Compte rendu

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

– Projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272) :

- Examen pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » :

................................................ Infrastructures et services de transports ; budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (M. JeanFrançois Cesarini, rapporteur pour avis) ;              2

................................................ Énergie, climat et après-mines ; compte d’affectation spéciale « Transition énergétique » (M. Christophe Arend, rapporteur pour avis) ;              2

 Informations relatives à la commission...................21

 


Mercredi 16 octobre 2019

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 9

session ordinaire de 2019-2020

Présidence de Mme Barbara Pompili,

Présidente,
puis de
Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, Vice-présidente


  1 

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a débuté l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les rapports pour avis de M. Jean-François Cesarini « Transports aériens » et de M. Christophe Arend « Transition énergétique ».

Mme la présidente Barbara Pompili. Mes chers collègues, nous sommes réunis pour débuter l’examen pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2020.

Nous examinerons les crédits de cette mission au cours de plusieurs réunions successives, chaque rapporteur pour avis apportant son éclairage sur le programme qui le concerne. Bien évidemment, les rapporteurs n’ont pas vocation à se substituer aux ministres et répondront aux questions qui leur seront posées en fonction des éléments d’information dont ils disposent.

Nous pourrons être amenés à examiner des amendements au cours de ces réunions, mais le vote final sur l’ensemble des crédits de la mission n’interviendra que lors de notre dernière réunion qui aura lieu le mercredi 30 octobre.

Aujourd’hui, nous entendrons M. Christophe Arend, rapporteur pour avis sur les crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines » et du compte d’affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique », et M. Jean-François Cesarini, rapporteur pour avis sur les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis sur les crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines » et du compte d’affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique ». Les quelques minutes dont je dispose pour vous présenter les crédits dont j’ai la charge sont bien peu au regard des enjeux. Mais les débats enrichiront certainement ce texte.

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2020 a considérablement modifié le programme 174, avec la création de deux nouvelles actions qui représentent près de 83 % des crédits du programme, soit plus de 2 milliards d’euros, et qui sont destinées à aider nos concitoyens à réduire leur consommation énergétique et leurs émissions de gaz à effet de serre.

L’action 2 « Accompagnement de la transition énergétique » regroupe les crédits dédiés à la fois au chèque énergie et au financement de la nouvelle prime de transition énergétique, qui remplacera progressivement le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE). En 2020, le chèque énergie sera distribué pour la troisième année au niveau national. C’est un véritable outil de solidarité pour nos compatriotes à faibles revenus, surtout pour ceux qui louent des logements énergivores dans lesquels ils ne peuvent pas faire de travaux. En 2019, la valeur du chèque énergie a été revalorisée et sa distribution étendue à de nouveaux ménages. Son montant moyen actuel est de 148 euros. En 2020, l’objectif du Gouvernement est de le distribuer à 5,8 millions de bénéficiaires. Il prévoit, en conséquence, un financement stable de 882 millions d’euros.

En l’état, la nouvelle prime de transition énergétique qui remplace le CITE s’adresse aux ménages des quatre premiers déciles. Elle leur permettra de bénéficier d’une aide financière contemporaine des travaux engagés, ce qui devrait permettre de lever l’obstacle de l’avance financière qu’ils devaient assumer dans le cadre du CITE. Cette prime sera fusionnée avec les aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), dans le cadre du programme « Habiter mieux Agilité ». De plus, elle pourra être majorée grâce au dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE), ce qui permettra de réduire, au final, le reste à charge.

Les crédits destinés au financement de la prime pour 2020 s’élèvent à 390 millions d’euros. C’est plus de deux fois ce qu’ont reçu les ménages des quatre premiers déciles au titre du CITE en 2017, à savoir 151 millions d’euros. C’est donc un effort qui me semble bien proportionné pour la première année du dispositif. Il faut également mentionner les 60 millions d’euros transférés à l’ANAH pour lui permettre de bonifier plusieurs de ses programmes qui pouvaient, jusqu’ici, être complétés par le CITE. Au total, ce sont 450 millions d’euros qui sont consacrés au seul financement de la prime, auxquels s’ajouteront les aides de l’ANAH.

À ce stade du projet, le CITE doit être prorogé d’une année supplémentaire pour les ménages intermédiaires, et ses montants doivent être fondés sur des critères relatifs à l’efficience énergétique des gestes de rénovation. En 2020, la dépense fiscale du CITE sera donc de 1,1 milliard d’euros environ pour les travaux effectués en 2019 ; elle devrait ensuite s’établir à 350 millions d’euros environ en 2021.

En tant que rapporteur pour avis, je soutiens pleinement le nouveau dispositif de la prime, car il permet de renforcer l’effort de rénovation vers les ménages les plus modestes qui représentaient le « maillon faible » du CITE. Mais face à un tel changement, les pouvoirs publics devront être attentifs aux évolutions du marché de la rénovation énergétique, car il est notre principal outil pour réduire la dépense énergétique dans le domaine de l’habitat.

La seconde action créée en 2020 est l’action 3 « Aide à l’acquisition de véhicules propres ». Elle reprend la prime à la conversion des véhicules polluants, qui avait déjà intégré le programme 174 l’année dernière, et le bonus écologique automobile. La prime à la conversion se verra consacrer 405 millions d’euros, soit une baisse de 32 % des crédits par rapport à 2019. Le nombre de primes devrait, en effet, baisser en 2020, en raison de nouveaux critères d’attribution entrés en vigueur au mois d’août, plus exigeants d’un point de vue environnemental. Je rappelle toutefois que le doublement de la prime a été conservé pour les ménages les plus modestes et les gros rouleurs. Le bonus automobile, pour sa part, connaîtra une augmentation de près de 50 % de ses crédits ; ce sont 395 millions d’euros qui permettront de soutenir le développement du marché des véhicules électriques.

Ces deux aides vont dans le bon sens, car elles permettent à nos concitoyens d’opter pour des véhicules plus vertueux à une grande échelle. L’objectif fixé par la ministre de la transition écologique et solidaire de retrait d’un million de véhicules polluants retirés du parc automobile à la fin du quinquennat est donc réaliste et atteignable.

Autre élément du versant solidaire du programme 174, l’action 4 « Gestion économique et sociale de l’après-mines » disposera en 2020 d’une enveloppe budgétaire de 340 millions d’euros, dont 299 millions d’euros consacrés au financement de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM), qui assure le versement des prestations de logement et de chauffage à la population, en diminution, des anciens mineurs et de leurs ayants droit. L’ANGDM s’occupe aussi des prestations relevant de l’action sanitaire et sociale, qui seront financées à hauteur de 21,6 millions d’euros par un versement de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM).

Lors de nos auditions, nous avons pu constater que l’ANGDM rencontrait des difficultés de gestion pour ces deux missions. Ses crédits au titre du programme 174 ont été régulièrement rabotés au fil des exercices budgétaires, au point que la trésorerie de l’agence atteint désormais un niveau dangereux pour honorer ses prestations. Quant aux crédits de l’action sanitaire et sociale, ils sont insuffisants pour honorer des prestations indispensables à un public de plus en plus âgé, dont le coût global baisse moins vite que la diminution de 5 % du nombre d’ayants droit. Dans les deux cas, il est important que le Gouvernement préserve les moyens d’action de l’Agence.

L’action 4 finance également, à hauteur de 28 millions d’euros, la structure de liquidation de la Société des mines de potasse d’Alsace. Ce budget est en augmentation de près de 24 % en raison de la montée en puissance des travaux de confinement du site de stockage souterrain de Stocamine.

Je terminerai la présentation du programme 174 avec les actions 5 et 1. L’action 5 « Lutte contre les changements climatiques et pour la qualité de l’air » dispose d’un budget de 34,2 millions d’euros, en très légère augmentation, qui sert principalement à financer les différents organismes chargés de la surveillance de la qualité de l’air aux niveaux national et régional. Ce sont des outils indispensables pour organiser notamment le déploiement des plans de protection de l’atmosphère dans nos agglomérations. Que le niveau de financement reste inchangé est donc un signal positif que nous saluons, même si l’examen détaillé des crédits et de leur affectation pourrait être plus nuancé.

