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N° 872

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 avril 2018.

PROPOSITION DE LOI

relative au pouvoir de police des maires
et des présidents de conseils départementaux en matière
de circulation routière,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Thierry BENOIT, Philippe VIGIER, Sophie AUCONIE, Olivier BECHT, PierreYves BOURNAZEL, Guy BRICOUT, Paul CHRISTOPHE, Charles de COURSON, Laure de LA RAUDIÈRE, Stéphane DEMILLY, Béatrice DESCAMPS, Philippe DUNOYER, Yannick FAVENNEC BECOT, Agnès FIRMIN LE BODO, Philippe GOMÈS, Meyer HABIB, Antoine HERTH, Yves JÉGO, JeanChristophe LAGARDE, Vincent LEDOUX, Maurice LEROY, Lise MAGNIER, Pierre MORELÀLHUISSIER, Christophe NAEGELEN, Bertrand PANCHER, Franck RIESTER, Maina SAGE, Nicole SANQUER, André VILLIERS, Francis VERCAMER, JeanLuc WARSMANN, Michel ZUMKELLER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 9 janvier 2018, à l’occasion d’un comité interministériel, le Premier ministre a annoncé 18 mesures pour renforcer la sécurité routière. Si la plupart d’entre elles méritent d’être appliquées, tout du moins d’être sérieusement étudiées, il en est une qui apparaît moins opportune puisque son efficacité incertaine et inégale ne justifie pas les préjudices qu’elle causerait.

Il s’agit de la réduction de la vitesse maximale autorisée à 80 km/h sur les routes à double sens sans séparateur central, dont l’entrée en vigueur est annoncée pour juillet 2018.

La mortalité routière étant malheureusement repartie à la hausse depuis 2014, il faut à l’évidence renforcer l’efficacité de la lutte contre l’insécurité routière et il appartient naturellement au Gouvernement de prendre les mesures permettant de sauver plus des vies sur nos routes. Pour autant, nous regrettons cette mesure qui serait particulièrement injuste et discriminante pour la plupart des usagers, selon le territoire dans lequel ils vivent et les routes qu’ils empruntent quotidiennement.

En effet, l’efficacité d’une telle mesure n’a jamais été démontrée, que ce soit en France ou à l’étranger. D’autant qu’aucune étude n’a été commanditée pour la justifier, seul est cité un rapport périmé et biaisé puisqu’il visait à étudier l’impact du changement de sens de la circulation en 1967 en Suède.

Une baisse généralisée de la vitesse maximale autorisée n’entraîne pas nécessairement une diminution de la mortalité routière. Ce raisonnement qui peut paraître logique est pourtant simpliste, en témoignent l’exemple de l’Allemagne, pays qui compte près de 20 millions d’habitants de plus que la France et où la vitesse maximale autorisée y est plus élevée alors que la mortalité routière y est équivalente, ou encore celui du Danemark, qui est récemment parvenu à faire baisser le nombre d’accidents en augmentant de 10 km/h la vitesse maximale autorisée.

Aussi, il apparaît que le véritable enjeu est moins la vitesse que le comportement des automobilistes. D’autres leviers – certainement bien plus efficaces – existent pour faire baisser le nombre de morts sur le réseau routier secondaire qui est effectivement le plus accidentogène : lutte contre l’alcool, l’usage de stupéfiants et la somnolence, respect des distances de sécurité, sensibilisation des jeunes conducteurs, état des routes, des signalisations et des éclairages, etc.

Par ailleurs, cette mesure apparaît particulièrement injuste et discriminante à l’égard de nos millions de concitoyens vivant dans les territoires ruraux et de montagne, généralement mal desservis par des infrastructures de transport autres que les routes nationales et départementales.

Cette réduction généralisée de la vitesse maximale autorisée à 80 km/h sur l’ensemble du réseau routier à double sens sans séparateur central ne tiendrait donc pas compte des spécificités ni des territoires, ni des 380 000 km de routes concernées. S’il est opportun de baisser la vitesse sur les routes où elle est un facteur d’accidents, ce n’est pas le cas de celles où une vitesse de 90 km/h ne présente pas de dangerosité particulière et dont les usagers seraient alors inutilement et injustement pénalisés.

C’est pourquoi, par cette proposition de loi, nous souhaitons remédier aux préjudices que causerait cette mesure tout en prévoyant un dispositif qui s’appliquerait à l’ensemble des voies nationales, départementales et communales soumises au pouvoir de police de la circulation des maires et des présidents de conseils départementaux.

L’objectif est de permettre aux autorités détentrices du pouvoir de la circulation, en l’espèce les maires et les présidents de conseils départementaux, d’aménager au cas par cas la vitesse maximale autorisée prévue par le code de la route pour les voies dont ils ont la charge, non seulement pour pouvoir fixer une vitesse inférieure, ce qui est déjà permis par la loi, mais également pour pouvoir fixer une vitesse supérieure dans la limite de 10 km/h, ce qui est l’objet de cette proposition de loi.

Naturellement, ces modifications des limitations de vitesse devront être pertinentes, raisonnables et justifiées par des nécessités de sécurité et de circulation routières, de mobilité ou de protection de l’environnement.

Par ailleurs, la proposition de loi prévoit que toute décision prise en la matière doit recueillir au préalable l’avis conforme de la commission départementale de la sécurité routière qui est prévue aux articles R. 411‑10 à R. 411‑12 du code de la route. Cette commission, présidée par le préfet et composée de représentants des services de l’État, d’élus locaux et de représentants des associations d’usagers, sera le gage de la concertation indispensable au renforcement de la sécurité routière.

L’article 1er vise ainsi à permettre au maire, après avis conforme de la commission départementale de la sécurité routière, de fixer pour les routes dont ils ont la charge une vitesse maximale autorisée supérieure, dans la limite de 10 km/h supplémentaires, ou inférieure à celle prévue par le code de la route, eu égard à une nécessité de sécurité et de circulation routières, de mobilité ou de protection de l’environnement.

L’article 2 poursuit le même objectif en permettant au président de conseil départemental d’aménager la vitesse maximale autorisée des voies dont il a la charge, dans les mêmes termes et conditions.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 2213‑1‑1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « route » sont insérés les mots : « supérieure, dans la limite de 10 km/h supplémentaires, ou ».

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Préalablement à toute décision prise en application de cet article, le maire recueille l’avis conforme de la commission départementale de la sécurité routière prévue aux articles R. 411‑10 à R. 411‑12 du code de la route. »

Article 2

Après l’article L. 3221‑4 du code général des collectivités territoriales, insérer l’article L. 3221‑4‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 322141. – Sans préjudice de l’article L. 3221‑4, le président du conseil départemental peut, par arrêté motivé, fixer pour tout ou partie des voies départementales ouvertes à la circulation publique une vitesse maximale autorisée supérieure, dans la limite de 10 km/h supplémentaires, ou inférieure à celle prévue par le code de la route, eu égard à une nécessité de sécurité et de circulation routières, de mobilité ou de protection de l’environnement.

« Préalablement à toute décision prise en application de cet article, le président du conseil départemental recueille l’avis conforme de la commission départementale de la sécurité routière prévue aux articles R. 411‑10 à R. 411‑12 du code de la route. »