Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

–  Suite de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272) (M. Joël Giraud, rapporteur général)              2

–  Présences en réunion...........................51


Mercredi
9 octobre 2019

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 7

session ordinaire de 2019-2020

 

 

Présidence de

 

 

 

M. Éric Woerth,

Président

 

 

 


  1 

La commission poursuit lexamen de la première partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272) (M. Joël Giraud, rapporteur général).

 

M. le président Éric Woerth. Mes chers collègues, nous avons déjà examiné, en un peu plus de cinq heures et demie de réunion, 143 amendements. Il nous reste donc très exactement 992 amendements à examiner. Je vous laisse appliquer une simple règle de trois pour constater qu’à ce rythme, il faudrait près de 40 heures de réunion pour achever l’examen du projet de loi de finances…

J’en appelle donc à la discipline collective, car je ne peux pas jouer systématiquement au maître d’école. La défense d’un amendement ne prend pas nécessairement deux minutes au stade de la commission et la séance publique aura lieu dès lundi.

Sur l’article 4, beaucoup d’amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40. C’est pourquoi je vous proposerai d’examiner l’article en ouvrant d’abord une petite discussion générale, par exception.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Une fois n’est pas coutume, nous sommes tous sur la même longueur d’onde. Je me permettrai de mon côté de rendre des avis beaucoup plus courts qu’hier sur les amendements.

Après larticle 3 (suite) :

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques ICF358 de M. Charles de Courson, I-CF524 de Mme Émilie Bonnivard et I-CF974 de Mme Marie-Christine Dalloz, lamendement I-CF95 de M. Pascal Lavergne et les amendements identiques I-CF671 de Mme Véronique Louwagie et I-CF946 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement a pour objet de faire sortir de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) les biens fonciers loués à long terme, c’est-à-dire pour plus de 18 ans.

La rentabilité brute du foncier est en effet de l’ordre de 1,2 %. Si vous soumettez ce rendement au taux de 17,2 % de CSG qui frappe les loyers et au taux marginal d’impôt sur le revenu, vous voyez bien que la rentabilité du foncier devient négative.

Ainsi, nous sommes en face d’une situation où une part croissante des propriétaires fonciers vendent car ils ne peuvent garder un bien dont la rentabilité est négative. Les fermiers sont alors pour ainsi dire obligés de leur acheter ce bien, s’ils veulent conserver la stabilité de leur exploitation. Les remboursements des prêts souscrits pour acheter ces terres entament alors une bonne partie de leurs capacités financières. On voit donc bien que le maintien de l’IFI sur le foncier agricole est un élément de destruction de l’entreprise familiale.

Je propose donc d’assurer aux propriétaires fonciers un minimum de rémunération, en exonérant de l’IFI tous les biens fonciers loués à long terme, c’est-à-dire pour au moins 18 ans.

Mme Émilie Bonnivard. L’objectif de mon amendement identique I-CF524 est en effet d’exonérer d’IFI les propriétaires qui affectent durablement leurs terres à des exploitations agricoles, avec un bail à long terme d’au moins 18 ans.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je pose le même principe dans mon amendement identique I-CF974. Mais posons la question de fond : si on ne sait évaluer le coût d’une exonération d’IFI au bénéfice des terres agricoles, peut-être faut-il leur appliquer un autre taux de CSG que celui appliqué aujourd’hui ? Cela leur permettrait de retrouver un équilibre économique. Je pense qu’il ne faut pas être dogmatique sur le sujet.

En tout cas, il faut sortir de cette situation où les locations de longue durée de biens fonciers, à destination de l’agriculture ou de la viticulture, sont largement pénalisées.

M. Charles de Courson. Mon amendement I-CF946 n’a pas l’envergure de mon amendement précédent.

Vous vous souvenez que, actuellement, au titre de l’IFI, il existe un abattement de 75 % sur les biens fonciers loués à long terme, mais avec un plafond de 101 897 euros, la taxation s’établissant à 50 % au delà de ce montant. Or vous vous souvenez aussi qu’en matière de succession, le plafond d’exonération des droits de mutation est passé brutalement de 100 000 à 300 000 euros ; c’était d’ailleurs très bien, puisque ce plafond n’avait jamais été revalorisé depuis des années.

De même, par cet amendement, je propose de relever le seuil d’exonération de l’IFI à 300 000 euros, comme on l’a fait en matière de succession.

M. Joël Giraud, rapporteur général. L’ensemble de ces amendements ont déjà fait l’objet d’une discussion l’an dernier. Avis défavorable à l’intégralité des amendements qui ont été déposés.

La commission rejette successivement les amendements I-CF358, I-CF524, I-CF974, I-CF95, I-CF671 et I-CF946.

Puis elle examine les amendements I-CF776 et I-CF777 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Mon amendement I-CF776 vise à alléger le taux d’IFI sur le foncier non bâti. La taxation du foncier non bâti vient s’ajouter à une faible rentabilité de ce dernier. Cette situation n’incite pas à l’acquisition ni à la détention de ce type de biens ; elle encourage leur artificialisation pour en augmenter la rentabilité. Cet amendement permet donc de lutter contre l’artificialisation des sols. Les agriculteurs retraités étant souvent propriétaires de terres agricoles, cette taxation réduit fortement leur revenu net après impôts, alors même que leurs retraites sont souvent très faibles. Cet amendement est donc un signal positif à leur égard.

Quant à mon amendement I-CF777, il vise à exonérer d’IFI tous les espaces naturels. En raison de la faible rentabilité de ces espaces, la taxation fait là encore peser un risque d’artificialisation. Une exonération d’IFI reviendrait donc à supprimer ce qui est aujourd’hui une incitation à l’artificialisation.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce sont des amendements que nous avons déjà vus deux fois dans le passé. Je donne un avis défavorable, comme les deux fois précédentes.

La commission rejette successivement les amendements I-CF776 et I-CF777.

Puis elle examine lamendement I-CF1125 de M. Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Il s’agit de la simple revalorisation du barème de l’IFI. Il fait en effet partie des impôts dont les tranches ne sont pas revalorisées. Je propose qu’elles le soient, en fonction de l’inflation. D’ailleurs, on pourrait trouver un autre indice de référence, correspondant mieux à l’IFI. Par simplicité, je propose cependant une actualisation du barème en fonction de l’inflation.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Si l’indexation est une règle juste pour l’impôt sur le revenu, en revanche, je pense que cela est beaucoup moins évident pour la fiscalité du patrimoine. Avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. Mon amendement inciterait les contribuables à déclarer des valeurs plus exactes. Car la sous-estimation des seuils des tranches du barème conduit à la sous-estimation des valeurs.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur général, lorsque le principe de l’indexation est oublié, on se réveille dix ou quinze ans plus tard pour procéder à une brusque réévaluation de 50 ou de 100 %, comme l’année dernière en matière de succession, lorsqu’on est passé d’un coup de 100 000 euros à 300 000 euros.

L’idée de notre président est pleine de sagesse. Monsieur le rapporteur général, on peut discuter du choix de l’indice de référence, indice des prix à la consommation ou autre. Mais il faut, sur le principe, qu’on indexe.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je ne suis pas très favorable à l’indexation des impôts qui relèvent de la fiscalité du patrimoine. Qu’on les relève de temps en temps en fonction d’une analyse ponctuelle, soit. Mais le patrimoine n’est pas la même chose que les revenus. Ce ne sont pas les mêmes indices ni les mêmes réalités qui s’appliquent et s’observent en termes d’évolution des valeurs. Je reste défavorable à une évolution de ce type.

M. Charles de Courson. Vous avez accepté l’année dernière une revalorisation de 300 %…

M. Joël Giraud, rapporteur général. Sur le sujet très particulier des baux ruraux ! Quand des valeurs locatives n’ont pas été revues depuis un certain temps, on peut analyser l’évolution du marché, pour opérer par exemple une révision au bénéfice de la province. Mais je parle ici de baux ruraux, c’est-à-dire de quelque chose de très particulier.

Mme Marie-Christine Dalloz. Quand on parle d’IFI, on parle bien d’immobilier. On ne peut pas ne pas tenir compte de l’évolution de la valorisation des patrimoines. Permettez-moi de prendre l’exemple du Jura, territoire frontalier de la Suisse. Certains secteurs y sont sous forte tension. Depuis trois ou quatre ans, le prix de l’immobilier y fluctue énormément. Je pense que c’est une erreur que de ne pas accepter cet amendement de bon sens sur le principe d’une revalorisation qui permettrait de mettre à jour, chaque année, la valeur patrimoniale des biens.

M. Laurent Saint-Martin. Je crois que le bon sens que vous invoquez est un faux bon sens. Car essayer d’indexer le barème de l’IFI sur l’inflation, c’est l’indexer sur une grandeur qui n’a, par définition, pas grand-chose à voir avec l’évolution de la valeur des biens immobiliers. L’inflation et l’évolution de la valeur des biens immobiliers ne sont pas corrélées.

Il vaudrait peut-être mieux réfléchir à indexer ce barème sur des valeurs qui reflètent l’évolution des prix immobiliers. Quoi qu’il en soit, si vous observez le marché de l’immobilier de Paris ou de la petite couronne parisienne, je ne pense pas que vous trouverez que son évolution est corrélée à l’inflation.

M. le président Éric Woerth. Dans mon exposé des motifs, j’ai relevé qu’on aurait plutôt pu prendre pour référence l’indice du coût de la construction ou un autre indice de ce type. En vérité, une indexation sur l’inflation est une sous-indexation par rapport à l’évolution réelle de la valeur patrimoniale.

Pour la séance publique, je déposerai un amendement, faisant référence à un autre index. Car je crois que ce débat vaut la peine d’être tenu. À partir du moment où existe un impôt sur le patrimoine dont le taux est fixe, l’assiette doit être indexée, car elle ne peut pas être totalement immuable dans un monde qui bouge énormément.

M. Charles de Courson. Puisque l’IFI frappe massivement l’immobilier, indexons-le sur l’évolution de la valeur immobilière. Pour ma part, je cosignerai volontiers avec le président un amendement qui répondra sur ce point aux objections du rapporteur général.

Lamendement I-CF1125 est retiré.

La commission examine lamendement I-CF897 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Il s’agit encore de l’IFI. Comme l’a très bien dit Charles de Courson, nous avions revalorisé l’an dernier de 100 000 euros à 300 000 euros le plafond applicable à certaines successions. Pour ma part, je vous propose de revaloriser la déduction au titre des dons consentis dans le cadre de l’IFI, en la portant de 50 000 à 100 000 euros. Soit une simple multiplication par deux.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je note l’effort que vous avez consenti sur le coefficient multiplicateur ! Mais je trouve élevé le seuil que vous proposez. Car je rappelle que ce montant est cumulable avec la réduction à l’impôt sur le revenu. Il faut encourager la générosité, certes, mais il y a aussi beaucoup de gens qui pratiquent la générosité sans jamais se prévaloir de réductions d’impôts. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement I-CF897.

Puis, conformément à lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement I-CF386 de M. Nicolas Forissier.

Elle examine ensuite lamendement I-CF648 de Mme Sarah El Haïry.

Mme Sarah El Haïry. Il s’agit d’un amendement technique. Il a vocation à sécuriser, pour les entreprises solidaires d’utilité sociale (ESUS), le dispositif d’incitation à l’investissement IR-PME. Mon amendement fait suite à la notification à la Commission européenne du nouveau régime, et au risque qu’il court de ce fait.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous avez présenté un amendement similaire quand nous en avons parlé sur l’impôt sur le revenu. J’ai rappelé quels avaient été les engagements du Gouvernement, pour que vous puissiez obtenir de lui une réponse en séance publique. Je vous avoue préférer examiner cette situation via votre amendement relatif à l’impôt sur le revenu, plutôt qu’à travers celui-ci, dans l’hypothèse où nous aurions un petit problème avec la Commission européenne.

Lamendement I-CF648 est retiré.

Puis la commission examine les amendements I-CF1058 et I-CF1059 de M. JeanPaul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. Ces amendements qui concernent l’assurance-vie apportent des recettes fiscales complémentaires à l’État.

Le régime de faveur dont jouit l’assurance-vie en matière de droits de succession a quelque chose de très choquant. C’est pourquoi je propose de le calquer désormais sur le barème de l’article 717 du code général des impôts en matière de droits de succession. Ce dernier prévoit, en ligne directe, une taxation à 45 % au-dessus de 1,8 million d’euros.

En matière d’assurance-vie, la même taxation ne s’établit qu’à 31,2 %. C’est excessivement choquant. Encore ne fais-je qu’évoquer la succession en ligne directe, sans parler du taux de 60 % qui frappe les autres successions… Ce n’est pas normal. Il y a vraiment un effet d’aubaine qui profite à ces contrats.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Votre groupe a déposé une série d’amendements qui font perdre beaucoup de son intérêt à l’assurance-vie, alors que je crois que des équilibres ont été trouvés. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements.

La commission rejette, successivement, les amendements I-CF1058 et I-CF1059.

Puis elle examine lamendement I-CF957 de M. François Pupponi.

M. Michel Castellani. Nous proposons que les acquisitions de logements par les organismes d’HLM, lorsqu’ils prennent l’engagement de les louer à des organismes bénéficiant de l’agrément relatif à l’intermédiation locative et à la gestion locative sociale, pour une durée d’au moins six ans, ne sont soumises qu’à un droit fixe de 125 euros. Il s’agit d’encourager la production de HLM dans le parc privé en France.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, la commission rejette lamendement I-CF957.

Puis elle examine lamendement I-CF1536 de la commission du développement durable.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de laménagement du territoire. Cette disposition fiscale incitative en faveur de la restauration de la qualité des sols, qui participe à la préservation de la biodiversité et de la santé publique, s’inspire des régimes de faveur prévus entre autres aux articles 1594 F et suivants du code général des impôts. Inciter à l’acquisition de friches polluées contribuerait à limiter l’étalement urbain et l’artificialisation de terres agricoles.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’ai demandé une expertise sur l’ensemble des points soulevés par cet amendement.

 

D’une manière générale, je suis toujours vigilant sur la rédaction précise des amendements qui touchent aux dépenses fiscales. En l’espèce, l’assiette de l’exonération me semble un peu large. Je préférerais un taux réduit à une exonération totale. L’opération que vous proposez n’est pas du tout encadrée dans son quantum. Il n’y a aucun plafond qui soit prévu pour son montant et nous ne disposons pas de chiffrage.

Je vous invite donc à retirer l’amendement pour que, d’ici à la séance publique, les questions que nous nous posons puissent obtenir une réponse précise.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Je vous remercie par avance de l’aide que vous nous apporterez pour obtenir ces réponses.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ces questions ont en effet été transmises au cabinet du ministre.

Lamendement I-CF1536 est retiré.

Puis la commission examine, en discussion commune, les amendements I-CF1398 et I-CF1399 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. L’amendement I-CF1399 propose de rétablir l’impôt sur la fortune (ISF) et l’amendement I-CF1398 de rétablir la progressivité de la fiscalité du patrimoine.

Sept milliards d’euros de recettes en moins, voilà ce qu’a coûté à l’État la suppression de l’ISF, tandis que vous faites supporter à tout le monde la baisse de dépenses publiques à due concurrence. Cette suppression est d’autant plus injuste que c’était un impôt qui frappait les plus fortunés. Vous aurez beau nous expliquer que c’était pour éviter l’exil fiscal, je rappellerai que les exilés fiscaux représentent seulement 0,2 % de l’effectif des personnes assujetties à l’ISF… D’ailleurs, si l’exil fiscal coûte de l’argent, en adoptant l’excellent amendement proposé par mon collègue Jean-François Mattei et moi-même sur un impôt universel ciblé, on résoudra en partie ce problème, qui n’en serait plus un.

Si on propose de rétablir l’ISF, on propose de le faire avec une plus grande progressivité. Car il n’y a pas de raison que, pour les personnes privilégiées, il n’y ait pas aussi de la progressivité. Notre proposition s’appuie sur les travaux de la fondation Copernic et de Thomas Piketty, en prévoyant un taux marginal de 0,1 % pour les personnes fortunées et de 2 % pour les personnes détenant un patrimoine supérieur à cinq millions d’euros. Ainsi, nous gagnerons en justice fiscale.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous comprendrez que, ces amendements étant complètement orthogonaux à la politique du Gouvernement, je donnerai à leur endroit un avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. « Orthogonal » veut dire, dans le vocabulaire de la commission des finances, « contraire ». Je le précise.

M. Charles de Courson. Cher collègue Éric Coquerel, si vous additionnez le taux actuel de 17,2 % de CSG sur les revenus du patrimoine au taux marginal d’impôt sur le revenu, vous arrivez à un taux de taxation d’un peu plus de 60 %. Un simple calcul montre qu’avec un barème qui culmine à 2 %, si le bien que vous détenez a une rentabilité inférieure à 3,6 %, sa rentabilité nette est nulle.

Cela veut donc dire que votre amendement tend à la suppression de la propriété privée au delà d’environ quatre à cinq millions d’euros de patrimoine. C’est mathématique. En cela, il est anticonstitutionnel. Si vous voulez détruire le système de la propriété privée, c’est tout à fait cohérent. Mais c’est indéfendable sur le fond.

La commission rejette, successivement, les amendements I-CF1398 et I-CF1399.

Puis elle examine lamendement I-CF1422 de Mme Sabine Rubin.

M. Éric Coquerel. Je pense que tous les collègues partageront notre souci vis-à-vis de l’habitat indigne, qui ne fait malheureusement que progresser. On en voit un peu partout des exemples, y compris lorsque des immeubles s’écroulent à Marseille. Dans ma circonscription, certaines situations rappellent aussi, malheureusement, plutôt Zola et Dickens qu’une situation propre à la sixième puissance économique du monde, tant les constats sont insupportables.

