N° 240

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIEME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 septembre 2017

 

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant la ratification de l’avenant modifiant la convention du 14 janvier 1971 entre la France et le Portugal tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu,

PAR Mme Samantha  CAZEBONNE

Députée

——

 

ET

 

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

 

Voir les numéros :

Sénat : 491, 622, 623 et T.A. 124 (2016-2017).

Assemblée nationale : 114.

 


 


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

I. Une rÉponse globalement très satisfaisante À un problÈme dapplication des règles dimposition des rémunérations publiques

A. les problèmes posés par les règles actuelles

1. Un principe dimposition partagée, non conforme aux recommandations de lOCDE, qui na pas été appliqué jusquen 2013

2. Le changement de position du Portugal et les difficultés qui en résultent

B. Une négociation au bénéfice des contribuables français qui pourrait utilement saccompagner dune mesure de clémence fiscale en faveur des retraités binationaux

1. Une renégociation globalement très favorable aux contribuables français à la seule exception des retraités binationaux

2. Une application rétroactive qui pourrait utilement saccompagner dune mesure de clémence fiscale de la part du Portugal en faveur des retraités binationaux

II. UnE mise à jour bienvenue de plusieurs stipulations de la convention au regard des derniers standards de lOCDE

A. ÉCHANGE DINFORMATIONS ET AIDE AU RECOUVREMENT : UNE MISE EN CONFORMITÉ AVEC LES STANDARDS DE LOCDE, AUXQUELS LA FRANCE ET LE PORTUGAL SONT DÉJÀ SOUMIS par ailleurs

B. Autres mesures dactualisation

EXAMEN EN COMMISSION

annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par lA rapporteure

ANNEXE :

TEXTE DE LA COMMISSION des affaires étrangères


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   Introduction

 

L’Assemblée nationale est saisie du projet de loi n° 114, adopté par le Sénat le 20 juillet 2017, autorisant la ratification de lavenant, signé à Lisbonne le 25 août 2016, modifiant la convention du 14 janvier 1971 entre la France et le Portugal tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu.

Cet avenant adapte les règles dimposition des rémunérations et pensions publiques, qui ont conduit à des difficultés d’application à partir de 2013, dans un sens globalement très favorable aux contribuables français, à l’exception des retraités binationaux pour lesquels une mesure de clémence fiscale de la part du Portugal serait particulièrement bienvenue (I).  

Elle procède par ailleurs à une mise à jour des stipulations relatives à la coopération administrative et à la lutte contre la fraude et lévasion fiscales conformément aux derniers standards internationaux, ce dont on ne peut que se féliciter (II).

La ratification par la France de cet avenant, particulièrement exemplaire en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales et qui facilitera la vie de nos agents et retraités publics au Portugal, est très attendue, étant précisé que le Portugal a achevé sa procédure de ratification le 3 avril dernier.

 

 


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I.   Une rÉponse globalement très satisfaisante À un problÈme d’application des règles d’imposition des rémunérations publiques

A.   les problèmes posés par les règles actuelles

1.   Un principe d’imposition partagée, non conforme aux recommandations de l’OCDE, qui n’a pas été appliqué jusqu’en 2013

En application de l’article 20 de la convention fiscale du 14 janvier 1971, le régime d’imposition des rémunérations et pensions publiques de source française perçues par les contribuables qui résident au Portugal est le suivant :

 les rémunérations et pensions publiques de source française des résidents français au Portugal sont soumises à un droit dimposition partagé entre les deux pays : ces revenus sont imposables en France, mais le Portugal, en tant quÉtat de résidence, peut aussi les imposer, à condition déliminer les doubles impositions ;

 les rémunérations ou pensions publiques versées par la France aux résidents de nationalité portugaise (qui ne disposent pas de la nationalité française) sont exclusivement imposables par le Portugal;

 en revanche, les binationaux franco-portugais relèvent de la règle générale dimposition partagée.

Comme le montre le tableau ci-dessous, ces règles dérogent aux recommandations de l’OCDE, selon lesquelles les rémunérations et pensions publiques doivent être exclusivement imposées à la source (par l’État qui les verse) mais imposées dans l’État de résidence dès lors que le bénéficiaire possède la nationalité de cet État ([1]).

