Compte rendu

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d’accélération et de simplification
de l’action publique

– Suite de l’examen du projet de loi, adopté par le Sénat, d’accélération et de simplification de l’action publique (n° 2750 rect.) (M. Guillaume Kasbarian, rapporteur)              2


Lundi
14 septembre 2020

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 3

session extraordinaire de 2019-2020

Présidence de
M. Bruno Duvergé,
Président

 


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La séance est ouverte à 21 heures 35.

(Présidence de M. Bruno Duvergé, président)

La commission spéciale poursuit l’examen du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, d’accélération et de simplification de l’action publique (n° 2750 rect.) (M. Guillaume Kasbarian, rapporteur).

M. le président Bruno Duvergé. Chers collègues, nous poursuivons l’examen des articles du projet de loi, adopté par le Sénat, d’accélération et de simplification de l’action publique.

Nous entamons l’examen de l’article 16.

Article 16 (article L. 1145-1 du code du travail [abrogé] et article 9-1 de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations) : Absorption du conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes par le haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes

La commission examine les amendements de suppression no 129 de Mme Cécile Untermaier, no 448 de M. Gabriel Serville et no 569 de Mme Émilie Cariou.

M. Jérôme Lambert. L’amendement no 129 vise à supprimer l’article 16, afin de revenir sur le transfert des missions du conseil supérieur de l’égalité professionnelle (CSEP) au haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes (HCE). La réorganisation envisagée envoie un mauvais message, alors que l’égalité entre les femmes et les hommes a été déclarée grande cause du quinquennat. Au-delà de la reconnaissance du rôle du conseil supérieur et des travaux qu’il mène – par exemple s’agissant du sexisme en milieu professionnel, de la place des femmes dans les conseils d’administration ou encore de la négociation collective en matière d’égalité –, il s’agit de veiller à sa pérennité, et ce indépendamment du haut conseil à l’égalité, dont la mission est plus globale, à savoir travailler sur les grandes orientations de la politique en matière de droits des femmes et d’égalité. Nous ne souhaitons donc pas que les deux organes soient fusionnés : chacun a sa spécificité et, jusqu’à présent, a indéniablement joué son rôle.

Mme Émilie Cariou. L’amendement no 569 vise lui aussi à revenir sur la fusion des deux instances. Nous considérons que leurs fonctions sont complètement différentes : le haut conseil a une mission large, quand le conseil supérieur de l’égalité professionnelle est une instance paritaire, qui a son mode de fonctionnement propre et qui est très axée sur l’égalité dans le monde professionnel. La fusion ne nous paraît pas du tout aller dans le sens de la garantie du droit des femmes.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Je suis défavorable à ces amendements. En effet, je vous trouve un peu sévères. L’égalité entre les femmes et les hommes, qui est effectivement la grande cause du quinquennat, n’est pas un enjeu que l’on pourrait découper en portions, en distinguant la sphère professionnelle du reste : c’est précisément parce qu’il faut mener une politique globale et inclusive qu’il est nécessaire de consacrer le HCE en tant qu’instance consultative transversale pour l’ensemble des questions liées à l’égalité entre les femmes et les hommes. Cette nouvelle organisation ne signifie pas, bien sûr, que les missions actuellement prises en charge par le CSEP vont disparaître : elles seront au cœur des attributions du HCE, lequel exercera directement le même rôle consultatif que le CSEP pour les projets de réforme législative ou réglementaire relatifs à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. L’évolution proposée améliorera, me semble-t-il, la lisibilité et l’efficacité des actions conduites en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Comme le rapporteur, je suis défavorable à ces amendements. Certaines questions sont traitées dans les deux instances, et il est difficile de bien séparer ce qui relève spécifiquement du conseil supérieur de l’égalité professionnelle et du haut conseil à l’égalité. Du reste, le haut conseil doit pouvoir traiter pleinement des enjeux liés au monde du travail.

Le rapprochement des deux instances a pour objectif de favoriser la mutualisation de leur travail et de leur communication. Nous maintiendrons bien sûr le paritarisme dans la section consacrée à l’égalité professionnelle, et le partenariat avec les élus et les associations sera préservé dans la section dévolue aux droits des femmes.

En tant que ministre de la transformation et de la fonction publiques, je fais mienne la priorité de féminiser un certain nombre de postes, notamment de direction et d’encadrement supérieur. L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est une priorité, dans le secteur privé comme dans le secteur public. L’existence de deux instances rend en fait peu lisible l’action de l’une et de l’autre ; les faire travailler ensemble nous aidera à avancer. Ce n’est pas parce que l’égalité professionnelle ne sera pas dissociée du reste qu’elle ne sera plus traitée – au contraire.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel no 585 du rapporteur.

Elle est saisie de l’amendement no 154 M. Jean-Marie Fiévet.

M. Jean-Marie Fiévet. Cet amendement a pour objectif d’assurer la représentation de chaque niveau de collectivités territoriales au sein du haut conseil à l’égalité, car elles sont directement concernées par les politiques publiques. Cet amendement procède d’une idée qui nous tient à coeur, au sein du groupe LaREM : les territoires devraient être davantage associés aux décisions publiques, surtout en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. La composition du HCE relève du niveau réglementaire. J’ajoute que le décret du 26 février 2019, qui énumère la qualité des membres du HCE, satisfait déjà l’objectif que vous poursuivez, car son article 1er prévoit la présence de conseillers régionaux, départementaux et municipaux. Je me permets donc de vous demander de retirer votre amendement. À défaut, j’y serais défavorable.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Même avis que le rapporteur : les précisions concernant les nominations au sein du HCE ne sont pas du ressort de la loi. Par ailleurs, le décret cité précise déjà bien les choses et inclut des représentants des collectivités territoriales.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel no 584 du rapporteur.

Elle adopte l’article 16 modifié.

