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N° 2562

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 janvier 2020.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

relative à la reconnaissance du vote blanc pour lélection présidentielle,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabrice BRUN, Emmanuelle ANTHOINE, Nathalie BASSIRE, Émilie BONNIVARD, Bernard BROCHAND, Dino CINIERI, Josiane CORNELOUP, Sébastien LECLERC, Véronique LOUWAGIE, Éric PAUGET, Bérengère POLETTI, JeanLuc REITZER, Laurence TRASTOURISNART, JeanPierre VIGIER, Stéphane VIRY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Mesdames, Messieurs,

Lors des élections présidentielles de 2017, l’abstention, estimée à 25,3 %, a atteint un record au second tour depuis 1969. Toutes élections confondues, les scrutins des dernières décennies ont révélé une progression de l’abstention massive.

Les élections législatives de 2017 ont en outre constitué un tournant majeur puisque pour la première fois depuis 1958, l’abstention a dépassé le taux de 50 %, 51,3 % au premier tour, 57,36 % au second tour avec 27 128 488 abstentions pour 47 293 103 d’électeurs inscrits.

L’abstention en France connait donc une progression constante, de scrutin en scrutin, quel que soit le type d’élection.

C’est un vrai danger pour la démocratie dans un contexte de défiance, où des électeurs portent pourtant des convictions qui ne se retrouvent pas toujours dans l’offre électorale.

L’un des moyens qui pourrait permettre de lutter contre l’abstention serait de reconnaître pleinement le vote blanc en le comptabilisant dans les suffrages exprimés.

Le vote blanc consiste à voter sans choisir un candidat. Il exprime ainsi la volonté de l’électeur de participer à l’élection, tout en refusant les différents choix de vote qui lui sont proposés. Il se distingue de l’abstention et du vote nul.

Depuis la loi du 21 février 2014 visant à reconnaître le vote blanc aux élections l’article 65 du code électoral, modifié par cette loi du 21 février 2014, « les bulletins blancs sont décomptés séparément et annexés au procès‑verbal. Ils n’entrent pas en compte pour la détermination des suffrages exprimés, mais il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins. Une enveloppe ne contenant aucun bulletin est assimilée à un bulletin blanc. »

Initialement, la loi de 2014 ne concernait pas l’élection présidentielle, la modification des règles de ce scrutin nécessitant une loi organique qui a été publiée deux ans plus tard. Il en résulte que depuis la loi organique du 25 avril 2016, les présidentielles sont donc également concernées par les nouvelles règles de décompte du vote blanc.

Au premier tour de l’élection présidentielle de 2017, 659 997 votes blancs ont été recensés (et 289 337 votes nuls) et au second tour de cette même élection 3 021 499 votes blancs ont été recensés (1 064 225 votes nuls).

Ce décompte séparé des votes blancs, et plus encore le fait que ces votes ne soient pas pris en compte dans les suffrages exprimés, peut amener les citoyens à choisir l’abstention alors qu’ils pourraient, par ce biais, marquer leur différence en ne faisant le choix d’aucune offre politique, tout en ayant la possibilité de voir leur opinion reconnue.

Par ailleurs la loi n° 2014‑172 du 21 février 2014 n’a pas rendu obligatoire la mise à disposition des électeurs, au sein des bureaux de vote, de bulletins blancs, au même titre que ceux portant la mention d’un candidat ; ce alors même que les bulletins en question seraient réutilisables. Cette omission pose la question du sens d’une telle adoption.

Dès lors, il est nécessaire et opportun d’apporter des modifications substantielles aux articles L. 58 et L. 65 du code électoral, qui permettront de faire évoluer la situation relative à la reconnaissance du vote blanc.

Cette mesure a d’ailleurs été demandée par de nombreux citoyens lors du grand débat organisé en 2019 pour répondre aux aspirations de nos concitoyens en faveur d’un meilleur fonctionnement de notre système représentatif.

C’est pourquoi l’auteur de la présente proposition de loi constitutionnelle a déposé une proposition de loi modifiant le code électoral afin de permettre la prise en compte du vote blanc.

Toutefois, pour permettre la prise en compte du vote blanc pour l’élection du Président de la République, il convient également de compléter l’article 7 de la Constitution du 4 octobre 1958, d’une part en supprimant l’exigence d’une majorité absolue pour l’élection et d’autre part en inscrivant le principe de la prise en compte du vote blanc dans le texte suprême pour cette élection.

Afin de préserver la représentativité du Président élu, la présente proposition de loi constitutionnelle prévoit que si le nombre de bulletins blancs décompté représente de plus de 50 % des suffrages exprimés, le Conseil Constitutionnel prononce l’invalidation de l’élection.

Elle précise en outre, qu’un nouveau scrutin pour l’élection du Président a lieu, vingt jours au moins et trente‑cinq jours au plus, après l’invalidation

Tel est, Mesdames, Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi constitutionnelle.


PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article 1er

« Au premier alinéa de l’article 7 de la Constitution, le mot : « absolue » est supprimé.

Sont ajoutés les mots : «, les bulletins blancs sont décomptés séparément et entrent en compte pour la détermination des suffrages exprimés et il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins ».

Article 2

Le premier alinéa de l’article 7 de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si le nombre de bulletins blancs décompté représente 50 % des suffrages exprimés, le Conseil constitutionnel prononce l’invalidation de l’élection. »

Article 3

Après le cinquième alinéa de l’article 7 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas d’invalidation de l’élection par le Conseil Constitutionnel en raison d’un nombre de bulletin blanc supérieur à 50 % des suffrages exprimés, le nouveau scrutin pour l’élection du Président a lieu, vingt jours au moins et trente‑cinq jours au plus, après l’invalidation. »