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N° 950

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 mai 2018.

PROPOSITION DE LOI

tendant à renforcer le soutien des collectivités territoriales aux librairies indépendantes labellisées,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Constance LE GRIP, Annie GENEVARD, Emmanuelle ANTHOINE, Bernard BROCHAND, Virginie DUBYMULLER, Brigitte KUSTER, Frédérique MEUNIER, Maxime MINOT, Guillaume PELTIER, Frédéric REISS, Nathalie BASSIRE, Valérie BEAUVAIS, Émilie BONNIVARD, Valérie BOYER, Éric CIOTTI, Josiane CORNELOUP, Olivier DASSAULT, Vincent DESCOEUR, Marianne DUBOIS, PierreHenri DUMONT, Daniel FASQUELLE, JeanJacques FERRARA, Philippe GOSSELIN, JeanCarles GRELIER, Patrick HETZEL, Valérie LACROUTE, Guillaume LARRIVÉ, Marc LE FUR, David LORION, Véronique LOUWAGIE, Olivier MARLEIX, JeanFrançois PARIGI, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Aurélien PRADIÉ, Robin REDA, JeanLuc REITZER, Bernard REYNÈS, Martial SADDIER, Raphaël SCHELLENBERGER, JeanMarie SERMIER, Isabelle VALENTIN, Arnaud VIALA, Michel VIALAY, Nicolas FORISSIER,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les librairies participent de l’accès de nos concitoyens à la lecture et au savoir. Lieux d’animation culturelle et sociale, elles représentent un joyau inestimable à l’heure de l’uniformisation de nos centres‑villes où prédominent les magasins des grandes enseignes, de distribution comme de services.

La France dispose d’un réseau de plus de 3 200 librairies indépendantes réparties sur l’ensemble du territoire, ce qui en fait le réseau le plus dense du monde et le premier circuit de vente de livres, encore relativement préservé de la concurrence de la grande distribution et de la vente sur Internet, avec une part de marché évaluée à 22 % en 2016.

Toutefois, le marché du livre est très fluctuant et les charges supportées par les libraires (rémunération des collaborateurs, frais de transport des marchandises, inflation des loyers en centre‑ville, gestion du stock) demeurent particulièrement lourdes avec, pour conséquence majeure, une rentabilité nette moyenne très faible, moins de 1 % du chiffre d’affaires, comme le note Mme la sénatrice Françoise Laborde dans son avis fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat sur le projet de loi de finances pour 2018.

Le loyer constitue l’un des postes de charges les plus élevés, de l’ordre de 5 à 10 % du chiffre d’affaires, menaçant à court terme l’existence même d’une offre culturelle de qualité en centre‑ville.

Conscient des enjeux économiques, sociaux et culturels inhérents à la disparition des librairies indépendantes, le législateur est intervenu à plusieurs reprises en tant que régulateur afin de préserver l’activité des libraires et assurer la stabilité du marché.

Tel est notamment le cas avec la loi n° 2014‑626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises qui répond, entre autres, à l’objectif de dynamiser les commerces de proximité en rénovant le régime des baux commerciaux. Parmi les mesures de régulation figure l’encadrement des loyers, dont l’évolution était auparavant fixée par référence à l’indice trimestriel du coût de la construction et qui est désormais calculée en fonction de l’indice des loyers commerciaux publié chaque trimestre par l’Institut national de la statistique et des études économiques.

L’indice des loyers commerciaux est constitué d’indices représentatifs de l’évolution des prix à la consommation, des prix de la construction neuve et du chiffre d’affaires du commerce de détail.

Cette réforme s’est avérée indispensable dans la mesure où l’indice du coût de la construction avait augmenté de 32 % entre 2000 et 2006 tandis que le chiffre d’affaires moyen des entreprises du commerce évoluait dans le même temps de 18 %.

