Compte rendu

Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République

 

 Audition de M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, sur la fonction publique                            2

 


Mardi
20 mars 2018

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 49

session ordinaire de 2017-2018

Présidence de
Mme Yaël Braun-Pivet,
Présidente


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La réunion débute à 17 heures 05.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, Présidente.

La Commission auditionne M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, sur la fonction publique.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous avons le plaisir d’accueillir M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, qui était il y a encore quelques mois membre de la commission des Lois : il y a siégé pendant deux mandats. Nous sommes très fiers de le recevoir aujourd’hui en qualité de secrétaire d’État.

Nous souhaitions aborder avec lui la situation de la fonction publique composée, comme chacun le sait, d’agents aux missions très différentes, qu’ils appartiennent à la fonction publique d’État, territoriale ou hospitalière.

Je rappelle, à ce titre, que le Gouvernement a annoncé, au mois de février dernier, un vaste programme de travail sur des points importants, comme l’accompagnement professionnel ou les rémunérations, qui doit se dérouler tout au long de l’année 2018.

Cette audition s’inscrit ainsi pleinement dans le champ de compétences de la commission des lois, tel que défini par l’article 36 de notre règlement, et était attendue à raison par nombre de nos collègues.

Elle poursuit par ailleurs notre programme d’auditions à intervalles réguliers des membres du Gouvernement sur les sujets d’actualité intéressant leur ministère et les projets de réforme en cours.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je suis très heureux de retrouver cette commission et de répondre à votre invitation pour évoquer les questions relatives à la fonction publique.

La modernisation de la fonction publique que le Gouvernement veut conduire s’inscrit en résonance avec le programme de transformation de l’action publique, dénommée « Action publique 2022 », qui fait l’objet d’une phase de concertation depuis plusieurs mois, avec différents acteurs, à travers différents canaux d’expression : je pense notamment au comité d’experts qui a été installé par le Gouvernement et par le Premier ministre, et qui rendra ses conclusions dans la première quinzaine du mois d’avril ; je pense aussi aux cinq chantiers transversaux qui mobilisent l’ensemble des directions centrales sur des problématiques liées à la simplification administrative et à la transformation numérique, à la rénovation du cadre de gestion des ressources humaines, à l’organisation territoriale des services publics ou encore à la modernisation de la gestion budgétaire et comptable.

Nous avons également mis en place un forum de l’action publique, d’abord sous une forme numérique, pour permettre aux usagers comme aux agents de réagir de manière interactive aux constats, aux propositions, et de formuler leurs propres propositions sur le programme de transformation de l’action publique. À ce jour, depuis le mois de novembre dernier, le site a fait l’objet de plus de 150 000 visites, avec 5 000 contributions et plus de 20 000 votes sur les différentes propositions émises, qui caractérisent le succès de cette consultation, eu égard à bien d’autres.

Nous avons aussi organisé un certain nombre de forums territoriaux et d’ateliers de coconstruction associant des agents des trois versants de la fonction publique pour échanger, débattre, territoire par territoire, sur les modalités d’action et de transformation de l’action publique.

Les partenaires sociaux sont associés à l’ensemble de ce processus : non seulement des auditions leur ont été proposées par le comité d’experts, mais nous avons mis en place un comité de suivi avec les organisations syndicales souhaitant y participer – entre six et sept, sur les neuf organisations syndicales représentatives. Dans ce comité de suivi, nous débattons de l’état d’avancement du programme Action publique 2022, de la concertation en cours en attendant les arbitrages. Nous dressons également un bilan des réformes qui ont été menées précédemment – je pense notamment à la Révision générale des politiques publiques (RGPP) et à la Modernisation de l’action publique (MAP). Nous avons ainsi missionné France Stratégie pour établir un bilan de ces réformes dites de l’action publique et souligner les écueils ou les difficultés qu’elles ont rencontrées, notamment en matière d’association des agents, d’association des services et de conduite du changement.

Parallèlement à tout cela, nous considérons que la modernisation de la fonction publique est un préalable nécessaire à la transformation de l’action publique. Et nous pensons qu’il faut tout à la fois, pour transformer l’action publique, donner de nouvelles souplesses aux employeurs publics, quel que soit le versant concerné, organiser ce changement en concertation avec les partenaires sociaux, penser enfin, avec les agents comme avec les usagers, les services publics de demain – les usagers pour la qualité du service et les agents pour les conditions d’exercice de leur profession et le déroulement de leur carrière – en leur garantissant un environnement de travail modernisé.

C’est dans ce cadre-là que le 1er février dernier, à l’issue du comité interministériel de la transformation publique, le Premier ministre a annoncé l’ouverture de quatre chantiers de modernisation – dont j’ai la charge – autour de quatre axes : un chantier autour du dialogue social, que nous souhaitons tout à la fois plus fluide et recentré sur les enjeux les plus importants ; un chantier sur l’élargissement des conditions de recours aux contrats, pour donner davantage de souplesse dans les recrutements ; un chantier autour de la rémunération, pour qu’elle soit plus individualisée ; et, enfin, un chantier sur l’accompagnement renforcé des carrières professionnelles.

Le premier chantier, je l’ai dit, vise à donner un nouveau souffle au dialogue social dans la fonction publique, à tous les niveaux pertinents. Il faut d’abord rappeler que ce dialogue social est consacré par l’article 9 de la loi du 13 juillet 1983 relative au statut des fonctionnaires qui garantit le droit des agents publics à participer aux instances de concertation. Or, nous constatons que l’organisation actuelle n’est pas nécessairement satisfaisante et que nous pourrions trouver à la fois de la souplesse et de la réactivité pour être plus efficaces. Nous devons donc définir un nouveau modèle de dialogue social et adapter la cartographie des instances représentatives du personnel – on en compte 22 000 à ce jour dans les trois versants de la fonction publique dont, pour la seule fonction publique d’État, 1 200 comités techniques, plus de 2 000 comités d’hygiène et de sécurité et plus de 300 commissions administratives paritaires. Il nous faut aussi réexaminer avec les organisations syndicales les attributions de ces instances représentatives en supprimant certaines redondances, en précisant la portée de leurs attributions pour limiter les risques contentieux, en amplifiant le mouvement de déconcentration et en veillant à ce que ces instances se concentrent sur l’essentiel, tout en garantissant l’intégralité des droits des agents.

Dans le cadre de ce chantier, nous avons un autre impératif : garantir le maintien des droits des représentants syndicaux. Plusieurs dizaines de milliers d’agents publics exercent un ou plusieurs mandats syndicaux, en lieu et place, ou en complément de leur activité professionnelle. Cela fait partie des points que nous devons examiner, pour que la modernisation du dialogue social ne se traduise pas par un amoindrissement des garanties apportées aux agents, ni par des difficultés, pour les organisations syndicales, à les représenter.

Deuxième chantier : l’assouplissement des modalités de recours au contrat dans la fonction publique et la rénovation des conditions d’emploi des agents contractuels – sujet particulier, à mettre au regard du principe d’occupation des emplois permanents par des fonctionnaires, tels que le définit l’article 3 de la loi du 13 juillet 1983, que j’ai cité tout à l’heure.

Aujourd’hui, le recours au contrat ne se fait que par exception et par dérogation au principe de l’article 3. Depuis le protocole d’accord de 2011 et la loi du 10 mars 2012 dite loi Sauvadet, la plupart des cas de dérogation sont communs aux trois versants : le recours au contrat est autorisé en l’absence de corps ou de cadre d’emploi des fonctionnaires correspondants ; pour les emplois de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions et les besoins du service le justifient ; pour des emplois à temps incomplet ou non complet ; enfin, pour faire face à une vacance durable d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire.

Nous devons donc nous poser aujourd’hui la question, pour des secteurs qui ne présenteraient pas une spécificité propre à la fonction publique, d’un recours plus souple au contrat, avec un objectif qui ne peut pas être quantitatif – entre 18 et 20 %, selon les années, des agents publics sont des contractuels. En revanche, nous voulons introduire de la souplesse, de la liberté et permettre aux administrations et aux établissements publics d’être plus réactifs.

Nous souhaitons donc offrir aux employeurs publics la possibilité de choisir entre l’ouverture d’un poste au concours, l’ouverture au recrutement direct par la voie de la mutation ou, le cas échéant, par la voie du recrutement contractuel, en fonction de l’analyse des besoins et des compétences attendues pour pourvoir l’emploi.

Nous souhaitons aussi permettre aux employeurs publics de recruter plus facilement dans le bassin d’emploi local, ou d’accueillir en mobilité des agents titulaires ou contractuels recrutés dans d’autres administrations, d’autres collectivités ou d’autres établissements. Cela nécessite de revoir les conditions dans lesquelles le recrutement sous contrat est possible.

Par ailleurs, un certain nombre de besoins ne sont pas traités : ainsi les besoins temporaires d’une administration ou d’un établissement public. Il ne s’agit pas d’envisager des contrats courts, mais plutôt des contrats qui permettent à une collectivité, voire à un établissement public, de mener à bien une mission nécessitant la mobilisation d’une compétence particulière pendant un certain nombre de mois, voire un certain nombre d’années, mais ne nécessitant pas le maintien de cette compétence de manière indéfinie ou indéterminée dans son organigramme ou sa structure.