Cependant, jusquen 2013, ladministration fiscale portugaise, à linstar de ladministration fiscale française, nappliquait pas le droit dimposition partagé et les revenus en question étaient donc seulement imposés par la France, une pratique conforme au modèle de l’OCDE.

Le tableau ci-après récapitule les règles applicables en vertu de la convention de 1971, la pratique de l’administration fiscale portugaise jusqu’en 2013 et les recommandations de l’OCDE.

 

nature du Revenu

Nationalité du bénéficiare résident du portugal

Régime d’imposition prévu par la convention de 1971

Pratique de l’admistration fiscale portugaise jusqu’en 2013

Recommandations de l’OCDE

Rémunérations des agents de la fonction publique française

Français

Partagé

Source (France)

Source (France)

Portugais

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Binational

Partagé

Source (France)

Résidence (Portugal)

Pensions des retraités de la fonction publique française

Français

Partagé

Source (France)

Source (France)

Portugais

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Binational

Partagé

Source (France)

Résidence (Portugal)

 

2.   Le changement de position du Portugal et les difficultés qui en résultent

En 2013, ladministration fiscale portugaise, à la recherche de recettes fiscales supplémentaires, a opéré un changement de position et engagé des contrôles et redressements fiscaux au titre des années 2009 et suivantes à l’encontre de d’agents publics et de retraités la fonction publique française résidents au Portugal.

Les contrôles ont visé des enseignants exerçant pour le compte de lÉtat dans les établissements de lagence pour lenseignement français à létranger (AEFE) à Lisbonne et à Porto et de certains retraités de la fonction publique française installés au Portugal ([2]).

Les propositions de rectifications qui ont été adressées à ces contribuables à l’issue des contrôles ont remis en cause l’absence de déclaration au Portugal des rémunérations et pensions publiques de source française qui leur ont été versées au titre des années concernées.

Comme lindique létude dimpact, les rectifications opérées au Portugal ont conduit à des difficultés pour les contribuables concernés.

Tout dabord,  ils ont pu être confrontés à des situations de double imposition temporaire, le temps de demander et dobtenir de ladministration fiscale portugaise lélimination de la double imposition (cest-à-dire limputation sur limpôt payé au Portugal dun montant égal à celui acquitté en France sur les mêmes revenus).

Par ailleurs, même après élimination de la double imposition, les contribuables concernés supportent une charge fiscale plus lourde, le barème de l’impôt sur le revenu étant sensiblement plus élevé au Portugal qu’en France.

Enfin, il faut ajouter que les redressements notifiés portent sur plusieurs années - l’administration fiscale disposant d’un droit de reprise de cinq ans au Portugal, contre trois ans en France -, et qu’aux rehaussements en base viennent le cas échéant s’ajouter les majorations et pénalités pour défaut de déclaration ou retard de paiement.

B.   Une négociation au bénéfice des contribuables français qui pourrait utilement s’accompagner d’une mesure de clémence fiscale en faveur des retraités binationaux

1.   Une renégociation globalement très favorable aux contribuables français à la seule exception des retraités binationaux

À la suite de ces difficultés, les autorités françaises ont entamé dès octobre 2013 des démarches auprès du Portugal, qui a accepté de suspendre les procédures en cours, et d’engager une négociation visant à faire évoluer les règles applicables, dans le sens dun alignement sur les standards de lOCDE.

L’article 3 du présent avenant vise donc à modifier l’article 20 de la convention fiscale du 17 janvier 1971 afin de prévoir, conformément au principe posé par l’OCDE, une imposition exclusive par la France des rémunérations et pensions versées aux agents publics français résidant au Portugal.

Par exception, les rémunérations et pensions publiques sont imposables par l’État de résidence quand le bénéficiaire possède la nationalité de cet État (portugaise en l’espèce).

La France a toutefois obtenu le maintien dune imposition à la source des revenus des fonctionnaires actifs binationaux résidant au Portugal, un mode dimposition qui déroge au modèle de lOCDE([3]). Ainsi, les citoyens français résidant et travaillant au Portugal pour le compte de l’État ou d’une personne publique française seront-ils imposés en France et donc à un taux inférieur, qu’ils soient seulement de nationalité française ou bien qu’ils disposent également - par naissance ou par acquisition - de la nationalité portugaise.