Nous proposons donc de créer une taxe sur l’acquisition de logements de luxe, en tout cas de logements chers, c’est-à-dire dont le prix dépasse un million d’euros. Le produit de cette taxe serait affecté pour moitié à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Sans alourdir les dépenses de l’État, cela permettrait ainsi de faire face à cette grande cause nationale qu’est l’habitat indigne.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je voudrais tout de même rappeler que les ventes immobilières sont soumises à des droits d’enregistrement, qui sont proportionnels à leur montant. On observe d’ailleurs que les ventes immobilières les plus importantes ont beaucoup contribué à la hausse de leur rendement.

Quant à la notion de biens immobiliers de luxe, n’étant pas Parisien, je peux en parler librement. Il me semble que le prix d’un appartement d’au moins 100 mètres carrés atteint, dans l’ensemble de Paris, justement un million d’euros. Vous définissez donc le luxe, monsieur Coquerel, par un barème qui, vu les prix malheureusement très élevés du marché, commence trop bas. Avis défavorable.

M. Julien Aubert. Je voudrais moi aussi m’élever contre cet amendement. Alors qu’on se retrouve avec des prix démesurés dans certaines communes, je crains que cette taxe provoque en réalité l’inverse de l’effet recherché, c’est-à-dire qu’elle alimente la spéculation immobilière et la hausse des prix. François Hollande a peut-être estimé qu’on était riche à partir de 4 000 euros de revenus mensuels, mais j’estime quant à moi que, lorsque vous habitez un appartement de 100 mètres carrés à Paris, vous ne vivez pas dans le luxe.

M. Éric Coquerel. C’est mal connaître Paris. Avoir un appartement d’un million d’euros à Paris permet tout de même de contribuer un peu plus que d’autres à lutter contre le fait que certains de nos concitoyens n’ont pas d’eau, d’électricité et vivent dans des logements insupportables.

Je vous rappelle que l’activité des agences spécialisées en immobilier de luxe a progressé de 17 % en Île-de-France. Cela montre bien qu’il y a de la marge. Pour ma part, je préfère lutter contre le logement insalubre que de plaindre les personnes qui ont un appartement d’un million d’euros à Paris.

La commission rejette lamendement I-CF1422.

Article 4 : Mise sous condition de ressources du crédit dimpôt pour la transition énergétique avant sa suppression en 2021 (et remplacement par une prime pour les ménages modestes)

M. le président Éric Woerth. Comme je l’ai annoncé, je vous propose une brève discussion générale sur cet article, compte tenu du nombre d’amendements que j’ai été amené à déclarer irrecevables, au titre de l’article 40, en raison du lien établi entre la prime et le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE).

M. Joël Giraud, rapporteur général. Les amendements qui ont été déclarés irrecevables avaient presque tous pour objectif de maintenir dans le dispositif des dépenses qui en sont exclues, de modifier les barèmes du CITE ou de maintenir les 20 % des ménages les plus aisés dans le champ du crédit d’impôt. On retrouve d’ailleurs globalement ces sujets dans les amendements qui restent, après que le couperet de l’article 40 est tombé.

Pour rappel, le présent article 4 met en œuvre en deux temps une promesse du Président de la République, à savoir l’instauration d’une prime à la transition énergétique. D’abord instituée pour les ménages modestes en 2020, elle sera étendue en 2021 aux ménages aux revenus intermédiaires.

L’article 4 réalise trois types de modification : il instaure une prime pour les ménages modestes ; il proroge le CITE sous conditions de ressources ; il instaure un montant forfaitaire de primes et de crédit d’impôt. Je soutiens la modification du dispositif telle qu’elle est présentée dans cet article 4. C’est une réforme qui a pour horizon la réalisation des objectifs environnementaux que nous nous sommes fixés. Elle a également deux autres objectifs : recentrer le dispositif sur des gestes techniques dont l’efficacité énergétique est avérée et significative ; concentrer l’effort sur les ménages aux revenus les plus modestes.

Par conséquent, certains gestes performants ont été exclus du dispositif, par exemple l’installation de chaudières à gaz à très haute performance énergétique. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen des amendements. Je rappelle que le champ des dépenses éligibles au CITE et le barème forfaitaire arrêté ont fait l’objet d’une concertation pendant tout l’été.

Concernant l’exclusion des 20 % de ménages les plus aisés, je voudrais dire que la réforme proposée répond à un choix politique ; elle s’inscrit dans un objectif de justice sociale. La concentration de l’effort budgétaire sur les ménages modestes se traduit par une budgétisation de 450 millions d’euros, inscrite en deuxième partie, pour financer la nouvelle prime. Le choix de concentrer les coûts sur les ménages les plus modestes a nécessairement une contrepartie : celle d’exclure les ménages les plus aisés, ceux qui ont la capacité financière d’engager des dépenses de rénovation sans le soutien actif de la puissance publique.

Permettez-moi d’émettre un bémol cependant : j’attends toujours la remise d’un rapport sur la transformation du CITE en prime forfaitaire. Prévu par l’article 182 de la loi de finances initiale pour 2019, ce rapport devait nous être transmis le 1er septembre 2019. Il aurait dû nous éclairer un peu plus sur les caractéristiques de cette nouvelle prime. En séance publique, je rappellerai au Gouvernement ce retard dommageable et lui demanderai de fournir au plus vite ce rapport, qui me semble important pour éclairer notre assemblée.

Mme Bénédicte Peyrol. Je rappelle que la rénovation énergétique des bâtiments est une priorité du Gouvernement. Lors des précédentes lois de finances, nous avons déjà travaillé sur le CITE et sur son recentrage. Le projet de loi énergie-climat prévoit également des mesures importantes, concernant notamment les passoires thermiques.

J’aimerais seulement donner quelques chiffres. Le CITE bénéficie aujourd’hui à 900 000 ménages, pour un montant moyen de crédit d’impôt d’environ 1 000 euros par personne. Il permet de soutenir environ 3,6 milliards d’euros d’investissements en 2019. Le CITE a fait l’objet l’année dernière d’une mission d’évaluation et de contrôle, qui m’a été confiée. J’en ai présenté les résultats à notre commission, en soulignant qu’aujourd’hui, le CITE est concentré à 50 % sur les ménages qui disposent d’un revenu fiscal de référence de plus de 37 000 euros.

La réforme présentée dans le cadre de ce PLF 2020 a pour objectif de rendre d’abord plus efficace, d’un point de vue économique, le pilotage du dispositif, ensuite de le rendre plus juste d’un point de vue social et, enfin de le rendre plus peritnent d’un point de vue écologique. À cet égard, la réforme propose de substituer à des taux de réduction d’impôts des montants forfaitaires de prise en charge fixés en fonction de l’efficacité écologique.

Quant aux ménages des neuvième et dixième déciles, pour lesquels certains disent qu’on ne fait plus rien, j’aimerais seulement préciser qu’ils pourront bénéficier du CITE pour les bornes électriques de recharge des voitures. Ainsi, le Gouvernement tient ses engagements.

Certes, le reste à charge demeure une une problématique majeure pour qui veut faire en sorte que les ménages modestes puissent utiliser ce dispositif. Mais j’aimerais qu’on n’oublie pas, dans nos discussions, les dispositifs adoptés par les collectivités territoriales – je pense notamment aux sociétés de tiers investissement qui permettent à certaines collectivités d’accompagner les ménages pour le financement de ce reste à charge.

Mme Émilie Bonnivard. Par cet article, vous modifiez profondément le crédit d’impôt pour la transition écologique. Vous transformez ce crédit en prime forfaitaire pour les ménages les plus modestes, ce qui peut être plutôt positif. Vous maintenez ledit dispositif pour les ménages des classes moyennes, en excluant toutefois certaines dépenses éligibles, dont les chaudières à gaz à très haute performance – on commence ici à avoir du mal à comprendre. Enfin, vous supprimez, dès 2020, le dispositif de transition énergétique pour les ménages les plus aisés, sachant que, à partir de 27 000 euros annuels pour un célibataire, on est considéré comme tel.

Quel est l’objet de cet article ? Est-ce de stabiliser et de renforcer les mesures permettant d’accélérer la transition écologique, sachant que l’habitat est l’un des premiers secteurs émetteurs de gaz à effet de serre et de particules ? Ou s’agit-il de raboter une dépense fiscale et, encore une fois, d’opposer les Français entre eux, en les divisant entre les moins aisés et les plus aisés, alors que l’objectif de transition écologique doit, par essence, pour être atteint, être poursuivi par chacun dans un cadre collectif ? Or cet effort collectif ne dépend pas des ressources des uns et des autres. En excluant ces ménages du CITE en 2020, vous excluez les ménages qui ont réalisé ces dernières années plus de 50 % des travaux de réhabilitation énergétique des logements ; vous supprimez cette incitation comportementale à la rénovation.

 

Si la transformation en prime est une bonne chose pour les plus modestes, elle ne suffira absolument pas, à elle seule, à déclencher massivement ces travaux de leur part. En effet, un ménage modeste, qui voudrait réaliser par exemple 3 000 euros de travaux, devra continuer à prendre 2 000 euros à sa charge, au delà des 1 000 euros couverts par la prime. Vous vous privez donc, avec cette transformation, de l’effet levier qui doit rester massif et uniforme pour une dépense fiscale, s’il s’agit bien d’atteindre l’objectif de 500 000 logements rénovés.

En outre, vous complexifiez le dispositif, en définissant trois catégories de Français. Vous rendez certaines dépenses éligibles pour certains – comme l’acquisition de chaudières à gaz à très haute performance mais non pour d’autres, puisque les classes moyennes sont exclues. On peine à comprendre la lisibilité d’un dispositif qui reste très complexe et qui va freiner la rénovation énergétique, même si la transformation en prime est positive.

M. Bruno Duvergé. La rénovation énergétique doit s’adresser plus particulièrement à ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire à ceux qui ont le moins de ressources ; je pense particulièrement aux propriétaires pauvres. Les dispositifs étaient jusqu’aujourd’hui plutôt complexes et peu efficaces, même si certaines collectivités essayaient de rassembler tous les dispositifs pour permettre à chacun d’y accéder.

La complexité des systèmes faisait que peu de gens utilisaient ces dispositifs. Surtout, ce qui était difficile jusqu’à maintenant, c’était de faire l’avance de trésorerie, puisque le CITE était remboursé ultérieurement. Le fait de le transformer en prime résout ce problème. Le confier à l’ANAH résout aussi le problème de la complexité, puisque l’agence gérera à la fois cette prime unifiée et ses propres subventions.

J’espère qu’on pourra aider ces propriétaires pauvres à rénover leur logement, en leur rendant ainsi le meilleur des services, ainsi que le meilleur des services à la nature.

Mme Christine Pires Beaune. La transformation de ce crédit d’impôt en prime est une excellente nouvelle. Il est parfois compliqué de faire l’avance de quelques centaines, sinon de plusieurs milliers d’euros. L’avance permettra aux ménages d’avoir un meilleur accès au dispositif. L’exclusion du dernier quintile ne nous pose absolument pas de problème. Sous le précédent quinquennat et avec un autre rapporteur général – l’actuel doit s’en souvenir – nous avions déjà tenté de recentrer le crédit d’impôt sur les huit premiers déciles. Compte tenu de du coût croissant du CITE au cours des dernières années, cette réforme est bienvenue. Seul bémol, le gain budgétaire du dispositif proposé aurait dû être redistribué sur les deuxième à quatrième quintiles. Nous avons déposé des amendements en ce sens.

Mme Lise Magnier. Je partage le constat de Mme Bonnivard. La transformation en prime est une bonne chose. Mais, depuis 2017, tous les ans, on modifie le dispositif du CITE. Les propriétaires, les ménages en général et le monde du bâtiment n’arrivent plus à suivre ! Pourtant, tout le monde soutient l’objectif – la lutte contre la précarité énergétique par la rénovation énergétique de tous les logements français qui en ont besoin.

Quel est l’objectif de la majorité ? Il aurait probablement été plus judicieux de réformer le CITE en profondeur, plutôt que de procéder par petites touches, comme c’est le cas depuis 2017. Nous regrettons ce mode opératoire.

 

S’agissant de l’exclusion des deux derniers déciles, dispose-t-on de la répartition des propriétaires français en fonction des déciles ? On nous explique que les déciles 9 et 10 consomment 50 % du CITE. Mais peut-être est-ce tout simplement parce que les propriétaires de logements français appartiennent à ces déciles. Si c’est le cas, nous devons aussi les accompagner dans la rénovation énergétique de leur logement.

M. Charles de Courson. L’idée de cet article 4 est sympathique : il s’agit, par le biais d’une avance, d’améliorer la situation des familles les plus modestes. Mais nous sommes inquiets pour le « haut de gamme », qui concentrait le plus d’investissements. Ne court-on pas un risque ? Ne pourrait-on trouver une solution pour maintenir un avantage fiscal – peut-être réduit – pour les deux derniers déciles afin de continuer à les inciter à investir dans les économies d’énergie ?

Notre collègue l’a souligné, ces deux déciles concentrent presque la moitié des investissements – le rapporteur général pourra peut-être le confirmer. En termes d’efficacité énergétique, améliorer la situation des premiers déciles tout en dégradant celle des deux derniers ne risque-t-il pas de détériorer le solde d’économies d’énergie ?

M. Éric Coquerel. Nous avions fait cette proposition l’an dernier afin d’aider la majorité à tenir rapidement la promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Nous allons donc soutenir le nouveau dispositif. C’est une transformation qui n’est pas seulement sympathique, comme le disait Charles de Courson, mais aussi utile écologiquement.

Pour autant, les relations avec l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) ne sont pas toujours simples. Il faudrait traiter ce sujet sérieusement.

En outre, nous regrettons que les chaudières au gaz soient exclues du périmètre pour les ménages à revenus intermédiaires et que l’on ait profité de l’exclusion des deux derniers déciles pour baisser les crédits – qui passent de 900 millions d’euros en 2019 à 800 millions d’euros en 2020. Il aurait été préférable de redistribuer le solde…

M. Fabien Roussel. Nous sommes très loin du compte et des objectifs que nous devrions nous fixer. La rénovation des passoires thermiques devrait concerner 500 000 logements par an, mais les moyens affectés ne permettent pas d’atteindre l’objectif.

Vous diminuez les crédits, à 800 millions d’euros en 2020, contre 900 millions en 2018 et 1,6 milliard d’euros en 2017.

Vous estimez qu’il s’agit d’une simplification du dispositif ; nous y voyons plutôt une complexification. Tous ceux qui ont été confrontés à l’ANAH savent que c’est une usine à gaz ! Dans nos permanences, nous recevons tous des citoyens aux prises avec leurs dossiers ANAH.

Vous prévoyez d’exclure du dispositif les ménages « les plus aisés » – ceux dont les revenus dépassent 27 000 euros. Nous n’avons pas la même conception des ménages aisés !

Nous avions déposé des amendements pour augmenter les crédits affectés au CITE, mais ils ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40. Ceux qui se battent pour le climat apprécieront… Nous le rappellerons en séance.

 

M. Julien Aubert. En tant que rapporteur spécial sur les crédits de l’énergie, je suis attentif à la transformation du CITE. C’est une bonne idée, mais il va falloir choisir entre la logique budgétaire – faire des économies –, la logique sociale – donner du pouvoir d’achat aux ménages les plus pauvres – et la logique écologique. À force de vouloir courir trop de lièvres à la fois, on n’en attrape aucun et l’on crée un produit hybride et chimérique.

La transition écologique est un processus qualitatif, qui coûte cher. Elle ne peut passer uniquement par les ménages les plus modestes, car les citoyens plus aisés sont aussi ceux qui ont les moyens d’investir dans ce processus qualitatif – à petits logements, petites dépenses et, à gros logements, grosses dépenses, donc gros impact.

En outre, mettre dans le même sac le début du neuvième décile et la fin du dixième n’a pas de sens. Cela revient à traiter de la même façon des concitoyens qui ont à peu près nos revenus et le propriétaire de Vuitton !

En ne choisissant pas entre logiques budgétaire, sociale et écologique, la prime devient incompréhensible et incroyablement complexe – il faut croiser les niveaux de revenus et les différents types de travaux. Si l’on voulait faire en sorte que personne ne la demande, on ne s’y prendrait pas autrement…

Enfin, l’insécurité juridique pénalise la politique de transition écologique : les règles changeant tous les ans, nos concitoyens n’ont pas le temps de s’y adapter. Il serait préférable de débattre des principes. Séparons politique sociale et politique de transition écologique, puis mettons-nous d’accord sur des règles lisibles et stables !

M. Jean-Louis Bricout. Nous avions proposé des amendements afin de moduler le CITE en fonction de la situation climatique des territoires. Ils ont été refusés. Pourtant, la réalité du climat n’est pas tout à fait la même au nord qu’au sud – d’où l’existence d’une carte avec coefficients climatiques.

Dans le même objectif, en deuxième partie du projet de loi de finances, je proposerai une modulation du chèque énergie en fonction des coefficients climatiques – on les retrouve dans les réglementations thermiques (RT) 2005 et 2012. Cela permettrait de réintroduire un peu de justice entre le nord et le sud, sans pénaliser le sud – le dispositif s’appliquerait uniquement sur les coefficients supérieurs à 1.

M. le président Éric Woerth. Ces amendements ont été refusés pour les raisons précédemment évoquées, le projet de loi faisant un lien entre prime et CITE.

M. Laurent Saint-Martin. C’est pour des raisons de justice fiscale, mais aussi d’efficacité dans la lutte contre les passoires thermiques, que nous recentrons le CITE sur les ménages modestes et le transformons en prime. Ce débat est symptomatique de notre difficulté à aborder une politique publique dans sa globalité : nous prenons pour seul angle le budget de l’État. Certes, on constate une baisse des crédits de l’État, mais c’est une politique publique qui engage d’autres acteurs – publics, parapublics et privés. Les fonds investis dans la rénovation énergétique des bâtiments sont globalement en hausse ; c’est ce qui compte.

Il s’agit donc d’une transformation de méthode et, globalement, les moyens sont aussi en hausse. La commission des finances devrait se pencher sur le meilleur moyen de résoudre cette difficulté à terme : nos débats lors des projets de loi de finances ne doivent pas se cantonner aux seuls crédits budgétaires, au risque de devenir binaires – en met-on plus ou moins dans une politique ? – et d’oublier les autres acteurs.