Par ailleurs, il convient de noter qu’aux termes de l’article 1464 I du code général des impôts, « les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés dune fiscalité propre peuvent, par une délibération de portée générale prise dans les conditions définies à larticle 1639 A bis, exonérer de cotisation foncière des entreprises les établissements réalisant une activité de vente de livres neufs au détail qui disposent au 1er janvier de lannée dimposition du label de librairie indépendante de référence ». Cette exonération est réservée aux établissements remplissant cumulativement les conditions tenant à leur taille, à la détention de leur capital et à leur indépendance (absence de lien avec une autre entreprise par un contrat de franchise).

Toutefois, la situation économique des librairies indépendantes demeure fragile et il importe d’envisager de nouvelles dispositions législatives afin de maintenir et de développer ces entreprises dans le cadre d’une politique du livre efficace.

Il est ainsi proposé, sur le modèle de la loi n° 92‑51 du 13 juillet 1992 relative à l’action des collectivités locales en faveur de la lecture publique et des salles de spectacle cinématographique, dite loi Sueur, de permettre aux communes et à leurs groupements (article 1er) ainsi qu’aux départements (article 2) d’attribuer des subventions aux librairies indépendantes disposant au 1er janvier de l’année d’imposition du label de librairie indépendante de référence, dans la limite d’un montant maximal de 30 % du chiffre d’affaires de l’établissement.

En cela, la présente proposition de loi s’inscrit dans l’esprit de la Convention de l’UNESCO de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, aux termes de laquelle « les activités, biens et services culturels ont une double nature, économique et culturelle, parce quils sont porteurs didentités, de valeurs et de sens et quils ne doivent donc pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale ».

En outre, les subventions accordées par les communes et les départements auraient vocation à s’ajouter à celles octroyées par un certain nombre de régions menant une politique active de soutien à l’économie du livre, comme la région d’Île‑de‑France qui, sous l’impulsion de sa Présidente, Valérie Pécresse, a fixé un nouveau cadre d’intervention et institué de nouvelles aides en faveur du livre et de la lecture dans l’objectif, notamment, de faciliter la constitution ou le renforcement du fonds de livres ou de permettre la création, la reprise, le déménagement et la rénovation des librairies.

Tel est l’objet de la présente proposition de loi, déposée simultanément au Sénat, par Mme Laure DARCOS, sénatrice.


proposition de loi

Article 1er

Le chapitre Ier du titre V du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 2251‑5 ainsi rédigé :

« Art. L. 22515. – Les communes ainsi que leurs groupements peuvent, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, attribuer des subventions à des établissements existants ayant pour objet la vente au détail de livres neufs et disposant au 1er janvier de l’année d’imposition du label de librairie indépendante de référence.

« Ces subventions sont attribuées dans la limite d’un montant maximal de 30 % du chiffre d’affaires annuel de l’établissement, calculé pour l’année précédant la décision d’attribution de la subvention. Elles sont attribuées conformément aux stipulations d’une convention conclue entre l’établissement et la commune. »

Article 2

Le chapitre II du titre III du livre II de la troisième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section 5 ainsi rédigée :

« Section 5

« Aides aux librairies indépendantes

« Art. L. 32326.  Le département peut, après avis du conseil municipal de la commune où est situé l’établissement concerné, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, attribuer des subventions à des établissements existants ayant pour objet la vente au détail de livres neufs et disposant au 1er janvier de l’année d’imposition du label de librairie indépendante de référence.

« Ces subventions sont attribuées dans la limite d’un montant maximal de 30 % du chiffre d’affaires annuel de l’établissement, calculé pour l’année précédant la décision d’attribution de la subvention. Elles sont attribuées conformément aux stipulations d’une convention conclue entre l’établissement et le département. »

Article 3

Les charges résultant pour les collectivités territoriales et leurs groupements de l’application de la présente loi sont compensées par la majoration, à due concurrence, de la dotation globale de fonctionnement et corrélativement pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.