Après l’article 16

La commission examine l’amendement no 449 de M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Cet amendement vise à élargir la possibilité de saisine de la commission de conciliation en matière de documents d’urbanisme. En effet, la multiplication des documents de planification et de prospective en matière d’aménagement du territoire a pour corollaire l’augmentation des situations litigieuses entre les collectivités locales, les citoyens et l’État. Il s’agit donc de favoriser le dialogue en faisant intervenir la commission départementale de conciliation, pour faire en sorte que les documents d’urbanisme soient plus consensuels.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Cet amendement relève du domaine réglementaire : avis défavorable.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. J’ajoute que, la semaine dernière, en conseil des ministres, a été présentée une disposition visant justement à simplifier la coordination entre les schémas de cohérence territoriale (SCOT), les plans locaux d’urbanisme (PLU) et les plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) : nous essayons vraiment de ne pas alourdir les procédures. Évidemment, les élus communaux des territoires limitrophes sont toujours consultés pour avis sur des documents d’urbanisme. Élargir la possibilité de saisine à tout le département, voire à une maille encore plus large, ne nous semble pas aller dans le sens que nous souhaitons, à savoir celui de la simplification. Par ailleurs, comme le disait M. le rapporteur, la présence des élus locaux et des personnalités qualifiées relève de l’ordre réglementaire.

La commission rejette l’amendement.

Article 16 bis A (articles L. 1512-6 à L. 1512-18 du code des transports [abrogés]) : Suppression du fonds pour le développement de l’intermodalité dans les transports

La commission adopte l’article 16 bis A sans modification.

Article 16 bis (article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime) : Modification de la composition des commissions départementales de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers

La commission examine les amendements de suppression no 693 du rapporteur, no 333 de Mme Mathilde Panot, no 395 de Mme Agnès Thill, no 502 de M. Stéphane Baudu et no 567 de Mme Émilie Cariou.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. L’article 16 bis a été ajouté par le Sénat pour instaurer, au sein des commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), une parité entre les élus locaux, d’une part, et les autres catégories de membres les composant, d’autre part, à savoir des professions agricoles et forestières, les chambres d’agriculture, les organismes nationaux à vocation agricole et rurale, des propriétaires fonciers, des notaires, des associations agréées de protection de l’environnement et des fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs. Or les élus locaux disposent d’ores et déjà de sièges au sein de ces commissions, dont la composition, définie au niveau réglementaire, vise à représenter de façon équilibrée toutes les parties concernées par le développement du territoire. Les avis de ces commissions, le plus souvent consultatifs, permettent de rendre compte de cette large concertation, marquée par un souci de pluralisme. Le présent amendement vise donc à maintenir en l’état la composition du CDPENAF en supprimant cet article.

Mme Mathilde Panot. L’amendement no 333 a lui aussi pour objectif de supprimer l’article : nous pensons qu’il déséquilibre la composition des commissions départementales de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers. Imposer 50 % d’élus locaux risquerait de créer une majorité artificielle et d’amoindrir fortement le rôle de la société civile, qui doit, selon nous, impérativement être partie prenante de la bifurcation écologique et solidaire – en l’espèce, de la préservation des espaces naturels.

M. Philippe Bolo. S’il avait été présent pour défendre l’amendement no 502, dont il est le premier signataire, M. Baudu vous aurait dit qu’il est inutile de renforcer le poids des élus locaux au sein de ces commissions dont l’objectif est de leur fournir un avis argumenté.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. J’ai comme l’impression qu’il y a une convergence de vues. Nous avons d’ores et déjà une instance de dialogue dont la composition est équilibrée au regard des différents intérêts économiques, agricoles et environnementaux. Ses avis permettent d’éclairer les décisions des collectivités territoriales. Il est d’ailleurs intéressant de noter que, d’après une étude réalisée en 2018 par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, sur la totalité des avis des CDPENAF, simples et conformes, les trois quarts sont favorables aux projets qui leur sont soumis. Cela montre bien qu’on ne saurait prétexter que la composition actuelle des CDPENAF est bloquante et qu’elle nuit au bon déroulement des projets qui leur sont soumis. Je suis donc favorable à la suppression de l’article.

Mme Patricia Lemoine. Ma collègue Laure de La Raudière n’a pas pu défendre son amendement no 400. Je l’avais moi-même cosigné mais, pour une raison qui m’échappe, ce n’est pas indiqué sur le document. Quoi qu’il en soit, je tenais à vous dire que le groupe Agir ensemble est lui aussi tout à fait favorable à la suppression de cet article.

La commission adopte les amendements. En conséquence, l’article 16 bis est supprimé et les amendements nos 130, 81 et 406 tombent.

Après l’article 16 bis

La commission examine l’amendement no 381 de M. Dimitri Houbron.

Mme Patricia Lemoine. Cet amendement vise à inclure les associations de protection de la nature dans les commissions d’indemnisation des dégâts des grands ongulés, corrigeant ainsi une incohérence administrative, car ces associations sont membres des commissions départementales de la faune sauvage, dont sont issues les commissions départementales d’indemnisation des dégâts. Au regard du fait que les dégâts causés par la grande faune sauvage sont exagérés – ils sont soixante fois moins importants que ceux qui découlent des aléas climatiques –, il apparaît cohérent que les associations de protection de la nature aient accès aux documents qui les recensent, à l’échelle départementale et nationale.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Je connais votre engagement sur le sujet, ainsi que celui de M. Houbron. La composition des commissions d’indemnisation des dégâts de gibier est déterminée au niveau réglementaire. Je ne pense pas qu’il soit souhaitable de préciser ces éléments au niveau législatif. Par ailleurs, comme vous le signaliez, les associations de protection de la nature sont membres des commissions départementales de la chasse et de la faune sauvage en formation plénière, lesquelles rendent public l’ensemble des données relatives aux dégâts de gibier, ce qui permet la bonne information de ces associations. Par conséquent, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Aux sages paroles de notre rapporteur, j’ajoute que, un mois avant chaque nouvelle campagne de chasse, les fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs transmettent au préfet et présentent à la commission départementale un bilan des dégâts commis lors de la dernière campagne, par espèce, par unité de gestion cynégétique, en volume, en valeur et en surface. Ces données sont ensuite rendues publiques. Les associations ont donc tous les éléments en leur possession. Par ailleurs, un décret relatif à la maîtrise des populations de grand gibier est en cours d’élaboration. Il prévoit d’ajouter au bilan les données brutes et cartographiées, ce qui concourra à renforcer encore l’obligation d’information. Dès lors que les informations que ces associations veulent avoir sont rendues disponibles, je ne crois pas qu’un élargissement de la composition des commissions soit la meilleure manière de procéder. Pour ces raisons, j’y suis défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 16 ter (nouveau) (articles L. 34-11, L. 35-2, L. 125 [abrogé], L. 131 et         L. 135 [abrogé] du code des transports et article 40 de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne) : Suppression de la commission supérieure du numérique et des postes (CSNP)La commission est saisie de l’amendement no 483 de M. Éric Bothorel.

