N° 273

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018 (n° 235),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 21
 

 

économie

 

 

COMMERCE EXTÉRIEUR

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Nicolas Forissier

 

Député

____

 


 

 


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SOMMAIRE

___

Pages

LES CONSTATS ET LES RECOMMANDATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

DONNÉES CLÉS

PREMIÈRE PARTIE

A. crédits budgétaires concourant au soutien des principaux acteurs publics de l’internationalisation des entreprises

1. Les crédits à destination de Business France

2. Les crédits à destination de Bpifrance Assurance Export

a. La rémunération au titre des prestations réalisées

b. Le programme 114 Appels en garantie de l’État

3. Le financement du réseau international du Trésor

B. Autres dispositions du plf relatives au soutien au commerce extérieur

DEUXIÈME PARTIE : OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. Le dispositif institutionnel de soutien à l’internationalisation ne répond pas efficacement aux besoins des entreprises

A. L’export est en situation d’extrême urgence

1. La position de la France sur le marché mondial est en retrait

2. Le nombre d’entreprises exportatrices est faible et en diminution

3. Les échanges de biens sont très concentrés sur les plus grandes entreprises

4. La dégradation de la situation du commerce extérieur a un impact négatif sur la croissance et pèse sur l’emploi

B. L’écosystème du soutien à l’internationalisation des entreprises est inefficient

1. L’effort budgétaire est insuffisant et dispersé

2. En l’absence de ministre en charge, la responsabilité politique est diluée

3. L’écosystème institutionnel met en concurrence les acteurs

a. Les acteurs de l’internationalisation des entreprises sont nombreux

b. Des réformes importantes ont été mises en œuvre ces dernières années

c. L’écosystème du soutien à l’internationalisation des entreprises est complexe et insuffisamment coordonné

d. Business France est enfermée dans un modèle économique qui le détourne de sa mission de service public

e. Les conventions ont été multipliées sans résoudre le problème de fond

C. Recommandations du rapporteur

a. Au niveau régional, un guichet unique piloté par les régions s’appuyant sur les avantages comparatifs de chacun

b. À l’international, assurer une offre adaptée aux besoins de l’entreprise dans une logique de subsidiarité

c. Assurer un pilotage politique au niveau ministériel

d. Assurer l’effort budgétaire dans ce cadre renouvelé

II. Face au défi alimentaire mondial, mobiliser la filière agricole et agroalimentaire française

A. LA France A PERDU SA PLACE PARMI LES GRANDS EXPORTATEURS DE L’agroalimentaire

B. La France doit se mettre en ordre de bataille pour faire face au défi alimentaire mondial

1. Le défi alimentaire mondial représente un enjeu majeur pour le secteur

2. Les efforts entrepris sont réels

a. L’accompagnement des entreprises a été renforcé

b. Des actions visant à structurer la filière ont été entreprises

c. Un effort particulier sur la promotion des produits

d. La France s’organise pour renforcer le soutien financier aux entreprises

III. un transfert réussi des garanties publiques dont le développement est encore entravé par des obstacles budgétaires et administratifs

A. Rappel des objectifs du transfert

B. Les obstacles à un meilleur déploiement des garanties publiques

1. L’assurance-prospection est victime d’une approche comptable

a. Présentation du dispositif

b. Un produit très populaire, en particulier chez les PME

c. L’assurance-prospection est victime d’une vision comptable du soutien à l’export

2. La part française ne correspond plus à la réalité de l’économie

Examen en commission

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Annexes

 


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   LES CONSTATS ET LES RECOMMANDATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

La situation du commerce extérieur français se dégrade depuis plus de 25 ans.

Depuis 2000, la part de marché mondial de la France a été divisée par deux pour s’établir à 3,7 %. Notre solde commercial, 48,3 milliards de déficit en 2016, est deux fois plus élevé qu’en 2005. Le nombre d’entreprises exportatrices est de 125 000, contre 132 000 en 2000 ; les primo-exportateurs sont de moins en moins nombreux également, et les 100 premiers exportateurs réalisent 40 % des exportations totales de biens depuis la France. Cette situation se dégrade encore au premier semestre 2017. Ce constat est connu et, malgré le fait qu’un emploi sur quatre dépende directement ou indirectement de l’export, le soutien à l’internationalisation des entreprises françaises ne fait pas l’objet d’une attention suffisamment importante.

La France dispose pourtant de toutes les ressources pour briller sur le marché mondial : une main-d’œuvre qualifiée, des infrastructures et des produits de qualité et une image forte et positive. Des réformes utiles ont vu le jour ces dernières années : renforcement de la diplomatie économique, création de Business France, renforcement de la responsabilité des régions. Face aux dysfonctionnements du système de soutien à l’internationalisation des entreprises, c’est cependant une réforme globale qu’il s’agit d’entreprendre.

L’action de l’État subit en effet un triple éclatement. Un éclatement budgétaire, tout d’abord : les crédits consacrés à l’internationalisation des entreprises relèvent de plusieurs ministères sans pilotage concerté. Un éclatement de la responsabilité politique, ensuite : pour la première fois depuis 1995, le gouvernement ne comprend pas de ministre spécifiquement en charge. Un éclatement institutionnel enfin : les acteurs sont multiples, leurs compétences ne sont pas définies, et ils se font concurrence. Du fait de cette désorganisation, la France agit de manière insuffisamment cohérente et coordonnée.

La nouvelle baisse de subvention à Business France dans ce budget ou encore les injonctions de réduction du déficit de l’assurance-prospection délivrée désormais par Bpifrance Assurance Export illustrent l’insuffisante priorité donnée à ce sujet. Pour les entreprises comme pour l’État, l’export doit être vu pour ce qu’il est : un investissement pour la croissance de demain. L’enjeu est plus large qu’une nécessaire augmentation de crédits. Il est dans la définition d’une stratégie nationale de mobilisation des filières pour la reconquête des marchés, la redéfinition des compétences des acteurs – à commencer par celle de Business France et de son recentrage sur sa mission de service public, et le portage politique de ce sujet comme priorité nationale.

Le Rapporteur spécial note que les circonstances favorables au changement semblent être réunies : volonté transformatrice du président de la République, nouvelle équipe à la tête de Business France, consensus chez les acteurs sur la nécessité de redéfinir les compétences de chacun.


C’est dans ce contexte que le Rapporteur spécial formule les recommandations suivantes :

1) La France doit se doter d’une réelle stratégie d’aide à l’internationalisation des entreprises. Elle doit être érigée en priorité nationale et être inclue dans l’ensemble de l’action économique, institutionnelle et diplomatique de la France. Un ministre ou un secrétaire d’État placé auprès du Premier ministre doit être nommé pour définir cette stratégie, la mettre en œuvre et coordonner les différents acteurs et ministères concernés.

2)  L’écosystème du soutien à l’internationalisation des entreprises doit être réformé dans les mois qui viennent afin de garantir une prise en charge des entreprises par l’acteur le mieux capable de répondre à ses enjeux. Les entreprises doivent se voir présenter un point d’entrée unique en région, en s’appuyant sur le réseau consulaire, sous l’autorité des conseils régionaux. A l’étranger, Business France doit établir le cahier des charges mis en œuvre par les chambres de commerce à l’étranger là où elles sont en capacité d’y répondre afin de n’avoir qu’un seul intervenant. L’Etat doit ainsi jouer le rôle de facilitateur du premier jour à la livraison dans l’objectif de faire gagner l’équipe de France de l’export.

3) Les moyens budgétaires doivent être mis au service des entreprises. D’une part, les subventions de Business France doivent cesser de baisser, et être sanctuarisées. La réforme à entreprendre ne doit en effet pas être l’occasion de faire des économies mais au contraire de conforter les moyens budgétaires investis dans le soutien à l’internationalisation afin que la France rattrape son retard sur ses partenaires européens, notamment dans les salons. D’autre part, Bpifrance Assurance Export doit se voir donner les moyens nécessaires à l’augmentation de la distribution de ses produits, ce qui passe notamment par l’augmentation des crédits destinés à couvrir le coût de l’assurance-prospection notamment en assouplissant ses critères et en relevant le plafond des dépenses autorisées. Cet outil dont seule la France dispose, qui assure les dépenses engagées par une entreprise dans ses démarches de prospection en cas d’échec, est le plus efficace pour accompagner les PME à l’export et doit donc être développé et non restreint.

 


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   DONNÉES CLÉS

 

Historique du solde et du taux de couverture (Export/Import)

Source : Direction générale des Douanes, octobre 2017.

 


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   PREMIÈRE PARTIE

Le soutien budgétaire au commerce extérieur fait l’objet, selon le document de politique transversale transmis pour la première fois au Parlement cette année, de douze programmes qui concourent de manière directe ou indirecte au soutien des entreprises, à la promotion de l’influence de la France ou encore à certains soutiens sectoriels.

Source : document de politique transversale « Développement international de l’économie française et commerce extérieur ».

L’importante augmentation apparente des crédits entre 2017 et 2018 (+ 660 millions d’euros en AE (+ 52 %) et + 214 millions d’euros en CP (+ 16 %)) est essentiellement issue du programme 851 Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France, qui porte l’évaluation des crédits dédiés aux Prêts du Trésor, qui financent des projets participant au développement économique de pays étrangers tout en faisant appel, pour leur réalisation, à des biens et services produits en France. Il convient cependant de noter que le taux d’exécution des crédits de paiement du programme n’était que de 64 % en 2016 (contre 35 % en 2015, 75 % en 2014 et 99,9 % en 2013) ; l’appréciation de cette augmentation est donc à relativiser au regard de cette potentielle sous-exécution.

Dans son commentaire, le Rapporteur spécial se limite ici aux crédits concourant au financement des principaux opérateurs publics du soutien à l’internationalisation des entreprises (Business France, Bpifrance Assurance Export, réseau international du Trésor). Les crédits inscrits sur les autres programmes sont détaillés dans les rapports spéciaux relatifs aux missions correspondantes.

A.   crédits budgétaires concourant au soutien des principaux acteurs publics de l’internationalisation des entreprises

1.   Les crédits à destination de Business France

Business France résulte de la fusion de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et d'UBIFRANCE (l’Agence française pour le développement international des entreprises), mise en œuvre par l’ordonnance n° 2014‑1555 du 22 décembre 2014 et entrée en vigueur au 1er janvier 2015. Business France est un établissement public industriel et commercial chargé de favoriser le développement international des entreprises implantées en France, de promouvoir l'attractivité du territoire national et les investissements étrangers et de mettre en œuvre une stratégie de communication et d’influence visant à développer l’image économique de la France à l’international.

