Description : LOGO

N° 3299

_____

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 septembre 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

invitant le Gouvernement à prendre toute initiative, toute mesure pour mieux protéger, et de façon effective, les élus locaux,

 

présentée par Mesdames et Messieurs

Philippe GOSSELIN, Damien ABAD, Emmanuelle ANTHOINE, Julien AUBERT, Édith AUDIBERT, Thibault BAZIN, Valérie BAZINMALGRAS, Sandrine BOËLLE, Bernard BOULEY, Jean-Luc BOURGEAUX, Valérie BOYER, Fabrice BRUN, Jacques CATTIN, Dino CINIERI, Éric CIOTTI, Pierre CORDIER, MarieChristine DALLOZ, Claude de GANAY, Bernard DEFLESSELLES, Vincent DESCOEUR, Fabien DI FILIPPO, Julien DIVE, Virginie DUBYMULLER, Nicolas FORISSIER, JeanJacques GAULTIER, Annie GENEVARD, Michel HERBILLON, Patrick HETZEL, Mansour KAMARDINE, Brigitte KUSTER, Marc LE FUR, Constance LE GRIP, David LORION, Véronique LOUWAGIE, Frédérique MEUNIER, Philippe MEYER, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Nathalie PORTE, Robin REDA, JeanLuc REITZER, Bernard REYNÈS, Martial SADDIER, Raphaël SCHELLENBERGER, JeanMarie SERMIER, Robert THERRY, Laurence TRASTOURISNART, Isabelle VALENTIN, Arnaud VIALA, Michel VIALAY, JeanPierre VIGIER, Stéphane VIRY,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Selon les chiffres du Ministère de l’Intérieur révélés le 9 août par le Journal du Dimanche, depuis janvier et jusqu’à juillet dernier, 233 maires ou adjoints ont été agressés physiquement. Ces violences contre les élus municipaux sont en forte progression par rapport à 2019 et 2018. Ainsi, pour toute l’année 2019 ils avaient été 383 à subir des coups ou des insultes contre 361 en 2018. Hélas, le mois d’août 2020 n’a pas vu leur nombre diminuer. Au contraire ! Au vu des chiffres, on comprend bien qu’il ne s’agit pas d’un « simple sentiment » d’insécurité qui envahit nos concitoyens et les maires, comme l’a affirmé le Garde des Sceaux, mais bel et bien une insécurité réelle ! Cette violence est bien incontestable !

Après l’agression du maire de Saint‑Philippe d’Aiguille, en Gironde, le mercredi 5 août, c’est le maire délégué de Portbail, dans le département de la Manche, qui a été agressé par des campeurs le jeudi 6 août.

Ces faits ont d’autant plus défrayé la chronique et suscité une vague d’indignation, qu’après la plainte déposée par cet élu, l’affaire a été classée sans suite par le parquet de Cherbourg. Et le « jeune » de 25 ans qui avait agressé ce maire se voit adressé un simple rappel à la loi !

Ces derniers mois, toujours dans la Manche, deux autres élus avaient été agressés, Marc BOURBEY, maire délégué de Marigny le Lozon et Michel RICHARD, maire de Tessy‑Bocage.

« La guerre tu vas l’avoir bougnoule ». Ces propos racistes, insupportables, ont aussi été adressés, dans un courrier de 4 pages, à Mohamed BOUDJELLABA, maire de Givors qui a porté plainte le 21 août.

Le mardi 25 août, c’est un autre maire, Laurent SIMON, maire de Chalifert, en Seine et Marne, qui a été frappé à plusieurs reprise par un habitant de la commune.

Et la liste risque de continuer à s’allonger... Ces actes sont insupportables et restent trop souvent encore impunis.

Comment peut‑on laisser impunies, comme à Portbail, de telles atteintes à un représentant de l’autorité, qui est aussi représentant de l’État, un élu local qui fait son travail ? Quel signal envoyé aux 36 000 maires de France, aux plus de 500 000 élus municipaux, souvent bénévoles, s’ils ne sont pas protégés ? Quel signal de laxisme envoyé aussi aux agresseurs !