M. Éric Bothorel. Cet amendement a pour objet de supprimer la commission supérieure du numérique et des postes (CSNP), dans un objectif de simplification, de rationalisation et d’accélération de l’action publique dans le domaine des communications électroniques et des postes.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Nous abordons un sujet éminemment sensible. L’amendement prend acte des dysfonctionnements auxquels la CSNP est confrontée, s’agissant à la fois de son organisation et de son champ d’intervention. Je comprends ce qui motive la demande d’évolution. J’ajoute que la commission des affaires économiques, la commission du développement durable et la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale exercent d’ores et déjà nombre de compétences de la CSNP en matière de contrôle et d’évaluation des activités numériques et postales. Ces commissions assument pleinement ces missions, notamment dans le cadre des auditions qu’elles sont amenées à organiser. J’émets donc un avis favorable sur cet amendement de suppression.

Le sujet est sensible, et je sais qu’un certain nombre de nos collègues sont attachés à cette commission. J’ajoute donc qu’il sera toujours possible d’en rediscuter en séance, d’apporter des modifications. Mais il me paraît important de « cranter » dès maintenant une position, de façon à ce que toutes les parties concernées puissent s’exprimer et, d’ici à l’examen du projet de loi en séance, trouver éventuellement des moyens de substitution, ou des solutions pour résoudre les dysfonctionnements que j’évoquais.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Pour bien éclairer le débat, mais aussi faire preuve de transparence, je précise que j’étais moi-même, en tant que députée, membre de la commission en question. Celle-ci fait des choses très intéressantes, qui devront continuer à faire partie du travail des parlementaires ; d’autres sont plus étonnantes.

Parmi les aspects positifs, il me semble essentiel que les parlementaires conservent un rôle actif dans l’observatoire national de la présence postale, dont les membres sont issus de la commission supérieure du numérique et des postes. De la même manière, il y a tout ce qui touche au contrôle de l’action du Gouvernement, notamment en ce qui concerne la couverture haut débit et le raccordement à la fibre – ce que l’on appelle le « New Deal » avec les opérateurs télécoms, qui est suivi de près par la CSNP.

À côté de cela, certains éléments appellent à examiner la proposition de M. Bothorel avec intérêt, car ils s’inscrivent dans la démarche dont procède le projet de loi. Je pense en particulier au fait qu’il s’agit d’une commission parlementaire, mais totalement financée par le Gouvernement, en l’occurrence avec les  crédits du ministère de l’économie et des finances : si l’on est attaché à la séparation des pouvoirs et à l’effectivité du rôle de contrôle et d’évaluation du Parlement, cela doit interroger. Il me semble essentiel – je sors de mon rôle en disant cela, mais ce ne sera pas le cas très longtemps – que les parlementaires, avec la présidence du Sénat et celle de l’Assemblée, réfléchissent à la manière de reprendre à leur compte les missions de contrôle exercées par la CSNP, de manière à garantir leur effectivité et à s’assurer qu’elles sont accomplies de manière indépendante. Tout en étant donc plutôt favorable à cet amendement, dans les limites que je viens d’indiquer, je m’en remets à la sagesse de la commission spéciale. Il faudra peut-être préciser certaines choses en séance si les parlementaires ne le font pas eux-mêmes.

Mme Christine Hennion. Je souhaite m’exprimer à propos de la CSNP, dont je suis vice-présidente. Nous sortons d’une période pendant laquelle, comme tout un chacun a pu s’en rendre compte, dans le domaine du numérique, la France a tenu. Nous avons également constaté à quel point le numérique était un enjeu extrêmement important pour l’ensemble de la société. Dans le plan de relance, nous allons lui consacrer 7 milliards d’euros, ce qui est plus que significatif. Je sors d’une réunion à l’Élysée consacrée à la French Tech ; le Président de la République a indiqué à quel point le numérique était important. Or nous nous apprêtons à supprimer la seule commission réunissant officiellement des sénateurs et des députés et exerçant un contrôle sur les textes relatifs aux télécommunications , aux postes et au numérique, y compris du point de vue de la mission de service public qui reste à La Poste – un peu aux télécommunications  également, même s’il n’y a plus grand-chose –, et qui se projette dans l’avenir en étudiant toutes les technologies. Voilà qui me semble paradoxal.

L’argument avancé est que la CSNP ralentit les procédures. Cela n’a absolument pas été le cas ces deux dernières années : tous les avis – et ils ont été nombreux – ont été rendus dans les délais, même quand ces derniers étaient courts. C’est une commission qui travaille : elle se réunit tous les quinze jours et est capable de siéger dans les deux à trois jours s’il faut faire vite – c’est ce qui s’est produit pour le texte consacré à la 5G, par exemple : le processus n’a en aucune façon été ralenti.