évolution des subventions de Business France depuis 2015

(en millions d’euros)

 

2015 (Exécution)

2016 (Exécution)

2017 (LFI)

2018 (PLF)

 

AE

CP

AE

CP

AE=CP

AE=CP

Subvention du ministère de l’Économie

(Action 07 du programme 134)

105,4

105,4

96,3

96,3

97,8

95,3

Subvention du ministère de la Cohésion des territoires

(Action 01 du programme 112)

7,3

6,6

6,1

6,8

6

5,8

Sous-total SCSP

112,7

112

102,4

103,1

103,8

101,1

Contribution du ministère de l’Agriculture

(Action 21 du programme 149)

-

-

0,9

0,9

3,2*

3,2

Total

112,7

112

103,5

104

107

104,3

Subvention effectivement reçue**

105,8

101,2

98,0

97

Ressources propres

77,8

86,4

98,8

100,2

*Augmentation suite au transfert d’activités de la Sopexa ** Source : Business France

Sources : RAP 2016, LFI 2017, PLF 2018.

Business France est bénéficiaire de trois subventions de l’État, en baisse de 2,7 millions d’euros en 2018 (– 2,6 %).

La principale est une subvention pour charges de service public (SCSP) portée par l’action 07 Développement international des entreprises et attractivité du territoire du programme 134 Développement des entreprises et régulations (mission Économie) au titre des activités de Business France. La programmation pour l’année 2018 voit une nouvelle baisse de la subvention du programme 134
(– 2,5 millions d’euros) qui s’établit à 95,3 millions d’euros. Pourtant, le CGEFI dans son rapport annuel 2016 sur Business France indiquait que cette tendance ne pourrait se poursuivre à moyen terme sans remettre en cause le modèle de développement économique de l’opérateur. La subvention ne permet ainsi même plus de couvrir la masse salariale (101 millions d’euros en 2017).

La deuxième est une SCSP portée par l’action 01 Attractivité économique et compétitivité des territoires du programme 112 Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire (mission Cohésion des territoires), piloté par le Commissariat général à l’égalité des territoires, issue du transfert des activités de l’AFII à l’occasion de la fusion avec Ubifrance. La Cour des Comptes recommande le transfert de cette SCSP vers le programme 134 afin de faciliter le pilotage de la performance de l’opérateur. Elle est en baisse (– 0,2 million d’euros) et s’établit à 5,8 millions d’euros.

La troisième est une contribution forfaitaire annuelle d’exploitation du ministère de l’Agriculture et de l’alimentation portée par l’action 21 Adaptation des filières à l’évolution des marchés du programme 149 en contrepartie du transfert d’activités qui étaient exercées dans le cadre d’une délégation de service public par la Sopexa. Les rencontres et mini-expositions BtoB de la Sopexa ont été transférées à Business France le 1er janvier 2016 et l’activité pavillons français sur les salons internationaux le 1er janvier 2017. Sopexa continue d’être responsable d’une délégation de service public (DSP) pour la promotion des produits agricoles et agroalimentaires jusqu’au 31 décembre 2017 et continue à recevoir une contribution également portée par cette action à ce titre. Elle est stable en 2018.

L’opérateur connaît également une baisse de son plafond d’emplois (‑ 10 ETPT) en 2018.

évolution du plafond d’emploi de business France

(en millions d’euros)

 

Réalisation 2015

Réalisation 2016*

LFI 2017

PLF 2018

ETPT

1 521

1 524

1 523

1 513

* En 2016, Business France a bénéficié du transfert de 17 ETP en provenance de la SOPEXA.

Sources : Rapport annuel de performances 2015, RAP 2016, NEB 2016, PAP 2018.

L’efficience du financement public de Business France fait l’objet d’un indicateur dans le projet annuel de performance. Il est mesuré par le ratio entre les subventions pour charges de service public d’une part, et le nombre de nouveaux courants d’affaires réalisés par les PME et ETI bénéficiaires de prestations individuelles ou collectives ou utilisatrices du VIE et le nombre de projets d’investissements étrangers aboutis en France accompagnés par Business France. Le résultat de cet indicateur se dégrade en 2016.

2.   Les crédits à destination de Bpifrance Assurance Export

a.   La rémunération au titre des prestations réalisées

Depuis le 31 décembre 2016, date de l’entrée en vigueur de l’article 103 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, Bpifrance Assurance Export est chargé de la gestion des garanties publiques à l’export pour le compte de l’État, sous son contrôle et en son nom. Ces garanties étaient auparavant gérées par Coface.

évolution de la rémunération de Bpifrance Assurance Export

(en millions d’euros)

 

2017

2018

 

AE

CP

AE

CP

Action 07
du programme 134

72,6

72,6

58,6

59,6

Sources : PLF 2017, PLF 2018

Bpifrance Assurance Export reçoit, au titre de ses prestations réalisées pour le compte de l’État, une rémunération inscrite dans l’action 7 du programme 134. Elle est en baisse de 19,3 % en 2018. Il convient cependant de préciser que la subvention 2018 se décomposait en 54,4 millions d’euros correspondant à la part fixe de rémunération annuelle 2017, mais aussi 12,2 millions d’euros de frais exceptionnels liés au transfert et 6 millions d’euros destinés à financer des investissements informatiques. Si l’on soustrait les 12,2 millions d’euros de frais de transfert, la baisse de subvention n’est plus que de 3 %.

Le projet annuel de performance précise que cette ligne pourra également être mobilisée pour financer certaines dépenses en lien avec le compte de commerce Soutien financier au commerce extérieur comme par exemple la rémunération de la caisse française de développement industriel (CFDI) pour la gestion des garanties à la construction navale, à hauteur de 0,24 million d’euros.

b.   Le programme 114 Appels en garantie de l’État

Le programme 114 Appels en garantie de l’État porte les dépenses budgétaires qui découlent de la mise en œuvre des garanties octroyées par Bpifrance Assurance Export. Il s’agit donc de crédits évaluatifs. Pour 2018, il est ainsi prévu 63 millions d’euros, dont :

– 32 millions au titre de l’assurance-prospection ;

– 1 million au titre de la garantie de change ;

– 30 millions au titre de la garantie du risque exportateur.

3.   Le financement du réseau international du Trésor

Cette action recouvre les dépenses du réseau international de la DG Trésor, constitué de 31 circonscriptions, placées sous l’autorité des chefs des services économiques régionaux, en charge de coordonner et d’animer l’activité des services économiques des ambassades de leur zone de compétence. Dans le respect des attributions de Business France, le réseau international du Trésor conserve les missions régaliennes de soutien aux entreprises, notamment via le suivi des situations économiques, la surveillance des conditions d'accès au marché et l’appui aux grands contrats. Ce réseau de la DG Trésor comprend, au 1er juillet 2017, 134 implantations immobilières dans 111 pays.

Les crédits augmentent de 1,5 % en 2018 (+ 1,3 million d’euros).

évolution des crédits à destination du réseau international du Trésor

(en millions d’euros)

 

Exécution 2016

2017

2018

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 02 du programme 305

83,3

83,4

84,5

84,5

85,8

85,8

Sources : Rapport annuel de performances 2016, LFI 2017, PLF 2018

L’indicateur 3.1 du projet annuel de performance mesure l’efficacité du réseau international de la Direction générale du Trésor à travers la proportion des services économiques mettant à disposition du public via le site internet de la DG Trésor une information économique actualisée de leur pays de résidence. En 2016, l’indicateur est en progression de 3 points, s’établissant à 82 %.

B.   Autres dispositions du plf relatives au soutien au commerce extérieur

L’article 19 du projet de loi de finances prévoit une baisse de l’affectation de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises affectée aux Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) de 150 millions d’euros.


—  1  —

   DEUXIÈME PARTIE : OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

I.   Le dispositif institutionnel de soutien à l’internationalisation ne répond pas efficacement aux besoins des entreprises

Depuis plus de quinze ans, la position de la France dans le commerce international se dégrade quasiment sans interruption. Non seulement il ne s’agit pas d’une fatalité, mais il ne s’agit pas non plus d’une seule question de compétitivité, malgré l’importance évidente de ce facteur. Nos voisins, notamment l’Allemagne et l’Italie, font la preuve qu’un volontarisme politique, la mobilisation du milieu économique et une culture de l’export partagée par l’ensemble des acteurs publics comme privés sont des facteurs essentiels sur lesquels la France possède des marges importantes de progression.

La France n’a pas su engager la réforme profonde de son écosystème de soutien à l’internationalisation des entreprises. Ces dernières années, les conventions et les réformes utiles, mais insuffisantes, se sont succédées. Alors que le gouvernement affiche sa volonté de « transformation » et qu’un consensus se dégage chez les acteurs pour redéfinir le rôle et les compétences de chacun dans l’intérêt des entreprises, il est temps de recentrer l’action de l’État sur sa mission de service public et de faire du commerce extérieur une réelle priorité nationale.

A.   L’export est en situation d’extrême urgence

La position de la France dans le commerce international s’est considérablement dégradée depuis quinze ans, avec de lourdes conséquences sur la croissance et l’emploi.

1.   La position de la France sur le marché mondial est en retrait

Le déficit commercial de la France est de 48,3 milliards de déficit en 2016, deux fois plus élevé qu’en 2005. Sur les douze mois précédant la publication de ce rapport, il dépasse les 60 milliards d’euros. Parallèlement, les parts de marché de la France se sont effondrées, divisées par deux depuis 2000.

Évolution des parts de marchés mondiales de la France

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

La France n’est cependant pas la seule à avoir subi la concurrence des pays émergents mais, contrairement à d’autres, elle n’a pas réussi à rebondir.

Évolution de la part de marché en valeur de biens et services
de différents pays

Source : direction générale du Trésor.

2.   Le nombre d’entreprises exportatrices est faible et en diminution

Entre 2000 et 2009, le nombre d’exportateurs de biens a baissé de 6 %, passant de 132 000 à 116 000. D’après les données publiées par les Douanes, il a augmenté depuis, s’établissant à 124 300 en 2016, chiffre cependant en diminution par rapport à 2015.

En 2016, le nombre de nouveaux exportateurs ([1]) est en baisse (29 000), celui des entreprises cessant d’exporter étant en revanche en hausse (près de 29 700). Un peu plus des deux-tiers sont des primo-exportateurs ([2]).

