Compte rendu

Commission
des affaires sociales

  – Audition de M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, et de Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 (n° 2296)              2

  – Présences en réunion.................................33

 

 

 


Jeudi
10 octobre 2019

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 4

session ordinaire de 2019-2020

Présidence de
Mme Brigitte Bourguignon,
Présidente
 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Jeudi 10 octobre 2019

La séance est ouverte à seize heures.

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(Présidence de M. Brigitte Bourguignon, présidente)

La commission procède à laudition de M. Gérald Darmanin, ministre de laction et des comptes publics, et de Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 (n° 2296).

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Nous poursuivons cet après-midi nos travaux sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, entamés mardi dernier avec l’audition du Premier président de la Cour des comptes, qui nous a présenté le rapport sur l’application des lois de financement.

Comme je l’avais indiqué à cette occasion, nous avons estimé, avec le rapporteur général, en tenant compte des contraintes respectives de la commission et des ministres, qu’il s’agissait du moins mauvais moment pour procéder à cette audition sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020, adopté hier en Conseil des ministres.

Conformément à nos usages, cette audition tient également lieu de discussion générale sur le PLFSS. Elle sera donc organisée selon les mêmes modalités dérogatoires que l’an dernier : après le rapporteur général, les groupes auront la parole pour 5 minutes chacun ; ensuite, les autres orateurs pourront intervenir pour 1 minute chacun.

Certains d’entre vous ont déploré les délais très serrés dans lesquels nous examinons le PLFSS. J’en conviens bien volontiers, mais j’observe que les conditions d’examen du PLFSS 2020 ne différeront pas de celles des précédents PLFSS.

Nous pouvons évidemment le regretter, mais nous devons aussi conserver à l’esprit que l’examen de ce texte est enserré dans des conditions très contraignantes qui s’imposent à toutes les institutions de la République. Non seulement la Constitution ne laisse au Parlement que cinquante jours pour mener à bien ses travaux, mais les conseils d’administration des caisses nationales doivent être consultés en amont sur l’avant-projet.

Soyez convaincus que je déplore autant que vous ces contraintes.

M. Jean-Pierre Door. J’en conviens avec vous, nous sommes confrontés à un réel problème, d’autant que les délais sont encore plus serrés qu’habituellement. Je compte moins de vingt-quatre heures entre l’audition, ce jour en fin de journée, des ministres sur le PLFSS, adopté hier en Conseil des ministres, et le dépôt des amendements, qui doit être effectué avant 17 heures demain. Après tant d’années de travail ici, je suis stupéfait que rien n’ait pu être fait pour réduire ces contraintes.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Nous avons à peine deux heures de décalage par rapport à l’an dernier. Mais, je le répète, je partage avec vous ce constat et je renouvelle ma demande visant à améliorer les conditions d’examen du PLFSS pour chacun.

M. Gérald Darmanin, ministre de laction et des comptes publics. En introduction et pour répondre à M. Jean-Pierre Door, je remarque que si la réforme institutionnelle est un jour discutée et adoptée par le Parlement, nous pourrions éventuellement revoir la façon dont les textes financiers, projet de loi de finances (PLF) et PLFSS, sont examinés. En effet, ils sont très insérés dans un cadre constitutionnel. Les ministres sont les premiers à souhaiter que l’on puisse améliorer un certain nombre de pratiques en la matière.

Vous parlez des délais relatifs au dépôt des amendements : lorsque nous venons devant la commission juste après la présentation du texte en Conseil des ministres, on nous reproche de manquer de temps pour en prendre connaissance, et lorsque nous sommes auditionnés un peu plus tard, comme c’est le cas au Sénat, on nous reproche de ne pas venir juste après la présentation du texte. Ce type d’observations émane de l’opposition, quelles que soient les majorités.

La question du calendrier des textes financiers et de leur imbrication pourra se poser dans le cadre de la réforme institutionnelle et permettra de répondre à une interrogation soulevée par tous les commissaires des affaires sociales depuis que le PLFSS a été inventé. Votre expérience en témoigne, monsieur le député.

Nous avons beaucoup travaillé à ce projet de financement de la sécurité sociale. C’est un texte financier auquel le ministère des comptes publics est évidemment très attentif. En effet, plus de la moitié des dépenses publiques sont des dépenses sociales. En outre, les cotisations sociales représentent une part très importante des prélèvements obligatoires, devant même la TVA.

J’aborderai les questions d’équilibre des branches et de recettes. Comme nous le faisons traditionnellement, Mme la secrétaire d’État évoquera plus particulièrement les dépenses et les questions de santé.

Tout d’abord, je tiens à préciser que ce PLFSS ne prévoit pas de mesures relatives aux retraites. En effet, un texte particulier sera déposé ultérieurement par le Gouvernement sous l’autorité conjointe de la ministre des solidarités et de la santé et du haut-commissaire aux retraites. C’est la raison pour laquelle le Premier ministre a décidé de présenter un projet de loi de programmation des finances publiques qui s’adapte aux nouvelles prévisions de croissance et aux dépenses effectuées postérieurement au dépôt du projet de loi relatif à la réforme des retraites. Bien évidemment, la question des retraites ou encore le Brexit ont une incidence sur la trajectoire des finances publiques.

Nous devons discuter de plusieurs sujets relatifs aux comptes publics et notamment du déséquilibre constaté de la sécurité sociale. Le déficit s’élève en effet à 5,4 milliards d’euros, alors que le Gouvernement avait prévu un excédent d’un peu plus de 100 millions d’euros. Avant d’évoquer plus avant les causes de ce déficit, je voudrais rappeler que les mesures d’urgence annoncées par le Président de la République et adoptées par l’Assemblée comme par le Sénat, ne sont pas les uniques responsables du « trou » de la sécurité sociale. La dégradation de la conjoncture économique en est la principale cause. En effet, la diminution des recettes qui en résulte pour la sécurité sociale s’élève à 2,5 milliards d’euros. La désocialisation des heures supplémentaires, qui a simplement été anticipée puisqu’elle a été appliquée non pas en septembre mais dès le mois de janvier, n’intervient en revanche qu’à hauteur de 1,2 milliard d’euros. Quant à l’annulation de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) des retraités percevant moins de 2 000 euros, elle porte sur 1,5 milliard d’euros.

Par ailleurs, nous constatons que la branche vieillesse accuserait en 2022 un déficit de 5 milliards d’euros. Nous attendons les nouvelles prévisions, afin de savoir quel sera exactement l’équilibre de la branche vieillesse, en fonction notamment de la conjoncture économique, des cotisations des actifs et du poids de la fonction publique ; vous connaissez l’importance de ce dernier point dans les prévisions du conseil d’orientation des retraites.

Le Gouvernement déplore bien évidemment le « trou » de la sécurité sociale, mais il a fait le choix de la baisse massive des impôts et de la sincérité des comptes. L’objectif demeure de résorber le déficit à l’horizon de 2023 ou 2024. Je vous rappelle qu’en 2010, la sécurité sociale avait connu un déficit de 24 milliards d’euros, en raison de la crise économique et de l’effondrement de la conjoncture qu’elle avait entraîné. En outre, même en 2017, le Gouvernement a trouvé un déficit de la sécurité sociale de 5 milliards d’euros. Pour autant, ce déficit, qu’il faut résorber, n’empêche pas le champ social de fonctionner.

Bien évidemment, les dépenses sociales ne se limitent pas à la sécurité sociale, puisque de nombreuses prestations sociales, dans le budget de Mme Pénicaud, comme dans celui de Mme Buzyn, relèvent du champ de l’État. Le PLF et le PLFSS sont complémentaires. Si l’on évoque le débat sur l’immigration, l’aide médicale de l’État (AME) provient de crédits d’État, tout comme la prime d’activité, dont la forte augmentation a été décidée par le Président de la République. Tel est le cas également d’autres prestations sur lesquelles je ne reviendrai pas.

Le déficit de la sécurité sociale s’établit donc à 5,4 milliards d’euros et son retour à l’équilibre a donc été repoussé à 2023. Les prévisions économiques ajustées seront différentes de celles que nous avions établies, lorsque nous pensions au début de l’année 2018 que la croissance serait de 1,7 %.

Je voudrais ensuite évoquer les mesures que nous pérenniserons dans le cadre du PLFSS. Tel sera le cas de la prime dite « Macron », nous aurons l’occasion d’en parler. Cette prime a été défendue par les ministres, en particulier par la ministre du travail. Dès l’origine, nous avions décidé collectivement qu’elle n’aurait pas d’impact sur les finances publiques. Comme la loi elle-même le précisait, cette prime ne constituait pas une perte pour la sécurité sociale. Nous avons donc décidé de reconduire cette prime exceptionnelle, en la conditionnant aux accords d’intéressement, afin d’éviter tout abus et de favoriser un meilleur partage entre le capital et le travail. À cet égard, cette reconduction correspond à ce qu’a souhaité le Gouvernement dans le cadre de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (« PACTE »).

S’agissant des non-compensations, le rapport Charpy-Dubertret privilégiait le « chacun pour soi ». De manière générale, la non-compensation entre l’État et la sécurité sociale n’est pas nouvelle, elle était déjà d’actualité au cours des précédents quinquennats. De nombreux exemples datant du dernier quinquennat ont d’ailleurs été évoqués. En outre, la non‑compensation était prévue dès le programme de stabilité adopté par la majorité parlementaire au mois d’avril dernier. Elle porte aujourd’hui sur la désocialisation des heures supplémentaires sur un certain nombre d’autres points. Mais, comme nous l’avons dit en Commission des comptes de la sécurité sociale, cela s’accompagne de l’abandon d’autres décisions. La sécurité sociale aurait dû ainsi verser à l’État 3 milliards d’euros répartis comme suit : 1,5 milliard d’euros pour la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et 1,5 milliard d’excédents de TVA, qui auraient dû être répartis de façon équitable, comme le prévoyait le rapport Charpy-Dubertret. La part de TVA perçue par la sécurité sociale est en effet de plus en plus importante, puisque la compensation de la recette d’État versée à la sécurité sociale avoisine désormais 57 milliards d’euros.

Nous devrons également discuter de sujets qui intéressent particulièrement la ministre de la santé, tels que la fixation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Celui-ci restera à 2,3 %, soit l’objectif fixé au début des travaux sur la loi de programmation des finances publiques. Je rappelle que 0,1 point d’ONDAM correspond à 205 millions d’euros. Il y aura donc un tendanciel de mesures nouvelles à hauteur de 4,6 milliards d’euros. Cet objectif est difficile à tenir, puisque nous rattrapons les années précédentes – en 2015 et en 2016, l’ONDAM était inférieur à 2 % – et que nous devons faire face au vieillissement de la population. Cela me permet d’évoquer la question du grand âge et de la dépendance sur laquelle reviendra la secrétaire d’État. Des crédits engagent d’ores et déjà le financement de la dépendance, avant les décisions qui pourraient être prises à la suite à du rapport Libault, et le texte législatif qui sera déposé sur le bureau du Parlement.

Sur la déduction forfaitaire spécifique, la fin de la niche sociale s’élève à 423 millions d’euros sur un total de 2 milliards d’euros. Ce point concerne uniquement les charges patronales, et non pas les charges salariales. Dans son dernier rapport, la Cour des comptes a évoqué un certain nombre de niches sociales : nous aurons l’occasion d’y revenir.

Par ailleurs, je souhaite revenir sur la façon dont le Gouvernement a présenté le texte relatif à l’indexation des retraites. Une disposition a été invalidée par le Conseil constitutionnel. Elle a été modifiée lors d’une annonce du Président de la République : à partir de 2 000 euros, l’indexation s’établit à 0,3 % ; en dessous de cette somme, elle est égale à l’inflation. Indépendamment du montant qui déclenche l’indexation, il existe un autre changement. En 2017, lorsque le Gouvernement a présenté la mesure, l’indexation se faisait sur le revenu fiscal de référence (RFR). Cela signifie que l’intégralité des revenus était prise en compte pour un couple. Désormais, le montant retenu comme seuil de déclenchement, à savoir 2 000 euros bruts, est un montant individuel, qui n’est pas corrélé au RFR. Ainsi, ce n’est plus l’intégralité des revenus qui est prise en compte pour déclencher l’indexation ou la sous-indexation, mais la pension individuelle, et le cas échéant les pensions complémentaires, perçues par une seule et même personne. De ce fait, 77 % des retraités seront indexés sur l’inflation.

Je voudrais également souligner l’importante réforme de l’unification du recouvrement qui est incluse dans ce PLFSS. La simplification concerne notamment les entreprises, qui doivent s’adresser à plusieurs autorités utilisant le recouvrement. Il s’agit là d’une source de complexité. Il est prévu dans le PLF un recouvrement simplifié avec des dates de mise en place entre la direction générale des douanes et droits indirects, et la direction générale des finances publiques (DGFiP). La même disposition devra s’appliquer dans le champ social, selon des dates arrêtées avec les professionnels : en 2022, les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) reprendront les cotisations de l’AGIRC-ARRCO et en 2023, les régimes de la fonction publique seront à leur tour concernés. Hormis dans l’exposé des motifs, nous n’avons pas abordé les professions libérales, qui font l’objet d’études complémentaires. Nous attendons donc le terme de la discussion qui sera menée avec les professionnels pour savoir comment mettre en place le recouvrement. Celui-ci fait écho à la volonté d’instaurer un système de retraite par points, qui figure dans le projet de loi relatif à la réforme des retraites, défendu par Mme Buzyn et M. Delevoye.

Je ne détaillerai pas l’ONDAM entre médecine hospitalière et médecine de ville, sur lequel reviendra Mme la secrétaire d’État. Je voudrais simplement souligner que le Gouvernement a exécuté fidèlement et sincèrement ce que le Parlement lui a accordé, c’est‑à‑dire un objectif à 2,5 %, – et à 2,3 % l’année précédente. Nous pourrons sans doute – les chiffres ne sont pas encore complets – reverser des fonds aux hôpitaux pour leur désendettement, avec une visibilité sur les tarifs comme nous l’avons fait l’an dernier à hauteur de 300 millions d’euros. Nous serons en mesure d’exécuter l’ONDAM à 2,5 % sans dépassement cette année encore d’après les chiffres communiqués par la direction de la sécurité sociale.