Il est vrai que la CSNP est financée par Bercy, ce qui est assez incongru. Nous reconnaissons tout à fait que sa gouvernance doit évoluer.

Vous avez évoqué l’observatoire de la présence postale, madame la ministre. Effectivement, comme il dépend de cette commission, si nous votons la suppression pure et simple de cette dernière, il y aura un problème : il faudra absolument étudier comment il pourrait être réintégré dans les textes.

J’en appelle à mes collègues : comment la France pourrait-elle supprimer une commission consacrée spécifiquement à ces aspects alors que tous nos voisins – Allemands, Britanniques, Espagnols – en ont une ?

Dans sa mission de contrôle, elle fait quelque chose qui ne se fait nulle part ailleurs : émettre des avis sur des décrets. Si ses missions sont réintégrées dans le Parlement, elle ne le pourra plus, en raison de la  séparation des pouvoirs.

M. Jérôme Lambert. Merci, madame Hennion, pour ces informations qui sont autant de bons arguments pour considérer qu’il ne faut pas supprimer la CSNP. À entendre les propos des différents intervenants, nous ne pouvons en effet, me semble-t-il, qu’avoir le sentiment qu’elle est très importante. Elle traite de questions primordiales, dont chacun considère qu’il faudra continuer à les suivre – fort bien, mais comment ? On ne le sait pas. Si nous décidions de la supprimer dès à présent, ce que je ne souhaite pas, pas davantage d’ailleurs, me semble-t-il, que les collègues qui se sont exprimés, nous agirions à l’aveugle. Combien de mois seront-ils perdus entre le moment où nous déciderions de la supprimer et celui où elle serait éventuellement recréée ? Quels risques courrions-nous dans l’intervalle ? C’est un enjeu majeur, tout le monde le dit, et il n’est pas nécessaire de supprimer cette commission – bien au contraire. Le groupe Socialistes et apparentés votera donc en faveur de son maintien.

Mme Émilie Cariou. Mes arguments iront dans le même sens que ceux de Mme Hennion. Je trouve étrange que des parlementaires sabrent leurs propres droits de contrôle, même s’il est vrai qu’une véritable commission consacrée au numérique serait encore préférable.

Je suis désolée de vous le dire, monsieur Bothorel, mais le conseil national du numérique n’a pas du tout les mêmes fonctions ; il s’agit d’une autre instance, indépendante, et je ne vois pas comment son travail pourrait s’articuler à celui des parlementaires.

Il serait même dangereux de supprimer la CSNP avant de créer un processus de contrôle différent, permettant d’accomplir toutes les missions dévolues à cette commission.

Je vous le dis franchement : je suis très étonnée que des parlementaires proposent un amendement comme celui-ci.

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Sans méconnaître l’importance de cet organe de contrôle, il est en effet problématique qu’il soit financé par le Gouvernement – et par La Poste, d’ailleurs, puisque des personnels de La Poste y siègent qui sont payés par celle-ci.

Mme Christine Hennion. Non !

Mme Sophie Beaudouin-Hubiere. Ne sont-ils pas juge et partie ?

De plus, l’organe doit être rattaché au Parlement ; or les discussions sur ce point n’avancent pas. En adoptant l’amendement, nous enverrions un message qui pourrait permettre de trouver une solution d’ici à l’examen du texte en séance publique ; les deux assemblées pourraient se mettre d’accord sur les modalités de ce rattachement.

Mme Christine Hennion. Une correction : le secrétaire général de la CSNP y est détaché par La Poste, mais est bien payé par Bercy une fois nommé.

Nous sommes tous d’accord pour dire que certains aspects de la gouvernance de la CSNP doivent évoluer. Mais peut-être faut-il, plutôt que la supprimer purement et simplement, attendre de disposer d’une solution permettant cette évolution.

M. Éric Bothorel. Le mariage de la présence postale et du numérique dans les domaines de compétence de la commission en souligne à lui seul le caractère daté.

D’autres organes informent les parlementaires à ce sujet et peuvent les conseiller, comme l’AVICCA, l’association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel, qui se consacrait à l’origine à la distribution de la télévision et reste active aujourd’hui : la CSNP n’est pas la seule à se prononcer sur le déploiement du plan France Très Haut Débit. De plus, chaque année, notre rapporteur pour avis – Christine Hennion l’a été pendant trois ans – éclaire la réflexion de ses collègues sur les crédits des communications électroniques et de l’économie numérique. Ce n’est pas au sein de la CSNP, où se réunissent députés et sénateurs, que ces travaux ont lieu. En outre, comme Émilie Cariou le sait, d’autres instances se consacrant à la question accueillent des parlementaires – ainsi, Jean-Michel Mis siège au conseil national du numérique. De ce point de vue, la CSNP ne fait nullement exception, contrairement à ce que ma collègue a laissé entendre.

Je suis d’accord avec la ministre quant à la nécessité de préserver l’observatoire national de la présence postale, mais son objet est très éloigné, reconnaissons-le, des enjeux du numérique, en particulier de la couverture numérique du territoire. Nous pouvons donc nous passer de cette commission, sans compter le problème que pose son mode de financement.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il importe que, d’ici à l’examen en séance, des précisions aient été apportées concernant le mandat des parlementaires actuellement membres de la CSNP – et dont la mission doit se poursuivre au moins jusqu’à la fin de la législature – et la reprise par le Parlement de ses travaux en cours. Celle-ci, je le répète, n’est pas de mon ressort : le Gouvernement juge assez baroque le mode de financement de la commission, mais importantes ses missions ; cela étant dit, les parlementaires sont autonomes pour exercer ces missions de contrôle et en organiser la mise en œuvre.

La commission adopte l’amendement.

Article 16 quater (nouveau) (article L. 642-9 du code rural et de la pêche maritime) : Représentation des consommateurs et des associations environnementales au sein des comités nationaux de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO)

Elle examine ensuite l’amendement n° 548 de M. Damien Adam, qui fait l’objet du sous-amendement n° 701 du Gouvernement.

