N° 273

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018 (n° 235),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

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ANNEXE N° 25
 

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOURCES HUMAINES

 

GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L’ÉTAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL

FACILITATION ET SÉCURISATION DES ÉCHANGES

CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES

action et transformation publiques

 

Rapporteur spécial : M. Laurent SAINT-MARTIN

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES ANALYSES ET PROPOSITIONS  DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

DONNÉES CLÉS

la mission gestion des finances publiques et des ressources humaines (programmes 156, 218 et 302)

la mission Action et transfrmation publiques

AVANT-PROPOS : Repenser l’évaluation des politiques publiques  le rôle du Rapporteur spécial

I. Le rapporteur spécial, en première ligne de l’évaluation des politiques publiques

II. Exploiter pleinement les pouvoirs et outils à la disposition du rapporteur

III. La place du Rapporteur spécial dans la procédure budgétaire : vers un renforcement des temps de contrôle

A. Le Rapporteur spécial : une voix à faire entendre sur l’architecture budgétaire à l’occasion du DOFP

B. Demander compte à tout agent public de son administration par un suivi renforcé des indicateurs de performance

1. La détermination et la publication des indicateurs

2. Le cas du changement d’indicateurs du programme 302

IV. Simplification et réforme : accompagner les ministres dans la réforme des administrations

A. Un décalage entre la responsabilité des ministres et celle des responsables de programme

B. Action publique 2022

PREMIÈRE PARTIE :  LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES (PROGRAMMES 156, 218 et 302)

I. LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES

1. Une mission qui rassemble l’essentiel des services des ministères financiers

2. Une mission de gestion fiscale et de lutte contre la fraude partagée entre deux administrations

3. Le développement de structures « souples » à l’efficacité reconnue en matière de lutte contre la fraude fiscale

II. LE PROGRAMME 156 GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L’ÉTAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL

A. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME

1. Des objectifs atteints

2. Des résultats satisfaisants en matière de lutte contre la fraude fiscale

B. réductions de personnel et restructuration du réseau

1. Des réductions de personnel qui ont permis de réaliser des économies substantielles

2. Une dynamique de réduction des effectifs que partagent de nombreux pays de l’OCDE, mais avec une intensité variable

3. Une nécessaire réflexion stratégique à mener pour maintenir la qualité du service public

a. Un maillage territorial dense, dont la pertinence est à réévaluer

b. Une adéquation des postes et des compétences à améliorer

C. des dÉpenses hors titre 2 en diminution sur longue période

1. La composition de la dépense pour 2018

2. Une politique d’investissement contrainte

III. LE PROGRAMME 302 FACILITATION ET SÉCURISATION DES ÉCHANGES

A. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME

1. Des indicateurs de performance qui ont significativement évolué depuis le précédent projet de loi de finances

2. Des résultats convaincants

B. des effectifs en augmentation en 2018, pour la troisième année consécutive

1. Une diminution des effectifs depuis une dizaine d’années, interrompue en 2015

2. Un budget 2018 marqué par la nécessaire adaptation de la Douane au Brexit

3. Une restructuration du réseau qui nécessite une véritable revue stratégique

a. Un réseau dense, en évolution

b. Une optimisation des ressources qui passe par le développement du ciblage

c. Des clarifications à apporter dans la gestion des points de passage frontaliers

C. hors titre 2, des dépenses stables

1. Des dépenses d’investissement et de fonctionnement stables

2. Des matériels vieillissants dont le renouvellement reste délicat

3. Les financements supplémentaires obtenus dans le cadre du plan de lutte antiterroriste (PLAT)

4. Des investissements informatiques limités

5. La « Masse des douanes » : une nécessaire amélioration de la gestion

IV. LE PROGRAMME 218 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES

A. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME ET LA MESURE DE LA PERFORMANCE

1. Une information et des services de qualité à destination du Parlement et des administrations

2. L’amélioration continue des conditions d’emploi des personnels

3. La maîtrise du coût des fonctions support

B. les crédits pour 2018

1. Les crédits du programme par action

2. Une dépense stable hors titre 2

3. Une saine gestion des dépenses de personnel du programme

a. Une diminution des crédits de titre 2 en 2017

b. Des effectifs en recul dans les cabinets ministériels des ministères économiques et financiers

DEUXIème partie : la MISSION ACTION ET TRANSFORMATION PUBLIQUES

I. LA MISSION ACTION ET TRANSFORMATION PUBLIQUES

II. LE PROGRAMME 348 rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi occupants

III. LE PROGRAMME 349 fonds pour la transformation de l’action publique

TROISIème PARTIE : ENJEUX POUR L’AVENIR

I. LE DROIT À L’ERREUR : UN DÉFI à RELEVER

1. Une philosophie nouvelle

2. Un principe déjà bien ancré dans le quotidien des administrations fiscale et douanière

a. La reconnaissance de l’erreur de bonne foi

b. La pratique du rescrit

c. L’accompagnement des particuliers et des entreprises dans leurs démarches

3. Des développements bienvenus, mais à délimiter précisément

II. LA COOPÉRATION INTERinstitutionnelle EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE aux finances publiques : DES ÉCHANGES d’INFORMATIONS À intensifier

1. Des risques de déperdition d’information

2. La DNLF, une structure légère à l’efficacité reconnue

3. L’AGRASC, une double tutelle innovante

4. Des efforts à consolider

EXAMEN EN COMMISSION

personnes auditionnées par le rapporteur spécial

 


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   PRINCIPALES ANALYSES ET PROPOSITIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les crédits de paiement des programmes 156, 218 et 302 de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, qui retracent les crédits de l’essentiel des directions et agences du ministère de l’action et des comptes publics, sont stables par rapport à l’année précédente. Les crédits de paiement demandés pour 2018 s’établissent à 10,65 milliards d’euros, fonds de concours et attributions de produits inclus, soit un recul de 4 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Cette évolution recouvre des dynamiques différentes selon les programmes. Ainsi, les crédits de paiement ouverts sur le programme 156 diminuent de 39 millions d’euros ; sur le programme 218, ils sont quasiment stables (– 2,6 millions) ; sur le programme 302, ils augmentent de 37,6 millions d’euros.

Le plafond d’emplois pour les trois programmes a été fixé à 126 536 ETPT, soit une diminution de 1 487 ETPT par rapport à l’exercice précédent. Le plafond d’emplois de la DGFiP diminuera de 1 702 ETPT, 71 ETPT disparaîtront au sein des différentes directions et agences du programme 218, tandis que les Douanes bénéficieront de renforts à hauteur de 286 ETPT dans le cadre de la préparation du Brexit.

Depuis le début des années 2000, les ministères économiques et financiers, et, en particulier, les grandes directions à réseau du ministère de l’action et des comptes publics ont mené des plans d’économies ambitieux, qui se sont traduits par des plans de rationalisation des effectifs, et ont permis un recul significatif de la dépense publique.

Pour s’adapter à ces mutations, nécessaires dans un contexte budgétaire tendu, ces administrations se sont engagées dans une profonde dynamique de modernisation : elles ont revu leur organisation territoriale, elles ont porté des projets de dématérialisation ambitieux, et elles ont développé de nouvelles méthodes de contrôle et de ciblage. Ces initiatives salutaires ont permis de maintenir les résultats à un niveau élevé, et votre Rapporteur salue la réactivité et la capacité de ces administrations à s’adapter.

Votre Rapporteur tient à mettre en lumière les initiatives de la DGFiP qui ont permis le développement rapide du télépaiement de l’impôt et un allégement des formalités pour les contribuables. Concernant la mission de gestion comptable, votre Rapporteur salue les progrès réalisés en matière de dématérialisation des pièces comptables, et encourage l’administration fiscale à aller au bout de cette logique. Dans cette perspective, votre Rapporteur souligne la nécessité d’optimiser la qualité de l’investissement informatique afin de permettre une meilleure interconnexion entre les outils informatiques utilisés par l’administration fiscale, et encourage l’exploration des possibilités offertes par l’analyse de données.

Néanmoins, la politique du « rabot », conduite au cours des quinquennats précédents, semble avoir atteint ses limites et, pour continuer à réaliser des gains de productivité dans les années à venir, il sera nécessaire d’effectuer une revue d’ensemble des missions poursuivies par ces administrations. Le Gouvernement a lancé ce chantier avec la création du Programme « Action Publique 2022 ».

Dans cette optique, l’évaluation des politiques publiques doit dès lors retrouver une place centrale dans le travail du Parlement. Pour cela, votre Rapporteur formule plusieurs propositions tendant à encourager les rapporteurs spéciaux à faire pleinement usage de leurs prérogatives, et pour cela, à accroître le temps dévolu à l’évaluation des politiques publiques, notamment à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement et ses annexes.

En ce qui concerne le programme 156, les conséquences de la mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu sur la productivité des agents devront faire l’objet d’un suivi attentif. Cette réforme majeure des modalités de recouvrement de l’impôt pourra, en effet, à terme, libérer des effectifs en matière de présence au guichet, et redéployer les agents sur des tâches à plus forte valeur ajoutée. À court terme, la suppression de la taxe d’habitation, impôt injuste qui génère de nombreuses demandes de remises gracieuses, pourrait avoir des conséquences non négligeables sur la fréquentation des services locaux.

En matière de ressources humaines, si l’administration fiscale française a supporté des suppressions d’effectifs à un rythme soutenu, le niveau de renouvellement des effectifs s’établit en revanche à un niveau relativement faible par rapport à ses pairs, ce qui fait l’objet d’une attention renforcée. Par ailleurs, les travaux de votre Rapporteur ont mis en évidence des besoins de compétences nouveaux pour permettre l’accomplissement des missions traditionnelles de la DGFiP.

Après le renforcement des moyens consacrés à la lutte contre le terrorisme depuis 2015, la DGDDI voit ses moyens accrus dans la perspective du Brexit, ce qui témoigne de l’adaptation constante cette administration aux évolutions économiques et sociales et de la cohérence des choix budgétaires.

La nouvelle mission Action et transformation publiques, permettra d’accompagner la modernisation de l’État dans le cadre du Programme « Action publique 2022 », à travers deux objectifs.

La création d’un fonds pour la transformation publique, doté de 700 millions d’euros sur 5 ans, permettra de financer les investissements nécessaires à la mise en œuvre de réformes structurelles de l’action publique, à travers la sélection rigoureuse de projets innovants.

Cette mission permettra également la rénovation des cités administratives et d’en améliorer l’efficacité énergétique, afin d’optimiser la présence des services de l’État sur le territoire, d’offrir aux agents de meilleures conditions de travail, et aux administrations, un accueil plus performant.

Au total, ce sera donc 1,7 milliard d’euros qui sera investi sur l’ensemble du quinquennat pour financer la transformation de l’action publique.

Enfin, la modernisation de l’action publique passe par deux chantiers essentiels pour lesquels la DGFiP et la DGDDI sont en première ligne :

– la coopération entre administrations doit être renforcée. La mission fiscale est en effet partagée entre la DGFiP et la DGDDI, et cette dualité, qui se retrouve dans d’autres pays européens, peut être à l’origine de déperdition d’informations. Les possibilités ouvertes par les techniques de l’analyse de données doivent faire l’objet d’investissements conséquents pour faciliter les échanges entre directions, entre administrations, entre ministères, et ainsi renforcer la qualité de l’action publique ;

– la philosophie nouvelle du « droit à l’erreur », à la source d’une relation de confiance entre l’administration et les usagers, entraînera des changements importants dans le quotidien des administrations fiscale et douanière, qui remplissent d’ores et déjà et parallèlement des missions de contrôle et de conseil.

 


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   DONNÉES CLÉS

la mission gestion des finances publiques et des ressources humaines (programmes 156, 218 et 302)

la mission Action et transfrmation publiques

 

 

 


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   AVANT-PROPOS :
Repenser l’évaluation des politiques publiques 
– le rôle du Rapporteur spécial

● Réformer l’État par le budget : le cas de la réserve de précaution

Le montant des crédits constituant, chaque année, la réserve de précaution, est un choix budgétaire aux conséquences importantes sur la gestion des crédits alloués. De 6 % de crédits mis en réserve en 2006, la réserve de précaution s’est stabilisée à un taux élevé, 8 %, depuis la loi de finances pour 2015. Plusieurs acteurs ont dénoncé cette pratique, qui amoindrit la visibilité et la responsabilité des gestionnaires sur les crédits qui leur ont été alloués, et qui, en ce sens, dévie de l’esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Dans un effort important de « sincérisation » et de responsabilisation des gestionnaires, il a été décidé, pour le budget 2018, de limiter drastiquement la réserve de précaution à 3 % au lieu de 8 % et de lui redonner par là sa vocation initiale : celle d’une réserve mobilisable en cas de nécessité. Les crédits mis en réserve ne doivent plus comprendre des dépenses obligatoires, comme cela a pu être le cas par le passé, conduisant à une consommation excessive de certains crédits en cours d’année.

Cette baisse des crédits mis en réserve chaque année a pour but d’instituer une nouvelle façon d’anticiper, d’exécuter, et de suivre la consommation des crédits budgétaires tout au long de l’exercice. D’apparence anodine, cette décision, par ses implications sur les administrations et les organes chargés de la contrôler, mais surtout dans la façon dont sont conduites les politiques publiques, s’inscrit dans l’esprit qui a présidé à la conception de la LOLF, celui de « la réforme de l’État par le budget » (Philippe Séguin). Elle implique que les rapporteurs spéciaux soient les garants de l’utilisation conforme de cette réserve.

Cet avant-propos est l’occasion de formuler quelques propositions tendant vers un accroissement de l’implication et du rôle du Rapporteur spécial dans sa mission de contrôle et d’évaluation des politiques publiques. Ces propositions sont dépendantes d’un postulat indispensable : la stabilité du Rapporteur spécial dans les programmes dont il a la charge, déjà effective mais qui pourrait être confirmée formellement, par une inscription dans le Règlement de l’Assemblée nationale. Une telle stabilité renforcerait l’expertise et la légitimité du Rapporteur spécial, tout en facilitant, par une meilleure connaissance réciproque, les échanges qu’il entretient avec les administrations contrôlées.

I.   Le rapporteur spécial, en première ligne de l’évaluation des politiques publiques

Par le rapport spécial, le député exerce son action de contrôle du Gouvernement via le contrôle de l’administration dont le Gouvernement dispose, en vertu de l’article 20 de la Constitution de 1958 ([1]). À ce rôle de contrôle, l’article 24 de la Constitution, tel qu’issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, ajoute un rôle d’évaluation des politiques publiques tout en clarifiant les missions du Parlement ([2]). Ce rôle, encore récent à l’échelle de l’histoire de la Ve République, n’est pas encore pleinement exercé, les députés étant focalisés sur les missions vues comme historiques – tant par les députés que par leurs électeurs – de vote de la loi et de contrôle de l’action du Gouvernement.

Ainsi, conformément à l’article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen aux termes duquel « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. », le Rapporteur spécial, par son action, demande compte aux agents publics – ou, en termes conformes à la LOLF, aux responsables de programmes, de leur gestion. Ce cadre légal à la portée normative très forte ne doit pas pour autant ancrer le rapport spécial dans un carcan formel trop technique. L’ambition du présent rapport est de rendre accessibles au citoyen les outils de compréhension d’une politique publique et de l’éclairer sur les choix opérés.

Les programmes 156 et 302, les plus importants de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, englobent deux grandes administrations de réseau, dotées d’une très forte implantation territoriale associée à une notoriété importante auprès du grand public, pour lequel bien souvent « les impôts » représentent l’idée même de l’Administration dans son apparence rationnelle, organisée, régalienne, probe, et accessible. De même, la figure du douanier jouit assurément d’une popularité importante auprès des Français.

Afin d’atteindre son but, ce rapport doit remplir certaines conditions de forme ainsi qu’être l’aboutissement d’un processus étalé sur une année entière durant lequel le Rapporteur spécial joue tant un rôle de contrôle que de médiation, voire d’accompagnement, de l’élaboration des politiques publiques.

Derrière cette ambition de rénover le rapport spécial, il s’agit de redonner au citoyen le pouvoir de contrôler, par l’intermédiaire de ses représentants, la façon dont il est administré.

 

II.   Exploiter pleinement les pouvoirs et outils à la disposition du rapporteur

Le Rapporteur spécial tire la source de sa fonction de l’article 57 de la LOLF qu’il convient de rappeler ici :

« Cette mission est confiée à leur président, à leur rapporteur général ainsi que, dans leurs domaines d’attributions, à leurs rapporteurs spéciaux et chaque année, pour un objet et une durée déterminés, à un ou plusieurs membres d’une de ces commissions obligatoirement désignés par elle à cet effet. À cet effet, ils procèdent à toutes investigations sur pièces et sur place, et à toutes auditions qu’ils jugent utiles. Tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif qu’ils demandent, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l’administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical, doivent leur être fournis. »

Doté de pouvoirs importants, le Rapporteur spécial n’en est pas moins tributaire de l’information qui lui est communiquée. Celle-ci se révèle abondante, tant par les occasions dont dispose le Parlement de solliciter l’appui de la Cour des comptes, que par l’ampleur des documents budgétaires transmis au Parlement. Sur ce point, la Direction du Budget évalue environ 20 000 le nombre de pages annexées au projet de loi de finances (PLF) et au projet de loi de règlement en moyenne. Comme le constate la Cour des comptes, « l’information produite sur les politiques publiques au moment de l’examen des moyens qui y sont consacrés apparaît abondante ».

Au-delà de l’information qui lui est communiquée, il appartient au Rapporteur d’engager une relation stable avec les administrations qu’il contrôle. Il deviendrait ainsi un interlocuteur permanent et fiable, pour les administrations, les organisations syndicales et les organes de contrôle et d’inspection.

Aidé par des fonctionnaires de l’Assemblée nationale dont la compétence et la loyauté sont à saluer, le député est parfois malheureusement conduit à n’effectuer son travail de contrôle des administrations dont il a la charge que quelques semaines par an, à l’occasion des auditions préparatoires et de la rédaction du rapport. Hormis les responsables des programmes concernés, peu, parmi l’administration ou le grand public, sont au courant du simple fait qu’il est chargé de cette mission, et qu’ils pourraient utilement le consulter au sujet des administrations qu’il suit.

Pour remédier à cela, il conviendrait :

– d’assurer une meilleure diffusion du rapport spécial en en rendant la forme plus accessible et harmonisée ;

C’est le sens des instructions données par le bureau de la commission des finances pour la rédaction des rapports spéciaux annexés au PLF 2018. Des rapports plus concis, agrémentés d’un court résumé illustré par des graphiques, et orientés vers l’analyse des politiques publiques seraient une première étape vers une diffusion plus large de ces rapports.

– de renforcer le rôle du Rapporteur spécial, en exigeant de sa part un investissement important tout au long de l’exercice budgétaire, tant dans la préparation que dans l’exécution du budget de la mission concernée.

En ce sens, le Rapporteur spécial partage la recommandation déjà énoncée en 2011 par la Cour des comptes ([3]). L’ensemble des auditions conduites dans le cadre du présent rapport a été l’occasion d’exprimer aux personnes auditionnées l’ambition du Rapporteur spécial d’instaurer des échanges continus durant l’exercice budgétaire. Cette proposition a systématiquement été accueillie avec intérêt.

Le Rapporteur spécial est convaincu que seul un suivi permanent peut lui permettre d’assumer pleinement la responsabilité de contrôler l’usage des crédits. Afin d’améliorer l’information du Parlement, il lui semble envisageable que les rapporteurs spéciaux soient conviés aux conférences de performance organisées en cours d’exécution (en avril ou en mai) sous l’égide de la direction du Budget.

Les conférences de performance de la direction du Budget

Réunissant la direction du Budget et les ministères, les conférences de performance portent à la fois sur l’analyse de l’atteinte des objectifs et du respect des indicateurs du budget N-1 et sur la préparation des projets annuels de performances qui sont annexés au projet de loi de finances (PLF) N+1. Le principe du « chaînage vertueux » est en effet de tirer les conséquences des résultats observés pour l’année à venir.

Les conférences de performance permettent de débattre, pour chaque programme, des grandes lignes du projet de présentation stratégique du projet annuel de performances et de passer en revue les objectifs et indicateurs de performance associés, ces derniers devant découler de la stratégie du programme. Les échanges doivent permettre de trouver un bon équilibre entre l’amélioration continue des objectifs et des indicateurs et la stabilité nécessaire à l’analyse pluriannuelle de la performance.

Ces conférences permettent également de discuter des cibles des indicateurs fixées.

Des indicateurs de mission, particulièrement représentatifs des politiques publiques poursuivies par les ministères, ont été introduits pour la première fois en PLF 2010. Ces indicateurs visent à donner une plus grande visibilité au dispositif de performance.

La liste des objectifs et indicateurs est présentée dans le tome 2 du rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, remis au Parlement en vue du débat d’orientation des finances publiques qui a lieu généralement fin juin.

L’inclusion du Rapporteur spécial dans les conférences de performance des programmes dont il a la charge s’inscrirait dans un mouvement plus large d’accroissement du temps passé à contrôler l’exécution des crédits.