Je ne reviendrai pas non plus sur le financement de la dépendance ni sur la baisse très importante des impôts que ce PLFSS consacre en même temps que le PLF. Je rappelle simplement que la baisse d’impôt atteindra 40 milliards d’euros sur l’ensemble du quinquennat, dont 27 milliards d’euros pour les ménages, un montant sans précédent. Je laisserai également Mme la secrétaire d’État exposer la mesure relative aux pensions alimentaires.

Je terminerai en évoquant une mesure de simplification très importante, que nous devions aux travailleurs indépendants. La réforme du Régime social des indépendants a été menée avec succès, sans mobilité forcée et en simplifiant le travail des indépendants. J’en remercie les responsables syndicaux et managériaux. Les indépendants remplissent trois déclarations différentes : pour le revenu fiscal relatif à leur revenu propre, pour le revenu fiscal relatif à leur activité économique et enfin pour la fiscalité sociale. En 2021, les indépendants rempliront un seul document relatif au volet fiscal et en 2022, ils n’en rempliront plus qu’un seul en tout et pour tout. En deux ans, nous serons donc passés pour les indépendants de déclarations non pré-remplies à des déclarations pré-remplies, et de trois à deux, puis à un seul document. Cela s’inscrit dans la continuité, bienvenue, des mesures de renforcement prises en faveur des travailleurs indépendants, et de la simplification promise en septembre 2017 par le Premier ministre lors d’un déplacement à Dijon.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Je vous prie, tout d’abord d’excuser le retard de Mme Agnès Buzyn, pour les raisons précédemment évoquées par Mme la présidente.

Je suis très heureuse de vous présenter les grands axes et l’esprit général de ce PLFSS pour 2020. Je remercie tous ceux qui ont participé à sa construction et qui n’ont ménagé ni leur temps ni leur énergie.

Gérald Darmanin l’ayant déjà évoqué, je ne dirai qu’un mot de la hausse du déficit de la sécurité sociale, qui a déjà fait couler de l’encre. Cette hausse est au premier chef imputable à la baisse des recettes sous l’effet d’hypothèses économiques moins favorables que prévu, mais également de mesures de baisse de prélèvements obligatoires, baisse qui correspondait à une attente forte et légitime des Français et qui faisait partie intégrante de notre programme politique.

En un mot, avec ce PLFSS, et sans négliger un seul instant la maîtrise de nos dépenses publiques, nous nous adaptons au réel. Je ne sais pas si c’est un PLFSS du réel, mais une chose est sûre, c’est un PLFSS de responsabilité. Il répond à l’ambition du Gouvernement de couvrir mieux les risques d’aujourd’hui en tenant compte de leurs caractéristiques propres.

De nouveaux risques exigent de nouvelles protections et de ce point de vue, la sécurité sociale poursuivra toujours, et sans relâche, sa vocation de « protéger les Français de la peur du lendemain ». Ces risques, l’actualité nous le rappelle d’ailleurs brusquement, ce sont les risques technologiques, industriels ou phytosanitaires.

À ce titre, la création d’un fonds d’indemnisation des victimes de produits phytosanitaires illustre notre volonté de protéger tous ceux qui ont été exposés à des substances dangereuses et en ont été affectés. À cet égard, je remercie le groupe Socialistes et apparentés d’avoir inscrit ce texte dans sa journée réservée en janvier dernier, car cela nous permet aujourd’hui d’avancer sur ce sujet.

Ce sont aussi les risques liés aux évolutions démographiques qu’il est impératif de regarder en face. Le PLFSS engage ainsi le premier volet de la réforme de la dépendance, en attendant une loi de grande envergure, une loi fondatrice, qui permettra à la France de relever un défi immense.

La société française de 2050, dans laquelle près de cinq millions de Français auront plus de 85 ans et dans laquelle le nombre d’aînés en perte d’autonomie aura presque doublé, se construit aujourd’hui. Ce PLFSS pose donc la première pierre de notre réforme, avec le congé proche aidant, qui permettra d’indemniser pour une durée de trois mois toutes celles et tous ceux qui, à un moment donné, doivent aider un proche malade ou en perte d’autonomie. Cette mesure était, je le sais, attendue et portée par plusieurs groupes.

S’adapter aux nouveaux risques et tenir compte de ce qu’ils sont aujourd’hui et de ce qu’ils seront demain, c’est ce que chacun attend d’un État social moderne, capable d’intégrer des parcours de vie et des trajectoires individuelles moins linéaires que par le passé. Nous ne construisons pas autre chose.

La protection sociale du XXIe siècle est une protection sociale qui connaît les vertus de la prévention et qui développe l’approche préventive à l’ensemble des risques, bien au-delà de la seule prévention en santé.

Prévenir, c’est voir venir et c’est intervenir avant que les risques ne se manifestent. Prévenir les risques sociaux, c’est donc agir en amont des difficultés et éviter les courants défavorables. Je pense ici aux familles monoparentales et au scandale des pensions alimentaires non versées. Il était temps d’en finir avec un système qui faisait de la négligence des uns la détresse des autres. La vie des parents isolés est suffisamment difficile. Une pension alimentaire qui n’est pas versée, c’est un caddie que l’on ne peut pas remplir, ce sont des loisirs auxquels on doit renoncer et c’est toujours un pas de plus vers la pauvreté. Telle est la conviction qui nous a guidés depuis le premier jour dans la mise en place d’une garantie de versement des pensions alimentaires, appelée de ses vœux par le Président de la République lors du Grand débat national. Avec Agnès Buzyn, nous sommes fières d’avoir créé un dispositif qui sécurise efficacement les familles monoparentales et plus largement toutes les familles, y compris celles recomposées.

Prévenir l’apparition des risques sociaux, c’est aussi, évidemment, démultiplier nos efforts auprès des plus fragiles. Je pense ici aux enfants entrant à l’aide sociale à l’enfance (ASE). Avec Adrien Taquet, nous allons systématiser un bilan de santé et si besoin, l’orientation dans un parcours de soin.

Notre protection sociale doit aussi s’attacher toujours plus aux individus, aux parcours et aux transitions. Dire cela n’est pas moderniser un discours, c’est moderniser un système, dont la complexité ne doit plus être subie par nos concitoyens ; les ruptures de droits sont un fléau qui est la conséquence directe de cette complexité. Simplifier le système, c’est ce que nous avons voulu faire en procédant au « versement en temps réel » des crédits d’impôt et des aides sociales dans le cadre de l’emploi à domicile, notamment pour les personnes dépendantes, de façon que l’assuré ne paye plus que son reste à charge et n’avance plus de trésorerie.

Un autre exemple de cette simplification consiste à rendre moins contraignante l’obligation en matière de certificats médicaux de non contre-indication à la pratique sportive pour les mineurs.

Nous portons aussi nos efforts sur l’articulation entre les aides sociales, ainsi que sur le passage d’une aide à une autre. C’est par exemple l’automatisation de la bascule du revenu de solidarité active (RSA) ou de l’allocation aux adultes handicapés vers les droits à la retraite.

Nous tenons compte, parce que c’est indispensable, des parcours de soins en sortie de cancers, adaptés à chacun et pris en charge par l’assurance maladie, qu’il s’agisse de la nutrition, de l’aide psychologique ou encore de l’activité physique adaptée.

Nous regardons aussi en face les inégalités territoriales, avec la mise en place d’un nouveau droit pour les femmes enceintes habitant loin d’une maternité, incluant le transport et l’hébergement en amont du terme.

Ces inégalités territoriales, qui ont très largement inspiré la loi sur l’organisation et la transformation du système de santé, nous ne les esquivons pas dans le PLFSS. Notre ambition consiste à aller vers les populations fragiles et à ne laisser personne de côté. Tel est le sens de la réforme du financement de la psychiatrie, afin de mieux répartir les ressources en fonction des besoins évalués au niveau du territoire. Tel est également le sens de la poursuite des mesures de lutte contre les déserts médicaux, avec les contrats d’installation et les exonérations de cotisations. C’est enfin, et je ne peux citer toutes les mesures, le financement et le déploiement des hôpitaux de proximité.

Le PLFSS n’est pas seulement un acte de responsabilité budgétaire. En faire une lecture strictement comptable, c’est passer à côté de ce qu’il est vraiment. Il est avant tout un instrument politique. Nous sommes en train de repenser la protection sociale dans son ensemble : dans sa méthode comme dans ses finalités, pour la rendre plus universelle, plus juste et plus efficace.

Notre objectif consiste à réaffirmer la présence de l’État social à chaque étape de la vie, de la petite enfance au grand âge en passant par la parentalité, la vie professionnelle, la maladie et tout ce qui compose une existence, dans ses joies, dans ses épreuves et dans ses espoirs.

M. Olivier Véran, rapporteur général. Je commencerai mon intervention en évoquant, non pas le PLFSS, mais la fierté que suscite l’annonce, par le Président de la République, de l’augmentation de 20 % de la participation de la France au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Il a réussi à réunir à Lyon un grand nombre de personnalités publiques et privées, des chefs d’État, de fondations et d’entreprises, et il est parvenu à obtenir un investissement de plus de 14 milliards d’euros dans la lutte contre les maladies infectieuses dans le monde. La commission des affaires sociales est nécessairement très sensible à ce geste fort.

Puis je mentionnerai les bonnes nouvelles que comporte ce PLFSS. Nous avons souvent tendance, en France, à insister sur ce qui ne va pas et à n’aborder les éléments positifs que dans un second temps. Je ferai l’inverse sans en dresser cependant la liste exhaustive, car de nombreux collègues auront à cœur de les évoquer.

Parmi ces éléments positifs figurent la réforme en profondeur du mode de financement de la psychiatrie, le soin de suite et de réadaptation (SSR) et, demain, la médecine d’urgence à l’hôpital, le congé proche aidant et les mesures d’invalidité pour les agriculteurs qui les attendaient beaucoup. La Caisse centrale de la mutualité sociale agricole s’est d’ailleurs prononcée en faveur du texte. Je citerai également, en matière de politique familiale, la possibilité du recouvrement des pensions alimentaires par un organisme, ce qui permettra aux mères isolées de ne pas rester dans la détresse. Ces mesures du quotidien, qui bénéficieront à un très grand nombre de Français, viennent s’ajouter aux très belles dispositions contenues dans le PLF, à savoir la baisse importante des impôts et la relance de l’emploi comme facteur d’émancipation.

Une question est revenue assez régulièrement au cours des auditions et je me dois de l’aborder ici, afin de pouvoir éventuellement ouvrir un débat préalable à l’examen des articles du texte en commission la semaine prochaine. Elle porte sur le financement de l’hôpital, dans un contexte de tensions marqué par un mouvement important dans les services d’urgence. La mobilisation d’un collectif de médecins est d’ailleurs prévue cet après-midi à l’AP-HP. Ces derniers veulent nous dire qu’au-delà du programme structurel « Ma Santé 2022 », un geste est attendu concernant l’hôpital public.

Il existe sur tous les bancs de cette commission, et notamment ceux de la majorité, une sensibilité particulière sur le travail qui permettrait d’apporter des gages à l’hôpital, ainsi qu’aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Des jalons ont d’ores et déjà été posés concernant les futures réformes dans le domaine du vieillissement : 50 millions d’euros ont ainsi été ajoutés aux sommes déjà prévues. L’investissement supplémentaire dans le domaine du grand âge atteint donc 500 millions d’euros. Nous attendons la réforme de la dépendance avec impatience. De nombreux membres de notre commission sont très motivés pour travailler à l’identification de sources de financement qui ne relèvent pas du PLFSS. Des pistes portant sur la CADES ont été évoquées ; nous aurons à cœur de travailler au-delà du budget de la sécurité sociale.

Une autre question est revenue régulièrement au cours des auditions – elle est d’ailleurs à l’origine des réserves de certaines caisses sur le PLFSS. Il s’agit du retour sur la « loi Veil » de 1994 relative à la sécurité sociale, c’est‑à‑dire de la non-compensation. Nous avions eu ce débat l’année dernière, tant en commission que dans l’hémicycle, et ce, dans un contexte où la sécurité sociale allait enfin pouvoir présenter des excédents, au-delà même de l’objectif inespéré du retour à l’équilibre. Il avait été convenu que la sécurité sociale participerait à l’effort de la nation pour réduire sa dette. Tel était l’objet du rapport Charpy-Dubertret, dont j’ai cru comprendre qu’il faisait maintenant office de doctrine au sein de l’exécutif. Toutefois, je rappelle qu’il n’a pas fait l’objet d’un débat parlementaire. Je me souviens même avoir réclamé ce rapport, qui nous avait été remis peu de temps avant l’examen du précédent PLFSS.

Néanmoins, considérant la situation de la sécurité sociale l’année dernière, nous avions voté de bonne grâce un certain nombre de transferts du champ du social vers le champ de l’État, privant ainsi la sécurité sociale de recettes, ce qui constituait déjà une rupture par rapport à la situation précédente. En effet, depuis la « loi Veil » de 1994 relative à la sécurité sociale, si un certain nombre de non-compensations avaient pu être adoptées, elles avaient toutes finalement été compensées a posteriori, soit par le biais d’une réforme fiscale, soit par le biais d’un transfert d’aide personnalisée au logement (APL). Jusqu’aux mesures portant sur le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires, les heures supplémentaires et le forfait social, la compensation s’élevait à 57 milliards d’euros, à quelques dizaines de millions d’euros près. À l’issue du Pacte de responsabilité sous la mandature précédente, la compensation a pris la forme d’un transfert de TVA et n’a plus fait l’objet de transferts directs, comme auparavant.

Pour la seule année 2019, il y a eu un peu plus de 4 milliards d’euros de non‑compensation, auxquels viennent s’ajouter pour 2020 des non-compensations portant sur les mesures d’urgence économiques et sociales, à savoir l’anticipation des dispositions relatives aux heures supplémentaires, la suppression du forfait social, le taux intermédiaire de CSG, et les mesures visant les jeunes entreprises innovantes, qui atteindront environ 2,8 milliards d’euros. Un calcul très simple consisterait à additionner les non-compensations et à comparer ce total au déficit de la sécurité sociale. On se rendrait compte alors que ce déficit n’est pas lié à un échec d’organisation des partenaires sociaux par branche, mais plutôt à des décisions externes qui interférent avec les équilibres. Le principe de responsabilisation, qui prévaut dans l’ensemble des branches de la sécurité sociale, a permis d’obtenir un équilibre dans quasiment toutes les branches. C’est d’ailleurs ce qui nous a été dit en audition. Ainsi, l’ONDAM, qui est respecté chaque année depuis plus de dix ans, correspond à cette logique des partenaires sociaux de s’inscrire dans un cadre où les règles du jeu sont claires et établies.