M. Damien Adam. Pour assurer une sorte de « service après censure », mon amendement vise à rétablir l’article 56 de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite EGALIM, article censuré par le Conseil constitutionnel au motif qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.

Il s’agit d’améliorer la représentation des consommateurs au sein des comités nationaux de l’Institut national de l’origine et de la qualité, l’INAO, chargé du contrôle de l’origine et de la qualité de plus de mille produits de notre terroir, en permettant aux représentants d’associations de protection de l’environnement de prendre part aux décisions.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Le sous-amendement du Gouvernement fixe la représentation des associations environnementales au même niveau que celle des consommateurs, parmi les personnalités qualifiées. En outre, il fait entrer la disposition en vigueur au 1er janvier 2022, afin que son application coïncide avec le renouvellement des instances de l’INAO prévu au début de cette année.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Avis favorable à l’amendement : il réintroduit une bonne mesure, que nous avions souhaitée lors de l’examen de la loi EGALIM.

M. le président Bruno Duvergé. Sous réserve de l’adoption du sous-amendement ?

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Oui.

La commission adopte le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement n° 548 sous-amendé.

Article 16 quinquies (nouveau) (articles 4, 5, 6 et 17 de la loi n° 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire) : Réorganisation d’ESS France

Elle en vient ensuite à l’amendement n° 617 du Gouvernement.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Le conseil national des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire, le CNCRESS, a fusionné avec ESS France en juillet. Pour tirer les conséquences de sa suppression, la loi de 2014 relative à l’économie sociale et solidaire est modifiée en vue de préciser qu’ESS France reprend les missions du CNCRESS et que les CRESS sont désormais membres de droit d’ESS France. Il s’agit également de tenir compte du changement de dénomination de la chambre française de l’ESS devenue ESS France.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Avis favorable à cette mesure de simplification organisationnelle dans le secteur de l’économie sociale et solidaire.

La commission adopte l’amendement.

 

TITRE II – DISPOSITIONS RELATIVES À LA DÉCONCENTRATION
DE DÉCISIONS ADMINISTRATIVES INDIVIDUELLES

Article 17 (article L. 361-2 du code de l’éducation, articles L. 212-10 [abrogé],  L. 212-10-1 [nouveau], L. 641-1 et L. 641-3 du code du patrimoine, article L. 480 1 du code de l’urbanisme et articles 2 et 3 de l’ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 relative aux spectacles) : Déconcentration de diverses décisions individuelles dans le domaine de la culture

La commission adopte l’article sans modification.

Article 17 bis (nouveau) (article 795 A du code général des impôts) : déconcentration des décisions de souscription des conventions fiscales relatives à l’ouverture des monuments historiques

La commission est saisie de l’amendement n° 694 du rapporteur.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Il s’agit de déconcentrer une mission jusqu’à présent assurée par les services centraux du ministère de la culture.

L’article 795 A du code général des impôts accorde aux propriétaires de monuments historiques une exonération des droits de mutation à titre gratuit à condition de souscrire une convention à durée indéterminée dans laquelle ils s’engagent notamment à ouvrir le monument au public et à ne pas le vendre.

Cette convention, aujourd’hui souscrite avec le ministre chargé de la culture après avis conforme du ministre chargé du budget, le serait désormais avec les responsables des services déconcentrés du ministère de la culture, à des fins de proximité et de réactivité.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Avis favorable. Les mesures de déconcentration de décisions administratives individuelles, auxquelles est consacré ce titre II, permettent aux services déconcentrés de l’État, qu’ils soient régionaux ou départementaux, de prendre des décisions qui ne relevaient jusqu’à présent que des administrations centrales. Dans certaines situations, en effet, il ne sert de rien de faire remonter les dossiers à Paris : cela allonge les délais, pour une décision qui ne diffère finalement guère de ce que proposent les acteurs de terrain. C’est le cas concernant ces questions culturelles.

La commission adopte l’amendement.

 

Article 17 ter (nouveau) (article L. 523-10 du code du patrimoine) : déconcentration des décisions de règlement des différends en matière d’archéologie préventiveLa commission est saisie de l’amendement n° 618 du Gouvernement.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Nous proposons de simplifier une procédure lourde et complexe d’arbitrage concernant la mise en œuvre de l’archéologie préventive. Cette procédure n’a jamais été utilisée depuis son instauration par la loi de 2003 relative à l’archéologie préventive, car elle n’est pas applicable. Notre solution est simple et rapide : les différends seront directement tranchés par l’autorité administrative compétente, à savoir le préfet de région.

Ce type de procédure de décision est très intéressant : plutôt que d’écrire depuis Paris la liste de ce qu’il faut faire pour chaque éventuelle exception, nous chargeons une autorité compétente de trancher quand la situation est particulièrement complexe.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Article 18 (article L. 612-9 du code de la propriété intellectuelle) : Transfert au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) des décisions relatives à l’interdiction de la divulgation et de la libre exploitation des brevets ainsi qu’à leur prorogation et levée

La commission examine l’amendement n° 586 du rapporteur.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Cet amendement rédactionnel tend à remplacer le mot « intellectuelle » par le mot « industrielle ».

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Avis favorable, même si j’aime à la fois l’industrie et la réflexion !

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 18 modifié.

Article 19 (articles L. 1313-1, L. 1313-5, L. 1321-5, L. 1322-4, L. 1322-13, L. 1431-3, L. 1432-2, L. 1441-5, L. 5123-2, L. 5126-6, L. 5132-6, L. 5132-7, L. 5311-1 et L. 5521-7 du code de la santé publique) : Déconcentration et simplification de certaines décisions administratives dans le champ de la santé

La commission est saisie de l’amendement n° 334 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Nous souhaitons la suppression de l’article, qui conduit à des situations aberrantes du point de vue environnemental. Il fournit un exemple caractéristique de transfert des compétences de l’État à des agences certes publiques, mais dont les conflits d’intérêts sont avérés.