III.   La place du Rapporteur spécial dans la procédure budgétaire : vers un renforcement des temps de contrôle

Le Rapporteur spécial constate qu’en raison de la qualité du travail des services d’inspection et de contrôle de l’administration, combinés aux travaux universitaires d’évaluation des politiques publiques, dont France Stratégie un l’exemple concret, l’ensemble des outils et analyses nécessaires au renforcement du contrôle sont, la plupart du temps, d’ores et déjà à la disposition des parlementaires.

Les rapports annuels de performances (RAP), instaurés par la LOLF et annexés aux projets de loi de règlement, constituent un précieux outil de contrôle. Le Rapporteur spécial déplore qu’en raison d’éléments d’ordre culturel (la diffusion de la culture de l’évaluation est à parfaire), et d’une publication sans doute trop tardive dans le calendrier budgétaire, leur utilisation demeure limitée.

Indépendamment des conséquences de la limitation du droit d’amendement en matière financière issue de l’article 40 de la Constitution, le Rapporteur constate un déséquilibre entre le temps passé à examiner les recettes et celui passé à examiner les dépenses, au détriment de ce dernier.

Le temps important consacré aux recettes résulte d’un intérêt marqué des parlementaires pour les questions de taux et les dépenses fiscales. Il conviendrait néanmoins d’équilibrer davantage ces deux parties, la procédure actuelle étant souvent à l’origine de deux phénomènes regrettables :

– d’une part, en complexifiant le système fiscal par des mesures marginales qui concernent peu de contribuables, elle accroît le sentiment, bien réel, d’une inflation, voire d’une frénésie normative (Jacques-Henri Stahl), que de nombreuses initiatives n’ont pas réussi à contenir ;

– d’autre part, elle entraîne un surcroît d’activité des services de la DGFiP afin d’adapter les systèmes informatiques aux nouvelles mesures, qui semble déraisonnable au regard de la gestion rigoureuse demandée au responsable du programme 156 (voir infra).

En cohérence avec les attentes du citoyen en faveur d’une gestion rigoureuse des finances publiques, le contrôle parlementaire de l’action du Gouvernement et de l’administration, tendant à rationaliser et moderniser l’organisation et les modes de fonctionnement de ces administrations, doit faire l’objet de la même publicité de la part du parlementaire que certaines mesures de modification des recettes.

Il conviendrait dès lors d’anticiper le temps consacré à l’examen du projet de loi de règlement et de ses annexes, les rapports annuels de performances.

En parallèle, afin de permettre d’y consacrer le temps nécessaire et d’en exploiter pleinement les ressources, il apparaît que l’examen de la loi de règlement pourrait intervenir un mois plus tôt, au cours du mois de mai, lors d’une période qui deviendrait une véritable séquence législative, comparable à celle du vote du budget pour l’année suivante.

À l’occasion de l’examen de la loi de règlement, davantage d’auditions préparatoires des ministres et de certains responsables de programme pourraient être réalisées. Celles-ci remplaceraient une partie des auditions réalisées traditionnellement en amont de l’exécution budgétaire. En effet, la Cour des comptes soulignait déjà en 2011 le fait que « les auditions interviennent paradoxalement davantage en amont de l’exécution budgétaire, au moment de l’examen du projet de loi de finances, qu’a posteriori au moment de l’examen des résultats présentés dans le projet de loi de règlement ». Un rapide examen statistique, avec les limites évidentes qu’il peut présenter, permet de constater que ce déséquilibre n’a pas été corrigé. En première lecture, la commission des finances a consacré 86h15 à l’examen du projet de loi de finances pour 2017, contre seulement 2h15 au projet de loi de règlement pour 2016, après 2h15 d’audition des ministres. Le basculement vers une logique d’évaluation implique d’y consacrer le temps nécessaire.

En l’état actuel de la procédure, les crédits des missions sont discutés lors de commissions élargies qui peuvent laisser le parlementaire désireux d’exercer sa fonction de contrôle et d’évaluation sur sa faim. Une partie du temps qui leur est consacré pourrait être réallouée à la tenue de commissions d’évaluation des politiques publiques, dans le cadre du débat de la loi de règlement, qui réuniraient les mêmes commissaires mais seraient consacrées au suivi de l’exécution des crédits au regard des prévisions et des engagements pris, plutôt qu’au commentaire des choix budgétaires arbitrés lors de la préparation du projet de loi de finances. Une solution plus radicale consisterait à redonner à la seule commission des finances l’examen au fond des missions. Cette solution permettrait d’allouer davantage de temps encore au contrôle en cours d’exécution, tout en libérant du temps parlementaire à l’automne, période excessivement chargée.

A.   Le Rapporteur spécial : une voix à faire entendre sur l’architecture budgétaire à l’occasion du DOFP

Si la LOLF a permis de construire une architecture budgétaire claire, préalable essentiel à l’exercice par le Parlement de sa mission de contrôle et d’évaluation, une revue périodique des missions et programmes permettrait certains ajustements visant tant à assurer la clarté de la structure au fur et à mesure des exercices qu’à encourager, par des regroupements entre programmes ou missions, la réforme de l’administration.

En l’absence d’une telle revue périodique, il appartient au Rapporteur spécial de prendre part au débat sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques en insistant sur le tome 2 du rapport préalable au débat d’orientation des finances publiques (DOFP) tout autant sur le tome 1. En l’état, il ressort des débats que l’évolution de la nomenclature des missions et programmes envisagée pour le PLF de l’année suivante ne fait l’objet que d’une attention limitée. Pour ce qui concerne la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, le Rapporteur spécial relève que celle-ci s’est vue conférer, pour l’année 2011, le statut de mission interministérielle. Ces changements non durables de la nomenclature sont à déplorer.

Les concepteurs de la LOLF avaient pour ambition, en instituant une architecture budgétaire fondée sur les résultats et non plus sur les moyens, d’inciter à la réforme de l’administration, en rassemblant certaines directions aux objectifs similaires. C’est dans cette logique qu’ont été fusionnées les directions générales de la comptabilité publique (DGCP) et des impôts (DGI) en 2008. Néanmoins, certaines missions fiscales assurées par la DGDDI pourraient utilement être confiées à la DGFiP, dans un mouvement de clarification des missions et de recentrement sur les missions pour lesquelles les services ont une forte spécialisation et une forte valeur ajoutée.

En ce sens, les recoupements actuels entre les objectifs de programmes distincts, bien que marginaux ou en cours de résorption, plaident fortement en faveur d’une revue périodique des missions et programmes. Cette revue pourrait être un des volets de la revue des missions et dépenses de l’ensemble des administrations publiques (État et opérateurs, administrations de sécurité sociale, opérateurs) prévue dans le cadre du Comité Action Publique 2022.

B.   Demander compte à tout agent public de son administration par un suivi renforcé des indicateurs de performance

L’accroissement du temps de contrôle des politiques publiques prendrait la forme d’un suivi plus assidu des indicateurs de performance communiqués dans les projets et rapports annuels de performances.

1.   La détermination et la publication des indicateurs

Les indicateurs de performance contenus dans les projets annuels de performances sont fixés par les administrations elles-mêmes, ce qui a pour effet de limiter leur caractère évaluatif. Sans pour autant aboutir à la détermination des indicateurs sans intervention de l’administration, ces indicateurs pourraient être déterminés en collaboration avec les administrations et le Rapporteur spécial.

Une telle collaboration conduirait les parlementaires à s’emparer davantage des indicateurs qui leur sont présentés et qui font, pour l’heure, l’objet de peu de commentaires en commission, comme le soulignait la Cour des comptes « au-delà des rapports parlementaires, les indicateurs de performance sont quasiment absents des débats en commission et en séance publique sur le projet de loi de finances. Les interventions des ministres mentionnent exceptionnellement les indicateurs des projets ou des rapports annuels de performances. Lors des auditions, lorsque la performance est abordée, ce sont les parlementaires qui l’introduisent et sollicitent des réponses des ministres. Lorsqu’ils sont auditionnés, les gestionnaires s’appuient davantage sur leur mesure de la performance, mais il ne s’agit pas nécessairement des indicateurs présentés dans le projet annuel de performances. »

En effet, il ressort que certains indicateurs pourtant stratégiques ne sont pas présentés dans les PAP et RAP. Bien que les directeurs d’administration semblent disposés à les partager avec le Rapporteur, une présentation dans le PAP pourrait être envisagée.

Enfin, des efforts importants restent à faire en matière d’harmonisation d’indicateurs similaires entre différents programmes d’une même mission. Si l’efficacité de toutes les actions ne peut être mesurée de façon uniforme, l’exemple des sommes recouvrées, composantes d’indicateurs de performance de la DGFiP (via notamment le sous-indicateur « Taux net de recouvrement DGFiP en droits et pénalités sur créances de contrôle fiscal (CFE et CSP) prises en charge en N–1 ») et de la DGDDI (via la notion de « contentieux à enjeu » nouvellement introduite dans le PAP 2018), illustre les progrès qui peuvent être faits.

2.   Le cas du changement d’indicateurs du programme 302

Les indicateurs de performance traduisent les priorités d’une politique publique donnée. La DGDDI a opportunément revu certains d’entre eux afin de diminuer le poids de critères quantitatifs bruts (les saisies de biens illégaux ou contrefaits) pour leur substituer des critères qualitatifs, liés au démantèlement de filières et à l’aboutissement de procédures parfois longues. Mal perçus par les agents et conduisant parfois à des logiques purement quantitatives au détriment de l’action générale de la Douane dans la lutte contre les trafics, les critères quantitatifs ne disparaissent pas pour autant mais sont affinés et nuancés. C’est le sens de l’introduction de la notion de « contentieux à enjeu » ([4]).

Le Rapporteur salue cette adaptation des indicateurs de performance au service d’une meilleure efficacité de la part de la DGDDI. Il salue également la baisse du taux de modification des indicateurs depuis le projet de loi de finances pour 2015. Il est en effet nécessaire d’assurer une certaine stabilité aux indicateurs de performance afin de pouvoir les comparer dans le temps.

MODIFICATIONs ET AJOUTs D’INDICATEURS DEPUIS 2015

 

2015

2016

2017

2018

Nombre d’indicateurs modifiés

95

83

44

39

Taux d’indicateurs modifiés

14 %

13 %

7 %

6 %

Nombre d’indicateurs nouveaux

47

22

17

27

Taux d’indicateurs nouveaux

7 %

3 %

3 %

4 %

Taux d’indicateurs conservés

79 %

84 %

90 %

90 %

Source : direction du budget.

IV.   Simplification et réforme : accompagner les ministres dans la réforme des administrations

A.   Un décalage entre la responsabilité des ministres et celle des responsables de programme

Le Rapporteur spécial a noté une situation paradoxale et parfois frustrante, qui naît d’un décalage entre une administration secouée par des programmes de modernisation qui s’enchaînent (RGPP, MAP), parfois sans prendre le temps de l’évaluation, et une faible incitation des ministres à réformer leur propre administration, du fait du temps limité passé en fonction (entre 2002 et 2016, 20 mois en moyenne). Davantage que de contrôle, d’ores et déjà exercé par les juridictions financières et services d’inspection, c’est probablement d’un déficit de suivi et d’accompagnement externe dont souffre l’administration. Dans cette perspective, le Rapporteur spécial, chargé des mêmes programmes durant plusieurs exercices budgétaires, devrait faire appel aux ressources universitaires pour assurer une évaluation approfondie des programmes dont il a la charge.

Un décalage demeure toutefois en raison de l’absence de responsabilité directe des responsables de programme vis-à-vis du Parlement. Ceux-ci sont en effet avant tout responsables vis-à-vis de leur ministre, qui rend les arbitrages principaux. Si les ministres sont régulièrement auditionnés par les commissions permanentes, les contours de leur responsabilité quant aux missions et programmes demeurent flous en raison de ce décalage, comme la Cour des comptes s’en était fait l’écho en 2011 : « Les limites actuelles de l’exercice de la responsabilité financière des ministres, qui empêche une mise en jeu réelle des responsabilités de missions et programmes, appellent en conséquence à une clarification du statut financier des ministres ou à une clarification de l’imputabilité des décisions des uns et des autres dans une « charte de responsabilités » des différentes autorités ». De surcroît, le Rapporteur spécial déplore l’absence d’un interlocuteur identifié au niveau de la mission, qui est pourtant l’unité de vote et l’échelle de cohérence d’une politique publique composée de différents programmes.

B.   Action publique 2022

La philosophie de la LOLF, la réforme de l’État par le budget, peut assurément être prolongée afin d’adapter l’architecture budgétaire à l’action publique d’aujourd’hui. Le Rapporteur spécial reste convaincu que seul un renforcement du contrôle des politiques publiques par le Parlement pourra contribuer à la rénovation de l’action publique et rendre celle-ci mieux acceptée et comprise par le citoyen. C’est le sens du volet de modernisation de la gestion budgétaire et comptable du Comité Action Publique 2022, qui vise les objectifs suivants : « renforcer la gestion pluriannuelle ; rendre les ministères et les entités publiques davantage comptables et responsables de leurs moyens et des économies à réaliser ; accroître l’efficience de la gestion budgétaire et comptable (tant dans son volet prélèvements obligatoires que dépenses) ».


—  1  —

   PREMIÈRE PARTIE :
LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES (PROGRAMMES 156, 218 et 302)

I.   LA MISSION GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES

1.   Une mission qui rassemble l’essentiel des services des ministères financiers

La mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines porte une partie des politiques publiques relevant du périmètre des ministères économiques et financiers, notamment le recouvrement des recettes et le paiement des dépenses de l’État, les activités douanières, les fonctions d’état-major, d’expertise, de conseil et de contrôle, ainsi que les politiques de formation des fonctionnaires, d’action sociale interministérielle et d’apprentissage.

Elle regroupe ainsi deux grandes catégories de programmes :

– les programmes opérationnels de politique fiscale, comptable et douanière : programmes 156 et 302, qui concentrent les crédits alloués aux deux grandes directions à réseaux du ministère de l’action et des comptes publics ;

– les programmes correspondant à des politiques de pilotage ou de coordination à dimension interministérielle, ou à des fonctions de soutien : le programme 148, qui retrace les crédits consacrés à la formation interministérielle des fonctionnaires de l’État et à l’action sociale interministérielle, et le programme 218, qui regroupe les effectifs et les crédits du secrétariat général des ministères économiques et financiers ainsi que d’autres directions et agences.

Le schéma suivant présente les directions et services dont les crédits sont analysés dans ce rapport spécial.

Les éléments encadrés par une ligne discontinue font partie du périmètre du programme 218.

Les programmes 156 et 302 concentrent 88,6 % des crédits de la mission, et 93,9 % des crédits de titre 2.

2.   Une mission de gestion fiscale et de lutte contre la fraude partagée entre deux administrations

La direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) remplissent, en plus de leurs missions spécifiques (paiement des dépenses et tenue des comptes publics pour la DGFiP, contrôle des flux de marchandises et de personnes pour la DGDDI), une mission de gestion fiscale et de lutte contre la fraude.

Ces deux administrations disposent d’un réseau étendu au maillage dense. Elles font face à des problématiques communes, et ont toutes deux engagé de vastes réformes au cours des dernières années, qui affectent significativement la conduite de leurs missions. La dématérialisation et la simplification des procédures ont ainsi permis d’accompagner d’importantes réductions de personnel et la rationalisation de leurs implantations territoriales.

Le Rapporteur spécial relève que le partage de la mission fiscale entre ces deux administrations, parfois critiquée et remise en question, ne constitue pas une spécificité française.

Lors de leur audition par le Rapporteur spécial, les représentants de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont rappelé que, sur les 55 administrations fiscales ayant participé à l’étude Tax Administration Survey ([5]), 31 ne sont pas compétentes pour gérer les droits de douane, et 22 ne gèrent pas non plus les accises. La répartition des compétences en matière de gestion de la TVA à l’importation (recouvrement par la DGDDI ([6]), contrôle et contentieux partagé entre DGFiP et DGDDI) est largement répandue au sein des pays étudiés.

En effet, si, dans certains pays, l’heure est plutôt à l’intégration – fusion de la douane et des impôts au Royaume-Uni en 2005, mouvements similaires dans les pays scandinaves, en Irlande, en Espagne ou aux Pays-Bas depuis le début des années 2000 et, plus récemment, création d’une administration unique en Pologne en mars 2017, la Krajowa Administracja Skarbowa, qui rassemble les administrations en charge du recouvrement de l’impôt, du contrôle fiscal, et des droits de douanes –, d’autres, en revanche restent attachés à une structure bicéphale.

En Italie, deux agences ministérielles se partagent ainsi la gestion des principaux impôts, taxes et droits indirects (dévolue à l’agence des revenus, ou Agenzia entrate), les droits de douane, la TVA à l’importation, et certaines accises (pour lesquels l’agence des douanes, ou Agenzia delle dogane e dei monopoli, est compétente).

Les représentants de l’OCDE ont également souligné que des synergies pouvaient certes être obtenues grâce au rapprochement ou à la fusion des administrations, mais que les gains à en attendre ne devaient pas être surestimés, en raison de la difficulté à conduire de telles réformes, et de l’existence de différences culturelles importantes entre administrations.

L’enjeu réside dès lors dans la capacité à faire travailler ensemble ces administrations, et à faciliter le partage de l’information utile, afin d’en améliorer l’efficacité. Le Rapporteur spécial reviendra plus en détail sur la nécessité d’améliorer le dialogue entre administrations fiscales (voir le II de la troisième partie).

3.   Le développement de structures « souples » à l’efficacité reconnue en matière de lutte contre la fraude fiscale

D’autres directions et services concourent à la mission de lutte contre la fraude fiscale.

Ainsi, au sein du programme 218, la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) a pour mission de « veiller à l’efficacité et à la coordination des actions menées en matière de lutte contre la fraude » ([7]) entre les services de l’État et les organismes de sécurité sociale. Placée par délégation du Premier ministre auprès du ministre de l’action et des comptes publics, elle crée les conditions d’un dialogue fructueux entre les administrations des ministères chargés du budget, du travail, de la sécurité sociale, de la santé, de la justice, de l’intérieur, des caisses de sécurité sociale et de Pôle emploi.

Au sein du même programme, la cellule de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (Tracfin, pour « Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits FINanciers clandestins ») est un service de renseignement dont la mission est de recueillir, analyser et enrichir les informations que les professionnels assujettis ont l’obligation de lui transmettre.

Ces structures, à l’organisation flexible et aux dimensions modestes complètent utilement l’action de la DGFiP et de la DGDDI, chacune dans leur domaine de compétence, en facilitant la communication interinstitutionnelle dans le premier cas, et en permettant de développer une analyse spécifique en matière de recueil et d’analyse d’informations relative aux flux financiers clandestins dans le second..

En raison de ces spécificités, une présentation des crédits par programme a été retenue.

II.   LE PROGRAMME 156 GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L’ÉTAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL

Le programme 156 regroupe les moyens consacrés aux opérations de recettes (assiette, recouvrement, contrôle) de l’État et des collectivités territoriales, au paiement des dépenses publiques et à la tenue des comptes publics. Il est mis en œuvre par la DGFiP.

A.   LES OBJECTIFS DU PROGRAMME

1.   Des objectifs atteints

L’action de la DGFiP est orientée vers l’atteinte de trois objectifs principaux :

– améliorer l’efficacité du recouvrement, de la lutte contre la fraude fiscale et du traitement des dépenses publiques ;

– renforcer la qualité de service au profit des usagers et des partenaires, (qui recouvre la qualité des comptes publics, le paiement des dépenses publiques, et la dématérialisation de l’offre de service aux usagers, notamment) ;

– maîtriser les coûts de gestion de la DGFiP au profit d’une efficience accrue.

Les différents indicateurs retenus présentent des résultats satisfaisants.

2.   Des résultats satisfaisants en matière de lutte contre la fraude fiscale

Le tableau suivant présente les résultats de la DGFiP en matière de lutte contre la fraude fiscale, depuis 2008.

montants d’impôt éludé et de sanctions

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Droits nets

12 738

12 380

13 113

13 479

14 369

14 286

15 334

16 122

15 292

Pénalités (y compris les intérêts de retard)

2 895

2 770

2 889

2 929

3 767

3 714

3 964

5 072

4 175

Total des droits et des pénalités

15 633

15 150

16 002

16 408

18 136

18 000

19 298

21 194

19 467

Dont STDR

1 914

2 654

2 476

Total des droits et des pénalités (hors STDR)

15 633

15 150

16 002

16 408

18 136

18 000

17 384

18 540

16 991

Détail des droits nets par impôt

Impôt sur les sociétés

2 926

3 011

3 912

3 624

4 082

3 433

3 809

4 837

4 029

Impôt sur le revenu

1 983

1 954

1 940

1 978

2 070

2 136

2 146

2 300

2 213

Taxes sur la valeur ajoutée

2 715

3 011

2 508

2 763

3 235

2 709

2 361

2 235

2 267

Remboursements de crédits de TVA

1 595

1 188

1 661

1 466

1 345

1 708

1 296

1 513

1 617

Droits d’enregistrement

1 679

1 430

1 414

1 450

1 525

1 460

1 590

1 261

1 326

Impôt de solidarité sur la fortune

273

257

282

306

383

421

381

357

336

Impôts locaux

696

795

579

584

436

428

509

510

680

Impôts divers (1)

871

734

817

1 309

1 293

1 992

1 604

1 194

1 222

STDR (Impôt sur le revenu, droits d’enregistrement, ISF et divers en droits nets et pénalités)

1 914

2 654

2 476

(1) dont la contribution sociale généralisée, la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la contribution à l’audiovisuel public et les taxes annexes sur le chiffre d’affaires à compter de 2011.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

L’analyse des résultats sur longue période montre que ceux-ci se sont maintenus à un niveau élevé, et ont dépassé les 21 milliards d’euros de droits et pénalités redressés en 2015.