Je veux partager ici avec vous l’émoi qui a pu être exprimé dans un certain nombre d’auditions au sujet de la non-compensation. J’ajoute que le rapport Charpy-Dubertret me paraît obsolète, dans la mesure où il s’inscrivait dans un contexte de gestion des futurs excédents de la sécurité sociale. Or il n’y a plus d’excédent.

En tout état de cause, ces questions font l’objet de discussions sur tous les bancs, y compris au sein de la majorité. Nous aurons à cœur d’en débattre la semaine prochaine en commission, d’autant que nous voudrions dégager des fonds pour financer des dépenses nouvelles, la dépendance notamment. Je rappelle à nouveau notre attachement à la « loi Veil » de 1994 relative à la sécurité sociale, qui avait été votée à l’unanimité du Parlement, à l’exception des communistes qui y voyaient la possibilité de masquer des allégements de cotisations patronales. Des députés tels Charles de Courson, Bernard Accoyer ou encore Claude Bartolone avaient apporté leur soutien.

M. le ministre. Il me semble important de rappeler que le PLFSS est le fruit d’un travail entre l’État et la sécurité sociale. Pour les Français, c’est la même poche ; ce sont les mêmes impôts, les mêmes dépenses. J’entends l’argument selon lequel la sécurité sociale s’organise différemment, mais regardons les choses telles qu’elles sont : si le retour à l’équilibre a été repoussé à 2023, c’est parce que nous avons baissé l’impôt des Français. C’est le point qui me paraît le plus important. Après, la situation économique explique en grande partie cette dégradation.

L’État prend la plus grosse part des mesures d’urgence en renonçant à la taxe carbone –3 à 4 milliards d’euros de recettes par an – et en défiscalisant les heures supplémentaires – ce qui n’était pas prévu dans le programme du candidat Emmanuel Macron. Il baisse l’impôt sur le revenu – 5 milliards d’euros à partir du mois de janvier – et assume 14 milliards d’euros de mesures tirées du Grand débat national – contre 2 milliards dans le champ social. On ne peut pas dire que l’État se soit déchargé sur la sécurité sociale.

J’ajoute que si le déficit public général – toutes administrations publiques confondues – diminue, celui de l’État demeure très élevé. Cela est dû notamment au fait que c’est l’État qui assume la quasi-intégralité des baisses d’impôts – baisse de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu ; suppression, pour 4 milliards d’euros par an, de la taxe d’habitation.

S’il y a bien quelque chose de positif depuis deux ans, c’est la baisse continuelle des impôts et du chômage. L’État a accepté l’idée qu’il devait réduire ses recettes, ce qui crée, il faut bien l’avouer, un peu de déficit, mais il tient ses dépenses, qui s’avèrent beaucoup moins dynamiques que dans le champ social. Encore une fois, le Gouvernement a fait un choix, et il s’y tient : l’État fait beaucoup d’économies et perçoit beaucoup moins de recettes, puisqu’il baisse les impôts ; de l’autre côté, grâce à la reprise de l’activité économique, les cotisations augmentent et le trou de la sécurité sociale est moins pire, pardon pour ce truisme, qu’il ne l’aurait été si l’État n’avait pas fait tous ces efforts. Les Français ont retrouvé le chemin de l’activité, ils touchent moins de prestations et paient davantage de cotisations.

Par ailleurs, avec l’augmentation de la prime d’activité, les dépenses de l’État vont encore croître de 4 milliards d’euros. L’AME, qui représente quelque 900 millions d’euros, relève, non pas du champ social mais de celui de l’État parce qu’elle n’est pas financée par des cotisations. De même, la prime d’activité, qui est une prestation sociale indexée sur l’activité économique, c’est-à-dire sur le retour au travail de salariés rémunérés autour du SMIC, est payée par l’État.

Alors je veux bien, monsieur le rapporteur général, que nous discutions de l’absence de compensations. Je commencerai par vous rappeler qu’en présentant le programme de stabilité 2019-2022, le Gouvernement n’a pris personne à revers. Vous avez accepté l’idée, nous en avons longuement débattu au Parlement, que ces non-compensations figuraient dans le programme.

Par ailleurs, l’État renonce aux compensations dues par la sécurité sociale. Certes, il ne s’agit pas de « renonciation » à proprement parler dans le cas de la CADES, puisque la Constitution lui interdirait de récupérer le 1,5 milliard d’euros que la sécurité sociale était censée transférer. Il ne récupérera pas non plus le 1,5 milliard d’euros de TVA que la sécurité sociale devait rendre en cas d’excédent. L’État respecte le champ de la sécurité sociale.

Vous parlez souvent de la bonne gestion par les partenaires sociaux de la sécurité sociale. Permettez-moi de vous dire que la branche vieillesse n’est pas tout à fait à l’équilibre – le déficit atteindra 5 milliards d’euros. Vous l’aurez constaté, nous ne prenons pas de mesures correctrices dans ce PLFSS. Mais nous en discuterons sans doute lors du projet de loi sur la réforme des retraites qui nous occupera pendant quelques jours et quelques nuits.

La position du Gouvernement est de respecter les premiers articles d’équilibre des comptes entre l’État et la sécurité sociale. Je rappelle qu’il était prévu que la désocialisation des heures supplémentaires ne serait pas compensée ; il n’y a donc pas de surprise. Cette mesure, qui devait entrer en vigueur en septembre, a simplement été avancée au mois de janvier, pour un coût supplémentaire, de mémoire, de 500 ou 600 millions d’euros. Nous aurons, sur ce point, une discussion. Elle a son importance et je ne la sous-estime pas. Le Gouvernement appliquera le rapport Charpy-Dubertret.

Vous avez interpellé les députés communistes. Je ne veux pas prendre la place de Fabien Roussel à la tête du parti, mais il est évident que les allégements de cotisations, qui présentent l’intérêt de réduire le coût du travail et d’augmenter le pouvoir d’achat, ce sont des recettes en moins pour la sécurité sociale. Ce qui a été décidé par le rapport de MM. Charpy et Dubertret n’est pas en soi mauvais.

M. le rapporteur général. Ce n’est qu’un rapport, ce n’est pas une loi !

M. le ministre. Nous avons souvent ce débat avec les parlementaires communistes, qui reprochent de décider des allégements sur le dos de la sécurité sociale. En tout état de cause, le Gouvernement maintiendra l’article 3 du PLFSS qui prévoit que les pertes de recettes de la sécurité sociale ne feront pas l’objet d’une compensation par le budget de l’État.

Mme Charlotte Lecocq. Le PLFSS 2020 traduit la volonté du Président de la République de poursuivre la valorisation du travail tout en soutenant les publics les plus vulnérables. Il met également en œuvre la réforme du système de santé et renforce la logique de prévention. Enfin, il traduit la volonté de modernisation et de simplification du système de protection sociale, très attendues par nos concitoyens.

Le PLFSS étant un texte budgétaire, il convient de s’arrêter sur les grands équilibres financiers de la sécurité sociale. Le retour à l’équilibre est retardé, en raison de perspectives macroéconomiques moins bonnes que prévu et de l’adoption, fin 2018, des mesures d’urgence, en réponse aux attentes exprimées par nos concitoyens en matière de pouvoir d’achat et de justice sociale. Ces mesures, qui ont amélioré le revenu des retraités et des travailleurs, relèvent d’un choix politique que nous assumons.

Pour autant, le retour à l’équilibre des comptes sociaux reste une priorité pour notre majorité et l’objectif d’apurement de la dette sociale portée par la CADES à l’horizon 2024 est confirmé dans ce PLFSS. Nous serons particulièrement vigilants sur ces questions, qui tiennent à la soutenabilité de notre modèle de protection sociale.

Le groupe La République en Marche tient à saluer la grande mesure de solidarité qu’est l’indemnisation du congé de proche aidant. C’est une mesure que nombre d’entre nous ici, et sur tous les bancs, ont défendue. La ministre Agnès Buzyn s’était engagée à tout mettre en œuvre pour y parvenir et elle a tenu promesse. Demain, les personnes qui suspendent leur activité professionnelle pour venir en aide à un proche dépendant, malade ou handicapé, bénéficieront de la solidarité nationale à travers une indemnité journalière, et ce pour une durée maximale de trois mois. C’est un pas en avant considérable pour les aidants, dont nous savons qu’ils seront de plus en plus nombreux compte tenu du vieillissement de la population.

Ce PLFSS concrétise une autre promesse faite par le Président de la République : lutter contre le non-versement des pensions alimentaires. Lors du Grand débat national, cette problématique est apparue de façon criante. La mise en œuvre du service de recouvrement des impayés permettra de mieux protéger les familles, bien souvent monoparentales, et d’apaiser, au bénéfice des enfants, les relations entre les parents séparés.

Nous saluons également les mesures de justice sociale, telles que l’indexation sur l’inflation des retraites de moins de 2 000 euros, la revalorisation des prestations sociales et la poursuite de la revalorisation exceptionnelle des minima sociaux. La solidarité nationale doit permettre de protéger les publics vulnérables.

Nous croyons dans l’émancipation sociale par le travail : nous saluons donc les mesures qui permettent à nos concitoyens de bénéficier des fruits de leur activité professionnelle, grâce notamment à la reconduction de la prime exceptionnelle et aux nouvelles règles de cumul entre pension d’invalidité et revenu professionnel.

De plus, ce PLFSS est marqué par la création du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, qui vise à apporter de façon plus efficace une réparation aux travailleurs exposés.

En matière de santé, le PLFSS met en œuvre la transformation de notre système de santé, avec une offre de soins de proximité mieux coordonnés entre les différents acteurs et plus adaptés aux réalités des territoires. Il permet de faire évoluer les modalités de financement du système de santé, s’agissant notamment des hôpitaux de proximité, des établissements de psychiatrie et des SSR. Le nouveau dispositif d’accompagnement post‑cancer est une autre illustration positive de la logique d’un parcours de soins structuré autour du patient.

Le projet de loi renforce également l’efficacité des mesures d’incitation à l’installation des médecins dans les zones sous-denses, afin de mieux lutter contre les déserts médicaux.

Le Gouvernement entend répondre aux préoccupations des Français en simplifiant et en modernisant notre système de santé et de protection sociale. Nos concitoyens, et particulièrement les personnes âgées en situation de dépendance, trouveront un bénéfice conséquent pour leur trésorerie personnelle à percevoir les aides et les crédits d’impôt au moment où ils effectuent la dépense.

La prise en compte de nos aînés et des personnes en situation de handicap est particulièrement prégnante dans ce projet de loi. Les commissaires aux affaires sociales sont fortement engagés dans la préparation de la réforme grand âge et autonomie. C’est pourquoi nous accueillons favorablement l’apport de nouveaux financements pour rénover les EHPAD et renforcer les effectifs de personnel, ainsi que pour soutenir le secteur de l’aide à domicile dans l’amélioration et la modernisation de son offre.

Nous saluons aussi la sécurisation des parcours des personnes en situation de handicap dans les établissements belges.

M. Gilles Lurton. On ne peut donc pas les accepter en France ?

Mme Charlotte Lecocq. Les députés du groupe La République en Marche soutiendront le PLFSS pour 2020.

M. Jean-Pierre Door. Le constat est clair : les finances de la sécurité sociale en général et du régime de retraite en particulier se sont fortement dégradées en 2019, et cette évolution se poursuivra, vous l’avez dit, en 2020. Les comptes sociaux replongent donc dans le rouge avec un déficit attendu de 5,4 milliards d’euros pour cette année et de 5,1 milliards d’euros en 2020.

Nous sommes très loin du satisfecit des ministres de l’an dernier. Le retour à l’équilibre n’est envisagé qu’à l’horizon 2023-2024. C’est malheureusement ce que nous prédisions lorsque nous vous mettions en garde contre l’absence de financement des mesures qui avaient été concédées sous la pression des « gilets jaunes » – et je rappelle quand même que ce mouvement relève de la responsabilité du Gouvernement. L’absence de compensation par l’État des pertes de recettes met en cause l’autonomie de la sécurité sociale, qui date du Conseil national de la Résistance (CNR). Vous avez fait l’unanimité contre vous : en raison de cette non-compensation, l’ensemble des caisses ont rejeté le projet.

L’ONDAM sera de 2,3 % en 2020, après avoir atteint 2,5 % en 2019. Cela suppose, comme l’a rappelé la Cour des comptes, un net renforcement de la maîtrise des dépenses. Comment entendez-vous tenir cet objectif compte tenu, notamment, des déficits hospitaliers ? Comment allez-vous financer le plan de transformation du système de santé à l’horizon 2022 ? L’objectif d’apurement de la dette sociale en 2024 est-il encore tenable ?

Vous faites la politique de la carotte et du bâton, puisque vous demandez 4,2 milliards d’économies. La Cour des comptes a recommandé à plusieurs reprises d’intégrer dans la construction de l’ONDAM un objectif de maîtrise des déficits et de la dette des établissements publics de santé. Qu’en est-il ?

Finalement, vous assumez le dérapage, sans avancer de solutions. Selon vous, quelles mesures structurelles en dépenses permettraient d’accélérer la trajectoire de retour à l’équilibre des régimes de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse, lequel continue à s’enfoncer ? Enfin, il faut arrêter de fragiliser l’industrie pharmaceutique française, qui a déjà consenti 5 milliards d’euros d’efforts en quelques années.

M. Jean-Carles Grelier. Vous avez promis aux Français de transformer leur système de santé, ce qui n’est pas une moindre affaire. Nous sommes un certain nombre à avoir voulu y croire. Force est de constater que nous sommes très loin du compte ! L’ONDAM hospitalier et l’ONDAM de ville sont un camouflet adressé aux professionnels de santé. Les urgences et l’hôpital ne sont pas en crise, ils sont en état de sidération ; la médecine de ville n’est pas en crise, elle est au bord du collapsus ! Notre santé brûle, et nous ne pouvons pas continuer à regarder ailleurs. Vous ne pourrez pas faire comme si vous ne saviez pas !

Mme Nathalie Elimas. D’abord, un mot pour dire que nous déplorons nous aussi le délai de transmission du texte – moins de 48 heures pour amender le budget de la sécurité sociale de la nation, c’est un peu court – mais nous nous efforcerons de travailler dans un esprit positif.

Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés soutiendra toute mesure visant à remplir les trois objectifs de la politique sociale sur laquelle nous nous sommes engagés en 2017 : une meilleure maîtrise des dépenses pour assurer un équilibre des comptes sociaux pérenne ; la poursuite de la transformation et de la simplification du système de protection sociale ; la poursuite de la politique de réduction des prélèvements obligatoires, afin d’augmenter le pouvoir d’achat des Français.

Malgré les contraintes budgétaires, ce PLFSS comporte plusieurs mesures d’importance qui méritent d’être soulignées. Le Gouvernement a fait un effort de transparence sur le financement de plusieurs secteurs-clefs du système de santé. Plus de 500 millions d’euros sont investis sur le chantier du grand âge et de l’autonomie, en anticipation de la loi prévue pour la fin de l’année. Cette enveloppe devra notamment permettre d’intensifier le recrutement des personnels soignants dans un secteur qui en a cruellement besoin. À ce titre, nous ne pouvons que souscrire au versement de la prime aux assistants de soins en gérontologie et aux aides‑soignants des EHPAD ayant suivi une formation spécifique.

Dans cette équation, il convient de ne pas oublier le secteur du soin à domicile, qui bénéficiera de 50 millions d’euros supplémentaires et d’une mesure de simplification des démarches administratives pour les employeurs à travers une expérimentation. Nous sommes convaincus que la réussite de la prise en charge de la dépendance passera par un renforcement accru des synergies entre les soins à domicile et les soins en établissement.

Elle ne pourra pas non plus se faire sans un soutien clair aux aidants familiaux, qui participent de manière essentielle au maintien à domicile des personnes dépendantes, malades et handicapées. Ils sont un maillon essentiel du système de santé, sans lequel la prise en charge des personnes en perte d’autonomie serait impossible. À ce titre, ils méritent notre reconnaissance et la mise en place de dispositifs adaptés. Beaucoup a été fait depuis le début du quinquennat : je pense notamment à l’adoption de la proposition de loi de Paul Christophe visant à étendre le dispositif de dons de jours de repos non pris aux aidants familiaux ou encore à l’adoption de la proposition de loi visant à renforcer la reconnaissance des proches aidants, que j’ai eu l’honneur de rapporter. Nous le savons, beaucoup reste à faire. Le Gouvernement s’était engagé à mettre en place l’indemnisation du congé de proche aidant : c’est chose faite avec ce PLFSS. Bien sûr, il ne s’agit que d’une première étape, mais je ne vous cache pas, madame la secrétaire d’État, notre déception. Comment se contenter d’une période d’indemnisation de trois mois, alors que les besoins sont si criants ? Une attention toute particulière devra être portée à la santé des aidants, ainsi qu’au cas spécifique des jeunes aidants. Notre groupe formulera des propositions à ce sujet et espère être entendu par le Gouvernement.

Nous saluons la mise en place d’un bilan de santé obligatoire pour les entrées dans l’ASE, afin de mieux prendre en charge ces enfants et ces jeunes particulièrement vulnérables.

Nous ne pouvons qu’approuver la création d’un forfait transport et hébergement destiné aux femmes éloignées des maternités pour offrir un accompagnement pré et post-natal sécurisé. Si cela ne règle pas le problème des fermetures de structures, il s’agit d’un mécanisme concret de suivi sanitaire.

Enfin, la création d’un parcours de soin global après le traitement d’un cancer est une mesure innovante, essentielle pour les anciens malades. Nous proposerons d’y ajouter des mesures spécifiques en faveur des enfants et d’améliorer la prévention des cancers pédiatriques.

Je conclurai en vous faisant part de ma déception, cette année encore, devant l’absence de mesures structurantes pour la politique familiale. La mission d’information sur l’adaptation de la politique familiale française aux défis de la société du XXIe siècle, dont je suis la rapporteure, mène un travail de fond et sera force de propositions dans les mois qui viennent pour avancer enfin dans ce domaine crucial pour notre pays.

Le groupe du MoDem et apparentés soutiendra ce budget de la sécurité sociale pour 2020.

M. Boris Vallaud. Je veux commencer par saluer la création de l’Agence de recouvrement des impayés des pensions alimentaires, le début du financement du congé du proche aidant et la création du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides. Autant de propositions que nous avions formulées et qui avaient été repoussées par la majorité il y quelques mois. Voilà pour les compliments.

Dison-le clairement et simplement : il s’agit d’un projet de loi de non-financement de la sécurité sociale.

Pour reprendre la formule de notre collègue, l’hôpital brûle, et vous regardez ailleurs. Vous fixez l’ONDAM à 2,3 % et le sous-ONDAM hospitalier à 2,1 %. Avec des prévisions de croissance à 1,3 % et d’inflation à 1%, donc 2,3 % en réel, la part des dépenses hospitalières dans le produit intérieur brut diminue. Alors même que la population augmente et vieillit, alors même que le progrès technique, médical, scientifique permet de prendre en charge de nouvelles pathologies, l’effort de la nation baisse !

Votre objectif est de réduire les dépenses publiques envers et contre tout. Votre PLFSS suppose 4,2 milliards d’euros d’économies sur la santé, en particulier sur l’hôpital public. Le niveau de l’ONDAM est proprement irresponsable, alors que les efforts consentis ces dernières années par l’hôpital, ses agents et les assurés sociaux ont été considérables. Vous demandez à nouveau de faire mieux, avec moins. Mais les poches de productivité sont aujourd’hui vides. Vous ne faites pas même bénéficier les assurés sociaux et les personnels de santé des efforts qu’ils ont consentis, puisque vous siphonnez la sécurité sociale.

Il faut dire que ce projet était déjà en germe dans la loi de programmation des finances publiques 2018-2022, puisque vous envisagiez de prendre 25 milliards d’euros dans les comptes de la sécurité sociale pour renflouer le budget de l’État. Vous dites : « ce sont les mêmes poches », mais ce n’est pas le même objet ! Les cotisations sociales, c’est du salaire différé, c’est la différence entre le net et le brut. La réalité, c’est que vous vous en prenez au salaire des Français !

L’hôpital brûle, et vous regardez ailleurs. Les personnels hospitaliers n’en peuvent plus, ils nous le disent. Ils quittent les hôpitaux, ils souffrent et deviennent leurs propres malades, les patients dont ils ont la charge en pâtissent. Au-delà des mesures structurelles qui, nous l’espérons, produiront leurs effets sur le long terme, nous avons aujourd’hui besoin d’un vrai plan d’urgence. Il y a le feu ! Nous avons besoin de lits, en particulier en aval des urgences. Les personnels doivent être mieux rémunérés pour que les professions redeviennent attractives. Le besoin de postes et d’investissement est considérable à l’hôpital. Avec le niveau d’investissement historiquement bas de ces dernières années, nous insultons l’avenir.

En réalité, ce PLFSS ne finance rien et vous avez beau jeu d’évoquer le déficit de la sécurité sociale – c’est le Gouvernement qui en est au premier chef le responsable.

J’évoquerai rapidement la sous-indexation – en dessous de l’inflation – des pensions de retraite et de prestations sociales, une mesure paramétrique quand vous annoncez une mesure systémique. Quant à la prime, défiscalisée et désocialisée, qu’a-t-elle produit ? La masse salariale, qui était en augmentation constante, a baissé au premier semestre : au lieu d’augmenter les salaires, les employeurs ont profité de l’effet d’aubaine et attendu que la prime produise ses effets. Enfin, j’aurais pu parler de la réforme de l’assurance chômage et de ses nombreux perdants, de la modification du mode de calcul des APL, autant de sujets que le débat parlementaire nous donnera l’occasion d’évoquer.

M. Paul Christophe. Vous présentez un budget de la sécurité sociale en nette dégradation, alors que nous avions voté l’an dernier le retour à l’équilibre. Nous ne pouvions alors que saluer ce retour à l’équilibre après dix-huit ans de déficit, tout en regrettant, sur ces bancs, la cure de rigueur infligée à l’hôpital et à la chaîne du médicament, au risque de dégrader notre capacité d’innovation en santé.

Mais nous avions aussi soutenu, de façon responsable, les mesures de la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales adoptée en décembre. Elles concrétisaient des choix forts, en réponse à la colère et au sentiment d’injustice qui traversaient notre pays.

Ces mesures et une conjoncture économique moins favorable que prévu font que les soldes prévisionnels pour 2019 et 2020 basculeront à nouveau dans le rouge, pour atteindre 5 milliards d’euros environ. Cela nous conduit à nous interroger sur les marges de manœuvre dont nous disposons, alors que le grand chantier de la dépendance est toujours devant nous. Il conviendra de faire des choix politiques forts pour répondre à l’immense attente de nos concitoyens – nous sommes prêts à vous accompagner.

Il convient de s’intéresser globalement au déficit des comptes publics. Faire porter au budget de l’État l’ensemble de l’effort lié à la crise sociale ne serait pas responsable. Toutefois, nous considérons que ce n’est pas à la sécurité sociale d’assumer tout l’effort, l’État doit prendre sa part.

Sur le fond, ce PLFSS nous paraît timoré, même si nous comprenons la difficulté de l’équation budgétaire. Nous saluons certaines mesures, comme la pérennisation de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, conditionnée à un accord d’intéressement. Nous appelons cependant votre attention sur le fait que cette mesure écarte les entreprises de moins de 11 salariés, où la mise en place d’un tel accord se heurte à de nombreux obstacles d’ordre technique et financier.

Nous saluons aussi l’indemnisation du congé de proche aidant, une mesure à laquelle je suis attaché. Il s’agit bien sûr d’une première brique, mais je suis convaincu qu’il faudra aller bien au-delà de trois mois pour couvrir l’ensemble des situations.

J’aimerais revenir sur la pertinence du maintien de l’ONDAM comme outil de régulation des dépenses. Calculé de manière annuelle et sans stratégie de moyen terme, l’ONDAM donne parfois le sentiment de ne pas correspondre à la réalité des besoins, ni de tenir compte des inégalités territoriales de santé, que les crédits du fonds d’intervention régional (FIR) ne parviennent qu’imparfaitement à compenser. Vous connaissez l’attachement de notre groupe à ce sujet.

Le sous-ONDAM hospitalier semble être particulièrement malmené par rapport au sous-ONDAM de ville. Il souffre du maintien du mécanisme de mise en réserve, soit 0,3 % utilisés pour compenser les dépassements des autres secteurs. Cela interroge sur la sincérité de l’ONDAM et des sous-ONDAM proposés à la sagesse du Parlement.

Les acteurs souffrent de ce manque de visibilité, pourtant indispensable pour déterminer les choix d’investissement. Le rapport de la task force pilotée par Jean-Marc Aubert sur le financement de la santé, dans le cadre des travaux « Ma Santé 2022 », souligne l’importance de donner une visibilité pluriannuelle aux acteurs, afin qu’ils puissent réaliser les investissements ou les adaptations nécessaires. L’idée d’une pluriannualité semble d’ailleurs faire son chemin, puisque c’est ce que le Gouvernement semble prévoir dans le cadre des ordonnances des hôpitaux de proximité.

Par ailleurs, la ministre Agnès Buzyn s’était engagée l’an dernier à trouver une solution pour pérenniser la situation des grossistes répartiteurs, indispensables pour l’approvisionnement des officines. Afin de rassurer les professionnels du secteur, pouvez‑vous nous dire quelles mesures vous avez prises ?

Attaché comme vous le savez à la mise à disposition des médicaments innovants et à la réduction des délais d’accès, j’observe que les autorisations temporaires d’utilisation (ATU) en extension d’indication, votées en LFSS 2019, ne sont toujours pas effectives. Certes, le décret a été publié cet été, mais le secteur est toujours en attente de deux arrêtés. Il y a là une perte de chance pour les patients.

Enfin, si je salue votre intention concernant les services d’aide et l’accompagnement à domicile (SAAD), je m’inquiète de la faiblesse des moyens qui y sont consacrés : si ces 50 millions d’euros ne devaient concerner que le seul département du Nord, cela représenterait une augmentation de 40 centimes de l’heure, bien loin des attentes du secteur !

Fidèle à sa démarche constructive, le groupe UDI, Agir & Indépendants aborde ce PLFSS dans un esprit d’ouverture et proposera plusieurs amendements pour améliorer le texte.

Mme Jeanine Dubié. « Un point de rupture est franchi, la sécurité nest plus assurée » : ce sont les mots des quelque 2 300 professionnels de santé qui ont signé à la fin du mois de septembre un appel pour des états généraux de l’hôpital public.

Chefs de service, médecins hospitaliers, internes, infirmiers, aides-soignants, tous alertent sur l’aggravation de leurs conditions de travail. Nous nous enfonçons dans une crise qui menace la survie de tout notre système de santé. Les hôpitaux ne parviennent plus à couvrir leurs charges d’exploitation courante, les urgences sont au bord de l’implosion et nos concitoyens sont confrontés à l’impasse de la désertification médicale. C’est peu dire que ce PLFSS était fort attendu par le secteur hospitalier, et plus largement par l’ensemble des acteurs de santé.

Mais la déception est à la hauteur des attentes. Vous présentez aujourd’hui un ONDAM à 2,3 %, alors que nous espérions voir se poursuivre la dynamique amorcée l’an dernier, avec un ONDAM à 2,5 %. Compte tenu du déficit du régime général, estimé à 5,1 milliards en 2020, la marge de manœuvre paraît bien limitée. Le retour à l’équilibre des comptes, initialement prévu en 2020, est repoussé à 2023.

Certes, ce déficit est pour moitié dû aux mesures d’urgence que nous avons votées en pleine crise des « gilets jaunes ». Mais c’est le Gouvernement qui fait le choix de ne pas compenser la perte de recettes pour la sécurité sociale de 2,7 milliards d’euros. Nous le regrettons. Non, monsieur le ministre, la cotisation et l’impôt, ce n’est pas pareil !

Il serait exagéré de dire que la ministre Agnès Buzyn n’a rien fait. Je pense notamment à la revalorisation tarifaire, au dégel des réserves prudentielles et à la restitution partielle de la sous-exécution de l’ONDAM en 2019. Mais tout cela est insuffisant au regard des besoins, criants. Les établissements de santé, publics comme privés, s’unissent pour nous alerter sur leurs conditions de fonctionnement, et ce malgré les mesures prises. Les déficits des hôpitaux publics ont atteint 620 millions d’euros en 2018 et 25 % des établissements privés sont déficitaires. Il est urgent et essentiel de repenser le financement des établissements : les ressources doivent augmenter et la pluriannualité doit être instaurée pour une meilleure visibilité.