L’action 1 « Politique de l’énergie » finance à hauteur de 1,9 million d’euros différentes actions de l’État permettant de garantir les besoins des consommateurs d’énergie. Elle fournit également une subvention de 2,7 millions d’euros à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) pour ses missions de recensement des déchets nucléaires et le stockage des déchets orphelins. Enfin, elle comprend, pour la première fois, les engagements financiers de l’État pour accompagner les projets de reconversion des territoires d’implantation de la centrale de Fessenheim et des quatre centrales à charbon qui vont fermer – 40 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 10 millions d’euros de crédits de paiement sont inscrits pour aider la réalisation des projets de territoire. C’est un engagement de responsabilité de l’État que nous saluons, car les changements économiques profonds qu’entraînera la fermeture de ces centrales découlent directement de la politique de transition énergétique de l’État. Nous invitons donc nos collègues à consulter la seconde partie de notre rapport pour prendre connaissance de la mise en œuvre de ces différents projets de territoire.

J’en viens aux crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », qui s’élèvent à 6,3 milliards d’euros. L’année 2020 verra la fin du remboursement de la dette que l’État avait contractée vis-à-vis d’EDF en raison du déficit de compensation des charges de service public entre 2009 et 2015. Ce dernier versement s’élèvera à 896 millions d’euros. Le soutien aux énergies renouvelables électriques se verra consacrer 5,1 milliards d’euros, soit une légère baisse de 3 % par rapport à 2019, qui s’explique notamment par une évolution des prix favorable au budget de l’État. En revanche, le soutien à la filière du biogaz est renforcé puisque son budget est en augmentation de plus de 88 %, pour atteindre près de 249 millions d’euros. C’est un effort considérable qui doit permettre de renforcer le développement de la filière pour atteindre les objectifs de la future programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour cette énergie.

Le compte d’affectation spéciale finance également les actions relatives à l’effacement de la consommation, à hauteur de 40 millions d’euros, ainsi que des dépenses relatives à la mise en place d’une ligne d’interconnexion entre la France et l’Irlande, à hauteur de 20 millions d’euros.

En conclusion, j’émets un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 174 et du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ».

M. Jean-François Cesarini, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs au transport aérien du programme 203 « Infrastructures et services de transport » et sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Mes chers collègues, dans la mesure où vous avez été destinataires du projet de rapport, je vous ferai une présentation synthétique des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Trois éléments principaux me semblent devoir être mis en valeur. Le premier est que la dynamique de désendettement du budget annexe se poursuit, sa dette ayant été divisée de moitié en cinq ans. Elle devrait s’élever à 662 millions d’euros à la fin de l’année 2020, soit une diminution sur l’année de 72 millions d’euros supplémentaires. Ce désendettement permettra au budget annexe de retrouver des marges de manœuvre pour l’avenir, les dépenses exceptionnelles liées à la crise des années 2008-2009 étant désormais absorbées.

La tenue, en 2018, des Assises du transport aérien a permis de rassembler tous les acteurs de la filière aéronautique autour des enjeux du secteur. Nous sommes dans un moment de transition et nous devons préparer l’avenir. C’est pourquoi j’ai choisi de m’intéresser à deux sujets de fond : la décarbonation du secteur du transport aérien et le maillage aéroportuaire français.

Les émissions de gaz à effet de serre liées au transport aérien peuvent sembler faibles puisqu’elles représentent de 2 % à 3 % de la totalité des émissions annuelles. Toutefois, ce pourcentage est en augmentation tendancielle. D’une part, la croissance forte du trafic aérien dépasse les gains d’efficacité énergétique des avions. Entre 2000 et 2018, les émissions du secteur du transport aérien en France ont augmenté de 21 % pour une hausse du trafic de 62 %. D’autre part, il n’existe pas d’alternative totale et technologique permettant, à court ou moyen terme, de se passer du kérosène d’origine fossile. Les alternatives technologiques telles que les avions électriques ou les moteurs à hydrogène sont encore à l’état de recherche et ne sont, en tout état de cause, adaptées qu’aux appareils de petite taille.

Le deuxième élément marquant est la poursuite de la progression des investissements. En 2020, 315 millions d’euros y seront ainsi consacrés, soit une progression de 18 millions d’euros. Une grande partie de ces investissements sera affectée à la modernisation des systèmes de navigation aérienne, dans le cadre de la convergence technologique du ciel unique européen. Onze projets informatiques structurants ont été engagés en ce sens.

Troisième élément, le protocole social 2016-2019 conclu entre l’État et les agents de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) arrive à son terme. Un nouveau protocole couvrant la période 2020-2024, qui doit être négocié dans les mois à venir, aura pour ambition de poursuivre la modernisation de la DGAC, tout en garantissant à ses agents des conditions de travail améliorées. Le financement de ces mesures a été provisionné à hauteur de 10 millions d’euros.

Le projet de budget pour 2020 s’inscrit dans un contexte particulier : la fragilité du secteur, dont témoignent les faillites récentes des deux compagnies aériennes Aigle Azur et XL Airways, et l’échéance du Brexit à laquelle ma prédécesseure, Mme Zivka Park, avait consacré des développements dans son rapport sur le budget 2019. Si la sortie du Royaume-Uni se fait sans accord, ce pays deviendra un pays tiers et verra les taxes sur les vols aériens s’appliquer en conséquence, ce qui pourrait évidemment en réduire le nombre. C’est donc dans ce contexte que nous devrons déployer toute une palette de solutions pour faire baisser les émissions de gaz à effet de serre du secteur, qui vont du progrès technologique à l’adaptation des trajectoires de vol en passant par le développement des biocarburants.

L’article 20 du projet de loi de finances prévoit d’augmenter la taxe sur les billets d’avion, hausse qui a été au cœur de nos auditions. Cet article ne concerne pas le budget annexe à proprement parler puisque le produit de la taxe bénéficiera à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Néanmoins, il porte directement sur le secteur du transport aérien. Il ressort de mes auditions que cette contribution est mal comprise dans sa forme actuelle par les différentes parties prenantes. Les compagnies y voient un alourdissement de la fiscalité pesant sur le secteur, dans un contexte où leurs marges sont faibles. Les associations écologiques regrettent le faible niveau de la contribution, qui n’est pas susceptible, selon elles, de dissuader suffisamment de recourir au transport aérien. Par exemple, Greenpeace considère que plus on taxe le secteur aérien, plus les billets seront chers et moins les gens prendront l’avion, ce qui est donc plus écologique. Cette logique n’intègre aucunement la notion de transition écologique. Les producteurs de biocarburants sont déçus de ne pas profiter du produit de cette taxe pour développer des carburants moins polluants.

Certains d’entre nous avaient défendu, en commission, des amendements en faveur de cette écocontribution. À l’époque, le Gouvernement nous avait répondu que ce dispositif ne pouvait être instauré qu’au niveau européen. Désormais, il semble que cette taxe additionnelle sur les billets d’avions soit possible. Nous avons souhaité lui donner une dimension plus écologique afin d’encourager le développement d’une filière française des biocarburants aéronautiques. C’est ainsi que nous proposons d’indexer le montant de cette taxe sur les efforts effectués par chaque compagnie aérienne pour décarboner son kérosène, grâce à un mécanisme de bonus-malus annuel. J’insiste sur la nécessité de poursuivre les efforts entrepris sur les plans européen et international pour instaurer une taxation du kérosène d’origine fossile. Une telle fiscalité serait un encouragement puissant au développement des biocarburants en rapprochant les coûts de revient de ces deux sources d’énergie.