La Cour des comptes souligne que « l’augmentation des droits rappelés observée en 2012 résulte principalement d’un meilleur ciblage des contrôles sur les fraudes les plus caractérisées » ([8]).

Les résultats exceptionnels constatés depuis 2014 ont été notamment permis par la création du Service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), chargé de permettre aux contribuables détenant des avoirs non déclarés à l’étranger d’exercer leur droit à rectification de leurs déclarations, afin de se mettre en conformité avec la loi fiscale, en acquittant les droits, pénalités et intérêts de retard dus. En 2017, les encaissements réalisés par le service devraient s’établir entre 1 et 1,2 milliard d’euros.

Le ministre de l’action et des comptes publics a finalement annoncé, le 14 septembre 2017, la fermeture du STDR au 31 décembre de cette année.

Ce service aura permis des régularisations nombreuses et un rendement budgétaire significatif. Entre 2013 et 2017, il aura en effet permis le traitement de près de 51 000 dossiers, représentant plus de 32 milliards d’euros d’avoirs, et le recouvrement de près de 8 milliards d’euros ([9]).

Le Rapporteur spécial considère que la suppression du service est justifiée, car, d’une part, les contribuables ont disposé d’un temps suffisamment long pour se mettre en conformité avec le droit existant, et, d’autre part, l’entrée en vigueur des échanges automatiques d’informations devrait permettre la détection des avoirs encore non déclarés.

Hors STDR, en 2016, les redressements d’impôts sur les sociétés représentent 20,7 % du total des droits et pénalités, les redressements de TVA, 11,6 %, et ceux d’impôt sur le revenu, 11,4 %.

Concernant le recouvrement, les résultats sont également en progression, malgré un léger décrochage en 2016, qui peut également s’expliquer par les résultats exceptionnels de l’année 2015.

le montant d’impôts recouvrés (droits et pénalités confondus)

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Impôt sur le revenu et cotisations sociales

2 109

2 051

2 266

2 118

2 050

TVA

1 291

1 264

1 139

1 231

1 268

Impôt sur les sociétés / taxe sur les salaires

2 594

4 164

2 508

3 718

2 863

Droits de déclarations de successions déposées suite à relance

1 087

986

896

783

869

Droits de déclarations d’ISF déposées suite à relance

68

80

58

57

55

Autres impôts

1 853

1 406

1 654

1 683

1 507

STDR

116

1 914

2 654

2 476

Montant total des encaissements (y compris STDR)

9 002

10 067

10 435

12 243

11 088

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Toutefois, le taux de recouvrement des créances issues du contrôle fiscal peine à dépasser les 50 %, niveau qualifié de « très peu satisfaisant » par la Cour. Si des éléments exogènes expliquent cette situation (organisation de l’insolvabilité, suspension du recouvrement par des procédures contentieuses, ou remises accordées par l’administration, par exemple), la Cour souligne que « cette faiblesse traduit également un manque de suivi entre les phases d’instruction et de recouvrement des dossiers, dont la responsabilité appartient à des services différents » ([10]). Les applications de suivi des opérations de contrôle et de recouvrement ne permettent notamment pas de suivre l’état du recouvrement d’un dossier déterminé, limitant ainsi les potentialités d’amélioration du ciblage sur les dossiers présentant les chances de recouvrement les plus élevées.

Interrogée sur cette question, la direction générale des finances publiques a précisé que la lutte contre la fraude fiscale ne poursuivait pas uniquement un objectif de rendement budgétaire, mais visait également à assurer l’égalité devant l’impôt et à permettre l’exercice d’une concurrence non faussée. Le contrôle fiscal ne saurait ainsi cibler uniquement les créances fiscales les plus susceptibles d’être recouvrées.

Le Rapporteur spécial insiste sur l’importance d’améliorer le recouvrement, et sera attentif aux initiatives prises par la DGFiP dans ce domaine.

B.   réductions de personnel et restructuration du réseau

1.   Des réductions de personnel qui ont permis de réaliser des économies substantielles

La DGFiP est engagée dans une politique de réduction de ses effectifs de long terme depuis la fin des années 1990 : près de 2 000 ETPT ont ainsi été supprimés chaque année, à périmètre de missions constant. L’administration fiscale a ainsi supporté, à elle seule, près de la moitié des réductions d’effectifs civils de l’État.

En 2017, cette tendance avait été légèrement infléchie, en raison de la mise en place du prélèvement à la source, qui a nécessité une mobilisation importante des agents de la direction, et qui, à court terme, imposera un accompagnement plus important des administrés dans leurs démarches.

Les suppressions d’emplois proposées par le Gouvernement dans le PAP 2018 s’élèvent à 1 600 ETP.

Effectifs de la DGFiP entre 2008 et 2018

(en ETPT et ETP)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

PLF 2018

Plafond d’emplois

125 949

123 588

121 156

118 784

116 251

114 417

111 990

109 726

107 294

105 690

103 988

ETPT exécutés

124 541

122 640

120 191

117 122

114 299

111 805

109 427

107 202

105 121

Suppressions d’ETP votées

– 2 385

– 2 391

– 2 565

– 2 667

– 2 438

– 2 023

– 1 988

– 2 000

– 2 130

– 1 630

– 1 600

Suppressions d’ETP exécutées

– 2 699

– 1 650

– 2 594

– 3 128

– 2 439

– 2 023

– 1 988

– 2 000

– 2 050

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

La DGFiP précise que l’ensemble des métiers contribue à la réduction des emplois, même si un effort particulier a été demandé aux fonctions support.

Ces réductions d’effectifs ont permis de contenir les dépenses de titre 2 aux alentours de 7 milliards d’euros. En 2018, selon les données du PAP, l’impact du schéma d’emplois devrait ainsi être de – 68,7 millions d’euros, et le total des crédits de titre 2 s’élèverait à 6,93 milliards d’euros.

Évaluation pluriannuelle des crédits de titre 2 de la DGFIp depuis 2012

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (*)

PAP 2018

Rémunérations d’activité

4,40

4,38

4,34

4,30

4,20

4,24

4,19

Total T2 (y.c. CAS Pensions)

7,06

7,11

7,12

7,06

6,94

7,01

6,93

Total T2 (hors CAS Pensions)

4,97

4,94

4,89

4,85

4,74

4,79

4,74

 (*) Prévision d’exécution au 30 juin 2017.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires, projet annuel de performances 2018.

L’impact des mesures catégorielles s’établira en 2018 à un niveau près de deux fois inférieur à celui constaté en 2017 (+ 22,3 millions d’euros en 2018, contre + 44,2 millions l’année précédente). L’impact du glissement vieillesse‑technicité, quasi-nul depuis 2013, sera négatif, et s’établira à
– 3,3 millions d’euros.

Ces éléments ont permis une amélioration continue du coût de gestion depuis 2008, en particulier sur le taux d’intervention sur l’impôt, comme en témoigne le tableau suivant.

évolution du taux d’intervention

(en %)

 

2008

2014

2015

2016

Taux d’intervention sur l’impôt

1,01

0,86

0,82

0,78

Taux d’intervention sur la dépense de l’État

0,09

0,09

0,08

0,07

Taux d’intervention sur la dépense du secteur public local

0,15

0,10

0,11

0,10

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Le Rapporteur spécial suivra avec attention les conséquences de la mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu sur la productivité des agents. Cette réforme majeure des modalités de recouvrement de l’impôt pourra, en effet, à terme, libérer des effectifs en matière de présence au guichet, et redéployer les agents sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.

Le Rapporteur spécial salue enfin la capacité de la DGFiP à avoir su adapter le fonctionnement de son administration tout en préservant un niveau de service public de qualité à ses usagers.

2.   Une dynamique de réduction des effectifs que partagent de nombreux pays de l’OCDE, mais avec une intensité variable

Cette dynamique de réductions d’effectifs n’est pas une spécificité française. De nombreuses administrations fiscales des pays de l’OCDE se sont ainsi engagées dans des politiques similaires, avec des méthodes et une intensité variables.

Le rythme et la répartition des suppressions d’emplois dépendent en effet de nombreux facteurs, et de choix politiques plus ou moins radicaux. L’étendue des missions de l’administration fiscale, la place du service public, l’existence d’un réseau territorial et la densité de son maillage, ou les garanties apportées par le statut de la fonction publique, ont des conséquences directes sur la capacité de l’administration à agir sur la masse salariale. Il ne semble dès lors ni opportun, ni possible, de définir un rythme optimal de réduction des effectifs, car les objectifs à atteindre dépendent des besoins des administrés comme des capacités de chaque administration.

Les travaux de l’OCDE fournissent néanmoins des éléments de comparaison intéressants.

La masse salariale représente une part plus importante des crédits de l’administration en France chez ses pairs, ce qui a des conséquences sur la capacité à investir, notamment (voir le II, C de la première partie).

Source : OCDE, Tax Administration Survey 2017, page 120.

Si l’administration fiscale française a supporté des suppressions d’effectifs à un rythme soutenu, le niveau de renouvellement des effectifs s’établit à un niveau relativement faible par rapport à ses pairs.

Source : OCDE, Tax Administration Survey 2017, page 130. Le triangle rouge représente la position de la France.

Le rapport de l’OCDE, qui ne vise pas spécifiquement la situation française, souligne que, de manière générale « dans les situations dans laquelle le taux d’usure (« attrition rate », qui correspond au taux de départ) et le taux de recrutement (« hire rate ») sont tous deux faibles, l’organisation pourrait ne pas disposer de la capacité de recruter des compétences nouvelles (…) ce qui peut constituer une difficulté, en particulier pour les administrations en phase de transformation » ([11]).

Cette situation peut également avoir, à terme, des conséquences importantes sur la pyramide des âges.

3.   Une nécessaire réflexion stratégique à mener pour maintenir la qualité du service public

Lors de son audition par le Rapporteur spécial, le directeur général des finances publiques, M. Bruno Parent, a souligné que l’approche qui avait prévalu lors de la préparation des budgets précédents était arrivée à son terme. L’administration fiscale a assumé les restrictions budgétaires qui lui étaient demandées, mais ces efforts prolongés ont eu des conséquences : l’administration a pris du retard sur les investissements qu’elle espérait pouvoir réaliser, et l’atteinte des objectifs fixés devient plus difficile.

Le Rapporteur spécial partage ce point de vue, et souligne que la poursuite des baisses d’effectifs ne pourrait être poursuivie de manière homothétique sans une réflexion d’ensemble, non seulement sur l’organisation de l’administration, mais, plus profondément, sur les missions que celle-ci doit remplir.

La mise en place du programme Action publique 2022 constitue l’opportunité de revoir en profondeur les missions dévolues aux administrations régaliennes.

Dans ce cadre, plusieurs impératifs doivent être considérés.

a.   Un maillage territorial dense, dont la pertinence est à réévaluer

Avec environ 4 000 implantations locales, la DGFiP est l’une des administrations les plus représentées dans les territoires. Cette situation s’explique tant par les missions spécifiques de la DGFiP en matière de gestion budgétaire et comptable, qui nécessitent une certaine proximité avec les collectivités territoriales, que par la volonté assumée de proposer une stratégie « multicanal » permettant aux usagers d’entrer en contact avec l’administration fiscale à distance, par téléphone et courrier papier ou électronique, mais également en personne.

L’État a ainsi fait le choix de proposer un service public de qualité, assuré par des agents proposant un accueil physique, et pas uniquement dématérialisé, et disposés à répondre aux sollicitations des usagers (questions individuelles, réalisation de rescrits fiscaux, par exemple). Ces services, qui ne sont pas nécessairement présents dans d’autres pays, correspondent à un choix fort en matière de politique publique.

Cette situation a évolué au cours des dernières années, et la DGFiP a engagé une politique de rationalisation de ses implantations territoriales, à travers le regroupement d’antennes locales, et de trésoreries, notamment. Depuis 2012, environ 440 trésoreries ont ainsi été fusionnées avec d’autres services géographiquement proches, et les regroupements de services des impôts des particuliers et de services des impôts des entreprises, amorcés en 2013, s’élèvent à environ 115.

Services et postes comptables du réseau de la DGFiP

 

Au 1er janvier 2015

Au 1er janvier 2016

Au 1er janvier 2017

Postes comptables

4 234

4 038

3 860

Trésorerie mixte

1 525

1 338

1 120

Trésorerie spécialisée

988

1 023

1 111

Service des impôts des particuliers (SIP)

518

513

515

Service des impôts des entreprises (SIE)

529

501

469

Service des impôts des particuliers et des entreprises

216

205

186

Pôle de recouvrement spécialisé

104

104

103

Service de publicité foncière

354

354

356

Trésorerie auprès des ambassades

16

12

12

Autres services non comptables supra ou infra départementaux (*)

1 557

1 368

522

(*) comprend les brigades de vérification, les PCE, les CDIF et les FI/PCRP.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Le Rapporteur spécial souligne que le réseau des trésoreries locales doit poursuivre son adaptation, de manière flexible et avec souplesse, dans une logique respectueuse des besoins des territoires.

Il relève également que la complexité de la fiscalité locale est à l’origine d’une charge de travail significative pour les agents. La suppression de la taxe d’habitation, impôt injuste qui génère de nombreuses demandes de remises gracieuses, pourrait à ce titre avoir des conséquences non négligeables sur la fréquentation des services locaux.

La taxe d’habitation : un coût de gestion élevé

Dans une communication publiée en février 2017 (1), la Cour des comptes rappelle que la taxe d’habitation est « l’impôt direct local le plus difficile à imposer en raison des difficultés d’identification des redevables et des nombreux cas particuliers et exemptions qui la caractérisent » : difficultés d’identification des occupants, modulations importantes selon le statut fiscal des occupants, notamment.

La Cour souligne également que le recouvrement de la fiscalité locale est complexe et occasionne de nombreuses demandes de remises gracieuses et de contentieux. Depuis 2012, le nombre de demandes gracieuses concernant la TH est près de deux fois supérieur au nombre de demandes relatives à l’impôt sur le revenu (entre 400 000 et 460 000 pour la TH, contre 200 000 environ pour l’IR). Le coût des remises gracieuses relatif à la TH s’est élevé à 88 millions d’euros en 2015, contre 128 pour l’ensemble de la fiscalité locale (TH, TFB, TFNB et CFE), soit près de 70 %.

Le nombre de contentieux est également très élevé en matière de taxe d’habitation : 893 181 affaires concernaient la seule TH en 2018, soit près de 62 % de l’ensemble des affaires enregistrées en matière de fiscalité locale.

La Cour évalue ainsi le coût administratif direct de la gestion de la fiscalité locale à près de 1,4 milliard d’euros en 2017.

(1)  La gestion de la fiscalité directe locale par la DGFiP, communication à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, janvier 2017.

Toutefois, la pertinence du maintien d’une stratégie « multicanal » ne doit pas se fonder uniquement sur des considérations budgétaires. En effet, l’OCDE souligne que, dans de nombreux pays étudiés, les usagers restent attachés à la possibilité de rendre visite aux agents de l’administration fiscale, malgré des efforts substantiels des administrations fiscales pour réduire leurs réseaux ([12]).

Ces travaux suggèrent également que le moyen de contact privilégié par les usagers correspond à des habitudes, voire à des usages culturels, partagés à l’échelle de zones géographiques plus vastes.

Concernant la mission de gestion comptable, le Rapporteur spécial salue les progrès réalisés en matière de dématérialisation des pièces comptables, qui permettront de faciliter l’optimisation des ressources de gestion de la comptabilité des collectivités locales, et encourage l’administration fiscale à aller au bout de cette logique.

b.   Une adéquation des postes et des compétences à améliorer

Les travaux du Rapporteur spécial ont mis en évidence des besoins de compétences nouveaux pour permettre l’accomplissement des missions traditionnelles de la DGFiP.

Ainsi, la numérisation et la dématérialisation des procédures impliquent un recours permanent aux outils informatiques dans le quotidien des agents. En matière de contrôle fiscal, le développement du ciblage nécessite des aptitudes nouvelles – analyse de données et gestion des bases afférentes, notamment –, pour lesquelles les agents n’avaient pas été nécessairement formés. 

Auditionnés par le Rapporteur spécial, les magistrats de la première chambre de la Cour des comptes ont également souligné que la complexification des schémas de fraude nécessite de faire appel à des compétences diversifiées, en matière comptable, juridique et fiscale, mais également en statistique, ou en finance de marché, compétences qui ne sont pas encore suffisamment développées au sein de l’administration fiscale.

Le Rapporteur spécial rappelle que, dans son ensemble, la DGFiP dispose d’un vivier de compétences solide, qui a su s’adapter aux enjeux nouveaux. Toutefois, la spécialisation requise sur certaines fonctions ou métiers, et la diversification des compétences, pourraient être mieux accompagnées par un recours plus large – même s’il resterait marginal à l’échelle des 105 000 agents de la direction – à des recrutements contractuels.

Cette exigence de spécialisation dans une optique d’amélioration de l’efficacité de l’administration fiscale se double d’un nécessaire encadrement de la mobilité des agents, à travers le développement des recrutements « sur profils ». Les critères liés à la compétence et à l’expérience professionnelle restent trop peu pris en compte dans les parcours de carrière – réservés aux principaux postes de direction uniquement –, le critère « d’ancienneté » des agents prévalant pour l’essentiel des affectations. Ces règles limitent également le temps passé sur un poste, restreignant d’autant la capacité à développer une expertise ([13]).

D’après les informations recueillies par le Rapporteur spécial, des réflexions sont en cours pour améliorer cette situation. Il suivra attentivement leur mise en place.

L’optimisation des ressources humaines et des compétences passe également par la réorganisation de la chaîne hiérarchique du contrôle fiscal au niveau local. Cette nouvelle organisation, qui favorise la mutualisation des compétences en matière de contrôle fiscal à l’échelon interrégional, tout en assurant une continuité de la chaîne hiérarchique du contrôle fiscal entre services centraux et locaux, devrait conduire à des gains d’efficacité. Sa mise en place doit toutefois se faire progressivement, et de manière respectueuse des réalités du terrain.

Le Rapporteur spécial est sensible à ces enjeux, et suivra avec attention les propositions de l’administration pour adapter les règles actuelles de gestion des ressources humaines aux spécificités du contrôle fiscal.

En cohérence avec la volonté d’engager une réflexion d’ensemble sur les missions de l’administration fiscale dans le cadre du Programme « Action publique 2022 », le Rapporteur spécial rappelle la nécessité de mettre en place une véritable politique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

C.   des dÉpenses hors titre 2 en diminution sur longue période

Depuis 2012, les crédits hors titre 2 du programme 156 ont connu une baisse tendancielle.

Évolution des Crédits de paiement, hors titre 2, depuis 2012

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

LFI 2017

PLF 2018

T3 – Fonctionnement

1 251,3

1 194,8

1 117,6

1 055,5

1 026,6

1 035,7

1 063,8

T5 – Investissement

63,2

46,5

39,0

34,0

33,3

30,2

55,8

T6 – Intervention

0,8

0,8

0,7

0,8

0,7

1,1

0,3

Total HT2

1 315,4

1 242,2

1 157,3

1 090,3

1 060,1

1 067,0

1 120,0

Total T2 + HT2

8 377,9

8 348,6

8 276,4

8 149,6

7 996,0

8 086,3

8 054,1

Source : projets et rapports annuels de performances.

1.   La composition de la dépense pour 2018

Sur le titre 3, la prévision de dépenses en crédits de paiement se répartit entre l’immobilier (496,2 millions d’euros, dont 245,7 millions d’euros de loyers budgétaires), les dépenses métiers (345 millions d’euros, pour des dépenses d’affranchissement, d’impression, de frais de justice ou de déplacement), et l’informatique (151,8 millions d’euros, permettant les achats de matériels et consommables, de télécommunications et de réseau).

Sur le titre 5, l’investissement informatique devrait représenter 44 millions d’euros (infrastructures et financement des applications hors ressources humaines), et l’immobilier, 10 millions.

Les dépenses de titre 6 permettent notamment de financer l’action de la France dans les négociations internationales sur la fiscalité, au sein du G20, de l’Union européenne et de l’OCDE, et s’établiront à 0,3 million d’euros en 2018.

2.   Une politique d’investissement contrainte

Le Rapporteur spécial constate que les crédits hors titre 2 ont supporté l’essentiel des économies constatées au niveau du programme.

Entre l’exécution 2012 et le PAP 2018, les dépenses HT2 devraient reculer de 195,4 millions d’euros (– 14,8 %), les dépenses T2, de 128,4 millions 
(– 1,2 %), et les crédits du programme, de 323,7 millions (– 3,9 %).

Près des deux tiers des économies en dépense sur le programme auront donc été réalisées grâce à une diminution des dépenses de fonctionnement et d’investissement.

Ces éléments font de la France l’un des pays dans lequel l’administration fiscale investit le moins dans l’informatique en proportion son budget, et se place à la 31e sur les 34 pays répondants de l’enquête Tax Administration Survey 2017 de l’OCDE.

