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N° 3465

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 octobre 2020

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES
SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2021 (n° 3360)

 

 

TOME I

 

 

 

ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION

PAR M. Philippe MICHEL-KLEISBAUER

Député

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 Voir le numéro : 3399 (annexe 7)


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

Première partie : Les crédits de la mission « anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

I. Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée »

A. Les liens armées-jeunesse

1. Les conséquences de la crise sanitaire sur la journée défense et citoyenneté

a. Le bilan de la situation à l’été 2020

b. Une reprise progressive, adaptée et strictement encadrée à la rentrée 2020

2. Le service militaire volontaire, un dispositif d’insertion socio-professionnelle aux résultats probants

a. Le nombre de volontaires engagés dans le dispositif depuis trois

b. Les conséquences de la crise sanitaire sur l’effectif des jeunes

c. Les modalités de financement du SMV et conditions de la participation financière des collectivités territoriales

d. Le nombre des personnels mobilisés

e. Le nombre des volontaires intégrant les armées ou rejoignant le secteur privé

B. La politique de mémoire

1. La politique de mémoire : les actions de mémoire

a. Le bilan des commémorations organisées en 2020 et impact de la crise sanitaire

b. Les commémorations de « l’année de Gaulle » : 130e anniversaire de sa naissance, 80e anniversaire de l’appel du 18 juin et 50e anniversaire de sa disparition

2. Les sépultures de guerre et les lieux de mémoire

a. Les sépultures de guerre

b. Les lieux de mémoire

II. Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant »

A. Les crédits du programme 169

1. L’administration de la dette viagère

2. Les droits liés aux PMI

3. La solidarité

4. Les actions en faveur des rapatriés

B. Les points d’attention relevés par le rapporteur

1. Les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant

a. Les ressortissants de l’ONACVG : catégories et évaluation du nombre

b. Les pensions militaires d’invalidité

c. La retraite du combattant

2. L’action sociale et les droits liés aux pensions militaires d’invalidité

a. Les droits accessoires ouverts aux titulaires d’une pension militaire d’invalidité

b. L’action sociale

c. Les subventions pour charges de service public aux opérateurs publics

d. Les actions en faveur des harkis et des rapatriés

C. L’effort fiscal et social de l’état

III. Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale »

A. L’indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations

1. L’indemnisation des orphelins

2. L’indemnisation des victimes de spoliations

a. Le bilan d’activité du dispositif d’indemnisation des victimes de spoliations matérielles et bancaires depuis le début des travaux de la CIVS

b. Les biens culturels spoliés

B. L’indemnisation des victimes d’actes de barbarie

Deuxième partie :  Les Tirailleurs sénégalais dans la politique de mémoire de la France

I. Les actions mémorielles conduites en l’honneur des combattants africains connus sous le nom de « tirailleurs sénégalais »

A. Les commémorations

B. La mise en valeur des nécropoles et carrés militaires

1. La nécropole de Chasselay dite du "Tata sénégalais" dans le Rhône

2. La nécropole d'Airvault dans les Deux-Sèvres

3. La nécropole de la Teste de Buch dite "du camp du Courneau" en Gironde

4. La nécropole de Saint-Florent en Haute-Corse

5. La koubba du carré militaire du cimetière de Nogent-sur-Marne dans le Val-de-Marne

6. Le cimetière du Trabuquet à Menton dans les Alpes-Maritimes

7. Le cimetière militaire de Thiaroye au Sénégal

8. Le monument dédié à l’Armée Noire de Fréjus dans le Var

C. La création de monuments commémoratifs

1. Le monument aux soldats musulmans de la nécropole de Fleury-devant-Douaumont dans la Meuse

2. Le monument commémoratif de la fraternité d'armes franco-malgache

3. Les plaques de la Grande Mosquée de Paris

4. Le monument aux héros de l'Armée Noire à Reims dans la Marne

D. Les hommages rendus à l’Armée noire

1. Les hommages les plus récents

2. Les actions menées par l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre

3. Les liens forts avec les administrations des pays concernés : Burkina Faso, Mali, Niger, Sénégal, Tchad

E. Une politique de soutien aux productions éditoriales et audiovisuelles consacrées à l’Armée Noire

II. Le massacre de Thiaroye : mémoire partagée et reconnaissance des morts

A. Le récit

B. La reconnaissance de la France pour les morts de Thiaroye

1. Le cimetière de Thiaroye : plus de deux cents tombes anonymes

2. Les discours du Président de la République, M. François Hollande, en 2012 et en 2014

C. Les différentes thèses des historiens

1. Des historiens qui n’hésitent pas à parler de mensonge alors que d’autres rappellent le contexte colonial et de la fin de la guerre

2. Des historiens qui mettent en exergue le courage des militaires face à leurs supérieurs

3. Un vide mémoriel à combler soixante-seize années après les faits

D. Les doléances des associations d’anciens combattants d’origine africaine

Travaux de la commission

I. Audition de Madame Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des Armées

II. Audition de représentants d’associations d’anciens combattants

III. Examen des crédits

Annexe : Auditions du rapporteur pour avis


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   Introduction

« Ces Français que nous fûmes contraints de jeter dans la bataille (…) ont des droits sur nous. Ils veulent qu’aucune de nos pensées ne se détourne d’eux, qu’aucun de nos actes ne leur soit étranger. Nous leur devons tout, sans aucune réserve. » Georges Clemenceau, président du Conseil, ministre de la Guerre, discours devant la Chambre des députés, le 20 novembre 1917.

De la première génération du feu, dont la Nation a commémoré l’engagement pendant la Première Guerre mondiale, aux soldats qui combattent aujourd’hui le terrorisme djihadiste au Levant comme au Sahel, des pupilles de la Nation aux victimes de guerre, des militaires blessés ou tués aux victimes des attentats terroristes, c’est à l’ensemble du monde combattant auquel le droit à reconnaissance et à réparation s’adresse. La mise en œuvre de ce droit est l’objet du présent avis budgétaire.

La mission interministérielle « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » constitue un trait d’union entre la société civile et le monde combattant ainsi qu’entre les générations. Les actions portées par la mission visent à témoigner la reconnaissance de la Nation à l’égard du monde des anciens combattants et à susciter l’adhésion de la population française aux enjeux et aux efforts qui sont consacrés au domaine de la défense et de la sécurité nationale. En confortant ainsi l’esprit de défense et l’esprit patriotique, cette mission contribue non seulement au bon fonctionnement des armées, mais aussi à la capacité de résilience de la Nation face aux crises traversées. La mission s’articule autour de trois programmes complémentaires :

 le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » qui voit des crédits augmenter afin de renforcer les actions à destination de la jeunesse et de la politique mémorielle ;

 le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » qui, dans la continuité des exercices antérieurs, voit également ses crédits conforter afin de consolider les droits des ressortissants du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) tout en renforçant l’équité entre les différentes générations du feu.

 le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale » qui relève du Premier ministre et rassemble trois dispositifs d’indemnisation : victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites, orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites, orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie.

 

En première partie du présent rapport, il sera procédé à une évaluation des ressources affectées à la mission budgétaire « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » par le projet de loi de finances pour 2021. Comme chaque année, le montant total de la dotation budgétaire diminue en raison de la disparition progressive et naturelle du nombre de bénéficiaires des dispositifs du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, au premier rang desquels les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant. Au total, le projet de budget pour 2021 des trois programmes s’élève à 2 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), 94 % de ce montant correspondant à des dépenses d’intervention en faveur du monde combattant.

Le rapporteur pour avis tient à rappeler qu’avec Madame Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, Florence Parly, la majorité poursuit depuis 2017 une politique constante et ambitieuse de maintien et d’extension des droits en faveur des ressortissants du monde combattant, en décidant et en mettant en œuvre des mesures demandées depuis longtemps, mais restées jusqu’alors sans réponse : harmonisation des conditions d’octroi de la pension de réversion aux conjoints survivants d’avant et après 1962, en 2018; extension du bénéfice de la carte du combattant aux anciens militaires pouvant justifier de quatre mois de présence en Afrique du Nord entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, mesures qui touchent plus de 50 000 anciens militaires, en 2019 ; hausse de la pension de celles qui ont renoncé à une grande partie de leur carrière professionnelle pour prendre soin de leur conjoint lourdement blessé pour la France (grand invalide de guerre).

Par ailleurs, dès le 1er janvier 2021, en application de la loi de finances pour 2020, les conjoints d’anciens combattants, principalement les victimes, ayant atteint l’âge de 74 ans, pourront bénéficier de la demi-part fiscale dès lors que leur conjoint avait bénéficié de la retraite du combattant. Ce bénéficie a été obtenu par le Parlement via un amendement de la commission des finances ayant repris et adopté l’amendement du groupe GDR. Cette avancée était réclamée par certaines associations, représente une dépense de 30 millions d’euros.

Cette année, les grandes avancées sont la convocation de la convention tripartite État, Parlement, associations, de revalorisation du point de Pension Militaire d’Invalidité et l’extension du nombre de conjoints survivants de grands invalides de guerre pouvant bénéficier d’une majoration de pension de réversion. Ainsi, une veuve de grand invalide de guerre pourra bénéficier d’un supplément de Pension Militaire d’Invalidité si son conjoint décédé avait bénéficié d’une PMI de 6 000 points, contre 10 000 points aujourd’hui. Ce qui représente près de 5 300 euros de plus pour 200 bénéficiaires, pour un coût de 1 million d’euros.

Le rapporteur a choisi de consacrer la seconde partie de son rapport à la place faite aux « tirailleurs sénégalais » dans la politique de mémoire de la France, dans la continuité de la thématique relative à l’Armée Noire qu’il poursuit depuis 2017.

Le rapporteur pour avis avait demandé que les réponses à ses questionnaires budgétaires lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2020, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. À cette date, 58 réponses sur 58 lui étaient parvenues, soit un taux de 100 %.

 


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   Première partie :
Les crédits de la mission « anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », couvre l’ensemble des politiques qui contribuent à pérenniser les liens entre la Nation et le monde combattant. Elle s’articule autour de trois programmes budgétaires complémentaires.

Le projet de budget pour 2021 des trois programmes de la mission s’élève à 2 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une diminution de près de 69 millions d’euros (3,4 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Cette baisse n’est néanmoins pour l’essentiel que le reflet de la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires de la dette viagère – pensions militaires d’invalidité et retraite du combattant. Les anciens appelés ayant combattu en Afrique du Nord il y a une soixante d’années constituent en effet la grande majorité des bénéficiaires de ces dispositifs et, l’âge avançant, nombre d’entre eux disparaissent.

Évolution des crédits de la mission

(en millions d’euros)

Source : PAP 2021.

I.   Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée »

Le budget 2021 du programme 167 s’établit à 38,80 M€ en AE et CP, soit une hausse de + 9,40 M€ par rapport à la LFI 2020 Il a pour objet notamment de financer la « Journée défense et citoyenneté », le Service Militaire Volontaire d’une part, et la politique de mémoire d’autre part.

La répartition des crédits de paiement pour 2021 est la suivante :

– 47 % pour la Journée défense et citoyenneté ;

– 27 % pour les sépultures de guerre et lieux de mémoire ;

– 18 % pour la politique mémorielle ;

– 8 % pour le service militaire volontaire.

 

Évolution des crédits du programme 167 de 2018 à 2020

(en euros)

Mission
« Anciens combattants »

LFI 2019

LFI 2020

PLF 2021

AE

CP

AE

CP

AE

CP

P 167

Action 1

Liens armées-jeunesse ([1])

14 787 483

14 624 062

17 792 623

17 789 899

18 460 670

18 446 092

Action 2

Politique de mémoire

28 056 938

28 056 938

15 913 166

15 913 166

10 950 000

10 950 000

Total P 167

42 844 421

42 681 000

33 705 789

33 703 065

29 410 670

29 396 092

Source : PAP 2021.

A.   Les liens armées-jeunesse

La dotation en 2021 pour l’action 1 est portée à 21,37 M€ en AE et 21,25 M€ en CP, soit une hausse de 2,91 M€ en AE et 2,80 M€ en CP par rapport à la LFI 2020. Les crédits relèvent essentiellement du titre 3, seule la subvention à l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANCLI) de 0,03 M€ relève du titre 6.

Cette hausse du budget de l’action 1 « Lien Armées-jeunesse » s’explique d’une part par la revalorisation en année pleine de l’indemnité de transport versée aux jeunes réalisant une Journée défense et citoyenneté (JDC) et d’autre part par le report de la JDC de 175 000 jeunes de 2020 à 2021. Conséquence de la crise sanitaire, 960 815 jeunes devraient en effet effectuer leur JDC en 2021 en lieu et place des 785 815 initialement prévus.

On note également une hausse des crédits dédiés au service militaire volontaire (SMV) (+ 0,5 M€) par rapport à la LFI 2020 suite à l’augmentation de la cible des volontaires stagiaires (elle passe de 1 000 à 1 200 entre 2020 et 2021) ainsi que par la prise en charge de marchés de formation professionnelle qui ne sont plus financés par des organismes extérieurs.

1.   Les conséquences de la crise sanitaire sur la journée défense et citoyenneté

La Journée défense et citoyenneté (JDC) assure la diffusion de l’esprit de défense auprès des jeunes Français. Conformément aux dispositions de l’article L. 114-3 du code du service national, elle a pour but de sensibiliser les jeunes aux droits et aux devoirs du citoyen, de détecter ceux qui se trouvent en situation d’échec scolaire ou d’illettrisme et d’assurer, avec le concours des mairies, leur recensement.

a.   Le bilan de la situation à l’été 2020

Les annulations de JDC ont commencé en semaine 10 (début mars) dans le secteur nord-est du territoire national à la suite de la détection d’un foyer épidémique COVID-19 sur la base aérienne de Creil (Oise), lieu d’hébergement d’un site JDC et d’un centre du service national dont le personnel organise et encadre l’ensemble des JDC pour la Picardie. L’aggravation de la situation sanitaire a ensuite conduit à la fermeture successive de plusieurs sites JDC jusqu’à l’annonce du confinement national mi-mars.

Dans une logique d’alignement sur les mesures prises pour les lycées, qui n’ont de facto pas repris une activité normale avant l’été, la JDC a finalement été suspendue jusqu’au 30 août 2020, à l’exception de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie qui ont pu accueillir 1 528 jeunes entre mai et juillet 2020 en application d’un protocole sanitaire strict.

Le bilan national de l’impact de cette crise sanitaire est, au titre de la JDC en 2020, de 336 000 jeunes Français non convoqués en temps utile (la convocation à la JDC intervenant en moyenne à 17 ans et 4 mois).

b.   Une reprise progressive, adaptée et strictement encadrée à la rentrée 2020

La reprise effective de la JDC s’est déroulée le 31 août, avec une série d’adaptations permettant le respect des prescriptions sanitaires. Les JDC réalisées en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie ont permis de roder un nouveau schéma organisationnel.

Au dernier trimestre 2020, près de 300 sites seront utilisés pour accueillir des jeunes, selon un protocole sanitaire combinant distanciation physique, réduction de la capacité d’accueil des salles, port du masque obligatoire, désinfection du matériel et des locaux. Il sera, en outre formellement demandé aux jeunes de prendre leur température avant leur déplacement.

Par ailleurs, le ministère des armées a adapté la durée et le contenu de la JDC : réduite à 3 h 30 au lieu de 8 h (déjeuner inclus), la session se concentrera sur les modules défense (présentation de l’appareil de défense et des formes d’engagement). Les volets portant sur la citoyenneté (informations diverses, don du sang, sécurité routière, etc.) seront mis à disposition des jeunes sur le site majdc.fr.

Pour autant, cette JDC adaptée conservera ses missions traditionnelles d’accompagnement des jeunes en fragilité scolaire ou sociale. Seront ainsi maintenus le test d’évaluation des fondamentaux de la langue française et les entretiens d’orientation individuels avec les décrocheurs. Le ministère continuera donc à jouer pleinement son rôle d’acteur majeur de la détection et de l’orientation des jeunes en difficulté.

Le format allégé de la JDC adaptée permet de doubler les sessions JDC sur un même site (une première le matin, une seconde l’après-midi). Malgré un remplissage des salles sensiblement réduit, ce cadencement permettra de résorber une partie significative de la « dette » dès 2020, sous réserve d’éventuels nouveaux confinements.

Les 336 000 personnes qui n’ont pu remplir leur obligation du fait de la crise sanitaire, seront appelées à la fin de l’année en cours pour 161 000 d’entre elles, et convoquées en 2021 pour 175 000 d’entre elles.

Ce cadencement exceptionnel, qui demande un investissement important des agents, devrait perdurer jusqu’au mois de mai 2021, avec la résorption totale du retard, si la situation sanitaire nationale demeure stable.

2.   Le service militaire volontaire, un dispositif d’insertion socio-professionnelle aux résultats probants

Depuis 2015, le SMV est un dispositif qui vise à délivrer à plus de 1 000 jeunes citoyens français âgés de 18 à 25 ans, exclus du marché de l’emploi, un parcours d’accompagnement spécifique pour favoriser et réussir leur projet d’insertion professionnelle. Il repose sur les principes de militarité et de volontariat, dans le cadre d’une prise en charge globale et individualisée des volontaires stagiaires. Il s’appuie également sur une politique partenariale avec les acteurs de la formation professionnelle, de l’emploi et de l’insertion, ainsi que du secteur privé.

Pérennisé à compter du 1er janvier 2019 par la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, le SMV propose aujourd’hui plus de 50 formations métiers, toutes en adéquation avec les besoins des bassins d’emploi. Sur le plan organisationnel, il se compose d’un état-major implanté à Arcueil et de six régiments et centres localisés dans cinq régions. Chaque centre offre plusieurs filières, soit à vocation nationale (agent d’entretien du bâtiment) ou régionale, soit créées en coopération avec une entreprise partenaire (SNCF, Disney).

Sur le plan des résultats, le taux d’insertion professionnelle des volontaires stagiaires est tout à fait probant puisqu’il avoisine 74 % en 2019, le taux de réussite au permis de conduire étant de 70 %.

a.   Le nombre de volontaires engagés dans le dispositif depuis trois

Promotion

Année

Nombre de volontaires stagiaires recrutés

2e

01/09/2016 – 31/08/2017

686

3e

01/09/2018 – 31/12/2018

1 148

4e

01/01/2019 – 31/12/2019

1 090

5e

01/01/2020 – 31/12/2020

514
(situation intermédiaire : juin 2020)

Le coût unitaire de la formation d’un volontaire stagiaire oscille entre 30 000 et 35 000 euros, selon le type de formation professionnelle suivi.

b.   Les conséquences de la crise sanitaire sur l’effectif des jeunes

En raison de la mise en place des mesures de confinement, 330 volontaires stagiaires (VS) n’ont pu être recrutés entre le 16 mars et le 20 mai 2020.

Au total, 560 VS ont interrompu leur formation, à différents stades de leur parcours :

– 59 dans la phase de formation militaire,

– 268 au stade de la formation complémentaire,

– 233 au cours de la formation professionnelle.

Dès le 18 mai, les formations interrompues ont repris progressivement, dans le respect des consignes sanitaires. Les incorporations ont pu se tenir dès le 8 juin à Brest et La Rochelle et dès le 16 juin à Châlons-en-Champagne et Montigny-lès-Metz (soit 188 VS incorporés). Les prochaines auront lieu en septembre 2020.

En raison du contexte sanitaire, les nouvelles cibles de recrutement sont de 980 VS et 162 volontaires expert (VE) pour 2020. Pour 2021, la cible de recrutement VS sera de 1 200.

c.   Les modalités de financement du SMV et conditions de la participation financière des collectivités territoriales

Le budget de fonctionnement est quasi exclusivement porté par le ministère des armées. Au titre de la loi de finances initiales pour 2020, le SMV a bénéficié de 2,5 M€ en AE et CP. Pour l’exercice budgétaire 2021, il est prévu que le SMV bénéficie de 3 M€ en AE et CP.

La reconnaissance aux volontaires stagiaires du double statut de militaire et stagiaire de la formation professionnelle permet au SMV de bénéficier des financements de France Compétences, de l’offre de formation des opérateurs de compétences (OPCO) et de nouer des conventions avec les régions. Ces dernières participent au financement de façon variable : la région Grand-Est a versé 2,5 M€ via la mise en place d’un fonds de concours ; les régions Bretagne et Auvergne-Rhône-Alpes ont opté pour une prise en charge directe des coûts de formation professionnelle en lien avec les OPCO.

Au bilan, 89 % du coût de la formation professionnelle des 1 000 volontaires formés a ainsi été financé en 2019 par des ressources extrabudgétaires.

Enfin, les régiments et centres du SMV se sont vu attribuer des subventions à partir du fonds social européen (FSE) pour la période 2014-2020, pour un montant total de 18,74 M€.

d.   Le nombre des personnels mobilisés

L’effectif mobilisé pour remplir la mission du SMV a évolué de la manière suivante :

 

Année

Effectif

Evolutions intervenues

2016

256

Création de l’antenne de Châlons-en Champagne

2017

348

Création du centre de l’armée de l’air à Ambérieu-en-Bugey et du centre Marine à Brest

2018

356

 

2019

358

Création de la deuxième compagnie du 2e RSMV

2020

358

Effectif figé jusqu’en 2026 par la LPM

Les effectifs du SMV sont de 358 cadres militaires, issus des trois armées et du service du commissariat des armées. Ils sont appuyés par des personnels extérieurs : médecins et psychologues du service de santé des armées, assistantes sociales des armées, professeurs du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, volontaires du service civique, membres d’associations, et d’experts engagés dans la réserve opérationnelle ou citoyenne du SMV.

e.   Le nombre des volontaires intégrant les armées ou rejoignant le secteur privé

En 2019, 21 volontaires ont rejoint les armées soit 4,3 % de la promotion insérée. Sur la même période, 468 volontaires ont obtenu un emploi dans le secteur privé, essentiellement dans de grandes entreprises de la région Ile-de-France, des PME et des TPE en région Grand Est, en Auvergne-Rhône-Alpes, en Bretagne et en Nouvelle-Aquitaine.

B.   La politique de mémoire

La politique de mémoire est financée sur le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée », précisément sur son action 2 « Politique de mémoire », elle-même composée de deux opérations stratégiques (OS) – « Mémoire » et « Sépultures de guerre et lieux de mémoire ». S’y ajoute la dotation pour l’entretien des lieux de mémoire par l’ONACVG, désormais intégrée à la Subvention Pour Charges de Service Public (SCSP) versée à l’opérateur sur le programme 169, programme qui finance déjà les rémunérations et charges sociales des agents chargés de la mise en œuvre des missions mémorielles.

À périmètre constant (disparition de la Mission du centenaire et apport des crédits du 14 juillet en 2019 et transfert des crédits d’entretien des lieux de mémoire en 2021), le niveau de financement de 2021 est équivalent à celui des années précédant 2019.

Le budget 2021 de l’action 2 s’établit à 17,55 M€ en AE et en CP, contre 10,95 en LFI 2020. Cette hausse de 6,60 M€ résulte notamment d’une revalorisation de l’OS « Sépultures de guerre et lieux de mémoire ». Cet effort permet de poursuivre les travaux d’entretien et de rénovation de certains hauts lieux de la mémoire nationale. Pour rappel, le budget 2020 de la politique de mémoire est complété d’une contribution prélevée sur la trésorerie de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre (ONACVG) à hauteur de 4,41 M€.

De plus, il faut ajouter au montant 2021, une enveloppe de 2,50 M€ pour l’entretien des lieux de mémoire du ministère des Armées dont la gestion est assurée par l’ONACVG, en France métropolitaine, en Algérie et au Maroc, qui à partir de 2021 est intégré à la subvention pour charges de service public (SCSP) versée à l’ONACVG depuis le programme 167.

Les dépenses de fonctionnement (titre 3) de la politique de mémoire en 2021 s’élèvent à 6 M€ en AE et en CP, soit une augmentation de 0,07 M€ par rapport à la LFI 2020. Cette évolution s’explique par une légère hausse de l’OB « Opérations lieux de mémoire réalisées par l’État ». Les dépenses d’intervention (titre 6) de la politique de mémoire s’élèvent à 11,55 M€ en AE et en CP pour le budget 2021, soit une augmentation de 6,53 M€ par rapport à la LFI 2020. Cette hausse résulte d’une revalorisation des crédits alloués à l’ONACVG consacrés au financement des opérations de rénovation et de valorisation des lieux de mémoire et traduit la priorité donnée par le ministère des armées au bon état d’entretien de son patrimoine mémoriel.

1.   La politique de mémoire : les actions de mémoire

Sous cette dénomination, il est question du financement des cérémonies commémoratives et de la conduite de diverses actions à caractère essentiellement pédagogique ou éditorial.

L’opération stratégique « Mémoire » est dotée en 2021 de 6,85 M€, qui financent, d’une part, les commémorations à hauteur de 4 M€ et, d’autre part, des projets mémoriels de toute nature réalisés par la DPMA (édition de la revue Les Chemins de la mémoire, remise des trophées « Héritiers de mémoire », actions pédagogiques mises en œuvre dans le cadre du protocole défense-éducation nationale-agriculture du 20 mai 2016) pour 0,35 M€, ou par des partenaires publics ou privés (ONACVG, mais aussi associations, fondations, collectivités territoriales, établissements d’enseignement) pour 2,5 M€.

Le budget des commémorations, inchangé par rapport à 2020, financera, en plus de l’organisation logistique du 14 juillet, les cérémonies des journées nationales commémoratives fixées par des textes législatifs ou réglementaires (1 M€) et des célébrations liées aux thématiques mémorielles prévues en 2021 (0,5 M€). Enfin, 0,10 M€ sont réservés pour des manifestations ponctuelles liées à l’actualité (hommages nationaux, par exemple).

11 journées dédiées à des commémorations nationales prévues par des textes législatifs et réglementaires :

– 19 mars, journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc – jour anniversaire du « cessez-le-feu » en Algérie ;

– 26 avril, journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation ;

– 8 mai, commémoration de la victoire de 1945 ;

– 10 mai, fête nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme ;

– 27 mai, journée nationale de la Résistance ;

– 8 juin, journée nationale d’hommage aux « morts pour la France » en Indochine ;

– 18 juin, journée nationale commémorative de l'appel du général de Gaulle le 18 juin 1940 à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l'ennemi ;

– 19 juillet, journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France ;

– 25 septembre, journée nationale d’hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives ;

– 11 novembre, commémoration de l’armistice de 1918 et hommage à tous les morts pour la France ;

– 5 décembre, journée nationale d’hommage aux « morts pour la France », aux rapatriés d'Afrique du Nord, aux personnes disparues, aux populations civiles victimes de massacres ou d'exactions et aux victimes civiles de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie.

À ces journées nationales s'ajoute traditionnellement la cérémonie d'hommage à Jean Moulin célébrée le 17 juin.

a.   Le bilan des commémorations organisées en 2020 et impact de la crise sanitaire

La pandémie de COVID-19 a perturbé le programme initialement prévu pour cette année, dont les thématiques principales étaient l’année de Gaulle, la bataille de France de mai-juin 1940, la fin du 75e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale, avec la libération des camps, l’entrée au Panthéon de Maurice Genevoix en novembre, le 70e anniversaire de l’engagement du bataillon français de l’ONU en Corée ainsi que le 150e anniversaire de la guerre de 1870, sous l’angle de la réconciliation franco-allemande.

Au cours du premier semestre de l’année 2020, plusieurs commémorations présidées par les plus hautes autorités de l’État ont pu être organisées, même si certaines n’ont pas pu être célébrées avec l’ampleur souhaitée. Ainsi, ont notamment été commémorés les anniversaires de l’appel du 18 juin, de la libération des camps, des combats de la bataille de France (cérémonie à Montcornet dans l’Aisne, le 17 mai, lieu de la bataille où s’est illustré le colonel de Gaulle), des combats de la bataille des Alpes (cérémonie à Cervières dans les Hautes-Alpes le 20 juin) ou encore celui du Massacre des tirailleurs africains par l’armée nazie (cérémonie au Tata sénégalais de Chasselay dans le Rhône, le 21 juin).

Parallèlement, avec la crise sanitaire, le développement de l’offre numérique s’est intensifié. Le site Internet Chemins de mémoire a proposé, pour chacun de ces temps commémoratifs, outre une offre documentaire et pédagogique, un aperçu des actualités mémorielles patrimoniales et culturelles des partenaires en lien avec la commémoration, et relayé les messages du chef de l’État ou de la ministre déléguée qui ont présidé les cérémonies.

Le ministère a également financé la création d’une web-série intitulée « Comme en 40 ! », pour commémorer l’année 40 autrement, en choisissant une voie innovante à travers un outil audiovisuel inédit. Les dix épisodes produits sont diffusés sur les sites et réseaux sociaux du ministère des armées, à partir du 27 mai jusqu’au 11 novembre 2020. Pendant l’été, quatre épisodes supplémentaires ont illustré le parcours de compagnons de la Libération emblématiques de cette période.

Par ailleurs, la DPMA était responsable pour la deuxième fois en 2020 de l’organisation logistique du défilé du 14 juillet, dans une scénographie et un format très particuliers, place de la Concorde, liés aux mesures de sécurité sanitaire.

Des cérémonies dans le courant du second semestre commémorent le 150e anniversaire de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, puis l’engagement des troupes françaises lors de la guerre de Corée en 1950. S’agissant de la guerre de 1870-1871, deux cérémonies distinctes se sont déroulées à Mars-la-Tour (Meurthe-et-Moselle) puis à Gravelotte (Moselle), le 30 août. La seconde cérémonie, à Gravelotte, était présidée par la ministre déléguée auprès de la ministre des armées et coprésidée par Pascal Hector, ministre plénipotentiaire auprès de l’ambassade d’Allemagne à Paris. Sa retransmission en direct sur les sites Internet et réseaux sociaux du ministère des armées a remporté un grand succès.

 

Le 70e anniversaire de l’engagement des troupes françaises lors de la guerre de Corée donnera lieu à l’organisation d’une cérémonie, en présence de la représentation diplomatique de Corée du Sud, le 13 octobre devant le monument dédié au souvenir de ce bataillon (Paris, 4e). Lors de cette manifestation, sera inauguré le « mur des noms » dont la réalisation, assurée par l’association nationale des anciens et amis des Forces françaises de l’ONU – Bataillon de Corée et régiment de Corée – 156e Régiment d’infanterie bénéficie d’un soutien financier du ministère des armées.

b.   Les commémorations de « l’année de Gaulle » : 130e anniversaire de sa naissance, 80e anniversaire de l’appel du 18 juin et 50e anniversaire de sa disparition

L’année 2020 est une année « de Gaulle ». En effet, outre le 80e anniversaire de l’Appel du 18 juin commémoré traditionnellement, c’est aussi le 130e anniversaire de sa naissance (1890) et le 50e anniversaire de sa mort (1970). Les actions conduites par le ministère visent à valoriser auprès du grand public, et en particulier la jeunesse, le « de Gaulle » militaire, dans un hommage plus large retraçant l’ensemble de son engagement.

Compte tenu de la pandémie de la COVID-19, les célébrations prévues ont été organisées en tenant compte des prescriptions sanitaires du Gouvernement. De fait, la participation du public n’a pas été possible et a réduit l’impact direct des commémorations, même si celles-ci ont été relayées par les différents médias. En revanche, certaines manifestations prévues par les partenaires de la DPMA, membres du réseau des musées et mémoriaux des conflits contemporains, tels que le musée de l’Ordre de la Libération, le musée de la Résistance de Bondues, le musée de la Résistance en Argoat, etc., n’ont pu être maintenues en raison du contexte sanitaire.

Il est à noter que les cérémonies nationales dédiées au souvenir du général de Gaulle auront toutes été présidées par le Président de la République Emmanuel Macron.

La première a été organisée à Montcornet (Aisne) pour célébrer les combats héroïques du 17 mai 1940 menés par le colonel de Gaulle, alors commandant la 4e DCR (division cuirassée). Présidée par le président de la République, cette cérémonie a débuté à Dizy-le-Gros, lieu de la première offensive allemande dans l’Aisne, puis à La-Ville-aux-Bois-les-Dizy, où la 4e DCR du colonel de Gaulle lança la contre-offensive. Ce fait d’armes fondateur fut également l’un des premiers actes de résistance militaire.

Le deuxième évènement fut l’appel du 18 juin du général de Gaulle, acte fondateur de la Résistance lors de la Seconde Guerre mondiale. L’appel a été commémoré par le chef de l’État et le Premier ministre, en comité restreint, sans public. La patrouille de France et les Red Arrows, la patrouille de la Royal Air Force, ont survolé le mémorial et les Invalides. Avant de se rendre au Mont-Valérien, Emmanuel Macron a passé une heure au Musée de la Libération, à Paris, en compagnie d’Hubert Germain, 99 ans, l’un des trois derniers Compagnons de la Libération encore vivants.

Avec une délégation restreinte, le président de la République s’est ensuite envolé pour Londres pour rendre hommage à la ville qui fut la capitale de la France libre. Le président français a été reçu à Clarence House, résidence du prince Charles, héritier de la couronne britannique. En présence du prince Charles, M. Macron a remis la Légion d’honneur à la ville de Londres, la septième ville ainsi décorée après Alger, Belgrade, Brazzaville, Liège, Luxembourg et Volgograd.

Ce déplacement était pour le chef de l’État le deuxième événement dans le cadre de « l’année de Gaulle » après la célébration du 80e anniversaire de la bataille de Montcornet (Aisne) et avant le 50e anniversaire de la mort du général à Colombey-les-Deux-Églises, le 9 novembre prochain.