Les règles d’imposition actuellement en vigueur, les règles appliquées jusqu’en 2013, les nouvelles règles proposées ainsi que les recommandations de l’OCDE sont retracées dans le tableau ci-après.

nature du Revenu

Nationalité du bénéficiare résident du portugal

Régime d’imposition prévu par la convention de 1971 avant avenant

Pratique de l’admistration fiscale portugaise jusqu’en 2013

Recommandations de l’OCDE

Après avenant

Rémunérations des agents de la fonction publique française

Français

Partagé

Source (France)

Source (France)

Source (France)

Portugais

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Binational

Partagé

Source (France)

Résidence (Portugal)

Source (France)

Pensions des retraités de la fonction publique française

Français

Partagé

Source (France)

Source (France)

Source (France)

Portugais

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Binational

Partagé

Source (France)

Résidence (Portugal)

Résidence (Portugal)

Le tableau montre que lavenant du 25 août 2016 est globalement particulièrement favorable aux contribuables français à la seule exception des retraités binationaux.

Le traitement différent qui est ainsi réservé aux rémunérations et aux pensions des binationaux a pu susciter l’incompréhension de la communauté française au Portugal.

Il convient à cet égard de souligner que cette situation est le résultat dune négociation dont la référence est le modèle de l’OCDE et dont l’issue est globalement très favorable aux contribuables français.

Ainsi, le Portugal a-t-il accepté de revenir sur limposition partagée, ce qui ne lui était pas favorable.

Les autorités portugaises ont également fait une concession concernant les rémunérations de source française. Elles ont accepté de s’éloigner du modèle de convention de l’OCDE, organisation dont les deux pays sont membres. La dérogation obtenue par la France sera en pratique avantageuse pour les contribuables concernés, compte tenu de la différence entre le barème de l’impôt français et celui de l’impôt portugais.

Par ailleurs, le Portugal a également accepté de ne pas insister sur le passé. Le texte prévoit en effet une application rétroactive aux périodes d’imposition commençant à compter du 1er janvier 2013.

Toutefois, il na pas été possible, lors des négociations, dobtenir une nouvelle concession du Portugal concernant les retraités binationaux. Il convient néanmoins de souligner que les règles applicables aux retraités sont conformes au modèle de l’OCDE et ne sont pas contestables sur le fond.

2.   Une application rétroactive qui pourrait utilement s’accompagner d’une mesure de clémence fiscale de la part du Portugal en faveur des retraités binationaux

Larticle 7 du présent avenant prévoit une application rétroactive des dispositions de son article 3 aux périodes dimposition commençant à compter du 1er janvier 2013, afin de permettre l’application des nouvelles règles aux contribuables visés par les procédures engagées par le Portugal cette année-là, et suspendues depuis le début de la négociation de l’avenant.

Pour l’essentiel des contribuables concernés, l’imposition rétroactive à la source, c’est-à-dire en France, revient à confirmer le statu quo, c’est-à-dire à annuler de facto les redressements effectués par le Portugal en 2013.

Une difficulté subsiste en revanche pour les retraités de la fonction publique française durablement installés au Portugal et disposant de la double nationalité, dont les représentants ont adressé une contribution écrite à votre rapporteure. Lapplication rétroactive ne change rien  pour eux : imposables à la résidence, ils se voient appliquer le barème de limpôt sur le revenu portugais, qui représente une charge plus lourde, et de surcroît sur plusieurs années. Ils seront exclusivement imposables au Portugal sur leurs pensions de source française perçues à compter du 1er janvier 2013. La France procèdera donc aux dégrèvements consécutifs à cette perte du droit dimposer ces retraités, et ceux-ci devront en parallèle sacquitter au Portugal des impôts dus sur leurs retraites perçues entre 2013 et 2017.

Dans ce contexte, pour éviter que les retraités ayant fait lobjet dune procédure de contrôle supportent une charge plus lourde que celle prévue par le nouvel avenant à la convention fiscale, M. Gérald Darmanin, Ministre de laction et des comptes publics, s’est engagé le 20 juillet 2017 au Sénat à demander à son homologue portugais la clôture définitive de ces procédures par une mesure de clémence fiscale conduisant à lannulation des majorations et intérêts de retard appliqués aux rappels dimpôt opérés ces dernières années à leur endroit.