Par ailleurs, nous notons une inscription de 100 millions d’euros sur les hôpitaux de proximité, alors que l’ordonnance n’est toujours pas prête. N’est-ce pas trop ambitieux, ou décalé ?

Vous dites soutenir, avec ce texte, le pouvoir d’achat. La réindexation des pensions de moins de 2 000 euros sur l’inflation ne doit pas occulter la sous-indexation à 0,3 % pour les autres. Nous nous opposerons à l’indexation différenciée des prestations sociales. À la veille de la réforme du système de retraite, quel mauvais signal !

Pensez-vous que la mesure consistant à reconduire la prime exceptionnelle de 1 000 euros en la conditionnant à des accords d’intéressement soit pertinente ? Encore une fois, cette restriction se fera au détriment des salariés des petites entreprises. Un premier bilan de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) montre en effet que 29,8 % des entreprises de plus de 2 000 salariés ont versé une prime, contre 9,7 % des entreprises de moins de 10 salariés. Nous proposerons d’améliorer ce dispositif pour mieux en répartir le bénéfice.

Compte tenu du défi qu’elle représente, le Gouvernement était très attendu sur la dépendance. Il est difficile de se prononcer aujourd’hui, puisque les mesures concrètes ne seront présentées qu’à la fin de l’année, dans le projet de loi relatif au grand âge et à l’autonomie. Mais compte tenu des déficits, la proposition de Dominique Libault qui suggérait d’affecter une partie de la contribution pour le remboursement de la dette sociale au financement du risque dépendance nous semble largement compromise. Il est prévu de consacrer 15 millions d’euros au recrutement du personnel en EHPAD et de reconduire la dotation de 50 millions pour les SAAD. Il n’est pas certain que ces mesures soient à la hauteur des difficultés rencontrées.

Nous aurons l’occasion de revenir sur l’indemnisation du congé de proche aidant. Très attendu, ce dispositif mérite encore d’être amélioré, notamment dans sa durée.

Le tableau sombre que je dresse aujourd’hui ne doit pas faire oublier l’existence de mesures qui vont dans le bon sens. Je pense au forfait accompagnement post-cancer, au mécanisme de recouvrement des pensions alimentaires ou à l’effort de simplification et d’amélioration des relations avec l’administration. Les débats permettront, je l’espère, d’avancer sur certains sujets, mais en l’état, le texte nous paraît en deçà de nos attentes et de celles des Français. Le groupe Libertés et Territoires réserve sa position.

Mme Caroline Fiat. Comme l’an dernier, nous avons reçu le PLFSS 2020 moins de 22 heures avant cette audition. Sauf à vouloir entraver notre travail, comment pouvez-vous nous imposer dans de tels délais un projet de loi de soixante‑quatre articles et de plusieurs centaines de pages ? Je l’ai répété hier en séance, cela compromet gravement l’exercice de notre mission. J’espère que vous saurez nous entendre à l’avenir. Je tiens toutefois à remercier vivement la présidente de son aide sur ce sujet. Ne prenez pas cette remarque à la légère, vous n’imaginez pas ma colère devant ce mépris pour la représentation nationale. Nous parlons pourtant ici d’une institution issue de la Seconde Guerre mondiale et du CNR, une des décisions les plus importantes et les plus transpartisanes du XXe siècle. Permettez-nous de travailler correctement !

Le PLFSS 2020 prend le contre-pied de l’euphorie affichée à la présentation du PLFSS 2019, qui prévoyait un retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. La réalité de 2019 est cruelle et parlante : un déficit de 5,4 milliards d’euros et une prévision de 5,1 milliards pour 2020, avec plus de 4 milliards d’économies nouvelles. Il s’agit clairement d’un texte de renoncement et de déception. Le déficit affiché n’est pas le fruit du hasard, il est le choix conscient du Gouvernement de poursuivre et d’amplifier sa politique d’exonération de cotisations sociales. Et surtout, ne me dites pas que c’est la faute des « gilets jaunes » !

Les mesures d’urgence pèseront encore fortement sur le budget : je pense au prolongement de l’exonération des cotisations sur la prime exceptionnelle, jusqu’à 1 000 euros, à l’exonération des cotisations sur les heures supplémentaires, pour un coût de 1,8 milliard, à la suppression du forfait social sur l’épargne salariale dans les PME votée dans la loi « PACTE », pour un coût de 600 millions d’euros, et à la création, non financée, d’un taux intermédiaire de la CSG des retraités.

Pourtant, l’heure n’a jamais été aussi propice à une augmentation du budget de la sécurité sociale : les taux d’intérêt sont historiquement bas, ce qui fait la joie des éditorialistes économiques néo-libéraux que vous aimez tant écouter.

Ayons malgré l’honnêteté d’évoquer quelques mesures particulièrement positives : la prise en charge de la contraception pour les mineurs de moins de 16 ans ; la rémunération, bien que limitée, des congés des proches aidants ; la réalisation de tests rapides d’orientation diagnostique et d’évaluation par les pharmaciens.

Ces mesures ne masquent cependant pas les manquements les plus criants. La politique du grand âge reste au point mort. Malgré l’urgence, aucune réponse n’est apportée aux personnels des SAAD et des EHPAD. Mardi, les personnels étaient une fois encore dans la rue, avec des revendications qui n’ont pas changé depuis plusieurs années. Faute de moyens, la maltraitance institutionnelle se poursuivra et le Gouvernement en sera comptable.

Même si, pour le Président de la République, le mot « pénibilité » « donne le sentiment que le travail serait pénible », sachez que, oui, le travail de soignant est devenu pénible. Afficher un ONDAM à 2,3 %, ce qui implique un nouveau train de mesures d’économie, relève d’une véritable provocation. Après plus de six mois de grève aux urgences, cette décision laisse n’importe quel observateur sans voix. Pourtant, des mesures de bon sens pour l’hôpital vous sont proposées. Je vous le dis avec force, l’hôpital agonise ! Vous devez nous répondre, et répondre aux soignants.

La première mesure consiste à mettre fin à l’assujettissement des hôpitaux à la taxe sur les salaires – qui représente 4 milliards d’euros. Plus généralement, c’est notre modèle social qui est en jeu. À l’aube d’une réforme des retraites des plus injustes, vous promettez aux Français une austérité budgétaire absurde. La sécurité sociale n’est pas née d’un coup de tête en 1945, elle est l’aboutissement d’un siècle de luttes pour les droits sociaux, pour la dignité humaine.

La discorde ne porte pas sur une simple histoire de virgule : ce budget porte le poids de l’histoire que nous sommes en train d’écrire. En tant que femme, mère, parlementaire et républicaine, je suis choquée par l’entorse terrible que vous faites au pacte républicain.

M. Pierre Dharréville. Le PLFSS 2019 a été le nœud d’une question sociale toujours plus prégnante. Vous avez d’ailleurs été obligés d’y retoucher sans le renier vraiment. Son petit frère, pour 2020, est un budget de sous-financement, d’affaiblissement et d’appauvrissement de la sécurité sociale.

L’État a décidé de prendre à la sécurité sociale une partie de ses recettes et de ses excédents potentiels, tout en lui laissant ses déficits. Résultat, il manque 5,8 milliards dans les caisses en 2019, l’équivalent du déficit du régime général. En 2020, le déficit atteindra 5,1 milliards d’euros. La sécurité sociale est confrontée à une crise de financement, organisée pour justifier la compression des dépenses sociales et préparer les esprits au déclassement généralisé de la réforme des retraites.

Hormis le coup de rabot sur la déduction forfaitaire spécifique, vous ne proposez jamais d’actionner le levier des recettes dans ce projet de loi. Il n’y a donc jamais eu autant de trous dans la raquette, avec diverses mesures d’exonération de cotisations sociales qui ont atteint des sommes astronomiques. On se perd dans les chiffres : 66 milliards d’euros selon le Gouvernement, 90 milliards selon la Cour des comptes. Ces mesures ne sont pas compensées. Je ne m’attendais pas à ce que les communistes soient au cœur du débat, mais je m’en félicite : la « loi Veil », effectivement, n’a pas empêché les non-compensations des allégements de cotisations patronales. C’est un débat sur lequel nous pourrons revenir.

Vous nous avez appelés à ne pas porter un regard strictement comptable sur ce PLFSS. Sans faire offense à Léonard de Vinci, ce budget, c’est un peu la Joconde : si l’on vous écoute en parler, il est magnifique, mais quand on se retrouve devant, on est quand même un peu déçu parce qu’il est tout petit !

Bien sûr, il y a quelques touches chatoyantes, dont l’indemnisation du congé de proche aidant. Je me réjouis que ma proposition de loi ait atteint son but. J’y vois une bonne nouvelle, même si ce ne peut être qu’un premier pas.

La faiblesse de la prise en charge de la perte d’autonomie nous inquiète, les 500 millions d’euros prévus ne sont pas à la hauteur du défi. Pour rappel, le rapport Libault sur la dépendance estime les besoins de financement à hauteur de 6 milliards d’euros par an. Ce sont selon moi des dépenses qui devraient être incluses dans le périmètre de la sécurité sociale.

Vous menez avec constance votre politique de baisse du coût du travail au profit des entreprises. Elle a un prix, mais peu de résultats : 22 milliards de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) pour 100 000 emplois créés ou sauvegardés, selon les études, 26 milliards d’allégements généraux, distribués sans contrepartie. Ces choix budgétaires, lourds de conséquences, privent la sécurité sociale de son autonomie – une autonomie pourtant nécessaire à la promotion de la solidarité et à la redistribution des richesses.

Vous évoquez un budget en faveur du pouvoir d’achat mais on cherchera en vain les progrès en la matière. Pour le domaine de la santé, c’est le régime sec : 4,2 milliards d’euros d’économies exigées par rapport à l’évolution naturelle des dépenses d’assurance maladie, une somme qui vient s’ajouter aux 8 milliards d’économies exigées et, hélas, obtenues en 2018 et en 2019.

La situation dans les hôpitaux de notre pays est intenable, et insoutenable. C’est un drame quotidien. J’ai rencontré il y a quelques jours les personnels de l’hôpital de ma circonscription : franchement, on ne peut pas en rester là. Il faut des mesures d’urgence, nous en proposerons dans les jours qui viennent. Il est impossible de s’en tenir au budget que vous proposez !

La ministre de la santé a dit qu’avec ce budget, vous préserviez l’hôpital. Je pense au contraire que nous abîmons encore un peu plus le service public hospitalier. Après avoir annoncé une enveloppe de 750 millions d’euros pour les urgences, étalée et prise sur des crédits existants, vous demandez maintenant aux hôpitaux un effort supplémentaire de 1 milliard d’euros. Il faut sortir de cette logique de compression de l’ONDAM : elle répond à une logique de comptabilité publique qui ne tient pas compte des besoins de santé de nos concitoyens et des conditions de travail des personnels hospitaliers.

M. Sébastien Chenu. La dégradation nette des comptes de la sécurité sociale était prévisible, son ampleur est cependant particulièrement préoccupante. Au titre des dépenses sensibles, la prise en charge des transports de malades représente un coût de l’ordre de 5 milliards d’euros. Le secteur du transport médical souffre d’une absence de mécanismes efficaces de régulation. Ainsi, les écarts de prix d’un département à l’autre peuvent aller de 1 à 4. Les professionnels de ce secteur se sont fortement mobilisés contre l’article 80 de la LFSS 2019, qui unifiait les modalités de prise en charge des dépenses de transport inter et intra-hospitalier. Dorénavant, ce sont les établissements de santé qui sont responsables du financement des transports inter-hospitaliers, auparavant pris en charge par la Caisse nationale de l’assurance maladie. L’un des motifs principaux d’inquiétude est la contractualisation, réalisée par l’intermédiaire d’appels d’offres : celle-ci favorise les grands groupes au détriment de petites entreprises ambulancières. Les risques sont clairement l’uberisation de la profession et la destruction massives d’emplois dans ce secteur. Aussi, un comité de suivi regroupant les fédérations hospitalières et d’usagers a été mis en place depuis octobre, il doit se réunir tous les deux mois.

Pouvez-vous indiquer en quoi cette réforme de la prise en charge des dépenses de transport permettra de réguler le secteur et de réaliser des économies substantielles ? Quel bilan pouvez-vous dresser des premières réunions du comité de suivi ?

M. le ministre. Monsieur Jean-Pierre Door, je regrette comme vous que la sécurité sociale ne soit pas à l’équilibre. Mais il me semble bien vain d’aggraver la situation en faisant des constats erronés. Il est faux de dire que le déficit va encore s’aggraver en 2020, puisqu’une amélioration est prévue et qu’il devrait se réduire en 2021 puis en 2022, avant l’équilibre en 2023. Parfois, on a l’impression parfois que vous avez envie que cela ne se passe pas bien !

Ensuite, j’ai du mal à vous suivre. Voyez, j’ai un système de pensée différent de celui de M. Dharréville, mais je le trouve cohérent ; vous, je ne vous comprends pas. Dans l’hémicycle, vous avez voté la défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires, et vous ne vous en êtes pas caché devant vos électeurs, vous n’avez pas non plus rejeté l’intégralité des mesures d’urgence ; mais neuf mois plus tard, en commission, vous nous reprochez d’avoir cédé aux « gilets jaunes ». J’ai envie de dire : « Choisis ton camp, camarade » !

J’en viens par ailleurs à vos inquiétudes relatives à l’autonomie de la sécurité sociale, que le Gouvernement viserait à étatiser. Au contraire, l’État transfère sans contrepartie une part de l’impôt national à la sécurité sociale ; celle-ci est passée de 7 % à 28 % entre 2016 et 2020.

Enfin, je comprends mal votre position : vous n’arrêtez pas de nous dire qu’il faut baisser les dépenses publiques, dont les dépenses sociales constituent 56 %, et les impôts, mais vous nous reprochez de priver la sécurité sociale de recettes... Oui, nous assumons notre choix de faire baisser l’impôt des Français ! Et vous, êtes-vous pour ou contre une hausse des impôts ? Je serais heureux de le savoir.