Parallèlement, la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, rendait hommage aux combattants de l’année 1940, qui, à l’instar du colonel de Gaulle résistaient valeureusement aux troupes allemandes. Le 20 juin, Madame Geneviève Darrieussecq était en déplacement à Cervières, dans les Hautes-Alpes, pour commémorer le 80e anniversaire de la bataille des Alpes. Elle a visité un bivouac reconstitué par l’association briançonnaise « Souvenir, sauvegarde et histoire militaire en lien avec la fédération des soldats de montagne ». La ministre s’est rendue ensuite au fort des Aittes pour découvrir cet ouvrage militaire de la ligne Maginot.

Le 21 juin, Madame la ministre déléguée Geneviève Darrieussecq a présidé une cérémonie au Tata sénégalais de Chasselay (Rhône) commémorant ainsi le 80e anniversaire des massacres des tirailleurs africains par l’armée allemande. Entre le 19 et le 25 juin 1940, plus d’une centaine de soldats africains ont été exécutés dans la région et dans les départements voisins. Lors de la cérémonie commémorative, la ministre déléguée auprès de la ministre des armées a rendu hommage aux combattants africains victimes de crimes racistes. Elle a dévoilé également un panneau retraçant leur histoire et leur rôle dans les combats au service de la France.

Outre l’organisation des cérémonies, la DPMA a proposé un accompagnement scientifique et pédagogique de l’année mémorielle, offrant aux enseignants et au grand public des clefs de compréhension et d’appropriation de l’année mémorielle « de Gaulle » et de ses enjeux à travers :

– la mise à disposition de ressources : publication d’un numéro de la revue Les Chemins de la mémoire intitulé « 1940 Répondre à l’Appel » et mise en ligne d’un dossier recensant des articles historiques, des documents iconographiques, des ressources pédagogiques ou encore la programmation culturelle et scientifique des partenaires du ministère ;

– le lancement d’un appel à projets pédagogiques dédié à l’engagement militaire de Charles de Gaulle et la valorisation des travaux des classes qui y ont répondu, à travers la publication d’articles, la participation à l’avant-première du film « De Gaulle » ou encore la réalisation d’un film dans le cadre de l’opération « Héritiers de mémoire » adaptée dans son format aux mesures sanitaires ;

– le lancement d’un appel à contributions numériques, durant le confinement, sur l’année 1940, afin de laisser les citoyens, et notamment les plus jeunes, se réapproprier cette mémoire et la traduire sous toute forme (texte, dessin, réalisation artistique, etc.) ;

– l’accompagnement pédagogique et le conseil scientifique pour la réalisation d’un web-série dédiée à l’année 1940, et souhaitée par la ministre déléguée.

c. Le programme des commémorations en 2021

En 2021, le budget des commémorations, soit 4 M€, assurera le financement de l’organisation logistique du défilé du 14 juillet (2,4 M€), des journées nationales commémoratives fixées par des textes législatifs ou réglementaires (1 M€) et des célébrations liées aux thématiques mémorielles prévues en 2021 (0,5 M€) : le centenaire de l’inhumation du soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe, le 150e anniversaire du siège de Belfort et du traité de Francfort du 10 mai 1871, la mémoire des soldats morts pour la France en opérations extérieures (anniversaires des engagements de la France lors de la guerre du Golfe et en Afghanistan), et, s’agissant du second conflit mondial, le 80e anniversaire du serment de Koufra et le souvenir d’Honoré d’Estienne d’Orves. Par ailleurs, 0,1 M€ sont réservés pour des manifestations ponctuelles liées à l’actualité (hommages nationaux, par exemple).

2.   Les sépultures de guerre et les lieux de mémoire

Les crédits pour le patrimoine de pierre s’élèvent à de 10,7 M€ en 2021, en augmentation de 5,7 M€ par rapport à 2020, sans prise en compte du transfert sur la SCSP de l’ONACVG de la dotation pour l’entretien des sites (2,5 M€), évoquée précédemment. Cette enveloppe permet de financer l’entretien (pour les sites situés outre-mer et à l’étranger), la rénovation et la valorisation du patrimoine mémoriel de pierre de l’État et de soutenir l’action d’autres acteurs au titre du tourisme de mémoire.

L’augmentation très sensible des crédits traduit la priorité donnée par le ministère des armées au bon état d’entretien de son patrimoine mémoriel, constitué de 275 nécropoles, 2 200 carrés militaires dans les cimetières communaux, 10 hauts lieux de la mémoire nationale (HLMN) et un millier de lieux de sépulture dans 80 pays.

La dotation pour l’entretien courant de ce patrimoine, en France métropolitaine, en Algérie et au Maroc, est de 2,25 M€ en 2020 et sera portée à 2,50 M€ en 2021. Pour 2021, ces crédits seront intégrés à la subvention pour charges de service public versée à l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) sur le programme 169. L’ONACVG ayant fermé son service en Tunisie, les sites y sont désormais entretenus par l’ambassade. Outre-mer et à l’étranger hors Algérie et Maroc, 1,5 M€ en 2020 comme en 2021, est délégué aux postes diplomatiques et aux directions du commissariat outre-mer (DICOM) pour l’entretien, la valorisation et l’organisation des cérémonies dans les cimetières militaires et de garnison.

La programmation pluriannuelle des travaux de restauration des lieux de mémoire pour les années 2020 à 2025 est finalisée et s’étend désormais aux hauts lieux de la mémoire nationale (HLMN). Elle s’inscrit dans la continuité de la programmation 2011-2018, tout en prenant en compte les nouvelles exigences environnementales (mise en œuvre de la charte paysagère des nécropoles, arrêt de l'utilisation de produits phytosanitaires). Elle priorise son effort sur les sites les plus dégradés, la préservation du bâti et la sécurité des personnes, et sur ceux qui concernent les deux cycles mémoriels qui seront commémorés au cours de la période 2020-2025, à savoir les 150 ans de la guerre franco-prussienne de 1870 et les 80 ans de la Seconde Guerre mondiale. L’accent est aussi mis sur la rénovation des quelque 2 200 carrés militaires.

L’enveloppe 2020 pour les travaux de restauration des nécropoles et des HLMN en France, en Algérie et au Maroc a été fixée à 4,28 M€, intégralement financés sur la trésorerie de l’ONACVG et provenant de dotations antérieures pour des travaux qui n’avaient pu être réalisés. En 2021, les crédits consacrés aux travaux de rénovation sont de 7,8 M€, financés sur le programme 167.

a.   Les sépultures de guerre

 Ce qui était prévu en programmation en 2020

2,115 M€ sont prévus en 2020 pour les nécropoles nationales et des carrés militaires en France, en Algérie et au Maroc.

En France, sont prévus en 2020, les travaux de restauration des portails de la basilique, des ossuaires et l’aménagement de sanitaires dans la nécropole de Notre-Dame de Lorette (Pas-de-Calais), le lancement de travaux de celle d’Amblény (Aisne) et du site de la Lègue (Var), ainsi que la mise en sécurité de la nécropole de Luynes (Bouches-du-Rhône). Par ailleurs, plusieurs études sont programmées, permettant de lancer en 2021 les travaux de restauration de plusieurs sites fortement dégradés. En Afrique du Nord, sont programmées les restaurations du cimetière militaire français de Bologhine en Algérie et du cimetière militaire d’Alnif au Maroc.

A l’étranger, hors Afrique du Nord, les principaux travaux de restauration des sites ont été terminés en 2018. Depuis 2019, les besoins consistent pour l’essentiel à des aménagements paysagers, des travaux d’entretien et des opérations de valorisation touristique des sites (conduite de commémorations et de cérémonies en lien avec le calendrier mémoriel, édition de plaquettes, pose de panneaux d’informations historiques et création de chemins de mémoire avec les acteurs locaux).

 Ce qui sera fait en 2020 compte tenu de modifications à la programmation décidées d’un commun accord DPMA-ONACVG le 23 septembre 2020

Pour les sépultures de guerre, un retard sur plusieurs chantiers s’explique par la complexité des dossiers et par la situation sanitaire exceptionnelle de l’année 2020 : sont ainsi différés les travaux du monument ossuaire de Navarin (Marne), de la crypte ossuaire de Champigny-sur-Marne (Val de Marne), du mémorial de Chasseneuil-sur-Bonnieure (Charente). Ces chantiers sont reportés à 2021 et 2022. Exception faite du lancement de l’opération de restauration de la nécropole d’Amblény (Aisne), les actions ont essentiellement porté sur le lancement des premiers diagnostics, préalables aux études de définition des projets de restauration.

 La programmation pour 2021

La programmation 2021 sera adaptée pour prendre en compte les conséquences de la crise sanitaire. Les opérations concerneront prioritairement les aspects sécuritaires et sanitaires des sites, dont beaucoup comportent des éléments architecturaux présentant des risques. Ainsi, il est prévu de lancer des études pour la restauration des chapelles des nécropoles de Vitry-le-François et de Sillery (Marne), de Riche et de Metz-Chambière (Moselle). Il en est de même pour le mur d’enceinte de la nécropole de Sarrebourg Buhl (Moselle), la restauration des tours lanterne des sites de Pierrepont (Meurthe-et-Moselle) et de Notre-Dame de Lorette (Pas-de-Calais), ainsi que les monuments de Lexy et de Gorcy (Meurthe-et-Moselle), qui présentent de nombreuses avaries (chutes de pierres, fissures, etc.).

À l’étranger hors Algérie et Maroc, les principaux travaux de restauration des sites ont été terminés en 2018 et 2019. Les besoins en 2020 et 2021 se concentrent désormais sur des aménagements paysagers, des travaux d’entretien, l’organisation de cérémonies et des actions de valorisation.

Les restaurations du cimetière militaire français d’Oran, de Bologhine en Algérie et du cimetière militaire d’Alnif au Maroc seront engagées dès que la situation sanitaire le permettra.

b.   Les lieux de mémoire

 Ce qui était prévu en programmation 2020 pour les hauts lieux de la mémoire nationale

Dans les HLMN, hors Notre-Dame de Lorette (haut lieu évoqué supra, car traité, du point de vue des problématiques d’entretien et de rénovation, comme une nécropole), étaient programmés en 2020 l’achèvement de la rénovation des miradors, les études pour la création d’un local de stockage au Struthof et la restauration de la chambre à gaz au Struthof (Bas-Rhin), l’installation d'un bâtiment provisoire au mémorial des martyrs de la déportation (Paris) dans l'attente de l'expertise à la suite d’infiltrations dans l’édicule d’accueil, le lancement de la réfection des murs d’enceinte et le désamiantage des ateliers à Montluc (Rhône), l’étude en vue des travaux de sécurisation et de valorisation du mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (Paris).

 Ce qui sera fait en 2020 pour les hauts lieux de la mémoire nationale compte-tenu de modifications à la programmation décidées d’un commun accord DPMA-ONACVG le 23 septembre 2020

De nouvelles opérations seront effectuées en 2020 : accessibilité de la chambre à gaz, escaliers de la baraque musée et travaux sur le bloc crématoire au Struthof et le regroupement des différentes phases de restauration des ateliers de Montluc. En 2021, les opérations lancées en 2020 seront poursuivies, et seront entrepris les travaux de sécurisation et de valorisation du mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (Paris), En revanche, la réfection des murs d’enceinte du mémorial de Montluc est reportée à 2022. Sera privilégié l’aménagement des ateliers dès 2021 de disposer d’espaces pour accueillir le public, les travaux sur les murs d’enceinte étant de nature à perturber le circuit de visites.

Par ailleurs, 0,15 M€ sont alloués à l’ONACVG pour contribuer au financement des travaux de rénovation des monuments aux morts communaux et départementaux.

Enfin, l’enveloppe vouée au développement des partenariats avec les territoires dans le cadre du tourisme de mémoire est ramenée de 0,90 M€ à 0,80 M€. Ces crédits permettront de finaliser les dossiers pour lesquels l’État s’est engagé les années précédentes et de débuter de nouveaux partenariats avec les collectivités territoriales pour la création et surtout la rénovation d’équipements mémoriels.

L’édification du monument « OPEX »

Depuis 1963, 549 militaires français sont morts hors de nos frontières lors d'opérations extérieures (OPEX). Aucun monument national ne leur rendait hommage, jusqu'à ce lundi 11 novembre 2019 où le président de la République a inauguré un monument en leur mémoire dans le 15e arrondissement de Paris, au cœur du jardin Eugénie Djendi (résistante, déportée et exécutée à Ravensbrück), en présence des familles des défunts.

Composé de deux éléments centraux, le monument représente six porteurs anonymes (cinq hommes et une femme des forces armées), dont les visages expriment la douleur, le recueillement et la détermination, portant un cercueil invisible. Leurs uniformes symbolisent l’ensemble de la communauté militaire. Un mur révèle les noms des militaires morts pour la France en opérations extérieures sur près de 17 théâtres.

L’ONACVG a été en première ligne dans le cadre de l’organisation de cette inauguration, en mobilisant les compétences de son réseau local. Ainsi, les services départementaux de l’ONACVG ont travaillé ensemble, et tous ont été mobilisés dans le cadre des relations avec les familles : l’ensemble des services départementaux, et dans certains cas, les HLMN ont été mobilisés pour les contacts téléphoniques.

Les services ont travaillé en lien privilégié avec des institutions partenaires, en particulier la cellule d’aide aux blessés de l’Armée de terre (la CABAT), ce qui a permis l’établissement d’une liste juste et complète.

Désormais, ce dixième haut lieu de la mémoire nationale offre un espace de recueillement pour la communauté de défense, les familles et proches des militaires. Ce lieu revêt plusieurs significations : celle de la reconnaissance, de la valeur de l’engagement, du recueillement et du souvenir.

Un certain nombre de dégradations sur les plaques ont eu lieu durant l’été. Le choix a été fait, en accord avec la ministre des Armées d’implanter un panneau invitant au respect du monument (pour mémoire : « Ce lieu est dédié à la mémoire des soldats tombés pour la France en opération extérieure. Ensemble, respectons-le. »). Par ailleurs, les plaques sont en train d’être rénovées et l’ONACVG poursuit le travail de mise à jour des noms.

II.   Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant »

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » retrace l’ensemble des actions et interventions réalisées au profit du monde combattant et destinées à témoigner la reconnaissance de la Nation à leur égard. Le monde combattant rassemble tous ceux qui, anciens combattants, combattants, victimes civiles de guerre, peuvent se prévaloir du bénéfice du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), ainsi que les associations et fondations qui œuvrent pour la mémoire des conflits des XXe et du XXIe siècles. Au total, il rassemble 2,4 millions de personnes.

Le dispositif déployé en faveur du monde combattant concerne pour l’essentiel la reconnaissance de la qualité de pensionné, de combattant, d’ancien combattant ou de victime de guerre, selon les conditions et les procédures définies par le CPMIVG, ainsi que la mise en œuvre des droits et avantages accordés aux pensionnés, combattants, anciens combattants et victimes de guerre.

La répartition des crédits de paiement du programme 169 pour 2021 est la suivante :

– 43 % pour les pensions militaires d’invalidité ;

– 33 % pour la retraite du combattant ;

– 20 % pour les dépenses d’intervention (entretien du patrimoine mémoriel) ;

– 3 % pour la subvention versée à l’ONACVG ;

– 1 % pour l’Institution Nationale des Invalides.

A.   Les crédits du programme 169

Le programme 169 représente 94 % des crédits de paiement inscrits au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », en projet de loi de finances pour 2021. Ceci s’explique par l’importance des ressources affectées à l’administration de la dette viagère, qui représentent 1,57 milliard d’euros. De manière plus précise, le budget prévisionnel du programme s’élève à 2 023 millions d’euros en AE et à 2 037 millions d’euros en CP, ce qui correspond à une diminution de 7,81 % en AE et de 5,79 % en CP. Celle-ci traduit la baisse naturelle du nombre de bénéficiaires des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre : pensions d’invalidité, retraite du combattant, dépenses médicales, dépenses complémentaires de sécurité sociale, aide sociale de l’ONACVG, etc.

Le budget 2021 du programme 169 s’établit à 1 954,2 M€ en AE et 1 957,9 M€ en CP. L’évolution pluriannuelle du budget traduit la baisse tendancielle des effectifs bénéficiaires de la dette viagère et des rentes mutualistes.

1.   L’administration de la dette viagère

Le budget de l’action 1 pour 2021 s’établit à 1 495,7 M€ et reflète la baisse tendancielle des effectifs bénéficiaires des PMI et de la RC. La dotation PMI s’élève à 850,9 M€ et intègre la mesure nouvelle évaluée à 1 M€, qui a pour objet d’étendre le bénéfice de la majoration de la pension de réversion, prévue à l’article L. 141-21 du code des pensions miliaires et des invalides de guerre aux conjoints ou partenaires survivants de pensionnés dont le taux de pension était à leur décès d’au moins 6 000 points, contre 10 000 points aujourd’hui.

La dotation pour la RC s’élève à 644,8 M€ en PLF 2021, prenant en compte la réduction des effectifs bénéficiaires.

2.   Les droits liés aux PMI

L’action 2 regroupe les prestations versées au titre des droits accessoires liés aux PMI. Sa dotation en PLF 2021 s’établit à 117,2 M€ et se répartit comme suit :

Sous-action 21 – Soins médicaux gratuits et appareillages : la dotation 2021 est de 40,5 M€.

Sous-action 22 – Remboursements transport SNCF : la dotation 2020 est de 1,3 M€.

Sous-action 23 – Remboursement des prestations de sécurité sociale : cette sous-action finance la section « Invalides de guerre » du régime général de l’assurance maladie. Sa dotation 2021 s’élève à 75,4 M€.

3.   La solidarité

La dotation 2021 de l’action 3 « Solidarité » s’élève à 320,2 M€ et se répartit comme suit :

Sous-action 31 – Majoration des rentes mutualistes : cette sous-action permet le financement des majorations légales et spécifiques des rentes mutualistes auxquelles les anciens combattants peuvent souscrire. La dotation 2021 s’établit à 221,2 M€. La baisse des crédits résulte de la diminution tendancielle des effectifs bénéficiaires.

Sous-action 32 – Subventions aux associations : la dotation 2021 s’élève à 0,3 M€.

Sous-action 33 – Indemnités, pécules et frais de pèlerinages : ces prestations font à nouveau l’objet d’une programmation budgétaire, à hauteur de la dotation antérieure à 2019, soit 0,05 M€, après avoir été pris en charge directement par l'ONACVG en 2019 et 2020.

Sous-action 34 – Action sociale de l’ONACVG : le budget de l’action sociale 2021 de l’ONACVG s’établit à 25 M€, quasi stable par rapport à 2020.

Sous-action 35 – SCSP ONACVG : la subvention pour charges de service public octroyée à l’ONACVG en 2021 retrouve un niveau comparable à celui de 2019 avant la mobilisation de la trésorerie de l’Office pour l’exercice 2020. Elle s’établit à 55,92 M€ et comprend 2,5 M€ au titre des crédits d’entretien des sépultures de guerre transférés du P 167 vers le programme 169.

Sous-action 36 – Subventions INI : la subvention pour charges de service public 2021 de l’institution nationale des invalides, qui s’élève à 12,3 M€, a été majorée pour intégrer la prime d’attractivité territoriale. L’INI bénéficie aussi d’une dotation en fonds propres de 3,7 M€ en CP dans le cadre de rénovation lourde de ses infrastructures. Au total, l’INI reçoit donc 16 M€ de subventions portées par la sous-action 36.

Sous-action 37 – SCSP CNCCL : la subvention pour charges de service public du conseil national des communes « Compagnon de la Libération » est de 1,7 M€.

4.   Les actions en faveur des rapatriés

Cette action regroupe les différents dispositifs en faveur des rapatriés et harkis.

Les mesures en faveur des harkis (aides aux enfants de harkis et aides diverses à caractère économique et social) sont poursuivies en 2021 et les crédits budgétaires qui y sont consacrés sont en augmentation de + 5,9 M€ par rapport à la LFI 2020. En 2021, il est prévu de recourir à la trésorerie de l’ONACVG pour compléter le financement via les crédits budgétaires.


Source : PAP 2021.

B.   Les points d’attention relevés par le rapporteur

1.   Les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant

L’action 1 finance les prestations versées au titre des pensions militaires d’invalidité (PMI) et de la retraite du combattant, qui représentent respectivement 43 % et 33 % des ressources du programme 169.

Son budget proposé pour 2021 s’établit à 1,495 milliard d’euros, soit une baisse de près de 5 % par rapport à l’année 2020. Cette baisse traduit une diminution tendancielle du nombre de bénéficiaires des PMI comme de la retraite du combattant. Au total, l’administration de la dette viagère représente plus de 77 % des crédits du programme 169.

 

Source : PAP 2021.

a.   Les ressortissants de l’ONACVG : catégories et évaluation du nombre

Rassemblant à l’origine, dans les années 1920, trois catégories de victimes de guerre (les invalides pensionnés de guerre, les pupilles de la Nation et orphelins de guerre, les victimes pensionnées), les ressortissants de l’Office National des Combattants et Victimes de Guerre se sont progressivement diversifiés, jusqu’à regrouper aujourd’hui 20 catégories énumérées par l’annexe législative du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG).

Ainsi, les victimes d’actes de terrorisme commis depuis le 1er janvier 1982 sont bénéficiaires des dispositions du CPMIVG applicables aux victimes civiles de guerre, conformément aux dispositions de l’article L. 113-13 du même code. En lien avec la commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites (CIVS), l’office est par ailleurs amené à intervenir au profit des victimes des spoliations perpétrées sous l’occupation. Enfin, l’Office intervient au profit des rapatriés et des anciens membres des formations supplétives ainsi que de leurs familles dans le cadre de la rationalisation des structures et dispositifs dédiés au traitement de ces populations.

Les ressortissants de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre :

1. – Les invalides pensionnés de guerre et des opérations extérieures ;

2. – Les titulaires de la carte du combattant ;

3. – Les combattants volontaires de la Résistance ;

4 – Les conjoints et partenaires survivants pensionnés au titre du présent code ou qui auraient bénéficié d'une pension militaire ou de victime civile, s’ils n'avaient pas opté pour un autre régime de pension ;

5. – Les ascendants de militaires ou de civils morts pour la France ;

6. – Les pupilles de la Nation et orphelins de guerre ;

7. – Les déportés et internés résistants et politiques ;

8. – Les anciens prisonniers de guerre ;

9. – Les patriotes résistant à l’occupation des départements du Rhin et de la Moselle, incarcérés en camps spéciaux ;

10. – Les réfractaires ;

11. –  Les patriotes transférés en Allemagne ;

12. – Les patriotes réfractaires à l’annexion de fait ;

13. – Les victimes civiles de guerre ;

14. – Les personnes contraintes au travail en pays ennemi ;

15. – Les victimes de la captivité en Algérie ;

16. –  Les titulaires du titre de reconnaissance de la Nation ;

17. – Les prisonniers du Viêt-Minh ;

18. – Les conjoints ou partenaires survivants de titulaires de la carte du combattant ou de bénéficiaires du présent code.

Les invalides pensionnés de guerre ou au titre des opérations extérieures dont la pension viendrait à être supprimée demeurent ressortissants de l’office.

Une étude réalisée par le contrôle général des armées au 1er semestre 2014 évaluait à 3 millions le nombre de ressortissants en 2013, prévoyant une baisse d’environ 21 % sur cinq ans et d’environ 38,5 % sur 10 ans. Pour autant, la répartition prospective entre les différentes catégories de ressortissants restait assez stable, les ayants droit demeurant majoritaires par rapport aux ouvrant droits. Selon cette étude, le nombre de ressortissants de l’office s’établissait ainsi à 2,7 millions en 2017 et à 2,35 millions en 2018.

À ce jour, seule l’évaluation de l’effectif des titulaires de la carte du combattant est régulièrement mise à jour, calculée à partir du suivi du nombre de retraites du combattant liquidées auquel est ajouté le nombre des nouvelles cartes ou titres délivrés. L’office ne dispose pas de système d’information permettant de suivre l’évolution des autres catégories de ressortissants.

Divers événements et mesures intervenus depuis 2013 doivent par ailleurs être pris en compte :

– Les opérations extérieures (OPEX) : si près de 70 000 combattants des OPEX étaient détenteurs de la carte du combattant en 2013, leur nombre est aujourd’hui d’environ 194 000, principalement en raison de l’application de la décision prise en LFI 2015 d’élargir les critères d’attribution de la carte à cette catégorie ;

– Carte 62-64 : la mise en œuvre en 2019 de la décision d’attribution de la carte du combattant aux personnes présentes en Algérie, pendant une durée de 4 mois ou 120 jours, entre le 3 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 dans le cadre des missions menées en Algérie après le 2 juillet 1962 conformément aux accords d’Evian, au titre des opérations extérieures, a permis de délivrer 35 108 cartes en 2019 et 1 260 cartes au 1er juillet 2020 ;

– Par ailleurs, consécutivement aux attentats terroristes qu’a subis la France depuis 2015, le nombre de victimes d’actes de terrorisme suivies par l’office est aujourd’hui supérieur à 4 000 et le nombre d’adoption de pupilles de la Nation du fait d’actes terroristes depuis 2016 s’élève à 468.

Évolution des effectifs des pensionnés et de la retraite du combattant

 

PMI

Retraite du combattant

2009

336 272

1 393 201

2010

308 940

1 339 730

2011

295 073

1 287 388

2012

280 793

1 237 694

2013

266 914

1 200 185

2014

254 668

1 159 167

2015

241 360

1 108 925

2016

230 285

1 058 921

2017

216 496

1 000 550

2018

206 676

940 071

2019

196 260

931 754

2021

186 369

861 666

Source : PAP 2021.

b.   Les pensions militaires d’invalidité

 Un budget qui reflète la baisse tendancielle des effectifs bénéficiaires

Les PMI sont concédées aux ayants droit pour indemniser la gêne fonctionnelle consécutive aux maladies ou aux blessures reconnues imputables au service ou à un fait de guerre. Elles sont versées à titre militaire ou de victime civile. Les pensions d'ayants cause sont concédées, sous certaines conditions, aux conjoints survivants, orphelins et ascendants d'un militaire décédé au combat ou d'un invalide pensionné.

Le montant des pensions d'invalidité est calculé, selon le taux d’invalidité, en nombre de points d'indice (point d’indice de pension militaire d’invalidité –point PMI), dont la valeur unitaire évolue selon les variations de l’« indice de traitement brut – grille indiciaire », publié conjointement par l’INSEE et la DGAFP. La valeur du point PMI est fixée à de 14,68 € au 1er janvier 2020.

Le montant de la pension tient également compte du grade du pensionné à titre militaire et peut être complété d’allocations spécifiques pour les invalidités les plus graves. Le montant des pensions de conjoints survivants et d'orphelins est déterminé en fonction de la situation de l'ayant droit. Les pensions d'ascendant sont accordées sous conditions de ressources.

Les crédits nécessaires au paiement des PMI sont inscrits à la sous‑action 10. Ils sont intégralement reversés au compte d’affectation spéciale « Pensions », dont le programme 743 assure le règlement via les centres régionaux des pensions et le centre de la trésorerie générale pour l’étranger.

En projet de loi de finances pour 2021, la dotation s’établit à 850,85 millions d’euros, ce qui représente une diminution de 60,4 millions d’euros par rapport à l’année 2020.

Cette baisse traduit une diminution naturelle du nombre de pensionnés, constante au cours des dernières années. Pour l’année 2019, le nombre de pensionnés a ainsi chuté de 9 820 personnes, les prévisions de baisse pour les années 2020 et 2021 atteignant respectivement 10 416 et 9 891 pensionnés.

Pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre
évolution depuis 2012 – Situation au 31 décembre de l’année considérée

 

 

Invalides

Conjoints et orphelins

Ascendants

Total

Taux d’évolution

2012

195 562

81 305

3 926

280 793

- 4,8 %

2013

186 614

76 570

3 730

266 914

- 4,9 %

2014

179 027

72 100

3 541

254 668

- 4,6 %

2015

170 755

67 234

3 371

241 360

- 5,2 %

2016

163 860

63 179

3 246

230 285

- 4,6 %

2017

155 824

57 570

3 102

216 496

- 6 %

2018

149 654

54 027

2 995

206 676

- 4,5 %

2019

 

 

 

196 260

- 5,3 %

2020

 

 

 

186 369

- 5,3 %

Source : DGFIP, service des retraites de l’État, base des PMIVG 2020.

 L’article 54 du projet de loi de finances pour 2021 : extension du bénéfice de la majoration de la pension de réversion pour un effectif de 200 conjoints survivants

Les crédits de la sous-action 10 (PMI) permettent de financer une mesure nouvelle, estimée à 1 M€, ayant pour objet d’étendre le bénéfice de la majoration de la pension de réversion, prévue à l’article L. 141-21 du code des pensions miliaires et des invalides de guerre aux conjoints ou partenaires survivants de pensionnés dont le taux de pension était à leur décès d’au moins 6 000 points, contre 10 000 points aujourd’hui.

Le nombre de conjoints survivants qui, au 1er janvier 2021, pourraient bénéficier de cette majoration (5 284,80 euros annuels selon la valeur du point d’indice de pension militaire d’invalidité prévue à 14,68 euros au 1er janvier 2020) est estimé à 197 personnes.

En prévoyant des régimes juridiques distincts applicables aux règles de calcul des pensions militaires d'invalidité d’une part et des pensions de conjoints ou partenaires, de pacte civil de solidarité (PACS), survivants (pensions de réversion) d'autre part, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ne permet aucune proportionnalité entre le montant de ces deux types de pension. Ces pensions sont, par ailleurs, exprimées en nombre de points d'indice de pension. Le code prévoit seulement que le montant des secondes ne peut dépasser le montant des premières (règle de plafonnement).

En pratique, il existe souvent, une disproportion significative entre le montant de la pension militaire d’invalidité que percevait l'ouvrant droit de son vivant et le montant versé au conjoint ou partenaire survivant. Cette disproportion est davantage marquée lorsque le montant de la pension touchée par l'invalide de son vivant était important en raison du grand nombre de points d'indice de pension qui lui étaient attribués.

Afin d'atténuer cet écart, source de difficultés pour les conjoints et partenaires survivants de très grands invalides, qui accusent une perte importante de revenus lors du décès de l'ouvrant droit, l'article L. 141-21 du CPMIVG prévoit que « la pension de conjoint ou partenaire survivant est assortie d'une majoration lorsque l’invalide était, à son décès, titulaire d'une pension dont l‘indice, défini à l’article L. 125-2, était égal ou supérieur à 10 000 points ». Cette majoration, est fixée en application de l'article D. 141-8 du CPMIVG, et est donc destinée à réduire l’écart qui existe entre le montant des pensions susmentionnées, au profit des conjoints et partenaires survivants.

c.   La retraite du combattant

La carte du combattant ouvre droit, au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, à l’âge de 65 ans, voire dès 60 ans, à la retraite du combattant. Ce n’est pas une retraite professionnelle. Elle est incessible, insaisissable et ne bénéfice pas du droit à réversion.

Le montant de la retraite du combattant équivaut à 52 points PMI, soit un montant de 763,36 € au 1er janvier 2020.

Les crédits nécessaires au paiement de la retraite du combattant sont inscrits à la sous-action 11. Ils sont eux aussi intégralement reversés au compte d’affectation spéciale « Pensions », dont le programme 743 assure le règlement selon les mêmes modalités que pour les PMI.

Le versement de la retraite du combattant fait l’objet, en projet de loi de finances pour 2021, d’une dotation de 660,2 millions d’euros, qui intègre la mesure d’extension de la carte du combattant en faveur des appelés présents plus de quatre mois sur le territoire algérien entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 (dite « carte 62-64 ») pour un coût estimé à 19,7 millions d’euros en année pleine.

Le montant de la dotation prévue pour le financement de la retraite du combattant est en baisse de près de 5 % par rapport à l’an dernier, cette évolution témoignant de la diminution continue du nombre de bénéficiaires, alors que les toutes dernières générations de combattants ne sont pas encore en âge de percevoir cette retraite. La diminution du nombre de titulaires de la carte du combattant au titre de la Deuxième Guerre mondiale s’accentue, à hauteur de 18,15 % en 2018 contre 6,6 % en 2017 et 7,3 % en 2016. En ce qui concerne les titulaires de la carte du combattant au titre de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc, la diminution du nombre de bénéficiaires est plus lente mais manifeste, à hauteur de 4,87 % en 2018, contre 3,7 % en 2016. Alors que l’âge médian des bénéficiaires de la carte du combattant est de 82 ans, la diminution du nombre de bénéficiaires est vouée à s’accentuer au fil des ans.

répartition par conflit des retraites du combattant versées

Conflits

effectifs au
31 décembre 2018

effectifs prévisionnels au
31 décembre 2019

effectifs prévisionnels au
31 décembre 2020

Guerre 14-18 (1)

1 157

915

592

Guerre 39-45 (2)

60 211

50 332

34 562

Algérie, Tunisie et Maroc

797 863

767 606

707 025

Opérations extérieures

22 063

62 026

77 518

Non déterminé (3)

58 777

50 875

41 969

TOTAL

940 071

931 754

861 666

(1) Les retraites du combattant de la catégorie « guerre 14-18 » comprennent toutes les opérations de guerre avant 1939.

(2) Les retraites du combattant de la catégorie « guerre 39-45 » concernent également la guerre d’Indochine.

(3) Correspond à des retraites payées dans les États ayant accédé à l’indépendance dont la nature du conflit n’est pas codifiée et des retraites du combattant versées en France pour lesquelles le conflit n’est pas renseigné.

Source : direction générale des finances publiques.