J’ai étudié, dans mon rapport, le maillage aéroportuaire français dans ses deux composantes qui concernent notre commission : le développement durable et l’aménagement du territoire. Le maillage aéroportuaire est particulièrement dense dans notre pays. La France compte 550 aérodromes, dont 460 en métropole, répartis sur l’ensemble du territoire ; 120 d’entre eux ont une activité commerciale régulière. La gestion de la majorité de ces aéroports incombe désormais aux collectivités territoriales, qui sont libres de leurs investissements et de leurs choix d’exploitation. Pour les aéroports de petite et moyenne taille, les collectivités doivent concilier des exigences souvent antagonistes. D’un côté, un aéroport est un pôle d’activité économique important qui peut générer des dizaines, voire des centaines ou des milliers d’emplois locaux. Il n’est donc pas rare que les collectivités territoriales cherchent à subventionner des lignes aériennes, quitte à entrer en concurrence avec des aéroports voisins. D’un autre côté, en dessous d’un trafic de 200 000 passagers par an, ces collectivités doivent très souvent contribuer fortement à l’équilibre financier de l’aéroport, notamment par des subventions d’exploitation. La gestion d’un aéroport peut donc constituer un poste budgétaire important pour les collectivités. En outre, un aéroport crée des nuisances pour les riverains, du bruit et de la pollution entre autres.

Il est évident qu’on ne peut pas trouver de solution à ce faisceau de contraintes sans un minimum de coopération et de mutualisation entre aéroports proches. Il serait illusoire de penser que deux aéroports distants de 30 ou 50 kilomètres pourraient assurer chacun la totalité des services aéroportuaires, depuis le trafic commercial jusqu’aux essais en vol, en passant par le fret ou le transport d’affaires. Le maillage territorial dense que connaît notre pays ne pourra perdurer que si des mutualisations entre aéroports proches sont envisagées. Il existe déjà des mécanismes de péréquation, comme les lignes d’aménagement du territoire, qui sont en développement, ou la taxe d’aéroport qui bénéficie aux aéroports de petite et moyenne taille. Mais les bonnes pratiques locales peuvent aussi être sources d’inspiration. Ainsi, un syndicat mixte a été créé pour réunir les aéroports de La Rochelle et de Rochefort, et éviter qu’ils ne soient en concurrence. Les aéroports de Carcassonne et de Perpignan seront gérés, à compter du 1er janvier 2020, par une société publique locale aéroportuaire régionale. Lors du déplacement que j’ai effectué à l’aéroport de Nîmes, j’ai pu vérifier la pertinence de la logique de spécialisation choisie par cet aéroport, d’abord dans le domaine de la défense, ensuite dans celui de la sécurité civile.

Les régions ont un rôle moteur à jouer en matière de mutualisation aéroportuaire. Elles doivent être aidées, et je fais deux propositions en ce sens dans mon rapport. Il s’agirait de mobiliser l’expertise et les financements de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), chère à cette commission, et dont c’est la mission, pour créer des projets de territoire. Aujourd’hui, les bassins de vie ne sont pas forcément dans les mêmes départements ou la même région ; deux ou trois petits aéroports peuvent s’y retrouver en concurrence, coûtant cher à la collectivité et produisant beaucoup de nuisances. Or un nouveau modèle économique est en train d’apparaître, qui est lié, non pas au nombre de passagers, mais à l’activité économique ou aux pistes. L’idée est de créer des pôles d’activité, des « clusters » qui créent de l’emploi. L’ANCT pourrait jouer un rôle dans le rapprochement de sites pour créer une gouvernance unique. Il s’agirait donc de dépasser les frontières administratives pour permettre à un bassin de vie de travailler sur l’aérien.

Pour conclure, j’émets un avis favorable à l’adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », en souhaitant que l’on puisse œuvrer dans les deux perspectives que j’évoquais à l’instant, à la fois l’écologie et l’aménagement du territoire.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en venons aux orateurs des groupes.

M. Pascal Lavergne. Je voudrais, en premier lieu, souligner, au nom du groupe La République en Marche, l’excellent travail de nos deux co-rapporteurs, MM. Jean-François Cesarini et Christophe Arend.

Nous avons eu de longs débats sur le transport aérien dans le cadre de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités, qui devrait d’ailleurs revenir en lecture définitive dans les toutes prochaines semaines. La première partie du projet de loi de finances prévoit une écomodulation sur les billets d’avion, et nous saluons l’engagement du Gouvernement sur ce sujet pour que le secteur aérien contribue, lui aussi, à la transition écologique et au financement des infrastructures de transport. Ce secteur connaît, depuis une quarantaine d’années, une croissance continue, mais aussi, depuis quelque temps, des secousses qui mettent en jeu des aspects à la fois économiques et territoriaux. Les cas d’Aigle Azur et de XL Airways nous rappellent qu’il existe une forte concurrence entre les compagnies aériennes.

Je me félicite, par ailleurs, que les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » soient stables sur un an, avec un peu plus de 2 milliards d’euros pour 2020.

Monsieur Jean-François Cesarini, dans votre rapport vous évoquez la possibilité d’une mutualisation de certains aéroports situés sur un même bassin de vie. Si, comme vous venez de le dire, des exemples existent, quelle approche recommandez-vous pour que l’État accompagne au mieux ces mutualisations ? Quels liens pouvez-vous faire avec la deuxième étape de décentralisation voulue par le Président de la République, dans la lignée du rapport que vous avez présenté dans cette commission sur l’aménagement du territoire ?

Concernant la transition énergétique, nous avons également œuvré depuis deux ans, avec la fin de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures, la fermeture des centrales à charbon ou encore l’inscription de l’objectif de neutralité carbone en 2050 dans le cadre de la loi relative au climat et à l’énergie. Cela nous impose de prendre des mesures contraignantes et d’accompagner les Français dans cette transition énergétique et écologique. Peut-être doit-on rappeler que l’écologie, c’est l’exigence et la discipline.

Les crédits de paiement du programme 174 connaissent une forte hausse puisqu’ils s’élèveront à 2,4 milliards d’euros en 2020 contre 996 millions d’euros en 2019. Cette augmentation est due à la création de deux nouvelles actions : l’action 2 « Accompagnement de la transition énergétique », dotée de 1,2 milliard d’euros en crédits de paiement et en autorisations d’engagement, répartis entre le nouveau dispositif issu de la transformation du CITE en prime à hauteur de 390 millions d’euros, et le chèque énergie pour 822 millions d’euros en crédits de paiement ; l’action 3 « Aide à l’acquisition de véhicules propres », dotée de 800 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement.

Monsieur Christophe Arend, vous indiquez dans votre rapport que le transfert de compétences pour l’action sanitaire et sociale a créé une situation complexe en raison de la tenue d’un budget distinct pour cette mission, les crédits venant de la CANSSM n’étant pas fongibles dans ceux du programme 174. Pouvez-vous développer les difficultés induites par cette double gestion, et les solutions à apporter pour la rendre plus lisible ?

Au nom du groupe La République en Marche, je salue ce budget qui illustre notre volonté d’accompagner la population, notamment les ménages les plus modestes, dans la transition énergétique et écologique.

Mme Valérie Lacroute. Lorsque l’on parle des infrastructures et services de transports, les Français ne comprennent pas tous la même chose. Les uns se soucient de la qualité du service des lignes ferroviaires, et c’est bien normal. Quelle que soit la ligne, les usagers sont exigeants sur l’état des rames, le prix des billets ou encore la qualité du service lorsqu’ils partent travailler en train, bus ou RER, ces lignes où il faut se serrer pour entrer dans une rame lorsque l’on a la chance d’avoir un train à l’heure… Les autres ne voient que les routes, tout simplement parce qu’ils n’ont pas d’autre choix que de prendre leur voiture. Or vous avez tendance à isoler ces personnes. J’en veux pour preuve la limitation de vitesse à 80 kilomètres/heure et la politique anti-voitures, avec l’interdiction de vente des voitures fonctionnant aux énergies fossiles et hybrides à partir de 2040, pour ne citer que ces mesures prises dans le cadre du projet de loi d’orientation des mobilités.

Une fois le constat général posé, on peut s’interroger sur plusieurs points de cette loi de finances. Pensez-vous sérieusement que les mesures présentées répondent à tous les Français ? N’avez-vous pas le sentiment, au contraire, de renforcer la fracture territoriale ?

