941 078

6 959 998

6 941 119

Dont crédits aux opérateurs

6 205 169

6 248 858

6 316 256

6 412 759

6 391 596

6 374 905

Part (%)

93,31

93,31

92,33

92,39

91,83

91,84

Source : PLF 2020 et rapport annuel de performance 2018.

Dans cet ensemble, les moyens d’intervention de l’administration centrale retracés dans l’action n° 1 « Pilotage et animation » augmentent fortement : 262,01 millions d’euros (AE) et 257,98 millions d’euros (CP) en 2020, en hausse respective de 56,61 millions d’euros (+ 27,56 %) et de 50,76 millions d’euros (+ 24,50 %) par rapport à 2019. Il s’agit, pour l’essentiel, de financer l’accélération de la mise en œuvre du plan de développement de lintelligence artificielle annoncé par le Président de la République au Collège de France le 29 mars 2018 (38 millions d’euros, contre 17 millions d’euros en 2019) et d’officialiser, à hauteur d’environ 25 millions deuros, une partie de la « marge de gestion » dégagée par le ministère pour octroyer un soutien financier ponctuel aux laboratoires et aux grands plans de santé de l’INSERM (cf. infra).

Comme en 2019, le programme 172 finance pour une part très importante (près de 92 % du total) les dotations allouées aux opérateurs. Celles-ci progressent de 75,34 millions d’euros en AE en 2020 (+ 1,19 %) mais diminuent de 37,85 millions deuros (– 0,59 %) en CP, essentiellement en raison de la correction à la baisse effectuée sur les crédits de paiement de l’Agence nationale de la recherche (cf. graphique ci-après).

 

Sources : Analyse du PLF 2020.

Remarque préliminaire :

Au cours des exercices 2018 et 2019, la direction générale de la recherche et de l’innovation (DGRI), responsable du programme 172, avait bénéficié d’un taux de mise en réserve sur les crédits, hors titre 2, de 3 % au lieu de 4,85 %, ce qui avait permis de dégager une « marge de gestion » susceptible de couvrir des besoins ponctuels (grands plans de santé de l’INSERM, moyens des laboratoires du CNRS, fusion INRA-IRSTEA – cf. infra). Pour 2020, la « marge de gestion » a été en grande partie intégrée dans les crédits de l’action n° 1 du programme.

Au cours de leur audition, les représentants de la DGRI ont indiqué que le Gouvernement n’excluait pas de remonter à 4 % le taux de mise en réserve hors titre 2 en 2020, ce qui remettrait en cause les marges de manœuvre du ministère. Votre rapporteur appelle lattention du Gouvernement sur limportance qui sattache à ce que des moyens complémentaires puissent être alloués en cours de gestion aux opérateurs dont la situation budgétaire est la moins confortable (CNRS, INSERM et INRIA).

I.   La relative stabilisation des capacités d’intervention de l’Agence nationale de la recherche (ANR) dans l’attente de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche

Dans les lois de finances, l’Agence nationale de la recherche (ANR) est financée à titre principal par le programme 172. Elle est également opérateur des crédits du programme des investissements d’avenir (PIA) retracés sur les programmes 421 « Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche » et 422 « Valorisation de la recherche ».

Hors crédits du PIA, la situation budgétaire de l’Agence nationale de la recherche (ANR) sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172 ANR

736 113

773 252

683 639

722 327

768 839

859 508

766 361

738 046

 dont dotation P172 avant mise en réserve

736 113

773 252

 

 

768 839

859 508

766 361

738 046

 Dotation après mise en réserve

 

722 286

 

722 327

 

797 138

 

 

Résultat budgétaire

 

+ 4 355

 

+ 9 120

 

+37 313

 

 

 Dépenses

709 436

753 290

706 650

740 056

 

786 000

 

 

 Recettes

 

757 645

 

755 176

 

823 315

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et ANR.

Après une période marquée par de fortes contraintes budgétaires entre 2013 et 2017, les lois de finances pour 2018 et 2019 ont sensiblement rétabli les moyens financiers de l’Agence : les crédits alloués en autorisations d’engagement (AE) ont progressé de 32,7 millions deuros par an pour s’établir à 768,84 millions deuros en 2019. Sur la même période, les crédits de paiement (CP) inscrits sont passés de 639,39 millions d’euros en 2017 à 859,51 millions deuros en 2019 (+ 220,12 millions d’euros).

Les dotations inscrites dans le projet de loi de finances pour 2020 témoignent d’une stabilisation de l’effort budgétaire : elles sont désormais quasiment identiques en AE (766,36 millions d’euros) par rapport à 2019 et diminuent même en CP (738,05 millions d’euros, en baisse de 14,13 %). Cette baisse est logique dans la mesure où les dotations particulièrement élevées des exercices 2018 et 2019 constituaient un rattrapage des années antérieures. On observe, d’ailleurs, que le montant inscrit en 2020 correspond globalement, après prise en compte des autres dépenses de l’ANR (environ 35 millions d’euros par an), à son budget d’intervention en AE en 2019 (708,3 millions deuros ([5])).

En revanche, la stabilisation des AE en 2020 pourrait amener l’ANR à ne pas accroître son budget d’intervention l’an prochain, sauf à ce qu’une mise en réserve très limitée soit appliquée sur cet exercice. Selon les éléments communiqués en audition par la direction générale de la recherche et de l’innovation (DGRI), un tel mécanisme est envisagé au travers de la « marge de gestion » ministérielle évoquée supra, ce qui permettrait d’accroître, pour une année supplémentaire, le budget d’intervention (AE) de 30 millions deuros.

Il est essentiel de ne pas interrompre la dynamique impulsée en 2018, car lANR nest pas encore parvenue à se positionner comme un acteur central et incontournable du financement sur appels à projets compétitifs en France : le taux de sélection des projets appliqué par l’Agence a, certes, progressé en 2018 (16,2 % contre 14,9 % en 2017), mais cette hausse n’est, en réalité, que le reflet d’un léger tassement du nombre de soumissions (– 2 % à environ 9 000).

Les travaux du groupe de travail de préparation de la LPPR (cf. supra) sur le financement de la recherche (n° 1) ont montré que la sélectivité de l’agence française était particulièrement élevée par rapport à celle de ses homologues européens : 30 % aux Pays-Bas, 48 % en Allemagne, 49 % en Suisse, etc. L’agence allemande (Deutsche Forschungsgemeinschaft ou DFG) dispose, par ailleurs, d’un budget dintervention près de 5 fois plus élevé que lANR, avec 3,2 milliards d’euros en 2018. L’agence française reconnaît elle-même que cette sélectivité, elle-même issue du manque de moyens globaux, contribue à renforcer la désaffection dont elle souffre vis‑à‑vis des chercheurs : d’après les analyses qu’elle a elle-même produites, la baisse significative (– 27,7 %) du montant moyen par projet financé entre 2009 (487 000 euros) et 2018 (352 000 euros) s’explique, notamment, par la propension des chercheurs à « limiter leurs demandes ».

Ces réticences sont d’autant plus fortes que le mécanisme de prise en charge des coûts indirects supportés par les établissements porteurs ou hébergeurs des projets financés reste encore, à ce jour, largement insuffisant.

Selon les dispositions de l’article L. 329-5 du code de la recherche, « une partie du montant des aides allouées par lAgence nationale de la recherche dans le cadre des procédures dappel doffres revient à létablissement public ou à la fondation reconnue dutilité publique dans lequel le porteur du projet exerce ses fonctions ».

À cet effet, le règlement financier de lANR prévoit deux mécanismes relatifs aux bénéficiaires de financements « à coût marginal ([6]) » :

– la possibilité pour les établissements gestionnaires des contrats de prélever 8 % des aides attribuées au titre des frais généraux de gestion sans justificatifs (point 1.1.1, paragraphe e) ;

– le versement à létablissement hébergeur, à hauteur de 11 % des financements alloués, d’une aide complémentaire et forfaitaire dénommée « préciput » dont les conditions d’utilisation sont encadrées (point 3.1.5).

Comme l’an dernier, votre rapporteur estime que le taux global de couverture des frais indirects en France (20,6 % ([7])) est insuffisamment rémunérateur au regard des standards internationaux (25 % au niveau européen, 30 % au Japon, etc.). On notera, par ailleurs, que l’assiette des coûts éligibles au remboursement est plus réduite en France qu’au niveau européen en raison des réticences à mettre en place un mécanisme revenant à financer deux fois la même chose sur fonds publics ([8]).

À ce jour, si l’on excepte quelques modifications purement formelles intervenues en juillet 2019, le Règlement financier de l’Agence reste inchangé. Pourtant, les conclusions du groupe de travail précité appellent explicitement à une réforme profonde et ambitieuse du dispositif de financement de lANR. L’Agence est, ainsi, appelée à :

– porter le taux de sélection à 25 %, voire 40 %, et réévaluer à 10 % le taux de prise en charge des frais de gestion et amener le taux du préciput stricto sensu à 15 %, voire à 30 % et même 40 % via un « bonus de performance scientifique » ;

– simplifier le dispositif en permettant aux établissements concernés de percevoir ces compléments en une seule fois à partir d’un montant d’aide fixé sur l’année.

Selon loption choisie, le surcoût pour lANR se situerait dans une fourchette allant de 550 millions deuros à 2 milliards deuros.

Scenarii

Impact budgétaire pour lANR

Taux de succès : 25 %

Frais de gestion : 10 %

Préciput : 15 %

+ 550 millions d’euros

Frais de gestion : 10 %

Préciput : 15 %

+ 15 % de bonus

+ 650 millions d’euros

Frais de gestion : 10 %

Préciput : 15 %

+ 25 % de bonus

+ 750 millions d’euros

Taux de succès : 40 %

Frais de gestion : 10 %

Préciput : 15 %

+ 1,65 milliard d’euros

Frais de gestion : 10 %

Préciput : 15 %

+ 15 % de bonus

+ 1,9 milliard d’euros

Frais de gestion : 10 %

Préciput : 15 %

+ 25 % de bonus

+ 2 milliards d’euros

Source : groupe de travail n° 1 (financement de la recherche)

La mise en œuvre des premiers scénarii, articulés autour d’un fort relèvement des taux de préciput et d’une légère amélioration de la sélectivité des projets constituerait un signal fort à destination des établissements (universités et organismes), qui verraient ainsi un intérêt direct à mobiliser leurs chercheurs sur les appels à projets de l’ANR. L’impact financier d’une telle réforme apparaîtrait significatif à première vue (quasi-doublement des dotations d’État) mais non démesuré dès lors que le budget de l’Agence française resterait encore bien inférieur à celui de la DFG allemande (cf. supra).

La relative stabilité des dotations fixées dans le PLF 2020 traduit la volonté d’attendre que les arbitrages soient effectués avant de donner, le cas échéant, une nouvelle impulsion à l’ANR. Votre rapporteur invite le Gouvernement à intégrer dans la future loi de programmation pluriannuelle de la recherche les scénarii budgétaires correspondant à un relèvement important du taux de préciput, lidéal étant datteindre les 40 % (avec un « bonus » de performance scientifique de 25 %) ou, à défaut, de sen tenir à 30 % (avec un bonus de 15 %).

II.   Le budget du CEA : des moyens nouveaux pour mettre en œuvre les orientations fixées par le comité de l’énergie atomique

Créé en 1945, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) est un établissement de recherche à caractère scientifique, technique et industriel relevant de la catégorie des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC). Il est placé sous la quintuple tutelle des ministères chargés de la recherche, de l’énergie, de la défense, de l’industrie et des finances. Il intervient dans quatre grands domaines : les énergies « bas carbone » (énergies nucléaire et renouvelables), les technologies pour l’information, les technologies pour la santé, la défense et la sécurité globale. Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par les programmes 172 et 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables » ainsi qu’à titre subsidiaire par le programmes 191 « Recherche duale » et 212 « Soutien de la politique de défense ».

La situation budgétaire du secteur civil du CEA sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172-190-191-212

1 917 548

1 926 063

1 906 716

1 915 182

1 949 281

1 954 125

1 975 499

1 985 341

 dont dotation démantèlement

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

740 000

dont dotation ITER

122 200

122 200

132 900

132 900

148 200

148 200

157 500

157 500

dont dotation hors démantèlement, hors ITER et avant mise en réserve

1 047 448

1 055 963

 

 

1 057 903

1 057 903

1 079 646

1 079 646

Dotation après mise en réserve

 

1 032 000

 

1 032 800

 

1 038 700

 

1 054 443

Résultat budgétaire

 

 122 356

 

+ 92 305

 

 6 574

 

 

 Dépenses

 

2 851 556

 

3 232 795

 

3 023 274

 

 

 Recettes

 

2 729 200

 

3 325 100

 

3 016 700

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et CEA.

La dotation de l’État au CEA comporte deux « fonds dédiés » :

– l’un au financement des opérations d’assainissement et de démantèlement des installations nucléaires (crédits stabilisés à 740 millions deuros par an depuis 2016) ;

– l’autre à la participation de la France au projet de réacteur de recherche civil à fusion nucléaire ITER (2018 : 132,9 millions d’euros ; 2019 : 148,2 millions d’euros ; 2020 : 157,5 millions deuros).

Si l’on exclut ces deux fonds dédiés, les crédits de paiement alloués pour les activités civiles du CEA s’établissent à 1 079,6 millions deuros avant mise en réserve dans le projet de loi de finances pour 2020 (+ 21,7 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2019, soit + 2,06 %). Selon les informations communiquées en audition, la mise en réserve appliquée au CEA en 2020 pourrait être supérieure d’environ 6 millions d’euros par rapport au montant de l’exercice 2019, ce qui ramènerait la dotation 2020 après mise en réserve à 1 054,4 millions deuros, en progression de 15,7 millions d’euros (+ 1,52 %) par rapport à son équivalent de 2019 (1 038,7 millions deuros).

Le PLF 2019 confirme donc le rebond de la dotation hors fonds dédiés effectué depuis 2018 au profit du CEA après plusieurs années de baisse (2015 : 1 005,3 millions d’euros ; 2016 : 998,6 millions d’euros ; 2017 : 987,2 millions d’euros ; 2018 : 1 032,8 millions d’euros). Cette allocation de moyens supplémentaires doit permettre à l’établissement de procéder à de nouveaux recrutements y compris dans le secteur civil et, ainsi, de faire face aux départs en retraite : les effectifs en ETPT ([9]) avaient sensiblement diminué entre 2017 (11 708) et 2018 (11 567) ; ils repartent à la hausse en 2019 (11 611) et devraient continuer leur progression en 2020 grâce à l’élévation du plafond d’emploi du CEA (2019 : 16 149 ETPT ; 2020 : 16 389 ETPT, soit + 240 ETPT, dont + 86 pour le seul secteur civil).