Évolution du nombre d’exportateurs de biens, de nouveaux exportateurs et d’entreprises cessant d’exporter, de 2006 à 2016

 

Source : douanes françaises.

3.   Les échanges de biens sont très concentrés sur les plus grandes entreprises

En 2016, les 100 premiers exportateurs réalisent 40 % des exportations totales de biens depuis la France. Les 1 000 premiers, qui représentent moins de 1 % des entreprises, concentrent quant à eux 70 % des exportations. Autrement dit ces 1 000 premiers exportent chacun en moyenne environ 320 millions d’euros de biens depuis la France. À l’opposé, les opérateurs classés au-delà du 10 000e rang, soit plus de 90 % des entreprises, réalisent seulement 5 % des ventes à l’international pour un montant annuel moyen d’exportation d’environ 20 000 euros.

Concentration de l’appareil exportateur français

Les grandes entreprises ne représentent que 0,4 % du nombre total des entreprises exportatrices mais effectuent 54 % des exportations totales de biens. En 2016, les performances de ces grandes entreprises à l’exportation sont moins bonnes qu’en 2015, notamment pour les filiales de groupes étrangers (‑ 3,3 % par rapport à 2015 contre – 0,9 % pour celles de groupes français), qui représentent presque la moitié des grandes entreprises exportatrices depuis la France.

En 2016, le nombre d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) exportatrices progresse très légèrement (+ 0,4 % par rapport à 2015) pour un montant d’exportation quasi stable (– 0,2 %). Ces ETI, majoritairement des filiales de groupes français, réalisent en 2016 un tiers des exportations depuis la France.

Les PME et les microentreprises, représentent 95 % des entreprises exportatrices, mais seulement 14 % des exportations. En 2016, elles sont un peu moins nombreuses qu’en 2015 (– 0,4 %) mais leurs performances à l’exportation s’améliorent, pour les PME (+ 2,5 %) comme pour les microentreprises (+ 3,1 %).

4.   La dégradation de la situation du commerce extérieur a un impact négatif sur la croissance et pèse sur l’emploi

Les mauvais résultats de la France en matière du commerce extérieur ont eu pour conséquence d’avoir une contribution négative sur la croissance.

Contribution du commerce extérieur à la croissance

(en point de PIB)

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Contribution du commerce extérieur à la croissance

0,0

0,5

– 0,1

– 0,5

– 0,5

– 0,8

– 0,4

0,0

Source : Insee jusqu’en 2016, prévisions RESF en 2017-2018.

Alors que, selon le think tank La Fabrique de l’Exportation, un emploi sur quatre dépend directement ou indirectement de l’export, les enjeux en termes d’emploi sont très importants.

B.   L’écosystème du soutien à l’internationalisation des entreprises est inefficient

Pourtant, si la France souffre de handicaps importants, notamment en termes de compétitivité coût, elle dispose aussi d’atouts importants (secteurs exportateurs à haute valeur ajoutée, réseau diplomatique étendu, image forte et positive de la France à l’international…).

Cette incapacité de la France à redresser sa situation dans le commerce international est notamment le fait d’un écosystème de soutien à l’internationalisation qui ne distingue pas les compétences entre les acteurs. Malgré des réformes positives ces dernières années, la nécessaire transformation profonde du système n’a pas eu lieu.

1.   L’effort budgétaire est insuffisant et dispersé

Bien que l’efficacité du soutien à l’internationalisation des entreprises ne dépende pas que des montants qui lui sont consacrés (l’Allemagne dépense, au niveau fédéral, 162 millions d’euros en 2017, soit une somme relativement équivalente à la France, pour des résultats bien meilleurs), il s’agit cependant d’un facteur réel et important.

Or, ces dernières années ont vu l’effort financier de l’État diminuer. C’est le cas notamment de la subvention de Business France (voir première partie du présent rapport et infra). L’État semble considérer de manière croissante que le soutien financier à l’export doit être une source de revenus davantage qu’un investissement, comme en atteste l’exigence de réduction du déficit lié à l’assurance prospection (voir III.).

De plus, le pilotage budgétaire du soutien à l’internationalisation des entreprises n’est pas coordonné. Le soutien public financier provient de nombreuses sources différentes (taxes affectées pour les chambres de commerce et d’industrie, subventions des régions, crédits budgétaires de l’État éclatés dans douze programmes…) dont le suivi et l’exécution sont insuffisamment concertés. La stratégie d’influence afin de bénéficier de financements, notamment européens, est également insuffisante. Ainsi, la France ne dispose que d’un emploi à temps plein à Eurochambre, le réseau des chambres au niveau européen, tandis que l’Allemagne en dispose de 20. Par conséquent, la captation des financements européens est essentiellement allemande, et un manque à gagner important est à déplorer pour la France.

2.   En l’absence de ministre en charge, la responsabilité politique est diluée

Pour la première fois depuis 1995, aucun ministre ou secrétaire d’État n’est spécifiquement en charge au commerce extérieur, alors que même la situation actuelle exigerait plus qu’à aucune autre époque une impulsion politique particulière.

Tout d’abord, le ministre est garant des moyens budgétaires mis au service de la politique qu’il est chargé de conduire. Deuxièmement, il incarne le visage de la France sur le sujet à l’international. Enfin, il dispose de l’autorité et de la légitimité nécessaire à coordonner un paysage d’acteurs divers et complexe. L’absence de portefeuille dédié au commerce extérieur manifeste donc une insuffisante priorité donnée à cette politique.

3.   L’écosystème institutionnel met en concurrence les acteurs

a.   Les acteurs de l’internationalisation des entreprises sont nombreux

Le paysage du soutien à l’internationalisation des entreprises est composé de nombreux acteurs, rendant le système difficilement lisible pour les entreprises.

● Business France

Business France est un opérateur issu de la fusion d’Ubifrance et de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) en 2015 qui porte l’essentiel de la politique de commerce extérieur de la France.

Sa première mission, dite Export, est de favoriser le développement international des entreprises implantées en France à travers la mise à disposition des entreprises et des organismes d’un socle d’information de base de plus de 5 000 documents, des veilles sur mesure, des événements collectifs, des prestations individuelles de prospection, la mise en place du dispositif du Volontariat International en Entreprise (VIE)…

Sa deuxième mission, dite « Invest », est de promouvoir l’attractivité du territoire national et les investissements étrangers. Pour cela, l’opérateur conseille, oriente et accompagne les potentiels investisseurs étrangers, notamment en servant de lien entre ces derniers et l’administration.

Sa dernière mission est de mettre en œuvre une stratégie de communication et d’influence visant à développer l’image économique de la France à l’international. C’est par exemple dans ce cadre qu’a été menée la campagne de communication « Créative France » entre 2015 et 2017.

L’établissement public s’appuie sur un réseau en propre de 92 sites, répartis dans 70 pays et plus de 1 500 emplois.

● Les régions

Les régions ont la compétence exclusive en matière de développement économique du territoire. Cette compétence, récemment renforcée, s’exerce notamment dans le cadre d’agences créées à cette fin (voir infra).

● Les Chambres de Commerce et d’Industrie en France et à l’étranger

Les Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) sont de nature diverses. On compte 18 chambres régionales et 90 chambres territoriales, ainsi que 120 chambres à l’international, dont le statut juridique est différent. Elles font de l’information, de l’organisation d’activités collectives, de l’accompagnement et de l’animation du réseau de manière inégale suivant leur implantation.

● Les Conseillers français du conseil extérieur

3 800 conseillers du commerce extérieur de la France, nommés par le ministre en charge du commerce extérieur, mettent bénévolement leur expérience au service du développement de la France à travers des actions concrètes, en partenariat avec les acteurs publics et privés. Ils sont présents sur le territoire français et regroupés en comités (au moins 7 conseillers du commerce extérieur) dans 121 pays.

● Les opérateurs privés

Une centaine de sociétés d’accompagnement à l’international (SAI), pour la plupart des petites et moyennes entreprises, sont spécialisées par secteurs d’activité et/ou zones géographiques. L’OSCI (Opérateurs spécialisés du commerce international) est l’organisation représentant le secteur.

● Le MEDEF International

MEDEF International accompagne les entreprises dans leur développement à l’international, notamment en organisant des missions, avec les pouvoirs publics notamment. Il dispose de délégations dans 30 pays.

● L’APCMA

L’Assemblée permanente des chambres de Métiers et de l'Artisanat accompagne les entreprises artisanales, notamment à travers un travail de prospection à l’étranger auquel un ETP est consacré.

● La Sopexa

Sopexa est une agence de communication et de marketing spécialisée dans l'agroalimentaire, les vins et l'art de vivre qui fait l’objet d’une délégation de service public pour la promotion des produits agricoles et agroalimentaires.

b.   Des réformes importantes ont été mises en œuvre ces dernières années

Des réformes nécessaires ont été mises en œuvre ces dernières années. La première est la création en 2015 de Business France, issue de la fusion d’Ubifrance et de l’AFII. Cette fusion a doté l’État d’un opérateur unique, visible et structuré qui a permis de cumuler une importante expertise et des connaissances sur toute la chaîne de valeur de l’internationalisation.

La diplomatie économique a été priorisée sous l’impulsion de Laurent Fabius qui a demandé aux ambassadeurs de faire de l’internationalisation des entreprises un point central de leur activité. Cette activité fait désormais l’objet de 17 indicateurs et constitue un réel facteur de contrôle des ambassadeurs et de l’appréciation de leur carrière. Le nombre de réunions de coordination des acteurs de l’export tenue par les ambassades a ainsi augmenté de 8 % en 2016 par rapport à 2015, avec près de 1 230 réunions.

La responsabilité des régions a été clarifiée et renforcée avec la loi NOTRe du 7 août 2015 en les dotant de la responsabilité exclusive de la définition des orientations en matière de développement économique et confié aux conseils régionaux l’élaboration d’un schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII), conçu comme un document de programmation à valeur prescriptive et une feuille de route applicable de 2017 à 2021. Les régions ont mis en place des agences au poids et aux missions parfois sensiblement différentes afin de mettre en œuvre la feuille de route ainsi définie.

