Description : LOGO

N° 2872

_____

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 avril 2020.

PROPOSITION DE LOI

relative à lengagement des entreprises au service de la Cité,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Olivier DASSAULT, Valérie BAZINMALGRAS, Valérie BEAUVAIS, JeanYves BONY, JeanClaude BOUCHET, Guy BRICOUT, Pascal BRINDEAU, Bernard BROCHAND, Jacques CATTIN, Dino CINIERI, Gérard CHERPION, Josiane CORNELOUP, Fabien DI FILIPPO, JeanPierre DOOR, Philippe GOSSELIN, Annie GENEVARD, Michel HERBILLON, Patrick HETZEL, Brigitte KUSTER, Marc LE FUR, Véronique LOUWAGIE, Olivier MARLEIX, JeanLouis MASSON, Philippe MICHELKLEISBAUER, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Alain RAMADIER, Frédéric REISS, Bernard REYNÈS, Vincent ROLLAND, Éric STRAUMANN, Guy TEISSIER, Laurence TRASTOURISNART, Didier QUENTIN, Pierre VATIN, Charles de la VERPILLIÈRE, Michel VIALAY, JeanPierre VIGIER, Philippe VIGIER, Stéphane VIRY,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Toutes les Nations du monde sont suspendues à la fabrication des produits sanitaires d’un pays si lointain, la Chine ; dépendantes à la qualité, aux transports, aux prix qui n’en finissent plus d’augmenter, cernées par une concurrence mondiale en besoins vitaux.

Condamnés à rester chez soi ou à travailler « la boule au ventre », les nerfs des citoyens et des entreprises sont mis à l’épreuve. Personne ne connaît encore la fin. La tragédie s’est invitée, c’est la seule certitude.

Alors que le manque de masques, de gels, de tests et tout autre matériel de soin est toujours chronique, des entreprises françaises ont réorienté leurs outils de production pour répondre aux besoins.

Rendons alors hommage à Tereos, à l’usine Givenchy de Beauvais, le groupe Chargeurs et tant d’autres d’avoir fabriqué du gel hydro‑alcoolique, à toutes les petites mains aux doigts de fée de Saint James, de Gang des Grand‑mères, de Regain, de Atelier Tuftery, de Chemise Gauthier, de Slip français, de Rue Mouffetard, de Plim, d’AVN… d’avoir produit en quantité des masques de protection pour les personnels de secours, les soignants ou encore les forces de l’ordre. Remercions‑les pour leur réactivité, leurs efforts et leur ingéniosité !

Cette épidémie exceptionnelle a ouvert des plaies qui ne pourront se refermer sans des mesures à la hauteur de la crise que nous traversons. Nul n’est épargné. L’économie, même des entreprises les plus saines, est touchée quand d’autres bien trop nombreuses, manquent de s’écrouler. Une fois le confinement terminé, celles liquidées pourront alors être comptabilisées.

Reprenant à la volée les propos du Président de la République « il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner à d’autres est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle », nous proposons notamment que l’État s’engage à créer un nouveau pôle de compétitivité spécifique à l’autonomie de la France dans le domaine des besoins de premières nécessités. Les innovations sont possibles et même indispensables, notamment en matière logistique.

Nous serons alors équipés pour réagir, pour ne plus être attentiste dans une situation qui nous dépasse.

Demain, nous vivrons dans un monde différent si nous nous donnons les moyens de nos ambitions. Cette difficile expérience doit aussi nous servir pour poser des bases solides et retrouver le « bon sens paysan » que nous avions perdu. Des décisions qui auraient pris, avant la période que nous traversons, des décennies pour convaincre seront adoptées, nous l’espérons, nous le souhaitons ardemment. La situation est historique. Les réponses sont urgentes.

Faisons que le malheur, le drame humain, que nous traversons donne naissance à des transformations salutaires. La production des besoins stratégique de la France doit dépendre des capacités de notre pays à fabriquer l’indispensable. Cette proposition de loi invite les entreprises à s’engager sur le long terme au service de la Cité.

L’article 1er définit l’entreprise stratégique et de première nécessité.