Au-delà, nous voulons aussi mettre à profit ce chantier sur l’élargissement des conditions de recours au contrat pour réfléchir à l’amélioration des droits et garanties des agents contractuels et de leurs conditions d’emploi. C’est essentiel, puisque derrière cette question se cache aussi la possibilité de préserver l’attractivité du recrutement contractuel, et plus largement, du recrutement dans la fonction publique. À cet égard, le bilan de l’accord de 2011 et de la loi dite Sauvadet de 2012, que j’ai citée aussi, sera une étape importante avant l’ouverture de ce deuxième cycle de concertation : il nous permettra d’évaluer la mise en œuvre des dispositifs tant dans leur dimension « accès à l’emploi titulaire » que dans leur dimension « CDIsation », et d’en tirer les enseignements sur les attentes des agents contractuels en termes de parcours professionnel.

Ces deux cycles de concertation, le premier sur le dialogue social et le deuxième sur l’élargissement des conditions dans lesquelles le recours au contrat sera possible, seront lancés et conduits avant l’été, avec comme ambition de formaliser un point d’accord ou de désaccord lors du point d’étape de juillet, sans que ce soit nécessairement conclusif.

Le troisième chantier, ouvert et annoncé par le Premier ministre, porte sur la rémunération des agents publics afin, notamment, de mieux distinguer la sécurisation du pouvoir d’achat, la prise en compte de l’expérience, des responsabilités et des sujétions, la performance individuelle et collective. Le droit à rémunération des fonctionnaires ainsi que les différentes composantes de la rémunération sont consacrés par l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983. Or, force est de constater dans la pratique une très grande hétérogénéité des situations, notamment pour ce qui touche à la prise en compte des fonctions ou des résultats professionnels des agents, ainsi que des résultats collectifs des services, pourtant expressément prévue par ce même article 20.

Un certain nombre de tentatives ont été faites, notamment en 2008, avec la prime relative à la performance et au mérite, puis, en 2014, avec le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP), qui s’est substitué à la prime de fonctions et de résultats pour l’État et les collectivités territoriales. Le déploiement de ce dispositif est encore limité : en tenant compte de l’ensemble des accords signés et en voie d’application, nous savons qu’à l’horizon 2020, 27 % des agents de l’État seront concernés par le RIFSEEP et que la partie réellement variable de la rémunération prévue au titre du nouveau régime est faible – 15 % du régime indemnitaire. Il faut aussi préciser que pour les corps n’ayant pas basculé dans ce régime, autrement dit dans la très grande majorité des cas, la rémunération ne fait pas l’objet d’une modulation au vu du mérite.

Nous allons mener ce travail avec les organisations syndicales et les employeurs publics, avec pour première volonté de définir ce qu’est le mérite : selon la nature des fonctions exercées, la définition du mérite n’est évidemment pas la même. Nous sommes convaincus que le mérite peut être individuel, lié à l’implication de l’agent dans son travail, en donnant la possibilité à l’encadrant de proximité d’en juger, mais qu’il peut être aussi collectif, et l’on peut imaginer des mécanismes d’intéressement permettant de valoriser l’engagement des collectifs de travail.

Sur la question du mérite, il nous faudra aussi interroger la structuration de la rémunération dans son ensemble et ce cycle de concertation nous permettra donc de réexaminer les composantes de la rémunération des agents publics en prenant en considération l’impact de la future réforme des retraites.

Je veux aussi préciser qu’il ne faut pas confondre les discussions que nous aurons dans le cadre de ce troisième chantier avec les discussions autour du rendez-vous salarial, initialement prévu au mois d’octobre et qui a été avancé, à la demande quasi unanime des syndicats, à la mi-juin – il aura lieu entre le 10 et le 20 juin. Il sera l’occasion de tirer le bilan des mesures prises au cours des mois précédents, mais aussi d’examiner les perspectives d’évolution du pouvoir d’achat des agents en 2018.

Dernier des quatre chantiers ouverts depuis le CITP du 1er février : l’accompagnement des agents, notamment en termes de formation, de mobilité et de seconde carrière, par exemple, à l’occasion de la transformation de l’organisation et des métiers des services publics. Là aussi, il faut rappeler un certain nombre de fondamentaux.

Les fonctionnaires bénéficient du principe de séparation du grade et de l’emploi, prévu à l’article 12 de la loi du 13 juillet 1983, ce qui implique un droit de reclassement en cas de suppression de leur emploi. Ce droit de reclassement recouvre des réalités très hétérogènes entre les trois versants de la fonction publique et même au sein de chacun des versants – à l’exception du versant territorial qui, dans le cadre de la loi de 1984, dispose d’une procédure d’accompagnement clairement établie.

Pour la fonction publique d’État, la loi de déontologie du 20 avril 2016 a supprimé la possibilité d’une réorientation professionnelle instaurée par une loi de 2009, au profit d’une priorité de mutation ou de détachement des agents concernés sur tout emploi correspondant à son grade et vacant dans un service ou une administration se trouvant dans la même zone géographique. Mais ces mesures ne sont pas entrées en vigueur faute de décrets d’application.

Il en est de même pour la fonction publique hospitalière : l’article 93 de la loi du 9 janvier 1986 qui définit le droit au reclassement des agents hospitaliers n’est jamais entré en vigueur faute de publication du décret d’application, qui devait définir le périmètre des offres d’emploi proposées à l’agent. Le 27 octobre dernier, le Conseil d’État a enjoint le ministère de la santé de combler ce vide juridique. En conséquence, nous aurons aussi pour objectif durant la concertation de préciser les modalités de mise en œuvre de ce droit au reclassement dans les trois versants, et de renforcer les leviers d’accompagnement et de mobilité existants.

Nous voulons aussi travailler sur un dispositif d’accompagnement de la mobilité vers le secteur privé. Une indemnité de départ volontaire de la fonction publique a été mise en place en 2008 et a été sollicitée par un nombre d’agents publics variant entre 700 et 1 400 par an. Mais, là encore, elle se caractérise par une grande hétérogénéité ; les conditions d’accès à l’indemnité de départ volontaire, les critères, les projets poursuivis ouvrant droit à cette indemnité sont différents d’un versant à l’autre. Il est nécessaire d’apporter de la cohérence et de l’homogénéité, pour que cette indemnité de départ volontaire soit tout à la fois plus attractive, plus sûre et plus équitable.

Nous voulons aussi mettre à profit cette concertation pour évoquer la possibilité de départs collectifs vers le secteur privé. Il s’agit de considérer que lorsqu’une administration ou un établissement public se réforme ou est amené à fusionner avec un autre service, nous pouvons mettre en place des procédures de départ volontaire – j’insiste sur l’adjectif – collectives, avec formation et indemnisation, vers le secteur privé, mais qui resteraient circonscrites aux seuls établissements ou aux seuls services qui font l’objet d’une restructuration. Loin de nous l’idée de mettre en place un seul et unique départ volontaire à l’échelle de toute la fonction publique ; cela n’aurait pas de sens, surtout s’il était amené à s’appliquer dans les secteurs où nous recrutons et où nous créons des emplois.

Nous avons prévu, et j’ai eu l’occasion de le dire à l’occasion de certains débats à l’Assemblée nationale, d’accompagner cette transformation par la mobilisation des moyens nécessaires, d’abord en termes de formation. Le schéma directeur national de formation est en cours de publication. Consolidé par la mobilisation de 1,5 milliard d’euros au titre du Grand plan d’investissement, il permettra d’accompagner les agents en termes de montée en compétences, de déploiement du compte personnel de formation et d’adaptation à la modernisation, notamment numérique, du service public. Mais nous avons ajouté à ces 1,5 milliard d’euros, au titre de la formation, un fonds de 700 millions d’euros disponibles pour la fonction publique d’État sur appel à projets, pour financer des investissements de modernisation. Nous ne pouvons pas demander à nos directions et à nos services de se moderniser sans leur donner les moyens de le faire. Lorsque l’on incite à la numérisation, il faut aussi pouvoir financer les travaux et les investissements qu’elle exige.

Le dialogue va être mené sur ces quatre chantiers pendant les mois qui viennent ; notre objectif est d’aboutir aux textes législatifs ou réglementaires nécessaires au début de l’année 2019, ce qui nous laisse un an de concertation et de discussion avec les organisations syndicales, comme avec le collège des employeurs.

Ces quatre chantiers sur le dialogue social, sur l’élargissement du recours au contrat, sur la rémunération et son individualisation, comme sur l’accompagnement renforcé des carrières professionnelles, n’épuiseront pas des problématiques plus particulières, plus spécifiques à la fonction publique territoriale. Le Premier ministre a donc chargé le président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, M. Philippe Laurent, et moi-même, de formuler un certain nombre de propositions spécifiques à ce versant. Nous devons notamment examiner des questions liées au temps de travail et à son organisation, en écho à un certain nombre de rapports – en particulier ceux de la Cour des comptes qui ont noté qu’en moyenne, les 1 607 heures de travail annuelles n’étaient pas toujours atteintes. Il faut donc y travailler.

