Compte rendu

Commission de la défense nationale
et des forces armées

Audition, ouverte à la presse, de Mme Florence Parly, ministre des Armées, sur la situation internationale.


Vendredi
18 septembre 2020

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 75

session extraordinaire de 2019-2020

Présidence de
Mme Françoise Dumas,
présidente

 


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La séance est ouverte à dix heures.

Mme la présidente Françoise Dumas. Madame la ministre, nous avons souhaité vous auditionner le plus rapidement possible en raison des nombreux événements qui, depuis le 1er août dernier, ont marqué l’actualité internationale et eu une incidence sur l’engagement de nos armées. Nombreux sont les sujets internationaux qui suscitent des interrogations légitimes.

Au Mali, un coup d’État militaire a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta le 18 août dernier. Certes, ceux qui ont conquis le pouvoir ont affirmé leur volonté de poursuivre la coopération militaire avec la France pour lutter contre le terrorisme, et il ne semble pas – mais vous nous le confirmerez – que cela ait affecté nos engagements opérationnels. Néanmoins, alors même que la force Barkhane démontre tous les jours sa capacité à frapper les combattants des organisations djihadistes dans la région, l’avenir de cette opération militaire demeure une question stratégique. Barkhane a besoin, pour capitaliser sur ses succès militaires, d’une part, d’une stabilité institutionnelle, reconnue par la communauté internationale et, d’autre part, des réponses adaptées aux nombreux problèmes que traverse la région, qu’ils soient de gouvernance, économique ou sociaux. Comment voyez-vous l’avenir de Barkhane dans ce nouveau contexte politique ? Ne craignez-vous pas que les incertitudes institutionnelles inhérentes à tout coup d’État n’entraînent le retrait de nos partenaires étrangers au Mali ?

En Méditerranée orientale, les motifs d’inquiétude sont encore nombreux, du fait des différends relatifs à la délimitation des espaces maritimes, des affrontements entre les pays riverains et des provocations unilatérales, dont « l’illumination », comme on dit en langage militaire, de la frégate Courbet par un navire turc en juin 2020. Ce qui s’est passé durant l’été a confirmé votre jugement sur l’attitude de la Turquie, devant nous, en juillet, que vous qualifiiez de plus que préoccupante. Le Président de la République a rappelé, lors du sommet des membres de l’alliance des pays du Sud de l’Union européenne à Ajaccio, sa détermination à faire respecter la souveraineté européenne, le droit international et de favoriser la désescalade. La décision d’Ankara de mettre un terme à la mission de son navire d’exploration maritime et des deux vaisseaux de l’armée qui l’escortaient va dans le bon sens.

Toutefois cette zone, devenue, selon vos propres mots, « un espace de tension », ne risque-t-elle pas de se transformer en espace de confrontation ? Doit-on craindre ce qui peut apparaître comme une politique d’appropriation de la part de la Turquie ? Pourriez-vous expliciter le choix de la France de renforcer sa coopération avec les alliés européens dans le domaine militaire et de l’armement, dont témoigne la décision de la Grèce d’acquérir dix-huit Rafale ? Pourriez-vous répondre aux craintes qui se sont exprimées ici ou là que les douze Rafale d’occasion qui seraient vendus à la Grèce puissent manquer à l’armée de l’air ?

Concernant la Libye, dont le sort à des conséquences à la fois au Sahel et en Méditerranée, faut-il interpréter votre annonce de renforcer notre contribution à l’opération Irini par l’envoi d’une nouvelle frégate, le Latouche-Tréville, comme le constat d’une difficulté accrue à faire respecter l’embargo ?

Vous vous êtes rendue fin août en Jordanie et en Irak. Cela a été certainement l’occasion de faire un point sur l’opération Chammal. Quel retour de ce déplacement et de vos entretiens pouvez-vous faire ?

Nous voulons également vous adresser toutes nos félicitations pour l’opération Amitié, qui a permis, une fois de plus, de démontrer la capacité de nos armées à se mobiliser pour porter secours aux pays amis frappés par des événements exceptionnels. Pourriez-vous nous apporter des précisions quant au déroulé de cette opération à Beyrouth, exemplaire quant à sa rapidité et son efficacité ?

Enfin, les moyens développés dans les opérations citées restent dépendants de notre capacité à les produire. Je rappelle que notre commission avait plaidé, notamment au travers du récent rapport de MM. Griveaux et Thiériot, pour réserver une place importante aux industries de défense par le plan de relance post-crise covid, notamment au regard des retours à espérer en termes de croissance économique et d’emploi. S’il convient de prendre en compte les annonces du plan de relance de soutien à l’industrie aéronautique et l’effort historique prévu par la loi de programmation militaire (LPM), des regrets s’expriment sur les nouvelles mesures en faveur de l’industrie de défense, que certains jugent trop limitées. Quels arbitrages ont conduit à ces choix ?

Mme Florence Parly, ministre des armées. Depuis notre dernière rencontre, en juillet dernier, durant tout l’été, les militaires français ont été sur tous les fronts. Je souhaiterais saluer leur action et rendre hommage aux quatre soldats morts en opération au Mali et au Tchad.

Je tiens également à saluer l’action des unités engagées au Liban dans le cadre de l’opération Amitié, décidée par le Président de la République. Ces militaires sont venus en aide au Libanais après la double explosion dans le port de Beyrouth, intervenue le 4 août dernier, qui a surpris le monde entier. Nous avons été les premiers à réagir. Près de 750 hommes se sont rendus sur place, dont plusieurs détachements du génie. Leur compétence a été précieuse, puisqu’ils ont activement contribué à déblayer non seulement le port de Beyrouth, qui est le poumon économique du Liban, mais aussi des écoles et la gare routière. Les plongeurs de la marine nationale ont directement aidé à dégager de nombreuses épaves des approches sous-marines du port, afin de permettre aux bateaux d’accoster. Le bataillon de marins-pompiers de Marseille a fait preuve d’une belle solidarité en faisant don de dix véhicules d’intervention aux pompiers de Beyrouth.

Cette opération éclair, tant par la rapidité de son déploiement que par son efficacité, prouve, une fois de plus, la disponibilité et le professionnalisme de nos armées, ainsi que leur capacité à réagir vite sans que leurs missions soient par ailleurs obérées, puisqu’aucune d’entre elles, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières, n’a été interrompue.

Avant de les détailler, je referai avec vous un constat simple de la situation internationale de ces derniers mois. Loin d’effacer les tensions internationales, la crise sanitaire constitue un prétexte commode pour justifier des comportements injustifiables qui fragilisent toujours un peu plus l’ordre international fondé sur le droit, auquel nous sommes profondément attachés. Le comportement de plusieurs puissances, animées de prétentions globales ou régionales, a atteint un niveau de désinhibition inédit. Les intimidations publiques, les démonstrations de force, les armes interdites et les stratégies de désinformation, qu’elles se déploient par WhatsApp, Tweeter ou même dans la rue, sont employées sans aucun complexe. Le désir de coopération internationale est de plus en plus supplanté par la compétition stratégique et le risque d’escalade non maîtrisée.

La France privilégiera toujours la voie exigeante du multilatéralisme, le dialogue et la coopération à l’isolement et à la confrontation, ce qui n’exclut pas la fermeté. C’est une ambition que nous portons au quotidien avec nos partenaires européens au sein de l’Europe de la défense, qui grandit chaque jour. Car le dialogue et la coopération, loin de se réduire par des réunions à Bruxelles ou en visioconférence, mènent aussi à l’action. Agir concrètement et nous mobiliser lorsque la sécurité de nos concitoyens européens est menacée, c’est l’objectif n° 1 de l’Europe de la défense.