La reprise de la dette de la SNCF – 25 milliards d’euros en 2020 et 10 milliards d’euros en 2022 – était nécessaire. Mais quel rôle comptez-vous jouer pour ne pas retomber dans la spirale de l’endettement à l’avenir ? Pouvez-vous nous dire – mais le Gouvernement sera sans doute mieux à même de répondre à cette question – si le régime des retraites des cheminots entrera dans le champ de la réforme souhaitée par le Président de la République ?

Enfin, pourquoi le rapport de M. François Philizot sur les petites lignes ferroviaires, que nous attendons tous depuis des mois, n’est-il toujours pas publié ? Nous avons discuté du projet de loi d’orientation des mobilités sans avoir eu ce rapport, et nous nous apprêtons à étudier un budget des transports sans connaître l’état réel de nos lignes. Naviguer sans cap n’est jamais bon présage.

Mme la présidente Barbara Pompili. Vous avez beaucoup parlé du budget relatif aux transports terrestres, mais il ne sera étudié que le 30 octobre.

M. Jean-Marie Sermier. Nous sommes tous d’accord sur l’urgence climatique mais pas sur les objectifs. Votre objectif est clair : réduire de 75 % à 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici à 2035 ; le nôtre l’est tout autant : réduire de 40 % les émissions de CO2 d’ici à 2030. Or ces deux objectifs ne sont pas compatibles. Aussi ne sommes-nous pas favorables à votre projet de loi de finances pour ce qui concerne l’énergie. On ne peut pas soutenir l’éolien à outrance, sachant qu’il ne donne aucun résultat en matière réduction des émissions de CO2. Je salue la qualité du budget sur le biogaz, mais certains signes sur les tarifs de rachat sont contradictoires, et on annonce des baisses régulières pendant un certain nombre d’années. Voilà pour la production.

Du point de vue de la consommation, alors que le CITE, qui permettait d’isoler les bâtiments, fortement responsables des émissions de CO2, avait donné pleinement satisfaction, vous le transformez en prime. On aurait pu s’en satisfaire, sauf que vous réservez cette prime aux seuls ménages figurant dans les comptes de l’ANAH, c’est-à-dire aux couples dont le revenu est inférieur à 43 000 euros par an, autrement dit moins de 1 800 euros par mois. Ce n’est pas sérieux ! En fait, vous amputez une grosse partie de l’aide aux bâtiments, puisque vous supprimez également le prêt à taux zéro (PTZ) pour la totalité des zones rurales.

M. Christophe Bouillon. Comme nos rapporteurs pour avis ont balayé un large éventail de sujets avec une rigueur comptable tout en apportant des observations non dénuées d’intérêt, j’insisterai seulement sur quelques points.

S’agissant de la transformation du CITE en prime, que nous ne discutons pas, nous nous interrogeons sur la cible. Le secteur du bâtiment est important pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre, certaines constructions étant très consommatrices d’énergie. Ce secteur réunit deux fortes ambitions : la lutte contre la précarité énergétique et la rénovation des fameux 500 000 logements, objectif ambitieux qui figure toujours dans la loi. Comment parvenez-vous à conjuguer ces deux cibles, sachant qu’en s’intéressant aux seuls publics dits en précarité énergétique, on risque de laisser échapper des publics propriétaires aux revenus moyens ? Un couple dont les deux membres travaillent et dont le logement, situé dans un lotissement en zone périurbaine, mérite d’être rénové, pourra-t-il bénéficier de la prime ?

Quelle est, également, la cible de l’aide à l’acquisition de véhicules propres ? On nous a dit que cette prime avait parfois servi à changer de véhicule, mais à motorisation pas très propre, si je puis dire. Disposez-vous d’une ventilation des emplois de cette prime ?

Quant aux contrats de transition écologique, ils cibleront certes les territoires où les centrales à charbon doivent être supprimées, mais est-il prévu d’élargir le dispositif ? Certains territoires vont d’ores et déjà devoir engager l’après-pétrole ou l’après-chimie. Par exemple, dans la vallée de la Seine, qui compte beaucoup d’industries lourdes, notamment chimiques et pétrolières, seule la partie havraise est concernée puisqu’une centrale à charbon doit y être fermée. Je m’interroge sur la possibilité d’une réflexion plus large en réaction à la récente catastrophe de Lubrizol. Pour ces territoires qui souhaitent travailler sur leur attractivité, l’avenir pourrait passer par une mutation aidée par ce dispositif.

Pour les collectivités, notamment les communautés de communes, qui souhaiteraient prendre la compétence « transport » et devenir autorités organisatrices des mobilités, dans quelle action sont inscrites les aides dont elles pourraient bénéficier ? Lors de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités (LOM), on a évoqué la possibilité qu’elles bénéficient d’une fraction de la TVA, mais je n’ai rien vu. Ai-je mal regardé ou cela ne figure-t-il pas dans votre rapport ?

Enfin, nous aurions souhaité que la totalité de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) soit dédiée au compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », alors que les deux-tiers sont affectés au budget de l’État.

M. Stéphane Demilly. Le Gouvernement a annoncé récemment que par un amendement au projet de loi de finances, l’État apporterait sa contribution au projet de canal Seine-Nord Europe par le biais de l’AFITF. C’est, bien sûr, une excellente nouvelle pour le développement économique, l’emploi et le report modal dans mon territoire. Cette décision était attendue de longue date. Or je constate que l’amendement n’a pas encore été déposé. J’attends donc de pied ferme qu’il le soit pour la séance. Peut-être les rapporteurs pour avis ont-ils des informations sur ce sujet ?

Avec le budget de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », le Gouvernement entend affirmer sa priorité donnée à l’urgence climatique et écologique. La France s’est, en effet, fixé des objectifs ambitieux en la matière, et nous ne pouvons qu’y souscrire. Toutefois, si je partage notamment la volonté d’aller vers une décarbonation du secteur des transports, je suis convaincu que cela ne peut pas se faire de manière brutale. Il est impératif d’accompagner les filières et de ne pas prendre le risque de déstabiliser un secteur du fait de changements radicaux ou d’absence de solutions alternatives. Il faut donc se donner les moyens de ses ambitions tout en accompagnant ces différentes filières.

C’est pourquoi je souhaite insister en particulier sur l’intérêt du développement des biocarburants à destination du secteur aérien, que vous avez mis en avant, Monsieur Jean-François Cesarini. Dans votre rapport, vous écrivez que « si les politiques publiques sont performantes en matière de recherche et de développement visant à réduire la consommation des avions et de réduction des émissions des aéroports, tel n’est pas encore le cas s’agissant du développement d’une filière française des biocarburants aéronautiques. » Vous avez raison, rien n’est prévu dans le projet de loi de finances pour 2020 sur le sujet. Que pouvons-nous proposer pour que les pouvoirs publics s’emparent de la question et y portent véritablement un intérêt ? Quelle solution et quel soutien vous paraissent les plus pertinents ?

Les biocarburants, pour les secteurs tant aérien que terrestre ou maritime, constituent, j’en suis convaincu depuis très longtemps, une voie dans laquelle il convient d’investir si nous voulons respecter nos engagements et être à la hauteur des défis écologiques, climatiques et économiques. Se donner les moyens de ses ambitions, c’est aussi ce qu’appelait de ses vœux le groupe UDI, Agir et Indépendants à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’énergie et au climat, dont le programme « Énergie, climat et après-mines » comporte les principales dépenses relatives aux priorités stratégiques. Nous soutenons pleinement les dispositifs déployés dans ce programme. Pour la plupart, à l’image du dispositif du chèque énergie, ils ont prouvé leur efficacité, et nous ne pouvons qu’inciter à leur déploiement. C’était le cas également du CITE dont nous déplorons les modifications proposées, qui excluent une partie de la population du dispositif. Dans ces conditions, tiendrons-nous l’objectif du Gouvernement d’une émission moyenne de 5,47 tonnes équivalent CO2 par personne en 2019 ?