Votre rapporteure se félicite vivement de cet engagement et se montrera particulièrement attentive à sa mise en œuvre.

 


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II.   UnE mise à jour bienvenue de plusieurs stipulations de la convention au regard des derniers standards de l’OCDE

Les parties ont également saisi l’occasion de cette négociation pour mettre à jour des standards les plus récents de l’OCDE les stipulations de la convention sur plusieurs aspects :

– premièrement, la mise en conformité de l’article régissant les échanges d’informations et l’introduction d’un article relatif à l’assistance au recouvrement, étant précisé que la France et le Portugal sont déjà soumis à ces dispositions en vertu de leurs engagements multilatéraux et européens ;

– deuxièmement, l’introduction de deux clauses anti-abus générales, permettant de refuser le bénéfice de la convention fiscale lorsque le bénéficiaire n’est pas le « bénéficiaire effectif », ou lorsqu’il apparaît que l’opération a un objectif « principalement fiscal » ;

– troisièmement, une actualisation des impôts visés et de la définition des autorités compétentes.

A.   ÉCHANGE D’INFORMATIONS ET AIDE AU RECOUVREMENT : UNE MISE EN CONFORMITÉ AVEC LES STANDARDS DE L’OCDE, AUXQUELS LA FRANCE ET LE PORTUGAL SONT DÉJÀ SOUMIS par ailleurs

L’article 4 de l’avenant actualise et complète la rédaction de l’article 27 de la convention relatif à l’échange de renseignements à des fins fiscales. Les nouvelles stipulations introduites par lavenant sont en tous points conformes au dernier modèle de lOCDE, publié le 25 juillet 2014 ([4]).

L’article 5 ajoute un nouvel article 27 bis à la convention fiscale, qui organise l’assistance en matière de recouvrement des créances fiscales, lui aussi conforme au dernier modèle de l’OCDE.

Comme l’indique l’étude d’impact, l’échange d’informations et l’assistance au recouvrement entre la France et le Portugal sont dores et déjà régis par dautres textes multilatéraux de portée équivalente, de sorte que le présent article constitue un fondement juridique supplémentaire qui n’est pas - ou plus - une condition nécessaire à l’échange d’informations et à l’assistance au recouvrement.

En effet, la directive 2011/16 UE du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, prévoit déjà une obligation d’échange de renseignements à des fins fiscales  entre les différents États membres de l’UE dont la France et le Portugal.

La directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l’assistance  mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres  mesures, s’applique également déjà à l’assistance mutuelle entre les deux États membres.

En outre, la France et le Portugal sont liés depuis le 1er mars 2015, date à laquelle elle est entrée en vigueur pour le Portugal, par la convention concernant l’assistance  administrative mutuelle en matière fiscale (MAC) du 25 janvier 1988, de l'OCDE et du Conseil de l'Europe, amendée par le protocole du 27 mai 2010 L’introduction de MESURES ANTI-ABUS conformes aux nouveaux standards de l’oCDE

L’article 6 du présent avenant introduit, au nouvel article 31 bis, deux clauses anti-abus destinées à éviter les montages d’optimisation visant à bénéficier indûment des avantages conventionnels.

Ces clauses font partie des recommandations du projet de lutte contre l’érosion de la base fiscale et les transferts de bénéfices, le projet « BEPS » (Base Erosion and Profit Shifting) de l’OCDE et anticipent donc l’application de l’accord multilatéral signé dans ce cadre le 7 juin 2017 à Paris par les représentants de 76 pays dont la France et le Portugal plus de soixante pays.

De telles clauses ont déjà été introduites par la France, sous une forme proche, dans les conventions récemment signées avec la Colombie le 25 juin 2015 et avec la Chine le 26 novembre 2013.

La première clause anti-abus introduite est une clause dite de « limitation des bénéfices » qui prévoit que « le bénéfice des avantages de la convention peut être refusé sur un élément du revenu lorsque :

a) le récipiendaire nest pas le bénéficiaire effectif de ce revenu, et

b) lopération permet au bénéficiaire effectif de supporter une charge fiscale moindre sur cet élément du revenu que celle quil aurait eu à supporter sil avait perçu directement cet élément du revenu ».