Nous le faisons dans le détroit d’Ormuz dans le cadre de l’opération Agénor qui contribue au respect de la liberté de navigation et à la stabilisation de cette zone. C’est également le sens de l’engagement des Européens au Sahel, au travers de la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM), comme dans la task-force Takuba, dont l’opérationnalisation se poursuit en dépit de la crise politique au Mali. C’est enfin l’ambition des Européens de peser sur le règlement de la crise libyenne et, plus largement, pour restaurer la stabilité indispensable dans l’espace méditerranéen, aux portes de l’Europe.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de renforcer notre contribution à l’opération de l’Union européenne Irini, en déployant la frégate Latouche-Tréville au cours des toutes prochaines semaines. Il s’agit de faire respecter l’embargo sur les armes mis en place par le Conseil de sécurité des Nations unies, condition essentielle pour réduire le niveau des tensions et engager un processus politique vertueux en Libye.

Avec les Européens, nous agissons au quotidien et nous préparons l’avenir de nos capacités militaires. En juillet, lors de la présentation du rapport sur les exportations d’armement, je vous avais dévoilé qu’en 2019, 42 % de celles-ci avaient pour destination les pays européens. Cette politique d’exportations résolument européenne continue de porter ses fruits après l’annonce récente du Premier ministre grec d’acquérir dix-huit Rafale. J’insiste sur le fait que c’est la première fois qu’un pays européen exprime le souhait de se doter des avions Rafale.

J’évoquerai notre priorité absolue, à l’intérieur comme à l’extérieur de nos frontières, qu’est la lutte contre le terrorisme. J’étais, il y a quelques semaines, au Levant. En Irak, Daech est encore et toujours une réalité. Ses combattants se terrent dans les reliefs montagneux. Ils n’ont plus de territoire, mais ils organisent une véritable vie souterraine. La clandestinité a toujours été, peu ou prou, leur mode d’action, mais j’ai retiré de ce déplacement la conviction que Daech continue d’exister.

Nous devons continuer ce combat aux côtés de nos partenaires irakiens, de nos partenaires kurdes et dans le cadre de la coalition internationale. En Jordanie, j’ai rendu visite à nos aviateurs sur la base H5. Je peux vous dire qu’ils continuent d’effectuer des missions de reconnaissance et de renseignement. Ils repèrent les positions de Daech et en décèlent les activités suspectes. Je soulignerai un fait qui n’est peut-être pas très connu : grâce à eux, la France couvre 25 % des besoins en images de la coalition tout entière !

À Bagdad et à Erbil, j’ai réaffirmé le soutien de la France à l’Irak dans ce combat. J’ai rappelé notre volonté de voir la région se stabiliser et se pacifier. L’Irak, pays souverain, doit être mis à l’abri des ingérences extérieures qui sont nombreuses et vont croissant. Il ne doit pas être pris en tenaille entre la Turquie et l’Iran.

Pour finir, je dirai quelques mots du Sahel et de la situation au Mali. Après le coup d’État du 18 août, une transition doit être engagée au plus vite. C’est pourquoi nous soutenons la médiation conduite par la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDAO).

Le contexte politique au Mali n’a pas entamé notre détermination à poursuivre la lutte contre les groupes armés terroristes qui sévissent dans toute la région. Les opérations continuent. Notre priorité est de fédérer les alliés qui sont sur place, à nos côtés, et ceux qui souhaitent nous rejoindre. J’échange très régulièrement à ce sujet avec mes homologues européens.

Tel est le panorama international dans lequel les armées françaises évoluent.

M. Philippe Folliot. Depuis plusieurs semaines, la situation en Méditerranée orientale est devenue préoccupante. La Grèce et Chypre, membres de l’Union européenne, doivent faire face à une démonstration de force hostile de la part d’Ankara, qui conteste l’existence de zones économiques exclusives, met en cause la souveraineté de deux États membres de l’Union européenne et met potentiellement en danger le droit fondamental de liberté de navigation. Ces tensions dans le bassin méditerranéen, à quelques heures de vol de nos frontières et à quelques milles nautiques des frontières de nos alliés européens, prouvent une nouvelle fois la nécessité de consolider de l’Europe de la défense, en s’appuyant sur une vision stratégique du contexte international, ce que les Allemands appellent « une boussole stratégique ».

La France et l’Allemagne ne semblent pas privilégier les mêmes réponses à la Turquie, la France choisissant une option militaire, alors que l’Allemagne a engagé une médiation entre la Grèce et la Turquie. Mais celles-ci peuvent devenir complémentaires si les pressions militaires françaises sont de nature à accélérer les conditions d’un rapport de force incitant la Turquie à s’asseoir à la table des négociations. Du reste, au sein de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, avec mes collègues, nous avons souvent interpellé nos collègues turcs sur un comportement qui n’est pas digne d’alliés.

Alors que l’Allemagne détient, pour quelques mois encore, la présidence du Conseil européen de l’Union européenne et que la France commence à préparer sa propre présidence en 2022, comment analysez-vous la réaction européenne dans cette crise avec la Turquie ?

Mme Sabine Thillaye. Comme Philippe Folliot, avec mes collègues du groupe MODEM et apparentés, nous nous interrogeons sur les conséquences pour la défense européenne de la récente crise en mer Méditerranée. Au-delà du rôle salutaire du Président de la République, pouvez-vous faire état de vos échanges avec vos homologues européens sur le rôle de l’Union dans un règlement de cette crise qui secoue aussi l’OTAN ?

Par ailleurs, on peut se réjouir que nos voisins grecs persistent dans leur choix de matériel européen et français par l’achat de dix-huit avions Rafale F3R, capables, au-delà de leurs capacités air-air, d’embarquer des missiles air-mer Exocet. L’effet dissuasif de ces armements n’étant plus à démontrer, la Grèce prévoit-elle d’en acquérir auprès de MBDA en guise de message aux flottes de ses voisins ?

Mme Laurence Trastour-Isnart. Depuis 2013, quarante-cinq militaires français sont morts au Mali. Au regard de la crise politique qui bouleverse le pays depuis un mois, ne devrions-nous pas renforcer le dispositif et surtout revoir la politique de sécurité afin de mieux protéger nos forces armées déployées sur le terrain ?

M. Bastien Lachaud. Je vous ai demandé par écrit d’informer la représentation nationale sur les directives que vous aviez données à la force Barkhane à la suite du renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta. Comment avez-vous organisé le travail des forces françaises avec les forces armées maliennes (FAMA) dont sont issus certains des putschistes ? Comment cette nouvelle situation influe-t-elle sur le climat sécuritaire, sur les objectifs de Barkhane, mais surtout sur l’acceptation par la population malienne de la présence des troupes française et sur la sécurité de nos forces sur le terrain ?

Enfin, après avoir réaffirmé l’inflexibilité de la France à l’égard du président Erdogan et le soutien ferme de la France à la Grèce malgré le silence de nos alliés otaniens ou européens, le Président Macron vient d’autoriser l’expulsion de Mehmet Yacin, militant kurde menacé de mort en Turquie. Comment expliquer ce qui semble être une attitude deux poids, deux mesures vis-à-vis de M. Erdogan ?

