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N° 675

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 février 2018.

PROPOSITION DE LOI

portant transposition de la directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection des savoirfaire et des informations commerciales
non divulgués contre lobtention, lutilisation et la divulgation illicites,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Raphaël GAUVAIN, Richard FERRAND, Naïma MOUTCHOU, Bérangère ABBA, Sophie BEAUDOUINHUBIÈRE, Grégory BESSONMOREAU, Pascal BOIS, Carole BUREAUBONNARD, Céline CALVEZ, Philippe CHALUMEAU, Yolaine de COURSON, Jennifer De TEMMERMAN, Françoise DUMAS, Éric GIRARDIN, Christine HENNION, Daniel LABARONNE, Jacques MARILOSSIAN, Didier MARTIN, Denis MASSEGLIA, Sereine MAUBORGNE, Claire O’PETIT, Xavier PALUSZKIEWICZ, Hervé PELLOIS, Patrice PERROT, Véronique RIOTTON, Laurent SAINTMARTIN, Stéphane TESTÉ, Vincent THIÉBAUT, Corinne VIGNON et les membres du groupe La République en Marche et apparentés (1),

députés.

____________________________

(1) Mesdames et Messieurs : Caroline Abadie, Bérangère Abba, Damien Adam, Saïd Ahamada, Éric Alauzet, François André, Aude Amadou, Patrice Anato, Pieyre‑Alexandre Anglade, Jean‑Philippe Ardouin, Christophe Arend, Gabriel Attal, Laetitia Avia, Florian Bachelier, Delphine Bagarry, Didier Baichère, Frédéric Barbier, Xavier Batut, Sophie Beaudouin‑Hubiere, Belkhir Belhaddad, Aurore Bergé, Hervé Berville, Grégory Besson‑Moreau, Barbara Bessot Ballot, Anne Blanc, Christophe Blanchet, Yves Blein, Pascal Bois, Bruno Bonnell, Aude Bono‑Vandorme, Julien Borowczyk, Éric Bothorel, Florent Boudié, Brigitte Bourguignon, Bertrand Bouyx, Pascale Boyer, Yaël Braun‑Pivet, Jean‑Jacques Bridey, Blandine Brocard, Anne Brugnera, Danielle Brulebois, Anne‑France Brunet, Stéphane Buchou, Carole Bureau‑Bonnard, Pierre Cabaré, Céline Calvez, Émilie Cariou, Anne‑Laure Cattelot, Lionel Causse, Danièle Cazarian, Jean‑René Cazeneuve, Sébastien Cazenove, Anthony Cellier, Jean‑François Cesarini, Émilie Chalas, Philippe Chalumeau, Annie Chapelier, Sylvie Charrière, Fannette Charvier, Philippe Chassaing, Guillaume Chiche, Stéphane Claireaux, Mireille Clapot, Jean‑Michel Clément, Christine Cloarec, Jean‑Charles Colas‑Roy, Fabienne Colboc, François Cormier‑Bouligeon, Bérangère Couillard, Yolaine de Courson, Michèle Crouzet, Dominique Da Silva, Olivier Damaisin, Yves Daniel, Dominique David, Jennifer De Temmerman, Typhanie Degois, Marc Delatte, Michel Delpon, Nicolas Démoulin, Frédéric Descrozaille, Christophe Di Pompeo, Benjamin Dirx, Jean‑Baptiste Djebbari, Stéphanie Do, Loïc Dombreval, Jacqueline Dubois, Christelle Dubos, Coralie Dubost, Nicole Dubré‑Chirat, Audrey Dufeu Schubert, Françoise Dumas, Frédérique Dumas, Stella Dupont, Jean‑François Eliaou, Sophie Errante, Christophe Euzet, Catherine Fabre, Élise Fajgeles, Valéria Faure‑Muntian, Jean‑Michel Fauvergue, Richard Ferrand, Jean‑Marie Fiévet, Philippe Folliot, Emmanuelle Fontaine‑Domeizel, Pascale Fontenel‑Personne, Paula Forteza, Alexandre Freschi, Jean‑Luc Fugit, Olivier Gaillard, Albane Gaillot, Grégory Galbadon, Thomas Gassilloud, Raphaël Gauvain, Laurence Gayte, Anne Genetet, Raphaël Gérard, Séverine Gipson, Éric Girardin, Joël Giraud, Olga Givernet, Valérie Gomez‑Bassac, Guillaume Gouffier‑Cha, Perrine Goulet, Fabien Gouttefarde, Carole Grandjean, Florence Granjus, Romain Grau, Olivia Gregoire, Émilie Guerel, Stanislas Guerini, Marie Guévenoux, Nadia Hai, Véronique Hammerer, Yannick Haury, Christine Hennion, Pierre Henriet, Danièle Hérin, Alexandre Holroyd, Dimitri Houbron, Sacha Houlié, Philippe Huppé, Monique Iborra, Jean‑Michel