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N° 3317

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 septembre 2020.

PROPOSITION DE LOI

relative à léducation à lenvironnement et au développement durable,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Jennifer De TEMMERMAN,

députée.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi est issue d’une réflexion approfondie sur la société dans laquelle nous souhaitons vivre.

Cette proposition de loi est construite autour de la notion de développement durable telle que définie dans Notre avenir à tous (Our Common Future), publication de 1987, plus connue sous le nom de rapport Brundtland. « Le développement durable est un mode de développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. » Cette notion de développement durable va bien plus loin qu’un seul engagement environnemental auquel elle est trop souvent réduite, car elle comporte des aspects certes environnementaux, mais également sociaux et économiques.

Alors que nous sortons progressivement de la pandémie de covid‑19, la question n’est pas de savoir quand de nouvelles catastrophes se produiront, mais comment réunir toutes les conditions pour éviter au maximum des situations similaires. Le choc de la pandémie nous a montré que nous pouvons faire les choses autrement. Pendant le confinement, les émissions de CO2 et les pollutions ont chuté. La faune a repris ses droits parfois jusque dans nos villes. La reprise économique sur les mêmes bases qu’avant n’est pas un remède durable au changement climatique ni à l’effondrement de la biodiversité. Une relance aveugle pour revenir à la « normalité » rattrapera rapidement les tonnes d’émissions polluantes évitées et nous replongera encore dans nos travers.

Le confinement a exacerbé les inégalités entre ceux qui doivent tenir les professions essentielles à la vie et ceux qui peuvent télétravailler, entre ceux qui sont surchargés par les tâches ménagères et le suivi des enfants confinés et ceux qui peuvent vaquer à leurs occupations, entre les habitants des centres‑villes ou des quartiers favorisés et ceux des quartiers populaires ou les habitants ruraux, entre les salariés encore couverts par la protection sociale et les précaires laissés à l’abandon, entre ceux disposant d’outils numériques et les maîtrisant et les laissés‑pour‑compte, entre la métropole et l’outre‑mer, entre le Nord et les Suds. En même temps, dans les campagnes et les quartiers, ancrées dans les réseaux associatifs et de sociabilité, ont émergé d’innombrables initiatives de solidarité et d’entraide qui préfigurent les mondes de demain.

Cet élan de solidarité initié par nos concitoyens, nous le retrouvons dans les Objectifs de développement durable. Maintenant plus que jamais, ces objectifs ont besoin d’un portage politique de haut niveau afin de donner un signal fort à nos concitoyens et de jeter les bases de la construction d’une société résiliente. À l’heure où nous nous interrogeons sur l’avenir que nous souhaitons avoir en commun, il apparaît primordial de s’appuyer sur ce plan équilibré et juste que constitue l’Agenda 2030.

Cet Agenda a été adopté en septembre 2015 par 193 pays aux Nations unies, à la suite des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Ces 17 objectifs de l’Agenda 2030, déclinés en 169 cibles, constituent une vision et une grammaire commune pour notre avenir, un avenir plus juste, équitable, pacifique, écologique et social. Un avenir où chaque être humain trouve sa place en harmonie avec la planète. La résolution adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies, encourage les États membres à se fixer leurs propres cibles pour répondre à l’Agenda 2030 en tenant compte des spécificités nationales ; à articuler leur action autour de stratégies nationales de développement durable et à procéder à des examens réguliers des progrès accomplis en tirant parti des contributions de la société civile, du secteur privé, du parlement et des autres institutions.

C’est ainsi que, dans notre pays, une feuille de route a été présentée le 20 septembre 2019, dessinant les grandes transformations à mener. Cette feuille de route propose de faire évoluer notre société vers un modèle plus prospère, plus inclusif et plus respectueux de l’environnement, afin que la France soit au rendez‑vous des Objectifs de développement durable en 2030. La notion de développement durable est mentionnée à plusieurs reprises dans plusieurs de nos textes législatifs. Il est malheureusement souvent utilisé à tort dans sa seule acception environnementale, par exemple dans le Code du commerce. Cependant, il arrive que les objectifs du développement durable soient cités dans les trois dimensions sociale, économique et environnementale comme à l’article L. 2111‑1 du code de la commande publique.

Cette réalité relève d’une mauvaise compréhension du concept de développement durable, trop souvent réduit au pilier environnemental. Il est donc essentiel dans un premier temps de travailler à faire connaître à la fois l’Agenda 2030 mais aussi tout simplement le concept de développement durable.

Notre proposition de loi propose donc de commencer par un changement du code de l’éducation car il est évident que c’est à l’école que commencent la formation des citoyens et l’impulsion des changements.