Que ce soit par des propos racistes ou par les mains, s’en prendre à un élu de la République, c’est s’en prendre à la République elle‑même ! Oui, c’est bien la République elle‑même qu’on bafoue ainsi ! Les élus sont les sentinelles de la République, et c’est à la République de les protéger.

L’an dernier, à la suite du terrible décès de Jean‑Mathieu MICHEL, maire de Signes, dans le Var, début août, le Sénat, sous la houlette du président de la Commission des lois, Philippe BAS, avait mené une mission d’information, sollicité les maires qui avaient été nombreux à répondre, et formulé différentes propositions.

Certaines ont été reprises dans la loi relative à « l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique », adopté définitivement le 19 décembre 2019.

Mais il nous faut aller plus loin.

Si le Ministre de l’Intérieur, Gérald DARMANIN a rappelé après l’agression de Givors que « la haine n’a pas sa place dans notre société », et que « nous ne laisserons rien passer », des actes forts sont attendus. Certes, quelques‑uns semblent se dessiner.

Le Premier ministre, Jean Castex, mercredi 2 septembre, à l’issue d’une rencontre avec les principales associations d’élus a ainsi demandé que les élus agressés puissent être immédiatement accompagnés par les services de l’État et la justice. En outre, les préfets devront systématiquement signaler aux parquets les faits dont les maires, adjoints et conseillers sont victimes et qui sont susceptibles de recevoir une qualification pénale.

Le ministre de la justice, Éric DUPOND‑MORETTI, à l’issue de cette même rencontre, a rappelé que la justice doit donner une réponse proportionnée, systématique et immédiate à de tels actes. C’est bien la moindre des choses ! C’est ce qui a fait défaut dans l’agression de Portbail alors que nos concitoyens sont en attente de leur justice ! Au terme de cette réunion interministérielle à Matignon, il a aussi annoncé que les insultes contre les maires seraient désormais considérées comme des outrages. Par une circulaire il veut ainsi « suggérer » (sic) aux parquets de retenir cette qualification, car un maire « insulté », est un maire, au sens du droit pénal, « outragé ». Contrairement à l’injure qui est souvent la qualification retenue dans ces affaires, celle d’outrage permet, en effet, au moins la mise en œuvre de TIG (Travail d’Intérêt Général). D’autres mesures pourraient être incluses dans cette circulaire très attendue mais dont le détail de contenu manque.

Tout cela va dans la bonne direction, mais semble encore loin du compte et de ce qui est attendu. Il faut, comme pour toutes les questions qui touchent à la sécurité et à la protection de nos concitoyens, des mesures fortes, à la hauteur des enjeux et des victimes. En l’espèce, ici, les élus locaux doivent se sentir soutenus et protégés, de façon indéfectible, par la République et ses institutions

À ce titre, il paraît important que l’Assemblée nationale, et notamment la Commission des lois, placée au cœur du régalien, au cœur du respect et de l’autorité de l’État, au cœur des valeurs de la démocratie, puisse s’emparer du sujet.

La création d’une mission d’information consacrée aux violences faites aux élus municipaux a été officiellement demandée. Il lui appartiendra, à la suite, de formuler, des propositions de modifications législatives et une proposition de loi, que l’on peut espérer transpartisane, pourra ensuite être déposée et débattue dans ce sens.

En parallèle, et à plus forte raison si cette mission était refusée, il est important d’inviter le Gouvernement à prendre toutes les mesures qui s’imposent, au‑delà de celles annoncées le 2 septembre, sous forme de circulaire, par voie réglementaire, ou en formulant des propositions qui devraient, le cas échéant, être débattues, enrichies et votées par le parlement.

Toutes les voies et moyens doivent être utilisés. La République se doit d’assurer la sécurité de celles et ceux qui la représentent et la servent. C’est son essence même !

Tel est l’objet de cette proposition de résolution.

 

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du règlement de l’Assemblée nationale,

Invite le Gouvernement, à la suite de la création ou non d’une mission d’information à l’Assemblée nationale sur les violences faites aux élus municipaux, à prendre toute initiative, toute mesure pour mieux protéger, et de façon effective, les élus locaux et sanctionner les atteintes à leur autorité comme à leur personne.