Jacques, Caroline Janvier, Christophe Jerretie, François Jolivet, Sandrine Josso, Hubert Julien‑Laferriere, Catherine Kamowski, Guillaume Kasbarian, Stéphanie Kerbarh, Yannick Kerlogot, Loïc Kervran, Fadila Khattabi, Anissa Khedher, Rodrigue Kokouendo, Jacques Krabal, Sonia Krimi, Aina Kuric, Mustapha Laabid, Daniel Labaronne, Amal‑Amélia Lakrafi, François‑Michel Lambert, Anne‑Christine Lang, Frédérique Lardet, Jean‑Charles Larsonneur, Michel Lauzzana, Célia de Lavergne, Fiona Lazaar, Marie Lebec, Gaël Le Bohec, Jean‑Claude Leclabart, Charlotte Lecocq, Sandrine Le Feur, Didier Le Gac, Gilles Le Gendre, Martine Leguille‑Balloy, Christophe Lejeune, Annaïg Le Meur, Marion Lenne, Nicole Le Peih, Roland Lescure, Fabrice Le Vigoureux, Monique Limon, Richard Lioger, Brigitte Liso, Alexandra Louis, Marie‑Ange Magne, Sylvain Maillard, Laurence Maillart‑Méhaignerie, Jacques Maire, Jacqueline Maquet, Jacques Marilossian, Sandra Marsaud, Didier Martin, Denis Masséglia, Fabien Matras, Sereine Mauborgne, Stéphane Mazars, Jean François Mbaye, Graziella Melchior, Ludovic Mendes, Thomas Mesnier, Marjolaine Meynier‑Millefert, Monica Michel, Thierry Michels, Patricia Mirallès, Jean‑Michel Mis, Paul Molac, Amélie de Montchalin, Sandrine Mörch, Jean‑Baptiste Moreau, Adrien Morenas, Cendra Motin, Naïma Moutchou, Cécile Muschotti, Sébastien Nadot, Mickaël Nogal, Delphine O, Claire O’Petit, Valérie Oppelt, Matthieu Orphelin, Catherine Osson, Xavier Paluszkiewicz, Sophie Panonacle, Didier Paris, Zivka Park, Hervé Pellois, Alain Perea, Patrice Perrot, Pierre Person, Anne‑Laurence Petel, Valérie Petit, Bénédicte Peyrol, Michèle Peyron, Damien Pichereau, Laurent Pietraszewski, Béatrice Piron, Claire Pitollat, Barbara Pompili, Jean‑Pierre Pont, Jean‑François Portarrieu, Benoit Potterie, Éric Poulliat, Natalia Pouzyreff, Bruno Questel, Cathy Racon‑Bouzon, Pierre‑Alain Raphan, Isabelle Rauch, Rémy Rebeyrotte, Hugues Renson, Cécile Rilhac, Véronique Riotton, Stéphanie Rist, Marie‑Pierre Rixain, Mireille Robert, Laëtitia Romeiro Dias, Xavier Roseren, Laurianne Rossi, Gwendal Rouillard, Cédric Roussel, Thomas Rudigoz, Pacôme Rupin, Laurent Saint‑Martin, Laëtitia Saint‑Paul, Nathalie Sarles, Jacques Savatier, Jean‑Bernard Sempastous, Olivier Serva, Benoit Simian, Thierry Solère, Denis Sommer, Joachim Son‑Forget, Bertrand Sorre, Bruno Studer, Sira Sylla, Aurélien Taché, Marie Tamarelle‑Verhaeghe, Buon Tan, Liliana Tanguy, Adrien Taquet, Jean Terlier, Stéphane Testé, Vincent Thiébaut, Agnès Thill, Sabine Thillaye, Valérie Thomas, Alice Thourot, Huguette Tiegna, Jean‑Louis Touraine, Alain Tourret, Élisabeth Toutut‑Picard, Nicole Trisse, Stéphane Trompille, Frédérique Tuffnell, Alexandra Valetta Ardisson, Manuel Valls, Laurence Vanceunebrock‑Mialon, Olivier Véran, Marie‑ChristineVerdier‑Jouclas, Annie Vidal, Patrick Vignal, Corinne Vignon, Cédric Villani, Guillaume Vuilletet, Martine Wonner, Hélène Zannier, Jean‑Marc Zulesi.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les entreprises investissent dans le développement et la mise en œuvre de savoir‑faire et d’informations, qui vont des connaissances technologiques aux données commerciales telles que les informations relatives aux clients et aux fournisseurs, les plans d’affaires ou les études et stratégies de marché. Ces savoir‑faire et informations, lorsqu’ils ne peuvent pas être pleinement exploités et diffusés, et partant couverts par un droit de propriété intellectuelle, doivent demeurer confidentiels, dans l’intérêt de l’entreprise en ce qu’ils constituent la base de ses capacités de recherche et développements. Ils méritent par conséquent de bénéficier d’une protection adéquate.