Mme la présidente Barbara Pompili. Je constate que beaucoup de vos remarques concernent notre rapporteure pour avis sur les transports terrestres, Mme Bérangère Abba. Vous pourrez lui reposer vos questions lorsqu’elle présentera son rapport.

M. Matthieu Orphelin. Je m’interroge sur les moyens humains affectés à la mission « Écologie, développement et mobilités durables », qui vont diminuer de plus de 1 000 postes. Alors que la discussion sur le projet de loi de finances pour 2020 a commencé depuis plus de quinze jours, nous ne savons toujours pas sur quels services, quels opérateurs, ou quels services déconcentrés porteront ces efforts de réduction. Il faudra vraiment que le ministère lève nos inquiétudes dans les prochains jours, sachant que la mise en œuvre de la transition écologique et solidaire doit être renforcée sur le terrain et que les réductions de postes se poursuivront jusqu’en 2022. Le ministère chargé de l’écologie est l’un des plus gros contributeurs à la baisse des moyens humains, en totale inadéquation avec l’ambition d’accélérer la transition écologique.

Plusieurs des amendements que j’avais déposés sur cette mission ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, mais je peux formuler des remarques.

S’agissant de la transformation du CITE en prime « j’écorénove », il est indispensable que les crédits dédiés soient suffisants, que la politique puisse être pilotée pour que les crédits soient abondés en cours d’année, que la prime soit élargie aux propriétaires bailleurs, et qu’un CITE pour rénovations performantes puisse être réintégré en direction des ménages les plus aisés. Nous espérons que le Gouvernement nous apportera de bonnes nouvelles d’ici à l’examen du texte en séance publique.

S’agissant du plan hydrogène, là aussi il nous faut de la clarté. Ce plan sera-t-il financé à hauteur de 100 millions d’euros dans le projet de budget pour 2020 ? Pour le moment, nous n’avons aucune assurance. Une part sera financée par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) sans qu’on sache de combien elle sera – 20 millions d’euros, 25 ou 50 ? –, et une autre par le Commissariat général à l’investissement. Il nous faut obtenir l’assurance que ce plan hydrogène, que tout le monde appelle de ses vœux, sera financé à la hauteur de l’ambition initiale.

Enfin, il faudrait réfléchir à une accélération des investissements sur certaines lignes, notamment sur les mobilités actives. Mais nous y reviendrons au moment de la discussion du rapport dédié.

M. Hubert Wulfranc. La mission « Écologie, développement et mobilités durables », c’est la protection de l’environnement et, à mon tour, je me concentrerai sur les moyens humains consacrés à la prévention des risques technologiques. Le rapport du Bureau d’analyse des risques et pollutions industriels (BARPI) du ministère de la transition écologique et solidaire, publié avant l’accident de Lubrizol, faisait apparaître une hausse très sensible, entre 2016 et 2018, des accidents survenus dans les usines à risques. Ce sont ainsi 1 112 accidents qui ont été recensés en 2018, en hausse de 34 % en deux ans, l’accidentologie due aux usines Seveso contribuant significativement à cette hausse.

Il ressort de ce rapport que les causes profondes de l’augmentation du nombre d’accidents se trouvent dans des facteurs organisationnels – organisation des contrôles, choix des procédés, identification des risques, rédaction des consignes – ainsi que dans la mauvaise prise en compte des retours d’expérience. On touche là du doigt l’insuffisance des contrôles dans ce type d’établissements et donc la baisse des contrôles par les services de l’État. En 2018, le nombre d’inspecteurs des installations classées était de 1 607 agents, contre 1 627 en 2016, et cette baisse est encore plus importante si on établit une comparaison sur la décennie.

Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit une baisse des effectifs de 797 agents dans les services du ministère chargé de l’écologie. Mme la ministre Élisabeth Borne a indiqué que le nombre des inspecteurs d’installations classées serait maintenu, mais, même dans ces conditions, ces agents restent totalement insuffisants sur le terrain, comme l’a illustré le récent accident survenu à Rouen. Je souhaiterais donc obtenir des réponses sur ce point d’alerte.

Mme Aude Luquet. On a beaucoup parlé, ces derniers mois, de la nouvelle contribution du secteur aérien pour financer le développement d’infrastructures de transport. Dans le contexte favorable d’une hausse continue du transport aérien dans le monde et en Europe, le groupe Mouvement démocrate et apparentés salue le projet de budget consacré au transport aérien, qui dégage un excédent d’exploitation. L’année dernière, le sujet de préoccupation concernait les effectifs des contrôleurs aériens, dont la baisse continue a abouti à une dégradation du service rendu et une augmentation des retards. Qu’en est-il cette année ? Quels choix budgétaires ont été faits afin d’améliorer la situation ?

Dans le cadre de la LOM, fruit d’un long travail de concertation, d’échanges et de débats avec le Gouvernement, les parlementaires et l’ensemble des acteurs de la mobilité ont eu à cœur d’améliorer nos transports du quotidien. Le transport aérien, pour sa part, comporte de nombreuses particularités et n’a pas été traité avec l’ensemble des autres moyens de transport, la réflexion le concernant ayant été renvoyée aux Assises du transport aérien. Un an après, qu’en est-il ? Quels choix budgétaires ont été faits pour prendre en compte le développement et l’impact écologique de ce mode de transport ?

Cette année, mon groupe s’est fortement mobilisé dans la lutte contre les nuisances sonores. C’est un sujet particulièrement important dans le secteur aérien, car, depuis plusieurs années, les associations de riverains demandent la mise en place de nouvelles procédures d’approche des aéroports. Le projet de budget prévoit-il des moyens pour enrayer ces nuisances, devenues insupportables pour de nombreux Français ?

Enfin, des financements ont-ils été dédiés au soutien de nouveaux carburants pour faire ainsi baisser les émissions de gaz à effet de serre des avions ?

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en venons aux questions.

M. Jean-Luc Poudroux. La liquidation de XL Airways a cloué au sol 2 700 passagers qui avaient acheté un billet Paris-La Réunion ou La Réunion-Paris. Serait-il possible, pour l’avenir, de créer un fonds de garantie pour les passagers se retrouvant dans une telle situation ?

M. Adrien Morenas. Monsieur Jean-François Cesarini, comment opère-t-on la mutualisation des aéroports lorsque leur mode de gestion n’est pas le même, par exemple lorsque l’un d’entre eux est financé par le ministère des armées et l’autre par la région ? Que se passe-t-il lorsqu’il s’agit d’aéroports appartenant à des régions différentes ?

Mme Sophie Auconie. Je tiens à saluer, en premier lieu, le travail effectué par les rapporteurs pour avis sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », destinés à la mise en œuvre de nos priorités en matière de lutte contre le changement climatique et d’accompagnement de la transition énergétique, notamment au sein du programme 174 « Énergie, climat et après-mines », qui regroupe les principales dépenses prévues par la loi relative au climat à l’énergie.

Cette loi fixe notamment pour objectif de ramener de 70 % à 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité française d’ici à 2035. Notre feuille de route énergétique prévoit également, sur la même période, la fermeture de quatorze réacteurs sur cinquante-huit. Or, dans le même temps, nous apprenons que le Gouvernement a envoyé, le 12 septembre dernier, une feuille de route au président d’EDF, afin qu’il soit « en mesure de répondre à l’exécution d’un programme de construction de trois paires de réacteurs sur trois sites distincts ». J’aimerais, Monsieur Christophe Arend, connaître votre sentiment sur ce courrier du Gouvernement à EDF.

Mme la présidente Barbara Pompili. C’est une question que nous ne manquerons pas de poser également au Gouvernement.

Mme Danielle Brulebois. M. Jean-François Cesarini a mis en avant la situation critique des petits aéroports par lesquels transitent moins de 200 000 passagers, ainsi que les difficultés des collectivités qui participent aux frais d’exploitation. Il a émis l’idée de travailler avec l’ANCT à partir des projets de territoire : comment le Gouvernement compte-t-il encourager cette mutualisation ?

Mme Valérie Beauvais. À la lecture du programme « Infrastructures et services de transport », j’ai noté que les crédits de paiement demandés en 2020 s’élèvent à 3,183 milliards d’euros, contre 3,193 milliards de crédits ouverts en 2019, soit une baisse de 0,31 %.