M. Aurélien Taché. La situation en Méditerranée orientale conduit à un envenimement des relations entre la Grèce et la Turquie sur fond de rivalité autour de l’appropriation des ressources en hydrocarbures. « L’Europe doit avoir une voie plus unie et plus claire », a déclaré le Président de la République en amont de la rencontre Med7, mais la position adoptée jusqu’ici par la France ne semble pas de nature à apaiser les tensions. Appeler à des sanctions et à une riposte directe contre Ankara, déployer des navires et des avions de guerre dans la région risque de conduire à une impasse.

La désescalade ne sera possible que si toutes les parties prenantes se retrouvent autour de la table. La solution allemande de médiation semble la plus raisonnable dans la perspective du prochain sommet européen, les 24 et 25 septembre. Mais comment dialoguer sereinement alors que des bâtiments de guerre se font face ? Comment envisager un compromis apaisé entre démonstration de force et menace de représailles ? La Turquie ne doit pas être considérée comme un ennemi. L’attitude offensive d’Ankara est certes condamnable, mais le gouvernement à tendance nationaliste du Premier ministre grec affiche également une attitude belliqueuse.

Les rapports avec la Turquie sont un sujet hautement stratégique pour la France comme pour l’Europe. L’équilibre géostratégique européen serait menacé si le climat venait à se dégrader faute d’un accord. La défense de la sécurité européenne ne peut s’envisager contre la Turquie, qui est notre partenaire au sein de l’Alliance atlantique : une crise diplomatique entre pays membres ne fait que nous fragiliser

Dans cette perspective, travailler à une sortie de crise en Méditerranée, notamment à un encadrement de l’exploration des gisements d’hydrocarbures, doit être notre priorité. C’est pourquoi je m’interroge sur les justifications réelles de la position singulière de la France dans ce dossier, qui place notre pays à contre-courant de la stratégie d’apaisement adoptée par la plupart de nos alliés.

M. Thomas Gassilloud. Après vingt ans d’expansion universaliste des droits de l’homme et de la démocratie, les nations occidentales se réveillent avec la gueule de bois : nous sommes entrés dans une nouvelle ère, où le droit peut être remis en cause et une frontière se redessine à coups de canon. Le lien stratégique, qu’il soit territorial, énergétique ou politique, s’acquiert par une combinaison de démonstrations de forces conventionnelles, nucléaires, d’actions hybrides, cyber, mercenaires, etc. Dans ce nouveau monde, pour ne pas disparaître, il faut être respecté et crédible.

Les armées sont de plus en plus adaptées pour répondre à la moyenne de nos engagements mais pas toujours à leurs pics. Dans ce contexte, il convient d’être attentif à la priorité des missions confiées aux armées, selon le principe de l’économie des moyens qui permet d’agir au bon moment, autrement dit de moins s’user pour mieux se préparer. Dans ce contexte, comment envisagez-vous l’évolution des moyens de l’opération Sentinelle ?

Quelle méthodologie sera utilisée pour la revoyure de la LPM, au regard d’une éventuelle mise à jour de la revue stratégique, afin de l’adapter à la nouvelle donne, tout en respectant la trajectoire financière ?

M. André Chassaigne. La guerre hybride gréco-turque se manifeste sous diverses formes : instrumentalisation des migrants par la Turquie en poussant des milliers d’entre eux vers la frontière grecque maritime et terrestre ; diffusion massive et ciblée d’informations en direction des médias occidentaux pour présenter la Grèce comme un pays hostile aux droits de l’homme et au droit d’asile ; violation à des milliers de reprises de l’espace aérien par des avions militaires turcs. La zone économique exclusive conduit à la recherche de combustibles fossiles dans des conditions différentes en fonction de la reconnaissance ou non de la convention des Nations unies sur le droit de la mer. La situation est aggravée par la présence de combustibles fossiles dans la « patrie bleue », selon l’expression employée par Erdogan.

On peut considérer que la Turquie teste l’Europe en faisant de la provocation. On peut penser qu’en intensifiant ses provocations, elle pose davantage de revendications, ce qui justifierait l’envoi par la France de navires de guerre en mer Égée pour soutenir la Grèce. Mais une telle action est-elle capable de ramener les deux pays vers la table de négociations ? Le Président Macron dit qu’il n’y a pas de diplomatie sans lignes rouges ; encore faudrait-il que l’Europe les définisse. La revendication par la Turquie, dans le cadre de son programme de territoire naval bleu, d’aller jusqu’au milieu de la mer Égée, à mi-chemin entre le continent grec et le côté turc, est-elle une ligne rouge ? Chypre est dans l’Union européenne mais pas dans l’OTAN, la Grèce est dans l’Union européenne et dans l’OTAN, la Turquie est dans l’OTAN mais pas dans l’Union européenne. Dans ce contexte, quelles peuvent être les lignes rouges et les possibilités d’intervention de la France et de l’Union européenne, qui doivent adopter des prises de position communes pour aboutir à une solution ?

Mme Florence Parly, ministre des armées. Notre politique en Méditerranée repose sur les principes de préservation de la libre circulation dans les espaces maritimes, de règlement pacifique et négocié des conflits et de solidarité avec nos partenaires au sein de l’Union européenne. Nous appelons tous les pays à respecter le droit international, en particulier le droit international de la mer, lequel a été transgressé de multiples façons. La France n’a pas une position singulière. Elle s’inscrit dans une démarche encourageant toutes les parties prenantes à régler leurs différends par le dialogue et la négociation.

Conformément au principe de solidarité, Chypre et la Grèce bénéficient du plein soutien de la France afin d’assurer le respect de leur souveraineté. Ce soutien se manifeste non seulement par des prises de parole mais aussi par des actions concrètes, qui ne doivent pas être comprises comme participant d’une quelconque escalade ou militarisation : j’insiste sur le fait que c’est la Turquie qui est responsable de la montée des tensions et de l’escalade militaire. Nous ne sommes absolument pas fermés au dialogue avec la Turquie ; nous considérons qu’il faut chercher des solutions aussi bien de façon bilatérale qu’avec nos principaux partenaires afin de contribuer à réduire les tensions et le niveau d’escalade. C’est pourquoi nous saluons les efforts de médiation entrepris par l’Allemagne et par Josep Borrell, notre haut représentant au sein de l’Union européenne, pour faciliter la reprise du dialogue entre la Grèce et la Turquie, en particulier sur la question cruciale de la délimitation des zones maritimes.

Il va de soi que si la Turquie devait persister dans son attitude escalatoire, il faudrait s’attendre à ce que l’Union européenne adopte une liste de sanctions : c’est ce qui a été discuté entre les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne, il y a quelques jours. Les Européens sont déterminés à mettre en œuvre ces sanctions si la Turquie persiste dans ses agissements.

Il ne faut pas caricaturer la position de la France. Cette position est claire : elle consiste à dialoguer autant qu’il est possible, mais dialoguer ne signifie pas donner le sentiment que nous sommes faibles et que nous acceptons les entorses, voire les encoches faites nettement aux principes fondamentaux du droit international, qu’il s’agisse de la liberté de navigation ou de la reconnaissance de la souveraineté de quelques États membres, mise en cause par les forages, les reconnaissances ou les travaux d’exploration entrepris par la Turquie sur le plateau chypriote.