Des responsables « pays » et « filières prioritaires » ont été nommés, avec des rôles très différents. Les responsables pays sont des personnalités publiques importantes reconnues à l’international qui jouent un rôle de représentation de la France en particulier en cas de situation litigieuse ou sensible. Les responsables de filière, eux, sont issus du secteur privé et ont un rôle de structuration et d’animation de la filière, en lien avec le ministère des Affaires étrangères.

Ces réformes vont toutes dans le bon sens, mais elles restent au milieu du gué. En effet, elles ne corrigent ni une vision excessivement comptable des activités de Business France, ni la concurrence entre les acteurs.

c.   L’écosystème du soutien à l’internationalisation des entreprises est complexe et insuffisamment coordonné

L’internationalisation des entreprises faisant intervenir de multiples acteurs étatiques, publics, semi-publics et privés. Faute d’une répartition claire des compétences, une concurrence contre-productive est à l’œuvre.

Récapitulatif des interventions des différents acteurs

 

Business France

CCI (en France
ou à l’étranger)

Régions

Ambassades (y compris réseau Trésor)

Bpifrance (y compris Bpifrance Assurance Export)

CCEF

Secteur privé

Informations pays

X

X

 

X

 

X

X

Opérations collectives (salons…)

X

X

X

X

 

X

X

Accompagnement individuel

X

X

X

 

 

X

X

VIE

X

 

 

 

 

 

 

Garanties publiques

 

 

 

 

X

 

 

Aides financières à l’Export

X

 

X

 

X

 

 

Bureau en région

 

X

X

 

X

 

X

Bureau à l’étranger

X

X

 

X

 

 

X

L’enchevêtrement de ces compétences est inefficace, inefficient et contre-productif pour trois raisons. Tout d’abord, il conduit à un gaspillage des deniers publics : deux financements financent le même objet. Par exemple, la région Nouvelle Aquitaine finance le diagnostic export que Business France, lui, facture. De plus, le soutien à l’internationalisation des entreprises dispose de trois « adresses » (ambassade, Business France et chambre de commerce à l’étranger) dans de nombreux pays.

Ensuite, cette situation amène les acteurs à se concurrencer sur une même action. Le Rapporteur spécial s’est ainsi vu rapporter que dans un même pays, l’ambassade et Business France avaient organisé chacun une mission à intervalle de seulement quelques semaines. Chaque acteur constitue son propre « fichier client » sur le territoire national qu’il dirige ensuite vers son propre réseau à l’international, plutôt que de l’orienter vers d’autres acteurs plus adaptés à la taille, au secteur ou aux enjeux particuliers de l’entreprise. Selon l’enquête du CNCCEF, dans 56 % des cas, la coopération entre Business France et les CCI est jugée nulle (14,7 %) ou faible (41,3 %). Une « redondance de missions, une concurrence et des tensions fortes » existent dans dix pays parmi lesquels certains des plus importants partenaires commerciaux de la France.

Enfin, le système devient illisible aux yeux des entreprises. La 4e édition du Baromètre « Les PME-ETI françaises et l’internationalisation » réalisé par Opinion Way pour CCI International montre ainsi que 64 % des entreprises ne sont pas capables de citer un seul organisme accompagnant les entreprises dans leur développement international ; seulement 8 % citent Business France et 2 % la région, malgré le rôle central confié à ces acteurs ces dernières années.

Notoriété spontanée des organismes d’accompagnement

Source : Opinion Way pour CCI International, juin 2016.

d.   Business France est enfermée dans un modèle économique qui le détourne de sa mission de service public

Le modèle économique de Business France n’est pas soutenable. Sa seule activité rentable est la gestion du Volontariat International en Entreprise, dont la qualité est unanimement reconnue. Dès lors, face à la baisse drastique des subventions publiques à Business France (– 20 % en cinq ans), le financement à moyen terme de la structure ne peut être assuré. En 2017, sa subvention (98 millions d’euros) représente moins de la moitié de ses ressources, ne couvrant même pas la masse salariale (101 millions d’euros).

Cette situation a poussé Business France à une fuite en avant : afin de satisfaire ses exigences de ressources propres et de compenser la baisse des subventions, l’agence s’est développée géographiquement, quitte à entrer en compétition avec des acteurs assurant déjà les activités de soutien de manière efficace, et tarifie la plupart de ses prestations.

Dans le « Benchmark 2016 » réalisé par l’opérateur, il apparaît ainsi que Business France fait partie des 36 % des agences publics de soutien à l’export qui facturent ses services de manière importante ; la vaste majorité (58 %) valorisant la gratuité et 6 % ne pratiquant qu’une tarification marginale. Parmi 18 agences (13 européennes dont Business France, l’Australie, les États-Unis, le Japon et la Corée du Sud), Business France est la seule, avec l’agence Business Sweden, à avoir un financement par facturation à ses clients représentant 40 % à 45 % de son budget annuel.

e.   Les conventions ont été multipliées sans résoudre le problème de fond

Afin de résoudre ces conflits de compétence, le choix a été fait de développer le conventionnement entre les acteurs. Il n’a cependant pas permis de clarifier et d’améliorer significativement le système.

● La première convention est le partenariat stratégique, signé entre Business France, CCI International et CCI France International à l’occasion du Forum des PME à l’international, le 11 mars 2015. Cet accord prévoit un accompagnement ciblé de 3 000 entreprises (TPE et PME) disposant d’un fort potentiel à l’exportation d’ici 2017, avec l’objectif commun pour Business France et les CCI d’un développement d’un courant d’affaires pour un tiers d’entre elles. Ce programme est mis en œuvre en liaison avec les régions. Les entreprises sont sélectionnées prioritairement parmi les familles prioritaires à l’export.

Partenariat stratégique entre Business France et les CCI

Étape du parcours d’internationalisation

Organisme responsable

Prestations proposées

1. Se préparer à l’international, valider et structurer son projet

CCI France

Diagnostic export incluant la validation du « potentiel marchés »

Définition et suivi d’un plan d’action personnalisé dans un cadre individuel ou collectif

2. Prospecter les marchés étrangers et développer des courants d’affaires

Business France

Mise en œuvre du plan d’action dans le cadre de prestations de prospection individualisées ou collectives issues notamment du programme France Export

3. S’implanter, se structurer et se pérenniser sur le marché cible

CCI France International

Mise en œuvre du plan d’action dans le cadre de prestations d’implantation, de structuration et de pérennisation sur le marché visé

Source : Réponse au questionnaire budgétaire

Mi-août 2017, 1 771 entreprises avaient ouvert une séquence d’accompagnement (réponse au questionnaire parlementaire pour le PLF 2017), soit un peu plus de la moitié de l’objectif seulement.

Si de multiples accords par pays ont été conclus afin de concrétiser ce partenariat, le Rapporteur spécial n’a pas constaté au cours des auditions que les doublons avaient été effectivement supprimés. L’impact sur la couverture géographique de chacun des acteurs est donc nul. La réponse au questionnaire budgétaire affirme également une « faible concrétisation en termes de chiffre d’affaires apporté par l’une à l’autre partie ». Selon l’enquête réalisée par le CNCCEF, Business France et les CCI n’organisent que très partiellement des contacts communs en entreprises (36 % de réponses positives seulement).

● Dans le cadre de ses relations avec les régions, Business France s’adosse sur plusieurs partenariats : un accord-cadre avec l’Association des Régions de France signé le 25 juin 2015 et reconduit avec la nouvelle gouvernance de Régions de France, le 29 septembre 2016 ; une contribution à l’élaboration aux schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation des régions ; un accord avec chaque agence régionale de développement comme correspondant chef de file sur les sujets de l’attractivité. Des conventions cadres Région / Business France ont été adoptées en Normandie, Pays de la Loire, Nouvelle Aquitaine, Occitanie, Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté, PACA, collectivité de Mayotte, soit 7 régions seulement à la date de fin août 2017.

● Business France et la fédération des entrepreneurs du commerce international, l’OSCI, ont signé le 2 novembre 2016 une convention cadre de partenariat. Elle fait suite à la saisine de l’Autorité de la concurrence par l’OSCI en 2013 d’une demande d’avis relative au fonctionnement de la concurrence dans le secteur de l’accompagnement à l’international. Elle estimait en effet que les pouvoirs publics outrepassaient leurs missions et provoquaient des distorsions de concurrence. À l’occasion de cet avis, l’Autorité a notamment considéré que des éclaircissements sur la charge de service public dont sont chargés les opérateurs pouvaient être nécessaires ; que la séparation comptable des activités marchandes et non-marchandes devait être effectuée par les organismes publics concernés ; que les opérateurs publics devaient assurer une promotion plus équitable des prestations d’accompagnement des opérateurs privés. En 2015, l’OSCI a également protesté contre la convention conclue entre Business France et les chambres de commerce qui prévoit, selon elle, que ces dernières seront seules en charge de l’accompagnement des entreprises à l’étranger.

La convention répond donc en partie à ces enjeux. Celle-ci prévoit notamment le développement des passerelles entre les deux organisations, notamment en ce qui concerne la mise en relation par Business France des entreprises qu’elle accompagne avec les entreprises de l’OSCI, et l’application des recommandations de l’Autorité de la concurrence. Cette convention est complétée par des accords signés entre les bureaux de Business France et les représentants de l’OSCI dans les pays couverts. Six ont déjà été signés (en Allemagne, Italie, Algérie, Vietnam, Russie et dernièrement au Mexique).

● Enfin, une convention a été signée le 11 mars 2015 entre le Comité national des conseillers du commerce extérieur (CNCCEF) et Business France.

C.   Recommandations du rapporteur

Le R apporteur spécial constate que nous traversons une période propice au changement radical du système. Premièrement, le président de la République a affirmé sa volonté transformatrice, aussi en matière de positionnement de l’État dans le soutien aux entreprises. Deuxièmement, le changement de direction de Business France avec la nomination de M. Pascal Cagni comme président et M. Christophe Lecourtier en tant que directeur général est l’occasion de lancer l’agence dans une nouvelle direction, conformément au rapport qui a été demandé par le gouvernement à ces deux responsables d’expérience. Troisièmement, le gouvernement, en fixant l’objectif de porter le nombre d’entreprises exportatrices à 200 000, s’oblige à avoir une action d’ampleur. Enfin et surtout, le Rapporteur spécial a constaté que la demande d’une réforme de l’écosystème vers davantage de subsidiarité était unanime aussi bien du côté des acteurs publics que privés. C’est dans ce sens qu’il formule les recommandations suivantes.

a.   Au niveau régional, un guichet unique piloté par les régions s’appuyant sur les avantages comparatifs de chacun

Les régions doivent être en charge de la gouvernance de la politique de soutien à l’internationalisation sur le territoire en charge de réunir les acteurs, de les coordonner et d’adapter leurs services aux besoins des entreprises du territoire, par exemple en matière de formation. Elles doivent assurer un point d’entrée unique pour les entreprises reposant sur les Chambres de commerce et d’industrie qui doivent se voir confier la mission de recenser les entreprises, de les sensibiliser et de les mobiliser autour de l’export.