Cela passe par un réexamen d’un certain nombre de dispositifs, tant législatifs que règlementaires, autour des autorisations exceptionnelles de congé, mais également, autour de la date d’entrée en vigueur d’un certain nombre de protocoles d’accords sur le temps de travail.

Cela passera aussi par la volonté de travailler sur une meilleure association, a minima, du collège des employeurs territoriaux à la définition des décisions prises par l’État et qui les impactent directement. À titre d’exemple, lorsque l’État augmente le point d’indice, il n’assume en réalité que 40 % de la dépense liée à cette augmentation, puisque le reste est supporté par les employeurs hospitaliers ou les employeurs territoriaux, alors que jusqu’à présent, ils sont très peu – voire, pratiquement pas – associés à ce type de décisions.

Ces quatre chantiers, ainsi que le chantier spécifique à la fonction publique territoriale, se dérouleront parallèlement à l’agenda social tel qu’il avait été fixé. Autrement dit, les dates et échéances figurant dans l’agenda social des douze mois qui viennent ne sont pas remises en cause : le 9 mars a marqué le lancement de la concertation pour le renouvellement de l’accord pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, signé à l’unanimité en 2013, et que nous espérons voir reconduit.

Nous allons aussi avancer, et rapidement, sur la rénovation des politiques d’emploi des personnes handicapées. C’est une concertation commune avec le secteur privé impliquant M. Bruno Le Maire, Mme Sophie Cluzel et moi-même. Nous allons aussi avancer sur la concertation relative aux conditions de travail des agents publics, au reclassement pour inaptitude et à la médecine de prévention. Par ailleurs, au second semestre, nous lancerons les discussions autour de la protection sociale complémentaire, après que le rapport des trois inspections nous aura été remis. La lettre de mission a été signée récemment.

Enfin, même si cela ne relève pas du dialogue social avec les employeurs, il faut avoir en tête que les élections professionnelles de la fonction publique se tiendront le 6 décembre prochain ; nous travaillons non seulement à sécuriser ce processus, mais aussi à promouvoir ces élections pour que le taux de participation soit le plus élevé possible.

Voilà ce que je pouvais vous dire à ce stade, madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, sur le calendrier de nos travaux, les orientations et l’objectif que nous nous sommes fixé : aboutir, au début de l’année 2019, à la modernisation du cadre général de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas. Je me réjouis de la nomination de notre ancien collègue Olivier Dussopt à cette responsabilité de secrétaire d’État en charge de la fonction publique. Je me réjouis également de cette audition, qui nous permet d’aborder les questions relatives à la fonction publique dans un cadre plus large, sans devoir nous limiter à des considérations strictement financières, comme ce fut le cas lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018.

Monsieur le secrétaire d’État, j’ai retrouvé dans vos propos un certain nombre de points que j’avais défendus dans mon rapport pour avis de la commission des lois en octobre 2017. Je ne peux que m’en satisfaire. Le travail va être riche et dense. Au sein de cette commission, le groupe de LaREM sera très attentif et vous apportera sa contribution. J’espère que vous la recevrez avec bienveillance.

La proposition n° 7 de mon rapport pour avis envisageait une évaluation de la contribution de l’ensemble des agents publics à la création de la richesse nationale. Il nous paraissait, en effet, intéressant que les services de l’État puissent apprécier la valeur du travail fourni. Si nous voulons construire un dialogue sain, serein, qui s’inscrive dans le temps, dans un climat de confiance mutuelle, il faut sortir de cette tendance trop facile au « fonctionnaire bashing ». Je l’avais déjà dit dans l’hémicycle : c’est un préalable indispensable au déroulement d’un bon dialogue social.

Ensuite, je crois en la spécificité des trois versants de la fonction publique – même si, à titre personnel, j’ai une sensibilité particulière à l’égard de la fonction publique territoriale. Non seulement la fonction publique hospitalière ne fonctionne pas comme celle de l’État, mais au sein même des différents corps de l’État, il existe des spécificités. Il conviendrait, selon moi, de s’arrêter un moment sur le diagnostic du fonctionnement des différents versants de la fonction publique. Mais il ne faudrait pas tomber dans l’excès en prenant des dispositions qui, à terme, pourraient créer des clivages ou des divisions à l’intérieur de la fonction publique.

Enfin, monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous me confirmer que l’objet de cette réforme n’est pas la suppression du statut de fonctionnaire ? Quelles seront les grandes lignes de l’évolution de ce statut ?

M. Arnaud Viala. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie pour votre présentation, dont nous connaissions déjà les grandes lignes, depuis notre débat sur le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance : à plusieurs moments de la discussion, nous avions été amenés à aborder le contenu de cette réforme.

À cette époque, j’avais déjà l’impression – que vos propos n’ont pas démentie – que la vision qui préside à l’écriture de ce texte est une vision de gestionnaire de la fonction publique d’État, que vous étendez bien sûr aux deux autres fonctions publiques. À ce titre, il me semble qu’elle laisse quelques zones d’ombre.

D’abord, étant par ailleurs fonctionnaire de l’éducation nationale, je constate que la France souffre aujourd’hui cruellement de la perte d’attractivité de certains métiers de la fonction publique. Une réforme comme celle que vous engagez ne peut faire l’impasse sur ce phénomène. Il faut absolument que les métiers concernés retrouvent un intérêt pour les français, en particulier pour les jeunes.

Ce n’est pas seulement une question de rémunération : on ne fera pas l’économie d’une comparaison avec le secteur privé, à qualification et formation égale, pour comprendre les ressorts de cette perte d’attractivité, encore aggravée par le manque de reconnaissance de la société vis-à-vis de nos concitoyens qui s’engagent dans la fonction publique – reconnaissance que les élus, les législateurs et le Gouvernement ont la charge de restaurer.

Je suis moi aussi très attaché à la permanence des trois fonctions publiques : elles reflètent une réalité culturelle et historique de notre pays. Mais alors que la durée de carrière d’un fonctionnaire dépasse aujourd’hui quarante ou quarante-cinq ans, la mobilité au sein de la fonction publique, et peut-être davantage entre les fonctions publiques, relève du parcours du combattant. Les exemples de passages d’une fonction publique à une autre sont très peu nombreux, sinon exceptionnels. Ces possibilités mériteraient d’être facilitées : un même individu peut très bien servir son pays de diverses manières, dans la fonction publique territoriale ou dans la fonction publique hospitalière, à différents moments de sa carrière. Le texte que vous proposerez va-t-il aborder cette question ?

Mme Cécile Untermaier. Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour cette présentation extrêmement claire et précise.

Actuellement, on parle beaucoup de statuts, que ce soit celui de la SNCF ou des fonctionnaires. Je tiens à rappeler ici que « statut » n’est pas un gros mot : c’est le résultat d’un partage de devoirs et de droits.

Lors du précédent quinquennat, nous avons bien travaillé, me semble-t-il, sur le statut de la fonction publique. Je pense à la loi de 2016 dont Mme Françoise Decamps-Crosnier, que vous connaissez bien, a été la rapporteure. Nous avons mis en avant les valeurs qui guident les agents de la fonction publique, en insistant sur la neutralité, l’impartialité, la laïcité, etc. Je pense aussi au collège de déontologie que nous avons mis en place dans les différentes fonctions publiques. Ne craignez-vous pas que l’élargissement des conditions de recours au contrat et autres possibilités de recrutement offertes aux employeurs publics, ne mettent à mal les valeurs consubstantielles au statut, qui permettent de répondre aux exigences du service public ?

Je voudrais également vous interroger sur la rémunération, qui serait davantage liée au mérite. On a souvent tenté d’aller dans ce sens, mais on a rarement réussi. Avez-vous des pistes ? Avez-vous imaginé un dispositif qui, sans faire exploser la cohésion nécessaire au sein de la fonction publique, inciterait à fournir des efforts particuliers ?

Par ailleurs, on entend souvent dans les ministères que la numérisation permettra de faire des économies de personnel. J’en appelle toutefois à la prudence, car la numérisation nécessite aussi un temps d’accompagnement, à plus forte raison sur le territoire national qui présente des situations extrêmement hétérogènes. J’ai eu l’occasion d’observer comment une profession réglementée, en l’occurrence les notaires, a mis en place un dispositif informatique de très grande qualité. Mais à y regarder de près, on constate que ce passage au numérique a exigé, au niveau de la maintenance, de créer des centaines d’emplois, un nombre sans comparaison avec ce que nous avons su mettre en place dans la fonction publique. Avez-vous des précisions à nous donner en la matière ?

Enfin, dans un rapport de 2012, la Cour des comptes avait remarqué que plus d’une centaine de préfets se trouvaient en statut hors cadre. Certains travaillent, d’autres pas. Cette question va-t-elle être évoquée dans le cadre de la réflexion que vous allez mener sur la fonction publique ?

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je souhaite, monsieur le secrétaire d’État, en savoir plus sur les préfectures. Si l’on se soucie de transparence, d’efficacité, de qualité des services publics, d’accélération de la transformation numérique, d’accompagnement dans les préfectures, il faut se pencher sur la question des demandes d’asile. Alors que le travail de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) est entièrement dématérialisé, en amont, aucune préfecture, à ma connaissance, ne s’est engagée sur la voie de la dématérialisation dans ce domaine.