Ainsi, alors que les scientifiques alertent depuis des années sur les dangers des SDHI, pesticides massivement épandus que l’on retrouve dans 60 % de nos aliments et qui seraient à l’origine de cancers, l’ANSES, l’agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, refuse de les interdire au nom du principe de précaution. Or l’une des expertes sollicitée par l’ANSES à ce sujet travaillait précisément au développement de ces pesticides. Comment une autorité pourrait-elle prendre des décisions impartiales et justes si ses membres sont régulièrement mis en cause en raison de conflits d’intérêts, notamment du fait de leurs liens avec l’industrie pharmaceutique ? On pourrait dire la même chose de Monsanto.

Comment notre assemblée pourrait-elle autoriser le préfet à déroger à des règles au nom de l’intérêt général quand il s’agit de nuire directement ou non à la qualité des eaux ? Je le répète, c’est aberrant ǃ Nous refusons que l’on joue ainsi avec la santé des Français et la protection de l’environnement. Des décisions aussi importantes que celles portant sur la qualité des eaux ou des médicaments doivent rester strictement encadrées.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Je ne partage pas du tout ces craintes. Le périmètre des compétences que l’article 19 transfère à l’ANSES et à l’ANSM, l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, est très restreint, et ce transfert ne fait que traduire le rôle prépondérant que ces agences jouent déjà dans la prise de décision du ministre.

Ainsi, actuellement, les agréments dont disposent les laboratoires pour la réalisation des prélèvements et des analyses en vue du contrôle sanitaire de la qualité des eaux leur sont délivrés par le ministre chargé de la santé après une expertise technique réalisée par le laboratoire d’hydrologie de l’ANSES, situé à Nancy. Le ministère chargé de la santé examine la recevabilité du dossier et délivre l’agrément au vu de l’avis de l’ANSES.

De même, l’arrêté du ministre chargé de la santé relatif aux plantes, substances et préparations vénéneuses est pris sur proposition du directeur général de l’ANSM.

Avis défavorable.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je veux d’abord réagir à cette mise en cause directe de l’ANSM et de l’ANSES : personne ne gagne à mettre ainsi en cause ceux qui cherchent à fournir des avis scientifiques éclairés sur des sujets très complexes. Il ne s’agit pas de croyance, de sentiment, de ressenti, mais d’une toxicité qu’il faut évaluer. Il est dangereux de mettre systématiquement en cause les autorités et agences qui sont là pour éclairer les débats citoyens.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Bien sûr, c’est du complotisme !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. On peut souhaiter qu’elles décident autrement, mais partir du principe que, parce qu’il s’agit de l’ANSM ou de l’ANSES, leurs décisions sont contraires à l’intérêt de nos concitoyens et à leur santé est très grave. Le risque, dans notre démocratie, est que les Français ne puissent plus distinguer ceux qui les protègent de ceux qui les exposent à des risques.

Vous l’aurez compris, je ne partage pas vos soupçons de conflits d’intérêts. L’ANSES et l’ANSM offrent de puissantes garanties d’indépendance, et toutes leurs décisions peuvent être contestées devant le juge, de sorte que, si désaccord il y a, il se règle devant les tribunaux et non par des attaques.

M. Ugo Bernalicis. Excellent argument ǃ

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Ces garanties d’indépendance ont été renforcées par la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, dite loi Bertrand. Faudrait-il contester cette loi au motif qu’elle vient d’une personnalité politique à laquelle vous vous opposez ? Ce serait une attaque ad hominem. Ne mélangeons pas la politique et les procès en légitimité.

Avis défavorable.

M. Ugo Bernalicis. Il est très intéressant que vous parliez de décisions de justice, madame la ministre : en 2019, c’est un tribunal qui a invalidé l’avis de l’ANSES sur le Roundup Pro 360, parce que l’agence n’avait fait analyser qu’une seule des molécules qui composent celui-ci. Cette affaire a d’ailleurs suscité une petite polémique, car la directrice de cabinet du directeur de l’agence, lequel a évidemment fait appel de la décision, était lobbyiste pour le compte de laboratoires fabriquant des pesticides. Vous avez raison : foin de l’ère du soupçon, fondons-nous sur des faits avérés et incontestables ǃ

Pour le reste, quand il s’agit de transférer des compétences de ministères certes imparfaits – peut-être seraient-ils mieux gérés sous une autre majorité, mais c’est une autre histoire – à des organismes qui n’apportent pas les garanties que vous prétendez donner, ce ne sont pas des craintes que nous nourrissons, monsieur le rapporteur : nous nous y opposons ǃ

Les conflits d’intérêts dont nous parlons ne sont pas de l’histoire ancienne : en témoignent la décision de justice que je viens d’évoquer ainsi que de nombreux articles de presse. Peut-être les journalistes mentent-ils, et peut-être leur fera-t-on des procès en diffamation qui demanderont à la justice qu’elle tranche, mais je ne le crois pas. Les faits plaident plutôt pour nous ǃ

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels n°s 255, 264, 270, 276 et 281 du rapporteur.

Puis elle aborde l’amendement n° 666 du rapporteur.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. C’est un amendement d’amélioration juridique.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Favorable. Il touche à la vie quotidienne des Français : il s’agit des vaccins à usage réservé, imposés ou conseillés pour certains voyages, qui n’ont pas vocation à être inscrits sur la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux. Désormais, les choses seront beaucoup plus simples : les centres de vaccination seront autorisés à les acheter et à les utiliser.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel n° 285 du rapporteur.

Elle examine l’amendement n° 498 de Mme Séverine Gipson.

