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N° 2222

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 septembre 2019.

PROPOSITION DE LOI

relative aux énergies renouvelables et propres,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Marine BRENIER, Valérie BEAUVAIS, Bernard DEFLESSELLES, Julien DIVE, Michel HERBILLON, Valérie LACROUTE, Gilles LURTON, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Didier QUENTIN, Robin REDA, JeanLuc REITZER, Vincent ROLLAND, JeanMarie SERMIER, Éric STRAUMANN, Isabelle VALENTIN, Pierre VATIN, Arnaud VIALA, Michel VIALAY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Nous faisons face à une urgence écologique. Une révolution s’impose à nous et elle passe avant tout par une transition énergétique la plus efficace et rapide possible.

Pour répondre à ces nouveaux objectifs, plusieurs grandes annonces ont été faites par le Président de la République et son Gouvernement : fermeture de centrales nucléaires, participation à hauteur de 40 % des énergies renouvelables dans la production totale d’électricité en France à l’horizon 2030, ou encore une neutralité carbone atteinte d’ici 2050.

Pour cela, il paraît nécessaire que ces énergies renouvelables soient réellement « décarbonnées ». Pourtant, plusieurs agences et associations sensibilisent depuis plusieurs années les pouvoirs publics sur les limites des énergies renouvelables. Ce fut le cas, dès 2015, de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Celle‑ci a publié un rapport concernant l’impact environnemental de l’éolien français. Elle y expose les défauts de ces énergies renouvelables, qui prennent de plus en plus de place dans notre mix énergétique et dans notre système de production.

Beaucoup de scientifiques également mettent en avant l’aspect polluant de ces énergies renouvelables censées être « propres ». Ces dispositifs énergétiques prétendument révolutionnaires souffrent en réalité des mêmes travers que leurs équivalents non renouvelables.

Lorsque l’on parle d’émissions polluantes produites par des dispositifs d’énergie renouvelable, il ne s’agit pas uniquement du moment où l’énergie est produite. Les pollutions sont surtout réalisées en amont et en aval de cette production, comme le souligne le physicien Jacques Treiner : « dès la naissance, les panneaux photovoltaïques et les éoliennes ont un lourd passif en termes de CO2. » Il met en cause les matériaux utilisés pour fabriquer ces dispositifs d’énergie renouvelable : « pour une même puissance produite, il faut cinq fois plus de matériaux avec l’éolien, par rapport au nucléaire par exemple. »

En aval de la production de l’énergie, ces émissions sont dues aux matériaux très polluants utilisés pour transformer ces énergies renouvelables en électricité, ainsi qu’à un manque de recyclage. Celui‑ci s’explique par la volonté de réaliser des économies d’échelle. Les coûts d’extraction sont bien plus faibles que ceux nécessaires au recyclage de ces matériaux. Pourtant, la lutte contre ces pollutions indirectes à la production d’énergie est une étape essentielle de la transition énergétique. Il est donc impératif, si l’on veut atteindre l’objectif de neutralité carbone, que le législateur se saisisse de ce sujet.

Au‑delà de cet impératif, il apparaît nécessaire de définir le terme d’énergie « propre » car, bien que mentionné dans différents codes, il n’a jamais été défini et se retrouve superposé à d’autres termes, comme celui d’énergie « renouvelable ».

Avec une augmentation de 5 milliards des investissements d’État dans l’éolien et le photovoltaïque, considérées comme les énergies renouvelables les plus polluantes, il nous faut réagir. Ces énergies d’avenir doivent être le plus écologiquement responsables, afin que ces investissements aient un réel impact sur la transition énergétique.

Alors que la loi énergie‑climat prévoit la fermeture progressive des centrales nucléaires pour des raisons environnementales et de sécurité publique, il serait contre‑productif de remplacer les énergies polluantes de ces centrales par des énergies renouvelables, mais dont les émissions de CO2 sont en réalité supérieures par kilowattheure produit. Selon une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, un kilowattheure produit par une énergie nucléaire émet en moyenne 16 grammes de CO2. Pour un dispositif photovoltaïque, ces émissions s’élèvent à 48 grammes, les dispositifs éoliens, eux, ont des émissions équivalentes à celles d’un dispositif nucléaire.

Il est primordial de maîtriser l’usage de ces matériaux polluants. Cette maîtrise permettrait une réduction des émissions indirectes dues à l’extraction de ces matériaux et à leur absence de recyclage lors du démantèlement d’un dispositif d’énergie renouvelable. Ce point est notamment évoqué par M. Bernard Multon, enseignant‑chercheur à l’École normale supérieure de Rennes : « L’industriel qui installe l’éolienne a pour obligation – c’est dans la loi – de démanteler la structure. Pas de la recycler ». 