Plus généralement, la hausse des dotations budgétaires traduit les impulsions données par le Comité de l’énergie atomique ([10]) dans sa réunion du 16 mai 2019 en faveur de la poursuite des études sur les réacteurs de 4ème génération à la suite du report du programme de démonstrateur technologique ASTRID ([11]), lui-même justifié par les perspectives concernant la disponibilité des ressources d’uranium jusqu’à la fin du siècle. Les moyens supplémentaires alloués en 2020 seront, pour une large part, mobilisés sur ce projet.

La réunion du comité de l’énergie atomique a également clarifié la question du financement du projet de réacteur de recherche expérimentale Jules Horowitz (RJH) à Cadarache, qui vise à maintenir la capacité de la France à effectuer des expérimentations sous irradiation aux neutrons.

En contrepartie d’économies réalisées par le CEA à hauteur de 200 millions d’euros sur la période 2020-2026 et d’efforts supplémentaires effectués par les industriels, l’État s’est engagé à apporter un soutien financier important au travers de ses dotations budgétaires ultérieures ([12]).

Par ailleurs, le CEA était pénalisé depuis 2004 par une dette considérable vis-à-vis du groupe ORANO (ex-AREVA), issue d’un accord attribuant à une filiale du groupe AREVA la responsabilité d’opérations de reprise des déchets du CEA à La Hague et de certaines opérations de démantèlement à Cadarache. En application d’un avenant conclu en 2015, le montant cumulé de cette dette, qui s’élevait à 670 millions d’euros fin 2017, aurait pu dépasser 720 millions deuros à la fin de lannée 2019 et atteindre les 800 millions deuros en 2024 lors du dernier remboursement si aucune procédure d’apurement n’avait été engagée.

Dès 2017, le Gouvernement a décidé de participer, à hauteur de 200 millions deuros, à la résorption de la dette via le compte d’affectation spéciale des participations financières de l’État et a demandé au CEA de couvrir le solde par des cessions d’actifs financiers. Selon les éléments communiqués par le CEA en audition, le capital restant dû de la dette a été ramené à 172 millions deuros au 31 décembre 2018 à l’issue des opérations de cession ([13]) et devrait être intégralement remboursé à la fin de lannée 2019.

Votre rapporteur se félicite du soutien ainsi apporté au CEA par le Gouvernement. Libéré des impasses budgétaires les plus significatives, l’organisme peut désormais concentrer ses efforts sur sa mission de modernisation des installations nucléaires françaises.

III.   L’INSERM : la problématique récurrente du financement des grands plans de santé

Créé en 1964, l’INSERM est un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la double tutelle du ministère chargé de la recherche et du ministère de la santé. Il assure la coordination stratégique et scientifique de la recherche biomédicale en France. En 2018, plus de 13 000 personnes travaillaient au sein de structures dépendantes ou associées à l’INSERM, dont 5 104 personnels statutaires, 3 035 contractuels et 5 232 hospitalo-universitaires associés.

Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par le programme 172.

La situation budgétaire de l’INSERM sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172

(et 111, 124 et 155)

632 359

632 359

632 564

632 564

635 366

635 366

639 753

639 753

 dont SCSP P172 avant mise en réserve

632 359

632 359

 

 

635 366

635 366

639 753

639 753

 SCSP P172 après mise en réserve

 

619,396

 

632 015

 

 

 

 

Résultat budgétaire

 

 38 750

 

+ 43 165

 

- 23 027

 

 

 Dépenses

 

947 210

 

884 367

 

935 589

 

 

 Recettes

 

908 460

 

927 532

 

912 561

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et INSERM.

La subvention pour charges de service public versée au titre du programme 172 avant mise en réserve s’était accrue de 3 millions d’euros (+ 0,48 %) dans la loi de finances pour 2019 pour s’établir à 635,37 millions deuros. Elle s’accroît un peu plus dans le projet de loi de finances pour 2020 (+ 4,4 millions d’euros, soit + 0,69 %, pour un montant total de 639,75 millions deuros).

À l’instar des autres EPST, l’INSERM est confronté, en dépit de ses efforts de maîtrise de la masse salariale, à une progression continue de ses charges de personnel liée aux mesures de revalorisation des carrières (PPCR) et de rémunération (compensation de la hausse de la CSG, mise en œuvre de nouvelles règles d’indemnisation du compte épargne temps, etc.). Les dépenses de personnel se sont accrues de 5,50 millions d’euros entre 2017 (539,63 millions d’euros) et 2018 (545,13 millions d’euros) en dépit d’une baisse du nombre d’ETPT (2017 : 5 744 ; 2018 : 5 716, soit – 0,49 %). Elles devraient repartir sensiblement à la hausse en 2019 (+ 10,59 millions deuros pour un total de 555,72 millions d’euros) compte tenu, notamment, des mesures salariales (+ 3,07 millions deuros) et d’une légère reprise des recrutements (+ 34 ETPT).

Par ailleurs, l’établissement reste fortement sollicité par le Gouvernement sur les grands projets de santé eu égard à ses capacités d’expertise : mise en œuvre du plan France médecine génomique 2025 et du plan de lutte contre les maladies neurodégénératives mise en place et animation d’un consortium pluridisciplinaire de préparation à la lutte contre les crises liées aux maladies infectieuses émergentes ([14]), contribution au plan de résistance aux antimicrobiens mené dans le cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), développement d’un partenariat franco-chinois dans la mise en place d’un laboratoire épidémiologique de haute sécurité (P4) à Wuhan (province de Hubei). Enfin, l’INSERM a été désigné l’an dernier responsable dun programme prioritaire de recherche sur la résistance aux antibiotiques.

Pour assurer le financement de ces différentes mesures, le ministère a décidé d’allouer, via sa « marge de gestion », des dotations complémentaires à l’INSERM : en 2018, la subvention allouée s’est élevée à 632,02 millions d’euros, soit 12,62 millions deuros de plus que celle budgétée initialement après mise en réserve (619,40 millions d’euros). Sur ces compléments, 6,3 millions deuros relevaient du financement des charges salariales et 6,1 millions deuros des grands plans de santé (notamment le programme France médecine génomique et le plan de résistance aux antimicrobiens).

Selon les éléments communiqués par l’organisme, un même processus de rattrapage est en train d’être opéré en 2019 : par rapport à la subvention allouée après mise en réserve (625,60 millions deuros), une dotation complémentaire de 1 million d’euros a été octroyée au titre du laboratoire P4, 2,5 millions d’euros pour clôturer le plan France médecine génomique et le dispositif de lutte contre les maladies neurodégénératives ainsi que 0,5 million d’euros en juillet 2019 afin de permettre aux équipes de l’INSERM compétentes sur le virus EBOLA d’intervenir en République démocratique du Congo. La subvention versée en 2019 devrait in fine dépasser les 630 millions deuros. Le programme sur l’antibiorésistance devrait, pour sa part, être financé sur le Programme des investissements d’avenir (PIA) à hauteur de 40 millions deuros sur 10 ans.

Les mêmes contraintes de gestion risquent de se prolonger encore en 2020, car, selon les informations fournies par l’INSERM, la progression de la dotation précitée de 4,4 millions d’euros ne couvrirait que le surcoût des charges de personnel à l’exclusion des grands plans de santé, pour l’instant non financés (5,4 millions deuros, dont 2 millions d’euros pour REACTing). Il n’est, par ailleurs, pas exclu qu’une mise en réserve plus importante soit appliquée en 2020 dans le cadre de la diminution de la « marge de gestion » dégagée sur les crédits, hors titre 2, du programme 172 (cf. supra), ce qui ramènerait la dotation à environ 630,50 millions deuros, c’est-à-dire au même niveau que celle versée en 2019. Une telle situation ne saurait être pleinement satisfaisante compte tenu de l’extrême sensibilité qui entoure les projets de recherche dans le domaine de la santé.

Pour cette raison, l’INSERM a engagé en 2019 des discussions avec ses ministères de tutelle en vue d’obtenir la constitution d’un « fonds » de financement d’urgence des activités de recherche en santé humaine. Ce fonds pourrait être constitué à partir des crédits alloués aux établissements de santé au titre de la recherche clinique, c’est-à-dire intégrés dans l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) ([15]).

Les négociations n’ont, pour l’instant, pas abouti en raison de la nature spécifique des lois de financement de la sécurité sociale, qui sont consacrées aux régimes de protection sociale, parmi lesquels figure le système de soins au sens strict et non les établissements publics de recherche.

Pour autant, les incertitudes qui pèsent sur la mise en réserve des crédits du programme 172 en 2020 rendent d’autant plus nécessaire la mise en place pour l’INSERM d’un accès facilité à un fonds d’urgence pour la recherche en santé humaine. Une réforme pourrait s’appuyer sur une reconnaissance dans les textes fixant les missions de létablissement (décret n° 83-975 du 10 novembre 1983) de son rôle daccompagnement du soin dans les centres hospitaliers.

Votre rapporteur réitère son soutien à cette initiative. Il appelle le ministère de la recherche à prendre contact avec son homologue de la santé afin d’étudier les possibilités de mise en place d’un accès de l’INSERM aux crédits de la recherche clinique au travers de la reconnaissance de l’organisme comme acteur du système de soins. À défaut, il appelle le Gouvernement à, tout au moins, permettre à la Direction générale de la recherche et de l’innovation (DGRI) de conserver, au travers d’une mise en réserve limitée des crédits, une « marge de gestion » suffisante de façon à pouvoir procéder à des abondements ponctuels, comme en 2018 et en 2019.

IV.   Le CNRS et INRIA : une progression encore mesurée des dotations d’état

1.   Le budget du CNRS : la question du financement des dépenses contraintes

Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) est un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) fondé en 1939. Avec 32 000 employés répartis sur l’ensemble du territoire national, le CNRS exerce son activité dans tous les champs de la connaissance et s’appuie, à cette fin, sur plus de 1 100 unités de recherche et de service. Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par le programme 172 et, à titre subsidiaire, par les programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité » et 150 (cf. supra).

La situation budgétaire du CNRS sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172-113-150

2 668 931

2 669 436

2 668 195

2 669 605

2 695 232

2 696 222

2 732 109

2 733 891

 dont SCSP P172-150 avant mise en réserve

2 622 113

2 622 113

 

 

2 643 778

2 643 778

2 673 056

2 673 056

 SCSP P172-150 après mise en réserve

 

2 580 877

 

2 614 592

 

2 629 938

 

 

Résultat budgétaire

 

 15 374

 

+ 66 234

 

- 67 201

 

 

 Dépenses

 

3 333 918

 

3 386 311

 

3 485 615

 

 

 Recettes

 

3 318 544

 

3 452 545

 

3 418 414

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et CNRS.

Les subventions pour charges de service public (SCSP) inscrites au titre des programmes 172 et 150 dans les lois de finances avant mise en réserve progressent de manière continue depuis 2017 : 2,62 milliards d’euros en 2018 (+ 17,98 millions d’euros) ; 2,64 milliards d’euros en 2019 (+ 21,67 millions d’euros) ; 2,67 milliards deuros dans le projet de loi de finances pour 2020 (+ 29,28 millions d’euros, soit + 1,11 %).

Cet effort ne permet pas, à lui seul, de couvrir l’intégralité des dépenses du CNRS, qui progressent sensiblement chaque année (+ 71,47 millions d’euros entre les réalisés 2017 et 2018 et + 99,30 millions d’euros entre le réalisé 2018 et le budget 2019), essentiellement au niveau des charges de personnel (2017 : 2,41 milliards d’euros ; 2019 : 2,52 milliards d’euros, soit une hausse de 108,74 millions deuros en 2 ans). Cette progression traduit les effets du glissement vieillesse technicité (GVT), estimé à 25 millions deuros par an, ainsi que des mesures de revalorisation des carrières et des rémunérations intervenues au cours des dernières années (protocole PPCR, réforme du régime indemnitaire ([16]), compensation de la hausse de la CSG, etc.). L’impact de ces mesures a été évalué à 26,7 millions deuros sur la seule année 2018.

Pour couvrir ses dépenses (toutes catégories confondues), le CNRS a pu bénéficier, en 2018, d’un apport significatif au titre de ses ressources propres (837,95 millions d’euros, soit + 50,91 millions deuros) en raison, notamment, d’une nette amélioration des produits issus de lANR. Toutefois, leur évolution est trop aléatoire pour constituer des ressources pérennes.

Pour cette raison, l’établissement a reçu de l’État en 2018 une dotation complémentaire de 33,72 millions deuros au travers de la « marge de gestion » dégagée sur le programme 172, amenant le montant de la SCSP effectivement versée (2,61 milliards d’euros) à un niveau très proche de celui inscrit en loi de finances (2,62 milliards d’euros). En 2019, la mise en réserve reste limitée comme en témoigne le niveau de la subvention notifiée (2,63 milliards d’euros). Il est souhaitable quil en soit de même en 2020 en raison de la légère progression attendue des effectifs, qui pourraient dépasser les 33 000 ETPT cette année-là (contre 32 377 ETPT en 2018) et l’on peut, à cet égard, sinquiéter légitimement des perspectives de rehaussement du taux de mise en réserve, hors titre 2, sur le programme 172 (cf. supra).

L’année précédente, la nouvelle direction du CNRS avait décidé d’opter pour un prélèvement sur son fonds de roulement pour financer, à hauteur de 80 millions deuros sur deux ans, une vaste opération de soutien aux laboratoires et de recrutement de 300 doctorants. Selon les données fournies par l’établissement, les échéances de réalisation annoncées ont été respectées : recrutement des doctorants en deux étapes (1er octobre 2019 et 1er octobre 2020) pour un coût total de 44 millions deuros, soutien aux laboratoires (investissements informatiques, développement de la prématuration, etc.) pour un coût d’environ 15 millions deuros par an.

