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N° 3037

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juin 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à alléger la fiscalité sur la transmission du patrimoine,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Arnaud VIALA, JeanMarie SERMIER, JeanPierre VIGIER, Brigitte KUSTER, Alain RAMADIER, JeanLouis MASSON, JeanLouis THIÉRIOT, PierreHenri DUMONT, Fabien DI FILIPPO, Guy TEISSIER, Bérengère POLETTI, Valérie LACROUTE, Véronique LOUWAGIE, Constance LE GRIP, Émilie BONNIVARD, Julien DIVE, Frédérique MEUNIER, Robin REDA, JeanYves BONY, Marc LE FUR, Patrice VERCHÈRE, Pierre VATIN, Thibault BAZIN, Frédéric REISS, Éric PAUGET, Valérie BEAUVAIS, Patrick HETZEL, Josiane CORNELOUP, Vincent DESCOEUR, Valérie BAZINMALGRAS, Michel VIALAY, Vincent ROLLAND, Bernard PERRUT, Philippe GOSSELIN, Laurent FURST, Stéphane VIRY, Laurence TRASTOURISNART, Nicolas FORISSIER, Didier QUENTIN, Gilles LURTON, Guillaume LARRIVÉ, Bernard BROCHAND, Nathalie BASSIRE,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les Français sont historiquement et culturellement attachés à la constitution durant leur vie active d’un patrimoine, plus ou moins important selon leur niveau de rémunération, leur situation et les aléas de leur existence. Le moment venu, la transmission de ce patrimoine, que ce soit sous la forme de succession ou de donation à leurs descendants, est un sujet très important pour tous, en dehors de tout critère de revenu. Plus qu’une simple question de perpétuation de biens, il s’agit de l’expression de la solidarité intrafamiliale et intergénérationnelle et beaucoup de Français considèrent que c’est là leur meilleure contribution à la réussite de leurs enfants ou de leurs petits‑enfants, afin de les « lancer » dans la vie.

Selon l’INSEE, 45 % des français ont reçu un héritage, la plupart du temps sous la forme d’une somme dont la moyenne se situe aux alentours de 30 000 euros.  Pourtant, ce que révèle aussi les chiffres de l’INSEE, c’est que 66 % des héritages ne dépassent pas ces 30 000 euros. Ces petites transmissions représentent tout de même un accès à un capital chez les ménages les plus modestes.

En France, la taxation qui règle les transmissions est une construction complexe qui fait jouer de nombreuses variables. C’est aussi, dans la tradition politique de notre pays, un des leviers de lutte contre les inégalités, au nom de la justice sociale. Ce dispositif fiscal est basé sur la part nette reçue par chaque héritier et sur une règle : les droits à régler aux agents de l’administration fiscale sont calculés sur la part nette de patrimoine chez chacun des héritiers, et dans le cas d’un testament, sur la valeur des biens légués par testament. Le système de taxation sur la transmission du patrimoine reste difficilement compréhensible et peut même décourager la reprise d’une entreprise familiale, puisqu’elle intègre des notions marchandes et individualistes dans l’environnement familial.

Plus que jamais, au cœur des bouleversements qu’engendre la crise mondiale dans laquelle nous sommes plongés, il paraît indispensable de conforter, de renforcer et d’inciter l’expression d’une solidarité familiale et de favoriser une optimisation des procédures de transmission.

La présente proposition de loi a par ailleurs pour volonté de sécuriser les entreprises familiales et plus précisément, les cessions de parts entre membres d’une famille. À l’heure où le revenu des Français est grandement impacté, ces mesures de simplification des taxes et droits sur les transmissions de patrimoine intrafamilial se veut une simple modification dans le dispositif actuel, et non un bouleversement des règles générales.

L’objectif principal de cette proposition de loi est de baisser les taxes sur la transmission de capital pour les familles modestes et de la classe moyenne, comme indiqué au chapitre Ier, afin d’augmenter le pouvoir d’achat que représente chez ces foyers la transmission par donation ou par succession. Dans ce sens, larticle 1 du chapitre Ier modifie le tableau 1 de l’article 777 du code général des impôts en réduisant les tarifs applicables de deux points pour les tranches inférieures à 250 000 €. L’objectif est d’aider les ménages dont l’héritage peut être un capital utile pour investir. L’article 2 vise à porter l’abattement de 100 000 € à 150 000 € pour la perception des droits de mutation à titre gratuit. La somme est donc réévaluée au niveau de celle en vigueur sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Larticle 3 du chapitre II quant à lui augmente l’abattement prévu lors de la cession en pleine propriété de fonds artisanaux, de fonds de commerce, de fonds agricoles ou de clientèles d’une entreprise individuelle ou de parts ou actions d’une société en le portant de 300 000 à 500 000 euros, facilitant ainsi la transmission d’une entreprise. Dans un cadre général, il s’agit de faciliter la transmission dans les entreprises familiales, afin d’aider la cession de parts de l’entreprise entre les membres d’une même famille sans avoir à passer par des techniques de transmission d’entreprise complexe et difficilement accessibles pour les petites entreprises.

Enfin, les articles 4, 5, 6 et 7 du chapitre III, plus spécifiques, traitent du cas de la cession des exploitations agricoles. La complexité du monde agricole demande d’être précis et ce chapitre prend en compte toutes les dimensions de l’organisation des propriétés agricoles. Ce chapitre III a pour but d’alléger la fiscalité appliquée aux cessions de parts des groupements fonciers agricoles entre les membres d’une même famille pour leurs membres et les ayants droits familiaux de ces derniers, alléger la fiscalité appliquée aux parts de ces groupements qui louent leurs biens à l’exploitation, et alléger la fiscalité appliquée aux cessions de parts des groupements agricoles d’exploitation en commun entre membres et simplifier les démarches administratives afférentes. Larticle 8 gage la proposition de loi.


proposition de loi

Chapitre Ier

Article 1er

Le tableau I de l’article 777 du code général des impôts est ainsi rédigé :

  

« 

Fraction de part nette taxable

Tarif applicable (%)

 

 

N’excédant pas 8 072 €

3

 

 

Comprise entre 8 072 € et 12 109 €

8

 

 

Comprise entre 12 109 € et 30 000 €

13

 

 

Comprise entre 30 001 € et 250 000 €

18

 

 

Comprise entre 250 001 € et 552 324 €

20

 

 

Comprise entre 552 324 € et 902 838 €

30 

 

 

Comprise entre 902 838 € et 1 805 677 €

40 

 

 

Au‑delà de 1 805 677 €

45 

 ».

 

Article 2

Au premier alinéa du I de l’article 779 du code général des impôts, le montant : « 100 000 € » est remplacé par le montant : « 150 000 € ».

Chapitre II

Article 3

Après le 2° de l’article 732 ter du code général des impôts, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :

« 2° bis Dans le cas d’une transmission entre parents ou alliés jusqu’au quatrième degré inclus, la valeur appliquée à l’abattement sur la valeur du fonds ou de la clientèle ou sur la fraction de la valeur des titres représentative du fonds ou de la clientèle est porté à 500 000 €. »

Chapitre III

Article 4

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 683 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, la quatrième occurrence du mot : « à » est remplacée par les mots : « au I de » ;

b) Il est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – Les apports immobiliers effectués à un groupement foncier agricole en application du second alinéa de l’article L. 322‑15 du code rural et de la pêche maritime par un parent ou un allié jusqu’au quatrième degré inclus d’un détenteur de parts de ce groupement ou par l’un de ses membres sont assujettis à la taxe de publicité foncière ou au droit d’enregistrement aux taux prévu au II de l’article 1594 D du présent code. » ;

2° Après le I de l’article 810, il est inséré un I bis ainsi rédigé : 

« I bis. – L’enregistrement des apports effectués à un groupement foncier agricole par un parent ou un allié jusqu’au quatrième degré inclus d’un détenteur de parts de ce groupement ou par l’un de ses membres donne lieu au paiement d’un droit fixe de 250 euros porté à 350 euros pour les sociétés ayant un capital d’au moins 300 000 euros. » ;

3° L’article 1594 D est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est insérée la référence : «  I. – » ;

b) Il est complété par un II ainsi rédigé :

« II. – Les apports immobiliers mentionnés au III de l’article 683 sont assujettis à la taxe de publicité foncière ou au droit d’enregistrement au taux de 2,50 %, sous réserve des dispositions du II de l’article 1594 F quinquies

« Il peut être modifié par les conseils départementaux sans que ces modifications puissent avoir pour effet de le réduire à moins de 0,50 % ou de le relever au‑delà de 4,50 %. » ;

II. – L’article L. 322‑15 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Art. L. 32215. – Les actes constatant des apports mobiliers à un groupement foncier agricole, l’augmentation du capital social ou la prorogation d’un groupement foncier agricole sont enregistrés au droit fixe prévu au I de l’article 810 du code général des impôts ou, lorsque ces actes ont été effectués par un parent ou un allié jusqu’au quatrième degré inclus d’un des détenteurs de parts de ce groupement ou par l’un de ses membres, au droit fixe prévu au I bis du même article 810 du même code.

« Les apports immobiliers à un groupement foncier agricole sont assujettis à la taxe de publicité foncière ou au droit d’enregistrement aux taux prévus aux I et III de l’article 683 dudit code. »

Article 5

L’article 730 bis du code général des impôts est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les parts cédées en application du précédent alinéa sont enregistrées au droit fixe de 100 euros, lorsque la cession intervient :

« 1° Entre un détenteur de parts d’un groupement foncier agricole et un parent ou un allié de celui‑ci jusqu’au quatrième degré inclus sous réserve que ce parent ou allié ne participe pas à l’exploitation des biens de ce groupement ;

« 2° Entre membres d’un même groupement foncier agricole ;

« 3° Entre membres d’un même groupement agricole d’exploitation en commun. »

Article 6

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 793 est ainsi modifié :

a) Après le sixième alinéa du 4° du 1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les parts mentionnées au premier alinéa du présent 4° sont exonérées à concurrence de la totalité de la fraction de la valeur nette des biens donnés à bail à long terme ou à bail cessible, sous réserve des dispositions de l’article 793 bis, lorsque le donataire est soit un parent ou allié du donateur jusqu’au quatrième degré inclus ne participant pas à l’exploitation des biens du groupement, soit un membre de ce groupement. » ;

b) Après le 4°, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :

« 4° bis Les parts des groupements agricoles d’exploitation en commun conformes aux dispositions des articles L. 323‑1 à L. 323‑16 du code rural et de la pêche maritime, lorsque la cession intervient entre membres du groupement, à concurrence de la totalité de la fraction de leur valeur nette ; » ;

2° L’article 793 bis est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « 4° », sont insérés les mots : « et au 4° bis » ;

b) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit au titre des parts mentionnées au 4° et au 4° bis du 1 de l’article 793 est ramenée à 75 % au‑delà de 150 000 euros, lorsque le donataire est : »

c) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés : 

« 1° Un parent ou un allié du donateur jusqu’au quatrième degré inclus ;

« 2° Un membre du même groupement foncier agricole ou du même groupement agricole d’exploitation en commun que le donateur. »

Article 7

L’article 1701 du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les droits de mutation par décès des exploitations agricoles, commerces et entreprises, dont l’actif net est inférieur à un million d’euros, peuvent être acquittés en parts égales sur quinze ans à compter du dépôt de la déclaration de succession, à la condition que l’un des héritiers exerce la fonction de chef d’exploitation ou de dirigeant de l’entreprise. 

« Cette faculté n’entraîne pas le paiement d’intérêts moratoires, ni la constitution de garanties. 

« Cette faculté s’achève six mois après la cessation des fonctions d’exploitant ou de dirigeant de l’entreprise sauf si le successeur est un conjoint ou un descendant en ligne directe »

Article 8

I. – La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.