Plus généralement, la numérisation, en débarrassant les agents de certaines tâches, leur laisserait plus de temps pour assurer un accueil plus performant. Compte tenu des difficultés actuellement rencontrées pour le renouvellement des titres de séjours, on pourrait même songer à des systèmes d’alerte, des logiciels qui permettraient de gérer au mieux les flux d’usagers. Une réflexion est-elle en cours sur ce sujet ?

M. Éric Poulliat. Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour votre intervention. Je me réjouis, comme ma collègue Émilie Chalas, qu’un membre du Gouvernement se penche sur ce sujet, qui le mérite.

Parlant de rénovation du dialogue social, vous avez souligné le besoin d’une plus grande efficacité. Avec 22 000 instances, un effort de rationalisation  s’impose effectivement, mais tout en maintenant les droits des fonctionnaires : il y a là un véritable défi. Avez-vous des pistes ?

Sur les contrats, le débat est ancien ; nous y avons recouru pour répondre à des besoins dans certains domaines, celui de l’animation par exemple, et au final, nous avons retrouvé une filière à part entière avec un concours. S’agit-il aujourd’hui de faire évoluer les filières et les cadres d’emploi ? Ou le recours actuellement envisagé aux contrats témoigne-t-il d’une volonté de ranger le concours parmi les archaïsmes à abandonner ? Se pose, par ailleurs, la question des différences de rémunération entre contractuels et non contractuels.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État chargé de la fonction publique. Mon propos, Madame Chalas, s’inscrit dans le prolongement de ceux du Président de la République et du Premier ministre : le statut de la fonction publique n’est pas remis en cause et les lois de 1983, 1984 et 1986 qui en forment l’architecture ne le sont pas davantage. J’ai d’ailleurs cité les principaux articles de la loi du 13 juillet 1983 : si certains peuvent faire l’objet d’adaptations ou d’ajustements, il ne s’agit pas d’abroger le texte ni d’éteindre le statut de la fonction publique. Il ne s’agit pas de remettre en cause cette spécificité qui définit les droits et les devoirs de l’ensemble des agents publics. Nous voulons apporter de la souplesse, moderniser certains éléments et procéder à des ajustements. Cela vaut pour les trois versants de la fonction publique, auxquels vous avez été nombreux à exprimer votre attachement. Cela fait d’ailleurs écho à l’attachement qu’expriment régulièrement les organisations syndicales à l’unicité de la fonction publique, qui peut aussi se concevoir sous la forme de trois versants, présentant chacun ses propres caractéristiques.

Nous sommes ouverts aux propositions des parlementaires. J’ai annoncé, pour les prochaines semaines, quatre chantiers, auquel s’en ajoutera un cinquième, propre à la fonction publique territoriale. Environ 90 réunions bilatérales et plusieurs dizaines de réunions multilatérales seront organisées, y compris avec les collèges employeurs. Il est évident que les propositions des parlementaires seront les bienvenues pour nourrir ce travail et nous permettre d’avancer.

En effet, monsieur Viala, la perte d’attractivité de la fonction publique n’est pas qu’une question de rémunération. Comme le demandent toutes les organisations syndicales, nous devons chercher le moyen de rendre les carrières plus attractives – en lien avec la réforme des retraites, car les deux interféreront. Cela suppose de faciliter les mobilités, de proposer des formations et d’offrir un accompagnement, pour l’heure insuffisant, notamment à celles et ceux de nos agents publics qui arrivent à un stade où ils pourraient commencer une deuxième ou une troisième carrière, ce qui ne leur est aujourd’hui pas proposé. Nous sommes ainsi confrontés à des difficultés liées au fait que des agents encore à dix ou quinze ans de l’âge où ils pourront faire valoir leurs droits à la retraite n’ont plus aucune perspective d’évolution professionnelle.

Pour ce qui est de la mobilité, en l’état, rien n’est inscrit dans un texte qui n’est pas encore écrit : nous avons encore un an pour le faire… L’une des priorités est effectivement de permettre les allers-retours entre fonctions publiques, entre employeurs publics ou entre employeurs publics et employeurs privés. Il faudra d’ailleurs d’examiner la question des polypensionnés.

Il faudra surtout faire mieux qu’actuellement. Effectivement, chaque année, seuls 4 % des agents publics changent de poste ou de fonction et seuls 0,4 % d’entre eux passent d’une fonction publique à l’autre – généralement, ils exercent des fonctions de direction ou occupent des postes très spécifiques qui facilitent cette mobilité d’un versant à l’autre. Nous sommes preneurs de toutes les propositions, d’autant que beaucoup d’organisations syndicales sont désireuses d’une concertation sur ce qu’on appelle la gestion des âges pour permettre aux uns et aux autres d’envisager cette deuxième, voire cette troisième partie de carrière et ainsi de pérenniser leur engagement dans la fonction publique.

Je veux rassurer Mme Untermaier à propos des contractuels. Il s’agit de recourir à des contrats de droit public qui imposent un certain nombre d’obligations aux cocontractants, et notamment à l’agent public contractuel. L’article 32 de la loi du 13 juillet 1983 a déjà anticipé la possibilité pour les employeurs d’y recourir et dispose que les agents contractuels ont les mêmes droits, obligations et devoirs que les agents statutaires. Ainsi la neutralité, à laquelle s’attache notamment la loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires du 20 avril 2016, sera respectée.

En matière de rémunération au mérite, beaucoup a déjà été tenté. J’ai évoqué la prime en fonction des résultats de 2008 et le RIFSEEP, qui peine à se déployer et ne concerne que l’État – je précise qu’une complication supplémentaire tient au fait que le déploiement dans la fonction publique territoriale dépend du rythme de déploiement au niveau de l’État. Il nous faudra s’attacher avec les organisations syndicales à définir la question du mérite. La prime en fonction des résultats comme le RIFSEEP ne l’abordaient que sous l’angle individuel ; nous voulons ouvrir une discussion sur la notion de mérite collectif – celui d’une équipe, d’un groupe de travail. Il ne sera pas particulièrement simple de définir des critères pertinents qui interdisent toute discrimination : il faut former les évaluateurs – on ne s’improvise pas évaluateur. Il faut aussi redéfinir les missions des agents publics : d’un métier à l’autre, d’une fonction à l’autre, elles ne sont pas forcément identiques, et la question n’a pas été débattue depuis longtemps. Au sein d’un même métier, on ne peut pas forcément non plus évaluer le mérite ou l’implication de la même manière. On ne peut évaluer le mérite du personnel soignant ni celui du personnel enseignant en se fondant sur le seul critère du résultat.

Je vois Mme Obono réagir. Peut-être sommes-nous d’accord, madame la députée, pour reconnaître que le terme « mérite » n’est pas forcément le plus approprié, mais c’est celui qui s’est imposé dans le débat et qu’il va falloir définir. Nous pouvons parler de performances, d’implication, de sujétions, d’engagement personnel… C’est tout cela que l’on retrouvera dans la notion de mérite.

Pour ce qui est de la numérisation, nous avons prévu un fonds de 700 millions d’euros, dont 200 millions d’euros disponibles dès 2018. Les administrations d’État pourront répondre aux appels à projets et voir des projets de modernisation numérique financés. Cependant, Mme Untermaier et Mme Jacquier-Laforge ont raison : la numérisation ne change rien à la nécessité de maintenir des hommes et des femmes pour assurer une médiation. D’ailleurs, ce travail de médiation et d’accompagnement des usagers mériterait d’être considéré dans le cadre de nos réflexions sur la possibilité d’une deuxième carrière, d’une nouvelle fonction.

Quant aux préfets, c’est plus généralement la question de l’ensemble de ces cadres de la haute fonction publique, placés en telle ou telle position statutaire et finalement « en réserve », qui se pose – elle renvoie aussi à la gestion des âges. Avec M. Gérald Darmanin, nous voulons identifier les cadres de la fonction publique dont les postes ne nécessitent pas leur niveau de formation ou qui sont sans affectation. Comment les mobiliser afin d’accompagner les établissements publics ou les collectivités qui ont besoin d’un renfort ou d’une compétence particulière ? Cela a très bien marché dans des circonstances exceptionnelles : après le passage de l’ouragan sur les îles Saint-Martin et Saint-Barthélemy, nous avons mobilisé des cadres qui ont quitté leur poste durant quinze jours, un mois ou un mois et demi pour participer à la reconstruction. Tant d’autres pourraient être mobilisés, dont les postes actuels ne correspondent pas à leur qualification.

M. Éric Poulliat m’a interrogé à propos du dialogue social. Nous sommes convaincus que nous pouvons garantir les mêmes droits avec moins de 22 000 instances représentatives. Nous sommes également convaincus que deux sortes de décisions au moins pourraient être rendues plus rapidement. Il s’agit tout d’abord des décisions individuelles relatives à la mobilité et même à la promotion : nous pourrions alléger le fonctionnement des commissions administratives paritaires (CAP), tout en garantissant un cadre et des droits. Il s’agit, d’autre part, des décisions qui nécessitent une consultation des instances paritaires. Certaines, notamment dans la fonction publique d’État, doivent être examinées par onze instances représentatives ; et, chaque fois, le passage d’une instance à l’autre impose de respecter certains délais, notamment pour la transmission des documents. Du coup, la procédure prend dix, douze, voire quatorze mois. Nous pourrions imaginer – ce n’est qu’une piste de travail – qu’en matière de mobilité les CAP de la fonction publique d’État soient chargées de poser le cadre et les règles, qu’elles examinent les situations conflictuelles et soient une instance d’appel, sans plus se prononcer sur l’intégralité des mouvements. De même, nous voulons travailler au rapprochement des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions du travail et des comités techniques paritaires (CTP) et rendre plus fluides le fonctionnement d’instances aux compétences redondantes qui risquent de rendre des décisions contradictoires sur une même situation.