M. Jean-Pierre Door. Je ne parlais pas des impôts, mais des cotisations !

M. le ministre. Monsieur Door, il faut faire correspondre les propos que nous tenons, en commission, dans l’hémicycle et en circonscription. Il faut être cohérent ! Pour ma part, je constate que nous baissons les impôts des Français, tout en gardant l’objectif de rétablir les comptes de la sécurité sociale et en prenant en compte la demande populaire. Si vous n’approuvez pas cette démarche, je vous encourage à ne pas voter en faveur des baisses d’impôts si vous devez regretter qu’il y ait moins de recettes ensuite, car, en général, les deux sont liés !

Monsieur Vallaud, j’ai encore plus de mal à vous suivre. Nous sommes à vos yeux responsables de situation dans les hôpitaux et vous déplorez que l’ONDAM ne soit pas assez élevé. Certes, la population vieillit et les besoins sont accrus. Peut-être peut-on en effet considérer que les 4,6 milliards d’euros de dépenses supplémentaires d’assurance maladie ne sont pas suffisants, au regard de ce que nous constatons sur nos territoires. Mais je note que, lorsque vous étiez aux responsabilités, chargé d’élaborer un certain nombre de textes financiers, l’ONDAM était inférieur à 2 %... Pardon de le dire, mais nous rattrapons vos bêtises, monsieur Vallaud ! L’ONDAM était à 1,8 %.

M. Boris Vallaud. Mais avec quelle inflation et quelle croissance à l’époque ?

M. le ministre. Ce n’est pas de cette année que l’hôpital connaît une crise. J’ai été élu en 2012 et je sais que le problème vient de loin. Certes, vous n’aimez pas qu’on vous rappelle un passé qui n’est pas si lointain. Sans doute cela s’explique-t-il, il fallait tenir les comptes... Mais au moins ne semblez pas découvrir aujourd’hui une situation dont la majorité serait seule responsable ! Il est vrai qu’il y a dix ans, l’ONDAM s’établissait parfois à 3,2 %, 3,3 % ou 3,4 %, et que sous le quinquennat précédant, il a été à 1,8 %. Nous rattrapons les choses. Partageons au moins la contraints. À en croire certains, il n’y aurait plus de financement de l’hôpital depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron. Or nous savons tous que c’est plus compliqué que cela !

Par ailleurs, puisque vous parlez du pouvoir d’achat de nos concitoyens, dois-je rappeler que vous avez procédé au gel des pensions, du point d’indice, au décalage de la revalorisation des retraites ? Monsieur Vallaud, votre critique n’était pas constructive car, malheureusement, nous n’avons tout à fait compris ce que vous proposiez.

J’en viens au groupe du MoDem, que je remercie pour ses encouragements à faire mieux dans le domaine de la politique familiale. Il comprend les difficultés des comptes, dont chacun doit prendre sa juste part. S’agissant de la branche vieillesse, son déficit n’est pas imputable au fait que l’État refuserait de lui compenser de moindres cotisations. Sur les 16 milliards d’euros de mesures d’urgence, seulement 2 sont financés par la sécurité sociale et 14 par l’État. Je crois donc qu’on peut dire que l’État en prend sa part !

Bien sûr, nous sommes tous d’accord pour considérer qu’il faudrait parvenir à équilibrer les comptes de la sécurité sociale. Comme l’a souligné le rapporteur général, il va falloir s’interroger sur l’avenir de la CADES, car la question va se poser de savoir comment on finance par exemple la dépendance, sujet très important. Vous avez eu raison de dire que les 500 millions d’euros apportés constituaient une première brique mais qu’il faudrait trouver une mesure pérenne, sachant que le Gouvernement ne souhaite pas augmenter les impôts. C’est effectivement le grand défi des années à venir.

Mme la secrétaire dÉtat. Je répondrai à vos interventions en regroupant les différentes thématiques.

Tout d’abord, l’ONDAM de ville est plus élevé, parce qu’il constitue un ensemble composite : on prend en compte les indemnités journalières, les médicaments et les conséquences du virage ambulatoire que nous avons voulu, en faveur d’une santé de ville que l’on souhaite plus importante, parce qu’elle répond à un besoin de proximité.

À l’hôpital, la progression de l’ONDAM va se traduire par une ressource supplémentaire de 1,6 milliard d’euros. Comme l’a souligné fort justement Mme Dubié, depuis plus de dix ans, nous sommes le premier gouvernement à augmenter les tarifs hospitaliers. Nous avons restitué aux hôpitaux près de 400 millions d’euros de crédits, qui avaient été jusqu’à présent gelés. Nous l’avons fait en assumant d’augmenter l’ONDAM. Comme l’a rappelé M. le ministre, alors qu’il s’établissait sous la barre des 2 % ces dernières années, nous l’avons, pour notre part, porté à 2,3 % en moyenne.

À la suite des travaux de Pierre Carli et du député Thomas Mesnier, nous avons également arrêté le pacte de refondation des urgences. Comme l’a mentionné à plusieurs reprises Mme Buzyn, nous avons alloué des crédits budgétaires nouveaux pour procéder à des recrutements, à des revalorisations et soulager les personnels des services des urgences, mais assurer aussi un meilleur service à la population – 750 millions d’euros sur trois ans. La mise en œuvre a déjà commencé au sein des services d’urgence et dans les hôpitaux de proximité.

Nous travaillons également à la pluriannualité, très attendue par les établissements. Elle leur permettra de développer une vision de long terme de leurs moyens d’investissement et, le cas échéant, de refondation ou d’évolution de leurs services.

S’agissant du congé de proche aidant, il ne s’agit que d’une première étape. Il fait suite au rapport de Dominique Libault de mars dernier. Nous allons tester la formule ; la porte n’est pas fermée d’autant qu’une clause de revoyure est prévue dans deux ans. Nous avons répondu à une urgence. En outre, Agnès Buzyn et Sophie Cluzel lanceront, le 23 octobre prochain, une stratégie nationale qui comportera des mesures concrètes relatives aux difficultés des aidants, et notamment des jeunes aidants.

Sur la politique familiale, nous attendons la remise du rapport confié à M. Viry. Nous partageons votre ambition de faire évoluer notre politique familiale. Comme je le dis très régulièrement, la politique familiale doit s’adapter aux familles, et non l’inverse. Prenons l’exemple de la garantie de versement des pensions alimentaires : on a entendu les demandes, on y répond et on s’adapte en travaillant avec l’ensemble des secteurs.

Sur le grand âge, le congé de proche aidant fait partie des mesures que nous prenons. Les 500 millions d’euros de crédits sont la marque d’une première étape et non d’une quelconque austérité. Une réforme d’ampleur va arriver. Nous tiendrons nos engagements sur ce sujet, comme nous les avons toujours tenus. Un projet de loi est en préparation ; il sera prête d’ici à la fin de l’année. En parallèle, nous travaillons avec Myriam El Khomri sur la question de la valorisation et de l’attractivité des métiers dans le domaine du grand âge, comme nous le faisons dans les hôpitaux. Il s’agit de voir comment on peut parvenir à une meilleure rémunération.

Sur les SAAD, l’enveloppe de 50 millions d’euros que nous avons dégagée en 2020 vise à soutenir le secteur en attendant la réforme. Celle-ci sera structurelle et doit nous permettre de concrétiser réellement le virage domiciliaire à compter de 2021. D’où les travaux en cours sur tout le secteur du grand âge et de l’autonomie.

Enfin, sur les grossistes répartiteurs, monsieur Paul Christophe, les entreprises de la distribution constituent en effet un maillon important de la chaîne du médicament. Elles garantissent, comme vous l’avez rappelé, l’approvisionnement des pharmacies d’officine. En 2019, comme Agnès Buzyn s’y était engagée devant la représentation nationale, des échanges techniques se sont ouverts pour rendre la marge des grossistes moins sensible à l’évolution du prix du médicament. Ces échanges techniques ont eu lieu fin juin. Une architecture est en train de se dessiner concernant le nouveau modèle tarifaire, qui sera validé prochainement par la profession. En outre, il est indispensable de tenir compte des travaux que nous menons actuellement dans le cadre de la feuille de route relative aux ruptures d’approvisionnement, pour voir dans quelle mesure les grossistes peuvent apporter leur aide. Je vous invite à y travailler avec nous, si vous le souhaitez.

Mme Monique Iborra. Madame la secrétaire d’État, malgré le fait que l’ONDAM médico-social soit en forte progression en 2020, ce dont nous nous réjouissons bien sûr, certains des personnels, acteurs et employeurs étaient en grève cette semaine. Soucieuse de les rassurer, je voudrais vous poser deux questions.

Tout d’abord, pouvez-vous nous dire combien de postes ont été créés en EHPAD ces deux dernières années, et combien le seront en 2020 ?

Par ailleurs, pensez-vous que les 50 millions d’euros prévus pour les acteurs du secteur de l’aide à domicile seront attribués en 2020 ? Nous savons en effet que les 50 millions d’euros votés dans le PLFSS l’année dernière ne l’ont pas encore été, ce que nous a confirmé la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Pouvez-vous nous indiquer la position des départements – partenaires acteurs et financeurs – sur une refonte urgente et nécessaire de notre politique dans ce secteur en très grande difficulté ?

M. Gilles Lurton. Dans le cadre de la discussion générale du PLFSS, j’ai l’habitude d’intervenir sur la politique de la famille. Je n’y dérogerai pas cette année. De mon point de vue, ce PLFSS consacre l’abandon total de la famille par votre gouvernement – il est d’ailleurs difficile de trouver des dispositions la concernant...

J’ai cependant relevé quelques articles que j’ai trouvés positifs. Ainsi en est-il de l’article 37 sur les maternités ou de l’article 38 sur l’accueil en Belgique des personnes en situation de handicap et le financement des personnels. Encore qu’il serait préférable de faire un peu plus pour accueillir en France une personne en situation de handicap... J’ai également pointé l’article 45 sur l’indemnisation du congé proche aidant, même si la durée de trois mois me paraît très courte. Mais j’ai noté que c’était un début. L’article 48 porte sur la garantie de versement des pensions impayées, mesure lancée sous le précédent quinquennat, et que vous améliorez : nous ne pouvons que l’approuver. L’article 49 favorise la satisfaction ponctuelle des besoins d’accueil des enfants dans les crèches. Mais je déplore la pauvreté des places de crèche dans tous vos PLFSS.

Voilà, je n’ai rien trouvé d’autre que ces quelques articles pour compenser les mesures désastreuses qui ont été prises à l’encontre de la famille depuis sept années.

M. Adrien Quatennens. 24 heures pour analyser, avec nos équipes, 189 pages hors annexes – dont certaines font jusqu’à 560 pages – c’est trop peu. Mais c’est suffisant pour comprendre l’essentiel, à savoir que vous affaiblissez de manière très importante notre sécurité sociale collective.

Vous l’affaiblissez d’abord en réduisant ses ressources, puisque vous multipliez les exonérations de cotisations sociales et que vous rompez avec le principe jusqu’à alors établi qui consistait à les compenser par le budget général de l’État. Ainsi, vous faites payer à tous les assurés sociaux les conséquences de vos choix fiscaux. Vous prétendez élever le niveau de vie en vous concentrant sur le salaire net par la baisse des cotisations, en omettant sciemment que ces cotisations sont une part intégrante du salaire socialisé, qui finance notre couverture collective face aux événements de la vie.

Vous ne mettez jamais rien d’autre dans une poche du grand nombre que ce que vous lui prenez dans l’autre. Ainsi, vous creusez le « trou de la sécu » pour mieux lui imposer cette nouvelle cure d’austérité. Celle que vous allez lui infliger cette fois est particulièrement rude : 4 milliards d’euros du fait de la moindre progression de l’ONDAM. Vous programmez l’affaiblissement de tous les services publics de santé, alors que la situation dans les hôpitaux, en grève depuis des mois, est absolument catastrophique. Au regard de l’actualité, c’est un PLFSS honteux, irresponsable et même dangereux, qui prépare évidemment la voie à la réforme des retraites que vous envisagez.

M. Belkhir Belhaddad. Je prends acte, pour m’en réjouir, des différentes avancées relatives au sport santé. Elles portent notamment sur le certificat médical ou le forfait soins post-cancer – et je sais la ministre très engagée sur la prévention des risques cardiovasculaires. La suppression du certificat médical pour les mineurs devrait permettre de faire des économies et, surtout, de lever un frein important au développement de la pratique sportive. Il devrait également être levé pour les plus de 18 ans. Au vu des dispositifs expérimentaux lancé par certaines villes et régions, tel le Grand Est, leur mode de financement paraît être au cœur de leur succès. C’est pour l’instant le FIR qui le finance aux côtés des collectivités locales et des mutuelles. Mais cela ne gomme pas les inégalités territoriales.

S’agissant du forfait soins post-cancer, seuls les bilans sont pris en compte. Il faudrait prévoir une extension au diabète type 3 et à l’hypertension. Rappelons les enjeux : les économies pourraient être de l’ordre de 5 à 6 milliards, soit l’équivalent du « trou » de la Sécu.

Mme Isabelle Valentin. Le vieillissement et la dépendance vont s’accélérer dans les vingt prochaines années. Or le maintien à domicile correspond à un souhait des Français. De plus, il est source d’économies dans un budget de sécurité sociale tendu.

Les métiers du grand âge, en structure ou à domicile, souffrent d’un manque d’attractivité important – vous en avez conscience. Les structures et associations font ainsi face à une pénurie croissante de personnel. Pourtant, ce PLFSS n’est pas à la hauteur des enjeux. Il ne comporte qu’une seule mesure financière pour l’accompagnement des seniors, mesure déjà prévue en 2018.

Quelles mesures et quels budgets, madame la ministre, comptez-vous mettre en place dans le PLFSS 2 020 pour permettre la revalorisation salariale des personnels concernés et la mise en place de formations adaptées aux nouvelles pathologies du vieillissement, dans le but de redonner de l’attractivité à ces métiers dont on a tant besoin ?

M. Dominique Da Silva. Le PLFSS propose, à l’article 10, une unification du recouvrement de la sphère sociale autour des URSSAF. C’est une très bonne chose, mais il faut veiller à ce que cette unification, source attendue de simplification, s’opère sans qu’on se défasse des solutions performantes que certaines entités ont su développer.

Je pense en particulier aux contrôles et à l’optimisation du recouvrement des cotisations employeurs menés à bien par l’AGIRC-ARRCO. En la matière, l’unification doit être l’addition des meilleures pratiques, et non le nivellement vers la plus accommodante des solutions pour les URSSAF. Comment les parlementaires peuvent-ils donc s’assurer de l’efficience des travaux qui résulteront de cette unification ?