Business France doit être placé dans un rôle de soutien en matière d’expertise et de diagnostic. Des effectifs actuellement postés à Paris ou à l’étranger pourraient être redéployés dans les régions pour assurer cette mission. L’opérateur pourrait également être chargé d’un recensement et d’un accompagnement spécifique envers les primo-exportateurs afin de lever les premiers freins à la démarche d’internationalisation d’une part, et de consolider les exportateurs « intermittents » qui s’arrêtent souvent à leur première vente.

L’action de l’État devra s’adapter pour les entreprises artisanales, qui réagissent davantage à une demande qu’elles ne cherchent à s’implanter à travers leur offre. Les chambres de métiers et de l’artisanat auraient un rôle de recensement de l’activité sur le territoire, tandis que l’État assurerait la prospection à l’étranger dont le coût est prohibitif pour une entreprise artisanale.

b.   À l’international, assurer une offre adaptée aux besoins de l’entreprise dans une logique de subsidiarité

Business France doit être placé dans un rôle de régulateur en définissant un cahier des charges visant à assurer le même niveau de qualité du soutien partout dans le monde. Si la Chambre de commerce à l’étranger est en capacité d’y répondre, elle est chargée de le mettre en œuvre ; dans le cas contraire, Business France assure cette mission le temps de la transition.

Business France doit conserver la prérogative de « l’image France », notamment en assurant la compétence « salons », ainsi que des VIE. Il doit assurer la bonne coordination des acteurs, l’enregistrement de « l’expérience client » des entreprises et le déploiement d’un système d’information partagé entre les acteurs permettant d’assurer le continuum du soutien de l’entreprise, de son territoire d’origine à sa vente à l’étranger.

c.   Assurer un pilotage politique au niveau ministériel

Le Rapporteur spécial recommande la nomination d’un ministre ou secrétaire d’État rattaché au Premier ministre en charge du commerce extérieur. Cette position lui permettrait d’avoir une autorité transversale sur ce dossier indispensable en raison de son caractère multidimensionnel, de coordonner les crédits dédiés à cette politique et de travailler à diffuser une « marque France » unique et unifiée.

Il doit se voir confier la responsabilité d’une task force chargée d’identifier les freins réglementaires à l’export et d’assurer leur levée dans les délais les plus rapides possible, faisant le lien entre les entreprises et les services des ambassades. Le Rapporteur spécial fera des propositions en ce sens au cours de l’année à venir.

d.   Assurer l’effort budgétaire dans ce cadre renouvelé

La réforme de l’écosystème avec un recentrage de Business France sur ses missions de service public ne doit pas être l’occasion de faire des économies supplémentaires. Au contraire, particulièrement lors de la phase de transition, des investissements seront nécessaires (création de systèmes d’information partagés en particulier, tel un CRM (Customer Relationship Management), progiciel de gestion client).

Le Rapporteur spécial recommande donc un cadre budgétaire pluriannuel garantissant la stabilité des subventions durant cette période.

II.   Face au défi alimentaire mondial, mobiliser la filière agricole et agroalimentaire française

A.   LA France A PERDU SA PLACE PARMI LES GRANDS EXPORTATEURS DE L’agroalimentaire

La situation française dans le marché mondial de l’agriculture et de l’agro-alimentaire s’est dégradée depuis dix ans.

Alors que la France représentait 7,7 % des parts de marché mondial en 2000, elle n’en détient plus aujourd’hui que 4,8 %. L’agriculture et l’agroalimentaire, autrefois têtes de pont des exportations françaises, sont désormais relégués à la troisième place des secteurs exportateurs derrière l’aéronautique et la chimie.

ÉVOLUTION DES EXPORTATIONS ET DES PARTS DE MARCHÉ DES PRODUITS AGROALIMENTAIRES DE LA France ENTRE 2000 ET 2015

Source : ministère de l’Agriculture.

La France est ainsi devenue cinquième exportatrice mondiale, alors qu’elle était détentrice de la deuxième place, derrière les États-Unis, en 2000.

ÉVOLUTION DES PARTS DE MARCHÉS françaises DANS LE MONDE

Source : ministère de l’Agriculture.

Les raisons en sont multiples (compétitivité, croissance de la présence sur le marché mondial des pays émergents…) mais elles tiennent également à des caractéristiques intrinsèques du milieu économique français de ce secteur et de l’organisation des pouvoirs publics pour faire face, ou pas, aux enjeux de l’exportation de ces produits. La comparaison avec l’Allemagne, aujourd’hui troisième exportateur dans le secteur juste derrière les Pays-Bas, passée devant la France en 2007, en atteste.

L’agriculture compte 7 556 entreprises exportatrices en 2016 (- 0,4 % par rapport à 2015) et les industries agroalimentaires 19 226 (+ 2 %) selon les Douanes, sur un total de 124 114 exportateurs de biens. Cela représente moins de 20 % des entreprises françaises du secteur, tandis qu’elles sont entre 70 % et 80 % en Allemagne. Plus encore, la part du chiffre d’affaires réalisé à l’étranger varie en moyenne entre 10 % et 20 % en France, alors qu’elle est de 50 % en Allemagne – une part que seulement 6 % des entreprises françaises du secteur français atteignent. 2 % des entreprises agroalimentaires en France réalisent aujourd'hui les 2/3 du chiffre d'affaires à l'export.

B.   La France doit se mettre en ordre de bataille pour faire face au défi alimentaire mondial

1.   Le défi alimentaire mondial représente un enjeu majeur pour le secteur

Le marché mondial est pourtant le principal relais de croissance du secteur du fait du défi alimentaire. D’une part, la croissance démographique est importante : d’ici 2050, la population mondiale devrait atteindre 9,77 milliards (contre 7,55 milliards aujourd’hui). L’Afrique connaîtra la croissance la plus importante, passant de 1,256 milliards d’habitants (17 % de la population mondiale) actuellement, à 4,468 milliards (40 %). D’autre part, le défi environnemental sera de plus en plus prégnant. La demande croissante de nourriture aggrave en effet la concurrence pour les ressources naturelles, la déforestation et la dégradation des terres tandis que le changement climatique compromet la production des cultures et de l’élevage, les stocks de poisson et la pêche.

Par conséquent, il faudra produire davantage, tout en préservant la planète. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ([3]), une augmentation de la production mondiale de 70 % par rapport à 2009 sera nécessaire pour répondre aux besoins, avec notamment une demande de céréales de 3 milliards de tonnes en 2050 contre 2,6 milliards de production en 2017 ([4]).

2.   Les efforts entrepris sont réels

Le Rapporteur spécial se félicite que des efforts aient récemment été entrepris afin de rendre nos entreprises plus armées sur le marché mondial.

a.   L’accompagnement des entreprises a été renforcé

Tout d’abord, l’accompagnement des entreprises à l’export a été amélioré. D’une part, le transfert pleinement effectif à partir du 1er janvier 2017 à Business France des activités BtoB auparavant confiés sous forme d’une délégation de service public à la Sopexa renforce la cohérence de l’action menée en la matière tout en contribuant à améliorer la lisibilité pour les entreprises. Ce transfert a entraîné une augmentation des opérations réalisées par Business France dans le secteur agricole et agroalimentaire. Ainsi, en 2017, on compte :

– 137 événements collectifs inscrits au « Programme France Export (PFE) » ouverts aux entreprises françaises (+ 34 % par rapport à 2016), soit 3 600 participations d’entreprises (+ 116 %) (2 500 participations à des salons (+ 225 %), 1 100 participations à des événements BtB (+ 22 %)) ;

– 50 Pavillons France (PF) sur salons (+ 47 %) dont 25 « produits agricoles et agroalimentaires » (+ 127 %), 16 PF équipements et machinisme agricole et IAA (– 15 %) + (22 opérations réalisées par ADEPTA (+ 1)) ; 9 PF vins et spiritueux (+ 125 %) ;

– 87 événements BtB (rencontres d’acheteurs, missions collectives découvertes, dégustations de produits) à l’étranger (+ 28 %).

D’autre part, le réseau des conseillers agricoles a été renforcé : ils sont aujourd’hui 30 dans 20 pays émergents, ce qui fait du réseau français le deuxième après le réseau américain. L’édition d’une lettre bimensuelle « Objectif Agro International » lancée il y a six mois par le ministère de l’Agriculture, dont l’écriture réunit plusieurs acteurs du secteur (Business France, Sopexa, MEDEF International, France AgriMer, Ania, Adepta) participe à l’information indispensable des entreprises pour les encourager à se tourner vers de nouveaux marchés. Ces initiatives permettent de rapprocher l’analyse du ministère des entreprises.

b.   Des actions visant à structurer la filière ont été entreprises

L’État s’est doté d’instruments pour structurer l’intervention des différents acteurs du secteur et les amener à collaborer, notamment dans le cadre d’un « Plan stratégique à l’export » élaboré par le ministère de l’Agriculture. Le ministère des Affaires étrangères a considéré l’agroalimentaire comme « filière prioritaire à l’export » et a nommé une fédératrice, Mme Catherine Chavrier. La famille « mieux se nourrir », qui regroupe l’amont (agriculture, produits bruts et équipements) et l’aval du secteur (produits transformés, boissons, distribution et gastronomie), a poursuivi, en 2016 et 2017 ses actions selon plusieurs axes :

– Le renforcement du dialogue public-privé par des échanges réguliers avec les filières afin de s’attaquer aux verrous à l’export. Un « Club export agroalimentaire » a ainsi été créé à cette fin.

– Des tutoriels destinés à sensibiliser les entreprises à l’évolution de la demande internationale ont été réalisés dans les domaines du bio, du marché halal et du e-commerce.