L’objectif de la directive 2016/943/UE du 8 juin 2016 sur la protection des savoir‑faire et des informations commerciales non divulguées est d’établir un niveau suffisant, proportionné et comparable de réparation dans tout le marché intérieur en cas d’appropriation illicite.

Elle invite également les États membres à veiller à ce que la mise en place du dispositif de protection du secret des affaires ne modifie pas le cadre juridique permettant de protéger l’exercice du droit à la liberté d’expression et de communication, les droits des salariés à l’information, à la consultation et à la participation, ainsi que les lanceurs d’alertes et plus largement toute personne qui révèle une information visant à la protection d’un intérêt légitime reconnu par le droit de l’Union Européenne ou le droit national.

La transposition de cette directive impose des modifications de niveau législatif avant le 9 juin 2018. C’est l’objet de cette proposition de loi qui comporte deux articles.

L’article 1er a pour objet la création d’un nouveau titre V du livre Ier du code de commerce intitulé « De la protection des secrets des affaires ». Il comprend trois chapitres.

Le chapitre Ier définit le secret des affaires et fixe les conditions dans lesquelles la protection du secret est accordée. Il est divisé en quatre sections.

La première section comprend un article L. 151‑1 qui définit la notion de secret des affaires. Cette définition reprend les trois critères prévus par l’article 2 de la directive, directement inspirés de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) : une information connue par un nombre restreint de personnes, ayant une valeur commerciale en raison de son caractère secret et qui fait l’objet de mesures particulières de protection. L’information a une valeur commerciale, par exemple, lorsqu’elle constitue, pour son détenteur, un élément de son potentiel scientifique et technique, de ses intérêts économiques ou financiers, de ses positions stratégiques ou de sa capacité concurrentielle. Dès lors qu’une information présente l’ensemble de ces caractéristiques, elle peut faire l’objet d’une protection dans les conditions prévues par le nouveau titre V du livre Ier, indépendamment du support sur lequel elle peut être incorporée.

La deuxième section est composée d’un article L. 151‑2 consacré aux détenteurs légitimes du secret des affaires.

La troisième section, composée des articles L. 151‑3 à L. 151‑5, précise les conditions dans lesquelles l’obtention, d’utilisation et de divulgation du secret des affaires sont illicites et susceptibles en conséquence d’engager la responsabilité civile de l’auteur de ces atteintes devant les juridictions compétentes.

Enfin, la quatrième section, qui comprend un article L. 151‑6, prévoit les cas de dérogation à la protection du secret des affaires, nécessaires pour, notamment, garantir le respect de droits fondamentaux.

Ainsi, le I de l’article L. 151‑6 précise que le secret des affaires n’est pas protégé lorsque l’obtention, l’utilisation ou la divulgation du secret est requise ou autorisée par le droit de l’Union ou le droit national. Ainsi, le dispositif de protection du secret des affaires désormais prévu au sein du code de commerce ne porte pas atteinte à l’application des règles permettant aux autorités publiques de recueillir, divulguer ou utiliser des informations dans l’exercice de leurs fonctions.