Quant aux contrats, notamment les contrats de mission, je prends souvent l’exemple des collectivités locales qui ont besoin d’un chef de projet pour cinq ans dans le cadre d’une opération de rénovation urbaine. Il faut que les choses soient claires : au terme du contrat, le contractuel n’est pas titularisé. Nous pouvons travailler avec les organisations syndicales sur la possibilité d’ouvrir les concours internes ou la troisième voie aux contractuels ; en tout cas, il ne faut pas mentir sur les possibilités de poursuite de la carrière ou de titularisation.

M. David Habib. Monsieur le secrétaire d’État, Mme Émilie Chalas s’est réjouie, tout à l’heure, que vous ayez rejoint le Gouvernement. Vous comprendrez que je ne fasse pas mien ce jugement, même si je sais que vous vous investirez dans cette fonction avec compétence.

M. Erwan Balanant. Il faut savoir partager les compétences !

M. David Habib. Parmi ces 120 000 postes de fonctionnaires dont la majorité nous dit qu’ils sont susceptibles de ne pas perdurer jusqu’au terme du quinquennat, 70 000 relèvent de la fonction publique territoriale. Comment ferez-vous pour ne pas déroger au principe de libre administration des collectivités territoriales ? Nous avons tous deux été maires et je sais que ce principe vous est cher.

La majorité actuelle, peut-être parce qu’elle ne détient pas beaucoup de mandats locaux, a souvent tendance à mettre en avant la vertu des pratiques de l’État et parfois à mettre en cause les collectivités locales. Celles-ci ont pourtant beaucoup fait pour l’emploi des personnes en situation de handicap au cours des dernières années. Comment l’État compte-t-il donc rattraper son retard en la matière ?

Par ailleurs, mon département commence à être confronté au problème de la mobilité géographique des fonctionnaires. Il y a des situations particulières dans toutes les fonctions publiques et pas seulement chez les enseignants et les policiers. Vous devez prendre en compte cette dimension pour permettre des parcours de carrière plus cohérents, plus convenables et plus respectueux de la volonté des fonctionnaires. Quels sont vos projets à cet égard ?

Enfin, nous sommes à vingt-quatre heures d’une grande mobilisation syndicale. Je vous sais très attaché, monsieur le secrétaire d’État, au dialogue social – n’y voyez aucune ironie –, mais comment rattraper les erreurs commises à cet égard depuis le mois de juin dernier par le Gouvernement ? La fonction publique est dans l’attente d’un discours mobilisateur, non d’un discours qui dénonce les quelques « privilèges » – je reprends le mot du Gouvernement – dont les fonctionnaires jouiraient encore. Je souhaiterais que vous soyez beaucoup plus incisif. Si vous voulez réactualiser les méthodes et repenser le service public, il faut rappeler aux uns et aux autres que l’État ne se réformera pas sans la mobilisation des fonctionnaires.

Mme Marie-France Lorho. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, des explications que vous avez déjà données dans votre propos liminaire.

Le 19 février dernier, le ministre de l’action et des comptes publics a prôné la rémunération au mérite. Évidemment, nous n’avons pas assez d’éléments pour juger de ce qu’il en sera et la question n’est pas si simple.

Cependant, les Français seraient particulièrement intéressés par l’application d’un tel dispositif aux hauts fonctionnaires. Je ne veux pas verser dans une critique catégorique, mais leurs études et leurs fonctions leur confèrent des responsabilités, qui appellent une reconnaissance, mais aussi des devoirs. Il serait naturel que nous nous montrions plus particulièrement exigeants à leur égard, d’autant que beaucoup de Français déplorent un manque de clarté et de transparence dans la gestion des hauts fonctionnaires – c’est le moins que l’on puisse dire. Pourriez-vous nous préciser quelles seraient vos inclinations sur ce volet d’une réforme importante, qui a d’ailleurs fait débat lors de la campagne présidentielle ?

M. Ugo Bernalicis. Moi aussi, monsieur le secrétaire d’État, je veux vous féliciter : il n’est pas si évident d’être un transfuge avec autant d’aplomb, autant de conviction et autant de détermination !

Vous avez parlé des prochains rendez-vous du dialogue social, mais la grande majorité des syndicats de la fonction publique se sont mobilisés et appellent à manifester le 22 mars. Alors, pourquoi remettre en cause le statut ? Certes, cela concernera non pas ceux qui en bénéficient déjà mais ceux qui seront recrutés ensuite, en tant que contractuels. L’astuce, qui sera aussi employée pour la réforme ferroviaire, est connue ; mais finalement, cela revient au même.

Votre « défense » du statut des fonctionnaires n’était pas vraiment brillante. Moi qui ai été un modeste examinateur lors d’oraux de concours de la fonction publique, je n’aurais pas été convaincu de vous embaucher, mais peut-être pouvez-vous encore progresser.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Cher collègue, pouvez-vous poser votre question et cesser vos commentaires quelque peu désobligeants ?

M. Ugo Bernalicis. Je crois qu’une certaine liberté de parole a cours dans cette maison, madame la présidente.

Comment voyez-vous donc, monsieur le secrétaire d’État, l’évolution du statut ? Le rapport remis par Jean-Ludovic Silicani, déjà un peu ancien, contenait un certain nombre de propositions, mais, en ce qui concerne précisément le mérite, il a été maintes fois prouvé que l’introduction d’une part de rémunération au mérite dans le traitement des fonctionnaires n’avait que peu d’impact sur le management. Pour avoir géré des équipes fournies dans l’administration, je sais que ce n’est pas parce que la rémunération de son équipe comporte une part variable de 15 % ou 20 % que le manager dispose d’un levier supplémentaire. La rémunération des surveillants pénitentiaires ne comporte d’ailleurs pas de part variable fondée sur le mérite ; ils font pourtant très bien leur travail, et je ne crois pas que quiconque propose de leur appliquer un tel dispositif. Sinon, pourquoi ne pas rémunérer députés et ministres au mérite ? (Exclamations.) J’aimerais ne pas être interrompu toutes les deux minutes, mais il est certain que si je le suis sans cesse, mon intervention risque d’être très longue.

Pour ce qui est de l’attractivité, comparez donc le niveau de rémunération des enseignants dans notre pays à ce qu’il est chez nos partenaires européens souvent cités. Il ne faut pas chercher midi à quatorze heures !

Ma dernière question portera sur le nombre de postes de fonctionnaires que vous voulez supprimer. Je vous interrogerai non pas sur ces 120 000 postes, mais sur les seuls 50 000 postes de la fonction publique d’État. En tant que membre du Gouvernement, vous pourrez me répondre. Est-ce au ministère de l’intérieur que le nombre de postes sera réduit, alors que nous avons besoin de davantage de policiers et de gendarmes, alors que nous avons besoin de davantage de personnel dans les préfectures, ne serait-ce que pour traiter les questions d’immigration et d’asile ? Est-ce au ministère de la transition écologique et solidaire, au lendemain de la COP21, alors que le changement climatique est un enjeu majeur ? Est-ce au ministère de la justice, alors que nous sommes au vingt-quatrième rang des pays de l’Union européenne pour le budget que nous lui consacrons ? Est-ce au ministère de l’Europe et des affaires étrangères, alors que notre diplomatie a besoin d’être renforcée ? Est-ce au ministère des armées, alors que nous prévoyons de porter le budget de la défense à 2 % du PIB ? Est-ce au ministère de la cohésion des territoires, qui mériterait d’être renforcé si la politique de la ville est bien un axe majeur ? Est-ce au ministère de l’économie et des finances, alors que la loi sur un État au service d’une société de confiance, récemment adoptée, crée des besoins supplémentaires, notamment pour jouer un rôle de conseil ? Est-ce au ministère de la culture ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. S’il vous plaît…

M. Ugo Bernalicis. Il est assez désagréable d’être encore interrompu.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il ne s’agit pas d’être désagréable, il s’agit de faire en sorte que vous posiez une question… Ce n’est pas une discussion générale, c’est l’audition d’un secrétaire d’État, que nous interrogeons donc. Pouvez-vous vous en tenir à cet exercice ? Vous vous exprimez déjà depuis cinq minutes, il me semble que vous avez pu parler suffisamment longtemps.

