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N° 2325

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2019.

PROPOSITION DE LOI

visant à limiter les émissions polluantes rejetées par les navires,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Éric CIOTTI, Fabien DI FILIPPO, JeanLuc REITZER, Michel VIALAY, Nathalie BASSIRE, Nicolas FORISSIER, Bérengère POLETTI, Vincent DESCOEUR, Valérie LACROUTE, Bernard PERRUT, Bernard REYNÈS, Daniel FASQUELLE, Brigitte KUSTER, Arnaud VIALA, Annie GENEVARD, Thibault BAZIN, Éric PAUGET, Bernard DEFLESSELLES, JeanLouis MASSON, Fabrice BRUN, Marc LE FUR, Raphaël SCHELLENBERGER, Vincent ROLLAND, Nadia RAMASSAMY, Dino CINIERI, JeanClaude BOUCHET, Éric STRAUMANN, JeanPierre DOOR, Jacques CATTIN, Damien ABAD, Robin REDA, Geneviève LEVY, Pierre VATIN, Valérie BOYER, Patrick HETZEL, JeanMarie SERMIER, Martial SADDIER, Michel HERBILLON, Gilles LURTON, MarieChristine DALLOZ,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La grande majorité des navires de transport utilise toujours du « combustible de soute », de basse qualité, chargé de gaz nocifs et de particules fines. Cela peut avoir un impact considérable sur la santé des personnes vivant près des grands ports. Par exemple, un habitant de la région Sud sur deux respire un air trop pollué au regard des normes de l’OMS, notamment en raison de la pollution due au transport maritime.

Si certaines compagnies maritimes agissent pour réduire leur empreinte environnementale et que certains maires, comme à Cannes, interdisent les navires trop polluants, il convient de conforter et de généraliser ces volontés par la loi.

Aussi, la présente proposition de loi prévoit trois séries de mesures :

– Réduire la teneur en soufre des navires entrant dans les ports ;

– Élargir le raccordement électrique dans les ports ;

– Renforcer les pouvoirs des maires des communes du littoral pour lutter contre les pollutions marines.

1. Réduire la teneur en soufre des navires entrant dans les ports

Actuellement, l’article L. 218‑2 du code de l’environnement règlemente la teneur en soufre des « navires naviguant dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction française ». Il distingue :

– La navigation « en dehors des zones de contrôle des émissions de soufre » où les navires doivent utiliser un combustible dont la teneur de soufre en masse est inférieure ou égale à 0,5 % à compter du 1er janvier 2020 (3,5 % jusqu’au 31 décembre 2019).

– La navigation « dans les zones de contrôle des émissions de soufre » où les navires doivent utiliser des combustibles dont la teneur en soufre est inférieure ou égale à 0,1 % en masse. Il existe actuellement 4 zones ECA dans le monde : au Canada, aux États‑Unis, en Manche‑Mer du Nord et dans la mer Baltique.

Un projet de nouvelle zone ECA est envisagé en mer Méditerranée, à l’initiative de la France mais ce processus peut être long.

Une diminution de la teneur en soufre est pourtant indispensable. Comme le souligne une étude d’impact financé par le ministère de la Transition écologique et solidaire, la création d’une zone ECA « permettra (…) une amélioration globale de la qualité de l’air dans toute la Méditerranée grâce à des effets significatifs sur certains polluants comme le dioxyde d’azote et les particules fines, ainsi que de réels bénéfices pour la santé des populations du bassin méditerranéen » :

– Un gain sanitaire monétarisé de 8,1 à 14 milliards d’euros par an pour toute la Méditerranée, avec des bénéfices doublés par rapport à 2020

– Près de 1 730 morts prématurées évitées chaque année pour l’ensemble du bassin méditerranéen

Compte tenu de l’importance sanitaire de ce sujet, en particulier pour les habitants des zones portuaires, la présente proposition de loi propose donc d’étendre le seuil de 0,1 % à l’ensemble des mers territoriales (article 1er).

S’agissant de la sanction du non‑respect de ces obligations, l’article L. 218‑15 du code de l’environnement prévoit qu’ : « Est puni d’un an d’emprisonnement et de 200 000 euros d’amende le fait, pour tout capitaine d’un navire, de se rendre coupable d’infractions (à ces) dispositions ». Des exceptions sont néanmoins prévues. L’article L. 218‑20 du code de l’environnement dispose, entre autres, que le non‑respect de ces dispositions n’est pas punissable si le capitaine du navire fournit la preuve qu’il n’a pas été en mesure d’acheter du combustible marin conforme à la réglementation à l’endroit prévu par son plan de voyage.

Sans remettre en cause les exceptions existantes, l’article 2 de la proposition de loi prévoit de durcir les sanctions en prévoyant d’élever la peine d’amende à 300 000 euros.

2. Élargir le raccordement électrique dans les ports

Lorsqu’ils sont à quai, les navires doivent pouvoir bénéficier d’un raccordement électrique, afin de soutenir leurs activités portuaires telles que le chargement, le chauffage ou l’éclairage. Cela leur permettrait notamment d’éteindre leurs moteurs auxiliaires, particulièrement polluants. Les ports de Vancouver et de Seattle ont été équipés de ces technologies, et la Californie a rendu l’alimentation électrique à quai obligatoire, permettant ainsi d’importantes réductions d’émissions.

Ainsi, l’article 3 prévoit que tous les ports français accueillant des navires d’un certain tonnage auront l’obligation de disposer d’équipements d’alimentation électrique à quai à l’horizon 2025.

3. Renforcer les pouvoirs des maires des communes du littoral

Les maires des communes du littoral doivent avoir les pouvoirs nécessaires pour lutter contre les pollutions marines des paquebots. Pour cela, il convient de prévoir :

– La création d’une police spéciale environnementale du Maire en matière maritime pour les doter d’un véritable pouvoir de police de l’écologie en matière de navigation. Ils pourraient ainsi contrôler et sanctionner les navires naviguant et mouillant sur leurs côtes et qui ne respecteraient pas les normes environnementales (article 4) ;

– La création juridique d’un nouvel outil intitulé Zone Maritime de Gestion Portuaire, qui permettrait d’étendre les pouvoirs de police portuaire au‑delà du périmètre stricto sensu du port sur une zone entre les Maires et le Préfet Maritime (article 5).


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 218‑2 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Au 1° du I, après le mot : « dehors », sont insérés les mots :« des mers territoriales françaises ou » ;

2° Au 2° du même I, après le mot : « naviguent », sont insérés les mots : « ou stationnent dans les mers territoriales françaises ou » ;

3° Le II est ainsi modifié :

a) Le mot : « réguliers » est supprimé ;

b) Après le mot : « dehors », sont insérés les mots : « des mers territoriales françaises ou » ;

c) Le taux : « 0,50 % », est remplacé par le taux : « 0,10 % ».

Article 2

Au II de l’article L. 218‑15 du code de l’environnement, le nombre : « 200 000 », est remplacé par le nombre : « 300 000 ».

Article 3

L’article 52 de la loi n° 2015‑992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte est complété par un VIII ainsi rédigé :

« VIII. – Dans tous les cas, tous les ports français accueillant des navires d’un certain tonnage, que le pouvoir réglementaire aura à fixer, ont l’obligation de disposer d’équipements d’alimentation électrique à quai à l’horizon 2025 ».

Article 4

Il est créé une police spéciale environnementale compétente en matière maritime dont les modalités de fonctionnement sont précisées en décret pris en Conseil d’État.

Article 5

Il est créé une zone maritime de gestion portuaire dont les modalités de fonctionnement sont précisées en décret pris en Conseil d’État.

Article 6

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.