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N° 1556

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juillet 2023.

PROPOSITION DE LOI

pour une meilleure reconnaissance des pupilles de la Nation
et de la République,

(Renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Inaki ECHANIZ, Joël AVIRAGNET, Christian BAPTISTE, MarieNoëlle BATTISTEL, Mickaël BOULOUX, Philippe BRUN, Elie CALIFER, ALAIN DAVID, Arthur DELAPORTE, Stéphane DELAUTRETTE, Olivier FAURE, Guillaume GAROT, Jérôme GUEDJ, Johnny HAJJAR, Chantal JOURDAN, Marietta KARAMANLI, Fatiha KELOUA HACHI, Gérard LESEUL, Philippe NAILLET, Bertrand PETIT, Anna PIC, Christine PIRES BEAUNE, Valérie RABAULT, Claudia ROUAUX, Isabelle SANTIAGO, Herve SAULIGNAC, Mélanie THOMIN, Cécile UNTERMAIER, Boris VALLAUD, Roger VICOT,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le statut des pupilles de la Nation a été créé lors de la Première Guerre mondiale. Cette mesure inédite en Europe a permis à des centaines de milliers d’orphelins d’après‑guerre de devenir enfants de la Nation et, à ce titre, de bénéficier d’un support matériel et moral de l’État français.

Depuis 1917, ce statut s’est renforcé en élargissant ses conditions d’éligibilité.

Aujourd’hui, il peut être demandé par toute personne jusqu’à l’âge de 21 ans, victime ou enfant de victime d’actes de terrorisme, enfants de militaires blessés ou décédés en opération ou enfants de » mort pour les services de la Nation ». Il a été élargi pour concerner un plus vaste champ de faits de guerre mais aussi de nature civile. Ainsi, il concerne également les enfants de parents militaires mais aussi plus largement de personnels civils de l’État, de professionnels de santé ou encore d’élus.

Cette « adoption par la Nation » ouvre droit à plusieurs mesures de soutien moral et financier dont la mise en place revient à l’Office National des Combattants et des Victimes de Guerres (ONaCVG) pour le compte de l’État. Diverses subventions sont ainsi attribuées pour contribuer aux besoins des pupilles (besoins de base, besoins d’entretien, frais médicaux, vacances, études ou recherche d’un premier emploi) qui sont particulièrement accompagnés jusqu’à leurs 21 ans même si l’ONaCVG veille à rester un soutien pour les pupilles tout au long de leur vie. Les pupilles de la Nation bénéficient également d’avantages fiscaux.

En 2020, la France comptait 966 pupilles de la Nation âgés de moins de 21 ans et leur nombre total est estimé à 26 000 ([1]).

Bien que remanié et élargi, ce dispositif centenaire n’en demeure pas moins perfectible pour permettre aux pupilles et futures pupilles de bénéficier pleinement du droit à réparation que la Nation a le devoir de leur accorder. En cette période de dégradation du contexte géopolitique et de regain des tensions diplomatiques qui font planer le risque d’une multiplication des Opérations extérieures dans les années à venir, il serait judicieux d’assortir à l’effort budgétaire inédit consenti par le gouvernement, l’amélioration des dispositifs de soutien aux familles de militaires, comme celui relatif aux pupilles de la Nation. Plus largement, l’élargissement de l’éligibilité à ce statut à de nouvelles catégories de fonctionnaires, qui exercent des activités particulièrement à risque, serait bienvenu.

Cette proposition de loi comporte ainsi cinq articles.

L’article 1er propose de faciliter l’obtention du statut de pupille de la Nation complexe pour certaines situations comme celles d’enfants dont un parent souffre de symptômes post‑traumatique à la suite d’une opération militaire extérieure de la France (OPEX). En effet, aujourd’hui, seuls les enfants nés avant la fin de la participation du parent à l’opération ou dans les 300 jours qui ont suivi la fin de la mission du parent, peuvent prétendre au statut de pupille de la Nation. Or, les troubles de stress post‑traumatique du parent ou du soutien de famille peuvent être décelés tardivement, en dehors de ces délais. Il est ainsi nécessaire de permettre aux enfants nés dans les jours qui suivent la reconnaissance de la blessure du parent, via un constat d’incapacité, de pouvoir prétendre au statut de pupille.