M. le président Éric Woerth. C’est tout le paradoxe de la fiscalité énergétique. Elle se veut incitative ; ce n’est donc pas une fiscalité de rendement. L’incitation intervient par le biais d’une multitude de dispositifs. Mais elle porte en elle ses propres contradictions : pourquoi réserver le CITE aux propriétaires et aux résidences principales, alors que les résidences secondaires sont aussi des passoires énergétiques – même si elles sont moins occupées ? Que se passe-t-il si un propriétaire n’a pas envie de faire les travaux et que le locataire décide de les faire ? C’est pour des raisons budgétaires qu’ils ne sont pas éligibles. La contradiction est donc totale… En outre, comment trancher entre effets d’aubaine et incitation ?

J’ai déposé un amendement, recevable au titre de l’article 40 car il supprime le lien entre la prime et le crédit d’impôt, qui réintègre les neuvième et dixième déciles dans le dispositif. On ne parle pas de super-riches ; arrêtons les caricatures ! On entre dans le neuvième décile à 28 000 euros de revenus annuels pour un célibataire et 55 000 pour un couple avec deux enfants. Certes, ce sont des revenus plus élevés que la moyenne, mais ils permettent tout juste à ces personnes de faire quelques travaux dans leur logement s’ils en sont propriétaires. Bien sûr, accompagner de tels travaux constitue une dépense fiscale. Mais quel est l’objectif ? Souhaitons-nous une baisse du nombre de passoires énergétiques ou une baisse de la dépense fiscale ? Le paradoxe n’est pas résolu et l’exclusion des neuvième et dixième déciles le rend encore plus criant…

La commission examine les amendements identiques I-CF907 de Mme MarieChristine Dalloz et I-CF922 de M. Vincent Rolland.

Mme Marie-Christine Dalloz. La transition écologique n’est pas que de la communication. Monsieur Saint-Martin, vous nous demandez d’arrêter de raisonner uniquement par rapport au budget de l’État. Mais les recettes fiscales liées à la transition énergétique ne sont-elles pas absorbées par ce même budget ? Le dispositif que vous proposez est opaque. Les deux derniers déciles compris, le dispositif coûtait 950 millions d’euros. Il y a 450 millions dans la nouvelle prime ; il manque donc 400 millions. C’est pourquoi l’amendement I-CF916 vise à supprimer l’article 4.

M. Vincent Rolland. L’amendement I-CF922 est identique. La transition énergétique n’est pas l’affaire des seuls ménages modestes. Tous sont concernés. Il est donc paradoxal de restreindre le dispositif. Cela signifie-t-il que le CO2 émis par certains est bon quand celui des autres est mauvais ?

Suivant lavis du rapporteur, la commission rejette les amendements I-CF907 et ICF922.

Elle en vient à lamendement I-CF910 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Prolongeons le dispositif actuel du CITE jusqu’en 2021. Cela permettra aux ménages des neuvième et dixième déciles de concrétiser et faire aboutir leurs projets.

Suivant lavis du rapporteur, la commission rejette lamendement I-CF910.

Elle passe à la discussion commune des amendements I-CF1505 de la commission du développement durable, I-CF1205 de Mme Christine Pires Beaune, des amendements identiques I-CF142 de M. Fabrice Brun, I-CF280 de Mme Véronique Louwagie, I-CF925 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF933 de M. Éric Pauget, ainsi que des amendements ICF695 de Mme Frédérique Lardet, I-CF824 de Mme Marie-Noëlle Battistel et I-CF435 de M. Vincent Descoeur.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. L’amendement I-CF1505 vise à maintenir un dispositif incitatif afin de permettre aux ménages appartenant aux neuvième et dixième déciles de changer de chaudière pour une chaudière gaz à très haute performance.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement I-CF1205 a le même objectif : maintenir le bénéfice du CITE pour ces chaudières car elles coûtent encore relativement cher. De plus, pour des raisons techniques et financières, certains ménages ne peuvent pas passer tout de suite à des équipements qui fonctionnent aux énergies renouvelables (ENR).

M. Fabrice Brun. L’amendement I-CF142 est un des rares amendements que nous avons déposés sur le CITE qui a échappé au couperet de l’article 40 ! Les chaudières à gaz à très haute performance énergétique n’échappent pas à votre coup de rabot pour les ménages intermédiaires – sont concernés les Français dont les revenus dépassent 28 000 euros pour une personne vivant seule ! L’amendement propose une phase transitoire pour ces publics exposés à la précarité énergétique.

Mme Véronique Louwagie. Je profite de la défense de l’amendement I-CF280 pour rappeler la question posée par ma collègue Marie-Christine Dalloz sur la justification des 950 millions, qui représente le dispositif avec les deux derniers déciles. Monsieur le rapporteur général, vous avez expliqué comment seraient utilisés 450 millions d’euros, mais qu’en est-il du delta ?

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement I-CF925 vise à maintenir les chaudières à gaz à très haute performance énergétique dans le champ du CITE pour éviter à certains ménages intermédiaires de se retrouver en situation de précarité énergétique.

M. Éric Pauget. L’amendement I-CF933 vise à revenir sur l’exclusion brutale de ces chaudières du périmètre du CITE. C’est un non-sens écologique, mais aussi économique : le pouvoir d’achat des ménages, tout comme les entreprises de cette filière, vont être pénalisés.

Mme Frédérique Lardet. L’amendement I-CF695 propose d’aménager une transition pour les ménages à revenus intermédiaires. Leur revenu fiscal de référence est compris entre 18 960 euros et 27 706 euros pour une personne seule, hors Île-de-France. Or le coût d’installation d’une chaudière ENR peut varier de 12 000 à 18 000 euros, soit presque un an de salaire…

M. Jean-Louis Bricout. Nous ne sommes pas prêts à exclure du bénéfice du CITE pour le remplacement de ces chaudières. L’amendement I-CF824 propose de les réintégrer – en excluant les chaudières au fioul.

M. Damien Abad. Comme ceux de mes collègues, l’amendement I-CF435 concerne les chaudières à gaz. Il s’agit d’une disposition anti-classe moyenne et d’un non-sens économique et écologique.

M. Joël Giraud, rapporteur général. En préalable, je réponds à la question de Véronique Louwagie : il y a bien 350 millions d’euros pour la prorogation du CITE et 450 millions pour la prime. Le delta n’est pas celui que vous avancez.

J’émettrai un avis défavorable à tous les amendements car l’exclusion des chaudières au gaz à haute performance énergétique répond à une double logique d’efficience de la dépense publique et de réduction du recours aux énergies fossiles. L’objectif n’est pas de punir, mais d’encourager les ménages à revenus intermédiaires à recourir à la chaleur renouvelable, c’est-à-dire à utiliser des moyens plus verts et plus efficients en termes de rénovation énergétique.

Ces moyens étant plus coûteux, dans un objectif de justice sociale, les chaudières au gaz à très haute performance énergétique sont éligibles à la nouvelle prime pour les ménages modestes. Ce choix me semble équitable.

La commission rejette les amendements I-CF1505, I-CF1205, I-CF142, I-CF280, ICF925, I-CF933, I-CF695, I-CF824 et I-CF435.

Elle passe à lamendement I-CF1508 de la commission du développement durable.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. J’ai bien compris les arguments du rapporteur général. Mais je vous propose de maintenir un dispositif incitatif au changement de chaudière pour les chaudières au gaz à très haute performance, pour les ménages appartenant aux déciles 5 à 8.

Suivant lavis du rapporteur, la commission rejette lamendement I-CF1508.

Elle examine ensuite lamendement I-CF1507 de la commission du développement durable.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Pour les pompes à chaleur, il s’agit, par souci de clarification, de supprimer les mots « dont la finalité essentielle est la production d’eau chaude sanitaire ».

Joël Giraud, rapporteur général. Il semblerait qu’une coquille se soit glissée dans les intitulés des pompes à chaleur dans les deux tableaux des alinéas 47 et 51. Il est en effet indiqué que seules les pompes à chaleur dont la finalité essentielle est la production d’eau chaude sanitaire sont éligibles au CITE, alors que l’article 200 quater mentionne aussi les pompes à chaleur dont la finalité essentielle est la production de chaleur.

Malgré tout, votre amendement mérite d’être analysé pour s’assurer qu’il n’élargit pas le périmètre des dépenses éligibles. Je vous propose donc de le retirer le temps de l’expertiser, puis de le redéposer pour la séance.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Je vous fais confiance, mais le délai de dépôt des amendements pour la séance publique est fixé à demain. Espérons que nous arriverons à clarifier la situation.

Lamendement I-CF1507 est retiré.

Lamendement I-CF1509 est également retiré.

La commission passe à lamendement I-CF1506 de la commission du développement durable.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Il s’agit d’inclure les appareils qui fonctionnent à la biomasse dans le dispositif de soutien. Les ménages pourront être orientés vers des appareils labellisés Flamme Verte 7*, dont le niveau de performances est meilleur que la moyenne, en termes tant d’efficacité énergétique que de qualité de l’air.

Joël Giraud, rapporteur général. Le dispositif prévu par l’article semble différer de ce qui a été présenté à la filière lors des négociations en amont de l’examen du projet de loi de finance. Il s’agit sans doute d’une erreur dans la rédaction de l’article. Nous devons vérifier ce point. Il serait donc pertinent d’attendre la séance pour nous assurer qu’il ne s’agit pas d’un élargissement non prévu des dépenses éligibles au CITE.

Lamendement I-CF1506 est retiré.

La commission en vient à lamendement I-CF1096 de M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Il s’agit de l’amendement que j’ai déjà défendu, visant à étendre le bénéfice du CITE aux neuvième et dixième déciles.

Suivant lavis du rapporteur, la commission rejette lamendement I-CF1096.

Elle passe à lamendement I-CF1512 de la commission du développement durable qui fait lobjet des sous-amendements I-CF1576, I-CF1577, I-CF1578, I-CF1579 et I-CF1580 de M. Matthieu Orphelin.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de bon sens, en cas de rénovation globale, qui retiendra, je l’espère, l’attention du rapporteur général.

M. Matthieu Orphelin. Mes sous-amendements constituent différentes variantes de la définition des rénovations performantes et des seuils afférents. Il faut conserver un signal fort pour les déciles 9 et 10. Je les ai déposés pour que la notion de rénovation performante reste au cœur de nos débats, malgré les difficultés liées à l’article 40 et aux autres raffinements de l’examen du projet de loi de finances, qui font que le sujet n’est pas abordé de façon très constructive. Mais nous en débattrons à nouveau en séance.

M. le président Éric Woerth. Même s’ils sont plus précis, l’amendement et les sous-amendements sont similaires au mien.

Joël Giraud, rapporteur général. Pour les raisons déjà évoquées, mon avis est défavorable, tant sur les sous-amendements que sur l’amendement.

La commission rejette successivement tous les sous-amendements, puis elle rejette lamendement I-CF1512.

Elle examine ensuite lamendement I-CF624 de M. Jérôme Nury.

M. Damien Abad. L’amendement vise l’alinéa 77 qui prévoit une amende de 50 % de l’avantage fiscal indûment obtenu pour les contribuables ayant bénéficié du crédit d’impôt et de la prime en raison d’une fraude. Nous souhaitons la porter à 100 %. En effet, une telle fraude devrait entraîner le remboursement total de l’avantage fiscal reçu. En outre, monsieur le rapporteur général, dans un autre article, vous allez mettre en place un « big brother ». Autant qu’il soit utile !

Joël Giraud, rapporteur général. J’ai analysé attentivement votre amendement car, tel qu’il est présenté, on ne peut qu’être choqué. J’ai vérifié : les sanctions prononcées viennent s’ajouter au reversement intégral des aides indûment perçues. Les contribuables qui auraient bénéficié indûment de la prime devront procéder au remboursement de celle-ci et se verront appliquer, en supplément, une sanction d’un montant maximum égal à la moitié de la prime perçue.

Lamendement I-CF624 est retiré.

La commission passe à la discussion commune de lamendement I-CF1510 de la commission du développement durable, qui fait lobjet du sous-amendement I-CF1581 de M. Matthieu Orphelin, et de lamendement I-CF221 de Mme Véronique Louwagie.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. En cohérence avec la volonté de réduire au maximum le reste à charge pour les ménages modestes bénéficiant des aides à la rénovation, l’amendement I-CF1510 vise à garantir que leur niveau de soutien ne diminuera pas avec la réforme du CITE.

M. Matthieu Orphelin. Par une voie détournée, le sous-amendement vise à étendre aux propriétaires bailleurs le crédit d’impôt pour les déciles 5 à 8, et la prime pour les déciles 1 à 4. La moitié des ménages qui vivent dans des passoires énergétiques sont des locataires. Il faut donc aider les propriétaires bailleurs, sous condition de ressources, à faire des travaux. En séance, il serait bon d’obtenir un engagement du Gouvernement pour que les dispositifs incitatifs soient ouverts aux propriétaires bailleurs en 2020 ou, a minima, en 2021.

Mme Véronique Louwagie. L’amendement I-CF221 est similaire. Demain, en l’état actuel de sa rédaction, le dispositif pourrait être moins favorable aux ménages modestes qui, aujourd’hui, peuvent cumuler le CITE avec des aides de l’ANAH. Nous proposons de maintenir ce cumul.

Joël Giraud, rapporteur général. Concernant le sous-amendement, les propriétaires bailleurs sont exclus des bénéficiaires du CITE depuis le 1er janvier 2014. Il n’y a donc aucune raison d’élargir à nouveau le dispositif en 2020, d’autant qu’il s’agira de sa dernière année d’existence.

Je suis également défavorable aux amendements. Sur la forme, ils posent problème puisqu’ils proposent de tenir compte du cumul entre les aides de l’ANAH dans leur version de 2019 et le CITE dans sa version 2020 qui bénéficie uniquement aux ménages intermédiaires et non aux ménages bénéficiaires des aides de l’ANAH.

Sur le fond, je comprends votre inquiétude : la nouvelle prime sera-t-elle plus intéressante – ou ne sera-t-elle pas moins favorable – que le cumul du CITE et de l’aide fusionnée de l’ANAH ? Je n’ai pas d’éléments précis à vous communiquer à ce stade puisque les barèmes applicables pour la prime sont toujours en cours d’élaboration.

Cependant, le montant de la budgétisation prévue pour financer cette nouvelle prime plaide pour constater le fait que le nouveau dispositif sera en tout état de cause plus favorable, puisque je l’évalue à environ 80 % de plus que le coût des deux dispositifs fusionnés. Je vous invite à retirer vos amendements et à poser la question en séance au Gouvernement.

M. le président Éric Woerth. On renvoie effectivement à un décret en la matière.

M. Matthieu Orphelin. J’entends qu’il s’agit de la dernière année du crédit d’impôt, mais je veux ouvrir le débat sur la prime. Il faut changer de rythme en matière de rénovation énergétique et traiter la question des locataires qui vivent dans des passoires énergétiques. Nous ne pouvons continuer à fermer les yeux et devons inciter les propriétaires bailleurs, sous condition de ressources, à faire des travaux.

Les amendements I-CF1510 et I-CF221 sont retirés, ainsi que le sous-amendement ICF1581.

M. Charles de Courson. Nos collègues soulèvent une question : comment s’articule cette aide entre propriétaires occupants et propriétaires bailleurs ? Nous avions modifié la loi pour permettre au bailleur de répercuter le coût des travaux sur le loyer. Sinon un propriétaire bailleur n’a aucun intérêt à faire des efforts en matière de rénovation énergétique. Vous me répondrez qu’il en tient malgré tout compte dans les charges locatives.

Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement envisage-t-il une mesure de coordination pour les propriétaires bailleurs ? 42 % du parc de logements leur appartient. Même en retirant les 15 % de logements à loyer modéré, il s’agit de près d’un tiers des logements…

La commission examine lamendement I-CF580 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Étant donné que l’on passe d’un crédit d’impôt à des primes, l’amendement vise à mettre en place des bilans trimestriels des attributions de primes afin d’éviter de se retrouver, comme dans mon département, avec une enveloppe 2019 d’aides de l’ANAH déjà consommée depuis quelques semaines.

Auparavant, le problème ne se posait pas car il s’agissait d’un crédit d’impôt. On pouvait donc constater une différence de plusieurs centaines de millions entre les montants votés en projet de loi de finances initial et ceux finalement consommés. Ainsi, le crédit d’impôt de l’an passé va dépasser les prévisions de 400 ou 500 millions d’euros…

Il faut mieux piloter le nombre de rénovations énergétiques par le biais de ces bilans trimestriels – nous avons eu un débat en commission du développement durable, certains d’entre nous souhaitant plutôt des bilans tous les quatre ou six mois. En outre, un tel pilotage nous permettrait, si besoin, d’augmenter les moyens de l’ANAH.

Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement entre dans des détails qui relèvent du décret d’application… Si vous voulez être rassuré, je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer en séance pour poser la question au ministre.

M. Matthieu Orphelin. Il me semble important que la politique de rénovation énergétique soit mieux pilotée en France.

La commission rejette lamendement I-CF580.

La commission est saisie de lamendement I-CF1511 de la commission du développement durable.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à ce que les décrets qui régissent la prime de transition énergétique soient pris avant la fin de l’année, afin que la mesure puisse être efficacement appliquée dès le début de 2021.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Pour permettre l’instauration de la nouvelle prime au 1er janvier 2020, les décrets nécessaires devront être pris avant le 31 décembre 2019. Votre amendement me paraît donc superfétatoire et je vous demande de le retirer.

Lamendement I-CF1511 est retiré.

La commission en vient à la discussion commune de lamendement I-CF1513 de la commission du développement durable et des amendements identiques I-CF217 de Mme Véronique Louwagie et I-CF222 de M. Vincent Descoeur.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. L’amendement I-CF1513 vise à évaluer, opération par opération, le niveau des aides accordées et à le mettre en regard du coût des travaux aidés et de l’effet, en particulier environnemental, afin d’orienter les aides du CITE et de la prime à la transition énergétique vers les opérations les plus pertinentes.