Sont ensuite énoncés les cas de dérogations permettant de protéger :

– l’exercice du droit à la liberté d’expression et de communication et, en particulier, le respect de liberté de la presse ;

– la révélation de bonne foi d’une faute, d’un acte répréhensible ou d’une activité illégale dans le but de protéger l’intérêt public général, correspondant à la protection des lanceurs d’alerte, y compris lors de l’exercice du droit d’alerte tel que défini par l’article 6 de la loi n° 2016‑1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ;

– la révélation d’une information pour la protection d’un intérêt légitime reconnu par le droit de l’Union ou le droit national ; il peut s’agir par exemple d’un motif d’intérêt général tel que l’ordre public, la sécurité publique ou encore la santé publique.

Le II de l’article L. 151‑6 est relatif à la situation des salariés ou des représentants du personnel qui, dans le cadre de l’exercice d’un droit à l’information et à la consultation prévue par le droit national ou le droit de l’Union ou du droit syndical, peuvent avoir connaissance d’informations relevant du secret des affaires. En application de cette disposition, si l’information est obtenue, utilisée ou divulguée dans les conditions qui y sont prévues, ces salariés ou ces représentants du personnel ne pourront pas être sanctionnés en application des dispositions prévues par la présente proposition de loi.

Le chapitre II prévoit les mesures pouvant être adoptées par les juridictions dans le cadre d’une action ayant pour objet la prévention, la cessation ou la réparation d’une atteinte au secret des affaires.

L’article L. 152‑2 du code de commerce énonce les mesures qui peuvent notamment être prononcées par la juridiction saisie au fond de l’action. Ces mesures portent sur la prévention d’une atteinte ou l’interdiction de toute forme d’atteinte au secret des affaires, la destruction totale ou partielle de l’objet issu de la violation du secret, sa confiscation, voire sa remise totale ou partielle au demandeur.

Ces mesures peuvent être prescrites sous astreinte, sans préjudice de l’octroi de dommages et intérêts. Elles sont en principe ordonnées aux frais de l’auteur de l’atteinte et leur durée doit être suffisante pour éliminer tout avantage commercial ou économique injustifié.

Dans certaines circonstances, le versement d’une indemnité spécifique à la partie lésée en remplacement des mesures prévues à l’article L. 152‑2 peut être justifié. Il peut être ordonné par la juridiction saisie dans les conditions prévues à l’article L. 152‑4 du code de commerce. Cet article traite en particulier de l’hypothèse où l’auteur de l’atteinte ne savait pas, ni ne pouvait savoir que le secret des affaires avait été obtenu d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite.

Le préjudice subi par la victime de l’atteinte au secret des affaires doit être intégralement réparé, dans toutes ses composantes, le manque à gagner, la perte subie et le préjudice moral. Les dommages et intérêts fixés par la juridiction doivent également prendre en considération les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte au secret des affaires, comme les économies de recherche et développement réalisées. L’article L. 152‑3 du code de commerce prévoit en outre que la juridiction peut, de manière alternative et sur demande de la partie lésée, allouer une somme forfaitaire à titre de dommages et intérêts, sans que cette somme ne soit exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé.

En complément des mesures prises pour la prévention, la cessation ou la réparation de l’atteinte au secret des affaires, la juridiction peut ordonner la publication de la décision judiciaire, en prenant en considération les circonstances dans lesquelles l’atteinte est intervenue. Lorsque de telles mesures sont ordonnées, l’article L. 152‑5 du code de commerce prévoit qu’elles le sont de manière à protéger le secret des affaires et aux frais de l’auteur de l’atteinte.

Enfin, la protection du caractère confidentiel du secret des affaires doit être assurée au plan procédural.

C’est l’objet du chapitre III qui prévoit des mesures de protection au cours des actions en prévention, cessation ou réparation d’une atteinte au secret des affaires.

