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N° 3033

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juin 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à casser les chaînes de contamination économique,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanChristophe LAGARDE, Christophe NAEGELEN, Michel ZUMKELLER, Pascal BRINDEAU, Philippe DUNOYER, Francis VERCAMER, Philippe GOMÈS, Thierry BENOIT, Stéphane DEMILLY, Pierre MORELÀL’HUISSIER, Guy BRICOUT, Sophie AUCONIE, Meyer HABIB,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Si la crise du coronavirus covid‑19 a eu des conséquences sanitaires désastreuses, elle aura, également, de répercussions économiques considérables pour nos entreprises.

Plusieurs économistes estiment que la crise économique qui succédera à la crise sanitaire du coronavirus sera plus grave que celles qui ont suivi les crises pétrolières des années 1970.

Si le gouvernement a, d’ores et déjà, déployé de nombreuses aides et mesures pour accompagner les entreprises tout le long de cette crise, il n’en demeure pas moins que nombre d’entre elles, notamment les plus petites, risquent de ne pas survivre.

À l’évidence, le nombre de difficultés de paiements, de cessations de paiements, de licenciements et de liquidations judiciaires devrait augmenter de manière significative, provoquant, par là même, un effet domino dévastateur.

Ainsi, les fournisseurs, qui subissent déjà de plein fouet la crise économique et qui, en temps normal, n’obtiennent pratiquement jamais le paiement de leur créance en cas d’ouverture de procédure collective, ne résisteront pas et risqueront, à leur tour, de s’effondrer.

Il est toutefois possible de casser ces chaînes de contamination économique en supprimant les privilèges des créanciers publics (Trésor et organismes sociaux) dans l’ordre de paiement des créanciers afin que ceux‑ci ne soient pas payés avant les fournisseurs.

Par cette proposition de loi, les salaires des employés continueront, évidemment, à être payés en priorité, mais la suppression des privilèges des créanciers publics permettra d’améliorer le niveau de remboursement des créanciers chirographaires.

En outre, les fournisseurs créanciers, pour lesquels le non‑paiement de créance menace la conduite de leur activité et le maintien des emplois salariés, pourront demander qu’elles remontent dans l’ordre de paiement des créanciers.

Rappelons qu’en 1999, l’Allemagne a supprimé le privilège du Trésor et des organismes sociaux avec l’entrée en vigueur de son code de l’insolvabilité. Il en est de même pour le Royaume‑Uni qui en 2002 afin de préserver les droits des créanciers privés a quasiment abandonné les droits prioritaires de la Couronne. La Belgique a pour sa part en 2009, transformé les créances fiscales en créances sursitaires ordinaires (l’équivalent des créances chirographaires). En 2011, le Portugal a renoncé aux privilèges des organismes sociaux et du Trésor public. Enfin, précisons que dès 2005, une réduction de ces privilèges était recommandée par la Commission de l’ONU pour le droit commercial.

Par cette proposition de loi, l’État et les organismes sociaux perdront assurément des recettes. Pour autant, ces pertes sont bien minimes en comparaison avec un risque de faillite en cascade de nos entreprises et des suppressions d’emploi qui en résulteront.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article 1920 du code général des impôts est complété par un 5 ainsi rédigé :

« 5. En cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du redevable ou d’un tiers tenu légalement au paiement des sommes dues au titre de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales, de la taxe sur les salaires, de la cotisation foncière des entreprises et des taxes annexes, des taxes sur le chiffre d’affaires et des taxes annexes, et des contributions indirectes, le Trésor ou son subrogé renonce à exercer son privilège. »

Article 2

L’article 1929 quater du même code est abrogé.

Article 3

Après le mot : « paiement », la fin du troisième alinéa de l’article L. 243‑5 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée :

« des cotisations et des majorations et pénalités de retard, les organismes sociaux ou organismes assimilés renoncent à exercer leur privilège. »

Article 4

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au II de l’article L. 525‑9, les mots : « et par préférence au privilège du Trésor, au privilège visé à l’article L. 243‑4 du code de la sécurité sociale » sont supprimés ;

2° À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 622‑8, les mots : « ou lorsqu’il intervient au bénéfice du Trésor ou des organismes sociaux ou organismes assimilés » sont supprimés ;

3° Le deuxième alinéa de l’article L. 622‑30 est supprimé.

Article 5

Lorsqu’un créancier établit que le respect de l’ordre de paiement entraîne des conséquences graves pour la poursuite de son activité ou pour le maintien de l’emploi salarié au sein de son entreprise, il peut demander au tribunal le paiement de sa créance par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûretés, à l’exception de celles garanties par le privilège établi aux articles L. 3253‑2, L. 3253‑4 et L. 7313‑8 du code du travail.

Article 6

I. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement, et corrélativement pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.