L’administration fiscale a réalisé d’importants efforts pour développer des interfaces efficaces et fonctionnelles pour les administrés comme pour les entreprises. La création et le développement de l’espace numérique sécurisé unifié (ENSU), qui consiste à offrir aux particuliers et aux professionnels un espace en ligne, permettant à l’usager de retrouver sur la même plateforme l’ensemble de ses interactions avec les services fiscaux, constituent ainsi une avancée technologique utile. Le Rapporteur spécial se félicite de ces initiatives, qui ont permis le développement rapide du télépaiement de l’impôt et un allégement des formalités pour les contribuables.

Les projets informatiques en cours à la DGFiP :
des projets centrés sur la gestion interne et l’offre aux particuliers en 2018

Les grands projets informatiques en cours de la DGFiP sont les suivants :

– Mistral : le projet « Mistr@l » (Management Interactif de la Situation au Trésor – Application en ligne) a pour objectif de sécuriser et pérenniser l’activité de dépôts de fonds au Trésor (DFT) des collectivités locales et organismes publics.

– ENSU : la DGFiP repense son offre en ligne afin de faire en sorte que le numérique soit le canal que l’usager privilégie pour accéder à l’information et échanger avec la DGFiP. La mise en place de l’ENSU (espace numérique sécurisé et unifié) s’effectue progressivement. Ainsi, en mars 2016, une messagerie sécurisée a été mise en place. La DGFiP a également achevé les travaux de rénovation complète du portail impots.gouv.fr pour offrir un meilleur accès à l’information en janvier 2017. La nouvelle ergonomie de l’interface « Mon Profil » (personnalisation des paramètres de l’usager comme l’adresse électronique, les options de dématérialisation…) a été livrée en janvier 2017.

Enfin, la DGFiP poursuit ses travaux de rénovation de l’ergonomie de l’ENSU pour présenter immédiatement à l’usager un tableau de bord personnalisé reflétant sa situation et lui permettre de payer en quelques clics ses factures. Le champ des documents déposés dans cet espace sécurisé sera progressivement étendu à l’ensemble des interactions entre les usagers et la DGFiP (produits locaux, amendes). La livraison de l’essentiel de ces nouvelles fonctionnalités est prévue pour la fin de l’année 2018.

– ENSAP : le projet d’espace numérique sécurisé de l’agent public (ENSAP) vise à mettre à la disposition des agents publics, tout au long de leur période d’activité puis durant leur retraite, un portail interactif sécurisé dans les domaines de la rémunération et de la retraite. Le déploiement du dispositif est progressif et s’étend de fin 2016 à fin 2019 au fur et à mesure de la bascule des ministères.

– PAYSAGE : comme suite à la décision de suspendre le volet système d’information paye (SI Paye) du programme d’Opérateur national de paye (ONP), le projet Paysage a pour objectif de sécuriser la paye des fonctionnaires via la réécriture de l’application de paye actuelle (PAY). La mise en production du dernier lot de réécriture est prévue pour 2020.

– SIRHIUS : le projet SIRHIUS vise la création d’un système d’information des ressources humaines (SIRH) unique pour l’ensemble des directions des ministères financiers et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE).

L’application SIRHIUS est actuellement déployée dans quatre directions des ministères financiers (INSEE, DGCCRF, DGDDI, administration centrale) et au MEAE. Ainsi, 60 000 dossiers d’agents sont gérés et payés à travers le nouveau SIRH. La DGFiP prépare activement sa bascule prévue en 2018.

– CLOUD : le projet de modernisation de la production informatique des ministères économiques et financiers a notamment pour objectifs d’améliorer la productivité globale des services informatiques et de garantir un fonctionnement résilient, sécurisé des infrastructures, notamment au travers de plans de reprise d’activité. S’y ajoutent pour l’État des enjeux d’indépendance, vis-à-vis des fournisseurs de solutions cloud externalisées – la production informatique des ministères économiques et financiers, étroitement liée aux missions régaliennes de l’État, devant être assurée en interne –, et vis-à-vis des éditeurs du marché – fondé sur l’utilisation de technologies « logiciel libre », le projet passe par la consolidation et le développement de l’expertise déjà acquise par les équipes informatiques des ministères économiques et financiers dans ces domaines. La construction de l’offre de CLOUD est prévue de façon échelonnée sur l’année 2018.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

 

En revanche, concernant les autres applications, l’architecture des systèmes d’information est vieillissante, et nécessite une mise à niveau.

Dans un contexte budgétaire contraint, le Rapporteur spécial souligne la nécessité d’optimiser la qualité de l’investissement informatique. Les besoins informatiques doivent être anticipés le mieux possible. Il rappelle la nécessité de permettre une meilleure interconnexion entre les outils informatiques utilisés par l’administration fiscale, et encourage l’exploration des possibilités offertes par l’analyse de données.


III.   LE PROGRAMME 302 FACILITATION ET SÉCURISATION DES ÉCHANGES

La direction générale des douanes et droits indirects assure trois missions distinctes : une mission de lutte contre la fraude et les grands trafics internationaux, une mission économique de contrôle des flux commerciaux, et une mission fiscale.

Cette diversité de missions est au cœur de l’histoire et de l’identité de la Douane. Elle lui permet de disposer d’une connaissance approfondie des flux transfrontaliers de marchandises, de personnes et de capitaux, et d’appréhender ainsi efficacement les fraudes et trafics, tout en œuvrant pour faciliter le commerce régulier.

Le partage de compétences avec d’autres administrations peut être à l’origine de dysfonctionnements et affecter l’efficacité de l’action publique (voir le 2 du I de la première partie et II de la troisième partie). Dans une série de rapports publiés depuis 2014, la Cour des comptes a souligné les points d’attention à suivre en matière de compétences fiscales et de sécurité.

Concernant la mission fiscale, la Cour rappelait ainsi que « la modernisation, longtemps retardée, de cette activité passe par un réexamen en profondeur des missions confiées à la Douane et des taxes dont elle a la charge, afin de recentrer celle-ci sur son cœur de métier » ([14]).

En matière de lutte contre les fraudes et trafics, la Cour soulignait également que « la Douane n’est pas la seule administration engagée dans la lutte contre les fraudes et trafics. L’efficacité de son action dépend donc en grande partie des relations nouées avec ses partenaires, au premier chef les autres services des ministères financiers, le ministère de l’Intérieur et celui de la Justice » ([15]), et appelait à de « nombreuses clarifications » dans la répartition des tâches entre la Douane et les services de police et de gendarmerie.

Le Rapporteur spécial relève que des améliorations ont pu être réalisées depuis la publication de ces rapports, en matière de gestion fiscale par exemple, mais restera attentif à la poursuite de l’amélioration de la coopération entre administrations. À court terme, il souligne notamment la nécessité de faciliter les échanges d’informations entre administrations (voir II de la troisième partie).

Le programme « Action publique 2022 » pourrait dès lors constituer l’opportunité de préciser l’étendue des missions de l’administration douanière et de conduire une réflexion cohérente en la matière.

A.   LES OBJECTIFS DU PROGRAMME

1.   Des indicateurs de performance qui ont significativement évolué depuis le précédent projet de loi de finances

L’action de la DGDDI est organisée autour de trois objectifs principaux, dont l’intitulé à peu évolué à l’occasion du projet de loi de finances pour 2018 :

– intensifier la lutte contre la fraude et renforcer la protection des entreprises et des consommateurs ([16]) ;

– soutenir le développement des entreprises à l’international ;

– améliorer l’efficacité de la collecte et des contrôles en matière douanière et fiscale ([17]).

Les indicateurs de performance ont en revanche été profondément remaniés.

Comme le rappelle le directeur général des douanes et droits indirects, M. Rodolphe Gintz, il s’agissait d’introduire une dimension qualitative à la mesure de la performance de l’action de la Douane, en matière de saisies notamment, en accordant une place plus importante aux résultats du ciblage, et en arrêtant de recourir à des indicateurs quantitatifs présentant le montant des saisies brutes.

Ainsi, les sous-indicateurs « montants des saisies de stupéfiants », « quantités de tabac et cigarettes de contrebande saisies », « nombre d’articles de contrefaçons saisis » et « montants des droits et taxes redressés » sont supprimés, au profit du « nombre d’organisations criminelles démantelées par la douane judiciaire », du « nombre de contentieux à enjeu en matière de contrefaçon » et du « nombre de contentieux fiscaux à enjeu ».

Ces évolutions ont été favorablement accueillies par les services, comme l’ont souligné les représentants du personnel. Le Rapporteur spécial sera attentif à l’impact de ces évolutions sur le quotidien et les résultats des services.

2.   Des résultats convaincants

Avant le passage au suivi d’indicateurs plus qualitatifs, le Rapporteur spécial a choisi de présenter les résultats selon les objectifs définis dans les précédents projets annuels de performances, qui ont guidé l’action de la Douane, et déterminé le montant des crédits alloués.

En matière de lutte contre les trafics, les résultats de la DGDDI se maintiennent à un niveau élevé, malgré un recul notable en matière de saisies de stupéfiants et de tabac.

Montants des saisies contrefaçons, stupéfiants, tabacs et cigarettes

 

2012

2013

2014

2015

2016

Stupéfiants

(en millions d’euros)

256

536

658

802

645

Contrefaçons

(en nombre articles)

4,6

7,6

8,8

7,7

9,2

Tabacs

(en tonnes)

371

430

423

630

441

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Les contrôles en matière de protection du consommateur, qui portent sur les produits industriels, les produits de santé et les produits soumis à réglementation sanitaire et phytopharmaceutique, ont également progressé en 2016 (+ 10,3 %).

contentieux « protection du consommateuR » 

(en nombre de contentieux)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Nombre de contentieux

6 122

7 113

7 213

7 597

8 380

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

En matière de commerce transfrontalier, la France a de nouveau été classée à la première place par la Banque mondiale en matière de fluidité des opérations de commerce international en 2017 dans le classement Doing business. Le Rapporteur spécial se félicite de ces bons résultats, qui attestent de la qualité des efforts effectués au cours des dernières années par l’administration douanière en matière de dématérialisation des procédures.

Enfin, en 2016, en matière fiscale, la DGDDI a recouvré près de 76 milliards d’euros de droits et taxes.

Montants recouvrés par la DGDDI

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Fiscalité énergétique

36 604,3

36 799,2

36 471,2

37 827,2

44 993,8

TVA à l’importation, droits de douane et assimilés

13 883,4

13 490,1

14 375,3

14 121,3

12 997,7

Fiscalité sur les tabacs

11 825,8

11 816,9

11 917,5

12 096,5

11 789,4

Fiscalité sur les boissons et les alcools

3 830,7

4 265,2

4 512,7

4 475,8

4 512,3

Fiscalité environnementale

732,6

740,4

772,0

699,4

638,4

Fiscalité sur les transports

682,7

697,8

707,3

728,1

725,5

Fiscalités diverses

386,4

420,5

307,2

374,9

304,9

Total général 

67 945,8

68 230,1

69 063,1

70 323,1

75 962,1

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Le montant des droits et taxes redressés est en constante progression depuis 2012 (+ 41 %). Cette évolution s’explique par un rendement accru du contrôle de la fiscalité énergétique (+ 137 %) et des entrepositaires agréés de produits alcooliques (+ 121 %). Pour 2017 néanmoins, la prévision s’établit à 324 millions d’euros.

DROITS ET TAXES REDRESSÉS PAR LA DGDDI, et pénalités infligées

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Fiscalité énergétique

48,1

40,0

69,4

75,8

114,4

TVA à l’importation, droits de douane et assimilés

187,4

195,3

205,6

226,4

200,3

Fiscalité sur les tabacs

1,9

2,1

1,5

2,2

2,1

Fiscalité sur les boissons et les alcools

28,8

56,9

59,7

43,2

63,7

Fiscalité environnementale

11,0

13,7

6,2

12,8

16,3

Fiscalité sur les transports

6,7

4,7

4,6

6,8

4,9

Fiscalités diverses

10,2

10,0

10,0

10,2

13,5

Total général

294,2

322,7

356,9

377,4

415,1

Montant des pénalités infligées

11,1

16,9

14,7

11,8

10,9

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

En matière de redressements de TVA cependant, les résultats connaissent un léger recul par rapport à 2015. La direction générale souligne que le développement des travaux relatifs au contrôle de la TVA dans le domaine du commerce en ligne – sur les vecteurs du fret express et du fret postal – devrait permettre d’améliorer les montants redressés.

MONTANTS DE TVA REDREssés

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

TVA à l’import (hors produits pétroliers)

147,8

155,4

143,9

175,0

149,9

TVA sur les produits pétroliers

13,3

8,5

42,2

24,3

29,2

Total TVA

161,2

163,9

186,1

199,3

179,2

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Les réformes entreprises par la DGDDI en matière de simplification et de dématérialisation des procédures, et la réduction des effectifs, jusqu’en 2015, ont permis de faire reculer le taux d’intervention ([18]).

La direction générale souligne que la diminution continue du taux d’intervention est « notamment liée aux travaux de réingénierie des processus fiscaux », visant à rationaliser et simplifier la gestion des perceptions douanières. Dans cette perspective, en s’appuyant sur les progrès de la dématérialisation, la douane souhaite centraliser la gestion de plusieurs blocs de fiscalité en pôles de compétences afin d’améliorer la professionnalisation des services tout en maîtrisant ses coûts comme en témoigne la création du centre de gestion de la fiscalité la consolidation, en 2018, du processus de centralisation de la gestion de la taxe sur les véhicules routiers (TSVR) et des remboursements de fiscalité énergétique au sein du service national douanier de la fiscalité routière (SNDFR) à Metz.

Taux d’intervention sur les recettes douanières

(en %)

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (e)

2018 (e)

Taux d’intervention sur les recettes douanières

0,47

0,45

0,45

0,44

0,41

0,41

0,41

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Le Rapporteur spécial se félicite de ces bons résultats. Il souhaite néanmoins attirer l’attention sur le fait que, si le taux d’intervention global des recettes douanières est faible, certaines taxes, recouvrées par la DGDDI, dites à « faible rendement » – lorsque les recettes fiscales générées par la taxe sont inférieures à 150 millions d’euros – peuvent occasionner un coût de gestion significatif.

La Cour des comptes évaluait ainsi en 2014 le coût de gestion d’un ensemble de petites taxes (taxes sur les farines, les céréales, et les spectacles ([19]), notamment) à 14,93 % en moyenne, ce taux pouvant aller de 1,11 % à 259,40 % selon les directions régionales ([20]).

Le Rapporteur spécial a conscience de la difficulté à supprimer de telles impositions, même lorsque leur rendement est faible, en raison de leur nature interministérielle ou de leur affectation. En matière agroalimentaire, la mission d’information sur la taxation des produits agroalimentaires de la commission des finances de l’Assemblée nationale ([21]) avait proposé en 2016 la suppression de 8 « petites » taxes, souvent complexes à gérer, et qui généraient souvent des distorsions économiques injustifiées. Malgré une réception favorable du rapport et de nombreux amendements déposés en projet de loi de finances pour 2017, une seule de ces taxes – la contribution sur les boissons caféinées – a finalement été supprimée par le Parlement depuis la présentation des propositions de la mission.

Dans ses réponses aux questionnaires budgétaires, la DGDDI évoque deux taxes dont le bien-fondé pourrait être réexaminé en raison de leur faible rendement et de leur coût de recouvrement :

– la cotisation sur les céréales (décret n° 85-1011 du 24 septembre 1985) ;

– la taxe sur les ouvrages de librairie (articles 1609 duodecies du code général des impôts et 66 bis du code des douanes).

Afin d’optimiser la gestion, la clarification des compétences respectives des administrations fiscale et douanière mériterait d’être précisée. Le Rapporteur spécial se félicite de l’annonce du transfert du recouvrement de l’impôt sur les cercles et maisons de jeux ([22]) à la DGFiP, qui devrait intervenir prochainement, et qui permettra à la Douane de se concentrer sur d’autres missions à forte valeur ajoutée, tel le contrôle des manquements à l’obligation de déclarer.

Le Rapporteur spécial se prononce pour une revue d’ensemble des taxes à « faible rendement » dans le cadre du programme « Action publique 2022 », afin de poser la question de leur maintien comme de leurs modalités de recouvrement.

B.   des effectifs en augmentation en 2018, pour la troisième année consécutive

1.   Une diminution des effectifs depuis une dizaine d’années, interrompue en 2015

La DGDDI a connu une importante baisse de ses effectifs depuis le début des années 2000. En 2003, le plafond d’emplois s’élevait à 19 638 ETPT. Les effectifs de la Douane ont régulièrement diminué jusqu’en 2015, à raison d’environ 250 suppressions de postes par an.

Ces réductions d’effectifs ont permis de contenir les dépenses de titre 2 à l’échelle du programme, sans toutefois parvenir à les faire diminuer de manière significative. Après une légère baisse entre 2014 et 2015, les dépenses de personnel sont reparties à la hausse à partir de 2016, en raison des plans de recrutement décidés par le précédent Gouvernement.

Évaluation pluriannuelle des crédits de titre 2 de la DGDDI depuis 2012

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

LFI 2017

PLF 2018

Rémunération d’activité

716,3

716,6

714,3

710,6

716,4

744,5

755,7

Total T2 (y.c. CAS Pensions)

1 118,5

1 134,5

1 142,0  

1 136,8  

1 149,0  

1 199,6  

1 222,5

Total T2 (hors CAS Pensions)

798,4

798,4

795,0

791,0

797,5

829,2

842,9

Source : réponses aux questionnaires budgétaires, projet annuel de performances.

En effet, à la suite des attentats de Paris et comme annoncé par le Président de la République le 16 novembre 2015 devant le Congrès, la Douane a procédé à 1 000 recrutements supplémentaires en deux ans (soit + 250 par an, après impact du schéma d’emplois), dont la moitié dès 2016.

La DGDDI a été en mesure d’effectuer ces recrutements supplémentaires. En 2016, le nombre de primo-recrutements s’est ainsi élevé à 867, contre 325 en 2015 (pour respectivement 488 et 490 départs en retraite). En 2017, le nombre de primo-recrutements devrait s’élever à 861, pour 518 départs en retraite.

Le schéma d’emplois pour 2018 est présenté dans le tableau suivant.

Schéma d’emplois 2018 (EN ETP)

(en ETP)

 

PLF 2018

Primo-recrutements

­+ 749

Autres entrées

+ 145

Total des entrées

+ 894

Départs en retraite

– 494

Autres départs définitifs

– 55

Autres départs

– 145

Total des sorties

 694

Entrées nettes

+ 200

Source : projet annuel de performances.

Les effectifs exécutés de la DGDDI ont ainsi mécaniquement augmenté à partir de 2016.

évolution des effectifs de la dgddi depuis 2012 (en etpt)

(en ETPT)

 

2012

2013

2014

2015

2016

LFI 2017

PLF 2018

Effectifs de la DGDDI

16 806

16 775

16 520

16 216

16 258

16 759

17 038

Évolution

– 31

– 255

– 304

+ 42

+ 501

+ 279

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Ce renforcement en effectifs a principalement bénéficié aux unités de surveillance en charge du contrôle des franchissements des frontières terrestres, notamment au Nord et à l’Est du territoire, ou des missions de sûreté dans les gares, les aéroports et sur les liaisons maritimes ainsi qu’aux services de renseignement. Compte tenu des délais de recrutement et de formation, la mesure sera pleinement achevée en 2018.

La répartition des emplois supplémentaires octroyés
dans le cadre des plans anti-terroristes

Présenté le 18 mars 2015, le plan d’action pour lutter contre le financement du terrorisme autorise la DGDDI à recruter 70 emplois complémentaires (35 ETP pour 2016 et 2017).

45 emplois ont pu être répartis dès 2016 (soit une anticipation de 10 emplois par rapport au schéma d’emplois) comme suit :

– 6 emplois pour le renforcement des centres opérationnels douaniers terrestres (CODT) de Bordeaux et Lille ;

– 20 emplois pour la constitution de l’Unité d’information Passagers – Passenger Name Record (UIP PNR) ;

– 4 emplois pour le contrôle du fret express et postal à Roissy ;

– 15 emplois pour la DNRED.

En 2017, la mise en place de nouveaux CODT et le renforcement des capacités de contrôle en matière de fret express et postal ont donné lieu à l’affectation des emplois restants (25 ETP).

Le 16 novembre 2015 devant le Congrès, le Président de la République a annoncé que la DGDDI serait autorisée, sur la période 2016-2017, à effectuer 1 000 recrutements complémentaires (soit 1 700 recrutements au lieu des 700 initialement prévus), dont la moitié dès 2016.

Les recrutements supplémentaires sont prioritairement orientés vers la branche de la surveillance et concernent surtout les catégories B et C.

Les 500 agents recrutés en 2016 au titre du plan de lutte contre le terrorisme ont été prioritairement et dans une très large majorité affectés (plus de 300) dans les directions territoriales en charge du contrôle des franchissements des frontières terrestres, au contact des pays limitrophes ou sur les points de passage frontaliers (PPF) ou agréés (PPA) sur lesquels la douane exerce ses prérogatives de contrôle migratoire.

Les autres affectations réalisées en 2016 au titre du plan de lutte contre le terrorisme ont été concentrées sur :

– la DNRED pour 50 agents ;

– les brigades chargées des contrôles de sûreté ferroviaire pour plus de 40 agents ;

– les services chargés du contrôle des flux postaux et de fret express des marchandises pour plus de 30 agents ;

– les brigades dédiées au contrôle de sites aéroportuaires (Roissy, Orly et Marseille‑Marignane) pour plus de 20 agents ;

– le nouveau service d’analyse de risque et de ciblage pour plus de 20 agents ;

– divers services d’orientation et de ciblage des contrôles pour 7 agents.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Le plan a été mis en œuvre très rapidement, dans des conditions délicates, les écoles de formation des douanes ayant une capacité d’accueil limitée. Le Rapporteur spécial salue la réactivité de l’administration douanière, qui a su faire face à un enjeu de recrutement important et qui, au vu des informations reçues dans le cadre des travaux du rapport spécial, s’est correctement déroulé.

2.   Un budget 2018 marqué par la nécessaire adaptation de la Douane au Brexit

L’augmentation des effectifs se poursuivra en 2018, un renforcement étant prévu pour commencer à préparer le rétablissement d’une frontière douanière avec le Royaume-Uni dans le cadre du Brexit. Chaque année, 11 millions d’articles, 16 millions de passagers par voie maritime, et 12 millions par voie aérienne, traversent la frontière entre la France et le Royaume‑Uni. 

Pour l’année 2018, le plafond autorisé d’emplois s’établira à 17 045 ETPT.  250 ETP seront créés.

Le directeur général des douanes et droits indirects, M. Rodolphe Gintz, a indiqué que les besoins en effectifs supplémentaires suite au Brexit pourraient atteindre 700 ETPT, sur l’ensemble des métiers douaniers (dédouanement, contrôle des flux, détaxe).

Au-delà de ces renforts, des redéploiements internes d’emplois seront réalisés au sein de la DGDDI en cohérence avec la démarche de modernisation nationale engagée et des économies du réseau comptable (– 50 ETP).

3.   Une restructuration du réseau qui nécessite une véritable revue stratégique

a.   Un réseau dense, en évolution

Le réseau de la DGDDI est composé de 12 directions interrégionales et 46 directions régionales :

– les directeurs interrégionaux ont en charge le pilotage opérationnel et stratégique et les fonctions support (ressources humaines, budget et informatique) ;

– les directeurs régionaux animent les services opérationnels : bureaux de douane, brigades de surveillance, centres de viticulture, services du contentieux, cellules conseil aux entreprises, notamment.

Les diminutions d’effectifs qu’a supportées la DGDDI se sont accompagnées de restructurations importantes au cours des dernières années. Ces restructurations devraient se poursuivre dans les années à venir. À l’horizon 2020, les regroupements ou fermetures suivants seront opérés :

– branche « opérations commerciales » : 28 fermetures et 2 regroupements (sur 176 bureaux et 61 services des contributions indirectes) afin de tenir compte de la dématérialisation des procédures, des simplifications administratives, du nouveau code de l’Union ;

– branche « surveillance » : 11 regroupements et 3 fermetures (sur plus de 200 unités), pour constituer des unités plus étoffées, en capacité d’engager de nouvelles méthodes de travail, dans un souci d’efficacité accrue et de renforcement de la sécurité des agents ;

– réseau comptable : à terme, 23 recettes régionales devraient être fermées en métropole, pour conserver une recette par interrégion douanière.

Le Rapporteur spécial insiste sur l’importance d’une véritable programmation stratégique en matière d’implantations territoriales. Il souligne que le renforcement des effectifs, préparé dans l’urgence en raison du contexte sécuritaire, puis prolongé en raison de la nécessaire préparation du Brexit, constitue une inflexion majeure par rapport à la dynamique engagée depuis le début des années 2000. Afin d’utiliser au mieux ces ressources supplémentaires, la DGDDI doit conduire une réflexion en profondeur portant sur son organisation territoriale.

b.   Une optimisation des ressources qui passe par le développement du ciblage

Afin d’optimiser l’utilisation des ressources disponibles, la Douane a mené des travaux importants et a développé ses techniques de ciblage. La direction générale souligne que « les évolutions réalisées visent à organiser la collecte et la diffusion du renseignement et à mettre en place des outils permettant de limiter la sélection aléatoire lors des contrôles ». Trois initiatives ont notamment été prises au cours des dernières années, et seront poursuivies en 2018 :

– sur le vecteur routier, six centres opérationnels douaniers terrestres (CODT) ont été créés.

La mission des CODT est double : d’une part, les centres soutiennent et sécurisent les conditions d’intervention (appui opérationnel 24 heures sur 24, géolocalisation des véhicules, traitement et partage de l’information en temps réel, appui logistique et réglementaire) ; d’autre part, ils permettent un commandement opérationnel lors de cas déterminés (plans d’alerte, opérations d’ampleur, autres cas d’urgence). Afin de traiter les flux d’informations et d’assurer le soutien opérationnel aux unités, les fonctions d’opérateur, d’analyste et de régulateur sont assurées de manière polyvalente et complémentaire. Les CODT ont ainsi vocation à être de véritables points d’entrée et de sortie de l’information ;

– sur le vecteur ferroviaire, la mise en place du réseau de la douane ferroviaire (création de six brigades ferroviaires spécialisées – BFS – et de neuf brigades à capacité ferroviaire – BACF –) devrait permettre d’améliorer le ciblage, grâce à la collaboration entre la direction du renseignement douanier, la SNCF, et les services opérationnels ;

– au niveau central, la création du service d’analyse de risque et de ciblage (SARC), opérationnel depuis le 1er septembre 2016, permet d’améliorer l’intégration de la chaîne des contrôles.

Le SARC est en effet chargé de la production de l’intégralité des analyses de risque et des études à vocation opérationnelle portant sur l’avant-dédouanement, le dédouanement et la fiscalité. Il a le monopole de la création des profils nationaux de sélection dans un outil de ciblage automatisé, et de l’orientation des contrôles ex-post en matière de dédouanement et de fiscalité.

c.   Des clarifications à apporter dans la gestion des points de passage frontaliers

En matière de contrôles migratoires, la Douane partage avec la police aux frontières (PAF) la gestion des points de passage frontaliers (PFF), portuaires, aéroportuaires et terrestres ([23]).

En octobre 2016, afin de rationaliser la mission Schengen, la révision de la cartographie des PPF a abouti à la déqualification de 13 PPF sur 131, dont le trafic extra-Schengen était nul ou résiduel. Aujourd’hui, la Douane gère 97 PFF, sur les 118 existants. Un 119e PPF a été notifié à la Commission pour la saison estivale 2017, l’aérodrome de la Môle, géré par la DGDDI.

La répartition de la gestion des 118 PPF est la suivante :

– 44 à la PAF : 22 aériens, 13 maritimes et 9 terrestres ;

– 74 à la DGDDI : 51 aériens, 20 maritimes, 3 terrestres (dont 2 ferroviaires).

La tenue de ces PPF est parfois à l’origine de difficultés d’organisation, en matière de contrôle des aéroports notamment. Ainsi, comme le rappelle la DGDDI, « l’évolution de la pression migratoire dans des aéroports disséminés sur l’ensemble du territoire implique de réaliser des trajets parfois conséquents pour rejoindre les PPF, souvent éloignés du siège des unités ou des sites prioritaires d’intervention au titre de la lutte contre la fraude ».

Le renforcement des contrôles aux frontières Schengen, dans le cadre de la crise migratoire, qui devait s’achever en novembre 2017, a mis en lumière des difficultés d’ordre technique, en cours de résolution. Ainsi, la PAF dispose d’une version plus aboutie de l’application informatique COVADIS, qui permet aux gardes-frontières de réaliser certaines les vérifications d’identité imposées par les évolutions du code frontières Schengen. Les vérifications sont automatisées pour l’ensemble des bases de données dans la version dont dispose la PAF, alors que dans celle qu’utilise la DGDDI, celles-ci ne le sont que partiellement, ce qui nécessite de recourir à des contrôles manuels, accroissant significativement le temps de contrôle.

Dans une logique d’optimisation du réseau et des ressources humaines, le Rapporteur spécial souligne la nécessité d’opter pour une répartition plus efficace des PPF entre la Douane et la PAF.

Le Rapporteur spécial salue en revanche le regroupement de l’ensemble des aéroports parisiens – Orly, Roissy, Le Bourget – dans une direction interrégionale unique, en cohérence avec les évolutions récentes réalisées en matière de police. Depuis un décret du 19 avril 2017 ([24]), la sécurité de ces trois aéroports est en effet placée sous l’autorité du préfet délégué à la sécurité et à la sûreté des aéroports, M. François Mainsard, rattaché au préfet de police de Paris, et non plus aux préfets de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, comme auparavant. Ce regroupement permettra ainsi d’harmoniser et d’améliorer les méthodes de travail sur ces trois implantations, et d’en renforcer la sécurité.

C.   hors titre 2, des dépenses stables

1.   Des dépenses d’investissement et de fonctionnement stables

Entre 2012 et 2017, les dépenses de fonctionnement et d’investissement exécutées sont restées globalement stables. La baisse constatée hors titre 2 s’explique en grande partie par le recul des dépenses d’intervention, et notamment, par des mesures de périmètre concernant le régime d’allocation viagère des débitants de tabac.

En 2018, les dépenses d’intervention continueront leur décrue, tandis que les dépenses de fonctionnement et d’investissement bénéficieront de crédits supplémentaires (respectivement + 15,3 et + 14,6 millions d’euros). Le Rapporteur spécial considère que cette augmentation des moyens, dans un contexte budgétaire contraint, s’avère nécessaire, étant donné la situation actuelle des matériels utilisés par la Douane.

crédits de paiement hors titre 2,
en prévision et en exécution, depuis 2012

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

LFI 2017

 PLF 2018

Fonctionnement – titre 3

162,76

170,59

164,56

170,58

172,50

158,86

174,12

Investissement – titre 5

32,90

38,65

51,42

46,97

41,00

55,59

70,23

Intervention – titre 6

271,88

253,79

218,73

219,17

183,20

112,21

97,21

Total – hors titre 2

467,55

463,02

434,72

436,71

396,70

326,65

341,56

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

2.   Des matériels vieillissants dont le renouvellement reste délicat

La Douane utilise des matériels vieillissants, qui répondent imparfaitement aux besoins du service, mais qui génèrent des coûts de maintenance importants. La DGDDI souligne que les coûts d’exploitation de la flotte (entretien, carburant) sont importants, et, du fait de son état, la disponibilité opérationnelle globale est limitée par le poids d’opérations de maintenance lourdes. Elle précise également que, de manière conjoncturelle, le renouvellement des moyens, corrélatif de la réorganisation du dispositif sur la façade atlantique, en 2016 et 2017, et le renouvellement tardif des matériels dans la zone Antilles-Guyane, ont affecté à la baisse le nombre de contrôles.

activité de contrôles des 4 directions régionales garde-côtes

(en nombre de navires contrôlés)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Antilles

717

916

1 024

1 144

897

Marseille

3 809

3 089

2 765

2 360

2 164

Nantes

2 357

2 431

2 264

1 941

1 477

Rouen

904

861

651

570

602

Total

7 787

7 297

6 704

6 015

5 140

Source : réponses aux questionnaires budgétaires

Face à une situation matérielle tendue, la Douane a développé des outils permettant de maintenir des résultats satisfaisants. Le renseignement et le développement des méthodes de ciblage ont conduit à concentrer les moyens disponibles sur des contrôles plus pertinents, orientés sur certaines catégories de navires qui nécessitent un temps dédié d’investigation plus important (navires de commerce, avec le développement des visites sous-coques, par exemple).

Le développement du système intégrateur de l’aéromaritime (SIAM), qui facilite la communication entre les navires, les avions et les centres opérationnels douaniers, devrait également permettre d’améliorer la qualité de l’intervention en mer. Ce dispositif bénéficiera d’abord à la Douane, avant d’être étendu au plan interministériel au titre de l’action de l’État en mer, et enfin au plan communautaire.

Le Rapporteur spécial insiste sur la nécessité, dans un contexte budgétaire contraint, d’optimiser le renouvellement et l’utilisation des ressources matérielles, afin de ne pas laisser les résultats se dégrader.

Suite aux difficultés rencontrées par la Douane lors du renouvellement de son parc aéronaval ([25]), le Rapporteur spécial sera attentif aux solutions proposées par l’administration.

3.   Les financements supplémentaires obtenus dans le cadre du plan de lutte antiterroriste (PLAT)

En 2016, la Douane a obtenu en 2016 une rallonge de 45 millions d’euros pour l’achat d’équipements nouveaux.

Selon les informations reçues par le Rapporteur spécial, la Douane a ainsi acquis des équipements de protection, des armements (pistolets automatiques et pistolets mitrailleurs HK UMP) et des munitions, pour 4,6 millions d’euros, et des matériels de détection, pour 2,5 millions.

En 2018, la DGDDI devrait engager le renouvellement de deux scanners mobiles parmi les quatre actuellement détenus, arrivés aujourd’hui en fin de vie technique, pour 5 millions d’euros.

Les crédits du PLAT ont également permis de financer l’acquisition de matériel de détection (spectromètre, analyseur de particules) et le renouvellement du parc de scanners à rayons X.

Auditionnées par le Rapporteur spécial, les organisations syndicales saluent le renforcement des matériels. Elles soulignent que l’équipement des agents en pistolets mitrailleurs s’est globalement bien déroulé, et que ce choix correspond « pour la plupart des agents [à] l’adaptation à une réalité profondément modifiée » par la menace terroriste. Toutefois, le choix de l’arme, et des équipements de protection associés, aurait pu être mieux affiné, en raison de leur poids important.

En revanche, ces organisations ont attiré l’attention du Rapporteur spécial sur le manque d’armes de service pour les nouvelles recrues.

4.   Des investissements informatiques limités

L’administration douanière a fourni des efforts très importants en matière de simplification et de dématérialisation des procédures. Le taux de dématérialisation du dédouanement a ainsi atteint 88 % en 2017 contre 84% en 2012.

Les crédits de paiement affectés à l’investissement informatique s’élèvent à 27,07 millions d’euros pour 2018. La DGDDI poursuivra la modernisation de ses systèmes d’information, à travers le développement de deux projets majeurs :

– le guichet unique national (GUN) permettra la mise en place de liaisons informatiques entre le système d’information douanier les bases de quinze administrations partenaires délivrant les documents d’ordre public (DOP) nécessaires à l’importation à l’exportation. L’objectif est la dématérialisation de 100 % de ces DOP et la généralisation du visa électronique des documents. L’année 2018 devrait permettre de raccorder la DGCCRF, pour les importations et exportations de fruits et légumes, et le ministère de l’intérieur, pour le commerce de véhicules d’occasion. Le coût pour 2018 devrait s’élever à 0,7 million d’euros en CP, ce qui porte le coût total à 4,7 millions ;

– le projet interministériel passenger name record (PNR) devrait être déployé très prochainement. Ce système permet la collecte, le traitement, l’analyse et l’échange de données des dossiers passagers aériens en vue de la prévention, de la détection, de l’investigation et de la poursuite des infractions terroristes et de celles relatives à la grande criminalité (trafic de stupéfiants, mouvements financiers, criminalité organisée, etc.).

Actuellement, près de 75 compagnies aériennes étaient reliées au « système API-PNR France », représentant entre 90 % et 93 % des vols extracommunautaires et près de 51 millions de passagers. Chaque semaine, entre 300 et 400 requêtes sont adressées à l’unité gérant ce système par les services habilités à interroger le fichier. L’achèvement du système et son extension programmée aux vols intracommunautaires, susceptibles d’intervenir au début de l’année 2018, devraient conduire au raccordement de 230 compagnies aériennes, et à la collecte des données de 100 millions de passagers par an environ ([26]).

En 2018, 7 millions de CP devraient être utilisés, portant le coût total prévu du projet à 47,3 millions d’euros, soit plus de deux fois le montant initialement prévu.

Le Rapporteur spécial se félicite du choix de ces investissements, qui permettront d’améliorer l’efficacité de l’administration douanière, et rappelle la nécessité de bien prévoir, en amont, le coût de ces projets.

5.   La « Masse des douanes » : une nécessaire amélioration de la gestion

La « Masse des douanes » est, depuis 1998, un établissement public national à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministre chargé des douanes, avec la mission de pourvoir au logement des agents de cette administration. L’établissement a pour origine l’obligation de casernement imposée aux agents de la DGDDI affectés aux tâches de surveillance, obligation qui a été supprimée en 1980, mais dont la disparition n’a pas entraîné la disparition du parc immobilier.

Dans un référé publié en mai 2016, la Cour des comptes a relevé que l’établissement ne permettait plus d’atteindre les objectifs qui lui étaient traditionnellement assignés.

Le logement des douaniers par la « Masse des douanes »

Dans son référé, la Cour des comptes dresse un constat critique du fonctionnement de l’établissement et appelle à en revoir l’organisation.

Selon la Cour, le maintien d’une telle politique de logement est coûteux pour l’État. Le taux de vacance élevé et la pratique de très faibles loyers entraînent des pertes de recettes significatives. Le taux d’occupation par les agents des douanes est faible (59 % en 2014) et en diminution, et le taux d’occupation global (par les douaniers en activité, retraités, et les personnes « présentant un lien avec la DGDDI ») est en dessous de la moyenne nationale (72 %, contre 97 % dans le parc immobilier social). Cette situation résulte des transformations de l’activité et de l’implantation géographique de la Douane, et des évolutions des attentes des agents.

La gestion de l’établissement représente un coût significatif (entre 7 et 8 millions d’euros et 68 ETP) ; une partie du parc est vétuste, et sa rénovation, mal gérée ; le stock de loyers impayés est élevé (5 % des loyers encaissés).

La Cour juge cette organisation inadaptée. Elle recommande de tirer les conséquences de cette situation, qui « ne peut que se dégrader », et de mettre en œuvre une politique de logement en faveur des douaniers impliquant la disparition de la Masse des douanes. Elle suggère de recourir aux services de l’Association pour le logement du personnel des administrations financières, et de transférer le parc domanial à la Société nationale immobilière.

Source : cour des comptes, Le logement des douaniers par la « Masse des douanes », référé, mai 2016.

Le Rapporteur spécial rappelle que si les douaniers doivent pouvoir disposer de solutions de logement conformes à leurs besoins et adaptées aux exigences du service public, il insiste sur la nécessité de remédier rapidement à cette situation, car l’action de la Masse se révèle peu efficace, et coûteuse pour les finances publiques.

Dans le cadre de ses travaux, le Rapporteur spécial a obtenu l’assurance, de la part de la DGDDI, ainsi que de la direction de l’immobilier de l’État (DIE), que l’administration avait réagi positivement suite au référé précité.

Une enquête a été réalisée en septembre 2016 auprès de tous les agents de la DGDDI, et la synthèse a été présentée aux représentants du personnel lors d’un groupe de travail, en novembre 2016.

La gestion financière de l’établissement a été améliorée grâce à certaines mesures de court terme. Une politique proactive de recouvrement des impayés a été engagée début 2015, conduisant à une baisse du stock d’impayés de 9 % sur 15 mois (789 000 euros au 31 mars 2017). La révision de la politique des loyers a été initiée, même si les augmentations restent faibles (augmentation ponctuelle de 3 % au 1er janvier 2018, et majoration d’occupation pour les revenus les plus élevés, avant une remise à plat des loyers en 2019). Le dépôt de garantie a été généralisé à tout nouveau locataire au 1er septembre 2017. Enfin, l’établissement a poursuivi la mise à niveau de son système d’information.

Lors de son audition, la directrice de l’immobilier de l’État, Mme Nathalie Morin, a évoqué que, en parallèle d’une réflexion générale sur l’amélioration de la performance du parc résidentiel de l’État, plusieurs initiatives avaient été prises afin d’améliorer la gestion du logement des douaniers. Ces travaux sont pilotés par une équipe composée de représentants de la DGDDI et de la DIE.

Ainsi, une phase de fiabilisation des données et de diagnostic du parc immobilier est en cours, afin d’en dresser un inventaire précis et de recenser l’état de ce dernier (mesurages, performances des bâtiments, notamment).

Une fois le diagnostic effectué, en fonction de celui-ci, et en cohérence avec l’évolution territoriale des missions de la Douane, la DIE pourra procéder à la cession des biens ne suscitant plus d’intérêt de la part des agents des douanes – ou, éventuellement, d’agents d’autres administrations – et réaliser des travaux sur les bâtiments restants.

La DIE souligne qu’une première expérience de mutualisation interministérielle pourra être mise en œuvre dans un nombre limité de territoires, dans un premier temps. La directrice de l’immobilier de l’État souligne que, si cette initiative est séduisante dans son principe, plusieurs considérations pratiques, tenant aux mécanismes de refacturation, à la répartition des biens, et aux modalités de définition des loyers, nécessitent d’être clarifiées, avant de considérer toute possibilité d’extension ou de généralisation du dispositif.

Le Rapporteur spécial se félicite de ces initiatives, qu’il suivra avec attention.


IV.   LE PROGRAMME 218 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES

A.   LES OBJECTIFS DU PROGRAMME ET LA MESURE DE LA PERFORMANCE

Depuis 2016, les objectifs assignés au programme 218 ont été recentrés autour de trois axes :

– l’amélioration de l’information du Parlement et de la qualité des prestations rendues aux administrations ;

– l’amélioration des conditions d’emploi des personnels ;

– la maîtrise des coûts des fonctions support.

De manière corollaire, le nombre d’indicateurs de performance a diminué.

1.   Une information et des services de qualité à destination du Parlement et des administrations

L’objectif n° 1 du programme 218 est de satisfaire les bénéficiaires de prestations rendues par plusieurs directions du ministère de l’économie et des finances : la direction du budget (DB), le contrôle général économique et financier (CGEFI), la direction des affaires juridiques (DAJ) et l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE).

Les résultats obtenus sur les différents indicateurs témoignent d’un haut niveau de satisfaction du Parlement et des administrations.

Concernant l’information à destination du Parlement, le taux de satisfaction des utilisateurs principaux (les rapporteurs spéciaux, les rapporteurs pour avis et les administrateurs du Parlement) devrait s’établir à 90 % en 2017, ce qui constituerait la meilleure performance depuis 2015. Pour 2018, la cible s’établit à 92 %, et l’objectif du triennal a été arrêté à 95 % pour 2020.

Les taux de satisfaction des commanditaires ou des clients traduisent la qualité des services de consultation et d’expertise des ministères économiques et financiers à destination des administrations. Le taux de satisfaction des directions partenaires du CGEFI devrait se stabiliser à 92 % en 2018, soit le niveau de 2016. Ce taux est toutefois en baisse de près de 2 points depuis 2013 (93,9 %). Pour ce qui est de l’indicateur mesurant la qualité des consultations juridiques de la DAJ, le taux de satisfaction des structures clientes devrait se stabiliser au niveau de 2016.

Enfin, le dernier indicateur de la performance de l’administration relatif à cet objectif apprécie de la qualité des prestations de l’AIFE, responsable en particulier du système d’information CHORUS. Selon le PAP, le taux de satisfaction des bénéficiaires des prestations de cette structure remonterait légèrement en 2018, à 84 %, après une baisse de 10 points entre 2016 (92 %) et 2017 (82 %). Le PAP précise que les modalités de réalisation de l’enquête sur laquelle est assis l’indicateur ont en effet évolué significativement depuis 2017 de façon à appréhender l’extension significative du périmètre du SI Chorus, notamment avec le déploiement de Chorus Portail Pro, et à mieux cerner les attentes et les besoins en termes de services.

2.   L’amélioration continue des conditions d’emploi des personnels

L’objectif n° 2 de la mission est l’amélioration des conditions d’emploi, de travail et de vie des personnels et de leurs familles.

Les résultats obtenus sur les trois indicateurs sont satisfaisants, stables depuis 2015, et la prévision 2018-2020 ne devrait pas être à l’origine d’une inflexion particulière des résultats. La part des agents ayant accès à une solution de restauration collective s’établirait ainsi à 70 % en 2018, la part des logements sociaux réservée en PLAI, PLUS, PLS et équivalents, supérieure à 60 %, et la part des familles modestes bénéficiaires des prestations « vacances enfants », supérieure à 50 %.

3.   La maîtrise du coût des fonctions support

La politique de maîtrise du coût des fonctions support repose sur quatre piliers : la globalisation et la standardisation des achats, la poursuite de la professionnalisation de la fonction RH, l’efficience en matière bureautique, et l’efficience de la gestion immobilière.

Entre 2016 et 2018, l’État et les établissements publics ont pour objectif de réaliser 1,9 milliard d’euros d’économies grâce à l’amélioration de la fonction achats. Pour mener à bien cet objectif, l’État s’est doté d’un nouvel instrument afin de rénover son action de rationalisation des achats par la création de la direction des achats de l’État (DAE), successeur du service des achats de l’État (SAE) en vertu du décret du 3 mars 2016 ([27]). En 2018, l’objectif d’économies fixées s’établit à 400 millions d’euros, comme en 2017.

Le Rapporteur spécial se félicite de cette initiative salutaire, qui contribue à l’amélioration de la dépense publique.

Les autres indicateurs relatifs à la maîtrise du coût des fonctions support sont stables. Le ratio d’efficience de la gestion des ressources humaines est stable depuis 2015, à 2,3 %. Le ratio d’efficience bureautique devrait quant à lui reculer, pour s’établir à un coût de 690 euros par poste informatique en 2018 (– 1,42 %).  Enfin, pour l’efficience de la gestion immobilière, les objectifs 2017 sont reconduits en 2018. Les résultats sont en amélioration depuis 2015, sauf pour les dépenses relatives à l’entretien lourd, en raison du vieillissement naturel du parc domanial et de la réalisation d’investissements permettant d’améliorer sa sécurité et sa performance énergétique.

B.   les crédits pour 2018

1.   Les crédits du programme par action

Le PLF 2018 propose, pour le programme 218, une diminution de 18,1 millions d’euros des autorisations d’engagement (AE) par rapport aux crédits ouverts en LFI 2017, soit une baisse de 1,8 % et une augmentation de 16,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 0,4 %. Les crédits des différentes actions connaissent des évolutions contrastées, et l’action n° 5 Prestations d’appui et de support connaît la plus forte baisse (– 29,2 millions d’euros, soit – 6,2 %). 

Les AE et CP de toutes les actions contribueraient à l’effort de redressement des comptes publics, à l’exception de l’action n° 5 Prestations d’appui et support.

Évolution des AE et CP du programme 218 par action, depuis 2016

(en millions d’euros)

 

LFI 2016

LFI 2017

PLF 2018

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 1 État-major et politiques transversales

335,0

334,3

313,4

313,4

304,0

304,0

dont titre 2

175,5

175,5

160,3

160,3

145,2

175,5

dont hors titre 2

159,5

158,9

153,1

153,1

158,8

158,8

Action n° 2 Expertise, audit, évaluation et contrôle

71,9

71,5

69,6

69,6

75,1

73,7

dont titre 2

68,3

68,3

66,4

66,4

70,2

68,3

dont hors titre 2

3,5

3,1

3,3

3,3

4,9

3,5

Action n° 5 Prestations d’appui et support

454,0

421,3

455,1

461,6

419,1

433,2

dont titre 2

185,8

185,8

206,7

206,7

201,2

185,8

dont hors titre 2

268,1

235,4

248,4

254,9

217,9

232,0

Action n° 7 Pilotage des finances publiques

et projets interministériels

168,0

166,2

165,3

163,3

187,2

193,1

dont titre 2

69,9

69,9

73,7

73,7

82,8

69,9

dont hors titre 2

98,0

96,3

91,6

89,6

104,3

110,2

Total

1 028,8

993,3

1 003,4

1 007,8

985,3

1 003,9

dont titre 2

499,6

499,6

507,0

507,0

499,5

499,6

dont hors titre 2

529,2

493,7

496,4

500,8

485,8

504,4

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

2.   Une dépense stable hors titre 2

Les crédits prévus pour les dépenses hors personnel dans le cadre du PLF 2018 s’élèvent à 485,83 millions d’euros en AE et 504,44 millions d’euros en CP soit une baisse de 2,1 % en AE et une hausse de 0,7 % en CP par rapport à la LFI 2017.

L’action n° 1 État-major et politiques transversales vise à développer l’unité et la coordination entre les programmes et les directions des ministères économiques et financiers, à travers l’élaboration et la mise en œuvre des politiques transversales. Elle rassemble à ce titre les crédits de Tracfin (hors titre 2 uniquement), de l’agence du patrimoine immatériel de l’État, du service de la communication (SIRCOM), de la direction des affaires juridiques (DAJ), ou du médiateur des ministères économiques et financiers, et retrace les politiques ministérielles d’action sociale, de santé et de sécurité au travail.

Les crédits de l’action n° 1 augmentent de 3,7 % en AE et en CP, essentiellement en raison d’une remise à niveau des crédits d’action sociale qui avaient bénéficié en 2017 d’une mesure d’autofinancement à partir des trésoreries des associations mettant en œuvre cette politique.

L’action n° 2 Expertise, audit, évaluation et contrôle regroupe les moyens de l’Inspection générale des finances (IGF), du contrôle général économique et financier CGEFI, du Conseil de normalisation des comptes publics (CNoCP), de la commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC), de la commission de certification des comptes des organismes payeurs des dépenses financées par les Fonds européens agricoles (CCCOP), ou de l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL).

Elle enregistre une augmentation de 48,6 % en AE et de 5,9 % en CP. La hausse en AE résulte du renouvellement en 2018 du loyer de l’Autorité de régulation des jeux en ligne, et en CP de crédits transférés du programme 134 Développement des entreprises et régulations pour la prise en charge d’une nouvelle mission du CGEFI.

L’action n° 5 Prestations d’appui et de support finance notamment l’informatique, l’immobilier et la logistique des services centraux, ainsi que l’IGDPE et le service commun des laboratoires partagé entre la DGDDDI et la DGCCRF. Cette action connaît une baisse de 12,3 % en AE et de 9 % en CP due principalement à une réévaluation à la baisse des loyers budgétaires.

Enfin, l’action n° 7 Pilotage des finances publiques et projets interministériels regroupe les moyens affectés à la DB, à l’AIFE, au centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines (CISIRH), à la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) et à la DAE.

Les crédits sont en hausse de 13,8 % en AE et de 23 % en CP, pour permettre le financement de projets de modernisation et de transformation des ministères ainsi que le développement du système d’information de la direction des achats de l’État.

3.   Une saine gestion des dépenses de personnel du programme

a.   Une diminution des crédits de titre 2 en 2017

Les crédits de titre 2 connaissent une baisse de 1,5 % entre 2017 et 2018, résultant de la réduction des effectifs du programme.

Le schéma d’emplois était fixé à – 108 ETP en 2016, – 18 ETP en 2017, et est prévu à – 50 ETP pour 2018. Le programme 218 participe donc de manière significative à la politique de réduction des effectifs conduite au sein des ministères économiques et financiers.

La répartition prévisionnelle des emplois par action est détaillée dans le tableau suivant (en ETPT).

Évolution du plafond autorisé d’emplois du programme 218 par action, depuis 2016

(en ETPT)

 

LFI 2016

LFI 2017

PLF 2018

Action n° 1 État-major et politiques transversales

2 092

2 026

1 899

Action n° 2 Expertise, audit, évaluation et contrôle

520

546

549

Action n° 5 Prestations d’appui et support

2 093

2 174

2 182

Action n° 7 Pilotage des finances publiques

824

828

873

Total

5 529

5 574

5 503

Source : réponses aux questionnaires parlementaires.

L’application du décret du 18 mai 2017 relatif aux cabinets ministériels ([28]) s’est traduite par une réduction des effectifs des cabinets ministériels portés par l’action n° 1. Par ailleurs, le renforcement de la DGAFP, effectif en gestion 2017 et pris en compte en PLF 2018, explique l’augmentation des crédits de l’action 7 (+ 12,4 % par rapport à la LFI 2017) et des ETPT (+ 45).

b.   Des effectifs en recul dans les cabinets ministériels des ministères économiques et financiers

Le programme 218 porte les crédits des emplois des cabinets des ministères économiques et financiers. Un « jaune » budgétaire annexé au projet de loi de finances ([29]) présente des éléments d’information relatifs aux effectifs et aux crédits alloués aux cabinets ministériels.

Le rôle et la composition des cabinets connaissent cette année une forte évolution : le décret du 18 mai 2017 précité limite strictement le nombre de membres de cabinet à dix pour un ministre, huit pour un ministre délégué et cinq pour un secrétaire d’État.

En outre, une circulaire du Premier ministre ([30]), rappelle ces nouvelles règles et invite à revoir les relations entre administrations et cabinets ministériels. Ainsi, « d’une part, les cabinets doivent être centrés sur des fonctions politiques et veiller à l’explication de l’action et de la communication relative à celle-ci. D’autre part, les directeurs d’administration centrale ont en charge de mener à bien les politiques publiques dans le cadre de l’action gouvernementale. »

Au 1er août 2017, date du dernier recensement, on comptait 25 membres de cabinet dans les ministères économiques et financiers (ministère de l’Économie et de finances et ministère de l’Action et des comptes publics), soit 44 emplois de moins qu’en 2016. L’évolution des compétences respectives des membres du Gouvernement, et la diminution du nombre de membres du Gouvernement en charge de ministères économiques et financiers (de deux ministres et trois secrétaires d’État au 1er août 2016 à deux ministres au 1er août 2017) expliquent partiellement cette évolution. Sur l’ensemble des ministères, les effectifs des cabinets ont été sensiblement réduits. En moyenne, entre 2007 et 2011, on comptait 597 membres de cabinet. Entre 2012 et 2016, ce nombre était de 522. En 2017, il s’établit à 300, soit une diminution de près de moitié.

La dotation destinée à financer les indemnités de sujétions particulières (ISP) des cabinets des ministères économiques et financiers s’élève à 1,42 million d’euros en 2017, contre 2,38 millions l’année précédente. Pour l’ensemble des ministères, la dotation s’établit à 21,1 millions, contre 25,8 millions en 2016.

 


—  1  —

   DEUXIème partie : la MISSION ACTION ET TRANSFORMATION PUBLIQUES

I.   LA MISSION ACTION ET TRANSFORMATION PUBLIQUES

La mission Action et transformation publiques, sous la responsabilité du ministre de l’action et des comptes publics, porte deux programmes budgétaires :

– le programme 348 Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants, qui a pour objectif d’améliorer la performance énergétique de ces bâtiments, de réduire les dépenses consacrées aux dépenses d’entretien correctifs, et de pouvoir développer une politique préventive d’entretien plus économique sur la durée, est doté d’un milliard d’euros sur cinq ans ;

– le programme 349 Fonds pour la transformation de l’action publique, qui financera, sur la base d’appels à projets, les coûts d’investissement nécessaires à la mise en œuvre de réformes structurelles, est doté de 700 millions d’euros sur cinq ans.

La programmation pluriannuelle des crédits de paiement est présentée dans le tableau suivant.

Plafonds de la mission (hors contribution de l’État au CAS pensions)

(en millions d’euros)

 

2018

2019

2020

2021-2022

Total

Plafond des crédits de paiement

20

280

550

850

1 700

Source : projet annuel de performances.

L’ensemble des crédits de la mission est labellisé au titre du Grand plan d’investissement (GPI). En cohérence avec le principe général qui gouverne l’allocation des crédits de ce plan, la programmation pluriannuelle pourra être modifiée annuellement, notamment dans le cas de réallocations vers ou depuis d’autres actions GPI.


II.   LE PROGRAMME 348 rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi occupants

Le Gouvernement propose de créer un programme à vocation interministérielle permettant de financer la rénovation des cités administratives, et plus généralement des sites occupés par plusieurs services de l’État et de ses opérateurs.

En effet, les cités administratives et, plus généralement, les sites multi-occupants, représentent une part significative du parc immobilier occupé par l’État et ses opérateurs. Les 50 cités administratives réparties sur l’ensemble du territoire s’étendent sur près de 800 000 m2 de locaux.

Le choix des cités administratives comme bénéficiaires du programme repose sur une triple justification :

– les cités administratives constituent la forme la plus connue, et la plus ancienne, de la politique d’optimisation des moyens et de mutualisation du parc immobilier par les services des différents ministères et les opérateurs, appelée à se développer dans les années à venir ;

– la plupart des bâtiments composant les cités administratives, construits dans les années 1960 et 1970, sont vieillissants, et les investissements réalisés jusque-là n’ont pas permis un entretien suffisant. Les besoins actuels, en termes de rénovation thermique notamment, nécessitent un investissement fort ;

– l’accueil du public dans ces cités, et notamment l’accès des personnes à mobilité réduite, reste largement perfectible, tandis que les conditions de travail des agents pâtissent parfois d’un patrimoine immobilier insuffisamment fonctionnel.

Ce programme sera mis en œuvre sur cinq ans par la Direction de l’immobilier de l’État (DIE).

La première année sera consacrée à la réalisation d’un diagnostic permettant de définir l’état du parc immobilier et des besoins du service public. Ce diagnostic permettra également de procéder à un recensement fin des occupants des cités administratives, car ceux-ci évoluent régulièrement. À ce jour, les principaux occupants sont les services de l’éducation nationale, de la DGFiP, des préfectures, et des directions départementales interministérielles.

Lors de son audition par le Rapporteur spécial, la directrice de l’immobilier de l’État, Mme Nathalie Morin, a souligné que, si un investissement d’un milliard d’euros représente un effort très important dans un contexte budgétaire contraint, ce montant ne sera pas suffisant pour financer la rénovation de l’ensemble du parc. De plus, les crédits mobilisés seront amortis à long terme
– entre vingt et trente ans – ce qui implique de sélectionner finement les projets viables. Il s’agit dès lors d’éviter tout risque de « saupoudrage », et de concentrer les moyens disponibles sur les investissements les plus efficients à long terme.

Toutes les cités ne présentent en effet pas les mêmes enjeux : leurs dimensions sont variables – de quelques milliers de mètres carrés pour les plus modestes, à 56 000 m2 pour les plus importantes, comme celle de Bordeaux –, et leurs besoins en termes de rénovation sont, eux aussi, très différents.

Selon la DIE, plusieurs principes devront donc guider le choix des projets de rénovation :

– le retour sur investissement doit être maximisé ;

– les cités dont le coût de rénovation est trop élevé et approcherait le coût de construction d’une cité nouvelle seront écartées ;

– les cités dont l’avenir n’est pas assuré, en raison des évolutions du service public, ne seront pas non plus prioritaires.

Parmi les cités qui pourraient nécessiter d’importants travaux de rénovation, celles de Lyon, Lille, Nantes, Nanterre et Bordeaux ont notamment été évoquées.

La DIE a rappelé que, dans le processus de sélection des cités administratives bénéficiaires, se posait avait tout la question de la pertinence de la présence territoriale des services de l’État, en fonction des besoins locaux du service public.

Si la construction de cités nouvelles n’est pour l’instant pas envisagée, la DIE est ouverte aux projets d’extension de bâtiments existants, lorsque ceux-ci permettraient d’accroître la mutualisation, et de générer ainsi des économies nouvelles à long terme.

La DIE insiste sur le fait que les projets retenus le seront sur la base de critères transparents et rendus publics. Tous les projets seront présentés en Conférence nationale de l’immobilier public (CNIP).

Le tableau suivant présente la répartition pluriannuelle indicative des crédits du programme.

Répartition pluriannuelle des crédits du programme 348

(en millions d’euros)

 

2018

2019

2021

2021-2022

Total

Autorisations d’engagement

20

280

300

400

1 000

Crédits de paiement

20

180

250

550

1 000

Source : projet annuel de performances.

Les 20 millions d’euros en AE et CP proposés pour 2018 permettront de financer les études préparatoires à la réalisation du diagnostic, ces études étant réalisées par un prestataire extérieur pour le compte de la DIE.

Les indicateurs de performance du programme (« performance énergétique » et « investir en vue de réduire les dépenses immobilières relatives aux cités administratives aux sites multi-occupants ») seront définis plus précisément suite à cette phase de diagnostic.

Le Rapporteur spécial se félicite de cette initiative. Il insiste sur l’importance de l’effort d’investissement réalisé par le Gouvernement, et suivra avec attention la conduite de ces travaux.


III.   LE PROGRAMME 349 fonds pour la transformation de l’action publique

Le programme 349 constitue le bras armé du programme « Action publique 2022 ». Présenté par le Premier ministre le 13 octobre 2017, ce programme poursuivra trois objectifs prioritaires ([31]) :

– « améliorer la qualité des services publics, en développant la relation de confiance entre les usagers et les administrations, et en travaillant prioritairement sur la transformation numérique » ;

– « offrir aux agents publics un environnement de travail modernisé en les impliquant pleinement dans la définition et le suivi des transformations » ;

– « accompagner rapidement la baisse des dépenses publiques avec un engagement ferme : réduire de trois points la part de la dépense publique dans le PIB d’ici 2022 ».

Ce plan de transformation ministériel repose sur trois éléments, qui permettront d’établir un diagnostic, entre octobre et mars 2018 :

– les travaux du Comité Action publique 2022. Composé de personnalités qualifiées, de chefs d’entreprises, de parlementaires, d’élus locaux et de hauts fonctionnaires, ce comité sera chargé de produire un rapport d’ici la fin du premier trimestre 2018, identifiant « des réformes structurelles et des économies significatives et durables, sur l’ensemble du champ des administrations publiques » ;

– le Grand Forum de l’action publique à l’écoute des agents publics et des usagers, qui permettra de « recueillir les attentes et propositions des citoyens », et de « réfléchir avec les agents publics à un cadre de travail modernisé ». Treize forums régionaux seront organisés en novembre et décembre 2017 ;

– cinq chantiers transversaux de transformation, qui porteront sur la simplification administrative et l’amélioration de la qualité de service, la transformation numérique, la rénovation du cadre des ressources humaines, 1’organisation territoriale des services publics et la modernisation de la gestion budgétaire et comptable.

Un Comité Jeune Action Publique 2022, composé d’étudiants et de jeunes actifs, sera lancé en parallèle.

L’élaboration et la mise en œuvre opérationnelle des plans de transformation débuteront à partir de mars 2018, après les arbitrages du Président de la République.

Placé sous la responsabilité de la directrice du budget, et à vocation interministérielle, le Fonds pour la transformation de l’action publique financera ainsi, sur la base d’appels à projets, les investissements nécessaires à la mise en œuvre de réformes structurelles de l’action publique.

Les modalités d’organisation et de pilotage des appels à projets seront définies par un comité de sélection, présidé par le ministre de l’action et des comptes publics. Il sera notamment composé d’un représentant du service pilotant le Grand plan d’investissement, du SGMAP, de la direction du budget et d’une personnalité qualifiée ayant une expérience dans le financement. Ce comité devra établir une doctrine d’emploi du fonds, dont le secrétariat sera assuré par la direction du budget. Le secrétariat d’État au Numérique sera associé aux décisions s’agissant des projets informatiques de l’État.

Le comité de sélection fixera les règles de contractualisation entre le ministre et les porteurs de projets. Ces contrats de transformation, qui identifieront les moyens budgétaires dédiés à l’action de transformation, préciseront notamment les modalités de calcul et de suivi des économies attendues.

Les projets portés par le programme 349 doivent permettre un retour sur investissement élevé en termes d’économies pérennes de fonctionnement : un euro investi aura vocation à conduire à un euro pérenne d’économies au bout de trois ans.

La répartition pluriannuelle indicative des crédits du fonds est la suivante.

Répartition pluriannuelle des crédits du programme 349

(en millions d’euros)

 

2018

2019

2020

2021-2022

Total

Autorisations d’engagement

200

500

700

Crédits de paiement

0

100

300

300

700

Source : projet annuel de performances.

Deux objectifs et trois indicateurs permettront de suivre l’efficacité du fonds :

– l’atteinte de l’objectif n° 1 « s’assurer d’un fonctionnement efficient du fonds pour la transformation de l’action publique » sera mesurée par l’indicateur « efficience du fonds pour la transformation de l’action publique » ;

– l’atteinte de l’objectif n° 2 « s’assurer de l’efficacité des projets financés » sera mesurée par les deux indicateurs « part des projets entraînant une hausse significative de satisfaction auprès des agents et des usagers » et « retour sur investissement des projets financés ».

Le Rapporteur spécial salue la création de ce fonds, qui permettra d’accompagner efficacement la modernisation de l’action publique.

   TROISIème PARTIE : ENJEUX POUR L’AVENIR

I.   LE DROIT À L’ERREUR : UN DÉFI à RELEVER

1.   Une philosophie nouvelle

Les réflexions tendant au développement d’un « droit à l’erreur » constituent un élément important de la stratégie du Gouvernement en matière de modernisation de l’action publique.

Sa philosophie est claire : face à l’inflation normative, à la complexification des règles, et à l’affaiblissement de la qualité du droit, régulièrement dénoncés par le Conseil d’État ([32]), l’administré peine parfois à déterminer la norme applicable, et ainsi, à connaître ses droits et ses devoirs. La sanction de l’administration suite au franchissement d’une règle dont l’administré aurait méconnu l’existence, apparaîtrait, dans certains cas, légale, certes, mais serait vécue comme injuste, et prompte à éroder, sinon à rompre, le lien de confiance qui l’unit à l’État.

Un premier essai de transcription d’un tel droit à l’erreur dans la loi pourrait consister, de manière générale et abstraite, à inviter l’administration à ne pas sanctionner un administré de bonne foi lorsque celui-ci a méconnu une règle, la première fois qu’il l’applique, en satisfaisant à une obligation déclarative.

Un tel énoncé, séduisant dans son principe, trouve néanmoins rapidement ses limites. D’une part, son champ d’application est limité : on ne saurait reconnaître de droit à l’erreur en matière pénale, en cas d’atteinte à la santé ou à la sécurité, ou en cas de contradiction avec le droit européen. D’autre part, le droit à l’erreur est déjà, par certains côtés, une réalité, en matière fiscale notamment, comme cela sera développé dans la suite de cet exposé.

Le développement du droit à l’erreur correspondrait ainsi, plus profondément, à un changement de culture administrative, réorientée, de manière schématique, d’une culture du « contrôle » à une culture du « conseil » et de l’accompagnement.

Le Rapporteur spécial a conscience de ces enjeux et a souhaité, dans le cadre de ses travaux, interroger les administrations fiscale et douanière, ainsi que les représentants du personnel de ces directions, sur le développement du droit à l’erreur dans leurs domaines de compétence respectifs.

2.   Un principe déjà bien ancré dans le quotidien des administrations fiscale et douanière

En droit et dans la pratique, le droit à l’erreur constitue déjà une réalité tangible pour les administrations fiscale et douanière.

a.   La reconnaissance de l’erreur de bonne foi

En matière fiscale, une erreur de bonne foi ne donne lieu à l’application d’aucune sanction, qu’elle soit constatée lors d’un contrôle ou réparée spontanément.

Comme le précise le Bulletin officiel des finances publiques ([33]), « les omissions ou inexactitudes que peuvent commettre les contribuables dans leur déclaration sont présumées involontaires. Dès lors, quels que soient les impôts, droits, taxes ou redevances en cause, les majorations prévues par l’article 1729 du code général des impôts ne peuvent être appliquées que si l’administration établit le caractère délibéré de l’omission ou de l’inexactitude. »

Il incombe à l’administration de démontrer la mauvaise foi de l’administré. L’article 195 A du livre des procédures fiscales dispose qu’en cas de « contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d’affaires, des droits d’enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l’administration ».

Les rectifications spontanées d’erreurs par le contribuable, ou les rectifications effectuées par l’administration, donnent seulement lieu à l’application de l’intérêt de retard ([34]), qui n’est pas une sanction mais la compensation au profit du Trésor du prix du temps, lorsque la bonne foi du contribuable n’est pas en cause.

En outre, plusieurs dispositifs permettent de rectifier d’éventuelles erreurs ou omissions. Ainsi, la mention expresse ([35]) permet, en cas de doute lors d’une déclaration, de se prémunir d’éventuelles pénalités. La procédure de proposition de rectification ([36]) donne aux services la possibilité de signaler une discordance entre les informations déclarées et celles détenues par la DGFiP, proposition qui peut être acceptée par le contribuable. La procédure de régularisation ([37]) permet au contribuable de régulariser sa situation en cours de vérification de comptabilité ou d’examen de comptabilité.

Enfin, des dispositifs de médiation, comme le conciliateur fiscal, jouent un rôle de régulation. L’administration douanière a souligné que, s’agissant de l’application des sanctions, elle a « toujours eu le souci de tenir compte de la bonne foi des opérateurs économiques » à travers le dispositif de la transaction.

b.   La pratique du rescrit

Le droit à l’erreur infuse également l’action de l’administration. Divers dispositifs permettent à l’administré d’interroger l’administration sur l’application du droit.

Mis en œuvre depuis 1987, le rescrit permet à l’administré d’obtenir des explications engageant l’administration fiscale.

Le rescrit peut être défini comme une « prise de position formelle de l’administration, qui lui est opposable, sur l’application d’une norme à une situation de fait décrite loyalement dans la demande présentée par une personne et qui ne requiert aucune décision administrative ultérieure » ([38]).

L’article L. 80 A du livre des procédures fiscales organise ainsi l’opposabilité de l’interprétation administrative des normes fiscales, sans appréciation d’une situation de fait, tandis que l’article L. 80 B permet d’obtenir une prise de position formelle sur la situation de l’administré au regard d’un texte fiscal. Ces deux articles s’appliquent aux contributions directes comme indirectes.

Si, en principe, les rescrits fiscaux ne peuvent pas être contestés par le contribuable, le juge administratif a récemment posé une exception, lorsque l’application de la position prise par l’administration entraînerait des effets notables autres que fiscaux ([39]). Dans ce cas, le contribuable doit préalablement demander à l’administration de procéder à un second examen de sa situation dans les conditions prévues par l’article L. 80 CB du livre des procédures fiscales.

D’après les données publiées dans le rapport annuel de la DGFiP sur l’activité en matière de rescrit ([40]), ce dispositif est largement répandu, puisque 18 291 rescrits ont été traités par l’administration fiscale en 2016. Ces demandes sont essentiellement traitées par les services déconcentrés (97,6 % en 2016).

Une forme de rescrit existe également en matière douanière.


Le rescrit douanier

La matière douanière est également soumise au rescrit :

– pour ce qui concerne les taxes nationales recouvrées en application du code des douanes, depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005. L’article 345 bis du code des douanes encadre l’interprétation de l’administration des normes fiscales relevant de ce code et les positions que l’administration est susceptible d’adopter à ce titre ;

– s’agissant de la mise en œuvre du code des douanes de l’Union européenne (CDU), et du recouvrement des ressources propres, depuis la fin des années 1970, l’administration des douanes est soumise à une forme de rescrit prévu par les dispositions européennes en matière de dette douanière. Il s’agit notamment de l’application de l’article 119 du CDU qui fait référence à « l’erreur des autorités douanières elles-mêmes » non raisonnablement décelable par le redevable de bonne foi. L’article 120 du même code impose, pour des raisons d’équité, une remise ou un remboursement de la dette douanière ou son recouvrement lorsque le redevable est placé dans une situation particulière résultant de circonstances n’impliquant ni manœuvres ni négligence de sa part. Le caractère décelable de l’erreur et la notion de circonstances n’impliquant ni manœuvres ni négligence sont appréciés au regard de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, très fournie en la matière.

En outre, le CDU met en place un système permettant aux opérateurs d’obtenir de l’administration un renseignement sur le classement tarifaire (renseignement tarifaire contraignant, ou RTC) d’une marchandise ou sur son origine (renseignement contraignant sur l’origine, ou RCO), avant tout dédouanement. Ces RTC ou RCO sont opposables aux autorités douanières de tous les États membres de l’UE.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Le Conseil d’État a récemment souligné les effets positifs du rescrit fiscal en matière de sécurité juridique ([41]), puisque celui-ci protège et prémunit contre un changement d’avis de l’administration, et a suggéré l’extension de ce dispositif aux autres prélèvements obligatoires, ainsi qu’à d’autres champs de l’activité économique.

Néanmoins, les directeurs généraux des finances publiques, M. Bruno Parent, et des douanes, M. Rodolphe Gintz, ont tous deux souligné, lors de leur audition par le Rapporteur spécial que ce dispositif restait encore sous-utilisé. Cette situation pourrait provenir d’un manque de communication et de publicité de la part de l’administration, comme de la peur de l’administré de révéler à l’administration une éventuelle irrégularité.

c.   L’accompagnement des particuliers et des entreprises dans leurs démarches

L’administration propose des prestations de conseil gratuites aux administrés, particuliers comme professionnels, afin de les aider à remplir leurs obligations dans les meilleures conditions.

La DGFiP accompagne les usagers en s’appuyant notamment sur le développement de l’offre numérique et des outils de contact à distance. L’amélioration du site internet, la facilitation des démarches en ligne à travers la création d’une messagerie sécurisée, l’organisation de campagnes d’information, de communication et de réception au guichet, sont autant d’exemples de la mobilisation de l’administration fiscale.

Au sein de la Douane, les cellules-conseil aux entreprises, implantées au sein des pôles d’action économique de chacune des directions régionales, et ainsi réparties sur l’ensemble du territoire, ont pour mission de recevoir, d’informer et d’orienter gratuitement les entreprises vers les procédures de dédouanement et les régimes douaniers les mieux adaptés à la structure de leurs opérations de commerce international. En 2016, les PAE ont ainsi conseillé 2 485 entreprises.

3.   Des développements bienvenus, mais à délimiter précisément

Les directions générales des finances publiques et des douanes et droits indirects se sont montrées enthousiastes quant au développement du droit à l’erreur.

Si l’erreur est déjà reconnue en droit, des avancées notables peuvent en effet être apportées.

L’extension du droit à l’erreur en matière fiscale et douanière

– En matière fiscale

La reconnaissance générale d’un droit à l’erreur pourra avoir pour effet de l’étendre aux quelques cas où il n’existe pas déjà, comme dans le cas des obligations déclaratives des tiers-déclarants, par exemple. Elle pourra aussi conduire à favoriser les démarches de correction ou de demande d’avis préalable (rescrit).

– En matière douanière

En ce qui concerne les contributions indirectes, un redevable d’un droit ou d’une taxe recouvrés par l’administration des douanes pourra rectifier les éventuelles erreurs dans sa déclaration ou régulariser sa situation en cas de défaut de respect de l’obligation de déclaration. Dès lors que ces erreurs ou absence de déclaration ont été́ commises de bonne foi, le redevable qui paie les droits et taxes dus n’encourra aucune sanction. Cette rectification ou régularisation peut être effectuée sur demande de l’administration ou de manière spontanée. Elle peut également intervenir dans le cadre d’un contrôle.

En ce qui concerne les taxes nationales recouvrées sur le fondement du code des douanes, la reconnaissance du droit à l’erreur procède de la même logique. Seront cependant exclues les ressources propres de l’Union européenne, lesquelles sont perçues dans le cadre déclaratif prévu par le règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union (CDU) et ses règlements d’application. En effet, le CDU, acte européen d’application immédiate et directe, prévoit une procédure spécifique de rectification des déclarations en douane.

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Les administrations ont néanmoins rappelé que son extension devrait conduire à un recul sensible de leurs résultats, en matière de montants de droits et taxes redressés, et de pénalités, notamment.

Elles ont également relevé que, du point de vue de la gestion des ressources humaines, des évolutions spécifiques seraient à prévoir. Ainsi, afin de rassurer l’administré quant aux suites d’une demande ayant révélé une situation irrégulière – l’administré ayant révélé une telle situation lors d’une demande de conseil pouvant craindre une sanction –, les compétences des services de contrôle et de conseil seraient mieux définies, et feraient l’objet d’une séparation plus stricte.

De leur côté, les organisations syndicales ont souligné que le conseil et l’accompagnement des administrés faisaient déjà partie de leur quotidien, et se sont inquiétées du risque de dessaisissement de l’administration de ses moyens d’action.

L’UNSA DGFiP ne se dit « pas opposée à ce droit à l’erreur, mais il doit être encadré et surtout assurer le paiement de l’impôt dû », tandis que la CFTC DGFiP l’assimile ainsi à « une fausse réponse à la complexité de la norme fiscale ». Le syndicat Solidaires-Douanes se dit « clairement rétif sur cette idée », car « les services ont déjà connu un alourdissement des procédures qui rend l’action au quotidien beaucoup plus laborieuse », et « une difficulté à définir la sphère de l’erreur et celle de la fraude peut se faire jour et nourrir un débat contentieux sans fin. Cela peut aussi introduire un décalage supplémentaire entre les opérateurs selon leur taille ou leur influence. »

Le Rapporteur spécial prend bonne note de ces éléments. Si des améliorations peuvent sans doute être apportées, au niveau juridique, au droit à l’erreur en matière fiscale et douanière, il appelle les administrations fiscale et douanière à développer les outils de conseil et d’accompagnement existants afin d’accompagner la transformation de la culture administrative qu’il appelle de ses vœux.


II.   LA COOPÉRATION INTERinstitutionnelle EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE aux finances publiques : DES ÉCHANGES d’INFORMATIONS À intensifier

1.   Des risques de déperdition d’information

Au sein des ministères financiers, les missions fiscales (recouvrement, contrôle et contentieux) sont partagées entre les directions générales des finances publiques et des douanes et droits indirects.

La mission fiscale de la DGDDI concerne principalement les taxes sur les marchandises (droits de douane, alcools, tabacs, énergie, déchets, moyens de transport, etc.), tandis que la DGFiP a compétence pour l’ensemble des autres impôts et taxes. Cette séparation de principe fait l’objet d’exceptions, en particulier pour la TVA, qui est collectée par ces deux administrations.

Cette répartition, qui s’explique notamment par considérations historiques, peut être à l’origine d’une dispersion et de perte d’informations, voire occasionner des réticences à coopérer, chaque administration cherchant avant tout à atteindre les objectifs qui lui sont assignés, alors qu’une mutualisation aurait pu permettre de meilleurs résultats.

Les ministères financiers ont conscience de ces difficultés, et ont réalisé des efforts importants pour améliorer la coopération interinstitutionnelle, à travers, notamment, le développement de services ou de structures interministérielles dont l’organisation, souple et évolutive, permet d’associer les différentes parties prenantes.

2.   La DNLF, une structure légère à l’efficacité reconnue

Ainsi, la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) a été créée en 2008 pour assurer le pilotage de la coordination des administrations et des organismes publics en charge de la lutte contre la fraude fiscale, douanière et sociale.

Dotée d’effectifs resserrés (une douzaine de cadres, aux profils diversifiés), la DNLF permet de mobiliser les acteurs et de faire émerger des pistes d’amélioration en matière de lutte contre la fraude, dans une relation de confiance. Au niveau local, elle pilote les comités opérationnels de lutte contre la fraude, qui facilitent l’échange d’informations entre les opérationnels, sur le terrain.

Au niveau national, l’action de la délégation a permis des avancées significatives en matière de coopération interinstitutionnelle : réalisation d’une cartographie des risques dans le domaine social, transmission d’information entre la DGFiP et l’inspection du travail en matière de lutte à la fraude TVA, lancement du groupe de travail sur le data mining, par exemple.

En matière d’échanges de renseignements, en particulier, le Rapporteur spécial a reçu de la DNLF des documents présentant notamment les ouvertures d’accès aux applications de la DGFiP et aux bases sociales, à des organismes externes. Il se félicite de ces initiatives, qui participent d’une meilleure utilisation de l’information disponible, et améliorent sensiblement les résultats de la lutte contre la fraude.

La Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF), une organisation utile pour faire avancer la coopération interinstitutionnelle

Créée par le décret du 18 avril 2008 modifié (1) et placée par délégation du Premier ministre auprès du ministre du budget et des comptes publics, la Délégation nationale à la lutte contre la fraude a pour mission le pilotage de la coordination des administrations et des organismes publics en charge, chacun dans son domaine, de la lutte contre la fraude fiscale, douanière et sociale.

Son objectif est de professionnaliser les démarches d’échanges entre organismes, d’assurer l’absence de déperdition d’informations entre entités, de mettre en évidence les mesures à prendre pour combler les lacunes juridiques ou les failles opérationnelles des dispositifs antifraudes. Elle rassemble ainsi les administrations des ministères chargés du budget, du travail, de la sécurité sociale, de la santé, de la justice, de l’intérieur, des caisses de sécurité sociale et de Pôle emploi.

La DNLF est constituée d’une douzaine de cadres aux profils diversifiés (magistrats, auditeurs, agents de l’administration fiscale, économètres, etc.).

Elle pilote les comités opérationnels départementaux de lutte contre la fraude (CODAF) qui réunissent, sous la co-présidence du préfet de département et du procureur de la République du chef-lieu du département, les services de l’État (police, gendarmerie, administrations préfectorale, fiscale, douanière et du travail), et les organismes locaux de protection sociale (Pôle emploi, URSSAF, caisses d’allocations familiales, d’assurance maladie et de retraite, Régime social des indépendants et Mutualité sociale agricole). Ces réunions ont pour but d’améliorer la connaissance réciproque entre les services et les échanges de renseignements, et d’organiser des opérations conjointes, notamment. La DNLF apporte aux CODAF un appui technique et juridique.

Les CODAF détectent des fraudes grâce aux opérations concertées (75 % des fraudes environ), et grâce aux signalements (25 %). En 2015, les 548 réunions de CODAF ont permis d’organiser 17 024 actions au niveau local, pour un impact financier estimé à 289,4 millions d’euros.

(1) Décret n° 2008-371 du 18 avril 2008 relatif à la coordination de la lutte contre les fraudes et créant une délégation nationale à la lutte contre la fraude (lien).

3.   L’AGRASC, une double tutelle innovante

Des initiatives en apparence modeste peuvent également améliorer significativement l’efficacité de l’action de l’État en facilitant le recouvrement de créances fiscales.

Créée en 2010, et placée sous la double tutelle du ministère de la justice et des ministères financiers, l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) centralise les saisies (comptes bancaires, numéraire, biens meubles et immeubles) dans le cadre de procédures pénales, veille à leur bonne gestion, procède aux ventes des biens, avant ou après jugement, et s’assure du reversement du produit de leur vente au budget général de l’État ou au fonds de concours « stupéfiants » géré par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca).

L’AGRASC informe également les créanciers publics et les victimes de toute restitution d’un bien non confisqué, afin que soit assuré le paiement de toute créance, fiscale, douanière ou sociale dans le premier cas, civile dans le second.

Si le montant des recettes issues des confiscations gérées par l’AGRASC peut paraître faible par rapport aux résultats de la lutte contre la fraude fiscale (73,5 millions d’euros entre 2011 et 2016), l’action de cette agence, en plus de contribuer à l’efficacité de la politique pénale – la confiscation des biens financés par le crime étant parfois plus dissuasive que les peines de prison – a permis le financement d’investissements utiles.

Le service commun des laboratoires Douanes – DGCCRF a ainsi bénéficié d’un nouvel équipement d’analyse des substances (un chromatographe LC‑Q‑TOF), inauguré en 2014, et, plus récemment les services des Douanes de Roissy ont reçu de nouveaux équipements de détection performants.

4.   Des efforts à consolider

Ces initiatives sont louables, mais le Rapporteur spécial insiste sur la nécessité d’aller plus loin dans l’échange d’informations et la coopération interinstitutionnelle. Les travaux préparatoires à la rédaction de ce rapport ont en effet souligné la persistance de difficultés à travailler ensemble, du fait d’une forme de méfiance culturelle envers d’autres administrations perçues comme potentiellement concurrentes.

Lors de son audition par le Rapporteur spécial, le directeur de la cellule de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (Tracfin), M. Bruno Dalles, a rappelé qu’en matière d’échanges de renseignements, la France avait fait le choix d’un modèle fondé sur la transmission d’informations à la demande des acteurs, et non, comme cela est le cas dans d’autres pays, comme aux États-Unis, d’une mise en commun de l’ensemble des informations détenues par les services de renseignement, dans lesquels les différentes administrations pourraient ensuite « piocher ». Cette structure permet notamment aux différents services d’analyser, d’enrichir et de filtrer l’information, puis de diffuser les éléments les plus pertinents.

Le Rapporteur spécial souligne la pertinence de ce choix, et insiste, dès lors, sur la nécessité de faciliter l’accès à cette information, dans un cadre respectueux des libertés publiques et des garanties exigées par la Commission nationale informatique et libertés, à travers le développement des accès et l’interconnexion des bases.


—  1  —

   EXAMEN EN COMMISSION

La commission poursuit l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2018 (n° 235).

Après l’audition de M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics (voir le compte rendu de la commission élargie du 2 novembre 2017 à 15 heures ([42])), la commission examine les crédits des missions Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Action et transformation publiques ainsi que les crédits de la mission Régimes sociaux et de retraite et du compte spécial Pensions.

 

Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, M. Laurent Saint-Martin, Mme Cendra Motin et M. Jean-Paul Mattei, la commission adopte les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Puis, suivant l’avis favorable M. Laurent Saint-Martin la commission adopte les crédits de la mission Action et transformation publiques, suivant l’avis favorable de M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial, elle adopte les crédits du compte spécial Gestion du patrimoine immobilier de l’État et sur l’avis favorable de Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale, elle adopte les crédits de la mission Crédits non répartis.

Enfin, suivant l’avis favorable de M. Olivier Damaisin, rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de la mission Régimes sociaux et de retraite et du compte spécial Pensions.

 

Après l’article 55

La commission examine en présentation commune les amendements II-CF277, IICF280 et IICF278 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Ces amendements sont des amendements d’appel. Leur objectif est d’inciter le Gouvernement à une réflexion sur deux indemnités incluses dans le traitement des fonctionnaires.

Il s’agit d’une part de l’indemnité de résidence, dont le calcul repose sur des critères datant des années 1970 : même s’ils sont révisés périodiquement afin d’essayer de correspondre davantage à la réalité des situations locales, je propose qu’elle soit revue à la lumière du travail engagé par le ministre de la cohésion des territoires sur la révision des zonages. D’autre part, à propos du supplément familial de traitement, qui, pour certains bénéficiaires, constitue une part importante de leur rémunération, je souhaite sensibiliser le Gouvernement, dans le cadre de la réforme de grande ampleur de notre politique familiale qui sera prochainement engagée, à la nécessité d’une réflexion sur certains dispositifs spécifiques aux fonctionnaires. Comme il est nécessaire de prendre le temps de la maturation et de la discussion, je retire ces amendements.

Les amendements II-CF277, II-CF280 et II-CF278 sont retirés.

 

Article additionnel après l’article 55 : Rapport du Gouvernement sur l’indemnité de résidence des fonctionnaires

La commission en vient à l’amendement II-CF279 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la pertinence de modifier le zonage de l’indemnité de résidence des fonctionnaires et sur les effets qu’aurait le rattachement de cette indemnité au lieu de résidence des agents et non au plus au lieu de leur résidence administrative.

La commission adopte l’amendement II-CF279.

Article additionnel après l’article 55 : Rapport du Gouvernement sur l’évolution des missions des agents des douanes

La commission est saisie de l’amendement II-CL79 de Mme Danièle Obono, qui fait l’objet de sous-amendements II-CF335 de M. Laurent Saint-Martin.

Mme Danièle Obono. Cet amendement porte sur le programme 302 relatif aux douanes, qui est un des rares au sein de la mission pour lequel les crédits semblent augmenter. Il s’agit, en réalité, d’une hausse de façade. En effet, les missions des douanes ont considérablement évolué depuis une dizaine d’années. L’espace Schengen est en crise profonde, les frontières sont devenues d’une part, des abstractions juridiques et d’autre part des barbelés qui tuent des milliers de migrants poussés à l’exil vers la France et l’Europe. La lutte contre le terrorisme est venue s’ajouter aux missions traditionnelles de ce service. Nous demandons donc à ce qu’il soit établi un bilan précis du ratio entre les missions des services des douanes et les moyens qui leur sont dévolus pour les accomplir.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Il faut avoir à l’esprit que ces multiples demandes de rapport constituent une charge de travail considérable pour les administrations, alors même que nous cherchons à optimiser leur efficacité. J’appellerai donc à la retenue quant à ces demandes, d’autant que les données peuvent être disponibles. C’est aussi le rôle des rapporteurs spéciaux que d’analyser l’adéquation entre les effectifs des administrations et les missions dont elles ont la charge.

Sur cet amendement précis, je reconnais toutefois l’intérêt de votre demande et je propose un sous-amendement pour d’une part élargir le champ de l’étude aux conséquences du Brexit sur l’organisation de la Douane et d’autre part supprimer le troisième alinéa qui risque d’être inconstitutionnel.

La commission adopte le sous-amendement II-CF335 puis elle adopte l’amendement II-CL79 ainsi amendé.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL86 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nos demandes de rapport n’ont pas pour objet de donner plus de travail à des agents qui sont déjà surchargés mais il nous semble nécessaire de cibler un certain nombre de questions budgétaires précises sur lesquelles des données n’existent pas ou sont anciennes. Ici, il s’agit d’aborder l’angle mort de la politique du Gouvernement, le contrôle de nos frontières. La lutte contre la fraude douanière et la contrebande est essentielle pour la santé de nos concitoyens comme pour l’emploi en France. Le risque de dumping social est réel. Il nous faut donc savoir précisément quelle est la part des marchandises importées en France qui ont fait l’objet d’un contrôle douanier et si les moyens humains et financiers des douanes pour effectuer ces contrôles sont suffisants.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Dans le rapport spécial vous verrez que justement la direction des douanes a modifié ses indicateurs de performance pour retenir un plus grande nombre d’indicateurs qualitatifs, initiative que je salue. Vous trouverez dans les prochains rapports de la douane la majeure partie des informations que vous sollicitez. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement II-CL86.

La commission examine l’amendement II-CL85 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Cet amendement demande un rapport sur l’effectivité du contrôle des administrations fiscales en fournissant des informations sur le nombre de fois où un contribuable est contrôlé au regard de son niveau de revenu ou de patrimoine. Il est aussi important de savoir si ces contrôles sont correctement effectués. Des cas récents en matière de sous-évaluation de patrimoines ont, en effet, montré les limites de ces contrôles.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Je vous renvoie à ce qui a été dit par le ministre. Notre majorité souhaite proposer une nouvelle société de la confiance entre l’administration et les usagers et souhaite aller vers une administration du conseil plus que de la sanction. Votre amendement ne va pas dans ce sens. Par ailleurs, il existe d’abondantes statistiques sur ce sujet disponibles sur le site de l’administration des finances.

Mme Danièle Obono. Nous parlons ici d’une administration dont le contrôle est la mission. Elle doit être suffisamment dotée en moyens humains justement pour suivre les dossiers et faire de la prévention pas seulement de la sanction, à l’égard des TPE et des PME notamment. Nous savons tous les effets de l’évasion fiscale sur les finances publiques : il y aurait là un investissement source d’efficacité.

La commission rejette l’amendement II-CL85.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL81 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nous demandons un rapport d’information sur les moyens des administrations face aux pratiques de fraude et d’optimisation fiscales indues et une évaluation du manque à gagner pour les finances publiques résultant du manque de moyens humains et financiers dédiés à la lutte contre ces pratiques, qui constituent un véritable désarmement fiscal.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Avis défavorable.

Mme Émilie Cariou, présidente. Je précise que nous avons obtenu, lors du vote de la loi de règlement, la réalisation d’un document de politique transversale sur les moyens de lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales.

La commission rejette l’amendement II-CL81.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL82 de M. Ugo Bernalicis.  

Mme Danièle Obono. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) représente plusieurs milliards d’euros octroyés par l’État aux entreprises et, en particulier, aux grandes entreprises. Cela mérite au moins d’être contrôlé mais les gouvernements précédents et le gouvernement actuel ont saigné l’administration fiscale. Un bilan de l’adéquation des moyens de l’administration au suivi du CICE est nécessaire.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Je comprends mal la demande. Il pourrait s’agir de tout crédit d’impôt. De toute façon nous allons remplacer le CICE par une baisse de charges. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CL82.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL80 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. L’égalité des droits devant l’impôt est mise à mal par les multinationales qui évitent de payer l’impôt en France ou par les gros contribuables qui font échapper leur patrimoine à l’impôt, alors que les simples contribuables sont normalement assujettis. Ce rapport permettra de faire le point sur le niveau d’impôt qui serait recouvré si l’égalité réelle était respectée.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. L’optimisation fiscale, que je déplore comme vous, est un vrai sujet en particulier quand elle est agressive, mais un rapport n’y apportera pas de solution. Cela passera par la coopération internationale et par une meilleure lisibilité de la fiscalité, ce que nous avons commencé à faire sur les revenus du capital.

La commission rejette l’amendement II-CL80.

La commission examine l’amendement II-CL87 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. L’État a vendu des biens immobiliers pour un montant de 7 milliards d’euros depuis 2005, ce qui représente potentiellement plusieurs millions de mètres carrés qui ont changé de main, depuis que l’État a décidé de mettre en œuvre une nouvelle politique de gestion de son patrimoine. L’État doit être fort et intraitable sur ces questions. Il importe d’établir le bilan de ces dix années de ventes accélérées pour combler le déficit budgétaire.

C’est la raison pour laquelle nous proposons la création d’un groupe de travail généraliste formé d’associations dont l’intégrité n’est plus à démontrer comme Anticor ou Sherpa. Nous pourrons disposer d’une étude claire sur les travers constatés notamment dans la presse de ces ventes « express » qui pourraient avoir été réalisées dans des conditions douteuses. Par là même, nous lèverons des soupçons sur des ventes qui peuvent paraître peu conformes.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. La valorisation du patrimoine immobilier de l’État, que ce soit d’ailleurs dans le cadre ou en dehors d’une cession, est un vrai sujet.

Comme M. Saint Martin, je ne pense pas que la remise d’un rapport soit un procédé très efficace, surtout dans le délai de trois mois que vous prévoyez. Il existe beaucoup de travaux d’origine parlementaire, également des travaux de la Cour des comptes qui retracent, exercice après exercice, les opérations de cession. Du reste, on peut s’interroger sur l’objet même du rapport que vous demandez. Vous évoquez la notion de ventes à « vil prix ». L’appréciation du prix de cession d’un bien public est compliquée, qui souvent ressort de choix politiques. Je souhaiterais donc que vous retiriez votre amendement. À défaut, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CL87.

 

Puis la commission examine l’amendement II-CL88 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. La ministre de la justice a annoncé la semaine dernière en commission élargie que son ministère ne recourrait plus aux partenariats public-privé. Ceci est peut être le signe que la Cour des comptes s’apprête à publier un rapport incendiaire sur ce sujet mais cela traduit aussi sans doute une évolution, du fait des scandales environnementaux, des affaires de conflits d’intérêts et de corruption engendrés par ces montages, ainsi qu’en raison de l’explosion de leurs coûts. Nous saluons donc ce geste car les partenariats public-privé sont, de notre point de vue, un danger pour les finances publiques et le bon fonctionnement de l’État.

Nous souhaitons donc que le Gouvernement réalise un rapport qui établisse de manière précise le surcoût engendré par les partenariats pour les grands projets, y compris ceux des collectivités territoriales, tels que le Grand stade de Lille.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. J’aurais tendance à dire : encore un rapport ? J’ajoute que l’Assemblée nationale s’est déjà prononcée contre l’opportunité d’un tel rapport dans le cadre de l’examen de la mission Justice. J’exprime donc un avis défavorable.

 

La commission rejette l’amendement II-CL88.

 

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   personnes auditionnées par le rapporteur spécial

Cour des comptes : M. Raoul BRIET, président de la 1ère chambre, M. Christian CHARPY, conseiller maître, M. Jean-Christophe CHOUVET, conseiller maître

Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) : Mme Jeanne-Marie PROST, déléguée nationale, M. Éric BELFAYOL, magistrat

Organisations syndicales de la DGDDI : CGT : Mme Anne AZOULAY-FRAVEL, Mme Manuela DONÀ ; USD-FO : Mme Marie-Jeanne CATALA, M. Salvatore LUNESU ; CFDT : M. Christophe ABADIE, M. David-Olivier CARON ; Solidaire : M. Philippe BOCK, M. Morvan BUREL ; UNSA : M. Pierre-Yves JACQMIN, M. Vincent DURAND

Organisations syndicales de la DGFiP : CGT Finances publiques : Mme Hélène GUERRA, M. François-Xavier FERRUCCI ; Force ouvrière-DGFiP : M. Olivier BRUNELLE, secrétaire général adjoint, M Jean-Christophe LANSAC, trésorier national ; CFDT Finances publiques : M. Pierre BOURGOIN, secrétaire général, M. Christophe BONHOMME-LHERITIER ; UNSA DGFiP : M. Raphaël DUPENLOUX, M. Pierre CLADERA ; CFTC-DGFiP : M. Luc VELTER, président, M. Régis BOURILLOT, responsable de la communication

Tracfin : M. Bruno DALLES, directeur

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) : M. Peter GREEN, M. Olivier PETZOLD

Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) : Mme Anne KOSTOMAROFF, directrice, Mme Virginie GENTILE, secrétaire générale

Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) : M. Rodolphe GINTZ, directeur général, M. Jean-Michel THILLIER, chef de service, adjoint au directeur général, Mme Isabelle PEROZ, sous-directrice de la programmation, du budget et des moyens, Mme Françoise TURPIN, chef du bureau budget, programmation et affaires financières, Mme Laurence JACLARD, chargée des relations institutionnelles – Élus (bureau communication)

Direction générale des finances publiques (DGFiP) : M. Bruno PARENT, directeur général, M. Vincent MAZAURIC, directeur général adjoint, Mme Virginie BEAUMEUNIER, chef du service de la stratégie, du pilotage et du budget

Direction du Budget (DB) : M. Philippe LONNÉ, sous-directeur de la 8e sous-direction, M. David BONNOIT, chef du bureau de l’économie, des finances et de l’Outre-Mer, M. Pierre-Marie VOEGELI, adjoint au chef de bureau

Direction de l’immobilier de l’État (DIE) : Mme Nathalie MORIN, directrice de l’immobilier de l’État, M. Alain CAUMEIL, directeur, chargé de la direction nationale d’interventions domaniales.


([1])  « Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. Il dispose de l'administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50. »

([2]) « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques. »

 

([3]) «Le développement plus soutenu des relations bilatérales entre les responsables d’administration et les rapporteurs spéciaux permettrait de travailler de manière plus efficace sur la nature des informations réellement utiles au Parlement ».

([4])  Le sous-indicateur « Nombre de contentieux à enjeu en matière de lutte contre la fraude » totalise le nombre de dossiers significatifs réalisés dans les secteurs des stupéfiants (saisies de plus de 1 000 euros), des tabacs et cigarettes de contrebande (saisies de plus de 2 800 euros), des contrefaçons (saisies de plus de 150 articles), des manquements à l’obligation déclarative de sommes, titres ou valeurs lors du franchissement de frontières intracommunautaires ou extracommunautaires (montant des sommes en jeu supérieur à 50 000 euros et/ou blanchiment [art. 415 du code des douanes]), des armes de guerre ou de défense (saisies de plus de deux armes) et des saisies réalisées dans le cadre de la convention de Washington sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacés.

([5])  Centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE, Tax Administration Survey 2017 : comparative information on OECD and other advanced and emerging economies (lien).

([6])  Sauf dans les cas d’auto-liquidation de la TVA à l’importation (art. 1695 du code général des impôts) et d’importation en franchise de TVA (art. 275 du code général des impôts).

([7]) Décret n° 2008-371 du 18 avril 2008 relatif à la coordination de la lutte contre les fraudes et créant une délégation nationale à la lutte contre la fraude (lien).

([8]) La lutte contre la fraude fiscale : des progrès à confirmer, inséré au rapport public annuel 2016.

([9]) Les régularisations d’avoirs à l’étranger gérées par le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), Communication à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, octobre 2017.  

([10]) La lutte contre la fraude fiscale : des progrès à confirmer, inséré au rapport public annuel 2016.

([11]) OCDE, Tax Administration Survey 2017, page 130.

([12]) « Information provided by 38 administrations attributes 13.9% of their total tax staff numbers to handling registration and provision of taxpayer service. (…) Taxpayer contact volumes are large and still resource intensive despite the significant investment made in telephone technology and on-line portals. The phone channel remains the channel most taxpayers use to contact the tax administration in most jurisdictions. (…) Despite initiatives in a number of administrations to scale back their office network, the volume of in person inquiries remains high. » OCDE, Tax Administrations Survey 2017.

([13]) Cour des comptes, La lutte contre la fraude fiscale : des progrès à confirmer, inséré au rapport public annuel 2016.

([14]) Les missions fiscales de la Douane, un rôle et une organisation à repenser, inséré au rapport public annuel 2014.

([15]) L’action de la douane dans la lutte contre les fraudes et trafics, communication au Président de l’Assemblée nationale pour le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, janvier 2015.

([16]) Anciennement « lutter contre la grande fraude douanière, la criminalité organisée et protéger les entreprises et les consommateurs européens ».

([17]) Anciennement « améliorer l’efficacité de la gestion et des contrôles douaniers et fiscaux ».

([18]) Le taux d’intervention sur les recettes douanières rend compte de l’efficience globale du dispositif fiscal de la DGDDI. Il correspond au coût total de collecte (assiette, contrôle et recouvrement) de la fiscalité douanière, rapporté aux recettes collectées.

([19]) Devenu impôt sur les cercles et maisons de jeux au 1er janvier 2015, et dont la gestion devrait être prochainement transférée à la DGFiP.

([20]) Les missions fiscales de la Douane, un rôle et une organisation à repenser, inséré au rapport public annuel 2014.

([21]) Rapport d’information de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire en conclusion des travaux d’une mission d’information sur la taxation des produits agroalimentaires, et présenté par Mme Véronique Louwagie, présidente de la mission, et M. Razzy Hammadi, rapporteur, déposé le 22 juin 2016 (lien).

([22])  Articles 1559 à 1566 du code général des impôts (lien).

([23])  La liste des points de passage frontaliers (PPF) doit être notifiée à la Commission par les États membres en application de l'article 39 du code frontières Schengen. En France, cette liste est notifiée par la direction de l'immigration de la direction générale des étrangers en France du ministère de l'intérieur et publiée au Journal officiel de l'Union européenne. La dernière liste publiée au JOUE est celle du 13 avril 2017.

([24]) Décret n° 2017-567 du 19 avril 2017 relatif aux compétences du préfet de police sur les emprises des aérodromes de Paris-Charles de Gaulle, du Bourget et de Paris-Orly.

([25])  Cour des comptes, Le renouvellement des moyens aériens et navals de la Douane : des échecs répétés et coûteux, une mutualisation à imposer, inséré au rapport public annuel 2017. 

([26]) Sources : réponses aux questionnaires budgétaires, et rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république de l’Assemblée nationale, sur le projet de loi, adopté par le sénat après engagement de la procédure accélérée, renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (n° 104) (lien).

([27])  Décret n° 2016-247 du 3 mars 2016 créant la direction des achats de l’État et relatif à la gouvernance des achats de l’État (lien).

([28])  Décret n° 2017-1063 du 18 mai 2017 relatif aux cabinets ministériels (lien).

([29])  Personnels affectés dans les cabinets ministériels, annexe au projet de loi de finances pour 2018 (lien).

 

([30])  Circulaire du 24 mai 2017 relative à une méthode de travail gouvernemental exemplaire, collégiale et efficace (lien).

 

([31])  Circulaire programme « Action publique 2022 » du 26 septembre 2017 (lien).

([32])  Voir notamment De la sécurité juridique, étude annuelle 1991, et Simplification et qualité du droit, étude annuelle 2016 (lien).

 

([33])  BOI-CF-INF-10-20-20-20170308 (lien).

([34]) Article 1727 du code général des impôts (lien).

([35]) La mention expresse est visée aux 2 et 2 bis du II de l’article 1727 du code général des impôts.

([36]) Article L. 57 du livre des procédures fiscales (lien).

([37]) Article L. 62 du livre des procédures fiscales (lien).

([38]) Conseil d’État, Le rescrit : sécuriser les initiatives et les projets, 2014.

([39]) CE, 2 décembre 2016, Ministre de l'Économie et des Finances c/ Société Export Press (lien).

([40])  Rapport annuel sur l’activité en matière de rescrit en 2016, de la DGFiP (lien).

([41]) Ibid.

([42]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/