Mme Véronique Louwagie. L’amendement I-CF217 va dans le même sens que celui qui vient d’être présenté.

M. Damien Abad. La vérité, monsieur le rapporteur général, c’est qu’on est en train de bâtir une usine à gaz qui va affecter la transition écologique dans notre pays. C’est peut-être pour cela que les amendements demandant un rapport ne sont pas acceptés. Cela mérite une véritable évaluation. Autant l’instauration d’une prime pour les plus modestes est une bonne chose, comme l’a dit ma collègue Émilie Bonnivard, autant les mesures concernant les ménages que l’on dit aisés vont entraîner de grandes difficultés. On aura abaissé qualitativement les objectifs de la transition énergétique.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je crois que vous ne m’avez pas écouté attentivement. Je vous expliquais, au début de mon propos liminaire, que nous n’avons pas reçu le rapport qui devait nous être remis le 1er septembre 2019, en vertu de la loi de finances initiale pour 2018. Je demande instamment qu’il nous soit adressé. D’ici là, ce n’est pas la peine de demander à nouveau un rapport. Il faut exiger du Gouvernement, en séance, qu’il nous apporte les éléments qui nous ont été promis. Je serai plus que vigilant à ce sujet.

M. le président Éric Woerth. Ce n’est d’ailleurs pas le seul rapport qui manque.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1513 et I-CF217 ainsi que I-CF222.

Elle examine les amendements I-CF451, I-CF633 et ICF636 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. L’amendement I-CF451 demande un rapport relatif à l’instauration d’une prime bonifiée pour favoriser les travaux de rénovation complète et performante.

Les amendements I-CF633 et I-CF636 demandent un rapport sur un autre point important : le reste à charge zéro.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme je le disais précédemment, nous sommes dans l’attente d’un rapport du Gouvernement.

La commission rejette successivement les amendements I-CF451, I-CF633 et ICF636.

Elle se saisit de lamendement I-CF1514 de la commission du développement durable.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. Cet amendement demande un rapport sur l’opportunité d’élargir la prime de transition énergétique aux propriétaires bailleurs. Cela étant, j’ai entendu les arguments du rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est un sujet un peu particulier, qui renvoie à ce que disait tout à l’heure Charles de Courson. Compte tenu des amendements qui ont été déposés, j’ai demandé qu’une réflexion particulière soit engagée sur la thématique des propriétaires bailleurs. Le Gouvernement devra nous répondre dans l’hémicycle à ce sujet. Pour permettre ce débat, je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer en vue de la séance publique, afin que le Gouvernement nous entende : je sais qu’il réfléchit à ce sujet que vous avez, les uns et les autres, opportunément soulevé.

M. Matthieu Orphelin. J’étais à l’initiative de cet amendement, qui a été adopté en commission du développement durable. Si la commission des finances le votait, elle enverrait un signal sur ce sujet important. Dans le cas contraire, on serait porté à penser que tout le travail qu’on fait ne sert pas à grand-chose. S’il ne faut venir qu’en séance, on peut s’économiser un certain nombre de travaux.

M. Jean-Louis Bricout. Il a raison !

M. Matthieu Orphelin. Nous examinons là un sujet essentiel – les propriétaires bailleurs – qui est de nature à nous rassembler.

M. Charles de Courson. Je rappelais tout à l’heure que les propriétaires bailleurs représentent 42 % du parc de logements, dont il faut déduire les 15 % relevant du secteur HLM, lequel fait l’objet d’une véritable politique ad hoc. Puisque vous avez semblé manifester votre accord, monsieur le rapporteur général, ne vaudrait-il pas mieux adopter l’amendement de la commission du développement durable, ce qui permettrait au Gouvernement de s’exprimer ?

M. le président Éric Woerth. Si on privilégie l’incitation ou la dépense fiscale, il faut toujours considérer que la dimension fiscale et budgétaire passe au second plan par rapport à l’objectif visé. On voit bien qu’il faut accorder aux propriétaires bailleurs le bénéfice du dispositif. Soit on veut lutter contre les passoires énergétiques, et il faut s’engager sans réserve, soit on ne le souhaite pas, ou on choisit l’entre-deux, ce qui revient à dépenser peu et à obtenir très peu de résultats. Mieux vaudrait, dans ce dernier cas, ne pas utiliser cet outil.

M. François Jolivet. Les propriétaires bailleurs peuvent employer une technique qui leur procure un avantage direct : le déficit foncier. À l’avenir, ils pourront donc soit recourir à cet outil, soit bénéficier de la prime. L’Agence nationale de l’habitat ne finance plus, depuis 2015, les propriétaires bailleurs. En effet, il était observé que, dans le cadre des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH) successives, tous les quinze ans, les mêmes propriétaires obtenaient des subventions pour réhabiliter leur logement. Par ailleurs, l’Agence nationale de l’habitat, dont on parle beaucoup et que certains de nos collègues jugent très mauvaise, a pu démontrer dans des rapports antérieurs que des propriétaires bailleurs qu’elle a aidés étaient devenus des marchands de sommeil. Je comprends que l’on souhaite élargir le champ des bénéficiaires de la prime de transition énergétique mais – vous le savez mieux que quiconque, monsieur le président – cela a toujours un prix, et, si on doit accorder la prime aux propriétaires bailleurs, il faudra aussi leur retirer la possibilité de recourir aux déficits fonciers. Tout va ensemble. Quand on calcule l’équilibre de son opération, on doit constituer une provision pour grosses réparations, que l’on utilise pour entretenir son logement. Si on extrapole, cela signifierait que tout propriétaire, du décile 1 au décile 10, aurait besoin d’une aide de l’État pour entretenir son logement, puisqu’on considère qu’il n’a pas à mettre d’argent de côté pour ce faire.

M. le président Éric Woerth. On ne parle pas d’entretien de logement mais de rénovation énergétique.

M. François Jolivet. Lorsque les organismes HLM louent un logement, ils doivent vérifier le taux d’effort, lequel ne doit pas excéder 30 %, charges comprises, du revenu fiscal de référence du foyer. Les propriétaires privés devraient sans doute se voir appliquer la même règle, actuellement fixée par un décret pour les propriétaires bailleurs HLM, et vérifier le taux d’effort de leurs locataires. Or, je vous rappelle que le juge peut, dans ce seul cas, adresser une injonction en modification des loyers et des charges à un bailleur HLM qui aurait loué à quelqu’un dont le taux d’effort excède 30 %. Le marché, dont certains font l’apologie, pourrait résoudre cette difficulté, parce que les logements qui ne seraient pas économiquement performants ne pourraient être loués tant que le propriétaire n’a pas effectué les travaux.

M. le président Éric Woerth. On ne peut pas exclure une grande partie de la population au seul motif que des gens font un usage excessif ou abusif du dispositif.

M. Charles de Courson. Je voudrais rappeler à notre collègue que le déficit foncier n’est imputable sur les autres revenus que dans la limite de 10 700 euros ; on ne peut donc pas dire qu’il pallie l’absence de politique en la matière. Notre rapporteur général, à l’instar de plusieurs collègues, constate, avec beaucoup de sagesse, un manque de coordination entre la politique menée envers les propriétaires occupants et celle à destination des propriétaires bailleurs. Une exception doit être faite pour le parc HLM, qui fait l’objet d’une politique d’ampleur – dans ma circonscription, par exemple, de gros efforts ont été entrepris, aidés par l’État. On a besoin des bailleurs privés pour la transition écologique. Ce n’est pas le déficit foncier qui peut motiver la réalisation d’investissements énergétiques.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le débat a un intérêt : faire évoluer les opinions. J’ai écouté vos arguments ; vous souhaitez faire pression pour qu’on obtienne une véritable réponse. Je change mon avis pour m’en remettre à la sagesse de la commission.

La commission adopte lamendement I-CF1514.

La commission en vient à la discussion commune des amendements I-CF912 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF429 de Mme Patricia Lemoine.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement est inspiré par la même philosophie que le précédent, à une nuance près. Je propose que, six mois après la publication des décrets instaurant la prime de transition énergétique, le Gouvernement remette un rapport sur l’effet de cette mesure sur les finances publiques. Monsieur le rapporteur général, vous ne pouvez pas vous abriter derrière le même argument, à savoir le fait que vous attendez un rapport, puisqu’il s’agit d’une mesure à venir. Six mois après la promulgation des décrets, il conviendrait d’avoir des précisions sur le calcul de la prime et le détail des tranches d’imposition concernées. Cela pourrait être un outil intéressant pour piloter le dispositif issu du CITE.

Mme Patricia Lemoine. Mon amendement vise à demander, dans le même esprit que ce qui vient d’être dit, la remise d’un rapport, au plus tard le 1er septembre 2022, évaluant le coût du crédit dans sa version actuelle et celui de la prime qui sera mise en place, et établissant des éléments de comparaison.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je le disais tout à l’heure, je voudrais vraiment que le Gouvernement se concentre sur le rapport qui nous a été promis pour le 1er septembre 2019. Je comprends votre volonté de disposer d’un bilan mais, pour l’heure, concentrons-nous sur l’obtention de ce rapport et les raisons du retard de sa remise, pour lequel je n’ai obtenu aucune explication. Je demande le retrait de tous les amendements demandant des rapports complémentaires ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. Si on accumule les demandes de rapports alors qu’ils ne sont pas remis, on se fera plaisir mais ce ne sera pas efficace.

Mme Marie-Christine Dalloz. Mon amendement n’a pas le même objet !

La commission rejette successivement les amendements I-CF912 et I-CF429.

Puis elle adopte larticle 4 modifié.

Après larticle 4

La commission examine lamendement I-CF1300 de M. Olivier Serva.

M. Saïd Ahamada. L’année dernière, nous avons créé pour certains territoires d’outre-mer les zones franches d’activité nouvelle génération, qui devaient bénéficier au secteur du tourisme, y compris aux activités de loisir et de nautisme. Il se trouve que l’administration fiscale, dans une interprétation stricte, a exclu du champ de la mesure la réparation et le carénage des bateaux. Cet amendement vise à corriger cette anomalie.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La réparation de navires ne relève pas, à strictement parler, du nautisme, entendu comme activité de tourisme, et ne paraît donc pas éligible aux abattements majorés appliqués dans les zones franches d’activité nouvelle génération. En tout état de cause, elle ne relève pas du champ d’application touristique arrêté l’an dernier. Votre amendement est habilement rédigé puisqu’il fait sortir le nautisme du champ touristique. Cependant, il risque, ce faisant, de couvrir un domaine un peu trop large. Je rappelle que les zones franches d’activité nouvelle génération ont moins d’un an d’existence et que les activités éligibles sont très larges. Le nautisme a été expressément inclus dans le champ des abattements majorés. Y inclure de nouvelles activités, après moins d’un an d’application, ne me paraît pas opportun. Il faut laisser un peu vivre un dispositif avant de l’évaluer et d’envisager des ajustements. Le Gouvernement doit évaluer ces zones franches d’ici à octobre 2020 ; nous disposerons de tous les éléments à cette date. Je vous invite à retirer votre amendement pour que nous puissions éventuellement avoir cette discussion en séance avec le ministre.

La commission rejette lamendement I-CF1300.

Elle passe à lamendement I-CF1403 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Va-t-on enfin en finir avec le dispositif Pinel ? C’est un peu la question que je me pose, à l’instar, semble-t-il, du rapporteur général, qui dénonce « les dérives d’une dépense fiscale coûteuse, mal – pour ne pas dire pas – pilotée, dont les contreparties associées à l’avantage fiscal ne font l’objet d’aucun contrôle. » J’entends lui donner satisfaction en lui permettant de voter cet amendement, auquel souscrirait sans doute la Cour des comptes, qui souligne également le « caractère inégalitaire » et « l’absence d’évaluation » du dispositif. Entre 2019 et 2035, la mesure a coûté 6,9 milliards à l’État, sans qu’on ait quelque assurance quant à ses répercussions sur le logement. En revanche, on a des certitudes quant aux cadeaux faits, une fois encore, aux plus aisés de nos contribuables, puisqu’en 2013, 45 % des ménages bénéficiaires se situaient dans la tranche d’imposition comprise entre 27 000 et 71 000 euros, et près du quart d’entre eux dans celle comprise entre 71 000 et 151 000 euros. Pour des raisons d’efficacité, d’économies budgétaires et de justice fiscale, je vous demande de supprimer le dispositif Pinel.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je voudrais d’abord remercier Éric Coquerel de la qualité de ses citations. (Sourires.) C’est une niche qui soulève en effet des interrogations – je ne peux pas dire le contraire puisque je l’ai écrit – eu égard aux contribuables concernés. Cela étant, je ne suis pas favorable à la disparition pure et simple de la réduction d’impôt Pinel, mais à un aménagement assez large de ce dispositif. C’est la raison pour laquelle je donnerai un avis favorable à certains amendements en deuxième partie – l’adoption de mesures en première partie pouvant avoir des effets négatifs sur les projets en cours. Je serai favorable à des amendements visant à recentrer la réduction d’impôt – je pense en particulier à l’amendement de la commission du développement durable sur le recentrage sur l’habitat collectif, qui me semble de bon aloi. Cela ne pourra se faire, j’y insiste, qu’en deuxième partie, pour ne pas déstabiliser le marché. Je suis donc défavorable à votre amendement, monsieur Coquerel.

Mme Christine Pires Beaune. Je ne voterai pas cet amendement, qui me semble un peu radical, bien que j’en approuve l’objectif. Cela fait des années que le logement est sous perfusion, pour quels résultats ? Il serait en effet souhaitable que des amendements, en seconde partie, visent à encadrer un peu mieux le dispositif Pinel, qui, je le rappelle, crée des inégalités territoriales. Je suis favorable à ce qu’on examine cette mesure de près. Si on devait le supprimer, qu’on le fasse de manière progressive, mais la question ne doit pas être taboue.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, au cours des vingt-cinq dernières années, on n’a fait que créer des dispositifs incitant les épargnants à investir dans le logement privé, afin d’augmenter le parc. On a en effet besoin d’un parc locatif privé. Ce ne sont pas les 15 % de HLM – en moyenne nationale – qui peuvent répondre aux besoins de nos concitoyens. Je suis un peu étonné de certains arguments contre la réduction d’impôt Pinel. Vous ne pouvez pas déplorer, mes chers collègues, que ce soient plutôt des gens aisés qui en bénéficient : cela va de soi, puisque ce sont eux qui ont de l’épargne. Je suis étonné que vous vous étonniez. Il faut savoir ce qu’on veut. Je pense, pour ma part, qu’il ne faut surtout pas voter cet amendement, mais qu’il faut s’assurer de l’efficacité de tous ces dispositifs. Des théoriciens vous expliquent que tout ce qu’on a voté depuis vingt-cinq ans n’a fait qu’accentuer la crise du logement, en augmentant le prix de l’immobilier. C’est un peu plus compliqué que cela, parce que les zones concernées entrent en ligne de compte, mais il convient d’étudier cela avant de proposer des amendements aussi brutaux.

 

M. Fabien Di Filippo. Je rejoins ce qui vient d’être dit. On peut remettre en cause tous les dispositifs dérogatoires, mais leur raison d’être est le poids de la fiscalité dans son ensemble. On peut remettre en question toutes ces niches, à condition de réviser complètement le système pour que la fiscalité soit moins lourde. Tant que ce n’est pas le cas, on ne peut pas aller dans ce sens.

Mme Émilie Cariou. Vous le savez, nous avons engagé une démarche d’évaluation, non seulement des politiques que l’on mène, mais aussi de toutes les dépenses fiscales existantes. Il faut conduire ce travail en profondeur, pas uniquement sur le dispositif Pinel, mais sur toutes les niches, toutes les dépenses fiscales. Il ne faut pas toucher aux dispositifs immobiliers avant d’avoir une évaluation approfondie. Lorsqu’on disposera des informations permettant de se faire une opinion, on pourra changer certains critères. Le rapport de Joël Giraud nous offre beaucoup d’informations, mais elles demeurent insuffisantes pour qu’on en tire immédiatement les conséquences dans les textes. Nous demandons aussi un retrait de ces amendements et appelons à entamer une démarche d’évaluation beaucoup plus approfondie.

M. Jean-Louis Bricout. Pour faire écho aux propos d’Émilie Cariou, la démarche d’évaluation est en effet nécessaire. Il faudra se pencher sur le volet territorial, parce que le dispositif Pinel est une catastrophe pour les zones non tendues, dans lesquelles plus personne n’investit. On a pourtant besoin d’investisseurs, ne serait-ce que pour l’économie de proximité. Des modifications à la marge sont sans doute nécessaires, dans certains domaines, mais il faut surtout avoir une vision territoriale.

M. Michel Castellani. Je suis d’accord avec tout ce que viennent de dire mes collègues. Le dispositif Pinel est sûrement source d’effets d’aubaine, qu’il convient sans doute de corriger, mais il est difficile d’envisager de faire cela « à la tronçonneuse » et de tout supprimer, s’agissant d’un domaine aussi important. Une évaluation est nécessaire, mais certainement pas la suppression brutale du dispositif.

La commission rejette lamendement I-CF1403.

Elle se saisit, en discussion commune, des amendements I-CF1534 de la commission du développement durable et I-CF693 de Mme Frédérique Lardet.

M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis. L’artificialisation des sols est un véritable fléau, qui touche nos campagnes, en particulier notre biodiversité. Par cohérence avec l’objectif de lutte contre ce phénomène, cet amendement vise à modifier les dispositifs d’aide à l’investissement locatif.

Mme Frédérique Lardet. On a en effet besoin de cohérence. On n’arrête pas de ressasser les mots de « zéro artificialisation nette », de « densification ». Cet amendement propose de mettre en œuvre ces principes.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, ce sont des amendements qui, pour éviter tout effet rétroactif, doivent être placés en seconde partie. Je donnerai, à ce stade de la discussion, un avis favorable à l’amendement I-CF1534.

Les amendements I-CF1534 et I-CF693 sont retirés.

Suivant lavis défavorable du rapporteur général, elle rejette lamendement ICF1090 de M. Joachim Son-Forget.