M. Ugo Bernalicis. J’aimerais quand même savoir dans quel ministère ces postes seront supprimés. Est-ce au ministère de l’éducation nationale, alors que nous avons besoin de plus d’enseignants ? Est-ce au ministère de l’agriculture, à l’heure des états généraux de l’alimentation, enjeu majeur pour les années à venir ? Est-ce au ministère de l’action et des comptes publics ? Est-ce au ministère de l’économie sociale et solidaire ? Est-ce au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, alors que nous savons quels défis l’université doit relever ? Est-ce au ministère des outre-mer, alors que nous savons à quel point la situation est tendue ? Est-ce au ministère des sports, à la veille des jeux olympiques de 2024 ? Ou encore dans les services du Premier ministre, dans les effectifs dédiés au numérique, à l’égalité entre les femmes et les hommes ou aux personnes en situation de handicap ? Où donc ? Dites-le nous, monsieur le secrétaire d’État !

M. Raphaël Schellenberger. Monsieur le secrétaire d’État, nous pouvons partager vos objectifs d’efficacité, d’efficience et, évidemment, d’exemplarité de la fonction publique, mais comment donc entendez-vous mieux associer le collège des employeurs publics, intention louable, à un certain nombre de décisions de l’État qui ne sont pas dénuées d’effets sur les autres employeurs publics, notamment les hôpitaux ou les collectivités territoriales ? Vous voulez par exemple modifier le RIFSEEP, qui vient d’être mis en place, mais la plupart des collectivités territoriales sortent d’un processus complexe de restructuration complète de leur régime indemnitaire pour basculer vers le RIFSEEP. Est-ce prendre en compte le collège des employeurs territoriaux que de faire à nouveau perdre à ces collectivités beaucoup de temps et d’énergie ? Le système vient d’être mis en place et n’a pas encore pu démontrer son efficacité ou son inefficacité.

La différenciation des trois fonctions publiques a un intérêt en raison de leurs missions respectives bien particulières. Il existe néanmoins des espaces où elles se chevauchent avec une réelle complexité, ce qui crée un vrai besoin de clarification : ainsi les gestionnaires des établissements scolaires, fonctionnaires de l’éducation nationale, ont une responsabilité hiérarchique, sans l’avoir, sur des agents des collectivités territoriales chargés, par exemple, de l’exécution d’un certain nombre de missions de maintenance ou d’entretien. Cette situation pose des questions concrètes en matière de management dans les établissements, s’agissant notamment du management du mérite. Vous intéresserez-vous à ce sujet ?

L’un des tout premiers textes dont nous nous sommes saisis, au début de cette législature, traitait de l’exemplarité de la vie politique. Nous avons longuement débattu du rôle que pouvait jouer la haute fonction publique dans une démarche visant à rendre la vie publique exemplaire, car la haute fonction publique est soumise aux impératifs qui s’imposent au monde politique. La réforme en cours constitue le vecteur qui peut vous permettre de vous intéresser à ce sujet. La question du niveau de rémunération devient par moment insupportable : plus de six cents fonctionnaires gagnent plus que le Président de la République : est-ce logique dans le fonctionnement d’une démocratie ? Il faut aussi s’intéresser à la question du pantouflage. Je ne crois pas à la vertu de l’interpénétration de la société civile avec la fonction publique, en particulier la haute fonction publique. Les hauts fonctionnaires peuvent mieux que d’autres monnayer leur carnet d’adresses, obtenu dans le cadre de leur carrière au service de l’État et aux formations performantes dont ils ont bénéficié. Loin de créer de la valeur ajoutée, ces pratiques engendrent plutôt des conflits d’intérêts.

Certaines agences, plus ou moins autonomes, qui se situent autour de l’État central constituent un vrai vecteur de surproduction normative. Je pense en particulier à la mission régionale d’autorité environnementale (MRAE) qui, pour justifier des projets d’aménagement, demande que l’on anticipe sur les normes applicables ou que l’on prenne en compte des problèmes qui n’existent pas encore. Des sommes folles sont consacrées à payer des études sur des questions qui ne se poseront peut-être jamais. Cette autorité, qui emploie beaucoup de monde, crispe nos territoires et empêche leur développement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État chargé de la fonction publique. Monsieur David Habib, j’ai moi aussi grand plaisir à vous retrouver ! (Sourires.)

Le Président de la République a annoncé que les 120 000 postes constituaient un objectif à atteindre d’ici à 2022. Il faut les comparer aux 5 480 000 postes que compte la fonction publique, trois versants confondus, au 31 décembre 2016, sans oublier les 120 000 départs à la retraite par an dans les sept années à venir. L’objectif fixé peut donc être atteint au rythme des réorganisations.

Vous avez noté que les annonces du Président de la République indiquaient qu’une partie des postes concernés pourraient relever de la fonction publique territoriale. Cela ne signifie pas qu’il y ait une remise en cause du principe de libre administration : la révision constitutionnelle que vous examinerez bientôt ne le remettra pas en question. En revanche, nous avons la volonté d’associer le collège des employeurs locaux aux décisions qui concernent la gestion de la fonction publique en général, qu’il s’agisse des questions de temps de travail, d’évolutions du point d’indice ou de niveau de rémunération.

Cela répond aussi à votre question, monsieur Schellenberger. Nous avons la conviction qu’en associant les employeurs territoriaux, dans le cadre d’une relation de confiance, avec le maintien avéré des dotations de l’État aux collectivités, nous pourrons discuter de ces sujets. Les employeurs territoriaux pourront prendre une part de cette responsabilité dans le respect du principe de libre administration. Nous pensons qu’il faut creuser certaines des propositions portées par le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, en particulier l’idée de rassembler les employeurs territoriaux dans une fédération professionnelle qui serait en mesure de passer une sorte d’« accord de branche » dans la fonction publique territoriale. Je suis prudent : ce n’est pour l’instant qu’une idée à approfondir. Elle n’a encore fait l’objet d’aucun arbitrage, ni d’aucune expertise.

Ce sujet renvoie à d’autres questions sur la capacité et la volonté des collectivités et des employeurs territoriaux de déléguer une partie de leurs pouvoirs à une fédération d’employeurs. Ce débat n’est pas tranché, et, sachant que l’on compte 55 000 employeurs territoriaux, ce n’est pas une mince affaire !

Il me semble que les trois versants de la fonction publique sont vraiment des exemples pour ce qui concerne la question du handicap. Alors que les objectifs d’emploi de personnes en situation de handicap sont fixés à 6 %, les trois fonctions publiques confondues atteignent 5,5 ou 5,6 % – la performance de la fonction publique territoriale en la matière est meilleure que celle de la fonction publique d’État. Dans le cadre de la rénovation des politiques d’emploi de personnes en situation de handicap, nous travaillons actuellement avec Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, et M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, pour faire en sorte d’atteindre les objectifs partout, dans le public comme dans le privé, et de pérenniser les financements en faveur de l’insertion des personnes en situation de handicap.

Nous devons en effet corriger un effet pernicieux d’un système de financement assis, pour le secteur public, sur les sanctions pécuniaires versées par les collectivités qui n’atteignent pas l’objectif des 6 %. À mesure que celles-ci progressent, le niveau de ressources du fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, qui permet d’accompagner ceux qui ont besoin de formation, diminue. Nous devons donc trouver un modèle de financement qui ne s’appuie pas uniquement sur les sanctions. Les futures lois sur les parcours professionnels et PACTE – pour plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises – seront les deux véhicules législatifs pour l’intégration de ces nouvelles dispositions relatives au handicap.

J’en viens à votre question sur le dialogue social. Dès ma nomination, j’ai rencontré les neuf organisations syndicales représentatives en réunions bilatérales formelles. Je les ai également rencontrés sur d’autres points à leur demande. Depuis le comité interministériel de la transformation publique (CITP) du 1er février dernier, je les ai à nouveau rencontrées en bilatéral. Nous avons par ailleurs déjà organisé, avec la direction générale de la fonction publique, deux réunions multilatérales pour arrêter la méthodologie de la discussion. Toutes les organisations y ont participé. À la fin du mois de mars – ce devrait être le 29 mars, mais ce n’est pas définitivement fixé, je réunirai les neuf organisations pour entériner la méthode et le calendrier des discussions. Les quatre chantiers s’ouvriront ensuite au cours desquels se tiendront environ quatre-vingt-dix réunions bilatérales et autant de réunions multilatérales qu’il le faudra.

Le dialogue est donc maintenu, il est même dense. Nous travaillons également sur la protection sociale complémentaire, sur l’égalité professionnelle, sur la question du handicap… À partir du mois d’avril, nous aurons à travailler sur les dispositions relatives aux contractuels, tant en termes de titularisation que d’accompagnement professionnel, à partir du bilan des dispositifs dit « Sauvadet ».

Vous le constatez, le dialogue social est une réalité. Il n’est rompu avec aucune des neuf organisations représentatives : aucune ne refuse de participer aux rencontres que j’ai citées. La question de la capacité des instances nationales que sont le Conseil supérieur de la fonction publique et le Conseil commun de la fonction publique à nourrir le débat, et celle de leur organisation pourront être posées en fin de parcours.

M. David Habib et M. Raphaël Schellenberger m’ont interrogé sur la mobilité dans la fonction publique. Nous avons pour objectif d’alléger ou, en tout cas, de réformer le fonctionnement des commissions administratives paritaires (CAP) pour permettre une mobilité plus rapide. Aujourd’hui, trop de mouvements, de recrutements, de sélections de candidats se heurtent, non seulement en termes calendaires, mais aussi en termes techniques, à la succession de CAP et d’avis parfois contradictoires. Nous devons trouver un moyen de donner aux employeurs publics plus de latitude dans le recrutement et aux agents la garantie du maintien de leurs droits et la capacité de faire évoluer leur carrière.