La seconde clause, dite du « critère des objets principaux », prévoit que « les avantages résultant de toute réduction ou exonération dimpôt prévue par la présente convention ne sont pas accordés lorsque le principal objectif de certaines transactions ou opérations ou daccords est dobtenir une position fiscale plus avantageuse et lorsque loctroi de cet avantage dans de telles circonstances serait contraire à lobjet et au but des dispositions pertinentes de la présente convention ».

Enfin, les paragraphes 3 et 4 de l’article 6 du présent avenant permettent à la France et au Portugal dappliquer leurs dispositions anti-abus prévues par leur législation fiscale interne. Pour la France, il s’agit des dispositions des articles 209 B et 212 du code général des impôts, qui permettent d’imposer en France les bénéfices et les revenus passifs artificiellement « délocalisés » dans un régime fiscal privilégié ou un État ou territoire non coopératif.

B.   Autres mesures d’actualisation

L’article 1er met à jour la liste des impôts couverts par la convention conformément au modèle de convention fiscale de l’OCDE, avec :

 pour la France, l’ajout de la CSG et de la CRDS (contribution sociale généralisée et contribution pour le remboursement de la dette sociale), la convention actuelle ne visant expressément que l’impôt sur le revenu des personnes physiques et l’impôt sur les sociétés ;

 pour le Portugal, prise en compte de la simplification de la fiscalité intervenue depuis 1971 : seuls sont désormais visés trois impôts, au lieu des dix impôts visés par la convention actuelle.

Cette modification est sans conséquence dans la mesure où l’article 3 de la convention actuelle prévoit que « la Convention sappliquera aussi aux impôts futurs de nature identique ou analogue qui sajouteraient aux impôts actuels ou qui les remplaceraient ».

Enfin, l’article 2 met à jour la définition des autorités compétentes dans l’article 3 qui définit certains termes de la convention. 


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   EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa séance du mercredi 27 septembre 2017.

Après l’exposé de la rapporteure, un débat a lieu.

M. Pierre Cordier. Je ne suis pas certain d’avoir bien compris pourquoi certains contribuables changent de nationalité.

Mme Samantha Cazebonne, rapporteure. Certains retraités de la fonction publique binationaux envisagent de renoncer à la nationalité portugaise afin de rester soumis à l’impôt français. Trois personnes l’ont déjà fait.

M. Jean-Paul Lecoq. Mme la Rapporteure, vous avez parlé des fonctionnaires. Qu’en est-il du reste des travailleurs ? Y a-t-il des règles spécifiques pour les fonctionnaires ? L’actualité, marquée par la volonté d’un chanteur connu de transférer sa résidence au Portugal pour des raisons fiscales, dit-on, cela pose la question de savoir si le Portugal, au regard de l’imposition globale, est un paradis fiscal en Europe. Y-a-t-il une tendance aux départs vers le Portugal, et la France veille-t-elle à ce qu’il n’en soit pas ainsi ?

Mme Samantha Cazebonne, rapporteure. Ce n’est pas l’objet de cet avenant, qui ne porte que sur la question précise de l’imposition des pensions et rémunérations publiques mais je ne doute pas que la commission aura d’autres occasions de s’intéresser de manière plus large aux questions fiscales au sein de l’Union européenne. Les revenus privés obéissent à d’autres règles d’imposition fixées par cette convention.

M. Jean-Paul Lecoq. Je comprends, Mme la  Rapporteure. J’observe que vous n’avez pas soulevé cette question dans votre rapport et j’observe aussi que le délai de ratification est rapide. Dès qu’il y a un enjeu financier, cela va plus vite.

M. Christian Hutin. Je n’ai jamais déposé de brevet, mais j’ai un brevet de liberté de pensée. Nous sommes la commission qui est dans l’actualité. J’ai bien compris l’enjeu du texte, qui est de régler avec efficacité un problème précis. Mais, il est extraordinaire de ratifier aujourd’hui un accord avec le Portugal. Nous venons de parler du Luxembourg ; tout cela est donc assez paradis fiscal ; tout cela dans le cadre d’une démarche européenne. Il faut effectivement ratifier le texte, mais cette décision pourra apparaître surréaliste. Il faut veiller à ce que vont penser les gens et à la confusion que cela va engendrer. La fiscalité du Portugal est une question sur laquelle nous pourrions nous pencher très sérieusement dans le cadre de nos travaux européens.