M. Jean-Marie Fiévet. Afin que leur pérennité soit garantie, nos pharmaciens ont besoin de pouvoir exercer leur activité dans des communes ayant des médecins. Un grand nombre de patients font régulièrement exécuter leurs prescriptions médicales en sortant de chez leur médecin, au plus près du cabinet de ce dernier. Dans les zones rurales, le pharmacien qui possède une officine dans un village qui a vu son dernier médecin partir à la retraite ou changer de commune subit une perte de clientèle. L’amendement donnera la priorité aux demandes de transfert des officines situées dans des communes qui ne possèdent plus de prescripteur.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Je comprends totalement votre préoccupation. Nous avons auditionné la semaine dernière, pendant une heure et demie, des représentants de l’ordre des pharmaciens. Néanmoins, j’ai l’impression que cet amendement pourrait conduire à déséquilibrer le maillage territorial en privant les habitants de petits bourgs ruraux d’un accès aisé aux pharmacies. Les conséquences pourraient donc être à l’opposé de ce que vous souhaitez. Je vous propose de travailler sur ce sujet d’ici à l’examen en séance, en mettant dans la boucle l’ordre des pharmaciens et en vérifiant les conséquences pratiques sur le terrain. Si l’ordre des pharmaciens juge que c’est positif, nous pourrons avancer ; sinon, il vaudrait mieux s’abstenir. Je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je comprends bien qu’une pharmacie qui n’a plus de prescripteur à proximité ait un peu moins de fréquentation, mais il faut aussi prendre en compte la télémédecine – il y a eu, très récemment, plus d’un million de consultations par semaine dans ce cadre. Les élus locaux encouragent fortement le développement de la télémédecine, notamment au moyen de cabines. Il serait dommage qu’une commune ou un bassin rural n’ait plus de pharmacie car cela réduirait l’intérêt de la prescription à distance. Je n’ai pas d’avis définitif, mais je crois qu’il y a des points à retravailler. Il ne faudrait pas affaiblir le maillage en services publics ou la capacité à avoir à proximité des choses utiles pour la vie quotidienne.

M. Jérôme Lambert. Vous venez de m’enlever, madame la ministre, la primeur de l’argument que je voulais mettre en avant. J’ai des exemples dans ma propre circonscription : il reste parfois une pharmacie mais il n’y a plus de médecin. Cela pose parfois des difficultés – pas toujours… On va mettre le paquet, sans doute à raison, sur les téléprescriptions qui permettent, où que l’on soit, à 50 kilomètres du médecin prescripteur ou davantage, de se rendre à la pharmacie de son village, si elle existe encore. Nous avions un maillage en pharmacies relativement bon, en raison d’un règlement ancien. Si on commence à y toucher, on risque de relancer des guerres territoriales et de désertifier encore un peu plus l’offre médicale, dont la pharmacie fait partie. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Mme Sereine Mauborgne. Ma Santé 2022 avait pour objet de créer des cadres d’expérimentation pour de nouveaux modes de cohabitation interprofessionnelle et de rémunération afin de contrebalancer les pertes de chiffres d’affaires liées au départ des praticiens.

L’amendement n° 498 est retiré.

La commission adopte l’article 19 modifié.

Après l’article 19

La commission examine l’amendement n° 619 du Gouvernement.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Cet amendement permettra à des établissements publics dits territorialisés, comme les agences de l’eau, les parcs nationaux, les établissements publics fonciers ou d’aménagement, mais aussi les ports maritimes, de déroger au principe législatif de spécialité pour mutualiser leurs fonctions support avec des établissements similaires opérant dans d’autres parties du territoire. Plusieurs établissements publics administratifs pourront, par exemple, créer une fonction support commune pour bénéficier de gains de productivité ou de mutualiser des services qu’il serait plus intéressant d’avoir en commun. On pourra simplifier les règles de fonctionnement au sein des administrations, notamment afin de gagner en productivité et peut-être aussi en expertise pour certaines fonctions support très techniques.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Avis favorable.

Mme Émilie Cariou. Cet amendement est extrêmement large, et nous n’avons aucune étude d’impact. On pourrait faire ce qu’on veut au sein des administrations, n’importe où en France. Alors qu’on observe une volonté de remettre du service public dans les territoires, vous voulez les reconcentrer je ne sais où. Nous ne pouvons pas nous prononcer à l’aveugle.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il ne faut pas qu’il y ait de malentendus : nous ne reconcentrerons rien. Nous dirons à des structures territorialisées similaires qu’elles pourront, si elles le souhaitent, mettre en commun des ressources. Si les parcs naturels régionaux voulaient créer un portail et une gestion en commun de leurs fonctions de marketing – mais je ne sais pas s’ils le voudraient – ils ne pourraient pas le faire à l’heure actuelle. Juridiquement, le principe de spécialité ne permet pas aux fonctions support de ces organismes d’être mutualisées. Chacun doit travailler chez soi. On voit bien l’intérêt qu’il peut y avoir, pour certaines structures, à mutualiser des fonctions. Il n’y aura pas de reprise en main puisque l’État central n’est en rien lié à de telles initiatives : ce sont les organismes concernés qui pourront mettre en commun des ressources.

Mme Émilie Cariou. On pourrait comprendre si votre amendement était un peu plus cadré, mais l’expression « fonctions support » est extrêmement large, et il n’y a pas d’étude d’impact. Tout cela n’a pas été analysé par le Conseil d’État. En l’état actuel, vous nous demandez un chèque en blanc.

M. Ugo Bernalicis. Il n’y aurait pas de lien avec l’État central… Mais on sait le chantage que vous avez exercé sur les subventions ou les dotations publiques de ces établissements, en leur disant qu’ils auraient peut-être un intéressement ou que leurs dotations seraient peut-être revues à la hausse en cas de mutualisation des fonctions support – les ressources humaines, la comptabilité, la paie…

C’est de cela qu’il s’agit, plutôt que de portails communs. Il n’y a aucun problème pour que des établissements publics se mettent d’accord pour en avoir. La décision peut être prise en conseil d’administration et chacun met alors un peu la main à la pâte. Je pense, par exemple, aux centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), qui sont des établissements publics autonomes, dotés d’une comptabilité propre. Ils ont les mêmes outils et les mêmes fonctionnalités. Il y a aussi les universités. Ne dites pas que ce que vous proposez n’est pas possible : c’est déjà le cas dans la réalité.

