Compte rendu

Commission
des affaires sociales

–  Examen de la proposition de loi de M. Philippe Berta relative à l’amélioration de la prestation de compensation du handicap (n° 559) (M. Philippe Berta, rapporteur)              2

– Examen de la proposition de loi de MM. Cyrille Isaac-Sibille et Philippe Berta et plusieurs de leurs collègues relative à l’expertise des comités de protection des personnes (n° 847) (M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur)              15

 Information relative à la commission.......................30

– Présences en réunion.................................31

 

 

 


Mercredi
9 mai 2018

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 62

session ordinaire de 2017-2018

Présidence de
Mme Brigitte Bourguignon,
Présidente,
 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 9 mai 2018

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

(Présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente de la Commission)
 

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La commission des affaires sociales examine la proposition de loi relative à l’amélioration de la prestation de compensation du handicap (n° 559) (M. Philippe Berta, rapporteur).

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Mes chers collègues, nous examinons ce matin les propositions de loi du groupe MODEM, dont la discussion en séance publique est prévue le 17 mai, et nous commençons par l’examen de la proposition de loi relative à l’amélioration de la prestation de compensation du handicap, dont M. Philippe Berta est le rapporteur.

M. Philippe Berta, rapporteur. La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a modifié en profondeur la politique en faveur des personnes en situation de handicap. La principale avancée de cette loi réside dans la reconnaissance d’un droit à la compensation par la solidarité nationale des conséquences du handicap, sous la forme d’une prestation de compensation du handicap (PCH). Cette prestation individualisée, attribuée quasiment sans condition de ressources, a permis la prise en charge des surcoûts de toute nature liés au handicap.

Toutefois, force est de constater, plus de treize ans après la promulgation de la loi de 2005, que son objectif initial n’a pas été totalement atteint. En effet, les associations de soutien aux personnes handicapées que j’ai auditionnées m’ont fait part de nombreuses difficultés, liées notamment à l’exclusion de certaines personnes handicapées âgées du bénéfice de la PCH en raison du maintien des barrières d’âge à 60 et 75 ans, à l’existence de restes à charge trop élevés, à l’exclusion de l’aide à domicile du champ de la PCH, à l’inadaptation de la prestation de compensation pour les enfants, aux insuffisances de l’aide à la parentalité des personnes en situation de handicap ou encore à la longueur des délais de traitement des dossiers par les maisons départementales des personnes handicapées (MPDH). Les défis sont donc nombreux et les attentes très fortes.

C’est pourquoi j’ai décidé, avec mes collègues du groupe Mouvement démocrate et apparentés, de profiter de la journée réservée à notre groupe pour présenter une proposition de loi visant à améliorer le droit à la compensation des personnes en situation de handicap. Il s’agit de combler certaines des lacunes de la loi de 2005 grâce à deux mesures. La première consiste à supprimer la barrière d’âge de 75 ans, au-delà de laquelle il n’est aujourd’hui plus possible de solliciter la PCH, quand bien même l’intéressé était en situation de handicap avant l’âge de 60 ans. La seconde mesure vise à lancer une expérimentation destinée à préciser le fonctionnement des fonds départementaux de compensation du handicap (FDC) afin de limiter le reste à charge des bénéficiaires de la PCH.

Cette proposition de loi s’inscrit dans la politique menée par la majorité, qui a fait du handicap l’une des priorités du quinquennat.

En effet, les objectifs du Gouvernement, annoncés le 20 septembre dernier par le Premier ministre, Édouard Philippe, lors du premier comité interministériel du handicap, sont ambitieux. La revalorisation de l’allocation aux adultes handicapées (AAH), qui sera progressivement portée à 900 euros d’ici à novembre 2019, la modernisation des outils de traitement des demandes des MDPH ou l’amélioration de l’accès aux droits des personnes en situation de handicap dans les territoires les plus vulnérables font ainsi partie des mesures d’ores et déjà engagées par la majorité.

Surtout, je tiens à saluer l’annonce par le Président de la République, lors de son interview télévisée du 15 avril dernier, d’une réforme ambitieuse du financement de la dépendance, dont je me réjouis qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour des réformes du Gouvernement.

Avant même le lancement de ce grand chantier, la proposition de loi que je vous présente vise à remédier à deux problèmes : celui des barrières d’âge pour bénéficier de la PCH, d’une part, et celui du reste à charge, d’autre part. Dans les deux cas, en effet, la loi de 2005 n’a pas tenu toutes ses promesses.

L’article 1er vise à supprimer la limite d’âge, actuellement fixée à 75 ans, au-delà de laquelle il n’est plus possible de demander la PCH. En effet, si la limite d’âge pour solliciter cette prestation est fixée à 60 ans, les personnes dont le handicap, apparu avant qu’elles aient atteint 60 ans, correspond aux critères d’attribution de la PCH peuvent également demander à bénéficier de cette prestation, sous réserve d’en solliciter le bénéfice avant l’âge de 75 ans. Or, cette limite d’âge est particulièrement injuste car elle pénalise ceux qui n’ont pas jugé utile de demander la PCH avant 75 ans mais qui, passé cet âge, rencontrent des difficultés en raison d’un changement survenu dans leur environnement. Par exemple, une personne en situation de handicap peut n’avoir jamais demandé à bénéficier de la PCH parce qu’un proche lui apportait toute l’aide humaine dont elle avait besoin au quotidien. Mais, le jour où ce proche, parce qu’il vieillit ou décède, n’est plus en mesure de subvenir à ses besoins, la personne handicapée se trouve, au-delà de 75 ans, dans l’impossibilité de demander à bénéficier de la prestation, alors même que son handicap s’est déclaré avant l’âge de 60 ans.

Aussi, la suppression de la barrière d’âge de 75 ans pour solliciter le bénéfice de la PCH apparaît comme une mesure de bon sens qui répond à un objectif d’équité. Elle permet en effet de prendre en compte les changements intervenus dans l’environnement des personnes en situation de handicap après 75 ans et l’allongement de leur espérance de vie, qui est une réalité. Si elle était adoptée, cette mesure permettrait d’améliorer le droit à la compensation d’environ 8 600 personnes handicapées vieillissantes, pour un coût évalué par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) à environ 69 millions d’euros par an.

Bien entendu, cette mesure incite à s’interroger sur la pertinence de l’autre limite d’âge, fixée à 60 ans, compte tenu de l’augmentation de l’espérance de vie et du recul de l’âge minimum du départ à la retraite de 60 à 62 ans. À titre personnel, je pense qu’il nous faudra ouvrir le débat sur sa suppression. Mais il serait prématuré de trancher cette question aujourd’hui, car nous ne disposons pas d’une évaluation financière fiable et nous risquerions d’anticiper sur le débat sur le financement de la dépendance.

L’article 2 traite, quant à lui, de la question des restes à charge des personnes en situation de handicap. Il s’agit de sortir d’une impasse juridique liée aux imprécisions de la loi de 2005 sur le fonctionnement des FDC, Ces derniers sont chargés d’attribuer des aides financières extralégales aux personnes en situation de handicap afin de leur permettre de faire face aux frais de compensation restant éventuellement à leur charge après l’intervention de la PCH. Or, dès l’origine, leur fonctionnement a été fragilisé par deux logiques contradictoires. D’un côté, l’abondement des fonds repose sur des financements facultatifs ; ils peuvent ainsi être financés par différents acteurs – départements, État, régions, organismes d’assurance maladie, caisses d’allocations familiales, notamment – sans que la participation de ces différents financeurs soit obligatoire. De l’autre, la loi impose que les frais de compensation restant à la charge du bénéficiaire de la PCH n’excèdent pas 10 % de ses ressources personnelles nettes d’impôts, dans des conditions définies par décret.

Cette obligation juridique doit ainsi être satisfaite par le recours à des fonds financés de manière facultative. La contradiction inhérente à cet article a empêché la publication du décret d’application, et donc l’entrée en vigueur effective de cette disposition relative au reste à charge. En attendant, l’installation des fonds de compensation s’est faite, faute de décret, de manière totalement hétérogène sur le territoire, de sorte que l’on observe de fortes inégalités, qui ne sont pas acceptables, entre les départements. Ainsi, une enquête de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) menée en 2016 révèle que si, en 2015, les fonds ont permis de financer, en moyenne, 134 interventions, les écarts entre les départements sont très importants : un fonds n’a financé aucune intervention – pour 17 demandes examinées – alors qu’un autre fonds en a financé 468.

Les aides techniques représentent en moyenne un peu plus de la moitié des dépenses des fonds mais, là encore, il existe d’importantes différences entre les départements puisqu’elles représentent entre 0 % et 85 % des dépenses selon les fonds. Par ailleurs, un tiers des départements apportent une aide pour tous les éléments de la PCH alors que deux tiers d’entre eux limitent l’aide à certains de ses éléments, le plus souvent les aides techniques ou l’aménagement du logement ou du véhicule.

Par ailleurs, si, dans la quasi-totalité des MDPH, le niveau de ressources de la personne est pris en compte afin de déterminer le montant qui lui sera accordé, les modalités de son calcul varient selon les fonds. Il en va de même pour le niveau du reste à charge. L’enquête de la CNSA montre que celui-ci, après intervention des fonds de compensation, s’élève en moyenne à 16 %. Le taux maximal de 10 % fixé par l’article L. 146-5 du code de l’action sociale et des familles n’est donc pas applicable et n’est pas appliqué.

Dès lors, l’article 2 de la proposition de loi a deux objectifs : réduire les inégalités de prise en charge entre les départements et permettre que soit enfin appliquée la disposition législative qui prévoit que, pour les bénéficiaires de la PCH, le reste à charge ne doit pas excéder 10 % de leurs ressources. Je précise à cet égard qu’en février 2016 le Conseil d’État a condamné l’État pour non-respect du délai raisonnable entre la publication de la loi et celle du décret d’application. Il est donc plus que jamais nécessaire de sortir de cette impasse juridique.

L’article 2 prévoit ainsi qu’une expérimentation sera menée pour une durée de trois ans dans des départements volontaires, afin d’étudier les conditions de faisabilité d’un dispositif garantissant un niveau de reste à charge équivalent au maximum à 10 % des ressources des bénéficiaires de la PCH. Il est prévu que, dans les départements menant l’expérimentation, les frais de compensation restant à la charge du bénéficiaire de la PCH, qui ne peuvent excéder 10 % de ses ressources, soient pris en charge par le fonds de compensation, dans la limite de ses financements. Cette aide du fonds serait accordée sous condition de ressources, un plafond de ressources devant être fixé par voie réglementaire.

À l’issue de l’expérimentation et après une évaluation de ses résultats, la généralisation du dispositif retenu, qui reposera sur des critères de prise en charge précis et homogènes, permettra de rendre enfin effective la limitation du reste à charge des bénéficiaires de la PCH et d’harmoniser le fonctionnement des fonds.

Pour conclure, la proposition de loi permet d’améliorer le droit à compensation des personnes en situation de handicap. Certes, elle ne règle pas tous les problèmes auxquels sont confrontées ces personnes pour faire reconnaître leurs droits, mais il s’agit d’une première avancée. Les deux mesures que je vous ai présentées ne sont pas négligeables pour ceux qui en bénéficieront ; elles ont d’ailleurs été unanimement saluées par les personnes que j’ai auditionnées, en particulier par les associations de soutien aux personnes en situation de handicap. En tout état de cause, je me réjouis que ma proposition de loi permette d’ouvrir le débat sur le droit à la compensation, qui se poursuivra dans le cadre de la réforme du financement de la dépendance annoncée par le Président de la République. En attendant cette grande réforme, je vous invite à adopter le texte que je viens de vous présenter.

Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel. La proposition de loi présentée par Philippe Berta comporte deux dispositifs. Le premier vise à supprimer la barrière d’âge qui prive de leur droit à compensation les personnes n’ayant pas déposé de demande avant 75 ans. Cette barrière, qui semble injuste, a été dénoncée à de nombreuses reprises par les associations, tant il est vrai que les situations incapacitantes peuvent apparaître à tout âge. En outre, sa suppression est une mesure financièrement équilibrée, puisque son coût a été évalué à 69 millions d’euros par an. Le groupe La République en Marche y est donc tout à fait favorable.

La seconde mesure consiste en une expérimentation dans certains territoires, pendant trois ans, d’un dispositif permettant que le reste à charge des frais de compensation du handicap pour les plus modestes n’excède pas 10 % de leurs ressources, comme cela est prévu par la loi du 11 février 2005 sans être appliqué. Cette mesure, même si elle ne correspond pas parfaitement aux souhaits exprimés par le monde associatif, sera également soutenue par le groupe La République en marche.

Cette proposition de loi a le mérite de remettre la question des prestations compensatoires au cœur du débat. Elles ne sont pas un luxe ; elles correspondent à un droit. Elles sont la manifestation de la solidarité nationale, qui agit concrètement pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap. Elles traduisent la volonté de notre société de prendre soin des plus fragiles, sa capacité à faire du commun.

Toutefois, ce texte n’est pas une fin en soi ; il soulève d’autres questions, notamment celle de la barrière d’âge de 60 ans. Nous devrons y être particulièrement attentifs dans le cadre des travaux de la Conférence nationale du handicap qui s’ouvriront dans quelques semaines, car le monde associatif attend du Gouvernement et de la majorité qu’ils lui apportent des réponses.

M. Gilles Lurton. Tout d’abord, je veux, au nom du groupe Les Républicains, remercier le groupe MODEM et le rapporteur de la proposition de loi, notre collègue Philippe Berta, pour le travail qu’il a accompli. La prestation de compensation du handicap, créée par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, permet d’aider ces dernières à prendre en charge les dépenses liées à leur situation. Si cette loi marque la reconnaissance, pour la première fois, du droit à compensation des conséquences du handicap par la solidarité nationale – ce dont je me félicite –, elle doit néanmoins évoluer.

Ainsi, la loi fixe, depuis la création de cette prestation, un âge limite de dépôt de la demande auprès des services du département ; or, le nombre des personnes âgées en situation de handicap ne cesse d’augmenter. La proposition de loi vise donc à adapter les conditions de versement de cette prestation aux données démographiques actuelles en supprimant la limite d’âge de 75 ans. Compte tenu du vieillissement de la population et du nombre croissant de personnes âgées, réserver la possibilité de déposer une demande de PCH aux moins de 75 ans ne semble, en effet, plus pertinent. Nous approuverons donc l’article 1er.

Cependant, même s’il est prévu de créer une taxe nouvelle destinée à financer l’élargissement de l’accès à la PCH, il serait intéressant que nous disposions d’une estimation du nombre de personnes susceptibles de bénéficier de cette mesure car, au-delà du seul coût financier, elle accroîtra nécessairement la charge de travail des départements, qui ont pour mission d’assurer la gestion de ces dossiers.

L’article 2 de la proposition de loi prévoit, quant à lui, l’expérimentation d’un dispositif visant à limiter le reste à charge des bénéficiaires de la PCH grâce à l’intervention de fonds de compensation du handicap gérés par les départements. Ces fonds se substitueraient, au moins en partie, au bénéficiaire de la PCH dans le paiement du reste à charge des prestations dont il bénéficie en raison de son handicap. En la matière, j’invite le Gouvernement à la prudence. En effet, si l’objectif d’une limitation du reste à charge est une bonne chose pour les bénéficiaires de la PCH, la question de la charge nouvelle qui incomberait aux finances des départements est une problématique importante que nous ne pouvons occulter. Il sera donc nécessaire, au terme des trois années que doit durer l’expérimentation, de dresser un premier bilan de celle-ci.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Je tiens tout d’abord à remercier notre rapporteur pour le travail de qualité qu’il a accompli sur ce sujet majeur qu’est la prise en compte du handicap. Celui-ci touche en effet 12 millions des 65 millions de Français, et nous savons tous combien il peut affecter profondément la vie d’une famille. Or, si l’accès aux droits fondamentaux a été reconnu à tous, il n’est pas garanti dans les faits pour les personnes en situation de handicap, dont l’accompagnement demeure insuffisant. C’est pourquoi le Président de la République s’est engagé à promouvoir une société plus inclusive, fraternelle et solidaire, dont les personnes handicapées seront reconnues comme des membres à part entière.

Le Gouvernement a d’ores et déjà pris des mesures importantes en leur faveur. Je pense notamment à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapées, qui sera progressivement portée à 900 euros d’ici à novembre 2019, à la modernisation des outils de traitement des demandes des MDPH, grâce au déploiement d’un nouveau système d’information, ou à l’amélioration de l’accès aux droits des personnes en situation de handicap dans les territoires les plus vulnérables.

En défendant cette proposition de loi, le groupe MODEM a pour objectif de favoriser de nouvelles avancées. Les deux mesures présentées par notre rapporteur découlent notamment des travaux menés, en 2016, par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et s’inscrivent dans la continuité des orientations fixées par le Gouvernement lors du premier Comité interministériel du handicap du 20 septembre 2017. Elles répondent à une demande forte des personnes handicapées et de leurs familles.

C’est pourquoi, vous vous en doutez, les députés du groupe MODEM approuveront cette proposition de loi, qui permettra de poser la première pierre d’une réforme plus ambitieuse du financement de la dépendance, annoncée par le Président de la République lors de son interview du 15 avril dernier.

M. Adrien Quatennens. La prestation de compensation du handicap est une aide destinée à financer certaines dépenses liées au handicap, telles que l’aide au quotidien, l’aménagement du logement ou l’achat d’un véhicule adapté. En 2017, 335 000 personnes ont bénéficié de cette prestation. Le groupe de la France insoumise est donc, bien entendu, favorable à la proposition de loi qui vise, d’une part, à supprimer la limite d’âge fixée à 75 ans pour le dépôt de la demande – qui prive certaines personnes du bénéfice de cette prestation alors même qu’elles remplissent les critères conditionnant son versement – et, d’autre part, à autoriser les départements à expérimenter certains dispositifs pour limiter le reste à charge des bénéficiaires.

N’oublions pas, toutefois, que cette aide est versée par des départements qui, confrontés à la baisse de leurs dotations décidée par le Gouvernement, ne sont pas tous en mesure de fournir la même aide à des personnes qui en ont pourtant besoin partout de la même façon.

Nous défendrons des amendements pour améliorer le texte et répondre mieux encore aux attentes des personnes en situation de handicap. Le premier d’entre eux a été retoqué, mais nous le redéposerons en vue de la séance publique. Il visait à supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul du montant de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), versée à un million de personnes. La majorité a déjà refusé cette proposition, mais nous pensons que les nombreuses alertes lancées notamment par les associations devraient la convaincre de l’accepter.

Nous proposerons également, par un second amendement, que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le chiffrage de la mesure consistant à porter AAH au niveau du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). Les revalorisations prévues par le Gouvernement sont en effet largement insuffisantes et tardives.

Ces amendements, qui nous semblent assez consensuels, devraient pouvoir être intégrés par la majorité dans la proposition de loi.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. La proposition de loi déposée par nos collègues du groupe MODEM et apparentés vise à faciliter la prise en charge et la compensation des frais liés au handicap. La loi du 11 février 2005 a posé le principe du droit à une telle compensation, qui doit permettre à la personne en situation de handicap de faire face aux conséquences de celui-ci, quels que soient l’origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. La PCH, créée par la même loi, est au cœur de ce dispositif innovant et ambitieux, non soumis à condition de ressources et qui a avantageusement remplacé l’allocation compensatrice pour tierce personne, qui était cantonnée aux aides humaines.

Pour autant, ce dispositif n’est pas sans défaut. Il prend ainsi insuffisamment en compte l’allongement de la durée de la vie et le vieillissement d’une partie croissante de la population, dont les personnes en situation de handicap. Le maintien d’une barrière d’âge, fixée à 75 ans, au-delà de laquelle une personne ne peut plus demander la PCH en est un bon exemple. Elle constitue, du reste, une grande injustice, puisqu’elle pénalise les personnes qui n’avaient pas jugé bon de demander le versement de cette prestation avant 75 ans et qui, lorsqu’elles en ont besoin, du fait des évolutions de la vie, ne peuvent plus en bénéficier.

La proposition de loi, qui reprend une partie des préconisations du rapport de l’IGAS, vise à supprimer cette barrière d’âge. Il s’agit d’une réelle avancée, que nous soutiendrons. Lors de la présentation du rapport d’évaluation de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, ma collègue Charlotte Lecocq et moi avions rappelé que le Gouvernement devait remettre au Parlement plusieurs des rapports prévus dans cette loi, notamment celui prévu à l’article 45 sur l’impact des seuils pour l’attribution de la PCH.

Le texte prévoit, par ailleurs, l’expérimentation d’un dispositif visant à limiter le reste à charge des bénéficiaires de la PCH. En effet, les imprécisions actuelles de la loi empêchent la publication du décret qui doit limiter ce reste à charge à 10 % des ressources des bénéficiaires. Nous sommes également favorables à cette mesure, tant il est nécessaire d’avancer dans ce domaine – les inégalités territoriales sont indéniables – et de rendre enfin effective la limitation du reste à charge.

Le groupe UDI, Agir et Indépendants aborde donc très favorablement l’examen de cette proposition de loi. Nous partageons avec son auteur la conviction qu’il est nécessaire d’agir avec volontarisme en faveur des personnes en situation de handicap et d’une société davantage inclusive.

M. Pierre Dharréville. La proposition de loi dont nous sommes saisis peut nous permettre de remédier à un certain nombre de problèmes liés à la loi actuelle. Si, en 2005, quelques avancées ont été réalisées en faveur des personnes en situation de handicap, beaucoup de droits doivent encore être consolidés et leur être reconnus. Les associations sont ainsi mobilisées depuis de nombreuses années pour exiger des pouvoirs publics des avancées significatives pour les personnes en situation de handicap et leurs familles. En 2016, le rapport de l’IGAS a en effet constaté que les montants de PCH attribués diminuaient progressivement et que de nombreuses familles pâtissaient d’inégalités sociales et territoriales, la situation étant très variable d’un département à l’autre.

C’est pourquoi j’ai formulé, dans le cadre de la « mission flash » sur les aidants familiaux dont j’étais rapporteur, un certain nombre de propositions concernant notamment l’automaticité des droits, la revalorisation de la PCH ou la prise en charge à 100 % de l’aide à domicile, afin d’éliminer le reste à charge et de mettre fin au renoncement aux droits, et de permettre l’ouverture de véritables droits pour les personnes en situation de handicap. En outre, je le rappelle, les agents des MDPH sont sur-mobilisés à cause du manque de moyens humains et de la diminution des dotations allouées aux départements qui, pour certains, sont en grande difficulté.