Elle examine ensuite lamendement I-CF638 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Dans la continuité des échanges que nous venons d’avoir, cet amendement vise à exclure de l’éligibilité au dispositif Pinel les constructions sur des zones non-urbanisées, afin de lutter contre l’artificialisation des sols. Je le retire et le redéposerai en seconde partie.

Lamendement I-CF638 est retiré.

La commission en vient à lamendement I-CF335 de M. Vincent Thiébaut.

M. Vincent Thiébaut. Cet amendement vise à créer une expérimentation portant sur un nouveau modèle économique, par l’aménagement de l’éco-prêt à taux zéro – PTZ – pour les rénovations énergétiques atteignant un niveau de performance « bâtiment basse consommation » ou assimilé. Il s’agit, en premier lieu, de répondre aux objectifs de la loi de transition énergétique du 17 août 2015 relatifs à la rénovation du parc bâti selon les normes « bâtiment basse consommation » ou assimilées. En second lieu, le plan national pour la rénovation énergétique, présenté en avril 2018, affirme la nécessité de soutenir le développement de rénovations dites « complètes et performantes ». Aussi cet amendement propose-t-il une expérimentation de deux ans pour favoriser les rénovations globales – sous la forme de bouquets de travaux –, tant pour les maisons individuelles que pour les logements collectifs.

M. le président Éric Woerth. Il me paraît intéressant que vous indiquiez dans l’exposé des motifs de l’amendement que vous avez travaillé avec une association.

M. Vincent Thiébaut. En effet, cet amendement a été élaboré avec l’association négaWatt.

M. le président Éric Woerth. Nous travaillons tous, j’imagine, avec des associations, des groupements. C’est une bonne chose de le dire : c’est une marque de transparence.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Vous entendez réintroduire, par cet amendement, la condition des « bouquets de travaux », qui a été supprimée par la précédente loi de finances. Vous comprendrez donc que je donne un avis défavorable.

La commission rejette lamendement I-CF335.

Elle se saisit de lamendement I-CF269 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Il s’agit d’étendre d’une année l’application du dispositif des zones de développement prioritaire (ZDP), dont la Corse bénéficie depuis le 1er janvier 2019. Je n’insiste pas sur l’intérêt de ce dispositif pour la Corse, ni sur l’attente qu’il suscite. Son efficacité est avérée. L’objectif est de faire bénéficier les entreprises créées au cours de l’année 2018 des mêmes conditions que celles qui sont nées en 2019.

M. Joël Giraud, rapporteur général. J’entends votre volonté de soutenir l’économie corse à la suite de toutes les dispositions qui ont été votées concernant l’ « île montagne », pour reprendre une expression qui m’est chère. Toutefois, je vous l’ai dit – puisque nous avons eu l’occasion d’évoquer ce sujet tous les deux – cela conduirait à un effet d’aubaine extrêmement important, dans la mesure où des entreprises déjà implantées bénéficieraient d’exonérations créées pour attirer de l’activité. C’est une limite qui me paraît difficile à franchir. Je vous demanderais donc de le retirer ; à défaut, mon avis serait défavorable.

M. Michel Castellani. Nous en avons en effet discuté. On va encore prétendre que les Corses réclament des avantages indus, mais ce n’est pas le cas ! Il faut tenir compte des réalités concrètes, monsieur le rapporteur général. Vous savez très bien que les entreprises corses sont confrontées à des conditions moins favorables que les sociétés équivalentes du continent. Il y a des surcoûts liés à l’insularité : les intrants sont plus chers, les stocks sont nécessairement plus élevés –, ce qui conduit à une inégalité objective des conditions de concurrence. Nous ne sommes pas quémandeurs, monsieur le rapporteur général, mais nous nous inscrivons dans une logique de développement gagnant-gagnant.

La commission rejette lamendement I-CF269.

Elle passe à lamendement I-CF49 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. Cet amendement vise à conforter les bassins d’emploi ruraux en difficulté. Il s’inspire d’une expérimentation instaurée par la dernière loi de finances, dans le cadre des zones franches urbaines, en faveur des quartiers en difficulté. Je voudrais que le même dispositif s’applique à des zones franches rurales et que des expérimentations similaires soient conduites dans des bassins d’emploi ruraux en difficulté. L’objet du présent amendement est d’instituer une expérimentation pour déterminer dans quelle mesure ce dispositif pourrait s’appliquer de manière complémentaire aux zones de revitalisation rurale (ZRR). Il s’agirait d’accorder des exonérations fiscales en cas de création d’emplois dans des bassins d’emploi ruraux en difficulté.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement a été présenté – et rejeté – l’année dernière. Je n’y suis pas favorable, pour les mêmes raisons que celles que j’ai exprimées alors, même si je suis aussi sensible que vous à la problématique des territoires ruraux, qu’ils soient alpins ou ardéchois. Il existe déjà un nombre de dispositifs considérable permettant de soutenir les zones rurales : les ZRR, les zones d’aides à finalité régionale (ZAFR), les bassins d’emploi à redynamiser (BER), les nouvelles ZDP pour la Corse. À cela s’ajoute une sérieuse difficulté. En effet, comme l’an dernier, vous renvoyez tout à un décret : les entreprises et les activités éligibles, les impôts concernés par les exonérations, les critères de qualification des nouvelles zones franches. Le dispositif s’expose ainsi à un risque d’incompétence négative, ces éléments devant figurer dans la loi, non pas dans un décret. Avis défavorable.

M. Fabrice Brun. J’entends vos arguments, monsieur le rapporteur général, mais nous avons tous nos marronniers – ou nos châtaigniers ; c’est un amendement qui reviendra. L’argument selon lequel d’autres dispositifs existent ne tient pas : les quartiers urbains sensibles bénéficient de dispositions très fortes, dans le cadre de la politique de la ville, par l’entremise, en particulier, de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), ce qui n’a pas empêché votre majorité d’expérimenter de nouvelles zones franches urbaines dans quatorze quartiers, si ma mémoire est bonne. Pourquoi ne pas les expérimenter aussi dans les zones rurales, dans des bassins d’emploi ruraux en difficulté ? L’expérimentation aurait aussi pour objet de définir la coordination avec les dispositifs existants.

 

Mme Émilie Cariou. Comme vous le savez, le Premier ministre a présenté un plan dédié à la ruralité, qui comporte un certain nombre de mesures, sur lesquelles Daniel Labaronne a travaillé. Ce dernier a estimé qu’il fallait revoir notamment le zonage en zone rurale. Une réflexion va s’ouvrir. Madame Louwagie avait aussi travaillé sur les ZRR et avait signalé plusieurs dysfonctionnements. Aujourd’hui, les zonages se superposent ; on a zoné presque toute la France. Il va falloir absolument retravailler sur la question du zonage, notamment en zone rurale – je suis d’accord avec vous, monsieur Brun. Des dispositifs d’exonération existent déjà : les ZRR. Il faut tout remettre à plat, voir ce qui est efficace et ce qui ne l’est pas. Entamons donc ce travail. La deuxième partie du projet de loi de finances comporte des dispositifs intéressants concernant la revitalisation des bourgs – nous en reparlerons.

M. Fabien Di Filippo. Monsieur le rapporteur général, j’ai du mal à comprendre votre point de vue. Je ferai trois brèves remarques. Premièrement, mon collègue Fabrice Brun est très sage en proposant simplement une expérimentation : mettons-la en œuvre au moins en un lieu donné. Deuxièmement, on sait aujourd’hui que la fracture territoriale s’aggrave. L’inégalité des chances, aujourd’hui, ne sépare plus seulement les villes et les banlieues, mais les villes et la périphérie : un enfant qui naît dans nos campagnes a 25 % de chances en moins qu’un enfant des quartiers de connaître une ascension sociale. Troisièmement, la première variable de développement dans tous les territoires, c’est l’emploi. Il faut donc, sans attendre, favoriser la création d’emplois, par tous les moyens, dans notre ruralité.

La commission rejette lamendement I-CF49.

Article 5 : Suppression de la taxe dhabitation sur les résidences principales et réforme du financement des collectivités territoriales

M. le président Éric Woerth. Puisque cela s’est révélé satisfaisant pour l’article 4, je vous propose de procéder à une petite discussion générale sur la réforme fiscale introduite par l’article 5, qui est long et très complexe. Je vous demanderai, encore une fois, de réduire la durée de vos interventions sur les amendements. Pour votre information – même si cela peut paraître un peu comptable – nous avons doublé notre vitesse d’examen ; nos discussions devraient encore durer vingt à vingt-cinq heures, ce qui nous ferait terminer dans la nuit de jeudi à vendredi.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je voudrais présenter les dispositions de l’article, pour que les choses soient très claires. En premier lieu, l’article 5 supprime la taxe d’habitation (TH) sur la résidence principale pour tous les contribuables. Pour 80 % des foyers, le dégrèvement sera de 100 % dès 2020 et, pour les 20 % restants, l’exonération sera progressive, pour atteindre 30 % en 2021 et 65 % en 2022. Je préfère clarifier les choses car la presse s’est parfois un peu trompée dans les dates. Donc, en 2023, plus aucun foyer ne paiera de TH sur la résidence principale. Je serai défavorable à l’ensemble des amendements qui visent à remettre en cause cette suppression. En effet, les valeurs locatives n’ayant pas été révisées depuis 1970, cet impôt a été jugé injuste pour 80 % des Français ; il ne peut pas être juste pour les 20 % restant. C’est une réforme qui entraîne la plus forte baisse d’impôts de ces dernières décennies, parce qu’elle va bénéficier à 24,4 millions de foyers qui gagneront, en moyenne, 723 euros. Par souci de justice fiscale, la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et les logements vacants, qu’il s’agisse de la taxe sur les logements vacants (TLV) obligatoire ou de la taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV) facultative, seront maintenues.

En deuxième lieu, l’article transfère à l’État, à partir de 2021, le produit de la TH sur les résidences principales et adopte un nouveau schéma de financement des collectivités territoriales, reposant sur plusieurs volets : le transfert de la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties aux communes ; l’instauration d’un mécanisme de coefficient correcteur destiné à neutraliser les écarts de compensation pour chaque commune ; l’affectation d’une fraction de TVA aux établissements publics de coopération intercommunale et aux départements ; enfin, l’adaptation des règles de lien et de plafonnement des taux pour remplacer la TH comme imposition pivot par la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB).

Je précise aussi que je donnerai un avis défavorable aux amendements qui ont pour objet de mettre un terme aux règles de lien entre les taux, ce qui risquerait de déséquilibrer la répartition de la charge fiscale, notamment au détriment des entreprises et des résidences secondaires. Il me paraît nécessaire que des garanties soient offertes à l’ensemble des contribuables, en particulier aux entreprises. C’est la raison pour laquelle je pense qu’il ne faut pas évoluer sur ce point.

Je serai également défavorable aux amendements qui visent à remettre en cause le schéma de compensation aux collectivités territoriales de la suppression de la TH. La nouvelle architecture est le fruit de plus d’un an de travaux et de préparation avec les associations d’élus. Elle va permettre, j’y insiste, une compensation intégrale pour les collectivités territoriales, par l’État, à l’euro près. Le taux de référence pour le calcul de la compensation doit être celui appliqué en 2017. Depuis la loi de finances pour 2018, il a toujours été annoncé aux collectivités territoriales que la compensation serait effectuée sur la base des taux appliqué en 2017. Les collectivités territoriales savaient qu’elles ne bénéficieraient pas d’une compensation au titre des hausses de taux ultérieures, qui sont actuellement supportées par les contribuables.

J’exprimerai toutefois un bémol, vous le savez, puisque je me suis exprimé à ce propos dans la presse. Le présent article prévoit le gel pour 2020 de la revalorisation forfaitaire des valeurs locatives pour l’établissement de la TH sur les résidences principales. Je suis favorable aux amendements qui reviennent partiellement sur ce gel en indexant de nouveau les valeurs locatives – je dis les choses très clairement –, non pas sur l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), mais sur l’indice des prix à la consommation (IPC) – actuellement de 0,9 % –, conformément à la philosophie d’origine de la mesure. Je tiens à ce qu’on conserve cette règle, et je proposerai donc un sous-amendement à un amendement de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, de façon à ce qu’on revienne à l’indice des prix à la consommation (IPC).

M. le président Éric Woerth. En ayant supprimé la taxe d’habitation – même si cela satisfait le contribuable, qui a toujours envie de payer moins d’impôts – vous avez épuisé l’ensemble des marges dont nous disposions pour réduire la fiscalité. C’est un choix que vous avez fait. On aurait pu utiliser ces marges à d’autres fins – c’est un débat que nous avons déjà eu et que je ne rouvrirai pas – et, surtout, on a plongé les collectivités territoriales dans un climat de confusion considérable. L’article 5 traduit cette complexité, qui est assez inouïe. Au fond, par l’affectation de 22 milliards de TVA aux EPCI et aux départements, on transfère au contribuable national le soin de financer les dépenses locales, comme cela se fait au travers des dotations. Honnêtement, je ne suis pas sûr qu’on y gagne en simplicité.

Il faut évidemment maintenir les règles de lien entre les taux, au risque d’aboutir à une très forte augmentation de la fiscalité locale sur les entreprises. Enfin, il conviendrait de ne pas geler les bases en 2020.

M. Jean-René Cazeneuve. Je remercie monsieur le rapporteur général pour son excellente présentation de l’article 5.

Comme il l’a indiqué, la suppression de la taxe d’habitation représentera un gain moyen de 723 euros par foyer. Quant à ceux qui s’opposent à cette mesure, j’aurais plaisir à savoir quel sera leur programme dans les prochaines années : rétabliront-ils la taxe d’habitation ?

Cet impôt présente plusieurs inconvénients : il est injuste géographiquement, il n’est pas lié au revenu et, dans les communes les plus pauvres, il est généralement à un taux des plus élevés avec un niveau de service qui n’est pas proportionnel.

Le principe retenu, décrit par le rapporteur général, permet à la fois de compenser les départements et les EPCI à l’euro près, avec une fiscalité nationale dynamique qu’est la TVA, dont le taux d’augmentation est plus ou moins similaire à ce que rapportait à ces collectivités territoriales la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Après la réforme, les maires conserveront la liberté de fixer les taux et les bases. Autrement dit, leur autonomie fiscale et financière sera identique.

Le Président de la République et la majorité ont pris l’engagement de compenser à l’euro près la suppression de la taxe d’habitation, engagement qui figure dans la réforme. La manière dont la dynamique se fera en 2020, qui est une année charnière, déterminera le niveau de compensation. Nous sommes attachés, ainsi que l’a précisé le rapporteur général, à une revalorisation des bases en 2020, comme c’est le cas chaque année, même si cela correspond à une augmentation de l’impôt pour certains contribuables. Mais il convient de prendre garde au niveau de la revalorisation. On peut être assez critique sur le taux de revalorisation des valeurs locatives tel qu’il a été appliqué, ne serait-ce que cette année puisqu’il est de 2,2 % tandis que la prévision d’inflation pour 2019 s’élève à 1,2 %. C’est donc un impôt supplémentaire sur les Français.

L’article 5 prévoit de modifier les règles de revalorisation des bases pour l’établissement de la taxe d’habitation sur les résidences principales. Mais cette mesure sera décalée d’une année pour éviter qu’elle ne se superpose à la suppression de la taxe d’habitation. Enfin, quand elles sont surcompensées de moins de 10 000 euros, 7 300 communes bénéficieront d’une ressource fiscale supplémentaire.

Mme Marie-Christine Dalloz. Alors que nous en sommes à la deuxième année d’application du pacte de Cahors, le Gouvernement décide seul, dans son coin, de ne pas revaloriser les bases d’imposition de 2020. C’est donc un vrai coup de couteau qui est donné au contrat puisque la revalorisation forfaitaire des bases est de droit depuis la loi de finances pour 2017.

Mme Véronique Louwagie. Tout à fait !

Mme Marie-Christine Dalloz. En 2020, cela représentera une perte de 250 millions d’euros pour l’ensemble du bloc des collectivités territoriales.

Le gel du taux de taxe d’habitation en 2020 à son niveau de 2019 et la poursuite du gel sur les résidences secondaires jusqu’en 2022 correspondent à une perte de 80 millions d’euros chaque année, soit 160 millions pour les deux prochaines années.

Vous oubliez de dire que ce gel aura un impact sur les taux additionnels de taxe spéciale d’équipement (TSE) et de gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations (GEMAPI). Vous occultez ces conséquences directes et préférez parler de compensation à l’euro près.

L’ensemble de ce dispositif représente une perte de 400 millions dès 2020 pour les collectivités territoriales. Il est donc faux de dire que la suppression de la taxe d’habitation est neutre pour elles.

La compensation due aux communes et aux EPCI est calculée sur les taux de taxe d’habitation de 2017, et les abattements au titre de 2019 avec les bases sur les résidences principales de 2019 non revalorisées en 2020. Où est la logique ? C’est complètement incohérent.

À compter de 2021, les communes percevront la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), soit 14,2 milliards d’euros, en lieu et place des 15 milliards perçus en 2019, soit une différence de 800 millions. Vous avez inventé un mécanisme de compensation avec des surcompensations et des sous-compensations : c’est une usine à gaz. À compter de 2021, en contrepartie de la perte de leur part de taxe foncière sur les propriétés bâties, les départements se verront affecter une part de TVA en lieu et place du seul impôt sur lequel ils avaient la main. Ce n’est plus de la simplification, mais une trahison vis-à-vis des collectivités territoriales. Celles-ci ne s’y sont pas trompées puisqu’elles n’ont pas approuvé l’engagement que vous leur demandiez.

Enfin, c’est une tuyauterie très complexe au moment où le Gouvernement veut renouer avec les territoires. Bon courage !

M. Jean-Paul Mattei. Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés considère que la suppression de la taxe d’habitation est une mesure d’équité, qui va dans le bon sens. L’outil utilisé qu’est le transfert du taux départemental de taxe foncière sur les propriétés bâties aux communes montre bien qu’on laisse une certaine liberté aux maires quant à la fixation des taux, ce qui est très important.