De plus, le recyclage de ces matériaux endigue l’épuisement des matériaux, ce qui convient parfaitement au rythme de renouvellement des dispositifs d’énergie renouvelable et propre. En effet, par rapport aux dispositifs non renouvelables, leur durée de vie est plus faible, allant de 20 à 30 ans pour une éolienne ou des panneaux photovoltaïques à 40 ans pour une centrale à charbon et 100 ans pour un barrage. Ainsi, le recyclage de ces matériaux permettrait de renouveler plus facilement ces dispositifs d’énergie renouvelable ou propre, en rendant cette économie d’avenir plus pérenne et circulaire.

L’objectif de cette proposition de loi est donc d’intégrer les énergies propres au sein d’un système déjà existant pour les énergies renouvelables. Afin de relever les défis écologiques que nous nous sommes fixés, il est impératif que ces nouvelles énergies tendent vers une pollution 0. Avec cette ambition, nous répondons à ces objectifs et prenons nos responsabilités envers notre environnement.

L’article 1 propose une définition du terme de « propre », le dissociant ainsi de tous les termes auxquels il pouvait être assimilé.

L’article 2 demande l’établissement d’un cahier des charges dans le but d’organiser cette notion d’un point de vue scientifique.

Les articles 3 et 4 s’attachent à la différenciation, au sein de la loi, des termes de « propre » et de « renouvelable ». L’article 4 intègre également une nouvelle notion dans la lutte contre les émissions énergétiques polluantes, celle des pollutions indirectes.

L’article 5 promeut l’usage de dispositifs énergétiques propres ou renouvelables et impose aux entreprises qui fabriquent ou assemblent des dispositifs énergétiques, d’émettre un rapport sur l’impact écologique des matériaux qu’ils emploient.

L’article 6 demande une étude d’impact concernant les modes de calcul d’attribution des Certificats d’économie d’énergie (CEE), dans l’hypothèse où ils seraient adaptés afin de favoriser l’installation de dispositifs moins polluants et la transition énergétique.

Tel est le sens de la présente proposition de loi.


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 211‑2 du code de l’énergie, il est inséré un article L. 211‑2‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 21121. – Une énergie est considérée comme “ propre” lorsque les émissions nocives à l’environnement ou à la biodiversité, quelles que soient leurs formes, sont nulles ou très faibles. Une valeur maximale d’émissions est fixée par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie. »

Article 2

Le II l’article L. 131‑3 du code de l’environnement est complété par un 7° ainsi rédigé :

« 7° L’établissement d’un cahier des charges sur la production d’énergie responsable et propre, définissant notamment une valeur maximale d’émissions d’une énergie propre. »

Article 3

À l’avant‑dernier alinéa de l’article L. 221‑7 du code de l’énergie, après la seconde occurrence du mot : « renouvelable », sont insérés les mots : « ou propre ».

Article 4

Le II de l’article L. 131‑3 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Après le 2°, il est inséré un 2°bis° ainsi rédigé :

« 2°bis La prévention et la lutte contre les pollutions indirectes des dispositifs énergétiques » ;

2° Au 4°, après le mot : « renouvelables », sont insérés les mots : « ou propres » ;

3° Au 5°, après le mot : « propres », sont insérés les mots : « ou durables ».

Article 5

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Après le f du 2° du II de l’article L. 122‑3, il est inséré un g ainsi rédigé :

« g) Toutes alternatives énergétiques plus durables, plus propres ou qui réduisent l’impact écologique ou environnemental. Ces alternatives doivent être favorisées lors de l’arbitrage final du maître d’ouvrage. » ;

2° Après l’article L. 211‑2, il est inséré un article L. 211‑2‑2 ainsi rédigé :

« Art. L. 21122. – Les entreprises qui fabriquent ou assemblent des dispositifs d’énergie durable doivent émettre un rapport sur l’impact écologique des matériaux qu’elles emploient à la fabrication de leurs dispositifs. »

Article 6

Dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport destiné à évaluer la pertinence d’une modification des modes de calcul relatifs à l’installation d’équipements renouvelables, propres ou de récupération de chaleur qui donnent lieu à l’attribution d’un certificat d’économie d’énergie. Les nouveaux modes de calculs doivent favoriser l’installation de dispositifs renouvelables ou propres.