L’article 2 indique que les sociétés qui conseillent ou contribuent financièrement aux investissements de l’entreprise stratégique et de première nécessité peuvent bénéficier des dispositions prévues au code général des impôts destinées au mécénat d’entreprise

L’article 3 créé un compte personnel de formation aux besoins de la Nation qui permet aux salariés d’acquérir un savoir‑faire indispensable en cas de crise sanitaire.

Enfin, l’article 4 propose la création d’un 57ème pôle de compétitivité qui regroupera les compétences sur un même territoire d’entreprises, d’établissements d’enseignement supérieur et d’organismes de recherche publics ou privés qui ont vocation à travailler en synergie pour mettre en œuvre des projets de développement économique pour l’innovation dans l’autonomie de la France en matière de besoins de premières nécessités.


proposition de loi

Article 1er

I. – L’entreprise stratégique et de première nécessité est un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé qui remplissent les conditions suivantes :

– une gouvernance partagée avec une ou plusieurs sociétés dont les bénéfices sont majoritairement consacrés à l’objectif de maintien ou de développement de l’activité de l’entreprise ;

– en cas de liquidation ou, le cas échéant, en cas de dissolution, l’ensemble du boni de liquidation est dévolu soit à une autre entreprise stratégique et de première nécessité au sens du présent article, soit dans les conditions prévues par les dispositions législatives et réglementaires spéciales qui régissent la catégorie de personne morale de droit privé faisant l’objet de la liquidation ou de la dissolution.

II. – L’entreprise stratégique et de première nécessité est composée des activités de production, de transformation, de distribution, d’échange et de consommation de biens ou de services en lien avec les besoins indispensables au bon fonctionnement de la France en cas de crise sanitaire, mises en œuvre :

1° Par les personnes morales de droit privé ;

2° Par les sociétés commerciales qui, aux termes de leurs statuts, remplissent les conditions suivantes :

a) Elles respectent les conditions fixées au I du présent article ;

b) Elles recherchent une action de salut public au sens du 3° du présent article ;

c) Elles bénéficient d’un impôt sur les sociétés de 12,5 % de l’article 2 de la présente loi ;

3° Sont considérées comme poursuivant une utilité de salut public au sens de la présente loi les entreprises dont l’objet social a pour objectif de contribuer à la juste indépendance sanitaire de la Nation.

III. – Peuvent faire publiquement état de leur qualité d’entreprise stratégique et de première nécessité pour bénéficier des droits qui s’y attachent, les personnes morales de droit privé qui répondent aux conditions mentionnées au présent article et qui, s’agissant des sociétés commerciales, sont immatriculées, sous réserve de la conformité de leurs statuts, au registre du commerce et des sociétés avec la mention de la qualité d’entreprise stratégique et de première nécessité.

IV. – Un décret précise les conditions d’application du présent article, et notamment les règles applicables aux statuts des sociétés mentionnées au 2° du II.

Article 2

Le 1 de l’article 238 bis du code général des impôts est complété par un h ainsi rédigé :

« h) Des conseils et des investissements en faveur des entreprises stratégiques et de première nécessité définies par la loi n°      du        relative à l’engagement des entreprises au service de la Cité. »

Article 3

Après l’article L. 6111‑8 du code du travail, il est inséré un article L. 6111‑9 ainsi rédigé :

« Art. L. 61119. – Le compte personnel de formation aux besoins de la Nation recense les formations au sein des entreprises stratégiques et de première nécessité. Il permet d’acquérir un savoir‑faire indispensable en cas de crise sanitaire.

« Un décret définit le montant des droits acquis en fonction de la durée consacrée à cette activité, dans la limite d’un plafond. »

Article 4

Le 3 de l’article 24 de la loi n° 2004‑1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 est rétabli dans la rédaction suivante :

« 3. L’État reste compétent pour accompagner et soutenir les projets des pôles de compétitivité, d’autant plus lorsque les dépenses de recherche et de développement bénéficient à des projets en faveur de l’autonomie de la France dans le domaine des besoins de premières nécessités. »

Article 5

La charge et la perte de recettes pour l’État sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.