Je n’ai pas du tout la même vision que notre collègue Marie-Christine Dalloz en ce qui concerne la perte pour les collectivités territoriales, les chiffres qu’elle cite, qui paraissent assez théoriques et anxiogènes, ne correspondant pas nécessairement à la réalité.

Nous appelons de nos vœux une vraie réforme des bases, tout en comprenant que cela nécessite un peu de temps au vu des problèmes apparus lors de la dernière réforme des valeurs locatives des locaux professionnels et commerciaux. Il serait même souhaitable que soit engagée une vraie réforme de la fiscalité immobilière qui est le marqueur de l’aménagement du territoire.

 

 

Quant à la compensation pour les départements, comme la TVA est une ressource dynamique, elle va générer des ressources complémentaires. Je suis donc assez confiant sur cette réforme qui doit être accompagnée d’ajustements à la marge, notamment sur l’indexation des valeurs locatives. Je crois que les amendements qui seront proposés iront partiellement dans ce sens.

Je le répète, il faut redonner aux maires la liberté de fixer leur taux, ce qui leur permettra ainsi d’assumer leurs responsabilités.

Mme Christine Pires Beaune. Le groupe Socialistes et apparentés a toujours été opposé à la suppression de la taxe d’habitation. C’était une promesse du candidat Macron populiste et populaire.

Dix ans après, la suppression de la taxe professionnelle laisse encore des traces, puisque l’on parle toujours de sa compensation. Je fais le pari que ceux qui siégeront ici dans dix ans parleront de la compensation de la suppression de la taxe d’habitation.

M. le président Éric Woerth. Bien sûr !

Mme Christine Pires Beaune. Je rappellerai que le Premier ministre s’était engagé à ce que cette réforme fasse l’objet d’un texte spécifique. Mais cet engagement n’a pas été tenu puisque l’on se retrouve avec un article du projet de loi de finances de vingt-cinq pages et de plus de 500 alinéas.

L’engagement avait été pris également de nous fournir des simulations. Or, nous les attendons toujours. Les aurons-nous avant l’examen du projet de loi en séance publique ?

Il avait été prévu que la compensation se fasse à l’euro près. En 2018, la commune dont je suis conseillère municipale a augmenté ses taux. Mais croyez bien qu’on ne l’a pas fait par plaisir. On sait qu’on a pris un risque électoral, mais on avait besoin de ce produit supplémentaire. Bénéficierons-nous d’une compensation sur le produit supplémentaire lié à l’augmentation des taux ? Tel qu’il est rédigé, l’article 5 ne prévoit pas de compensation à l’euro près. Voilà encore une promesse non tenue.

Quant à la question de la revalorisation des bases, les taxes foncières sont, elles aussi, assises sur des bases qui sont obsolètes. Comptez-vous supprimer la taxe foncière l’année prochaine ? Non, vous poursuivrez la réforme des valeurs locatives qui a été lancée et qui sera achevée dans quelques années. Oui, les valeurs locatives sont obsolètes, oui il aurait fallu les corriger plutôt que de jeter le bébé avec l’eau du bain. Nous sommes favorables à un impôt citoyen qui lie les citoyens à la politique locale, car dans les communes où l’impôt local reposera sur 10 % ou 15 % seulement de la population, la situation deviendra insupportable. Certes, ce n’est pas le cas de ma commune qui compte 90 % de propriétaires, mais je rappelle que certaines communes ont jusqu’à 70 % de locataires.

Enfin, vous communiquez sur le montant moyen de taxe d’habitation rendu. Je rappelle juste ce que veulent dire les moyennes : vous ne rendrez rien à ces 5 millions de Français qui ne paient déjà pas de taxe d’habitation.

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

Mme Patricia Lemoine. Le groupe UDI-Agir souscrit majoritairement au principe de suppression de la taxe d’habitation pour tous les ménages à l’horizon 2023 puisqu’il a pour objectif de redonner du pouvoir d’achat aux Français.

Néanmoins, la complexité de la rédaction de l’article 5 montre que cette mesure aura de nombreuses conséquences. Elle a une portée historique car elle a vocation à réformer l’architecture globale de la fiscalité locale. Comme Mme Pires Beaune, je crois qu’il faudra aller plus loin dans le dispositif avec la révision des valeurs locatives.

Nos inquiétudes portent sur l’architecture de la fiscalité locale. Monsieur le rapporteur général, vous avez déposé un amendement relatif au gel des bases fiscales non réévaluées en 2020 – nous avons aussi déposé un amendement en ce sens – et je me réjouis que vous ayez trouvé une solution à ce problème très pénalisant pour les collectivités territoriales.

L’autre sujet qui mérite qu’on s’y attarde est celui des lissages et des intégrations fiscales progressives via les harmonisations de taux, qui seront suspendues en 2020, notamment pour les EPCI qui ont vu leur périmètre évoluer en 2018, 2019, voire en 2020. Nous avons besoin d’avoir des éclaircissements sur ce point, car nous ne savons pas si la suspension est ponctuelle, c’est-à-dire si elle ne concerne que l’année 2020 ou si elle s’appliquera jusqu’en 2023.

Enfin, nous avons besoin d’être rassurés quant aux conséquences de la réforme sur le calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des variables d’ajustement, puisque le potentiel fiscal et financier des communes est calculé à partir des recettes fiscales – taxe d’habitation et taxes foncières.

M. François Pupponi. Nous sommes quelques-uns ici à avoir du recul et une certaine expérience par rapport à des amendements ou des articles de lois de finances votés un peu rapidement en commission des finances. J’en veux pour preuve la suppression de la taxe professionnelle pour laquelle quatre-vingt-dix pages ont été votées en dix minutes, avec les conséquences que l’on sait.

Quand on analyse cet article qui est arrivé la semaine dernière, on voit bien qu’il y a des zones grises qu’on ne pourra pas évaluer tout de suite. En l’absence de simulations, on nous demande de voter un texte les yeux bandés sans savoir ce qu’il va se passer ; je refuse de faire cela. On doit savoir en effet quelles en seront les conséquences.

Je ne reviens pas sur le fait qu’on empêche l’évolution des bases même s’il y a un dégel, et que l’on prive de fait les collectivités territoriales de leur droit de prélever l’impôt en 2018 et 2019 puisque la compensation portera sur ce qui a été voté en 2017.

Ce qui me préoccupe, c’est le passage, au hasard d’une phrase, du dégrèvement à l’exonération. Chacun sait ici que le dégrèvement implique la compensation à 100 %, tandis que ce n’est pas le cas pour l’abattement ou l’exonération puisque les variables d’ajustement bougent tout le temps.

M. Jean-Paul Mattei. Non !

M. François Pupponi. Mais si ! Vous pensez que vous savez tout et que vous avez tout inventé. Mais vous devriez plutôt écouter ceux qui ont un peu d’expérience et qui savent comment ça se passe.

C’est pour cela que je pose la question suivante à la majorité : puisque vous considérez que c’est la même chose, pourquoi n’en restez-vous pas au dégrèvement ? Vous devez bien avoir une raison objective à nous donner pour changer la règle du jeu en cours de route. Dès le début, les ministres avaient dit que ce serait un dégrèvement

M. Laurent Saint-Martin. Pendant trois ans !

M. François Pupponi. Non.

On avait insisté pour que ce soit un dégrèvement parce que c’était la seule façon d’avoir la certitude que la compensation se ferait à l’euro près. Avec l’abattement, on sait que dans le temps la compensation ne se fera pas à l’euro près. Le tour de passe-passe, il est là.

Il serait donc plus raisonnable d’attendre d’avoir les simulations, de connaître les vraies raisons du choix de l’exonération, et de prendre le temps de traiter un sujet aussi complexe dans le cadre d’une loi spécifique.

M. Éric Coquerel. Vous vous préparez à commettre une faute lourde de conséquences pour la justice fiscale, pour les recettes de l’État et pour les collectivités territoriales. Permettez-moi de citer à nouveau le rapporteur général – mais de manière moins agréable cette fois – : « Si un impôt est injuste pour 80 % des Français, il ne peut pas être juste pour les 20 % qui restent ». Cette phrase étonnante est contraire à la promesse de campagne de M. Macron qui était de supprimer la taxe d’habitation seulement pour les 80 % les plus modestes. C’est absurde puisque je vous ferai remarquer que vous avez supprimé l’ISF mais pas l’IFI. Si on pense qu’un impôt est juste dès lors qu’il touche seulement 5 % de la population, il sera difficile de m’expliquer pourquoi un autre tout d’un coup serait injuste parce toucherait les 20 % les plus aisés. De la même manière, l’impôt sur le revenu n’est payé que par 43 % de la population. Finalement, le principe de la progressivité de l’impôt semble vous être étranger.

Si la taxe d’habitation est un impôt injuste, c’est parce que les valeurs locatives n’ont pas été révisées depuis 1970, ce qui fait que la taxe d’habitation d’un logement social à Paris est plus élevée que celle d’un pavillon dans le seizième arrondissement. Pour corriger cela, il suffisait de réviser les taxes locatives plutôt que de supprimer un impôt qui sera compensé, en partie, par l’augmentation de la TVA. Or, tout le monde sait bien que la TVA est l’impôt le plus injuste.

20 % des foyers les plus riches vont avoir un gain moyen de 1 158 euros grâce à la suppression de la taxe d’habitation, ce qui fait que 44,6 % des 17,6 milliards des baisses d’impôt profiteront aux 20 % les plus aisés. À l’inverse, les 16 % de personnes les moins favorisées en France qui ne payent pas de taxe d’habitation n’auront aucun gain. On augmente donc encore l’injustice fiscale.

Pour les collectivités, j’observe que c’est un coup supplémentaire porté à leur autonomie financière, coup qui pourrait même être fatal aux départements en raison de la disparition de toute forme d’indépendance fiscale. Je me demande si on ne s’attaque pas au triptyque issu de la Révolution : communes, départements, État.

Enfin, la compensation de cette réforme comporte de nombreuses incertitudes. Les projections du Sénat montrent que le maintien de la taxe d’habitation aurait permis une augmentation des recettes de cet impôt de 4 milliards d’euros d’ici à 2020. Le manque à gagner pour les communes en 2023 risque d’être bien plus important que les 17 milliards d’euros que vous promettez de compenser.

Il convenait donc d’éviter absolument de faire cette réforme. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre cet article dont nous demandons la suppression.

M. Jean-Paul Dufrègne. Au regard de la complexité et des enjeux d’un article de vingt-huit pages, du jeu de vases communicants entre collectivités territoriales et des impacts potentiels sur le calcul des dotations, la réforme proposée aurait dû faire l’objet d’un projet de loi spécifique avec des simulations fiables. Or, elle se traduira par un véritable big bang fiscal. Bien évidemment, nous étions favorables à une réforme de la fiscalité locale, mais dans l’optique de renforcer le lien entre le peuple et le pouvoir local, de donner aux élus la capacité d’agir en toute autonomie, notamment en matière financière et fiscale, en garantissant le financement pérenne des services publics. La réforme proposée va à rebours de cette aspiration populaire.

Cette réforme conduira les collectivités territoriales à se retrouver toujours plus sous pression de l’État, pression à la réduction de la dépense publique, nous l’avons vu avec le pernicieux mécanisme de contractualisation. Le Gouvernement met ici en avant le fait que le bloc communal disposera du levier de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans son intégralité, gage de son autonomie et, plus généralement, de la lisibilité du système fiscal. Mais cette autonomie serait toute relative dans la mesure où les marges de manœuvre sur la taxe foncière sont très faibles, on l’a vu avec la polémique estivale sur la revue des valeurs locatives. Pour rhabiller Pierre – les communes –, le Gouvernement fait le choix de déshabiller Paul – les départements. En perdant le levier de la taxe foncière, les départements se verraient désarmés d’un outil fiscal majeur sur lequel ils ont encore la main et qui est au cœur de leur autonomie d’action. La compensation pour les départements, par une fraction de TVA, conduirait à accélérer l’institutionnalisation de cet outil fiscal injuste au sein du financement des collectivités territoriales. D’ailleurs, l’Assemblée des départements de France (ADF) a indiqué que les départements seront perdants.

La suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % les plus aisés bénéficiera, c’est incontestable, aux très aisés. Ses effets seront certes plus larges car une personne seule qui touche 25 000 euros par an serait également concernée. La mesure est chiffrée à environ 7 milliards d’euros. Les compensations de l’État peuvent être fragilisées, on l’a vu par le passé avec la suppression de la taxe professionnelle – la parole de l’État est elle aussi fragile.

Monsieur le rapporteur général, vous dites qu’on ne touchera pas à une architecture qu’on a mis un an à élaborer, ce qui montre bien que cette réforme est l’effet d’une annonce du Président de la République qu’il a ensuite fallu habiller.

En conclusion, nous nous opposons à cette réforme qui dénature nos collectivités territoriales et leur autonomie à agir.

M. Laurent Saint-Martin. Je veux revenir sur quelques propos qui me paraissent pour le moins contradictoires, voire faux.

Cela me révolte d’entendre ici que la suppression de la taxe d’habitation est une mesure populiste et populaire, alors qu’il s’agit seulement de baisser la pression fiscale des ménages, qui a augmenté de façon irresponsable et particulièrement drastique pendant le quinquennat précédent.

La question de la revalorisation des bases fera l’objet d’un débat au travers des amendements. Il ne faut pas s’y tromper : la revalorisation des bases conduira à une augmentation des impôts.

Monsieur Pupponi, je m’inscris en faux contre ce que vous avez dit en matière de dégrèvement. L’engagement portait sur trois ans, le temps de trouver un mécanisme permettant de mettre fin à la taxe d’habitation pour 80 % de la population. Le dégrèvement, c’est la décharge d’un impôt. Si vous dégrevez ad vitam aeternam, vous ne supprimez jamais l’impôt. Il n’a jamais été question d’un dégrèvement ad vitam aeternam, mais de repenser un mécanisme de fiscalité locale. On pourrait dire, à la rigueur que la question pourrait se poser pour les années suivantes, le temps de supprimer totalement la taxe d’habitation pour les 20 % restants, mais on n’a jamais pris l’engagement d’un dégrèvement jusqu’au bout.

M. Christophe Jerretie. Il faut assumer le choix de baisser les impôts et de supprimer une part importante d’un impôt local.

Cette année est le début d’une réforme. Nous avons un an pour ajuster tout ce qui posera problème. Tous les éléments qui ont été évoqués ont déjà été à peu près ciblés par la majorité des députés et par les administrations.

Je fais partie de ceux qui souhaitaient un projet de loi de financement des collectivités territoriales spécifique. Cela dit, on nous propose pour une fois quelque chose d’assez simple et d’assez juste qui permet de consolider la taxe foncière au niveau du bloc communal et de faire en sorte que les départements puissent avoir une fiscalité dynamique, ce qui n’est pas anodin quand on connaît les difficultés qu’ils rencontrent. Il faut aboutir à un système cohérent.

Nous avons là un article qui permettra d’aboutir, dans trois ou quatre ans, à une vraie refonte de la fiscalité, à la fois des ménages et des entreprises, et probablement dans un troisième temps à un impôt environnemental pour les collectivités territoriales. Il ouvre cette première page de façon correcte avec une mécanique plutôt simple et claire pour la population et les collectivités territoriales.

Toutefois, cette réforme comporte trois éléments pour lesquels j’émets un bémol. Premièrement, j’ai toujours été contre les règles de lien des taux, je l’avais dit au ministre à l’époque. Le deuxième bémol porte sur la revalorisation forfaitaire des valeurs locatives. On avait annoncé qu’on ne toucherait pas à ce point et que l’on en resterait à une fixation du taux appliqué en 2017. C’est le rôle de l’homme politique et du Parlement de tenir parole à l’égard de tous les gens qui ont travaillé sur ce sujet. Troisièmement, les collectivités doivent continuer à vivre correctement. Pour ce faire, il faut absolument conserver une logique d’intervention à la fois financière et fiscale parce qu’on sait que le paquet des finances et des fiscalités est très évolutif dans le temps.

M. Charles de Courson. L’article 5 constitue une atteinte fondamentale au principe de la démocratie locale en ce qu’il affaiblit considérablement le lien entre le citoyen contribuable électeur et les élus locaux.

Certes, comme l’a dit madame Pires Beaune, quand dans votre commune la quasi-totalité des habitants sont propriétaires de leur logement, le lien sera maintenu par le foncier bâti. Mais ce lien est complètement cassé dans une petite ville de ma circonscription qui compte 65 % de logements sociaux, les 35 % d’habitants restants étant pour moitié locataires dans le privé et pour l’autre moitié des propriétaires occupants.

Croyez-en ma petite expérience : cette réforme improvisée donnera lieu à d’innombrables ajustements. On nous avait promis un texte spécifique, de façon à prendre le temps de l’étudier. Mais ce n’est pas le cas puisque cette réforme est présentée dans le présent projet de loi de finances. On nous avait aussi promis des simulations. Or nous sommes en train de légiférer sans avoir obtenu la moindre simulation. Cette façon de procéder est incroyable. Certes, ce n’est pas la première fois que cela se passe de cette manière, mais à chaque fois, cela a entraîné de nombreux problèmes.

Cette réforme n’est pas neutre financièrement puisque, dès 2020, le gel de l’assiette représentera 250 millions d’euros même si le rapporteur général présentera un sous‑amendement qui, semble-t-il, réglera le problème. Plus fondamentalement, le gel des taux et la compensation sur les taux de 2017 représentera 60 millions. J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu’on a laissé la liberté de fixer les taux en 2019 et en 2020, ce qui fait que la compensation ne devrait pas porter sur les taux de 2017, mais devrait porter sur les taux en vigueur lors de la réforme. Sinon, un recours sera fait devant le Conseil constitutionnel au motif que vous ne respectez pas l’article 72-2 de la Constitution.

Enfin, cette réforme est économiquement très dangereuse pour la compétitivité des entreprises, car en modifiant complètement la part des assiettes sur laquelle les départements mais surtout les communes et les intercommunalités ont une autonomie en ce qui concerne les taux, vous allez bouleverser l’équilibre fiscal entre entreprises et ménages.