Néanmoins, la suppression de la barrière d’âge de 75 ans semble être une mesure de bon sens pour les 8 600 personnes concernées. Elle soulève cependant la question de la barrière des 60 ans, qu’il faudra également faire tomber – nous pourrions d’ailleurs l’envisager dans le cadre de ce texte. Je salue par ailleurs la volonté de trouver une solution aux contradictions de la loi de 2005, mais je regrette que l’on se limite à une expérimentation, laquelle pourrait conduire à repousser à 2021 l’application d’une mesure qui avait été votée en 2005 ! Je m’interroge donc sur cette mesure, mais si celle-ci permet de faire avancer les choses, il faudra la prendre.

M. Stéphane Le Foll. La compensation du handicap est, bien entendu, un pilier de la politique en faveur des personnes en situation de handicap. C’est pourquoi, en 2016, la ministre des affaires sociales, Marisol Touraine, et la secrétaire d’État chargée des personnes en situation de handicap, Ségolène Neuville, ont confié à l’IGAS une mission sur la révision des conditions et des modalités d’attribution de la prestation de compensation du handicap. Trois pistes d’amélioration ont été suggérées : la mise en commun de la prestation de compensation du handicap dans le cadre d’un logement partagé, la prise en compte d’une aide à la parentalité au sein de la prestation et la suppression de la barrière des 75 ans, voire de celle des 60 ans.

Le comité interministériel du 2 décembre 2016 a ensuite pris quatre décisions : supprimer la barrière des 75 ans, prendre en compte les besoins liés au handicap psychique, cognitif ou mental dans les critères d’éligibilité de la PCH, créer les aides à la parentalité dans le cadre de la PCH et accompagner, dans le cadre d’un partenariat pluriannuel, l’association Handéo dans ses démarches d’enrichissement des offres de services à la personne destinées aux publics en situation de handicap. Le 20 septembre 2017, en revanche, aucune mesure concernant le droit à compensation du handicap n’a été proposée.

La proposition de loi que nous examinons comporte cependant deux dispositions tendant à améliorer la PCH. La première, et c’est un point important, tend à supprimer la barrière d’âge à 75 ans. Actuellement, en effet, les textes législatifs et réglementaires imposent deux barrières d’âge – l’une à 60 ans, l’autre à 75 ans – qui sont toutes deux contestées. Ainsi, après l’âge de 75 ans, les personnes en situation de handicap ne peuvent plus demander à bénéficier de la PCH, même si leur handicap a été déclaré avant 60 ans. Elles ont seulement la possibilité de solliciter l’allocation personnalisée d’autonomie, qui ouvre droit à une prise en charge.

L’article 45 de la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement a prévu la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement sur l’impact des seuils d’âge…

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Je vous prie de conclure, mon cher collègue.

M. Stéphane Le Foll. Je conclus, madame la présidente, en disant que le groupe Nouvelle Gauche soutient les deux dispositifs de la proposition de loi.

M. Philippe Berta, rapporteur. Merci à tous pour vos contributions. Je pense que nous partageons tous la même vision et le même souhait, qui est d’ouvrir une nouvelle étape. Certes, ce n’est encore qu’une étape. Nous allons devoir aussi nous pencher sur la deuxième limite d’âge de 60 ans. Mais cela nécessitera de faire des évaluations, et prendra du temps.

La suppression de la barrière d’âge de 75 ans concernerait8 600 personnes, et coûterait, selon l’IGAS, qui s’appuie sur une évaluation de la DREES, 69 millions d’euros par an. Cette charge étant à répartir entre 100  départements, cela n’affecterait pas gravement leurs finances, et c’est pourquoi la mesure devrait pouvoir être appliquée rapidement.

Mais venons-en aux fonds de compensation du handicap et à la mise en place d’un reste à charge ne dépassant pas 10 % des ressources des bénéficiaires de la PCH. Vous l’avez compris, ce qui avait été décidé n’a jamais pu être réalisé. Les décrets n’ont jamais été publiés. Nous sommes confrontés à des situations totalement ubuesques puisque, selon les départements, le fonds peut financer de nombreuses interventions, ou aucune : manifestement, il vaut mieux être handicapé dans certains départements que dans d’autres, ce qui est inacceptable.

Le coût reste à évaluer, puisque le travail n’a pas été fait. C’est le principe même de l’expérimentation, qui serait à mener sur deux années ; la troisième année, on procéderait à une évaluation et, une fois les sources de financement trouvées – en les ayant, je l’espère, diversifiées au maximum –, on pourrait enfin adopter le même principe partout.

Je ne vais pas rentrer dans une discussion sur l’AAH. Je me suis concentré sur la PCH, qui est l’objet du texte. Je connais la problématique de la prise en compte du revenu du conjoint, mais ce n’est pas mon propos aujourd’hui.

Votons cet article 1er au plus vite, lançons l’expérimentation sur l’article 2 au plus vite également, et reprenons la réflexion. De fait, le système est d’une complexité assez étonnante. Je me demande d’ailleurs comment nos concitoyens pourraient s’en sortir : pour avoir fait quelques tests dans mon proche environnement, je me suis aperçu que certaines personnes étaient complètement dépassées par les notions d’AAH, de PCH, etc.

Nous avons l’habitude de dissocier l’entrée en dépendance liée à l’âge de celui qui a eu une activité, du handicap qui donne droit à une prestation compensatoire. Il faudra bien, un jour, simplifier tout cela. Mais aujourd’hui, nous souhaitons seulement ouvrir la discussion et donner un peu d’air au système.

M. Bernard Perrut. La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a profondément fait évoluer la politique en faveur des personnes en situation de handicap, et tous les gouvernements se sont investis en ce sens. Toutefois, les défis demeurent nombreux. Je pense notamment à l’exclusion de certaines personnes handicapées âgées du bénéfice de la prestation de compensation du handicap, en raison du maintien de certaines barrières. Il faut aussi évoquer les restes à charge trop élevés, et l’inadaptation de la prestation de compensation à certaines situations.

Le vieillissement général de la population concerne bien évidemment les personnes en situation de handicap, et aucune mesure n’a été prise jusqu’ici pour supprimer les barrières d’âge, malgré les rapports et les recommandations qui allaient dans ce sens. Voilà pourquoi cette proposition de loi est aujourd’hui nécessaire. C’est une proposition de loi de justice, et nous la soutenons bien volontiers.

Demeurent toutefois des interrogations sur ce dispositif de prestation de compensation du handicap, car il y a d’importantes différences de prise en charge selon les départements ; les modalités d’organisation et de financement varient et les critères d’éligibilité des bénéficiaires sont très hétérogènes – d’où de grandes disparités entre les territoires.

On peut également s’interroger, monsieur le rapporteur, sur l’absence de décret d’application, que vous avez soulignée. Ce décret n’a pas été pris depuis treize ans, en raison d’incertitudes législatives sur le caractère facultatif ou obligatoire de l’aide. Ne faut-il pas modifier la loi, ou prendre le décret pour appliquer le dispositif juridique adopté en 2005 et le généraliser, plutôt que s’engager dans une expérimentation qui ne réglera pas la situation ?

Pouvez-vous, monsieur le rapporteur, nous indiquer le montant des dépenses de PCH, les moyens financiers supplémentaires qui seraient nécessaires pour faire face aux mesures que vous proposez et l’impact que celles-ci pourraient avoir sur les départements ? Et quel est, si vous le savez, le montant de la contribution de l’État au fonds de compensation du handicap ? Car cette charge pèsera bien sûr sur les départements, et donc sur les contribuables. Il faudra trouver une solution.

Mme Carole Grandjean. Monsieur le rapporteur, je tiens à souligner l’intérêt de cette proposition de loi, qui correspond à la vision d’une société inclusive sachant soutenir chacun, notamment dans son handicap et dans son vieillissement.

Un certain nombre de propositions avaient été faites par l’IGAS en 2016. On a évoqué les fortes inégalités territoriales, les critères d’éligibilité et les handicaps psychiques et cognitifs, qui sont mal reconnus et pris en charge. Vous tentez d’apporter certaines réponses, et je tiens à le saluer.

Ce dispositif de compensation du handicap, qui vient compléter les aides de droit commun ou spécifiques, est modulable, pour pouvoir accompagner le projet de vie – maintien à domicile ou accompagnement en établissement. Il doit en effet s’adapter au vieillissement de la population.

Supprimer la limite d’âge fixée à 75 ans est une mesure d’égalité d’accès aux droits et d’accès à un accompagnement, par la société, de certaines situations, dans le cadre d’une démarche d’inclusion.

Au nom du groupe La République en Marche, mais aussi en mon nom propre, je tiens également à souligner l’intérêt de l’expérimentation que vous proposez. J’espère que le territoire sur lequel j’œuvre participera à cette expérimentation, qui vise à réduire le reste à charge des bénéficiaires de la PCH.

Je vous remercie pour cette proposition de loi.

Mme Josiane Corneloup. Je remercie notre collègue Philippe Berta pour cette proposition de loi, qui est tout à fait salutaire en cette période où les personnes en situation de handicap nous font part de certaines inquiétudes ; hausse en trompe-l’œil de l’AAH, nouveau mode de calcul restrictif du fait de la prise en compte des revenus du conjoint. Ces deux mesures gouvernementales vont pénaliser lourdement les foyers concernés, et ils sont nombreux. Nous sommes d’ailleurs plusieurs ici à avoir cosigné la proposition de loi de notre collègue Marie-George Buffet visant à supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l’AAH.

L’amélioration du versement de la prestation de compensation du handicap pour les adultes constitue un levier intéressant. La suppression de la barrière d’âge à 75 ans pour l’accès à la PCH et l’expérimentation visant à réduire le reste à charge des bénéficiaires sont de bonnes mesures. Elles font d’ailleurs parfaitement écho à la loi dite « handicap » de 2005, qui précisait dans son article 11 que la personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap, quels que soient son origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie.

En 2016, près de 300 000 demandes de PCH ont été instruites par les MDPH, chiffre en constante augmentation. La difficulté que représente le reste à charge revient souvent lorsqu’on aborde le sujet avec les personnes handicapées. Mais ces dernières pointent aussi la baisse du taux d’acceptation des dossiers – 45 % seulement – et surtout la longueur des délais d’instruction des MDPH – de l’ordre de six à huit mois. Nous devrions d’ailleurs nous pencher également sur ce point, afin de faciliter la fluidité du traitement administratif des dossiers.

Le fonds départemental de compensation est la bonne entrée pour la prise en charge du reste à charge, dans la limite de 10 % des ressources de la famille. Nous connaissons déjà l’action qu’il mène pour limiter les sommes qui restent à la charge des personnes handicapées lorsqu’elles demandent des aides pour compenser le handicap. Il faut toutefois que ce fonds soit suffisamment alimenté : comme vous l’évoquiez précédemment, aucune obligation ne pèse aujourd’hui sur les différents contributeurs. L’expérimentation du dispositif sur trois ans permettra d’apprécier son impact. Il ne doit pas se traduire par une charge supplémentaire sur les finances des départements.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Monsieur le rapporteur, je vous remercie pour ce focus sur un problème qui nous touche tous : le handicap. Celui-ci constitue souvent une double peine, de par son impact sur la santé et son impact économique, dans la vie de tous les jours.

Votre travail met en évidence que la prise en compte du handicap relève de la responsabilité de la société. La loi de 2005 marquait déjà un progrès, mais on n’en fera jamais assez en la matière. Il faut toutefois se confronter à la réalité de ce que nous pouvons faire. Cela m’amène à rebondir sur cette différenciation que l’on fait entre la dépendance liée à l’âge et la dépendance liée à un problème de santé. Je pense effectivement que nous devrions y réfléchir.