Alors que la mobilité durable est censée être la priorité du Gouvernement, comment expliquer que, à l’intérieur du programme, les crédits alloués au ferroviaire baissent de 0,89 %, alors que l’action consacrée aux transports collectifs connaît une hausse de plus de 80 % et celle consacrée aux fonctions supports une hausse de 60 % ? Pourrions-nous connaître le périmètre exact de ces actions ?

À l’heure où nous n’avons pas encore les conclusions du rapport de M. François Philizot sur le sort des petites lignes, cette baisse des crédits consacrés à l’action ferroviaire me paraît d’autant plus importante qu’elle aura certainement une incidence sur le fret ferroviaire.

Mme la présidente Barbara Pompili. Votre question est très intéressante, mais ce sera à Mme Bérangère Abba de vous apporter une réponse, lorsque nous étudierons le budget concerné.

M. Alain Perea. Alors que nous venons de voter en nouvelle lecture une loi importante sur les mobilités, en insistant sur le fait qu’il fallait avoir une vision globale de l’ensemble des mobilités sur un territoire, je regrette que nous continuions à étudier des budgets « saucissonnés », mode de transport par mode de transport.

Cela me conduit à demander à M. Jean-François Cesarini ce qu’il entend exactement par mutualisation, alors qu’en Occitanie, on vient de décider de mettre un terme aux investissements dans les lignes TGV et de ne plus construire d’infrastructures autoroutières. Comment avoir une approche globale de la mobilité et nous citer en même temps, comme exemples de petits aéroports à mutualiser, ceux de Nîmes et de Perpignan, qui sont en Occitanie ? J’entends les problèmes que posent ces aéroports, notamment la pollution, mais on ne peut faire l’économie d’une vision globale de la problématique des transports.

M. Vincent Descoeur. Le rapporteur pour avis a évoqué la nouvelle prime de transition énergétique et sa fusion avec les aides de l’ANAH : cette prime va-t-elle se cumuler avec les dispositifs du programme « Habiter mieux » ou a-t-elle vocation à s’y substituer ?

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis. L’Agence nationale de la garantie des droits des mineurs rencontre aujourd’hui des problèmes de gestion du fait de ses deux sources de financement et des deux missions qu’elle a en charge. Ainsi, le fait que les agents interviennent à la fois sur des prestations liées au logement et sur des aides liées à l’action sanitaire et sociale engendre des difficultés fonctionnelles et comptables. Ces difficultés sont amplifiées par le fait qu’on a voulu considérer que la diminution de 5 % du nombre de bénéficiaires équivalait à une diminution de 5 % des besoins, ce qui n’est nullement le cas, du fait du vieillissement et de la plus grande fragilité de ces bénéficiaires, dont la moyenne d’âge atteint 75 ans dans l’Est de la France, et plus de 84 ans dans le Nord et le Sud. Notre proposition n’est pas de fusionner les deux missions de l’ANGDM, mais de maintenir les deux budgets avec une comptabilité unique, comme l’autorise la loi, sachant que l’ANGDM va également subir indirectement les répercussions de la fermeture d’une de nos deux centrales à charbon.

En ce qui concerne l’extinction du CITE, je partage vos inquiétudes sur l’état actuel du texte. Le fait que les neuvième et dixième déciles, qui assumaient près de 49 % de l’effort de rénovation, perdent le bénéfice de l’aide a de quoi inquiéter dans le secteur du bâtiment. C’est la raison pour laquelle nous travaillons avec le Gouvernement pour éviter les effets pervers. Cela étant, à l’autre bout du spectre, c’est-à-dire dans les quatre premiers déciles, le CITE ne permettait pas aux familles en grande difficulté d’entreprendre des travaux, dans la mesure notamment où ce crédit d’impôt était au mieux différé de douze mois. Le fait de le transformer en une prime versée immédiatement va diminuer le reste à charge, ce qui va faciliter l’accès aux travaux. Quant aux déciles intermédiaires, du cinquième au huitième, il est question qu’ils continuent de bénéficier pour l’instant du CITE, avant de se voir, à leur tour, proposer la prime.

En ce qui concerne le cumul de cette prime avec les aides de l’ANAH, celle-ci doit être dotée de 60 millions d’euros qui doivent lui permettre de mieux répartir les aides – dont certaines seront en effet cumulables. L’accès aux différents dispositifs devrait être facilité, dès le mois d’avril, grâce à la mise en place d’une plateforme unique.

J’ai été interrogé sur les projets de territoire et les contrats de transition écologique, qui renvoient à deux types de situation. Les projets de territoire ont été mis en place quand les mutations territoriales découlaient d’une décision de l’État, par exemple la fermeture de Fessenheim ou l’arrêt des quatre centrales à charbon du Havre, de Cordemais, de Gardanne et la centrale Émile-Huchet. Dans les autres cas, il est tout à fait possible d’envisager d’ores et déjà, selon les sites, des contrats de transition écologique. Il ressort de nos auditions que, lorsqu’il existe un consensus entre les élus et les acteurs locaux, l’État est tout à fait prêt à engager ce genre de procédure.

M. Matthieu Orphelin m’a interpellé sur l’évolution des postes au ministère de la transition écologique et solidaire. Bien que cela ne dépende pas directement de notre programme, nous y sommes très attentifs.

Je répondrai de la même façon à M. Hubert Wulfranc que la prévention des risques ne fait pas partie du programme 174, mais que nous regardons également de très près cette question.

Madame Aude Luquet, on ne peut pas considérer pour l’instant que les efforts faits en faveur du développement du biogaz aient une incidence sur le transport aérien.

Enfin, Madame Sophie Auconie, nous partageons les objectifs que le Gouvernement a inscrits dans la loi relative à l’énergie et au climat en matière de diminution du nucléaire dans notre mix énergétique. Néanmoins, nos auditions nous ont fait comprendre qu’il se posait une question majeure de sécurité de l’approvisionnement électrique, notamment dans l’ouest de la France, du fait de la reconversion de la centrale de Cordemais, de la fermeture de la centrale du Havre et du retard pris par l’EPR de Flamanville, à quoi s’ajoutent les problèmes de soudure détectés sur plusieurs générateurs de vapeur du parc nucléaire. La trajectoire est donc bien actée, mais on ne peut laisser une partie de la France exposée à un risque de rupture d’approvisionnement.

 

Présidence de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, vice-présidente de la commission

 

M. Jean-François Cesarini, rapporteur pour avis. M. Pascal Lavergne s’interroge sur le fait de savoir si l’idée d’une mutualisation des petits aéroports s’inscrit dans la lignée de mon rapport sur la décentralisation, conformément à la volonté du Président de la République de franchir une nouvelle étape en ce sens. Cela procède en effet de la même philosophie générale, qui, bien au-delà du transport aérien, devrait s’appliquer à d’autres secteurs, comme la santé ou la justice. En vérité, l’aménagement du territoire concerne à peu près tous les secteurs d’activité, et notre commission devrait, pour cette raison, être saisie, au moins pour avis, de bien des lois que nous n’examinons pas.

Pour en revenir au secteur aérien, la question se pose d’un cadre et de frontières administratives qui datent de plusieurs siècles et ne correspondent plus aux nouveaux bassins de vie. Les aéroports d’Avignon et de Nîmes sont l’exemple de deux aéroports qui, bien que situés dans des régions différentes, appartiennent au même bassin de vie, à l’intérieur duquel ils sont en concurrence. Chacun absorbe de l’argent public, chacun produit des nuisances sonores, alors que, si nos villes et nos EPCI parvenaient à travailler ensemble, il serait possible, non pas de fermer l’un d’entre eux mais de mutualiser leur gestion pour de meilleures synergies.

En ce qui concerne les biocarburants, si nous avons proposé l’idée d’une modulation de l’éco-contribution, c’est que le fait de taxer de la même manière les compagnies qui font des efforts et celles qui n’en font pas n’a aucun effet incitatif. La modulation, au contraire, devrait pousser les compagnies à utiliser davantage les biocarburants, ce qui ne peut qu’aider au développement de la filière.