2.   L’action sociale et les droits liés aux pensions militaires d’invalidité

a.   Les droits accessoires ouverts aux titulaires d’une pension militaire d’invalidité

L’action 2 « Gestion des droits liés aux pensions militaires d’invalidité » est dotée de 6 % des crédits du programme 169, soit un peu de plus de 117 millions d’euros en AE comme en CP. Ces crédits ont vocation à permettre le financement des droits accessoires ouverts aux titulaires d’une PMI au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, leur financement faisant l’objet de trois sous-actions budgétaires détaillées ci-dessous.

● Les soins médicaux gratuits et des appareillages

L’article L. 212-1 du nouveau code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) dispose que l'État doit gratuitement aux titulaires d'une pension d'invalidité les prestations médicales, paramédicales, chirurgicales, pharmaceutiques et de cures thermales nécessitées par les infirmités qui donnent lieu à pension ou appareillage. Le suivi sanitaire des anciens militaires est également pris en charge par l’État. L’article L. 213-1 du CPMIVG dispose que les invalides pensionnés au titre du code ont droit aux appareils nécessités par les infirmités qui ont motivé la pension. Les appareils et accessoires sont fournis, réparés et remplacés aux frais de l'État tant que l'infirmité en cause nécessite l'appareillage.

La sous-action 21 Soins médicaux gratuits et appareillage des mutilés du programme 169 retrace les crédits nécessaires à la prise en charge de ces prestations. Elle permet également de financer les frais de gestion de la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) et les expertises médicales prescrites aux demandeurs de pensions militaires d’invalidité.

Pour l’année 2021, la dotation des soins médicaux et appareillages des mutilés gratuits s’élève à 40,5 millions d’euros.

● Les réductions sur les transports

Ce dispositif concerne la prise en charge par l’État des réductions sur les tarifs du réseau SNCF accordées sous conditions à certains titulaires d’une PMI.

Les réductions accordées par la SNCF représentent 50 % ou 75 % des tarifs de transport du réseau. Les bénéficiaires potentiels, pensionnés d'Afrique du Nord, victimes civiles de guerre, réformés pensionnés hors guerre, doivent être pensionnés au moins à 25 % et être titulaires d'une carte d'invalidité délivrée par l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre. De plus, la gratuité est accordée à l’accompagnateur des plus grands invalides.

En PLF 2021, la dotation de la sous-action 22, dédiée à cette prestation, s’élève à 1,3 million d’euros, en diminution de 500 000 euros par rapport à la loi de finances pour 2019. Cette baisse rend simplement compte de la contraction du nombre de bénéficiaires.

● Le régime de sécurité sociale des pensionnés de guerre

La sous-action 23 retrace les crédits relatifs au financement de la section « Invalides de guerre » du régime général de l’assurance maladie, qui prend en charge les pensionnés invalides à 85 % et plus et qui ne détiennent pas déjà la qualité d’assuré social.

b.   L’action sociale

L’action 3 « Solidarité » est dotée de 17 % des crédits du programme 169, soit 316, 50 millions d’euros en AE et 320,20 millions d’euros en crédits de paiement. Elle couvre ainsi les crédits nécessaires au financement des prestations et avantages particuliers au titre de la solidarité envers les pensionnés et les titulaires d’un titre d’ancien combattant ou de victime de guerre, ainsi que les subventions pour charges de service public de trois opérateurs : l’Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre, l’Institution nationale des Invalides et l’Ordre de la Libération-Conseil national des communes « Compagnons de la Libération ».

La mise en œuvre de la politique de solidarité revêt plusieurs modalités, qui font l’objet de trois sous-actions budgétaires présentées ci-dessous :

D’abord, la sous-action 31 regroupe les crédits nécessaires au financement de la majoration des rentes mutualistes des anciens combattants et des victimes de guerre. Pour rappel, les titulaires de la carte du combattant ou d’un titre de reconnaissance de la Nation peuvent adhérer à un dispositif particulier de rente viagère mutualiste, qui leur ouvre droit à une majoration légalement définie ainsi qu’à une majoration spécifique selon l’âge et le délai de souscription. Le plafond donnant lieu à une majoration de la retraite mutualiste du combattant est fixé à 1 806,25 euros depuis le 1er janvier 2018, c’est-à-dire 125 points d’indice des PMI.

La dotation prévue s’élève à 226,1 millions d’euros, en baisse de 8,6 millions d’euros par rapport à l’an dernier. En 2020, cette dotation permettra de couvrir les coûts associés à un effectif présumé de 314 445 bénéficiaires, en diminution de 4,4 % selon les estimations du ministère des Armées.

Ensuite, la sous-action 32 retrace les crédits de subventions de fonctionnement versées à diverses associations et œuvres, pour un montant de 310 000 euros en PLF 2020 contre 260 000 jusqu’à l’an dernier, en raison d’une évolution de la maquette budgétaire,

Enfin, la sous-action 34, dotée d’un budget de 25 millions d’euros, supporte la subvention d’action sociale versée par l’ONACVG.

La subvention versée par l'État constitue la source principale de financement des crédits d’action sociale. Elle est complétée par des ressources propres issues des fonds collectés au titre de l'œuvre nationale du bleuet de France (ONBF), des dons et legs effectués au profit de l’office, ainsi que par quelques subventions reçues de collectivités territoriales.

En 2021, le montant prévu de la subvention d’action sociale versée par l’État s’élève à 25 M€, soit un montant en légère diminution par rapport à 2020, qui tient compte de la diminution du nombre de ressortissants mais permet cependant la poursuite de l’effort sur les priorités validées depuis 2015 par le conseil d’administration : vigilance particulière envers les ressortissants les plus démunis, accompagnement de la quatrième génération du feu et des victimes du terrorisme et notamment des nouveaux pupilles de la Nation.

c.   Les subventions pour charges de service public aux opérateurs publics

L’action 2 assure également le financement des subventions pour charges de service public des trois opérateurs rattachés au programme 169 :

– la sous-action 35 retrace le montant de la subvention allouée à l’ONACVG.

Le rapporteur pour avis se félicite de la signature en juillet 2020 du contrat d’objectifs et de performance de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre. Ce dernier a fixé les orientations de l’action de l’Office pour la période 2020-2025 : maintien de son réseau départemental, transformation, renforcement de son action au profit des anciens combattants des opérations extérieures et de son rôle comme opérateur de la mémoire combattante. Le projet de loi de finances pour 2021 donne à l’établissement les moyens de fonctionnement nécessaires, ce qui se traduit par la remise à niveau de la subvention pour charges de service public.

En effet, la subvention pour charge de service public octroyée à l’ONACVG retrouve un niveau comparable à celui de 2019 avant la mobilisation de la trésorerie de l’Office pour l’exercice 2020. Elle s’établit ainsi à 55,92 M€ et comprend 2,5 M€ de crédits d’entretien des sépultures de guerre transférés du P 167 vers le programme 169. Ces crédits, précédemment inscrits au sein du programme 167 (action 2, opération stratégique « Sépultures de guerre et lieux de mémoire », opération budgétaire « subventions et transferts », les crédits alloués à l’ONACVG étaient, en 2020 de 2,47 M€) seront donc désormais intégrés dans ceux attribués au titre de la subvention pour charge de service public.

– la sous-action 36 finance, quant à elle, les subventions et dotations allouées à l’Institution nationale des Invalides.

L’Institution nationale des Invalides bénéficie d’une subvention de 12,3 millions d’euros et une dotation d’investissement de 3,7 millions d’euros en crédits de paiement et une dotation d’investissement de 3,7 millions d’euros en crédits de paiement afin de mettre en œuvre son important programme d’infrastructures. Destiné à devenir le centre de référence de la prise en charge des blessés atteint de syndromes post-traumatique, l’INI doit enfin pouvoir lancer ses travaux qui ont été retardés ;

– la sous-action 37, enfin, retrace les crédits versés à l’Ordre de la Libération – Conseil national des communes « Compagnons de la Libération ». La dotation correspondante s’élève à 1,7 million d’euros en PLF 2021, un montant identique à celui inscrit en loi de finances initiale pour 2020.

d.   Les actions en faveur des harkis et des rapatriés

Les mesures en faveur des harkis sont poursuivies en 2021 et les crédits budgétaires qui y sont consacrés sont en augmentation de 6,16 M€ par rapport à la LFI 2020. Le dispositif « Solidarité aux enfants de harkis et aux rapatriés » se voit ainsi doter de 4,90 M€ de crédits budgétaires en complément de la contribution de la trésorerie de l’ONACVG pour les années 2021 et 2022.

     Le plan d’action en faveur des harkis de 2014

Dans le cadre de la modernisation de l’action publique (MAP), un plan d’action réformant la gestion des prestations en faveur du monde combattant, des victimes de guerre, des rapatriés et des harkis a été approuvé par le gouvernement en juillet 2013. Confiant au seul Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre la gestion de l’ensemble des dispositifs d’aides et de prestations en faveur des rapatriés (guichet unique), cette réforme s’est traduite par une rationalisation des structures de mise en œuvre et par une simplification des procédures et des circuits de traitement des aides et prestations.

Présenté le 25 septembre 2014, un plan d’action, comprenant dix mesures d’amélioration en faveur des harkis, a été élaboré en concertation avec les représentants des associations d’anciens supplétifs et leurs familles.

– La mise en œuvre du volet « reconnaissance » de ce plan d’action s’est traduite par l’organisation d’actions éducatives et culturelles (expositions et témoignages présentés par l’ONACVG dans les établissements scolaires, les préfectures et les lieux culturels), par le recueil de témoignages oraux de harkis, par la création d’un lieu de mémoire et de recueillement au mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, quai Branly à Paris, par la transformation en lieux de mémoire des anciens hameaux de forestage  qui accueillirent plus de 10 000 harkis, leurs conjoints et enfants après 1962, et par la recherche et l’identification à l’intérieur des camps de lieux d’inhumation anonyme, spécifiques des harkis et de leurs enfants.

– La mise en œuvre du volet « réparation » s’est traduite par :

● La mise en place de comités régionaux de concertation avec les représentants des harkis permettant, notamment, de porter à la connaissance de l’administration les difficultés auxquelles sont confrontés les harkis et leurs familles, en particulier dans les domaines de l’emploi, de la formation et du logement ;

● Le déploiement de mesures favorisant l’insertion professionnelle des enfants de harkis (1 788 inscrits sur la liste des emplois réservés de catégories B et C et ouverture par la loi de programmation militaire de 2019 à l’emploi en catégorie A ; accord cadre national du 9 mars 2017 entre Pôle emploi et l’ONACVG, modernisé par la signature d’un nouvel accord cadre national 2019-2022 en septembre 2019, afin de renforcer l’accompagnement et un meilleur suivi de ces personnes) ;depuis l’intégration des enfants de harkis au dispositif des emplois réservés, 13 % de ces derniers inscrits ont pu être recrutés (soit 749 recrutés parmi les 5 751 enfants de harkis inscrits) (données juin 2019) ;

● La revalorisation de l’allocation de reconnaissance de 167 € au 1er janvier 2015, puis de 100 € au 1er janvier 2017 et au 1er janvier 2018 ; l’allocation viagère créée par la loi de finances pour 2016 au profit des conjoints survivants de harkis a été revalorisée de 100 € au 1er janvier 2017, puis à nouveau de 100 € au 1er janvier 2018. L’article 223 de la loi de finances pour 2019 a institué une revalorisation de 400 € des allocations de reconnaissance et viagère.

● Parallèlement à ces revalorisations exceptionnelles, les allocations de reconnaissance et viagères sont revalorisées chaque année au 1er octobre depuis leur création par décret du ministre en charge des rapatriés suivant l’indice des prix à la consommation hors tabac.

À l’issue de ces revalorisations et indexations annuelles, leur montant s’élève à 4 150 € par an, 3 017 € pour l’option 2 de l’allocation de reconnaissance. Au total, le coût de l’ensemble des revalorisations exceptionnelles de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère depuis la loi de finances pour 2015 est de 4,80 M€.

     Les mesures prises à la suite du rapport « Aux harkis, la France reconnaissante »

Le Président de la République a souhaité la mise en place d’un groupe de travail chargé d’évaluer les dispositifs déjà existants en faveur des harkis. La secrétaire d’État auprès de la ministre des armées en a confié la présidence au préfet Dominique Ceaux. Le rapport « Aux harkis, la France reconnaissante », remis en juillet 2018, préconise de nouvelles mesures visant à parachever le travail de mémoire, compléter la réparation, et renforcer la solidarité à l’égard des anciens supplétifs et de leurs enfants. Les victimes d’assimilés ont ainsi pu désormais bénéficier du dispositif de l’allocation viagère.

Outre la revalorisation précitée de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère, le décret n° 2018-1320 du 28 décembre 2018 a institué à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2022 un dispositif d’aide destiné aux enfants d’anciens supplétifs en difficulté.

Le gouvernement a par ailleurs décidé d’intensifier les actions visant la transmission des mémoires des rapatriements. Pour la préservation de la mémoire des harkis, des témoignages d’anciens supplétifs, leurs épouses et leurs enfants nés en Algérie sont déposés au service historique de la défense (SHD). La transmission scolaire de l’histoire des harkis continuera de s’appuyer sur des outils pédagogiques, tels que des formations pour enseignants, des expositions (« Parcours de harkis », « La guerre d’Algérie, Histoire commune, mémoires partagées ? », exposition numérique du site de l’ONACVG) et une mallette pédagogique à destination des enseignants.

Concernant les lieux de mémoire, l’ONACVG soutient la maison d’histoire et de mémoire d’Ongles et une convention a été signée avec le mémorial du camp de Rivesaltes, où une stèle consacrée aux anciens harkis, épouses et enfants décédés dans ce camp a été posée.

En conclusion, la dotation prévue par le PLF 2021 pour l’ensemble de l’action 7 s’élève à 24,78 M€, soit une augmentation, dont 18,88 M€ pour les allocations de reconnaissance et viagère : on observe une diminution continue des bénéficiaires de l’allocation de reconnaissance, néanmoins l’accroissement des bénéficiaires d’allocations viagères implique une estimation à la hausse (+ 0,26 M€) par rapport à l’enveloppe disponible en 2020.

C.   L’effort fiscal et social de l’état

Le rapporteur tient à souligner qu’à l’effort budgétaire de l’État s’ajoutent nombre de dispositifs fiscaux qui permettent également de témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des anciens combattants et de leurs familles. Si l’attention se focalise souvent sur la demi-part fiscale supplémentaire accordée aux titulaires de la carte du combattant âgés de plus de 74 ans et à leurs victimes, cinq autres dispositifs participent à cet effort fiscal, pour un coût total de 750 millions d’euros. Ces dispositifs ont été créés au profit des anciens combattants au titre du droit à réparation pour services rendus à la Nation. Il serait donc indécent d’y revenir, d’autant plus que les pensions versées par ailleurs ont des niveaux plutôt modestes.

Le coût total des dépenses fiscales chiffrées est évalué à 725 M€ pour 2021 (740 M€ en 2020).

Dans le cadre des conférences fiscales, le ministère des armées a proposé une modification du 2° bis du I de l’article 796 du code général des impôts afin que ses dispositions soient en conformité avec la rédaction du 3° de l'article L. 4138-3-1 du code de la défense, tel qu’il résulte de l’article 1er de l'ordonnance n° 2018-1127 du 12 décembre 2018. Cette modification a pour garantir l’exonération de droits pour les successions des victimes d’opérations « mobilisant des capacités militaires, se déroulant sur le territoire national ou hors de celui-ci, visant à la défense de la souveraineté et des intérêts de la France, à la préservation de l'intégrité de son territoire ou à la protection de ressortissants, d'une intensité et d'une dangerosité particulières assimilables à celles d'une opération extérieure ».

A l’exception de cette modification adaptative, aucune évolution de ces dépenses fiscales n’est prévue par le ministère des armées dans le projet de loi de finances pour 2021.

La demi-part supplémentaire bénéficie chaque année à environ 900 000 foyers pour un coût évalué à 550 M€, soit un avantage fiscal moyen d’un peu plus de 600 €.

Dépenses fiscales sur impôts d’État rattachées au programme 169

(en millions d’euros)

Libellé

Chiffrage pour 2019

Chiffrage pour 2020

Chiffrage pour 2021

Demi-part supplémentaire pour les contribuables (et leurs veuves) de plus de 74 ans titulaires de la carte du combattant

531

550

540

Exonération de la retraite du combattant, des pensions militaires d’invalidité, des retraites mutuelles servies aux anciens combattants et aux victimes de guerre et de l’allocation de reconnaissance servie aux anciens membres des formations supplétives de l’armée française en Algérie (harkis) et à leurs veuves, ainsi que l’allocation viagère servie aux conjoints et ex-conjoints, survivants de harkis, moghaznis et personnels des autres formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie qui ont fixé leur domicile en France

165

155

150

Déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant

24

34

34

Exonération des indemnités versées aux victimes des essais nucléaires français et à leurs ayants droit

1

1

1

Réduction de droits en raison de la qualité du donataire ou de l’héritier

Non significatif (<0,5 M€)

Non significatif (0,5 M€)

Non significatif (<0,5 M€)

Exonération de droits de mutation pour les successions des victimes d’opérations militaires ou d’actes de terrorisme

Non chiffrable

Non chiffrable

Non chiffrable

Coût total des dépenses fiscales

721

740

725

Source : PAP 2021.

III.   Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale »

Placé sous la responsabilité du Premier ministre, le programme 158 assure le financement de dispositifs d’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis durant la Seconde Guerre mondiale. Trois dispositifs ont été institués en ce sens par le pouvoir réglementaire :

 le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 a créé un dispositif d’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait de législations antisémites. Si l’activité de la commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations (CIVS) connaît un net ralentissement, de nouvelles demandes continuent néanmoins à être enregistrées et s’ajoutent aux dossiers encore à l’instruction ;

 le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a créé un dispositif d’indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. L’activité demeure stable, et l’on constate un net ralentissement du dépôt de nouveaux dossiers ;

 le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 a créé un dispositif d’indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie. L’activité demeure soutenue, et les services enregistrent encore de nouvelles demandes.

L’instruction des dossiers est réalisée par la commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations (CIVS) pour les spoliations, et pour l’aide aux orphelins par le département reconnaissance et réparation de l’ONACVG, situé à Caen. Les décisions accordant ou refusant des mesures de réparation financière sont prises par le Premier ministre, tandis que la mise en paiement est confiée à l’ONACVG par les trois décrets.

Évolution des crédits du programme 158 de 2020 à 2021

(en euros)

Mission
« Anciens combattants »

LFI 2020

PLF 2021

AE = CP

AE = CP

P 158

Action 1

Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation

42 482 860

41 962 848

Action 2

Indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la seconde guerre mondiale

51 054 097

5 175 364

Total P 158

93 536 357

93 138 212

Source : PAP 2021.

A.   L’indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations

1.   L’indemnisation des orphelins

Le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a institué une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Ce dispositif s’adresse à toute personne, mineure de moins de vingt‑et‑un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, déporté de France en raison des persécutions antisémites, est décédé ou a disparu en déportation.

D’octobre 2000, début de la campagne d’indemnisation, au 30 juin 2020, le service instructeur a enregistré 17 660 demandes, 14 352 décisions ont été transmises, 13 651 décisions d’indemnisation ont été prises et 700 rejets ont été notifiés.

Les bénéficiaires ont le choix entre un capital au montant fixe de 27 440,82 € ou une rente viagère dont le montant mensuel s’élève à 615,08 € en 2020. Selon les vœux des bénéficiaires, sur les 13 651 indemnisations accordées, 6 651 l’ont été sous forme de capital (49 %) et 7 000 sous forme de rente viagère (51 %).

Le coût total des aides financières accordées aux orphelins de parents victimes de persécutions antisémites s’élève au 30 juin 2020 à 886,23 M€ Pour 13 651 bénéficiaires.

Par ailleurs, un accord a été signé à Washington, le 8 décembre 2014, entre le gouvernement de la République française et le gouvernement des États-Unis d’Amérique pour assurer l’indemnisation de certaines victimes de la Shoah, déportées depuis la France mais non couvertes par les programmes français d’indemnisation. En exécution de cet accord, 60 millions de dollars ont été transférés, en novembre 2015, à partir des crédits ouverts sur le programme 158 (décret n° 2015-1347 du 23 octobre 2015 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance). Le coût total du dispositif s’élève donc au 30 juin 2020 à 946,23 M€.

À dispositif réglementaire constant et hors hypothèse de forclusion, la quasi-totalité des dossiers ont d’ores et déjà été traités et la direction des missions de l’ONACVG, chargée d’instruire les demandes reçues au titre du décret du 13 juillet 2000, enregistre un nombre restreint de nouvelles demandes (pour mémoire : 11 en 2017, 11 en 2018, 6 en 2019).

Pour cette raison, la prévision 2021 porte sur 34,1 M€, soit 33,9 M€ au titre de l’arrérage annuel destiné aux 4 484 crédirentiers attendus sur l’exercice, 0,1 M€ au titre des décisions nouvelles attendues sur l’exercice versées sous forme de rente et 0,1 M€ au titre des décisions nouvelles attendues versées sous forme de capital.

2.   L’indemnisation des victimes de spoliations

Le décret du 10 septembre 1999 a institué auprès du premier Ministre une commission d’indemnisation des victimes de spoliations, chargée « de rechercher et de proposer les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisation appropriées ». Cette commission propose au Premier ministre les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisation pour des préjudices consécutifs aux spoliations de biens.

Les indemnités accordées peuvent être mises à la charge de l’État français ou, en application des accords de Washington du 21 mars 2001, imputées sur les fonds du Fonds social juif unifié lorsqu’il s’agit d’indemniser des avoirs bancaires.

Instituée sur la recommandation de la Mission Mattéoli par le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 modifié par le décret n° 2000-932 du 25 septembre 2000, la CIVS examine les demandes individuelles présentées par les victimes directes ou leurs ayants droit afin d’obtenir réparation des préjudices consécutifs aux spoliations matérielles et bancaires intervenues du fait des législations antisémites en vigueur en France, pendant l’Occupation. La CIVS étudie et propose des mesures équitables de réparation, restitution ou indemnisation et émet à cette fin des recommandations. Les indemnités accordées peuvent être mises à la charge de l’État français ou, en application de l’accord de Washington passé entre le gouvernement des États-Unis et celui de la France, le 21 mars 2001, imputées sur le fonds social juif unifié lorsqu’il s’agit d’indemniser des avoirs bancaires.

Le décret n° 2018-829 du 1er octobre 2018 modifiant le décret du 10 septembre 1999 a confié à la CIVS le soin de formuler, à l’attention du Premier ministre, des recommandations relatives à la restitution ou à l’indemnisation de biens culturels spoliés du fait du national-socialisme, après instruction des demandes par la Mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945, instituée au sein du ministère de la Culture (décret n° 2019-328 et arrêté du 16 avril 2019).

Par décret n° 2019-409 du 3 mai 2019 relatif à certaines commissions administratives à caractère consultatif relevant du Premier ministre, la CIVS a été renouvelée pour une durée de cinq ans.

a.   Le bilan d’activité du dispositif d’indemnisation des victimes de spoliations matérielles et bancaires depuis le début des travaux de la CIVS

Depuis le début de ses travaux jusqu’au 31 décembre 2019, la Commission a enregistré 29 711 dossiers : 19 702 concernent des spoliations matérielles, 9 978 des spoliations bancaires, et 31 des spoliations de biens culturels spoliés au sens du décret n° 2018-829 du 1er octobre 2018.

Parmi ces 29 711 dossiers, 894 ont été classés en raison de l’absence de réception d’un questionnaire dûment renseigné et 1 086 pour désistement, incompétence de la Commission ou carence des demandeurs au cours de l’instruction.

Les recommandations sont émises par le collège délibérant, réuni en formation plénière ou restreinte, ou selon la procédure du président statuant seul.

Au 31 décembre 2019, la CIVS a formulé 35 052 recommandations, dont 22 270 recommandations matérielles et 12 728 recommandations bancaires (l’écart entre le nombre de total de dossiers et le nombre total de recommandations s’explique par le fait qu’à un seul et même dossier peuvent correspondre plusieurs recommandations). On dénombre sur le total des recommandations 4 389 rejets et 4 687 recommandations de levée de parts réservées.

Durant l’année 2019, la CIVS a organisé 17 séances restreintes au cours desquelles 115 dossiers ont été examinés, et 12 séances en formation plénière (pour les dossiers les plus complexes et à fort enjeu financier et pour les demandes de réexamen) qui ont permis l’examen de 41 dossiers. Enfin, 48 dossiers ont été examinés selon la procédure dite du « président statuant seul ». En tout, 207 recommandations ont été émises en 2019 (215 en 2018), dont 160 ont concerné des recommandations matérielles et 47 des spoliations bancaires.

Le montant total des indemnisations recommandées par la Commission depuis le début de ses travaux jusqu’au 31 décembre 2019 s’élève à 533,7 M€ mis à la charge de l’État (dont 10,7 M€ au titre des spoliations bancaires).

Le montant des indemnisations allouées au titre des spoliations bancaires s’élève à 55,9 M€, dont 43,56 M€ à la charge des banques.

L’instruction des dossiers révèle régulièrement l’existence d’autres ayants droit qui ne sont pas associés à la requête, soit parce qu’ils n’ont pas souhaité donner pouvoir de représentation aux requérants initiaux soit parce que leurs identités et adresses postales sont inconnues. Le collège délibérant est donc tenu de réserver les parts d’indemnité qui reviennent à ces héritiers, à charge pour les bénéficiaires de se manifester par écrit auprès de la Commission afin de demander la levée de la réserve émise sur leur part indemnitaire en justifiant de leur identité et de leur qualité d’ayants droit.

Les parts réservées dont la levée n’a pas été demandée sont conservées sans limitation de durée et dans l’attente que les ayants droit concernés se manifestent.

Depuis 2016, et dans un souci de bonne gestion publique, et rejoignant en cela les préconisations de la Cour des comptes qui relevait dès 2011 l’enjeu financier constitué par les parts réservées, estimée à 27,6 M€, la CIVS a décidé de développer la recherche des ayants droit afin de rendre effectif le versement des indemnités réservées. Ces mesures poursuivent deux finalités :

– limiter la création de nouvelles parts réservées en recherchant les ayants droit dès l’ouverture du dossier et jusqu’au terme de l’instruction ;

– lever les parts réservées en recherchant les ayants droit des dossiers ayant déjà fait l’objet de recommandations d’indemnisation.

Afin de mener à bien ce nouveau dispositif, une nouvelle organisation interne a été définie et mise en œuvre au dernier trimestre 2016.

Au 31 décembre 2019, 4 687 recommandations de levée de parts ont été émises dont 859 se rapportent à des dossiers bancaires. Le montant total des parts en attente de versement s’élève à cette date à 25,4 M€. La baisse constatée est en partie liée à une unique recommandation de levée de réserve de 3 M€ prise en avril 2019 pour un seul et même ayant droit.

Sur fonds bancaires, les parts réservées s’élèvent à 1,7 M€ au 31 décembre 2019.

b.   Les biens culturels spoliés

● Le nouveau dispositif

En 2018, la France a décidé de modifier son organisation publique pour renforcer la mission de restitution des biens culturels spoliés du fait du national-socialisme. Dans cette nouvelle configuration, une procédure spécifique de recherche des propriétaires ou de leurs héritiers est mise en place en vue de restituer, ou à défaut d’indemniser les biens culturels ayant été spoliés pendant l’Occupation, notamment ceux conservés par les institutions publiques :

– le décret n° 2018-829 du 1er octobre 2018 modifiant le décret du 10 septembre 1999 confie à la CIVS le soin de formuler des recommandations au Premier ministre après instruction des demandes par la Mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 (M2RS) ;

– l’arrêté du 16 avril 2019 portant création de cette mission au sein du ministère de la Culture lui confie l’instruction des cas de spoliations de biens culturels mentionnés à l’article 1-1 du décret instituant la CIVS, dans les conditions fixées à l’article 1-2 de ce décret.

Le dispositif issu de ces deux textes instaure par principe les étapes suivantes :

– ouverture d’un dossier par la CIVS sur autosaisine, ou sur saisine d’un requérant ou à la demande de toute personne concernée, soit directement auprès de la CIVS, soit indirectement, par l’intermédiaire de la Mission ;

– instruction du cas de spoliation par la Mission ;

– proposition de restitution ou d’indemnisation par les membres du collège délibérant de la CIVS, siégeant en commission élargie à plusieurs personnalités qualifiées, afin de renforcer son expertise en la matière (les personnalités qualifiées ont été nommées par décret du 6 mai 2019) ;

– décision de restitution ou d’indemnisation par le Premier ministre.

Lorsque les œuvres d’art ne sont pas localisées, celles-ci sont indemnisées sur la base de la valeur financière estimée, et réactualisée, de l’œuvre au moment de la spoliation. L’étude s’appuie sur des documents et témoignages produits par les demandeurs, des informations retrouvées dans les fonds d’archives et différents ouvrages qui recensent les ventes et fournissent les prix d’adjudication des œuvres d’un artiste sur la période 1935-1955. Cependant, l’évaluation des indemnités concernant les œuvres d’art est délicate et complexe. Si l’œuvre est localisée, des pourparlers sont entamés avec le détenteur actuel afin de tenter d’obtenir sa restitution. La situation la plus favorable se produit lorsque l’œuvre revendiquée est identifiée comme « MNR » (pour « Musées Nationaux Récupération » : œuvres retrouvées sur le territoire du Reich et ramenées en France à la fin de la guerre, confiées depuis lors à la garde des musées nationaux dans l’attente de leur restitution).

Depuis le 16 avril 2019, la Commission s’est réunie à 9 reprises dans la nouvelle formation prévue par le décret du 1er octobre 2018. Ces séances ont permis l’examen de 15 demandes de réparation pour la spoliation de biens culturels mobiliers ; 46 dossiers sont en cours d’instruction, dont 24 font l’objet de recherches par la M2RS.

● Les actions de coopération en matière de restitution de biens culturels spoliés

Le 22 mai 2019, en présence de l’Ambassadrice de France en Allemagne, a été signée à Berlin une convention de coopération pour un partenariat franco-allemand dans le domaine de la recherche de provenance. Cette coopération vise à identifier les biens culturels spoliés du fait du national-socialisme et à promouvoir à leur propos des solutions justes et équitables.

Les partenaires signataires de cette convention sont le Deutsches Zentrum Kulturgutverluste, la CIVS et la M2RS.

La convention prévoit une coopération étroite et confiante concernant les investigations et la recherche relatives aux biens culturels spoliés, et l’organisation d’opérations communes (partage de bases de données, organisation en commun d’événements…).

À l’initiative de la CIVS, le réseau européen des commissions de restitution a été créé le 1er janvier 2019. Il a pour objectif d’œuvrer à la recherche et à la restitution des œuvres d’art spoliées du fait du national-socialisme. Ainsi, la Beratende Kommission allemande, la Kommission für Provenienzforschung autrichienne, la CIVS, la Restitutiecommissie hollandaise et le Spoliation Advisory Panel britannique s’associent pour mener des actions en commun et partager des informations. La CIVS qui, en 2019, célébrait son vingtième anniversaire, a assuré le secrétariat permanent de ce réseau. La Kommission für Provenienzforschung autrichienne l’assure, à son tour, depuis le 1er janvier 2020.


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● Données globales au 31 décembre 2019 sur les dossiers de biens culturels mobiliers (BCM) de la CIVS :

 

Montant des indemnisations accordées par la CIVS pour les BCM :

52 382 425 €

Montant minimum accordé (pour un instrument de musique) :

100 €

Montant maximum accordé (pour une collection de tableaux) :

12 276 000 €

Montant moyen pour des dossiers mentionnant un ou des « biens culturels »

163 511 €

Nombre de dossiers au sein desquels des BCM ont été revendiqués :

4 386 €

Nombre de dossiers mentionnant des BCM examinés par le collège délibérant de la CIVS :

4 290 €

B.   L’indemnisation des victimes d’actes de barbarie

L’action 2 du programme 158 couvre les dépenses relatives à l’indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Ce dispositif, institué par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004, prend la forme d’une aide financière versée en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins de déportés résistants et politiques morts en déportation, les orphelins de personnes arrêtées et exécutées dans les conditions définies aux articles L. 342-3 et L. 343-5 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, ainsi qu’aux personnes dont le père ou la mère a été déporté à partir du territoire national, durant l’Occupation et dans des conditions mentionnées aux articles L. 342-1 et L. 343-1 du même code.

S’agissant des dossiers d’indemnisation des orphelins, les tables actuarielles sont établies au 31 décembre de chaque exercice par la direction des missions de l’ONACVG, sur la base des informations transmises par le comptable chargé des mandatements individuels :

– orphelins de parent victime de persécutions antisémites : sur les 13 651 indemnisations accordées depuis 2000, 7 000 l’ont été sous forme de rente viagère, 4 614 crédirentiers étant recensés au 31 décembre 2019 ;

– orphelins de parent victime d’actes de barbarie : sur les 22 773 indemnisations accordées depuis 2004, 8 856 l’ont été sous forme de rente viagère, 6 841 crédirentiers étant recensés au 31 décembre 2019.