Mme la secrétaire dÉtat. Madame Iborra, les 50 millions d’euros seront bien attribués en 2020. Nous allons en effet soutenir le secteur de l’aide à domicile et, plus largement, de la dépendance. Nous avons commencé à travailler avec les conseils départementaux. S’agissant du recrutement dans les EHPAD, nous avons prévu 210 millions d’euros en 2020 et 240 millions d’euros en 2021. Cela représente environ 22 500 équivalents temps plein. Nous mettons donc les moyens nécessaires. Pour autant, les structures sont-elles en mesure de procéder à des recrutements ? C’est tout l’objet du travail sur l’attractivité du métier qui a été confié à Myriam El Khomri. Les propositions, qu’elle nous remettra dans le courant du mois d’octobre, serviront de base à notre réflexion. Sachez que 6 000 postes ont été créés ces deux dernières années ; 5 000 autres devraient l’être en 2020, grâce aux moyens supplémentaires qui ont été alloués.

Sur le parcours de soins post-cancer, la mesure relève de la prévention après une maladie et de la nécessité de prévoir une prise en charge spécifique pour les 3 millions de personnes qui vivent aujourd’hui en France avec un cancer. Malgré les progrès liés notamment au diagnostic, des expérimentations ont montré en effet qu’une prise en charge spécifique, faite de bilans nutritionnels, d’accompagnement nutritionnel, d’accompagnement psychologique ou de sport adapté, évite les rechutes. C’est donc dans le cadre d’une prévention que nous mettons en œuvre de telles dispositions. Concrètement, des enveloppes seront données aux agences régionales de santé (ARS), qui travailleront directement avec les établissements de soins du cancer, qui ont repéré les acteurs agissant au quotidien dans ce domaine. Cette mesure est attendue par les professionnels et par les Français souffrant de ces pathologies.

Sur la famille, je ne peux pas vous laisser dire, monsieur Lurton, que nous ne faisons rien. C’est totalement faux alors qu’on met en place la prise en charge du transport et de l’hébergement pour permettre aux femmes d’arriver au terme de leur grossesse dans de bonnes conditions, qu’on prévoit la procréation médicalement assistée pour toutes les familles, qu’on instaure le congé proche aidant, ou encore le versement des impayés de pensions alimentaires. Ceux-ci concernent en effet pour 25 % des familles monoparentales et, selon la Banque de France, 54 % d’entre elles ont un dossier de surendettement. On voit bien combien ces mesures sont utiles ! Je rappellerai encore que nous avons mis en place un comité de suivi scientifique sur les 1 000 premiers jours – soit dès le quatrième mois de grossesse et jusqu’aux deux ans de l’enfant – pour favoriser la prise en charge de l’enfant et la parentalité. Enfin, dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion, avec les caisses d’allocations familiales, nous avons ouvert 30 000 places de crèche supplémentaires. Comment accompagne-t-on les collectivités et comment informe-t-on les familles sur ces offres ? Un système nous permettra de proposer de manière lisible, sur la page monenfant.fr, les places de crèche mais aussi les assistantes maternelles disponibles. Car je crois beaucoup au libre choix des familles entre solutions collectives et individuelles. C’est tout le sens du service offert par la page emploiplus.com, voté dans le PLFSS de l’année dernière et mis en place le 25 mai dernier. Comme on l’a fait pour les personnes dépendantes, ce service évite aux familles de faire l’avance des frais.

M. le ministre. S’agissant du recouvrement, monsieur Da Silva, les services de la direction de la sécurité sociale (DSS) ont beaucoup travaillé pour que la fusion se fasse en bonne intelligence et reprenne les bonnes pratiques de part et d’autre. Il s’agit de simplifier la vie des gens, mais aussi d’améliorer le taux de recouvrement et de conserver le dispositif de fiabilisation. La recherche des données déclarées par l’AGIRC-ARRCO, telle qu’elle existe aujourd’hui, profitera ainsi à tous les organismes sociaux.

M. Gardette a rendu un rapport très intéressant sur ce sujet, et la ministre des solidarités et de la santé y travaille beaucoup avec l’ACOSS et la DSS. Monsieur le député, je suis prêt à vous recevoir, ainsi que tous les parlementaires intéressés, pour discuter de cette réforme du recouvrement. Un échelonnement a été prévu jusqu’en 2025, après une longue concertation. Mais nous pouvons travailler ensemble lorsqu’il apparaît que les choses ne sont pas assez mûres – tel est par exemple le cas pour les professions libérales. Il s’agit en tout état de cause d’un très gros chantier de transformation de l’État, qui faisait d’ailleurs partie du programme d’action publique CAP22 – on l’oublie trop souvent. Il sera source d’améliorations pour les personnes comme pour les organismes de sécurité sociale.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Depuis le 1er janvier 2019, le CICE a été transformé en une baisse pérenne des charges, puis en allégement de 6 points des cotisations sociales d’assurance maladie pour les salaires inférieurs à 3 SMIC, voire à 2,5 SMIC pour les salariés du régime agricole.

En séance publique, j’avais appelé votre attention, monsieur le ministre, sur l’impact de cette transformation pour les associations intermédiaires qui bénéficiaient jusque-là de dispositions d’exonération propres. Vous m’aviez alors indiqué que, si ces nouvelles dispositions étaient a priori plus favorables, vous étiez disposé à effectuer un point d’étape après la mise en place du dispositif.

Les associations intermédiaires ont compilé des données qui ont été transmises à vos services. Il s’avère que, pour certaines structures, les nouvelles dispositions ont un impact négatif sur le montant de leur charge, de l’ordre de 3 % ou 4 %. Sachant que l’insertion par l’activité économique est une priorité du Gouvernement, comment comptez-vous, à travers ce PLFSS, corriger les effets de bord constatés pour éviter que les associations intermédiaires soient impactées par les nouvelles dispositions ?

Mme Hélène Vainqueur-Christophe. Comme s’y était engagée la ministre Agnès Buzyn lors de la discussion des deux propositions de loi de notre groupe discutées en janvier, le Gouvernement crée bien un fonds d’indemnisation des victimes de pesticides. Mais, à l’examiner de plus près, nous sommes plus que déçus. J’ai eu la fâcheuse impression, à la lecture du dispositif et de l’étude d’impact, qu’au final, malgré les espoirs suscités, vous ne créez pas en réalité de fonds d’indemnisation, mais seulement un guichet unique de simplification des démarches. Car il n’y aura ni indemnisation intégrale du préjudice ni prise en compte des victimes environnementales ou économiques.

Concernant le chlordécone, comment les victimes professionnelles, comme il en existe très peu, seront-elles prises en charge ? Pour les victimes, compte tenu de la nature du produit – qui n’est plus en circulation et n’est plus utilisé depuis 26 ans – et de la présomption que certaines pathologies lui sont imputables, ne pensez-vous pas qu’il vaudrait mieux prendre pour modèle le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante ? En d’autres termes, devons-nous attendre que des actions en justice soient intentées contre l’État pour manquement, pour défaillance et pour faute, et que l’État soit condamné, pour que les victimes professionnelles ou environnementales soient enfin justement indemnisées ?

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Le Président de la République a manifesté sa volonté de soutenir les start-up françaises. Dans le domaine de l’innovation en matière de santé, elles font preuve d’un réel dynamisme et elles apportent une véritable plus-value, mais elles ont du mal à être visibles dans le cadre des marchés publics, en particulier ceux des hôpitaux : ce sont de puissantes structures financières d’origine étrangère qui remportent les marchés alors que des start-up françaises innovantes, qui offrent un meilleur rapport qualité-prix, sont écartées. Je sais qu’une réflexion est en cours au sein du ministère, mais j’aimerais savoir quelles mesures peuvent être envisagées pour que les petites entreprises innovantes puissent être visibles et que les fonds publics soient utilisés à bon escient, c’est-à-dire en faveur de solutions offrant le meilleur rapport efficacité-prix.

Mme Mireille Robert. L’instauration d’un forfait post-cancer pour les soins de support correspond à une revendication, de longue date, des associations de lutte contre le cancer. Ce sera une avancée inédite et un message fort de soutien aux patients. L’après-traitement est en effet souvent oublié, alors que c’est une période de fragilité marquée par des répercussions sur la vie personnelle, sociale et professionnelle. Pourriez-vous nous donner davantage de détails, madame la secrétaire d’État, sur le contenu du forfait ? Quel sera son montant ? Combien de consultations cela permettra-t-il de couvrir ? Pourra-t-on utiliser le forfait dès l’annonce de la maladie, sans attendre la fin des traitements ? Enfin, qu’entendez-vous par « traitement aigu » ? Je pense en particulier aux patients atteints de cancers métastatiques qui auront des traitements toute leur vie.

M. Julien Borowczyk. Oui, l’hôpital est malade, mais j’ai été surpris par ce qu’ont dit beaucoup de nos collègues : ils ont évoqué un infarctus brutal, qui serait survenu en 2017, alors que j’ai plutôt l’impression qu’il s’agit d’une insuffisance cardiaque patiemment entretenue depuis de nombreuses années.

Il faut évidemment des budgets – et nous sommes au chevet de l’hôpital – mais aussi un équilibre entre le budget de l’État et celui de la sécurité sociale, qui sont intimement liés : le budget de l’État est également un aspect capital. Il faut, par ailleurs, une certaine visibilité sur l’avenir pour structurer l’ONDAM et les investissements. Monsieur le ministre, quelles précisions pouvez-vous nous apporter à propos des transferts envisagés entre l’État et la sécurité sociale dans le cadre des compensations de recettes, étant entendu que le PLFSS pour 2020 prévoit qu’il n’y aura pas de transferts de la sécurité sociale vers l’État ?

M. Thierry Michels. Vous avez fait référence, madame la secrétaire d’État, à la création d’un parcours post-traitement pour les patients atteints de cancer afin d’améliorer leur accompagnement. En cette période d’« Octobre rose », c’est une excellente nouvelle pour les 60 000 femmes auxquelles on diagnostique chaque année un cancer du sein.

Mieux vaut, néanmoins, prévenir que guérir. La prévention, qui est un des leviers de l’action du ministère de la santé, est un investissement essentiel pour la bonne santé de nos concitoyens, comme pour celle des comptes de la sécurité sociale. Je salue le lancement de l’initiative « territoires d’innovation », qui est dotée de 450 millions d’euros, et la sélection, dans ce cadre, de Strasbourg pour porter au niveau national le projet « territoires de santé de demain ». C’est une opportunité pour accélérer les initiatives innovantes, comme celles du pôle sénologie des hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui développe un manchon connecté pour mieux comprendre et prévenir les lymphœdèmes résultant d’une opération chirurgicale du sein.

Pouvez-vous préciser l’articulation entre les dispositions du PLFSS qui contribuent à la prévention en matière de santé et les initiatives nationales en faveur de la recherche et de l’innovation, en particulier dans le domaine de l’exploitation des données et du recours à l’intelligence artificielle ?

M. Brahim Hammouche. Je vais vous poser une question qui m’a été soumise récemment par la section des mineurs de fer retraités et des veuves de mineurs de ma circonscription au sujet de l’abondement de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) en matière d’action sanitaire et sociale, au regard des besoins des bénéficiaires de ce régime. L’ANGDM offre aux retraités et aux futurs retraités un large éventail de prestations qui visent à prévenir la perte d’autonomie, à favoriser le maintien à domicile des personnes âgées et à renforcer le lien social. Avec les diminutions successives des crédits disponibles, d’année en année, il devient impossible de servir certaines prestations, pourtant indispensables à une population vieillissante et de plus en plus dépendante. Qu’en sera-t-il en 2020 ?

Mme Stéphanie Rist. Le PLFSS 2020 comporte des mesures importantes pour l’hôpital, dans la continuité des engagements pris dans le cadre du plan « Ma Santé 2022 ». Des réformes très structurantes vont ainsi accompagner la nouvelle organisation des soins, notamment la réforme du financement des hôpitaux de proximité, qui permettra d’améliorer la qualité et la proximité de la prise en charge des patients tout en progressant en matière d’attractivité, et la réforme du financement de la psychiatrie, qui va diminuer les inégalités territoriales – vous l’avez dit.

Alors que d’importants efforts budgétaires ont été réalisés au cours des quinze dernières années par les hôpitaux, il faut maintenant engager d’importantes transformations structurelles dont les enjeux sont liés au vieillissement de la population, à l’augmentation des maladies chroniques et à la poursuite du virage ambulatoire, dans un contexte de faible démographie médicale. Le sous-objectif « dépenses relatives aux établissements de santé », pour lequel l’évolution prévue est de 2,1 %, fait l’objet d’inquiétudes que le Gouvernement n’ignore pas. Madame la secrétaire d’État, l’ONDAM hospitalier vous semble-t-il soutenable ? Pourriez-vous notamment nous rassurer sur la campagne tarifaire de 2020 ?

M. Sylvain Maillard. Environ 830 000 personnes travaillent actuellement auprès des personnes âgées en perte d’autonomie, et leur nombre devrait augmenter d’environ 20 % d’ici à 2030 du seul fait de l’évolution démographique, c’est-à-dire sans tenir compte des hausses des effectifs qui seront nécessaires pour améliorer la qualité de la prise en charge. Or les structures existantes, à domicile comme au sein des établissements, peinent à recruter et à fidéliser leur personnel. Ce secteur connaît des difficultés de recrutement majeures : entre 2012 et 2017, on a constaté une diminution de 25 % du nombre des candidatures aux concours d’entrée des instituts de formation des aides-soignants. Le nombre de personnes de plus de 85 ans va pourtant tripler d’ici à 2050. Le PLFSS 2020 prévoit d’investir dans la formation des professionnels et la qualité des SAAD à hauteur de 50 millions d’euros. Quelles actions et quels moyens de suivi prévoyez-vous pour la formation des professionnels, en vue d’améliorer la qualité des services d’aide à domicile ?

Mme Fadila Khattabi. Je voudrais associer Corinne Vignon à ma question. L’article 40 du PLFSS vise à améliorer l’état de santé et la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer après leur période de traitement. Le forfait de soins dits de « support » qui va être créé est une grande avancée. Cela couvrira notamment une activité sportive et un suivi psychologique.