Mme Samantha Cazebonne, rapporteure. Vous pensez en particulier je crois à la question du statut fiscal des résidents non habituels. Nous sommes face à un malheureux concours de circonstances.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. L’harmonisation fiscale européenne est une vraie question. Celle-ci pourrait déboucher sur davantage d’équité.

M. Bruno Fuchs. Ce qui vient d’être dit sur l’harmonisation fiscale en Europe répond à mes interrogations.

M. Ludovic Mendes. C’est un sujet important, car beaucoup de Portugais reviennent au pays après avoir travaillé en France. Le pays a connu des difficultés. Aujourd’hui, nous parlons de paradis fiscal, alors que le Portugal est un pays allié, un membre de l’Union européenne et qui a subi une crise économique très importante, et que l’on doit soutenir et accompagner. On ne peut pas considérer ainsi que le Portugal alimente l’évasion fiscale. Beaucoup de Français résident sur le territoire portugais, et ils n’y sont pas simplement pour des raisons fiscales, mais parce que c’est un pays où il fait bon vivre. Beaucoup de Portugais se déplacent en Europe dans le cadre de la libre circulation et c’est à nous de les accompagner fiscalement. Il faut se garder de tenir certains propos. Florent Pagny est parti en raison des droits de succession, et c’est une question

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Il faut rappeler, même si c’est une évidence, l’amitié entre la France et le Portugal. En même temps, si nous pouvons aller vers l’harmonisation fiscale avec un calendrier, c’est souhaitable.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission adopte, à l’unanimité des présents, le projet de loi n° 114 sans modification.

 

 

 


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   annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées par lA rapporteure

 

– M. Edouard Marcus, sous-directeur Prospective et relations internationales, direction de la législation fiscale, direction générale des finances publiques (DGFIP), accompagné de M. Romain Betti, inspecteur principal des finances publiques et de M. Mathieu Carat, inspecteur des finances publiques.

 

 

 

 


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   ANNEXE :

   TEXTE DE LA COMMISSION des affaires étrangères

 

 

 

Article unique

Est autorisée la ratification de l’avenant modifiant la convention du 14 janvier 1971 entre la France et le Portugal tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu, signé à Lisbonne le 25 août 2016, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                     

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 114)


([1]) L’article 20 de la convention franco-portugaise du 14 janvier 1971 est conforme à l’article 19 du modèle de l’OCDE dans sa version de 1963. Celui-ci prévoyait une imposition partagée des rémunérations et pensions publiques entre l’État de la source et celui de la résidence. Une règle d’imposition exclusive, en général dans l’État de la source, s’est substituée au principe initial lors de la mise à jour du modèle de l’OCDE en 1977. Dans ce cadre, d’autres conventions fiscales conclues par la France avant la fin des années 1970 peuvent prévoir des modalités d’imposition similaires concernant les rémunérations et pensions publiques. Tels sont les cas des conventions conclues par la France avec la Finlande (1970), la Grèce (1963) ou les Pays-Bas (1973).

 

([2])  Si le nombre d’enseignants concernés par ces contrôles n’est pas connu avec précision, l’AEFE comptait à titre indicatif, pour l’année scolaire 2016/2017, 46 enseignants à Lisbonne et 30 à Porto.

 

([3])  En effet, l’article 19 du modèle de l’OCDE du 25 juillet 2014 prévoit une imposition dans l’État de résidence dès lors que le bénéficiaire possède la nationalité de cet État, peu importe qu’il possède ou non une autre nationalité, et sans distinction entre les rémunérations d’activité et les pensions. La dérogation est conforme à la rédaction que la France propose systématiquement à ses partenaires conventionnels. Elle s’inscrit dans le cadre de la réserve émise par les autorités françaises au paragraphe 11 des commentaires sur l’article 19 du modèle de l’OCDE et vise à sécuriser la situation fiscale des personnels bénéficiaires de rémunérations publiques de source française à l’étranger. Cette spécificité française existe pour les rémunérations publiques dans de nombreuses conventions comme celles conclues avec l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, l’Irlande ou le Royaume-Uni.

 

 

([4]) http://www.oecd-ilibrary.org/taxation/modele-de-convention-fiscale-concernant-le-revenu-et-la-fortune-version-abregee-2014_mtc_cond-2014-fr