Au Mali, l’instabilité créée par le coup d’État à la mi-août pose question à tous les membres de la coalition internationale pour le Sahel qui se constitue, car c’est un facteur d’instabilité supplémentaire dans une région qui en connaissait déjà beaucoup. C’est pourquoi il paraît indispensable à la France et à la communauté internationale que la junte assure rapidement la transition politique et transmette les pouvoirs à des autorités civiles. Cela est en cours de discussion avec la CEDAO qui insiste, à juste titre, sur la nécessaire rapidité de cette transition. Ces dernières heures, il semble qu’un accord ait été conclu pour ramener à une période de dix-huit mois une transition envisagée par la junte à horizon de trois ans, ce qui était hors de propos, mais des personnalités du monde civil doivent être rapidement identifiées et nommées afin de permettre au Mali d’organiser dans ces dix-huit mois des élections pour revenir dans le cadre institutionnel normal et légal.

Nos opérations militaires n’ont été ni remises en cause, ni freinées, ni désorganisées par le coup d’État. Cela ne veut pas dire que nous ne le considérions pas comme un fait politique majeur devant trouver une issue rapide dans une transition en faveur du pouvoir civil ; mais, sur le plan opérationnel, les forces armées maliennes sont au rendez-vous, les opérations planifiées depuis plusieurs mois ont bien lieu. La coalition internationale qui s’est progressivement constituée depuis le sommet de Pau continue de se mettre en place. L’opérationnalisation de la task-force Takuba est en cours autour du premier plot constitué d’unités françaises et estoniennes.

En outre, au début du mois de septembre, je me suis assurée auprès de nos principaux partenaires engagés à nos côtés au Sahel de la poursuite de leur soutien. J’en ai obtenu la confirmation auprès d’un certain nombre d’entre eux, notamment les Britanniques, les Danois, les Espagnols et les Estoniens. J’ajoute que les Américains continuent de nous apporter leur soutien sur le terrain, même si le principe du maintien de ce soutien au Sahel fait encore débat aux États-Unis. Je ne préjuge pas d’une décision à venir mais, à ce stade, les moyens américains engagés depuis de nombreux mois sont maintenus.

Au cours des échanges avec mes homologues européens, nous avons insisté sur le fait que les missions de formation assurées par EUTM, d’abord suspendues à cause de la crise sanitaire, puis à cause du coup d’État, devaient impérativement reprendre le plus tôt possible. Le haut représentant a également appelé à ce qu’il en soit ainsi. Il a été souhaité que, fortes de l’extension du mandat de la mission EUTM au Niger et au Burkina Faso, pendant la période où elles ne reprennent pas au Mali, ces missions y soient développées.

Le sentiment anti-français s’était puissamment exprimé à la fin de 2019. La manière dont les choses ont été reprises à partir du sommet de Pau a conduit à en atténuer significativement l’expression ; il a pu, de manière sporadique, se ré-exprimer depuis le coup d’État, mais nous n’en avons pas de témoignages caractérisés. Il importe de poursuivre dans la ligne fixée par le Président de la République, à Pau, avec ses homologues sahéliens, c’est-à-dire de reprendre le plus tôt possible non seulement les opérations militaires, puisqu’elles ont continué, mais les autres piliers de la coalition visant au retour des institutions publiques sur la totalité du territoire malien, la montée en puissance des projets de développement portés par différents opérateurs et la poursuite de la formation des forces de sécurité intérieure, auxquelles différentes missions de l’Union européenne ou d’autres contribuent. La transition politique doit avoir lieu le plus rapidement possible, car cela permettra la reprise d’une dynamique dans les différents chantiers identifiés lors du sommet de Pau.

La protection de nos forces au Mali n’a pas baissé. Elle continue d’être ferme. Depuis les mois de janvier et février, nous avons revu à la hausse le format de Barkhane. Il n’a pas été diminué depuis, mais nous n’avons pas l’intention de relever encore cet effectif. La stratégie que nous avons déroulée depuis le mois de janvier vise à faire venir de plus en plus à nos côtés des partenaires internationaux et européens. C’est bien le cas avec la montée en puissance de Takuba, en temps et en heure conformément au calendrier imaginé.

Le dispositif Sentinelle, rénové il y a deux ans, permet de concentrer les efforts dans le temps et dans l’espace là où l’action des forces de sécurité intérieure est prioritaire. Autrement dit, Sentinelle est là pour décharger la police et la gendarmerie de leurs missions de lutte contre le terrorisme, et exclusivement de celle-là, lorsque policiers et gendarmes sont accaparés par d’autres missions. Plusieurs échelons ont été définis. L’engagement peut aller jusqu’à dix mille personnes, en fonction des besoins ; le dispositif continue à se déployer en s’ajustant en permanence aux besoins exprimés par les préfets. Pendant la période du confinement, l’action de Sentinelle a été moins intense. Ce dispositif modulable ne crée pas d’effet d’éviction au regard d’autres missions de nos forces armées. Nous devons maintenir cette philosophie. L’expérience des deux années écoulées prouve que la qualité du dialogue qui s’est noué entre les préfets et les responsables zonaux de l’armée de terre a permis un déploiement ciblé, bien dosé et pertinent de la force Sentinelle.

La loi de programmation militaire prévoit elle-même une clause de revoyure avant la fin de l’année 2021. Nous travaillons à sa préparation et nous ferons des propositions dans les prochaines semaines pour en déterminer la méthode et le calendrier. Je serai certainement amenée à vous en reparler prochainement. Cette revoyure est utile pour resituer le contexte dans lequel interviennent nos forces armées. Avant d’entamer les travaux de la LPM, nous avions engagé une revue stratégique afin d’identifier les menaces permanentes et les menaces apparues au cours des dernières années. Sans nous lancer dans une nouvelle revue stratégique, il convient de réévaluer les différentes menaces pour nous assurer que la LPM reste parfaitement adaptée. Il ne s’agit pas de la remettre sur le métier mais de s’assurer de la pertinence des réponses que nous avons choisi d’apporter aux différentes menaces.

Dans le contexte de forte tension en Méditerranée orientale, le Premier ministre grec a décidé de passer une commande de dix-huit avions Rafale. C’est une excellente nouvelle – je le dis, parce qu’il est curieux de constater dans notre pays que lorsqu’un projet historique se concrétise, ce sont les esprits chagrins que l’on entend d’abord… C’est une excellente nouvelle pour l’Europe. J’espère que cela contribuera à affermir encore la stratégie que je vous ai présentée au mois de juillet concernant la politique d’exportation d’armement, dont je souhaite le développement en faveur de nos partenaires européens. Nous nous sommes suffisamment désolés de voir l’armée de l’air belge privilégier le F-35 pour nous féliciter du choix du Rafale par le gouvernement grec. Nous ne pouvons pas à la fois promouvoir une politique de préférence européenne, à laquelle je crois profondément, et nous désoler du choix de la Grèce.

C’est aussi une très bonne nouvelle pour notre industrie : la politique de préférence européenne a aussi des implications industrielles. Au-delà des grands groupes, la chaîne des sous-traitants, dont plusieurs centaines sont concernés, bénéficiera de cette commande. Globalement, 7 000 emplois ou personnes sont impliqués dans la chaîne de production des Rafale. Dans le contexte économique actuel, cette annonce doit être considérée comme un très grand succès et une excellente nouvelle.