– La fédératrice a également poursuivi son action visant à accompagner les PME et les ETI à l’international, à améliorer la diffusion des informations aux entreprises et à identifier des actions concrètes à engager à l’étranger. Plusieurs missions lui ont été confiées : présence sur de grands salons (SIAL Shanghai, Sirha, etc.) ; accompagnement de délégations officielles spécialisées sur l’agroalimentaire (Chine, Iran, Arabie saoudite, etc.) ; travail avec des grands groupes pour structurer leur « portage » de PME/ETI à l’étranger (montage d’opérations de promotion de produits français organisées avec le groupe Carrefour, hébergement de salariés dans leurs implantations locales, mutualisation de VIE, partage d’information commerciale, etc.) ; mise en place d’actions transversales de promotion des produits et de la gastronomie française via des « semaines françaises » organisées en liaison avec nos ambassades et des régions françaises, que la fédératrice a mobilisées en amont.

De plus, sur les quatorze ateliers des États généraux de l’alimentation, un était dédié à l’export (l’atelier 4) afin de faire émerger un consensus chez les acteurs sur le constat et les moyens à mobiliser. Un volet « export » est également demandé dans le cadre des plans de filières demandés par le Ministre aux acteurs de la filière, manifestant la prise en compte de l’enjeu par le ministère de l’Agriculture.

Enfin, le développement des exportations fait partie des cinq axes du Contrat de la filière alimentaire signé le 19 juin 2013. L’axe « Export/Qualité / Promotion » compte 5 actions qui abordent la problématique des exportations sur les 36 actions du Contrat (action 19 à action 23). Ce Contrat est un document d’orientation et de référence, qui fait l’objet d’une actualisation avec les professionnels de la filière. Ces orientations sont déclinées dans les territoires. Des plans d’action régionaux ont ainsi été bâtis en 2014 et 2015 dans 20 régions, sous l'impulsion et la responsabilité du préfet de région, associant les représentants des salariés et des entreprises, les services déconcentrés de l’État et les Conseils Régionaux.

c.   Un effort particulier sur la promotion des produits

Le ministère de l’Agriculture a pris acte de la montée en puissance des régions dans le domaine de l’internationalisation des entreprises issue de la loi NOTRE dans le pilotage des actions de promotion dans les secteurs agricoles et agroalimentaires.

Une cartographie actuelle des dispositifs de promotion (interprofessions et autres structures représentatives de professionnels, régions, État) a été lancée, et une première réunion visant à définir les modes de fonctionnement entre l’ensemble des acteurs (ministères, Centre National pour la Promotion des Produits Agricoles et Alimentaires (CNPA), opérateurs, Comité de Liaison des Interprofessions Agricoles et Agroalimentaires (CLIAA) et interprofessions, ANIA, Coop de France, régions). La première réunion a eu lieu le 11 octobre 2017.

Le ministère favorise la valorisation des productions nationales à l’international en contribuant au développement de l'identité « France agroalimentaire », déployée dans les salons internationaux au travers de la démarche fédératrice « made in France made with love ». La promotion à l’international des produits agricoles et alimentaires bénéficie ainsi d’un budget d’environ 10 millions d’euros pour 2017 et 2018.

La structuration d’un « pavillon France » uni sous une même marque générique lors des salons dans le secteur est une évolution notable et manifeste le succès de cette dynamique.

d.   La France s’organise pour renforcer le soutien financier aux entreprises

Outre les différents programmes budgétaires au sein du ministère de l’agriculture, le Programme d'Investissements d'Avenir (PIA), dédie une action spécifique à la compétitivité des secteurs agricole et agroalimentaire. Elle a été lancée en 2015 dotée de 120 millions d'euros pour la période 2015-2017.

Les appels à projets de cette action (« Projets Agricoles et Agroalimentaires d’Avenir » - P3A) mise en œuvre par FranceAgriMer (FAM), viennent en complément des dispositifs portés par Bpifrance et l'Ademe. En additionnant les différents volets des P3A, ce sont plus de 82 millions d’euros qui sont mobilisés pour soutenir 88 projets visant à restaurer la compétitivité des outils d'abattage et de découpe.

Il faut rappeler qu’en complément de ces interventions directes en soutien à l’investissement et l’innovation, les entreprises agricoles et agroalimentaires bénéficient de gains de compétitivité par le biais des dispositifs généraux de politique économique dont notamment le Crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) et le pacte de responsabilité, ou encore le Crédit d’impôt recherche. Ce sont en tout 1 814 millions d’euros d’allégement de charges attendus en 2017 pour les IAA et les coopératives agricoles soit 43 millions d’euros de plus qu'en 2016 et 1 022 millions d’euros de plus qu'en 2012. Ces mesures d'allégement ont un impact direct sur la compétitivité des secteurs agricoles et agroalimentaires puisqu’elles réduisent une partie des coûts portés par les entreprises.

Enfin, la France s’est mobilisée sur le dispositif européen d’aide à l’information et à la promotion des produits agricoles. Chaque année, un Programme de travail est présenté par la Commission européenne pour fixer les priorités, les objectifs, les montants budgétaires par thème possible pour des programmes de promotion. Il se traduit par le lancement en début d'année d'un appel à propositions pour des programmes simples et pour des programmes multipays.

Le budget européen consacré à la promotion passe de 60 millions d'euros en 2015 à 188,5 millions d'euros en 2018, 200 millions d’euros en 2019. La France est devenue largement bénéficiaire de ce dispositif. En 2016, à l'issue du premier appel à propositions du nouveau régime, elle avait obtenu un cofinancement pour 8 programmes de promotion sur les 17 qu'elle avait présentés, et reçu 9 millions d’euros d'aide, soit 9,6 % de l'enveloppe des programmes simples. En 2017, la mobilisation des entreprises lancée par le ministère de l’Agriculture (accompagnement des entreprises, séminaire spécifique organisé en 2017 accompagné, tenue de plusieurs réunions techniques) a permis d’obtenir 17 programmes retenus pour une aide de 31,5 millions d’euros, soit 35,9 % de l'enveloppe des programmes simples.

Les entreprises du secteur agricole et agroalimentaire bénéficient également des fonds européens du Programme de Compétitivité et d’Amélioration des Exploitations (PCAE) et plus globalement des plans de développement rural régionaux dont les Conseils Régionaux sont désormais autorité de gestion dans le cadre de la nouvelle programmation du FEADER 2014-2020.

III.   un transfert réussi des garanties publiques dont le développement est encore entravé par des obstacles budgétaires et administratifs

Prévu depuis 2015, le transfert des garanties publiques de la COFACE à Bpifrance Assurance Export, filiale de Bpifrance, est pleinement effectif depuis le 1er janvier 2017.

A.   Rappel des objectifs du transfert

L’objectif de ce transfert était triple.

Tout d’abord, il s’agissait d’entrer dans une logique de guichet unique du soutien financier à l’export au sein de Bpifrance. Avec le transfert des garanties publiques, elle est quasiment aboutie. Seuls la stabilisation du taux d’intérêt, actuellement gérée par Natixis, et le refinancement des grands contrats à l’exportation, géré par la SFIL/CAFFIL, ne sont pas encore intégrés. Le Rapporteur spécial est favorable à la poursuite de ce regroupement.

Il s’agissait ensuite de rapprocher l’offre de financement des entreprises via le réseau déconcentré de Bpifrance, qui compte près de 50 antennes régionales là où Coface ne disposait que d’un réseau d’une quinzaine de correspondants.

Enfin, un objectif de réduction des coûts de gestion de 20 % était fixé à Bpifrance Assurance Export.

Bpifrance Assurance Export propose ainsi une gamme composée de cinq types de produits :

– Une assurance-crédit à l'exportation ;

– Une assurance prospection ;

– La garantie des cautions et des préfinancements ;

– Une assurance change ;

– Une assurance investissement à l'étranger. 


Gamme de couverture des risques à l’exportation de Bpifrance Assurance Export

Source : Bpifrance Assurance Export.

B.   Les obstacles à un meilleur déploiement des garanties publiques

Le Rapporteur spécial a pu constater que l’État adopte parfois à l’égard des garanties publiques à l’export des réflexes ne correspondant ni aux mutations des enjeux de l’export, ni aux besoins des entreprises. Deux exemples sont particulièrement illustratifs : la part française et l’assurance prospection.

1.   L’assurance-prospection est victime d’une approche comptable

a.   Présentation du dispositif

Créée en 1951, l’assurance prospection est gérée par Bpifrance Assurance Export pour le compte de l'État. Ce dispositif, sans équivalent à l’étranger, offre aux PME une assurance contre le risque d’échec de leurs actions de prospection à l’étranger. En effet, la prospection des marchés étrangers implique des dépenses spécifiques qui, même en cas de succès, ne s’amortissent que progressivement, au fur et à mesure des commandes enregistrées. Le principe de l’assurance prospection consiste donc à prendre en charge une partie des frais engagés par l’entreprise qui n’ont pu être amortis par un niveau suffisant de chiffre d’affaires généré sur la zone garantie. Si l’entreprise ne réalise pas le chiffre d’affaires escompté, elle conserve en subvention l’avance qui lui a été faite à hauteur de 65 % maximum.

b.   Un produit très populaire, en particulier chez les PME

Il s’agit du produit le plus populaire de Bpifrance Assurance Export avec environ 12 000 clients en instantané. Ces bénéficiaires sont presque exclusivement des PME. Selon Bpifrance Assurance Export, ces produits permettent un effet de levier supérieur à 10 (1 million d’euros d’indemnité génère 10,5 millions d’euros d’exportations).

La prévision du coût global du dispositif est de 32 millions d’euros en 2018 et, avec la relance des produits grâce à l’amélioration de la distribution grâce au réseau de Bpifrance, Bpifrance Assurance Export prévoit un coût deux fois plus important en 2019.

c.   L’assurance-prospection est victime d’une vision comptable du soutien à l’export

Plusieurs mesures d’économies ont été entreprises pour maîtriser les coûts du dispositif :

– réduction du périmètre des catégories de dépenses éligibles ;

– les frais de séjour applicables aux salariés ou représentants légaux de l’entreprise ont été limités à 200 euros par jour ;

– la quotité garantie a été plafonnée à 65 % ;

– la bonification pour les entreprises innovantes et les entreprises ayant déjà remboursé un contrat d’assurance-prospection a été supprimée ;

– la prise en charge des frais de conseil a été plafonnée ;

– l’assurance-prospection Recherche et Développement et l’assurance prospection pour les Français de l’Étranger ont été supprimées.

Le déficit budgétaire associé à la procédure s’est ainsi réduit progressivement : 88,1 millions d’euros en 2014, 54,8 millions d’euros en 2015 et 20,4 millions d’euros en 2016.