Je me suis déjà exprimé sur la rémunération au mérite. L’essentiel sera de définir le mérite, ce qui ne sera pas simple.

Je m’en voudrais d’oublier votre intervention, Monsieur Bernalicis, en tout cas sur un certain nombre de points. Vous réfléchissez comme si vous deviez mettre en œuvre la révision générale des politiques publiques (RGPP), en demandant un décompte des postes à supprimer dans tel ou tel ministère. Vous connaissez le budget pour 2018 : moins de 2 000 postes sont supprimés au total et nous créons des postes dans l’éducation, dans le secteur pénitentiaire, dans la police, dans la justice et dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) – Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, a ajouté, en effet, des moyens aux 430 millions d’euros prévus dans le cadre de la réforme de la tarification. Nous prenons le temps de regarder les situations de près et de faire les choses proprement, notamment en matière d’accompagnement. Aujourd’hui, il n’y a pas de liste de secteurs concernés. Nous allons travailler sur le sujet et mettre à profit toutes les opportunités, toutes les réorganisations pour atteindre notre objectif, sans avoir d’a priori mathématiques, contrairement à ce que vous semblez croire.

Monsieur Schellenberger, le RIFSEEP est pour l’instant peu présent dans les collectivités territoriales : non seulement ce régime est récent, mais il n’est déployé que dans la filière administrative, car le rythme de son déploiement dans la fonction publique d’État interdit à ce stade aux collectivités de le mettre en place dans leur filière technique, ce qui est un facteur de déséquilibre de leur propre organisation interne. Il faudrait que nous puissions avancer assez rapidement afin d’éviter le phénomène de la « réforme permanente ».

Selon moi, la question que vous posiez en citant les gestionnaires de collège ne renvoie pas au problème de la mobilité ou à celui d’un chevauchement entre fonctions publiques, mais plutôt à la celle de la répartition des compétences entre les collectivités – certaines sont compétentes pour la gestion, d’autres pour les questions éducatives. Tant que cette question n’est pas tranchée, il est difficile d’avancer autrement qu’au moyen de conventions et de mobilités facilitées.

M. Schellenberger et Mme Lorho ont évoqué l’exemplarité des hauts fonctionnaires. Des mesures relatives à la haute fonction publique d’État et la haute fonction publique en général seront annoncées par le Premier ministre et le Président de la République plus rapidement encore que celles sur lesquelles nous travaillons, puisqu’elles devraient intervenir dès l’année 2018. Elles concerneront à la fois l’encadrement des parcours, en particulier la question du pantouflage – le récent rapport d’information de vos collègues M. Olivier Marleix et M. Fabien Matras sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêts comporte, à ce titre, des réflexions intéressantes sur ce sujet, mais aussi la nécessité de confronter les membres des grands corps à une expérience de terrain ou à un passage dans un secteur dit prioritaire.

Des efforts devront aussi être consentis en matière de rémunération, notamment sur les plus hautes rémunérations. Elles sont souvent le fait, soit de situations qui les justifient, en raison de l’ampleur des tâches à accomplir, soit, comme c’est le cas à Bercy, de modèles en voie d’extinction – je pense aux primes des administrateurs généraux des finances publics. La Cour des comptes avait émis une injonction pour que l’État en finisse avec un dispositif de primes qui n’avait pas de fondement légal d’ici à 2023. Ce dispositif sera clos en 2019. Nous allons également supprimer la classe exceptionnelle des administrateurs généraux au sein de laquelle sont concentrées les principales hautes rémunérations. De 2014 à 2018, le nombre d’administrateurs généraux a diminué de 10 % et leur rémunération globale de presque 20 %. Cela montre que nous faisons un large effort pour éteindre les primes qui n’ont pas de support légal et pour modifier la grille des traitements des administrateurs afin de les replacer à un niveau plus conforme et plus acceptable pour tous.

S’agissant des opérateurs et agences que vous avez évoqués, monsieur Schellenberger, nous ne sommes plus dans un sujet « fonction publique ». La production normative réglementaire peut avoir pour origine des agences ou des établissements administratifs indépendants. Pour ce qui concerne la fonction publique, dans le cadre de notre politique pour l’égalité professionnelle, nous allons amener ces opérateurs à plus d’exemplarité en élargissant la liste des emplois concernés par le dispositif de nomination équilibré. Pour la partie normative, nous travaillons sur la question de sa production. J’aurai l’occasion, dans les semaines qui viennent, de présenter une communication conjointe avec Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, sur la production normative et la régulation des dépenses dont on peut considérer qu’elles sont imposées aux collectivités par ce biais.

Mme Virginie Duby-Muller. Monsieur le secrétaire d’État, votre réforme se présente en trois axes : recours accru aux contractuels, assouplissement des statuts, et rémunération au mérite. Nous partageons bon nombre des objectifs visés dès lors qu’ils répondent à un souci d’efficacité.

Le candidat Emmanuel Macron avait promis de supprimer 120 000 emplois de fonctionnaires, mais nous avons constaté, en examinant le budget pour 2018 dans lequel était inscrite la suppression de seulement 1 600 postes, qu’il aurait du mal à atteindre son objectif d’ici à 2022. À ce rythme, il faudra soixante-quinze ans pour tenir cette promesse électorale…

Vous avez fait allusion à un plan de départs volontaires qui a été, du reste, plutôt mal accueilli par les syndicats. Comment comptez-vous le mettre en œuvre ? Il faut savoir qu’un dispositif semblable existe déjà pour des cas très particuliers et précis et qu’il n’a pas forcément les effets escomptés. Pouvez-vous nous donner des informations sur le calendrier des réformes ? Quand comptez-vous demander au Parlement d’examiner le projet de loi sur ce sujet ? Sur quels ministères porteront les efforts demandés ?

J’en viens à une question plus locale. Vous avez évoqué les enjeux liés à la rémunération. Je souhaitais aborder avec vous la question de la prime de vie chère ou de l’indemnité de résidence, versée dans certaines zones du territoire où la vie est particulièrement chère, comme l’Île-de-France ou à Toulon. Cette prime s’élève à 3 % du traitement brut, mais elle n’a pas été réactualisée depuis très longtemps. Je suis élue de Haute-Savoie, dans une circonscription proche de la Suisse, où le coût de la vie est particulièrement élevé ; de ce fait, de nombreux postes de fonctionnaires ne sont pas pourvus. À terme, cela peut poser des problèmes d’efficacité du service public. J’avais eu l’occasion d’interpeller votre ministre de tutelle sur ce sujet. J’espère que la prime de vie chère pourra être intégrée dans la prochaine réforme. Les postes non pourvus concernent la police, la trésorerie, à Saint-Julien-en-Genevois, mais aussi la fonction publique hospitalière, au point que nous avons dû fermer des étages de certains EHPAD – on imagine les conséquences. Même si sa part est assez faible, la prime de vie chère a au moins le mérite de stabiliser et de fidéliser nos fonctionnaires.

Mme Danièle Obono. Monsieur le secrétaire d’État, je tenais à vous remercier pour l’honnêteté de la seule réponse que vous avez donnée à notre collègue Ugo Bernalicis, en reconnaissant que vous ne saviez pas dans quels ministères les carrières devront évoluer vers un départ volontaire. Au passage, je vous fais remarquer que ce n’est pas nous qui avons annoncé 120 000 départs volontaires ; c’est votre Gouvernement. Ce n'est pas nous, mais bien vous qui êtes encore dans la logique de la RGPP. Les mots et les acronymes ont changé, mais l’état d’esprit comptable reste le même.

Vous venez de reconnaître que le chiffre de 120 000, donné par le Premier ministre et le Président de la République, ne repose sur aucune étude ni aucune prévision sérieuse. Votre approche « moins de fonctionnaires, mieux d’État, bla-bla-bla » ne se fonde donc sur aucun travail qui identifierait les secteurs ministériels concernés. Au moins, sur ce point, votre réponse a été claire.

Je suis désolé de vous avoir interpellé au milieu de vos propos relatifs au mérite, mais la question est importante. Vous êtes à nouveau très honnête en disant que ces termes nous ont été « imposés » et qu’il faut les accepter. Cela permet de poser le débat. Nous, nous refusons précisément que ces termes nous soient imposés. Nous ne le faisons pas par dogmatisme, mais, parce que, de notre point de vue, ils renvoient à une philosophie générale. Au-delà des déclarations qui prétendent préserver le service public, nous croyons que votre Gouvernement s’engage dans la remise en cause de la fonction publique comme mission républicaine fondamentale. Pourtant, cette mission n’appartient pas au passé ; c’est une conquête politique démocratique, sociale et économique, un héritage, certes, mais un héritage porteur d’avenir qui nous permet de proposer le développement et l’extension du champ du service public à tous les domaines, y compris ceux extrêmement dynamiques et facteurs d’activité économique de la petite enfance, de la dépendance, ou de la transition écologique. Nous ne parlons donc pas d’un acquis ou d’une survivance du passé sur lequel nous nous recroquevillerions, mais d’une conquête sociale qui nous permettra d’aller demain encore plus loin au service de l’intérêt général.