En fait, vous voulez encore réaliser des économies de bouts de chandelle, en éloignant des fonctions support des territoires, ce qui conduit à des aberrations. On l’a vu avec la gestion de la paie au niveau de l’État : on a voulu tout concentrer, tout mutualiser, puis on s’est rendu compte qu’il fallait quand même garder un peu de liens avec les gens, sur leur lieu de travail. Je vois bien la fuite en avant qui aura lieu, sous couvert de bonne gestion, de simplification, car c’est toujours la même chose…

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Un décret en Conseil d’État précisera les modalités. Les éventuels doutes sur la constitutionnalité et la légalité du dispositif seront examinés par le Conseil d’État.

M. Vincent Thiébaut. Au nom du groupe La République en Marche, je soutiens cet amendement qui va dans le bon sens. Pouvoir mutualiser certaines fonctions qui ne sont pas nécessairement spécifiques permettra peut-être d’avoir plus de moyens pour se concentrer sur les véritables missions au plan territorial. Par ailleurs, cet amendement s’inscrit dans une vraie logique de décloisonnement des services publics. C’est une opportunité pour leur personnel.

M. Ugo Bernalicis. Mais de quel décloisonnement parlez-vous ? Croyez-vous que l’on ne se parle pas entre établissements publics appartenant aux mêmes réseaux et ayant les mêmes champs de compétence ? Pensez-vous que les parcs naturels régionaux ne parlent pas avec leurs homologues ? Bien sûr que si. On échange des bonnes pratiques, on se voit. Ce que vous demandez, ce sont des économies d’échelle, comme d’habitude, en fusionnant pour faire en sorte qu’il y ait une grosse gestion de la paie, des ressources humaines, centralisée par grandes régions. Assumez-le au lieu de nous parler de portail ou de je ne sais pas quoi d’autre encore. Ce n’est pas la question. Malgré le recul des services publics, vous voulez encore supprimer des postes. Assumez-le.

La commission adopte l’amendement.

Article 19 bis (article L. 1123-7 du code de la santé publique) : Simplification des procédures applicables aux recherches non interventionnelles ne portant pas sur un produit de santé

La commission est saisie de l’amendement n° 542 de Mme Sereine Mauborgne.

Mme Sereine Mauborgne. L’alinéa 9 de cet article instaure un contrôle a posteriori du comité de protection des personnes en ce qui concerne la procédure pour les recherches non interventionnelles, ce qui est contraire à l’esprit initial du projet de loi : il tendait à simplifier le dépôt des dossiers et à ne pas alourdir les procédures pour des recherches qui ne sont pas les plus à risque. La suppression de cet alinéa permettra de revenir au texte initial et de simplifier réellement la procédure.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Avis favorable.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Même avis. Ajouter des contrôles pour des recherches ne présentant pas de risque ne correspond pas à l’objet du projet de loi. Je vous remercie pour cet amendement.

La commission adopte l’amendement.

Après avis favorable de la ministre, la commission adopte l’amendement rédactionnel n° 289 du rapporteur.

Elle adopte l’article 19 bis modifié.

Article 19 ter (article L. 521-2 du code de l’environnement) : Simplification de la délivrance des certificats de conformité aux bonnes pratiques pour les laboratoires d’essais dans le champ de la santé et de l’environnement

La commission examine l’amendement n° 290 du rapporteur.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel. Nous enlèverons simplement un « s ».

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il est toujours important de faire les accords (Sourires). Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 19 ter modifié.

Article 20 (article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales) : Agrément des dispositifs de traitement dans les installations d’assainissement non collectif

Après avis favorable de la ministre, la commission adopte l’amendement rédactionnel n° 293 du rapporteur.

Elle examine l’amendement n° 667 du rapporteur.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. C’est un amendement rédactionnel.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Presque. Il s’agit d’aligner la terminologie retenue par la loi française sur celle du droit de l’Union européenne.

M. Guillaume Kasbarian, rapporteur. Après la deuxième occurrence du mot « à », nous rédigerons ainsi la fin de l’alinéa 4 : « une nouvelle évaluation d’une demande d’agrément qu’il a instruite ».

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 20 modifié.

M. le président Bruno Duvergé. Nous avons achevé l’examen des articles des titres Ier et II du projet. Je remercie Mme la ministre pour sa présence parmi nous.

 

La séance est levée à 22 heures 40.

 

 

 

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Membres présents ou excusés

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique

Réunion du lundi 14 septembre 2020 à 21 h 35

Présents. - M. Damien Adam, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Ugo Bernalicis, Mme Barbara Bessot Ballot, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, Mme Pascale Boyer, Mme Danielle Brulebois, Mme Émilie Cariou, Mme Anne-Laure Cattelot, Mme Bérangère Couillard, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Bruno Duvergé, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Christine Hennion, Mme Catherine Kamowski, M. Guillaume Kasbarian, M. Jacques Krabal, M. Jérôme Lambert, Mme Annaïg Le Meur, Mme Patricia Lemoine, Mme Sereine Mauborgne, Mme Monica Michel, Mme Mathilde Panot, Mme Isabelle Rauch, M. Gabriel Serville, M. Buon Tan, M. Vincent Thiébaut, Mme Agnès Thill

Excusés. - M. Thibault Bazin, M. Julien Dive, Mme Paula Forteza, Mme Laure de La Raudière, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Cécile Untermaier, M. Philippe Vigier

Assistaient également à la réunion. - Mme Danièle Obono, Mme Frédérique Tuffnell