L’aviation civile est dotée cette année de 135 millions d’euros destinés à financer la recherche et le développement pour parvenir à un transport aérien moins polluant. Or il se trouve que le produit de l’éco-contribution aérienne est destiné au secteur ferroviaire, à travers l’Agence de financement des infrastructures de transport en France (AFITF). J’ai donc déposé un amendement sur la première partie du PLF pour que l’aviation n’en perde pas ainsi le bénéfice de cette nouvelle contribution : je vous invite à le voter en séance, afin d’encourager l’émergence d’une filière de biocarburants.

S’agissant du contrôle aérien, Madame Aude Luquet, plusieurs actions sont prévues. En premier lieu, comme je l’ai mentionné dans mon propos liminaire, un nouveau protocole social va être négocié pour améliorer l’organisation du transport et du contrôle aériens. En second lieu, onze projets numériques et informatiques structurants sont en cours de développement, pour plus de 2 milliards d’euros, afin d’augmenter la sécurité aérienne. Enfin, dès 2020, les promotions de contrôleurs aériens à l’École nationale de l’aviation civile vont être élargies.

En ce qui concerne les nuisances sonores, nous préconisons que les collectivités locales s’emparent davantage de la question, quitte à leur imposer pour cela des délais d’action, et qu’elles n’attendent pas le dépôt des dossiers pour financer des travaux de rénovation anti-bruit. Nous avons, en effet, constaté que le nombre de dossiers déposés restait assez faible dans le dispositif actuel.

J’en viens à la mutualisation des aéroports. Si l’on prend l’exemple d’Avignon et de Nîmes, cette mutualisation peut passer par la désignation d’un même exploitant, quand bien même le statut de ces deux aéroports est différent. Il est important de bien comprendre qu’aujourd’hui, le modèle économique des aéroports a profondément évolué : à Avignon, l’autofinancement ne couvre que 5 % des recettes, tout le reste provenant de l’extérieur. L’aéroport est rattaché à un pôle de compétitivité de 27 entreprises, qui représentent 300 à 400 emplois. Ce ne sont donc plus les passagers qui font l’économie de l’aéroport ; pas davantage à Nîmes, qui est spécialisé dans la sécurité civile. Il nous faut donc réinventer des modèles, par exemple des syndicats mixtes ouverts, ainsi que nous l’avons évoqué avec le président de la métropole de Nîmes.

Quoi qu’il en soit, nous préconisons, en cas de mise en place d’une gouvernance commune entre deux aéroports, de maintenir le bénéfice de la taxe d’aéroport pendant plusieurs années après l’arrêt du trafic commercial, afin d’aider les aéroports à développer d’autres activités, dans l’industrie, la technologie ou la recherche. Il faut encourager le développement de ces nouveaux schémas, que l’Agence nationale de la cohésion des territoires doit accompagner en termes d’ingénierie humaine et de financement. Il est essentiel de ne pas fermer ces aéroports qui offrent un formidable maillage du territoire et contribuent au désenclavement, ce qui est l’une des missions de service public.

Ne nous racontons pas d’histoires : Avignon et Nîmes ne feront jamais concurrence à Marignane ou à Montpellier. En revanche, Nîmes peut se prévaloir d’être aujourd’hui un pôle majeur en matière de sécurité aérienne et de sécurité civile, et d’attirer parmi les meilleures entreprises d’Europe et du monde dans ce domaine, lesquelles entreprises n’ont d’ailleurs aucune envie de se délocaliser à Marignane, parce qu’elles bénéficient à Nîmes de meilleures conditions de travail et d’un accès facilité aux pistes.

C’est dans cette logique de réinvention des modèles économiques, Monsieur Alain Perea, que la région Occitanie vient tout récemment de mettre en place un pilotage régional des différents aéroports. C’est un bon exemple d’action permettant de rationaliser le financement, en développant sur chaque site différentes spécialisations. Car c’est tout le sens de la deuxième étape de la décentralisation : à l’inverse des métropoles qui ont vocation à être généralistes, nos territoires doivent se spécialiser, c’est la clef de leur développement.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, présidente. Nous en venons à l’examen des amendements.

 

Article 38 et État B : Crédits du budget général

 

La commission examine l’amendement II-CD43 de M. Jean-Luc Fugit.

M. Jean-Luc Fugit. Cet amendement vise à augmenter les crédits du programme 174, afin de renforcer les moyens financiers nécessaires à la surveillance de la qualité de l’air. Si ces crédits sont en légère augmentation pour l’action 5 du programme 174, il apparaît en réalité que le financement par l’État des associations chargées de la surveillance de la qualité de l’air est en baisse de 15 %, ce qui me paraît d’autant plus inacceptable que ces associations accomplissent également un travail d’amélioration des instruments de mesure.

Je rappelle que, selon un rapport parlementaire de 2015, la pollution de l’air nous coûte chaque année 5 milliards d’euros, et qu’elle est responsable de 50 000 à 60 000 morts prématurées. Il nous faut donc agir, ce qui passe par la surveillance de la qualité de l’air mais également par un contrôle accru des actions menées pour lutter contre la pollution.

Ces actions se développent sur l’ensemble du territoire. Ainsi, dès le début de l’année prochaine, le nouvel indice Atmo va intégrer la mesure des particules fines d’un diamètre inférieur à 2,5 microns (PM 2,5) ainsi que la ministre l’a entériné après le vote unanime du Conseil national de l’air. Cette nouvelle mesure représente du travail supplémentaire pour les associations, et pourtant on diminue leurs moyens. Sans compter que le projet de loi d’orientation des mobilités renforce le rôle des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA), notamment dans le développement des plans d’actions en faveur de la qualité de l’air créés par l’article 27 et la mise en place des zones à faibles émissions qui découle de l’article 28.

Je passe sur les cartes stratégiques air qui doivent permettre aux collectivités d’améliorer leur politique d’urbanisme et d’aménagement, mais vous appelle à méditer sur les chiffres suivants : la part de l’État dans le financement des AASQA s’élève actuellement à 0,22 euro par an et par habitant ; mon amendement propose de la porter à 0,29 euro. Cela reste un prix relativement modeste pour préserver ce que nous avons de plus cher en commun, à savoir l’air que nous respirons.

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis. Je partage à double titre votre volonté d’œuvrer en faveur de l’amélioration de la qualité de l’air. En tant que rapporteur pour avis du programme 174 d’abord, je ne peux voir que d’un bon œil que vous souhaitiez augmenter nos crédits ; en tant que professionnel de santé, je sais ensuite combien la qualité de l’air est une problématique de santé publique et dans quelle mesure investir aujourd’hui dans la qualité de l’air est une manière de réduire demain nos dépenses de santé.

Néanmoins, extraire ces crédits du budget consacré à la prévention des risques technologiques ne me paraît pas une bonne idée, a fortiori dans le contexte qu’a rappelé tout à l’heure M. Hubert Wulfranc. Je vous propose donc de retravailler votre amendement pour la séance, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. Jean-Luc Fugit. J’ai conscience que le prélèvement des crédits sur le budget de la prévention des risques n’est pas nécessairement la meilleure solution, mais j’en profite pour rappeler que les AASQA interviennent également dans le cas d’accidents comme celui de Lubrizol. Atmo Normandie a effectué, en l’occurrence, un travail remarquable – et nous allons l’auditionner dans le cadre de la mission d’information que la Conférence des Présidents de l’Assemblée a décidé de créer.

J’accepte donc de retirer mon amendement pour le retravailler, mais pensons-y, car il ne sert à rien de se gargariser de grands discours sur la qualité de l’air si l’on n’est même pas capable de se donner les moyens de surveiller correctement les actions que nous menons en la matière.

L’amendement est retiré.

 

Après l’article 76

 

La commission examine l’amendement II-CD17 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit de demander au Gouvernement la remise d’un rapport qui permettrait d’anticiper et de réfléchir à une refonte des différents dispositifs de soutien au développement des mobilités propres.

