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N° 2692

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 février 2020.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

visant à instaurer un noncumul des mandats exécutifs locaux
avec des fonctions ministérielles,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution dune commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Véronique LOUWAGIE, François CORNUTGENTILLE, JeanMarie SERMIER, JeanPierre VIGIER, JeanPierre DOOR, Brigitte KUSTER, Marianne DUBOIS, Pierre CORDIER, Dino CINIERI, Philippe GOSSELIN, Pierre VATIN, Alain RAMADIER, Thibault BAZIN, PierreHenri DUMONT, Stéphane VIRY, MarieChristine DALLOZ, Emmanuelle ANTHOINE, Xavier BRETON, Michel HERBILLON, Claude de GANAY, Valérie BEAUVAIS, Nicolas FORISSIER, Martial SADDIER, Bruno BILDE, Gabriel SERVILLE, Ludovic PAJOT, Emmanuelle MÉNARD, Christine PIRES BEAUNE, Moetai BROTHERSON, MarieFrance LORHO, Charles de COURSON, Guy BRICOUT, François RUFFIN, Yannick FAVENNEC BECOT, Pierre MORELÀL’HUISSIER, Marc LE FUR, Constance LE GRIP, Ian BOUCARD, Bérengère POLETTI, MarieNoëlle BATTISTEL, Frédéric REISS,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi constitutionnelle a pour objet d’interdire aux membres du Gouvernement d’exercer une fonction exécutive territoriale. Elle réaménage ainsi l’article 23 de la Constitution prévoyant les incompatibilités de la fonction ministérielle avec des mandats parlementaires, les fonctions de représentation professionnelle à caractère national et tout emploi public ou activité professionnelle.

Cette proposition de loi entre en continuité avec la réforme du cumul des mandats pour les parlementaires de 2014 et répond à une crispation et une crise de confiance qui touchent tous les Français vis‑à‑vis de leurs élus et responsables politiques. Depuis le début du mouvement des « Gilets jaunes » en novembre 2018, la crise gagne toutes les personnalités politiques de notre pays, y compris le Gouvernement. Les Français réclament d’eux un engagement plein et total dans la mission qui leur a été confiée.

La Constitution de la Ve République précise les missions que se doit de remplir le Gouvernement : il conduit et détermine la politique de la Nation. Or, ce travail ne peut, de manière évidente, se faire à temps partiel, mais exige un engagement de tous les instants de la part des ministres.

2020 est une année d’élections municipales, élections particulièrement importantes aux yeux des Français pour qui le maire reste l’élu de référence. Or, un grand nombre de nos ministres s’engagent dans ces élections partout en France, déployant leur temps et leur énergie dans la campagne électorale. Questionné à ce sujet le 28 janvier 2020, le Gouvernement a assuré qu’il ne serait pas permis à un ministre ou à un secrétaire d’État de cumuler à la fois sa fonction au sein du Gouvernement et un mandat qui lui confierait la tête d’un exécutif local.

Néanmoins cet engagement oral n’est sanctionné par aucun texte de loi. De plus, il apparaît insuffisant. Il est en effet essentiel de rappeler combien l’engagement d’un élu local doit être, comme celui qui sied à un ministre, total. Cumuler les deux serait exposer le ministre à négliger l’une de ses deux fonctions. Et, il est fort à parier que ce sont les mandats locaux qui en pâtiront.

Il apparaît ainsi qu’à l’image des règles applicables aux députés et aux sénateurs, il devrait être interdit aux ministres d’exercer un mandat exécutif au niveau local. C’est l’objet de cette proposition de loi qui suit ainsi les recommandations émises d’abord en 2007 par le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République présidé par monsieur Édouard Balladur. Il demandait une « limitation plus stricte du cumul des mandats électifs » qui devrait s’appliquer non seulement aux parlementaires mais également aux membres du Gouvernement. La loi organique n° 2014‑125 du 14 février 2014 a répondu en partie à ces exigences en interdisant toute fonction exécutive locale aux députés et aux parlementaires et ce, à compter de l’année 2017. La présente proposition de loi constitutionnelle vient donc en renfort pour faire aboutir un processus qui nous semble inachevé aux vues de ce rapport datant de 2007 qui voudrait qu’un membre du Gouvernement « se consacre exclusivement à sa tâche ».

Cette conviction se trouve d’autant plus renforcée que les mêmes propositions ont été émises à nouveau en 2012 par la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par M. Lionel Jospin. Elle rappelle ainsi que le ministre est avant tout le chef d’une administration qui ne pourrait souffrir son absence répétée en cas de cumul d’une fonction ministérielle et d’un mandat exécutif local. De plus, le rapport produit par cette commission souligne le risque que courent les membres du Gouvernement d’être influencés dans leurs décisions en tant que ministres par un intérêt local qu’ils auraient à défendre en tant qu’élus. Permettre un tel engagement double aux ministres irait dans le sens contraire à ce que réclament les Français aujourd’hui : à savoir un engagement sans concessions de leurs élus pour qu’ils puissent à nouveau les assurer de leur confiance.

C’est pourquoi nous proposons aujourd’hui, par cet article unique, une modification de l’article 23 de la Constitution afin de limiter les possibilités pour des membres du Gouvernement d’exercer un mandat local. La limitation ne s’appliquera qu’aux mandats exécutifs afin de suivre les règles applicables aux parlementaires à l’heure actuelle.


PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Au premier alinéa de l’article 23 de la Constitution, après le mot : « parlementaire, », sont insérés les mots : « de tout mandat exécutif local, ».