Je ne balaie pas d’un revers de la main la question des prélèvements qui pourraient être opérés sur nos flottes, sachant qu’une partie de cette commande pourrait se traduire sous forme d’avions d’occasion prélevés sur l’armée de l’air. Vous imaginez bien que ma priorité est de m’assurer que de tels prélèvements n’auront pas d’effets opérationnels sur nos forces : c’est ma responsabilité première. Imaginer que je puisse envisager de tels prélèvements sur l’armée de l’air sans en évaluer les effets potentiels sur les opérations, c’est considérer que j’exerce ma responsabilité avec beaucoup de légèreté ! Je le dis avec solennité. J’aimerais qu’il soit bien compris par les représentants de la nation que nous examinons ces possibilités avec infiniment de sérieux et que nous ne laisserions pas opérer des prélèvements qui pourraient avoir une incidence opérationnelle. Est-ce à dire qu’il n’y a pas de marge de manœuvre ? Est-ce à dire que des solutions intelligentes ne pourraient être mises en œuvre ? La réponse est évidemment non.

Vous avez indiqué des questions sur la manière dont les arbitrages du plan de relance avaient été rendus. C’est vous, Mesdames et Messieurs, les députés, qui avez permis le vote d’une loi de programmation militaire constituant le socle de la relance. Concernant les chiffres inscrits en dur, les annuités 2019 à 2023 conduisent à prévoir le montant considérable de 110 milliards d’euros, afin de réaliser des investissements pour les équipements, les infrastructures et le maintien en condition opérationnelle. En cinq ans, c’est l’équivalent du plan de relance que vous avez choisi de mobiliser en faveur de nos armées. Certes, vous l’avez décidé en 2018, le temps passe et on oublie, mais il faut rappeler les faits. À l’échéance 2025, ce sont 180 milliards d’euros que vous avez prévu d’affecter à nos équipements et à notre maintien en condition opérationnelle (MCO), donc à notre base industrielle et technologique de défense. On ne peut donc parler d’un désintérêt de l’État à l’égard des sujets de défense, bien au contraire.

Vous avez fait bien mieux, dès l’automne 2017, en choisissant de relever l’effort en faveur de nos armées, puisque le budget pour 2018, que vous avez voté avant même l’adoption de la loi de programmation militaire, était en forte progression, de 1,8 milliard d’euros par rapport à celui pour 2017. C’est une stratégie très cohérente que, tous ensemble, nous poursuivons depuis 2017.

De plus, au mois de juin de cette année, les premières décisions qui ont été prises, avant même l’élaboration et l’annonce du plan de relance, consistaient en un plan de soutien à la filière aéronautique tant mise à mal par la crise économique. Au ministère des armées, nous avons décidé de revoir notre programmation à l’intérieur de l’enveloppe autorisée par la LPM et d’anticiper des commandes à destination de nos industriels. Ainsi, 600 millions d’euros de commande ont été anticipés, se traduisant par trois commandes d’A330 MRTT, qui auraient dû être passées en toute fin de loi de programmation militaire mais qui ont été notifiées à Airbus dès le mois d’août. Par conséquent, aucun retard n’a été pris par rapport aux annonces du mois de juin. J’ajoute que la commande de huit hélicoptères destinés à l’armée de l’air va rapidement se traduire en activité non seulement pour Airbus Helicopters, pour le site de Marignane, mais aussi pour le site de Safran, dans les Pyrénées atlantiques. Tout cela a des effets immédiats en termes de soutien à nos industries aéronautiques et à notre base industrielle et technologique de défense.

Enfin, nous n’avons pas attendu le plan de relance pour nous intéresser non seulement à la situation des grands groupes de l’industrie de défense, mais aussi à celle de tous les sous-traitants de petites ou moyennes entreprises (PME), qui constituent la chaîne de souveraineté à laquelle nous accordons une très grande attention. Nous avons mis en place une petite équipe auprès des équipes de Bercy pour les identifier toutes, soit plus de mille entreprises ayant vocation à être visitées par des équipes de la délégation générale de l’armement (DGA) ou de la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRRECTE), afin de faire le point sur leur trésorerie, leurs carnets de commandes, leur relation avec les banquiers. Pour un tiers des entreprises visitées, nous avons déjà activé des mesures de remédiation, autrement dit de soutien. Je ne rappellerai pas toutes les mesures que nous avons activées depuis 2018 en soutien de notre chaîne de souveraineté, tels que le plan action PME et les fonds mis en place ou sur le point de l’être à destination des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Je ne peux pas laisser dire que le ministère des armées a été oublié par le plan de relance : en fait, il a été le premier servi au travers de la loi de programmation militaire que vous avez discutée. Je vous remercie encore de votre appui pour la défense, aussi bien dans les votes que vous exprimez que dans votre travail sur le terrain, dans vos circonscriptions.

Mme la présidente Françoise Dumas. Effectivement, nous avons beaucoup travaillé pendant cette période. Certains collègues ont commis une série de rapports. Les missions flash réalisées cet été ont permis de suivre de près cette évolution, en complément de votre travail de suivi et d’accompagnement des entreprises.

M. Olivier Faure. L’environnement sécuritaire se détériore, les conflits n’épargnent plus notre continent. Vous avez évoqué ce qui se passe entre la Grèce, Chypre et la Turquie. Les divergences entre États membres de l’Union européenne sont malheureusement devant nous. Quel est l’état d’avancement de la boussole stratégique lancée le 16 juin, destinée à l’analyse commune des menaces et au rapprochement des cultures stratégiques ? Quel rôle entendons-nous jouer pour faire avancer ce projet ? Je le dis avec d’autant plus d’inquiétude qu’on a le sentiment que la grande perdante du plan de relance européen est la défense, les crédits alloués au fonds européen de la défense passant de 13 à 7 milliards d’euros.

On a raison de parler de l’autonomie sanitaire de l’Europe, mais on doit aussi parler de l’autonomie stratégique et militaire de l’Union européenne. Un rapport sénatorial encourage nos partenaires allemands et espagnols à accélérer le développement du système de combat aérien du futur (SCAF). Allons-nous donner l’exemple en investissant dans ce projet européen emblématique des vingt prochaines années ?

M. Jean-Michel Jacques. La mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM), destinée aux soldats maliens, interrompue par le coup d’État, reprend plus ou moins. L’Europe a tout de même décidé d’ajouter, pour la période 2020-2024, notamment pour cette mission, 134 millions d’euros fin d’accélérer la montée en puissance de l’armée malienne. Lors de la mission d’information sur le continuum entre sécurité et développement que j’ai réalisée avec ma collègue Manuéla Kéclard-Mondésir, nous avons constaté que l’action de l’EUTM n’était pas toujours efficiente, parce que les soldats auxquels étaient dispensées des formations de qualité se retrouvaient dans une organisation militaire totalement diffuse : on retrouve parfois des matricules sans soldats en face et il est difficile de mettre les gens formés en groupes constitués pour avoir un réel effet tactique sur le terrain. Le manque de structuration de l’armée malienne n’est pas nouveau : beaucoup disent que la situation est entretenue pour permettre une certaine « captation » – corruption, pour parler clair. D’autres redoutent les risques de coup d’État, mais nous avons vu qu’ils pouvaient intervenir malgré le manque de structuration de l’armée. Avez-vous des liens avec vos homologues au sujet de la structuration de l’armée malienne, indispensable pour obtenir des résultats tactiques ?

M. Christophe Lejeune. La montée des tensions en Méditerranée orientale liées à l’exploration gazière en violation du droit international nous inquiète particulièrement. La Grèce, en première ligne face aux prétentions territoriales turques, ne saurait être laissée seule. Je salue la volonté politique du Gouvernement d’apporter un entier à Athènes. La position que vous défendez honore la France.