Dans la continuité de cette démarche et dans le cadre des travaux qui seront menés par l’Institut national du cancer, ne pourrait-on pas envisager un élargissement des soins pris en charge dans le forfait ? C’est ce que demande notamment l’association « Les entreprises contre le cancer », que nous avons rencontrée. Elle nous a interpellés sur le reste à charge qui demeure très important pour certains soins, pourtant tout à fait indispensables, après la maladie. Je pense, par exemple, à certaines crèmes à utiliser après un cancer de la peau ou des brûlures engendrées par une exposition aux rayons.

Mme Albane Gaillot. Le 31 janvier dernier, alors que nous examinions la proposition de loi du groupe Socialistes et apparentés portant création d’un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, Mme Buzyn s’était engagée à ce qu’un tel fonds soit créé dans le cadre du prochain PLFSS. Quelques mois plus tard, le texte que nous nous apprêtons à examiner consacre la création de ce fonds. C’est une excellente nouvelle dont nous devons tous nous réjouir. Un délai de quelques mois était nécessaire, notamment afin de travailler sur les questions de financement que nous n’étions pas parvenus à régler. Quels mécanismes avez-vous décidé d’instaurer pour éviter de nuire à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, acteur principal de la pharmacovigilance, et aux agriculteurs, pour lesquels on peut craindre une répercussion de l’augmentation de la taxe sur les produits phytopharmaceutiques ?

Mme Carole Grandjean. Je voudrais saluer des avancées majeures qui concernent des enjeux de société forts : les 500 millions d’euros prévus pour le grand âge, la reconduction de l’exonération de toute cotisation sur les primes exceptionnelles, le congé proche aidant et les dispositions prévues au sujet des pensions alimentaires, qui permettent de soutenir les parents isolés. Je tiens également à souligner l’enjeu de la modernisation des processus liés aux systèmes d’information : un pas en avant supplémentaire aura lieu en matière de « juste prestation ». Pourriez-vous nous éclairer sur les avancées prévues en ce qui concerne le partage d’informations entre les organismes de protection sociale et leurs partenaires, en vue de renforcer l’efficacité du versement des prestations, des contrôles et de la lutte contre les fraudes ?

M. Thomas Mesnier. Notre système de santé se caractérise aujourd’hui par un financement lié à une tarification qui se fonde essentiellement sur l’activité. On ne s’intéresse pas ou peu, dans le cadre du levier financier, à la qualité des soins et à la coordination entre les différents acteurs de santé. La réforme qui a été annoncée en février dernier a pour objectif de corriger la situation en orientant les financements vers la qualité, la prévention et la coordination. Dans le cadre de la mission qui m’a été confiée, j’ai travaillé sur la transformation du financement des urgences : il me semble nécessaire d’envisager, à la place de la seule tarification à l’activité, un financement prenant en compte plusieurs paramètres, tels que la population desservie, l’activité et la qualité des services, dans l’objectif de recentrer nos services d’urgence sur leur mission première – l’urgence –, sans impact financier pour les hôpitaux. Pouvez-vous exposer les orientations que vous souhaitez pour le financement des services d’urgence ?

Mme Catherine Fabre. Je tiens également à saluer les avancées prévues dans le cadre de ce PLFSS, notamment en ce qui concerne les pensions alimentaires, le congé proche aidant, la valorisation du travail et, de manière générale, le soutien aux plus modestes. La majorité des personnes en situation de précarité sont des femmes : elles représentent 53 % des personnes pauvres, 57 % des bénéficiaires du RSA et 70 % des travailleurs pauvres. Ces femmes, parce qu’elles sont en situation de précarité, sont plus susceptibles d’avoir une santé dégradée et un moindre accès aux soins.

Même s’il est complexe d’établir un budget précis, une étude menée en 2019 par Le Monde estimait le budget consacré aux protections hygiéniques à près de 3 800 euros dans la vie d’une femme. Il faut rappeler que ces protections ne constituent en aucun cas des produits de confort – ce sont des biens de première nécessité : il est impossible de s’en passer. Certaines femmes utilisent encore dans notre pays des protections de fortune qui les exposent à des risques d’irritation et d’infection. Mme Buzyn s’est engagée en décembre dernier, devant le Sénat, à trouver un vecteur pour améliorer la disponibilité et la gratuité des protections hygiéniques. J’aimerais savoir, alors que nous allons examiner le PLFSS pour 2020, ce qui est prévu pour que cette gratuité se concrétise et quelles échéances sont envisagées.

Mme la secrétaire dÉtat. La campagne tarifaire de 2020, madame Rist, se déroulera aussi bien que celle de 2019. Agnès Buzyn s’y est engagée à plusieurs reprises. Par ailleurs, comme je l’ai déjà indiqué, le travail en cours sur la pluriannualité permettra aux hôpitaux d’avoir une vision à long terme, notamment à propos de l’évolution de leurs services.

L’attractivité des métiers sanitaires et médico-sociaux est une préoccupation majeure du Gouvernement, monsieur Maillard. L’enveloppe de 50 millions d’euros que j’ai évoquée concernera aussi la qualité de vie au travail. Il y aura également 10 millions d’euros supplémentaires dans le cadre de la prime qui a été annoncée – elle sera versée non seulement aux salariés des EHPAD mais aussi à tous les aides-soignants œuvrant dans des secteurs en lien avec la dépendance. J’ai aussi rappelé que Myriam El Khomri remettra en octobre un rapport sur l’attractivité, qui permettra de poursuivre le travail réalisé par Dominique Libault dans la perspective du projet de loi relatif à la réforme du grand âge et de l’autonomie. Par ailleurs, c’est un des grands enjeux de la réforme de la tarification, qui est en cours au niveau des conseils départementaux, mais aussi de l’accès à la formation, initiale et continue, et de la prise en compte des frais kilométriques dans le cadre de l’aide à domicile – ces frais ne sont pas toujours remboursés, ou pas très bien. Il y a, enfin, la question des plannings. Tout un travail a été engagé avec les services de soins à domicile, les associations et les collectivités locales, en particulier les départements.

Je vais répondre à la question portant sur les échanges de données entre la DGFiP et la sécurité sociale, mais Gérald Darmanin pourra compléter mes propos s’il le souhaite. Nous faisons en sorte que les deux systèmes d’information puissent se parler. À titre d’exemple, une déclaration trimestrielle préremplie verra le jour dans le courant de l’année 2020 pour les bénéficiaires du RSA et de la prime d’activité. Il n’y aura plus qu’à la valider – vous savez qu’on se demande parfois quels sont les montants à déclarer ou ce qu’on doit faire quand un salaire perçu au titre du mois de mars a été versé en avril. Tout le travail qui a été engagé dans le cadre de l’évolution de nos services nous permettra d’aboutir sur ce sujet en 2020, comme nous nous y étions engagés. C’est également sur cette base que nous pourrons assurer la contemporanéisation des aides au logement au début de l’année prochaine.

L’article 80 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a conduit à une réflexion sur la structuration des transports entre les établissements : il y a eu de la place pour inventer de nouvelles prestations, étant entendu que l’État n’a pas à intervenir dans les marchés entre les établissements. Une évaluation est en cours pour faire le bilan de cette mesure. Nous continuons à travailler avec les établissements et les représentants des ambulanciers pour trouver de bonnes solutions.

Permettez-moi de revenir plus en détail sur la prise en charge du parcours global après la phase de traitement aigu d’un cancer, que j’ai déjà évoquée rapidement. Les ARS pourront désormais financer certains organismes, qu’elles connaissent. En quoi la prise en charge consistera-t-elle ? Il pourra s’agir d’un bilan motivationnel et fonctionnel d’activité physique, pour lever les freins, sur la base des recommandations de la Haute Autorité de santé, mais aussi d’un bilan psychologique ou nutritionnel et de consultations de suivi. Le dispositif sera réservé à 250 000 patients par an, au-delà des femmes victimes d’un cancer du sein : un suivi pourra être proposé à tous les patients ayant eu une pathologie en lien avec un cancer. Nous vous donnerons en séance publique d’autres éléments plus concrets que nous sommes en train de finaliser.

M. Michels m’a interrogée sur le financement de l’innovation en matière de santé. La diffusion la plus précoce possible des innovations, dans tous les domaines, doit avoir lieu dans un cadre assurant une sécurisation pour les patients et pour les professionnels de santé, selon une logique de validation reposant sur un juste équilibre. Notre triptyque est le suivant : la sécurité, l’efficacité et l’efficience avec, le échéant, un remboursement par l’assurance maladie.

Madame Fabre, la question de la précarité menstruelle fait l’objet, dans un premier temps, de mesures que nous sommes en train de mettre en œuvre dans le cadre du PLF. La stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté prévoit ainsi une expérimentation relative au financement de protections hygiéniques pour les femmes vivant dans la rue ou dans les centres d’hébergement et de réinsertion sociale. C’est une première. En parallèle, un travail est réalisé avec des parlementaires, notamment dans le cadre de la délégation aux droits des femmes. Il y a aussi un travail interministériel, conduit avec Marlène Schiappa, Agnès Pannier-Runacher et Brune Poirson, sur la manière dont on peut récupérer puis redistribuer des produits dans des lieux de travail, en lien avec des acteurs associatifs.

En réponse à M. Mesnier, je confirme l’intention du Gouvernement, qui a été annoncée dans le cadre du pacte de refondation des urgences, de réformer le financement actuel. Nous souhaitons verser aux services d’urgence une dotation populationnelle dépendant des caractéristiques de la population et de l’offre de soins dans chaque territoire. Une part du financement continuera, dans une moindre mesure, à dépendre de l’activité des services d’urgence, en prenant mieux en compte qu’aujourd’hui l’intensité des prises en charge. Enfin, une incitation financière à la qualité complétera le nouveau financement des services d’urgence que nous souhaitons instaurer. Nous sommes ouverts à toute initiative en la matière.

En ce qui concerne le fonds d’indemnisation pour les victimes des produits phytopharmaceutiques, je voudrais vous rassurer : le chlordécone fait partie des produits concernés.

M. le ministre de laction et des comptes publics. En réponse à Mme de Vaucouleurs, je voudrais quand même souligner que nous appliquerons la clause de revoyure prévue dans le cadre du PLFSS 2019 au sujet des associations intermédiaires. Nous n’avons pas nécessairement la même analyse en ce qui concerne les effets de bord, mais nous regarderons la question. Si Mme de Vaucouleurs veut que nous la recevions avec les associations concernées, nous le ferons. Nous allons examiner, en tout cas, les éléments qui nous ont été transmis ou qui pourraient encore l’être.

S’agissant des relations entre l’État et la sécurité sociale, le fait que l’on corrige ce qui était initialement prévu à propos de la TVA montre bien que l’objectif premier, pour le Gouvernement, est le rétablissement des comptes de la sécurité sociale : elle devait rendre 1,5 milliard d’euros à l’État, mais nous abandonnons cette idée – vous savez aussi qu’elle devait transférer un montant comparable à la CADES. Par ailleurs, notre idée n’est pas de continuer à créer des non-compensations. Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur le rapport Charpy-Dubertret. Il serait intéressant, madame la présidente, d’organiser une réunion conjointe des commissions des finances et des affaires sociales, à un moment ou un autre – pas nécessairement à l’occasion du PLFSS –, pour discuter ensemble des relations entre l’État et la sécurité sociale. Il faut regarder ce qui s’est fait auparavant : il n’est pas tout à fait vrai que l’État a toujours assuré, jusqu’à présent, une compensation des exonérations de cotisations sociales, même si les montants en question n’étaient pas aussi importants sous le quinquennat précédent – ils tournaient autour de 150 millions d’euros – que dans le cadre de la désocialisation des heures supplémentaires. Enfin, vous n’ignorez pas ce qui est la tradition, malheureusement – ou heureusement, je ne sais pas : la fiscalité nationale remplace de plus en plus les cotisations, mais nous pourrons également en reparler.

Je dois dire que je nai pas déléments à vous apporter, monsieur Hammouche, en ce qui concerne le régime minier, mais je propose de vous répondre par écrit dici à la séance publique, avec Mme Dubos, ou de vous recevoir en compagnie de lassociation qui vous a saisi.

Mme la secrétaire dÉtat. Je voudrais revenir sur le fonds d’indemnisation pour les victimes de pesticides. Concrètement, ce fonds permettra d’assurer une prise en charge, notamment pour les exploitants retraités, alors que ce n’est pas possible aujourd’hui dans le cadre de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Par ailleurs, la prise en charge sera élargie aux conjoints et aux enfants touchés parce qu’ils ont vécu dans une exploitation. C’est une évolution importante. Les non-salariés agricoles auront, en outre, un complément d’indemnisation par rapport à ce qui est actuellement versé par la branche AT-MP, ce qui compte aussi. Nous allons assurer un alignement sur les prestations versées par des régimes plus favorables. Je souhaite vous remercier pour le travail qui a été réalisé. Il a commencé au Sénat, vous l’avez poursuivi, et je crois que nous allons aboutir à de belles mesures, qui sont attendues. Il en résultera une simplification et une meilleure lisibilité en termes de procédure, et cela nous permettra d’aller plus vite. La création du fonds correspond à une demande très forte, à laquelle nous allons apporter des réponses claires et simples.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Merci infiniment, monsieur le ministre et madame la secrétaire d’Etat, pour ces premiers échanges. Nous reprendrons nos travaux sur le PLFSS dès mardi prochain.

 

La réunion sachève à dix-huit heures vingt-cinq.

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Présences en réunion

Réunion du jeudi 10 octobre 2019 à 16 heures

Présents. - M. Belkhir Belhaddad, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, M. Sébastien Chenu, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, M. Dominique Da Silva, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Caroline Fiat, Mme Albane Gaillot, Mme Carole Grandjean, M. Jean-Carles Grelier, M. Brahim Hammouche, Mme Monique Iborra, Mme Fadila Khattabi, Mme Charlotte Lecocq, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, Mme Michèle Peyron, M. Laurent Pietraszewski, M. Adrien Quatennens, M. Alain Ramadier, Mme Stéphanie Rist, Mme Mireille Robert, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, M. Philippe Vigier

Excusés. - Mme Delphine Bagarry, Mme Justine Benin, Mme Claire Guion-Firmin, Mme Véronique Hammerer, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean‑Hugues Ratenon, Mme Nicole Sanquer, M. Jean-Louis Touraine, Mme Annie Vidal

Assistaient également à la réunion. - Mme Olivia Gregoire, Mme Valérie Rabault, M. Laurent Saint-Martin