Le montant des crédits d’intervention (titre 6) votés en loi de finances 2020, le montant des crédits inscrits au projet de loi de finances 2021, ainsi que les montants prévisionnels inscrits en 2022 et 2023, sont les suivants :

 

En M€ / AE = CP

LFI 2020

PLF 2021

Prévision 2022

Prévision 2023

Action 01

40,55

40,09

39,63

39,48

Décret n° 99-778

6

6

6

6

Décret n° 2000-657

34,55

34,09

33,63

33,48

Action 02

50,81

51,07

50,75

50,54

Décret n° 2004-751

50,81

51,07

50,75

50,54

Total

91,36

91,16

90,38

90,02

Les particularités attachées à la mise en œuvre de ce programme rendent toute projection difficile au-delà d’une échéance triennale.

Pour ces orphelins, la mesure prend la forme, au choix du bénéficiaire, d’un capital au montant fixe de 27 440,82 euros ou d’une rente viagère dont le montant mensuel s’élève à 585,44 euros en 2018.

Entre août 2004, qui marque le début de la campagne d’indemnisation et le 31 juillet 2019, le service instructeur a enregistré 34 342 demandes, 27 054 décisions ont été transmises, 22 754 décisions d’indemnisation ont été prises et 4 300 rejets ont été notifiés. Sur les 22 754 indemnisations accordées, 13 906 l’ont été sous forme de capital (61 %) et 8 848 sous forme de rente viagère (39 %).


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   Deuxième partie :
Les Tirailleurs sénégalais dans la politique de mémoire de la France

Les « tirailleurs sénégalais », figures emblématiques de nos troupes levées bien au-delà des frontières de l’actuel Sénégal, ont été mobilisés par la France dès la guerre franco-prussienne de 1870-1871, pendant la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale, mais aussi au sein du corps expéditionnaire français en Indochine et au début de la guerre d’Algérie.

Au cours de la Première Guerre mondiale, le total des incorporés originaires de ces pays d’Afrique fut de quatre cent soixante-quinze mille hommes soit 5,6 % des 8,5 millions d’hommes incorporés et le total des pertes de l'ordre de soixante-quinze mille hommes soit 5,3 % pour cent du total des 1,4 million de tués. Cent trente-six mille sénégalais ont été incorporés, soit 1,6 % du total des hommes mobilisés, dont vingt mille quatre cents tués représentant 1,45 % du total des morts de la guerre.

L’hommage, malheureusement trop faible, rendu par la Nation à ces troupes se manifeste à travers l’entretien et la valorisation de lieux de mémoire, par diverses commémorations et par le soutien accordé à des productions éditoriales et audiovisuelles qui les concernent.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, ils furent cinq cent mille hommes originaires de l’Afrique subsaharienne, de l’Afrique du Nord et de Madagascar. Ils furent cent vingt mille à débarquer sur les côtes de Provence pour participer à la libération du territoire. Quarante mille d’entre eux périrent au cours de la campagne de 1944 et de la libération.

I.   Les actions mémorielles conduites en l’honneur des combattants africains connus sous le nom de « tirailleurs sénégalais »

A.   Les commémorations

Les commémorations de la Première Guerre mondiale ont été l’occasion de mettre à l’honneur les troupes issues des ex-colonies, même si, préalablement au Centenaire, le ministère des Armées leur a rendu hommage. Ainsi, le 24 octobre 2016, a eu lieu à Douaumont, un hommage au courage et au sacrifice des soldats des anciennes colonies. L’année 2018 a été encore l’occasion de se souvenir de l’action des hommes de ces formations, que ce soit dans les lieux spécifiques à cette mémoire (Reims ou Chasselay), ou dans des sites évoquant des figures des troupes issues des ex-colonies (ainsi Villers-Cotterêts, où se trouve un monument en hommage au capitaine Van Vollenhoven du régiment d'infanterie coloniale du Maroc, tué le 20 juillet 1918, lors de l'offensive de la 10e Armée du général Mangin). Le rapporteur pour avis a indiqué dans ses précédents rapports que seulement deux monuments étaient dédiés à l’Armée Noire. Il ne peut donc que saluer l’initiative du Président de la République, Emmanuel Macron, accompagné du Président de la République de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara et du Président de la République de Guinée, Alpha Condé, ainsi que de l’ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, honorant depuis la nécropole de Boulouris à Saint-Raphaël dans le Var, l’engagement et le courage de ces guerriers.

Ce 15 août 2019, à l’occasion du 75e anniversaire du Débarquement de Provence, le Président de la République a appelé à une meilleure reconnaissance de la mémoire des combattants d’Afrique ayant libéré la France. Il a lancé un appel aux maires pour les inciter à donner à leurs rues et places des noms de combattants d’Afrique. De cet appel est née une convention signée le 20 novembre 2019 entre le ministère des armées et l’Association des Maires de France et des Présidents d’intercommunalité, portant mise à disposition des maires d’une liste de 100 noms de combattants africains ayant contribué à la libération de la France pendant la Seconde Guerre mondiale. Cette liste a été publiée sur le site Mémoire des hommes. Pour aider les maires dans leur choix, une biographie de chaque soldat, rédigée par le service historique de la défense, est proposée sur le site. Ces nouveaux toponymes incorporent ces hommes et leurs mémoires à l’histoire de la France.

B.    La mise en valeur des nécropoles et carrés militaires

La plupart des nécropoles et des carrés militaires des cimetières communaux contiennent des sépultures de tirailleurs sénégalais. Dans les nécropoles, certains carrés sont ainsi constitués essentiellement de ces soldats, ainsi à Douaumont et à Lemmes-Vadelaincourt dans la Meuse, à Cuts dans la Meuse, à Notre-Dame de Lorette dans le Pas-de-Calais et à la Doua dans le Rhône.

Il existe également des nécropoles et des carrés militaires qui, pour des raisons historiques, abritent essentiellement des coloniaux et dont le rapporteur fait état infra.

1.   La nécropole de Chasselay dite du "Tata sénégalais" dans le Rhône

Ce cimetière rassemble les corps de 188 tirailleurs sénégalais, six maghrébins et deux légionnaires, un russe et un albanais, laissés sans sépulture par les Nazis. Il a été déclaré nécropole nationale en 1966. Les cent quatre-vingt seize stèles reposent sur un mélange de deux terres : celle de Chasselay et celle de Dakar expressément apportée du Sénégal ; matérialisant ainsi la symbolique du Tata qui signifie « enceinte de terre sacrée » en wolof. Il est unique en France de par ses caractéristiques architecturales d’inspiration soudanaise.

Des cérémonies y sont régulièrement organisées. En 2018, en prévision des commémorations des combats de juin 1940, le site a été entièrement restauré et paysagé. Le 21 juin 2020, Madame Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, Florence Parly, a présidé une cérémonie en l’honneur du 80e anniversaire du Massacre de ces hommes.

2.   La nécropole d'Airvault dans les Deux-Sèvres

Reposent en ce lieu vingt-six prisonniers nord-africains morts pour la France en captivité de 1940 à 1944 et inhumés par les troupes allemandes. Un monument aux Français d'Outre-mer morts pour la patrie y a par ailleurs été inauguré en 1945.

3.   La nécropole de la Teste de Buch dite "du camp du Courneau" en Gironde

Créé en juillet 1916, le cimetière national de la Teste, situé au lieu-dit Natus-de-Haut, regroupe les restes mortels de combattants décédés à l’hôpital du camp d’instruction du Courneau, qui a accueilli initialement des troupes coloniales puis, à partir de 1917, des troupes étrangères (russes et américaines). Réaménagé en 1928, ce cimetière, implanté dans une forêt de pins, rassemble les corps de neuf cent cinquante-six tirailleurs sénégalais et neuf Russes. Tombé progressivement en déshérence, le site a ensuite fait l’objet d'importants travaux. En 1967, les dépouilles ont été exhumées et placées sous un mémorial-ossuaire, qui demeure ainsi le seul vestige du camp. À l’occasion du Centenaire de la Première Guerre mondiale, une mise en valeur du site a été effectuée, avec notamment l’installation de totems, inaugurés le 11 novembre 2018, indiquant le nom de chacun des soldats qui y sont inhumés. En 2020, le ministère des Armées et la Direction des Patrimoines, de la Mémoire et des Archives ont programmé de nouveaux travaux d’aménagement dans la nécropole avec la création d’un chemin de mémoire et la pose de plusieurs panneaux d’information présentant des portraits de combattants ayant vécu dans le camp.

4.   La nécropole de Saint-Florent en Haute-Corse

Ce site est également appelé cimetière des Tabors. Quarante-huit soldats du 2e groupe de Tabors marocains, tombés en 1943 lors de la libération de la Corse, y sont inhumés. Divers travaux y ont été réalisés en vue des cérémonies du 70e anniversaire de la libération de la Corse.

5.   La koubba du carré militaire du cimetière de Nogent-sur-Marne dans le Val-de-Marne

Le cimetière de Nogent-sur-Marne abrite une centaine de tombes de tirailleurs sénégalais et de soldats maghrébins décédés dans l'hôpital de Nogent, réservé aux contingents d'Afrique lors de la Première Guerre mondiale. Une koubba, monument composé d’une partie cubique et d’un dôme blanc, ornée d'une sourate du Coran, inspirée de la tombe des marabouts d'Afrique du Nord, y fut érigée dès 1919 mais, faute d'entretien, dut être démolie. En 2010, sur l'initiative de l'association Études coloniales, la commune élabora un projet global de rénovation du carré militaire. La Direction du Patrimoine, de la Mémoire et des Archives a contribué à cette opération pour un montant de 50 000 €, soit quarante pour cent du coût global du projet de 125 000 €. Reconstruite à partir d’archives, la koubba fut inaugurée en 2011 et la rénovation du cimetière achevée en 2012.

6.   Le cimetière du Trabuquet à Menton dans les Alpes-Maritimes

Le carré militaire du cimetière a recueilli les corps de mille trois cent dix-neuf militaires français appartenant aux troupes coloniales, dont un grand nombre de tirailleurs sénégalais, décédés durant la Première Guerre mondiale dans les hôpitaux de la ville.

En 2010, l’Association Mémoire des Tirailleurs Sénégalais a souhaité un geste significatif pour rappeler la mémoire de quelque six cents tirailleurs, inhumés sur place dans des fosses communes. Le projet d'un coût d'environ 90 000 euros, comprenait la réalisation d'une statue en pied d'un tirailleur, financée par l'Association Mémoire des Tirailleurs Sénégalais, une série de plaques nominatives et un ensemble de panneaux d'information historique. Les plaques nominatives ont été financées et réalisées par la Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives, après vérification de l'orthographe du nom de chaque soldat.

Pour mieux mettre en valeur le rôle des tirailleurs sénégalais dans la Première Guerre mondiale, a en outre été acceptée la mise en place, sur les murs extérieurs du cimetière, d'une série de panneaux pourvus de textes détaillés et d'une riche iconographie, dérogeant à la charte graphique des panneaux d'information historique placés dans les nécropoles et les principaux carrés militaires. La Direction du Patrimoine, de la Mémoire et des Archives a également apporté à l'association son expertise pour concevoir ces panneaux, aussi bien quant à la rigueur historique des textes que pour le choix des illustrations, et a fait procéder à leur réalisation. Sa contribution financière au projet s'est élevée à 30 000 €, soit le tiers du coût total de l'opération. L'implication du ministère dans cette opération a ainsi été décisive pour permettre son aboutissement. Le nouvel aménagement du site a été inauguré le 1er décembre 2012.

7.   Le cimetière militaire de Thiaroye au Sénégal

Situé à une vingtaine de kilomètres à l’est de Dakar, le cimetière militaire de Thiaroye comporte deux cent deux tombes in memoriam de soldats inconnus, morts durant la Seconde Guerre mondiale, dont les victimes du « Massacre du 1er décembre 1944 ». Longtemps laissé à l’abandon, il est désormais entretenu par le ministère des Armées, ce depuis 2014. Le cimetière rénové a conjointement été inauguré par le Président de la République française, François Hollande et le Président de la République du Sénégal, Macky Sall, lors du Sommet de la francophonie, le 30 novembre 2014.

Le Massacre de Thiaroye est l’objet de la partie thématique du présent rapport ci-après exposé (deuxième partie).

8.   Le monument dédié à l’Armée Noire de Fréjus dans le Var

En 1994, à Fréjus dans le Var, a été érigé par l’Association des Amis du musée des Troupes de Marine, avec le concours du ministère des Armées et de la ville de Fréjus et impulsé par François Léotard, ancien Ministre de la Défense et Maire de Fréjus le Mémorial de l’Armée Noire.

Portant l’épitaphe de Léopold Sédar Senghor, ancien Président de la République du Sénégal, « Passant, ils sont tombés, fraternellement unis pour que tu restes français », ce monument rappelle à chacun l’engagement de l’Armée Noire au service de la République, et impose de commémorer son souvenir.

C.   La création de monuments commémoratifs

1.   Le monument aux soldats musulmans de la nécropole de Fleury-devant-Douaumont dans la Meuse

La nécropole nationale de Fleury-devant-Douaumont a été créée en 1923 pour regrouper les corps exhumés des cimetières du département de la Meuse et ceux retrouvés sur le champ de bataille. Elle comprend les tombes individuelles de seize mille cent trente-six soldats français.

La demande d'une commémoration spécifique des soldats musulmans « morts pour la France » originaires d'Afrique du Nord et d'Afrique subsaharienne est un souhait ancien du recteur de la Grande Mosquée de Paris, le docteur Boubakeur. Dans cet esprit, c'est dès 1992 qu'il fit apposer à Verdun une plaque commémorative.

En 2002, il demanda la réalisation d'un grand monument sur le site de l'ancien champ de bataille de Verdun, « afin que ces jeunes puissent se reconnaître dans l'action de leurs aïeux au service de la France ». Conformément aux instructions données par le Premier ministre, fut confiée au ministère de la défense la réalisation, à Fleury-devant-Douaumont, dans la Meuse, d'un mémorial aux soldats musulmans « Morts pour la France » pendant la Première Guerre mondiale et plus particulièrement lors de la bataille de Verdun.

Ce monument devait compléter, symboliquement, l'évocation des religions du Livre, déjà marquée autour de la nécropole par le clocher chrétien de l'ossuaire et le monument israélite rappelant le Mur des lamentations et les tables de la Loi. D’un coût total de 350 000 €, le monument fut inauguré le 26 juin 2006 par le Président de la République, Jacques Chirac, lors des commémorations du 90e anniversaire de la bataille de Verdun. Il fut restauré en 2016, pour un montant de près de 75 000 €.

2.   Le monument commémoratif de la fraternité d'armes franco-malgache

En 2005, l'ambassadeur de Madagascar exprima le souhait que soit élevée une stèle commémorant la fraternité d'armes franco-malgache. Il proposa que cette stèle prenne la forme d'un « vatolahy », du nom des pierres de trois à cinq mètres de haut dressées traditionnellement pour symboliser les événements importants d'une communauté villageoise. En 2005, le ministère de la défense décida de donner suite à cette suggestion. En accord avec la ville de Paris, l'emplacement choisi fut le jardin du Ranelagh, en face de l'ambassade malgache, sur l'avenue Raphaël. Le monument, en granit rose, orné d'une plaque commémorative en bronze, conçu et financé par le ministère de la défense, fut installé en octobre 2006.

3.    Les plaques de la Grande Mosquée de Paris

En 2010, le docteur Boubakeur émit le souhait qu'un « support commémoratif » soit installé dans l'enceinte de la Grande Mosquée de Paris, lieu plus central que le site de Verdun. Le ministre des armées décida que, dans le cadre des cérémonies du 11 novembre, des plaques commémoratives portant la mention : « Aux soldats musulmans morts pour la France – 1914-1918 / 1939-1945 », l'une en français, l'autre en arabe, seraient réalisées et financées par la Direction du Patrimoine, de la Mémoire et des Archives et installées près du tombeau du fondateur de la Grande Mosquée. Elles ont été inaugurées par le ministre et le recteur de la Grande Mosquée le 11 novembre 2010. Début 2011, le docteur Boubakeur demanda que soient apposées, près du tombeau du fondateur, des plaques nominatives comportant les noms de tous les musulmans « morts pour la France ». Cette demande n’a pu être satisfaite, les documents figurant dans les archives du ministère ne mentionnant pas la religion des combattants.

Toutefois, en 2013, dans le cadre du réaménagement de l'espace où repose le premier recteur de la mosquée, fut décidée la réalisation de plaques en marbre vert, comportant chacune la liste, en caractères dorés, des unités où servirent des soldats musulmans morts pour la France lors des Première et Seconde Guerres mondiales. Le ministère des armées et la Direction du Patrimoine, de la Mémoire et des Archives participèrent à cette opération par le biais d'une subvention d'un montant de 51 000 €, soit plus du tiers du coût de l'opération de 140 000 €.

4.   Le monument aux héros de l'Armée Noire à Reims dans la Marne

Réplique de celui réalisé à Bamako, capitale du Soudan français et celle de l’actuel Mali, le monument d’origine dédié « aux Héros de l’Armée Noire », inauguré le 3 janvier 1924, avait été démonté le 10 septembre 1940 par les autorités allemandes. En 1963, la ville de Reims a inauguré un nouveau monument mentionnant : « La France et la ville de Reims, aux soldats africains tombés pour la défense de la liberté, 1914-1918 ». L'Association pour la Mémoire de l'Armée Noire a lancé en janvier 2009 le projet de reconstruction du monument d’origine avec le soutien financier du ministère des Armées. Le monument, édifié en 2013, sera officiellement inauguré par le Président de la République, Emmanuel Macron, le 6 novembre 2018.

Enfin, il convient de mentionner qu'il existe, dans les cimetières militaires ou dans les communes, de nombreuses plaques et monuments dédiés aux soldats de l'Empire.

D.   Les hommages rendus à l’Armée noire

1.   Les hommages les plus récents

De nombreux hommages ont été rendus à l’Armée Noire par le ministère des armées. Pour la période la plus récente, on peut citer les manifestations suivantes :

En 2007, un hommage particulier a été rendu aux tirailleurs sénégalais, à l'occasion du 150e anniversaire de la création de ce corps par décret impérial du 21 juillet 1857. Cette cérémonie comportait deux phases : l’inauguration de l’Esplanade des Tirailleurs africains et malgaches, dans le Var sur le front de mer de Fréjus, le 31 août 2007, puis une cérémonie militaire au camp Lecocq, route de Bagnols-en-Forêt, le 1er septembre.

Parallèlement, ont été organisés une cérémonie au « Tata sénégalais », des colloques et deux expositions portant sur la participation des tirailleurs sénégalais à la Première Guerre mondiale, au Musée des Troupes de Marine de Fréjus dans le Var et dans l'espace muséographique de la Caverne du Dragon dans l’Aisne.

Dans le cadre des cérémonies organisées pour le 90e anniversaire de l’Armistice de 1918, deux cérémonies présidées par le secrétaire d'État à la défense, commémorant la participation des troupes coloniales à la Première Guerre mondiale, se sont déroulées à Reims le 3 novembre 2008.

En 2010, dans le cadre des célébrations officielles du 50e anniversaire des indépendances africaines et malgache et de la commémoration du 70e anniversaire du ralliement de l'Afrique Equatoriale Française à la France Libre, le ministère de la défense a mis en œuvre plusieurs initiatives. Le cycle « Force Noire » a consisté en la réalisation d’un véritable centre de ressources développé en partenariat avec Radio France Internationale accompagné d’actions de terrain dont une série de rencontres et d’échanges entre les anciens combattants africains, les forces armées, les chercheurs, les étudiants, les scolaires et la population, sur le continent africain et à Madagascar, ainsi qu’en France (Toulon, Fréjus, Marseille, Lyon, Paris, Tours, Bordeaux et Pessac).

Par ailleurs, le 70e anniversaire de l’année 1940, notamment de la campagne de France (mai-juin 1940), de la création de la France Libre et du ralliement au Général de Gaulle des territoires du Tchad, de l’Oubangui-Chari, du Cameroun, du Congo et du Gabon (26 août-10 novembre 1940), a donné lieu à des manifestations tout au long de l’année 2010.

Le 15 août 2014, date du 70e anniversaire du débarquement de Provence, fut l’occasion d’honorer les combattants originaires d’Afrique dont certains, invités aux commémorations, furent décorés dans les ordres nationaux. L’exposition « Tirailleurs sénégalais dans les deux guerres mondiales » réalisée par le Service Historique de la Défense a par ailleurs été présentée à l’Institut Fondamental d’Afrique Noire à Dakar en novembre 2014.

En 2016, la commémoration du centenaire de la reprise du fort de Douaumont, le 24 octobre, fut l’occasion de rappeler, en présence de vingt-cinq ambassadeurs des pays ayant fourni des troupes d'outre-mer, le rôle éminent des troupes de la « Force Noire » lors de la Grande Guerre.

Le 15 avril 2017, vingt-huit anciens tirailleurs sénégalais, de nationalités sénégalaise, congolaise, centrafricaine et ivoirienne, ont reçu la nationalité française lors d'une cérémonie à l'Élysée, en présence du Président de la République Monsieur François Hollande. Ces tirailleurs appartiennent à la « dernière génération » d'une longue lignée de combattants africains engagés dans les armées françaises.

2.   Les actions menées par l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre

Le travail de mémoire de l’Office s’inscrit sans la droite ligne du Président de la République M. Emmanuel Macron à Boulouris en août 2019 qui préconise de rendre un juste hommage aux combattants non-métropolitains venus d’Afrique, d’Asie et d’Outre-mer pour défendre les valeurs de la République.

L’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre et le Service Historique de la Défense accompagnent les communes qui souhaitent honorer la mémoire d’un combattant africain. Ce sont pour le moment une cinquantaine de communes qui travaillent sur ce sujet avec l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre. Parmi les plus connues : Rouen en Seine-Maritime, Saint Étienne dans la Loire et Bonifacio en Corse du Sud.

L’Office a également travaillé à la création, en partenariat avec le groupe de recherche ACHAC, d’une exposition pédagogique intitulée « Les soldats d’Afrique, les massacres de mai-juin 1940, Histoire, mémoire et héritages ». L’exposition disponible dans tous les territoires aborde le thème de l’engagement des combattants d’Afrique, de leurs premiers recrutements au XIXe siècle, jusqu’aux décolonisations. Un dispositif pédagogique accompagnant ladite exposition (contenus numériques, mallette pédagogique) est en préparation. Sur ce sujet l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre et surtout l’ACHAC ont été saisis par Madame Armelle Mabon, historienne qui a publié sur le Massacre de Thiaroye. Cette dernière déplorait que ces écrits ne soient pas cités dans l’exposition. Elle dénonce une forme de censure. Or, le passage sur Thiaroye dans l’exposition est très mesuré et prend en compte les débats historiques et scientifiques en cours.

L’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre a organisé une journée d’études le 8 octobre 2020 sur le thème : « D’une guerre à l’autre : Les soldats des colonies et la France, 80e anniversaire des massacres de mai-juin 1940 ». Sous le haut patronage de Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants, ce colloque regroupant de nombreux historiens et chercheurs internationaux a été l’occasion de présenter la longue histoire de l’engagement des soldats issus des colonies dans les grands conflits contemporains.

3.   Les liens forts avec les administrations des pays concernés : Burkina Faso, Mali, Niger, Sénégal, Tchad

Dans le cadre de l’année de Gaulle et du 80e anniversaire de l’année 1940, la Direction des Patrimoines de la Mémoire et des Archives a pris contact avec les missions de défense dans les pays concernés afin de recenser, accompagner au besoin et valoriser les actions et projets entrepris dans ce cadre commémoratif. En effet, le Président de la République, Emmanuel Macron et la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, Geneviève Darrieussecq, ont souhaité donner un relief particulier à la mémoire des combattants venus Afrique, le 80e anniversaire du ralliement des anciennes colonies d'Afrique à la France Libre créant alors une opportunité.

Plusieurs projets, signalés par les attachés de défense, n’ont pu être menés à bien en raison des mesures de sécurité sanitaire. Par ailleurs, il est à noter que les actions envisagées sont généralement à l’initiative des attachés de défense ou de porteurs de projets français, soutenus par l’ambassade de France, et non des administrations des pays concernés. Au Cameroun par exemple, la Fondation Maréchal Leclerc de Hauteclocque organise les cérémonies du 80e anniversaire à Yaoundé. À l’initiative de l’attaché de défense au Tchad, il est prévu un soutien financier apporté par la Direction des Patrimoines de la Mémoire et des Archives à la rénovation du foyer du combattant, via la fondation de la France Libre.

Il convient d’indiquer que la Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives a repris à sa charge en 2004 l’entretien des tombes de garnison effectué auparavant par le Service de Santé des Armées.

À l’exception du Niger, elle assure le financement de la préservation des tombes françaises dans ces pays en attribuant chaque année des crédits après réception des projets de budgets élaborés en liaison avec les missions de défense situées dans les pays concernés.

Au Burkina Faso, le cimetière de Ouagadougou, idéalement situé en centre-ville, accueille chaque année la cérémonie du 11 novembre. La Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives a fait en outre rénover en 2015 le monument de Bobo-Dioulasso qu’elle entretient depuis lors. Une cérémonie y a lieu chaque année mais les conditions sécuritaires n’ont pas permis de l’organiser cette année.

Au Mali, après un inventaire des cimetières, cinquante environ, a été entrepris. La Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives avait planifié sur le long terme la rénovation des sites, mais les circonstances actuelles ne permettent d’effectuer des travaux que dans les sites proches de la capitale.

Au Sénégal, la Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives entretient sept cimetières (Lazaret, Sor, Bel-Air, Soumbédioune, Rufisque, Thiès et des Goréens) et Thiaroye (cf. infra).

Au Tchad, la Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives entretient plusieurs cimetières, notamment Farcha à N’Djamena, Sarh ou Faya Largeau). À Farcha, deux évènements majeurs ont eu lieu en 2019 : la commémoration de l’Armistice du 11 novembre 1918 et la plantation d’un rosier appelé « la rose de la mémoire » devant la tombe du soldat Jean, Louis Allain, décédé le 31 juillet 1971 à Bokoro et inhumé, conformément à la volonté qu’il avait exprimée de son vivant, dans le carré français du cimetière de Farcha. Il s’agit d’un des cinq soldats « morts pour la France » en Opération Extérieure, la plupart ayant été restitués à leurs proches pour être inhumés en sépulture familiale. En effet, chaque soldat « mort pour la France » a le droit à une sépulture perpétuelle et l’entretien de celle-ci est continuel.

E.   Une politique de soutien aux productions éditoriales et audiovisuelles consacrées à l’Armée Noire

En 2002, la Direction du Patrimoine de la Mémoire et des Archives a soutenu le documentaire historique « Tirailleurs malgaches » de la société Arc-en-ciel production. En 2005 et 2007, ont également été organisées avec le soutien du ministère l’exposition « Tirailleurs sénégalais, hommage à la force noire » portée par l’association double coup d'œil M. Demarque et « les tirailleurs sénégalais sur le chemin des dames », sous l’égide du conseil général de l’Aisne.

En 2007, un soutien a été accordé pour la réalisation de l’ouvrage Sur les traces du 4e régiment de tirailleurs tunisiens. En 2012, les éditions Pierre de Taillac et le ministère des armées ont coédité un ouvrage consacré au régiment de marche du Tchad, unité héritière d’un des plus anciens régiments de tirailleurs sénégalais.

En 2014, le ministère a soutenu le documentaire « Jean-Jules Joseph, un soldat créole » (Cinétévé), qui relate la quête de Daniel Picouly sur les traces de son grand-père martiniquais, mort pendant la Première Guerre mondiale. Il a également soutenu cette même année la série documentaire « 14-18 au-delà de la guerre » de même que le film « Ils sont venus sauver la France » (Les Productions du Lagon), retraçant l’aventure des hommes – et particulièrement des tirailleurs sénégalais – venus du monde entier combattre sur le front, travailler dans les usines ou dans les champs.

En 2014 le ministère a coédité avec les éditions Perrin le livre d’Éric Jennings, La France Libre fut africaine, qui rappelle le rôle prépondérant de l’odyssée africaine et des troupes d’Afrique Noire dans la Libération.

Enfin, dans le cadre du dossier franco-belge de classement des sites funéraires et mémoriels de la Première Guerre mondiale au patrimoine mondial, pour lequel le ministère des armées apporte son soutien plein et entier, les approches pluriculturelles et internationales sont des points essentiels du dossier.

L’association « Paysages et sites de mémoire de la Grande Guerre » en charge du dossier pour la partie française cherche à définir précisément l’origine des tirailleurs sénégalais inhumés dans les nécropoles. Ce travail de recherche inédit présentera une cartographie des combattants africains ayant combattu lors de la Grande Guerre. La France et la Belgique travaillent, en lien avec les gestionnaires de site, à parfaire le dossier et à en assurer la promotion auprès des autorités étrangères et plus précisément d’Afrique compte tenu de la forte présence de tirailleurs sénégalais dans les troupes françaises lors de la Grande Guerre. Leur appropriation du dossier est un vecteur essentiel de l’obtention de ce classement, qui initialement attendu en 2018 a été reporté à 2021. C’est ainsi qu’un colloque dont le thème fut « Interprétation et réconciliation des mémoires : la contribution des sites patrimoniaux liés aux conflits » a réuni des autorités et des experts étrangers, notamment venus d’Inde, du Canada et de plusieurs États du continent africain a eu lieu le 18 décembre 2019 aux Invalides. Au cours de ce colloque, une exposition sur le caractère pluriculturel du Front occidental de la Grande Guerre et l’origine des soldats ayant participé au conflit a été présentée et, à la demande de divers pays, est diffusée à l’étranger, notamment en Afrique.

II.   Le massacre de Thiaroye : mémoire partagée et reconnaissance des morts

A.   Le récit

Fin novembre 1944, plus de mille six cents soldats africains, officiellement mille deux cent quatre-vingts, issus de différents territoires de l'Afrique-Occidentale française – intégrés dans les tirailleurs sénégalais sont regroupés dans le camp de Thiaroye à une quinzaine de kilomètres du centre de Dakar. Ils viennent du Sénégal, du Dahomey, l’actuel Bénin, du Soudan français, l’actuel Mali, de la Côte d'Ivoire, de l’Oubangui-Chari, l’actuelle Centrafrique, du Niger, du Tchad, du Gabon et du Togo.

Alors que la Seconde Guerre mondiale n'est pas encore terminée, « ceux de Thiaroye » sont, durant l'été 1944, parmi les premiers prisonniers de guerre libérés par l'avancée des troupes alliées à la suite du débarquement de Normandie. L'Occupant nazi avait en effet interné ces prisonniers dans des camps en France.

Après leur libération, il est décidé de les démobiliser, notamment pour une opération de « blanchiment » des troupes françaises. Ainsi, « de novembre 1944 à mars 1945, le nombre d’autochtones rapatriés en AOF […] s'élève à 9 678, soit 3 261 ex-prisonniers et 6 334 rapatriés de France ». Ils attendent le versement d'un pécule constitué de leurs arriérés de solde (un quart aurait dû être versé avant l’embarquement), de la prime de démobilisation, et souhaitent pouvoir retirer l’argent économisé pendant la guerre, sur des livrets d’épargne du Frontstalag.

Au lieu de le faire en France, le ministre des Colonies leur promet d'être démobilisés à Dakar. Le contingent provenant des centres de transit de Rennes, Versailles et La Flèche est rassemblé à Morlaix où les mille six cent trente-cinq tirailleurs embarquent le 5 novembre 1944 sur un navire britannique, le Circassia et arrivent à Dakar le 21 novembre 1944. Trois cent quinze tirailleurs, sur mille neuf cent cinquante, avaient refusé d’embarquer en France avant que leur situation ne soit réglée. En chemin, quatre cents d’entre eux auraient à nouveau refusé d’embarquer, après une escale à Casablanca. Les paiements relatifs à la démobilisation n’ont pas lieu : seule une avance sur prime de 1 500 francs leur est versée en octobre, avant le départ de la métropole. Le commandement ne donne satisfaction aux tirailleurs que sur les demandes de conservation de divers effets personnels.

Un groupe qui devait être acheminé sur Bamako refuse de partir le 28 novembre tant qu'il n'a pas été intégralement payé. Cela entraîne la visite du Général Marcel Dagnan, au cours de laquelle les tirailleurs se font exigeants sur les réponses qu’ils attendent ; sa voiture est bousculée, son autorité s’évanouit, il ne répond à aucune des questions concernant le règlement administratif de la situation. Choqué, il considère même avoir été à deux doigts d’être séquestré. Dagnan prend la décision de faire une démonstration de force, en accord avec son supérieur, le général Yves de Boisboissel. Une fusillade éclate. Des hommes ouvrent le feu. Le nombre de victimes de cette fusillade reste controversé.

Selon l’historien Monsieur Julien Fargettas, le camp est investi au matin et les affrontements ont lieu vers 9 heures 30 le 1er décembre 1944. Partagées entre des tirs de semonce des forces de l’ordre face au harcèlement verbal des tirailleurs et tirs d’un tirailleur consigné dans un baraquement, les versions se contredisent sur l’origine du premier coup de feu. Trois cents tirailleurs sont extraits du camp et envoyés à Bamako. Le combat entraîne officiellement la mort de trente-cinq tirailleurs. Un télégramme du 2 décembre 1944 parle en effet de vingt-quatre tués et onze blessés décédés ensuite, soit trente-cinq morts, et trente-cinq blessés en traitement. Mais un rapport du 5 décembre 1944 évoque « 24 tués et 46 blessés transportés à l’hôpital et décédés par la suite », soit finalement 70 morts parmi les tirailleurs. Il est possible que les blessés du premier rapport soient décédés avant la rédaction du second.

Trente-quatre tirailleurs survivants et considérés comme meneurs sont jugés le 6 mars 1945, condamnés à des peines allant de un à dix ans de prison, à une amende de mille francs de l'époque et ils perdent leurs droits à l'indemnité de démobilisation. Ils sont graciés en juin 1947, lors de la venue à Dakar du président de la République, Vincent Auriol.