L’annonce faite la semaine passée par Athènes de vouloir acquérir dix-huit Rafale est un témoignage de confiance politique et de l’excellence de notre industrie aéronautique. Par ce contrat, Athènes pourra assurer la suprématie de ses forces aériennes face à la Turquie. Pour notre industrie – je pense à Dassault et à la chaîne de production rassemblant nombre de petites entreprises –, cette nouvelle a été accueillie avec une très grande satisfaction. Je souhaite à nouveau les féliciter pour le travail qu’ils réalisent depuis des décennies. Cette commande pourrait appeler de nouveaux contrats. Je pense à la Suisse, qui va s’exprimer par référendum sur l’éventualité du renouvellement de sa flotte de combat, car un autre pays européen sera enfin équipé de notre Rafale.

Pourriez-vous apporter des précisions sur le contrat en cours de finalisation avec Athènes ? Quels bénéfices sont espérés pour l’ensemble de la chaîne de production du Rafale, notamment pour les petits sous-traitants présents sur notre territoire, et dans quel délai ?

Mme Florence Morlighem. Le 13 août dernier, vous vous êtes rendue au Liban pour lancer officiellement la mission d’aide baptisée du beau nom d’Amitié. Vous avez accueilli le porte-hélicoptères amphibie Tonnerre, dans lequel avaient embarqué 750 hommes chargés d’aider la population libanaise et transportant de l’aide alimentaire, des matériaux de construction fournis par différents ministères français et des entreprises privées. Quel premier bilan dresser de cette opération, qui démontre le lien indéfectible unissant les peuples libanais et français, lien d’autant plus important après qu’un nouvel incendie vient d’affecter le port de Beyrouth, détruisant un entrepôt utilisé par la Croix-Rouge pour stocker de l’aide alimentaire ? Quelles garanties avez-vous obtenu des autorités libanaises que l’aide internationale parvienne effectivement aux populations, conformément aux exigences formulées par le Président de la République ?

M. Jacques Marilossian. Notre pays se rapproche de l’Inde dans le cadre de négociations bilatérales, notamment en lien avec la crise entre l’Inde et la Chine à propos du Ladakh. La Chine est de plus en plus présente dans la zone Indo-Pacifique, au risque de menacer notre zone économique exclusive ; elle peut être aussi une menace pour les câbles sous-marins internationaux, ce qui inquiète notre allié américain.

Pour soutenir notre présence dans la zone Indo-Pacifique, le porte-avions de nouvelle génération est très attendu. Comme je le soulignais dans le rapport du budget de la marine en 2017, un porte-avions accompagné de son groupe aéronaval est un instrument politique et diplomatique. C’est un concentré de capacités militaires variées. Outil de maîtrise de vastes espaces maritimes, vecteur de projection de puissance assurant une grande flexibilité et disposant d’une solide autonomie d’action, c’est un outil d’interopérabilité qui renforce l’autonomie stratégique européenne. Nous sommes respectés par nos alliés et nos partenaires quand nous mobilisons le Charles de Gaulle. Ses successeurs seront plus massifs et plus interopérables, grâce à de nouveaux équipements issus des technologies de rupture.

Comment concevez-vous l’utilisation future d’un groupe aéronaval dans la zone Indo-Pacifique ? Quelles conséquences pouvons-nous en espérer pour notre relation renforcée avec l’Inde ? J’ajoute que je pourrais, hélas ! remplacer Indo-Pacifique par Méditerranée orientale et Inde par Grèce…

M. Alexis Corbière. L’ONG International Crisis Group affirme que les événements du 18 août ramènent le Mali au point de départ de la crise de 2012. À l’époque, des militaires avaient renversé le président Toumani Touré, alors qu’une crise sécuritaire secouait le nord du pays. « La leçon est sans appel, estime cette ONG, les huit années qui se sont écoulées depuis ont largement été gaspillées et le sur-place politique s’est révélé coûteux ». Critique que je partage largement.

Les représentants de La France insoumise avaient demandé la création d’une commission d’enquête sur le bilan géostratégique de notre action militaire au Mali, ce qui n’avait pas été accepté. L’échec de la situation est dû, selon moi, à l’absence de visibilité de ce que nous cherchons à faire au Mali. Certes, nos opérations sont maintenues et n’ont pas été remises en cause par le coup d’État, mais quel est le but de nos opérations ? Quel bilan tirez-vous de ce qui vient d’avoir lieu ?

N’est-il pas temps d’avoir, dans cette commission ou dans l’hémicycle, un débat sur le plan politique poursuivi par notre présence au Mali ? Nos soldats sont terriblement exposés, certains ont perdu la vie. Nous leur devons un plan politique réfléchi et débattu afin de ne pas les exposer inutilement à une situation qui risque de s’enliser. Lors d’une visite de nos troupes dans le cadre de l’opération Barkhane à laquelle j’ai eu la chance de participer, des officiers ont estimé que nous étions là pour vingt ans.

Mme Nathalie Serre. Quelles peuvent être, selon vous, l’incidence de la crise sanitaire liée et de son intensification sur les risques d’escalade et de conflit armé global régional ? Qu’est-il prévu pour protéger nos militaires, les populations locales et surtout pour assurer nos missions et nos opérations extérieures ?

M. Jean-Marie Fiévet. J’associerai à ma question mon collègue Stéphane Trompille, député de l’Ain et co-rapporteur de la mission d’information sur la stratégie spatiale de défense.

La semaine prochaine, débutera dans l’hémicycle l’examen du projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030. Un amendement du Gouvernement lui permettant d’agir par ordonnances a été adopté par la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Il a pour but, en adaptant la législation actuelle, de favoriser la recherche en matière spatiale et d’accompagner le développement des opérateurs. Cependant, il convient de séparer les aspects techniques et administratifs relevant du domaine réglementaire, et le domaine juridique, comme les services en orbite ou les ressources spatiales. Le second volet peut être soumis à débat parlementaire ou à examen par une mission d’information. Quels sont les futurs champs d’application des ordonnances ? Des consultations sont-elles prévues entre les acteurs du monde spatial, les industriels et les experts juridiques de l’espace ?

M. Jean-Louis Thiériot. La défense n’est pas l’angle mort du plan de relance, avez-vous dit ; permettez-moi d’en douter. La mission flash que nous avons faite avant les vacances évoquait bien la situation post-covid. Cette LPM de qualité était peut-être un plan de relance anticipé, mais la situation est nouvelle : les PME duales notamment sont durement touchées.

Si nous nous félicitons de la vente des Rafale à la Grèce, il n’en reste pas moins le problème des douze appareils qui seraient prélevés sur les armées françaises, soit environ 10 % de notre capacité. La France commandera-t-elle avion pour avion pour remplacer ceux qui seront mis à la disposition de la Grèce ? Cette décision sera-t-elle prise rapidement afin de garantir le respect du plan de charge des chaînes de montage, essentiel pour les cols-bleus qui sont au cœur de notre industrie de défense ? Un addendum au plan de relance est-il envisageable lors de l’examen de la clause de revoyure, afin de réinjecter des moyens en direction de la base industrielle et technologique de défense (BITD), vitale pour notre économie industrielle ?