Alors que le développement de cette activité devrait être valorisé et encouragé, au contraire, selon les informations recueillies par le Rapporteur spécial, l’État demande à Bpifrance Assurance Export de maintenir le coût du dispositif à 28,5 millions d’euros en 2019 et 26,5 millions d’euros en 2020, ce qui reviendrait à freiner dès maintenant la distribution de ce produit efficace pour l’internationalisation des entreprises françaises.

Le Rapporteur spécial regrette qu’une vision purement comptable vienne entraver le développement des entreprises et demande au gouvernement de modifier le quinquennal de Bpifrance Assurance Export, alors que le résultat de l’opérateur est dans son ensemble largement excédentaire grâce à l’assurance-crédit. Par conséquent, il recommande une augmentation des crédits destinés à couvrir le coût à la hauteur de la croissance de la demande dont le produit fait l’objet.

2.   La part française ne correspond plus à la réalité de l’économie

La « part française » est un critère déterminant d’éligibilité aux produits d’assurance export délivrés par Bpifrance. Il s’agit du rapport entre la valeur ajoutée réalisée en France et le chiffre d’affaires export. Elle est calculée opération par opération.

Règles de part française applicables à l’assurance-crédit, l’assurance-change, la garantie des cautions et des préfinancements (risque exportateur) ([5])

Source : Bpifrance Assurance Export.

Si elle assure un affichage politique certain, la part française est devenue inadaptée pour au moins trois raisons. Premièrement, elle rend la prise en garantie incertaine pour les demandeurs, qu’il s’agisse du montant qui pourra être garanti (en assurance-crédit) ou sur le principe de la garantie en lui-même (en assurance-change ou en garantie des cautions et des préfinancements par exemple, cette part n’étant pas forcément connue au moment de l’examen de la demande).

Deuxièmement, ce critère handicape les groupes français face à leurs concurrents internationaux. Ces derniers sont en effet soutenus par d’autres agences de crédit-export qui n’ont pas la même exigence. Ainsi, les groupes italiens, japonais, coréens, canadiens, suédois, néerlandais concurrents doivent seulement respect le critère de leur « intérêt national », qui est le plus souvent uniquement déterminé par le fait qu’ils constituent des « champions nationaux ».

Enfin, la règle de la part française empêche à des entreprises de profiter pleinement des garanties publiques pour se consolider au niveau international, ce qui ne peut avoir que des retombées positives, bien qu’indirectes, pour l’économie nationale. Elle est d’autant moins adaptée à des secteurs tels que celui des énergies renouvelables, où la part française est nécessairement plus faible (autour de 20 %) du fait de la localisation nécessairement locale de la production.

Le Rapporteur spécial est favorable à la proposition de lui substituer un système de « passeport » dans lequel la vérification préalable des opérations en‑dessous des 200 millions d’euros serait supprimée au profit de la délivrance pour trois ans des garanties après avis de la Direction générale des entreprises sur une base multicritère, y compris d’éventuels engagements de maintien de sites de production en France. Cette approche est en effet plus flexible à la fois quant au profil de l’entreprise (négociation au cas par cas) et dans le temps, permettant aux entreprises d’avoir une visibilité pluriannuelle.


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   Examen en commission

La commission poursuit l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2018 (n° 235).

Après l’audition de MM. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, et Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères (voir le compte rendu de la commission élargie du 8 novembre 2017 à 16 heures 15 ([6])), la commission examine les crédits de la mission Économie : Développement des entreprises et régulations ; compte spécial Prêts et avances à de particuliers ou à des organismes privés (Mme Olivia Gregoire et M. Xavier Roseren, rapporteurs spéciaux) ; Commerce extérieur (M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial) Statistiques et études économiques ; Stratégie économique et fiscale ; compte spécial Accords monétaires internationaux (MM. Philippe Chassaing et Alexandre Holroyd, rapporteurs spéciaux).

 

Article 29 et état B

La commission examine ensuite les crédits de la mission Économie et des comptes spéciaux Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés et Accords monétaires internationaux.

La commission examine l’amendement II-CF281 de M. Joël Giraud, rapporteur général.

M. Joël Giraud, rapporteur général. Cet amendement vise à renforcer les moyens du fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, à hauteur de 5 millions d’euros. Ces crédits seront destinés à soutenir les stations-service traditionnelles dans les territoires ruraux. Ils seront pris sur les crédits de fonctionnement du programme Stratégie économique et fiscale pour lesquels une certaine marge existe.

Mme Olivia Gregoire, rapporteure spéciale. Les stations-service indépendantes participent dans les zones rurales de la cohésion de ces territoires. Cet amendement mériterait cependant une discussion et des explications plus approfondies. Je vous demande donc, à ce stade, son retrait.

Mme Amélie de Montchalin. En 2015 et 2016, l’ensemble des dossiers relatifs aux stations-service ont été traités. Des demandes plus importantes que cela n’était anticipé ont même conduit au dépassement des budgets prévisionnels du FISAC. Nous devons donc disposer de tous les éléments pour pouvoir nous prononcer sur la nécessité de disposer de 5 millions d’euros pour répondre à des besoins nouveaux. En effet, il n’y a pas, à notre connaissance, de dossiers pour lesquels il manquerait des financements. Nous demandons donc le retrait de cet amendement.

M. Damien Adam. Le groupe La République en Marche est défavorable à cet amendement.

M. le président Éric Woerth. C’est dommage car c’est un vrai sujet.

M. Sébatien Jumel. La France rurale souffre. Le renoncement de l’État dans les communes rurales conduit à ce que les oubliés de la République soient de plus en plus nombreux. Un geste comme celui-ci sur un sujet qui est très concret dans les villages concernés serait de bon aloi.

Mme Véronique Louwagie. De nombreux députés ont regretté la baisse des crédits du FISAC et l’existence de stations-service est un enjeu très fort pour les territoires ruraux. Les députés Les Républicains soutiendront donc cet amendement.

Mme Perrine Goulet. Pourquoi les 5 millions d’euros supplémentaires devraient-ils être fléchés sur les seules stations-service ? Pour cette raison, je suis opposée à cet amendement.

M. le rapporteur général. Je vais retirer cet amendement et le redéposer pour la séance publique en m’assurant que le calibrage corresponde bien aux besoins réels. Dès lors, je précise que je ne le retirerai pas.

L’amendement II-CF281 est retiré.

La commission examine l’amendement II-CF699 de Mme Olivia Gregoire et M. Xavier Roseren, rapporteurs spéciaux.

Mme Olivia Gregoire. Cet amendement a pour objet de majorer les crédits destinés à la protection économique du consommateur et en particulier les dépenses d’intervention en faveur des associations de consommateurs. Ces crédits s’élevaient à 8,9 millions d’euros en 2017. Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit de les diminuer de 40 %, soit d’environ 3,5 millions d’euros, dans l’objectif global de maîtrise des dépenses publiques. Cette baisse serait préjudiciable à l’existence de la presse et des associations de défense des consommateurs qui fournissent une information indépendante et fiable qu’il convient de sanctuariser. Les quinze associations nationales agréées ont déjà connu des baisses de subventions en 2016 et 2017. Il est donc proposé par cet amendement d’augmenter de 1,9 million d’euros les crédits d’intervention prévus pour 2018 afin d’en limiter la baisse.

M. Damien Adam. Le groupe La République en Marche est favorable à cet amendement.

Mm  Amélie de Montchalin. Dans le contexte actuel de défiance à l’égard d’un certain nombre de produits ou de services, il est important de pouvoir alerter les Français et de leur fournir une information indépendante et fiable. Les débats multiples sur le glyphosate et les perturbateurs endocriniens et les États généraux de l’alimentation montrent que les moyens dotant des organes associatifs, partenaires de la puissance publique, doivent être préservés. Cet amendement permet de limiter la baisse de leurs subventions en 2018 à 5 % au lieu de 40 %.

La commission adopte l’amendement II-CF699.


La commission examine l’amendement II-CL56 de M. Arnaud Viala majorant de 200 millions d’euros les crédits du programme Plan France Très haut débit.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Lors de la conférence des territoires, le 17 juillet 2017, le Président de la République s’est engagé sur l’objectif d’une couverture du territoire en haut débit d’ici 2020 et en très haut débit en 2022. Les objectifs sont donc très clairs, ainsi que le plan de financement. Les réseaux fixes à très haut débit nécessitent un investissement de 13 à 14 milliards d’euros. La moitié est financée par les recettes d’exploitation des réseaux d’initiative publique et le cofinancement des opérateurs et l’autre moitié par les pouvoirs publics. L’État apportera 3,3 milliards d’euros d’ici 2022, soit la moitié du financement public. Ainsi, à l’heure où nous parlons, 2,3 milliards d’euros ont été engagés dans des projets et 208 millions d’euros supplémentaires le seront en 2018. Dès 2019 220 millions d’euros en crédits de paiement seront ouverts, puis 562 millions en 2020. Les montants pour 2021 et 2022 seront encore plus élevés. Il convient également de souligner que plusieurs centaines de millions d’euros ont déjà été décaissés via le Fonds national pour la société numérique (FSN). Pour toutes ces raisons, il ne nous semble ni exact ni justifié d’entretenir des craintes au sujet du financement par l’État d’une partie de la couverture du territoire en très haut débit, à laquelle nous sommes tous attachés. Avis défavorable.

M. Nicolas Forissier. Il s’agit d’accélérer les financements pour que le plan puisse avancer.

La commission rejette l’amendement II-CL56.

Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux Mme Olivia Gregoire et MM. Xavier Roseren, Philippe Chassaing et Alexandre Holroyd, M. Nicolas Forissier ayant donné pour cette année un avis favorable sous réserve des remarques exposées dans son rapport, la commission adopte les crédits de la mission Économie ainsi que les crédits des comptes spéciaux Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés et Accords monétaires internationaux.

Article additionnel après l’article 54 : Création d’une taxe affectée au centre technique du papier.

La commission examine l’amendement II-CF698 de M. Joël Giraud, rapporteur général.

M. le rapporteur général. Le centre technique du papier soutient la filière du papier à recycler, filière au potentiel de croissance extrêmement important. Cet amendement propose de créer une taxe affectée pour financer ce centre. Conformément à l’article 15 du projet de loi de programmation des finances publiques, je précise que l’affectation de cette taxe sera plafonnée par un amendement qui sera déposé au cours de la navette, au moment de la discussion des articles de la première partie de la loi de finances.