Nous avions, par exemple, évoqué, au moment du précédent PLF, la possibilité d’étendre la prime à la conversion à d’autres types de mobilité que l’automobile. Dans le cadre d’une réflexion globale, nous pourrions également réfléchir à l’extension de la prime à la conversion au rétrofit d’anciens véhicules diesel ou bien à l’achat d’un véhicule à assistance électrique ou d’un vélo cargo, cette dernière option permettant que la prime à la conversion profite à des ménages modestes qui n’ont pas nécessairement les moyens de racheter une voiture.

Enfin, il faudrait également étudier la possibilité de compléter cette prime pour les ménages modestes qui rachètent un véhicule par d’autres dispositifs, comme le prêt à taux zéro ou des offres de location longue durée. Cela permettrait à ces ménages de financer un reste à charge qui s’élève souvent à 1 000 ou 1 500 euros.

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis. Les barèmes qui établissent les critères d’attribution de la prime ont évolué en juillet dernier. Il me paraît donc un peu tôt pour demander un rapport au Gouvernement. Par ailleurs, lui demander de s’auto-évaluer me semble en contradiction avec notre mission parlementaire de contrôle et d’évaluation de l’action gouvernementale. La réflexion que vous demandez me paraît davantage relever d’une mission d’information. Retrait ou avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Au-delà de l’évolution des montants alloués, ce rapport permettrait d’étudier d’éventuelles extensions ou évolutions du dispositif, afin qu’elle profite davantage à nos concitoyens, notamment à ceux qui en ont le plus besoin.

Nous manquons d’une réflexion globale sur le sujet et, si je vous accorde que c’est aux parlementaires de faire des propositions, nous sommes assez vite limités dans nos initiatives par le fait qu’elles se traduisent souvent sous forme de dépenses.

La commission rejette l’amendement.

 

Article additionnel après l’article 76 : Rapport sur la mise en œuvre d’un plan d’investissement climat

La commission en vient à l’amendement II-CD21 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Le jaune budgétaire consacré au financement de la transition écologique met, pour la première fois, en regard les investissements que nécessiterait la trajectoire bas-carbone et ce qui est réellement réalisé. L’écart entre les deux est manifeste : il résulte d’années de sous-investissements.

Nous souhaitons donc que le Gouvernement produise un rapport qui permette d’établir les moyens de respecter la Stratégie nationale bas-carbone qu’il a fixée : à en croire les chiffres du dernier Panorama d’I4CE, il manquerait 15 milliards d’euros d’investissement par an, déficit qui grimperait jusqu’à 30 milliards d’euros après 2024. Ces chiffres recouvrant l’investissement public et privé, on peut imaginer, si l’on conserve la répartition actuelle entre les deux sources de financement, que le déficit d’investissement public s’élève, jusqu’en 2024, à 7 milliards d’euros par an.

Ce n’est évidemment pas un amendement qui réglera le problème mais nous devons aider le Gouvernement dans sa réflexion sur la mise en œuvre d’un nouveau plan d’investissement massif en faveur du climat ; il me semble que cela participe du rôle du Parlement.

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis. Si je reste très réservé sur le fait d’intégrer dans un rapport l’étude des moyens financiers à mobiliser dans le secteur privé, compte tenu de la complexité d’un tel exercice, je trouve intéressant de disposer d’une analyse qui nous permette d’apprécier l’effort d’investissement. J’émets donc un avis de sagesse.

La commission adopte l’amendement.

 

Après l’article 76

 

La commission examine l’amendement II-CD13 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Ce troisième amendement propose de réfléchir à ce que pourrait être une contribution supplémentaire des Français les plus aisés pour financer la transition écologique et solidaire. Il y a beaucoup d’idées sur la table, parmi lesquelles celle d’un impôt de solidarité écologique, que soutiennent notamment notre rapporteur pour avis M. Jean-François Cesarini et M. François-Michel Lambert.

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis. Vous faites référence, dans votre amendement, aux Français les plus aisés. C’est une notion difficile à cerner et à définir en l’état. Il est donc compliqué, dans ces conditions, d’évaluer les incidences qu’aurait cette nouvelle imposition. Avis défavorable.

M. Matthieu Orphelin. Vous avez raison, et l’étude devra, en effet, définir ce qu’on entend ici par les Français les plus aisés ; sans doute pas les 20 %, mais plutôt les 5 ou 10 % les plus aisés – pourquoi ne pas reprendre les seuils de l’impôt sur la fortune ou de l’impôt sur la fortune immobilière ?

Quoi qu’il en soit, il me paraissait important d’introduire cette question dans nos débats, au moment où ce projet de loi de finances supprime la taxe d’habitation pour les 20 % des Français les plus aisés, ce qui, en année pleine, va représenter une perte de 7 milliards d’euros, somme qui correspond exactement au déficit d’investissement public annuel dans la transition écologique.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle examine enfin l’amendement II-CD23 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Dans le même sens que l’amendement précédent, cet amendement propose d’étudier l’opportunité d’une réforme de la fiscalité sur les droits de succession et de donation pour financer la transition écologique. Je vais le retirer, car il serait repoussé comme le précédent, mais j’insiste sur le fait que nous devons aborder les vraies questions : il manque dans ce PLF 7 milliards d’euros d’investissements publics en faveur de la transition écologique. Nous devons apporter des réponses à ce déficit, et il existe pour cela toute une série de solutions. Sans ces 7 milliards d’euros, très concrètement, toutes les politiques que nous voulons mettre en œuvre sont vouées à l’échec. Ne nous résignons pas !

L’amendement II-CD23 est retiré.

M. Christophe Arend, rapporteur pour avis. Je vous remercie de ce retrait, car la modification de la fiscalité que vous proposiez nous paraissait dépasser le strict champ du financement de la transition écologique.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Nous avons achevé l’examen des amendements. Le vote sur l’ensemble des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » aura lieu le 30 octobre.

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Informations relatives à la commission

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a nommé M. Alain Perea rapporteur pour avis sur le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (sous réserve de sa transmission).

 


 

Membres présents ou excusés

 

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

 

Réunion du mercredi 16 octobre 2019 à 9 h 35

 

Présents. - Mme Bérangère Abba, M. Christophe Arend, Mme Sophie Auconie, Mme Ericka Bareigts, Mme Nathalie Bassire, Mme Valérie Beauvais, M. Jean-Yves Bony, M. Christophe Bouillon, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Lionel Causse, M. Jean-François Cesarini, M. Jean-Charles Colas-Roy, M. Paul-André Colombani, Mme Yolaine de Courson, M. Stéphane Demilly, M. Vincent Descoeur, Mme Jennifer De Temmerman, M. Loïc Dombreval, Mme Nadia Essayan, M. Jean-Luc Fugit, M. Guillaume Garot, M. Yannick Haury, Mme Stéphanie Kerbarh, Mme Valérie Lacroute, M. François-Michel Lambert, Mme Florence Lasserre-David, M. Pascal Lavergne, Mme Célia de Lavergne, M. Jean-Claude Leclabart, Mme Sandrine Le Feur, M. Patrick Loiseau, Mme Aude Luquet, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, Mme Sandra Marsaud, M. Gérard Menuel, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Adrien Morenas, M. Matthieu Orphelin, M. Jimmy Pahun, M. Ludovic Pajot, M. Alain Perea, M. Patrice Perrot, Mme Barbara Pompili, M. Jean-Luc Poudroux, M. Loïc Prud'homme, Mme Véronique Riotton, Mme Laurianne Rossi, M. Martial Saddier, M. Jean-Marie Sermier, M. Vincent Thiébaut, M. Pierre Vatin, M. Michel Vialay, M. Hubert Wulfranc, M. Jean-Marc Zulesi

 

Excusés. - M. Guy Bricout, M. Jacques Krabal, M. Bruno Millienne, Mme Claire O'Petit, M. Damien Pichereau, M. Gabriel Serville

 

Assistaient également à la réunion. - M. Dino Cinieri, M. Romain Grau