Description : LOGO

N° 3331

_____

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 septembre 2020.

PROPOSITION DE LOI

portant renforcement des pouvoirs de la police municipale,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Pierre MORELÀLHUISSIER, Sébastien CHENU, Sophie PANONACLE, Philippe MEYER, Sophie AUCONIE, MarieFrance LORHO, Fabrice BRUN, Michel FANGET, Fabien LAINÉ, Isabelle VALENTIN, Grégory BESSONMOREAU, Dino CINIERI, Jacques CATTIN, JeanLuc WARSMANN, Emmanuelle MÉNARD, Stéphane BAUDU, JeanClaude BOUCHET, Agnès THILL, Thomas GASSILLOUD, Thibault BAZIN, Valérie PETIT, Christophe NAEGELEN, Nicolas MEIZONNET, Marine BRENIER, Béatrice DESCAMPS, Nicolas DUPONTAIGNAN, Ludovic PAJOT, Philippe VIGIER, Paul CHRISTOPHE, Valérie SIX, Meyer HABIB, Pierre CABARÉ, Guy BRICOUT, JeanLuc REITZER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans son discours de politique générale, le Premier Ministre a fait de la sécurité le point d’orgue de son mandat, parlant d’une justice qui a trop longtemps été délaissée, d’une crise de l’autorité qui a conduit à l’ensauvagement d’une certaine partie de la société. « Ne rien laisser passer », voici les mots attendus, que nous parlementaires avons entendus.

Cette demande émane aussi de nombreux Maires, demandant l’extension des pouvoirs de leur police municipale pour une réponse ferme et sans complaisance. Les communes participent déjà aux efforts de sécurité et de protection des concitoyens sur le territoire en se dotant de nouveaux matériels, en augmentant les effectifs quand cela leur est possible et en mettant à disposition de la police nationale et de la justice leurs images vidéo.

C’est pourquoi cette proposition de loi propose de renforcer l’action de « proximité » sur les questions de sécurité pour une approche adaptée aux réalités et aux besoins de chaque territoire, à l’écoute des citoyens mais aussi en capacité de prendre des sanctions fortes quand cela est nécessaire.

Si le Premier Ministre a annoncé généraliser à la rentrée la forfaitisation des délits de stupéfiants déjà en expérimentation dans certaines villes de France, il nous faut aller plus loin en permettant aux forces municipales d’avoir accès à un certain nombre de fichiers comme ceux des permis de conduire, des voitures volées, des personnes recherchées mais encore des fichiers S. Sans cet accès, la police municipale de proximité ne peut avoir les outils nécessaires pour appliquer les mesures qui s’imposent.

Il convient aussi de leur donner la possibilité de réaliser des contrôles d’identité, tout en poursuivant la généralisation du « ticket de contrôle » pour éviter les abus et au contraire, encourager une action de justice.

La police municipale doit aussi pouvoir prononcer des fermetures d’établissements lorsque ces derniers ne respectent pas les impératifs de tranquillité publique.

La sécurité est d’abord et avant tout une compétence de l’État. Pour autant, les Maires sont prêts aujourd’hui à « faire un pas de plus pour accompagner l’État dans cette mission dans un contexte de menace terroriste et de délinquance sans doute renforcé par les crises sanitaire, économique et sociale liées au covid‑19 ».

Toutes ces mesures devront faire l’objet d’une Convention signée entre le Maire, le Préfet représentant de l’État et le procureur de la justice, dans les cas où le Maire y serait favorable.

Larticle 2 permet lui de généraliser l’usage de la caméra piéton à toutes les communes, suite au succès de l’expérimentation dans 300 communes où l’ensemble des objectifs portés par le décret n° 2016‑1861 du 23 décembre 2016 ont été atteints : prévention, répression, formation. Cette généralisation doit aussi permettre aux agents de surveillance de la voie publique et aux gardes‑champêtres de bénéficier du dispositif de caméra individuelle.

Larticle 3 prévoit de sanctionner plus facilement le délit d’outrage. Les personnes dépositaires de l’autorité publique, notamment les forces de l’ordre, sont confrontées de manière récurrente à des insultes ou des menaces.

Par ailleurs, cette proposition de loi souhaite s’inscrire dans une démarche transpartisan, reprenant des précédentes propositions de loi sur le sujet qui n’ont pu encore être examinées et votées par les deux chambres comme la proposition de loi de Madame Emmanuelle Ménard visant à donner à la police municipale les moyens d’exercer sa mission.

Aussi,

L’article 4 a pour objectif de sanctionner de manière plus adaptée et cohérente les contrevenants qui ne seraient pas coopératifs lors d’un relevé d’identité. Une peine de trois mois de prison et 7 500 euros d’amende permettrait d’aligner cette infraction à celle du refus de se soumettre aux vérifications pour un conducteur de véhicule (article L. 233‑2 du code de la route).

L’article 5 permet de revenir sur le dispositif actuel prévu pour procéder à des fouilles pour les manifestations sportives, récréatives ou culturelles par les polices municipales comme pour les forces de sécurité privée en dessous du seuil de 300 personnes. Supprimer ce seuil permettrait de gagner en efficacité d’autant plus que, depuis une vingtaine d’année, notre pays est soumis à d’importants risques terroristes. 