M. Damien Adam. Le groupe La République en Marche est favorable à cet amendement.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Le centre technique du papier était un des derniers organismes de ce type à ne pas être financé par une taxe affectée. Nous sommes favorables à cet amendement qui donnera au centre les moyens de son action.

La commission adopte l’amendement II-CF698.

 

Après l’article 54

La commission examine l’amendement II-CE77 de M. François Ruffin

M. François Ruffin. Le programme de campagne d’Emmanuel Macron accordait bien plus de place à la fraude sociale qu’à la fraude fiscale, alors que le coût pour l’État de cette dernière est 200 fois plus élevé. Nous demandons donc un rapport évaluant le nombre d’agents à recruter dans l’administration fiscale et les dispositifs à mettre en place pour réduire la fraude fiscale de 40 milliards d’euros par an.

Nous souhaitons également que nos propositions soient évaluées : obliger les entreprises à déclarer leurs résultats pays par pays, créer un impôt universel en soumettant chaque citoyen français aux impôts français quel que soit son pays de résidence comme le font les États-Unis, interdire aux banques françaises toute activité dans les paradis fiscaux en retirant leurs licences bancaires aux établissements récalcitrants...

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial. La lutte contre la fraude fiscale est une priorité de la législature, comme le montre la proposition de déchéance des droits civiques pour les fraudeurs fiscaux. Votre amendement paraît relever plutôt de la mission Gestion des finances publiques, relative aux moyens de la direction générale des finances publiques, alors que la mission Économie porte les effectifs de la direction de la législation fiscale. Je donne donc un avis défavorable.

M. Damien Adam. Le groupe La République en Marche est défavorable à cet amendement car de nombreux rapports ont été rendus sur le sujet. Il n’est plus temps de réfléchir, il faut passer à l’action.

M. le président Éric Woerth. Lors de l’examen d’un amendement, l’avis du groupe devrait être donné par un membre de la commission des finances.

M. Damien Adam. Je continuerai à prendre la parole si je le souhaite.

M. Sébastien Jumel. Je soutiens cet amendement, qui est pleinement d’actualité. Il ne faut plus se contenter de dénoncer des réalités, il est urgent de passer aux actes. Depuis 2010, 3 000 emplois ont été supprimés dans les services administratifs chargés de lutter contre la fraude, l’évasion et l’optimisation fiscales.

M. François Ruffin. Si des rapports ont déjà été rendus, je souhaiterais savoir quels effectifs de fonctionnaires supplémentaires seront recrutés pour mieux lutter contre la fraude fiscale.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Je vous renvoie au rapport public 2016 de la Cour des comptes et au rapport d’activité annuel de la commission des infractions fiscales, établi conformément à l’article 16 de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. Le ministre Gérald Darmanin a rappelé qu’il s’agit d’une priorité, car la fraude fiscale porte atteinte au pacte républicain.

La commission rejette l’amendement IICE77.

La commission examine l’amendement IICE416 demandant un rapport sur le dumping fiscal intra-européen.

Suivant l’avis défavorable de M. Philippe Chassaing, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement IICE416.

La commission examine l’amendement II-CE417.

M. François Ruffin. Nous demandons un rapport sur les pratiques d’optimisation fiscale des multinationales. Une entreprise réalisant des profits sur le territoire national profite des investissements de l’État dans les infrastructures, les services publics, l’éducation des salariés ou tout simplement le marché national. Le principe d’égalité et de justice veut que ces mêmes entreprises participent à l’effort national en payant des impôts ; pourtant, les grandes multinationales parviennent à s’en exonérer ce qui révèle l’existence de carences légales et fiscales.

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial. La commission des finances a auditionné début septembre M. Pascal Saint-Amans, responsable de l’OCDE sur plan de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, le BEPS, une initiative majeure qui comporte de nombreuses mesures qui accroissent la transparence et le reporting pays par pays. Comme l’a dit le ministre Bruno Le Maire, l’optimisation fiscale des multinationales est une perte de recettes pour l’État mais aussi une atteinte à la démocratie.

M. Sébastien Jumel. Les révélations de la presse conduisent à douter que ces mesures suffisent. Les rapports parlementaires de nos collègues Alain et Eric Bocquet sur l’évasion fiscale comportaient des préconisations qui n’ont pas été mises en œuvre. L’optimisation fiscale est une évasion fiscale consentie et parfois encouragée. Nous ne cesserons de vous interpeller sur le sujet, car si les riches échappent à l’impôt, les pauvres continuent de le payer.

M. Jean-Paul Dufrègne. Le contexte actuel montre que notre Assemblée attend des résultats qui ne sont pas là.

M. le président Éric Woerth. Les coopérations entre les États et les administrations fiscales se renforcent considérablement depuis dix ans. La communauté internationale progresse sur ce sujet.

M. Philippe Chassaing, rapporteur spécial. Vous n’avez pas, M. Jumel, le monopole de l’indignation sur la fraude fiscale. Le ministre est pleinement engagé dans ce combat et a fixé un délai de deux années pour progresser encore en la matière.

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial. Au 30 septembre dernier, une cinquantaine de pays pratiquent l’échange automatique de renseignements bancaires et financiers sur les contribuables et ce nombre dépassera la centaine dans un an, dont tous les États à secret bancaire. C’est l’effet de dix années d’améliorations dans la coopération entre État, en particulier grâce à l’action de l’OCDE, un travail dans lequel notre majorité se reconnaît et qui va être poursuivi.

 

M. François Ruffin. M. Bernard Arnault, première fortune de France, a recours à des paradis fiscaux et soutient M. Macron.

La commission rejette l’amendement II- CE 417.

Enfin, elle examine l’amendement II-CL84 demandant un rapport sur les moyens humains et financiers dégagés en cas de suppression de la mission d’appui aux partenariats public-privé.

Sur l’avis défavorable de M. Philippe Chassaing, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II- CL84.

 

 


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PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

MEDEF International : M. Frédéric SANCHEZ, président, Mme Christine LEPAGE, directrice, Mme Stéphanie TISON, directrice adjointe

Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA) ([7]) : M. François Moutot, directeur général, Mme Valérie CHAUMANET, responsable du département des relations institutionnelles nationales

Chambre de Commerce et d’industrie France internationale : M. Pierre Goguet, président, M. Arnaud Vaissié, président de l’Union des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger

OSCI : M. Étienne Vauchez, président, Mme Agathe HARTEMANN, déléguée générale

Business France : M. Christophe Lecourtier, directeur général, M. Frédéric KAPLAN, directeur général délégué, M. François RAFFRAY, directeur du département Relations institutionnelles

Bpifrance Assurance Export : M. Christophe Viprey, directeur général, M. Jean-Baptiste MARIN-LAMELLET, responsable des relations institutionnelles et du suivi des politiques publiques

Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères - Direction des entreprises, de l’économie internationale et de la promotion du tourisme : Mme Caroline Malaussena, directrice, M. Emmanuel Maury, sous‑directeur du commerce extérieur et de l’attractivité, M. Clément LALOUX, chef de la mission tourisme

Ministère de l’agriculture – Direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises : Mme Catherine GeslainLaneelle, directrice générale, Mme Heloïse PESTEL, sous‑directrice International

 

 

*

*     *

 

   Annexes

Annexe I : Résultats de la mise en œuvre du contrat d’objectifs et de performance de Business France en août 2017

 

Domaine

Indicateur

Cible 2017

Réalisation août 2017

Taux de réalisation

EXPORT

Nb de nouveaux courants d’affaires réalisés par les PME et ETI bénéficiaires de prestations individuelles, collectives ou utilisatrices du VIE

11 100

11 444

103 %

Nb de PME et ETI Distinctes par an bénéficiaires de prestations individuelles, collectives ou utilisatrices du VIE chaque année

10 230

8 154

80 %

Nb de PME et ETI distinctes bénéficiaires de prestations individuelles, collectives ou utilisatrices du VIE sur la période 2015-2017

17 830

18 121

102 %

Nb d’ETI et de PME de croissance distinctes bénéficiant d’un suivi personnalisé et ayant activé leur plan d’action à l’international

1 000

1 409

141 %

Taux de courants d’affaires réalisé sur le nb de TPE et PME accompagnées dans le cadre de la convention signée le 11/03/2015 entre CCI de France et Business France

33 %

ND

(54 % en 12/2016)

ND

Nb de VIE en poste

9 600

9 678

101 %

INVEST

Nb de projets d’investissements détectés

1 500

1 143

76 %

Nb de projets d’investissements étrangers aboutis en France accompagnés par l’agence

500

ND

(1 553 en 12/2016)

> 100 %

Nb d’emplois prévisionnels en France créés ou maintenus par les projets d’investissements étrangers aboutis en France accompagnés par l’agence

15 500

ND

(16 708 en 12/ 2017)

> 100 %

COMMUNICATION

Part des prescripteurs et agents d’influence dans le monde sensibilisés à l’attractivité économique de la France

75 %

ND

(74 % en 12/2016)

> 100 %

GESTION ET SYNERGIES

Taux de couverture des charges de l’Agence par ses ressources propres

>43 %

ND

(49,6 % en 12/2016)

> 100 %

Évolution du montant de la subvention publique de l’État par opération d’internationalisation d’entreprise

– 3 %

ND

(+ 0,6 % au 12/2016)

ND

Part des entreprises clientes recommandant Business France à d’autres entreprises

>60 %

ND (66 % au 12/2016)

ND

Part des entreprises étrangères implantées en France avec le concours de l’action de l’agence ayant recours aux services export de l’agence

>Réalisé N-1

ND

(2,7 % au 12/2016)

ND

Source : Business France.


([1])  Définis comme les entreprises exportatrices au cours de l’année considérée qui ne l’étaient pas l’année précédente.

([2])  Définis comme les entreprises exportatrices au cours de l’année considérée qui ne l’étaient pas les 5 années précédentes.

([3])  FAO, Rapport « Comment nourrir le monde en 2050 », 2009.

([4])  FAO, Bulletin de la FAO sur l’offre et la demande de céréales, octobre 2017.

([5])  La réforme de la part française mise en œuvre depuis mai 2016 abaisse le seuil d’éligibilité pour bénéficier d’un soutien public à l’exportation, ce dernier passant de 50 % de part française à 20 % pour les garanties publiques.

([6]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/

([7]) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique