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N° 2757

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 mars 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à la mise en place d’un plan exceptionnel d’accompagnement
du phénomène de vieillissement accéléré de la Martinique,

 

 

présentée par Mesdames et Messieurs

Manuéla KÉCLARD–MONDÉSIR, Moetai BROTHERSON, Alain BRUNEEL, MarieGeorge BUFFET, André CHASSAIGNE, Pierre DHARRÉVILLE, JeanPaul DUFRÈGNE, Elsa FAUCILLON, Sébastien JUMEL, Karine LEBON, JeanPaul LECOQ, JeanPhilippe NILOR, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La Martinique sera en 2050 le département le plus vieux de France. Département parmi les plus jeunes au début des années 2000, la Martinique a connu une transition spectaculaire en 20 ans. Les statistiques prévoient ainsi que près d’un Martiniquais sur deux aura plus de 60 ans.

À côté de ce phénomène inédit, c’est aussi la situation actuelle des personnes âgées à la Martinique qui est préoccupante :

– 1 retraité sur 4 perçoit le minimum vieillesse ;

– 1 retraité sur 3, âgé de plus de 65 ans, vit seul et est potentiellement isolé ;

– plus de la moitié des retraités martiniquais vit en dessous du seuil de pauvreté qui est de 615 € en Martinique et 997 € en France hexagonale.

Ces situations de précarité et d’isolement se cumulent à une démographie médicale moindre. On décompte 140 médecins pour 100 000 habitants contre 180 dans l’Hexagone. L’Agence régionale de Santé (ARS) évalue à 10 le nombre de postes de gériatres nécessaires pour couvrir les besoins de la Martinique sur les 10 prochaines années. Par ailleurs, l’indice de fragilité conçu par la CGSS de Martinique fait ressortir un niveau élevé de non‑recours aux soins et de désertification médicale particulièrement dans les zones nord et est de la Martinique.

Cette situation exceptionnelle requiert des moyens exceptionnels. La future loi Grand âge et Autonomie doit être l’occasion de donner de nouveaux leviers aux acteurs de terrain et favoriser des réponses locales novatrices et adaptées pour chaque territoire, dans l’esprit de différenciation souhaitée par le Gouvernement.

Le rapport Libault sur la concertation Grand âge et autonomie remis à la ministre des solidarités et de la santé le 28 mars 2019 dont l’un des forums régionaux s’est tenu à Fort‑de‑France, a formulé des propositions riches. Il a aussi mis en exergue la situation d’urgence de certains territoires, plus exposés que d’autres à cette problématique. La future loi devra intégrer les propositions de la mission menée par Dominique Libault, qui se veulent complémentaires de celles recommandées pour le cas spécifique de la Martinique.

L’Assemblée portera une attention particulière aux mesures visant la valorisation des métiers du grand âge, la formation des professionnels, les garanties nouvelles pour les proches aidants et la résorption des inégalités de reste à charge en établissement et à domicile.  

Par la présente proposition de résolution, l’Assemblée nationale propose au Gouvernement d’intégrer au sein de la prochaine loi Grand âge et autonomie des mesures d’urgence pour la Martinique afin de faire face aux enjeux du vieillissement accéléré de sa population.


proposition de rÉsolution

Article 1er

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

Vu le code de l’action sociale,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° Qu’en Martinique, une agence de l’Autonomie soit créée sous la forme d’un GIP regroupant l’État et la Collectivité Territoriale de Martinique. Cette entité exercerait désormais l’ensemble des missions territoriales de ces deux acteurs en matière d’autonomie et de prise en charge du grand âge. L’agence de l’Autonomie serait gestionnaire d’un budget unique issu de la fusion des budgets dédiés à l’autonomie et les fonds d’expérimentation, avec une complète fongibilité entre les différentes enveloppes ;

2° Que l’agence de l’Autonomie soit désormais l’organe pilote de la politique d’autonomie sur le territoire martiniquais. L’agence de l’Autonomie aurait seule compétence pour lancer des appels à projets et hébergerait la conférence des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie ;

3° Que l’agence de l’Autonomie s’appuie sur un modèle de guichet unique pour les personnes âgées et les aidants ainsi que du dispositif unique d’appui à la coordination, actuellement en cours de déploiement.

Article 2

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

Vu le décret n° 2016‑696 relatif aux résidences autonomie et portant diverses dispositions relatives aux établissements sociaux et médico‑sociaux pour personnes âgées,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° Que soit créé en Martinique un fonds exceptionnel d’expérimentation pour l’autonomie et la prise en charge du vieillissement accéléré de la Martinique ;

2° Ce fonds devrait permettre sur un horizon de 5 ans, le financement de :

– La réhabilitation des 6 EHPAD identifiés par l’ARS comme chantiers prioritaires ;

– Le développement de nouvelles solutions d’hébergement des séniors mieux adaptées au contexte martiniquais (Petites Unités de Vie, MARPA et résidence‑autonomie) ;

3° Ce fonds bénéficierait d’une dotation annuelle de l’État, prélevée sur le budget du ministère en charge des solidarités et de la santé ;

4° L’extension à la Martinique des mesures relatives aux résidences autonomie et au forfait autonomie issues des articles 1 à 8 du décret n° 2016‑696 du 27 mai 2016.

Article 3

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

Vu la loi n° 2017‑256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité outre‑mer,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° D’envisager l’exonération de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les entreprises constituant des Petites Unités de vie (PUV) sur une période de 10 ans suivant l’autorisation de l’établissement par les autorités publiques compétentes ;

2° D’envisager l’instauration au sein de l’ARS d’un poste d’accompagnement et d’ingénierie technique et financier pour aider les porteurs de projet « résidence pour personnes âgées » à la Martinique.

Article 4

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° De planifier une hausse progressive du montant de l’Aide personnalisée d’autonomie (APA) afin de réduire le reste à charge en établissement pour les plus modestes et annuler le reste à charge pour les personnes les plus précaires au niveau de dépendance élevé (correspondant au Gir 1 à 3) ;

2° D’ouvrir l’APA à domicile au financement de nouveaux dispositifs d’aide technique, dispositifs numériques et dispositifs multiservices.

Article 5

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

Vu la loi n° 2017‑256 de programmation relative à l’égalité réelle outre‑mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° De favoriser le retour des jeunes docteurs en médecine, particulièrement ceux spécialisés en médecine gériatrique, ayant leurs Centres d’intérêt matériels et moraux (CIMM) à la Martinique ;

2° D’instaurer pour 5 ans une exonération fiscale pour les porteurs de projets dans le domaine de la silver‑économie ayant leurs CIMM à la Martinique. L’Agence de l’Outre‑mer pour la Mobilité (LADOM) serait en charge d’examiner les demandes d’exonération sur la base d’un objectif annuel fixé par décret ;

3° De viser l’objectif de faire du Centre Emma Ventura un gérontopole d’excellence à l’échelle de la Caraïbe au travers d’un plan d’investissement et de montée en compétence.

Article 6

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

Vu la loi n° 2017‑256 de programmation relative à l’égalité réelle outre‑mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique,

Vu le décret n° 2019‑1471 portant généralisation des emplois francs et création d’une expérimentation à La Réunion,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° De considérer l’extension à la Martinique du dispositif d’expérimentation ouvrant le bénéfice de l’aide de l’État mentionnée aux articles 4 à 6 du décret n° 2019‑1471. Ce dispositif permet le recrutement d’un salarié sortant depuis moins de trois mois de l’un des dispositifs dont la liste est fixée par arrêté préfectoral, sans condition d’inscription à Pôle emploi ni de résidence dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, prévue à La Réunion jusqu’au 31 décembre 2022 ;

2° De donner priorité au sein du dispositif susmentionné au recrutement de salariés au sein d’associations gestionnaires de structures d’accueil ou d’aide aux personnes âgées dépendantes ;

3° De renforcer le dispositif existant au sein du RSMA de Martinique dans son rôle en matière d’apprentissage et de service aux séniors en ouvrant des places supplémentaires aux 36 existantes.

Article 7

Vu l’article 72‑3 de la Constitution,

Vu l’article 73 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la loi n° 2014‑173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine,

Vu la loi n° 2015‑1776 relative à l’adaptation de la société au vieillissement,

Vu le décret n° 2014‑1575 du 22 décembre 2014 relatif aux modalités de détermination des quartiers prioritaires de la politique de la ville particulières aux départements d’outre‑mer, à Saint‑Martin et à la Polynésie française,

Vu le décret n° 2015‑1138 du 14 septembre 2015 rectifiant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville,

L’Assemblée nationale suggère au Gouvernement :

1° De procéder à l’ajout d’un nouveau critère d’âge moyen dans la pondération des points déterminant la géographie des quartiers prioritaires en outre‑mer. Les zones ayant une forte proportion de personnes âgées pourraient ainsi bénéficier d’une bonification dans l’attribution des points aux différentes zones.