2.   INRIA : un opérateur au service de la souveraineté numérique de la France qui mériterait d’être plus largement soutenu

Créé en 1967, l’Institut de recherche en informatique et en automatique (INRIA) est un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la double tutelle des ministères chargés de la recherche et de l’industrie. Il a pour missions de produire une recherche d’excellence dans les champs informatiques et mathématiques des sciences du numérique et de garantir l’impact, notamment économique et sociétal, de cette recherche. INRIA s’appuie sur plus de 180 équipes‑projets déployées au sein de huit centres de recherche répartis dans toute la France et représentant environ 2 500 personnes. Dans les lois de finances, l’établissement est financé exclusivement par une dotation du programme 172.

La situation budgétaire d’INRIA sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172 avant mise en réserve

173 252

173 252

172 323

172 308

173 946

173 946

174 894

174 894

 SCSP après mise en réserve

 

170 771

 

172 133

 

172 643

 

173 310

Résultat budgétaire

 

 6 699

 

+11 426

 

 

 

 

 Dépenses

 

236 508

 

227 554

 

239 766

 

 

 Recettes

 

229 809

 

238 980

 

235 104

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et INRIA.

Après avoir évolué à un rythme très mesuré dans les lois de finances pour 2018 et 2019 (respectivement + 0,55 million d’euros et + 0,69 million d’euros), la subvention pour charges de service public versée à INRIA au titre du programme 172 (avant mise en réserve) progresse de près de 1 million d’euros (+ 0,95 million d’euros, soit + 0,54 %) pour s’établir à 174,89 millions deuros dans le projet de loi de finances pour 2020. Si l’on compare les montants notifiés (après mise en réserve), la progression est plus mesurée (2019 : 172,64 millions d’euros ; 2020 : 173,31 millions deuros, soit + 0,49 million deuros).

Comme l’an dernier, les moyens supplémentaires alloués à ce stade ne seront pas suffisants pour couvrir les effets du GVT, évalués à 1,5 million deuros par an. La mise en œuvre par l’organisme des priorités qui lui ont été assignées dans le cadre du contrat d’objectifs et de performance (COP) 2015-2019 (sécurité numérique, intelligence artificielle « responsable », calcul haute performance, etc.) a occasionné de nouveaux recrutements de personnels permanents et contractuels (2017 : 2 392 ; 2018 : 2 468) et ainsi contribué à une relance des dépenses de personnel, qui devraient passer de 162,55 millions d’euros en 2017 (réalisé) à 174,29 millions d’euros en 2019 (prévision). Les ressources propres (2018 : 66,85 millions d’euros ; 2019 [prév.] : 62,46 millions d’euros) ne seront pas suffisantes pour absorber l’intégralité de ces surcoûts.

En 2019, INRIA a bénéficié, au travers de la « marge de gestion » du ministère, d’un complément de subvention de 1,8 million deuros au titre du plan « Intelligence artificielle ». Il est essentiel que le ministère puisse disposer, en 2020, dune marge de manœuvre similaire ou, à défaut, dun « dégel » partiel de la mise en réserve afin d’aider l’organisme à mettre en œuvre les objectifs qui découlent du nouveau contrat d’objectifs et de performance (COP) conclu avec l’État pour la période 2019‑2023 (maintien de l’excellence scientifique, renforcement de l’impact économique de l’établissement, accroissement de son apport aux politiques publiques, notamment de sécurité et de défense).

À terme, le positionnement d’INRIA comme « outil de la souveraineté et de lautonomie stratégique numérique de la Nation » et le renforcement de ses performances en matière de création de start-ups nécessiteront de la part de l’État un engagement financier significatif, estimé par l’établissement à 150 millions deuros par an (hors dépenses d’investissement immobilier) sur l’ensemble du COP.

Votre rapporteur salue les efforts ainsi opérés par les deux organismes pour renforcer leurs capacités de recherche dans un contexte budgétaire relativement contraint. Il rappelle, toutefois, l’exigence qui s’attache à ce qu’ils puissent bénéficier en 2020, comme en 2018 et en 2019, de dotations complémentaires au titre de la « marge de gestion » du ministère afin de financer les surcoûts auxquels ils devront probablement faire face en matière de charges de personnel.

 


—  1  —

V.   INRAE : l’émergence d’un nouvel acteur de l’excellence scientifique française issu de la fusion INRA-IRSTEA

Fondé en 1946, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) est depuis 1984 un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST), placé sous la double tutelle des ministères chargés de la recherche et de l’agriculture. L’INRA couvre des champs disciplinaires très différents, qu’il s’agisse des sciences de la vie, des sciences économiques et sociales, des sciences de l’environnement ou des sciences de l’aliment.

Depuis 1982, l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA) est, comme l’INRA, un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la double tutelle des ministères chargés de la recherche et de l’agriculture. Ses domaines d’intervention sont la maîtrise des risques naturels, sanitaires et environnementaux, la bio-économie, la gestion adaptative des ressources sous la contrainte du changement climatique et la biodiversité.

Compte tenu de la proximité de leurs missions respectives, le Gouvernement a invité le 6 février 2018 les deux établissements à procéder à leur fusion le 1er janvier 2020 au plus tard. Le nouvel environnement sintitulera « Institut national de recherche pour lagriculture, lalimentation et lenvironnement » (INRAE). Fin 2018, les effectifs cumulés des deux organismes s’élevaient à 10 587 ETPT, dont 8 406 emplois de personnels titulaires et 2 181 emplois de personnels contractuels.

Dans les lois de finances, le nouvel établissement est financé à titre principal par les programmes 172 et 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles » ainsi qu’à titre subsidiaire par les programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité », 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », 215 « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture » et 776 « Recherche appliquée et innovation en agriculture ».

La situation budgétaire cumulée des deux organismes en 2018 et en 2019, puis celle du nouvel établissement en 2020, se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018*

Réalisé 2018*

LFI 2019*

PLF 2020

 

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P172-113-142-149-162 -206-215-776 *

781 812

781 212

787 159

786 934

792 208

793 479

803 160

803 281

 Dont SCSP tous programmes avant mise en réserve

781 812

781 212

 

 

791 608

792 879

802 560

802 680

 SCSP tous programmes après mise en réserve

 

769 761

 

781 083

 

784 816

 

 

Résultat budgétaire

 

- 8 391

 

+ 30 633

 

 6 371

 

 

 Dépenses

 

997 706

 

990 066

 

1 013 747

 

 

 Recettes

 

989 315

 

1 020 699

 

1 007 375

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et INRA-IRSTEA.

* Les montants 2018 et 2019 sont l’addition de ceux de l’INRA et de l’IRSTEA.

L’évolution des dotations sur la période 2018-2020 illustre l’effort consenti par l’État pour accompagner le processus de rapprochement entre les deux organismes : le cumul des deux subventions pour charges de service public versées à l’INRA et à l’IRSTEA en 2018 s’est élevé à 781,08 millions deuros en crédits de paiement, soit un niveau très proche de la somme des subventions inscrites en loi de finances initiale de cet exercice avant mise en réserve (781,21 millions deuros). En 2019, les subventions budgétées sont portées à 784,82 millions deuros (+ 3,73 millions d’euros par rapport au réalisé 2018) : selon les informations communiquées par l’INRA, elles devraient bénéficier d’un abondement complémentaire de 2 millions d’euros en cours de gestion.

En sus des dotations d’État, les perspectives de ressources propres ([17]) plus élevées que prévu, notamment pour l’INRA (206,1 millions d’euros en exécution prévisionnelle 2019, contre 194,4 millions d’euros inscrits au budget), devraient permettre aux deux établissements de faire face au ressaut significatif des dépenses qui devrait être observé cette année (+ 23,68 millions deuros, soit un total de 1 013,75 millions deuros) en raison, notamment :

– de la progression des charges de personnel liée à la légère progression des effectifs entre 2018 (10 587 ETPT) et 2019 (10 611), aux effets du glissement vieillesse technicité (GVT), évalués à environ 5 millions deuros chaque année, ainsi que de l’impact du rapprochement des régimes indemnitaires des deux établissements (surcoût estimé à 2,5 millions deuros par an) ;

– de la mise en œuvre de diverses mesures ponctuelles directement liées à la fusion, notamment l’extension du système informatique de gestion à l’ensemble des composantes de la nouvelle entité (3,9 millions deuros en 2019).

En 2020, première année de gestion de l’INRAE, les dépenses de personnel devraient continuer leur progression en dépit de la forte réduction envisagée des effectifs contractuels (2019 : 2 295 ETPT ; 2020 : 1 991 ETPT) et de la poursuite de la diminution progressive du nombre de titulaires (2019 : 8 316 ; 2020 : 8 289). La mise en place d’un programme scientifique intégré et l’alignement correspondant des dotations de fonctionnement des unités scientifiques devraient, en outre, engendrer de nouvelles dépenses, estimées à 3,1 millions deuros en 2020. Enfin, le nouvel établissement devrait poursuivre les travaux de reconstruction d’une halle technologique de l’IRSTEA (Cévennes) à Montpellier, qui s’était effondrée en mars 2018 (coût de l’opération sur 2020‑2022 : 4,5 millions deuros).

Compte tenu de ces contraintes, la subvention inscrite dans le projet de loi de finances pour 2020 (avant mise en réserve) apparaît satisfaisante : elle s’élève, tous programmes confondus, à 802,68 millions deuros en CP, ce qui représente une progression de 9,8 millions d’euros par rapport au montant inscrit en loi de finances pour 2019 (792,88 millions d’euros) et de 17,86 millions d’euros par rapport à la subvention notifiée après mise en réserve (784,82 millions deuros).

LÉtat est appelé à effectuer en 2020, comme en 2018 et en 2019, des abondements complémentaires au profit de lINRAE afin de lui permettre de mener à bien le processus de convergence entre les deux anciennes entités.

Au cours de leur audition à l’Assemblée nationale, les membres du nouvel établissement ont répété que la fusion n’était aucunement un prétexte à de quelconques économies budgétaires et que l’objectif recherché était lémergence dune culture scientifique commune. Les domaines de recherche de deux organismes sont, par nature, complémentaires : lorsqu’il est, par exemple, demandé à l’État de fournir un avis sur les techniques d’épandage agricoles, l’INRA peut faire valoir sa connaissance des produits phytopharmaceutiques et l’IRSTEA, pour sa part, mobiliser ses compétences en matière d’agroéquipements.

Par ailleurs, la direction de l’INRAE a assuré qu’aucun site scientifique n’aurait à souffrir du processus de fusion et, en contrepartie d’une rationalisation des fonctions de support, il est même envisagé de renforcer les effectifs de chercheurs en 2020 (1 965 ETPT prévus, contre 1 954 à fin 2018).

Comme l’an dernier, votre rapporteur se félicite de l’état d’esprit dans lequel s’opère ce rapprochement. Il invite le Gouvernement à faire usage de la marge de manœuvre budgétaire disponible pour couvrir les besoins qui seraient éventuellement exprimés, en cours d’exercice, par le nouvel opérateur dans le cadre de la phase de convergence. Pour les exercices 2021 et suivants, il conviendra, par ailleurs, de veiller à ce que l’INRAE puisse faire face aux surcoûts issus du rapprochement des régimes indemnitaires des deux organismes.

 

 


—  1  —

   deuxième partie :

les situations toujours aussi contrastées du CNES (programme 193) et de L’IFP-EN (programme 190)

Les crédits affectés au programme 193 « Recherche spatiale » progressent fortement depuis deux ans, passant de 1,60 milliard deuros en 2018 (réalisé) à 2,03 milliards deuros dans le projet de loi de finances pour 2020 (+ 27,29 %). Les crédits du programme 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables » s’accroissent à un rythme beaucoup plus faible sur la même période (CP 2018 : 1,72 milliard deuros ; CP 2020 : 1,77 milliard deuros, soit + 2,88 %).

(En milliers d’euros)

 

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Total du programme 190

1 743 903

1 717 516

1 763 264

1 722 927

1 791 521

1 766 930

Dont crédits aux opérateurs

1 597 692

1 597 692

1 527 858

1 527 858

1 552 873

1 552 873

Part (%)

91,62

93,03

86,65

88,68

86,68

87,89

Total du programme 193

1 597 665

1 597 665

1 820 013

1 820 013

2 033 626

2 033 626

Dont crédits aux opérateurs

1 597 665

1 597 665

1 820 013

1 820 013

2 033 626

2 033 626

Part (%)

100

100

100

100

100

100

Source : RAP 2018 et PLF 2020.

Les crédits du programme 193 sont intégralement constitués des dotations de l’État à deux opérateurs : le Centre national d’études spatiales (CNES) et Météo-France (contribution française à l’Organisation européenne de satellites météorologiques EUMETSAT). Ceux du programme 190 comprennent des dotations à six opérateurs (pour un peu moins de 90 % des crédits ([18])), notamment IFP - Énergies nouvelles (IFP-EN), le CEA et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Parmi les opérateurs du programme 190, lIFP-EN est, comme lan dernier, le seul organisme à voir ses dotations diminuer.

I.   IFP-Énergies nouvelles : un acteur essentiel DE LA TRANSITION énergétique de nouveau pénalisé

IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN), né initialement en 1919 sous le nom « d’Institut français du pétrole », est un établissement public industriel et commercial placé sous la double tutelle du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, et du ministère de l’économie et des finances. Il est chargé de « développer les technologies et les matériaux du futur dans les domaines de lénergie, du transport et de lenvironnement » et de favoriser leur transfert vers les filières industrielles associées. Ses trois priorités en matière de recherche portent sur les domaines de la « mobilité durable », des « énergies nouvelles » et des « hydrocarbures responsables ».

L’organisme dispose, par ailleurs, d’un important portefeuille de participations industrielles (AXENS : procédés de raffinage, pétrochimie et catalyseurs, BeicipFranlab : conseil et logiciels en géoscience, start-ups de transition énergétique, etc.). En 2018, l’Institut disposait d’un effectif de 1 841 personnes en équivalents temps plein travaillé (ETPT), dont 219 temporaires, 77 employés en CDD et 1 545 en CDI. Sagissant de la part publique de ses ressources, lorganisme est financé intégralement par une subvention pour charges de service public du programme 190.

La situation budgétaire de l’IFP-EN ([19]) sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P190

130 111

130 111

128 264

128 264

125 290

125 290

123 290

123 290

 dont SCSP avant mise en réserve

130 111

130 111

 

 

125 290

125 290

123 290

123 290

 SCSP après mise en réserve

 

128 500

 

128 264

 

124 200

 

 

Résultat budgétaire

 

7 950

 

4 796

 

 3 400

 

 

 Dépenses

 

293 650

 

287 718

 

283 000

 

 

 Recettes

 

285 700

 

282 922

 

279 600

 

 

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et IFP-EN.