L’article L. 153‑1 du code de commerce prévoit ainsi la possibilité pour le juge, d’une part, de décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée hors la présence du public, d’autre part, d’adapter la motivation de sa décision aux nécessités de la protection du secret des affaires, par dérogation aux principes de publicité des débats et des décisions. L’article L. 153‑2 du même code précise que toute personne ayant accès à une pièce dont le contenu est susceptible d’être couvert par le secret des affaires est tenue à une obligation de confidentialité. Cette obligation ne s’applique pas aux personnes habilitées à assister ou représenter les parties à l’égard de celles‑ci. Afin de garantir l’effectivité de cette obligation, le dernier alinéa prévoit qu’elle perdure à l’issue de la procédure et prend fin sur décision d’une juridiction ou lorsque les informations en cause ont cessé de constituer un secret des affaires.

L’article 2 a pour objet de rendre applicables aux îles Wallis‑et‑Futuna les dispositions de la proposition de loi.


proposition de loi

Article 1er

Le livre Ier du code de commerce est complété par un titre V ainsi rédigé :

« Titre V

« DE LA PROTECTION DU SECRET DES AFFAIRES

« Chapitre Ier

« De l’objet et des conditions de la protection

« Section 1

« De l’information protégée

« Art. L. 1511.  Est protégée au titre du secret des affaires toute information présentant l’ensemble des caractéristiques suivantes :

« 1° Elle n’est pas, en elle‑même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible à une personne agissant dans un secteur ou un domaine d’activité traitant habituellement de cette catégorie d’information ;

« 2° Elle revêt une valeur commerciale parce qu’elle est secrète ;

« 3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables pour en conserver le secret.

« Section 2

« Des détenteurs légitimes du secret des affaires

« Art. L. 1512.  Est détenteur légitime d’un secret des affaires au sens du présent chapitre celui qui l’a obtenu par l’un des moyens suivants :

« 1° Une découverte ou une création indépendante ;

« 2° L’observation, l’étude, le démontage ou le test d’un produit ou d’un objet qui a été mis à la disposition du public ou qui est de façon licite en possession de la personne qui obtient l’information ;

« 3° L’expérience et les compétences acquises de manière honnête dans le cadre de l’exercice normal de son activité professionnelle.

« Est également détenteur légitime du secret des affaires au sens du présent chapitre celui qui peut se prévaloir des dispositions de l’article L. 151‑6 ou celui qui n’a pas obtenu, utilisé ou divulgué ce secret de façon illicite au sens des articles L. 151‑3 à L. 151‑5.

« Section 3

« De l’obtention, de l’utilisation et de la divulgation illicites

« Art. L. 1513.  L’obtention du secret des affaires est illicite lorsqu’elle intervient sans le consentement de son détenteur légitime et en violation d’une ou plusieurs des mesures suivantes prises pour en conserver le caractère secret :

« 1° Une interdiction d’accès à tout document, objet, matériau, substance ou fichier numérique ou d’appropriation ou de copie de ces éléments, qui contiennent ledit secret ou dont il peut être déduit ;

« 2° Une interdiction ou une limitation contractuellement prévue d’obtention du secret des affaires.

« L’obtention du secret des affaires sans le consentement de son détenteur est également illicite dès lors qu’elle résulte de tout comportement déloyal contraire aux usages en matière commerciale.

« Art. L. 1514.  L’utilisation ou la divulgation du secret des affaires est illicite lorsqu’elle est réalisée sans le consentement de son détenteur légitime par une personne qui a obtenu le secret dans les conditions prévues à l’article L. 151‑3 ou qui agit en violation d’une obligation de ne pas divulguer le secret ou de limiter son utilisation.

« La production, l’offre ou la mise sur le marché, l’importation, l’exportation ou le stockage à ces fins de tout produit résultant de l’atteinte au secret des affaires sont également considérés comme une utilisation illicite lorsque la personne qui exerce ces activités savait, ou ne pouvait ignorer au regard des circonstances, que ce secret était utilisé de façon illicite au sens du précédent alinéa.

« Art. L. 1515. – L’obtention, l’utilisation ou la divulgation d’un secret des affaires est aussi considérée comme illicite lorsque, au moment de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation du secret des affaires, une personne savait, ou ne pouvait ignorer au regard des circonstances, que ledit secret des affaires avait été obtenu directement ou indirectement d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 151‑4.

« Section 4

« Des dérogations à la protection du secret des affaires

« Art. L.1516.  I. – Le secret des affaires n’est pas protégé lorsque l’obtention, l’utilisation ou la divulgation du secret est requise ou autorisée par le droit de l’Union ou le droit national.