L’article 6 a pour objectif de permettre à la police municipale d’être en mesure de prendre en charge les personnes en état d’ivresse sur la voie publique pour assurer non seulement leur sécurité mais aussi celle des riverains et des passants. 

L’article 7 vise à étendre le champ d’action de la police municipale en cas de mise en commun des agents rattachés à différentes communes. Actuellement, ce dispositif est limité à 80 000 habitants. Il convient de l’étendre à 120 000 afin d’assurer une meilleure mutualisation des moyens et permettre à la police municipale d’assurer plus largement la sécurité des Français.

L’article 8 donne à la police municipale la possibilité d’exercer sa mission en civil et armée lorsque cela est nécessaire. 

L’article 9 permet de revenir sur un problème souvent rencontré par la police municipale. En cas de flagrant délit d’un crime ou d’un délit, l’agent de police municipale peut interpeller la personne en fuite grâce à l’article 73 du code de procédure pénale. Cependant, dès lors que la personne franchit le périmètre de la commune, le policier municipal devient une personne comme les autres, dépouillée de ses prérogatives professionnelles. Dans un souci d’efficacité de notre droit et de notre justice, il convient donc de corriger cette carence qui empêche nos policiers municipaux d’assurer pleinement leur mission.

L’article 10 vise à permettre aux agents de police municipale de procéder à des tests d’alcoolémie dans le cadre de certaines infractions au code de la route sur l’ordre et le contrôle du maire en sa qualité d’officier de police judiciaire.

L’article 11 est très largement demandé au sein de la police municipale pour lui permettre d’être facilement joignable par le biais d’un numéro facile à retenir et donc d’intervenir rapidement là où elle est appelée.

Tel est l’objet de la présente loi.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 511‑1 du code de la sécurité intérieure est complété par huit alinéas ainsi rédigés :

« À l’initiative du maire, après accord du conseil municipal, une convention de sécurité communale peut être établie entre le maire de la commune, le représentant de l’État dans le département et le procureur de la République.

« Cette convention définit les conditions d’accès et les moyens nouveaux accordés à la police municipale et aux gardes champêtres afin que ces derniers puissent :

a) Accéder au fichier des permis de conduire ;

b) Accéder au fichier des voitures volées ;

c) Accéder au fichier des personnes recherchées ;

d) Accéder aux fichiers S ;

e° Réaliser des contrôles d’identité définis aux articles 78‑1 à 78‑7 du code de procédure pénale ;

f° Prononcer des fermetures d’établissements relevant de l’article L. 123‑4 du code de la construction et de l’habitation. »

Article 2

Au premier alinéa de l’article L. 241‑1 du code de la sécurité intérieure, après la première occurrence du mot : « nationale », sont insérés les mots : « , les agents de la police judiciaire adjoints membres de la police municipale, les agents de surveillance de voie publique et les gardes‑champêtres ».

Article 3

Au premier alinéa de l’article 433‑5 du code pénal, les mots : « non rendus publics » sont supprimés.

Article 4

À l’avant‑dernière phrase du second alinéa de l’article 78‑6 du code de procédure pénale, le mot : « deux », est remplacé par le mot : « trois ».

Article 5

À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 613‑3 du code de la sécurité intérieure, les mots : « rassemblant plus de 300 spectateurs » sont supprimés.

Article 6

L’article L. 2212‑2 du code général des collectivités territoriales est complété par un 8° ainsi rédigé :

« 8° Le soin de conduire à ses frais, dans le local de police ou de gendarmerie le plus proche ou dans une chambre de sûreté, une personne trouvée en état d’ivresse dans les lieux publics, pour y être retenue jusqu’à ce que son taux d’alcoolémie soit inférieur ou égal à 0,25 mg d’alcool d’air expiré. »

Article 7

Au premier alinéa de l’article L. 512‑1 du code de la sécurité intérieure, le nombre : « 80 000 » est remplacé par le nombre : « 120 000 ». 

Article 8

Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 511‑4 du code de la sécurité intérieure, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Les agents de police municipaux peuvent, en fonction des nécessités de leur activité professionnelle et du but poursuivi, et avec l’accord du maire, exercer leur mission armée et en tenue civile. Lors d’opérations de police, ils sont porteurs, de façon visible, de l’un des moyens matériels d’identification dont ils sont dotés sauf instructions expresses de l’autorité commandant l’opération. »

Article 9

L’article 21 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dès lors que l’agent de police municipale est amené, en cas de force majeure et pour les besoins d’une mission de police, à sortir des limites administratives de la commune à laquelle il est rattaché, en vue d’interpeller une personne susceptible d’avoir commis un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, il dispose des mêmes prérogatives que lorsqu’il exerce ses fonctions sur les limites administratives de la commune à laquelle il est rattaché. » 

Article 10

Au premier alinéa de l’article L. 234‑3 du code de la route, le mot : « soumettent », est remplacé par les mots : « mentionnés à l’article 21 du code de procédure pénale, sur l’ordre et sous la responsabilité du maire, peuvent soumettre ».

Article 11

Pour appeler la police municipale, et sur le modèle du numéro 115 pour le Samu social, il est créé un numéro d’urgence unique : le 120.

Article 12

Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application de la présente loi.

Article 13

I. ‑ La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. ‑ La charge pour les collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création de taxes additionnelles aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.