B.   La reconnaissance de la France pour les morts de Thiaroye

1.   Le cimetière de Thiaroye : plus de deux cents tombes anonymes

Le cimetière de Thiaroye, situé au sud de la route nationale reliant Dakar et Rufisque, comporte deux cent deux tombes in memoriam sans inscription d’identité. Ces dernières ont été construites sur l’emplacement de trois fosses communes dans lesquelles ont été inhumées les victimes des événements.

Ce site comporte depuis 2006 un mémorial « À nos morts » ainsi qu’un musée depuis 2010. La ville de Pikine et les forces armées sénégalaises se sont chargées de leur financement initial, mais avaient ensuite cessé tout soutien financier. Un gardien, rémunéré par la ville de Pikine, est chargé de l’entretien des lieux mais, faute de moyens, ne pouvait assurer cette tâche convenablement.

Laissé à l’abandon, le site s’est donc rapidement dégradé : la végétation s’est fortement développée sur l’ensemble du site ; le mur d’enceinte s’est effondré par endroits, musée, plaques et mémorial se sont détériorés au fil des années, etc.

Lors de sa visite officielle au Sénégal, le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants, M. Kader Arif, a rencontré les autorités politiques et militaires sénégalaises le 2 novembre 2013. Au cours de son entretien avec Monsieur Augustin Tine, ministre des forces armées sénégalaises, la situation du cimetière de Thiaroye a été évoquée.

Monsieur Kader Arif a proposé que ce site rejoigne à nouveau les cimetières militaires français, afin de pérenniser sa rénovation et son entretien régulier. Cette proposition a été faite afin de souligner la dimension mémorielle forte unissant les deux pays. En effet, de nombreux tirailleurs sénégalais succombèrent lors des deux conflits mondiaux sous l'uniforme français.

Cette proposition a été acceptée par les autorités sénégalaises. En juillet 2014, la mission de défense près l’Ambassade de France à Dakar a entrepris d’importants travaux de rénovation du cimetière pour le compte du ministère des armées. Les tombes et leurs abords, pris sous la végétation, ont été nettoyés et le mur d’enceinte reconstruit. Le musée a été entièrement rénové et une petite maison a été construite afin de loger le gardien, grâce au concours de deux sociétés françaises, Eiffage et Vicat. Le montant des travaux, délégué par le ministère des Armées au poste diplomatique français au Sénégal, s’est élevé à dix-huit mille euros.

Le cimetière restauré a été inauguré lors du sommet de la francophonie le 30 novembre 2014 par le Président de la République, François Hollande, conjointement avec le Président de la République du Sénégal, Macky Sall. Depuis 2015, les crédits nécessaires à l’entretien courant du cimetière de Thiaroye sont inclus dans la dotation annuelle déléguée au poste par le ministère des armées, qui s’élève à 47 000 € en 2020.

Depuis quatre ans, la journée de commémoration annuelle des tirailleurs fait l’objet d’un événement sur place avec discours et dépôt de gerbe. En décembre 2016, le thème était celui des tirailleurs dans la bataille de Verdun, en 2017 ce fut le « Chemin des dames », en 2018 le centenaire de l’armistice. Lors de ces cérémonies, les Sénégalais ont fait de ce monument au cœur d’un cimetière le monument national dédié aux tirailleurs.

2.   Les discours du Président de la République, M. François Hollande, en 2012 et en 2014

Lors de son allocution le 12 octobre 2012 à Dakar, le président François Hollande a évoqué la « répression sanglante » de décembre 1944 à Thiaroye comme « une part d’ombre de notre histoire ». Le bilan officiel, rappelé par le Président de la République, est de trente-cinq morts. Dans un rapport du 5 décembre 1944, le Général Dagnan dénombrait cependant soixante-dix tirailleurs décédés, ce qui reste une estimation minimale, selon les témoignages et les recherches les plus récents. Le Président de la République, François Hollande s’est alors engagé à donner au Sénégal l’intégralité des archives françaises relatives à ce drame. Les archives numérisées ont été remises fin novembre 2014 lors de sa venue dans le cadre du sommet de la Francophonie.

Le 30 novembre 2014, à Thiaroye, le Président de la République, François Hollande, évoque non plus trente-cinq morts mais au moins « soixante-dix morts », et déclare vouloir « réparer une injustice et saluer la mémoire d'hommes qui portaient l'uniforme français et sur lesquels les Français avaient retourné leurs fusils ».

C.   Les différentes thèses des historiens

Plus de soixante-dix ans après les faits, cet évènement demeure un sujet de controverse historiographique. Ce qui a longtemps été considéré par l’armée française comme une mutinerie sévèrement réprimée apparait pour certains historiens comme une tuerie organisée par les officiers coloniaux présents à Dakar et d’obédience pétainiste.

Aujourd’hui, au Sénégal, les représentations attachées à l’évènement du 1er décembre 1944 apparaissent comme un des paradigmes de la mémoire coloniale.

Le rapporteur pour avis a souhaité présenter les différentes versions données à cette répression sanglante de tirailleurs sénégalais, c’est-à-dire les soldats ouest-africains sortis de quatre ans de captivité sur le territoire métropolitain et rapatriés en Afrique.

1.   Des historiens qui n’hésitent pas à parler de mensonge alors que d’autres rappellent le contexte colonial et de la fin de la guerre

L’historienne Madame Armelle Mabon auteur de l’ouvrage « Les prisonniers de guerre indigènes : visages oubliés de la France occupée » précise que le chiffre de trente-cinq morts est la version officielle depuis 1945 et que des documents traitant des causes et responsabilités ont été dissimulés : « L'absence de ces documents dans les archives ne relève pas du hasard, d'une perte malencontreuse ou d'un mauvais classement. Nous sommes confrontés à une volonté de les soustraire à tout regard et cela depuis près de 70 ans. »

L’historienne ajoute, dans le journal Libération du 25 décembre 2012 : « Je souscris à la volonté du président de la République de donner les archives au Sénégal mais pour que ce geste fort ait du sens et permette une réconciliation après tant de malentendus et de mensonges, il faut impérativement : restituer tous les documents officiels dans les archives ; donner le bilan sincère du nombre de morts ; révéler le lieu de leur sépulture ; nommer ces hommes qui ont été tués ; amnistier ceux qui ont été condamnés, la grâce ne suffisant pas ; reconnaître la spoliation du rappel de solde et la responsabilité de l’armée ; réhabiliter ces tirailleurs en leur rendant un hommage solennel. »

En juillet 2014, l'historien Monsieur Julien Fargettas publie une lettre ouverte au Président de la République François Hollande sur le sujet, où il réclame la « constitution d’un comité d’historiens franco-africains ». Il critique également les travaux de Madame Armelle Mabon en affirmant que « l'omission d’archives et témoignages, des conclusions hâtives et autres raccourcis incohérents, témoignent de la partialité de son travail. » Celle-ci porte plainte en diffamation contre son confrère en septembre 2014, plainte dont elle sera déboutée en mai 2017.

Le 27 novembre 2014, le Conseil Représentatif des Associations Noires annonce une action judiciaire contre l'État français pour obtenir la révision du procès d'un des tirailleurs. De son côté, la Ligue des Droits de l'Homme demande au gouvernement français « de reconnaître les faits et d'assumer ses responsabilités » dans cette affaire en organisant un procès en cassation.

2.   Des historiens qui mettent en exergue le courage des militaires face à leurs supérieurs

Coécrit avec Nicolas Bancel et Sandrine Lemaire, Pascal Blanchard consacre un chapitre au Massacre de Thiaroye dans son livre « Décolonisation française : la chute d’un empire » en voici quelques extraits :

« Entre novembre 1944 et mars 1945, plus de 9 000 soldats d’AOF sont rapatriés en vue notamment de « blanchir » les troupes françaises avant la victoire, désormais certaine, sur l’Axe. Beaucoup attendent dans les ports ce rapatriement et réclament leurs soldes de captivité et leur prime de démobilisation, comme à Morlaix en octobre-novembre 1944 (…).

A partir de début décembre novembre 1944, plusieurs centaines de tirailleurs embarquent pour Dakar, alors que quelques centaines ont refusé le retour, pour protester contre le non-paiement de leurs arriérés de solde. Promis à la démobilisation, les soldats transférés de Dakar au camp de Thiaroye réclament immédiatement leurs arriérés et soupçonnent leurs officiers supérieurs de détourner l’argent qui leur est dû. Le 28 novembre 1944, le général Marcel Dagnan tente d’apaiser ses hommes, mais sa voiture est « bousculée ». Il fait réunir les tirailleurs désarmés, sur l’esplanade du camp au petit matin, le 1er décembre 1944. Face à eux, un impressionnant déploiement de force et d’armement lourd. Les premiers tirent fusent, déclenchant une fusillade nourrie. Des dizaines de tirailleurs sont tués. (…). D’autres sont arrêtés et jugés le 6 mars 1945 par la justice militaire, trente-quatre d’entre eux écopent de peines allant jusqu’à dix ans de prison pour « rébellion armée ».

L’historien Monsieur Pascal Blanchard ajoute : « Il fallait faire un exemple, l’ordre colonial est rétabli. De nombreux corps n’ont jamais été retrouvés, alors que des manifestants à Dakar réclament la vérité.

A l’occasion d’un voyage du Président de la République M. Vincent Auriol, en juin 1947, les tirailleurs emprisonnés bénéficient d’une grâce présidentielle. Il déclare alors, dans le contexte de la Guerre froide naissante, que la France « répudie la force. Mais quand on lui impose la trahison ou la violence, elle est aussi ferme que sa sincérité et sa bonne foi sont hors de soupçon et que son cœur est généreux.

Certains généraux eurent le courage de dire la vérité, comme le général André Bach, contestant les chiffres des décès évoqués par les rapports de l’époque. »

3.   Un vide mémoriel à combler soixante-seize années après les faits

Le rapporteur pour avis aspire, à travers la partie thématique de son présent rapport à ouvrir aux témoins et aux chercheurs les portes de l’Assemblée Nationale afin d’inscrire officiellement leurs doléances et leurs travaux ; afin de permettre à la représentation nationale et au Gouvernement de se saisir de ce récit historique et d’apporter soixante-seize années après une réponse à ce vide mémoriel.

« Ces Services, qui ne sont pas sans gloire, ne peuvent pas demeurer plus longtemps enveloppés des voiles de l’oubli parce que tout corps qui a bien servi son pays a droit à l’estime publique et aux souvenirs de l’Histoire. » Essai historique sur les Troupes de la Marine – 1853 de J.R.M. Malaise, site de la Fédération nationale des anciens d’outre-mer et des anciens combattants des Troupes de Marine.

Nonobstant, le rapporteur pour avis rappelle que des officiers s’étaient insurgés contre ce Massacre, qu’il appert que les faits se sont passés dans la continuité du régime de Vichy. Que ni la France ni ses armées ne peuvent être mises en cause. Que ce Massacre perpétré par des hommes qui ne voulaient pas voir qu’une France sortant de l’Occupation ne serait plus jamais la même, qu’une France Juste et Résistante s’élèverait désormais contre toutes les formes d’oppression.

Afin de résorber ce vide mémoriel, le rapporteur pour avis se dit favorable à l’ouverture d’une réflexion relative à une réparation individuelle ou collective spécifique au Massacre de Thiaroye.

Alors que certains historiens demandent une reconnaissance, une réparation maximalistes, la reconnaissance officielle par l’État du Massacre, le procès en révision, la restitution des grades par décret, l’exhumation des corps, l’octroi de la mention « mort pour la France » et le remboursement aux familles des sommes spoliées, le rapporteur pour avis cherche, quant à lui, à éveiller les consciences et que chacun regarde notre histoire lucidement dans toutes ses facettes, afin d’en tirer les leçons pour que jamais elle ne se reproduise. 

Au demeurant, le rapporteur pour avis souhaite que tous les faits soient connus afin que ceux qui en connaissance de cause continuent de faire l’apologie d’un régime capable des pires crimes, soient blâmés pour de telles idées. Il ne souhaite qu’une chose, la réhabilitation de ces combattants africains, sans oublier celle des officiers qui les ont défendus.

Le rapporteur précise que la décision d’engager de potentielles enquêtes et fouilles à Thiaroye relève uniquement de la souveraineté de la République du Sénégal, qu’il ne serait remettre en cause de quelque manière. 

En restituant les archives que la France avait en sa possession, le Président de la République, François Hollande, affirmait dans son discours de 2012 que « Comme toute nation, la France se grandit lorsqu’elle regarde lucidement son passé. » Par le biais du Président François Hollande et du rapporteur pour avis, la France, en se saisissant elle-même de ce dossier assume les responsabilités de son passé, et se tourne vers un avenir commun et partagé avec les États africains. 

Aussi, selon le rapporteur pour avis, le devoir de mémoire et sa symbolique, pourraient trouver résonance à travers la création de chaires littéraires, philosophiques, historiques, anthropologiques entre le Sénégal et la France. Narrer et professer notre histoire commune aux générations futures par le biais de la culture et de la science s’inscrit dans la continuité de l’actuelle coopération entre nos pays respectifs. 

D.   Les doléances des associations d’anciens combattants d’origine africaine

– Le Massacre de Thiaroye a été porté à la connaissance du rapporteur pour avis par des membres de l’association Vigil Tricolore. 

– Le rapporteur pour avis, par le biais des auditions, a voulu donner aux membres de Vigil Tricolore Sénégal, un moyen de s’exprimer et d'informer la représentation nationale française quant au combat mené pour la reconnaissance du Massacre de Thiaroye. Les différents Présidents associatifs n’ont pas souhaité être auditionnés par le rapporteur pour avis, qui respecte leur volonté, faisant prévaloir la voie juridique dans laquelle ils se sont engagés. 

– L’association regroupe et représente des descendants de combattants français et de différents États africains. Monsieur Sory Camara, Président de Vigil Tricolore Sénégal, a fait part, par écrit, de toutes les revendications des membres du collectif qui sont les suivantes :

● l’octroi de la nationalité à tous les anciens combattants français des origines africaines qui sont encore en vie, sans discrimination de pays de résidence et à tous les ayants droit et descendants légitimes ;

● l'acquisition de la nationalité française par le Sang Versé sans distinction de pays et de lieux de résidence à tous descendants demandeurs ;

● la délivrance de visas aux anciens combattants français des origines africaines, les victimes et les descendant(e)s n’ayant pas encore reçu leur nationalité française, sur présentation des preuves et documents des militaires français et leurs liens de filiation ;

● insérer dans les programmes et enseigner dans les écoles françaises et faire ancrer dans la mémoire collective nationale française l'histoire des anciens combattants français d’origines africaines ;

● l'exhumation des corps des soldats français d’origines africaines non identifiés enterrés en France, pour prélèvement d'ADN, afin d'identifier les familles et les pays de provenance ;

● faciliter l'accès au Titre de Reconnaissance de la Nation ; faciliter la délivrance de la carte d’anciens combattants français aux soldats encore en vie, le rapatriement des dossiers des anciens combattants français d’origines africaines dans les ambassades de France pour la mise en application des compétences et les responsabilités étatiques françaises ;

● la décoration de la Légion d’Honneur à titre posthume de tous les soldats français d’origines africaines « morts pour la France »  ainsi que ceux encore en vie, la réhabilitation à titre posthume du soldat tirailleur Cheikhou Cissé condamné injustement par un procès militaire colonial en octobre 1917 à Dakar et déporté le 18 avril 1918 pour le bagne en Nouvelle-Calédonie où il décède en 1933 ;

● le soutien du Gouvernement français à notre cause et son implication dans la recherche de la vérité ;

● au même titre que les anciens combattants français d’origines africaines, leur reconnaissance et leur réhabilitation en tant que membres à part entière de la patrie française ;

● l’élaboration des plaintes juridiques contre l'Allemagne sur les crimes de guerre et les crimes racistes exercés sur les soldats français d’origines africaine, notamment feu Capitaine Charles N'Tchorere ; le soutien aux harkis ;

● la célébration des éditions du Centenaire de l'Armistice avec la représentation effective des familles. Examiner puis tirer leçon de l'affaire Windrush au Royaume-Uni en 1948.

– Monsieur Sory Camara, lors de son audition, cite les propos du Président de la République, Emmanuel Macron, à la cérémonie de célébration du 75e anniversaire du débarquement de Provence, à Boulouris dans le Var, le 15 août 2019 : « La France a une part d’Afrique en elle ». Monsieur Sory Camara ajoute que pour cela il est nécessaire d’accepter les valeurs de chaque partie. Arborant les couleurs de la France, l’association témoigne de son attachement, de celui du Sénégal et plus largement de celui de l’Afrique à la France. 

– Le rapporteur pour avis, souhaite, qu’au-delà des revendications émises par Vigil Tricolore, la France fasse de cette reconnaissance un point de départ d’une nouvelle façon de coexister avec l’Afrique. Empruntant à Claude Cheysson, ancien ministre des Relations extérieures, la notion de « codéveloppement », le rapporteur pour avis s’inscrit dans la pensée de Alain Mabanckou et propose d’accompagner l’Afrique sur le chemin de son avenir, une voie qu’elle aura elle-même choisi et que nous respecterons.


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   Travaux de la commission

I.   Audition de Madame Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des Armées

Mme la présidente Françoise Dumas. Madame la ministre, je voudrais d’abord vous féliciter pour le titre de ministre déléguée qui est désormais le vôtre et qui, à travers vous, honore le monde combattant. Il manifeste la volonté du Président de la République de souligner l’importance d’une mission qui constitue un élément essentiel de la transmission de nos valeurs républicaines aux jeunes générations et contribue à la reconnaissance de la nation envers ceux qui ont combattu, ont parfois été blessés ou ont versé pour elle le tribut du sang.

Je me félicite que le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », d’un montant de 2 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2021, continue à vous permettre de mettre en œuvre la politique ambitieuse que vous menez, depuis plus de trois ans, au profit des droits des anciens combattants. Je pense à l’extension du nombre de conjoints survivants pouvant bénéficier d’une majoration de pension de réversion et à la mise en œuvre, à compter du 1er janvier prochain, de la mesure d’extension de la demi-part fiscale en faveur des conjoints survivants de grands invalides de guerre.

Vous nous direz également ce qu’il convient d’attendre de la commission tripartite État-Parlement-associations sur l’évolution du point de pension militaire d’invalidité (PMI).

En ce qui concerne les institutions, je pense à la dotation de l’office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), en augmentation, confortant le rôle qui est le sien pour l’accompagnement des combattants dans la durée et pour l’entretien des nécropoles et des hauts lieux de mémoire. Je me réjouis de la poursuite de la rénovation de l’Institution nationale des Invalides, après les nombreux travaux réalisés en 2020.

Je me félicite que les actions en direction de la jeunesse restent au cœur de vos préoccupations par des crédits en augmentation au bénéfice de l’esprit de défense, de la journée de défense et citoyenneté, ainsi que de l’aide à l’insertion professionnelle.

Mais c’est à vous qu’il revient d’annoncer les bonnes nouvelles contenues dans le projet de loi de finances.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je suis heureuse de vous retrouver pour cette présentation budgétaire. Le monde combattant fait l’objet de toutes vos attentions, non seulement ici, à Paris, mais également dans chacun de vos territoires, où il reste présent et actif, et nous aide à transmettre les valeurs de la République au travers des actions de mémoire.

Ce projet de budget doté de 2 milliards d’euros maintient tous les droits à réparation des anciens combattants, de leurs ayants droit, des victimes civiles de guerre et des victimes du terrorisme. Comme les années précédentes, il est en diminution, de 3,4 %, soit 69 millions d’euros, en raison de l’attrition démographique du monde des anciens combattants, mais il est totalement préservé et marque même, dans certains domaines, de belles avancées.

Les crédits du programme 169, « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », s’élèvent à 1,958 milliard d’euros. Les pensions militaires d’invalidité (PMI) en représentent la plus grande part, 851 millions d’euros, et la retraite du combattant, 645 millions d’euros.

Bien entendu, les avantages fiscaux de la retraite du combattant, de l’allocation de reconnaissance des anciens harkis et la rente viagère pour leurs veuves sont préservés. Tous les dispositifs existants sont préservés, y compris ceux que nous avons mis en place ensemble.

Depuis 2017, nous avons conduit une politique active en faveur du monde combattant. En 2017, la retraite du combattant a augmenté de deux points, décision prise par le précédent gouvernement mais que nous avons mise en œuvre. En 2018, nous avons harmonisé les conditions d’octroi de la pension de réversion au conjoint survivant d’avant et après 1962 – c’était une mesure d’équité. En 2019, nous avons mis en place la carte du combattant pour les 62-64, si attendue par le monde combattant. À ce jour, 37 000 cartes ont été attribuées. En 2019, nous avons procédé à une revalorisation exceptionnelle de 400 euros de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère en faveur des harkis et de leurs conjoints, ainsi que l’extension d’un fonds de solidarité en faveur des enfants de harkis ayant séjourné en camp ou hameaux de forestage. En 2020, nous avons relevé la pension des conjoints survivants des grands invalides de guerre, qui du fait de leur rôle d’aidants ont rarement pu exercer une carrière professionnelle. J’en propose cette année une nouvelle revalorisation. En outre, le 1er janvier 2021, en application de la loi de finances que vous avez votée, les conjoints d’anciens combattants, principalement les veuves ayant atteint l’âge de 74 ans, pourront bénéficier de la demi-part fiscale dès lors que leur conjoint aura bénéficié de la retraite du combattant.

Toutes ces mesures répondaient aux demandes d’avancées significatives présentées par les associations. Le travail fin que nous avons réalisé avec leur participation active a permis de faire avancer tous ces dossiers.

Ce projet de budget poursuit l’effort en faveur des personnes en situation de fragilité, qui m’importe beaucoup chaque année. Ainsi, une veuve de grande invalide de guerre bénéficiera d’un supplément de pension militaire d’invalidité si son conjoint décédé avait bénéficié d’une PMI de six mille points, contre dix mille points aujourd’hui. Cela équivaut à une majoration d’environ 5 300 euros par an, pour quelque deux cents personnes, qui bénéficieront de façon significative d’une meilleure reconnaissance de leur action auprès d’un grand invalide.

Le fonds d’action sociale de l’ONACVG sera doté de 25 millions d’euros ; nous continuons à le préserver malgré la diminution du nombre des ressortissants. Le fonds de solidarité destiné aux enfants de harkis s’élèvera à 7 millions d’euros.

Les moyens d’action de tous nos établissements publics sont garantis. Je sais votre attachement à l’ONACVG. Nous en avons signé, au mois de juin, le nouveau contrat d’objectifs et de performance (COP), qui donne de la visibilité à l’établissement jusqu’en 2025. Ce COP sur six ans vise des objectifs simples : maintien du réseau départemental, transformation de l’établissement, renforcement de son action au profit des anciens combattants des opérations extérieures (OPEX) et de son rôle comme opérateur de la mémoire combattante sur les territoires.

Le projet de loi de finances pour 2021 donne à l’établissement les moyens nécessaires à son fonctionnement, à hauteur de 56 millions d’euros, dont 2,5 millions d’euros dédiés à l’entretien courant des nécropoles et hauts lieux de mémoire. Nous revenons à un financement habituel de l’établissement, après la ponction opérée l’an dernier sur sa trésorerie qui avait été jugée par tous anormalement importante.

L’Institution nationale des Invalides (INI) bénéficie d’une subvention de fonctionnement de 12,3 millions d’euros et d’une dotation d’investissement de 3,7 millions d’euros en crédits de paiement pour la mise en œuvre de son programme d’investissement, qui débutera à la fin de l’année.

Comme je m’y étais engagée, les crédits de la politique de mémoire augmentent de 60 %, passant de 11 millions d’euros à 18 millions d’euros, auxquels s’ajoutent les 2,5 millions d’euros pour l’entretien des hauts lieux de mémoire qui sera assuré par l’ONACVG. Ceux-ci permettront de faire face aux besoins d’entretien et de rénovation des nécropoles, de financer les cérémonies, des actions éducatives pour la jeunesse et de développer le tourisme de mémoire dans les régions et les départements concernés.

Le programme mémoriel pour 2021 est orienté vers l’entrée en Résistance, notamment des outremers, la mémoire des OPEX et particulièrement de l’opération Daguet, qui s’est déroulée en 1991 au Koweït, et la poursuite de la commémoration de la guerre 1870-1871. L’année 2021 peut paraître moins riche que 2020, année de Gaulle. Même si la crise du covid a réduit le format de ce que nous souhaitions réaliser, nous pouvons être fiers de ce qui a été fait.

La politique en faveur de la jeunesse reste au cœur du lien armée-nation. Les crédits consacrés à la jeunesse augmentent de 15 %. L’année 2021 sera un peu particulière : les journées défense et citoyenneté (JDC) seront réalisées comme chaque année pour une catégorie d’âge, mais nous devrons rattraper la dette de celles qui n’ont pas pu être réalisées pendant les six premiers mois de 2020 en raison de la crise sanitaire. Les crédits augmentent du fait de la décision prise l’an dernier d’augmenter le remboursement des frais de déplacement pour les jeunes ; dans la mesure où beaucoup plus de jeunes seront concernés, cela doit être inscrit au budget.

Le service militaire volontaire (SMV) sera évidemment maintenu. Il est prévu d’en porter le nombre des bénéficiaires de 1 000 à 1 200 jeunes. Dans un contexte économique difficile qui risque de fragiliser une partie de la jeunesse, il est important d’offrir des possibilités de formation et d’insertion. Si le budget n’augmente pas, c’est parce que le SMV a d’autres sources de financements, notamment auprès des régions et du fonds social européen, qui permettent de former plus de jeunes sans incidence budgétaire supplémentaire.

Le ministère des armées ne consacre pas de crédits spécifiques au service national universel (SNU), mais il met en place la journée défense et mémoire (JDM) et propose aux jeunes des missions d’intérêt général au sein des armées ou de l’ONACVG. Ce fut le cas cet été, au cours duquel une partie des jeunes qui n’ont pu suivre le stage de cohésion ont fait des missions d’intérêt général et ont été reçus avec beaucoup de bienveillance et même d’intérêt au sein des armées ou de l’ONACVG.

C’est donc un bon budget. Nous avons répondu aux attentes et tenu des engagements que nous avions pris et que le que le Président de la République avait pris, notamment l’attribution de la carte 62-64. Le monde combattant souhaite qu’une commission tripartite associations-Parlement-administrations examine l’évolution du point de PMI par rapport à l’inflation et les suites éventuelles à envisager ; je souhaitais la réunir plus tôt, mais les conditions sanitaires en ont décidé autrement. Cette commission tripartite entamera ses travaux ce dernier trimestre et rendra ses conclusions au printemps prochain.

Nous aurons ainsi répondu à la majorité des attentes du monde combattant. Nous avons pris des engagements que nous tenons : dans ce monde complexe, émaillé de conflits divers et en pleine transformation, le monde combattant a besoin de savoir que la nation est avec lui. Si la majorité des anciens combattants sont issus du conflit d’Algérie, la part de ceux qui ont servi dans le cadre des OPEX augmente progressivement. Ce projet de budget sert des personnes qui ont combattu pour la France dans des conditions différentes, mais qui méritent toutes notre attention et la reconnaissance de la nation.

Mme Patricia Mirallès. Madame la ministre, j’aurai un mot de remerciement pour les légionnaires du 1er régiment étranger de génie qui, grâce à leur matériel et à leur expérience, aident les populations sinistrées des Alpes-Maritimes. C’est l’illustration du lien armée-nation, une armée au service de sa population, par tout temps.

Vous avez précisé l’agenda de la commission tripartite. Quels seront les premiers dossiers traités ? Il y va également de l’héritage que nous laissons à nos jeunes et la construction du lien armée nation. Le PLF prévoit une augmentation du financement de la journée défense et de citoyenneté, qui est souvent la première marche vers le lien armée-nation. En attendant la bascule vers le service national universel, retardée par la pandémie, quelle est votre vision de l’évolution de ce dispositif qui ne doit pas être délaissé ?

Mme Marianne Dubois. Année après année, nous ne pouvons que regretter la baisse mécanique de votre budget, corrélative à la diminution du nombre de bénéficiaires des dispositifs de reconnaissance et de réparation. Il y aurait pourtant tant à faire pour continuer à affermir le lien entre la nation et son armée – je pense aux cadets de la défense – ou solder une bonne fois pour toutes les légitimes demandes du monde combattant.

Plus précisément, la dématérialisation systématique des JDC pour les jeunes Français vivant à l’étranger me conforte dans l’idée qu’elles ne servent plus qu’à détecter les jeunes en situation d’illettrisme, mission importante que pourrait exercer l’Éducation nationale, mais plus vraiment à affermir le lien armée-nation ou à renforcer la cohésion nationale.

S’agissant du programme 167, une réelle montée en puissance du service militaire volontaire a-t-elle été étudiée, en installant par exemple un centre par région ? J’ai conscience de la pression d’un tel dispositif sur les armées, mais les besoins sont là : 1 200 jeunes en métropole, c’est trop peu, surtout quand on sait qu’en outre-mer, le service militaire adapté (SMA) accueille près de 6 000 jeunes.

La dotation d’action sociale de l’ONACVG diminue d’un million d’euros, passant de 26 à 25 millions d’euros, ce qui m’apparaît comme une économie dont nous aurions pu nous passer. Je m’interroge également sur l’utilisation de la trésorerie de l’ONACVG comme variable d’ajustement – nous avions regretté le procédé l’an dernier. Je crois comprendre que vous ne reproduisez pas cette pratique cette année, mais pourriez-vous nous fournir quelques éléments complémentaires sur ce point ?

Enfin, en novembre 2019 a été décidée la création d’un pôle interétablissements entre les hôpitaux militaires Percy, Bégin et l’Institution des Invalides. Ce beau projet qui a du sens étoffera la prise en charge des blessés en permettant un parcours individuel et leur garantira des soins de qualité sur mesure sur un plateau technique performant en région parisienne. Où en est-il ?

M. Philippe Michel-Kleisbauer. Madame la ministre, je suis satisfait que la cause des anciens combattants, de la mémoire et surtout de la jeunesse, que vous défendez, ait été élevée au rang de ministère délégué. Les anciens combattants y sont très sensibles.

Nous avons travaillé en excellente collaboration avec vos services et satisfait la quasi-intégralité des demandes relatives aux anciens combattants. Il restait le point PMI dont vous avez parlé. La réunion tripartite a déjà examiné plus de la majorité des sujets souhaités ; elle va pouvoir aborder les questions liées aux pensions de réversion, aux demi-parts fiscales, à la jeunesse ou la remontée en puissance des crédits destinés aux lieux de mémoire. En tant que rapporteur pour avis de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », je tenais à restituer ce qui est ressorti de ce « G12 » qui a rassemblé les grandes associations et fédérations.

M. André Chassaigne. Je regrette aussi la baisse du montant de ce projet de budget, d’autant qu’il faudrait très peu de choses pour répondre quasi intégralement aux revendications des associations d’anciens combattants. Cela n’est pas propre à la majorité actuelle, nous le vivons depuis des décennies, mais compte tenu de la diminution du nombre des bénéficiaires, il serait plus facile de répondre aux revendications.

J’ai regretté la suppression de l’allocation différentielle de solidarité, en 2016, qui portaient mécaniquement les revenus des veuves d’anciens combattants au niveau du seuil de pauvreté. Elle a été remplacée par l’action sociale. Il faut saluer les associations d’anciens combattants, car les demandes se font souvent par proximité. À l’époque, on notait une baisse du nombre des aides apportées, car les dossiers doivent être renouvelés annuellement, ce qui est beaucoup plus lourd. Comment évoluent ces demandes ?

Le Président de la République a confié à l’historien Benjamin Stora une mission sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, et la réconciliation entre les peuples français et algérien. Ce travail s’imposait : si les accords d’Évian ont soldé un passé, ils n’ont pas contribué à la reconstruction d’un avenir équilibré entre nos deux pays. Êtes-vous partie prenante de ce travail ? Le Président de la République, durant l’été, a eu cette formule : « On en apprend toujours, nos historiens continuent le travail, de révéler la vérité, de mieux comprendre. […] Il y a sans doute des héros oubliés […] mais il n’y a pas une histoire à revoir ». On peut effectivement se pencher sur les pages de l’histoire pour essayer d’avancer dans nos relations avec l’Algérie.

M. Jean Lassalle. Qui aurait dit, Madame la ministre, que nous nous retrouverions dans ce contexte ? Félicitations !

Mme la présidente Françoise Dumas. Beaux parcours !

M. Jean Lassalle. Notre rapporteur a dit que les anciens combattants étaient très sensibles au fait d’être, pour la première fois, représentés par une ministre. Je puis en témoigner.

Vous avez évoqué la « complexité » du monde des anciens combattants. Mes premiers mandats de maire m’ont montré que ce n’était pas effectivement un long fleuve tranquille. Nous avions constitué une association que nous réunissions deux fois par an, le 8 mai et le 11 novembre. Ils avaient une capacité à résister à des repas plutôt longs, aux apéritifs et aux digestifs, au point de me mettre moi-même en difficulté alors que j’étais en peine possession de mes moyens… (Sourires.) Ceux de 1914-1918 avaient la dent dure à l’égard de ceux de 1939-1945, qui en étaient bien malheureux. Ceux d’Indochine ont toujours été traités comme des moins que rien, ce dont ils ont conçu une amertume définitive, jusque dans leurs votes. Quant à ceux d’Algérie, ils n’étaient pas considérés du tout, d’autant qu’ils étaient accusés d’avoir contribué à fracturer la France et d’avoir laissé tomber l’Algérie. Il ne reste plus qu’eux et je sais que vous saurez leur accorder la reconnaissance, et pas seulement financière, à laquelle ils aspirent depuis si longtemps.

Mais maintenant, puisqu’il faut regarder l’avenir en face, comment refaire société autour de l’armée, qui reste très présente dans le cœur de notre patrie, en particulier des jeunes ? J’ai posé hier la question à Mme Parly qui m’a renvoyé à vous.

M. Thomas Gassilloud. Où en est le service national universel ? En quoi le projet de budget pour 2021 est-il concerné ? Pouvez-vous nous rassurer sur la poursuite de ce projet ?

Mme la ministre. La commission tripartite a pour vocation de réunir des représentants des associations, des parlementaires du Sénat et de l’Assemblée nationale et des représentants des administrations – notre ministère et Bercy – afin d’analyser conjointement l’évolution du point PMI comparé à l’évolution de l’indice des prix. Le monde combattant s’inquiète de ce qu’elle ne suit pas celle de l’indice des prix. En 2005, une décision, entièrement avalisée par le monde combattant, visait à indexer l’évolution du point PMI sur l’évolution de l’indice des traitements bruts de la fonction publique. L’introduction de nouveaux systèmes de rémunération dans la fonction publique, notamment l’application du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), pourrait favoriser l’évolution de ce point. Une étude fine, objective et impartiale doit être faite, afin d’estimer s’il y a lieu de proposer une évolution de l’indexation du point PMI ou d’en rester à l’évolution actuelle.

Entre le mois de mars et la fin de l’année scolaire, il n’y a pratiquement pas eu de journées défense et citoyenneté, et un peu moins de 350 000 jeunes n’ont pas pu faire leur JDC. La direction du service national et de la jeunesse (DSNJ) a proposé de réviser non leur contenu mais leur mode opératoire en mettant en place des demi-journées, en évitant les repas pris en commun afin de réduire les risques de transmission virale et en organisant des séquences en visio. Il faut en augmenter le rythme pour régler cette dette et ne pas bloquer certains projets des jeunes – permis de conduire, examens ou concours nécessitant une attestation de JDC. Je veux saluer le travail du général Ménaouine, le directeur du service national et de la jeunesse, qui fait preuve de réactivité pour retravailler avec pertinence ces dispositifs.

En 2008, il y a à peine douze ans, le budget du monde combattant s’élevait à 3,619 milliards d’euros, contre 2 milliards aujourd’hui, du fait de l’attrition du nombre des anciens combattants. Tous les ans, et j’aurais pu remonter plus loin, il connaît une évolution naturelle, puisqu’il est directement lié celle des PMI et de la retraite du combattant : si le nombre de personnes servies diminue, le budget diminue forcément. Cela ne nous a pas empêchés de faire entrer 50 000 personnes de plus par l’attribution de la carte du combattant 62-64, soit un important effort budgétaire en année pleine. Cela nous a même permis de prendre des mesures d’équité et de soutien qui me tenaient à cœur en direction des plus fragiles, notamment les conjoints survivants qu’il est de notre devoir d’aider. La diminution n’est que de 3,4 %, contre 5 à 7 % les autres années, et j’en suis très heureuse.

La dématérialisation des JDC pour les Français à l’étranger interviendra aussi en partie pour les jeunes vivant dans notre pays. Celle-ci permet d’organiser des JDC en direction de toute la jeunesse française, y compris celle disséminée à l’étranger, ce qui posait de réelles difficultés à nos ambassades. Grâce à la dématérialisation, nous agirons de façon pertinente et accessible à chacun.

Concernant le service militaire volontaire, vous dites qu’il n’y a pas assez de jeunes…

Mme Marianne Dubois. Pris en charge !

Mme la ministre. …pris en charge. Le service militaire volontaire est essentiellement un dispositif ambitieux de formation et d’insertion qui n’a rien à voir avec la préparation opérationnelle et la préparation militaire. Des jeunes qui s’engagent pour neuf mois suivent pendant deux mois une formation initiale qui se concentre surtout sur le savoir-être, puis une formation professionnelle, voire une remise à niveau des connaissances. À l’issue des neuf mois, le dispositif étant mis en œuvre sur chaque territoire avec des entreprises partenaires, 75 % de ces jeunes trouvent un emploi, ce qui considérable comparé aux résultats des organismes d’insertion. L’idée est de maintenir le nombre de sites mais en augmentant leur capacité, et en gardant le même nombre de militaires engagés dans l’encadrement. Porter le nombre de ces jeunes à 1 200 me semble convenable : rappelons que la mission principale des armées n’est pas de faire de l’insertion pour la jeunesse ; elles se doivent d’être attractives, parce qu’elles ont besoin de recruter 26 000 jeunes par an, de diffuser les valeurs républicaines et les valeurs d’engagement au service de la nation, mais on ne peut pas leur demander de tout faire. Le dispositif d’insertion réalisée pour la jeunesse ne peut que venir en complément de tous ceux qui existent dans le pays, même s’il peut être intéressant de faire prospérer nos méthodes de formation d’encadrants. Mais je me félicite que nos armées participent à cette attention à la jeunesse en difficulté.

Le fonds d’action sociale de l’ONACVG est maintenu à un niveau élevé : il diminue très légèrement, de 3,8 %, alors que la baisse du nombre des anciens combattants est estimée à 7 %. Je suis de près la consommation de ce fonds. En 2019, l’ONACVG a réalisé 54 000 interventions pour un budget de 27 millions d’euros. L’action sociale est complétée, si nécessaire, par les fonds recueillis par l’œuvre nationale du Bleuet de France en faveur des pupilles de la nation et du monde combattant.

La trésorerie de l’ONACVG n’est pas une variable d’ajustement. Toutefois, il est n’est pas normal qu’un opérateur public de cet ordre dispose d’un fonds de roulement excessif : il était légitime que nous y puisions. Nous allons retrouver une situation classique.

L’Institution nationale des Invalides est un très bel établissement où les travaux immobiliers vont enfin démarrer. Ils ont été légèrement retardés par le covid et les contraintes qu’impose une intervention sur un monument historique. Au-delà des travaux bâtimentaires, je mentionnerai le projet médical. En plus de ses pensionnaires, dont le nombre sera préservé, l’INI va participer au pôle interétablissements de reconstruction physique et psychique des blessés. Il comportera : une unité de vingt lits, dédiée au stress post-traumatique, agissant en complémentarité avec le service de santé des armées ; un pôle de rééducation médico-chirurgical d’une capacité de cinquante lits, spécialisé en médecine physique et en réadaptation, en lien avec les établissements de Percy et de Bégin, sur la plaque parisienne, et un plateau technique et ambulatoire d’une dizaine de places en hôpital de jour. Il sera naturellement doté d’un centre de consultation très bien équipé et son centre d’appareillage montera aussi en puissance. Ce centre de référence nationale, articulé autour de l’hôpital de Percy, de l’hôpital Bégin et de l’institution nationale des Invalides, sera la tête de pont de la réponse aux besoins de nos armées en termes de suivi et de réhabilitation physique et psychique du blessé. Il y aura d’autres centres dans les hôpitaux en province, à Marseille, Metz, Lyon. Il convient de souligner l’importance de ce projet pour nos blessés physiques ou psychiques, auxquels notre ministère doit prêter une attention constante.

Je le répète : malgré une baisse du budget, nous arrivons à servir davantage de monde après l’arrivée des titulaires supplémentaires de la carte du combattant.

L’allocation différentielle de solidarité a été supprimée pour des raisons juridiques mais je vous assure que l’action sociale fonctionne bien. Les associations prennent part à la constitution des dossiers. Les services départementaux de l’ONACVG sont à la manœuvre, très réactifs dans leur soutien. Les commissions départementales, dans lesquelles siègent des représentants de l’ONACVG et du monde combattant, se réunissent régulièrement. Je souhaite y inclure des représentants de l’aide sociale de droit commun, auquel cette aide vient en supplément et non en substitution. Après être allée dans des ONACVG départementales pour voir comment le travail était fait sur le terrain, je peux témoigner que ces services sont très soucieux d’aider les futurs bénéficiaires à recourir à ce fonds dans les meilleures conditions. Je veux d’ailleurs remercier l’ONACVG qui fait cet important travail de proximité et qui le fait bien.

Le Président de la République a missionné M. Stora pour faire un rapport complet sur la colonisation et la guerre l’Algérie. C’est un travail d’historien dont le Président de la République devrait s’inspirer et tirer les éléments qu’il souhaite défendre sur ce conflit et sur le sujet sensible de la colonisation. J’ai moi-même l’occasion dans mes fonctions de m’apercevoir qu’il n’y a pas une mémoire, mais des mémoires : chacun a sa propre perception en fonction de son vécu. L’idée n’est pas de nier chaque mémoire mais de faire en sorte que les personnes puissent se parler, se respecter, échanger afin d’aboutir progressivement à l’apaisement.

Je retiens la différence entre tous les conflits. Dans le monde combattant, il y a la mémoire personnelle du conflit vécu par chacun et il y a la mémoire collective. La guerre d’Indochine fut un conflit difficile, bien souvent ignoré en France et ceux qui en sont revenus étaient souvent amers. Il y a deux ans, nous avons organisé une belle cérémonie en présence du Premier ministre ; à Fréjus, un monument leur est consacré, qui fera l’objet de travaux de restauration mérités. La guerre d’Algérie était un conflit différent. Mon rôle est de respecter toutes ces mémoires individuelles dont aucune ne vaut plus que l’autre et de les réunir au sein d’une mémoire collective. L’histoire et la construction de notre pays méritent d’être connues par les jeunes générations, car elles ont de nombreuses incidences sur notre société. De conflits difficiles et, pour certains, oubliés, il faut faire un élément positif.

Comment faire société autour de l’armée ? Nous réalisons des actions de mémoire et de transmission de valeurs républicaines en direction des jeunes et des parents, mais le tout commémoratif est insuffisant. Nous devons moderniser nos modes de transmission pour toucher bien plus de jeunes. Nous travaillons main dans la main avec l’Éducation nationale. J’en appelle à tous les professeurs d’histoire, de géographie ou autres, intéressés par ces sujets. Nous avons besoin d’eux pour les développer dans nos établissements scolaires.

Le service national universel permet aux jeunes Français de développer une culture de l’engagement pour leur pays et leur société. On vit mieux ensemble quand on se connaît et quand on se respecte. Le SNU vise à ce que les jeunes Français se connaissent mieux et se reconnaissent.

Nous contribuons à l’insertion des jeunes par la reconnaissance des différences. L’armée française est un exemple d’unité autour d’une mission. Quelle que soit son origine, quelle que soit sa couleur de peau, quelle que soit sa religion, un soldat est d’abord un soldat au service d’une mission, au service de la France et est reconnu en tant que tel. C’est la plus belle intégration qui se puisse concevoir. Nous devons tous être, individuellement, avec nos moyens propres, au service de notre pays. Les armées françaises en sont un bon exemple pour la jeunesse française.

S’agissant des perspectives du service national universel, nous avons été ennuyés cette année, puisque ce qui devait être réalisé au mois de juin n’a pu l’être. Nous avons sans doute encore devant nous quelques mois de crise durant lesquelles nous devrons faire le dos rond, mais une montée en puissance est attendue l’année prochaine. Le ministère des armées participe à la hauteur qui doit être la sienne, mais le dossier est placé sous la responsabilité du ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, en particulier Mme Sarah El Haïry, avec qui je travaille régulièrement.

Nous participons à la mise en œuvre de la phase de cohésion, puisque notre journée particulière « Défense et mémoire » reprend l’organisation des JDC en la complétant par une partie mémoire. Le ministère des armées participe à la formation des encadrants, notamment des chefs de centre. Notre participation va se poursuivre. Les journées défense et mémoire remplaceront progressivement les JDC, mais dans l’intervalle, celles-ci vont se poursuivre, car c’est pour les jeunes la première approche des notions de sécurité du pays et d’armée. C’est un travail sur le civisme et pas seulement sur la détection des difficultés d’apprentissage.

M. Stéphane Baudu. Le 25 septembre dernier, la ministre des armées a présenté à Varennes-sur-Seine sa stratégie énergétique de défense dont vous serez chargée de la mise en œuvre. Cette stratégie repose le constat simple que nos armées sont dépendantes des énergies fossiles, ressources de plus en plus rares et onéreuses et vouées à disparaître. En outre, nos armées sont le premier consommateur d’énergie de l’État français, alors que la France s’est donné pour objectif la neutralité carbone en 2050. L’armée française a donc le devoir environnemental et moral de revoir sa consommation énergétique. Ce changement n’est pas seulement une obligation, c’est aussi un choix salutaire : changer de modèle énergétique permettra à l’armée française de maîtriser ses dépenses énergétiques, de recouvrer une souveraineté énergétique et de renforcer son lien avec la nation. Pour permettre ce changement structurant, Mme Parly a annoncé des actes, des expérimentations concrètes et des recherches tangibles. Pouvez-vous nous donner des exemples sur nos emprises en France, mais aussi sur nos bases à l’étranger ?

Par ailleurs, la mission « Défense » du projet de budget prévoit la création d’un service de l’énergie opérationnelle. Quels seront ses missions et ses moyens d’action ?

M. Jean-Michel Jacques. De quels garde-fous dispose notre pays et votre ministère pour éviter que les pages douloureuses de notre histoire soient l’objet de projets inadaptés au nom de profits commerciaux ? J’ai été interpellé par plusieurs associations d’anciens combattants, de vétérans américains et de descendants de membres des commandos Kieffer au sujet d’un projet privé, dénommé « D-Day Land », s’inscrivant dans le cadre du 80e anniversaire du débarquement. Celui-ci n’a fait l’objet d’aucune présentation publique de la part des investisseurs ni même du conseil régional de Normandie, qui le soutient. Alors que 100 millions d’euros devaient initialement y être consacrés, il n’est plus question que de 25 millions d’euros, car le projet a évolué au fil des questionnements. Il se ferait sur 35 hectares de terres et pourrait déséquilibrer les sites muséographiques d’une région qui en est déjà riche. Vos moyens de régulation sont sont-ils suffisants ? Peut-on imposer une méthodologie pour éviter certaines dérives ?

M. Christophe Blanchet. Nous ne pouvons que nous réjouir du renforcement du budget consacré aux actions en faveur des jeunes. Le cadre du service national universel est propice à la transmission des valeurs de notre pays et de nos armées autour de l’engagement. Nos armées ont un rôle à jouer au sein du SNU, ne serait-ce qu’à travers le module « Journée défense et mémoire nationales ». Après avoir suivi les premiers déploiements du SNU – je vous avais remis un rapport en ce sens – , et le retour d’expérience des 2 000 jeunes premiers volontaires autour du jeu de rôles Décision défense, cette journée n’est pas apparue comme la plus efficace pour atteindre l’objectif visé. En 2020, l’annulation de la phase de cohésion pour les raisons sanitaires que nous connaissons n’a pas permis de mesurer les évolutions intervenues. Quelles améliorations est-il prévu d’apporter au module « Journée de défense et mémoire ». Quels vecteurs pédagogiques vont être modifiés, renforcés ou adaptés ?

M. Didier Le Gac. L’année dernière, vous êtes venue inaugurer le service des urgences de l’hôpital interarmées de Brest, bel exemple de mutualisation entre le civil et l’armée. Si j’évoque ces travaux dont le montant de 6 millions d’euros a été financé uniquement par le budget des armées, c’est parce que nous avons découvert avec plaisir que le budget du service de santé des armées bénéficiera d’une hausse de 27 % dans le projet de loi de finances pour 2021. Comment cette augmentation sera-t-elle ventilée ?

M. Gérard Menuel. Liée au devoir de mémoire, une plaie ne s’est jamais totalement refermée entre la France et l’Algérie. Depuis des décennies, les opérations d’exhumation et de rapatriement des soldats français morts en Algérie ont été très rares et se sont heurtées à de nombreuses difficultés. À ma connaissance, le dernier corps rapatrié vers sa terre natale, les Pyrénées-Orientales, l’a été en 2017. Doit-on penser que ce rapatriement fut le dernier et que plus aucune discussion n’aura lieu avec les autorités algériennes sur ce sujet, ou avons-nous encore une possibilité d’agir pour les quelques familles qui espèrent toujours le rapatriement d’un des leurs ?

M. Jean-Marie Fiévet. Grâce à son maillage territorial, l’office national des anciens combattants et victimes de guerre assure une mission de solidarité par différents types d’actions : services aux ressortissants, accompagnement des combattants dans la durée, assistance administrative, ambition pour les Bleuets de France. L’action sociale de l’ONACVG est indéniable : retraite professionnelle, retraite du combattant, aide matérielle, hébergements en sont quelques exemples. Nous pouvons nous féliciter du maintien de son budget à hauteur de 56 millions d’euros, malgré la diminution du nombre de ressortissants.

Vous avez signé un contrat d’objectifs et de performance couvrant la période 2020-2025. Quels en sont en les principaux objectifs ?

M. Yannick Favennec Becot. À l’occasion de l’examen du projet de budget des anciens combattants, je reviens chaque année sur un marronnier : la prise en charge des pupilles de la nation et des orphelins de guerre. Je le faisais également lors des précédentes législatures, preuve que le sujet n’a guère avancé. La prise en charge des orphelins victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale au même titre que l’ensemble des pupilles de la nation et des orphelins de guerre ne devrait pas constituer une charge financière très lourde pour les finances publiques, compte du petit nombre de personnes concernées. Ne pourrait-on procéder à un recensement exhaustif des pupilles de la nation et orphelins de guerre afin de savoir précisément ce qu’il en coûterait à la collectivité ?

M. Jean-Philippe Ardouin. Le service militaire volontaire est une expérimentation nécessaire parallèle au service national universel. Cette contribution du ministère des armées pour les jeunes, notamment ceux exclus du marché de l’emploi, renforce le lien entre les armées et la nation, en s’appuyant sur des partenaires civils et institutionnels tels que les collectivités, les associations et les entreprises. Il est décrit comme une réussite par de nombreux observateurs et constitue une véritable politique d’insertion. Comment entendez-vous attirer un plus grand nombre de jeunes en 2021 et les années à venir, notamment les femmes, qui ne représentent que 28 % de cette jeunesse ?

Mme Séverine Gipson. Pourriez-vous nous indiquer le taux d’insertion professionnelle des jeunes qui ont bénéficié du service militaire volontaire ?

Mme Anissa Khedher. Le 21 juin dernier, vous vous êtes rendue aux Tatas sénégalais de Chasselay, dans le Rhône, pour commémorer le 80e anniversaire du massacre des tirailleurs sénégalais pendant la Seconde Guerre mondiale. Depuis, vous avez fait parvenir à tous les maires de France un ouvrage intitulé Aux Combattants d’Afrique, la Patrie reconnaissante, afin de transmettre la mémoire de ceux qui sont venus de loin pour défendre la France. Nombreux sont nos concitoyens à ne pas connaître cette partie de l’histoire française. L’œuvre de transmission que vous entretenez est nécessaire pour perpétuer cette mémoire. Je tiens à vous remercier et à remercier celles et ceux qui agissent en ce sens, particulièrement les habitants et les élus de Chasselay, ou encore M. Kamel Mouellef, auteur de bandes dessinées sur ce sujet, ainsi que l’association Africa 50. Quelle action mettrez-vous en œuvre en 2021 pour continuer à transmettre et à honorer la mémoire de ces nombreux soldats ?

Mme Carole Bureau-Bonnard. Qu’ils l’aient oubliée ou qu’ils ne l’aient pas apprise, la méconnaissance de l’histoire de France par nos jeunes est source de difficultés entre générations. Un crédit spécifique est-il prévu par votre ministère pour la mise en valeur de la mémoire dans nos écoles, collèges et lycées avec le concours des associations d’anciens combattants présentes sur le territoire ?

M. Fabien Gouttefarde. Malgré la crise, le projet de loi de finances pour 2021 sanctuarise et consolide les droits acquis par les anciens combattants. Depuis votre entrée en fonction, en 2017, vous avez fait droit à nombre de demandes d’associations d’anciens combattants par la concertation. Cette année, vous poursuivez dans cette voie par une mesure réclamée de longue date, l’extension de la reconnaissance des conjoints survivants des grands invalides de guerre. Cette mesure permet, à l’article 54 du projet de loi de finances, d’élargir le nombre de conjoints survivants bénéficiant d’une pension de réversion majorée de 360 points, dès lors que le conjoint décédé a bénéficié d’une pension militaire d’invalidité de 6 000 points, contre 10 000 actuellement. Cette mesure est applicable aux pensions en paiement au 1er janvier 2021.

Quelle méthode d’estimation avez-vous utilisée pour la budgétisation de cette nouvelle mesure ? Pouvez-vous nous éclairer sur les bénéficiaires visés à l’article 54 ? Qu’en sera-t-il d’un conjoint de grand invalide de guerre dont la pension serait mise en paiement postérieurement à cette date ?

M. Philippe Meyer. Vos services ont participé aux commémorations annuelles du camp de concentration du Struthof, dans le Bas-Rhin, le seul qui ait été installé par les nazis sur le territoire national. Nous avons notamment entendu le témoignage bouleversant de deux rescapés. Le mémorial, réalisé à l’initiative du général de Gaulle, qui l’a lui-même inauguré en 1960, connaît, grâce au plan pluriannuel de travaux, une nouvelle jeunesse, lesquels vont se poursuivre prochainement sur la chambre à gaz.

Le site qui accueille plus de 200 000 visiteurs par an, dont de nombreux scolaires, conforte le tourisme de mémoire dans la région. Je souhaite cependant que les collectivités territoriales qui soutiennent la politique touristique, l’aménagement des routes, soient davantage associées aux décisions, avec les élus, qui connaissent le mieux les contraintes liées à l’accueil d’un si grand nombre de visiteurs sur de petites routes de montagne.

Il faudrait également davantage associer les historiens. Ce travail pourrait être piloté par le directeur du centre européen du résistant déporté, qui fait du bon travail et gère le site pour le compte de l’État. Les moyens sont présents ; il faudrait mettre autour de la table tous les acteurs pour que ces investissements soient salués par tous et ne donnent pas lieu à des divisions.

M. Jacques Marilossian. Les crédits du Gouvernement pour la politique mémorielle augmentent de 60 %, passant de 11 à 18 millions d’euros, et nous pouvons nous en féliciter.

Nous avons célébré cette année les 150 ans de la guerre de 1870-1871 entre la France du Second Empire et la Prusse, soutenue par les États allemands de l’époque. Ce conflit, élément important des guerres européennes, reste méconnu et peu enseigné en France ; elle constitue pourtant le prélude à la guerre de 1914-1918 et représente l’acte fondateur de la IIIe République. Un colloque s’est d’ailleurs tenu le 4 septembre à l’Assemblée nationale pour célébrer les 150 ans de cette naissance. Les historiens français et allemands manifestent un intérêt croissant pour cette guerre. Le ministère des armées a son rôle à jouer dans le développement des connaissances de ce conflit qui a laissé de nombreuses traces dans ma circonscription : incendie du château de Saint-Cloud, combats de Buzenval, de La Malmaison, destruction du village de Garches, résistance du fort du Mont-Valérien. Des crédits sont-ils prévus en 2020 et 2021 pour la commémoration de la guerre de 1870-1871 ?

Mme Laurence Trastour-Isnart. Ma question porte sur les oubliés de la nation. Envisagez-vous une action de reconnaissance pour les militaires décédés en préparation opérationnelle, dont les familles endeuillées attendent toujours des réponses à plusieurs courriers adressés au ministère ?

Dans le cadre de l’élaboration d’un rapport avec Anissa Kheder, j’ai rencontré des blessés. Beaucoup observent que si la carte d’invalidité permet d’obtenir une réduction pour les transports en commun, ils peuvent rarement les emprunter à cause de troubles post-traumatiques. Cette carte ne leur permet pas non plus d’être prioritaires dans les files d’attente des supermarchés ou ailleurs, ou encore de bénéficier de moyens de transport dédiés aux personnes en situation de handicap qui peuvent difficilement se rendre dans des lieux très fréquentés.

M. Jean-Charles Larsonneur. Le budget alloué au service de santé des armées augmente significativement, comme le soulignait Mme Parly, qui a confirmé le renforcement de l’effectif de l’hôpital d’instruction des armées Clermont-Tonnerre, à Brest. Il faut s’en féliciter, car il remplit des missions importantes liées à la dissuasion.

L’indicateur de performance de la JDC reste stable. Dans le contexte de la pandémie, les stagiaires y passent rarement plus d’une journée. Les documents budgétaires font état de la mise en place d’une JDC en ligne ou d’une e-JDC. Ce dispositif est-il appelé à être pérennisé ? Vous avez en partie répondu en annonçant la montée en puissance du SNU et de la journée Défense et mémoire. Pouvez-vous nous rassurer sur son intérêt pédagogique ?

Au titre des actions mémorielles, rien n’est prévu pour le 200e anniversaire de la mort de Napoléon Ier, le 5 mai. C’est un événement important qui tient à cœur à nombre de Français. Je signale que nous avons à Brest le canot de l’Empereur, dont beaucoup d’associations mémorielles souhaitent la mise en valeur à l’occasion de cet événement.

Mme Monica Michel. Le 25 septembre, nous rendions hommage aux harkis, comme c’est le cas depuis 2003. Nous pouvons saluer dans ce projet de loi de finances la confirmation des moyens au profit des rapatriés par l’allocation de reconnaissance, l’allocation viagère et les aides aux enfants de harkis. Toutefois, les conditions d’attribution de l’indemnité des harkis ont été simplifiées. Pouvez-vous nous éclairer sur ces nouvelles conditions ?

M. Nicolas Meizonnet. Je tiens à mon tour à saluer votre volonté politique sincère de faire vivre la mémoire des anciens combattants et les progrès réalisés en matière de reconnaissance et de réparation, même si la baisse budgétaire peut susciter quelques regrets.

Concernant la politique mémorielle, une date me semble encore et toujours oubliée, celle du 12 mai 1962. Cette date qui survient après les accords d’Évian est une plaie ouverte pour nos compatriotes harkis, puisqu’elle marque leur abandon par la France : c’est le jour où Pierre Messmer, alors ministre des armées, donne instruction confidentielle au chef des armées d’Alger d’empêcher les harkis de rejoindre la métropole. Nous connaissons la suite : 150 000 harkis seront massacrés par le FLN et seulement 20 000 pourront fuir vers la métropole grâce à des officiers courageux. Avec mon ex-collègue Louis Alliot et à la demande d’associations, nous avions déposé une proposition de loi visant à instituer une journée nationale du souvenir de l’abandon des harkis, le 12 mai 1962. Cette reconnaissance est-elle envisageable ?

Mme la ministre. Je suis attentivement la stratégie énergétique pour laquelle notre ministère développe un schéma de développement durable ambitieux.

La transformation du service des essences des armées en service de l’énergie opérationnelle destiné à alimenter tous nos avions et véhicules militaires ne se réduit pas à un changement de nom : elle vise des objectifs importants de sécurisation d’approvisionnement, d’innovation par la recherche de carburants différents, notamment bio, tout en maintenant nos capacités opérationnelles sur notre territoire comme en opérations extérieures.

Nous devons maîtriser notre empreinte environnementale. Avec plus de 250 000 d’hectares d’emprises militaires, nous sommes le plus grand propriétaire foncier public, et nos plus de 50 000 bâtiments représentent un enjeu de rénovation thermique considérable. La rénovation annuelle en bâtiments basse consommation se poursuivra de façon coordonnée jusqu’en 2026, appuyée par des budgets conséquents. Les 1 600 chaufferies au charbon et au fioul lourd qui équipent les bases militaires françaises seront supprimées d’ici à 2030 : 100 millions d’euros déjà sont prévus dans la loi de programmation militaire (LPM), auxquels s’ajouteront des crédits supplémentaires pour atteindre l’objectif prévu. Afin de réaliser des économies d’énergie, nous mettons en œuvre, pour 250 millions d’euros, des contrats de performance énergétique allant jusqu’en 2025. Nous avons développé des systèmes de management de l’énergie dans les quinze bases de défense les plus énergivores et dans nos lycées militaires.

Dans le cadre du plan interministériel « Place au soleil », 2 000 hectares de terrain du ministère seront progressivement mobilisés d’ici la fin 2022 pour l’exploitation de fermes photovoltaïques par des opérateurs. Quelque 370 hectares l’ont déjà été et 170 le seront dans les prochains mois.

Notre filière environnementale se professionnalise. Nous allons désigner des référents « développement durable » au sein des unités. Des clauses environnementales seront présentes dans tous les programmes d’achat courant. À Nancy, j’ai pu voir les innovations développées pour les circuits courts d’alimentation, le recyclage de nos déchets ménagers et de nos déchets végétaux, le nettoyage des locaux ou l’achat de véhicules électriques ou hybrides pour des usages non opérationnels. Dans les programmes d’équipement, y compris en armements, les éléments d’écoconception et d’efficacité énergétique sont de forts critères de choix. Le ministère développe donc une politique complète et volontariste en ce domaine.

Je ne connais pas ce projet normand et personne ne semble le connaître : j’évite de prendre position sur des sujets que je ne connais pas. Le Normandie a engagé depuis de longues années un formidable travail en matière de tourisme de mémoire autour de lieux historiques comme les plages du Débarquement ou le Mémorial de Caen. Doit-on s’interdire de réfléchir à d’autres moyens de transmission mémorielle ? Nous disposons de nouveaux outils comme le numérique pour faire preuve d’attractivité à l’égard des jeunes notamment.

M. Jean-Michel Jacques. Ma question portait sur le risque de dérapage.

Mme la ministre. Je ne peux pas parler d’un projet que je ne connais pas. Vous dites qu’il s’agit d’une initiative privée, soutenue par le conseil régional.

M. Jean-Michel Jacques. Par le président du conseil régional.

Mme la ministre. Le meilleur moyen de faire partager quelque chose, c’est de mettre les gens autour de la table. Si un nouveau projet sur la terre normande avait la caution de chacun, il ne ferait sans doute pas concurrence à l’existant, parce que le monde attire le monde. Le meilleur garde-fou pour ses promoteurs, c’est de réunir des historiens, des représentants du monde combattant, des représentants des collectivités territoriales. S’il faut participer à la réflexion avec les historiens de notre ministère, nous sommes prêts à proposer notre expertise. Pour ce qui est des 35 hectares de terres, les plans locaux d’urbanisme (PLU) sont aussi un garde-fou, aux mains des élus locaux.

J’ai déjà évoqué le cadre du SNU, l’évolution des JDM et leur articulation. Une évaluation des journées défense et mémoire développées pendant la première génération du service national universel a été réalisée. Des révisions simples ont été opérées. Les autres ministères concernés sont intervenus ; la durée des séquences a été réduite, passant d’une heure à cinquante minutes ; les jeux de stratégie ont été simplifiés. Les jeunes les comprennent très vite, mais ils n’avaient pas suffisamment de temps pour y participer pleinement. Ils peuvent y jouer le soir ; on peut les leur mettre à disposition dans des conditions différentes.

Florence Parly m’a confié le suivi de l’évolution du service de santé des armées, qui bénéficiera de crédits supplémentaires par rapport au budget 2020 : nous avons besoin de reconstituer des stocks de médicaments et de renouveler des dispositifs médicaux au profit de la médecine des forces. Nous souhaitons finaliser la mise en œuvre du projet « SSA 2020 ». Nous devons continuer de penser l’avenir. À l’hôpital de Brest, nous avons inauguré le service des urgences mais conservé des services qui, initialement, devaient être partagés avec l’hôpital public. Le service de santé des armées est entièrement tourné vers le soutien aux forces : tous les projets de transformation en coopération avec l’hôpital public ou d’autres partenaires, à Metz, à Lyon, à Brest, à Bordeaux, visent d’abord à répondre à ce besoin.

Des investissements sont prévus dans certains hôpitaux – je viens de lancer les travaux du service des urgences de l’hôpital Percy. Outre la reconstitution des stocks, des projets de remontée en puissance des ressources humaines viseront à consolider ce service indispensable, mis à rude épreuve par la crise du covid, comme tous les services de santé publique en France. Nos hôpitaux ont pris en charge des malades, multipliés par trois leurs capacités de réanimation, participé au soutien des régions les plus touchées, notamment à Mulhouse, et aux évacuations sanitaires de patients en réanimation dans d’autres régions. Le service a été particulièrement actif. Trente-cinq personnels ont été envoyés en Guadeloupe. Les membres du service doivent être remerciés pour leur implication dans les crises. Grâce à eux, nous avons pu soutenir des forces, maintenir la présence dans les opérations extérieures, agir en soutien pendant les crises sanitaires : il faut les en saluer. La remontée en puissance du budget est un bon signe pour le service de santé des armées qui doit être soutenu à proportion de ce qu’il apporte à nos armées et à notre pays.

En Algérie, les morts pour la France sont inhumés dans des nécropoles militaires, sauf si la famille a demandé, à l’époque, leur rapatriement. Les familles ont la possibilité de le demander aux autorités algériennes. Le sujet est différent de celui des disparus militaires et de la recherche des corps qui nécessitent un travail avec l’Algérie. Le service historique de la défense et l’association Soldis finalisent la liste des militaires disparus en Algérie, qui sera présentée début décembre. Nous devons aussi renouer le dialogue avec les autorités algériennes, ce qui n’était pas simple : pendant de longs mois, nous n’avions plus d’interlocuteur politique.

J’ai souhaité un contrat d’objectifs et de performance 2020-2025, soit six ans, contre trois ans auparavant, afin de donner de la perspective à l’ONACVG. La modernisation de l’office est déjà lancée. La dématérialisation des demandes de cartes de titres et d’aides sociales est une avancée précieuse, qui fait gagner du temps et de l’efficacité et décharge du temps d’agent pour d’autres missions. Le COP confirme le rôle d’opérateur mémoriel de l’ONACVG. C’est un opérateur des mémoires de l’État au niveau local, responsable de la mise en œuvre, de l’entretien et de la valorisation des nécropoles et des dix hauts lieux de la mémoire nationale, dont le Struthof. Nous lui transférons les crédits. Un montant de 56 millions d’euros est prévu dans le projet de budget, dont 53,5 millions d’euros en subventions de fonctionnement et 2,5 millions d’euros pour l’entretien des nécropoles et des hauts lieux de mémoire. De plus, un budget d’investissement de 8 millions d’euros est dévolu à la restauration des hauts lieux de mémoire.

L’ONACVG, notre opérateur principal, prévoit des efforts de réorganisation et des diminutions de coûts de fonctionnement, tout en préservant le réseau des services de proximité. Nous avons atteint un équilibre dans le contrat voté à l’unanimité du conseil d’administration.

Enfin, le COP lance le processus d’amélioration du modèle économique du Bleuet de France et de sa sécurisation, ce qui conforte l’ONACVG dans son rôle d’opérateur.

Aucun gouvernement n’est insensible à la situation des orphelins de la Seconde Guerre mondiale. En application des décrets pris en 2000 et 2004, l’ONACVG procède au réexamen de chaque dossier. Nous maintenons un examen au cas par cas des dossiers aux orphelins afin de garantir une égalité de traitement. Ces décrets contribuent au soutien des orphelins dont les parents sont morts dans des camps de concentration, dans des situations de barbarie extrême. C’est une spécificité. Cela figure au programme 158, programme particulier sous l’autorité du Premier ministre. Si des situations particulières motivent l’entrée d’autres orphelins dans ce cadre, elles seront examinées. Mais tous les orphelins de guerre et pupilles de la nation peuvent être soutenus par l’ONACVG au titre de l’action sociale, puisqu’ils en sont des ressortissants.

Pourquoi seulement 28 % de femmes participent-elles au service militaire volontaire ? Probablement parce que nous recevons davantage de dossiers de garçons que de filles… Il faut sensibiliser les prescripteurs, que sont également les missions locales, les organismes sociaux des communes, en leur expliquant que les femmes y ont toute leur place et qu’elles y seront accueillies dans d’excellentes conditions. Avec Florence Parly, nous soutenons résolument la mixité dans le ministère des armées.

Quant au taux d’insertion professionnelle, il est en moyenne de 75 % : c’est excellent. Quand j’étais élue locale, je voyais fonctionner les services d’insertion ; aucun d’eux n’atteint un résultat aussi élevé. Nous pouvons en être fiers.

Les tirailleurs d’Afrique sont un sujet auquel nous prêtons une grande attention. J’ai souhaité créer cet ouvrage à l’attention des élus locaux qui veulent baptiser des espaces publics de noms de tirailleurs sénégalais ou de combattants africains. Le livre en donne cent, mais la liste n’est pas exhaustive ; une commune peut s’attacher à un autre nom. Le service historique de la défense est à la disposition des communes pour leur fournir toutes les informations souhaitables. C’est un beau travail. Je vous remercie de continuer, chacun dans vos territoires, à défendre l’histoire et la diversité de nos armées, miroir de la diversité de notre nation. Ces combattants africains ont combattu pour la liberté de la France, pour notre République et nous devons leur en être reconnaissants.

S’agissant de la méconnaissance de notre histoire, sans doute devons-nous intensifier nos efforts de transmission avec l’aide de l’Éducation nationale, qui en reste le pilier. Peut-être faut-il faire évoluer les programmes. Nous souhaitons continuer à travailler avec eux.

Nous devons multiplier les supports, les rendre plus attractifs pour la jeunesse et plus interactifs. Compte tenu de nos contraintes dans l’organisation des cérémonies, j’ai souhaité la création d’une web-série sur l’année 1940, composée de films courts mais denses. Nous devons continuer à utiliser des supports pédagogiques différents. Un crédit d’environ 550 000 euros est inscrit pour les actions pédagogiques de l’ONACVG, les actions directes de la direction des patrimoines, de la mémoire et des archives et les publications. Par ailleurs, des subventions dont le montant varie chaque année en fonction des besoins sont également attribuées.

Pour ce qui est des conjoints survivants, quand on prend des décisions, il faut les appliquer. Le service des pensions de La Rochelle réalise un important travail de suivi et de mise en œuvre des dossiers. Chacun peut être rassuré, ces mesures seront mises en œuvre et le seuil de 6 000 points se substituera tout simplement dans le code des pensions à l’actuel seuil de 10 000 points. C’est sur cette base nouvelle que les pensions seront liquidées.

Les hauts lieux de mémoire font l’objet d’investissements importants. Le Struthof est un site particulièrement émouvant. Tous les investissements prévus y seront réalisés. Le meilleur moyen d’y parvenir, c’est de passer par un plan pluriannuel d’investissement qui présente l’avantage d’offrir une visibilité.

Nous devons soutenir le tourisme de mémoire avec les collectivités. Les régions, les départements et les intercommunalités sont dotés de la compétence touristique. Nous continuerons bien entendu à travailler avec eux.

Nous avons commémoré le conflit de 1870 : je me suis rendue à Gravelotte et à Bazeilles. Nous souhaitons transmettre la mémoire de cet épisode déterminant pour le XXe siècle : il a contribué à l’arrivée de la République dans notre pays et il est à l’origine des deux guerres mondiales. Il a profondément marqué une partie du territoire français, l’Alsace et la Moselle.

Nous n’oublions pas Napoléon. De nombreuses expositions seront organisées. Le patrimoine d’envergure du dôme des Invalides sera valorisé avec une restauration du tombeau, de la chapelle Napoléon, la cathédrale Saint-Louis, des expositions patrimoniales temporaires et un parcours d’art contemporain, à partir du mai 2021, intitulé « Napoléon ? Encore ! ». D’autres actions importantes seront conduites par le service historique de la défense et plusieurs partenaires, tels qu’un colloque international et la projection d’un film. Toutes ces actions seront développées sous l’angle historique.

Faute de temps, je m’engage à répondre par écrit à Mme Trastour-Isnart et à M. Jean-Charles Larsonneur.

Les conditions d’accès aux aides pour les harkis sont simplifiées. Nous avons élargi le cadre d’intervention, le nombre de lieux, hameaux de forestage et camps, ouvrant droit aux fonds.

Pour de qui est du 12 mai 1962, les harkis ont la journée du 25 septembre : ce jour-là, nous pouvons parler de tout. Les présidents de la République successifs, ainsi que le Président Macron, se sont clairement exprimés sur le sujet. Ils ont tous condamné l’abandon des harkis et reconnu que ceux accueillis en France l’avaient été dans des conditions exécrables, qui ne correspondaient pas à la reconnaissance due par la nation à des personnes ayant participé aux combats aux côtés de l’armée française. Tout cela, nous le traitons, nous en parlons, nous mettons en œuvre des moyens de reconnaissance et de réparation. Nous poursuivrons le dialogue avec les harkis. Mais créer une nouvelle date, je n’y suis pas favorable.

Vos questions nombreuses montrent votre intérêt à toutes et tous. Cet intérêt va droit au cœur des anciens combattants et me permet de travailler activement avec vous pour la mémoire sur tous les territoires. Je vous en remercie infiniment. (Applaudissements.)

Mme la présidente Françoise Dumas. Madame la ministre, les applaudissements de mes collègues montrent combien cette mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » est incarnée par vous-même comme par nos collègues. Je tiens à saluer votre niveau d’implication. La diversité des sujets, la façon dont vous les appréhendez et votre dynamisme incitent à vous soutenir, à vous apporter nos éclairages et à continuer à faire tout ce que nous pouvons pour ceux qui le méritent tant ainsi que pour notre jeunesse.


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II.   Audition de représentants d’associations d’anciens combattants

La commission de la Défense nationale et des forces armées a entendu des représentants d’associations d’anciens combattants, sur le projet de loi de finances pour 2021 (n° 3360), au cours de sa réunion du mardi 20 octobre 2020.

Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l’Assemblée à l’adresse suivante :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9685221_5f8f0ed2bf20f.commission-de-la-defense--audition-de-representants-d-associations-d-anciens-combattants-plf-2021-20-octobre-2020

 


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III.   Examen des crédits

La commission de la Défense nationale et des forces armées a examiné, pour avis, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » au cours de sa réunion du mercredi 21 octobre 2020.

Un débat suit l’exposé du rapporteur pour avis.

 

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis (Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation). « Ces Français que nous fûmes contraints de jeter dans la bataille, ils ont des droits sur nous. Ils veulent qu’aucune de nos pensées ne se détourne d’eux, qu’aucun de nos actes ne leur soit étranger. Nous leur devons tout, sans aucune réserve. » Ces mots furent prononcés par Georges Clemenceau devant notre chambre le 20 novembre 1917.

Je vous remercie de m’avoir confié, pour le quatrième exercice consécutif, la fonction de rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire, liens avec la Nation ». Celle-ci s’articule autour de trois programmes budgétaires complémentaires, dont les deux premiers, les programmes 167 et 169, sont placés sous la responsabilité du ministère des armées.

Le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » retrace les crédits de la journée de défense et de citoyenneté (JDC), du service militaire volontaire (SMV) et de la politique de mémoire du ressort du ministère des armées.

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » couvre les dépenses relatives à l’administration de la dette viagère, c’est-à-dire les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant, l’action sociale et les mesures en faveur des harkis. Ce programme contient également les crédits nécessaires au fonctionnement de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG), et de l’Institution nationale des Invalides (INI), engagée dans un vaste projet de transformation destiné à en faire un lieu de référence dans l’accueil et le suivi des victimes de syndromes post-traumatiques. La répartition des crédits se fait de la manière suivante : 43 % vont aux pensions militaires d’invalidité ; 33 % à la retraite du combattant, 20 % à l’entretien du patrimoine mémoriel, 3 % à la subvention pour charges de service public de l’ONACVG et 1 % à l’INI.

Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale » relève, quant à lui, du Premier ministre.

Le projet de budget pour 2021 des trois programmes de la mission s’élève à 2,86 milliards en autorisations d’engagement et 2,89 milliards en crédits de paiement, ce qui correspond à une diminution de près de 69 millions par rapport à la loi de finances pour 2020. Il y a certes une diminution, mais moins forte que l’attrition, autrement dit le nombre d’anciens combattants qui nous ont quittés – laquelle s’établit à 7 %.

Avec Mme Geneviève Darrieusecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, la majorité mène depuis 2017 une politique constante et ambitieuse de maintien et d’extension des droits en faveur des ressortissants du monde combattant. Ce faisant, nous avons répondu aux demandes formulées à l’unanimité par les associations d’anciens combattants que nous avons réunies au sein d’un groupe de travail, le G12. Nous avons ainsi introduit : l’harmonisation des conditions d’octroi de la pension de réversion aux conjoints survivants d’avant et d’après 1962, en 2018 ; l’extension du bénéfice de la carte du combattant aux anciens militaires pouvant justifier de quatre mois de présence en Afrique du Nord entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 – une mesure qui touche plus de 50 000 anciens militaires – en 2019 ; la hausse de la pension de celles qui ont renoncé à une grande partie de leur carrière professionnelle pour prendre soin de leur conjoint lourdement blessé pour la France – les grands invalides de guerre.

Enfin, dès le 1er janvier 2021, en application de la loi de finances pour 2020, les conjoints d’anciens combattants, principalement les veuves, ayant atteint l’âge de 74 ans, pourront bénéficier de la demi-part fiscale dès lors que leur conjoint avait bénéficié de la retraite du combattant. Vous vous rappelez que lorsque cette avancée notable a été votée, la commission des finances ayant repris un amendement du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, votre serviteur s’est retrouvé le seul à voter contre : je suis allé mourir seul devant tout le monde, sabre au clair, et j’ai dû m’en expliquer. Il fallait que je sois logique avec ce que j’avais toujours défendu devant cette commission : j’estimais que si nous disposions d’une somme de 30 millions, il fallait avant tout nous en servir pour augmenter la retraite du combattant. Chaque année, je repoussais un amendement du groupe Les Républicains qui proposait systématiquement de le faire en prenant sur les crédits de la jeunesse. Si la commission des finances nous avait dit qu’elle disposait de 30 millions supplémentaires, nous aurions pu multiplier par deux cette augmentation.

Sur le plan budgétaire, je souhaite revenir sur cinq mesures fortes.

Premièrement, l’article 54 du projet de loi de finances pour 2021 prévoit l’extension du nombre de conjoints survivants de grands invalides de guerre pouvant bénéficier d’une majoration de pension de réversion. Ainsi, une veuve de grand invalide de guerre pourra bénéficier d’un supplément de pension militaire d’invalidité (PMI) si son conjoint décédé avait bénéficié d’une PMI de 6 000 points, contre 10 000 points auparavant. Cela représente près de 5 300 euros de plus pour 200 bénéficiaires, pour un coût de 1 million d’euros environ.

Deuxièmement, au titre de son action sociale, l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre est doté de 25 millions, malgré la diminution du nombre de ressortissants. Le soutien aux publics en situation de fragilité reste une mission prioritaire de l’ONACVG. De plus, le fonds de solidarité destiné aux enfants de harkis, dont le périmètre a été élargi, s’élève à 7 millions.

Troisième mesure d’importance, le projet de loi de finances donne à l’ONACVG les moyens de fonctionnement nécessaires dans le cadre de son nouveau contrat d’objectifs et de moyens pour cinq ans – l’équivalent d’une LPM ! –, salué par tous les anciens combattants. Ce contrat se traduit par la remise à niveau de la subvention pour charges de service public, à hauteur de 56 millions.

Quatrième mesure : les crédits destinés à la politique de mémoire passent de 11 à 18 millions, pour retrouver leur niveau de l’année précédente – puisque nous avions pioché dans la trésorerie de l’ONACVG l’année dernière.

La cinquième et dernière mesure sur laquelle je souhaite insister concerne les actions envers la jeunesse : les crédits qui lui sont consacrés augmentent de 15 %. Ce budget permettra de convoquer les jeunes qui doivent effectuer leur journée de défense et de citoyenneté cette année, mais aussi ceux qui n’ont pu y participer en 2020 du fait de la crise sanitaire. Enfin, le nombre de jeunes accueillis au sein du service militaire volontaire augmentera : ils seront 1 200, au lieu de 1 000 – 50 % d’entre eux s’engagent dans l’armée ou trouvent un emploi à la sortie, ce qui est un bon résultat.

Je voudrais consacrer les quelques minutes qui me restent à la partie thématique de mon avis. Vous savez que, depuis le début de cette législature, je m’intéresse à « l’armée noire » et à ce que nous devons aux tirailleurs sénégalais, malgaches et annamites. J’ai fait la liste de toutes les actions que nous menons pour entretenir leur mémoire, par exemple en prenant soin de leurs nécropoles. Le Président de la République a lui-même appelé les maires à donner à leurs rues et places des noms de glorieux tirailleurs sénégalais, réunis dans un livret.

J’ai consacré plusieurs pages de mon rapport au massacre de Thiaroye, dont j’ai appris la connaissance un jour où j’évoquais le Tata sénégalais de Chasselay. Cette nécropole abrite des tirailleurs qui ont été massacrés par des nazis, parce qu’ils étaient noirs. L’association Vigil Tricolore était venue à moi pour me dire que c’était très bien de parler de cet événement, mais que des Français avaient commis des actes équivalents au cours de la Seconde Guerre mondiale. J’ai travaillé pendant deux ans sur le massacre de Thiaroye, qui a eu lieu dans la périphérie de Dakar, le 1er décembre 1944. J’ai invité cette association à nous présenter ses doléances, car c’est un symbole fort au Sénégal et dans l’ensemble de la bande sahélo-saharienne, mais j’ai aussi invité les historiens Pascale Blanchard, Martin Mourre et Armelle Mabon. L’important, pour moi, était que tous ceux qui travaillent sur cette question puissent exprimer leurs doléances.

Je rappelle que le président Hollande, en 2012 et 2014, s’est rendu sur place, a inauguré le cimetière et remis les archives disponibles : la France reconnaissait ainsi ce qui s’était passé à Thiaroye. L’ensemble des revendications sont réunies dans mon rapport, que je vous invite à lire. À titre personnel, j’estime que la demande de sépultures est légitime, mais nous ne pouvons pas y répondre, car nous respectons la souveraineté de la République du Sénégal. Quant à la question de la réparation individuelle ou collective, je pense que nous pourrions en débattre prochainement.

Mme la présidente Françoise Dumas. Je vous remercie pour la passion et le sérieux que vous mettez dans vos investigations, Monsieur le rapporteur.

M. André Chassaigne. Je ne suis pas là pour distribuer les bons et les mauvais points, mais j’ai eu d’excellentes remontées, de la part des associations d’anciens combattants, sur le travail réalisé par notre rapporteur : l’énergie qu’il déploie à les réunir et à les écouter est exemplaire, et même exceptionnelle.

Je veux insister sur la nécessité qu’il y a à réunir la commission tripartite pour adopter un mode de calcul du point de pension militaire d’invalidité. Cette décision a été prise par Mme Geneviève Darrieusecq lorsqu’elle était secrétaire d’État, en 2018 ; il est incroyable que cette commission n’ait toujours pas été réunie. Cela crée une forme de frustration parmi les associations d’anciens combattants. C’est la seule observation que je voulais faire, et je suppose que cela figure dans le rapport.

Mme Patricia Mirallès. Hier, M. Jean-Pierre Pakula, le président de l’Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX), insistait, à propos du lien entre jeunesse, armée, et nation, sur le rôle de sensibilisation que nous pourrions avoir dans les collèges ou les lycées.

J’aimerais évoquer l’association De la Pierre à l’Olivier, créée en mémoire du maréchal des logis Pierre-Olivier Lumineau, décédé en Afghanistan le 14 juillet 2012, par sa maman. Avec d’autres familles endeuillées, elle se bat pour que son enfant ne meure pas une seconde fois. Il faut soutenir ces familles qui, souvent, se sentent seules. Nous devons les inviter systématiquement à s’exprimer dans nos circonscriptions, pour continuer à faire vivre les enfants qu’elles ont perdus.

M. Jean Lassalle. J’ai eu les mêmes retours que le président Chassaigne sur votre travail, Monsieur le rapporteur. J’anime depuis deux ans un groupe dans lequel j’échange avec des retraités : ils m’ont fait savoir qu’ils étaient très sensibles à l’augmentation de la pension pour les veuves de grands invalides de guerre et à la disposition relative à la demi-part fiscale. Ils souhaiteraient davantage, mais ils saluent d’ores et déjà ces avancées.

Mme Sereine Mauborgne. Monsieur le rapporteur, je veux à mon tour saluer la qualité de votre rapport. Dans ce travail mémoriel, il appartient à chacun de nous de faire la promotion des programmes existants : je pense par exemple au plan en faveur des harkis de deuxième et troisième générations. Avec Mme la présidente Françoise Dumas et Mme Patricia Mirallès, nous avons travaillé sur l’arc méditerranéen : promouvoir de belles réalisations, c’est une façon d’inciter les nouvelles générations à agir, afin que les crédits consacrés à ce plan soient effectivement consommés.

Même si l’enjeu mémoriel peut parfois paraître assez peu sexy, il est essentiel. Le patriotisme et les questions mémorielles ne doivent être le monopole d’aucun parti, et surtout pas de l’extrême droite. Notre combat de tous les jours, c’est de rappeler combien l’État s’engage sur cette question mémorielle. On pourrait croire que ce sont les villes qui financent les travaux dans les musées, mais c’est bel et bien l’État qui, à Fréjus, s’est engagé au côté du Musée des troupes de marine : pour la mémoire, pour le patriotisme et pour que l’on n’oublie pas ce qu’ont fait les troupes de marine depuis quatre cents ans. Il ne faut pas laisser les sujets mémoriels se faire récupérer par l’extrême droite. Nous pouvons être fiers du travail que vous avez fait, Monsieur le rapporteur, et de l’action du Gouvernement.

M. Jean-Charles Larsonneur. Merci, monsieur le rapporteur, d’avoir insisté sur les crédits destinés à la jeunesse. C’est essentiel, tant la question de la mémoire est liée à celle de la transmission aux nouvelles générations.

Nombre de cérémonies et de commémorations ont été perturbées du fait de la pandémie. Or il me semble que la Direction des patrimoines, de la mémoire et des archives (DPMA) a fait un travail remarquable : pouvez-vous nous en dire davantage sur la manière dont les commémorations doivent s’adapter à la période très particulière que nous vivons ?

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Monsieur Lassalle, je suis un marin, puisque j’ai eu la chance de grandir au pied de la base 126, très chère à Jean-Jacques Ferrara, mais j’ai le sentiment que ma mission est aussi d’être un berger : je vous invite donc à lire, dans le numéro du printemps 2020 de la revue Politique internationale, l’entretien de M. Marc-Antoine Pérouse de Montclos, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), avec l’imam Mahmoud Dicko dont vous parliez tout à l’heure. Ce texte est extrêmement instructif : il nous rappelle combien, sur les questions mémorielles, il importe d’éviter les amalgames et les maladresses.

Monsieur le président Chassaigne, nous avons effectivement organisé de nombreuses réunions avec les associations d’anciens combattants, car mon souhait est d’entendre tout le monde. Je remercie Mme la présidente Françoise Dumas d’avoir bien voulu organiser une table ronde, plutôt que des auditions individuelles, même si tout le monde n’a pas pu y participer : c’était la meilleure façon de procéder, compte tenu de la situation sanitaire.

La convention tripartite devait se réunir cette année mais elle a subi, elle aussi, le contrecoup de la crise sanitaire. Nous avons répondu à toutes les demandes formulées par les grandes associations réunies au sein du G12 et nous voulions terminer par cette convention tripartite, qui va réviser le niveau du point PMI, dont tout le reste découle. Elle doit aussi permettre d’aborder les dernières questions que nos glorieux aînés, ou leurs représentants, souhaitent encore poser. Il faut que nous ayons répondu à toutes ces questions à la fin de notre mandat.

Madame Mirallès, vous avez évoqué l’association De la Pierre à l’Olivier. Mme Pascale Lumineau, qui l’a fondée, avait demandé à être auditionnée, par l’intermédiaire de l’ANOPEX. Je suis allé la voir à Montpellier, où vous m’avez accueilli : elle a perdu un fils au combat et j’estimais que la moindre des choses était d’aller vers elle, pour ne pas l’obliger à se déplacer.

Elle lutte contre l’oubli. Nous avons déjà évoqué, l’année dernière, les vides qui existent dans notre protocole, notamment vis-à-vis des parents qui perdent un enfant au combat : on n’a pas de mot pour le dire. Lorsqu’un enfant perd l’un de ses parents, il devient un pupille de la nation : c’est ce qui vient encore d’arriver la semaine dernière, avec le drame qui nous a tous bouleversés. Lorsqu’une épouse perd son mari, elle est une veuve ; mais lorsque des parents perdent un enfant au combat, il n’y a pas de mot pour décrire leur situation. Mme Pascale Lumineau nous a suggéré une idée qui est en train de faire son chemin : au sein de l’état-major, on est en train d’imaginer un protocole pour témoigner notre compassion pour ceux qui sont tombés en OPEX. Cela rejoint les mots de Georges Clemenceau que j’ai cités au début de mon intervention. Ce sera une belle avancée.

Madame Mauborgne, je connais votre attachement au plan en faveur des harkis. Vous étiez présente la semaine dernière, avec la secrétaire d’État, à l’inauguration d’une boulangerie dans le Var, qui a vu le jour grâce à ce mécanisme. Cette année, ce plan bénéficie de 7 millions de crédits et il a vocation à perdurer.

Les musées sont effectivement essentiels : il y a deux ans, je m’étais particulièrement penché sur la question de la muséologie. Le ministère est très engagé au côté des musées des armées et des musées d’armes, comme celui des troupes de marine, que vous avez évoqué. Le ministère s’engagera également auprès du Musée de l’infanterie qui doit voir le jour à Draguignan : depuis le transfert de l’école d’infanterie de Montpellier à Draguignan, ses collections extraordinaires dorment dans des cartons. Mme Geneviève Darrieusecq s’y est engagée, car les aspects muséologiques sont essentiels et attractifs, notamment auprès de la jeunesse.

Cela me permet de répondre à M. Larsonneur. Nous avons des musées très attractifs qui permettent à la jeunesse d’avoir un premier contact avec la Défense. Cette année, le programme des commémorations a été extrêmement perturbé, mais la DPMA a très bien réagi : elle est par exemple parvenue à imaginer, en moins de quinze jours, une cérémonie du 14 juillet totalement nouvelle dans son format, qui a été regardée dans le monde entier. Elle a su aussi développer une offre culturelle et audiovisuelle sur internet, qui a fait un vrai carton. Il faut saluer la DPMA pour son action : elle a joué un rôle éducatif essentiel en s’invitant chez les gens en cette période de crise sanitaire. Elle a notamment créé une websérie intitulée « Comme en 40 ! », qui décrit la deuxième guerre mondiale.

Cette année, c’était l’année De Gaulle, l’anniversaire de la bataille de mai-juin 1940, mais aussi le soixante-quinzième anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale et de la libération des camps. C’était aussi le cent cinquantième anniversaire de la guerre de 1870, qui devait être célébrée sous l’angle de la réconciliation franco-allemande. Et puis, ce sera l’entrée de Maurice Genevoix au Panthéon, en novembre. Toutes ces manifestations ont pu avoir lieu, dans un format dégradé, mais adapté aux circonstances. Nos services ont fait un travail remarquable pour y parvenir, notamment en développant l’interactivité sur les réseaux sociaux.

Pour finir, je voudrais dire un mot de l’environnement, en rappelant que pour l’entretien de nos nécropoles, de nos sépultures et de nos tombes, pour l’entretien des carrés militaires, des pelouses et des espaces verts gérés par ce ministère, depuis des années, on n’utilise aucun insecticide, ni aucun pesticide. Le ministère traite d’une façon absolument écologique tous les espaces qu’il entretient. Cela méritait d’être souligné.

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Mme la présidente Françoise Dumas. Mes chers collègues, après avoir examiné ce matin les huit avis budgétaires, nous en venons cet après-midi aux orateurs de groupe, puis à l’examen des amendements et aux votes sur les missions « Défense » et « Anciens combattants ».

M. Jean-Michel Jacques. Rien n’a fondamentalement changé depuis la revue stratégique faite en amont de la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025, mais la crise sanitaire a agi comme un accélérateur et un révélateur de tensions géopolitiques préexistantes.

Depuis plusieurs années, le contexte géostratégique s’est dégradé et il est hélas amené à se durcir encore.

Pour assurer sa mission essentielle, c’est-à-dire protéger les Français, notre pays doit être en capacité de projeter sous très faible préavis des forces dûment entraînées et équipées sur tous les champs de conflictualité, au plus loin comme au plus près.

Au plus près aussi car, depuis plusieurs années et pour des raisons différentes, nos forces armées ont été mobilisées sur le territoire national. À ce titre, notre armée a prouvé à différentes reprises qu’elle demeure un acteur essentiel de la résilience de notre pays.

Cependant, tous ces enjeux sécuritaires ne sont pas nouveaux, puisqu’en adoptant la LPM, nous nous sommes dotés des moyens nécessaires pour y faire face. Pour cela, nous avons collectivement reconnu qu’il était indispensable de remédier à un certain nombre de fragilités auxquelles était soumis notre modèle d’armée depuis des années et d’assurer sa remontée en puissance afin qu’il soit le plus complet et le plus équilibré possible.

Nous le savons tous, une LPM, aussi ambitieuse soit-elle, ne pourrait remplir pleinement sa mission si elle ne se traduisait pas en bonne et due forme en loi de finances. Aussi pouvons-nous nous réjouir, pour la troisième année consécutive, que le projet de budget pour 2021 poursuive les objectifs ambitieux que nous avons adoptés dans le cadre de la LPM.

Conformément à nos engagements, le projet de budget dédié à nos armées pour 2021 est un budget ambitieux, puisqu’il consacre 39,2 milliards d’euros à la mission « Défense », soit une augmentation de 1,7 milliard.

En plus d’être d’un budget ambitieux, c’est un budget sincère puisque, contrairement à ce qui était devenu une coutume jusqu’en 2017, il prévoit de nouveau d’augmenter l’enveloppe de la provision servant à financer les missions intérieures et les opérations extérieures (OPEX), portées respectivement à 100 millions et 1,1 milliard.

Non content d’être ambitieux et sincère, ce budget demeure plus que jamais à hauteur d’homme, puisqu’il veille à améliorer le quotidien du soldat et de sa famille. En 2021, des efforts seront notamment consentis en matière non seulement d’habillement et d’équipement, d’hébergement en enceinte militaire, mais également de rémunération, puisque 2021 sera l’année du premier bloc de la nouvelle politique de rémunération des militaires centrée sur l’harmonisation de la mobilité géographique.

Enfin, pour réussir leurs missions, les forces armées doivent être équipées. À ce titre, la troisième année de l’exécution de la loi de programmation militaire sera une année de concrétisation, marquée par la fourniture de nombreux équipements : 157 Griffon, 1 000 véhicules tactiques polyvalents, six hélicoptères Caïman, une frégate multimissions et bien d’autres équipements.

L’ambition de doter nos armées des meilleurs équipements, couplée à la volonté du ministère de soutenir et de préserver les entreprises de notre base industrielle et technologique de défense, se poursuivra en 2021 par différentes prises de commandes pour un montant total de près de 44,7 milliards d’euros d’engagements, auxquels il faut ajouter les commandes anticipées annoncées dans le cadre du plan de soutien au secteur aéronautique.

Ambitieux, sincère, à hauteur d’homme, assurant la souveraineté de notre pays et la pérennité de notre tissu économique, le projet de budget pour 2021 est également tourné vers les anciens combattants et à même de financer des politiques en faveur de la mémoire et du renforcement du lien armée-nation.

Comme l’an passé, il convient de rappeler, d’une part, que la légère baisse structurelle est essentiellement liée à la diminution du nombre de bénéficiaires ayants droit, d’autre part, que l’ensemble des dispositifs de reconnaissance et de réparation sont maintenus, voire améliorés, comme en atteste la reconnaissance des conjoints survivants des grands invalides de guerre prévue dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021.

En conclusion, avec grande satisfaction, nous pouvons dire que, pour la troisième année consécutive, le budget dédié à la défense est au rendez-vous des engagements de la loi de programmation militaire. Ensemble, mes chers collègues, nous continuerons à être exigeants dans son suivi et sa bonne exécution. C’est donc en confiance que le groupe La République en Marche émettra un avis favorable à l’adoption des crédits de ces missions.

Mme Marianne Dubois. Plusieurs sujets préoccupent les députés du groupe Les Républicains, auxquelles ils ne trouvent pas de réponse claire dans la présentation budgétaire pour 2021.

L’hypothèse de la survenue à plus ou moins court terme d’un conflit de haute intensité est largement évoquée. Lors de sa prise de fonctions en juillet 2019, le général Thierry Burkhard indiquait : « Le rapport de force redevient le mode de règlement des différends entre nationaux. Nous devons résolument nous y préparer en gardant à l’esprit que le combat de haute intensité devient une option très probable. La situation en Méditerranée occidentale paraît, à ce stade, la plus préoccupante. La concentration dans une zone réduite de nombreuses nations ou intérêts divergents présente un risque majeur ».

Le respect de la trajectoire budgétaire dont nous prenons acte avec satisfaction n’est pas une fin en soi, d’autant que 2021 doit être l’année de la clause de revoyure de la LPM. « Les hausses de crédit prévues par la loi de programmation militaire 2019-2025 sont nécessaires mais encore insuffisantes, car elles n’autorisent pas la montée en puissance qui nous permettrait de faire face à un conflit classique de grande intensité ni même à certaines situations dégradées », a estimé le général Lecointre. Aussi l’effort devra être poursuivi après 2025, a-t-il prévenu. Même avec la LPM 2019-2025, l’armée française demeurera en volume une armée de gestion de crise, pas une armée de temps de guerre, non plus sans doute une armée capable de faire face aux crises complexes, simultanées, de types différents qui se multiplient.

La question du format opérationnel face aux nouvelles menaces et des moyens nécessaires pour y répondre se pose donc de manière prégnante et ne doit pas être mise sous le tapis.

Nous estimons que le rendez-vous avec le plan de relance est manqué. Le rapport Thiériot et Griveaux a fait plusieurs propositions afin de permettre au secteur de participer au plan : aucune n’a été retenue.

Les députés du groupe Les Républicains se félicitent de l’effort de sincérisation du financement des OPEX. Ils rappellent que le financement de leur surcoût a été un véritable serpent de mer pendant des années au sein du budget de la défense. Si la provision pour 2021 doit permettre de couvrir une grande partie du financement des OPEX à venir, la situation du budget 2020, toujours en cours, qui avait prévu un financement de 1,1 milliard d’euros, doit d’ores et déjà nous interroger. Au 15 octobre, le chef d’état-major des armées, le général Lecointre, a indiqué que, pour la seule opération Barkhane, les surcoûts sont de 911 millions d’euros – en raison d’une augmentation de 600 hommes liée à la montée en puissance de la task force Takuba –, soit une hausse de 10 %, dont plus de 30 millions consacrés, entre autres, à l’entretien des matériels. Il ne reste donc que 289 millions pour financer les autres OPEX et opérations intérieures (OPINT) ainsi que les deux derniers mois de Barkhane. Étant donné le niveau d’engagement des forces françaises, on peut sérieusement douter que la provision pour 2020 suffise.

Le principe de solidarité interministérielle ayant été battu en brèche, fin 2018, une inquiétude forte demeure. Nous demandons le respect de ce principe et réitérons la demande que le ministère de la défense ne participe pas à cette réserve de précaution en vue de financer le surcoût des OPEX : il ne doit pas payer deux fois.

Par ailleurs, lors de son audition, la ministre des armées a indiqué qu’1 milliard de crédits était encore gelé au titre de la réserve de précaution. En 2019, 3,9 milliards de report de charges ont été constatés. La ministre ne dispose pas encore de chiffres pour 2020, sachant que la direction générale de l’armement (DGA) a indiqué, lors de son audition le 15 octobre, que le report de charges pour le programme 146 s’élevait à 2,4 milliards.

Considérer que la LPM votée en 2018, soit deux ans avant la crise sanitaire majeure que nous connaissons, est la contribution déterminante du ministère des armées à la relance n’est pas à la hauteur des enjeux pour un secteur qui compte 4 000 entreprises et plus de 200 000 emplois non délocalisables et qui contribue chaque année de manière positive à notre balance commerciale.

Concernant le budget alloué aux anciens combattants, le groupe Les Républicains dénonce, une fois de plus, le discours de la ministre qui consiste, année après année, à se réjouir du maintien des droits existants. À la fin du quinquennat de 2022, le budget consacré aux anciens combattants passera sous la barre symbolique des 2 milliards.

Le groupe Les Républicains poursuivra dans sa logique et demandera la reprise de l’augmentation de la retraite du combattant. Un amendement tendant à une majoration de deux points d’indice au 1er juillet 2021 sera proposé.

L’annonce de la création d’une mission État-Parlement-associations sur l’évolution du point d’indice de la pension militaire d’invalidité (PMI) suscite des interrogations. Une réflexion est en effet nécessaire et le groupe LR souhaite y être associé.

Les députés du groupe Les Républicains continueront à soutenir sans faille le monde combattant et ses justes revendications tout en regrettant la vision purement comptable de l’actuelle majorité. Nous rappelons que le budget est en constante baisse depuis 2017. Nous supposons que la retraite du combattant sera revalorisée de quatre points en 2021, comme cela avait été fait en 2017, année électorale.

Dans ce contexte, les trajectoires budgétaires, certes conformes à la LPM, nous paraissent insuffisantes. En attendant les réponses de Mme la ministre dans l’hémicycle, nous nous abstiendrons.

M. Jean-Pierre Cubertafon. Le groupe MODEM et démocrates apparentés soutient un budget cette année encore conforme à la programmation budgétaire. Le cap tracé par le Gouvernement, que nous avons collectivement amendé et validé à la majorité pendant l’examen de la LPM, est clair et survit à la conjoncture.

Le projet de budget pour 2021 conforte l’ambition de régénération de nos forces après des années de coupes. Cette stratégie budgétaire reste la même et nous pouvons nous féliciter que sa consécration ne varie pas en fonction de l’actualité, alors que nous savons toutes les pressions qui peuvent être exercées sur le budget des armées et des anciens combattants. Rappelons toutefois que chaque euro investi, des investissements à effet majeur aux petits équipements en passant par l’amélioration des conditions de vie et d’hébergement, a une incidence dans nos territoires.

Cela a déjà été rappelé, mais réjouissons-nous encore, mes chers collègues, d’une croissance supplémentaire du budget de la défense de 1,7 milliard d’euros. Nous pouvons évidemment nous attarder sur tel ou tel point des arbitrages entre programmes, mais restons conscients des équilibres négociés et des efforts consentis depuis le début du quinquennat, c’est-à-dire un renfort de 6,8 milliards.

Quant aux Anciens combattants, notre collègue Michel-Kleisbauer l’a rappelé, la réduction structurelle ne s’oppose pas à des réponses à des demandes récurrentes d’associations d’anciens combattants et à la transmission de la mémoire vivante aux jeunes générations.

Nous serons particulièrement attentifs à la seconde phase du projet budgétaire de la LPM qui devrait s’ouvrir sur la revoyure en 2021. Dans l’exécution du budget et la préparation de la revoyure, je rappellerai combien nous sommes attachés au respect du rôle du Parlement, en particulier pour la veille et la prospective. Il en est ainsi des sujets que nous défendons depuis la LPM et qui trouvent leur application croissante dans le budget à venir. Citons le budget de 624 millions pour l’espace, en cohérence avec nos amendements au rapport annexé sur l’arsenalisation et la densité spatiale ou, plus récemment, l’achat de nouveaux hélicoptères Caracal, en cohérence avec notre mission flash sur le parc d’hélicoptères, ou encore, les 237 millions investis dans le logement à l’issue du rapport d’évaluation de Fabien Lainé et Laurent Furst, qui ont tous deux quitté la commission et que je salue.

Le groupe MODEM et démocrates apparentés sera particulièrement vigilant à l’articulation entre nos travaux passés et leur concrétisation budgétaire.

En évoquant la prospective, au-delà du budget qui lui est alloué cette année au sein de nos administrations, je sais que notre commission prendra toute sa place dans l’accompagnement et le contrôle de l’action du Gouvernement. Je souhaitais notamment mettre en valeur le travail de nos collègues sur la seconde partie du rapport. Comment ne pas penser que les travaux sur le porte-avions de nouvelle génération ne participeront pas au débat public ? Comment ne pas penser que les travaux sur nos combattants issus des colonies ne pourront pas contribuer à des actions mémorielles à engager demain ?

De même, les travaux toujours plus conjoints entre notre commission et celle des affaires européennes sont des vecteurs forts de notre participation à la construction d’une Europe de la défense qui passe également par notre participation budgétaire.

Enfin, l’accroissement des budgets dans certains domaines comme le renseignement ne peut qu’inciter au renforcement de la fonction de contrôle du Parlement. Notre groupe prendra toute sa part dans la préparation de demain, en particulier dans le cadre croissant des énergies, des réserves et de la synergie interministérielle.

Pour toutes ces raisons, qui conduisent le Parlement à s’intéresser de près à la conduite de la politique de la défense nationale et à celle de la reconnaissance due aux anciens combattants, notre groupe donnera un avis favorable au projet de budget et s’associera à vous, mes chers collègues, pour le faire vivre dans le dialogue et le respect du débat parlementaire au service des armées de la France.

Mme Isabelle Santiago. La discussion budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2021 s’inscrit dans un contexte marqué par le covid-19 et par l’accroissement des menaces et des tensions au niveau international. Face à la montée de conflits au voisinage de l’Union européenne et à l’affirmation d’acteurs étatiques révisionnistes de plus en plus enclins à remettre en cause le statut hérité de l’ordre international libéral d’après 1945, les dépenses en matière de défense n’ont peut-être jamais autant trouvé leur importance pour assurer la sécurité des Français.

L’année 2021 est également importante et significative pour le budget de défense, car c’est celle de l’actualisation à mi-parcours de la loi de programmation militaire 2019-2025. Comme le souligne à juste titre le chef d’état-major des armées, le général Lecointre, jusqu’en 2021, la LPM permettait de réparer les armées après des années de sous-dotation. Après 2021, s’ouvrira le temps du renouvellement et de l’augmentation.

C’est donc une année charnière aux nombreux enjeux pour la conception et l’élaboration de nouveaux programmes d’armement, dont beaucoup sont conçus en coopération avec d’autres États européens. Il s’agit notamment du système de combat aérien du futur (SCAF), du système de patrouille maritime futur, du système de lutte antimines du futur. Cependant, hormis le programme SCAF, ces programmes sont financièrement sous-dotés.

On peut légitimement s’interroger sur la dynamique d’avancement différenciée de ces programmes d’armement et l’efficacité de l’actualisation de la loi de programmation militaire en vue des trois prochaines années. Certes, le rythme d’augmentation des crédits de la mission « Défense » par rapport aux objectifs de la loi est tenu ou presque. Au lieu du 1,7 milliard d’euros annoncé, le document budgétaire ne retrace que 1,61 milliard, soit une différence significative de 100 millions. Mais l’augmentation des crédits ne doit pas seulement être la seule boussole à laquelle évaluer la pertinence de ce projet de budget et ses conséquences pour les armées, elle doit également permettre de relever des défis plus structurels et récurrents auxquels font face les armées.

De ce point de vue, il convient de souligner que les armées restent soumises à de fortes tensions et fonctionnent parfois à la limite de leur capacité. Ainsi le renouvellement et l’amélioration de la préparation opérationnelle restent de forts enjeux.

Face aux engagements toujours plus intenses en opérations extérieures, au retard de certains programmes d’armement ou à la difficulté de fidéliser les personnels, les armées ne sont plus en mesure d’assurer l’entraînement et la préparation opérationnelle indispensables au maintien des compétences. La crise du covid n’a guère contribué au maintien d’un rythme de recrutement soutenu en 2020.

Je terminerai par le soin que l’on doit accorder aux personnels des armées, la fidélisation des personnels et l’amélioration de la condition des militaires, notamment par le plan « famille ». Il n’est pas encore pleinement satisfaisant. Le nombre des attributions et des dénonciations de contrats, tant par les officiers que par les sous-officiers, reste élevé.

En conclusion, même si, budgétairement, les engagements sont tenus, le budget « Défense » du PLF 2021 comporte encore un grand nombre d’hypothèques qui rendent l’actualisation de la loi de programmation militaire, le renouvellement et l’augmentation des armées encore incertains. C’est la raison pour laquelle le groupe Socialistes et apparentés s’abstiendra.

M. Thomas Gassilloud. Nous sommes réunis pour examiner notre quatrième budget de ce mandat et le troisième dans le cadre de la LPM 2019-2025. Après avoir entendu les exposés complets de nos collègues rapporteurs, que je félicite de nouveau pour leur travail, j’ai été chargé de vous faire part de l’avis du groupe Agir ensemble.

Ce projet de budget représente une performance, puisqu’il a résisté à l’habituelle remise en question, toujours à la baisse, des LPM en cours de mandat, performance d’autant plus notable au regard de la conjoncture : crises des gilets jaunes, des retraites puis sanitaire.

Ce projet de budget respecte les engagements fixés dans la LPM. Il augmente de 1,7 milliard d’euros, soit 4,5 %. Il évite le piège de la marche en termes de pourcentage du PIB pour rester dans la trajectoire financière prévue par l’Ambition 2030 et permettra à nos armées de disposer d’un budget annuel d’environ 50 milliards. Les domaines critiques de l’espace, de la cyberdéfense et de la dissuasion sont bien pris en compte pour garantie notre autonomie stratégique nationale. Les capacités conventionnelles verront les livraisons d’une frégate multi-missions (FREMM), de trois MRTT Phénix, de 157 blindés Griffon et de nombreux autres équipements. Le quotidien du soldat, trop longtemps sacrifié au profit des grands programmes d’armement, est amplement valorisé grâce à 237 millions d’investissement dans les programmes d’hébergement, la poursuite du plan « famille » ou la livraison de petits équipements. Ce budget soutient l’activité industrielle de nos PME, TPE et start-up sur le territoire national et contribue activement à la relance économique.

Au-delà du prisme budgétaire, ce projet de budget est l’occasion d’une réflexion sur notre vision stratégique pour les années qui viennent. Les évolutions prévues par la revue stratégique se sont accélérées : risque terroriste, affrontement sino-américain, revanche des empires russe et ottoman. Une rupture stratégique s’est même opérée avec la crise covid dont les répercussions sur le long terme sont encore inconnues.

De nombreuses questions se posent. Dans ce monde instable, j’évoquerai la conciliation du dilemme entre masse et haute technologie, en gardant le modèle d’armée complet pour éviter toute impasse et des capacités prépositionnées ou déployées en OPEX. Malgré une LPM très ambitieuse, le sujet de la masse reste malheureusement d’actualité puisque, depuis la fin de la guerre froide, les armées ont souvent été dimensionnées, voire organisées, pour faire face à une moyenne d’engagement et non à des pics. Compte tenu du risque d’engagement majeur, il nous faut désormais mieux travailler notre capacité à faire face à des pics d’engagement, en termes matériels ou humains, c’est-à-dire, maintenir une logique de flux tout en prévoyant une logique de stock.

Les travaux préparatoires de la revoyure de la revue stratégique sont en cours du côté du ministère. L’enjeu des prochains mois me semble être désormais, individuellement et collectivement, au Parlement, de préparer ces travaux de revoyure qui interviendront au printemps prochain et auxquels notre groupe souhaite être associé. Là encore, nous rappelons notre attachement à ce que le Parlement soit associé à ces travaux.

Dans cette attente, le groupe Agir ensemble approuve sans réserve et avec conviction les crédits des missions « Défense » et « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

M. Grégory Labille. C’est pour moi un moment particulier et important puisque, député nouvellement arrivé sur les bancs de cette commission, c’est la première fois que je suis amené à émettre un avis et à voter les crédits des missions budgétaires. Enseignant de profession, avant d’intégrer la commission de la défense et de participer à la séance de ce matin, j’étais plutôt sensible aux sujets touchant l’éducation. Je remercie Mme la présidente pour la qualité de l’animation de la commission, les nombreux rapporteurs pour la qualité de leur travail et celles et ceux qui, ce matin, ont questionné les rapporteurs. Vous avez tous fait preuve de pédagogie et les sujets abordés ont aiguisé ma curiosité de jeune élu.

Avant de vous indiquer la position du groupe UDI et indépendants, je me dois de vous exposer nos remarques, nos constats, nos interrogations et nos points de vigilance.

Force est de constater que pour la mission « Défense », dotée d’un budget de 39,2 milliards d’euros, en hausse de 4,5 % par rapport à 2020, la tâche aurait pu être beaucoup plus difficile. Alors que notre pays connaît une violente crise sanitaire et économique, une réflexion court-termiste aurait pu conduire le Gouvernement, comme d’autres l’ont fait si souvent par le passé, à tailler dans le budget des armées. Cela n’a pas été le cas, et nous nous en réjouissons. À l’inverse, le choix a été fait de respecter la LPM votée en 2018 en augmentant le budget de la mission de 1,7 milliard.

Nous regrettons toutefois que la défense soit la grande oubliée du plan de relance, car l’industrie de défense constitue un des investissements les plus performants en matière d’emploi et de retour budgétaire pour l’État.

Face à un monde chaque jour plus instable et dangereux, où les conflits gagnent en complexité et où les crises se multiplient, face au retour du fait guerrier et à la politique du fait accompli, face à l’apparition de nouveaux champs de conflictualité, il est urgent de reconstruire une armée de guerre capable de répondre à l’ensemble des menaces.

S’il est indispensable d’intensifier les efforts, il faut néanmoins se rappeler l’état dans lequel se trouvaient nos armées il y a quelques années et le chemin parcouru.

Il s’agit d’un projet sérieux et satisfaisant dont notre groupe souhaite souligner quelques aspects.

Nous nous réjouissons que les armées deviennent le premier recruteur public de France par l’embauche de près de 27 000 personnes. Des domaines aussi essentiels que le renseignement, la cyberdéfense, la protection des emprises militaires et le soutien aux exportations doivent être renforcés. La création de 300 postes y contribuera.

De surcroît, ce budget concourra à l’amélioration des conditions de travail, de vie et d’équipement de nos soldats. Nous savons tous ici combien ces améliorations sont attendues.

Sur le plan capacitaire, la livraison de nombreux équipements, tels qu’une frégate multi-missions (FREMM) de défense aérienne, trois avions ravitailleurs MRTT Phénix, 157 blindés Griffon, 20 blindés Jaguar ou 6 hélicoptères NH90 Caïman, ainsi que les différentes commandes prévues en 2021, sont des signes visibles et concrets de cette remontée en puissance.

Alors que nos armées se doivent de garder un coup d’avance pour faire la différence sur les théâtres d’opération, le Gouvernement, en consacrant 901 millions pour soutenir l’innovation et concevoir les technologies de demain, prouve qu’il a conscience qu’innover demeure plus que jamais une question de survie.

Si nous sommes satisfaits du projet de budget pour 2021, notre groupe demeurera vigilant sur quatre points pouvant avoir de sérieuses répercussions : la conséquence de la vente de Rafale à la Grèce, l’incendie du sous-marin nucléaire Perle, les décisions prises quant au futur porte-avions de nouvelle génération et les surcoûts liés aux OPEX et aux missions intérieures (MISSINT).

Même si le budget de la mission « Anciens combattants » est en baisse, notre groupe considère qu’il demeure satisfaisant dans un contexte économique particulièrement difficile et compte tenu de l’éclaircissement malheureux des rangs au sein des combattants.

Les droits en faveur des anciens combattants et de leurs ayants droit sont maintenus et même, dans certains cas, étendus.

Nous nous réjouissons des 17,5 millions supplémentaires destinés à la politique de mémoire et des 2,5 millions consacrés à l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) pour l’entretien courant des lieux de mémoire. Il était important que cette fonction essentielle soit remise à niveau. Il nous paraît maintenant nécessaire de réfléchir à une structuration de la mémoire avec le monde enseignant. C’est l’enseignant d’un territoire durement touché lors des premières guerres mondiales qui le dit.

Pour toutes ces raisons, le groupe UDI et indépendants votera ces missions budgétaires.

M. Bastien Lachaud. La publication de l’annexe budgétaire suscite de nombreuses questions et même un malaise, dans la mesure où de grandes décisions structurantes ont été prises avant ou seront prises après l’adoption de ce projet de budget et auront échappé à la représentation nationale.

Commençons par évoquer le cadre global dans lequel ce budget nous est proposé. Dans le contexte de crise sanitaire et économique engendré par l’épidémie de covid-19, chacun reconnaît que la relance s’impose. Vous revendiquez d’y participer mais en réalité, il n’en est rien. Suivre la trajectoire budgétaire même haussière d’une LPM définie il y a trois ans ne peut être considéré comme de la relance. Les PME de la base industrielle et technologique de défense (BITD), les sous-traitants des grands groupes ont besoin d’une action volontariste qui ne se limite pas à lancer des commandes qui figuraient déjà dans de nombreux plans de charge. J’ai déjà donné ici même l’exemple de Tarbes Industry, dont l’avenir est en jeu. Je renouvelle mon alerte au sujet de ce prestataire de Nexter, mais de nombreux autres sont en danger. Une ligne budgétaire spécifiquement dédiée aurait été souhaitable.

Le contexte militaire en tant que tel est marqué par les prises de position des différents chefs d’état-major en faveur d’une révision de l’état des menaces et des moyens d’y faire face. En 2021, une clause de revoyure de la LPM est prévue. Dans ces conditions, on aurait pu penser que le lancement des grandes commandes s’accompagnerait d’une sorte d’aggiornamento doctrinal, voire y serait subordonné. Cela n’est pas le cas.

Entrons dans le détail des mesures pour lesquelles nous ne possédons guère d’éléments suffisants pour voter.

Concernant les ressources humaines, la nouvelle politique de rémunération des militaires doit être mise en œuvre en 2021, mais nous ne savons que deux choses : elle s’appuiera sur le déploiement de sources soldes et elle commence par la création d’une prime dont le coût est estimé à 38 millions. Elle est pourtant présentée comme une profonde transformation du système. Par conséquent, on est prié de voter la mise en chantier d’une politique fondamentale dont nous ne possédons pas le dernier mot.

Venons-en au porte-avions de nouvelle génération pour lequel 7 millions de crédits de paiement et 330 millions d’autorisations d’engagement doivent être débloqués. Quand les données du problème ont-elles été exposées méthodiquement au public ou même à la représentation nationale ? Quand a-t-on pris le temps de construire ou d’essayer de construire un consensus éclairé à ce propos ? Jamais !

De même, concernant l’avenir de la flotte sous-marine, la décision de réfection du SNA Perle est certes tributaire d’analyses complexes, mais aucune des grandes pistes qui pourraient être suivies n’est mentionnée dans le document budgétaire. On compte deux mentions du SNA seulement et aucune ne précise combien il faudrait provisionner pour sa réfection. Le budget sera-t-il obsolète immédiatement après son adoption ?

La vente de 18 Rafale et le rachat de 12 appareils neufs ne figurent pas non plus dans notre annexe budgétaire. L’échéancier des commandes et livraisons ne présente pas cette opération, quasiment assurée. L’effet sur les capacités de l’armée de l’air demeure incertain et le bilan financier de l’opération tout autant. Il n’est pas certain que les produits de la vente reviennent de Bercy à Brienne. Les appareils d’occasion seraient vendus 400 millions, soit un rabais d’environ 60 %. L’achat de douze autres avions, pour environ 1 milliard, représenterait donc un trou d’environ 600 millions. La dépense n’est pas anticipée.

Venons-en à l’un des chiffres les plus originaux de cette année : 1 milliard en autorisations d’engagement supplémentaires au bénéfice de projets immobiliers du renseignement. On comprend sans peine que les projets des services du renseignement bénéficient d’une certaine discrétion. Nous soutenons également le principe de la hausse de ce budget, mais nous avons tout de même du mal à admettre que des opérations immobilières s’élevant à 1 milliard soient soumises à l’approbation des élus sans que quelques éléments techniques et juridiques soient présentés. Pour donner un ordre de grandeur, ce milliard représente à lui seul le tiers du coût initialement prévu pour Balard. De quoi nous laisser perplexes !

Enfin, parlons de la jeunesse et du service national universel (SNU). Le programme 212 transfère 461 000 euros au programme 163, mais cela ne signifie pas que les armées seront déchargées. La description de la sous-action « commandement et activités centralisées des forces aériennes » précise que son budget comprend la montée en puissance du SNU. Pour quel montant ? On l’ignore. Qu’en est-il des autres armées ? On l’ignore également.

Finissons par les OPEX. La LPM prévoyait une dépense de 1,1 milliard. Le projet est de 820 millions dans cette loi de finances initiale. Les 300 millions devront-ils être rattrapés pour boucler l’exercice ? En tout cas, cette provision contrevient au principe de financement interministériel des OPEX et acte le maintien d’un haut niveau d’engagement pour lequel nous n’avons toujours pas de bilan stratégique. C’est pour le moins ennuyeux.

Pour conclure, je suis tenté de dire que la communication hypnotique sur le thème de la remontée en puissance laisse transparaître, dans ce projet de budget, de nombreux impensés et en suspens de nombreuses questions.

M. André Chassaigne. Je laisserai le soin à Manuéla Kéclard-Mondésir de livrer en séance publique notre analyse sur les différents crédits et de préciser le vote des deux composantes du groupe de la Gauche démocrate et républicaine : les députés communistes et les députés d’outre-mer. Pour ma part, j’évoquerai l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), la dissuasion nucléaire et les ventes d’armes.

Interrogé ce matin sur le coût de notre participation à l’OTAN pour notre budget, le rapporteur a indiqué qu’il me répondrait sur la mise à disposition d’environ 400 personnes et la permanence aérienne assurée par la France au-dessus des pays baltes. Pour ma part, je considère qu’il faut dégager le continent européen de l’OTAN en prônant sa dissolution. Elle pourrait commencer par le retrait de la France de cette alliance dépassée par l’histoire et que le Président de la République a définie comme étant « en état de mort cérébrale ». Chacun sait ce que cela représente pour les intérêts industriels et commerciaux des États-Unis. Nous constatons une forme de schizophrénie. Rappelons l’opération de l’OTAN au large des côtes de la Libye quand la frégate légère furtive française Courbet a été visée par une manœuvre hostile de deux frégates turques lance-missiles protégeant un navire turc pratiquant la contrebande d’armes en direction d’un pays sous embargo de l’ONU. C’est dire à quel point l’OTAN est effectivement en état de mort cérébrale.

Faut-il conserver une dissuasion nucléaire ? La question, aussi importante sur le plan éthique que sur celui de l’efficacité, doit faire l’objet d’un débat public. J’ai signé une proposition de loi visant à organiser un référendum en application de l’article 11 de la Constitution, alinéa 3, sur la participation de la France à l’abolition des armes nucléaires et radioactives, avec la question suivante : « Approuvez-vous que la France participe à l’abolition des armes nucléaires et radioactives et engage avec l’ensemble des États concernés des négociations visant à établir, ratifier et appliquer un traité d’interdiction et d’élimination complète des armes nucléaires et radioactives sous un contrôle mutuel et international strict et efficace ? ».

Sur le plan éthique, nous demandons que le Gouvernement, fort de l’autorité qui est celle de la France dans le monde, prenne l’initiative d’un processus de désarmement nucléaire complet, multilatéral, contrôlé, vérifiable et intégrant de façon contraignante tous les pays à capacité nucléaire. Certes, la lutte pour la paix ne peut se réduire à un simple désarmement unilatéral, ce qui conduirait au même échec que la bulle papale interdisant l’arbalète au Moyen Âge, mais notre budget comporte 4,12 milliards d’investissements, soit 25 milliards sur cinq ans, dont une partie pourrait être réorientée vers d’autres actions, comme je le proposerai par voie d’amendement.

Quant aux ventes d’armes, les entreprises du secteur de la défense n’exercent pas la diligence requise en matière de droits humains définie par les principes directeurs de l’ONU relatifs aux droits humains. Les États, dont la France, ont été incapables d’exercer une diligence raisonnable dans leurs activités internationales, tant pour leurs chaînes d’approvisionnement que pour l’utilisation de leurs produits et services. Pour ne citer que les deux plus importantes, Dassault Aviation et Thales sont des entreprises françaises qui fournissent des équipements et des services militaires à la coalition menée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, parties prenantes au conflit en cours au Yémen. Depuis le 27 mars 2017, une loi impose un devoir de vigilance aux sociétés mères et aux entreprises donneuses d’ordres. Les États, dont la France, on le devoir de jouer un rôle protecteur face à des abus commis par des acteurs non étatiques.

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La commission en vient à l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation ».

Elle examine l’amendement II-DN17 de M. de La Verpillière.

Mme Nathalie Serre. Cet amendement vise à augmenter de deux points l’indice de la retraite du combattant au 1er juillet 2021. Il s’agit de rappeler une nouvelle fois notre attachement au monde combattant et de faire en sorte que cette augmentation soit régulière et ne dépende pas des aléas électoraux.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Si la commission des finances ou le ministère des armées trouvait les fonds nécessaires, je ne m’y opposerais pas. Mais comme vous proposez de puiser dans l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et les actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, je ne peux qu’émettre un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Puis elle examine l’amendement II-DN14 de M. David Habib.

Mme Isabelle Santiago. L’amendement est défendu.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Cet amendement est satisfait, puisqu’il porte sur une dotation pour les rapatriés et les descendants des harkis qui fait l’objet depuis décembre 2018 d’un programme qui s’est poursuivi et a même été augmenté. De plus, proposer d’aller piocher dans l’indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale me conduit à rejeter votre amendement.

M. Bastien Lachaud. Quoi que l’on pense de l’amendement, la Constitution ne laisse guère à mes collègues du groupe Les Républicains d’autre choix que de prendre l’argent quelque part. Si le Gouvernement juge que le fonds sur lequel l’argent est prélevé doit être maintenu, il le maintiendra. Que l’on réponde sur l’objet même de l’amendement et non pas sur le gage et nos débats gagneront en sérénité.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Depuis décembre 2018, un programme satisfait la demande. Cette année encore, l’allocation viagère sur le fonds de solidarité destiné aux enfants de harkis est en hausse de 260 000 euros par rapport à l’enveloppe de 2020. L’amendement est donc satisfait sur le fond.

La commission rejette l’amendement.

 

Puis, suivant l’avis du rapporteur pour avis, elle rejette l’amendement II-DN15 de M. David Habib.

 

Puis la commission examine l’amendement II-DN13 de M. David Habib.

Mme Isabelle Santiago. Il est défendu.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Même vote pour des raisons différentes, puisque des efforts organisationnels ont permis de faire passer de 1 000 à 1 200 le nombre de jeunes pouvant participer au service militaire volontaire, moyennant à une augmentation de 15 % des crédits. Avis défavorable donc.

La commission rejette l’amendement.

 

Puis elle examine l’amendement II-DN16 de M. Gassilloud.

M. Thomas Gassilloud. Il s’agit d’une ancienne demande rappelée l’an dernier à Sereine Mauborgne et à moi-même lors de l’élaboration de notre rapport sur la préparation et l’emploi des forces terrestres. Les anciens militaires d’active servant dans la réserve plus de 30 jours consécutifs voient leur pension suspendue au bout du troisième jour, même si elle est par la suite révisée. Nous avons remarqué sur le terrain que c’était un motif d’irritation d’autant plus vif que les délais de paiement des soldes de réservistes sont parfois allongés.

Nous proposons la suppression de cette disposition pour homogénéiser la gestion. Cette proposition simple permettrait d’appliquer les mêmes dispositions à tous les réservistes, quelle que soit leur origine. Un retraité de n’importe quel métier dans le civil servant dans la réserve ne voit pas sa retraite suspendue. Les anciens militaires d’active sont des réservistes très efficaces puisqu’ils ont déjà été formés par l’institution.

J’ajoute que le système est contourné. Beaucoup d’anciens militaires d’active signent des contrats d’engagement à servir dans la réserve de 29 jours, font un jour de pause, puis repartent pour 29 jours. Ce serait un signe positif pour le développement des réserves.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Si je n’ai pas d’objection sur le fond, sur la forme, cela nécessite une expertise approfondie avec les services du ministère afin de savoir si cet amendement se rapporte bien à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » puisqu’il concerne les pensions militaires et non les anciens combattants. Je suis donc perplexe. Essayons de travailler cette semaine sur la question.

M. Thomas Gassilloud. Sur le fond, une telle disposition fait consensus, y compris de la part des gestionnaires de la réserve. Je comprends qu’il y a une incertitude quant à la recevabilité dans le cadre du PLF. Je propose donc d’en faire un amendement d’appel : s’il y a un doute sur la recevabilité, cela pourra être dit en séance publique.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Cela me convient.

Mme la présidente Françoise Dumas. Il paraît plus sage de réexaminer l’amendement dans le cadre des crédits de défense.

L’amendement est retiré.

 

La commission examine l’amendement II-DN12 de M. David Habib.

Mme Isabelle Santiago. L’amendement est défendu.

M. Philippe Michel-Kleisbauer, rapporteur pour avis. Cet amendement demande un rapport pour évaluer le point de la pension PMI. Or c’est le but de la mission tripartite État-Parlement-associations qui sera réunie cette année afin de se pencher sur le continuum du PMI. Avis défavorable.

Mme Marianne Dubois. Nous aimerions connaître la composition de cette mission qui va commencer son travail. Mais nous serons favorables à cette disposition.

La commission rejette l’amendement.

 

Puis la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

 


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   Annexe :
Auditions du rapporteur pour avis

  Ministère des armées, Madame Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées ;

Fédération nationale André Maginot  Amiral Henri Lacaille, président, Monsieur Alain Clerc, secrétaire national ;

  Fondation des plus grands invalides de guerre  Monsieur Raymond Casal, président ;

  Union des blessés de la face et de la tête « les gueules cassées » –Monsieur le Général Paul Dodane, vice-président et président du comité d’entente des grands invalides de guerre ;

  Association nationale des participants aux opérations extérieures  Monsieur le Colonel (2S) Jean-Pierre Pakula, président ;

  Fédération nationale des combattants prisonniers de guerre et combattants d’Algérie, Tunisie, Maroc  Monsieur Serge Auffredou, secrétaire général ;

  Association de soutien à l’armée française  Monsieur le Général (2S) Henri Pinard Legry, président ;

  Fédération nationale des déportés, des internés résistants et patriotes – Monsieur Hubert Siebenschuh, trésorier général ;

  Office national des anciens combattants et des victimes de guerre –Madame Véronique Peaucelle-Delelis, directrice générale ;

  Le Souvenir français  Monsieur le Contrôleur Général Serge Barcellini, président ;

  Union nationale des combattants  Monsieur le Général (2S) Hervé Longuet, président ;

  Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre, des combattants pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix  Madame Liliane Rehby, secrétaire nationale ;

  Ministère des Armées, direction du patrimoine, de la mémoire et des archives  Monsieur Sylvain Mattiucci, directeur ;

  Institution nationale des Invalides  Monsieur le médecin inspecteur général Michel Guisset, directeur, Monsieur le commissaire en chef de 1ère classe Philippe Havil, directeur-adjoint ;

  Association nationale des femmes de militaires  Madame Florence Lendroit, présidente, Madame Isabelle Gomart, secrétaire générale ;

  Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie  Monsieur André Cognard, secrétaire général ;

  État-major de l’armée de terre, sous-direction des études et de la politique de la direction des ressources humaines de l’armée de terre  Monsieur le Général de brigade Marc Conruyt, sous-directeur ;

  Mission gouvernementale sur l’avenir de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre - Monsieur le Contrôleur Général des armées Samuel Heuzé, Madame l’Inspectrice générale de l’administration Yasmina Goulam, Monsieur l’Inspecteur général des finances Julien Senèze ;

 Monsieur Éric Lucas, directeur de cabinet de Madame Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’Etat auprès de la ministre des Armées ;

Madame Armelle Mabon, historienne ,

Monsieur Martin Mourre, historien ,

Monsieur Pascal Blanchard, historien ,

Madame Gisèle Grosz, attachée de l’INSEE ;

Monsieur Sory Camara, Président de l’association Vigil Tricolore Sénégal


([1]) Libellé à compter de la LFI 2019 ; auparavant, l’action 1 ne traitait que de la « JDC »