Mme Stella Dupont. C’est la première fois que la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation s’est saisie pour avis d’un article du projet de loi de finances. C’est un article complexe relatif à un sujet structurant pour les collectivités.

Je considère que les conditions de travail des députés que nous sommes sont de manière générale et pas uniquement sur ce texte, particulièrement difficiles…

M. Charles de Courson. Inacceptables !

Mme Stella Dupont. …pour pouvoir réaliser un travail de fond.

Mme Véronique Louwagie. C’est joliment dit !

Mme Stella Dupont. C’est peut-être joliment dit, mais c’est sincère. Faire un travail de qualité est extrêmement complexe. Moi qui suis élue locale de longue date, je peux vous assurer que si nous devions travailler de cette façon localement, nous prendrions certaines décisions de façon erronée.

Sur l’article 5, nous avons obtenu des éléments que nous devons analyser très rapidement, ce qui est compliqué.

Je ne reviendrai pas sur l’intérêt ou non de cette réforme, mais je veux vous alerter sur la complexité de cet article, et de ce fait sur la nécessité de bien l’analyser pour ne pas dire des contrevérités ou tout simplement pour ne pas se tromper.

Madame Dalloz, vous avez indiqué que les taux de GEMAPI étaient figés. Non, pour cette une taxe additionnelle, les collectivités ne votent pas un taux mais une masse de recettes. Du coup, c’est la répartition en addition aux différentes taxes – taxe d’habitation, taxes foncières et cotisation foncière des entreprises – qui évolue, ce qui est sans conséquence sur la dynamique et sur les recettes de la taxe. Il faut donc étudier très attentivement le dispositif afin d’éviter d’ajouter de la confusion sur un sujet effectivement très complexe.

M. Jean-Louis Bricout. On nous dit que la suppression d’un impôt permettra davantage d’équité. Or, il ne s’agit pas de la suppression d’un impôt mais de la transformation d’un impôt local en impôt national puisqu’il faudra bien rembourser la taxe d’habitation aux communes. Cette dépense supplémentaire conduira à trouver des recettes supplémentaires ou peut-être à réduire la dépense publique.

On nous parle d’équité. Or, celui qui ne paie déjà pas de taxe d’habitation ne bénéficiera pas d’un cadeau fiscal. De surcroît, il devra participer de toute façon au remboursement des communes, peut-être pas au travers de l’impôt sur le revenu mais de la TVA. Voilà une iniquité tout simplement flagrante.

Monsieur Saint-Martin, vous dites que les élus sont irresponsables. Ces propos n’engagent que vous.

La commission examine les amendements identiques I-CF117 de M. Damien Abad, ICF555 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF597 de M. François Pupponi, I-CF710 de M. Fabrice Brun, I-CF830 de M. Jean-Paul Dufrègne, I-CF930 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF1016 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1407 de M. Éric Coquerel, qui visent tous à supprimer larticle.

M. Damien Abad. L’amendement I-CF117 est un amendement d’appel sur un article de décentralisation. C’est aussi un article anticonstitutionnel en ce qui concerne l’autonomie financière et fiscale des départements.

Supprimer la taxe d’habitation peut effectivement être considéré comme une mesure populaire, mais en réalité il n’y a plus de marge de manœuvre pour l’État. J’aimerais savoir quel sera l’impact réel sur le pouvoir d’achat des Français, au vu des transferts de taxes qu’entraînera par ailleurs cette réforme.

Tous les départements qui auront augmenté la taxe foncière sur les propriétés bâties entre 2015 et 2017, autrement dit tous ceux qui auront eu une mauvaise gestion, seront récompensés par une compensation, tandis que ceux qui, comme l’Ain, n’ont pas augmenté les impôts, ne bénéficieront pas de cette compensation.

Par ailleurs, les départements n’ont plus d’autonomie fiscale puisque le seul impôt qui demeurera sera celui sur les droits de mutation à titre onéreux sur lequel nous n’avons quasiment aucune marge de manœuvre et qui dépend fortement du marché de l’immobilier. Soyons clairs, il s’agit là d’une atteinte forte à l’autonomie des territoires, notamment des départements.

Je partage les propos de mon collègue François Pupponi quant à la différence entre les exonérations et les dégrèvements. On sait bien que, dans cette affaire, les communes seront encore malheureusement les victimes.

Enfin, toutes les associations d’élus, qu’il s’agisse des départements, des régions ou des communes, sont opposées à cet article, à ce mécanisme que vous avez monté et qui porte atteinte aux collectivités territoriales.

Mme Émilie Bonnivard. La suppression de la taxe d’habitation devait être compensée à l’euro près pour les collectivités, comme s’y était engagé le Président de la République. Or les arbitrages réalisés par le Gouvernement entraînent, dans le présent projet de loi de finances, une perte de 400 millions pour les collectivités territoriales. Ce n’est pas acceptable ! Le Gouvernement supprime une ressource aux collectivités sans donner de la lisibilité, de la clarté et des certitudes aux élus locaux à moyen et long termes.

Enfin, chaque année on baisse les dotations de compensation de la taxe professionnelle. Essayons de ne pas reproduire cette injustice avec la réforme de la taxe d’habitation.

M. François Pupponi. Je prendrai un exemple pour bien montrer à nos collègues de la majorité les problèmes que cette réforme posera aux communes.

Dans des communes dites défavorisées qui sont toutes éligibles à la politique de la ville, soit les bailleurs sociaux sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties s’ils ont construit des logements sociaux, soit ils bénéficient d’un abattement de 30 % qui n’est pas compensé aux communes, ou très peu. La compensation de la suppression de la taxe d’habitation se fera-t-elle sur les logements sociaux imposés ou sur ceux qui ne le sont pas ? Ils ne sont pas imposés aujourd’hui, et ils le seront dans deux, trois, quatre ou cinq ans. Si la compensation ne porte pas sur la valeur que les bailleurs devraient payer, les communes concernées, dites de banlieue, perdront de l’argent sur la durée, puisqu’elles ne seront pas compensées pour des impôts qui seront payés dans cinq, dix ou quinze ans.

J’attends la réponse du rapporteur général et éventuellement de la majorité ou du ministre pour savoir comment procéder dans ces cas-là.

M. Fabrice Brun. La suppression de la taxe d’habitation constitue l’erreur fondamentale de ce quinquennat. Cette mesure est faussement populaire : dès que l’on gratte la surface, elle révèle l’incapacité de l’État à réduire ses dépenses, sur fond de déficit, et à engager de nouveaux chantiers comme la dépendance ou la transition écologique, très présents dans nos débats. Cette mesure fragilise aussi l’autonomie des collectivités territoriales, comme l’a brillamment démontré Damien Abad. Et par effet domino, elle aura forcément des conséquences sur le pouvoir d’achat des Français, par le jeu du transfert d’autres taxes.

M. Jean-Paul Dufrègne. Deux ans et demi après l’arrivée de cette nouvelle majorité, certains bénéficient de la suppression de l’impôt sur la fortune, du prélèvement forfaitaire unique sur les revenus financiers, de la baisse de l’impôt sur le revenu et de la suppression de la taxe d’habitation.

Les plus aisés des aisés bénéficient de ces quatre mesures, les plus précaires d’aucune, alors qu’ils participent à leur financement, par exemple suite à la réduction des APL. Cherchez l’erreur !

M. Éric Coquerel. J’entends les réactions de nos collègues de la République en marche, mais je ne les ai pas entendus réfuter rationnellement un seul argument. Nous étudions un article dont le dispositif juridique atteint vingt-cinq pages et comporte cinq cents alinéas, et nous n’avons qu’une semaine pour l’analyser et l’amender, sans aucune simulation des compensations qui seront attribuées aux collectivités territoriales. Vous pourriez faire preuve d’un peu plus d’humilité, car cette attitude n’est pas à la hauteur du débat parlementaire concernant une mesure qui sera très lourde de conséquences. La majorité prend une grave responsabilité.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Après mon propos liminaire, je n’insisterai pas pour expliquer mon avis défavorable à ces amendements de suppression.

Nous reviendrons après cette séance à la question posée par monsieur Pupponi, afin de vous apporter une réponse précise.

M. Jean-René Cazeneuve. S’agissant du département, nous avons entendu une chose et son contraire en cinq minutes : il ne serait pas juste de retenir le taux de 2019 pour les départements, ni de prendre celui de 2017 pour les communes. Il faut être cohérent !

Les départements n’ont jamais eu d’autonomie fiscale. Cette expression n’existe pas dans la Constitution, et ils ne disposent aujourd’hui de manière autonome que de 8 % de leur budget. Ce n’est pas un problème majeur pour les départements, à la place de la taxe foncière, ils vont toucher une part de TVA, dont les recettes sont plus dynamiques.

Les régions avaient beaucoup protesté il y a deux ou trois ans lorsque la dotation globale de fonctionnement a été remplacée par une fraction de TVA. Elles ne se font plus entendre aujourd’hui, car elles sont très contentes de cette modification.

M. Damien Abad. Monsieur Cazeneuve, vous n’avez pas le monopole de la vérité, je vous invite à plus d’humilité. Je respecte votre position, vous devriez respecter celle des autres.

Vous ne pouvez pas dire qu’il est équivalent pour une collectivité locale de lever un impôt ou de bénéficier d’un impôt local et de recevoir une dotation ou une part d’un impôt national. Vous ne pouvez pas non plus vous asseoir sur l’article 72-2 de la Constitution.

La perte de la taxe foncière affaiblit les départements. Au moment même où les besoins de financement de la dépendance sont de plus en plus importants, les départements sont les seules collectivités à subir l’effet ciseaux d’une hausse des dépenses sociales et d’une baisse des dotations. Et les services départementaux d’incendie et de secours connaissent également une montée en charge extrêmement forte.

Par ailleurs, la dynamique de la TVA nationale n’est pas exactement identique à celle de la taxe foncière. Assumez vos choix : les départements sont les laissés-pour-compte de cette réforme.

M. Laurent Saint-Martin. Nous ne prétendons pas détenir la vérité absolue, nous défendons nos convictions, c’est le principe du débat.

Le transfert de la TVA, ressource dynamique, n’aggrave pas l’effet ciseaux. Au contraire, il a plutôt tendance à le résorber. Nous pourrons y revenir en détail, chiffres à l’appui.

Monsieur Coquerel nous reproche de ne pas être factuels, et cite deux problématiques. Il compare notamment la réforme de la taxe d’habitation avec l’impôt sur la fortune immobilière. La grande différence tient aux valeurs locatives, qui sont évaluées sur des cadastres de 1970. En conséquence, la taxe d’habitation est bien supérieure à Aubervilliers que dans le seizième arrondissement de Paris. C’est pour cette raison que les deux mesures ne sont pas comparables et qu’il est urgent de supprimer la taxe d’habitation. Nous compensons cette suppression et nous créons un mécanisme permettant aux collectivités territoriales de bénéficier d’une ressource stable et pérenne.

Monsieur Coquerel, vous avez laissé penser que la TVA augmenterait à l’issue de ce changement de mécanisme. Ne dites pas n’importe quoi : il s’agit du transfert d’une part de TVA nationale, il n’y a aucun rapport avec une hausse de son taux.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’Association des départements de France (ADF) a calculé que si les départements avaient perçu une part de la TVA en 2005, comme le propose le Gouvernement, ils auraient perçu environ 370 millions d’euros de moins par an en moyenne par rapport au produit du foncier, soit 4 milliards d’euros depuis 2005. Ces chiffres ne sont pas des simulations, mais le calcul de l’application aux dernières années des mesures que vous comptez prendre.

M. Éric Coquerel. Monsieur Saint-Martin, vous m’avez mal entendu. J’ai expliqué que les bases locatives devaient être révisées : nous aurions pu le faire pour rendre l’impôt plus juste.

Je comparais l’IFI à l’ISF en réponse aux propos du rapporteur général selon lesquels vous étendiez aux 20 % les plus aisés la mesure initialement appliquée aux autres ménages. Il n’est pas nécessairement normal et juste d’étendre aux plus favorisés ce qui est fait pour le reste de la population, ma comparaison avec l’ISF et l’IFI était correcte dans ce contexte.

S’agissant des valeurs locatives, il faudra de toute façon les revoir, à moins de supprimer la taxe foncière.

M. Julien Aubert. Monsieur Saint-Martin, la TVA est dynamique, sauf en cas de retournement de cycle. En 2008 et 2009, lors du dernier retournement de cycle, les recettes de TVA se sont massivement réduites.

Les départements dépensent essentiellement dans le domaine social, et ce sont les dépenses qui explosent en cas de retournement de cycle, tandis que les ressources des départements s’amenuiseront du fait de la réduction des recettes de TVA. Dans ce contexte, je leur souhaite bonne chance pour équilibrer leurs budgets !

De plus, par principe, les collectivités territoriales devraient être responsables des ressources qu’elles lèvent. En rigidifiant les dépenses et les recettes, on retire aux élus la capacité de faire des choix différents et d’expliquer aux électeurs comment ils ont géré le budget qui leur a été confié.

La commission rejette les amendements I-CF117, I-CF555, I-CF597, I-CF710, ICF830, I-CF930, I-CF1016 et I-CF1407.

 

Elle en vient, en discussion commune, aux amendements identiques I-CF565 de M. François Pupponi, I-CF673 de Mme Véronique Louwagie et I-CF705 de Mme Émilie Bonnivard, ainsi quà lamendement I-CF1197 de Mme Christine Pires Beaune.

M. Charles de Courson. Nous souhaitons supprimer les alinéas 19 à 63. Lors de la première tranche de suppression de la taxe d’habitation, qui concernait 80 % de nos concitoyens, le Gouvernement avait promis qu’il s’agirait d’un dégrèvement.

Les alinéas 19 à 63 transforment ce dégrèvement en compensation, créant du même coup des surcompensés – grâce au transfert du foncier bâti – et des sous-compensés. L’exposé des motifs du projet explique que les sous-compensés seront moins bien traités que les surcompensés, qui bénéficieront d’une hausse éventuelle du taux de leur foncier bâti dont ne profiteront pas les sous-compensés. Ce n’est pas acceptable.

Mme Véronique Louwagie. Une difficulté va apparaître dans les communes surcompensées : une retenue y sera effectuée sur les recettes de taxe foncière, mais ces sommes n’iront pas aux départements, elles iront aux communes sous-compensées.

Ce prélèvement sera donc effectué sur les habitants d’un département et ira au budget de l’État pour servir de compensation. L’information sera alors biaisée : les habitants penseront payer la part départementale de taxe foncière, mais les sommes prélevées n’iront pas au département. Les bordereaux de taxe foncière indiqueront-ils le montant qui sera prélevé aux habitants du département mais qui sera versé au budget de l’État ?

Mme Émilie Bonnivard. La transformation du dégrèvement en exonération ne permet pas au Gouvernement d’atteindre ses objectifs : la suppression totale de la taxe d’habitation sur les résidences principales et la compensation intégrale des pertes de recettes pour les collectivités.

Pour atteindre ces objectifs, le dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables doit être maintenu, et le produit de taxe d’habitation au titre de 2020 relatif aux augmentations de taux en 2018, 2019 et 2020 doit être pris en charge par le budget de l’État.

Mme Christine Pires Beaune. Nous souhaitons également pérenniser le dégrèvement, au moins jusqu’à 2023. Substituer une compensation au dégrèvement, soit, mais pourquoi le faire avant la mise en œuvre complète de la réforme, en 2023 ?

Par ailleurs, l’argument de monsieur Aubert est très juste : qu’adviendra-t-il de la compensation par la TVA en cas de retournement économique ? Pouvez-vous confirmer que l’alinéa 452 a bien pour objet de pallier un éventuel retournement de cycle en créant un cliquet interdisant la baisse de la compensation ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Les argumentaires en défense de ces amendements identiques sont légèrement divergents.

Les deux premiers orateurs ont plutôt évoqué la question du coefficient correcteur, dont nous débattrons ultérieurement.

Les deux dernières oratrices ont évoqué plus précisément l’objet des amendements dont nous débattons maintenant : revenir sur la transformation en exonération du dégrèvement de la taxe d’habitation sur les résidences principales en faveur des contribuables en 2021.

Je crois que personne n’est de mauvaise foi, mais il y a une incompréhension. Cette mesure entrera en vigueur en 2021, concomitamment au transfert du produit de la taxe d’habitation sur les résidences principales à l’État et à l’entrée en vigueur du nouveau schéma de financement pour les collectivités territoriales.

Dès lors, la transformation du dégrèvement en exonération en 2021 n’aura aucune conséquence financière pour les collectivités territoriales et aucune conséquence sur le montant de la compensation à verser cette même année.

 

En effet, en 2021, le dégrèvement – devenu une exonération – de la taxe d’habitation sur les résidences principales sera compensé par un nouveau schéma de financement, à savoir le transfert de la taxe foncière sur les propriétés bâties départementale aux communes, et l’affectation d’une fraction de TVA aux EPCI et aux départements.

L’État assume seul la compensation intégrale des collectivités territoriales. Je suis persuadé qu’il y a une incompréhension et que nous ne sommes pas dans la situation que vous décrivez.

S’agissant de la question spécifique de madame Pirès-Beaune, son interprétation est correcte, et le montant de référence pour la garantie sera celui arrêté en 2021.

Avis défavorable.

M. François Pupponi. Il n’y a pas d’incompréhension, monsieur le rapporteur général, mais le fruit de l’expérience. Combien de fois les rapporteurs généraux et les ministres ont-ils tenu un tel discours devant la commission des finances ? Et combien de fois, au fil des ans, les compensations ont disparu ? Seul le dégrèvement nous offrait des certitudes, car personne n’a jamais osé y toucher. Les abattements et exonérations ne fonctionnent pas.

M. Jean-René Cazeneuve. L’article est effectivement complexe, il doit faire l’objet d’explications. Les surcompensés et les sous-compensés sont traités exactement de la même manière quand ils décident d’augmenter leurs taux, et ils touchent l’intégralité de l’augmentation de la taxe foncière liée à l’augmentation de ce taux.