« Cette protection n’est également pas due lorsque l’obtention, l’utilisation ou la divulgation du secret est intervenue :

« 1° Pour exercer le droit à la liberté d’expression et de communication, y compris le respect de la liberté de la presse ;

« 2° Pour révéler de bonne foi une faute, un acte répréhensible ou une activité illégale dans le but de protéger l’intérêt public général, y compris lors de l’exercice du droit d’alerte tel que défini par l’article 6 de la loi n° 2016‑1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ;

« 3° Pour la protection d’un intérêt légitime reconnu par le droit de l’Union ou le droit national, et notamment pour la protection de l’ordre public, de la sécurité publique et de la santé publique.

« II.  Le secret des affaires n’est également pas protégé lorsque :

« 1° L’obtention du secret des affaires est intervenue dans le cadre de l’exercice du droit à l’information et la consultation des salariés ou de leurs représentants ;

« 2° La divulgation du secret des affaires par des salariés à leurs représentants est intervenue dans le cadre de l’exercice légitime par ces derniers de leurs fonctions, pour autant que cette divulgation ait été nécessaire à cet exercice.

« Chapitre II

« Des actions en prévention, en cessation ou en réparation
d’une atteinte au secret des affaires

« Art. L. 1521. – Toute atteinte au secret des affaires telle que prévue aux articles L. 151‑3 à L. 151‑5 engage la responsabilité civile de son auteur.

« Section 1

« Des mesures pour prévenir et faire cesser une atteinte
au secret des affaires

« Art. L. 1522.  I. – Dans le cadre d’une action relative à la prévention ou la cessation d’une atteinte à un secret des affaires, la juridiction peut, sans préjudice de l’octroi de dommages et intérêts, prescrire, y compris sous astreinte, toute mesure proportionnée de nature à empêcher ou à faire cesser une atteinte au secret des affaires. Elle peut notamment :

« 1° Interdire la réalisation ou la poursuite des actes d’utilisation ou de divulgation d’un secret des affaires ;

« 2° Interdire les actes de production, d’offre, de mise sur le marché ou d’utilisation des produits résultant de l’atteinte au secret des affaires, ou l’importation, l’exportation ou le stockage de tels produits à ces fins ;

« 3° Ordonner la destruction totale ou partielle de tout document, objet, matériau, substance ou fichier numérique contenant le secret des affaires concerné ou dont il peut être déduit ou, selon le cas, ordonner leur remise totale ou partielle au demandeur.

« II. – La juridiction peut également ordonner que les produits résultant de l’atteinte au secret des affaires soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, modifiés afin de supprimer l’atteinte au secret des affaires, détruits ou, selon le cas, confisqués au profit de la partie lésée.

« III. – Lorsque la juridiction limite la durée des mesures mentionnées aux 1° et 2° du I, cette durée doit être suffisante pour éliminer tout avantage commercial ou économique que l’auteur de l’atteinte au secret des affaires aurait pu tirer de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation illicite du secret des affaires.

« IV. – Sauf circonstances particulières et sans préjudice des dommages et intérêts qui pourraient être réclamés, l’ensemble des mesures mentionnées aux alinéas précédents sont ordonnées aux frais de l’auteur de l’atteinte.

« Elles peuvent être révoquées à la demande de l’auteur de l’atteinte lorsque les informations concernées ne peuvent plus être qualifiées de secret des affaires au sens de l’article L. 151‑1 pour des raisons qui ne dépendent pas directement ou indirectement de lui.

« Section 2

« De la réparation d’une atteinte au secret des affaires

« Art. L. 1523.  Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend notamment en considération :

« 1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte au secret des affaires, dont le manque à gagner et la perte subie par la partie lésée ;

« 2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

« 3° Les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte au secret des affaires, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui‑ci a retirées de l’atteinte.

« La juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui tienne notamment compte des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le secret des affaires en question. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

« Art. L. 1524.  Sans préjudice des dispositions de l’article L. 152‑3, la juridiction peut ordonner, à la demande de l’auteur de l’atteinte, le versement d’une indemnité à la partie lésée aux lieu et place des mesures mentionnées à l’article L. 152‑1 quand l’ensemble des circonstances suivantes sont réunies :

« 1° Lorsqu’au moment de l’utilisation ou de la divulgation du secret des affaires, l’auteur de l’atteinte ne savait pas, ni ne pouvait savoir au regard des circonstances que le secret des affaires avait été obtenu d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite ;

« 2° L’exécution des mesures mentionnées à l’article L. 152‑1 causerait à cet auteur un dommage disproportionné ;

« 3° Le versement d’une indemnité à la partie lésée paraît raisonnablement satisfaisant.