Le débat que nous devons mener doit aussi être une confrontation saine et démocratique. C’est pour cela que nous sommes ici : pour confronter nos visions. Derrière les formules un peu creuses, j’aimerais comprendre ce qu’est, aujourd’hui, votre vision du rôle de la fonction publique et du service public. Finalement, le statut n’est qu’une conséquence, une traduction du service public en termes de garanties, à la fois pour les agents concernés, mais aussi pour les usagers et les citoyens.

Enfin, pouvez-vous nous parler du bilan humain de l’ensemble des politiques menées à l’égard de la fonction publique ? Les noms et les acronymes changent, je l’ai dit, mais derrière tout cela, il y a bien une théorie. Hier, c’était la philosophie du New Public Management, aujourd’hui on parle de « modernisation », parce que le mot « moderne » est censé porter des valeurs positives.

Au-delà des mots, certains d’entre vous qui sont fonctionnaires ou l’ont été, comme M. Ugo Bernalicis ou moi-même, connaissent la réalité et les conséquences de ces politiques en termes de souffrance au travail. Cela n’a rien à voir avec la question économique de la reconnaissance pécuniaire du mérite : je parle du sens donné à l’action des fonctionnaires. Quand, dans le même temps, un membre du Gouvernement salue cette action, mais qu’un autre stigmatise les fonctionnaires, le message envoyé ne leur permet pas de retrouver le sens de leur action. Les fonctionnaires vivent aujourd’hui une grande souffrance parce que les modes de management de l’entreprise ont été appliqués au service public, ce qui est un contresens. Vous engagez-vous à mener un travail sur ces conséquences humaines désastreuses pour les personnes et pour la collectivité ?

Mme Émilie Chalas. Monsieur le secrétaire d’État, nous avons évoqué la souplesse par la contractualisation, mais puisque l’on conserve le statut, dans quelle mesure pourra-t-on donner de la souplesse pour la gestion des masses salariales ? Comment pourrons-nous finalement redonner du souffle et de la dynamique aux masses salariales titulaires ? Ce sujet mérite un long travail et des discussions intenses. Il ne doit pas être tabou.

Mme Coralie Dubost. À l’inverse de Mme Danièle Obono, je ne pense pas qu’il y ait une seule méthode de management en entreprise. Ces méthodes sont plurales et elles ont énormément évolué. Il en est de même dans le secteur public : les méthodes de management sont plurales et, dans un contexte qui a changé, la question du management opérationnel doit être reposée. Avec cette question du mérite, ce qui m’intéresse dans le management, c’est de savoir comment nous pourrons redéfinir les objectifs et le sens du travail pour l’adapter aux modes nouveaux d’organisation de nos missions de service public. Il s’agit de dynamiser ce management opérationnel et de valoriser notre capital humain, qui à mon sens est fondamental.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État chargé de la fonction publique. Je l’ai dit dans mon intervention liminaire : nous assumons le fait que le budget 2018 ne compte pas autant de suppressions d’emplois que Mme Virginie Duby-Muller le souhaite. Comme je l’expliquais à M. Ugo Bernalicis, nous prenons le temps de la réflexion. L’atterrissage législatif et réglementaire de tout cela se fera au printemps 2019 : nous avons donc un an de concertation devant nous pour mener à bien ces chantiers.

L’indemnité de vie chère fait partie de l’ensemble des composantes de la rémunération que nous reverrons dans le chantier 3. Nous versons aussi cette question au débat déjà inscrit à l’agenda social, qui vise à réformer un certain nombre d’indemnités comme la prise en charge kilométrique, celles liées à hébergement ou à la nourriture. Mme Duby-Muller soulignait l’existence de disparités, mais il y a aussi des iniquités : selon que vous êtes amené à vous déplacer pour des raisons professionnelles dans Paris ou dans une ville de moindre taille, les frais de déplacement ne sont pas toujours les mêmes, alors que le barème de remboursement est strictement identique.

S’agissant des départs volontaires, évoqués par Mme Duby-Muller et par Mme Obono, il n’y a pas « un » plan de départs volontaires de 120 000 personnes. L’objectif de 120 000 ne sera pas atteint par des départs volontaires.

Je rappelle qu’il existe une indemnité individuelle de départ volontaire. Elle est aujourd’hui extrêmement difficile à mobiliser dans la mesure où les critères qui permettent d’en bénéficier sont différents d’une fonction publique et d’un employeur à l’autre.

Nous voulons lui donner un caractère collectif. Lorsque deux établissements publics seront amenés à fusionner, lorsqu’une administration sera formée ou transformée et que nous nous trouverons en sureffectif pour une raison ou pour une autre, il faudra proposer aux agents de ces établissements publics ou de ces administrations, et seulement à eux, la possibilité d’un départ vers le privé grâce à un plan qui aurait un caractère volontaire et collectif. Ce plan permettrait de fixer l’aide en termes de formation, de reclassement ou d’indemnité, afin d’accompagner ces départs. Il y aura des plans de départs en fonction des restructurations ou des fusions. Tout cela s’inscrira dans le temps, et il n’y aura rien de global. Autrement dit, il n’est pas prévu de plan unique : cela serait contradictoire avec ce que nous souhaitons faire.

Madame Obono, le mot « mérite » n’apparaît pas dans le statut en l’état. En revanche, à l’article 20 de la loi 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est précisé que la rémunération prend en compte les fonctions et les résultats professionnels des agents ainsi que les résultats collectifs des services. Si l’on veut travailler sur une part de la rémunération qui dépende de l’engagement, de l’implication, de la performance, du mérite – peu importe le terme –, personnel ou collectif, des agents dans leur service, le statut nous donne les bases pour le faire et pour avancer.

Un certain nombre d’études ont déjà été menées pour dresser un bilan de la RGPP et de la modernisation de l’action publique (MAP). Je pense au rapport consacré par les trois inspections générales, finances, administration, et affaires sociales, à la RGPP, en septembre 2012 – ce panorama assez complet traitait, entre autres sujets, des effets de la désorganisation sur les conditions de travail des agents. Nous avons confié une mission à France Stratégie pour accompagner le comité de suivi qui réunit la quasi-totalité des syndicats, en tout cas tous ceux qui veulent participer, pour dresser un bilan – la MAP sera bien sûr au programme. Nous souhaitons tirer le meilleur des expériences passées pour nous en inspirer.

Madame Chalas, le problème de la gestion de la masse salariale renvoie au débat relatif à l’association des employeurs publics. La décorrélation du point d’indice constituerait une alternative, mais le débat montrera sans doute que le collège des employeurs est assez unanime pour la refuser. Il préfère que les employeurs soient associés aux décisions qui les concernent.

Enfin, madame Dubost, la formation et le chantier 4 sur l’évolution des parcours constituent les principales réponses à votre question. Un schéma national de formation se met en place. Il est abondé à hauteur de 1,5 milliard d’euros sur cinq ans dans le cadre du grand plan d’investissements d’avenir. Il met en avant des priorités propres à l’organisation de l’État, en termes de montée en compétences, d’accompagnement des transformations de numérisation. D’autres priorités concernent les conditions de vie au travail et la capacité à améliorer les conditions dans lesquelles nos agents évoluent, de l’ergonomie à la prévention des comportements inappropriés, en passant par la sensibilisation au refus de toute forme de discrimination et des modules sur l’égalité d’accès à la fonction publique. Cela implique de former les formateurs, les évaluateurs et les membres du jury sur ces questions.

Derrière ce schéma, il y a aussi un objectif consistant à rendre effectif le compte personnel de formation. Il s’agit d’un droit des agents publics qui n’est pas encore réellement en vigueur. Nous nous employions à le rendre effectif à la fois par des propositions de formation qui répondent à des besoins personnels, mais aussi, et c’est important, à des besoins en termes de mobilité et de passion. Nous voulons faire en sorte que son financement soit sécurisé puisqu’il n’a pas les mêmes modalités que dans le secteur privé.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous remercions. Vous êtes ici chez vous, et nous serons heureux de vous revoir lorsque vous aurez terminé les concertations sur ce plan bien ambitieux.

 

La réunion s’achève à 18 heures 35.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Erwan Balanant, M. Ugo Bernalicis, M. Florent Boudié, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Vincent Bru, Mme Émilie Chalas, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Virginie Duby-Muller, M. Christophe Euzet, M. David Habib, M. Dimitri Houbron, M. Sébastien Huyghe, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Marie-France Lorho, Mme Danièle Obono, M. Jean-Pierre Pont, M. Éric Poulliat, M. Robin Reda, M. Raphaël Schellenberger, Mme Cécile Untermaier, M. Arnaud Viala, Mme Hélène Zannier

 

Excusés. - Mme Huguette Bello, M. Éric Ciotti, M. Philippe Dunoyer, Mme Élise Fajgeles, M. Jean-Michel Fauvergue, Mme Paula Forteza, Mme Marie Guévenoux, M. Jean-Michel Mis, M. Aurélien Pradié, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Maina Sage, Mme Alice Thourot, M. Guillaume Vuilletet, M. Jean-Luc Warsmann