Le dégrèvement n’est pas maintenu jusqu’en 2023 car il faut bien figer les taux à un moment. À défaut, il sera impossible de continuer à augmenter les taux, car nous devrions les compenser, ce qui induirait des effets pervers extrêmement importants.

Enfin, nous ne créons pas un nouveau fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR). Je sais que beaucoup d’entre vous ont une mauvaise expérience de cet outil créé pour compenser la suppression de la taxe professionnelle, mais le principe n’est pas du tout le même : au lieu d’une somme fixe qui peut être réduite au fil du temps, nous prévoyons une part des recettes d’un impôt, il n’y a rien de plus solide.

Mme Christine Pires Beaune. À partir de 2021, le dégrèvement deviendrait une exonération, donc il entrerait dans l’enveloppe normée. Dès lors, quelles seraient les conséquences sur les autres dotations ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Non, ces sommes n’entreront pas dans l’enveloppe normée.

Mme Christine Pires Beaune. Elles ne figureront pas dans le tableau des transferts financiers de l’État vers les collectivités territoriales ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Non.

M. le président Éric Woerth. Il faudra poser la question au ministre, beaucoup d’éclaircissements doivent être apportés.

La commission rejette les amendements identiques I-CF565, I-CF673 et I-CF705. Puis elle rejette lamendement I-CF1197.

Elle est saisie de lamendement I-CF1072 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. La suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % les plus aisés est le point le plus problématique de ce projet de loi de finances.

J’entends les arguments dénonçant l’injustice de cet impôt, mais il aurait fallu accompagner sa suppression par l’instauration d’une contribution des plus aisés, qu’il s’agisse des 5 % ou 10 % des plus riches, et que l’on passe par la création d’un nouvel impôt de solidarité pour la transition écologique ou un renforcement des tranches les plus élevées de l’impôt sur le revenu.

Selon les chiffres, il manque entre 7 et 9 milliards d’euros d’investissements publics dans la transition écologique en France, et la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % des ménages les plus aisés représente exactement 7 milliards d’euros en année pleine.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable.

La commission rejette lamendement I-CF1072.

Elle examine lamendement I-CF182 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. La taxe d’habitation pour les résidences secondaires sera maintenue, sous le nom de taxe pour les résidences non-principales. J’avais proposé l’année dernière d’étendre la faculté de majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires.

Cet outil fiscal permet de pallier la pénurie de logements pour les populations résidentes, mais il n’est utilisable que dans les zones urbanisées continues de plus de 50 000 habitants.

Mon amendement propose d’ouvrir cette possibilité aux zones touristiques tendues. Dans la plupart des zones touristiques, 65 % des résidences sont des résidences secondaires.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Il ne faut pas laisser penser aux Français que la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales se traduira par une hausse de la fiscalité locale sur d’autres impositions. Or votre amendement permet une hausse potentielle de près de 60 % de la cotisation de taxe d’habitation sur les résidences secondaires pour ces communes.

De plus, la fiscalité ne règle pas tout : certaines résidences secondaires sont de vraies maisons de famille, d’autres sont des locations abusives par le biais de plateformes en ligne. Il existe des manières de régler différemment ce problème, je suis très défavorable à cet amendement.

M. le président Éric Woerth. Je rappelle que les résidences secondaires consomment très peu de services publics, ces contribuables sont plutôt contributeurs très nets au budget des communes.

La commission rejette lamendement I-CF182.

Elle en vient à lamendement I-CF181 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. L’article 5 consacre la réforme de la fiscalité locale annoncée par le Gouvernement en conséquence de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales pour la totalité des ménages.

Une déclaration automatique est prévue afin que les propriétaires fassent connaître l’affectation des locaux à l’habitation principale ou non. Dans un souci de bonne gestion, cet amendement prévoit de donner cette information aux mairies, afin qu’elles sachent quelles habitations sont des résidences principales.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cette idée est intéressante, mais je suis réservé sur la rédaction de l’amendement. Certaines informations sont couvertes par le secret fiscal, on ne peut pas jeter ainsi dans la nature un certain nombre de fichiers.

J’ai interrogé la DGFiP afin de connaître les voies et moyens d’obtenir certaines informations. Les délais de transmission prévus dans l’amendement semblent d’ailleurs trop serrés.

Je suggère le retrait de cet amendement, il faut creuser l’idée pour trouver les bons moyens de fournir cette information aux collectivités territoriales.

Lamendement I-CF181 est retiré.

La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques I-CF876 de M. Charles de Courson et I-CF1452 de Mme Stella Dupont, qui font lobjet dun sous-amendement I-CF1575 du rapporteur général ; les amendements identiques I-CF273 de Mme Patricia Lemoine, I-CF585 de M. François Pupponi, I-CF676 de Mme Véronique Louwagie, I-CF733 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF1086 de M. Christophe Jerretie, I-CF1181 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1438 de M. Éric Coquerel ; ainsi que lamendement I-CF828 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Charles de Courson. L’un des problèmes posé par cet article est la suppression de la revalorisation des valeurs locatives en application de l’article 1518 bis du CGI, qui définit le coefficient de majoration des valeurs locatives.

Par cet amendement, je vous propose de rétablir cette indexation en appliquant un coefficient de 1,1 %, qui correspond au taux d’inflation prévisionnel pour 2019 tel qu’il ressort de l’indice des prix à la consommation hors tabac.

Mme Stella Dupont. La délégation aux collectivités territoriales a soulevé le problème de cette non-revalorisation des valeurs locatives sur les résidences principales. Il semble légitime de prévoir une revalorisation forfaitaire, basée non sur l’indice des prix harmonisés retenu depuis le PLF 2017, mais sur l’indice des prix à la consommation hors tabac. Cette revalorisation est légèrement moindre que celle pratiquée pour l’ensemble des autres bases, mais permet une dynamique pour 2020 sur la taxe d’habitation sur les résidences principales.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Je suis favorable à ces amendements, sous réserve de l’adoption du sous-amendement que je présente.

Lors des dernières années, les bases ont été revalorisées sur l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), calculé au niveau européen, qui est structurellement supérieur à l’indice des prix à la consommation en France (IPC).

Soyons raisonnables sur un tel sujet : des compensations importantes ont été accordées aux collectivités locales, je propose de revenir à l’indexation sur l’indice des prix à la consommation (IPC) qui s’élève à 0,9 %. Mon sous-amendement prévoit donc une revalorisation de 0,9 %, plutôt que celle de 1,1 % que vous proposez.

Mme Patricia Lemoine. Mon amendement est satisfait par l’amendement de madame Dupont, sous-amendé par le rapporteur général.

Lamendement I-CF273 est retiré.

M. Christophe Jerretie. Nous avions travaillé sur le sujet l’année dernière ; la revalorisation forfaitaire n’avait alors jamais été évoquée, elle devait être glissante. L’amendement proposé, sous-amendé par le rapporteur général, modifie ce qui a été prévu pour les collectivités et que nous avions travaillé ensemble.

Je considère pour ma part que l’alinéa 159 doit être supprimé purement et simplement, et que le Gouvernement doit justifier la modification de ce que nous avions décidé au mois de juillet. Je maintiens donc mon amendement, et je le présenterai à nouveau dans l’hémicycle, même si je comprends la volonté du rapporteur général de trouver une solution de compromis.

Nous ne devons pas changer la règle aujourd’hui, c’est une modification importante de la fiscalité : la base et le taux étaient définis, la revalorisation devait être effective. Nous allons remettre en cause un des éléments fondamentaux de la réforme de la fiscalité locale.

Mme Christine Pires Beaune. Je propose également la suppression de l’alinéa 159, qui constitue une marque de défiance à l’égard des élus au regard des engagements qui avaient été pris.

Vous prenez prétexte du taux de majoration de 2,2 % qui a été appliqué en 2019, mais il ne sort pas de nulle part. Il correspond aux dispositions votées dans la loi de finances initiale pour 2017 afin d’éviter de nous diviser, comme nous le faisions tous les ans, entre ceux qui voulaient que la revalorisation soit plus importante, ou moindre, et ceux qui ne voulaient pas revaloriser du tout. Un consensus avait été trouvé, vous revenez dessus en vous appuyant peut-être sur les constats de la Cour des comptes.

Le panier des maires est supérieur à l’inflation, nous le savons depuis longtemps, donc la référence à l’IPCH avait sa raison d’être. Le plus grave dans cette affaire est que vous reveniez sur un engagement : il n’y aura pas de compensation à l’euro près, et vous exprimez une défiance à l’égard des élus au moment où Sébastien Lecornu essaie de restaurer la confiance.

M. Éric Coquerel. Par cet alinéa, le Gouvernement tente de se faire de l’argent sur le dos des collectivités territoriales, ni vu ni connu. Heureusement, les associations du bloc communal ont publié un communiqué de presse à ce sujet.

Je note la proposition de notre collègue Stella Dupont de revaloriser la base des valeurs locatives de 1,1 %, revalorisation que notre rapporteur général propose dans sa grande bonté de ramener à 0,9 %.

Ce sera mieux que rien, mais, comparé au droit en vigueur, le compte n’y est pas. Nous proposons plutôt de supprimer le gel de la revalorisation forfaitaire des bases locatives, dont le coût est évalué à 250 millions d’euros par an pour les collectivités.

M. Jean-Paul Dufrègne. Nous proposons également la revalorisation forfaitaire des valeurs locatives pour l’établissement de la taxe d’habitation des locaux affectés à l’habitation principale en 2020. Sa suppression pénaliserait les budgets locaux d’environ 250 millions d’euros selon les associations d’élus. La suppression de la compensation ne doit pas se faire sur le dos des collectivités.

M. le président Éric Woerth. Je m’interroge : est-ce que les 250 millions d’euros sont compensés en cas d’adoption du sous-amendement du rapporteur général, ou n’est-ce qu’une partie du chemin ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. C’est une grande partie du chemin.

M. Jean-René Cazeneuve. Ce n’est pas un problème de compensation à l’euro près : dans tous les cas, cette compensation aura lieu pour 2021 par rapport à 2020. La question est de savoir quel niveau nous retenons pour 2020, donc pour 2021.

Il ne s’agit pas seulement d’une ressource pour les collectivités territoriales, mais aussi d’un impôt sur les Français. La règle a changé dans la loi de finances intitiales pour 2017, il est intéressant de faire un bilan après deux années d’application de cet indice significativement supérieur à l’inflation. Cette année, l’augmentation retenue est de 2,2 % pour la taxe foncière, au regard du taux d’inflation qui est de 1,1 %.

Nous pouvons chercher quel indice est le plus juste, en tenant compte de cet historique sur deux ans, afin de trouver le bon taux pour l’année prochaine.

M. Christophe Jerretie. L’an dernier, la revalorisation forfaitaire a été un argument positif pour les collectivités territoriales, et nous avons tous admis que ce serait une augmentation de leurs financements. Cette année, nous faisons l’inverse.

Nous devons être cohérents dans nos propos, on ne peut pas dire une année que la revalorisation est favorable aux collectivités territoriales et faire l’inverse l’année suivante. Nous avons fait des choix compliqués en supprimant la taxe d’habitation, respectons ce que nous avons dit.

M. Charles de Courson. Quelle est la différence entre les amendements identiques que Stella Dupont et moi proposons et la version sous-amendée par le rapporteur général ? Le sous-amendement retient un taux de 0,9 %, soit 200 millions d’euros, tandis que notre amendement retient la somme de 250 millions. L’écart est de 50 millions d’euros.

Les années précédentes, nous n’appliquions pas l’indice de septembre, mais le taux prévisionnel. Les amendements présentés sont donc plus cohérents. L’écart est de 50 millions, respectons le système précédent, sinon nous serons accusés de commencer à rogner sur la revalorisation. Votons nos amendements, et passons à la suite !

Mme Christine Pires Beaune. Le dispositif de l’article 1518 bis du CGI retient l’inflation sur les douze derniers mois glissants, de novembre à novembre. En application de cet article, l’indice serait aujourd’hui de 1,6 %.

Mme Véronique Louwagie. Nous prônons tous la stabilité fiscale, un engagement a été pris il y a deux ans, ce n’est pas très vieux, et les collectivités territoriales, les ménages et les entreprises ont besoin de pouvoir se projeter dans l’avenir. Il ne faut pas changer les règles tous les deux ans lorsque cela s’arrange.

Selon monsieur Cazeneuve, cette mesure constitue un impôt prélevé sur les contribuables, mais il est important de laisser la libre administration aux collectivités. Si ces dernières jugent que la revalorisation est trop importante, elles ont la possibilité d’agir sur les taux.

M. Jean-Paul Mattei. C’est hypocrite !

Mme Véronique Louwagie. Pas du tout, ma collectivité a baissé les taux !

M. Jean-Paul Mattei. S’il y a une revalorisation, il y aura un impact pour le contribuable. Laisser aux élus le choix de fixer le taux est une hypocrisie terrible. Au final, c’est le contribuable qui va payer.

La commission adopte le sous-amendement I-CF1575.

Puis elle adopte les amendements identiques I-CF876 et I-CF1452, ainsi sousamendés.

En conséquence, les amendements I-CF585, I-CF676, I-CF733, I-CF1086, ICF1181, I-CF1438 et I-CF828 sont sans objet.

 

La commission est saisie de quatre amendements pouvant faire lobjet dune discussion commune : les amendements identiques I-CF274 de Mme Patricia Lemoine et ICF402 de M. François Pupponi et les amendements identiques I-CF1013 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF1182 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Patricia Lemoine. Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit que les lissages, intégrations fiscales progressives et harmonisation de taux d’imposition de la taxe d’habitation en cours au 1er janvier 2020 sont suspendus, et que ceux qui auraient pu prendre effet au cours de cette même année ne sont pas mis en œuvre.

Liés aux nombreuses évolutions des périmètres intercommunaux au cours des dernières années, ces dispositifs permettent d’opérer une convergence progressive des taux et ont fait l’objet de délibérations des exécutifs locaux. Ils ne sont pas contraires à la mise en œuvre de la réforme fiscale.

Cet amendement vise donc à revenir sur cette suspension, en supprimant les alinéas 164 et 179.

M. Charles de Courson. Quand deux intercommunalités fusionnent, il est possible de choisir de lisser les taux, de manière à éviter les changements brutaux. Ce lissage peut s’étaler sur douze ans.

Supprimer cette faculté risque de déstabiliser des accords passés.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Avis défavorable à l’ensemble des amendements.

M. Charles de Courson. Tous ces amendements posent une vraie question. Si vous y êtes défavorable, les accords passés, parfois avec difficulté, seront suspendus ad vitam aeternam. Comment l’expliquer aux élus locaux ?

Par ailleurs, s’agissant des résidences secondaires, pour lesquelles la taxe d’habitation sera maintenue, les taux seront gelés à des niveaux différents au sein de la même intercommunalité. Ce n’est pas possible à gérer, et c’est contraire au principe d’égalité des citoyens devant l’impôt. Il faut absolument trouver une solution, celle que nous proposons n’est peut-être pas la bonne, mais vous ne pouvez pas vous contenter de la rejeter sans faire de contre-proposition.

M. le président Éric Woerth. Ce sont les taux de l’intercommunalité qui sont lissés, pas les taux des communes…

M. Charles de Courson. Mais au sein d’une même intercommunalité, tout le monde doit converger vers un taux unique. L’article 5 interrompt ce lissage, l’inégalité va donc être maintenue alors qu’on ne peut l’accepter que temporairement.

M. Joël Giraud, rapporteur général. La suspension des lissages n’est pas prévue ad vitam aeternam, comme vous l’indiquez, mais seulement jusqu’en 2023.

Mme Patricia Lemoine. Je partage les préoccupations de monsieur de Courson, et de nombreux présidents d’intercommunalités se sont émus de cette disposition. Le lissage des taux sera suspendu jusqu’en 2023, cela signifie-t-il qu’en 2020, 2021 et 2022, les taux appliqués seront ceux de 2019, ou ceux de 2017 ?

M. Joël Giraud, rapporteur général. Ce seront les taux de 2019.

Mme Patricia Lemoine. Cela revient à balayer d’un revers de main la période de lissage et de convergence décidée dans le cadre d’un pacte territorial avec les élus, et formalisée dans une délibération. Ce n’est pas un bon signal.

Mme Stella Dupont. Ce sujet a également préoccupé la délégation aux collectivités territoriales. Cette suspension vient remettre en cause les pactes financiers et fiscaux qui ont été négociés à l’occasion des regroupements de communautés de communes et de la recomposition territoriale.

Il faut interroger précisément le Gouvernement, pour obtenir une réponse claire et précise. Il n’est pas possible de suspendre cette harmonisation pour une durée indéterminée, la suspension doit être la plus courte possible, dans l’intérêt des EPCI concernés.

Mme Christine Pires Beaune. Le texte ne prévoit pas de date butoir à la suspension. C’est la raison de l’amendement qui propose de fixer le terme de cette suspension à 2023, afin que le lissage et l’harmonisation des taux reprennent ensuite.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Le terme de cette mesure de suspension en 2023 figure dans le texte, dans les chapeaux.

La commission rejette successivement les amendements I-CF274 et I-CF402 ainsi que I-CF1013 et I-CF1182.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 9 octobre 2019 à 9 heures 30

 

Présents. - M. Damien Abad, M. Saïd Ahamada, M. François André, M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bricout, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Francis Chouat, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Bruno Duvergé, Mme Sarah El Haïry, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, Mme Olivia Gregoire, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Mohamed Laqhila, M. Jean Lassalle, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, Mme Patricia Lemoine, Mme Marine Le Pen, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Jean-François Parigi, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. Benoit Potterie, M. François Pupponi, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth

Excusés. Mme Sophie Errante, M. Nicolas Forissier, M. David Habib, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Alauzet, M. Fabien Di Filippo, Mme Frédérique Lardet, M. Sébastien Leclerc, M. Gilles Lurton, M. Matthieu Orphelin, M. Éric Pauget, M. Vincent Rolland, M. Vincent Thiébaut, M. Jean-Marc Zulesi

 

 

 

 

 

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