En 2015, à l’occasion de la COP 21 à Paris, le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche s’est mobilisé et a intégré l’éducation à l’environnement et au développement durable dans la formation initiale des élèves, dans l’ensemble des écoles et des établissements scolaires. De son côté, le ministère de l’Agriculture et de l’alimentation a procédé à cette intégration au travers de son instruction DGER/SDPFE/2017‑445 du 16 mai 2017 dans l’ensemble des établissements d’enseignement techniques agricoles. Le ministère des sports a, quant à lui, introduit ce sujet au travers de la création d’un brevet professionnel dédié par arrêté du 27 février 2017. Il s’agit d’enseignements transversaux qui intègrent les enjeux du développement durable dans les nouveaux programmes d’enseignement de l’école primaire et aux programmes d’enseignement disciplinaires du collège et des lycées généraux, technologiques et professionnels. Le sujet est donc déjà partiellement pris en compte par les ministères en charge de la formation et de l’éducation. Cependant, cette prise en compte ne relève finalement que de l’administration en place, ainsi que de la volonté des académies, personnels de direction, enseignants… L’éducation à l’environnement est à peine évoquée dans quelques lignes du code de l’éducation, et le développement durable compris comme une expression synonyme. La situation doit être clarifiée et cet enseignement capital, et motivant pour les jeunes en demande doit enfin prendre toute sa place.

La finalité de l’éducation à l’environnement et au développement durable est de donner aux futurs citoyens les moyens de faire des choix en menant des raisonnements intégrant les questions complexes du développement durable qui leur permettront de prendre des décisions responsables dans la sphère publique et sur le plan personnel.

L’article 1 vise à entériner la présence de l’éducation à l’environnement et au développement durable dans le code de l’éducation, introduit pour la première fois par la loi n° 2013‑595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. Il met l’éducation à l’environnement et au développement durable sur le même plan que l’enseignement technologique, les enseignements artistiques et l’éducation physique et sportive en le faisant apparaître dans les objectifs et missions du service public de l’enseignement. En outre, pour être en adéquation avec l’instruction obligatoire à 3 ans, il fait débuter l’éducation à l’environnement et au développement durable dès l’école maternelle.

L’article 2 vise à intégrer la notion d’activités environnementales dans le code de l’éducation afin de compléter le chapitre sur les activités périscolaires.

L’article 3 vise à afficher les objectifs de développement durable dans les établissements scolaires afin de sensibiliser les élèves, sur le même modèle que celui de la déclaration universelle des droits de l’homme.

 


proposition de loi

Article 1er

Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le livre Ier de la première partie est ainsi modifié :

a) Après la cinquième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 111‑2, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle éveille aux grands enjeux de développement durable ».

b) Après la quatrième phrase de l’article L. 121‑1, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ils concourent à l’éducation à l’environnement et au développement durable. » ;

c) La première phrase du I de l’article L. 121‑4‑1 est complétée par les mots : « et des enjeux de développement durable » ;

d) Le chapitre II du titre II est complété par un article L. 121‑8 ainsi rédigé :

« Art. L.1218. – L’éducation à l’environnement et au développement durable contribue à l’épanouissement et à la responsabilisation civile des élèves. » ;

2° À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 312‑19, le mot « primaire » est remplacé par le mot : « maternelle ».

Article 2

I. – Le titre V du livre V de la deuxième partie du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° À l’intitulé, après le mot : « périscolaires », sont insérés les mots : « environnementales et d’initiation au développement durable » ;

2° À la première phrase du second alinéa de l’article L. 551‑1, après le mot : «sportives », sont insérés les mots : « , environnementales et de développement durable ».

3° Il est ajouté un chapitre III ainsi rédigé :

« CHAPITRE III

« Les activités environnementales de sensibilisation au développement durable

« Composantes de l’éducation au développement durable, les activités environnementales volontaires des élèves sont organisées dans les établissements par les associations environnementales scolaires agréées par les ministères concernés.

« Une association environnementale est créée ou associée dans tous les établissements du second degré. L’État et les collectivités territoriales favorisent la création ou le partenariat d’une association environnementale dans chaque établissement du premier degré. Les associations environnementales scolaires agréées bénéficient de l’aide de l’État. Les collectivités territoriales peuvent concourir au développement de ces associations, en particulier en favorisant l’accès à des équipements locaux.

« Les associations environnementales scolaires adoptent des dispositions statutaires obligatoires définies par décret en Conseil d’État et sous couvert d’un agrément défini par chacun des ministères concernés. »

II. – La charge pour l’État  est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 3

L’article L. 111‑1‑1 du code de l’éducation est complété par la phrase suivante :

« L’Agenda 2030 et les objectifs de développement durable sont affichés de manière visible dans les locaux des mêmes écoles et établissements. »