Mme Florence Parly, ministre des armées. L’exercice dit de boussole stratégique lancé par l’Union européenne, au cœur des priorités de la présidence allemande, a vocation à identifier les menaces et à en produire une analyse commune. Ce travail doit être terminé d’ici la fin de l’année 2020, mais au-delà, nous souhaitons l’élaboration de nouveaux moyens. Cet exercice doit être l’occasion de redonner un nouvel élan à la construction de l’Europe de la défense. Nous travaillons activement à ce projet aux côtés de nos autres partenaires, en appui de la présidence allemande.

Concernant les outils déjà mobilisés pour l’Europe, je me réjouis au contraire de la création du fonds européen de la défense. J’ai beaucoup lu, comme vous sans doute, que ce fonds européen aurait vu ses ambitions rabattues. Mais il faut remettre les choses en perspective. Pas un euro n’était mis par l’Union européenne à la disposition des États membres pour financer le moindre projet de recherche et de développement dans le domaine de l’industrie de la défense ; c’est maintenant chose faite. Par conséquent, nous ne passons pas de 13 à 7 milliards d’euros, mais bien de zéro à 7 milliards. Il est important de le rappeler. Certes, une ambition a été fixée par les États membres lors de la discussion, mais vous connaissez les difficultés qu’il y a toujours à se mettre d’accord sur la totalité d’un cadrage pluriannuel pour l’Union européenne. Je suis heureuse que le fonds européen de la défense voie le jour et soit doté de moyens pas du tout minimaux qui nous permettront non pas de financer 100 % des efforts de recherche et de développement dans les États membres, mais d’exercer un effet de levier pour 20 à 30 % d’entre eux, selon les configurations.

La France est impliquée dans le projet majeur du système de combat aérien du futur, révolutionnaire par sa conception et son ampleur : il s’agit de faire évoluer un avion de combat de nouvelle génération dans un système comprenant beaucoup d’autres effecteurs, en particulier des drones, grâce à l’existence d’un cloud de combat permettant de partager en temps réel une très grande quantité de données. C’est un projet dont nous sommes à l’origine avec l’Allemagne, puisqu’en juillet 2017, le Président de la République et la chancelière Merkel ont décidé de lancer ce programme qui nous occupera pendant au moins quarante ou cinquante ans.

Nous avons déjà fait beaucoup. Nous avons investi 65 millions d’euros dans des études d’architecture dont le contrat a été notifié au début de l’année 2019. En 2020, nous avons débloqué 150 millions d’euros pour conduire les études de recherche et de technologie, convaincus de l’importance que la France détienne un véritable leadership dans ce programme. Ces études visent à la mise au point d’un avion démonstrateur capable de voler en 2026. Dans ce rétro-planning, nous devons nous assurer mois après mois que les contrats répondent aux objectifs fixés et au principal qui est la conception d’un démonstrateur capable de voler en 2026.

C’est un programme à l’origine franco-allemand, mais l’Espagne nous a rejoints : à partir du mois d’octobre, elle commencera à collaborer aux différents contrats, le principe de sa participation ayant été acté au début de l’année 2020. La France est totalement mobilisée dans le programme SCAF, que nous considérons comme crucial pour la supériorité de nos armées, pour nos technologies et pour les emplois de demain.

Je n’ai rien à retrancher à ce qui a été dit : l’armée malienne souffre de nombreux défauts d’organisation. L’un des objectifs de l’EUTM est de s’atteler à la solution de ce problème. Cette mission dispose d’une équipe de conseillers dédiés aux questions organiques. C’est un chantier colossal mais prioritaire. À titre bilatéral, nous apportons une expertise grâce à des coopérants qui, insérés au sein des états-majors maliens, forment des cadres maliens soit sur place, soit dans nos écoles militaires. Je partage le constat qu’il s’agit d’un travail de longue haleine.

Je compléterai ma réponse au sujet de la vente des Rafale. C’est une très bonne nouvelle et pour la politique européenne de défense et pour nos industries, mais je préciserai un point. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors d’une audition sur les exportations d’armement, notre industrie de défense marche sur deux jambes : les commandes nationales et les exportations. Sans les exportations d’armement, nous ne pourrions pas, à nous seuls, assumer l’entretien et la pérennité des chaînes industrielles et l’ensemble des compétences de nos industries de défense. Les activités d’exportation assurent cette continuité et réduisent le coût d’acquisition des capacités dont nous avons besoin. Ce point est crucial.

Le dosage entre avions neufs et d’occasion doit être examiné avec beaucoup d’attention. C’est bien ce que nous faisons.

Je répondrai avec retard au sujet des missiles qui peuvent être vendus en complément des avions Rafale. Il est probable que la Grèce voudra également se doter de missiles pour équiper ses avions. Les discussions ne sont pas encore engagées ; je rappelle que les Mirage 2000-5 dont les Grecs disposent sont déjà dotés de missiles MICA, qui pourront être utilisés sur les Rafale.

Concernant l’opération Amitié, la France a été la première sur le terrain après l’explosion qui a ravagé le port de Beyrouth, le 4 août. À partir du 5 août, soit moins de vingt-quatre heures, un pont aérien a été organisé, nourri par huit vols d’avions militaires qui ont transporté plus de cent tonnes de fret humanitaire et les premiers personnels déployés sur place. Dans un second temps, nous avons pris très rapidement la décision d’envoyer le porte-hélicoptères amphibie Tonnerre, qui est arrivé le 17 août. Il a été complété par un cargo affrété le ministère des armées pour transporter la totalité des équipements du régiment du génie du groupement Ventoux, comprenant 400 personnels disposant de capacités lourdes. Ce groupement du génie a été complété par des hélicoptères, des plongeurs de la marine qui ont localisé les obstacles susceptibles de bloquer l’accès des navires aux quais.

Ce travail a été mené avec grande célérité. Nos forces n’ont pas attendu pour agir que le port de Beyrouth soit entièrement accessible aux opérations – une enquête judiciaire ayant lieu, il fallait préserver un certain nombre de sites. Durant nos premiers jours de présence, nous avons consacré nos forces à aider au déblaiement de quatre écoles, l’école du Sacré-Cœur, l’école des Trois Docteurs, l’école de la Sagesse et l’école des Saints-Cœurs, ainsi que de la gare routière, qui joue un rôle important dans l’économie du Liban.

Au-delà de l’implication des forces armées dans l’opération Amitié, je ne peux pas ne pas mentionner que toute la France s’est mobilisée en faveur du Liban, par des élans de générosité traduits par de multiples associations ou des entreprises ont fait parvenir des matériaux de reconstruction, des denrées alimentaires et du matériel pour les soignants.

Le porte-hélicoptères est rentré à sa base de Toulon, le groupement Ventoux vient de rentrer, mais nous nous tenons toujours aux côtés du Liban par les voies militaires, si nécessaire, ou par la voie civile. C’est un pays cher à notre cœur et que nous n’abandonnerons pas plus dans le futur que nous ne l’avons fait au cours de ces semaines si tragiques pour le peuple libanais.

La zone Indo-Pacifique est fondamentale pour les intérêts de la France, puisque nous y avons 1,6 million de résidents français et que s’y trouvent 90 % de notre zone économique exclusive et la majorité de nos importations y transitent. C’est une raison pour s’y intéresser en temps de paix et c’est une raison supplémentaire pour s’y intéresser lorsque des tensions s’y exercent de façon croissante. Dans ce contexte, le groupe aéronaval, c’est-à-dire le porte-avions et l’ensemble des navires qui gravitent autour, est un outil particulièrement adapté pour mettre en œuvre la stratégie Indo-Pacifique. Son déploiement est un message politique, diplomatique et militaire. C’est un outil technologique au service de la totalité de ce que nous voulons décliner dans le cadre de cette stratégie.