Pour avoir moi-même participé aux fonds de compensation du handicap, je terminerai sur la nécessité de s’interroger sur l’implication des différents partenaires. Les départements ne sont pas les seuls concernés. Comment améliorer ou harmoniser l’implication des différents partenaires ?

M. Jean-Carles Grelier. In limine litis, je voudrais saluer le travail du rapporteur, à la fois sur le fond et sur la forme de son rapport, et me faire l’écho de mes collègues qui s’inquiètent du devenir de la PCH dans les départements.

Monsieur le rapporteur, vous soulignez vous-même, dans votre rapport, la baisse extrêmement sensible des concours de la CNSA au cours de ces dernières années, et la charge de plus en plus lourde qui pèse sur les finances départementales.

Si j’entends votre volonté, que je partage, d’essayer d’uniformiser et de mettre en cohérence l’action des départements, j’estime que nous ne devons jamais négliger la libre administration des collectivités locales, donc la possibilité pour des départements, qui n’ont pas tous les mêmes charges, de faire des choix parmi leurs concours financiers. Tous les départements n’ont pas les mêmes dépenses de solidarité, parce qu’ils n’ont pas tous les mêmes populations. Tous les départements n’ont pas les même dépenses d’infrastructures, parce qu’ils n’ont pas le même nombre de kilomètres de routes départementales à entretenir. Placer tous les départements sur un pied d’égalité en matière de PCH pourrait créer, là aussi, d’importantes difficultés.

Comme l’ont dit certains de nos collègues, on ne règlera jamais complètement le problème tant que l’on ne se sera pas penché véritablement sur le financement et le mode de fonctionnement des MDPH, dont les délais d’instruction des dossiers sont absolument énormes, et vont en s’aggravant année après année. C’est un sujet connexe à votre proposition de loi, qui devra un jour retenir l’attention du législateur.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je ne m’étendrai pas beaucoup plus avant.

Il se trouve qu’à l’échelle de mon territoire, je mène une expérimentation qui porte sur la fluidité des parcours – et en particulier sur celui des dossiers. Vous avez raison, cette fluidité dépend totalement des MDPH. Dans mon département, la MDPH fonctionne bien. Mais je sais que, dans le département voisin, tout le monde s’en plaint. Il nous faudra donc travailler sur ce point.

Par ailleurs, comme je l’ai indiqué dans le rapport, le montant mensuel de PCH perçu par ses bénéficiaires s’élevait en moyenne à 745 euros par mois en 2015. Les dépenses des départements en matière de PCH ont quant à elle atteint 1,786 milliard d’euros en 2016.

Ensuite, la part des concours de l’État est en effet allée en décroissant, passant de 47 % des dépenses des départements en 2010 à 32 % aujourd’hui. La question des participations va donc se poser.

Enfin, je voudrais souligner un point qui n’a pas été soulevé, et qui mériterait selon moi de faire partie de l’expérimentation : la liste des matériels auxquels la personne handicapée peut avoir accès.

Ces matériels, que je désignerai sous le terme générique de « dispositifs médicaux », ne sont pas les mêmes d’un département à l’autre. En outre, ils sont en permanente évolution. On pourrait se réjouir du dynamisme de ce secteur industriel, notamment en matière de recherche – sauf que les dispositifs proposés sur ces listes sont souvent dépassés ! L’« espérance de vie » moyenne d’un dispositif médical sur le marché est de l’ordre de deux à trois ans. Il conviendrait donc de chercher comment remettre à jour les listes – cela devrait faire partie de l’expérimentation – et uniformiser au niveau des territoires ce qui est proposé – par exemple, comme aide technique.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Nous en venons à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Suppression de la barrière d’âge de 75 ans au-delà de laquelle il n’est plus possible de demander à bénéficier de la prestation de compensation du handicap

La commission adopte  l’article sans modification.

Article 2 : Expérimentation visant à limiter le reste à charge des bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS1 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS5 du rapporteur.

M. Philippe Berta, rapporteur. Cet amendement vise à substituer aux mots : « à compter du 1er janvier 2018 », les mots : « à compter du 1er janvier de l’année suivant la publication du décret ». J’ai souhaité apporter cette petite correction, car je suis conscient des délais qui s’imposent à nous.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS2 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 2 modifié.

Après l’article 2

La commission est saisie de l’amendement AS4 de Mme Caroline Fiat.

M. Jean-Hugues Ratenon. Madame la présidente, mes chers collègues, il y a quelques jours, le Gouvernement a trouvé 800 millions d’euros à offrir aux plus riches du pays, en supprimant l’exit tax. En parallèle, il n’a prévu d’augmenter l’AAH que de quelques dizaines d’euros par an, pour arriver à peine à 900 euros mensuels. Je vous rappelle que le seuil de pauvreté est d’un peu plus de 1 000 euros mensuels sur le territoire : le Gouvernement a donc fait le choix de maintenir les personnes handicapées sous le seuil de pauvreté.

Par cet amendement, nous demandons que l’on chiffre ce que coûterait le fait de porter l’AAH au niveau du SMIC, soit un peu moins de 1 200 euros par mois, pour les personnes handicapées se trouvant dans l’incapacité totale de travailler. Cette augmentation, que nous ne pouvons proposer directement du fait de l’article 40 de la Constitution, serait une mesure de justice sociale. Mes chers collègues, nous ne demandons pas la charité, mais la dignité pour toutes et tous.

Ce rapport d’information ayant pour objectif de chiffrer une telle augmentation est donc, à notre sens, nécessaire.

M. Philippe Berta, rapporteur. La loi de finances pour 2018 prévoit une augmentation sans précédent de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH. Je rappelle que celle-ci était de 810 euros par mois au 1er avril 2017, qu’elle s’élève depuis le 1er avril 2018 à 819 euros, qu’elle passera à 860 euros le 1er novembre 2018 et à 900 euros dès 2019.

On peut certes ne pas s’en satisfaire, mais c’est tout de même une augmentation importante – 90 euros par mois – qui sera intervenue en l’espace d’à peine deux ans. Au cours du précédent quinquennat, l’AAH n’avait augmenté que de 50 euros. Il convient de saluer cet effort non négligeable en faveur des personnes en situation de handicap. Cette augmentation est d’autant plus significative qu’elle a été décidée dans un contexte budgétaire contraint.

Je suis donc défavorable à votre amendement, étant donné que des mesures importantes de revalorisation – qui ne sont pas encore totalement entrées en vigueur – ont déjà été prises l’année dernière.

Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel. Il en sera de même pour le groupe La République en Marche. Comme vous l’avez souligné, le Gouvernement a engagé une revalorisation exceptionnelle de l’AAH, qui passera à 900 euros par mois, soit une hausse de plus de 11 % du montant de l’allocation pour une personne isolée et sans autres ressources. Le gain mensuel sera de 48 euros dès la fin 2018, et sera porté à 90 euros fin 2019. J’ajoute que l’AAH est une allocation dont l’objectif est de permettre une garantie de ressources à ses bénéficiaires. Elle ne doit donc pas être comparée au SMIC, qui est un salaire.

M. Gilles Lurton. Nous nous réjouissons tous de voir l’AAH augmenter. Il n’empêche qu’un problème demeure, que j’avais soulevé avec la ministre au mois de novembre dernier à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances : l’existence d’un plafond de ressources de 1 620 euros.

L’augmentation de 50 euros de l’AAH, qui va être appliquée à partir du 1er novembre prochain, fera augmenter le niveau de ressources de nombreuses personnes qui risquent de ne plus pouvoir bénéficier de cette allocation – par exemple, un couple disposant de deux ressources, comme deux AAH différentes. C’est un problème de fond, sur lequel Mme la ministre m’avait assuré qu’elle répondrait. Mais, à ce jour, je n’ai toujours pas obtenu de réponse.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite à l’unanimité l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

Puis la commission procède à l’examen de la proposition de loi de MM. Cyrille Isaac-Sibille et Philippe Berta et plusieurs de leurs collègues relative à l’expertise des comités de protection des personnes (n° 847) (M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur).

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Chers collègues, la proposition de loi inscrite à l’ordre du jour par le groupe du Mouvement démocrate et apparentés (MODEM) vise à faire bénéficier les malades des innovations médicales les plus récentes, à faciliter le travail des équipes de recherche de nos hôpitaux et de nos universités – étudiants, médecins, enseignants, chercheurs, tous reconnus pour leur excellence –, à améliorer l’attractivité de notre pays en matière d’essais cliniques dans un environnement européen et international où les progrès médicaux s’accélèrent, et qui est marqué par une concurrence intensive. Dans ce contexte, la procédure administrative d’autorisation des essais cliniques en France mérite d’être sensiblement améliorée.

Depuis la loi du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine, dite « loi Jardé », tous les projets de recherche impliquant la personne humaine sont soumis pour avis à des comités de protection des personnes (CPP). Instances pluridisciplinaires par excellence, les CPP émettent un avis éthique sur chaque projet de recherche.

Pour être soumis à l’avis d’un CPP, chaque promoteur doit déposer un dossier auprès de la Commission nationale des recherches impliquant la personne humaine (CNRIPH). Celle-ci procède au tirage au sort permettant d’attribuer un dossier à l’un des trente-neuf CPP que compte notre pays. Elle est par ailleurs chargée d’harmoniser les pratiques des comités de protection, de suivre les dossiers, et constitue enfin une instance d’appel en cas d’avis négatif. En l’absence d’avis positif, aucun projet de recherche ne peut être en effet lancé.

L’instauration de la Commission nationale et la procédure de tirage au sort constituent deux des avancées majeures de la loi Jardé. Il faut y ajouter l’élargissement du champ des recherches soumises pour avis – je fais ici référence aux recherches non interventionnelles – qui contribue à une sollicitation accrue des CPP.

Cette procédure ne donne pas entière satisfaction, mais elle est perfectible. Tel est le constat opéré par notre groupe ainsi que par les nombreux et différents acteurs que nous avons auditionnés.

Pour autant, tous les acteurs s’accordent à vouloir maintenir l’existant, considérant qu’il n’est pas utile de modifier encore notre corpus juridique. Tous – représentants des CPP et des usagers, direction générale de la santé – sont attachés au tirage au sort afin d’éviter tout conflit d’intérêt entre chercheurs, industriels de santé et CPP, ainsi que de mieux répartir la charge de travail entre les CPP.

Notre proposition de loi s’inscrit dans cet esprit et ne vise qu’à rendre le mécanisme plus opérationnel.

Partant du constat que les dossiers de recherche ne peuvent être étudiés dans les délais impartis – quarante-cinq jours – le dispositif vise à rendre plus « intelligent » le tirage au sort afin que les dossiers soient orientés vers un comité doté, en son sein ou par l’intermédiaire de son réseau, de la compétence nécessaire à l’évaluation de la nature du projet de recherche. Par exemple, la réglementation rend obligatoire, pour les projets impliquant des mineurs de moins de seize ans, la présence d’un pédiatre au sein des CPP ; or plus de la moitié d’entre eux ne sont pas en mesure de satisfaire à cette obligation. Par ailleurs, faute de secrétariat disponible, certains dossiers ne peuvent être immédiatement pris en compte, conduisant de facto à un retard de traitement.

Il n’est donc pas utile, sauf à considérer que le délai d’examen ne constitue pas un enjeu majeur pour les patients, les chercheurs ou les industriels de santé, d’inclure dans le tirage au sort des comités qui ne sont pas en mesure de mobiliser cette compétence indispensable à l’évaluation de la démarche éthique du projet.

Le dispositif proposé a été soumis aux différentes institutions, organismes et personnes consultées, qui l’ont jugé simple et facilement applicable. Pour autant, des ajustements sont apparus nécessaires, sur lesquels nous reviendrons à l’occasion de l’examen des amendements.

En bref, il faut imaginer une rédaction qui permette d’ajuster le tirage au sort en fonction de la disponibilité du CPP – présence d’un secrétaire, plan de charge permettant d’assurer la gestion d’un dossier supplémentaire, prise en compte des sessions des CPP – et des compétences requises par la nature du projet de recherche – sollicitation d’un spécialiste au sein du CPP ou via le réseau établi par lui. Mme Dufeu Schubert, pour le groupe La République en Marche, et M. Berta, pour le groupe MODEM, ne manqueront pas d’y revenir. Pour illustrer notre proposition, je vous renvoie à l’annexe au projet de rapport, qui résume l’effet attendu de la proposition de loi.

Cette proposition de loi ne prétend pas résoudre toutes les difficultés identifiées par les acteurs. Elle n’entend pas moins apporter une solution souple, opérationnelle et souvent attendue. Il s’agit d’un enjeu identifié dans le cadre du huitième Conseil stratégique des industries de santé (CSIS). Alors que l’ordre du jour du Parlement est particulièrement chargé, cette proposition de loi, examinée à l’occasion d’une journée réservée aux groupes minoritaires ou d’opposition, constitue le seul vecteur disponible pour favoriser des changements rapides. Le ministère de la santé, consulté, s’est spontanément rangé à notre proposition moyennant les quelques ajustements que nos collègues apporteront par voie d’amendements. Je me félicite d’ailleurs de la convergence de vue qui a régné à l’occasion des travaux préparatoires.

Au-delà, le rapport est l’occasion de proposer d’autres axes d’amélioration qui n’ont pas manqué d’être abordés au cours des auditions, et dont je me fais le modeste porte-parole. Je pense notamment aux moyens de fonctionnement dévolus aux CPP, à la reconnaissance des parcours des membres des CPP qui agissent bénévolement, ou à l’identification d’experts via une liste nationale pour faciliter le travail des CPP. Sur toutes ces questions, il appartient plutôt au pouvoir exécutif, dûment habilité, d’apporter des réponses, celles-ci n’appelant pas de modifications législatives.

Mme Audrey Dufeu Schubert. Monsieur le rapporteur, merci pour vos travaux et votre exposé.

La recherche clinique en France est un secteur d’excellence, où nos chercheurs français démontrent depuis plus d’un siècle leur capacité à innover. Ils contribuent au quotidien à faire rayonner la France, à faire progresser la science et à améliorer la santé humaine.

Une recherche clinique performante et ambitieuse est un enjeu stratégique pour notre pays. Les cycles d’innovation dans ce secteur sont très rapides ; ils sont témoins de notre agilité scientifique au seul service de nos concitoyens. Ainsi, notre système doit pouvoir s’adapter et être réactif, avec le seul objectif et la seule intention d’accroître les bénéfices apportés à nos malades souffrant d’affections pour lesquelles l’innovation thérapeutique est parfois leur seul espoir.

Dans un contexte européen où la concurrence est très forte, notre responsabilité en tant que législateur est de préserver l’attractivité de notre pays en matière de recherche clinique afin de garantir toujours aux patients un accès à l’innovation. Ce texte ne remet pas en cause la loi Jardé votée en 2012 et appliquée depuis seulement 2016. Bien que de nombreux points soient perfectibles, je vous rejoins, monsieur le rapporteur, sur le besoin d’adapter le processus du parcours de recherche clinique en modifiant les modalités relatives aux CPP. Notre groupe souhaite adapter la loi tout en garantissant l’indépendance et la transparence des CPP, en préservant l’efficience de notre système de recherche clinique, et en se gardant de toute inflation législative inutile.

Aimé Césaire a écrit que « la vérité scientifique a pour signe la cohérence et l’efficacité ». Mes chers collègues, soyons aujourd’hui cohérents et efficaces dans l’étude de ce texte en affinant les conditions de déroulement du tirage au sort des CPP et en faisant en sorte que la recherche clinique en France puisse être innovante, agile et au service de nos malades.

M. Jean-Carles Grelier. Comme l’a rappelé le rapporteur, les CPP ne sont pas des autorités administratives indépendantes ni des autorités juridictionnelles : ils n’ont donc pas à dire le droit. Ce ne sont pas non plus des autorités philosophiques ou religieuses : ils n’ont donc pas à dire la morale. Ils ont à dire beaucoup plus que cela : ils ont à dire l’éthique en matière d’expérimentation et de recherche impliquant la personne humaine.

Pour dire l’éthique correctement, il faut être indépendant, et pour être indépendant il faut maintenir le caractère aléatoire de la désignation des CPP, ce à quoi la proposition de loi ne contrevient pas puisqu’elle aménage, facilite et renforce le caractère aléatoire de cette désignation. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains lui apportera son soutien.

Comme il est précisé dans le rapport, il convient de donner aux CPP les moyens de fonctionner, et ce dans des délais rapides pour que l’échelon administratif et l’échelon éthique ne constituent pas un frein au développement de la recherche et de l’innovation. France Biotech évalue à près de 2 milliards d’euros le manque à gagner annuel dû aux tests et essais cliniques qui ne peuvent être réalisés en France aujourd’hui, souvent en raison de blocages administratifs et de délais. Pour que notre pays conserve sa place et son rang dans la recherche et l’innovation médicales, il convient que le Gouvernement se saisisse de cette question par voie réglementaire et donne aux CPP les moyens de leur fonctionnement, que vous avez fort justement évalués dans votre rapport.

M. Philippe Berta. La recherche académique et industrielle en biologie-santé constitue l’un des principaux moteurs des publications et des brevets français. Cette recherche a pour objet de conduire à la mise sur le marché de nouveaux médicaments, essentiellement aujourd’hui sous forme de bio-médicaments, mais aussi de nouveaux outils et biomarqueurs de diagnostic ou encore de nouveaux dispositifs médicaux. Ces innovations contribuent pleinement, à travers les big pharma, les bio-pharmas, les biotechs et les centaines de TPE-PME du secteur, à la richesse de notre pays.

Le monde de la santé est un monde hautement concurrentiel. Tout retard pris met en péril la compétitivité et donc la pérennité de nos entreprises, ainsi que notre capacité à attirer les entreprises étrangères sur notre territoire. Si des centaines de milliers d’euros sont mis en jeu par le développement d’un dispositif médical, ce sont des millions d’euros qui le sont pour celui d’un médicament. Divers rapports publiés ces derniers mois par diverses institutions ou syndicats professionnels ont révélé que le principal goulet d’étranglement, source de retard dans la mise sur le marché de ces innovations, se situait dans la phase finale de leur développement, à savoir la phase des essais, dits « cliniques » ou « thérapeutiques », sur le patient.

Si les éléments retardants mis en cause au cours de cette phase sont multiples, la modification par voie d’amendements de la loi Jardé en 2015, du mode de sélection du CPP chargé du suivi de cette évaluation clinique en est assurément un. La sélection « randomisée » est unanimement dénoncée. Si l’on en perçoit l’objectif probable, à savoir parer au risque d’un éventuel conflit d’intérêts entre producteur et évaluateur, celui qu’une étude soit attribuée à un comité ne possédant pas, de par sa composition, les compétences nécessaires à la validation n’a pas été anticipé. Dans beaucoup de situations, cela a considérablement allongé les délais de l’évaluation, pour des innovations pour lesquelles le time to market est majeur, mettant en péril tout un modèle économique. L’effet s’est vite fait sentir, les chiffres nous apprenant que plus de 60 % des essais cliniques ont quitté notre pays ces douze derniers mois. Il en résulte que, premièrement, nos patients ne sont plus en première ligne pour bénéficier de ces innovations ; deuxièmement, des millions d’euros ne sont plus investis dans notre recherche clinique, et par contrecoup dans nos hôpitaux ; troisièmement, des entreprises quittent le pays, ou d’autres ne s’y implantent pas. Enfin, tout simplement, c’est de la perte de contrôle de nos essais cliniques et de leur qualité qu’il s’agit.

Le groupe MODEM est conscient que cette proposition de loi ne constitue pas toute la solution, mais qu’elle en est sans nul doute une partie. Elle donnera, de plus, un signal positif fort à la filière, démontrant que la représentation nationale sait mesurer l’importance de cette dernière pour notre santé et pour notre économie.

Nous y apportons donc tout notre soutien.

M. Jean-Hugues Ratenon. Les comités de protection des personnes dont il est question dans cette proposition de loi déposée par le groupe MODEM visent à s’assurer que les recherches sur les personnes humaines respectent les normes scientifiques, éthiques et légales. Ce sont donc des filets de sécurité importants pour protéger les volontaires et les patients. À chaque essai clinique, un tirage au sort est effectué pour désigner un comité qui sera chargé d’examiner la demande d’essais cliniques et ses résultats.

Le principe du tirage au sort a été instauré pour éviter les risques de conflit d’intérêts. Autant vous dire que nous avons eu du mal à comprendre, dans un premier temps, pourquoi nos collègues centristes nous ont proposé de réduire la possibilité de tirage au sort. Puis nous avons travaillé davantage sur le sujet et deux éléments nous ont alertés. Premièrement, il se trouve que cette proposition reprend mot pour mot ce que propose le lobby des industriels du milieu pharmaceutique français. En effet, ces entreprises n’ont de cesse de se plaindre que les délais pour les essais cliniques sont trop longs et que cela leur coûte donc trop cher. Deuxièmement, je me demande si le rapporteur de cette proposition de loi est le député le plus objectif sur la question. En effet, monsieur le rapporteur, votre déclaration de patrimoine nous apprend que vous possédez 92 parts chez Sanofi, grand laboratoire pharmaceutique, et il est indiqué, sur le site gouvernemental transparence.sante.gouv.fr, que vous avez reçu plus de 3 000 euros de cadeaux des laboratoires entre 2012 et 2016. (Exclamations.) Vous pouvez peut-être infirmer cela, si je me trompe.

Il y a quelques mois, on nous avait promis la moralisation de la vie publique. Aujourd’hui, ce texte est la preuve que l’Assemblée nationale n’est pas libérée des lobbies et c’est dommage. En l’état, le groupe La France insoumise votera contre ce texte.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Monsieur le rapporteur, je tiens tout d’abord à saluer la qualité de votre travail sur un sujet important qu’il est difficile de traiter tant il est sensible.

On se souvient de l’émoi qu’avait suscité le décès d’un patient volontaire lors d’un essai clinique au centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes en janvier 2016. L’objet premier de la loi Jardé était de moderniser et de simplifier le cadre juridique des recherches sur la personne afin d’encourager la recherche sur la personne tout en garantissant un très haut niveau de protection des patients volontaires pour participer aux recherches.

Lors des débats sur la proposition de loi Jardé, les deux chambres étaient en désaccord sur les modalités de sélection du CPP. La loi a finalement fixé le principe d’une répartition aléatoire des protocoles entre les comités de protection des personnes, par opposition au libre choix des promoteurs et en vue de garantir leur indépendance et d’écarter tout risque de conflit d’intérêts. Il ne me paraît a priori pas souhaitable de revenir sur ces choix, pour éviter le moindre doute sur leur indépendance vis-à-vis des laboratoires.

Pour autant, il est indéniable que cette procédure a eu des effets adverses importants en matière de délais, en raison notamment de la composition des CPP, qui ne disposent pas toujours des compétences et de l’expertise technique requise pour évaluer de manière efficace les demandes qui leur sont faites. Le maintien de cette situation se fait évidemment au détriment de la recherche française, mais également des patients. Aujourd’hui, selon les professionnels du secteur de l’innovation thérapeutique, 68 % des essais cliniques qu’ils mettent en œuvre sont effectués à l’étranger.

Le dispositif prévu à l’article unique de cette proposition de loi a l’avantage, tout en conservant le système du tirage au sort, de préciser son périmètre pour ne conserver que des comités incluant un ou des membres dotés de l’expertise nécessaire à l’examen du projet de recherche concerné. Nous abordons donc favorablement l’examen de ce texte qui va dans le bon sens et favorisera un secteur potentiellement grand pourvoyeur d’emplois à haute valeur ajoutée, tout en conservant l’exigence d’indépendance nécessaire à la prévention des conflits d’intérêts.

M. Pierre Dharréville. Depuis la loi de finances pour 2012, les CPP reçoivent une dotation de l’État. Initialement fixée à 3,5 millions d’euros, cette dotation s’élève aujourd’hui à 3,3 millions d’euros seulement. À cela s’ajoute le fait que les CPP ne peuvent recruter des personnels salariés. Leur fonctionnement repose donc exclusivement sur le bénévolat des membres y siégeant et sur la mise à disposition de locaux et de personnels par les établissements publics de santé auxquels ils sont rattachés.

La présente proposition de loi revient pour partie sur le caractère aléatoire de la désignation des CPP pour expertiser les projets de recherche. On est en droit de se demander si ce texte ne va pas fragiliser la lutte contre les conflits d’intérêts dans le milieu de la recherche médicale. Comme nous le soulignions lors des débats sur la loi Jardé, l’attribution aléatoire des protocoles au comité de protection des personnes est d’une importance cruciale pour éviter le compérage. Or, à notre sens, cette proposition vient limiter ce caractère aléatoire de la désignation, puisque les comités seraient choisis en fonction des compétences des personnes qui y siègent et, au prétexte de l’efficacité, même si nous savons qu’elle a été effectivement réclamée par les industriels des entreprises du médicament, les projets de recherche risqueraient d’être expertisés par un nombre restreint de CPP, et porter atteinte à une confiance déjà entamée.

Plus largement, le débat sur cette proposition de loi renvoie à des enjeux fondamentaux liés à la maîtrise publique et à la transparence des recherches biomédicales en vue de la commercialisation de nouveaux médicaments et traitements. C’est un sujet important qui a resurgi à plusieurs reprises dans l’actualité ces derniers temps. La recherche clinique repose aujourd’hui en grande partie sur l’industrie pharmaceutique et les récents scandales sanitaires appellent au contraire à davantage de régulation publique. La mise en place d’un pôle public du médicament serait de nature à se réapproprier la chaîne du médicament – recherche, production, distribution – qui se trouve aujourd’hui presque entièrement entre les mains du privé. Il s’agit d’un enjeu économique et de démocratie sanitaire.

Mme Josiane Corneloup. Monsieur le rapporteur, je vous remercie de nous présenter une proposition de loi qui vise à lever certains freins au développement de la recherche médicale dans notre pays.

Nous le savons, la recherche clinique est cruciale dans la mise au point de nouveaux médicaments. La recherche impliquant la personne humaine est naturellement encadrée, elle ne peut être mise en œuvre qu’après avis favorable du comité de protection des personnes et autorisation de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Dans ce cadre, le CPP évalue des protocoles de recherche qui lui sont soumis par les promoteurs afin de protéger les personnes qui se prêtent à ces recherches, d’évaluer le bien-fondé et la pertinence du projet de recherche et sa qualité méthodologique.

Il faut rappeler que la France est un grand acteur de la recherche clinique mondiale grâce à l’excellent niveau académique des équipes de recherche et la présence de bonnes infrastructures. Elle concentre ainsi 10 % des études internationales, avec un investissement très fort en oncologie qui concerne 45 % des études faites dans ce domaine.

Cette vivacité se mesure également par la bonne dynamique de recrutement, notamment dans la phase la plus importante de la dernière étape avant la mise sur le marché d’une molécule.

Les patients concernés font souvent face à un échec thérapeutique. En participant aux essais cliniques, ils peuvent accéder à des traitements potentiellement bénéfiques.

La bonne santé de la recherche se heurte toutefois aux délais administratifs de mise en place des essais, qui restent encore trop longs. En effet, seulement un dossier sur deux est traité dans le délai réglementaire de cinquante-sept jours. Dans ce cadre, la désignation aléatoire des comités chargés d’émettre un avis sur les protocoles de recherche apparaît inadaptée.

Les évolutions présentées dans cette proposition de loi sont de nature à fluidifier le processus d’expertise et à raccourcir les délais. Il convient donc que nous votions ce texte.

La France ne doit pas décrocher. La dégradation de l’attractivité française en matière de recherche a également des répercussions économiques pour les établissements hospitaliers de l’hexagone. L’attractivité de la France en matière de recherche clinique doit devenir un enjeu prioritaire pour le pays, pour les patients, mais aussi pour la vitalité de notre économie.

M. Belkhir Belhaddad. Monsieur le rapporteur, merci pour la qualité et la précision de votre rapport et pour cette proposition de loi qui nous permet de bien appréhender le fonctionnement des comités de protection des personnes, ainsi que les tensions auxquelles ils sont confrontés pour faire face à la fois à l’évolution de la recherche et à celle des normes, notamment européennes.

J’apprécie la simplicité et le pragmatisme des propositions formulées dans cet article unique qui permet, par de simples ajustements de la loi Jardé, de mieux équilibrer la charge entre les comités et de s’assurer que les compétences requises sont bien présentes en leur sein.

Toutefois, le tableau que dresse votre rapport, notamment quant aux moyens dont disposent ces comités en termes de secrétariat ou de formation, me paraît assez inquiétant au regard de la sensibilité des enjeux, tant éthiques qu’économiques. Aussi, parmi les dernières pistes que vous formulez, visant notamment à améliorer les conditions matérielles des comités de protection des personnes, pouvez-vous nous indiquer comment elles ont été accueillies lors de vos auditions par la direction générale de la santé ? En d’autres termes, serons-nous en position, à l’automne, dans le cadre de la préparation du budget, de corriger cette fragilité en dépenses comme en recettes, pour nous rapprocher des pratiques de nos voisins européens ?

M. Dino Cinieri. Merci, madame la présidente, de m’accueillir dans votre commission.

Je tiens à saluer notre rapporteur pour le travail qu’il a effectué, et souhaite rebondir sur les propos tenus par M. Grelier. Les CPP se prononcent sur les conditions dans lesquelles le promoteur de la recherche, personne physique ou morale, qui prend l’initiative de la recherche, assure la protection des personnes, notamment des participants, sur le bien-fondé et la pertinence du projet de recherche et sur la qualité méthodique.

Les CPP sont agréés par le ministère chargé de la santé pour une durée de six ans et ont une compétence régionale. Cependant, leur composition, variable d’un territoire à l’autre, ne permet pas toujours de garantir l’expertise nécessaire à l’évaluation des projets de recherche. L’introduction du tirage au sort a en effet eu pour conséquence la possibilité de désigner un CPP dont aucun membre ne dispose de l’expertise nécessaire à l’examen du projet de recherche dont il est saisi. La proposition de loi vise donc à pallier cet éventuel dysfonctionnement en prévoyant que le tirage au sort se fait parmi les comités incluant un ou plusieurs membres dont l’expertise est nécessaire pour rendre l’avis. Pouvez-vous, monsieur le rapporteur, me le confirmer ?

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Madame Dufeu Schubert, comme vous l’avez souligné, nous souhaitons rendre le système plus efficace, plus agile. Je tiens à rappeler que les premiers bénéficiaires des nouveaux moyens thérapeutiques sont les patients. Viennent ensuite toutes les équipes universitaires et hospitalières qui ont une véritable excellence dans notre pays et qu’il faut aider, enfin les TPE, PME, l’industrie pharmaceutique qui sont là pour produire. Mais c’est l’ensemble de la chaîne que nous soutenons. Cette proposition de loi permet de rendre le système plus réactif, ce qui profitera à tout le monde.

Monsieur Grelier, il va de soi qu’un CPP a d’abord à dire l’éthique. C’est bien pourquoi nous souhaitons conserver le caractère aléatoire du tirage au sort, afin d’éviter les conflits d’intérêts.

Ce n’est pas au Parlement de juger des moyens alloués aux CPP, mais au Gouvernement. Je reviendrai sur les propositions que l’on peut faire en ce qui concerne le secrétariat de ces comités. Il faut savoir que chaque CPP dispose d’un seul équivalent temps plein (ETP). Il ne peut donc pas être réactif toutes les semaines de l’année, car il faut prendre en considération les vacances et les absences. Il conviendra donc de proposer d’augmenter le nombre de postes dédiés au secrétariat.

Monsieur Berta, vous avez insisté sur les innovations qui contribuent, à travers l’investissement des TPE et des PME, à la richesse de notre pays. Je me suis rendu, il y a peu, dans un salon sur l’intelligence artificielle, où j’ai pu constater que la majorité des projets présentés étaient d’ordre médical. Actuellement, l’investissement dans le secteur médical est conséquent. Nous devons donc encourager la filière, afin de conserver cette excellence sur le territoire national. Les industriels trouvent en effet que les lourdeurs administratives sont trop fortes en France et ont tendance à préférer d’autres pays que le nôtre, ce qui est regrettable.

Monsieur Ratenon, je m’exprime ici en tant que rapporteur et non à titre personnel. Je regrette les attaques ad hominem auxquelles vous vous êtes livré. Cette commission n’est pas le lieu pour vous répondre, et j’ai déjà suffisamment répondu dans la presse.

Je rappelle que nous sommes attachés, comme tout le monde, à protéger les personnes. Nous avons auditionné les membres des CPP, les associations de représentants des usagers du système de santé, les administrations, les représentants des TPE-PME, etc. : tous sont du même avis. Ils considèrent que les CPP visent d’abord à assurer la protection des personnes, et il n’est absolument pas question de remettre en cause la désignation aléatoire.

Madame Firmin Le Bodo, nous souhaitons tous, naturellement, éviter les conflits d’intérêts. Les moyens des CPP ne sont pas assez importants. Il faut savoir que les gens qui y siègent sont des bénévoles et qu’ils prennent une journée par mois pour venir étudier les dossiers. Auparavant, ils examinaient en moyenne trois ou quatre dossiers par mois, contre neuf à dix aujourd’hui, avec, à chaque fois un rapporteur, une instruction. Je pense qu’il faudra valoriser ce temps bénévole.

Monsieur Dharréville, les CPP ont trait aux recherches portant sur les médicaments, les dispositifs médicaux, et aussi aux recherches non interventionnelles. Tout étudiant en médecine, tout chercheur, qu’il s’agisse d’une thèse, d’un travail, d’une publication, est amené à aller rechercher des dossiers au sein de son service hospitalier. Or le fait d’aller chercher vingt ou trente dossiers pour faire une étude est désormais soumis au CPP, puisque ce travail sur dossier est une recherche clinique. Actuellement, le délai de réponse d’un CPP peut être de trois, quatre à cinq mois. Il convient donc de réduire ce temps de réponse afin d’éviter de retarder l’ensemble de la filière.

Enfin, vous évoquez la mise en place d’un pôle public du médicament. Or il ne s’agit pas du sujet de la proposition de loi.

Monsieur Belhaddad, notre proposition de loi est modeste, mais tout le monde reconnaît qu’elle est simple et efficace. Avec quelques simples mots, on peut changer de façon majeure la recherche dans notre pays.

Bien évidemment, la direction générale de la santé (DGS) reconnaît la faiblesse des moyens alloués aux CPP. À nous de travailler à l’automne, dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances (PLF), pour abonder la ligne budgétaire qui lui est consacrée.

Monsieur Cinieri, il ne s’agit pas de tout remettre en cause : nous voulons seulement rendre le tirage au sort plus simple et donc plus intelligent. Comme je l’ai dit tout à l’heure, la moitié seulement des trente-neuf CPP dispose de la qualification pédiatrique. Lorsque l’on tire au sort un comité qui n’a pas cette compétence, on perd deux mois puisqu’il faut à nouveau procéder à un tirage au sort. Et si c’est à nouveau un CPP qui n’a pas la compétence pédiatrique qui est tiré au sort, c’est encore reparti pour deux mois. Nous voulons donc simplifier le système et pouvoir tirer au sort seulement les comités qui ont la compétence pédiatrique. Nous éviterons ainsi de perdre deux, quatre ou six mois.

Enfin, je remercie Mme Corneloup pour son soutien.

La commission en vient à l’examen de l’article unique.

Article unique

La commission examine l’amendement AS4 de M. Adrien Quatennens.

M. Adrien Quatennens. S’ils sont indispensables à la recherche médicale, les essais cliniques peuvent aussi présenter des risques graves, comme nous en avons eu la preuve avec la mort d’un patient en 2016, lors d’une étude menée par le laboratoire portugais Bial à Rennes. Les essais, souvent commandés par des industriels du médicament, nécessitent une grande vigilance quant aux risques auxquels sont exposés les patients volontaires. Leur consentement libre et informé doit être assuré, et c’est pour veiller de façon indépendante et pluridisciplinaire à ce que la méthodologie d’un essai clinique intègre la protection des patients que les comités de protection des personnes ont été créés en 1984, puis renforcés en 2004.

Pour assurer la neutralité et la parfaite indépendance des CPP, le législateur a voulu que chaque étude soit évaluée par un CPP tiré au sort – un dispositif visant à lutter contre la tendance fâcheuse et persistante des industriels à chercher à influencer préalablement les professionnels de santé. Cette vigilance n’a d’ailleurs pas d’effets négatifs sur la quantité d’essais menés puisque, contrairement à ce qu’affirme l’industrie pharmaceutique, la France reste dans la fourchette haute du nombre d’essais. Au contraire, notre législation rassure les patients et permet de sécuriser les volontaires.

Nous nous opposons donc fermement à cette proposition de loi qui vise à réduire l’indépendance des comités de protection des personnes. Le groupe La France insoumise se montre favorable à toutes les propositions allant dans le sens de l’intérêt général, quel que soit le groupe politique dont elles émanent. En revanche, quand ces propositions se font explicitement l’écho de l’industrie pharmaceutique et de son lobby français, nous n’avons pas d’autre choix que de réclamer la suppression de cet article.

Par ailleurs, si tous les députés rendent publics leur patrimoine et leurs prises d’intérêt, ce n’est pas par coquetterie, mais bien parce que cette démarche obligatoire a un intérêt. Aussi, lorsque nous prenons connaissance, monsieur le rapporteur, de l’information publique selon laquelle vous possédez des actions dans 34 groupes, notamment le fleuron pharmaceutique Sanofi, dont vous détenez 92 parts, et que nous mentionnons cette information au cours de nos débats, n’est-ce pas une attaque ad hominem : il ne s’agit que de mentionner une information afin d’éclairer notre débat.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. M. le rapporteur vous ayant déjà répondu sur ce point, il n’y a plus à y revenir, monsieur Quatennens.

M. Adrien Quatennens. Cette ambiance est insupportable, madame la présidente ! Il ne s’agit en rien d’une mise en cause personnelle : nous ne faisons que rappeler une information publique constituant un élément central de notre débat – et si nous ne pouvons pas le faire, alors on se demande à quoi sert le travail du déontologue de l’Assemblée nationale.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Vous avez déjà donné cette information et il ne sert à rien de le refaire à chaque fois que vous prenez la parole. Je considère d’ailleurs qu’en cherchant à exploiter politiquement un argument qui n’a pas lieu de l’être, vous vous livrez bel et bien à une mise en cause personnelle.

M. Adrien Quatennens. Ne souhaitons-nous pas tous la moralisation de la vie politique ?

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Les déclarations d’intérêts permettent d’accéder aux informations de façon tout à fait transparente, et vous avez évoqué à deux reprises celles relatives à M. le rapporteur sans que personne ne vous empêche de parler. Il me semble que je peux maintenant vous demander de passer à autre chose sans que vous vous considériez comme une victime, monsieur Quatennens.

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Je constate, monsieur Quatennens, que nous avons la même démarche, le même souci d’éthique, mais que nous ne parvenons pas à la même conclusion. L’objectif de la proposition de loi n’est nullement de remettre en question l’aspect aléatoire induit par le tirage au sort. Cela étant, tel qu’il est conçu, ce tirage au sort ne donne pas entière satisfaction.

Ainsi, la réglementation prévoit la nécessité de recourir à un pédiatre lorsque les études portent sur des personnes de moins de seize ans ; de même, certaines personnes majeures ne sont pas en mesure d’exprimer valablement leur consentement. Dans ces deux cas, il est nécessaire que les personnes concernées puissent être représentées au sein du CPP : c’est le fait de ne rien prévoir pour défendre leurs intérêts qui serait contraire à l’éthique. Par ailleurs, notre proposition vise également à ce qu’il soit tenu compte de la disponibilité effective des CPP pour éviter des retards fâcheux.

Je ne comprends donc pas que vous soyez opposé à une solution répondant à toutes les préoccupations que nous partageons.

Pour ce qui est des attaques ad hominem portées contre ma personne, ma déclaration d’intérêts, comme vous l’avez dit, est publique, et j’estime n’avoir à rougir d’aucune des informations figurant dans cette déclaration – au contraire, j’ai mis un point d’honneur à ne rien omettre. Ce qui m’étonne, en revanche, c’est votre insistance à vouloir m’en faire reproche. Pour ma part, je suis fier d’investir dans des sociétés françaises et vous devriez le comprendre, même si cela ne correspond pas à votre façon de voir les choses.

M. Philippe Berta. Je me demande si je n’aurais pas dû, avant de venir, passer un coup de fil à ma banque afin de savoir quelles sont les actions composant le petit PEA que je crois encore détenir…

Plus sérieusement, j’estime que nous ne devons pas perdre de vue ce qui se trouve au centre de nos débats, à savoir le patient. Je viens de passer cinq jours au sein d’un service d’oncologie, et je me disais que les personnes qui j’y ai croisées aimeraient sans doute pouvoir faire l’objet d’un essai clinique dans leur phase de développement pathologique ultime.

Pour ce qui est de la pédiatrie, chacun doit bien comprendre les enjeux essentiels qui s’y rattachent. Nous avons actuellement 8 000 pathologies génétiques à combattre, dont la majorité sont pédiatriques, et je peux vous assurer que les enfants concernés, tout comme leurs parents, attendent avec impatience les essais cliniques des médicaments issus de la recherche pharmaceutique, actuellement en pleine explosion. Tout ce qui peut aider à ce que ces essais se fassent en France me semble souhaitable.

Par ailleurs, résumer la filière santé à l’industrie pharmaceutique et à ses quelques grands groupes, parmi lesquels Sanofi et Pierre Fabre, c’est ne rien comprendre à cette filière. Aujourd’hui, elle est majoritairement constituée de centaines de biotechnologies – que l’on appelle les biotechnologies rouges – et de milliers d’entreprises et de dispositifs médicaux implantables (DMI) ou non implantables (DMNI), auxquels il faut donner la possibilité de se développer. Savez-vous qu’en 2017, il y a eu, en France et dans la majorité des pays occidentaux, plus d’investissements dans le domaine de la santé que dans celui du numérique ? Nous devons donc veiller à être très présents dans ce domaine – et dans les meilleures conditions possibles.

Mme Audrey Dufeu Schubert. Le groupe La République en Marche estime qu’il est nécessaire de faire évoluer la loi Jardé, car celle-ci, dans sa rédaction actuelle, risque de freiner la recherche clinique. Afin de sortir de la logique purement technocratique de cette loi pour aller vers une logique plus réaliste, basée sur une approche de terrain, il nous paraît judicieux de modifier les conditions du tirage au sort afin de le rendre plus intelligent.

Vous dites, monsieur Quatennens, que cette proposition reproduit à l’identique les souhaits des industriels pharmaceutiques : en réalité, elle traduit surtout les aspirations des patients atteints de maladies graves, pour lesquels la recherche clinique constitue le seul espoir d’accéder aux thérapies innovantes. Vous remettez en question l’indépendance des chercheurs et des médecins français, et vous confondez les notions d’investigateur et de promoteur dans les programmes de recherche. Or, c’est justement pour garantir l’éthique et toute la transparence nécessaire que les CPP ont été mis en place. Quant à l’égalitarisme du tirage au sort sans ajustement efficient que vous prônez, il ne ferait que ralentir l’accès à l’innovation des patients. En tant que législateur, nous avons la responsabilité de réajuster la loi afin d’améliorer la situation de ces patients, c’est pourquoi nous sommes défavorables à cet amendement.

M. Adrien Quatennens. M. le rapporteur a raison de souligner que les informations que nous avons citées sont publiques et que, dès lors, il n’y a aucune raison d’en rougir. Cela dit, il nous a semblé que ces informations pouvaient présenter un intérêt dans le cadre de notre débat, c’est pourquoi nous les avons mentionnées.

Sur le fond, vous nous dites que le tirage au sort tel qu’il est actuellement pratiqué aboutit parfois à la mise en place d’un CPP qui n’est pas compétent, ce qui nécessite un deuxième tirage au sort et entraîne donc une perte de temps – que vous déplorez avant tout, j’imagine, parce que c’est aussi une perte d’argent pour l’industrie pharmaceutique. (Exclamations.)

Cependant, vous ne devez pas perdre de vue que, s’il n’est pas exempt de tout défaut, le tirage au sort reste un système permettant de garantir la protection des patients et l’indépendance des comités. À mon sens, c’est là le point central de notre désaccord.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS1 de Mme Audrey Dufeu Schubert.

Mme Audrey Dufeu Schubert. Le tirage au sort tel qu’il est prévu aujourd’hui par la loi ne tient pas compte des « empêchements » – congés, arrêts maladie, etc. – des secrétariats permanents des comités de protection des personnes. Par ailleurs, certains comités peinent à faire face à l’augmentation de leur activité – comme l’a dit M. le rapporteur, les CPP ont dû passer de trois dossiers d’évaluation mensuels à huit, neuf, parfois même dix dossiers mensuels – et se retrouvent dans l’impossibilité de rendre leur avis dans les délais. Je ne parle pas d’argent, monsieur Quatennens, mais bien du temps qui passe, et de la perte de chance qui peut en résulter, pour certains patients, d’avoir accès à la meilleure thérapeutique.

Notre amendement AS1 a pour objet de permettre de retirer du tirage au sort un comité lorsque ce dernier se trouve dans l’impossibilité de recevoir un dossier. Cet amendement logique et intelligent vise à apporter plus de cohérence et d’agilité dans l’évaluation des programmes de recherche. Il soulève aussi la question des moyens alloués aux CPP qui, je le rappelle, fonctionnent avec très peu de moyens grâce à la participation de bénévoles : sans doute faudra-t-il engager prochainement une réflexion sur la meilleure façon de préserver leur fonctionnement et de promouvoir la recherche française.

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Je suis évidemment favorable à cette modification qui résulte du travail accompli en commun avec Mme Dufeu Schubert lors des travaux préparatoires à l’examen de cette proposition de loi.

Les auditions ont rapidement fait apparaître la nécessité de sélectionner les comités de protection des personnes effectivement disponibles pour traiter les dossiers dans le cadre des délais réglementaires. Parfois, le dossier est renvoyé à un CPP qui ne peut réceptionner le dossier et le transmettre à un rapporteur, faute de secrétaire disponible. Dans d’autres cas, le plan de charge du CPP ne permet pas d’examiner en temps voulu le dossier. Dans d’autres encore, la réunion programmée par le CPP est trop proche du tirage au sort pour permettre un examen approprié : dans ce cas, le dossier est examiné lors d’une prochaine session, ce qui peut occasionner un dépassement du délai réglementaire.

Cette modification de bon sens n’empêche pas non plus de renforcer substantiellement les moyens des CPP. Je vous renvoie à cet effet à mon rapport, qui évoque notamment la nécessité de renforcer les effectifs de soutien.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS2 de M. Philippe Berta.

M. Philippe Berta. La rédaction de la proposition de loi n’envisage, pour l’ajustement du tirage au sort, que l’hypothèse de la présence ou non d’un expert au sein du comité. Le terme « expertise » se révèle cependant peu adapté, le comité étant plutôt composé de spécialistes ou de personnalités qualifiées. Par ailleurs, le terme d’« expert » renvoie aux personnalités mobilisées par un CPP donné lorsque la nature de la recherche le nécessite. Enfin, ce terme semble exclure le cas des pédiatres et des personnalités qualifiées pour les travaux portant sur des personnes hors d’état d’exprimer leur consentement qui, elles, peuvent délibérer au sein des comités.

C’est pourquoi il est suggéré de lui substituer le terme de « compétence ». Il ne s’agit pas de préjuger ou non de l’incompétence de tel ou tel CPP, mais plutôt de déterminer si le CPP est en mesure de mobiliser une spécialité requise au sein de ses membres, mais aussi de son réseau.

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Je suis également favorable à cette modification qui résulte du travail accompli en commun avec M. Berta lors des travaux préparatoires à l’examen de cette proposition de loi.

Le système actuel, résultant de l’application de la loi Jardé, est assez compliqué. On parle de « spécialistes » – les pédiatres, les oncologues, les personnes chargées de représenter celles n’ayant pas la capacité d’exprimer leur consentement –, mais aussi d’« experts » – dans le domaine des radiations ionisantes, ou pour ce qui est de la première administration d’un traitement à l’homme –, et il peut y avoir une confusion entre les deux termes. Pour cette raison, je suis tout à fait favorable à ce qu’on parle de compétence plutôt que d’expertise.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article unique modifié.

Après l’article unique

La commission est saisie de l’amendement AS5 de Mme Caroline Fiat.

M. Adrien Quatennens. En 2015, les cinq principales industries pharmaceutiques affichaient plus de 200 milliards d’euros de revenus, pour un bénéfice de 47 milliards d’euros.

En avril dernier, la presse financière britannique diffusait des extraits d’une note d’un analyste de Goldman Sachs consacrée au défi économique que représentaient pour le secteur pharmaceutique les nombreux progrès enregistrés sur l’effectivité des thérapies géniques. Cette note, traduisant une certaine vision du monde, peut se résumer dans l’interrogation qui la conclut : « Guérir des patients est-il un modèle économique soutenable ? »

Ce cynisme choquant est révélateur de la politique inacceptable pratiquée par les industriels du secteur, en France comme ailleurs, pour lesquels la santé est avant tout un marché confortable. Les actionnaires y sont rémunérés à hauteur de 20 % depuis plusieurs décennies, les bénéfices y battent de nouveaux records chaque année, et les grands groupes sont tellement puissants qu’ils influencent régulièrement les décideurs politiques, souvent à la lisière de la légalité et parfois même en dehors. Dans le même temps, près d’un Français sur deux renonce aux soins pour des raisons financières.

Tant d’opulence au mépris de la santé et de la dignité humaine n’est pas supportable. Vous le savez, La France insoumise défend une sécurité sociale intégrale et universelle, mais notre programme, « L’Avenir en commun », contient aussi une proposition relative à la constitution d’un pôle public de recherche biomédicale et de production du médicament. Un tel pôle aurait des effets positifs en matière de santé publique, ainsi que pour les finances sociales, puisqu’il pourrait limiter la dépendance aux acteurs privés, soumis à la course aux profits à tout prix, et assurer une recherche planifiée sur le long terme, afin de répondre aux défis sanitaires du xxie siècle.

La modernité se trouve dans la constitution de ce pôle public responsable de l’intérêt général, et non pas dans une confiance aveugle envers les opérateurs privés, responsables de l’intérêt du chiffre d’affaires. Notre amendement vise donc à demander au Gouvernement d’étudier la faisabilité de la constitution de ce pôle public du médicament.

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Cet amendement n’a qu’un lien très indirect avec le sujet que nous abordons aujourd’hui, à savoir le tirage au sort des comités de protection des personnes. Je rappelle que le champ est plus large que celui des médicaments et couvre l’ensemble des produits de santé et des recherches non interventionnelles. L’objet de la proposition de loi n’est donc pas d’aborder l’organisation du secteur pharmaceutique ni la production du médicament.

Comme vous, je condamne l’interrogation concluant le rapport de Goldman Sachs. Cependant, nous le savons, les médicaments vont devenir de plus en plus chers, leur mise au point nécessitant toujours davantage de recherche. Dans ce contexte, il n’est évidemment pas question d’avoir une confiance aveugle dans l’industrie pharmaceutique, et le rôle du Parlement consiste bien à faire des propositions visant à encadrer ses pratiques : tel est l’objectif de ce texte.

En revanche, et c’est là que nos points de vue divergent, j’estime pour ma part que la recherche n’a pas vocation à être effectuée uniquement par le secteur public. Si aujourd’hui l’essentiel de la recherche, notamment de la recherche clinique, se fait dans le cadre de l’université et des hôpitaux publics, la mise en application des résultats obtenus peut, elle, être confiée à des acteurs privés. Notre rôle est de permettre le renforcement des liens entre les deux secteurs, et de veiller à ce que l’intervention d’acteurs privés ne donne pas lieu à des dérives.

Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable à l’amendement AS5.

Mme Audrey Dufeu Schubert. La position du groupe La République en Marche rejoint celle du rapporteur : effectivement, cet amendement est sans rapport avec le texte dont nous débattons, et n’a donc pas lieu d’être. Si nous devons faire preuve de vigilance à l’égard de l’industrie du médicament, je veux tout de même rappeler que l’alliance du secteur public et des acteurs privés est aujourd’hui indispensable pour donner à la recherche française l’agilité et l’efficacité dont elle doit faire preuve dans le contexte international. Ne vous en déplaise, monsieur Quatennens, la recherche clinique en France n’est pas seulement effectuée par les industries pharmaceutiques, mais aussi et surtout par des médecins agrégés et des chefs de service de CHU. En tant que législateur, nous devons veiller à préserver cette expertise de la recherche, pour le bien des patients.

M. Adrien Quatennens. Vous soutenez l’idée que le partenariat public-privé représente le modèle le plus efficace : je respecte votre point de vue, mais ce n’est pas le mien. Pour ce qui est de la SNCF, par exemple, vous n’êtes pas sans savoir que les partenariats de ce type creusent le déficit de la compagnie ferroviaire, un déficit que certains utilisent ensuite comme argument pour dire que la SNCF n’est pas efficace, et qu’elle fonctionnerait mieux si on la rendait totalement privée.

Je ne suis donc pas d’accord avec vous pour considérer que le partenariat public-privé soit le modèle le plus efficace et, pour ce qui est du secteur stratégique de la santé et du médicament, j’estime que la constitution d’un pôle public nous permettrait de disposer d’une indépendance qui nous coûterait moins cher que la situation actuelle.

M. Philippe Berta. Je veux simplement rappeler que le développement d’un médicament, de la recherche jusqu’au moment où l’un des produits qui en est issu peut se retrouver sur l’étagère d’une pharmacie, représente un coût minimum de 800 millions de dollars. Je ne suis pas persuadé que la puissance publique ait les moyens de mettre sur la table tout l’argent nécessaire à la recherche dans le domaine pharmaceutique : si elle le faisait, notre pays courrait à la faillite…

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. Monsieur Quatennens, vous évoquez la création d’un pôle public du médicament à vocation internationale. Or, la recherche se fait déjà dans le cadre d’une coopération européenne et même mondiale, et je ne vois pas en quoi la création d’un pôle public français constituerait une amélioration.

M. Adrien Quatennens. On peut coopérer !

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. La coopération existe déjà, et ce n’est qu’en raison de certaines lourdeurs administratives qu’elle peine à se développer. Nous considérons pour notre part que la France doit maintenir son excellence dans le domaine de la recherche médicale, et rester en mesure de produire et d’exporter des médicaments. C’est pourquoi je suis défavorable à votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

Titre

La commission examine l’amendement AS3 du rapporteur.

M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur. L’amendement AS3 est un amendement de cohérence. À l’issue de nos travaux, il me semble en effet logique que cette proposition de loi soit dite relative à la « désignation aléatoire » des comités de protection des personnes plutôt qu’à leur « expertise ».

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

 

 

 


  1 

Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

 Mme Nathalie Elimas, rapporteure sur le titre III du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel

La séance est levée à onze heures trente.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 9 mai 2018 à 9 heures 30

 

Présents. – Mme Delphine Bagarry, M. Belkhir Belhaddad, M. Philippe Berta, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Blandine Brocard, M. Guillaume Chiche, Mme Christine Cloarec, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Catherine Fabre, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, Mme Albane Gaillot, Mme Patricia Gallerneau, Mme Carole Grandjean, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, M. Mustapha Laabid, Mme Fiona Lazaar, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, M. Bernard Perrut, Mme Valérie Petit, Mme Michèle Peyron, M. Laurent Pietraszewski, M. Adrien Quatennens, M. Alain Ramadier, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, Mme Isabelle Valentin, Mme Michèle de Vaucouleurs, Mme Annie Vidal, Mme Corinne Vignon

Excusés. - Mme Ericka Bareigts, Mme Gisèle Biémouret, M. Gérard Cherpion, M. Paul Christophe, Mme Jeanine Dubié, Mme Caroline Fiat, Mme Claire Guion-Firmin, Mme Geneviève Levy, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, Mme Mireille Robert, Mme Nicole Sanquer, M. Adrien Taquet, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, M. Boris Vallaud

Assistaient également à la réunion. - M. Dino Cinieri, M. Stéphane Le Foll, M. Christophe Naegelen