« Cette indemnité ne peut être fixée à une somme supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser ledit secret des affaires pour la période pendant laquelle l’utilisation du secret des affaires aurait pu être interdite.

« Section 3

« Des mesures de publicité

« Art. L. 1525.  La juridiction peut ordonner toute mesure de publicité de la décision relative à l’obtention, l’utilisation ou la divulgation illicite d’un secret des affaires, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu’elle désigne, selon les modalités qu’elle précise.

« À cette fin, la juridiction prend en considération, le cas échéant, la valeur du secret des affaires, le comportement de l’auteur de l’atteinte lors de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation de ce secret, l’incidence de l’utilisation ou de la divulgation illicite dudit secret et la probabilité que l’auteur de l’atteinte continue à l’utiliser ou le divulguer de façon illicite.

« Elle prend également en considération le fait que les informations relatives à l’auteur de l’atteinte seraient ou non de nature à permettre l’identification d’une personne morale et, dans l’affirmative, le fait que la publication de ces informations serait ou non justifiée, notamment au regard du préjudice éventuel que cette mesure pourrait causer à la vie privée et la réputation de celui‑ci.

« Lorsqu’elle ordonne une telle mesure, la juridiction veille à protéger le secret des affaires dans les conditions prévues à l’article L. 153‑1.

« Les mesures ordonnées sont aux frais de l’auteur de l’atteinte.

« Chapitre III

« Des mesures de protection au cours des actions en prévention,
cessation ou réparation d’une atteinte au secret des affaires

« Art. L. 1531.  Lorsque, à l’occasion d’une action relative à la prévention, à la cessation ou à la réparation d’une atteinte à un secret des affaires, il est fait état d’une pièce dont il est allégué par une partie ou un tiers qu’elle est de nature à porter atteinte à un secret des affaires, le juge peut, d’office, à la demande des parties ou d’un tiers, si la protection de ce secret ne peut être autrement assurée et sans préjudice de l’exercice des droits de la défense :

« 1° Prendre seul connaissance de cette pièce, limiter sa communication ou sa production à certains éléments, en ordonner la communication ou la production sous forme de résumé et en restreindre l’accès à certaines personnes ;

« 2° Décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée hors la présence du public ;

« 3° Adapter la motivation de sa décision aux nécessités de la protection du secret des affaires.

« Art. L. 1532.  Toute personne ayant accès à une pièce ou au contenu d’une pièce considérée par le juge comme étant couverte ou susceptible d’être couverte par le secret des affaires est tenue à une obligation de confidentialité lui interdisant toute utilisation ou divulgation des informations qu’elle contient.

« Dans le cas d’une personne morale, l’obligation prévue à l’alinéa précédent s’applique à ses représentants légaux ou statutaires.

« Les personnes ayant accès à la pièce ou à son contenu ne sont liées par cette obligation ni dans leurs rapports entre elles ni à l’égard des représentants légaux ou statutaires de la personne morale partie à la procédure.

« Les personnes habilitées à assister ou représenter les parties ne sont pas liées par cette obligation de confidentialité à l’égard de celles‑ci, sauf en cas de mesures prises par le juge au titre du 1° de l’article L. 152‑5 pour restreindre l’accès d’une ou plusieurs pièces à certaines personnes.

« L’obligation de confidentialité perdure à l’issue de la procédure. Toutefois, elle prend fin si une juridiction décide, par une décision qui n’est plus susceptible de recours, qu’il n’existe pas de secret des affaires ou si les informations en cause ont entretemps cessé de constituer un secret des affaires ou sont devenues aisément accessibles. »

Article 2

Après le quatrième alinéa de l’article L. 950‑1 du code de commerce est inséré un alinéa rédigé :

« Les articles L. 151‑1 à L. 153‑2 sont applicables dans leur rédaction résultant de la loi n° 2018‑       du        portant transposition de la directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites. »