La coopération maritime avec l’Inde est ancienne, remontant au début des années 1980, et intense. En 2019, nous avons réalisé l’exercice Varuna. Réunissant des bateaux de surface, des forces sous-marines et le groupe aéronaval, il a permis un entraînement intense entre les forces indiennes et les forces françaises pour s’aguerrir au combat maritime. La marine indienne est devenue un partenaire majeur au sein de l’océan Indien. Cet exercice est complété régulièrement, comme ce fut le cas en 2020, juste avant que la crise sanitaire ne stoppe les exercices que nous avions programmés. En février, nous avons réalisé avec la marine indienne et des avions indiens des exercices de surveillance maritime autour de La Réunion et de Mayotte : une frégate française a pu interagir avec un avion de surveillance indien pour conduire ces missions. Je me suis rendue récemment en Inde pour célébrer l’arrivée dans l’armée de l’air indienne de ses cinq premiers Rafale. J’ai constaté le désir et la volonté de l’Inde de poursuivre notre coopération entre nos marines et nos armées de l’air. De ce point de vue, l’arrivée des Rafale au sein de l’armée de l’air indienne est une opportunité extraordinaire pour développer cette coopération. Cela s’inscrit pleinement dans la stratégie Indo-Pacifique.

Vous avez repris, Monsieur Corbière, les conclusions d’une ONG qui compare la situation actuelle et celle qui prévalait en 2012. Permettez-moi de ne pas partager ce constat. La situation n’est pas du tout le même qu’en 2012, puisque l’État malien est toujours présent, même si je pourrai le dire avec beaucoup plus de force lorsque la transition politique vers les autorités civiles aura été réalisée. Contrairement à 2012, l’armée malienne ne s’est pas dissoute, elle n’a fui ni ses garnisons ni les opérations dans lesquelles elle est engagée. Les forces armées maliennes sont toujours en opération, afin de lutter contre le terrorisme, stabiliser la situation sécuritaire et conforter les forces locales. Enfin, à la grande différence de la situation de 2012, les pays européens ou les partenaires non européens présents au Sahel sont toujours engagés et bon nombre d’entre eux ont confirmé le maintien de leur engagement actuel ou leur désir de l’accroître.

Vous avez appelé l’attention sur la nécessité d’un dialogue entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif sur ces questions. Il ne m’appartient pas de définir comment ces débats doivent être organisés : c’est le rôle de la conférence des présidents. J’ai toujours voulu, avec Mme la présidente de votre commission, maintenir un dialogue permanent sur ce sujet comme sur l’ensemble des opérations dans lesquelles nos armées sont engagées. Il est essentiel que le contrôle parlementaire puisse s’exercer. Pour l’instant, celui-ci prend la forme des auditions auxquelles vous voulez bien m’inviter. Il y en a eu un certain nombre depuis le début de l’année, en janvier, en avril, en juin ; elles sont complétées par les auditions qui ont lieu au Sénat. Il est essentiel que nous ayons un dialogue régulier, sinon permanent, sur ces questions.

Je comprends que vous accordiez une attention particulière à l’opération Barkhane, puisqu’elle mobilise plus de 5 000 militaires. Je reste à votre entière disposition pour essayer de satisfaire votre curiosité bien légitime et répondre à vos questions. Je suis totalement disponible pour le faire sous quelque forme que ce soit.

Pour ce qui est de l’incidence du covid sur nos opérations, le ministère applique la totalité des directives gouvernementales au fur et à mesure qu’elles sont prises. Elles ne souffrent que de très rares exceptions, qui se comptent sur les doigts de la main, liées à notre activité opérationnelle. Depuis le début de la pandémie, le covid n’a pas affecté le bon déroulement de nos opérations, précisément parce que nous appliquons toutes les directives sanitaires destinées à la prévenir et à la cantonner lorsque des cas positifs sont déclarés. Au fil du développement de la pandémie, nous avons durci nos mesures sanitaires. Lorsque nous déployons des forces à l’extérieur ou lorsque nous rapatrions des éléments projetés, nous appliquons toutes les mesures de précaution possibles, notamment les quatorzaines devenues des septaines, et nous testons nos militaires. En opérations extérieures, nous avons déployé tous les moyens utiles pour réaliser des tests en cas de doute sur l’émergence de cas dans les forces projetées ou à bord des bâtiments de la marine nationale. Il s’agit de moyens nouveaux, dont nous ne disposions pas au début de la pandémie. Dans le cadre du service de santé des armées, nous avons développé une capacité de 2 000 tests par jour. Nous avons décliné l’ensemble des moyens nécessaires, conformément aux directives gouvernementales, afin d’éviter le développement de l’épidémie au sein des forces armées.

Enfin, concernant le domaine spatial, je ne reviens pas sur le constat qui nous a conduits à définir une stratégie militaire spatiale, liée à l’émergence de tensions dans l’espace exo-atmosphérique, susceptible de devenir un espace de confrontation. Les opérations spatiales militaires doivent être menées par l’État lui-même dans un cadre juridique déterminé ; il est donc nécessaire de faire évoluer le dispositif juridique issu d’une loi de 2008 sur les opérations spatiales. Cette révision doit pouvoir se faire rapidement ; je crois pouvoir dire qu’elle est en cours, puisque le Gouvernement a proposé au Parlement de l’habiliter à procéder par voie d’ordonnances, afin de permettre à l’État de devenir opérateur spatial pour les satellites militaires : un amendement au projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche a été adopté à cette fin en commission cette semaine. Lorsqu’elle aura été au terme du processus d’adoption, cette habilitation nous permettra de tenir les engagements que nous avons pris, d’ici la fin du quinquennat.

Mme la présidente Françoise Dumas. Merci, Madame la ministre, de vous être prêtée au jeu des questions et des réponses dans une séquence liée à l’actualité, non prévue initialement dans notre calendrier d’auditions. Nous nous retrouverons très bientôt puisque nous aurons le plaisir de vous accueillir le 6 octobre pour évoquer les questions relatives au budget.

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La séance est levée à douze heures.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Xavier Batut, M. Jean-Jacques Bridey, M. Philippe Chalumeau, M. André Chassaigne, M. Alexis Corbière, Mme Marianne Dubois, Mme Françoise Dumas, M. Olivier Faure, M. Jean-Marie Fiévet, M. Philippe Folliot, M. Thomas Gassilloud, M. Fabien Gouttefarde, M. Jean-Michel Jacques, Mme Anissa Khedher, M. Bastien Lachaud, M. Fabien Lainé, M. Christophe Lejeune, M. Jacques Marilossian, Mme Sereine Mauborgne, M. Philippe Meyer, Mme Monica Michel, M. Philippe Michel-Kleisbauer, Mme Florence Morlighem, Mme Catherine Pujol, Mme Nathalie Serre, M. Aurélien Taché, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Sabine Thillaye, Mme Laurence Trastour-Isnart, Mme Alexandra Valetta Ardisson

 

Excusés. - M. Florian Bachelier, M. Olivier Becht, M. Sylvain Brial, Mme Carole Bureau-Bonnard, M. Richard Ferrand, Mme Séverine Gipson, M. Stanislas Guerini, M. Christian Jacob, Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Didier Le Gac, M. Nicolas Meizonnet, M. Charles de la Verpillière, Mme Martine Wonner