Par ailleurs, il convient d’améliorer l’accès aux soins des troubles psychologiques du pupille comme conséquence du drame vécu par le parent. Si l’ONaCVG porte la mission de subvenir aux besoins des pupilles, dans la limite de ses disponibilités financières, force est de constater que l’accompagnement psychologique des pupilles devrait être pris en charge intégralement et automatiquement par l’État en raison des difficultés qu’ils peuvent connaitre tout au long de leur vie. Cette prise en charge représenterait une reconnaissance des traumatismes et de l’impact psychologique subis par les pupilles, au même titre que pour leur parent blessé, elle garantirait aussi un meilleur accès aux soins pour les personnes concernées. Ainsi il est proposé, dans l’article 2, de mettre en place une prise en charge intégrale des frais relatifs à l’accompagnement psychologique des pupilles de la Nation et de la République.

En effet, en mai 2021, le statut de pupille de la République a été créé pour les enfants des « Morts pour le service de la République », et concerne notamment les agents de police, sapeurs‑pompiers, sauveteurs en mer ou soignants décédés au cours de l’épidémie de la Covid‑19. Il donne droit à des dispositions semblables à celles des pupilles de la Nation à la différence qu’il peut être octroyé jusqu’aux 21 ans « inclus » du jeune concerné, soit jusqu’à ses 22 ans, contre 21 ans pour les pupilles de la Nation. L’article 3 propose ainsi d’aligner ces deux âges sur celui du statut de pupille de la République afin de réparer cette inégalité et dans un souci de clarification du droit.

L’article 4 propose d’attribuer la qualité de pupille de la Nation aux enfants des fonctionnaires et contractuels des Directions Interdépartementales des Routes décédés dans le cadre de l’exercice de leur métier particulièrement risqué. Il y a un mois, un agent de la Direction Interdépartementale des Routes Atlantique est décédé près de La Rochelle, un autre a été grièvement blessé. Depuis 2007, 11 agents des directions interdépartementales des routes ont trouvé la mort sur leur lieu de travail et, en moyenne, 16 sont blessés par an. Alors que leur rôle est majeur pour sécuriser nos routes, il est important de soutenir leur famille si survient un accident.

L’article 5 gage cette proposition de loi.

 

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 411‑3 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre est ainsi modifié :

1° Au 1°, après le mot : « maladies », sont insérés les mots : « , y compris psychiques, » ;

2° Après la première occurrence du mot : « ou », la fin du 2° est ainsi rédigée : « , au plus tard, dans les trois cents jours qui auront suivi le constat de l’incapacité du parent ou du soutien de famille de pourvoir à ses obligations et à ses charges de famille, en raison de blessures reçues ou de maladies contractées ou aggravées au cours desdites opérations. »

Article 2

Après le 28° de l’article L. 160‑14 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 29° ainsi rédigé :

« 29° Pour les frais relatifs à l’accompagnement psychologique des pupilles de la Nation dont le statut est défini au chapitre Ier du titre Ier du livre IV du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et des pupilles de la République mentionnés à l’article 30 de la loi n° 2021‑1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs‑pompiers et les sapeurs‑pompiers professionnels. »

Article 3

Le livre IV du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre est ainsi modifié :

1° À l’article L. 411‑8, le mot : « vingt‑et‑un » est remplacé par le mot : « vingt‑deux » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 421‑1, après le mot : « ans », il est inséré le mot : « inclus ».

Article 4

Après le 5° de l’article L. 411‑5 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Des fonctionnaires et des contractuels des directions interdépartementales des routes tués ou décédés des suites d’une blessure reçue ou d’une maladie contractée ou aggravée du fait de l’accomplissement de leurs missions. »

Article 5

I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

II. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.


([1]) https://www.senat.fr/questions/base/2021/qSEQ210723655.html