La subvention pour charges de service public allouée à l’IFP-EN avant mise en réserve avait été ramenée à 125,90 millions d’euros en 2019, contre 130,11 millions d’euros en 2018 (‑ 3,71 %). Après une mise en réserve levée en partie, la subvention prévisionnelle a été ramenée à 124,20 millions d’euros. En 2020, elle est, de nouveau, sensiblement réduite (‑ 1,60 %) et s’établit à 123,2 millions deuros avant mise en réserve. Si une mise en réserve de 1,8 million d’euros est appliquée en 2020, la subvention allouée sélèvera à 121,49 millions deuros : elle sera alors inférieure de 2,71 millions d’euros à celle de 2019 et de 6,77 millions d’euros à celle effectivement versée en 2018 (128,26 millions deuros).

Le traitement spécifique appliqué à l’organisme se justifie, en apparence, par l’importance de ses ressources propres (produits des brevets et dividendes des filiales), celles-ci s’élevant chaque année à environ 150 millions d’euros (144,87 millions deuros ([20]) en 2018), soit la moitié du total des ressources (51,21 % en 2018). Ces recettes restent globalement stables d’une année sur l’autre et sont même légèrement en baisse si l’on considère le réalisé des exercices 2016 (150,57 millions deuros) et 2017 (146,07 millions deuros).

La réduction de l’effort financier de l’État apparaît d’autant moins compréhensible que lorganisme a engagé depuis 2018 une réorientation profonde de ses activités de recherche vers les nouvelles technologies environnementales, comme en témoigne le graphique ci-dessous :

(1) Les dépenses prises en compte sont celles des rapports annuels de performance 2017 et 2018 (charges décaissables uniquement).

(2) Rubrique prise en compte en 2017 : « Recherche sur moteurs et procédés de combustion ».

Selon les données fournies par l’établissement en audition, la réorientation se poursuit en 2019 et devrait aboutir à réduire encore la part « hydrocarbures » de 14 millions deuros environ au profit de celles consacrées à la mobilité durable et aux énergies nouvelles. Les projets développés avec succès par l’IFP‑EN dans ces domaines ne manquent pas : fabrication d’un caoutchouc issu de ressources végétales, mise en place de systèmes houlomoteurs pour les éoliennes marines, développement de mécanismes de captage et de stockage de dioxyde de carbone, etc.

L’organisme poursuit, par ailleurs, ses efforts de stabilisation de la masse salariale autour de 150 millions deuros par an au prix d’une réduction progressive de ses effectifs depuis 2011 (2011 : 1920 ; 2018 : 1841, soit – 4,11 %) et d’un accroissement de la part des emplois temporaires ou en contrat à durée déterminée (CDD) depuis 2015 (2015 : 13,5 % du total des effectifs ; 2018 : 16,1 %).

Comme lan dernier, votre rapporteur regrette que soit ainsi pénalisé un organisme résolument tourné vers la transition énergétique et dont les efforts de bonne gestion sont significatifs. Il invite le Gouvernement à limiter en 2020, comme en 2019, le recours au mécanisme de mise en réserve de façon à maintenir la dotation au-dessus du seuil de 122 millions d’euros. Il estime également essentiel que l’organisme puisse avoir la garantie de voir sa dotation stabilisée sur la prochaine période budgétaire triennale (2021-2023).

II.   Le Centre national d’études spatiales (CNES) : la France au cœur de l’effort européen de recherche dans le domaine spatial

Institué en 1961, le Centre national d’études spatiales (CNES) est un établissement public industriel et commercial placé sous la double tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la défense. Chargé de proposer au Gouvernement et de mettre en œuvre la politique spatiale de la France en Europe, le CNES est à la fois une agence de programmes et un centre technique dont l’activité s’inscrit dans un cadre multinational, notamment en partenariat privilégié avec l’Agence spatiale européenne (ASE/ESA), où il représente la France. Les effectifs du CNES sont d’environ 2 300 collaborateurs (2 347 en août 2019, dont la quasitotalité en CDI).

Dans les lois de finances, l’établissement est financé à titre principal par le programme 193 et, à titre subsidiaire, par le programme 190 « Recherche duale (civile et militaire) ».

La situation budgétaire du CNES sur la période 2018-2020 se présente comme suit :

(En milliers d’euros)

 

LFI 2018

Réalisé 2018

LFI 2019

PLF 2020

 

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dotation P191193

1 687 532

1 687 532

1 662 803

1 662 803

1 891 756

1 891 756

2 112 765

2 112 765

 dont transfert ASE/ESA

965 000

965 000

963 000

963 000

1 175 000

1 175 000

1 401 009

1 401 009

 Dont dotation dinvestissement P191

106 374

106 374

98 375

98 375

106 374

106 374

91 141

91 141

 Dont SCSP avant mise en réserve

615 602

615 602

 

 

610 382

610 382

620 615

620 615

 SCSP après mise en réserve

 

594 988

 

586 289

 

594 876

 

 

Résultat budgétaire*

 

- 157 926

 

- 11 150

 

+ 5 304

 

 

 Dépenses

 

1 438 869

 

1 334 330

 

1 347 809

 

 

 Recettes

 

1 280 943

 

1 323 180

 

1 353 113

 

 

(*) Hors transferts à l’Agence spatiale européenne (ASE/ESA)

Source : Analyse du rapport annuel de performance 2018, PLF 2020 et CNES.

Comme en 2018 et en 2019, le projet de loi de finances pour 2020 est marqué par la volonté de la France de maintenir un haut degré d’investissement dans la recherche spatiale. Après une hausse de 204,78 millions deuros (+ 12,14 %) en 2019, les crédits alloués au CNES (AE/CP) progressent de 221 millions deuros en 2020 pour sétablir à 2,11 milliards deuros (+ 11,68 %). Dans cet ensemble, la France accroît, une nouvelle fois sa contribution à l’Agence spatiale européenne (ASE/ESA), qui est portée à 1,40 milliard deuros en 2020, contre 1,18 milliard deuros en 2019 (+19,23 %).

Les moyens ainsi alloués permettront, d’abord, à notre pays de résorber entièrement sa dette vis-à-vis de l’Agence, conformément au plan de désendettement décidé en 2017. Le différentiel entre les besoins en contribution de la France vis-à-vis l’ASE/ESA et les fonds réellement versés sera réduit à environ 282 millions d’euros à la fin de l’année 2019 (contre 412 millions d’euros à la fin de 2018) et devrait être presque intégralement résorbé à la fin de lannée 2020. Cet effort considérable permet à la France de rester le premier pays européen contributeur à l’ASE/ESA devant l’Allemagne, place qu’elle avait perdue en 2016 et qu’elle a récupérée en 2017. Notre pays conserve un rôle prééminent la mise en œuvre des grands projets de coopération européenne et disposera ainsi d’un poids non négligeable lorsque les États membres définiront les nouvelles orientations de l’Agence lors du prochain conseil ministériel prévu à Séville les 27 et 28 novembre prochains.

Lors de cette conférence, les projets portés par la France devraient être confortés. Au titre des lanceurs, le premier vol d’Ariane 6 reste programmé pour le second semestre 2020. Afin de lutter contre la concurrence internationale, le projet Prometheus de moteur partiellement réutilisable devrait donner lieu à un premier essai à feu à la même période. Le programme Copernicus d’observation de la Terre devrait bénéficier d’une nouvelle impulsion : en plus des 6 satellites Sentinelles en cours de déploiement, des satellites de nouvelle génération devraient être déployés dans les années 2020 afin d’observer les émissions de dioxyde de carbone ainsi que les zones polaires, agricoles et forestières.

Le conseil ministériel devrait, par ailleurs, engager une nouvelle phase de développement du système spatial de navigation européen et, notamment, de sa composante de géolocalisation Galileo. Bien que deux pannes, sans grandes conséquences, soient intervenues depuis le lancement de l’application en juillet 2018, celle-ci connaît aujourd’hui un succès croissant : plus dun milliard dusagers ont été recensés par la Commission européenne en septembre 2019, ce qui devrait encourager les États membres à envisager le développement d’une nouvelle génération du système au cours des années 2021-2027.

Hors contribution à l’ASE/ESA, la dotation de l’État au CNES reste quasiment stable à 711,76 millions deuros en 2020 (2019 : 716,76 millions deuros, soit – 0,70 %). Comme l’an dernier, ces montants restent largement supérieurs à la dotation effectivement versée en 2018 (698,06 millions deuros). Les crédits alloués permettront au CNES de mener à bien certains des projets conclus avec des agences non européennes.

L’établissement porte actuellement ses efforts dans le développement d’un Observatoire spatial du climat (Space Climate Observatory), dont le lancement a été effectué par le Président de la République au Salon international de l’aéronautique et de l’espace (SIAE) du Bourget le 17 juin dernier. Le projet, qui vise à fédérer au niveau mondial les ressources des agences spatiales et météorologiques afin de mieux mesurer les impacts du changement climatique, est soutenu par la totalité des agences européennes ainsi que par la Chine, lInde, la Russie, le Mexique, le Maroc et les Émirats arabes unis.

Les projets pour lesquels le CNES assure la maîtrise d’ouvrage bénéficient, pour leur part, de financements dédiés. Ainsi, le programme franco‑allemand de reconnaissance militaire par composante spatiale optique (CSO) a fait l’objet d’un financement via la direction générale de l’armement (DGA) de 173,2 millions deuros en 2017 et de 133,58 millions deuros en 2018, ce qui a permis d’effectuer avec succès le lancement du premier satellite en décembre 2018.

Les financements alloués via le programme des investissements d’avenir (PIA) permettent également au CNES d’être réactif sur des projets thématiques d’excellence à haut contenu technologique. Ainsi, le projet MicroCarb ([21]), qui avait pu être initié rapidement grâce à la mobilisation immédiate de fonds sur le deuxième volet du PIA en 2016, a bénéficié l’an dernier d’une nouvelle enveloppe de 62,2 milliards deuros dans le cadre du PIA 3.

Comme lan dernier, votre rapporteur se félicite de leffort ainsi confirmé pour la recherche spatiale française et européenne. Un tel effort est d’autant plus essentiel que le marché des lanceurs spatiaux est en pleine recomposition : sur les 114 lancements orbitaux effectués en 2018, 39 ont été effectués par la Chine (34 %), 31 par les États-Unis (27 %), 20 par la Russie (18 %) et seulement 8 par l’Europe (7 %), soit presque autant que l’Inde (6 %) ([22]).

Au-delà de la traditionnelle compétition entre les grandes puissances, le champ des applications du spatial sétend aujourdhui de manière considérable et pourrait couvrir à terme la plupart des activités humaines : la gestion de l’énergie au travers de la surveillance du réchauffement climatique, le développement de nouveaux modes de transport au travers de l’aide au positionnement des véhicules et des navires, la numérisation de l’économie au travers de l’utilisation des objets connectés, etc. Ces potentialités attirent de nouveaux acteurs, essentiellement privés, qui composent une « nouvelle économie de l’espace » (New Space) et avec lesquels les agences étatiques traditionnelles sont appelées à coopérer plus étroitement.

 

Votre rapporteur estime que lEurope ne peut se permettre de prendre du retard dans la constitution dune nouvelle offre de lanceurs compétitifs (Ariane 6 et Prometheus) : il note avec satisfaction que l’ampleur des moyens financiers alloués au CNES devrait contribuer à ce quune impulsion décisive soit donnée au conseil ministériel de Séville des 27 et 28 novembre prochain.

Il appelle également l’établissement à renforcer ses liens avec les acteurs privés de la « nouvelle économie de lespace » et se félicite des premiers partenariats conclus, notamment dans le domaine des nano-satellites avec la société HEMERIA (projet ANGELS) et la start-up KINEIS (internet des objets connectés).

 


—  1  —

   troisième partie :

l’affirmation progressive des satt
comme des acteurS clef de la valorisation
dans l’écosystème de la recherche publique

Le terme de « valorisation » de la recherche publique regroupe les procédés ou les structures permettant aux connaissances produites par les acteurs publics de la recherche (universités, grands organismes, etc.) d’être utilisées par les entreprises (ou les chercheurs eux-mêmes) afin de produire une valeur économique et sociale.

La valorisation peut s’appuyer sur des transferts de technologies, des travaux de recherche partenariale associant les laboratoires publics et les entreprises ou la mise à disposition de chercheurs auprès d’entreprises.

I.   le potentiel des satt dans la valorisation des résultats de la recherche publique  

1.   Le positionnement des SATT au regard des autres structures de valorisation issues du PIA

Pour pallier les retards persistants de la France en matière de valorisation de la recherche, les pouvoirs publics ont choisi de créer des structures ex nihilo positionnées dans les domaines où les entreprises ne bénéficiaient pas toujours d’acteurs clairement identifiés, à l’exception des quelques organismes de recherche nationaux qui avaient mis en place leurs propres filiales de valorisation (CNRS, INRA, INSERM, etc.). Ces structures bénéficient d’un financement public issu du programme des investissements davenir (PIA), créé par la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010. Ces financements transitent par l’Agence nationale de la recherche (ANR), opérateur du programme.

Le paysage français de valorisation de la recherche publique a été présenté dans sa globalité dans l’avis budgétaire publié l’an dernier ([23]). La plupart des structures créées (instituts de recherche technologique, instituts pour la transition énergétique, labels « Carnot ») relèvent dune logique de projet de recherche partenariale associant des acteurs publics et privés préalablement identifiés.

Les sociétés daccélération du transfert de technologies (SATT) exercent leurs activités sur un champ sectoriel et territorial potentiellement plus large.

1. Les SATT disposent d’importantes capacités d’action liées à leur personnalité juridique et aux moyens financiers mis par l’État à leur disposition.

Ce sont des sociétés par actions simplifiées créées par un ou plusieurs établissements de recherche publique et chargées d’assurer l’interface entre les laboratoires publics et les entreprises sur un territoire donné. Leur capital est détenu à 67 % par des établissements publics de recherche ou d’enseignement supérieur et à 33 % par Bpifrance (depuis 2019). Selon la convention conclue le 29 juillet 2010 entre l’État et l’ANR, les SATT « ont vocation à regrouper lensemble des équipes de valorisation de sites universitaires et à mettre fin au morcellement des structures pour améliorer significativement lefficacité du transfert de technologies et la valeur économique créée. »

Les SATT ont été dotées d’un financement du premier volet du PIA de 850 millions deuros sur dix ans ([24]). Le troisième volet du PIA (2017) leur alloue de nouveaux moyens (dotations et subventions) sur une nouvelle période de dix ans à hauteur de 230 millions deuros.

2. Les prestations offertes par les SATT dans le domaine de la valorisation sont très variées. À partir d’une innovation donnée, la SATT peut être chargée d’effectuer toutes les procédures aboutissant à la reconnaissance du droit de propriété à létablissement dorigine (dépôt de brevets). Elle peut également obtenir la licence de l’innovation de l’établissement propriétaire et démarcher les entreprises potentiellement intéressées afin de leur proposer, moyennant un prix, une sous-licence.

Les SATT disposent également de capacités de « maturation » des innovations, c’est-à-dire en effectuant ou en finançant toutes les démarches visant à accroître le degré de maturité dune technologie (expertise sur la faisabilité technologique, industrielle, économique et juridique de l’innovation, mise à l’épreuve dans des situations proches du marché, démonstration du potentiel par des projets pilotes, etc.). Elles peuvent enfin apporter un soutien à la création de start-ups, y compris pour des chercheurs publics qui souhaiteraient s’engager dans un projet entrepreneurial.

3. Les SATT sont présentes sur lensemble du territoire national, à l’exception de la Normandie et de l’outre-mer. Treize SATT sont actuellement en activité : Aquitaine Science Transfert (Talence, près de Bordeaux), AXLR (Montpellier), Conectus (Illkirch), Erganeo, et Lutech (Paris), Linksium (Grenoble), Nord (Lille), Ouest Valorisation (Rennes), Paris Saclay (Orsay), Pulsalys (Villeurbanne), Sayens (Dijon), Sud‑Est (Marseille) et Toulouse Tech Transfert (Toulouse). Une quatorzième SATT avait été créée à Clermont-Ferrand (Grand Centre), mais a été fermée en 2018.

Depuis leur création, les SATT se sont clairement positionnées comme des acteurs territoriaux de la valorisation des résultats de recherche obtenus dans les universités et établissements assimilés : à ce jour, 29 universités ou communautés d’universités et d’établissements (COMUE) sont actionnaires des 13 SATT. La SATT Sud-Est, par exemple, compte parmi ses fondateurs les universités d’Aix-Marseille, de Nice Sophia Antipolis, d’Avignon, de Toulon ainsi que celle de Corse. La signature, le 16 novembre 2018, d’une convention de partenariat entre l’association Réseau SATT et la Conférence des présidents d’université (CPU) témoigne de l’attention portée par les universités aux travaux des SATT.

Les SATT entretiennent des relations plus ou moins étroites avec les organismes de recherche nationaux : à l’exception du CNRS et de l’INSERM, qui sont respectivement actionnaires de 13 et de 6 SATT, les organismes préfèrent n’être présents que dans les SATT qui sont les plus proches d’un point de vue sectoriel ou géographique : le CEA, par exemple, est actionnaire des SATT Paris Saclay et Linksium, situées respectivement à proximité de deux de ses plus importants centres de recherche (Orsay et Grenoble). D’autres organismes, comme l’INRA, l’IFP-EN et le CNES, ne sont actionnaires d’aucune SATT mais développent avec certaines d’entre elles des partenariats ponctuels.

2.   La montée en puissance du dispositif au cours des dernières années

Bien que les SATT aient mis plusieurs années (2012-2014) à être créées et à déployer leurs activités, leurs résultats opérationnels sont aujourdhui loin dêtre négligeables, comme en témoigne le tableau ci-dessous :

RÉSULTATS CUMULÉS DES SATT AU 31 DÉCEMBRE 2018

SATT

Nombre de projets de maturation engagés

Nombre de brevets déposés

Nombre de licences concédées

Nombre de startups créées

Conectus

102

208

99

20

Sud Est

158

261

78

19

Toulouse Tech Transfert

249

210

97

14

Lutech

132

186

51

20

Erganeo

127

211

45

13

Ouest Valorisation

215

305

113

47

Nord

142

99

39

13

Aquitaine Science Transfert

126

227

74

21

AxLR

143

124

55

29

Grand Centre (fermée en 2018)

63

74

11

1

Sayans

94

99

19

7

Pulsalys

172

247

60

26

Linksium

102

89

18

33

Paris Saclay

57

12

11

15

Total

1 882

2 352

770

278

Source : Direction générale de la recherche et de linnovation (DGRI)

L’activité des SATT semble même monter en puissance au cours des deux dernières années. Ainsi, à la fin de l’année 2016, elles n’avaient engagé que 1 110 projets de maturation et n’avaient concédé que 464 licences, ce qui, dans les deux cas, représente une progression de près de 70 % en deux ans. Le dynamisme est particulièrement sensible dans le domaine de la création de start-ups, puisque les SATT en avaient initié 154 à la fin de 2016, 209 à la fin de 2017 (+ 35,7 %) et 278 à la fin de l’année dernière (+ 33 %).

Selon le président de Réseau SATT, lors de son audition à l’Assemblée nationale, les SATT s’efforcent daccroître aujourdhui leur visibilité auprès des très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME) : par exemple, la SATT Erganeo a récemment mis sur le marché un réseau social qui leur est spécifiquement consacré (Linkinnov) et qui permet, à l’image du réseau LinkedIn de faciliter la mise en relation entre un demandeur (une entreprise ou un acteur industriel) et un chercheur.

II.   Un dispositif dont le positionnement vis-à-vis des établissements de recherche doit encore être conforté

1.   Les difficultés des SATT à être pleinement intégrées à l’écosystème public de la valorisation

En dépit de ces performances, les SATT ne font pas encore lunanimité parmi les PME-TPE, ni même parmi les acteurs publics de recherche. Dans un rapport publié le 26 juillet 2017 ([25]), le sénateur Philippe Adnot indiquait que certaines SATT, notamment Grand Centre et Sayens, n’avaient pu développer chez leurs partenaires et actionnaires un « affectio societatis » fort. En mars 2018, la Cour des comptes, elle-même, a émis un jugement assez sévère sur le dispositif des SATT dans un rapport d’évaluation des outils de valorisation de la recherche publique, estimant qu’il s’était inséré « trop partiellement » dans l’écosystème de la valorisation.

Plus précisément, les SATT souffrent de deux défauts essentiels qui expliquent leurs difficultés à s’imposer par rapport aux structures de recherche partenariale (IRT, Carnot, etc.) ou aux filiales de valorisation des grands organismes :

1. Des doutes subsistent quant à la capacité des SATT à assurer leur équilibre financier sans financement public ([26]). Malgré leurs bons résultats, les SATT ne parviennent pas encore à afficher un taux de couverture de leurs dépenses par leurs recettes propres supérieur à 50 % : 2017 : 33 % ; 2018 : 31 % ; 2019 (prévision) : 32 % ([27]).

Dans son rapport précité, la Cour des comptes évoquait « la soutenabilité incertaine de leur modèle économique ». La fermeture de la SATT Grand Centre était précisément justifiée par l’absence de résultats susceptibles de la faire sortir de sa dépendance vis-à-vis du PIA. Dans le discours qu’il a prononcé à l’institut de recherche technologique M2P (Metz) le 21 juin 2018, le Premier ministre a reporté l’échéance d’un autofinancement à 10 ans des SATT, mais lexigence demeure.

Votre rapporteur estime que cet objectif de rentabilité ne doit pas être une fin en soi et pourrait produire à moyen terme des effets pervers dès lors quune telle contrainte peut amener les SATT à délaisser les brevets à faible maturité ou à « capter » de manière excessive le produit de linnovation.

2. Les SATT ne bénéficient pas toujours d’un positionnement efficace en cas de copropriété publique d’une innovation. En effet, l’intervention des SATT s’inscrit souvent juridiquement dans le cadre de l’article L. 533-3 du code de la recherche qui permet aux établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) de « confier par convention les activités » de valorisation de leurs propres résultats de recherche. Lorsque ce résultat est le produit d’une collaboration entre des unités de recherche relevant de plusieurs établissements différents, la SATT ne pourra commencer à en tirer pleinement profit qu’à la condition :

– que les établissements copropriétaires se soient entendus au préalable pour désigner celui d’entre eux qui exercera en leur nom les activités de valorisation en tant que « mandataire unique » au sens de l’article L. 533-1 du code de la recherche ;

– que cet établissement ait lui-même clarifié par convention ([28]) l’étendue des compétences qu’il souhaite déléguer à la SATT.

Sur le premier point, la procédure de désignation du mandataire unique, actuellement fixée par le décret n° 2014-1518 du 16 décembre 2014, est très lourde, dès lors qu’elle prend pour point de départ la date de dépôt de la demande de brevet (article 1er) et peut durer neuf mois, voire être prolongée de sept mois pendant lesquels le ministre chargé de la recherche peut être saisi. Même lorsqu’un mandataire unique est désigné, celui-ci exerce des compétences limitées aux actes liés à la gestion des brevets, à l’exploitation des licences et à l’encaissement des revenus correspondants avant redistribution (article 2). Le mandat ne fixe pas, dès l’origine, les modalités de partage de ces revenus (quotes‑parts) entre personnes publiques copropriétaires et renvoie à un accord ultérieur la détermination des clefs de répartition.

Enfin, lorsque le mandataire unique souhaite développer un projet de maturation avec une entreprise autour d’un produit issu de la recherche publique, il ne dispose pas toujours du droit de négocier directement les accords dits « de confidentialité » qui permettent de s’assurer que les éléments constitutifs du produit ne soient pas divulgués sans accord de leurs propriétaires ou utilisés à d’autres fins que celles de leur valorisation.

Cette absence de marge de manœuvre oblige le mandataire unique, et donc son délégué (SATT), à solliciter fréquemment l’autorisation des autres copropriétaires, ce qui allonge considérablement les délais de mise en place des projets ou de signature des contrats avec les entreprises. La mission confiée en octobre 2018 par la ministre de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation à M. François Jamet, ancien chef de département à la direction générale de la recherche et de l’innovation, sur le transfert de technologies aux start-ups a confirmé le manque d’efficacité du dispositif : « La copropriété est une source de lourdeur généralisée. Le CNRS a constaté que les délais de signature des licences avec les start-ups sont majorés de 70 % en cas de copropriété (de 180 jours sans copropriété à 300 jours) ([29]) ».

Cette lourdeur explique probablement le faible nombre de start-ups créées par les universités françaises via les SATT (environ 50 par an retracées dans le rapport Jamet, précité) au regard des universités anglo-saxonnes (106 par an pour les seules universités de Harvard, Stanford, Columbia, MIT et Pennsylvanie).

2.   Les perspectives de renforcement du dispositif au travers de la mise en œuvre de la loi PACTE

Soucieuses de s’affirmer comme les acteurs privilégiés de la valorisation des résultats de la recherche publique, les SATT ont appelé de leurs vœux une refonte globale du dispositif. Au cours de son audition, l’association Réseau SATT a estimé nécessaire d’aller aussi loin que possible dans la mise en place d’un mécanisme de désignation implicite du mandataire unique, celui-ci pouvant être la SATT elle-même, et de faciliter la fixation des quotes-parts de copropriété, quitte à imaginer un mécanisme de répartition égalitaire (50/50 dans le cas de deux copropriétaires, par exemple).

S’il paraît difficile d’ériger la SATT elle-même comme un mandataire unique « de principe » compte tenu de la diversité des dispositifs de collaboration donnant lieu à des résultats de recherche communs entre établissements publics, il reste possible d’articuler la réforme autour d’une désignation facilitée du mandataire unique et de l’attribution à ce dernier de pouvoirs étendus.

C’est, en partie, le sens de la réforme opérée par la loi  2019-486 du 22 mai 2019 (dite loi PACTE) en son article 119.

La rédaction du V de l’article L. 533-1 du code de la recherche a ainsi été modifiée de façon à systématiser la désignation d’un mandataire unique en cas de copropriété et à permettre au pouvoir réglementaire de définir directement les « règles de gestion de la copropriété, les modalités de désignation du mandataire unique, ses missions et ses pouvoirs ».

La première version du projet de décret, telle qu’elle a été communiquée à l’appui des auditions, illustre la volonté du ministère :

– de permettre la désignation du mandataire unique dans un délai dun mois (et non plus neuf mois) à compter de la création de l’unité mixte de recherche concernée ou de « lactivité de recherche » menée en commun ([30]) (et non plus à compter du dépôt de brevet) ;

– d’étendre les pouvoirs du mandataire à « létablissement daccords de confidentialité » ([31]) et à la défense des droits attachés aux résultats, y compris la résolution amiable de tout litige.

On peut observer, toutefois, que, sous réserve des arbitrages actuellement en cours, que la réforme envisagée pourrait comporter des voies d’amélioration :

1/ Le dispositif envisagé ne prévoirait, en cas d’absence de désignation du mandataire dans le délai d’un mois prévu supra, qu’une simple saisine, elle-même facultative, du rectorat ou du ministère chargé de la recherche, celui-ci statuant dans un délai d’un mois ([32]). Il faudrait, tout au moins, rendre obligatoire lintervention de lautorité supérieure ;

2/ La détermination des quotes-parts de copropriété resterait toujours le fruit de négociations entre les établissements concernés, celles-ci intervenant au moment de la production des résultats des travaux de recherche.

Au cours de leur audition, les représentants de la DGRI ont indiqué qu’ils envisageaient d’inscrire dans le texte le principe dune répartition égalitaire des revenus issus de la recherche sauf accord contraire (et préalable) des établissements concernés. Cette disposition, qui reste encore en débat, constituerait un réel progrès.

D’un point de vue plus général, les modes de répartition des revenus tirés des résultats de recherche, régis par les dispositions combinées de l’article R. 611‑14-1 du code de la recherche et d’un arrêté ministériel du 19 juillet 2016, apparaissent extrêmement complexes comme en témoigne le tableau récapitulatif ci-dessous :

Exemple de répartition de produits tirés de la recherche publique
en copropriété

Hypothèses :

1/ Deux établissements publics ont eu un résultat de recherche en commun et l’un d’entre eux (établissement n° 1), mandataire unique, a confié entièrement la valorisation de cette innovation à une SATT.

2/ Les quotes-parts ont été fixées par convention à 50/50.

3/ L’innovation a été produite par deux chercheurs. Chacun de ces chercheurs est affecté en tant que salariés dans l’un des deux établissements. Le chercheur n° 1 (établissement n° 1) a contribué à l’invention à hauteur de 40 % et le chercheur n° 2 à hauteur de 60 %.

Phase de répartition

Montants

Base juridique

Perception des revenus par la SATT après remboursement de ses frais directs de gestion de l’innovation.

100 000 €

(par exemple)

Article 1er de l’arrêté du 19 juillet 2016.

Convention entre l’établissement n° 1 et la SATT

Prise par la SATT d’une commission (généralement 40 %) dans une optique de rentabilité économique.

40 000 €

Convention entre l’établissement n° 1 et la SATT

Solde à répartir (A)

60 000 

 

(B) Revenu devant revenir à chacun des chercheurs :

– chercheur n° 1 : 50 % x 40 % de 60 000 € ;

– chercheur n° 2 : 50 % x 60 % de 60 000 €.

30 000 € au total (12 000 € + 18 000 €)

 

Article R. 611-14-1 du code de la recherche (II et IV) : l’inventeur perçoit une prime d’intéressement correspondant à 50 % du revenu perçu des établissements copropriétaires. Il est tenu compte de la contribution respective de chacun des inventeurs dans l’innovation.

(C) Perception par la SATT d’un forfait de 20 % pour frais indirects au nom du mandataire unique (établissement 1)

12 000 €

 

Article 3 de l’arrêté du 19 juillet 2016.

Solde revenant aux deux établissements

(A-B-C)

18 000 

 

Revenu final revenant à chaque établissement après versement de la rémunération à son chercheur

9 000 €

Accord de copropriété

Source : Réseau SATT.

Plus il y a d’établissements publics copropriétaires, de quotes-parts différenciées et si le mandat confié à la SATT est réduit ([33]), et plus le circuit de rémunération est complexe. Par ailleurs, en dépit d’un revenu théoriquement significatif, les chercheurs ne le perçoivent souvent que tardivement, car le versement seffectue après rémunération de leur établissement employeur.

Les mécanismes permettant la valorisation des produits de la recherche doivent être autant que possible simplifiés. Pour cette raison, votre rapporteur appelle l’attention du ministère de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation sur l’importance qui s’attache à ce que le décret en cours de préparation :

rende lintervention du rectorat ou du ministre obligatoire en cas de retard dans la désignation du mandataire unique ;

– pose le principe d’une répartition égalitaire des quotes-parts de copropriété sauf accord contraire conclu préalablement entre les établissements concernés.

Enfin, compte tenu de la diversité des mandats de gestion confiés aux SATT, il pourrait être envisagé d’inciter à leur harmonisation sous la forme, par exemple, d’un modèle de convention-cadre unique susceptible d’être utilisé par tout établissement public souhaitant déléguer ses activités de valorisation à une SATT.

 


—  1  —

  EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 23 octobre 2019, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Richard Lioger, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. Chers collègues, nous en arrivons au dernier avis budgétaire soumis à notre commission, celui qui porte sur les grands organismes de recherche, dont le rapporteur pour avis est M. Richard Lioger pour la troisième année consécutive.

Ces crédits dépendent des programmes 150, 172 et 193 de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

La dynamique impulsée depuis le début de la législature en faveur du budget de la recherche se poursuit cette année : les crédits de paiement alloués à l’ensemble de la mission dans le projet de loi de finances pour 2020 s’établissent à 28,68 milliards d’euros, en progression de plus de 500 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale de 2019.

Je note que, sur la période 2018-2020, la hausse cumulée des crédits de paiement de la mission est supérieure à 1,7 milliard d’euros, ce qui correspond à un taux d’accroissement moyen de 2,10 % par an. L’effort ainsi consenti pour la recherche et l’enseignement supérieur est donc significatif au regard des impératifs de maîtrise de la dépense publique qui s’imposent à notre pays.

En matière spatiale, la France est redevenue, de très loin, le premier pays contributeur à l’Agence spatiale européenne et jouera un rôle central dans la définition des orientations du programme spatial européen qui seront examinées lors du prochain conseil ministériel à Séville, les 27 et 28 novembre 2019.

Au niveau national, à l’exception de l’Agence nationale de la recherche (ANR), les principaux organismes de recherche, notamment le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), voient leurs dotations en crédits de paiement de nouveau progresser entre 2019 et 2020.

Au-delà des seules finances publiques, tous les établissements ont apparemment intégré dans leur fonctionnement la priorité qui s’attache à la diffusion de l’innovation vers les entreprises. L’an dernier, vous aviez, Monsieur le rapporteur, déjà évoqué les dispositifs de valorisation de la recherche publique, et vous avez, cette année, décidé de prolonger votre réflexion à la faveur, notamment, des potentialités offertes dans ce domaine par la loi PACTE.

En début d’année, le Premier ministre a annoncé la mise en place de trois groupes de travail afin qu’une loi de programmation pluriannuelle de la recherche soit présentée au Parlement au début de l’année 2020. Les groupes de travail ont remis leurs conclusions en septembre dernier. Notre commission les entendra lors d’une réunion conjointe avec la commission des affaires culturelles, le 6 novembre prochain. Pouvez-vous retracer leurs principales recommandations ?

En 2018, la Chine est devenue la première nation spatiale en termes de lancements orbitaux devant les États-Unis, la Russie et l’Europe. Cette dernière a-t-elle encore les moyens, selon vous, de faire face à l’intensification de la compétition internationale ?

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. C’est la troisième année consécutive que j’ai la responsabilité de ce rapport et c’est un plaisir, en tant qu’universitaire, de constater que ce gouvernement traite bien la recherche et qu’il a bien compris les enjeux qui y étaient attachés en termes de développement économique.

Il y a plus d’une vingtaine d’années, l’anthropologue Bruno Latour publiait un ouvrage de référence sur le métier de chercheur, réaffirmant la place centrale du scientifique dans la société. Il illustrait par des anecdotes parfois amusantes le poids de la bureaucratie dans la journée type d’un chercheur de laboratoire. Indéniablement, le monde de la recherche offre plusieurs facettes, même si l’actualité se fait régulièrement l’écho de réussites brillantes consacrées par des prix Nobel et autres récompenses ainsi que par les classements internationaux.

En matière spatiale, les performances réalisées par l’Europe sous l’impulsion de la France sont remarquables. Savez-vous que le nombre d’utilisateurs du système de géolocalisation européen Galileo, dont tous vos smartphones sont sans doute équipés, vient de dépasser le milliard de personnes ?

Au-delà de ces succès de grande ampleur, il y a le travail discret de dizaines de milliers de personnels scientifiques qui s’appliquent à utiliser au mieux les outils qu’on leur donne pour faire progresser leur domaine de connaissance. Sur ce point, ne cachons pas que les moyens matériels et humains ne sont pas toujours à la hauteur des attentes. Certains organismes de recherche en sont aujourd’hui à recruter des personnels permanents ayant cumulé deux voire trois contrats de recherche postdoctoraux, ce qui porte la moyenne d’âge du premier emploi à 35 ans !

Face à la situation parfois délicate que rencontraient certains organismes il y a encore quelques années, l’État se devait de réagir, ce qu’il a fait depuis deux ans. Les crédits de paiement de la mission « Recherche et enseignement supérieur » sont portés à 28,68 milliards d’euros, ce qui représente une hausse de plus de 500 millions d’euros par rapport à 2019. La hausse cumulée des crédits de la mission est supérieure à 1,7 milliard d’euros pour la période 2018-2020, soit une progression de plus de 6 % en trois ans. Et je tiens ici à saluer les efforts du Gouvernement pour que le budget consacré à la recherche n’ait pas à souffrir des impératifs de maîtrise des dépenses publiques.

Dans cet ensemble, la recherche spatiale reste le premier secteur bénéficiaire de cette dynamique. Au travers des crédits alloués au Centre national d’études spatiales (CNES), principal opérateur du programme 193, la France accroît de nouveau sa contribution à l’Agence spatiale européenne de plus de 200 millions d’euros et devrait avoir intégralement remboursé sa dette vis-à-vis de l’agence à la fin de l’année prochaine.

Pour répondre à votre question sur les chances de notre pays de maintenir son rang dans la compétition internationale, Madame la Présidente, je dirai que son poids au niveau européen lui permettra d’accélérer la mise en œuvre de projets cruciaux tels que la fusée Ariane 6 ou le moteur partiellement réutilisable Prometheus. Les responsables du CNES, lors d’une audition, m’ont confirmé que le premier vol d’Ariane 6 restait programmé pour le second semestre 2020 et que les premiers essais à feu de Prometheus pourraient avoir lieu à la même période. J’ai également noté avec satisfaction que cet organisme avait parfaitement saisi les enjeux de la nouvelle économie de l’espace. Le CNES n’hésite plus aujourd’hui à engager les projets de coopération avec des acteurs non traditionnels. C’est le cas, par exemple, du partenariat conclu cette année avec la start-up française Kinéis dans le domaine de l’internet des objets. Je reste donc très confiant sur la capacité de l’Europe à retrouver assez rapidement une position éminente sur le marché mondial.

S’agissant du programme 172, qui regroupe la plupart des grands organismes de recherche nationaux, la stabilité des crédits de paiement – 6,94 milliards d’euros –, s’explique principalement par l’achèvement du rattrapage des capacités d’intervention de l’Agence nationale de la recherche opéré en 2018 et 2019. Hors ANR, les crédits du programme continuent d’augmenter de 121,5 millions d’euros. En dépit de cette progression, une incertitude demeure quant aux dotations qui seront effectivement allouées aux organismes en cours de gestion. Selon les éléments qui m’ont été communiqués lors des auditions, un taux de mise en réserve de 4 % au lieu de 3 % pourrait être appliqué aux crédits du programme 172, hors titre 2, ce qui est un peu inquiétant. Ce mécanisme réduirait sensiblement la marge de manœuvre dont dispose le ministère pour couvrir les besoins ponctuels des organismes en cours d’exercice. J’appelle, dès lors, le Gouvernement à ne pas recourir à un tel coup de rabot. Il serait de nature à pénaliser les activités nucléaires du CEA et les grands plans de santé de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM).

Enfin, comme l’an dernier, mon rapport s’est intéressé aux mécanismes de valorisation de la recherche publique mis en place dans le cadre du programme d’investissements d’avenir (PIA). Cette année, j’ai plus spécialement examiné les sociétés d’accélération du transfert de technologies, les fameuses SATT. En dépit des critiques auxquelles elles ont dû faire face, ces structures apparaissent comme les mieux positionnées dans les écosystèmes locaux pour permettre la mise en relation des universités et des acteurs privés.

Ce dispositif monte en puissance : en deux ans, de 2016 à 2018, les 13 SATT ont accompli presque autant qu’au cours de leurs premières années d’existence. Elles ont aujourd’hui à leur actif la création de 278 start-up et le dépôt de 2 352 brevets. À mon sens, il existe encore deux principaux obstacles à leur pleine affirmation au sein de la recherche publique. Le premier réside dans l’objectif de rentabilité qui leur a été assigné à moyen terme : de l’avis général, il génère de nombreux effets pervers. Le second tient à leur positionnement vis-à-vis des établissements et des organismes publics lorsque ces sociétés sont chargées partiellement ou intégralement de valoriser les résultats de travaux de recherche effectués en commun.

Le dispositif de gestion de l’innovation en copropriété tel qu’il a été présenté au cours des auditions est, de toute évidence, extrêmement complexe. À cet égard, je salue les perspectives de simplification, ouvertes notamment par la loi PACTE, qui allégeront les procédures de désignation souvent très lourdes de ce que l’on appelle le mandataire unique.

J’achèverai mon intervention en évoquant l’avenir à plus long terme de la recherche française. Le Premier ministre a engagé une large concertation reposant sur trois groupes de travail afin de préparer une loi de programmation pluriannuelle de la recherche particulièrement attendue. Ces groupes de travail, auxquels ont participé trois de nos collègues – Cédric Villani, Philippe Berta et Francis Chouat –, ont fondé leurs réflexions sur le constat que le rattrapage budgétaire opéré depuis deux ans par le Gouvernement ne saurait être suffisant. Il convient d’insuffler une nouvelle dynamique si l’on veut que notre pays mette son effort de recherche au même niveau que nos partenaires allemands, soit 3 % du PIB. C’est précisément l’objectif recherché par les trois groupes de travail, comme ils l’ont souligné dans les conclusions audacieuses qu’ils ont rendues au Premier ministre le 23 septembre dernier.

Le premier groupe de travail, consacré aux appels à projets compétitifs, a mis l’accent sur le rôle central que devrait jouer dans ce domaine l’ANR. Celle-ci serait dotée de moyens supplémentaires suffisamment importants pour que le taux de succès des projets déposés en France soit aligné sur les standards européens et que les financements alloués garantissent un rehaussement du fameux « préciput », cher à Mme Amélie de Montchalin, à 30 % voire 40 %, contre aujourd’hui seulement 11 %, de manière à permettre une réelle prise en charge des coûts indirects, qui sont supportés aujourd’hui par les établissements hébergeurs.

Le deuxième groupe de travail, centré sur les questions de ressources humaines, propose d’améliorer l’attractivité des entités publiques de recherche en offrant aux jeunes chercheurs des voies de recrutement diversifiées et des rémunérations plus élevées que celles qui prévalent aujourd’hui en France. Nous savons bien que les grilles salariales de la fonction publique ne contribuent pas à attirer les meilleurs chercheurs.

Le troisième groupe de travail, qui s’est penché sur l’innovation, insiste sur la nécessité de renforcer les moyens alloués aux diverses structures de recherche partenariales et surtout sur la nécessité de faciliter la mutualisation des activités de valorisation au travers d’un label unique, le « pôle universitaire d’innovation ».

Sans préjuger à ce stade des arbitrages qui seront rendus par le Premier ministre, j’estime que les réflexions menées par ces groupes de travail sont stimulantes et que les recommandations formulées, notamment celles relatives à l’ANR, sont de nature à donner à la recherche française une place encore plus importante que celle qu’elle occupe dans notre économie.

Enfin, je tiens à souligner la richesse exceptionnelle que constitue l’apport des directeurs d’organisme de recherche et des présidents d’université. La France peut s’enorgueillir d’avoir à la tête de sa recherche des gens d’une très grande qualité qui ont le sens de l’intérêt public chevillé au corps.

Mme Valéria Faure-Muntian, présidente. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Graziella Melchior. Albert Einstein disait : « L’imagination est plus importante que la connaissance car la connaissance est limitée tandis que l’imagination englobe le monde entier, stimule le progrès, suscite l’évolution ». Cette citation illustre bien le rôle moteur que joue la recherche dans les mutations économiques et sociales que nous vivons. Celle-ci constitue un véritablement investissement d’avenir qu’il est nécessaire de soutenir et de développer afin de préparer notre société aux enjeux écologiques et économiques auxquelles elle doit faire face.

Je profite de cette intervention pour saluer Mme Esther Duflo, deuxième femme à recevoir le prix Nobel d’économie depuis sa création en 1968 et plus jeune lauréate dans cette catégorie. Ses recherches, faut-il le rappeler, portent sur l’économie du développement, les inégalités et la pauvreté.

La France encourage ses scientifiques, car elle a bien compris le rôle moteur de la recherche, au point d’en avoir fait l’un des atouts majeurs de son rayonnement culturel et scientifique. La progression du budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » est continue depuis 2017. Pour 2020, la hausse est de 500 millions d’euros en crédits de paiement et de 700 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Les ambitions de l’État en matière d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation s’expriment également aujourd’hui à travers les initiatives du Premier ministre. Soucieux de préparer l’avenir, il a engagé, au début de l’année 2019, une réflexion afin de dessiner les contours d’une future loi de programmation pluriannuelle de la recherche.

Pour l’ensemble des programmes sur lesquels notre commission est saisie pour avis, les crédits sont en hausse ou stables sur un an. Nous maintenons ainsi la capacité de nos grands organismes de recherche à innover et de notre système d’enseignement supérieur à produire des chercheurs et des étudiants reconnus internationalement.

S’agissant des grands organismes de recherche, certains d’entre eux – le CNES, le CEA, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) – voient le niveau des crédits qui leur sont alloués s’accroître dans des proportions satisfaisantes. D’autres, comme le CNRS, l’INSERM ou l’Institut national de recherche dédié aux sciences du numérique (INRIA), devront poursuivre leurs efforts de maîtrise de la masse salariale avec des moyens parfois contraints.

Dans votre rapport, Monsieur le rapporteur, vous évoquez les SATT qui sont des vecteurs intéressants de valorisation de la recherche. Ce sont des structures multiformes réparties sur le territoire, qui répondent à la nécessité de développer des brevets et des applications aux côtés des établissements de recherche et en direction des entreprises. Leur positionnement semble cependant un peu difficile à trouver dans le paysage de la recherche. La loi PACTE pourra-t-elle, d’après vous, apporter un plus à ce secteur ?

L’avis du groupe La République en Marche est favorable : ce budget va dans le bon sens et il est à la hauteur de notre système de recherche et d’enseignement supérieur. Le groupe votera donc en faveur des crédits alloués à cette mission.

M. Julien Dive. Le budget de cette mission est en apparence positif puisque les crédits sont en augmentation par rapport à 2019, mais il suscite quelques bémols, que je vais détailler au nom du groupe Les Républicains.

Tout d’abord, nous resterons très vigilants quant aux actions réelles que le Gouvernement mènera dans les mois et années à venir. Je pense notamment au prochain dépôt d’une loi de programmation pluriannuelle de la recherche applicable à partir de 2021, car elle portera de lourds enjeux pour le développement d’une recherche efficiente et stratégique dans un contexte international de plus en plus compétitif.

Pour ce qui concerne l’enseignement supérieur, le budget pour 2020 semble plus réaliste que le précédent avec une hausse de 175 millions d’euros, mais son niveau reste bien en deçà des besoins réels, estimés à 670 millions d’euros par la Conférence des présidents d’université. Le PLF ne prend pas en compte l’évolution indispensable du patrimoine immobilier des universités alors même que celle-ci correspond à la volonté générale d’aller vers la transition énergétique et qu’elle constituerait un levier. Cette évolution est, en outre, souhaitée par les différents présidents de nos universités. Elle permettrait une réduction des consommations énergétiques et des émissions de gaz à effet de serre, encouragerait la maîtrise de l’ensemble des consommations pour chaque euro investi et générerait une économie de charges d’exploitation. Le Gouvernement refuse pourtant toute aide ou contribution. Comment peut-il, d’un côté, diffuser un message ambitieux sur la transition énergétique et, de l’autre, empêcher nos universités d’y procéder ?

S’agissant de la recherche, je relève qu’au 1er janvier 2020, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et l’Institut national de la recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA) fusionneront pour devenir l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE). Ce PLF prévoit donc 2,5 millions d’euros supplémentaires pour accompagner le rapprochement entre les personnels des deux instituts. L’agriculture est à l’aube d’un nouveau modèle et la recherche est la clef de son évolution, qu’il s’agisse de trouver des alternatives, d’accompagner nos agriculteurs dans la transition agricole, de garantir la qualité de notre alimentation et le respect de l’environnement ou de répondre aux attentes du consommateur. Les moyens doivent donc être beaucoup plus importants. L’INRA compte 17 centres régionaux sur plus de 150 sites en métropole et outre-mer ; l’IRSTEA, neuf centres régionaux. De nouveaux locaux seront nécessaires tout comme de nouveaux objectifs. La somme de 2,5 millions d’euros apparaît dès lors insuffisante.

Ce PLF comporte certes des hausses de crédits mais elles ne répondent pas toutes à des problématiques pourtant essentielles.

Mme Marguerite Deprez-Audebert. Monsieur le rapporteur pour avis, je vous remercie pour votre travail de qualité sur les grands organismes de recherche, qui souffrent parfois d’un manque de moyens et de compétitivité, dans un contexte de compétition mondiale exacerbée. L’examen de cette mission budgétaire arrive à point nommé, à quelques mois seulement de la présentation d’un projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche, qui devra nous permettre de redoubler d’efforts dans notre soutien à la recherche et de renforcer le statut de la France dans ce domaine, à l’échelle européenne et internationale.

Je souhaite centrer mon intervention sur la recherche scientifique et technologique dans le domaine de l’environnement en évoquant deux organismes qui me semblent d’une importance vitale.

Le premier est Météo-France. Avec sa météopole basée à Toulouse, la France dispose d’un leadership incontestable en matière d’observation météorologique et climatique. Présente dans tous les océans grâce à nos outre-mer et dans l’espace, par le biais des satellites météorologiques développés par l’Organisation européenne pour l’exploitation de satellites météorologiques (EUMETSAT), la France se doit de poursuivre et d’accentuer son observation pour s’adapter au changement climatique, et pour atténuer ce phénomène.

Dans le même domaine, la France contribue à hauteur de 8 millions d’euros au financement du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme, ce qui représente 14 % du budget total de cet organisme. Pensez-vous, Monsieur le rapporteur pour avis, que ces fonds suffisent ? Cette organisation intergouvernementale dispose-t-elle de moyens suffisants pour développer de nouvelles méthodes numériques de prévision météorologique et pour élaborer régulièrement des prévisions sur l’Europe ? Ce centre étant localisé à Reading, au Royaume-Uni, il est impératif que la France prenne position pour l’accueillir sur son territoire dans le contexte de la sortie imminente du Royaume-Uni de l’Union européenne. Mon collègue Jean-Luc Lagleize m’a d’ailleurs chargé de vous dire que la ville de Toulouse est prête à l’accueillir à bras ouverts…

Je voudrais également faire un focus sur l’Institut polaire français Paul-Émile Victor, l’IPEV. Cet organisme, quoique relativement méconnu, est une agence de terrain et de compétence au service de laboratoires de recherche nationaux, qui offre des moyens humains, logistiques, techniques et financiers nécessaires au développement de la recherche française dans les régions polaires et subpolaires. L’IPEV est aussi un outil de l’influence stratégique et géopolitique française, car elle dispose de six bases scientifiques, une en Arctique, trois en Subantarctique et deux en Antarctique. L’Institut dispose aussi de L’Astrolabe, navire indispensable pour se rendre dans ces contrées lointaines en toute indépendance.

En 2018, l’IPEV a soutenu pas moins de soixante-quinze projets scientifiques et technologiques, dans le cadre de collaborations internationales. Il n’est pourtant financé qu’à hauteur de 15 millions d’euros, alors même que la course au pôle Sud bat son plein et que tous nos voisins et partenaires, tels que l’Allemagne, l’Italie, la Corée du Sud ou encore l’Australie investissent plusieurs dizaines de millions d’euros en Antarctique chaque année.

La situation de ces deux organismes démontre la nécessité d’une augmentation importante de nos efforts financiers et scientifiques, que le groupe du Mouvement démocrate et apparentés appelle de ses vœux. Pensez-vous, Monsieur le rapporteur pour avis, que les choix budgétaires dont nous débattons aujourd’hui permettront de soutenir ces organismes scientifiques de première importance ?

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. Madame Melchior, les SATT ont beaucoup évolué au cours des trois dernières années et elles ont désormais trouvé leur place dans le paysage de la recherche française. Elles ont généralement un ancrage territorial assez fort et rassemblent tous les acteurs dudit territoire. Ce qui simplifierait encore les choses, je l’ai dit, ce serait la désignation d’un mandataire unique, car cela permettrait d’accélérer le passage à l’industrie et à la création de start-up à partir de brevets. Aujourd’hui, les délibérations au sein des SATT ont tendance à retarder la prise de décision, parfois jusqu’à un an. La solution du mandataire unique serait sans doute la bonne, encore faut-il arriver à le désigner. Les choses, en tout cas, avancent, et les gens apprennent à travailler ensemble dans ce cadre.

Monsieur Dive, l’entretien du patrimoine des universités, notamment la rénovation thermique des bâtiments, est un sujet sur lequel je travaille beaucoup, en essayant de rapprocher la Conférence des présidents d’université de la Fédération des entreprises publiques locales. Votre diagnostic est tout à fait juste. La loi Pécresse, relative à l’autonomie des universités, comportait un volet relatif à la dévolution du patrimoine. Or, à l’exception des plus grandes, qui ont des moyens importants, la plupart des universités ont des difficultés à entretenir leurs bâtiments. Vous avez évoqué la rénovation thermique, mais ce n’est pas la seule question qui se pose. Les universités n’ont pas forcément les compétences pour gérer l’entretien de leur patrimoine et elles considèrent qu’elles n’en ont pas toujours les moyens.

Nous essayons actuellement de concevoir, avec la Conférence des présidents d’université, un nouveau modèle économique qui associerait les sociétés publiques locales (SPL) et les organismes qui ont été créés pour gérer le patrimoine des universités, mais qui ne donnent pas toute satisfaction. Cette nouvelle structure assurerait la gestion et la rénovation du patrimoine. Lorsqu’une collectivité finance la rénovation thermique d’une piscine, les économies d’énergie réalisées grâce à cette rénovation permettent de réduire les subventions demandées à l’État ou aux collectivités locales. Nous nous proposons de prendre modèle sur ce type de pratique. Cela ne veut pas dire que les universités ne demanderont plus de subventions, mais nous sommes en train de travailler à un modèle économique vertueux. Vous avez eu raison de soulever la question du patrimoine, car elle est vraiment importante pour un grand nombre d’universités, particulièrement pour celles de taille moyenne et pour celles qui ne sont pas dans une grande métropole.

Vous m’avez également interrogé sur la fusion de l’INRA avec l’IRSTEA. Un des bâtiments de ce dernier s’est effondré à Montpellier. Son directeur nous a dit que l’Institut commençait à remonter un peu la pente, mais il se peut que les 2,5 millions d’euros attribués à l’INRAE, organisme issu de la fusion de ces deux établissements, ne soient pas suffisants. On peut certes toujours faire mieux, mais le Gouvernement a fait un geste et il faut le saluer.

Madame Deprez-Audebert, vous appuyez là où ça fait mal, en évoquant Météo-France et l’IPEV, dont les dotations ont baissé. On peut regretter ce choix politique, surtout quand, dans le même temps, le CNES voit son budget augmenter de manière très significative, pour la deuxième année consécutive. Mais il a fallu faire des choix.

La commission en vient à l’examen des amendements.


Article 38 et État B 

La commission est saisie de l’amendement II-CE53 de Mme Laure de La Raudière.

Mme Laure de La Raudière. Cet amendement vise à soutenir le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle ». Ce programme finance l’innovation dans les PME et la phase d’amorçage des start-up, sous la forme de subventions ou d’avances remboursables, mais surtout sous forme d’actions individuelles. C’est le seul mode de financement de Bpifrance qui intervient à ce stade et sous cette forme, c’est-à-dire sans autre cofinancement public-privé.

Si nous voulons que la France compte de nombreuses scale-up, autrement dit de nombreuses licornes – des start-up valorisées à plus d’un milliard d’euros –, nous devons continuer de disposer d’un mécanisme qui finance les start-up au démarrage, afin d’alimenter le flux et le « pipe » de ces entreprises, susceptibles de croître. Le programme 192 est essentiel, car personne d’autre n’est capable, aujourd’hui en France, de financer les toutes petites start-up dans leur phase de démarrage. C’est ce que l’on appelle parfois le love money. Le programme 192 est un dispositif extrêmement égalitaire et solidaire, qui profite à tous les territoires : lorsque des petits entrepreneurs ne peuvent pas compter sur l’appui financier de leur famille, il met à leur disposition 20 000, 30 000 ou 40 000 euros, ce qui rend possible le démarrage de leur entreprise.

Le programme 192, qui était doté de 250 millions d’euros en 2011, n’en compte plus que 100 millions aujourd’hui. C’est une perte considérable alors même que Bpifrance estime qu’il faut au minimum 20 millions d’euros supplémentaires pour assurer le flux de financement de nos start-up, si nous voulons avoir, dans cinq ou dix ans, un grand nombre de scale-up. La réduction des crédits du programme 192 est une grave erreur, parce qu’il n’existe aucun autre mode de financement des start-up à cette phase de lancement.

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. Je suis très réservé sur cet amendement qui, du reste, ne porte pas précisément sur ce qui faisait le cœur de mon rapport, à savoir les organismes de recherche. Par ailleurs, il propose de gager l’augmentation des crédits du programme 192 sur le budget des universités, alors même qu’elles sont, comme on l’a rappelé, en difficulté. On ne peut évidemment qu’être d’accord avec votre argumentation et il est de nombreux secteurs auxquels on voudrait accorder davantage de crédits, par exemple les hôpitaux, mais en retirer aux universités ne me semble pas être une bonne solution.

M. Éric Bothorel. J’ai défendu un amendement du même ordre hier, en commission des finances, et je le défendrai de nouveau en séance. Il existe certes de nombreux dispositifs de soutien à l’innovation, comme le programme d’investissements d’avenir (PIA) et le fonds Deep Tech. Mais le programme 192 a ceci de particulier qu’il permet, après une présentation simple, de lever les premiers fonds qui permettront de lancer un projet, n’importe où sur notre territoire. C’est ce que l’on appelle, comme Mme Laure de La Raudière l’a rappelé, le love money. Mobiliser 5 milliards d’euros pour les start-up auprès des institutionnels, comme le Président de la République est arrivé à le faire, c’est une très bonne chose, et tout le monde s’en félicite. Cela permettra peut-être à la France d’avoir vingt-cinq licornes en 2025. Mais pour remplir une baignoire, il faut un robinet qui coule. Et ce robinet, c’est le programme 192.

Mme Laure de La Raudière. Exactement !

M. Éric Bothorel. Depuis des années, on réduit le débit de ce robinet, alors que cette politique a un vrai effet de levier – on estime que son ratio est de 1 à 3. À force de le réduire, nous risquons de le faire totalement disparaître. Notre commission a auditionné il y a peu le directeur général de Bpifrance, M. Nicolas Dufourcq, qui nous a sensibilisés sur cette question. Indépendamment de la question du gage, sur le principe et sur le fond, j’apporte donc mon plus profond soutien à cet amendement.

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. Puis-je vous demander l’avis que la commission des finances a rendu ?

M. Éric Bothorel. Le rapporteur spécial Francis Chouat a émis un avis défavorable.

M. Grégory Besson-Moreau. Avant de devenir ce qu’elle est, la Seine est un petit ruisseau, qui prend sa source pas loin de mon département, en Côte-d’or. Dans ma vie, j’ai créé un grand nombre d’entreprises qui n’auraient pas pu voir le jour si elles n’avaient pas bénéficié de financements par des mécanismes de l’État.

J’ai approuvé le ministre de l’économie et des finances quand il a décidé de supprimer les fonds d’aide aux financements qui étaient financés par des réductions de l’impôt sur la fortune (ISF), en raison de leurs frais de fonctionnement qui s’élevaient entre 15 % et 30 %. Je trouvais normal de supprimer des fonds qui se nourrissaient des deniers de l’État, c’est-à-dire de l’argent des contribuables. En revanche, je ne suis pas favorable à la suppression d’une aide directe de l’État aux entreprises, à travers le programme 192. Je soutiens l’amendement de notre collègue, car il est tout à fait dans l’esprit de l’ambition du Président de la République de multiplier les licornes dans notre pays. Pour devenir une licorne, il faut commencer par être une start-up, et pour être une start-up, il faut un financement.

Mme Laure de La Raudière. L’argument du rapporteur spécial en commission des finances a consisté à dire que Bpifrance finance déjà massivement l’innovation, à travers le fonds Deep Tech ou le fonds pour l’innovation et l’industrie, ciblé sur l’innovation de rupture. Mais ces dispositifs ne financent pas les mêmes choses, et pas de la même façon. J’ai le sentiment que le rapporteur spécial a additionné des choux et des carottes : il n’est pas vrai que les différents fonds de Bpifrance permettraient de financer les start-up et l’innovation dans les PME de nos territoires. Nous parlons ici de love money, des 20 000 ou 30 000 euros qui sont nécessaires au lancement d’une entreprise. Ce n’est qu’ensuite que l’on cherche un vrai fonds d’amorçage, capable de fournir 300 000 ou 400 000 euros. C’est aussi la Bpifrance qui finance cela, mais à parité avec un financement privé, jamais en action individuelle.

Par ailleurs, j’ai gagé l’amendement sur l’enseignement supérieur parce qu’il fallait bien faire un choix : aurait-il été préférable de gager mon amendement sur la recherche spatiale ? Notre but, c’est de lancer un signal, au nom de la commission des affaires économiques, dans le prolongement du débat que nous avons eu avec M. Nicolas Dufourcq. Ce que nous voulons, c’est ouvrir un débat en séance pour rappeler qu’il est absolument nécessaire de financer l’innovation et la croissance des start-up et des PME dans nos territoires. Nous débattrons de cette question avec les membres de la commission des finances, mais je crois que nous aurions vraiment intérêt à voter cet amendement, au nom de la commission des affaires économiques.

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. Le montant de 100 millions d’euros qui a été retenu dans le PLF 2020 est celui qui a été réalisé l’année dernière. Ce qui me gêne le plus dans cet amendement, je le répète, c’est le fait qu’il soit gagé sur le budget des universités : c’est un très mauvais signal adressé à ces dernières.

Je comprends votre raisonnement et je suis évidemment d’accord avec vous, mais le mécanisme que vous proposez est problématique. Un budget est un tout : le Gouvernement nous propose une vision d’ensemble et vous remettez en cause cet ensemble, qui repose pourtant sur les dépenses effectivement réalisées l’année dernière.

M. Grégory Besson-Moreau. Pour avoir créé une entreprise aux États-Unis, je crois que la France devrait s’inspirer du modèle américain, où les universités investissent dans les start-up. C’est un modèle qui fonctionne, comme en témoigne le succès des start-up américaines. Ce succès tient à la créativité et à l’imagination des patrons de start-up. Il me semble donc justifié que des fonds finançant l’enseignement supérieur soient transférés aux start-up, puisque ce sont elles qui créent la valeur, ce sont les jeunes étudiants et les jeunes ingénieurs qui, en sortant de l’université, peuvent inventer les licornes de demain.

Je pense que le gage a bien été choisi et je voterai cet amendement. Nous devrions même être plus ambitieux et demander un montant plus important.

M. Éric Bothorel. Si nous parvenons à convaincre nos collègues en séance et si le Gouvernement admet que cet effort en direction des start-up est nécessaire, il lèvera le gage, comme il en a le pouvoir. Nous avons l’obligation constitutionnelle de gager nos dépenses et nous avons fait un choix. En tout cas, le gage n’est pas un obstacle important : le Gouvernement a la possibilité de le lever s’il le souhaite.

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. La politique est aussi affaire de symboles. La mission dont nous examinons les crédits ne concerne pas seulement la recherche, mais aussi l’enseignement supérieur. Or la Conférence des présidents d’université a indiqué, dans un communiqué de presse, que le budget par étudiant est en baisse. Or cet amendement donne un très mauvais signal. Trouvez autre chose ! Symboliquement, je ne peux pas aller dans votre sens.

Mme Laure de La Raudière. Combien de milliards pour le budget de la recherche ?

M. Richard Lioger, rapporteur pour avis. Ce n’est pas la question : tout à l’heure, sur la mission « Outre-mer », nous avons débattu longuement pour 100 000 euros. Je répète que la politique, ce sont aussi des symboles, et je ne peux pas vous suivre, si vous voulez retirer de l’argent aux universités. Nous allons voter, et chacun prendra ses responsabilités.

La commission adopte l’amendement.

Puis, suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », modifiés.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES auditionnées

Agence nationale de la recherche (ANR)

M. Thierry Damerval, président

M. Jérôme Ferrand Ammar, chargé de mission auprès de la direction générale

Centre national détudes spatiales (CNES) *

M. Jean-Yves Le Gall, président

M. Antoine Seilland, directeur financier

M. Pierre Tréfouret, directeur de cabinet du président

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

M. Antoine Petit, président-directeur général

M. Christophe Coudroy, directeur général délégué aux ressources

M. Thomas Borel, chargé des relations avec le Parlement

Conférence des présidents duniversité (CPU) *

M. Jean-François Balaudé, président de la commission des moyens et personnels

Mme Sibylle Rochas, chargée de mission moyens

Mme Florence Egloff, chargée de mission recherche et innovation

M. Michel Dellacasagrande, consultant pour les moyens et personnels

M. Kévin Neuville, conseiller parlementaire

Commissariat à lénergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) *

Mme Marie-Astrid Ravon-Bérenguer, directrice financière

M. Jean-Pierre Vigouroux, directeur des affaires publiques

Direction générale de lenseignement supérieur et de linsertion professionnelle (DGESIP)

Mme Anne-Sophie Barthez, directrice générale

M. Brice Lannaud, chef de service, adjoint à la directrice générale

M. Maurice Caraboni, chef du département gestion budgétaire et pilotage des programmes à la direction générale de la recherche et de l’innovation (DGRI)

M. Pierre-Olivier Legris, chef du département de la synthèse budgétaire (DGESIP)


Direction générale de la recherche et de linnovation (DGRI)

M. Bernard Larrouturou, directeur général

M. Maurice Caraboni, chef du département gestion et pilotage budgétaire des programmes

M. Damien Rousset, adjoint au chef du service performance, financement et contractualisation avec les organismes de recherche

M. Pierre-Louis Autin, chef du service de l’innovation, du transfert de technologie et de l’action régionale

IFP-Énergies nouvelles (IFP-EN) *

M. Didier Houssin, président

M. Eric Lafargue, directeur général adjoint

Institut national de recherche agronomique (INRA)

M. Philippe Mauguin, président-directeur général

M. Fabrice Marty, directeur général délégué chargé de l’appui à la recherche

M. Louis-Augustin Julien, directeur du financement et des achats

M. Marc Gauchée, conseiller du PDG pour les relations institutionnelles

 

Institut national de la recherche en informatique et en automatique (INRIA)

M. Bruno Sportisse, président-directeur général

Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

M. Gilles Bloch, président-directeur général

Mme Laurianne Cruzol, directrice des affaires financières

Mme Anne-Sophie Etzol, chargée des relations institutionnelles

Association Réseau SATT (Sociétés daccélération du transfert de technologies)

M. Philippe Nérin, président de l’association

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants dintérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale.


([1]) Établi par l’OMPI, l’université Cornell et l’Institut européen d’administration des affaires (INSEAD), l’indice mondial de l’innovation prend en compte 81 paramètres (environnement politique, éducation, infrastructure, perfectionnement des entreprises…).

([2]) Migration Policy Debates – n° 19, mai 2019.

([3]) Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, qui naîtra en 2020 de la fusion de l’INRA et de l’IRSTEA – cf. partie II.

([4]) Notamment trois députés : M. Cédric Villani (groupe 1), Philippe Berta (groupe 2) et Francis Chouat (groupe 3).

([5]) Montant correspondant à la dotation pour transfert de la LFI 2019 (738,6 millions d’euros) après mise en réserve et prise en compte des ressources en cofinancement (ressources propres).

([6]) Les organismes publics (sauf les établissements public industriels et commerciaux dans le cadre de projets menés en collaboration avec une société commerciale) sont financés à hauteur des seuls coûts marginaux générés par le projet de recherche (point 2.4.1 du règlement financier).

([7]) Sur un financement de 100 euros, l’établissement gestionnaire prélèvera 8 euros et l’hébergeur 11 euros, ce qui fait une prise en charge indirecte de 19 euros sur 92 (20,6 %).

([8]) Le financement est dit à « coût marginal », ce qui permet de limiter le financement aux seuls coûts additionnels des projets. Les rémunérations des personnels permanents, par exemple, ne sont pas pris en charge (à la différence des financements européens).

([9]) Emplois en équivalent temps plein travaillé (secteur civil uniquement) – CDI et CDD confondus.

([10]) Instance créée en 1945 par le général de Gaulle et réunissant les principales administrations (y compris militaires) compétentes en matière d’énergie nucléaire sous la présidence du Premier ministre. Le comité est chargé d’arrêter « le programme de recherche, de fabrication et de travaux du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives » (art. L. 332-2 du code de la recherche).

([11]) Prototype de réacteur à neutrons rapide au sodium fonctionnant par le recyclage des stocks d’uranium 238 et de plutonium.

([12]) En sus de l’effort déjà consenti au travers des PIA 1 et PIA 3 (550 millions d’euros).

([13]) Cession de titres ORANO à l’État et de titres d’une holding (FT1C1) à BPIfrance.

([14]) Research and Action targeting emerging infectious diseases (REACTing)

([15]) L’ONDAM est fixé par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).

([16]) Mise en place progressive du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP) par le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014.

([17]) Financements reçus de l’Agence nationale de la recherche (ANR) et de l’Union européenne, produits issus de redevances pour brevets, de prestations de services, de ventes de produits, etc.

([18] Le nombre d’opérateurs pris en compte dans le programme 190 est passé de 6 à 5 entre 2018 et 2019 avec l’intégration dans la future université Gustave Eiffel (programme 150) de l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (IFSTTAR) à compter de 2020. Le montant 2019 a été retraité en conséquence.

([19]) Les dépenses présentées dans le tableau ci-dessous ne comprennent pas les charges non décaissables (amortissements et dépréciations d’actifs).

([20]) Hors autres subventions publiques (9,8 millions d’euros) et y compris les produits exceptionnels.

([21]) MicroCarb doit permettre de cartographier les sources et puits de CO2 à l’échelle planétaire.

([22]) Les Échos (1er janvier 2019).

([23]) Avis n° 1288 – tome n° 14.

([24]) Sous la forme de dotations consommables (DC) et d’intérêts de dotations non consommables (DNC)

([25]) Rapport n° 683 (session extraordinaire 2016-2017)

([26]) Objectif explicite des SATT (articles 3.6 et 5.1 de la convention État-ANR du 29 juillet 2010 précitée. Pour les IRT, la convention du 27 juillet 2010 évoque simplement un objectif de « rentabilité socio-économique » (article 3.7).

([27]) Source : Réseau SATT

([28]) L’article L. 533-3 du code de la recherche autorise explicitement les établissements publics à caractère scientifique et technologique à confier tout ou partie de leurs activités de valorisation à des entités privées (notamment aux SATT).

([29]) Rapport de M. François Jamet à la ministre de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation (mars 2019) : page 29.

([30]) Article 1er du projet de décret

([31]) Article 4 du projet de décret

([32]) Article 2 du projet de décret

([33]) Dans le cas d’un mandat limité, le prélèvement pour frais de gestion indirects de 20 % est partagé entre l’établissement et la SATT.